26-Oeuvres de Saint Francois de Sales-Tome XXVI-Vol.5-Opuscules


26-Oeuvres de Saint Francois de Sales-Tome XXVI-Vol.5-Opuscules

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ŒUVRES
DE
SAINT FRANÇOIS DE SALES
ÉVÊQUE ET PRINCE DE GENÈVE
ET
DOCTEUR DE L'ÉGLISE
______
ÉDITION COMPLÈTE
D'APRÈS LES AUTOGRAPHES ET LES ÉDITIONS ORIGINALES
ENRICHIE DE NOMBREUSES PIÈCES INÉDITES
DÉDIÉE A N. S. P. LE PAPE LÉON XIII
HONORÉE DE DEUX BREFS PONTIFICAUX
ET COURONNÉE PAR L’ACADÉMIE FRANÇAISE
PUBLIÉE SUR L’INVITATION DE MGR ISOARD, ÉVÊQUE D'ANNECY
PAR LES SOINS DE RELIGIEUSES DE LA VISITATION
DU 1ER MONASTÈRE D’ANNECY
__________
TOME XXVI
OPUSCULES VOLUME V
ANNECY
MONASTÈRE DE LA VISITATION
___
IMPRIMERIE J. ABRY & CIE
MCMXXIX
Droits d'auteur pour tous les fichiers des Oeuvres complètes de saint François de Sales: sont mis à disposition pour
un usage personnel ou l'enseignement seulement. Dans l'usage public vous devez indiquer la source
www.donboscosanto.eu. Pas être utilisés à des fins commerciales de toute nature!
Deuxième édition
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ŒUVRES
DE
SAINT FRANÇOIS DE SALES
ÉVÊQUE ET PRINCE DE GENÈVE
ET
DOCTEUR DE L'ÉGLISE
_____
TOME VINGT-SIXIÈME
OPUSCULES
Vme VOLUME [1]
_____
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Propriété [II]
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ŒUVRES
DE
SAINT FRANÇOIS DE SALES
ÉVÊQUE ET PRINCE DE GENÈVE
ET
DOCTEUR DE L'ÉGLISE
______
ÉDITION COMPLÈTE
D'APRÈS LES AUTOGRAPHES ET LES ÉDITIONS ORIGINALES
ENRICHIE DE NOMBREUSES PIÈCES INÉDITES
DÉDIÉE A N. S. P. LE PAPE LÉON XIII
HONORÉE DE DEUX BREFS PONTIFICAUX
ET COURONNÉE PAR L’ACADÉMIE FRANÇAISE
PUBLIÉE SUR L’INVITATION DE MGR ISOARD, ÉVÊQUE D'ANNECY
PAR LES SOINS DE RELIGIEUSES DE LA VISITATION
DU 1ER MONASTÈRE D’ANNECY
__________
TOME XXVI
OPUSCULES VOLUME V
ANNECY
MONASTÈRE DE LA VISITATION
___
IMPRIMERIE J. ABRY & CIE
MCMXXIX [IV]
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Index OCR
Index OCR...................................................................................................................................6
Florent-Michel-Marie du Bois de la Villerabel, Évêque d'Annecy, honoré du sacré Pallium aux
lecteurs de l'édition authentique des Œuvres de saint François de Sales .................................. 17
Préface ....................................................................................................................................... 21
Avis au lecteur...........................................................................................................................24
Opuscules de saint François de Sales. Sixième série : Ascétisme et mystique .........................25
A. Opuscules et fragments sans destinataires........................................................................26
I. Fragments d'une concordance sur la Passion ................................................................. 26
II. Déclaration mystique sur le Cantique des Cantiques ...................................................30
Advertissement l'imprimeur au lecteur ......................................................................... 30
Preface ........................................................................................................................... 30
Le Cantique des Cantiques, eglogue de Salomon ......................................................... 33
I. Premier empeschement la souvenance des playsirs sensibles ............................... 33
II. Second empeschement : la distraction imaginative .............................................. 35
III. Troisiesme empeschement : les louanges humaines ........................................... 37
IV. Quatriesme empeschement : le travail du cors....................................................39
V. Cinquiesme empeschement : les respectz humains .............................................. 42
VI. L'ame avant surmonté tous les empeschemens, n'a plus besoin de remede mays
demeure absorbee et unie en Dieu par une parfaitte devotion .................................. 44
III. Fragments sur les vertus cardinales et morales ........................................................... 46
Avertissement des Editeurs ........................................................................................... 46
[Quelques moyens pour transformer nos œuvres par la charité]...................................47
Comme l'amour employe les vertus cardinales, et premierement la prudence ......... 48
Comme la charité employe la justice ........................................................................ 54
De la force ................................................................................................................. 64
De la temperance ou moderation...............................................................................66
IV. Fragments sur la Sainte Vierge ................................................................................... 72
V. Sur le signe de la Croix ................................................................................................ 73
VI. De la charité dans les jugements. Dieu seul doit juger. Mal penser et parler mal du
prochain est la marque la plus sûre d'une âme vicieuse. Le portrait d'Antigone.
Ceux qui jugent témérairement et qui médisent sont des aveugles et des esprits pleins de
malice. Injustice, de vouloir être absous de ses fautes et de condamner les moindres en
autrui. Qui ne regardera son prochain avec pitié gâtera toutes les parties de son âme.
Le temps fera voir si nous sommes meilleurs que ceux que nous jugeons.
Exemples. Considérons nos propres défauts, et nous ne verrons pas les vices du
prochain. ............................................................................................................................ 74
VII. Sentiment de saint François de Sales sur la conduite a tenir par les pasteurs de
l'eglise. Comment un Supérieur doit sortir de la lecture et de la méditation. Ne pas
négliger le bon exemple. Quel doit être l'abord de ceux qui commandent. Leur
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attitude envers ceux qui les visitent. Les « malades honteux » et les remèdes pour les
grandes maladies de l'âme. Suivre une multiplicité de conseils est chose dangereuse.75
VIII. Conseils aux supérieurs. Porter remède aux moindres murmures. Avec quelle
discrétion un Supérieur doit accorder quelques particularités. Les enfants qui pleurent.
Bien examiner les sujets avant de les recevoir. Certains esprits trop prompts sont
comme la pierre lancée avec la fronde. Mieux vaudrait pour un Ordre religieux n'avoir
que deux Maisons, plutôt que de les multiplier par la prudence humaine. Les
fondements de la vie religieuse. ........................................................................................ 76
IX. Similitudes. Premier recueil ........................................................................................ 77
X. Deuxième recueil..........................................................................................................80
XI. Troisième recueil.........................................................................................................81
XII. Similitudes et Notes sur la Sainte Vierge .................................................................. 83
De Beata Virgine et de quibusdam similitudinibus.......................................................83
XIII. Recueil de similitudes .............................................................................................. 85
XIV. Recueil de similitudes ............................................................................................ 104
XV. Autre recueil de similitudes.....................................................................................106
XVI. Recueil de similitudes et notes pour la rédaction du Traité de l'Amour de Dieu ... 108
B. Petits traités et avis a des destinataires particuliers ........................................................ 114
I. Avis a Mme Rose Bourgeois, Abbesse du Puits-d'Orbe, sur les devoirs que lui imposent
sa profession religieuse et sa charge, Dijon, avril 1604 . Qu'est-ce que la dévotion ? La
vraie Religieuse « doit estre devote » et fervente. Fuir le péché et tout ce qui peut être
une entrave pour l'âme. La méditation, l'Office divin, les oraisons jaculatoires, la
lecture spirituelle. Conseils pour le coucher et le lever. Comment on acquiert la «
promptitude a bien faire ». La sainte Communion les premiers dimanches de chaque
mois : préparation et action de grâces. Eviter la mélancolie, et pourquoi. Douceur,
joie, humilité et tranquillité, accompagnées d'une grande confiance en Dieu.
Obligation, pour une Abbesse, de travailler à la perfection de ses Religieuses et de
réformer le Monastère. L'exemple est le meilleur moyen. Le dortoir doit être fermé
aux séculiers. Livres à lire pendant les repas. Que faire pour l'Office. Choisir
une Religieuse pour les affaires temporelles. Le rétablissement de la perfection et de la
Règle sera le plus grand service que l'Abbesse pourra rendre à Notre Seigneur ; le désirer
et le poursuivre, mais avec patience. ............................................................................... 114
II. Méditation pour le commencement de chaque mois avant la Sainte Communion,
adressée a la même [Dijon, avril 1604]. Pourquoi sommes-nous en ce monde ? Tout ce
qui est contraire à notre fin dernière doit être rejeté. Malheur de ceux qui n'y pensent
point. Aveu de notre misère et résolutions. Un mot de saint Bernard. La
couronne de roses après la couronne d'épines. ................................................................ 118
III. Fragments d'avis sur la manière de méditer, suivis d'une méditation incomplète sur le
crucifiement de Notre-Seigneur Jésus-Christ [Dijon, avril 1604]................................... 119
IV. Méditation sur le crucifiement de Notre-Seigneur Jésus-Christ, donnée a la Présidente
Brulart le 15 avril 1604 ................................................................................................... 123
V. Fragment d'un avertissement sur la perfection chrétienne, envoyé a la Présidente
Brulart, 3 mai 1604 (Minute inédite). En quoi consiste la perfection. Reconnaître la
volonté de Dieu pour l'accomplir. Les commandements de Dieu et le devoir d'état ; les
tribulations et les maladies ; les « petites traverses et incommodités ». Erreur de ceux
qui se préparent aux grandes épreuves et qui ne savent pas supporter les petites. Pour
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les actions de peu d'importance et auxquelles on n'est pas obligé, considérer avec liberté
d'esprit ce qui tend davantage à la gloire de Dieu et se résoudre. Ce qui doit être
soumis au guide de notre âme. Deux moyens pour parvenir à la perfection..............126
VI. En quoi consiste la perfection et comment l'acquérir ; degrés de l'obéissance. Ecrit
envoyé a la Baronne de Chantal, [3 mai 1604 ?]. La perfection n'est autre chose que la
charité. Qu'est-ce qui la produit. La prière, les Sacrements, l'exercice des vertus :
moyens pour l'acquérir. Les trois vertus de Religion, quoique non vouées, rendent
parfait. Les degrés de l'obéissance par rapport à ceux à qui on la rend. Exemple de
Jésus-Christ. Obéir aux commandements de Dieu et des supérieurs, aux conseils
évangéliques suivant sa vocation, aux inspirations de la grâce. L'obéissance dans les
choses agréables, dans les indifférentes et dans les difficiles. ........................................ 128
VII. Avis a la Baronne de Chantal, Saint-Claude, 26 ou 27 août 1604. Pensées et
aspirations pour le lever. Exercice pour la sainte Messe. Le congé et la bénédiction
du bon Ange. Oraisons jaculatoires et regard sur « la divine Bonté » , L'entrée dans
les plaies du Sauveur. ...................................................................................................... 130
VIII. Divers avis pour l'oraison, les aridités et les distractions, et sur la manière de se
comporter dans les exercices spirituels de la journée envoyés a Mme Rose Bourgeois,
Abbesse du Puits-d'Orbe, le 9 octobre 1604 ................................................................... 131
1) Meditation sur l'eslevation de Jesus Christ crucifié ................................................ 131
2) Conseils pour la meditation. Quand faut-il « lascher la bride aux affections ». Un
avis de saint François de Sales et de saint Pierre d'Alcantara. A qui on peut parler
pendant la méditation. Trois remèdes contre les engourdissements d'esprit et les
sécheresses. Pourquoi on se met en la présence de Dieu. Les courtisans en la
chambre du roi et l'âme dans l'oraison. C'est un grand honneur d'être auprès de
Dieu. Que faire lorsqu'on est distrait. L'oraison doit toujours se finir en paix et
avec la résolution de servir Dieu fidèlement ............................................................... 135
3) Exercice pour le matin. Considérations et aspirations pour le lever. Exercice de la
« Preparation» : en quoi il consiste. Une partie de celui-ci peut se joindre à la
méditation quand elle se fait le matin. Ce qu'il ne faut pas prévoir pendant l'oraison.
..................................................................................................................................... 137
4) Avis pour bien entendre la sainte Messe.................................................................138
5) Les retours vers Notre-Seigneur, les oraisons jaculatoires et la pensée de la mort
pendant la journée ....................................................................................................... 139
6) Exercice pour le soir. L'examen de conscience. Le souvenir de la mort ........... 140
7) Avis divers sur les exercices précédents. Vivre sans scrupules et servir Dieu avec
amour. La durée de la méditation, et quand la faire. Encore la Messe. C'est
une superstition de croire qu'il faille recommencer le Chapelet ou autres prières quand,
légitimement, on les a interrompus. Se mettre toujours en la présence de Dieu avant
de prier.........................................................................................................................140
IX. Petit traité sur la Sainte Communion, rédigé pour Mme Rose Bourgeois, Abbesse du
Puits-d'Orbe, [décembre 1604, ou commencement de 1605]. Une seule chose est
nécessaire pour communier : le bon état de l'âme. Chasser de notre entendement toute
curiosité. Comparaison de la manne. S'humilier dans les tentations, ou encore les
mépriser. Qu'est-ce que la sainte Communion ? Pour s'y préparer, oublier les
affaires domestiques et les choses matérielles, et se rappeler les bienfaits de Dieu. Les
« affections » ne doivent pas « estre a l'abandon, mais resserrees et couvertes ».
Exemple des Israëlites mangeant l'agneau pascal. Ardent désir. Ne pas disputer
avec l'ennemi. Considérations suggérées pour la veille de la Communion. Un peu
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de retraite intérieure et récréation plus « devote ». Retrancher peu à peu les attaches.
Que faire la nuit et le matin au réveil. Ce que le Saint n'approuve pas. Comment
traiter avec Notre-Seigneur le jour où on l'a reçu. Préparation et action de grâce ;
diverses aspirations. Comment se servir de l'imagination. La Sainte Vierge, et l'âme
qui communie. Que personne ne s'approche de la Table sainte par coutume. L'un
des principaux fruits de la Communion : la charité mutuelle. ........................................ 141
Consideration dont il faut paver l'entendement...........................................................142
Comment il faut purger la memoyre ........................................................................... 143
Comment il faut purger la volonté et de quoy il la faut parer ..................................... 143
Advis particuliers pour reduire en prattique la preparation a la sainte Communion...144
X. Quelques avis pour combattre la tristesse et l'inquiétude intérieure, adressés a Mme
Rose Bourgeois, Abbesse du Puits-d'Orbe, [mai] 1605. La tristesse et l'inquiétude
s'engendrent l'une l'autre, et pourquoi. L'âme peut chercher à être délivrée d'un mal ou
pour l'amour de Dieu ou pour l'amour propre : effets contraires de ces deux amours.
Grand mal de l'inquiétude ; d'où elle vient. Quand on tombe en quelque imperfection,
rasseoir d'abord l'esprit et puis y mettre ordre. La sentinelle de l'âme. Notre «
edification spirituelle » doit se faire dans une grande paix. La tristesse peut être bonne
ou mauvaise, mais elle est plus souvent mauvaise. Ses productions. Marques de la
mauvaise tristesse et de la bonne. D'où vient la différence qui existe entre elles : le
Saint-Esprit est « l'unique Consolateur » ; le malin esprit, « un vray desolateur ».
Remèdes contre la mauvaise tristesse : avoir patience ; contrarier ses inclinations ;
chanter des cantiques spirituels ; s'employer aux œuvres extérieures ; faire souvent des
actes extérieurs de ferveur ; la discipline modérée ; la prière et s'adresser à Dieu avec des
mots de confiance ; la sainte Communion ; l'ouverture de cœur. ................................... 149
De l'inquietude ............................................................................................................ 150
De la tristesse .............................................................................................................. 151
Signes de la mauvaise tristesse....................................................................................151
Quelques remedes ....................................................................................................... 153
XI. Première méthode pour réciter le Chapelet, écrite à Saint-Jean d'Aulps, 14 août 1606
......................................................................................................................................... 155
XII. Deux occupations pour la retraite spirituelle [1604-1608]. La sainte enfance de
Notre-Seigneur. Sa Passion. ....................................................................................... 156
XIII. L'imitation de Notre-Seigneur, [1604-1609 ?] Comment Jésus a-t-il agi pendant sa
vie ? Exciter notre âme par ses exemples ; un seul regard suffit ............................... 157
XIV. Deuxième méthode pour réciter le Chapelet, envoyée à Dijon le 29 septembre 1608
......................................................................................................................................... 158
XV. Avis a la Baronne de Chantal, Sales, 15-20 avril 1610. Ne pas faire de réflexions sur
les choses qui arrivent. Dans les sécheresses, s'humilier. Comment reprendre le
prochain. Le voyageur dans un navire et le soin du pilote. ........................................ 159
XVI. Conseils a un ami, 1609-1610. Le secret pour avoir la paix extérieure et intérieure.
......................................................................................................................................... 160
XVII. Le saint reçoit les vœux de religion de la Mère de Chantal, renouvelle son vœu de
chasteté et fait celui de servir l'ame de la sainte, 22 août 1611.......................................160
XVIII. Mémorial pour bien faire la confession, adressé au Duc de Bellegarde, le 24 août
1613 (Minute). Faire sa confession devant Jésus crucifié qui, » avec une douceur de
misericorde incomparable », nous prépare son pardon. Il faut s'accuser non seulement
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du genre de péché, mais de l'espèce, du nombre, des divers degrés du péché. Entre ces
degrés, celui qui multiplie la malice du péché en une seule action doit être déclaré. Le
désir et la résolution de pécher est de fait un péché, ainsi que les mauvaises pensées
volontairement entretenues. Certaines actions comprennent en elles plusieurs espèces
de péché : on doit s'en accuser. Détail des péchés contre les commandements de Dieu.
Examen sur les sept péchés capitaux. Les péchés contre les commandements de
l'Eglise. Comment discerner le péché mortel du véniel. Moyens suggérés pour
détourner du péché les grands de ce monde. Prière avant la confession....................162
2e Advis ....................................................................................................................... 162
3e Advis ....................................................................................................................... 163
4e Advis ....................................................................................................................... 163
5e Advis ....................................................................................................................... 163
6e Advis ....................................................................................................................... 164
7e Advis ....................................................................................................................... 164
8e Advis. Du tems que l'on a demeuré en chaque action du peché ............................. 165
Des pechés contre le premier commandement du decalogue..................................165
Pechés contre le second commandement ................................................................ 166
Pechés contre le 3. commandement ........................................................................ 166
Pechés contre le 4. commandement ........................................................................ 167
Pechés contre le 5. commandement ........................................................................ 167
Pechés contre le 6. commandement ........................................................................ 167
Pechés contre le 7. commandement ........................................................................ 168
Peches contre le 8. commandement ........................................................................ 168
Pechés contre le 9. commandement ........................................................................ 169
Contre le 10. commandement..................................................................................169
Examen touchant les pechés capitaux ..................................................................... 169
Des pechés qui se commettent contre les commandemens de l'esglise...................171
Moyen de discerner le peché mortel du veniel........................................................172
Moyens pour divertir les grands du peché de la chair ............................................. 173
Oraison pour dire avant la confession ..................................................................... 173
XIX. Sur la Très Sainte Vierge, a la Mère de Chantal ? [1610-1613?]. Marie a passé par
tous les états de vie pour attirer toutes les âmes à son divin Fils. ................................... 174
XX. Prière composée pour la Baronne Marie-Aimée de Thorens, février 1615.............174
XXI. Avis a la Mère de Chantal, [1613-1615 ?]. Confiance et abandon. La Mère de
Chantal doit tenir son âme ferme, sans « vouloir voir ce qu'elle fait ou si elle est
satisfaitte ». Bel exemple de simplicité des petits enfants. De la trop grande activité
d'esprit naît l'inquiétude. Quitter tout ce qui déplaît à Dieu et ne pas « s'embesoigner »
de notre avancement spirituel..........................................................................................176
XXII. Fragments de conseils a la même, [1613-1616]. Les petites vertus. Tout faire
pour Dieu. Garder la paix et reposer dans le sein de la Providence. .......................... 177
XXIII. Avis a la même, sur la simplicité, l'abandon et l'amour du prochain, 31 mars 1616.
Comment marcher en esprit de simplicité. Ne pas faire des retours sur soi-même.
Exemple des petits enfants. Les « amantes spirituelles » se « purifient et ornent » pour
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2 Pages 11-20

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plaire à l'Epoux céleste. Leur préparation n'est pas longue ni empressée, mais fidèle et
amoureuse. Avis de saint François d'Assise. Imiter le Sauveur sur la croix. Les
inquiétudes de notre cœur et l'avancement dans la perfection. — Rien ne peut ébranler
celui qui se remet au bon plaisir de Dieu. Regarder le prochain dans la poitrine du
Sauveur. La présence ne peut rien ajouter « a un amour que Dieu a fait, soustient et
maintient ». — Vivre et mourir comme il plaira au « cœur souverain » de Notre-Seigneur.
Arrêter l'inconstance de l'esprit humain par la force des anciennes résolutions. ....... 178
XXIV. Fragments de conseils a la même, [1615-1616]. Excellence du sommeil amoureux
entre les bras du Sauveur. La Mère de Chantal doit demeurer en la remise de tout elle-
même à Notre-Seigneur et coopérer à sa grâce. Que faire à l'oraison. Délaisser sa
vie et ses affaires au bon plaisir de Dieu. ........................................................................ 180
XXV. Derniers avis a la même, Annecy, 6 juin 1616. Simplicité de l'amour, remise de
soi-même en Dieu. Tout recevoir de sa main et ne vouloir que lui............................181
XXVI. Questions de la Mère de Chantal a saint François de Sales, et réponses de celui-ci,
fin mai et août-novembre 1616. Renouveler chaque année l'abandon de soi-même entre
les mains de Dieu. Les paroles et pensées qu'il faut retrancher. Petit examen
conseillé. Oublier tout. Que la Mère de Chantal demeure ferme en l'oraison de
simplicité et d'abandon ; commandement que le saint Directeur fait à son esprit. Etre
comme de petits enfants. L'indifférence doit se pratiquer en toutes rencontres. Que
l'obéissance à la Règle domine les « menus attraitz ». Ce que le Saint « desire bien fort
». Parler peu de soi-même et pourquoi. Le Traitté de l'Amour de Dieu est fait
surtout pour la Sainte. L'oraison et la contrition. ....................................................... 182
XXVII. Avis a la Sœur Claude-Agnès de la Roche, Religieuse de la Visitation d'Annecy,
[1612-1617]. Tenir son âme en paix, mais avec simplicité et amour. Un seul désir :
plaire à Dieu. Pour se débarrasser des troubles de la partie inférieure, passer outre,
sans les regarder. Il faut du temps pour parvenir à la paix. Pourquoi se défaire de la
propre volonté. Dieu veut détacher de toutes choses la destinataire pour la « mieux
serrer a sa Bonté ». Indifférence, confiance, humilité. Plus on se sent pauvre, plus il
faut avoir de grandes prétentions de bien faire. Essayer d'aimer la correction.
L'égalité du maintien extérieur. S'abîmer dans son néant devant Notre-Seigneur et la
Sainte Vierge. .................................................................................................................. 185
XXVIII. Dédicace d'un exemplaire du Traité de l'Amour de Dieu A M. Humbert Vibert,
13 avril 1617 (Inédit).......................................................................................................188
XXIX. Confidences a la Mère de Chantal, [1610-1618]. Pourquoi le Saint-Esprit nous
donne le don d'intelligence. Faveurs divines accordées à saint François de Sales.....188
XXX. Avis a la Sœur Marie-Adrienne Fichet, Religieuse de la Visitation d'Annecy,
1611-1618 (Inédit)...........................................................................................................189
De l'obeyssance ........................................................................................................... 189
De l'humilité ................................................................................................................ 190
De la douceur .............................................................................................................. 191
De la simplicité............................................................................................................192
De la generosité ........................................................................................................... 192
Du parler......................................................................................................................193
Comme il se faut relever quand on est tombee ........................................................... 194
Comme il faut vivre selon la partie superieure ........................................................... 195
Comme il faut tous les jours renouveller ses bons propos .......................................... 195
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2.2 Page 12

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De l'amour de Dieu [et du prochain] ........................................................................... 197
Des secheresses et sterilités.........................................................................................198
Des tentations : premierement de la vocation ............................................................. 198
Des aversions...............................................................................................................199
De la melancolie..........................................................................................................199
De l'office .................................................................................................................... 200
De l'orayson.................................................................................................................201
XXXI. Avis a une Religieuse de la Visitation sur les vertus qu'elle doit surtout pratiquer,
[1612-1618] (Inédit) ........................................................................................................ 203
Prattique de l'humilité ................................................................................................. 203
Prattique de la douceur ................................................................................................ 204
Prattique de la simplicité ............................................................................................. 204
Prattique de la modestie .............................................................................................. 204
Prattique de la charité fraternelle ................................................................................ 205
Prattique de la mortification ........................................................................................ 205
Prattique de la patience ............................................................................................... 206
Prattique de l'obeyssance.............................................................................................206
Prattique de la pauvreté ............................................................................................... 206
Prattique de la chasteté ................................................................................................ 206
Prattique de la generosité ............................................................................................ 207
Prattique de la devotion forte et intime ....................................................................... 207
Prattique de la conformité à la volonté de Dieu .......................................................... 207
XXXII. Autres avis a une Religieuse de la Visitation, sur l'obeissance et l'examen qui doit
suivre l'oraison, [1612-1618] (Inédit).............................................................................. 208
De l'obeyssance ........................................................................................................... 208
Examen sur l'orayson, qui se doit faire apres icelle, se pourmenant ou faysant son
ouvrage ........................................................................................................................ 208
XXXIII. Avis a la Sœur Anne-Marie Rosset lors de son départ d'Annecy pour la
fondation du Monastère de la Visitation de Bourges, vers le 15 octobre 1618. Etre
couverte d'humilité. Moins on sent de capacité en soi, plus il faut s'appuyer avec
confiance sur Notre-Seigneur. La Mère Rosset doit être « Depenciere » des dons de
Dieu. Vertus qu'elle devra pratiquer envers les âmes appelées à la Visitation. ......... 209
XXXIV. Exercice envoyé a Madame de Villesavin, juillet-août 1619 ........................... 209
XXXV. Aux Religieuses de la Visitation d'Annecy 1612-1620] (Fragment). Une leçon de
Marie à propos de la fête de la Transfiguration. ............................................................. 212
XXXVI. Avis pour la charge de Supérieure, a la Mère Claude-Agnès de la Roche, juin ou
commencement de juillet 1620. Chaque jour, au réveil, dire la parole de saint Bernard : «
Qu'es tu venu faire ceans ? » Ne pas subtiliser, mais avoir une intention droite de tout
faire pour Dieu. Supporter les imparfaites et les aider. Le maintien extérieur.
Importance de la charge. La nouvelle Supérieure doit demander à la Sainte Vierge de
l'offrir à son divin Fils, et renouveler son âme. Après cet acte de parfait abandon,
Marie la gardera tout le temps de sa vie. ......................................................................... 212
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2.3 Page 13

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XXXVII. Adieux a la Mère Claude-Agnès de la Roche, première Supérieure de la
Visitation d'Orléans, vers le 10 juillet 1620. Trois vertus spécialement recommandées.
......................................................................................................................................... 214
XXXVIII. Lettre d'obédience a la Sœur Paule-Jéronyme de Monthoux, pour être
Supérieure au Monastère de la Visitation de Nevers, 27 juillet 1620 ............................. 214
XXXIX. Ecrit dans un volume de l'Introduction a la Vie Devote, donné a la sœur Marie-
Philiberte Christin, Tourière de la Visitation d'Annecy, 8 mars 1621 (Inédit) ............... 215
XL. Avis a la Mère Paule-Jeronyme de Monthoux, Supérieure de la Visitation de Nevers,
décembre 1620-1621 (Inédit). La prise d'habit doit se faire à la grille du chœur. — Vanité
et discrétion. Les mères et les filles s'appellent « Seurs ». Conduite à tenir à l'égard
des malades. On peut admettre des Novices d'un autre Ordre ; pour les Professes, il
faut une dispense de Rome. N'appeler le médecin que pour la vraie nécessité. Avis
touchant les Pères spirituels. Raisons qui peuvent dispenser du jeûne. Demander ce
dont on a besoin est plus parfait que de se laisser à « la providence des Superieurs ».
Murmures contre la Supérieure. Ce que la destinataire doit faire au début de sa charge,
soit pour les séculiers, soit pour les Sœurs. — Ne pas s'exempter facilement de l'Office.
Attitude au parloir. Les prétendantes opiniâtres et négligentes ne doivent pas être
reçues. Confiance aux Pères Jésuites. Exercer les veuves. Attirer doucement les
Sœurs qui sont dans la peine. — Quelques autres points d'observance. ......................... 216
XLI. Fragments d'avis aux Supérieures de la Visitation, [1615-1622]. Grand honneur
d'être appelées à la conduite des âmes ; comment faut-il s'en acquitter ? Les
Supérieures doivent suivre les voies de Dieu et non les leurs. Qualités de l'homme
intérieur. Comment agir avec les inférieures revêches et orgueilleuses. Suivre
l'esprit de douceur et cultiver surtout les âmes. Souhaits du Saint aux Supérieures. . 219
XLII. Avis spirituels a une personne vivant dans le monde, novembre 1619-1622 (Inédit).
Les satisfactions de l'amour-propre et l'exercice de l'amour de Dieu. Craindre la
tentation, c'est ouvrir la porte à l'ennemi ; la confiance en Dieu lui fait peur. Mépriser
les tentations et recourir à la prière. Pourquoi le démon donne quelqu'apparence de
vertu à ceux qui le servent. « Celuy qui nous a donné la fleur du desir nous donnera
aussi le fruit de l'accomplissement. » Le Sauveur est père par sa providence et mère
par son amour. Un effet de la dévotion qui est selon Dieu. Exemple du bienheureux
Amédée de Savoie et de sainte Paule. L'amour de Dieu ne trouve jamais qu'on fait trop
pour lui. ........................................................................................................................... 221
XLIII. Autres avis spirituels a une personne vivant dans le monde, novembre 1619-1622,
(Inédit). En quoi consiste la simplicité. Qui ne cherche que Dieu le trouve toujours.
Il faut le chercher par le chemin qu'il nous a marqué. Ce n'est pas « nostre mal qui
nous fait mal », c'est l'amour-propre. L'homme simple ne se trouble point. Exercice
d'union à la volonté de Dieu pour le matin, et « acte de reunion » à multiplier dans la
journée. Ne faire aucun acte de piété par manière d'acquit. Mieux vaut n'entendre
qu'une Messe, mais avec attention, que plusieurs avec irrévérence. Conseil de saint
François de Sales aux personnes très occupées. L'égalité d'esprit est l'un des plus
beaux ornements de la vie chrétienne. Tâcher de l'acquérir en demandant le secours du
Saint-Esprit et en se tenant en garde contre la langue.....................................................223
XLIV. Avis a la Mère Claude-Agnès de la Roche, Supérieure de la Visitation d'Orléans,
[juin 1620-1622]. Parler très peu de soi-même. L'affabilité ne doit pas empêcher
l'exercice de l'autorité. La gravité avec les séculiers. Ne pas cacher le bien qui se
fait à la Visitation. Rapports avec les Carmélites, les Jésuites et les Minimes. Ce
qu'il faut faire au parloir. La Vie, Passion et Mort de Notre-Seigneur sont les meilleurs
sujets d'oraison. Certaines âmes sont attirées à une plus grande simplicité. Marque
d'une bonne oraison. Ce que la Supérieure peut permettre. Discrétion qu'elle doit
13/332

2.4 Page 14

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observer. Ne rien faire de plus que la Communauté. La sainte Communion et la
reddition de compte. La charité. Regarder Dieu. .................................................. 225
XLV. Avis spirituels a une Religieuse de la Visitation (Inédit). Marcher dans la vertu
sinon toujours avec joie, du moins avec courage. La statue dans sa niche. Ne
soyons pas des anges, mais de petits poussins. Nous n'avons pas à craindre le
jugement du monde. Nos misères ne nous doivent pas accabler ni étonner. Quel est,
parmi les pauvres, « le plus advantagé » ? Parlons à Dieu de nos misères. Ne pas
insulter notre cœur et ne pas trop le presser. — Dieu seul doit y régner. Le réjouir et le
consoler. La couche de l'Epoux, et l'agneau de l'holocauste. Recevoir Jésus-Christ :
le plus grand moyen d'arriver à la perfection. Ne pas quitter la sainte Communion pour
les distractions et aridités. Le divin Maître est Roi, soleil, fournaise, baume, trésor,
gage de la gloire. Aspirer à l'éternité qui approche. ................................................... 227
XLVI. Autres avis spirituels a une Religieuse de la Visitation (Inédit). Trésor de
l'abandon total à Dieu. Bonheur d'une âme petite et humble. Les emplois dans la
maison du Seigneur. Tout est indifférent au cœur qui ne veut que Dieu. — Dans les
choses qui ne sont pas clairement manifestées, interroger nos Supérieurs et suivre leurs
avis. Suavité des inspirations divines ; trouble et inquiétude en celles qui viennent du
démon. L'humilité change en or le plomb de nos infirmités. « Mesnager les petites
rencontres ». Bienheureuse est l'âme dépouillée de toutes choses. Ce qui nous
empêche de nous jeter à corps perdu entre les bras de la Providence. Dieu n'est pas
comme les hommes. « Aymer sans mesure l'Amour eternel. ».................................. 230
XLVII. Fragments sur la pauvreté (Inédit). En quoi consiste la parfaite pauvreté
intérieure. Comment regarder les biens de la Communauté. Accepter avec amour
les disettes. Trois degrés de la pauvreté spirituelle. La grande et sainte pauvreté.
Quel en est le dernier degré. Celui qui n'a aucune confiance en soi-même est vraiment
fidèle. ............................................................................................................................... 231
XLVIII. Fragments sur l'obéissance, (Inédit). L'obéissance religieuse est un holocauste.
Devoir du Supérieur et de l'inférieur. Qu'est-ce que le propre jugement ?
L'indifférence du parfait obéissant .................................................................................. 232
XLIX. Conseils a un religieux pour l'examen de conscience..........................................233
L. Méditation sur le choix d'un état de vie pour un aspirant a la vie religieuse. Bonté de
Dieu qui se contente de nous obliger à garder ses Commandements. Ce qu'il nous
conseille. Toujours nous aurons à combattre. Consolations de la vie religieuse et de
la « vie commune ». Examiner ses dispositions et attendre. ...................................... 233
LI. Autre méditation pour le même aspirant, sur la naissance de Notre-Seigneur Jésus-
Christ. L'arrivée de Marie et Joseph à Bethléem ; ils reçoivent le mépris avec une douceur
incomparable. Le moindre oubli excite notre arrogance. L' « establerie » pour le
Sauveur, et « les superbes edifices » pour les pécheurs. Tout est pauvre dans cette
naissance, et nous ne cherchons qu'à nous satisfaire.......................................................234
LII. Troisième méthode pour réciter le Chapelet ............................................................ 235
LIII. Paraphrase de l'Oraison Dominicale adressée a une de ses filles spirituelles (Inédit)
......................................................................................................................................... 237
Appendice................................................................................................................................ 264
A. Dévotes méditations sur tous les mysteres du Saint Sacrifice de la Messe....................264
Petite preface ................................................................................................................... 264
L'entree du prestre a l'autel (Jesus entre au Jardin) ......................................................... 264
Au commencement de la Messe (Les prieres de Jesus au Jardin)...................................264
14/332

2.5 Page 15

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Au Confiteor (Jesus est courbé en terre) ......................................................................... 265
Au bayser de l'autel (Jesus est trahi par le bayser de Judas) ........................................... 265
A l'Epistre(Jesus est mené prisonnier) ............................................................................ 265
A l'Introit (Jesus est souffletté) ....................................................................................... 265
Au Kyrie Eleison (Jesus est renié par Pierre)..................................................................265
Au Dominus Vobiscum (Jesus regarde Pierre et le convertit) ........................................ 265
A l'Epistre (Jesus est mené chez Pilate) .......................................................................... 265
Au Munda Cor Meum (Jesus est mené chez Herode) ..................................................... 265
A l'Evangile (Jesus est moqué et ramené devant Pilate) ................................................. 266
A l'ouverture du Calice (Jesus est despouillé).................................................................266
A l'Offertoire (Jesus est fouetté) ..................................................................................... 266
Lhors qu'on couvre le Calice (Jesus est couronné) ......................................................... 266
Lhors que le prestre lave ses mains (Pilate lave ses mains) ............................................ 266
A l'Orate, fratres (Pilate dit aux Juifz : Ecce homo)........................................................ 267
A la Preface (Jesus est condamné a mort) ....................................................................... 267
Au Memento pour les vivans (Jesus porte sa Croix).......................................................267
A l'Action (Sainte Veronique essuye d'un linge la face de Nostre Seigneur) ................. 267
A la benediction des offrandes (Jesus est attaché en croix) ............................................ 267
A l'eslevation de l'Hostie (Jesus crucifié est eslevé) ....................................................... 267
A l'eslevation du Calice (Le sang de Jesus Christ coule de ses playes) .......................... 267
Au Memento pour les Trespasses (Jesus prie pour les hommes) .................................... 268
Au Nobis quoque peccatoribus (La conversion du larron) ............................................. 268
Au Pater (Les sept paroles de Jesus en croix) ................................................................. 268
A la division de l'Hostie (Jesus meurt en croix)..............................................................268
Quand le prestre met une particule de l'Hostie au Calice (L'ame de Jesus descend aux
enfers) .............................................................................................................................. 268
A l'Agnus dei (La conversion de plusieurs a la mort de Nostre Seigneur) ..................... 268
A la Communion (Jesus est enseveli) ............................................................................. 268
A l'Ablution (Jesus est embaumé) ................................................................................... 269
Apres la Communion (La resurrection de Jesus) ............................................................ 269
Au Dominus Vobiscum (Jesus apparoist a ses Disciples)...............................................269
Aux dernieres collectes (Jesus converse avec ses Disciples pendant quarante jours) .... 269
Au dernier Dominus Vobiscum (Jesus monte au Ciel) ................................................... 269
A la Benediction (La descente du Saint Esprit) .............................................................. 269
Actions de graces apres avoir ouy la Sainte Messe.........................................................269
B. Prière a la Sainte Vierge, attribuée a saint François de Sales.........................................270
C. Autre prière a la Sainte Vierge, attribuée au même........................................................271
Note des editeurs ................................................................................................................. 271
15/332

2.6 Page 16

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Glossaire des locutions et des mots surannés ou pris dans une acception inusitée aujourd'hui
................................................................................................................................................. 272
Index des destinataires et des notes historiques et biographiques de ce volume .................... 291
Table de correspondance de cette nouvelle edition avec les précédentes, et indication de la
provenance des manuscrits......................................................................................................293
Table générale des opuscules de saint François de Sales ........................................................ 298
Lettres découvertes après l'impression des volumes précédents ............................................. 312
(CCLXXVI). A la Baronne de Chantal. La santé est inutile si elle n'est employée à la «
conqueste de la sainteté. » Ecrire à la Baronne ne peut nuire au Saint. Plus la croix est
grande, moins elle pèse. Pieux souhaits, ardentes aspirations à propos d'une « image
devote ». Un projet de voyage à Annecy et une décision. Avis de saint François de
Sales touchant le désir de mesdames Brûlart et de Villers d'accompagner en Savoie Mme de
Chantal. Mme de Boisy recevra celle-ci « avec plus de cœur et d'amour. » — Prière de
l'excuser auprès de MM. Frémyot, père et oncle.................................................................312
MMCI. A Messieurs les Curés de Valromey et de Sur-Semine (Inédite). Monsieur Rosetain
est chargé de transmettre aux ecclésiastiques destinataires l'avis du Saint au suiet de leurs
bénéfices. ............................................................................................................................. 315
MMCII. A Madame de la Forest, Religieuse de l'Abbaye de Bons (Inédite). Une
excommunication qui, peut-être, reste sans effet. Quand nous commettons des fautes, les
réparer par l'humilité, et nous abimer dans la confiance en Dieu et la défiance de nous-
mêmes. Soumission amoureuse à l'Abbesse du monastère ; ne pas la regarder « comme
mauvaise, mais comme malade ». Nos Supérieurs sont les officiers de Dieu. Vaincre
ses répugnances en témoignant à l'Abbesse une vraie charité. ........................................... 316
(MCCCXL). A la Présidente du Faure (Fragment inédit). Un mot du cœur. — Prière du
Saint pour la destinataire. .................................................................................................... 317
MMCIII. A Monsieur Sylvestre de Saluces de la Mente, Abbé d'Hautecombe.
Reconnaissance de saint François de Sales pour un service qui lui est rendu ; sa pauvreté.
Il aurait de bonnes raisons pour se dispenser d'accompagner le duc de Savoie et le prince
Cardinal en France ; mais pour leur être utile, mort ou vif il ira. Si l'Abbé d'Hautecombe
lui indique le jour, le Saint ira le chercher en son monastère. Remerciements de l'Evêque
de Chalcédoine. ................................................................................................................... 318
Erratum .................................................................................................................................... 320
Table des matières ................................................................................................................... 321
16/332

2.7 Page 17

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Florent-Michel-Marie du Bois de la Villerabel, Évêque
d'Annecy, honoré du sacré Pallium aux lecteurs de
l'édition authentique des Œuvres de saint François de
Sales
_____
Nous éprouvons une satisfaction profonde à offrir au public catholique ce XXVIe volume
des Œuvres complètes de Saint François de Sales, Evêque de Genève, Docteur de l'Eglise, notre
très illustre Prédécesseur.
Avec ce XXVIe volume, nous arrivons en effet au terme de la grande entreprise,
commencée en 1892, sur l'invitation de Monseigneur Isoard, Evêque d'Annecy, par les Religieuses
de la Visitation de ce Ier Monastère de la « Sainte Source ».
L'œuvre dont il s'agissait était immense : l'Edition authentique, critique, aussi complète
que possible et définitive de tous les Manuscrits du saint Docteur. On les savait nombreux.
Beaucoup avaient déjà été publiés, beaucoup n'avaient jamais encore vu le jour ; un très grand
nombre étaient gardés avec soin dans les Archives du Ier Monastère ; d'autres étaient dispersés de
droite et de gauche, dans des collections particulières ou dans des dépôts publics, dans des
Bibliothèques de villes ou dans des Communautés. Il en était enfin qui, au cours des siècles,
avaient disparu. Il fallait les retrouver, les collationner tous, les reconnaître, les réunir, [V] les
grouper par catégories, les présenter au public avec leurs textes définitifs, en tenant compte des
corrections successives que le Saint, très soigneux sur le choix des expressions ses Manuscrits
en font foi y avait apportées.
Devant cet immense travail, le Ier Monastère de la Visitation d'Annecy n'a pas reculé, tant
était vif son désir de donner l'Edition complète et dernière, si souvent réclamée, des Œuvres de
son saint Fondateur.
Il a fallu quarante années de recherches patientes pour réaliser ce vœu, que certains, au
début, qualifièrent de vain rêve ! Le rêve est devenu une réalité, et quelle réalité : l'accueil que le
public catholique, ou simplement cultivé, ainsi que le monde savant ont réservé à cette Edition le
dit assez ! Il est vrai que rien n'a été négligé pour qu'elle soit aussi parfaite que possible, comme
textes, comme notes et commentaires, comme Préfaces et Introductions diverses, aussi bien que
comme disposition et présentation typographiques. Nous n'oublierons jamais la réflexion que nous
fit un jour le Pape Pie XI, alors qu'à l'audience qu'il voulait bien nous accorder, Il feuilletait avec
une satisfaction évidente un des volumes de la Collection, récemment paru, dont nous Lui faisions
hommage : « Nous croyons, » nous dit-Il, « avoir quelque compétence en cette matière. « Eh bien
! croyez-Nous : cette Edition des Œuvres de « Saint François de Sales est une des plus belles et
des « mieux réussies de notre époque. Rien ne lui manque : « elle nous présente telle quelle et sans
défauts l'œuvre incomparable du saint Evêque !.. »
*
**
De ces félicitations, nous devons faire hommage d'abord et avant tout à la Visitation
d'Annecy. C'est elle qui a voulu élever à la gloire de son illustre Fondateur [VI] et Père, cet
imposant monument. C'est elle qui n'a rien négligé, ni son temps, ni ses recherches, ni ses
ressources, pour que ce monument soit vraiment digne du grand Docteur. Elle garde avec amour
son tombeau, elle a voulu en garder également, dans ces volumes, la pensée toute entière. A elle
donc nos félicitations et nos remerciements aussi, car à combien d'âmes cette Edition des Œuvres
du Saint portera-t-elle, avec la lumière qui éclaire et fortifie dans la recherche d'une vertu toujours
plus haute, la consolation qui rend tout plus facile pour assurer sur nos misères la victoire de la
17/332

2.8 Page 18

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grâce divine ?
Il n'est que justice que ces félicitations et ces remerciements soient adressés ensuite aux
collaborateurs que les Religieuses de ce Ier Monastère ont rencontrés et qui leur ont donné, sans
compter, leur concours précieux. Ils furent nombreux et les services qu'ils rendirent sont divers.
Notre intention n'est pas de les nommer ici, certain que nous sommes d'ailleurs d'interpréter ainsi
leur propre sentiment. C'est de Dieu seul qu'ils souhaitent entendre l'éloge qu'a mérité leur labeur.
Leur espérance ne sera pas déçue : Saint François de Sales qu'ils auront contribué à mieux faire
connaître et aimer, dont ils auront en quelque sorte prolongé l'apostolat ici-bas, sera, nous n'en
doutons pas, là-haut, auprès de Dieu, un avocat puissant et un intercesseur écouté !
Parmi ces collaborateurs, il en est un pourtant que nous ne voulons pas, que nous ne
pouvons pas ne pas nommer. Dom Benedict Mackey, de l'Ordre de Saint Benoît, a eu, en effet, une
trop grande part dans la publication des onze premiers volumes des « Œuvres », pour qu'au
moment où s'achève l'entreprise à laquelle il donna, avec tant d'intelligence et d'érudition, son
cœur et son temps, nous ne payions pas à sa mémoire le juste tribut d'éloges et de gratitude qui
lui revient. A son nom, nous nous faisons un devoir d'unir celui [VII] de son propre frère, le R. P.
Pierre-Paul Mackey, des Frères Prêcheurs, dont la collaboration fut si précieuse pour la
publication du véritable texte des « Controverses », reconstitué par lui, grâce au Manuscrit
conservé à Rome, dans les Archives des Princes Chigi, et qu'il put reproduire avec une exactitude
complète, qu'aucune édition précédente n'avait pu jusqu'alors fournir.
A tous ces bons ouvriers d'une Cause qui nous est chère, comme elle le fut à nos deux
Prédécesseurs immédiats d'heureuse mémoire, Mgr Louis-Romain-Ernest Isoard et Mgr Pierre-
Lucien Campistron qu'il nous soit permis d'exprimer notre très vive gratitude, au nom de Saint
François de Sales lui-même et de tous ceux et ils sont à notre époque plus nombreux que jamais
qui trouvent dans ses écrits le secret d'une piété sans cesse plus éclairée et plus forte !
*
**
Ce qui frappe tout d'abord dans cette Œuvre, — telle que nous pouvons maintenant
l'envisager dans son ensemble, c'est son importance même. Importance au point de vue de la
quantité et de la qualité même des écrits. Elle comprend en effet :
6 gros volumes, de 500 pages en moyenne, de Traités comme les « Controverses » la «
Défense de la Sainte Croix » l' « Introduction à la Vie dévote » le « Traité de l'Amour de
Dieu » et les « Entretiens spirituels » ;
4 volumes de Sermons ;
11 volumes de Lettres ;
5 volumes d'Opuscules enfin…..
Ne croit-on pas rêver quand on considère cet ensemble imposant, véritable Encyclopédie
des sciences religieuses, dans laquelle pas un point de dogme ou de morale, pas une question
d'ascétisme ou de théologie mystique ne sont laissés dans l'ombre ? Et qu'on veuille bien se [VIII]
rappeler ce que fut la vie relativement courte du Saint, il mourut le 28 décembre 1622, à
cinquante-cinq ans ! ce qui la remplit à l'excès, semble-t-il : travaux sans fin, pendant les années
qu'il consacra à la conversion du Chablais ; travaux plus absorbants encore, lorsqu'il fut devenu
Evêque et qu'au service d'un immense Diocèse, difficile entre tous avec ses vallées profondes et
ses grands monts, il ajouta, sans s'accorder jamais aucun repos, des voyages sans cesse renouvelés
et par quels chemins ! non seulement en Savoie, mais dans tous les pays d'alentour, à Lyon,
dans le Dauphiné, en Bourgogne, en Provence, en Piémont, jusqu'à Paris, où il prêcha si souvent
et si bien, jusqu'à Rome, où les graves affaires qu'il avait en charge le conduisirent aussi !
Et c'est au milieu de cette vie surchargée, toujours en soucis et toujours en mouvement,
qu'il trouva le moyen d'écrire l'œuvre immense dont nous venons de parler : l'équivalent de 26
gros volumes
Les Saints ont-ils donc plusieurs vies pour faire tant de choses et les faire si bien ?
18/332

2.9 Page 19

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Pour se faire une juste idée de l'œuvre du saint Evêque, il ne faut pas se contenter d'en
considérer seulement ce qu'on pourrait appeler la masse, si énorme qu'elle soit.
La « qualité » de cette œuvre immense est bien faite pour augmenter en nous la stupeur et
l'admiration.
Saint François de Sales s'y montre tour à tour Théologien consommé et Moraliste très sûr.
Dans l' « Introduction à la Vie dévote » ce livre qui sans doute, après l'Imitation de
Jésus-Christ (nous ne parlons pas de l'Evangile qui est tout divin), aura été le plus lu, et aura fait
le plus de bien aux âmes il montre avec tant de précision et tant de charme, que la sainteté se
concilie parfaitement avec tous les devoirs et toutes les conditions de la vie ! Il apprend si [IX]
bien « à vaincre la nature sans la détruire, à s'envoler « vers le Ciel, peu à peu, par petits coups
d'aile comme « les colombes, si l'on ne peut prendre l'essor des aigles... » (Encyclique « Rerum
omnium» de S. S. le Pape Pie XI, pour le IIIe Centenaire de la mort du Saint.) Combien d'âmes
auront dû et devront encore à cette doctrine, à la fois si simple, si consolante et si forte, le secret
d'une sanctification qu'elles auraient vainement cherchée ailleurs ?
Dans le Traité de l'Amour de Dieu qui est bien et de beaucoup, le plus important et le
plus beau de ses ouvrages, c'est la plus magnifique des histoires qu'il raconte : celle de la
charité de Dieu pour ses créatures. Il en raconte « l'origine, les progrès, les raisons pour lesquelles
elle brûle ou languit dans le cœur des hommes, il apprend enfin la manière de s'y exercer et d'y
avancer. » (Op. cit.) Et avec quelle facilité et avec quelle grâce il évolue au milieu de ces questions
qui sont parmi les plus graves et les plus difficiles : la grâce efficace, l'appel à la foi, la
prédestination ! Il semble se jouer au milieu de ces difficultés, tant la lumière d'en haut illumine
son intelligence des choses divines et donne à son style, alors même qu'il traite des choses les plus
cachées en Dieu, de souplesse et de clarté. Oui vraiment, il mérite bien, comme un second
Augustin ce titre de « Docteur de l'Amour divin » que lui décerna le Pape Pie IX dans la Bulle
par laquelle il le déclarait Docteur de l'Eglise.
Le Controversiste n'est pas moins remarquable en lui. Pour avoir été le premier en date de
ses ouvrages encore qu'il ait été écrit au jour le jour et n'ait été réuni en volume que longtemps
après le « Livre des Controverses » restera un des plus précieux qui soit sorti de sa plume.
Qu'est donc ce Livre, sinon une complète démonstration de la foi catholique ? Il a un autre mérite,
c'est qu'il n'a pas vieilli ! S'il fut, en son temps, l'arme [X] la plus redoutable peut-être avec
laquelle l'Apôtre du Chablais détruisit, dans cette province, l'édifice d'erreurs et de préjugés
contre la Religion catholique que le Calvinisme y avait dressé, il garde, à notre époque, toute sa
valeur et toute sa force. Il faut regretter, croyons-nous, qu'on ne l'utilise pas davantage, car, si
l'hérésie se répète sans cesse, les réfutations que ce Livre magistral en apporte sont aussi
victorieuses et péremptoires maintenant qu'elles le furent au XVIe siècle.
Et que dire du Directeur d'âmes, tel qu'il se révèle au cours des onze volumes de Lettres
qui ont été recueillies ? Quelle sagesse ! Quelle prudence ! Quelle richesse de doctrine spirituelle
! Quel bon sens ! Quelle fermeté et quelle douceur à la fois pour guider les âmes dans les voies
surnaturelles ! Quelle sûreté dans les conseils, qu'il s'agisse des affaires parfois très compliquées
dans lesquelles s'embarrassaient ses correspondantes, ou des grâces d'ordre mystique qui parfois
les sollicitaient !
Ce n'est pas tout. Saint François de Sales ne fut pas seulement Théologien et Moraliste,
Controversiste et Directeur d'âmes : il fut Apôtre aussi et Prédicateur. La « Bonne nouvelle » ! Il
n'apprit pas seulement aux âmes chrétiennes à la mieux aimer et à en vivre davantage. Il l'annonça
aussi à celles qui ne la connaissaient plus ou la connaissaient mal. Prédicateur ? Nous préférons
ce terme à celui d'orateur, dont ne se seraient point accommodées son humilité et sa simplicité
voulue, exempte de toute prétention et contrairement à l'éloquence de son temps de tout
pédantisme.
Les 240 sermons ou plans de sermons réunis dans les quatre volumes qui leur sont
réservés, constituent en somme, un cours complet d'enseignement religieux. Ils sont pleins à ce
point qu'on peut dire d'eux qu'ils contiennent plus de choses que de mots. Aucune recherche,
aucune superfluité, rien d'humain : c'est vraiment la « Parole de Dieu » qui s'affirme dans toute
19/332

2.10 Page 20

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[XI] sa plénitude et toute sa beauté. Quel plus bel éloge pourrions-nous en faire et comme on
comprend que les âmes de ses auditeurs aussi bien protestants que catholiques l'aient écoutée
avidement et que, sous l'action de la grâce divine que distillait cette parole, ils se soient rendus en
foule à ses appels touchants.
*
**
Et c'est parce que toute cette richesse s'étale complaisamment sous les yeux du lecteur, que
nous éprouvons, à livrer au public cette Collection complète des Œuvres du saint Evêque, cette
intime satisfaction dont nous parlions tout à l'heure.
Saint François de Sales y apparaît encore plus grand, plus saint, plus beau que peut-être
on l'avait rêvé auparavant... Devant une telle œuvre, on reste confondu ! Vraiment cet homme
exceptionnel, cet Apôtre intrépide, ce Docteur aussi doux que fort, cet Evêque dont on a très
justement dit qu'il fut « le plus saint des humains et le plus humain des Saints », fut bien l'envoyé
de Dieu ! Nous devons voir en lui un des dons les plus magnifiques que Dieu ait fait à la terre,
pour lui montrer les chemins du Ciel, pour faire briller la lumière de la vérité éternelle au milieu
de ses ténèbres, pour rappeler aux hommes qu'ils ont là-haut un Père qui les aime et qui ne leur
demande qu'une seule chose : c'est qu'en retour de son amour infini, ils s'efforcent de Lui donner
celui que sa grâce leur inspire, afin qu'ils soient heureux et saints en Lui et par L ui !
Il nous semble que cette magnifique collection de ses Œuvres fera mieux comprendre
encore cette bienfaisante action de l'illustre Docteur. Bien au-delà du temps et du pays où il vécut,
elle s'étend sur l'Eglise toute entière et se continuera jusqu'à la fin, car « la vérité de Dieu demeure
éternellement » et les âmes humaines connaissent [XII] toutes les mêmes misères et les mêmes
aspirations, les mêmes faiblesses et les mêmes élans !
C'est dans cette confiance et en faisant ce vœu, que nous livrons au public ces volumes tout
remplis de la force et de la suavité du Docteur de l'Amour !
† FLORENT DU BOIS DE LA VILLERABEL,
EVÊQUE D'ANNECY.
Annecy, ce 28 Novembre 1932. [XIII]
__________
20/332

3 Pages 21-30

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3.1 Page 21

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Préface
_____
Avec une grande joie et après l'avoir déposé aux pieds de saint François de Sales, nous
offrons à l'Eglise et au public le dernier tome de ses Œuvres. Ce jour depuis longtemps espéré,
désiré, attendu, arrive enfin. Quarante ans de labeur sembleront peut-être bien longs, mais il faut
en compter sept d'interruption absolue ; la guerre mondiale et l'après-guerre ne permettaient pas
de poursuivre, faute d'ouvriers, les beaux travaux d'imprimerie. Aujourd'hui, malgré les difficultés
présentes, les temps troublés que nous traversons, la crise financière qui enveloppe le monde entier,
l'Edition complète et authentique s'achève avec ce XXVIe volume.
Nos lecteurs retrouveront dans sa première partie, saint François de Sales ascète et
mystique ; dans la seconde, le Maître des âmes surtout, le Directeur et le Père. Une des pièces
principales du groupe A) est assurément la Declaration mystique sur le Cantique des Cantiques1 ;
à son sujet, sainte Jeanne-Françoise de Chantal écrivait en 1637 2 : « L'on a trouvé dans une vieille
malle, qui était inscrite Vieilles quittances, une explication en forme de méditation, du Cantique
des Cantiques. Je pense que ce sont de ses premiers ouvrages qui s'étaient égarés, car je ne me
souviens pas de lui en avoir ouï parler... » Elle mentionne ensuite plusieurs sermons de son
Bienheureux Père, qu'elle envoie à son correspondant, et ajoute : « Tous ces cahiers sont écrits de
sa bénite main, et le Cantique. » On ne saurait en douter ; c'est bien le style et le cœur du Saint,
quoique l'on y reconnaisse, comme le dit l'auteur de [XV] l'Advertissement placé en tête de cette
pièce, « un des premiers exercices de sa plume. »
Le Manuscrit sur les Vertus cardinales et morales3 laissera au lecteur le regret de ne
connaître que des morceaux de ce travail important. Hélas ! ce que nous pourrions appeler un pieux
vandalisme, a morcelé sans pitié ces pages si intéressantes et nous a privés de plusieurs parties de
ce texte qui n'ont pu être retrouvées.
Après divers fragments, parmi lesquels on remarquera celui qui a trait à la Charité dans les
jugements4, viennent les curieux recueils des Similitudes5 : ils sont inédits. Celui qui se conserve
au Monastère de la Visitation de Harrow (Londres) est de tous le plus digne d'attention6. Soit par
les courtes réflexions dont saint François de Sales fait suivre les sujets de comparaison, soit par
les références mises en marge par les éditeurs, on verra comment le Saint entendait se servir, et
s'est en effet servi dans ses ouvrages et dans ses sermons, de bon nombre de ces Similitudes. Dans
le dernier recueil, qui concerne le Traité de l'Amour de Dieu7, on le sent tout appliqué à la charité
divine et, quoiqu'il dise le contraire, non seulement très « heureux à instruire les hommes de la
dévotion commune », mais encore, et bien plus « du grand amour8. »
Le groupe B) est une sorte de complément des Lettres ; plusieurs des filles spirituelles de
l'Evêque de Genève y apparaissent de nouveau : sainte Jeanne-Françoise de Chantal, ses amies
dijonnaises, quelques Religieuses de la Visitation qui nous sont bien connues, et quelques autres
qu'il n'a pas été possible de découvrir. A l'Abbesse du Puits-d'Orbe et à la présidente Brûlart, le
Saint envoie des conseils pour l'oraison, il leur donne même une méditation « toute formee » ; il
ajoute pour la première, des Avis tochant [XVI] la réforme de son Monastère et sa conduite
personnelle, un très pieux traité sur la sainte Communion, un autre sur la tristesse et l'inquiétude.
1 Page 10.
2 Lettre à M. Noël Brûlart, commandeur de Sillery, 27 avril. (Sainte Jeanne-Françoise Frémyot de Chantal, sa Vie et
ses Œuvres, Paris, Plon, 1879, Lettres, vol. IV, p. 621.)
3 Pages 43-89.
4 Page 93.
5 Pages 100-164.
6 Pages 113-148.
7 Pages 155-164.
8 Page 159.
21/332

3.2 Page 22

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Dans tous les documents de la seconde partie de notre volume, saint François de Sales se
montre tel que nous l'avons admiré dans sa Correspondance : charité, bonté, sagesse, fermeté aussi,
mais toujours tempérée par une délicatesse sans égale, par une condescendance qui s'incline vers
les faibles et les petits. Il ne cache pas la vérité, mais il la dit de façon à la faire agréer ; il voit tous
les replis de l'âme, il s'y insinue doucement et, sans la blesser, il lui découvre le mai, lui indique le
remède, l'encourage, la soutient. Certains conseils à la Sœur de la Roche et à la Sœur Fichet
n'échapperont pas au lecteur, ils sont remarquables à ce point de vue. « Il faut que vous ayes grand
soin de vous desfaire de vostre propre volonté, » dit-il à la première, « car il n'y a que cela seul qui
vous nuise, d'autant que vous l'aves tous-jours extremement forte, et vous estes fort attachee a
vouloir ce que vous voules. Embrasses donq bien fidelement cet exercice, puisque je vous le dis
avec la charité de Dieu et la connoissance que j'ay de vostre necessité9. » Et à la Sœur Fichet qui
était très vive : « Vous deves estre bien humble, et vous le seres a cette heure que vostre Pere vous
le commande ; oh ! je vous en prie. Mais je vous dis, d'une humilité vraye et solide, qui vous rende
souple a la correction, maniable et prompte a l'obeyssance10. » Et encore : « Vous aves un esprit
comme ces arbres qui ont tant de branches autour qui les empeschent de croistre : tant de menus
desirs empeschent de croistre le plus grand, qui est de plaire a Dieu11. » Un autre jour, il encourage
si joliment sa dirigée : « Marches tous-jours vostre petit pas, apres les autres. Encor que je die le
petit pas, ce n'est pas que je n'aye un grand desir de vostre avancement a la perfection. Je me
prometz beaucoup de vostre bon cœur, ma chere Fille ; ne me trompes pas, car je veux [XVII] que
vous soyes la fille forte de ceans, la plus courageuse, douce et humble de toutes12. »
A la Mère de Chantal, c'est le dépouillement de toutes choses, l'abandon total, la remise de
tout elle-même en Dieu que le saint Directeur recommande sans cesse ; il répète la même leçon de
différentes manières, mais tou-jours il en revient là. « Il y a si long tems » que Notre-Seigneur
attire la Sainte a cette unité et simplicité de presence et abandonnement en Dieu13 » ; il le sait, et
il sait aussi que « les personnes de cette condition luy sont cheres comme la prunelle de son œil14.
» Voila pourquoi il insiste sur « ce que si souvent » il lui a dit15, et la presse de demeurer ainsi,
sans retours sur elle-même, avec une grande douceur d'esprit et une filiale confiance en la divine
Bonté. A plusieurs reprises, il lui donne les petits enfants pour modèle : « Ilz ne regardent
nullement » ce que font leurs mères, « ni ne font point de retours sur eux mesmes ni sur leurs
satisfactions, ilz les prennent sans les regarder... Ilz ne se soucient point d'aller, ains ayment mieux
estre portés... Bienheureux, » conclut-il, « sont ceux qui ne veulent pas tous-jours faire, voir,
considerer, discourir16 ! »
Cependant, saint François de Sales n'oublie pas qu'il est Fondateur : il veille surtout sur
l'intérieur de ses Filles, mais l'extérieur ne saurait lui échapper. Il dit à la Mère de la Roche qu'elle
doit se « pencher toute du costé de l'humilité17 », mais il lui recommande aussi, après son élection
au supériorat, de maintenir son « exterieur en telle mediocrité entre la gravité et la douceur et
l'humilité, que l'on reconnoisse que si bien » elle aime tendrement ses filles, elle est pourtant « la
Superieure18. » — « Ayes a cœur, » lui écrit-il encore, « le support des filles imparfaittes qui seront
en vostre charge ; ne faites jamais [XVIII] de l'estonnee... Soyes grandement tendre » à leur égard,
« pour les ayder a faire grand prouffit de leur imperfection19. » Puis il entre dans des détails sur la
manière dont elle doit se comporter au parloir, sur les rapports avec les autres Ordres religieux, sur
9 Pages 287, 288.
10 Page 295.
11 Page 300.
12 Page 302.
13 Page 281.
14 Page 282.
15 Page 269.
16 Page 270.
17 Page 290.
18 Page 356.
19 Page 335.
22/332

3.3 Page 23

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les pénitences qu'elle peut permettre « en quelque grande et signalee occasion20. »
Il répond au long questionnaire de la jeune Mère de Monthoux qui l'avait interrogé sur
nombre de points d'observance. Les malades n'y sont point oubliées : « Il faut les gouverner comme
malades, » écrit le Fondateur, « et neanmoins, imperceptiblement, les tenir en sousmission et
obeissance21. » Quant au jeûne, il « appreuve grandement que personne ne s'en dispense de soy
mesme... Et si l'on vous remet a vostre choix, » dit-il, « prenés le jeusne, car il est mieux de ne
flatter pas le cors que de l'attendrir22... » On le voit, si notre Saint est toujours d'une condescendante
bonté pour les faibles et les maladives, il n'entend pas supporter la douilletterie et la recherche de
soi-même.
Il y a des pages exquises dans les Avis inédits que l'inimitable Directeur donne A une
personne vivant dans le monde et A une Religieuse de la Visitation23 ; le lecteur en jugera lui-
même et, sans doute, il ne nous contredira pas.
La Paraphrase de l'Oraison dominicale, qui clôt cette sixième et dernière Série24, est un
document inconnu jusqu'ici ; sa valeur ne passera pas inaperçue. Saint François de Sales faisait
souvent son oraison sur le Pater ; la méditation très affective qu'on lira plus loin nous découvre
un peu ce que devait éprouver son âme quand il prononçait seulement ces mots : Notre Père !
On trouvera à la fin de ce volume les quelques lettres qui nous ont été communiquées après
l'impression du tome XXI. [XIX]
Le Glossaire général, la Table analytique, l'Index des textes de la Sainte Ecriture, des noms
propres, etc., paraîtront en leur temps dans un dernier volume. Ils seront précédés par les
documents arrivés après la publication des tomes antérieurement parus. Nous prions instamment
nos lecteurs de nous faire part des Lettres ou autres pièces qu'ils pourraient découvrir, ou de nous
avertir de leur existence, afin que nous puissions les joindre à celles que nous avons déjà. S'ils
désirent acquérir ce XXVIIe volume, nous leur serons reconnaissants de nous le faire savoir.
La grande Vie de saint François de Sales se prépare ; elle sera le couronnement de ses
Œuvres, monument littéraire élevé à la gloire de notre incomparable Docteur. L'amour filial le
commença, ce même amour le poursuivit et le mena à bonne fin en ce qui concerne ses Ecrits ;
puissions-nous, dans quelques années, en voir le complément dans l'Histoire de sa vie ! Nous
aurons alors saint François de Sales tout entier : nous pourrons nous éclairer au contact de son
intelligence, nous instruire par ses exemples, nous nourrir de son esprit, nous fortifier, nous
consoler près de son cœur fait sur le modèle du Cœur de Jésus.
En terminant, nous voulons remercier de nouveau tous ceux qui nous ont aidés de leur
précieuse collaboration. Bon nombre d'entre eux sont morts ; Dieu est maintenant leur souverain
Rémunérateur, mais nous ne saurions oublier les services qu'ils nous ont rendus. D'autres vivent
encore : c'est surtout à ceux-ci que nous faisons parvenir l'expression de notre gratitude, demandant
à saint François de Sales d'acquitter nos dettes et de se faire lui-même notre répondant.
LES EDITEURS.
Annecy,
en la Fête du Christ-Roi,
30 octobre 1932.
_____
20 Pages 356-359.
21 Page 341.
22 Ibid.
23 Pages 348-355, 360-367.
24 Page 377.
23/332

3.4 Page 24

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Avis au lecteur
_____
Un certain nombre de pièces publiées dans ce volume ont été revues sur les originaux ou
sur des copies authentiques ; la provenance est indiquée à la fin de chacune. On excepte les
Fragments de l'Etude sur les Vertus (groupe A, no III, pp. 43-89), où l'on a dit en note d'où
provenait chaque morceau.
Les documents qui ne sont suivis d'aucune indication sont ceux dont, à défaut
d'Autographes ou de copies, on a dû emprunter le texte à des publications antérieures. Voir à la
fin de ce volume la Table de correspondance.
Les Editeurs sont seuls responsables des titres et dates qui précèdent chaque pièce, sauf
indication contraire. Quand la date attribuée à un document n'est pas absolument sûre, elle est
insérée entre [ ]. Ces signes sont également employés pour les mots qu'il a fallu suppléer et, dans
les recueils des Similitudes, pour les références des auteurs cités par saint François de Sales et
ajoutées par les Editeurs ; pour ne pas trop charger les marges, on a dû mettre ces références
dans le texte même.
Quant aux divergences qui existent entre les différentes leçons d'une même pièce, le lecteur
les trouvera au bas des pages, en petits caractères. Le commencement de la variante est indiqué
par la répétition, en italiques, des mots qui la précèdent immédiatement au texte ; la fin est
régulièrement marquée par la lettre de renvoi. Les mots biffés sur les Autographes sont enchâssés
entre [ ].
Des points placés au commencement ou à la fin d'un document indiquent qu'il est
incomplet.
Les quelques références marginales en italiques sont de saint François de Sales, toutes les
autres sont une addition des Editeurs.
A la suite du Glossaire se trouve un Index dans lequel on a fondu les noms des destinataires
avec les titres des rares notes historiques et biographiques.
Une table générale des Opuscules, par ordre chronologique, termine la collection. [XXI]
_____
24/332

3.5 Page 25

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Opuscules de saint François de Sales. Sixième série :
Ascétisme et mystique [1]
_____
25/332

3.6 Page 26

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A. Opuscules et fragments sans destinataires
_____
I. Fragments d'une concordance sur la Passion
1594-1596 25
(INEDIT)
CONTINUA EX 4 EVANGELISTIS PASSIONIS
DOMINICÆ SERIES
EX TOLETO
Post orationem quæ est Jo. c. XVII, dixit
Dominus verba quæ habentur Mat. 26, v. 31 ad 36.
Venit trans torrentem Cedron26. Cedron, id est
obscurus [3] locus, quia vallis erat arboribus umbrosa
; ibi erat torrens. Figura hujus rei est 1 27 Reg. 15.
Venit inde in prædium28, seu villam
Gethsemani29, id est vallis pinguedinis, seu olei mei ;
quo in prædio erat hortus30 arboribus ornatus et
amœnus. Initium perditionis hominis fit in horto ;
initium restitutionis in integrum, in horto ; Cirillus31,
l. 11. c. 31. In horto Adam decipitur a diabolo ; in horto
Christus consolatur ab Angelo. Judas autem sciebat
locum32 ; ibi tradit Dominum ubi Dominus præcepta
orandi tradiderat.
33 Post hæc, in eodem horto factum est quod
alii Evangelistæ dicunt. Mat. : Et dixit discipulis suis :
Sedete hic, donec vadam illuc et orem. Et assumpto
CONTINUATION DU RÉCIT DE
LA PASSION DE NOTRE-
SEIGNEUR
D'APRÈS LES QUATRE
EVANGÉLISTES
D'APRES TOLET
Après la prière qui est dans
saint Jean, chap. XVII, le Seigneur dit
les paroles qui sont en saint Matthieu,
chap. XXVI, du verset 31me au 36me. [3]
Il alla au delà du torrent de
Cédron. Cédron, c'est-à-dire lieu
obscur, parce qu'il y avait une vallée
ombragée par les arbres ; là aussi était
un torrent. La figure de cette chose se
trouve au livre [II] des Rois, chap. XV.
Il vint ensuite au jardin ou
domaine de Gethsemani, c'est-à-dire la
vallée onctueuse, ou de mon huile.
Dans ce domaine était un jardin orné
25 De cette Concordance nous avons : 1. six pages d'un petit cahier, conservées à la Visitation de Turin ; 2. un feuillet
de grand format, d'une écriture ideatique, également gardé au même Monastère (ce feuillet, plié en deux, donne les
dimensions du susdit cahier) ; 3. deux fragments écrits au verso d'une minute de lettre au sénateur Favre, datée de
1594 (voir tome XI, p. 62) ; 4. un autre fragment commençant par ces mots : Tenebræ factæ sunt, qui occupe la
quatrième page de la feuille sur laquelle se trouve le plan d'un Sermon pour la fête de Pâques (tome VII, p. 377). La
Visitation d'Annecy possède ces deux derniers fragments.
L'identité des caractères permet de placer les quatre morceaux à la même époque, en leur assignant une date
approximative.
Il eût été inutile de donner en entier les pages de cette Concordance ; nous nous sommes bornés à citer les
passages qui contiennent des paroles et des réflexions de saint François de Sales ; le reste est simplement le récit des
Evangélistes. Notre texte commence par l'Autographe indiqué au n° 1 de la présente note et se poursuit avec le n° 2
(p. 6) : « Mort de Pilate, » etc. ; vient enfin le fragment Tenebræ factæ sunt, que signale le n° 4 (p. 8). L'un des passages
au n° 3 est reproduit sous la variante (45) ; l'autre ne comprend que sept lignes du récit évangélique et débute par ces
mots : Hymno dicto, venit in montem Oliveti, etc.
26 Joan., XVIII, 1.
27 Sic, pro II1, v. 23.
1 Dans cette référence, I Reg. au lieu de II Reg., la faute est dans Tolet. que saint François de Sales a copié.
28 Marc., XIV, 32.
29 Matt., XXVI, 36.
30 Joan., XVIII, 1.
31 Cyrill. Alex., in Joannis Evangel.
32 Joan., XVIII, 2.
33 Hæc, pro tenuitate nostra, ex Evangelistis disposuimus, non ex Toleto.
26/332

3.7 Page 27

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Petro et duobus filiis Zebedæi, cæpit constristari et
mæstus esse34 ; Marc., pavere et tædere. Et ait illis :
Tristis est, etc. ; sedete hic et vigilate35. Mat. :
Sustinete hic et vigilate mecum. Luc. : Et orate, ne
intretis in tentationem36. 37 [4]
………………………………………………………..
Sequitur quod narrat Joannes38. Dominus
interrogavit : Quem quæritis ? etc. Et Judam, signo
dato, rediisse cum cæteris, unde dicitur : Stabat autem
Judas, qui tradebat eum, cum ipsis, [etc.]. 39
………………………………………………………..
Et exinde, quærebatur Pilatus dimittere eum40.
(Videtur iterum egressus Pilatus ad populum, verba de
dimittendo Christo habuisse.) Judei autem clamabant,
dicentes41, [etc.]
Pilatus autem adduxit foras Jesum, et sedit pro
tribunali, in loco qui dicitur Lithostrotos, hebraice
autem Gabbatha. (Gabbatha celsitudo significat ;
Lytostrotos, græce, lapidibus stratus, locus judicii 42.)
Erat autem Parasceve Paschæ, hora quasi sexta (id
est hora sexta orationis : 1, 3, 6, 9, occasus ; sic
dividebatur dies) ; 43 et dicit Judæis, [etc.]
Responderunt pontifices : [5] Non habemus regem nisi
Cæsarem44 45. (Ergo Messias venit, Gen. 49 46 : Non
auferetur sceptrum, etc.)
………………………………………………………..
47 Mort de Pilate. Josephe, l. 18, Ant. Jud.48 :
Apres vingt ans de sa prevosté (præture), il fut accusé
par les Samaritains vers Vitellius, gouverneur de Sirie,
quod plurimos hommes injuste condemnasset quasi
rebelles Romanis a). Vitellius luy commande d'aller a
Rome vers Tibere Cæsar ; mays avant quil arrivat,
d'arbres et agréable. Le
commencement de la perte de l'homme
eut lieu dans un jardin ; le
commencement de sa réhabilitation se
fit en entier dans un jardin. Dans un
jardin, Adam fut trompé par le démon ;
dans un jardin, le Christ fut consolé par
un Ange. Judas, lui, connaissait ce lieu
; là, il livre son Maître où le Maître
avait livré le précepte de la prière.
Après cela, dans ce même
jardin, il arriva ce que les autres
Evangélistes racontent. Matt. : Et il dit
à ses disciples : Asseyez-vous ici
pendant que je m'éloignerai pour prier.
Ayant pris avec lui Pierre et les deux
fils de Zébédée, il commença à
éprouver de la tristesse et de l'angoisse
; Marc : à avoir peur et du dégoût. Et il
leur dit : Mon âme est triste, etc.
Asseyez-vous ici et veillez. Matt. :
Demeurez ici et veillez avec moi. Luc :
Et priez, afin de ne pas entrer en
tentation. [4]
………………………………………..
Suit ce que raconte saint Jean.
Le Seigneur interrogea : Qui cherchez-
vous ? etc. Et Judas, ayant donné un
signe, revint avec d'autres, d'où il est dit
: Or Judas, qui le trahissait, se tenait
debout avec les autres, [etc.]
………………………………………..
Dès ce moment, Pilate
34 Ubi supra, vv. 36-38.
35 Idem, vv. 33, 34.
36 Cap. XXII, 40.
37 Suit l'agonie, l'arrivée de Judas et son baiser, d'après les Evangélistes.
38 Cap. XVIII, 4-6.
39 Il y a ici une lacune considérable ; une feuille du petit cahier, peut-être même deux, manquent. Le Manuscrit reprend
à ces mots : Dicunt omnes : Crucifigatur.
40 Joan., XIX, 12.
41 Ibid.
42 pro tribunali Lithostrotos, lapidibus stratus ; Gabbatha, altitudinem.
43 id est [6 orationis, ut dies in 8 partes dividitur : 4 a media nocte ad meridiem, 4 a meridie ad mediani noctem...]
44 Joan., XIX, vv. 13-15.
45 nisi Cæsarem. Sententiam contra se feront.
[Un autre fragment, conservé à la Visitation d'Annecy, porte la leçon suivante :] Ja Nostre Seigneur avoit
esté pris, examiné, souffleté, batu, craché, couronné, quand Pilate, pensant le delivrer, le leur presenta au plus pitoyable
equippage que jamais homme fut veu, pour les esmouvoir a compassion affin de le delivrer, et dict : Ecce Rex vester
; Voyci vostre Roy. Lhors les Juifz crierent : Tolle, tolle, etc. ; et leur repliquant : Crucifieray je vostre Roy ? ilz
respondent : Non habemus regem nisi Cæsarem. Alhors Ponce Pilate, voyant que rien n'y proufitoit, tradidit eis illum
ut crucifigeretur.
46 Vers. 10.
47 Voir ci-dessus, note (25), p. 3.
48 Lib. XVIII, c. IV, 1.
27/332

3.8 Page 28

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Tibere mourut. Eusebe49, l. 2. c. 7, racconte quil se tua.
Les gendarmes le prennent au prætoire, le
despouillent du pourpre et luy remettent ses habitz ; le
menent hors50 ; bajulans sibi crucem51. Id est Is. 9 52 :
Factus est principatus ejus super humerum ejus b).
Genes. 22 53 : Isaac portoit le bois ; Simon Cyreneen
la porte54, Nostre Seigneur estant trop affligé.
On le suit, les femmes pleurent ; Conversus ad
eas : [6] Filiæ Hierusalem, nolite c), etc. Deux
malfaicteurs conduitz avec luy55.
Exivit in eum, qui dicitur Calvariæ locum,
hebraice Golgotha56. Basil., in c. 5 Is.57, ait esse
traditionem communem ibi sepultum Adam d).
Hieron., ad Marcellam58.
La ilz luy donnent a boire du 59 vin mirrhé60,
ou avec du fiel, et cum gustasset noluit bibere61.
(Nimirum videtur ex fatigatione recreandus
Dominus.) Psal. 68 62 : Dederunt in escam meam fel e).
Ilz le crucifient entre deux larrons63. Et cum
iniquis reputatus est64 f).
Pilate fit mettre le tiltre (il y a de la redite). Ilz
prenent ses vestemens65, etc., ut scriptum Psal. 21 66.
Notes que Nostre Seigneur avoit une roube, un
manteau, une tunique (apud Euthym., Mat. 27 67), et la
tunique, faite par la Vierge 68.
Pater, ignosce69. Juxta crucem mater g), [etc.] ;
il parl'a sa Mere, puys au disciple70.
Ceux qui viennent voir et qui passent,
blasphement : Vah, qui destruis, etc. ; salva
temetipsum ; si Filius Dei es, etc. Semblablement les
pontifes et scribes : Si Christus est electus Dei, rex
cherchait à le délivrer. (Pilate étant
retourné de nouveau vers le peuple,
parlait, semble-t-il, de relâcher le
Christ.) Mais les Juifs criaient, disant,
[etc.]
Pilate... emmena dehors Jésus,
et il s'assit sur son tribunal, au lieu
appelé Lithostrotos, et en hébreu
Gabbatha. (Gabbatha signifie hauteur
; Lithostrotos, en grec, balcon de
pierres, lieu de jugement.) C'était la
préparation de la Pâque, environ la
sixième heure (c'est-à-dire la sixième
heure de la prière : ainsi divisait-on le
jour : 1, 3, 6, 9), et il dit aux Juifs, [etc.]
Les princes des [5] prêtres répondirent
: Nous n'avons de roi que César. (Donc
le Messie vient, Gen. XLIX : Le sceptre
ne s'éloignera point, etc.)
………………………………………..
a) d'avoir condamné
injustement, comme rebelles aux
Romains, beaucoup d'hommes.
b) portant sa croix. C'est-à-dire,
Isaïe, IX : Son empire a été posé sur ses
épaules.
c) Tourné vers elles : Filles de
Jérusalem, ne pleurez pas sur moi, etc.
[6]
d) Arriva hors de la ville, au
lieu nommé Calvaire, en hébreu
49 Hist. Eccles.
50 Matt., XXVII, 31 ; Marc., XV, 20.
51 Joan., XIX, 17.
52 Vers. 6.
53 Vers. 6.
54 Matt., v. 32 ; Marc., v. 21 ; Luc., XXIII, 26.
55 Luc., vv. 27-32.
56 Joan., XIX, 17.
57 Append. t. I oper. S. Basilii. (P. G. t. XXX, 347.)
58 du [vinaigre meslé de fiel...]
59 Epist. XLVI, § 3.
Athan., Serm. de Cruv, et Pas.1, ait Adami calvariam ibi esse sepultum. (P. G. t. XXVIII, 207.)
1 Inter dubia S. Athan., tom III. (Cf. tom. II hujus Edit., p. 62.)
60 Marc., v. 23.
61 Matt., v. 34.
62 Vers. 22.
63 Luc., v. 33 ; Joan., 18.
64 Isaiæ, LIII, 12 ; Marc., XV, 28 ; Luc., XXII, 37.
65 Joan., 19-24.
66 Vers. 19.
67 Comment. in Matt. (P. G. t. CXXIX, 723.)
68 une tunique tunicam, Euth. ait fuisse a Beata Virgine factam, ex traditione.
69 Luc., v. 34.
70 Joan., vv. 25-27.
28/332

3.9 Page 29

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Israel, descendait de cruce71. Les [7] larrons aussi
; l'un : Si tu es Christ, sauve toy et nous. L'autre
respond : Neque tu Deum, etc., et dict : Memento.
Hodie mecum h). Les soldatz : Si tu es roy des
Juifz72. 73
………………………………………………………..
Sola mors restabat, venire formidabat ;
Christus, inclinato capite, eam vocat ; antequam
inclinasset, accedere verebatur74 i). (Athan., in
Quæstionibus ad Antioch., quæst. 41 75.)
76 Tenebræ factæ sunt super universum terram,
[etc.] ; sepulcra mortuorum aperta sunt, terra mota
est77 j).
Sainct Chrysostome, in Mat. 27 78, dict quil [le
soleil] ne pouvoit ni ne vouloit servir a l'injure du
Createur ; sainct Ephrem, l. de Passione79, dict quil «
prit le dueil » de la mort de son Maistre.
Trois miracles : 1. le 14 de la lune, lune pleyne
; 2. l'ecclipse dura des que Nostre Seigneur fut crucifié
jusqu'a none, qui n'a accoustumé de durer que bien peu
; le 3. il fut universel.
80 Phlegon, autheur grec : que le 18e de Tibere
Cæsar il y eut un'eclipse de soleil, la plus grande que
jamais fut veüe, et qu'en ce tems il y eut un si grand
tremblement en Asie et en Bithinie, que plusieurs
grans ædifices tumberent. Pline, l. 2 81, raconte le
tremblement de terre au tems de [8] Tibere avoir esté
le plus grand qu'on eut ouy ni apperceu, et ruina 12
villes en Asie. Sainct Denis, converty a ce miracle
estant en Hæliopoli ; luy mesme, en l'epistre a
Policarpe82, l'instruisant pour la conversion des
Apollophanes.
Golgotha. Saint Basile dit que c'est une
commune tradition qui fait du Calvaire
le lieu de sépulture d'Adam.
e) mais l'ayant goûté, il ne
voulut pas boire. (Sans doute, il semble
qu'à cause de son épuisement il faut
ranimer le Seigneur.) Psaume LXVIII :
Dans ma soif, ils m'ont donné du fiel.
f) Et il fut mis au rang des
scélérats.
g) Père, pardonnez-leur. Sa
Mère se tenait debout près de la croix,
[etc.]
h) Toi qui détruis le temple, etc.
; sauve-toi toi-même ; si tu es le Fils de
Dieu, etc... Si le Christ est l'élu de Dieu,
roi [7] d'Israël, qu'il descende de la
croix... Ne crains-tu donc pas Dieu,
etc... Souvenez-vous de moi.
Aujourd'hui même, tu seras avec moi.
i) La mort seule s'arrêtait, elle
redoutait de venir ; le Christ, ayant
incliné la tête, l'appelle ; avant qu'il
l'eût inclinée, elle avait honte
d'approcher.
j) Il y eut des ténèbres sur toute
la terre, etc. ; les sépulcres des morts
s'ouvrirent, la terre trembla. [8]
Revu sur les Autographes conservés à la Visitation
de Turin et d'Annecy. (Voir ci-dessus, note (25), p.
3.) [9]
_____
71 Matt., vv. 39-42 ; Marc., vv. 29-33 ; v. 35, 37.
72 Luc., vv. 39-43, 36, 37.
73 Nous supprimons les dernières paroles de Notre-Seigneur et sa mort.
74 Cf. tom. VII huj. Edit., p. 449.
75 Vide in notis1.
1 Question, in N. T. (dicta et interpretationes Parabolarum). P. G. tom. XXVIII, col. 726.
76 Ici commence le second fragment que possède la Visitation d'Annecy.
77 Matt., XXVII, 45, 51, 52.
78 In Catena.
79 Circa medium, (Ephrem syri oper. græce et latine ; Roma, 1746, t. III, p. 246, in-fol.)
80 Au recit d'Eusebe, in Chronico, [ad ann. 35 ;] Tertul., in Apol., [c. XXI,] renvoye les payens a leurs Annales.
81 Histor. nat., c. LXXXIV (al. LXXXVI).
82 Epist. VII, § 11. (P. G. t. III, 1082.)
29/332

3.10 Page 30

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II. Déclaration mystique sur le Cantique des Cantiques
[1602 - 1604 83]
_____
Advertissement l'imprimeur au lecteur
Mon cher Lecteur, je sçay bien que pour vous faire estimer ce petit ouvrage que je vous
presente, il suffit de sçavoir que son Autheur est le Bien-heureux François de Sales ; un esprit si
sainct, si esclairé et si seraphique ne pouvoit parler que tres-dignement et tres-sainctement sur une
telle matiere. Et je ne pense pas contrevenir à ses intentions en le publiant ; car, quoy qu'il l'aye
tenu long-temps secret, estant un des premiers exercices de sa plume, il est neantmoins bien
croyable que si la mort n'eust prevenu le dessein qu'il avoit de donner d'autres piec.es au public,
non moins utiles que celles qui paroissent maintenant par tout avec tant de fruict et d'approbation,
sa charité incomparable l'auroit porté à vous le presenter luy-mesme, mais sans cloute avec plus
d'ornement et de perfection.
Cependant, le voilà tout tel qu'il est sorty de sa main et qu'il a esté trouvé apres son decez
; lequel en avoit rendu depositaires des personnes lesquelles, soit pour leur consolation particuliere,
ou pour quelque autre bonne consideration, n'avoient pas jugé à propos de le publier plus tost. L'on
a adjousté le texte latin aux marges, pour luy donner, par le rapport de l'un à l'autre, plus
d'esclaircissement84.
Les ames sçavantes et esclairées dans la vie interieure y trouveront, ainsi que je l'espere,
de la satisfaction ; mais je vous prie, cher Lecteur, si vous desirez en tirer du profit, de le lire avec
un esprit aussi sainct que le requiert la saincteté de son sujet. [10]
VIVE JÉSUS
Preface
Il y a deux sortes d'unions de l'ame avec Dieu en ce monde : la premiere par grace, et
laquelle se fait dans le Baptesme ou par le moyen de la penitence ; et la seconde par devotion, et
celle ci se fait par le moyen des exercices spirituelz. L'une nous rend innocens, et l'autre spirituelz.
Salomon, pretendant avoir suffisamment enseigne la premiere sorte d'union dans ses autres
Livres, n'enseigne que la seconde es Cantiques, ou il presuppose que l'Espouse, qui est l'ame
devote, soit des-ja mariee avec le divin Espoux ; et represente les saintz et chastes amours de leur
mariage qui se font par l'orayson mentale, qui n'est autre chose que la consideration de Dieu et des
choses divines.
Sous ce nom de consideration sont comprises quatre diverses actions de l'entendement, a
sçavoir : la pensee, l'estude, la meditation et la contemplation. Nous pensons es choses, sans fin et
intention ; nous les estudions pour estre plus doctes ; nous les meditons pour les aymer, et nous les
contemplons pour nous y plaire. Les uns regarderont simplement un pourtrait pour y voir les
couleurs et images, sans autre fin ; les autres, pour apprendre l'art et l'imiter ; les autres, pour aymer
83 Le lecteur remarquera sans doute ces mots, dans l'Adverlissement qu'on va lire : « estant un des premiers exercices
de » la « plume... du Bien-heureux François de Sales » ; cette pièce serait donc antérieure à l’Introduction a la Vie
devote (1608), le style même paraît l'indiquer. Faut-il la placer avant la rédaction de la Defense de l'Estcndart de la
sainte Croix (1598), ou entre 1602 et 1604 ? La première hypothèse nous semble très douteuse, car dans ce cas on
devrait écarter les années de la mission du Chablais, où le saint Apôtre ne put certainement pas s'occuper de ce travail,
et remonter peut-être à la dernière période de ses études (1590-1592). C'est un peu tôt, étant donnée l'autorité avec
laquelle il écrit. Nous suggérons, mais sous toutes réserves, 1602-160.).
84 Le texte latin du Cantique des Cantiques n'ayant pas été mis par le Saint, on a jugé bon de le supprimer.
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4 Pages 31-40

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la personne representee, comme les princes font leurs espouses, que bien souvent ilz ne voyent
qu'en image ; les autres, parce qu'ilz ayment des-ja la personne representee, se playsent a regarder
son pourtrait. L'une de ces quatre actions est sans fin ; la seconde prouffite a l'entendement ; la
troysiesme et quattriesme prouffitent a la volonté, l'une l'enflammant, l'autre la resjouissant. Ces
deux dernieres sont supermistiques du Cantique ; mais entre l'une et l'autre on peut justement
colloquer la demande, et respondront toutes troys aux vertus theologales.
La meditation se fonde sur ia foy, considerant ce que nous croyons pour l'aymer ; la
demande sur l'esperance, demandant ce que nous esperons pour l'obtenir ; la contemplation [11]
sur la charité, contemplant ce que nous aymons pour nous y plaire.
Neanmoins, le sujet de ce Livre ne comprend pas la demande ni les deux seules
considerations affectives, ni mesme la devotion, laquelle n'est ni meditation ni contemplation, mais
en est l'effect, n'estant autre chose qu'une vertu generale, contraire a la paresse spirituelle, qui nous
rend prompts au service de Dieu85. En sorte que la ou est la foy, nous sommes faitz plus prompts
a croire par la devotion ; la ou est l'esperance, nous sommes rendus plus prompts a desirer ce que
Dieu promet, et par la charité, a aymer ce que Dieu commande ; par la temperance, a nous abstenir
; par la force, a endurer, et ainsy des autres. La devotion, aux promptitudes particulieres que les
habitudes donnent, en adjouste une generale et commune engendree par la meditation et
contemplation, ainsy que le pelerin est plus dispos par la refection.
Salomon a pour fin en ce Livre la devotion, mais pour sujet l'orayson mentale prise pour la
meditation et contemplation, non pour la pensee, ni pour l'estude, ni pour la demande, ni pour la
devotion, ni mesme pour la consolation et le goust que l'on a en l'orayson, lequel ne s'y trouvant
pas tous-jours est distingué d'ieelle ; ains arrive souvent que ce goust n'estant pas en l'orayson des
bons, se trouve en celle des grans pecheurs. Mays le pelerin estant sain, apres estre repeu, soit avec
goust ou sans goust, retourne tous-jours plus promptement a son voyage.
Que si l'orayson mentale est distinguee du goust spirituel comme la cause de l'effect, elle
l'est encor plus de l'allegresse spirituelle qui est engendree de la multitude des goustz. Le courtisan
qui a receu de son prince diverses faveurs, acquiert une habitude avec laquelle il le sert non
seulement promptement, mais gayement : ainsy, nous devons tous-jours servir Dieu promptement
; nous le servons seulement gayement quand nous recevons plusieurs goustz spirituelz qui
reviennent de l'orayson mentale. Le pelerin sera plus disposé au voyage s'il a mangé ; mais s'il a
mangé avec goust et appetit, il sera non seulement disposé, ains joyeux et allegre tout ensemble.
[12]
Disons aussi que la possibilité, la facilité, la promptitude et la gayeté sont choses differentes
en une action. Resusciter un enfant mort n'est pas en la possibilité de la mere ; le guerir estant
extremement malade, est chose possible, mais non pas facile ; mettre le feu a sa playe par
ordonnance du medecin est possible et facile, mais non pas avec promptitude, ains avec resistance
et frayeur ; rafraischir son appareil se fait facilement, possiblement, promptement, mais non
allegrement ; mays apres qu'il est gueri, le recevoir et accueillir entre ses bras, se fait possiblement,
facilement, promptement et gayement. Ainsy, le pecheur n'a pas de soy la possibilité a servir Dieu
meritoirement : estant en grace, il a la possibilité, avec resistance et sans facilité ; apres avoir
continué, il le sert facilement ; apres qu'il est devot, il le sert promptement ; s'il est contemplatif,
il le sert allegrement : la grace donnant la possibilité, la charité donnant la facilité, l'orayson
mentale la promptitude et devotion, la multitude des goustz la gayeté.
Au dessus de toutes ces actions sont l'extase et le ravissement ; car lhors qu'en l'orayson,
meditant et contemplant, l'homme s'attache tellement a l'object qu'il sort de soy mesme, perd
l'usage des sens et demeure absorbé et attiré, cette alienation d'entendement de la part de l'object
qui ravit l'ame, s'appelle ravissement, et de la part de la puissance qui demeure absorbee et
engloutie s'appelle extase, dernier effect de l'orayson mentale icy bas.
Bref, l'orayson mentale est le sujet des Cantiques. Mais on a besoin de la connoissance des
choses susdites pour la declaration des termes, mesme lhors qu'ilz ne semblent estre que litteraux,
85 Cf. Introd. a la Vie dev., Part. I, ch. I.
31/332

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bien que ce soit fort rarement et qu'il soit bien difficile de les y connoistre ; ou, au contraire, les
mistiques y sont en abondance et tres divers. Comme, par exemple, devotion, goust, allegresse,
ravissement, extase et choses semblables, ne s'y treuvent jamais ; mays a chaque pas, sommeil,
songe, enyvrement, langueur, defaillance et choses pareilles. Mesme la nature ni les proprietés de
Dieu ou de l'ame n'y sont point nommees ; mays, au lieu de tout cela, yeux, cheveux, dens, levres,
colz, vestemens, jardins, unguens, et mille choses pareilles qui ont mis confusion [13] es
expositions par la liberté que les expositeurs ont eu de les faire joindre un chacun a son sens, et,
qui pis est, par la licence insupportable qu'un mesme expositeur a pris, d'entendre en une mesme
page une mesme parole en diverses manieres et pour diverses choses.
Mais nous n'avons rien entrepris sans imitation des meilleurs autheurs et sans apparente
convenance entre le terme signifiant et le signifié ; et ayant donné une fois une signification a un
terme, nous ne l'avons despuis jamais changé. Les baysers signifieront tous-jours les consolations
spirituelles ; les embrassemens, les unions avec Dieu ; les douceurs des viandes, les goustz
spirituelz ; les langueurs et defaillances, les gayetés et allegresses ; les sommeilz et enyvremens,
les ravissemens et extases. En l'Espouse, quand il se traitte de vertu exterieure, le col signifiera la
force pour executer ; quand on traitte de vertu interieure, il signifiera la partie irascible, et jamais
ne changera de signification. En l'Espoux, le chef signifiera la charité. Le theatre de Hierusalem
sera tous-jours l'Eglise militante ; l'Espoux sera tous-jours Dieu increé ou incarné ; l'Espouse, l'ame
; le chœur des dames, les conversations mondaines.
En fin, l'orayson mentale est le sujet mistique du Cantique. Mais quelles choses en veut
dire Salomon, ou plustost le Saint Esprit ? Il nous veut monstrer par combien de degrés une ame,
estant en l'orayson mentale, peut monter a la plus haute consideration de Dieu, et avec quelz
remedes elle se peut ayder contre beaucoup d'empeschemens. Dont on peut faire cette division :
Il y a cinq principaux empeschemens en l'orayson, cinq principaux remedes et cinq degrés
d'icelle. Mais la sixiesme scene represente une ame laquelle, ayant surmonté tous ces
empeschemens, n'a plus besoin de remedes ; et a chacune des cinq autres scenes, donnant ou
mettant un empeschement, un remede et un degré.
En la premiere, la souvenance des playsirs passés sensitifs est l'empeschement ; le remede
est le desir des choses spirituelles et les demander a Dieu ; le premier degré est de considerer Dieu
es choses corporelles.
En la seconde, l'empeschement est la distraction de [14] l'imaginative par les fantosmes et
visions sensibles ; le remede est l'attention aux inspirations ; le degré, la consideration de Dieu es
choses spirituelles.
En la troysiesme, l'empeschement est les louanges humaines ; le remede est de gouster les
divines ; le degré est la consideration que l'ame fait de Dieu en elle mesme.
En la quatriesme, l'empeschement est la fatigue du cors et partie sensitive ; le remede sont
les colloques et devis spirituels ; le degré est mediter Dieu, non en luy mesme, mais en son
Humanité.
En la cinquiesme, l'empeschement est des respectz humains ; le remede est la solitude ; le
degré, la consideration de Dieu en luy mesme, mais comme Dieu. [15]
_____
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Le Cantique des Cantiques, eglogue de Salomon
I. Premier empeschement la souvenance des playsirs sensibles
Qui delibere de ne plus offencer Dieu, rencontre plusieurs occasions suggerees par le diable
pour pecher ; qui se resoult ne plus vouloir de consolation qu'en Dieu, rencontre le monde qui luy
presente nouveaux playsirs temporelz. Ce luy est un grand empeschement pour apprehender les
consolations divines de ne se pouvoir separer ni desfaire des anciennes compaignies, conversations
et recreations.
Donques l'Espouse, c'est a dire l'arae des-ja en grace, voulant entendre a la vie spirituelle
par les baysers de son divin Espoux, qui sont les consolations spirituelles, a une grande peyne a se
desprendre du chœur des dames (conversations anciennes) qui luy offrent des vins et parfums, qui
sont les playsirs temporelz. Dont l'ame languissante pour l'absence de son Espoux, desirant s'unir
a luy par l'orayson, le chœur des dames la veut conforter avec vins et parfums, luy remettant en
memoyre les playsirs passés ; nonobstant lesquelz elle demande : Qu'il me bayse d'un bayser de
sa bouche86.
Remede : Desirs et demande des biens spirituels
Premierement elle considere que les biens et playsirs mondains, aupres des divins ne sont
que vanité ; secondement, que Dieu est doux et souhaittable en luy mesme ; troysiesmement, que
plusieurs ames saintes ont frayé le chemin, n'ayant trouvé aucun playsir qu'en Dieu ;
quatriesmement, elle demande a Dieu qu'il luy oste toutes affections terrestres.
Et quant au premier, elle dit : Tes amours sont meilleurs que le vin et plus odorans que les
parfums ; quant [16] au second : Ton nom est le mesme parfum respandu ; pour le troysiesme :
Les jeunes filles t'ont aymé ; et pour le quatriesme : Tire moy apres toy, nous te suivrons et courrons
a l'odeur de tes parfums. Et tout incontinent, portee par une grande confiance d'obtenir ce qu'elle
demande, comme si des-ja c'estoit fait elle adjouste : Mon Roy m'a menee en ses cabinetz ; nous
sauterons de joye et nous res-jouirons en luy et avec luy de la souvenance de tes amours qui sont
meilleurs que le vin ; les bons t'ayment et te prisent87.
Les scrupules neanmoins surviennent, par la memoire des pechés passés ; dont elle dit : Je
suis noire ; mais l'integrité de sa conscience presente fait qu'elle adjouste : mais je suis belle, o
filles de Hierusalem, comme les tabernacles de Cedar et comme les peaux de Salomon. Le foyer
du peché en la concupiscence y apporte du deschet, mays sans quil luy puisse estre reproché ni
imputé a peché : Ne prenes donq pas garde a ce que je suis brune, car mon Soleil m'a voulu ainsy
laisser en ceste guerre : le soleil m'a donné le teint que j'ay, et ne m'est pas advenu par ma faute,
mais par celle des premiers enfans de la nature humaine, ma mere. Les filz de ma mere ont combattu
contre moy, ce fut par leur peché que je fus mise en necessité de prendre tant de soins et garde a
moy mesme comme si j'estois a garder une vigne : ilz m'ont mise a garder les vignes contre les
assautz de la concupiscence, et tout cela, helas ! non par ma faute propre et actuelle, mays par celle
d'autruy, dont je puis dire : La vigne que j'ay gardee n'estoit pas a moy88.
Et partant, que la confiance revienne en moy, et que je commence a chercher mon Espoux
ou il est plus aysement trouvé, par l'orayson. O vous que mon ame ayme, enseignes moy ou vous
paisses et ou vous couches a l'ombre du midy, affin que je ne coure ça et la esgarément aux
troupeaux de vos compaignons89, c'est a dire, apres les creatures. Enseignes moy ou je pourray
vous trouver en l'orayson, avec vos lumieres et consolations, sans m'arrester a la creature. [17]
Premier degré : Consideration de Dieu es choses corporelles
86 Cap. I, 1.
87 Vers. 1-3.
88 Vers. 4, 5.
89 Vers. 6.
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4.4 Page 34

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Vois tu bien ce soleil, o mon espouse, ces estoilles, ces deux, ceste terre, ces rochers ? ce
sont autant de voyes et chemins pour me trouver. Elles ne se sont pas faittes elles mesmes90 ; elles
ne sont pas sans quelque principe qui les a faittes et qui est leur fin derniere, qui les conserve, qui
les garde. Mais qui est ce principe et ceste fin ? C'est Dieu ; les meres de toutes choses sont les
idees qui en sont en moy, en ma puyssance et bonté. Mays les aigneaux, aussi tost que l'huys de la
bergerie est ouvert, courent droit a leurs meres ; ainsy l'homme, voyant les creatures, monte petit
a petit a Dieu : c'est un moyen de me trouver.
Si tu n'as pas encores une entiere connoissance, o la plus belle des femmes, parce que tu es
encores commençante, sors de la souvenance des playsirs passés, et va suyvant les pas de tes
troupeaux ; cherche mes sentiers en toutes les creatures, laisse-toy guider et mener la par ou elles
mesmes retournent, et tu trouveras qu'elles iront reposer aux pasturages de leur premier berger :
Fais paistre tes chevreaux pres les loges des pasteurs91.
Tu seras conduitte a troys paissans et un Pasteur, a troys creans et un Createur. Toutes les
creatures sensibles te meneront la, et les plus nobles encores mieux. Sur tout, la nature humaine,
en tes premieres meditations, t'y sera prouffitable ; tu verras les biens surnaturelz qui sont en elle
: comme, qu'elle est l'habitation de Dieu, son throsne et quasi son chariot ; dont il luy peut dire : O
ma bienaymee, je t'ay fait semblable a ma genisse attelee aux chariotz de Pharaon. Tu y verras
les biens naturelz, car elle est aussi belle en elle mesme comme si elle avoit tous les omemens du
monde : Tes joües sont belles comme si elles estoyent parees de quelques beaux ornemens ; ton
col est beau comme s'il estoit paré de quelque beau carquan. Tu verras ces biens accidentelz,
comme quoy tout le monde a esté fait pour ton usage, ornement et service : Nous te ferons des
bagues d'or qui seront esmaillees d'argent ; qui sont des bienfaitz si grans, que l'ame les meditant
s'enflamme d'amour et est contrainte de s'escrier : [18] Puisque je ne puis autre chose, au moins
t'aymeray je, o mon Espoux, et seray moy mesme ta salle royale, laquelle je parfumeray de nard ;
c'est a dire, je m'empliray d'amour : Tandis que mon Roy sera en sa salle, mon parfum, qui est
composé de nard, embaumera tout ce lieu de la suavité de son odeur ; et de plus, je m'uniray
tellement avec luy, que je le porteray comme un bouquet dedans mon sein : Mon Bienaymé est le
bouquet de mirrhe que je porteray tous-jours entre mes deux mammelles. Il sera tous-jours mon
tres cher bausme et mon plus grand thresor : Mon Bienaymé m'est une grappe de bausme cueillie
aux vignes d'Engaddi92.
Ces affections font que l'Espoux ayme l'ame et la loue, disant : O que tu es belle, ma
bienaymee ! Voyci que tu es belle ; tes yeux sont comme ceux de la colombe. L'ame de son costé,
reconnoissant que toute sa lumiere depend de son Soleil, qui est Dieu, confesse que luy seul est
beau par essence : O mon Bienaymé, tu es beau et de bonne grace, et tu embellis tellement nostre
essence, quand il te plaist, que mesme nostre lict, qui est nostre cors, en est beau : voyla nostre lict
fleurissant. Et mesme ce monde, nostre habitation : Les chevrons de nos maysons sont de cedres
et nos solives sont de cypres93 ; donq, quelle merveille si je suis la fleur du champ et le lys des
vallees ? Ce qu'advouant l'Espoux, il monstre que plusieurs ames sont bien de contraire condition
par la malice de leurs volontés, car elles sont comme des espines : Comme un lys entre les espines,
ainsy est ma bienaymee entre les filles94.
Cheres loüanges que l'ame n'accepte ni ne refuse, mays, esprise de son Espoux, retourne a
le considerer es mesmes choses sensibles, non plus en meditant pour l'aymer, mais en contemplant
pour se res-jouir, le confessant tres haut entre toutes les choses creées : Comme est un pommier
entre les arbres des forestz, ainsy est mon Bienaymé entre les enfans des hommes. Dont, ayant
trouvé un bien si eminent au dessus de tout autre, elle s'y repose sans en plus rechercher : Je me
suis reposee a l'ombre de celuy que je desirois ; et en ce repos spirituel se fait le goust de la [19]
90 Cf. Ps. XCIX, 3.
91 Vers. 7.
92 Vers. 8-13.
93 Vers. 14-16.
94 Cap. II, 1, 2.
34/332

4.5 Page 35

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devotion : et son fruict est doux a mon goust, et si doux qu'il engendre des saintes manies et fureurs
en mon ame, comme si elle estoit enyvree d'amour ; dont elle s'escrie : Il m'a menee au cellier de
son vin, il a desployé sur moy l'estendart de son charitable amour95. Mais particulierement avec
leur frequente communication, ilz engendrent l'habitude de l'allegresse spirituelle, en laquelle,
languissant doucement, elle se sent defaillir et esvanouyr, et pour ce dit elle : Hé, reconfortes moy
avec des fleurs, mettes des pommes autour de moy, car c'est d'amour que je languis96.
Quoy plus ? Le ravissement, mistiquement signifié par le sommeil. L'ame, le sentant
survenir et ne voulant dormir ailleurs qu'entre les bras de son Espoux, dit : Que sa main gauche
soit sous mon chef et que de sa main droitte il m'embrasse estroittement. Lhors Dieu a soin que
les choses basses ne nous empeschent cette divine consolation ; dont il dit au chœur des dames :
Je vous adjure, o filles de Hierusalem, par les chevres et par les cerfz des chams, que vous
n'esveillies ni facies esveiller ma bienaymee jusques a ce qu'elle le veuille97. Lhors l'ame
commence a esprouver et connoistre qu'il n'y a douceur qui esgale celle qui se trouve en l'orayson
mentale.
II. Second empeschement : la distraction imaginative
Plus un chemin nous est conneu, plus nous le hantons ; plus nous y connoissons de gens,
et plus volontier aussi nous y cheminons et plus facilement. Mais aussi, par telz chemins nous
arrivons plus tard au giste, parce qu'ayant beaucoup de connoissances, icy nous parlons a l'un, la a
l'autre ; icy nous entrons en la boutique de l'un, la nous nous arrestons avec un amy. Pour la
consideration de Dieu, nul chemin ne nous est plus battu, conneu et familier que celuy des choses
corporelles entre lesquelles nous vivons ; nul n'a en soy plus de facilité, mays aussi, nul n'a plus
de distractions. Quand je medite Dieu en l'Ange, qui [20] est une chose invisible et qui ne m'est
nullement familiere, il n'engendre en moy que peu de fantosmes et distractions ; mais si je
considere Dieu en l'homme, mon imagination descend de l'universel au particulier, et, sous le nom
d'homme, me represente Pierre, Paul, ou chacun d'eux, lhors que nous faisons telle ou telle chose.
Si bien que tandis qu'en ce chemin qui nous est si familier nous nous arrestons a toutes les
boutiques de nostre connoissance, ou nous arrivons tard a nostre but, ou jamais.
De mesme que la multitude des songes ne laisse dormir paysiblement, mays fait presque
veiller en dormant, ainsy l'orayson arrivee au sommeil de l'extase, qui est comme son giste, elle
peut estre appellee elle mesme sommeil ; mays quand elle est interrompue de distractions
phantastiques, c'est un sommeil plein de songes. Et lhors, nostre Espoux nous parle et vient a nous,
mais non pas pour y demeurer et reposer, ains il vient par sautz et eslancemens : C'est la voix de
mon Bienaymé, le voyla qui vient aux montaignes, saillant et traversant les collines. Il semble que
tantost il vienne et que tantost il fuye : Mon Bienaymé est semblable a un chevreuil et a un faon
de cerf ; maintenant il se monstre, maintenant il se cache : Le voyla qui se tient debout derriere
nos murs ; et bien qu'il semble qu'il se face voir, regardant par les fenestres, neanmoins la vision
n'estant ni bien claire ni bien arrestee, l'on peut dire que les fenestres ont des barreaux et qu'il
regarde par les treillis98.
Remede : Attention a l'inspiration
Or, il ne faut pas s'ennuyer demesurement en ces distractions, car elles sont conjointes a
nostre nature, et nous n'en pouvons estre repris si elles ne viennent de nostre faute. Neanmoins, il
faut user de remede, qui est de se recueillir souvent et prester l'oreille pour escouter les inspirations
: Voyla mon Bienaymé qui m'appelle et me dit : Leve toi, ma bienaymee, ma colombe, ma belle, et
95 Vers. 4, juxta Heb. et Septuag.
96 Vers. 3-5.
97 Vers. 6, 7.
98 Vers. 8, 9.
35/332

4.6 Page 36

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t'en viens ; la faysant, outre cela, resouvenir de l'innocence en laquelle elle peut pieusement croire
estre arrivee, ne se sentant chargee d'aucun peché mortel. O combien estoit [21] triste l'hyver du
peché : car des-ja l'hyver est passé, la pluye s'en est allee. Il se res-jouit de ce que les fleurs de
devotion commencent a sortir et pousser : Des-ja les fleurs paroissent en nostre terre ; de ce qu'elle
a commencé a retrancher les superfluités vicieuses : le tems d'esmonder et nettoyer les arbres est
venu ; de ce qu'ainsy qu'une tourterelle, elle a fait ouÿr sa plainte et son gemissement avec l'orayson
: On a ouÿ la voix de la tourterelle en ceste contree ; mays de plus, il se res-jouit de ce que des-ja
elle a produit des fleurs de bonnes œuvres et des odeurs de bon exemple : Des-ja le figuier jette
son fruict, les vignes sont fleuries et jettent leur bonne odeur. Il l'admoneste, outre ce, de passer
plus avant, et, de commençante, qu'elle se face prouffitante, luy redisant : Leve toy, ma bienaymee,
ma belle, et t'en viens99.
Et parce qu'es commencemens il semble a l'ame qu'elle soit entre plusieurs difficultés,
comme entre des pierres ou des espines (Ma colombe, qui est dans les trous de la pierre et an
creux de la muraille), pour cette cause il asseure qu'elle ne laisse pourtant de luy estre bien
aggreable : Hé, monstre moy ta face, que le son de ta voix vienne a mes oreilles, car ta voix est
douce et ta face tres belle100.
Ce discours est si doux qu'il devroit chasser toutes autres pensees ; toutesfois, si ces pensees
reviennent, elle dira comme en songeant : Prenes ces petitz renardeaux qui fouillent et gastent les
vignes, car nostre vigne est en fleur ; et se reunissant avec son objet, elle dira : Mon Bienaymé est
a moy et moy a luy ; et le priera qu'il revienne a elle tant que le jour dure et jusques a ce que les
ombres s'abbaissent : Reviens, mon Bienaymé, et sois semblable a un chevreuil ou a un faon de
cerf sur les montaignes de Bether101. Et ainsy, elle surmontera ce second empeschement.
Second degré
L'ame considere Dieu es choses spirituelles, hors de soy mesme
Cette voye des considerations est moins conneuë, mais aussi moins sujette aux distractions.
Au precedent degré il semble qu'on ne trouve pas Dieu, encor qu'on l'ayt trouvé ; [22] mais en
celuy ci on reconnoist incontinent qu'on l'a trouvé : La nuict, en mon lict (c'est a dire es cors
humains, qui sont les lictz des ames), j'ay cherché Celuy que mon ame ayme, et je ne l'ay point
trouvé. Je me leveray, et tourneray la cité de ce monde ; et courant tantost par les cors terrestres,
tantost par les celestes, je l'ay cherché, et ne l'y ay point trouvé ; au moins les distractions ont esté
si grandes qu'a peyne me semble-il de l'avoir rencontré : Je chercheray par les rues et par les
places Celuy que mon ame ayme ; je l'ay cherché, et ne l'ay pas trouvé102.
Mon bonheur a voulu que je me suis souvenu des Anges qui sont comme les sentinelles du
monde : Les sentinelles qui gardent la cité m'ont trouvee, et me suis resolue de voir si en eux je
trouverois la consideration de Dieu plus fermee : N'aves vous point veu le Bienaymé de mon ame
? Au dessus de la nature angelique j'ay trouvé immediatement la divine : Un peu apres les avoir
passees j'ay trouvé Celuy que mon ame ayme, et ce, sans distractions sensibles, si bien qu'il semble
que je ne le dois jamais perdre : Je le tiens et je ne le lairray point, jusques a ce que j'entre en la
gloire celeste, vraye mayson de la nature humaine ; ma mere est en sa chambre, c'est a dire au
siege des Anges qui m'est preparé. Lhors, a cette vision enigmatique succedera une vision claire :
Quand je l'introduiray, mais plustost, quand il m'introduira en la mayson de ma mere, et en la
chambre de celle qui m'a engendree103.
Sainte consideration de Dieu es choses spirituelles, laquelle, comme de sa nature elle
n'engendre point de fantosmes, aussi n'engendre-elle point de songes. La consideration du premier
degré est plus interrompue, celle cy plus stable et plus haute, dont elle produit tous ses effectz avec
99 Vers. 10-13.
100 Vers. 14.
101 Vers. 15-17.
102 Cap. III, 1, 2.
103 Vers. 3, 4.
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plus d'excellence, a sçavoir, l'amour plus vif et l'allegresse plus spirituelle. A quoy Dieu adjoustant
sa grace, defend avec un soin plus particulier qu'on ne l'esveille, disant : Je vous adjure, o filles de
Hierusalem, par les chevres et les cerfz des chams, que vous n'esveillies ni ne facies esveiller ma
bienaymee jusques a ce qu'elle le veuille104. [23]
III. Troisiesme empeschement : les louanges humaines
L'ame s'acheminant de degré en degré en la sainte orayson, se rend si resplendissante qu'il
est impossible qu'elle ne soit admiree, et que le monde mesme la voyant, au milieu du desert
empetré de tant de pechés, cheminer droit, ainsy qu'une colomne de parfum odoriferant qui s'esleve
vers le ciel, ne s'escrie : Qui est ceste ci qui marche par le desert ainsy qu'un rayon de parfum, de
compositions aromatiques de mirrhe et d'encens et de toutes sortes de poudres a embellir105 ? Or,
cest applaudissement est un venin caché et doucereux qui fait bien souvent que les plus saintz et
devotz perdent leur justice et leur devotion.
Remede : Estre attentif aux loüanges de Dieu
Quicomque entend ses propres louanges, qu'il se tourne vers celles de Dieu ; qu'il persuade
a celuy qui le loüe de ne vouloir loüer une chose de si petit merite, mays qu'il esleve les louanges
de Dieu de nostre bassesse et petitesse. Que s'il ne peut si tost arrester ses yeux sur la Divinité,
qu'au moins il loüe Jesus Christ homme, nostre vray Salomon, et ce principalement en troys choses
: la chair, la Croix, la gloire, disant : Voyes combien est digne sa chair, lict de sa Divinité et de son
ame, entouree de plus de soixante vaillans soldatz qui la defendent contre quicomque, de nuit,
pourroit luy faire peur ; ceste chair, qui n'est inclinee au peché comme la nostre, mais, par l'union
hypostatique et par l'empire qu'elle tient sur les Anges, est du tout asseuree et impeccable : Voicy
que soixante hommes des plus fortz d'Israël entourent le lict de Salomon, tous tenans des glaives
et bien duitz a la guerre, chacun desquelz tient son espee droitte sur sa cuisse pour les craintes de
la nuit106.
Quant a la Croix, o qu'elle est sainte ! elle est de bois, mais de bois du Liban, c'est a dire
incorruptible : Le Roy Salomon s'est fait une litiere du bois du Liban. La justice [24] et la
misericorde sont les deux colomnes qui soustiennent ceste Croix : Il a fait les colomnes d'argent,
l'appuy ou reposoir en est d'or, d'autant que tout s'est fait pour conduire les ames a la gloire, l'appuy
d'or ; la montee en est de pourpre, car il ne nous conduit a la gloire que par son sang. Et tout cela,
pour les ames de l'Eglise ; dont il est dit : orné de charité au milieu pour les filles de Hierusalem.
De la s'ensuit, pour ce Seigneur, la couronne de la gloire de sa Resurrection et Ascension, laquelle
doit ravir tout le monde a sa louange : Sortes, filles de Sion, et voyes le Roy Salomon avec le
diademe duquel sa mere l'a couronné le jour de ses espousailles et le jour de la joye de son cœur107.
Troysiesme degré
L'ame considere Dieu en elle mesme
Donq, l'ame rejettant ses louanges en celles de Dieu, prend soin de se parer en toutes ses
parties pour plaire a Celuy que seul elle estime digne de toutes louanges. Or ses parties mistiques
sont : les yeux, c'est a dire les intentions qui la meuvent ; les cheveux, c'est a dire les affections,
amour, hayne, desir et autres, qui, comme les cheveux, ne sont ni bonnes ni mauvaises, sinon
entant qu'elles sont employees au bien ou au mal ; les dens, c'est a dire les sens qui maschent toutes
les viandes qui doivent entrer en l'estomach de l'entendement ; les levres et le parler, c'est a dire
104 Vers, 5.
105 Vers. 6.
106 Vers. 7, 8.
107 Vers. 9-11.
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les pensees qui, en façon de paroles interieures, produisent des discours insensibles ; les joües sont
les deux puissances raysonnables, qui sont l'entendement et la volonté ; le col, la force irascible
qui rechasse et repousse les empeschemens ; les mammelles sont les deux actions de la
concupiscible : suivre le bien, fuyr le mal. Tout cela doit estre orné et embelli, affin que Dieu ayme
l'ame et qu'il puisse dire : Que tu es belle, ma bienaymee, que tu es belle !
Les intentions doivent estre simples, pures et interieures, sans qu'on puisse dire que l'une
soit au dehors et l'autre au dedans, et qu'elles soyent louches et diverses : Tes [25] yeux sont de
colombe, sans ce qui est caché au dedans.
Les affections ne doivent estre esparses, mais serrees et unies comme un troupeau sous la
houlette du souverain Pasteur : Tes cheveux sont comme des troupeaux de chevres qui viennent du
mont Galaad.
Les sens doivent estre gardés comme en prison, ainsy que les dens sous les levres, ou
comme brebis nouvellement lavees ; et leurs jumeaux, c'est a dire l'apprehensive et l'appetitive, se
doivent tenir rangees et reglees : Tes dens sont comme troupeaux de brebis fraischement tondues
qui retournent du lavoir, chacune avec deux jumeaux, et pas une d'elles n'est sterile.
Les pensees doivent estre si bien accommodees que toutes les conceptions soyent teintes
au sang du Sauveur, et les paroles et discours pleins de douceur et prouffit pour le prochain : Tes
levres sont comme une bande de couleur pourprine et ton parler est bien doux.
L'entendement et volonté monstreront d'entendre le bien et le vouloir faire ; et, comme en
une grenade ouverte, tout y sera descouvert, rien n'y paroistra laid et desaggreable ; et ces deux
puissances seront tous-jours humbles et assujetties : Tes joües sont comme une grenade entamee,
sans ce qui est caché au dedans.
L'irascible sera si vaillante contre les tentations qu'on pourra dire : Ton col est comme la
tour de David, bastie avec des boulevars ; mille boucliers sont pendus en icelle et toutes sortes
d'armes pour les hommes fortz. Et quant a la concupiscible, elle aura son desir du bien et sa fuite
du mal si simples qu'on pourra dire : Tes deux mammelles sont comme deux faons de chevres que
l'on fait paistre entre les lys108.
En fin l'Espoux qui, des son Ascension, est allé a la montaigne de la mirrhe et a la colline
de l'encens, au Ciel, a la dextre du Pere, comme il l'avoit predit (Devant que le jour decline et que
les ombres s'abbaissent, j'iray a la montaigne de la mirrhe et a la colline de l'encens), il loüera
l'ame, disant : Tu es toute belle, o ma bienaymee, et il n'y a pas une petite tache en toy ; et l'invitera
de passer de la Hierusalem militante a la triomphante, disant : [26] Viens du Liban, mon espouse,
viens du Liban, viens, et promettra les couronnes et sieges dont furent chassés les demons : Tu
seras couronnee du haut du mont Amana, du coupeau de Sanir et d'Hermon, des sieges des lions,
des montaignes des leopars109.
Tous ces ornemens sont aggreables a Dieu, mays sur tout la netteté et pureté d'intention,
qui doit estre si grande que toutes nos fins se reduisent a une fin, toutes nos intentions a une
intention, tous nos desirs a un desir, d'aymer et servir Dieu, en sorte qu'il n'y ayt plus qu'un œil :
Vous aves navré mon cœur, ma seur, mon espouse, vous aves navré mon cœur avec un de vos yeux
; et qu'il n'y ayt plus qu'un cheveu, dont il s'ensuit : et de l'un des cheveux de vostre col110.
L'intention estant bien dressee avec le desir, les mammelles de la concupiscence seront
bien ordonnees : Que tes mammelles sont belles, ma seur, mon espouse ! tes mammelles sont plus
belles que le vin. Les exemples en seront de bonne odeur : L'odeur de tes parfums est par dessus
toute composition aromatique ; les pensees et paroles seront tres devotes et douces : Tes levres
sont un rayon de miel qui distille, ce qui est dessous ta langue est lait et miel ; les actions seront
tres exemplaires : L'odeur de tes vestemens est comme l'odeur de l'encens111.
Disons ainsy : les actions appartenantes a une ame sont interieures ou exterieures ; les
exterieures se font par le commandement des interieures. Et quant aux interieures, il faut qu'elles
108 Cap. IV, 1-5.
109 Vers. 6-8.
110 Vers. 9.
111 Vers. 10, 11.
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soyent serrees en Dieu sans que le monde les voye ; c'est pourquoy il dit : Un jardin clos est ma
seur, mon espouse, elle est un jardin clos et fermé ; elle est une fontayne scellee. Et quant aux
exterieures, il faut qu'elles soyent comme un beau paradis : Ce que tu envoyes et metz dehors est
comme un paradis auquel on void toutes vertus : de grenade, des fruictz des pommiers, de bausme
avec du nard et saffran, sucre et cannelle et toutes sortes de fruictz des arbres du Liban, mirrile
et aloës, avec toutes sortes des plus excellens parfums. En somme, l'ame est une fontayne de
bonnes œuvres qui saillent jusques au ciel avec impetuosité, pareille [27] a celle des eaux qui
viennent du Liban : La fontayne des jardins, le puitz des eaux vives, qui fluent impetueusement du
Liban112.
Mays en tout cecy, deux choses sont requises. De la part de Dieu, qu'il chasse la bize des
tentations et qu'il envoye le vent du midy de sa grace prevenante, disant : Fuys, Aquilon, et viens,
o Midy, souffle en mon jardin, et les odeurs d'iceluy s'espandront ; de la part de l'ame, qu'elle
accepte ceste grace et coopere, disant : Que mon Bienaymé vienne en son jardin, et qu'il mange du
fruict de ses pommiers113.
Ainsy, apres la mirrhe de penitence, Dieu tirera l'ame, par le moyen des saintz exercices,
aux odeurs aromatiques de l'orayson, avec du miel, du lait et du vin de meditation, d'amour et de
contemplation, mays contemplation telle, qu'elle produira des goustz, allegresses et extases qui
non seulement estancheront la soif, mais enyvreront. Et Nostre Seigneur pourra dire : Voyci que
je t'attens ; viens en mon jardin, ma seur, mon espouse ; j'ay cueilli et moissonné ma mirrhe avec
mes fleurs et odeurs tres souëfves ; j'ay mangé un rayon de miel avec du miel mesme et ay beu
mon vin avec mon lait mangés, mes amis, beuvés, enyvres vous, mes tres chers114.
IV. Quatriesme empeschement : le travail du cors
L'ame qui arrive jusques a ces degrés passés se trouve bien souvent avec le cors las et
travaillee ; dont il advient que, si Dieu l'invite a nouvelles considerations et plus hautz degrés, elle
est en perplexité. Elle voudroit bien advancer, mais la peyne l'espouvante ; et si l'Espoux l'appelle
derechef, elle se leve pour aller a l'orayson, neanmoins avec resistance de la partie sensitive qui la
prive du goust et fait qu'a peyne peut elle penser que Dieu soit avec elle, et, comme il advient a
ceux qui sont extremement las, elle dort en veillant : Je dors, mays mon cœur veille. [28] Puys, se
tournant vers son Espoux qui heurte a son cœur : C'est la voix de mon Bienaymé qui heurte, et
l'excite affin de luy ouvrir et commencer de nouveau son orayson : Ouvre moy, ma seur, ma
bienaymee, ma colombe, ma toute belle, et, avec un quatriesme degré d'orayson, medite un peu ma
Passion : Tu trouveras que j'ay le Chef plein de la celeste rosee de mon sang, et les cheveux
sanglans des nocturnes pointures des espines : Car mon chef est plein de rosee et mes cheveux
entortillés sont tout trempés des gouttes des nuictz115.
L'ame voudroit bien obeyr, mays la lassitude luy fait desirer un peu de repos ; ce qui luy
fait dire : J'ay despouillé ma robbe, comme la revestiray je ? J'ay lavé mes pieds, comment les
saliray je ? Tres doux Jesus, nonobstant ceste resistance vous ne laisses pourtant de faire instance
pour entrer ; et, comme avec la main d'une plus forte inspiration, il semble qu'il veuille luy mesme,
sans cooperation, oster le verrou de la sensualité qui luy fait empeschement, et entrer par le pertuis
du cœur : Mon Bienaymé a mis la main par le pertuis. A ceste grande vocation, l'ame s'esmeut
(Mon ventre a tremblé de son seul attouchement) et resoult qu'elle doit ouvrir a son Espoux et
commencer nouvelle meditation : Je me suis levee pour ouvrir a mon Bienaymé. Mais d'autre part,
elle sent si grande douleur de n'avoir ouvert au premier coup, qu'elle renverse le vase de la mirrhe,
c'est a dire qu'elle s'emplit toute de penitence, en arrousant jusques au verrou, c'est a dire faysant
passer sa douleur jusques a la sensualité : Mes mains ont distillé la mirrhe et mes doigtz sont pleins
112 Vers, 12-15.
113 Vers. 16 ; cap. V, 1.
114 Vers. 1.
115 Vers. 2.
39/332

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de vraye mirrhe et de la meilleure116.
Par le moyen de ceste douleur il se fait que, bien que l'ame, au defaut de la partie corporelle
et sensitive, ouvre a son Seigneur (J'ay ouvert le verrou de mon huys a mon Bienaymé), neanmoins,
a cause de ceste repugnance, elle trouve si peu de goust en l'orayson qu'il luy est advis que Dieu
n'est point avec elle : mays il s'estoit destourné et avoit des-ja passé. Dont, se resouvenant avoir
esté tant appellee et tant paresseuse, elle se contriste et consomme [29] de douleur : Mon ame s'est
toute fondue des que mon Bienaymé a parlé. Elle essaye a trouver goust au premier degré de
consideration par le moyen des choses sensibles ; mais le travail ne permet pas qu'elle y en puisse
trouver : Je l'ay cherché et ne l'ay point trouvé ; je l'ay appelle, et ne m'a point respondu. Elle
passe au second degré, des choses spirituelles et angeliques : Les gardes qui entourent la cité m'ont
trouvee ; mais quand elle compare leur promptitude avec sa paresse, elle demeure transpercee de
douleur : Ilz m'ont battue et navree. Et, qui est le pis, si elle entre au troysiesme degré, a considerer
soy mesme en son ordre vers Dieu, elle opere la mesme resistance ; dont elle se desplaist a soy
mesme, et luy est advis que sa face est trop laide en comparaison de celle des Anges, et que, par
maniere de dire, ilz luy ostent tout son lustre : Les gardes des murs m'ont osté mon manteau117. De
façon que, par tout ou elle se trouve, elle rencontre de grandes difficultés, esmeuës par ce
quatriesme empeschement des travaux corporelz.
Remede : Colloques et devis spirituelz :
L'orayson vocale, ou plustost les devis spirituelz servent de remedes a l'ennuy du travail ;
ainsy void on celuy qui par maladie a perdu le goust et appetit, changeant de viande le recouvre,
et qu'es Congregations contemplatives on entrejette des colloques spirituelz aux oraysons. L'ame
donques, degoustee par le travail de l'orayson, doit s'addresser a des personnes spirituelles et les
prier de l'ayder a trouver son Espoux : Je vous adjure, o filles de Hierusalem, que si vous trouves
mon Bienaymé, vous luy disies que je languis d'amour pour luy ; et elles, sçachant la necessité, la
mettront sur le discours des qualités de l'Espoux : Quel est vostre Bienaymé, o belle entre les
femmes, que, pour luy, vous nous aves si fort adjurees118 ?
Lhors elle propose Jesus Christ si bien au naturel qu'il n'est pas possible de le mieux
representer. Il est Dieu, candeur de la mesme lumiere119, mays fait homme pour nous pouvoir
racheter au pourpre de son sang : Mon Bienaymé [30] est blanc et rouge ; et, entant qu'homme, il
est si singulier qu'on le peut connoistre entre mille : choysi de mille. Parce que la charité, chef des
vertus, se peut dire estre d'or en luy, c'est a dire tres pretieuse : son chef est un or tres pur et tres
bon ; et les graces et benefices qui, comme cheveux innombrables, en procedent, sont les premiers
fruictz des palmes et noires comme corbeaux ; ce sont les effectz de la victoire qu'il eut en l'arbre
de la Croix, si dignes d'estre admirés, comme le noir en un cheveu : Sa cheveleure est comme
branches de palmes hautes et touffues, noire comme un corbeau. Il est comme une blanche
colombe qui a en soy tous les dons du Saint Esprit, representé par les yeux : Ses yeux sont comme
des colombes sur les rivages des eaux, que l'on a lavees de laict ; le Saint Esprit, appellé en autre
façon riviere, non par mesure, mais avec toute plenitude luy est donné : et resident es pleins cours
des eaux. Partant, si tu contemples ses exemples, comme les joues pleines, ouvertes et mises a la
veüe de tous, aussi odoriferantes que vases pleins de parfums aromatiques, ilz se font sentir de
tous costés : Ses joües sont comme parterres de fleurs aromatiques que les parfumeurs mesmes
ont plantés. Sa doctrine semble estre mirrhe pretieuse qui sort comme des lys de ses saintes levres
: Ses levres sont des lys qui distillent la mirrhe la plus singuliere. Ses miracles sont telz qu'il semble
que de ses mains coulent et tombent abondamment les jacinthes : Ses mains sont anneaux d'or
pleins de jacinthes120.
116 Vers. 3-5.
117 Vers. 6, 7.
118 Vers. 8, 9.
119 Sap., VII, 26.
120 Vers. 10-14.
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5 Pages 41-50

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5.1 Page 41

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Quoy plus ? soit au dedans, soit au dehors, cest Espoux est admirable : son cœur est
d'ivoyre, enrichi de pierres pretieuses ; ses deliberations sont simples, mays prudentes : Son ventre
est d'ivoire, semé de saphirs au dehors ; ses executions sont fortes, mays avec discretion : Ses
cuisses sont colomnes de marbre fondees sur des bases d'or ; et, pour finir icy, il est tout tres cher,
il est tout tres beau : Sa beauté est comme celle du Liban, son port comme d'un cedre. 121 [31]
Quatriesme degré
Consideration de nostre Dieu en luy mesme, mais humanisé
Tandis que l'ame discourt de Dieu en son humanité, les goustz luy reviennent et est
contrainte de s'escrier : Helas ! sa gorge est tres souëfve et il est tout a fait a desirer ; tel est mon
Bienaymé, et il est mon tres cher, o filles de Hierusalem. Et si les personnes avec qui elle est
veulent poursuivre et luy disent : Ou est allé vostre Espoux, o la plus belle entre toutes les femmes
? ou s'est il destourné ? et nous le chercherons avec vous122, elle ne veut plus les entretenir ; mays,
reconnoissant qu'encores que les travaux luy fissent sembler que son Espoux se fust retiré bien
loin, neanmoins il ne s'en estoit pas allé, au contraire, il estoit tous-jours demeuré avec elle comme
en son jardin ou comme en un cabinet de parfums ; et, tirant de la plus grande occasion de inerite,
elle peut dire qu'il en a cueilli des lys tres odoriferans : Mon Bienaymé est venu en son jardin, au
parterre des fleurs aromatiques, pour repaistre aux jardins et y cueillir des lys. Et pour ce,
puisqu'elle connoist qu'il a tous-jours esté avec elle et y est encor a present, elle dit : Je suis a mon
Bienaymé, et mon Bienaymé est a moy, qui se repaist entre les lys. Elle n'a plus besoin d'autre
chose que de s'entretenir avec luy, disant : O Seigneur, quand vous pourray je plaire par ma beauté,
douceur, bonne grace, force, innocence, devotion et discretion ? Quand sera ce donq que vous me
dires : O ma bienaymee, tu es belle, douce et de bonne grace comme Hierusalem, forte comme une
armee bien rangee ? Des-ja, Seigneur, vous m'aves monstré par mille signes que mes œillades
vous ont blessé, c'est a dire que mes intentions ne vous sont pas desplaysantes : Destournes vos
yeux de moy, car ilz m'ont fait sortir de moy mesme ; que mes cheveux, c'est a dire mes desirs, sont
purs et netz : Tes cheveux sont comme un troupeau de chevreaux qui paissent sur le mont de
Galaad ; que mes sens, ainsy que troupeaux, ont esté fidellement gardés : Tes dens sont comme
troupeaux de brebis qui sortent du lavoir, chacune ayant deux petitz, et nulle d'icelles n'est sterile
; [32] et que mes forces de la partie concupiscible, desirant le bien et fuyant le mal sans
dissimulation, comme deux joües bien colorees, vous sont cheres et aggreables : Tes joües sont
comme une grenade entamee, sans ce qui est caché au dedans. 123
Mais, o Dieu, dit l'ame, des-ja ci devant vous m'aves loüee de presque toutes ces parties ;
je desirerois maintenant m'advancer et surpasser en devotion beaucoup d'autres ames devotes, ou
qui pensent l'estre, et que vous peussies me dire : Il y a soixante reynes et quatre vingt concubines,
et des jeunes filles sans nombre, mays ma colombe est toute seule. Que sçay je ? peut estre
desireray je trop ; je voudrois que vous me peussies appeller ma parfaitte. Je voudrois, en ma
nature qui est ma mere, avoir quelque rareté et que l'on en dist : Elle est unique a sa mere, elle est
choysie a celle qui l'a engendree. Je voudrois que l'on peust encores dire : Voyla celle que les filles
ont veuë et ont dit estre tres heureuse ; les reynes et les concubines l'ont loüee de son innocence,
estant sortie de la nuict du péché. Qui est celle ci qui marche en devotion, comme fait l'aurore
quand elle se leve ; belle comme la lune ; de prudence et bonne eslection, choysie comme le soleil
; et finalement d'invincible force, terrible comme les escadrons d'une armee bien rangee124 ?
Mais, outre cela, l'ame adjouste : Ou aves vous esté, mon Seigneur, qu'il m'a semblé que
vous m'avies laissee, quand le travail et la fatigue ne me permettoit pas que j'eusse du goust ?
J'ay esté, respond il, en toy mesme qui es mon jardin, et y ay esté avec plus de prouffit pour toy
que je n'y eusse esté si, du premier coup, je t'eusse donné des goustz, te donnant occasion de
121 Vers. 14, 15.
122 Vers. 17.
123 Cap. VI, 1-6.
124 Vers. 7-9.
41/332

5.2 Page 42

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meriter, dont j'ay tiré de mon jardin un plus grand fruict de merite125 : Je suis descendu au jardin
des noyers pour voir les pommiers des vallees, et regarder si la vigne estoit fleurie et si les
grenades avoyent germé.
Que beny soyes vous donques, o Seigneur, respond l'ame, qu'en telle façon, me faisant
accroire que vous esties absent, vous m'aves donné occasion de meriter, et m'aves fait faire en peu
de tems plus de chemin que les carrosses [33] des princes ; et par ce, puisque je n'ay sceu que vous
esties avec moy, je peux dire que mon ame m'a troublee a cause des chariotz d'Aminadab126.
V. Cinquiesme empeschement : les respectz humains
Quand quelqu'un arrive a quelque maniere de vivre rare et non accoustumee, non seulement
chacun le loüe, mays il semble que chacun desire de le voir, et on crie apres l'ame : Reviens,
reviens, o Sulamite, reviens, reviens, affin que nous te voyons127.
Et ce n'est pas asses que la personne spirituelle extenue ce qui est en soy : Que voyes vous
en ceste Sulamite, sinon compaignies d'armees ? car, ce nonobstant, ceux qui la voyent, la louent
de ses pieds et façons de marcher, c'est a dire de l'obeyssance avec laquelle ilz voyent que ceste
ame garde les commandemens de Dieu : Que tes pas sont beaux en leur chausseure, o fille de
prince ! de sa chasteté spirituelle, qui fait reconnoistre que Dieu y coopere : Les jointures de tes
cuisses sont comme joyaux mis en œuvre de la main d'un bon ouvrier ; d'une riche pauvreté, qui
n'a jamais besoin d'aucune chose : Ton nombril est comme un hanap rond, qui n'a jamais besoin
de breuvages ; des jeusnes qui, remplissans le ventre de pain seulement, couronnent l'ame de beaux
et riches lys : Ton ventre est comme un monceau de froment environné de lys ; de l'estude des deux
Testamens : Tes deux mammelles sont comme deux faons jumeaux d'une chevre ; de la force : Ton
col est comme une tour d'ivoyre ; de la prudence : Tes yeux sont comme les piscines d'Hesebon qui
sont a la porte de la fille de la multitude ; d'une justice exacte : Ton nez est comme la tour du Liban
qui regarde vers Damas ; de la maistrise des affections et conformité a la volonté de Dieu, conneüe
par les canaux de la revelation : Ton chef est comme le mont Carmel, et tes tresses [34] comme
pourpre royale qui n'est pas encor tiree de la teinture128.
Bref, ceste ame est la butte des langues qui luy disent, la loüant : Que tu es belle, que tu es
de bonne grace, tres chere, en delices. Mais elle, croissant tous-jours en charité et faisant fruictz
parmy le prochain, elle est comme la palme et la vigne : Ta stature et ton port est comme d'une
palme, et tes mammelles sont pleines comme grappes de raysins. Les necessiteux, ou d'esprit ou
de cors, disent : Je monteray sur le palmier et prendray de ses fruictz, et tes mammelles seront
comme grappes de raysins ; et pour ses bons exemples on luy dit : L'odeur de ta bouche est comme
celle des pommes ; pour les bonnes paroles : Helas ! dit on, ta gorge est comme un vin tres bon a
boire, digne de mon Espoux, et d'estre savouré de ses levres et de ses dens129. Bref, voyla une
grande inquietude a l'ame devote.
Remede : La solitude
O qu'il est donq bon de se retirer en la solitude ou l'ame peut dire : Moy a mon Bienaymé,
et son regard est dessus moy ; viens, mon Bienaymé, sortons aux chams, demeurons au village130.
Or, les fruictz de la solitude sont quattre.
Premierement, on se resveille mieux a l'examen de la conscience : Levons nous du matin
pour aller aux vignes ; voyons si la vigne est fleurie, si les fleurs porteront du fruict, si les grenades
125 Cf. Introd. a la Vie dev., Part, IV, ch. IV.
126 Vers. 10, 11.
127 Vers. 12.
128 Cap. VII, 1-5.
129 Vers. 6-9.
130 Vers. 10, 11.
42/332

5.3 Page 43

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sont fleuries ; secondement, on y fait une plus entiere resignation de la faculté concupiscible et de
ses desirs : La, je te donneray mes mammelles ; tiercement, la devotion croist : Les mandragores
ont rendu leur odeur ; quatriesmement, on y presente plus humblement a Dieu nos petitz merites
passés et presens : J'ay serré pour toy, o mon Bienaymé, au dedans de nos portes, toutes sortes de
fruictz, vieux et nouveaux131. [35]
Cinquiesme degré
La consideration de Dieu en luy mesme, mays comme Dieu
Mays entre les fruictz de la solitude, cestuy ci est eminent, qu'on y peut considerer plus
aysement Dieu comme Dieu : ce qui fait user a l'Espouse de ces deux paroles, seul et hors ; c'est a
dire, hors de toute creature : Qui te donnera a moy, mon frere, sucçant les mammelles de ma mere,
et que je te trouve dehors, tout seul ? Consideration qui fait saintement affoler les hommes, les fait
danser devant l'Arche132 ; d'ou vient que jusques a ce que l'ame soit arrivee a l'affection du mespris
de soy mesme, elle a tous-jours quelque honte : c'est pourquoy elle desire la solitude, affin, dit elle,
que je le bayse sans que personne nous voye133.
Consideration qui est un arrhe de la jouissance du Ciel, dont il est advis a l'ame qu'elle y
soit des-ja, disant : Je te prendray134, je te verray face a face135. O Dieu, quand nous serons en la
vraye mayson et en la vraye chambre de la nature humaine, qui est au Ciel, quand je te meneray
en la mayson de ma mere et en la chambre de celle qui m'a engendré136, la je verray tout ce qui
appartient a mon bonheur comme en un miroüer137 ; la tu m'enseigneras, et quand tu auras tiré de
moy, pour ma felicité, le vin de la vigne et le moust des grenades, la gloire essentielle et
accidentelle (et je te donneray d'un breuvage de vin composé, et du moust de mes grenades), et
voyla les goustz qui arriveront, voyla les extases, voyla les sommeilz des puyssances ; de façon
que l'Espouse sacree demande des oreillers pour dormir : qu'il mette sa main gauche dessous ma
teste, et qu'il m'embrasse de sa main droitte. L'Espoux aussi, de son costé, tasche de faire qu'elle
ne soit point esveillee : Je vous adjure, filles de Hierusalem, que vous n'esveillies ni facies esveiller
ma bienaymee jusques a ce qu'elle le veuille138. [36]
131 Vers. 12, 13.
132 Cf. II Reg., VI, 14-16.
133 Cant., VIII, 1.
134 Vers. 2.
135 I Cor., XIII, 12.
136 Cant., III, 4, VIII, 2.
137 I Cor., XIII, 12.
138 Vers. 2-4.
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5.4 Page 44

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VI. L'ame avant surmonté tous les empeschemens, n'a plus besoin de remede mays demeure
absorbee et unie en Dieu par une parfaitte devotion
En fin, l'ame est parvenue a une si grande perfection de devotion que nul playsir du monde
ne l'esmeut, nul fantosme ne la destourne, nulle louange ne l'affoiblit, nul travail ne la fait craindre,
nul respect humain ne la retient ; mais, a la veüe de tout le monde, elle caresse librement son
Espoux et danse devant l'Arche139, ne se souciant pas que la sagesse du monde, apres luy avoir dit
: Qui est celle ci qui monte du desert, affluente en delices ? la suive encor pour la reprendre de ce
qu'elle se tient appuyee sur son Bienaymé. Au contraire, elle parle tous-jours avec son Espoux du
grand signe d'amour qu'il donna la ou il avoit esté le plus offencé, et qu'il resoulut de mourir pour
nous apres qu'Adam et Eve luy eurent desobey : Je t'ay esveillee dessous un pommier ; la, ta mere
a esté corrompue, la, celle qui t'a engendré a esté violee140.
L'ame ne trouvera plus aucune difficulté aux travaux, car rien n'est difficile a l'amour
qu'elle a gravé profondement en son cœur, et mesme es actions exterieures : Metz moy comme un
cachet sur ton cœur et comme un sceau sur ton bras ; si bien que l'amour combat la mort : L'amour
est fort comme la mort ; l'enfer ne la peut espouvanter : La jalousie est dure comme l'enfer. Les
flammes et les feux sont glacés au prix de son amour : Ses lampes sont lampes de flammes et de
feux ; la mer ne les sçauroit esteindre : Toutes les eaux ne sçauroyent esteindre la charité, ni tous
les fleuves ne la noyeroyent pas. Rien ne luy est comparable : Si un homme vouloit donner toute
la substance de sa mayson pour la dilection, il n’en feroit cas nomplus que de rien141.
Quant aux louanges qui luy sont donnees, l'ame ne s'en soucie point, pour ce qu'elle dit
dedans soy : Quelles sont ces ames impàrfaittes qui, n'ayans aucun bien propre, [37] veulent
s'embellir de parures externes ? Mes petites seurs, c'est a dire les ames imparfaittes, sont celles qui
doivent penser a cela, car elles n'ont point de mammelles d'elles mesmes, de propres vertus et
merites : Nostre petite seur n'a point de mammelles ; que ferons nous a nostre petite seur au jour
qu'il faudra parler a elle ? En elles, on peut suppleer le defaut avec louanges estrangeres, tout
ainsy que si on couvroit d'argent un mur crevé et corrompu, et de cedre un huys qui seroit pourry
: Si c'est un mur, bastissons dessus des boulevars d'argent ; si c'est un huys, renforçons le d'ais de
cedre ; mays, moy bien heureuse, dit l'ame, je me soucie fort peu de plaire aux hommes142, mon
Espoux m'ayant faitte comme un mur tel et comme une tour telle, que je suis fort playsante et
aggreable : Je suis un mur, et mes mammelles comme une tour, dont je suis faitte, trouvant repos
et paix devant luy143.
Suyvent les choses sensibles et temporelles, contre lesquelles l'ame parfaitte, en l'orayson
mentale a pris une telle habitude que, les tenant pour viles et de petit prix en comparayson de son
riche object, elle n'en fait estime que tant qu'elles peuvent modestement servir a la necessité. Au
reste, nul soin d'elle mesme ne la peut destourner : peu de chose, dit l'ame, est necessaire a qui
veut vivre en la paix de Nostre Seigneur et avec modestie ; mille pieces d'argent ou quelque autre
grand prix est chose de trop petite valeur : L'homme qui a la paix en soy a une vigne en laquelle
sont des peupliers ; il l'a baillee a des gardes, et on luy rend pour les fruictz d'icelle mille pieces
d'argent. Et moy, dit l'ame, je n'ay point affaire de tant de choses : Ma vigne est devant moy autant
que mille pacifiques ; au contraire, je veux encor donner deux cens pour aumosne a ces pauvres,
qui, avec leurs oraysons, nous gardent nos biens : et deux cens a ceux qui gardent les fruictz
d'icelle144 ; au reste, estant abstraitte de toutes les choses sensibles, je ne veux que pas une d'elles
puisse me distraire ou me troubler.
Et finalement, si nous voulons passer aux playsirs mondains : Je sçay, dit l'ame, que mon
Espoux ne veut endurer des compaignons, et qu'avec les consolations qu'il me donne [38] il ne
139 Vide pag. præced.
140 Vers. 5.
141 Vers. 6, 7.
142 Galat., I, 10 ; I Thess., II, 4.
143 Vers. 8-10.
144 Vers. 11, 12.
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5.5 Page 45

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veut pas que je mesle les consolations qu'autres que luy me pourroyent donner ; ains il me
commande que, me resveillant, et me resignant du tout a luy avec une claire et ouverte protestation,
je renonce a tous autres espoux : Toy qui habites es jardins, tes amys t'escoutent ; fais moy ouÿr ta
voix. Et partant, me voyla prompte a luy obeyr. Non plus, le monde ni ses playsirs, non plus aucune
chose mortelle ; o Dieu, mon Dieu, vous seul estes mon Bienaymé, vous seul estes tout mon bien,
c'est vous seul que je cherche : Fuys, c'est a dire viens, mais accours legerement, mon Bienaymé,
et sois semblable a un chevreuil ou a un faon de cerf sur les mons des bonnes senteurs145. En
laquelle derniere protestation et resignation parfaitte de l'ame en Dieu consiste la fin de l'orayson
mentale et le plus haut degré de la spiritualité, qui est cette grande union de l'ame avec Dieu par
devotion.
Et pour conclure, il ne nous reste rien a faire qu'a prier Nostre Seigneur qu'il veuille, par sa
misericorde, nous tirer a soy par ces degrés d'orayson mentale, a ce qu'estans des-ja unis avec luy
en ce monde par grace, nous le soyons encor par devotion, affin qu'apres nostre mort nous le
puissions estre eternellement par gloire ; et en toutes ces saintes unions, qu'il nous bayse, ce divin
Espoux, d'un bayser de sa bouche146 sacree. Amen.
APPROBATION DES DOCTEURS
Nous soubs-signez, Docteurs en Theologie de la Faculté de Paris, Maison et Societé de
Sorbonne, certifions avoir leu et examiné un petit Livre intitulé : Declaration Mystique sur le
Cantique des Cantiques, composé par le, Bien-heureux François de Sales, Evesque et Prince de
Geneve, dans lequel n'avons rien trouvé qui soit contraire à la Foy Catholique : ains l'avons jugé
digne d'estre donné au public, pour la consolation et profit des ames spirituelles et esclairées dans
la vie intérieure.
En foy dequoy nous avons signé à Paris, ce 24. Octobre mil six cent quarante-deux.
L. BOUGRAIN.
_____
I. HOBIER. [39]
145 Vers. 13, 14.
146 Cap. I, 1.
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5.6 Page 46

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III. Fragments sur les vertus cardinales et morales
1614
_____
Avertissement des Editeurs
L'Etude sur les Vertus, que nous allons reproduire, fut imprimée pour la première fois par
Blaise, en 1833, à la fin du tome XVI des Œuvres de saint François de Sales, Opuscules inédits.
Vivès et Migne l'ont donnée à leur tour : l'un au tome III, p. 7, le second au tome VI, col. 8. Un
feuillet conservé à la Visitation du Mans fut inséré par l'abbé de Baudry dans ce même volume,
col. 42-44 ; on en trouvera le texte ci-après, pp. 81-83. Plusieurs passages sont cependant restés
inédits jusqu'ici ; nous les signalerons sur place.
Dans la première pensée du saint Auteur, ce travail devait faire partie du Traitté de l'Amour
de Dieu ; il suffit, pour s'en convaincre, de comparer le fragment qui figure aux pp. 44-46, avec le
chapitre VIII du Livre XI : on verra que ce fragment est un brouillon des pp. 262, 263 de notre
tome V. Pour cette raison, les éditeurs donnèrent à l'Appendice du Traitté le passage en question,
et un autre qui se voit au même volume, pp. 486, 487. Mais aujourd'hui, après nouvel examen,
nous croyons devoir publier en entier ce qui nous est parvenu du Manuscrit sur les Vertus, et
répéter pour cela les deux fragments que nous venons de signaler, d'autant plus que le Saint y fait
plusieurs allusions. Ainsi, à la p. 54 ci-après, il parle du « second fleuve » ; donc, il avait d'abord
parlé du premier. Et plus loin (p. 58) il dit : « Elle » la dévotion « nous fait particulierement
faire la sainte offrande, donation et dedicace de nous mesme a la divine Majesté, que nous avons
ci dessus marquee ; » évidemment, il entend renvoyer au morceau qui se lit au tome V de notre
Edition, p. 486, et qui est de nouveau donné ici, p. 44.
On ne lira pas sans intérêt, peut-être aussi avec une sorte de pieuse indignation, une partie
de l'Avertissement que Blaise a mis en tête de ce « Fragment » et que les éditeurs suivants ont
reproduit en entier. Il est dû à M. Jules Gossin, vice-président en 1824 du tribunal de première
instance de la Seine, ensuite conseiller à la cour royale de Paris, et rentré au barreau depuis la
révolution de 1830.
« En 1824, un magistrat de Paris, » dit-il, « fut obligé de voyager [40] pour cause de santé.
Se trouvant à Annecy dans les premiers jours de juillet, il eut l'honneur de présenter ses respects à
M. de Thiolaz, alors évêque de cette ville, pour lequel il étoit porteur d'une lettre de
recommandation, accompagnée d'aumônes offertes pour faciliter à ce prélat la continuation de la
nouvelle église destinée à recevoir les reliques de saint François de Sales et de sainte Chantal.
Encouragé par l'excellent accueil de M. de Thiolaz, ce magistrat lui exprima le désir de
posséder ou une lettre de son illustre et vénérable prédécesseur, ou le moindre fragment d'un de
ses écrits. M. l'évêque ne rejeta pas cette prière, mais demanda quelque temps pour la satisfaire,
attendu la rareté toujours croissante des écrits originaux tracés de la propre main du Saint. De
retour à Paris, le voyageur, impatient de posséder le trésor qu'on lui avoit fait espérer, prit la liberté
d'écrire à M. de Thiolaz pour rappeler à sa mémoire une promesse qui avoit rendu son ancien hôte
si heureux. Par suite de cette lettre, et le 6 février 1825, arriva à Paris, avec la lettre la plus aimable
du prélat, un fragment notable et autographe de saint François de Sales ; il étoit composé de
quatorze feuillets in-folio, écrits de chaque côté, avec ces ratures fréquentes qui indiquent la
première minute ou le brouillon d'un ouvrage sérieux et profondément médité.
Le commencement et la fin du cahier manquoient. Suivant M. de Thiolaz, ce précieux
fragment, alors récemment découvert dans une vieille malle avec d'autres papiers, devoit être une
partie des toutes premières ébauches du célèbre Traité de l'Amour de Dieu. Toutefois, M. l'évêque
n'affirmoit rien de positif à cet égard, et se bornoit à de simples conjectures ; il finissoit par prier
son correspondant de faire servir, s'il le pouvoit, ce cahier incomplet, à la gloire du Saint, en le
distribuant par morceaux à des personnes qui, jalouses de la possession de si précieux écrits,
reconnoîtroient sans doute ce présent par quelques dons destinés à l'achèvement de la nouvelle
46/332

5.7 Page 47

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église d'Annecy.
Le possesseur du fragment ne s'en regardant plus dès lors que comme le dépositaire, ne
tarda pas à remplir les vues du donateur.
Des portions notables de l'autographe enrichirent successivement les séminaires
d'Avignon, de Viviers et de Verdun. D'autres satisfirent le pieux empressement de mesdames
Dambray, de la Tour du Pin Montauban, de M. de Blanquart de Bailleul, aujourd'hui évêque de
Versailles, de M. Bordier, ancien chef de la division des secours et pensions de la liste civile, et de
M. Collette de Baudicourt, maître de forges à Marnaval, près St-Dizier (Haute-Marne). D'autres
fragments, mais d'une dimension beaucoup moins considérable, furent offerts à quelques amis.
Dans l'été de 1825, le magistrat dont il s'agit eut la satisfaction d'envoyer à Annecy le produit de
sa collecte. »
A plus d'un siècle de distance, la plupart des propriétaires des fragments autographes ont
changé ; nous les signalerons à mesure que nous les rencontrerons dans les pages qui vont suivre.
[41]
La date de 1614 assignée à cet écrit est certaine. Saint François de Sales voulait y insérer
les « Meditations des offrandes, prises des Regles de la Visitation ; » or ces Méditations sont
enchâssées dans le Manuscrit des Constitutions daté de juillet-septembre 1613 (voir le tome
précédent, notes (1487), (2114), pp. 278, 422) : le présent travail n'est donc pas antérieur. D'autre
part, la première rédaction du Traitté de l'Amour de Dieu fut achevée vers la fin de 1614 (voir
notre tome IV, Introduction, pp. XI, XII) ; il convient, par conséquent, de ne pas reculer au delà
de cette année celle des pages qui nous occupent. Enfin, il y a, aux pp. 60-62 ci-après, un passage
touchant les vœux de Religion et la simple Oblation qui rappelle la Præface pour l'instruction des
ames devotes donnée au tome précédent, pp. 291-321 ; ce qui persuade que cet écrit sur les Vertus
est de la même époque.
Les références marginales en italiques distinguent celles qui ont été mises par le Saint. [42]
_____
[Quelques moyens pour transformer nos œuvres par la charité]
…………………………………………………………………………………………………….
147 de sorte que mesme ce n'est pas chose resolüe si l'amitié est vertu, bien que je le croye, quand
elle est un peu bien formee et que sa communication est honneste.
Apres tout le discours de la force de la charité pour l'annoblissement des vertus, il faut
mettre la methode d'employer la charité a cela, et il faut mettre les Meditations des offrandes,
prises des Regles de la Visitation. Puis, dire qu'il faut donques faire cet exercice tous les ans, la
protestation tous les moys, l'exercice du matin tous les jours, et parmi la journee plusieurs
eslancemens de cœur et plusieurs oraysons jaculatoires148, par lesquelles le feu de la charité
s'enflamme de plus en plus et brusle comm'en holocauste toutes nos actions a la gloire de Dieu ;
et s'accoustumer a faire toutes choses au nom de Dieu149, comme est de travailler pour Dieu, saluer
pour Dieu, aymer pour Dieu, servir pour Dieu, estant impossible qu'une personne fort affectionnee
a Nostre Seigneur ne puisse dire en verité, que comme sa personne est a Dieu, aussi sont toutes
ses actions : les pecheurs le disent aussi, mays ilz mentent, ou les affectionnés disent la verité. Ces
oraysons jaculatoires peuvent servir a cela : Hé, Seigneur, je suis vostre150 ; Mon Ami est mien, et
moy je suis sienne151 ; Ma vie c'est Jesus Christ152 ; O Seigneur, ou que je ne face rien, ou que tout
147 Ce fragment est donné d'après l'édition Blaise (1833), teme XVI ; il a été déjà reproduit, sauf les trois premières
lignes, dans l'Appendice du Traitté de l'Amour de Dieu, tome V, pp. 486 (lignes 21-25) et 487.
148 Cf. Tr. de l'Amour de Dieu, liv. XII, ch. IX (tom. V huj. Edit., p. 336).
149 I Cor., X, 31 ; Coloss., III, 17.
150 Ps. CXVIII, 94.
151 Cant., II, 16.
152 Philip., I, 21.
47/332

5.8 Page 48

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soit a vostre gloire ; et, Gloria Patri et Filio ; Non nobis Domine, non nobis153. Cela soit pour les
actions frequentes, ordinaires et qui ne peuvent estre preveües, car celles qui peuvent estre
preveiies il les faut dedier specialement et purifier l'intention, et si elles durent, renouveller
souvent, de peur du change. O que bienheureux sont ceux qui sçavent faire le despouillement de
soy mesme duquel nous avons parlé ci dessus154 ! car par ce moyen ilz n'ont qu'a faire un petit
souspir ou un petit regard en Dieu, pour tesmoignage [43] qu'ilz confirment leurs despouillemens
et qu'ilz ne veulent rien qu'en Dieu et pour Dieu, et qu'ilz ne s'ayment eux mesmes, ni chose du
monde, que pour cela.
Comme l'amour employe les vertus cardinales, et premierement la prudence
155 Un fleuve sortoit du lieu de 156 delices pour arrouser le Paradis terrestre, qui de lâ se
divisoit ou separoit en quatre chefs ; Gen. 2 157. Or l'homme, sans doute, est le paradis du Paradis
mesme, puisque le Paradis terrestre n'estoit fait que pour estre le sejour de l'homme, comme
l'homme a esté fait pour estre le sejour de Dieu. En ce second paradis mystique, Dieu a fait sourdre
et jaillir le fleuve de la rayson et lumiere naturelle, de laquelle il est dit : La lumiere de vostre
visage est marquee sur nous158 ; et ce fleuve que Dieu fait sourdre pour arrouser tout l'homme en
toutes ses facultés et exercices 159 se divise en quatre chefs, selon les quatre parties ou regions de
nostre ame, qui produisent les actions humaines et libres. Car sur l'entendement prattique, la
lumiere naturelle respand le 1. fleuve, de la prudence, qui incline nostre entendement a 160
veritablement discerner le mal qui doit estre evité, d'avec le bien qui doit estre fait ; [le 2. de] la
justice, qui regne principalement en la volonté, puis qu'elle n'est autre chose qu'une perpetuelle et
constante volonté de rendre a chacun ce qui luy est deü ; le 3. fleuve est celuy de la temperance,
qui gouverne l'appetit de convoitise ; le 4. celuy de force, qui gouverne l'appetit irascible.
161 Et puis ces quatre fleuves se separent en plusieurs autres, affin que toutes les actions
humaines soyent bien addressees par la rayson a l'honnesteté et felicité naturelle. Or, outre cela,
Nostre Seigneur voulant favoriser [44] l'homme pieux, affin de rendre le paradis du cœur humain
plus aggreable et delicieux, il fait sourdre sur la cime de la partie superieure de nostre ame une
fontaine surnaturelle que nous appelions grace, composee de la foy, esperance et charité, qui
espanche ses eaux sur toute nostre ame et l'arrouse tout entierement, la rendant gracieuse a
merveilles et grandement aymable a sa divine Majesté. Et non seulement cela, mais en vertu de la
charité qui la rend active, elle respand sur les puissances de nostr'ame certaines vertus qui sont de
mesme espece, ou au moins toutes semblables aux quatre vertus cardinales, et pour cela elles
portent leurs noms : sur l'entendement elle pousse une prudence sainte, sur la volonté une justice
sacree, sur l'appetit de la convoitise une temperance religieuse, et sur l'appetit irascible une force
devote ; si que par ces quatre fleuves toutes les actions humaines sont addressees par la charité a
l'honnesteté et felicité surnaturelle, qui consiste en l'union avec Dieu.
Et d'autant que ces vertus qui fluent de la charité comme de leur source sont superieures
aux quatre vertus cardinales, si elles les rencontrent en quelqu'ame elles les reduysent a
l'obeissance de la charité, se meslent avec elles et les perfectionnent, comme le vin perfectionne
153 Ps. CXIII, 1.
154 Tr. de l'Amour de Dieu, liv. IX, ch. XVI (tom. V, p. 160).
155 Vide Tr. de l'Amour de Dieu, liv. XI, ch. VIII, et tom. V hujus Edit., pp. 483-485.
156 de [volupté]
157 Vers. 10.
158 Ps. IV, 7.
159 et exercices [s'estend en quatre parties...]
160 qui nous porte a [bien operer...]
161 [L'alinéa suivant est emprunté à l'édition Blaise, pp. 13, 14 ; la fin du fragment se conservait en 1894 à la Visitation
de Meaux, avec le commencement du chapitre.]
48/332

5.9 Page 49

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l'eau avec laquelle il se mesle. 162 Que si elles ne treuvent point de vertus naturelles en l'ame ou la
charité les produit, elles suppleent a leur defaut ; y ayant cette difference entre le meslange du vin
et de l'eau et celuy des vertus infuses et acquises, que le vin seul est meilleur que l'eau, ou les
vertus infuses estans seules, ne sont pas si bonnes comme quand elles sont meslees avec les
acquises, la grace ne destruisant point la nature, ains la perfectionnant sans qu'elle perde rien de sa
force. La comparayson estant meilleure de l'odeur des roses, sur laquelle les autres odeurs, en
l'affinant s'affinent elles mesmes, quoy que plus excellentes qu'elle ; [45] dont on employe ou les
roses, ou l'eau rose, ou le jus de rose en presque toutes les eaux odorantes : car ainsy les vertus
morales, saintes, perfectionnent les vertus naturelles, et en les perfectionnant s'en affinent elles
mesmes et agissent plus excellemment avec icelles que sans icelles. Ainsy la charité treuvant, par
exemple, saint Ambroyse si vertueux, elle le rendit soudain extremement parfait ; et treuvant …..
………………………………………………………………………………………………….......
163 Or, la prudence a troys degrés : le premier est l'eubulie, l'habilité de treuver des bons
advis et conseilz es affaires ; le 2. synesis, l'habileté de bien juger 164 sur la diversité des advis,
selon les loix 165, façons et coustumes establies entre les hommes ; le 3. gnome, un'habileté de bien
juger, discerner ou choysir selon la rayson, le droit et l'equité 166 contre les paroles et le sens des
loix167, par la consideration et connoissance de l'intention et sentiment du legislateur (Ipsæ etiam
leges cupiunt168, etc.) et pour des motifs extraordinaires, pour lesquelz, si le legislateur les eut
præveu, il eut fait un'exception a la loy ; la varieté des occurrences humaines estant si grande que
jamais on ne peut prescrire l'ordre convenable pour toutes.
(Il faut parler de la prudence de la chair et de la prudence de l'esprit169, et descrire l'une
et lautre, et les degrés de l'une et de lautre. Il faut recourir a la marque*, page 3. de lautre cayer
170.)
……………………………………………………………………………………………………...
ou 171 ………………………………………………………………………………………….. [46]
quelcomque p ………………………………………………………………………………………
portee de diverses passions [emmi lesquelles on ne saurait ni bien] juger, ni bien resoudre. Les
advis [d'un] ………, [d'un] avare, d'un voluptueux ont accoustumé [d'être fort] panchans a la
faveur de la passion qui domine ; et l'amour, comme estant le poids et contrepoids de l'horologe
de nostre ame, il nous fait juger en faveur du bien quil affectionne. Que si c'est l'amour de charité,
il nous fait juger en faveur du vray bien ; c'est pourquoy il employe saintement la prudence et la
gouverne. (La proposition est notable : l'amour fait juger.) Le peintre Androcides le tesmoigna
ayant a peindre les fameux escueilz de Sylle et Caribde ; car il employa tout son art a representer
au naturel, apres le vif, les poissons autour de ces bancz, par ce quil en estoit fort friand, et le reste
il le peignit fort grossierement172. Ainsy, quand nous sommes passionnés, nous employons toute
nostr'industrie en faveur de nostre passion, et par ce moyen la prudence est convertie en ruse,
finesse et tromperie.
……………………………………………………………………………………………………...
162 [En marge du Ms. :] [La charité, comme] vertu eminente, supplee a toutes les vertus, comme le soleil par sa lumiere
remplit toutes estoiles, en sorte qu'on peut dire que la lumiere de la lune ell'est ou lumiere de la lune ou lumiere du
soleil ; ainsy on peut dire que toute vertu est amour, comme St Augustin dit, que je cite ci apres.
163 [Les deux fragments qui suivent sont inédits. Ils représentent le tiers d'un feuillet autographe dont la partie
supérieure a été coupée. En 1894, l'original appartenait à M. Charles Tresvaux du Fraval, propriétaire à Laval.]
164 juger [des choses de...]
165 les loix [ordinaires et]
166 et l'equité, [par des considerations mesme]
167 Aristolelis Opera, Ethica Nicomachæa, l. VI, cc. IX-XI.
168 Les lois même désirent [d'être bien comprises, bien appliquées].
169 Rom., VII, 6.
170 [Ce « cayer » n'a pas été retrouvé.]
171 [Ici et dans la suite de notre texte les points de suspension remplacent des lignes ou des mots disparus dans la
mutilation de l'Autographe. Les mots qu'on a pu suppléer d'après le sens sont insérés entre crochets.]
172 Plutarc., Quæst. convival., l. IV, quæst. II, 3, et quæst. IV, 2.
49/332

5.10 Page 50

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173 Et en fin, la prudence requiert en nous la vivacité et habileté d'esprit, la promptitude a
bien remarquer et apprendre, la memoire des choses passees, l'intelligence des presentes, la
prouvoyance des futures, le discours pour bien tirer consequence d'une chose a une autre, la
curieuse [perception] des circonstances et des choses qui sont autour de nous qui peuvent ou nuire
ou favoriser nostre dessein, et la prouvoyance pour se garder des inconveniens et se prevaloir des
occasions.
Or la prudence de la chair porte nostre entendement a bien observer ce quil faut faire pour
jouir des biens utiles et delectables a la vie charnelle, et pour eviter les empeschemens contraires
a cette jouissance. Et parce que la plupart des hommes estime ces biens la des vrays biens, et que
par iceux on est rendu honnorable aux yeux des enfans [47] du monde, on donne aussi le nom de
prudens et de vertueux a ceux qui sont prudens selon la chair. Il y a des vices semblables aux
vertus, dit saint Augustin174 ; comme l'affeterie et malice est semblable a la prudence, encor qu'elle
soit un vice. Or, les degrés de la prudence de la chair sont : l'astuce, qui n'est autre chose qu'une
habileté pour faire, imperceptiblement et par des moyens inconneus ou conneus, reuscir les
mauvais desseins (Ne cheminans pas en astuce, dit le saint Apostre, II Cor., IV175, apres qu'il avoit
dit : Ayant rejette les cachettes de honte, c'est a dire honteuses, parce que l'astuce use de certaines
cachettes et secrettes menees, lesquelles estans descouvertes sont honteuses a ceux qui les
employent, leur ostent tout credit et authorité) ; le dol ou tromperie, qui est l'effect et execution de
l'astuce, [et] s'appelle fraude quand il est commis par voye d'oeuvre ; l'empressement apres les
biens mondains et la sollicitude des moyens de vivre a l'advenir.
Et il ne se peut dire, ma chere Philothee, combien cette prudence de la chair est subtile,
combien d'inventions elle a pour se fourrer dans les cœurs des mortelz, combien de pretextes et de
moyens. On se moque de la simplicité, et chacun veut estre estimé prudent ; on colore cette ardeur
qu'on a de nourrir les commodités de la chair, par mille moyens. Ce serpent se fourre ça et la dans
la terre, il se glisse partout ; quand il ne peut mordre, il pique de la queue ; il va en l'eau et en la
terre, il va tous-jours en biaysant ; les gens voués a Dieu n'en sont pas exemptz, ni les Israelites au
desert176. Ces prudences sont maintefois emmi les cœurs religieux, comme Pline dit177 que vers les
Indes, au royaume de Suzerat, il y a une herbe d'odeur pretieuse, qui neanmoins est toute couverte
de petitz serpentaux et extremement veneneux ; car vous verres, Philothee, maintes personnes
religieuses et devotes qui ont une prudence extremement active et soigneuse pour les proces, pour
les honneurs, pour les rangs, pour amasser et, en somme, sous pretexte de certains devoirs
imaginaires, de certain zele sophistiqué et de certaine charité artificieuse.
Or vous connoistres si la prudence est prudence de la chair, en ce qu'elle eschauffe et donne
des ardeurs cuysantes [48] et pressantes : ainsy, les serpenteaux qui piquoyent les Israelites es
desertz, estoyent des serpens enflammés178, c'est a dire desquelz les piqueures donnoyent des
inflammations mortelles a ceux qui en estoyent blessés. 179 Mays la prudence de l'amour sacré est
douce, tranquille, et tellement meslee de simplicité qu'il n'y a rien en elle d'empressé ni d'affecté ;
et en somme, qui veut guerir de toutes les ardeurs du soin, de la sollicitude immoderee et de la
precipitation, il faut regarder l'image du serpent eslevé au desert180, c'est a dire Nostre Seigneur,
qui n'est pas pecheur, mays qui porte l'image du pecheur181, sur la croix, et estre prudent de sa
173 [Ce qui suit, jusqu'à la p. 50, lig. 25, est donné d'après le texte de Blaise, tome XVI, pp. 15-18.]
174 Lib. IV contra Julian., c. III [19, 20].
175 Vers 2.
176 Num., XXI, 6.
177 Hist. nat., l. XII, c. VIII.
178 Num., XXI, 6.
179 [Une partie de cette phrase, jusqu'à « d'empressé », est insérée dans un recueil d'extraits des premiers manuscrits
du Traitté de l'Amour de Dieu, fait par sainte Jeanne-Françoise de Chantal et relié dans un volume in-12 de la Vie...
de S. Catherine de Gennes (Paris, 1610), conservé à la Visitation de Trévise. (Voir notre tome IV, p. XC, et la note
(133) de la même page.) On trouvera aux pp. 50, 51, 52, 54 d'autres fragments du même recueil.]
180 Ibid., v. 9 ; Joan., III, 14.
181 Philip., II, 7 ; Heb., IV, 15.
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6 Pages 51-60

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6.1 Page 51

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divine prudence182.
183 L'amour ne tendant qu'en Dieu a une prudence simple, innocente et toute pure, car en
toutes ses affaires il met sa confiance en son Sauveur qui le deslivrera184 ; il ne mesprise pas les
moyens humains, mays il ne se confie nullement en iceux. L'amour employe la prudence, mays il
la tempere tellement, qu'il ne veut point qu'elle le distraye ni divertisse, parce qu'il ne veut estre
prudent que pour mieux aymer, et parce que l'amour divin n'est pas comme l'amour humain.
L'amour humain va par tout cherchant des moyens pour obtenir ce qu'il ayme, et parce que les
moyens sont divers et que bien souvent il les ignore, il s'empresse et a une sollicitude incroyable :
il veut de l'argent pour paroistre, il veut des belles paroles, il veut des belles contenances, il veut
des reputations, il craint les corrivaux. Mais l'amour divin sçachant que pour obtenir ce qu'il ayme,
le principal moyen est d'aymer, il s'amuse simplement a bien aymer, sçachant que c'est toute sa
finesse, avec laquelle il doit gaigner son object : c'est pourquoy il est simple et sage ; comme vous
voyes Magdeleyne, [49] laquelle, avec cette unique attention au Sauveur, fait mieux ses besoignes
que sainte Marthe avec son empressement185. Ainsy Eliezer, qui avoit un bon maistre, ne va point
cherchant de ruse ni d'astuces pour estre salarié, se contentant de bien servir186 ; mais Jacob, qui
sert un maistre rusé, il use aussi de finesse et dexterité pour estre recompensé de ses peynes187.
Ceux qui servent le monde, qui a tout propos cherchent des recompenses, ilz ont besoin d'user de
finesses ; mais ceux qui servent Dieu n'ont point de plus grande finesse que la simplicité qui les
fait marcher en confiance188.
Il est vray qu'en ce que les philothees sont philanthropes et qu'il faut qu'ilz servent les
hommes, ilz ont besoin d'une sainte prudence, mays prudence que l'amour leur suggere
admirablement. Voyes la prudence de Nathan, et comme finement il surprend David ; et n'osant
pas luy donner le coup du rasoir de la correction, il le luy fait prendre a luy mesme de sa propre
main, puis, le poussant, le luy fait entrer bien avant dans la poitrine de son peché, dont il guerit189.
Voyes la prudence de Joseph a sauver l'Egypte de la famine190 ; voyes celle d'Abigail a divertir le
courroux de David injustement indigné contre Nabal191 ; et l'admirable prudence de saint Paul en
ce sermon fait aux Atheniens, ou, avec tant de sagesse, il prend occasion de l'un de leurs idoles de
leur annoncer le vray Dieu192. Et en toute occurrence 193 il se comporta si sagement, quil pouvoit
bien dire en verité ce que ses ennemis luy imposoyent par calomnie, qu'estant fin il avoit pris ses
auditeurs par ruse et tromperie : Ouy da, dit il a ses chers Corinthiens194, estant un fin homme et
accord, je vous ay pris par tromperie ; esquelles paroles il a peut estre voulu dire (car saint
Thomas195, Sa196, Lyranus197 interpretent ces motz comme une calomnie faite par ses ennemis, quil
rejette) : Je n'ay voirement rien pris du vostre, mais en cela j'ay usé d'une grande finesse, car ne
prenant rien de vous, je vous ay pris par cet artifice. [50]
Le grand saint Augustin, au livre De Moribus Eccles., c. 15, monstre que les 4 vertus
182 Cf. tom. VI huj. Edit., p. 220, var, (742).
183 [Les lignes 13-20 et 31 de cette page figurent dans le recueil de la Mère de Chantal.]
184 Cf. Pss. LXXVIII, 9, XC, 14.
185 Cf. Luc., X, 39-42.
186 Cf. Gen., XXIV.
187 Ibid., XXX, 27-42.
188 Cf. Prov., X, 9.
189 II Reg., XII, 1-13.
190 Gen., XLI, 54-57, XLVII, 13-25.
191 I Reg., XXV, 4-35.
192 Act., XVII, 22-31.
193 [L'Autographe des trois pages suivantes, jusqu'aux mots : « luy est adjousté » (p. 53, lig. 28), se conserve au Ier
Monastère de la Visitation de Paris.
Les lignes 1, 5, 9, 10 de cette page ; 12-18, p. 51 ; 25-36, p. 52 ; 19, 20, 24-28, p. 54, se trouvent dans le
recueil de la Mere de Chantal.]
194 II Cor., XII, v. 16.
195 IIa IIæ, quæst. LV, art. IV.
196 Notationes in Script. Sacr., Anvers, 1598.
197 Postillæ in Bibliam.
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6.2 Page 52

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cardinales et toutes vertus ne sont autre chose que l'amour de Dieu qui fait tout en nous198. Que si
la vertu, dit il, nous conduit a la vie bienheureuse, j'asseureray que la vertu n'est nullement autre
chose sinon le souverain amour de Dieu ; car « ce qu'on dit que la vertu est divisee en quatre, on
le dit, ce me semble, a rayson des diverses affections qui proviennent de l'amour : dont je ne feray
nul doute de definir en cette sorte ces quatre vertus (desquelles comme les noms sont en la bouche
d'un chacun, ainsy pleut a Dieu que l'efficace fut es espritz !), de maniere que la temperance soit
l'amour qui se donne tout entier a 199 Dieu ; la force, un amour qui supporte volontier toutes choses
pour 200 Dieu ; la justice, un amour servant a Dieu seul, et pour cela commandant droitement a tout
ce qui est sujet a l'homme ; la prudence, un amour qui choysit ce qui luy est profitable pour s'unir
avec 201 Dieu, et rejette ce qui est nuysible. »
Et certes, Philothee, bien que la prudence soit une vertu qui guide et qui, par consequent,
tient 202 entre les actions des vertus le lieu que la lumiere corporelle [tient] entre les oeuvres
artificielles, en sorte que comme ceux qui travaillent sans lumiere sont sujetz a mille fautes, comme
ceux qui veulent exercer les vertus sans la sainte discretion font des pechés et des grandes nullités
(comme le grand saint Anthoyne declara en la conference quil eut avec ses autres Peres du desert,
ainsy que raconte Cassian203, qui dit que la prudence selon l'Evangile estoit l'œil et la lampe de
tout le cors204) ; si est ce neanmoins, Philothee, que nul n'est estimé prudent pour sçavoir ce qu'il
faut eviter et choysir, sil n'est diligent a le bien executer. Si que, encor que l'arbre de la prudence
ayt ses racines en l'entendement, il a neanmoins ses fleurs et ses fruitz de la volonté, mesme [51]
selon les philosophes, qui pour cela tesmoignent que nul ne peut estre prudent sil n'est bon205. Et
l'on void une quantité de gens extremement sçavans es choses morales et grans discoureurs de la
prattique des vertus, qui en verité n'ont nulle sorte de sagesse et prudence, parce quilz parlent et
entendent bien en quoy consiste la vertu, mays ilz ne la pratiquent nullement. Certes, Isaie voulant
exalter l'admirable prudence de Nostre Seigneur, il ne la colloque pas tant en la connoissance des
yeux comm'en celle du goust : Il mangera, dit il206, le beurre et le miel, en sorte quil sache
repreuver le mal et choysir le bien. En quoy, Philothee, vous voyes quil y a deux prudences, selon
deux connoissances : une prudence qui consiste en une science, ou [connaissance] par science,
discours et sçavoir ; l'autre, qui est une connoissance par goust, experience et savourement. Et par
ce que nous savourons par la volonté et l'amour, saint Augustin a eu rayson de dire207 que la
prudence chrestienne n'estoit autre chose sinon un amour discernant le bien d'avec le mal ; comme
sil eut dit, par les paroles du Prophete, que la prudence estoit une manducation amoureuse ou un
savourement du beurre et miel spirituel, c'est a dire des suavités divines, par le moyen duquel on
sçait rejetter et repreuver le mal et eslire le bien convenable a s'unir a Dieu.
Cette prudence domine heureusement en l'ame, et assaisonne toutes les vertus d'une sainte
discretion et d'une sacree simplicité non pareille, car elle ne s'estend qu'a plaire a Dieu et estre utile
au prochain. Ceux qui ont divers amours ont aussi diverses prudences, car il faut une sorte de
prudence pour acquerir les honneurs, un'autre pour acquerir les richesses, un'autre pour acquerir
les playsirs ; mais l'ame qui ne veut que Dieu n'a besoin que d'une simple et pure prudence, qui,
non point par discours, mais par l'experience de la bonté de Dieu, sçait discerner le bien et le mal.
Aussi vous voyes les enfans de Dieu si sages, et neanmoins si simples, que c'est merveilles.
Il ne faut pas grand artifice a ceux qui ont une grande force, ni beaucoup de finesse a ceux
qui ont un grand credit. Vous voyes un petit compaignon, lequel voulant obtenir [52] quelque 208
198 Cf. Tr. de l'Am. de Dieu, l. XI, c. VIII ; tom. V hujus Edit., p. 265.
199 a [celuy qui est aymé...]
200 pour [ce qui est aymé...]
201 avec [la chose aymee...]
202 tient [lieu de lumiere...]
203 Collat. Patrum, l. II, c. II.
204 Luc., XI, 34.
205 Aristot., Etihca, l. VI, c. XII.
206 Cap. VII, 15.
207 De Moribus Ecclesiæ l. I, c. XV.
208 quelque [grace]
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6.3 Page 53

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chose du prince, ou mesme du peuple, il faudra quil deguise ses intentions et quil aille accortement
209 s'insinuant et prattiquant son affaire ; mays un homme de grand credit va rondement en
besoigne, et a mesme quil a de la confiance, il propose simplement sa demande et en reuscit. Ainsy
les lievres, les renars et les cerfs, race couarde entre les animaux, ont une prudence si diverse et
des ruses en si grand nombre que c'est merveilles ; le lion, au contraire, l'elephant, le thoreau vont
droit et sans finesse, et leur prudence consiste en leur vaillance et vertu210. Les enfans de Dieu sont
comme cela : leur sagesse est toute simple, ronde, franche, car l'amour qui les gouverne ayant
reduit toutes choses a son obeissance les fait marcher selon luy ; et, comme dit saint Hierosme211,
Nostre Seigneur veut que nous soyons prudens non pas 212 pour l'offensive, mais pour la defense :
prudens comme le serpent, pour n'estre point deceuz ; simples comme la colombe213, pour ne point
tromper personne.
La prudence amoureuse est humble, obeissante et qui se laisse conduire. Ne t'appuye point
sur ta propre prudence, dit le Sage214 ; et les Anciens ont dit que le plus heureux estoit celuy qui
de soy est sage ; lautre apres, celuy qui escoute et croid le sage.
La prudence amoureuse se confie tout en Dieu, elle le prie ; elle fait fidelement ce qui est
requis, par fidelité, mais elle attend l'issue bonne de son Amant ; elle cherche le Royaume de Dieu
et sa justice, et tout le reste luy est adjousté215. 216 Aussi saint Paul desire que les Philippiens soyent
simples, c'est a dire ronds, francz et sinceres, comme sont les vrays enfans de Dieu217, et loüe les
Macedoniens dequoy leur profonde et tres haute pauvreté avoit abondé es richesses de leur
simplicité218, c'est a dire de leur confiance en Dieu, qui leur ostoit toute apprehension [53] de
s'appauvrir trop en donnant leurs moyens, eux estans des-ja asses pauvres. Aussi Nostre Seigneur
veut que nous soyons comme petitz enfans219 : or, les petitz enfans n'ont point de plus grande
finesse que de se tenir entre les bras de leur mere, en quoy ilz establissent toute leur richesse220.
……………………………………………………………………………………………………..
il tesmoigne un'extreme sagesse221. La simplicité est contraire aux artifices, duplicités,
compositions de divers genres.
En somme, ou la prudence est amour, ou elle depend de l'amour et est servente de l'amour
qui la fait marcher devant la trouppe de toutes les vertus ; comme nostre Seigneur, qui estoit assis
sur le propitiatoire222, c'est a dire sa majestueuse presence, faysoit marcher la colomne de nuee et
de feu devant le peuple d'Israel comm'une guide223, ainsy que nous voyons les grans faire porter
les flambeaux devant a (sic) eux a leurs pages, pour servir de guide a leurs pas et de ceux qui les
suivent, et le phanal aux navires.
209 quil [cache] aille accortement [proposant]
210 Cf. tom. VI huj. Edit., p. 220, var. (741).
211 L. II in Os., in c. VII. 11.
212 non pas [tant en agissant comme...]
213 Matt., X, 16.
214 Prov., III, 5.
215 Matt., VI, 33.
216 [La fin de cet alinéa, empruntée au recueil de sainte Jeanne de Chantal, est inédite. Viennent ensuite, après une
lacune, deux pages autographes (54-57) qui appartenaient à Mgr Monnier, évêque de Troyes.]
217 Philip., II, 15.
218 II Cor., VIII, 1, 2.
219 Matt., XVIII, 3, 4.
220 Cf. tom. VI huj. Edit., p. 216.
221 sagesse [avec un extreme...]
222 Exod., XXV, 22 ; Num., VII, 89.
223 Exod., XIII, 21, 22 ; Num., XIV, 14.
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6.4 Page 54

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Comme la charité employe la justice
Le second fleuve qui procede de la charité, c'est la justice, laquelle, comme dit saint
Augustin224, n'est autre chose qu' « un amour servant a Dieu seul, et pour cela dominant droittement
a tout ce qui est sujet a l'homme. » 225 Ou il faut noter quil parle de la justice legale ou dominante,
qui est es Princes et Roys, lesquelz doivent servir a Dieu seul, et pour le service de Dieu, «
dominant droittement » sur les peuples par des loix equitables, par la distribution raysonnable et
bien proportionnee des estatz et offices, par l'administration de la correction et vangeance des [54]
fautes et crimes qui se commettent en la republique. Mays au l. 19 de la Cité, chap. 21, il declare
plus amplement que c'est que la justice, disant que c'est une « vertu qui rend a chacun son droit, »
c'est a dire ce qui luy appartient et luy est deu : si que, parlant chrestiennement et joignant les deux
passages de saint Augustin en une seule intention, nous pouvons dire que la justice n'est autre
chose que l'amour de Dieu entant que par iceluy nous avons une constante et perpetuelle volonté
de rendre a chascun ce qui luy appartient. Et certes, saint Augustin, au livre De Moribus Ecclesiæ,
ne separe point la justice de l'amour de Dieu, monstrant au chap. 26, que qui ayme Dieu luy rend
toute sorte de devoir, et qui ayme le prochain n'offence personne, rend a chacun ce qui luy
appartient. Car 226 l'amour est sur toutes choses ; desirant complaire a la chose aymee, luy rend
premierement tout devoir, et non seulement tout devoir, mais tout ce dont il se peut aviser devoir
ou pouvoir estre aggreable a celuy quil ayme. De sorte que la charité n'est autre chose qu'une
justice surabondante, car apres que l'amour a fait rendre a chacun ce quil luy doit, il passe plus
outre et donne plus quil ne doit selon la rigueur de la justice ; et fait comme son Maistre, qui ne se
contente pas de donner la bonne mesure des recompenses, mais la donne bien comble, bien pressee
et sureffluente227.
Or, comme remarque le grand saint Bernard228, nous sommes debiteurs 229 superiori,
inferiori, æquali ; mays a Dieu premierement, a qui nous devons 230 honneur, gloire, louange,
action de graces231 et toute sorte de sousmission et sujettion. Et pour tout ce que nous devons a
Dieu, 232 nous avons un'espece de vertu qui s'appelle religion, par laquelle nous rendons a Dieu 233
la reverence, hommage et sousmission que nous luy devons comme a nostre souverain Seigneur
et premier principe. Et pour acela [55] nous employons premierement deux actes, l'un de
l'entendement et lautre de la volonté ; car en l'entendement nous faysons ceste connoissance que
le grand saint Augustin demandoit si ardemment234 : Noverim te, noverim me ; et le grand saint
François235 : Quis es tu, et quid sum ego 236 ? et sur cette connoissance nous establissons l'acte de
la volonté, qui s'appelle reconnoissance, c'est a dire la protestation de l'excellente superiorité
infinie de Dieu sur nous et de l'infinie dependence que nous avons de Dieu. Or cette protestation
se fait interieurement, par les actes propres de nostre volonté qui se sousmet et fait reconnoissance
a la divine Majesté, et par tous les autres actes qui rendent tesmoignage de nostre sousmission ; et
exterieurement, par des actes par lesquelz nous declarons cette sousmission. Et de la dependent
224 Ubi supra, p. 51.
225 a l'homme. Il veut dire, Philothee, que c'est un amour par lequel nous avons une constante et perpetuelle volonté
de rendre a Dieu le service qui luy est deu et, pour l'amour de Dieu, ce qui appartient a un chacun. [Sans biffer cette
phrase, le Saint a mis un signe de renvoi après « l'homme », indiquant ainsi son intention de rattacher à ce mot la
phrase ; « Ou il faut noter, » etc., et de transporter quelques lignes plus bas la pensée supprimée ici.]
226 Car [la charité et l'amour sont...]
227 Luc., VI, 38.
228 Ser. 3 de Adventu Domini, (§ 4).
229 debiteurs [a Dieu, a nous mesme et au prochain...]
230 devons [ou porter, ou rap...]
231 I Tim., 1, 17 ; Apoc., VII, 12.
232 Et tout ce que nous devons a Dieu [s'appelle religion...]
233 a Dieu [l'honneur et reverence...]
234 Soliloq., l. II, c. 1.
235 Oratio quotidiana B. Patris Francisci, in Sti Francisci Assisiatis opera (Paris, 1641) : Opusculorum, t. I, p. 20.
236 [Les éditeurs précédents ont substitué des... aux paroles de saint Augustin et de saint François, et à plusieurs autres
mots que le copiste n'avait pu déchiffrer.]
54/332

6.5 Page 55

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toutes les parties et especes de la religion qui sont celles ci :
1. La reverence, qui est un des actes procedans de la religion, et n'est autre chose qu'une
certaine vive apprehension et juste crainte de ne se pas bien comporter, et manquer d'honneur et
de respect envers Dieu et les choses divines ; et de cett'apprehension procede un soin 237 particulier
de rendre le plus exactement quil se peut toute sorte de tesmoignage de l'estime que nous faysons
de la majesté et eminence de Dieu et de nostre vileté et bassesse, et de la disproportion quil y a
entre nous et Dieu. Et cette sainte affection se respand generalement en toutes les œuvres de
religion, et est contraire a la negligence et peu d'estime 238 des choses divines, et au manquement
d'attention de la veneration que nous devons apporter de la grandeur de l'excellence que nous
servons et honnorons. Car c'est elle qui fit prendre le soin a saint Abel de prendre le meilleur de
ses trouppeaux pour offrir a Dieu, comme la nonchallance contraire fit 239 que Cain choysit le
moindre240 ; [56] c'est elle qui fit 241 tumber en terre Daniel242 et les autres Prophetes a moytié
mors devant la majesté de Dieu243 ; c'est elle qui fait qu'emmi les tressaillement et plus grandes
consolations nous tremblons et craignons d'estre devant une si grande majesté244 ; c'est elle qui fait
que les Seraphins mesme voylent leurs yeux et leurs pieds245, comm'indignes de regarder Dieu et
de s'arrester pres de luy ; c'est elle qui fait dire a David246 : Te decet hymnus silentium247 in Syon,
car la grand'estime de la perfection divine fait qu'on n'ose pas en parler, crainte d'en parler peu
convenablement. C'est cette crainte chaste et sainte qui persevere 248 es siecles des siecles249 ; car
si bien les saintz ne craignent pas d'offencer Dieu, car ilz sont asseurés de vivre a jamais en sa
bienveuillance, si est ce que l'inestimable estime quilz font de l'excellence divine fait qu'ilz
reverent sa divine Majesté, et ont un'aggreable et amoureuse apprehension de sa grandeur, qui les
tient en une continuell'attention soigneuse et leur donne un soin perpetuellement 250 attentif a bien
exalter la divine Bonté : qui est la crainte dont il est dit que « les puissances tremblent251 » devant
sa Majesté, c'est a dire, elles ont un soin de l'honnorer et l'estiment avec tant d'admiration et de
vive attention comme si elles craignoyent de mesprendre ; car, autant que sa bonté les asseure que
jamais ilz ne manqueront, sa majesté les provoque a l'attention et au soin et reverence. [57]
252 Or cette reverence interieure nous fait prosterner extérieurement, demeurer sur les
genoux, faire des 253 abbaissemens de cors, tenir les yeux en terre, les mains jointes, porter les
voyles sur nos yeux, vestir le sac et le cilice ; elle nous empesche de toucher les choses sacrees
qu'avec beaucoup de preparation et de protestation de nostr'indignité, elle nous fait confesser nos
miseres et la grandeur de Dieu.
2. La devotion en matiere de religion n'est autre chose qu'une 254 ardeur et ferveur d'esprit
237 un soin [exacte de ne rien faire...]
238 de conte
239 comme [le mespris...] la nonchallance [de l'estime de... de cette affection...] contraire fit [offrir... choysir le
moindre...]
240 Gen., IV, 3-5.
241 fit [dire a Moyse...]
242 Dan., VIII, 17, 18, X, 5-9.
243 Exod., XXXIII, 20 ; Judic., VI, 21 23 ; Is., VI, 5 ; Ezech., XLIV, 4.
244 Cf. Ps. II, 11.
245 Is., VI, 2.
246 Ps. XLIV, 1.
247 Au lieu de « Te decet » (à toi convient) de la Vulgate d'après les Septante, saint Jérôme traduit l'hébreu par « Tibi
silentium » (attente silencieuse, faite d'adoration et de confiance). C'est bien le sens du mot hébreu actuel, comme la
traduction du Targum : le mot lu par les Septante, légèrement différent, semble demandé par le parallélisme. Ici, saint
François de Sales garde le « Te decet » de la Vulgate et ajoute le silentium de saint Jérôme d'après l'hébreu actuel.
Pour lui, le Te decet équivaut sans doute simplement à tibi, et il veut dire : A toi convient la louange faite de silence.
248 demeure
249 Ps. XVIII, 10.
250 perpetuellement [actf et]
251 In Præfat. Missæ.
252 [Ici commencent deux autres pages autographes qui se conservaient en 1893 au Grand Séminaire de Verdun.]
253 des [inclinations]
254 qu'une [excellente]
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6.6 Page 56

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qui nous rend promps a faire tout ce qui regarde le service et lhonneur de Dieu ; vertu toute pareille
a la devotion en matiere de charité, dont nous avons parlé au commencement de l'Introduction255,
car comme l'une est un'excellente charité, l'autre [est] un'excellente affection de religion. Et par ce
que ceux qui sont animés de cette tant desirable vertu se dedient et consacrent, donnent et
addonnent totalement au service de Dieu et a tout ce qui le regarde, elle nous fait particulierement
faire la sainte offrande, donation et dedicace 256 de nous mesme a la divine Majesté, que nous
avons ci dessus marquee 257, par laquelle nous sommes rendus 258 voués, dediés, consacrés a Dieu,
et comme specialement Religieux, que, au commencement de l'Eglise, on appelloit moynes, c'est
a dire uns ou unis259, a cause de la speciale union avec Dieu a laquelle ilz se dedioyent, ou de
l'unité de leur intention et profession qui n'estoit que du seul service de Dieu ; et, comme parle le
grand saint Denys260, a rayson de leur vie une et simple, non distraitte ni divisee, ains toute
ramassee et recueillie, pour estre toute destinee [58] a la perfection de l'unique amour de Dieu. Et
par ce que ceux ci, par l'excellence et ferveur quilz ont en la Religion, se sont devoiiés et dediés a
l'unique profession de servir Dieu et vacquer a son amour, on les a nommés specialement Religieux
par apres.
Et passant plus avant, par ce qu'entre ceux qui se dedient a l'unique service de Dieu, les uns
le font par des simples oblations 261 qui se font par maniere de protestation et declaration d'une
volonté absolue et resolue, comme font la pluspart des Oblatz de saint Ambroyse 262, les Dames
de la Tour des Miroüers de la Congregation de sainte Françoise a Romme 263, les vierges de Sainte
Ursule 264, et comme faysoient les hommes et femmes du Tiers Ordre de Saint François, les Peres
de la Congregation de l'Oratoire 265, et plusieurs tressaintes societés que Dieu a grandement benies
et illustrees de plusieurs Saintz et Saintes, comme de sainte Catherine de Sienne et de Gennes, de
sainte Angele de Foligni, de sainte Elizabeth d'Ongrie, saint Elzear, saint Ives, sainte Françoise (et
en nostr'aage, du B. P. Philippe Nerius), sainte Geneviefve. Les autres le font par des vœux 266 qui
sont voirement appreuvés de l'Eglise, mais non pas 267 pourtant acceptés [ni] appliqués pour mettre
la personne qui les fait en l'estat que l'on appelle regulier : telz sont tous les vœux qui se font par
les personnes seculieres, voire mesme ecclesiastiques, encor bien que ce seroyent les vœux de
pauvreté, chasteté et obeissance, quand ilz sont faitz sans estre acceptés par quelqu'Ordre qui ayt
le pouvoir ou l'establissement de rendre ses membres reguliers. Les autres le font par des vœux
acceptés par l'Eglise pour establir une personne en l'estat 268 que nous appelions [59] regulier, soit
que telz vœux soyent solemnelz, soit qu'ilz soyent simples, comme ceux des coadjuteurs formés
de la Compaignie du nom de Jesus.
Or est il vray que tous les vœux, autant les simples que les solemnelz, ceux qui se font en
la profession 269 reguliere et ceux qui se font hors d'icelle, obligent egalement devant Dieu, sans
qu'il y ait nulle difference ; 270 en sorte que qui viole les vœux simples il est autant perfide et
255 Part. I, ch. 1.
256 la sainte offrande et abandonnement
257 Voir ci-dessus, pp. 42, 43, et au volume précédent les Meditations écrites pour la Visitation, p. 426.
258 rendus [devotz]
259 Cf. tom. IX huj. Edit., pp. 136, 345.
260 Ed. c. 6. et vide Jo. a. Sto Franco 1, c. XIII.
1 Les Œuvres du divin saint Denys Areopagite... traduites du Grec en François, par Frère Jean de Saint François...
avec une apologie pour les Œuvres du mesme auteur. Paris, Jean de Heuqueville, MDCVIII.
261 oblations — [ou bien par des vœux simples...]
262 Voir le tome précédent, p. 307.
263 Voir tome XIV, note (946), p. 330 ; XV, note (115), p. 29 ; XXV, p. 307.
264 Voir le tome précédent, pp. 304, 305.
265 Voir ibid., p. 306.
266 des vœux[simples, soit dedans ces Congregations, ou dehors...]
267 non pas [acceptés pour mettre une personne en l'estat regulier...]
268 en l'estat [de Religion...]
269 se font [par maniere de] profession [religieuse...]
270 nulle difference ; [bien que, quant a l'Eglise...]
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6.7 Page 57

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sacrilege, a rayson du vœu, comme celuy qui viole les vœux solemnelz. 271 Mais pourtant, ceux
qui violent les vœux solemnelz, ou simples, mais de Religion, pechent plus griefvement que les
autres, a rayson du scandale qui s'en ensuit, [qui] est plus grand : outre que, par l'establissement
du droit, ilz peuvent estre apprehendés et chastiés, ne pouvans ni contracter legitimement ni rien
acquerir entre les hommes, tandis quilz sont dans les liens du vœu ; la ou ceux qui ont fait les vœux
purement simples ne sont pas rendus inhabiles a contracter et acquerir entre les hommes, quoy que
devant Dieu et en conscience ilz soyent 272 autant perfides en ce faysant que les autres.
Or, d'autant que ceux qui par vœu se sont obligés aux Religions appreuvees se sont non
seulement liés de l'obligation consciencieuse et devant Dieu, mays aussi 273 d'un'obligation civile,
ecclesiastique et devant les hommes, non seulement sous des peynes eternelles, mais aussi
temporelles ; non seulement pour estre redevables et obligés en conscience, mays pour estre
contraintz en effect a l'observation des vœux : partant on leur a donné specialement le nom de
Religieux, et a leurs Congregations le nom de Religions, a cause de 274 ce lien par lequel, outre le
commun lien des Chrestiens, ilz se sont reliés au devoir de la poursuite de la perfection par les
trois vœux propres a [60] l'obtenir, et de rechef encor, reliés pour la sousmission aux peynes et
astrictions ecclesiastiques en cas de contravention et infraction des vœux.
Et quant aux autres personnes qui ne sont liees que par les simples oblations (qui est un
lien de reverence, respect et verité ; car c'est un'irreverence de ne point observer ce que l'on a
protesté, quoy que non voué de faire, devant un si grand Roy et pour son service, bien que ce ne
soit pas contre la fidelité, n'y ayant eu aucune promesse), elles ne sont pas appellees Religieuses
si absolument, ains seulement devotes et dediees a Dieu. Comm'aussi celles qui par des vœux
particuliers et purement simples se sont liees devant Dieu a l'obeissance, pauvreté et chasteté ; car
si bien elles ne sont pas moins liees devant Dieu que les Religieux, neanmoins, en la police
exterieure de l'Eglise et en ce qui en depend, les Religieux le sont beaucoup davantage. 275
……………………………………………………………………………………………………..
L'orayson, certes, ou la priere n'est autre chose, a proprement parler, qu'une demande faite
a Dieu de ce que nous praetendons obtenir de luy. Nous pouvons demander une chose diversement
: car nous la pouvons demander 276 par droit de justice, comm'un debte ; ou par droit d'authorité,
comm'un devoir ; ou comm'une grace et faveur, par le seul droit de liberalité, de courtoysie et de
bienveuillance. Car je vous prie, Philothee, si je demande en justice l'argent que j'ay preste a mon
voysin, 277 est ce une priere et orayson ? Non certes, ains une demande rigoureuse. Si un seigneur
demande son manteau, son chapeau, son espee, ou du vin a son valet, est ce une priere ? Nullement,
mais une demande par authorité. Mays je demande a un homme qui ne me doit rien, ni service ni
chose quelconque, quil me donne de l'argent, quil me preste son [61] cheval, ou quil me donn'a
manger ou a boire, a cett'heure-la je ne puis user d'autre sorte de demande que de celle de la priere
; et si c'est une personne qui soit relevee au dessus de moy en quelque eminente qualité, je ne prie
pas seulement, mais adjoustant avec l'humilité la reverence, je supplie.
Or, Dieu ne nous doit rien, Philothee, a tous tant que nous sommes, pour nostre regard et
pour nostre consideration ; car, qu'avons nous pour l'obliger de quoy il ne nous ayt premierement
obligés278 ? Nous ne luy sçaurions jamais rien donner, car si nous luy 279 presentons quelque chose,
l'ayant premierement receue de luy, c'est rendre, non pas donner ; c'est payer, non pas obliger ;
nous ne l'obligeons pas, mais nous nous acquitons de la dette. L'isle Halonesus avoit esté aux
Atheniens, mais les pirates la leur occuperent ; sur lesquelz Philippe, Roy de Macedoine, l'ayant
271 solemnelz. [Dont les anciens Peres ont tous-jours tenu pour infracteurs...]
272 ilz soyent [tous-jours]
273 liés en conscience et devant Dieu, mays aussi [devant l'Eglise et]
274 de [cette liayson par laquelle...]
275 [Fin du feuillet qui se conservait à Verdun. Il y a une lacune entre ces pages et la suite de notre texte, donnée d'après
l'Autographe gardé à Avignon, au Séminaire Saint-Charles.]
276 demander [comme deue par justice ou comme deue...]
277 voysin, [fay je pour cela...]
278 Cf. I Cor., IV, 7.
279 luy [baillons]
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6.8 Page 58

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prise, les Atheniens la luy demanderent, et il 280 consentit de la leur donner, mais non pas de la
rendre ; au contraire, les Atheniens ne la vouloient pas prendre, mais reprendre281. Certes, nous ne
pouvons rien donner a Nostre Seigneur, a proprement parler, ains seulement rendre ; et il ne peut
rien prendre sur nous, oui bien reprendre, puis que nos mains ne luy peuvent rien presenter que
nous n'ayons receu des siennes.
Ce n'est pas, Philothee, que Nostre Seigneur ne se soit constitué debteur envers nous des
recompenses immortelles, si nous observons ses commandemens, et quil ne die souvent que non
seulement il nous les donnera, mais quil les nous rendra : Mon Pere, dit il a celuy qui priera en son
nom, te le rendra282 ; et l'Apostre, parlant de la coronne de gloire : laquelle, dit il283, en ce jour la
advenir le juste Juge me rendra. Ouy, en verité, Philothee, nos bonnes œuvres faites en la grace
de Dieu meritent recompense, et Nostre Seigneur s'oblige de la rendre, comme toute l'Escriture
tesmoigne ; mays ce n'a pas esté par 284 [62] droit de justice que Nostre Seigneur s'est obligé de
nous rendre recompense, ça esté par pure misericorde, selon la grandeur de laquelle il nous a voulu
sauver285. Or, despuis neanmoins quil s'y est obligé par misericorde, il le fait par justice ; dont il
dit quil rendra, par ce que s'estant engagé de parole il est constitué debteur de justice, comme par
ce qul ne s'est engagé que par misericorde il est donateur de liberalité : il donne, par ce quil ne s'est
pas obligé par justice, ains liberalement et de grace ; il rend pourtant, par ce quil doit, et il doit par
ce quil s'est obligé.
Mays outre cela, il ne nous considere pas en nous mesme, ains en Nostre Seigneur son Filz,
sur lequel nous sommes entés comme des greffes sur un noble tige286 ; et partant, en qualité de
membres d'un tel chef287, au nom duquel nous demandons toutes choses, il nous rend ce qui luy
est deu. Imagines vous, Philothee, le petit Thobie qui demande le payement a Raguel 288 pour son
pere, et voyes comme il est payé favorablement par ce quil ressembloit son pere289 ; car il en est
de mesme : nous demandons au Pere ce quil doit a son Filz, auquel si nous sommes rendus
semblables par une sainte charité, mon Dieu que de graces290 ! Or il doit a son Filz selon mesme
toute la rigueur de justice, ainsi que nos sçavans theologiens enseignent, tout ce quil a merité pour
nous291 : or il a merité pour nous que nous puissions meriter, si que le pouvoir que nous avons de
meriter est un rejetton du merite de Nostre Seigneur. Il nous a merité la grace et tout ce qui est
necessaire pour nous acheminer a la grace, pour cheminer en la grace et pour obtenir, par sa grace,
la grace consommee et parfaite, qui est la gloire et vie eternelle. C'est pourquoy, demandons au
Pere eternel quelque chose au nom de Nostre Seigneur, nous la demandons par justice et par grace
tout ensemble : en justice, entant que c'est au nom de Nostre Seigneur ; en grace, entant que c'est
pour nous, qui de nous mesme en sommes grandement indignes. Et bien que 292 nous ayons [63]
promesse expresse d'obtenir tout ce que nous demanderons au nom de Nostre Seigneur293, cela
neanmoins s'entend sous cette condition, que nous soyons enfans de Dieu et que nous ayons l'esprit
d'adoption qui nous donne la hardiesse de crier : Abba Pater294, ou convenablement disposés pour
le devenir ; dequoy n'estant pas asseurés, nous ne pouvons jamais demander qu'en grace pour
nostre regard.
Mays quant a Nostre Seigneur, estant au Ciel et ayant achevé toutes les œuvres par
280 et il [leur accorda...]
281 Orat. de Halonneso, Demosthenis opera (Edit. Didot), p. 41, et Litteræ Philippi, ibid., p. 85.
282 Matt., VI, 4, 6, 18.
283 II Tim., IV, 8.
284 par [devoir]
285 Cf. Tit., III, 5.
286 Cf. Rom., XI, 17 , 24.
287 Cf. Ephes., I, 22, 23, IV, 15, 16 ; Coloss., I, 18, II, 10, 19.
288 Pour Gabel.
289 Tobiæ, IV, 21, 22, V, 2, 3, VII, 1-15, IX, 3-9.
290 Cf. tom. IX huj. Edit., p. 60.
291 Cf. ibid., pp. 51, 52.
292 bien que [tout ce qui excede...]
293 Joan., XIV, 13, 14, XVI, 23.
294 Rom., VIII, 14, 15. Cf. tom. VIII huj. Edit., pp. 408, 409.
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6.9 Page 59

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lesquelles il a merité aux Anges et aux hommes la grace et la gloire, il demande a son Pere toutes
les benedictions que nous recevons, par droit de justice, comme les ayant acquises par son sang.
C'est pourquoy il est appellé advocat295, car les advocatz, a proprement parler, ne font des
requisitions qu'en vertu du 296 droit des parties, et implore la justice et l'equité, non la misericorde
ni la grace ; et en cette qualité d'advocat il montre les tiltres et les droitz pour lesquelz les graces
luy sont deües, qui ne sont autres choses que ses playes, tiltre pour lequel le Pere eternel est obligé
de favoriser tous ceux qui obeissent a son Filz. Or, par ce que ses demandes sont fondees en droit
et justice, plusieurs grans personnages (Greg. Naz., Orat. 36 297, 53 et 54) ont dit qu'a proprement
parler Nostre Seigneur ne prioit plus maintenant quil est au Ciel, selon que luy mesme l'affirme
disant : Je ne dis pas que je prieray mon Pere298 ; mays par ce que neanmoins il demande en qualité
d'advocat et que, comme les advocatz, il demande avec un infini respect et une reverence
incomparable, plusieurs aussi ont dit quil prioit299. En quoy les uns et les autres ont eu rayson : car
il demande sans doute a son Pere les benedictions que nous recevons, et sa demande n'est pas
priere quant a ce quil demande, car ce quil demande luy est deu par justice ; mais elle ressemble
pourtant a la priere, par ce qu'il ne demande [64] pas avec moins de reverence, d'humilité et de
sousmission que si ce qu'il demande ne luy estoit pas deu300.
Or, l'orayson consiste donq principalement a demander a Dieu quil nous donne par faveur,
grace, liberalité et misericorde ce qui est requis pour nostre salut, et depend principalement de
l'esperance, comme la meditation de la foy et la contemplation de l'amour : car la meditation
considere ce que nous croyons, pour l'aymer ; la priere demande ce que nous esperons, pour
l'obtenir ; et la contemplation regarde ce que nous aymons, pour nous y plaire.
301 Mays, outre ces trois parties de l'orayson, il y a la louange de Dieu, en laquelle nous
employons une partie des Heures canoniales ; il y a aussi l'action de grace pour les benefices
receus, et l'offrande et sousmission de nous mesmes a Dieu : lesquelles parties sont principalement
fondees sur la vertu de religion, par laquelle nous sommes portés a rendre a Dieu l'honneur et
gloire qui luy est deüe, entant qu'elle luy est deüe ; comme aussi l'adoration accompaigne tous-
jours l'orayson302, car personne ne prie Dieu qu'il ne l'adore.
Or, l'adoration est la plus eminente espece d'honneur que l'on puisse rendre a qui que ce
soit ; dont saint Augustin a dit303 que « les hommes sont appellés dignes de service et venerables,
mays que si on veut beaucoup adjouster a cela, on les appelle encor adorables. »
Or, entre toutes les adorations il y en a une qui est hors de toute comparayson ; car l'honneur
se donne en contemplation de l'excellente vertu de quelqu'un, et l'adoration se donne non pour la
vertu entant qu'elle est excellente, mays pour l'excellence entant qu'elle nous est
[incompréhensible] a cause de son infinie grandeur et profondité, et laquelle, comme dit Anastase,
Evesque de Theopolis304, est l'emphase et sureminence de tout honneur : qui est l'adoration deue a
Dieu, et que non seulement les hommes, mays aussi les Anges ont commandement de luy rendre ;
et ce n'est autre chose que la plus grande, juste et profonde sousmission [65] et reconnoissance
spirituelle que nous puissions faire a la supresme et, pour dire ainsy, incomprehensible
sursouveraine Majesté et superiorité de Dieu. Nous prononçons telles ou semblables paroles, du
plus profond de nostre esprit, ou si nous ne les prononçons pas, nous en avons le sentiment : Saint,
295 I Joan., II, 1.
296 [Comme on l'a dit ci-dessus, p. 41, le Manuscrit autographe de ce Traité se composait de plusieurs feuilles formant
un cahier dont quelques parties ne nous sont pas parvenues : telle la feuille qui contenait la suite du texte de la présente
page. La Visitation d'Annecy en possède cependant une copie partielle, restée inédite jusqu'à ce jour, et faite en 1840
par M. l'abbé Combeyrat, à qui appartenait le feuillet original.]
297 Al. Orat. XXX, § XIV.
298 Joan., XVI, 26.
299 Vide tom. IX huj. Edit., p. 51.
300 Cf. tom. IX huj, Edit., pp. 51, 52.
301 [Il faut commencer ainsy : L'orayson...]
302 Exod. c. 4, v. 31.
303 De Civit. Dei, l. X. c. IV. (Cf. tom. II huj. Edit., l. IV, c. V, p. 320.)
304 II Concil. Nicæn., Act. IV. (Vide tom. II huj. Edit., not. (1882), p. 320.)
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6.10 Page 60

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Saint, Saint, le Seigneur Dieu des armées305. O Seigneur, vous estes Celuy qui est306 ; vous estes
mon Dieu redoutable, infini, et la grandeur de vostre majesté est trop plus eslevee sur moy307, et
mon ame le reconnoist. Je prosterne mon neant devant vous, et mon estre s'incline jusques au fin
fons de la terre devant l'incomprehensible majesté de vostre Deité et authorité. O si je pouvois
m'abbaysser jusques dedans l'abisme du neant duquel vous m'aves tiré, pour mieux faire hommage
a vostre infinie authorité et reconnoistre de vostre liberalité l'estre que vous m'aves donné ! O
Anges, desquelz les affections sont plus grandes et fortes que les miennes, hé ! secoures mon
imbecillité et adores pour moy cette couronne eternelle de la gloire de mon Dieu, de la plus
profonde adoration que vous puissies exercer. Helas ! Seigneur, que ne puis je asses connoistre,
reconnoistre et reverer vostre grandeur ! O Sauveur de mon ame, qui, en qualité d'homme, a rayson
de la dignité infinie de vostre personne, pouves adorer d'une adoration d'infinie estime la tres
souveraine Divinité, hé, secoures mon desir, et adores pour moy vostre Pere eternel de cette
souveraine adoration que vous seul sçaves, voules et pouves faire308. Et puysque vous estes
homme, faites luy l'hommage pour tous les hommes, qui n'ont ni asses de cœur ni asses de force
pour s'abbaysser si profondement qu'il seroit requis devant une si infinie Essence. O Pere, Filz et
Saint Esprit, une seule sainte souveraine Divinité, je vous adore par ce que vous estes
souverainement adorable, et encor plus, parce que vous estes si excellemment adorable que vous
ne pouves jamais estre suffisamment adoré. Adorons Dieu par ce qu'il doit estre infiniment adoré
; adorons le par ce qu'il ne peut estre suffisamment adoré.
Telles ou semblables sont les actions interieures et essentielles de l'adoration ; differentes
des actions de l'humilité [66] en cela seulement, que nous adorons en reconnoissance de l'eminence
et majesté devant laquelle nous nous prosternons en esprit et a laquelle nous nous sousmettons,
mays nous nous humilions en reconnoissance de nostre bassesse et vileté. Par l'adoration nous
regardons Dieu, par l'humilité nous nous regardons nous mesmes. 309
……………………………………………………………………………………………………..
En fin, dans le Sanctuaire il y avoit quatre Cherubins : deux estoyent tout d'or, qui estoyent
sur le propitiatoire, qui s'entreregardoyent et couvroyent, de leurs aysles estendues l'un vers l'autre,
tout le propitiatoire ; et ceux cy representoyent l' [ordre] des Anges assistans, qui n'ont [qu'une 310]
contemplation, et leur reciproque amour ne sert qu'a la louange de Dieu. Les autres deux Cherubins
estoyent de boys d'olive doré, et regardoyent devers la porte du Sanctuaire, ayant chacun une de
leurs aysles estendue sur l'Arche et le propitiatoire, et l'autre estendue jusques a la paroy du
Sanctuaire. Ilz avoyent dix coudees de haut et leurs aysles cinq de longueur311, parce que les Anges
administrans ou servans ont charge de regarder et garder l'Eglise, et partant ilz ont leurs affections
misericordieuses comme d'olive ; et, sans laysser leur contemplation beatifique, laquelle est sur le
propitiatoire, ilz estendent leurs secours et exercent promptement leur charité envers les murs de
Hierusalem, de l'Eglise, envers la mayson et famille de Dieu. Ilz ont dix coudees de hauteur, pour
cooperer avec les hommes aux œuvres des dix commandemens ; et leurs deux aysles sont de
mesme, parce qu'a cet effect ilz prient devers le Sanctuaire et inspirent devers les peuples. [67]
……………………………………………………………………………………………………..
312 Et par ce que nos parens sont des appartenances plus proches de nos pere et mere, et
que toute la parentee semble estre un seul arbre a diverses branches esquelles toutes un mesme
sang, commune mesme seve, joint et sustente, partant la pieté s'estend encor a eux ; comm'aussi,
par ce que les alliés et amis de nostre patrie sont comme ses appuys et mainteneurs, nous les
305 Is., VI, 3 ; Apoc., IV, 8.
306 Cf. Exod., III, 14.
307 Cf. Ps. XLVI, 3.
308 Cf. Tr. de l'Am. de Dieu, liv. V, ch. XI.
309 [Lacune de deux pages autographes qui n'ont pu être retrouvées. L'alinéa : « En fin, dans le Sanctuaire » etc., égaré
plus loin clans l'édition Blaise (p. 46) et dans les suivantes, semble devoir se placer ici.]
310 Les éditeurs précédents donnent cette leçon évidemment fautive : « et ceux cy representoyent l'arche des Anges
assistans, qui n'ont aucune contem plation... »
311 Exod., XXV, 17-20 ; III Reg., VI, 23-28 ; II Par., IV, 10-13.
312 [Notre texte reproduit la seconde moitié de la feuille gardée au Séminaire d'Avignon. Voir ci-dessus, (277), p. 61.]
60/332

7 Pages 61-70

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7.1 Page 61

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cherissons aussi par pieté.
Or, le devoir de pieté s'estend a tous les offices qui se peuvent legitimement rendre, soit en
honneur, soit en service, mais sur tout a sustenter et servir nos pere et mere en leurs necessités :
obligation qui passe si avant, que nous ne pouvons pas mesme faire aucun vœu qui nous puisse
empescher de rendre ce devoir ; et si nous l'avons fait, il ne nous tient pas liés de ce costé la, ains,
nonobstant iceluy, nous pouvons et devons rendre ce devoir 313 originaire de pieté auquel la nature
nous oblige. Et par ainsy, les enfans sortent des Religions, quoy quilz soyent profes, pour secourir
leurs peres et meres quand ilz sont, je ne dis pas en extreme, mais en grande necessité, 314 quand
sans sortir ilz ne peuvent leur procurer d'ayde et de soulagement.
L'observance est une vertu par laquelle nous rendons l'honneur et le service qui est deu a
ceux qui 315 sont ordonnés a nostre gouvernement ou qui sont propres a cela : car, comme nous
honnorons et servons avec une speciale affection nos pere, mere et patrie par ce qu'ilz nous
representent Dieu en qualité d'autheur, principe et origine de nostre estre, et comme instrumens de
sa puissance productrice, aussi honnorons nous ceux qui nous gouvernent par ce quilz representent
Dieu en qualité de gouverneur et recteur des hommes et comm'instrumentz de sa providence. En
quoy nous donnons les premiers rangs a nos gouverneurs et princes spirituelz ; car 316 l'authorité
et [68] pouvoir quilz ont estant surnaturel et leur gouvernement tendant a une fin surnaturelle, 317
le devoir de sousmission et service que nous leur avons a cette consideration est surnaturel,
religieux et purement pieux.
En suite de la pieté et de l'observance vient la sainte obeissance : vertu par laquelle nous
faysons volontairement ce que nos superieurs et [ceux] qui ont authorité legitime nous ordonnent
ou commande (sic) par ce quilz le nous commandent, c'est a dire par ce que nous devons le faire.
Car un œuvre que nous n'estions pas obligé de faire avant quil fut commandé, soudain quil est
commandé nous sommes obligés de le faire, et d'œuvre simple elle devient debte ou devoir pour
nous, le commandement liant et obligeant nostre volonté avec cett'œuvre : et partant, l'obeissance
est la vertu par laquelle nous rendons aux superieurs ce que leur authorité nous oblige de faire par
leur commandement.
Or, toute l'authorité a laquelle nous rendons obeissance procede de Dieu, ou par l'ordre
special quil a mis en son service et pour nostre conduite au salut eternel, donnant la puissance
spirituelle a ses Apostres et a leurs successeurs ; ou par l'ordre naturel, donnant aux peres, meres,
mari authorité sur leurs enfans et femmes ; ou par l'ordre civil, aux princes et magistratz sur leurs
sujetz : de sorte que la vertu d'obeissance se termine en fin finale a l'authorité divine, bien que
sensiblement et selon nostr'apprehension particuliere elle regarde cette varieté de superieurs a
l'authorité desquelz Dieu nous a sousmis. Obeissance, vertu admirable, qui nous rend toutes les
actions des vertus aggreables, qui establit la justice en paix318 et donne la victoire en la guerre319.
C'est pourquoy elle est meilleure que les victimes320 par ce que les victimes sans obeissance ne
sont pas aggreables a Dieu, oui bien l'obeissance sans victimes, et par ce que les victimes ne sont
aggreables sinon comm'elles sont commandees. Vertu generale, laquelle ne perd point son unité
par la diversité de ceux qui obeissent, [69] ni de ceux auxquelz on obeit, ni des commandemens,
car tousjours ell'obeit par ce qu'elle le doit et quil luy est commande par ceux qui ont authorité.
La gratitude est une vertu par laquelle nous rendons a ceux qui nous ont fait du bien quelque
sorte de contrechange, ou par honneurs, ou par services, ou par des autres reciproques bien faitz.
Et cette vertu requiert : [1.] que nous estimions et prisions grandement et au plus haut pris le bien
fait, et sur tout l'affection avec laquelle le bien facteur le distribue et nous le departit ; 2. que nous
le recevions cordialement ; 3. que nous declarions combien il nous aggree et en facions une
313 ce devoir [naturel]
314 necessité, [et bien quilz doivent sortir avec licence...]
315 qui [nous gouvernent...]
316 car [leur excellence et...]
317 surnaturelle, [l'honneur et service qui leur est...]
318 Cf. Ps. LXXI, 1-3.
319 Cf. Prov., XXI, 28.
320 I Reg., XV, 22 ; Eccles., IV, 17.
61/332

7.2 Page 62

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protestation et reconnoissance ; 4. que nous en conservions et pratiquions la souvenance, faysant
volontier mention lhors que l'occasion s'en presente ; 5. que selon les occurrences et nostre pouvoir
nous rendions bienfait pour bienfait. Je dis selon les occurrences, car l'empressement et
precipitation a contrechanger un bienfait tesmoigne un esprit qui se deplait d'estre debiteur a son
bienfacteur. La debte de gratitude doit estre aggreable, et ne se doit pas payer par ce quil nous
deplait de 321 devoir, mais par ce quil nous plait et aggree de rendre le reciproque. Et deffait, rendre
un bien fait avec cett'inquietude, c'est plus tost le payer que le rendre, ou encor, plus tost le rejetter
et vouloir effacer que de le vouloir contrechanger. Aussi ay je dit quil failloit rendre bien fait pour
bien fait : or, ce n'est pas un bien fait sii ne procede d'un esprit aymant, doux, aggreable, officieux,
et sil ne regarde plus l'affection du bienfacteur que le bien fait. C'est pourquoy il faut rendre, sil se
peut, plus que l'on n'a pas receu, comme font les chams fertiles qui produisent plus de graines
incomparablement qu'on n'en a jetté dedans leur sein : car si vous 322 ne rendes que le mesme, c'est
plustost une restitution de rigueur qu'une gratitude d'affection et d'amour ; et en cela vous ne rendes
pas bienfait pour bienfait, car si vous ne rendes que ce que vous aves receu, il [70] n'y a point de
bienfait de vostre part. J'ay dit selon son pouvoir ; car, qui ne peut rendre aucun bienfait, quil face
tant [plus] 323 de tesmoignages et de reconnoissance en paroles, quil face force souhaitz pour le
bonheur du bienfacteur.
Il y a une vertu que l'on appelle juste vangeance, a laquelle il appartient de punir les
meschans et malfaiteurs, par ce qu'il est raysonnable qu'ilz reçoivent de la peyne pour leurs coulpes
et que, par ce moyen, il se face quelque reparation de la faute commise et du tort qui a esté fait au
prochain, soit par maniere de dommage qu'on luy a porté, soit par maniere de scandale ou de
mauvais exemple. Or, affin que ceste vangeance soit vertu, il faut qu'elle soit juste ; et partant elle
n'appartient qu'aux superieurs qui seulz ont le juste pouvoir de chastier, bien que tous ayent le
pouvoir de repouser et empescher l'injure. Et faut, outre cela, que telle vengeance se face en telle
sorte qu'elle ne passe point a la cruauté par exces, ni a la lascheté par defaut.
La vertu de verité consiste en une volonté perseverante de ne rien signifier au prochain,
soit par paroles, soit par autres signes, que selon la verité de nostre sentiment. Nous pouvons 324
celer nos sentimens quand il en est tems, mais si nous les voulons exprimer, nous le devons faire
fort veritablement et ne point mentir.
325 Or, quand nous disons nos sentimens, nous n'entendons pas parler des sentimens
involontaires que nous avons quelquefois contre nos prochains, mays de vrays sentimens que nous
avons selon nostre volonté superieure. Ainsy, si j'ay quelqu'aversion et repugnance a mon
prochain, pourveu que, selon ma volonté et resolution, je sois deliberé de l'aymer, non seulement
je dois luy tesmoigner de l'amour, mais je ne dois nullement luy tesmoigner mon aversion, car
cette aversion n'est pas'volontaire et si, [71] elle seroit scandaleuse ; et en verité je l'ayme, puisque
je l'ayme selon la partie maistresse et regente de mon ame326.
Et parce que cette vertu m'oblige de conformer mes paroles et mes gestes exterieurs a mes
sentimens interieurs et a la verité de ce que j'exprime, elle m'oblige aussi a rechercher la verité,
mais d'une recherche raysonnable et qui prend sa mesure de l'importance de la chose que je veux
exprimer. Car si je veux affirmer une chose de grande consequence, je suis obligé d'avoir un grand
soin pour sçavoir la verité ; si c'est une chose indifferente, il n'est pas requis de me mettre en peyne
pour m'asseurer de la verité, ains suffit que je die simplement ce que je croy estre veritable d'abord.
Si je raconte ce que Virgile dit de Junon, d'Œneas et de Priamus, il suffit que je die selon ce que
ma memoire me fournit et que je pense estre vray ; car, qu'importe-il quand je dirois bien une
chose pour une autre en chose si frivole ? Mais si je raconte les miracles de Nostre Seigneur ou de
321 de [payer]
322 [L'Autographe (un feuillet) des trois pages suivantes se conservait, en 1898, à Paris, au couvent de Notre-Dame de
la Charité, dit de Saint-Michel.]
323 [Mot disparu dans une déchirure du papier.]
324 Nous pouvons [taire la verité et la celer...]
325 mentir. [Mays pour vous affranchir de scrupule, saches que nous ne sommes pas obligés de dire tous nos
sentimens, ains seulement...]
326 Cf. tom. VI huj. Edit., p. 206.
62/332

7.3 Page 63

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Moyse, ou mesme d'autres histoires desquelles la verité importe a l'establissement de nostre foy,
je suis obligé d'estre grandement sur mes gardes a ne rien dire qu'en verité. Si je raconte comme
un seigneur ou une dame estoit (sic) vestus en telles occasions, pourveu que je die selon ce quil
m'en semble il suffit ; mays si je raconte leurs actions, par lesquelles on peut discerner silz ont esté
vertueux ou non, je dois estre plus discret et parler avec plus d'asseurance de la verité : car 327 le
mensonge n'a jamais aucun juste usage, c'est tous-jours un abus, pour utile qu'en soit la
consequence ; et n'en est pas de mesme comme de l'hellebore, car bien que nos cors puissent estre
gueris par le tourment des medicamens, les espritz le doivent voirement estre par le tourment de
la tristesse et repentance, mais non jamais par la coulpe. Or, puisque les signes sont ordonnés pour
exprimer les choses, nous nous devons cela les uns aux autres, de ne nous point decevoir par iceux,
les employant a signifier le mensonge et ce qui n'est point.
S'ensuit la douce affabilité, qui donne une aggreable [72] bienseance a nos conversations
serieuses, affin que d'un costé nous ne soyons ni trop blandissans, amadoüans et flateurs, ni de
l'autre trop aspres, austeres, rebarbatifs, durs, desdaigneux et fascheux ; mais qu'avec une
condescendance bien assaisonnee, nous traittions, en paroles, actions et contenances, suavement
et amiablement avec le prochain.
328 La suave amitié est une vertu differente de l'affabilité, car elle se prend a un chacun,
pour inconneu quil soit ; mays l'amitié ne se fait qu'avec privauté et familiarité, car c'est une
reciproque et manifeste affection par laquelle nous nous souhaitons et procurons du bien les uns
aux autres, selon les regles de la rayson et de l'honnesteté : dont j'ay parlé ailleurs, en
l'Introduction329 et au livre de l'Amour du prochain 330.
Apres, vient la liberalité, qui nous donne la juste estime et. affection des richesses, ne
permettant pas qu'on les prise plus quil ne faut, et par consequent nous porte a les despenser et
employer volontier et librement quand il est convenable, affin que d'un costé nous ne soyons pas
avares, soyt a ramasser et acquerir trop ardemment les biens de ce monde, soit a les retenir trop
chichement, et que d'autre part nous ne soyons pas prodigues, donnant a gens indignes, comme
sont les flateurs, bouffons, joüeurs, ni pour choses frivoles et vaines. On ne sçauroit dire lequel de
ces deux vices est plus dangereux. Certes, l'avarice ne proffite a personne, non pas mesme a l'avare,
auquel le bien quil a luy defaut et est autant inutile comme celuy quil n'a point. C'est un vray vilain
vice que celuy-la, et qui monstre une grande bassesse de courage : c'est pourquoy la prodigalité et
profusion des richesses seroit plus aymable, si elle n'engendroit. ordinairement l'avarice ; car il
arrive souvent que ceux qui se playsent trop a donner aux uns, affin d'assovir leur inclination en
cela, ilz 331 [73] …………………………………………………………………………………....
332 Mays sur tout ce qui regarde la justice, il y a une vertu que nous appelions œquité, qui
empesche que la justice ne soit pas injuste et que le droit ne se change pas en injure ; c'est cette
prudence qui modere les loix inferieures par les superieures, en sorte que une loy cede a l'autre
selon que la rayson requiert et que le legislateur mesme le diroit sil voyoit l'estat present des
affaires. Il faut rendre a chacun ce qui luy appartient : rendes donc a ce furieux son espee, et il en
tuera quelqu'un sur le champ ! Non, Philothee, cela ne se doit pas faire ; car bien quil faille rendre
a chacun ce qui est a luy, cela s'entend quand il n'en abuse pas au plus grand dommage du prochain,
et l'equité nous enseigne cela. La loy dit : Ne tues point333 ; mais si le voleur attaque vostre
personne et vous le tues pour vostre juste defence, qui vous en peut blasmer ? car la loy de la
conservation de nostre propre vie præcede celle de la conservation de la vie du prochain. La loy
dit : Chommés les jours de feste, ouyes la sainte Messe ; le fœu cependant se prend a la mayson,
ne l'esteindray-je donq pas ? Si faites, car la loy n'a pas entendu de vous obliger en ce cas la ; vous
327 car [d'user de mensonge...]
328 [Le Saint a écrit cet alinéa après coup, dans la marge de la page.]
329 Part. III, ch. XVII, XIX.
330 Ce « livre » était donc déjà commencé quand saint François de Sales écrivit ces pages.
331 [Nouvelle lacune, de deux pages, pour le moins.]
332 [La moitié d'un feuillet du Manuscrit original appartient aux Rdes Oblates de saint François de Sales, Paris. Il
comprend cet alinéa, qui occupe le recto, et, au verso, le fragment qui le suit dans notre texte.]
333 Exod.. XX, 13 ; Deut., v. 17 ; Matt. v. 21.
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feres bien un autre jour la feste et ouires bien un autre jour la Messe, mays vous ne sçauries eviter
ce grand dommage si vous n'y travailles maintenant. Ainsy donq, les loix veulent que par droit on
les modere.
De la force
334 ………………………………………………………………………………………….
A la force appartient la magnanimité, qui n'est autre chose qu'une vertu qui nous porte et
incline aux [actions [74] grandes 335] et relevees en chasque matiere et espece de vertu, non pour
le regard du bien quil y a en l'action grande de la vertu, mais pour le respect de la seule grandeur
de l'action. Car, par exemple, consideres d'un costé un homme qui ayme grandement la chasteté,
et d'autre costé un homme magnanime et de grand courage : l'un et lautre, au choix de la chasteté,
entreprendront la chasteté virginale comme 336 le plus haut et relevé degré qui puisse estre en la
vertu de chasteté ; mais l'un fait cett'entreprise pour le grand amour quil porte a la chasteté, laquelle
plus ell'est grande plus il l'ayme, l'autre fait la mesme entreprise, non pour l'amour de la chasteté
qui est en cette grandeur et hauteur de vertu, mays pour l'amour de la grandeur qui est en cette
chasteté : si que l'un cherche la perfection de la chasteté en la grandeur de cett'action, et l'autre
cherche la grandeur de l'action en la perfection de la chasteté. Or, comme cette vertu recherche la
vraye grandeur qui est es actions heroiques des vertus, aussi n'estime elle rien de grand que cela ;
c'est pourquoy ell'a ces proprietés, selon Aristote337 (qui neanmoins, au sujet de cette vertu,
tesmoigne asses la foiblesse de la philosophie naturelle en comparayson de l'evangelique) : 1. de
ne se plaire que fort sobrement entre les honneurs, pour grans et relevés quilz soyent ; 2. estre
egalement [modéré] dans l'adversité et les prosperités ; 3. fuir les menus et inutiles………. et
convenables ; 4. secourir …………………………………………………………… la rayson 338
……………………………………………………………………………………………………..
339 on recherche de la gloire par des moyens vains, ou pour des choses vaynes ou des personnes
vaines. Et en fin, nous evitons la pusillanimité ou decouragement, par lequel [75] nous fuyons les
grandes actions, les grans honneurs et les grans offices pour la trop grande apprehension que nous
avons de la grandeur, n'estimans pas nos forces asses dignement et selon leur mesure ; car, comme
les presomptueux entreprennent indiscrettement outre leur pouvoir, les pusillanimes
n'entreprennent pas selon leur pouvoir, ains laissent une partie de leurs forces inutiles, faute de
cœur pour les employer.
De la magnanimité depend la magnificence, qui nous porte non aux actions grandes des
vertus, mays aux grans et somptueux ouvrages qui requierent force despence ; car cette vertu nous
les fait entreprendre genereusement, destournant d'un costé une certaine sotte affection de
despence par laquelle on fait des frais inutiles et outre la bienseance, et d'autre costé une certaine
vileté d'esprit par laquelle on n'esgale pas la despence a la dignité et bienseance de l'ouvrage qu'on
entreprend.
Apres, vient la tressainte patience, par laquelle nous moderons les tristesses et fascheries
340 qui nous arrivent des maux ordinaires en cette miserable vie mortelle : la mort des parens et
amis, les bannissemens, les pertes, les maladies, les injures et opprobres, et autres sortes
d'afflictions de la vie mortelle ……….. de la vie, parce que les maux de la mort et les craintes 341
horribles pour la mort doivent estre surmontés par la force, comme il a esté dit. Or, la patience
334 [Par suite de la mutilation du feuillet, le commencement de ce chapitre manque.]
335 [Mots coupés.]
336 comme [la plus grande de toutes les...]
337 C. 3, lib. 4. Eth.
338 [Fin du fragment autographe.]
339 [Les onze lignes suivantes et les lignes 15-24 de la page 77 reproduisent le recto et le verso d'un fragment
autographe conservé au 1er Monastère de la Visitation de Paris. Le reste de notre texte, jusqu'à la 5e ligne de la page
81 est emprunté à l'édition Blaise, dont nous corrigeons les erreurs évidentes.]
340 L'édition Blaise et les suivantes ont fasderies.
341 Ce mot est substitué à choses qui se lit dans Blaise et les éditions qui l'ont suivi.
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7.5 Page 65

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nous fait supporter tranquillement ces afflictions pour l'honnesteté et le bien qu'elle reconnoist
estre en l'egalité de l'esprit et la bonn'assiette de l'ame entre ces occasions.
Or, quand, outre le mal que nous endurons avec moderation, 342 nous devons l'avoir
longuement : c'est a dire, [76] qu'outre le mal nous devons supporter une longue duree du mal, qui
est une grandeur en duree et estendile de continuation, nous n'avons pas seulement besoin de
patience, mays de longanimité, qui est la vertu par laquelle nous supportons ou une longue attente
du bien, ou une longue duree du mal. Et tant la patience que la longanimité sont requises, affin que
d'un costé nous evitions l'insensibilité, qui n'est autre chose qu'une certaine stupidité et brutale
lourdise par laquelle, comme si nous avions nos sens assoupis, nous ne sentons aucune douleur ni
tristesse de maux, et par consequent sommes hors de tout sujet de patience ; et d'autre costé, que
nous evitions l'impatience, par laquelle nous ressentons immoderement les afflictions et
contradictions.
En fin, la force produit la perseverance. Je ne dis pas le don de perseverance, car c'est une
grace toute divine dont nous avons parlé, en passant, ailleurs343 ; mays la perseverance qui est une
vertu par laquelle nous continuons et poursuivons un bien jusques a la fin, 344 contre la difficulté
et l'ennuy que la longueur et duree d'un affaire ou entreprise peut apporter. Mays quand, outre
l'ennuy de la duree et longueur du tems, nous avons encor des autres obstacles et resistances
exterieures qui s'opposent a la poursuite et continuation de nos exercices en la vertu et du dessein
que nous avons fait pour le bien, lhors nous avons besoin de la constance. Deux choses nous lassent
en un chemin : la longueur et esgalité, car, comme dit Aristote345, on se plait plus en un chemin ou
il y a par fois des [inégalités] et varietés, qu'en un chemin tous-jours uni et sans diversité, et les
pierres, les ronces, les fossés, les fanges et autres difficultés. Ainsy, au chemin de la vertu, deux
choses nous lassent : la duree et continuation de mesm'exercice, et contre cet ennuy nous avons la
vertu de perseverance ; et les autres difficultés et resistances, comme sont les oppositions des
hommes, nostre foiblesse, les murmurations, les remonstrances de ceux qui sont de contraire
opinion, [77] et toutes autres telles [choses] contre lesquelles la constance nous arme : en sorte que
nous ne sommes ni opiniastres et aheurtés pour continuer et vouloir poursuivre chose quelconque
contre rayson ; ni inconstans et legers pour nous laisser vaincre a la duree et longueur du tems
requis a nostre entreprise ; ni molz, tendres ou delicatz de courage pour nous laisser surmonter aux
autres difficultés.
Or, entre toutes les actions de force, il n'y en a point de comparable a celle de nos Martyrs
chrestiens : gens invincibles et invariables entre les plus divers et espouvantables tourmens qu'il
est possible d'imaginer, qui ont combattu contre les tyrans pour confirmer les plus excellentes
vertus de toutes, entant que Nostre Seigneur les a enseignees, et combattu par la seule volontaire
souffrance, qui les rend tant plus vaillans en toute façon. Car, comm'ont remarqué nos anciens
Peres, celuy qui souffre courageusement, il combat le mal present ; celuy qui attaque ou resiste,
combat le mal a venir ou evitable. Le martir estant le plus foible, fait l'office du plus fort, car il
garde la vertu pour laquelle il combat et demeure vainqueur. La souffrance n'est aydee d'autre
chose que de la vive force de la rayson ; mais l'attaque est. portee par la cholere, par l'esmotion et
impetuosité sensitive. Et aussi, le martir est parfaitement conforme a Nostre Seigneur, qui
tesmoigna sa charité non attaquant ses ennemis et les mesprisant, mays souffrant la mort, joint que
celuy qui meurt en se defendant, comme font nos Chevaliers de Saint Jean de Hierusalem contre
le Turc 346 …………………………………………………………………………………………..
La force sert de boucle a la crainte pour la moderer, la temperance modere les joyes, la
prudence les douleurs et la justice les desirs.
342 avec moderation, il nous faut supporter une longue duree du mal, et que nous n'avons pas seulement du mal,
mays que... [Ce membre de phrase, que les éditeurs précédents ont rattaché au texte, doit être une première leçon,
ensuite abandonnée, des lignes 31 de cette page et 1 de la suivante : « nous devons... du mal ».]
343 Tr. de l'Am. de Dieu, liv. III. ch. IV.
344 jusques a la fin, [sans nous laisser vaincre a...]
345 Problemata, Lectio V, 23.
346 [Le Saint avait-il laissé inachevée cette phrase, ou bien le copiste ne sut-il pas en déchiffrer la suite ?]
65/332

7.6 Page 66

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De la temperance ou moderation
La temperance est ordinairement nommee en l'Escriture Sainte, modestie, sobrieté,
honnesteté347. Or, comme [78] dit saint Augustin348, « c'est l'amour qui se donne tout a Dieu, » et
c'est le 4. fleuve 349 qui se respand sur nostre appetit concupiscible. La complaisance que nous
prenons es choses sensibles par le moyen de nos cinq sens corporelz attire puissamment nostr'ame
aux objetz de ces cinq sens, lesquelz estant bas, corporelz et caduques, rendent aussi nostr'ame
telle, quand elle est passionnee de leur delectation et jouissance. Et lhors, elle ne peut bonnement
se relever a l'objet intelligible et s'attacher si fermement par amour a Dieu ; car sa force et puissance
amoureuse, ou aymante, ou affective, s'escoulant et dissipant par les sens aux choses sensuelles,
elle est d'autant plus foible et alangourie pour les choses superieures et spirituelles. C'est pourquoy
saint Augustin a dit que la temperance n'est autre chose que « l'amour qui se donne tout a Dieu, »
c'est a dire l'amour qui ramasse toute sa vigueur pour aymer Dieu et, pour la ramasser toute, il la
divertit des objetz sensuelz esquelz elle se pourroit espancher et dissiper.
Mays parce qu'entre tous les sens il y en a deux qui sont plus grossiers, brutaux et
impetueux en leurs actes, et qui par consequent dissipent et divertissent plus furieusement et
desbordent la force affective de nostre ame, c'est a sçavoir l'attouchement et le goust (qui, comme
dit Aristote350, n'est presque qu'un certain attouchement par lequel nous nous appliquons
immediatement aux objectz les plus grossiers), partant la temperance modere les playsirs et
voluptés de ces deux sens principalement, bien qu'elle regie aussi les autres playsirs, soit interieurs
ou exterieurs, entant que par iceux la force affective pourroit estre mise en desordre et dissipee
contre la juste rayson. Or j'ay dit qu'elle les modere, parce que nostre nature, composee de cors et
d'ame, ayant besoin des playsirs sensibles, soit pour la conservation particuliere de chasque
personne, soit pour [79] la conservation de l'espece et race humaine, ce seroit egalement dementir
la rayson et violer ses loix, de vouloir estre sensuel en s'appliquant demesurement aux voluptés
des sens. Ainsy y a-il deux vices contraires a la temperance. 351
……………………………………………………………………………………………………..
Mays l'autre, qui s'appelle intemperance, est le grand vice du monde, par lequel on desire
les playsirs sensuelz outre mesure et sans discretion ; et c'est le vice qui attira le deluge352, qui fit
perdre les quatre cités et les fit fondre353 et en somme c'est le vice le plus infame et vilain, comme
dit Aristote354, qui nous rend pareilz aux bestes brutes, assoupit l'usage de la rayson et, comme dit
Hippocrate, le plus vehement de tous ces playsirs sensuelz n'est autre chose qu'une epilepsie
passagere. Et Aristote dit355 que tout animal est triste apres iceluy, hormis le coq ; mais l'homme
plus que tous les animaux, comme ayant en iceluy perdu la rayson. Vice brutal, qui rend comme
furieux et phrenetique l'homme avant qu'il le commette, epileptique en le commettant, triste et
melancholique apres l'avoir commis. Mays si l'intemperance passe jusques au dela de la nature, ce
n'est plus un vice, « c'est un monstre de vice, » dit Tertulien356 ; ce n'est plus un vice humain, dit
Aristote357, il est brutal et forcenerie.
Or, d'autant que les playsirs du goust et des autres sens sont donnés a nostre nature pour
servir a la conservation de chasque particulier, la regie d'en bien user c'est, comme dit saint
347 Prov., X, XII, 4 ; Galat., V, 23 ; Sap., VIII, 7 ; Rom., XIII 13 ; I Tim., II, 15.
348 Ubi supra, p. 51.
349 Saint François de Sales au début de ce travail a indiqué cet ordre : prudence, justice, tempérance, force (voir p. 44).
S'il met ici la tempérance comme « le 4. fleuve », c'est qu'ayant écrit ces pages à diverses reprises, il a dû oublier
l'ordre suivi au commencement.
350 De animal. generat., l. II, c. VIII ; De anima, l. II, c. X.
351 [Nous croyons qu'ici encore il y a une lacune.]
352 Gen., VI, 3, 5-7, 11-13, 17.
353 Ibid., XVIII, 20, XIX, 24, 25.
354 Ethica Nicomachæa, ll. III. c. X, VII, c. 1.
355 De animal., l. IV, c. IX.
356 De pudicitia, c. IV.
357 Ethica, l. VII, cc. I et V.
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7.7 Page 67

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Augustin358, d'en prendre autant que la necessité de la vie humaine et des offices d'icelle le requiert.
C'est a dire, qu'il faut premierement prendre ce qui est requis pour maintenir la vie : Ayant la
nourriture, dit l'Apostre359, et dequoy nous couvrir, nous en sommes contens. Mays non seulement
il faut prendre ce qui est pour la necessité, ains aussi ce qui est pour la bienseance, selon la varieté
des offices et occurrences de cette vie : c'est pourquoy on jeusne quelquefois, et quelquefois on
fait des [80] festins ; on s'habille mieux une fois qu'autre ; et Dieu mesme donne quelquefois du
pain seul a Helie360, quelque-fois il luy envoye de la chair361 ; quelquefois il donne du pain et du
poisson362, d'autres fois il donne du miel363 et de la manne364. La temperance sçait discerner le
quand et le comment 365 ……………………………………………………………………………
Mays si l'on prætend de chastier, corriger et moderer cet appetit en sorte qu'on puisse avec
une grande liberté d'esprit vaquer a Dieu, et en somme ramasser et recueillir toutes les forces de
son amour pour les employer en la dilection du souverain Bien, alhors on retranche tout a fait a
l'appetit charnel toutes les actions auxquelles il tend, et on le reduit a la parfaite et absolue chasteté,
que l'on appelle cælibat parce que, selon saint Hierosme366, que (sic) c'est quasi une celeste
beatitude d'estre hors du commerce de la chair pour estre plus attentif a celuy 367 de l'esprit ;
conformement a ce que dit le grand Apostre, I. Cor. 7. vers. 32 et 33, [34, 35] : Celuy qui n'est
point marié a souci des choses du Seigneur, comm'il plaira au Seigneur ; mais qui est marié a
souci des choses de ce monde, comm'il plaira a sa femme, et est divisé. La femme qui n'est point
mariee et la vierge a soin des choses qui sont du Seigneur, affin qu'elle soit sainte de cors et
d'esprit ; mais celle qui est mariee a soin des choses du monde, comm'elle plaira au mary. Or je
vous dis ceci pour vostre utilité, non point pour vous enlacer, mais tendant a ce qui est bienseant
et propre a vous joindre au Seigneur sans aucune distraction 368.
Notes, Philothee, que le grand saint Augustin a tiré de ce lieu la deffinition de la
temperance, quand il a dit que c'estoit 369 « un amour qui se donne tout entier a Dieu ; » car
l'Apostre monstre clairement que le principal but du cœlibat et la virginité est de se joindre et unir
plus entierement [81] a Dieu ; qu'en comparayson de la personne qui s'abstient parfaitement, la
personne mariee est divisee en ses affections, 370 partageant son soin en deux partz, bien
qu'inegales ; car tous-jours en faut il quelque partie pour aggreer au mari, et c'est autant de 371
moins en ce qui se pouvoit donner a Dieu, c'est tous-jours une distraction et un retranchement de
l'entiere et absolue attention que l'on eut donnee a Dieu. Mays, Philothee, cela ne s'entend pas en
sorte que les personnes mariees ne puissent pas estre tout entierement a Dieu aussi bien que les
continens et vierges : car 372 [combien de mariés] y a-il eu en l'Eglise, d'une tres eminente sainteté,
[plus grande même que celle de] beaucoup de vierges et continens ?
Aussi l'Apostre ajoute : Or, je dis ceci four vostre [utilité, non point pour vous enlacer]
………………… [bien que le cœur] de la personne mariee ayt ramassé tout son amour pour Dieu,
rapportant parfaitement a Dieu l'amour mesme et les actions de son mariage, si est ce que, au
moins, le cors est un peu divisé, distrait et alteré par les passions et sentimens necessaires a l'estat
358 De diversis quæstionibus, XXX. (P. L. t. XL, 19.)
359 I Tim., VI, 8.
360 III Reg., XIX, 4-8.
361 Ibid., XVII, 3-6.
362 Matt., XV, 32-37 ; Joan., VI, 5-13.
363 Cf. Ps. LXXX, 17.
364 Exod., XVI, 14-22, 31.
365 [Ici se termine le texte publié par Blaise. Un feuillet autographe conservé à la Visitation du Mans semble en être la
suite, mais avec une lacune avant le début ; Migne l'a donné au tome VI, col. 42.]
366 Adversus Jovinianum, l. II, § XXXVII.
367 a celuy [du Ciel]
368 sans aucun destourbier. [Vous voyes...]
369 c'estoit [une vertu qui se ramasse toute pour...]
370 en ses affections, [partissant entre Dieu...]
371 de [retranché de...]
372 [Le bas du feuillet a été coupé ; quelques membres de phrases et deux ou trois lignes au plus ont disparu. Nous
rétablissons entre [ ] les premiers, d'après le sens.]
67/332

7.8 Page 68

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nuptial, avec quelque sorte de messeance. C'est pourquoy, quant a la substance et essentielle
perfection de l'amour celeste, les mariés en peuvent avoir tout autant, et voire plus que les vierges
et parfaitz ; mais quant a la bienseance, dignité et honnesteté exterieure, les continens et les vierges
les devancent tous-jours. C'est ce que veut dire l'Apostre, selon que saint Augustin mesme l'a
remarqué au livre Du bien de la viduité373, quand il dit quil exhorte a ce qui est honeste et bienseant
; car il ne veut pas dire que le saint mariage ne soit honneste et bienseant, mais il advertit que l'estat
de continence et vierginité est plus seant et plus honneste, au moins de l'honnesteté exterieure.
Mon Dieu, Philothee, que la chasteté est belle, qui range [82] 374 l'appetit brutal de nostre
concupiscence a la pureté des Anges et Espritz caslestes, desquelz comme la pureté est plus pure,
aussi la nostre est plus vaillante, car ilz l'ont sans vertu, par nature, et nous la conquerons entre
mille hazars, par une continuelle guerre que nous faysons a nos ennemis et, ce qui est plus
considerable, a nos amis : aux sens, a l'imagination et a toute cette trouppe de sentimens rebelles
et mutins que nostre chair fournit a nostr'ennemi. Mays par ce que nostr'aage a produit mille et
mille cerveaux frivoles, 375 badins et voluptueux, qui ont mesprisé cett'angelique vertu, Philothee,
je diray encor seulement ce mot. La chasteté n'est pas une vertu oysivete (sic) et qui consiste en la
cessation des actions. Ah ! non, c'est une vertu hardie, genereuse, active, ains qui 376 fait une
continuelle guerre contre le plus fascheux ennemi qu'on ayt, duquel elle reprime voirement les
actions, mais non pas 377 …………………………………………………………………………..
ains, comme 378 la santé d'un homme gueri est plus forte bien souvent que celle d'un autre qui ne
fut onques malade, ainsy la chasteté d'un homme penitent est quelquefois 379 plus estimable que
celle d'un vierge. Qui ne præferera la chasteté de Magdeleyne convertie a celle de plusieurs vierges
qui ne furent jamais diverties ?
380 Mais la sainte pudicité est comm'une sentinelle qui, descouvrant quelques actions,
contenances ou paroles contraires a la chasteté et a [la] pureté, donne l'alarme au cœur, qui, comme
pour armer les frontieres, envoye de la chaleur et du sang au visage. Vertu marque de naturel
honneste, qui ne peut pas mesmement souffrir les signes de la deshonnesteté ni en soy ni es autres.
[83]
Or, la premiere resolution de 381 resister aux passions sensuelles 382, s'appelle continence
simple, selon les scholastiques383 et Aristote384 ; et lhors que cette resolution, se fortifiant par
l'exercice, devient parfaite, elle s'appelle temperance et chasteté : car la continence est semblable
a celuy qui a pris charge de domter un cheval ; la temperance et chasteté, a celuy qui l'a des-ja
façonné et domté. La continence est comme la fleur qui nous donne promesse du fruit, et
comm'un'aube qui nous annonce le jour. (Ceci doit estre mis au commencement du chapitre De la
temperance, puisque la continence n'est qu'un commencement de temperance.)
A la temperance est attachee la mansuetude, qui manie et modere l'ire et la cholere pour la
retenir dans les bornes de la rayson ; car l'ire estant bien conduite est bonne, et la mansuetude a
cette charge, qui neanmoins n'en use que fort rarement et seulement autant quil faut pour faire
roydir le courage es occasions ou il faut vaincre, surmonter et chastier. Or, parce qu'ell'est si
dangereuse et que c'est un ingredient si perilleux pour la vertu, il en faut user tres rarement, et lhors
seulement qu'on a des-ja acquis une grande maistrise sur ses passions ; autrement, en lieu d'en user
373 Cap. V.
374 qui modere [tellement]
375 frivoles, [gausseurs et contentieux,]
376 ains qui [ne cesse de combattre a...]
377 [Fin du verso du feuillet mutilé. Entre celui-ci et les quatre pages autographes et inédites gardées à la Visitation de
Milan, qui terminent notre texte, il doit manquer un autre feuillet.]
378 comme [apres la guerison...]
379 quelquefois [meilleure]
380 [Le Saint a ajouté en marge cet alinéa.]
381 de [s'abstenir des...]
382 charnelles
383 S. Thom., IIa IIæ, quæst. CLV, art. 1.
384 De virtutibus et vitiis, c. II.
68/332

7.9 Page 69

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ell'abusera de nous et nous præcipitera. Nostre Seigneur, en St Marc, 3 385, regarda les Scribes et
Pharisiens avec indignation et cholere, mais l'effect ne fut autre chose que de guerir ce pauvre
perclus, malgré leur obstination : ainsy nostre cholere ne se doit estendre qu'a vaincre les difficultés
qui s'opposent aux bonnes œuvres, affin que nous les facions nonobstant les contradictions.
La clemence est proprement es superieurs, pour moderer la 386 punition quilz doivent faire
des criminelz, affin que autant que la justice le permet, on n'use pas de 387 toute la rigueur, ains on
addoucisse la peyne ; car, comme Dieu 388 punit tous-jours moins que nous ne meritons et [84]
recompense tous-jours plus que nous ne meritons, aussi la clemence punit non selon la 389 rigueur
et severité, mais avec douceur, moderation et temperament : 390 en sorte neanmoins qu'evitans la
cruauté, ilz ne tumbent pas en la lascheté et 391 exces de douceur. Et tous-jours faut il prendre garde
au bien publiq, selon lequel c'est quelquefois une grande clemence d'user de rigueur et severité, 392
quand le chastiment des meschans est requis pour tenir les autres en bride et les gens de bien en
asseurance : dont saint Thomas dit393 que la severité n'est pas contraire a la clemence, ains est une
vertu qui sert a la rayson quand il n'est pas convenable d'user de clemence.
394 La pudeur ou juste honte est une passion vertueuse par laquelle on craint 395 et
apprehende le deshonneur pour quelque chose ou action vilaine ; et quand le deshonneur est arrivé,
la pudeur se change en confusion. C'est une passion grandement utile pour garder l'ame de mal
faire, comm'au contraire l'effronterie et impudence est un grand acheminement a toute sorte de
meschanceté.
L'honnesteté est une certaine 396 vertueuse affection que nous avons de rejetter tout ce qui
est contraire a la beauté, proportion, bienseance et ornement de nostre conversation et de toutes
les actions qui en dependent, tant interieures qu'exterieures. Et parce que l'exercice des voluptés
charnelles est le plus laid, desreglé, messeant, vil, vilain et deshonneste, l'honnesteté nous 397
retient plus fort pour ce regard ; et puis encor, comme en suite, ell'a soin de 398 repouser tout ce qui
est difforme et desordonné [85] au commerce des playsirs sensuelz, affin que rien ne s'y passe
contre la bienseance.
La sainte humilité, qui est la plus petite et neanmoins la plus necessaire de toutes les vertus,
n'est autre chose qu'une volontaire profession et reconnoissance de nostre vileté et abjection en ce
qui, en nous, [est] de nous mesme. Je ne dis pas une connoissance, mais une reconnoissance et
profession cordiale et volontaire ; parce que plusieurs connoissent quilz ne sont rien, qui ne le
veulent pas reconnoistre, advouer, ny professer399. Et je dis que nous reconnoissons et faisons cette
profession de nostre neant en ce qui est de nous mesme, parce qu'en ce qui est en nous de Dieu
nous ne laissons pas, pour l'humilité, d'avoir un extreme courage et une sainte hauteur d'esprit,
l'humilité n'estant nullement contraire a la magnanimité ; car l'humilité fait une juste estime de 400
ce qui est de nous en nous, comme la magnanimité de ce qui est de Dieu en nous401. C'est pourquoy
385 Vers. 5.
386 la [vangeance]
387 affin que [sans violer les termes de la justice,] on retranche...
388 Dieu [chastie]
389 non a la
390 temperament fil est vray que, evitant par ce moyen...]
391 et [fadesse]
392 et severité, [affin que l'exemple du chastiment de quelques uns empesche... tienne les autres en asseurance...]
393 IIa IIæ, quæst. CLVII, art. II.
394 Ceci va devant la sobrieté, car ce sont des acheminement a la parfaite temperance.1
1 [Ces deux alinéas sont en effet séparés du reste du texte par un trait horizontal.]
395 on craint fou on est confus des...]
396 certaine — [ noble et... noblesse et beauté de cœur qui nous fait suivre la...]
397 nous [range de plus pres pour ce...]
398 de [mettre ordrè a tout le...]
399 Cf. tom. VI huj. Edit., pp. 76, 400, 401.
400 de [ce que nostre abjection...]
401 Cf. ibid., pp. 75, 76 ; Introd. a la Vie dev., Part. III, ch. V.
69/332

7.10 Page 70

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le grand Apostre, qui ne s'estime pas digne d'estre appelle apostre402 en considerant ses defautz,
veut estre estimé de tout homme comme serviteur, officier de Dieu et dispensateur de ses
misteres403. Or, cette vertu a esté inconneue a la plus part des philosophes ; et je dis a la plus part,
parce que Platon a semblé la reconnoistre mesme envers Dieu, L. 4. De legibus404. (Vide Javellum,
Tractatu 4. Epitomes Philosophiæ Plat., c. I405.)406
……………………………………………………………………………………………………..
[La vertu d'humilité] est d'autant plus chere aux Chrestiens, auxquelz ell'est necessaire
affin quilz n'entreprennent rien d'eux mesme comme d'eux mesme, ains quilz veuillent dependre
de Dieu. La charité 407 donne la juste estime a Dieu, et l'humilité a nous mesme : et comme ceux
qui ont esté longuement parmi la splendeur ne voyent [86] goutte 408 en l'ombre ou en quelque
lumiere un peu obscure, ainsy ceux qui se sont addonnés grandement a l'estime de Dieu ne
s'estiment rien eux mesme ; comm'au contraire, ceux qui ont demeuré longuement, en tenebres,
venans a la clarté du soleil n'en peuvent presque soustenir la grandeur, laquelle leur est dautant
plus esclattante, ainsy ceux qui ont demeuré en la connoissance de leur neant admirent bien
davantage la majesté de Dieu. Et comme par l'humilité nous n'osons rien entreprendre sur nos
forces, aussi par la magnanimité nous entreprenons tout sur la faveur divine : c'est pourquoy
l'humilité nous rend vrayement magnanimes, comme l'orgueil donne une faulse magnanimité409.
Et comme l'humilité nous ravale en nous mesme devant Dieu, 410 elle nous fait aussi humilier
devant le prochain, car elle nous fait regarder qui nous sommes selon nous, et quel est le prochain
selon Dieu. En fin, l'humilité nous fait glorifier Dieu et vilipender nous mesme ; mays l'orgueil
nous fait estimer nostre 411 excellence ou comme plus grande qu'elle n'est, ou comme plus nostre
qu'elle n'est, et partant est contraire a l'humilité comm'a l'opposite.
La vileté de cœur non seulement nous ravale jusques a nostre neant, mais nous y laisse,
sans nous vouloir permettre [de voir] ce qui est de Dieu en nous ; l'humilité nous ravale en ce qui
est de nous, mais c'est pour nous faire plus estimer ce qui est de Dieu en nous. La vileté nous demet
et nous laisse sans cœur, sans mouvement, et, pour nous faire fuir l'estime de nostre propre
excellence, ne veut pas que nous considerons (sic) l'excellence de Dieu en nous. En somme, a
mesure que nous descendons par l'abjection et mespris de nous mesme et vraye estime de nostre
neant, nous remontons par l'estime de Dieu et de ses dons ; et c'est cette sainte vertu qui 412
supprime la fause estime de nous mesme produite par l'amour propre, affin que nous [87] estimions
plus les graces de Dieu, tant en luy, qu'au prochain, qu'en nous mesme.
Mais par ce que la sainte humilité est une vertu qui nous regarde principalement, nous
pratiquons l'humilité seulement 413 en nous mesme et sur nous mesme ; car, quant aux autres, nous
la prattiquons envers eux et non en eux ni sur eux : c'est pourquoy nous ne regardons pas en eux
ce quilz sont d'eux mesme, mais ce quilz sont en Dieu, et partant nous les estimons grandement,
et non pas nous. Car en fin, le mespris que nous faysons de nous mesme en l'humilité tend a nous
faire plus hautement 414 estimer Dieu et le prochain en Dieu, et nous aussi en Dieu, mais pour la
mesme rayson pour laquelle la charité nous commande d'aymer Dieu et le prochain. Et quant a
nous, il ny a pas besoin de commandement, pour la mesme [raison qu'] il n'y a pas besoin de
402 I Cor., XV, 9.
403 Ibid., IV, 1.
404 Platonis opera omnia, Marsilio Ficeno interprete (Lugduni, 1590, in fol.), p. 600.
405 D. N. Chrysostomo Javelli, O. F. P., Moralis Philosophiæ platonice dispositio (Venetiis, 1536, in-4°), Tr. IV, c. I.
406 [Ici finit la deuxième page de l'Autographe conservé à Milan. Comme il est intact et que, d'autre part, il y a une
lacune entre le dernier alinéa de notre texte et la suite de celui-ci, on peut supposer qu'une feuille entière du cahier
original manque.]
407 La charité [estime Dieu sur toutes choses...]
408 ne voyent goutte, [parmi des tenebres... lumieres...]
409 Cf. tom. VI huj. Edit., pp. 75-81.
410 devant Dieu, [aussi nous oste elle toute...]
411 qui [modere]
412 nostre [propre]
413 nous [nous humilions] seulement nous mesme, [et non les autres...]
414 plus hautement [distinguer]
70/332

8 Pages 71-80

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8.1 Page 71

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commander nostre estime, ni d'y appliquer la vertu.
Il y a encor une vertu qui range nostre esprit en l'estude et appetit de connoistre les choses,
affin que nous ne desirions sçavoir que ce qui est convenable, comm'il est convenable et autant
quil est convenable, et pour la fin convenable, en sorte que nous evitions d'un costé, la curiosité
qui nous porte au desir [de] sçavoir ce qui 415 ne nous appartient pas, ou d'autre façon quil
n'appartient, ou plus qui' n'appartient, ou pour 416 autre intention quil n'appartient, et d'autre part,
la negligence qui, par une contraire extremité, nous destourne d'apprendre ce qui nous est necesre
et convenable417. Certes, comme il y a une temperance pour le 418 goust corporel, aussi en faut il
une pour le goust de l'esprit : dont le grand Apostre a dit, Ro., 12 419, quil ne failloit pas plus
sçavoir quil 420 estoit requis de sçavoir, mais sçavoir a sobrieté on selon sobrieté ; comme [88] sil
vouloit dire quil [y] a une sobrieté pour l'esprit comm'il y en a une pour le cors.
Celle ci est suivie de la modestie, qui modere nostre maintien, nos mouvemens, gestes et
actions exterieures, et les reduit a la vraye bienseance, selon la varieté des personnes, des lieux,
des tems et des affaires421 ; a la charge, dit le grand saint Ambroyse, l. I. Off., c. 18 422, qu'il ny ait
rien d'affecté, car tout ce qui est fardé desplait ; et sil y a quelque defaut en la nature, il le faut
corriger par le soin, en sorte que l'on voye l'amendement, mais pur et sans artifice. (De ceci il y a
un chapitre en l'Introduction423 : De la conversation.) Et par ce que cette bienseance a une beauté
particuliere, qui de soymesme est aymable, la vertu qui nous affectionne a procurer cette beauté
est aussi particuliere ; bien qu'outre cela plusieurs dignes respectz nous obligent a cette modestie,
et sur tout l'amitié, affabilité et edification du prochain. Et c'est cette vertu que le saint Apostre
desire es Evesques, quand il dit 424 que l'Evesque doit estre orné (I. Tim., 3. v. 2.), ainsy que saint
Theodoret, Evesque de Cyr425, (et communement les Docteurs426, apres saint Thomas427, in ejus
locum) l'interprete ; par ce que le principal ornement, parement et embellissement de la personne
depend de l'honnesteté et bonne grace, et bienseance de son maintien et mouvement.
Il y a aussi un'autre modestie, qui modere et ordonne la bienseance es habitz, pareures,
logis, meubles, table, serviteurs et autres telles choses exterieures428. Aucuns l'appellent mal a
propos parcimonie, d'autres l'appellent mieux frugalité, d'autres honneste suffisance ; mays en
somme, c'est une certaine moderation qui reduit tout nostr'exterieur a la rayson, suffisance et
bienseance. Et outre cela, le grand saint Thomas429 adjouste la simplicité, qui non seulement
modere ces choses, mais contient nostre soin, affili quil ne s'espanche pas trop en ces choses
exterieures. [89]
……………………………………………………………………………………………………..
415 sçavoir plus quil
416 ou pour [une fin...]
417 Cf. tom. VI huj. Edit., pp. 131, 137.
418 pour le [boire et le manger...]
419 Vers. 3.
420 quil [ne failloit...]
421 Cf. tom. VI huj. Edit., pp. 131-134.
422 No 75.
423 Part. III, ch. XXIV. Vide tom. III huj. Edit., p. 224.
424 es [matrones] quand if dit [qu'elles soyent ornees...]
425 Interpr. Ep. I ad Tim., c. III. (P. G. LXXXII, 806.)
426 Cf. Cornel, a Lapide, in I Ep. ad Tim., III, 2.
427 Ep. ad Tim., III, Lectio prima, 2.
428 Cf. tom. VI huj. Edit., pp. 132, 143.
429 IIa IIæ, quæst. CLX, art. II.
71/332

8.2 Page 72

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IV. Fragments sur la Sainte Vierge430
C'est une verité, que qui ne se sauvera pas par Marie perira, comme tout ce qui estoit hors
de l'arche de Noë fut a perdition ; non que Marie soit cause absolue de la redemption, car c'est
Jesus, son adorable Filz, mais elle est le moyen duquel ce Redempteur s'est voulu servir en prenant
d'elle son humanité. Elle a esté, de toute eternité, preveuë, regardee et preclestinee pour estre Mere
de Jesus ; et, comme telle, ell'a esté plus aymee elle seule que tous les hommes et tous les anges
ensemble.
Marie veut dire Mere unissante, d'autant que c'est par cette Mere et dans son sein que le
Verbe s'est uni hypostatiquement a la nature humaine pour nostre salut. Par Marie le Verbe s'est
fait chair431, et nous pouvons dire : O Jesus, soyes moy Jesus, c'est a dire soyes moy Sauveur ; et
nous pouvons aussi dire : O Marie, soyes moy Marie, c'est a dire : Soyes nous Mere et nous unisses
a Jesus vostre Filz, affin qu'il soit nostre Espoux et que nous soyons ses espouses.
Dans le Ciel, toutes les vierges suivront l'Aigneau432 ; mais en terre, quelz admirables
vierges sont Marie et Joseph, que l'Aigneau suit luy mesme !
Si la femme de l'Evangile crioit dans les places publiques ou Jesus passoit : Beni soit le
ventre qui vous a porté et les mammelles qui vous ont allaité433, devons nous pas donner des
benedictions perpetuelles au sacré cœur de Marie qui a tant aymé Jesus ? O Vierge glorieuse, vous
aves receu le Verbe en vostre cœur avant que de le recevoir [90] en vostre sein, et vous estes plus
heureuse de l'avoir aymé souverainement et sans intermission que de l'avoir porté corporellement
en vostre sein et entre vos bras ; et c'est ce que Nostre Seigneur nous vouloit signifier quand il a
dit : Mays plustost bienheureux sont ceux qui font la volonté de mon Pere qui est aux Cieux434,
c'est a dire qui n'ont qu'un mesme esprit et qu'un mesme cœur avec Dieu. Marie n'avoit qu'un
mesme cœur et qu'un mesme esprit avec le Pere eternel et son mesme Filz unique Jesus, le seul
object de ses eternelles complaisances435.
Ah ! l'immaculee et incomparable Vierge Mere de Dieu ne fit jamais la douillette ni la
rencherie pour converser avec sainte Magdeleyne, et cela parce que Marie estoit non seulement
parfaitte vierge, mays parfaittement humble. Dans cet esprit elle receut saint Paul et saint Denys
Areopagite qui proteste436 qu'ayant veu Marie, s'il n'eust esté bien affermi dans la foy, il auroit pris
Marie pour une divinité.
O Mere de vie, que faysies vous en ce triste Calvaire qui estoit un lieu d'agonie et de mort
? L'amour severe du Pere eternel s'appliquoit a vostre ame, affin que par la douleur mortelle que
vostre cœur endura, vous fussies la premiere martyre de l'Eglise naissante et la Reyne souveraine
de tous les Martyrs.
Le Pere eternel a tant aymé le monde qu'il luy a donné son propre Filz437, ce Filz s'est livré
430 Ces fragments sont extraits d'un ancien Manuscrit de l'Année Sainte de la Visitation, qui n'est pas l'original de la
Mère de Chaugy, mais une copie de l'époque. L'annaliste, en les citant, les donne, comme paroles de saint François de
Sales ; il peut se faire, cependant, qu'elle leur ait fait subir des retouches, tout en conservant les pensées. Ils sont
reproduits ici sous toutes réserves.
431 Joan., I, 14.
432 Cf. Apoc., XIV, 4.
433 Luc., XI, 27.
434 Luc., XI, 28 ; Matt., XII, 50.
435 Cf. Matt., III, 17 ; II Petri, I, 17.
436 De div. Nomin., c. III.
437 Joan., III, 16.
72/332

8.3 Page 73

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luy mesme a la mort438 ; et nous pouvons dire que Marie, Mere de ce Dieu mourant, a tellement
aymé le salut du monde qu'elle a volontairement offert, son Filz a la mort et elle mesme en son
Filz. Le Filz est mort par la force de sa passion amoureuse pour les ames, et Marie par sa dilection
compatissante.
Helas, o Vierge sainte, les larmes de vostre divin Enfant dans la cresche n'estoyent que des
douces rosees, mais celles de sa sainte Passion sont des torrens et des mers d'amertume. Vostre
cœur douloureux et amoureux offroit les unes et les autres au Pere eternel, sçachant bien que [91]
c'estoyent les larmes d'un Dieu qui devoyent produire des joyes eternelles aux enfans de salut.
….. Elle estoit pasmee sans pasmer ; car si l'extremité de la douleur l'affoiblissoit, la force
de l'amour la soustenoit, et ne voyant les horreurs de la mort de son Filz que dans les beautés de
son amour, son ame sainte eut d'esgaux mouvemens d'amour et de douleur. Les uns et les autres
estoyent insoustenables a la nature, et Marie fust esgalement morte d'amour et de douleur au pied
de la croix de son Filz mort, si la grace de ce mesme Filz ne l'eust soustenue.
La sacree Vierge, eslevee a la dextre de son Filz, [est] la Generale des armees de Dieu, la
Gouvernante du royaume de l'Eglise, la Mere de toutes les saintes familles, le Refuge de tous les
coeurs. Qu'apres son Filz nous luy disions : O Sainte Vierge, les yeux de tous les croyans sont
fixés sur vostre majesté ; nous attendons le secours de vos graces, et si vous ouvres vos mains
liberales, nous serons tous remplis de benedictions439. O sainte et genereuse Gouvernante, que
commandes vous dans vostre estat de gloire que ce que vous aves commandé en vostre estat de
grace : Faites ce que mon Filz vous dira. 440
Le divin Espoux a pris playsir de mettre des pendans aux oreilles de cette Espouse441 : c'est
la clameur des pauvres442 et des necessiteux.
Consacres vos devotions du samedy a la Mere de Dieu ; medites quelques pointz de sa vie
et de ses vertus.
Revu sur un ancien Ms. de l'Année Sainte de la Visitation, conservé au
Monastère d'Annecy. [92]
_____
V. Sur le signe de la Croix443
Quand vous vous signeres, faut que vostre esprit se represente d'embrasser Jesus Christ
crucifié comme un bouclier contre tous ennemis, comme l'arbre de vie, comme la colomne
d'asseurance.
Imagines vous quelquefois que vostre cœur est un jardin et que, vous signant, vous y mettes
l'arbre pretieux de la Croix ; ou bien qu'il est comme une forteresse, en laquelle vous plantes cest
estendart ; ou qu'il est comme un cabinet, lequel vous fermes avec cette clef ; ou qu'il est comme
une lettre, laquelle vous scelles de ce sceau, affin qu'elle ne soit exposee a la veüe des ennemis,
suyvant le desir de l'Espouse qui dit : Mettes moy comme un cachet, ou comme un estendard sur
438 Galat., II, 20.
439 Cf. Ps. CXLIV, 15, 16.
440 Joan., II, 5.
441 Cf. Gen., XXIV, 30, 47.
442 Ps. IX, 13.
443 Le Bienheureux, écrit le P. Philibert de Bnneville dans la Vie du Saint, chap. XXXIII, p. 345, « faisoit le signe de
la Croix avec grand ressentiment de devotion, et donnoit plusieurs devotes considerations pour cet effect. » Et il cite
le fragment reproduit ici, auquel on ne peut assigner aucune date.
73/332

8.4 Page 74

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vostre cœur444. Et de la tires ce propos, de ne rendre jamais la forteresse qu'a Celuy a qui est ledit
estendart, ni n'ouvrir jamais le cachet qu'a Celuy a qui est la clef.
VI. De la charité dans les jugements445. Dieu seul doit juger. Mal
penser et parler mal du prochain est la marque la plus sûre d'une âme
vicieuse. Le portrait d'Antigone. Ceux qui jugent témérairement et
qui médisent sont des aveugles et des esprits pleins de malice.
Injustice, de vouloir être absous de ses fautes et de condamner les
moindres en autrui. Qui ne regardera son prochain avec pitié gâtera
toutes les parties de son âme. Le temps fera voir si nous sommes
meilleurs que ceux que nous jugeons. Exemples. Considérons nos
propres défauts, et nous ne verrons pas les vices du prochain.
Ne jugeons personne avant le tems446 ; cela appartient a [93] Dieu seul de juger ; il voit le
mouvement du cœur humain et l'homme ne voit qu'en la face. Mais lhors que la probabilité de
quelque action est si forte et qu'elle conclud avec tant de necessité que la rayson ne se peut desdire
de la convaincre, il la faut renvoyer a la surprise, a la promptitude, a la tentation ou, en toute
extremité, s'en desfaire et se l'oster de l'esprit et n'en point parler ; car
Toute verité qui n'est point charitable
Vient d'une charité qui n'est pas veritable.
Si les hommes vouloyent, ilz gousteroyent en ce monde les felicités des Espritz celestes et
n'auroyent point besoin, dit un ancien, de chercher d'autre paradis que celuy qui se rencontre en la
societé civile, laquelle, par la vertu de charitable union, ne feroit qu'une seule mayson de celles
qui sont separees en ce monde. Je vous asseure qu'il n'y a signe plus asseuré d'une ame vicieuse
que l'inclination a mal penser et a mal parler de son prochain.
Si tost qu'on vist le pourtrait d'Antigone, qu'Apelles avoit tiré obliquement et de sorte que
l'incommodité de son œil perdu estoit couvert par un trait de pinceau, il fut importuné de tout le
monde qui luy demandoit pourquoy il ne l'avoit pas peint comme il estoit : Ou est l'autre œil ? luy
disoit on. Mais vous, mes amis, repartit il, ou est le vostre ? Qu'ay je affaire de produire un defaut
en ma peinture, si je le puis couvrir sans offenser personne447 ? Voyes vous, ceux qui jugent mal
et qui mesdisent de leur prochain, ce sont des sangsues qui ne savent que tirer le mauvais sang et
laisser le plus pur dans le cors. Gens aveugles, qui crient contre la cruauté d'Abraham et qui, voyant
l'espee nue, n'apperçoivent point l'Ange de Dieu qui le benit et luy dit que son sacrifice est
aggreable au Seigneur des armees448. Espritz malicieux qui attaquent tout le monde, cœurs remplis
de ces mauvaises qualités qui se mettent entre la veuë spirituelle et l'object, et qui pensent avoir
rayson de croire que tout le monde est aussi corrompu que leurs pensees sont noires. Quelle
injustice de [94] demander d'estre absous de toutes les fautes que l'on fait, et vouloir condamner
les plus petites des autres ! Je n'ay encores veu personne qui se soit mal treuvé de dire du bien de
son prochain. Telle qu'est la chaleur interne, tel est le sang en nostre cors ; et en nostre ame, telle
444 Cant., VIII, 6.
445 Ce texte pourrait être un fragment du Traité de l'Amour du prochain que notre Saint avait en projet ; cf. ci-dessus,
p. 73. Il est cité par Mgr de Maupas, La Vie du Venerable Serviteur de Dieu François de Sales (Paris, 1657), Partie V,
chap. III, p. 336.
446 I Cor., IV, 5.
447 Plin., Hist. nat., l. XXXV, c. XXXVI.
448 Gen., XXII, 10-12.
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est sa beauté, que son amour vers son prochain. Qui ne regardera pas son prochain saintement,
charitablement et avec pitié, ou avec le respect qu'il luy doit comme chrestien, par ce
commencement il gastera toutes les parties de son ame : de la il deviendra superbe, insolent,
envieux, barbare, et ne retiendra plus aucun trait de l'image de Dieu.
Considerons-nous, et nous ne serons point tentés, dit le saint Apostre449. S'il nous semble
que nous sommes meilleurs que ceux desquelz nous parlons, il y a asses de tems pour leur ceder
la place, ilz rempliront peut estre nostre siege dans les Cieux ; ilz se releveront de nostre cheute,
et nous enseveliront sous leurs vielles ruines, car Dieu est puissant pour leur donner la main quand
ilz sont tombés450. Combien de voleurs y a-il dans les forestz qui serviroyent mieux Dieu que moy,
s'ilz en avoyent receu autant de graces ? Combien de miserables seroyent plus spirituelz que je ne
suis, si Nostre Seigneur leur avoit donné le loysir d'estudier et le moyen de le connoistre ?
Regardons les differences qui se sont treuvees entre saint Pierre et Salomon : l'un fut meschant,
l'autre le plus sage de son tems ; le mauvais se fit sage, et le sage devint insensé. Judas eut des
commencemens de sainteté plus accomplis que ceux qu'on se pourroit figurer en la personne
qu'aujourd'huy nous estimons la plus parfaitte ; saint Paul en eut de pires et fut plus cruel
persecuteur de l'Eglise de Jesus Christ451 que le plus eschauffé tyran de ce siede ne l'est a nos
pauvres freres qui sont parmy les infideles : celuy qui estoit Apostre et l'un des plus cheris de Dieu,
se rendit le plus malheureux du monde ; et celuy qui ne valoit rien devint le meilleur et le plus
ardent defenseur de l'Evangile.
Heureux celuy qui vit tous-jours en crainte452 et qui, estant occupé en la consideration de
ses propres defautz, n'ouvre point les yeux pour regarder les vices des autres. Les animaux
d'Ezechiel se portoyent devant leurs yeux et [95] ne marchoyent qu'en devant453 : ainsy les gens
de bien ne considerent que leurs imperfections, et les meschans ne vont que derriere eux pour
suivre a la piste les actions d'autruy. Et remarques cecy, que ceux que vous voyes si facilement
treuver a redire aux moindres fautes du prochain, d'ordinaire ces gens la en entretiennent des
grandes. En verité, c'est une experience reconneue, que la pluspart de ces personnes ne voyent que
des festus a leurs yeux, parce qu'ilz estiment que la veuë de leur frere est aveuglee de poutre454.
VII. Sentiment de saint François de Sales sur la conduite a tenir par les
pasteurs de l'eglise455. Comment un Supérieur doit sortir de la lecture et
de la méditation. Ne pas négliger le bon exemple. Quel doit être
l'abord de ceux qui commandent. Leur attitude envers ceux qui les
visitent. Les « malades honteux » et les remèdes pour les grandes
maladies de l'âme. Suivre une multiplicité de conseils est chose
dangereuse.
Un Superieur ne [devroit] sortir de la lecture des saintes Lettres, ni de la meditation, que
comme un capitaine sort du camp, pour voir en passant l'armee ennemie, affin de reconnoistre ce
qu'on y fait, pour en tirer du prouffit.
449 Galat., VI, 1.
450 Cf. Rom., XIV, 4.
451 Act., IX, 1, 2, 21 ; Galat., I, 15.
452 Prov., XXVIII, 14.
453 Ezech., I, 9, 12.
454 Cf. Matt., VII, 3-5.
455 Ce fragment est tiré de la Vie de tres-illustre Messire François de Sales, par Longueterre (Lyon, Cœursilly, 1624),
pp. 408, 412-414 ; on trouvera ci-après le contenu des pp. 409-411. Le biographe écrit à la page 407 : « Mais avant
qu'on luy ferme la bouche et que la mort luy serre les dents, tirons quelques salutaires instructions de ses discours
ordinaires, et les recueillons comme des miettes de pain qui tombent de la table... »
Il serait téméraire d'avancer une date quelconque, et ce n'est guère possible.
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[Il devroit] ressembler aux pasteurs, qui paissent les aigneaux, encores qu'ilz ne leur
donnent ni laict ni laine. [Il] ne devroit jamais negliger le moindre exemple pour edifier le
prochain, parce que tout ainsy qu'il n'y a si petit ruysseau qui ne meine a la mer, il n'y a trait qui
ne [96] conduise l'aine en ce grand Ocean des merveilles de la bonté de Dieu.
L'abord des personnes qui commandent doit estre comme l'entree de la boutique d'un
chirurgien, ou l'on ne fait que relever la moustache, anneler les cheveux et faire la barbe. Ilz doivent
s'accommoder avec ceux qui les viennent visiter, comme saint Jean, lequel n'ordonnoit aux soldatz
qui le venoyent treuver au desert sinon de garder les commandemens de Dieu456. Et comme en une
chambre particuliere l'on panse les malades honteux, l'on met le feu et le fer a des playes, l'on tire
le tronçon d'une espee du ventre ou la basle du cors, en cette façon le Superieur, apres avoir
reconneu la disposition de ceux avec lesquelz il traitte, doit entrer plus avant, et leur tirer de l'ame
des vielles habitudes, et par la representation des horribles conditions du peché, apporter le fer et
le feu d'enfer ou les legeres saignees ne servent de rien. Et en effect, il y a des meschans dont les
exces pour estre passés en coustume treuvent que le repentir est un crime, l'amendement lascheté
et l'innocence une honte et une pure niayserie.
On ne se doit point tant embrouiller la teste d'advis ni en multiplicité de conseilz ; les livres
sont plus croyables et moins interessés que ceux en qui nous avons confiance, et il faut prendre
garde que les autres se trompans ne nous abusent aussi, et ne sortent d'avec nous comme la guespe,
apres avoir laissé son aiguillon. [97]
VIII. Conseils aux supérieurs457. Porter remède aux moindres murmures.
Avec quelle discrétion un Supérieur doit accorder quelques
particularités. Les enfants qui pleurent. Bien examiner les sujets
avant de les recevoir. Certains esprits trop prompts sont comme la
pierre lancée avec la fronde. Mieux vaudrait pour un Ordre religieux
n'avoir que deux Maisons, plutôt que de les multiplier par la prudence
humaine. Les fondements de la vie religieuse.
Il disoit qu'on devoit en Religion remedier aux plus petitz murmures ; car, comme les grans
orages se forment de vapeurs invisibles, les grans troubles viennent de causes fort legeres.
Qu'un Superieur ne doit jamais accorder aucune particularité a un Religieux, si ce n'est
avec cette mesme discretion de saint Ignace458, et que s'il arrive de leur faire quelque grace, cela
ne doit arriver que quand ilz sont dans l'acces de leurs esmotions, comme un peu d'eau dans l'ardeur
de la fievre ; mais apres, leur faire connoistre que cela nuit a la santé. Aux mutineries des peuples,
on leur permet quelque chose semblable a ce qu'on tire des cabinetz pour appaiser les enfans qui
pleurent ; aussi tost qu'ilz ont cessé de pleurer, on le leur oste, et s'ilz recommencent a crier pour
le ravoir, au lieu de confitures on prend une petite verge.
Rien ne perd tant les Ordres que le peu de soin qu'on [98] apporte a examiner les espritz de
456 Luc., III, 14.
457 Comme la pièce précédente, ce texte est emprunté en grande partie à la Vie du Saint par Longueterre, p. 409. Mgr
de Maupas, Partie IV, chap. XV, le cite avec quelques variantes, comme ayant été adressé à l'Abbesse du Puits-d'Orbe.
Mais, outre que ce n'est pas le style de saint François de Sales écrivant à Rose Bourgeois, le biographe y a interpolé
un morceau de la lettre de janvier 1603 à Mme de Beauvillier, abbesse de Montmartre ; la supposition de la destinataire
paraît donc plus que douteuse, c'est pourquoi nous n'en tiendrons pas compte.
Un alinéa donné par Mgr de Maupas ne se trouve pas dans Longueterre ; il est placé à la fin de notre texte,
bien que nous ne puissions affirmer qu'il appartient au même écrit.
458 Il est spécialement recommandé aux Recteurs d'éviter les particularités et d'agir avec discrétion : Communes
Regulas ipse servet et particularia in cibo, indumentis et aliarum rerum usu quantum fieri potest vitet, et familiaritate
atque indulgenza cum quibusdam alios ne offendat. (Regules Rectoris, entrées dans la Compagnie de Jésus par décret
de la quatrième Congrégation générale, 1580.)
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ceux qui se jettent au cloistre. On dit : Il est docte, de bonne mayson, etc., mais l'on oublie qu'il ne
se sousmettra qu'avec difficulté a la discipline. On devroit leur representer plus de rigueur qu'il n'y
en a, et ne leur figurer point si avantageusement tant de consolations spirituelles ; car tout ainsy
que la pierre, encores que vous la jetties en haut, retombera en bas de son propre mouvement, aussi
plus une ame que Dieu veut a son service sera repoussee, d'autant plus elle s'inclinera a ce que
Nostre Seigneur voudra d'elle.
Ceux qui prennent ce parti par un despit d'avoir un courage haut avec une basse fortune,
apportent plus de desordre parmi les cloistres que de bon ordre en eux. Et lhors que d'autres s'y
rendent par un mouvement de promptitude que leur met en l'esprit quelque tendre et peu judicieuse
imagination, ilz font ni plus ni moins que la pierre au partir de la fronde, qui demeure arrestee
quand l'effect de la machine commence a manquer ; car, a nommer cela par son nom, ce sont des
pensees lourdes et grossieres, qui s'efforcent en vain de monter vers le Ciel ; ou bien des espritz
semblables aux cabanes qui sont sur le rivage d'un fleuve, que la premiere pluye emporte.
Il vaudroit mieux n'avoir que deux Maysons en tout l'Ordre, que de les estendre avec des
voyes de prudence humaine ; car tost ou tard les fondemens qui sont sur le sable et ne seront pas
en la pierre de Jesus Christ459, feront tomber tout l'edifice460.
……………………………………………………………………………………………………...
Voules vous que je vous die ce qu'il m'en semble, Madame ? L'humilité, la simplicité de
cœur et d'affection, et la sousmission d'esprit sont les solides fondemens de la vie religieuse.
J'aymerois mieux que les cloistres fussent remplis de tous les vices que du peché d'orgueil et de
vanité ; parce que, avec les autres offences, on peut se repentir et obtenir pardon ; mais l'ame
superbe a dans soy les principes de tous vices, et ne fait jamais penitence, s'estimant en bon estat
et mesprisant tous les advis qu'on luy donne. On ne sçauroit rien faire d'un esprit vain et plein de
l'estime de soy mesme ; il n'est bon ni a soy ni aux autres. [99]
IX. Similitudes. Premier recueil
1594-1598 461
(INÉDIT)
Pic, oyseau, fait des trouz dans les arbres pour y habiter ; si on y met des coins, il les fait
sortir par la vertu d'une certaine herbe. Democrite et Theophraste ; [Matthioli, édition de
Desmoulins, Epitre, p. 3 462 ; Theophr., Hist. Plant., l. IX, c. VIII.]
Ætiopis, herbe, a vertu d'ouvrir toutes choses closes 463. [100] Es mons d'Italie, une certaine herbe
459 I Cor., X, 4.
460 Cf. Matt., VII, 26, 27.
461 Les trois recueils suivants sont écrits sur du papier du même format que le plan du Sermon sur la Transsubstantiation
et la sainte Messe, placé en octobre 1594 (tome VII, pp. 226-230) ; ce sont aussi les mêmes caractères. Pour cette
double raison, nous proposons les dates de 1594-1598.
Le premier de ces Autographes est un feuillet écrit au recto et au verso ; celui-ci est partagé en deux colonnes,
dont celle de droite est restée blanche. Le second a deux pages ; le troisième n'en a qu'une, et même les deux tiers de
la deuxième colonne sont laissés en blanc, ainsi que la quatrième page.
462 Pour les emprunts à Mattioli, saint François de Sales semble avoir utilisé deux traductions. Les Commentaires sur
Dioscoride sont ordinairement pris dans la traduction d'Antoine Du Pinet (in-folio, Lyon, 1572) ; mais pour l'Epître
dédicatoire que Mattioli a mis en tête de son ouvrage, le Saint a dû se servir de la traduction de Desmoulins (in-folio,
Lyon, 1572). C'est donc à celle-ci que nous renvoyons.
Afin de ne pas trop charger les marges, les références des auteurs cités par saint François de Sales et ajoutées
par les éditeurs sont insérées entre [ ] et placées dans le texte même.
463 [Plusieurs passages de ce texte sont aussi insérés dans le recueil reproduit ci-après, p. 105. Pour éviter des
répétitions inutiles, nous en donnerons seulement les variantes. Il est encore des similitudes qui reparaissent dans le
recueil conservé à Harrow, commençant ci-après, p. 116, lig. 14 ; elles sont d'ordinaire plus étendues, nous les avons
laissées dans les deux textes.]
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deferre les chevaux. [Matthioli, ibid.]
Ictericz, id est qui ont la jaunisse, portans sous leurs piedz nudz la grande chelidoine,
guerissent. [Matthioli, Comment. sur Dioscoride, l. II, c. CLXXVI.] 464 Pedes, affectus, quibus
applicanda medicina, ut oculus, id est intellectus, curetur.
Les cors mors touchés du scordium ne pourrissent jamais 465. (Ex Mitridate et Galeno) ;
[Matthioli, Epitre, p. 4.] 466 Cur non tactum corpus Eucharistia ad incorruptionem servetur ?
Schites treuvent autour de Bætia l'herbe scitica, douce au goust ; la tenant en bouche, on
ne sent ni faim ni soif. [Matthioli, Epitre, p. 4.] L'herbe apellee par les Scithes hippice, fait le
mesme effect es chevaux ; dont lesdits Schites passent 12 jours sans manger. [Plin.467, l. XXV, c.
XLIV.]
468 Coriacesia 469 et callitia fait glacer l'eau. Pithagoras ; [Matthioli, Epitre, p. 4.]
Le suc de minais 470 cuit en eau guerit soudainement la morsure 471 des serpens si on les en
fomente ; et ceux qui [101] touchent ce mesme suc espandu par l'herbe, ou qui en sont arrousés,
meurent sans aucun remede. (Idem.)
Aproxis et naphta s'allume de loin au feu. (Idem ; Plin., l. XXIV, c. XVII, al. CI.)
Achemendon, en Tardistili, region d'Indie, plante sans feuilles, de couleur d'electrum ; la
racine reduitte en trocisques et beüe de jour avec du vin, fait dire aux malfaiteurs, estans
tourmentés, tout ce quilz ont fait. Democrite ; [Plin., ibid., c. XVII, al. CII.]
Le bois engraissé d'huile s'allume incontinent, sil est touché de l'herbe ariadnis cueillie le
soleil estant au signe du lion. [Ibid.]
En Elephantine, region d'Etiopie, croist l'herbe ophiusa, livide, horrible a voir ; beüe, fait
quil semble avoir devant les yeux menaces des serpens et choses espouvantables, dont ceux qui en
ont beu se tuent eux mesmes ; dont anciennement on contraignoit les sacrileges d'en boire. Le seul
472 vin de palme resiste a ce venin. [Mattinoli, Epitre, p. 4.]
Potamantis, pres le fleuve Inde : beue, fait devenir insensé par la representation de choses
miraculeuses 473. [Ibid.]
Theangelis, au Liban de Sirie : qui en boit, prædit les choses futures. [Ibid.]
Asciomenes, 474 arroüsee de vin, retire en soi ses feuilles 475. [Plin., l. XXIV, c. XVII, al.
CII.]
Appian Alexandrin escrit 476 que les Parthes, mis en fuitte par Marc Anthoine, pressés de
la faim, ont trouvé une certaine herbe que, qui en mange, oublie tout477 et [102] n'entend qu'a tirer
Le pic fait sortir, par une certaine herbe, un coin qu'on auroit fiché dans ses trouz quil fait dans les arbres.
Toutes choses closes s'ouvrent, touchees de l'herbe æthiopis.
464 Les pieds sont les affections auxquelles doit s'appliquer la médecine, afin que l'œil, c'est-à-dire l'entendement, soit
guéri.
465 Galien tesmoigne que les cors sont preservés de pourriture par l'attouchement du scordium.
466 Pourquoi l'Eucharistie ne conserverait-elle pas dans l'incorruption le corps qu'elle a touché ?
467 Dans ce recueil et les suivants, saint François de Sales a dû se servir, pour la traduction de Pline, de l'ouvrage
intitulé : L'histoire du monde de C. Pline second, collationnée et corrigée sur plusieurs vieux exemplaires latins et
enrichie d'annotations en marge, servant à la conference et declaration des anciens et modernes noms de villes,
regions, simples et autres termes obscurs comprins en icelle. Le tout fait et mis en François par Antoine Du Pinet,
seigneur de Noroy. (2 vol. in-fol., Lyon, 156-2.)
468 L'herbe
469 Coriacesia est le mot de Du Pinet ; maintenant ou dit coraceica.
470 Appelé actuellement minyas.
471 Minais cuit en eau guerit incontinent les morsures
472 quil semble qu'on aye tous-jours devant les yeux des choses horribles et menaces de serpens, de sorte que, en
cette peur, ilz se tuent eux mesme ; pource, on contraint les sacrileges d'en boire. Toutefois, le
473 Potamantis croit pres le fleuve Inde, laquelle beüe fait devenir les hommes insensés, choses miraculeuses se
presentans devant leurs yeux.
474 Asciomenes, selon Apollodore,
475 Le texte de Pline a : æschynomenes.
476 dit
477 Vide tom. VIII huj. Edit., p. 299.
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tous-jours des pierres de terre 478 ; et meurent ainsi en la peine 479. [Mattinoli, Epitre, p. 4.]
Le scorpion ne pique qui porte la racine de polemonia, ou la piqueure ne fait aucun mal.
[Plin., l. XXV, c. X, al. LXXII.]
En Judee, l'herbe appelé (sic) du lieu, baaras (Josephe, lib. De bello Judaico, [l. VII, c. VI,
3],) semble estre la lunaire. Qui la touche, meurt ; dont on attache a icelle un chien qui, l'arrachant,
en meurt, apres quoi elle ne nuit point. Mise sur les endiablés, ilz sont soudainement delivrés 480.
[Mattinoli, Epitre, p. 4.]
Achemenides jettee en l'armee des ennemis les fait trembler et fuir 481. Pline, [l. XXVI, c.
IV, al. IX ; Matthioli, ibid.]
Lote d'Egipte : ses fleurs et sa tige sur le soir se plongent en l'eau jusques a la minuit, le
tout s'en allant au fons sans qu'on la puisse attaindre de la main ; puis, peu a peu, se redresse et
retourne, les fleurs s'epanoüissent et les testes s'ouvrent et se treuvent bien 482 loin de l'eau. [Plin.,
l. XIII, c. XVII, al. XXXII.]
Aconit est tous-jours un grand poison ; beu neanmoins, il guerit la morsure du scorpion,
ces deux venins s'entretuans l'un l'autre et laissant en vie l'homme que l'un d'eux, prins a part,
tueroit. Telle est sa nature, quil tue la personne qui n'a dedans soi chose qui la puisse tuer 483. [Plin.,
l. XXVII, c. II.]
Napellus et anthora ou anthithora, laquelle anthithora [103] s'apelle autrement napel moysi
; il croit avec l'autre napellus et est son grand contrepoison. [Mattinoli, trad. Desmoulins, l. IV, c.
LXXIII.]
484 Accipiter, avium quas cæperit nunquam cor edit. Aristot., De Hist. animalium, [l. IX, c.
XI, 2.]
De Ætna, monte Siciliæ : in eo antrum in cujus circuitu maxima copia florum omni anni
tempore ; maximum autem esse spatium violis conspersum, quæ regionem proximam suave olentia
replent. Unde venatores cum canes, ab odore devicti fuerint, leporum vestigia insequi nequeunt485.
Aristot., De admir. aud.486
Venin de la tarantole, ainsy nommee pour Tarante, ville de la Poüille, fait que les piqués
chantent, rient, pleurent, veillent, dorment ; divers et innombrables effectz procedent de la diversité
du venin de ces animaux, ou de la diversité de la temperature de ceux qui en sont piqués. Vivent
dedans les blez, es trouz de la terre, et piquent les moysonneurs silz sont a jambes nues. C'est
merveille que la force de ce venin s'adoucit par la musique, car je puis testifier pour l'avoir veu,
dit Mathioli, [Trad. Desmoulins, l. II, c. LVII,] qu'aussi tost quilz oyent les instrumentz ilz perdent
leur mal, et sautent et dansent comme silz estoyent sains ; si les sonneurs d'instrumentz cessent,
ilz tumbent en terre et reprennent leur mal, sinon quilz ayent des-ja tant sauté que le venin soit
sorti par sueurs ; si que on loüe des menestriers qui, les uns apres les autres, sonnent jusques a ce
quilz soyent gueris. Neanmoins cependant, on leur donne de la theriaque et mithidrat et autres
contrepoysons. C'est un'espence (sic) de phalanges et airagnees.
478 Des guerres des Romains, livres XI, traduit en françois par Claude de Seyssel ; Lyon, 1544, in-fol. Guerre
parthique, chap. V.
Les Guerres parthiques ont été retranchées dans les éditions modernes parce qu'elles ne sont pas d'Appien.
479 Marc Anthoine, ont treuvé un'herbe de laquelle ceux qui en mangent ne se souvenoyent que de tirer tous-jours
des pierres hors de terre.
480 Baaras, herbe de Judee, semble a une flamme de feu. Qui la touche, il meurt, sil ne la porte pendante en la main.
Elle delivre des malins espritz.
481 s'enfuir.
482 Lotus d'Egipte : le soir se cache dans l'eau jusques a minuit ; le matin il sort, s'espanoüit et se treuve
483 L'aconit beu en decoction guerit la morsure des scorpions.
484 L'épervier ne mange jamais le cœur des oiseaux qu'il a pris.
De l'Etna, montagne de Sicile : dans cette montagne est une grotte à l'intérieur de laquelle pousse une très
grande quantité de fleurs dans toute saison ; mais la partie la plus étendue est semée de violettes qui remplissent de
leur parfum les alentours. Par suite, quand les chiens ont succombé à l'influence de ces douces odeurs, les chasseurs
ne peuvent plus suivre les traces des lièvres.
485 Cf. Tr. de l'Am. de Dieu, liv. IX. ch. II, et liv. XII, ch. III.
486 De mirabilibus auscultationibus, c. LXXXII.
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La Sardaigne est sans serpens, mais en lieu d'icelles (sic) ell'a un'espece d'aragne nommé
solifuga, parce [104] qu'elle fuit le jour, qui fait mourir ceux qui s'assisent dessus. [Mattinoli, trad.
Desmoulins, L. II, c. LVII.]
L'aconit a tout son venin en la racine, sans que les feuilles ni fruit face aucun mal. [Ibid., l.
IV, c. LXXIII.]
Quand le chamæleon s'enfle, il change de couleur ; c'est de crainte et d'apprehension, disent
les autres. Dæmocrite dit que sa langue arrachee, luy vivant, fait gaigner les proces a qui la porte
sur soy ; cela s'entend de la langue des advocatz, qui sont des vrais chamæleons. [Ibid., l. V, c.
CX.]
Corail, arbre, pierre ; ou il est, la foudre ne tumbe. [Ibid., c. XCVII.]
Revu sur l'Autographe conservé à la Visitation de Turin.
_____
X. Deuxième recueil
1594-1598
(INÉDIT)
Celuy ne sera offencé de l'ophtalmie qui portera avec soy la racine de la parelle sauvage.
[Mattinoli, l. II, c. CVIII.]
Les Schites ont treuvé un' herbe naissant a l'entour de Bætia, nommee schitica, fort douce
au gouster, qui est grandement estimee parce qu'en la tenant a la bouche on ne sent ni faim ni soif.
L'herbe aussi nommee des Schites hippice, a mesm' effect es chevaux ; et dit on que les Schites,
avec ces herbes, peuvent durer sans boire ne manger douze jours487.
On a donné tant d'honneur a l'herbe vetonica, que la maison ou elle sera plantee est
contregardee de tout mal. [Mattinoli, Epitre, p. 4.)
Adamantis, ainsy nommé (sic) parce qu'elle ne peut estre brisee non plus que le diamant ;
presentee aux lions, les fait tumber renversés a gueule ouverte. [Ibid.]
Les bestes deviennent estourdies et endormies si elles [105] sont touchees de l'herbe
therionarca qui croit en Capadoce et Misie. [Plin., l. XXIV, c. XVII, al. CII.]
Le solarium furieux, selon Dioscoride, represente plusieurs imaginations plaisantes, si on
boit une drachme de la racine avec du vin. [Mattinoli, l. IV, c. LXIX ; Plin., l. XXI, c. XXXI, al.
CV.]
Es Bactres, a l'entour de Boristenes, croit gelotophilis qui, beue avec vin et mirre, fait
sembler que l'on voye plusieurs choses, et ne cesse l'on de rire si on ne boit des pignons avec du
vin de palme, poivre et miel. [Plin., l. XXIV, c. XVII, al. CII ; Mattinoli, Epitre, p. 4.]
Une branche de la troisiesme espece de ramnhu, mis aux portes et fenestres, chasse tous
venefices, selon Dioscoride 488. [Matthioli, ibid.]
J'ay une racine trouvee par Francesco Calceolario, Veronnois 489 ; ayant trempé en vin une
nuit, qui en boit ne peut manger, pour faim quil aÿe, sil n'hume une cueilleree de vinaigre.
[Matthioli, l. IV, c. LXIX.]
En l'Inde occidentale, une racine produit des feuilles de sureau de la grosseur de la cuisse
d'un homme ; le suc, beu, fait incontinent mourir ; le reste, mis en farine, fait de tres bon pain et
nourrissant. [Matthioli, Epitre, p. 10.]
487 Vide supra. p. 101.
488 Il le dit en effet au mot paliure, qui est un rhamnus ; Pline l'appelle agrifolium, soit le houx.
489 François Calceolario était un apothicaire de Vérone, que Mattioli avait connu. La racine trouvée par lui est le
solanum majus, appelé en Italie belladonna, au dire de Mattioli.
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9 Pages 81-90

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Herbe des batteleurs 490. [Ibid., pp. 10 et 11.]
L'aymant tire de sa propre vertu le fer a soy, hormis celuy qui est rouillé ; pourveu aussi
que la pierre ne soit point frottee d'aux, ou quil ny ayt point de diamant aupres. [Matthioli, l. V, c.
CV.]
La pierre theamedes, qui croit es montaignes d'Etiopie non pas loin de la montagne de
l'Aymant, a la vertu du tout contraire, car si on luy approche du fer, incontinent elle le rejette et
chasse. Partant, ceux qui avec semelles de fer cheminent par la montaigne d'Aymant, ilz ne peuvent
[106] mouvoir les piedz, et par le mont Theamedes ilz ne se peuvent soutenir et ne font que
trepigner. Mais si quelqu'un pensoit que ce fut fable, je l'asseure que j'ay un (sic) piece d'aymant
lequel d'une partie tire le fer et de l'autre le rejette. [Ibid., p. 747.]
Revu sur l'Autographe conservé à la Visitation de Turin.
_____
XI. Troisième recueil
(INÉDIT)
Abarmon, multis ovis fœcundus piscis,
non ejicit ova nisi confricet ventrem ad arenam
contactu asperam, in illa pullos educat et
complet. (Albertus Magnus, De animalibus, [l.
XXIV, c. VI, 1].)
Abeston, lapis coloris ferrei, arabicus,
semel accensus non extinguitur ; habet
naturam lanuginis quæ dicitur pluma
salamandræ, cum humido modico unctuoso
pingui et inseparabili ab ipso, et illud fovet
ignem. (Alb., [De mineralibus, l. II, tr. II, c. I].)
Abides, animal marinum, cujus
conversatio et cibus in aquis ; postea mutatur
ejus figura et efficitur terrestre ; et tunc, cum
figura et natura, mutat nomen et dicitur astoiz
491. (Alb., [De animalibus, l. XXIV, tr. I].)
[107]
Absinthium servat pannos a tineis et
chartas a corruptione. (Alb., [De vegetab., l.
VI, tr. II, c. II.)
Acabo, animal arabicum, fugit ab eo
qui defert radicem colochintidis. (Alb., [De
animalibus, l. XXII, tr. II, c. I].)
Acanes, animal magnitudine cervi,
cujus fel est in auriculis. (Alb., [ibid.].)
Acanthis, avis ad instar passeris,
nidificat in spinis, quas si equus asinusve
tangat dorso eorum insidens mordet acriter, et
hinnitum equorum imitans, irridet. (Alb.,
L'abarmon, poisson très fécond en
œufs, ne rejette ses œufs qu'après s'être frotté
le ventre sur un sable âpre au toucher ; c'est sur
ce sable qu'il nourrit ses petits et les élève
complètement.
L'abeston, pierre couleur de fer,
provenant d'Arabie, une fois allumé ne s'éteint
plus. Il a la nature du duvet que l'on appelle
plume de salamandre, avec une légère
humidité onctueuse et grasse, et c'est cela qui
nourrit le feu.
L'abidès, bête marine, qui vit et se
nourrit dans les eaux ; ensuite il change de
forme et de nature, reçoit un autre nom et est
appelé astoim. [107]
L'absinthe protège les étoffes coatre les
teignes et les papiers contre la moisissure.
L'acabo, animal d'Arabie, s'enfuit
devant celui qui porte une racine de coloquinte.
L'acanès, animal de la taille d'un cerf,
et dont le fiel est dans les oreilles.
L'achantis, oiseau qui ressemble au
passereau, fait son nid dans les épines, et si un
cheval ou un âne s'en approche, il se pose sur
leur dos, et, imitant le hennissement des
chevaux, se moque d'eux.
Le lierre dessèche les arbres sur
lesquels il pousse parce qu'il en suce la
nourriture.
490 Il en est question dans l'Epître que Mattioli a mise en tête de ses Commentaires sur Dioscoride. Deux pages sont
consacrées à cette herbe servant aux charlatans pour tromper le public.
491 Albert le Grand l'appelle astoim, mais l'Autographe a très clairement astoiz.
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9.2 Page 82

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[ibid., l. XXIII, tr. I].)
Hædera siccat arbores quibus
agnascitur, quia sugit earum nutrimentum.
(Alb., [De vegetab., l. VI, tr. VI, c. XVIII].)
Accipitres et omnes aves rapaces
habent pennas, pedes et anhelitum venenosum,
maxime cum balneati fuerint, et pennas rostro
composuerint. Hipocritæ. (Alb.)
Accipiter avium quas cæperit nunquam
cor edit. (Aristot., De animalibus, l. IX, c. XI].)
Accipitres modo venandi differunt : alii
columbam humi insidentem, nunquam autem
volantem ; alii volantem, nunquam humi
insidentem ; alii nec humi nec volantem, sed
arboribus et locis altis insidentem rapiunt.
(Aristoteles, [ibid., c. XXXVI].) [108]
Accipiter prædam videns nec appetens,
nimis pinguis esse cognoscetur. (Alb., [l.
XXIII, c. XXII].)
Accipiter si sanguinem avium sæpe
bibat, fit fortior et audacior. (Alb., [ibid.].)
Adamas nec igne nec ferro mollescit,
sed sanguine hirci, maxime si hircus ante
biberat vinum ; penetrat ferrum et omnes
gemmas, præter calibet. Magneti superpositus
non permittit trahere ferrum. [Alb., De
mineralibus, l. II, tr. II, c. I ; Plin., l. XX, c. I.]
Caprimulgus, avis magna, sugit lac
caprarum, quarum sequitur exsiccatio lactis
vel earum excœcatio. (Alb. ; [Plin., l. X, c. XL,
al. LVI].)
Alauda, gallinago et coturnix nunquam
in arbore, sed humi consident. Accipitrem ita
timent, ut in sinum hominis fugiant et sinat se
capi. (Alb., [De animalibus, l. XXIII, tr. I ;
Plin., l. X, c. XXIII, al. XXXIII].)
Alces est animal figura, colore et
quantitate muli ; labrum superius habens ita
protensum, ut nisi retrograde incedat herbam
capere non possit. [Alb., ibid., l. XXII, tr. II, c.
I ; Plin., l. VIII, c. XV, al. XVI.]
Alforas, piscis ex putredine luti
generatur. In luto sine aqua procreatur ad
modum vermiculi, aqua descendente [109]
concrescit in piscem. Et dicunt nautæ : si
consumatur putrefactus usque ad caput et
oculos, adveniente aqua iterum vivit et diu
vivit ; alioquin parum. [Alb., ibid., l. XXIV, tr.
I.]
Aloes, cujus originem nemo novit,
invenitur in magno flumine Bacalonis (sic), et
retibus, ut corallus, expiscatur. [Alb., De
Les éperviers et tous les oiseaux de
proie ont les ailes, les pieds et l'haleine
venimeux, surtout quand ils se sont baignés et
qu'ils ont lissé leurs plumes avec leur bec. Les
hypocrites.
L'épervier ne mange jamais le cœur des
oiseaux qu'il a pris.
Les éperviers ne chassent pas tous de la
même manière : les uns prennent la colombe
quand elle est posée à terre, mais jamais quand
elle vole ; les autres, quand elle vole, et jamais
quand elle pose à terre ; les autres, ni quand
elle est posée à terre, ni quand elle vole, mais
quand elle se pose sur les arbres ou sur les lieux
élevés. [108]
Quand l'épervier voit la proie et ne
désire pas s'en emparer, c'est signe qu'il est trop
gras.
Si l'épervier boit souvent le sang des
oiseaux, il devient plus fort et plus audacieux.
Le diamant ne s'amollit ni par le feu ni
par le fer, mais par le sang de bouc, surtout si
le bouc a bu auparavant du vin. Il pénètre le fer
et toutes les pierres précieuses, à l'exception de
l'acier. [Le diamant] placé sur l'aimant, ne lui
permet pas d'attirer le fer.
Le caprimulge (engoulevent), gros
oiseau qui suce le lait des chèvres, d'où suit
pour elles le dessèchement du lait, ou bien leur
cécité.
L'alouette, la poule, la caille ne se
tiennent jamais sur un arbre, mais à terre.
[L'alouette] craint tant l'épervier qu'elle fuit
entre les bras de l'homme et se laisse prendre.
L'alce (élan) est un animal qui a la
forme, la couleur et la grandeur d'un mulet ; il
a la lèvre supérieure si avancée qu'il ne peut
paître l'herbe qu'en marchant à reculons.
L'alforas est un poisson qui s'engendre
de la pourriture de la vase. Dans la vase sans
eau il se forme à la manière d'un vers ; à l'eau
descendante il se développe en poisson. Et
disent les nautonniers : s'il est anéanti par la
putréfaction jusqu'à la tête et aux yeux, l'eau
revenant il vit de nouveau et vit longtemps ;
autrement peu. [109]
L'aloès, dont personne ne sait l'origine,
se trouve dans le grand fleuve de Babylone, et
on le pêche avec des filets comme le corail.
82/332

9.3 Page 83

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vegetab., l. VI, tr. I, c. II.]
Revu sur l'Autographe conservé à la
Visitation de Turin.
_____
XII. Similitudes et Notes sur la Sainte Vierge
[1602-1604 492]
(INÉDIT)
493De Beata Virgine et de quibusdam similitudinibus494
L. 4. des Propos de tab.495, q. 2 : Peintre Androcides peint Scilla, mais sur tout les poissons,
employant plus d'affection que d'artifice.
Au traitté des Regles de santé : la cime des palmiers, appellee la cervelle, est douce, mais
fait mal a la teste.
L'ache et le cumin : l'un croit mieux estant foulé et l'autre planté avec maudissons. (L. 7. q.
2.) [110]
Pommiers portant beau fruit (l. 5. des Propos, q. 8), parce qu'ilz recreent les 4 sent[iments].
Figuier acre, figue douce ; rue pres du figuier, douce (q. 9). L. 7, q. 2 : Figues sauvages
retiennent les franches sur le figuier.
Le cœur faut, et pasment les asnes et chevaux quand ilz portent des figues et pommes.
Miel au fons, vin au milieu, huile au sommet.
Noe Deum, subverso mundo, non
precatur496, at Moses pro populo precatur :
Parce populo, aut dele me de libro vitæ ; Ex. 32
497. Obliviscaris mei, quia ex eo populo
Messias.
Liber generationis498. Generationem
ejus quis enarrabit ? 53 Isaiæ499.
[Chose] subtile : Viam viri in
adolescentula ; Prov. 30 500, almah 501.
Osculetur me osculo oris sui : meliora
sunt libera tua vino, fragrantia unguentis
Noé ne prie pas pour le monde détruit,
mais Moïse prie pour le peuple : Pardonne à
ton peuple, ou efface-moi du livre de vie...
Oublie-moi, parce que de ce peuple sortira le
Messie.
Livre de la génération. Sa génération,
qui la racontera ?
... La trace de l'homme dans la jeune
fille (almah).
Qu'il me baise d'un baiser de sa
bouche : tes mamelles sont meilleures que le
492 L'apparence de l'Autographe, format, écriture, etc., est celle des quelques Sermons qui nous restent de 1602 ; c'est
sur cette apparence que reposent nos conjectures pour la date.
493 SUR LA BIENHEUREUSE VIERGE ET DE QUELQUES SIMILITUDES.
494 Ce titre est écrit par le Saint au coin supérieur de la quatrième page de la feuille ; les deux premières pages seules
sont remplies. Il est très possible que cette feuille ait fait partie d'un petit cahier dont les feuillets intérieurs auraient
été dispersés ; mais les notes qu'elle contient sont trop disparates pour qu'on puisse l'affirmer.
495 Plutarch., Opusc.
496 Gen., VI, 12, 13, VII, 21-23.
497 Vers. 11-13, 31, 32.
498 Matt., I, 1-16.
499 Vers. 8.
500 Juxta heb., v. 19.
501 Saint François de Sales en citant ce verset, a mis le sens de l'hébreu : La trace de l'homme dans l'almah
(adolescentula, c'est-à-dire la vierge), et il a ajouté almah pour expliquer la raison de sa préférence pour adolescentula
au lieu d'adolescentia de la Vulgate.
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9.4 Page 84

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optimis. Oleum effusum nomen tuum : ideo
adolescentulæ dilexerunt te nimis. Sunt
desideria. Vox dilecti mei, ecce iste venit saliens
in montibus, transiliens colles ; similis est
dilectus meus capreæ, hinnuloque cervorum ;
en ipse stat post parietem nostrum, et cætera.
Sed valde accommodanda sunt. (Cant. I502.)
[111]
Deut. 29 503 : Deus cum vellet invitare
populum ad recte vivendum, minatur de
facturum alioquin omnes maledictiones scriptas
in libro hoc, et dicent omnes gentes : Quare hoc
fecit Dominus ? et cætera. Sed hic liber
benedictionum est.
Deut. 31 504. Dicit Moises levitis : Tollite
librum istum, et ponite eum in latere Arcæ
fœderis Domini Dei vestri, ut sit ibi contra te in
testimonium.
[Ps.] 39 505 : In capite libri scriptum est,
et cæt., ut facerem voluntatem tuam, et cæt.,
Paulus506 Christo aptat.
Radicavi in populo honorificato, et in
parle Dei mei hæreditas illius, et in plenitudine
; Eccli. 24 507. Prov. 8 508.
509 Præfatio : servus Abrahæ, Eliezer,
tria habuit gaudia : 1° Quod filiam invenit ; 2°
quia pulchram ; 3° quia beneficam. Ecce
Rebecca ; contemplabatur eam, et cætera ; Bibe,
et cætera510.
Aurora appropinquante : Non dimittam
te511.
Custos, quid de nocte ? et cætera ; [Is.,]
21 512.
Paravi lucernam Christo meo513.
Rinoceros.
Alexandre allant en Asie contre Darius,
ne garde que l'esperance ne Perdiccas 514 avec
luy. [112]
Archelaus a son barbier : « Comment
voules vous 515 que je vous face la barbe ?
vin, plus odoriférantes que les parfums les
plus fins. Ton nom est une huile répandue :
c'est pourquoi les jeunes filles t'ont
passionnément aimé. Ce sont les désirs. Voix
de mon bien aimé, voici qu'il vient bondissant
sur les montagnes, franchissant les collines ;
mon bien aimé est semblable à la gazelle et
au faon des biches ; voici qu'il se tient debout
derrière notre mur, etc. Mais il faut beaucoup
accommoder ces paroles. [111]
Comme Dieu voulait inviter son
peuple à vivre vertueusement, il le menace, si
ce peuple n'obéit pas, de toutes les
malédictions écrites dans ce livre, et toutes les
nations diront : Pourquoi le Seigneur a-t-il
fait ces choses ? etc. Mais ce livre-ci est le
livre des bénédictions.
Moïse dit aux lévites : Prenez ce livre,
et placez-le à côté de l'Arche de l'alliance dit
Seigneur votre Dieu, afin qu'il soit là en
témoignage contre toi.
En tête du livre, il est écrit, etc., afin
que je fisse ta volonté ; Paul applique [ces
paroles] au Christ.
J'ai pris racine dans le peuple que
Dieu honore, et dans la part de Dieu, laquelle
est son héritage, et dans l'assemblée...
Préface : Eliezer, serviteur
d'Abraham, eut trois joies : 1. Quand il
rencontra la jeune fille ; 2. parce qu'elle était
belle ; 3. parce qu'elle était bonne. Voici
Rébecca ; il la contemplait, etc. ; Bois, etc.
L'aurore approchant : Je ne te laisserai
pas partir.
Sentinelle, où en est la nuit ?
J'ai préparé une lampe à mon Christ.
[112]
502 Vers. I, 2, II, 8, 9.
503 Vers. 20-29.
504 Vers. 26.
505 Vers. 8, 9.
506 Heb., X. 3, 7.
507 Vers. 16.
508 Vers. 22-36.
509 [3° servus Abrahas, Eliezer prestitit. : 1° Perrexit magno animo ; défiance juste, asseurance d'Abraham ; 2°...]
510 Gen., XXIV, 15-21.
511 Ibid., XXXII, 26.
512 Vers. 11, 12.
513 Ps. CXXXI, 17.
514 C'était un des généraux d'Alexandre.
515 voules vous [estre tondu...]
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9.5 Page 85

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Sans dire mot516. »
…………………………………………………
Revu sur l'Autographe conservé à la Visitation
de Turin.
_____
XIII. Recueil de similitudes
[1600-1604 517]
(INÉDIT)
……………………………………………………………………………………………………..
Apelles n'employoit jamais en ses tableaux que quatre couleurs ; ni le prædicateur, peintre
chrestien, ne doit employer que l'Evangile contenu es 4 Evangelistes. [Plin., Hist. nat., l. XXXV,
c. VII, al. XXXII.]
Il fit un Alexandre le Grand et un'image de victoire et un dieu de guerre lié et garrotté, et
un Alexandre le Grand assis en un char triumphal. Ces deux tableaux [113] furent mis par Auguste
au plus apparent lieu de sa place ; mais l'Empereur Claudius fit effacer la face d'Alexandre en tous
deux, et y supposa celle de l'Empereur Auguste peinte au vif. [Ibid., c. X, al. XXXV.] 518 Unus ex
vobis diabolus est519 mutatione animi, dum quæ Deus pinxit expunguntur et aliena supponuntur.
Sic hæretici corpori Scripturæ supponunt sensum malum.
Il fit un cheval a l'envy d'autres peintres qui vouloit (sic) emporter le prix sur luy, et se
doutant que la faveur de ses parties ne luy fit perdre le prix, il ayma mieux suivre le jugement des
bestes. Et ayant monstre les chevaux de ses parties aux chevaux naturelz, ilz n'en tindrent compte
; mais leur ayant monstré le sien, ilz commencerent a hennir contre : qui servit par apres de regie
aux espreuves de peintures. [Ibid., c. X, al. XXXVI.] 520 Bestiæ reddunt gloriam Deo, et inanimata,
et Gentes quæ legem non habent, quæ legis sunt faciunt521.
Protogenes, Rhodien, fit un Dalylus 522, un chien aupres de luy, avec un si grand soin quil
ne mangeoit, pendant ce tems, que lupins detrampés, de peur que le goust des viandes ne luy
changeast ou chargeast le sens. Le chien fut presque miraculeusement fait, car ayant peint ce chien
516 Plut., in Opusc. De nimis loquendo. circa medium ; de Archelao. (Vide tom. VIII huj. Edit., p. 319.)
517 Le Manuscrit autographe reproduit ici est celui qui a été mentionné dans la Préface de notre tome III, note (49), p.
XXXIV, et aussi au tome VIII, note (1900), p. 299. Mgr d'Arenthon d'Alex, évêque de Genève, parle dans son
attestation (voir ci-après, p. 148), d'un cahier de « seize feulliets », soit de 32 pages ; mais actuellement, le recueil
conservé à Westbury-Harrow n'a que treize feuillets, auxquels il faut en ajouter un autre le premier qui en a été
détaché pour être offert aux Oblats de Saint-Charles, de Westminster où, cependant, malgré de soigneuses recherches,
il n'a pas été possible de le retrouver. Nous en avons un calque. Le troisième et le septième feuillets ont été aussi
coupés et sont introuvables. C'est donc par erreur que dans la Préface de notre tome III il est question d'« un manuscrit
inédit de 52 pages » ; la copie occupe ce nombre de pages, mais l'Autographe lui-même en a 26, sans compter les deux
de Westminster.
L'écriture de ce recueil est à peu près la même tout au long ; les caractères sont ronds et serrés, ils se
rapprochent de ceux de la Defense de l'Estendart de la sainte Croix ; d'autre part, l'orthographe de certains mots est
d'une date postérieure à cet ouvrage. Par conséquent, il est assez difficile de fixer, même approximativement, celle du
Manuscrit ; mais il nous paraît presque certain qu'il faut le placer entre 1600 et 1604.
518 L'un de vous est un démon par le changement de l'âme, alors que les traits que Dieu a peints sont effacés et que des
traits étrangers y sont substitués. Ainsi les hérétiques substituent au corps de l'Ecriture un mauvais sens.
519 Joan., VI, 71.
520 Les bêtes rendent gloire à Dieu, ainsi que les êtres inanimés, et les Gentils qui n'ont pas la loi, fonf ce que la loi
commande.
521 Rom., II, 14.
522 La traduction de Du Pinet porte Ialylus, mais l'Autographe ici est très clair. Ialysus est le héros tutélaire de Rhodes,
que Protogènes avait sans doute représenté soit chassant, soit revenant de la chasse.
85/332

9.6 Page 86

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exquisement et du tout a sa fantasie (ce qui luy arrivoit peu souvent), il ne pouvoit rencontrer a
bien exprimer l'escume qu'un chien jette apres quil a couru. Ayant donq souvent osté les couleurs
quil avoit assisses avec un'esponge, voyant quil ne luy succedoit pas, il jetta l'esponge contre le
lieu du tableau qui luy desplaisoit ; et icelle estant pleyne des couleurs qu'ell'avoyt prinses et ostees
du tableau, elle les rendit en ce lieu la, et se treuverent [114] assisses si a propos que l'escume fut
faitte comm'il desiroit523. 524 Heu ! quam sæpe Deus nostros conatus ad bonum dirigit, nobis aliud
cogitantibus ! Sic... velut sp... et recte illis cecidi …………………………………………………
passionum 525 ………………………………………………………………………………………
Nealces en usa de mesme pour l'escume d'un cheval quil avoit peint, avec un garçon qui le
retenoit a le flatter526.
Le Roy Demetrius pouvant aysément prendre Rhodes du costé ou estoit la mayson de
Protogenes, defendit le feu de ce costé la, de peur de brusler ledit tableau du chien, et pour
espargner cette piece, il perdit l'occasion de prendre Rhodes [Ibid.] 527 Heu ! propter talem
picturam pepercit Demetrius urbi : cur non Deus propter justos, propter Virginem, propter
Eucharistiam, propter Filium et imaginem suam ?
Protogenes, audit siege de Rhodes, estoit en un petit jardin aux fauxbourgs, et ne laissa
jamais de travailler. Le Roy fit asseoir un guet a l'entour de son logis affin qu'on ne luy fit
desplaisir, et prenoit playsir a le venir voir travailler durant qu'on livroit les assaux. Neanmoins, il
ne se pouvoit faire quil n'eut presque tous-jours l'espee a la gorge pendant quil travailloit ; et luy,
pour monstrer qu'il ne s'en soucioit gueres, fit lhors un satyre admirable qui jouoit du flageolet et
l'apella anapauomenos528, c'est a dire s'esgayant. 529 Ibant gaudentes a conspectu concilii530. Omne
gaudium existimate, fratres, cum in varias tentationes531, etc. Exultate ei cum tremore532. [115]
Il fit un tableau ou il y avoit des religieuses de Bacchus 533 et des petitz satyres qui leur
rampoyent et gravissoyent contre. [Ibid., c. X, al. XXXVI, 40.] Dames de caremprenant courent
fortune des satyres, id est de perdre leur reputation et leur chasteté. 534 Satyrus salax et pruriens ;
item, mordax et maledicus.
Pireicus, comme semble a Pline535, vouloit assoupir son bruit, et [ne peignait qu'en petit]
volume et petites choses, comme boutiques [de barbiers, de cordonniers,] petitz asnes [char]gés
d'herbes, et semblables [menus fatras ; dont enfin on l'appela] paintre de bass'estoffe ; [et
néanmoins, à cause de son art, ces choses 536] menues se vendoyent plus que plusieurs grandes des
autres537 538. Les moindres besoignes faittes en charité et selon l'art de vraye devotion, comme
sont les mortifications des petites passions, les bas services et offices, les petites œuvres, valent
523 Plin., Hist. nat., l. XXXV, c. X (al. XXXVI). Cf. tom. VIII huj. Edit., p. 150.
524 Hélas ! combien souvent Dieu dirige vers le bien nos efforts, alors que nous nous proposions autre chose ! Ainsi...
comme sp... et je suis tombé bien pour eux des passions.
525 Le bas de l'Autographe est coupé ; des trois dernières lignes du recto il ne reste que les premiers mots.
526 Vide ibid.
527 Hélas ! à cause d'une telle peinture Démétrius épargna la ville : pourquoi Dieu n'en ferait-il pas autant à cause des
justes, à cause de la Vierge, à cause de l'Eucharistie, à cause de Celui qui est son Fils et son image ?
528 Plin., ibid. Cf. Tr. de l'Am. de Dieu, liv. IX, ch. XV.)
529 Ils sortaient du conseil remplis de joie. Mes frères, considérez comme le sujet d'une grande joie les diverses
afflictions qui vous arrivent, etc. Réjouissez-vous en lui avec tremblement.
530 Act., V, 41.
531 Jacobi, I, 2.
532 Ps. II, 11.
533 Du Pinet traduit ainsi Pline qui écrit simplement Bacchæ, c'est-à-dire Bacchantes.
534 Satyre lubrique et lascif ; de même, mordant et médisant.
535 Hist. n., LXXXV, c. X (al. XXXVII).
536 Par suite de la coupure signalée à la note (525), p. 115, une partie des cinq dernières lignes du verso manque. Nous
avons comblé cette lacune d'après le texte du Traitté de l'Amour de Dieu, Livre XI, chap. V (tome V, pp. 251, 252),
où se trouve la comparaison de Pireicus que saint François de Sales note ici ; on remarquera qu'elle se rattache
parfaitement aux premières lignes du recueil de Harrow. Il devait cependant y avoir quelques divergences entre le
texte du Traitté et celui des Similitudes, si on en juge par la place qu'occupèrent jadis les mots disparus de ce dernier.
537 Cf. Tr. de l'Am. de Dieu, liv. XI, ch. V.
538 Fin des deux pages qui se conservaient à Westminster.
86/332

9.7 Page 87

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plus que les plus grandes faittes laschement et sans devotion. 539 Charitas est mensura hominis,
quæ est Angeli, id est hominis et Angeli, Apoc. 21 540 ; arundo aurea sunt opera parva et nullius ex
se momenti, ut arundo, et tamen, quia aurea sunt, mensura caritatis541.
Vide c. illud 10 [al. XXXVII], l. 35 542 circa finem, de rationibus [116] propter quas pictores
antiqui muros non pingebant, nam multum juvant ad interpretationem loci illius Concilii
Laodiceni543, quem citant hæretici contra usum imaginum.
Arellius, peintre fort renommé un peu avant le regne d'Auguste a Romme, est oit sujet aux
femmes, et toutes les deesses quil faysoit estoyent faittes a patron des femmes a qui il faysoit la
court544. 545 Hæretici Virginem Divosque pingunt ut mulieres suas et ministres, et zelotipiam Dei
ut suam, justitiam Dei ut suam, misericordiam Dei ut suam, potentiam Dei ut suam : unde ex
Joanne Baptista, mollem faciunt ministrum et mollibus vestitum546 ; ex Virgine, puellam de trivio.
C. XI [al. XXXVIII] : Lepidus estant triomvir, fut invité par les magistratz de Romme en
une mayson de playsance tout environné de boys ; les oyseaux ne le laisserent dormir de toute la
nuit, de quoy se pleignant le lendemain, ilz firent peindre un grand parchemin en forme de dragon,
et ce fantosme mis a l'endroit du lieu ou il dormoit fit taire tous les oyseaux. 547 Umbra peccati
obmutescere facit Angelos piosque.
Nealces voulant representer le rencontre de l'armee des Ægiptiens et de celle des Perses,
tous (sic) deux navales, sur [le fleuve] du Nil, et ne pouvant contrefaire l'eau du [Nil pour ce qu'elle
est semblable à] la marine, il peignit [un asne beuvant à bort de riviere et un crocodile qui le
guettoit 548.] [L. XXXV, c. XI, al. XL.] [117] …………………………………………………….
L. 22. c. 21 [al. XXIX], et l. 2. c. 41 : Heliotropium se contourne, feuilles et fleurs, avec le
soleil, mesme en tems couvert, et la nuit il serre sa fleur bleüe. (Dioscoride dit qu'ell'est blanche
en l'absence du soleil. [L. IV, c. CLXXXV].) Addition : Quasi toutes fleurs jaunes suivent le soleil,
mais non les feuilles qu'en celle ci549. 550 Perfectus amor omnia omnino convertit ad Christum, et
folia, id est minima et naturalia.
Il y a en l'isle de Cypre, les Marses, les Psylliens et les Ophyogenes qui font fuir les serpens
et guerissent ceux qui en sont mordus a leur toucher seulement la playe551 ; item, ceux de l'isle
Tentyris, qui est au Nil, ont si grande proprieté contre les crocodyles, qu'a oüir seulement leur
voix, les crocodiles s'enfuyent552. Ceux qui ont le cors ainsy medicinal et privilegié, par leur seule
presence allegent ceux qui sont mordus des animaux qui leur sont contraires. 553 Si tetigero
539 La charité est la mesure de l'homme et celle de l'Ange ; c'est-à-dire de l'homme et de l'Ange. Le roseau d'or, ce
sont les œuvres petites et de nulle importance en elles-mêmes, comme le roseau, et cependant, parce qu'elles sont d'or,
elles sont la mesure de la charité.
Voir livre XXXV, chap. X, vers la fin : raisons pour lesquelles les peintres anciens ne peignaient pas les
murs, car elles aident beaucoup à l'interprétation de ce passage du Concile de Laodicée (sic) que citent les hérétiques
contre l'usage des images.
540 Vers. 15, 17.
541 Cf. Tr. de l'Am. de Dieu, liv. XI, ch. V, sub finem. et VI.
542 Plin., Hist. nat.
543 Pro Concil. Elviræ, can. 36.
544 Plin., Hist. nat.. l. XXXV, c. X (al. XXXVII. Cf. Introd. a la Vie dev., Part. I, ch. I.
545 Les hérétiques peignent la Vierge et les habitants du Ciel comme leurs femmes et leurs serviteurs, et la jalousie de
Dieu comme la leur, la justice de Dieu comme la leur, la miséricorde de Dieu comme la leur, la puissance de Dieu
comme la leur ; aussi font-ils de Jean-Baptiste un serviteur efféminé et vêtu de vêtements efféminés, et de la Vierge
une fille de carrefour.
546 Matt., XI. 8.
547 L'ombre du péché fait taire les Anges et les hommes pieux.
548 Ici encore deux lignes et demi du bas du feuillet sont coupées, mais on a pu suppléer à cette lacune par la traduction
de Du Pinet. (Voir ci-dessus, note (467), p. 101.)
549 Cf. Tr. de l'Am. de Dieu, liv. VIII, ch. XIII. et liv. XI, ch. III.
550 L'amour parfait tourne entièrement tout vers le Christ, même les feuilles, c'est-à-dire les choses les plus petites et
naturelles.
551 Plin., Hist. nat., l. VII. C. II. (Cf. tom. VIII huj. Edit., p. 1-5.)
552 Ibid., l. VIII, c. XXV (al. XXXVIII). Cf. tom. VIII huj. Edit., p. 147.
553 Si je peux toucher la frange. Qui m'a touché ?
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fimbriam554. Quis me tetigit555 ?
[Plin.,] l. XXVIII. c. III [al. VI] : Ceux qui ont autrefois esté morduz des chiens enragés ou
des serpens, encor quilz soyent gueris rengregent les playes de ceux qui en sont malades a
s'approcher seulement d'eux556. 557 Quam facilis est casus eorum qui cum peccatoribus versantur !
Nemo habitare debet cum iis cum quibus semel peccavit, nisi cauté, nam plagæ etiam obductæ
reviviscere et recrudescere faciunt vulnera.
Un serpent acharné est malaisé a oster et arracher si ce n'est de la main gauche558, 559
Peccator peccato addictus, maxime carnali, vix nisi flagellis abigitur. (Ibid.)
Il ne faut jamais desesperer de la vie d'un malade pendant qu'on se peut mirer en la prunelle
de ses yeux. [118]
560 Dum quis clares habet oculos et nitidos, id est judicium, bene est ; at judicio corrupto,
ut in hæreticis, actum est.
En l'isle de Syros, une pierre mise par quartiers nage sur l'eau ; brisee, va a fons. L. 36, [c.
XXVI, al. XVI]. 561
……………………………………………………………………………………………………..
……………………………………………………………………………………………………..
……………………………………………………………………………………………………..
Napellus et anthora ou anthithora, l'un pres de l'autre, contrepoison. [Mattinoli, Comment.
sur Dioscoride, l. IV, c. LXXIII 562.]
Les dauphins n'ont nulles oreilles, et neanmoins ont l'ouÿe delicate et se playsent a la
musique ; ni aucun nez, et sentent parfaittement. L. XI, c. 37 [al. L].
Le grand duc, en latin bubo, et le hibou cournu sont seulz entre les oyseaux qui ont les
oreilles cornues. Les monteures et bestes a selle parlent par les oreilles et monstrent ce qu'elles
pensent. (Ibid.)
Tous animaux ont le cœur au milieu de la poitrine, l'homme sous le tetim (sic) gauche. [L.
XI, c. LXIX.] Les seulz poissons, entre tous animaux, ont la pointe du cœur contre la bouche. Le
cœur s'estressit contre bas, et la palme aussi. 563 Justus ut palma florebit564.
Le cœur est la premiere partie qui se forme et qui vit, les yeux la derniere565 ; et ceux ci
meurent les premiers, le cœur le dernier. On diroit que c'est un animal a part, sautelant et se remuant
; ceste seule partie n'est jamais malade, car la premiere offence la fait mourir. [Ibid.]
Tous animaux qui ont le cœur dur sont estimés brutaux. Le petit cœur est hardi ; le grand
ou gros, timide.
Le jour que Cæsar fut fait dictateur et quil chargea la robbe de pourpre, il fit deux sacrifices,
en tous lesquelz ne se treuva nul cœur es bestes quil sacrifia. 566 Cæsar, [119] eversor reipublicæ
a cædendo diabolus quos sacrificat in die suæ dictaturæ, id est dictando eis mala, excordat. L. XI,
c. 37. [al. LXXI].
Bœufz seulz se paissent a reculons ; l. 8. [c. LXX].
554 Matt., IX, 21.
555 Luc., VIII, 45.
556 Cf. Introd. a la Vie dev., Part. III, ch. XXI.
557 Combien est facile la chute de ceux qui fréquentent les pécheurs ! Personne ne doit habiter avec ceux avec qui il a
une fois péché, si ce n'est avec précaution, car les plaies, même cicatrisées, font renaître et se rouvrir les blessures.
558 Cf. tom. VII, p. 470.
559 Le pécheur attaché au péché, surtout au péché de la chair, ne peut guère être délivré que par les fouets.
560 Tant qu'on a les yeux clairs et brillants, c'est-à-dire le jugement, cela va bien ; mais quand le jugement est corrompu,
comme chez les hérétiques, c'est fini.
561 Au verso du feuillet autographe, deux ou trois lignes manquent et le feuillet suivant a été enlevé.
562 Voir ci-dessus, note (462), p. 100.
563 Le juste fleurira comme le palmier.
564 Ps. XCI, 13.
565 Aristot., De gener. animal., l. II, c. IV. (Tr. de l'Am. de Dieu, liv. XI, ch. VII, initio.)
566 César, le destructeur de la république, [ne trouva pas de cœur dans les bêtes qu'il sacrifiait] ; quant au diable, il
arrache le coeur de ceux qu'il immole, le jour de sa dictature, c'est-à-dire en leur dictant le mal.
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Echeneis 567 arreste le navire, fait retarder l'issue d'un proces, fait porter l'enfant a terme ;
salé, attire l'or tumbé dans un puy, pour profont (sic) qu'il soit. L. 9. c. 25 568.
Chastagnes ou herissons de mer 569 ont la bouche au milieu du cors, tournee contre terre.
Prevoyent la tempeste, car par leur rondeur estans aysés a tournebouler ça et la, ilz se chargent de
pierres pour s'appeusantir ; les mariniers les voyans aynsi, ont soudain recours a l'ancre. [L. LIX,
c. LI, al. XXXI.]
Es Indes, arbre retirant au terebentim porte des amandes tres douce[s]. [Theophraste, Hist.
Plant., l. IV, c. IV.]
Au royaume de Turquestan 570, une plante, raphanus, attire les chevaux par son odeur, et
neanmoins les fait mourir ; Alexandre le Grand passant par la, perdit presque toute sa cavalerie.
[L. XII, c. VIII, al. XVIII.]
Si ta vigne est maigre, metz au pied, en sa racine, la cendre de ses sermens (sic). 571 Caput,
radix hominis ; serment, la fin. Plinius, l. 17, c. 9. [al. VI], et c. 28. [al. XLVII]. Pour garder que
les raysins ne tumbent, jette de (sic) cendres sur la racine ; si ell'est sterile, mesle de fort vinaigre
avec cendres et en enduis les racines.
Les palmiers d'estre pinsés et mordus, se nourrissent es eaux salees et cendrees. [Idem.] 572
Mortificatio conservat opera et producit. [120]
Amandiers doux deviennent amers si une chevre les leche tant soit peu573 ; les amers
deviennent doux si on les perce au fons avec une teriere pour en faire sortir le suc574.
Les aspicz s'enflent le col voulant jetter leur venin, et ni a remede a leur morsure que de
coupper le membre ou chair mordue. Il a la veüe courte. (Pl., l. 8. c. [35, al.] 23 ; Diosc., l. 6, c. 5.)
La plaÿe est petite comme si ell'estoit faitte de la pointe d'un'eguille, sans enfleure ; les patiens se
sentent incontinent les yeux offusqués et couvers, diverses douleurs par tout le cors, legeres et non
sans quelque playsir575.
Le ptias jette son venin en crachant ; remede, de boire quantité de vinaigre. Le ptias fait
devenir sourd. [Mattinoli, l. VI, c. LIV.]
Le basilic (lat. regulus, de la longueur d'un empan) fait mourir a la seule veüe et aleyne
(sic), non seulement les hommes, mais les serpens576. Leur (sic) trouz et cavernes se connoissent
a leur puanteur, ou les belettes entrent, les faysant mourir par leur haleyne, et meurent elles
mesmes. Il va droit, la teste levee despuis la moytié du cors ; il a une tache blanche sur sa [tête],
comme un diademe.
Le serpent se despouille premierement la teste577, puis le reste, et non en un'heure mais en
24 : ainsy nous devons 578 scindere primo corda, et non vestimenta579. Matthioli, [l. VI, c. LIV ;]
Pline, Aristote, [De animal., l. VIII, c. XVII.]
Ichneumon, dit rat d Inde, animal ægiptien, se veautre plusieurs fois en la fange et autant
de fois se seche au soleil, et, ainsy armé de limon, assault l'aspic et, sans estr'offensé de luy, le
prend a la gorge. L. 8. c. 24, [al. XXXVI], Plin.
Le crocodile, saoul de poisson du Nil, s'endort sur le gravier, et le roytelet, oyseau, pour
prendre sa curee, vient sauteler a l'entour de sa gueule, la nettoyant et pique tant avec le bec pour
la luy faire ouvrir, ce quil fait ; et ce petit oyseau luy cure les dens et le gosier, a quoy il s'endort a
567 C'est ce qu'on appelle la rémora.
568 Al. XLI. (Cf. tom. VII, p. 438, et VIII, p. 267.)
569 Maintenant on ne les nomme plus « chastaignes », mais oursins. Les châtaignes d'eau sont les macres. Saint
François de Sales a pris ce mot dans Du Pinet, ouvrage cité plus haut, note (467), p. 101.
570 C'est ainsi que Du Pinet rend Ariana de Pline, pays des ariens. Cela, en effet, correspond en partie.
571 La tête, racine de l'homme ;
572 La mortification conserve les œuvres et les produit.
573 Plin., Hist. nat., l. XVII, c. XXIV (al. XXXVII). Cf. Introd. a la Vie dev., Part. III, ch. XIII.
574 Plin., ibid.. c. XXVII (al. XLIII). Cf. Introd. a la Vie dev., Part. I, ch. XXIV.
575 Cf. Introd. a la Vie dev., Part. III, ch. XXIX.
576 Plin., Hist. nat., l. VIII, c. XXI [al. XXXIII). Cf. Introd. a la Vie dev., Part. III, ch. XIII, et tom. VIII, p. 88.
577 Cf. tom. VII, p. 470.
578 déchirer d'abord les cœurs, et non les vêtements.
579 Joel, II, 13.
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gueule bee, et lhors le rat d'Inde se lance dans le [121] gosier et ventre du crocodile commun trait,
luy ronge les boyaux et le fait mourir580.
Les daulphins faysans la guerre au crocodile, connoissans que la peau de son ventre est
mince et tendre, font semblant d'avoir peur de luy et se fondent en l'eau, et se relevent contre son
ventre et avec leurs arrestes trenchantes le luy fendent et le tuent. [L. VIII, c. XXV, al. XXXVIII.]
Les Tentirites, petites gens d'un'isle voisine au Nil, tuent admirablement les crocodiles,
nageans contre eux et montans a cheval dessus, et les poussent a terre prisonniers et les vainquent
; aussi les crocodiles fuyent l'odeur des Tentirites comme les serpens celle des Psilliens581. Le
crocodile est furieux contre ceux qui le craignent et qui le fuyent, et jamais ne fait teste quand on
le poursuit582. Pl., l. 8. c. 25 [al. XXXVIII].
Le serpent ceraste a quatre petites cornes qui se remuent, avec lesquelles il amuse les
oyseaux pour les attrapper, cachant tout le reste de son cors ; c. 23 [al. XXXV].
C. 22 [al. XXXIV] : « Lupi Mœrin videre priores583 584 » ; loup cervier, pour faim quil aye,
sil tourne la teste, il oublie sa viande et s'en va pour en chercher d'autre.
Tigresses : bell'histoire ; l. 8. c. 18 [al. XXV]585.
Chameaux passeront 4 jours sans boire, mais s'en revanchent treuvans l'eau, laquelle ilz ne
boivent quilz ne l'aÿe (sic) troublee, ne la treuvans bonne autrement (aucuns estiment que c'est
pour ne voir leur difformité en icelle). 586 Optime congruunt hæreticis de Scriptura non bibentibus,
nisi sensum turbaverint, ut gustui suo aptent miscendo terrena sacris, vel ne suam videant
turpitudinem. Pl. l. 8. c. 18 [al. XXVI], non dicit inclusa.
Mantichore indien, animal a trois rancz de dens ; a le visage et oreilles d'un homme, les
yeux verdz, son pelage rouge, le cors de lion, la queue de scorpion, sa voix comme [122] le son
d'une fleuste et trompette mise ensemble et meslee ; friant de chair humaine. Lib. 8. c. 21 [al.
XXX].
Elles [les hyènes] contrefont le parler des hommes ; c. 30 [al. XLIV]. Ibid., c. 30 [al.
XLIV]. Le vulgaire estime les hienes avoir deux natures, et qu'elles servent deux ans de masle et
deux ans de femelle tour par tour et conçoivent sans masle ; mais Aristote dit le contraire, [De
animal, generat., l. III, c. VI.] On en dit choses admirables : elles contrefont le langage des bergers,
et ayant appris le nom de quelqu'un, elles l'apellent pour le faire sortir de la grange et le devorer ;
elles vont chercher les cors humains dans les sepulchres ; les chiens marchans sur son (sic) ombre,
ne peuvent japper. On les treuve en Afrique ; c. 30 [al. XLIV].
Chameleon : sa langue arrachee, luy vivant, portee sur soy, fait gaigner les proces ;
Democrite, Mathioli, [l. V, c. CX] ; l. 2. c. 60.
Un jour juge l'autre et le dernier les juge tous ; folie des hommes de conter les jours, au lieu
de les peser. Pline, l. 7, c. 40 [al. XLI].
Publius Cornelius Rufinus 587 songeant quil perdoit la veüe, la perdit de fait. Jason Phæreus,
abandonné des medecins pour un aposteme quil avoit en la poitrine, par desespoir se donna un
coup de cousteau pour se tuer, mais il treuva par ce moyen la guerison ; l. 7. c. 50 [al. LI].
Les dragons et elephans font la guerre en trois façons : 1. Le dragon est si grand quil
entortille l'elephant, et fait tumber l'elephant qui en tumbant le tue. 2. Le dragon espie l'elephant
quand il fait son viandis, et se lance sur luy de dessus un arbre ; l'elephant tasche de s'accoster d'un
arbre pour se froter contre iceluy et escacher le dragon, mais le dragon entortille les deux jambes
de l'elephant pour le garder de se remuer, et se fourrant dans son muffle luy empeche l'haleyne et
580 Plin., Hist. nat., l. VIII, c. XXV (al. XXXVII). Cf. tom. VII, p. 470 ; VIII, pp. 226, 353.
581 Ubi supra, p. 118.
582 Cf. Introd. a la Vie dev., Part. III, ch. VII.
583 Virgil., Eclog. IX, vers. 54.
584 « Les loups ont, les premiers, aperçu Moeris. »
585 Vide Introd. a la Vie dev., Preface.
586 Ils ressemblent beaucoup aux hérétiques qui ne boivent pas [à la source] de l'Ecriture s'ils n'en ont troublé le sens
pour le conformer à leur goût en mêlant le terrestre au sacré, ou bien pour ne pas apercevoir leur turpitude. (Pline, lib.
VIII, chap. XVIII, ne dit pas ce qui est inséré entre parenthèses.)
587 Le texte des éditions actuelles a Rufus, mais Du Pinet, selon quelques manuscrits de Pline, a Rufinus.
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le luy ronge. 3. Silz se treuvent en chemin, ilz viennent droit debout l'un contre l'autre et s'entrefont
la guerre aux yeux, de maniere qu'on a treuvé des elephans aveugles, devenus thysiques et secz de
fain [123] (sic) et par le poison du dragon. 4. Le sang de l'elephant est froid et les dragons desirans
se rafraichir en sont frians ; dont, aux chaleurs, le dragon se chache (sic) dans l'eau, espians que
l'elephant vienne boire, et lhors se jettent (sic) a leur muffle et l'entortille, puis les mordant a
l'oreille ou l'elephant ne peut porter la muffle, tire tout le sang de l'elephant, lequel tumbant mort,
tue le dragon yvre de son sang. [L. VIII, c. XII.]
La lionnesse est extremement luxurieuse et se laisse couvrir au liepart (sic), ce que le lion
sent longtems apres et la chastie ; mais pour oster ce sentiment, elle se lave588. On estime qu'elle
ne porte qu'une seule fois en sa vie, par ce que ses fans, en sortant, luy esgratignent le ventre.
Aristote dit, [De animal., l. VI, c. XXXI,] qu'elle porte cinq fois, et la premiere litee cinq, puis en
diminuant jusques a rien ; ilz nayssent en piece de chair.
Les lions ont l'aleyne et le hasle du cors fort puant ; ilz ne mangent guere, et si on les saoule,
ilz ne mangent que de trois jours l'un ; ordinairement, de deux jours l'un. Toutefois, ce qu'ilz
peuvent avaler sans mascher ilz l'avalent, et se sentans l'estomac empesché ilz le retirent avec la
patte, de peur de se treuver alaschiz sil falloit fuir. [L. VIII, c. XVII, al. XVIII.] Ilz ayment
naturellement les gens vieux, qui ne peuvent chasser ni leur faire la guerre, comme dit Polybius
589 qui fit le voyage d'Afrique avec Scipion ; et dit qu'en ce voyage les lions y estoyent si espés
qu'on n'osoit sortir des villes, et qu'on pendoit et crucifioit des lions pour faire peur aux autres. Le
lion ne fait rien a ceux qui se couchent et humilient, et ne s'addresse jamais aux petitz enfans, sil
n'est bien pressé de faim. Pline dit quil a veu une esclave Getulienne qui luy racontoit qu'ell'avoit
eschappé la fureur de plusieurs lions par douces paroles, leur remonstrant qu'ell'estoit pauvre fille,
esclave, bannie, malade, indigne de servir de proye a leur generosité ; elle estoit en la Guinee. [L.
VIII, c. XVI, al. XIX.]
Le lion donne signe de ce quil pense par la queüe, comme [124] les chevaux par les
aureilles. Quand il entre en cholere, il bat la terre d'icelle, et passant plus avant, il s'en bat les
flanez. [Ibid.] 590 De duplici ira Dei, qua percutit corpus, qua percutit animas quas in latere suo
portat. De toutes les blesseures quil fait, le sang en sort noir, soit avec les dens, soit avec les
griffes. 591 Omnes actiones a diabolo procedentes nigræ sunt, sive omnes dolores ; at dolores a
Christo, rubicundi. Il regarde fixement les traitz qu'on luy jette, sans en tenir compte, taschant
d'espouventer des yeux. [Ibid.] Pendant quil est en lieu ou on le voit a descouvert, il fait sa retraitte
tout bellement, monstrant de mespriser les chiens et le veneur592 ; estant couvert de bois, il fuit
excellemment. Estant blessé, il regarde tous-jours celuy qui l'a blessé et en veut tous-jours a luy,
non a autre, quel grand nombre de gens quil y aie ; si on luy lance un coup sans blesser, il ne blesse
point, ains foulent (sic) des pieds.
La lionnesse combattant pour ses petitz a tous-jours les yeux en terre, de peur de s'estonner
des espieux ; [ibid., c. XVI al. XIX.] 593 Nos ad Cælum respicere debemus.
Il n'est frauduleux ni soupçonneux et ne regarde jamais personne de travers ; aussi ne prent
il pas playsir qu'on l'y regarde. Il pleure et mord la terre en mourant. Il craint et tremble au bruit
d'un charion (sic) sur tout vuide ; a la veüe d'un coq et a son chant encor plus594, et sur tout a la
veüe du feu. [Ibid.] 595 ………………………………………………………………………………
……………………………………………………………………………………………………...
588 Plin., Hist. nat., VIII. c. XVI (al. XVII). Cf. Introd. a la Vie dev., Part. II c. XIX.
589 C'est Pline (Hist. nat., lib. VIII, cap. XVIII) qui cite Polybe ; nous n'avons plus, dans le livre de ce dernier, le
chapitre qui contenait ce texte.
590 De la double colère de Dieu, celle par laquelle il frappe le corps, celle par laquelle il frappe les âmes qu'il porte
dans son sein.
591 Toutes les actions ou toutes les douleurs venant du diable sont noires ; mais les douleurs venant du Christ sont
vermeilles.
592 Cf. tom. VIII, p. 175.
593 Nous, nous devons lever nos regards vers le Ciel.
594 Vide tom. VII. p. 429.
595 Le septième feuillet de l'Autographe manque.
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10.2 Page 92

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Pl. l. VII, c. 16 [al. XV] : Zoroastes a esté seul entre les hommes qui aïe ris (sic) le jour
mesme quil nasquit596. Addition : ce fut le premier Roy de Bactriane qui mena la guerre a Ninus,
dit Nembrod en la Sainte Escriture597. Addition [125] au c. 42 du livr'onziesme : aucuns pensent
que ce soit Loth ou Abraham, mais la plus part tient que ce fut le premier Roy de Bactriane.
Les elephans, par leur haleyne seule, font sortir les serpens de leurs trouz, et celle des cerfz
les brusle ; c. 53 [al. CXVII], l. XI, Pline. 598 Sic vox Christi torquet demones et extrahit peccata.
Entre les oyseaux de proye, les uns ne se jetteront jamais sur un oyseau sil n'est en terre,
les autres les espient seulement quand ilz volent le long des arbres, d'autres quand ilz sont
branchez, et d'autres qui les prennent en l'air, a force d'aisles. Les pigeons, connoissans le naturel
de l'oyseau qui les poursuit, quelquefois se jettent en terre, quelquefois volent par dessous, et font
tous-jours le contraire du naturel de l'oyseau de proye. Excellent exemple pour combattre les
tentations et diables. Pl., l. X, c. 8 [al. IX].
Soldi, ville au cap d'Anthioche, appellee Seleucie 599, au dessus de laquelle le mont Casius
(il y en a un autre de mesme nom qui confronte l'Arabie), si haut qu'a deux heures apres minuit,
d'un costé on voit le soleil levant, de l'autre la plaine nuit600 ; c. [XVIII, al.] 22. l. 5. 601 Mons
Thabor, mons pœnitentiæ.
Coucu est un'espece d'espervier ; change de figure en certain tems de l'an ; il a la teste d'un
pigeon, et la couleur de son pennage, avec les ongles d'un espervier. Si l'espervier le rencontre, il
le bat tant quil le defait. Il change de voix par fois ; il pond au nid d'autruy et principalement en
celuy des ramiers, pour eviter la fureur de ceux qui voudroyent abolir sa race, car tous les oyseaux
luy font la guerre, estant asses poltron et timide. Les parons qui le couvent et au nid desquelz il
esclost ne tiennent conte de leurs petitz en comparayson du petit coucu qui, estant [126] plus goulu
que les autres, mange leur viande et se rend gras et poly ; dont le paron se mire en luy, se baignans
de voir un si bel oyseau quil pensent (sic) avoir produit, jusques a luy permettre de manger et se
paistre de leurs petitz propres devant leurs yeux. Et pour recompense, quand le petit coucu se sent
asses fort pour s'en voler, il se jette sur les parons qui l'ont eslevé et les mange. (L. X, c. IX [al.
XI].) 602 Elegans descriptio hipocritæ, cujus opera, cum sint diaboli, reponuntur cum bonis, et ea
fovet Ecclesia videnturque illi speciosa et datur illis merces debita veris operibus, et cætera omnia
absumit Ecclesiamque lacerat. A fructibus eorum cognoscetis eos603. Faciem habet columbæ,
cæterum accipiter ; est unguibus aduncis, sed ignavus.
La lanterne de mer, nommee en latin lucerna (aucuns disent que c'est le rouget), se tient
ordinairement sur l'eau, et la nuit estant clere et calme, elle tire une langue luysante comme feu604
; l. IX. c. 27 [al. XLIII]. 605 Egregia descriptio concionatoris, qui supereminet fluctibus maris et,
lux, in tenebris lucet606.
Les poissons qui portent les perles sont quasi faitz a mode d'huistres. Leur sayson de
concevoir estant venue, elles s'ouvrent pour recevoir la rosee qui leur sert de semence genitale607,
et le fruit qu'elles rendent sont perles grosses ou petites, selon la quantité de la rosee. Si la rosee
est pure, elles sont cleres ; si le tems estoit trouble, elles le sont, participans plus de l'air que de la
mer ; elles s'engrossissent et nourrissent si elles peuvent recevoir a suffisance de la rosee. Quand
596 Cf. tom. VIII, pp. 128, 141.
597 Gen., X. 8, 9.
598 Ainsi la voix du Christ torture les démons et fait sortir les péchés.
599 Pline l'appelle ainsi, et Du Pinet Soldi ; en langue turque, son nom est actuellement : Soueïdiyèh.
600 Cf. tom. VIII, p. 262.
601 Mont Thabor, mont de pénitence.
602 Elégant portrait de l'hypocrite dont les œuvres, bien qu'elles viennent du diable, sont placées au même rang que les
bonnes, et l'Eglise les encourage ; elles lui paraissent belles, et il leur est accordé la reconnaissance due aux œuvres
véritablement bonnes, et lui dévore tout le reste, et il déchire l'Eglise. Vous les connaîtrez à leurs fruits. Il a visage de
colombe, pour le reste c'est un épervier ; il a les ongles crochus, mais il est lâche.
603 Matt., VII, 16, 20.
604 Cf. Tr. de l'Am. de Dieu, l. IX, c. V, et tom. VIII, p. 155.
605 Remarquable description du prédicateur qui domine les flots de la mer et, lumière, luit dans les ténèbres.
606 Joan., I. 5.
607 Plin., Hist. nat., l. IX, c. XXXV (al. LIV). (Cf. Tr. de l'Am. de Dieu, tom. IV, pp. 171, 235, 274 ; tom. XIII, p. 209.)
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il tonne et esclaire, les mere-perles se tiennent serrees et les perles se fondent faute de nourriture,
ou bien elles engendrent une certaine forme de [127] perle pleine de vent comme une vescie608 :
ce sont avortons de perles ; elles rougissent au soleil, et par viellesse.
La pierre tracienne mouïllee d'eau et approchee du feu, s'allume soudain et ne se peut
estaindre que par l'huile. [Matthioli, l. V, c. CIV.]
C'est chose asseuree que les chiens en Ægipte lappent et boivent au Nil tous-jours en
courant, de peur de servir de proÿe aux crocodiles. 609 Pl. l. 8. c. 40 [al. LXI]. 610 Et nos, si sapimus,
aquas delitiarum mundi cursim bibamus, nam in earum flumine habitat crocodilus, demon,
peccatum.
Au voyage qu'Alexandre le Grand fit es Indes, le Roy de l'Albanie d'Asie luy donna un
chien de grandeur prodigieuse, auquel Alexandre prenant plaisir, luy fit lascher d'ours, sanglers,
dains, mais ce chien n'en tenant compte demeuroit couché sans se bouger. Le Roy, marri de la
poltronnerie de [ce] grand cors, commanda qu'on le tuast. Le Roy d'Albanie, adverti de cela, luy
en renvoya un autre, l'advertissant qu'il ne failloit espreuver ce chien contre petites bestes ;
Alexandre luy fit bailler un lion, lequel fut incontinent mis en pieces par ce chien, puis un elephant,
de mesme. 611 Heu, quam indignum Christianos, tam magnos viros, velle cum hominibus
contendere ! Contendant et vindictam exerceant cum dæmone, magna illa bestia et leone
circumeunte. (Plin., ubi supra.)
Les saumes ayment fort leurs asnons, mais la crainte de l'eau surpasse cet amour ; car pour
aller vers leurs petitz elles ne craindront point de passer par le feu, mais si seulement il y a un petit
ruisseau entre deux, elles ont si grand peur de le passer que mesmes elles ni osent mettre le pied.
Aussi ne passeront elles jamais un pont ou on peut voir la riviere parmi les ais, et pour alterees
qu'elles soyent, si on leur change d'abbreuvoir elles ne boiront sinon par contrainte et [a] coups de
bastons. Il leur faut grand place [128] pour se coucher et ne se couchent qu'au large, car il leur
vient mille fantasies et songes en dormant, de sorte qu'elles ruent deça et dela, et si elles
rencontroyent quelque chose dure, cela les feroyt clocher. (Pl. l. 8. c. 43 [al. LXVIII]. 612 Aqua,
afflictio hujus mundi : Intraverunt aquæ usqne ad animant meam613 ; ignis, inferni. Pro filiis,
parentes, asinis pejores aut similes, ignem inferni subeunt et afflictiones hujus mundi subire volunt
; pauci pro filiis educandis, ad paupertatem venire volunt ; pro filiis ditandis, in infernum
descendunt. Nolunt bibere hæretici aquas quibus non sunt assueti, etsi, mordente conscientia, sint
sitibundi. Dormierunt somnum suum614, etc. Divites nunquam quiescunt nisi habeant magna spatia
terrarum, qui per somnia et ludicras cogitationes et desideria, modo huc, modo illuc, volvuntur615.
Muletz et chevaux se chassent l'un l'autre et ne se peuvent accorder. Idem, l. 8, c. 44 [al.
LXIX]. 616 Hæretici, muli, nunquam cum iis concordant qui facti sunt ut jumentum apud Deum617,
id est Catholicis ; et hæretici sunt steriles, ultra non proficiunt618.
608 Cf. Introd. a la Vie dev., Part. III, ch. XV.
609 Cf. tom. VIII, p. 300.
610 Et nous, si nous sommes sensés, buvons en courant les eaux des délices du monde, car dans leur fleuve habitent le
crocodile, le démon, le péché.
611 Hélas ! quelle indignité de voir les Chrétiens, si grands hommes, vouloir lutter avec les hommes ! Qu'ils luttent et
qu'ils exercent leur vengeance contre le démon, cette bête énorme, ce lion qui rôde autour de nous.
612 L'eau, ce sont les afflictions de ce monde : Les eaux sont entrées jusqu'à mon âme ; Je feu, c'est le supplice de
l'enfer. Pour leurs fils, des parents pires que les ânes, ou semblables à eux, passent par le feu de l'enfer et veulent subir
les afflictions de ce monde ; pour élever leurs fils, peu veulent devenir pauvres ; pour enrichir leurs fils, ils descendent
en enfer. Les hérétiques ne veulent pas boire les eaux auxquelles ils ne sont pas habitués, bien que, sous la morsure
de leur conscience, ils meurent de soif. Ils ont dormi leur sommeil, etc. Les riches n'ont jamais de repos, à moins qu'ils
ne possèdent de grands espaces de terres ; dans leurs rêves, dans leurs folles imaginations, dans leurs désirs, ils sont
ballotés en tous sens.
613 Ps. LXVIII, 2.
614 Ps. LXXV, 6.
615 Cf. tom. VIII, pp. 297, 298.
616 Hérétiques, mulets, ne sont jamais d'accord avec ceux qui sont devenus comme une bête de somme devant Dieu,
c'est-à-dire avec les catholiques ; et les hérétiques sont stériles, leur progrès ne va pas plus loin.
617 Ps. LXXII, 23.
618 II Tim., III, 9.
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Guenons et marmotz sont tristes et mornes au deiïaut de la lune ; au renouvellement, sautent
et dancent619. 620 Adulatores prospera fortuna rident, adversa mærent. Id., l. 8. c. 54 [al. LXXX].
Singesses portent leurs petitz ça et la par mignardise et les faire voir, [si] que par le tracas
elles les tuent. (Idem, [129] ibidem.) 621 Superbi sua opera adeo venditant, ut ea perdant.
Les lievres, es hautes montaignes, sont blancz l'hiver pendant que la neige y est, et, dit on,
quilz vivent de neige ; et reprennent leur premier pelage, la neige estant fondue622. Pl., l. 8. c. 55,
[al. LXXXI]. 623 Qui inter virgines degit pariter albus fit castitate ; exeat ad mundum, amittit
priorem albedinem.
Le lion tremble a la presence du coq, et beaucoup plus sil l'entend chanter624. 625 Dæmon,
leo rugiens626, timet pastorum præsentiam, longe magis si prædicent. Pierre Messie dit 627 quil
craint plus les coqs blancz que les autres628.
629 O Prælati, si sint innocentes et cantent.
Les petitz pouletz ne craignent ni l'elephant, ni le beuf, ni le cheval, mais a la seule velie
de l'ombre du milan volant, ilz fuit (sic) sous les æles de leur mere630, et les aigneaux, du loup.
Le loup ayant touché a la scille devient perclus. [Preface de Mattinoli, traduction de Du
Pinet, p. 12.] 631 Sic dæmon cura tetigit Christum, qui vere Scilla in terra posita est et miræ virtutis.
Les chiens, tant quilz sont couvertz de l'ombre d'une hiene, ne peuvent abbayer ni mordre,
ou abbayer contre celuy qui porte la langue d'une hiene. [Plin., l. VIII, c. XXX, al. XLIV, et l.
XXVIII, c. VIII, al. XXVII.]
L'herbe polipode mise sur les cancres leur fait en peu d'heure despouïller l'escorce qui les
couvre. [Preface de Matthioli, trad. Desmoulins, p. 15.]
Les cicoignes mettent des feuilles de plane en leurs nidz [130] pour en chasser les
chauvesauris, leurs ennemies mortelles. Les arondelles y mettent l'ache pour les garder de teignes
et autre vermine [ibid.], et l'esclaire pour rendre la veüe a leurs petitz. [Plin., l. XXV, c. L.]
Les serpens recouvrent la veüe se frottant contre le fenouïl632, [L. VIII, c. XXVII, al. XLI.]
Le lion ayant mangé un singe, guerit incontinent de sa fievre. [Ibid., c. XV, al. XIX.] Les cerfz et
chevres sauvages se guerissent de leurs playes par le dictam, en Candie [l. XXV, c. LIII], et
rejettent les fleches dont elles sont frappees633. Les ours ayant mangé la mandragore, mangent des
formies pour se guerir. [Plin., l. VIII, c. XXVII, al. XLI.]
L'elephant ayant mangé le camæleon, se guerit mangeant les feuilles de l'olivier sauvage.
L'homme ayant mangé le monde et son inconstante vanité, se guerit par la grace, mais sauvage, a
cause quil faut qu'elle l'induise a pœnitence.
Le saphir et l'escarboucle guerissent du mal des yeux au seul toucher ; l'ematiste garde
d'enyvrer ; le jaspe estanche le sang ; le topase amortit l'ardeur de luxure634, et l'herbe agnus castus,
619 Cf. tom. VI, p. 118.
620 Les flatteurs rient quand le sort est prospère et sont tristes quand il est contraire.
621 Les orgueilleux font un tel étalage de leurs œuvres, qu'ils les détruisent.
622 Cf. Introd. a la Vie dev., Part. II, ch. XXI.
623 Celui qui vit parrai les vierges devient pareillement blanc par la chasteté ; les quitte-t-il pour le monde, il perd sa
blancheur première.
624 Plin., Hist. nat., l. VIII. c. XIX (al. XVI). Cf. tom. VII, p. 429.
625 Le démon, lion rugissant, craint la présence des pasteurs, et beaucoup plus s'ils prêchent.
626 I Petri, V, 8.
627 Les diverses leçons de Pierre Messie, gentilhomme de Sevile, mises de Castellan en François par Ch. Gruget,
parisien. In-8, Lyon, 1592, p. 178.
628 S. Ambr., Hexaem., l. VI, c. IV, 26. Cf. tom. VII, p. 438.
629 O Prélats, pourvu qu'ils soient innocents et qu'ils chantent.
630 Cf. tom. XIV, p. 382, XV, p. 96.
631 Ainsi le démon, quand il a touché le Christ qui est véritablement une scille placée sur la terre, et une scille d'une
admirable puissance.
632 Cf. tom. VII, p. 470, et VIII. pp. 90, 91.
633 Aristot., Hist. animal., l. IX, c. VI ; Plin., Hist. nat., l. VIII, c. XLI (al. XXVII). Cf. tom. VII, p. 447, et VIII, pp.
56, 361.
634 Vincent. Bellov., Speculum naturæ, l. VIII, c. XVI. (Cf. Introd. a la Vie dev., Part. III, ch. XIII, sub finem.)
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si on couche dessus635. 636 Dilexi mandata tua super aurum et topazion637, quia ipsa etiam mandata,
et divitem faciunt et castum. Qui vult animam habere castam, incubet super agnum castum, id est
super meditatione vitæ et mortis Christi.
On chasse les formies avec les aisles d'une chauvesauris et le cœur d'une puput. [Pref. de
Mattinoli, trad. Du Pinet, p. 15.]
Les serpes fuyent l'odeur d'un viel cuir bruslé, et les papillons le parfum d'un foye de bouq.
[Plin. l. XXVIII, c. VIII, al. XLII et XLVI.]
La torpille amortit le bras qui la touche, mesme avec une longue perche. [L. XXXII, c. I,
al. II]
Le serpent catablepa fait mourir tous ceux qui le regardent, [131] voire a la distance de
mille pas. [L. VIII, c. XXI, al. XXXII.]
Si on mesle des plumes d'aigle avec les autres, elles seront bien tost consumees et gastees.
Les cordes de luth se rompent toutes toutes eu les touchant, si on en touche a mesme tems
une seule faitte de boyeau de loup ; et de mesme les tambours de peau de mouthon, si on en bat
entre eux un fait de peau de loup. 638 Omnes articuli fidei dissolvuntur si unicus error interseratur
unicave hæresis ; articuli autem fidei ex intestinis Agni, hæresis ex intestinis lupi.
Si on frotte les narines d'un toreau d'huile rosat, il tumbe soudain en tournoyement de teste.
Figues sauvages pendues aux figuiers cultivés empeschent leurs fruitz de tomber avant
qu'ilz soyent meurs639. [Aristot., Hist. animal., l. V, c. XXXII, et De animal. generat., l. I, c. I.]
Le persil, plus il est foulé aux piedz, plus il croit. (Mathioli, [Pref., trad. Du Pinet, p. 13].)
Plutarque en dit autant du cumin640 641, duquel Mathioli, page 432, dit que les hipocrites, pour
paroistre plus macerés, usent du cumin en leurs viandes et s'en parfument souvent. Mathiol. et
Dioscoride, l. 3. ch. 60 : Il fait devenir pasles ceux qui en boivent ou qui s'en frottent. 642 Cyminum
ou cuminum diligenter decimant hipocritæ Scribæ et Pharisei ; Mathæi, 23, v. 23. Decimant etiam
anethum 643, cujus virtus est somnum concitare et digestionem juvare ; quare antiqui coronas sibi
ex anetho faciebant in conviviis, ut ait Mathiol., [l. III, c. LVIII,] fol. 431. Et mentham644 quæ, ex
Galeno, [Simpl. med., l. VI.] et Mathiolo, [l. III, c. XXXV,] licet contradicente Plinio, [l. XX, c.
XIV, al. [132] LIII,] luxuriam provocat. Ergo Pharisei, cum mentha, quæ luxuriam ciet, et cum
anetho, quæ ad gulam et somnum provocat, cyminum conjungunt, ut exterminent facies suas et
videantur continentes et jejunantes645.
Pouletz tués et pendus a un figuier en deviennent plus tendres et meilleurs. [Pref. de
Matthioli, trad. Du Pinet, p. 12.]
Une broche d'airain mise dans une chair la garde longuement de se corrompre. [Ibid.]
Cors tués par le foudre deviennent secz et ne pourrissent jamais ; dont le poete qui dit
Phaeton frappé de foudre pourrit en certaine vallee, a esté reprins. [Ibid.]
635 Plin., Hist. nat., l. XXIV, c. XIX (al. XXXVIII) ; Mattioli, in Dioscor., l. I, c. CXVI. (Cf. ibid.)
636 J'ai aimé tes commandements plus que l'or et la topaze ; parce que ces commandements, par eux-mêmes rendent
riche et chaste. Que celui qui veut avoir l'âme chaste se couche sur l'agneau chaste, c'est-à-dire sur la méditation de la
vie et de la mort du Christ.
637 Ps. CXVIII, 127.
638 Tous les articles de foi se désagrègent s'il s'y mêle une seule erreur ou une seule hérésie ; or, les articles de foi
sortent des entrailles de l'Agneau et l'hérésie des entrailles du loup.
639 Cf. tom. VIII, pp. 149, 150.
640 Cf. Introd. a la Vie dev., Part. III, ch. IV : (tom. III, p. 143, var.)
641 Quæstionum convivalium, lib. VII, quæst. 2. (Edit, Didot, 1844, Scripta moralia, tom. II, p. 853.)
642 Les Scribes et les Pharisiens hypocrites pavent exactement la dîme du cymin ou cumin... Ils payent même la dîme
de l'aneth, dont la vertu est de provoquer le sommeil et d'aider la digestion ; c'est pourquoi les anciens se couronnaient
d'aneth dans les festins, dit Mattioli, fol. 431. Et [ils payent la dîme de] la menthe, qui, d'après Galien et Mattioli,
quoique Pline dise le contraire, provoque la luxure. Donc les Pharisiens mêlent le cymin avec la menthe qui provoque
la luxure, et l'aneth qui provoque la gourmandise et le sommeil, afin de rendre leur visage tout défait et d'avoir l'air
continents et jeûnants.
643 Matt., ibid.
644 Ibid.
645 Matt., VI, 16.
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Martia, enceinte, frappee du foudre. [Ibid.]
Menthe dans le lait l'empesche de cailler. [Matthiol., l. III, c. XXXV.]
Murenes frappees d'une ferule meurent soudain.
Scorpions approchans l'herbe delphinium ou lychnis sauvage, ou la racine du premier
aconit, sont tellement amortis quilz semblent plus mortz que vifz, et touchant a l'helebore blanc
sont incontinent remis en force. [Pref. de Matthioli, trad. Du Pinet, p. 12.]
Les mains frottees de la cotule puante, abeilles et guespes ne piquent jamais. [Ibid.]
Roseau et feugere tellement ennemies, que si on tient au soc de la charrue un roseau attaché,
toute la feugere qui sera en la terre labouree meurt ; au contraire, les roseaux et asperges
s'entr'ayment fort. [Ibid.]
Les martes, fouines, belettes ne touchent aux poules frottees du jus de rue, ni le renard a
celles qui ont mangé du poulmon de renard. [Ibid.]
La vipere rencontrant une branche de fau (fagi), elle s'arreste et demeure estonnee ; aussi
fait elle si on la touche tant soit peu d'un roseau. [Ibid.]
L'elephant en furie s'adoucit au seul regard du belier646. [133]
647 Heu ! videntes Agnum Dei, quare non mansuescimus ?
Il ni a toreau si furieux qui ne s'appaise estant attaché a un figuier. 648 Christo confixus sum
cruci649 ; et quis ibi non securetur ?
L'aymant frotté de l'ail ne tire le fert650 si, par apres, il n'est lavé de sanc de bouc. 651 Allium,
superbia Adami, impedit attractionem magnetis, id est Dei ; sed cum Deus lotus est in sanguine
Christi, tunc iterum attrahit.
L'ambre attire les pailles et festus652, mais il ne le fait sil est frotté d'huile. Mathioli, sur le
c. 93, dit que c'est si les pailles sont frottees d'huile, et dit que ce qu'on dit quil n'attire pas l'hissope
est faux. 653 Anima comedit et attrahit vilia quæque et stipulis quæ vertuntur ante faciem venti654 ;
sed id non facit si linita sit gratia et charitate, tunc enim cessant rerum inutilium desideria.
Les chevaux morduz du loup sont plus vistes ; mais silz marchent sur les pas du loup, les
jambes s'engourdissent et ammortissent655. [Pref. de Matthioli, trad. Du Pinet, p. 12.] 656 Si nos
dæmon momordit tentatione, alacriores reddit (priusquam enim humiliarer, ego deliqui657) ; sed si
vestigia ejus sequamur, id est gloriemur et induremur in peccatis, tunc obstupescunt affectus. Si
mundus affligit nos, meliores efficimur ; si vestigia ejus sequamur et affectuum pedes cum eo
componamus, languidi efficimur.
La chair des moutonz morduz du loup est meilleure, [134] mais la laine engendre des poux
au drap qui en est fait, [Ibid.]
Le baume, selon Pline, l. XII. chap. XXV [al. LIV], croit en la seule Judee, et est la liqueur
la plus odorante de toutes. Il retire a la vigne : on le plante par chappons et prouvins ; on l'accoustre
comme la vigne qui se soustient d'elle mesme sans eschalas ; on le taille comme la vigne ; ses
feuilles ressemblent a celles de la rüe et sont tous-jours vertes. Il recite que au sac de Hierusalem,
646 Cf. Introd. a la Vie dev., Part. III. ch. VIII.
647 Hélas ! voyant l'Agneau de Dieu, pourquoi ne sommes-nous pas pacifiés ?
648 Je suis attaché à la croix avec le Christ ; et là, qui ne serait pas dans le calme ?
649 Galat., II, 19.
650 Cf. Tr. de l'Am de Dieu, l. VII. ch. XIV, et tom. VIII, pp. 25, 137.
651 L'ail, l'orgueil d'Adam, empêche l'attraction de l'aimant, c'est-à-dire de Dieu ; mais quand Dieu est baigné dans le
sang du Christ, alors il attire de nouveau.
652 Cf. tom. XVIII, p. 335.
653 L'âme avale et attire vers elle toutes sortes de choses viles et ces paillés qui tourbillonnent dans le vent ; mais elle
ne le fait pas si elle est enduite de grâce et de charité, car alors cessent les désirs des choses inutiles.
654 Ps. LXXXII, 14.
655 Cf. tom. VIII, pp. 248, 353.
656 Si le démon nous mord par la tentation, nous devenons plus vifs (avant que j'aie été humilié, j'ai commis des fautes)
; mais si nous suivons ses traces, c'est-à-dire si nous nous glorifions et nous endurcissons dans les péchés, alors les
sentiments s'engourdissent. Si le monde nous afflige, nous devenons meilleurs ; si nous suivons ses pas et si nous
accordons avec lui les pieds de nos désirs, nous devenons languissants.
657 Ps. CXVIII, 67.
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les Juifz se voulans perdre, voulurent aussi ruiner les jardins de baume qui n'estoyent que deux,
mais bien grans ; au contraire, les Romains les defendirent et se donna une bataille.
Pour tirer du baume, il le faut inciser avec du verre ou avec une pierre ou une lancette d'os,
car le fer luy porteroit præjudice658. Estant l'arbre incisé au (sic) grans jours de l'esté, le baume sort
goute a goute et tumbe sur de la laine qu'on met au pied de l'arbre, puis on l'espraint dans des
cornes. Estant frais, il est blanc et espais comm'huille demi prins ; petit a petit il devient rouge, dur
et transparent.
Justin, historien, l. 36, [§ 3,] dit quil croit aupres de Hiericho, en une vallee ceinte de
montaignes ; Strabon en dit de mesme, l. 16 de sa Geographie, [ch. II et IV,] mais il adjouste quil
croit encor en la region des Sabæans ; Pausanias, en ses Bœotiques 659, dit quil croit encor en Arabie
et que les viperes se nourrissent de sa tresoüaifve liqueur. Mathioli, [l. I, c. XVIII] : Mais comme
s'est il fait que la Judee est privee du baume, laquelle seule jadis le portoit en plus grande
abondance ? Il respond que les Rois ægiptiens l'ont transporté ; mais Dioscoride et Galien 660
tesmoignent qu'en mesme tems il y avoit du baume en Ægipte et en Judëe. (La rayson donc est
que, par le mahumetisme, cette region a perdu ses faveurs.)
Theophraste, en l'Histoire des plantes, [l. IX, c., VI,] dit que l'arbre est grand comme un
grenadier et que ses feulles ressemblent a la rüe, et tant luy que Dioscoride, [135] qu'on l'incise
avec le fer. Pline, ibidem, [l. XII, c. XXV, al. LIV] : La vraye espreuve du baume est quil face
prendre le lait et ne tache point le drap.
Pline, parlant du cinamome, l. XII, c. XIX [al. XLII], dit quil croit en Ethiopie parmi les
buissons, quoy qu'en la plaine, et n'a nulle odeur estant verd ; il est, au plus, de deux coudees. On
dit quil croit en Arabie, et qu'Alexandre, singlant en la haute mer, descouvrit premierement
l'Arabie a son odeur661. [Ibid.] Il y a un oyseau (Plin., X, c. XXXIII, [al. L], nommé cinamologue,
qui fait son nid de branches de cinamome662 ; en Arabie, les chasseurs l'abbattent avec des fleches
pour s'en prævaloir.
Mirrhe (Plin., l. XII, c. XV, [al. XXXIV,]) est un arbrisseau de cinq coudees, le tronc
espineux et tors ; aucuns disent qu'elle croist au mesme bois que l'encens, l'un parmi l'autre. Les
arbres, avant qu'estre taillés, jettent le stacte et prætieuse mirrhe663, puis on les taille deux fois l'an
et sort l'autre mirrhe seconde, comme ceux de l'encens. 664 Sicut cinamomum siccum et inter spinas,
et balsamum et mirrham, odorem Dei665, quia posteriores arbores dant odorem incisæ ; contritio :
Scindile corda666.
Oyseaux seleucides viennent au secours des habitans [sur] le mont Casius ou le long
d'iceluy, contre les sauterelles, et tient on que Juppiter les leur envoye a leur (sic) prieres, a cause
du grand desgast que les sauterelles leur font. [Plin., l. X, c. XXXIX, al. XXVII.] On ne sçait d'ou
ilz viennent ni ou ilz vont, on ne les voit jamais sinon quand le pais en a afaire. 667 Religiosi
veniunt, tempore opportuno, contra hæreticos in subsidium habitantium in monte Sion et in
circuitu Hierusalem. Plin., l. X. c. XX [al. XLIII].
Rossignolz admirables en leur chans (sic) ; estans si petitz quilz chantent si bien. Ilz
chantent en parfaitte melodie [136] quinze jours seulement et au feuiller des arbres ; l'un ne chante
comme l'autre, et a l'envi a qui fera mieux, et quelquefois, sur la contention, ilz meurent en
658 Cf. tom. VIII, p. 328.
659 Descriptio Græciæ, lib. IX, cap. XXVIII.
660 Cités par Mattioli, lib. I, cap. XVIII.
661 Cf. Introd. a la Vie dev., Part. IV, ch. XIII ; tom.V III, p. 223, et XII, p. 331.
662 Cf. tom. VI, p. 455.
663 Cf. tom. VIII, p. 158.
664 Comme le cinnamome sec, même au milieu des épines, [exhale] le baume et la myrrhe, odeur de Dieu, parce que
les secondes pousses, quand elles sont taillées, donnent leur parfum ; la contrition [est signifiée par ces mots] : Brisez
vos cœurs.
665 Eccli., XXIV, 20.
666 Joel. II, 13.
667 Les Religieux viennent, au moment opportun, pour secourir contre les hérétiques ceux qui habitent sur la montagne
de Sion et dans l'enceinte de Jérusalem.
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chantant, la vie leur manquant avec la voix. Les petitz aprennent des grans. Ilz chantent les quinze
jours et quinze nuitz durans668. Ilz muent et changent de pennages ; ilz se retirent en hiver, 669 Pro
virginibus cantantibus canticum novum, quod nemo scit nisi qui accipit670, car chasque rossignol
a son chant particulier. Semper laus in ore671 ; moriuntur cantando, ut Christus, Stephanus,
plerique. Plin., l. X, c. 29.
Racine de polemonia portee, empesche qu'on n'est piqué des scorpions, ou si on est piqué,
la piqueure ne nuit ; Dioscoride. [Mattinoli, l. IV, c. VIII, et Epitre, trad. de Desmoulins, p. 5.]
On a donné tant d'honneur a l'herbe vetonica, que la mayson en laquelle elle sera plantee
sera contregardee de tout malheur672. [Plin., l. XXV, c. VIII, al. XLVI.]
En Judee croit une racine appellee du lieu, baaras, ainsy qu'escrit Josep., l. De bel. Jud., [l.
VII, c. VI, 3,] ressemblant en couleur a une flambe de feu, et est sur le soir comme une lueur
faysant eclairs. Elle fuit ceux qui l'approchent ; qui la touche, il faut quil meure, si il ne la porte
pendante en la main. On fouit donq la terre a l'entour et y attachent un chien, lequel voulant suivre
son maistre, il l'arrache et meurt incontinent, comme au lieu de celuy qui la devoit arracher ; apres
cela, on la prend sans peril. Mise sur les vexés des espris malins elle les delivre sur le champ673.
J'ay une racine, dit Mathioli, treuvee par Francesco Calceolario, Veronnois, laquelle ayant
trempé une nuit dans du vin, qui boit du vin ne peut nullement manger, pour fain (sic) quil aÿe,
jusques a ce quil aye beu une cueïlleree de vinaigre674.
Es Indes [occidentales, une racine de la grosseur de [137] la cuisse, le suc de laquelle estant
beu, fait mourir tout soudain ; du reste, on en fait de tres bon pain et nourrissant675. Mathioli, [Trad.
Du Pinet, Epitre, p. 10.] 676 In persecutione, inimici duo sunt : succus, et hoc peccatum est. Si
læteris de peccato, illud bibis et moreris ; si de pœna tua, tunc vivis ; unde : Facientes
prævaricationes odivi677 ; Si reddidi retribuentibus mihi mala678 ; et hoc est perfectum odium679.
L'herbe achemenides jettee en l'armee des ennemis les fait trembler et fuir680 ; Pline, [l.
XXVI, c. IV, al. IX.] Idem, raconte que les Rois de Perse donnoyent a leurs ambassadeurs l'herbe
latace, affin que par tout ilz eussent abondance de toutes choses. [Ibid.]
Les fleurs et testes du lote d'Egipte, sur le soir se plongent en l'eau jusques a la minuit et
va au fond ; puis, peu a peu, il s'en retourne et se redresse et sort hors ; au soleil levant ses fleurs
espanouissent, et les testes s'ouvrent et se treuvent loin de l'eau681. [Plin., l. XIII, c. XVIII, al.
XXXII ;] Mathioli, [l. IV, c. CIX, trad. Desmoulins, Epitre, p. 5.] 682 Resurrectio Christi media
nocte, qui post cænam in mare demersus fuit.
La cigue qui tue estant avalee, mise sur les yeux en guerit les inflammations ; Mathioli, [l.
VI, c. XI, Epitre, p. 5.] 683 Peccata per prædicationem representata.
Les asnes, mules, chevaux, meurent mangeans le nerium ; beu en vin, il guerit la morseure
des serpens. Mathioli, [Epitre, p. 5.]
668 Cf. Tr. de l'Am de Dieu, ll. V, ch. VIII, et IX, ch. X.
669 Pour les vierges chantant le cantique nouveau que personne ne connaît, si ce n'est celui qui le reçoit... Toujours la
louange est dans leur bouche ; elles meurent en chantant, comme le Christ, Etienne et presque tous.
670 Apoc., XIV, 3, II, 17.
671 Ps. XXXIII, 3.
672 Vide supra, p. 105.
673 Ibid., p. 105.
674 Ibid., p. 106.
675 Vide supra, p. 106.
676 Dans la persécution il y. a deux sortes d'ennemis : le suc, et cela c'est le péché. Si tu te réjouis du péché, tu le bois
et tu meurs ; si tu te réjouis de ta peine, alors tu vis ; de là : Je hais ceux qui violent la loi de Dieu ; Si j'ai rendu le mal
à ceux qui m'en ont fait ; et cela c'est la haine parfaite.
677 Ps. C, 3.
678 Ps. VII, 5.
679 Cf. Ps. CXXXVIII, 22.
680 Vide supra, p. 106.
681 Idem.
682 La résurrection du Christ au milieu de la nuit, lui qui, après la cène, fut plongé dans la mer.
683 Péchés représentés par la prédication.
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Le pavot mangé cause un sommeil perpetuel, mais il appayse les maladies de grandes
douleurs. Mathioli, [Epitre, p. 5.]
Cantharides mangees, tuent ; guerissent neanmoins les mordus des chiens enragés. Math.,
[Epitre, p. 6.] [138]
La vipere appliquee esteint son venin propre et tous les autres.
Mithridates, Roy de Pont, inventeur du mithridat, avoit tellement renforcé son cors par
icelluy que, s'efforçant de s'empoisonner pour eviter la servitude des Romains, il ne sceut
onques684. Pline raconte quil sçavoit 22 langues. [Hist. nat., l. VII, c. XXIV.]
La ferule nourrit et engraisse les asnes et tue les boeufz et chevaux ; elle ne nuit a l'homme
estant mangee quand elle commence a pousser ses feuilles. Math., [l. III, c. LXXV.]
Feuilles et fleurs du rosage sont poyson a la muletaille, chiens, asnes et bestes a 4 piedz ;
et aux hommes servent de contrepoison contre les scorpions. (Math.) Cigue, venim aux hommes
et bestes a 4 piedz ; viande des estorneaux. [Matthioli, Comment. Dioscor., l. VI, proœmium.]
Cocombres s'alongent pour descendre dans l'eau qui leur sera voysine et remontent pour
s'esloigner de l'huile.
Nul arbre portant huile ou resine ne peut estre enté. Huile, ennemi de toute plante qu'on
seme, car en estans ointes, elles meurent et sechent.
La peau de la hiene, du crocodile, de l'hippopotame et du veau marin garde de gresle et de
foudre ; le figuier et le laurier n'en sont jamais frappés685.
Pl., l. X, c. XXXVI [al. LII] : On tient que les pigeons ont ressentiment de gloire et quilz
se pavonnent en l'air et font des esplanades ça et la, se mirans en la varieté de leur pennage ; mais
cela est cause que les tierceletz et faucons les attrapent, car s'ilz volloyent leur droit vol, il (sic) ne
les attraperoyent jamais, car ilz ont l'aysle plus royde que les oyseaux de proye686 ; mais les
ennemis les espient quand ilz s'amusent a leur gloire, pour les surprendre et attraper. 687 Heu,
superbi !
La cresserelle est bonne aupres des pigeons, car elle espouvente, par un certain naturel
qu'ell'a, tous animaux de proye, qui craignent son regard et son cri688. 689 Humilitas [139] debet
adesse cuilibet virtuti, nam eam timent dæmones. Ubi sup. 690, c. 37 [al. LII].
Ibidem : Au tems du siege de Modena, Decimus Brutus, qui estoit dedans, faysoit sçavoir
de toutes ses nouvelles au camp des consulz par le moyen des pigeons, leur attachant des billetz
aux piedz : de quoy donq servoit a Antonius de tenir Brutus soigneusement enfermé, puisqu'il avoit
ses postes en l'air ? 691 Pro oratione, quam in hoc ergastulo ad Deum et Sanctos fundimus, nam
Spiritus Sanctus eam innotescere facit Sanctis, interpellat pro nobis gemitibus innenarrabilibus692,
vel Angeli. Sic etiam Paulus inclusus et vinctus erat, non tamen verbum Dei693.
Martinetz, appellés apodes, jamais n'ont repos qu'en leurs nidz, car ou ilz se pendent, ou ilz
se couchent. Ilz n'ont nul usage des piedz, et pour prendre vol ilz ne se longent jamais qu'en lieux
eminentz ou le vent les puisse saysir694. Pl. c. 39 [al. LV], l. X.
« De sorte que l'histoire d'Arion, dit Pline, est aysee a croire 695. Arion, excellent jouëur de
cytre, estant sur mer, les mariniers delibererent de le jetter en mer. Il les pria de luy donner loysir
684 Aulus Gellius, Noctes Atticæ, l. XVII, c. XVI. (Cf. Introd. a lu Vie dev., Part. II, ch. XX.)
685 Cf. tom. XV, p. 52.
686 Cf. Tr. de l'Am. de Dieu, liv. IV, ch. III.
687 Hélas, orgueilleux !
688 Cf. Introd. a la Vie dev., Part. III, ch. IV.
689 L'humilité doit se joindre à toute vertu, car les démons la craignent.
690 C'est-à-dire à l'alinéa précédent, où saint François de Sales cite Pline, livre X.
691 Pour la prière que, dans la prison de ce monde, nous adressons à Dieu et aux Saints ; car le Saint-Esprit, qui l'inspire
aux Saints, prie pour nous par des gémissements ineffables, et même les anges. C'est ainsi que même saint Paul était
prisonnier et enchaîné, lui, mais non la parole de Dieu.
692 Rom., VIII, 26.
693 II Tim., II, 9.
694 Cf. Tr. de l'Am. de Dieu, liv. II, ch. IX, XII, XIII, et tom. VIII, p. 359.
695 Pline raconte plusieurs histoires prodigieuses de dauphins, et ensuite il dit : « De sorte que » etc. C'est tiré mot à
mot de Du Pinet.
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de jouer encor un coup de sa cytre, ce qu'ilz firent ; et tout incontinent, des daulfins vindrent, et
fut receu par l'un d'iceux qui le porta au cap de Tenaro, » qui est en la contree de Misistrat en
Lacedemone. Pl., l. 9, c. 8. 696 Si ante mortem possemus cythara orationis et contritionis uti,
salvaremur ; veruni non interdum conceditur.
En Languedoc 697, au ressort de Nismes, il y a un'aiguemorte [140] nommee Laterra. En
une sayson de l'annee, les muges, poissons, se jettent en grande abondance en ladite eau ou fosse,
par un'estroitte emboucheure qu'il y a de la mer en icelle. Les pescheurs tendent leurs filetz en
ladite morte, et par ce que les muges s'eschapperoyent par l'emboucheure, ilz crient aux daulfins :
Simon, simon ! Les daufins accourent et gardent l'emboucheure ; si que les muges qui ne sont prins
au (sic) filetz et qui les veulent eschapper sont tués par les daulfins, qui par apres les mangent ; et
le jour suivant les pescheurs, pour les recompenser, leur donne (sic) du pain trempé en vin. 698 Heu
me ! quid faciet anima quæ se in aquas mortuas voluptatum injicit ? Vel a mundo, vel a dæmone
capiet. Ibidem, [c. VIII, al. IX.]
En Chipre, es forneaux et forges de bronze qui y sont communes, on y voit au milieu d'iceux
un'espece de grosses mouches a 4 piedz qui volent parmi le feu et sont appellees pirates ou
piraustes699 ; si elles sortent du feu un peu loin, elles meurent. Pl., l. XI. c. 36 [al. XLII] ; le
traducteur dit que c'est fable 700. 701 O anima in charitate vivit ; sine charitate nihil est702. Homo,
musca quadrupés : et quare ?
Pl., l. XI. c. 6 [al. V-VI] : Mouches a miel enduisent leurs ruches du commosis et y meslent
du jus des herbes les plus ameres qu'elles puissent rencontrer, affin de desgouster les menues
bestioles qui s'y voudroyent affriander, et bastissent de mesme les entrees. La munition delaquelle
elles vivent est faitte de la rosee du printems et des gommes des feüilles703 ; elle se treuve au fons
des rayons, et amere. 704 Dum mei faciunt, amaris vescuntur705 ; sic in pænitentibus consolatio.
[Lib.] XI. c. 7. ibidem.
Abeilles ne font point de mal au fruit quel quil soit. Aristoteles, [141] de Hist., l. 4. c. 22 :
706 Colligunt apes ex floribus, sine ullo fructu detrimento707, et ne se poseront jamais sur une fleur
morte ; tant s'en faut qu'elles ayment les cors mors708 ; c. 8. 709 Charitas ex omnibus actionibus mel
elicit, nullam autem offendit. Flos mortuus virtus est moralis, charitate destituta ; huic non insidet
Spiritus Sanctus.
Pl. l. XIII, c. 4 [al. VI-VIII] : Les palmiers croissent insignement en Judee ; en Italie, ilz
sont steriles ; en Espagne, ilz portent fruit, mais non point a maturité. Ilz ayment les terres
sablonneuses, neanmoins moüillees et trempees, si que ilz se playsent pres les fleuves. En Levant,
il y en a de rons et fort grans, environnés de cercles faitz de leur escorce, de la grosseur du poulce,
mis a mode de degrés asses pres l'un de l'autre ; et cela sert de robbe a l'arbre et de degré a ceux
qui veulent y monter. Ilz ne jettent leurs branches qu'a la cime ; ilz jettent leur fruit (sic) attachés
a des petitz sions sortans des branches a mode d'une grappe, tenant en partie du raysin. Leurs
696 Si, avant de mourir, nous pouvions jouer de la cithare de la prière et de la contrition, nous serions sauvés ; mais
parfois cette grâce n'est pas accordée.
697 « En la province de Narbonne, » dit Pline ; Du Pinet traduit : « En Languedoc ».
698 Hélas ! que fera l'ême qui se jette dans les eaux mortes des voluptés ? Elle sera prise soit par le monde, soit par le
démon.
699 Cf. Introd. a la Vie dev., Preface, et tom. XVI, p. 213.
700 Du Pinet, en effet, le dit en marge de sa traduction.
701 Oh ! l'âme vit dans la charité, sans la charité elle n'est rien. Homme, mouche quadrupède ; et pourquoi ?
702 Cf. I Cor., XIII, 1-3.
703 Cf. tom. III, Part. II, ch. XXI ; IX, pp. 7, 68.
704 Tandis qu'elles font le miel, elles se nourrissent de plantes amères : symbole de la consolation chez les pénitents.
705 Cf. Introd. a la Vie dev., Part. III, ch. III.
706 Les abeilles butinent les fleurs sans nuire aucunement au fruit.
707 Cf. tom. III, Part. I, ch. III.
708 Cf. ibid., Part. III, ch. XIII.
709 La charité fait sortir le miel de toutes les actions, mais elle ne fait de tort à aucune. La fleur morte, c'est la vertu
morale ; le Saint-Esprit ne s'y posera pas.
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feuilles sont a mode d'espee710 ; on en fait des cordages et liayson de vignes, et des chappeaux et
lottes a la piemontoyse. Il y a masle et femelle ; notoirement le masle produit sa fleur en son
sarment ; la femelle ne jette point de fleur, ains le fruit comme le bourguespine. L'un et l'autre
produit premierement la chair de la datte, puis le noyau dedans, qui sert comme de graine a la datte
; on le void par ce que les jeunes dattes n'ont encor nul noyau. Les palmiers femelles, ce dit on,
croissent a leur juste grandeur, mais demeurent steriles si elles n'ont le masle au pres, par le regard
duquel, ou par son exalation, ou par la poudre qui en sort, elles conçoivent et sont rendues
fertiles711 ; aussi on void les femelles s'incliner doucement et replier leurs branches du costé des
masles, comme leur faisant la court, la ou le masle demeure ferme, accresté et roide ; si on le
coupe, les femelles deviennent steriles. Ilz ayment un terroir nitreux et salé, et les Assyriens [142]
sement du sel, non sur les racines, mais un peu loin tout autour. Il y a des dattes que les Grecz
appellent caryotes (Kάρυον veut dire pesanteur de teste, hinc carous), excellentes a manger, et font
un vin singulier qui donne : fort a la teste. L'armee d'Alexandre le Grand fut extremement
endommagee de ce que ses soldatz ne se pouvoyent souler de ce bon fruit qui les estouffoyt par
apres.
Dioscoride, l. I. c. 125 : Les dattes font douleur de teste et enivrent, si on en mange trop.
Mathioli, ibidem, [c. CXXV] : Le palmier est un arbre haut, il gette grand nombre de fleurs
dependantes de certains petitz poilz en mode d'une grappe, de figure semblable a celles du saffran,
mais beaucoup moindres et blanches. Elles sont, avant que de sortir, encloses en une grande
couverture nommé (sic) palma elaté, laquelle s'ouvrant, elles sortent et s'espanoüissent, d'ou
viennent les dattes rougeastres. Laditte couverture, palma elaté, croit du tronc mesme, entre les
premieres branches, longue de deux empans.
712 Palma victoriæ signum, ex Apocal. 7 713, quia nimirum compressa erigitur. Item,
justitiæ, Deut. 25 714, a. et victoriæ in causa : ad litteram, ait Lyranus715, dabatur palma in manu,
ut ostenderetur eum victorem in causa. (Vide ibi.) Item : Justus ut palma florebit, [Ps.] 91 716, c.,
quem locum Tertullianus intellexit de phœnice ave, quia palma grece φοῖνιξ ut et avis, l. De resurr.
carnis, [c. XIII]717. (Tu ex iis quæ dicuntur hic, multis modis illustrabis.) Item, insigniter locum
Cant. : Comæ ejus sicut elatæ palmarum ; Cant. 5 718 et 7 719 ; Statura tua, etc., et : Ascendant ad
palmam, nam justus ramos in superiori parte [143] extendit, semper viret, flores ejus non apparent
nisi conscidatur ejus cortex et saccus tribulationibus. Comæ sponsæ sicut elatæ, et cætera, quia
elatæ palmarum contegunt flores ; ipsis apertis, apparent albi : sic capilli sponsæ discreti, apparet
eximia pulchritudo vultus, quæ videtur fasciculus florum tamtaque apparet albedo, ut nigrescere
710 Cf. tom. VI, p. 365.
711 Cf. tom. VI, pp. 353, 354 ; VIII, p. 400.
712 Palme, symbole de victoire, d'après l'Apocalypse, chapitre VII, sans doute parce que comprimée elle s'épanouit.
C'était aussi le signe de la justice et de la victoire dans un procès : à la lettre, dit Nicolas de Lyre, on mettait une palme
dans la main [de l'acquitté] pour montrer qu'il était vainqueur dans le procès. (Voir à cet endroit.) De même : Le juste
fleurira comme le palmier, expression que Tertullien rapporte au phénix, parce que palmier se dit en grec φοῖνιξ,
comme cet oiseau... (De tout ce qui est dit à cet endroit, tu pourras tirer beaucoup d'exemples pour illustrer ta pensée.)
De même très remarquablement ce passage du Cantique : Ses cheveux sont comme l'élate des palmiers ; Ta taille, etc.,
et : Je monterai sur le palmier, car le juste étend ses branches dans la partie supérieure ; il est toujours vert, ses fleurs
n'apparaissent que si son écorce et son enveloppe est fendue par les tribulations. Les cheveux de l'épouse sont comme
les élates, parce que les élates des palmiers enveloppent les fleurs ; quand les élates s'ouvrent, les fleurs apparaissent
blanches : ainsi, quand les cheveux de l'épouse sont séparés, apparaît la remarquable beauté de son visage qui semble
un bouquet de fleurs, et ii apparaît une telle blancheur que la chevelure semble devenir noire comme le corbeau.
Celui qui a trop reçu du fruit du palmier et de la victoire spirituelle et qui a bu le vin, c'est-à-dire une joie immodérée,
sa tête est alourdie par la vaine gloire, et il est enivré d'orgueil. Il y a beaucoup de considérations à faire au sujet de
l'ascension sur le palmier.
713 Vers. 9.
714 Vers. 1.
715 Postilla, in Apoc. VII, 9.
716 Vers. 13.
717 Cf. tom. VII, pp. 83, not. (616), et 378 ; VIII, p. 399.
718 Vers. 11.
719 Vers. 7, 8.
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videatur coma sicut corvus. Qui nimis accepit de fructu palmæ et Victoriæ spiritalis et vinum,
id est lætitiam immoderatam, caput ejus gravate inani gloria et inebriatur superbia. Considera
multa de ascensu in palmam.
Herisson ne sort guere de sa taniere le jour ; la nuit va aux vignes et sous les arbres, fait
tumber les raysins avec sa patte et se veautre et monte pour les piquer, comme les pommes tumbees
par le vent, et les rapporte. Se fait tout d'espines devant les chiens. Mathioli, [Comment. Dioscorid.,
l. II, c. II.]
Dioscoride : Scorpion broyé et mis sur sa playe la guerit720. [Ibid., c. XI, et l. VI, c. XLIV.]
Mathioli, [ibid.] : L'huile [de scorpion] guerit toute (sic) poyson qui n'est corrosive.
721 Torpille endort la main qui la touche et les piedz, soit mediatement ou immediatement
; elle se fourre dans le limon et arreste les poissons, les engourdissans, et les mange. [Ibid., c. XV.]
722 …………………………………………………………………………………………………..
On dit que gardant les cors des mouches a miel mortes (noyëes, les couvrant et eschauffant
de cendres chaudes, l. XI, c. XXXVI) dans la mayson tout le long de l'hiver et les remettant au
soleil au printems, les tenans couvertes [144] de cendres de figuier, elles resusciteront et seront
bonnes comm'au paravant723. Pl. l. XI. c. XX [al. XXII], 724 Homines, muscæ mortuæ tempore
baccanalis universi aquis voluptatis, si soli verbi Dei exponantur ut calefiant, et cinere
conspergantur, reviviscunt.
Virgile dit725 quil faut tuer un toreau et le laisser la ; il engendrera des mouches a miel,
comme les chevaux mors engendrent les guespes et frelons, et les asnes les escharaveaux et
foüillemerdes 726. Ibidem, [c. XX, al. XXIII.] 727 Christus occisus in cruce ; apes, id est
contemplativos, generavit, qui mellificium exercent, ut leo Samsonis728, etc. Alii mortui non
generant nisi frelones, id est luctuosos, tristes.
Les guespes ayment la chair ; les mouches a miel, au contraire, ne se posent jamais sur un
cors mort729. 730 Hæc est differentia mundanorum et spiritualium ; c. 21 [al. XXIV].
Petites guespes surnommees ichneumons : elles chassent aux araignes phalanges et, les
ayant tuees, elles en enduisent leurs nids et couvent ce liniment dont elles produisent leur
generation ; [cap.] 21 [al. XXIV]. 731 Concipiunt dolorem et pariunt iniquitatem732.
Frelons et guespes, bastars des mouches a miel, leur font la guerre ; ilz font la cire, mais
non pas le miel733 ; 24 et 19. 734 Hæretici, infesti Catholicis, faciunt ore ceram, id est promunt
corticem litteræ ; nam et cera continet mel, mel autem minime. Aucuns pensent qu'elles meurent
au [145] premier coup d'eguillon qu'elles donnent ; autres, que non, sinon qu'elles les fichent si
profond qu'elles ne les puissent retirer sans y laisser le boyau, mais que, par apres, elles sont du
tout inutiles, comme les bourdons. 735 Nota pro iracundis et iis qui vindictam exercent ; c. 18 [al.
720 Cf. Introd. a la Vie dev., Part. I, ch. XIX.
721 Ouy, estant vive, car morte, non.
722 Quelques mots de l'Autographe sont coupés.
723 Cf. Tr. de l'Am. de Dieu, liv. XI, ch. XII.
724 Les hommes sont des mouches mortes dans les eaux de la volupté à l'époque de la bacchanale générale ; ceux-là
seuls qui ont été exposés à la parole de Dieu pour être réchauffés et se couvrir de cendre, reprennent vie.
725 Georg, IV, vers. 284.
726 C'est la traduction de Du f'inet ; le latin a scarabæos, et nous disons maintenant : scarabées, bousiers.
727 Jésus-Christ mort en croix ; abeilles, ce sont les contemplatifs qu'il a engendrés qui produisent le miel, comme le
lion de Samson, etc... Les autres morts n'enfantent que des frelons, c'est-à-dire le deuil et la tristesse.
728 Judic., XIV, 8.
729 Cf. Introd. a la Vie dev., Part. III, ch. XIII.
730 Telle est la différence entre les mondains et les spirituels.
731 Ils conçoivent la douleur et enfantent l'iniquité.
732 Ps. VII, 15.
733 Cf. Introd. a la Vie dev., Part. III, ch. X.
734 Les hérétiques, ennemis des catholiques, font de la cire avec leur bouche, c'est-à-dire expriment l'éeorce de la lettre
; car la cire aussi contient le miel, mais ils ne produisent nullement le miel.
735 A noter pour les irascibles et pour ceux qui exercent la vengeance.
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11.3 Page 103

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XIX].
Les araignes ne travaillent point quand il fait beau tems, mais quand il est trouble ; 736 apes
contra737 (c. 24 [al. XXVIII].) Mali piscantur tempore malo.
Les araignes phalanges font leurs petitz en leurs tesnieres et les couvent en grande quantité,
mais quand ilz commencent a germer ilz mangent leur mere et leur pere qui aussi s'ayde a les
couver ; et les scorpions terrestres de mesmes. [L. XI, c. XXIV, al. XXIX.]
Les cygales vivent de rosee. Ce seul animal, entre tous ceux qui ont vie, n'a point de bouche
ni de cul ; en lieu de bouche elles ont une pointe en l'estomac, faitte a mode d'une langue avec la
[quelle elles lèchent] la rosee738. Elles chantent neanmoins infiniment 739 …………………………
…………… tuyaux. 740 Sanctus Franciscus fratres appellabat in toto corde meo741.
Figuiers sauvages produit (sic) des mouchons qui, ni treuvant a manger, se jettent sur les
figues privees et ouvrent les souspiraux d'icelles, et par ce moyen, le soleil et vent chaud qui fait
meurir le blé entre dedans ; joint aussi que ces mouchons succent le lait qui tenoyt lesdittes figues
en enfance, et les font meurir par ce moyen. Et les sages laboureurs mettent des figuiers sauvages,
d'ou le vent vient contre les figuiers privés742. Les figuiers plantés et exposés a la bise et en lieu
(sic) maigres n'ont besoin de cet ayde, car ilz dessechent asses d'eux mesmes et crevassent. [146]
(XIX c. [al. XXI], lib. XV.) 743 Mali prosunt bonis : In tribulations dilatasti mihi744 ; sed si nos
ipsos dijudicaremus, non utique judicaremur745.
Si l'elephant rencontre un homme qui va simplement son chemin par la forest, il se monstre
doux et benin a luy ; sil sent la piste et frais d'un homme avant que de le voir, il tremblera, de peur
d'estre surprins ; s'arreste, regarde ça et la, et ne marche point sur icelle, mais la jette a l'autre
suivant, et l'autre a l'autre, et tous font ainsy et se mettent en combat. L. 8. c. 4 [al. V], 746 Pudicitia.
Elephans beuvans huile, font tumber les traitz et fléchés qui tiennent a leur peau ; l. 8. c. X.
L. XXXV. c. IX [al. XXXV] : Polignotus, Thasien, fit un tableau qui fut despuis mis en la
galerie de Pompee, ou il y avoit un homme si proprement peint sur un'eschelle, qu'on n'eut sceu
dire sil monte ou sil descend. 747 Non progredi, retrogredi est.
Zeuxis, Heraclien, estant devenu riche par son art, donnoit ses peintures pour neant, ayant
cette presomption qu'on ne [les] eüt sceu asses payer. Ibid., [c. IX, al. XXXVI].
748 Deus dat gratiam quam nemo recte emat. Sed si pictor, data pictura aliqua, aliam pro prima
voluisset vendere, nullam operi sua minuisse gloriam ; sic Deus cum gloriam pro gratia.
Zeuxis : Il fit une luitte ou il print grand playsir, et mit dessous « qu'elle seroit plus tost
enviee que contrefaite749. »
750 Ad luctam Christi cum dæmone751, potius laudatam quam irnitatam.
Zeuxis voulant faire un tableau pour ceux de Girgenti, [147] qui en avoyent voüé un au
temple de Juno en [Calabre], il voulut voir toutes les filles de Girgenti nües et en choisit cinq pour
736 Les abeilles au contraire... Les mauvais pêchent en temps mauvais.
737 Cf. Introd. a la Vie dev., Part. III, ch. XXVIII ; tom. VIII, p. 354.
738 Plin., Hist. nat., l. XI, c. XXVI (al. XXXII). Cf. Tr. de l'Am. de Dieu, liv. V, ch. VIII.
739 Les deux dernières lignes de la page autographe n'étaient pas pleines ; quelques mots seulement ont disparu dans
la mutilation. Nous suppléons entre crochets ceux qui manquent à la ligne précédente.
740 Saint François appelait frères………. de tout mon cœur.
741 Pss. LXXXV, 12, CXVIII, 58, 145, CXXXVII, 1.
742 Cf. tom. VIII, p. 150.
743 Les mauvais sont utiles aux bons : Lorsque j'étais dans la détresse, vous m'avez mis au large. Si nous nous jugions
nous-mêmes nous ne serions pas jugés.
744 Ps. IV, 2.
745 I Cor., XI, 31.
746 Pudicité.
747 Ne pas avancer, c'est reculer.
748 Dieu donne la grâce que personne ne pourrait assez payer. Mais si un peintre, ayant donné une peinture quelconque
avait voulu en vendre une autre à la place de la première, il n'aurait nullement diminué la gloire due à son œuvre ;
ainsi Dieu quand il donne la gloire à la place de la grâce.
749 Plin., Hist. nat., l. XXXV, c. IX (al. XXXVI). Cf. tom. VIII, pp. 245, 376.
750 Ceci s'applique à la lutte du Christ contre le démon, lutte plutôt louée qu'imitée.
751 Matt., IV, 1-10.
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amasser toutes les marques de beauté qu'elles avoyent. [Ibid.] 752 Sic Christus volens... lacere...
filiarum vel Eucharistiam omnium antiquorum misteriorum 753
……………………………………………………………………………………………………..
Revu sur l'Autographe conservé à la Visitation de Harrow (Londres).
_____
Nous, Jean d'Aranthon D'Alex, par la grace de Dieu et du Sainct Siege Apostolique
Evesque et Prince de Geneve, a tous ceux qui ces presentes verront, salut.
Sçavoir faisons et attestons, que les seize feulliets 754 escripts et conteneus dans le present
cayer a Nous exhibé par Rd Seigneur Mre Joseph de Sales, seigneur de Richemont, Docteur en
saincte Theologie, chanoine de Nostre Esglise cattedrale de Sainct Pierre de Geneve, et ont esté
escripts de la main propre et caracthere de nostre incomparable predecesseur Sainct François de
Sales, comme ayant esté par Nous dheuement recogneus et parangonné (sic) sur des autres escripts
dudit Sainct, treuvés et delaissés dans les Registres du Greffe de Nostre evesché. En foy et
tesmoignage de quoy avons signé les presentes, scellés du seel de ladite evesché et contresignés
(sic) par le greffier d'icelle.
Donnés Annessy en Nostre palais episcopal, le dix septierne jour du mois d'avril, mil six
cents soixante six.
JEAN, Evesque de Geneve.
MORENS.
XIV. Recueil de similitudes
1612-1614 755
(INÉDIT)
756 Pline, in Præf., [trad. de Du Pinet, p. 2] : Ceux qui prætendoyent aux estatz de Rome
promettoyent quelque somme des deniers au peuple, et les remettoyent es mains de quelque
homme responsable. Or, du tems de Caton, ceux qui pouvoyent avoir le credit de consigner la
somme promise en ses mains, avoyent en cela un prejugé et tesmoignage d'innocence. 757 Qui in
Cælo regnare vult, debet propositum servandi legem habere, et fidem, spem et charitatem
promittere ; qui autem propositum hoc fidemque spem ac caritatem suam speciali in Virginem
752 Ainsi le Christ voulant... faire... des filles ou l'Eucharistie de tous les antiques mystères ...
753 Dans cet alinéa, quelques mots sont oblitér
és ; à la fin, une ou deux lignes ont été coupées.
754 Voir ci-dessus, note (517), p. 113.
755 On a parlé dans l'Introduction générale (tome Ier, p. LIII) et, avec plus de détail, dans l'Avant-Propos du tome VIII,
pp. X-XVII, d'un grand Manuscrit de Sermons appartenant à la Visitation de Turin. Les Similitudes et les Notes qui
vont suivre font partie de ce Manuscrit : elles occupent les folios 300, 324 recto, et 342 recto et verso. Ce dernier
contient des Notes pour le Traitté de l'Amour de Dieu, écrites évidemment avant sa rédaction définitive.
Les années 1612-1614 semblent convenir à ce recueil ; une année postérieure à 1614 ne saurait être indiquée
: 1. Dans un plan de Sermon du 26 octobre 1614, saint François de Sales renvoie au folio 324 de son Manuscrit,
lequel est justement un des trois qui nous occupent. (Voir tome VIII, p. 152, et ci-après, p. 153.) 2. Au folio 342
recto, se trouve cité un mot de saint Grégoire de Nazianze : Episcopi siint pictores, etc., que le Saint rappelle clans le
plan de Sermon pour la fête de saint Charles Borromée, 4 novembre 1614. (Voir ibid., p. 155, et ci-après, p. 158.) 3.
Quant aux Notes relatives au Traitté il est impossible de les reculer au-delà de 1614 ; on sait, en effet, que c'est à
partir de cette année que le saint Evêque travailla assidûment à son chef-d'œuvre.
756 (Ms. f. 300, recto)
757 Celui qui veut régner dans le Ciel doit avoir la résolution de garder la loi, et promettre foi, espérance et charité ;
mais celui qui, par dévotion spéciale à la Vierge, lui confie cette résolution, ainsi que sa foi, son espérance et sa charité,
et se place sous sa protection, celui-là possède comme un présage et un gage de salut.
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devotione eidem committit, ac se in ejus tutelam deponit, habet quoddam præsagium et
testimonium salutis. [149]
Cicero, ibidem : Ah ! gentil Caton, que tu es heureux d'avoir esté tel que jamais homme
n'osa te solliciter a chose deshonneste ! 758 Sic de plerisque virginibus, et maxime de Virgine Maria,
quæ scuto pudicitiæ tecta, nunquam oculis impudicis a nemine visa.
Apion, grammarien que l'empereur Tybere Cesar appelloit cymbale ou tambour du monde
et porte nouvelles, estoit si outrecuidé quil disoit quil immortalisoit les lieux ou il composoit
quelque livre. [Pref. de Pline, trad. Du Pinet, p. 4.] 759 Sed merito Patmos, montana Judeæ, mons
Sion, carcer Pauli immortalia sunt, in quibus Joannes, Maria, Dominus, Paulus composuerunt.
La pedanterie d'Apion.
760 Apelles et Policletus solebant inscribere picturas 761 : « Apelles faciebat, Policletus
faciebat. » Toutefois, Apelles fit troys tableaux auxquelz il mit : « Ille fecit 762, » monstrant
combien il se contentoit de ces trois ouvrages. [Ibid., p. 5.] 763 Sic Deus initio mundi : Fiat ; et
factum est ita, et fecit bestias, etc, ; vidit quod esset bonum, sic enim ait Scriptura764 cum de cæteris
creaturis. At cum de homine : Faciamus hominem ; et tunc : et erant valde bona765.
Les loups garoux en ont aux mortz et fouillent les sepulcres : 766 [150] sic et maledici, qui
maledicunt defunctis, ut hæretici nostri temporis.
[Plin., Hist. nat., l. II,] chap. 37 : Les lumieres et feux qui viennent sur les navires sont de
mauvais præsage quand il ny en a qu'une seule, que les mariniers appellent helene ; et mesme, ce
feu solitaire tumbant au fond, il brusle le vaisseau. Mays quand on void deux feux, ilz apportent
tout bonheur et presagent bon voyage, et a leur arrivee le feu malheureux qui est seul et s'appelle
helene, s'enfuit et s'esvanouit. Quand ilz sont deux ilz s'appellent Castor et Pollux, et se posent
quelquefois sur les testes des hommes ou a l'entour. 767 Spes sine timore, vel timor sine spe, est
solitarium et malignum lumen comburens carinam ; at cum duo, bonum omen et expellunt
malignum, id est desperationem, nimirum timorem sine spe, aut presumptionem quæ nihil aliud
est quam spes sine timore. Sic zelus sine scientia aut scientia sine zelo. Sic amor Dei sine amore
proximi est falsus amor et presumptuosus, et amor proximi sine amore Dei est amor
concupiscentiæ et malignus ; adveniente charitate, quæ utrumque habet, evanescunt illi falsi
amores.
Ch. 40, [Plin., ibid.] : La canicule regnante, la mer bouillonne, les vins poussent. Il y a une
sorte de chevreul 768 qui n'a qu'une corne, en Egipte, qui regarde droit cest'estoile apres qu'ell'est
758 Ainsi de la plupart des vierges, et surtout de la Vierge Marie qui, couverte du bouclier de la chasteté, n'a jamais été
regardée par personne avec des yeux impudiques.
759 Mais c'est avec justice que Patmos, les montagnes de Judée, le mont Sion, la prison de Paul sont immortels, ces
lieux où Jean, Marie, le Seigneur, Paul, ont composé.
760 Apelle et Polyclète avaient coutume d'inscrire sur leurs peintures : « Apelle faisait, Polyclète faisait. »
761 Il y a ici une petite faute au sujet de Polyclète ; il ne fit pas des peintures, mais des sculptures. Du Pinet a induit en
erreur saint François de Sales en unissant les œuvres des deux sous le nom de tableaux. Pline parle des œuvres des
deux maîtres dans l'art de peindre et de sculpter.
762 « Il a fait, »
763 Ainsi Dieu, au commencement du monde : Soit fait ; et il fut fait ainsi, et il fit les animaux, etc. ; il vit que c'était
bon ; c'est ainsi en effet que parle l'Ecriture quand [il est question] des autres créatures. Mais quand il s'agit de l'homme
: Faisons l'homme ; et alors [l'Ecriture ajoute] : et c'était tout à fait bon.
764 Gen., I, 3-25.
765 Ibid., vv. 26, 31.
766 Ainsi les médisants qui médisent des morts, comme les hérétiques de notre temps.
767 L'espérance sans la crainte, ou la crainte sans l'espérance est cette lumière solitaire et malfaisante qui brûle le
vaisseau ; mais quand elles paraissent toutes deux, c'est un bon augure et elles chassent la mauvaise lumière, c'est-à-
dire le désespoir, la crainte sans espérance, ou la présomption qui n'est que l'espérance non accompagnée de crainte.
De même le zèle sans la science, ou la science sans le zèle. Ainsi, l'amour de Dieu sans l'amour du prochain est un
amour faux et présomptueux, et l'amour du prochain sans l'amour de Dieu est un amour de concupiscence et un
mauvais amour ; mais dès qu'arrive ia charité, qui possède l'un et l'autre, ces faux amours s'évanouissent.
768 Du Pinet traduit orygem, oryx, par chevreul.
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levee, et esternue en signe de reverence, et les chiens sont sujetz a devenir [151] enragés. 769
Heresis, stella canicularis, dum paret in cælo Ecclesiæ, mare, id est populi, tumultuant, vinum
doctrinæ subvertitur pessimis interpretationibus ; capreæ Ægiptiacæ (et a cornibus unicornium
humilitatem meam770), homines addicti carni et lasciviæ, eam libenter adorant ; denique, plerique
canes, maxime ex monachis, in rabiem vertuntur.
Revu sur l'Autographe conservé à la Visitation de Turin.
………………………………………………..
771 Relicta ex præparatis.
Tentatio luxuriæ similis est aux cirons
qui intus et ubique urgent, maxime desiccatis ;
nam sudantes et cerosum humorem emittentes
vix urgentur. Item, differentia inter Philippum
et Alexandrum, ut videre est apud
Plutarchum772, quod Philippus omnibus ex
rebus gloriam, at Alexander non nisi ex magnis
captabat773. [152]
………………………………………………..
Abandonné après avoir été préparé.
La tentation de luxure est semblable
aux cirons qui s'attaquent au dedans et au
dehors, surtout des objets secs. Ceux qui
transpirent ou suintent une humeur visqueuse
sont à peine attaqués. Item, la différence entre
Philippe et Alexandre, comme on peut le voir
dans Plutarque : c'est que Philippe tirait gloire
de tout ; Alexandre, des grandes actions
seulement. [152]
XV. Autre recueil de similitudes
1612-1614
(INÉDIT)
774 Loups dorés de Cilicie fuyent quand le soleil se monstre. (Appian, l. 3.) 775 Sic heretici,
vere lupi, sed aurati propter prætextum Scripturæ, fugiunt Ecclesiam amictam sole776, vel solem
in Ecclesia, Concilia amicta Spiritu Sancto.
Laurier enrage (aupres d'Heraclee), apud Plin., l. 16, c. 44 [al. LXXIX] ; si on en mettoit
une branche dans un navire, tous les passagers s'entrequerelloyent (sic) sans cesse. 777 Superbia,
meum et tuum, hæresis, præsumptio, inter homines rixas, odia, dissidia pariunt. Mais le laurier
naturel ordinaire est signe d'asseurance, n'estant touché du foudre.
Plin., l. 12. c. [XVIII, al. XLI] ; L'Arabie Heureuse est ingrate, rendant graces aux dieux
769 Lorsque l'hérésie, étoile de la canicule, paraît au ciel de l'Eglise, la mer, c'est-à-dire les peuples, bouillonne ; le vin
de la doctrine est troublé par les interprétations les plus détestables ; les chevreuils d'Egypte (protège mon humilité
contre les cornes des licornes), c'est-à-dire les hommes adonnés à la chair et à la lasciveté, la saluent avec joie ; enfin,
la plupart des chiens, surtout parmi les moines, deviennent enragés.
770 Ps. XXI, 22.
771 Ces lignes ont primitivement appartenu au Manuscrit de Turin comme les pages précédentes, et on doit leur assigner
la même date. Actuellement, elles se conservent dans la même ville, à la Maison mère des PP. Salésiens du
Bienheureux don Bosco.
772 Vita Alex. Mag., circa initium.
773 Cf. tom. X, p. 103.
774 (Ms. f. 324, recto)
775 Ainsi les hérétiques, véritables loups, mais loups dorés parce qu'ils se couvrent du prétexte de l'Ecriture, fuient
l'Eglise vêtue de soleil, ou fuient le soleil dans l'Eglise, c'est-à-dire les Conciles revêtus du Saint-Esprit.
776 Apoc., XII, 1.
777 L'orgueil, le mien et le tien, l'hérésie, la présomption font naître entre les hommes les querelles, les haines, les
divisions.
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celestes de ce qu'elle recevoit des infernaux778. 779 Sic hommes plerumque agunt gratias diis
mortalibus et terrenis de acceptis a celesti ; hinc se creaturas hominum potentum nuncupant, etc.,
et sepe se Dei gratia regna, episcopatum, etc., quæ Dei ira, vel vitio ipsorum obtinent.
Ou le soleil bat a plomb il ny a point d'ombre ; ainsy en la Vierge, regardee directement et
a plomb par Nostre Seigneur, il ny a nulle ombre de peché : 780 Quia respexit [153] humilitatem
ancillæ suæ, ecce enim ex hoc beatam me dicent omnes781. Le midi des creatures.
Les dams de la Cilicie ne sortent jamais de la province et ne passent jamais les montz qui
la divisent de la Syrie. (Pl., l. 8. c. 58 [al. XXXIII].) Ainsy chacun doit demeurer clans sa vocation.
Nymphidius vouloit estre creu filz de Caesar, mais sa mine le dementoit, car il ressembloit
a l'escrimeur Martian. (Plut. in Galba, [c. IX].) Les ministres voudroyent faire croire quilz sont
enfans des Apostres, mais ilz n'en ont pas la mine. Ilz ne prisent pas le jeune, la virginité, la
pauvreté, etc. ; ilz ressemblent plus tost au Turc et leurs eglises aux mosquees.
Pline. Xagua, plante de l'isle Espagnolette, produit un suc blanc a merveilles, qui tache
neanmoins les draps d'une noirceur qui ne peut estr'ostee. (Silvester [de Nierio]. E contrario 782, le
savon noir blanchit admirablement. 783 Mala causa bonus effectus, et e contrario. Scientia inflat784
; abjectio ex peccatis, tribulatio lætificat ; prosperitas in pericula projicit et peccati interdum mater,
etc.
Rossignol commençant a chanter, c'est signe quil commence a manger seul. [Ch. Estienne,
Mayson rustique, p. 386.] 785 Heu, sed nos diu comedimus antequam gratias agamus et
benedicamus Domino !
Paon chasse naturellement a la vermine, araignes, mouches ; 786 e contrario aquila.
Interdum, ingeniosissimi (beaux espritz), ut Montagne, rebus ludicris et malis incumbunt ; at
ingenia fortia, solida, aliter.
Une poule qui meyne les poussins, en voyant un'autre qui meyne les paonneaux, elle laisse
les siens, de jalousie [154] et desdain. 787 Sic plerique relinquunt iter virtutum cum vident alios
perfectiores ; relinquunt opera vacationis cum vident alios opera pulchriora facere, ut prædicare,
etc. At vero, deberent considerare melius esse opera propria ac pullos proprios ducere, quam opera
gratiarum gratis datarum et quæ in utilitatem solum aliorum sunt, et pullos alienos habere.
Revu sur l'Autographe conservé à la Visitation de Turin.
_____
778 Vide tom. VIII huj. Edit., p. 152.
779 Ainsi, la plupart du temps, les hommes rendent grâces aux dieux mortels et terrestres pour ce qu'ils ont reçu du
Ciel. En conséquence, ils se donnent le titre de créatures des hommes puissants, etc., et souvent ils attribuent à la grâce
divine les royaumes, l'épiscopat, etc., dignités qu'ils possèdent par suite de la colère de Dieu ou de leurs propres vices.
780 Parce qu'il a abaissé son regard sur l'humilité de sa servante, voici que désormais toutes les générations me diront
bienheureuse.
781 Luc., I. , 48.
782 Au contraire,
783 Mauvaise cause, bon effet, et réciproquement. La science enfle ; l'abjection provenant de nos péchés, la tribulation,
produisent la joie ; la prospérité nous précipite dans les dangers, et quelquefois est la mère du péché, etc.
784 I Cor., VIII, 1.
785 Hélas, nous, au contraire, nous mangeons longtemps avant de rendre grâces au Seigneur et de le bénir !
786 L'aigle, au contraire. Parfois les beaux esprits, comme Montaigne, s'appliquent à des choses frivoles et mauvaises
; mais les esprits solides et forts agissent autrement.
787 Ainsi la plupart abandonnent le chemin des vertus quand ils voient d'autres plus parfaits ; ils abandonnent les
travaux de leur profession quand ils voient les autres faire des œuvres plus belles, comme de prêcher, etc. Mais au
contraire, ils devraient considérer qu'il vaut mieux pour eux faire leur œuvre propre et conduire leurs propres poussins,
que de faire les œuvres de grâces gratuitement données et qui ne sont utiles que pour les autres, et de conduire les
poussins des autres.
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XVI. Recueil de similitudes et notes pour la rédaction du Traité de
l'Amour de Dieu
1612-1614
(INÉDIT)
788 789Pro Passione Dominica, vide Per.790, ad c. 22 Genes., disp. 15, fol. 632 ; nimirum, ad
locum Reg., 4 ; c. 3, de Rege Moab immolante filium, et cætera.
Initio lib., de amoris fortitudine791, afferendus gladius in porta paradisi792 ; et vide Per., [lib.
VI, p. 710.] Gladius autem portatur a Cherubim, id est scientia.
Aug., tom. 10, Ser. 46, [P. L.,tom. V, Append., CVI, 8.] [155] Vide de immolatione cordis
sub figura Isaac793, et applica ad immolationem liberi arbitrii794.
Les Æthiopiens excitent le feu a leur rubis par vinaigre795. (Plin., l. 37. c. 7. nu. 20, [al.
XXVI].)
796 Bernardus 797 : Uspiam curiosus alta potius quam apta scrutatur.
Les enfans qui parlent fort tost, marchent tard ; Plin., l. XI. c. 51 [al. CXII], 798 Loquaculi
parum affectus habent.
[Plin.,] l. XI. c. 53 [al. CXV] : Porceaux mangent les serpens sans s'en sentir ; tous autres
animaux en meurent. 799 Sic peccata porcis sunt cibus, id est fœdis et luxuriosis ; aliis sunt interitus,
id est amara ut mors.
Chattons ne sont ni fruitz ni feuilles, ni fleurs ni fruitz. 800 Opera mere indifferentia.
Le sappin meurs (sic) si on luy oste la cime.
788 Pour la Passion du Seigneur, vois Pereira... ; assurément livre IV des Rois, chap. m, sur le roi de Moab immolant
son fils, etc.
Au début du Livre, sur la force de l'amour, il faut indiquer l'épée au seuil du paradis ; et vois Pereira. Or
l'épée est portée par le Chérubin, c'est-à-dire par la science.
Saint Augustin, tome X, Sermon XLVI. Vois, au sujet de l'immolation du cœur sous la figure d'Isaac, et
applique à l'immolation du libre arbitre.
789 (Ms. f. 342, recto)
790 Pereira, Comment. in Genesim.
791 Vide Tr. de l'Amour de Dieu, liv. II, ch. VIII, initio.
792 Gen., III, 24.
793 Gen., XXII. 1-18.
794 Tr. de l'Am. de Dieu, liv, XII, ch. X.
795 Cf. tom. VIII, huj. Edit., p. 152.
796 Saint Bernard : En quelque lieu qu'il soit, le curieux scrute les choses profondes plutôt que les choses utiles.
797 Ce texte ne se trouve pas dans les Œuvres du saint Docteur.
798 Les bavards ont peu de sentiment.
799 Ainsi les péchés sont nourriture pour les porcs, c'est-à-dire pour les hommes souillés et luxurieux ; pour les autres
ils sont trépas, c'est-à-dire amers comme la mort.
800 Actions purement indifférentes.
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801 Halietus, aquila marina802, quæ pisces capit ; et si piscem majorera quam ferre possit
accipiat, potius seipsam cum onere in profundum demergi patitur, quam prædam relinquat.
Fures restituere nolentes, et societates, conversationes et artes malas relinquere nolentes. (Lauretus
803.)
O verba Gregorii Nazianzeni miranda ! Apol. 1, [Orat. [156] II, Apologetica, 77 ; P. G.,
tom. XXXV] : « A juvenili ætate accersitus fui (libet enim aliquid ignotum in vulgus efferre) atque
ad Deum, a vulva ipsa projectus, maternaque pollicitatione in munus oblatus. « Paulo post, ait
omnia se contempsisse propter Christum804 : famam, valetudinem, litteras ipsas « a quibus, » ait,
« dumtaxat hoc commodi tuli ut eas aspernarer, atque aliquid haberem cui Christum anteferrem. »
O qui incumbitis altis, non aptis scientiis, audite.
Sed et lamiæ nudaverunt mammam, lactaverunt filios suos805. Philostratus 806 ; Politianus,
in Miscellaneis ; Cælius Rodigenus 807, var. Lect., L. 29, c. 5 ; Dion 808. Lamise sunt monstra
aphricana ; facie, oculis, dentibus, pectore summe decoro ; reliquo corpore immani, horrendo,
crudeli. Unde ostendunt junioribus pectus a primo pulchrum, attractos autem vorant et, ut dixit
Horatius809 :
« Ne pransæ lamiæ puerum vivum extrahat alvo. »
Lactare, in Scripturis est blandiri : Cum te lactaverint peccatores, ne acquiescas eis810.
801 Haliet, aigle de mer, qui prend les poissons ; et s'il lui arrive d'en saisir un trop grand pour qu'il puisse le porter, il
se laisse engloutir dans l'abîme avec sa charge, plutôt que de lâcher sa proie. Voleurs se refusant à restituer et à
abandonner les sociétés, conversations et moyens coupables.
O admirables paroles de Grégoire de Nazianze !... « J'ai été attiré dès mon jeune âge (car il me plaît de révéler
au public quelque chose qu'il ignore), et je fus offert en présent à Dieu par un vœu de ma mère, au moment même où
je sortis de son sein. » Peu après il dit qu'il méprisa tout à cause du Christ : la faim, la santé, les belles-lettres même,
elles dont, » dit-il, « j'ai surtout tiré cet avantage, de pouvoir y renoncer, afin qu'il y ait quelque chose que je puisse
sacrifier à Jésus-Christ. » Ecoutez, vous, qui vous appliquez à des sciences élevées, mais non appropriées.
Les lamies aussi ont découvert leurs mamelles, elles ont allaité leurs petits. Philostrate ; Politien, dans les
Miscellanées ; Cælius Rodrigenus... ; Dion. Les lamies sont des monstres d'Afrique : leur tête, leurs yeux, leurs dents,
leur poitrine sont d'une grande beauté ; le reste du corps est monstrueux, horrible, hideux... C'est pourquoi elles
montrent d'abord à leurs petits leur belle poitrine ; mais quand elles les ont ainsi attirés, elles les dévorent, et, comme
dit Horace : « Que [le poète] ne fasse pas sortir un enfant vivant du ventre d'une lamie qui s'en serait repue. »
Allaiter signifie, dans les Ecritures, caresser : Si les pécheurs te caressent, ne te laisse pas attirer à eux. Les courtisanes
montrent leur poitrine, comme
les lamies, pour caresser les jeunes gens ; s'ils consentent, elles les précipitent dans la ruine. Les petits des lamies sont
ces jeunes coquets, bien frisés et bien peignés qui se livrent à la vanité féminine.
Les évêques sont les peintres de la vertu, sujet le plus excellent de tous ; qu'ils se gardent de mal reproduire,
soit en paroles, soit en actions, un sujet aussi excellent.
Isaïe, cap. VI, v. 5 : Je suis un homme aux livres souillées et j'habite au milieu d'un peuple qui a les lèvres
souillées. Pour la Préface : Comment [parler] de l'amour au milieu des foules populaires s'il ne vient l'un des Séraphins
?
Les lèvres et les joues de l'épouse sont de pourpre, cap. IV Cant., v. 3 ; dans tout ce passage la comparaison
porte sur les lèvres et les joues.
Saint Augustin, De Civit., l. XIV, c. VIII, vers la fin : « On raconte, » dit-il, « qu'Alcibiade, si ma mémoire
ne me trompe pas sur le nom du personnage, » etc. Où l'on voit que ce grand homme ne se souciait pas tellement
dans ses exemples de tous les détails de noms et de circonstances, car même en écrivant ces livres très graves, il ne
prit pas la peine de chercher si celui à qui était arrivé ce qu'il raconte s'appelait bien Alcibiade.
Pline, rapporte l'histoire de deux jumeaux extraordinaires, l'un Asiatique, l'autre Allobroge. Pour l'amour faux
et l'amour vrai.
802 Vide tom. VIII huj. Edit., p. 298, et not. (1891).
803 H. Lauretus, Sylva allegoriarum totius Scripturæ. In-8°, Venetiis, 1575, p. 451.
804 Cf. Philip., III, 7, 8.
805 Thren., IV, 3.
806 De vita Apollonii, lib. IV.
807 Lectionum antiquarum libri XXX ; in-8o, Lugduni, 1560.
808 Dion Chrysostome, Historia libyca.
809 Ars poetic., vers. 340.
810 Prov., I, 10.
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11.10 Page 110

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Meretrices ostendunt pectus, ut lamiæ ad blandiendum junioribus ; at si acquiescunt, eos in ruinam
dejiciunt. Catuli lamiarum sunt cincinnatali et comatuli juvenes vanitati fœmineæ addicti. [157]
Episcopi sunt pictores virtutis, rei præclarissimæ811 ; videant vero ne rem tam excellentem,
vel verbis, vel operibus, male pingant. (Greg. Naz., Apol. 1. pag. 5, 1-13 ; [P. G., tom. XXXV, col.
420].)
Is., c. 6. v. 5. : Vit pollutus labiis ego sum, et in medio populi labia polluta habentis ego
habito. Pro Præfatione812 : Quomodo de Amore inter populares turbas, nisi veniat unus de
Seraphim813 ?
Labia et genæ sponsæ purpureæ, c. 4. Cant., v. 3 ; tota locutio fit labiis et genis.
D. Augustinus, l. 14. De Civit. c. 8, extremo : « Nam Alcibiadem ferunt, » dit il, « si me de
hominis nomine memoria non fallit, » etc. Ubi vides hunc tantum virum non adeo sollicitum de
cunctis nominum et circumstanciarum momentis in exemplis, nam neque scribendo libros illos
gravissimos operæ prætium duxit quærere num Alcibiades vocaretur cui id quod narrat contigerat.
Pl., l. VII. c. XII [al. X], affert historiam de duobus miris gemellis, quorum unus Asiaticus,
alter Allobrox814. Pro amore falso et vero.
Arbres de Tylos, fleurs admirables en odeur, et fruit detestable en amertume ; [Ibid.], l.
XII. c. X [al. XXI].
815 Charitas vinculum perfectionis. Ut anima unit [158] membra, sic charitas corpus
virtutum ; ad Col. 3 816. Vid. Act.817
811 Cf. tom. VIII, huj. Edit., p. 155.
812 Du Tr. de l'Am. de Dieu.
813 Vers. 6.
814 Vide tom. VIII huj. Edit., p. 148, et X, p. 269.
815 Charité, lien de perfection. Comme l'âme unit les membres, ainsi la charité unit le corps des vertus...
L'amour de Dieu se tourne en amour de l'homme.
Pour l'amour du prochain, voir saint Augustin, De vera religione...
La charité complète toute forme de vertus. Apporter comme exemple le chrétien répondant à tout : Je suis
chrétien. Voir Eusèbe, cité au début du Catéchisme.
Minutius Félix, comparant les Gentils aux Chrétiens : « Vous, » dit-il, « vous craignez les témoins, et nous,
la conscience. »
Le cœur a en lui un mouvement qui lui est propre et qui fait mouvoir tout le reste : ainsi la charité.
Exemple remarquable tiré des juments qui se regardent dans l'eau et qui en arrivent à la rage ; elles se
consument d'amour, courant et regardant de tous côtés, comme si elles devaient avoir avec elles leur image. Pour le
remède, voir La Maison rustique, fol. 83.
Phidias plus heureux dans la représentation des dieux que dans celle des hommes ; et moi, peut-être, [plus
heureux à instruire] les hommes de la dévotion commune que du grand amour.
Ne pas vouloir aimer Dieu autant qu'on peut, par mépris, découragement, orgueil, est un péché.
Dans le Traité sur l'empire et le règne de l'amour : comme il a été établi que l'amour réside dans la suprême
pointe de l'âme comme sur le trône suprême de tout le royaume, il faudra faire des chapitres où nous montrerons que
ce suprême amour se sert des amours inférieurs : à savoir, comment la charité se sert de l'amour de convoitise, qui est
l'espérance, et lui commande ; comment elle se sert de l'amour de désir, de l'amour de bienveillance ; ensuite, comment
elle se sert de la crainte, de la joie, de la douleur et de toutes les autres passions de l'âme ; et puis, comment elle se
sert des vertus, et règne ainsi partout. (Voir à ce sujet saint Augustin, d'après Azor, fol. 169, où il dit que l'amour
désire, craint, souffre. C'est qu'en effet, il commande à tous ces sentiments.)
Sur qui les Anges aspirent à fixer leurs regards. L'amour qui se rassasie du bien souverain est toujours plus
ardent à aimer et ne consent pas à se reposer, de là une satiété sans dégoût ; il a le désir et le calme ; il désire une chose
non pas absente, mais présente et qu'il possède ; il est rempli sans être assouvi. Amour désirant et désir aimant.
Au chapitre sur l'amour inné et intime, il nous faudra ajouter la comparaison de celui qui cherche, pour creuser
un puits, les eaux cachées sous terre : au moment le plus chaud de l'été, quand la terre est toute sèche, peu avant le
lever du soleil, couché sur la terre, il parcourt du regard la plaine du côté de l'orient, et à l'endroit où il aperçoit un
léger nuage, une légère vapeur, il juge que là se cache une source que, d'ailleurs, il ne voit pas. Ainsi, bien que l'amour
de Dieu par dessus toute chose n'apparaisse pas en nous, nous apercevons, si nous y regardons bien, une sorte de
vapeur qui, même dans la plus grande sécheresse, apparaît : ce sont certaines affections, certaines inclinations qui
révèlent la source cachée de l'amour.
Le poirier ne peut jamais être greffé sur le chêne, ni l'olivier sur le figuier. Ainsi sont certaines passions sur
lesquelles la charité ne peut être entée, comme la colère, la tristesse ; c'est à grand peine qu'on y peut enter la charité.
816 Vers. 14.
817 Cap. IV, 32.
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12.1 Page 111

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Philotheia vertitur in philantropiam.
Pro amore proximi, vide D. August., De vera religione, c. 47, tom. I.
Charitas supplet omnem virtutum formam. Afferatur exemplum de Christiano se ad omnia
respondentem : Christianum. Vide Euseb., citatum initio Cathechismi.
Minutius Fœlix, comparans Gentiles cum Christianis : « Vos, » ait, « conscios timetis, nos
conscientiam. »
Cor habet motum in se proprium et alia movere facit : sic charitas.
Insigne exemplum de jumentis seipsas in aquis inspicientibus, et in rabiem venientibus ;
quæ tabescunt amore, currentes et circumspicientes hinc inde, quasi imaginem sui debeant habere
secum. Remedium, vide Domum rust., fol. 83 818.
819 Phidias diis quam hominibus exprimendis fœlicior (Calep. 820 ;) et ego, forsan,
communis devotionis hominibus instruendis quam amantissimis. [159]
Nolle amare Deum quantum possis ex contemptu, accidia, superbia, peccatum est ; L. 2.
de Monachis, c. 13, Bel[larmin].
In Tract, de imperio et regno amoris821 : cum constitutum sit amorem residere in suprema
parte animæ, veluti in supremo totius regni solio, facienda erunt capita quibus ostendamus hunc
amorem supremum, uti amoribus inferioribus : scilicet, quomodo charitas utatur amore
concupiscentiæ, qui est spes, illique imperet ; quomodo utatur amore desiderii, amore
benevolentiæ ; deinde, quomodo utatur timore, gaudio, dolore cæterisque omnibus animæ
passionibus ; tum vero, quomodo utatur virtutibus, et sic ubique regnet. (Vide pro ea re
Augustinum822, apud Azor 823, fol. 169, dicentem amorem desiderare, timere, sperare, dolere, quia,
scilicet, istis omnibus imperat.)
In quem desiderant Angeli prospicere824. Amor qui expletur summo bono, alacrior est ad
amorem et non vult cessare, unde et satietas sine fastidio ; desiderium habet et quietem ; desiderat
non rem absentem, sed presentem et quam habet, non enim tam expletur quam repletur. Amor
desiderans et desiderium amans825. [160]
Ad cap. de amore congenito et intimo826, nobis addenda similitudo de eo qui aquas in terra
latentes ad puteum faciendum querit : nam tempore calidissimo æstatis, cum terra valde sicca est,
paululum ante solis ortum, prostratus humi circumspicit ad orientem planiciem terræ, et ubi videt
nebulum et vaporem tenuem, ibi judicat latere fontem quem alioqui non videt. Sic, quamvis in
nobis non appareat amor Dei super omnia, videmus enim, si recte inspiciamus, quemdam vaporem,
qui etiam tempore siccissimo apparet : quosdam, scilicet, mentis affectus, quasdam inclinationes
quæ fontem hujus amoris latentem indicant.
Quercui pirus nunquam inseri potest, neque oliva ficui ; sic sunt quidam affectus quibus
nunquam charitas inseri potest, ut ira, tristitia, vix istis inseras charitatem,
Le pin, sapin, cypres et autres arbres gommeux et oleeux, ne reçoit (sic) le mariage d'aucun
arbre, arbres insociables ; quia succus (la seve) ne se peut mesler, ou parce qu'ell'est trop espesse
et parce qu'estant grasse elle ne se peut appliquer. 827 Sic fabulis poetarum, vix inseras conceptus
theologicos ; non enim mendacia poetarum possunt misceri veritatibus theologorum, neque
818 Charles Estienne, La Mayson rustique.
819 (Ms. f. 342, verso)
820 Ambroise Calepino, Augustin (1440-1510), né à Caleppio, composa un Dictionnaire latin-italien (in-fol. 1502 ;
autre édition, 1509) qui eut une vogue immense. Dans les éditions postérieures on. a ajouté la traduction des mots
latins en plusieurs autres langues. Le nom de Calepin est devenu usuel pour désigner les registres de notes de
renseignements.
821 Tr. de l'Am. de Dieu, liv. XI.
822 De Civit. Dei, l. XIV, c. VII.
823 J. Azor (1533-1603), Institutiones morales, lib. III, cap. IV.
824 I Petri, I, 12.
825 Cf. Tr. de l'Am. de Dieu, liv. V, ch. III.
826 Tr. de l'Am. de Dieu, liv. I, ch. XVI.
827 Ainsi sur les fables des poètes on ne peut guère greffer les concepts théologiques, car les mensonges des poètes ne
peuvent être mêlés aux vérités de la théologie, ni la prudence de l'esprit à la prudence de la chair.
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prudentiæ carnis prudentiam spiritus828.
Le fruit provient selon le greffe, mais il tient le goust du tronc [Maison rustique], l. II, p.
193]. 829 Sic opera ex [161] charitate imperata sunt opera amoris, habentia tamen aliquam
dignitatem peculiarem ex suo genere.
Œilletz sauvages jettés devant les scorpions leur ostent la faculté et force de nuire [Maison
rustique, p. 133 b] : la parole de Dieu oste la force des tentations. 830 Incumbe studio Scripturarum,
et carnis vitia non timebis. Non student Scripturis, nam Scriptura est affectiva scientia, illi tantum
student litteræ, non sensui ; aliud est enim studere intelligentiæ ut intelligas, aliud studere sensui
ut sentias. Hoc sentite in vobis, quod et in Christo Jesu831. Item, vita Christi et exempla oste la
force aux tentations.
832 Lilium convallium833, grand muguet. [Maison rustique, l. II, p. 134.]
Flambe, glay (gladiolus). Le souci s'ouvre a la lueur du soleil [Ibid, l. II, p. 234 b] ; les
fleurs de flambes, tant blanches que bleues, [se] ferment a la lueur du soleil et s'ouvrent seulement
en tems froid et humide. Sa racine est odorante ; elle ressemble a l'arbre triste, en ce que l'arbre
triste ne fleurit que la nuit. 834 Charitas maxime extenditur in tribulatione ; at falsa, inter prospera
et consolationes tantum dilatatur. Magnificentia, cum habet radicem charitatis, patescit inter
pauperes et secreto ; falsa vult videri.
Lilium omnes colores suscipit, si ejus radix antequam plantetur in liquore alicujus coloris
; [Ibid., p. 134.] Sic et caritas patiens est, benigna est, cætera835. [162]
A mesure qu'on le plante avant en terre, il fleurit tard ; en plantant 12 doigs, 6, 4, il en
viendra les uns tost, les autres tard, si que sa sayson depend de cela. [Ibid., p. 135.] 836 Sic corda,
vel citius, vel tardius florent, quo terræ vel magis, vel minus infixa sunt.
Sancti Francisci stigmata837 : amore compiacentiæ incaluit cor ejus ; deinde corpus, unde
lenius per dilatationem effectum est ; deinde per compassionem attracta Passio, facile sui
impressionem fecit. Amor iste mirificus.
828 Cf. Rom., VIII, 6.
829 Ainsi les œuvres commandées par la charité sont des œuvres d'amour, mais qui tiennent cependant de leur nature
propre une certaine dignité particulière.
830 Appliquez-vous à l'étude des Ecritures, et vous ne craindrez pas les vices de la chair. Ils n'étudient pas [réellement]
les Ecritures, car l'Ecriture est une science qui s'adresse au cœur ; eux, ils étudient seulement la lettre, non le sens ;
autre chose est de s'adresser à l'intelligence pour comprendre, autre chose est de s'adresser au sentiment pour sentir.
Soyez dans le même sentiment où a été Jésus-Christ. De même la vie du Christ et ses exemples, tout cela ôte la force
aux tentations.
831 Phil., II, 5.
832 Lys des vallées,
833 Cant., II, 1.
834 La charité se développe surtout dans la tribulation ; mais la fausse charité se déploie seulement dans les prospérités
et les consolations. La bienfaisance, quand elle a pour racine la charité, s'épanouit au milieu des pauvres et dans le
secret ; la fausse, veut se faire voir.
Le lys se teint de toutes les couleurs si sa racine, avant d'être plantée, est plongée dans un liquide colore.
Ainsi la charité est patiente, douce, et le reste.
835 I Cor., XIII, 4-7.
836 Ainsi les cœurs fleurissent, soit plus tôt, soit plus tard, selon qu'ils sont plus ou moins enfoncés dans la terre.
Stigmates de saint François : son cœur brûla de l'amour de complaisance, puis son corps qui, par suite, devint
plus tendre, grâce à la dilatation ; ensuite, la Passion y étant attirée par la compassion, s'y imprima facilement. Un tel
amour est merveilleux.
Comme le lupin et la fève n'épuisent pas, mais au contraire fertilisent le champ qui les nourrit, ainsi l'aumône,
la pitié pour les pauvres, l'action faite par miséricorde, n'épuisent ni le patrimoine, ni l'exercice de la contemplation,
mais les fertilisent.
Stigmates : par cet amour de complaisance grâce auquel il aimait tellement les stigmates [de Jésus-Christ]
qu'il les attirait sur lui. Ainsi nous voyons que le loriot, ou ictère, attire à lui la maladie de ceux qui ont la jaunisse ;
ainsi encore nous voyons que les maladies se communiquent par sympathie : Qui est infirme sans que je sois infirme
avec lui ? Nous contractons l'inflammation des yeux, surtout parmi les amants. De même ces stigmates, étant donné
un très ardent amour de complaisance, auraient été attirés en partie, par des causes naturelles, en partie imprimés
miraculeusement par l'aimé qui, pour plaire à son amant, imprima sur lui ces blessures pour lesquelles il avait tant
d'amour.
837 Vide Tr. de l'Am. de Dieu, liv. VI, ch. XV.
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Ut lupinum et paba non exhaurit, sed stercorat agrum in quo alitur (Plin., l. 18, c. 12 et 14,
[al. XXX, XXXVI],) sic eleemosina, misericordia pauperum, actio ob misericordiam non exhaurit
patrimonium aut contemplationem, sed stercorat, fertilize.
Stigmata : per amorem complacentiæ quo sibi tantopere placebant stigmata [Jesu Christi],
ut in se attraheret. Ut videmus lorioth (icterum) attrahere morbum ictericorum838 [Plin., l. XXX, c.
XI, al. XXVIII] ; ut videmus morbos communicari per amorem : Quis infirmatur et ego non
infirmor839 ? Oculorum inflammationem contrahimus, maxime inter amantes ; ut ista stigmata,
presupposto ferventissimo amore compiacentiæ, partim fuerint naturaliter [163] attracta, partim
miraculose inflicta ab amato qui, ut amanti complaceret, vulnera quæ sibi tantopere placebant,
inussit.
L'amour de complaysance provoque a la louange et honneur, par maniere d'admiration et
de declaration du sentiment que nous avons840 : c'est pourquoy, au traitté de l'Orayson, il en faudra
faire mention es chapitres de la louange841, etc.
Il faudra faire trois traittés de la prattique de l'amour de Dieu : l'un en l'orayson, l'autre es
actions, et le 3. es souffrances842, car on prattique l'amour en ces trois occasions.
Quand le roy des abeilles est mort, elles s'amoncelent autour de luy, et si leur gouverneur
ny prend garde, elles meurent-la plustost que de le quitter843 ; il faut donq quil le leur oste de
devant. 844 O morienti Christo, quare non commorimus ? Christo confixus sum cruci845. Elles
murmurent et bourdonnent, comme le plaignant. (Mayson rustique, [l. II, c. LXVI,] fol. 182 1.)
Si elles entrent en sedition, on leur jette un peu de vin cuit ou emmiellé, et par cette douceur
elles sont bien tost appaysees846. 847 Heu ! Eucharistiæ Sacramentum quam deberet omnes
contentiones expellere !
Canes, si immittas carnes, ad certamen provocantur ; apes, si immittas mel, ad pacem.
Differentia inter bona vera et bona falsa.
Revu sur l'Autographe conservé à la Visitation de Turin. [164]
_____
838 Cf. tom. X huj. Edit., pp. 370, 371.
839 II Cor., XI, 29.
840 Tr. de l'Am. de Dieu, liv. V, ch. I, XI.
841 Ibid., ch. VIII-XII.
842 Ibid., Livres VI, VIII, IX.
843 Cf. tom. IX huj. Edit., pp. 147, 148.
844 Oh ! pourquoi ne mourons-nous pas avec le Christ mourant ? Je sais attaché à la croix avec le Christ.
845 Galat., II, 19.
846 Vide Tr. de l'Am. de Dieu, liv. VI, ch. IX, sub finem.
847 Oh ! comme le Sacrement de l'Eucharistie devrait chasser toutes les disputes.
Les chiens, si on leur jette de la viande, sont provoqués au combat ; les abeilles, si on leur offre du miel, sont
provoquées à la paix. Différence entre les vrais biens et les faux biens.
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12.4 Page 114

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B. Petits traités et avis a des destinataires particuliers
_____
I. Avis a Mme Rose Bourgeois, Abbesse du Puits-d'Orbe, sur les devoirs
que lui imposent sa profession religieuse et sa charge, Dijon, avril 1604
. 848 Qu'est-ce que la dévotion ? La vraie Religieuse « doit estre devote
» et fervente. Fuir le péché et tout ce qui peut être une entrave pour
l'âme. La méditation, l'Office divin, les oraisons jaculatoires, la
lecture spirituelle. Conseils pour le coucher et le lever. Comment
on acquiert la « promptitude a bien faire ». La sainte Communion les
premiers dimanches de chaque mois : préparation et action de grâces.
Eviter la mélancolie, et pourquoi. Douceur, joie, humilité et
tranquillité, accompagnées d'une grande confiance en Dieu.
Obligation, pour une Abbesse, de travailler à la perfection de ses
Religieuses et de réformer le Monastère. L'exemple est le meilleur
moyen. Le dortoir doit être fermé aux séculiers. Livres à lire
pendant les repas. Que faire pour l'Office. Choisir une Religieuse
pour les affaires temporelles. Le rétablissement de la perfection et de
la Règle sera le plus grand service que l'Abbesse pourra rendre à Notre
Seigneur ; le désirer et le poursuivre, mais avec patience.
1. Vous aves deux qualités, car vous estes Religieuse et si estes Abbesse. Il faut servir Dieu
en l'une et en l'autre, [165] et a cela doivent estre rapportés tous vos desseins, exercices et
affections.
2. Resouvenes vous qu'il n'est rien de si heureux qu'une Religieuse devote, rien de si
malheureux qu'une Religieuse sans devotion.
3. La devotion n'est autre chose que la promptitude, ferveur, affection et mouvement que
l'on a au service de Dieu. Et y a difference entr'un homme de bien et homme devot, car cestuy-la
est homme de bien qui garde les commandemens de Dieu, encor que ce ne soit pas avec grande
promptitude ni ferveur ; mais celuy-la est devot qui non seulement les observe, ains les observe
volontier, promptement et de grand courage 849.
4. La vraye Religieuse doit estre devote, et procurer d'avoir une grande promptitude et
ferveur. Pour ce faire, il faut premierement prendre garde de n'avoir point la conscience chargee
d'aucun peché, car le peché est un si pesant fardeau que, qui le porte ne peut cheminer contre mont
; c'est pourquoy il se faut confesser souvent et ne jamais laisser dormir le peché dans nostre sein.
848 Dans une lettre du 3 mai 1604, saint François de Sales dit à la destinataire : « J'ay envoyé a madame la presidente
Brulart, vostre seur, un escrit que je desire vous estre communiqué ; non pas que celuy que je vous ay donné ne suffise
pour vous et pour ce tems, mais affin que vous ayés tous-jours plus d'esclaircissement en vostre esprit... » (Tome XII,
p. 271 ; cf. ibid., note (597), p. 266.) A la même date, le Saint adresse à la Présidente l'Advertissement qu'on trouvera
ci-après, p. 185 ; quant au document reproduit ici, il doit être antérieur, puisque l'Evêque le donna à l'Abbesse. Or, il
quitta Dijon le 26 avril (voir ibid., note (587), p. 262), et n'alla pas au Puits-d'Orbe en 1604 ; Rose Bourgeois (ibid.,
note (607), p. 271) dut le voir et le consulter à Dijon, peut-être chez M. de Crépy, son père, ou chez Mme Brûlart.
La Visitation de Dijon conserve quatre pages autographes de cette pièce ; la suite est empruntée à l'édition
in-folio des Œuvres du Saint (1652), Epistres spirituelles, liv. II, epistre XXXI, col. 982.
849 Cf. Introd. a la Vie dev., Part. I, ch. I.
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12.5 Page 115

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Secondement, il faut oster tout ce qui peut embarasser « les piedz » de nostre ame, qui « sont les
affections850, » lesquelles il faut retirer et desprendre de tout object non seulement mauvais, mais
de celuy qui n'est pas bien bon, car un cheval entravé ou piqué ne peut courir.
5. Outre cela, il faut demander cette promptitude a Nostre Seigneur, et partant il faut
s'exercer a la priere et meditation, ne laissant passer aucun jour sans en faire une petite heure
durant.
Et touchant la priere, je vous advertis que, premierement, vous ne devés jamais laisser de
dire l'Office ordinaire, qui est commandé de l'Eglise, et plus tost faut laisser toutes autres prieres.
Secondement, apres l'Office, il faut preferer la meditation a toutes autres prieres, car elle vous sera
plus utile et plus aggreable a Dieu. Troysiesmement, ayes l'usage des oraysons jaculatoires, qui
sont des souspirs d'amour que l'on jette devant Dieu pour requerir son ayde et son secours. A quoy
vous servira beaucoup de garder en vostre imagination le point de la meditation que [166] vous
aurés le plus gousté, pour le remascher le long de la journee, comme l'on fait les tablettes pour le
cors. A cela mesme vous servira une croix ou image devote pendue a vostre col, ou chapelet, la
maniant et baysant souvent en lhonneur de Celuy qu'elle represente. Et lhors que l'horologe sonne,
de dire quelque petit mot de cœur ou de bouche, comme seroit : VIVE JESUS ! ou bien : Voicy
l'heure de se resveiller au bien ; Mon heure s'approche, et semblables851. Quatriesmement, ne
passes aucun jour, sil est possible, sans lire quelque peu dans quelque livre spirituel, mesmes avant
la meditation, pour resveiller en vous l'appetit spirituel.
Prenes par coustume de vous mettre en la presence de Dieu le soir avant vostre repos, le
remerciant de ce quil vous a conservé, et faysant l'examen de vostre conscience, ainsy que les
livres spirituelz vous l'enseignent. Le matin, faites en de mesme, vous preparant a servir Dieu le
long du jour, vous offrant a son amour et luy offrant le vostre. Je suis d'advis que vostre meditation
se face le matin, et que le soir precedant vous lisiés le point que vous voudres mediter, dans
Grenade 852, Bellintani 853 ou quelqu'autre semblable.
6. Pour acquerir la sainte promptitude a bien faire, ne laissés passer aucun jour sans en
prattiquer quelqu'action particuliere a cett'intention ; car l'exercice sert merveilleusement pour se
rendre un chemin aysé a toute sorte d'operation854.
7. Ne manques jamais [de] 855 communier tous [les] pre[miers] Dimanches du moys, outre
les bonnes festes, et le so[ir] devant, confessés vous et excites en vous une sainte reverence et joÿe
spirituelle de devoir estre si heureuse] que de recevoir vostre doux Sauveur ; et faittes alhors
nouvelle resolution de le servir fervemment, laquelle [167] l'ayant receu, il faut confirmer, non pas
par vœu, mais par un bon et ferme propos. Le jour de vostre Communion, tenés vous la plus devote
que vous pourres, souspirant a Cel[uy] qui sera en vous, et le regardes perpetuellement de l'œil
interieur, gisant ou assis dans vostre propre cœur comme dans son trosne, et luy faites venir
l'un'apres l'autre vos puissances et sens pour ouïr ses commandemens et luy promettre fidelité856.
Ceci se doit faire apres la Communion, par une petite meditation de demi heure.
8. Gardes vous de vous rendre melancolique et importune a ceux qui sont aupres de vous,
de peur qu'ilz n'attribuent cela a la devotion et qu'ilz ne la mesprisent. Au contraire, rendes leur le
plus que vous pourres de consolation et contentement, affin que cela leur face honnorer et estimer
la devotion et la leur face desirer.
Procurés en vous l'esprit de douceur, joye et humilité, qui sont [vertus] les plus propres a
la devotion ; comm'aussi la tranquillité, sans vous empresser ni pour ceci ni pour cela, mais alles
850 S. Aug., Enarr. in Ps. XCIV, 2.
851 Cf. tom. præced., p. 154, et infra, pp. 207, 208.
852 Probablement, ses Devotes contemplations et spirituelles instructions sur la Vie, Passion, Mort, Resurrection et
Ascension de N. S. J. C, Paris, De la Noue, 1572. (Voir tome III de notre Edition, note (321), p. 71.)
853 Pratique de l'Oraison mentale, parue en italien, à Brescia, en 1573 ; une traduction française fut publiée à Lyon en
1601. (Voir tomes III, note (317), p. 71, et XII, note (442), p. 190.)
854 Cf. tom. XXI, p. 156.
855 Les mots et les finales des mots insérés entre [ ] sont oblitérés sur l'Autographe.
856 Vide tom. præced., p. 160.
115/332

12.6 Page 116

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vostre chemin de devotion avec un'entiere confiance en la misericorde [de] 857 Dieu q[ui] vous
conduira par la main jusques au pais celeste ; et partant, gardes [vous] des chagrins [et disputes].
Touchant vostre qualité d'Abbesse, c'est a dire Mere du Monastere, elle vous oblige a
procurer le bien de tous (sic) vos Religieuses pour la perfection de leur ame, et par consequent a
reformer leurs mœurs et toute la Mayson.
Le moyen de ce faire en ce commencement doit estre doux, gracieux et jo[yeux], sans
commencer par reprehensions des choses qui ont esté supportees jusques a present ; ains vous
deves vous mesme, sans leur dire mot, monstrer tout le contraire en vostre vie et conversations,
vous occupant devant elles en saintz exercices : comme seroit, faysant quelquefois des prieres en
l'eglise, ou bien mesme la meditation, disant le Chapelet, faisant lire quelque livre spirituel pendant
que vous travailles de l'eguille, et les caressant plus doucement et modestement que jamais. Faittes
une speciale amitié avec celles qui se rangeront a la [168] devotion, et ne laisses pourtant de bien
caresser les autres pour les gaigner et attirer au mesme chemin.
Tenes-vous courte avec les conversations mondaines et ne permettes pas, que le moins que
vous pourres, qu'elles soyent en vostre chambre particuliere, pour, petit a petit 858, procurer que le
dortoir des Dames en soit entierement exempt ; ce qui seroit bien requis, et vostre exemple en est
un grand moyen.
A la table, procures que l'on lise quelque beau livre spirituel, comme Grenade 859 La vanité
du monde 860, Gerson 861, Bellintani 862 et telz autres ; et mettes en coustume que ce soit tous les
jours.
En l'Office, il faut que vostre contenance devote donne loy a toutes les Religieuses de
modestie et reverence ; ce que vous feres aysement si vous vous mettes en la presence de Dieu au
commencement de chaque Office. J'estime que d'introduire le Breviaire du Concile de Trente 863
sera une chose utile et prouffitable.
Ne faites point trop l'austere pour le commencement ; mais soyes gracieuse a tout le monde,
hormis aux personnes bien mondaines, avec lesquelles il faut estre courte et retiree.
Il sera bon que vous employies quelqu'une de vos Religieuses pour vous ayder en la
conduite des choses temporelles, affin que vous ayes tant plus de commodité pour vous addonner
au spirituel et aux offices de charité. [169]
En fin, ne vous empressés point pour ce commencement ; mais faites tout ce que vous feres
si gayement et avec tant de douceur, que toutes vos filles ayent occasion de vouloir embrasser la
devotion. Petit a petit, et lhors que vous les y verres embarquees, il faudra traitter plus entierement
du restablissement de la perfection et de la Regie, qui sera le plus grand service que vous puissies
faire a nostre Sauveur : mais tout cela doit proceder non tant de vostre authorité, comme de vostre
exemple et douce conduitte.
Dieu vous appelle a toutes ces saintes besoignes ; escoutes-le et obeysses. N'estimés jamais
d'avoir trop de peyne ni de patience a la poursuitte d'un si grand bien. Que vous seres heureuse si,
a la fin de vos jours, vous pouves dire comme Nostre Seigneur : J'ay consommé et parfait l'œuvre
857 Omis par le Saint, sans doute par distraction.
858 Ici se termine l'Autographe conservé à Dijon.
859 La guide des Pecheurs, ou encore ses Œuvres spirituelles et devotes, dont une traduction française fut imprimée à
Paris en 1602. (Voir tomes III, note (53), p. XXXVI ; XII, notes (380), (437), pp. 169 et 190 ; XXIII, note (888-3), p.
266.)
860 Ouvrage publié en espagnol par le P. Diègue Stella, et traduit en latin : De contemnendis mundi vanitatibus, libri
tres, in latinam linguam translati a R. P. Petro Burgundo, S. J. ; Coloniæ, 1585. Plus tard, il eut aussi une version
française.
861 C'est, vraisemblablement, l'Imitation de Jésus-Christ que saint François de Sales veut indiquer à l'Abbesse du Puits-
d'Orbe. On sait que ce livre était d'ordinaire désigné sous le nom de l'auteur auquel il était plus généralement attribué.
(Voir tome III, note (455), p. 107, et XII, note (963), p. 387.)
862 Voir ci-dessus, note (853), p. 167.
863 Breviarium Romanum, ex decreto sacrosancti Concilii Tridentini restitutum, Pii V, Pont. Max. jussu editum ; 1568.
(Voir tome XXIV, note (1003), p. 448.)
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12.7 Page 117

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que vous m'aves mis en main864 ! Desires le, procures le, penses a cela, pries pour cela ; et Dieu,
qui vous a donné la volonté pour desirer, vous donnera les forces pour le bien faire 865.
Revu en partie sur l'Autographe conservé à la Visitation de Dijon.
864 Joan., XVII, 4.
865 Cf. Philip. II, 13.
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12.8 Page 118

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II. Méditation pour le commencement de chaque mois avant la Sainte
Communion, adressée a la même866 [Dijon, avril 1604]. Pourquoi
sommes-nous en ce monde ? Tout ce qui est contraire à notre fin
dernière doit être rejeté. Malheur de ceux qui n'y pensent point.
Aveu de notre misère et résolutions. Un mot de saint Bernard. La
couronne de roses après la couronne d'épines.
Mettes vous en la presence de Dieu, pries le qu'il vous inspire.
Imagines-vous que vous estes une pauvre servante de [170] Nostre Seigneur, et qu'il vous
a mis en ce monde comme en sa mayson.
1. Demandes luy avec humilité pourquoy il vous y a mise, et consideres que ce n'est pas
pour aucun besoin qu'il eust de vous, mais affin d'exercer en vous sa liberalité et bonté ; car c'est
pour vous donner son Paradis. Et affin que vous le puissies avoir, il vous a donné l'entendement
pour le connoistre, la memoire pour vous resouvenir de luy, la volonté et le cœur pour l'aymer et
vostre prochain, l'imagination pour le vous representer et ses benefices ; tous vos sens pour le
servir, les oreilles pour ouyr ses louanges, la langue pour le loüer, les yeux pour contempler ses
merveilles, et ainsy des autres.
2. Considerés qu'estant creée a cette intention, toutes actions contraires a cela doivent estre
extremement evitees, et celles qui ne servent de rien a cela doivent estre mesprisees.
3. Considerés quel malheur c'est au monde de voir que les hommes pour la pluspart ne
pensent point a cela, mais leur est advis qu'ilz sont en ce monde pour bastir des maysons, ageancer
des jardins, avoir des vignes, amasser de l'or, et semblables choses transitoires.
4. Faites une representation de vostre misere, qui a esté si grande quelque tems, que vous
aves esté de ce nombre-la. Helas, ce dires vous, que pensois je quand je ne pensois pas en vous ?
O Seigneur, dequoy me resouvenois je quand je vous avois oublié ? Qu'aymois je quand je ne vous
aymois pas ? N'estois je pas miserable de servir la vanité au lieu de la verité ? Helas, le monde,
lequel n'est fait que pour me servir, dominoit et maistrisoit sur mes affections. Je [171] vous
renonce, pensees vaynes, souvenances inutiles, amitiés infideles, services perdus et miserables.
Resolves vous, et faites un ferme propos de cy apres vaquer fidellement a ce que Dieu
desire de vous, luy disant : Vous seres cy apres mon unique lumiere pour mon entendement ; vous
seres l'object de ma souvenance, qui ne s'occupera plus qu'a se representer la grandeur de vostre
bonté si doucement exercee en mon endroit ; vous seres les seules delices de mon cœur et l'unique
Bienaymé de mon ame.
APPLICATION PARTICULIERE
Ah, Seigneur, j'ay de telles et telles pensees, je m'en abstiendray cy apres ; j'ay trop de
memoire des picques et injures, je la perdray doresnavant ; j'ay mon cœur encor attaché a telle et
telle chose, qui est inutile ou prejudiciable a vostre service et a la perfection de l'amour que je vous
dois : je le retireray et desengageray entierement, moyennant vostre grace, affin que je le puisse
tout donner au vostre.
Pries Dieu fervemment qu'il vous en face la grace, et prattiqués ce jour mesme, en quelque
866 La destinataire est désignée par son prénom à la fin de cette Meditation qui, dans l'édition de 1652 et les suivantes,
vient immédiatement après les Avis donnés au n° I. Etait-elle, en effet, jointe à ces Avis, ou l'a-t-on placée après ceux-
ci à cause de la recommandation que le Saint fait à Rose Bourgeois de « communier tous les premiers Dimanches du
mois, » de se confesser la veille et de faire « alhors nouvelle resolution de servir » Notre-Seigneur ? (Voir ci-dessus,
p. 167.) Il n'est guère possible de le dire. Une chose, cependant, semble être en faveur de la place que lui a assignée
le premier éditeur : la phrase finale de cette Meditation est suivie des clausules et de la signature de saint François de
Sales, que ne portent pas les Avis, ce qui permet de supposer que ceux-ci et celle-là furent écrits à la même date.
Dans l'Introduction a la Vie devote, Ire Partie, chap. X, la Méditation deuxième : De la fin pour laquelle nous
sommes creés, paraît avoir été calquée sur celle-ci ; on y retrouve des phrases textuelles.
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12.9 Page 119

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chose, ce qui se pourra touchant ce poinct.
Repetes souvent la parole de saint Bernard867, et a son imitation, excitant vostre cœur, dites
souvent : Rose, qu'es tu venue faire en ce monde ? que fays tu ? fays tu ce que ton Maistre t'a
donné en charge, et pour quoy il t'a mise en ce monde et te conserve ?
Nul ne sera couronné de roses, qu'il ne le soit premierement des espines de Nostre Seigneur.
C'est celuy qui desire vostre perfection en Dieu, es entrailles duquel il est
Vostre tres humble serviteur,
FRANÇS, E. de Geneve. [172]
_____
III. Fragments d'avis sur la manière de méditer, suivis d'une méditation
incomplète sur le crucifiement de Notre-Seigneur Jésus-Christ [Dijon,
avril 1604]868
…………………………………………………………………………………………………….
Quatriesme fruit de la meditation
869 Apres tout cela il faut faire la demande, suppliant Dieu quil luy playse nous donner la
grace de bien le servir et executer fidellement nos bonnes resolutions, l'adjurant par le merite de
son Filz, et particulierement par celuy qui reluira au mistere que nous aurons medité, par
l'intercession de la Vierge et des benitz Saintz. Il faut demander le mesme pour toute l'Eglise,
specialement pour le Pape, les Evesques et nommement pour le nostre, pour le Prince sous lequel
nous sommes, pour les pere, mere, parens, amis, bienfacteurs, ennemis.
Cinquiesme fruit
Et en fin, s'offrir entierement a Dieu, protestant de vouloir que nous et nos actions soyent
a luy et pour luy en pureté d'intention, et luy offrir tous les susnommés, le priant [173] les avoir
aggreables pour l'amour de nostre Sauveur, au nom duquel nous luy demanderons la benediction
pour nous et pour tous ceux pour lesquelz nous avons prié, dirons le Pater et Ave, puis nous
Sixiesme et dernier fruit 870
867 Guillaume de Saint-Thierry, Vita S. Bernardi, l. I, c. IV.
868 Une minute incomplète (six pages autographes) de conseils pour la méditation et d'une méditation sur le
crucifiement de Notre-Seigneur a été retrouvée : quatre pages à la Visitation de Milan, elles sont inédites ; les deux
dernières à Venise, en l'église Saint-Thomas, publiées par Migne, tome VI, col. 77. Le commencement et la fin du
document font défaut.
Avons-nous ici la minute de l'écrit envoyé par saint François de Sales à l'Abbesse du Puits-d'Orbe au mois
d'octobre 1604 (voir ci après, p. 194), ou bien la rédigea-t-il à Dijon pendant le Carême de la même année ? L'une et
l'autre suppositions sont également probables, car nous savons que le Jeudi-Saint (15 avril) le Prélat donna à la
présidente Brûlart une méditation dont il lui recommande « la methode » le 3 mai suivant. (Voir tome XII, p. 269, et
ci-après, note (904), p. 180.) En faveur du mois d'avril, nous avons cette phrase (p. 174) : « C'est le mistere de
l'elevation de Jesus crucifié sur le mont de Calvaire [pour un vendredi de Caresme], et præuppose » etc. (les mots
insérés entre ces signes f J sont biffés). Cependant, lors même que la présente minute daterait du Carême, il est certain
que le Saint dut s'en servir pour la rédaction de l'écrit destiné à Rose Bourgeois.
869 Cf. Introd. a la Vie dev., Part. II, ch. VII.
870 Ce sous-titre est ajouté en surcharge.
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12.10 Page 120

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Ferons une petite revëue sur nostr'orayson. Et comme ceux qui sortent d'un jardin 871
cueillent quattr'ou cinq fleurs pour les porter en leur main, les 872 sentir et regarder le long de la
journee, ainsy nous faut il choisir deux ou trois point (sic), ou au moins un de ceux que nous aurons
le plus gousté, pour, le long de la journee, le sentir et ressentir coup sur coup selon la diversité des
occasions873, et s'en aller en paix et tranquillement vacquer aux affaires ausquelles Dieu nous
appelle, quelles qu'elles soyent.
Mais affin que vous m'entendies mieux, je mettray devant vos yeux une Meditation formee
et estendile fort au long, avec toutes ses dependances, sur laquelle vous connoistres mieux ce que
je me suis essaÿé de vous dire de ce saint exercice ; et neanmoins je ne mettray sinon quelques
principales considerations, et de mesme quelques principales affections, et non toutes celles que
j'en pourrois tirer, car ce serait trop.
MEDITATION MISE EN FORME ET ESTENDUE AU LONG
J'ay choysi un mistere qui est des plus beaux et fertiles, et sur lequel neanmoins je ne diray
que fort peu au prix de ce qui s'en pourrait dire. C'est le mistere de l'elevation de Jesus crucifié sur
le mont de Calvaire, 874 et præsuppose que c'est [un vendredi 875].
Apres donques que le soir au paravant j'auray pensé ou [174] leu l'histoire, et auray præparé
en gros les pointz de la meditation ainsy quilz sont couchés ci bas, le matin estant arrivé et estant
prest, prenant de l'eau benite, faysant le signe de la Croix et mis a genoux au lieu de la priere, je
commenceray a mediter en cette sorte :
La presence de Dieu
Je me representeray et 876 mettray une vive apprehension en mon esprit que Dieu est
veritablement present a toutes choses, mais specialement a mon cœur et a mon 877 entendement,
ou il est comme cœur de mon cœur et l'ame de mon ame. Cela fait, je commenceray a m'humilier
et faire l'invocation.
Humble invocation
Et donques, diray-je, cette mer de perfections, cet abisme de bonté, non seulement
m'environne de tous costés, mais se communique par 878 une vraye presence et tres entierement a
ce cœur desloyal, a cett'ame felonne ! Helas, mon Dieu, mon Seigneur, il me semble que mon
cœur, ainsy profondement meslé et uni de toutes pars a vostre divine presence, n'est autre chose
qu'un vil et venimeux crapaut qui nage, 879 se supporte et maintient dans une mer de bausme tres
prætieux. Helas, comme peut vivre une si chetifve creature emmi cette infinie Essence et en une
si intime presence de 880 vostre immense bonté ?
Mais, Seigneur, puisque vous m'i aves receu et que je suis nay, nourri et maintenu dans les
entrailles de cette vostre presence, hé, mon bon Dieu, ne me rejettes point de vostre sainte face881
871 d'un jardin [prennent]
872 les [fleurer]
873 Cf. Introd. a la Vie dev., ubi pag. præced.
874 de Calvaire, [pour un vendredi de Caresme...]
875 Probablement, le Saint a biffé ces mots par mégarde ; c'est pourquoi nous les rétablissons entre [ ].
876 et [feray]
877 mon [ame]
878 se communique [en]
879 qui nage [et est porté sur...]
880 de [cette]
881 Ps. L, 13.
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13 Pages 121-130

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13.1 Page 121

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; permettes a ce miserable 882 cœur quil respande ses indignes pensees et ses chetifves affections
883 dans le sein de vostre misericorde et quil prononce [175] ses afflictions devant vous884. Vous
m'aves commandé de vous invoquer et promis que vous m'exauceries885 ; mon Dieu, mon Sauveur,
me voyci vostre indigne servante, me soit fait selon vostre parole886. Esclaires sur moy vostre face
sacree887, et tenes mes yeux fichés sur les vostres, affin que je puisse 888 considerer vos
merveilles889 et vous en louer, benir et adorer.
Proposition du misiere
Il me semble que parmi cette grande foule de gens qui accourent de toutes pars de la ville
de Hierusalem pour voir crucifier mon Sauveur, je me treuve au mont de Calvaire, en un lieu un
petit plus esloigné que les autres, mais aussi plus advantageux et relevé, d'ou je voy plus aysement
le triste et cruel spectacle de la crucifixion. Mon Sauveur couronné d'espines estoit desja tout nud
couché sur le bois de la croix, et les bourreaux l'avoyent desja serré et cloué pieds et mains 890 sur
iceluy ; et commencent, avec des instrumens propres et destinés a cet effect, a relever petit a petit
ce saint Crucifié en l'air, pour ficher et planter la croix au lieu et dans le trou fait a cett'intention.
Maintenant je voy, ce me semble 891, en l'air, le haut bout de la croix et le saint escriteau :
Jesus de Nazareth, Roy des Juifz892. Soudain apres cela, je descouvre la teste 893 couronnee
d'espines, delaquelle les yeux regardent ores au Ciel avec une grande reverence, ores sur
l'assistence avec une amoureuse compassion ; et semble qu'avec ses regars, il aille puisser (sic) la
misericorde cæleste dans le sein de son Pere, pour en arrouser ceux-la mesme qui le crucifioyent.
Sa bouche, toute meurtrie des coups de la nuit, tenant un profond silence, n'est ouverte que pour
jetter des souspirs amoureux sur le peuple, en la presence du Pere æternel. Je voy quant et quant
son divin estomach, et [176] sous son tetin gauche un perpetuel mouvement de son cœur qui
pantele et tremousse d'amour et fait un'inflammation en cet endroit si grande, quil me semble tout
vermeil de ce costé-la. Je descouvre l'un' et l'autre main attaché (sic) et les deux pieds aussi, qui,
comme quatre ruisseaux d'une mesme source, versent continuellement un sang le plus beau, clair
et vermeil qui fut onques au monde.
Et enfin, voyla la croix qui tumbe dans le creux auquel elle doit estre fichee et donne une
secousse au cors qui y est pendu, au moyen de laquelle les playes s'agrandissent et plusieurs
goustes de sang s'espluyent esparsement ça et la sur les plus proches, dont la plus part les ostent
avec indignation et ne leur semble jamais asses tost quilz s'en puissent laver.
Voyla ce que je m'imagine de voir, tout conforme a l'histoire.
Meditation
894 Je considere premierement celuy qui est ainsy pendu et eslevé, et voy par l'escriteau,
que c'est Jesus de Nazareth, Roy des Juifz. Est ce donques, ce dis-je, ce grand Jesus qui a tant fait
de miracles, de sermons et d'actes vertueux tout le tems de sa vie ? Est ce pas la le Filz de Dieu
æternel, qui est Maistre du Ciel et de la terre ? et comment donques est-il pendu en croix ? Ne
882 ce miserable [crapau]
883 affections [devant... en vostre...]
884 Cf. Ps. CXLI, 3.
885 Pss. LXXX, 8, CI, 3, CXXXVII, 3 ; Is., LVIII, 9.
886 Luc., I, 38.
887 Pss. XXX, 17, CXVIII, 135.
888 je puisse [vous]
889 Ps. CXVIII, 18.
890 les bourreaux [luy serrent] pieds et mains [et le clouent en croix. Puis...]
891 Je [le] voy, ce me semble : [premierement l'escriteau...]
892 Joan., XIX, 19.
893 la teste [de mon Sauveur couronnee d'espines, avec...]
894 [Je pense a cet escriteau...]
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13.2 Page 122

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pouvoit-il pas 895 mourir de mille sortes de mortz plus honnestes, plus doulces et supportables, puis
qu'il vouloit mourir ? O quil faut bien dire que cette mort a quelque secrette beauté, puisqu'elle a
esté choysie par le Filz de Dieu mesme ! O quelle admiration sera ou peut estre digne de cette
merveille ?
Je considere le maintien du Sauveur, auquel je voy une extreme douceur et debonaireté.
Ses yeux ne sont nullement effarouchés par les douleurs, ni 896 enflammés par les injures. Hé, que
cet Aigneau est benin ! Oui me donnera [177] la grace que, parmi les travaux et injures, je
puiss'estre de mesme ?
Je considere ce grand silence en toute cett'eslevation. Ce n'est pas faute d'haleyne, car il en
a bien pour souspirer ; ce n'est pas faute de sujet, car il a bien dequoy se plaindre ; ce n'est pas
faute d'auditeurs, car il en est environné ; ce n'est pas faute d'estre interrogés (sic), car un chacun
crie apres luy, qui ceci, qui cela. Pourquoy donques se taist il, sinon pour tesmoigner sa
mansuetude et douceur ? Helas que je suis miserable ! pour peu qu'on me touche, je crie, je me
plains, je ne finis jamais mes lamentations, je ne rencontre personne a qui je ne communique mes
regretz.
Je considere ce cœur si plein d'amour a l'endroit de ceux mesme qui le crucifient. O feu
admirable et sacré qui enflammés cette poitrine, mon Dieu, que vous estes ardent ! Le vent des
tribulations accroist vos flammes, la glace de vos persecuteurs vous eschauffe, et le torrent des
persecutions donne force a vos ardeurs. Quand sera ce que mon cœur sera embrasé de ce celeste
feu de charité et qque j'aymeray mes ennemis ? Ah, que je suis bien esloigné de cette sainte flamme
! Une goute de l'eau de mesdisance, un seul vent de quelque petite injure estaint soudainement
toute mon amitié et la convertit en glace et nege.
Je considere pourquoy mon Sauveur souffre tant de tormens ; dont je treuve plusieurs
raysons :
1. Pour obeir a son Pere ; c'est pourquoy en sa premiere parole il l'apelle Pere897. O saint
enfant d'obeissance, o obeissance vrayement filiale ! Helas, comme suis-je si presumptueux et
temeraire d'apeller Pere celuy auquel je n'ay jamais bien obei, et comm'obeirois-je jusques a la
mort898, moy qui n'obeis pas seulement jusques a la souffrance d'une petite parole fascheuse ou
d'un regard traversé ?
2. Pour effacer mon peché et mon iniquité899. Mon iniquité, donques, est bien grande,
puisqu'il faut tant de peyne a l'effacer. O que je suis miserable de m'y tant et si souvent abismé et
veautré (sic). O que je suis chetif d'en avoir tant avalé, car je suis bien de ceux-la qui, comme dit
[178] la sainte Parole900, boivent l'iniquité comme l'eau ! Mais puisqu'il vous a pleu, o ma douce
Esperance, souffrir ces peynes et travaux pour me nettoyer de mes iniquités, je veux respirer en
vostre bonté. Et considerant mes fautes passees, o Seigneur, je vous supplie, en vertu de ces peynes,
de les effacer entierement ; si que, comm'une nüee dissipee 901 n'empesche plus les rayons du soleil
de venir esclairer et eschauffer la terre, ainsy 902 jamais plus mes pechés ne puiss'empescher la
douceur de vostre regard misericordieux sur ma pauvre et langoreus'ame. Et pour le regard des
mauvaises habitudes et inclinations qui tormentent mon ame, helas, Seigneur, permettes-moy que
je vous die : Lavés, lavés de rechef ce cœur qui, comme vase immonde, retient encor l'odeur de
l'infecte liqueur de peché ; lavés encor, Seigneur, et nettoyes tous-jours903, jusques a ce quil soit
affranchi de ceste senteur si fascheuse.
3. Pour me retirer de l'enfer. O Dieu, que vos peynes sont bien contraires aux miennes !
895 Ici commence l'Autographe qui se conserve à Venise.
896 ni [courroucés par...]
897 Luc., XXIII, 34.
898 Philip., II, 8.
899 Ps. L, 4.
900 Job, XV, 16.
901 dissipee [devant les rayons du soleil...]
902 ainsy [mes pechés effacés...]
903 Ps. L, 4.
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13.3 Page 123

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Vous patisses pour me sauver, et jusques a present, pourquoy ay-je souffert que pour me perdre ?
Helas, si j'ay couru, si j'ay veillé, si j'ay eu aucun soin cuysant, n'a ce pas esté pour la vanité, pour
l'ambition, pour la vengeance ?
……………………………………………………………………………………………………..
Revu sur les Autographes conservés à la Visitation de Milan et en l'église Saint-Thomas, de
Venise.
_____
IV. Méditation sur le crucifiement de Notre-Seigneur Jésus-Christ,
donnée a la Présidente Brulart le 15 avril 1604904
Proposition du mistere
Il me semble que parmi cette grande foule de gens qui accourent de toutes pars de la ville
de Hierusalem pour voir crucifier Nostre Seigneur, je me treuve au mont de Calvaire, en un lieu
un petit plus esloigné que les autres, separé et relevé, qui me le rend advantageux pour voir et
considerer a part moy ce triste et cruel spectacle. La crucifixion est faite ; c'est a dire, la croix
estant couchee sulla terre, Nostre Seigneur est estendu sur icelle tout nud et despouillé, et les
bourreaux l'ont serré et cloué pieds et mains la dessus. Maintenant donques, des ce lieu la, je
m'imagine que je voy relever ce saint Crucifié en l'air, petit a petit, et que la croix est fichee et
plantee dans le trou fait a cette intention.
Voyla le mistere proposé en gros par l'imagination, laquelle a logé en mon cœur un lieu
propre pour voir et bien considerer tout ce qui se passe. Les deux parties du mistere [180] sont
l'eslevation et le plantement de ce saint arbre. Il reste que je poursuive a considerer les particularités
par lesquelles ma volonté puisse estre excitee a produire beaucoup de bonnes saintes affections et
resolutions : et cela, c'est la meditation.
I. MEDITATION
Je considere ce que Nostre Seigneur souffre en ce mistere, tant exterieurement
qu'interieurement. Exterieurement : par cette eslevation son cors est tout entierement supporté sur
ses pieds et ses mains cloués, dont advient que les playes s'agrandissent et la douleur se rend
immense. Quand la croix tumbe dans le trou preparé auquel elle est fichee, le Sauveur reçoit une
secousse effroyable, qui augmente de nouveau les playes et donne comme un coup d'estrapade a
tous ses nerfs et tendons ; de tous costés le sang pleut et distille ; l'air et le vent froid saysissent
tout ce cors eslevé, penetrant dans les playes, et le font presque transir et pasmer. Ses oreilles
n'entendent que blasphesmes, ses yeux ne voyent que la furie de ceux qui le tuent, et en tous ses
sens il endure des douleurs insupportables.
Mays ce n'est rien de cela au prix des douleurs de son cœur, qui, languissant de l'amour des
904 « Vous choysirés... la meditation que vous voudres faire, et la lirés attentivement pour vous en resouvenir au tems
de l'orayson, et n'avoir autre chose a faire que de la remascher, suyvant tous-jours la methode que je vous mis par
escrit en la meditation que je vous donnay le Jeudy Saint, » lisons-nous dans une lettre de saint François de Sales, 3
mai 1604, à la présidente Brûlart. (Voit tome XII, p. 269, et note (598), p. 267 ; cf. ci-dessus, p. 173.) Sans vouloir
l'affirmer, nous avons quelques raisons de croire que cette Méditation est celle mentionnée par le Saint. « Vous verres
l'exercice de l'orayson que j'envoye a Madame du Puis d'Orbe, » lui écrit-il encore le 13 octobre ; « tirés-en une copie,
et vous en prevalés, car je le desire. » N'est-ce pas une preuve que l' « exercice » fait pour l'Abbesse était plus détaillé
que la présente Méditation ?
Celle-ci a paru pour la première fois dans Les vrays Entretiens spirituels du Bien-Heureux François de
Sales... Quatriesme edition, augmentée de divers Entretiens. (A Lyon, chez Vincent de Cœursilys, 1649.) On lui a
donné, mais à tort, le titre de : « Entretien XXIII. »
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ames, voit une si grande perte de personnes, et sur tout de ceux qui le crucifient.
Affections
Ah ! qui sera ce tigre qui ne pleurera voyant cet innocent, ce jeune Roy, le Filz de Dieu,
endurer tant de peynes ? Elles sont des-ja bien grandes et capables de tenir a couvert tous les
hommes du monde contre l'indignation du Pere eternel. Hé, je vous prie, de grâce, mes amis,
releves bellement cette croix, et fiches la si doucement, que ses playes ne s'agrandissent point et
que la secousse n'en soit pas si grande. Helas, nul n'est si denaturé que voyant un criminel sur la
roue, n'en ayt compassion. Hé donques, mon ame, n'auras tu pas compassion de ton Sauveur qui
souffre tant ? Si jamais tu fus touchee de commiseration sur la nudité d'aucun pauvre emmi la
rigueur de l'hyver, ne dois tu pas [181] compatir a ce pauvre Roy, qui est exposé tout fin nud sur
cet arbre ? Si jamais quelque pauvre ulceré te fit pitié, regarde, je te prie, celuy-la, auquel tu ne
verras, de la plante des pieds jusques a la teste, aucun lieu qui ne soit tout gasté de coups905. Hé,
vois ce cœur affligé de tant de pechés que le peuple commet ; et si ton cœur ne s'afflige avec luy,
il faut que tu ne l'ayes pas de chair, mais de pierre, et plus [dur] que le diamant mesme.
De la commiseration ou compassion naist ordinairement le desir de secourir celuy auquel
nous compatissons ; partant, a la precedente affection j'adjouste celle-cy :
O qui me donnera la grace que je puisse en quelque façon donner allegement a mon Sauveur
affligé ! Hé, que ne m'est-il loysible de prendre mes habitz plus prætieux pour couvrir vostre nudité
! que n'ay je du bausme excellent pour en oindre vos play es ! que ne suis je pres de vous sulla
croix pour soustenir vostre cors en mes bras, affin que la pesanteur ne dechirast pas si fort les
playes de vos pieds et de vos mains ! Mais sur tout, que ne puis je empescher les pecheurs de tant
offenser vostre cœur, qui ne feroit que se jouer de toutes les peynes de vostre cors, si pour icelles
les pecheurs pouvoyent estre amendés ! Que ne suis je quelque excellent et fervent predicateur
pour leur annoncer la penitence ! O comme ne dirois je aux iniques : Ne veuilles plus vivre
iniquement ; et aux delinquans : Ne relevés plus les cornes906 de vostre fierté et felonie !
Mais, o Seigneur, pourquoy m'amuse-je a ces desirs, desquelz je n'ay la force d'en prattiquer
un seul ? Comme vous donnerois je mes habitz prætieux, moy qui n'en donnay jamais un vil et usé
a vos pauvres ? Sur la croix vous ne me les demandes pas, et je vous les offre ; en vos pauvres
vous me les demandes, et je les refuse ! O vaynes et miserables offres qui ne se font qu'en
apparence, et en effect ne sont que mocqueries. Comme vous respandrois-je du bausme sur vos
playes, puisque je ne respandis jamais un verre d'eau pour vos pauvres907 ? Comme voudrais je
vous supporter en croix, puisque je ne fuis jamais rien tant que les croix ? Et quel predicateur de
penitence, moy [182] qui n'en fais point, et qui contribue tous les jours, plus que nul autre, au
desplaysir que les pechés vous donnent ?
Resolution
O Seigneur, ayes mercy de moy, et je me propose de par ci apres vous estre plus fidelle.
Non, ce ne seront plus desirs, ce seront effectz. Je soulageray le pauvre, je feray penitence et
cesseray de pecher. J'instruiray les desvoyés, et diray a mon cœur et aux autres : Voules vous estre
plus cruelz a l'endroit de vostre Sauveur que ne sont les vautours a l'endroit des colombeaux ? ilz
n'en deschirent ni devorent jamais le cœur. Voules vous bien estre si acharnés a l'encontre du beni
Colombeau qui niche sur la croix, que de deschirer son cœur avec les dens de vos impietés ?
Seigneur, ah, doresnavant je consoleray par effect le pauvre et empescheray le peché.
CONSIDERATION
905 Is., I, 6.
906 Ps., LXXIV, 5.
907 Matt., X, 42 ; Marc., IX, 40.
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Je considere la maniere avec laquelle Nostre Seigneur souffroit en ce mistere, et cette
maniere est double. Exterieurement : avec un grand silence, les yeux doux et benins, qui regardent
par fois au Ciel, dans le sein de la misericorde du Pere, quelquefois sur le peuple, auquel il procure
la grace de cette misericorde, sa bouche n'estant ouverte en ce mistere que pour jetter des souspirs
de douceur et de patience. Il me semble que je voy en sa poitrine l'endroit du cœur qui pantele et
tremousse d'amour, et fait une inflammation si grande que tout cet endroit me semble rougissant.
Il souffre patiemment, volontairement et amoureusement. Mais, helas, miserable que je
suis, qui ne sçaurois souffrir un mot sans crier, sans me plaindre, sans faire du bruit au logis ;
jamais je ne finis mes lamentations, je les estens et respans par tout.
Et si quelquefois je tiens contenance, mais mon cœur comme se comporte-il ? il semble
qu'il s'enflamme de colere, d'impatience, de vengeance et de douleur. [183]
Resolution
Mais doresnavant, o mon ame, je veux que nous soyons patiens, doux et gracieux, et que
jamais l'eau de contradiction ne puisse esteindre le feu sacré de la charité908 que nous devons au
prochain.
CONSIDERATION
Je considere pourquoy il souffre : pour obeir a son Pere. O obeissance admirable et filiale
! Mais quel effronté suis-je, d'oser appeller Dieu mon Pere, auquel je n'ay jamais porté le respect
filial ; et comme obeirois-je jusques a la mort909, que je ne le puis pas mesme jusques a la
souffrance d'une petite parole fascheuse et d'un regard traversé ? Mais doresnavant, venes, o
tribulations et desplaysirs ; que venant de la part du Pere eternel, je vous recevray de bon cœur, et
beniray le calice d'obeissance.
Mon iniquité est donques bien grande : o que je suis miserable de m'y estre si souvent
abismé ! O Seigneur, qui me delivrera de ce labyrinthe, si ce n'est vous ? O ja ne vous playse de
permettre que j'y retombe plus si lourdement. O peché tres abominable, je ne te verray jamais d'un
costé que, plustost que de me souiller en tes ordures, je ne me jettasse en cent mille tourmens.
Resolution
Pour me retirer de l'enfer, helas, et pour me delivrer de perdition, que vous souffres ! Et
que je souffre pour m'y engager ! Tout ce que j'ay souffert jusques a present n'a esté qu'a ma perte.
Ah ! non, vous me voules sauver, Seigneur ; que vostre volonté soit faite910. Je suivray vostre
dessein et monteray. Non, je ne descendray plus.
DIEU SOIT BENY ! [184]
_____
908 Cant., VIII, 7.
909 Philip., II, 8.
910 Matt., VI, 10.
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V. Fragment d'un avertissement sur la perfection chrétienne, envoyé a la
Présidente Brulart, 3 mai 1604911 (Minute inédite). En quoi consiste la
perfection. Reconnaître la volonté de Dieu pour l'accomplir. Les
commandements de Dieu et le devoir d'état ; les tribulations et les
maladies ; les « petites traverses et incommodités ». Erreur de ceux
qui se préparent aux grandes épreuves et qui ne savent pas supporter les
petites. Pour les actions de peu d'importance et auxquelles on n'est
pas obligé, considérer avec liberté d'esprit ce qui tend davantage à la
gloire de Dieu et se résoudre. Ce qui doit être soumis au guide de
notre âme. Deux moyens pour parvenir à la perfection.
Chacun est obligé d'aspirer a la perfection de la vie chrestienne, car Nostre Seigneur
commande que nous soyons parfaitz912, et saint Paul le repete aussi913.
La perfection de la vie chrestienne consiste en la conformité de nostre volonté avec celle
de nostre bon Dieu, qui est la souveraine regie et loy de toutes actions. Pour donques acquerir la
perfection, nous devons tous-jours considerer et reconnoistre quell'est la volonté de Dieu en tout
ce qui nous regarde, affin que nous fuyons ce quil veut que nous evitions, et que nous observions
ce quil veut que nous facions.
Il y a des sujetz esquelz 914 on ne peut douter quelle est la volonté de nostre bon Dieu,
comm'en ce qui despend des [185] commandemens de Dieu et du devoir de nostre vocation. C'est
pourquoy nous devons tous-jours regarder a bien observer ce que Dieu commande a tous les
chrestiens, et aussi ce que nostre vocation requiert de nous particulierement ; et qui ne fait
soigneusement ceci ne peut jamais avoir qu'une devotion trompeuse.
Il y a encor des autres sujetz dont on ne peut douter que Dieu ne les veuille, comme sont
les tribulations, maladies et afflictions. C'est pourquoy il les faut recevoir de bon cœur, et
conformer sa volonté a celle de Dieu qui les veut ; et qui peut passer jusques au point de non
seulement les supporter patiemment, mais aussi de les vouloir, il peut bien dire quil a acquis une
tres grande conformité. Ainsy, les mortz des parens, pertes, maladies, secheresses, distractions,
nous donnent sujet de nous perfectionner.
Mais il faut passer plus avant et bien considerer ceste volonté non seulement es grandes
afflictions, mais jusques aux petites traverses et moindres incommodités 915 que nous sceussions
recevoir 916 en cette miserable vie. En quoy une grande quantité de personnes se trompent, qui ne
se preparent que contre les grandes afflictions, et demeurent 917 sans armes, sans force et sans
aucune resistence es petites ; la ou il seroit plus supportable d'estre moins præparé aux grandes,
qui ne surviennent que fort peu souvent, et l'estre aux petites, qui sont quotidiennes et se presentent
a chasque moment. Je donne un exemple de ce que je dis : Je me prœpareray a supporter
patiemment la mort, qui ne me peuvent (sic) arriver qu'une fois, et je ne me præpareray point a
911 La date, non pas de la rédaction, mais de l'envoi de cette pièce est indiquée par la lettre du même jour à la présidente
Brûlart : « J'ay fait, » lui dit le Saint, « un petit advertissement sur le sujet de la perfection chrestienne, dont je vous
envoye une copie que je desire estre communiquee a Madame du Puis d'Orbe. Prenes-la en bonne part... » (Tome XII,
p. 270.) Il la mentionne aussi à l'Abbesse (p. 271) ; et à la baronne de Chantal il écrit en lui faisant part du document
: « Je l'ay dressé non pour vous, mays pour plusieurs autres ; neanmoins vous verrés en quoy vous le pourrés faire
valoir...» (Ibid., p. 266.) Malheureusement, il est incomplet ; saint François de Sales a laissé en blanc les deux tiers de
la troisième page et la quatrième. Cf. la pièce suivante.
912 Matt., v. 48.
913 II Cor., XIII, 11 ; Ephes., VI, 13 ; Coloss., IV, 12.
914 esquelz [c'est chose superflue...]
915 [piqueures]
916 recevoir [es conversations qui...]
917 demeurent [tres imparfaitz]
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supporter les incommodités que je reçoy des humeurs de ceux avec lesquelz je converse, ou les
importunités d'esprit que ma charge m'apporte, qui se presentent cent fois le jour : c'est cela qui
me rend imparfait.
Il y [a] des autres actions ausquelles je ne suis point obligé ni par les commandemens
generaux de Dieu, ni par le particulier devoir de ma vocation ; et en celles ci il faut [186] estre
soigneux de considerer en liberté d'esprit ce qui tend a la plus grande gloire de Dieu, car c'est cela
que Dieu veut. J'ay dit, en liberté d'esprit, par ce que cela se doit faire sans empressement ni
inquietude, ains par une simple veüe du bien que nostr'action doit apporter : comme de faire un
petit voyage de Saint Bernard 918, de se confesser un tel jour, visiter un tel malade, donner une
petite somme, commun escu, pour l'amour de Dieu. Que si elle n'est pas de grande importance,
aussi ne faut il pas une grande sollicitude, ains, apres une petite consideration, il se faut resoudre ;
et si par apres l'action, la resolution ne semble pas bonne et qu'on se soit trompé, on ne s'en doit
nullement affliger ni troubler, ains s'humilier et mocquer de soi mesme.
Mais si la chose est d'importance, comme de changer de profession, faire des veuz
perpetuelz, entreprendre des grans voyages, donner des grandes quantités en aumosne, apres y
avoir un peu pensé, il en faut conferer avec les peres spirituelz sous la conduitte des quelz on s'est
remis, et passer par leur advis avec simplicité, car Dieu les assistera a vous bien adresser. Et si par
leur defaut la resolution n'est pas la meilleure en soy, elle ne laissera pas d'estre la plus utile et
meritoire pour vous, car Dieu la rendra fructueuse. 919
Les grans moyens pour parvenir a la perfection sont de deux sortes. 920 Le premier et
principal, c'est d'avoir la grace interieure de Dieu, et celluy ci se doit obtenir par prieres, oraysons,
sacrifices, reception des Sacremens. L'autre, c'est l'exercice, et celluy ci consiste en trois
resolutions proportionnees aux vœux de Religion, c'est a dire, obeissance 921, chasteté et pauvreté.
……………………………………………………………………………………………………...
Revu sur l'Autographe conservé à la Visitation de Turin. [187]
_____
918 A Saint-Bernard de Fontaine-les-Dijon, lieu de naissance du saint Docteur, où avait été bâti un monastère de
Feuillants. (Voir tome XVI, note (706), p. 218.)
919 fructueuse. [Quicomque observera ceci parviendra aysement a la perfection... Prenes donq garde a vostre
vocation en laquelle vous...]
920 sortes. [Les uns sont... dependent immediatement...]
921 [obedience]
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VI. En quoi consiste la perfection et comment l'acquérir ; degrés de
l'obéissance. Ecrit envoyé a la Baronne de Chantal, [3 mai 1604 ?922].
La perfection n'est autre chose que la charité. Qu'est-ce qui la
produit. La prière, les Sacrements, l'exercice des vertus : moyens
pour l'acquérir. Les trois vertus de Religion, quoique non vouées,
rendent parfait. Les degrés de l'obéissance par rapport à ceux à qui
on la rend. Exemple de Jésus-Christ. Obéir aux commandements
de Dieu et des supérieurs, aux conseils évangéliques suivant sa
vocation, aux inspirations de la grâce. L'obéissance dans les choses
agréables, dans les indifférentes et dans les difficiles.
Nostre Dieu nous commande d'estre parfaitz923 ; mais en quoy consiste la perfection ? C'est
chose asseuree qu'elle n'est autre chose que la charité, qui comprend l'amour de Dieu et du
prochain. Neanmoins, selon la commune façon d'entendre, on n'appelle pas parfaitz tous ceux qui
ont la charité, ains seulement ceux qui l'ont en un degré sublime et eminent ; c'est a dire ceux qui
ont un amour de Dieu et du prochain fort excellent.
Puis donq que nous sommes obligés d'aspirer a la perfection, il est requis de connoistre les
moyens propres pour l'acquerir, et tout ensemble les actions qu'elle produit en nous, qui n'est
qu'une mesme chose ; car tout ainsy que le grain du froment produit la plante et la plante produit
le grain, ainsy les saintz exercices produisent la perfection et la perfection fait naistre les saintz
exercices. Puisque la perfection de l'ame consiste en la charité, et la charité est [188] le don
principal du Saint Esprit, le premier moyen pour obtenir la perfection, c'est de la demander
humblement, instamment et continuellement a Dieu par prieres et meditations ; le deuxiesme, c'est
l'usage des Sacremens, car ilz sont les canaux par lesquelz Dieu distille en nous la grace, charité
et perfection ; le troisiesme, c'est l'exercice des vertus en general.
Mais parce que ce troisiesme moyen est si ample, je le reduiray en cette sorte : Les trois
vertus des Religieux sont les trois plus signalés instrumens pour acquerir la perfection et les trois
plus grans effectz d'icelle. Or, ces trois vertus ou vœux estant gardees, quoy que non vouees, elles
rendent l'homme parfait ; il faut donq tascher a les acquerir en tous les degrés qu'elles ont.
EXEMPLE DE L'OBEYSSANCE
L'obeyssance a trois degrés en ce qui concerne les personnes a qui nous rendons obeissance.
Le premier degré, c'est d'obeyr aux Superieurs et [à ceux] qui ont du pouvoir sur nous, comme
peres, meres, maris, Prelatz : donq le filz doit obeyr a son pere avec la mesme souplesse qu'un
Novice d'une Religion fort reglee feroit a son Superieur ; et est une niayserie de s'imaginer qu'on
obeyroit bien a un Superieur de la Religion qu'on aurait choisie, si on ne peut obeyr aux Superieurs
que Dieu mesme et la nature nous a donnés.
Le 2. degré, c'est d'obeyr a nos compaignons et a ceux qui nous sont esgaux ; et ce degré
se prattique en se rendant doux et facile a la volonté de nos compaignons. Contre ce degré pechent
tous les espritz opiniastres, contentieux et sujetz a leurs volontés.
922 Citant ces pages au chapitre XL de la Vie du Saint, pp. 409-417, le Père Philibert de Bonneville les intitule :
Discours remarquable des moyens propres pour acquerir la charité, treuvé parmy ses escritz.
Avons-nous ici un fragment du Traité sur les vertus cardinales et morales, ou bien est-ce un écrit du genre
de celui que le saint Evêque adressa à la présidente Brûlart le 3 mai 1604 ? (Voir la pièce précédente.) La seconde
hypothèse nous semble plus probable et, dans ce cas, il aurait été rédigé vers la même date pour la baronne de Chantal.
Noter, en effet, ces mots (p. 190) : « ...comme de demeurer vefve quand on l'est ; de rechercher celuy qui nous a
offencés...»
923 Matt., V, 48.
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Le 3. degré, c'est d'obeyr aux inferieurs, s'accommodant aucunement a leurs desirs entant
qu'ilz ne sont point mauvais, avec une [douce] condescendance ; et a ce degré est contraire
l'authorité imperieuse et desdaigneuse que l'on prend sur les inferieurs. La prattique de ce degré
rend nostre cœur doux, humble et gratieux aux commandemens des superieurs, aux volontés des
compaignons et aux desirs et prieres des inferieurs. L'exemple de cette obeyssance [189] est en
Jesus Christ, qui obeit non seulement a son Pere eternel et a sa sainte Mere, mais aussi a saint
Joseph et aux statutz et coustumes de l'Eglise924. Nostre Dame obeit a saint Joseph et aux autres.
Et cela est ordonné par l'Apostre925, qui veut que nous soyons sujetz a un chacun pour l'amour de
Dieu.
Cette mesme obedience a troys autres degrés, selon les choses esquelles il faut exercer
l'obeyssance. Le 1. est d'obeyr aux commandemens de Dieu et des superieurs ; et ce degré
d'obeyssance est necessaire a un chacun, car qui ne l'observe peche mortellement, quand il s'agit
de quelque chose d'importance. Et a ce degré est formellement contraire la des-obeyssance.
Le 2. degré, c'est d'obeyr aux conseilz, chacun selon sa vocation : comme de demeurer
vefve quand on l'est ; de rechercher celuy qui nous a offencés, par caresses et courtoysies ; d'ayder
ceux qui en ont quelque besoin, encores qu'ilz ne soyent pas en grande necessité. Et a ce degré est
grandement contraire la tepidité et froideur.
Le 3. degré, c'est d'obeyr aux inspirations et mouvemens interieurs que l'on reconnoist
tendre a la plus grande gloire de Dieu, et ce, apres les avoir examinés ou fait examiner. Et a ce
degré est contraire l'inadvertance et mespris de nostre interieur. La prattique de ce troisiesme degré
fait qu'en tout et par tout nous nous conformons a Dieu et a sa sainte volonté. L'exemple en est en
Nostre Seigneur qui fit toute sa vie tout ce qui visoit plus a la gloire de son Pere eternel926, de la
glorieuse Vierge Marie, sa Mere, et de tous les Saintz.
L'obedience a encores troys autres degrés, prins de la facilité ou difficulté que nous avons
en l'obeyssance. Le 1. est lhors qu'on nous commande quelque chose aggreable, comme seroit de
ne point travailler les festes, de chanter en musique, ou quelque autre chose semblable, laquelle de
soy mesme nous est aggreable ; et en cela il n'y a pas grande vertu en obeyssant, mais il y a bien
du grand vice en des-obeyssant. [190]
Le 2. c'est quand on nous commande des choses indifferentes, c'est a dire choses qui de soy
mesme ne sont ni aggreables ni desaggreables, comme seroit de se promener, de porter tel ou tel
habit ; et lhors la vertu de l'obeyssance est grande, et le vice aussi de la des-obeyssance bien grand.
Le 3. est quand on nous ordonne de faire des choses aspres et difficiles, comme de
pardonner aux ennemis, souffrir patiemment les afflictions, ou faire quelque autre chose qui soit
fort contraire a nostre inclination ; et lhors le merite est extremement grand en obeyssant, et le
peché moins grand en des-obeyssant.
La prattique de ces trois degrés fait que nous obeyssons entierement, soit en choses grandes,
soit en choses petites. L'exemple en est en Nostre Seigneur, qui en tout a voulu que le vouloir de
son Pere se fist927, mesme en la Passion928.
_____
924 Cf. Luc., II, 22-24, 42.
925 Rom., XIII, 5.
926 Cf. Joan., VIII, 50, 54.
927 Cf. Joan., IV, 34, V, 30, VI, 38.
928 Matt., XXVI, 39, 42 ; Philip., II, 8.
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VII. Avis a la Baronne de Chantal, Saint-Claude, 26 ou 27 août 1604929.
Pensées et aspirations pour le lever. Exercice pour la sainte Messe.
Le congé et la bénédiction du bon Ange. Oraisons jaculatoires et
regard sur « la divine Bonté » , L'entrée dans les plaies du Sauveur.
930 Mettes ordre qu'aussi tost que seres esveillee, vostre ame se jette du tout en Dieu par
quelque sainte pensee, telle que celle-cy : Comme le sommeil est l'image de la mort, aussi le resveil
est l'image de la resurrection. Je croy que mon Redempteur est vivant et qu'en ce dernier jour je
resusciteray931. O Seigneur, que ce soit, s'il vous plaist, [191] a la vie eternelle : cette esperance
repose dans mon sein932. Hé, de grace, donnes vostre dextre a l'ouvrage de vos mains. Vous aves
conté mes pas ; mais pardonnes moy mes offenses933.
Voyant le jour, passés de la consideration de la lumiere corporelle a la spirituelle, ou bien
de la temporelle a l'eternelle, et dites avec David934 : O Seigneur, en vostre clarté nous verrons la
lumiere.
Et vous habillant, apres avoir fait le signe de la Croix, dites tacitement : Revestés moy,
mon Dieu, du manteau d'innocence et de la robe nuptiale935 de charité. Cela estant fait, occupés
vous quelque tems en la meditation.
Arrivee que seres a l'eglise pour ouyr Messe, tandis que le prestre preparera le calice et le
messel, mettés-vous en la presence de Dieu. Despuis le Confiteor jusques a l'Evangile, produisés
des affections de contrition ; de l'Evangile jusques a la Preface, faites la protestation de foy ; apres
le Sanctus, considerés le benefice de la Mort et Passion de Nostre Seigneur ; a l'eslevation, adorés
tres profondement le divin Sauveur, et offrés le a Dieu son Pere ; apres l'eslevation, remerciés le
tres humblement de l'institution de ce saint Sacrement ; quand le prestre dira le Pater, recites le
mentalement en toute devotion ; a la Communion, communies vous reellement ou spirituellement
;936 apres la Communion, contemplés Nostre Seigneur assis dans vostre cœur, et faites venir devant
luy, l'un apres l'autre, vos sens et vos puyssances, pour ouyr ses commandemens et pour luy
promettre fidelité.
Quand vous voudres le matin, sortir de vostre chambre, [192] demandés humblement congé
et benediction a vostre bon Ange ; le long du jour, faites a force oraysons jaculatoires. Quand
l'horloge sonnera, eslevés vostre cœur en disant : Dieu soit beni, l'eternité s'approche. Pendant les
affayres, regardés souvent la divine Bonté ; ayés provision de quelques parolles enflammees qui,
de tems en tems, servent de refrain a vostre ame. Avant le souper, j'appreuve fort un petit de
929 Ce texte est tiré du P. de la Rivière (La Vie de l'Illustrissime et Reverendissime François de Sales, Lyon, 1625, liv.
III, chap. XXIII, p. 315), qui, en relatant le voyage du Saint et de la baronne de Chantal à Saint-Claude, s'exprime
ainsi : « Avant le despart, il luy donna plusieurs salutaires advis, et luy escrivit certains articles, desquels voicy une
partie : Mettez ordre, Madame, » etc. De son côté, la Mère de Chaugy (Mémoires sur la Vie et les vertus de Sainte
Jeanne-Françoise Frémyot de Chantal, Paris, 1874, Ire Partie, chap. XV, p. 63) dit : « Notre Bienheureux Père lui
écrivit de sa main une méthode nouvelle pour passer dévotement la journée, laquelle est un crayon du Directoire
spirituel que ce Bienheureux Père a dressé puis après pour notre Congrégation. Il lui donna encore une méthode pour
entrer chaque jour de la semaine dans une des plaies sacrées de Notre-Seigneur. » Charles-Auguste (Histoire, etc., liv.
VI, p. 325) cite ce même document in-extenso, avec de légères variantes dont sans doute il est responsable. En 1626,
il fut inséré dans le petit volume qui a pour titre : Les sacrees Reliques du Bien-Heureux François de Sales, chap. II,
p. 14, et intitulé : Practique pour tout le jour, conseillée à une Dame qui commençoit la vie devote. On le trouve encore
dans les éditions des Œuvres du Saint, 1637, 1641 et suivantes.
Au mois d'octobre de cette même année 1604, l'Abbesse du Puits-d'Orbe reçut du saint Evêque des Avis dont
une partie est résumée ici ; on peut les lire ci-après, pp. 204, 205, 206-208, et voir les notes (962), (977) des pp. 204,
206.
930 Vide tom., præced., Directoire spirituel, p. 137.
931 Job. XXIX, 25.
932 Job, XIX, 27.
933 Ibid., XIV, 15, 16.
934 Ps. XXXV, 10.
935 Cf. Matt., XXII. 11, 12.
936 Cf. tom. præced., Directoire spirituel, pp. 141, 142.
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recollection.
Entrés chaque jour de la semaine devotement dans l'une des sacrees playes de nostre
douloureux et amoureux Sauveur. Le Dimanche, entrés dans celle du costé ; le lundy, dans celle
du pied gauche ; le mardy, dans celle du pied droit ; le mercredy, dans celle de la main gauche ; le
jeudy, dans celle de la main droite ; le vendredy, dans les cicatrices de son adorable chef ; le
samedy, retournés entrer dans son sacré costé, affin que par iceluy vous commencies et finissies
vostre semaine. 937 [193]
_____
VIII. Divers avis pour l'oraison, les aridités et les distractions, et sur la
manière de se comporter dans les exercices spirituels de la journée
envoyés a Mme Rose Bourgeois, Abbesse du Puits-d'Orbe, le 9 octobre
1604938
1) Meditation sur l'eslevation de Jesus Christ crucifié
……………………………………………………………………………………………………..
Pour se mettre en la presence de Dieu
Je vous voy, o mon Dieu, des yeux de mon esprit, comme une mer de perfections et un
abisme de bonté qui non seulement m'environne de tous costés, mais qui habite et qui reside tres
entierement et par une vraye presence dans le fons de mon miserable cœur ; et il n'y a partie en
moy qui ne soit totalement soustenue et animee de vostre sainte Divinité.
Pour l'invocation
Helas, comment peut vivre cette miserable et si chetifye creature en une si profonde
presence de vostre Bonté ? Il me semble, o mon Dieu, que mon cœur ainsy meslé, uni [194] et
nageant en vostre infinie Essence, n'est autre chose qu'un vil et venimeux crapaud qui flotte, se
supporte, maintient et vit dans une mer de bausme praetieux.
937 Le P. de la Rivière et les éditions des Œuvres de saint François de Sales terminent par un alinéa dont un fragment
appartient à la lettre du 14 octobre 1604 à Mme de Chantal (tome XII, p. 359, lignes 1-3, 6-14) ; le reste a été donné
dans le tome XXI.
938 Le 9 octobre 1604, saint François de Sales écrivant à l'Abbesse du Puits-d'Orbe, lui envoie « un escrit touchant la
façon de faire l'orayson mentale qui me semble, » dit-il, « la plus aysee et utile. Je vous ay mis quelques autres
exercices et des oraysons jaculatoires. Cela suffira bien pour vous enseigner la forme qu'il faut tenir a passer la journee.
Je desire que vous la communiquies a madame la Presidente vostre seur, et a madame de Chantal... » (Tome XII, p.
333.) Il y revient encore le 13 du même mois : « J'ay bien peur que l'escrit de la meditation ne soit si mal fait que vous
ne sachies pas le lire ; vous prendres la peyne, s'il vous plaist, de le faire mettre au net pour le pouvoir lire avec plus
de fruit. J'estois si indisposé quand je le fis escrire, que je ne peus y mettre la main pour l'escrire, me contentant de le
dicter. » (Ibid., p. 342.)
Ce « petit memorial a, comme le Saint l'appelle ailleurs (ibid., p. 334), fut imprimé à Paris, en 1688, dans
l'opuscule intitulé : Instructions et pratique de piété pour communier saintement. Avec des Lettres spirituelles sur
divers sujets, tirées des Manuscrits originaux nouvellement trouvez de saint François de Sales, conservés « dans
l'Abbaye Roiale du Puits d'Orbe, » est-il dit dans l'Avertissement. En comparant certaines pièces de ce recueil avec
les Autographes, on est obligé de se convaincre que ceux-ci ont subi, par endroits, des retouches dans le style ; mais
à défaut de ces Autographes, force nous est de reproduire le texte imprimé.
L' « escrit de la meditation » est incomplet ; le commencement doit manquer. On peut s'en rendre compte en
le confrontant avec celui donné ci-dessus, p. 173, qui lui-même n'est pas entier. Le Saint avait sans doute ce dernier
sous les yeux, comme nous l'avons dit plus haut (note (868), ibid.), quand, vers le 9 octobre 1604, il rédigea cette «
façon de faire l'orayson mentale » pour Rose Bourgeois. Les pensées sont identiques, quoique exprimées différemment
; elles sont les mêmes aussi dans la Méditation attribuée à la présidente Brûlart (voir ci-dessus, p. 180), mais les
divergences entre l'un et l'autre texte sont trop nombreuses pour qu'on puisse les donner en variantes.
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Mais, Seigneur, puisque vous m'aves receu, eslevé et maintenu dans les entrailles de vostre
sainte presence, hé, mon bon Dieu, ne me rejettes point de devant vostre sainte face939, permettes
a ce cœur miserable qu'il respande ses indignes pensees et chetifves affections dans le sein de
vostre misericorde, et qu'il prononce ses afflictions devant vous 940. Vous me l'aves commandé, o
mon Dieu ; me voyci vostre indigne servante, qu'il me soit fait selon vostre parole941. Esclaires sur
moy vostre face sacree942, affin que je considere vos merveilles943 pour vous louer, adorer et benir
a jamais.
Proposition du mistere
Je m'imagine et il me semble que parmi cette grande foule de gens qui accourent de toutes
pars pour voir crucifier le Sauveur, je me treuve sur le mont de Calvaire, en un lieu un peu plus
esloigné que les autres, separé et relevé, et par consequent plus advantageux pour voir et considerer
a part moy ce triste et cruel spectacle. Je m'imagine de plus, que le crucifiement est des-ja fait,
c'est a dire, la croix estendüe sur la terre ; que Nostre Seigneur, despouillé, tout fin nud, a esté
attaché par les bourreaux sur icelle, cloüé et serré pieds et mains. Maintenant, donques, m'estant
logé par imagination en ce lieu que j'ay dit, je m'imagine [195] outre cela que je voy relever ce
saint Crucifié tout vivant en l'air, et que la croix est fichee et plantee en terre dans le creux qui a
esté fait a cette fin.
Voyla le mistere proposé en gros, lequel a deux parties : l'eslevation de la croix, et le
plantement d'icelle. Il reste que je poursuyve a considerer les particularités qui peuvent esmouvoir
ma volonté aux saintes affections et resolutions : et cela est la meditation.
MEDITATION
Je considere que le doux Sauveur souffre tant exterieurement qu'interieurement. En
l'exterieur, a mesure qu'on l'esleve, son cors s'incline, pese et se supporte tout entierement sur ses
pieds et ses mains cloués, dont les playes s'agrandissent et la douleur se rend immense. Quand la
croix tumbe dans le trou preparé, le Sauveur en reçoit une secousse et comme un coup d'estrapade
qui augmente de nouveau ses playes et ses douleurs ; ce qui fait pleuvoir et distiller le sang de tous
costés. Estant eslevé en l'air et le vent froid saysissant ce cors tout ulceré et deschiré des coups de
la nuit, le fait presque transir et pasmer.
Pour l'interieur, ce cœur tout languissant d'amour se fend de detresse a la veüe d'une si
grande perte de gens, et sur tout de ceux qui le crucifient ; et il me semble qu'il die : Helas, tant
d'aines pour la vie desquelles je veux mourir dessus ce bois, se perdront elles æternellement ?
Affections
Hé, qui sera ce tigre qui ne fondra en larmes sur ce jeune Roy, le plus doux de tous les
hommes944, vray Filz de Dieu, et qui est si mal traitté ? Helas, nul n'est si denaturé qui voyant un
criminel sur la roue, pour criminel qu'il soit, n'en ayt compassion : hé donques, mon ame, mourras
tu point de compassion de voir ton Sauveur qui souffre tant ? Voy ce cœur tant affligé pour les
pechés du monde ; et si ton cœur ne s'afflige avec luy, faut il pas qu'il soit plus dur qu'un diamant
?
O qui me fera la grace que je puisse en quelque façon soulager mon Sauveur en cette
affliction ? Hé, que ne m'est [196] il permis de le couvrir de quelque habit praetieux, de respandre
939 Ps. L, 13.
940 Cf. Ps. CXLI, 3.
941 Luc., I, 38.
942 Pss. XXX, 17, CXVIII, 135.
943 Ps. CXVIII, 18.
944 Num., XII, 3.
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sur ses playes quelque bausme excellent et supporter entre mes bras la pesanteur de ce cors ! Et
vous qui releves cette croix, alles y tout bellement, je vous supplie, et ne la rejettes pas si rudement
dans le creux, affin que la secousse ne soit pas si grande pour ce pauvre Patient. Helas, ses playes
sont des-ja bien grandes et capables de tenir a couvert les pechés du monde contre l'indignation du
Pere æternel ! O Dieu, que ne suis je quelque excellent et fructueux praedicateur, pour au moins
empescher que ce divin cœur ne fust tant offensé par tant d'iniquités ! O comme je dirois : Ne
veuilles plus vivre iniquement, et ne releves plus les cornes945 de vos meschancetés pour les ficher
dedans ce cœur des-ja tant affligé !
Mais, o mon Dieu, pourquoy m'amusé-je a ces desirs, moy qui n'ay presque pas la force
d'en prattiquer un seul ? Vous ne me demandes pas sur la croix mes vestemens, et je vous les offre
; vous me les demandes en vos pauvres qui sont vos membres, et je vous les refuse. Je n'en donnay
jamais un seul, pour vil et usé qu'il fust ; et comment vous donnerois-je les prætieux ? Comment
respandrois-je du bausme sur vos playes, puisque j'ay bien de la peyne a respandre un verre d'eau
pour vos pauvres946 ? Hé, quel prædicateur de penitence, moy qui n'en ay point encor fait, et qui
contribue tous les jours plus qu'aucun autre aux desplaysirs que vous donnent les pechés ! O vains
et miserables desirs, o offres inutiles, puisqu'elles ne sont qu'en apparence, et qu'en effect ce ne
sont que mocqueries.
Resolutions
Ne cesseray je pas en fin de vous estre infidelle, mon Sauveur et mon Dieu ? O non, ce ne
seront plus des-ormais d'inutiles desirs, ce seront des effectz ; ce ne seront plus des paroles, ce
seront des œuvres. Je me resous de soulager les pauvres, de faire penitence, d'y semondre les
autres. Je me diray a moy mesme, et puis aux autres : Serons-nous plus cruelz au Sauveur que les
vautours ne le sont aux colombes ? ilz n'en deschirent jamais le cœur. Serons-nous si acharnés
contre le saint Colombeau qui niche sur [197] l'arbre de la croix, que de massacrer et deschirer son
cœur avec les malheureuses dens de nos impietés ? Ah, Seigneur, ah ! je seray doresnavant
impitoyable en la resolution que je fay d'aymer et de secourir les pauvres, qui sont vos membres,
et de procurer mon amendement et celuy des autres.
Voyla une consideration bien au long estendue, avec les affections et resolutions ; je
passeray maintenant et legerement sur les autres et ne feray que les marquer.
Je considere la maniere avec laquelle le Sauveur souffre en ce mistere. Pour l'exterieur :
voyes le grand silence de cette divine bouche, qui n'est ouverte que pour jetter de doux et paysibles
souspirs ; ses yeux gratieux et benins regardoyent quelquefois le Ciel avec grande reverence,
quelquefois ilz se tournoyent du costé du peuple qu'ilz regardoyent avec beaucoup de compassion
; et il me semble que je voy en sa poitrine, du costé gauche, son cœur qui pantele et tremousse
d'amour, avec tant d'inflammation, que tout cet endroit me semble rougir.
Pour l'interieur, il souffre volontairement, patiemment, amoureusement.
Affections
O miserable que je suis, qui ne sçaurois souffrir un mot sans replique, qui pour la moindre
affliction fais sans cesse des plaintes et les respans aux oreilles de tout le monde. Et si quelquefois
je tiens contenance a l'exterieur, que devient mon cœur en l'interieur ? il s'enfle de rancune, il
s'enflamme de colere, d'impatience et de vengeance.
Resolutions
945 Ps. LXXIV, 5.
946 Matt., X, 42 ; Marc., IX, 40.
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Et doresnavant, donques, je vous embrasse, o sainte Croix ; je vous jure fidelité, o benite
vertu de patience. Jamais, non jamais, mon Sauveur, l'eau de contradiction n'esteindra le feu de la
charité947 que je doy au prochain.
Je considere pourquoy il souffre, et j'en treuve plusieurs [198] raysons. Premierement, c'est
pour obeir a Dieu son Pere. O obeissance admirable et vrayement filiale ! O que vous merites bien
d'avoir un tel Pere, puisque vous luy rendes une telle obeissance ! Mais ne suis-je pas bien effronté
d'appeller ce mesme Dieu mon Pere, luy estant si desobeissant ? Et comment obeirois-je jusques
a la mort948, puisque je n'obeis pas mesme jusques a la souffrance d'une petite parole fascheuse et
d'un regard de travers ? O je veux changer d'humeur, et pour l'amour de mon Sauveur je veux
boyre cy apres tous les calices qu'il me presentera.
2. Il souffre pour effacer mon peché. Mon iniquité est donques bien grande : helas, que je
suis miserable de m'y estre si souvent abismé ! O peché tres abominable, je ne te verray jamais
d'un costé que je ne me jette incontinent de l'autre, quand il y auroit tous les tourmens du monde a
souffrir ; non, je ne veux plus me souiller en tes miserables ordures.
3. Il souffre pour nous tesmoigner son amour envers nous. O donques, que son amour est
grand ! Helas, Seigneur, je ne sçay pas si j'ay aucun amour ; mais si j'en ay, il est si miserable qu'il
s'assouvit d'une seule larme, et il croit s'estre bien fait paroistre quand il a jetté quelques souspirs.
Hé, bon Dieu, que je desire et que je proteste de vouloir cy apres vous aymer et vous donner tout
mon cœur.
Je considere encor la forme particuliere de ce mistere, qui est l'eslevation. Et pourquoy
donques eslever mon Sauveur, sinon parce qu'il veut estre l'estendart de mon ame ? O traistre et
desloyal soldat que je suis ! Combien de fois ay-je abandonné cette enseigne pour suivre celles du
monde. Ah, maintenant, mon Dieu, je vous jure et prometz une nouvelle fidelité.
Actions de graces et offrande
Mon Dieu, mon Sauveur, je vous remercie de la grace que vous m'aves faite, m'ayant
permis de jetter mes yeux sur vostre divine Majesté en cette mienne meditation, et je vous rens
mille actions de graces de toutes les peynes et souffrances que vous aves endurees en tout ce sacré
[199] mistere ; et sur tout je vous remercie de l'amour qui vous les a fait souffrir, et de cette tres
misericordieuse intention que vous eustes d'appliquer a mon ame en particulier les merites que
vous y aves acquis. Hé, mon Dieu, je vous supplie et conjure par toutes ces peynes, ces vertus et
merveilles que vous y prattiquastes, de me fortifier en vostre service, d'esteindre en moy mon
amour propre et de m'abismer dans le vostre. Faites, o mon Dieu, que vostre sang serve de ciment
pour cimenter en mon ame les affections et resolutions que vous m'aves donnees. Hé, Seigneur,
que vous soyes tout mien, comme je veux estre doresenavant tout vostre.
O Pere æternel, je vous offre toutes ces peynes et afflictions de vostre Filz mon Sauveur,
ses vertus, ses merites et son sang ; et en vertu de tout cela, et de l'intercession de sa Mere, de toute
vostre Cour cœleste, de l'Eglise son Espouse et de tous vos fideles qui combattent icy bas en terre,
je vous demande vostre sainte et paternelle benediction pour mon cœur, et vostre speciale
assistance pour vostre Eglise, pour les chefz d'icelle, pour les princes chrestiens, pour mes parens,
amis et bienfacteurs, pour les desvoyés, pour le soulagement des ames du Purgatoire. Ah, Seigneur,
convertisses les pecheurs, fortifies les pœnitens et perfectionnes les justes.
Pater, Ave.
947 Cf. Cant., VIII, 7.
948 Philip., II, 8.
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2) Conseils pour la meditation. Quand faut-il « lascher la bride aux affections ».
Un avis de saint François de Sales et de saint Pierre d'Alcantara. A qui on peut
parler pendant la méditation. Trois remèdes contre les engourdissements d'esprit
et les sécheresses. Pourquoi on se met en la présence de Dieu. Les courtisans
en la chambre du roi et l'âme dans l'oraison. C'est un grand honneur d'être
auprès de Dieu. Que faire lorsqu'on est distrait. L'oraison doit toujours se
finir en paix et avec la résolution de servir Dieu fidèlement
949 Je vous advertis premierement, qu'encor qu'il soit [200] bon pour l'ordinaire de tenir
cette methode 950, c'est a dire, d'adjouster les affections aux considerations et les resolutions aux
affections, en sorte que la consideration marche la premiere, toutesfois, si apres la proposition du
mistere l'affection se treuve asses esmeue, comme il arrive quelquefois, alhors il luy faut lascher
la bride et la laisser courir, car c'est signe que le Saint Esprit nous tire de ce coste la ; et puis, la
consideration ne se fait que pour esmouvoir l'affection951.
2. Il me semble qu'il est meilleur de faire les affections apres chaque consideration que
d'attendre apres toutes les considerations, parce qu'on chemine plus simplement. C'a esté aussi
l'opinion du bienheureux Pierre d'Alcantara952 et l'experience l'enseigne ; ce que je dis, parce que
desirant que vous vous servies fort souvent des Prattiques de Bellintani953, vous pourries a son
imitation vouloir faire autrement, ce qui vous seroit beaucoup plus difficile et moins utile954. Je
vous donne donq pour regie generale de ne retenir jamais les affections en vostre meditation ; mais
de les laisser sortir tous-jours quand elles se presentent, jusques a la fin du tems prefigé a la
meditation, qu'il faut venir aux resolutions, action de graces, priere et offrande.
3. Encor qu'il soit bon de reserver l'action de graces, la priere et l'offrande pour la fin de la
Meditation, si est ce que ce sont trois affections qui se peuvent aussi faire avec les autres parmi les
considerations, et se presentant, il leur faut aussi librement faire place sans les retenir.
4. 955Parmi les affections et resolutions, il est bon de parler non seulement a Nostre
Seigneur, aux Anges et aux personnes representees aux misteres ; mais a soy mesme, a son cœur,
aux pecheurs, voire mesme aux creatures insensibles, comme l'on void que David fait en ses
Psalmes et saint François en ses oraysons. Mais il faut que le tout se face tous-jours en la presence
de Dieu, c'est a dire, en vertu de l'attention que nous nous sommes procuree au fin commencement
de la meditation. [201]
5. Encor que vous ayes preparé plusieurs considerations, toutesfois si une suffit pour vous
entretenir pendant vostre demy heure, ne passes pas plus avant ; et si vous ne treuves pas en l'une
d'icelles dequoy eschauffer vos affections, faites les suivantes l'une apres l'autre, jusques a ce que
vous ayes treuvé la veine des affections956.
6. 957S'il vous arrive, comme il vous arrivera souventesfois indubitablement, de n'avoir
aucun goust aux considerations, uses de l'un de ces trois remedes. Le premier, c'est d'ouvrir la
porte aux paroles, vous lamentant de vous mesme a Nostre Seigneur, confessant vostre indignité,
le priant qu'il vous soit en ayde, baysant le Crucifix, si vous l'aves devant vous, et disant mesme
de bouche au Sauveur : Si ne vous lairray-je pas ; je me tiendray icy aupres de vous, et n'en partiray
949 On peut faire des rapprochements entre ces pages et les chapitres V, VIII, IX de la seconde Partie de l'Introduction
a la Vie devote ; certaines phrases sont textuelles. Preuve que le saint Auteur se reporta à ces Avis, dont sans doute il
avait garde une copie, quand il rédigea les chapitres indiqués. L'Introduction n'a donc pas été composée tout entière
de mémoires écrits exclusivement pour Mme de Charmoisy.
950 Celle que le Saint a donnée dans la Meditation précédente.
951 Cf. Introd. a la Vie dev., Part. II, ch. VIII.
952 Vide Traité de l'oraison et de la meditation, traduit par le P. Ubald d'Alençon (Paris, 1923), pp. 143, 147.
953 Vide supra, p. 167, not. (853).
954 Cf. Introd. a la Vie dev., ubi supra.
955 Ibid.
956 Cf. Introd. a Vie dev., Part. II, ch. V.
957 Ibid., ch. IX.
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point que je n'aye eu vostre benediction958. Quelquefois il sera bon de vous resouvenir de la
Chananee, laquelle estant rejettee par Nostre Seigneur qui l'appella chienne, le prit au mot luy
disant : Ouy vrayement, je le veux bien ; mais les chiens mangent au moins quelques miettes de la
table de leurs maistres959. Ainsy, reconnoissant par la tristesse et engourdissement de vostre esprit
que vous estes fort miserable, serves vous de cette occasion et, pleine de confiance, escries vous
devant Dieu : Ouy, Seigneur, je suis miserable ; mais pour qui la misericorde est-elle, sinon pour
les miserables ? Et par ce moyen, vous passeres de la meditation que vous avies preparee a la
meditation de vostre propre misere, de laquelle vous tireres des affections d'humilité, de confiance,
et telles semblables qui vous seront tres utiles.
960Le second remede sera de prendre un livre en main, et le lire avec attention jusques a ce
que vostre esprit soit resveillé.
Le troysiesme, c'est de picquer vostre esprit par quelque contenance de devotion : comme
se prosterner en terre, estendant les bras en croix, tenant les mains jointes et eslevees au ciel. Que
si apres tout cela vous demeures encor en secheresse et sans consolation, mesme en telle sorte que
vous ne puissies proferer aucune parole ni interieurement ni exterieurement, ne laisses pas pour
cela de [202] vous tenir en une contenance devote, sans vous inquieter ni troubler, vous
resouvenant qu'il y a deux fins principales pour lesquelles on se met en la presence de Dieu et en
orayson : l'une est pour exciter son affection en l'amour de Dieu, et lhors que nostre affection n'y
est point vivement excitee nous disons que nostre ame est en secheresse ; l'autre est de rendre
hommage a Dieu, protestant qu'il est nostre souverain Createur et Seigneur : et cette fin est
extremement noble, parce qu'il y a moins de nostre interest. Que si, venant a l'orayson, nous ne
pouvons pas faire le premier, il se faut contenter du second, qui est tous-jours beaucoup, encor que
nous ne puissions parler a Dieu et qu'il semble qu'il ne nous parle point. 961 Combien y a-il de
courtisans qui vont cent fois l'annee en la chambre du Roy et en sa presence, non pour luy parler
ni pour l'ouyr, mais simplement pour estre veus de luy et tesmoigner par cette assiduité qu'ilz sont
ses serviteurs. Ainsy devons-nous venir a l'orayson comme a la chambre de nostre Roy, pour luy
parler et l'ouyr en ses inspirations et mouvemens interieurs ; ce qui arrivant, ce nous est un playsir
tres delicieux. Mais si, ne pouvant luy parler ni l'ouyr, nous demeurons la en devotieuse
contenance, il aggreera nostre patience et favorisera nostre assiduité, et sans doute qu'une autre
fois il nous prendra par la main, s'entretiendra avec nous et nous fera voir toutes les allees du saint
jardin de l'orayson. Mais quand il ne le feroit jamais, contentons-nous que ce nous est un honneur
trop plus grand d'estre aupres de luy et a sa veue.
POUR LES DISTRACTIONS
Quand vous seres distraitte, ce vous sera un grand soulagement de vous imaginer la
devotion et ferveur des Anges et des Saintz, a l'orayson desquelz vous joindres la vostre, quoy
qu'indigne. Il sera bon mesmement de vous imaginer que vous estes en la compaignie de plusieurs
personnes devotes avec qui vous voules faire orayson ; et mesme, si vous en connoisses, vous
pourres vous les imaginer en l'acte de ferveur et de priere. [203]
Tous les remedes contre la secheresse sont bons contre les distractions.
Au demeurant, quoy qu'il arrive, il ne faut jamais se laisser surprendre a la tristesse et
inquietude ; mays, soit que nostre orayson ayt esté douce et savoureuse, ou qu'elle ayt esté seche
et sans goust, il faut s'en retirer tous-jours en paix, avec intention de servir Dieu tous-jours
fidellement tout le reste de la journee.
958 Gen., XXXII, 26.
959 Matt., XV, 27.
960 Cf. Introd. a la Vie dev., ubi supra.
961 Ubi pag. præced.
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3) Exercice pour le matin962. Considérations et aspirations pour le lever. Exercice
de la « Preparation» : en quoi il consiste. Une partie de celui-ci peut se joindre à
la méditation quand elle se fait le matin. Ce qu'il ne faut pas prévoir pendant
l'oraison.
963 Faites qu'a vostre resveil vostre ame se jette du tout en Dieu par quelques saintes
parolles, telles que sont celles cy : D'autant que le sommeil est l'image de la mort, aussi le resveil
est l'image de la resurrection. Resouvenes vous donques de la voix qui retentira tout par tout au
dernier jour : O mortz, levés-vous et venés au jugement ; parolles desquelles saint Hierosme faisoit
si grand prouffit964. Vous pourres adjouster cette orayson jaculatoire avec Job965 : Je croy que mon
Redempteur est vivant et qu'en ce dernier jour je resusciteray. O Seigneur, faites que ce soit a la
vie eternelle ; cette esperance repose dans mon sein. Ou bien, vous imaginant quelquefois d'avoir
ouy la mesme voix de l'Ange966, vous dires avec le mesme Job967 : En ce jour la, o Seigneur, vous
m'appelleres, et je vous respondray ; [204] vous donneres vostre dextre a l'ouvrage de vos mains.
Vous aves conté tous mes pas ; mays pardonnes moy mes offenses.
Autres fois, voyant le jour, vous porteres vos pensees 968 de la lumiere temporelle a
l'eternelle, et dires avec David969 : O Seigneur, en vostre clairté je verray 970 la lumiere eternelle.
Ou bien, passant de la lumiere interieure a l'exterieure, vous dires : Esclaires mes yeux, affin que
je ne m'endorme point a la mort971. Ou bien avec saint Paul972 : La nuit est passee, le jour est arrivé
; sus, non plus des œuvres de tenebres, mais 973 endossons le harnais de clairté. Ainsy vous pourres
faire de saintes considerations, telles que le Saint Esprit vous les suggerera.
En vous habillant, apres avoir fait le signe de la Croix, dites : Donnes moy, Seigneur, le
manteau d'innocence et la robbe nuptiale974 de charité.
Il est bon de faire, s'il se peut, la meditation le matin, avant que l'esprit soit embarrassé
d'autres affaires ; mais a qui ne le pourroit, au moins faut-il faire ce petit exercice qui suit, et lequel,
servant pour toute la journee, s'appelle Preparation.
975On remercie Dieu de ce qu'il nous a conservé cette nuit la, et on considere que si Dieu
nous donne le jour present, c'est pour l'employer a sa gloire et a nostre salut, et que sa Majesté hait
et deteste souverainement le peché, suyvant le dire de David976 : Au grand matin je m'approcheray
de vous, o mon Dieu, et reconnoistray que vous estes un Dieu qui n'ayme point l'iniquité.
962 « Le matin, estant levee, vous deves faire vostre meditation, et l'exercice du matin que j'ay appellé preparation. »
C'est ce que saint François de Sales écrit à Rose Bourgeois le 9 octobre 1604 (tome XII, p. 334). Nous avons donné
plus haut (p. 191) un « exercice » semblable adressé à la baronne de Chantal ; toutefois, celui-ci est plus détaillé et il
a en plus la « Preparation ». On y retrouve les mêmes pensées que dans le chapitre x de la seconde. Partie de
l'Introduction a la Vie devote ; l'article Du lever des Seurs, dans le Directoire spirituel des Religieuses de la Visitation
(voir le tome précédent, p. 137), est manifestement tiré de celui-ci, aussi bien que l'article : Comme il faut ouïr la
sainte Messe (ibid., p. 141) l'est du suivant. Cf. aussi, dans le tome XXII, p. 21, l'Exercice de la Préparation que le
Saint se prescrivit à Padoue.
963 Vide tom. præced., Directoire spirituel, p. 137.
964 Reg. Monach. ex scriptis S. Hieron. collecta, c. XXIII.
965 Cap. XIX, 25, 27.
966 I Thess., IV, 15.
967 Cap. XIV, 15, 16.
968 [Sainte Jeanne-Françoise de Chantal transcrivit pour elle-même les deux alinéas suivants ; ils sont copiés, avec de
petites variantes, dans le recueil conservé à la Visitation de Nancy (voir tome XXI, note (902), p. 140) :]
Voyant le jour venir, vous passeres vostre pensee
969 Ps. XXXV, 10.
970 je mire
971 Ps. XII, 4.
972 Rom., XIII, 12.
973 ains
974 Cf. Matt., XXII, 11, 12.
975 Cf. Introd. a la Vie dev., Part. II, ch. X.
976 Ps. V, 5.
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14.8 Page 138

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On considere quelles occasions on pourra rencontrer le long de la journee pour servir Dieu,
ou au contraire pour l'offenser, et cela chacun selon sa condition, et les affaires que l'on peut avoir
ce jour la ; et les ayans reconneues, on [205] fera une ferme resolution d'embrasser la vertu et
d'eviter le peché ; en quoy il faut encor qu'un chacun ayt esgard aux imperfections ausquelles il est
sujet.
Apres cela, on offre a Dieu et soy et toutes ses actions, et pour les luy rendre aggreables on
prie Jesus Christ son Filz de les vouloir unir a ses merites et a sa Passion.
En fin on prie Dieu de nous estre propice et de nous fortifier en nos bons desseins ; et a
mesme intention on invoque la Vierge et les Saintz pour qui nous avons le plus de devotion, avec
tous les autres, et particulierement nostre bon Ange. A quoy on adjouste le Pater, l'Ave, le Credo
et la benediction.
Advertissement
Si la meditation se fait le matin, on joindra l'action de graces de la conservation de la nuit
avec l'action de graces du mistere. Par les considerations, on verra qu'il faut embrasser la vertu et
fuir le peché. L'offre de soy mesme se fera avec celuy du mistere, comme aussi la priere.
Il ne reste que la consideration des dispositions et affaires de la journee, qui ne se doit pas
faire parmi la meditation, parce qu'elle regarde trop par le menu nos occupations, nostre mesnage,
nos rencontres des personnes avec qui nous avons a traitter, avec leurs conditions : comme si elles
sont choleres, despiteuses et semblables, et tout cela nous distrairoit trop. Il faut donques faire ces
reflexions a part, apres le Pater noster.
4) Avis pour bien entendre la sainte Messe977
978A la Messe, quand on va dire l'Evangile, leves vous pour tesmoigner que vous estes
preste et appareillee pour cheminer en la voye des commandemens de l'Evangile ; et [206] pour
vous y exciter, vous pourres dire en vous levant : Jesus Christ a esté fait obeissant jusqu'a la mort,
et mesme a la mort de la croix979. Et faisant le signe de la Croix sur vostre front, vostre bouche et
vostre cœur, vous dires : Dieu soit en mon esprit, en ma bouche et en mon cœur, affin que je
reçoive son saint Evangile.
Au Credo, il faut dire le Credo et protester mentalement de vouloir vivre et mourir dans la
foy de l'Eglise.
Apres le Sanctus, il faut en grande humilité et reverence penser au grand bienfait de la Mort
et Passion de nostre Sauveur, le suppliant de la vouloir appliquer au salut de tout le monde, et
particulierement au nostre et a celuy des enfans de son Eglise, a la gloire et felicité de tous les
Saintz et au soulagement des ames du Purgatoire.
A l'eslevation du tres saint Sacrement, il faut avec une grande contention de cœur l'adorer,
puis, avec le prestre, l'offrir a Dieu le Pere pour la remission de nos pechés et de ceux de tout le
monde, et nous offrir nous mesmes avec toute l'Eglise, et nos parens et nos amis.
Apres l'eslevation, il faut remercier Jesus Christ de sa Passion et de l'institution de ce saint
Sacrifice de l'autel.
Quand le prestre dit le Pater, il le faut dire avec luy, ou vocalement ou mentalement, avec
une grande humilité et devotion, tout ainsy que si on l'oyoit dire a Nostre Seigneur et qu'on le dist
mot a mot apres luy.
A la Communion, si on ne la fait pas reellement, il la faut faire spirituellement, s'approchant
de Nostre Seigneur par un saint desir d'estre unie a luy et le recevoir en son cœur.
977 Saint François de Sales mentionne cet exercice dans sa lettre du 14 octobre 1604 à Mme de Chantal : « Oyés tous
les jours la Messe, » lui dit-il, « en la façon que j'ay descritte en l'escrit de la meditation... » (Tome XII, p. 358.) Déjà
il lui en avait donné un abrégé à Saint-Claude, le 26 ou le 27 août. (Voir ci-dessus, p. 192.)
978 Vide tom. præced., Directoire spirituel, p. 141.
979 Philip., II, 8.
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A la benediction, il faut se representer que Jesus Christ en mesme tems nous donne la
sienne.
5) Les retours vers Notre-Seigneur, les oraisons jaculatoires et la pensée de la mort
pendant la journée
Pendant les affaires de la journee, il faut le plus que l'on peut regarder souvent a Nostre
Seigneur Jesus Christ, [207] et se resouvenir du poinct de la meditation que l'on a le plus gousté et
ressenti ; 980comme si la douceur de ses yeux nous a esté aggreable, nous nous les representerons
en disant : Ja ne vous playse, mon Sauveur, que je fasse chose qui puisse offencer vos yeux ; et
ainsy des autres. 981 Il est bon aussi d'avoir certaines parolles enflammees qui servent de refrain a
nostre ame, comme : Vive mon Dieu 982 ! VIVE JESUS ! Dieu de mon cœur !
983 Quand l'horloge sonne, il est bon de se resouvenir qu'il est autant passé de cette vie
mortelle, et se resouvenir de la derniere heure qui sonnera pour nous. On pourra dire, faisant le
signe de la Croix sur nostre cœur : Il faut mourir. D'autres fois, nous souvenans que nous nous
acheminons a l'eternité, dire : Beni soit Dieu ! Dieu soit loué. Quelquefois, nous repentant des
heures inutilement passees : Dieu 984 me donne la grace de mieux faire ; d'autres fois 985 simplement
: JESUS, MARIA ; Dieu me soit en ayde ; Dieu soit avec nous 986.
980 Cf. tom, præced., Directoire spirituel, pp. 152, 154.
981 [Un gros in-folio gardé à la Visitation de Caen, copié par la Sœur Anne-Thérèse de Matignon, morte en 1694,
renferme bon nombre d'extraits de Lettres de saint François de Sales à sainte Jeanne de Chantal, déjà donnés dans les
tomes précédents. Il contient aussi l'avant-dernier alinéa du n° 7, page suivante, et ensuite, avec les variantes que nous
relevons, le passage ci-dessus : « Il est bon », etc. Si l'on en croit la copiste, ces deux fragments auraient été retranchés
de la lettre du 14 octobre 1604 à la Sainte (tome XII, p. 352) ; ils se trouvent dans ses Œuvres, tome II (1875), pp. 30,
31.]
982 comme : Vive Dieu !
983 [Les six lignes qui suivent sont omises dans le Ms. de Caen, qui reprend à : « Beni soit Dieu ! »]
984 loüé. Dieu
985 d'autres fois tout
986 avec moy. Il faut mourir, etc. Ayes quelque croix a vostre col, ou chapelet, la maniant ou baysant en l'honneur
de Celuy qu'elle represente.
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14.10 Page 140

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6) Exercice pour le soir. L'examen de conscience. Le souvenir de la mort
Il ne faut jamais oublier l'examen de conscience tel que tous ces petitz livres nous
l'enseignent.
En se despouillant, il est bon de dire avec Job987 : Je suis [208] sorti nud du ventre de ma
mere, nud j'y rentreray ; se resouvenant qu'il faut tout laisser.
Se couchant, il faut se resouvenir du tombeau ; et comme on se couche pour le repos
temporel, il faut avoir memoyre du repos eternel, et dire ce que l'on dira pour nous quand nous
serons mortz : Requiem æternam ; et : Sancta Maria, Mater Dei.
J'appreuve qu'autant qu'il se peut, l'on s'endorme avec une contenance devote, comme les
mains croisees sur l'estomach, ou jointes.
7) Avis divers sur les exercices précédents. Vivre sans scrupules et servir Dieu
avec amour. La durée de la méditation, et quand la faire. Encore la Messe.
C'est une superstition de croire qu'il faille recommencer le Chapelet ou autres
prières quand, légitimement, on les a interrompus. Se mettre toujours en la
présence de Dieu avant de prier
Apres tout cecy, je vous advise de vivre sans scrupule et servir Dieu plus avec amour
qu'avec peur. Partant, s'il arrive que pour quelque honneste sujet vous laissies de faire tous ces
exercices, ou l'un d'eux, ne vous mettés point en peyne, mais reprenes-les tout bellement le jour
suyvant.
Je ne veux point que vostre meditation soit de plus que d'une grosse demie heure ou trois
quartz d'heure, et quand vous ne la pourres faire le matin ou devant le disner, je ne voudrois pas
que ce fust sinon pour le moins quattre bonnes heures apres le disner, c'est a dire, un petit avant le
souper. Il ne la faut faire nullement apres le souper, mais seulement quelques prieres vocales, avec
l'examen de conscience.
988 Pour le regard de la Messe, je n'ay pas voulu 989 particulariser sur tous les misteres
d'icelle, pour vous instruire comme il y faut correspondre 990 par le menu avec des oraysons et des
pensees, d'autant que cela charge tant la me [209] moyre que la volonté n'a pas ses affections 991
libres. Donques, pour le reste du tems de la Messe auquel je n'ay pas dit ce qu'il failloit faire, ou
bien il faut continuer les affections que je vous ay marquees chacune en son ordre : comme, par
exemple, celle de la 992 contrition jusqu'a l'Evangile ; celle de protestation de 993 foy jusqu'a la
Preface, et ainsy des autres. Ou bien il faut dire quelque orayson vocale, comme seroit quelque
partie du Chapelet ou des Heures, ou autres telles oraysons. Que 994 si c'est le Chapelet, vous ne
laisseres pas, en le disant, de faire presque tout ce que j'ay marqué ; l'un n'empeschera pas l'autre.
Et si vous ne le pouves pas tout dire 995 en une fois, dites le en deux, et l'Office de Nostre Dame
aussi ; dequoy vous ne deves faire nul scrupule, ains il y a de la superstition a croire que pour de
legitimes interruptions il faille recommencer, car cela est sans nulle rayson, ni apparence de pieté
: nostre 996 Dieu ne regardant qu'a la devotion avec laquelle on prie, et non pas si c'est a deux fois
987 Cap. I, 21.
988 [Voir remarque (981) de la page précédente.]
989 je n'ay point voulu vous le
990 il s'y faut comporter
991 n'a pas les actions
992 de contrition
993 de la
994 dire quelques oraysons vocales. Que
995 l'un n'empeschant gueres l'autre. Que si vous ne pouvies le dire tout
996 recommencer, nostre
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15 Pages 141-150

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ou a troys 997. Au contraire, il semble meilleur de prier souvent, quoy que peu, que de prier
beaucoup une seule fois ; et les anciens Peres ont prattiqué cecy.
Au demeurant, vous ne deves jamais commencer aucune priere sans premierement vous
estre mise briefvement en la presence de Dieu. [210]
_____
IX. Petit traité sur la Sainte Communion, rédigé pour Mme Rose
Bourgeois, Abbesse du Puits-d'Orbe, [décembre 1604, ou
commencement de 1605998]. Une seule chose est nécessaire pour
communier : le bon état de l'âme. Chasser de notre entendement toute
curiosité. Comparaison de la manne. S'humilier dans les
tentations, ou encore les mépriser. Qu'est-ce que la sainte
Communion ? Pour s'y préparer, oublier les affaires domestiques et
les choses matérielles, et se rappeler les bienfaits de Dieu. Les «
affections » ne doivent pas « estre a l'abandon, mais resserrees et
couvertes ». Exemple des Israëlites mangeant l'agneau pascal.
Ardent désir. Ne pas disputer avec l'ennemi. Considérations
suggérées pour la veille de la Communion. Un peu de retraite
intérieure et récréation plus « devote ». Retrancher peu à peu les
attaches. Que faire la nuit et le matin au réveil. Ce que le Saint
n'approuve pas. Comment traiter avec Notre-Seigneur le jour où on
l'a reçu. Préparation et action de grâce ; diverses aspirations.
Comment se servir de l'imagination. La Sainte Vierge, et l'âme qui
communie. Que personne ne s'approche de la Table sainte par
coutume. L'un des principaux fruits de la Communion : la charité
mutuelle.
997 a deux ou troys fois. [La suite ne se trouve pas dans le Manuscrit ni dans les Œuvres de sainte Jeanne-Françoise
de Chantal.]
998 Saint François de Sales désigne la destinataire et la date approximative de ce petit traité quand il écrit vers le 22
novembre 1604 à Rose Bourgeois : « Je ne puis vous envoyer maintenant l'escrit de la Communion, car vostre homme
me presse trop. Je vous l'envoyeray bien tost, car j'en auray commodité, » (Tome XII, p. 393.) Le 7 décembre, le
messager ne lui donne loisir d'écrire qu'à Mme de Chantal (ibid., p. 396) ; probablement, il aura tenu sa promesse avant
la fin de 1604 ou les premiers jours de 1605. Dans le courant de janvier de cette année, le Saint fut saisi « d'une fievre
continue » qui, le 22, l'obligeait à se servir de « la main d'autruy » ; le 18 février il emploie encore un secrétaire « au
sortir de » sa « maladye », mais ajoute lui-même quelques lignes. (Tome XIII, pp. 2, 12.) Ce n'est donc pas dans ce
laps de temps qu'il aura pu rédiger ce traité.
L'édition des Sermons (1643) l'a donné pour la première fois à la fin du volume, p. 265, avec des changements
de mots et plusieurs omissions qui sont répétés dans les Œuvres de 1652 et les suivantes, y compris les éditions de
Vivès et de Migne. Hérissant (1767) a reproduit le texte complet, Opuscules, tome III, p. 172, l'empruntant en partie
au petit livre de 1688 : Instructions et pratique de piété pour communier saintement (voir ci-dessus, note (938), p.
194), et en partie à une copie que l'éditeur tenait des « Dames de Sainte Marie de Langres, laquelle, » dit-il, « a été
tirée sur l'original qu'elles ont entre les mains et qui leur est venu du Puits d'Orbe. » (Note des pp. 172, 173.) Le «
Certificat » lui fut délivré avec la copie le 26 janvier 1751.
Deux pages in-folio du Manuscrit autographe se conservent à la Visitation d'Annecy, nous les signalerons en
leur lieu ; tout le reste est perdu.
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15.2 Page 142

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Tous les docteurs spirituelz sont d'accord que deux choses sont principalement necessaires
avant la Communion, a sçavoir, le bon estat de l'ame et le bon desir. Mais parce que le bon desir
est une piece du bon estat, on peut dire qu'une seule chose est requise, a sçavoir, le bon estat de
l'ame. Voyons donques en quelle disposition nous devons mettre nostre ame, pour, autant qu'il
nous sera possible, dignement communier. Et pour le sujet duquel nous parlons, considerons les
facultés principales de l'ame. [211]
Quant a l'entendement, il le faut espurer d'une chose et le parer d'une autre. Il le faut
premierement purger de toute curiosité, en sorte qu'il ne s'enquiere point comme il se peut faire
que le propre cors de Nostre Seigneur, avec son sang, son ame et sa Divinité, soit tout entierement
en la sainte hostie et en chaque partie d'icelle ; ni comme il se peut faire qu'estant au Ciel, il soit
en terre ; ni comme il peut estre vray que n'estant qu'un seul cors, il soit neanmoins en tant de lieux
et sur tant d'autelz et en tant de bouches. Non, il faut tenir nostre entendement clos et couvert a
telles vaynes et sottes questions et curiosités, car nous n'avons que faire de sçavoir comme ce divin
Sacrement se fait : il suffit que nous sçachions qu'il se fait. C'est a Dieu d'avoir le soin de le faire,
nous n'avons pas besoin de nous en empescher ; c'est a nous seulement d'avoir le soin de le bien
croire et de nous en prevaloir.
Ce poinct est commun a tous les misteres de la sainte foy et a plusieurs autres choses,
comme a la creation du monde, duquel nous ne sçaurions dire comme Dieu fit quand il le crea, ni
comme il fit quand il crea nostre ame et la mit dans nostre cors. Qu'est-il donques besoin de sçavoir
comme il met son tressaint cors, son sang et son ame en ce Sacrement ? C'est a luy de le faire, c'est
a nous de le croire. En figure dequoy la celeste manne tomboit jadis au desert, non de jour, mays
de nuit, si que nul ne sçavoit comme elle se faisoit, ni comme elle descendoit ; mais le matin estant
venu, on la voyoit toute faite et descendue999 : ainsy cette surceleste et divine manne de
l'Eucharistie se fait en une façon et maniere qui nous est secrette et cachee ; nul ne peut dire comme
elle se fait et vient a nous, mais par la lumiere de la foy nous la voyons toute faitte. [212]
Que si contre cette pureté d'entendement le malin esprit nous donne des tentations, il s'y
faut opposer, s'humiliant devant la toute puissance de Dieu, disant, ou de cœur, ou de bouche : O
sainte et immense toute puissance de mon Dieu, mon entendement vous adore, trop honnoré de
vous reconnoistre et de vous faire l'hommage de son obeissance et sousmission. O que vous estes
incomprehensible, et que je suis joyeuse dequoy vous l'estes ! Non, je ne voudrois pas vous pouvoir
comprendre, car vous seriés trop petit si une si petite et chetifve capacité vous comprenoit. Puis,
se retournant a son propre entendement : Et quoy, petit mouscheron, nourri parmi la pourriture de
ma chair, voules vous brusler vos aisles a cest immense feu de la puissance divine, laquelle
consumeroit et devoreroit les Seraphins, s'ilz se vouloyent fourrer en telles curiosités ? Non, petit
papillon, il vous appartient seulement d'adorer cet abisme, et non pas de le sonder. Et quelquefois
on peut repartir au tentateur : O malheureux, ton outrecuydance de vouloir voler trop haut t'a
precipité en l'enfer ; je m'empescheray bien de faire un tel sault, moyennant la grace de mon Dieu.
Tu trompas ainsy la pauvre Eve, luy voulant apprendre a sçavoir autant que Dieu ; mais tu ne
m'attrapperas pas : je veux croire, et ne rien sçavoir.
Il est aussi bon quelquefois de mespriser ces pointilles et tentations, et n'en tenir conte
quelcomque, laisser japper et clabauder ce matin et passer outre en son chemin ; car encor qu'il est
enragé, si est ce qu'il ne mord que ceux qui le veulent ; et partant, tenant la volonté constante en la
foy, qu'il aboye tant qu'il voudra, nous ne craignons rien.
Consideration dont il faut paver l'entendement
Voyla dequoy il faut purger l'entendement. Mais cela ne suffit pas ; car il le faut encor parer
et orner d'une autre chose : il le faut tapisser de considerations. Et qu'est ce qu'il faut considerer ?
Nous avons dit plus haut (note de la p. 195) que l'éditeur du petit volume de 1688 a plusieurs fois modifié le
style du saint Auteur, qui est plus fidèlement reproduit par Hérissant ; c'est donc son texte que nous suivrons de
préférence.
999 Exod., XVI, 14 ; Num., XI, 9.
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15.3 Page 143

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Il ne faut pas considerer comme ce Sacrement se peut faire, car ce seroit nous perdre ; mais il faut
bien considerer ce que c'est que ce Sacrement. En figure dequoy les Israelites ne demanderent pas
comme la manne se faysoit, mais la voyant toute faitte, ilz demandoyent [213] ce que c'estoit.
Qu'est cecy, disoyent-ilz, qu'est cecy1000 ? Considerons donq ce que c'est que ce divin Sacrement,
et nous treuverons que c'est le vray cors de Nostre Seigneur, son sang, son ame, sa Divinité. C'est
le mistere de la plus intime union que nostre Redempteur pouvoit faire avec nous. C'est la plus
entiere communication qu'il pouvoit faire de luy mesme, par laquelle il se joint a nous d'une façon
merveilleuse et toute pleine d'amour. En fin ce Sacrement, c'est Jesus Christ luy mesme qui, d'une
façon nompareille, vient a nous et nous tire a soy.
Comment il faut purger la memoyre
Quant a la memoyre, il la faut aussi purger d'une chose et la parer d'une autre. Il la faut
purger de la souvenance des choses caduques et affaires mondaines ; en figure dequoy, la manne
ne tomboit qu'au desert et solitude1001, hors du commerce du monde, et non point es villes et
bourgades, et ceux qui mangeoyent l'aigneau paschal retroussoyent leurs robbes1002, affin que rien
ne traisnast et flottast sur la terre. Il faut donques pour un tems oublier les choses materielles et
temporelles, quoy que bonnes et utiles, pour se preparer a la sainte Communion, et faire comme le
bon Abraham, qui, voulant aller sacrifier son filz, laissa l'asne et les serviteurs au pied de la
montagne jusques a ce qu'il eust fait1003 ; car tout de mesme faut il retirer sa memoyre du souvenir
des affaires domestiques et temporelles, jusques apres la Communion, toutes choses ayant leur
tems1004.
Il faut, apres cest oubli volontaire, parer la memoire d'une sainte souvenance de tous les
bienfaitz dont Dieu nous a gratifiés : la creation, conservation, redemption et plusieurs autres, mais
sur tout de sa sainte Passion, en memoyre de laquelle il a voulu nous laisser le propre cors qui
souffrit pour nous, en ce divin Sacrement, n'ayant peu nous en laisser une plus vive et expresse
representation. Quand on vous demandera (dit la sainte Parolle traittant de l'observation de
l'aigneau paschal1005) ce que c'est que vous faittes, dites a la posterité que c'est en memoyre de ce
que Dieu vous delivra de l'Egipte, vous passant par le milieu de la Mer Rouge. Ainsy, en ce divin
Sacrement, nous devons [214] nous reduire en memoire la journee en laquelle Dieu, par son amere
Passion, nous delivra de la damnation.
Comment il faut purger la volonté et de quoy il la faut parer
Quant a la volonté, il la faut aussi purger d'une chose et la parer d'une autre. Il la faut purger
des affections desreglees et desordonnees, mesme des choses bonnes ; c'est pourquoy ceux qui
mangeoyent l'aigneau paschal devoyent avoir des souliers en leurs piedz1006, affin qu'ilz ne
touchassent point la terre des piedz ; car « les piedz de l'ame sont ses affections », qui la portent
par tout ou elle va, dit saint Augustin1007, et ses affections ne doivent pas toucher la terre ni estre
a l'abandon, mais doivent estre resserrees et couvertes en mangeant le vray Aigneau paschal, qui
est le tressaint Sacrement. Ainsy Nostre Seigneur lava les piedz a ses Apostres avant l'institution
d'iceluy1008, pour monstrer que les affections des communians doivent estre fort pures ; et la manne
devoit estre cueillie a la fraischeur, avant le lever du soleil, 1009 parce que les chaleurs naturelles,
1000 Exod., XVI, 15.
1001 Exod., ubi supra, p. 212.
1002 Cf. ibid., XII, 11.
1003 Gen., XXII, 5.
1004 Eccles., III, 1.
1005 Exod., XII, 26, 27.
1006 Exod., ubi pag. præced., v. 11.
1007 Enarrat. in Ps. XCIV, 2.
1008 Joan., XIII, 5-9.
1009 [Les variantes qui suivent sont tirées du recueil d'extraits de Lettres et Avis de saint François de Sales, fait par
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15.4 Page 144

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les amours et affections desmesurees des enfans, des parens, amis, biens, commodités empeschent
qu'on ne puisse cueillir cette celeste viande. Il y faut venir avec une ame et une volonté fraische,
non eschauffee, ni 1010 affectionnee a aucune autre chose qu'a la cueillette de cette manne.
Mais il faut parer la volonté d'une affection et desir extreme de cette viande celeste, de cette
manne secret te ; c'est pourquoy il estoit commandé a ceux qui mangeoyent l'aigneau paschal, de
le manger avidement et vistement1011, et a ceux qui cueilloyent la manne, de se lever fort matin1012
; et Nostre Seigneur mesme, avant que d'instituer ce saint Sacrement, l'avoit extremement souhaité
: J'ay desiré, disoit il, d'un grand desir de manger cette pasque avec vous1013. [215]
L'ame estant ainsy disposee en ses trois principales facultés, fait un fruit admirable en la
sainte Communion. Mais parce que cette preparation est deduitte en termes generaux, je mettray
icy les advertissemens particuliers a la prattique d'icelle.
Advis particuliers pour reduire en prattique la preparation a la sainte Communion
1. Si vous n'estes point agitee des tentations de curiosité, vous n'aves que faire de penser a
ce que j'en ay dit ; car, en y pensant, vous luy pourries ouvrir la porte pour la faire entrer chez vous
; mais vous devés seulement remercier Dieu de ce qu'il vous donne 1014 la simplicité de la foy, qui
est un don tres pretieux et desirable, et prier sa divine Majesté de vous le continuer 1015.
2. Que si vous estes agitee de cet esprit de curiosité, faittes ce que j'ay dit, mais faittes le
briefvement, par forme de simple rejet et detestation, sans vous amuser a disputer et contester avec
l'ennemy, lequel doit estre combattu par abomination, non par rayson, selon l'exemple de Nostre
Seigneur, qui ne le fit fuir qu'en luy disant : Arriere 1016, Satan, tu ne tenteras point le Seigneur
ton Dieu1017.
3. Combien que la tentation ne cesseroit point, ne laissés pas de communier ; car si vous
laissies pour cela, vous donneries gain de bataille a vostre adversaire. Alles donques
vigoureusement et, sans avoir esgard aux tentations, receves le Pain de vie1018 ; et ainsy faisant,
vous demeureres victorieuse de vostre ennemy. Qui la quitte la perd.
4. Pour vaincre la curiosité en ce poinct, vainques la en toutes choses, pour petites qu'elles
soyent, ne cherchant 1019 autre science que celle des Saintz, qui est Jesus Christ crucifié1020 et ce
qui vous 1021 conduit a luy. [216]
5. Touchant la consideration, il sera bon que le jour avant la Communion, aux heures de
vostre orayson mentale ou recueillement, 1022vous dressies quelque peu vostre esprit a Nostre
Seigneur en ce saint Sacrement, et mesme en l'examen de conscience a la fin, et ce par quelque
briefve pensee de l'amour du Sauveur en l'endroit de vous ; et mesme vous pourrés user de quelques
eslancemens de priere vocale, lesquelz vous repeteres souvent, sur tout despuis Vespres, comme
seroit celuy de saint François1023 : « Qui suis je, Seigneur, et qui estes-vous ? » ou celuy de sainte
sainte Jeanne-Françoise de Chantal, conservé à la Visitation de Nancy ; il en a été parlé au tome XXI, note (902), p.
140, et voir ci-dessus, remarque (968), p. 205.]
a la fraischeur, devant le soleil levant
1010 une volonté franche, qui ne soit
1011 Exod., ubi supra.
1012 Ibid., XVI, 21.
1013 Luc., XXII, 15.
1014 vous a donné
1015 sa Majesté qu'il vous le continue.
1016 qui le fit fuir disant : Arriere de moy
1017 Matt., IV, 10, 7.
1018 Joan., VI, 35, 48.
1019 recherchant
1020 I Cor., II, 2.
1021 nous
1022 Cf. tom. præced., Directoire spirituel, pp. 159, 160.
1023 Speculum Vitæ S. Franc., circa me dium.
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15.5 Page 145

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Elizabeth : D'ou me vient ce bonheur que mon Seigneur vient a moy1024 ? ou celuy de saint Jean
l'Evangeliste1025 : Ouy, venés Seigneur Jesus ! ou celuy de l'Espouse sacree : Que mon Espoux me
bayse d'un bayser de sa bouche1026.
6. Que si vous voulies par fois faire vostre meditation sur la Communion le jour precedent,
vous pourres aysement y accommoder les misteres de la vie de Nostre Seigneur qui se
rencontreroyent en la suitte de vostre orayson mentale, les appliquant comme a exercer en vostre
endroit a l'heure de vostre Communion : car, qui vous empeschera de vous representer que Nostre
Seigneur vous y presente les benefices qu'il a faitz, ou vous donne interieurement les enseignemens
qu'il a donnés ? Et ainsy des autres ; et il y a peu de misteres qui ne soyent propres a cela.
1027 7. Pour la memoire, il est bon de donner ordre le plus qu'il se pourra, que sur tout
despuis souper vous ne soyes occupee ni d'esprit ni de cors a aucune affaire esloignee du dessein
de la Communion, mais que vous fassies une particuliere retraitte de vostre esprit et de tous vos
sens en vostre interieur, pour attendre l'Espoux avec les lampes en main, et que l'huile n'y manque
pas1028 ; et pour cest effect, que la recreation de l'apres souper soit un peu plus devote et de propos
de charité, et le souper plus sobre, sans tristesse neanmoins, ni trop d'austerité.
1029 8. J'appreuverois que pour ayder la compaignie a [217] se resouvenir des bienfaitz de
Dieu au jour de la Communion, chaque Religieuse sceut le jour de sa reception et des autres graces
plus signalees receues de Dieu ; et qu'autant que l'humilité et la simplicité chrestienne le peut
permettre, le soir avant la Communion, elle en resouvint les Seurs en l'heure de la recreation, et
sur la fin les priast d'en remercier Dieu avec elle. Cela s'entend du jour anniversaire ; cela ne se
rencontreroit pas tous-jours, mais quelquefois.
9. Quant a la purgation de la volonté, il la faut tenir nette en tout tems de toutes affections
desreglees, mais sur tout allant a la Communion, et regarder a quoy et a qui nos affections tiennent
en ce monde, et si c'est point trop tendrement, trop ardemment ; et si nous y voyons du trop, il faut
peu a peu le retrancher pour pouvoir dire a Nostre Seigneur avec David1030 : Qu'est ce qu'il y a au
Ciel pour moy, ou que veux je en la terre sinon vous ? Vous estes le Dieu de mon cœur et mon
partage eternel. Car a cette intention Nostre Seigneur vient a nous, affin que nous soyons tous en
luy et a luy ; ce que nous ne sommes pas si nous nourrissons des affections desordonnees, voire es
choses de soy bonnes et legitimes.
Et quant au desir du saint Sacrement, il le faut exciter par l'amour de l'Espoux et par la
consideration de l'honneur et du bien que nous recevons de sa venue : a quoy serviront les
eslancemens spirituelz desquelz j'ay parlé ci dessus, et les considerations que je mettray ci dessous,
avec les imaginations que j'y depeindray.
1031 10. Si la nuict on s'esveille, il faut remplir sa bouche de quelque bonn'aspiration,
comme du nom de Jesus et Marie, qui sont propres a parfumer la bouche en laquelle Nostre
Seigneur veut entrer ; ou bien les parolles de l'Espouse1032 : Je dors, et mon cœur bienaymé veille,
et semblables.
11. Le mattili il se faut lever avec joÿe extraordinaire pour le bien qu'on doit recevoir ce
jour-la ; et ainsy se præparer a la Communion.
12. Il faut, s'approchant de la Communion, y aller les yeux baysés (sic) et en posture tres
humble. Je n'appreuve pas que sur le point on die aucun'orayson vocale, sinon le : [218] Seigneur,
je ne suis pas digne1033 et le Confiteor. Je n'appreuve pas nomplus le souspir en cet instant, car il
1024 Luc., I, 43.
1025 Apoc., XXII, 20.
1026 Cant., I, 1.
1027 Cet alinéa et les nos 9-13 ne se trouvent pas dans les éditions de 1643, 1652 et suivantes.
1028 Matt., XXV, 1, 4, 8, 9.
1029 L'édition de 1652 et les suivantes, ainsi que celle de Hérissant, donnent cet alinéa qui ne figure pas dans le petit
livre de 1688.
1030 Ps. LXXII, 25, 26.
1031 Ici commence l'Autographe gardé à la Visitation d'Annecy. (Voir le facsimile placé en tète de ce volume.)
1032 Cant., V, 2.
1033 Matt., VIII, 8.
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peut faire du scandale remuant les hosties qui sont dans la petene ou vase de Communion. Je
n'appreuve pas aussi que l'on estende la langue hors des levres, ni que l'on ouvre si peu la bouche
quil soit malaisé d'y mettre la sainte hostie, ni que l'on s'avance en quelle façon que ce soit pour la
prendre, puisque celuy qui la presente ne se rencontrant pas avec la bouche de celuy qui s'avance,
il se pourroit faire de l'irreverence. Il faut donques ouvrir la bouche et dresser la teste, et attendre
que le prestre mette la sainte hostie dans la bouche, sans faire autre mouvement jusques a ce qu'elle
soit logee. J'appreuve de tenir les mains sous la nappe et non dessus. La retraitte doit estre de
mesme façon.
13. Le jour qu'on a communié il faut autant qu'il se peut caresser le saint Hoste qu'on a
receu chez soy, et partant se divertir des autres occupations ; car c'est en ce tems-la quil a
accoustumé de parler plus souaifvement a nostre cœur et luy departir plus favorablement ses graces
par la presence reelle de son Humanité. C'est pourquoy il faut l'entretenir de nos necessités,
impuissances et imperfections ; il faut en ce tems-la traitter avec luy de nos desseins, intentions et
prætentions que nous avons a son amour, de l'esperance que nous avons en luy, et bref, nous donner
a luy comm'il s'est donné a nous. Or, tout cela se doit faire par eslancemens de cœur et de voix,
par regars interieurs de Celuy que nous possedons et par l'orayson mentale, selon que nous aurons
commodité d'en faire un peu apres la Communion.
14. Je m'en vay maintenant proposer plusieurs points desquelz vous pourres vous servir
tant pour aller a la Communion que pour rendre graces a Dieu apres icelle.
Avant que d'y aller on peut exciter le desir par la comparaison du cerf lancé et malmené,
comme fait David au Psalme 41 1034, qui est bon a lire puisque vous les aves en françois, et par
l'exemple de Magdeleyne qui par tout le cherche avec ardeur : chez Simon le Lepreux1035, au
sepulchre1036, au jardin, qui pleure en le cherchant, et qui dit a [219] luy mesme qu'il luy enseigne
le lieu ou il s'est mis : Si tu l'as enlevé, dit elle, dis le moy et je l'iray reprendre1037. Tantost comme
l'enfant prodigue, nous excitans a nous aller jetter entre les bras de nostre Pere et luy demander de
rentrer en son service1038. Tantost comme la Cananee1039, nous excitans a courir apres luy et
demander la guerison de nostr'ame. Tantost comme Rebecca, laquelle estant interrogee si ell'iroit
treuver Isaac pour estre son espouse, elle respondit tout court : J'y iray1040. Nous aussi devons
considarer qu'en ce cæleste banquet nous unissons nostr'ame par une liayson indissoluble avec
Nostre Seigneur ; c'est pourquoy nous avons rayson de dire : Vadam, J'y iray. Et ainsy nous
exciterons en nous le desir, l'amour et la confiance, avec une grande 1041 [reverence],
1042[Apres la Communion, nous devons semondre nostre ame a plusieurs affections,]
comme par exemple : a la crainte de contrister et perdre ce saint Hoste, comme faysoit David,
disant : Seigneur, ne vous departes point de moy1043 ; ou comme les deux pelerins d'Emaüs qui luy
disoyent : Demeures avec nous, car il se fait tard1044. A la confiance et force d'esprit, avec David
: Je ne craindray nul mal, par ce, Seigneur, que vous estes avec moy1045. A la joye d'esprit, a
l'exemple de la bonne Lia, laquelle voyant qu'ell'avoit conceu un enfant en son ventre, s'escrioit
tout par tout de joye : Ce sera maintenant que mon mari m'aymera1046 ; car ainsy, ayans en nous-
mesme le Filz de Dieu, nous pouvons bien dire : C'est maintenant que Dieu le Pere m'ayme. Ou
bien comme Sara, laquelle ayant Isaac disoit : Maintenant Dieu m'a fait une joye, et quicomque
1034 Vers. 2, 3.
1035 Matt., XXVI. 6, 7 ; Marc., XIV, 3 ; Luc., VII, 36-38.
1036 Matt., XXVIII, 1 ; Marc., XVI, 1, 2 ; Joan., XX, 1.
1037 Joan., XX, 11, 15.
1038 Luc., XV, 18, 19.
1039 Matt., XV, 22-27.
1040 Gen., XXIV, 58.
1041 Le bas de l'Autographe est coupé et, par suite, une ligne a disparu : nous l'empruntons au petit volume de 1688 et
à Hérissant.
1042 Cf. tom. præced., Directoire spirituel, p. 160.
1043 Ps. XXXVII, 22.
1044 Luc., XXIV, 29.
1045 Ps. XXII, 4.
1046 Gen., XXIX, 32.
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15.7 Page 147

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l'entendra s'en res-jouira avec moy1047. Et il est vray aussy que les Anges font feste autour de ce
saint Sacrement et de ceux qui l'ont receu, comme dit saint Chrisostome1048. 1049A l'amour, comme
l'Espouse, laquelle en cette consideration disoit : Mon Bienaymé est a moy et moy je suis a luy ; il
demeurera entre mes mammelles1050, c'est a dire, sur mon cœur. J'ay treuvé celuy que mon ame
cherit, je le conserveray soigneusement1051. [220]
A l'action de graces, par les paroles que Dieu mesme dit a Abraham quand il luy eut voüé
le sacrifice de son filz ; car nous pouvons les addresser a Dieu le Pere qui nous donne son propre
Filz en viande : O Seigneur, par ce que vous m'aves faitte cette grande grace, je vous beniray de
benedictions immortelles et multiplieray vos louanges comme les estoiles du ciel1052.
A la resolution de le servir, par les paroles de Jacob apres qu'il eüt veü la sainte eschelle :
Dieu me sera mon Dieu, et la pierre de mon cœur, ci devant endurci, sera sa mayson1053. Et ainsy
on peut tirer mill'affections de la sainte Communion.
15. Encor se faut il servir de l'imagination pour nous ayder a bien festoyer nostre Hoste.
Or, nous les pouvons faire diverses ; les plus [utiles] 1054 sont de Nostre Dame et de saint Joseph.
Combien de goustz et consolations pendant l'enfance de Nostre Seigneur, quand ilz le portoyent
en leurs bras et sur leur poitrine, quand ilz le baysoyent et que de ses divins bras il les accoloit
souaifvement ! et puis, considerer que nous sommes faitz semblables a eux par la Communion, en
laquelle Nostre Seigneur s'unit bien plus a nous que sil nous baysoit et accoloit. 1055
1056Et quand a Nostre Dame, imaginons quelle fut son ardeur interieure, sa devotion, son
humilité, sa confiance, son courage quand l'Ange luy dit : Le Saint Esprit surviendra en toy et la
vertu du Tres Haut t'enombrera, et partant, ce qui naistra de toy sera nommé Filz de Dieu ; car il
ni a rien qui soit impossible envers Dieu1057. Il ne faut point douter que son beni cœur ne
s'espanoüit tout entierement aux rayons de ses paroles, quil ne s'aprofondit dessous tant de
benedictions, et qu'a mesme quil entendoit [221] que Dieu luy donnoit son cœur propre, qui est
son Filz, il ne se donnast reciproquement a Dieu ; et qu'alhors cette supersainte ame ne fondit en
charité, et pouvoit dire : Mon ame s'est liquefiee ou fondue quand mon Bienaymé m'a parlé1058.
Or, quant a nous, nous recevons une pareille grace en la Communion, [car] non un Ange, mais
bien Jesus Christ mesme nous asseure qu'en icelle le Saint Esprit vient en nous et la vertu celeste
nous enombre, et le Filz de Dieu vient reellement en nous1059, et, par maniere de dire, il naist en
nous et y est conceu. O Dieu, que de suavités et douceurs ! Et partant, l'ame peut bien dire comme
Nostre Dame, apres cette consideration : Voyci la servante du Seigneur, me soit fait selon sa
parole1060. Et quelle parole ? Selon la parole quil a dite de sa sacree bouche, que 1061 qui le mange,
il demeure en luy, et luy demeure en celuy qui le mange ; qui le mange vivra pour luy, par luy et
en luy, et ne mourra point eternellement1062. C'est pourquoy il est mesmement bon de dire, apres
la Communion, le saint cantique de Nostre Dame, appellé le Magnificat, et le bien considerer et
peser ; et pour ce faire, il est requis d'en sçavoir la signification en françois.
1047 Ibid., XXI, 5, 6.
1048 De Sacerdotio, l. VI, § IV.
1049 Cf. tom. præced., pp. 160, 161.
1050 Cant., II, 16, I, 12.
1051 Ibid., III, 4.
1052 Gen., XXII, 16, 17.
1053 Ibid., XXVIII, 21, 22.
1054 Mot déchiré ; il est rétabli d'après les imprimés, de même que celui de la page suivante, ligne 6.
1055 [Le Manuscrit de Nancy donne encore ce passage inédit : ] Quelquefois, apres la sainte Communion, imagines
vous que vostre sainte Abbesse vous donne son cher Filz pour le dorloter et caresser. Autres fois, imagines vous que
vous portes entre vos mains un beau vase de cristal dans lequel est le pretieux sang de nostre Sauveur.
1056 Cf. tom. præced., Directoire spirituel, pp. 161, 162.
1057 Luc., I, 35, 37.
1058 Cant., V, 6.
1059 Vide tom. præced., p. 161, not. (1005)
1060 Luc., I, 38.
1061 Fin de la partie autographe.
1062 Joan., VI, 57, 58, 50, 51, 55, 59.
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Je n'ay rien dit du nettoyement de la conscience qui se fait par la confession, parce que
chacun sçait qu'il le faut faire ou le soir devant, ou le matin, et ce avec un grand soin et humilité.
Vous treuveres peut estre aussi bien longue cette instruction, mais il faut que vous sçachies
deux choses : l'une, que vous ne deves pas faire tout ceci tout a coup, mays seulement vous en
servir a mesure que vous connoistres en avoir besoin, et en prendre ce qui vous aydera ; l'autre,
c'est que je vous ay couché cette preparation si au long, affin que vous en puissies ayder les autres
qui en auront necessité.
Au demeurant, parce que le plus grand moyen de prouffiter en la vie spirituelle c'est la
devote Communion, je vous la recommande ; et ayés soin que nulle ne la fasse par maniere d'acquit
ou de coustume, mais tous-jours pour glorifier Dieu en icelle et s'unir a luy, et prendre force a le
[222] servir et supporter toutes afflictions et tentations. Ainsy soit il.
1063 Et s'il vous survient quelque doute et que vous n'entendies pas bien ce que j'ay dit,
vostre Pere Confesseur extraordinaire vous esclarcira, ou moy, si vous me l'envoyes.
J'avois oublié de vous resouvenir que ce Sacrement ne nous unit pas seulement avec Nostre
Seigneur, mais avec nos prochains, avec lesquelz, participant a mesme viande, nous sommes
rendus une mesme chose. Et l'un de ses principaux fruitz c'est la charité mutuelle et la douceur de
cœur les uns envers les autres ; 1064 car nous nous tenons tous a un mesme Seigneur, et en luy nous
nous devons entretenir cœur a cœur les uns avec les autres. [223]
_____
1063 Ces deux derniers alinéas sont omis dans les éditions de 1643, 1652 et suivantes.
1064 Par erreur, sans doute, Hérissant n'a pas donné cette phrase qui se trouve dans le petit livre : Instructions et
pratique, etc.
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X. Quelques avis pour combattre la tristesse et l'inquiétude intérieure,
adressés a Mme Rose Bourgeois, Abbesse du Puits-d'Orbe, [mai]
16051065. La tristesse et l'inquiétude s'engendrent l'une l'autre, et
pourquoi. L'âme peut chercher à être délivrée d'un mal ou pour
l'amour de Dieu ou pour l'amour propre : effets contraires de ces deux
amours. Grand mal de l'inquiétude ; d'où elle vient. Quand on
tombe en quelque imperfection, rasseoir d'abord l'esprit et puis y mettre
ordre. La sentinelle de l'âme. Notre « edification spirituelle » doit
se faire dans une grande paix. La tristesse peut être bonne ou
mauvaise, mais elle est plus souvent mauvaise. Ses productions.
Marques de la mauvaise tristesse et de la bonne. D'où vient la
différence qui existe entre elles : le Saint-Esprit est « l'unique
Consolateur » ; le malin esprit, « un vray desolateur ». Remèdes
contre la mauvaise tristesse : avoir patience ; contrarier ses inclinations
; chanter des cantiques spirituels ; s'employer aux œuvres extérieures ;
faire souvent des actes extérieurs de ferveur ; la discipline modérée ; la
prière et s'adresser à Dieu avec des mots de confiance ; la sainte
Communion ; l'ouverture de cœur.
1066La tristesse engendre l'inquietude, et l'inquietude engendre aussi la tristesse. C'est
pourquoy il faut traitter de l'une et de l'autre ensemble, et les remecies de l'une sont prouffitables
pour 1067 l'autre.
Et affin que vous entendies comme la tristesse et l'inquietude s'engendrent l'une l'autre,
sçaches que 1068la tristesse [224] n'est autre chose que la douleur d'esprit que nous avons du mal
qui est en nous contre nostre gré, soit que le mal soit interieur ou qu'il soit exterieur, comme
pauvreté, maladie, infamie, mespris ; interieur, comme ignorance, secheresse, mauvaise
1065 Malgré la ressemblance qui existe entre ce petit traité et l'Introduction a la Vie devote, Partie IV, chapitres XI et
XII, il est certain que saint François de Sales rédigea d'abord le premier pour quelques personnes placées sous sa
direction. L'Abbesse du Puits-d'Orbe lui avait demandé « quelque chose touchant la paix de l'ame et l'humilité. » Le
Saint répond de Sales, par sa lettre du 15-18 avril 1605 (tome XIII, p. 25) ; ensuite il ajoute : « Si j'avois icy mes
papiers, je vous envoyerois un traitté que je fis a Paris pour ce sujet, en faveur d'une fille spirituelle et Religieuse d'un
digne monastere, qui en avoit besoin et pour soy et pour les autres. Si je le treuve, a la premiere fois je vous l'enverray.
» (Ibid., p. 31.) Dans la note (128) de cette page, il est dit que « ce traité ne nous est pas parvenu » ; mais on peut se
demander si nous ne l'aurions pas dans le présent écrit ? Rose Bourgeois dut recevoir celui-ci au mois de mai ; bien
que dans les lettres qui suivirent celle d'avril il n'en soit pas fait mention, elle en fut, à coup sûr, sinon la première, du
moins la seconde destinataire, comme le prouve l'insertion de ce document dans le petit livre de 1688 (voir ci-dessus,
note (938), p. 194), où figurent nombre de pièces conservées jadis à l'abbaye du Puits-d'Orbe.
Mme de Chantal eut-elle communication de ce traité par l'Abbesse, ou bien le Saint lui-même lui en envoya-
t-il une copie ? Si on en juge par les extraits donnés en variantes, la seconde hypothèse paraît plus probable ; autrement,
il faudrait croire que la sainte baronne a considérablement changé, en le transcrivant partiellement, le texte de son
Directeur.
1066 Cf. Introd. a la Vie dev., Part. IV, ch. XI. (Tom. III, huj. Edit., p. 313.)
1067 [Les variantes que nous allons reproduire sont extraites du recueil d'Avis du Saint à la Mère de Chantal, qu'on est
convenu d'appeler : Manuscrit de Nancy (voir ci-dessus, (968), (1009), pp. 205, 215). Ce Manuscrit ne contient qu'un
Abregé tiré d'un plus grand discours faict par notre Bx Pere pour combatre l'inquietude [et] la tristesse interieure :
c'est le titre qu'il porte dans le recueil. Il a été imprimé au tome III, pp. 362-364, de Sainte Jeanne-Françoise Frémyot
de Chantal, sa Vie et ses Œuvres, Paris, Plon, 1876.]
contre
1068 Ibid., p. 310.
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inclination, peché, imperfection, repugnance au bien.
Quand donq l'ame sent quelque mal en soy, elle se desplaist premierement de l'avoir, et
voyla la tristesse. Secondement, elle voudroit et desire en estre quitte, cherchant les moyens de
s'en desfaire ; et jusques la il n'y a point de mal, et ces deux actes sont louables. Mais,
troisiesmement, l'ame cherchant les moyens d'estre delivree du mal qu'elle sent, peut les chercher
pour l'amour de Dieu ou pour l'amour propre : si c'est pour l'amour de Dieu, elle les cherchera avec
patience, humilité et douceur, attendant le bien non tant de soy mesme et de sa propre diligence,
comme de la misericorde de Dieu ; mays si elle les cherche pour l'amour propre, elle s'empressera
a la queste des moyens de sa delivrance, comme si ce bonheur dependoit d'elle plus que de Dieu.
Je ne dis pas qu'elle pense cela, mais je dis qu'elle s'empresse comme si elle le pensoit, et cela
provient de ce que, ne rencontrant pas de premier abord la delivrance de son mal, elle entre en de
grandes inquietudes et impatiences. Voyla donques l'inquietude arrivee, et peu apres arrive,
quatriesmement, une extreme tristesse, parce que l'inquietude n'ostant pas le mal, ains au contraire
l'empirant, l'on tumbe en une angoisse desmesuree, avec une defaillance de force et troublement
d'esprit si grand, [225] qu'il luy semble ne pouvoir jamais en estre quitte ; et de la elle passe a un
abisme de tristesse qui luy fait abandonner l'esperance et le soin de mieux faire.
Vous voyes donques que la tristesse, qui de soy n'est pas mauvaise en son commencement,
engendre l'inquietude, et que, reciproquement, l'inquietude engendre une autre tristesse, qui de soy
est tres dangereuse.
De l'inquietude
Je ne diray que peu de chose de cette inquietude, pour ce que ses remedes sont presque
pareilz a ceux que je donne pour la tristesse, et aussi parce que je vous renvoye aux 14, 15, 16
chapitres du Combat spirituel1069. Je diray seulement ces deux ou trois motz.
1070L'inquietude, mere de la mauvaise tristesse, est le plus grand mal qui puisse arriver a
l'ame, excepté le peché ; car il n'y a aucun defaut qui empesche plus le progres en la vertu et
l'expulsion du vice que l'inquietude. Et comme les seditions en une republique la ruynent
entierement et empeschent qu'on ne puisse combattre l'ennemy, ainsy nostre cœur estant troublé
en soy mesme, perd la force d'acquerir les vertus et de se servir des moyens qu'il devroit employer
contre ses ennemis, lesquelz ont, comme l'on dit, la commodité de pescher en eau trouble.
2. L'inquietude provient d'un ardent et desreglé desir d'estre delivré du mal que l'on sent ou
en l'esprit ou au cors ; et neanmoins, tant s'en faut que cette inquietude serve a la delivrance, qu'au
contraire elle ne sert qu'a la retarder. Qu'est ce qui fait que les oyseaux ou autres animaux
demeurent pris dans les filetz, sinon qu'y estans entrés, ilz se desbattent et remuent dereglément
pour en vistement sortir, et ce faysant ilz s'embarrassent et empeschent tant plus. Ceux qui sont
parmi les halliers et buissons, s'ilz veulent courir et s'empresser a cheminer, ilz se piquent et
deschirent ; mais s'ilz vont tout bellement, destournant les espines de part et d'autre, ilz passent
plus vistement et sans piqueure.
3. Quand nous cherchons trop ardemment une chose, nous la passons souvent sans la voir,
et jamais besoigne [226] que l'on fait a la haste ne fut bien faite. C'est pourquoy, estans tumbés
clans les filetz de quelques imperfections, nous n'en sortirons pas par l'inquietude, au contraire
nous nous embarrasserons tous-jours davantage. 1071Il faut donq rasseoir nostre esprit et jugement,
et puis tout bellement y mettre ordre ; je ne veux pas dire negligemment, mais sans empressement,
trouble, ni inquietude. Et pour parvenir a cela, il faut lire et relire les 14, 15 et 16 chapitres du
Combat spirituel. Il faut sur tout tenir la sentinelle de laquelle parle le Combat spirituel, laquelle
nous advertira de tout ce qui voudra esmouvoir aucun trouble ou empressement en nostre cœur,
sous quelque pretexte que ce soit 1072. Cette sentinelle qui doit estre entree en l'ame, peut estre
1069 Secunda editio. (Vide tom. III huj. Edit., not. (55), p. XXXVII.)
1070 Introd. a la Vie dev., p. 311.
1071 Ubi supra, p. 312.
1072 que ce soit toutes telles choses venant du diable, et partant ne les faut recevoir.
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16 Pages 151-160

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16.1 Page 151

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signifiee en ce que le mont de Sion estoit enclos en Hierusalem, qui veut dire Vision de paix ; et
Sion, selon plusieurs1073, veut dire sentinelle et eschauguette. Or, cette sentinelle ne doit estre autre
chose qu'un soin tres particulier de la conservation du repos interieur, lequel nous devons
specialement renouveller au commencement de tous nos exercices, au soir, au matin, au midi.
4. Nostre Seigneur ne voulut point que son Temple fust edifié par David1074, roy tressaint,
mais belliqueux, ni qu'en l'edification fust ouy aucun marteau, ni aucun fer1075 ; mais par Salomon,
roy pacifique1076 : signe qu'il ne veut pas que nostre edification spirituelle se fasse sinon en tres
grande paix et tranquillité, laquelle il faut tous-jours demander a Dieu, comme enseigne le roy
David1077 : Demandes, dit il, ce qu'il faut pour la paix de Hierusalem. Aussi Nostre Seigneur
renvoyoit tous-jours les penitens en paix : Alles en paix, disoit il1078.
De la tristesse
1079La tristesse peut estre bonne ou mauvaise, selon le dire de saint Paul1080 : La tristesse
qui est selon Dieu opere la penitence pour le salut ; la tristesse du monde, la mort.
2. L'ennemy se sert de la tristesse pour exercer ses tentations [227] a l'endroit des bons ;
car, comme il tasche de faire res-jouir les mauvais au mal, aussi tasche il de faire attrister les bons
au bien. Et comme il ne peut procurer le mal qu'en le faysant treuver aggreable, aussi ne peut il
destourner du bien qu'en le faysant treuver desaggreable. Mays outre cela, le malin se plaist en la
tristesse et melancholie, parce qu'il est luy mesme triste et melancholique, et le sera eternellement,
dont il voudroit qu'un chacun fust comme luy.
3. La tristesse est presque ordinairement mauvaise et rarement bonne ; car, selon les
Docteurs1081, l'arbre de tristesse produit huit branches, sçavoir : misericorde, penitence, angoisse,
paresse, indignation, jalousie, envie et impatience ; entre lesquelles, comme vous voyes, il n'y a
que les deux premieres qui soyent purement bonnes. Ce qui a fait dire au Sage, en l'Ecclesiast.1082,
que la tristesse en tue beaucoup, et qu'il n'y a point de prouffit en elle ; parce que pour deux bons
ruisseaux qui en proviennent, il y en a six tres mauvais.
Signes de la mauvaise tristesse
1083La mauvaise tristesse trouble l'esprit, agite l'ame et la met en inquietude. Dont le roy
David ne se plaint pas seulement de la tristesse, disant : Pourquoy es tu triste, o mon ame ? mais
encores du troublement et inquietude, adjoustant : Et pourquoy me troubles-tu1084 ? Mais la bonne
tristesse laysse une grande paix et tranquillité en l'esprit ; c'est pourquoy Nostre Seigneur, apres
avoir predit a ses Apostres : Vous seres tristes1085, il adjouste : Et que vostre cœur ne soit point
troublé, et n'ayes point de crainte1086, etc. Voicy que ma tres amere amertume est en paix1087.
La mauvaise tristesse vient comme une gresle, avec un changement inopiné et des terreurs
et impetuosités bien grandes, et tout a coup, sans que l'on puisse dire d'ou elle vient, car elle n'a
1073 Vide S. Hier., De nominibus hebraicis, t. III. (P. L. XXIII, 878 et 1228, 822 et 1248.)
1074 III Reg., V, 5.
1075 Ibid., VI, 7.
1076 II Reg., VII, 13 ; III Reg., V, 5-18, VI.
1077 Ps. CXXI, 6.
1078 Luc., VII, 50.
1079 Cf. Introd., Part. IV, ch. XII, p. 313.
1080 II Cor., VII, 10.
1081 Cf. Hugonis de S. Victore Oper., Pars III Mystica, De fructibus carnis et spiritus.
1082 Eccli., XXX, 25.
1083 Ubi supra, p. 314.
1084 Ps. XLII, 5.
1085 Joan., XVI, 20, 33.
1086 Ibid., XIV, 1, 27.
1087 Is., XXXVIII, 17.
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point de fondement ni de rayson ; ains, apres qu'elle est arrivee, elle en cherche de tous costés pour
se parer. Mays la bonne tristesse vient doucement en l'ame, comme une pluye douce qui attrempe
les chaleurs des consolations, et avec quelque rayson precedente. [228]
La mauvaise tristesse perd cœur, s'endort, s'assoupit et rend inutile, faysant abandonner le
soin et l'œuvre, comme dit le Psalmiste1088, et comme Agar, qui laissa son filz sous l'arbre pour
pleurer1089. La bonne tristesse donne force et courage, et ne laisse point, ni n'abandonne un bon
dessein ; comme fit la tristesse de Nostre Seigneur, laquelle, quoy que si grande qu'il n'en fust
jamais de telle, ne l'empescha pas de prier et d'avoir soin de ses Apostres1090. Et Nostre Dame
ayant perdu son Filz fut bien triste, mais elle ne laissa pas de le chercher diligemment1091 ; comme
fit aussi la Magdeleyne, sans s'arrester a lamenter et pleurer inutilement1092.
1093La mauvaise tristesse obscurcit l'entendement, prive l'ame de conseil, de resolution et
de jugement, comme elle fit ceux desquelz parlant le Psalmiste1094, il dit qu'ilz furent troublés et
esbranslés comme un homme qui est ivre, et toute leur sagesse fut devoree ; on cherche les remedes
ça et la confusement, sans dessein et comme a tastons. La bonne ouvre l'esprit, le rend clair et
lumineux, et, comme dit le Psalmiste1095, sa vexation donne l'entendement.
La mauvaise empesche la priere, degouste de l'orayson, et donne desfiance de la bonté de
Dieu ; la bonne, au contraire, est de Dieu, asseure la personne, accroist la confiance en Dieu, fait
prier et invoquer sa misericorde : La tribulation et l'angoisse m'ont troublé, mais vos
commandemens ont esté ma meditation1096, disoit David.
Bref, ceux qui sont occupés de la mauvaise tristesse ont une infinité d'horreurs, d'erreurs et
de craintes inutiles, de peynes et de peurs d'estre abandonnés de Dieu, d'estre en sa disgrace, de ne
devoir plus se presenter a luy pour luy demander pardon, que tout leur est contraire et a leur salut,
et sont comme Caïn, qui pensoit que tous ceux qui le rencontreroyent le voudroyent tuer1097. Ilz
pensent que Dieu soit inequitable en leur endroit, et severe jusqu'a l'eternité, et le tout pour leur
particulier seulement, estimant tous les autres asses heureux au pris d'eux : ce qui provient d'une
secrette superbe qui leur persuade qu'ilz devroyent estre plus fervens et meilleurs que les autres,
plus parfaitz que nul autre. Bref, s'ilz y pensent bien, ilz [229] trouveront que ce qu'ilz pensent leur
faute plus considerable, c'est parce qu'ilz se pensent eux mesmes plus considerables.
Mais la bonne tristesse fait ce discours : Je suis miserable, vile et abjecte creature, et partant,
Dieu exercera en moy sa misericorde ; car la vertu se parfait dans l'infirmité1098, et ne s'estonne
point d'estre pauvre et miserable.
Or, le fondement de ces differences qui sont entre la bonne et la mauvaise tristesse, c'est
que le Saint Esprit est Autheur de la bonne tristesse ; et parce qu'il est l'unique Consolateur1099,
ses operations ne peuvent estre separees de consolation ; parce qu'il est la vraye Lumiere, elles ne
peuvent estre separees de clairté ; bref, parce qu'il est le vray Bien, ses operations ne peuvent estre
separees du vray bien : si que les fruitz d'iceluy, dit saint Paul1100, sont charité, joye, paix, patience,
benignité, longanimité. Au contraire, le malin esprit, autheur de la mauvaise tristesse (car je ne
parle point de la tristesse naturelle, qui a plus besoin de medecins que de theologiens), c'est un
vray desolateur, tenebreux et embarrasseur ; et ses fruitz ne peuvent estre que hayne, tristesse,
inquietude, chagrin, malice, defaillance. Or, toutes les marques de la mauvaise tristesse sont les
1088 Pro Prov., XV, 13 (?)
1089 Gen., XXI, 15, 16.
1090 Matt., XXVI, 38-45 ; Joan., XVIII, 8, 9.
1091 Luc., II, 44-46, 48.
1092 Marc., XVI, 1-4 ; Joan., XX, 1, 2.
1093 Ubi supra, p. 314.
1094 Ps. CVI, 27.
1095 Pro Is., XXVIII, 19.
1096 Ps. CXVIII, 143.
1097 Gen., IV, 14.
1098 II Cor., XII, 9.
1099 Joan., XIV, 16, XVI, 7.
1100 Galat., V, 22.
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mesmes pour la mauvaise timidité.
Quelques remedes
11011. Il la faut recevoir avec patience, comme une juste punition de nos vaynes joyes et
allegresses 1102 ; car le malin, voyant que nous en ferons nostre prouffit, ne nous en pressera pas
tant ; bien qu'il ne faille pas avoir cette patience pour en estre delivré, mais pour le bon playsir de
Dieu, et la prenant pour le bon playsir de Dieu, elle ne layssera pas de servir de remede.
11032. Il faut contrevenir vivement aux inclinations de la tristesse et forcer ses suggestions
; et bien qu'il semble que tout ce qui se fait en ce tems-la se face tristement, il ne faut pas laisser
de le faire, car l'ennemy, qui pretend de nous allentir aux bonnes œuvres par la tristesse, voyant
[230] qu'il ne gaigne rien et qu'au contraire nos œuvres sont meilleures estans faites avec
resistance, il cesse de nous plus affliger.
11043. Il n'est pas mauvais, quand il se peut, de chanter des cantiques spirituelz ; car le malin
a souvent cessé son operation par ce moyen, pour quelque cause que ce soit : tesmoin l'esprit qui
agitoit Saul, duquel la violence estoit attrempee par la psalmodie1105.
11064. Il est bon de s'employer a l'œuvre exterieure et la diversifier le plus que l'on peut,
pour divertir la vehemente application de l'esprit de l'objet triste, purifier et eschauffer les espritz
; la tristesse estant une passion de [la] complexion froide et humide.
11075. Il est bon de faire souvent des actions exterieures de ferveur, quoy que sans goust :
comme d'embrasser le Crucifix, le serrer sur son cœur et sur sa poitrine, luy bayser les pieds et les
mains, lever les yeux au Ciel avec des propos d'esperance, comme : Mon Bienaymé est a moy, et
moy a luy1108. Mon Bienaymé m'est un bouquet de mirrhe, il demeurera entre mes mammelles1109.
Mes yeux se fondent sur vous, o mon Dieu, disant : Quand me consoleres-vous1110 ? Si Dieu est
pour moy, qui sera contre moy1111 ? Jesus, soyes moy Jesus. Vive mon Dieu, et mon ame vivra.
Qui me separera de la Croix de mon Dieu1112 ? et semblables. 1113
11146. La discipline moderee y est quelquefois bonne, parce que la volontaire affliction
exterieure impetre la consolation interieure de l'ame, et s'appliquant au cors des douleurs
exterieures, on sent moins l'effort des interieures ; dont le Psalmiste disoit1115 : Mais quant a moy,
quand ilz me molestoyent, je me revestois de haire. Et ailleurs1116, peut estre tout a propos : Ta
verge et ton baston m'ont consolé.
11177. La priere y est souveraine, suivant l'advis de saint Jacques1118 : Quelqu'un est il triste,
qu'il prie. Je ne veux pas dire qu'il faille faire en ce tems-la de plus longues meditations, mais je
veux dire qu'il faut faire de frequentes [231] demandes et repetitions a Dieu. Il faut tous-jours
s'addresser en ce tems-la a sa divine bonté par des invocations pleines de confiance, ce que l'on ne
fait pas quand on est dans le tems de la joye et hors de la tristesse, ou l'on peut croire que l'on a
1101 Cf. Introd., Part. IV, ch. XII, pp. 316, 315.
1102 allegresses passees
1103 Ibid., pp., 314, 315.
1104 Ubi supra, p. 315.
1105 I Reg., XVI, 23.
1106 Ubi supra, p. 315.
1107 Ibid.
1108 Cant., II, 16.
1109 Ibid., I, 12.
1110 Ps. CXVIII, 82.
1111 Rom., VIII, 31.
1112 Ibid., v. 35.
1113 et semblables. J'en dis de mesme a l'endroit de la Vierge et de ses images.
1114 Ubi supra, p. 315.
1115 Ps. XXXIV, 13.
1116 Ps. XXII, 5.
1117 Ubi supra, p. 314.
1118 Cap. V, 13.
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plus de besoin d'exciter en son cœur les sentimens de crainte ; par exemple, ceux ci : O Seigneur
tres juste et terrible, o que vostre souveraine Majesté me fait trembler ! et semblables. Mais dans
le tems de tristesse, il faut employer des paroles de douceur ; par exemple : 1119O Dieu de
misericorde, tres bon et tres benin, vous estes mon cœur, ma joye, mon esperance, le cher Espoux
de mon ame ; et semblables. Et les faut employer bon gré mal gré la tristesse, a laquelle il ne faut
point donner d'audience ni de credit, pour vous empescher de proferer et eslancer ces parolles de
confiance et d'amour ; et bien qu'il semble que ce soit sans fruit, il ne faut pas laisser de continuer,
et attendre le fruit qui ne laissera 1120 pas de paroistre apres un peu de contention.
11218. La frequentation de la Communion a cette intention est excellente, car elle nous
donne le Maistre des 1122 consolations.
11239. L'un des plus asseurés remedes est de desployer et ouvrir son cœur, sans y rien cacher,
a quelque personne spirituelle et prudente, et luy declairer tous les ressentimens, affections et
suggestions qui arrivent de nostre tristesse, et les raysons avec lesquelles nous les nourrissons ; et
cela il 1124 le faut faire humblement et fidellement. [232]
1125Et notes que la premiere condition que le malin met en l'ame qu'il veut affliger et seduire
c'est le silence, comme font les seditieux dans les conspirations et fascheux evenemens ; car ilz
demandent sur tout que leurs entreprinses et resolutions soyent secrettes. Dieu, au contraire,
demande pour la premiere condition, la discretion ; ne voulant pas a la verité que l'on descouvre
indiscrettement ses graces et faveurs, mais bien que l'on les descouvre avec prudence et selon les
regles d'une humble discretion aux personnes de qualités requises. 1126
Ces regles sont grossieres, et seulement bonnes a combattre la tristesse et inquietude
desmesuree. Ceux qui ont plus de discernement aux choses spirituelles se pourront guider par
d'autres voyes que Nostre Seigneur leur suggerera ; ce pendant, si celles cy peuvent servir,
employes-les soigneusement, et pries pour celuy qui vous les a marquees.
_____
1119 Ubi supra, p. 314.
1120 La priere est un souverain remede. Non qu'il faille faire de longues meditations, mais des ferventes et frequentes
demandes a Dieu, et tous-jours s'addresser a Dieu en ce tems-la avec invocation de ses tiltres joyeux. Par exemple,
hors le tems de tristesse, pour m'exciter a la crainte, je diray : O Seigneur terrible, o Juge tres juste, o tres effroyable
Maistre, et semblables. Mais en tems de tristesse je diray : O Dieu de misericorde, tres bon, tres benin ; mon coeur,
ma joye, mon esperance, cher Espoux de mon ame, seul appuy des affligés, refuge des desolés, la douceur et appuy
de mon ame ; venes, venes, bon Jesus ; tires moy a vous, Jesus, et semblables ; lesquelz termes j'employeray tous-
jours bon gré mal gré ma tristesse, a laquelle je ne donneray point de credit quand elle voudra m'en empescher. Et si
bien il semble, pour quelque tems, que ce soit sans fruit, je ne laisseray pas de continuer, attendant le fruit qui ne
manque
1121 Ibid., p. 315.
1122 nous donne la mer de
1123 Ibid.
1124 de desployer et communiquer, sans rien celer, a vostre Directeur tous les ressentimens, affections, suggestions
qui proviennent de vostre tristesse et
1125 Ubi supra. ch. VII, p. 305.
1126 en l'ame c'est le silence ; ou, au contraire, Dieu, pour la premiere condition, demande que l'on se descouvre,
avec prudence et selon la regie d'une humble discretion, a personne de qualité requise.
Pries pour celuy qui a marqué ces regles. [Sainte Jeanne de Chantal ajoute : O mon Dieu, quil soit tout vostre,
et moy aussy. Amen. » ]
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16.5 Page 155

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XI. Première méthode pour réciter le Chapelet, écrite à Saint-Jean
d'Aulps, 14 août 16061127
Vous prendres vostre chapelet par la croix, que vous bayseres apres vous en estre signee,
et vous vous mettres en la presence de Dieu, disant le Credo tout entier.
Sur le premier gros grain vous invoqueres Dieu, le priant d'aggreer le service que vous luy
voules rendre et de vous assister de sa grace pour le bien dire.
Sur les trois premiers petitz grains vous demanderes l'intercession de la sacree Vierge, la
saluant, au premier, comme la plus chere Fille de Dieu le Pere ; au second, comme Mere de Dieu
le Filz ; et au troysiesme, comme Espouse bienaymee de Dieu le Saint Esprit.
Sur chaque dizaine vous penseres a un des misteres du Rosaire, selon le loysir que vous
aures, vous resouvenant de celuy que vous vous proposeres, principalement en prononçant les
tressaintz noms de MARIE et de JESUS, les passant par vostre bouche avec une grande reverence
de cœur et de cors. S'il vous vient quelques autres sentimens, comme la douleur de vos pechés
passés, ou le propos de vous amender, vous le pourres mediter tout le long du Chapelet, le mieux
que vous pourres, vous resouvenant de ce sentiment, ou autre que Dieu vous inspirera,
principalement lhors que vous prononces les deux tressaintz noms de JESUS et MARIE.
Au gros grain qui est au bout de la derniere dizaine, vous remercieres Dieu de la grace qu'il
vous a faitte de vous permettre de le dire. Et passant aux trois petitz grains qui suivent, vous
salueres la sacree Vierge Marie, la suppliant, au premier, d'offrir vostre entendement au Pere
eternel, affin que vous puissies a jamais considerer ses misericordes ; au second, vous la supplieres
d'offrir vostre memoyre au Filz, pour avoir continuellement en vostre pensee sa Mort et Passion ;
au troysiesme, vous la supplieres d'offrir vostre [234] volonté au Saint Esprit, affin que vous
puissies a jamais estre enflammé de son amour sacré.
Au gros grain qui est au bout, vous supplieres la divine Majesté d'aggreer le tout a sa gloire
et pour le bien de son Eglise, au giron de laquelle vous la supplieres de vous conserver et d'y
ramener tous ceux qui en sont desvoyés, et prierés Dieu pour tous vos amis ; finissant comme vous
aves commencé, par la profession de la foy, disant le Credo et faisant le signe de la Croix.
Vous porteres le chapelet a vostre ceinture ou en autre lieu evident, comme une sainte
marque par laquelle vous voules protester que vous desires estre serviteur de Dieu nostre Sauveur,
et de sa tres sacree Espouse, Vierge et Mere, et de vivre en vray enfant de la sainte Eglise
Catholique, Apostolique et Romaine.
Revu sur le texte inséré dans un ancien Ms. de l'Année Sainte de la Visitation, conservé au
Monastère d'Annecy.
_____
1127 « Le quatorzieme jour d'aoust, » lisons-nous dans l'Année Sainte de la Visitation (Ms. conservé au Monastère
d'Annecy), « saint François de Sales visita avec une devotion extraordinaire l'eglise de Saint Jean Baptiste d'Aux... Ce
fut en ce jour que ce grand Eveque composa et ecrivit de sa main la Méthode de dire le Chapelet, parce qu'il trouva
dans cette parroisse plusieurs bonnes aines fort affectionnées a la Mere de Dieu et trop peu instruites clans le mistere
de sa sainte vie. Il en corrigea fort paternellement le curé, qui gardoit cherement, comme une relique pretieuse, dans
sa parroisse, l'escrit de ce saint Pasteur, dont voicy la coppie : Vous prendrez vôtre chapelet par la croix, » etc.
Cette Méthode figure dans les Œuvres in-folio du Saint, 1637 (Tolose, Bosc), immédiatement après le dernier
chapitre de l'Introduction a la Vie devote (p. 110) et avant la Table des matières de celle-ci ; il en est de même dans
l'édition de 1641, tome Ier. Pourquoi lui a-t-on assigné cette place, tandis qu'une autre Méthode, publiée par le P. de la
Rivière (on la trouvera ci-après, p. 238), est donnée à la p. 1051 de l'édition de 1637, parmi Les sacrees Reliques du
Bien-Heureux François de Sales ? Peut-être avait-elle été insérée dans quelque édition de l'Introduction antérieure à
1637, connue on l'a fait plusieurs fois depuis.
155/332

16.6 Page 156

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XII. Deux occupations pour la retraite spirituelle [1604-16081128]. La
sainte enfance de Notre-Seigneur. Sa Passion.
Pour vostre retraitte spirituelle, vous pourres vous servir des pointz icy marqués, lesquelz
regardent la divine enfance de nostre Sauveur.
Le Dimanche, consideres le aux entrailles tres pures de [235] sa tres chaste Mere, et admires
comme cette grandeur immense s'est ainsy ravalee pour vostre amour. Le lundy, admires le dans
la crescile en une extreme pauvreté. Le mardy, voyes le adoré des Anges et des pasteurs ; faites
luy avec eux mille reverences interieures. Le mercredy, regardes que des-ja il respand son sang en
la circoncision ; supplies le qu'il retranche toutes les superfluités de vostre ame. Le jeudy, occupes
vous a mediter les misterieuses offrandes que luy presentent les Rois ; offres vous a luy, et adores
le avec eux. Le vendredy, contemples le au Temple entre les bras de sa sainte Mere ; donnes luy
vostre cœur pour estre sa demeure et son temple sacré. Le samedy, medités sa fuite en Egipte ;
demandes luy la grace de bien fuir et eviter tout ce qui luy peut desplaire.
Une autre semayne, vous pourres vous entretenir sur les douloureux misteres de la Passion
de nostre Redempteur.
Le Dimanche, voyes comme il lave les pieds a ses bienaymés Disciples ; pries-le qu'il vous
lave et purifie de toute ordure de peché. Le lundy, regardes le au jardin des Olives, priant son Pere
a chaudes larmes1129 ; demandes luy humblement le don de l'orayson. Le mardy, medités avec
quelle douceur et mansuetude il reçoit le bayser du traistre Judas ; demandes luy la charité et
suavité envers vos ennemis. Le mercredy, consideres-le pris et lié par les Juifz ; demandes luy la
patience aux tribulations. Le jeudy, admires comme sans resistance quelconque il se laisse vestir
en fol chez Herode ; demandes luy l'humilité et le mespris de vous mesme. [236] Le vendredy,
contemples comme volontairement et d'un grand courage il charge le pesant fardeau de la croix,
et la porte ainsy sur ses espaules jusques au mont de Calvaire ; faites a force actes de compassion
sur ses inestimables tourmens. Le samedy, levés les yeux en haut, voyes le estendu de son long,
cloüé, eslevé en l'air sur l'arbre de la croix ; prestes soigneusement l'oreille a ses douces parolles,
pries le qu'il vous fasse la grace de vivre tout a luy, puisqu'il est mort pour vous1130.
1128 Le P. de la Rivière a publié ces trois « Exercices » dans sa Vie du Saint, liv. III, chap. XXX, comme si celui-ci les
avait donnés aux « Dames de la Visitation. » Dans le petit volume des Sacrees Reliques du B.-H. François de Sales
(1626), il n'est fait aucune mention des Religieuses, pas plus que dans les éditions de 1637, 1641, 1652. Nous les
croyons antérieurs à la fondation (1610) et, les deux premiers du moins, rédigés pour l'une des filles spirituelles que
le Saint avait à Dijon, peut-être même pour la baronne de Chantal : de là notre date oscillante entre 1604 et 1608.
Quant au troisième, nous avons ce témoignage de Michel Favre, déposant au Procès de Béatification : « Souventes
fois etnmy la journee, » le Bienheureux « faisoit des elevations de cœur en Dieu, s'unissant a luy par des eslancemens
d'amour et employant toutes sortes de rencontres, ainsy que j'ay veu par un escript de sa main et que j'av longtemps
porté sur moy, que je donnay l'annee derniere au premier gentilhomme de la chambre de S. A. de Lorraine qui me le
demanda pour relique, et duquel voicv la teneur : « Vous pouves excellemment, » etc. (Process. remiss. Gebenm (I),
ad art. 26.) Les petites variantes qui existent entre ce texte et celui du P. de la Rivière sont reproduites ci-après. En
lisant la déposition de l'aumônier de saint François de Sales on peut se demander si cet « Exercice » n'aurait pas été
écrit pour lui ; ou bien, sainte Jeanne de Chantal, qui l'aurait eu de première main étant dans le monde, s'en serait
ensuite dessaisie en faveur du confesseur de la Visitation. Dans le premier cas, on ne devrait pas songer à une date
antérieure à 1609, M. Michel n'étant entré au service du Saint qu'à la fin de l'année précédente ; dans le second, les
dates extrêmes proposées pour les deux autres « Exercices » pourraient convenir. Il semble néanmoins que le troisième
ne fut pas envoyé en même temps que les deux premiers ; c'est pourquoi nous l'en détachons.
1129 Cf. Heb., V, 7.
1130 Cf. II Cor., V, 15.
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16.7 Page 157

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XIII. L'imitation de Notre-Seigneur, [1604-1609 ?] Comment Jésus a-t-il
agi pendant sa vie ? Exciter notre âme par ses exemples ; un seul
regard suffit
Vous pourres 1131 excellemment tirer le motif du saint amour sur toutes les actions 1132 que
le tres aymable Jesus a prattiquees durant le cours de sa tres sainte vie, en cette sorte :
Quand il se presente quelque sujet d'exercer la vertu 1133 (il s'en presente a tous momens),
voyes briefvement comme Nostre Seigneur l'a exercee tandis qu'il vivoit icy bas entre les hommes
; et puys, animant vostre cœur d'une amoureuse imitation : Or sus, dires vous, allons, suivons,
imitons 1134 le doux Jesus, nostre Maistre. Par exemple, s'il faut prier, donner aux pauvres,
conseiller 1135 quelqu'un, estre solitaire, entrer en conversation, souffrir quelque travail, souvenes
vous 1136 que Nostre Seigneur en diverses occasions fit tout cela ; et par apres 1137, excitant vostre
ame : Hé ! [237] ce dires vous, quand il n'y auroit point d'autre rayson pour prier, pour faire
l'aumosne, pour consoler les affligés, pour demeurer en solitude, pour acquiescer a cette
souffrance, pour m'arrester en cette conversation, ne me 1138 suffit il pas que mon cher Maistre
m'en ayt monstré le chemin ? Et cela se peut faire par un simple regard et unique souspir : Ouy,
Seigneur, je suis avec vous.
_____
1131 pouves
1132 les actions des vertus
1133 quelque sujet de prattiquer quelque vertu (et
1134 allons, imitons
1135 consoler
1136 souvienne vous
1137 et puis
1138 pour prier, pour acquiescer a cette souffrance, pour demeurer en cette solitude, pour m'arrester en cette
conversation, ne
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XIV. Deuxième méthode pour réciter le Chapelet, envoyée à Dijon le 29
septembre 16081139
Vous prendres vostre chapelet par la croix, que vous bayseres apres avoir fait le saint signe
de nostre Redemption 1140, et vous mettres en la presence de Dieu, disant le Credo tout entier 1141.
Vous invoqueres Dieu sur le premier grain, le priant [238] d'aggreer le service que vous
luy voules rendre, et de vous assister 1142 de sa grace pour le bien dire.
Aux trois petitz grains vous demanderes l'intercession de la sacree Vierge : au premier, 1143
vous la salueres comme la plus chere Fille du Pere eternel ; au second, comme Mere tres chere du
Filz de Dieu 1144 ; au troisiesme, comme Espouse bienaymee 1145 du Saint Esprit.
Apres cela, vous commenceres les mysteres du Rosaire, soit les glorieux, les joyeux ou les
douloureux ; ou bien vous vous porteres a quelqu'autre devot sentiment 1146 que Dieu vous
inspirera.
A la fin, vous reprendres le gros grain qui est au bout du chapelet et remercieres Dieu de la
grace qu'il vous a fait de vous permettre de le dire 1147. Et passant aux trois petitz grains suivans,
vous salueres la sacree 1148 Vierge, la suppliant, au premier, d'offrir vostre entendement au [239]
Pere eternel, affin que vous puissies a jamais considerer ses misericordes ; au second, vous la
supplieres d'offrir vostre memoyre au Filz, pour avoir continuellement sa Mort et Passion en vostre
pensee 1149 ; au troysiesme, d'offrir vostre volonté au Saint Esprit, affin que vous puissies estre a
jamais enflammé de son sacré 1150 amour.
Finissant au gros grain qui est au bout, vous dires le Pater, suppliant la divine Majesté
1139 Longueterre, dans La Vie de tres illustre Messire François de Sales, Evesque et Prince de Geneve (Lyon,
Cœursilly, 1624, p. 440), écrit : « Une grande ame et relevée en qualité voulut sçavoir de luy une methode de servir
la sacree Vierge ; il la dressa avec une industrie toute saincte et toute simple. La voicy telle qu'il l'envoya, car je fay
scrupule d'enchasser ses pierreries en d'autre or que dans le sien propre. » Après avoir cité la Méthode telle qu'elle se
lit dans notre texte, le biographe ajoute, p. 444 : « Et puis, j'entasse d'une sincere affection ce que m'a donné un esprit
grandement couvert en ce monde, mais veritablement bien conneu de Dieu. » De qui veut-il parler ? Serait-ce de la
Mère de Chantal qu'il appellerait aussi très justement « une grande ame et relevée en qualité » ?
D'autre part, nous lisons dans le P. de la Rivière (Vie de l'Illustrissime et Reverendissime François de Sales,
Lyon, Rigaud, 1625, liv. I, chap. VII, p. 32) : « Peut-estre que quelques uns prendront de bonne part si je viens à glacer
ce chapitre d'une methode de reciter le S. Rosaire, qu'il donna à un de ses domestiques, estant des-ja Prelat, et que j'ay
veuë et leuë moy-mesme escripte de sa propre main. »
Enfin, le 29 septembre 1608, le Saint envoie à la baronne de Chantal, à la présidente Brûlart et à ses deux
sœurs « le papier du chapelet » (voir tome XXI, pp. 191, 192) ; ce qui prouve que la Méthode est antérieure. C'est tout
ce qu'on peut dire pour la date.
Quant au premier destinataire de ce petit écrit, il est impossible de le désigner. Si la « grande ame » dont
parle Longueterre est Mme de Chantal, il a pu le recevoir d'elle sans qu'il ait été rédigé exprès pour elle ; de même, le
saint Evêque put donner « à un de ses domestiques », comme le dit le P. de la Rivière, « une methode de reciter le S.
Rosaire » composée d'abord pour une autre personne, et avec les variantes que nous allons reproduire au bas des pages.
En 1626, cette « Méthode » parut dans le petit volume intitulé : Les sacrees Reliques du Bien-Heureux
François de Sales... contenant diverses Practiques et Exercices de devotion. Elle y porte ce titre, au chap. III, p. 21 :
Maniere tres-aysée pour dire le Chappellet ; titre qui est également répété dans les éditions des Œuvres du Saint, de
1637 et 1641. (Cf. ci-dessus, note (929), p. 192.)
1140 Ayant pris vostre chapelet par la croix et l'avant baysee, vous feres avec icelle le signe de la Croix sur vous
1141 tout au long.
1142 Au premier gros grain vous invoqueres Dieu, le suppliant d'avoir aggreable le service que vous luy voules faire
disant le Chapelet, et de vous donner l'assistance
1143 de la glorieuse Vierge a mesme fin : au premier desquelz
1144 tres aymee du Filz de Dieu, nostre Sauveur
1145 comme la tres-unique Espouse
1146 Cela fait, vous considereres, sur les dizaines, les mysteres du saint Rosaire, prenant ou les joyeux, ou les
douloureux, ou les glorieux, ou bien quelqu'autre devot sujet, tel
1147 de ce qu'il vous a fait la grace de l'avoir dit.
1148 sainte
1149 au Filz, a ce qu'a jamais vous ayes souvenance de sa Passion
1150 saint
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16.9 Page 159

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qu'elle addresse le tout a sa 1151 gloire et pour le bien de son Eglise, en la foy et union de laquelle
vous prieres sa Bonté de vouloir ramener 1152 tous les desvoyés, et prierés Dieu 1153 pour tous vos
amis ; finissant comme vous aves commencé, par la profession de foy, 1154 disant le Credo, puys
faisant le signe de la Croix. Et [porterez 1155] vostre chapelet 1156 comme une sainte marque par
laquelle vous voules protester que vous desires estre serviteur de Dieu, du Sauveur et de la sacree
et tous-jours Vierge Mere 1157. [240]
_____
XV. Avis a la Baronne de Chantal, Sales, 15-20 avril 16101158. Ne pas
faire de réflexions sur les choses qui arrivent. Dans les sécheresses,
s'humilier. Comment reprendre le prochain. Le voyageur dans un
navire et le soin du pilote.
Pour toutes les choses qui vous arriveront, n'alles point [en] rechercher la cause (il suffit
que Dieu la sçait), mais simplement humilies vous devant Dieu, supportant la contradiction avec
douceur, sans reflexions.
Au tems des secheresses, humilies vous, et au tems des sentimens et veüe de vostre misere,
jettes vous au plus profond des entrailles de la misericorde divine.
1159 Mortifies vous en ces petites saillies contre les imperfections du prochain, les reprenant
avec l'esprit de douceur.
N'ayes point soin de vous mesme, non plus qu'un voyageur qui s'est embarqué de bonne
foy sur un navire, qui ne prend garde qu'a se tenir et vivre dans iceluy, laissant le soin de prendre
le vent, tendre les voiles et faire voguer, au pilote sous la conduitte duquel il s'est mis.
Revu sur le texte inséré dans un ancien Manuscrit conservé à la Visitation d'Annecy. [241]
_____
1151 Finalement, au gros grain dernier vous dires le Pater, en priant la divine Majesté qu'elle accepte et addresse le tout
a son honneur et
1152 rappeller
1153 encor
1154 commencé, en
1155 Le contexte demande porterez au lieu de portant, qui se lit dans Longueterre.
1156 puys vous signant et baysant la croix, vous remettres vostre chapelet a la ceinture
1157 serviteur dedié tout a fait au divin Sauveur et a sa benigne Mere. Amen.
1158 Le recueil manuscrit conservé à la Visitation d'Annecy, d'où sont extraits ces Avis, porte à la fin de ceux-ci : «
Escrit sur mes tablettes a Sales, en avril 1610. » Mme de Chantal arrivée à Annecy le dimanche des Rameaux, 4 avril,
dut y passer la Semaine Sainte et les fêtes pascales. Elle était probablement à Sales le 14 ; le saint Evêque l'y
accompagna ou l'y rejoignit bientôt. Ces données fixent à peu près la date de ces lignes.
1159 Cette phrase figure déjà dans le tome XXI, p. 155, d'après les Manuscrits qui nous ont fourni les textes qui la
précèdent et la suivent.
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16.10 Page 160

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XVI. Conseils a un ami, 1609-16101160. Le secret pour avoir la paix
extérieure et intérieure.
Voules vous que rien ne traverse vostre vie ? Ne souhaites point de reputation ni de gloire
du monde.
Ne vous attaches point trop aux consolations et amitiés humaines.
N'aymes point vostre vie, et mesprises tout ce qui sera sensible a vos inclinations naturelles.
Supportes genereusement les douleurs du cors et les plus violentes maladies, avec
acquiescement a la volonté de Dieu.
Ne vous soucies point des jugemens humains.
Taises vous de toutes choses, et vous aures la paix interieure ; car, pour vous et pour moy,
il n'y a point d'autre secret pour acquerir cette paix que de souffrir a la rigueur les jugemens des
hommes.
Ne vous inquietes point de ce que le monde dira de vous ; attendes le jugement de Dieu, et
vostre patience jugera alhors ceux qui vous auront jugé. Ceux qui courent la bague ne pensent pas
a la compaignie qui les regarde, mais a bien courre pour l'emporter. Considerés pour qui vous
travailles, et ceux qui vous voudront donner de la peyne ne vous travailleront gueres. [242]
_____
XVII. Le saint reçoit les vœux de religion de la Mère de Chantal,
renouvelle son vœu de chasteté et fait celui de servir l'ame de la sainte,
22 août 16111161
Je, FRANÇOIS, EVESQUE DE GENEVE, accepte de la part de Dieu les vœux de chasteté,
obeissance et pauvreté, presentement renouvellés par Jeanne Françoise Fremyot, ma tres chere
Fille spirituelle. Et apres avoir moy mesme reiteré le vœu solemnel de perpetuelle chasteté par
moy fait en la reception des Ordres, lequel je confirme de tout mon cœur, je proteste et prometz
de conduire, ayder, servir et advancer laditte Jeanne Françoise Fremyot, ma Fille, le plus
soigneusement, fidellement et saintement que je sçauray, en l'amour de Dieu et perfection de son
ame, laquelle des-ormais je reçois et tiens comme mienne, pour en respondre devant nostre
1160 Un des amis du saint Evêque « luy demanda les moyens qu'il pourroit tenir pour passer sa vie en l'exercice de cette
veritable et perpetuelle paix en laquelle il le voyoit estably dans les tribulations. » Il lui répondit : « Voules vous que
rien ne traverse vostre vie ? » etc. Demande et réponse furent faites de vive voix et très probablement en 1609-1610,
peu après l'apparition de l'Introduction a la Vie devote. On se rappelle qu'il y eut dans la ville d'Avignon un Religieux
d'un Ordre austère qui ne craignit pas d'attaquer du haut de la chaire le « petit livret » qu'un concert unanime venait
d'acclamer ; il le mit en pièces et osa même nommer le saint Auteur un vrai successeur de Calvin, un docteur corrompu
et corrupteur. La nouvelle en courut bientôt à Annecy, et ce fut alors qu'un ami de saint François de Sales, admirant
sa paix merveilleuse, le pria de lui confier son secret. (Voir Maupas, La Vie du Venerable serviteur de Dieu François
de Sales, Paris, 1657, Partie V, chap. V, p. 352.)
1161 Les éditrices des Œuvres de sainte Jeanne-Françoise de Chantal ont rectifié au tome II (Paris, Plon, 1875), p. 50,
l'erreur de plusieurs écrivains du XIXe siècle qui attribuent à ce document la date de 1604, le confondant avec la
promesse faite par saint François de Sales à Saint-Claude. Tout d'abord, notre document est du 22 août, tandis que les
deux Saints n'arrivèrent à Saint-Claude que le 24. En second lieu, le 25 août 1604, le saint Evêque, en acceptant la
conduite spirituelle de Mme de Chantal, fit une simple promesse ; ici, il s'agit d'un vœu. Enfin, le même jour, la Baronne
fit vœu d'obéissance à son Directeur et le lui envoya ensuite par écrit (Chaugy, Mémoires, Ire Partie, chap. XV, pp. 62,
63) ; elle ne pouvait donc le renouveler le 22 août de la même année. Moins encore pouvait-elle renouveler celui de
pauvreté, qu'elle prononça pour la première fois le 22 août 1611, comme l'atteste la Mère de Chaugy (Partie II, chap.
IV, p. 154), qui cite la formule écrite par la Sainte. Les Religieuses de la Visitation, on s'en souvient, ne vouèrent la
pauvreté qu'à partir du 20 novembre 1615 (voir le tome précédent, g), p. 344, et tome XVII, note (404), p. 104) ; mais
la Mère de Chantal fit ce vœu et renouvela ceux de chasteté et d'obéissance en 1611, avant son voyage en Bourgogne,
après la mort du président Frémyot. Son obédience est du 5 septembre (tome précédent, p. 488) ; le lendemain elle
partait avec la Sœur Favre et le baron de Thorens.
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17 Pages 161-170

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Sauveur. Et ainsy je le voue au Pere, Filz et Saint Esprit, un seul vray Dieu, auquel soit honneur,
gloire et benediction es siecles des siecles. Amen.
Fait en eslevant le tressaint et adorable Sacrement de [243] l'Autel en la sainte Messe, a la
veüe de sa divine Majesté, de la tressainte Vierge Nostre Dame, de mon bon Ange et de celuy de
laditte Jeanne Françoise Fremyot, ma tres chere Fille, et de toute la Cour celeste, le XXII jour
d'aoust, octave de l'Assomption de la mesme tres glorieuse Vierge, a la protection de laquelle je
recommande de tout mon cœur ce mien vœu, affin quil soit a jamais ferme, stable et inviolable.
VIVE JESUS ! Amen.
FRANÇOIS, Evesque de Geneve.
Revu sur une ancienne copie conservée à la Visitation de Turin.
_____
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17.2 Page 162

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XVIII. Mémorial pour bien faire la confession, adressé au Duc de
Bellegarde, le 24 août 16131162 (Minute). Faire sa confession devant
Jésus crucifié qui, » avec une douceur de misericorde incomparable »,
nous prépare son pardon. Il faut s'accuser non seulement du genre de
péché, mais de l'espèce, du nombre, des divers degrés du péché.
Entre ces degrés, celui qui multiplie la malice du péché en une seule
action doit être déclaré. Le désir et la résolution de pécher est de fait
un péché, ainsi que les mauvaises pensées volontairement entretenues.
Certaines actions comprennent en elles plusieurs espèces de péché :
on doit s'en accuser. Détail des péchés contre les commandements de
Dieu. Examen sur les sept péchés capitaux. Les péchés contre les
commandements de l'Eglise. Comment discerner le péché mortel du
véniel. Moyens suggérés pour détourner du péché les grands de ce
monde. Prière avant la confession.
Estant a genoux devant vostre confesseur en la contenance la plus humble quil vous sera
possible, vous vous representeres que vous faictes ceste action devant Nostre Seigneur crucifié,
lequel vous prepare le pardon et l'absoulution [244] avec une douceur de misericorde
incomparable. Et partant, avec une sainte confusion accompagnee neantmoins d'une confiance tres
grande, vous vous accuserés selon les advis suyvantz.
1163Il se faut accuser non seulement du genre du peché que l'on a commis, mais aussy de
l'espece : donc, il ne suffit pas de dire que l'on a esté homicide, luxurieux ou larron, mais il faut
encore nommer l'espece de l'homicide, de la luxure et du larcin que l'on a commis. Par exemple :
si l'homicide a esté commis en la personne du pere ou de la mere, il le faut exprimer, car cela
s'appelle parricide ; si l'homicide a esté commis en lieu sacré, c'est sacrilege ; si on a tué une
personne sacree, c'est un parricide spirituel. De mesme au genre du peché de luxure, il y a bien de
la difference entre les especes d'iceluy : car desfleurer une vierge, c'est un stupre ; cognoistre une
femme mariee, c'est adultere ; et ainsy des autres pechés.
2e Advis
1162 Saint François de Sales écrit le 24 août 1613 à Roger de Saint-Lary, duc de Bellegarde (tome XV, note (833), p.
293) : « Parmi les lassitudes et autres ressentimens que la maladie m'a layssé, j'ay dressé le Memorial qu'il vous avoit
pleu desirer de moy... Vous y treuverés, Monsieur, des marques de ma maladie ; car si j'eusse fait ce petit ouvrage en
pleine santé, j'eusse sans doute employé un soin plus exacte de le rendre moins indigne de vostre reception. Je n'ay
sceu non plus l'escrire moy mesme, mais ceux qui l'ont escrit n'ont point de connoissance de l'usage auquel je l'ay
dedié. » (Tome XVI, p. 55.) Le Saint y avait joint un abrégé qui n'est pas arrivé jusqu'à nous.
Evidemment, c'est une minute qui est conservée à la Visitation d'Annecy. Elle comprend vingt-cinq pages,
dont les trois premières, le quart de la quatrième et la dernière, écrites par un secrétaire inconnu ; la plus grande partie
est de M. Michel Favre et corrigée par l'Auteur. Dans notre texte, ses corrections sont
marqués d'un pointillé Les pages du secrétaire que nous n'avons pas réussi
à identifier doivent appartenir à une autre transcription ; en effet, le reste de la quatrième est laissé en blanc et s'arrête
à ces mots : « seroit de grande quantité « (voir ci-après, p. 247, lig. 25), tandis que l'écriture de l'aumônier du Saint
commence presque au début du « 4e Advis » , par : « du peché en une seule action ». Voir ibid., note (1164), p. 247,
et cf. note (1222), p. 265.)
Migne, tome VI, p. 61, a publié ce Memorial, mais en y faisant bon nombre de suppressions et en modernisant
le style de saint François de Sales. Il le dit écrit « tout de sa main », ce qui est une erreur.
1163 Cf. tom. XXIII huj. Edit., Advertissement aux Confesseurs, ch. IV, pp. 285-287.
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17.3 Page 163

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Non seulement on se doit accuser des especes des pechés que l'on a commis, mais aussy
du nombre d'iceux, disant combien de foys on a commis tel ou tel peché, au plus pres que l'on peut,
selon la souvenance que l'on a ; et si l'on n'a pas souvenance de la quantité des pechés, il suffit de
dire combien plus ou moins environ ; que si mesme on ne peut bonnement se resoudre de l'environ,
il suffit de dire [245] combien de temps on a perseveré au peché et si on y est fort addonné.
Or, la necessité de dire au plus pres que l'on peut la quantité des pechés mortelz est
essentiellement requise pour faire une bonne confession, d'autant que pour absoudre le pecheur de
ses pechés, il faut avoir cognoissance de l'estat de sa conscience ; mais on ne peut cognoistre l'estat
d'une ame si on ne sçait a peu pres la quantité des pechés qu'elle a commis : car, quelle apparence
y auroit il d'avoir en esgale consideration une femme, par exemple, qui n'auroit offencé de son
corps qu'une seule foys, comme la sainte penitente Aglaë, et celle qui auroit offencé peut estre dix
mille fois, comme on peut croire de sainte Pelagienne, de sainte Marie Ægytiaque et de sainte
Magdelaine ?
3e Advis
Il se faut encor accuser de la diversité des degrés qui se retreuve en chasque espece de
peché ; car tout ainsy quil y a divers degrés en chasque vertu par lesquels passant de l'un a l'autre
on arrive a la vertu heroique ou angelique, aussy [y] a il divers degrés au peché par lesquelz on
descend jusques au peché diabolique. Par exemple, il y a bien de la difference entre le corroux et
injurier, frapper du poing, ou avec un baston, ou avec l'espee et tuer, qui sont des divers degrés du
peché de collere ; de mesme, il y a bien a dire entre le regard charnel, l'attouchement deshonneste
et la conjunction luxurieuse, qui sont divers degrés d'un mesme peché. Il est vray que celuy qui a
confessé une action mauvaise n'a pas besoing de dire les autres actions qui sont ordinairement
requises pour faire celle la : ainsy, celuy qui s'est accusé d'avoir commis adultere une fois n'est
point obligé de dire les baisers et attouchemens quil a faict parmy cela, car cela s'entend asses sans
qu'on le die, et l'accusation de telle chose est comprise en la confession de l'acte principal duquel
les autres ne sont que les accessoires.
4e Advis
Or, entre les degrés du peché, il faut prendre garde a [246] celle (sic) qui multiplie ou
redouble la malice 1164 du peché en une seule action : comme, par exemple, celuy qui derobe un
escu fait un peché ; celuy qui en derobe deux tout a la fois ne fait aussy qu'un peché, mais toutesfois
la malice de ce second peché est deux fois aussy grande comme celle du premier. De mesme il se
peut faire qu'avec un mauvais exemple on scandalisera une seule personne, et qu'avec un autre
mauvais exemple de mesme espece on scandalisera trente ou quarante personnes : et qui ne void
que la malice de ce second peché est beaucoup plus grande que celle du premier ? Ainsy, sy l'un
tue une fille et l'autre tue une femme enceinte, ilz n'ont chacun fait qu'un seul coup ; mays l'un
neammoins, en un seul peché, a fait deux homicides, et par consequent son peché, quoy qu'il ne
soit qu'un quant a l'acte, a neammoins double malice. C'est pourquoy il faut particulariser, tant
qu'il se peut bonnement faire, la qualité de l'objet ou de la matiere par le moyen delaquelle la
malice du peché peut croistre ou descroistre ; car il ne suffiroit pas a celuy qui auroit empoisonné
un flaccon de vin, de dire qu'il a empoisonné du vin pour faire mourir des personnes, mais faudrait
dire combien de personnes ; car encor que l'empoisonnement se fist par une seule action,
neammoins il se termineroit a la mort de plusieurs personnes, et bien que l'action fust unique, la
nuysance neammoins seroit de grande quantité.
5e Advis
1164 Ici commence l'écriture de M. Michel Favre.
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17.4 Page 164

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Le desir est un degré du peché, et la resolution d'exequuter en est un autre dont il se faut
confesser, bien que par appres on ne vienne point a l'exequution ; car qui desire et beaucoup plus
qui se resoult de pecher, il a formé le peché dans son cœur, suyvant le dire de Nostre Seigneur :
Qui regardera la femme pour la convoiter, il a desja adulteré en son cœur1165, et s'il n'a pas peché
par effet, il a peché par affection. Mais cela s'entend des desirs qui sont formés, et non pas de
certaine sorte de mouvemens interieurs qui, de sursaut, a l'improuveüe et sans nostre consentement,
[247] passent par nostre cœur, pendant lesquelz mesmement, qui nous interrogeroit sy nous
voudrions les choses ausquelles ces mouvemens semblent nous porter, nous dirions
indubitablement que non ; car par la on void bien que 1166 ces desirs sont des actions de nostre
nature et non pas de nostre franc arbitre.
6e Advis
Il se faut encor accuser des mauvaises pensées quand, avec une volontaire complaisance
au peché, nous nous y arrestons, car elles sont un degré du peché, encor bien qu'elles n'ayent esté
suyvies ny du desir, ny de la resolution. Par exemple, celuy qui prend plaisir a penser en soy mesme
a tuer, ruiner et 1167 maltraitter son ennemy, encor qu'il ne desire point d'en venir aux effetz,
neammoins, sil a volontairement et a son escient pris delectation et res-jouissance en telles
imaginations et pensées, il s'en doit accuser rigoureusement ; comm'aussy celuy qui, pour prendre
plaisir, s'amuse a penser, imaginer et se representer les voluptés charnelles, car il peche
interieurement contre la chasteté, d'autant qu'encor qu'il n'ait pas voulu appliquer son cors au
peché, il y a neammoins appliqué son cœur et son ame. Or, le peché consiste plus a l'application
du cœur qu'a celle du cors, et il n'est nullement loisible de prendre a son escient plaisir et
contentement au peché ny par les actions du cors, ny par celles du cœur.
7e Advis
Encor faut il prendre garde, pour se bien confesser, a certaines actions qui comprennent en
elles plusieurs especes de pechés enveloppés l'un dans l'autre : comme, par exemple, celuy qui
feroit tuer le mary pour jouïr de la femme, comme David1168, feroit trois sortes de peché tout
ensemble, car il commettroit scandale, homicide et adultaire ; ainsy, celuy qui battroit un valet, et
en le battant se representeroit par imagination le plaisir quil prendroit a [248] battre le maistre,
feroit ensemblement deux pechés, l'un de cœur et l'autre de cors ; et celuy qui ayant accointance a
une fille s'imagineroit, pour prendre plaisir, une femme mariee quil auroit desiré, feroit du cors un
stupre, et du cœur un adultaire. Il y a mesme certaines actions lesquelles semblent estre meslées
de peché mortel et de veniel, esquelles quelquefois on est grandement trompé : comme, par
exemple, une personne grandement en cholere aura voulu donner un grand coup a quelqu'un qui,
gauchissant, se sera eschappé ; et par ce que l'effect de sa mauvaise volonté ne sera pas ensuivy, il
tiendra l'offence pour petite, bien que reellement son intention de frapper rudement la fasse fort
grande. Ainsy, celuy là ne se confesseroit pas bien, qui ayant derobé une bourse en laquelle il n'y
avoit 1169 que demy douzaine de jettons lesquels il pensoit estre 1170 des escus, ne s'accuseroit que
d'avoir derobé des jettons ; car encor qu'en effet il n'ayt derobé que des jettons, en affection
neammoins il a derobé des escus.
1165 Matt., V, 28.
1166 car [cela monstre] bien que [ce sont...]
1167 et [se venger de...]
1168 II Reg., XI, 15-17, 24-27.
1169 n'y avoit [qu'un liard qu'il pensoit estre un escu...]
1170 estre [demy douzaine d'escus...]
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17.5 Page 165

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8e Advis. Du tems que l'on a demeuré en chaque action du peché1171
……………………………………………………………………………………………………..
Des pechés contre le premier commandement du decalogue
En ce premier commandement il nous est ordonné de servir, honnorer et aymer Dieu selon
les reigles de la vraye relligion ; les especes de peché qui se commettent contre ce commandement
sont :
Premierement : le blaspheme, qui n'est autre chose qu'une mesdisance de la divine Majesté
faite par mauvaise affection ; comme quand on dit que Dieu n'est pas bon, qu'il n'est pas juste,
qu'on le renie, qu'on le maugrée, qu'on le despite et, enfin finale, toutes fois et quantes que
volontairement et a nostre escient 1172 nous parlons de Dieu [249] incivilement, 1173 ainsy que l'on
fait quand on dit : Aussy vray comme Dieu est ; un tel est vilain comme Dieu est noble ; Dieu ne
se soucie pas de ce que nous faisons ; laissons Dieu en Paradis et demeurons icy ; et semblables
impertinences.
C'est aussy un'espece de blaspheme de mesdire des Saintz ou parler incivilement d'eux et
des choses sacrées : comme, par exemple, emprunter les paroles de l'Escriture par gausserie, risée
et deshonnesteté.
1174 La seconde espece des pechés contre ce commandement, c'est l'impieté, qui consiste és
actions par lesquelles nous voulons deshonnorer Dieu ou les choses sacrées : comme font ceux qui
employent les Sacremens, le saint Cresme, les paroles sacrées pour des charmes, ou qui les foulent
par desdain, rompent les images, ruinent les autelz, les reliques et semblables choses.
1175 La troysiesme espece, c'est la superstition, comm'est idolatrer, c'est a dire adorer
comme Dieu ce qui n'est point Dieu ; user de magie, c'est a dire emploier le diable pour
quelqu'operation, soit qu'on l'employe ouvertement, comme font ceux qui ont fait convention avec
luy et les sorciers, soit qu'on l'employe tacitement par paroles et caracteres inconneus, ou paroles
et caracteres connus, mais appliqués faussement et vainement ; item, aller aux devins, et, en
somme, faire ou dire quelque chose pour obtenir quoy que ce soit du malin esprit ou de ceux qui
dependent de luy 1176.
4. Violer les vœux que l'on a fait, ou bien faire des mauvais vœux : comme par exemple,
de tuer quelcun, ou de ne faire pas quelque bien.
5. Tenter Dieu, c'est a dire vouloir espreuver et essaier si Dieu est bon, juste ou puissant,
soit expressément, comme faisoient les Juifz demandant des miracles a Nostre Seigneur sans
necessité ny raison quelconque, soit tacitement, [250] comme font ceux qui, sans necessité ny
occasion, mesprisent les moyens ordinaires que Dieu nous a donné pour faire les choses,
pretendantz que Dieu en fournira d'extraordinaires, et ceux qui, sans necessité, se mettent en des
dangers eminentz, presumans que Dieu les en doive delivrer.
1177 Les pechés suivans sont aussi contre ce commandement :
Douter de la foy. Se desfier de son salut ou de son amendement et remission des pechés ;
ou bien, au contraire, præsumer d'obtenir le salut sans s'amender, ou penser avoir l'amendement
sans penitence, ou la penitence sans prier, s'humilier et se disposer a l'avoir. Mettre son cœur és
choses creés en telle sorte qu'on oublie le Createur.
1178 Dire des mauvaises parolles contre Dieu, les Saintz et l'Esglise ; disputer curieusement
1171 Ce titre est mis en surcharge avec un signe de renvoi qui est répété dans la marge où on lit cette note : « 8e Advis.
Regarde la derniere feuille. » Malheureusement, celle-ci manque au cahier.
1172 a nostre escient [on parle]
1173 incivilement, [comme]
1174 [Secondement : l'impieté qui...]
1175 [3ent]
1176 de luy [qui ne peuvent proceder que de luy par les moyens que l'on employe.]
1177 [PREMIER DEGRÉ DES PECHÉS QUI SE COMMETTENT CONTRE LE PREMIER COMMANDEMENT,
C'est aussi pecher...]
1178 [2. DEGRÉ]
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17.6 Page 166

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et temerairement des choses de la foy ; disputer ou faire des persuasions que les commandemens
de Dieu n'obligent pas les personnes, qu'il ne faut pas craindre de les rompre, et semblables choses
que des jeunes gens font quelquefois, ou pour pervertir l'esprit des filles, ou pour faire les gallans
en matiere du peché de la chair. Se plaindre de Dieu, blasphemer, invoquer le diable ou pour soy,
ou contre soy, ou contre les autres, comme font ceux qui dient : Je voudrois que le diable me
guerise d'une telle maladie, ou me rompist le col, ou me fist avoir telle chose ; le diable t'emporte
; le diable m'emporte ; et semblables choses.
1179 Emploier les enchanteurs et les assister. Ouïr les heretiques en leurs preches, prieres et
assemblées ; avoir leurs livres et tous livres faitz pour deviner. Faire des irreverences dedans les
esglises, comme muguetter, cajoller, pavonner, raïller, tenir des contenances inciviles et
arrogantes, empescher les autres de prier, et semblables discourtoisies et messeances spirituelles.
[251]
Outre cela, on peche contre ce commandement : laissant de servir Dieu quand l'occasion le
requiert, pour respect humain. Ne sçavoir pas les choses requises au bon chrestien, comme sa
creance, le Patenostre, la Salutation angelique, les Commandementz de Dieu et de l'Esglise. Ne
prier pas Dieu le soir et le mattin, ne faire point l'honneur et la reverence deüe aux choses sacrées,
ne benir ou faire benir la table, ne dire ou faire dire Graces appres le repas.
Pechés contre le second commandement
[1.] 1180 Jurer sans discretion par le nom de Dieu, ou des Saintz et des autres creatures
quelconques entant qu'elles dependent de Dieu et se rapportent a iceluy : comme font ceux qui
jurent a tous propos, autant pour chose de peu d'importance comme pour chose de grande
importance ; car ceux cy exposent le sacré nom de Dieu et prennent a tesmoin sa divine Majesté
vaniement (sic), frivolement et contemptiblement, sans jugement ny discernement quelconque.
2. Jurer contre la justice, c'est a dire contre la raison : comme font ceux qui jurent de faire
le mal ou de ne faire pas le bien ; car c'est mespriser grandement Dieu que de l'appeller a tesmoin
d'une action mauvaise, comme fit Herodes, jurant de faire trancher la teste a saint Jean Baptiste1181,
auquel sont semblables ceux qui jurent de battre, de couper le nez, de ruiner, de tuer et autres.
3. Jurer pour le mensonge ; 1182 qui est parjurer.
4. Procurer ou donner occasion aux autres de jurer sans necessité, contre raison, et de
parjurer.
Pechés contre le 3. commandement
1183 1. Travailler les festes a quelqu'œuvre servile, ou estre cause que l'on travaille, sans
evidente necessité et congé des Superieurs ecclesiastiques.
2. Obmettre d'ouïr la sainte Messe les jours de festes et [252] Dimanches ; ou bien l'oüir,
mais sans attention, avec irreverence et incivilité. Ne point avoir soin que les serviteurs et autres
domestiques oyent la Messe esditz jours de festes. Frapper, battre, paillarder et faire telles
dissolutions és lieux sacrés.
Or, quant a la chasse ou tournois loisibles et autres exercices appertenentz principalement
a la noblesse, ilz ne sont pas prohibés es jours de festes en qualité d'oeuvre servile, et partant, la
Messe estant oüye, on peut loisiblement s'y appliquer esditz jours de festes ; mays ce seroit
neammoins un'irreverence trop grande d'y vacquer és grands jours solennelz esquelz, tant qu'il est
possible, un chacun doit assister non seulement a la Messe, mais aux autres services chrestiens. Et
seroit aussy une chose messeante et abuser de l'institution des festes, de faire profession et mestier
1179 [3. DEGRÉ]
1180 [Quant au second commandement, la premiere espece...]
1181 Matt., XIV, 7-9 ; Marc., VI, 23-27.
1182 le mensonge ; [qui s'appelle perjure...]
1183 [Quand au troisiesme...]
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ordinaire d'emploier les tems sacrés en telles occupations.
Pechés contre le 4. commandement
Desirer la mort ou quelque mal au pere et a la mere naturelle, aux superieurs civilz et
politiques qui tiennent lieu de pere en la republique, et aux superieurs ecclesiastiques qui tiennent
lieu de peres 1184 en l'Eglise. Se resoudre de ne point leur obeir et d'user de mespris envers eux. Ne
tenir comte d'eux en son cœur. Juger temerairement de leurs deportementz et de leurs intentions ;
ou bien, au contraire, les affectionner tant les uns et les autres que, pour leur respect, on soit disposé
d'offencer Dieu. Parler mal des peres, meres, superieurs, tant temporelz que spirituelz ; les
contreroller, censurer et se plaindre d'eux mal a propos ; leur faire des repliques hautaines,
fascheuses et piquantes ; les provoquer a ire volontairement et a son escient. Depiter contr'eux.
Leur defaillir en leurs necessités, ne les consolant pas ny secourant selon son pouvoir.
Item, les peres, meres et superieurs des maisons, villes et republiques offencent Dieu contre
ce commandement, traittans indignement et outrageusement leurs femmes, enfans, sujetz et
inferieurs ; n'aiant pas soin de les advancer [253] en la vertu ; ne les assistant pas és choses requises,
selon leur pouvoir ; les scandalisant par mauvais exemple.
Enfin, les enfans, heritiers et legataires qui n'accomplissent pas les volontés de leurs
bienfacteurs, dont ilz sont chargés.
Pechés contre le 5. commandement
Prendre plaisir és cogitations de vengeance et s'y entretenir volontairement pour 1185 s'y
complaire. Desirer la mort ou quelque mal notable au prochain ou a soy mesme, par hayne et
malveillance. (Je dis par hayne, parce que de desirer la mort ou a soy ou au prochain pour la gloire
de Dieu, pour son salut et pour autres telles bonnes occasions, quand la hayne de la personne ne
s'y mesle point, il n'y a pas peché.) Haïr quelcun ; desirer de s'en venger ; se res-jouir du mal
d'autruy ; se contrister de son bien ; se mutiner contre luy et ne luy vouloir point parler a
cett'intention. Infamer et injurier le prochain ; le maudire, le mespriser, conseiller ou inciter a luy
faire du mal.
Tuer ou battre ; susciter des inimitiées ; provoquer aux querelles et notamment aux duelz.
Se courroucer et entrer en grand'ire. Ne vouloir pardonner l'injure ny remettre l'offence a celuy qui
est prest de faire satisfaction ; persequuter le prochain par menées, proces ou autre moyen. Prendre
plaisir a faire battre les uns contre les autres, comm'on fait souventefois des laquais, gojatz et autres
semblables sortes de gens. Donner ou faire donner la couverte aux pauvres gens et insensés ; piquer
et harier les folz, user de cruauté envers eux. S'exposer temerairement aux dangers et inconveniens.
Procurer la sterilité ou avortement des femmes. Estre dur et cruel envers les pauvres ; les laisser
perir ou souffrir des grandes necessités, quand on les peut secourir. Laisser les innocens a la mercy
de l'injustice, quand, par voye legitime et juste, on les peut garantir.
C'est encor peché contre ce commandement de tuer l'ame du prochain, la provoquant a
peché, ou bien de luy nuire spirituellement, la destournant des bonnes œuvres [254] ou l'empescher
malicieusement de bien faire 1186. C'est aussi peché de ne l'aider pas au bien, la conseillant,
admonestant et corrigeant quand on le peut bonnement faire.
Pechés contre le 6. commandement
Avoir des pensées deshonnestes et les entretenir volontairement pour se complaire en la
delectation sensuelle qui en peut 1187 naistre. Desirer les actions deshonnestes. Dire des parolles
1184 peres [spirituelz]
1185 pour [en tirer plaisir...]
1186 bien faire [et mesme de..]
1187 se complaire [au plaisir] qui en peut [revenir]
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17.8 Page 168

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ou chanter des chansons lascives, principalement quand c'est a mauvaise intention. Se loüer, venter
et glorifier du peché de la chair ; dire des parolles en faveur d'iceluy ; l'excuser et amoindrir son
enormité. Avoir des livres et images lubriques. Regarder impudiquement les personnes. Envoyer
des dons, faire des promesses, escrire des pouïetz, envoier des messages, prendre ou donner des
assignations, et toutes autres sortes de poursuittes qui se font en intention d'impudicité. Muguetter,
cajoller, donner de l'amour, et toutes sortes d'amourettes, bien que d'abord il ne semble pas que
l'intention soit tout a fait charnelle. Faire des attouchemens des-honnestes sur soy ou sur autruy,
avec intention de plaisir sensuel. Se provoquer, soy mesme ou autruy, a pollution ; faire la
fornication, c'est a dire avoir compaignie des femmes non vierges, non mariées, non sacrées et non
parentes. Faire l'adultaire, qui se commet lorsque l'une des parties ou toutes deux sont mariées.
Faire le stupre, c'est a dire desfleurer une vierge consentante. Faire le violement, c'est a dire prendre
une femme ou une fille par force. Faire l'inceste, c'est a dire avoir accointance avec une parente ou
alliée, tant spirituellement que temporellement ; je dis spirituellement, a cause des comperes,
commeres, parrains, marraines, fileulz et fileules. Faire le sacrilege, c'est a dire avoir connoissance
des personnes sacrées a Dieu, comme prestres, Religieux et Religieuses, ou bien faire l'exces de
paillardise en lieu sacré. Faire le vice execrable de Sodome, c'est a dire commettre l'acte charnel
avec un autre de son propre sexe, ou bien [255] avec une personne de sexe different, mais usant
des endroitz non dediés a la generation. Et enfin, employant ou les bestes ou le diable, qui sont les
deux plus malheureux exces de tous.
Ce commandement aussi s'estend a ce que les personnes mariées s'entrerendent fidellement
l'un a l'autre le devoir 1188 nuptial, usant de l'acte que Dieu a beny 1189 en faveur du mariage et selon
rayson, tant pour la generation que pour la conservation de l'amitiée et complaisance requise 1190
entre les mariés ; se ressouvenans qu'ilz sont hommes raisonnables et chrestiens, et qu'ilz doivent
posseder les cors l'un de l'autre en sanctification, avec honneur1191, amour et dilection, et tous-
jours dans les bornes que la nature a prescrites.
Pechés contre le 7. commandement
Derober le bien d'autruy ; le retenir contre rayson. Tromper en vendant et acheptant, voire
mesme jouant. Prendre l'usure ; faire contratz injustes. Acheter ou vendre es benefices. Frauder
l'Esglise des dismes et primices, ou les primices des tributz et peages justes. Poursuivre des proces
injustement. Retenir les gages des serviteurs, mercenaires, artisans, ouvriers, soldatz. Imposer des
daces, subsides, contributions, angaries, injustement et contre rayson. Ne payer point les debtes
quand on le peut faire. Contracter des debtes démesurées pour lesquelles on est insolvable, ou que
difficilement peuvent estre payées. Favoriser les injustes detenteurs du bien d'autruy contre les
justes poursuites des vrays possesseurs et maistres. N'empescher pas les larcins, concussions et
autres dommages du prochain. Et generalement, oster ou retenir sans rayson le bien, l'honneur et
les commodités du prochain ; comm'aussy, 1192 faire des prodigalités et despences excessives, pour
lesquelles on fait des empruntz et on se prive des moyens d'assister le pauvre et met a souffrance
sa famille. [256]
Peches contre le 8. commandement
1193 Juger mal et temerairement de la conscience et des actions du prochain ; or, on juge
temerairement quand c'est sans legitime fondement. Disant mal du prochain, ou faisant mal parler
d'autruy ; ce qui se fait en plusieurs façons :
1188 le devoir [du mariage]
1189 a beny [justement et legitimement en faveur l'un de l'autre...]
1190 requise [au mariage]
1191 I Thess., IV, 4.
1192 comm'aussy [lors que l'on fait...]
1193 [Quant au huictiesme, l'on peche jugeant...]
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17.9 Page 169

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1194 1. Par imposture, qui n'est autre chose que de jetter sur une personne un crime ou un
vice qui n'est pas en luy ; par aggrandissement du vice ou du peché qui se treuve en quelcun ; par
revelement d'un crime secret de quelqu'un ; par mauvaise interpretation de l'intention de quelcun,
detournant en mauvais sens les bonnes actions d'autruy ; 1195 niant le bien estre en une personne,
lequel y est, ou 1196 ravallant la juste estime que l'on doit avoir d'une personne ; se 1197 taisant
lorsque l'on peut justement deffendre de blasme une personne.
Item : mentir en quelle façon que ce soit, particulierement quand le mensonge apporte le
dommage au prochain. Faire lire, avoir, reciter des pasquins qui ne sont pas publiquement connus.
Celer la verité ou dire le mensonge en jugement. Semer des noyses. User d'accusations, calomnies,
exaggerations és proces et autres disputes d'importance. Prendre plaisir a oüir mesdire et
calomnier.
Pechés contre le 9. commandement
Desirer la femme du prochain, ou sa fille, ou les autres personnes qui luy appertiennent,
pour les avoir et en user charnellement ; car, comme le sixiesme defend le peché de luxure quant
a l'effet, le neuviesme le deffend quant a l'affection.
Contre le 10. commandement
Desirer le bien d'autruy, de quelle sorte qu'il soit, pour l'avoir injustement et avec
incommodité du prochain, car, [257] comme le septiesme commandement deffend le larcin quant
a l'effet, le dixiesme le deffend quant a l'affection.
Examen touchant les pechés capitaux
Quant a l'orgueil
L'orgueil n'est autre chose qu'une volonté desordonnée d'une grandeur disproportionnee a
celuy qui la veut, et partant c'est peché d'orgueil de s'attribuer le bien que l'on a d'autruy comme
sy on l'avoit de soy mesme ; penser meriter les biens et les graces que l'on a, encor qu'il n'en soit
rien ; s'attribuer des biens et des graces que l'on n'a pas ; se preferer aux autres es choses esquelles
on ne se doit pas preferer. 1198 Or, l'orgueil est peché mortel quand on ne veut pas reconnoistre de
Dieu ce que l'on a ; quand, pour maintenir sa vaine estime, on est prest a violer les commandemens
de Dieu et quand, pour s'exalter, on deprime et mesprise on le prochain en chose notable.
A l'orgueil est attachée la vaine gloire, 1199 qui est se glorifier de ce que l'on n'a pas, ou de
choses qui ne le meritent pas, ou de choses qui ne nous appertient (sic) pas, ou de choses mauvaises
; ou 1200 vouloir avoir la gloire du bien que l'on a, sans reconnoissance de Dieu duquel il vient.
A la vaine gloire est attachée la jactance, qui consiste a se venter de chose mauvaise, ou de
chose bonne, mais plus qu'on ne doit, ou avec mespris du prochain, comme quand on se vente
d'estre plus que les autres ; ou avec le dommage du prochain, comme quand on se vente de sçavoir
guerir de telle et telle maladie, et que les personnes s'y amusent et sont trompées.
L'ypocrisie est encor une branche de l'orgueil, laquelle consiste a faire semblant d'estre
saint ou vertueux, pour amuser ou decevoir le prochain. La contention s'ensuit, qui n'est autre chose
qu'un debat de paroles fait contre la verité. La discorde 1201 vient apres, qui n'est autre chose [258]
1194 [Imposant par...]
1195 d'autruy ; [nier]
1196 ou [ravaller]
1197 se [taire]
1198 preferer [et cet]
1199 la vaine gloire, [qui consiste a...]
1200 ou [quand on veut...]
1201 La discorde [s'en ensuit...]
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17.10 Page 170

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qu'une contrarieté desreglee a la volonté du prochain 1202, laquelle est en sa perfection quand
l'opiniastreté survient, par laquelle on s'arreste fermement en son opinion 1203, quoy que sans bon
fondement.
La curiosité appertient aussy a l'orgueil, qui n'est autre chose qu'un desir immoderé de
sçavoir et connoistre les choses qui ne sont pas de nostre profession, ou qui sont dangereuses, ou
qui sont deffendues.
Appres cellecy suit la recherche des nouveautés en habitz, en discours et en opinions, et
enfin la des-obeissance et mespris des loix et des superieurs.
De tout cela naist la presomption, par laquelle on entreprend de faire, dire, paroistre et estre
plus qu'il ne nous appartient : comme quand on veut parler de choses qu'on n'entend pas, ou faire
un art que l'on ne sçait pas, ou paroistre plus que l'on n'est pas, ou qu'on veut estre plus que l'on ne
peut pas. Et ce dernier porte proprement a l'ambition, qui n'est autre chose qu'un desir desordonné
des honneurs et dignités.
De l'avarice
L'avarice n'est autre chose qu'une volonté immoderée d'avoir des biens temporelz contre
raison, et d'icelle naissent tous les pechés contraires au septiesme commandement ; comm'aussy
la durté (sic) de cœur, qui n'est autre chose qu'un trop grand soin de garder le bien que l'on a,
jusques mesmes a n'avoir point de pitié des souffreteux. Item, l'inquiétude que le soin et l'ardeur
immoderée des choses temporelles excite en nos espritz. De la naissent bien souvent les
tromperies, fraudes, perjures, violances et trahisons.
De la luxure
La luxure n'est autre chose qu'un appetit desordonné du plaisir de la chair. Or, l'appetit est
desordonné, ou parce qu'il veut prendre le plaisir sur un sujet qui n'est pas a [259] nous, comm'il
advient en la fornication et en l'adultaire ; ou parce qu'il le veut prendre contre l'ordre estably par
la nature ; ou parce quil le veut prendre contre la fin et l'intention pour laquelle ce plaisir est destiné.
Or, de la luxure dependent tous les pechés contraires au sixiesme commandement, qui 1204 rendent
l'esprit distrait, obscur, inconsideré, inconstant, terrestre et brutal.
De l'ire
L'ire n'est autre chose qu'un appetit de vengeance, et produit tous les pechés que nous avons
marqué au cinquiesme commandement, 1205 qui engendrent les pechés suivans :
1. L'indignation, qui consiste a rejetter comm'indigne le prochain ;
2. L'enfleure du cœur, qui n'est autre chose qu'un assemblage de pensées et de mouvemens
qui portent le cœur a la vengeance ;
3. Le desordre [de] la voix et de la parolle ; 4. les injures ; 5. les blasphemes ; 6. 1206 les
querelles et les noyses.
1202 contrarieté [de volonté] a la volonté du prochain, [deraisonnable et dereiglée...]
1203 son opinion [sans fondement]
1204 commandement [Or, toutes les dependances de la luxure se reduisent a ce qu'elles]
1205 commandement [Elle produit]
1206 vengeance ; felle met en] desordre la voix et la parolle ; [fait dire] les injures, les blasphemes ; [suscite]
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18.1 Page 171

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De la glotonie
La 1207 glotonnie n'est autre chose qu'un appetit desordonnée (sic) de boire et de manger.
Or, le desordre consiste ou a desirer des viandes ou breuvages trop precieux, ou a les prendre en
trop grande quantité, ou a les faire apprester trop curieusement, ou a s'y complaire trop
delicieusement, ou a les prendre hors de tems et de saison.
1208 La gloutonnie a deux branches : la gormandise, qui regarde les viandes, et l'yvrongnerie
qui regarde le breuvage. Ell'hebete l'entendement, engendre la dissolution, trouble les paroles,
souille le cors et infame toute la vie. [260]
De l'envie
L'envie n'est autre chose que la tristesse que nous avons du bien d'autruy en tant qu'il
semble diminuer le nostre. J'ay dit, entant qu'il semble diminuer le nostre, parce qu'on peut estre
marry du bien de quelcun non seulement sans pecher, mais aussy par charité : comme quand on
est marry que les indignes soyent advancés, ou que les ennemis de la Republique prosperent.
De l'envie naissent les jalousies, competances, haines, murmurations, detractions,
resjouïssances du mal d'autruy et mille sortes de maux.
De la paresse
La paresse n'est autre chose qu'une certaine tristesse que l'on a a pratiquer le bien spirituel.
Elle procede d'une trop grande affection aux choses temporelles et des trop grandes delectations
es choses 1209 sensuelles, qu'il nous fascile de laisser pour suivre la vertu ; comm' aussi elle procede
encor de l'apprehension du travail et de ia peine qu'il y a a pratiquer les bonnes œuvres.
Elle produit le decouragement, par lequel on n'ose pas entreprendre le bien qui nous est
conseillé ; l'engourdissement d'esprit, par lequel on est empesché de se mouvoir a bien faire ; 1210
l'aigreur malicieuse, par laquelle on hait la perfection chrestienne ; 1211 la rancune et desgoust
contre les personnes spirituelles, parce qu'ilz nous provoquent au bien ; 1212 l'inadvertance aux
choses bonnes ; le 1213 desespoir, comme sy c'estoit chose impossible de garder les commandemens
de Dieu et de se sauver.
Des pechés qui se commettent contre les commandemens de l'esglise
On peche contre le premier commandement de l'Esglise, [261] violant le Caresme, les
vendredis, samedis, vigiles et Quattre Tems quant a l'usage des viandes prohibées, ou bien ne
jeusnant pas 1214 ; ce qui s'entend, sinon que quelque legitime occasion nous empesche.
On peche contre le second commandement, n'oyant pas la Messe entiere és jours de
Dimanche et de feste, sinon aussy que quelque legitime raison excuse. Or, celuy est estimé ouïr la
Messe entiere qui oyt presque toute la Messe, encor qu'il ne l'oye pas exactement toute : ainsy,
celuy qui arriveroit quand on dit l'Epistre, oyant tout le reste de la Messe, satisferoit au
commandement, l'Esglise n'ayant pas intention d'obliger plus rigoureusement que cela.
On peche contre le troisiesme commandement, lors qu'on obmet de se confesser a
Pasques, ou qu'on se confesse a quelqu'un qui n'a point d'authorité.
On peche contre le quatriesme, ne se communiant pas a Pasques. Or, celuy là est estimé communier
1207 La [gormandise ou]
1208 [Ell'a deux especes...]
1209 et delectations
1210 bien faire ; [une certaine aigreur...]
1211 chrestienne ; [une]
1212 au bien ; [une]
1213 bonnes [et maintenois elle conduit jusques au]
1214 pas [sinon que quelque raison legitime empesche...]
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18.2 Page 172

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a Pasques, qui communie dans les huict jours precedens ou dans les huict jours suivans la feste de
Pasques.
On peche contre le cinquiesme commandement, ne payant pas la disme et autres devoirs
ordinaires qu'on est obligé de rendre a l'Esglise.
Moyen de discerner le peché mortel du veniel
Toute la loy de Dieu consiste en ces deux commandemens : Tu aymeras Dieu sur toutes
choses et ton prochain comme toy mesme1215. C'est pourquoy, tout ce qui est contraire a l'amour
de Dieu et a l'amour du prochain, sy la contrarieté est parfaite, doit estre estimé peché mortel ;
mais sy la contrarieté n'est pas parfaite ni accomplie, ains 1216 imparfaite et non accomplie, il n'y a
que peché veniel.
Or, la contrarieté qui se fait a l'amour de Dieu et du prochain est reputée imparfaite en trois
façons :
Premierement : de la part de nostre volonté, lorsque nostre liberté n'est pas parfaite et que,
par consequent, [262] nostre volonté n'agist pas avec pleine deliberation ny avec un total usage de
son franc-arbitre : comm'il arrive quelque fois que nous dirons un'injure a quelqu'un par une si
soudaine surprise de colere, que nous l'avons plus tost dite que pensée ; car alors, bien que d'injurier
le prochain soit ordinairement un peché mortel, toutesfois, a raison de ce que l'acte de la volonté a
esté fort imparfait et indeliberé, ce n'est qu'un peché veniel, parce que la contrarieté a l'amour de
Dieu en cet acte de la volonté n'a pas esté une pleine et accomplie contrarieté, ains une contrarieté
sortie par surprise et inadvertence et la volonté n'estant pas pleynement a soy mesme.
Secondement : la contrarieté a l'amour de Dieu et du prochain est quelquefois imparfaite a
raison de la petitesse de la matiere en laquelle ell'est commise : comme, par exemple, derober c'est
un peché mortel, parce que le larcin contrarie a la charité du prochain ; mais pourtant, ce que l'on
derobe peut estre sy peu de chose, que la nuysance qui s'en ensuit contre le prochain est si
extremement legere qu'elle n'est point considerable, et par consequent la contrarieté de cette action
là a l'amour du prochain n'est pas une parfaite contrarieté, mais plustost comm'un commencement
de contrarieté. Ainsy, celuy qui derobe une pomme, une poire, un liard ne peche que veniellement,
parce qu'il offence fort peu le prochain et par consequent ne contrarie pas parfaitement a l'amour
qui luy est deu ; de mesme les coleres legeres, petitz chagrins, ou quelque legere et imparfaite
caresse a l'endroit de la femme d'autruy ne seront pas estimés peché mortel.
Tiercement : la contrarieté a l'amour de Dieu et du prochain est imparfaite a raison de la
nature mesme de l'action que nous prattiquons, laquelle de soy n'est pas parfaitement mauvaise,
mais seulement a quelque sorte de defaut en soy, lequel defaut ne la rend pas contraire a l'amour
de Dieu et du prochain, ains seulement a la perfection de l'amour 1217. Comme par exemple, un
mensonge dit par joyeuseté ou pour excuser quelqu'un : c'est un'action laquelle [263] n'est point
contraire a l'amour de Dieu et du prochain, ou sy ell'est contraire, c'est par une contrarieté fort
imparfaite et qui regarde plustost la perfection de l'amour que l'amour mesme ; car bien que le
prochain reçoive 1218 les petitz mensonges pour la verité, sy est ce que cela ne luy apporte nulle
sorte de nuysance. Or je dis neammoins que la perfection de la charité est violée, parce que la
perfection de la charité ne requiert pas seulement que nous ne nuysions pas au prochain, mais
aussy que nous ne le frustrions pas de ses justes desirs et que nous ne nous contrarions pas nous
mesmes : or, chacun desire naturellement de sçavoir la verité des choses qui luy sont representées,
et nous nous contrarions nous mesmes quand nous parlons contre nostre pensée. De mesme, joüer
plus longuement qu'il ne faut par recreation c'est une chose qui n'est point louable, mais elle n'est
pas de soy contraire a l'amour de Dieu et a l'amour du prochain ; car, comme il appert, en cela il
ny a point de meschanceté, mais seulement de l'inutilité.
1215 Deut., VI, 5 ; Levitic., XIX, 18 ; Matt., XXII, 37-40 ; Marc., XII, 30, 31.
1216 ains [foible]
1217 de l'amour [de Dieu et du prochain]
1218 bien [que par ces mensonges] le prochain reçoive [le mensonge...]
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18.3 Page 173

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Moyens pour divertir les grands du peché de la chair
Les grands ordinairement ne pratiquent point ce peché que par l'entremise de quelques
confidens messagers et solliciteurs. Sy, donc, ilz entreprennent a bon escient de s'amender de ce
peché là, il faut qu'ilz esloignent de leur suitte telles sortes de gens, car par ce moyen ilz perdront
la facilité de retourner au malheur. Or, cet esloignement se peut faire 1219 par beaucoup de bons
pretextes.
De plus, tant que la commodité des affaires le peut permettre, ilz doivent avoir avec eux
leurs femmes ; le mariage estant ordonné, non seulement pour la generation des enfans, mais aussy
pour le remede de la concupiscence.
Chose grandement utile d'avoir tous-jours avec eux certaine sorte de gens, soit
gentilzhommes ou autres, qui ayent beaucoup de la crainte de Dieu ; car, comme la presence [264]
des meschans facilite 1220 le consentement au mal, aussy la presence des bons facilite la resistence.
C'estoit un des saintz artifices du glorieux saint Louys, qui avoit tous-jours pres de soy
quelqu'homme de grande devotion duquel l'entretien le confortoit et consoloit au bien1221. Les
grans donques ayans un de ces gens-là pres d'eux et luy parlant une fois ou deux le jour, c'est
merveille comme ilz en sont divertis du mal et soulagés contre les tentations.
Quand on s'est resoulu a bon escient de se retirer de ce vice, il est bon de s'en declairer
parmy ceux qui sont le plus pres autour de nous, affin de nous brider par nostre propre parolle et
declaration.
Bon encores en la priere du mattin et du soir de faire une resolution particuliere contre ce
peché et offrir cette resolution a Dieu, tantost a l'honneur de sa Passion, tantost a l'honneur de sa
Nativité, tantost a l'honneur de sa sepulture ; quelquefois a l'honneur de la glorieuse Vierge Marie,
sa Mere ; 1222 d'autrefois a l'honneur de nostre Ange gardien ; et ainsy diversement a l'honneur des
Saintz que nous honnorons le plus, protestant que pour l'amour d'eux nous observerons nostre
resolution. Et qui, a l'oraison, adjousteroit quelqu'aumosne pour mesme fin, feroit mieux.
Il est encore bon de s'imposer, voire par vœu, quelque penitence en cas que l'on retombe :
comme seroit de dire tant de prieres a genoux, de jeusner, et semblables choses. Mais sur tout,
l'excellent remede a ce mal c'est de se confesser et communier souvent. Or, bien quil y aye de la
difficulté en ces remedes, si est ce que celuy la se resoulura (sic) aysement de les pratiquer qui se
ressouviendra quil faut ou quitter ce peché par quel moyen que ce soit, ou quil faut quitter la grace
de Dieu et perir eternellement. [265]
Oraison pour dire avant la confession
O Seigneur, faictes moy voir la quantité et l'enormité de mes maux, afin que je les deteste
et me confonde en la grandeur de ma misere ; mais faictes moy voir aussy l'infinité de vostre bonté,
afin que je m'y confesse, et que, comme je confesse humblement devant vous et devant le Ciel que
je suis mauvais, ains la meschanceté mesme de vous avoir tant offensé, je confesse aussy
hautement que vous estes bon, ains la bonté mesme de me pardonner si misericordieusement. O
souveraine Bonté, octroyes le pardon a ce chetif coulpable qui confesse et accuse son peché en
ceste vie mortelle, en esperance de confesser et celebrer vostre misericorde en l'eternelle, par le
merite de la Mort et Passion de vostre Filz qui, avec vous et le Saint Esprit, est un seul Dieu vivant
et regnant es siecles des siecles.
1219 peut faire [avec force...]
1220 facilite [l'acheminement]
1221 Vide Saint Louis, par M. Sepet (Paris, Lecoffre), p. 64.
1222 La vingt-cinquième et dernière page du Manuscrit commence ici ; elle est écrite par le secrétaire qui a transcrit les
quatre premières pages. Mais le texte de Michel Favre finit un peu plus bas, au mot « aumosne » ; ce qui prouve encore
une fois qu'il devait y avoir une copie complète de la main de l'aumônier du Saint, dont quelques pages ne nous sont
pas parvenues.
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18.4 Page 174

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AMEN.
Revu sur l'original conservé à la Visitation d'Annecy.
_____
XIX. Sur la Très Sainte Vierge, a la Mère de Chantal ? [1610-16131223?].
Marie a passé par tous les états de vie pour attirer toutes les âmes à son
divin Fils.
……………………………………………………………………………………………………..
Voyes comme cette Mere universelle de tous les enfans de Dieu s'est faite toute a tous1224
pour attirer et conduire toutes les ames a son Filz. Mais sur tout, regardes combien [266]
doucement cette jeune Princesse a passé du couvent des vierges dans la congregation des mariees,
par son chaste et tres pur mariage avec saint Joseph, auquel, selon la coustume du tems et selon le
conseil divin, elle fut remise par ses parens. De la, elle passa fort humblement dans la societé des
vefves apres la mort de saint Joseph ; et c'est l'opinion de plusieurs Peres, que cette sainte Mere de
Dieu, apres l'Ascension de son adorable Filz au Ciel, vescut en terre plusieurs annees, comme les
autres vefves et comme plusieurs fideles de la primitive Eglise, des aumosnes et de la communauté
des biens des premiers chrestiens.
……………………………………………………………………………………………………..
Revu sur un ancien Ms. de l'Année Sainte de la Visitation, conservé au Monastère d'Annecy.
_____
XX. Prière composée pour la Baronne Marie-Aimée de Thorens, février
16151225
O Dieu eternel, Pere d'infinie bonté, qui aves ordonné le mariage pour en multiplier les
hommes ici bas, repeupler la celeste cité la haut, et aves principalement destiné nostre sexe a cet
office, voulant mesme que nostre fecondité fust une des marques de vostre benediction sur nous :
hé, me voyci prosternee devant la face de vostre Majesté que j'adore, vous rendant graces de la
conception de l'enfant auquel il vous a pleu donner estre dedans mon cors. Mais, Seigneur, puisque
ainsy il vous a semblé bon, estendes donq le bras de vostre providence jusques a la perfection
[267] de l'œuvre que vous aves commencee : favorises ma grossesse de vostre perfection, et portes
avec moy, par vostre continuelle assistence, la creature que vous aves produite en moy, jusques a
l'heure de sa sortie au monde ; et lhors, o Dieu de ma vie, soyes moy secourable, et de vostre sainte
main supportes ma foiblesse et receves mon fruit, le conservant jusques a ce que, comme il est
vostre par creation, il le soit aussi par redemption, lhors qu'estant receu au Baptesme il sera mis
dans le sein de l'Eglise vostre Espouse.
1223 Ce texte, que nous empruntons à l'Année Sainte de la Visitation (ancien Ms.), pourrait être un fragment d'Avis à
la Mère de Chantal, ou encore le passage d'un Sermon aux Religieuses de la Visitation. Le membre de phrase : « De
la, elle passa fort humblement dans la societé des vefves », fait plutôt songer à la première, déjà peut-être à Annecy ;
d'où les dates extrêmes proposées, mais sous toutes réserves.
1224 I Cor., IX, 22.
1225 Le 4 février 1615 saint François de Sales écrit à la Mère de Chantal, alors à Lyon : « Nostre fille de Thorens se
confessa » le 1er février, « et s'en alla bien brave ; elle m'a prié de luy faire un'orayson qu'elle die tous les jours tandis
qu'elle sera grosse ; ce que je feray, et vous en envoyeray une copie affiti que vous sachies tout. » (Tome XVI, p. 303.)
Le Saint ne dut pas tarder à satisfaire le pieux désir de Marie-Aimée, sa belle-sœur ; la prière fut certainement
composée dans le courant de février, et imprimée pour la première fois en 1629, Epistres spirituelles, liv. III, p. 567.
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O Sauveur de mon ame, qui, vivant ici bas, aves tant aymé, si souvent pris entre vos bras
les petitz enfans, hé, receves encor celuy ci et l'adoptes en vostre sacree filiation, affin que, vous
ayant et invoquant pour Pere, vostre nom soit sanctifié en luy, et que vostre royaume luy
advienne1226. Ainsy, o Redempteur du monde, je le voüe, dedie et consacre de tout mon cœur a
l'obeyssance de vos commandemens, a l'amour de vostre service et au service de vostre amour.
Et d'autant que vostre juste courroux rendit la premiere mere des humains, avec toute sa
pecheresse posterité, sujette a beaucoup de peynes et douleurs es enfantemens, o Seigneur,
j'accepte tous les travaux qu'il vous plaira permettre m'arriver pour cette occasion ; vous suppliant
seulement, par le sacré et joyeux enfantement de vostre innocente Mere, de m'estre propice a
l'heure du mien douloureux, de moy, pauvre et vile pecheresse ; me benissant, avec l'enfant qu'il
vous plaira me donner, de la benediction de vostre amour eternel, qu'avec une parfaite confiance
en vostre bonté je vous demande tres humblement.
Et vous, Vierge Mere tres sainte, ma chere Dame et unique Maistresse, qui estes l'unique
honneur des femmes, receves en protection et dans le giron maternel de vostre incomparable
suavité, mes desirs et supplications, affin qu'il plaise a la misericorde de vostre Filz de les exaucer.
Je le vous requiers, o la plus aymable de toutes les creatures, vous en conjurant par l'amour virginal
que vous portastes a vostre cher espoux saint Joseph, par l'infini merite de la naissance de vostre
Filz, par les tressaintes [268] entrailles qui l'ont porté et par les sacrees mammelles qui l'ont allaité.
O saintz Anges de Dieu, deputés a ma garde et a celle de l'enfant que je porte, defendes
nous, gouvernes nous, affin que par vostre assistence nous puissions en fin parvenir a la gloire
delaquelle vous jouisses, pour, avec vous, louer et benir nostre commun Seigneur et Maistre, qui
regne es siecles des siecles. Amen.
_____
1226 Matt., VI, 9, 10.
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XXI. Avis a la Mère de Chantal, [1613-1615 ?1227]. Confiance et
abandon. La Mère de Chantal doit tenir son âme ferme, sans «
vouloir voir ce qu'elle fait ou si elle est satisfaitte ». Bel exemple de
simplicité des petits enfants. De la trop grande activité d'esprit naît
l'inquiétude. Quitter tout ce qui déplaît à Dieu et ne pas «
s'embesoigner » de notre avancement spirituel.
Prosterné, ce me semble, en quelque petit recoin du mont de Calvaire ou Nostre Seigneur
me voit, je vous escris ces lignes, ma tres chere Mere, pour vostre soulagement, comme un abbregé
des resolutions plus convenables a vostre advancement devant Dieu.
Je repete ce que si souvent je vous ay dit : que, non seulement en l'orayson, mays en la
conduitte de vostre vie, vous deves marcher en l'esprit d'une tres parfaitte et tres simple confiance
en Dieu, entierement remise et abandonnee a son bon playsir, comme un enfant innocent qui se
laisse aller a la conduitte et direction de sa mere.
Secondement : Et pour bien marcher ainsy a la mercy de l'amour et du soin de ce cher
souverainement aimable [269] Pere, tenes souëfvement et paysiblement vostre ame ferme, sans
permettre qu'elle se divertisse a se retourner sur elle mesme, ni a vouloir voir ce qu'elle fait ou si
elle est satisfatte ; car, ma chere Mere, nos satisfactions ne sont point aymables devant les yeux de
Dieu, ains seulement elles aggreent a nostre propre amour. Le Sauveur de nostre ame inculque si
souvent la simplicité des petitz enfans1228, que nous la devons aymer tres particulierement. Or, ces
petitz enfans innocens ayment leurs meres qui les portent, avec une extreme simplicité : ilz ne
regardent nullement ce qu'elles font, ni ne font point de retours sur eux mesmes ni sur leurs
satisfactions, ilz les prennent sans les regarder ; ilz tetent avec avidité et ne regardent point si ce
lait est meilleur une fois que l'autre, car tandis qu'il y en a ilz le prennent tout de bon, sans autre
curiosité. En cela donq nous devons ressembler aux petitz enfans. Comme encor en cette douce
oysiveté par laquelle ilz ne se soucient point d'aller, ains ayment mieux estre portés ; et quand ilz
commencent a vouloir aller, ilz commencent aussi a souvent tomber et trebuscher es choses qu'ilz
rencontrent. Bienheureux sont ceux qui ne veulent pas tous-jours faire, voir, considerer, discourir
!
Ma tres chere Fille, il faut accoyser nostre activité d'esprit, puisque nous voyons
manifestement que Dieu nous appelle a cette unique, tres simple attention de confiance. De cette
activité d'esprit et du soin que nostre amour nous suggere d'avoir de nostre cœur et de ce qu'il fait,
provient l'inquietude de nostre cœur lhors que nous appercevons soit de loin, soit de pres, quelques
tentations ou de la foy ou de quelques autres vertus que nous cherissons fort, ou mesme quand
nous craignons de perdre la douceur et consolation : c'est pourquoy il faut simplifier nostre esprit,
et ayant abandonné et quitté tout ce qui desplaist a Dieu, demeurer en paix dans nostre barque,
c'est a dire faire en paix les exercices de nostre vocation. Et ne nous empressons point de nostre
advancement ; car, comme ceux qui sont en une barque ou il y a bon vent, sans remuer tirent au
port, aussi ceux qui sont en une vocation bonne, sans s'embesoigner de leur prouffit, prouffitent et
s'advancent perpetuellement. [270] Que s'ilz n'ont pas la satisfaction de voir leurs progres, ilz ne
doivent pas pour cela s'alangourir, car ilz sont certains qu'ilz ne laissent pas de s'advancer.
_____
1227 Les éditrices des Œuvres de sainte Jeanne-Françoise de Chantal ont inséré cet écrit dans le tome II, pp. 19, 20,
avec quelques autres fragments ; elles ont intitulé le tout : Derniers avis du Bienheureux [pendant la Retraite de 1616.]
Les crochets indiquent que la date a été ajoutée par elles, mais aucune note n'en donne la raison. Les premiers numéros
(46, 47) sont bien de la Retraite de 1616 ; les numéros 48-50, qui représentent cet écrit, nous semblent antérieurs. Ne
seraient-ils pas de 1613-1615 ? Nous proposons ces dates avec dues réserves.
1228 Cf. Matt., XVIII, 2, 3.
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XXII. Fragments de conseils a la même, [1613-16161229]. Les petites
vertus. Tout faire pour Dieu. Garder la paix et reposer dans le sein
de la Providence.
Je desire que vous soyes extremement humble et petite a vos yeux, douce, condescendante
et simple comme une colombe1230 ; que vous aymies vostre abjection et la prattiquies fidellement,
employant de bon cœur toutes les occasions qui vous arriveront pour cela.
Dites beaucoup en vous taisant, par la modestie et esgalité.
Supportés et excusés fort le prochain, et avec une grande douceur de cœur 1231.
Faites toutes choses pour Dieu, unissant ou continuant vostre union par de simples regards
ou escoulemens de vostre cœur en luy.
Ne vous empresses de rien, faites toutes choses tranquillement, en esprit de repos. Pour
chose que ce soit, ne perdes vostre paix interieure, quand bien tout bouleverseroit ; car, qu'est ce
que toutes les choses de cette vie en comparaison de la paix du cœur ? [271]
Recommandes toutes choses du tout a Dieu, et vous tenes coye et en repos dans le sein de
sa paternelle Providence.
Prenés bon courage et vous tenes humble devant la divine Providence.
Ne desires rien que le pur amour de Nostre Seigneur.
_____
1229 Ces fragments sont empruntés aux Œuvres de sainte Jeanne de Chantal, tome II, pp. 65-67. Nous avons supprimé
plusieurs passages qui se retrouvent ailleurs dans notre Edition. En 1875, une copie faite par la Sainte se gardait dans
le volume de ses Constitutions, conservé à la Visitation de Rennes ; elle l'avait donné à la Mère Claude-Agnès Joly
de la Roche lors du départ de celle-ci pour la fondation d'Orléans (1620).
Blaise (1821) a publié ces conseils pour la première fois, tome IV des Lettres du Saint, p. 70, les tirant d'un
imprimé qui appartenait à la Visitation de la rue Saint-Antoine, à Paris.
La Mère de Chantal n'a pas copié seulement un écrit de son Bienheureux Père, mais divers conseils reçus à
des dates différentes, entre autres en 1616 ; de là, les dates extrêmes suggérées.
1230 Matt., X, 16.
1231 Pour ces trois premières phrases, cf. tome XXI, pp. 168, 169.
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XXIII. Avis a la même, sur la simplicité, l'abandon et l'amour du
prochain, 31 mars 16161232. Comment marcher en esprit de simplicité.
Ne pas faire des retours sur soi-même. Exemple des petits enfants.
Les « amantes spirituelles » se « purifient et ornent » pour plaire à
l'Epoux céleste. Leur préparation n'est pas longue ni empressée, mais
fidèle et amoureuse. Avis de saint François d'Assise. Imiter le
Sauveur sur la croix. — Les inquiétudes de notre cœur et l'avancement
dans la perfection. Rien ne peut ébranler celui qui se remet au bon
plaisir de Dieu. Regarder le prochain dans la poitrine du Sauveur.
La présence ne peut rien ajouter « a un amour que Dieu a fait, soustient
et maintient ». — Vivre et mourir comme il plaira au « cœur souverain »
de Notre-Seigneur. Arrêter l'inconstance de l'esprit humain par la
force des anciennes résolutions.
En ce saint jour anniversaire auquel nous celebrons la memoire de nostre Redemption, je
vous escris ces lignes, ma tres chere Fille, comme un abbregé des resolutions plus convenables a
vostre advancement au pur amour de Nostre Seigneur crucifié.
Non seulement en l'orayson, mays encor en la conduitte [272] de vostre vie, marches
invariablement en esprit de simplicité, abandonnant et remettant toute vostre ame, vos actions et
vos succes au bon playsir de Dieu, par un amour de parfaitte et tres absolue confiance, vous
delaissant au soin et a la mercy de l'amour eternel que la divine Providence a pour vous. Et pour
cela, tenes vostre ame ferme en ce train, sans permettre qu'elle se divertisse a faire des retours sur
elle mesme pour voir ce qu'elle fait ou si elle est satisfaite. Helas ! nos satisfactions et consolations
ne satisfont pas aux yeux de Dieu, ains elles contentent seulement ce miserable amour et soin que
nous avons de nous mesme, hors de Dieu et de sa consideration.
Les enfans, certes, que Nostre Seigneur nous inculque devoir estre le modelle de nostre
perfection1233, n'ont ordinairement aucun soin, sur tout en la presence de leurs pere et mere ; ilz se
tiennent attachés a eux, sans se retourner a regarder ni leurs satisfactions ni leurs consolations,
qu'ilz prennent a la bonne foy et en jouissent en simplicité, sans curiosité quelconque d'en
considerer les causes ni les effectz, l'amour les occupant asses sans faire autre chose. Qui est bien
1232 Le P. de la Rivière est le premier qui ait publié cet écrit dans sa Vie de notre Saint (1625), liv. III, chap. XXXII,
p. 351 ; il l'adresse aux Religieuses de la Visitation, avec ce titre : Exercice de l'abandonnement de soy-mesme entre
les mains de Dieu, donné aux mesmes Dames. En 1626 il fut reproduit dans le petit volume des Sacrees Reliques du
Bien-Heureux François de Sales, et depuis lors dans les éditions des Œuvres du Saint, soit dans les Sacrees Reliques,
soit dans les petits Traités. On le trouve également dans les Vrays Entretiens spirituels (1629), où il a été intercalé
dans le douzième Entretien : De la Simplicité. (Voir notre Edition, tome VI, p. 217-219.)
Au livre IV, chap. VI, p. 381 de la même Vie, le P. de la Rivière a inséré les deux alinéas de la page 275, qu'il
a seulement intervertis : « Alhors nous serons tout destrempés en douceur... » et : « Quand sera ce que cet amour
naturel... » La Mère de Chantal n'est pas nommée, mais ces mots la désignent : « Cet incomparable Evesque... manda
dans un billet, il y a environ huict ans, a une sienne fille de cœur et au cœur d'une sienne fille spirituelle. » — Nous
avons donné, mais à tort, ces deux alinéas au tome XVII de notre Edition, sous la date du 15-17 mai 1616 (p. 213 et
la note (735) qui l'accompagne) ; on nous permettra de les rétablir à leur vraie date, sur laquelle le Manuscrit de Nancy,
qui ne nous était pas alors connu, ne laisse aucun doute.
C'est en partie à ce Manuscrit, en partie à l'Autographe même que notre texte est emprunté ; on y remarquera
quelques différences avec le texte du P. de la Rivière. La destinataire est évidemment la Mère de Chantal ; cet écrit
fut-il ensuite retouché par l'auteur et donné à ses Filles de la Visitation ? Nous ne le pensons pas. Peut-être la Sainte
aura-t-elle fait les changements qu'on voit dans la biographie du Religieux Minime, qui date de 1625.
Le premier alinéa est inédit ; il est extrait du Manuscrit de Nancy, ainsi que les pp. 273, 274, lignes 1-10 ;
275, lig. 27, jusqu'à la fin.
1233 Matt., XVIII, 3, 4.
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attentif a plaire amoureusement a l'Amant celeste n'a ni le cœur ni le loysir de se retourner sur soy
mesme, son esprit tendant continuellement du costé ou l'amour le porte.
Cet exercice d'abandonnement continuel de soy mesme es mains de Dieu comprend
excellemment toute la perfection des autres exercices, en sa tres parfaitte simplicité et [273] pureté,
et tandis que Dieu nous en laisse l'usage, nous ne devons point le changer.
Les amantes spirituelles, espouses du Roy celeste, se mirent voyrement de tems en tems
comme des colombes qui sont aupres des eaux1234 tres pures, pour voir si elles sont bien ageancees
au gré de leur Amant ; et cela se fait es examens de conscience, par lesquelz elles se lavent, se
purifient et ornent au mieux qu'elles peuvent, non pour se satisfaire, non pour desir de leur progres
au bien, non pour estre parfaittes, 1235 mais pour obeir a l'Espoux, pour la reverence qu'elles luy
portent, pour l'extreme desir qu'elles ont de luy donner contentement, elles se lavent, se nettoyent
purifient et ornent au mieux qu'elles peuvent. Mays n'est ce pas un amour bien pur, bien net et bien
simple, puisque elles ne se purifient pas pour estre pures, elles ne se parent pas pour estre belles,
ains seulement pour plaire a leur Amant, auquel si la laydeur estoit aussi aggreable, elles
l'aymeroyent autant que la beauté. Et si, ces simples colombes n'employent pas un soin ni fort
long, ni aucunement empressé a se laver et parer ; car la confiance que leur amour leur donne
d'estre grandement aymees, quoy qu'indignes (je dis la confiance que leur amour leur donne en
l'amour et en la bonté de leur Amant), leur oste tout empressement et desfiance de ne pas estre
asses belles ; outre que le desir d'aymer, plustost que de se parer et præparer a l'amour, leur
retranche toute curieuse sollicitude et les fait contenter d'une douce et fidele preparation faite
amoureusement et de bon cœur.
Et pour conclure ce premier point, saint François envoyant ses enfans aux chams, en
voyage, leur donnoit cet advis en lieu d'argent et pour toute provision : Jettes vostre soin en Nostre
Seigneur et il vous nourrira1236. Je vous en dis de mesme, ma tres chere Fille, ma Mere : Jettes
bien tout vostre cœur, vos prætentions, vos sollicitudes et vos affections dans le sein paternel de
Dieu, et il vous conduira, ains portera ou son amour vous veut.
Oyons et imitons le divin Sauveur qui, comme tres parfait [274] Psalmiste, chante les
souverains traitz de son amour sur l'arbre de [la] croix ; il les conclud tous : Mon Pere, je remetz
et recommande mon esprit entre vos mains1237. Apres que nous aurons dit cela, ma tres chere Mere,
que reste-il, sinon d'expirer et mourir de la mort de l'amour, ne vivant plus a nous mesme, mais
Jesuschrist vivant en nous1238 ?
Alhors cesseront toutes les inquietudes de nostre cœur, provenantes du desir que l'amour
propre nous suggere et des tendretés que nous avons en nous et pour nous, qui nous fait
secrettement empresser a la queste des satisfactions et perfections de nous mesme ; et, embarqués
dans les exercices de nostre vocation, sous le vent de cette simple amoureuse confiance, sans nous
appercevoir de nostre progres nous le ferons grandement, et sans aller nous avancerons ; sans nous
remuer de nostre place, nous tirerons païs, comme font ceux qui singlent en haute mer sous un
vent propice.
Alhors tous les evenemens et varietés d'accidens qui surviennent sont receuz doucement et
souefvement : car, qui est entre les mains de Dieu et qui repose dans son sein, qui s'est abandonné
a son amour et qui s'est remis a son bon playsir, qu'est ce qui le peut esbransler et mouvoir ? Certes,
en toutes occurrences, sans s'amuser a philosopher sur les causes, raysons et motifz des evenemens,
il prononce de cœur ce saint acquiescement du Sauveur : Ouy, mon Pere, car ainsy a il esté aggreé
devant vous1239.
1240 Alhors nous serons tout destrempés en douceur, en suavité envers les Seurs et les autres
1234 Cant., V, 12.
1235 A partir d'ici jusqu'aux mots : « aggreé devant vous », notre texte est pris sur l'Autographe conservé à la
Bibliothèque royale de Turin. Il a deux pages.
1236 Ps. LIV, 23.
1237 Luc., XXIII, 46.
1238 Cf. Galat., II, 19, 20.
1239 Matt., XI, 26.
1240 La suite est tirée du Manuscrit de Nancy.
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prochains, car nous verrons ces ames la dans la poitrine du Sauveur. Helas ! qui regarde le prochain
hors de la, il court fortune de ne l'aymer ni purement, ni constamment, ni esgalement ; mays la,
qui ne l'aymeroit ? qui ne le supporteroit ? qui ne souffriroit ses imperfections ? qui le treuveroit
de mauvaise grace ? qui le treuveroit ennuyeux ? Or, il y est ce cher prochain, ma tres chere Fille,
dans le sein et dans la poitrine du Sauveur ; il y est comme tres aymé et tant aymable, que l'Amant
meurt d'amour pour luy.
Quand sera ce que cet amour naturel du sang, des contenances, [275] des bienseances, des
correspondances, des sympathies, des graces, sera purifié et reduit a la parfaitte obeissance de
l'amour tout pur du bon playsir de Dieu 1241 ? Quand sera ce que cet amour de nous mesme ne
desirera plus les presences, les tesmoignages et significations exterieures, ains demeurera
pleinement assouvi de l'invariable et immuable asseurance que Dieu luy donne de sa perpetuité ?
Que peut adjouster la presence a un amour que Dieu a fait, soustient et maintient ? Quelles marques
peut on requerir de perseverance en une unité que Dieu a creé ? La distance et la presence
n'apportera ni n'ostera jamais rien a la solidité d'un amour que Dieu a luy mesme formé.
Sur ces fondemens, abandonnons et delaissons-nous nous mesmes dans le fond du cœur
percé de Nostre Seigneur. Soit fait de nous et en nous selon le bon playsir royal de ce cœur
souverain, auquel, par lequel et pour lequel nous voulons vivre et mourir ainsy et comme il luy
plaira, sans reserve et sans exception quelcomque.
Fait le Jeudi Saint, l'an 1616.
VIVE JESUS qui est mort pour nostre cœur ! et qu'a jamais nostre cœur meure pour revivre
eternellement de la mort de son amour.
1242 Il faut arrester l'inconstance de l'esprit humain en l'instabilité et changement de nos
sentimens et imaginations par la force de nos premieres resolutions, puisque Dieu a establi une
invariable et indissoluble fermeté.
Revu en partie sur le Manuscrit de Nancy et en partie sur l'Autographe conservé à Turin,
Bibliothèque royale. [276]
_____
XXIV. Fragments de conseils a la même, [1615-16161243]. Excellence du
sommeil amoureux entre les bras du Sauveur. La Mère de Chantal
doit demeurer en la remise de tout elle-même à Notre-Seigneur et
coopérer à sa grâce. Que faire à l'oraison. Délaisser sa vie et ses
affaires au bon plaisir de Dieu.
Cet amour simple de confiance et cet endormissement amoureux de vostre esprit entre les
bras de ce Sauveur comprend excellemment tout ce que vous alles cherchant ça et la pour vostre
goust.
Demeures en la tranquille resignation et remise de vous mesme entre les mains de Nostre
Seigneur, sans toutesfois laisser de cooperer courageusement et diligemment a sa sainte grace par
l'exercice des vertus es occasions qui s'en presenteront. Demeures en cette simple et pure confiance
filiale aupres de Nostre Seigneur, sans vous remuer nullement pour faire des actions sensibles ni
de l'entendement, ni de la volonté.
1241 Les trois pages interpolées dans l'Entretien De la Simplicité finissent par ces mots : « du bon playsir divin. »
1242 Cet alinéa est inédit.
1243 Les deux premiers alinéas sont extraits du Manuscrit de Nancy ; ils se trouvent aussi dans les Œuvres de sainte
Jeanne de Chantal, tome II, pp. 14, 15, nos 40, 41. La suite est empruntée au même tome, p. 62.
Il paraît assez probable que ces fragments remontent aux années 1615, 1616.
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19.1 Page 181

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……………………………………………………………………………………………………..
Demeures la en repos, en esprit de tres simple et amoureuse confiance. Et ceci se doit
prattiquer non seulement a l'orayson, ou il faut aller avec une grande douceur d'esprit, sans dessein
d'y faire autre chose quelconque, ains seulement pour estre a la veuë de Dieu dans cette simple
remise et repos en luy et comme il luy plaira ; se contenter d'estre en sa presence, encor que vous
ne le voyies, ni senties, ni sçauries representer, et ne vous enqueres de luy de chose quelconque
sinon a mesure qu'il vous excitera.
Ne retournes nullement sur vous mesme, ains soyes la pres de luy ; non seulement, dis je,
il faut prattiquer cette simplicité et abandonnement en l'orayson, mays en la conduite de toute la
vie, rejettant et delaissant toute vostre [277] ame, vos actions, vos succes, vos affaires au bon
playsir de Dieu et a la mercy de son soin. Il faut tenir l'ame ferme en ce train.
_____
XXV. Derniers avis a la même1244, Annecy, 6 juin 1616. Simplicité de
l'amour, remise de soi-même en Dieu. Tout recevoir de sa main et ne
vouloir que lui.
En ce jour de saint Claude, memorable a nostre Congregation 1245, je ramasse ainsy tout ce
que je vous ay dit, pour l'abbreger : Soyes fidelement invariable en cette resolution, de demeurer
en une tres simple unité et unique simplicité de la presence de Dieu, par un entier abandonnement
de vous mesme en sa tressainte volonté, et toutes les fois que vous treuveres vostre esprit hors de
la, ramenes l'y doucement, sans faire pour cela des actes sensibles de l'entendement, ni de la
volonté ; car cet amour simple de confiance et cette remise et repos de vostre esprit dans le sein
paternel de Nostre Seigneur et de sa Providence, comprend excellemment tout ce que l'on peut
desirer pour s'unir a Dieu. Demeures donq ainsy, sans vous en divertir pour regarder ce que vous
faites ou feres, ou ce qui vous adviendra, en toute occurrence et en tout evenement.
Ne philosophes point sur vos contradictions et afflictions, mais receves tout de la main de
Dieu, sans exception, demeurant douce, patiente et acquiesçant en tout tres simplement a sa sainte
volonté. Que toutes vos paroles et [278] actions soyent accompaignees de douceur et simplicité.
Quand vous appercevres que quelque soin ou desir naistra en vous, remettes le en Dieu, ne voulant
seulement que luy et l'accomplissement de sa sainte volonté, luy laissant le soin de tout le reste.
Demeures en la tressainte solitude et nudité avec Nostre Seigneur Jesus Christ crucifié.
Faites bien cecy, ma tres chere Mere, ma Fille. Mon ame, mon esprit vous benit de toute
son affection, et Jesus soit Celuy qui face de vous, par vous et pour luy sa tres adorable volonté.
Amen, amen 1246.
_____
1244 Migne, tome VI, col. 1004, donne ces Avis d'après une copie de la Mère de Chantal, trouvée, après sa mort, dans
le livre de ses Constitutions. Cet autographe de la Sainte était soigneusement conservé au monastère de la Visitation
de la Charité, à Nevers. Il a été inséré dans ses Œuvres, tome II (Plon, 1875), p. 63, où il est précédé de ces mots : «
Abrégé des Avis de notre Bienheureux Père et le fin dernier. Il me dit ainsi : En ce jour, » etc. Le Manuscrit de Nancy
reproduit cet écrit avec de légères variantes.
1245 C'est en effet en la fête de saint Claude, 6 juin 1610, qu'avait commencé, dans la petite maison de la Galerie,
l'Institut de la Visitation.
1246 « Je vous assure, ma vraie première et très chère fille, » écrivait le même jour la Mère de Chantal à la Mère Favre,
« que je tâche aujourd'hui de fort renouveler mon cœur, afin de vivre dorénavant selon la très sainte volonté de Dieu.
» (Lettres, vol. I, p. 123.)
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XXVI. Questions de la Mère de Chantal a saint François de Sales, et
réponses de celui-ci, fin mai et août-novembre 16161247. Renouveler
chaque année l'abandon de soi-même entre les mains de Dieu. Les
paroles et pensées qu'il faut retrancher. Petit examen conseillé.
Oublier tout. Que la Mère de Chantal demeure ferme en l'oraison de
simplicité et d'abandon ; commandement que le saint Directeur fait à
son esprit. Etre comme de petits enfants. L'indifférence doit se
pratiquer en toutes rencontres. Que l'obéissance à la Règle domine
les « menus attraitz ». Ce que le Saint « desire bien fort ». Parler
peu de soi-même et pourquoi. Le Traitté de l'Amour de Dieu est fait
surtout pour la Sainte. L'oraison et la contrition.
AU NOM DE † JESUS ET MARIE
Premièrement tu dois demander à ton très cher Seigneur s'il trouvera à propos que tu
renouvelles tous les ans, aux reconfirmations, entre ses mains, tes vœux, ton abandonnement
general et remise de toi-même entre les mains de Dieu ; spécifie particulièrement [279] ce qu'il
jugera qui te touche le plus, pour enfin faire cet abandonnement parfait et sans exception, en sorte
que je puisse vraiment dire : Je vis, non pas moi, mais Jésus-Christ vit en moi1248. Que, pour
parvenir là, ton bon Seigneur ne t'épargne point, et qu'il ne permette que tu fasses aucune réserve
ni de peu ni de prou. Qu'il te marque les exercices et pratiques journalières requises pour cela, afin
qu'en vérité et réellement l'abandonnement soit fait.
Je respons au nom de Nostre Seigneur et de Nostre Dame : Quil sera bon, ma tres chere
Fille, que toutes les annees vous facies le renouvellement proposé, et que vous rafraichissies le
parfait abandonnement de vous mesme entre les mains de Dieu. Pour cela, je ne vous espargneray
point, et vous vous retrancherés des paroles superflues qui regardent l'amour, quoy que juste, de
toutes les creatures, notamment des parens, mayson, païs, et sur tout du Pere ; et, tant quil se pourra,
des longues pensees de toutes ces choses-lâ, sinon es occasions esquelles le devoir oblige
d'ordonner ou procurer les affaires requises ; affin de parfaitement prattiquer cette parole : Oy, ma
Fille, et entens, et panche ton oreille ; oublie ton peuple et la mayson de ton pere1249. Devant
disner, devant souper et le soir s'allant coucher, examines si, selon vos actions du tems precedent,
vous pouves dire sincerement : Je vis moy, mays non pas moy, ains Jesuschrist vit en moy.
Si l'âme étant ainsi remise, ne se doit pas, tant qu'il sera possible, oublier de toute chose
pour le continuel souvenir de Dieu, et en lui seul se reposer par une vraie et entière confiance ?
1247 Le petit cahier autographe qui contient ces pages se compose de dix feuillets, et a 13 cm. × 8 cm. Sur son
enveloppe, la Mère de Chaugy a écrit : Piece excellente de la main de nos B. Peres et Meres (sic) pour estre produite
au proces de Bm. Dans notre reproduction, l'orthographe de saint François de Sales est maintenue ; à celle de sainte
Jeanne-Françoise de Chantal, trop difficile à lire, est substituée la moderne, et ses questions sont en caractères moins
gros.
Pour la date de la plus grande partie de ces pages, c'est-à-dire jusqu'à : « Faites le et vous vivres. Amen « (p.
283, lig. 31), fin mai 1616 paraît convenir. Ces questions de la Mère de Chantal et les réponses de son Bienheureux
Père ont dû suivre de très près la grande retraite qu'ils firent simultanément au mois de mai de la même année et qu'ils
terminèrent le 22, fête de la Pentecôte. (Voir tome XVII, pp. 212-220 et 408-411.) D'autre part, le 6 juin, le Saint écrit
encore à sa chère Fille : « En ce jour de saint Claude, memorable a nostre Congregation, je ramasse ainsy tout ce que
je vous ay dit... » (Voir p. 278.) Il semble donc que les réponses ci-dessus ont dû précéder ces Avis. Quant à la
dernière partie du petit cahier, la mention du « livre de l'Amour de Dieu », achevé d'imprimer le 31 juillet 1616, permet
de la placer entre août et novembre suivants ; le départ du saint Evêque pour Grenoble eut lieu le 24 ou 25 novembre.
1248 Galat., II, 20.
1249 Ps. XLIV, 11.
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Ouy, vous deves tout oublier ce qui n'est pas de Dieu [280] et pour Dieu, et demeurer
totalement en paix sous la conduite de Dieu.
1250 Si l'âme ne doit pas, spécialement en l'oraison, s'essayer d'arrêter toute sorte de
discours, industrie, replique, curiosité et semblables, et au lieu de regarder ce qu'elle a fait, ce
qu'elle fera ou qu'elle fait, regarder à Dieu ; et ainsi simplifier son esprit et le vider de tout et de
tout soin de soi-même, demeurant en cette simple vue de Dieu et de son néant, tout abandonnée à
la sainte volonté dans les effets de laquelle il faut demeurer contente et tranquille, sans se remuer
nullement pour faire des actes de l'entendement, ni de la volonté. Je dis même qu'en la pratique
des vertus et aux fautes et chutes il ne faut bouger de là, ce me semble, car Notre-Seigneur met en
l'âme les sentiments qu'il faut et l'éclaire là parfaitement ; je dis pour tout, et mieux mille fois
qu'elle ne pourrait être par tous ses discours et imaginations. Vous me direz : Pourquoi sortez-vous
donc de là ? O Dieu, c'est mon malheur et malgré moi ; car l'expérience m'a appris que cela est fort
nuisible. Mais je ne suis pas maîtresse de mon esprit, lequel, sans mon congé, veut tout voir et
ménager. C'est pourquoi je demande à mon très cher Seigneur l'aide de la sainte obédience pour
arrêter ce misérable coureur, car il m'est avis qu'il craindra le commandement absolu.
Puysque Nostre Seigneur, des il y a si long tems, vous a tiree a cette sorte d'orayson, vous
ayant fait gouster les fruitz tant desirables qui en proviennent et connoistre les nuysances de la
methode contraire, demeures ferme et, avec la plus grande douceur que vous pourres, ramenes
vostre esprit a cette unité et simplicité de presence et abandonnement en Dieu. Et dautant que
vostre esprit desire que j'employe l'obeissance, je luy dis ainsy :
Mon cher esprit, pourquoy voules vous prattiquer la partie de Marthe en l'orayson, puisque
Dieu vous fait entendre quil veut que vous exercies celle de Marie ? Je vous commande donques,
que simplement vous demeuries ou en Dieu ou pres de Dieu, sans vous essayer d'y rien faire et
sans vous enquerir de luy de chose quelconque, sinon a mesure quil vous excitera. Ne retournes
nullement sur vous mesme, ains soyes la pres de luy.
Je retourne donc à demander à mon très cher Père si l'âme étant ainsi remise ne doit pas
demeurer toute reposée en son Dieu, lui [281] laissant le soin de tout ce qui la regarde tant
intérieurement qu'extérieurement, et demeurant, comme vous dites, dans sa providence et volonté,
sans soin, sans attention, sans élection, sans désir quelconque, sinon que Notre-Seigneur fasse en
elle, d'elle et par elle sa très sainte volonté, sans aucun empêchement ni résistance de sa part. O
Dieu, qui me donnera cette grâce que seule je vous demande, sinon vous, bon Jésus, par les prières
de votre Serviteur.
Dieu vous soit propice, ma treschere Fille. L'enfant qui est entre les bras de sa mere n'a
besoin que de laisser faire et de s'attacher a son col.
Si Notre-Seigneur n'a pas un soin particulier d'ordonner tout ce qui est requis et nécessaire
à cette âme ainsi remise ?
Les personnes de cette condition luy sont cheres comme la prunelle de son œil1251.
Si elle ne doit pas recevoir toute chose de sa main, je dis jusque aux moindres petites, et
lui demander aussi conseil de tout, de tout ?
Pour cela, Dieu veut que nous soyons comm'un petit enfant. Il faut seulement prendre garde
de ne faire pas des attentions superflues, s'enquerant de la volonté de Dieu en toutes particularités
des actions menues ordinaires et inconsiderables.
Si ce ne sera pas un bon exercice de se rendre attentive, sans attention pénible, de demeurer
tranquillement dans la volonté de Dieu en tant de petites occasions qui nous contrarient et
voudraient fâcher (car pour les grosses on les voit de loin) : comme d'être détournée de cette
1250 Il faut faire cet exercice hors de l'oraison comme en l'oraison.
1251 Deut., XXXII, 10.
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consolation qui semble être utile ou nécessaire ; être empêchée de faire une bonne action, une
mortification, ceci ou cela, quel qu'il soit, qui semble être bon, et, au lieu, être divertie par des
choses inutiles et quelquefois dangereuses et mauvaises ?
Ne consentant point aux choses mauvayses, l'indifference pour le reste doit estre prattiquee
en toutes rencontres sous la conduite de la providence de Dieu.
Se rendre fidèle et prompte à l'observance et obéissance des Règles quand le signe se fait.
Il y a tant d'occasions de petites mortifications ! cela surprend au milieu d'un compte, de quelque
action, on a peine de se déprendre ; il ne faut plus faire que trois points [282] pour achever
l'ouvrage, une lettre à former, se chauffer un peu, que sais-je moi ?
Ouy, il est bon de ne s'attacher a rien tant qu'aux Regles ; de sorte que sil ny a quelque
signalee occasion, alles ou la Regie vous tire et la rendes plus forte que tous ces menus attraitz.
Se laisser gouverner absolument pour ce qui est du corps, recevoir simplement tout ce qui
nous est donné ou fait : bien, mal, incommodité, ce qui sera de trop selon notre jugement, sans en
rien dire ni témoigner nulle sorte de désagrément ; prendre les soulagements du dormir, reposer,
chauffer, de l'exemption de quelque exercice pénible ou de mortification ; dire à la bonne foi ce
que l'on peut faire : que l'on s'insiste 1252, céder sans rien dire. Ce point est grand et difficile pour
moi.
Il faut dire a la bonne foy ce que l'on sent, mais en telle sorte que cela n'oste pas le courage
de repliquer a ceux qui soignent de nous. Au reste, de se rendre si parfaitement maniable, c'est ce
que je desire bien fort de nostre cœur.
Se porter avec grande douceur à la volonté des Soeurs et de tout autre si tôt que l'on la
connaîtra, encore que l'on pût facilement s'en détourner et examiner 1253. Ceci est un peu difficile,
et pour ne rien laisser à soi-même ; car, combien de fois voudrait-on un peu de solitude, de repos,
de temps pour soi ! cependant, l'on voit une Sœur qui côtoie, qui s'approche, qui désirerait ce quart
d'heure pour elle, une parole, une caresse, une visite, que sais-je moi ?
Il faut prendre le tems convenable pour soy et, cela fait, regaigner l'occasion de servir les
desirs des Seurs.
Voilà ce qui m'est venu en vue où il me semble que je pourrais m'exercer et mortifier. Mon
très cher Seigneur l'approuvera, s'il le trouve à propos, et ordonnera ce qui lui plaira et, mon Dieu
m'aidant, je l'obéirai.
Faites le et vous vivres. Amen.
Je demande pour l'honneur de Dieu de l'aide pour m'humilier. Je pense à me rendre exacte
à ne jamais rien dire dont il me pût revenir quelque sorte de gloire ou d'estime.
Sans doute, qui parle peu de soymesme fait extremement [283] bien ; car, soit que nous en
parlions en nous accusant, soit en nous excusant, soit en nous louant, soyt en nous mesprisant,
nous verrons que tous-jours nostre parole sert d'amorce a la vanité. Si donques quelque grande
charité ne nous attire a parler de nous et de nos appartenances, nous nous en devons taire.
Le livre de l'Amour de Dieu, ma chere Fille, est fait particulierement pour vous ; c'est
pourquoy vous pouves, ains deves avec amour, prattiquer les enseignemens que vous y aves
trouvé.
La grace de Dieu soit avec nostre esprit a jamais1254. Amen, amen.
Je ne veux oublier ceci, parce que souvent j'en ai été en peine. Tous les prédicateurs et bons
livres enseignent qu'il faut considérer et méditer les bénéfices de Notre-Seigneur, sa grandeur,
1252 Il faut lire : « que si l'on insiste ».
1253 La Mère de Chantal a sans doute voulu écrire : exempter.
1254 Tit., III, 15.
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notre rédemption, et spécialement quand la sainte Eglise les nous représente. Cependant, l'âme qui
est en l'état ci-dessus, voulant s'essayer de le faire, ne peut en façon quelconque, dont souvent elle
se peine beaucoup. Mais il me semble néanmoins qu'elle le fait et en une manière fort excellente,
qui est un simple ressouvenir ou représentation fort délicate du mystère, avec des affections fort
douces et savoureuses. Monseigneur l'entendra mieux que je ne pourrais le dire. Mais aussi
quelquefois l'on se trouve dur en la mémoire de ces benefices ou en quelque occasion où il serait
requis de discourir : comme quand on veut faire des confessions ou renouvellements, qu'il faut
avoir de la contrition ; et cependant l'âme demeure sans lumière, sèche et sans sentiment, ce qui
donne grande peine.
Que l'ame s'arreste aux misteres en la façon d'orayson que Nostre Seigneur luy a donnee ;
car les prædicateurs et livres spirituelz ne l'entendent pas autrement. Et quant a la contrition, ell'est
fort bonne seche et aride ; car c'est une action de la partie superieure, ains supreme de l'ame.
Revu sur l'Autographe conservé à la Visitation de Turin. [284]
_____
XXVII. Avis a la Sœur Claude-Agnès de la Roche, Religieuse de la
Visitation d'Annecy, [1612-16171255]. Tenir son âme en paix, mais avec
simplicité et amour. Un seul désir : plaire à Dieu. Pour se
débarrasser des troubles de la partie inférieure, passer outre, sans les
regarder. Il faut du temps pour parvenir à la paix. Pourquoi se
défaire de la propre volonté. Dieu veut détacher de toutes choses la
destinataire pour la « mieux serrer a sa Bonté ». Indifférence,
confiance, humilité. Plus on se sent pauvre, plus il faut avoir de
grandes prétentions de bien faire. Essayer d'aimer la correction.
L'égalité du maintien extérieur. S'abîmer dans son néant devant
Notre-Seigneur et la Sainte Vierge.
RECUEIL DES AVIS PARTICULIERS QUE MONSEIGNEUR M'A DONNES
POUR MON AMENDEMENT
J'ay jugé qu'il vous seroit extremement utile de tascher de tenir vostre ame en paix et en
tranquillité ; et pour cela, il faut que le matin en vous levant vous commencies cet exercice, faisant
vos actions tout doucement, pensant a ce que vous aves a faire dans l'exercice du matin, prenant
garde de ne point laisser espancher vostre esprit le long de la journee. Observes tous-jours si vous
estes en cet estat de tranquillité, et si tost que vous vous en treuveres dehors, ayes un grand soin
de vous y remettre, et cela sans discours ni effort.
Je ne veux pas dire pourtant que vous vous bandies continuellement l'esprit pour vous tenir
en cette paix ; car il faut que tout cecy se fasse avec une simplicité de cœur tout amoureuse, vous
tenant aupres de Nostre Seigneur comme un petit enfant aupres de son pere. Et quand il vous
arrivera de faire des fautes, quelles qu'elles soyent, demandes en pardon tout doucement a Nostre
Seigneur, en luy disant que vous estes bien asseuree qu'il vous ayme bien et qu'il vous pardonnera
; et cela tous-jours simplement et doucement. [285]
1255 Ces Avis, publiés par Hérissant (Lettres, 1758, tome V, p. 144), furent écrits par la Sœur de la Roche elle-même
dans un petit livre à son usage. Il est évident que le Saint ne les a pas tous donnés en une seule fois ; nous proposons
les dates 1612-1617 comme assez probables, n'entendant pas exclure, toutefois, les années 1618-1619. Voir la note
de la destinataire au tome XVIII, p. 353.
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Cecy doit estre vostre exercice continuel ; car cette simplicité de cœur vous empeschera de
penser distinctement (car nous ne sommes pas maistres de nos pensees, pour n'en avoir que celles
que nous voulons) qu'a ce que vous aures a faire et a ce qui vous est marqué, sans espancher vostre
ame ni a vouloir, ni a desirer autre chose ; et fera que toutes ces pretentions de plaire et ces craintes
de desplaire a nostre Mere, s'esvanouiront, reservant le seul desir de plaire a Dieu, qui est et sera
l'unique objet de nostre ame.
Lhors qu'il vous arrivera de faire quelque chose qui pourroit fascher ou mal edifier les
Seurs, si c'estoit chose d'une grande importance, excuses vous, en disant que vous n'aves pas eu
mauvaise intention, s'il est vray ; mais si c'est chose legere et qui ne tire point de consequence, ne
vous excuses point : observant tous-jours de faire cela avec douceur et tranquillité d'esprit, comme
aussi de recevoir les advertissemens. Et si bien vostre partie inferieure s'esmeut et se trouble, ne
vous en mettes pas en peyne, taschant a garder la paix emmi la guerre ; car peut estre ne sera-il
jamais en vostre pouvoir de n'avoir pas du sentiment estant reprise. Mais vous sçaves tres bien que
les sentimens, non plus que toute autre tentation, ne nous rendent pas moins aggreables a Dieu,
pourveu que nous n'y consentions pas.
Vous vous trompes en croyant que vous devries faire des actes vifz pour vous desfaire de
ces sentimens et troubles de la partie inferieure ; c'est au contraire, il n'en faut faire nul estat, mais
passer simplement chemin, sans les regarder seulement. Que s'ilz vous importunent trop, il faut se
mocquer de tout cela, comme seroit de leur faire la moue, et cela par un simple regard de la partie
superieure ; apres quoy il n'y faut plus penser, quoy qu'ilz veuillent dire.
Et tout de mesme en est il des pensees de jalousie ou d'envie, et mesme de ces
attendrissemens que vous aves sur vos commodités corporelles, et semblables tricheries qui vont
ordinairement roulant autour de nos espritz, retranchant a vostre ame tout autre soin que celuy de
se tenir en paix et en tranquillité. Je dis mesme celuy de vostre propre perfection ; car je remarque
que ce trop grand soin [286] de vous perfectionner vous nuit beaucoup, d'autant que des qu'il vous
arrive de faire des fautes, vous vous en inquietes, parce qu'il vous semble que c'est tous-jours
contre la pretention que vous aves de vous amender. Tout de mesme, si l'on vous monstre quelque
defaut en vous, vous entres en descouragement.
Et tout cecy, il ne le faut plus faire, ains vous affermir a cela, de ne point vous laisser
troubler pour quoy que ce soit. Que si neanmoins il vous arrive de le faire, nonobstant vostre
resolution, ne vous fasches pas pourtant, ains remettes vous en tranquillité tout aussi tost que vous
vous en appercevres, et tous-jours de la mesme façon que je vous ay dit, tout simplement, sans
effortz ni secousse d'esprit.
Et ne penses pas que cecy soit un exercice de quelques jours ; oh ! non, car il y faut bien
du tems et du soin pour parvenir a cette paix. Il est vray pourtant que, si vous vous y rendes fidele,
Nostre Seigneur benira vostre travail. Sa Bonté vous attire a cet exercice, c'est une chose tout
asseuree : c'est pourquoy vous estes grandement obligee a vous y rendre fidele, pour correspondre
a sa volonté. Il vous sera difficile, d'autant que vous aves l'esprit vif, et qu'il s'arreste et s'amuse a
chaque objet qu'il rencontre ; mais la difficulté ne vous doit pas faire entrer en descouragement,
pensant de ne pouvoir parvenir au but de vostre pretention. Faites tout bonnement et tout
simplement ce que vous pourres, sans vous mettre en peyne d'autre chose.
Et tout de mesme, quand vous arrestes quelque chose qui ne sera bien pris selon vostre
intention : passes outre, pensant a ce que vous aves a faire. Regardes Nostre Seigneur, et tasches
d'aller au Dieu de toutes choses, multipliant le plus que vous pourres les oraysons jaculatoires, les
veuës interieures, les retours, les eslans fervens de vostre esprit en Dieu, et je vous asseure que
cecy vous sera fort utile.
Dieu vous veut toute et sans aucune reserve, et toute fine nue et despouillee ; c'est pourquoy
il faut que vous ayes grand soin de vous desfaire de vostre propre volonté, car il n'y a que cela seul
qui vous nuise, d'autant que vous l'aves tous-jours extremement forte, et vous estes fort attachee a
vouloir ce que vous voules. [287]
Embrasses donq bien fidelement cet exercice, puisque je vous le dis avec la charité de Dieu
et la connoissance que j'ay de vostre necessité, qui est que vous regardies la providence de Dieu
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aux contradictions qui vous seront faites, Dieu les permettant affin de vous destacher de toutes
choses, pour vous mieux serrer a sa Bonté et unir a luy ; car je sçay qu'il veut que vous soyes
sienne, mais d'une façon toute particuliere.
Rendes vous donq bien indifferente, si on vous accordera ou non ce que vous demanderes,
et ne laisses pas de demander tous-jours avec confiance ; et demeures en l'indifference d'avoir des
biens spirituelz ou non. Et quand vous sentires que la confiance vous manque pour recourir a
Nostre Seigneur, a cause de la multitude de vos imperfections, faites alhors joüer la partie
superieure de vostre ame, disant des paroles de confiance et d'amour a Nostre Seigneur, avec le
plus de ferveur et le plus frequemment qu'il se pourra.
Ayes un grand soin de ne vous point troubler lhors que vous aures fait quelque faute, ni de
vous laisser aller a des attendrissemens sur vous mesme, car tout cela ne vient que d'orgueil ; mais
humilies-vous promptement devant Dieu, et que ce soit d'une humilité douce et amoureuse, qui
vous porte a la confiance de recourir soudain a sa Bonté, vous asseurant qu'elle vous aydera pour
vous amender.
Je ne veux plus que vous soyes si tendre, ains que, comme une fille forte, vous servies Dieu
avec un grand courage, ne regardant que luy seul ; et partant, quand ces pensees, si l'on vous ayme
ou non, vous arrivent, ne les regardes pas seulement, vous asseurant que l'on vous aymera tous-
jours autant que Dieu le voudra, et que cela vous suffise. Que la volonté de Dieu s'accomplisse en
vous, qui estes obligee d'une obligation particuliere de vous perfectionner ; car Dieu veut se servir
de vous. Faites le donq, et pour cela tasches a fort aymer vostre propre abjection, laquelle vous
empeschera de vous troubler de vos defautz.
Prenes soin de tenir vostre esprit en paix et occupé des choses hautes, le tirant fidelement
de l'attention que vous faites sur vous mesme, principalement quand vous aves [288] du chagrin
et que vous n'aves point de courage. Occupes-vous a dire a Nostre Seigneur que vous en voules
avoir, et que vous ne consentires jamais a ce que le chagrin vous suggere. Vous feries encores
mieux de vous divertir, faysant accroire a vostre esprit qu'il n'en a point, n'en faysant non plus
d'estat que si vous ne senties point l'effort de cette passion.
Plus vous vous sentes pauvre et destituee de toutes sortes de vertus, ayes de plus grandes
pretentions de bien faire. Ne vous estonnes point des mauvais sentimens que vous aves, pour grans
qu'ilz soyent ; mais ayes soin en ce tems-la de multiplier les oraysons jaculatoires et retours de
vostre esprit en Dieu ; et comme vous aves une grande necessité de la douceur et de l'humilité,
prenes soin de mettre fort souvent emmi la journee vostre cœur en la posture d'une humble douceur.
Et quand vous seres reprise ou corrigee de quelque chose, essayes-vous tout doucement d'aymer
la correction ; et ne vous fasches pas si la partie inferieure s'esmeut, mais faites regner la partie
superieure, affin que vous fassies ce que l'on veut de vous en cette occasion.
Ne soyes point tant amie de vostre paix que, quand on vous l'ostera par quelque
commandement, ou correction, ou contradiction, vous en demeuries troublee ; car cette paix qui
ne veut point estre agitee est recherchee par l'amour propre.
Or, maintenant je vous dis que vous ayes un soin tres particulier de vous rendre esgale en
vos humeurs, sans jamais laisser paroistre en vostre exterieur aucun changement. Quelle apparence
y a il de monstrer ainsy vos imperfections, puisque cela empesche que Dieu ne soit servi de vous
ainsy qu'il le desire ? Cette esgalité de vostre maintien exterieur manque a l'accomplissement des
talens que Dieu vous a donnés. Consideres donq souvent quel desplaysir ce vous sera et ce vous
doit estre, de voir que vous manques de correspondance a la volonté de Dieu, puisqu'il a laissé a
vostre pouvoir d'acquerir cela, qui doit perfectionner et accomplir vostre talent.
Travailles fidelement pour cela, bandes toutes les forces de vostre esprit pour l'acquerir, et
prenes garde que la mortification [289] reluise en vostre exterieur ; en sorte que les seculiers
treuvent plus de sujet de l'observer, que non pas de bonne mine, ni de bonne façon.
Vous deves avoir un tres grand soin de vous pencher toute du coste de l'humilité, puisque
vous aves une si grande inclination a l'orgueil et a la propre estime. Ne doutes point qu'ayant acquis
cette vertu, vous n'ayes quant et quant toutes celles dont vous aves necessité. Approfondisses-vous
fort souvent en l'abisme de vostre neant devant Nostre Seigneur et devant Nostre Dame. Mais
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ressouvenes vous de ce que j'ay dit en l'Entretien de l'Humilité ; et toutes fois et quantes qu'elle ne
produit pas ce fruit, elle est suspecte et indubitablement fause. Aneantisses vous en la connoissance
de vostre petitesse ; mais soudain apres, releves vostre esprit pour considerer ce que Dieu veut de
vous.
_____
XXVIII. Dédicace d'un exemplaire du Traité de l'Amour de Dieu A M.
Humbert Vibert1256, 13 avril 1617 (Inédit)
Antiquæ, probatæ et nunquam perituræ
Avec une grande affection, l'auteur de
amicitiæ domini Humberti Vibert, auctor hujus ce petit ouvrage a envoyé à monsieur Humbert
opusculi hoc signum amoris Dei magno amore Vibert cette marque de l'amour de Dieu, en
misit.
souvenir d'une ancienne, éprouvée et
XIII Aprilis 1617.
impérissable amitié.
FRANÇS, Eps. Gebennen.
13 avril 1617.
FRANÇOIS, Evêque de
Revu sur l'exemplaire du Traité de l'Amour de Genève. [290]
Dieu appartenant à M. le comte de Roussy de
Sales, au château de Thorens-Sales (Annecy).
[290]
_____
XXIX. Confidences a la Mère de Chantal, [1610-16181257]. Pourquoi le
Saint-Esprit nous donne le don d'intelligence. Faveurs divines
accordées à saint François de Sales.
Le Saint Esprit nous donne le don d'entendement pour trois fins : premierement, pour nous
faire croire et admirer les mysteres de la foy ; secondement, pour les nous faire honnorer et reverer
; troysiesmement, pour les nous faire aymer et cherir.
1258 J'advoue que la divine Bonté m'a favorisé d'une particuliere lumiere pour l'intelligence
de ces sacrés mysteres-la, et si me semble que j'entens fort bien l'intention de l'Eglise en tout ce
qu'elle propose a ses enfans. J'ay receu aussi de Dieu un tendre amour envers les maximes de
l'Evangile, et je me persuade que c'est en suite de la connoissance qu'il m'a communiquee de leur
eminente beauté. [291]
_____
1256 Humbert Vibert, de Beaufort, demeurant à Moûtiers, fut un des condisciples de saint François de Sales à Paris et
à Padoue. C'est tout ce que nous savons sur cet ami du Saint à qui il envoya la première édition de son chef-d'œuvre.
1257 « Un jour, traictant avec une bonne ame de la foy parfaicte, » le Bienheureux lui dit les paroles que nous
reproduisons d'après le P. de la Rivière, dans sa Vie du Saint (1625), liv. IV, chap. III, p. 366. La « bonne ame » n'est
autre que la Mère de Chantal ; elle-même le dépose en ces termes (Process. remiss. Gebenn. (I), ad art. 24) : « Un
jour, comme il m'instruisoit sur ce sujet, il me dit des choses admirables de l'excellence de la sainte foy catholique,
adjoustant que Dieu l'avoit gratifié de beaucoup de lumieres... pour l'intelligence des mysteres » etc. La variante est
tirée du Manuscrit de Nancy. Nous ne pouvons qu'indiquer les dates extrêmes entre lesquelles on peut placer ce
fragment.
1258 Dieu m'a favorisé de grandes clartés pour l'intelligence des misteres de nostre foy. Je pense que j'entens fort bien
l'intention de l'Eglise en tout ce qu'elle propose a ses enfans. Dieu m'a donné un tres grand amour aux maximes de
l'Evangile ; je croy que c'est en suite de la connoissance qu'il me donne de leur beauté et excellence.
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XXX. Avis a la Sœur Marie-Adrienne Fichet, Religieuse de la Visitation
d'Annecy, 1611-16181259 (Inédit)
De l'obeyssance
Soyes grandement prompte a l'obeyssance et simple a tout ce qu'on vous commandera, sans
regarder a la personne, ni les choses, pour voir si elles sont a propos ou non.
Si vous voules avancer au chemin de la vertu, ne regardes pas au visage de ceux qui vous
commandent, parce que si vous les consideres il vous arrivera tous-jours de la difficulté a obeir et
sousmettre plustost a cette Superieure qu'a une autre, si elle estoit en charge. Tandis que nous
regardons aux creatures et non au Createur nous ne ferons jamais rien qui vaille, ni ne ferons
aucuns progres en la vertu. Il faut donq obeir a celle que Dieu nous a donnee pour Superieure en
regardant tous-jours Nostre Seigneur en elle, par l'ordonnance duquel elle nous commande et
conseille ce qui est pour nostre bien et avancement spirituel. [292]
Voyes l'obeissance d'Abraham. Nostre Seigneur luy commande de luy sacrifier son filz1260
; il luy dit qu'il sorte de sa terre, de son parentage et qu'il aille au lieu qu'il luy monstrera1261. Il ne
luy dit point le chemin qu'il tiendra, ni Abraham ne luy dit point : Seigneur, de quel costé vous
plaist il que je sorte ? Si vous ne me dites par quelle porte je dois sortir, je ne sçay pas ou aller. Il
ne fit point tout ce discours, mais alla tout simplement la ou la volonté de Dieu l'appelloit pour
executer son bon playsir. Il faut faire ainsy : obeir simplement a la voix de Dieu qui nous est
signifiee par nos Superieures, ne faisant aucun discours ni pensee pour en juger selon nostre
inclination.
Quand vous auries la plus mauvaise Superieure du monde et qu'elle vous auroit craché au
nez, il ne faudroit jamais entrer en descouragement ni en desfiance, mais luy ouvrir tout vostre
cœur en simplicité ; je dis tous-jours selon la partie superieure. Et soyes bien ayse de n'avoir point
de sensible satisfaction, car nous aymons tant ceux qui nous disent de belles choses !
O je vous prie, ne vous attaches point tant aux Superieures. Je ne veux point que vous soyes
attachee a moy, ni a nostre Mere, ni a chose du monde. Dittes avec la Mere Therese de Jesus : «
Tout ce qui n'est point Dieu ne m'est rien. » Ne desires point d'estre aymee particulierement de vos
Superieures. J'ay bien envie de vous arracher cela du cœur, car on vous aymera tous-jours autant
que Dieu voudra, et Dieu le voudra tous-jours et ainsy vous seres aymee. Et puis, qu'est ce que dit
le Point d'humilité ? Qu'il ne faut point vouloir estre aymé 1262. C'est un grand moyen d'avancer en
1259 Il est hors de doute que ces Avis ont été donnés à la Sœur Fichet (voir tome XV, note (70), p. 12), qui les a ensuite
recueillis avec soin. Quelques-uns sont insérés dans sa biographie (tome XI, p. 2 de l'Année Sainte) ; de plus, la phrase
suivante de ce recueil la désigne clairement : « Je veux que vous soyes la fille forte de ceans, la plus courageuse, douce
et humble de toutes, parce que vous estes nee entre mes bras. » (Voir ci-après, p. 303, Comme il se faut relever quand
on est tombee.) On se rappelle, en effet, que la petite Adrienne fut baptisée par saint François de Sales le 30 décembre
1594.
Les dates extrêmes que nous proposons semblent assez probables. Certains conseils sont évidemment du
commencement de la vie religieuse de la dirigée ; d'autres cependant paraissent postérieurs de quelques années. Il est
question, par exemple, de lettres à écrire aux Sœurs absentes (p. 301) ; ce qui ne put se vérifier la première fois qu'en
1615, puis en 1616, 1618 et plus tard encore. Le long séjour du Fondateur à Paris, les occupations absorbantes qui
l'accablèrent ensuite, le nombre croissant de la Communauté d'Annecy font supposer que ces Avis ne doivent pas se
placer dans les dernières années de la vie du Saint.
Nous croyons aussi que les copies conservées à la Visitation de Pignerol et à celle de Caen ne représentent
pas dans son ordre le manuscrit de la Sœur Fichet ; vraisemblablement, on aura groupé sous un même chef et sans
tenir compte des dates ce qui se rapportait au même sujet.
1260 Gen., XXI, 2.
1261 Ibid., XII, 1.
1262 Points notables pour un Religieux désireux d'acquérir une profonde humilité... par le R. P. Dom Sans de Ste
Catherine, Religieux Feuillantin. Revus, corrigés et augmentés par l'auteur. A Paris, chez Michel Soly, M.DC.XXXI.
Dans ce petit opuscule, on trouve en effet ces paroles : « C'est un grand secret en la vie spirituelle pour acquerir la
sainte humilité, de ne pourchasser ni desirer d'estre aymé de personne... Si donc, comme vray amateur d'humilité, vous
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la vertu et en l'amour de Dieu quand nous avons des Superieures qui ne nous ayment pas et que
nous n'aymons pas aussi. Il ne se faut pas descourager ni entrer en desfiance pour cela, bien que
les Superieures n'en doivent [293] donner aucun sujet. Il ne faut pas estre tendre comme les petitz
enfans.
Dites avec l'Apostre : Seigneur, que vous plaist il que je face1263 ? Mais saint Bernard dit1264
qu'il y a des Religieux a qui il faut dire : Que vous plaist il de faire ? O ma chere Fille, ne soyes
point ainsy enfant.
En fin, le cœur obeyssant racontera les victoires1265 ; les victoires nous les remportons
quand nous sousmettons nostre volonté et jugement a celuy d'autruy, a l'imitation de Nostre
Seigneur qui s'est rendu obeissant jusqu'a la mort, et a la mort de la croix1266, et a mieux aymé
mourir que de perdre l'obeissance.
Quand la cloche sonne et nous appelle pour quoy que ce soit, il faut estre prompte a partir
et quitter tout. Il ne faut jamais rien faire contre l'obeyssance, specialement quand il nous vient en
l'esprit que cela n'est pas bien, et que le scrupule nous prend ou que nous ne voudrions pas que nos
Superieures le sceussent.
Il faut demeurer la ou il y a plus de repugnance : c'est la ou il faut faire de plus grandes
prattiques de vertu, obeissant avec respect, sousmission, amour, de bon cœur. Il faut avoir un grand
courage pour obeir a la buandiere comme a la cuisiniere indifferemment, pour Dieu, et tous-jours
parce qu'elles sont nos superieures. Il faut tous-jours penser que les Superieures considerent bien
les choses avant que de les dire ; ainsy, laisses vous gouverner a elles comme un petit enfant.
S'il vous arrive du proffit quand vous rendes conte, de dire que c'est moy qui vous ay
enseigné cet exercice, dites le affin qu'on vous le laisse continuer ; mais si elles vous disent que
vous facies autrement, quittes tout et faites simplement ce qu'elles vous diront, encor que vous
ayes de la repugnance tant a quitter qu'a faire autrement que je vous ay dit. Il faut tous-jours faire
la volonté des autres, sur tout des Superieures, plustost que de les attirer a faire la nostre.
Saint Paul dit une bonne parole : Nous avons conneu Nostre Seigneur selon la chair1267,
mais nous l'aymons maintenant selon l'esprit. Ainsy, ne nous aymons point par les [294] sentimens,
mays selon l'esprit, pour nous perfectionner et nous unir davantage a l'amour de Dieu.
Il faut bien prattiquer tous les moyens qui nous sont donnés pour arriver au Ciel et au salut,
purement pour Dieu et pour luy plaire, parce qu'il le veut ainsy et qu'il est bon de le faire. Si on
vous fait la mine, il ne la faut pas faire ; saint Paul dit qu'il faut rendre bien pour mal1268.
De l'humilité
Nostre Seigneur qui se voyant Dieu, et partant ne voyant aucune chose en soy pour
s'humilier, a voulu neanmoins s'humilier et a dit : Apprenes de moy que je suis doux et humble de
cœur et vous treuveres le repos en vos ames1269. C'est le plus haut point de l'humilité de s'humilier
pour Nostre Seigneur, parce qu'il s'est humilié pour nostre amour, pour nous donner exemple de
faire comme luy.
Il faut estre humble en toutes vos actions, faire vos retours a Dieu par abbaissement en
vostre neant et en vostre propre vileté et bassesse. Vous deves estre bien humble, et vous le seres
a cette heure que vostre Pere vous le commande ; oh ! je vous en prie. Mais je vous dis, d'une
humilité vraye et solide, qui vous rende souple a la correction, maniable et prompte a l'obeyssance.
Allés en paix, ma tres chere Fille, tenes vous humble devant Dieu. Que vos imperfections
ne voulez estre reputé bon, sage, savant, ou doué de quelqu'autre prerogative, ne cherchez point aussi ni ne desirez
d'estre aymé. »
1263 Act., IX, 6.
1264 Serm. in Convers S. Pauli. (P. L., t. CLXXXIII, 363.)
1265 Prov., XXI, 28.
1266 Philip., II, 8.
1267 II Cor., V, 16.
1268 Rom., XII, 17, 21 ; I Thess., V, 15.
1269 Matt., XI, 29.
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vous servent a cela et ne vous facent entrer en nul descouragement ; nous sommes en bon chemin,
par la grace de Dieu. Craignons sans descouragement. Rien ne nous peut nuire que la propre
volonté : or nous n'en devons point avoir, car nous l'avons toute consacree a Dieu ; donq
encourageons-nous sans presomption.
Quand les Saintz avoyent fait quelque bien, ilz ne se l'attribuoyent jamais en particulier,
ouy bien le mal, et mettoyent tout le bien qu'ilz faisoyent en commun : marque d'humilité.
Il faut avoir une gravité de princesse, par ce que nous sommes espouses du Filz de Dieu ;
mais simple, sans affectation ; et l'humilité du publicain1270, pleine de confiance. [295]
Pour avoir la grace de Dieu en nos cœurs il les faut avoir vuides de nostre propre gloire et
dire : O mon Dieu, regardes cette chetifve creature si comblee de misere ; remplisses la de vostre
misericorde.
Quand vous aures fait des fautes contre la douceur, humilies vous ; et quand vous aures fait
des fautes contre l'humilité, adoucisses vous et faites comme je vous ay dit : alles tous-jours de
l'humilité a la douceur, et de la douceur a l'humilité.
Pour recevoir le Saint Esprit il faut rendre son cœur fort profond en humilité, simplifier
vostre esprit, aller en tout simplement, etc.
De la douceur
Le premier sermon que Nostre Seigneur fit a ses disciples fut : Apprenes de moy que je suis
doux et humble de cœur1271. Je vous en dis de mesme, ma tres chere Fille, soyes grandement douce
et humble, ayes tous-jours ces cheres vertus en la bouche et au cœur. Aymes les bien, puisque
Nostre Seigneur les a tant recommandees. L'humilité nous perfectionne envers Dieu, et la douceur
envers le prochain. Que ces vertus reluisent en vous, en toutes vos actions, en toutes vos paroles,
en vos yeux, en tout vostre maintien. Rendes vous amiable, puis aymable ; tasches d'estre gratieuse
et affable, cordiale et communicative. C'est une injustice de vouloir sçavoir les affaires des autres
et ne vouloir rien dire des siennes, par cordialité.
Je vous recommande l'affabilité, que vous sçavés qui se prattique avec ceux a qui on parle
; se rendre joyeuse avec ceux qui le sont, pleine de compassion avec les affligés, s'accommodant
a la façon des autres, a leurs humeurs, faire comme saint Paul : se rendre tout a tous pour les
gaigner tous1272.
Toutes les fois que vous treuveres vostre cœur hors de la douceur, ne faites que le prendre
avec le bout du doigt, et non a plein poing, comme l'on dit, ni brusquement. Ne dittes jamais de
paroles seches ni de correction.
Tasches d'acquerir la sainte tranquillité exterieure et interieure en toutes vos actions et vous
formés selon cela ; [296] et quand on ne sçait plus que faire a son esprit, qui est piqué et troublé,
il se faut divertir. Si cela ne fait rien, il faut pourtant tous-jours essayer, affin que la negligence ne
nous face accroire que le divertissement n'y fait rien ; alhors il faut avoir patience avec soy mesme.
Il faut quelquefois flatter son cœur et le servir en ses maladies et l'encourager ; et quand il est bien
piqué, il le faut prendre comme un cheval de bride et le mettre fermement en soy mesme, sans le
laisser courir apres ses sentimens et passions. Presque tous-jours la douceur a cet effect.
Dites souvent : Bienheureux sont les debonnaires, car le royaume des deux est a eux1273.
Et avec le Psalmiste : Goustes et voyes combien le Seigneur est doux1274. Dites aussi souvent le
verset Virgo singularis1275, et pries Nostre Dame qu'elle visite vostre cœur et le parfume de sa
bonté et douceur.
1270 Luc., XVIII, 13.
1271 Vide pag. præced.
1272 I Cor., IX, 19-22.
1273 Matt., V, 4, 3, 10.
1274 Ps. XXXIII, 9.
1275 Hymn. Ave maris Stella.
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Soyes la plus suave qu'il vous sera possible, et plus que toutes les autres. Selon les
occasions, retires vous en vous mesme, par des retours de vostre esprit en Dieu ; il ne faut pas que
vous soyes trop retiree, car ce n'est point vostre humeur.
Il faut prattiquer l'aneantissement de soy mesme en la douceur.
De la simplicité
Il faut estre grandement simple et aller a la bonne foy. Ayes un grand soin de simplifier
vostre esprit de toutes ses superfluités, et quand elles se presentent, ne faites que tout simplement
les oster, retournant vostre cœur vers Nostre Seigneur sans les regarder ; et vous employes de bon
cœur a ce travail pour l'amour de Dieu, pour en acquerir la couronne. Faites toutes choses pour
Nostre Seigneur, avec une pure intention, sans regarder aux creatures. Si vous faites ainsy, vous
aures un jour la simplicité, grace a Dieu.
Il faut estre simple comme des petitz enfans pour entrer au royaume des Cieux1276. Alles
ainsy simplement quand vous descouvres vostre cœur, sans reflexion. N'amuses point vostre esprit
a ce qui se passe autour de vous. Il faut [297] estre une colombe, parce que Nostre Seigneur est
colombin, et n'avoir rien a cœur que luy et l'affection de luy plaire, et estre tant simplifiee que vous
puissies dire en verité : Je ne pense a rien, hors ce a quoy je suis obligee de penser. Retranches de
vostre cœur toutes sortes de reflexions contraires a la simplicité. Que vostre esprit ne regarde point
ses repugnances et difficultés, mais combattes les en les mesprisant.
Tenes vostre cœur proche de Dieu. C'est le moyen d'estre simple, puisque Dieu est un Esprit
simplificateur. Specialement a l'orayson, je veux que vous y soyes comme une statue dans sa niche,
sans rien vouloir que plaire a vostre Espoux. Pourquoy demeures vous en cette niche, o statue
? Parce que mon Espoux m'y a mise ; je ne veux rien que cela1277.
Donnes vous toute a luy, laisses luy tout faire en vous ; remettes luy vostre reputation et
propre estime. S'il veut que l'on vous ayme et estime, il le permettra bien ; s'il veut que l'on vous
humilie, de mesme. Laisses luy tout le soin de vous et n'ayes soin ni souci que de plaire a vostre
Espoux, et demeures en la niche sans rien vouloir.
De la generosité
Je vous donne pour cette annee la vertu de generosité pour prattique particuliere. Vous
l'entreprendres courageusement et suavement, non point violemment ni rudement. Vous
prattiqueres la douceur et humilité avec generosité, car il faut tous-jours ces deux vertus, sans
jamais les quitter. La vraye generosité consiste a se rendre independante de toutes choses et des
creatures, et ne point penser si elles nous ayment et pensent a nous ou non ; il ne faut point s'amuser
a cela. Je veux bien que vous m'aymies et croyies que je vous ayme bien ; mais je veux que l'amitié
que vous me portes ne nuise point a la perfection et union de vostre esprit avec Dieu, ains qu'elle
vous serve pour vous y unir davantage. Je ne veux point que vous soyes attachee a moy ni a nostre
Mere.
Il faut mespriser toutes reflexions en se relevant courageusement ; aller la teste levee par
dessus tout, et ne regarder [298] point aux actions du prochain, ce qu'il fait ou dit et comme il se
comporte en nostre endroit. Nous n'aurions jamais fait si nous voulions tout considerer et peser les
pensees et reflexions. La generosité passe par dessus tout cela, ne s'attachant qu'a Dieu seul, pour
l'amour duquel elle fait tout, et mortifie ce qui est d'humain pour ne vivre plus que pour luy. Il faut
encourager son ame, luy disant qu'elle est toute a Dieu et pour l'eternité. En effect, nous ne sommes
plus a nous mesme, nous sommes consacrés a Dieu pour l'aymer et servir parfaitement. Il faut
donq aller genereusement en son chemin, sans s'estonner de rien, et laisser aller chacune son
chemin.
1276 Matt., XVIII, 2, 3.
1277 Cf. hujus Edit., tom. IV, l. VI, c. XI ; XV, p. 321 et not. (910) ; XXI, p. 96.
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Il nous suffit, ma chere Fille, que nous sachions Jesus Christ crucifié1278. Ne soyes point
pointilleuse en l'exercice des vertus, mais alles rondement, franchement, naifvement, a la bonne
foy. Certes, je crains l'esprit de contrainte. O ma, chere Fille, je desire que vous ayes un cœur large
et grand au chemin de Nostre Seigneur, mais je veux aussi tous-jours qu'il soit doux.
La vie interieure c'est de faire mourir la nature et vivre selon la grace et la rayson. Quand
les mouches nous piquent, il ne faut que tout simplement les oster ; ainsy, quand il nous vient des
contradictions, il ne faut que tout simplement les oster, c'est a dire s'en destourner et non pas s'en
occuper. Je vous dis comme je voudrois faire et comme je veux que vous facies. Je n'attens pas de
vous que vous n'ayes point de sentimens ; ouy bien que vous les combatties, vainquies et
surmonties avec douceur et patience.
Quand vous n'aures pas de croix, demeures tranquille ; Nostre Seigneur vous en envoyera
bien quand il luy plaira.
Du parler
Demandes conseil a Nostre Seigneur de ce que vous devres dire, avant de parler, et a vostre
partie superieure aussi, affin de ne rien dire qui offense Dieu ni les creatures. Tasches de parler
utilement, posement et humblement a chacun, specialement aux Seurs, comme si elles estoyent
toutes vos Superieures. [299]
Il se faut rendre gratieuse et affable a chacune, et satisfaire aussi les seculiers le plus
doucement et courtement qu'il se peut ; si vous ne pouves courtement, escoutes les avec patience
et cordialité, les divertissant de leurs propos inutiles le plus doucement qu'il sera possible, et les
caressés affablement. Et pour vous oster la crainte que vous ne faites pas ce que vous leur dites,
pensés que vous leur parles comme messagere et envoyee de la part de Dieu ; et quand il vous
vient de prendre de la vanité de ce que vous leur dites, penses en vous mesme que ce que vous
dites n'est pas de vous, mais de Dieu, et vous humilies.
Quand vous aures fait quelque bien ou resiste a des tentations n'y faysant point de fautes,
dites tous-jours : J'ay fait cela par la grace de Dieu. Ou si l'on vous commande quelque chose,
adjoustes y ce mot : que vous le feres avec la grace de Dieu ; ou bien : s'il plaist a Dieu. Il faut
tous-jours dire ainsy, car nous ne pouvons ni faire le bien, ni resister au mal sans la grace de Dieu.
Quand vous envoyeres ou recevres des commissions de quelqu'un, il faut ainsy parler de
Nostre Seigneur, et dire a ceux qui vous les font : Je vous prie de remercier N. de ma part, du
souvenir qu'il a de moy ; asseures le ou asseures la (selon la personne) que je prieray Nostre
Seigneur pour elle, affm qu'il luy continue tous-jours ses saintes graces ; et choses semblables.
Pour la recreation, il la faut faire comme dit la Regie. Il vous faut mettre quelquefois
derriere les autres par humilité ; mais pour l'ordinaire, il se faut tenir la ou vous vous treuveres,
sans affecter les dernieres places. Il faut bien mortifier son bec. Mortifies fort la curiosité. Il ne
faut point vouloir des particularités ; la Regie le dit, et que les premieres seront comme les
dernieres.
On vous parlera autant que vous en aures besoin, et qu'il plaira a Dieu nous inspirer. La
perfection ne consiste pas a parler, mais a faire. Vous aves un esprit comme ces arbres qui ont tant
de branches autour qui les empeschent de croistre : tant de menus desirs empeschent de croistre le
plus grand, qui est de plaire a Dieu.
Quand vous advertisses les autres de leurs defautz il se [300] faut premierement accuser
soy mesme dans son cœur, et puis faire la charité pour l'amour de Dieu. Il faut quelquefois alleguer
ce que disent les Constitutions en ses advertissemens, a l'imitation de Nostre Seigneur ; comme
quand l'esprit malin le tenta au desert, il dit : Tu ne tenteras point le Seigneur ton Dieu1279 ; et aussi
quand les pharisiens l'interrogeoyent, il leur alleguoit l'Escriture, disant : Il est escrit telle chose1280.
Vous en pouves faire de mesme, disant : Les Constitutions disent telle chose. Il faut aussi
1278 I Cor., II, 2.
1279 Matt., IV, 1, 7.
1280 Ibid., XXI, 13 ; Marc., VII, 6 ; Luc. XX, 17 ; Joan., X, 34, etc.
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quelquefois dire les defautz simplement, sans allegation. Il faut aller fort simplement en tout et
laisser dire aux autres ce qu'elles veulent.
Ma chere Fille, il est bon d'entendre les coulpes des autres pour recevoir la lumiere pour
voir les vostres, et penser en soy mesme que cette Seur est bien humble de s'accuser ainsy. Mais
quand vous les escouteres par curiosité, alhors il se faut mortifier et ne les pas ouyr. Et quand vous
dites les vostres, il faut desirer que les autres pensent que vous estes telle que vous vous accuses,
et encor pire, pour pratiquer l'humilité.
Vous pourres escrire aux Seurs absentes, parce que cela les console et entretient l'amour
les unes envers les autres ; quelquefois vous n'escrires point aussi, par humilité et vray mespris de
vous mesme. Il faut cela sans contrainte et avec liberté.
Retranches ces paroles interieures : Si on me dit ceci, je respondray cela ; car cela ne fait
que s'aigrir le cœur et oster de la douceur. Ne vous estonnes point de ces bouleversemens de cœur
et aversions au prochain ; pourveu que vous ne les nourrissies pas volontairement il n'y aura point
de peché. — Mais vous ne leur parles pas de bon cœur. — Il n'y a pas moyen, ma chere Fille, de
le faire comme si on les aymoit bien, sinon qu'on se fist une grande violence. Et de [se] la faire,
c'est une grande prattique de vertu, et de ne la pas faire, c'est la perdre.
Comme il se faut relever quand on est tombee
Quand on tombe en quelques defautz et imperfections, c'est un remede et moyen tres bon,
et qui plaist fort a Dieu [301] et confond le diable, que de s'humilier tout aussi tost devant Dieu et
eslever son esprit au Ciel, usant de ces paroles ou autres semblables : O Seigneur, vous voyes
combien je suis fragile et miserable, et comme je tombe souvent ; pardonnes moy, Seigneur, et
donnes moy la grace de ne plus tomber. Si vous aves failli devant les Seurs, il faut reparer le defaut
; et si c'est vers une particuliere que vous aves commis la faute, dites ainsy, si c'est un manquement
de douceur, [une] replique, tesmoignage de repugnance : « Ma tres chere Seur, je vous demande
pardon de ce que je vous ay tesmoigné de la repugnance et manqué de douceur ; je vous ay mal
edifiee, je vous prie de prier Nostre Seigneur pour moy, affin qu'il me fasse misericorde et la grace
de m'amender. » Et puis, ma chere Fille, ne penses plus a vostre faute. Ne faites pas comme les
petitz enfans : quand ilz sont tombés, ilz s'amusent a regarder si quelqu'un les a veus. Ne vous
estonnes pas de vos cheutes et imperfections ; qu'elles ne vous fassent entrer en aucun
descouragement, car cela est contraire a la perfection que nous desirons.
En toutes actions, tasches de vous mortifier et crucifier vos passions, inclinations,
aversions, avec Nostre Seigneur au mont du Calvaire, affin que vous vivies avec luy en sa gloire.
Cloues vostre cœur au pied de la Croix, et le laisses la reposer en son amour. Soyes bien ayse
d'estre sauvee par la seule misericorde de Dieu, vostre Sauveur, sans aucune correspondance de
vostre part que l'obeissance a ses inspirations.
Qu'importe que vous soyes tous-jours imparfaitte, pourveu que vous ayes le soin de vous
perfectionner en embrassant tous les moyens qui vous seront possibles pour cela, avec fidelité ?
Laisses faire a Dieu, il vous aydera. N'ayes pas tant de soin de vous mesme et de ce que vous
deviendres. Marches tous-jours vostre petit pas, apres les autres. Encor que je die le petit pas, ce
n'est pas que je n'aye un grand desir de vostre avancement a la perfection. Je me prometz beaucoup
de vostre bon cœur, ma chere Fille ; ne me trompes pas, car je veux que vous soyes la fille forte
de ceans, la plus courageuse, douce et humble [302] de toutes, parce que vous estes nee entre mes
bras 1281. Vous sçaves combien mon cœur vous ayme et que, tout a fait et sans reserve, vous vous
estes donnee a moy et que nous avons ensemble le cœur : le vostre est a moy et le mien est a vous,
tout a fait, et quand vous entendres parler de vostre cœur ce sera du mien. Or sus, ma Fille, je vous
prie de n'entrer jamais en desfiance de moy, pour me cacher quelque chose de ce qui se passe en
vous.
Sçachés que vous satisferes asses pour vos pechés quand vous feres tout ce que vous faites
1281 Voir ci-dessus, note (1259), p. 292.
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purement pour Dieu et pour luy plaire, sans autre intention ; et cela est plus parfait.
Nostre Seigneur dit a ses Apostres : Receves le Saint Esprit1282 et le Sanctificateur, mais
parce qu'ilz estoyent sur la terre ilz ne pouvoyent pas s'empescher de crotter leurs piedz marchant
dans la boue. Ainsy, tandis que nous serons en cette vie, nous aurons tous-jours des miseres. Il se
faut fort humilier et prendre bon courage pour combattre nos imperfections, car tandis que nous
serons en cette vie, nous aurons tous-jours a faire et a combattre : c'est l'exercice de nostre humilité.
Il ne se faut pas estonner de se voir tous-jours faillir et tomber en des fautes ; et comme il faut
avoir un grand courage pour se relever quand on a failli, il le faut encor plus grand pour se supporter
se voyant tomber souvent dans les mesmes fautes. Et s'il faut avoir bon courage avec soy mesme,
il le faut encor plus grand a supporter le prochain, avec amour, en ses defautz et retardement a la
perfection par ses continuelles cheutes, sans se relever. Il faut supporter surtout les infirmes.
Vous estes marrie, ma chere Fille, parce que vous faites des fautes : il se faut humilier et
demeurer en paix. Nous ne pouvons rien de nous mesme sans la grace de Dieu1283. Il a dit que nous
ne sçaurions changer un seul cheveu de nostre teste pour le faire blanc ou noir1284.
Qu'on vous accuse a tort ? dites la verité ; nous devons cela. C'est la Superieure, et elle
vous fait la correction comme si on luy avoit celé quelque chose. Il luy faut dire la verité, et
apres souffrir en silence. Au reste, il ne faut pas [303] aller dire ses troubles sur le champ, quoy
qu'ilz nous pressent bien ; il faut attendre qu'ilz soyent un peu passés.
Comme il faut vivre selon la partie superieure
Retenes bien cet advis de vostre Pere, ma tres chere Fille, pour le mettre en prattique : c'est
qu'il faut vivre de la vie de Nostre Seigneur, marcher tous-jours selon la partie superieure. Tenes
cette regie, de ne point vivre selon vos sentimens, mais selon la rayson. C'est une chose qu'il faut
tous-jours redire.
Mais il vous semble que vous ne faites rien si vous ne sentes des consolations et
satisfactions en ce que vous faites, car nous aymons tant cela ! Oh ! je veux que vous soyes plus
courageuse, ma chere Fille, et que vous ne soyes attachee a rien, ni aux consolations sensibles de
Dieu, ni aux affections des creatures. Nostre Seigneur veut que nous facions quelque chose de plus
que les payens qui ayment davantage ceux qui les ayment1285 ; il veut que nous exercions nostre
vertu a l'endroit de ceux que nous aymons moins, et il le faut faire. S'il y avoit une personne qui
fust punaise et qu'il la fallust servir et qu'elle ne se contentast jamais de nos services, il ne faudroit
pas pour cela laisser un brin du service qu'on luy doit. Chacun ayme mieux ceux qui sont a son gré
; c'en est de mesme des vertus. Il est bien facile d'estre doux quand rien ne fasche. Il faut tourner
son esprit a toutes mains par une excellente mortification de nous mesme et de tout ce qui est du
naturel, pour se ranger au bon playsir de Dieu.
Hé, quand sera ce que vous pourrés dire avec l'Apostre1286 : Ce n'est plus moy qui vis, mais
c'est Jesus Christ qui vit en moy. Il faut que ce soit tout a cette heure que vous soyes superieure de
vous mesme et que vous soyes la nouvelle fille de Nostre Seigneur. Vous prattiqueres
l'aneantissement en la vie et mort de Nostre Seigneur.
Il faut avoir un grand soin du salut des ames pour la gloire de Dieu, et joindre a cela
l'humilité.
Comme il faut tous les jours renouveller ses bons propos
Reunisses vous fortement a Nostre Seigneur par le renouvellement [304] de vos vœux, avec
le plus de ferveur qu'il vous sera possible ; et vous jettes aux pieds de Nostre Dame et la tires par
1282 Joan., XX, 22.
1283 Cf. II Cor., III, 5.
1284 Matt., V, 36.
1285 Cf. Matt., 46, 47.
1286 Galat., II, 20.
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sa robbe, la priant qu'elle vous reçoive en sa protection comme une fille nouvelle, et qu'il luy playse
visiter vostre cœur et le parfumer de sa tressainte humilité. Ayes une grande confiance en elle et a
saint Joseph.
Il faut commencer tous les jours a bien faire, comme si on n'avoit rien fait. Pour arrester
l'activité de l'esprit et le pousser de sa negligence, il faut souvent demander a son cœur qu'est ce
qu'il est venu faire en Religion1287, sans penser au lendemain ; chaque jour a bien asses de sa
besoigne1288. Nostre Seigneur dit a ses Apostres : N'ayes point souci du lendemain1289. Il ne faut
pas plus penser au lendemain pour l'esprit que pour le cors.
Ce que le Combat spirituel veut dire, ma chere Fille, que ce n'est pas si grande vertu et
perfection de se resoudre pour tout un jour comme pour toute sa vie ? Sçachés, ma Fille, qu'il
y a deux sortes de perfection : par exemple, une personne sera tentee de la tentation de la chair ;
elle n'y fait point de faute, elle est parfaitte en cela. Une autre n'est point tentee, elle est plus
parfaitte, parce que c'est un don de Dieu. Ainsy ceux qui commencent la perfection d'un jour a
l'autre, ne laissent pas, en leur resolution, d'estre parfaitz aussi bien que les autres qui en font la
resolution determinee tout en un coup, pour toute leur vie. Ressembles, si vous pouves, a la robbe
de [Joseph], qui tenoit despuis la teste jusqu'aux pieds1290 ; c'est a dire, qu'il se faut exercer toute
sa vie a la prattique des vertus.
N'ayes point de desirs avant le tems. Il faut lier nos passions avec des chaisnes d'or, qui
sont des chaisnes d'amour, sans oublier les inclinations et aversions, affin de les ranger en toutes
choses selon le bon playsir de Dieu.
Ayant fait vostre reveuë, rejetté et detesté vos imperfections, il reste a faire la fin, qui est
de bien mettre en prattique vos resolutions et vouloir des-ormais vivre toute a Dieu et vous
appliquer a son amour. Rendes vous toute abjecte a vos propres yeux : nous en avons bien sujet. Il
faut grandement aymer son abjection, mais tout doucement. [305] Il ne faut pas estre tant rude a
soy mesme. L'amour de nous mesme ne meurt jamais qu'avec nous ; on le mortifie bien, mais il
revient tous-jours. Quand nous voyons que nous ne sommes pas si parfaitte que nous voudrions, il
se faut humilier devant Dieu et luy dire : Seigneur, vous voyes ce que je suis ; je voudrois bien
estre plus parfaitte pour mieux vous plaire et aymer.
Ma chere Fille, de la racine amere procede fruit doux et savoureux : c'est la mortification.
Vous estes en la plus heureuse vocation du monde et en la grace de Dieu ; si vous fussies demeuree
au monde, vous eussies plus pati en un jour que vous ne feres icy en toute vostre vie. O Dieu,
plustost mourir que s'en repentir.
Pour nous, c'est le chemin du Ciel que nos Regles et Constitutions. Il faut estre bien exacte
a les observer. Leur esprit, c'est l'humilité et la douceur interieure et exterieure. Unisses vous fort
a Dieu, et ne luy demandes rien que son amour et l'union de vostre volonté a la sienne, et dites
souventesfois : Vostre volonté soit faite, vostre Nom soit sanctifié, vostre royaume nous
advienne1291. Pries Nostre Dame qu'elle offre vostre cœur a son Filz et le rende aggreable a sa
divine Majesté. Jettes vous a ses pieds et en son giron, demandes luy souvent sa benediction.
Il faut aymer Dieu de tout son cœur. En fin, nous sommes espouse d'un Espoux crucifié ;
il est raysonnable que nous le soyons aussi avec trois clous comme luy. Faites toutes vos actions
pour vous rendre aggreable a Dieu ; vous n'estes ceans que pour cela et pour vous perfectionner.
Il faut aymer et vouloir sentir en soy la Passion de Nostre Seigneur crucifié.
Vous prattiqueres cette annee le mespris et rejet de toutes vos pensees inutiles. C'est une
parole de Nostre Seigneur : qui marche droitement a luy ne regarde qu'a le suivre droitement, sans
regarder les autres1292 ; n'y penses point. Il ne s'ensuit pas que vous facies comme elles. Marches
vostre voye courageusement.
1287 Cf. supra, p. 172.
1288 Cf. Matt., VI, 34.
1289 Ibid.
1290 Gen., XXXVII, 3, 23.
1291 Matt., VI, 9, 10.
1292 Cf. Luc., IX, 61, 62.
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Sentir la Passion de Nostre Seigneur, c'est quand il se presente une occasion de colere : il
se faut representer [306] comme Nostre Seigneur se comportoit en sa Passion. Quel acte de colere
fit il ? Il faut imiter sa douceur. Je vous la donne cette annee pour prattique.
Les Constitutions disent qu'il faut marcher droitement, « sagement1293 ». Il faut faire
comme ceux qui vont par un beau chemin, rempli de belles fleurs : [ils] ont beaucoup de sujetz de
s'amuser par le chemin ; ilz ne s'amusent a rien, pas seulement a cueillir ni sentir ces belles fleurs,
ilz font leur chemin droit. Il faut faire ainsy, aller droit a Dieu, le regardant tous-jours devant soy,
sans s'amuser a rien. Ce n'est pas aller droit de penser beaucoup a ses fautes, et aussi si les
Superieures nous ayment. Il ne faut pas estre marrie si elles ne nous ayment et ne tesmoignent
point d'affection a nostre avancement ; il suffit qu'elles l'ayent devant Dieu. Si elles nous negligent
et nostre avancement, il ne faut pas se negliger soy mesme, ni perdre courage a s'avancer. Il faut
estre bien ayse si elles nous ayment, parce que cela donne courage a s'avancer ; mais ce n'est pas
marcher droit de penser beaucoup a cela.
Ne regardés qu'a Dieu, ma Fille, pour luy plaire en tout, et generalement alles en toutes
choses simplement devant.
Ne vous mettes point en peyne de ce que les autres diront de vous. Marches tous-jours
vostre train en l'amour de Dieu, ma chere Fille, que j'ayme bien de tout mon cœur.
De l'amour de Dieu [et du prochain]
Ma chere Fille, oyes saint François s'escrier : Nostre Seigneur est mort d'amour et personne
ne l'ayme1294 ! Taschés donq [de l'aimer] de tout vostre cœur, de toutes vos forces et puissances.
Vous luy estes bien obligee pour tant de graces qu'il vous a faites et fait continuellement. Nostre
Seigneur vous a aymee de toute eternité1295 et il vous ayme bien, croyes le, je vous en prie.
Comme il faut faire pour l'aymer ? Il n'y a rien a faire qu'a l'aymer et mettre tout son
amour en luy. Contentes vous en luy, et vous devries estre contente. Quand il n'y auroit que Dieu
et vous au monde, seroit-ce pas asses, sans vouloir tant de creatures et vous amuser a tant de [307]
tricheries qui passent par vostre esprit ? Resouvenes vous souvent de Dieu par des frequentes
aspirations en luy.
Il ne se faut fascher si on n'est pas tous-jours en la presence de Dieu. Il faut une habitude
et prattique pour donner un bon maintien a vostre ame en ses actions interieures et exterieures.
Faites les toutes comme si Nostre Seigneur vous les ordonnoit et qu'en la presence de son humanité
vous les deussies executer. Je ne dis pas seulement cecy des actions pieuses d'elles mesmes, mais
aussi des indifferentes, comme d'aller se coucher, se reposer, quand il le faut. Si Jesus Christ estoit
present et qu'il voulust que nous allassions rire avec quelqu'un par charité et en sa presence, comme
ferions nous cette action ?
Nostre Seigneur a tant aymé ses creatures, qu'il a estimé qu'il ne pouvoit envoyer ni Anges
ni Saintz pour nous monstrer l'amour qu'il nous portoit, s'il ne venoit luy mesme en personne
prendre nostre humanité et donner son sang et sa vie pour nostre redemption. Cela nous doit bien
encourager a l'aymer et servir de bon cœur et joyeusement.
Essayons nous de n'avoir en l'entendement que Jesus, en la memoire que Jesus, en la
volonté que Jesus et en l'imagination que Jesus. Prononçons souvent ce saint Nom, comme nous
pourrons ; que si pour le present ce n'est qu'en begayant, a la fin nous apprendrons a le bien
prononcer. Le seul amour divin peut seul exprimer ce saint Nom : JESUS. Prions le qu'il luy plaise
l'imprimer au fond de nostre cœur en cette vie, affin de le voir en l'autre. Amen.
De l'amour de Dieu derive celuy du prochain. Il faut bien aymer nos Seurs et les espouses
de Nostre Seigneur. Ne vous estonnes pas si vostre amour n'est pas tendre, tant a l'endroit de Dieu
comme a l'endroit des creatures ; pour estre fort, il en est meilleur. Il les faut aymer tendrement
1293 Constit. XLIX. (Vide tom. præced., p. 121.)
1294 Chronica Fratr. Min., l. I, c. LXXXVI.
1295 Cf. Jerem., XXXI, 3.
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tant que l'on peut. La confiance, deference et sousmission attirent le Createur et les creatures a
nous aymer et nous procurer le bien par inclination. Il ne faut pas seulement se disposer a ne pas
negliger l'innocent, mais il se faut joindre avec luy pour la defence de sa cause. Nous devons a
Dieu la bonne conscience, et au prochain le bon [308] exemple. L'ame du prochain, c'est l'arbre
de vie du paradis terrestre1296 ; il est defendu d'y toucher parce qu'il est a Dieu qui le doit juger, et
nous aussi. Quand il nous vient envie de nous fascher avec quelqu'un, il faut tout aussitost regarder
cette ame dans le sein de Dieu ; a cette heure nous n'aurons garde de nous fascher avec elle, et c'est
le vray moyen de conserver la paix en nostre cœur et l'amour du prochain.
Et pourquoy ne nous appartient il d'avoir des graces, desirs et sacrees inspirations ? Nostre
Seigneur commande que nous soyons parfaitz comme son Pere celeste1297 ; il faut tascher de se
perfectionner et y employer toutes nos forces. Et pourquoy ne recevrons nous pas les sacrees
inspirations de nostre divin Espoux, qu'il nous envoye avec tant d'amour ?
Non seulement on est plus obligé a secourir les proches et voysins, mais il le faut faire.
Quand nous sentons que nous n'avons point de confiance en Dieu, il en faut aller prendre
dans son cœur, car Nostre Seigneur en est tout plein. Il ne nous oste jamais sa grace pour ces petites
choses ; il n'est sujet a se fascher contre nous quand nous manquons, pourveu que nous retournions
a luy en nous humiliant avec amour et confiance. Rendes vous autour de luy comme un petit enfant.
Laisses vous gouverner de luy, a son gré ; encor qu'il ne soit pas selon le vostre, il sera tous-jours
bien selon le sien. Il faut entreprendre de se perfectionner, non point pour nostre contentement,
mais pour plaire a nostre Espoux qui le veut.
Des secheresses et sterilités
Sçaches, ma tres chere Fille, qu'on fait plus de chemin quand le tems est couvert qu'au
grand de la chaleur ; ainsy, quand on est en grande secheresse on avance plus au pur amour de
Dieu, pourveu qu'on soit fidele et sans descouragement. L'amour propre n'est pas si satisfait, car
nous voudrions tous-jours avoir des goustz, des satisfactions et consolations, ou autrement tout est
perdu. Nous voudrions avoir les vertus sans qu'il nous en coustast rien. Oh ! il faut estre plus
courageuse que cela, Il faut autant [309] aymer Nostre Seigneur, et plus, s'il est possible, au mont
de Calvaire qu'en celuy de Thabor.
Des tentations : premierement de la vocation
Puisque vous aves choisi cette sorte de vie, par la grace de Dieu, ne permettes point a vostre
cœur de s'appliquer a d'autres desirs ; mais, en benissant Dieu des autres vocations, arrestes vous
humblement a celle ci, puisque Dieu vous a fait la grace de vous y appeller. Demeures donq
simplement en cette resolution, sans regarder ni a droitte ni a gauche, et quand l'ennemi vous mettra
cette tentation au cœur, que vous ne persevereres pas, dites en vous mesme : Si ferons, s'il plaist a
Dieu ; Celuy qui a commencé l'œuvre la parachevera1298. Addresses vous a Nostre Seigneur et luy
dittes que vous le voules aymer et que vous estes toute sienne, et pour rien vous ne vous
desmentires jamais de le vouloir servir le plus parfaittement qu'il vous sera possible en cette sorte
de vie ou il vous a mise luy mesme par sa misericorde.
Soyes bien fidelle a faire tous les exercices de Religion avec le plus de ferveur que vous
pourres. Alles de bon cœur a l'Office, a l'orayson, a la recreation et autres lieux, nonobstant la
secheresse et repugnance que vous y aves. Je dis tous-jours selon la partie superieure. Et ainsy
pour la sainte Communion : quand il vous viendra des desgoustz, ne laisses pas de communier,
mais alles tout simplement et amoureusement recevoir vostre Createur, vous imaginant de le
recevoir avec la Sainte Vierge.
1296 Cf. Gen., II, 9.
1297 Matt., V, 48.
1298 Philip., I, 6.
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Des aversions
Regardes d'ou vient cette aversion, et l'ayant reconneu combattes la ; et si cela accroist
vostre peyne pour un tems, divertisses vous, parlant a Nostre Seigneur d'autre chose. Neanmoins
il faut tascher de se vaincre et parler a cette Sœur le plus gratieusement qu'il est possible, prier
Dieu pour elle, rechercher sa conversation, la caresser, estre bien ayse de luy rendre service. Ne
faites rien qui puisse faire connoistre vostre aversion. En fin, ce sont des [310] mouches du monde
qui nous piquent, mais il [ne] faut que tout simplement les oster.
Pour bien faire, il se faut comporter en ses actions comme si on n'avoit point d'aversion. Et
que vous doit il importer d'en avoir ou non, pourveu que vous ne les suivies et que vous ne les
nourrissies pas volontairement ? Il n'est pas en nostre pouvoir de n'avoir point de tentations et
sentimens, mais ouy bien de n'y point consentir et y faire des fautes en suite. Nostre Seigneur veut
que vous porties sa Croix et permet que vous soyes tentee pour vous esprouver et faire meriter,
parce qu'il vous ayme ; mais il veut aussi que vous soyes fidele a ne point suivre vos sentimens et
inclinations.
Je vous diray, ma tres chere Fille, une chose que vous diries bien a une autre : c'est que ou
il y a plus de repugnance, Nostre Seigneur veut que nous prattiquions plus de grandes vertus, car
la vertu ne s'acquiert que par son contraire. Jamais nous ne l'acquererions si nous n'avions des
occasions de combattre, comme cette fille qui alla treuver saint Athanase affin qu'il luy baillast
une femme qui l'exerçast a la patience, pour en acquerir la vertu1299. Si nous ne nous mettions point
aupres de ceux qui nous piquent, nous n'acquerrions jamais la douceur et patience. Il y a un peché
qu'il faut fuir, et ses objectz, pour en acquerir la vertu contraire ; mais pour la partie irascible il luy
faut aller au devant et faire des actes positifs. De mesme a l'aversion, quand elle ne presse pas trop,
soyes soigneuse de faire des actes positifs. Il faut faire son devoir en ces tentations ; Nostre
Seigneur veut que nous les ayons et que nous rendions nostre devoir aux creatures ; puis, qu'elles
pensent de nous ce qu'elles voudront.
Ne penses pas, ma Fille, que je voulusse trahir vostre ame ; o non, car elle m'est aussi
pretieuse que la mienne mesme. Je vous dis ce que je dois et que vous estes obligee de faire pour
parvenir a la perfection, comme toutes les Filles de Sainte Marie pretendent, et faire tout pour cela.
Je vous dis, ma chere Fille, j'ay un desir tout particulier pour vostre avancement, parce que Dieu
le veut, et vous a donné beaucoup de moyens pour cela. Employes-les bien. Et ne feres vous pas
bien ce que je vous diray ? [311]
Ma chere Fille et partiale, je vous prie, ne faites rien a cette Seur qui puisse luy faire
connoistre que vous luy aves de l'aversion ; au contraire, soyes ayse de luy rendre des services. Il
faut beaucoup aymer le prochain avec tendresse, specialement celles [envers] qui vous aves plus
de repugnances. C'est un grand moyen d'avancer a la perfection et d'acquerir des vertus heroïques.
Ne perdes pas ces occasions que vous aves de vous avancer en l'amour de Dieu.
Il y a de la difference de l'envie aux aversions. L'envie c'est que l'on est marri du bien du
prochain ; l'aversion est une passion qui vient sans que nous voulions, et pour la vaincre quand elle
est forte il se faut divertir et n'y point penser que le moins que l'on peut. Quand elle n'est pas si
forte, il se faut surmonter. Je veux que les autres connoissent que vous vous surmontes.
N'avertisses point les Seurs quand vous leur aves de l'aversion.
De la melancolie
Quand vous seres assaillie de la melancolie, divertisses vous tant que vous pourres ; parles,
chantes, recrees vous avec les autres. Mais vous ne dites rien qui vaille, ce vous semble. Il
vaut bien mieux ne rien dire qui vaille, pour aymer son abjection, que suivre son humeur, car c'est
ce que nostre ennemi pretend : nous abattre le courage, pour aucunes choses qui nous puissent
1299 Collat. Patrum, l. XVIII, c. XIV. (Vide tom. III huj. Edit., p. 127.)
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arriver. Quand bien nous aurions fait un grand peché, il ne faudroit se descourager ni entrer en
aucune sorte de desfiance de la misericorde de Dieu. Ne sçaves vous pas que le throsne de sa
misericorde c'est nostre misere ?
Dites des paroles d'amour a Nostre Seigneur, quoy que sans goust. Ne laisses pas un brin
de vos exercices, pour tout ce que la tentation vous dira de contraire : il les faut redoubler, j'entens
au moins les oraysons jaculatoires, et les faire avec ferveur, et tout le reste des exercices autant
qu'il vous sera possible, en despit de vostre degoust. Sainte Gertrude dit que Nostre Seigneur ayme
mieux qu'on luy bayse les pieds avec de la repugnance que quand on y a bien du goust, parce qu'on
fait plus pour son amour. [312] Saint François demeura trois ans en melancolie et secheresse1300,
et saint Bernard, et tant d'autres. Mais sur tout, ma chere Fille, ne vous estonnes point de tout ceci
et parles a Nostre Seigneur d'autre chose que de ce que vous sentes en vostre cœur ; car cela
aggrandiroit vostre mal. Vous luy en parleres une autre foys, quand le mal sera passé. Parles luy
d'amour, jettes vous entre ses bras comme un petit enfant entre les bras de sa mere ; dites luy que
vous voules estre toute sienne, car il est tous-jours en nostre pouvoir de dire cela, et VTVE JESUS,
et chose semblable. Il vous semble que vous ne pouves pas. Si fait, mais c'est que vous ne
le voules pas, parce que vous y aves de la peyne et que vous n'y aves point de satisfaction. En ce
tems la, parles a Nostre Seigneur d'autres choses, le plus doucement, gratieusement et humblement
que vous pourres.
Supportes vostre mal avec patience, fuyes les choses qui croissent ou font naistre vostre
mal, comme : prendre playsir a vostre pleur, fuir les conversations, faire tout ce que l'on fait avec
regret, et choses semblables. En fin, souffres vostre mal pour Nostre Seigneur.
Pour vos tentations, c'est vostre chemin, ne vous en mettes point en peyne ; tasches
seulement de ne point faire de fautes en leur faveur. Il se faut divertir en des choses exterieures.
En fin, bienheureux, en toutes tentations, qui croit et peut dire : Credo in Deum ; il ressent mille
suavités au cœur. Et ne sçaves vous pas Jesus Christ crucifié1301 ? vous sçaves bien cela, c'est asses
; vous sçaves plus que vous ne faites. Nostre Seigneur a laissé escrit en sa loy que nous aurions
tous-jours des ennemis a combattre jusqu'a la mort. Nous voudrions estre saintz et qu'il ne nous
coustast qu'un Ave Maria !
Vous aves plus de peyne a vaincre vos passions parce qu'elles sont fortes, mais la vertu en
sera plus excellente et Nostre Seigneur vous en sçaura plus de gré. Ce n'est rien que les sentimens
de la partie inferieure, pourveu que la superieure tienne ferme. Saint Paul qui dit : Je ne vis plus,
mais c'est Jesus Christ qui vit en moy1302, se plaint et dit : Je sens une loy en mes membres qui
repugne a celle [313] de mon esprit1303. La loy de l'homme exterieur c'est de frapper des pieds et
mains, dire des paroles ; mais l'interieur ne fait rien de cela, encor qu'il ayt le sentiment. Nos saintz
Peres ont eu des sentimens ; vous n'estes pas plus qu'eux.
De l'office
Pour l'Office, prepares vous avant que d'y aller, ou bien en y allant, et dites : Je
psalmodieray les louanges de Dieu en la face des Anges1304 ; ou bien [pensez] que vous alles avec
Nostre Dame chanter les louanges de Nostre Seigneur. Et tous-jours, quand vous treuveres vostre
esprit distrait, remettes vous doucement en une sainte attention que vous dites les louanges de Dieu
avec Nostre Dame, et penses a elle, joignant vos prieres aux siennes pour les presenter a son Filz.
Tenes vous en reverence devant Dieu, faites des retours de vostre cœur a Nostre Seigneur
quand l'autre chœur respond, et dites du vostre avec attention. Ne vous laisses aller a rire et faire
des impertinences. Faites tout ce que vous pourres pour vous empescher de dormir, pour la
1300 Barthol. de Pisis, De Conform. vitæ B. Franc, ad vitam D. J. C. Redempt. N. lib. I, Conf. VII. (Vide tom. III huj.
Edit., p. 337.)
1301 I Cor., II, 1.
1302 Galat., II, 20.
1303 Rom., VII, 23.
1304 Ps. CXXXVII, 1.
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reverence du Tres Saint Sacrement, des reliques de l'autel et de l'office que vous faites a Nostre
Seigneur avec les Anges. Il faut estre grandement fidele a ne se point arrester a des inutilités ; si
tost qu'on s'en apperçoit, il faut promptement en destourner son esprit. Pour moy je n'y suis point
distrait, pour affaires que j'aye. Quand je suis a l'Office, je m'imagine que je suis au Ciel avec les
Anges, et que je chante avec eux les louanges de Nostre Seigneur ; et au partir de la, je treuve qu'en
un moment toutes ces affaires se font, qui auparavant que d'aller a l'Office me donnoyent tant de
peyne. Nostre Seigneur fait cela. Il ne faut point penser a ses charges ni a ce que nous ferons apres,
quand l'Office sera dit ; vous y penseres quand vous seres sortie du chœur. Conserves bien les
affections que Dieu vous donnera pour les mettre en prattique.
Quand la cloche sonne, penses que Nostre Seigneur vous dit : Ma fille, viens chanter mes
louanges.
Ne laisses pas de dire vos pensees a la Superieure ; encor qu'elle vous mortifiera et fera la
mine, il faut croire qu'elle [314] dit la verité et que vous vous trompes. Divertisses vostre esprit, et
le tenes aupres de Dieu.
Le don d'entendement est un don que Dieu respand dans l'ame juste des lumieres de la foy
et de la ferme creance d'icelles, de leurs clartés et beauté. Il se prattique ainsy : en la fermeté des
considerations que l'on fait a l'oraison, aux affections et resolutions que l'on y fait pour la prattique.
Nostre Seigneur dit : Si quelqu'un me leve de terre, je tireray tout apres moy1305. Il vouloit
dire : Si quelqu'un me crucifie, je tireray toutes les creatures apres moy au Ciel, au moins celles
qui voudront faire prouffit de ma Passion. Nostre Seigneur a dit que quicomque perdra son ame,
c'est a dire sa vie, la gaignera, et que qui la gaignera la perdra1306. En la primitive Eglise tous les
Chrestiens qui estoyent martyrs perdoyent leurs ames et vies temporellement pour les gaigner
eternellement. Nostre Seigneur dit a saint Pierre : Je mettray ma vie pour la tienne ; et saint Pierre
dit le mesme a Nostre Seigneur1307. Les mondains qui vivent selon la chair et les vices gaignent
leurs ames en ce monde pour les perdre eternellement en l'autre. Les Seurs perdent leurs ames
venant icy, parce qu'elles n'ont plus a faire de la vie qu'elles menoyent au monde ; il faut qu'elles
vivent selon Nostre Seigneur crucifié, et le suivant, elles gaigneront leurs ames pour le Ciel. On
perd aussi sa vie quand on mortifie ses inclinations et passions pour vivre selon la rayson.
Vous estes obligee de vous perfectionner.
Il y a difference des murmures a la mesdisance : le murmure est en des choses de peu, la
mesdisance s'entend en des choses grandes.
De l'orayson
Il faut fonder toutes nos oraysons sur celle de Nostre Seigneur au Jardin des Olives1308,
nous despouillant de nous mesme et de tout propre interest, nous resignant a la volonté de Dieu ;
puis luy demander nos necessités et de toutes les creatures, et que son Nom soit sanctifié1309.
Tasches de faire ainsy. Prenes soigneusement un point et vous mettes [315] en la presence de Dieu
avec le plus d'humilité qu'il vous sera possible ; tasches de faire vos considerations, si vous pouves,
et si Nostre Seigneur vous tire et empesche par son attrait et inspiration de faire des considerations
pour vostre amendement, ne les faites pas, vous les feres apres l'orayson si vous pouves ; mais
laisses aller vostre ame aux affections ou Dieu l'attire, sans vous rechercher ni regarder ce qui se
passe en vous, mais soyes fidele a suivre l'attrait de Dieu.
Il faut estre grandement pure ; puisque Nostre Seigneur vous fait ce don, il ne vous le donne
pas pour vos beaux yeux, mais affin que vous le servies mieux et le prochain aussi. Exerces-vous
fidelement a l'orayson et Dieu vous y fera beaucoup de graces. Il semble qu'il conduit luy mesme
vostre ame par le chemin de l'orayson.
1305 Joan., XII, 32.
1306 Matt., X, 39.
1307 Joan., XIII, 37.
1308 Matt., XXVI, 39, 42, 44.
1309 Ibid., VI, 9.
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21.2 Page 202

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Quand on ne peut pas faire des considerations par secheresse, il faut faire ses resolutions
et affections selon la partie superieure, sans se desgouster ni quitter l'orayson ; mais quand il vient
des pesanteurs, sur tout aux oraysons extraordinaires, vous vous pouves bien un peu divertir,
comme pendant la lecture et autres qui ne sont pas d'obligation. Ne laissés pourtant de la faire
quand vous pourres et en aures la devotion, car l'ennemi pourroit bien donner ces pesanteurs affin
de vous divertir de cet exercice. Il se faut surmonter pour Nostre Seigneur et ne se pas laisser
emporter a la negligence de combattre le sommeil et les distractions. Il s'y faut bien preparer, puis,
si Nostre Seigneur prend nostre cœur, il le faut laisser faire et suivre son attrait, sans nous
destourner pour regarder ce que nous faysons ou sentons, car c'est une des plus fines tentations et
distractions que celle la ; il [s'en] faut bien garder.
Alles tout doucement avec Nostre Seigneur, et pendant qu'il vous fait la grace de jouir de
sa sainte presence et vous donner de ses consolations et lumieres, il se faut bien garder de s'en
divertir par une fause humilité. Ne faites pas cela ; gardés vous de le plus faire, car c'est resister au
Saint Esprit et luy faire la loy et vouloir se gouverner soy mesme. Nostre Seigneur nous attire a
luy, nous voulant donner ses graces, et nous resistons ! Il est bien employé [316] qu'il nous laisse
la tout imparfaitz, puisque nous ne voulons pas recevoir la grace et l'honneur qu'il nous fait avec
tant d'amour, sans que nous l'ayons merité. Nous sommes bien coupables. C'est comme si un
seigneur vous appelloit pour vous parler, et que vous n'y voulussies pas aller et que vous dissies :
J'ayme mieux parler a ses valetz. C'en est de mesme resistant aux inspirations et au don de Dieu.
Que vostre principal exercice soit de vous tenir tous-jours aupres de Nostre Seigneur, mais
tranquillement ; et ne laisses pas plus dissiper vostre esprit hors de l'orayson qu'en l'orayson, et
soyes telle hors d'icelle comme vous voudries estre en la faysant. Ne vous en desgoustes jamais,
pour secheresse que vous y ayes. Quand on n'a pas bien fait l'orayson, il le faut reparer par des
oraysons jaculatoires. Soyes fidele a faire des frequens et continuelz retours de vostre esprit en
Dieu.
En fin, qui n'a l'esprit d'orayson et de recollection, il est impossible quasi qu'il arrive a une
parfaitte victoire de soy mesme et a un grand degré de mortification, comme l'experience le
monstre. Toute l'immortification qu'ont aucunes fois les Religieux provient de ce qu'ilz ne
s'addonnent pas a la meditation, laquelle est le chemin raccourci de la perfection. Il n'est pas
possible que l'ame qui au tems de la meditation est occupee de quelqu'autre affection ou desir,
puisse estre attentive a ce qu'elle medite, pour bien recevoir en soy mesme l'image de Dieu auquel
elle cherche de se transformer par l'orayson. C'est comme une eau qui est tant agitee des vens
qu'elle ne represente pas l'image de l'homme, d'autant qu'elle est troublee ; et bien qu'elle soit
claire, les parties du cors y paroissent comme desunies les unes des autres. Tout de mesme l'ame
qui est agitee des vens contraires des passions n'est pas propre pour recevoir en soy l'image de
Dieu.
Il faut estre bien fidele a employer l'heure d'orayson, parce qu'elle est toute a Nostre
Seigneur, sans se laisser emporter aux distractions volontairement. Je sçay bien, ma Fille, que la
perfection ne consiste pas a l'orayson, mais a l'humilité. [317]
Un des preceptes de la vie spirituelle est de prendre deux ou trois Saintz et les prier qu'ilz
intercedent pour nous vers Nostre Seigneur ; mais s'ilz ne nous impetrent pas ce que nous voulons
et desirons d'eux, il ne les faut pas quitter. Nostre Seigneur nous donnera d'autres choses qui sont
meilleures pour nous. Il ne faut pas servir Dieu ni les saintz Protecteurs par fantaisie, ni se
gouverner soy mesme. Il faut tous-jours avoir Nostre Seigneur crucifié devant les yeux ; il nous
regardera, pour respandre sur nous la suavité de ses parfums.
Pour s'habituer a la presence de Dieu, il faut prendre le sujet de l'orayson, comme par
exemple, de la Nativité de Nostre Seigneur. Les Anges chanterent : Gloire au Ciel et paix en la
terre aux hommes de bonne volonté1310. Il faut dire tous les jours : Mon petit Dieu de faix 1311. Et
de celle de la Passion ; de celle icy tires en tous-jours le fruit de la douceur et humilité.
1310 Luc., II, 14.
1311 II Cor., XIII, 11 ; Philip., IV, 9 ; et passim.
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Il faut suivre les mysteres de l'Eglise pour l'orayson ; ce peut estre une tentation de la faire
sur la Nativité au tems de Pasques. Ainsy des autres.
Revu sur deux anciens Manuscrits conservés à la Visitation de Pignerol et à celle de Caen.
_____
XXXI. Avis a une Religieuse de la Visitation sur les vertus qu'elle doit
surtout pratiquer, [1612-16181312] (Inédit)
Aux peynes d'esprit et de cors que vous endures, consoles vous, considerant cinq choses :
[318]
Premierement, que cela arrive par la volonté de Dieu, ou permission, qui la juge estre a sa
plus grande gloire et vostre plus grand bien que cela se fist ainsy.
La seconde, que vos pechés meritent bien cela et davantage.
La troisiesme, que Dieu est la present qui contemple si en l'occasion qu'il vous donne de
prattiquer la vertu, vous prattiqueres la bonne resolution qu'aves prise de ne le jamais quitter ni
offenser.
La quatriesme, que la sainte humanité du Filz de Dieu a bien plus enduré, plus
innocemment et plus injustement que vous ; encourages vous donq par son exemple a patir, et vous
res-jouisses d'avoir ce moyen de l'imiter en cela.
La cinquiesme, que tous les maux que l'on vous fait sont autant de couronnes au Ciel, si
vous les supportes ; si bien que ceux qui sont vos malfaicteurs soyent vos bienfacteurs.
Prattique de l'humilité
Faire toute chose, tant exterieure qu'interieure, avec desir de s'humilier et rendre abjecte.
Se tenir pour la moindre de toutes et vous res-jouir quand l'on vous tient pour telle.
Rabaisser souvent vostre cœur devant Dieu ; aymer que l'on connoisse vos fautes et lourdises, ou
infirmités, et ne rien faire pour les couvrir. Aymer cherement vostre abjection et la tirer de toute
chose.
Ne nous troublons point pour nos fautes, ni pour nostre peu d'advancement, ni pour rien
qui soit en nous, ni que nous puissions faire.
Ne se point excuser, ni interieurement, ni par paroles et actions.
Parfumer son cœur des pensees d'abjection qui viennent.
Se rendre grandement sousmise en toute chose, pour petite qu'elle soit ; estre facile a
condescendre a toutes ; en toutes choses ne rien faire pour estre loüee ni estimee.
Ne point desirer ni aymer que l'on appreuve ou estime ce que nous disons ou faisons.
Nous res-jouir de voir et entendre parler de la vertu [319] de nos Seurs ; porter un grand
respect a nos Seurs, les regardant toutes comme nos Superieures, et mesme oyant en toutes les
sacrees paroles de Nostre Seigneur.
Aymer a faire les choses humbles et abjectes. Aymer a estre reprise et humiliee devant
toutes.
Parler bassement et humblement ; ne point parler de soy, de ses parens, ni d'aucune chose
qui puisse estre a son advantage.
Estre toute courageuse et preste de faire et entreprendre tout ce que l'obeissance nous
ordonne.
1312 La destinataire pourrait être la Sœur Anne-Marie Rosset, qui prit l'habit à la Visitation d'Annecy le 27 septembre
1612. (Voir tome XIX, note (157), p. 33.) Donnés de vive voix par le saint Fondateur, ces Avis ont été résumés et
recueillis par celle à qui il s'adressait. On en trouve la copie dans un Manuscrit conservé à la Bibliothèque publique
de Bourges.
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Avoir une grande confiance en Dieu et au secours de la Sainte Vierge parmi les sentimens
de nos foiblesses et infirmités.
Ne jamais laisser de dire ou de faire aucunes choses pour crainte d'en recevoir de
l'abjection.
Prattique de la douceur
S'accoustumer a parler, et faire toutes ses actions petites et grandes, en la plus douce façon
qu'il est possible.
Au premier sentiment de colere, d'impatience et souslevement de cœur, c'est de ramasser
promptement et doucement ses forces aupres de Nostre Seigneur. Quand on sent quelque trouble
ou ressentiment, recourir a Dieu, invoquant son secours par un simple divertissement.
Quand on a fait quelque acte de colere ou d'impatience, reparer la faute par un acte de
douceur exercee promptement a l'endroit de la personne mesme ; tenir son visage doux, respondant
et faysant gratieusement tout ce que l'on nous ordonne.
Se rendre douce, affable et cordiale en nostre conversation.
Accueillir un chacun doucement, l'ayder et contenter, tant par nos façons que par nos
responses.
Ne tesmoigner jamais aucun mescontentement, pour chose qu'on fasse ou dise de nous.
Ne nous despiter jamais contre nous mesme, ni contre nos imperfections.
Ne se point troubler ni inquieter pour nous voir imparfaitte et mal mortifiee. Avoir un
desplaysir de nos fautes [320] qui soit paisible, rassis et ferme, et non point aigre, empressé ni
inquiete. Reprendre et corriger son cœur doucement et par voye de compassion, disant : Oh ! mon
pauvre cœur, nous voyla tombé ; or sus, relevons nous et quittons pour jamais nos imperfections.
Bailler du courage a son cœur quand on a failli, et de l'esperance que Dieu l'aydera et
qu'avec son [secours] l'on fera prou. Faire ferme resolution de ne plus tomber en sa faute. Ne se
point estonner de nos cheutes, puisque ce n'est pas chose admirable que l'infirmité soit infirme et
la foiblesse foible ; et en fin nous humilier de toutes nos fautes generalement, soyent elles grandes
ou petites ; mettre cela devant Dieu par une humble reconnoissance de nostre misere, puis nous
relever tout doucement.
Prattique de la simplicité
D'avoir une tres unique pretention en toutes ses œuvres et actions, qui est de plaire a Dieu
; de voir et aymer la volonté de Dieu en tout ce qui nous arrive, tant du bien que du mal.
Demeurer tous-jours tranquille de tout, mesme du retardement de nostre perfection,
travaillant neanmoins fidellement pour l'acquerir.
Estre naifve et sincere a descouvrir ses defautz sans les ombrager.
Estre veritable et ronde en nos paroles, sans les multiplier, sur tout pour s'excuser et couvrir.
Estre sans fard, artifice ni reflexions sur nos actions, sur nos fautes et paroles.
Regarder plustost ce que dira Dieu et ses Anges sur ce que nous faisons et disons, que non
point que diront ceux qui nous voyent et entendent.
Vivre au jour la journee, sans tant de prevoyance ni de soin de nous mesmes, ni de tout ce
qui doit arriver.
Faire ce qui nous est present selon nostre vocation, et nous confiant entierement en la divine
Providence.
Faire les choses ainsy qu'elles se presentent, tout a la bonne foy, sans regarder tant [de]
choses. [321]
Prattique de la modestie
N'estre point legere en ses paroles et actions.
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Avoir le visage et les yeux sereins, sans fronce ni mine froide et melancholique ; porter la
veuë basse et marcher avec un maintien humblement rabaissé ; estre cordiale et franche entre les
Seurs.
Se porter et parler avec un grand respect.
Ne point trop familiariser, principalement avec celles a qui nous avons de l'inclination.
Se saluer par l'inclination de la teste, avec application d'esprit et un grand respect.
Ne point contester, ni parler avec empressement ; ne pas rire ni parler trop haut, ni faire des
gestes en parlant, des mains ni de la teste, ni des autres membres du cors.
Respondre ou dire ce que l'on dit posement, sans [faire] la honteuse ni la craintifve.
Faire ses [actions] avec tranquillité et sans empressement ni interieur, ni exterieur.
Retrancher la curiosité es choses esquelles on sent de se contenter.
Avoir la volonté de plaire en toutes choses a Dieu.
Ne point tant chercher de moyens pour bien aymer et servir Dieu, mais se tenir aux pieds
de Nostre Seigneur, demandant sa grace et son amour, sans rechercher autres moyens pour y
parvenir que ceux qui nous sont marqués dans nos Constitutions.
Se contenter de marcher en simplicité en l'observance de nos Regles, sans desirer de sçavoir
autres choses.
Prattique de la charité fraternelle
Ne murmurer ni dire aucune faute d'autruy, quoy qu'elle soit legere. Dire du bien de tous
et ne se plaindre de personne.
Ne jamais rapporter aux autres ce que nous aurons ouy dire d'elles, [si c'est] chose qui
puisse mortifier ou mescontenter ; ne jamais dire aucune chose qui puisse tant soit peu mortifier
les Seurs. [322]
Ne rien dire qui rabbatte ou desappreuve ce que les autres disent.
Ne tesmoigner aucune singularité a aucune, qui puisse tant soit peu donner du soupçon aux
autres.
Traitter avec tous, avec amour et charité ; ne juger personne, ains les excuser, tant a part
soy qu'a l'endroit des autres.
Ne reprendre personne sans en avoir charge.
Fuir toute aversion, mais sur tout de les faire paroistre.
Ne laisser de parler, regarder et se mettre aupres de celles qui nous auront donné quelque
mescontentement.
Prattique de la mortification
Se mortifier en toutes les choses et occasions qui se presentent.
Bien faire son prouffit de toutes les mortifications qui nous arrivent de la part de Dieu, de
la Superieure et des Seurs.
Se mortifier et vaincre en tout ce qui empesche d'observer la Regie.
Bien faire les choses ordinaires que nous faisons tous les jours, tant interieures
qu'exterieures.
Se mortifier de ne point sortir de la celle quand on en a bien envie.
Ne regarder chose aucune qui soit curieuse.
Ne point desirer sçavoir ni demander ce qui ne nous touche point.
Ne point dire ce que l'on sent grande envie de dire.
Se mortifier es choses que l'on doit faire par obligation, comme de manger, se recreer et tel
autre exercice auquel on prend playsir, disant avant que de les faire : Je ne veux pas faire cela pour
mon playsir, ains parce que mon Dieu le veut.
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Prattique de la patience
Ne donner aucun signe d'impatience quand il (le prochain) ne prend pas bien ce que nous
faisons ou avons en charge. [323]
Ne permettre qu'aucune tristesse ni ressentiment s'empare de nostre cœur.
Ne se point ennuyer des advertissemens ni que l'on nous reprenne de nos defautz.
Souffrir avec patience la peyne que nous avons que l'on nous monstre et redise souvent une
mesme chose.
Ne point s'impatienter quand on a de la peyne de retenir et comprendre ce que l'on nous
monstre.
Recevoir tout ce qui repugne a nostre goust, volonté et affection, avec allegresse et
promptitude, parce que tel est le bon playsir de Dieu.
Prattique de l'obeyssance
Obeyr soigneusement, sans rien oublier ; promptement, sans delay ni remise ; simplement,
sans discours ni raysons ; fidellement, rien prendre pour vous en vos obeyssances ; franchement,
sans contrainte ni chagrin ; amoureusement et non point pesamment, maussadement et a contre
cœur.
Obeyr de cœur et de volonté, ayant mesme vouloir et non vouloir avec nos Superieurs.
Obeyr d'entendement et jugement, sans recevoir aucun advis ni opinion contraire a celuy
de nos Superieurs.
Obeyr a toutes Superieures, quelles qu'elles soyent, comme a Nostre Seigneur Jesus Christ.
Obeyr a l'aveugle, sans s'enquerir, examiner ou demander pourquoy, comment, ains n'avoir
autre rayson pour se contenter que celle de sçavoir que c'est l'obeyssance, et dire en soy mesme :
Je fais ceci parce que telle est la volonté de Dieu, et en icelle est tout mon contentement.
Prattique de la pauvreté
Ne prester ni recevoir aucune chose, pour petite qu'elle soit, sans congé ; aymer et nous
res-jouir quand quelque chose qui nous est necessaire nous manque. Aymer et nous res-jouir quand
le moindre de la Mayson nous est donné.
Avoir souvent la pauvreté de Nostre Seigneur, de la Sainte Vierge et des Apostres devant
les yeux.
Une abnegation des choses dont on se sert tesmoigne un grand contentement. [324]
Bayser et caresser tendrement ce qui repugne a nostre goust et sensualité.
Ne point manger avidement, ni desirer d'avoir autre viande que celle que l'on nous donne.
Quand on est sec et aride, et sans goust ni consolation, aymer cette pauvreté devant Dieu.
Estre bien ayse que l'on ayme plus les autres que nous et que l'on se playse plus a leur
conversation qu'a la nostre.
Se res-jouir quand on ne tient conte de nos raysons et que l'on tesmoigne que l'on ne prend
gueres de playsir de nous entendre.
Prattique de la chasteté
Faire toutes ses actions avec une grande honnesteté et bienseance.
Estre bien soigneuse de se bien occuper en Dieu, nous divertissant promptement et
soigneusement de toute sorte de pensees et souvenir des choses que nous avons autrefois veuës et
ouÿes.
Aspirer et respirer souvent en Dieu comme nostre unique Espoux.
N'aymer rien que pour luy, en luy et pour l'amour de luy.
Parler pour l'ordinaire des choses bonnes et utiles.
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Avoir grand soin de porter la veuë basse et de mortifier tous ses sens.
Prattique de la generosité
Ne se jamais estonner pour les difficultés, repugnances et aversions.
Ne faire non plus d'estat de tous nos sentimens, pour grans qu'ilz soyent, que nous ferions
des abbayemens des chiens.
Aggrandir son cœur et son courage parmi les peynes et difficultés, car c'est pour cela que
Dieu les envoye et permet.
Pretendre au plus haut point de la perfection parmi la veuë et sentiment de nos miseres,
foiblesses et infirmités, appuyees sur la misericorde de Dieu ; ne se point estonner, encor que nous
nous voyions comme engluees dans nos imperfections, attendant avec une douce et tranquille [325]
patience nostre delivrance de Nostre Seigneur, et quand nous l'avons, la tenir bien chere comme
un don pretieux de sa bonté.
Ne cesser « jamais de crier a Dieu : Tires moy1313» a vous ! ni « d'esperer et de se promettre
de courir » apres luy, nonobstant les sentimens de nos imbecillités1314.
Ne laisser point a nos cœurs aucune pensee de descouragement.
Ne se point fascher si d'abord nous ne marchons pas si fermement et fidellement comme
nous voudrions, ains nous contenter de marcher le petit pas a nos commencemens, pour puis apres
courir et marcher a grande course.
Ne point vous inquieter ni troubler pour voir l'advancement des autres. Ne point vouloir
attirer les autres a nostre train, ni les mesestimer si elles ne font pas ce que les autres font, ains
estimer tout ce qu'elles font.
Regarder les mieux faisantes avec une douce cordialité et sainte reverence. Tirer de
l'humilité de nos imbecillités, particulierement quand nous voyons l'advancement des autres.
Prattique de la devotion forte et intime
Avoir la volonté conforme aux bonnes actions, petites et grandes.
Ne rien faire « par coustume, mais » avec « application de volonté. »
Que l'action exterieure soit prevenue de l'affection interieure, ou « qu'au moins l'affection
la suive de pres. »
Faire « naistre l'exterieur de l'interieur. »
Il faut estre « forte a supporter les tentations ; forte a supporter la varieté des espritz ; forte
a supporter ses propres » inclinations et « imperfections, pour ne se point inquieter de s'y voir
sujette ; forte pour combattre ses imperfections et entreprendre la correction et amendement
parfait. »
« Se tenir independante des consolations des creatures1315. »
Prattique de la conformité à la volonté de Dieu
Prendre toutes les occasions qui nous arrivent, grandes et petites, comme venant de la main
de Dieu. [326]
Se resigner en tout a la volonté de Dieu ; se conformer a la volonté de Dieu, soit en maladie,
secheresse, aridités, distractions, tentations et frequentes cheutes.
Revu sur le texte inséré dans un ancien Manuscrit conservé à la Bibliothèque publique de
Bourges, A, n° 113.
1313 Cant., I, 3.
1314 Cf. tom. VI huj. Edit., Entretien Ier p. 14.
1315 Cf. ibid., pp. 13, 14.
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XXXII. Autres avis a une Religieuse de la Visitation, sur l'obeissance et
l'examen qui doit suivre l'oraison, [1612-16181316] (Inédit)
De l'obeyssance
Ier Point de l'obeyssance est que nous devons croire et tenir pour asseuré que Dieu a establi
toute sorte de Superieures et que ce ne sont pas les hommes qui les eslisent, c'est Dieu mesme.
2. C'est que Dieu a establi les Superieures comme ses lieutenantes en terre, affin que nous
leur obeyssions comme a luy mesme, et tient estre fait a luy ce qui est fait aux Superieures, comme
il le tesmoigne par ces parolles : Celuy qui vous obeit m'obeit, et celuy qui vous mesprise me
mesprise1317.
3. C'est que Dieu ne permettra jamais que vous perissies tandis que vous obeyres
fidellement vous confiant en luy ; car si Dieu vous a mise sous une Superieure affin que vous luy
obeyssies, croyes qu'il vous protegera de sa providence divine pour parvenir a vostre derniere fin,
qui est vostre perfection.
4. C'est qu'il ne faut jamais regarder au visage des Superieurs ni dire : Sont ilz propres pour
nous ? commanderont ilz bien ? ains obeyr a l'aveugle en tout ce qu'ilz nous commandent, car ce
ne seront pas les Superieures qui nous rendront parfaittes, mais la sousmission et obeyssance que
[327] nous leur rendrons. Et l'on voit beaucoup d'inferieurs qui sont saintz sous des Superieurs fort
imparfaitz, et des inferieurs imparfaitz sous des Superieurs qui sont saintz, tellement qu'il n'y a
point d'excuse en l'obeyssance sinon la grande, qui est d'offenser Dieu. Toutes les autres sont
suspectes et ne viennent que d'une vayne recherche de nous mesmes. Nostre Seigneur priant au
Jardin des Olives dit a son Pere : Que vostre volonté soit faite et non la mienne1318 ; Qu'il soit fait
ce que vous voules et non ce que je veux ; comme [vous] voules et non comme je veux1319. Amen.
Examen sur l'orayson, qui se doit faire apres icelle, se pourmenant ou faysant son
ouvrage
Si vous aves esté bien preparee ; si vous aves donné entree a quelque pensee impertinente
ou infructueuse.
Si vous vous estes laissé aller au sommeil ou a la pesanteur de cors et d'esprit.
Si vous vous estes trop laissé aller aux speculations de l'entendement et considerations.
Si vous aves esté lasche ; si vous n'aves tasche de mouvoir l'affection et la volonté.
Si vous aves eu autre intention que de chercher le bon playsir de Dieu.
Si vous aves eu de la curiosité en l'intelligence ; si vous aves eu de la propre volonté en
l'affection ; si vous aves eu de la propre complaysance en la consideration.
Si vous aves eu de la negligence a correspondre a la grace.
De plus, remarques les illustrations que Dieu donne en l'orayson, nous faisant voir 1320
Revu sur le texte inséré dans un ancien Manuscrit conservé à la Bibliothèque publique de
Bourges, A, n° 113. [328]
_____
1316 Ces deux morceaux extraits du même Manuscrit que les Avis précédents ont-ils la même destinataire ? C'est
possible, mais rien ne le prouve,
1317 Luc., X, 16.
1318 Matt., XXVI, 42 ; Luc., XXII, 42.
1319 Matt., ibid., v. 39 ; Marc., XIV, 36.
1320 La suite manque.
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XXXIII. Avis a la Sœur Anne-Marie Rosset lors de son départ d'Annecy
pour la fondation du Monastère de la Visitation de Bourges, vers le 15
octobre 16181321. Etre couverte d'humilité. Moins on sent de capacité
en soi, plus il faut s'appuyer avec confiance sur Notre-Seigneur. La
Mère Rosset doit être « Depenciere » des dons de Dieu. Vertus qu'elle
devra pratiquer envers les âmes appelées à la Visitation.
Monseigneur m'a dit que les armes quil faut enporté pour aler en quelque fondation ne sont
autre que la saincte humilité, de laquelle vertu il m'a dit quil me faloit estre toute couverte ; car
l'humilité est toute genereuse, et nous fait entreprendre avec un courage invincible tous ce qui
regarde le service de Dieu et l'agrandissement de sa gloire. Et moins nous sentons de capacité en
nous pour ce faire, dautant plus nous nous devons serrés et ataché a Nostre Seigneur, nous confiant
et apuyant toutalement en luy seul, en son assistance et en sa grace, laquelle sa Bonté ne manquera
de nous donné pour nous acquiter de nostre devoir selon sa sainte volonté, si nous sommes remplie
d'humilité et defiance de nous mesme ; car il est tout assurer que nous ne pouvons chose
quelconque de nous mesme, mais c'est la verité qu'en Dieu toutes choses nous seront possible.
Nous ne sommes pas Econnome ni Superieure des talans et dons que Dieu a mis en nous,
mais seulement Depenciere, pour les distribuer aux autres, pourtant l'esprit de la Visitation par tout
afin de le repandre au prochain ; [329] tachant de polir, purifier et formé les esprits de celles que
Nostre Seigneur nous commettra, qui se treuveront fort divers, esquels il faudra que nous exercions
une grande douceur, simplicité, suport et patience pour les voir cheminer le petit pas et tousjours
commettre des imperfections ; inculquant en ces ames là la vraye humilité, generosite, douceur et
charité, qui est le vray esprit de nos Regles, afin que par ce moyen elles parviennent a la perfection
de l'amour sacré et a l'union de leurs ames avec sa divine Majesté, qui est la fin pour laquelle elle
les a apellé a la Religion.
Revu sur une copie faite par la Sœur Rosset, conservée à la Visitation d'Annecy.
_____
XXXIV. Exercice envoyé a Madame de Villesavin, juillet-août 16191322
1321 Dans un recueil de lettres des saints Fondateurs, fait par la Sœur Rosset, elle a aussi inséré ce que son Bienheureux
Père lui dit lorsqu'elle fut envoyée à la fondation de Bourges. Nous reproduisons cet écrit et en gardons l'orthographe.
La Mère de Chantal et les Sœurs destinées à l'établissement partirent d'Annecy le 22 octobre 1618 ; le Saint,
le 17 ou le 18, pour se rendre à Paris. (Voir tome XVIII, notes (980), p. 295, et (983), p. 296. Pour la destinataire, voir
tome XIX, note (157), p. 33.)
1322 Une lettre de saint François de Sales à Isabelle Blondeau, dame de Villesavin, nous indique la destinataire et la
date approximative de ce texte, juillet-août 1619 : « Je vous envoye une petite methode de vous unir a Nostre Seigneur
le matin et toute la journee. » Puis, le 10 ou 11 novembre 1621 il écrit à la Mère de Chantal : « M. Crichant m'a dit
que nostre tres chere et tres bonne madame de Villesavin avoit une de mes lettres qu'elle aymoit bien fort ; et parce
que je crois que ce soit celle par laquelle je luy envoyois l'Exercice du matin et de la reunion a Dieu, que j'escrivis
avec une grande affection, je vous prie de luy en demander une copie dextrement, comme de vous mesme ; m'estant
advis que l'affection que je porte a cett'ame me fit exprimer mieux qu'a mon ordinaire. » (Tomes XVIII, p. 417, et XX,
pp. 180, 181.) Pour la destinataire, voir tome XVIII, note (1240), p. 384.
L' « Exercice » qu'on va lire a été publié par le P. de la Rivière avec plusieurs variantes et sous ce titre :
Exercice de l'union, addressé ausdites Dames [de la Visitation], que l'on peut praticquer parmy les secheresses et
ariditez spirituelles. (Liv. III, chap. XXXIII, p. 354.) C'est le texte du biographe qui a été donné depuis 1631 à la fin
du Directoire spirituel (voir le tome précédent, note (1023), p. 165) et dans les éditions des Œuvres de saint François
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EXERCICE DU MATIN
QUI, POUR ESTRE BRIEF, SIMPLE ET TENDANT IMMEDIATEMENT A L'UNION
AMOUREUSE DE NOSTRE VOLONTE AVEC CELLE DE DIEU, POURRA ESTRE
PRATIQUE PAR LES PERSONNES QUI SONT EN SEICHERESSE, STERILITE,
TRISTESSE, 1323 FOIBLESSE CORPORELLE OU ACCABLEES D'OCCUPATIONS.
1. 1324 Prosterné a genoux et profondement humilié devant Dieu, vous adorerés sa
souveraine et infinie bonté.
2. Vous jetteres attentivement la pensee sur la tres douce [330] volonté de Dieu, 1325
laquelle, de toutte eternité, vous nomma par vostre nom et fit dessein de vous sauver, vous
destinant entre autres choses ce jour present, affin qu'en icelluy vous fissiés les euvres de vie et de
salut, croyant ce quil 1326 dit par le Prophete1327 : Je t'ay aymé d'une charité æternelle ; a cette
cause 1328 je t'ay attiré, ayant pitié de toy. Et sur 1329 cette veritable pensee, vous unirés vostre
volonté a celle de ce tres doux et 1330 misericordieux Pere celeste, par telles ou semblables parolles
cordiales 1331 : O tres douce volonté de mon Dieu, qu'a jamais soyés vous faitte ! O dessein æternel
de la volonté de mon Dieu, je vous adore, et vous 1332 consacre et dedie ma volonté pour vouloir a
jamais æternellement ce que æternellement vous aves voulu ! Que je fasse donc aujourdhuy et
tousjours et en toutes choses vostre divine volonté, o mon doux Createur ! Ouy, Pere celeste, car
tel fust vostre bon plaisir1333 de toutte seternité, ainsy soit il. O Bonté divine, 1334 comme vous
l'aves voulu. O volonté æternelle, vives et regnes en toutte ma volonté et sur toutte ma volonté 1335,
maintenant et a jamais. Amen. [331]
3. On invoque le secours celeste par quelques devotes exclamations exterieures et
interieures, comme : O Dieu, soyes moy en ayde1336 ! Je suis vostre, sauves moy1337 1338. Que vostre
main secourable soit sur ce pauvre et foible courage. Ou bien, on pourra, en ce 3. point, user de la
petitte orayson qui est en l'Exercice du mattin de Philothee1339 1340.
Vous feres 1341 donc ainsi une vive et puissante union amoureuse de vostre volonté a celle
de Dieu ; puis, parmi toutes les actions de la journee, soit spirituelles, soit corporelles, vous feres
de frequentes reunions, c'est a dire, vous renouvellerés et confirmeres 1342 l'union faitte le matin,
de Sales ; en 1626, il fut aussi inséré dans le petit volume des Sacrees Reliques. Nous en reproduisons les variantes,
sans toutefois pouvoir affirmer qu'elles soient toutes du Saint.
1323 [Ce titre n'est pas dans le P. de la Rivière, niais dans le Directoire.]
sterilité et
1324 Premier point.
1325 devant l'incomprehensible majesté de Dieu, vous adoreres sa souveraine bonté
1326 vous — vinssies a exercer les œuvres de vie et de salut, suivant ce qui est
1327 Jerem., XXXI, 3.
1328 æternelle ; c'est pourquoy
1329 de toy. Second point. Sur
1330 de ce tres benin et tres
1331 parolles cordialement proferees
1332 O desseins eternelz de la volonté de mon Dieu, je vous adore,
1333 Matt., XI, 26 ; Luc., X, 21.
1334 O Bonté tres aggreable, soit
1335 en toutes mes volontés et sur toutes mes volontés
1336 Ps. LXIX, 2.
1337 Ps. CXVIII, 94.
1338 Troisiesme point. Invoques par apres le secours et l'assistance divine, avec telles ou semblables devotes
acclamations, interieurement neanmoins, et du fond du cœur : O Dieu, soyes en mon ayde !
1339 Partie II, ch. X.
1340 courage. — Voyla, o Seigneur, ce pauvre et miserable cœur qui a conceu, par vostre Bonté, plusieurs saintes
affections ; mais, helas ! il est trop imbecille et chetif pour effectuer sans vostre ayde le bien qu'il desire. J'invoque la
tres sacree Vierge Marie, mon bon Ange et toute la Cour de Paradis ; que leur faveur me soit maintenant propice, s'il
vous plaist.
1341 Quatriesme point. Faites
1342 volonté avec celle de Dieu ; et puis, parmi toutes les actions de la journee, tant spirituelles que corporelles,
faites encor de frequentes reunions, c'est a dire, renouvelles et confirmes de rechef
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jettant un simple regard interieur sur la divine Bonté et disant par maniere d'acquiescement :
Ouy, Seigneur, je le veux ; o mon Dieu, a jamais, a jamais, o volonté divine ! Ou bien vous
ne dirés sinon simplement : Ouy, Seigneur ; tousjours, Seigneur, mon Pere ; je confirme, o mon
Dieu, æternellement. Ou bien, sans dire autre chose, vous feres le signe de la Croix, ou baiserés
celle que vous portés ou quelque image ; car tout cela voudra dire que vous voulés souverainement
la providence de Dieu, que vous l'adores et aymés, que vous l'acceptés et embrassés 1343 de tout
vostre cœur, et que vous unisses inseparablement vostre volonté a cette volonté supreme.
1344 Mais ces traits de cœur, ces parolles interieures doivent [332] estre prononcés
doucement et tranquilement, fermement mays paisiblement et, par maniere de dire, elles doivent
estre distilées et filees tout bellement en la pointe de l'esprit, comme on prononce a 1345 l'oreille
d'un ami une parolle qu'on luy veut jetter bien avant dans le cœur, sans que personne s'en aperçoive.
Car ainsi ces sacrees parolles, filees, coulees et distilees par la pointe de nostre esprit en la mesme
pointe de nostre esprit, la 1346 penetreront et detremperont plus intimement et fortement qu'elles ne
feroyent pas si 1347 elles estoyent dittes par maniere d'eslans, d'orayson jaculatoyre et de saillie
d'esprit. L'experience vous le fera voir, moyennant que vous soyes humble et simple 1348.
Revu sur une copie faite par M. Michel Favre, conservée à Issy (Paris), dans la chambre du
Supérieur général de la Compagnie de Saint-Sulpice.
_____
1343 je le veux ; ou bien seulement : Ouy, Seigneur, ouy mon Pere, ouy, tous-jours ouy. Si vous voules aussi, vous
pourres faire le signe de la Croix, ou bayser celle que vous portes ou quelque image ; car tout cela signifiera que
souverainement vous voules la providence de Dieu, que vous l'acceptes, que vous l'adores et aymes
1344 Cinquiesme point.
1345 en
1346 par la pointe de nostre esprit, le
1347 ne feroyent si
1348 L'experience le vous fera connoistre, pourveu que vous soyes humble et simple. Amen.
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XXXV. Aux Religieuses de la Visitation d'Annecy1349 1612-1620]
(Fragment). Une leçon de Marie à propos de la fête de la
Transfiguration.
……………………………………………………………………………………………………..
Voyes, mes tres cheres Filles, que la sacree Vierge, nostre sainte Abbesse, ne se treuva
point au Thabor, ouy bien a l'estable de Bethlehem pour voir les yeux de son divin Enfant pleins
de larmes ; au Temple pour le racheter ; au [333] Calvaire pour le voir souffrir et mourir. Que nous
apprend cette conduitte, sinon qu'il se faut resoudre, a l'exemple de cette Vierge sacree, de passer
nos jours dans la privation des graces sensibles et extraordinaires, pour vivre dans les tourmens,
les peynes et la mort, quand il plaira a nostre Bienaymé ………………………………………….
Revu sur un ancien Manuscrit de l'Année Sainte de la Visitation, conservé au Monastère
d'Annecy.
_____
XXXVI. Avis pour la charge de Supérieure, a la Mère Claude-Agnès de
la Roche, juin ou commencement de juillet 16201350. Chaque jour, au
réveil, dire la parole de saint Bernard : « Qu'es tu venu faire ceans ? »
Ne pas subtiliser, mais avoir une intention droite de tout faire pour
Dieu. Supporter les imparfaites et les aider. Le maintien extérieur.
Importance de la charge. La nouvelle Supérieure doit demander à
la Sainte Vierge de l'offrir à son divin Fils, et renouveler son âme.
Après cet acte de parfait abandon, Marie la gardera tout le temps de sa
vie.
Dieu veut que vous le servies en la conduite des ames, puisqu'il a arrangé les choses comme
elles le sont et qu'il vous a donné la capacité de gouverner les autres.
Faites une tres grande estime du ministere a quoy vous estes appellee ; et pour le bien faire,
tous les jours en vous resveillant, ne manques jamais de dire cette parole que saint Bernard disoit
si souvent : « Qu'es tu venu faire ceans1351 ? » Qu'est ce que Dieu veut de toy ? Puis, soudain apres,
abandonnes vous totalement a sa divine volonté, [334] affin quil fasse de vous et en vous tout ce
qu'il luy plaira, sans aucune reserve.
Ayes une devotion particuliere a Nostre Dame et vostre bon Ange ; puis, ma Fille, souvenes
vous qu'il faut avoir plus d'humilité pour commander que non pas pour obeir. Mais prenes garde
aussi de ne pas tant subtiliser sur tout ce que vous feres. Ayes une droitte intention de faire tout
pour Dieu et pour son honneur et gloire, et vous destournes de tout ce que la partie inferieure de
1349 Dans un ancien Ms. de l'Année Sainte de la Visitation, qui paraît être une copie de celui de la Mère de Chaugy, on
lit à la date du 6 août : « Nôtre Pere saint François de Sales nous a marqué pour aujourd'huy nôtre Epitre, pieuse
consideration en faveur de l'amour solide de la Mere de Dieu. » L'annaliste propose pour chaque jour de l'année, aux
Filles de l'Evêque de Genève, une « station » dans quelque église ou lieu de dévotion, où elles feront en esprit un pieux
pèlerinage et leurs exercices ; de là, l'allusion à l' « Epitre ». (Cf. l'Année Sainte, tome VIII, p. 111, où le passage que
nous citons a été modifié.)
Il est difficile de dire si nous avons ici le fragment d'un Sermon ou d'un écrit spirituel, et il est également
impossible de lui assigner une date positive.
1350 La Mère de la Roche et ses compagnes partirent d'Annecy pour Orléans « environt le dizeime juillet » ; saint
François de Sales dut donner ces Avis à la première dans le courant de juin ou au commencement du mois suivant.
1351 Vide supra, p. 172.
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22.3 Page 213

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vostre ame voudra faire ; laisses-la tracasser tant qu'elle voudra autour de vostre esprit, sans
combattre nullement tous ses assautz, ni mesme regarder ce qu'elle fait ou ce qu'elle veut dire, ains
tenes-vous ferme en la partie superieure de vostre ame et en cette resolution de ne vouloir rien
faire que pour Dieu et qui luy soit aggreable.
De plus, il faut que vous fassies grande attention sur cette parole que j'ay mise dans les
Constitutions, sçavoir, que la Superieure n'est pas tant pour les fortes que pour les foibles1352, bien
qu'il faille avoir soin de toutes, affin que les plus avancees ne retournent point en arriere. Ayes a
cœur le support des filles imparfaittes qui seront en vostre charge : ne faites jamais de l'estonnee,
quelque sorte de tentation ou d'imperfection qu'elles vous descouvrent, ains tasches a leur donner
confiance a vous bien dire tout ce qui les exercera.
Soyes grandement tendre a l'esgard des plus imparfaittes, pour les ayder a faire grand
prouffit de leur imperfection. Resouvenes vous qu'une ame grandement impure peut parvenir a
une parfaitte pureté, estant bien aydee. Dieu vous en ayant donné la charge et le moyen, par sa
grace, de le pouvoir faire, appliques-vous soigneusement a le faire pour son honneur et gloire.
Remarques que celles qui ont le plus de mauvaises inclinations, sont celles qui peuvent parvenir a
une plus grande perfection. Gardes vous de faire des affections particulieres.
Ne vous estonnes nullement de voir en vous beaucoup de fort mauvaises inclinations,
puisque, par la bonté de Dieu, vous aves une volonté superieure qui peut estre regente au dessus
de tout cela. [335]
Prenes un grand soin de maintenir vostre exterieur en une sainte esgalité. Que si vous aves
quelque peyne dans l'esprit, qu'elle ne paroisse point au dehors. Maintenes vous dans une
contenance grave, mais douce et humble, sans jamais estre legere, principalement avec des jeunes
gens. Voyla, ce me semble, ce a quoy il faut que vous prenies garde, pour rendre a Dieu le service
qu'il a desiré de vous.
Mais je desire grandement que vous fassies attention fort souvent sur l'importance de la
charge que vous aures, non seulement d'estre Superieure, mais d'estre au lieu que vous seres. La
gloire de Dieu est jointe a ceci et la connoissance de vostre Institut ; c'est pourquoy il faut que vous
relevies fort vostre courage, en luy faysant entendre l'importance de ce a quoy vous estes appellee.
Aneantisses vous fort profondement en vous mesme de voir que Dieu veuille se servir de
vostre petitesse pour luy faire un service de si grande importance. Reconnoisses vous fort honnoree
de cet honneur, et vous en alles courageusement supplier Nostre Dame qu'il luy plaise vous offrir
a son Filz comme une creature tout absolument abandonnee a sa divine volonté, vous resolvant
que, moyennant sa grace, vous vivres des-ormais d'une vie toute nouvelle, faysant maintenant un
renouvellement parfait de toute vostre ame, detestant pour jamais vostre vie passee avec toutes vos
vielles habitudes.
Alles donq, ma chere Fille, pleyne de confiance qu'apres avoir fait cet acte parfait du saint
abandonnement de vous mesme entre les bras de la tres sainte Vierge, pour vous consacrer et
sacrifier derechef au service de l'amour de son Filz, elle vous gardera tout le tems de vostre vie en
sa protection, et vous presentera derechef a sa Bonté a l'heure de vostre mort. [336]
_____
1352 Constit. XXIX. (Vide tom. præced., p. 88.)
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22.4 Page 214

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XXXVII. Adieux a la Mère Claude-Agnès de la Roche, première
Supérieure de la Visitation d'Orléans, vers le 10 juillet 16201353. Trois
vertus spécialement recommandées.
Alles, ma tres chere Fille, Dieu vous sera propice. Trois vertus vous sont cherement
recommandees : la debonnaireté tres humble, l'humilité tres courageuse, la parfaitte confiance a la
providence de Dieu ; car quant a l'esgalité de l'esprit et mesme du maintien exterieur, ce n'est pas
une vertu particuliere, mais l'ornement interieur et exterieur de l'espouse du Sauveur. Vives donq
ainsy toute en Dieu et pour Dieu, et que sa Bonté soit a jamais vostre repos. Amen.
_____
XXXVIII. Lettre d'obédience a la Sœur Paule-Jéronyme de Monthoux,
pour être Supérieure au Monastère de la Visitation de Nevers, 27 juillet
16201354
Par ces presentes Nous avons donné la sainte benediction de l'obeissance a Nostre tres
chere Fille et Seur en Jesus Christ Paule Hieronyme de Monthoux, Religieuse professe du
monastere de Sainte Marie de la Visitation de Nostre cité d'Annessi, pour aller demeurer en la ville
de Nevers, y estre Superieure au monastere nouvellement establi en icelle [337] du mesme Institut,
pour le tems qu'il sera jugé a propos, sans que par le sejour qu'a cet effect elle pourra faire hors le
monastere de Nostre cité elle laisse d'estre tenue et censee veritablement pour Religieuse de la
Mayson d'Annessi, a laquelle, en tems et lieu, selon qu'il plaira a Dieu en disposer, elle devra et
pourra estre receuë avec toute sorte de charité et pour toutes sortes d'offices ; priant Dieu qu'il la
tienne en sa sainte main allant, demeurant et revenant, et qu'il rende toutes ses actions et tous ses
travaux utiles a la vie eternelle.
Donné a Annessi, en Nostre hostel episcopal, le 27 jullet 1620.
FRANÇS, E. de Geneve.
_____
1353 Saint François de Sales avait écrit lui-même ces lignes dans un livre à l'usage de la nouvelle Supérieure. Elle quitta
Annecy, avec plusieurs Sœurs, vers le 10 juillet. (Voir ci-dessus, note (1350), p. 334.)
1354 Cette pièce aurait dû être insérée dans le tome précédent, à la p. 509 ; elle est placée ici pour réparer un oubli.
(Voir le tome XIX, note (1152), p. 365, et l'Appendice et les notes indiquées dans le IVme volume des Opuscules, note
(2337), p. 509.)
214/332

22.5 Page 215

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XXXIX. Ecrit dans un volume de l'Introduction a la Vie Devote, donné a
la sœur Marie-Philiberte Christin, Tourière de la Visitation d'Annecy1355,
8 mars 1621 (Inédit)
Donné de la main et du cœur de la... a ma Seur Marie Philiberte, de la Visitation, a laquelle
Dieu veuille donner [338] l'esprit de la vraye devotion, qui consiste en l'humilité, douceur et
simplicité. Amen.
Le VIII mars 1621.
FRANCS, E. de Geneve.
JESUS, Sauveur du monde, si nous aymons bien vostre Croix, que nous serons humbles,
doux, gratieux, patiens ! L'amour de la Mort et Passion de Nostre Seigneur donne la mort a toutes
nos passions, et en la mort de nos passions consiste la vie de nostre cœur.
VIVE JESUS. Amen.
Revu sur l'Autographe conservé à la Visitation de Turin.
_____
1355 Elle était de Saint-Claude, d'une honnête famille de bourgeois. Saint François de Sales y étant allé en pèlerinage
en 1613, cette bonne fille entendit sa Messe, puis elle lui dit : « Monseigneur, je viens me donner à vous. » A quoi il
répondit : « Ma fille, je le veux bien ; je m'en vais vous donner à Dieu. Venez à Annecy, et nous vous ferons fille de
la très sainte Vierge. » Elle prit cela tellement à la lettre, qu'elle épia le moment où le Saint montait à cheval, et se mit
à sa suite. Tout en admirant sa simplicité, il la corrigea, lui disant qu'on n'était plus au temps des Apôtres, où les sœurs
charitables se mettaient du train de ces hommes célestes. Le Fondateur la fit recevoir comme seconde tourière de
l'Institut ; il prenait un soin particulier de lui enseigner à bien faire son emploi, à diriger ses intentions, à réparer ses
défauts. Sœur Marie-Philiberte fit son oblation le 25 mars 1620 ; en 1632 elle fut mise au rang des Sœurs associées,
et en 1634 elle partit pour la fondation du Monastère de Pignerol où elle travailla, jusqu'à soixante-sept ans, aux offices
les plus pénibles, « disant que c'était l'intention de notre Bienheureux Père que cela fût ainsi. » Sa mort arriva le 5
décembre 1655. (Année Sainte de la Visitation, tome XII, 1871, p. 280.)
L'édition de l'Introduction est de 1620, imprimée chez Rigaud, à Lyon ; les premières lignes du Saint ont été
écrites au commencement du volume, les dernières, à la fin.
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22.6 Page 216

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XL. Avis a la Mère Paule-Jeronyme de Monthoux, Supérieure de la
Visitation de Nevers, décembre 1620-16211356 (Inédit). La prise d'habit
doit se faire à la grille du chœur. — Vanité et discrétion. Les mères et
les filles s'appellent « Seurs ». Conduite à tenir à l'égard des
malades. On peut admettre des Novices d'un autre Ordre ; pour les
Professes, il faut une dispense de Rome. N'appeler le médecin que
pour la vraie nécessité. Avis touchant les Pères spirituels. Raisons
qui peuvent dispenser du jeûne. Demander ce dont on a besoin est
plus parfait que de se laisser à « la providence des Superieurs ».
Murmures contre la Supérieure. Ce que la destinataire doit faire au
début de sa charge, soit pour les séculiers, soit pour les Sœurs. — Ne
pas s'exempter facilement de l'Office. Attitude au parloir. Les
prétendantes opiniâtres et négligentes ne doivent pas être reçues.
Confiance aux Pères Jésuites. Exercer les veuves. Attirer
doucement les Sœurs qui sont dans la peine. — Quelques autres points
d'observance.
Tenes vostre courage en Dieu, vives saintement en sa Providence, res-jouisses vous d'avoir
quelque chose a meriter [339] pour luy, car en cela consiste le vray estat des enfans de sa Bonté.
Quand les filles n'ont que 14 ans, il y a peu a dire pour les recevoir, si d'ailleurs elles sont
bien conditionnees ; et quand les filles ont fait leur essay dans la Maison on ne les fait pas sortir
pour leur donner l'habit, ains tout cela se fait a la grille, parce qu'il a esté treuvé plus a propos pour
eviter la presse et se conformer aux autres.
Pour celles qui ont la voix bonne et en tirent trop de complaysance il sera tres bon de les priver
parfois de tenir les premiers rangs en telles charges, si ce sont filles qui ayent l'esprit fort a
supporter la mortification ; mais neanmoins il y en a auxquelles il est besoin de donner quelque
complaysance au chant des Offices pour les y encourager, en les portant tous-jours de referer tout
a Dieu en mortifiant la vanité. On ne peut donner une regle absolue sur ce sujet ; le tout depend de
la prudence de la Superieure.
Quant a celles qui desirent les premiers rangs et charges parce qu'elles sont anciennes, en
cela la Superieure doit faire selon qu'elle le jugera pour le mieux, sans avoir esgard a telles
foiblesses ; car c'est en cela ou il faut rompre et mortifier la volonté et propre estime, sans faire
semblant de rien. Faire le tout prudemment et suavement ; la Constitution n'est-elle pas pour
cela1357, affin de rompre les affections et attachemens aux charges ?
Pour les meres et filles qui sont Religieuses, je vous respons en un mot qu'elles se doivent
appeller Seurs tout ainsy comme les autres ; mais je ne treuve pas bon qu'on en reçoive facilement
ensemble, si ce n'estoyent filles ou femmes extraordinaires et de grande consideration.
Pour les malades qui semblent ne prendre playsir a parler des choses bonnes, il faut en cela
suivre la discretion, car il ne les faut pas importuner, mais suavement leur dire de tems en tems
quelque chose de bon, sans faire des longs discours. Et faut qu'en l'infirmerie l'ordre soit de lire au
tems de la lecture au moins un quart d'heure ; non pas que les malades le facent, si cela les
incommode, mais quelqu'autre en leur presence. Et pour leur traittement, il faut user de prudence
pour leur faire recevoir les viandes, [340] sans toutesfois tesmoigner d'appreuver leur douilletterie,
1356 Pour la destinataire, voir tome XIX, note (1152), p. 365. Nous ignorons si ces Avis ont été écrits en une seule
fois ou en plusieurs, mais ils doivent plutôt dater de la première année de l'établissement de la Visitation à Nevers.
1357 Constit. XLVII. (Vide tom. præced., p. 118.)
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22.7 Page 217

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car il faut les gouverner comme malades, et neanmoins, imperceptiblement, les tenir en
sousmission et obeissance. Il y en a qui tesmoignent la foiblesse du sexe, car si on les veut un peu
tenir en devoir au tems de leurs maladies, elles se mettent au descouragement, s'imaginant d'estre
abandonnees de Dieu et des creatures ; que s'il leur semble que la Superieure n'ayt essayé que c'est
d'estre malade, elles prendront plus mal ce qui viendra d'elle : et neanmoins le support ne procede
que de la grace de Dieu, quoy que l'experience y serve en quelque façon pour la connoissance de
cette infirmité.
Suit maintenant vostre demande, ma Seur, si on peut recevoir des Religieuses d'un autre
Ordre ? Il est certain qu'on le peut, pourveu qu'elles ne soyent pas Professes ; si elles le sont, on
ne le peut sans dispense de Rome. Pour les recevoir, il leur faut faire poser leur habit et les faire
habiller honnestement et modestement selon leur qualité ; on n'y doit point faire de difference,
voire mesme il les faut mieux espreuver que pas un'autre.
Il ne faut pas appeller le medecin que pour la vraye necessité et tous-jours avec dispense
pour chaque malade, si ce n'est que l'on fust bien pressé ; l'on ne leur doit parler des filles que fort
discrettement et en sorte que la modestie y soit observee.
Touchant les Peres spirituelz, il est malaysé d'en donner une regie ; les difficultés que vous
aves sceu estre arrivees ailleurs vous ont fait faire cette demande. La prudence est icy grandement
necessaire pour traitter avec eux comme il faut, mais tous-jours avec humilité et douceur, en tenant
neanmoins la regie droitte et ferme pour ce qui est de l'observance des Regles et de l'esprit de la
Visitation.
Du jeusne, j'appreuve grandement que personne ne s'en dispense de soy mesme ; mays si
l'on en a besoin, il en faut laisser le soin a ceux qui ont charge de nous. Et si l'on vous remet a
vostre choix, prenés le jeusne, car il est mieux de ne flatter pas le cors que de l'attendrir, si ce n'est
pour les raysons suivantes : si le jeusne vous rend chagrine ou donne des estourdissemens de teste,
ou bien si l'on est [341] travaillé de quelque douleur, il n'y a point de doute que l'on ne doit pas
jeusner si cela accroist la douleur ; car l'Eglise ordonne le jeusne pour macerer' un peu ceux qui
sont sensuelz et pour faire pœnitence ; mais ceux qui en reçoivent de l'incommodité qui empesche
l'esprit de ses fonctions, l'on en peut dispenser, mais non pas de soy mesme. Si en prenant quelque
petite chose l'on peut mieux porter le jeusne, l'on le doit faire sans scrupule ; mais si une fille ne
peut supporter du fruit ou de la resinee, l'on peut luy donner un œuf au tems qu'il est permis d'en
manger. Mais de manger autant pesant que feroit une poire, il ne seroit pas a propos, d'autant qu'un
œuf est fort leger ; si ce n'est que l'on ne se peust pas passer a si peu, car alhors l'on peut manger
davantage : la discretion doit gouverner le tout. Il y a plus de perfection a demander ses necessités
que de se laisser a la providence des Superieurs, qui ne doivent pas se lasser a observer celle ci et
celle la. La Superieure doit donner rondement et franchement les soulagemens aux Seurs, mais
elle les doit rendre simples a les demander. Pour celles qui sont tendres, il faut mespriser leur mal
et se moquer d'elles mesmes ; mais neanmoins, si l'on connoist qu'elles en ayent necessité, il les
faut soulager gracieusement.
Si une Seur murmuroit contre la Superieure, treuvant a redire a ses actions, il ne faudroit
en façon quelconque luy en rien tesmoigner ; mais si le murmure estoit d'importance, il faudroit
prier une de celles qui les auroit ouy, d'advertir celle qui auroit murmuré, en particulier, sans luy
donner a connoistre que la Superieure en sçache rien.
Quand les seculiers parlent a la Superieure de sa charge, il ne faut pas qu'elle dise beaucoup
de paroles d'humilité, mais seulement qu'elle seroit bien ayse qu'on luy enseignast et que l'on ne
l'y a mise que pour apprendre.
Il faut, au commencement de sa superiorité, qu'elle soit condescendante a contenter la
curiosité des espritz, en leur respondant asses familierement selon les demandes que luy feront les
seculiers, et mesme aux Seurs de dedans, ayant un grand soin de les contenter ; et en cet abord il
faut qu'elle donne une grande estime des Constitutions et [342] qu'elle aye un grand soin de tenir
les Seurs dans l'estroitte observance des menues choses, comme de lever ses habitz, fermer les
portes apres soy, en leur faysant concevoir la sincerité des Constitutions qui n'obligent point a
peché quand il n'y a point de negligence.
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22.8 Page 218

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Il faut que la Superieure ayt une grande discretion pour ne pas s'exempter des Offices,
estant au parloir, si ce n'est qu'elle soit avec des personnes de respect, ou affligees, ou quelque
affaire de la Mayson ; alhors il faudroit patienter ; mais les autres, il leur faut dire humblement que
c'est l'heure de l'Office ; hors de ce tems la, il s'y faut assujettir autant que l'on le requerra. Elle
pourra lever le voyle devant les seigneurs de l'Eglise, devant les Evesques, devant les Princes et
grans seigneurs. Il faut entrer au parloir tous-jours le voyle baissé, mesme devant les femmes, et
s'il n'y a point d'homme on le peut lever. Il ne faut point donner a manger au parloir et ne toucher
que rarement la main des seculiers.
L'on doit prendre garde de ne point rejetter des filles pour des choses legeres ; mais il faut
prendre garde aussi de n'en point recevoir de celles qui sont opiniastres et negligentes a se corriger
de leurs defautz et tout ensemble malicieuses ; mais si l'on voit qu'elles eussent [assez] de force a
se surmonter, il faut alhors user de patience, en leur donnant du tems a se surmonter et corriger. Il
ne faut pas que la Superieure s'informe des pechés particuliers lhors que les pretendantes luy
rendent conte de l'histoire de leur vie ; la Directrice leur doit apprendre de le rendre ainsy : J'ay
esté autrefois adonnee a la vanité, ayant beaucoup perdu de temps a cela ; j'ay esté sujette a la
cholere ou a l'humeur melancholique. La Maistresse doit tout dire a la Superieure, quoy que la
pretendante ne voulust pas ; mays la Superieure ne doit en façon quelconque en donner rien a
connoistre a la Novice de le sçavoir.
L'on peut parler librement aux Peres Jesuites et leur faut donner une grande confiance, mais
avec beaucoup de respect. L'on leur peut mesme parler en particulier, quand quelque Seur en a
necessité.
Il faut exercer les vefves, pour spirituelles qu'elles soyent, [343] a la simplicité de la
Communauté, mesme des exercices interieurs.
La Superieure doit escouter les peynes abjectes des Seurs comme celle qui n'y pense pas,
et pour les Seurs qui en sont en peyne et celles qui ne les disent pas, il faut charitablement leur
aller au devant ; tout de mesme a celles qui sont trop tardifves a rendre conte, les attirer doucement.
L'on ne doit laisser lire des livres ou sont des autres Regles, affin que cela ne serve de
tentation ; mesme il y en a qui ne permettent pas de lire les Chroniques de saint François a cause
de cela.
La Superieure peut donner, s'il y a des commodités a la Mayson. Il faut eviter deux
extremités : d'estre trop liberale et aussi trop retenue. Il sera, bon de s'informer s'il y a des pauvres,
affin de les assister de quelque chose.
C'est a son choix de rendre conte ou a un Pere, ou au Confesseur, ou a son Ayde, et rien du
tout si elle ne veut.
Si le Confesseur demandoit souvent de parler a une Seur, il la faudroit mettre en quelque
office qui l'occupast, affin d'avoir dequoy s'excuser.
La Superieure, en visitant les layettes des Seurs, ne doit point lire les lettres du Pere spirituel
ni de nostre Mere de Chantal ; mais pour les autres, elle les peut lire si elle veut.
Revu sur un ancien Manuscrit conservé à la Visitation
de Bourg-en-Bresse. [344]
_____
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XLI. Fragments d'avis aux Supérieures de la Visitation, [1615-16221358].
Grand honneur d'être appelées à la conduite des âmes ; comment faut-il
s'en acquitter ? Les Supérieures doivent suivre les voies de Dieu et
non les leurs. Qualités de l'homme intérieur. Comment agir avec
les inférieures revêches et orgueilleuses. Suivre l'esprit de douceur et
cultiver surtout les âmes. Souhaits du Saint aux Supérieures.
……………………………………………………………………………………………………..
Puisque c'est le haut point de la perfection chrestienne de conduire les ames a Dieu,
l'aymant qui a attiré Jesus Christ du Ciel en terre pour y travailler et consommer son œuvre dans
la mort et par la Croix, il est aysé de juger que celles qu'il employe a cette fonction se doivent tenir
bien honnorees, s'en acquittant avec un soin digne des espouses de Celuy qui a esté crucifié et est
mort comme un Roy d'amour, couronné d'espines, parmi la trouppe de ses esleus, les encourageant
a la guerre spirituelle qu'il faut soustenir icy bas pour arriver a la celeste Patrie promise a ses
enfans.
Ainsy, mes cheres Filles, celles que Dieu appelle a la conduite des ames se doivent tenir
dans leurs ruches mystiques ou sont assemblees les abeilles celestes pour mesnager le miel des
saintes vertus, et la Superieure, qui est entre elles comme leur roy, doit estre soigneuse de s'y rendre
[345] presente, pour leur apprendre la façon de le former et conserver. Mais il faut travailler cette
œuvre et cette sainte besoigne avec une entiere sousmission a la sainte Providence, puisant dans
le sein du Pere celeste les moyens convenables a cet employ.
……………………………………………………………………………………………………..
Puisque vous tenes, mes cheres Filles, la place de Dieu dans la conduite des ames, vous
deves estre fort jalouses de vous y conformer. Observes ses voyes et non les vostres, soustenant
fortement son attrait dans chacune, en leur aydant a le suivre avec humilité et sousmission, non a
leur façon, mais a celle de Dieu que vous connoistres mieux qu'elles tant que l'amour propre ne
sera pas aneanti, car il fait souvent prendre le change, et tourner l'attrait divin a nos manieres et
suites de nos inclinations.
Portes tous-jours a cet effect sur vos levres et par vos langues le feu que vostre ardent
Espoux a apporté en terre1359 dans les cœurs, a ce qu'il consomme tout l'homme exterieur, et en
reforme un interieur1360, tout pur, tout amoureux, tout simple et tout fort a bien soustenir les
espreuves et exercices que son amour luy suggerera en leur faveur, pour les purifier, perfectionner
et sanctifier.
Mais si quelques unes se rendoyent contraires a cette conduite, vous pourries, prenant sujet
de les y exercer, leur faire voir leur ignorance, leur peu de rayson et de jugement de s'amuser aux
presomptions et fauses imaginations que produit la nature depravee ; combien l'esprit humain est
opposé a Dieu, dont les secretz ne sont revelés qu'aux humbles1361 ; qu'il n'est pas question, en la
Religion, de philosophes et de beaux espritz, mays de graces et de vertus, non pour en discourir,
1358 Hérissant, au tome V des Lettres de saint François de Sales (1758), p. 133, a publié le premier un Manuscrit qui
se trouvait « dans le monastère de la Visitation de la rue Saint-Antoine de Paris, et qui » avait « été écrit par une
ancienne Mère de cet Ordre. » Des onze pages qu'il a éditées, nous ne donnons que quelques fragments qui n'ont pas
encore figuré dans notre Edition. Tout le reste n'est qu'une mosaïque composée de morceaux de lettres aux Supérieures
et Directrices des Maisons fondées du vivant du Saint : aux Sœurs de Compain et de Blonay, aux Mères Favre, de
Bréchard, de la Martinière, de Villette, etc. En recueillant ces Avis, on a substitué le pluriel au singulier et fait plusieurs
changements pour en former un tout. A coup sûr, les fragments que nous reproduisons ici ont subi les mêmes retouches
; ils contiennent cependant les paroles du Fondateur, et c'est à ce titre que nous les conservons.
Les dates extrêmes sont celles entre lesquelles ces fragments ont pu être écrits : la fondation du monastère de
Lyon (1615), et la mort du Saint, 28 décembre 1622.
1359 Luc., XII, 49.
1360 Cf. Ephes., III, 16, IV, 22, 24 ; Coloss., III, 8, 10.
1361 Matt., XI, 25 ; Luc., X, 21.
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22.10 Page 220

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mais pour les prattiquer humblement ; leur faysant faire et ordonnant des choses difficiles a faire
et comprendre et qui soyent humiliantes, pour les destacher insensiblement d'elles mesmes et les
engager a une humble et parfaitte sousmission a l'ordre des Superieures, lesquelles aussi doivent
avoir une grande discretion a bien observer le tems, les circonstances et les personnes. [346]
……………………………………………………………………………………………………..
Serves vous volontier des conseilz, lhors qu'ilz ne seront point contraires au projet que nous
avons resolu, de suivre en tout l'esprit d'une suave douceur et de penser plus a l'interieur des ames
qu'a l'exterieur ; car en fin, la beauté des filles du Roy est au dedans1362, qu'il faut que les
Superieures cultivent, si elles n'ont elles mesmes ce soin, crainte qu'elles ne s'endorment dans leur
chemin et ne laissent esteindre leurs lampes par negligence ; car il leur seroit dit indubitablement
comme aux vierges folles se presentant pour entrer au festin nuptial : Je ne vous connois point1363.
Je vous recommande a Dieu pour obtenir ses saintes graces dans vos conduites, affin que,
tout a son gré et par vos mains, il façonne les ames, ou par le marteau, ou par le ciseau, ou par le
pinceau, pour les former toutes selon son bon playsir, vous donnant a ce dessein des cœurs de
peres, solides, fermes et constans, sans omettre les tendresses de meres qui font desirer les
douceurs aux enfans, suivant l'ordre divin qui gouverne tout avec une force toute suave et une
suavité toute forte1364. [347]
……………………………………………………………………………………………………..
_____
1362 Ps. XLIV, 14.
1363 Matt., XXV, 11, 12.
1364 Cf. Sap., VIII, 1.
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23 Pages 221-230

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XLII. Avis spirituels a une personne vivant dans le monde, novembre
1619-16221365 (Inédit). Les satisfactions de l'amour-propre et l'exercice
de l'amour de Dieu. Craindre la tentation, c'est ouvrir la porte à
l'ennemi ; la confiance en Dieu lui fait peur. Mépriser les tentations
et recourir à la prière. Pourquoi le démon donne quelqu'apparence
de vertu à ceux qui le servent. « Celuy qui nous a donné la fleur du
desir nous donnera aussi le fruit de l'accomplissement. » Le Sauveur
est père par sa providence et mère par son amour. Un effet de la
dévotion qui est selon Dieu. Exemple du bienheureux Amédée de
Savoie et de sainte Paule. L'amour de Dieu ne trouve jamais qu'on
fait trop pour lui.
C'est es choses difficiles, malaysees et desaggreables que nous devons prattiquer la fidelité
envers Dieu, laquelle sera d'autant plus excellente que nous aurons moins de choix a ce qui nous
sert d'exercice. L'amour propre se contente aucunement entre les souffrances, quand elles sont de
son eslection ; l'amour de Dieu s'exerce plus heureusement es sujetz que la Providence divine
permet ou ordonne sans nous, mais sur nous et pour nous.
La divine Escriture dit : Celuy qui n'est point esprouvé que sçait il 1366 ? Bienheureux est
l'homme qui endure l'essay de la tentation, car apres avoir esté esprouvé [348] par l'Esprit, il
recevra la couronne de gloire que Dieu a promise a ceux qui l'ayment1367. Si vostre cœur craint
plus la tentation qu'il ne faut, il donne l'ouverture a son ennemy ; comme au contraire, si nous
avons une confiance filiale en Dieu et que nous nous retournions de son costé prenant asseurance
en sa bonté, l'ennemy craindra de nous tenter, voyant que sa tentation nous donne sujet de nous
jetter entre les bras de Nostre Seigneur. Et pour l'ordinaire, la meilleure methode de resister a la
tentation, c'est de ne point disputer avec elle, ni mesme s'amuser a regarder les sujetz ; ains il faut,
aussi tost qu'on la sent, parler d'autre chose avec Nostre Seigneur ou avec sa sainte Mere, ou avec
les Anges et les Saintz, ou avec son ame mesme. Bref, si la tentation est d'une rose, il faut parler
d'une violette, et ne point s'estonner de la varieté des pensees, puisqu'il n'est pas requis de les
combattre l'une apres [l'autre], ains seulement de les maistriser et desdaigner toutes par un simple
retour du cœur a Dieu, a la Majesté duquel on recourt par prieres ; par exemple, de luy dire, en se
retournant vers luy : Je suis vostre1368, mon Dieu ; hé, que vous estes aymable ! Jesus est bon ;
VIVE JESUS ! et semblables paroles. En somme, c'est un bon moyen de vaincre que de ne point
regarder l'ennemy, mais tous-jours se retourner devers le bienaymé Amy celeste ; et quoy que
nostre ennemy crie et tempeste, il suffit pour le rejetter de ne point respondre, ne point s'amuser a
luy et ne point faire semblant de luy. Tandis que l'on dit : Non, on n'est jamais vaincu.
1365 Ce texte et le suivant sont empruntés à un petit in-4º conservé à la Bibliothèque publique de Bourges, dont il est
parlé dans la Préface de notre tome VI, pp. LIX, LX. Probablement, le Manuscrit fut à l'usage particulier d'une
Religieuse, qui réunit à quelques Entretiens plusieurs extraits du Coustumier, divers Avis de saint François de Sales,
certains passages des Réponses de sainte Jeanne de Chantal, etc.
Il est impossible d'indiquer ou même de proposer une destinataire pour les deux documents ; il semble bien
pourtant qu'ils s'adressent à une fille spirituelle vivant dans le monde. Ont-ils été écrits pour la même personne ? autre
question qu'il serait téméraire de résoudre.
Quant à la date, nous pouvons leur assigner les dernières années de la vie du Saint, après son retour de Paris
: novembre 1619-1622. Si pour la première pièce elle est certaine à cause de la Vie du Bien-Heureux Amedee (1619)
qui y est citée, pour la seconde elle est assez probable ; nous y trouvons en effet un écho de la « petite methode » pour
s' « unir a Nostre Seigneur » envoyée à Mme de Villesavin en juillet-août 1619. (Voir ci-dessus, p. 330, et le tome
XVIII, p. 417.)
1366 Eccli., XXXIV, 9, 11.
1367 Jacobi, I, 12.
1368 Ps. XCVIII, 94.
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23.2 Page 222

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N'estimer rien de soy mesme, sinon seulement parce que nous appartenons a Dieu et
sommes a luy, et s'aneantir soy mesme. Helas ! tandis que les ames servent au peché, l'ennemy
leur donne quelque apparence de vertu pour quelque particulier sujet, affin de nourrir en elles
quelque sorte de presomption et une vayne complaysance en elles mesmes, sans laquelle on ne
pourroit gueres demeurer en peché ; car, comme l'on ne peut gueres ressentir de perfection sans
humilité, aussi ne peut on long tems demeurer en peché sans la vanité, c'est a dire sans
presomption... 1369, nous confians en ce grand Salutaire, esperans qu'en sa sayson [349] elle le
rendra multiplié. Confions nos bons desirs a Dieu et ne soyons point en anxieté s'ilz fructifieront,
car Celuy qui nous a donné la fleur du desir nous donnera aussi le fruit de l'accomplissement pour
sa gloire, si nous avons une fidelle et amoureuse confiance en luy.
Soyes toute a Dieu, ma tres chere Fille, penses en luy et il pensera en vous1370. Il vous a
tiree a soy affin que vous fussies sienne, et il aura soin de vous. Ne craignes rien, car si les petitz
poussins se tiennent asseurés quand ilz sont sous les aisles de leur mere, combien doivent estre
asseurés les enfans de Dieu sous sa paternelle protection ! Demeures donq en paix, ma Fille,
puisque vous estes de ces enfans ; et reposes vostre cœur et toutes les lassitudes et langueurs qui
vous arriveront, sur la sacree et tres aymable poitrine de ce Sauveur, qui sert a ses enfans de pere
par sa providence et de mere par son doux et tendre et cordial amour.
La devotion nous aydera beaucoup et nous servira grandement a la vraye perfection. Tout
ainsy comme nous aydons aux malades, quand nous les allons visiter, a supporter leur mal en le
regrettant et lamentant, de mesme aussi la devotion nous ayde, quand elle est simple et selon Dieu,
a supporter plus patiemment les afflictions et tribulations quand elles nous arrivent.
Nous lisons en la Vie du bienheureux Amedee1371, que ceux qui le voyoyent en devotion
[disaient qu'il] falloit qu'ilz n'eussent point de cœur ou bien [qu'] ilz l'avoyent de roche s'ilz ne
l'amollissoyent, a l'heure particulierement que l'on le voyoit a la Messe ou aux Offices divins, «
ou jamais il ne parloit a personne [qu'] a Dieu. La douceur de ses yeux, et ses larmes coulant si
doucement sur sa face angelique, » les « ardens souspirs » qui entrecoupoyent « ses innocentes
prieres, sa modestie en toute sa personne donnoyent de la devotion a tous ceux qui avoyent
l'honneur de le voir en ce saint exercice. » Le monde disoit qu'« il pleuroit trop. Ouy certes, mais
je vous diray de luy ce que disoit saint Hierosme de sainte Paule1372 : elle pleuroit trop pour une
grande dame, » il est « vray, mais les pechés de sainte Paule eussent esté de bien grandes vertus »
a d'aucune. « Ainsy le bienheureux Amedee pleuroit trop, donnoit trop aux pauvres, s'humilioit
[350] trop, aymoit la solitude trop : soit ainsy, puisque vous le voulés ; mais trois fois et trois fois
heureux trop ! et o sacrés excès ! ces pechés mortelz eussent esté de grandes vertus aux autres
princes. »
L'« homme qui ayme Dieu et qui a le cœur vivement frappé » de l'amour de Dieu « ne
treuve rien de trop, hormis » le peché, et « luy semble de faire tous-jours trop peu pour Dieu qui a
fait tant d'exces d'amour et de souffrance pour nous ; » mais nous autres, pour peu que nous
fassions, nous pensons encor « avoir fait trop et que Dieu » nous en « doit de reste. » Miserables
que nous sommes ! Oh, a Dieu ne playse que cette presomption si vayne nous entre dans la cervelle.
Il faut tous-jours bien faire de mieux en mieux, car quand [nous] vivrions les siecles entiers en
souffrance et peyne, nous ne pourrions trop faire pour un si bon Dieu qui nous a fait tant de graces
et tant de biens. Servons le donq de bon cœur, avec amour ; courons a luy, affin qu'il nous donne
sa gloire et la consolation de son Saint Esprit1373, laquelle soit a jamais au milieu de nos cœurs.
Amen. [351]
Revu sur un ancien Manuscrit conservé à la Bibliothèque publique de Bourges, A, n° 113.
1369 Quelques mots manquent ici.
1370 Cf. B. Raym. de Cap., Vita S. Cath. Sen., Pars Ia, c. X.
1371 La Vie du Bien-Heureux Amedee, duc III de Savoye, par un Pere de la Cie de Jesus (Paris, Chappelet, 1619), chap.
XII.
1372 Epist. XXXIX ad Paulam, super obitu Blæsillæ filiæ, 5. (P. L., t. XXII, 471, 472.)
1373 Act., IX, 31.
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23.3 Page 223

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XLIII. Autres avis spirituels a une personne vivant dans le monde,
novembre 1619-1622, (Inédit). En quoi consiste la simplicité. Qui ne
cherche que Dieu le trouve toujours. Il faut le chercher par le chemin
qu'il nous a marqué. Ce n'est pas « nostre mal qui nous fait mal »,
c'est l'amour-propre. L'homme simple ne se trouble point. Exercice
d'union à la volonté de Dieu pour le matin, et « acte de reunion » à
multiplier dans la journée. Ne faire aucun acte de piété par manière
d'acquit. Mieux vaut n'entendre qu'une Messe, mais avec attention,
que plusieurs avec irrévérence. Conseil de saint François de Sales
aux personnes très occupées. L'égalité d'esprit est l'un des plus beaux
ornements de la vie chrétienne. Tâcher de l'acquérir en demandant le
secours du Saint-Esprit et en se tenant en garde contre la langue
Nostre Seigneur desire de vous, ma tres chere Fille, une grande simplicité spirituelle et une
grande prudence : la simplicité de la colombe et la prudence du serpent1374. Or, la simplicité de la
colombe consiste a ne vouloir qu'une seule chose, comme fit cette corneille changee en blanche
colombe, je veux dire Magdeleine convertie, qui pour tout ne cherche que son Maistre. Tout ce
qui n'est pas Dieu ne luy est rien ; son cœur n'est point sujet au change, car elle rencontre les Anges,
elle les quitte sans s'arrester avec eux, pour chercher son Bienaymé crucifié1375. Helas, mais helas
! que faites vous, ma chere Magdeleine ? vous laisses des Anges glorieux pour chercher un mort
crucifié. En somme, elle ne cherche que son Maistre.
Ma tres chere Fille, le premier point de la simplicité de l'ame amante gist a ne chercher, a
ne vouloir que Dieu. O si nous ne cherchions que cela, que nous serions heureux, car nous le
treuverions tous-jours en le cherchant et le chercherions en le treuvant ; nous croistrions d'heure
en heure au desir de le treuver, et le treuverions en la perseverance de le desirer.
Mais, ce me dires vous, que desiray je sinon luy ? Escoutes, ma Fille, et consideres le
premier point de la simplicité celeste, qui consiste a ne chercher Dieu que par le [352] chemin qu'il
nous a marqué ; car qui ne veut pas aller par ou Dieu le conduit ne le treuvera jamais, d'autant qu'il
ne le cherche pas simplement. Et quel est le chemin qu'il vous a marqué, ma tres chere Fille ?
Celuy auquel vous estes ; et croyes moy, Dieu conduisit les enfans d'Israel par la voye du desert.
pierreux, espineux et raboteux. O qu'heureux furent ceux qui ne murmurerent point, car jamais
rien ne leur manqua ! O que malheureux furent ceux qui murmurerent, car ilz furent piqués du
serpent1376 et eurent mille angoisses.
Ne gromellons point dans nos cœurs, disant que nostre condition est insupportable. O
combien de gens changeroyent volontier la leur a la nostre ! Ce n'est pas tant nostre mal qui nous
fait mal, comme c'est nostre amour propre qui s'aigrit et inquiete a tout ce qu'il a a contre cœur. Le
saint homme Job est moins inquiet entre les incomparables travaux sur son fumier1377, que le roy
Achab sur son lit au milieu de son palais1378, et que les mauvais Israelites entre les delices de la
manne1379. L'hiver nous nous plaignons du froid et l'esté du chaud ; les mouches nous mettent en
peyne sur le chemin ; en fin il n'y a que l'homme simple qui ne se trouble point, car il ne cherche
que Dieu par le chemin auquel il est. Nous avons passé plusieurs jours d'extreme ennuy du tems
que nous n'estions pas tant a Dieu que nous devions estre, mays nous y remedierons, moyennant
1374 Cf. Matt., X, 16.
1375 Joan., XX, 12-16.
1376 Num., XXI, 5, 6.
1377 Job, II, 7-10.
1378 III Reg., XXI, 4.
1379 Num., XI, 4-6.
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23.4 Page 224

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son ayde, et commencerons ainsy :
Premierement, le matin, prosternee devant sa face et l'adorant profondement, vous jetteres
vostre pensee a luy et considereres l'eternelle volonté qu'il a d'estre aymé de vous et d'estre uni par
charité a vostre cœur, lequel donq vous eslanceres en cette souveraine Bonté et entre les bras
aymables de cette sainte volonté. Vous unires la vostre avec icelle de toutes vos forces, par telles
ou semblables protestations interieures : Ouy, mon Dieu, mon ame se sousmet a vostre volonté et
veut a jamais demeurer inseparablement unie et sujette a vostre intention. O Seigneur, que je sois
donq sauvee, puisque telle est vostre volonté. Que je face a jamais vostre volonté et non la
mienne1380. Vous estes le Dieu de mon cœur1381 : qu'a jamais [353] mon cœur soit dedié a
l'obeissance du vostre, mon Dieu !
Secondement. Cet acte d'union a la volonté de Dieu estant fait au commencement de la
journee, il faut souvent faire l'acte de reunion. Je dis de tems en tems, ou plustost de moment en
moment, par des frequentes eslevations de cœur en Dieu et par maniere de repetitions et
confirmations de l'union des-ja faitte, comme disant interieurement : Ouy, Seigneur, je demeureray
a jamais jointe et unie a vostre sainte volonté. O Seigneur, de grace, que ma volonté soit
eternellement et inseparablement vostre. Mesme on peut repeter cet acte de reunion sans rien dire,
faysant le signe de la Croix sur le cœur, ou levant les yeux au ciel, ou bien prononçant le sacré
nom de JESUS. Et semble bon encores de faire cet acte de reunion au commencement de toutes
les prieres qui se prattiquent parmy la journee, comme oyant la sainte Messe, au Benedicite et
Graces de table, aux Ave de midi et du soir, apres l'examen, et particulierement avant la confession,
parce qu'il faut prendre soigneusement garde de ne faire aucun acte de pieté par maniere d'acquit,
ains avec une serieuse et veritable affection.
Et en suite de cela, il est a noter que nous ne sommes pas obligés sous peyne de peché
mortel ni mesme veniel d'ouyr la Messe, si ce n'est les jours de festes et Dimanche, non plus que
d'ouyr les prieres extraordinaires du soir ; * nous ne sommes point obligés d'ouyr Vespres ni de
dire le Benedicite entrant a table, ni Graces en sortant, sous peyne de peché ; et pourtant, quand
nous faysons ces actes de religion et de devotion, nous sommes obligés de les faire serieusement
et avec reverence. Il vaudroit mieux n'ouyr qu'une Messe et l'ouyr reveremment, que d'en ouyr
plusieurs ayant l'esprit distrait, sans attention ni reverence, n'estant pas loysible d'omettre le respect
es exercices de religion, pour petitz qu'ilz soyent. C'est pourquoy, ceux qui sont sujetz a beaucoup
d'occupations, je leur conseille de faire leurs exercices spirituelz courtement, affin qu'ilz les
puissent faire plus attentivement, s'y adonnant avec l'esgalité de l'esprit, qui est un des plus illustres
ornemens de la vie chrestienne et un des plus aymables moyens pour acquerir [354] et conserver
la grace de Dieu, et mesme de bien edifier le prochain ; n'y ayant rien aussi qui detraque tant le
bon estat du cœur, ni qui rende plus malaysee la conversation humaine que la bigearrerie de l'ame.
C'est une des plus blasmables conditions des creatures que d'estre immortifiees, c'est a dire
d'estre sujettes a estre de differente humeur : tantost chagrine, melancholique, tantost colere,
tantost rieux, tantost serieux, tantost censeur ; comme au contraire, c'est une inestimable perfection
que d'avoir une humeur douce, esgale et qui face bon rencontre a quelqu'heure et a quelque tems
que ce soit. Bien qu'il soit vray qu'il est presque impossible de conserver tous-jours si exactement
cet advis parmy l'embarras de cette vie mortelle ; mais du moins il faut tascher d'acquerir ce bien
nompareil de l'esgalité, et quand on s'apperçoit d'estre hors du train de la tranquillité, il faut avant
toutes choses se mettre en devoir de corriger l'humeur et action contraire, s'humiliant devant le
Saint Esprit et demandant son secours, empeschant du moins que, pendant le trouble, la passion
ne s'evapore par la langue, ni par les assautz exterieurs.
L'esprit de paix et de tranquillité, suavité et d'esgalité, c'est l'esprit de Dieu et d'edification
que je vous souhaite de tout mon cœur, et qu'il demeure a jamais avec vous. Ainsy soit il.
Revu sur un ancien Manuscrit conservé à la Bibliothèque publique de Bourges, A, n° 113. [355]
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1380 Luc., XXII, 42.
1381 Ps. LXXII, 26.
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23.5 Page 225

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XLIV. Avis a la Mère Claude-Agnès de la Roche, Supérieure de la
Visitation d'Orléans, [juin 1620-16221382]. Parler très peu de soi-même.
L'affabilité ne doit pas empêcher l'exercice de l'autorité. La
gravité avec les séculiers. Ne pas cacher le bien qui se fait à la
Visitation. Rapports avec les Carmélites, les Jésuites et les Minimes.
Ce qu'il faut faire au parloir. La Vie, Passion et Mort de Notre-
Seigneur sont les meilleurs sujets d'oraison. Certaines âmes sont
attirées à une plus grande simplicité. Marque d'une bonne oraison.
Ce que la Supérieure peut permettre. Discrétion qu'elle doit observer.
Ne rien faire de plus que la Communauté. La sainte Communion et
la reddition de compte. La charité. Regarder Dieu.
Maintenant je vous dis : Ne parles que le moins qu'il se pourra de vous mesme ; mays ceci,
je le dis tout de bon, retenes le bien et faites y attention. Si vous estes imparfaitte, humilies vous
au fond de vostre cœur et n'en parles point ; car cela n'est que l'orgueil, qui fait que vous penses
en dire beaucoup, affin que l'on n'en treuve pas tant que vous en dites. Parles peu de vous, mais je
dis peu.
Ayes un grand soin de maintenir vostre exterieur parmi vos filles en telle mediocrité entre
la gravité et la douceur et l'humilité, que l'on reconnoisse que si bien vous les aymes tendrement,
que vous estes aussi la Superieure ; car il ne faut pas que l'affabilité empesche l'exercice de
l'authorité. J'appreuve fort que les Superieures soyent Superieures, se faysant obeir, pourveu que
la modestie et le support soyent observés.
Ayes envers les seculiers une sainte gravité ; car tandis que vous estes jeune, il faut observer
soigneusement cela. Que vostre rire soit moderé, et mesme envers les femmes, avec lesquelles on
peut avoir un peu plus d'affabilité et de cordialité. Il ne faut pas entendre par cette gravité qu'il
faille estre severe ou renfrognee ; car il faut conserver tous-jours une gracieuse serenité. Devant,
les jeunes gens, quoy que de profession ecclesiastique, ayes pour l'ordinaire vos [356] yeux
rabaissés, et soyes courte en paroles avec telles gens, observant tous-jours de profiter a leurs ames,
en faysant voir la perfection de vostre Institut. Je ne dis pas la vostre, ains celle de vostre Institut,
non en paroles, que fort simplement, ne le louant que comme on parle un chacun de soy mesme,
ou de ses parens, c'est a dire courtement et simplement.
Loües grandement les autres Ordres et Religions, et le vostre au dessous des autres choses,
bien que vous ne devies pas cacher que vous vives paisiblement, et disant, quand l'occasion s'en
presente, le bien qui se fait, simplement.
Faites tous-jours grand cas des Seurs Carmelites, et vous entretenes en leur amitié par tout
ou vous seres, tesmoignant tous-jours que vous en faites grande estime et que vous les aymes
cherement.
Entretenes vous fort avec les Peres Jesuites et communiques volontier avec eux, comme
aussi les Peres de l'Oratoire et les Peres Minimes ; prenes conseil d'eux tous ou vous en aures
besoin, et particulierement des Peres Jesuites.
Ne soyes pas du tout tant retenue a relever le voile comme les Seurs Carmelites, mais
pourtant uses de discretion pour cela, faysant voir, quand vous le leveres, que c'est pour gratifier
ceux qui vous parlent ; observant de ne gueres vous avancer des treilles, ni moins d'y passer les
mains que pour certaines personnes de qualité qui le desirent.
Pour ce qui est de l'orayson, il faut que vous observies de faire que les sujetz sur quoy on
la fera soyent sur la Mort, Vie et Passion de Nostre Seigneur ; car c'est une chose fort rare que l'on
1382 Le Saint donna-t-il ces Avis de vive voix ou par écrit ? Dans le premier cas, la date serait juin 1620 ; dans le
second, il faudrait les placer entre cette date et 1622.
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ne puisse proffiter sur la consideration de ce que Nostre Seigneur a fait. En fin, c'est le Maistre
souverain que le Pere eternel a envoyé au monde, pour nous enseigner ce que nous devons faire :
et partant, outre l'obligation que nous avons de nous former sur ce divin Modele pour ce sujet,
nous devons grandement estre excités a considerer ses œuvres pour les imiter, parce que c'est une
des plus excellentes intentions que nous puissions avoir pour tout ce que nous avons a faire et que
nous faysons, que de [357] les faire parce que Nostre Seigneur les a faites, c'est a dire prattiquer
les vertus parce que Nostre Seigneur les a prattiquees et comme il les a prattiquees. Ce que pour
bien comprendre, il faut fidellement peser, voir et considerer dans ce : « Parce que nostre Pere l'a
fait en telle façon je le veux faire, » en enclosant l'amour envers nostre divin Sauveur et Pere tres
aymable ; car l'enfant qui ayme bien son bon pere a une grande affection de se rendre fort conforme
a ses humeurs et de l'imiter en tout ce qu'il fait.
Il se peut faire pourtant qu'il y ayt certaines ames exceptees lesquelles ne peuvent s'arrester
ni occuper leur esprit sur aucun mistere ; elles sont attirees a une certaine simplicité devant Dieu,
toute douce, qui les tient en cette simplicité, sans autre consideration que de sçavoir qu'elles sont
devant Dieu et qu'il est tout leur Bien, demeurant ainsy utilement. Cela est bon ; mais il me semble
qu'il est asses clairement dit dans le livre de l'Amour de Dieu, ou vous pourres avoir recours, si
vous en aves besoin, et aux autres qui traittent de l'orayson.
Mais, generalement parlant, il faut faire que toutes les filles, tant qu'il se peut, se tiennent
en l'estat et methode d'orayson qui est la plus seure, qui est celle qui tend a la reformation de vie
et changement de mœurs, qui est celle que nous disions premierement, qui se fait autour des
mysteres de la Vie et de la Mort de Nostre Seigneur. Et il ne faut pas tous-jours croire les jeunes
filles qui ne font que d'entrer en Religion, quand elles disent qu'elles ont de si grandes choses ; car
bien souvent ce n'est que tromperie et amusement. C'est pourquoy il faut les mettre au train et aux
mesmes exercices que les autres ; car si elles ont une bonne orayson, elles seront bien ayses d'estre
humiliees et de se sousmettre a la conduitte de ceux qui ont du pouvoir sur elles. Il y a tout a
craindre en ces manieres d'oraysons relevees ; mais l'on peut marcher en asseurance dans la plus
commune, qui est de s'appliquer tout a la bonne foy autour de nostre Maistre pour apprendre ce
qu'il veut que nous fassions.
La Superieure peut, en quelque grande et signalee occasion, faire faire deux ou trois jours
de jeusne a la Communauté, [358] ou bien seulement aux filles qui sont plus robustes ; faire
quelque discipline, plus librement que de jeusner, car c'est une mortification qui ne nuit point a la
santé, et partant, toutes la peuvent faire en la sorte qu'on la fait ceans. Mais il faut tous-jours
observer de n'introduire point les austerités en vos Maysons ; car ce seroit changer vostre Institut,
qui est principalement pour les infirmes.
La Superieure doit sans doute de tems en tems visiter les cellules des Seurs pour empescher
qu'elles n'ayent rien en propre ; mais pourtant il faut faire cela si discrettement, que les Seurs ne
puissent point avoir de juste rayson de penser que la Superieure ayt quelque desfiance de leur
fidelité, soit en cela, soit en autre chose. Car il le faut tous-jours observer discrettement, ne les
tenant ni trop resserrees ni trop en liberté ; car vous ne sçauries croire combien c'est une chose
necessaire de se tenir en cet entredeux.
Pour moy, j'appreuverois fort que vous ne fissies rien que de suivre simplement la
Communauté en toutes choses, soit aux mortifications, ou en quoy que ce soit. Il me semble que
ce devroit estre la prattique principale d'une Superieure que d'aller devant ses filles en cette
simplicité, que de ne rien faire ni de plus ni de moins qu'elles font ; car cela fait qu'elle est
grandement aymee, et qu'elle tient merveilleusement l'esprit de ses filles en paix. J'ay grandement
envie que l'histoire de Jacob soit tous-jours devant vos yeux, affin de faire comme luy, qui ne
vouloit pas seulement s'accommoder au pas de ses enfans, mais encor a ceux-la mesme de ses
aigneletz1383.
Et quant a ce qui est de la Communion, je voudrois que l'on suivist l'advis des confesseurs
; quand vous aves envie de communier quelquefois extraordinairement, que vous prissies leurs
1383 Gen., XXXIII, 13, 14.
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advis. Pour communier une fois toutes les semaines de plus que la Communauté, vous le pouves
bien faire, et a vostre tour comme les autres ; et mesme pour communier plus souvent
extraordinairement. Vous feres ce que ceux qui auront soin de vous treuveront bon, car il leur faut
laisser conduire cela.
Il sera bon, ma chere Fille, que vous vous assujettissies a rendre conte tous les mois, ou les
deux ou trois mois, si [359] vous voules, au confesseur extraordinaire, ou mesme au confesseur
ordinaire, s'il est capable, ou tel autre que vous jugeres ; car c'est un grand bien que de ne rien faire
que par l'advis d'autruy.
Il ne me semble pas que vous devies maintenant faire plus d'attention sur aucune autre
prattique que sur celle de la tres sainte charité a l'endroit du prochain, en le supportant doucement
et le servant amoureusement ; mais en sorte que vous observies tous-jours de conserver l'authorité
et gravité de Superieure, accompagnee d'une sainte humilité.
Quand vous aures jugé que quelque chose se doit faire, marches seurement et sans rien
craindre, regardant Dieu le plus souvent que vous pourres. Je ne dis pas que vous soyes tous-jours
attentive a la presence de Dieu, mais que vous multipliies le plus qu'il se pourra les retours de
vostre esprit en Dieu. 1384
_____
XLV. Avis spirituels a une Religieuse de la Visitation1385 (Inédit).
Marcher dans la vertu sinon toujours avec joie, du moins avec courage.
La statue dans sa niche. Ne soyons pas des anges, mais de petits
poussins. Nous n'avons pas à craindre le jugement du monde. Nos
misères ne nous doivent pas accabler ni étonner. Quel est, parmi les
pauvres, « le plus advantagé » ? Parlons à Dieu de nos misères.
Ne pas insulter notre cœur et ne pas trop le presser. — Dieu seul doit y
régner. Le réjouir et le consoler. La couche de l'Epoux, et l'agneau
de l'holocauste. Recevoir Jésus-Christ : le plus grand moyen d'arriver
à la perfection. Ne pas quitter la sainte Communion pour les
distractions et aridités. Le divin Maître est Roi, soleil, fournaise,
baume, trésor, gage de la gloire. Aspirer à l'éternité qui approche.
Ma Fille, demeures en paix devant Nostre Seigneur, ne [360] vous embarrasses pas.
Pourveu que vous marchies dans le chemin de la vertu, quoy que lentement, vous ne laisseres pas
d'arriver a vostre but. Alles donq avec joye ; mais si vous ne pouves marcher dans la carriere tous-
jours avec joye, faites le au moins avec courage, et confies vous en Dieu. Faites comme ces enfans
qui veulent marcher ; mais des aussi tost qu'ilz font quelque faux pas, ilz courent a leurs meres, ilz
se jettent entre leurs bras et sur leur sein et s'y tiennent attachés.
Travailles a l'acquisition des vertus de bonne foy, sans vous embarrasser ; laisses vous
gouverner a Dieu, serves le selon son goust et non selon le vostre, regardes que c'est luy qui vous
a placee ou vous estes. Tenes vous donq comme une statue dans sa niche ; vous estes la pour luy
1384 A la suite de ces conseils, la Mère de la Roche a écrit : « C'est ce dernier point que, de tout mon cœur, j'ay promis
a mon Dieu de pratiquer fidelement, moyennant sa grace, ayant pris Nostre Dame protectrice de cette mienne
resolution.
1385 Nous sommes, croyons-nous, en présence d'une compilation ; il n'est donc guère possible d'attribuer une date à
ces Avis. Une partie de ceux-ci aurait-elle été adressée à sainte Jeanne de Chantal encore dans le monde ? La signaler
sous toutes réserves, c'est ce que nous pouvons faire.
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plaire, cela vous doit suffire1386. Nostre divin Maistre, de tems en tems, vous regardera et jettera
les yeux sur vous. Ne desires point estre autre que vous estes, car si vostre soleil semble s'ecclipser,
il reviendra bien tost et vous esclairera de nouveau.
Tasches d'acquerir la perfection qui est propre a cette vie. Ne veuillons pas estre trop tost
des anges ; soyons de petitz poussins sous l'aisle de nostre mere, car nous ne sçaurions pas encores
voler. Prattiquons les petites vertus qui nous sont propres et qui n'ont pas tant d'esclat ; resjouissons
nous de nostre propre abjection. Il faut treuver bon que nostre parfum sente mauvais au nez du
monde ; ne craignons point le jugement qu'il fait de nous, ne nous abbattons point, car tant que
Dieu nous voudra bien faire la grace de nous tenir de sa main en nous conservant le desir que nous
avons de l'aymer, nous n'avons rien a craindre.
Il ne faut pas aymer nos imperfections, ouy bien l'humiliation qu'elles nous causent. Il ne
faut pas se laisser troubler et accabler dans nos miseres, il faut tascher d'en sortir avec paix. Cher
mespris, que mes imperfections et defautz m'apportent, je vous ayme ; je deteste le mal, et me
resjouis de la honte. Il faut, en cette vie, se porter, et avec tranquillité. Mais qu'est ce que nous
portons quand nous nous portons nous mesme ? C'est rien qui vaille ; il ne faut pas que cela nous
estonne. [361]
Dieu ayme les miserables, il regarde ceux qui ne sont rien ; les chetifz et personnes abjectes
deviennent le throsne de Dieu1387 ; il establit son siege sur une ame qui est vile. Confessons donq
nostre pauvreté. Res-jouisses vous, ma Fille, de n'estre rien, monstres luy vos playes, exposes luy
vostre indigence. Parmi les pauvres du monde, celuy qui n'a que des haillons a faire paroistre et
des playes a monstrer s'estime le plus advantagé, esperant que, par la descouverte de sa pauvreté,
il recevra de plus grandes aumosnes1388. Tenons nous dans cette disposition devant Dieu ; ne luy
parlons que de nos miseres, allons a son temple sacré luy exposer ce que nous sommes1389, mais
ne nous abbattons pas.
Releves vostre pauvre cœur quand il tombe, gardes vous d'insulter en son endroit ; prenes
nouveau courage, car si vous tombes souvent, vous vous releves aussi souvent sans vous en
appercevoir. Ne presses pas vostre cœur, tenes le au large, puisqu'il aymeroit mieux mourir que
d'offenser son Dieu. Il faut aussi plustost perdre toutes choses que la paix. Marches donq
simplement, et vous marcheres avec joye et confiance1390 ; tenes vostre cœur au large, et ne le
presses pas trop. Soyes juste envers vostre ame, pour ne la pas accuser ni excuser trop legerement
: l'un pourroit la rendre orgueilleuse, et l'autre la faire devenir pusillanime.
Tant que nous serons ferme dans nostre resolution que Dieu regne dans nostre cœur, ne craignons
point. Ouy, ma Fille, ou la mort ou l'amour ; il faut aymer ou mourir : que Dieu seul y vive,
ou rien du tout. Et tant que ce sentiment sera bien gravé dans nostre cœur, pourquoy nous
tourmenter ? Ne voyes vous pas que c'est l'amour propre qui se mesle subtilement de nous donner
la torture ? Je vous exhorte encor une fois de tenir vostre cœur au large ; Dieu mercy, il se porte
bien, puisque l'amour l'anime et quil veut tous-jours aymer.
Res-jouisses donq, ma Fille, vostre pauvre cœur ; consoles le dans ses tristesses, fortifies
le dans ses travaux, recrees le dans ses ennuis, consoles le dans ses angoisses, affin que n'estant
point abbattu, il ressente un nouveau courage pour servir Dieu. C'est en cette consideration que
[362] je vous prie de le tenir le plus joyeux que vous pourres ; mesnages le, affin quil fasse de
grans progres. Songes que l'Espoux a choysi ce cœur pour en faire son lit de repos ; il faut qu'il
soit fleuri1391. Ce doit estre aussi l'aigneau que vous deves offrir en holocauste et que vous deves
aussi immoler a Nostre Seigneur ; il faut qu'il soit gras et en bon point1392. Vous sçaves que Dieu
reçoit avec playsir l'offrande qu'on luy fait d'une franche volonté1393.
1386 Cf. supra, p. 298.
1387 Cf. Ps. CXII, 6, 7.
1388 Cf. tom. XIII, p. 392c.
1389 Cf. Act., III, 2.
1390 Cf. Prov., X, 9.
1391 Cant., I, 15.
1392 Vide tom. XV, pp. 16, 17.
1393 Cf. Eccli., XXXV, 11 ; II Cor., IX, 7.
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Alles librement, ma chere Fille, vous consacrer a nostre divin Sauveur ; donnes luy le sacré
bayser de la charité1394, et continues tous-jours a vous humilier profondement, affin que vous
l'approchies sans crainte ; car je croy que le plus grand moyen pour arriver a la perfection est de
recevoir Jesuschrist, pourveu qu'on ayt soin de destruire tout ce qui peut luy desplaire. Croyes
moy, ma Fille, rien ne me fortifie plus l'estomac que de ne manger que d'une viande qui soit
excellente ; nourrisses vous donq de la viande des Anges. Il vous fera faire une bonne digestion de
luy mesme, il se communiquera a toutes vos puissances, il agira en vous, il y operera ; ce sera luy
qui esclairera vostre esprit, qui eschauffera vostre volonté, et ne sera plus vous qui vivres, ce sera
Jesuschrist en vous1395. Et pour recevoir cette grace, il faut nous repaistre de Jesuschrist crucifié ;
c'est luy qui eschauffera et fortifiera l'estomac de nostre ame, et qui nous preparera et rendra dignes
de le recevoir souvent.
Ne quittes donq pas vos Communions pour les peynes et foiblesses que vous sentes, quoy
que vous soyes distraitte et que vous soyes en secheresse. Tout cela n'est que dans la partie
inferieure, car je sçai que la superieure est unie a Dieu et ne souspire que pour luy. Et puisque vous
cherches nostre divin Maistre, ou le pouves vous mieux treuver que dans le throsne de son amour
? Il veut estre nostre Roy : et ainsy il nous donnera la paix, il fera cesser la guerre, il mettra le
calme dans nos puissances et nous fera recueillir.
Ne vous esloignes pas de vostre Soleil si vous voules estre esclairee. C'est une fournaise
d'amour ou nos tiedeurs seront consumees, c'est un bausme pretieux qui guerira nos blesseures,
c'est en fin un thresor de toutes les graces qui vous enrichira. Si vous estes dure, vous seres amollie
; si [363] vous estes seche, vous seres arrousee ; si vous estes en tristesse, il sera vostre joye. Bref,
Jesuschrist, dans ce divin Sacrement, vous veut estre toutes choses : c'est cette tablette cordiale
que vous deves prendre, affin de vous conforter et de vous preserver de la corruption. En fin, ce
divin Sauveur veut bien estre le gage de la gloire qu'il nous a promise.
Hastons nous d'aspirer a cette bienheureuse eternité ; elle s'approche, le tems passe. Hé,
quil importe peu, ma Fille, que les momens de cette vie soyent fascheux, pourveu qu'a jamais nous
louions et benissions Nostre Seigneur.
Tasches, ma chere Fille, de faire une bonne provision de sousmission a la sainte volonté de
Dieu. Amen
Revu sur une copie conservée à la Visitation d'Annecy.
_____
1394 Cf. Cant., I, 1.
1395 Galat., II, 20.
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XLVI. Autres avis spirituels a une Religieuse de la Visitation1396 (Inédit).
Trésor de l'abandon total à Dieu. Bonheur d'une âme petite et
humble. Les emplois dans la maison du Seigneur. Tout est
indifférent au cœur qui ne veut que Dieu. — Dans les choses qui ne sont
pas clairement manifestées, interroger nos Supérieurs et suivre leurs
avis. Suavité des inspirations divines ; trouble et inquiétude en celles
qui viennent du démon. L'humilité change en or le plomb de nos
infirmités. « Mesnager les petites rencontres ». Bienheureuse est
l'âme dépouillée de toutes choses. Ce qui nous empêche de nous jeter
à corps perdu entre les bras de la Providence. Dieu n'est pas comme
les hommes. « Aymer sans mesure l'Amour eternel. »
Ma chere Fille, si vous connoissies le thresor qui est enfermé dans l'abandon total que l'ame
fait de tout elle mesme entre les mains de Dieu pour ne plus vouloir que ce qui luy plaist, vous
souspireries apres cet estat, et vous ne souhaitteries rien que d'estre ce que Dieu veut que vous
soyes. Que les autres soyent eslevés comme des Seraphins ; [364] mon partage est de me tenir
petite et humble aux pieds de mon Sauveur ; hé bien, je veux m'y tenir contente. Laissés la tous
les raysonnemens et tous les desirs que vostre pauvre cœur voudroit vous suggerer pour sortir de
cet estat. Croyes moy, que dans la mayson du Seigneur les emplois les plus vilz ne sont pas les
moins advantageux ; mais le cœur qui est indifferent dit mesme qu'il ne peut pas envisager les
advantages qui s'y trouvent. Je sçay que c'est mon Dieu, qui m'ayme, qui m'a choysi cest employ
et cette maniere de vie ; je ne veux plus envier l'excellence des autres, mais je veux me
perfectionner sans empressement et sans inquietude. Si je tombe, je ne m'abattray pas, car le Tout
Puyssant me peut relever ; si je suis dans l'obscurité, le Seigneur est ma lumiere, que craindray-
je1397 ? En fin, ni le ciel, ni la terre, ni mesme l'enfer ne me peuvent oster mon Dieu1398. Je ne
souhaitte que luy : tout m'est indifferent ; je veux aymer toutes choses en Dieu et pour Dieu ; j'iray
avec luy a la bonne foy, sans trop critiquer. Je veux luy obeir dans ce qu'il me demande, mais pour
connoistre sa volonté dans une infinité de choses qui ne me sont pas clairement manifestees, je ne
veux point donner la torture a mon pauvre cœur, ni les examiner avec scrupulosité ; je m'en
tiendray a ce que me diront ceux que Dieu a establis pour me conduire et, en paix, je tascheray a
suyvre ses inspirations.
Remarqués que lhors qu'elles viennent du Seigneur, c'est avec douceur et suavité qu'elles
nous portent au bien, et nous sommes indifferens du succes, parce que, pourveu que nous ayons
fait de nostre costé ce qu'il demande de nous, nous demeurons en paix. Au contraire, le malin esprit
nous suggere des desirs des vertus avec aspreté, inquietude, chagrin et empressement ; si nous
treuvons quelqu'obstacle, tout a l'heure nous sommes troublés, nous nous empressons. Ne sçaves
vous pas, ma Fille, que nostre Dieu est le veritable Salomon qui veut se reposer dans nostre cœur
? Il est bon ; si nous pouvons le placer dans le Ciel, nous ne nous troublerons pas des accidens de
cette vie.
Ne nous affligeons pas si nous sommes appesantis par le poids de nos mauvaises
inclinations ; aymons l'abjection [365] qui nous en revient. Vous ne sçaves pas la force de
l'humilité qui change en or tres pur le plomb de nos infirmités, laquelle sainte metamorphose opere
dans l'ame cette vertu. Faites que ce bausme salutaire nage tous-jours dans vostre ame.
1396 Ces Avis sont-ils tous de la même date et ont-ils été donnés à la même destinataire ? Double question qu'il est
impossible de résoudre. Pour quelques-uns du moins on pourrait proposer la Sœur de Blonay et ne pas les placer avant
1612. (Voir tome XV, note (826), p. 290.)
1397 Ps. XXVI, 1.
1398 Cf. Rom., VIII, 38, 39.
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Ayes tous-jours une grande douceur et affabilité ; vous sçaves que l'affabilité est la cresme
de la charité. Ayes soin de mesnager les petites rencontres que Dieu vous presente, mettes en cela
vostre vertu, et non pas a desirer de grans travaux ; car souvent on se laisse abbattre par un
mouscheron quand on combat des monstres par imagination.
Ne vous inquietes point dans la veuë des maux et des peynes qui vous peuvent arriver ; car
le Seigneur ne permettra pas qu'ilz vous arrivent, ou il vous donnera la force de les porter, s'il vous
les envoye. Laisses vostre ame et vostre cors entre ses benites mains, abandonnes vous a luy,
perdes vous en luy, n'aymes que luy, ne veuilles que luy, et que toutes choses hors de luy vous
soyent indifferentes ; et vous connoistres dans le Ciel que bienheureuse est l'ame qui a vescu dans
ce monde despouillee de toutes choses, et qui a rendu hommage au grand despouillement et a la
nudité de son Espoux attaché a la croix, et mourant, affin d'enrichir et de revestir ses espouses
bienaymees.
Pour affermir nostre amour pour nostre souverain Bien, resveillons nostre foy ; car la
prudence de la chair et les raysonnemens de nostre esprit nous nuysent souvent et nous empeschent
de nous jetter a cors perdu entre les bras de la divine Providence. Nous croyons, parce que nous
ne valons rien, que le Seigneur n'aura point soin de nous : ne voyes vous pas la finesse de la
prudence humaine qui nous trompe en nous faysant sortir de l'estat d'une parfaitte confiance ? Ne
faysons point ce [tort] a sa divine Majesté de raysonner si bassement ; Dieu n'est pas comme les
hommes, qui ne font cas que de ce qui peut leur estre utile. Je sçay, dira une ame fidele, que la foy
m'enseigne que le Seigneur supporte et reçoit les foibles et les miserables qui se confient en luy :
je veux donq m'y confier et abandonner.
C'est dans la sainte dilection, ma chere Fille, quil faut bastir nostre demeure ou tabernacle,
car il n'y a rien de bon [366] pour nous que d'aymer sans mesure l'Amour eternel. Presses fort, ma
chere Fille, ce divin Sauveur sur vostre cœur : c'est luy qui l'a scellé et cachetté1399, affin qu'il soit
tout sien. Amen.
Revu sur une copie conservée à la Visitation d'Annecy.
_____
XLVII. Fragments sur la pauvreté1400 (Inédit). En quoi consiste la
parfaite pauvreté intérieure. Comment regarder les biens de la
Communauté. Accepter avec amour les disettes. Trois degrés de la
pauvreté spirituelle. La grande et sainte pauvreté. Quel en est le
dernier degré. Celui qui n'a aucune confiance en soi-même est
vraiment fidèle.
La parfaitte pauvreté interieure consiste a avoir le cœur destaché et disjoint de toutes les
choses dont il se sert, ne les tenant que par emprunt, estant prest de les quitter sans fascherie, toutes
fois et quantes que les Superieurs l'ordonneront. Ainsy, ceux qui ont le vray amour divin sont
contens des choses necessaires ; et encor en sont ilz destachés non seulement d'affection, mais
aussi en la façon d'en parler, n'usant point du mot de mien, mais nostre. [C'est] avec la mesme
moderation qu'il faut aymer les biens de la Communauté, les regardant non avec une affection
proprietaire qui nous oste la paix du cœur ou nous desregle en la pretention, conservation ou
1399 Cf. Cant., VIII, 6.
1400 Les fragments qu'on va lire sur la Pauvreté et l'Obéissance sont extraits du Manuscrit de Nancy dont il a été déjà
question plus haut, remarques (968), (1009), pp. 205 et 215. Il peut se faire qu'ils aient été adressés à la Mère de
Chantal ; mais il est tout aussi probable que le Saint ait dit ces paroles à ses Filles dans quelque conférence spirituelle.
Le recueil d'où elles sont tirées ne suivant pas l'ordre chronologique, on ne saurait non plus en indiquer la date même
approximative ; nous dirons seulement qu'elles font suite aux passages de 1620-1622.
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24.2 Page 232

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distribution d'iceux, ains avec un esprit religieux, comme choses consacrees a Dieu, lesquelles il
ne faut aymer que selon le goust du Seigneur a qui elles sont consacrees.
La pauvreté religieuse engendre pauvre table, pauvre lict, pauvres habitz et pauvre cellule.
Cela doit sembler [367] necessaire, dont nous ne sçaurions nous passer commodement ; tout le
reste doit estre retranché, autant que nous pourrons. Il se faut mesme retrancher quelquefois des
choses mesme necessaires ; mays sur tout accepter avec amour tous les manquemens des choses
necessaires qui nous arriveront, de quelque part qu'ilz viennent, recevant aussi de bon cœur les
choses pauvres qui nous arriveront, en quoy que ce soit.
Par dessus toute pauvreté, il nous faut avoir celle du cœur, qui nous rend humbles et petitz
a nos yeux. La pauvreté spirituelle, c'est l'abandonnement de toutes choses, le mespris de soy
mesme et la renonciation de toutes choses et de la propre volonté en toutes choses : ces trois degrés
sont les enseignemens de la vraye Religion. Ne se vanter jamais de ce que l'on a esté au monde,
n'en vouloir estre loüé ni estimé ; fuir cela tant qu'il se peut, craignant que nostre pauvreté n'en soit
plus prisee, c'est imiter la souveraine humilité de Nostre Seigneur. Il faut fuir tout ce qui est
d'honnorable.
La grande et sainte pauvreté est de reconnoistre que nous n'avons rien [et] ne pouvons rien
de nous mesme que misere. Je suis mendiant et pauvre : mon Dieu, aydes moy1401. Il est bon de
regarder nostre bassesse en comparayson de la sainteté des Saintz, qui se tenoyent pour rien.
Le dernier degré de la pauvreté c'est l'absolu renoncement de sa propre volonté, se
conformant en toutes choses a celle du prochain, et ne vouloir chose quelconque sinon Dieu et
l'accomplissement de son bon playsir.
Bienheureux le pauvre, car il se reposera au sein de Dieu. Ayes fiance en Dieu1402, mettes
vous en sa garde, dresses vers luy vostre pensee, et il vous nourrira1403. Affin qu'en fidelité vous
puissies dire : Le Seigneur a soin de moy1404, mettes tout vostre soin vers luy, car il a soin de vous.
Se fier en soy mesme n'est point le propre de la foy, mays de la perfidie. Celuy la est
vrayement fidele qui ne se fie ni a aucune confiance en soy, qui s'est rendu comme un vaysseau
corrompu et qui perd tellement son ame, qu'il la veut conserver pour la vie eternelle1405. La seule
humilité de cœur est cause que l'ame ne se fie pas en elle mesme ; [368] mais, la tenant en abandon,
se retire au desert, se reposant toute sur son Bienaymé1406.
Revu sur un ancien Manuscrit conservé à la Visitation de Nancy.
_____
XLVIII. Fragments sur l'obéissance, (Inédit). L'obéissance religieuse est
un holocauste. Devoir du Supérieur et de l'inférieur. Qu'est-ce que
le propre jugement ? L'indifférence du parfait obéissant
Saint Pierre dit1407 : Sousmettes vous a toutes creatures humaines pour l'amour de Dieu.
L'obeissance religieuse est un holocauste qu'on offre a Dieu, sans se rien reserver de sa propre
volonté. L'obeissance est la supresme et unique vertu. Saint Bernard dit1408 : « Que le Prelat ne
commande a sa poste, ains selon la Regie ;... qu'il n'accroisse les vœux sans la volonté du sujet,
qu'il ne les diminue aussi que par necessité ; » mais « que le sujet sçache que l'obeissance est
imparfaite qui se renferme dans les bornes des vœux, car la parfaite s'estend a toutes choses
1401 Ps. XXXIX, 18, LXIX, 6.
1402 Eccli., XI, 22.
1403 Ps. LIV, 23 ; I Petri, V, 7.
1404 Ps. XXXIX, 18.
1405 Matt., X, 39 ; Luc., IX, 24, XVII, 33.
1406 Cf. Cant., VIII, 5.
1407 I Ep., II, 13.
1408 Lib. De præcepto et dispensatione, cc. V, VI. (P. L., t. CLXXXII, 867-868.)
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auxquelles la charité se treuve. » Saint Bernard dit1409 : « Celuy que nous avons pour Superieur au
lieu de Dieu, nous le devons ouyr comme Dieu mesme, es choses qui ne sont apertement contre
Dieu. »
Il faut obeir par la sousmission du jugement. L'on appelle jugement propre celuy qui se
separe du sens de l'Eglise, des Prelatz et Superieurs ; celuy qui se despart du sens de l'Eglise, des
Prelatz, des Superieurs est en erreur.
L'indifference consiste a n'incliner pas plus d'un costé que d'autre ; de sorte que le parfait
obeissant, encor qu'il soit resolu d'accomplir tout ce qui sera de precepte, de Regie, d'ordonnance,
il est indifferent a tout le reste, ayant tous-jours au cœur et en la bouche : Seigneur, que voules
vous que je face1410 ?
Revu sur un ancien Manuscrit conservé à la Visitation de Nancy. [369]
XLIX. Conseils a un religieux pour l'examen de conscience1411
Mon Filz, si vous desires faire quelque progres en la perfection religieuse, consideres Dieu
tous-jours present en toutes vos actions, et ne manques point de faire troys fois le jour l'examen de
vostre conscience.
Le matin, consideres comment est ce que vous aves passé la nuit ; prevoyes avec prudence
comment est ce que vous employeres ce jour au service de Dieu.
Sur le midy, faites une reflexion sur toutes vos actions, si vous aves mis en execution les
bons propos qu'aves fait le matin, si vous aves surmonté vos passions, fait toutes vos œuvres avec
une pureté d'intention et donné bon exemple a vos Freres.
Le soir, ne manques point de faire encor une reveüe, pour voir si vous seres plus souvent
tombé aux imperfections que vous aves remarqué en vous sur le midy, ou si vous aves esté plus
prompt a l'exercice de la vertu. Conferes les actions d'un jour avec un autre, pour voir si vous
proffites ou si vous retournes en arriere, taschant de reconnoistre l'imperfection principale, qui est
comme la source et origine de tous vos manquemens, affin que vous la puissies peu a peu
surmonter. [370]
_____
L. Méditation sur le choix d'un état de vie pour un aspirant a la vie
religieuse1412. Bonté de Dieu qui se contente de nous obliger à garder ses
Commandements. Ce qu'il nous conseille. Toujours nous aurons à
combattre. Consolations de la vie religieuse et de la « vie commune
». Examiner ses dispositions et attendre.
1409 Ibid., c. IX. (P. L., ibid., 871.)
1410 Act., IX, 6.
1411 Le P. Philibert de Bonneville cite ce fragment dans sa Vie du B. François de Sales (1628), chap. XXVI, p. 269. «
Un devot Religieux, » dit-il, « auquel il se communiquoit fort familierement, l'ayant supplié de luy donner quelque
brief document pour profiter à la vie spirituelle, » il reçut du saint Evêque ces conseils touchant l'examen de
conscience. Qui est le destinataire ? Ne serait-ce point le P. Philibert lui-même ?
1412 Dans l'édition de 1641 (tome II, p. 576) et les suivantes, la seconde Méditation se termine par un fragment de lettre
à la Mère Paule-Jéronyme de Monthoux, 9 novembre 1620 (voir tome XIX, p. 377) : est-ce une raison pour croire que
l'aspirant à la vie religieuse, destinataire de ces deux pièces, est son cousin Jean-Marc de Monthoux en Duingt, qui fit
profession chez les Capucins le 13 août 1612 ? Nous ne pouvons faire plus que suggérer ce nom et poser ce point
d'interrogation.
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O que Dieu est bon a son Israël ! Qu'il est bon a ceux qui sont droitz de cœur1413 !
Consideres premierement, que Nostre Seigneur ayant peu obliger ses creatures a toutes
sortes de services et obeissances envers luy, il ne l'a pas neanmoins voulu faire, ains s'est contenté
de nous obliger a l'observation de ses Commandemens ; de maniere que s'il luy eust pleu
d'ordonner que nous jeusnassions toute nostre vie, que nous fissions tous vie d'hermites, de
Chartreux, de Capucins, encor ne seroit ce rien au respect du grand devoir que nous luy avons : et
neanmoins, il s'est contenté que nous gardassions simplement ses Commandemens.
Consideres secondement, qu'encor qu'il ne nous aye point obligé a plus grand service qu'a
celuy que nous luy rendons en gardant ses Commandemens, si est ce qu'il nous a invités et
conseillés a faire une vie tres parfaite, et observer l'entier renoncement des vanités et convoytises
du monde.
Consideres troysiesmement, que, soit que nous embrassions les conseilz de Nostre
Seigneur nous rangeant a une vie plus estroitte, soit que nous demeurions en la vie commune et en
l'observance seule des Commandemens, nous aurons en tout de la difficulté : car si nous nous
retirons du monde, nous aurons de la peyne de tenir perpetuellement bridés et sujetz nos appetitz,
renoncer a nous mesmes, resigner nostre propre volonté et vivre en une tres absolue [371] sujettion
sous les loix de l'obeissance, chasteté et pauvreté ; si nous demeurons au chemin commun, nous
aurons une peyne perpetuelle a combattre le monde qui nous environnera, a resister aux frequentes
occasions de pecher qui nous arrivent, et a tenir nostre barque sauve parmi tant de tempestes.
Consideres quatriesmement, qu'en l'une et en l'autre vie, servant bien Nostre Seigneur nous
aurons mille consolations. Hors du monde, le seul contentement d'avoir tout quitté pour Dieu vaut
mieux que mille mondes ; la douceur d'estre conduit par l'obeyssance, d'estre conservé par les loix,
et d'estre comme a couvert des plus grandes embusches, sont de grandes suavités : layssant a part
la paix et tranquillité qu'on y treuve, le playsir d'estre occupé nuit et jour a l'orayson et choses
divines, et mille telles delices. Et quant a la vie commune, la liberté, la varieté du service qu'on
peut rendre a Nostre Seigneur, l'aysance de n'avoir a observer que les Commandemens de Dieu, et
cent autres telles considerations la rendent fort delectable.
Sur tout cela : Helas ! dires vous a Dieu, Seigneur, en quelle condition vous serviray-je ?
Ah ! mon ame, ou que ton Dieu t'appelle, tu luy seras fidele : mais de quel costé t'est il advis que
tu ferois mieux ? Examinés un peu vostre esprit pour sçavoir s'il sent point aucune inclination
plustost d'un costé que d'autre, et l'ayant descouvert, ne faites encor point de resolution, ains
attendes jusques a ce qu'on vous le dise.
_____
LI. Autre méditation pour le même aspirant, sur la naissance de Notre-
Seigneur Jésus-Christ. L'arrivée de Marie et Joseph à Bethléem ; ils
reçoivent le mépris avec une douceur incomparable. Le moindre
oubli excite notre arrogance. L' « establerie » pour le Sauveur, et «
les superbes edifices » pour les pécheurs. Tout est pauvre dans cette
naissance, et nous ne cherchons qu'à nous satisfaire
Imagines vous de voir saint Joseph avec la Sainte Vierge, [372] sur le point de son
accouchement, arriver en Bethleem et chercher par tout a loger, sans treuver aucun qui les veuille
recevoir1414. O Dieu, quel mespris et rejet le monde fait des gens celestes et saintz, et comme ces
deux saintes ames embrassent volontier cette abjection ! Ilz ne s'eslevent point, ilz ne font point
de remonstrances de leur qualité, mais tout simplement reçoivent ces refus et aspretés avec une
douceur nompareille. Ah ! miserable que je suis ! le moindre oubli que l'on fait de l'honneur
1413 Ps. LXXII, 1.
1414 Cf. Luc., II, 7.
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pointilleux qui m'est deu, ou que je m'imagine m'estre deu, me trouble, m'inquiete, excite mon
arrogance et ma fierté ; par tout je me pousse a vive force es premiers rangs. Helas ! quand auray
je cette vertu, le mespris de moy mesme et des vanités ?
Consideres comme saint Joseph et Nostre Dame entrent dans l'entree et porche qui servoit
par fois d'establerie aux estrangers, pour y faire le glorieux enfantement du Sauveur. Ou sont les
superbes edifices que l'ambition du monde esleve pour l'habitation des vilz et detestables pecheurs
? Ah ! quel mespris des grandeurs du monde nous a enseigné ce divin Sauveur ! Que bienheureux
sont ceux qui sçavent aymer la sainte simplicité et moderation ! Miserable que je suis, il me faut
des palais, encor n'est ce pas asses ; et voyla mon Sauveur sous un toit tout percé, et sur du foin,
pauvrement et piteusement logé.
Consideres ce divin petit Enfançon né nud, frileux, dans une cresche, enveloppé de
bandelettes1415. Helas ! que tout est pauvre, que tout est vil et abject en cet accouchement, et que
nous sommes doüilletz et sujetz a nos commodités, amoureux des sensualités ! Il faut grandement
exciter en nous le mespris du monde et le desir de souffrir pour Nostre Seigneur les abjections,
mesayses, pauvretés et manquemens. [373]
_____
LII. Troisième méthode pour réciter le Chapelet1416
Ayant pris vostre chapelet par la croix et l'ayant baysee, vous feres avec icelle le signe de
la Croix sur vous, et vous mettres en la presence de Dieu1417, luy offrant vostre ame avec toutes
ses puissances, principalement vostre entendement et volonté, avec un grand desir de considerer
avec attention les misteres de nostre foy et de tirer d'iceux quelque sainte affection d'imiter les
vertus que nostre Redempteur nous a enseigné, et de faire d'autres actes d'amour de Dieu,
d'admiration de ses perfections infinies, d'actions de graces pour ses benefices, de contrition de
vos pechés, de saintz propos de vous amender, de surmonter vos passions, de prouffiter en la vertu.
En apres, vous prieres Dieu, par les merites de la vie, mort et passion de nostre Sauveur, par
l'intercession de la glorieuse Vierge et de vostre Ange tutelaire, d'accepter vos foibles prieres pour
ceux ou celles des vivans et trespassés pour lesquelz vous aures prins resolution de prier.
Cela fait, vous dires avec grande foy le Credo, et pour vous preparer a dire plus devotement
le Chapelet, vous imploreres le secours divin en disant : Deus, in adjutorium meum intende :
Domine, ad adjuvandum me festina1418 ; et vous adjousteres : Gloria Patri et Filio et Spiritui
Sancto, et ce, avec un grand desir d'adorer et glorifier la tres sainte [374] Trinité ; et en fin
adjousteres le devot hymne : Memento, salutis auctor1419, avec le verset Dignare me laudare te,
Virgo sacrata.
Apres cette preparation vous commenceres le Chapelet, et aux trois petitz grains vous
demanderes l'intercession de la glorieuse Vierge, affin que vous le puissies bien dire et en tirer
quelque fruict spirituel. Et a cette intention, au premier grain des trois petitz, vous salueres Nostre
1415 Ibid., v. 12.
1416 Cette troisième Méthode est une compilation. Le P. Philibert de Bonneville l'a insérée au chapitre XXXI, p. 330,
de sa Vie du B. François de Sales (Lyon, Rigaud, 1628), où il dit que le Saint l'a laissée « a quelque sien amy ». Mais
dans sa déposition au Ier Procès de Genève (ad art. 33), le même P. Capucin s'exprime ainsi : « J'ay veu une maniere
fort devote pour dire le Chapelet, escripte de sa propre main, et une aultre quil avoit baillié a un devot Religieux,
lesquelles j'ay colligé en une parce qu'elles estoient fort semblables, retenant tant que j'ay peu les paroles de l'autheur.
» Donc, non seulement le déposant a fait une compilation de deux textes, mais il y a fait encore quelques retouches.
Plusieurs passages ont dû être empruntés à l'écrit cité par le P. de la Rivière (voir ci-dessus, note (1139), p. 238) ; la
plupart sont textuels. Toutefois, comme il serait difficile de les séparer du reste, nous donnons en entier la compilation
du P. Philibert de Bonneville et, en marge, des renvois à la Méthode qu'on a lu plus haut, pp. 238-240.
Il est évident qu'aucune date ne peut être proposée.
1417 Vide supra, p. 238.
1418 Ps. LXIX, 2.
1419 Hymn. Christe Redemptor gentium.
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Dame comme la Fille la plus chere du Pere eternel ; au second, vous la salueres comme Mere tres
chere du Filz de Dieu, nostre Sauveur ; et au troysiesme, vous la salueres comme Espouse
bienaymee du Saint Esprit1420.
Cela fait, vous commenceres a mediter les misteres du Rosaire, prenant ou les joyeux, ou
les douloureux, ou les glorieux, ou mesme quelque autre devot sujet, tel que Dieu vous
inspirera1421, vous entretenant en la meditation d'iceluy pendant que vous dites la premiere dizaine
; et me semble encor estre plus utile de s'y entretenir quelque peu avant que de la commencer. Et
apres, dires l'Orayson dominicale, par laquelle doivent commencer toutes vos oraysons, comme
estant la plus excellente que nous puissions faire ; et ensuite vous dires les dix Ave Maria,
continuant en cette maniere de dire les cinq dizaines d'une partie du Rosaire.
A la fin, vous reprendres le gros grain qui est au commencement dudit Chapelet et
remercieres Dieu de la grace qu'il vous a faitte de vous permettre de dire le Chapelet, luy
demandant l'assistence de sa grace pour pouvoir mettre en execution les bons propos qu'il vous a
donnés. Et passant aux trois petitz grains suivans, vous salueres la Sainte Vierge, la suppliant, au
premier, d'offrir vostre entendement au Pere eternel, affin que vous puissies a jamais considerer
ses misericordes ; au second, vous la supplieres d'offrir vostre memoire au Filz, a ce qu'a jamais
vous ayes souvenance de sa Passion ; au troysiesme, vous la supplieres d'offrir vostre volonté au
Saint Esprit, affin qu'a jamais vous puissies estre enflammé de son saint amour1422. Et en fin, au
gros grain qui est au fin bout, vous feres un bouquet spirituel de recollection, renouvellant tous les
bons propos [375] et saintes resolutions qu'aves faites en la meditation de ces cinq mysteres,
suppliant la divine Majesté qu'elle accepte et addresse toutes vos oraysons a son honneur et gloire
et pour le bien de son Eglise, en la foy et union de laquelle vous prieres sa Bonté de vouloir
rappeller tous les desvoyés. Et prieres encor pour toutes vos necessités particulieres et de vos amis,
finissant comme vous aves commencé, par la profession de foy, disant le Credo1423.
Puys, vous signant et baysant la croix, mettes vostre chapelet a la ceinture, comme une
sainte marque par laquelle vous voules protester que vous voules estre serviteur du tout dedié au
service du Sauveur et de sa sainte Mere1424, disant devotement ces paroles de David1425 : Servus
tuus sum ego, et filius ancillæ tuæ 1426. [376]
_____
1420 Vide supra, p. 239.
1421 Vide ibid.
1422 Vide ibid., pp. 239, 240.
1423 Vide supra, p. 240.
1424 Vide ibid.
1425 Ps. CXV, 16.
1426 Je suis votre serviteur, et le fils de votre servante.
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LIII. Paraphrase de l'Oraison Dominicale adressée a une de ses filles
spirituelles1427 (Inédit)
PUNTI DA MEDITARE SOPRA
L'ORAZIONE DEL PATER NOSTER
POINTS A MÉDITER SUR L'ORAISON :
NOTRE PÈRE
Flexis genibus prius ad Patrem
Domini nostri Jesu Christi con ogni humiltà,
levi Vostra Eccellenza gl'occhi dell'anima al
Cielo, e s'imagini veder quel gran Padre di
lume1428, Iddio, che stà sedendo nel throno
della sua gloria, circondato da miglioni
d'Angeli e di Seraphini, e con gran fede,
riverenza ed amore faccia quell'Orazione che
Christo c'insegnò, e gli domandi quelle sette
petizioni ch'in quella si contengono1429, e
questo con amorosi ed ardenti colloqui con
esso Padre, poichè tutta quest' Orazione non
è altro cb'un dolcissimo colloquio dell'anima
con Dio. [377]
Et acciò questo negocio si renda più
facile a Vostra Eccellenza, metterô qui alcuni
punti da meditare sopra ogni parola del Pater
noster, come Lei m'ha domandato per le sue
lettere. Appresso metterô tutt'il Pater noster
in prattica, più diffusamente di quel ch'altra
Ayant d'abord fléchi les genoux devant
le Père de Notre-Seigneur Jésus-Christ en toute
humilité, que Votre Excellence lève au Ciel les
yeux de son âme et s'imagine voir ce grand Père
des lumières, Dieu, assis sur le trône de sa
gloire, entouré de millions d'Anges et de
Séraphins ; puis, avec une grande foi, respect et
amour, faites cette prière que Jésus-Christ nous
a enseignée, et adressez-lui ces sept demandes
qui y sont contenues. Faites cela avec des
amoureux et ardents colloques avec le même
Père, car toute cette prière n'est autre chose
qu'un très doux entretien de l'âme avec Dieu.
[377]
Et afin que la chose soit rendue plus
facile à Votre Excellence, je mettrai ici quelques
points à méditer sur chaque parole du Notre
Père, comme vous me l'avez demandé par vos
lettres. Ensuite, je commenterai le Notre Père
plus amplement que ce que je communiquai
1427 En 1880 un chanoine de Crémone se rendait à Annecy. Il était porteur d'un Manuscrit et demandait si l'écriture
était de saint François de Sales. La réponse fut facile ; les anciennes Religieuses du 1er Monastère de la Visitation
répondirent que les caractères n'étaient pas du Saint ; quant à savoir si le texte venait de lui, la chose était à étudier.
Le Manuscrit italien portait ce titre : « PATER NOSTER composto et scritto di propria mano da S. Francesco
di Sales, rimesso già ad una dama, sua figlia spirituale, e passato al P. Generale de' Domenicani, e da esso donato a
Donna Anna Galliana de Cara, sua Nipote. PATER NOSTER compose et écrit de la propre main de saint François
de Sales, jadis remis à une dame, sa fille, spirituelle, passé ensuite au Père Général des Dominicains et donné par lui
à madame Anne Galliana de Cara, sa Nièce. »
Bien des recherches ont été faites récemment, soit pour retrouver le Manuscrit, soit pour en découvrir la
destinataire, ainsi que le Général des Dominicains et sa nièce ; toutes les démarches ont été infructueuses. Mgr l'Evêque
de Crémone interrogé, a répondu qu'on n'a rien pu trouver dans la ville ; mais qu'à « la Chancellerie de l'évêché il
existe une enveloppe vide sur laquelle on a écrit : Pater noster commenté par saint François de Sales. » Donc la pièce
a disparu.
Dans l'absence de documents, nous sommes réduits à des conjectures. Saint François de Sales a dû écrire
cette paraphrase en français ; l'italien et l'orthographe ne sont pas de lui, mais la traduction italienne date certainement
du XVIIe siècle. Le traducteur aurait-il mis au masculin ce membre de phrase : Consideri Sua Eccellenza [ciô] ch'
Iddio gl' ha dato, facendolo suo figliuolo adoptivo, etc., « le faisant son fils adoptif » ? On le dirait, si le document a
été rédigé par le Saint pour une fille spirituelle ; mais il peut se faire aussi qu'il l'ait d'abord écrit pour lui-même ou
pour d'autres, et « remis » ensuite à celle-ci avec quelques retouches.
Cette destinataire serait-elle Dona Ginevra Scaglia, fille de l'ambassadeur du duc de Savoie en France et sœur
de l'ambassadeur du même à Rome, à qui saint François de Sales écrit plusieurs lettres et qui s'honorait d'être sa fille
spirituelle ? Le Saint ne la vit que lors de son dernier voyage en Piémont en 1622, et, à cette époque elle avait déjà
pris le voile à Chieri, chez les Religieuses Dominicaines, avec le nom de Sœur Marie-Chrétienne. (Voir tomes XVIII,
note (607), p. 177, et XX, Lettre MDCCCXXXVII, p. 161, et p. 361.) Le fait que le Manuscrit original a été transmis
plus tard au Général des Frères Prêcheurs serait en sa faveur ; le doute néanmoins plane toujours, et c'est tout ce qu'on
en peut dire.
Les références en italiques ont été mises par saint François de Sales, les autres sont ajoutées par les éditeurs.
1428 Jacobi, I, 17.
1429 Matt., VI, 9-13.
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volta a bocca communichai a Vostra
Eccellenza.
Sopra la prima parola del Pater
Primo : consideri Sua Eccellenza [ciò]
ch'Idio gl'ha dato, facendolo suo figliolo
adoptivo, e però vuole che lo chiami Padre.
Quel Dio ch'il tutto da niente creò e che il
tutto tiene nelle sue mani, al qual servono
tutte le hierarchie de Cielo, è Padre nostro.
Felice e bene aventurato si reputeria un
povero pastorello che guarda le pecorelle
ne'campi, se Vostra Eccellenza l'adoptasse
per figliuolo e per herede ; [378] molto più,
ecc. Ben potiamo dire quel che rispose
Davide quand'il Re Saullo l'offerì per moglie
la sua figliuola Michol 1430 : Quis sum ego,
aut quæ est vita mea, aut cognatio patris mei
in Israel, ut fiam gener Regis1431 ? E chi son
io, o Dio del Cielo, che mi volete per vostro
figliuolo et volete ch'io vi chiami Padre ?
2°. Può eccitare la speranza a ottener
ogni cosa che domandarà, quanto maggior
grande sia, poichè il padre non niegha al
figliolo ciò che gli domanda, se risulta in
benefizio al figliolo.
3°. Può eccitar l'amore verso di questo
buon Padre, poichè questo nome di Padre è
nome d'amor reciproco.
4°. Consideri che questo buon Padre
nostro [ha] verso di noi tutti gl'effetti di
padre. Ci ama : Sic Deus dilexit mundum1432
; [379] Pater amat nos, dice Christo1433. Ci
provede di tutte le cose necessarie et al corpo
et all'anima : tutta questa gran machina di
questo mondo, di quest'elementi e di questi
cieli tiene occupata al servizio nostro,
perinsino gl'Angioli ; provede all'anima del
suo cibo, ch'è il precioso Corpo e Sangue del
suo unigenito Figliolo. Ci drizza al Cielo con
il suo Evangelio predicato, ci ajuta e difende
dalli nemici, ci consiglia, ci onora, ci veste e
ci castigha quando è bisogno.
5°. Domandargli che già che lui così
bene essercita con noi gl'effetti di buon padre,
che noi anche verso d'esso essercitiam gl'atti
di buoni figli, quali sono : amore, obedienza
autrefois de bouche à Votre Excellence.
Sur la première parole du Pater
Premièrement : que Votre Excellence
considère ce que Dieu lui a donné, le faisant son
fils adoptif, et il veut pour cela qu'elle le nomme
Père. Ce Dieu qui créa toutes choses du néant et
qui tient tout entre ses mains, à qui servent
toutes les hiérarchies du Ciel, est notre Père. Un
pauvre berger qui garde ses brebis dans les
champs s'estimerait heureux et bien fortuné si
Votre Excellence l'adoptait pour fils et pour son
héritier ; bien plus, etc. Nous pouvons [378] dire
à bon droit ce que David répondit au roi Saül
quand il lui offrit pour épouse sa fille [Mérob] :
Qui suis-je et qu'est-ce que ma vie, qu'est-ce que
la famille de mon père en Israël, pour que je
devienne le gendre du roi ? Et qui suis-je, ô Dieu
du Ciel, pour que vous me vouliez pour votre
enfant et que vous vouliez que je vous appelle
Père ?
2. Vous pouvez exciter l'espérance
d'obtenir tout ce que vous demanderez, pour
grand qu'il soit, car le père ne refuse rien à son
fils de ce qu'il lui demande, si la chose
demandée tourne à son avantage.
3. Vous pouvez exciter l'amour envers ce
bon Père, car ce nom de Père est un nom
d'amour réciproque.
4. Considérez en notre bon Père et vis-
à-vis de nous tous, les effets de père. Il nous
aime : Dieu a tellement aimé le monde ; Mon
[379] Père nous aime, dit le Christ. Il nous
pourvoit de tout ce qui nous est nécessaire pour
le corps et pour l'âme ; il met à notre service
toute cette grande machine du monde, ces
éléments, ces cieux et même les Anges ; il
pourvoit notre âme de sa nourriture, qui est le
précieux Corps et le Sang de son Fils unique. Il
nous dirige vers le Ciel par la prédication de son
Evangile, nous aide et défend contre nos
ennemis, nous conseille, nous honore, nous
revêt et nous châtie aussi quand il en est besoin.
5. Lui demander que puisqu'il exerce si
bien vis-à-vis de nous les offices d'un bon père,
nous exercions aussi à son égard les devoirs de
bons fils, qui sont l'amour, l'obéissance, le
1430 Il y a ici une petite erreur : c'est à propos de Mérob que David dit à Saiil les paroles citées.
1431 I Reg., XVIII, 17, 18.
1432 Joan., III, 16.
1433 Ibid., XVI, 27.
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e riverenza ; che l'amiamo teneramente e ci
rallegriamo d'havere un Padre cosi buono e
così santo, cosi savio e cosi potente, ch'è
l'istessa bontà, santità, sapienza e bellezza, et
infinitamente potente ; che siamo obedienti
alla sua legge e che li portiamo in ogni luogo
riverenza, e cerchiamo che tutto l'mondo
l'honori e riverisca. Finalmente, domandargli
che già che noi ci rallegramo d'haver così
buon Padre, ch'esso ci faccia tali che si
rallegri d'haver noi per suoi figlioli.
respect ; que nous l'aimions tendrement et nous
réjouissions d'avoir un Père si bon, si saint, si
sage et si puissant, qu'il est la même bonté,
sainteté, sagesse, beauté et infinie puissance ;
que nous obéissions à sa loi, que nous lui
portions en tout lieu le respect qui lui est dû et
que nous cherchions que le monde entier
l'honore et le révère. Enfin il faut lui demander
que puisque nous nous réjouissons d'avoir un
Père si bon, il nous rende tels qu'il puisse se
réjouir de nous avoir pour enfants. [380]
Sopra la parola : Nostro
Sur cette parole : Notre
Vostra Eccellenza consideri che
questo gran Padre volle [380] communicare
questa eccellentissima dignità a tutti, d'onde
non dice ch'è Padre di ricchi e signori, ma
nostro, id est di tutti, etiam poveri ; come il
sole, che drizza i suoi raggi, la sua luce e il
suo splendore sopra la minima pianta e sopra
il minimo fiore che v'è in un gran monte, e
sopra l'istesso monte. Così Iddio a tutti volse
communicare il nome di Padre.
2°. Nostro, per scuoprirci che tutti
siamo fratelli, e che tutti ci dobbiamo amare,
e per tutti far orazione, et osservare li doi
comandamenti nelli quali si contiene tutta la
Legge : il primo, d'amar Dio perchè è Padre ;
il secondo, amar il prossimo perch'è nostro
fratello1434.
3°. Nostro, acciô noi siamo suoi ; è
ben raggione, siamo tutti suoi, poich'esso è
tutto nostro. Qui offerirò tutto me stesso a lui,
supplicandolo che non sia più mio, ma tutto
suo, poichè esso s'è degnato essere tutto mio.
Sopra : Qui es in Cælis
1°. Sei ne' Cieli. Pregharò questo gran
Padre che mi faccia cielo spirituale, acciò
questa mia anima sia stanza [381] di sua alta
Maestà. Il cielo è forte, mobile e pieno di
stelle ; pregharò mi faccia forte nel suo santo
servizio, che mi dia continuo moto d'amore
verso d'esso ed orni la mia anima di tante
virtù quante stelle sono nel cielo et metta li
due gran luminarij : luminare majus, l'amor
fervente di sua Maestà ; luminare minus1435,
quel del prossimo.
Que Votre Excellence considère que ce
grand Père a voulu communiquer à tous cette
très excellente dignité ; c'est pourquoi il ne dit
pas qu'il est Père des riches et des seigneurs,
mais nôtre, c'est-à-dire de tous, même des
pauvres : comme le soleil, qui darde ses rayons,
sa lumière et sa splendeur sur la plus petite
plante, sur la plus petite fleur qui se trouve sur
une grande montagne, et sur la montagne même.
Ainsi Dieu a voulu communiquer à tous le nom
de Père.
2. Notre, pour nous révéler que nous
sommes tous frères, que nous devons aimer tout
le monde, prier pour tous et observer les deux
commandements auxquels se rattache toute la
Loi : le premier, d'aimer Dieu parce qu'il est Père
; le second, d'aimer le prochain parce qu'il est
notre frère.
3. Notre, afin que nous soyons siens.
C'est bien la raison : nous sommes tout siens
parce qu'il est tout nôtre. Ici je m'offrirai tout
entier à lui, lui demandant de n'être plus à moi,
mais tout à lui, puisqu'il daigne être tout mien.
Sur [cette parole] : Qui êtes aux Cieux
1. Qui êtes aux Cieux. Je prierai ce grand
Père de me rendre un ciel spirituel, afin que mon
âme soit la demeure de sa très haute [381]
Majesté. Le ciel est fort, mobile, rempli d'étoiles
; je le prierai de me rendre fort dans son saint
service, de me donner un mouvement continuel
d'amour envers lui, d'orner mon âme d'autant de
vertus qu'il y a d'étoiles au ciel et d'y mettre les
deux grands luminaires : le plus grand, l'amour
fervent de sa Majesté ; le plus petit, celui du
1434 Cf. Matt., XXII, 36-40 ; Joan., XIII, 34, XV, 12.
1435 Gen., I, 16.
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2°. Nei Cieli. Nell'Angioli :
illuminandoli, acciò lo conoscano, perciò
ch'Egli è luce eterna1436, omnia
illuminans1437 ; infiamandoli, acciò l'amino,
perciò ch'Egli è fuoco ch'accende ;
riempiendoli di beatitudine, acciô siano
eternamente beati, perchè Egli è Ben infinito
che riempie il tutto. Priegharò che sia in
questa mia anima, per riempirla delli suoi
doni e gratie.
3°. Nei Cieli. Acciô ch'io intenda che
l'anima mia non deve abbracciare la terra, ma
il Cielo ; non deve più caminar con l'affetto
delle cose basse e transitorie, ma levarsi alle
cose del Cielo, ut sit nostra conversatio in
Cælis1438, ubi Patrem habemus Deum. Questo
domanderà.
Sopra la prima petitione : Sanctificetur
Nomen tuum
1°. Domandar primo, ch'il suo Nome
santo sia santificato ; id est, ch'esso Dio, per
tutto il mondo, sia conosciuto, [382] amato,
adorato, honorificato, glorificato e esaltato
come quello vero et eterno Dio immortale,
omnipotente, solo buono, solo santo, solo
giusto, solo admirabile e solo meritevole
d'esser infinitamente amato ; pregandoli dia
luce a tutto l'Oriente et Ponente, et a tutte
l'altre parti del mondo dove regnano Turchi,
Mori, Gentili, pagani e altre simili genti,
acciò vengano in cognitione di questo Nome
suo santissimo1439, et pieghino a lui et al suo
Figliolo, con lo Spirito Santo, li suoi
ginocchi1440, e tutti dicano : Pater noster qui
es in Cælis, sanctificetur Nomen tuum.
2°. Sanctificetur Nomen tuum.
Prieghare il Signore mi faccia buono e santo,
acciò ch'il mondo vedendo le mie buone
opere, venghi a lodare, benedir e sanctificar
sua alta e gloriosa Maestà1441.
3°. Sanctificetur Nomen tuum.
Prieghar dia a tutti cognitione, ut possimus
comprehendere cum omnibus sanctis, quæ sit
latitudo, longitudo, sublimitas et
prochain.
2. Aux Cieux. Dans les Anges : les
éclairant, afin qu'ils le connaissent, lui, lumière
éternelle qui éclaire tout ; les enflammant, afin
qu'ils l'aiment, puisqu'il est un feu qui embrase ;
les comblant de béatitude, afin qu'ils soient
éternellement bien heureux, puisqu'il est le Bien
infini qui remplit tout. Je le prierai de demeurer
dans mon âme pour la remplir de ses grâces et
de ses dons.
3. Aux Cieux. Pour que je comprenne
bien que mon âme ne doit pas embrasser la terre,
mais le Ciel ; qu'elle ne doit plus cheminer ayant
l'affection aux choses basses et transitoires, mais
s'élever aux choses du Ciel, afin que notre
conversation soit dans les Cieux, où nous avons
pour Père Dieu lui-même. C'est ce que vous
demanderez. [382]
Sur la première demande : Que voire Nom soit
sanctifié
1. Demander d'abord que son saint N'om
soit sanctifié ; c'est-à-dire que Dieu lui-même
soit connu, aimé, adoré, honoré, glorifié et
exalté dans le monde entier comme le vrai Dieu,
éternel, immortel, tout-puissant, seul bon, seul
saint, seul juste, seul admirable, seul digne d'être
infiniment aimé. Il faut ensuite le prier de
répandre sa lumière sur tout l'orient et l'occident
et sur les parties du monde où règnent les Turcs,
les Maures, les Gentils, les payens et autres
peuples semblables, afin qu'ils arrivent à la
connaissance de son Nom très saint, qu'ils plient
les genoux devant lui et devant son Fils et le
Saint-Esprit, et qu'ils disent tous : Notre Père
qui êtes aux Cieux, que votre Nom soit sanctifié.
2. Que votre Nom soit sanctifié. Prier le
Seigneur de me rendre bon et saint, afin le
monde voyant mes bonnes œuvres, loue, bénisse
et exalte sa très haute et glorieuse Majesté.
3. Que votre Nom soit sanctifié. Le prier
de donner à tous l'entendement, afin que nous
puissions comprendre avec tous les saints,
quelle est la largeur, la longueur, la hauteur et
la profondeur : la largeur de ses bienfaits, la
1436 Sap., VII, 26.
1437 Cf. Joan., I, 9.
1438 Philip., III, 20.
1439 Cf. Sap., XII, 27.
1440 Is., XLV, 24 ; Rom., XIV, 11 ; Philip., II, 10.
1441 Cf. Matt., V, 16.
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profundum1442 : la larghezza delli suoi
benefizii, la lunghezza e grandezza delle sue
promesse, l'altezza della sua Maestà e la
profondità de' suoi giudizii. [383]
Sopra la 2da petitione : Adveniat Regnum
tuum
1°. Domandar instantemente che
venghi in noi il Regno celeste, quale ci meritò
il suo benedetto Figliolo con la sua santissima
Passione.
2°. Che mentre siamo in questa valle
di lagrime1443, esso regni per gratia
nell'anima nostra e nel corpo, et l'uno e l'altro
li dia obedienza come a suo Re.
3°. Che venghi il giudicio nel quale
Esso solo regnarà nelli suoi Santi.
Sopra la 3a petitione : Fiat voluntas tua
sicut in Cælo et in terra
1°. Domandar che sì come i cieli, che
sono gl'Angioli e Santi, fanno sempre la sua
volontà, così anco la terra, che siamo noi, la
facciamo.
2°. Fiat voluntas tua, qual è
ch'amiamo Dio ex toto corde, ex tota mente,
ex tota anima et ex omnibus viribus, et il
prossimo sicut nos ipsos1444.
3°. Fiat voluntas tua, ut imitemur
Christum qui dixit : Non mea, sed tua fiat
voluntas1445. [384]
Sopra la 4a petitione : Panem nostrum
quotidianum da nobis hodie
1°. Domandar il pane per noi, per tutto
il mondo e massime per il povero.
2°.
Panem
nostrum
supersubstantialem1446, ch'è il suo santo
Figliolo nel Sacramento, acciò habbiamo
memoria et intelligentia dell'amor che ci
portò e delle cose che per noi fece e pati, che
furon infinite.
3°. Pane della sua santa parola, quale
ci ministra per mezzo delli suoi predicatori, e
longueur et grandeur de ses promesses, la
hauteur de sa Majesté et la profondeur de ses
jugements. [383]
Sur la deuxième demande : Que votre Règne
arrive
1. Demander instamment qu'il vienne en
nous ce céleste Royaume que son Fils béni nous
a mérité par sa très sainte Passion.
2. Que pendant que nous sommes en
cette vallée de larmes, il règne par sa grâce en
notre âme et sur notre corps, et qu'il donne à l'un
et à l'autre de lui obéir comme à leur Roi.
3. Que vienne le jugement, après lequel
lui seul règnera dans ses Saints.
Sur la troisième demande : Que votre volonté
soit faite en la terre comme au Ciel
1. Demander que de même que les cieux,
qui sont les Anges et les Saints, font toujours sa
volonté, de même la terre, c'est-à-dire nous, la
fassions aussi.
2. Que votre volonté soit faite. Cette
volonté est que nous aimions Dieu de tout notre
cœur, de toute notre âme, de tout notre esprit et
de toutes nos forces, et le prochain comme nous-
mêmes.
3. Que votre volonté soit faite, afin que
nous imitions le Christ qui a dit : Non pas ma
volonté, mais la vôtre soit faite. [384]
Sur la quatrième demande : Donnez-nous
aujourd'hui notre pain de chaque jour
1. Demander le pain pour nous, pour tout
le monde et surtout pour le pauvre.
2. Notre pain supersubstantiel, qui est
son saint Fils dans le Saint Sacrement, afin que
nous ayons le souvenir et l'intelligence de
l'amour qu'il nous a porté et des choses qu'il a
faites et souffertes pour nous, qui sont infinies.
3. Pain de sa sainte parole qu'il nous
distribue par ses prédicateurs, et par lui-même
lorsque nous faisons oraison.
1442 Ephes., III, 18.
1443 Ps. LXXXIII, 7.
1444 Matt., XXII, 37, 39 ; Marc., XII, 30, 31 ; Luc., X, 27.
1445 Luc., XXII, 42.
1446 Matt., VI, 11.
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per se stesso quando facemo orazione.
Quinta petitione : Et dimitte nobis debita
nostra sicut, ecc.
1°. Considerar che vuole che ci
humiliamo, confessando che siamo peccatori
: Si dixerimus quod peccatum non habemus,
ipsi nos seducimus1447.
2°. Considerar che dice, debita, acciò
ch'intendiamo quod in multis offendimus
omnes1448 ; come si scuopre nella parabola di
quello che dovea decem milita talenta ; Matt.
c. 18 1449. [385]
3°. Sicut et nos dimittimus, quia
eadem mensura qua mensi fuerimus,
remetietur et nobis1450.
Sopra la 6a petitione : Et ne nos inducas in
tentationem
1° Mundi ; 2° carnis ; 3° diaboli.
Sopra la 7a petitione : Sed libera nos a malo
Cinquième demande : Pardonnez-nous nos
offenses comme, etc.
1. Considérer qu'il veut que nous nous
humiliions, confessant que nous sommes
pécheurs : Si nous disons que nous sommes sans
peché, nous nous séduisons nous-mêmes.
2. Considérer qu'il dit, debita, dettes,
afin que nous comprenions que nous péchons
tous en beaucoup de choses ; comme on le voit
dans la parabole de celui qui devait dix mille
talents. [385]
3. Comme nous les pardonnons, car de
la même mesure que nous [aurons] mesuré, on
nous mesurera.
Sur la sixième demande : Et ne nous induisez
point en tentation
1. [Tentations] du monde ; 2. de la chair
; 3. du diable.
Sur la septième demande : Mais délivrez-nous
du mal
1°. A malo, peccati, id est a culpa.
2°. A pena æterna.
3°. Ab omnibus adversitatibus,
periculis et malis quæ ab extrinseco
inferuntur.
IL PATER NOSTER IN PRATTICA
O Padre eterno, Padre di Nostro
Signore Giesù Christo, Padre di lumi1451,
Padre santo, Padre dolce e amorevole, o
Padre Creatore dell'universo : onde meritai io
chiamarvi Padre, io terra, polvere e
cenere1452, il minor di tutti vostri servi ? E
qual bene havete voi scoperto in me o in altro
degli figlioli d'Adamo, che havete voluto
esser Padre nostro ? « Chi siete voi, Signore,
et chi son io1453 ? » Voi siete Dio [386]
d'infinita maestà, Re de' re, Signore de'
signori1454, Santo de Santi, gloria
1. Du mal, du péché, c'est-à-dire de la
faute.
2. De la peine éternelle.
3. De toutes les adversités, de tous les
dangers, de tous les maux qui nous arrivent du
dehors.
LE NOTRE PÈRE PARAPHRASÉ
O Père éternel, Père de Notre-Seigneur
Jésus-Christ, Père des lumières, Père saint, Père
très doux et aimant, Père Créateur de l'univers :
quand méritai-je de vous appeler Père, moi
terre, poussière et cendre, le dernier de tous vos
serviteurs ? Et quel bien avez-vous découvert en
moi ou en quelqu'autre enfant d'Adam, pour que
vous ayez voulu être notre Père ? « Qui êtes-
vous, Seigneur, et qui suis-je ? » Vous êtes le
Dieu d'infinie majesté, Roi [386] des rois,
Seigneur des seigneurs, Saint des Saints, gloire
1447 I Joan., I, 8.
1448 Jacobi, III, 2.
1449 Vers. 23-34.
1450 Matt., VII, 2 ; Luc., VI, 38.
1451 Jacobi, I, 17.
1452 Gen., XVIII, 27.
1453 S. Franc. Assis., ubi supra, p. 217.
1454 Apoc., XVII, 14, XIX, 16.
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degl'Angioli et allegrezza per tutti i Beati.
Inanzi al vostro conspetto i cieli e la terra e
tutto quello che v'è dentro è meno d'un picciol
granello d'arena, a tutt'il mondo ; io, dall'altro
canto, sono vermicello della terra, peccatore
e figliolo d'Adamo peccatore, che tante volte
ho offeso la vostra eccelsa Maestà : e pure
volete ch'io vi chiami Padre ! O
ch'eccellenza, o che dignità è questa che mi
date. Piacciavi, Signore, che questa mia
anima la sappi conoscere e che vi renda
debite grazie a tanti benefizii. Ma perch'io
non basto, priegho li nostri Angeli mi aiutino
a lodare e ringratiar continuamente vostra
Maestà.
Padre, due cose mi bisogna
confessare : l'una, che questo dono e questo
sì gran beneficio nasce dalla vostra infinita
bontà e dall'amor infinito che mi portate ;
l'altra, che questa parola Padre sta molto
bene in bocca del vostro unigenito Figliolo e
Signor mio Christo, il quale vi è Figliolo per
eterna generazione consubstanziale, ma nella
mia bocca, che sono sì gran peccatore, non stà
bene, non li conviene, non merito, Signore,
tanto bene. Pur, poichè così piace a vostra
Maestà, dì qua inanzi ben al petto vi chiamerò
Padre, e mi goderò di questo dolce nome di
Padre. [387]
Questa parola mi certifica l'amor
grande che voi, Signore, mi portate ; e però il
vostro Evangelista, stupito di questo, dice, 1
Ep. 3 1455 : Videte qualem charitatem dedit
nobis Pater, ut filii Dei nominemur et simus.
M'insegna anche e m'ammonesta ch'io
parimente v'ami con tutto il mio cuore :
Diligam te, Domine, fortitudo mea,
firmamentum meum, refugium meum,
liberator meus1456 et Pater. Qual figliolo al
mondo si può trovar così ingrato, ch'avendo
un Padre buono, santo, dolce, glorioso e
amorevole come voi, che non l'ami ? O Padre,
chi buono, chi santo, chi dolce e amorevole
come voi ? Donque, Padre, dal mio cuore sia
sbandito ogn'altro amore nostro, sia
infiammato questo mio cuore, acciò tra voi,
Padre, e me figliolo vi sia un continuo amor
reciproco.
Questa parola, Padre, m'eccita a
domandarvi le cose che mi sono necessarie,
des Anges et allégresse de tous les Bienheureux.
En votre présence, les cieux, la terre et tout ce
qu'ils contiennent, sont moins qu'un petit grain
de sable en face du monde entier ; moi, d'autre
part, je suis un petit ver de terre, pécheur et
enfant d'Adam pécheur, qui si souvent ai offensé
votre souveraine Majesté : et cependant, vous
voulez que je vous appelle Père ! Oh ! quelle
excellence, quelle dignité me donnez-vous !
Qu'il vous plaise, Seigneur, que mon âme la
sache reconnaître et qu'elle vous rende les dues
actions de grâce pour tant de bienfaits. Mais
parce que je ne suffis pas à cela, je prie les
Anges de m'aider à louer et remercier
continuellement votre Majesté.
Père, je dois confesser deux choses :
l'une, que ce don et ce grand bienfait vient de
votre bonté infinie et de l'amour infini que vous
avez pour moi ; l'autre, que ce mot de Père sied
bien sur les lèvres de votre Fils unique mon
Seigneur Jésus-Christ, qui est votre Fils par une
étemelle et consubstantielle génération, mais sur
les miennes, moi qui suis un si grand pécheur, il
ne sied pas, il ne convient pas, je ne mérite pas,
Seigneur, un si grand bien. Cependant, puisqu'il
plaît ainsi à votre Majesté, de grand cœur
désormais je vous appellerai Père et je jouirai de
ce doux nom de Père. [387]
Ce mot m'atteste l'amour immense que
vous me portez, Seigneur ; c'est pourquoi votre
Evangéliste, émerveillé, dit : Voyez quel amour
le Père nous a témoigné, que nous soyons
appelés enfants de Dieu, et que nous le soyons
en effet. Il m'apprend aussi et m'avertit
également que je dois vous aimer de tout mon
cœur : Je vous aime, Seigneur, ma force, mon
rocher, mon refuge, mon libérateur et mon Père.
Quel fils ingrat peut-on trouver au monde, qui
ayant un Père bon, saint, doux, glorieux et
aimant comme vous l'êtes, il ne l'aime pas ? O
Père, où trouverons-nous quelqu'un qui soit
aussi bon, aussi saint, aussi doux et aimant que
vous l'êtes ? Donc, Père, que de mon cœur soit
chassé tout autre amour, qu'il soit enflammé,
afin qu'entre vous, mon Père, et moi votre enfant
il y ait un continuel amour réciproque.
Ce mot de Père m'excite à vous
demander les choses qui me sont nécessaires,
car le père ne refuse jamais à son enfant ce qu'il
voit lui être nécessaire, pourvu qu'il puisse le lui
1455 Vers. 1.
1456 Ps. XVII, 2, 3.
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poichè il padre non mai niegha al figliolo ciò
che vede essergli necessario, potendoglielo
dare. So, Padre, che voi potete e che volete :
potete, perchè siete omnipotente ; volete,
perchè siete tutto buono. A me non mancano
bisogni, mi trovo ferito di molte ferite di
peccati, ho bisogno di medicine ; voi, Padre,
siete medico qui sanas omnes languores et
curas omnes infirmitates1457. [388] Miserere
mei ergo, Domine, quoniam infirmus sum ;
sana me, Domine, quoniam conturbata sunt
ossa mea1458, et sanabor. Signore, sanate
quest'anima, vedetela che si presenta a voi
tutta ferita. (Oui ripresenta tutte le sue ferite
di superbia, avaritia, lussuria, ecc., et
affettuosamente domanda la sanità.)
Di più, Padre, mi trovo ignudo e
spogliato delli vestimenti delle virtù.
Vestitemi, Padre, poichè vestite li cieli di
tanti luminarij e la terra di tanti fiori ; datemi
la veste nuptiale della charità, acciò possi
comparire alle vostre nozze1459 ; la veste
dell'obedienza, acciò obedisca alli vostri
comandamenti e legge ; la veste della
humiltà, acciò sia grato alli vostri occhi.
Vestitemi con quelli vestimenti ricchi delle
virtù infuse : datemi perfetta fede, salda
speranza e ardente carità.
Appresso vi domando, o buon Padre,
ch'essercitate in me l'uffizii di padre. Il padre
batte il figliuolo quand'erra, acciò s'emendi,
perchè altrimente se non lo battesse farebbe
peggio, e talvolta sarebbe appicato alla forca.
Battetemi, Signore, con misericordia : peto,
Domine, virgam cum misericordia ; hic ure,
hic seca, ut in seternum parcas. Et se [389]
non m'emenderò, aggravate, Padre, la vostra
santa mano, e battetemi più forte con
tribulationi, infìrmitadi, afflizioni e angustie.
Ingrediatur putredo in ossibus meis et subter
me scateat, ut requiescam in die tribulationis,
et ascendant ad populum accinctum
nostrum1460 ; vi priego, buon Padre, ch'in
questi miei ossi entri la putredine, id est, che
com'un altro Giob sia questo mio corpo
impiagato e flagellato, purchè quest'anima
riposi nel giorno della tribulatione, ch'è il
giorno della morte, e sia conumerata nel
donner. Je sais, mon Père, que vous pouvez et
que vous voulez ; vous pouvez, parce que vous
êtes tout-puissant ; vous voulez, parce que vous
êtes tout bon. Les besoins ne me manquent pas :
je suis blessé par beaucoup de péchés, il me faut
des remèdes ; vous, Père, vous êtes le médecin
qui [388] guérit toute langueur et soigne toute
infirmité. Ayez donc pitié de moi, Seigneur, car
je suis faible ; guérissez-moi, Seigneur, car mes
os sont tremblants, et je serai guéri. Seigneur,
guérissez cette âme, voyez comme elle se
présente devant vous toute blessée. (Ici elle
montre toutes ses blessures d'orgueil, d'avarice,
de luxure, etc., et affectueusement elle demande
la santé.)
En outre, ô Père, je suis nu et dépouillé
des vêtements des vertus. Revêtez-moi, ô Père,
vous qui revêtez le ciel de tant d'étoiles et la terre
de tant de fleurs ; donnez-moi la robe nuptiale
de la charité, afin que je puisse paraître à vos
noces ; la robe de l'obéissance, afin que j'obéisse
à vos commandements et à vos lois ; la robe de
l'humilité, afin que je sois agréable à vos yeux.
Revêtez-moi des riches vêtements des vertus
infuses ; donnez-moi la parfaite foi, la ferme
espérance, l'ardente charité.
Je vous demande ensuite, ô bon Père,
que vous daigniez exercer envers moi les offices
de père. Le père frappe le fils quand il s'égare,
afin qu'il se corrige, parce qu'autrement, s'il ne
le frappait pas, il ferait pire, et parfois serait
même pendu. Frappez-moi, Seigneur, avec
miséricorde. Je vous demande, Seigneur, la
verge avec votre miséricorde ; brûlez, tranchez
ici-bas, afin que vous me pardonniez dans
l'éternité. Et si je ne m'amende pas,
appesantissez, [389] ô Père, votre sainte main et
frappez-moi plus fort avec des tribulations, des
maladies, des afflictions et des angoisses. Que
la pourriture entre dans mes os et qu'elle me
consume au-dedans de moi, afin que je sois en
repos au jour de la tribulation et que je me
joigne à notre peuple pour marcher avec lui ; je
vous prie, ô bon Père, que dans ces os entre la
pourriture, c'est-à-dire que, comme un autre
Job, mon corps soit couvert de plaies et flagellé,
pourvu que mon âme soit en repos au jour de la
tribulation, qui est celui de la mort, et soit du
1457 Ps. CII, 3 ; Matt., IV, 23.
1458 Ps. VI, 3.
1459 Cf. Matt., XXII, 2-12.
1460 Habacuc, III, 16.
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25.5 Page 245

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numero di vostri figlioli, ch'è quel populo
celeste cinto di gloria e di beatitudine.
Il padre, doppo che ha castigato e ben
battuto il figliuolo, gli fa qualche carezza.
Padre, doppochè m'havete battuto per le mie
dementi con la vostra misericordia, visitatemi
con qualche consolatione spirituale,
accarezate quest'anima con la suavità interna,
acciò più s'accenda nel vostro amore e non
cessi dalla vostra lode.
Oh ! quanta consolatione eccita
nell'anima mia questa parola, Padre, e non
solamente consolatione, ma allegrezza,
gaudio e somma giocondità. Auditui meo
dabis gaudium et lætitiam, et exultabunt ossa
humiliata, diceva il santo Profeta1461 ; e
ancora non gl'era rivelato questo nome di
Padre. [390] E che dirò io ? Padre, auditui
meo dedisti gaudium et lætitiam ; o quant'è il
gaudio, quanta mi è l'allegrezza che causa
nelle mie orecchie questa dolce parola :
Padre ! Quest'anima tutta humiliata, questi
miei ossi habastatti 1462 per la moltitudine di
peccati, si ricreano e prendono vigore
sentendo questa parola : Padre. E qual
maggiore allegrezza posso haver'io, che
ricordarmi che ho un Padre tanto buono, ch'è
l'istessa bontà ; tanto santo, ch'è l'istessa
santità ; tanto savio, ch'è l'istessa sapientia ;
finalmente tanto potente, ch'ogni cosa può nel
cielo, nella terra e negli abissi. Rallegrinosi i
ricchi nelle loro ricchezze, i potenti nella loro
potenza, li savij nella loro sapientia : 1463 Ego
autem in Domino meo gaudebo, quia Pater,
quia Pater noster. Hi in curribus, et hi in
equis ; nos autem in nomine Dei nostri
exultabimus1464. Domine, exultet spiritus
meus in te, Deo salutari nostro1465 et Padre
nostro.
Questa parola, Padre, mi dimostra la
cura e providenza grande che havete sopra di
me e sopra di tutti. Ogni giorno, Padre,
mettete la tavola et fate banchetto a tutt'il
mondo, ed io sempre partecipo di questa
mensa ; ogni giorno fate [391] questo sole al
mondo illuminar noi, vostri figlioli, e la sera
nascondete questa bella lampada et in certo
nombre de vos enfants qui sont ce peuple
céleste, ceint de gloire et de béatitude.
Le père, après avoir châtié et frappé son
enfant, lui fait quelques caresses. Père, après
m'avoir frappé pour mes folies avec votre
miséricorde, daignez me visiter par quelque
consolation spirituelle, caressez cette âme par la
suavité intérieure, afin qu'elle brûle de votre
amour et ne cesse point de vous louer.
Oh ! quelle consolation excite dans mon
âme cette parole : Père, et non seulement
consolation, mais allégresse, joie et souverain
contentement. Vous ferez entendre à mon cœur
des paroles de joie et d'allégresse, et mes os
humiliés exulteront, disait le saint Prophète ; et
cependant, ce nom de Père, ne lui était pas
encore [390] révélé. Et moi, que dirai-je ? Père,
vous m'avez fait entendre des paroles de joie et
d'allégresse ; oh ! quelle est ma joie, quelle mon
allégresse lorsque cette douce parole, Père,
résonne à mes oreilles ! Mon âme humiliée, mes
os anéantis à cause de la multitude de mes
péchés, se récréent et prennent une nouvelle
vigueur entendant cette parole : Père. Quelle
plus grande joie puis-je avoir que de me
ressouvenir que j'ai un Père si bon, qu'il est la
bonté même ; si saint, qu'il est la sainteté même
; si sage, qu'il est la sagesse même, et enfin si
puissant, qu'il peut toutes choses au Ciel, sur la
terre et dans les abîmes. Que les riches se
réjouissent de leurs richesses, les puissants de
leur puissance, les sages de leur sagesse : pour
moi, je me réjouirai dans mon Seigneur, parce
qu'il est Père et notre Père. Ceux-ci mettent leur
confiance dans leurs chars et ceux-là dans leurs
chevaux ; nous, nous exulterons dans le nom de
notre Dieu. Seigneur, que mon esprit tressaille
en vous, ô Dieu notre Sauveur et notre Père.
Ce mot de Père me montre votre soin et
combien est grande votre providence à mon
égard et à l'égard de tous. Chaque jour, ô Père,
vous préparez la table et faites le festin pour le
monde entier, et je participe toujours à ce festin
; chaque jour vous faites [391] que le soleil nous
éclaire, nous vos enfants, et le soir vous cachez
cette belle lampe et il semble en certaine façon
que vous éteigniez cette belle lumière afin que
1461 Ps. L, 10.
1462 Ce mot n'est pas italien. Faudrait-il lire abattuti, abattus ?
1463 Hab. 3, [18.]
1464 Ps. 19, [8.]
1465 Luc., I, 47.
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modo par che smorzate questa bella luce,
acciò noi, vostri figlioli, riposiamo e
pigliamo il sonno. Li cieli e la terra occupate,
Signore, in mio servitio, e perinsino [a]
gl'istessi Angioli havete dato cura di me, e
tutto acciò io conseguisca l'heredità che tocca
agli figlioli, ch'è il Regno del Cielo : onde
conosco quanto provido Padre siete sopra di
noi, vostri figli.
Finalmente, questa parola, Padre, mi
conforta, acciò quand'io caderò, corra alle
vostre braccia con penitenza, perchè sarò
ricevuto molto più amorevolmente che quel
figliolo prodigo ; e hora, ricordandomi delli
falli passati, corro a voi, Padre, e dico : Pater,
peccavi in cælum et coram te, jam non sum
dignus vocari filius tuus ; fac me sicut unum
ex mercenariis tuis1466. O pur, Padre, perchè
conosco la vostra misericordia, l'amor che mi
portate, uscitemi al incontro, aprite le braccia
della vostra misericordia, abbracciate questo
figliolo prodigo, datemi la stuola
dell'innocenza, l'anello della viva fede, le
scarpe dell'essempi di vostri Santi ch'io habbi
a imitare. Datemi, Padre, il vitello
sanguinato1467, che è il vostro benedetto
Figliuolo [392] nel Santissimo Sacramento,
acciò sia cibo dell'anima mia e quelle 1468
……... con la sua più abondante gratia.
Concludo, Padre, che questa parola
dolcissima è un verbo abbreviato1469 che
contiene ogni dolcezza, come quella manna
che deste a mangiare al vostro popolo nel
deserto1470 ; et io mi contento che questa
parola, Padre, sia cibo saporitissimo
all'anima mia. All'Apostolo Paulo bastava
solamente sapere et intendere esso
crucifisso1471 ; et a me mi basta sapere et
intendere questa parola, Padre,
perch'intendola, io intenderò che m'havete
pigliato per vostro figliolo adoptivo, il che è
la maggior dignità che vi è in Cielo et in terra,
dopo d'esser vostro figliuolo naturale, il che
solo è proprio del vostro unigenito Figliuolo
e mio Signor Jesu Christo.
nous, vos enfants, puissions reposer et prendre
le sommeil ; vous occupez, Seigneur, le ciel et
la terre à mon service, et vous m'avez même
confié aux soins des Anges : tout cela afin que
j'obtienne l'héritage réservé à vos enfants, qui
est le Royaume des Cieux. Par là je reconnais
quel Père prévoyant vous êtes pour nous, qui
sommes vos fils.
Enfin, ce mot de Père m'encourage, afin
que lorsque je tomberai je coure me jeter dans
vos bras avec contrition, car je serai reçu bien
plus amoureusement que l'enfant prodigue. Et
maintenant, me souvenant des fautes passées, je
cours vers vous, Père, et je dis : Père, j'ai péché
contre le ciel et contre vous, je ne suis pas digne
d'être appelé votre fils ; traitez-moi comme l'un
de vos mercenaires. Ou bien, Père, parce que je
connais votre miséricorde et l'amour que vous
me portez, venez à ma rencontre, ouvrez les bras
de votre miséricorde, embrassez cet enfant
prodigue, donnez-moi la robe d'innocence,
l'anneau de la foi vive, les souliers des exemples
de vos Saints que je dois imiter. Donnez-moi, ô
Père, le veau gras, c'est-à-dire votre Fils béni
dans le Très Saint Sacrement, [392] afin qu'il
soit la nourriture de mon âme et par sa grâce la
plus abondante.
Pour conclusion, ô Père, cette parole très
douce est un verbe abrégé qui contient, toute
douceur, comme la manne que vous donnâtes
jadis à manger à votre peuple dans le désert ; et
moi, je suis heureux que ce mot, Père, soit une
nourriture très savoureuse pour mon âme. Il
suffisait à l'apôtre Paul de savoir seulement et de
comprendre [Jésus-Christ] crucifié ; et à moi il
suffit de savoir et de comprendre cette parole :
Père, parce que la comprenant, je saurai que
vous m'avez pris pour votre fils adoptif, qui est
la plus grande dignité qui existe au Ciel et sur la
terre après celle de fils naturel, qui appartient en
propre à votre Fils unique et mon Seigneur
Jésus-Christ.
Sur cette parole : Notre
Vous êtes, Seigneur, notre Père : qu'elle
1466 Luc., 15, [18, 19, 21.]
1467 Ibid., vv. 20, 22, 23.
1468 Quelques mots manquent ici.
1469 Rom., IX, 28.
1470 Exod., XVI, 14, 15, 31 ; Num., XI, 7-9.
1471 I Cor., II, 2.
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Sopra quella parola : Noster
Padre nostro siete, o Signore : quanto
è grande la vostra bontà ! Non vi contentate
di comunicare questo precioso nome di
Padre alli vostri Angioli e Santi che stanno
nella vostra casa, ma ancora lo volete
comunicare a quelli che siam' in questo
mondo, e non solamente alli ricchi e potenti
[393] del mondo, ma alli più poveri
pastorelli, che sopra li ponti e selve dormono
sopra la nuda terra. Mi par, Signore, che siete
com'il sole che comunica la sua luce e spiega
i suoi raggi al minimo fiore che sta sopra del
monte, come a l'istesso monte ; così voi, mio
Signore, ugualmente comunicate questo
vostro dolce nome di Padre a grandi e
piccoli, a ricchi e poveri, e però volete che vi
chiamino nostro.
Un altro gran misterio, Signore, mi
scoprite in queste due parole : Padre nostro,
et è che volete ch'io [ami] molto bene la
vostra santa legge d'amor e carità, poichè
l'avete ridotta tutt'all'amor vostro et all'amor
del prossimo. Nella prima parola : Padre, mi
domandate amor verso vostra alta Maestà ;
nella seconda : nostro, mi domandate ch'io
ami li miei prossimi1472, poichè me li date per
fratelli et volete che per loro faccia oratione.
Padre nostro siete, perchè ci havete
creato : Manus tuæ, Domine, fecerunt me1473
; Opera manuum tuarum ne despicias1474.
Padre nostro siete, perchè ci havete comprato
col precioso sangue del vostro Figliuolo,
Agnello immaculato, Christo Jesu1475 nostro,
con il quale siamo stati adoptati per vostri
figli. Padre nostro siete, perchè ci consolate
[394] in questa valle di lagrime1476 molto
dolcemente. Finalmente siete Padre nostro,
perchè dopo questa vita di fatiche e
penitenza, ci havete preparata una vita di
riposo e d'eterna beatitudine.
Finalmente siete Padre nostro perchè
tutto v'impieghate in noi poverelli, e perchè
tutto v'havete comunicato a noi qua in questo
mondo nel Santissimo Sacramento ; e poi là
nel Cielo vi comunicarete più chiaramente,
est grande votre bonté ! Vous ne vous contentez
pas de communiquer ce nom de Père à vos
Anges et à vos Saints qui sont dans votre
maison, mais vous voulez aussi le communiquer
à ceux qui sont dans ce monde, et non seulement
[393] aux riches et aux puissants, mais aux plus
pauvres bergers qui, sur les ponts et dans les
forêts, dorment sur la terre nue. Il me semble,
Seigneur, que vous êtes comme le soleil qui
communique sa lumière et envoie ses rayons à
la plus petite fleur de la montagne comme à la
montagne même ; ainsi vous, mon Seigneur,
communiquez également votre nom si doux de
Père aux grands et aux petits, aux riches et aux
pauvres, et vous voulez que pour cela nous vous
appelions nôtre.
Dans ces deux mots : Notre Père, vous
me découvrez, Seigneur, un autre grand mystère
: c'est que vous voulez que j'aime beaucoup
votre sainte loi d'amour et de charité, car vous
l'avez toute ramenée à votre amour et à l'amour
du prochain. Par la première parole, Père, vous
me demandez l'amour pour votre très souveraine
Majesté ; par la seconde, notre, vous me
demandez d'aimer mon prochain, puisque vous
me le donnez pour frère et vous voulez que je
prie pour lui.
Vous êtes notre Père, parce que vous
nous avez créés : Vos mains Seigneur, m'ont
formé ; N'abandonnez pas l'ouvrage de vos
mains. Vous êtes notre Père parce que vous
nous avez achetés avec le précieux sang de votre
Fils, l'Agneau immaculé, notre Christ Jésus,
avec qui nous avons été adoptés pour vos
enfants. [394] Vous êtes notre Père parce que
vous nous consolez très suavement dans cette
vallée de larmes. Enfin vous êtes notre Père
parce que, après cette vie de travaux et de
pénitence, vous nous préparez une vie de repos
et d'éternelle béatitude.
Enfin vous êtes notre Père parce que
vous vous employez tout entier pour nous, si
pauvres, et parce que vous nous avez tout
communiqué en ce monde dans le Très Saint
Sacrement ; et puis, au Ciel, vous vous
communiquerez plus manifestement, nous
découvrant votre bienheureuse essence, les
1472 Vide supra, p. 381.
1473 Job, X, 8.
1474 Ps. CXXXVII, 8.
1475 I Petri, I, 19.
1476 Ubi supra, p. 384.
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scoprendo a noi la vostra superbeatissima
essentia, i thesauri infiniti di vostra
beatitudine e la gloria di vostra Maestà. Fate
dunque, vi priegho, Padre, che poichè voi
siete tutto nostro, ch'io sia figliuolo vostro ;
voi, Padre, et io figliuolo. All'hora starà bene
nella mia bocca questa parola : Pater noster,
quando la mia anima e [il] mio corpo sarà
tutto vostro, poichè voi siete tutto nostro.
trésors infinis de votre béatitude et la gloire de
votre Majesté. Faites donc, je vous en prie, ô
Père, que puisque vous êtes tout nôtre, je sois
aussi votre enfant ; vous, Père, et moi fils. Ces
mots : Notre Père, siéront bien sur mes lèvres
quand mon âme et mon corps seront tout vôtres,
puisque vous êtes tout à nous.
Sur ces mots : Qui êtes aux Cieux
Sopra : Qui es in Cælis
Cognosco, Signore, che siete in ogni
luogo e che i cieli e la terra sono pieni di
vostra gloria1477 ; anzi conosco, Padre, che
l'universo tenete nel vostro pugno e lo
conservate, perchè altrimente ogni cosa
ritornerà a quel niente dal [395] quale fu da
voi creata. State pure, Padre, ne' Cieli,
glorificando quella gran compagnia d'Angioli
e Santi che continovamente assistono manzi
al trono di vostra gloria, adorandovi con ogni
riverenza. Quando sia, Padre, che questa mia
anima sia come un cielo, elevata dalla terra
per forza d'amor ; ornata di tanti luminarli di
virtù quanti luminarii et stelle tiene il cielo ;
salda e forte nel vostro servitio, senza giamai
cader, com'i cieli, che non cadono, acciò sia
tutta bella e grata nel vostro conspetto, et
acciò voi, Padre, vi degniate habitar in quella
com'in un cielo tutto bello ? Vi domando
anche, Padre, ch'accio questa mia anima sia
cielo et habitatione di vostra alta Maestà, fate
si muova com'i cieli ad motum primi mobilis.
Voi siete il primo e supremo Motore ; al moto
della vostra santissima voluntà si muova
quest'anima, acciò in ogni cosa si renda
conforme al vostro volere.
Siete, Padre, ne' Cieli, id est
negl'Angioli e Santi, illuminandoli acciò vi
conoscano, perciochè voi siete eterno
lume1478 omnia illuminans1479. Siete, Padre,
negl'Angioli e Santi, infiamandoli con fuoco
d'ardentissimo amore, acciò perfettamente vi
amino ; perchè voi siete fuoco che consuma
ogni imperfettione, facis Angelos tuos,
spiritus, et ministros [396] tuos, ignem
urentem1480. Siete, Padre, nelli vostri Angeli
Je sais, Seigneur, que vous êtes partout
et que les cieux et la terre sont pleins de votre
gloire ; et même je sais, Père, que vous tenez
l'univers dans vos mains et que vous le
conservez, car s'il en était autrement, toutes
choses retourneraient dans le néant d'où [395]
vous les avez tirées. Vous êtes aussi, ô Père,
dans les Cieux, où vous glorifiez cette immense
multitude d'Anges et de Saints qui sont
continuellement présents devant le trône de
votre gloire, vous adorant en toute révérence.
Quand sera-ce, ô Père, que mon âme sera
comme un ciel, élevée de la terre par la force de
l'amour ; ornée d'autant de vertus que le ciel
contient d'astres et d'étoiles ; ferme et forte en
votre service, sans jamais tomber, ainsi que les
cieux qui ne tombent pas, afin qu'elle soit toute
belle et agréable devant votre face et que vous,
Père, daigniez y habiter comme en un ciel très
beau ? je vous demande encore, ô Père, qu'afin
que mon âme soit un ciel et la demeure de votre
très souveraine Majesté, elle puisse se mouvoir
comme les cieux, selon le mouvement du
premier moteur. Vous êtes le premier et
souverain Moteur ; que mon âme n'ait de
mouvement que par votre sainte volonté, afin
qu'en toutes choses elle se rende conforme à
votre vouloir.
Vous êtes aux Cieux, ô Père, c'est-à-dire
dans les Anges et dans les Saints ; vous les
éclairez afin qu'ils vous connaissent, car vous
êtes la lumière éternelle qui éclaire tout. Vous
êtes, Père, dans les Anges et dans les Saintz, et
vous les enflammez du feu d'un ardent amour,
afin qu'ils vous aiment parfaitement, car vous
êtes ce feu [396] qui consume toute
imperfection : Vous rendez vos Anges aussi
prompts que les vents et des flammes de feu vos
1477 Is. 6, [3.]
1478 Ubi supra, p. 382.
1479 Ibid.
1480 Ps. CIII, 4 ; Heb., I, 7.
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e Santi, riempiendoli di beatitudine, acciò
siano eternamente beati, perciochè voi siete
beatitudine, gloria e riposo di tutta questa
gloriosa compagnia. Fate, Padre, ch'io sia
angelo e santo per gratia, acciò partecipi a
cotanti beni, acciò questo mio intelletto sia
illuminato nella cognition vostra. Al servo
vostro Francesco donaste, Padre, quelli doi
gran lumi : l'uno per cognoscer vostra alta
Maestà, l'altro per cognoscer se stesso1481.
Dattemi, Padre, un gran lume, acciò io
conosca, come gl'Angeli e come il vostro
servo Francesco, voi, Dio mio d'infinita virtù,
d'infinita potenza, d'infinita sapienza e
d'infinita bellezza. Datemi anche l'altro gran
lume, col quale io conosca la mia bassezza e
la mia vilezza.
Domando ancora, Padre, ch'accendete
questo mio affetto con il fuoco del Spirito
Santo, com'accendete nel Cielo gl'Angioli e
come accendeste nella terra gli cuori
dell'Apostoli nel santo giorno della
Pentecoste1482. O Padre beatissimo, di quel
gran fiume e fuoco che procede dalla sedia
vostra e dall'Agnello1483, ch'è il Spirito Santo,
mandate alcune scintille in quest'anima mia,
acciò abruggi nell'amor vostro. De [397]
excelso mitte ignem in ossibus meis1484 ;
entri, Padre, questo fuoco insino la midolla
dell'anima mia, acciò aquæ multæ
tribulationis non possint extinguere
charitatem1485. Con questo gran fuoco
accendete il mio affetto, acciò non più vada
mendicando le cose basse della terra, ma
tirato dalla virtù sua, cerchi le cose eterne del
Cielo1486.
Padre santo, è ben raggionevole che
già [che] voi, mio Dio, mio Padre e mia
heredità1487 siete nel Cielo, ch'io non cerchi
più la terra ne m'impacci in quella ; che ho da
fare io, Padre, con la terra, poichè tutt'il mio
bene, tutt'il mio tesoro sta nel Cielo1488 ? Se
voi, mio Padre, siete nel Cielo, seguita ch'io,
figliolo vostro, sono forestiero1489 in questo
serviteurs. Vous êtes, Père, dans vos Anges et
dans vos Saints, les comblant de béatitude afin
qu'ils soient éternellement heureux, car vous
êtes la béatitude, la gloire, le repos de cette
glorieuse assemblée. Faites, ô Père, que je sois
un ange et un saint par grâce, afin que je
devienne participant de si grands biens et que
mon entendement soit éclairé pour vous
connaître. Vous avez donné, ô Père, à votre
serviteur François ces deux grandes lumières : la
première pour connaître votre sublime Majesté,
la seconde pour se connaître lui-même. Donnez-
moi, ô Père, cette grande lumière, afin que je
vous connaisse comme les Anges et votre
serviteur François, vous, mon Dieu, d'infinie
vertu, de puissance infinie, de sagesse infinie et
de beauté infinie. Donnez-moi aussi l'autre
grande lumière par laquelle je connaîtrai ma
bassesse et ma misère.
Je vous demande aussi, ô Père, que vous
daigniez embraser mon cœur du feu du Saint-
Esprit, comme vous embrasez les Anges au Ciel,
et de même que vous embrasâtes sur la terre les
cœurs des Apôtres le saint jour de la Pentecôte.
O Père très heureux, envoyez quelques parcelles
de ce grand fleuve et de ce grand feu qui procède
de votre siège et de l'Agneau, c'est-à-dire du
Saint-Esprit ; envoyez-les [397] à mon âme afin
qu'elle brûle de votre amour. Lancez d'en haut
le feu dans mes os ; que ce feu, Père, pénètre
jusqu'à la moëlle de mon âme, afin que les
grandes eaux de la tribulation ne puissent
éteindre la charité. Avec ce grand feu, embrasez
mes affections, afin que je n'aille plus mendier
les choses viles de la terre, mais qu'entraîné par
sa vertu je cherche les choses éternelles du Ciel.
Père saint, il est bien juste que puisque
vous, mon Dieu, mon Père et mon héritage êtes
au Ciel, je ne cherche ni ne m'embarrasse plus
de la terre ; qu'ai-je à faire de la terre, ô Père,
puisque tout mon bien, tout mon trésor est au
Ciel ? Si vous, mon Père, êtes au Ciel, il suit de
là que moi, votre enfant, je suis étranger dans ce
monde et que je marche toujours vers ma patrie,
1481 Ubi supra, pp. 217 et 386.
1482 Act., II, 1-4.
1483 Apoc., XXII, 1.
1484 Thren., I, 13.
1485 Cant., VIII, 7.
1486 Cf. Coloss., III, 1, 2.
1487 Ps. XV, 5.
1488 Matt., VI, 20, 21.
1489 Ps. XXXVIII, 13 ; I Petri, II, 11.
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mondo e camino di continuo alla mia patria,
ch'è il Cielo. E se il peregrino quando camina,
il corpo tiene alla strada e l'anima nella dolce
patria, parendoli ogn'hora mill'anni per il
desiderio che tiene d'arrivar a quella e veder
il suo caro padre e li suoi dolci fratelli, perchè
non sarà così di me ? Perchè, Padre nostro,
[non] sta questa mia anima conversando con
voi nei Cieli come l'anima di quel vostro
santo Apostolo che diceva : Nostra autem
conversatio in Cælis1490, e perchè non mi par
mill'anni ogn'hora di quest'esilio ? perchè non
bramo di veder li miei cari fratelli, che sono
[398] gl'Angeli e Santi ? perchè, Padre, non
reputo le cose tutte di questa vita vili, basse
et indegne, ch'io metta a quelle il mio cuore,
poichè sono creato per possedere li beni del
Cielo ? E certo, Padre, che sarebbe gran
dishonore ad un figliuolo di qualche gran
Principe o Re strigliare con le sue mani
cavalli, o colle medesime mani toglier via
l'imondizie et il letame delle strade ; e molto
maggior dishonor è a me, che sapendomi voi,
Padre celeste, adoptato per vostro figliuolo e
tenendomi apparecchiati beni infiniti,
ricchezze inestimabili e lo stesso regno del
Cielo, io mi abassi e avilisca a cercar le cose
vili e basse di questo mondo. Dunque, Padre
nostro che siete ne' Cieli, datemi amor delle
cose celesti, acciò amando quelle, disprezzi
le cose terrene, e tutto l'amor mio sia in voi,
Padre nostro celeste.
Finalmente vi domando, Padre, che
siccome riempite quelli cieli, quali che sono
gl'Angeli e Santi, di gloria, così riempite
quest'anima quando, passando da questo
mondo, si presentarà al vostro conspetto,
acciò sia « Cielo pieno della gloria vostra1491
qui est le Ciel. Si le pèlerin, quand il marche, a
le corps sur la route et l'âme en la douce patrie,
chaque heure lui semblant mille ans pour le désir
qu'il a de l'atteindre et de voir son cher père et
ses très doux frères, pourquoi n'en sera-t-il pas
ainsi de moi ? Pourquoi, notre Père, mon âme
ne converse-t-elle pas dans les Cieux comme
l'âme de votre saint Apôtre qui disait : Notre
conversation est dans le Ciel, et pourquoi
chaque heure de cet exil ne me semble-t-elle pas
mille ans ? pourquoi ne désiré-je pas voir mes
chers frères, qui sont [398] les Anges et les
Saints ? pourquoi, Père, ne réputé-je pas toutes
les choses de cette vie, basses, viles et indignes
d'y attacher mon cœur, puisque je suis créé pour
posséder les biens du Ciel ? Il est hors de doute,
ô Père, que ce serait un grand déshonneur pour
le fils d'un grand prince ou d'un roi d'étriller de
ses mains les chevaux ou, avec les mêmes
mains, ramasser les immondices et le fumier
dans les rues ; mais c'est un bien plus grand
déshonneur pour moi de ce que sachant, ô Père
céleste, que vous m'avez adopté pour votre fils
et que vous me préparez des biens infinis, des
richesses inestimables et même le royaume du
Ciel, je m'abaisse et me rende méprisable en
recherchant les choses viles et basses de ce
monde. Donc, notre Père qui êtes aux Cieux,
donnez-moi l'amour des choses célestes, afin
qu'aimant celles-là je méprise les choses de la
terre et que tout mon amour soit en vous, notre
Père du Ciel.
Je vous demande enfin, ô Père, que de
même que vous remplissez les deux, qui sont les
Anges et les Saints, de gloire, de même vous
daigniez remplir mon âme, lorsque, quittant ce
monde, elle se présentera devant vous, afin
qu'elle soit un « Ciel plein de votre gloire. »
[399]
Sopra : Sanctificetur Nomen tuum
Sur ces mots : Que votre Nom soit sanctifié
Deh ! Padre eterno, fate sì che questo
Nome sì dolce e [399] soave sia manifestato
per tutt'il mondo. Non tenete, o Padre,
nascosto cosi ricco tesoro all'anime [cui]
havete dato la vostra imagine e
similitudine1492. Conosca l'oriente, il ponente
e tutte l'altri parti del mondo che voi siete
O Père éternel, faites, je vous en prie,
que ce Nom si doux et suave soit connu dans le
monde entier. Ne tenez pas caché, ô Père, un si
riche trésor aux âmes auxquelles vous avez
imprimé votre image et ressemblance. Que
l'orient, l'occident et les autres parties du monde
sachent que vous êtes Père, que Jésus-Christ est
1490 Philip., III, 20.
1491 Hymn. SS. Aug. et Ambr.
1492 Gen., I, 26, 27, V, 1, IX, 6.
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26 Pages 251-260

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26.1 Page 251

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Padre, e che Jesu Christo è il vostro
unigenito, coeterno e consubstantiale
Figliuolo, e che tutti possono esser vostri
figliuoli adoptivi. Scoprite, Padre, e
comunicate a tutte le genti quest'amoroso
Nome, acciò tutte s'accendano et infiammo
nel vostro santo amore. O quant'allegrezza
prenderia quest' anima mia se vedesse un
giorno che tutt'il mondo piegasse li suoi
ginocchi ad adorare vostra alta Maestà !
Padre del mio Signore Jesu Christo, se a
questo fosse bisogno il mio sangue e la mia
vita, il sangue, la vita e mille vite, se tante
n'havessi, volentieri offerirei.
Sanctificetur Nomen tuum. Fate
Padre, che questa mia anima e parimente tutto
il mondo habbia sempre più chiara cognitione
di vostra Maestà. Conosciamo, Padre, cum
omnibus sanctis, quæ sit latitudo, longitudo,
sublimitas, profundum1493 : conosciamo la
larghezza de'vostri benefizij verso di noi, che
è più del mare e della terra ; la lunghezza de'
vostre promesse, quali sono infinite ; l'altezza
di vostra [400] Maestà, qual'è immensa ; la
profundità dei vostri giudicij, quali sono un
abisso.
Sanctificetur Nomen tuum. Padre
santo, tutte le creature vostre m'eccitano a
lodar il vostro santo Nome, a benedirvi di
continuo : gl'Angioli, con la sua (sic) dolce
musica, di continuo vi cantano dolci matutini,
vi lodano e benedicono, e non cessano
d'esclamare : Sanctus, Sanctus, Sanctus,
Dominus Deus Sabaoth1494, et a me invitano
a fargli compagnia ; i cieli, con li suoi
continui movimenti, e le stelle con la loro
chiara luce, e supra tutto quelli doi luminarij
maggiori1495, il sole e la luna, con la
grandezza del loro lume, m'eccitano ad
adorar e benedir il vostro santo Nome ; tutti
gl'elementi, il fuoco, l'aria, l'acqua, la terra,
gl'uccelli che volano nell'aria, li pesci che
notano nel mare, li fiumi, le fontane, li monti
et valli, le piante della terra e finalmente tutti
gl'animali che per quella scorrono, mi
predicano ch'io v'adori e benedica. Eia ergo,
Pater, sanctificetur Nomen tuum ; fatemi
santo, acciò ch'io benedica di continuo vostra
alta Maestà e acciò che vedendo il mondo
votre Fils unique, coéternel et consubstantiel, et
que tous peuvent être vos enfants d'adoption.
Découvrez, ô Père, et communiquez à toutes les
nations cet aimable Nom, afin que toutes
s'embrasent et s'enflamment de votre saint
amour. Oh ! quelle joie serait pour mon âme de
voir un jour le monde entier plier le genou pour
adorer votre très souveraine Majesté ! Père de
mon Seigneur Jésus-Christ, si mon sang et ma
vie étaient nécessaires pour cela, j'offrirais
volontiers mon sang, ma vie et mille vies, si je
les avais.
Que votre Nom soit sanctifié. Faites, ô
Père, que mon âme et celles du monde entier
aient toujours une plus claire connaissance de
votre Majesté. Nous savons. Père, avec tous les
saints, quelle est la largeur, la longueur, la
hauteur et la profondeur : nous connaissons la
largeur de vos bienfaits envers nous, qui est plus
vaste que la mer et la terre ; la longueur de vos
promesses, [400] qui sont infinies ; la hauteur
de votre Majesté, qui est immense ; la
profondeur de vos jugements, qui sont un
abîme.
Que votre Nom soit sanctifié. Père saint,
toutes vos créatures m'excitent à louer votre
saint Nom, à vous bénir incessamment : les
Anges avec leur douce musique, vous chantent
sans cesse de suaves matines, vous louent, vous
bénissent et ne cessent de s'écrier : Saint, Saint,
Saint, le Seigneur, Dieu des armées, et ils
m'invitent à leur tenir compagnie. Les cieux,
avec leurs continuels mouvements, les étoiles
avec leur brillante lumière, et surtout ces deux
plus grands luminaires, le soleil et la lune, par
la splendeur de leur clarté, m'excitent à adorer et
bénir votre saint Nom. Tous les éléments, le feu,
l'air, l'eau, la terre, les oiseaux qui volent dans
l'air, les poissons qui nagent dans la mer, les
fleuves, les fontaines, les monts et les vallées,
les plantes de la terre et enfin tous les animaux
qui la parcourent, me prêchent l'adoration et me
disent de vous bénir. Donc, ô Père, que votre
Nom soit sanctifié ; daignez faire de moi un
saint, afin que je ne cesse de bénir votre
souveraine Majesté et que le monde, voyant que
je suis occupé à vous louer et à vous bénir, vous
glorifie, ô notre Père, et sanctifie votre Nom qui
est béni dans les siècles des siècles. [401]
1493 Ubi supra, p. 383.
1494 Isa. 6, [3 ; Apoc., IV, 8.]
1495 Ubi supra, p. 382.
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ch'io attendo a lodarvi e benedirvi, glorificent
te, Patrem nostrum1496, et sanctificent Nomen
tuum quod est benedictum in sæcula
sæculorum1497. [401]
Sopra : Adveniat regnum
Seconda Petitione
Appresso, Padre, vi domando quel
regno di Beati e quel regno di tutti secoli, quel
regno tanto desiderato da un figliuolo e in
quello che riposano le nostre anime, in quello
goderanno. E voi, Padre santo, e del vostro
benedetto Figliuolo et insieme del Spirito
Santo, in questo regno santo vi loderemo
sempre, vi amaremo e goderemo. O Padre
santo, adveniat regnum tuum, venghi il vostro
regno, poichè a questo fine creaste queste
nostre anime ; adveniat regnum tuum, venghi
il vostro regno, poichè per questo voleste che
l'vostro Figliuolo morisse nel legno della
croce ; adveniat regnum tuum, venghi il
vostro regno, poichè ad confitendum nomini
tuo, me expectant justi donec retribuas
mihi1498 : li vostri Angeli insieme con tutti li
Santi desiderano questa giornata, perchè
scuoprirà in voi, Padre, un pelago d'infinita
bellezza, d'infinita virtù ; laonde bramano
haver più compagni che l'aiutino a lodar et
amar vostra alta Maestà.
Benigne fac, Domine, in bona
voluntate tua Sion, ut ædificentur muri
Hierusalem1499. Mirate, Padre, che buona
[402] parte delli muri di cotesta vostra celeste
Hierusalem è andata per terra, al basso
del'inferno ; raccogliete, o Padre santo, con la
vostra benignità, e riponeteci in cotesta nostra
gloriosa città, acciochè da voi siano finiti di
fabricare cotesti santi e benedetti muri.
Adveniat regnum tuum : Padre santo,
siamo sbanditi dal vostro regno « in hac
lacrimarum valle1500 ; » fate, Padre, che [vi]
ritorniamo. Come li pelegrini desiderano
l'ultima giornata nella quale si terminerà la
loro peregrinatione e si trovino dentro la loro
città e case, così noi desideriamo che venghi
il vostro regno, acciò si compisca questa
Sur ces paroles : Que votre règne arrive
Deuxième demande
Je vous demande, ensuite, ô Père, le
royaume des Bienheureux, ce royaume de tous
les siècles, si ardemment désiré par un fils, celui
où reposeront nos âmes et où elles jouiront. En
ce saint royaume, nous vous louerons toujours,
nous vous aimerons et nous jouirons de vous, ô
Père saint, avec votre Fils béni et le Saint-Esprit.
O Père saint, que votre règne arrive, parce que
c'est dans ce but que vous avez créé nos âmes ;
que votre règne arrive, parce que c'est pour cela
que vous avez voulu que votre Fils mourût sur
l'arbre de la croix ; que votre règne arrive, pour
que je bénisse votre nom : les justes sont dans
l'attente de la justice que vous me rendrez ; vos
Anges et tous les Saints désirent ce jour, parce
qu'il découvrira en vous, Père, un abîme
d'infinie beauté, de puissance infinie ; c'est
pourquoi ils désirent ardemment avoir de
nombreux compagnons qui les aident à louer et
à aimer votre souveraine Majesté.
Dans votre bonté, Seigneur, répandez
vos bienfaits sur Sion et que les murs de
Jérusalem soient bâtis. Voyez, ô Père, une [402]
bonne partie des murs de votre Jérusalem sont
tombés jusqu'au profond de l'enfer ; recueillez-
nous dans votre bonté, ô Père saint, et placez-
nous dans cette glorieuse cité, afin que vous
puissiez achever de bâtir ses saintes et bénites
murailles.
Que votre règne arrive : Père saint,
bannis de votre royaume, nous sommes « dans
cette vallée de larmes. » Faites, ô Père, que nous
y revenions. Comme les pèlerins désirent la
dernière journée qui terminera leur voyage et où
ils retrouveront leur ville et leurs demeures,
ainsi nous désirons que votre règne arrive, afin
que s'achève notre pèlerinage et que nous
entrions dans le séjour que vous nous avez
préparé dans votre saint royaume.
Que votre règne arrive : nous sommes
en guerre ; faites, Seigneur, que nous
remportions la victoire, afin que nous obtenions
le prix qui est votre saint royaume. Vous êtes
1496 Matt., V, 16.
1497 Rom., I, 25.
1498 Ps. CXLI, 8.
1499 Ps. L, 20.
1500 Ant. Salve Regina.
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nostra peregrinatione e ritorniamo nelle
stanze ch'in cotesto vostro santo regno ci
havete preparate.
Adveniat regnum tuum : siamo nella
battaglia ; fate, Signore, ch'abbiamo la
vittoria, acciò conseguiamo il premio ch'è il
vostro santo regno. Justus es, Domine1501, ut
justificeris in sermonibus tuis1502. Ci havete
promesso il vostro regno, e vi priegho
humilmente che non guardiate alli nostri
demeriti, ma al sangue prezioso del vostro
santo e benedetto Figliuolo Jesu Christo,
Signore nostro : Respice, Pater, in faciem
Christi tui1503, et per Christum tuum adveniat
regnum tuum.
Adveniat regnum tuum. O felice
giorno, o benedetta [403] hora ! o quando fia,
Padre, che s'accosti questo giorno, che venghi
quest'hora ? Quando veniam et apparebo
ante faciem tuam1504 ? Quando vedrò, Padre,
li muri di questo vostro regno, lavorati di
pietre preziose1505 ? Quando batterò alle tue
porte, o celeste Hierusalem ? quando vedrò li
tuoi ricchi palazzi ? quando goderò li tuoi
ameni giardini, vestiti d'eterni fiori ? quando
gustarò di quelle fontane [di] vita ch'in te vi
sono ? O Padre santo, quando vedrò in questo
vostro regno tante schiere d'Angeli e Santi
pieni di gloria ? tanti chori di vergini, quali
con le palme cantando, seguitano il vostro
Agnello1506 ? quando sentiranno queste mie
orecchie la dolce musica, l'armonia d'Angeli
et il concerto de Santi, quali tutti cantano
inanzi al vostro conspetto : Sanctus, Sanctus,
Sanctus, Dominus Deus Sabaoth1507 ? Quam
dilecta tabernacula tua, Domine virtutum1508.
O Dio degl'Angeli, quanto sono belli, quanto
sono amabili cotesti vostri tabernacoli !
Concupiscit et deficit anima mea in atria
Domini ; melior est enim dies una in atriis
tuis super milita1509. Donque, Padre eterno
che siete ne Cieli, acciò io possi goder della
vostra gloriosa presenza et veder la gloria di
vostra Maestà, e quella lodare, amare [404] e
juste, Seigneur, vous serez trouvé juste dans
votre sentence. Vous nous avez promis votre
royaume ; je vous prie donc humblement de ne
pas regarder nos démérites, mais le sang
précieux de votre Fils bien aimé Jésus-Christ
Notre-Seigneur : Regardez, Père, la face de
votre Christ, et que par votre Christ votre règne
arrive. [403]
Que votre règne arrive. Oh ! jour
heureux ! Oh ! heure bénie ! Quand sera-ce, ô
Père, que ce jour s'approchera et que viendra
cette heure ? Quand viendrai-je et apparaîtrai-
je devant votre face ? Quand verrai-je, ô Père,
les murs de votre royaume, travaillés avec des
pierres précieuses ? Quand frapperai-je à tes
portes, ô céleste Jérusalem ? Quand verrai-je tes
riches palais ? quand jouirai-je de tes beaux
jardins revêtus de fleurs éternelles ? quand
m'abreuverai-je à tes sources de vie ? O Père
saint, quand verrai-je dans votre royaume ces
innombrables légions d'Anges et de Saints
pleins de gloire, ces chœurs de vierges qui, les
palmes à la main, chantent et suivent votre
Agneau ? Quand donc mes oreilles entendront-
elles la douce musique, l'harmonie des Anges et
le concert des Saints qui tous chantent devant
vous : Saint, Saint, Saint le Seigneur, Dieu des
armées ? Que vos tabernacles sont aimables, ô
Seigneur des armées ! O Dieu des Anges, qu'ils
sont beaux, qu'ils sont aimables vos tabernacles
! Mon âme s'épuise en soupirant après les parvis
du Seigneur ; mieux vaut un jour dans vos parvis
que mille [loin de vous]. Donc, ô Père éternel
qui êtes aux Cieux, afin que je puisse jouir de
votre glorieuse présence et voir la gloire de votre
Majesté, pour la louer, aimer et bénir [et [404]
être enfin, logé parmi] vos fils, je vous prie
humblement, qu'une fois dépouillé de mon
enveloppe mortelle, votre règne arrive.
Que votre règne arrive. Voici, Père,
votre royaume : mon corps et mon âme. Dans ce
royaume vous voulez régner ; je vous le rends, ô
Père, je vous le donne, qu'il soit bien vôtre,
puisqu'en réalité il est vôtre ; que je ne l'usurpe
1501 Ps. CXVIII, 137.
1502 Ps. 50, [6.]
1503 Ps. 83, [10.]
1504 Ps. 41, [3.]
1505 Cf. Apoc., XXI, 18-20.
1506 Ibid., VII, 9, XIV, 4.
1507 Ubi supra, p. 401.
1508 Ps. LXXXIII, 2.
1509 Ibid., vv. 3, 11.
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benedire, e finalmente alberghatevi vostri
figliuoli 1510, humilmente vi pregho, spogliato
che sarò di questo vello mortale, adveniat
regnum tuum.
Adveniat regnum tuum. Ecco, Padre,
il vostro regno : il corpo mio e l'anima mia.
In questo regno volete voi regnare ; ecco,
Padre, ve lo rendo, ve lo dono, sia vostro,
poichè realmente è vostro ; non ve l'usurpi io,
non lo dia più al demonio, nè al mondo, nè
alla carne, che sono crudelissimi tiranni, ma
a voi che siete il vero Signore. Dunque, Padre
santo, adveniat regnum tuum. Regnate,
Padre, da qua inanzi nella mia anima : nella
mia memoria, acciò sempre mi ricordi di voi
; nel mio intelletto, acciò che sempre
consideri la vostra infinita bontà e grandezza
; nella mia voluntà acciò che continuamente
v'ami, lodi e benedica. Regnate, Padre, in
questo mio corpo con tutti li suoi sentimenti,
acciò s'impieghi tutto nel vostro santo
servizio, et io sia un regno nel quale vostra
Maestà pacificamente regni in sæcula
sæculorum.
Sopra : Fiat voluntas tua sicut in Cælo et in
terra
3a Petitione
Vi priegho ancora, Padre, che la
vostra santissima voluntà [405] sia fatta nella
terra come si fa nel Cielo. Fate, Padre, che si
come in quella terra de' viventi1511, ch'è il
Cielo, tutti gl'Angioli e Santi fanno la vostra
divina voluntà, cosi ancora in questa terra di
morienti, ch'è questo mondo, questa mia
anima faccia la vostra benedetta voluntà. La
vostra voluntà, Padre, è santa, è buona ; la
mia è mala, è sensuale : fiat ergo voluntas tua
siccome nel Cielo, così in questa terra
dell'anima mia. Benedett'all'hora sarà
quest'anima mia, quando in tutto si renderà
conforme alla vostra voluntà. Padre santo, vi
priegho togliate da questa mia anima la
propria voluntà, et in quella inestate la vostra,
acciò non mai la mia, ma sempre faccia la
vostra voluntà. Quando d'un albero si taglia
un ramo et in quello s'inesta altro meglio, fa
assai migliori frutti : togliete, Padre santo, di
questo albero il ramicello della propria
pas, que je ne le livre plus au démon, au monde
ni à la chair, qui sont de très cruels tyrans, mais
à vous qui en êtes le vrai Seigneur. Donc, ô Père,
que votre règne arrive. Régnez dorénavant en
mon âme : en ma mémoire, afin qu'elle se
souvienne toujours de vous ; en mon
intelligence, afin qu'elle considère toujours
votre bonté infinie et votre grandeur ; en ma
volonté, afin que sans cesse elle vous aime, vous
loue et vous bénisse. Régnez, ô Père, en mon
corps et en tous ses sens, afin qu'il s'emploie tout
entier à votre saint service et que je sois un
royaume où votre Majesté règne paisiblement
dans les siècles des siècles.
Sur ces paroles : Que votre volonté soit faite
sur la terre comme au Ciel
Troisième demande
Père, je vous prie aussi que votre très
sainte volonté soit faite [405] sur la terre comme
elle se fait au Ciel. Faites, ô Père, que de même
qu'en cette terre des vivants, qui est le Ciel, tous
les Anges et les Saints font votre divine volonté,
ainsi sur cette terre des mourants, qui est ce
monde, mon âme fasse votre sainte volonté.
Votre volonté, ô Père, est sainte et bonne ; la
mienne est mauvaise et sensuelle : que voire
volonté, donc, soit faite sur cette terre de mon
âme comme au Ciel. Mon âme sera bénie
lorsqu'en tout elle se rendra conforme à votre
volonté. Père saint, ôtez de mon âme, je vous
prie, la volonté propre et greffez en elle la vôtre,
afin que toujours votre volonté se fasse et jamais
la mienne. Lorsqu'à un arbre on coupe une
branche et qu'on y greffe une autre meilleure,
bien meilleurs aussi sont ses fruits ; enlevez de
cet arbre, ô Père, la petite branche de la volonté
propre et greffez-y celle de votre volonté sainte
; alors je suis sûr qu'il portera de très beaux
fruits. Tous mes défauts et péchés procèdent de
cette volonté mauvaise. Donc, Seigneur,
qu'attendez-vous ? Coupez seulement ce qui est
mien et greffez ce qui est vôtre. Je dirai, ô Père,
avec votre Fils bien aimé Notre-Seigneur Jésus-
Christ : Père, non pas ma volonté, mais la vôtre
soit faite ; Père, non ce que je veux, mais ce que
vous voulez ; [406] Père, que votre volonté soit
faite sur la terre comme au Ciel.
Je vous prie aussi, Père, que de même
1510 L'italien est certainement fautif ici ; peut-être faudrait-il lire : e finalmente alberghato tra i vostri figliuoli.
1511 Pss. XXVI, 13, CXLI, 6.
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voluntà et inestate il ramo della vostra santa
voluntà, et all'hora sono certo che farà
bellissimi frutti. Tutti li miei difetti e peccati
procedono da questa mia mala voluntà.
Dunque, Signore mio, che spettate ? tagliate
pur quel ch'è mio et inestate quel ch'è vostro.
Dirò, Padre, col vostro benedetto Figliuolo e
nostro Signore Jesu Christo : Pater, non mea,
sed tua fiat voluntas1512 ; Pater, non quod ego
volo, sed quod tu vis1513 ; Pater, fiat voluntas
tua, sicut in Cælo et in terra1514. [406]
Vi priegho anco, Padre, che sì come
quelle menti angeliche, significate per li cieli,
sempre fanno la vostra santissima voluntà,
così ancora l'anime delli peccatori, significate
per la terra, esse anco faccino quel ch'è il
vostro volere, perch'in questo modo non
v'offenderanno più.
Padre, vi domando con istanza ch'in
me e in tutti sia fatta la vostra voluntà, perchè
sono certo che la vostra voluntà è che tutti
siamo santi. Sancti estote, quia ego sanctus
sum1515 ; et, Hæc est voluntas mea,
sanctificatio vestra1516. O Fontana d'ogni
santità, fatteci santi, poichè quest'è vostra
voluntà. E quale è quello tanto cieco
d'intelletto che non desideri d'esser santo ?
Padre santo, altro non cerco, altro non
desidero ; queste siano le mie ricchezze,
questi tutti li miei beni e thesori : esser santo.
Fiat ergo in me voluntas tua, ut sim sanctus.
Padre santo, fiat voluntas tua sicut in
Cælo et in terra. « La vostra voluntà è ch'io
sia saldo nella fede, humile nel conversare,
vergognoso nelle parole, giusto nelle opere,
misericordioso con li bisognosi, disciplinato
nelli costumi ; che a niuno faccia ingiuria, che
tutti sopporti, che con tutti conservi la pace ;
che v'ami come Padre, che vi tema come
[407] Padre1517. » Fiat voluntas tua. Questo,
Padre, voglio, questo domando, questo con
tutto mio cuore desidero, ch'in me sia fatta la
vostra santa voluntà. Questo sia l'allegrezza,
la contentezza et il gaudio dell' anima mia in
ogni luogo et in ogni tempo, per compire la
vostra voluntà, perchè so certo, Padre, che
que les esprits angéliques, signifiés par les
cieux, font toujours votre très sainte volonté, de
même l'âme des pécheurs, représentés par la
terre, fasse aussi ce qui est de votre volonté, car
de cette manière ils ne vous offenseront plus.
Je vous demande avec instance, ô Père,
que votre volonté soit faite en moi et en tous,
parce que je suis sûr que votre volonté est que
nous soyons tous des saints. Soyez saints, car je
suis saint ; et : Ce que je veux, c'est votre
sanctification. O Source de toute sainteté, faites-
nous saints, car telle est votre volonté. Quel est
donc l'homme si aveugle d'intelligence qu'il ne
désire être saint ? Père saint, je ne cherche, je ne
désire autre chose ; mes richesses, mes biens,
mes trésors seront d'être saint. Que votre volonté
soit donc faite en moi, afin que je sois saint.
Père saint, que votre volonté soit faite sur
la terre comme au Ciel. « Votre volonté est que
je sois ferme dans la foi, humble dans la
conversation, modeste dans mes paroles, juste
dans mes actions, miséricordieux avec les
nécessiteux, bien réglé dans mes mœurs ; que je
ne lasse injure à personne, que je supporte tous
les hommes, qu'avec tous je garde la paix, que je
vous aime comme Père, que [407] je vous
craigne comme Père. » Que votre volonté soit
faite. Père, c'est cela que je veux, que je
demande, que je désire de tout mon cœur, que
votre volonté sainte soit faite en moi. Que
l'accomplissement de votre volonté soit le
plaisir, le contentement, la joie de mon âme en
tout lieu et en tout temps ; car je sais, Père, qu'il
est plus utile à mon âme de souffrir tous les
tourments du monde, si telle est votre volonté,
que de jouir de tous les divertissements et
plaisirs des enfants d'Adam. La joie des Anges,
le désir des Saints et la consolation des justes
sont en cela : que votre volonté soit faite. Que
votre volonté soit faite sur la terre comme au
Ciel ; je vous prie donc, 6 Père, que votre
volonté soit faite en moi.
Enfin, ô Père, vous et votre Fils bien
aimé m'avez déclaré votre volonté quand celui-
ci a dit : Vous aimerez le Seigneur votre Dieu de
tout votre cœur, de toute votre âme, de tout votre
1512 Matt., XXVI, 42 ; Luc., XXII, 42.
1513 Marc., XIV, 36.
1514 Matt., VI, 9, 10.
1515 Levit., 11, [44, XIX, 2.]
1516 I Thess., IV, 3.
1517 Cipr., sopra il Pater noster. [Lib. de Orat. Dominica, c. XV.]
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più utile è all'anima mia patir tutti li tormenti
del mondo, essendo questo vostra voluntà,
che haver tutti li spassi e piaceri delli figliuoli
d'Adamo. L'allegrezza degl'Angioli, il
desiderio dei Santi e la consolazione
de'giusti, è [in] questo, che sia fatta la
volontà vostra. Fiat voluntas tua sicut in
Cælo et in terra ; prieghovi dunque, Padre,
ch'in me sia fatta la volontà vostra.
Finalmente, Padre, la vostra voluntà
me la dichiaraste et anche il vostro benedetto
Figliuolo quando disse : Diliges Dominum
Deum tuum ex toto corde, ex tota anima tua,
ex tota mente tua et ex totis viribus tuis, et
proximum tuum sicut teipsum1518. O Padre,
già che questa è tua voluntà ch'io vi ami di
tutto il mio cuore, con tutta l'anima mia e con
tutte le mie forze, da, jube, Pater, « quod jubes
et quod vis. » Fontana di carità, datemi carità
; pelago d'amor infinito, datemi amore.
Accendete, Padre, questa lucerna dell'anima
mia con la luce del vostro amore1519.
Comandasti [408] nos, Pater, che nel vostro
altare sempre vi fusse del fuoco1520. Ecco,
Padre, che v'offerisco quella mia anima per
vostro altare ; fate sì ch'arda continuamente
in quella il fuoco del vostro amore. O Luce
eterna, « omne lumen illuminans et
consumans in æterno splendore, mille
millena lumina fulgurantia ante thronum
Divinitatis tuæ a primo diluculo1521 ! » O
Luce eterna, ch'ogni lume illuminate e
conservate nel vostro eterno splendore,
migliaia de migliaia d'Angeli stanno inanzi al
conspetto di vostra Maestà, come tante torcie
accese dal fuoco di vostra carità, et ardono
continuamente senza bruggiarsi nè
consumarsi. Datemi licenza, Dio mio e Padre,
ch'io accosti questa torcia dell'anima mia a
voi, Fuoco d'amore, acciò accesa, arda
continuamente, amando voi et il prossimo in
voi, e così sarà fatta in me la vostra santa
voluntà.
Sopra : Panem nostrum quotidianum da
nobis hodie
4a Petitione
esprit et de toutes vos forces, et votre prochain
comme vous-même. O Père, puisque votre
volonté est que je vous aime de tout mon cœur,
de toute mon âme et de toutes mes forces,
donnez-moi, ô Père, de faire « ce que vous
ordonnez et ce que vous voulez. » Source de
charité, donnez-moi la charité ; abîme d'amour
infini, donnez-moi l'amour. Allumez, Père, cette
lampe de mon âme avec la lumière de votre
[408] amour. Vous nous avez ordonné, Père,
qu'il y eût toujours du feu sur votre autel. Je vous
offre, ô Père, mon âme pour autel ; faites que le
feu de votre amour brûle sans cesse en elle. O
Lumière éternelle, « qui éclairez toute lumière et
consumez dans l'éternelle splendeur des milliers
et des milliers d'étincelants flambeaux devant le
trône de votre Divinité dès le point du jour ! » O
Lumière éternelle qui éclairez toute lumière et la
conservez dans votre éternelle splendeur, des
milliers et des milliers d'Anges sont devant votre
Majesté comme autant de flambeaux allumés
par le feu de votre charité et brûlent
continuellement sans se brûler ni se consumer.
Permettez-moi, mon Dieu et mon Père,
d'approcher de vous, Feu d'amour, ce flambeau
de mon âme, afin qu'étant allumé, il brûle sans
cesse, vous aimant vous-même et le prochain en
vous : ainsi sera faite en moi votre sainte
volonté.
Sur ces paroles : Donnez-nous aujourd'hui
notre pain de chaque jour
Quatrième demande
Oui, Père, les enfants ont besoin de pain
; ne nous le refusez pas, de peur que nous ne
mourions. Donnez-nous, ô Père, notre Pain
supersubstantiel, votre Fils unique Jésus-Christ
Notre-Seigneur [409] dans le Très Saint
Sacrement, afin que par ce Pain nous soyons
nourris dans la vie spirituelle, nous croissions
dans la vertu et nous soyons tellement fortifiés,
que nous puissions faire le voyage en cette
vallée de larmes, jusqu'à la montagne de Dieu,
à Horeb. Père saint, ce Pain est celui que votre
Fils nous a apporté, ce sont les choses
merveilleuses qu'il a opérées, prêchées,
endurées ; faites, ô Père saint, que pendant la
1518 Luc. 10, [27 ; Marc., XII, 30.]
1519 Aug., [Confess., l. X, c. XXIX.]
1520 Levit. 6, [12, 13.]
1521 Bern., in Serm.
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26.7 Page 257

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Padre, sì, i figliuoli hanno bisogno di
pane ; non cel neghate, acciò non muoiamo.
Dateci, Padre, il Pane nostro
supersubstantiale1522, ch'è il vostro unigenito
Figliuolo Jesu [409] Christo, Signore nostro,
nel Santissimo Sacramento, acciò con questo
Pane siamo nudriti nella vita spirituale,
cresciamo nelle virtù e siamo talmente
fortificati che possiamo caminare questo
viaggio per questa valle di lagrime1523, usque
ad montem Dei, Oreb1524. Padre santo, questo
Pane è pane che il vostro Figliuolo ci portò e
le cose meravigliose ch'operò, predicò, patì ;
fate, santo Padre, che mentre dura questa
peregrinatione, non ci manchi questa manna
celeste, e fate che gustiamo la sua immensa
soavità1525.
Oculi omnium in te sperant, Domine,
et tu das escam illis in tempore opportuno1526
; gl'occhi di vostri figliuoli riguardano a voi,
Padre, e domandano quel Pane di vita1527,
perchè mediante quello si fa vita celeste. Io
adonque, Padre, uno di vostri figliuoli, se ben
d'ogni parte indegno, negl'anni grande, ne'
meriti piccolo, famelico et bisognoso, vi
domando pane ; et perch'in me si ritrovano
due substantie, una corporale, altra spirituale,
per ambedue vi domando pane. Per il corpo
ch'è terra, vi domand'il pane della terra ; per
l'anima che è spirito, domand'il Pane celeste,
il Pane degl'Angeli1528. Hor, Padre pietoso,
mirate che quando i figliuoli piccolini
domandano a loro padre il pane, massime
[410] [se] sono affamati, replicano ben al
petto questa parola : Pane, pane ! e con
questa, come con acute saette, feriscono i
cuori di loro padri ; d'onde i padri sopra la
terra cercano il pane per dar a loro figliuoli.
Ecco, Padre nostro, che son affamato ben al
petto ; sentite nelle vostre orecchie questa
mia parola : Pane, Padre, pane, Padre !
Piacciavi donque, Padre santo, aprire le
viscere della vostra misericordia1529, et
poichè potete, soccorrete a me vostro
figliuolo con il pane della vostra gratia e con
durée de ce pèlerinage, cette manne céleste ne
vienne jamais à nous manquer et que nous
goûtions son immense suavité.
Les yeux de tous les êtres sont tournés
vers vous dans l'attente, Seigneur, et vous leur
donnes la nourriture en temps opportun ; les
yeux de vos enfants vous regardent, ô Père, et
demandent ce Pain de vie, parce que par lui on
mène une vie céleste. Moi donc, Père, l'un de
vos enfants, bien que d'ailleurs indigne, grand
par les années, mais très petit en mérites, affamé
et besogneux, je vous demande le pain. Et parce
qu'en moi se trouvent deux substances, l'une
corporelle, l'autre spirituelle, pour toutes deux je
vous demande du pain. Pour le corps, qui est
terre, je vous demande le pain de la terre ; pour
l'âme, qui est esprit, je vous demande le Pain
céleste, le Pain des Anges. Or, Père plein de
pitié, souvenez-vous que lorsque les petits
enfants demandent du pain à [410] leur père,
surtout s'ils ont bien faim, ils crient de toutes
leurs forces ce mot : Pain, pain ! et avec ce mot,
comme avec autant de flèches, ils blessent le
cœur de leurs pères qui, sur la terre, cherchent
du pain pour le donner à leurs enfants. Me voici
bien affamé, ô notre Père ; écoutez ce mot que
je vous adresse : Du pain, Père, du pain !
Daignez donc, Père saint, ouvrir les entrailles de
votre miséricorde, et puisque vous le pouvez,
secourez-moi et donnez à votre enfant le pain de
votre grâce et le Pain supersubstantiel du Très
Saint Sacrement.
Donnez-nous en outre, ô Père, le pain de
votre suave et très douce parole ; rompez-le-
nous, coupez-le en morceaux par le moyen de
vos ministres qui sont vos prédicateurs ; faites
qu'il fructifie dans nos âmes, comme ce bon
grain qui tomba dans la bonne terre et qui
rapporta le cent pour un.
Enfin, Père, je suis maintenant sous la
table de votre haute Majesté, où mangent une
multitude d'Anges et de Saints ; agenouillé
devant votre face royale, humilié en votre
présence comme les petits chiens qui sont sous
la table de leurs maîtres guettant les miettes qui
1522 Matt., VI, 11.
1523 Ps. LXXXIII, 7.
1524 3 Reg. 19, [8.]
1525 Cf. Sap., XVI, 20.
1526 Ps. CXLIV, 15.
1527 Joan., VI, 35, 48.
1528 Ps. LXXVII, 25.
1529 Luc., I, 78.
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il Pane supersubstantielle1530 del Santissimo
Sacramento.
Di più, Padre, dateci il pane della
vostra parola soave e dolce ; rompetecelo,
pezzatecelo per mezzo di vostri ministri che
sono li vostri predicatori ; fate che dentro
delle anime nostre fruttifichi, come quel buon
seme che cascò nella buona terra e rese frutto
di cento1531.
Finalmente, Padre, hora che mi trovo
sotto la tavola di vostra alta Maestà, alla
quale mangiano tanta moltitudine d'Angioli e
Santi, inginochiato inanzi al vostro real
conspetto, humiliato inanzi la vostra
presenza, come li cagnoli che stanno sotto la
mensa de loro padroni chettando le molliche
che cascano di quella1532, onora me anche di
quella soavità, di quella dolcezza che li Beati
gustano alla vostra [411] tavola, acciò in
questa mia oratione gusti alquanto di quel che
gustano i vostri figlioli nel Cielo ; fate, Padre,
che questa mia oratione non sia arida e secca,
ma dolce e soave, con il pane delle vostre
consolationi e visite.
Sopra : Et dimitte nobis debita nostra sicut
et nos dimittimus debitoribus nostris
5a Petitione
Padre, siamo poveri e debitori, voi
siete ricco e creditore : conviene che l' ricco
rimetta al povero ; dimitte ergo nobis debita
nostra. Padre, misericordia con questo vostro
figliuolo che tanti debiti ha fatto quanti
peccati ha commesso. Qual padre vi è che
non rimetta al figliuolo posto in gran povertà,
qualsivoglia debito, quando humilmente gli
domanda ? O Padre santo, e chi più povero
figliuolo di me e chi più carico di debiti ?
Ecco, com'un altro publicano1533,
humilmente vi domando : perdonatemi tanti
debiti di peccati con li quali io v'ho offeso ; «
Deus, cui proprium est misereri semper et
parcere1534, » habbiate misericordia di questo
povero figliuolo et rilasciatemi ogni mio
debito. Cognosco, Padre, che li debiti sono
en tombent, daignez m'honorer de cette suavité,
de cette douceur que goûtent les Bienheureux à
votre table, afin que [411] dans mon oraison je
goûte quelque chose de ce que goûtent vos
enfants au Ciel. Faites, ô Père, que mon oraison
ne soit pas aride et sèche, mais douce et suave,
avec le pain de vos consolations et de vos
visites.
Sur ces paroles : Pardonnez-nous nos offenses
comme nous les pardonnons à ceux qui nous
ont offensés
Cinquième demande
Père, nous sommes pauvres et pleins de
dettes ; vous, vous êtes riche et notre créancier ;
il faut que le riche remette au pauvre ses dettes :
remettez-nous donc nos dettes. Père, faites
miséricorde à votre enfant qui a contracté autant
de dettes qu'il a commis de péchés. Quel est le
père qui ne remettrait pas à son fils tombé en
grande pauvreté n'importe quelle dette, si
humblement il le lui demandait ? Et qui donc, ô
Père saint, est un fils plus pauvre et plus chargé
de dettes que moi ? Voici que, comme un autre
publicain, humblement je vous prie : remettez-
moi tant de dettes de péchés par lesquels je vous
ai offensé ; « O Dieu, dont le propre est de faire
toujours miséricorde et de pardonner, » ayez
pitié de ce pauvre enfant et remettez-moi toutes
mes dettes. Je reconnais, ô Père, que les dettes
sont nombreuses (dix mille talents), parce [412]
que j'ai péché contre toute votre loi ; mais les
richesses de votre miséricorde les surpassent
infiniment. Souvenez-vous, ô Père, de vos
miséricordes qui sont éternelles, et de même que
vous avez usé de miséricorde à l'égard de tant de
vos serviteurs, daignez me remettre tous mes
péchés.
Je me souviens, ô Père, de votre
miséricorde à l'égard de votre ancien peuple à
qui tant de fois vous pardonnâtes ses péchés. Je
me rappelle, ô Père, que vous vous êtes souvenu
de votre serviteur David et que vous lui avez
pardonné sa grande faute. Je me souviens, ô
Père, que votre bien aimé Fils, étant en ce
monde, regarda d'un œil de pitié son Apôtre
1530 Ubi supra, p. 409.
1531 Math., [XIII, 8 ; Luc., VIII, 8.]
1532 Matt., XV, 27.
1533 Luc., [XVIII, 13.]
1534 Litaniæ Sanctorum. oratio 1a.
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assai (decem millia talenta1535), [412] perchè
contra tutta la vostra legge ho peccato ; però
le ricchezze della vostra misericordia
avanzano infinitamente. Reminiscere, Pater,
misericordiarum tuarum quæ a sæculo
sunt1536, e sì come con tanti servi havete usato
misericordia, rimettete tutti li miei peccati.
Mi ricordo, Padre, la misericordia che
usaste al vostro populo antiquo, tante volte
perdonando li suoi peccati. Mi ricordo, Padre,
che vi ricordaste del vostro servo David e li
perdonaste il suo gran fallo1537. Mi ricordo,
Padre, che il vostro benedetto Figliuolo, in
questo mondo riguardò con l'occhio della
misericordia il suo Apostolo quando lo
neghò1538 e la Madalena quando si
convertì1539, e finalmente riceveva tutti li
peccatori a penitenza e mangiava con
loro1540. Non siete mutato di quel Dio
misericordiosissimo in altro meno
misericordioso, siete l'istesso Iddio che
sempre foste ; non è finita la vostra
misericordia perchè è infinita, non s'è fermata
perchè fermar non si può, più tosto si
fermeriano i cieli ; non è cessata, perchè sì
come il fuoco sempre opera essendovi
materia di consumare, così la vostra
misericordia,
essendovi
peccati
d'abbruggiare e debiti da perdonare. Et
misericordia ejus a progenie in progenies
timentibus [413] eum1541 ; canto de la Madre
santissima del vostro benedetto Figliuolo e
Signore nostro Gesù Christo, e che sapeva
bene quanto gl'era immensa. Al mare,
Signore, metteste termine1542 ; però alla
vostra misericordia havete lasciato senza
termine, acciò sempre camini a cercar li
peccatori carichi di debiti per perdonarli.
Ecco, Padre, si scontra la vostra misericordia
con il maggior peccatore fra tutti i peccatori,
e con quello che tiene più debiti che niun altro
de' figliuoli d'Adamo : scancelli li miei
peccati e rimetta tanta somma e debiti, e passi
manzi cercando li altri debitori. Abissus
quand il le renia et Madeleine quand elle se
convertit, et enfin qu'il recevait tous les
pécheurs à pénitence et mangeait avec eux.
Vous n'êtes point changé ; vous étiez autrefois
le Dieu très miséricordieux, vous ne l'êtes pas
moins maintenant ; vous êtes le même Dieu que
jadis, votre miséricorde n'est pas finie
puisqu'elle est infinie ; elle ne s'est point arrêtée
puisqu'elle n'a point d'arrêts et que, plutôt, on
fermerait le Ciel ; elle n'a pas cessé, puisque de
même que le feu opère toujours tant qu'il y a de
la matière à consumer, ainsi votre miséricorde,
tant qu'il y a des péchés à brûler et des dettes à
remettre. Sa miséricorde s'étend d'âge en âge
sur ceux qui le craignent : cantique de la très
sainte [413] Mère de votre Fils béni, Notre-
Seigneur Jésus-Christ, qui savait bien qu'elle
était immense. Vous avez mis, Seigneur, des
bornes à la mer, mais vous avez laissé sans
bornes votre miséricorde, afin que toujours elle
aille chercher les pécheurs chargés de dettes
pour leur pardonner. Voilà, ô Père, que votre
miséricorde se rencontre avec le plus grand
pécheur entre tous les pécheurs, avec celui qui a
plus de dettes qu'aucun autre enfant d'Adam :
effacez mes péchés, remettez-moi la grande
somme de mes dettes et passez toujours plus
avant pour chercher les autres débiteurs. Un
abîme appelle un autre abîme ; le fils de la
misère invoque [le Père des miséricordes.] Que
l'abîme absorbe un autre abîme ; que l'abîme,
mes misères infinies, soit absorbé par l'abîme. Je
sais, ô Père, que tous mes péchés, pour
nombreux qu'ils soient, et tous ceux du monde
entier, sont devant votre miséricorde comme un
brin de paille en présence d'un grand feu. Enfin
je vous prie, Père saint, par votre miséricorde
infinie, par la vertu de cette Passion que votre
Fils bien aimé endura sur le bois de la croix et
par les mérites et l'intercession de la
Bienheureuse Vierge et de tous les élus qui
existent depuis le commencement du monde, de
daigner nous remettre nos dettes. [414]
Comme nous les remettons à ceux qui
nous ont offensés. Je vous prie aussi, ô Père, de
1535 Mathæi, 18, [24.]
1536 Ps. XXIV, 6.
1537 II Reg. 12, [13.]
1538 Luc., XXII, 55-61.
1539 Ibid., VII, 37-50.
1540 Ibid., XV, 1, 2.
1541 Luc., I, 50.
1542 Cf. Prov., VIII, 29.
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abissum invocat1543 ; filius miseriæ invocat
[Patrem misericordiarum]. Abissus abissum
absorbeat ; abissus, infinite mie miserie,
absorbeat abissum. Conosco, Padre, che tutti
li miei peccati, per molti che sono, e tutti
quelli del mondo insieme, inanzi la vostra
misericordia sono come una paglia alla faccia
d'un gran fuoco. Finalmente, Padre santo, vi
priegho, per questa vostra infinita
misericordia e per la virtù di quella Passione
che'l vostro diletto Figliuolo sostenne su il
duro legno della croce, e per li meriti et
intercessione della Beatissima Vergine e di
tutti i vostri eletti che sono stati dal principio
del mondo, dimitte nobis debita nostra.
Sicut et nos dimittimus debitori bus
nostris. Vi prego [414] anche, Padre, che mi
diate tanta virtù e gratia, ch'io anche
perfettamente perdoni tutti quelli che
m'avessero offeso ; e se pur trovate qualche
imperfettione restata nel mio cuore circa
quelli che m'hanno offeso, voi, Padre, col
fuoco della vostra carità toglietela via,
bruggiatela, fate sì che niun vestigio nè
tenebra di rancore resti in questo mio cuore,
acciò perfettamente possi dire : Dimitte nobis
debita nostra sicut et nos dimittimus
debitoribus nostris.
Et ne nos inducas in tentationem
Siamo, Padre, in luogo di tentatione.
Adversarius noster diabolus tanquam leo
rugiens circuit, quærens quem devoret1544.
Fer opem, fer auxilium, Pater ; li nemici sono
molti come l'arena del mare, sono potenti et
esperti nel combattere ; quest'anima è fiacca,
debole et impotente se voi non l'aiutate.
Apprehende ergo, Deus meus, arma et
scutum, et exurge in adjutorium mihi.
Effunde frameam, et conclude adversus eos
qui persequuntur me ; dic animæ meæ : Salus
tua ego sum1545. O Signore, quant'è grande la
necessità che tiene questa poverella della
vostra gratia, del vostro aiuto e favore per non
soccombere alle tentationi ! [415] Una
pecorella fra mille lupi, se l'pastor non la
salva, si perde ; così, Padre, quest'anima fra
tanti lupi che l'assaltano nel mondo che con
me donner assez de vertu et votre grâce pour que
je puisse parfaitement pardonner à ceux qui
m'ont offensé ; et si vous trouvez dans mon cœur
quelque reste d'imperfection contre ceux qui
m'ont offensé, vous, Père, par le feu de votre
charité, faites-le disparaître, brûlez-le, faites que
nulle trace ni ombre de rancune demeure dans
mon cœur, afin que je puisse dire en toute vérité
: Pardonnez-nous nos offenses comme nous les
pardonnons à ceux qui nous ont offensés.
Et ne nous induisez point en tentation
Nous sommes, ô Père, en un lieu de
tentation. Notre adversaire, le diable, rôde
autour de nous, cherchant qui dévorer. Donnez
les moyens, portez secours, 6 Père ; les ennemis
sont aussi nombreux que le sable de la mer et
expérimentés dans le combat ; mon âme est
languissante, faible, impuissante si vous ne
venez à son aide. Saisissez donc vos armes et
votre bouclier, et levez-vous pour me secourir ;
tirez la lance et barrez le passage à mes
persécuteurs ; dites à mon âme : Je suis ton
salut. O Seigneur, que cette pauvre âme a besoin
de votre grâce, de votre secours, de votre
assistance pour ne pas succomber aux tentations
! Une petite brebis [415] au milieu des loups se
perd si le berger ne la sauve ; ainsi, Père, cette
âme au milieu de tant de loups qui l'assaillent
dans un monde où elle est sollicitée par mille
occasions de péchés, avec la chair qui
continuellement la combat, que fera-t-elle sans
votre secours ?
Père saint, je lèverai mes yeux au Ciel
d'où me viendra le secours ; mon secours vient
du Seigneur qui a fait le ciel et la terre. O Père
des miséricordes et Dieu de toute consolation,
venez à mon aide ; Seigneur, hâtez-vous de me
secourir. Père saint, quand donc ferez-vous
justice de ceux qui me persécutent ? Faites
justice, Seigneur, de ceux qui cherchent la mort
de mon âme, donnez-moi cependant votre aide
pour ne point tomber, pour ne pas vous offenser.
Je ne demande pas que vous me délivriez des
tentations, ô Père, mais je vous demande la
grâce et la force pour résister et combattre
énergiquement. Par amour pour vous, je veux
bien avoir des tribulations et des angoisses en ce
1543 Ps. XVI, 8.
1544 I Petr. 5, [8.]
1545 Ps. 34, [2, 3.]
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27.1 Page 261

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mille occasioni di peccati la move, con la
carne che continuamente la combatte, che
farà se non havrà il vostro aiuto ?
Padre santo, levabo oculos meos in
Cælum, unde veniet auxilium mihi ; auxilium
meum a Domino, qui fecit cælum et
terram1546. O Pater misericordiarum et Deus
totius consolationis1547, in adjutorium meum
intende ; Domine ad adjuvandum me
festina1548. Padre santo, quando facies de
persequentibus me judicium1549 ? Fate,
Signore, giustitia di quelli che cercano la
morte di questa mia anima ; datemi in questo
mentre aiuto per non cadere, per non
offendervi. Non domando, Padre, che mi
togliate le tentationi, ma domando grafia e
fortezza per resistere e per combattere
fortemente. Mi contento per amor vostro
d'esser tribulato et angustiato in questo
mondo, pur che nelle tribulationi non manchi
l'anima mia. Fate, Signore, che si come l'oro
posto nella fornace diventa più bello1550, così
quest'anima posta nella fornace delle
tribulationi, diventi più chiara, lucida e
risplendente. Non sia come la paglia, che per
mancamento di virtù il fuoco l'abrugia e
consuma. [416] Sia io simile alli vostri Santi,
ch'in questo mondo, posti in mille fiamme di
fuoco, stettero forti e saldi, e di quelle, come
pietre preciose, uscirono, e con più splendore
et luce. Ne ergo, Pater, inducas nos in
tentationem, qua tantam Majestatem
offendamus.
Sed libera nos a malo. Amen
Padre santo, confesso le vostre
misericordie sopra di me, perchè m'havete
liberato da molti mali ch'io meritavo per li
miei peccati ; quante volte peccai, tante volte
meritai quel male infinito ch'è la dannatione
eterna. O quanti, Padre, sono incorsi in
questo male ! Havevano fatto meno peccati di
me ; o quanti, per non essergli dato tanto
spatio di penitenza quanto a me m'è stato
dato, miserabilmente morirono nelli loro
peccati e si persero !
monde, pourvu que dans les tribulations mon
âme ne défaille pas. Faites, Seigneur, que,
comme l'or dans la fournaise devient plus beau,
ainsi mon âme jetée dans la fournaise des
tribulations, devienne plus pure, lumineuse et
resplendissante. Qu'elle ne soit pas comme la
paille qui, par manque de force, se laisse brûler
et consumer par [416] le feu. Que je sois plutôt
comme vos Saints qui, en ce monde, jetés dans
les flammes et le feu, restèrent forts et fermes, et
ensuite, comme des pierres précieuses, en
sortirent avec plus de splendeur et de lumière.
Ne nous induisez donc pas en tentation, ô Père,
afin que nous n'offensions pas une telle Majesté.
Mais délivrez-nous du mal. Ainsi soit-il
Père saint, je reconnais vos miséricordes
sur moi, car vous m'avez préservé de beaucoup
de maux que j'avais mérités par mes péchés ;
autant de fois que je péchai, autant de fois je
méritai ce mal infini qui est la damnation
éternelle. Qu'ils sont nombreux, Père, ceux qui
ont encouru ce malheur ! Ils avaient commis
moins de péchés que moi ; et combien, parce
qu'il ne leur fut pas donné, comme à moi, le
loisir de faire pénitence, moururent
misérablement dans leurs péchés et se perdirent
! Je vous en prie, ô Père, délivrez-moi désormais
de toute faute, afin que j'échappe aux peines de
l'enfer ; faites, Seigneur, que je ne vous offense
plus ; vous avoir offensé dans le passé est bien
suffisant. Que mes péchés, Seigneur, ne se
multiplient pas comme le sable de la mer et les
étoiles du ciel ; que l'enfer ne m'engloutisse pas
et que la fosse ne se ferme pas sur moi. [417]
Vous m'avez délivré, ô Père, de
beaucoup de maux qui sont en ce monde. Que
d'aveugles, que de sourds, que de muets, que de
paralytiques sont au nombre des enfants d'Adam
! et vous, Seigneur, m'avez préservé de tous ces
maux, bien que je fusse comme eux enfant
d'Adam, et pécheur plus qu'eux tous ; cependant,
cela me servirait de peu de chose ou même de
rien, si vous ne me délivriez du mal du péché.
Donc, du péché, de la faute et de la peine due au
péché, je demande d'être délivré : Mais délivrez-
1546 Ps. CXX, 1, 2.
1547 II Cor., I, 3.
1548 Ps. LXIX, 2.
1549 Ps. CXVIII, 84.
1550 Prov., XVII, 3, XXVII, 21 ; Sap., III, 6.
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Vi priegho, Padre, di qua inanzi
liberatemi d'ogni male di colpa, acciò scampi
le pene dell'inferno ; fate, Signore, che non
v'offenda più ; basta quel che v'offesi per il
passato. Non si multiplichino, Signore, li
miei peccati sopra l'arena del mare1551 e
sopra le stelle del cielo ; ne absorbeat me
tartarus, et urgeat super me puteus os
suum1552. [417]
Mi liberaste, Padre, di molti mali che
vi sono in questo mondo. Quanti ciechi,
quanti sordi, quanti muti e quanti paralitichi
vi sono del numero delli figliuoli d'Adamo, e
voi, Signore, da tutti questi mali mi liberaste,
essend'io, come loro, figliuolo d'Adamo e più
peccatore di tutti loro ; però questo, poco o
nulla mi giovarebbe, se non mi liberate dal
male del peccato. Donque, dal peccato e dalla
colpa et pena del peccato domando esser
liberato : Sed libera nos a malo.
M'havete, Padre, liberato dalle
tenebre e cecità nelle quali si trovano Turchi,
Mori, Giudei, Gentili e pagani, facendomi
nascere nel grembo della santa Chiesa ;
liberatemi, Padre, dalle tenebre e cecità del
peccato, acciò io goda del sangue, di meriti
del vostro benedetto Figliuolo Christo, mio
Signore, e sia numerato tra li vostri figliuoli,
che sono figliuoli della luce1553 nel vostro
Regno.
Padre, mi ricordo che quella buona
donna Thecuite, entrando dal re David,
domandò perdono per Absalone suo
figliuolo, et intendendo questo buon Re che
questa petitione e domanda l'haveva ordinata
quel suo diletto e favorito capitano Gioab,
subito li concesse la gratia1554. Padre, il
vostro santo e benedetto Figliolo Jesu Christo
m'ha ordinato [418] questa petitione, e con
quella m'ha mandato a voi, Signore mio,
acciò vi domandi le gratie che in quella si
contengono. E non riguardate, Padre, me, che
sono il maggiore di tutti peccatori, ma
riguardate esto vostro santo e benedetto
Figliuolo, maggior di tutti Santi, anzi
Santificatore di tutti quelli1555, e per l'amor
che ad Egli portate, concedetemi quel tanto
nous du mal.
Vous m'avez délivré, 6 Père, des
ténèbres et de l'aveuglement où se trouvent les
Turcs, les Maures, les Juifs, les Gentils et
payens, me faisant naître dans le sein de la sainte
Eglise ; délivrez-moi, ô Père, des ténèbres et de
l'aveuglement du péché, afin que je jouisse du
sang et des mérites de votre Fils béni, Jésus-
Christ mon Seigneur, et que je sois compté
parmi vos enfants, qui sont les fils de la lumière
dans votre Royaume.
Père, je me rappelle cette bonne femme
de Thécua qui, entrant chez le roi David, lui
demanda pardon pour Absalon son fils ; et ce
bon roi, entendant que la demande avait été
ordonnée par le capitaine Joab, son bien aimé et
son favori, aussitôt il lui accorda [418] la grâce
qu'elle implorait. Père, votre saint et bien aimé
Fils Jésus-Christ m'a ordonné de faire cette
prière et m'a envoyé à vous afin que je vous
demande les grâces qui y sont contenues. Ne me
regardez pas, ô Père, moi qui suis le plus grand
de tous les pécheurs, mais regardez votre Fils
très saint et béni, le plus grand de tous les Saints,
voire le Sanctificateur d'eux tous ; et par l'amour
que vous lui portez, accordez-moi ce qu'il m'a
ordonné de vous demander.
Je me souviens aussi, Père, qu'il n'était
pas permis aux fils de Jacob de paraître une
seconde fois en présence de Joseph s'ils ne
conduisaient avec eux leur frère cadet Benjamin
; et à nous il n'est pas permis de paraître en votre
présence sans notre frère aîné, qui est votre Fils
unique Jésus-Christ. Voilà donc, 6 Père, je viens
maintenant devant vous avec votre saint Fils,
mon Seigneur Jésus. Je vous le présente, et vous
prie humblement que par ses mérites et par sa
très sainte Mort et Passion vous daigniez
m'accorder ce que lui-même, dans cette Oraison
et cette requête qui sont siennes, m'a ordonné de
vous demander, afin que mon âme soit toute
vôtre et qu'elle vous loue et bénisse dans les
siècles des siècles. Ainsi soit-il. [419]
1551 Job, VI, 3.
1552 Ps. 68, [16.]
1553 Luc., XVI, 8 ; Ephes., V, 8 ; I Thess., V, 5.
1554 II Reg. 14, [1-22.]
1555 Cf. I Cor., I, 30.
262/332

27.3 Page 263

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ch'Egli m'ha comandato ch'io vi domandi.
Mi ricordo anco, Padre, che a'
figliuoli di Giacob non era lecito comparire la
seconda volta nella presenza di Gioseph se
non menavano seco il loro fratello minore
Benjamino1556 ; et a noi non è lecito
comparire alla vostra presenza senz'il nostro
fratello maggiore, ch'è l' vostro unigenito
Figliuolo Jesu Christo. Ecco donque, Padre,
hora vengo avanti il vostro conspetto e porto
meco il vostro santo Figliuolo e Signore mio
Gesù. Ve lo presento, e priegho humilmente,
che per li suoi meriti e per la sua Morte e
Passione santissima, mi concediate quel tanto
ch'esso in questa sua Orazione et in questo
suo memoriale mi ha ordinato ch'io vi
domandi, acciò che quest'anima sia tutta
vostra, e vi lodi e benedica in sæcula
saeculorum. Amen.
Revu sur une copie conservée à la Visitation
d'Annecy. [419]
_____
1556 Gen., XLII, 20, XLIII, 3, 5, XLIV, 23, 26.
263/332

27.4 Page 264

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Appendice
_____
A. Dévotes méditations sur tous les mysteres du Saint Sacrifice
de la Messe1557
______
Petite preface
On celebre la sainte Messe en memoire de la Passion de Nostre Seigneur Jesus Christ,
comme il a commandé a ses Apostres leur donnant son corps et son sang, et leur disant : Hoc
facite in meam commemorationem, c'est a dire : Faites cela en memoire de moy. Comme s'il
vouloit dire : Souvenes vous de ce que j'ay enduré pour vostre salut, prattiques donq ce mesme
mystere pour vous et pour les vostres.
L'entree du prestre a l'autel (Jesus entre au Jardin)
Mon Seigneur Jesus Christ, Filz de Dieu vivant, qui aves voulu estre saisi de crainte et de
tristesse a l'instant de vostre Passion, donnes moy la grace de vous consacrer tous mes ennuis. O
Dieu [421] de mon cœur, aydes moy a les endurer dans l'union de vos souffrances et tristesses,
affin que par le merite de vostre Passion ilz me soyent rendus salutaires. Amen.
Au commencement de la Messe (Les prieres de Jesus au Jardin)
Mon Seigneur Jesus Christ, Fils de Dieu vivant, qui aves voulu estre conforté lhors que
vous priies au Jardin des Olives, faites que par la vertu de vostre orayson, vostre saint Ange
m'assiste tous-jours en mes prieres.
1557 Hérissant qui, le premier, a inséré ces Dévotes Méditations parmi les Œuvres de saint François de Sales (Opuscules,
1767, tome III, p. 51), les a tirées d'un opuscule qui a pour titre : La piété française vers la Sainte Vierge Marie, Mère
de Dieu, Nostre Dame de Liesse en Picardie, par le R. P. Artus du Monstier, de Rouen, predicateur Recollet de la
province de Saint Denis. (Paris, 1637, in-12.) Il n'y a rien dans cet opuscule qui concerne notre Saint ; seulement, à la
suite des Méditations, on lit cette Approbation : « Nous soussignés, Docteurs en théologie, certifions avoir lu ce petit
livre trouvé écrit de la main de saint François de Sales, auquel nous n'avons rien trouvé de contraire à la foi de l'Eglise
catholique. Fait ce 20 janvier 1643. CANTAL et FLEURY. » Les Dévotes Méditations, approuvées en 1643, ont
donc été reliées ensuite avec le volume de 1637, mais elles en sont indépendantes.
La « Petite Preface » donnée par Hérissant, est l'exacte traduction du texte d'Alcuin qui se trouve dans le
recueil in-folio fait par Melchior Hittorpetintitulé : De divinis Catholicæ Ecclesiæ officiis et ministeriis scriptores
vetustiores. Collegit Hittorpius, Coloniæ, 1568. Le troisième Livre de ce recueil est d'Albinus Flaccus Alcuin : Des
offices divins ; à la p. 79, De celebratione Missæ et ejus significatione, on lit la « Petite Preface » que nous
reproduisons.
Les prières qui suivent sont-elles vraiment de saint François de Sales ? Nous avons peine à le croire en lisant,
par exemple, ce qu'il écrit déjà à l'Abbesse du Puits-d'Orbe en 1604 : « Pour le regard de la Messe, je n'ay pas voulu
particulariser sur tous les misteres d'icelle, pour vous instruire comme il y faut correspondre par le menu avec des
oraysons et des pensees, d'autant que cela charge tant la memoyre que la volonté n'a pas ses affections libres. » (Voir
ci-dessus, p. 209.) Il en dit autant à Mme de Chantal, et toutes deux reçoivent du Saint un « exercice » beaucoup plus
simple, le même, à peu de chose près, qui fait partie du Directoire spirituel des Religieuses de la Visitation. (Voir le
tome précédent, p. 141, et ci-dessus, p. 206.) De plus, le style ne nous paraît pas le sien.
Il peut se faire que le « petit livre trouvé écrit de la main de saint François de Sales », comme il est dit dans
l'Approbation, ait été copié et non composé par lui, et trouvé ensuite parmi ses papiers. Le doute au sujet de l'auteur
de ces Dévotes Méditations persistant, nous les donnons, non pas dans les textes authentiques du Saint, mais en
Appendice, comme texte douteux.
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27.5 Page 265

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Au Confiteor (Jesus est courbé en terre)
Mon Seigneur Jesus Christ, qui aves sué du sang par tous vos membres et dans l'exces de
vostre douleur, lhors qu'estant reduit a l'agonie vous priies le Pere eternel au Jardin, faites que par
le souvenir de vostre Passion, je puisse participer a vos douleurs divines, et qu'au lieu de sang je
verse des larmes pour mes pechés.
Au bayser de l'autel (Jesus est trahi par le bayser de Judas)
Mon Seigneur Jesus Christ, qui aves enduré le bayser du traistre Judas, faites moy la grace
de ne vous trahir jamais, et de rendre a mes calomniateurs les offices d'une amitié chrestienne.
Amen.
A l'Epistre1558(Jesus est mené prisonnier)
Mon Seigneur Jesus Christ, qui aves bien voulu estre garrotté par les mains des meschans,
rompes les chaisnes de mes pechés, et retenes moy tellement par les liens de la charité et de vos
commandemens, que les puissances de mon ame et de mon cors ne s'eschappent point a commettre
aucune chose qui soit contraire a vostre sainte volonté.
A l'Introit (Jesus est souffletté)
Mon Seigneur Jesus Christ, qui aves voulu estre conduit comme un criminel a la maison
d'Anne, faites moy la grace de ne pas estre [422] attiré au peché par l'esprit malin, ou par les
hommes pervers, mais d'estre guidé par vostre Saint Esprit a tout ce qui est aggreable a vostre
divine volonté. Amen.
Au Kyrie Eleison (Jesus est renié par Pierre)
Mon Seigneur Jesus Christ, qui aves permis d'estre trois fois renié en la maison de Caïphe
par le prince des Apostres, preserves moy des mauvaises compagnies, affin que le peché ne me
separe jamais de vous. Amen.
Au Dominus Vobiscum (Jesus regarde Pierre et le convertit)
Mon Seigneur Jesus Christ, qui par un regard de vostre amour aves tiré des yeux de saint
Pierre les larmes d'une veritable penitence, faites par vostre misericorde, que je pleure amerement
mes pechés, et que je ne vous renie jamais de fait ou de parole, vous qui estes mon Seigneur et
mon Dieu. Amen.
A l'Epistre (Jesus est mené chez Pilate)
Mon Seigneur Jesus Christ, qui aves voulu estre mené devant Pilate et accusé fausement
en sa presence, apprenes moy le moyen d'eviter les tromperies des meschans et de professer vostre
foy par la prattique des bonnes œuvres. Amen.
Au Munda Cor Meum (Jesus est mené chez Herode)
1558 C'est-à-dire : le Prêtre va du côté de l'Epître.
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27.6 Page 266

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Mon Seigneur Jesus Christ, qui estant en la presence d'Herode aves souffert les fauses
accusations sans repliquer un seul mot, donnes moy la force d'endurer courageusement les injures
des calomniateurs, et de ne pas publier aux indignes les sacrés mysteres. Amen.
A l'Evangile (Jesus est moqué et ramené devant Pilate)
Mon Seigneur Jesus Christ, qui aves souffert d'estre renvoyé d'Herode a Pilate, qui
devinrent amis par ce moyen, faites moy la grace de ne pas craindre les conspirations que les
meschans font contre moy, mais d'en tirer du proffit, affin d'estre digne de vous estre conforme.
Amen.
A l'ouverture du Calice (Jesus est despouillé)
Mon Seigneur Jesus Christ, qui aves voulu estre despouillé de vos habitz et cruellement
fouetté pour mon salut, faites moy la grace de me descharger des pechés par une bonne confession,
affin de ne pas paroistre devant vos yeux despouillé des vertus chrestiennes. Amen.
A l'Offertoire (Jesus est fouetté)
Mon Seigneur Jesus Christ, qui aves voulu estre lié a la colomne [423] et deschiré a coups
de fouetz, donnes-moy la grace d'endurer patiemment les fleaux de vostre correction paternelle, et
de ne vous point affliger doresnavant par mes pechés. Amen.
Lhors qu'on couvre le Calice (Jesus est couronné)
Mon Seigneur Jesus Christ, qui aves voulu estre couronné d'espines pour moy, faites que
je sois tellement piqué par les espines de la penitence en ce monde, que je merite d'estre couronné
au Ciel. Amen.
Lhors que le prestre lave ses mains (Pilate lave ses mains)
Mon Seigneur Jesus Christ, Filz de Dieu vivant, qui estant declaré innocent par la sentence
du president Pilate, aves souffert les impostures et les reproches des Juifz, donnes moy la grace de
vivre dans l'innocence et de ne me point inquieter de mes ennemis. Amen.
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27.7 Page 267

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A l'Orate, fratres (Pilate dit aux Juifz : Ecce homo)
Mon Seigneur Jesus Christ, qui aves voulu estre bafoué pour moy en presence des Juifz,
portant les marques de leurs risees, faites que je ne ressente point le chatouillement de la vaine
gloire, et que je comparoisse au jugement sous l'enseigne de ces marques mystiques.
A la Preface (Jesus est condamné a mort)
Mon Seigneur Jesus Christ, qui aves voulu, quoy qu'innocent, estre condamné pour moy
au supplice de la croix, donnes moy la force de soustenir la sentence d'une mort cruelle pour vostre
amour, et de ne redouter pas les faux jugemens des hommes et de ne juger personne injustement.
Amen.
Au Memento pour les vivans (Jesus porte sa Croix)
Mon Seigneur Jesus Christ, qui aves porté la croix pour moy sur vos espaules, faites que
j'embrasse volontairement la croix de la mortification et que je la porte journellement pour vostre
amour. Amen.
A l'Action (Sainte Veronique essuye d'un linge la face de Nostre
Seigneur)
Mon Seigneur Jesus Christ, qui estant dans le chemin par lequel vous marchies au supplice
de la croix, aves dit aux femmes qui pleuroyent pour l'amour de vous qu'elles devoyent pleurer
pour elles mesmes, donnes moy la grace de bien pleurer mes pechés, donnes moy les larmes d'une
sainte compassion et d'un saint amour, qui me rendent aggreable a vostre sainte Majesté.
A la benediction des offrandes (Jesus est attaché en croix)
Mon Seigneur Jesus Christ, qui aves voulu estre attaché en croix [424] pour mon salut, y
attachant avec vous l'obligation de nos pechés et de la mort, percés ma chair d'une sainte crainte,
affin qu'embrassant fortement vos commandemens, je sois tous-jours attaché a vostre Croix. Amen.
A l'eslevation de l'Hostie (Jesus crucifié est eslevé)
Mon Seigneur Jesus Christ, qui aves voulu estre eslevé en croix, et exalté de la terre pour
moy, retires moy des affections terrestres, esleves mon esprit a la consideration des choses celestes.
Amen.
A l'eslevation du Calice (Le sang de Jesus Christ coule de ses playes)
Mon Seigneur Jesus Christ, qui aves fait couler de vos playes salutaires la fontaine de vos
graces, faites que vostre sacré sang me fortifie contre les mauvais desirs et me soit un remede
salutaire a tous mes pechés. Amen.
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27.8 Page 268

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Au Memento pour les Trespasses (Jesus prie pour les hommes)
Mon Seigneur Jesus Christ, qui estant attaché a la croix aves prié vostre Pere pour tous les
hommes, mesme pour vos bourreaux, donnes moy l'esprit de douceur et de patience qui me fasse
aymer mes ennemis, rendre le bien pour le mal, suivant vostre exemple et vos commandemens.
Amen.
Au Nobis quoque peccatoribus (La conversion du larron)
Mon Seigneur Jesus Christ, qui aves promis la gloire du Paradis au larron qui se repentoit
de ses pechés, regardes moy des yeux de vostre misericorde, affin qu'a l'heure de ma mort vous
disies a mon ame : Aujourd'huy tu seras avec moy en Paradis. Amen.
Au Pater (Les sept paroles de Jesus en croix)
Mon Seigneur Jesus Christ, qui estant attaché a la croix aves recommandé vostre sainte
Mere au Disciple bienaymé et le Disciple a vostre Mere, faites moy la grace de me recevoir sous
vostre protection, affin que me preservant parmi les dangers de cette vie, je sois du nombre de vos
amis. Amen.
A la division de l'Hostie (Jesus meurt en croix)
Mon Seigneur Jesus Christ, qui mourant en la croix pour mon salut aves recommandé
vostre ame au Pere eternel, faites que je meure avec vous spirituellement, affin qu'a l'heure de ma
mort je rende mon ame entre vos mains. Amen.
Quand le prestre met une particule de l'Hostie au Calice (L'ame de
Jesus descend aux enfers)
Mon Seigneur Jesus Christ, qui, apres avoir terrassé les puissances [425] du diable, estes
descendu aux enfers, et aves delivré les peres qui y estoyent detenus, faites, je vous prie, descendre
en Purgatoire la vertu de vostre sang et de vostre Passion sur les ames des fidelles trespassés, affin
qu'estant absoutes de leurs pechés, elles soyent receues dans vostre sein et jouissent de la paix
eternelle. Amen.
A l'Agnus dei (La conversion de plusieurs a la mort de Nostre Seigneur)
Mon Seigneur Jesus Christ, plusieurs ont deploré leurs pechés par la consideration de vos
souffrances : faites moy la grace, par les merites de vostre Passion douloureuse et de vostre Mort,
de concevoir une parfaite contrition de mes offenses, et que des-ormais je cesse de vous offenser.
Amen.
A la Communion (Jesus est enseveli)
Mon Seigneur Jesus Christ, qui aves voulu estre enseveli dans un nouveau monument,
donnes moy un cœur nouveau, affin qu'estant enseveli avec vous, je parvienne a la gloire de vostre
resurrection.
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27.9 Page 269

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A l'Ablution (Jesus est embaumé)
Mon Seigneur Jesus Christ, qui aves voulu mourir, estre embaumé, enveloppé d'un linge
net par Joseph et Nicodeme, donnes moy la grace de recevoir dignement vostre saint corps au
Sacrement de l'autel et dans mon ame embaumee des precieux unguens de vos vertus. Amen.
Apres la Communion (La resurrection de Jesus)
Mon Seigneur Jesus Christ, qui estes sorti victorieux et triomphant du sepulchre fermé et
cacheté, faites moy la grace que resuscitant du tombeau de mes vices, je marche dans une nouvelle
vie, affin que, lhors que vous paroistres dans vostre gloire, j'y paroisse aussi avec vous. Amen.
Au Dominus Vobiscum (Jesus apparoist a ses Disciples)
Mon Seigneur Jesus Christ, qui aves res-joui vostre chere Mere et vos Disciples
apparoissant a eux apres vostre resurrection, donnes moy cette grace, que puisque je ne puis vous
voir en cette vie mortelle, je vous contemple en l'autre en vostre gloire. Amen.
Aux dernieres collectes (Jesus converse avec ses Disciples pendant
quarante jours)
Mon Seigneur Jesus Christ, qui apres vostre resurrection aves daigné converser l'espace de
quarante jours avec vos Disciples et leur aves enseigné les misteres de la foy, resuscites dans moy
et m'affermisses dans la creance de vos divines verités. Amen. [426]
Au dernier Dominus Vobiscum (Jesus monte au Ciel)
Mon Seigneur Jesus Christ, qui estes monté au Ciel en presence de vos disciples, apres
avoir accompli le nombre de quarante jours, faites moy la grace que mon ame se degouste pour
vostre amour de toutes les choses de la terre, qu'elle aspire a l'eternité et qu'elle vous desire comme
le comble de la felicité. Amen.
A la Benediction (La descente du Saint Esprit)
Mon Seigneur Jesus Christ, qui aves donné le Saint Esprit a vos disciples perseverant
unanimement en l'orayson, espures, je vous prie, l'interieur de mon cœur, affin que le Paraclet
trouvant un sejour aggreable en mon ame, l'embellisse par ses dons, de ses graces et de sa
consolation. Amen.
Actions de graces apres avoir ouy la Sainte Messe
Mon Seigneur Jesus Christ, Fils de Dieu, mon Redempteur, je vous remercie de ce que
vous m'aves fait la grace d'avoir entendu aujourd'huy la sainte Messe. Je vous prie, par les merites
de ce divin Sacrifice, de me donner l'esprit et la force de resister tous-jours a toutes les mauvaises
tentations, affin que, sortant de ce monde, je sois digne du Paradis. Ainsy soit il.
269/332

27.10 Page 270

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B. Prière a la Sainte Vierge, attribuée a saint François de
Sales1559
Je vous salue, tres douce Vierge Marie, Mere de Dieu. Vous estes ma Mere et ma
Souveraine ; partant je vous supplie de m'accepter pour vostre filz et serviteur, parce que je ne
veux plus avoir de Mere et de Maistresse que vous. Je vous prie donq, ma bonne, gracieuse et
douce Mere, qu'il vous playse de me consoler en toutes mes angoisses et tribulations, tant
spirituelles que corporelles.
Ayes memoire et souvenance, tres douce Vierge, que vous estes [427] ma Mere et que je
suis vostre filz, que vous estes tres puissante et que je suis une pauvre creature vile et foible. Partant
je vous supplie, ma tres douce Mere, que vous me gouvernies et defendies en toutes mes voyes et
actions, car helas ! je suis un pauvre disetteux et mendiant qui ay grand besoin de vostre sainte
protection. Sus donq, ma tres sainte Vierge, ma douce Mere, preserves et delivres mon cors et mon
ame de tous maux et dangers, et, de grace, faites moy participant de vos biens et de vos vertus, et
principalement de vostre sainte humilité, excellente pureté et fervente charité.
Ne me dites pas, gracieuse Vierge, que vous ne pouves, car vostre bienaymé Filz vous a
donné toute puyssance, tant au Ciel comme en la terre. Ne me dites pas que vous ne deves, car
vous estes la commune Mere de tous les pauvres humains, et singulierement la mienne. Si vous ne
pouvies, je vous excuserois disant : Il est vray qu'elle est ma Mere et qu'elle me cherit comme son
filz, mais la pauvrette manque d'avoir et de pouvoir. Si vous n'esties ma Mere, avec rayson je
patienterais disant : Elle est bien asses riche pour m'assister, mais helas ! n'estant pas ma Mere elle
ne m'a.yme pas.
Puis donq, tres douce Vierge, que vous estes ma Mere et que vous estes puyssante,
comment vous excuseray je si vous ne me soulages et ne me prestes vostre secours et assistance ?
Voyes, ma Mere, que vous estes contrainte de m'accorder ce que je vous demande.
Soyes donq exaltee sur les Cieux et sur la terre, glorieuse Vierge et ma tres haute Mere
Marie, et pour l'honneur et la gloire de vostre Filz, acceptes moy pour vostre enfant, sans avoir
esgard a mes miseres et pechés. Delivres mon ame et mon cors de tout mal, et donnes moy toutes
vos vertus, sur tout l'humilité. Faites moy present de tous les dons, biens et graces qui playsent a
la tres sainte Trinité, Pere, Filz et Saint Esprit. Ainsy soit il. [428]
__________
1559 De plusieurs côtés on nous a interrogés au sujet de cette prière : est-elle de saint François de Sales ? Une tradition
déjà ancienne en 1726, l'attribue au saint Evêque de Genève. On la trouve dans l'Histoire de la découverte de l'image
de Notre-Dame de l'Etang, par le P. Dejoux (1re édition 1726 ; 2e édition 1853) ; dans l'Histoire de la statue
miraculeuse de Notre-Dame de Bonne Délivrance, par un prêtre du diocèse de Paris (Gaume, 1844) ; dans le Mois de
Marie, tiré des écrits de saint François de Sales, par le R. P. Huguet, etc.
Le P. Dejoux raconte que le saint Evêque se trouvant à Dijon où il avait prêché le Carême (1604), « concerta
avec » Mme de Chantal « l'établissement de la Visitation. » C'est une erreur ; on sait que jusqu'à 1607 le Saint garda
son secret, même avec sa fille spirituelle. L'auteur continue : « Afin que cette entreprise eût un heureux succès, tous
deux se rendirent dans la chapelle de Notre-Dame de l'Etang, où étant prosternés devant l'image miraculeuse, ils lui
adressèrent humblement leurs prières. On nous a même conservé heureusement la dévote oraison que l'on assure avoir
été faite en cette occasion par cet incomparable Evêque... » Il a pu la faire, sans doute ; mais fut-elle composée par
lui, ou la trouva-t-il sur une « tablette », comme le Memorare de saint Bernard à Notre-Dame de la Délivrance à Paris
? Toutes les recherches ont été infructueuses.
La prière a été souvent reproduite avec des variantes qui sont identiques pour le fond ; le texte donné ci-
dessus nous paraît plus conforme au caractère et au style de saint François de Sales : il est plus simple, plus pressant,
plus confiant, plus naïf.
Quant à la seconde prière, nous n'avons aucune preuve en faveur de son attribution à saint François de Sales,
mais nous n'avons non plus aucune preuve du contraire.
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28 Pages 271-280

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28.1 Page 271

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C. Autre prière a la Sainte Vierge, attribuée au même
_____
O bienheureuse Vierge Marie, digne Mere de Dieu et fidele Dispensatrice de toutes les
graces qu'il veut nous distribuer en cette vie, je vous supplie, par l'amour de vostre cher Filz, nostre
Sauveur Jesus Christ, de m'obtenir de vostre divin Espoux, le Saint Esprit, une lumiere celeste et
un bon conseil pour connoistre ce que je dois faire et comment je dois me conduire pour la gloire
de Dieu et l'advancement de mon salut.
J'espere, o Sainte Vierge, recevoir par vostre moyen cette faveur du Ciel, car apres Dieu, j
'ay mis en vous toute ma confiance.
_____
Note des editeurs
_____
Toutes les éditions des Œuvres de saint François de Sales, à commencer par celle in-folio
de 1637, p. 1033, donnent une pièce intitulée : Maniere devote pour celebrer avec fruict le tres-
sainct Sacrifice de la Messe. On nous permettra de l'écarter de notre Edition, comme n'ayant
aucune preuve d'authenticité ; on n'y retrouve ni les pensées du Saint, ni son style, mais un amas
de considérations qui suffoquent l'esprit, au lieu de le recueillir ; plusieurs mots y sont employés
qui ne se rencontrent pas dans ses écrits.
De nombreux déposants au Procès de Béatification du Serviteur de Dieu parlent de
différents documents de moindre étendue : tels, la Briefve Meditation sur le Symbole des Apostres,
l'Advertissement aux Confesseurs, etc. ; aucun ne mentionne la Maniere devote pour celebrer... la
Messe.
Avant 1637, elle fut publiée à la suite de l'Advertissement aux Confesseurs, dans le petit
volume imprimé à Lyon par Jean Charvet, 1620, ou 1615 ? (Voir notre tome XXIII, note (920), p.
279.) C'est de là, sans doute, que les éditeurs de 1637 l'auront tirée, sans trop examiner si elle était
vraiment du saint Evêque de Genève. Mais M. de Ville, qui donna une Approbation à l'opuscule
de Charvet le 24 août 1615, s'exprime ainsi : « Certifie avoir leu ces deux presents traictés, [429]
dont le premier (l'Advertissement) marque la rare capacité de son Autheur, le second temoigne la
ferveur et zele de la saincte Messe. » A noter qu'il ne dit pas « sa ferveur », mais « la ferveur ». Le
« Permis » de Fr. Robert Berthelot, évêque de Damas, ne se rapporte qu'au second traité ; il nous
paraît très sec, contrairement à son habitude, quand il s'agit des ouvrages de saint François de
Sales. Qu'on en juge : « Ce devot, traicté, traictant d'un haut mystere, est digne de paroistre partout
; car, comme son Aucteur est orthodoxe, aussi l'est l'œuvre. »
Pour ces raisons, qui nous semblent probantes, nous supprimons dans notre Edition
authentique l'opuscule en question. [430]
_____
271/332

28.2 Page 272

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Glossaire des locutions et des mots surannés ou pris dans
une acception inusitée aujourd'hui1560
_____
(L'astérisque désigne les mots qui ont paru dans les Glossaires des tomes précédents.)
* A pour contre (voir p. 353, lig. 13), dans (pp. 170, lig. 13 ; 326, lig. 11 ; 344, lig. 1), dans
une, pour une (p. 255. lig. 9), de (p. 13, lig. 12), de façon à (p. 72, lig. 20), en (pp. 132, lig. 6 ;
248, ll. 22, 23), envers (p. 169, lig. 20), par (pp. 78, lig. 5 ; 204, lig. 4 ; 247, lig. 23, etc.), pour
(pp. 33, ll. 15, 16 ; 115, lig. 7 ; 178, lig. 36, etc.), vers (pp. 302, lig. 36 ; 353, lig. 28).
* AAGE pour époque, temps (p. 83).
* ABBAYEMENT aboiement (p. 325).
* ABBAYER aboyer (p. 130).
ABESTON asbestos, asbeste, minéral incombustible dont on tissait des toiles (p. 107).
* ABORD pour arrivée, contact (p. 342).
*ACCOINTANCE (avoir) avoir union charnelle, en dehors du mariage (pp. 249, 255).
ACCOLER embrasser (p. 221).
* ACCOMMODÉ pour adapté, approprié (p. 26).
* ACCOMMODER, ACCOMMODER (s') pour adapter (p. 217), s'adapter (p. 359).
ACCORD pour accort, avisé ; mot emprunté à l'italien ACCORTO, adroit, rusé (p. 50).
ACCORTEMENT adroitement, d'une manière avisée (p. 53).
ACCOSTER D'UN ARBRE (s') s'appuyer au moyen d'un arbre (p. 123).
ACCOUSTRER pour arranger, disposer (p. 135).
* ACCOUSTUMÉ (avoir) avoir coutume (pp. 8, 47, 219, etc.)
* ACCOYSER apaiser (p. 270).
ACCRESTÉ droit (p. 142).
ACCROISTRE pour augmenter (pp. 342, 369).
* A CE QUE afin que, pour que (pp. 39, 346, 375).
* A CETTE CAUSE c'est pourquoi, c'est pour cela que, pour ce motif que (p. 331).
ADAMANTIS espèce d'herbe magique mentionnée par Pline, mais inconnue (p. 105).
ADMINISTRANS qui dirigent (p. 67).
* ADMIRABLE pour étonnant (p. 321).
* ADMONESTER pour avertir (p. 22).
* ADRESSER pour diriger (p. 187). [431]
ADVANCÉ pour favorisé, privilégié (p. 261).
* ADVANCER pour faire avancer (pp. 243, 253).
* ADVANTAGÉ favorisé (p. 362).
* ADVENIR arriver (pp. 17, 181, 260, etc.)
ADVENIR (ce jour la) ce jour à venir, qui viendra (p. 62).
ADVIS (il est) il semble (p. 36).
* ADVISER avertir, conseiller (p. 209).
* AFFECTION pour désir, disposition (p. 358).
* AFFECTIONNÉ pour attaché, dévoué (p. 43).
AFFECTIONNÉS (les) les âmes dévouées (p. 43).
* AFFECTIONS pour la libre expression de ses sentiments (p. 210), mouvements du cœur,
sentiments (pp. 192, 201, etc.)
AFFECTIONS (faire les) faire naître un mouvement du cœur, un sentiment (p. 201).
* AFFETERIE pour affectation (p. 48).
1560 Voir le tome XXI, note (1214), page 317.
272/332

28.3 Page 273

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AFFLUENT pour abondant (p. 37).
AFFOLER pour rendre comme fou (p. 36).
AFFRIANDER être alléché par, être friand (p. 141).
A FONS pour au fond (p. 119).
AHEURTÉ arrêté, tenace (p. 78).
AIGUEMORTE eau morte (p. 141).
* AINS bien plus (pp. 83, 266, 284, etc.), et même (p. 274), mais (pp. 45, 61, 62, etc.), mais au
contraire (pp. 12, 39, 210, etc.), mais encore (p. 166), mais plutôt (pp. 21, 84, 263, etc.), ou plutôt
(p. 266).
AIRAGNEE araignée (p. 104).
* AIS planche (pp. 38, 128).
* ALANGOURI alangui, languissant (p. 79).
* ALANGOURIR (s') se rendre languissant (p. 271).
ALASCHIZ affaiblis, sans force ; du verbe alaschir (p. 124).
* A L'ENTOUR à proximité d'elles, autour d'elles (p. 151).
* ALLENTIR ralentir, rendre plus lent (p. 230).
A LUY pour vers lui (p. 306).
* A MESME à une même (p. 223).
* A MESME QUE en même temps que (p. 221).
A MESME QU'IL A étant à même d'avoir (p. 53).
* AMIABLE douce (p. 296).
* AMIABLEMENT aimablement (p. 73).
AMORTIR pour engourdir, rendre comme mort (pp. 131, 133).
* AMUSER pour occuper, distraire (p. 258).
* AMUSER (s') pour passer son temps (p. 49), perdre le temps (pp. 216, 275, 307, etc.)
* AMUSER A pour perdre le temps avec (p. 349), s'occuper de (p. 307).
ANGARIE impôt (p. 256) ; mot médiéval tiré du latin ANGARIA, obligation d'aider aux
courses et transports du prince.
ANNELER corrouler en forme d'anneaux, faire des boucles, friser (p. 97).
* A PECHÉ sous peine de péché (p. 343).
* APERTEMENT ouvertement (p. 369).
APOSTEME apostume (p. 123). Du lat. APOSTEMA, corrompu.
* APPARTENANCES qui ont la qualité de se rattacher à (p. 68).
APPARTENANTE appartenant, qui appartient (p. 27).
* APPERT (il) il est évident (p. 264).
APPETITIVE (l') la pensée qui désire (p. 26).
* APPREHENDER pour comprendre, saisir par l'esprit (p. 16).
* APPREHENSION pour conception (p. 69), idée vive (p. 175.)
APPREHENSIVE (l') la pensée qui craint ou appréhende un péril (p. 26).
APRES pour d'après (p. 47). [432]
A QUOY pour auquel (p. 334).
ARAGNE, ARAIGNE araignée (pp. 104, 146, 154).
ARAIGNE PHALANGE araignée venimeuse ou phalange (pp. 145, 146).
* ARONDELLE hirondelle (p. 131).
* ARRESTER pour projeter, règler (p. 287).
ARRHE comme un acompte (p. 36).
ARTIFICIEL pour manuel, mécanique (p. 51).
* ASPRETÉ pour dureté (p. 373).
ASSAULT assaille, attaque brusquement (p. 121).
* ASSEURÉ pour sûr (p. 94).
* ASSEURÉ (est) pour ferme (p. 24).
ASSEURER pour affermir (p. 229), être sûr (p. 288).
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28.4 Page 274

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ASSISENT (s') s'asseyent (p. 105).
* ASSISTER pour prêter son aide, son concours (pp. 251, 254).
ASSISTER A prêter son aide pour (p. 187).
ASSOUPIR SON BRUIT calmer le bruit qu'il faisait dans le monde, diminuer sa réputation
(p. 116).
ASSOUVIR (s') se contenter (p. 199).
ASSOVIR contenter, satisfaire (pp. 73, 276).
ASTRICTIONS contraintes, obligations (p. 61).
* ATTENDRIR pour amollir (p. 341).
* ATTREMPER modérer, tempérer (pp. 228, 231).
* AU pour d (p. 227, lig. 20), dans le (pp. 20, lig. 4 ; 86, lig. 1 ; 246, lig. 1, etc.), en (p. 341, lig.
6), le (p. 274, lig. 13), pour le (p. 171, lig. 17), vers le (p. 309, lig. 32).
AU CONTRAIRE pour le contraire (p. 286).
* AUCUN, AUCUNE pour quelque (pp. 179, 181, 199, etc.)
AUCUNE (d') quelqu'une (p. 350).
* AUCUNEMENT pour de quelque manière, en quelque façon (pp. 189, 348), en aucune façon
(p. 274).
* AUCUNES FOIS quelquefois (p. 317).
AUCUNS pour quelques-uns (pp. 126, 127, 136, etc.)
* AU DEMEURANT au reste (pp. 210, 222).
AU LIEU pour à la place (p. 369).
AUPARAVANT QUE DE avant de (p. 314).
AU PLUS PRES QUE L'ON PEUT le plus exactement possible (p. 245).
* AU PRIS, AU PRIX pour en comparaison (pp. 174, 181, 229).
* AUQUEL pour dans lequel, où (pp. 27, 353, 369), en qui (p. 317).
* AUSSI pour non plus (pp. 219, 293).
AUTANT PESANT QUE FEROIT UNE POIRE autant en poids que le feroit une poire (p.
342).
AUTRE (qu') qu'une autre (p. 81).
* AUTRES pour d'autres (p. 146).
* AUTRES FOIS pour d'autres fois (p. 221).
* AUX pour après les (p. 17, lig. 34), avec les (p. 30, lig. 25), dans les (pp. 198, lig. 25 ; 230,
lig. 36 ; 288, lig. 4, etc.), par les (p. 78, lig. 7).
AUX YEUX DE DIEU suivant, selon le regard observateur, le jugement de Dieu (p. 273).
* AVANCER pour approcher (p. 357).
AVANT pour plus profondément (p. 163).
* AVANT QUE DE avant de (pp. 147, 215, etc.)
AVEC (qu') pour sinon avec (p. 58).
* AVIDEMENT avec empressement (p. 215).
* AVISER (s') croire (p. 55).
AYSANCE pour commodité, facilité (p. 372).
BAIGNER (se) pour être satisfait pleinement (p. 127).
* BAILLER donner (pp. 38, 311, 321).
* BANDER pour appliquer fortement, tendre (p. 289). [433]
* BASSE pour petite (p. 99).
* BASSEMENT bas, à voix basse (p. 320), d'une manière grossière, vulgaire (p. 366).
BASS'ESTOFFE (de) d'un talent inférieur (p. 116).
BATTELEUR charlatan (p. 106).
* BEE béante (p. 121).
BELLEMENT doucement (p. 181).
* BELLEMENT (tout) tout doucement (pp. 197, 209, 226, 227, etc.), tout simplement (p. 125).
274/332

28.5 Page 275

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* BENEFICE pour bienfait (pp. 31, 65, 171, etc.)
* BIENFACTEUR, BIEN FACTEUR bienfaiteur (pp. 70, 71, 173, etc.)
* BIGEARRERIE bizarrerie (p. 355).
BLANDISSANT caressant, disant des paroles doucereuses (p. 73).
BONNE FOY (a la) avec une confiance assurée (p. 365).
* BONNEMENT facilement (pp. 79, 247, etc.)
BONNEMENT SE RESOUDRE DE L'ENVIRON facilement dénouer la difficulté au sujet du
nombre approximatif (p. 245).
BOUGER (se) bouger, se remuer (p. 128).
BOURGUESPINE arbuste à baies, nerprun (p. 142).
* CAREMPRENANT les trois jours qui précèdent le mercredi des Cendres (p. 116).
* CARESSER pour accueillir, traiter avec bienveillance (pp. 168, 169, 300).
* CARESSES pour accueil bienveillant (p. 190).
* CARQUAN collier de femme (p. 18).
CATABLEPA (serpent) le texte de Pline porte catoblepas, mot venu du grec, mais inconnu. Il
y a peut-être confusion avec le basilic (p. 131).
* CE pour ceci, cela.
* CEANS ici (pp. 306, 334, 359).
* CELLE du lat. CELLA, cellule (p. 323).
CELLE ICY celle-ci (p. 318).
CE NONOBSTANT malgré cela, non obstant cela (p. 34).
CESSE L'ON (ne) l'on ne cesse (p. 106).
* CESTE CI celle-ci (p. 24).
C'EST POINT ce n'est point (p. 218).
* CESTUY LA celui-là (p. 166).
* CHAMS (aux) à la campagne (p. 274).
* CHANGE pour changements (p. 43).
CHAPPONS nom donné à des boutures de vignes (p. 135).
* CHARGE (a la) à cette condition (p. 89).
CHARION chariot (p. 125).
CHASTAGNE oursin (p. 120).
* CHEREMENT pour avec tendresse (p. 357).
CI BAS ci-dessous (p. 175).
COCOMBRE ancienne forme de concombre (p. 139).
* COGITATION du lat. COGITATIO, pensée (p. 254).
* COL cou.
* COLLOQUE entretien (pp. 15, 30).
* COLLOQUER du lat. COLLOCARE, placer (pp. 11, 52).
COLOMBEAU petit pigeon (p. 183).
COMBIEN QUE LA TENTATION NE CESSEROIT POINT bien que la tentation pourrait ne
pas cesser (p. 216).
* COMME pour comment (pp. 29, 44, 135, etc.), de la manière que (p. 81), de la même manière
que (p. 18), que (pp. 52, 73, 225, etc.)
COMME A EXERCER EN VOSTRE ENDROIT comme s'ils devaient s'exercer, être mis en
jeu en vous (p. 217).
* COMMODITÉ pour facilité (pp. 219, 226).
* COMMODITÉS pour aises (p. 373), avantages (p. 256), bien-être, facilités de vivre (p. 286),
facilités, occasions d'agir (p. 215), ressources pécuniaires (p. 344).
COMMOSIS sorte de résine (p. 141). [434]
* COMMUNIER (se) pour communier (pp. 192, 262).
COMPETENCE pour compétition (p. 261).
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28.6 Page 276

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* COMPOSITION pour accord, arrangement (p. 54).
CONCUSSION gain illicite d'un fonctionnaire public, perception frauduleuse de taxes qui ne
sont pas dues (p. 256).
* CONDUITE, CONDUITTE pour direction, manière de gouverner (pp. 169, 277, 269, 272).
* CONFERER pour comparer (p. 37o).
* CONFORTER pour affermir, réconforter (pp. 16, 265, 364).
CONFRONTER pour être attenant à, en bordure à (p. 126).
* CONJOINT pour adhérent (p. 21).
* CONSIDERABLE pour digne de considération (pp. 230, 263).
* CONSIDERATION (pour nostre) si nous nous considérons (p. 62).
* CONSIDERER pour se considérer (p. 30).
* CONSOMMER (se) pour se consumer (p. 29).
* CONTE pour compte (pp. 126, 213, 325, etc.)
* CONTEMPLATION (en) pour en considération (p. 65).
CONTEMPTIBLEMENT par mépris (p. 252).
* CONTENTER (se) pour être content, satisfait (pp. 150, 348).
* CONTENTIEUX pour porté aux contradictions (p. 189).
* CONTENTION pour contestation (p. 258), effort (p. 232).
* CONTER pour compter (p. 123).
* CONTOURNER (se) pour se tourner (p. 118).
CONTRARIÉTÉ EST PARFAITE (si la) si cette opposition est absolue (p. 262).
* CONTRECHANGE compensation, échange en retour (p. 70).
* CONTRECHANGER échanger un bienfait par autre chose, le compenser par (p. 70).
* CONTREGARDÉ préservé, sauvegardé (pp. 105, 137).
* CONTRE MONT en remontant la pente (p. 166).
* CONTRE ROLLER contrôler (p. 253).
* CONVERSATIONS pour compagnies, société (pp. 169, 238).
* CORPOREL pour physique (p. 51).
CORRESPONDRE (y) s'y conformer, y répondre (p. 209).
CORRIVAUX pluriel de corrival (p. 49).
COTULE PUANTE plante, genre de composées antémidées (p. 133).
* COUCHÉ pour exposé par écrit (pp. 175, 222).
COUCU coucou (pp. 126, 127).
* COULPE du lat. CULPA, faute (p. 72).
* COUPEAU cime (p. 27).
* COURAGE pour cœur (pp. 73, 336).
COURIR LA BAGUE jeu où des cavaliers enlèvent avec le doigt une bague à la course (p.
242).
COURRE ancien infinitif de courir (p. 242).
COUVERTE (donner la) berner, faire sauter en l'air quelqu'un dans une couverture (p. 254).
COUVRIR (se) pour cacher ses fautes (p. 321).
* COYE coite (p. 272).
CRACHÉ couvert de crachats (p. 6).
* CREANCE Credo, Symbole (p. 252), croyance (p. 315).
CREANT pour croyant (p. 18).
* CREDIT pour confiance que quelqu'un inspire (p. 52).
CRITIQUER pour examiner (p. 365).
* CROISTRE pour accroître, augmenter (p. 313).
* CURIEUSE pour pleine de recherche (p. 274), pleine de recherches intéressées (p. 47).
* CURIEUSEMENT pour d'une manière trop recherchée (p. 260).
CURIEUX (qui soit) qui excite la curiosité, l'intérêt (p. 323). [435]
* CY APRES pour à l'avenir, désormais (pp. 172, 199).
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28.7 Page 277

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CYTRE cithare (p. 140).
D' (ours) sens partitif indéterminé pour des (p. 128).
DACE tribut (p. 256). Du lat. DATIO, action de donner.
DANS SOY pour en elle-même (p. 99).
* DE pour à (pp. 187, lig. 6 ; 320, lig. 9 ; 340, lig. 15), au point de vue, pour ce qui est de (p.
82, lig. 32), au sujet de (pp. 270, lig. 36 ; 271, lig. 21), du (p. 332, lig. 31), par (p. 166, lig. 32).
DEBTEUR débiteur (pp. 62, 63).
DE CELA pour cela (p. 181).
* DEDANS pour dans (pp. 19, 66, 70, etc.)
DEDANS SOY en soi-même (p. 37), en soi (p. 103).
DE DEDANS (Seurs) qui sont à l'intérieur du monastère (p. 342).
DE DEVANT pour de leur présence (p. 164).
* DEDUIRE énoncer, exposer (p. 216).
* DEFAILLANCE pour manque (p. 225).
DEFAILLIR EN faire défaut en, manquer en (p. 253).
* DEFAUT pour faute (p. 187).
DEFAUT (le) à ce qui manque (p. 38).
* DEFAUT (luy) lui manque (p. 73).
DEFFAIT en effet (p. 70).
DE GRACE par faveur (p. 63).
* DEITÉ du lat. DEITAS, divinité (p. 66).
DELIBERATION pour décision, réflexion (p. 31).
DE NE POINT SORTIR pour en ne sortant pas (p. 323).
* DEPARTIR pour accorder (p. 219).
DEPARTIT (nous le) nous le donne comme part (p. 70).
DE PROPOS DE faite de sujets de conversation sur (p. 217).
* DEPUTÉ pour commis (p. 269).
* DEQUOY pour de ce que (p. 53).
* DES pour par les (p. 196).
DES AUTRES pour d'autres (p. 186).
DESCOUVERTE action d'étaler, de montrer (p. 362).
* DESENGAGER dégager, délivrer de ses entraves (p. 172).
* DESPARTIR (se) pour se séparer (p. 369).
DESPITER (quelqu'un) mépriser quelqu'un (p. 249).
* DESPLAYSANT désagréable (p. 32).
* DESPLAYSIR pour chagrin, douleur, impression pénible (pp. 183, 184, 197).
* DESPLOYER pour manifester, mettre à nu (p. 232).
* DESPRENDRE (se) se dégager (p. 16).
* DESSOUS pour sous, sous la face inférieure de (pp. 27, 36, 37, etc.)
* DESSUS pour sur (pp. 35, 196).
* DESTOURBIER empêchement, obstacle, trouble (p. 81).
DESTOURNER pour écarter (p. 76).
DESVOYÉ écarté, sorti de la voie (p. 235).
DETESTATION pour aversion (p. 216).
* DEVANT pour avant (pp. 26, 85, 167, etc.), dès avant (pp. 209, 215), en avant (p. 307).
DEVANT (en) en avant (p. 96).
DEVANT A devant (p. 54).
* DEVERS vers (pp. 67, 349).
DEVINER découvrir ce qui est caché dans le présent, le passé, l'avenir (p. 251).
* DEVIS pour discours (pp. 15, 30).
* DEVOT pour pieux (p. 217).
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28.8 Page 278

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* DEVOTIEUSE dévote, pleine de dévotion (p. 203).
* DEXTRE droite (pp. 26, 92, 192).
* DIE dise (pp. 62, 72, 179, etc.)
* DISCOURIR pour parler (p. 32), raisonner (p. 270).
* DISCOURS pour raisonnement (pp. 47, 52, 285, etc.)
* DISCRET circonspect (p. 72). [436]
* DISCRETION pour discernement (p. 31).
* DISJOINT pour séparé (p. 367).
* DISTILLER pour couler goutte à goutte (p. 181).
* DISTRAIT pour détourné (p. 82).
* DIVERTIR du lat. DIVERTERE, détourner (pp. 50, 79, 83, etc.)
DIVERTIR (se) se détourner, se distraire (pp. 310, 312, 315, etc.)
DIVERTIR A se détourner pour, jusqu'à (pp. 270, 273).
* DIVERTISSEMENT action de se détourner (pp. 297, 320).
* DONT pour à la suite de quoi (pp. 102, 116), au sujet de laquelle (p. 65), au sujet de quoi
(pp. 85, 88), au sujet desquels, de là (pp. 14, 16, 17), c'est pourquoi, de là (pp. 18, 19, 23, etc.),
d'où, (pp. 27, 181), d'où il arrive que (p. 196), d'où il résulte que (p. 231).
DOUILLET pour délicat (p. 91).
* DRESSER pour diriger (p. 368), lever, tenir droit (p. 219).
DRESSER A diriger vers (p. 217).
* DU pour au point de vue de, pour le (p. 365), dès le (p. 35, lig. 25), pour le (p. 365, lig. 28).
* DUIT dressé, instruit pour (p. 24).
DU TEMS QUE dans le temps où, quand (p. 353).
* DU TOUT entièrement (pp. 39, 191, 204, etc.), tout à fait (pp. 24, 106, 114, etc.)
ECHENEIS échénéide, rémora (p. 120).
EMATISTE améthyste (p. 131).
EMBARRASSEUR qui cause de la gêne, de l'inquiétude (p. 230).
EMBESOIGNER DE LEUR PROUFFIT (sans s') sans s'embarrasser de leur progrès, sans
s'en donner du souci (p. 270).
* EMMI au milieu de (pp. 175, 181, etc.), dans (p. 289), dans les (p. 48).
EMOUVOIR L'AFFECTION faire naître un mouvement du cœur, un sentiment (p. 201).
* EMPESCHÉ pour embarrassé (p. 124).
EMPESCHE DE SES FONCTIONS qui embarrasse, entrave ses fonctions (p. 342).
* EMPESCHER (s') pour s'embarrasser (p. 212).
EMPESCHENT TANT PLUS (s') sont entravés d'autant plus (p. 226).
EMPETRÉ pour embarrassé comme par des entraves (p. 24).
EMPRESSER A LA QUESTE (s') s'empresser en la recherche (p. 225).
* EN pour à (pp. 169, lig. 13 ; 215, lig. 8 ; 218, lig. 6, etc.), avec l', dans l' (p. 266, lig. 11),
dans le (p. 106, lig. 16), dans les (p. 87, lig. 4), sur (p. 31, lig. 8).
* EX APRES ensuite (p. 374).
ENCLOSANT (en) en y comprenant, en y renfermant (p. 358).
ENCONTRE (à l') contre (p. 183).
ENCOR BIEN QUE alors même que (p. 59), bien que, quoique (p. 248).
ENCORES QUE, ENCOR QUE bien que, étant donné que, quoique (pp. 32, 248, 249, etc.)
ENCOR QU'IL EST bien qu'il soit, quoiqu'il soit (p. 213).
ENDORMISSEMENT nom inusité, formé sur endormir (p. 277).
EN FAÇON DE comme des, en manière de (p. 25).
* ENFANÇON petit enfant (p. 373).
ENGROSSIR (s') devenir grosse (p. 127).
ENIVRER (d') de s'enivrer (p. 131).
ENLACER pour prendre comme dans un filet (pp. 81, 82).
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28.9 Page 279

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EN L'ENDROIT DE VOUS envers vous, en votre endroit (p. 217).
* EN LIEU pour au lieu (pp. 84, 104, 146, etc.)
* ENOMBRER couvrir de son ombre (p. 221).
EN SA GARDE sous sa garde, sa protection (p. 368).
* ENSEMBLEMENT ensemble (p. 249).
* ENSUIT (s') arrive par suite, [437] en conséquence (p. 25), suit, vient ensuite (pp. 72, 258).
ENSUIT (s'en) de là s'ensuit (p. 60), en résulte (p. 263).
EN SUITE pour à la suite de cela, en conséquence (p. 85).
ENSUIVY (ne sera pas) n'aura pas eu l'effet voulu (p. 249).
* ENTANT QUE autant, dans la mesure que (pp. 65, 78, 261), dans la mesure où (pp. 189,
252), d'autant que (p. 79), parce que (p. 63).
ENTÉ greffé (p. 63).
* ENTENDRE A s'adonner à (p. 16).
ENTENDRE QU'A (n') ne penser qu'à, ne porter son attention qu'à (p. 103).
EN TERRE pour sur la terre (pp. 200, 212).
* ENTRE pour dans, parmi (p. 76).
ENTREFAIRE (s') se faire réciproquement (p. 123).
* ENTREJETTER pour mêler (p. 30).
* ENTREPRINSE entreprise (p. 233).
ENTREREGARDER se regarder réciproquement (p. 67).
ENTRERENDRE (s') se rendre réciproquement (p. 256).
* ENTRETENIR (nous) pour nous tenir ensemble, nous tenir unis (p. 223).
ENTRETENIR SUR LES (vous) pour converser avec vous-même, vous occuper des (p. 236).
* ENVERS pour à (p. 221).
* EQUIPPAGE pour état (p. 6).
ESCACHER comprimer, fouler (p. 123).
ESCHARAVEAU nom vieilli d'écharbot ou escarbot, mot tiré de SCARABÆUS, scarabée,
bousier (p. 145).
* ESCIENT (a nostre, a son) à notre connaissance (p. 249), en connaissance de cause,
sciemment (p. 248), exprès (p. 253).
ESCLAIRE nom vulgaire de la chélidoine (p. 131).
ESCLAIRES pour rendez visible (p. 176).
* ESLANCEMENT pour élan (pp. 21, 43, 217, etc.)
* ESLECTION pour choix (p. 348).
ESPARSEMENT d'une manière éparse (p. 177).
ESPÉS ancienne forme d'épais, du lat. SPISSUM ; ici, nombreux (p. 124).
* ESPLUYER (s') se répandre en pluie (p. 177).
* ESPRAINDRE presser (p. 135).
ESQUELZ dans lesquels (p. 185).
* ESSAY pour épreuve (p. 348).
* ESSAYER (s') essayer, s'efforcer (p. 281).
* ESTABLERIE auberge (p. 373).
EST CE PAS n'est ce pas, avec la négation sous entendue (p. 177).
EST D'HONNORABLE (ce qui) ce qu'il y a en fait d'honneur (p. 368).
ESTOURDI pour engourdi (p. 105).
ESTRAPADE châtiment par lequel on élevait en l'air un criminel au moyen d'une corde, pour
le laisser ensuite retomber brusquement de tout son poids (p. 181).
ESTRESSIT CONTRE BAS (s') devient étroit, s'étrécit en bas (p. 119).
* ET SI et ainsi (p. 274), et aussi (p. 71).
ET SI ME SEMBLE et ainsi il me semble (p. 291).
* EXALATION exhalaison (p. 142).
* EXECUTION pour action (p. 31).
279/332

28.10 Page 280

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* EXQUISEMENT d'une manière recherchée (p. 114).
* EXTENUER pour atténuer, rabaisser (p. 34).
* EXTERNE pour extérieur (p. 38).
FAÇONS pour manières (p. 320).
* FAIRE pour accorder (p. 217), entretenir (p. 335), rendre (pp. 170, 252, 336).
FAIRE DES PERSUASIONS essayer de persuader (p. 251). [438]
FAIRE PAS DES ATTENTIONS SUPERFLUES, S'ENQUERANT DE (ne) ne pas porter sa
pensée sur des choses superflues, cherchant à connaître (p. 282).
FAIRE PROFESSION pour avoir l'habitude de déclarer hautement que (p. 253).
FAITZ A LA MODE D'HUISTRES faits, pour ainsi dire, à la manière des huîtres, ont la forme
des huîtres (p. 127).
FANS orthographe du XVIe siècle, pour faons, les petits d'un animal (p. 124).
* FANTASIE (a sa) selon son imagination (p. 114).
* FASCHERIE contrariété, ennui, peine (p. 367).
FAU hêtre (p. 133).
FAUT manque, défaille (p. 111).
* FERMEMENT pour constamment (p. 326).
FESTOYER fêter (p. 221).
FEUGERE fougère, anc. français feugière (p. 133).
FEUILLER (au) nom verbal de feuiller ; quand les arbres se couvrent de feuilles (p. 137).
* FIANCE confiance (p. 368).
* FICHÉ, FICHER enfoncé, fixé (pp. 100, 176, 180, etc.), enfoncer, fixer (pp. 176, 197).
FIGURE DEQUOY (en) en comparaison de quoi (p. 214).
FIGURER pour représenter (p. 99).
* FIN BOUT (au) au dernier bout, tout au bout (p. 375).
FIN COMMENCEMENT (au) tout à fait au commencement (p. 201).
FINEMENT pour adroitement, subtilement (p. 50).
FIN FONS dans la profondeur extrême (p. 66).
FLAMBE autre forme de flamme, feu clair (p. 137), nom de l'iris des jardins ou glaïeul (p.
162).
FLUER couler (p. 45).
* FOL fou (pp. 236, 254).
FONDENT (se) pour se dirigent d'une facon continue, se reposent sur (p. 231).
FONT LEUR CHEMIN DROIT (ilz) ils vont leur chemin tout droit (p. 307).
* FORCE (a) beaucoup de, de nombreux (pp. 193, 237).
FORCENERIE (c'est) c'est une folie, c'est être hors de ses sens (p. 80).
* FORCER pour faire céder, s'opposer résolument à (p. 230).
FORMÉ (coadjuteur) qui a fait ses derniers vœux (p. 60).
* FORTUNE chance, risque (p. 275).
FORTUNE DES chance, risque de rencontrer des (p. 116).
FOUDRE (du, le) aujourd'hui féminin ; de la foudre (pp. 133, 153).
FRAIS pour présence, trace fraîche (p. 147).
FRONCE pour pli, ride (p. 322).
* GARDER pour préserver (p. 131).
* GAUCHIR se détourner pour éviter un coup (p. 249).
GAUSSERIE moquerie (p. 250).
GLAY glaïeul (p. 162).
* GLOTONNIE gloutonnerie (p. 260).
* GOUST pour saveur, sensation agréable (p. 221).
* GRAND pour gros (p. 309).
280/332

29 Pages 281-290

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29.1 Page 281

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GREFFE (le) aujourd'hui la greffe (p. 161).
* GROSSIERE formulée en gros, imparfaite (p. 233).
GUIDE (une) est aujourd'hui masculin (p. 54).
* HABILITÉ aptitude, habileté (p. 46).
* HANAP grande coupe à boire (p. 34).
HARIER harceler, tourmenter (p. 254).
HASLE exhalaison chaude (p. 124). [439]
HAUT élevé, grand (pp. 99, 288).
HELENE probablement le feu Saint Elme (p. 151).
* HONNESTE pour bienséant (p. 83), convenable (p. 177).
HONNESTE (ce qui est) ce qui est conforme aux devoirs dont il est question (p. 82).
* HONNESTEMENT pour convenablement (p. 341).
HONNESTE SUJET cause, motif convenable (p. 209).
* HONNESTETÉ pour convenance (p. 82, 325), vertu (p. 76).
* HORS pour dehors (p. 6).
* HUMEUR, HUMEURS caractère (p. 199), caractère, goûts (p. 358).
* HUYS porte extérieure (p. 18), porte (pp. 29, 38).
IL EST BIEN EMPLOYÉ c'est bien fait, il est bien naturel (p. 316).
* IMBECILLE pour faible (p. 332).
* IMBECILLITÉ pour faiblesse (p. 66, 326).
* IMPERTINENCE pour chose déplacée, qui ne convient pas (p. 314).
* IMPERTINENTE pour déplacée, hors de propos (p. 328).
* IMPETRER obtenir (p. 231), obtenir par prières (p. 318).
* IMPROUVEÜE (a l') à l'improviste (p. 247).
INADVERTANCE ne pas tourner son esprit vers (p. 261).
* INCOMMODITÉ pour difficulté, gêne (p. 186), préjudice (p. 257).
* INCONSIDERABLE qui n'est pas digne d'attention (p. 282).
INDIE Inde (p. 102), forme du XVe siècle, tirée du grec.
INDISCRETTEMENT pour sans discernement (p. 76).
* INFAMER avilir, flétrir (p. 260).
INGREDIENT pour élément qui entre (p. 84).
INQUIETE pour inquiet (p. 321).
INSIGNEMENT d'une façon remarquable (p. 142).
INSPIRER DEVERS respirer en se tournant vers (p. 67).
* INTERESSÉ pour attaché à des questions d'intérêt personnel (p. 97).
INTERNE pour intérieur (p. 95).
* IRE du lat. IRA, colère, courroux (pp. 84, 253, 254, etc.)
* JA déjà (p. 6).
JA NE VOUS PLAYSE puisse-t-il ne pas vous plaire (p. 184).
* JOINT QUE ajoutez que, joignez à cela que (pp. 78, 146).
* LAIRRAY laisserai (pp. 23, 202).
* LAMENTER pour se plaindre fortement (p. 350).
LANGOUREUX pour languissant, plein d'abattement (p. 179).
* LA OU pour alors que, tandis que (pp. 60, 186).
* LES pour pendant les (p. 252, lig. 30).
LEUR EST ADVIS il leur paraît (p. 171).
* LEVER pour élever (p. 315), relever (pp. 343, 357).
* LHORS pour alors (pp. 6, 20, 23, etc.)
281/332

29.2 Page 282

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* LIBREMENT pour avec plus de liberté (p. 359).
LIEPARD forme du XVe siècle, pour léopard (p. 124).
LOGE pour cabane (p. 18).
* LOISIBLEMENT bien (p. 253).
LONGER pour loger (p. 140).
LOTE lotus (p. 138).
LOTTE cf. le patois savoyard : LOTTA, hotte (p. 142).
* LOURDISE grosse maladresse (p. 319).
* LOYSIBLE pour permis (pp. 182, 253, 354).
* LUITTE du lat. LUCTA, combat, lutte (p. 147).
MACERÉ pour mortifié (p. 132). [440]
MAINTENEUR soutien (p. 68).
MAISTRISER exercer sa maîtrise, son autorité (p. 171).
MANDUCATION action de manger, quand il s'agit d'un acte religieux (p. 62).
* MANQUEMENS pour privation (pp. 368, 373).
MANTICHORE on qualifie le mantichoras de Pline d'animal fabuleux, car on n'a pu l'identifier
(p. 122).
* MARQUER pour indiquer (p. 198).
* MARRI, MARRY attristé, fâché (pp. 128, 303, 307, etc.)
MAUDISSONS anc. français maudiçons, paroles de malédiction (p. 110).
* MEMOIRE pour souvenir (p. 272).
* MERCY pour miséricorde, pitié (p. 183).
MERITOIREMENT de façon à être digne de récompense, d'une manière méritoire (p. 13).
* MESMEMENT même (pp. 83, 203, 222, etc.)
MESPRENDRE pour se méprendre (p. 57).
MESSEANCE inconvenance (p. 251).
MESSEANTE inconvenante (p. 253).
* MESSEL missel (p. 192).
* MESTIER (faire) avoir l'habitude, prendre pour habitude (p. 253).
METTRAY MA VIE POUR LA TIENNE (je) j'abandonnerai ma vie en faveur de la tienne (p.
315).
MIEUX FAISANTES (les) celles qui font mieux (p. 326).
MINAIS minyas (p. 101).
MITHIDRAT mithridate, sorte de drogue (p. 104).
MODE DE (a, en) à la manière de, en forme de, comme des (pp. 142, 143, 146).
* MOL mou (p. 78).
MONSTRANT DE faisant montre de (p. 125).
* MOUCHON moucheron ou petite mouche (p. 146).
* MOUVOIR pour émouvoir (pp. 275, 328).
MOYENNANT QUE à la condition que, pourvu que (p. 333).
MUFFLE (la) le mufle (p. 124).
MUGUETTER courtiser, faire le galant, le muguet, le jeune homme élégant qui se parfume
d'essence de muguet (pp. 251, 255).
MULETAILLE famille des mulets (p. 139).
MUNITION pour provision (p. 141).
* MURMURATION mécontentement, murmure (pp. 77, 261).
NAPEL sorte d'aconit (p. 104).
* NAVRÉ, NAVRER blessé, blesser (pp. 27, 30).
* NE pour et (p. 112) ; forme ancienne de la conjonction ni (p. 105).
*NEANT pour rien, négatif (p. 147).
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29.3 Page 283

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* NECESSITÉ pour besoin (p. 342).
* NECESSITÉS (ses) ce dont on a besoin (p. 342).
NE REGARDER POINT AUX ne faire point attention aux (pp. 298, 299).
NERIUM nérion, genre de plante de la famille des apocynées (p. 138).
* NI MOINS moins encore (p. 357).
* NOMPLUS pour pas plus (p. 37).
* NONOBSTANT malgré (p. 287).
* NOURRIR pour entretenir (pp. 48, 3o1, 311, etc.)
* NOYSE dispute, querelle (pp. 257, 260).
* NUYSANCE dommage (p. 263), préjudice (pp. 247, 264, 281).
* OBEDIENCE du lat. OBEDIENTIA, obéissance (p. 190).
* OBLIGER A pour tenue de (p. 287).
OFFENCÉ DE SON CORPS offensé Dieu au sujet de son corps, avec son corps (p. 246). [441]
OFFENSÉ DE LUY blessé par lui (p. 121).
* OFFICE pour emploi (p. 54).
OLEEUX du lat. OLEOSUS, huileux (p. 161).
OMBRAGER pour cacher, voiler (p. 321).
* ONQUES jamais (pp. 83, 139, 177).
OPPOSITE une chose qui est opposée à une autre (p. 87).
* ORDONNÉ pour préposé (p. 68).
* ORDRE synonyme de degré (p. 30).
* ORES tantôt (p. 176).
ORIGINAIRE qui touche notre origine (p. 68).
* OR SUS parole d'encouragement, courage ! (pp. 237, 303, 321). Cf. l'ital. ORSÙ.
* OU pour là où (p. 43), quand (p. 357), tandis que (pp. 13, 45, 233).
* OUTRE pour au-delà de, au-dessus de (p. 76).
OUTRE CE outre cela (p. 22).
* OUTRECUIDÉ présomptueux, qui croit trop en lui (p. 150).
* OUTRECUYDANCE présomption (p. 213).
OUY BIEN mais plutôt (p. 333).
* OUY DA oui vraiment (p. 50).
* OUYES entendez (p. 74).
* OY, OYANT, OYENT, OYONS, OYT écoute (p. 280), entendant (pp. 262, 320, 354),
entendent (p. 253), écoutons (p. 274), il entend (p. 262).
PAISSANS troupeaux paissant (p. 18).
PAISTRE (se) se nourrir, se repaître (p. 127).
PANTELER s'agiter convulsivement (p. 177).
* PAR pour par suite d'une habitude (p. 167).
* PARACHEVER achever complètement (p. 310).
* PAR AINSY ainsi, c'est ainsi que (p. 68).
* PAR APRES après, en suite de (p. 187), ensuite (pp. 114, 134, 141, 143, 146, etc.)
* PAR CE pour pour cela, pour ce motif (p. 34).
* PAR CI APRES à l'avenir, désormais (p. 183).
PAR EFFECT effectivement (p. 183).
* PAREMENT ce qui sert à parer (p. 89).
* PARENTAGE parenté (p. 293).
PARER (se) se garantir, se protéger (p. 228).
PARFAIRE achever (p. 170).
PARFAIRE (se) se perfectionner (p. 230).
* PARMI pour au cours de, au milieu de, dans (pp. 43, 99, 325), entre (p. 128), pendant (p.
283/332

29.4 Page 284

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201).
PARON oiseau appelé aussi verdon (p. 126).
* PARTIAL préféré (p. 312).
PARTICULARISER pour donner des détails (p. 209).
PARTIE (d'une) pour d'un côté (p. 107).
PASSANT (les) pour les faisant passer (p. 234).
PASSANT PAR LE MILIEU (vous) vous faisant passer au milieu (p. 214).
* PASSER pour dépasser, passer à côté (p. 226), faisant passer (p. 234).
PASSER A SI PEU (se) s'accommoder de si peu, se contenter de si peu (p. 342).
PATENOSTRE Pater noster, Notre Père (p. 252).
PATRON (a) à la ressemblance (p. 117).
* PENDU pour suspendu (pp. 26, 167).
* PENNAGE plumage des oiseaux de proie en général (p. 126), plumage, plumes (p. 137),
plumes des ailes (p. 139).
PENSER (se) se croire (p. 230).
* PERTUIS ouverture, trou (p. 29).
PESAMMENT comme si cela était à charge, lourdement (p. 324).
PESANTEUR pour accablement, lourdeur de l'esprit (p. 316). [442]
PETENE patene (p. 219).
* PETIT (un) pour un peu (pp. 176, 180, 209).
PETIT COMPAGNON homme qui fait petite figure parmi les autres (p. 52).
PETIT DE RECOLLECTION (un) un peu de recueillement (p. 193).
PHALANGE araignée venimeuse ou palange, d'après Godefroy (p. 104).
* PIECE pour partie (p. 211).
PIGNONS graines de la pomme de pin prises en décoction (p. 106).
PIQUÉ aigri, tourné comme le vin (p. 297).
PIS pour pire (p. 30).
PLANE forme dialectale de platane (p. 130).
PLANTEMENT action de fixer, de planter (pp. 181, 196).
* PLAYSANT pour attrayant (p. 38).
PLEUR larmes (p. 313).
PLOMB (a) directement, perpendiculairement (p. 153).
* PLUS pour davantage (pp. 184, 231).
PLUS FORT pour davantage (p. 85).
POINTILLE chicane, pointillerie (p. 213).
POINTURE piqûre (p. 29).
POLEMONIA polemoine bleue ou valériane grecque (p. 137).
* POLICE pour gouvernement (p. 61).
POLIPODE (herbe) sorte de petite fougère aux multiples racines (p. 130).
POLY au poil luisant, lustré, (p. 127).
PORTANT (en les) en les poussant (p. 340).
PORTOYENT DEVANT LEURS YEUX (se) allaient, marchaient droit devant eux (p. 95).
POSSIBLEMENT d'une manière possible (p. 13).
* POSTE (a sa) à sa convenance, à sa guise (p. 369).
* POULET pour billet d'amour, billet doux plié en ailes d'oiseau (p. 255).
* POUR pour par (p. 252).
* POUR CE, POURCE pour cela (pp. 20, 32, 102).
* POUR CE QUE parce que (p. 117, 226).
* POURMENER promener (p. 328).
POURPRE (du) du manteau de pourpre (p. 6).
POURPRE DE SON SANG (au) au prix de son sang rouge (p. 30).
* POURPRINE purpurine (p. 26).
284/332

29.5 Page 285

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* POUR QUOY pour quelle raison, pour quel motif (p. 172).
POURTANT pour tout cela (p. 63).
POUSSER DE (le) le faire sortir de (p. 305).
PRESUPPOSER supposer avant tout (p. 174).
* PRETENTION, PRETENTION action de prétendre à, but où tendent les désirs (pp. 219,
321), affirmation de la possession (p. 367), désirs avoués, ouvertement exprimés (pp. 286, 287,
289).
PREVALOIR pour tirer avantage (p. 136).
PRATTIQUE (la) pour le moment de les pratiquer, de passer à l'action (p. 315).
PREFIGÉ A déterminé d'avance pour, fixé pour (p. 201).
PRENDRE A (se) pour se montrer envers (p. 73).
* PRESSER pour accabler (p. 230), comprimer, gêner, serrer (p. 362).
* PRETENDANTE pour personne qui aspire à la vie religieuse (p. 343).
PREVOSTÉ fonction du prévôt, agent du souverain, chargé de rendre la justice (p. 6).
* PRIMICE prémice, premiers fruits de la terre (p. 256).
* PRINS, PRINT pris, prit (pp. 103, 114, 147, etc.)
* PRIS pour prix (p. 70).
PRIVÉ pour cultivé (p. 146).
* PROFONDITÉ du lat. PROFUNDITAS, profondeur (p. 65). [443]
* PROPOS pour résolution (pp. 93, 375), sujet de conversation (p. 300).
PROPOS D'ESPERANCE paroles ayant comme sujet l'espérance (p. 231).
PROPOSER pour mettre devant les yeux, montrer (p. 30).
* PROPRE pour approprié, convenable (pp. 180, 188, etc.), convenable à notre état (p. 361).
* PROPREMENT pour convenablement (p. 147).
PROPRES (sont ilz) ont-ils les qualités convenables, requises pour nous (p. 327).
* PROU beaucoup (p. 321).
* PROUVOYANCE prévoyance (p. 47).
* PROVENANTE provenant, qui provient (p. 275).
* PSALME Psaume (p. 219).
PTIAS sorte de serpent venimeux (p. 121).
* PURGATION pour purification (p. 218).
* PURGER pour débarrasser, purifier (pp. 212-215).
QU'A pour que (p. 307).
* QUAND BIEN lors même que (p. 312).
* QUANT ET QUANT aussi, en même temps (pp. 176, 290).
QUANTITÉS (grandes) pour grandes sommes (p. 187).
* QUE pour car (p. 184), si ce n'est, sinon (pp. 179, 357).
QUE CE QU'ILZ que ce qui fait qu'ils (p. 230).
QUE C'EST ce que c'est (p. 341).
* QUI pour ce qui (pp. 30, 114, 188, etc.)
* QU'IL alors que (p. 201).
QUOY PLUS que dire de plus, quoi de plus (pp. 31, 20).
RABAISSÉ pour baissé (p. 357).
RABAISSER pour abaisser (p. 319).
* RAFRAISCHIR pour renouveler (pp. 13, 280).
* RAMASSER pour amasser (p. 73), concentrer, recueillir, unifier (pp. 79, 82, 320),
rassembler, réunir (p. 278).
RAMPOYENT (qui leur) qui grimpaient sur elles (p. 116).
RANGER A ramener à (p. 82).
RAPHANUS nom latin du raifort sauvage ou cran (p. 120).
285/332

29.6 Page 286

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RASSEOIR pour remettre dans son état premier (p. 227).
RAVALER pour rabaisser (p. 87).
RAYSON DES (a) par rapport aux (p. 51).
RECHASSE pour chasse (p. 25).
RECONNOISSANCE DE (sans) sans se montrer reconnaissant envers (p. 258).
REDUIRE EN MEMOIRE (nous) nous rappeler, ramener à notre mémoire (p. 215).
* REFORMATION action de réformer (p. 358).
* REGARD (pour ce) sur ce point (p. 85).
* REGARD (pour le) au sujet de (p. 179), en ce qui concerne, pour ce qui est (p. 209), en
considération de, pour ce qui concerne le (p. 75).
REGARD (pour nostre) pour ce qui est de nous, si nous nous considérons (pp. 62, 64).
* REGARDER A diriger son esprit, ses regards vers (p. 207).
REGENTE pour celle qui gouverne, directrice (p. 72).
REGENTE (estre) diriger, gouverner (p. 335).
* RELEVÉ pour élevé, situé plus haut (pp. 176, 180, 195).
RELEVER A (se) pour s'élever jusqu'à (p. 79).
* RELIGION pour état religieux, vie religieuse (pp. 59, 187, 310, 346, etc.), Maison religieuse,
Ordre religieux (pp. 60, 68, 189, etc.)
REMASCHER pour repasser dans l'esprit (p. 167).
* REMONSTRANCE pour représentation (p. 77). [444]
REMONSTRANCES DE LEUR QUALITÉ exposé, représentation de leur situation (p. 373).
RENCHERI dédaigneux, qui se donne une grande valeur (p. 91).
RENCONTRE (bon) bon accueil (p. 355).
RENCONTRE (le) la rencontre (p. 117).
* RENFORCER augmenter les forces, fortifier, rendre plus fort (pp. 38, 139).
* RENGREGER aggraver, augmenter (p. 118).
REPAISTRE (se) pour se nourrir (p. 363), se rassasier (p. 32).
REPANDRE AU répandre dans le (p. 329).
* REPENTANCE repentir (p. 72).
REPETITIONS réclamations (p. 232).
* REPRINS repris (p. 133).
* REQUERIR demander (pp. 166, 252, 264, etc.), demander instamment (p. 268), exiger (pp.
74, 186).
REQUIS demandé comme nécessaire (pp. 256, 349), nécessaire (pp. 169, 252).
* RESIGNER (se) s'abandonner (p. 39).
RESINEE raisiné, confiture de raisin mêlé de poires et autres fruits (p. 342).
RESOULURA (se) se résoudra (p. 265).
* RESPECT (au) en considération (p. 371).
RESSEMBLER pour rappeler, ressembler à (p. 63).
* RESSENTIMENT pour vif sentiment (p. 139).
* RESSENTIR pour sentir profondément (p. 208).
* RESSERRÉ pour renfermé (p. 215).
RESVEILLE (on se) pour on a plus d'attention pour (p. 35).
* RETARDEMENT retard (pp. 303, 321).
RETENIR JAMAIS LES AFFECTIONS (de ne) de ne pas garder en soi les élans du cœur, de
les laisser aller (p. 201).
RETIRANT pour ressemblant (p. 120).
* RETIRER A ressembler à (p. 135).
* RETRAITTE pour action de se retirer (p. 219).
REUSCIT (en) à la suite de cela on vient à bout, on réussit (p. 53).
REVANCHER (s'en) se dédommager de cela (p. 122).
REVELEMENT révélation (p. 257).
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29.7 Page 287

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REVERENCE acte de respect (p. 236), respect (p. 198).
* REVEUË pour considération générale, examen général (p. 370), examen général et
accusation (p. 305).
RIEUX rieur (p. 355).
RIGUEUR (a la) pour rigoureusement, strictement (p. 242).
* ROUBE ancienne forme de robe (p. 7).
SAILLANT pour sautant, s'élançant (p. 21).
SAILLENT montent, s'élancent (p. 27).
* SAILLIE pour élan de la pensée (p. 241).
SALARIÉ obtenir son salaire, payé de son travail (p. 50).
* SALUTAIRE (ce grand) ce grand instrument de salut (p. 349).
* SAUME bête de somme (p. 128). Cf. le patois savoyard, SÔMA, ânesse.
* SAVOUREMENT mot rare exprimant l'action de savourer (p. 52).
SAYSON (qu'en sa) qu'au moment propice (pp. 349, 350).
SCEUT (il ne) il ne put (p. 139).
SCRUPULOSITÉ scrupule (p. 365). Du lat. SCRUPULOSITAS, exactitude minutieuse.
SEANT pour bienséant, qui convient, qui est admis comme convenable (p. 82). [445]
SELEUCIDES (oiseaux) de la famille des pies grièches (p. 136).
* SEMONDRE, SEMONDRE (y) inviter (p. 220), inviter à cela (p. 197).
SENT GRANDE ENVIE (l'on) l’on sent qu'on a grande envie (p. 323).
* SENTIMENT pour impression que l'âme ressent, mouvement d'humeur, de sensibilité qui
trouble la paix spirituelle (pp. 286, 311, 314), sens, anc. français SENTEMENT (p. 111).
* SENTIR (s'en) s'en ressentir (p. 156).
SERPE cf. l'ital. SERPE, serpent (p. 131).
* SERRÉ pour caché, enfermé comme en un lieu sûr (p. 27).
* SERRER pour tenir fermé (p. 118).
SERVANS qui servent (p. 67).
* SI pour ainsi (p. 222), aussi (p. 165), cependant, pourtant (p. 202).
* SI BIEN bien que, quoique (pp. 57, 61, 232, etc.)
* SI BIEN QUE de telle manière que (p. 319).
* SI EST CE il n'est pas moins vrai (p. 51).
* SI EST CE QUE cependant, néanmoins, toujours est-il que (pp. 57, 82, 201, 213, etc.),
toutefois (p. 264).
SI FAIT oui vraiment, il en est ainsi (p. 313).
* SI FAITES faites ainsi, faites-le (p. 74).
SI FERONS nous ferons ainsi (p. 310).
* SIGNE pour preuve, témoignage (pp. 37, 154, 201, etc.), marque (pp. 94, 153).
SIMPLIFICATEUR qui simplifie tout (p. 298).
SINGLER cingler (p. 275).
SINGULIER odoriférant, rare (p. 31).
SINGULARITÉ pour affection particulière, particularité (p. 323).
* SINON QUE à moins que (p. 262).
SION rejeton (p. 142) ; anc. français CION, aujourd'hui scion.
* SI QUE de sorte que, si bien que, tellement que (pp. 45, 51, 104, 129, etc.)
* SI TOST pour aussitôt (pp. 94, 285).
SOIGNENT DE NOUS ont soin de nous (p. 283).
* SOIN pour sollicitude, souci (p. 279).
SOIT AINSY qu'il en soit ainsi (p. 351).
SOPHISTIQUÉ dénaturé (p. 48).
SORTE (en la) de la même manière (p. 359).
* SOUAIFVEMENT, SOUËFVEMENT suavement (pp. 219, 221, 270, etc.)
287/332

29.8 Page 288

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* SOUËFVE suave (p. 28).
* SOUVENANCE souvenir, souvenir lointain (pp. 14, 16, 172, etc.)
* SOUVENTESFOIS souvent (pp. 202, 306).
* SOUVIENNE VOUS souvenez-vous (p. 237).
* STACTE du lat. STACTA, liqueur extraite de la myrrhe, ou gomme (p. 136).
SUFFISANCE (a) à ce qui suffit (p. 89), suffisamment (p. 127).
* SUITTE (en la) pour au cours (p. 217).
* SUJET pour personne (p. 259), soumis (p. 189).
SUPERMISTIQUE mystique au plus haut degré (p. 11).
* SUPERSAINTE sainte au plus haut degré (p. 222).
* SUPPORTER, SUPPORTER (se) pour soutenir, se soutenir (pp. 175, 268).
SUPPORTER EN soutenir sur la (p. 182).
* SUR pour au-dessus de (p. 66), par dessus toute chose (pp. 55, 262), en s'appuyant sur (p.
87), en (p. 357).
SURCELESTE au-dessus de céleste, plus que céleste (p. 212). [446]
SUREFFLUENTE débordante au plus haut degré (p. 55).
SUREMINENCE qualité d'être éminent au suprême degré (p. 65). Du lat.
SUPEREMINENTIA, grandeur suprême.
SUR LE POINT au moment voulu (p. 218).
SURPRINS surpris (p. 147).
SURSOUVERAINE souveraine au plus haut degré (p. 66).
TABLE (a la) à table (p. 169).
TABLETTE substance médicamenteuse solidifiée en forme de petite planchette (pp. 167, 364).
TACITEMENT pour mentalement (p. 192).
TAISES VOUS DE gardez le silence sur (p. 242).
* TANT pour autant (pp. 38, 247, 264, etc.), à tel point, tellement (p. 29, etc.), si (pp. 306, 357).
TANT A PART SOY QUA L'ENDROIT DES AUTRES tant en soi-même qu'avec les autres
(p. 323).
TANT LUY aussi bien lui (p. 135).
* TANT PLUS d'autant plus (pp. 71, 78, 169, etc.)
TARANTOLE de l'ital. TARANTOLA, tarentule (p. 104).
TARDIFVE hésitante, s'attardant pour agir (p. 344).
TELLE MEDIOCRITÉ (en) dans un état moyen tel (p. 356).
* TEMPERATURE pour constitution physique, tempérament (p. 104).
* TENDRE pour douillet, sensible (pp. 288, 294, 342), faible (p. 78), impressionnable (p. 99).
TENDRETÉ tendresse (p. 275).
TENES VOUS COURTE consacrez peu de temps (p. 169).
TEPIDITÉ tiédeur (p. 190).
TEREBINTIN térébinthe (p. 120).
TERIERE tarière (p. 121).
TESNIERE tanière (p. 146).
TESTIFIER attester (p. 104).
THYSIQUE phtisique (p. 123).
TIENT LE GOUST DU TRONC a un goût qui vient du tronc (p. 161).
TIERCEMENT troisièmement (pp. 35, 263).
TINDRENT tinrent (p. 114).
TIRÉ pour attiré (p. 281).
TIRÉ OBLIQUEMENT reproduit de profil (p. 94).
* TIRER pour entraîner (p. 286), faire sortir, retirer (p. 288).
TIRER LE MOTIF DU SAINT AMOUR SUR amener le sujet, la raison du saint amour, vous
appuyant sur (p. 237).
288/332

29.9 Page 289

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TIRERONS PAÏS (nous) nous nous en irons (p. 275).
TORS tordu (p. 136).
TOURNEBOULER tourner comme une boule (p. 120).
* TOUT A COUP pour tout à la fois (p. 222).
* TOUT AINSY COMME de même manière que (p. 340), de même que (p. 350).
* TOUT AINSY QUE comme (p. 38), de la même façon que (p. 207), de même, de même que
(pp. 96, 99, 188, 246).
TOUT A LA FOIS pour en une fois (p. 247).
* TOUT A L'HEURE pour aussitôt (p. 365).
TOUTE FINE NUE tout à fait dénuée de toute personnalité (p. 287).
TOUT ENSEMBLE pour en même temps (p. 343).
TOUT ENTIEREMENT entièrement, tout entier (p. 221).
* TOUTES FOIS ET QUANTES toutes les fois (pp. 249, 290, 367).
* TOUT FIN NUD tout à fait dépouillé de ses vêtements (p. 195).
* TOUT PAR TOUT en tout lieu, partout ; locution qui renforce le sens de partout (pp. 204,
220).
* TRAIN chemin (p. 357), manière d'agir, d'aller, d'être, de faire, de vivre (pp. 273, 278, 326,
358).
TRAIN DE LA manière d'agir, manière d'être de la (p. 355). [447]
* TRAIT pour actes, marque (p. 275), marque en actions ou en paroles de quelque qualité (p.
96).
* TRAVAIL pour fatigue (p. 30), lassitude (p. 33), souffrance (p. 37).
* TRAVAILLÉ pour fatigué (p. 28).
* TRAVAILLÉ DE tourmenté par (p. 342).
* TRAVAILLER pour faire des efforts, se donner de la peine (p. 242), tourmenter (p. 242).
* TRAVAUX fatigues, lassitudes (pp. 30, 32, 37), fatigues, souffrances (pp. 268, 353, 362),
grands efforts à faire (p. 366).
TRAVERSÉ pour qui est de travers (pp. 178, 184).
* TREILLE grille (p. 357).
* TREMOUSSER remuer, trembler (pp. 177, 183, 198).
TRESOÜAIFVE très suave (p. 135).
* TRICHERIE bagatelle, chose de peu d'importance (p. 308).
TROCISQUE trochisque, forme tirée du latin ; pastille (p. 102).
* TROP PLUS extrêmement, infiniment (pp. 66, 203).
* TROUBLEMENT trouble.
* VEFVE veuve (p. 267).
VENEFICE empoisonnement accompagné de sortilège (p. 106).
* VERS pour auprès de, en se tournant vers (pp. 6, 318).
VERS LUY de son côté, en se tournant vers lui (p. 368).
VETONICA bettonica, bétoine (p. 137).
* VEUË pour regard intérieur (p. 287).
VEXATION du lat. VEXATIO, tourment (p. 229).
VEXÉ pour harcelé, tourmenté (p. 137).
* VIANDE pour aliment (pp. 14, 30, 132, etc.), ce qui le fait vivre (p. 122), mets (p. 260),
nourriture (pp. 127, 139, 215, etc.)
VIANDIS pâture (p. 123).
VIERGINITÉ virginité (p. 82).
VIL pour sans valeur (p. 197).
VILIPENDER mépriser, rendre vil (p. 87).
VINDRENT vinrent (p. 140).
* VISTE pour rapide, adjectif (p. 134).
289/332

29.10 Page 290

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* VISTEMENT promptement, vite (pp. 215, 226).
VOCATION pour appel (p. 29).
* VOIREMENT à la vérité, vraiment (pp. 50, 59, 72, 83).
* VOUÉ pour promis par vœu (p. 189).
* Y A il y a (p. 166). [448]
_____
290/332

30 Pages 291-300

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30.1 Page 291

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Index des destinataires et des notes historiques et
biographiques de ce volume1561
_____
Ami (un)
Pages
242
Bellegarde Roger de Saint-Lary, duc de
Bourgeois Rose, Abbesse du Puits-d'Orbe
Brûlart Marie Bourgeois, présidente
»
244
» 165, 165,170, 194,
194, 211, 211, 224,
224, 239
» 180, 180, 185, 185,
239
CALCEOLARIO François
»
106
CALEPINO Ambroise, Augustin
»
159
Chantal Jeanne-Françoise Frémyot (Sainte), Mère de. Voir » 188, 191, 191, 238,
FRANÇOIS DE SALES
241, 241, 243, 243,
266 (?), 269, 271,
272, 277, 278, 279,
291, 271, 367 (?),
369 (?)
Christin Marie-Philiberte, Tourière de la Visitation d'Annecy
»
338, 338
Destinataires inconnus. Voir AMI, RELIGIEUX, »
371, 372
SUPERIEURS
Destinataires inconnues. Voir RELIGIEUSE DE LA » 233, 235, 237, 348,
VISITATION, SUPERIEURES
352, 377
ETUDE sur les fragments qui concernent les Vertus cardinales »
40
et morales
FAVRE Michel
»
Fichet Marie-Adrienne, Religieuse de la Visitation d'Annecy
»
235
292, 292
GOSSIN Jules
»
40, 41 [449]
IALYSUS (Dalylus)
»
114
INTRODUCTION A LA VIE DEVOTE attaquée à Avignon
242
Monthoux Paule-Jéronyme, Religieuse de la Visitation »
d'Annecy
337, 339
PARAPHRASE DE L'ORAISON DOMINICALE
»
377, 377
RECTEUR DE LA COMPAGNIE DE JESUS
Religieuse de la Visitation d'Annecy
Religieuse de la Visitation d'Annecy (Mère de Chantal ?)
Religieuses de la Visitation d'Annecy
»
98
» 318, 327, 360, 364
»
367, 369
»
333
1561 Les pages des pièces sont indiquées par des chiffres ordinaires ; les caractères gras désignent les noms des
destinataires. Quant aux autres notes, leurs titres sont donnés en petites capitales.
291/332

30.2 Page 292

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Religieux
»
370, 370
Roche Claude-Agnès Joly (de la), Religieuse de la Visitation » 285, 334, 337, 356,
d'Annecy
360
Rosset Anne-Marie, Religieuse de la Visitation d'Annecy
»
329
SAINT JEAN D'AULPS (Saint François de Sales à)
»
233
SALES FRANÇOIS de (Saint). Voir CHRISTIN, » 165, 180, 185, 191,
INTRODUCTION A LA VIE DEVOTE
194, 211, 224, 233,
235, 243, 244, 267,
279, 291, 330, 374,
421, 427 (?), 429
(?)
SCAGLIA Dona Ginevra. Voir PARAPHRASE.
SIMILITUDES (Manuscrits autographes de)
»
100, 113, 149
Supérieures de la Visitation
»
345
Supérieurs de Communautés
»
98
THIOLLAZ Claude-François (de), Evêque d'Annecy (Lettre à
Mgr de). Voir GOSSIN.
Thorens Marie-Aimée de Rabutin-Chantal (baronne de)
»
267, 267
Vibert Humbert
Villesavin Isabelle Blondeau (dame de)
»
290, 290
»
330 [450]
__________
292/332

30.3 Page 293

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Table de correspondance de cette nouvelle edition avec
les précédentes, et indication de la provenance des
manuscrits
_____
SIXIÈME SÉRIE
A
NOUVELLE ÉDITION
pp. 3-6 (ll. 1, 2)
I
pp. 6-9
p. 6, var. (45)
II
pp. 43, 44 (ll. 1-
3)
p. 44, ll. 4-24
p. 44, ll. 25-28
p. 45, ll. 1-18
pp. 45, ll. 19-34,
46, ll. 1-8
pp. 46 (suite) et
47, ll. 1-19
pp. 47 (suite) 48,
49, 50, lig. 25
pp. 50, ll. 25-35,
51-53, ll. 1-28
pp. 53, 54 (fin de
l'alinéa)
pp. 54-57
III
pp. 58-61, ll. 1-
17
pp. 61 (suite),
62-64 (ll. 1-14)
pp. 64 (suite),
65-67 (ll. 1-6)
p. 67 (suite)
pp. 68-70, ll. 1-
32
pp. 70 (suite),
71-73
pp. 74, 75, ll. 1-
27
pp. 75, ll. 28-30,
et 76, ll. 1-8
pp. 76 (suite),
77, ll. 1-14
p. 77, ll. 15-24
PROVENANCE DES
MSS.
TURIN. Visitation
ANNECY. Visitation
Idem
………………..
………………..
MEAUX. Visitation
………………..
MEAUX. Visitation
LAVAL. M. Charles
Tresvaux du Fraval (1894)
………………..
PARIS. Visitation (1er
Monastère)
TREVISE. Visitation
(Recueil fait par Ste J.-Fse de
Chantal)
TROYES. Mgr Monnier,
alors Evêque de cette ville
VERDUN.
Grand
Séminaire (1893)
AVIGNON. Séminaire St-
Charles
ANNECY.
(Copie)
Visitation.
………………..
AVIGNON. Séminaire St-
Charles
PARIS. Couvent de N.-D.
de la Charité, dit de St-
Michel (1898)
PARIS. Rdes Oblates de
saint François de Sales
PARIS. Visitation (1er
Monastère)
………………..
PARIS. Visitation (1er
Monastère)
PREMIÈRE
PUBLICATION
………………..
Sermons, Paris, 1643, p. 1
(fin du volume)
Blaise, t. XVI, Opuscules
inédits (1833), pp. 11, 12
Ibid., pp. 12, 13
Ibid., pp. 13, 14
Ibid., pp. 14, 15
………………..
Blaise, t. XVI, pp. 15-18
Ibid., pp. 18-22
………………..
Blaise, t. XVI, pp. 22-26
Ibid., pp. 26-30
Ibid., pp. 30-33
………………..
Blaise, t. XVI, p. 46
Ibid., pp. 33-37
Ibid., pp. 37-40
Ibid., pp. 40-43
Ibid., p. 43
Ibid., pp. 43, 44
Ibid., pp. 44, 45
ÉDITIONS
MODERNES
Inédit
Vivès, III, p. 40
Mig. III, col. 1231
Viv. III, pp. 7, 8
Mig. VI, col. 5-7
Viv. III, pp. 8, 9
Mig. VI, col. 7
Viv. III, p. 9
Mig. VI, col. 7, 8
Viv. III, pp. 9, 10
Mig. I, col. 8
Inédit
Viv. III, pp. 10-13
Mig. VI, col. 8-11
Viv. III, pp. 13-16
Mig. VI, col. 11-14
Inédit
Viv. III, pp. 17-20
Mig. VI, col. 14-17
Viv. III, pp. 20-23
Mig. VI, col. 17-19
Viv. III, pp. 23-26
Mig. VI, col. 19-22
[451]
Inédit
Viv. III, pp. 36, 37
Mig. VI, col. 30, 31
Viv. III, pp. 26-29
Mig. VI, col. 22-24
Viv. III, pp. 29-32
Mig. VI, col. 24-26
Viv. III, pp. 32, 33
Mig. VI, col. 27, 28
Viv. III, pp. 33, 34
Mig. VI, col. 28
Viv. III, pp. 34, 35
Mig. VI, col. 28, 29
Viv. III, p. 35
Mig. VI, col. 26
293/332

30.4 Page 294

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pp. 77 (suite),
78-81, ll. 1-6
pp. 81 (suite),
82, 83, ll. 1-16
pp. 83 (suite),
84-89
IV (fragments)
V (fragments)
VI
VII
pp. 98, 99 (ll. 1-
VIII
27)
fin
IX
X
XI
XII
pp. 113-116, ll.
XIII
1-13
suite
XIV
Fragment
XV
XVI
………………..
LE MANS. Visitation
MILAN. Visitation
ANNECY. Visitation
(Ancien Ms.)
………………..
………………..
………………..
………………..
………………..
TURIN. Visitation
Idem
Idem
TURIN. Visitation
WESTMINSTER. Oblats
de St-Charles (1898)
HARROW (Londres).
Visitation
TURIN. Visitation
TURIN. Maison Mère des
Salésiens du Bx don Bosco
TURIN. Visitation
Idem
Ibid., pp. 45-50
………………..
………………..
Année Sainte de la
Visitation, t. XII, 43 ; IX,
677 ; X, 419 ; VI, 1 ; V, 635
; IV, 314, 219, 354 ; VIII,
690 ; VI, 59 ; IV, 702
P. Philibert de Bonneville,
Vie du Saint (1628), chap.
XXXIII, p. 346
Mgr de Maupas, Vie du
Saint (1657), Partie V,
chap. III, p. 336
Longueterre, Vie du Saint
(1624), pp. 408, 412-114
Ibid., p. 409 ; Maupas, Vie
du Saint, Partie IV, chap.
XV, p. 287
Maupas, ibid., p. 286
………………..
………………..
………………..
………………..
………………..
………………..
………………..
………………..
………………..
………………..
Viv. III, pp. 35-39
Mig. VI, col. 29-34
Mig. VI, col. 42-44
Inédit
Inédit
Inédit
Inédit [452]
Inédit
Inédit
Inédit
Inédit
Inédit
Inédit
Inédit
B
I
II
III
IV
V
VI
VII
VIII, 1
2
3
pp. 165-169, ll.
1-5
suite
pp. 173-177, ll.
1-24
suite
texte
DIJON. Visitation
………………..
………………..
MILAN. Visitation
VENISE. Eglise Saint-
Thomas
………………..
TURIN. Visitation
………………..
………………..
………………..
………………..
………………..
Œuvres (1652), liv. II, ep.
XXXI, col. 979
Ibid., col. 983
………………..
………………..
Entretiens spirituels
(1649), p. 789
………………..
Vie du Saint, par le P.
Philibert de Bonneville
(1628), chap. XL, p. 409
Vie du Saint, par le P. de la
Rivière (1625), liv. III,
chap. XXIII, p. 315
Instructions et pratique
de pieté, etc. (Paris, 1688),
p. 45
Ibid., p. 61
Ibid., p. 70
Viv. VI, p. 181
Mig. V, col. 439
Viv. III, p. 100
Mig. III, col. 1281 et
1423 ; V, col. 443
Inédit
Mig. VI, col. 77
Viv. III, p. 106
Mig. III, col. 1285
Inédit
Viv. III, p. 159
Mig. III, col. 1470
Cf. Mig. V, col. 266
Mig. III, col. 1353
294/332

30.5 Page 295

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4
5
6
7
IX
X
XI
XII
XIII
XIV
XV
variantes, p. 205
texte
variantes, p. 208
texte
variantes, pp.
209, 210
pp. 211-217, nos
5, 6
variantes, pp.
215, 216
p. 217, n° 7
pp. 217, 218, n°
8
p. 218, n° 9
p. 218, nos 10, 11
pp. 218, 219, nos
12, 13
pp. 219, n° 14,
220-222, lig. 17
p. 221, var.
(1055)
fin
texte
variantes
texte
variantes
NANCY.
Visitation
(Ancien Manuscrit)
………………..
………………..
CAEN. Visitation (Ancien
Manuscrit)
………………..
………………..
CAEN. Visitation (Ancien
Manuscrit)
………………..
NANCY.
Visitation
(Ancien Manuscrit)
………………..
………………..
………………..
ANNECY. Visitation
Idem
Idem
NANCY.
Visitation
(Ancien Manuscrit)
………………..
………………..
ANNECY. Visit. (Ancien
Ms. de l'Anne Sainte)
………………..
………………..
Ier Procès de Canonis.
………………..
………………..
ANNECY. Visitation
(Ancien Manuscrit)
Ibid., p. 70.
Ibid., p. 79
Œuvres de Ste J.-F. de
Chantal (Paris 1875), tome
II, p. 31
Instructions et pratique,
etc., p. 80
Ibid., p. 81
Œuvres de Ste J.-F. de
Chantal (Paris, 1875), tome
II, pp. 30, 31
Sermons du Bx François
de Sales (Paris, 1643), p.
265 ; Hérissant,
Opuscules (1767) t. III, p.
172
Instructions et pratique,
etc., pp. 16, 17 ; Hérissant,
Opuscules, t. III, p. 185
Œuvres (1652), p. 2253 ;
Hérissant, t. III, pp. 185,
186
Instructions et pratique,
etc., pp. 18, 19 ; Hérissant,
t. III, pp. 186, 187
Ibid.
Instructions et pratique,
etc. pp. 20-22
Sermons (1643), pp. 270-
272 ; Hérissant, t. III, pp.
188-194
………………..
Sermons (1643), p. 272 ;
Hérissant, t. III, pp. 194-
196
Instructions et pratique,
etc., pp. 85-107
Œuvres (Tolose, Bosc,
1637), p. 110
Vie du Saint, par le P. de la
Rivière, liv. III, chap.
XXX, p. 345
Ibid., 347
[454]
Vie du Saint, par
Longueterre (Lyon, 1624),
p. 440
Vie du Saint par le P. de la
Rivière, liv. I, chap. VI, p.
32
Ste J.-F. Frémyot de
Chantal, sa Vie et ses
Cf. Viv. III, p. 223
Cf. Mig. III, c. 1295
Viv. III, p. 221
Mig. III, col. 1293
[453]
Viv. III, p. 221
Mig. III, col. 1294
Viv. III, p. 191
Mig. III, col. 1495
Viv. III, p. 197
Mig. III, col. 1500
Viv. III, p. 197
Mig. III, col. 1500
Inédite
Viv. III, p. 200
Mig. III, col. 1503
Viv. III, p. 86
Mig. III, col. 1269
Viv. III, p. 98
Mig. III, col. 1279 et
VI, col. 82
Viv. III, p. 172
Mig. III, col. 1479
Viv. III, p. 173
Mis, III, col 1481
Mig. VI, col. 79
295/332

30.6 Page 296

▲back to top
XVI
XVII
XVIII
XIX (fragment)
XX
XXI
XXII
XXIII
XXIV
XXV
1er alinéa
pp. 273, 274 (ll.
1-10)
pp. 274 (lig. 10)
275 (ll. 1-26)
suite
dernier alinéa
deux 1er alinéas
suite
XXVI
XXVII
XXVIII
XXIX
XXX
texte
variante
XXXI
XXXII
XXXIII
XXXIV texte
………………..
TURIN.
Visitation
(Ancienne copie)
ANNECY. Visitation
(Copie corrigée par le
Saint)
ANNECY. Visitation
(Ancien Ms. de l'Année
Sainte)
………………..
………………..
………………..
NANCY.
(Ancien Ms.)
Idem
Visitation
TURIN.
royale
Bibliothèque
NANCY.
Visitation
(Ancien Ms.)
Idem
NANCY.
Visitation.
(Ancien Ms.)
………………..
NANCY.
Visitation
(Ancien Ms.)
TURIN. Visitation
………………..
THORENS-SALES.
Archives du Comte de
Roussy de Sales
………………..
NANCY.
Visitation
(Ancien Ms.)
PIGNEROL et CAEN.
Visitation
(Anciens
Manuscrits)
BOURGES. Bibliothèque
publique (Ancien Ms. A.
N° 113)
Idem
ANNECY. Visitation
(Copie de la Sœur A.-M.
Rosset)
ISSY. Compagnie de
Saint-Sulpice (Copie de M.
Œuvres, t. II, (1875), pp.
14, 15
Vie du Saint par Mgr de
Maupas (1657), Partie V,
ch. V, p. 352
Œuvres de Ste J.-F. de
Chantal, t. II, p. 49
………………..
Année Sainte de la
Visitation, tome XI
(1870), p. 620
Epistres spirituelles,
(1629), liv. III, p. 567
Ste J.-F. Frémyot de
Chantal, sa Vie et ses
Œuvres, t. II (1875), pp.
19, 20
Œuvres du Saint, Blaise
(1821), Lettres, t. IV, p. 70
………………..
Vie du Saint par le P. de la
Rivière, liv. III, ch. XXXII
Ibid.
Ibid., liv. IV, ch. VI, p. 381
………………..
Œuvres de Ste J.-F. de
Chantal, t. II, pp. 14, 15
Ibid., p. 62
Ibid., p. 63
Epistres spirituelles de
la Mere J.-F. Fremiot,
baronne de Chantal
(Lyon, Cœursillys, 1644),
p. 889
Hérissant (1758), Lettres,
tome V, p. 144
………………..
Vie du Saint par le P. de la
Rivière, liv. IV, chap. III, p.
366
………………..
………………..
………………..
………………..
Viv. XII, p. 57
Mig. V, col. 1555
Cf. Mig. VI, col. 61
Viv. III, p. 112
Mig. III, col. 1289
Viv. XI, p. 401
Mig. V, col. 1435
Inédit
Viv. III, p. 181
Mig. III, col. 1487
Viv. III, p. 182
Mig. III, col. 1488 et
IX, col. 88
Inédit
Mig. VI, col. 1004
[455]
Viv. XI, p. 404
Mig. V, col. 1438
Viv. VI, p. 506
Mig. V, col. 35
Inédit
Inédit
Inédit
Inédit
Mig. VI, col. 1355
296/332

30.7 Page 297

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variantes
XXXV
XXXVI
XXXVII
XXXVIII
XXXIX
XL
XLI
XLII
XLIII
XLIV
XLV
XLVI
XLVII
XLVIII
XLIX
L
LI
LII
LIII
A
B
C
Michel Favre)
………………..
ANNECY. Visitation
(Ancien Ms. de l'Année
Sainte)
………………..
………………..
………………..
TURIN. Visitation
BOURG-EN-BRESSE.
VIsitation (Ancien Ms.)
………………..
BOURGES. Bibliothèque
publique (Ms. A. n° 113)
Idem
………………..
ANNECY. Visitation
(Copie)
Idem
NANCY.
Visitation
(Ancien Ms.)
Idem
………………..
………………..
………………..
………………..
………………..
Vie du Saint, par le P. de la
Rivière, liv. III, chap.
XXXIII, p. 354
Année Sainte de la
Visitation, tome VIII
(1869), p. 111
Hérissant (1758), Lettres,
tome V, p. 154
Ibid., p. 165
………………..
………………..
………………..
Hérissant (1758), Lettres,
tome V, pp. 133, 134, 137,
138, 139, 142, 143
………………..
………………..
Hérissant (1758), Lettres,
tome V, p. 157
………………..
………………..
………………..
………………..
Vie du Saint, par lu P.
Philibert de Bonneville
(1628), chap. XXVI, p.
269
Œuvres (1641), t. II, epist.
VI, p. 575
Ibid., p. 576
Vie du Saint, par le P.
Philibert de Bonneville
(1628), chap. XXXI, p. 330
………………..
Viv. III, p. 151
Mig. III, col. 1463
Viv. VI, p. 512
Mig. V, col. 41
Viv. VI, p. 519
Mig. V, col. 47
Mig. VI, col. 1035 et
IX, col. 107
Inédit
Inédit
Viv. VI, pp. 499, 501-
503, 505
Mig. V, col. 29, 30,
32, 33, 34-36 [456]
Inédit
Inédit
Viv. VI, p. 514
Mig. V, col. 43
Inédit
Inédit
Inédit
Inédit
Viv. III, p. 102
Mig. III, col. 1283 et
V, col. 1519
Viv. III, p. 104
Mig. III, col. 1285 et
V, col. 1520
Mig. VI, col. 79
Inédit
APPENDICE
………………..
………………..
………………..
P. Artus du Monstier,
Recollet, La piété
françoise vers la Sainte
Vierge Marie ... Nostre
Dame de Liesse en
Picardie ; Paris, 1637-
1643
(Voir note (1559), p. 427.)
(Voir ibid.)
Viv. III, p. 224
Mig. III, col. 1295
[457]
__________
297/332

30.8 Page 298

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Table générale des opuscules de saint François de
Sales1562
_____
DATES ET TITRES DES PIÈCES
I, 11
»
3
»
6
» 14
» 18
» 19
» 21
» 27
» 33
» 37
» 43
» 45
» 46
» 48
» 51
» 63
» 68
» 82
» 90
I, 102
» 103
» 104
III, 339
I, 104
» 105
» 139
II,
1
2 1 [Avant 1586] Règles pour la réception de la sainte
Communion.
11 2 Octobre 1585-février 1586 Premier Manuscrit de
Philosophie …………………………………………………. aut.
12 3 Mars 1586 Second Manuscrit de Philosophie …………….. aut.
31 4 1586 ou 1587 Recueil d'Oraisons jaculatoires tirées des
Psaumes.
32 5 1586 ou 1587 Aspirations et Prières.
33 6 1586 ou 1587 Acte d'abandon héroïque ……………………
41 7 1590 Exercice de la Préparation.
42 8 1590 Conduite particulière pour bien passer la journée.
43 9 1590 Exercice du Sommeil ou Repos spirituel.
44 10 1590 Règles pour les conversations et rencontres.
45 11 1590 Communion fréquente ; Préparation et action de
grâces.
5 12 Fin juillet-août 1590 Beauregard (fragment d'une pièce de
vers) ……………..……………..……………..…………….. aut.
61 13 15 décembre 1590 Notes de Théologie.
62 14 Janvier-juin 1591 Notes de Théologie ……………………..
63 15 Janvier-juin 1591 Fragment sur la Prédestination …………. aut.
64 16 1591 Protestation au sujet de la réprobation des méchants.
71-7 17 22 février-20 novembre 1591 Manuscrit du cours de Droit
(extraits) ……………..……………..……………………….. aut.
78 18 5 septembre 1591 Harangue de remerciement aux docteurs
de Padoue
79-11 19 17 septembre-décembre 1591 Extraits du Manuscrit du
cours de Droit ……………..……………..………………….. aut.
81 20 [1592-1594] Mourir pour vaincre (fragment d'une pièce de
vers) ……………..……………..……………..…………….. aut.
82 21 [1592-1594] Qu'est-ce que combattre l'ennemi spirituel ? … aut.
91 22 19 mai 1593 Retraite préparatoire aux saints Ordres 1563.
1A 23 1er septembre 1593 Statuts de la Confrérie de la Sainte
Croix.
92 24 19 avril [1595 ou 1596] Pendant la mission du Chablais.
93 25 25 mai 1595 En la fête du Saint-Sacrement.
1A 26 Mai ou juin 1595 Mémoire adressé au duc de Savoie pour
le rétablissement de la religion catholique ………………….
1 27 [1594-1596] — Fragment sur la Prédestination ………………. aut.
inéd.
inéd.
inéd.
inéd.
inéd.
inéd.
inéd.
[459]
inéd.
inéd.
inéd.
inéd.
1562 Il a semblé intéressant de donner dans ce tableau, par ordre chronologique, les titres des pièces qui figurent dans
les cinq volumes des Opuscules selon la Série à laquelle elles appartiennent.
A la première colonne on trouvera le numéro du volume et les pages ; à la deuxième, en chiffres gras, les
numéros d'ordre des documents qu'ils contiennent, avec la lettre et le petit chiffre du groupe auquel ils se rattachent ;
à la troisième, les numéros des mêmes documents selon leur chronologie.
Les abréviations aut. et inéd. de la quatrième et cinquième colonnes, indiquent les pièces autographes et les inédites
; l'astérisque * désigne celles qui ne le sont qu'en partie.
1563 Saint François Je Sales fit une retraite d'environ un mois. La date de l'Annie Sainte de la Visitation, 19 mai, fête
de saint Célestin, est exacte, mais la note du 1er volume des Opuscules qui s'y rattache est fautive ; le Saint reçut les
Ordres mineurs le 9 juin, et le sous-diaconat le 12 du même mois.
298/332

30.9 Page 299

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»
8
V, 3
II, 12
» 16
I, 145
V, 100
» 105
» 107
I 158
II, 18
» 30
» 37
I, 162
» 168
III, 207
II, 44
I, 106
» 107
II, 52
» 54
» 58
» 61
I, 108
I, 171
» 174
» 182
» 189
» 200
» 110
» 205
» 213
» 218
» 223
III, 270
2 28 [1594-1596] Notes théologiques ………………………….. aut.
1 29 [1594-1596] Fragments d'une Concordance sur la Passion .. aut.
3 30 16 juillet 1596 Fragment d'un Catéchisme dialogué.
4 31 4 octobre 1596 Formule de l'abjuration de M. Gabriel de
Saint-Michel ……………..……………..………………….. aut.
2 32 Octobre 1596 Memoires pour estre præsentés a Son Altesse,
sur le restablissement de la religion catholique en Chablaix
9 33 1594-1598 Premier recueil de Similitudes ………………… aut.
10 34 1594-1598 Deuxième recueil ……………..………………. aut.
11 35 1594-1598 Troisième recueil ……………..………………. aut.
3 36 Octobre 1596-septembre 1598] Requête au duc de Savoie
en faveur du Chapitre de Saint-Pierre de Genève …………… aut.
5 37 [Janvier-avril ?] 1597 Briefve meditation sur le Symbole des
Apostres.
6 38 [Mai ou juin ?] 1597 Lettre au ministre Viret en réponse à
ses attaques contre la virginité de Marie, Mère de Dieu ……
7 39 [Mai ou juin ?] 1597 Autre lettre au même sur le même sujet
4 40 29 juillet 1597 Projet d'un Mémoire à présenter au duc de
Savoie d'après les conclusions adoptées à Annemasse.
5 41 21 octobre 1597 Avertissement aux hérétiques qui désirent
rentrer dans le sein de l'Eglise ……………..……………….. aut.
1F 42 [1597-septembre 1598] Lettres testimoniales données par
saint François de Sales agissant au nom de Mgr de Granier
(fragment) ……………..……………..…………………….. aut.
8 43 [Avril-juin] 1598 Demandes aux ministres [460] de la
prætendue religion reformee sur leur doctrine touchant la
cene.
104 44 6-15 août 1598 La Transfiguration et le Cœur de Jésus
(Essai de poésie) ……………..……………..………………. aut.
102 45 6-15 août 1598 En l'honneur du Saint-Sacrement (Essai de
poésie) ……………..……………..……………..………….. aut.
Documents relatifs à une conférence entre le P. Chérubin de
Maurienne, Capucin, et les ministres de Genève ;
101 46 16 août 1598 Première réponse du P. Chérubin à M. Sarasin,
délégué de Genève ……………..……………..…………….. aut.
102 47 18 septembre 1598 Deuxième réponse du même à M.
Sarasin ……………..……………..……………..………….. aut.
103 48 24 septembre 1598 Troisième réponse du même à M.
Sarasin ……………..……………..……………..………….. orig.
104 49 15 octobre 1598 Quatrième réponse du même à M. Sarasin orig.
103 50 Septembre ou octobre 1598 La Croix (Essai de poésie) ….. aut.
6A 51 Fin septembre-4 octobre 1598 Articles présentés au Duc de
Savoie en faveur de la religion catholique, et réponses de Son
Altesse.
7A 52 Vers le 15 octobre 1598 Autres articles présentés au Duc de
Savoie pour la conservation et propagation de la religion
catholique en Chablais, et réponses de Son Altesse.
8A 53 Octobre 1598 Mémoire présenté à Sa Sainteté Clément VIII
au nom de Mgr de Granier ……………..……………………. aut.
9A 54 Octobre 1598 Autre Mémoire présenté au même Pontife au
nom de Mgr de Granier.
10A 55 Octobre 1598 Supplique du Prévôt et du Chapitre de la
cathédrale de Saint-Pierre de Genève au même Pontife.
11 56 25 mars 1599 Note intime touchant une faveur surnaturelle
reçue à Rome.
11A 57 Fin avril 1599 Mémoire concernant différentes affaires du
diocèse de Genève, adressé à Mgr Riccardi, Nonce de Savoie.
12A 58 1er ou 2 mai 1599 Réponse à une Requête des Chevaliers
des saints Maurice et Lazare.
13A 59 [Vers le 15] mai 1599 Requête au Duc de Savoie ………… aut.
14A 60 Vers le 15 novembre 1599 Mémoire adressé à Mgr Riccardi,
Nonce de Savoie ……………..……………..………………. aut.
1H 61 [Décembre 1601] Mémoire destiné à prouver que l'Evêque aut.
inéd.
inéd.
inéd.
inéd.
inéd.
inéd.
inéd.
inéd.
inéd.
inéd.
inéd.
inéd.
inéd.
inéd.
299/332

30.10 Page 300

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I, 241
I, 249
» 254
» 258
» 260
» 263
» 111
» 126
III, 208
» 211
» 394
» 213
II, 261
III, 384
» 139
» 394
I, 268
III, 29
» 216
III, 397
» 34
» 441
II, 262
» 273
» 276
III, 39
II, 279
» 297
III, 141
de Genève est le seul légitime Prince souverain de la cité et
de ses dépendances ……………..……………..…………….
1B 62 [20 décembre 1601-fin janvier 1602] Mémoire remis à Mgr
del Bufalo, Nonce de France, [461] pour le rétablissement du
culte catholique dans le pays de Gex ……………………….
2B 63 20-25 décembre 1601 Requête au Roi de France, au nom de
Mgr de Granier ……………..……………..………………… aut.
3B 64 [Fin janvier] 1602 Autre minute de la même Requête …… aut.
4B 65 [Commencement de février] 1602 Requête au Roi Henri IV
et à son Conseil privé ……………..…………………………
5B 66 [Vers le 8] février 1602 Mémoire présenté à M. de Villeroy
pour le rétablissement de la religion catholique dans le pays
de Gex.
6B 67 Vers la fin de mars 1602 Mémoire adressé au Conseil privé
du Roi de France ……………..……………..………………. aut.
121 68 Fin novembre-8 décembre 1602 Règlement épiscopal.
122 69 Fin novembre-8 décembre 1602 Fragment du même
document.
2F 70 19 décembre 1602 Mandement sur l'immunité de l'église de
Faverges, à propos d'un soldat espagnol qui s'y était réfugié..
3F 71 21 décembre 1602 Mandement pour la restitution à l'église
de Faverges du même soldat espagnol ……………………… aut.
1B 72 29 décembre 1602 Légalisation d'un acte concernant la
Sainte-Maison de Thonon.
4F 73 1er janvier 1603 Sentence en faveur du soldat espagnol
fugié dans l'église de Faverges ……………..…………….. aut.
1A 74 15 janvier 1603 Mandement pour le Carême et le Synode de
1603 ; obligation des bénéficiers à la résidence.
2A 75 [Janvier-mars 1603] Réponse à quelques objections contre
les privilèges de la Confrérie de la Sainte Croix …………….. aut.
1D 76 21 mars 1603 Faculté accordée à M. Charles-Emmanuel
Ginod de prêcher, exorciser et administrer les Sacrements
dans le diocèse de Genève ……………..…………………… aut.
2B 77 [1er-11 août 1603] Mandement sur les Indulgences
accordées par le Saint-Siège à la Confrérie de Notre-Dame
de Compassion de Thonon.
7B 78 10-20 août 1603 Conventions relatives à la cession du
prieuré d'Asserens au curé de Farges ………………………. aut.
1C 79 16 septembre 1603 Patentes d'érection d'une chapelle
contiguë à l'église de Notre-Dame de Compassion de
Thonon, fondée par le marquis de Lullin …………………… orig.
5F 80 [Vers le 21 septembre 1603] Recommandation en faveur
d'une mère de famille obligée de quitter Genève pour
soustraire ses enfants au danger d'apostasie ………………… aut.
3B 81 Vers le 21 septembre 1603 Acte par lequel saint François de
Sales cessant d'être Préfet de la Congrégation de la Sainte-
Maison de Thonon, se dédie à ladite Congrégation ………… aut.
2B 82 21 septembre 1603 Patentes d'érection d'une chapelle en
l'église paroissiale d'Allinges, réédifiée par M. Jean-Louis de
Bonivard et sa femme ……………..………………………... orig.
1C 83 24 septembre 1603 Procès-verbal de la première visite de
saint François de Sales à l'abbaye de Sixt ………………….. aut.
2A 84 2 octobre 1603 Constitutions faites au Sinode du diocese de
Geneve.
3A1 85 [Octobre 1603] Règlements pour l'enseignement du
Catéchisme. Pour la ville d'Annecy.
3A2 86 Pour les Paroisses du diocèse.
3C 87 12 novembre 1603 Nomination d'un coadjuteur en faveur
du curé des Clefs ……………..……………..……………….
4A 88 1603 ou 1604 Avertissements aux Confesseurs.
5A 89 [1603 ou 1604] Fragment de conseils aux Confesseurs.
2D 90 28 mars 1604 Testimoniales en faveur du chanoine Jean-
François de Sales son frère.
inéd.
inéd.
inéd.
inéd.
inéd.
inéd.
inéd.
inéd.
inéd.
inéd.
[462]
inéd.
300/332

31 Pages 301-310

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31.1 Page 301

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V, 165
» 170
» 173
» 180
» 185
» 188
II, 298
I, 272
» 274
III, 3
» 41
V, 191
» 194
» 200
» 204
» 206
» 207
» 208
» 209
III, 43
» 45
V, 10
» 110
» 113
II, 299
» 67
» 303
V, 211
III, 47
II, 305
V, 224
III,
9
1B 91 Avril 1604 Avis à Mme Rose Bourgeois, Abbesse du Puits-
d'Orbe, sur les devoirs que lui imposent sa profession
religieuse et sa charge ……………..………………………... aut.*
2B 92 [Avril 1604] Méditation pour le commencement de chaque
mois avant la sainte Communion, adressée à la même.
3B 93 [Avril 1604] Fragments d'Avis sur la manière de méditer,
suivis d'une méditation incomplète sur le crucifiement de
Notre-Seigneur Jésus-Christ ……………..………………… aut.
4B 94 15 avril 1604 Méditation sur le crucifiement de Notre-
Seigneur Jésus-Christ, donnée à la présidente Brûlart.
5B 95 3 mai 1604 Fragment d'un avertissement sur la perfection
chrétienne, envoyé à la présidente Brûlart ………………….. aut.
6B 96 [3 mai 1604 ?] En quoi consiste la perfection et comment
l'acquérir ; degrés de l'obéissance. Ecrit envoyé à la baronne
de Chantal.
97 5 mai 1604 Ordonnances synodales (Appendice, p. 403).
8B 98 11 mai 1604 Requête à M. François Briet …………………
9B 99 11 mai 1604 Autre requête au même ………………………
1B 100 Vers le 13 juin 1604 Ordonnance pour la procession du
Saint-Sacrement le jour de la Fête-Dieu …………………… aut.
4C 101 16 août 1604 Concession d'Indulgence pour chaque visite à
un oratoire érigé à Chatelard-en-Bauges …………………… aut.
7B 102 26 ou 27 août 1604 Avis à la baronne de Chantal.
8B1 103 9 octobre 1604 Divers Avis pour l'oraison, les aridités et les
distractions, et sur la manière de se comporter dans les
exercices spirituels de la journée, envoyés à Mme Rose
Bourgeois, Abbesse du Puits-d'Orbe. Meditation sur
l'eslevation de Jesus Christ crucifié.
8B2 104 Conseils pour la méditation.
8B3 105 Exercice pour le matin.
8B4 106 Avis pour bien entendre la sainte Messe.
8B5 107 Les retours vers Notre-Seigneur, les oraisons jaculatoires et la
pensée de la mort pendant la journée.
8B6 108 Exercice pour le soir.
8B7 109 Avis divers sur les exercices précédents.
5C 110 6 novembre 1604 Requête des syndics et paroissiens de
Veyrier demandant la Visite de leur Evêque, et Décret de
celui-ci ……………..……………..………………………… orig.
6C 111 18 décembre 1604 Requête des paroissiens de Domancy
sollicitant la confirmation du vœu fait en 1596 de chômer
plusieurs fêtes, et Approbation de saint François de Sales ….
2A 112 [1602-1604] Déclaration mystique du Cantique des
Cantiques.
12A 113 [1602-1604] Similitudes, et Notes sur la Sainte Vierge ….. aut.
13A 114 [1600-1604] Recueil de Similitudes ………………………. aut.
6A 115 [Après 1604] Avis aux Confesseurs et Directeurs pour
discerner les opérations de l'Esprit de Dieu et celles du malin
esprit dans les âmes.
12 116 [1595-1605] Premier Titre du Code Fabrien.
7A 117 [1603-1605 ?] Exhortation aux ecclésiastiques pour qu'ils
s'appliquent à l'étude.
9B 118 [Décembre 1604 ou commencement de 1605] Petit traité sur
la sainte Communion, rédigé pour Mme Rose Bourgeois,
Abbesse du Puits-d'Orbe ……………..…………………….. aut.*
7C 119 [1605 ?] Indulgences accordées aux membres de
l'Archiconfrérie du Cordon de Saint-François ……………… aut.
8A 120 20 avril 1605 Constitutions synodales.
10B 121 [Mai] 1605 Quelques Avis pour combattre la tristesse et
l'inquiétude intérieure, adressés à Mme Rose Bourgeois,
Abbesse du Puits-d'Orbe.
2B 122 6 et 7 juin 1605 Procès-verbal et Ordonnances concernant
le différend entre le Chapitre cathédral et la Collégiale de
Notre-Dame d'Annecy, par rapport à la [464] préséance en la
inéd.*
inéd.
inéd.
inéd.
inéd.
[463]
inéd.
inéd.
inéd.
inéd.
inéd.
inéd.
301/332

31.2 Page 302

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I, 276
» 281
II, 65
III, 398
» 218
» 284
II, 310
III, 48
» 219
» 49
» 51
» 52
V, 233
III, 54
» 55
II, 311
III, 220
» 242
II, 335
III, 385
» 388
» 391
» 285
II, 339
» 340
III, 400
» 466
II, 342
» 344
III, 142
» 403
procession de la Fête-Dieu ……………..…………………..
10B 123 Juillet-août 1605 Requête aux députés du Clergé de France orig.
11B 124 Juillet-août 1605 Mémoire adressé aux mêmes ……………
11 125 6 août 1605 Déclaration au sujet d'une conférence avec les
ministres de Genève.
4B 126 [Vers le 25 août] 1605 Note sur les revenus de la Sainte-
Maison de Thonon et sur le service de l'église ……………… aut.
6F 127 5 février 1606 Diverses permissions à l'occasion de la
célébration d'un mariage ……………..…………………….. aut.
1I 128 [Vers le 6 mars] 1606 Mémoire adressé à M. Charles
d'Albigny, concernant une pension attribuée à l'Abbé
commendataire de Filly ……………..……………………… aut.
129 12 avril 1606 Ordonnances synodales (Appendice, p. 404).
8C 130 14 juin 1606 Approbation de l'établissement de la Confrérie
du saint Rosaire au Petit-Bornand ………………………….. aut.
7F 131 27 juin 1606 Commission au curé de Rumilly pour la
célébration d'un mariage.
9C 132 2 juillet 1606 Requête de M. Aubert Darand au sujet d'une
chapelle de l'église paroissiale de Saint-Félix, et Décret de
saint François de Sales ……………..………………………. aut.
10C 133 2 juillet 1606 Requête de M. Nicolas Clerc, curé de Saint-
Félix, au sujet de différends survenus avec ses paroissiens
pour les sépultures et l'entretien des cordes des cloches, et
Décret de saint François de Sales …………………………..
11C 134 23 juillet 1606 Confirmation de la fondation d'une plébanie
à Flumet ……………..……………..……………………….
11B 135 14 août 1606 Première méthode pour réciter le Chapelet,
écrite à Saint-Jean d'Aulps.
12C 136 15 septembre 1606 Procès-verbal de la consécration d'un
autel de l'église d'Allinges, et Indulgences accordées à cette
occasion ……………..……………..……………………….. aut.
13C 137 20 septembre 1606 Requête de M. Pierre Vallet, curé de
Vacheresse, touchant une quête, et Décret de saint François
de Sales.
9A 138 Novembre 1606 Compte-rendu de l'état du diocèse de
Genève, envoyé à Sa Sainteté Paul V ………………………. aut.
8F 139 9 novembre 1606 Dispense de proclamations pour un
mariage ……………..……………..……………………….. aut.
1G 140 [Novembre-décembre 1606] Statuts de l'Académie
Florimontane.
10A 141 [Novembre 1606 ou vers le 15 janvier 1607] Mémoire
touchant les revenus et les charges de la mense épiscopale aut.
3A1 142 [1607] Sommaire des Statuts de la Confrérie [465] de la
Sainte Croix, et Indulgences accordées à celle-ci par Sa
Sainteté Paul V ;
Note sur la Confrérie ………………………………………….
3A 143 Abbregé des exercices spirituels et Indulgences de la
Confrerie.
3A8 144 Indulgences.
21 145 14 janvier 1607 Procuration pour le serment de fidélité à
prêter au prince de Piémont, Victor-Amédée.
11A 146 [Mars] 1607 Premier mandement pour le Jubilé de Thonon aut.
12A 147 Avril 1607 Publication d'Indulgences …………………….. aut.
5B 148 1er mai 1607 Publication d'Indulgences en faveur des
membres de la Confrérie de Notre-Dame de Compassion de
Thonon.
1D 149 2 mai 1607 Délégation à M. Jean Favre pour l'introduction
des Pères Feuillants à Abondance.
13A 150 8 mai 1607 Second mandement pour le Jubilé de Thonon aut.
151 30 juin 1607 Ordonnances synodales (Appendice, p. 406).
3D 152 11 juillet 1607 Testimoniales dimissoires en faveur de M.
Henri Barbier ……………………………………………….. aut.
6B 153 Mai ou 6-15 juillet 1607 Advis sur l'establisment de la aut.
inéd.
inéd.
inéd.
inéd.
inéd.
inéd.
inéd.
inéd.
inéd.
inéd.
inéd.
inéd.
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IV 197
» 199
III, 72
Sainte Mayson de Thonon …………………………………..
7B 154 [6-15 juillet 1607 ?] Sommaire des avis précédents ………. aut.
8B 155 18 juillet 1607 Procès-verbal de l'érection de la Sainte-
Maison de Thonon et confirmation de ses Statuts ………….
14C 156 27 octobre 1607 Requête de M. Pierre Gros, curé de Lullin,
touchant l'exaction des décimes, et Décret épiscopal ……… aut.
12B 157 [1604-1608] Deux occupations pour la retraite spirituelle.
10 158 1605-1608 Au pied de la Croix (Essai de poésie) ………… aut.
15A 159 [1607-1608] Mémoire adressé aux Chevaliers des saints
Maurice et Lazare ………………………………………….. aut.
15C 160 22 janvier 1608 Ordonnance accordant un supplément à la
portion congrue du curé de Versonnex.
16C 161 Fin février-mars 1608 Ordonnance concernant l'église de
Rumilly …………………………………………………….. aut.
162 23 avril 1608 Ordonnances synodales (Appendice, p. 408).
4D 163 19 mai 1608 Décret donnant charge à M. Jean-Claude
Blanc, curé d'Arith, de l'entretien de son prédécesseur
orig.
1E 164 15 juin 1608 Procès-verbal de la première abjuration de l'ex-
Jésuite Claude Boucard ……………………………………..
165 15 juin 1608 Minute de la pièce précédente ……………….
aut.
2E 166 15 juin 16o8 Notes pour le procès-verbal de l'abjuration de
l'ex-Frère Mineur, Pierre Gillette …………………………… aut.
5D 167 25 ou 30 juin 1608 Commission à M. Scipion Machet, curé
de Saint-Julien, pour instruire les procès contre certains
laïques ……………………………………………………… aut.
14B 168 29 septembre 1608 Deuxième méthode pour réciter le
chapelet, envoyée à Dijon.
1F 169 [Octobre ou novembre] 1608 Advis pour la reparation de la
discipline reguliere au Monastere du Puys d'Orbe.
17C 170 5 décembre 1608 Assignation de portion congrue aux curés
de Craz et de Surjoux en Michaille.
13B 171 [1604-1609 ?] L'imitation de Notre-Seigneur.
14A 172 Janvier 1609 Requête de saint François de Sales et de Mgr
Milliet, Evêque de Maurienne, au Duc de Savoie.
9F 173 15 janvier 1609 Requête touchant la célébration d'un
mariage, et Décret épiscopal ……………………………….. aut.
174 6 mai 1609 Ordonnances synodales (Appendice, p. 410).
18C 175 11 mai 1609 Ordonnances touchant le service de l'église de
Rumilly dû par les Altariens ……………………………….. aut.
19C 176 4 juin 1609 Assignation de portion congrue à M. Guillaume
Coudurier, curé de Feigères …………………………………
20C 177 12 août 1609 Requête de MM. de Vallon demandant une
chapelle en l'église de Samoëns, et Décret de saint François
de Sales.
3E 178 22-29 octobre 1609 Projet de transaction entre les
Carmélites de Dijon et Mme Chevrier ………………………. aut.
21C 179 6 janvier 1610 Confirmation de la Confrérie du Saint-
Sacrement érigée en la paroisse de Saint-Félix ……………..
2D 180 28 janvier 1610 Exécution d'un Bref autorisant l'Abbé
d'Abondance à donner à cens le membre de Présinges.
22C 181 22 février 1610 Procès-verbal de la consécration d'un
maître-autel, et Indulgences accordées à cette occasion.
15B 182 15-20 avril 1610 Avis à la baronne de Chantal.
183 28 avril 1610 Ordonnances synodales (Appendice, p. 412).
3B 184 29 avril 1610 Sentence arbitrale de saint François de Sales
et du président Antoine Favre au sujet d'un différend entre la
Collégiale de Samoëns et les Chartreusines de Mélan.
185 [Janvier-avril 1610] Fragment d'un premier jet des
Constitutions de la Visitation, Ms. F. ……………………… aut.
Suite …………………………………………………………. aut.
23C 186 13 mai 1610 Assignation de dîmes pour l'entretien du curé
de Thonex …………………………………………………..
inéd.
inéd.
inéd.
inéd.
inéd.
inéd.
inéd.
[466]
inéd.
inéd.
inéd.
inéd.
inéd.
inéd.
inéd.
inéd.
inéd.
[467]
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4E 187 19 juin 1610 Lettres déclarant nulle la Profession de
François Bochatton, Cordelier du couvent de Cluses.
188 Juin-juillet 1610 Constitutions de la Visitation, 2de leçon,
Ms. G. ……………………………………………………… aut.
24C 189 31 août 1610 Requête de M. Nicolas Perrolaz touchant
l'érection d'un oratoire à Vorsiers, paroisse de Sallanches, et
commission de saint François de Sales …………………….. aut.
16B 190 1609-1610 Conseils à un ami.
191 Juillet 1610-janvier 1611 Constitutions de la Congregation
des Dames dediees a Dieu sous l'invocation de Nostre Dame
de la Visitation en la ville de Neci. (Variantes, Ms. H.) …..
3 192 [1er janvier 1611 ?] Cartel de Desfy aux Dames de la
Visitation, 2de leçon, nos 1-8 …………………………………
193 20 avril 1611 Ordonnances synodales (Appendice, p. 414).
194 6 juin 1611 Souhaits de saint François de Sales à ses Filles aut.
25C 195 22 juillet 1611 Requête de M. Pierre Vallet, curé de
Vacheresse, de ses paroissiens et de ceux de Bonnevaux et
Chevenoz touchant l'érection projetée de deux oratoires, et
Décret épiscopal.
17B 196 22 août 1611 — Le Saint reçoit les vœux de Religion de la
Mère de Chantal, renouvelle son vœu de chasteté et fait celui
de servir l'âme de la Sainte.
1 197 5 septembre 1611 Lettre d'obédience à la Mère de Chantal
pour son premier voyage en Bourgogne.
10F 198 12 septembre 1611 Approbation de la Vie de saint
Bernard de Menthon par M. Nicolas de Farnex.
26C 199 11 octobre 1611 Procès-verbal de la consécration du maître-
autel de l'église de Meinier, et Indulgences accordées à cette
occasion ……………………………………………………..
27C 200 19 octobre 1611 Approbation d'un accord passé entre le
Prieur des Feuillants d'Abondance et le curé du lieu, M. Jean
Moccand ……………………………………………………. aut.
4B 201 [1608-1612 ?] Notes relatives à la juridiction du Doyen
d'une Collégiale …………………………………………….. aut.
15A1 202 8 février 1612 Quelques pièces du Rituel de 1612
Præfatio ad parochos.
15A2
Appendix ad calendarium.
15A3
Formulaire du Prône.
15A4
Fêtes commandées et Fêtes de dévotion.
15A5
Casus episcopales Gebennensis diæcesis.
15A6
Exorcismus pro impeditis in matrimonio a dæmone vel
maleficis.
31 203 [Entre la mi-mars et le 22 avril] 1612 Mémoire adressé à Sa
Sainteté Paul V pour l'érection d'un évêché à Chambéry.
[468]
5E 204 17 mai 1612 Pouvoirs accordés à des Pères Capucins du
diocèse de Genève …………………………………………. aut.
6E 205 18 mai 1612 Pouvoir accordé à Dom Jean de Saint-Pasteur,
Prieur des Feuillants d'Abondance, et à ses successeurs.
28C 206 24 mai 1612 Supplique des habitants de Macherine au sujet
d'une chapelle récemment érigée par eux, et Décret de saint
François de Sales …………………………………………… aut.
29C 207 11 août 1612 Concession d'Indulgence pour chaque visite à
la chapelle rebâtie par les habitants de Macherine …………. aut.
30C 208 1er septembre 1612 Nomination d'un curé à Maxilly ……..
12B 209 Août-septembre 1612 Requête au Roi de France, Louis
XIII.
6D 210 28 septembre 1612 Pouvoir d'administrer les Sacrements,
accordé à M. Jean-Pierre Moccand …………………………. aut.
13B 211 [Vers la fin de 1612] Requête à Mgr André Frémyot,
Archevêque de Bourges ……………………………………. aut.
212 1605-1613 Fragment d'Ordonnances synodales
(Appendice, p. 416).
13 213 1608 et 1613 Notes sur le culte des Saints ………………… aut.
inéd.
inéd.
inéd.
inéd.
inéd.
inéd.
inéd.
inéd.
inéd.
inéd.
inéd.
inéd.
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31C 214 29 janvier 1613 Approbation et homologation des
conditions faites entre M. et Mme de Bonivard et le curé
d'Allinges pour la dotation d'une chapelle fondée par les
premiers ……………………………………………………. orig.
2H 215 3 avril 1613 Accusé de réception de Lettres de l'Empereur
Mathias …………………………………………………….. orig.
7E 216 [Entre le 8 mars et le 15 avril ?] 1613 Testimoniales en
faveur de deux Cordeliers du couvent d'Annecy se rendant en
celui des Récollets de Grenoble, ou autre de la même
observance …………………………………………………. aut.
16A 217 24 avril [1613 ?] Notes pour des Ordonnances synodales aut.
2F 218 Mai 1613 Mémoire adressé à la Sacrée Congrégation des
Réguliers en faveur des Religieuses de Savoie …………….. aut.
9B 219 [Fin mai ou juin 1613 ?] Mémoire touchant les prétentions
des Chevaliers des saints Maurice et Lazare sur la Sainte-
Maison de Thonon …………………………………………. aut.
32C 220 27 juin 1613 Sentence au sujet d'un différend entre le curé
des Ollières et Aviernoz et trois de ses paroissiens.
2 221 16 juillet 1613 Lettre d'obédience à la Mère de Chantal pour
son second voyage en Bourgogne ………………………….. aut.
33C 222 22 juillet 1613 Requête de M. Guillaume Marin, curé de
Saint-Nicolas-la-Chapelle, touchant les abus qu'il a trouvés
dans sa paroisse, et Ordonnance de saint François de Sales à
ce sujet ……………………………………………………… aut.
18B 223 24 août 1613 Memorial pour bien faire la confession,
adressé au duc de Bellegarde
224 Juillet-septembre 1613 Regles et Constitutions de la
Congregation des Seurs dediees a Dieu sous l'invocation de
Nostre Dame devla Visitation en la ville d'Annessi ………..
225 [1613] Preparation a l'Oblation pour les Filles de Nostre
Dame de la Visitation (Ms. K, variantes).
14B 226 20 novembre 1613 Ordonnances pour le service divin à Gex
et dans les autres paroisses du bailliage.
3F 227 28 novembre 1613 Signification et Certificat à l'Archevêque
de Corinthe et à l'Evêque de Toul touchant une commission
du Pape de visiter l'abbaye de Remiremont …………………. orig.
19B 228 [1610-1613 ?] Sur la Très Sainte Vierge, à la Mère de
Chantal ( ?).
14A 229 1612-1614 Recueil de similitudes ………………………… aut.
15A 230 1612-1614 Autre recueil de similitudes …………………… aut.
16A 231 1612-1614 Recueil de similitudes et Notes pour la rédaction
du Traité de l'Amour de Dieu …………………………… aut.
232 [1er janvier 1614 ?] Cartel de Desfy pour ses Filles de la
Visitation (Suite de la 2de leçon, nos 9-18).
3 233 1er janvier 1614 Sacré cartel de Desfy a mes cheres Filles de
la Visitation Sainte Marie, en bonne estrenne pour cette
annee 1614.
3A 234 1614 Fragments sur les vertus cardinales et morales ……… aut.*
17A 235 [Janvier ou février 1614] Fragment d'un compte-rendu de
l'état du diocèse de Genève concernant les Monastères ……. aut.
7D 236 27 mars 1614 Faculté de binage accordée au curé de Pringy
et à son vicaire ……………………………………………… aut.
8D 237 29 mars 1614 Pouvoir de prêcher et d'administrer les
Sacrements, conféré à M. Louis Chevrier ………………….. aut.
34C 238 8 avril 1614 Sentence touchant les différends entre les
habitants du village Saint-Robert et les autres paroissiens de
Montcel …………………………………………………….. aut.
9D 239 13 avril 1614 Dimissoires pour la promotion aux saints
Ordres de M. Jean de Vassau ……………………………….. orig.
240 16 avril 1614 Ordonnances synodales (Appendice, p. 417).
3H 241 3 juillet 1614 Accusé de réception de Lettres [470] de
l'Empereur Mathias, et testimoniales en faveur du porteur
35C 242 11 juillet 1614 Supplique de M. Nicolas Clerc, curé de orig.
inéd.
inéd.
inéd.
inéd.
inéd.
inéd.
inéd.
[469]
inéd.
inéd.
inéd.
inéd.
inéd.
inéd.
inéd.*
inéd.
inéd.
inéd.
inéd.
inéd.
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Saint-Félix, touchant la procession mensuelle des confrères
du Saint-Sacrement, et Décret de saint François de Sales ….
8E 243 31 juillet 1614 Ratification de l'élection de Frère Maximien
de Moulins, Capucin, député par le clergé du bailliage de Gex
aux Etats généraux …………………………………………. aut.
36C 244 11 octobre 1614 Supplique des paroissiens de La Giettaz
touchant le service et entretien des chapelles de leur église
paroissiale, et Décret épiscopa ……………………………… aut.
2G 245 1er décembre 1614 Homologation du contrat d'introduction
des Barnabites au Collège Chappuisien d'Annecy …………. orig.
246 Septembre-décembre 1614 Præface pour l'instruction des
ames devotes, sur la dignité, antiquité, utilité et varieté des
Congregations ou Colleges des femmes et filles dediees a
Dieu ………………………………………………………… orig.
37C 247 13 décembre 1614 Supplique de maître Guillaume Faucoz
touchant l'érection d'une chapelle sur la paroisse de
Vacheresse, et Décret de saint François de Sales.
5B 248 7 janvier 1615 Déclaration sur le privilège de l'alternative
ou droit d'élection de l'Evêque aux canonicats de l'Eglise
cathédrale.
38C 249 28 janvier 1615 Supplique de M. Jacques Evrard au sujet
d'un legs fait pour la fondation d'une Messe, et Décret
épiscopal …………………………………………………… aut.
20B 250 Février 1615 Prière composée pour la baronne Marie-Aimée
de Thorens, sa belle-sœur.
251 6 mai 1615 Ordonnances synodales (Appendice, p. 418)
4 252 1er juillet 1615 Approbation et confirma tion des
Constitutions de la Visitation par l'Archevêque de Lyon et
l'Evêque de Genève ………………………………………… aut.
10B 253 Août 1615 Constitutions et Regles de l'Oratoire de Thonon
9F 254 13 octobre 1615 Pouvoirs accordés au Père André de
Constance, du Tiers-Ordre de Saint-François ………………. aut.
C 255 Vers la fin de 1615 Mémoire pour la conversion des
hérétiques et leur réunion à l'Eglise.
21B 256 [1613-1615] Avis à la Mère de Chantal.
14 257 [1600-1616] Notes sur la Sainte Trinité ………………….. aut.
22B 258 [1613-1616] Fragments de conseils à la Mère de Chantal.
24B 259 [1615-1616] Fragments de conseils à la même.
[471]
260 1616 Preparation et Meditations pour la Profession.
261 2 février 1616 Réponse de saint François de Sales au
Mémoire de Mgr de Marquemont concernant la Congrégation
de la Visitation.
262 Août-novembre 1615-mars-avril 1616 Autre Manuscrit des
Constitutions de la Visitation (Ms. P, variantes) …………
23B 263 31 mars 1616 Avis à la Mère de Chantal sur la simplicité,
l'abandon et l'amour du prochain …………………………… aut.*
39C 264 29 avril 1616 Supplique des syndics et notables de Bonne
au sujet de M. Jean-François du Martherey, et acte d'institution
de celui-ci pour vicaire perpétuel de la paroisse ……………… orig.
40C 265 30 avril 1616 Confirmation d'Indulgence en faveur de la
Confrérie de Saint-Sébastien ………………………………..
266 20 mai 1616 Ordonnances synodales (Appendice, p. 419).
25B 267 6 juin 1616 Derniers avis à la Mère de Chantal.
4F7 268 Septembre 1616 Mémoires présentés au prince de Piémont,
Victor-Amédée, pour le rétablissement de la discipline
religieuse dans les Monastères de Savoie. Pour les
Monastères des hommes
4 269 Pour la reformation des Monasteres des filles de l'Ordre de
Cisteaux.
10D 270 7 septembre 1616 Dimissoires en faveur de M. Pierre Godet aut.
26B 271 Fin mai et août-novembre 1616 Questions de la Mère de
Chantal à saint François de Sales, et réponses de celui-ci …. aut.
11D 272 23 novembre 1616 Dimissoires en faveur de M. Claude
inéd.
inéd.
inéd.
inéd.
inéd.
inéd.
inéd.
inéd.
inéd.
inéd.
inéd.
inéd.
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Garbillon, étudiant à Lyon.
27B 273 [1612-1617] — Avis à la Sœur Claude-Agnès de la Roche,
Religieuse de la Visitation d'Annecy.
274 Août 1616-janvier 1617 Autre Manuscrit des Constitutions
de la Visitation (Ms. Q) …………………………………….
10E 275 Mi-février-mars 1617 Procès verbal de la seconde
abjuration de M. Claude Boucard ………………………….. aut.
18A 276 12 avril 1617 Ordonnances synodales ……………………. orig.
12D 277 12 avril 1617 Patentes d'institution du chanoine François de
l'Espine comme Surveillant ………………………………… aut.
28B 278 13 avril 1617 Dédicace d'un exemplaire du Traité de
l'Amour de Dieu à M. Humbert Vibert …………………… aut.
3G1 279 Pièces relatives à la fondation de M. François Bochut en faveur
du Collège et de l'église paroissiale de Cluses
2 juin 1617 Règles fondamentales des régents du Collège ..
3G2 280 2 juin 1617 Approbation des Statuts en faveur de la
fondation du Collège ……………………………………….
11E 281 9 juillet 1617 Procès-verbal de la consécration de l'église
des Capucins de Thonon.
13D 282 19 juillet 1617 Supplique de M. Pierre Vallet, curé de
Vacheresse, et consentement de saint François de Sales.
41C 283 27 juillet 1617 Procès-verbal de la consécration d'un autel
de l'église de Gex, et Indulgences accordées à cette occasion orig.
3G3 284 12 août 1617 Décret portant l'union de deux chapelles au
Collège de Cluses …………………………………………..
5 285 Septembre 1617 Notice de Marie-Aimée de Rabutin-
Chantal, baronne de Thorens ………………………………. aut.
11F 286 23 octobre 1617 Dispense de proclamations de mariage.
15B 287 30 octobre 1617 Mandat à M. Claude Jacquin pour le
payement d'une somme …………………………………….. aut.
41 288 [Novembre] 1617 Témoignage sur les vertus de Mgr Juvénal
Ancina, Evêque de Saluces …………………………………. aut.
12E 289 2 novembre 1617 Permission pour un voyage à Lyon
accordée au Père André de Constance, du Tiers-Ordre de
Saint-François ……………………………………………… aut.
131 290 29 novembre 1617 Premier testament de saint François de
Sales ……………………………………………………….. aut.
132 291 29 novembre 1617 — Enveloppe du testament ……………… aut.
13E 292 [1617 ou 1620 ?] Lettres de recommandation en faveur d'un
quêteur de l'hospice du Grand Saint-Bernard ………………. aut.
29B 293 [1610-1618] Confidences à la Mère de Chantal.
294 [1610-1618 ?] — Directoire spirituel pour les Sœurs
Religieuses de la Visitation Sainte Marie.
30B 295 [1611-1618] Avis à la Sceur Marie-Adrienne Fichet,
Religieuse de la Visitation d'Annecy ……………………….
31B 296 [1612-1618] Avis à une Religieuse de la Visitation, sur les
vertus qu'elle doit pratiquer …………………………………
32B 297 [1612-1618] Autres Avis à une Religieuse de la Visitation,
sur l'obéissance et l'examen qui doit suivre l'oraison ………
298 1618 Regles de l'Institut de saint Augustin pour les Seurs.
(Traduction de saint François de Sales) ………………….. aut.*
42C 299 9 janvier 1618 Homologation du contrat de fondation pour
l'entretien d'un vicaire à Morzine …………………………..
43C 300 12 janvier 1618 Approbation et homologation d'une clause
du testament de M. Nicolas Clerc, curé de Saint-Félix,
concernant la fondation d'une chapelle et d'une école à Ville-
en-Michaille ………………………………………………...
12F 301 17 janvier 1618 Dispense de proclamations de mariage ….
aut.
2C 302 23 janvier 1618 Homologation de l'acte des Chanoines de
Sixt, du 30 décembre 1617.
inéd.*
inéd.
inéd.
inéd.
[472]
inéd.
inéd.
inéd.
inéd.
inéd.
inéd.
inéd.
inéd.
inéd.
inéd.
inéd.
[473]
307/332

31.8 Page 308

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» 199 14E 303 26 janvier 1618 Renouvellement des pouvoirs d'exercer le
ministère, accordé au Père André de Constance, du Tiers-
Ordre de Saint-François ……………………………………. aut.
» 200 15E 304 13 février 1618 Approbation d'un ouvrage de Don Redento
Baranzano, Barnabite.
» 110 44C1 305 20 février 1618 Requête de M. Gaspard de Lucinge et des
paroissiens de Sales, demandant la séparation de leur cure de
celle de Cranves et un prêtre pour la desservir, et Décret
épiscopal …………………………………………………….
» 112 44C2 306 21 février 1618 Dissolutio unionis parrochialium
ecclesiarum de Cranves et de Sales ……………………
» 115 45C 307 21 février 1618 Approbation et homologation d'une
donation en faveur des curés d'Epagny ……………………..
» 225 13F 308 10 mars 1618 Conventions relatives au mariage projeté
entre le baron Celse-Bénigne de Chantal et Mlle Huguette
Liotard ……………………………………………………… aut.
I, 234 16A 309 [Avant avril ? 1618] Requête au prince de Piémont, Victor-
Amédée, en faveur des curés d'Armoy et de Draillant …….. aut.
III, 201 16E 310 16 avril 1618 Délégation à Don Juste Guérin, Barnabite,
pour la visite ad limina ……………………………………. aut.
» 117 46C 311 29 mai 1618 Projet de transaction entre le Prévôt du Mont-
Joux et le curé des Allinges ………………………………… orig.
» 118 47C 312 29 mai 1618 Décret relatif à certains revenus appartenant à
la Confrérie du Saint-Esprit érigée à Jarsy-en-Bauges …….. aut.
» 226 14F 313 19 juin 1618 Attestation du mariage de M. Roc Calcagni
avec Mlle Marguerite de Chavanes …………………………. orig.
» 119 48C 314 22 juillet 1618 Reconnaissance des reliques de saint Joyre,
faite au prieuré de St-Jorioz.
IV, 3
315 [Fin juillet-septembre] 1618 Preface de François de Sales,
Evesque de Geneve, aux Sœurs du Monastere de la Visitation
d'Annessi.
III, 120 49C 316 7 et 8 septembre 1618 Supplique des syndics et paroissiens
de Saint-Félix touchant la célébration de la fête de saint Grat,
et Décret épiscopal ………………………………………….
» 160 14D 317 9 septembre 1618 Testimoniales en faveur de M. Jacques
Deléglise ……………………………………………………. orig.
» 27
6B 318 15 septembre 1618 Requête des chanoines de la Collégiale
de Samoëns au sujet d'une dévotion en l'honneur des saints
Fabien et Sébastien, et Ordonnance de saint François de Sales aut.
» 454
3C 319 15 septembre 1618 Décrets pour la réforme de [474] la
discipline régulière dans l'abbaye de Sixt ………………….. orig.
III, 464
4C 320 [Fin septembre 1618 ?] — Vœux de saint François de Sales
pour les Chanoines de Sixt.
IV, 51
321 [Mai-9 octobre 1618] Constitutions pour les Religieuses de
la Visitation (Variantes) ………………………………….. aut.
» 439
322 Septembre 1617-15 octobre 1618 Notes relatives à divers
points d'observance ………………………………………… aut.
III, 162 15D 323 Mai-mi-octobre 1618 Testimoniales en faveur de M.
Gaspard Perrucard de Ballon, présenté au Saint-Siège pour
coadjuteur, avec future succession, de l'Abbé de Chézery aut.
V, 329 33B 324 Vers le 15 octobre 1618 — Avis à la Sœur Anne-Marie Rosset
lors de son départ d'Annecy pour la fondation du Monastère
de la Visitation de Bourges.
IV, 504
6 325 16 octobre 1618 Lettre d'obédience à la Mère de Chantal
pour les fondations des Monastères de Bourges, Paris et
Dijon ………………………………………………………... aut.
» 505
7 326 16 octobre 1618 Erection de la Visitation d'Annecy en Ordre
religieux.
II, 244
15 327 [1619] Note sur la présence réelle de Notre-Seigneur Jésus-
Christ dans l'Eucharistie ……………………………………. aut.
IV, 51
328 1619 — Constitutions pour les Sœurs Religieuses de la
Visitation (Variantes).
II, 246
16 329 [Février ou mars] 1619 Déclaration touchant une conférence aut.
inéd.
inéd.
inéd.
inéd.
inéd.
inéd.
inéd.
inéd.
inéd.
inéd.
inéd.
inéd.
inéd.
inéd.
inéd.
308/332

31.9 Page 309

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avec le ministre du Moulin …………………………………
III, 257
4G 330 13 mai 1619 Approbation de la fondation d'une Messe
perpétuelle pour la Maison de Savoie en l'église des
Barnabites d'Annecy ………………………………………..
IV, 437
331 Juillet-août 1619 Notes au sujet du Formulaire de la
Profession de la Visitation …………………………………. aut.
V, 330 34B 332 Juillet-août 1619 Exercice envoyé à Mme de Villesavin.
III, 227 15F 333 4 septembre 1619 Attestation de l'abjuration d'Alexandre
Gauttier, seigneur de Beauregard …………………………… aut.
» 228 16F 334 11 septembre 1619 Testimoniales en faveur de M.
Guillaume de Bernard de Foras.
» 122 50C 335 18 novembre 1619 Supplique de M. Jean Moccand, curé
d'Abondance, pour l'érection de la Confrérie du saint Nom de
Jésus dans sa paroisse, et Approbation de saint François de
Sales ……………………………………………………….. aut.
» 203 17E 336 18 novembre 1619 Lettres de recommandation en faveur
d'un quêteur Dominicain du couvent d'Annecy …………….. orig.
V, 333 35B 337 [1612-1620] Aux Religieuses de la Visitation d'Annecy.
III, 123 51C1 338 17 mars 1620 Deux suppliques au sujet des Altariens et du
service religieux de la paroisse de Rumilly, et Décrets de
saint François [475] de Sales. Supplique du curé et des
Altariens ……………………………………………………. orig.
III, 125 51C2 339 17 mars 1620 Supplique des syndics, conseillers et habitants
de Rumilly ………………………………………………….. orig.
» 230 17F 340 [Vers la fin de mars ?] 1620 Requête à Henri de Savoie, duc
de Nemours ………………………………………………… aut.
» 233 18F 341 [Vers la fin de mars ?] 1620 Requête à M. de la Pierre …… aut.
» 489
2E 342 Entre le 9 mai et le 7 juin 1620 Abrégé des Constitutions
des Ermites du Mont-Voiron.
IV, 176
343 Vers juillet 1620 Formulaire de la Vêture pour les
Religieuses de la Visitation.
» 185
344 Vers juillet 1620 Formulaire de la Profession pour les
mêmes.
V, 334 36B 345 Juin ou commencement de juillet 1620 Avis pour la charge
de Supérieure, à la Mère Claude-Agnès de la Roche.
III, 473
1E 346 9 mai, 7 juin et 16 juillet 1620 Premier projet des Règles des
Ermites du Mont-Voiron, et Décrets épiscopaux ……………
V, 337 37B 347 Vers le 10 juillet 1620 Adieux à la Mère Claude-Agnès de
la Roche, première Supérieure de la Visitation d'Orléans.
IV, 508
8 348 16 juillet 1620 Lettre d'obédience aux Soeurs de Monthoux
et de Musy pour se rendre à Moulins ……………………….
III, 166 16D 349 22 juillet 1620 Confirmation de l'élection de M. Jean
Moccand, curé d'Abondance, pour la visite du district d'Evian aut.
V, 337 38B 350 27 juillet 1620 Lettre d'obédience à la Soeur Paule-
Jéronvme de Monthoux pour être Supérieure au Monastère
de la Visitation de Nevers.
III, 127 52C 351 6 septembre 1620 Procès-verbal de la consécration du
maître-autel de l'église de Nonglard et concession
d'Indulgences à cette occasion ……………………………… orig.
» 128 53C 352 22 octobre 1620 Permission de célébrer la sainte Messe dans
un oratoire construit sur la paroisse de Moye ……………… aut.
IV, 509
9 353 30 décembre 1620 Conventions du Prieur Jean-François de
Blonay pour le paiement de la dot de sa sœur Marie-Aimée,
Religieuse de la Visitation, et Approbation de saint François
de Sales …………………………………………………….. orig.
» 447
354 [1618-1620 ?] Directoires pour les Officières de la
Visitation.
III, 234 19F 355 9 janvier 1621 Supplique de François Delesvaux, sentence
du Procureur fiscal de l'évêché et Décret épiscopal ………… aut.
» 205 18E 356 13 février 1621 Faculté accordée au Père Philibert de
Bonneville, Capucin, d'ériger [476] dans le diocèse de
Genève les Confréries du Rosaire et du Saint-Sacrement …. aut.
V, 338 39B 357 8 mars 1621 Ecrit dans un volume de l'Introduction a la aut.
inéd.
inéd.
inéd.
inéd.
inéd.
inéd.
inéd.
inéd.
inéd.
inéd.
inéd.
inéd.
inéd.
inéd.
309/332

31.10 Page 310

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IV, 511
» 517
I, 238
III, 129
» 131
» 133
» 134
» 236
» 259
» 261
» 262
» 263
I, 300
V, 339
» 345
» 348
V, 352
» 356
IV, 51
III, 239
» 135
» 268
» 137
» 169
» 494
IV, 422
Vie devote donné à la Sœur Marie-Philiberte Christin,
tourière de la Visitation d'Annecy …………………………..
10 358 Avril 1621 Mémoire présenté par le prince Cardinal
Maurice de Savoie à Sa Sainteté Grégoire XV en faveur de
la Visitation …………………………………………………
11 359 Avril 1621 Autre Mémoire présenté par le Cardinal Maurice
de Savoie au même Pontife pour les Monastères de la
Visitation ……………………………………………………
17A 360 [Avril ou mai 1621 ?] Requête au prince de Piémont, Victor-
Amédée ; minute pour les curés d'Armoy et de Draillant ….. aut.
54C 361 29 mai 1621 Supplique de M. Gaspard Querlaz touchant le
service d'une chapelle dont il était recteur, et Décret épiscopal aut.
55C 362 4 juin 1621 Supplique des paroissiens de Tully au sujet des
réparations à faire à leur église, et Décret épiscopal ………. aut.
56C 363 11 juin 1621 Commission à MM. de Blonay et de Châtillon
d'examiner une requête des paroissiens de Lully …………… aut.
57C 364 11 juin 1621 Autre commission aux mêmes, concernant les
services à faire pour les fidèles inhumés au cimetière de
Saint-Bon.
20F 365 12-14 juin 1621 Requête relative à la conclusion d'un
mariage, et Décret de saint François de Sales ……………… orig.
5G1 366 1er, 5 octobre 1621 Documents relatifs à la cession du
prieuré de Saint-Clair aux Barnabites d'Annecy. Première
supplique des Pères Barnabites à saint François de Sales, et
Décrets de celui-ci ………………………………………….. orig.
5G2 367 4 novembre 1621 Deuxième supplique des mêmes, et
Décret du Saint ……………………………………………... orig.
5G3 368 18 novembre 1621 Troisième supplique des mêmes, et
Décret du Saint ……………………………………………... orig.
5G4 369 19 novembre 1621 Décret d'union du prieuré de Saint-Clair
au Collège d'Annecy ……………………………………….. orig.
16B 370 17 décembre 1621 Délégation de M. Claude de Nambride,
curé de Divonne, à l'administration d'une partie des biens
ecclésiastiques du bailliage de Gex ………………………… orig.
40B 371 Décembre 1620-1621 Avis à la Mère Paule-Jéronyme de
Monthoux, Supérieure de la Visitation de Nevers ………….
41B 372 [1615-1622] Fragments d'Avis aux Supérieures de la
Visitation.
42B 373 Novembre 1619-1622 Avis spirituels à une personne vivant
dans le monde ……………………………………………….
43B 374 Novembre 1619-1622 Autres Avis spirituels à une personne
vivant dans le monde ……………………………………….
44B 375 [Juin 1620-1622] Avis à la Mère Claude-Agnès de la Roche,
Supérieure de la Visitation d'Orléans.
376 1622 Constitutions pour les Seurs Religieuses de la
Visitation (Manuscrit de 1621).
21F 377 20 janvier 1622 Dispense de proclamations de mariage …. aut.
56C 378 9 avril 1622 Commission à M. Pierre Vernet, curé de
Corbonod, de visiter et bénir l'oratoire de Grex …………….. aut.
5G5 379 16 et 17 avril 1622 Quatrième supplique des Pères
Barnabites à saint François de Sales, et deux Décrets de celui-
ci ……………………………………………………………. orig.
59C 380 20 mai 1622 Requête de Mme Jeanne Constantin et de son
fils, touchant l'érection d'un oratoire en leur château de
Magny, et commission de saint François de Sales au chanoine
de Pollinge.
17D 381 5 juin 1622 Testimoniales de la tonsure conférée à Jean
Scozia, à Pignerol ………………………………………….. orig.
3E 382 31 août 1622 Lettres patentes en faveur des Ermites du
Mont-Voiron.
383 [Septembre ou octobre] 1622 Advertissement sur
l'abnegation et renoncement qu'il faut faire avant la
Profession, envoyé à la Sœur Marie-Christine Scaglia, aut.
inéd.
inéd.
inéd.
inéd.
inéd.
inéd.
inéd.
inéd.
inéd.
inéd.
inéd.
inéd.
[477]
inéd.
inéd.
inéd.
inéd.
inéd.
310/332

32 Pages 311-320

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32.1 Page 311

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III, 206
» 240
I, 134
IV, 443
II, 398
V, 90
» 93
» 93
» 96
» 98
» 360
» 364
» 367
V, 369
» 370
» 371
» 372
» 374
» 377
Dominicaine (2de leçon) ……………………………………..
19E 384 29 octobre 1622 Permission pour un voyage à Lyon
accordée au Père André de Constance, du Tiers-Ordre de
Saint-François ……………………………………………… aut.
22F 385 3 novembre 1622 Commission à M. Laurent de la Place de
célébrer le mariage de M. Antoine de Rossillon avec Mlle
Marie de Viry ……………………………………………….
14 386 6 novembre 1622 Second testament de saint François de
Sales, fait conjointement avec Jean-François, son frère et
Coadjuteur.
387 [1619-1622 ?] Du Supérieur de la Visitation et moyens
d'union.
19A 388 Sans date Sentiment sur la collation des bénéfices et la
nomination des curés.
4A 389 Fragments sur la Sainte Vierge.
5A 390 Sur le signe de la Croix.
6A 391 De la charité dans les jugements.
7A 392 Sur la conduite à tenir par les Pasteurs de l'Eglise.
8A 393 Conseils aux Supérieurs.
45B 394 Avis spirituels à une Religieuse de la Visitation ………………
46B 395 Autres Avis spirituels à une Religieuse de la Visitation ………
47B 396 Fragment sur la pauvreté ……………………………………...
48B 397 Fragments sur l'obéissance ……………………………………
49B 398 Conseils à un Religieux pour l'examen de conscience.
50B 399 Méditation sur le choix d'un état de vie pour un aspirant à la
vie religieuse.
51B 400 Autre méditation pour le même aspirant, sur la naissance de
Notre-Seigneur Jésus-Christ.
52B 401 Troisième méthode pour réciter le Chapelet.
53B 402 Paraphrase de l'Oraison dominicale …………………………..
inéd.
inéd.
inéd.
inéd.
inéd.
[478]
inéd.
inéd.
[479]
__________
311/332

32.2 Page 312

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Lettres découvertes après l'impression des volumes
précédents
_____
(CCLXXVI). A la Baronne de Chantal. La santé est inutile si
elle n'est employée à la « conqueste de la sainteté. » Ecrire à
la Baronne ne peut nuire au Saint. Plus la croix est grande,
moins elle pèse. Pieux souhaits, ardentes aspirations à propos
d'une « image devote ». Un projet de voyage à Annecy et une
décision. Avis de saint François de Sales touchant le désir de
mesdames Brûlart et de Villers d'accompagner en Savoie Mme
de Chantal. Mme de Boisy recevra celle-ci « avec plus de
cœur et d'amour. » — Prière de l'excuser auprès de MM.
Frémyot, père et oncle
Madame,
La Roche, 28 février 1605. 1564
J'ay receu vos deux lettres du 3 et XVII febvrier, et pense qu'a mesme tems vous aurés eu
celle que je vous escrivis par monsieur de Maillans 1565, laquelle vous aura tout entierement asseuré
de ma santé, miserable santé qui, jusques a present, n'a point esté employee a la conqueste de la
sainteté. Prions Dieu, ma chere Seur, qu'il m'oste tout le soin que j'ay de celle la, sinon entant quil
regardera l'acquisition de celle ci. Que si elle doit estre autant inutile ci apres qu'elle l'a esté jusques
a present, il n'est pas expedient d'en desirer la conservation. Mais laissons-la la, elle ne merite pas
que nous y pensions.
Il est vray que les medecins m'ont defendu d'escrire le soir apres souper, qui est le seul tems
duquel je puis disposer ; mais il (sic) ne m'ont pas defendu de vous escrire en [481] plein jour,
comme je fay maintenant 1566. J'ay tant de suavité au desir que j'ay de vostre bien spirituel que tout
ce que je fay sous ce mouvement ne me sçauroit nüyre. Je vous escriray donques, et ne vous
desplayse, et le plus souvent que je pourray. Vos lettres, pour longues qu'elles soyent, ne me sont
jamais que trop courtes. Trefves a toutes ces considerations ; les amitiés cimentees au sang de
l'Aigneau n'ont pas besoin de tant de ceremonies.
1567 Vous me dites que vous portes tous-jours vostre grande croix, mais qu'elle vous pese
moins par ce que vous aves plus de force. O Sauveur du monde, que voyla qui va bien ! Il faut
porter sa croix1568 ; quicomque la portera plus grande s'en treuvera mieux. Dieu donques nous en
1564 Une photographie de cette lettre, dont l'Autographe appartient à M. le chanoine Minat, à Saint-Dizier (Haute-
Marne), nous fut offerte en 1931 par M. le chanoine Viard, curé-doyen de Notre-Dame de la même ville. Le texte
tronqué de l'édition de 1626, donné au tome XIII de la nôtre, pp. 16, 17, est ainsi rétabli en son entier, de même que
sa vraie date.
1565 Jean-Marin de Maillans (voir tome XII, note (194), p. 108).
1566 Le Saint avait été très malade en janvier, et ses lettres du 18 février sont en partie écrites par secrétaire. (Voir tome
XIII, Lettres CCLXXII-CCLXXV.)
La phrase : « J'ay tant de suavité » etc., constitue le début de la lettre dans la première édition.
1567 Les trois alinéas suivants figurent dans notre Edition, tome XIII, p. 17, d'après l'édition de 1626. La suite est
inédite, sauf la phrase finale : « Dieu soit en tout et sur tout beni, » etc., les clausules et la date, moins le quantième.
1568 Cf. Luc., XIV, 27.
312/332

32.3 Page 313

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veuille donner des plus grandes, mais quil luy playse nous donner des grandes forces pour les
porter. Or sus, donques, courage : Si vous aves confiance vous verres la gloire de Dieu1569.
Je ne vous respons pas maintenant, car je ne sçaurois ; je ne fay que passer legerement sur
vos lettres. Je ne vous envoyeray rien a present pour la reception du tressaint Sacrement ; si je puis,
ce sera a la premiere commodité.
Je vis un jour un'image devote : c'estoit un cœur sur lequel le petit Jesus estoit assis. O
Dieu, dis-je, ainsy puissies-vous vous asseoir sur le cœur de cette fille que vous m'avés donnee et
a laquelle vous m'aves donné. Il me playsoit en cett'image que Jesus estoit assis et se reposoit, car
cela me representoit une stabilité ; et me playsoit quil y estoit enfant, car c'est l'aage de parfaitte
simplicité et douceur. Et communiant au jour auquel je sçavois que vous en faysies de mesme, je
logeois par desir ce beny Hoste en cette place et chez vous et chez moy.
Vous me demandés quand ce sera que vous viendrez de deça. Je respons sans ceremonies
et vous dis : Si vous voules venir au printems, venes entre Pasques et la Pentecoste [482]
precisement, car passé cela je seray a la Visite, Dieu aydant. J'excepte de ce tems la troysiesme
semayne apres Pasques quil faut que je vacque a nostre Sinode ; passé cela, au tems quil vous
plaira, j'en suis prest. Mais je vous adjure de venir en tems et en equippage tel que je vous puisse
voir au moins huit jours durant, car il faut bien cela pour bien establir toutes les pieces de
nostr'interieur, lesquelles il faudra sans doute revoir, pour voir sil y a quelque defaut. Et ce qui me
fait prendre cette resolution, c'est ce que vous me dites quil faut qu'il y ait quelque chose en vostre
esprit qui n'aye pas esté satisfait. Et puis, je veux que cett'entrevëue serve pour plusieurs annees :
quand donques vous aures plus de loysir tout en ira mieux 1570.
Madame Brulart 1571 desireroit de venir, mais je n'en suys nullement d'advis pour le respect
de sa condition qui ne me permet pas d'en conclure autrement ; mais je feray bien que vostre
voyage luy servira. Quant a madamoyselle de Vilers je n'ose pas luy dire que non, si elle croit que
le voyage luy soit fort utile et que monsieur de Vilers le luy permette 1572.
J'ay choysi le lieu de nostre entrevëue chez ma mere, au (sic) chams, par ce qu'en la ville
je ne puis pas dire qu'un seul quart d'heure soit a ma disposition, et aussi que vostre hostesse vous
y recevra mieux, c'est a dire avec plus de cœur et d'amour 1573. Reste que vous prenies vostre
resolution, et d'ores en avant je remettray beaucoup de choses a ce tems-la, et a la premiere je vous
diray ce que je desire que vous præpariés en vostre esprit pour apporter a cett'occasion. [483]
Excuses moy vers messieurs vos pere et oncle 1574 qui m'ont escrit, car je n'ay nul loysir
que celuy d'entre le sermon et le disner pour faire ce petit despeche. Conferés avec madamoyselle
de Vilers du voyage, mais en sorte que si elle n'est pas desireuse de venir elle n'y soit point
provoquee, car je crains tous-jours les desgoustz des maris pour ces voyages.
Dieu soit en tout et sur tout beni, et veüille se saysir de nos cœurs es siecles des siecles.
Amen.
Vostre serviteur tres dedié es entrailles de N. Sr.
FR. †
A La Roche, XXVIII febvrier 1605.
Il sera necessaire de m'advertir du tems auquel vous voules venir, et que tout cela soit avec
fort peu de bruit. Dieu demeure avec vous.
A Madame
1569 Joan., XI, 40.
1570 Arrivée à Thorens le 21 mai, Mme de Chantal en repartit le 31, après avoir amplement conféré avec son saint
Directeur. (Voir tome XIII, notes (161), (163), pp. 45, 46.)
1571 Voir tome XII, note (598), p. 267.
1572 Probablement, la permission ne fut pas accordée, car « Madamoyselle de Vilers » ne vint pas en Savoie. Sur cette
dame et sur son mari, Philippe de Villers, voir tomes XIII, note (103), p. 23, et XIV, note (1032), p. 356.
1573 En effet, c'est au château de Sales que Mme de Boisy reçut avec grande joie la Baronne ; à son départ, elle lui confia
sa fille Jeanne qui devait mourir en 1607 entre les bras de la Sainte. (Voir tomes XIII, p. 41, et Lettre CDXVIII.)
1574 Sur le président Bénigne Frémyot et sur Claude, son frère, voir tome XII, notes (822), p. 326, et (627), p. 280.
313/332

32.4 Page 314

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Madame la Baronne de Chantal.
Revu sur l'Autographe appartenant à M. le chanoine Minat, à Saint-Dizier (Haute-Marne). [484]
314/332

32.5 Page 315

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MMCI. A Messieurs les Curés de Valromey et de Sur-Semine1575
(Inédite). Monsieur Rosetain est chargé de transmettre aux
ecclésiastiques destinataires l'avis du Saint au suiet de leurs
bénéfices.
Annecy, 13 avril 1606.
Messieurs mes Confreres,
Nous avons conferé avec monsieur Rosetan 1576, des moyens qui nous semblent requis pour
pouvoir bien establir la portion congrue de vos benefices. Il vous en dira plus amplement
nostr'advis que je ne sçaurois vous l'escrire. Et je croy que vous le treuveres bon et vous
accommoderés a l'executer, puisquil tend au bien de vos eglises et a la plus grande gloire de Nostre
Seigneur, a la bonté duquel je vous recommande et desire le reciproque de vous pour moy qui suis
Vostre confrere bien humble et aff
FRANÇS, E. de Geneve.
13 avril 1606, a Neci.
A Messieurs
Messieurs les Curés de Valromey
et de Sur Samie.
Revu sur l'Autographe conservé au 1er Monastère de la Visitation de Paris. [485]
_____
1575 La Semine est un pays situé sur les bords du Rhône près du Vuache et des Usses ; géologiquement, il se continue
de l'autre côté du fleuve. On l'appelle ordinairement la Michaille, mais il se peut aussi qu'on lui ait donné parfois le
nom de Sur-Semine, c'est-à-dire, pays dominant la Semine. Ce qui confirme cette supposition, c'est que la présente
lettre est adressée aux curés de toute la partie du diocèse de Genève qui occupait alors le Bugey ; or, ce territoire se
composait du Valromey et de la Michaille : quoi d'étonnant, dès lors, que Sur-Semine désigne ce dernier pays ?
Saint François de Sales a écrit Samie ; probablement, il a oublié le signe d'abréviation pour n.
1576 Jean Rosetain, en 1606, curé de Chavornay. (Voir tome XIX, note (1167), p. 372.)
315/332

32.6 Page 316

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MMCII. A Madame de la Forest, Religieuse de l'Abbaye de
Bons1577 (Inédite). Une excommunication qui, peut-être, reste
sans effet. Quand nous commettons des fautes, les réparer par
l'humilité, et nous abimer dans la confiance en Dieu et la
défiance de nous-mêmes. Soumission amoureuse à l'Abbesse
du monastère ; ne pas la regarder « comme mauvaise, mais
comme malade ». Nos Supérieurs sont les officiers de Dieu.
Vaincre ses répugnances en témoignant à l'Abbesse une vraie
charité.
Madame,
[Octobre 1608-1610 1578 ?]
Je suis marry que je ne puis vous escrire plus souvent et qu'encor, quand je le fay, mes
lettres tardent tant en chemin. La derniere que j'ay receu de vostre part me fait voir vostr'esprit en
estonnement pour l'excommunication jettee contre vous de la part de M. vostre Superieur ; sur
quoy j'ay a vous dire deux choses.
L'une, que vostre droitt'intention et la bonté de vostre cause rend la faute, sil y en a, bien
fort legere ; l'excommunication aussi n'a peut estre pas esté effectuelle. L'autre, que quand en vraye
verité vous auries fait la plus grande faute du monde, il faudroit s'en resoudre et accoyser par une
grande humilité et sousmission a la misericorde de Dieu, sans se descourager nullement, ni entrer
en aucune sorte de regret. Car enfin, ma chere Fille, ce n'est pas grand merveille que nous facions
des fautes ou bien que nous n'en facions pas. Mon Dieu, il me semble que c'est alhors que nous
devons nous abismer tant plus en une entiere et [très] soüefve... 1579 confiance en sa divine bonté,
et en [une] [486] douce et paysible desfiance de nous mesme. C'est pourquoy je vous prie de ne
plus permettre a ces tristes suggestions de l'ennemi qu'elles troublent vostre cœur, lequel ayant
imploré la misericorde de Dieu, ne doit pas moins estre asseuré et consolé qu'auparavant.
Quant a la difficulté que vous aves de vous humilier et sousmettre a vostre Abbesse 1580, je
vous conseille de la vaincre en toutes les façons quil vous sera possible. Ouy, tandis qu'elle tient
cette place-la, ou dignement ou indignement que ce soit, il faut luy rendre le devoir non seulement
exactement, mais encor amoureusement. Et en cela il se faut surmonter et domter vostre cœur,
lequel sans doute est incliné a l'indignation, et faut il l'incliner a la compassion ; et tant plus vostre
Abbesse aura de misere, tant plus faut il luy avoir de commiseration. Ce n'est rien, ma chere Fille,
d'obeir a des Superieurs aggreables ; le fait de la vraye obeissance c'est d'obeir aux desaggreables
et, comme dit l'Apostre1581, aux discoles. Dieu aura infiniment aggreable cette violence que vous
vous feres pour faire le tout amoureusement, car c'est l'importance. Il vous faut regarder cette
Abbesse non point comme mauvaise, mais comme malade, et comme saint François, sainte
Catherine de Sienne et plusieurs autres Saintz baysans et servant les ladres, ne les ont pas baysé
comme ladres, mais comme membres de Nostre Seigneur, en les considerant en luy et luy en eux,
aussi ne devons nous pas considerer nos Superieurs comme pecheurs, mais comm'officiers de
Dieu, regardant Dieu en eux et eux en Dieu, car encor que leur personne ne fut pas en Dieu, leur
1577 Jeanne-Bonaventure de la Forest, sœur de Mme de la Fléchère. L'adresse manque, mais la destinataire que nous
indiquons est très probable. (Voir tome XIV, note (600), p. 204.)
1578 Plusieurs lettres à Mme de la Fléchère, le titre de Madame que le Saint donne à sa correspondante et qu'on ne
retrouve pas plus tard, nous font supposer que ces pages ont été écrites entre les deux dates proposées.
1579 Mot qu'on n'a pu déchiffrer, ainsi que les deux autres placés entre [ ].
1580 Jeanne de Vignod (voir tome XIV, note (603), p. 206).
1581 I Petri, II, 18.
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32.7 Page 317

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office neanmoins y est. Ma chere Fille, vous voyla en une occasion laquelle vous doit estre plus
pretieuse que l'or, car en icelle vous pouves exercer les grandes resignations, les fortz renoncemens
et les vives douceurs si souvent promises et desirees pour l'amour de Dieu.
Mais sur ce que vous me demandes de la hantise et familiarité que vous deves rendre a
vostre Abbesse, je respons qu'attendu le peu de proffit que vous y pouves faire, ainsy que vous me
dites, il suffira que vous luy rendies franchement, [487] humblement, promptement et
amoureusement les devoirs communs. Mais neanmoins, par ce que vous n'aves pas tant de
difficulté a cette conversation la pour l'inutilité qui y est que pour la repugnance interieure, je vous
conseille de vous violenter le plus que vous pourres a la voir quelquefois sans necessité et luy
tesmoigner une vraye charité, d'autant qu'encor que tout cela luy fut inutile, il ne le sera pas a vous
qui domteres vostre courage et mangeres le pain cuit sous la cendre1582 et bayseres la croix.
Madame vostre Seur, ma chere fille, m'escrivit hier que Monsieur de Cisteaux 1583 vous
avoit envoyé quelque sorte de consolation sur ce sujet, en quoy j'ay eu ma part.
J'ay receu le poulet d'Inde, lequel vous ne devies nullement m'envoyer.
Nostre Seigneur soit tous-jours au milieu de vostre esprit, et je suis en luy,
Madame,
Vostre tres affectionné et tres [asseuré serviteur 1584]
F. E. de Geneve.
Revu sur une copie de l'Autographe conservé chez les Révérendes Mères Ursulines de Québec
(Canada). [488]
_____
(MCCCXL). A la Présidente du Faure1585 (Fragment inédit). Un
mot du cœur. — Prière du Saint pour la destinataire.
Annecy, 7 avril 1617.
Je m'imagine que vous estes sur vostre depart pour Languedoc, ma tres chere Fille (car c'est
le mot du cœur), et avant que vous soyes en chemin je vous resalue mille et mille fois, priant Dieu
qu'il vous accompaigne et vous tienne tous-jours de sa sainte main, puisque par sa bonté il vous a
saysie, affin que vous fussies a jamais toute sienne. 1586
……………………………………………………………………………………………………..
Annessi, le VII avril 1617.
A Madame
Madame la Præsidente du Faure.
Revu sur l'Autographe appartenant à M. le marquis de Monteynard, à Tencin (Isère). [489]
_____
1582 III Reg., XVII, 13, XIX, 6.
1583 Nicolas Boucherat, Général de l'Ordre depuis 1604. (Voir tome XIV, note (252), p. 81.)
1584 Saint François de Sales avait-il écrit : tres asseuré ou bien tres humble ? Il est difficile de le dire. Le dernier mot
est certainement serviteur qu'il aura mis en abrégé : serr.
1585 Une année à peine après l'impression de notre tome XVIII, M. le marquis de Monteynard nous communiqua
l'Autographe de cette lettre, tronquée dans la première édition (1626) et les suivantes. Nous rétablissons le premier
alinéa, qui est inédit, la date qui était fausse, et l'adresse.
Pour la destinataire, voir tome XVIII, note (889), p. 260.
1586 Voir la suite au tome XVIII, p. 59.
317/332

32.8 Page 318

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MMCIII. A Monsieur Sylvestre de Saluces de la Mente, Abbé
d'Hautecombe1587. Reconnaissance de saint François de Sales
pour un service qui lui est rendu ; sa pauvreté. Il aurait de
bonnes raisons pour se dispenser d'accompagner le duc de
Savoie et le prince Cardinal en France ; mais pour leur être utile,
mort ou vif il ira. Si l'Abbé d'Hautecombe lui indique le jour,
le Saint ira le chercher en son monastère. Remerciements de
l'Evêque de Chalcédoine.
1588 Monsieur,
Annecy, 3 novembre 1622.
Je ne me suis pas estonné quand j'ay sceu par une lettre de monsieur le premier Præsident
1589, le bon office qu'il vous plait de faire pour moy et pour mon voyage envers Monseigneur le
Serenissime Prince Thomas 1590. Et c'est la verité que ne faysant point de reserve, comme je croy
que chacun sçait que je ne puis pas faire, il me sera malaysé de treuver l'argent necessaire pour
cett' occasion, en laquelle il importe que le monde ne sache pas que les serviteurs d'un tel maistre,
comm'est Son Altesse 1591 et Monseigneur le Prince Cardinal 1592, ne sont pas en necessité. Que si
il n'estoit pas grandement utile a leur service que je fis le voyage, certes, j'aurois bien des bonnes
et solides raysons pour m'en excuser ; comme au contraire, sil y va de leur service, mort ou vif je
ne voudrois nullement arrester, ains irois [490] ou me ferois traisner. Sur tout j'ay une particuliere
consolation de sçavoir que vous estes de la partie, et sil vous sembloit a propos que je vous allasse
prendre, en passant, a Autecombe 1593, des le Rosne, sur lequel mes incommodités m'obligent de
faire mon voyage tant que je pourray, pourveu qu'il vous plaise de me marquer le jour, je m'en
estimerois grandement honnoré : comm'encor, qu'en tous evenemens vous me tenies,
Monsieur,
Vostre tres humble et tres affné serviteur,
FRANÇS, E. de Geneve.
3. 9. 1622, Annessi.
Monsieur, il y a long tems que, comme je vous dis a Turin 1594, Monsieur de Calcedoine
mon frere 1595 m'a communiqué l'obligation quil a a vostre courtoysie, et tout presentement il me
1587 Voir tome XVII, note (1280), p. 390.
1588 Cette lettre, qui nous était inconnue jusqu'ici, fut imprimée à Carmagnola (Piémont) en 1926, dans une brochure
intitulée : Lettere inedite dì Giambattista, Bodoni. Precede una Notizia delia Raccolta di Lettere del secolo XVI°, del
XVII°, del XVIII° e del XIX°, che si conserva nel Castello di Verzuolo ; con la veduta del Castello di Vezuolo e il
facsimile d'una lettera di San Francesco di Sales, dal Prof. Giacomo Rodolfo. (Carmagnola, dalla Tipografia
Scolastica, MCMXXVI.)
1589 Antoine Favre, premier président du souverain Sénat de Savoie. (Voir tome XI, note (68), p. 18.)
1590 Le prince de Carignan, Thomas de Savoie (voir tome XX, note (878), p. 285). Il s'agit du dernier voyage de saint
François de Sales en France, pour accompagner à Avignon le duc de Savoie, qui allait féliciter Louis XIII de la victoire
remportée sur les protestants. Charles-Emmanuel y arriva le 17 novembre ; le saint Evêque, parti d'Annecy le 8,
atteignit Lyon le 9 ou le 10. (Voir tome XX, notes (1152), (1154) des pp. 389 et 390.)
1591 Charles-Emmanuel Ier, duc de Savoie (voir tome XI, note (389), p. 168).
1592 Le cardinal Maurice de Savoie (voir tome XIII, note (934), p. 345).
1593 Monastère de Cisterciens (voir tome XI, note (187), p. 76) dont le destinataire était Abbé commendataire.
1594 Lors du séjour que le Saint y fit en cette même année 1622, depuis environ la mi-juin jusque vers le 21 août. (Voir
tome XX, note (1030), p. 348.)
1595 Jean-François, sacré évêque à Turin le 17 janvier 1621. (Voir tome XVII, note (207), p. 48.)
318/332

32.9 Page 319

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prie de le vous ramentevoir, avec asseurance qu'il est vostre serviteur.
A Monsieur
Monsieur [de] la Mente,
Conseiller de S. A. Serme, Abbé d'Hautecombe,
Senateur au souverain Senat.
Revu sur une photographie de l'Autographe appartenant à Son Altesse Humbert, Prince de
Piémont. [491]
_____
319/332

32.10 Page 320

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Erratum
_____
Page 383, traduction : de me rendre bon et saint, afin le monde lire : afin que le monde.
320/332

33 Pages 321-330

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33.1 Page 321

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Table des matières
_____
Son Excellence Mgr Florent du Bois de la Villerabel aux lecteurs de l'Edition authentique
des Œuvres de saint François de Sales …………………………………………………..
Préface …………………………………………………………………………………...
Avis au Lecteur …………………………………………………………………………..
_____
V
XV
XXII
SIXIÈME SÉRIE : ASCÉTISME ET MYSTIQUE
A) OPUSCULES ET FRAGMENTS SANS DESTINATAIRES
I
II
III
IV
V
VI
VII
VIII
FRAGMENTS D'UNE CONCORDANCE SUR LA PASSION, 1594-
1596, (Inédit) ………………………………………………………………
DÉCLARATION MYSTIQUE SUR LE CANTIQUE DES CANTIQUES,
[1602-1604], Advertissement. Preface. Le Cantique des Cantiques,
eglogue de Salomon : I. Premier empeschement : la souvenance des playsirs
sensibles. II. Second empeschement : la distraction imaginative. III.
Troisiesme empeschement : les louanges humaines. IV. Quatriesme
empeschement : le travail du cors. V. Cinquiesme empeschement : les
respectz humains. VI. L'ame ayant surmonte tous les empeschemens, n'a
plus besoin de remede, mays demeure absorbee et unie en Dieu par une
parfaitte devotion. — Approbation des Docteurs ………………………….
FRAGMENTS SUR LES VERTUS CARDINALES ET MORALES,
1614. Avertissement des Editeurs ……………………………………….
[Quelques moyens pour transformer nos œuvres par la charité.] — Comme
l'amour employe les vertus cardinales, et premierement la prudence.
Comme la charité employe la justice. De la force. De la temperance
ou moderation ……………………………………………………………...
FRAGMENTS SUR LA SAINTE VIERGE ………………………………
SUR LE SIGNE DE LA CROIX …………………………………………..
DE LA CHARITÉ DANS LES JUGEMENTS. Dieu seul doit juger.
Mal penser et parler mal du prochain est la marque la plus sûre d'une âme
vicieuse. Le portrait d'Antigone. Ceux qui jugent témérairement et
qui médisent sont des aveugles et des esprits pleins de malice. Injustice,
de vouloir être absous de ses fautes et de condamner les moindres [493] en
autrui. Qui ne regardera son prochain avec pitié gâtera toutes les parties
de son âme. Le temps fera voir si nous sommes meilleurs que ceux que
nous jugeons. Exemples. Considérons nos propres défauts, et nous
ne verrons pas les vices du prochain ……………………………………….
SENTIMENT DE SAINT FRANÇOIS DE SALES SUR LA CONDUITE
A TENIR PAR LES PASTEURS DE L'EGLISE. Comment un
Supérieur doit sortir de la lecture et de la méditation. Ne pas négliger le
bon exemple. Quel doit être l'abord de ceux qui commandent. Leur
attitude envers ceux qui les visitent. Les « malades honteux » et les
remèdes pour les grandes maladies de l'âme. Suivre une multiplicité de
conseils est chose dangereuse ……………………………………………...
CONSEILS AUX SUPÉRIEURS. Porter remède aux moindres
murmures. Avec quelle discrétion un Supérieur doit accorder quelques
particularités. Les enfants qui pleurent. Bien examiner les sujets
avant de les recevoir. Certains esprits trop prompts sont comme la pierre
3
10
40
43
90
93
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96
98
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33.2 Page 322

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lancée avec la fronde. Mieux vaudrait pour un Ordre religieux n'avoir
que deux Maisons, plutôt que de les multiplier par la prudence humaine.
Les fondements de la vie religieuse ………………………………………..
IX SIMILITUDES. Premier recueil, 1594-1598, (Inédit) ……………………. 100
X Deuxième recueil, 1594-1598, (Inédit) ……………………………………. 105
XI Troisième recueil, 1594-1598, (Inédit) ……………………………………. 107
XII Similitudes et Notes sur la Sainte Vierge, [1602-1604], (Inédit) ………….. 110
XIII Recueil de similitudes, [1600-1604], (Inédit) ……………………………... 113
XIV Recueil de similitudes, 1612-1614, (Inédit) ……………………………….. 149
XV Autre recueil de similitudes, 1612-1614, (Inédit) …………………………. 153
XVI Recueil de similitudes et Notes pour la rédaction du Traité de l'Amour de
Dieu, 1612-1614, (Inédit) …………………………………………………. 155
B) PETITS TRAITÉS ET AVIS A DES DESTINATAIRES PARTICULIERS
I AVIS A Mme ROSE BOURGEOIS, ABBESSE DU PUITS-D'ORBE, sur
les devoirs que lui imposent sa profession religieuse et sa charge, avril
1604. Qu'est-ce que la dévotion. La vraie Religieuse « doit estre
devote » et fervente. Fuir le péché et tout ce qui peut être une entrave
pour l'âme. La méditation, l'Office divin, les oraisons jaculatoires, la
lecture spirituelle. Conseils pour le coucher et le lever. Comment
on acquiert la « promptitude a bien faire ». La sainte Communion les
premiers dimanches de chaque mois : préparation et action de grâces.
Eviter la mélancolie, et pourquoi. Douceur, joie, humilité et
tranquillité, accompagnées d'une grande confiance en Dieu.
Obligation, pour une Abbesse, de travailler à la perfection de ses
Religieuses et de réformer le [494] Monastère. L'exemple est le
meilleur moyen. Le dortoir doit être fermé aux séculiers. Livres à
lire pendant les repas. Que faire pour l'Office. Choisir une
Religieuse pour les affaires temporelles. Le rétablissement de la
perfection et de la Règle sera le plus grand service que l'Abbesse pourra
rendre à Notre-Seigneur ; le désirer et le poursuivre, mais avec patience 165
II MÉDITATION POUR LE COMMENCEMENT DE CHAQUE MOIS
AVANT LA SAINTE COMMUNION, ADRESSÉE A LA MÊME, [avril
1604]. Pourquoi sommes-nous en ce monde ? Tout ce qui est
contraire à notre fin dernière doit être rejeté. Malheur de ceux qui n'y
pensent point. Aveu de notre misère et résolutions. Un mot de saint
Bernard. La couronne de roses après la couronne d'épines ……
170
III FRAGMENTS D'AVIS SUR LA MANIÈRE DE MÉDITER, SUIVIS
D'UNE MÉDITATION INCOMPLÈTE SUR LE CRUCIFIEMENT DE
NOTRE-SEIGNEUR JÉSUS-CHRIST, [avril 1604] ………………
173
IV MÉDITATION SUR LE CRUCIFIEMENT DE NOTRE-SEIGNEUR
JÉSUS-CHRIST, DONNÉE A LA PRÉSIDENTE BRULART le 15 avril
1604 ……………………………………………………………….
180
V FRAGMENT D'UN AVERTISSEMENT SUR LA PERFECTION
CHRÉTIENNE, ENVOYÉ A LA PRÉSIDENTE BRULART, 3 mai
1604, (Minute inédite). En quoi consiste la perfection. Reconnaître
la volonté de Dieu pour l'accomplir. Les commandements de Dieu et
le devoir d'état ; les tribulations et les maladies ; les « petites traverses et
incommodités ». Erreur de ceux qui se préparent aux grandes épreuves
et qui ne savent pas supporter les petites. Pour les actions de peu
d'importance et auxquelles on n'est pas obligé, considérer avec liberté 185
322/332

33.3 Page 323

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d'esprit ce qui tend davantage à la gloire de Dieu et se résoudre. Ce qui
doit être soumis au guide de notre âme. Deux moyens pour parvenir à
la perfection …………….
VI EN QUOI CONSISTE LA PERFECTION ET COMMENT
L'ACQUÉRIR ; DEGRÉS DE L'OBÉISSANCE. ECRIT ENVOYÉ A LA
BARONNE DE CHANTAL, [3 MAI 1604 ?]. La perfection n'est autre
chose que la charité. Qu'est-ce qui la produit. La prière, les
Sacrements, l'exercice des vertus : moyens pour l'acquérir. Les trois
vertus de Religion, quoique non vouées, rendent parfait. Les degrés de
l'obéissance par rapport à ceux à qui on la rend. Exemple de Jésus-
Christ. Obéir aux commandements de Dieu et des Supérieurs, aux
conseils évangeliques suivant sa vocation, aux inspirations de la grâce.
L'obéissance dans les choses agréables, dans les indifférentes et dans les
difficiles …………………………………………………………….
188
VII AVIS A LA BARONNE DE CHANTAL, 26 ou 27 août 1604. Pensées
et aspirations pour le lever. Exercice pour la sainte Messe. Le congé
et la bénédiction du bon Ange. Oraisons jaculatoires et regard sur « la
divine Bonté ». L'entrée [495] dans les plaies du Sauveur
…………………………………………………………………
191
VIII DIVERS AVIS POUR L'ORAISON ET SUR LA MANIÈRE DE SE
COMPORTER DANS LES EXERCICES SPIRITUELS DE LA
JOURNÉE, ENVOYÉS A Mme ROSE BOURGEOIS, ABBESSE DU
PUITS-D'ORBE, le 9 octobre 1604.
1) Meditation sur l'eslevation de Jesus Christ crucifié ………………… 194
2) Conseils pour la meditation. Quand faut-il « lascher la bride aux
affections ». Un avis de saint François de Sales et de saint Pierre
d'Alcantara. A qui on peut parler pendant la méditation. Trois
remèdes contre les engourdissements d'esprit et les sécheresses.
Pourquoi on se met en la présence de Dieu. Les courtisans en la
chambre du roi et l'âme dans l'oraison. C'est un grand honneur d'être
auprès de Dieu. Que faire lorsqu'on est distrait. L'oraison doit
toujours se finir en paix et avec la résolution de servir Dieu fidèlement
200
3) Exercice pour le matin. Considérations et aspirations pour le lever.
Exercice de la « Preparation » ; en quoi il consiste. Une partie de
celui-ci peut se joindre à la méditation quand elle se fait le matin. Ce
qu'il ne faut pas prévoir pendant l'oraison …………………………….. 204
4) Avis pour bien entendre la sainte Messe …………………………… 206
5) Les retours vers Notre-Seigneur, les oraisons jaculatoires et la pensée
de la mort pendant la journée ………………………………………….. 207
6) Exercice pour le soir. L'examen de conscience. Le souvenir de la
mort ………………………………………………………………….
208
7) Avis divers sur les exercices précédents. Vivre sans scrupules et
servir Dieu avec amour. La durée de la méditation, et quand la faire.
Encore la Messe. C'est une superstition de croire qu'il faille
recommencer le Chapelet ou autres prières quand, légitimement, on les a
interrompus. Se mettre toujours en la présence de Dieu avant de prier
……………………………………….…………………………………… 209
IX PETIT TRAITÉ SUR LA SAINTE COMMUNION, RÉDIGÉ POUR
Mme ROSE BOURGEOIS, ABBESSE DU PUITS-D'ORBE, [décembre
1604, ou commencement de 1605]. Une seule chose est nécessaire pour
communier : le bon état de l'âme. Chasser de notre entendement toute
curiosité. Comparaison de la manne. S'humilier dans les tentations, 211
323/332

33.4 Page 324

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ou encore les mépriser. Qu'est-ce que la sainte Communion ? Pour
s'y préparer, oublier les affaires domestiques et les choses matérielles, et
se rappeler les bienfaits de Dieu. Les « affections » ne doivent pas «
estre a l'abandon, mais resserrees et couvertes ». Exemple des Israëlites
mangeant l'agneau pascal. Ardent désir. Ne pas disputer avec
l'ennemi. Considérations suggérées pour la veille de la Communion.
Un peu de retraite intérieure et récréation plus « devote ».
Retrancher peu à peu les attaches. Que faire la nuit et le matin au réveil.
Ce que le Saint n'approuve pas. Comment traiter avec. Notre-
Seigneur le jour où on l'a reçu. [496] Préparation et action de grâce,
diverses aspirations. Comment se servir de l'imagination. La Sainte
Vierge, et l'âme qui communie. Que personne ne s'approche de la Table
sainte par coutume. L'un des principaux fruits de la Communion : la
charité mutuelle …………………………………………………………..
X QUELQUES AVIS POUR COMBATTRE LA TRISTESSE ET
L'INQUIÉTUDE INTÉRIEURE, ADRESSÉS A Mme ROSE
BOURGEOIS, ABBESSE DU PUITS-D'ORBE, [mai] 1605. La
tristesse et l'inquiétude s'engendrent l'une l'autre, et pourquoi. L'âme
peut chercher à être délivrée d'un mal ou pour l'amour de Dieu ou pour
l'amour-propre : effets contraires de ces deux amours. Grand mal de
l'inquiétude ; d'où elle vient. Quand on tombe en quelque imperfection,
rasseoir d'abord l'esprit et puis y mettre ordre. La sentinelle de l'âme.
Notre « edification spirituelle » doit se faire dans une grande paix.
La tristesse peut être bonne ou mauvaise, mais elle est plus souvent
mauvaise. Ses productions. Marques de la mauvaise tristesse et de
la bonne. D'où vient la différence qui existe entre elles : le Saint-Esprit
est « l'unique Consolateur » ; le malin esprit, « un vray desolateur».
Remèdes contre la mauvaise tristesse : avoir patience ; contrarier ses
inclinations ; chanter des cantiques spirituels ; s'employer aux œuvres
extérieures ; faire souvent des actes extérieurs de ferveur ; la discipline
modérée ; la prière et s'adresser à Dieu avec des mots de confiance ; la
sainte Communion ; l'ouverture de cœur ………………………………… 224
XI PREMIÈRE MÉTHODE POUR RÉCITER LE CHAPELET, écrite à
Saint-Jean d'Aulps, 14 août 1606 ………………………………………… 233
XII DEUX OCCUPATIONS POUR LA RETRAITE SPIRITUELLE [1604-
1608]. La sainte enfance de Notre-Seigneur. — Sa Passion …………. 235
XIII L'IMITATION DE NOTRE-SEIGNEUR, [1604-1609 ?] Comment
Jésus a-t-il agi pendant sa vie ? Exciter notre âme par ses exemples ;
un seul regard suffit ……………………………………………………… 237
XIV DEUXIÈME MÉTHODE POUR RÉCITER LE CHAPELET, envoyée à
Dijon le 29 septembre 1608 ……………………………………………… 238
XV AVIS A LA BARONNE DE CHANTAL, 15-20 AVRIL 1610. Ne pas
faire de réflexions sur les choses qui arrivent. Dans les sécheresses,
s'humilier. Nomment reprendre le prochain. Le voyageur dans un
navire et le soin du pilote ………………………………………………… 241
XVI CONSEILS A UN AMI, 1609-1610. Le secret pour avoir la paix
extérieure et intérieure …………………………………………………… 242
XVII — LE SAINT REÇOIT LES VŒUX DE RELIGION DE LA MÈRE DE
CHANTAL, RENOUVELLE SON VŒU DE CHASTETÉ ET FAIT
CELUI DE SERVIR L'AME DE LA SAINTE, 22 août 1611 …………… 243
XVIII MÉMORIAL POUR BIEN FAIRE LA CONFESSION, ADRESSÉ AU
DUC DE BELLEGARDE, le 24 août 1613. Faire sa confession devant 244
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Jésus crucifié qui, « avec une douceur [497] de misericorde incomparable
», nous prépare son pardon. Il faut s'accuser non seulement du genre
de péché, mais de l'espèce, du nombre, des divers degrés du péché.
Entre ces degrés, celui qui multiplie la malice du péché en une seule action
doit être déclaré. Le désir et la résolution de pécher est de fait un péché,
ainsi que les mauvaises pensées volontairement entretenues. Certaines
actions comprennent en elles plusieurs espèces de péché : on doit s'en
accuser. Détail des péchés contre les commandements de Dieu.
Examen sur les sept péchés capitaux. Les péchés contre les
commandements de l'Eglise. Comment discerner le péché mortel du
véniel. Moyens suggérés pour détourner du péché les grands de ce
monde. — Prière avant la confession …………………………………….
XIX SUR LA TRÈS SAINTE VIERGE, A LA MÈRE DE CHANTAL ?
[1610-1613 ?] . Marie a passé par tous les états de vie pour attirer toutes
les âmes à son divin Fils …………………………………………………. 266
XX PRIÈRE COMPOSÉE POUR LA BARONNE MARIE-AIMÉE DE
THORENS, février 1615 ………………………………………………… 267
XXI AVIS A LA MÈRE DE CHANTAL, [1613-1615 ?]. Confiance et
abandon. La Mère de Chantal doit tenir son âme ferme, sans « vouloir
voir ce qu'elle fait ou si elle est satisfaite ». Bel exemple de simplicité
des petits enfants. De la trop grande activité d'esprit naît l'inquiétude.
Quitter tout ce qui déplaît à Dieu et ne pas « s'embesoigner » de notre
avancement spirituel ……………………………………………………... 269
XXII FRAGMENTS DE CONSEILS A LA MÊME, [1613-1616]. Les
petites vertus. Tout faire pour Dieu. Garder la paix et reposer dans
le sein de la Providence ………………………………………………….. 271
XXIII AVIS A LA MÊME, SUR LA SIMPLICITÉ, L'ABANDON ET
L'AMOUR DU PROCHAIN, 31 mars 1616. Comment marcher en
esprit de simplicité. Ne pas faire des retours sur soi-même. Exemple
des petits enfants. Les « amantes spirituelles » se « purifient et ornent
» pour plaire a l'Epoux céleste. Leur préparation n'est pas longue ni
empressée, mais fidèle et amoureuse. Avis de saint François d'Assise.
Imiter le Sauveur sur la croix. — Les inquiétudes de notre cœur et
l'avancement dans la perfection. Rien ne peut ébranler celui qui se
remet au bon plaisir de Dieu. Regarder le prochain dans la poitrine du
Sauveur. La présence ne peut rien ajouter « a un amour que Dieu a fait,
soustient et maintient ». — Vivre et mourir comme il plaira au « cœur
souverain » de Notre-Seigneur. Arrêter l'inconstance de l'esprit humain
par la force des anciennes résolutions …………………………………… 272
XXIV FRAGMENTS DE CONSEILS A LA MÊME, [1615-1616].
Excellence du sommeil amoureux entre les bras du Sauveur. La Mère
de Chantal doit demeurer en la remise de tout elle-même a Notre-Seigneur
et cooperer à sa grace. Que faire à l'oraison. Délaisser sa vie et ses
affaires au bon plaisir de Dieu …………………………………………… 277
XXV DERNIERS AVIS A LA MÊME, 6 juin 1616. Simplicité de l'amour,
remise de soi-même en Dieu. Tout recevoir [498] de sa main et ne
vouloir que lui ……………………………………………………………. 278
XXVI QUESTIONS DE LA MÈRE DE CHANTAL A SAINT FRANÇOIS DE
SALES, ET RÉPONSES DE CELUI-CI, fin mai et août-novembre 1616.
Renouveler chaque année l'abandon de soi-même entre les mains de
Dieu. Les paroles et pensées qu'il faut retrancher. Petit examen
conseillé. Oublier tout. Que la Mère de Chantal demeure ferme en 279
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l'oraison de simplicité et d'abandon ; commandement que le saint
Directeur fait à son esprit. Etre comme de petits enfants.
L'indifférence doit se pratiquer en toutes rencontres. Que l'obéissance
à la Règle domine les « menus attraitz ». Ce que le Saint « desire bien
fort ». Parler peu de soi-même et pourquoi. Le Traitté de l'Amour
de Dieu est fait surtout pour la Sainte. — L'oraison et la contrition ……..
AVIS A LA SŒUR CLAUDE-AGNÈS DE LA ROCHE, Religieuse de
la Visitation d'Annecy, [1612-1617]. Tenir son âme en paix, rirais avec
simplicité et amour. Un seul désir : plaire à Dieu. Pour se
débarrasser des troubles de la partie inférieure, passer outre, sans les
regarder. Il faut du temps pour parvenir à la paix. Pourquoi se
défaire de la propre volonté. Dieu veut détacher de toutes choses la
destinataire pour la » mieux serrer à sa Bonté ». Indifférence,
confiance, humilité. Plus on se sent pauvre, plus il faut avoir de grandes
prétentions de bien faire. Essayer d'aimer la correction. L'égalité du
maintien extérieur. S'abîmer dans son néant devant Notre-Seigneur et
la Sainte Vierge …………………………………………………………..
DÉDICACE D'UN EXEMPLAIRE DU Traité de l'Amour de Dieu A M.
HUMBERT VIBERT, 13 avril 1617, (Inédit) ……………………………
CONFIDENCES A LA MÈRE DE CHANTAL, [1610-1618].
Pourquoi le Saint-Esprit nous donne le don d'intelligence. Faveurs
divines accordées à saint François de Sales ………………………………
AVIS A LA SŒUR MARIE-ADRIENNE FICHET, Religieuse de la
Visitation d'Annecy, 1611-1618, (Inédit) :
De l'obeyssance …………………………………………………………..
De l'humilité ……………………………………………………………...
De la douceur ……………………………………………………………..
De la simplicité …………………………………………………………...
De la generosité …………………………………………………………..
Du parler ………………………………………………………………….
Comme il se faut relever quand on est tombee ……………………………
Comme il faut vivre selon la partie superieure …………………………..
Comme il faut tous les jours renouveller ses bons propos ……………….
De l'amour de Dieu [et du prochain] ……………………………………..
Des secheresses et sterilités ………………………………………………
Des tentations : premierement de la vocation ……………………………
Des aversions …………………………………………………………….
De la melancolie ………………………………………………………….
De l'Office ………………………………………………………………..
De l'orayson ………………………………………………………………
AVIS A UNE RELIGIEUSE DE LA VISITATION SUR LES VERTUS
QU'ELLE DOIT SURTOUT PRATIQUER, [1612-1618], (Inédit) : …….
Prattique de l'humilité …………………………………………………….
Prattique de la douceur ……………………………………………………
Prattique de la simplicité …………………………………………………
Prattique de la modestie …………………………………………………..
Prattique de la charité fraternelle …………………………………………
Prattique de la mortification ………………………………………………
Prattique de la patience …………………………………………………...
Prattique de l'obeyssance …………………………………………………
Prattique de la pauvreté …………………………………………………..
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Prattique de la chasteté …………………………………………………… 325
Prattique de la generosité ………………………………………………… 325
Prattique de la devotion forte et intime ………………………………….. 326
Prattique de la conformité à la volonté de Dieu …………………………. 326
XXXII AUTRES AVIS A UNE RELIGIEUSE DE LA VISITATION, SUR
L'OBEISSANCE ET L'EXAMEN QUI DOIT SUIVRE L'ORAISON,
[1612-1618], (Inédit) :
De l'obeyssance ………………………………………………………….. 327
Examen sur l'orayson, qui se doit faire apres icelle, se pourmenant ou
faysant son ouvrage ……………………………………………………… 328
XXXIII — AVIS A LA SŒUR ANNE-MARIE ROSSET lors de son départ
d'Annecy pour la fondation du Monastère de la Visitation de Bourges,
vers le 15 octobre 1618. Etre couverte d'humilité. Moins on sent de
capacité en soi, plus il faut s'appuyer avec confiance sur Notre-Seigneur.
La Mère Rosset doit être « Depenciere » des dons de Dieu. Vertus
qu'elle devra pratiquer envers les âmes appelées à la Visitation ………… 329
XXXIV EXERCICE ENVOYÉ A MADAME DE VILLESAVIN, juillet-août
1619 ……………………………………….…………………………….. 330
XXXV AUX RELIGIEUSES DE LA VISITATION D'ANNECY, [1612-1620].
Une leçon de Marie à propos de la fête de la Transfiguration ………… 333
XXXVI AVIS POUR LA CHARGE DE SUPÉRIEURE, A LA MÈRE CLAUDE-
AGNÈS DE LA ROCHE, juin ou commencement de juillet 1620.
Chaque jour, au réveil, dire tu parole de saint Bernard : « Qu'es-tu venu
faire ceans ? » [500] Ne pas subtiliser, mais avoir une intention droite
de tout faire pour Dieu. Supporter les imparfaites et les aider. Le
maintien extérieur. Importance de la charge. La nouvelle Supérieure
doit demander à la Sainte Vierge de l'offrir à son divin Fils, et renouveler
son âme. Après cet acte de parfait abandon, Marie la gardera tout le
temps de sa vie …………………………………………………………… 334
XXXVII ADIEUX A LA MÈRE CLAUDE-AGNÈS DE LA ROCHE, première
Supérieure de la Visitation d'Orléans, vers le 10 juillet 1620. Trois
vertus spécialement recommandées …………………………………….. 337
XXXVIII LETTRE D'OBÉDIENCE A LA SŒUR PAULE-JÉRONYME DE
MONTHOUX, pour être Supérieure au Monastère de la Visitation de
Nevers, 27 juillet 1620 …………………………………………………… 337
XXXIX ECRIT DANS UN VOLUME DE L'INTRODUCTION A LA VIE
DEVOTE, DONNÉ A LA SŒUR MARIE-PHILIBERTE CHRISTIN,
Tourière de la Visitation d'Annecy, 8 mars 1621, (Inédit) ………………. 338
XL AVIS A LA MÈRE PAULE-JERONYME DE MONTHOUX, Supérieure
de la Visitation de Nevers, décembre 1620-1621, (Inédit). La prise
d'habit doit se faire à la grille du chœur. — Vanité et discrétion. Les
mères et les filles s'appellent « Seurs ». Conduite à tenir à l'égard des
malades. On peut admettre des Novices d'un autre Ordre ; pour les
Professes, il faut une dispense de Rome. N'appeler le médecin que pour
la vraie nécessité. Avis touchant les Pères spirituels. Raisons qui
peuvent dispenser du jeûne. Demander ce dont on a besoin est plus
parfait que de se laisser à « la providence des Superieurs ». Murmures
contre la Supérieure. Ce que la destinataire doit faire au début de sa
charge, soit pour les séculiers, soit pour les Sœurs. — Ne pas s'exempter
facilement de l'Office. Attitude au parloir. Les prétendantes
opiniâtres et négligentes ne doivent pas être reçues. Confiance aux
Pères Jésuites. Exercer les veuves. — Attirer doucement les Sœurs qui 339
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sont dans la peine. — Quelques autres points d'observance ……………..
XLI FRAGMENTS D'AVIS AUX SUPÉRIEURES DE LA VISITATION,
[1615-1622]. Grand honneur d'être appelées à la conduite des âmes ;
comment faut-il s'en acquitter ? Les Supérieures doivent suivre les
voies de Dieu et non les leurs. Qualités de l'homme intérieur.
Comment agir avec les inférieures revêches et orgueilleuses. Suivre
l'esprit de douceur et cultiver surtout les âmes. Souhaits du Saint aux
Supérieures ………………………………………………………………. 345
XLII AVIS SPIRITUELS A UNE PERSONNE VIVANT DANS LE MONDE,
novembre 1619-1622, (Inédit). Les satisfactions de l'amour-propre et
l'exercice de l'amour de Dieu. Craindre la tentation, c'est ouvrir la porte
à l'ennemi ; la confiance en Dieu lui fait peur. Mépriser les tentations
[501] et recourir à la prière. Pourquoi le démon donne
quelqu'apparence de vertu à ceux qui le servent. « Celuy qui nous a
donné la fleur du desir nous donnera aussi le fruit de l'accomplissement.
» Le Sauveur est père par sa providence et mère par son amour. Un
effet de la dévotion qui est selon Dieu. Exemple du bienheureux
Amédée de Savoie et de sainte Paule. L'amour de Dieu ne trouve jamais
qu'on fait trop pour lui …………………………………………………… 348
XLIII AUTRES AVIS SPIRITUELS A UNE PERSONNE VIVANT DANS LE
MONDE, novembre 1619-1622, (Inédit). En quoi consiste la
simplicité. Qui ne cherche que Dieu le trouve toujours. Il faut le
chercher par le chemin qu'il nous a marqué. Ce n'est pas « nostre mal
qui nous fait mal », c'est l'amour-propre. L'homme simple ne se trouble
point. Exercice d'union à la volonté de Dieu pour le matin, et « acte de
reunion » à multiplier dans la journée. Ne faire aucun acte de piété par
manière d'acquit. Mieux vaut n'entendre qu'une Messe, mais avec
attention, que plusieurs avec irrévérence. Conseil de saint François de
Sales aux personnes très occupées. L'égalité d'esprit est l'un des plus
beaux ornements de la vie chrétienne. Tâcher de l'acquérir en
demandant le secours du Saint-Esprit et en se tenant en garde contre la
langue ……………………………………………………………………. 352
XLIV AVIS A LA MÈRE CLAUDE-AGNÈS DE LA ROCHE, Supérieure de
la Visitation d'Orléans, [juin 1620-1622]. Parler très peu de soi-même.
L'affabilité ne doit pas empêcher l'exercice de l'autorité. La gravité
avec les séculiers. Ne pas cacher le bien qui se fait à la Visitation.
Rapports avec les Carmélites, les Jésuites et les Minimes. Ce qu'il faut
faire au parloir. La Vie, Passion et Mort de Notre-Seigneur sont les
meilleurs sujets d'oraison. Certaines âmes sont attirées à une plus
grande simplicité. Marque d'une bonne oraison. Ce que la
Supérieure peut permettre. Discrétion qu'elle doit observer. Ne rien
faire de plus que la Communauté. La sainte Communion et la reddition
de compte. La charité. — Regarder Dieu …………………………….. 356
XLV AVIS SPIRITUELS A UNE RELIGIEUSE DE LA VISITATION,
(Inédit). Marcher dans la vertu sinon toujours avec joie, du moins avec
courage. La statue dans sa niche. Ne soyons pas des anges, mais de
petits poussins. Nous n'avons pas à craindre le jugement du monde.
Nos misères ne nous doivent pas accabler ni étonner. Quel est, panni
les pauvres, « le plus advantagé » ? Parlons à Dieu de nos misères.
Ne pas insulter notre cœur et ne pas trop le presser. — Dieu seul doit y
régner. Le réjouir et le consoler. La couche de l'Epoux et l'agneau
de l'holocauste. Recevoir Jésus-Christ : le plus grand moyen d'arriver 360
328/332

33.9 Page 329

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à la perfection. Ne pas quitter la sainte Communion pour les
distractions et aridités. Le divin Maître est Roi, soleil, fournaise,
baume, trésor, gage de la gloire. — Aspirer à l'éternité qui approche ……
XLVI AUTRES AVIS SPIRITUELS A UNE RELIGIEUSE DE [502] LA
VISITATION (Inédit). Trésor de l'abandon total à Dieu. Bonheur
d'une âme petite et humble. Les emplois dans la maison du Seigneur.
— Tout est indifférent au cœur qui ne veut que Dieu. — Dans les choses
qui ne sont pas clairement manifestées, interroger nos Supérieurs et suivre
leurs avis. Suavité des inspirations divines ; trouble et inquiétude en
celles qui viennent du démon. L'humilité change en or le plomb de nos
infirmités. « Mesnager les petites rencontres ». Bienheureuse est
l'âme dépouillée de toutes choses. Ce quinous empêche de nous jeter à
corps perdu entre les bras de la Providence. Dieu n'est pas comme les
hommes. — « Aymer sans mesure l'Amour eternel. » …………………… 364
XLVII FRAGMENTS SUR LA PAUVRETÉ (Inédit). En quoi consiste la
parfaite pauvreté intérieure. Comment regarder les biens de la
Communauté. Accepter avec amour les disettes. Trois degrés de la
pauvreté spirituelle. La grande et sainte pauvreté. Quel en est le
dernier degré. Celui qui n'a aucune confiance en soi-même est vraiment
fidèle
………………………………………………………………………
367
XLVIII FRAGMENTS SUR L'OBÉISSANCE, (Inédit). L'obéissance
religieuse est un holocauste. Devoir du Supérieur et de l'inférieur.
Qu'est-ce que le propre jugement ? L'indifférence du parfait obéissant 369
XLIX CONSEILS A UN RELIGIEUX POUR L'EXAMEN DE CONSCIENCE 370
L MÉDITATION SUR LE CHOIX D'UN ÉTAT DE VIE POUR UN
ASPIRANT A LA VIE RELIGIEUSE. Bonté de Dieu qui se contente
de nous obliger à garder ses Commandements. Ce qu'il nous conseille.
Toujours nous aurons à combattre. Consolations de la vie religieuse
et de la « vie commune. » — Examiner ses dispositions et attendre ……. 371
LI AUTRE MÉDITATION POUR LE MÊME ASPIRANT, SUR LA
NAISSANCE DE NOTRE-SEIGNEUR JÉSUS-CHRIST. L'arrivée de
Marie et Joseph à Bethléem ; ils reçoivent le mépris avec une douceur
incomparable. Le moindre oubli excite notre arrogance. L' «
establerie » pour le Sauveur, et « les superbes edifices » pour les pécheurs.
Tout est pauvre dans cette naissance, et nous ne cherchons qu'à nous
satisfaire …………………………………………………………………. 372
LII TROISIÈME MÉTHODE POUR RÉCITER LE CHAPELET …………. 374
LIII PARAPHRASE DE L'ORAISON DOMINICALE ADRESSÉE A UNE
DE SES FILLES SPIRITUELLES, (Inédit) …………………………….. 377
__________
APPENDICE
A DÉVOTES MÉDITATIONS SUR TOUS LES MYSTERES DU
SAINT SACRIFICE DE LA MESSE ………………………………….
B PRIÈRE A LA SAINTE VIERGE, ATTRIBUÉE A SAINT
FRANÇOIS DE SALES ……………………………………………….
C AUTRE PRIÈRE A LA SAINTE VIERGE, ATTRIBUÉE AU MÊME
NOTE DES EDITEURS …………………………………………………………………
_____
421
427
[503]
429
429
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Glossaire des locutions et des mots surannés …………………………………………… 431
Index des destinataires et des notes historiques et biographiques de ce volume ……….. 449
Table de correspondance de cette nouvelle Edition avec les précédentes, et indication de
la provenance des Manuscrits …………………………………………………………… 451
Table générale des Opuscules de saint François de Sales ………………………………. 459
_____
LETTRES
DÉCOUVERTES APRÈS L'IMPRESSION DES VOLUMES PRÉCÉDENTS
LETTRE
(CCLXXVI)
MMCI
MMCII
MCCCXL)
MMCIII
A LA BARONNE DE CHANTAL (Inédite en partie). La santé est
inutile si elle n'est employée à la « conqueste de la sainteté. » Ecrire
à la Baronne ne peut nuire au Saint. Plus la croix est grande, moins
elle pèse. Pieux souhaits, ardentes aspirations à propos d'une «
image devote ». Un projet de voyage à Annecy et une décision.
Avis de saint François de Sales touchant le désir de mesdames Brûlart
et de Villers d'accompagner en Savoie Mme de Chantal. Mme de
Boisy recevra celle-ci « avec plus de cœur et d'amour. » — Prière de
l'excuser auprès de MM. Frémyot, père et oncle ……………………..
A MESSIEURS LES CURÉS DE VALROMEY ET DE SUR-
SEMINE (Inédite). Monsieur Rosetain est chargé de transmettre
aux ecclésiastiques destinataires l'avis du Saint au sujet de leurs
bénéfices ……………………………………………………………...
A Mme DE LA FOREST, RELIGIEUSE DE L'ABBAYE DE BONS
(Inédite). Une excommunication qui, peut-être, reste sans effet.
Quand nous commettons des fautes, les réparer par l'humilité et nous
abîmer dans la confiance en Dieu et la défiance de nous-mêmes.
Soumission amoureuse à l'Abbesse du monastère ; ne pas la regarder
« comme mauvaise, mais comme malade. » Nos Supérieurs sont les
officiers de Dieu. Vaincre ses répugnances en témoignant à
l'Abbesse une vraie charité ……………………………………………
(A LA PRÉSIDENTE DU FAURE (Fragment inédit). Un mot du
cœur. — Prière du Saint pour la destinataire …………………………
A M. SYLVESTRE DE SALUCES DE LA MENTE, ABBÉ
D'HAUTECOMBE. Reconnaissance de saint François de Sales
pour un service qui lui est rendu ; sa pauvreté. Il aurait de bonnes
raisons pour se dispenser d'accompagner le duc de Savoie et le prince
Cardinal en France ; mais pour leur être utile, mort ou vif il ira. Si
l'Abbé d'Hautecombe lui indique le jour, le Saint ira le chercher en son
monastère. — Remerciements de l'Evêque de Chalcédoine ………….
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Annecy, Imp. J. ABRY et Cie, 1932
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Annecy, Imp. J. ABRY et Cie, rue de la République
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