La raison souligne les valeurs de l’humanisme chrétien, telles que la recherche de sens, le travail,
l’étude, l’amitié, la joie, la piété, la liberté non séparée de la responsabilité, l’harmonie entre la
sagesse humaine et la sagesse chrétienne.
La religion signifie accorder une place à la Grâce qui sauve, cultiver le désir de Dieu, favoriser la
rencontre avec le Christ Seigneur en tant qu’il offre un sens plein à la vie et une réponse à la soif de
bonheur, s’insérer progressivement dans la vie et dans la mission de l’Église.
L’affection (« amorevolezza ») exprime la nécessité que, pour mettre en route une relation éducative
efficace, le jeune non seulement soit aimé, mais qu’il sache qu’il est aimé ; elle traduit un style
particulier de rapports et une manière d’aimer qui réveille les énergies du cœur du jeune et les fait
mûrir jusqu’à l’oblativité (faisant passer les besoins d’autrui avant les siens propres).
La raison, la religion et l’affection sont de nos jours, plus qu’hier, des éléments indispensables pour
l’action éducative et des ferments précieux pour faire éclore une société plus humaine, en réponse
aux attentes des nouvelles générations » . [5]
Une fois correctement connu le passé historique, il est nécessaire de traduire dans le contexte actuel
les grandes intuitions et les grands virtualités du Système Préventif. Il faut en moderniser les
principes, les concepts, les orientations originelles, en réinterprétant aux plans théorique et pratique
soit les grandes idées de fond, que nous connaissons tous (la plus grande gloire de Dieu et le salut
des âmes ; foi vivante, espérance ferme, charité théologico-pastorale ; le bon chrétien et l’honnête
citoyen ; joie, étude et piété ; santé, étude et sainteté ; piété et moralité, culture, civisme ;
évangélisation et civilisation…), soit les grandes orientations de la méthode ( se faire aimer avant
de se faire craindre ; raison, religion, affection [amorevolezza] ; père, frère, ami, familiarité, surtout
en récréation ; gagner le cœur ; l’éducateur « consacré » au bien de ses élèves ; ample liberté de
sauter, courir, chahuter à volonté…). Et tout cela à l’avantage de la formation des jeunes
« nouveaux » du XXIème siècle, appelés à vivre et à affronter une gamme, très vaste et absolument
inédite, de situations et de problèmes, en des temps décidément changés, sur lesquels les sciences
humaines elles-mêmes sont en phase de réflexion critique.
Je désire suggérer en particulier trois perspectives, en analysant plus profondément la première
d’entre elles.
1. La relance de l’« honnête citoyen » et du « bon chrétien »
Dans un monde profondément changé par rapport à celui du dix-neuvième siècle, pratiquer la
charité selon des critères étroits, locaux, pragmatiques (et ici nous devons reconnaître que Don
Bosco n’était sûrement pas en mesure de faire plus que ce qu’il a fait), en oubliant les dimensions
les plus amples du bien commun, aux niveaux national et mondial, serait une grave lacune d’ordre
sociologique et même théologique. La maturation éthique de la conscience contemporaine s’est
heurtée en fait aux limites d’un assistanat qui, oubliant la dimension politique du sous-
développement, ne réussit pas à influer positivement sur les causes de la misère, sur les structures
de péché qui génèrent un contexte social toujours dénoncé par tous. Concevoir la charité seulement
comme une aumône, une aide d’urgence, signifie risquer d’évoluer dans un climat de « faux
samaritanisme » qui, au-delà des bonnes intentions, finit parfois par devenir une expression de
piètre solidarité parce que fonctionnant sur des modèles de développement qui visent au bien-être
de quelques-uns, en dorant la pilule amère pour les autres.
Souvenons-nous que dans la période de l’après-Concile, les expressions « pauvreté de l’Église » et
« Église des pauvres » prirent beaucoup de visages, même contradictoires. Et cependant, nous
devons nous rappeler aussi que ce n’est pas nous qui avons inventé l’Évangile, comme nous