Don Bosco et la vie spirituelle Chapitre III Le monde surnaturel


Francis DESRAMAUT.Don Bosco et la vie spirituelle. Ed Beauchesne.Paris 1967


Les représentations religieuses


L'originalité d'un style de vie religieuse ne tient pas aux seuls moyens qu'il préfère : oraison, sacrements ou action apostolique. Les représentations familières à l'âme y jouent un grand rôle. L'étonnement de la carmélite espagnole Anne de Jésus, plongée tout à coup en France dans un monde dionysien, où le Christ était remplacé par l'ineffable de Dieu, est à lui seul une leçon 1 : comme la religion, la « spi­ritualité » est nécessairement objective. L'esprit de Don Jean Bosco n'a évidemment pas échappé â cette loi générale. Il a vécu dans un monde surnaturel, parmi des représenta­tions de Dieu, du Christ, de Marie, des saints et de l'Église, qui ont décidé, parfois à son insu, de ses prises de position spirituelles. Il faut donc tâcher de jeter sur elles un peu de lumière, entreprise d'autant plus nécessaire que les chrétiens contemporains n'acceptent plus sans réticences quelques-unes de ces images religieuses. Quoi qu'on en puisse penser, et même véhiculées par une longue tradition, elles relèvent partiellement du dix-neuvième siècle.


Les origines d'une représentation de Dieu


Nous avons des raisons de dire que le Dieu de l'enfance de jean Bosco fut un Dieu sévère. Sa mère, Margherita Occhiena, lui avait enseigné sa présence universelle et sa justice rigoureuse, tempérée d'ailleurs par sa Providence bienveillante 2. Le séminaire de Chieri aurait plutôt favorisé de telles conceptions, que l'on retrouve dans la deuxième partie du premier ouvrage publié par Don Bosco en 1844, sur des notes prises au séminaire même. Le Dieu de la ma­ladie et de la mort de Luigi Comollo était un justicier. Dans ses rêves ou visions, la compréhension était incarnée dans le personnage de la Vierge Marie 3.

Nous savons que la vie rapprocha son ami d'une doctrine plus consolante, dont son maître, Giuseppe Cafasso, s'était fait le défenseur très décidé. Le Dieu des liguoriens était un Dieu d'amour. Sa paternité et sa bonté ont été des idées-­forces de Giuseppe Cafasso 4. I1 prêchait « un Dieu père, mais un pere tellement aimable [caro] et unique [singolare] que, non seulement il n'a pas son pareil au ciel et sur terre, mais qu'il ne sera jamais possible d'en imaginer un autre qui fût meilleur, plus tendre, plus patient, plus affec­tueux » 5, etc.

Jean Bosco l'entendit. L'un de ses premiers ouvrages fut un petit livret anonyme sur l'Exercice de dévotion â la miséricorde de Dieu 6, il montrait que « le Seigneur donne des preuves de sa bonté envers tous indistinctement » 7, les bons et les méchants. Au cours de sa vie sacerdotale, notre saint devait insister sur la bonté de Dieu, sans toutefois oublier sa justice, particulièrement terrible au pécheur, quand il comparaît devant lui après sa mort.


Dieu justicier ici-bas et dans l'au-delà


Dieu, enseignait Don Bosco, rend à chacun selon ses oeuvres, et ce jugement commence dés ici-bas. Ce Dieu vigi­lant châtie souvent en cette vie les transgresseurs de sa loi. « Il y a une Providence qui dispose du sort des hommes et qui, la plupart du temps, permet que les oppresseurs re­çoivent par leur propre écrasement le châtiment de leurs iniquités » 8. Apparemment dés sa jeunesse même, Jean Bosco avait recouru â cette explication un peu inquiétante du malheur 9, destinée â devenir l'une des thèses de sa théologie de l'histoire : le mal retombe - habituellement - sur le méchant. Il en trouvait des justifications dans la Bible : « Les âmes justes sont entre les mains du Seigneur, et le tourment de la mort ne les atteindra pas » 10 ; mais : « Celui qui refuse la sagesse est malheureux. Son espérance est vaine et ses fatigues sont sans fruits. Tout ce qu'il fait ne vaut rien » 11. I1 en voyait aussi de multiples applications dans les temps les plus divers de l'histoire du monde. Ci­tons : le déluge 12, la mort tragique de Romulus 13, l'aven­ture de Tarquin le Superbe 14, la fin horrible d'Hérode « rongé par les vers » 15, la ruine de Jérusalem en 70 16, le sac de Milan par Frédéric Barberousse en 1162 17, la mort tragique du comte Hugolin de Pise â la fin du treizième siècle 18, etc. Le bras du Dieu de Don Bosco n'était pas « raccourci ».

En règle générale, Dieu demeure cependant pitoyable sur terre, même aux méchants, que, dans sa miséricorde, il n'anéantit pas. Comme disait Giuseppe Cafasso, sa justice demeure « suspendue » et « cette terre continue de me por­ter » 19. Mais tout change avec la mort. L'opposition était abrupte dans l'esprit de Don Bosco : « La miséricorde et la justice de Dieu sont les deux attributs qui resplendissent le plus dans la puissance divine. Tant que l'homme vit sur cette terre, c'est le temps de la miséricorde. Mais, quand l'âme est séparée du corps, commence le temps de la jus­tice » 20.

Les avertissements de notre saint et certaines descriptions de ses rêves didactiques montraient « combien il est terrible de tomber entre les mains d'un Dieu vengeur » 21, qui « exa­minera tout ce que nous aurons fait en notre vie »22 . Il décrivit, dans son Mois de mai, « au-dessus de nous, le juge irrité », « d'un cote nos péchés qui nous accusent, de l'autre les démons prêts â exécuter la sentence de condamnation ; au dedans de nous, la conscience qui nous agite et nous tourmente ; et, au-dessous, un enfer qui se dispose â nous engloutir » 23. A l'approche de la mort, le petit Michele Magone entrevoyait avec effroi le terrible passage : « Au jugement je serai seul avec Dieu » 24, et ne se rassérénait qu'en évoquant la présence apaisante de Marie â ce tribu­nal 25. Discrètement, Don Bosco répétait cette doctrine dans les Lectures Catholiques, où il publiait la vie de ce garçon 26.


Dieu, père infiniment bon

La bonté, deuxième attribut majeur du Tout-Puissant, à l'emporter sur la justice dans l'esprit de saint Jeann Bosco ? Une étude scrupuleuse de ses écrits et de es montrerait probablement que, dans la dernière partie de sa vie, il se complut dans l'image de Dieu, père amoreux et tendre. Il aurait alors réalisé, mais transposé dans le monde religieux, le voeu de son enfance : avoir un père - lui-même, comme nous savons, avait été orphelin â deux ans -, et le voeu de son âge mûr: donner un père à de jeunes délaissés.

Dieu est bon, infiniment bon. Jean Bosco le prouvait d'abord par la création. « En ce monde, tout ce qui se pré­sente â nos regards nous parle de la majesté, de la puissance et de la bonté de Dieu créateur » 27. Tous les biens, maté­riels et spirituels, viennent de lui. « Quels sentiments de gratitude, de respect et d'amour ne devons-nous pas avoir envers un Dieu aussi grand et en même temps aussi bon ! » 28 De ce point de vue, toutes les créatures bénéficient de sa bonté.

Il manifeste une bienveillance spéciale â l'égard de cer­taines d'entre elles : les enfants, les baptisés, les pécheurs... « Les enfants sont grandement aimés de Dieu », écrivait Don Bosco, en s'appuyant du reste sur une exégèse peu or­thodoxe du verset : Deliciae meae esse cum filiis hominum 29. Et que dire des baptisés ? Quand il en parlait, lui qui était de nature plutôt réservé dans ses formules, devenait presque lyrique : « A cet instant [le baptême], tu es devenu l'objet de l'amour spécial de Dieu ; les vertus de foi, d'espérance et de charité ont été infusées dans ton âme. Lorsque tu as été fait chrétien, tu as pu jeter un regard vers le ciel et dire : Dieu, créateur du ciel et de la terre, est aussi mon Dieu. Il est mon Père, il m'aime et m'ordonne de l'appeler par ce nom : Notre Pere, qui es aux cieux » 30. Prêtre tra­vaillant dans un milieu encore pénétré de « jansénisme », il eut souvent l'occasion de magnifier la bonté de Dieu envers les pécheurs. C'est le thème essentiel de l'Exercice de dévotion à la miséricorde de Dieu, que l'on retrouve aussi dans divers songes et dans la Vie de Michele Magone 31. « Malgré l'ex­trême horreur que lui causent nos offenses, Dieu nous sup­porte dans sa bonté infinie, jette un voile sur nos péchés et attend notre pénitence » 32. Doctrine commune, que les considérations antérieures faisaient pressentir.

La série des préférés de Dieu selon Don Bosco n'est pas close. Il avait perçu son influence bienfaisante dans sa pro­pre vie et dans celle de ses disciples. Son « autobiographie » des années 1873-1878 fut, entre autres, un hymne â la Pro­vidence. Cet écrit « servira â faire connaître comment Dieu lui-même a guidé toutes choses â tout instant . . . » 33. Dés après le récit de son ordination sacerdotale, son auteur, comme la Vierge du Magnificat, s'exclamait : « Combien les desseins de la divine Providence sont merveilleux ! Dieu a vraiment soulevé de terre un pauvre enfant pour le placer parmi les premiers de son peuple » 34.

Résumons avec ses propres termes : « Dieu est miséricor­dieux et juste. Il est miséricordieux pour celui qui veut bénéficier de sa miséricorde, mais il frappe avec une justice rigoureuse celui qui ne veut pas en bénéficier » 35.


Un Dieu provident : père et justicier


Les deux attributs de justice et de bonté étaient unis chez Don Bosco dans la figure du Dieu provident, en qui il voyait à la fois un père et un justicier.

Par la même Providence, les bons sont récompensés et les méchants sont punis. Vers la fin du petit drame moralisa­teur: La casa della fortuna, le vieil Eustachio interprète évidemment la pensée de l'auteur, quand il dit, en apprenant que les deux bons orphelins retrouvaient la maison de leur grand-père, tandis que le voiturier qui les avait escroqués manquait de peu d'être lui-même assassiné : « Je remarque que cela est pour vous et pour tous une terrible leçon. N'ou­blions pas qu'il y a une Providence, qui veille sur le destin des hommes. Elle permet souvent que les maux eux-mêmes que l'homme fait ou voudrait faire â d'autres retombent sur lui » 36. C'est la Providence manzonienne des Promessi sposi, qui, â la fois, récompense et châtie 37.


Le Christ pour Don Bosco


Les mêmes traits caractérisaient aussi le Christ de Don Bosco, dont la figure était du reste assez complexe. Notre saint le voyait évidemment avec les yeux d'un Latin du dix-neuvième siècle, moins familier du Christ glorieux, tête de son corps vivant, «qui est l'Église», et principe d'unité du monde présent et futur; que du Christ historique, maître et modèle de vie chrétienne, du Christ rédempteur, incarné pour effacer les péchés du monde, et du Christ eucharistique qui, par sa présence ininterrompue au long des siècles, donne aux âmes la force et la vie de Dieu. S'il lui arrivait d'écrire que « Jésus-Christ fonda l'Église par sa mort et devint tête [capo] de tous les justes, qui furent et demeurent ses mem­bres principaux » 38, le jour où, â la fin de sa vie, il évoqua le Christ dans son testament spirituel aux salésiens, il nota spontanément : «Votre vrai supérieur, le Christ Jésus, ne mourra pas. I1 sera toujours notre maître, notre guide et notre modèle. Mais retenez qu'en son temps il sera notre juge et le rémunérateur de notre fidélité â son service » 39. Faudrait-il, en conséquence, lui appliquer ce qui a été dit de saint François de Sales : « Le Christ ne joue donc pas, â proprement parler, dans cette voie [salésienne], un rôle de premier plan, et il n'y est guère envisage comme Verbe incarné : lorsqu'il y est question de lui, c'est bien plus pour tirer de lui un exemple que pour chercher en lui un média­teur » 40 ? Pas tout â fait.


Le Christ compagnon aimé et modèle â imiter


La spiritualité affective de Don Bosco et la propension des adolescents à l'amitié l'ont parfois incliné à considérer dans le Christ l'ami et le compagnon de route, lequel était du reste le martyr du chemin de la croix plus que l'enfant et le travailleur de Nazareth. Il disait par exemple assez curieusement à des garçons : « D'où vient que nous sentions si peu de goût pour les choses spirituelles ? C'est que notre coeur aime peu Jésus crucifié ... » 41 Cette préférence, nul­lement maladive, semble devoir s'expliquer par de hautes raisons : les dernières heures du Christ furent celles où il manifesta pleinement son amour de l'homme et, par consé­quent, celles où il se montra le plus digne d'être aimé de lui 42. Ses meilleurs disciples vivaient heureux dans la com­pagnie d'un Christ qui les soutenait et les réjouissait. Selon Don Bosco, Francesco Besucco s'écria, quand il fut sur le point de recevoir le viatique : « Si Jésus est mon ami et mon compagnon, je n'ai plus rien à craindre. N'ai-je pas tout à espérer de sa grande miséricorde ? » 43 Quelques an­nées plus tôt, Dominique Savio avait tenu le même langage, en suppliant son maître de proclamer cela « toujours » et « â tout le monde » 44. Cet aspect peu connu de la pensée du saint doit être rapproché de sa doctrine générale sur l'amitié spirituelle 45.

Les phrases de Besucco et de Savio, si insistantes qu'elles soient, ne nous interdisent pas d'avancer que Don Bosco considérait plus souvent dans le Christ le maître et le modèle que le compagnon et l'ami.

Le Christ est professeur de sagesse. A la question : « Qu'est-ce que Jésus-Christ disait de lui-même ? », il répon­dait : « Il disait de lui-même qu'il était le fils unique de Dieu et le sauveur promis aux hommes, venu du ciel sur la terre pour leur enseigner la route du salut » 46. Le sauveur est un maître. On remarque, non sans surprise, que la moitié d'un chapitre doctrinal de son Mois de mai, intitulé pour­tant : La Rédemption, résumait la morale évangélique 47. Car, du Christ docteur, il relevait de préférence les leçons de morale sur « la pénitence, le pardon des injures, le mépris des richesses, le renoncement â soi-même » 48. Quand il eut décidé de consacrer un chapitre de son Histoire sainte à raconter des paraboles, il choisit : la brebis perdue, l'enfant prodigue, les dix vierges, Lazare et le mauvais riche, histo­riettes dont les moralités étaient immédiatement appli­cables 49. Son auditoire de jeunes l'y poussait sans doute, mais aussi les habitudes du dix-neuvième siècle et la tradition liguorienne.

Dés sa jeunesse, il avait été frappé par la richesse de l'Imitation de Jésus-Christ 50. Toute la vie du Christ a été pour lui une leçon à méditer et à pratiquer, comme, à elles seules, les versions des premiers articles des constitutions salésiennes le font comprendre. C'est « en imitant les vertus de notre divin sauveur » que les membres de la société se perfectionneront 51. Au reste, « le modèle que chaque chré­tien doit copier est Jésus-Christ. Nul ne peut se vanter d'appartenir à Jésus-Christ s'il ne s'emploie à l'imiter. Dans la vie et les actions du chrétien, on doit donc retrouver la vie et les actions de Jésus-Christ lui-même » 52.

N'allons pourtant pas croire que tous les « mystères » du Christ faisaient indistinctement l'objet de ses réflexions. Comme il était normal, certains traits de son visage le sédui­saient plus que d'autres. Quand les sujets s'y prêtaient, il relevait devant ses disciples ou ses enfants l'obéissance de jésus 53, son extrême humilité 54 et sa pauvreté constante de la crèche â la croix 55. Il est aussi notable que l'esprit de l'époque dirigeait ses regards vers le Christ pénitent, ployant sous les péchés du monde. Telle était la vision que devaient conserver les lecteurs de son Mois de mai, qui s'achevait en effet sur ce tableau 56, celle aussi qui paraît avoir eu les faveurs de Francesco Besucco, grand dévot du chemin de la croix 57 et, plus certainement, de Dominique Savio, telle­ment avide de ressembler au Christ crucifié 58. Cependant quand, dans sa maturité et sa vieillesse, Don Bosco lui-même s'abandonnait â ses goûts, il retrouvait surtout le Christ doux et bon, cherchant la brebis perdue ou caressant les cheveux des enfants. « La douceur est la vertu préférée de Jésus-Christ » 59. Les guérisons décrites par les évangélistes étaient pour lui des signes de sa « singulière bonté » 60. Et il écrivait avec toute la clarté désirable : « Tous ceux qui ont lu l'Évangile savent que Jésus-Christ naquit d'une Vierge dont le nom était Marie, par la seule opération du Saint­Esprit ; qu'il naquit dans une étable, qu'il vécut du travail de ses mains et que toutes les vertus, notamment la bonté et la douceur, ont constitué [formarono] son caractère » 61. On ne peut être plus explicite. I1 est permis de conclure que le Christ de Don Bosco était, non seulement l'ami compréhen­sif, mais le maître souffrant, doux et bon, attitude qu'il conciliait parfaitement avec le « zèle pour la plus grande gloire de son Père céleste » 62, qualité que notre saint se plaisait â relever partout où il la rencontrait.


Le Christ, source de vie


Mais il voyait également dans le Christ le médiateur de la vie divine par son mystère eucharistique.

Sa doctrine de l'incarnation rédemptrice était plutôt « négative ». I1 pensait que le Fils de Dieu s'était incarné « pour détruire le péché » 63, ou bien qu' « il était venu au monde pour sauver les pécheurs » 64 et « pour libérer par sa mort tous les hommes de l'esclavage du démon » 65. Dans un lexique, il définissait le rédempteur en ces termes : « Nom donné par excellence â Jésus-Christ qui nous a rachetés du péché, de la mort et de l'esclavage du démon » 66. De maniere plus positive, il écrivait pourtant, dans la Vie de Dominique Savio, que « Jésus-Christ a versé tout son sang pour délivrer [notre] âme de l'enfer et l'emmener avec lui au paradis » 67. Il n'empêche : 1e rôle vivificateur du Christ est peu marqué dans son enseignement sur le Verbe incarné.

Il faut prendre ailleurs ses idées sur Jésus, vie nouvelle des croyants. De manière générale, il affirmait que « Jésus­Christ (. . .) est la sainteté par essence », « la source de toute sainteté » 68 et que sa sainteté est génératrice de force. « Nous ne sommes pas seuls, jésus est avec nous, et saint Paul nous dit qu'avec son aide nous devenons tout-puis­sants » 69. Le Christ, principe de force surnaturelle, se trouve assurément dans l'Église qui, par les évêques et le pape, unit les catholiques à leur tête invisible 70, mais, de façon très particulière, dans l'eucharistie, son mystère le plus sacré, où le sauveur est tangiblement présent. Quand, dans une breve présentation de saint Louis de Gonzague, il avait à choisir deux mystères du Christ pour l'édification des jeunes, Don Bosco retenait jésus crucifié et dans le saint sacrement, la passion et l'eucharistie 71. Sa dépendance de la Restau­ration catholique, renforcée par son antiprotestantisme mili­tant, l'amenait à insister sur la présence réelle. Nous verrons que ses jeunes héros se sanctifiaient, entre autres, par leurs communions sacramentelles ou spirituelles au pain de vie 72. Si bien que, là où nous attendrions le Seigneur ou le Sau­veur, Don Bosco parlait quelquefois et, peut-être, souvent du Christ sacramentel, c'est-à-dire du Christ au tabernacle. Il écrivait par exemple à un salésien. « Confiez toutes choses à Jésus au saint sacrement (Gesù sacramentato) et à Marie auxiliatrice, et vous verrez ce que sont les miracles » 73.

Nous allons dire la très grande place de Marie dans sa spiritualité. I1 était bon de montrer d'abord comment il se représentait le Christ Jésus. Au vrai, il n'est pas pos­sible de comprendre pourquoi il recommandait avec tant d'insistance les vertus de douceur et de compréhension et la pratique des sacrements de pénitence et d'eucharistie, si l'on ignore à quel point le Christ « doux et humble de coeur » était à la fois son guide et son soutien dans ses démarches d'homme et de prêtre.


Marie dans le monde de Jean Bosco


Marie était partout autour de lui. I1 avait découvert son nom sur les lèvres de sa mère, qui lui faisait réciter trois angélus et au moins un chapelet par jour 74. La bourgade de ses jeunes années avait pour fête patronale la Maternité, au mois d'octobre 75. En conformité avec une recommanda­tion de sa mère, collégien et séminariste, il fréquenta autant que possible des garçons attachés au culte marial 76. Turin, avec son sanctuaire traditionnel de la Consolata, était une ville de Marie. Quant à son principal auteur spirituel, saint Alphonse de Liguori, il avait composé les Gloires de Marie, oeuvre alors extrêmement célèbre.

La dévotion mariale de Luigi Comollo, présentée par Don Bosco lui-même, est caractéristique de cette atmosphère. Sa description nous permet d'imaginer en quoi les fervents la faisaient consister dans le cercle de ses amis. Luigi reconnaissait sans réserve la puissance bienveillante de Marie, qu'il aimait aussi « avec tendresse », lui mani­festant son affection par des pratiques longues et onéreuses. « Dés qu'il put apprendre à prononcer les très saints noms de Jésus et de Marie, ils furent l'objet de sa tendresse et de sa révérence ... » 77. « Quand il discourait de la Madone (avec son confident, c'est-à-dire, vraisemblablement, avec Jean Bosco), il était visiblement tout saisi de tendresse et, aptes avoir raconté ou entendu raconter une grâce accordée par la Madone en faveur du corps, quand le récit était achevé, son visage s'empourprait et, parfois, il s'exclamait en versant jusqu'à des larmes : « Si Marie favorise ce misérable corps, quelles faveurs n'accordera-t-elle pas aux « âmes de ceux qui l'invoquent ? » 78 Il récitait quotidienne­ment et avec soin son chapelet 79 et, quand il avait quelques loisirs, le petit office de la sainte Vierge « avec son compa­gnon habituel » 80. « Il faisait précéder ses communions d'un jour de jeûne rigoureux en l'honneur de la très sainte Marie » 81 et « jeûnait le samedi de chaque semaine par amour de la bienheureuse Vierge » 82. Enfin, après avoir cru voir Marie sur son lit de mort 83, il expira en prononçant « les noms de Jésus et de Marie » 84. En 1844, le jeune prêtre Bosco proposait ce modèle de piété mariale « â messieurs les séminaristes de Chieri »85.

Pour lui aussi, Marie fut toujours une mère très sainte, très bonne et très puissante. S'il a propagé le culte du très saint coeur de Marie et la dévotion à Notre-Dame des sept douleurs, culte et dévotion répandus d'ailleurs depuis des siècles 86, il reste que l'histoire de son temps et la sienne propre l'amenèrent à parler plutôt de son immaculée concep­tion et, plus encore, de sa bonté maternelle au service de l'Église.


La beauté exemplaire de l'Immaculée


La définition de l'immaculée conception de Marie par Pie IX (1854) l'a incité â voir en elle le symbole par excellence de la pureté et de la sainteté, comme le prouvent ses explications du Mois de mai et de la biographie de Dominique Savio, dont les premières éditions furent publiées respectivement en 1858 et 1859. « L'Église exprime cette sainteté de Marie quand elle définit qu'elle fut toujours exempte de tout péché et nous invite a l'invoquer par ces mots précieux : Reine conçue sans la tache originelle, priez pour nous » 87. Le 8 décembre 1854, son disciple Dominique Savio « donna son coeur » â Marie et la supplia de le faire mourir plutôt que de commettre un péché véniel contre la modestie 88.

De manière plus générale, la contemplation de l'Immacu­lée devait le rendre, ainsi que ses imitateurs, intraitable pour ses faiblesses et affamé de sainteté héroïque. Cet esprit exigeant se retrouve dans le dernier article du règlement de la compagnie de l'Immaculée, sous sa forme approuvée et diffusée par Don Bosco : « La compagnie est placée sous le patronage de l'Immaculée, dont nous porterons le titre et dont nous garderons la sainte médaille. Par notre confiance en Marie, sincère, filiale, illimitée, notre tendresse particu­lière et notre dévotion constante pour elle, nous viendrons à bout de tous les obstacles, nous serons tenaces dans nos résolutions, durs pour nous-mêmes, aimables pour notre prochain et irréprochables en tout » 89.


Marie, mère et auxiliatrice


La raideur relative d'une telle attitude était corrigée par la contemplation de Marie, mère de Dieu, et, partant, mère des chrétiens. « Ayant été rachetés par Jésus-Christ, nous devenons ses enfants et les frères de son divin fils. La raison en est que, devenant mère de Jésus, vrai Dieu et vrai homme, elle devint aussi notre mère. Dans sa grande miséricorde, Jésus-Christ voulut nous appeler ses frères et, par ce titre, nous constitua tous enfants adoptifs de Marie » 90.

Jusqu'en 1862 environ, Don Bosco ne parlait pas d'auxi­liatrice. En 1845, rien n'est encore dit sur la victoire de Lépante sous Pie V, dans la premere édition de l'Histoire ecclésiastique 91. Il est vrai que ses garçons chantaient des 1847:

« Nous sommes les fils de Marie,

Que le répètent la brise et le vent,

Que le répètent les éléments

Dans une douce harmonie.

Nous sommes les fils de Marie »92.

N'était-ce pas déjà un peu l'auxiliatrice avant l'apparition du terme ? En vérité, il fallait encore passer de la mère de la vie à la reine du monde.

Vers 1863, Don Bosco commença de célébrer Marie sous le titre d'auxiliatrice pour des raisons variées, parmi les­quelles il y eut certainement la construction par ses soins d'une grande église au Valdocco, menée à bien entre 1864 et 1868. Or, en 1862, une image miraculeuse, dite de Marie auxiliatrice par l'archevêque du lieu, avait été découverte dans le diocèse de Spolète et de manière assez étonnante pour déclencher un pèlerinage important93. La crise des États pontificaux devenait alors irrémédiable. L'Église de Pierre semblait menacer ruine et réclamer un secours miraculeux. Le titre, pour ces raisons déjà doublement recommandable à Don Bosco, lui convenait d'autant plus que les Turinais connaissaient, depuis le dix-huitième siècle au moins, la confrérie de Marie auxiliatrice érigée à Munich94, et que Pie IX, consulté, opinait, nous dit-on, pour ce vocable 95. Il n'en fallait pas tant : l'église en construction fut dédiée â Marie auxiliatrice.

Et notre saint s'adressera désormais â l'auxiliatrice, mère et reine des chrétiens et de l'Église. Un grand tableau peint sur ses instructions disait, au-dessus du maître-autel de son sanctuaire, comment il se représentait Marie jouissant de cette prérogative. « Marie se dresse dans une mer de lumière et de majesté, assise sur un trône de nuages et couronnée d'étoiles, en même temps que du diadème qui la proclame reine du ciel et de la terre. Un groupe d'anges fait cercle autour d'elle et lui présente leurs hommages comme â leur reine. Elle tient, dans sa main droite, le sceptre, symbole de sa puissance ... » 96. C'est une reine glorieuse qui domine le monde et l'Église, symbolisée ici par les apôtres et par les évangélistes Luc et Marc.

Outre la nouvelle église, six livrets de Don Bosco allaient, entre 1868 et 1879, expliquer et magnifier le titre 97. Cette littérature nous installe dans les luttes de la « chrétienté ». A Marie, « l'Église attribue la déroute des hérésies » 98. L'auxiliatrice fut la reine des batailles de Lépante en 1571 et de Vienne en 1683, celle aussi qui sauva Pie VII de la captivité de Fontainebleau en 1814 99. Elle fut et demeure la « protectrice des armées qui combattent pour la foi » 100. Qu'une nécessité s'impose aux chrétiens, et la très sainte Marie intervient aussitôt apportant son aide puissante. Le secours de Marie paraissait â Don Bosco plus nécessaire que jamais dans le siècle où il propageait son culte, car « ce ne sont plus des tièdes à enflammer, des pécheurs à convertir, des innocents à conserver. L'Église catholique elle-même est assaillie » 101. Un vrai climat de croisade !

Faut-il ajouter que l'auxiliatrice des vingt-cinq dernières années du saint (1863-1888) n'a pas effacé de son esprit la mere très bonne et l'immaculée très exigeante de la première partie de sa vie sacerdotale ? Selon les circons­tances, il trouvait en Marie tout ce que son âme désirait : une source de vie, un modèle insurpassable et une force victorieuse.


Les saints, modèles de perfection


Sur le tableau de l'église de Turin, les anges et les saints tiennent compagnie à Marie, qu'ils entourent et qu'ils admi­rent. Le monde spirituel de Don Basco était en effet peuplé d'anges et de saints, en qui il voyait de puissants interces­seurs assurément, mais aussi et, peut-être, surtout des modèles à reproduire par les chrétiens préoccupés de leurs progrès dans la perfection.

Après ses premières années de sacerdoce, quand il eut publié un livret sur Le dévot de l'ange gardien 102 et demandé à Silvio Pellico de lui composer l'aimable cantique dialogué Angioletto del mio Dio, inséré dans le Garçon instruit 103, Don Bosco a, somme toute, peu parlé des anges. En tout cas, l'ange du cantique était de bon conseil : il répétait sa spiri­tualité, condensée dans le Servite Domino in laetitia. Tu craindras ton Dieu, disait-il à l'âme, mais « comme une enfant qui ose lever les cils vers son père ». « Ris donc, mais que ton sourire soit une joie du ciel ! »

Les saints aussi montrent le ciel et le Christ. Ils disent d'abord que Dieu est admirable. Les plus extraordinaires d'entre eux « rassemblent un tel monde de vertu, de science, de courage et d'oeuvres héroïques, qu'ils nous découvrent clairement combien Dieu est merveilleux dans ses saints. Mirabilis Deus in sanctis suis » 104.

Les chrétiens trouvent aussi en eux des héros « de partout, de tout âge et de toute condition » 105, qu'ils peuvent par conséquent imiter dans tous les états de vie. L'admiration pour les saints, chefs-d'oeuvre de Dieu, doit en effet se transformer en volonté d'imitation. « Si ille, cur non ego ? » 106. Don Bosco écrivit pour l'édification des lecteurs

ses ouvrages sur Luigi Comollo 107, saint Vincent de Paul 108, saint Martin 109, Giuseppe Cafasso 110, etc. L'édification do­mine jusque dans les biographies que l'on croirait plutôt doctrinales, comme celles de saint Pierre 111 et de saint Paul 112. Au terme de cette dernière, notre auteur avouait candidement : « I1 ne convient pas de parler de ses vertus (de saint Paul), étant donné que tout ce que nous avons exposé jusqu'ici n'est autre qu'un tissu des vertus héroïques qu'il a fait resplendir en tout lieu, en tout temps et avec toute sorte de personnes ... » 113. En définitive, ce qu'il disait de la vie de Marie des Anges : « Bref, tu trouveras, lecteur, dans la vie de la bienheureuse Marie des Anges un parfait modèle de vertu et de sainteté, apte néanmoins â être imité par tout chrétien selon son propre état. C'est en vue de tout cela que l'on a cru bon de publier aussi dans les Lectures Catholiques le présent résumé de la vie de cette remarquable épouse de Jésus-Christ, pour fournir à nos lecteurs le moyen opportun d'en tirer un bienfait spiri­tuel » 114, cette conclusion vaut, mutatis mutandis, pour une suite de ses allocutions et de ses livres, sans oublier les tableaux de l'Histoire ecclésiastique. La vie des saints aide â reproduire en soi la sainteté de Dieu qu'elle manifeste au monde.


L'Église visible dans le monde religieux


Le ciel de Dieu, du Christ, de Marie, des anges et des saints, descendait pour Don Bosco sur la terre des hommes dans l'Église visible, institution pontificale et seule arche du salut et de la sainteté.

Après sa formation au convitto ecclesiastico, les luttes de sa vie l'ont amené à défendre avec vigueur ses conceptions sur l'Église de Pierre. La propagande vaudoise, dont il prit le contrepied, la question romaine, qui fit de lui l'un des hommes de Pie IX à Turin, et la création de la société salésienne, que ce pontife facilita, l'ont poussé à répandre la théorie d'une Église fortement soudée autour du pape de Rome. Sans nécessairement tomber dans ses travers, il appartenait à l'aile marchante de l'Église du dix-neuvième siècle, représentée en France par joseph de Maistre, Louis Veuillot et Mgr de Ségur, celle qui l'emporta au premier concile du Vatican. Lui aussi fut l'homme du pape, principe de l'indispensable unité ecclésiale 115.


L'Église est une institution pontificale


Certes, il savait l'Église « fille de Dieu Pere », « épouse de Jésus-Christ » et « temple de l'Esprit-Saint » 116, mais insistait beaucoup plus sur son aspect terrestre, social et organique que sur son essence mystique. Dans la ligne bel­larminienne, il en donnait la définition suivante : « Avant de monter au ciel, Jésus-Christ a fondé une Église, qui est la société (congregazione) des fidèles chrétiens, qui, sous la conduite du souverain pontife et des pasteurs légitimes, pro­fessent la religion établie par Jésus-Christ et participent aux mêmes sacrements » 117, définition qui reparaissait, analogue et quelquefois plus raide, chaque fois qu'il devait parler de l'Église avec précision 118. C'était, à peu près textuellement, celle du théologien Giovanni Perrone dans son Catéchisme sur l'Église catholique, publié en 1854 dans les Lectures Catholiques 119.

Le « royaume » ou la « famille » de l'Église 120 a un chef ou père unique, hors de qui il n'y a pas d'Église. Selon Michele Rua à son procès de canonisation, le premier chapitre d'évangile que Don Bosco demandait à ses clercs d'apprendre par coeur était Matthieu, 16, celui du Tu es Petrus 121. Le Christ a bâti l'Église sur Pierre et Pierre en est demeuré le fondement. Il ordonne avec sécurité, car il en est le chef, et doit être affectueusement obéi, car il en est le père.

Pierre est un chef qui ordonne. Aux yeux de Don Bosco, les guerres de toute sorte que l'Église avait dû soutenir, guerres qu'il racontait dans ses travaux d'histoire, mettaient en valeur ce rôle du pape. Son admiration pour certains chefs caractéristiques : Grégoire VII, Pie V et, bien entendu, Pie IX, semble avoir grandi avec les années, â en juger du moins par les qualificatifs des deux premiers dans l'Histoire d'Italie de 1855 et l'Histoire ecclésiastique de 1870, com­parés avec ceux de l'Histoire ecclésiastique de 1845. En 1870, Grégoire VII était « l'un des plus grands papes qui aient gouverné l'Église » 122, et Pie V, « un pontife parmi les plus illustres qui soient montés sur le trône de saint Pierre » 123. Ce chef est inspiré. L'époque où Don Bosco prit résolument parti pour l'infaillibilité du pape est, il est vrai, moins définie que ses biographes ne l'ont cru sur la foi de G. B. Lemoyne 124. En 1854, le Catéchisme cité de Perrone se contentait de dire que l'infaillibilité du pape enseignant ex cathedra en matière de foi était l'opinion (la sentenza) la plus sure 125. Mais, dix ans après, le livret du chanoine Lorenzo Gastaldi, publié lui aussi dans la col­lection des Lectures Catholiques, était déjà beaucoup plus affirmatif. Cet auteur, futur membre du concile, estimait que «l'Église pourrait, quand elle le voudrait, déclarer en termes exprès le caractère hérétique de celui qui ne croirait pas en l'infaillibilité du pape » 126. On ne doit pas se trom­per en affirmant que telle était alors la position de Don Bosco, directeur de la collection. En tout cas, à la veille de Vatican I, sa doctrine était très nette : «Nous disons que le pape est infaillible ... », proclamait-il en 1869. Elle était aussi bien étayée par des arguments historiques et théologiques 127.

Il traduisait en termes de famille l'autorité et le pouvoir doctrinal du pape : le souverain pontife est le père des chrétiens. L'image de la famille est, par exemple, très accusée dans le résumé doctrinal : Avis aux catholiques, répété pendant quarante ans dans diverses publications sous ce titre ou sous celui de Fondements de la religion catho­lique. « L'Église romaine (... ) a toujours été considérée comme la société visible des fidèles réunis dans la même foi, sous la conduite d'un même chef, le pontife romain, qui, en tant que père d'une grande famille, a guidé par le passé et guidera dans l'avenir tous les bons croyants, ses fils, par le chemin de la vérité jusqu'à la fin des siècles »128. L'histoire des papes de l'Église doit être expliquée et lue dans cet esprit, disait Don Bosco : « Comme un fils doit être naturel­lement porté à écouter les glorieuses actions de son père, en tant que fils spirituels de saint Pierre et de ses successeurs, nous devons nous réjouir intérieurement beaucoup à la lecture des glorieuses actions de ces grands hommes qui, de­puis dix-huit siècles, gouvernent l'Église de Jésus-Christ 129. » Sa défense de Pie IX fut un geste filial. Très naturellement, il demandait à ses propres fils de parler souvent du pape et de prier pour lui. Diverses quêtes furent organisées parmi ses garçons pour lui venir en aide. En 1871, une « fête du pape », au programme alléchant, marqua le jubilé pontifical de Pie IX130. Selon G. B. Lemoyne, lors d'une audience de janvier 1867, à ce pape qui lui avait demandé si ses garçons l'aimaient, Don Bosco aurait répondu sans ambages : « S'ils vous aiment ? Ils vous ont dans leurs coeurs et ils portent votre nom lié [intrecciato) au coeur de Dieu »131. Nous ne savons s'il a réellement tenu ce propos, mais tel était assuré­ment le désir d'un homme qui vouait sa société religieuse, c'est-à-dire l'oeuvre de sa vie, au service du souverain pontife132

On le devine, la théorie et l'affection s'accordaient en lui pour ne pas majorer dans l'Église l'autonomie des évêques et l'initiative des fidèles. Toute l'autorité apparte­nant à la tête, la hiérarchie locale devait s'appliquer à la recevoir d'elle et â la transmettre jusqu'aux laïcs. Dans le climat des années qui préparèrent Vatican I, il a signé des phrases qui, en d'autres temps, surprendront à juste titre. Celle-ci par exemple : « Les évêques reçoivent les suppliques, perçoivent les besoins des peuples et les font parvenir jus­qu'a la personne du hiérarque suprême de l'Église. Et le pape, selon le besoin, communique ses ordres aux évêques du monde entier et les évêques en font part aux simples fidèles chrétiens » 133. La surenchère de l'époque ne suffit pas à les expliquer. Dés le temps troublé de 1848, son idée maîtresse avait été exprimée dans la formule lapidaire : « Nos pasteurs nous unissent au pape ; le pape nous unit â Dieu » 134. Le pape était vraiment pour lui le prolongement du Christ dans le monde.


L'Église est la seule arche du salut


Cette Église gouvernée par le pape est la seule arche du salut et, a fortiori, de la sainteté.

Seule sainte, seule divine, elle seule peut conduire les hom­mes à Dieu. Don Bosco a été guidé par cette conviction. Sa lutte contre les vaudois est éclairée par elle. I1 répandit alors à des centaines de milliers d'exemplaires des chapitres, il disait qu' « une est la véritable religion », que « les Églises des hérétiques n'ont pas les caractères de la divinité », que, « dans l'Église des hérétiques, il n'y a pas l'Église de Jésus­Christ » 135. Jésus-Christ est en effet avec le pape, que les hérétiques ont abandonné. Conformément à sa théologie, Don Bosco signait des phrases camme celles-ci : « Qui est uni au pape est uni à Jésus-Christ, et qui rompt ce lien fait naufrage dans la mer agitée de l'erreur et se perd misérable­ment » 136, ou bien : « Heureux les peuples unis à Pierre dans la personne des papes, ses successeurs. Ils marchent sur la route du salut ; tandis que tous ceux qui se trouvent hors de cette route et ne sont pas en union avec Pierre n'ont aucune espérance de salut, parce que Jésus-Christ nous assure que la sainteté et le salut ne peuvent se trouver que dans l'union avec Pierre, sur qui s'appuie le fondement im­mobile de son Église » 137. Il n'y a qu'une Église mère des hommes, qui est l'Église de Pierre.

Celui qui connaît la vie de saint jean Bosco sait combien son zèle fut orienté par la. Son apostolat, tant par la presse et le lieu de culte que par l'école, doit être compris par son ecclésiologie. Mais on ne manquera pas non plus de noter l'influence de celle-ci sur son sens de la sainteté. Qui veut se sanctifier doit être profondément uni à l'Église et au successeur de Pierre. Le devoir d'un fidèle logique avec son christianisme est de se conformer aux directives, aux inten­tions manifestes et même aux simples désirs du pasteur universel. Pour son compte, Don Bosco, à l'âge mûr, en tout cas sous Pie IX et Léon XIII, gardait les yeux fixés sur le pape, qui représentait Dieu sur terre. Sa foi, son espérance et sa charité étaient colorées par ce sens de l'Église, que la mentalité de l'époque concentrait dans son foyer romain.

Le monde religieux de Don Bosco


Il ne s'enfermait pourtant pas dans l'institution visible. Nous savons que son monde religieux était infiniment plus large. Il ne serait pas faux de le dire théocentrique ou chnstocentrique. Mais le genre d'amour qu'il manifestait pour l'Église tangible mérite réflexion. Il y avait la un signe de son tempérament. On trouvera qu'après tout, dans l'uni­vers spirituel de Don Bosco, les êtres concrets occupent une place bien grande et, qu'en revanche, les profondeurs de Dieu, l'âme de l'Église et même l'Esprit-Saint y paraissent bien peu. Même si certains ne voient la qu'une preuve sup­plémentaire de sa proximité délibérée avec les gens simples, un tel choix était assurément aussi dirigé par sa mentalité. Paysan dans sa jeunesse, homme d'affaires dans son âge mûr, Piémontais toujours, c'est-à-dire peu porté aux cons­tructions nébuleuses et inefficaces, il se défiait des abstrac­tions de toute sorte et même des oeuvres simplement théo­riques. Il transposait cette tendance dans sa vision du monde religieux. Qu'il ait vécu sous le regard d'un Dieu juge et père, dans la compagnie d'un Christ historique doux et bon, d'un Christ eucharistique « présent au tabernacle », d'une Vierge immaculée et reine « terrible comme une armée rangée en bataille », de légions d'anges et de saints aptes à montrer la route du salut et de la perfection aux humains « de tout âge et de toute condition », cela peut s'expliquer par une formation, par l'air du temps, par les désirs de ses auditeurs ou de ses lecteurs. Cela doit être aussi mis au compte des choix d'un homme qui avait le goût de l'utile. Nous retrouverons la même tendance dans ses préférences pour certains instruments de perfection : il opta toujours pour les plus simples, les plus solides et, partant, à son avis les meilleurs.

1 Voir, par exemple, J. DAGENS, Bérulle et les origines de la Restau­ration catholique (1575-1611), Bruges, 1952, p. 208.

2 Quelques données à travers les maximes de Margherita recueillies par G. B. LEMOYNE Memoire biografiche, t. I, p. 44-45, dont on se gardera de penser qu'elles furent imaginées par le compilateur.

3 {G. BOSCO}, Cenni storici sulla vita del chierico Luigi Comollo . . , Turin, 1844, chap. 4-5, p. 42-72. Ces chapitres furent composés d'après le manuscrit Infermità e morte del giovane Chierico Luigi Comollo, scritta dal suo collega C. Gio. Bosco, conservé à Turin, ACS, S. 123, Comollo.

4 Voir le chapitre de F. ACCORNERO sur la confiance, dans La dottrina spirituale di S. Giuseppe Cafasso, op. cit., p. 107-130­

5 G. CAFASSO, Manoscritti vari, VIII, 2444 B et sv.; dans F. ACCOR­NERO op. cit., p. 115.

6 {G. BOSCO}, Esercizio di divozione alla misericordia di Dio, Turin, s.d. Ce livre parut entre 1846, puisqu'il contient un document de cette année-là (p. 12), et 1856, car il est mentionné dans le testament de Don Bosco du 26 juillet 1856 (d'après son édition dans A. AMADEI Memorie biografiche, t. X, p. 1333). P. Stella (Valori spirituali .., p. 51) a discerné dans le Giovane provveduto de 1847 des « réminiscences » de l'Esercizio, mais les correspondances qu'il cite ne sont pas convaincantes. L'ordre chronologique suivi par Don Bosco dans son testament incite pourtant à placer le livret vers 1847.

7 [G. BOSCO], Esercizio . . , éd. cit., premier jour, p. 29.


8 G. BOSCO, Storia d'Italia. . , éd., Turin, 1866, troisième époque, chap. 22, p. 223. Sentence analogue dans le même ouvrage, première époque, chap. 9, p. 24, 25.

9 Nous lisons en effet dans un dialogue avec Luigi Comollo : « C'est la main du Seigneur qui pèse sur nous. Crois-moi, nos péchés en sont la cause » [G. BOSCO], Cenni storici sulla vita del giovane Luigi Co­mollo .. , éd., Turin, 1854, chap. 4, p. 50), proposition à vrai dire inconnue de l'édition antérieure (chap. 4, p. 42) et probablement fabri­quée pour les besoins du dialogue.

10 Sagesse, 3, 1. Cité parmi les maximes morales tirées de la Sainte Écriture, en appendice à G. BOSCO, Maniera facile per imparare la Storia Sacra. . , éd., Turin, 1877, p. 100­

11? Sagesse, 3, 11. Cité ibid., d'aprèsla Vulgate.

12 G. BOSCO, Maniera facile.., éd. cit., § 6, p. 16-19

13 G. BOSCO, Storia d'Italia.., 5` éd., Turin, 1860, première époque, chap. 4, P. 13.

14 G. BOSCO, Storia d'Italia.., éd, cit., première époque, chap. 9, P. 24, 25.

15 G. BOSCO, Vita di San Pietro.., Turin, 1856, chap. 21, p. 121.

16 G. BOSCO, Maniera facile . . , éd. cit., § 28, p. 78-79.

17 G. Bosco, Storia d'Italia. . , éd. cit., troisième époque, chap. 22, p. 223

18 G. BOSCO, Storia d'Italia. . , éd. cit., troisième époque, chap. 28, P. 244.

19 Esercizi spirituali di S. Giuseppe Cafasso al clero, Turin, 1955, p. 173

20 G. BOSCO, Il mese di maggio.., éd., Turin, 1874, dix­hui tième jour, p.116-117­

21 G BOSCO, Il mese di maggio.., éd. cit., seizième jour, p. 107.

22 G.BOSCO, Il mese di maggio.., éd. cit., ibid., p. 105.

23 G. BOSCO, Il mese di maggio..,, éd. cit., ibid.

24 G. BOSCO, Cenno biografico sul giovanetto Magone Michele. . , Turin, 1861 chap. 13, p. 70.

25 G. BOSCO, Cenno biografico . , éd. cit., chap. 14, p. 76.

26 Les biographies écrites par Don Bosco avaient un but, non seu­lement documentaire, mais aussi didactique, on ne le répétera jamais assez.


27 G. BOSCO, Il mese di maggio . . , éd. cit., premier jour, p. 29.

28 G. BOSCO, Il mese di maggio. . , éd. cit., premier jour, p. 28.

29 {G. BOSCO}, Il giovane Provveduto.., éd., Turin, 1851, première partie, art. 2, p. 10-11 ; répété dans toutes les éditons (voir la 101ª éd., 1885, p. 10-11 ). Même idée dans {G. BOSCO}, Porta teco.., Turin, 1858, p. 42 ; reproduite dans la deuxième édition de ce livre, Turin, 1878, p. 49. P. Stella a noté que Don Bosco, au niveau du Giovane provveduto, devait cette particularité à Charles Gobinet et à la tradition, dont il avait été le père (P. STELLA, Valori Spirituali . . , p. 27, 98). Comme souvent, un auteur lui aurait rappelé des phrases de la Bible et des scènes de la vie du Christ.

30 G. BOSCO, Il mese di maggio . . , éd. cit., neuvième jour, p. 69. Cette idée se retrouve dans un autre texte important - composé d'après saint Alphonse - que saint jean Bosco a répété toute sa vie dans les diverses éditions du Giovane provveduto : « II t'a fait son enfant par le saint baptême. Il t'a aimé et il t'aime comme un tendre père, et l'unique but pour lequel il t'a créé, c'est d'être aimé et servi sur cette terre pour te rendre ensuite heureux au paradis » [G. BOSCO], Il giovane prov­veduto . , 2ª éd., Turin, 1851, première partie, Sette considerazioni per ciascun giorno della settimana, Considerazione prima, p. 32). Seules amé­liorations stylistiques dans la 101ª éd. Turin r 1885), p. 36.

31 G. BOSCO, Cenno biografico sul giovanetto Magone Michele . . , éd. cit., chap. 3, 4, P. 16-24.

32 G. BOSCO, Il mese di maggio . . , éd. cit., vingtième jour, p. 128.

33 Memorie dell'Oratorio . . , Introduction, p. 16

34 Memorie dell'Oratorio . . , p. 116.

35 G. BOSCO, Il mese di maggio . . , éd, cit., vingtième jour, p. 131.


36 G. BOSCO, La cara della fortuna, éd., Turin, 1888, acte 2, scène 4, p. 45. Même réflexion un peu plus bas dans la pièce (acte 2, scène 5, p. 52) ; dans G. BOSCO, Storia d'Ita!ia.., éd., Turin, 1866, troisième époque, chap. 28, p. 244 ; etc.

37 Un commentateur récent des Promessi sposi a quelque tendance à séparer les deux aspects de providence bienfaisante et de providence justicière qu'il s'étonne de trouver là réunis. (M. F. SCIACCA, Il pensiero italiano nell'età del Risorgimento, éd., Milan, 1963, p. 219.)

38 G. BOSCO, Storia sacra.., 3ª éd., Turin, 1863, Storia sacra del Nuovo Testamento Introduction (dans Opere e scritti. . , vol. I, première partie, p. 281).

39 G. BOSCO Testament spirituel, vers 1884, dans E. CERIA Memorie biografiche, t. XVII, p. 258.

40 L. COGNET, La spiritualité française au XVII° siècle, Paris, 1949, p. 52.

41 [G. BOSCO], Il giovane provveduto .., éd., Turin, 1851, Le Sei domeniche e la Novena di S. Luigi Gonzaga, sixième dimanche, p. 66. Passera plus tard au cinquième dimanche : voir Il giovane provveduto . . , 101ª éd., Turin, 1885, p. 63.


42 Voir G. BOSCO, Storia sacra. . , éd., Turin, 1863, septième époque, chap. 9 (dans Opere e scritti. ., vol. I, première partie, p. 334) ; et une allocution préparatoire à la fête du coeur du Christ, en 1875, dans E. CERIA Memorie biografiche, t. XI, p. 249.

43 G. BOSCO, Il pastorello delle Alpi.. , Turin, 1864, chap. 29, p. 158.

44 G. BOSCO, Vita del giovanetto Savio Domenico.., Turin, 1859, chap. 23, p. 112. Figurera plus tard au chap. 24 : voir la sixième édition, Turin, 1880, p. 110.

45 Voir, ci-dessous, chap. 4, note 107.

46 G. BOSCO, Maniera facile per imparare la Storia sacra..,éd., Turin, 1855, § 20 (dans Opere e scritti.., vol. I, première partie, p. 57). La formule était intacte dans la cinquième édition de ce fascicule : Turin, 1877, § 19, p. 59.

47 G. BOSCO, Il mese di maggio . . , éd., Turin, 1874, troisième jour, p. 36-38.

48? G. BOSCO, Storia sacra . . , éd., Turin, 1863 , septième époque, chap. 4 (dans Opere e scritti . . , vol. I, première partie, p. 305).

49 G. BOSCO, Storia sacra. . , éd. cit., septième époque, chap. 6 (dans Opere e scritti . . , ibid., p. 316-320).

50 Voir, ci-dessus, chap. 1, p. 24, 40.

51 Congregazione di S. Francesco di Saler, manuscrit cité, chap. : Scopo di questa congregazione, art. 1-2. (Ci-dessous, document 12.) La «perfection chrétienne» des membres, dont il est question dans les versions postérieures, c'est-à-dire à partir de 1864 semble-t-il ... ut socii simul ad perfectionem christianam nitentes », dira l'édition approuvée par Rome en 1874), est la perfection « à l'imitation du Christ » des projets précédents.

52 G. BOSCO, La Chiave del Paradiso.. , éd., Turin, 1857, p. 20.

53 G. BOSCO, Introduction aux Regole o Costituzioni. . , Turin, 1877, p. 21.

54 G. BOSCO, Storia sacra. . , éd. cit., septième époque, chap. 7 (dans Opere e scritti.., ibid., p. 325).

55 G. BOSCO, Introduction aux Regole o Costituzioni . , éd. cit., p. 28. Nous n'ignorons d'ailleurs pas que cette introduction, établie sur un projet des collaborateurs de Don Bosco, n'est pas nécessairement et en tous points révélatrice de ses habitudes.


56 G. BOSCO, il mese di maggio . . , éd., Turin, 1874. premier juin, p. 191.

57 G. BOSCO, Il pastorello delle Alpi. . , Turin, 1864, chap. 9, p. 53 ; chap. 11, p. 60-61 ; chap. 19, p. 102.

58 G. BOSCO, Vita del giovanetto Savio Domenico . . , éd., Turin, 1880, chap. 15, p. 65; chap. 16, p. 70; chap. 22, p. 103 ; chap. 24, p. 108; chap. 25, p. 114.

59 G. BOSCO, Introduction aux Regole o Costituzioni. . , éd. cit., P. 35.

60 G. BOSCO, Storia sacra ... éd. cit., septième époque, chap. 5 (dans Opere e scritti. . , ibid., p. 313).

61 G. BOSCO, Storia sacra. ., éd. cit., Introduction à la Storia sacra del Nuovo Testamento (dans Opere e scritti. ., ibid., p. 285).

62 « D. De quelles vertus Jésus-Christ a-t-il donné l'exemple ? - R. Jésus-Christ a donné l'exemple de toutes les plus sublimes vertus, mais principalement de la charité, de la patience et du zèle pour la gloire de son Père céleste » (G. BOSCO, Maniera facile. ., éd., Turin, 1877, § 19, p. 59). - Après 1870, Don Bosco était donc tout prêt à magnifier le coeur du Christ avec ses contemporains catholiques. Ce culte, il est vrai, ne prit qu'assez tard une place un peu importante dans sa pensée spiri­tuelle. Le Giovane provveduto de 1847 ne contenait que le Chapelet du Sacré Coeur de Jésus (p. 105), sans encore d'explication sur le thème. Rien de plus dans les premières éditions de la Chiave del Paradiso (Turin, 1856). Pour le Giovane provveduto, la situation n'avait pas encore changé en 1874 (39ª éd.). L'article : Dévotion au Sacré Coeur de Jésus, et la courte prière : Offrande au Sacré Coeur de Jésus devant sa sainte image, n'ont paru, semble-t-il, qu'en 1878 (75ª éd.), et les Promesses faites par Jésus-Christ à la bienheureuse Marguerite Alacoque qu'en 1885 (101ª éd.). La Chiave del Paradiso de 1881 (3° éd., petit format, p. ro), comportera une image du Sacré-Coeur avec une phrase de Marguerite-Marie. On peut penser que l'auteur connaissait suffisamment cette dévotion, qui avait été propagée en son temps par saint Alphonse, pour n'avoir pas à la découvrir lui-même ; mais que la pression de l'époque, probablement représentée par l'un ou l'autre de ses auxiliaires, à qui nous sommes tentés d'attribuer les additions tardives, l'incita à la promouvoir lui aussi à la fin de sa vie. Les premières lignes de l'instruction citée : a La dévotion au Cœur très sacré de jésus qui tous les jours va croissant, écoutez, mes chers garçons, comment elle prit naissance ... » (G. BOSCO, Il giovane provveduto . . , 101ª éd., Turin, 1885, p. 119), favorisent cette interprétation.

63 G. BOSCO, Storia sacra.., éd. cit.. septième époque chap. 3 (dans Opere e scritti . . , ibid.; p. 302).

64 G. BOSCO Storia sacra..,. éd. cit.. septième époque, chap. 6 (dans Opere e scritti . . , ibid., p. 316).

65 G. Bosco, Storia sacra.., éd. cit., septième époque, chap. 7 (dans Opere e scritti . . , ibid.., p. 323).

66 G. Bosco, Storia sacra .., éd. cit., Dizionario dei vocaboli s.v. Redentore (dans Opere e scritti . . , ibid.., p. 392).

67 G. BOSCO, Vita del giovanetto Savio Domenico..,. éd., Turin, 1880, chap. 22, p. 104.


68 G. BOSCO, Il cattolico nel secolo.., éd., Turin, 1883, première partie, vingt-deuxième entretien, p. 146.

69 G. BOSCO à la soeur Maddalena Martini, s.d. (août 1875), dans Epistolario, t. I1, p. 492.

70 Voir ci-dessous.

71 (G. BOSCO), Il giovane provveduto.., 2ª éd., Turin, 1851 : Le sei domeniche. . , sixième dimanche, p. 65. Le texte n'avait pas changé dans G. BOSCO, Le Sei domeniche. ., éd., Turin, 1886, p. 32.

72 Voir, ci-dessous, chap. 4.

73 G. Bosco à G. Cagliero, 13 novembre 1875, dans Epistolario, c. II, p. 518.

74 Memorie dell'Oratorio . . , p. 21-22, 24. 79.

75 Memorie dell'Oratorio . . , p. 41-42.

76 Memorie dell'Oratorio. . , p. 89.

77 (G. BOSCO), Cenni sulla vita del chierico Luigi Comollo . . , Turin, 1844, chap. I p. 5.

78 (G. BOSCO), Cenni. . , éd. cit., chap. 2, p. 24.

79 (G. BOSCO), Cenni. . , éd. cit., chap. 3, p.32.


80 (G. BOSCO), cenni.., éd. cit., ibid.

81 (G. BOSCO), cenni.., éd. cit., ibid.

82 (G. BOSCO), cenni.., éd. cit., ibid. P. 36.

83 (G. BOSCO), cenni.., éd. cit., chap. 5 p. 56.

84 (G. BOSCO), cenni.., éd. cit., cha. 5, p. 70.

85 Selon la préface de la première édition de {G. BOSCO}, Cenni. . , p. 3

86 Voir {G. BOSCO}, Il giovane provveduto .. , éd., Turin, 1851 : Orazione a1 Sacratissimo cuore di Maria, p. 108 ; les allusions au coeur de Marie et à la Vierge douloureuse dans la vie de Dominique Savio (G. BOSCO, Vita del giovanetto Savio Domenico . . , éd., Turin, 1830, chap. 13, p. 55, 56) et le livret sur les événements de la Salette (G. BOSCO, Apparizione della Beata Vergine sulla Montagna di La Salette con altra fatti prodigiosi . . , Turin, 1871 ; d'abord paru dans G. Bosco, Raccolta di curiosi avvenimenti contemporanei, Turin, 1854, p. 46-83). Sur l'éla­boration du culte et de la dévotion pendant le moyen âge et leur plein épanouissement à l'époque moderne, voir E. BERTAUD, Douleurs, dans le Dictionnaire de Spiritualité, t. III, col. 1689-1701.

87 G. Bosco, Il mese di maggio . . , éd., Turin, 1874, ouverture, p. 20. Voir l'ensemble de ce chapitre d'introduction.

88 G. BOSCO, Vita del giovanetto Savio Domenico . . , Turin, 1859, chap. 8, p. 40 ; non modifié dans la sixième édition, Turin, 1880, p. 32-33. Rapprocher ce texte d'un récit de Don Bosco, le 28 novembre 1876, d'après E. CERIA Memoire biografiche, t. XII, p. 586-595.

89 G. BOSCO, Vita del giovanetto Savio Domenico . . , Turin, 1859, chap. 16, p. 81. (Voir l'édition de 1880, chap. 17, p. 77.) Le groupement de jeunes, dit compagnie de l'Immaculée Conception, reçut sa forme définitive en 1856 à l'oratoire du Valdocco, sous l'impulsion, entre autres, de Dominique Savio. Les premiers salésiens furent formés dans son esprit.



90 G. BOSCO, Il mese di maggio. ., ëd. cit., ouverture, p. 21.

91 G. BOSCO, Storia ecclesiastica. . , Turin, 1845, cinquième époque (dans Opere e scritti, . . vol. I, deuxième partie, p. 124).

92 Voir {G. BOSCO}, I1 giovane Provveduto . . , éd., Turin, 1851, p. 340-341. Autant que nous sachions, ce cantique a figuré dans toutes les éditions de ce manuel.

93 Le récit, d'après l'archevêque de Spolète, Mgr Arnaldi, dans G. BOSCO, Meraviglie della Madre di Dio invocata sotto il titolo di Maria Ausiliatrice, Turin, 1868, p. 95-103. Voir aussi l'article documenté de P. BROCARDO L' « Ausiliatrice di Spoleto » e Don Bosco, dans Accademia Mariana Salesiana, L'Immacolata Ausiliatrice. ., Turin, 1955, P. 239-272.

94 Détails dans G. BOSCO, Meraviglie. . , éd. cit., p. 104-106. Voir, sur cette confrérie, C. MINDERA Origine e sviluppo del culto di Maria Auxilium Chrirtianorum in Germania, dans Accademia Mariana Salesiana, L'Ausiliatrice della Chiera e del Papa, Turin, 1953, p. 77-90.

95 G. Bosco, Meraviglie. . , éd. cit., p. 106-109.

96 G. Bosco, Maria Ausiliatrice col racconto di alcune grazie. . , Turin, 1875, chap. 6, p. 54-55. Pour souligner la forme nouvelle prise par la piété mariale de saint Jean Bosco, notons, dans 1e Giovane prov­veduto, l'apparition, relativement tardive, du cantique au premier vers très parlant : O del Cielo gran Regina, que les deux premières éditions de 1847 et de 1851 n'avaient pas connu. Nous le trouvons dans le manuel de 1863 (9ª éd.), date vraisemblable de son insertion, mais il existait peut-être déjà dans les versions disparues échelonnées entre 1851 et 1863. II a témoigné de l'insistance de l'auteur sur la royauté de Marie.

97 Voir notre bibliographie, ci-dessous, p. 343-344.

98 G. BOSCO, Maria Ausiliatrice. . , éd. cit., chap. I, p. 9.

99 Récits dans G. Bosco, Meraviglie. . , éd. cit., chap. 9-11, 13, P. 71-80, 89-94.

100 G. BOSCO, Meraviglie. . , éd. cit., chap. 8, p. 61.

101 G. BOSCO, Maraviglie. . , éd. cit., préface, p. 6-7.

102 {G. Bosco], II Divoto dell'Angelo Custode Turin, 1845­

103 {G. BOSCO}, Il giovane provveduto . . , Turin, 1847. (Voir la deuxième édition, Turin, 1851, p. 358-359.) L'attribution de ce cantique à Silvio Pellico est « traditionnelle ». (Voir G. B. LEMOYNE, Memorie biografiche, t. II, p. I33.)

104 G. BOSCO, Panégyrique cité de saint Philippe Néri, 1868, dans G. B. LEMOYNE, Memorie biografiche . . , t. IX, p. 214. Même idée à propos des bienheureuses Marie des Anges et Catherine de Racconigi. dans G. BOSCO, Préface à la biographie anonyme : Vita della Beata Maria degli Angeli.., éd., Turin, p. 3-4; et G. BOSCO, Cenni storici intorno ... B. Caterina de Mattei da Racconigi . . , Turin, 1862, p. 3.

105 G. BOSCO, Al lettore, dans Le Sei domeniche e la Novena di San Luigi Gonzaga. , éd., Turin, 1886, p. 3.

106 Voir G. BOSCO, Vita del giovanetto Savio Domenico . . , éd., Turin, 1880, Préface, p. 5.

107 [G. BOSCO]. Cenni storici sulla vita del Chierico Luigi Comollo . . , Turin, 1844, Préface p. 3-q. (Ci-dessous, document 6.)

108 [G. BOSCO], Il Cristiano guidato ... secondo lo spirito di san Vincenzo de Paoli, Turin, 1847, Preface, p. 3-4.

109 G. BOSCO, Vita di San Martino . . , Turin, 1855.

110 G. BOSCO, Biografia del Sacerdote Giuseppe Caffasso . . , Turin, 1860.

111 G. BOSCO, Vita di san Pietro . . , Turin, 1856.

112 G. BOSCO, Vita di S. Paolo apostolo.., Turin, 1857.


113 G. BOSCO, Vita di S. Paolo apostolo.., éd., Turin, 1878, chap. 33, p. 149-150.

114 G. Bosco, Préface à la Vita della Beata Maria degli Angeli.., éd cit., p. 4.

115 Voir, pour comprendre les idées du temps, l'ouvrage collectif : L'Ecclésiologie au XIXe siècle (coll. Unam sanctam, 34), Paris, 1960.

116 Ces formules, que l'on trouve dans la finale de G. BOSCO, Storia ecclesiastica.., nouv. éd., Turin, 1870 : Che debbasi imparate dalla Storia ecclesiastica, p. 369 (voir Opere e scritti . . , vol. I, deuxième partie, p. 503), n'existaient pas dans le passage correspondant de la première édition (Turin, 1845 ; voir Opere e scritti . . , ibid., p. 155), signe parmi d'autres qu'elles n'étaient pas familières à Don Bosco.

117 G. BOSCO,LaChiave del Paradiso.., 2ªéd., Turin, 1857 : Compendio di ciò che un Cristiano deve sapere, credere e praticare, p. 10. Voir R. BELLARMIN Disputationes de controversiis christianae fidei.., quarta controv., lib. III, cap. 2.)

118 Simplifiée et plus abrupte dans G. BOSCO, Storia ecclesiastica . . , Turin, 1845 : Nozioni preliminari (Opere e scritti.., vol. I, deuxième partie, p. 13) ; une définition voisine se retrouve à peu près mot pour mot dans l'édition de 1870 de cet ouvrage, p. 6 (Opere e scritti . . , op. cit., p. 24z). Définition semblable à celle de la Chiave de 1857 dans G. BOSCO, Il centenario di S. Pietro apostolo . , Turin, 1867, triduum, p. 202-203 ; dans la troisième édition de G. BOSCO, La Chiave del Paradiso . . , petit format, Turin, 1881, p. 24 ; etc.

119 G. PERRONE, Catechismo intorno alla Chiesa Cattolica ad uso del popolo. Turin, 1854, leçon I : Delia origine e natura della Chiesa Cattolica p. 5.

120 . L'assimilation de 'l'Église « à un royaume, à un empire, à une republique à une cité, à une forteresse, à une famille », ce trouve dans G. BOSCO, IL centenario di S. Pietro apostolo . , Turin, 1867, triduum, p 206

121 M. Rua, Procès apostolique de canonisation, ad 42, dans Positio super virtutibus t. I, p. 335.

122 G. BOSCO, Storia ecclesiastica.., nouv. éd., Turin, 1870, troisième époque, chap. 5 (dans Opere e scrítti. . , vol. I, deuxième partie, p. 384).

123 G.BOSCO, Storia ecclesiastica . . , éd. cit., cinquième époque, chap. 3 (dans Opere e scritti . . , ibid., p. 442). Quoi qu'il en soit de la part de Giovanni Bonetti dans cette édition, celle-ci fut acceptée par Don Bosco.

124 Pour montrer que Don Bosco était partisan de l'infaillibilité dès la publication, en 1848, de Il Cristiano guidato alla virtù ed alla civiltà secondo lo spirito di San Vincenzo de Paoli, cet auteur Memorie bio­grafiche, t. III, p. 380) s'est servi d'une réédition postérieure de cet ouvrage. Si, au « vingt-deuxième jour », un chapitre intitulé : Suo attaccamento e figliale ossequio al Sommo Pontefice (voir la troisième édition, Turin, 1887, p. 173-184) y figurait bien, ce chapitre n'existait pas encore dans l'édition de 1848, qui, en revanche, renfermait un titre appelé à disparaître ensuite, sur la Conformité au vouloir de Dieu (1ère éd., 1848, p. 228-234).

125 G. PERRONE, op. cit., p. 23.

126 L. GASTALDI Sull'autorità del Romano Pontefice, Turin, 1864, chap. 3, P. 75.

127 G. BOSCO, 1 Concili generali e !a Chiesa cattolica, Turin, 1869, deuxième conversation, p. 52 et sv.

128 {G. BOSCO}, Avissi ai Cattolici ... Turin, 1650, § 2, p. 13. Voir G. BOSCO, Fondamenti della Cattolica religione, Turin, 1883, § 2, p. 8 ; et noter que l image du père et des fils appliquée au pape et aux fidèles revient un peu p!us loin, dans un passage du livret 7, p. 28), que ne comportaient pas les Avvisi ai cattolici, première forme des Fondamenti.

129 G. BOSCO, Vita di San Pietro . . , Turin, 1856, préface, p. 6-7.

130 Voir G. Bosco à G. Bonetti, 13 juin 1871, dans Epistolario, t. II, p. 164.


131 G. B. LEMOYNE Memorie biografiche, t. VIII, p. 719.

132 Voir, sur ce dévouement, ses paroles au cardinal Alimonda, le 26 décembre 1887, dans G. ALIMONDA, Jean Bosco et son siècle.., trad. fr., Nice, 1888, p. 54-55.

133 G. BOSCO, Il centenario di S. Pietro.., Turin, 1867, triduum, p. 211. Voir aussi G. BOSCO, La Chiesa Cattolica e la sua Gerarchia, Turin, 1869, chap. 4, surtout p. 79.

134 [G. BOSCO], Avvisi ai cattolici.., Turin, 1853, épigraphe.

135 [G. BOSCO], Avvisi ai cattolici.., Turin, 1853, titres des § 2, 3, 4. Le titre du § 4 devait être modifié. On lira plus tard : « L'Église de Jésus-Christ n'est pas l'Église des hérétiques » (G. BOSCO, Fondamenti della Cattolica Religione, Turin, 1883, § 4).

136 G. BOSCO, Il centenario di S. Pietro-, Turin, 1867, présenta­tion, p. V.

137 G. BOSCO, Il centenario.., Turin, 1867, chap. 29, p. 190. Ajoutez, entre beaucoup de phrases similaires, cette réponse à la question : « [Les hérétiques] qui meurent à l'âge adulte ne peuvent-ils pas se sauver ? » ... « Les adultes qui vivent et meurent séparés de l'Église catholique ne peuvent pas se sauver, car celui qui n'est pas avec l'Église catholique n'est pas avec Jésus-Christ, et celui qui n'est pas avec Lui est contre Lui. Voir l'Évangile » (G. BOSCO, Maniera facile. . , éd., Turin, 1855, § 32 ; dans Opere e scritti . . , vol. I, première partie, p. 70. Formule intacte de la cinquième édition de l'opuscule, Turin, 1877, § 31, p. 86).


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Chapitre III. Le monde surnaturel