18-Oeuvres de Saint Francois de Sales-Tome XVIII-Vol.8-Lettres


18-Oeuvres de Saint Francois de Sales-Tome XVIII-Vol.8-Lettres

1 Pages 1-10

▲back to top

1.1 Page 1

▲back to top
ŒUVRES
DE
SAINT FRANÇOIS DE SALES
ÉVÊQUE ET PRINCE DE GENÈVE
ET
DOCTEUR DE L'ÉGLISE
______
ÉDITION COMPLÈTE
D'APRÈS LES AUTOGRAPHES ET LES ÉDITIONS ORIGINALES
ENRICHIE DE NOMBREUSES PIÈCES INÉDITES
DÉDIÉE A SA SAINTETÉ LÉON XIII
ET HONORÉE DE DEUX BREFS PONTIFICAUX
PUBLIÉE SUR LES AUSPICES DE MGR L’ÉVÊQUE D'ANNECY
PAR LES SOINS DE RELIGIEUSES DE LA VISITATION
DU IER MONASTÈRE DANNECY
__________
TOME XVIII
LETTRES VOLUME VIII
ANNECY
MONASTÈRE DE LA VISITATION
___
MCMXII
Droits d'auteur pour tous les fichiers des Oeuvres complètes de saint François de Sales: sont mis à disposition pour
un usage personnel ou l'enseignement seulement. Dans l'usage public vous devez indiquer la source
www.donboscosanto.eu. Pas être utilisés à des fins commerciales de toute nature!
Deuxième édition
1/346

1.2 Page 2

▲back to top
ŒUVRES
DE
SAINT FRANÇOIS DE SALES
ÉVÊQUE ET PRINCE DE GENÈVE
ET
DOCTEUR DE L'ÉGLISE
_____
TOME DIX-HUITIÈME
LETTRES
VIIIme VOLUME
1617 1619 [I]
2/346

1.3 Page 3

▲back to top
_____
Propriété [II]
_____
3/346

1.4 Page 4

▲back to top
[III]
4/346

1.5 Page 5

▲back to top
ŒUVRES
DE
SAINT FRANÇOIS DE SALES
ÉVÊQUE ET PRINCE DE GENÈVE
ET
DOCTEUR DE L'ÉGLISE
______
ÉDITION COMPLÈTE
D'APRÈS LES AUTOGRAPHES ET LES ÉDITIONS ORIGINALES
ENRICHIE DE NOMBREUSES PIÈCES INÉDITES
DÉDIÉE A SA SAINTETÉ LÉON XIII
ET HONORÉE DE DEUX BREFS PONTIFICAUX
PUBLIÉE SUR LES AUSPICES DE MGR L’ÉVÊQUE D'ANNECY
PAR LES SOINS DE RELIGIEUSES DE LA VISITATION
DU IER MONASTÈRE DANNECY
__________
TOME XVIII
LETTRES VOLUME VIII
ANNECY
MONASTERE DE LA VISITATION
MCMXI [IV]
5/346

1.6 Page 6

▲back to top
Index OCR
Index OCR................................................................................................................................................ 6
Avant-Propos.......................................................................................................................................... 19
Avis au lecteur........................................................................................................................................ 25
Lettres de Saint François de Sales. Année 1617..................................................................................... 26
MCCCVIII. A M. Etienne Dunant, Curé de Gex. Zèle du Saint pour la discipline ecclésiastique. Il
soutient avec fermeté ses droits d'Evêque dans toute l'étendue de son diocèse, et impose sa volonté
pour la gloire de Dieu et l'honneur de l'Eglise.................................................................................... 26
MCCCIX. A Madame de la Valbonne. Double renoncement. Délicate charité de François de
Sales à l'égard de ceux qui n'approuvent pas ses avis. Quand la perte des Communions n'est pas
dommageable à l'âme. ........................................................................................................................ 27
MCCCX. A M. Philippe de Quoex. Amour maternel que doivent avoir les ministres de Dieu pour les
âmes. Aimable réponse à une filiale inquiétude. La « petite ruche » et les « pauvres abeilles. »
Ce qui affligeait l'Evêque de Genève et ce qui le consolait. Dissension dans un prieuré......... 28
MCCCXI. A Madame de la Fléchère (Inédite). Quelques nouvelles. Intérêt de saint François de
Sales pour les enfants de la destinataire. Messages. « Une carrossee de dames » arrivant de
Grenoble. Les exercices spirituels de Mme de la Thuille. .............................................................. 30
MCCCXII. Au Duc de Savoie, Charles-Emmanuel Ier. Droits de la ville d'Annecy aux bienfaits du
souverain. ........................................................................................................................................... 31
MCCCXIII. Au Prince de Piémont, Victor-Amédée. Recours à l'intervention du prince pour obtenir
la confirmation des privilèges de la ville d'Annecy............................................................................ 32
MCCCXIV. A M. Claude de Blonay. Pourquoi François de Sales retarde volontiers son voyage en
Chablais. Sa douleur et sa résignation au sujet de la maladie de son frère Bernard...................... 32
MCCCXV. A la Mère de Bréchard, Supérieure de la Visitation de Moulins. Le Saint console la Mère
de Bréchard de la perte de son père. Quel douloureux message il doit porter à la baronne de
Thorens. Gloire humaine et saint trépas du frère de l'Evêque de Genève. .................................... 34
MCCCXVI. A Madame de Cornillon, sa sœur. Cris de douleur et larmes de tendresse au sujet de la
mort de Bernard de Sales. Détails sur ses derniers jours. La vertu de sa veuve. ...................... 35
MCCCXVII. Au Baron Amédée de Villette. Deuil profond. Pleurs et résignation de Marie-
Aimée. Adhérence au vouloir de Dieu. ......................................................................................... 36
MCCCXVIII. A Madame de Montfort. Réponse à des condoléances. .............................................. 37
MCCCXIX. Au Président Antoine Favre (Inédite). Décès du président de Sautereau. — Un cœur où
se mélangent l'amour, l'amertume et la constance. Prochain voyage à Thonon et à Gex.
Départs répétés pour l'éternité. ........................................................................................................... 38
MCCCXX. A la Présidente de Sautereau. François de Sales s'afflige avec la destinataire du décès de
son mari. Comment se préparer à « la vie ou il n'y a plus de mort. » Pour l'amour du défunt, sa
veuve doit modérer sa douleur. .......................................................................................................... 40
MCCCXXI. A la Mère de Chantal. Une novice de la Visitation malade à la mort ; ce qu'il faudrait
faire pour ses funérailles. — Le cœur du Saint pour ses Filles. — Conseils à la Mère de Chantal. .. 41
MCCCXXII. Au Pére René Ayrault, de la Compagnie de Jésus. Compliments affectueux à un ancien
« compaignon d'escole. » Deux prises de voile à la Visitation...................................................... 43
MCCCXXIII. A la Mère de Chantal (Inédite). Paternelle sollicitude pour la santé de la Mère de
Chantal. Ne pas se contenter d'attendre les âmes, mais leur aller au-devant. La pureté en ce
monde. Désirs d'une sainte mère pour sa fille. .............................................................................. 44
6/346

1.7 Page 7

▲back to top
MCCCXXIV. A la Baronne de Thorens, sa belle-sœur. Les consolations d'un « frere et Pere tout
ensemble. » Rien de précieux ne s'acquiert sans peine. Une joie de la Mère de Chantal......... 46
MCCCXXV. A Madame Louise de Ballon, Religieuse de l'Abbaye de Sainte-Catherine. La chose la
plus étonnante et douloureuse qui se voit tous les jours. Malgré les épreuves intérieures, aimer
Dieu et lui rester fidèle. ...................................................................................................................... 47
MCCCXXVI. A une dame. Combat et liberté. Moyen de triompher. Le principal devoir de la
vraie dévotion. Particulières facilités de la destinataire pour la vie chrétienne et pieuse.
Témoignages d'honneur et de sainte affection. Pourquoi la fécondité est une bénédiction de Dieu.
............................................................................................................................................................ 48
MCCCXXVII. A une personne inconnue (Fragment inédit). Deshonorée devant le monde ; en estime
devant Dieu......................................................................................................................................... 49
MCCCXXVIII. A M. Michel Favre (Billet inédit). Demande de nouvelles de deux chers malades. 50
MCCCXXIX. Au Duc de Savoie, Charles-Emmanuel Ier (Minute). François de Sales sollicite
l'indulgence de Charles-Emmanuel pour un homme plus malheureux que coupable. Les deux ailes
de la renommée des bons princes. ...................................................................................................... 51
MCCCXXX. Au Prince de Piémont, Victor-Amédée (Fragment inédit). Deux offensés qui souhaitent
la grâce de l'offenseur. Plus d'infortune que d'iniquité. ...................................................................... 52
MCCCXXXI. A la Mère de Chantal. Une postulante attendue à Sainte-Catherine et qu'il faut
recevoir à la Visitation. Madame du Puits-d'Orbe en route pour Annecy. Trempe d'esprit de
l'Abbesse. Le Saint offre son logis pour la voyageuse. Malades corporelles et malades
spirituelles. ......................................................................................................................................... 53
MCCCXXXII. A Madame Bourgeois, Abbesse du Puits-d'Orbe. Bienvenue à l'Abbesse. La
société des âmes pleines d'amour divin allège les afflictions. ............................................................ 55
MCCCXXXIII. Au Chanoine Jean-François de Sales, son frère. Un empressé départ...................... 56
MCCCXXXIV. A la Mère de Chantal. Annonce de retour................................................................ 56
MCCCXXXV. A Madame de Genève, Abbesse de Baume-Les-Dames (Inédite). Consécration d'une
chapelle mortuaire. Compliments affectueux et saints conseils. ................................................... 57
MCCCXXXVI. A la Mère de Chantal. Des fermiers retardataires à payer. Fine et aimable
proposition du Saint à la Mère de Chantal. ........................................................................................ 58
MCCCXXXVII. A la même. Retour de l'Evêque à Annecy. Pourquoi il veut le lendemain se lever
de bonne heure.................................................................................................................................... 58
MCCCXXXVIII. Au Président Jean-Georges Crespin (Fragment inédit). Raisons d'un retard à écrire.
............................................................................................................................................................ 59
MCCCXXXIX. Au Président René Favre de la Valbonne. Félicitations au destinataire. Joie du
Saint, et celle qu'il promet au nouveau président du Conseil de Genevois. Le petit Antoine et son
grand-père........................................................................................................................................... 60
MCCCXL. A une dame. Ne jamais s'attrister, car Dieu nous aime et nous sommes siens. ............... 61
MCCCXLI. Au Père Pierre de Bérulle. L'Evêque de Genève propose au fondateur de l'Oratoire un
établissement dans son diocèse. ......................................................................................................... 62
MCCCXLII. A la Mère de Chantal (Inédite). Que faire contre les bruyantes réclamations de deux
femmes. .............................................................................................................................................. 63
MCCCXLIII. A Madame de la Fléchère. Une dame « un peu brune » sur le Saint. Pourquoi son
protégé n'a pas été pourvu au concours. ............................................................................................. 64
MCCCXLIV. A Monseigneur Pierre Fenouillet, Evêque de Montpellier (Inédite). Paris et Grenoble
en attente de l'Evêque de Genève pour le Carême. Mince bagage de science qu'emporte d'Annecy
7/346

1.8 Page 8

▲back to top
le jeune des Hayes. Uu engagé militaire en congé. Souvenir douloureux de la mort de Bernard
de Sales. Capitulation devant une « batterie de pleurs ». La tyrannie du péché....................... 65
MCCCXLV. Au Président Antoine Favre (Inédite). Une distraction de François de Sales.
Démarches de Mme de Thorens pour recouvrer les armes de son mari. Inquiétudes au suiet de la
santé de la présidente de la Valbonne................................................................................................. 67
MCCCXLVI. A Madame de Blanieu. Comment ne pas dévier du chemin des ordonnances divines.68
MCCCXLVII. A la Mère de Chantal. Attente et désir du saint Evêque. ........................................... 68
MCCCXLVIII. A la même (Fragment inédit). Visite différée........................................................... 69
MCCCXLIX. A M. Laurent Scotto (Inédite). Un bénéfice prêt à vaquer. ......................................... 69
MCCCL. A Madame de Montfort. Nouveau deuil et nouvelle douleur. Saintes dispositions de la
baronne de Thorens à son lit de mort. ................................................................................................ 70
MCCCLI. A un gentilhomme (Fragment). Sainte mort de la baronne de Thorens ............................ 71
MCCCLII. A la Mère de Bréchard, Supérieure de la Visitation de Moulins (Fragment). Suprême
transformation d'une âme. « Un amour infiniment plus que fraternel. » ....................................... 72
MCCCLIII. A la Mère Favre, Supérieure de la Visitation de Lyon. Une baronne qui promettait de
devenir une autre Mère de Chantal. Sa mort douloureuse et sainte............................................... 72
MCCCLIV. Au Cardinal Robert Bellarmin. Un heureux transfuge de l'hérésie. Pour lui, le Saint
réclame le paiement d'une pension promise. Souhait ardent d'avoir, de la main du savant Cardinal,
l'explication de quelque Epître de saint Paul. Les princes en guerre et le Pacificateur à venir. .... 73
MCCCLV. Aux Religieux du Monastère de Sixt (Inédite). Encouragement à la réforme. ................ 75
MCCCLVI. A un gentilhomme. Quelques points qui doivent servir à justifier les Religieuses de la
Visitation. — Les Sœurs ne manquent ni aux lois civiles, ni aux lois ecclésiastiques dans la
construction du monastère.................................................................................................................. 77
MCCCLVII. A Madame de la Fléchère. Visite au milieu d'un appointement. L'avis de François de
Sales au sujet des études de Charles de la Fléchère. .......................................................................... 79
MCCCLVIII. A Sa Sainteté Paul V (Minute). L'Evêque de Genève implore une dispense pour les
pauvres Clarisses de son diocèse. Son but est de leur faciliter l'observance de la Règle et la vie de
prière................................................................................................................................................... 80
MCCCLIX. Au Cardinal Robert Bellarmin (Minute). La misère des Clarisses du diocèse de Genève.
Ce qu'apprend l'expérience sur la trop grande pauvreté des Monastères de femmes. Sollicitude
du Saint pour des Religieuses exemptes de sa juridiction. Il dénonce des manquements aux
décrets du Concile de Trente. ............................................................................................................. 81
MCCCLX. A Don Jérome Boerio, Général des Barnabites. Eloge du P. Baranzano. Prière de le
renvoyer au collège d'Annecy. ........................................................................................................... 83
MCCCLXI. A Don Juste Guérin, Barnabite. Départ précipité du P. Redento. François de Sales ne
sait pas encore s'il prêchera à Paris ou à Grenoble. Le jardin des Barnabites. Pourquoi le Saint
garde une lettre sans l'envoyer............................................................................................................ 85
MCCCLXII. A M. Guillaume de Bernard de Foras. Le « Pré Lombard » demandé au duc de
Nemours pour la Visitation. ............................................................................................................... 86
MCCCLXIII. A Madame de Granieu. Le courage appuyé sur la confiance. Joie inaltérable des
âmes données à Dieu. « Religieux entre les soldatz » et « sainte entre les Religieuses » ............. 87
MCCCLXIV. A une religieuse. L'arbre de vie et la rosée qui le féconde. Un désir qui sera
sûrement satisfait. ............................................................................................................................... 88
8/346

1.9 Page 9

▲back to top
MCCCLXV. A Madame de Grandmaison (Inédite). Retour douloureux et résigné sur les deuils
multiples de l'année qui s'achève. Le Saint prépare la destinataire à celui qui doit la frapper
bientôt. Où se transforment nos amertumes. ................................................................................. 89
MCCCLXVI. A Monseigneur Pierre Fenouillet, Evêque de Montpellier (Inédite). Pourquoi le duc de
Savoie désigne Grenoble à François de Sales pour les prédications de l'A vent et du Carême. Une
ambition de l'apôtre au sujet de Lesdiguières ; son peu d'espoir de la voir satisfaite. Joies qu'il
aurait eues à Paris, avantage qu'il trouve en Dauphiné. La paix sans les effets de la paix. Doute
sur la validité d'une dispense. ............................................................................................................. 90
MCCCLXVII. Au Prince de Piémont, Victor-Amédée. L'Evêque de Genève implore la charité du
Prince en faveur d'un ancien converti................................................................................................. 92
MCCCLXVIII. Au Duc de Savoie, Charles-Emmanuel Ier. Un pauvre capitaine converti, solliciteur
de Son Altesse. ................................................................................................................................... 92
MCCCLXIX. A la Mère de Chantal. Béatitude des crucifiés. Le testament de la baronne de
Thorens. Murmures faits au sujet d'un projet de mariage pour Françoise de Chantal................... 93
MCCCLXX. A une personne inconnue (Fragment inédit). Douceur de la main divine. Affliction
et consolation...................................................................................................................................... 94
MCCCLXXI. A M. Jean de Lacurne. Lettres perdues. Eloge des PP. Barnabites ; la seule chose
qui leur manque. Fruits qu'on peut espérer de leur établissement en France. La divine origine
des afflictions. Souvenir du baron et de la baronne de Thorens.................................................... 94
MCCCLXXII. A la Mère de Chantal. Attente de nouvelles de la Fondatrice malade. ...................... 96
MCCCLXXIII. A Don Jérôme Boerio, Général des Barnabites (Minute). Action de grâces pour le
retour d'un Religieux. Les desseins du prince de Piémont et de l'Evêque de Genève sur Contamine
; pour les faire réussir, l'intervention de D. Juste auprès des cours de Savoie et de Rome est
nécessaire. Deux autres affaires importantes demandent ce voyage. Litige au sujet d'un étang
sans poissons ; équité et charité du Saint............................................................................................ 97
MCCCLXXIV. Au Duc de Savoie, Charles-Emmanuel Ier. Supplique en faveur de ceux qui
s'occupent de «l'art de la soye»......................................................................................................... 100
MCCCLXXV. A la Mère de Chantal. Salutation affectueuse.......................................................... 101
MCCCLXXVI. A la Mère Favre, Supérieure de la Visitation de Lyon Inquiétudes du Saint au sujet
de la Mère de Chantal. Nouvelles et salutations.......................................................................... 101
MCCCLXXVII. A la Mère de Chantal. Un chant de joie du saint Evêque. Ses souhaits pour lui-
même et pour la destinataire............................................................................................................. 102
MCCCLXXVIII. A la même (Fragment). Messe d'action de grâces pendant laquelle la Sainte Vierge
a regardé François de Sales de « bon œil ». ..................................................................................... 103
MCCCLXXIX. A Madame de Chailliol. Un heureux mariage. Exhortation à l'humilité. Les
avantages de la dévotion. Quelle vertu il faut « soigneusement nourrir. ».................................. 104
MCCCLXXX. A la Sœur de Gérard, Novice de la Visitation. La plus grande austérité. L'école de
l'abnégation de la propre volonté. Quelle mortification il faut rechercher. ...................................... 105
MCCCLXXXI. A la Mère Favre, Supérieure de la Visitation de Lyon. Force des vœux dans l'Institut
de la Visitation. Un procédé que le monde n'approuve pas. Légitimité de l'expulsion dans les
Ordres religieux, et de la prolongation du noviciat. Douce plainte du saint Fondateur. ............. 106
MCCCLXXXII. A Madame de la Valbonne. Deux vertus essentielles. Le plus sûr moyen
d'acquérir l'honneur. Les sécheresses spirituelles et leurs remèdes. Avis pour la confession. 108
MCCCLXXXIII. A la Mère de Brechard, Superieure de la Visitation de Moulins (Fragment).
Pourquoi les premières Mères de la Visitation doivent être très humbles et unies à Dieu............... 109
Année 1618 .......................................................................................................................................... 110
9/346

1.10 Page 10

▲back to top
MCCCLXXXIV. Au Duc de Savoie, Charles-Emmanuel Ier. Prochain voyage du Cardinal de Savoie
en France. L'Evêque de Genève se dispose à l'accompagner. ..................................................... 110
MCCCLXXXV. Au Prince de Piémont, Victor-Amédée (Inédite). Reconnaissance et soumission au
sujet d'un commandement honorable. .............................................................................................. 111
MCCCLXXXVI. A Don Juste Guérin, Barnabite. Raisons pour lesquelles on sollicite le privilège du
petit Office pour les Sœurs de la Visitation. Demande d'Indulgences pour les Monastères.
Traiter toute cette affaire avec prudence. Nouvel effort du Saint pour l'établissement d'un
Séminaire.......................................................................................................................................... 111
MCCCLXXXVII. A M. Benigne Milletot. Aimable réponse à la demande d'une cédule d'amitié.
Le voyage de l'Abbesse du Puits-d'Orbe ; ce que le Saint blâme et regrette. Une âme que
l'amertume trouble démesurément. Nouvel ami de l'Evêque de Genève. Tristesses et difficultés
au sujet du testament de la baronne de Thorens. .............................................................................. 113
MCCCLXXXVIII. A la Mère de Chantal. L'embarras du Saint à l'arrivée de voyageurs dauphinois.
.......................................................................................................................................................... 116
MCCCLXXXIX. A M. Bénigne Milletot. Recommandation en faveur d'un ami engagé dans un
procès. Voyage du Prince Cardinal de Savoie différé. ................................................................ 116
MCCCXC. A Madame de Blanieu. Le prix de la paix ; sa récompense. Deux moyens de la
conserver. ......................................................................................................................................... 117
MCCCXCI. A la Présidente de Bouquéron. Comment le respect règle les témoignages de l'affection.
Souhaits des gens de bien et contradictions au sujet de la fondation du Monastère de Grenoble.
Le service de Dieu, unique bonheur en ce monde. ........................................................................... 118
MCCCXCII. Au Roi de France, Louis XIII (Minute). L'avis du Saint pour le rétablissement des
Carmes à Gex. Impossibilité de leur assigner le revenu destiné au service des paroisses.
Travail et dévouement des Capucins. Deux moyens de hâter l'entière conversion du pays........ 119
MCCCXCIII. A la Mère de Chantal. Départ d'une belle âme pour le Ciel. Une demeure toute de
paix. Confiance en Dieu, et regrets sur les morts. ....................................................................... 120
MCCCXCIV. A la Mère Favre, Supérieure de la Visitation de Lyon (Fragment). Mort de deux
grands serviteurs de Dieu. Admirable acquiescement du Saint................................................... 121
MCCCXCV. A la Baronne de Menthon (Inédite). Vacance d'un bénéfice. Trois raisons d'en
pourvoir sur-le-champ Benoît de Chevron. ...................................................................................... 122
MCCCXCVI. A Madame Bourgeois, Abbesse du Puits-d'Orbe. Très sage avis du Saint au sujet du
transfert de l'abbaye du Puits-d'Orbe. Devoir de l'Abbesse pour maintenir ses filles en union et
charité. Humble démarche qu'elle doit faire................................................................................ 123
MCCCXCVII. A la Mère de Chantal. Discrétion que garde le baron de Chantal et qu'il faut garder
avec lui. ............................................................................................................................................ 124
MCCCXCVIII. Au Père Claude-Louis-Nicolas de Quoex, Prieur de Talloires. Doux reproche à un
ami trop affligé. Aimer le bonheur de ceux qui nous ont quittés pour aller à Dieu. ................... 125
MCCCXCIX. Au Père Ange Calcagni, Cordelier. Consolation à un prisonnier.............................. 126
MCD. A M. Jean de Chatillon (Inédite). Décisions pour le service de quelques paroisses. ............ 127
MCDI. Au Prince de Piémont, Victor-Amédée. Supplique pour l'installation des Chartreux à
Ripaille. ............................................................................................................................................ 128
MCDII. A la Sœur de Blonay, Maitresse des novices a la Visitation de Lyon. La foi en la Providence
au milieu des sécheresses spirituelles. Quel examen il faut faire. Le grand acte d'amour de
Notre-Seigneur sur la croix. Profit que nous devons tirer de nos imperfections. Vivre joyeuse
sous le regard de Dieu. Saluts paternels. ..................................................................................... 129
10/346

2 Pages 11-20

▲back to top

2.1 Page 11

▲back to top
MCDIII. A la Mère Favre, Supérieure de la Visitation de Lyon. Les mères poules et leurs poussins.
Une école de charité et de patience. Conseils au sujet de Novices. Le filet imperceptible de
la Providence. Parure de ce monde et parure du Ciel pour les épouses du Christ. Humilité du
saint Evêque. .................................................................................................................................... 131
MCDIV. Au Père Jean-Matthieu Ancina de la Congrégation de l'Oratoire (Inédite). Envoi d'un
mémoire sur les vertus de Juvénal Ancina. ...................................................................................... 132
MCDV. A Dona Ginevra Scaglia. Remerciements pour une lettre et un présent. Sur la demande
de la destinataire, l'Evêque de Genève lui offre une occasion d'aider les Sœurs de la Visitation. —
Nouvelles de la Congrégation. ......................................................................................................... 133
MCDVI. Au Prince de Piémont, Victor-Amedee. Les nécessités de la Sainte-Maison de Thonon.
Appel à la bonté du prince................................................................................................................ 136
MCDVII. A Madame de Vignod, Religieuse de l'Abbaye de Sainte-Catherine. Un bouquet mystique
à offrir aux Saints ; de quelles fleurs il faut le composer. Saint Thomas d'Aquin. Quel est
l'ennui le plus importun. Les menues tracasseries exercent l'amour de la propre abjection. Avis
pour supporter et corriger une petite fille d'humeur difficile............................................................ 137
MCDVIII. Au Duc de Savoie, Charles-Emmanuel Ier. Témoignage et intercession en faveur du P.
Ange Calcagni. ................................................................................................................................. 138
MCDIX. A Don Juste Guérin, Barnabite (Inédite). Louange à Dieu pour le bon et le mauvais succès
de divers événements. Confiance en la Providence et courage pour agir. Pourquoi il faut tout
tenter et tout sacrifier afin d'obtenir aux Sœurs de la Visitation le privilège du petit Office. .......... 139
MCDX. A M. Claude de Quoex. Dévouement aux Religieux de Talloires en mémoire d'un ami
défunt. « Multitude de bonnes occupations. » ............................................................................. 141
MCDXI. A Madame de Lescheraine. Une visite manquée. ............................................................. 142
MCDXII. A la Mère de Chantal (Fragment). A quelle condition Dieu bénit les entreprises. Sortie
d'« avettes ». ..................................................................................................................................... 142
MCDXIII. A la même (Fragment inédit). Pronostic sur une Novice. .............................................. 143
MCDXIV. A la Mere de Bréchard, Supérieure de la Visitation de Moulins. Espérance d'un prochain
revoir. Projets de fondations à Bourges et à Paris ; celle de Grenoble va se faire. Un bienfaiteur
de la Maison de Moulins. — Œuvres dont Dieu « tiendra bon comte »........................................... 144
MCDXV. A Don Juste Guérin, Barnabite. A quoi les Sœurs de la Visitation emploieront-elles le
temps si elles ne disent le grand Office ? Deux réponses à cette objection................................. 145
MCDXVI. A la Présidente le Blanc de Mions. Aimable et ferme correction de François de Sales à
une de ses filles spirituelles excessive en ses témoignages d'estime et d'affection, ......................... 146
MCDXVII. Au Duc Roger de Bellegarde (Inédite). Un converti fugitif qu'il faut accueillir
favorablement. L'audace des hérétiques et le remède à y opposer. ............................................. 147
MCDXVIII. Au Prince de Piémont, Victor-Amédée. Reconnaissance pour la protection accordée à
de pauvres curés ; prière de la continuer. ......................................................................................... 148
MCDXIX. A la Mère de Chantal, a Grenoble. Charmantes nouvelles de la Communauté d'Annecy.
Comment employer le nous et nostre. Avis sur une dispense. « Un peu de consideration
humaine » dans des désirs paternels. Difficultés du mariage de Celse-Bénigne. La pensée du
Saint sur la Communion dans son Institut. Craintes pour le voyage de la Mère de Chantal à Lyon.
Lettres aux dames de Grenoble ; recommandations à ce sujet. ................................................... 149
MCDXX. A Madame de la Baume. Baser sa dévotion sur de fortes maximes. Le « grand artisan
de misericorde. » Quel doit être le seul souci des enfants de Dieu. Confiance et abandon en la
Providence. Qu'importe le temps à qui regarde l'éternité ? Moyen de transformer en roses
toutes les croix.................................................................................................................................. 154
11/346

2.2 Page 12

▲back to top
MCDXXI. A Don Juste Guérin, Barnabite (Fragment). Esprit conciliant et condescendant du Saint.
— Pourquoi les Sœurs de la Visitation se contenteront d'être logées » avec incommodité. »
Pèlerines en route vers la cité permanente, hôtesses d'une nuit........................................................ 156
MCDXXII. A Madame Cottin (Inédite). Recommandation à la destinataire de soumettre sa volonté à
celle de Dieu. .................................................................................................................................... 157
MCDXXIII. A la Mère Favre, Supérieure de la Visitation de Lyon. Espoir d'aller à Lyon. Le
premier Président de Savoie et sa famille attendus à Annecy. ......................................................... 157
MCDXXIV. A la Mère de Chantal, a Grenoble (Fragment). Petites violettes à transplanter en divers
jardins. .............................................................................................................................................. 158
MCDXXV. A la Mère Favre, Supérieure de la Visitation de Lyon (Inédite). Deux visites promises à
la Mère Favre. Lettres envoyées et reçues................................................................................... 159
MCDXXVI. A la Mère de Chantal, a Grenoble (Inédite). Encore l'affaire des jardins. Les lettres
de M. de Granier. Difficultés au sujet d'un contrat de mariage. Roses changées en épines.
La clarté dans les affaires. ................................................................................................................ 160
MCDXXVII. A Madame Liotard. Regrets du Saint en apprenant les obstacles qui s'opposent à la
conclusion d'une alliance. Prière de la faciliter. .......................................................................... 162
MCDXXVIII. Au Duc de Nemours, Henri de Savoie. Recommandation en faveur d'un avocat..... 163
MCDXXIX. A Madame de la Fléchère. Un mal moins grand qu'on ne pensait. Prochain retour de
la Mère de Chantal. .......................................................................................................................... 163
XXX. A M. Guillaume de Bernard de Foras. Témoignage d'amitié. Ombre à la joie du saint
Evêque au sujet du mariage de Henri de Nemours........................................................................... 164
MCDXXXI. A M. Claude de Blonay. Union de joies et de peines. La Mère de Chantal est à Lyon
et se dispose à rentrer à Annecy. ...................................................................................................... 165
MCDXXXII. A Madame de Granieu. Quelles consolations donner à la Mère de Chastel après le
départ de la Mère de Chantal............................................................................................................ 166
MCDXXXIII. A Madame de la Fléchère. Sollicitude paternelle. Visites consolantes. .............. 166
MCDXXXIV. A la Présidente le Blanc de Mions (Inédite). Un petit signe du cœur. — Messages
affectueux. ........................................................................................................................................ 167
MCDXXXV. A une tante. Condoléances et consolations. Le chemin de la félicité future.
Rempart contre le torrent des adversités. ......................................................................................... 168
MCDXXXVI. A une dame. La souffrance des séparations. Par quelle pensée s'en consoler.
Encouragement paternel à écrire souvent......................................................................................... 169
MCDXXXVII. A la Mère de Chantal. Conséquence d'un accablement d'affaires. Annonce d'un
mariage. ............................................................................................................................................ 169
MCDXXXVIII. A M. Guillaume de Bernard de Foras. Les étoiles pâlissant devant le soleil. Une
nouvelle apprise « a tastons. » Souhaits de bonheur au duc de Nemours. Aimable plaisanterie.
.......................................................................................................................................................... 170
MCDXXXIX. A la Mère de Chantal (Fragment). Comment se disposer à recevoir le comble du saint
amour. D'où procède la souveraine unité dans une âme.............................................................. 171
MCDXL. A Monseigneur Pierre Fenouillet, Evêque de Montpellier. La vanité d'un chef de guerre.
La vanité d'un portrait.................................................................................................................. 171
MCDXLI. A Madame de Granieu. Les « empeschemens » du saint Evêque et sa paternelle bonté.
Envoi de deux portraits. « Le secret des secretz en l'orayson. » Quelle est la meilleure prière.
Double travail de la « petite mouche a miel. » Messages de père et d'ami. ........................... 172
12/346

2.3 Page 13

▲back to top
MCDXLII. A Don Juste Guérin, Barnabite (Fragment). Un serment inutile. Protestation d'amitié.
.......................................................................................................................................................... 174
MCDXLIII. A Madame de la Forest, Religieuse de l'Abbaye de Bons (Inédite). Comment apaiser,
par humilité et douceur, un cœur mécontent. — Nul déshonneur à pardonner. ............................... 175
MCDXLIV. A madame de la Fléchère. Deux mots écrits en allant à Vêpres. Ne pas se mettre en
peine après avoir fait ce que l'on a cru être bon. .............................................................................. 176
MCDXLV. A la Mère de Chastel, Supérieure de la Visitation de Grenoble (Fragment). Un homme «
tout spirituel et tout de Dieu. » Avis du Saint pour la conduite intérieure. ................................. 176
MCDXLVI. Au Duc Roger de Bellegarde. Inquiétudes au sujet de la santé du destinataire et action
de grâces pour sa guérison. Que faire pour le bien de la vie conservée. Recommandation en
faveur d'un nouveau converti. .......................................................................................................... 177
MCDXLVII. A la Mère de Bréchard, Supérieure de la Visitation de Moulins (Inédite). Envoi d'une
lettre pour Mme des Gouffiers. Comment vivre au-dessus du monde et de ses embûches........... 178
MCDXLVIII. Au Chanoine Jean-François d'Ulme. Contradictions suscitées à la Visitation. Le
vaisseau « prest a singler et a faire voyle. » — Pourquoi les Sœurs de Grenoble sont heureuses.
Fleurs de suavité. .............................................................................................................................. 179
MCDXLIX. A madame de Granieu. Heureuse occasion d'avoir de mutuelles nouvelles. Ce que dit
un portrait au cœur filial. — Conseils au sujet du confesseur et de la confession. Salutations
paternelles......................................................................................................................................... 180
MCDL. A Messieurs du Conseil de la Sainte-Maison de Thonon. Projet d'une assemblée pour le bien
de la Sainte-Maison. ......................................................................................................................... 182
MCDLI. A la Mère Favre, Supérieure de la Visitation de Lyon (Inédite). Estime que l'on fait du
crédit du Saint ; celle qu'il en fait lui-même..................................................................................... 183
MCDLII. Au Roi de France, Louis XIII. Petite mer agitée. Eloge des PP. Célestins. Double
sentiment de l'Evêque de Genève en approchant le trône de France................................................ 183
MCDLIII. A la Mère de Chantal (Inédite). Vraie cause du peu de santé d'une Novice. Que faire
en face de caprices inguérissables. ................................................................................................... 184
MCDLIV. Aux Consuls de Chabeuil. Le Saint congratule les consuls de l'établissement projeté des
PP. Barnabites dans leur ville........................................................................................................... 185
MCDLV. A la Présidente du Faure. Réponse à des témoignages de confiance et d'affection.
Prières et souhaits pour la destinataire. ............................................................................................ 186
MCDLVI. A Madame de Granieu. L'obéissance et le pain quotidien. Explication d'un avis mal
compris. Comment la confiance restreint le nombre des lettres. L'amour céleste exercé ici-bas.
Préparation d'un sermon. ............................................................................................................. 187
MCDLVII. A Don Jérome Boerio, General des Barnabites. L'offre d'un collège aux PP. Barnabites,
Réponses à des objections. .......................................................................................................... 188
MCDLVIII. A la Mère de Chastel, Supérieure de la Visitation de Grenoble (Fragment). Tenir son
cœur au-dessus des variations de la dévotion sensible. .................................................................... 190
MCDLIX. Au Prince de Piémont, Victor-Amédée. Insuccès de précédentes démarches. Nouvelles
instances en faveur de deux pauvres curés. ...................................................................................... 190
MCDLX. A M. Jean Carron (Inédite). Premier témoignage d'honneur et d'estime. L'insuccès des
démarches et la vanité des promesses faites en faveur des curés d'Armoy et de Draillant. Triste
état de leurs paroisses. Financiers à court d'argent. Moyen proposé par le Saint pour remédier
au mal. .............................................................................................................................................. 191
MCDLXI. Au Père Léonard Lessius, de la Compagnie de Jésus. Pourquoi le Saint aime et vénère le
P. Lessius. Trois livres du docte Jésuite ; appréciation de François de Sales................................... 193
13/346

2.4 Page 14

▲back to top
MCDLXII. A Don Juste Guérin, Barnabite. Chant de victoire avant le triomphe. Un contrat
rompu. Désir d'avoir quelques livres. .......................................................................................... 195
MCDLXIII. Au Duc de Savoie, Charles-Emmanuel Ier. Les victimes d'un désastre aux pieds de Son
Altesse. L'Evêque joint ses supplications aux leurs pour obtenir la pitié du prince.................... 196
MCDLXIV. A Don Juste Guérin, Barnabite (Fragment). Affectueux reproches à un ami qui ne prend
pas assez de soin de sa santé. ........................................................................................................... 196
MCDLXV. A un religieux (Fragment). Course rapide d'une âme vers le sommet de la perfection.
Le mystère d'un nom. ....................................................................................................................... 197
MCDLXVI. Au Chanoine Honore des Echelles. L'inconstance, loi des choses de ce monde ; les
amitiés saintes en triomphent. Désir de quelques jours de repos à Belley. La demeure des
Filles de la Visitation ici-bas, leur demeure dans l'éternité. Eloge de la Mère de Chantal.......... 198
MCDLXVII. A M. François Fyot de Barain. Grande union des chanoines de Saint-Pierre de Genève
avec leur Evêque. Celui-ci soutient leurs droits dans un procès avec la ville de Seyssel............ 199
MCDLXVIII. A Monseigneur Pierre Fenouillet, Evêque de Montpellier. Remerciements pour
l'accueil fait au président Crespin. Naufragé abordant au hâvre de grâce. Le voyage du
Cardinal de Savoie est toujours incertain. ........................................................................................ 200
MCDLXIX. A la Présidente du Faure (Inédite). Lettres qui soulagent au lieu de surcharger.
Demande et promesse de prières. ..................................................................................................... 201
MCDLXX. A Madame de Granieu. Ne pas craindre d'écrire souvent. Le souhait du Saint pour
l'âme de sa chère fille. Espérance d'un revoir.............................................................................. 202
MCDLXXI. A Dom Bruno d'Affringues, Général des Chartreux. Messages affectueux par un
Capucin en route pour la Chartreuse. ............................................................................................... 202
MCDLXXII. A Messieurs les Avoyers et les Membres du Conseil de ville de Fribourg. Gracieuses
offres de service. Pourquoi le Saint veut toujours obliger les magistrats de Fribourg. ............... 203
MCDLXXIII. A la Mère de Chantal. François de Sales seconde, sans les connaître, les désirs de la
Mère de Chantal. .............................................................................................................................. 204
MCDLXXIV. A la même (Billet inédit). Une bannière, ou une croix de confrérie à restaurer. ...... 204
MCDLXXV. A la même. Sollicitude paternelle du Saint pour ses Filles. Quelque chose que la
Mère de Chantal ne saura peut-être jamais. Une postulante pauvre qu'il faut gratifier............... 205
MCDLXXVI. A un gentilhomme (Inédite). Offre de services et demande de protection. .............. 206
MCDLXXVII. Au Cardinal Frédéric Borromée, Archevêque de Milan. Envoi d'une harangue du
cardinal du Perron, et promesse de son oraison funèbre. ................................................................. 206
MCDLXXVIII. A Dona Ginevra Scaglia (Inédite). Nouveaux délais pour la fondation de Turin.
Départ pour la France ; joie au sujet d'un compagnon de voyage. L'itinéraire de la Mère de
Chantal différent de celui de l'Evêque de Genève. ........................................................................... 208
MCDLXXIX. Au Père Jean-Matthieu Ancina de la Congrégation de l'Oratoire. Pourquoi le Saint est
obligé de renoncer à écrire la Vie de Juvénal Ancina. Ses regrets. ............................................. 209
MCDLXXX. A M. Michel Favre. Une liste de nécessiteux à soulager. .......................................... 210
MCDLXXXI. A la Mère de Bréchard, Supérieure de la Visitation de Moulins. Les excuses que doit
faire la Mère de Bréchard, pour le Saint et pour elle-même............................................................. 211
MCDLXXXII. A la Mère Favre, Supérieure de la Visitation de Lyon (Fragment). Servantes, grandes
et petites, de la Mère de Dieu, unies dans son amour....................................................................... 212
MCDLXXXIII. A M. Guillaume de Bernard de Foras. Grand désir de l'Evêque de Genève d'obliger
M. de Montholon. Difficultés d'accepter les prédications de l'Avent à Saint-André-des-Arts.... 212
14/346

2.5 Page 15

▲back to top
MCDLXXXIV. A Dona Ginevra Scaglia. Projets de voyages pour la Mère de Chantal. La
bienveillance du comte de Verrua pour François de Sales. Un Cardinal et un Evêque ramant sur la
Loire. Tout Paris à la rencontre de Maurice de Savoie. Portrait de la future princesse de
Piémont. Accroissement de piété dans la capitale....................................................................... 214
MCDLXXXV. A Madame de Charmoisy. Le seul mot de consolation que puisse dire le Saint.
Comment apaiser les sanglots et soupirs. ......................................................................................... 217
MCDLXXXVI. A la Mère Favre, Supérieure de la Visitation de Lyon (Fragment). Une pépinière de
fondations. Vertus à y enraciner. Ce que la Mère Favre doit lire dans le cœur de son père
spirituel............................................................................................................................................. 218
MCDLXXXVII. A la Mère de Bréchard, Supérieure de la Visitation de Moulins. Comment Dieu
bénit une œuvre. — Trois fondements de la Visitation. La racine de la joie. ............................. 219
MCDLXXXVIII. Au Prince de Piémont, Victor-Amedée. Félicitations à Victor-Amédée au sujet de
son mariage. Eloge de la future princesse de Piémont. Grand prince et très digne cardinal. . 220
MCDLXXXIX. A Madame de la Fléchère. Douloureuses nouvelles de Savoie ; nombreuses et
bonnes affaires à Paris. Difficultés pour l'établissement de la Visitation.................................... 221
MCDXC. A la Mère de Chantal, a Bourges (Fragment). Un sermon devant « la Reyne et son beau
monde. » ........................................................................................................................................... 222
MCDXCI. A Madame de la Fléchère. Permission et conditions pour l'entrée de la destinataire à la
Visitation. — Pourquoi le Saint est de bon cœur à Paris, pourquoi il y souffre............................... 222
MCDXCII. A la Mère de Chantal, a Bourges (Fragment). Un novice qui ne sera pas profès.
Racine, branches et fruits. Pommes de senteur entre les mains de Dieu. Le dépouillement total
de soi-même, combien difficile. ....................................................................................................... 223
MCDXCIII. A un ecclésiastique. Le mot du plus franc amour selon la nature et la grâce. Assaut
d'humilité et d'affection. ................................................................................................................... 224
MCDXCIV. A la Mère de Chastel, Supérieure de la Visitation de Grenoble. Conseils de prudence au
sujet de visions et de révélations. Ruses du malin esprit. Exemple de Nicole Tavernier.
Quelle conduite tenir à l'égard d'une âme qui marche par une voie extraordinaire ; la leçon qu'elle
doit apprendre. Puissance de l'imagination. ................................................................................ 225
MCDXCV. Au Père Gérard de Tournon, Capucin L'esprit de contrariété là où devraient régner
l'union et la « conformité. » Un poste favorable pour un ecclésiastique. Sollicitude du Saint
pour quelques paroisses du pays de Gex. Son humilité et sa reconnaissance à l'égard du
destinataire........................................................................................................................................ 227
Année 1619 .......................................................................................................................................... 229
MCDXCVI. A la Présidente de Herse. Le Saint accepte une invitation et le carrosse de la Présidente.
.......................................................................................................................................................... 229
MCDXCVII. A la Mère de Chantal, a Bourges. Les aventures de Celse-Bénigne et les tourments de
la Mère de Chantal. Consolations et encouragements. Le bonheur de ceux qui sont à Jésus-
Christ. Un prétendant grandement en peine. ............................................................................... 230
MCDXCVIII. A une religieuse. Le cœur de l'Enfant Jésus : ses attraits. — Une sainte jalousie.
Comment concourir, du fond du cloître, à la prédication du Saint. Efficacité de la prière. ........ 231
MCDXCIX. A Dona Ginevra Scaglia. Au milieu des affaires de la cour, François de Sales n'oublie
pas la vocation de sa fille spirituelle. La conduite de la Providence sur ses serviteurs. Quand
différer l'exécution d'un vœu en toute sûreté de conscience............................................................. 232
MD. A la Mère de Chantal, a Bourges (Fragments). Jésus crucifié et Jésus glorifié. Quand est-ce
que Dieu supporte notre fardeau avec nous...................................................................................... 234
15/346

2.6 Page 16

▲back to top
MDI. A Madame de Granieu. Grand et doux moyen de n'être jamais séparés. Une recherche
inutile. Où la Sainte Vierge tient son noviciat. Nouvelles de la Mère de Chantal.
Prédications multipliées. La mort de M. de la Coste................................................................... 235
MDII. A Madame de Veyssilieu. Le « tracas insupportable » de Paris. Un cher malade en voie de
guérison. Ce qu'il faut pour vivre content en ce monde. Filiale confiance en Dieu et paix entre
ses bras. ............................................................................................................................................ 236
MDIII. A la Mère de Chantal, a Bourges. Abjuration d'un gentilhomme. A quelles conditions
peut-on recevoir les infirmes à la Visitation. Sans jambes, si elle n'est point estropiée de cœur,
une Sœur est capable de tous les exercices essentiels de la Règle. — « La plus brave princesse » qui
se puisse voir et le cartel de son royal fiancé. Celse-Bénigne s'apprivoise avec le Saint ; ce qui lui
manque pour faire des merveilles. Le projet de mariage entre Mlle de Chantal et M. de Foras. . 238
MDIV. A la même. Celse-Bénigne recommandé au Cardinal de Savoie. Affectueux éloges de M.
de Foras. Projet de fondation dans la capitale. Les Haudriettes. Monde et mondains.
Messages d'affection paternelle........................................................................................................ 241
MDV. A la Soeur de la Roche, Assistante-Commise de la Visitation d'Annecy. Gracieuse annonce
de François de Sales à sa correspondante. Sainte liberté et surnaturelle prudence à garder au sujet
des confesseurs extraordinaires. Espérances pour l'établissement de la Visitation à Paris.
Salutations. ....................................................................................................................................... 243
MDVI. A la Comtesse de Rossillon. Prière d'agréer une protestation de respect et d'affection.
Souhait du cœur. — Délicat conseil à une jeune cousine................................................................. 244
MDVII. A Madame de Villeneuve. Des tentations « plus ennuyeuses que perilleuses. » Promesse
d'une entrevue................................................................................................................................... 245
MDVIII. A la Mère de Chantal, a Bourges (Fragment). Les craintes de la prudence humaine au sujet
de la fondation d'un Monastère de la Visitation à Paris. .................................................................. 246
MDIX. A Dona Ginevra Scaglia. Détails bar la mort du comte de Verrua. Consolations à sa fille.
La pensée du prince de Piémont sur la fondation de la Visitation à Turin. Une vertu plus
nécessaire que la magnanimité. ........................................................................................................ 247
MDX. A la Mère de Chantal, a Bourges (Fragments). Nécessité de presser le départ pour Paris.
Hardiesse de l'entreprise. Renouveler son courage pour le service de Dieu. .............................. 249
MDXI. A Madame de Veyssilieu. Quatre lignes sorties du cœur. — Aspirer aux contentements de
l'éternité à mesure que Dieu nous sèvre de ceux de ce monde. ........................................................ 250
MDXII. A une dame (Inédite). Une jeune fille prisonnière chez les hérétiques. ............................. 251
MDXIII. A Madame Angélique Arnauld, Abbesse de Port-Royal a Maubuisson. Ce que le Saint a vu
dans le cœur de la destinataire. — Pourquoi Dieu n'exauce pas tout de suite nos prières. La
Visitation fondée à Paris................................................................................................................... 252
MDXIV. A la Mère de Chantal, a Paris. Une journée laborieusement et fructueusement employée.
Proposition d'une maison pour les Filles de la Visitation................................................................. 253
MDXV. A la même. Annonce d'une visite, et d'un visiteur qu'il faut traiter avec prudence............ 255
MDXVI. A la Mère de Chastel, Supérieure de la Visitation de Grenoble (Fragment inédit). La
présidente Le Blanc parmi les Anges. .............................................................................................. 256
MDXVII. A la Mère de Chantal, a Paris. En quête d'un carrosse. ................................................... 256
MDXVIII. A M. Michel Bouvard. Insuccès des démarches du Saint en faveur de M. de Quoex.
Recommandations au sujet de diverses affaires. .............................................................................. 257
MDXIX. A Madame Angélique Arnauld, Abbesse de Port-Royal a Maubuisson. Les pensées de
François de Sales sur la confiance qu'on lui témoigne. Pourquoi il est bon de prendre avis de
16/346

2.7 Page 17

▲back to top
diverses personnes. Réponse à la crainte de suivre ses inclinations tout en obéissant. Promesse
d'une visite ou d'une lettre. ............................................................................................................... 258
MDXX. A M. Soudan de la Palme (Inédite). Un parrain heureux des nouvelles de son filleul.
Prochain départ de Paris. Deux adresses pour les lettres............................................................. 260
MDXXI. A Madame de Charmoisy (Inédite). L'Evêque de Genève solliciteur pour Mme de
Charmoisy. Difficultés d'obtenir et circonspection à garder dans les demandes. Approches du
retour en Savoie................................................................................................................................ 261
MDXXII. A Madame de Villesavin. Comment supporter les petites persécutions des enfants du
monde. Salomon, ses richesses, et « son inenarrable malheur. » La devise du Christ. Un
adieu jusqu'à l'éternité. Pourquoi se réjouir de s'être aimés en cette vie. .................................... 262
MDXXIII. A la Mère de Chantal, a Paris. Un conseil de conscience. Ce qui « osta un peu
l'asseurance » au saint prédicateur.................................................................................................... 263
MDXXIV. A Madame Angélique Arnauld, Abbesse de Port-Royal a Maubuisson. Les noms de «
plus grande force pour tesmoigner la dilection. » Un sentiment que le Saint veut conserver
soigneusement. Desseins de Dieu sur l'Abbesse de Port-Royal. Le livre de D. Sens et la
manière de le comprendre. Remarque pleine de sagesse et de délicatesse de l'Evêque de Genève
au sujet de la doctrine du Général des Feuillants. Ne pas trop se charger d'austérités. ............... 264
MDXXV. Au Prince de Piémont, Victor-Amédée. Une dame d'honneur de la princesse de Piémont
retenue à Paris. ................................................................................................................................. 266
MDXXVI. Au Duc Roger de Bellegarde. Instante requête au destinataire pour l'heureuse conclusion
d'un procès entre les chanoines de Saint-Pierre de Genève et les habitants de Seyssel. .................. 267
MDXXVII. A la Mère de Chantal, a Paris. Un sentiment de l'âme du Saint au lieu d'un bouquet du
désert. Deux regards qui rendent bienheureux. Comment faire la grille du choeur. La
première profession à la Visitation de Paris. .................................................................................... 268
MDXXVIII. A une dame. Pourquoi on ne peut pas recevoir Mme du Tertre à la Visitation de Paris.
Réserve et prudence du saint Evêque. .............................................................................................. 269
MDXXIX. A Madame Angélique Arnauld, Abbesse de Port-Royal a Maubuisson. Une confession
générale faite « a la desrobee. » Promesse d'un revoir. Le chemin d'une « excellente sorte de
vie. » Divin compagnon de route ; manière de le suivre. Méditation du Saint sur la
Communion. ..................................................................................................................................... 270
MDXXX. Au Duc de Savoie, Charles-Emmanuel Ier. « Quatre lignes pour gage. » ........................ 271
MDXXXI. A un gentilhomme. La clarté de l'Ecriture, et l'obscurité de l'esprit humain.
Contradictions des luthériens et des calvinistes dans l'explication de certains passages. L'Eglise,
gardienne et interprète infaillible de la Parole de Dieu. ................................................................... 272
MDXXXII. Au Prince de Piémont, Victor-Amédée. Remerciements et soumission. Le duc et la
duchesse de Nemours. ...................................................................................................................... 273
MDXXXIII. A la Mère de Chantal, a Paris. Une protectrice pour la Visitation. Préparatifs d'une
cérémonie de profession. .................................................................................................................. 274
MDXXXIV. Au Duc de Savoie, Charles-Emmanuel Ier. Témoignage en faveur du collatéral de
Quoex. Quelle correction permettent l'équité et la clémence pour des fautes sans malice.
Espérance en la bonté du prince. ...................................................................................................... 275
MDXXXV. A la Mère de Chantal, a Paris. Le Saint, malade, traité par une « archimedecine. »
Confessions avant de « s'en aller aux chams. » ................................................................................ 276
MDXXXVI. Au Prince de Piémont, Victor-Amédée. La détresse du duc de Nemours. François de
Sales appuie sa cause. Désir de l'Evêque de retourner en son diocèse. ....................................... 277
17/346

2.8 Page 18

▲back to top
MDXXXVII. A la Mère de Bréchard, Supérieure de la Visitation de Moulins. Une jeune veuve qui
désire la vocation religieuse. Pourquoi le saint Fondateur a choisi le monastère de Moulins pour
sa retraite. De quelle tyrannie délivrer cette âme, quel joug lui imposer. ................................... 278
MDXXXVIII. A la Mère de Chantal, a Paris. Obligeante intervention de M. de Neufchèzes dans une
affaire. Le saint Evêque, malade, est obligé de contremander plusieurs sermons....................... 279
MDXXXIX. A Madame de Villesavin. Un même trésor pour tous les cœurs des enfants de Dieu. —
Ne pas se lasser ni lasser les autres par la longueur des exercices spirituels. Conduite à tenir dans
les conversations. Chasser la tristesse. Envoi d'une méthode pour s'unir à Notre-Seigneur. . 280
MDXL. A la Mère de Chantal, a Paris. Programme d'une journée. ................................................. 281
Appendice............................................................................................................................................. 282
I. Lettres adressées a Saint François de Sales par quelques correspondants .................................... 284
A. Lettre de la Mère Favre, Supérieure de la Visitation de Lyon................................................. 284
B. Lettre de Charles-Emmanuel Ier, Duc de Savoie...................................................................... 285
C. Lettre du Cardinal Robert Bellarmin (Fragment) .................................................................... 285
D. Bref se Sa Sainteté Paul V ....................................................................................................... 286
E. Lettre des Avoyers et du Conseil de la Ville de Fribourg........................................................ 287
F. Lettre de M. Etienne Dunant, Curé de Gex.............................................................................. 288
G. Lettre du Président Crespin ..................................................................................................... 290
H. Lettre du Chanoine Artus de Lionne, Seigneur d'Aoste .......................................................... 291
II. Lettres & Pièces diverses ............................................................................................................. 293
A. Lettre de l'Abbé de la Mente au Duc de Savoie (Fragment).................................................... 293
B. Lettre de Don Juste Guérin a D. Boerio, Général des Barnabites............................................ 294
C. Lettres patentes de Henri de Savoie, Duc de Nemours, en faveur des Religieuses de la
Visitation d'Annecy ...................................................................................................................... 296
D. Requête des Religieuses de la Visitation d'Annecy au Duc de Savoie .................................... 297
Glossaire des locutions et des mots surannés ou pris dans une acception inusitee aujourd'hui ........... 298
Index des correspondants et des principales notes biographiques et historiques de ce volume ........... 306
Table de correspondence de cette nouvelle édition avec les précédentes et indication de la provenance
des manuscrits ...................................................................................................................................... 317
Table des matières ................................................................................................................................ 331
18/346

2.9 Page 19

▲back to top
Avant-Propos
_____
Une nouvelle série de deux cent trente-deux Lettres et fragments s'offre aujourd'hui aux
admirateurs de saint François de Sales1 ; elle retrace vingt-sept mois de cette vie féconde qui
maintenant semble emprunter quelque chose des beautés sereines du couchant, sans perdre l'éclat
rayonnant du plein midi.
Dès les premières pages, presque aussitôt après la vigueur tout apostolique du début, par
un contraste saisissant, le cœur du Saint se montre à nous, sensible, profond, tendre à l'excès, dans
la douloureuse et touchante histoire de ses deuils.
Il avait un frère, gentilhomme accompli, vaillant guerrier, âme noble et attirante, « aymable
a chacun2 » et honoré des princes. Une fièvre pestilentielle l'emporte en quelques jours, loin des
siens, loin de sa femme, la délicieuse Marie-Aimée de Chantal, et celle-ci, après avoir lutté en vain
contre sa souffrance, succombe elle-même au bout de trois mois.
Déjà nous avons vu pleurer l'Evêque de Genève près de cercueils aimés ; on se souvient de
ses accents émus sur Jeanne de Sales et Mme de Boisy ; mais cette fois, le glaive pénètre plus avant,
l'âme laisse échapper des mots qui révèlent la profondeur de la plaie, et la blessure saignante est
plus longue à se cicatriser. C'est qu'il aimait « incroyablement3 » le baron et la baronne de Thorens
dont naguère il bénissait l'union providentielle, [V] après avoir souri avec une tendresse de père et
de frère aux premiers élans de leurs deux cœurs. Au reste, Bernard, c'était l'honneur de la famille,
il promettait d'être une de ses gloires, tandis que par ses qualités morales il en faisait le charme.
Marie-Aimée, la dame parfaite, comme autrefois la baronne de Chantal, lui ressemblant encore
dans son brusque veuvage, marchait si rapidement sur ses pas vers la perfection, qu'on « pouvoit
esperer que dans peu de tems elle seroit une « autre nostre Mere4. » Et tous deux, enlevés au milieu
du bonheur le plus pur, des espérances les plus riantes et les plus belles ; si unis dans la vie qu'il
ne se peut même que la mort les sépare ! On comprend la douleur de l'Evêque, doublée de celle,
non moins vive, de la Mère de Chantal ; et volontiers l'on pleure avec lui sur tant de promesses
d'avenir évanouies, sur ces existences charmantes, disparues comme les fleurs dont parle le
Psalmiste : brillantes au matin, et le soir languissantes et flétries. Mais, avec lui aussi, peut-on
s'empêcher de bénir la bonté de Dieu qui retire le jeune chevalier d'une profession où se rencontrent
« en ce miserable aage5 » tant d'occasions de pécher, pour le « recueillir... entre ses esleus6, » le
fait mourir « saint entre les soldatz, » et donne aussi à « sa chere espouse... unique fille » du
bienheureux Prélat7, la fin « la plus sainte, la plus suave « et la plus aymable qu'il est possible de
s'imaginer8 » ?
D'autres départs pour l'éternité vont se succéder ; les amnis de François de Sales se suivront
« sans intermission » dans la tombe9, et il pourra écrire tristement10 : « Toute cett'annee j'ay vescu
parmi les mortz. »
En ces circonstances, l'Evêque de Genève nous apparaît « tant homme que rien plus11, »
pour employer [VI] l’une de ses expressions, avec un cœur de chair et des affections puissantes.
1 Outre plusieurs fragments et la plupart des pièces de l'Appendice qui paraissent ici pour la première fois, ce volume
contient trente-trois Lettres inédites.
2 Page 15.
3 Page 18.
4 Page 76.
5 Page 20.
6 Page 17.
7 Page 111.
8 Page 75.
9 Page 21.
10 Lettre MCCCLXV, p. 103.
11 Lettre à la baronne de Chantal, 2 novembre 1607, tome XIII, p. 330.
19/346

2.10 Page 20

▲back to top
Loin de lui le stoïcisme des philosophes, la honte des larmes et le silence affecté. Il sait, lui, que
rien ne doit être étouffé de ce que Dieu a mis dans sa créature, il sait que son Maître, le Christ, a
pris un cœur d'homme et en a sanctifié tous les sentiments. Et il pleure comme Jésus pleura sur
Lazare ; et il dit sa douleur à ses parents, à ses Filles, à ceux qui lui font « l'honneur de » lui «
vouloir du bien12. »
La souffrance ne resserre pas les grandes âmes, ne les replie pas sur elles-mêmes ; tout au
contraire, l'épée sanglante ouvre leur cœur, semble-t-il, pour que chacun puisse y venir puiser des
trésors de dévouement, de bonté et d'amour. Tournons ces pages trempées de larmes : voici les
noms de la Bellot, « cette chetifve fille13 » dont les rechutes, la noire ingratitude, n'ont pu lasser la
patience du miséricordieux Prélat ; de Crespin, encore plus infortuné que coupable14 ; de la « fille
de « Bons..., pauvre ame » à retirer « du hazard15 ; » de l'Abbesse du Puits-d'Orbe qu'il faut
supporter « emmi » ses « enfances16, » et d'autres malheureux vers lesquels se penche avec
tendresse le compatissant Evêque qui a toujours devant les yeux « saint Pierre, prince des «
pœnitens,... si doux aux pecheurs apres quil ne le fut « plus17. »
Et voilà l'homme à qui l'on a donné pour disciple, pour imitateur et continuateur le sombre
et dur Jean Duvergier de Hauranne ! Vraiment, l'opposition ne pourrait être plus totale et plus
frappante entre un père et un fils. François de Sales et Saint-Cyran, ce sont les deux antipodes.
L'un, travaillant à développer et sanctifier, en lui et dans les autres, tout germe bon déposé par le
Créateur, l'autre ne cherchant qu'à détruire ; l'un faisant de la nature purifiée de ses vices le support,
le [VII] point d'appui de l'édifice surnaturel, l'autre dont le rêve fondamental fut toujours la contre-
nature ; l'un formant des libres, enfants d'amour qui vont à leur Père en passant joyeusement par
dessus tout obstacle, l'autre ne façonnant que des esclaves frémissant de crainte devant un maître
cruel, dont ils pensent apaiser le courroux en tuant en eux tout ce qu'il y a mis de vivant. Le second
ne veut voir en Dieu que le juge sévère ; le premier interroge « le cœur de Nostre Seigneur, » pour
y trouver dans « le divin amour » l'origine de toutes choses, même des afflictions les plus dures ;
et, s'ans s'en douter, il exprime d'un mot l'abîme qui sépare leurs doctrines : « C'est bien fait de
jetter nostre pensee sur la justice qui nous punit, mais c'est mieux fait encor de benir la misericorde
qui nous exerce18. »
Mais pourquoi le nom de Saint-Cyran est-il venu sous notre plume ? C'est que, vers la fin
du volume, nous entrevoyons la silhouette lointaine de ce mauvais génie de Port-Royal, au moment
où la Mère Angélique Arnauld entre en scène au milieu des âmes qui, avides de perfection, de
lumière et d'obéissance, se jettent aux pieds de l'Evêque de Genève. Quatre lettres seulement à la
nouvelle Philothée sont données ici ; il faut attendre celles qui suivront pour étudier à fond cette
direction où éclate le mérite sans pair du Maître de la vie spirituelle, et pour pénétrer dans les replis
d'un cœur fait pour de grandes choses assurément, riche en ressources de sainteté, et, plus que nul
autre peut-être, réclamant une main ferme qui le maîtrise, un jugement sûr qui le guide, entre les
extrêmes où l'entraîne sa pente, par le chemin d'une « douce, paysible et forte humilité19. » Il suffit
à cette heure de signaler le début de cette importante correspondance, et d'incliner le lecteur à
commencer sans retard le parallèle entre les deux hommes qui se succédèrent dans la conduite de
la célèbre Abbesse.
Comment François de Sales l'avait-il connue ? En [VIII] 1618, à la suite du Cardinal de
Savoie, l'Evêque de Genève rentrait à Paris qu'il avait quitté en 1602, simple coadjuteur de Mgr de
Granier. La face des choses avait bien changé depuis cette époque. Sous le poignard de Ravaillac
étaient tombés les desseins du grand Henri et la paix du royaume. Le nouveau Roi, presque un
12 Page 74.
13 Page 33.
14 Voir Lettres MCCCXXIX, MCCCXXX, et note (228), p. 56.
15 Pages 48 et 36.
16 Page 48.
17 Page 33.
18 Lettre MCCCLXXI, p. 114.
19 Page 399.
20/346

3 Pages 21-30

▲back to top

3.1 Page 21

▲back to top
enfant encore, voyait les princes se révolter ; sa mère, après une régence orageuse, relâchait
difficilement son autorité, tandis que celle des favoris excitait d'universelles colères. A peine
trouve-t-on, dans la correspondance du Saint, de discrètes allusions à ces événements. Sa
pénétration n'est pas en défaut sans doute, non plus que son intérêt affectueux pour notre patrie ;
mais, homme de Dieu avant tout, ces questions ne paraissent pas de son ressort ; on dirait qu'il se
fait un point d'honneur de sa délicatesse et de son silence. En fait de politique, il s'occupe
uniquement de l'affaire pour laquelle il est venu, et dont son souverain l'a chargé. Charles-
Emmanuel, en effet, si longtemps et injustement méfiant à son égard, avait enfin reconnu que la
loyauté et le dévouement, chez l'Evêque de Genève, ne le cédaient ni à la vertu ni au talent de
gagner les hommes. Aussi songea-t-il à utiliser l'influence que le Prélat avait, malgré
l'éloignement, gardée à la cour de France ; et son fils Maurice se présenta devant Louis XIII entouré
des trois hommes les plus remarquables de ses Etats : le grand jurisconsulte Antoine Favre, l'habile
diplomate Philibert-Gérard Scaglia, et le saint et savant François de Sales.
La mission était importante il s'agissait d'une alliance, la vingtième, entre l'ancienne
Maison de Savoie et la royale Maison de France ; elle fut conduite avec bonheur par les
ambassadeurs, et l'Evêque eut sa part bien marquée dans le succès. On peut suivre, dans les Lettres
de ce volume, l'intéressant récit du voyage du Prince-Cardinal et de sa négociation. Départ
précipité après des remises sans fin, pompeuses réceptions dans les principales villes, agréable
navigation sur la Loire, entrée solennelle à Paris, telle qu'il ne s'en est [IX] pas vue « de mémoire
d'homme20 ; » puis, c'est le portrait physique et moral de la future princesse de Piémont, plusieurs
fois tracé, et résumé par ce mot : « C'est la « plus brave Princesse quil est possible de voir21 ; »
enfin, vient l'heureuse conclusion du mariage de Victor-Amédée de Savoie et de Christine de
France, et l'aimable écrivain n'oublie même pas l'histoire du cartel, digne de l'âge d'or de la
chevalerie, qu'il ne sait « pas trop bien, » mais qu'il nous raconte avec beaucoup de grâce22.
L'ambassadeur s'est donné tout entier à sa mission ; lorsqu'elle est terminée, l'Evêque songe
à retourner dans son diocèse, où il a son « devoir » et ses « cheres brebis23. » Respectueusement,
il le rappelle au Prince de Piémont ; mais Victor-Amédée n'avait garde de laisser repartir comme
un serviteur ordinaire celui à qui il devait tant, et qu'il voulait placer auprès de Son Altesse
Christine en qualité de grand Aumônier. François de Sales, attendant les princes, demeura donc à
Paris.
Si les changements politiques de la capitale l'ont laissé en apparence indifférent, par contre,
la transformation religieuse le frappe dès l'abord. « J'ai trouvé à Paris un tel accroissement de piété
que c'est merveille, » écrit-il presque aussitôt son arrivée24 ; et un peu plus tard25 : « Il ne se peut
dire... combien on voit « d'exemples de pieté icy, mesme au milieu de la cour. » Etait-il donc si
étranger à ce mouvement ? La pensée ne lui vint pas, sans doute, que la semence jetée par lui, seize
ans auparavant, avait germé dans les âmes, et que ses livres de l'Introduction a la Vie devote et du
Traitté de l'Amour de Dieu avaient silencieusement, mais efficacement, continué son œuvre. Et
pourtant, il fallait bien que chacun le comprît et le reconnût, puisque, dès la première heure, tous,
« serviteurs et servantes « de Nostre Seigneur, » dont le nombre et la confiance [X] étonnent son
humilité26, accourent à lui, et ne lui laisseront plus un moment de repos jusqu'au départ. Il y avait
cependant à cette époque des hommes éminents en science et en piété, renommés pour leur talent
de directeurs. N'importe ! les premiers, ils viennent à l'Evêque de Genève comme à leur maître, et
tel d'entre eux déclarait en avoir plus appris en quelques heures d'entretien avec ce saint Prélat que
dans de longues études.
20 Page 308.
21 Lettre MDIII, p. 347.
22 Ibid.
23 Page 319.
24 Lettre italienne à Dona Ginevra Scaglia, p. 310.
25 Lettre MCDXCI, p. 319.
26 Voir Lettre MDXIX, p. 378.
21/346

3.2 Page 22

▲back to top
C'était un maître, en effet, et nul ne l'égalait dans l'art de manier les âmes, de les conduire
vers un but unique par des routes adaptées à leur situation, à leur tempérament, à leur caractère ;
d'obtenir d'elles une obéissance qui n'était pas une servitude ; de briser leur amour-propre, sans
jamais briser leur élan ni blesser leur cœur. Aux filles spirituelles que nous lui connaissons déjà,
et dont plusieurs sont, dans ce volume, destinataires de lettres remarquables : Mmes de Granieu, de
Veyssilieu, Le Blanc, pour ne citer que celles-là, se joignent les femmes de la haute société
parisienne. Aujourd'hui, François de Sales leur donne ses conseils, les pousse dans le chemin de
la dévotion où les a introduites la Philothée ; demain, elles seront les auxiliaires de Vincent de
Paul dans les œuvres magnifiques qui vont s'épanouir. Elles apprennent de l'Evêque de Genève
qu'il faut être « les servantes des pauvres27, » et, guidées par un homme suscité de Dieu pour ce
service royal, elles sauront forcer l'admiration du monde. Les bases se posent maintenant, l'édifice
va s'élever bientôt, et la mission de l'Evêque prépare celle de l'humble Prêtre. Dans l'histoire de
l'humanité, comme dans celle de chaque âme, un événement a sa cause dans un événement
précédent, et rien n'est intéressant et profitable comme de suivre la marche de la Providence et
d'étudier la genèse de ses grandes œuvres.
François de Sales, du reste, ne travaille pas seulement la société par ses enseignements et
par ses prédications [XI] elles furent incessantes pendant ses onze mois de séjour en France
; n'oublions pas qu'il est le fondateur d'un Ordre qui aura sa part, l'histoire nous le dit, dans le
renouvellement de la vie monastique et, en général, du sentiment religieux au plus intime de la
société française du XVIIe siècle.
Et voilà que, dans les plans divins, l'une des raisons du voyage à Paris est l'établissement,
au sein même de la capitale, d'une Maison de la Visitation. Un grand pas venait d'être fait pour
l'Institut nouveau. Le Bref de Paul V le transformant en Ordre religieux avait été donné le 23 avril
1618 28, et l'Evêque le fulminait au premier Monastère d'Annecy avant de partir pour la France.
Quelques jours après, la Mère de Chantal, revenue depuis cinq mois de la fondation de Grenoble,
s'éloigne à son tour de la Savoie, se dirigeant sur Bourges, où elle jette les fondements d'un
Monastère ; là, elle attend le signe du Saint pour aller vaillamment souffrir les contradictions, les
difficultés de toutes sortes, la pauvreté, dans la première ville de France. Son renom même était
un obstacle. On craignait qu'elle n'enlevât « la vogue aux autres Maysons religieuses, » et « que,
quand on auroit veu cette madame de Chantal, il « n'y auroit plus que pour elle29. » Le bon Saint
écrit cela avec un sourire, mais avec quelque tristesse aussi de voir dominer toujours la prudence
humaine jusque dans le cœur des plus parfaits. Il la connaissait si peu lui-même ! il aimait tant les
coups hardis, lorsque « Dieu requiert que l'on » les « fasse », et les affaires entreprises « sous la
seule Providence » divine30.
Mais il faut le dire, chacun n'a pas comme lui, pour triompher des hommes et des choses,
le talent s'ajoutant à sa surnaturelle confiance de demeurer toujours « au fin point de la
moderation31, » de trouver ce juste milieu où, suivant les anciens, réside la vertu. Il s'en [XII] servit
merveilleusement dans la circonstance, et la Visitation s'établit à Paris.
Les charmants petits billets du Fondateur à sa sainte coopératrice nous initient à ces
commencements pénibles, aux démarches que l'Evêque fait pour ses Filles, sans jamais se rendre
importun ni exigeant. Les nouvelles venues n'eurent-elles pas même à endurer la faim ? Vertueuses
et discrètes comme leur Père, elles lui laissèrent en partie ignorer leur détresse. Et pourtant, il
n'aurait eu qu'un mot à dire : grands seigneurs et grandes dames auraient largement pourvu à toutes
les disettes, trop heureux de lui témoigner ainsi leur estime. Mais non ; là, de même qu'à Annecy,
il ne prétend dresser à ses chères « avettes... qu'une petite ruche mediocre, » sachant bien qu'elles
27 Introduction a la Vie dévote, Partie III, chap. XV.
28 Voir ce Bref à l'Appendice I, p. 423.
29 Page 359.
30 Page 365.
31 Page 379.
22/346

3.3 Page 23

▲back to top
ne se soucieront point de son « embellissement, » mais seulement « de cueillir » leur « miel32, » et
que, « pelerines » en route pour « leur cité permanente, » elles ne se mettront pas en peine des
incommodités du logis où elles doivent passer « la nuit de cette petite « vie33. »
Et pourquoi voudrait-il pour ses Filles ce qu'il dédaigne pour lui-même ? Les splendeurs
de la cour le laissent insensible ; dans la capitale, il a presque la nostalgie de ses montagnes, et son
cœur « se plairoit grandement d'estre parmi » les « petitesses » de la Savoie34. Ce n'est pas qu'il
soit dépaysé dans ce nouveau milieu. Il reconnaît que la France est la terre de « la franche et
generale « courtoysie35 » et qu'il faut y « estre grandement en respect36. » Mais lui, n'est-il pas le
gentilhomme consommé, auquel son habitude du monde, sa parfaite éducation, sa vertu donnent
une suprême aisance en face des grands, des têtes couronnées ? Il a du courtisan l'exquise politesse
et souvent les mots heureux, quoique exempts de flatterie, sans en avoir jamais la servilité, même
quand [XIII] il est solliciteur. Veut-on voir comme il excelle à demander protection sans déroger
? Qu'on lise sa lettre à un gentilhomme de la cour de Rome en faveur des Chanoines de sa
cathédrale37.
Mais ce Prélat qui ne le cède en rien à ceux des rangs les plus illustres, quand il s'agit de
traiter avec la haute société et d'approcher du trône, reste toujours le Père tendre, charitable,
compatissant aux petites gens, pour lesquels son cœur a des attraits particuliers. Si Paris le lasse,
Paris où l'insatiable ambition fait tourner les têtes, où « tout est recherché » avec tant d'ardeur
qu'on croirait « que le monde va finir, car tous ont peur qu'il ne « leur manque38, » ne serait-ce
pas aussi parce qu'il a hâte de se retrouver au milieu du menu peuple de sa ville épiscopale, de ces
indigents qu'il connaît par leur nom, dont il a pesé les besoins aux balances de sa maigre richesse
; auxquels, avant de partir, il assure des secours pour qu'ils ne souffrent point de son absence39 ?
Que de fois, à travers ces pages nouvelles, nous rencontrons le saint Evêque s'inclinant, non plus
seulement vers les misères morales, mais vers toutes les nécessités matérielles : habitants de la
vallée d'Aulps accablés d'un désastre, malheureux prisonniers, converti abandonné des siens et
sans ressources, etc. Près de tous, il passe, comme son Maître, en faisant le bien.
Quelle belle âme ! Une fois de plus, dans le miroir si limpide de ses écrits, elle nous apparaît
noble, pure, attachante, pétrie d'amour de Dieu et du prochain. L'Evêque de Genève, écrivant ses
Lettres, nous fait songer à ces grands peintres qui ont laissé d'eux-mêmes des portraits immortels,
la gloire de nos musées. A son insu, sans y prétendre, sa correspondance continue d'être, dans ce
volume comme dans les précédents, son histoire la plus vraie, la plus fidèle, la gloire de la
littérature française. Oui, car si nous pouvons dire : quelle belle âme ! ajoutons [XIV] sans hésiter
: quelle belle langue ! A mesure qu'on l'étudie, on n'est plus surpris de l'ardeur avec laquelle
Ozanam, soutenant sa thèse de doctorat en Sorbonne, revendiquait pour François de Sales une
place de choix parmi les fondateurs de la langue française. La richesse, la grâce, la limpidité, la
note populaire sans bassesse, le goût de terroir, la bonne humeur, le piquant des saillies heureuses,
quoi de plus français que cet ensemble de qualités ? On les retrouve à chaque page, et avec un à-
propos tel, qu'on oublie l'écriture pour retrouver la voix : on ne le lit plus, on croit l'entendre.
Trop longtemps, peut-être, nous avons retenu le lecteur ; qu'il savoure maintenant ce
langage d'un écrivain qui, sans prendre « garde a bien bastir » ses « lettres, » sans chercher « les
beaux ædifices40, » produisait d'impérissables chefs-d'œuvre ; qu'il pénètre dans cette âme toujours
vivante, et écoute ses pensées qui gardent, après trois cents ans, la même vigueur, la même
fraîcheur qu'au moment où elles jaillirent du cœur du grand Evêque.
32 Page 7.
33 Page 213.
34 Page 319.
35 Page 316.
36 Page 374.
37 Lettre MCDLXXVI.
38 Page 352.
39 Voir le billet à M. Michel Favre, son aumônier, 16 octobre 1618.
40 Page 400.
23/346

3.4 Page 24

▲back to top
Annecy, 21 novembre 1912,
Fête de la Présentation de la Très Sainte Vierge. [XV]
LES ÉDITEURS.
24/346

3.5 Page 25

▲back to top
Avis au lecteur
_____
Des Lettres publiées dans ce volume, un grand nombre ont été revues sur les originaux. La
provenance indiquée à la fin de chaque pièce, est celle qui nous était connue au moment où elle
nous a été communiquée. Lorsqu'un Autographe provient d'une Communauté française exilée ou
dispersée, nous donnons l'ancienne adresse de celle-ci.
Les Lettres qui ne sont suivies d'aucune indication sont celles dont, a défaut d'Autographes
ou de copies authentiques, on a dû emprunter le texte à des publications antérieures. Voir à la fin
de ce volume la Table de correspondance, et l'Avant-Propos du tome XI, pp. xxv-xxvij.
Les Editeurs sont seuls responsables de l'adresse et de la date qui précèdent chaque pièce
; l'une et l'autre sont répétées à la fin quand elles figurent sut l'original, ou qu'elles sont
authentiques, quoique fournies par les textes imprimés. Les points remplaçant quelque
énumération de la date indiquent que cette partie de la date est donnée, mais fautivement, par
l'édition à laquelle notre texte est emprunté.
Quand la date attribuée à une lettre n'est pas absolument sûre, elle est insérée entre [ ].
Ces signes sont également employés pour les mots qu'il a fallu suppléer dans le texte.
Les divergences qui existent entre quelques minutes et le texte définitif sont données au bas
des pages. Le commencement de la variante est indiqué par la répétition en italique des mots qui
la précèdent immédiatement au texte ; la fin est régulièrement marquée par la lettre de renvoi. Les
passages biffés dans les Autographes sont enchâssés entre [ ].
Des points placés au commencement ou à la fin des lettres indiquent un texte incomplet.
Quand les Autographes ont subi quelque mutilation, nous l'indiquons chaque fois.
A la suite du Glossaire se trouve un Index, dans lequel il a été jugé à propos de fondre les
noms des destinataires avec les titres des principales notes historiques et biographiques. Toutes
les notes concernant le clergé de l'ancien diocèse de Genève sont tirées des Registres de l'époque
; elles sont désignées par les deux initiales R. E.
Sauf indication contraire, tous les renseignements relatifs à la noblesse savoisienne sont
empruntés au monumental ouvrage du Comte Amédée de Foras, si dignement continué par le
Comte de Mareschal de Luciane : Armorial et Nobiliaire de l'ancien Duché de Savoie. [XVI]
25/346

3.6 Page 26

▲back to top
Lettres de Saint François de Sales. Année 1617
(Suite)
_____
MCCCVIII. A M. Etienne Dunant, Curé de Gex41. Zèle du Saint
pour la discipline ecclésiastique. Il soutient avec fermeté ses
droits d'Evêque dans toute l'étendue de son diocèse, et impose sa
volonté pour la gloire de Dieu et l'honneur de l'Eglise.
Annecy, 11 mai 1617.
Monsieur,
Je ne retarde d'aller a Gex que pour y aller plus a propos42. Mays en attendant, je vous prie
d'advertir tous nos ecclesiastiques de dela de faire retirer promptement les femmes quilz ont peut
estre en leurs maysons. Et je dis peut estre, parce que je sçai que nul n'en avoit ci devant sinon M.
Jaquin43, auquel j'en ay parlé, et [1] m'asseure quil y aura mis ordre. Que sil ne l'a pas fait il a tort,
car il sçait bien ce que je luy en ay dit. Ni ne veux pas croire quil soit si outrecuidé de dire, comme
quelques uns, qu'il est en l'Eglise gallicane en laquelle les prestres sont privilegiés ; car je pense
qu'il sçait que l'Eglise gallicane est un membre de l'Eglise universelle, et que les anciens canons
des Conciles y sont receuz, et que les Evesques ne sont pas moins Evesques en France qu'ailleurs,
et, qu'en particulier, je ne suis rien moins dela le Rosne que deça, ains j'affectionne d'establir la
discipline ecclesiastique de dela, et sur tout a Gex, avec plus de soin que de deça, par ce qu'icy les
adversaires de l'Eglise sont moins puissans et moins præsens.
Mays, de tout ceci, communiques en avec le P. Commissaire44 qui est, je m'asseure,
maintenant vers vous, affin quil fortifie mon intention de ses remonstrances, sil y escheoit. Or,
mon intention est que nul præstre n'ayt en sa mayson aucune femme qui y habite, sinon les meres,
bellemeres, seurs, belleseurs, tante (c'est a dire seur du pere ou de la mere) et niece, fille de frere
ou de seur, selon l'ordre porté par le Concile de Nicee45. Et ce soit asses dit quant a ce point, auquel
je veux estre obei absolument, sachant combien il importe a l'honneur de l'Eglise. Toutefois, si
ledit M. Jaquin n'avoit pas obtemperé et quil demandast quelques quinze jours de delay, vous le
luy pourres donner.
Je dis de mesme de la distribution des saintes Huiles, en quoy tous nos confreres doivent
suivre l'ordre mis au Sinode46. Il n'est pas expedient pour encor que M. Jaquin aille faire residence
41 Voir tome XIV, note (188), p. 65.
42 Ce voyage, retardé plusieurs fois pour diverses raisons, n'eut lieu qu'au mois de juillet. (Voir ci-après, Lettres
MCCCXIV, MCCCXIX.)
43 Originaire de Gex, Claude Jacquin avait été ordonné diacre le 17 septembre 1611. Deux ans après, il était, comme
sacristain, chargé d'aider M. Dunant, à la fois titulaire et économe de la cure de Gex. Celle de Chevry lui fut aussi
confiée ; mais tous les habitants de cette paroisse étaient huguenots, et jamais M. Jacquin n'y fit aucun exercice du
culte catholique. Le 16 février 1619, il devint curé de Grilly, tout en gardant le titre d'« œconome des biens
ecclesiastiques du bailliage de Gex, » que M. Dunant lui avait laissé. Il mourut en 1622. (R. E.)
44 Le P. François de Chambéry, Capucin (voir tomes XI, note (419), p. 179, et XVI, note (712), p. 220).
45 Canon. III.
46 A moins de raisons majeures, François de Sales, selon l'ordonnance de Mgr de Granier. son prédécesseur, réunissait
le synode diocésain le mercredi qui suit le deuxième dimanche après Pâques. Celui de 1617 dut donc avoir lieu le 12
avril, jour où tombait ce mercredi. Trente-et-un statuts furent promulgués dans cette assemblée : le neuvième regarde
la distribution des saintes Huiles, en désigne les officiers et en règle le temps et la manière ; le onzième ordonne aux
ecclésiastiques, sous peine d'excommunication, de congédier les femmes qu'ils tiendraient dans leurs maisons, si elles
n'ont le degré de parenté indiqué dans la présente lettre du Saint.
26/346

3.7 Page 27

▲back to top
; car, comme pourroit il faire [2] commodement la charge de l'œconome que vous luy aves remise
? Il a promis de faire reparer la mayson presbiterale de sa cure47 et accommoder les choses requises
a l'exercice, ce qu'attendant il pourra bien suppleer. Le P. Commissaire estant la, je m'asseure,
employera sa prudence a discerner ce qui sera expedient, affin que, quand j'y iray avec luy, nous
puissions trancher nettement et ordonner a chacun son office et ce qul devra faire.
Atant, me recommandant a vos bonnes graces et prieres et saluant humblement le P.
Commissaire avec tous les Peres48 et nos confreres Mrs les curés, je demeure,
Monsieur,
Vostre tres humble confrere,
FRANÇS, E. de Geneve.
XI may 1617, Annessi.
Monsieur
Monsieur du Nant, Curé de Gex.
Revu sur l'Autographe appartenant à Mmc la comtesse d'Asnières de Sales, à Metz (Annecy).
_____
MCCCIX. A Madame de la Valbonne49. Double renoncement.
Délicate charité de François de Sales à l'égard de ceux qui
n'approuvent pas ses avis. Quand la perte des Communions
n'est pas dommageable à l'âme.
Annecy, 15 mai 1617.
50 Il n'y a remede, ma chere Fille : nous avons renoncé aux consolations mondaines, et, non
contens de cela, [3] encor nous faut il renoncer aux spirituelles, puisque telle est la volonté de
Celuy pour lequel nous devons vivre et mourir.
Pensés si nostre Mere51 eust fait une grande feste de vous voir a la Visitation, et si vostre
consolation m'en eust donné une excellente. Mais puisque le mary ni le confesseur ne l'ont pas
treuvé bon52, il faut demeurer en paix, comme aussi aux retranchemens des Communions. Je ne
sçai leurs motifs en cela, et ne les sachant pas, il ne faut pas que j'en die autre chose. Ilz ne sçavent
peut estre pas aussi les miens, et c'est pourquoy ilz ne les jugent pas dignes d'estre suivis. En cela,
chacun a son goust particulier ; mais pour vous, je vous asseure bien que vous ne perdres rien, car
ce que vous ne gaigneres pas en la suavité de la Communion, vous le treuveres en l'humilité de
vostre sousmission, si vous acquiesces simplement a leurs volontés.
Mays de cette crainte qu'on vous donne que vos frequentes Communions vous pourroyent
tourner a mal, je pense que vous ne vous en deves point mettre en peine, et qu'on ne vous a pas dit
cela par discernement de l'estat de vostre cœur, mays pour vous mortifier, ou peut estre simplement
47 La cure de Chevry (voir ci-dessus, note (43), p. 1).
48 Les Pères Capucins du bailliage de Gex.
49 Andrée de Nicolle de Crescherel, femme de René Favre de la Valbonne. (Voir tome XV, note (631), p. 216.)
50 L'Autographe conservé autrefois à Bourges comprenait seulement le texte reproduit ici, qui paraît former un tout
complet ; les éditeurs de 1626 et ceux qui les ont suivis le donnent enchâssé dans un autre auquel une étude sérieuse
reconnaît une date différente. Nous renvoyons ce dernier à la fin de l'année 1617.
51 Lorsque le Saint emploie cette expression, il s'agit toujours de la Mère de Chantal ; nous croyons superflu de le
rappeler chaque fois au lecteur.
52 Au mois de janvier, Mme de la Valbonne avait déjà fait une tentative infructueuse pour obtenir l'autorisation d'un
voyage à Annecy (voir le tome précédent, p. 336) ; elle dut revenir à la charge au printemps, sans avoir plus de succès.
Il semble que, par les présentes lignes, le Saint réponde à ses regrets et à ses plaintes.
27/346

3.8 Page 28

▲back to top
par maniere de desfaite, comme quelquefois il arrive aux personnes mesme fort sages de ne peser
pas bien toutes choses.
Quand madame la Presidente viendra53, au moins alhors nous verrons-nous ; et ce pendant,
vivés toute humble, toute douce, toute passionnee de l'amour sacré de l'Espoux celeste. Je suis en
luy, ma tres chere Fille, tout parfaitement vostre.
D'Annessi, le 15 may 1617. [4]
_____
MCCCX. A M. Philippe de Quoex54. Amour maternel que
doivent avoir les ministres de Dieu pour les âmes. Aimable
réponse à une filiale inquiétude. La « petite ruche » et les «
pauvres abeilles. » Ce qui affligeait l'Evêque de Genève et ce
qui le consolait. Dissension dans un prieuré.
Annecy, 16 mai 1617.
Monsieur,
Sans offencer ou quasi sans offencer une fille, on la jugeroit peu sage et n'avoir pas la
cervelle bien arrestee si, au milieu de la ville, elle ouvroit son sein et exposoit ses mammelles a la
veuë de chacun es rues et aux eglises ; mais on ne murmurera jamais, et l'on ne le doit pas faire,
de voir qu'une mere nourrice ouvre son sein, monstre et donne sa mammelle a son poupon, pour
ce que l'on sçait bien qu'elle est nourrice, et que son devoir de mere nourrice l'oblige a donner le
lait a son cher petit poupon en quel lieu et place qu'elle connoist qu'il en a de besoin.
Je dis ceci et pour vous et pour moy ; car il faut tous-jours faire ce que nous devons, pour
le service de nostre doux et bon Maistre, envers ceux qui sont veritablement en luy nos enfans, et
leur ouvrir en tout lieu, ou leur necessite le requiert, le sein maternel de nostre affection a leur salut
et leur donner le lait de la doctrine. Je dis maternellement, a cause que l'amour des meres est tous-
jours plus tendre envers les enfans que celuy des peres, pour ce, a mon advis, qu'il leur couste plus.
Soyons-le pourtant l'un et l'autre ; car c'est le devoir que le Souverain nous a imposé. [5]
55 Au reste, je vous asseure que j'ay ri, mais sçaves vous, de bien bon cœur, quand j'ay veu,
sur la fin de vostre lettre, que l'on vous avoit dit que je m'estois mis en grande cholere, et avois dit
tout ce que vous me marques. Et de plus, vous me dites : Mon Pere, ne caches point la verité a
vostre filz, qui est perplexe sur ce sujet.
Et je vous dis donq que veritablement, mon Filz, mon cœur va rendre a vostre cœur
l'hommage de la verité. Si celuy qui vous a fait un narré de ma cholere, n'en eust pas eu davantage
que moy, vous ne series pas en peine de ce chetif Pere. Mays je vous supplie, quand il retournera
a vous, embrassés-le de ma part, et luy donnes double charité, car je vous confesse qu'il n'a pas
tout a fait tort. Je suis un chetif homme, sujet a passion ; mais, par la grace de Dieu, depuis que je
suis berger, je ne dis jamais parole passionnee de cholere a mes brebis. Il est vray que, sur la
53 Philiberte Martin de la Perouse, femme du président Favre et belle-mère de la destinataire. (Voir tome XIV, note
(1079), p. 372.)
54 Ce texte est-il unique ? C'est fort douteux. On croirait reconnaître non seulement différentes dates, mais double
destinataire. La majeure partie de la lettre s'adresse certainement à Philippe de Quoex (voir tome XII, note (57), p. 30)
; peut-être le post-scriptum a-t-il été écrit à son frère, le Prieur de Talloires (voir tome XIV, note (517), p. 172).
Nous laissons la date indiquée par l'édition de 1641, qui s'applique au moins en toute assurance aux passages
relatifs aux difficultés suscitées contre les Religieuses de la Visitation.
55 Les trois alinéas suivants sont donnés d'après le texte inséré dans l'Histoire de la Fondation du 1er Monastère
d'Annecy, par la Mère de Chaugy, et l'édition de 1641.
28/346

3.9 Page 29

▲back to top
resistance de ces bons NN., je menaçay celuy ci de son Superieur et l'autre de N. ; mais je ne fis
rien en cela que ce que je doys faire et que je feray tous-jours en tel cas56. Je fus esmeu a la verité,
mais je retins toute mon esmotion, et confessay ma foiblesse a nostre Mere, qui, en cette occasion,
n'eut, non plus que moy, aucune [6] parole de passion57 ; et je vous diray bien de plus : il semble
que ces bonnes gens la se plaisent a luy donner des frequens sujetz de mortification, qu'elle boit
insatiablement.
Mais dites moy, Monsieur mon cher Confrere, quel tort avons nous fait a ce bonhomme ?
Helas ! nostre Mere ni moy ne pretendons qu'a dresser une petite ruche, mediocre et conforme a
nostre dessein, pour loger nos pauvres abeilles qui ne se mettront en peine que de cueillir le miel
sur les sacrees et celestes collines, et non de la grandeur ou embellissement de leur ruche. Il est
vray que, quand je considere nostre Mere et ses filles, 58 gratias ago ei qui me confortavit, Christo
Jesu Domino nostro, quia fidelem me existimavit, ponens in ministerio59, a l'occasion de cette
Congregation. C'est asses dire la dessus pour vous oster de peine, mon tres cher Frere, mon ami ;
priés seulement pour nous, et tout va bien.
Pour le regard de ces bons gentilzhommes60, pour Dieu, Monsieur mon tres cher Confrere,
absolves de tout ce que je puis absoudre, sans reserve ; car, pourquoy vous reserverois-je aucune
authorité que je puisse communiquer, puisque vous ne reserves aucune peine que vous puissiés
prendre pour le bien de mes cheres brebis ? [7]
Helas ! Monsieur mon cher ami, j'ay quelquefois les larmes aux yeux, quand je considere
ma babilonique Geneve calviniste : 61 Hæreditas nostra versa est ad alienos62 ; le sanctuaire est
en derision63, la mayson de Dieu en confusion ; et qu'en diray-je ? Je ne puis bonnement autre
chose que pleurer sur ses ruines.
Quand je considere nostre pauvre, petite et humble Visitation qui apportera tant de gloire
a Dieu, encor ay je quelque consolation d'estre Evesque de ce diocese ; au moins y auray je fait ce
bien. Mais si cet evesché avoit un Hilaire, un Augustin, un Ambroyse, ah ! ces soleilz dissiperoyent
les tenebres de l'erreur. Toutefois je m'arreste, et dis comme les gens de nostre Evangile64 : Dieu
a tout bien fait. Et vous, mon parfait ami et tres cher Confrere, vous feres bien, si vous me croyes
incomparablement
56 « Dieu permit pour un grand exercice du saint Prélat et de nostre unique Mere, » raconte la Mère de Chaugy, que le
diable jetta tant d'aversion en l'esprit de certaines personnes, de voir dresser ce monastere au lieu ou l'on luy donnoit
assiette,... qu'avec une extreme importunité, a grans coups de pierre, ils chassoient les ouvriers de la besougne et leur
fesoient mille niches. » (Cf. Lettres de Ste J.-F. de Chantal, vol. I, p. 15 ; la date de 1614 attribuée à la lettre de la
Sainte que nous indiquons, est évidemment fausse.)
« Une fois, » poursuit l'Histoire de la Fondation, « l'insolence de quelques personnes passa si avant, qu'a
grans coups de hache, ils rompoient les tours des ouvriers. L'on fut promptement querir le Bienheureux, la presence
duquel ne fit pas cesser cette action dereglee ; luy, dans son incomparable douceur, se tenant à l'opposite de celuy qui
fesoit ce scandale,... luy dit par trois ou quattre fois : Mon ami, cessé, cessé, je vous prie. Et voiant qu'il n'en
fesoit rien, il luy prit doucement son hacheron de la main ; et alors, il raffermit son visage, et joignant a sa douceur
une majesté, autorité et force pontificale, il reprit fortement ce personnage, fesant entendre que si l'on ignoroit jusqu'ou
arrive le pouvoir d'un Evesque sur tous ceux qui vivent dans son diocese, qu'il le leur feroit savoir par experience. »
57 « Ce Bienheureux allant au parloir vers nostre unique Mere, » continue l'annaliste citée à la note précédente, « luy
confessa que ce desordre l'avoit emeu, et qu'il avoit falu qu'il eut pris son cœur a deux mains... afin qu'il ne fit
mouvement, ny dit parolle que selon la justice et la droite raison ; en quoy il mit en admiration toute l'assemblee, ayant
veu reluire en cette seule action tant de mansuetude et de majesté, de douceur et de sainte force tout ensemble. «
Quant à la Sainte, elle n'eut en effet « aucune parole de passion. » « Mon pauvre très cher Père, » écrivait-
elle à cette occasion (lettre indiquée ci-dessus), « ceci passera bientôt, et la paix nous durera éternellement, s'il plaît à
Dieu. » Ce fut toute sa plainte.
58 Je rends grâces à Celui gui m'a fortifié, au Christ Jésus notre Seigneur, de ce qu'il m'a jugé digne de sa confiance,
en m établissant dans le ministère.
59 I Tim., I, 12.
60 Quelques gentilshommes de Genève, peut-être, ou des environs, qui auraient eu recours à M. de Sainte-Catherine,
souvent à Thonon, pour être absous de l'hérésie.
61 Notre héritage a passé à des étrangers.
62 Thren., ult., 2.
63 Cf. Ezech., XXII, 8.
64 Marc., VII, ult.
29/346

3.10 Page 30

▲back to top
Vostre tres humble frere et serviteur,
(a peu s'en faut que je ne die filz)
FRANÇS, E. de Geneve.
D'Annessi, le 16 may 1617.
65 J'ay esté vivement touché d'apprendre qu'au prieuré de [Talloires66] l'on n'y voit plus la
face de la sacree dilection et union, sans laquelle la Religion n'est qu'une veritable illusion. Le pire
est que la dissension est entre les bons, dont elle est plus dangereuse ; et, comme dit saint Bernard
parlant des Religieux qu'il estime estre les yeux de l'Eglise, espouse de Jesus Christ, 67 non est [8]
dolor sicut dolor eorum68. Vostre œil doit discerner ce qui sera propice pour remedier a ce mal ;
vostre moderation paternelle doit dissiper les humeurs peccantes ; vostre zele, vostre justice et
vostre force, doit terminer ces discordes.
_____
MCCCXI. A Madame de la Fléchère69 (Inédite). Quelques
nouvelles. Intérêt de saint François de Sales pour les enfants
de la destinataire. Messages. « Une carrossee de dames »
arrivant de Grenoble. Les exercices spirituels de Mme de la
Thuille.
Annecy, 20 mai 1617.
Nous ferons ce que nous pourrons pour ce pauvre bonhomme affin quil demeure icy, quoy
quil me sera malaysé, le P. François70 qui sçait tout, estant absent. Dieu accompaigne monsieur le
Marquis de Saint Damian71, avec lequel nous avons esté bien doucement icy, et croy qu'il soit de
bonne nature.
Puysque monsieur de Charmoysi, nostre cousin72, a esté d'advis que l'on ramenast le filz73,
il ne peut estre que bon. Vous aures sceu comme nous avons gouverné [9] l'Anthoine74 qui, avec
un peu de soin, deviendra brave fille, ayant l'esprit bon comme ell'a, et vous pouves penser si je
luy souhaite du bien.
Je vous salue mille et mille fois de tout mon cœur, du quel je suis tres parfaitement tout
vostre.
F. E. de G.
Annessi, le XX may 1617.
65 Voir ci -dessus, note (54), p. 5.
66 C'est bien le monastère de Talloires qu'on peut indiquer avec le plus de vraisemblance ; on se souvient combien
saint François de Sales avait travaillé pour y introduire la réforme et comme il avait été secondé par les frères de
Quoex. (Cf. tomes XIV, note (518), p. 173, et XVI, notes (364), p. 113, (403), p. 127, et Appendice II, C, p. 403.)
67 il n'y a pas une douleur semblable à leur douleur.
68 Thren., I, 12.
69 Madeleine de la Forest, veuve de Claude-François de la Fléchère. (Voir tome XIV, note (40), p. 1.)
70 Très probablement le P. François de Chambéry qui, à cette date, se trouvait à Gex. (Voir ci-dessus, p. 2.)
71 Henri de Maillard, fils du comte de Tournon (voir le tome précédent, note (1292), p. 394), se rendait en Piémont
pour prendre part à la guerre contre les Espagnols.
72 Cousin à la fois du Saint et de Mme de la Fléchère, Claude de Charmoisy (voir tome XII, note (510), p. 216) s'occupait
activement des affaires de celle-ci depuis son veuvage. (Cf. le tome précédent, pp. 164, 169, 195.)
73 Le fils de Mme de la Fléchère, Charles (voir tome XV, note (258), p. 86), avait été envoyé à Lyon pour y continuer
ses études. (Cf. le tome précédent, note (1037), p. 307.)
74 Antoinette de la Fléchère, fille de la destinataire, élevée à l'abbaye de Bons, auprès de sa tante. (Voir tome XV, note
(258), p. 86.)
30/346

4 Pages 31-40

▲back to top

4.1 Page 31

▲back to top
Je vous supplie de saluer Mlle de Beaufort75, que je cheris et honnore infiniment, et Mme de
Mirebel76, et madame de Monthouz un peu a part77.
Nostre Mere est en affaire pour la reception d'une vertueuse damoyselle de Grenoble qui
est venue ce matin, avec une carrossee d'autres dames qui l'ameynent78 ; car il vous faut tenir
advertie des particularités de la Mayson, et que Mme de la Thuille79 partit hier, ayant fait sa revëue
a la Visitation, ou ell'a esté cachee environ sept ou huit jours, avec beaucoup de consolation pour
son cœur.
A Madame
Madame de la Flechere.
Revu sur l'Autographe conservé à la Visitation de Harrow (Londres). [10]
_____
MCCCXII. Au Duc de Savoie, Charles-Emmanuel Ier80. Droits
de la ville d'Annecy aux bienfaits du souverain.
Annecy, 26 mai 1617.
Monseigneur,
Cette ville d'Annessi recourt a la debonaireté de Vostre Altesse pour avoir la confirmation
des privileges que Messeigneurs ses prædecesseurs luy ont donné81. Je jointz ma tres humble
supplication a la sienne, protestant que jamais Vostre Altesse ne gratifiera aucuns peuples de sa
sujettion qui ayt (sic) plus de cœur, d'honneur, de fidelité et d'obeissance a vostre coronne,
Monseigneur, que celuy ci qui, au reste, a un extreme besoin d'estre revigoré par telz bienfaitz,
tandis qu'incessamment avec moy il leve les mains et les yeux au Ciel pour la prosperité de Vostre
Altesse, delaquelle je seray a jamais,
Monseigneur,
Tres humble, tres obeissant et tres fidele
orateur et serviteur,
FRANÇS, E. de Geneve.
75 Jeanne-Aimée de Beaufort (voir le tome précédent, note (919), p. 268).
76 Françoise Portier, femme de Pierre Solliard, seigneur de Miribel. (Voir tome XIV, note (369), p. 120.)
77 Sans doute Claire-Marie de Maillard-Tournon, mariée à Gabriel Guillet de Monthoux. (Voir le tome précédent, note
(1030), p. 305.)
78 Mlle Hélène de Gérard-Réautier (voir ibid., note (1265), p. 388), destinée à la future fondation de Grenoble, venait,
selon l'avis de l'Evêque de Genève, se former à la vie religieuse au Monastère d'Annecy ; elle y prit l'habit le 5 août
suivant, avec le nom de Jeanne-Hélène. Parmi les dames qui l'accompagnaient, se trouvaient sa mère et sa tante, Mme
de Bouquéron. (D'après l'Hist. de la Fondation de la Visitation de Grenoble.)
79 On sait que Louis de Sales, seigneur de la Thuille, avait épousé en secondes noces Madeleine Roero de Bressieu,
propre nièce de la destinataire. (Voir tome XVI, note (118), p. 27.)
80 Voir tome XI, note (389), p. 168.
81 Depuis 1614, la Ville d'Annecy importunait le duc de Savoie et le duc de Nemours pour que fût maintenue en sa
faveur l'exemption des impôts extraordinaires (voir tomes XVI, note (883), p. 269, note (1048), p. 324, et XVII, note
(1117), p. 334). Le 26 mai 1617, elle députa encore, dans le même but, à Turin, le syndic Claude de Lalée, connu par
« sa diligence et rare prudence. » Il fut le porteur de cette lettre et de la suivante. Mais le 12 juillet, deux Barnabites,
D. Juste Guérin et D. Urbain Peyra, Provincial, arrivaient de Piémont avec la nouvelle de la maladie du délégué qui
mourut, en effet, quelques jours après, sans avoir accompli sa mission. Elle fut confiée alors, le 19 août, au P. Juste
Guérin, et dès le 6 septembre, Mgr le prince Cardinal octroyait pour deux ans la continuation des privilèges. Le dévoué
Barnabite poursuivit jusqu'en 1619 pour l'obtenir à perpétuité, mais sans réussir complètement. La Ville dut se
contenter d'une immunité temporaire. (D'après les Reg. des Délib. municip.)
31/346

4.2 Page 32

▲back to top
XXVI may 1617, Annessi.
Revu sur l'Autographe conservé à Turin, Archives de l'Etat. [11]
_____
MCCCXIII. Au Prince de Piémont, Victor-Amédée82. Recours à
l'intervention du prince pour obtenir la confirmation des
privilèges de la ville d'Annecy.
Annecy, 26 mai 1617.
Monseigneur,
Cette petite ville d'Annessi recourant a Son Altesse83 pour la confirmation de ses privileges,
a toute son esperance en vostre bonté. C'est pourquoy elle l'implore de toutes ses forces ; et moy,
Monseigneur, j'accompaigne d'autant plus hardiment sa supplication, que Vostre Altesse me
tesmoigna lhors qu'elle estoit de deça84, qu'elle nous favoriseroit tous en cett'occasion. Et je le
croy, Monseigneur, puisque vostre debonaireté se plait aux bien-faitz, et particulierement envers
les peuples fideles, obeissans et affectionnés a la coronne de Son Altesse, tel que je puis attester
estre celuy ci, qui, outre cela, a grand besoin d'estre en quelque sorte allegé.
Ainsy nous prions tous Dieu qu'il benisse, conserve et prospere Vostre Altesse, delaquelle
je vivray a jamais,
Monseigneur,
Tres humble, tres obeissant et tres fidele
orateur et serviteur,
FRANÇS E. de Geneve.
Annessi, 26 may 1617. [12]
_____
MCCCXIV. A M. Claude de Blonay85. Pourquoi François de
Sales retarde volontiers son voyage en Chablais. Sa douleur
et sa résignation au sujet de la maladie de son frère Bernard.
Annecy, 28 mai 1617.
O Dieu, mon tres cher monsieur de Blonnay, mon ami, que je retarderay volontier mon
voyage, puisque monsieur le Marquis le desire86 ; car aussi bien estois-je prest de vous escrire, ou
a monsieur l'Abbé87 : 88 Dimitte me, ut plangam paululum dolorem meum89. Helas ! j'attens tous
82 Voir le tome précédent, note (199), p. 45.
83 Le duc de Savoie. (Voir la lettre précédente.)
84 En août-octobre 1616. (Voir le tome précédent, notes (916), p. 268, et (974), p. 285.)
85 Voir tome XII, note (224), p. 124.
86 Gaspard de Genève, marquis de Lullin (voir tome XI, note (645), p. 285), désirait le retard du voyage à Thonon
peut-être parce que la chapelle qu'il faisait construire, et que François de Sales devait consacrer, n'était pas prête. (Voir
ci-après, la lettre du 24 juillet à l'Abbesse de Baume-les-Dames.)
87 L'Abbé commendataire d'Abondance, Vespasien Aiazza. (Voir tome XIII, note (165), p. 48.)
88 Laisse-moi, afin que je pleure un peu ma douleur.
89 Job, X, 20.
32/346

4.3 Page 33

▲back to top
les quartz d'heure la nouvelle du trespas de mon frere de Thorens, qui partit d'icy il y a trois
semaines, et le jour de la Trinité estoit a Thurin, abandonné des medecins, et hors de toute
esperance d'eschapper ; et des-ja, de Chamberi, le bruit vient qu'il est mort90. Penses si j'auray
besoin de 15 jours pour consoler sa pauvre vefve et toute cette fraternité, et pour rasseoir un peu
mon cœur, qui est certes grandement esmeu.
Or sus, je dis neanmoins de tout mon cœur a Dieu : Je me tais, et n'ouvre point ma bouche,
car vous l'aves fait91. J'adore les decretz de sa providence et embrasse la croix quil luy plait nous
presenter. Oüy, Pere æternel, car il a semblé ainsy bon devant vous92. [13]
Je le recommande a vos prieres, et de tous nos amis generalement.
Vostre tres humble confrere,
FRANÇS, E. de Geneve.
Le 28 may 1617.
Je salue tres humblement monsieur le Marquis, et suis son serviteur fidele.
Monsr
Monsr de Blonnay,
Præfect de la Ste Mayson.
Revu sur l'Autographe qui appartenait à M. le chanoine Jean-Marie Chevalier, à Annecy.
_____
90 Ce jour même, le Saint reçut la triste certitude du décès de Bernard, arrivé le 23 mai. (Voir ci-après, note (104), p.
17.)
91 Ps. XXXVIII, 10.
92 Matt., XI, 26.
33/346

4.4 Page 34

▲back to top
MCCCXV. A la Mère de Bréchard, Supérieure de la Visitation
de Moulins93. Le Saint console la Mère de Bréchard de la perte
de son père. Quel douloureux message il doit porter à la
baronne de Thorens. Gloire humaine et saint trépas du frère
de l'Evêque de Genève.
Annecy, 29 mai 1617.
Ma tres chere Fille,
Hier nostre Mere me fit voir vostre derniere lettre et la nouvelle du trespas de monsieur
vostre pere94. [14] Ne doutés point que je ne prie pour luy, car c'estoit le pere de ma tres chere
Fille, qui m'est, je vous asseure, infiniment chere, et aux desplaysirs et playsirs de laquelle mon
cœur participe affectionnement. Mais icy, hors le sentiment naturel, il y a occasion de sainte
consolation, puisque ce bon gentilhomme s'en est allé en une bonne viellesse, et, ce qui importe,
en une bonne disposition spirituelle.
Donq, ma tres chere Fille, demeures consolee, et nous rendes la pareille par vos prieres
pour mon pauvre tres cher frere de Thorens, lequel estant allé en Piemont avec un regiment de
mille hommes, y fut enseveli mardy passé95, comme on me vient d'escrire, et comme je
m'attendois, il y a trois jours, sachant la qualité de la maladie. Or, penses, ma tres chere Fille, ou
cette affliction me touche, et voyes si la mienne n'est pas surchargee de celle de sa pauvre petite96
et de nostre Mere, a qui il faut que ce matin j'aille oster le peu d'esperance qui leur estoit restee
apres les premieres nouvelles de cet accident, sur lesquelles nous avons mille et mille fois adoré
le decret de la Providence divine, et avons jetté nos cœurs entre les mains de Dieu avec esprit de
sousmission, repetant : Ouy, Seigneur, car ainsy il a esté aggreable devant vous97. Et nous n'avons
aussi a dire autre chose en tout ce que Dieu fait, sinon : Amen.
Ce pauvre garçon est mort le premier jour de son arrivee en ce païs-la, d'une fievre
pestilentielle, dans le sein de l'Eglise, muni des Sacremens receus avec grand sentiment de religion,
sous la direction du bon Pere D. Juste98. Helas, qu'il est heureux ! ce me semble ; mais il est
pourtant impossible que je ne pleure sur luy. Vous ne sçauries croire combien il estoit accomply,
combien il s'estoit rendu aymable a chacun, combien il s'estoit signalé aux yeux du Prince en
93 L'allusion à la mort du père de la destinataire ne permet pas de douter que celle-ci ne soit la Mère Jeanne-Charlotte
de Bréchard (voir tome XIV, note (263), p. 86). Les éditions précédentes adressent cette lettre : A une Religieuse de
la Visitation.
94 Jean de Bréchard (voir tome XIV, note (475), p. 160). Si le « bon gentilhomme » s'en était allé en « une bonne
disposition spirituelle, » il en restait en grande partie redevable à sa fille. Celle-ci, oubliant le rebut et l'abandon de la
maison paternelle, avait demandé « avec toute instance à Nostre Seigneur qu'il » la « fit soûfrir en ce monde toutes les
peines imaginables, » pourvu qu'il accordât à son père la grâce « de mourir en vray enfant de l'Eglise. » « Veritablement
j'ay eu quelque sûjet de croire que ce bon Dieu avoit êté propice à mon oraison, » avoue-t-elle, « car, dépuis la mort
de ce cher pere, aucune sorte de douleurs et de traverse ne m'a manqué. » (Les Vies de quatre des premieres Meres,
par la Mère de Chaugy, 1659-1892, Vie de la Mère de Bréchard, chap. X.)
95 C'était le 23 mai. Le Saint veut parler ici de la mort, et non de la sépulture.
96 Sa femme, Marie-Aimée de Chantal.
97 Matt., XI, 26.
98 D. Juste Guérin, Barnabite (voir le tome précédent, note (618), p. 171, et ci-après, note (104), p. 17).
34/346

4.5 Page 35

▲back to top
l'occasion de [15] l'annee passee99 ; et sur cela, le voyla emporté. Mais Dieu est bon, et fait toutes
choses en sa bonté100. A luy soit honneur, gloire et benediction101.
Le pauvre chevalier est encor la, qui aura esté spectateur de ce triste trespas, et peut estre
en sera-il le sectateur102.
Dieu soit beni en la vie et en la mort des siens. Amen.
Vostre tres affectionné serviteur,
FRANÇS, E. de Geneve.
Cette lettre, ma tres chere Fille, a esté escritte a trois reprises, et je la ferme ce jourd'huy,
29 may 1617.
_____
MCCCXVI. A Madame de Cornillon, sa sœur103. Cris de douleur
et larmes de tendresse au sujet de la mort de Bernard de Sales.
Détails sur ses derniers jours. La vertu de sa veuve.
Annecy, 30 mai 1617.
O Dieu, ma pauvre tres chere Seur, que j'ay de peine pour le desplaysir que vostre cœur
souffrira sur le trespas de ce pauvre frere, qui nous estoit a tous si cher ! Mays il n'y a remede : il
faut arrester nos volontés en celle de Dieu, qui, a bien considerer toutes choses, a grandement
favorisé ce pauvre defunt, de l'avoir osté d'un siecle et d'une vocation ou il y a tant de dangers de
se damner. [16]
Pour moy, ma chere Fille, j'ay pleuré plus d'une fois en cette occasion, car j'aymois
tendrement ce frere, et n'ay sceu m'empescher d'avoir les ressentimens de douleur que la nature
m'a causés ; mais pourtant, je suis maintenant tout resolu et consolé, ayant sceu combien il est
trespassé devotement entre les bras de nos Peres Barnabites104 et de nostre chevalier105, apres avoir
fait sa confession generale, s'estre reconcilié trois fois, avoir receu la Communion et l'Extreme
Onction fort pieusement. Que luy peut on desirer de mieux selon l'ame ?
99 Lors de la révolte du duc de Nemours. « Il fut illustre dans sa patrie, » dit un historien, par ses « beaux faits de
guerre, à la vûë même de son Prince ; utile à son pays, dans les troubles émûs par la faction et la violence du capitaine
de la Grange et autres gens de bruit et de tumulte. » (De Hauteville, La Maison naturelle de St Fr. de Sales, Paris,
1669, Ire Partie, p. 226 ; voir le tome précédent, notes (909), p. 266, et (971), (973), p. 284.)
100 Cf. Ps. CXVIII, 65, 68 ; Baruch, II, 27.
101 Apoc., IV, 9, V, 12, 13.
102 Janus de Sales, chevalier de Malte, ne suivit pas alors son frère dans la mort ; il vécut jusqu'en février 1640. (Voir
tome XV, note (1024), p. 362.)
103 Gasparde de Sales, femme de Melchior de Cornillon. (Voir tome XIV, note (468), p. 158.)
104 Le mourant fut assisté surtout par D. Juste Guérin (cf. la lettre précédente, p. 15), alors confesseur des Infantes, et
ami intime de François de Sales. Il choisit pour sa sépulture l'église des Barnabites, Saint-Dalmaze (voir le tome
précédent, note (626), p. 173), et on grava sur sa tombe cette épitaphe latine :
Intuere, morlalis. humanarum rerum vicissitudinem, catastrophen, fallaciam. Bernardus, Baro Salesius et
Torentinus, Sabaudus. Francisco Salesii Episcopi et Principis Gebennensis frater, strenuissimus Allobrogicæ legionis
præfectus, ipso ætatis flore, fælicissimis magnorum honorum auspiciis, incredibili de sua bellica virtute, industria et
victoriis, apud Serenissimos Sabaudiæ Principes et amicos spe concitata, dum duodecim militum Centurias ad sui
Ducis castra e Sabaudia fideliter et fortiter cogit, importuno, infœlici, lethali morbo corripitur, quem sentiens, Divinis
mysteriis religiosissime susceptis et a Clericis Regularibus Sancti Pauli, quos in vita summopere dilexitt etiam in
morte dividi minime passus, electo in hac Ecclesia sepulchro, ad cœlestes acies magno sui relicto desiderio evolavit.
Vixit annos triginta quatuor, mortuus anno Domini millesimo sexcentesimo decimo septimo, decimo Calendas Junii.
(D'après Charles-Auguste de Sales, Histoire, etc., liv. IX, éd. latine, 1634.)
105 Janus de Sales.
35/346

4.6 Page 36

▲back to top
Et selon le cors, il a esté assisté en sorte que rien ne luy a manqué. Monseigneur le Prince
Cardinal106 et Madame la Princesse107 l'envoyerent visiter, et les dames de la cour luy envoyerent
des presens pour sa bouche ; et en fin, Monseigneur le Prince Cardinal, apres son trespas, envoya
douze flambeaux avec les armoiries de Son Altesse, pour honnorer son ensevelissement.
Dieu donq soit a jamais beni pour le soin qu'il a eu de recueillir cette ame entre ses esleus
! car en somme, que devons nous pretendre autre chose ?
Il ne se peut dire combien sa pauvre petite vefve a [17] tesmoigné de vertu en cette
occasion. Nous la garderons encor icy quelques jours108, jusques a ce qu'elle soit bien rassise.
Jamais homme ne fut plus generalement regretté que celuy ci.
Or sus, ma tres chere Fille, consolons nos cœurs le mieux que nous sçaurons, et tenons pour
bon tout ce qu'il a pleu a Dieu de faire ; car aussi, tout ce qu'il a fait est tres bon109.
Je rens cette lettre commune a mon tres cher frere110 et a vous, avec esperance de vous voir
bien tost. Dieu benisse a jamais vostre cœur, ma tres chere Seur, ma Fille, et je suis sans fin tres
parfaitement tout vostre, et
Vostre plus humble frere et serviteur,
FRANÇS, E. de Geneve.
_____
MCCCXVII. Au Baron Amédée de Villette111. Deuil profond.
Pleurs et résignation de Marie-Aimée. Adhérence au vouloir
de Dieu.
Annecy, 30 mai 1617.
Monsieur mon Oncle,
Helas ! il n'est que trop vray que vous aves perdu un tres humble neveu et fidele serviteur,
et moy mon tres cher frere que j'aymois incroyablement pour plusieurs bonnes raysons, outre celle
du sang. C'est quasi un songe de gens qui veillent, de sçavoir ce pauvre garçon [18] mort aussi tost
qu'arrivé en ce païs-la112, et sans avoir eu le loysir d'avoir veu le Prince auquel il alloit consacrer
sa vie et son courage.
Or, apres toutes les idees que le desplaysir me donne, je conclus que Dieu l'ayant voulu,
ç'a esté le mieux. Que son nom soit beni113, et les decretz de sa volonté adorés es siecles des siecles.
Amen.
Certes, je croy bien que M. de Giez, mon cousin114, M. le Baron de Bonvilaret115 et mon
neveu du Vuaz116 auront ressenti grandement cette perte, comme sçachant que ce pauvre trespassé
106 Le cardinal Maurice de Savoie, quatrième fils de Charles-Emmanuel. (Voir tome XIII, note (934), p. 345.)
107 Marguerite de Savoie, duchesse de Mantoue. (Voir tome XVI, note (344), p. 104.)
108 Au départ de son mari pour Turin, Marie-Aimée s'était retirée auprès de sa mère, à la Visitation d'Annecy.
109 Cf. Eccli., XXXIX, 21.
110 Melchior de Cornillon, mari de la destinataire. (Voir le tome précédent, note (879), p. 254.)
111 Amédée de Chevron-Villette (voir tome XI, note (761), p. 341).
112 En Piémont. Bernard venait de passer les Alpes pour aller arrêter les Espagnols qui menaçaient Verceil. Sans avoir
eu le temps de combattre, il fut frappé par la mort.
113 Job, I, 21.
114 Gaspard de Chevron-Villette, fils du destinataire. (Voir tome XV, note (758), p. 264.)
115 Amé de Pingon-Cusy. (voir tome XIV, note (818), p. 288).
116 C'était, non pas le propre neveu du Saint, mais le fils de son cousin-germain Amé de Sales et de sa femme Françoise
Puthod. Jacques-François naquit le 23 novembre 1592, et fut seigneur du Vuad ou Vuaz, de l'Ile et Vallières. Le 10
novembre 1608, dans la maison dite « la Cave », à Thorens, l'Evêque de Genève assistait à son contrat de mariage
36/346

4.7 Page 37

▲back to top
les cherissoit et honnoroit tres particulierement, selon que la nature et plusieurs considerations l'y
obligeoyent ; mais s'il leur manque, ce n'est pas par son eslection, ni par sa faute. Dieu, par sa
bonté, les veuille proteger et conduire parmi les hazars ou cette guerre les porte.
Ma pauvre chere seur tesmoigne entre ses pleurs et regretz la plus aymable, constante et
religieuse pieté qu'il est possible de dire : en quoy elle nous contente extremement, pour le desir
que nous avons qu'elle conserve l'enfant que nous croyons, par bonnes conjectures, avoir esté laissé
en ses flancs par le defunt, comme pour quelque sorte d'allegement a ses freres.
Que vous diray-je plus, Monsieur mon cher Oncle ? Ce pauvre garçon decedé s'estoit
destiné a la vie militaire, et pouvoit mourir de cent façons plus lamentables que celle de laquelle
il est mort. Beni soit Dieu qui l'a ravi devant les duelz, les mutineries, les desespoirs, et en [19]
somme devant ces innombrables occasions d'offencer Dieu que cette espece de vacation donne en
ce miserable aage.
Et pour tout, je ne puis dire autre chose, sinon : 117 Ita, Pater, quoniam sic placitum fuit
ante te118. J'acquiesce et dis Amen, non seulement sur les paroles, mais aussi sur les œuvres de
Dieu, le suppliant qu'il vous conserve, et demeurant pour jamais,
Monsieur,
Vostre tres humble neveu et fidele serviteur,
FRANÇS, E. de Geneve.
Le 30 may 1617.
_____
MCCCXVIII. A Madame de Montfort119. Réponse à des
condoléances.
Annecy, 3 juin 1617.
Madame ma Cousine,
Vous pouves aysement vous imaginer quelle est nostre affliction pour la perte que nous
venons de faire, ayant connoissance comme vous de l'amitié qui a tous-jours esté, graces a Dieu,
entre ceux de cette mayson. Je vous remercie tres humblement du soin que vous aves pris de nous
tesmoigner le ressentiment que vous aves de nostre mal.
Je vous supplie de recommander a la misericorde de Nostre Seigneur le repos de l'ame de
nostre pauvre defunt et de nous tous-jours aymer. Je fay la mesme [20] requeste a monsieur de
Montfort120, auquel, comme a vous, je suis tres certainement, Madame ma Cousine,
Vostre tres humble cousin et serviteur,
FRANÇS, E. de Geneve.
Annessi, 3 juin 1617.
_____
avec Marguerite de Lucinge qu'il avait épousée la veille. (Cf. Piccard, Saint François de Sales et sa famille, Paris
1911, chap. XXIII.)
117 Oui, mon Père, car ainsi il a été agréable devant vous.
118 Matt., XI, 26.
119 Michelle de Cerisier, dame de Montfort (voir tome XV, note (72), p. 14). Migne, tome VI, col. 1013, adresse ces
lignes « A Mme de Montfret » qui est évidemment une erreur de lecture.
120 Aimé de Montfort, mari de la destinataire. (Voir tome XVI, note (221), p. 60.)
37/346

4.8 Page 38

▲back to top
MCCCXIX. Au Président Antoine Favre121 (Inédite). Décès du
président de Sautereau. — Un cœur où se mélangent l'amour,
l'amertume et la constance. Prochain voyage à Thonon et à
Gex. Départs répétés pour l'éternité.
Sales, 21 juin 1617.
Monsieur mon Frere,
Je regrette extremement la perte que nous avons faite par le trespas du bon monsieur le
President de Sautereau122, qui vous honnoroit certes plus quil ne se peut dire, et me favorisoit d'un'
amitié extraordinaire, a vostre consideration. Et donques, comme je voy, c'est presque sans
intermission que nos amis se vont separant de nous tous les jours ; et partant, il se faut resoudre de
bonn'heure de n'esperer plus es consolations de cette vie, pour attendre plus doucement celles de
l'autre vie, en laquelle nostre societé sera inseparable.
J'escris la ci jointe123 a madame la Presidente de Sautereau124, non pour la consoler, mais
pour luy tesmoigner que je conserveray a jamais la memoire des infinies obligations que j'avois a
son defunt ; tandis que je me treuve icy a Sales, aupres de nostre jeune vefve, qui me fait [21] tout
estonné de voir en son ame tant d'amour de son mari trespassé et tant de constance a supporter
l'amertume du desplaysir de son trespas.
Je passeray vandredi a La Roche pour planter la premiere pierre de l'eglise des Capucins125,
et dela je m'en vay a Thonon, parti (sic) pour consacrer l'eglise que les mesmes Peres y ont
dressee126, avec le grand autel des Peres Barnabites127, partie pour appayser, si je puis, quelques
noyses, lesquelles par tentation humaine sont survenues en la Sainte Mayson128. Dela je passeray
a Gex, ou je suis desiré pour pareilles affaires129, et, Dieu aydant, me rendray a Annessi pour nostre
feste de Saint Pierre aux liens130. [22]
121 Voir tome XI, note (68), p. 18.
122 François de Sautereau, président au Parlement du Dauphiné. (Voir le tome précédent, note (1042), p. 308.)
123 Epist. seq.
124 Marie Gibert (voir ci-après, note (139), p. 25).
125 Au mois de mars 1616, le Saint avait employé son crédit, et avec succès, pour l'établissement des Capucins à La
Roche. (Voir le tome précédent, Lettre CMLXXXV, et note (647), p. 183.) Le nouveau couvent s'élevait sur le grand
jardin de Mme de la Forest, dont le Chapitre de la Collégiale, malgré sa pauvreté, fit lui-même l'acquisition. (D'après
Vaullet, Hist. de la ville de La Roche, Annecy, 1874, Notes historiques, chap. VI.)
126 Cette cérémonie eut lieu le 9 juillet 1617. La chapelle avait été bâtie sur les ruines du château de la Maison de
Savoie, où naquit le bienheureux Amé ; Charles-Emmanuel en avait cédé aux Capucins les galeries et dépen dances,
par patentes du 20 juillet 1601. C'est donc non seulement dans la ville, mais peut-être précisément à l'endroit de la
naissance du Prince dont François de Sales poursuivait avec tant de zèle l'entière glorification, qu'il eut le bonheur de
lui dédier une église, en même temps qu'à saint François d'Assise. Benoit XIV, dans son traité de la Canonisation des
Saints, signale le fait comme très remarquable, et cite le procès-verbal de cette consécration. Deux autres autels de la
chapelle furent consacrés le même jour par l'Evêque de Genève, en l'honneur de la Conception de la Sainte Vierge et
de saint Charles Borromée. (Voir Vittoz, St Fr. de Sales à Thonon, Lyon, Périsse, 1865, pp. 317, 318.)
127 Les Barnabites, comme les Capucins, faisaient partie intégrante de la Sainte-Maison, où ils étaient entrés en avril
1616 pour diriger le collège. (Voir au tome précédent les notes (201, 634) des pp. 46 et 177.) Dès lors, l'ancienne
église des Ermites de Saint-Augustin leur avait été attribuée. (Ibid., note (203), p. 47.)
128 Il avait fallu la persévérance de François de Sales et l'autorité du duc de Savoie pour établir les PP. Barnabites au
collège de Thonon, sous des conditions que le Presbytère trouvait désavantageuses pour lui. On se souvient que
l'attribution des revenus de Contamine souleva particulièrement les plaintes et réclamations des prêtres séculiers. (Voir
ibid., notes (201), p. 46, et (307), p. 74.) La lutte continua longtemps, empêchant le plein succès de l'œuvre, et la
transaction arbitrale de 1677 vint bien tard mettre une paix relative entre les deux partis.
129 Quelques-unes de ces affaires sont expliquées dans la lettre du 11 mai, au curé de Gex. (Voir ci-dessus, p. 1.)
130 Le Saint revint en effet à Annecy le 30 juillet.
38/346

4.9 Page 39

▲back to top
Une chose en tout ceci me donne de la peine : c'est que je laisse mon frere de Boysi131 fort
malade d'une fievre tierce, et que sil est vray que Monseigneur l'Archevesque de Lyon aille
ambassadeur a Rome, il se pourroit faire quil passast les mons pendant ce tems-la ; ce que toutefois
m'est difficile a croire, puisque, comme je pense, il voudra voir le Roy son maistre avant son
depart132.
J'ay perdu un bon et cordial amy en monsieur de Chanal, qui ayant esté appellé de Dieu a
la vie devote des quelques annees en ça, sera mort en tel estat, je m'asseure, que nous avons
occasion de benir l'heure de son trespas ; et moy particulierement, qui ay une invincible rayson de
l'estimer heureux, par le conte de sa conscience et de ses bonnes intentions quil me rendit avant
son depart d'Annessi133. Comm'au contraire, je regretterois infiniment monsieur de Bourgeois134
et monsieur de la Pierre135, s'ilz s'estoyent entreservis de bourreau l'un a [23] l'autre, pour s'abismer
en la damnation par le duel ; mays, tandis que je le puis, je me veux abstenir de croire une chose
si malheureuse. C'est dommage de monsieur de Passier136 ; et Dieu sçait sil y en aura point d'autres
que nous ayons a regretter en cette rencontre.
Je supplie de tout mon cœur sa divine Bonté qu'il vous conserve, avec madame ma tres
chere seur137 et toute vostre compaignie, et vous saluant tous tres humblement, je demeure a
jamais,
Monsieur mon Frere,
Vostre tres humble et tres obeissant
frere et serviteur,
FRANÇS, E. de Geneve.
Ma seur138 vous bayse tres humblement les mains, et a madame vostre chere Presidente, et
est vostre tres humble servante.
A Sales, le XXI juin 1617.
A Monsieur
131 Jean-François de Sales, vicaire général du diocèse. (Voir le tome précédent, note (207), p. 48.)
132 Déjà Mgr de Marquemont était en route pour Rome. Arrivé la veille à Chambéry, il en repartait ce jour même, 21
juin, à deux heures après minuit. (Mugnier, Correspondance du Président Favre, tome II, publié par la Société
savoisienne, etc., 1905.) Tant de compétiteurs s'étaient présentés pour recueillir la succession du marquis de Tresnel
(voir le tome précédent, note (844), p. 246), que Louis XIII, avant de se prononcer, avait pris un moyen terme et
délégué Marquemont comme envoyé extraordinaire, pour négocier à la Cour pontificale les intérêts de la couronne de
France. Suivant les intentions de son maître, l'Archevêque se montra partisan du duc de Savoie contre l'Espagne ;
Borghese tour à tour lui donna et lui retira sa faveur, tandis que le Nonce Bentivoglio fut constant à le soutenir et
défendre. François-Annibal d'Estrées, marquis de Cœuvres, l'ayant enfin emporté sur ses rivaux, Mgr de Marquemont
quitta Rome deux mois après l'arrivée du nouvel ambassadeur, juin 1619. (Cf. De Stefani, La Nunziatura di Francia
dei Card. Bentivoglio, Lettere a Scipione Borghese, Firenze, Le Mounier, 1863-1870.)
133 Francois Chanal (voir le tome précédent, note (1235), p. 378) mourut à la guerre. C'est à son départ d'Annecy pour
le Piémont sans doute en même temps que Bernard de Sales (commencement de mai) qu'il rendit au Saint " le
conte de sa conscience. »
134 Commissaire et contrôleur général des guerres en Savoie, Claude Bourgeois ou de Bourgeois, épousa (contrat dotal
du 18 juillet 1606) Jeanne de Gerbais. L'année suivante, il devint possesseur du château de Billia, au pays de Gex, sur
lequel la dot de sa femme était hypothéquée.
135 On peut supposer avec assez de probabilité, que le duelliste adversaire de M. Bourgeois est François de Macognin,
seigneur de la Pierre, marié à Antoinette de la Chambre. Il porta longtemps les armes et vivait encore en 1650.
Originaire de Bons, près Belley, il pouvait avoir facilement des rapports, et par suite des différends, avec Claude
Bourgeois, propriétaire au pays de Gex.
136 François de Sales semble ici regretter une victime de la guerre ; cependant Paul de Passier, seul homme d'épée de
sa famille à cette époque, ne mourut pas avant 1626. Fils d'Antoine de Passier et de la seconde femme de son père,
Claire d'Aynaud (Jeanne de Menthon mentionnée au tome XI, note (137), p. 49, était la troisième), il fut d'abord (1614)
cornette de la compagnie de chevau-légers du marquis de la Chambre, puis lieutenant de la compagnie de cavalerie
des ordonnances de Savoie. Par contrat dotal du 25 décembre 1606, il avait épousé Philiberte de Cordon, dernière de
sa branche. Trois de leurs filles entrèrent à la Visitation ; deux à Annecy, dont l'une, Marie-Thérèse, fut supérieure, et
la troisième à Thonon.
137 Philiberte Martin de la Perouse, femme d'Antoine Favre. (Voir tome XIV, note (1079), p. 372.)
138 La baronne de Thorens.
39/346

4.10 Page 40

▲back to top
Monsieur Favre, Baron de Peroges,
Premier President de Savoye,
commandant generalement deça les montz pour S. A.
Revu sur une photographie de l'Autographe, conservée à la Visitation d'Annecy. [24]
_____
MCCCXX. A la Présidente de Sautereau139. François de Sales
s'afflige avec la destinataire du décès de son mari. Comment
se préparer à « la vie ou il n'y a plus de mort. » Pour l'amour
du défunt, sa veuve doit modérer sa douleur.
Sales, 21 juin 1617.
Madame,
Vous ne sçauries croire combien m'est sensible l'affliction que vous aves. J'honnorois avec
une affection toute particuliere le cher seigneur trespassé140, pour plusieurs respectz ; mais celuy
de sa vertu et pieté tenoit lieu de fondement. Quelle pitié qu'en une sayson en laquelle il est si
grande disette de telles ames parmi les gens de ce rang la, nous voyons et souffrons ces pertes si
dommageables au public !
Neanmoins, ma chere Dame, toutes choses considerees, il faut accommoder nos cœurs a la
condition de la vie en laquelle nous sommes : c'est une vie perissable et mortelle, et la mort qui
domine sur cette vie ne tient point de train ordinaire ; elle prend tantost ci, tantost la, sans choix ni
methode quelcomque, les bons emmi les mauvais et les jeunes parmi les vieux.
O que bienheureux sont ceux qui, vivans en continuelle [25] desfiance de mourir, se
treuvent tous-jours prestz a mourir, en sorte qu'ilz puissent revivre eternellement en la vie ou il n'y
a plus de mort ! Nostre bienaymé trespassé estoit de ce nombre la, je le sçai bien. Cela seul,
Madame, est suffisant pour nous consoler ; car en fin, en peu de jours, ou tost ou tard en peu
d'annees, nous le suivrons en ce passage, et les amitiés et societés commencees en ce inonde se
reprendront pour ne recevoir jamais de separation. Ce pendant, ayons patience, et attendons
courageusement que l'heure de nostre depart sonne pour aller ou ces amis sont ja arrivés ; et
puisque nous les avons aymés cordialement, perseverons a les aymer, faysons pour l'amour d'eux
ce qu'ilz ont desiré que nous fissions et ce que maintenant ilz souhaitent pour nous.
Sans doute, ma chere Dame, le plus grand desir que monsieur vostre trespassé eut a son
depart fut que vous ne trempassies pas longuement dans le regret que son absence vous causeroit,
mais que vous taschassies de moderer, pour l'amour de luy, la passion que son amour vous donnoit
; et maintenant, en son bonheur dont il jouit, ou qu'il attend en asseurance, il vous souhaite une
sainte consolation et que, moderant vostre tribulation, vous conservies vos yeux pour un meilleur
sujet que les larmes, et vostre esprit pour des plus desirables occupations que celles de la tristesse.
139 La destinataire et la date sont indiquées par la lettre précédente, p. 21.
Marie Gibert, fille unique et héritière de Justine Plouvier et de noble Claude Gibert, seigneur de Chasse et de
Chuzelle, conseiller du Roi, général de ses finances en Dauphiné et au marquisat de Saluces, avait épousé François de
Sautereau le 24 avril 1583. Leur nièce, Andrée de Nicolle de Crescherel, était devenue la belle-fille d'Antoine Favre ;
ainsi s'expliquent les rapports intimes entre les deux familles. La présidente de Sautereau se plaça sous la direction de
l'Evêque de Genève dès la première station qu'il prêcha à Grenoble, et édifia la ville par ses hautes vertus, surtout, dit
l'Année Sainte de la Visitation (tome VI, p. 393), par sa charité envers les membres souffrants de Jésus-Christ.
140 Le mari de la destinataire (voir ci-dessus, p. 21).
40/346

5 Pages 41-50

▲back to top

5.1 Page 41

▲back to top
Il vous a laissé des gages pretieux de vostre mariage141 : conservés vos yeux pour regarder
a leur nourriture, conservés vostre esprit pour relever le leur. Faites cela, Madame, pour l'amour
de ce cher mari, et vous imagines qu'il vous en a prié a son depart et qu'il vous demande encor cet
office ; car en verité, il l'eust fait s'il eust peu, et il desire cela de vous a present : tout le reste de
vos passions peut estre selon vostre cœur, qui est encor en ce monde, mais non pas selon le sien,
qui est en l'autre.
Et puisque la vraye amitié se plaist a complaire aux justes aggreemens de l'amy, pour
complaire a monsieur vostre mari, consoles-vous vous mesme, soulages vostre [26] esprit et
relevés vostre courage. Que si ce conseil, que je vous donne avec une sincerité nompareille, vous
est aggreable, prattiqués le, vous prosternant devant Nostre Seigneur, acquiesçant a son
ordonnance, et considerant l'ame de ce cher defunt qui desire a la vostre une vraye et chrestienne
resolution, et vous abandonnant du tout a la celeste providence du Sauveur de vostre ame, vostre
protecteur, qui vous aydera et vous secourra, et en fin vous reunira avec vostre trespassé, non point
en qualité de femme avec son mari, mais d'heritiere du Ciel avec son coheritier et de fidele amante
avec son fidele amant.
J'escris ceci, Madame, sans loysir et presque sans haleyne, vous offrant mon tres
affectionné service qui vous est de long tems acquis, et celuy encor que les merites et la
bienveuillance de monsieur vostre mari envers moy pouvoyent exiger de mon ame. Dieu soit au
milieu de vostre cœur. Ainsy soit il.
FRANCS, E. de Geneve.
_____
MCCCXXI. A la Mère de Chantal. Une novice de la Visitation
malade à la mort ; ce qu'il faudrait faire pour ses funérailles.
Le cœur du Saint pour ses Filles. — Conseils à la Mère de
Chantal.
La Roche, 24 juin 1617 142.
En verité, ma tres chere Mere, et moy et tout suis grandement touché de la maladie de cette
pauvre chere fille, digne certes d'estre bien aymee143. Il faut attendre ce que Dieu fera, et non
seulement l'accepter, mais, [27] autant que nous pourrons, il faudra l'accepter aggreablement et
amiablement. J'espere quil la nous laissera ; il y en a tant d'autres qui sont eschappees apres avoir
jetté le tac, et qui ont esté moins assistee (sic) qu'elle ne sera. Toutefois je replique : Ainsy que la
volonté de Dieu sera au ciel, soit fait en terre144.
Si ell'estoit preste a passer, on pourroit luy faire faire la profession simplement, en luy
lisant, devant, l'oblation et les vœux, qu'elle confirmeroit, sinon qu'elle mesme la peut prononcer.
On la pourroit enterrer en l'eglise, car ell'est asses benite en la benediction des fondemens que nous
141 Guillaume, Marie et Anne-Catherine (voir tome précédent, note (1116), p. 333, et note (1042), p. 308).
142 C'est en 1617 que François de Sales se trouvait à La Roche le 24 juin (voir ci-dessus, Lettre MCCCXIX, p. 22) :
en cette même année la Sœur Marie-Gasparde d'Avise, novice, fut malade à la mort. (Lettre de la Mère de Chantal, 3
juillet, vol. I, p. 200.) La date de 1616, donnée par Datta, suivi par Vivès et Migne, est donc fausse.
143 Sœur Marie-Gasparde d'Avise (voir tome XVI, note (154), p. 40).
144 Matt., VI, 10.
41/346

5.2 Page 42

▲back to top
fismes en la position de la premiere pierre145. Il faudroit faire venir le vicaire de Saint Maurice146,
et trois ou quatre prestres avec luy pour faire l'Office, et mettre simplement 4 cierges blancz au
(sic) quatre coins du cors. Vous pourries donner audit vicaire un ducaton, et aux autres prestres a
chacun 8 solz d'aumosne affin quilz dissent Messe pour elle. Pour le reste, vous vous conseillieries.
Mays, qu'elle vive ou meure, je luy donneray [28] en la sainte Messe que je vay dire, la sacree
benediction de Dieu et de son Eglise.
O ma tres chere Mere, mon cœur, mes espritz et mon ame s'esmeuvent en disant ceci, car
j'ayme toutes nos filles tres cordialement, et celle-la avec une speciale tendreté. Mays sur tout, en
pleurant descharges bien vostre cerveau, reposes vous convenablement, et vous divertisses le plus
doucement que vous pourres ; prenes bien souvent des raysins un peu amollis au vin et eau chaude,
et en somme ayes soin de vous conserver la, car icy, ne doutes point ; je suis un certain homme
quil ny a rien a craindre, sinon quand je le diray moymesme.
Ma tres chere Mere, salues et benisses mille fois cette chere fille de ma part, et ma. Seur
Marie Michele147. Dieu soit a jamais nostre tout, et sa volonté nostre amour. Amen.
A La Roche, jour saint Jean.
On ne peut partir que le tems ne s'accoise, a cause des ruisseaux, mais soudain quil sera
remis je feray porter la presente.
A ma tres chere Mere en N. S.
A la Visitation.
Revu sur l'Autographe conservé à la Visitation d'Annecy. [29]
_____
145 Le 18 septembre 1614. (Voir tome XVI, note (274), p. 78, et Lettre MLXXXIV, p. 379.)
Sœur Marie-Gasparde survécut trente-et-un ans à cette maladie ; et cependant Dieu permit qu'elle fût
effectivement enterrée dans l'église « en la chapelle qui est proche de celle de sainte Luce, dans laquelle est le precieux
depost de nostre B. H. Mere, a cause d'un debourdement d'eau qui estoit arrivé a la ville, qui avoit rempli nostre
sepulcre d'eau, en sorte que l'on n'y pouvoit presque entré. » (Livre du Couvent, du 1er Monastère d'Annecy.)
146 L'église Saint-Maurice (celle qui était située sous le château et qui fut détruite à la Révolution), la plus ancienne
d'Annecy, fut toujours la paroisse de la ville. Une Bulle d'union de l'antipape Pierre de Lune l'annexa en 1397, à la
Collégiale de Notre-Dame de Liesse ; mais cette Bulle n'eut force de loi qu'après avoir été renouvelée par Jules II, le
18 juin 1506. Le Chapitre de Notre-Dame devenait vraiment curé de Saint-Maurice, et faisait desservir la paroisse par
un recteur ou vicaire. (Voir Mercier, Souv. hist. d'Annecy, 1878, chap. V.)
En 1617, le vicaire de Saint-Maurice était Thomas Peyssard, frère d'Antoine (voir le tome précédent, note
(135), p. 28). Il reçut les Ordres en 1578, devint curé de Saint-Jorioz en 1586, et de Doucy en 1589. L'année précédente,
il avait obtenu, le 8 juin, la paroisse de la Compote qu'il dut céder le 15 du même mois à Louis Girollet. On le trouve
en 1605 qualifié de chanoine de Notre-Dame de Liesse, mais déjà, à partir du 1er mars 1591 jusqu'au 3 mars 1604), il
avait signé comme vicaire les Registres de Saint-Maurice. Après une interruption de deux ans, il reprend cette fonction
en juin 1606, la remplit jusqu'au mois de février 1621 et meurt en 1630 (R. E. et Reg. par. d'Annecy.)
147 Fille de Michel Viallon, seigneur de Nouvelles, et de Nicolarde Puthod, novice depuis le 6 juin précédent, Sœur
Marie-Michelle de Nouvelles avait alors environ vingt-quatre ans, et fit profession le 7 juin 1618, reçue la première
au rang des Sœurs associées. Elle fut envoyée en 1619 à la fondation du Monastère d'Orléans, et, de là, à celle de
Rennes, où elle mourut le 9 octobre 1629. Douée d'une « tres grande simplicité, » d'une « tres douce et extraordinaire
confiance en la bonté de Dieu, » elle se reposait « en sa misericorde sans faire nul estat de ses œuvres. » (Livre du
Couvent, du 1er Monastère d'Annecy.)
42/346

5.3 Page 43

▲back to top
MCCCXXII. Au Pére René Ayrault, de la Compagnie de
Jésus148. Compliments affectueux à un ancien « compaignon
d'escole. » Deux prises de voile à la Visitation.
La Roche, [24-28 juin149] 1617.
Mon Reverend Pere,
J'ay receu a beaucoup d'honneur la lettre que Mlle Favreau150 [30] et Mlle d'Albamé151
m'escrivirent de vostre part ; car, outre la douceur que je prens a me ramentevoir le tems auquel
nous estions compaignons d'escole152, vos merites me font grandement estimer tous les
tesmoignages quil vous plait me donner de vostre bienveuillance, laquelle je vous conjure de me
vouloir continuer par vostre courtoysie, bien ayse de sçavoir que vous soyes arresté en nostre
voysinage, sous l'esperance que, par ce moyen, il se pourra bien faire que j'aye encor un jour
lhonneur de vous revoir.
Et cependant, je cheriray de tout mon cœur tout ce quil vous plaira de me recommander,
comme je fay le sujet d'avoir soin plus particulier de ces deux damoyselles, desquelles l'une,
madamoyselle Favreau, est des-ja voylee, et l'autre le sera soudain que je seray de retour d'un
148 Au bas de l'Autographe, qui ne porte plus d'adresse, se lisent ces mots : Cette epitre est ecrite au Rd Pere Ayraud,
Recteur du Colege de la Compagnie de Jesus a Dole. René Ayrault, bien digne par ses mérites et ses vertus de
l'estime de saint François de Sales, était angevin. Né le 12 novembre 1567, moins de vingt ans après il fuyait la maison
paternelle pour répondre à l'appel de Dieu et entrer chez les Jésuites. Son père, Pierre Ayrault, lieutenant-criminel au
présidial d'Angers, le poursuivit à Paris, puis à Rome ; mais le vaillant jeune homme cacha son nom et s'exila de
nouveau, s'abritant en Allemagne pour échapper à ceux qui voulaient l'empêcher de servir Jésus-Christ. Cette vocation
généreuse souleva, contre la Compagnie, une tempête qui eut un long retentissement, mais elle lui donna un homme
dont la fermeté d'âme et la fidélité à Dieu ne pouvaient être suspectées. Le P. Ayrault, profès des quatre vœux le 5
novembre 1605, après avoir rempli les fonctions de professeur, fut, pendant vingt-trois ans, recteur dans les provinces
de Lyon et de Champagne ; envoyé à la Flèche en 1635, il y mourut le 18 décembre 1644. (D'après le P. de Guilhermy,
Ménologe de la Compagnie de Jésus, et les Notes du R. P. Hafner, archiviste général de la Compagnie.)
149 Mois et quantième ont disparu de l'Autographe, mais le séjour du Saint à La Roche en 1617, et par suite la date
exacte de cette lettre, se trouvent compris entre le 24 et le 28 juin.
150 Marguerite Favrot naquit à Pontarlier en 1579 « d'une famille tres honnorable et de parens tres-vertueux, » Antoine
Favrot et Anne Brule. Mariée bien jeune à un avocat de Poligny, Désiré Masson, elle resta veuve de bonne heure, et
s'adonna sérieusement à la piété. Pour y faire plus de progrès encore, elle alla passer six ans en Lorraine sous la
conduite d'un grand serviteur de Dieu ; plus tard, la réputation de l'Evêque de Genève l'attira en Savoie. Le 6 juin
1617, Mme Masson prit, avec l'habit de la Visitation, le nom de Sœur Françoise-Marguerite, et prononça ses vœux
l'année suivante. Le Livre du Couvent fait ainsi son éloge : « Elle avoit un tres bon jugement, et parloit avec beaucoup
de sagesse et de consideration. Elle avoit aussi un cœur grand, emporté a l'amour de la sainte pauvreté, a la sobrieté
et mespris de son corps. » Bientôt (en juillet 1620) nous trouverons sous la plume du saint Fondateur, tracé en quelques
lignes, un portrait achevé de la vertueuse Religieuse, alors Assistante-commise à Annecy, « sage, constante et veritable
servante de Nostre Seigneur ; un peu seche et froide « de visage, mais bonne de cœur ; courte en paroles, mais
moelleuse. » Sainte Jeanne de Chantal aima beaucoup cette âme virile et ressentit vivement sa mort, arrivée à Lyon le
29 octobre 1630. La Mère Françoise-Marguerite Favrot revenait alors de Marseille où elle avait fondé en 1623 une
Maison de la Visitation, (Voir sa Vie par la Mère de Chaugy, dans Les Vies de VIII venerables Veves. Religieuses de
l'Ordre de la Visitation Sainte Marie, Annessy, Jacques Clerc, MDCLIX.)
151 Originaire du comté de Bourgogne, Claude d'Albamey demeura fort jeune orpheline de son père, Antoine
d'Albamey, et de sa mère, Pierrotte de Vaulgrenant. Une de ses tantes, Religieuse de Saint-Bernard, se chargea de son
éducation ; mais la jeune fille, quoique résolue de se donner à Dieu, ne voulut point s'engager dans le Monastère non
réformé de sa parente, et préféra se mettre à la suite d'une dame son alliée. Elle avait près de quarante ans lorsqu'elle
entendit parler de l'Institut fondé par l'Evêque de Genève ; elle y demanda une place et fut agréée par les deux Saints
qui l'honorèrent de leur affection et de leur estime. Sœur Claude-Thérèse prit part à l'établissement du Monastère de
Belley (août 1622), et, quatorze mois après, à celui de Pont-à-Mousson. En 1636, elle passe au couvent de Metz
comme Assistante, et revient mourir au Pont en 1643, 17 décembre. (D'après le Livre du Couvent, du 1er Monastère
d'Annecy.)
152 A Paris, au collège de Clermont.
43/346

5.4 Page 44

▲back to top
voyage que je vay faire a Thonon153 ; et espere que l'un'et l'autre donneront [et recevront154]
reciproquement de l'edification et consolation en la Congregation en laquelle elles ont esté
appellees, puisque a ce commencement Dieu leur en donne de si bonnes arres. [31]
Playse a la divine Bonté de vous conserver et prosperer de plus en plus en son saint service,
et je suis de tout mon cœur,
Mon Reverend Pere,
Vostre plus humble, tres affectionné
confrere et serviteur,
FRANCS, E. de Geneve.
…… 1617, a La Roche.
Revu sur l'Autographe conservé à Beaufort, chez les Sœurs Hospitalières de Saint-Joseph.
_____
MCCCXXIII. A la Mère de Chantal (Inédite). Paternelle
sollicitude pour la santé de la Mère de Chantal. Ne pas se
contenter d'attendre les âmes, mais leur aller au-devant. La
pureté en ce monde. Désirs d'une sainte mère pour sa fille.
Viuz-en-Sallaz, 29 juin 1617 155.
Je suis tous-jours bien brave homme a me porter bien icy et par tout, et n'y a rien a craindre,
ma tres chere Mere. Mais, comme me pourrois-je empescher d'estre en peine de ce que je suis la,
quant a la santé ? Pour Dieu, ne parles pas beaucoup, soulages vous, et vous tenés un peu tranquille
tant d'esprit que de cors ; car le premier accident vous arriva apres le traitté avec M. de la Roche156,
ou vous ne fustes pas sans parler avec affection, et puis le tracas des malades157 fit venir le second.
Travailles, ma [32] tres chere Mere, mais tout bellement, tout doucement, tranquillement.
Je suis consolé que nos pauvres filles soyent un peu allegees, car je les cheris d'un cœur
plus que paternel toutes, et vous sçaves que j'ayme particulierement cette pauvre Marie Gasparde
de tous tems, et, maintenant qu'elle est malade, encor plus tendrement158. Nous continuerons a
faire prier pour elles.
J'ay pensé sur cette chetifve fille dont je vous escrivis ; et en fin, si elle veut faire une
retraitte pour se resoudre, il faut non seulement la recevoir, mais, sil se pouvoit, luy aller au
devant159. Qui sçait si Dieu aura pitié d'elle et luy pardonnera ? Son mauvais naturel ne m'estonne
153 Le voyage dura de la fin de juin au 30 juillet, et la Sœur d'Albamey fut « voylee » le 5 août.
154 Mots oblitérés.
155 L'Autographe n'a pas de date d'année ; mais celle que nous ajoutons est prouvée par l'allusion à la maladie de la
Sœur Marie-Gasparde d'Avise, et par le « traitté avec M. de La Roche. » (Cf. les Lettres MCCCXXI, et MCCCXXXI,
p. 49.)
156 Ce traité eut lieu le 22 juin 1617. Il s'agissait de la vente des vignes situées à Chavoire, sur lesquelles était constituée
en partie la dot de la Sœur Claude-Agnès Joly de la Roche. (Voir le tome précédent, note (1107), p. 329.)
157 Plusieurs Sœurs du Monastère d'Annecy étaient alors atteintes de graves maladies. « Toutes nos malades sont hors
de péril de mort, « écrit la Mère de Chantal le 3 juillet suivant ; « elles nous ont fait belle peur, mais surtout la pauvre
Sœur Marie-Gasparde ; elle la peut bien compter pour une. » (D'après l'Autographe : voir Lettres, vol. I, p. 200.)
158 Voir ci-dessus, Lettre MCCCXXI, p. 27.
159 Quelques jours après, la Mère de Chantal mandait à la Mère Favre, Supérieure à Lyon : « Nous écrivons un mot à
M. l'Aumônier1 en réponse de celle qu'il avait écrite à Monseigneur pour Mlle Bellot. Si cette pauvre créature veut,
nous la retirerons ici et lui ferons de grand cœur l'assistance qu nous sera possible ; mais, comme nous vous avons
déjà mandé, il n'y a moyen que vous lui donniez l'entrée en votre Maison de Lyon. Or, si elle ne cherche que Dieu et
sa réconciliation avec sa Bonté, elle agréera de venir ici ; sinon, la divine Majesté se contentera de notre bonne volonté.
» (Lettre du 3 juillet citée plus haut.)
44/346

5.5 Page 45

▲back to top
point, car Nostre Seigneur fait quelquefois les enfans d'Abraham des pierres160. La conversion ne
depend pas de la nature, mais de la grace. Je voy que cette venue apportera de l'incommodité, mais,
peut estre, bienheureuse incommodité, qui se prend pour recueillir l'estranger par l'hospitalité
spirituelle. Saint Pierre, prince des pœnitens, est devant mes yeux, qui fut si doux aux pecheurs
apres quil ne le fut plus.
Je suis bien en peine de l'autre chere fille, que nous cherissons tant en suite de la dilection
de sa mere161 ; car je [33] ne sçai bonnement comme en parler a sa mere, qui en recevra bien du
desplaysir, estant bien esloignee de cette humeur-la. Je m'essayeray de l'attirer en confession et de
la faire bien confesser, car de la depend sa delivrance. Il est vray, ma tres chere Mere, il y a peu
de pureté en ce monde, sinon celle que la pœnitence opere et la vie devote.
Or bien, je vous escriray a toutes occurrences, ma tres chere Mere, mon cœur et ma vie ne
pouvant subsister avec consolation que par l'unité quil a pleu de faire a Dieu de nous, affin
qu'aeternellement nous fussions siens.
Madame de la Flechere de ce pais162, qui vint hier faire sa reveüe,vous bayse millefois les
mains. C'est une sainte ; elle a grand desir de vous aller voir et de vous mener une sienne brave
fille a mon gré, laquelle est aagé (sic) de 19 ans, et, par ouï dire, est un peu touchee d'estre de la
Visitation ; et cette bonne mere, qui en brusle, estime que la veüe la fera resoudre163.
Dieu vous conserve, ma tres chere Mere, et remplisse a jamais nostre unique ame de son
tres pur amour. Amen.
A Viu, le jour des deux saints amans, saint Pierre et saint Paul.
A ma tres chere Mere.
A la Visitation.
Revu sur l'Autographe conservé à la Visitation de San Vito al Tagliamento
(Italie). [34]
_____
Le rapprochement de ce texte avec celui du Saint permet d'indiquer presque avec certitude la « chetifve fille
» qui. plus d'une fois déjà, avait été l'objet de la charité miséricordieuse de l'Evêque de Genève et de la sainte
Fondatrice. (Voir tomes XV, note (951), p. 335 ; XVI. Lettres DCCCLXXXIV, p. 21. CMLVIII, p. 155, et note (906),
p. 319).
1 Claude de Sevelinges, aumônier de Belleville, ancien confesseur de la Visitation de Lyon, (Voir tomes XV, note
(948), p. 333, et XVII, note (1118) p. 335.)
160 Matt., III, 9.
161 C'est Françoise de Charmoisy qui préoccupait le Bienheureux ; elle est clairement désignée par ces mots, dans une
lettre des premiers jours de juillet : « la fille de la petite seur. » (Lettre MCCCXXXI, p. 49.) On a vu en effet (tome
précédent, p. 39), que François de Sales en écrivant à la Mère de Chantal, se plaisait à donner l'appellation de « petite
seur » à Mme de Charmoisy. Françoise, la seconde de ses enfants, avait à cette époque environ quatorze ans ; sa note
sera donnée dans la suite de la correspondance.
162 La fille du baron d'Avully, Madeleine de Saint-Michel, veuve de François de la Fléchère, seigneur de Rovorée.
(Voir tome XI, note (456), p. 199, et cf. tome XVII, p. 120.)
163 Il paraît bien qu'elle ne se résolut pas à embrasser la vie religieuse ; car Jacquemine ou Jacqueline de la Fléchère.
seule fille de Madeleine de Saint-Michel et du seigneur de Rovorée, épousa par contrat dotal du 29 avril 1619, Charles
de Compois, baron de Féternes, auquel elle apporta les seigneuries de la Fléchère et de Rovorée. Six enfants naquirent
de ce mariage ; leur mère, décédée avant le 8 août 1669, figure encore dans une transaction de 1653.
45/346

5.6 Page 46

▲back to top
MCCCXXIV. A la Baronne de Thorens, sa belle-sœur164. Les
consolations d'un « frere et Pere tout ensemble. » Rien de
précieux ne s'acquiert sans peine. Une joie de la Mère de
Chantal.
Viuz-en-Sallaz, 30 juin 1617.
Vous pouves penser, ma tres chere Fille, ma Seur, et je croy que vostre cœur vous le dit
asses, que j'ay une extreme consolation dans le mien quand vous m'escrives de vos nouvelles ; car,
puisqu'il a pleu a Dieu, je suis le cher frere et le Pere tout ensemble, mais le plus affectionné et
sincere que vous sceussies imaginer.
Or, faites donq bien, ma chere ame, vos petitz effortz, doux, paysibles et amiables pour
servir cette souveraine Bonté qui vous y a tant obligee par les attraitz et bien-faitz dont elle vous a
favorisee jusques a present, et ne vous estonnes point des difficultés ; car, ma chere Fille, que peut
on avoir de pretieux sans un peu de soin et de peine ? Il faut seulement tenir ferme a pretendre la
perfection du saint amour, affin que l'amour soit parfait, l'amour qui cherche moins que la
perfection ne pouvant estre qu'imparfait.
Je vous escriray souvent, car vous sçaves le rang que vous tenes dans mon esprit, le tout
joignant nostre Mere, a laquelle je vous prie de me recommander ; car, bien que je luy escrive165,
si est ce qu'il faut un peu employer vostre entremise pour la recreer et res-jouir, d'autant qu'elle
prend playsir a sçavoir que vous estes tres parfaitement ma tres chere fille et que vous me cherisses
en cette qualité la. [35]
Dieu soit au milieu de vostre cœur et de celuy de nostre chere seur166, qui est certes ma fille
de tout mon cœur ; au moins je le croy et le veux tous-jours croire pour mon contentement.
FRANÇS, E. de Geneve.
Le 30 juin 1617.
_____
164 La destinataire, que l'édition de 1626 et les suivantes désignent ainsi : Une Religieuse de la Visitation, est, à n'en
pas douter, Marie-Aimée de Chantal, baronne de Thorens (voir tome XII, note (828), p. 328) ; mais l'absence d'allusion
à son veuvage si récent fait croire que nous n'avons ici qu'un texte tronqué.
165 Epist. præced.
166 Françoise de Rabutin-Chantal, sœur de la destinataire. (Voir tome XII, note (906), p. 360.)
46/346

5.7 Page 47

▲back to top
MCCCXXV. A Madame Louise de Ballon, Religieuse de
l'Abbaye de Sainte-Catherine. La chose la plus étonnante et
douloureuse qui se voit tous les jours. Malgré les épreuves
intérieures, aimer Dieu et lui rester fidèle.
[Juin 1617 167.]
Ma chere, mais vrayement tres chere Fille, ma Cousine,
Il la faut certes retirer, cette pauvre ame, du hazard, car la molle façon de vivre du lieu ou
elle est, est tellement perilleuse, que c'est merveille quand on eschappe de la meslee. Helas ! ma
pauvre Fille, vous aves rayson de vous estonner qu'une creature veuille offenser Dieu, car cela
surpasse tout estonnement ; mais pourtant cela se fait, comme par malheur on voit tous les jours.
Et l'infortunee beauté et bonne grace que ces pauvres filles [36] faineantes se font accroire d'avoir,
parce que ces miserables le leur dient, est cela qui les perd, car elles s'amusent tant au cors, qu'elles
perdent le soin de l'ame. Or sus, ma Fille, il faut faire ce qui se pourra et demeurer en paix.
Et pour vostre regard, ma chere Cousine, ma Fille, il ne faut perdre courage ; car vous deves
estre si amoureuse de Dieu, qu'encor que vous ne puissies rien faire aupres de luy et en sa presence,
vous ne laissies pas d'estre bien ayse de vous y mettre pour seulement le voir et regarder
quelquefois. Et quelque peu avant que d'aller en l'orayson, mettes vostre cœur en paix et en repos,
et prenes esperance de bien faire ; car si vous y alles sans esperance et des-ja toute degoustee, vous
aures peine de vous remettre en appetit.
Courage donq, ma petite Cousine, dites a Nostre Seigneur que vous ne le laisseres jamais,
encor qu'il ne vous communiqueroit jamais aucune douceur ; dites luy que vous demeureres devant
luy jusques a ce qu'il vous aye beny168. Quand vostre cœur s'esgarera ou se distraira, ramenes-le
tout doucement a son point, remettes-le tendrement aupres de son Maistre ; et quand vous ne feries
autre chose tout au long de vostre heure que de reprendre tout bellement vostre cœur et le remettre
aupres de Nostre Seigneur, et qu'autant de fois que vous l'y remettries il s'en destourneroit, vostre
heure seroit tres bien employee, et feres un exercice fort aggreable a vostre cher Espoux, auquel
je vous recommande du mesme cœur que je suis tout vostre. [37]
_____
167 Le ton de cette lettre est bien celui du Saint s'adressant à sa « petite Cousine » de l'abbaye de Sainte-Catherine ;
nous n'hésitons donc pas à l'indiquer pour destinataire. (Voir le tome précédent, note (761), p. 220.)
Quant à la date, il paraît raisonnable de l'éloigner des premières années de profession de Louise de Ballon, à
cause de l'œuvre de délicate charité que lui conseille l'Evêque de Genève, et de la rapprocher des « rudes épreuves »
intérieures qui précédèrent les progrès de la vertueuse Cistercienne dans la vie d'oraison. (Cf. Grossi, La Vie de la Vble
Mere de Ballon, Annecv. Fontaine, 1695.) Enfin, peut-être est-il permis d'identifier la « pauvre ame » dont il est parlé
ici, et la « fille de Bons » de la lettre de juillet 1617, Jeanne-Antoinette de Chevron-Villette. (Voir ci-après, note (203),
p. 48.)
168 Gen., XXXII, 26.
47/346

5.8 Page 48

▲back to top
MCCCXXVI. A une dame. Combat et liberté. Moyen de
triompher. Le principal devoir de la vraie dévotion.
Particulières facilités de la destinataire pour la vie chrétienne et
pieuse. Témoignages d'honneur et de sainte affection.
Pourquoi la fécondité est une bénédiction de Dieu.
[Juillet 1617 ou 1604 ? 169]
Madame,
La lettre que vous m'aves escrite le 16 may et laquelle je n'ay receuë que le 27 juin, me
donne grand sujet de benir Dieu de la fermeté en laquelle il conserve vostre cœur pour le desir de
la perfection de la vie chrestienne, lequel je descouvre bien clairement par la naïfveté sainte avec
laquelle vous representes vos tentations et le combat que vous faites ; et je voy bien que Nostre
Seigneur vous assiste, puisque pied a pied et jour a jour vous conqueres vostre liberté et
affranchissement des imperfections et infirmités principales qui vous ont ci devant affligee. Je ne
doute point que dans fort peu de tems vous n'en soyes entierement victorieuse, puisque je vous
voy si courageuse au combat et si pleyne d'esperance et de confiance de vaincre par la grace de
nostre bon Dieu. La consolation que vous aves en cette entreprise est sans doute un vray presage
qu'elle vous reuscira tres heureusement. [38]
Fortifies-vous donq, Madame, en ce bon dessein, duquel la fin est la gloire eternelle ;
n'oublies rien au logis de ce qui est requis pour en chevir. Continues vos Communions et
confessions frequentes, ne passés point de jour sans lire quelque peu dans un livre spirituel, et,
pour peu que ce soit, pourveu que ce soit avec devotion et attention, le prouffit en sera bien grand.
Faites l'examen de conscience au soir ; accoustumes-vous aux prieres briefves et oraysons qu'on
appelle jaculatoires, et le matin, en sortant du lict, mettes-vous tous-jours a genoux pour saluer et
faire la reverence a vostre Pere celeste, a Nostre Dame et a vostre bon Ange ; et quand ce ne seroit
que pour trois minutes, il n'y faut jamais faillir. Ayés quelque image bien devote et la baysés
souvent.
Je suis consolé dequoy vous aves l'esprit plus gay que ci devant. Sans doute, Madame, tous
les jours vos contentemens croistront, car la douceur de Nostre Seigneur se respandra de plus en
plus en vostre ame. Jamais personne n'a gousté de la devotion, qui ne l'ayt bien treuvee souëfve.
Je m'asseure que cette gayeté et consolation d'esprit s'estend et rend son odeur pretieuse sur toutes
vos conversations et particulierement sur la domestique, laquelle, comme elle vous est la plus
ordinaire et selon vostre principal devoir, aussi s'en doit elle ressentir plus que nulle autre. Si vous
aymes la devotion, faites que tous luy portent honneur et reverence ; ce qu'ilz feront s'ilz en voyent
des bons et aggreables effectz en vous.
Mon Dieu, que vous aves de grans moyens de meriter en toute vostre mayson !
Indubitablement vous la pouves rendre un vray paradis de pieté, ayant monsieur vostre mari si
propice a vos bons desirs. Hé, que vous seres heureuse si vous observes bien la moderation que je
169 On pourrait proposer avec vraisemblance Mme de Veyssilieu comme destinataire (voir le tome précédent, note
(1215), p. 371) ; les conseils donnés ici s'accorderaient assez bien avec ce que nous savons de cette fille spirituelle du
grand Evêque. Dans ce cas, ces conseils étant un début de direction, ils ont dû suivre le Carême de 1617, sans toutefois,
d'après les premières lignes, devancer le mois de juillet.
Il est vrai cependant que le ton général, les avis de ces pages rappellent quelque peu la présidente Brûlart
(voir tome XII, note (598), p. 267) et les lettres de 1604 ; de plus, le temps (16 mai-27 juin) mis par le message de la
correspondante du Saint pour arriver à Annecy, indiquerait plutôt la Bourgogne que le Dauphiné comme point de
départ.
Enfin, il n'est pas impossible que ce texte soit composé de plusieurs fragments de lettres de différentes dates.
(Cf. tome XIV, note (67), p. 14.)
48/346

5.9 Page 49

▲back to top
vous ay dite en vos exercices, les accommodant le plus que vous pourres a vos affaires domestiques
et a la volonté de vostre mari, puisqu'elle n'est point desreglee ni farouche. Je n'ay guere veu de
femmes mariees qui puissent estre devotes a meilleur marché que vous, Madame, qui partant estes
fort obligee a vous y avancer.
Je voudrois bien que vous fissies l'exercice de la sainte [39] meditation, car il me semble
que vous en estes fort capable. Je vous en dis quelque chose pendant ce Caresme, je ne sçai si vous
y aures mis la main ; mays je desirerois que vous n'y employassies pas sinon demi heure chasque
jour et non plus, au moins de quelques annees ; je pense que cela serviroit bien fort a la victoire de
vos ennemis.
Je suis pressé d'escrire, et neanmoins je ne sçai finir, tant je suis consolé de vous parler sur
ce papier. Et crovés, Madame, je vous supplie, que le desir que j'ay une fois receu de vous servir
et honnorer en Nostre Seigneur, croist et s'augmente tous les jours en mon ame, marri que je suis
d'en pouvoir si peu rendre d'effectz. Au moins ne manque-je point de vous offrir et representer a
la misericorde de Dieu en mes foibles et languissantes prieres, et sur tout au saint Sacrifice de la
Messe ; j'y adjouste tous-jours toute vostre mayson, que je cheris uniquement en vous, et vous en
Dieu.
J'ay appris que vous esties grosse ; j'en ay beni Dieu qui veut accroistre le nombre des siens
par l'augmentation des vostres. Les arbres portent les fruitz pour les hommes, mais les femmes
portent les enfans pour Dieu ; c'est pourquoy la fertilité est une de ses benedictions. Faites vostre
prouffit de cette grossesse en deux façons : offrant vostre fruit a Dieu cent fois le jour, comme
saint Augustin tesmoigne170 que sa mere, estant enceinte de luy, avoit accoustumé de faire ; puis,
es ennuis et afflictions qui vous en arriveront et qui ont accoustumé de suyvre la grossesse, benissés
Nostre Seigneur de ce que vous souffres pour luy faire un serviteur ou servante, qui, moyennant
sa grace, le louera eternellement avec vous.
Dieu en fin soit en tout et par tout glorifié en nos peines et consolations.
FRANÇS, E. de Geneve.
_____
MCCCXXVII. A une personne inconnue (Fragment inédit).
Deshonorée devant le monde ; en estime devant Dieu.
[Mai-juillet] 1617 171.
……………………………………………………………………………………………………..
sa femme et l'Abbé de la [Mente172]. C'est une famille gastee et des ames perdues, et l'unique fille
de cet homme-la, qui est une bonne fille, deshonnoree devant le monde, bien que devant Dieu,
estant devote comme ell'est, elle ne laisse pas d'estre d'estime. Or cett'
Revu sur l'Autographe conservé au 1er Monastère de la Visitation de Marseille.
170 Confess., l. I, c. XI. (Cf. Introd. a la Vie dev., Partie III, chap. XXXVIII.)
171 A qui ont été écrites ces lignes ? Peut-être à la Mère de Chantal pour recommander à sa douce charité la malheureuse
fille du président Crespin. Pour lui servir d'asile, la Visitation s'offrait à la pensée du Saint. Cette conjecture n'a rien
d'étonnant pour qui connait la bénignité de l'Evèque de Genève.
Quant à la date, on ne peut l'indiquer que d'une manière vague, dans les premiers mois qui suivirent
l'assassinat de Lucrèce Belly. (Voir le tome précédent, Lettre MCCCI, p. 390, et ci-après, les Lettres MCCCXXIX,
MCCCXXX.)
172 Ce nom est entièrement rayé sur l'Autographe, mais le doute n'est pas possible ; il s'agit de Sylvestre de Saluces,
abbé de la Mente. (Voir ibid., note (1280), p. 390.)
49/346

5.10 Page 50

▲back to top
MCCCXXVIII. A M. Michel Favre173 (Billet inédit). Demande
de nouvelles de deux chers malades.
Thonon, 2 juillet 1617 174.
Monsieur Michel, mon ami,
Salues, je vous prie, mon frere de ma part, et faites moy sçavoir a tous propos de ses
nouvelles, comm'aussi [41] de ma Mere175. C'est tout ce que je vous puis dire cette matinee de la
tressainte Visitation, vous donnant le bon jour et demeurant
Vostre plus humble confrere,
FRANÇS, E. de Geneve.
A Monsieur Michel Favre,
A la Visitation.
Revu sur une ancienne copie conservée à la Visitation de Turin.
_____
173 Aumônier de saint François de Sales et confesseur de la Visitation d'Annecy. (Voir le tome précédent, note (722),
p. 208.)
174 La date de ce billet est indiquée par l'absence du Saint d'Annecy, et par la maladie de son « frere de Boysi, » Jean-
François, dont il demande des nouvelles. (Cf. ci-dessus, Lettre MCCCXIX, p. 23.) La lettre du 29 juin étant datée de
Viuz-en-Sallaz et celles du 7 juillet de Thonon, il est fort probable que l'Evêque passa la fête de la Visitation dans
cette dernière ville.
175 La Mère de Chantal, souffrante aussi à cette époque. (Voir Lettre MCCCXXIII, p. 32.)
50/346

6 Pages 51-60

▲back to top

6.1 Page 51

▲back to top
MCCCXXIX. Au Duc de Savoie, Charles-Emmanuel Ier
(Minute). François de Sales sollicite l'indulgence de Charles-
Emmanuel pour un homme plus malheureux que coupable.
Les deux ailes de la renommée des bons princes.
176 Monseigneur,
Thonon, 7 juillet 1617.
Je demande tres humblement pardon a Vostre Altesse, si, en un tems auquel elle est
environnee de tant d'affaires de consequence177, je prens la confiance en sa [42] douceur de luy
presenter cette supplication, a laquelle je suis forcé par le devoir que ceux de ma condition ont de
compatir aux miserables et soulager les desolés, lors mesme qu'ilz sont abandonnés de tout autre
secours.
Apres, donq, avoir bien sceu que l'estrange accident advenu au sieur [Président Crespin]
estoit procedé de malheur, plustost que d'aucune malice ou deliberation178 ; voyant qu'en une si
extreme tribulation il recouroit a moy pour obtenir, par ma tres humble intercession, l'acces aux
pieds de Vostre Altesse, je ne l'ay peu ni voulu esconduire, de peur d'offencer Celuy qui jugera les
vivans et les mortz selon l'assistence qu'ilz auront faite aux affligés179, puysque mesme les deux
personnes [43] qui ont esté les plus touchees en ce desastre semblent conspirer au desir de la
consolation de celuy auquel il est arrivé : car la fille180 ne souhaite rien tant que d'avoir son pere,
176 [L'Autographe d'une première minute, inédite mais incomplète, de cette lettre se conserve à la Visitation d'Annecy.
Il est reproduit ci-dessous intégralement, avec la plupart de ses ratures.]
Monseigneur,
[Avant que je face ma supplication a V. A.] je [luy] demande tres humblement pardon a V. A., si, en un tems
auquel elle est environnee de tant d'affaires de consequence, je prens la confiance en sa bonté de luy presenter [cet
escrit] cette supplication, forcé du devoir que ceux de ma condition ont de [secourir les...] compatir aux affligés et [de
consoler... d'alleger ceux...] de soulager les desolés, et lors particulierement qu'ilz sont abandonnés de tout autre
secours.
Apres donq avoir bien sceu que [ce funeste] l'estrange accident [arrivé] advenu au President Crespin estoit
plus tost procedé de malheur [et desastre] que d'aucune malice et deliberation, [comme font foy les...] 1 et que d'ailleurs
les deux personnes qui en ont esté les plus touchés (sic) semblent conspirer au desir que le coulpable soit absoulz :
puisque, quant a l'une, ayant perdu sa mere, elle ne craint rien tant que d'estre encor destituee de son pere ; et l'autre,
soit quil ay (sic) eu compassion [de l'extreme tribulation] de ce pere et de cette fille, soit qu'il ayt… voyant qu'en une
si grande tribulation, [delaissé d'un chacun] il recouroit a moy pour avoir en quelque sorte acces en la misericorde de
V. A., je ne l'ay peu ni volu esconduire, de peur d'offencer Celuy qui [commande a ses...] jugera les vivans et les mors
selon l'assistence qu'ilz auront fait aux miserables ; puysque mesme les deux personnes qui ont esté les plus touchees
en ce desastre semblent conspirer au desir de la consolation [du coulpable] de celuy [qui en est...] auquel il est [advenu]
arrivé.
………………………………………………………………………………………………………………………….
1 Les cinq lignes suivantes, encadrées d'abord par un trait de plume pour être transposées, représentent une leçon que
l'auteur a ensuite abandonnée..
177 Le duc de Savoie était alors dans de grandes inquiétudes au sujet de la ville de Verceil, assiégée depuis le 24 mai
par le gouverneur de Milan. Encore quelques jours, et le baron de Digoine-Damas, commandant pour Son Altesse,
serait obligé de capituler, faute de poudre ; en vain Charles-Emmanuel avait-il essayé d'en faire pénétrer dans la place.
La chute de Verceil (26 juillet) eut surtout pour cause le rappel, par la cour de France, des troupes de Lesdiguières ;
la Reine mère ne jugeait plus à propos de combattre contre les intérêts du duc de Mantoue, devenu son cousin par son
mariage avec Catherine de Médicis. (Cf. Guichenon, Hist. généal. de la Maison de Savoie, tome II.)
178 Voir au tome précédent la Lettre MCCCI, p. 390, et plus loin, note (228), p. 56.
179 Cf. Matt., XXV, 34-46.
180 A la date du 29 juin 1619, Jean de Coysia, conseiller de Son Altesse et plus tard sénateur au Sénat de Savoie, signe
son contrat de mariage avec Dlle Claude, fille de noble et spectable Georges Crespin, du Dauphiné. C'est, très
vraisemblablement, la fille du malheureux Président.
51/346

6.2 Page 52

▲back to top
puisqu'elle a perdu sa mere ; et quant a monsieur [l'Abbé de la Mente181,] soit qu'il ayt eu
compassion de ce pere et de cette fille, soit qu'il ayt esté animé de ce divin Esprit qui nous fait
vouloir du bien a ceux qui nous font du mal182, il a des-ja protesté qu'il ne vouloit procurer aucune
punition, ni faire partie.
Reste l'œil du publiq qui, je m'asseure, regardera avec edification la grace d'un homme qui
a tant de raysons et de justes excuses, ainsy que Vostre Altesse jugera bien, si elle commande que
rapport luy soit fait de cette desadventure, selon qu'il en resultera des procedures de justice. Et
partant, Monseigneur, la faveur que Vostre Altesse fera a cette calamiteuse famille sera egalement
ornee de justice et de misericorde, qui sont les deux aisles sur lesquelles l'aggreable renommee des
bons princes vole et au Ciel et en terre, parmi mille benedictions et de Dieu et des hommes.
Playse donq a vostre debonnaireté, Monseigneur, de tendre sa main secourable a ce pauvre
desolé, et d'excuser la liberté avec laquelle je luy propose ce bon œuvre, protestant que c'est avec
toute la tres humble reverence que je doys a Vostre Altesse, a laquelle je souhaite le comble de
toute sainte prosperité, demeurant a jamais,
Monseigneur,
Son tres humble, tres obeissant et tres fidele
orateur et serviteur,
FRANÇS E. de Geneve.
Le 7 julliet 1617, a Thonon.
_____
MCCCXXX. Au Prince de Piémont, Victor-Amédée183
(Fragment inédit). Deux offensés qui souhaitent la grâce de
l'offenseur. Plus d'infortune que d'iniquité.
Thonon, 7 juillet 1017.
……………………………………………………………………………………………………...
la fille ne184 craint rien tant que de se voir privee de son pere, a mesure qu'elle se treuve avoir
perdu sa mere ; et quant a monsieur l'Abbé de la Menthe, soit quil ayt eu compassion du pere et de
la fille, soit quil ayt esté animé de l'Esprit celeste qui nous fait souhaiter du bien a ceux mesme qui
nous font du mal, il a protesté qu'il ne vouloit en façon quelcomque faire partie, ni procurer aucune
punition.
Reste le publiq185 lequel, je m'asseure, ne186 sera nullement scandalisé si, sur forces (sic)
raysons justificatives d'un tel accusé, il plait a Son Altesse d'ouctroyer la grace, laquelle affin de
pouvoir plus aysement obtenir, j'addresse a vostre187 charité, Monseigneur, cette tres humble
requeste, fondee partie sur la justice, partie sur la misericorde ; d'autant que, comme on ne peut
pas nier qu'il ny ayt en cet accident quelque sorte d'apparence de coulpe, puisqu'il y a des mortz et
181 Sylvestre de Saluces (voir le tome précédent, note (1280), p. 390, et à l'Appendice II, sa lettre au duc de Savoie, 18
juin 1617). Ses bonnes dispositions ne durèrent pas longtemps, comme on peut le constater par la lettre du président
Crespin à saint François de Sales, donnée à l'Appendice I.
182 Cf. Matt., V, 44.
183 Ce fragment semble faire suite à la variante de la minute précédente ; mais la confrontation des deux Autographes
et la mention de « Son Altesse » ne permettent pas de douter qu'il n'y ait deux lettres différentes. François de Saies,
comme il le faisait souvent, en écrivant au Duc se sera adressé en même temps au prince de Piémont pour obtenir son
appui.
184 ne [craignant]
185 le publiq [et la Justice]
186 ne [tirera nul scandale...]
187 a vostre [bonté]
52/346

6.3 Page 53

▲back to top
blessés, aussi faut il confesser qu'il y a beaucoup d'innocence en effect, et plus de grande infortune
que de grande iniquité. [45]
Playse donq a Vostre Altesse de gratifier de sa faveur188 ce calamiteux demeurant de
famille, affin que, par le pardon fait a son chef, elle puisse aucunement subsister apres un si funeste
esbranlement.
……………………………………………………………………………………………………...
Revu sur l'Autographe appartenant à Mlle Angéline Gavard, à Ville-en-Sallaz (Haute-Savoie).
_____
MCCCXXXI. A la Mère de Chantal. Une postulante attendue à
Sainte-Catherine et qu'il faut recevoir à la Visitation.
Madame du Puits-d'Orbe en route pour Annecy. Trempe
d'esprit de l'Abbesse. Le Saint offre son logis pour la
voyageuse. Malades corporelles et malades spirituelles.
Thonon, vers le 8 juillet 1617 189.
Ma tres chere Mere,
M. le Premier190 et M. de la Valbonne191 m'escrivent d'un'affection si extraordinaire pour
Mlle de Beauvilars, que j'ay creu ne pouvoir ni devoir l'esconduire192, attendu que ce bon seigneur
peut et veut tant favoriser nostre mayson dAnnessi en toutes les occurrences esquelles la
Congregation en pourra avoir besoin. Vous verres, sil vous plait, la lettre que j'escris et celles que
j'ay receues, [46] par lesquelles, je pense, vous connoistrés que nous ne pouvons pas gauchir.
Je voy bien qu'a Sainte Catherine193, ou on gardoit la place, j'auray a m'excuser, puisque mesme la
chere fille194 s'estoit desfaite de tout autre besoigne pour avoir le soin de cette fille ; mays j'auray
plus tost accommodé cela que mon esprit, si en chose qui se peut j'avois despieu a monsieur le
premier Præsident. Dieu, ce crois-je, convertira ceci en bien, et si la fille sçait lire et escrire, et
qu'elle soit si bien conditionnee qu'on dit, l'incommodité ne sera pas si grande. Monsieur le Curé
de Bons195, qui connoit M. de Beauvilars196, en dit beaucoup de bien.
188 de sa faveur [cette pauvre]
189 L'allusion à la prochaine arrivée de Rose Bourgeois à Annecy, permet de rapprocher cette lettre de la suivante à
l'Abbesse du Puits-d'Orbe.
190 Antoine Favre, premier président au Sénat de Savoie.
191 René Favre, fils du précédent, seigneur de la Valbonne. (Voir ci-après, note (230), p. 57.)
192 Il s'agit sans doute de la fille de Gaspard de Bernières, sieur de Beauvillars, en Dauphiné (voir note (196) de la
page suivante), qui avait épousé, en 1601, Huguette de Copier, ou Coppier. L'enfant n'était « qu'entrée en sa
quatorzième année, » comme l'écrit la Sainte à la Mère Favre (Lettre du 8 juillet 1617, vol. I, p. 203), et c'est pourquoi
on avait fait difficulté de la recevoir à la Visitation. Rien n'indique qu'elle y vint en effet, car son nom ne figure sur
aucun livre de l'ancien Monastère.
193 L'abbaye cistercienne de Sainte-Catherine (voir tome XIII, note (334), p. 116).
194 Plutôt Louise de Ballon que Bernarde de Vignod, bien que toutes deux fussent les « cheres filles » de l'Evêque de
Genève.
195 Jean Mangier (voir tome XIV, note (121), p. 38).
196 Fils de Guillaume de Bernières, Gaspard (voir note (192) de la page précédente) occupa toute sa vie dans un
interminable procèsà lui suscité par Jacques de Rochevieille, chanoine de Saint-Chef, au sujet de la maison-forte de
Ville-Moirieu, près Crémieu. Propriété de la famille du Bourg, cette maison-forte avait été apportée à M. de
Beauvillars par sa femme, veuve en premières noces de Laurent du Bourg-Cézargues. (Rivoire de la Batie, Armorial
du Dauphins.)
53/346

6.4 Page 54

▲back to top
Mays voyla un'autre affaire. Mme du Puys d'Orbe vient197, et je ne puis nullement quitter
les affaires que j'ay icy sur les bras, qui sont publiques et pour ma charge. Et encor, si un jour
suffisoit a voir cette fille, je m'efforcerois de courir jusque la et revenir ; mays, comme vous sçaves,
cet esprit est malaysé a s'ouvrir, il y va des jours et des jours. Ma pauvre tres chere Mere, ma vie
(je vous asseure que je pensois escrire ma mie, mais il ne va pas mal ainsy) ; je dis donq, ma tres
chere Mere, escrives moy ce que je pourray et devray faire, a vostre advis.
Mays, mon Dieu, cette pauvre fille que j'ayme tant198, a grand tort, ce me semble, d'avoir
veu M. de Sauzea199 [47] a Lyon ; car, quand il seroit un saint, puisque M. le Premier200 et M. le
Baron d'Origni201 l'aborre (sic) si fort, ne failloit il pas s'abstenir de cette veüe ? Or bien, il ny a
remede ; c'est pour cela que Dieu donne ces affections paternellement maternelles, affin qu'on se
degouste point de servir ces enfans emmi leurs enfances.
Au reste, serves vous absolument de nostre logis pour la recevoir et de tout ce qui y est, sil
vous semble bon de la faire loger la. En somme, je ne sçai que vous dire ; vous sçaves mon cœur
comme le vostre propre, faites ce que vous verres. O si la petite mayson de M. le fiscal202 estoit
desembarassee, il y auroit commodité ; au moins, moins d'incommodité.
Voyla aussi cett'autre fille de Bons qui peut estre viendra203 : voyla bien du tracas. Tout se
convertira en [48] bien, et la peine de l'enfantement estant passee, on se res-jouira du bien qui
demeurera. La multitude des occasions de bien faire tient quelquefois lieu de croix, mais cet (sic)
pourtant la croix la plus douce. Les convulsions des enfantemens, les tranchees, les douleurs sont
fascheuses ; les steriles, pourtant, les prefereroit (sic) a la tristesse de la sterilité.
Nos malades m'ont fait une grande consolation de guerir204, et ces malades spirituelles nous
en feroyent encor un (sic) plus grande si elles guerissoyent. On ne peut pas aymer sans travail,
mais le travail est aymable quand on ayme205.206
……………………………………………………………………………………………………...
197 Rose Bourgeois était en route, en effet, pour Annecy. Elle s'arrêta à Lyon trop longtemps, et n'arriva pas jusqu'en
Savoie. (Voir la lettre suivante, et plus loin celle du 13 janvier 1618 à M. Milletot.)
198 L'Abbesse elle-même.
199 André de Sauzéa (voir tome XIII, note (741), p. 271), qui avait été confesseur de la Communauté du Puits-d'Orbe.
200 Beau-frère de l'Abbesse par son mariage avec Marie Bourgeois (voir tome XII, note (598), p. 267), Nicolas Brùlart
était fils de Denis Brûlart, baron de la Borde et de Madeleine Hennequin. Il eut d'abord la charge de maitre des requêtes
au Parlement de Bourgogne ; devenu président en 1602, et premier président eu 1610, sur la démission de son père, il
mourut en 1627. (Moreri, 1740, tome II.)
201 Guillaume Bourgeois, frère de Mme du Puits-d'Orbe. (Voir tome XIV, note (402), p. 131.)
202 La maison de Maurice Barfellv, procureur fiscal nu Conseil de Genevois (voir tome XVI, note (826), p. 257), ne
fut acquise définitivement que le 15 août suivant. (Voir ci-après. Lettre MCCCXLII, p. 62, et les notes qui
l'accompagnent.)
203 On peut suggérer avec beaucoup de probabilité le nom de Jeanne-Antoinette de Chevron-Villette-la-Couz.
Religieuse de l'abbaye de Bons, où les « tendres ames » couraient de grands dangers par suite des scandales qui, trop
souvent, venaient s'ajouter à la décadence de la vie monastique. (Voir tome XIV, note (254), p. 81, et cf. ci-dessus.
Lettre MCCCXXV, p. 36.) La Cistercienne, fille de Pierre de Chevron-Villette, seigneur de la Couz, et de Simonne
de Bussv et Gevressia, était la propre sœur de Françoise-Jéronyme de Villette, professe de la Visitation de Lyon.
Notre conjecture s'appuie sur deux lettres de sainte Jeanne-Françoise de Chantal, revues sur les Autographes.
« Je saurai la tentation de la pauvre Sœur F. Jéronyme, » écrit-elle à la Mère Favre le 10 avril 1617 : « hélas ! sa pauvre
sœur s'est perdue, à ce que l'on dit ; je prie Dieu qu'il la radresse. » (Voir Lettres, vol. I, p. 192.) Et quelques mois plus
tard, a la même : « Je n'ai point parlé à Monseigneur ; il m'a mandé que demain il donnerait une heure et demie à ma
sœur de la Cout1 pour sa confession. » (Ibid., p. 217.)
1 La Tour est, dans l'imprimé, une erreur de lecture, et la date de septembre attribuée à cette lettre est inexacte ; en la
comparant avec celle du 15 août (ibid., p. 213), on se convainc en effet qu'elle a dû la précéder. Celle-ci dut arriver à
Annecy peu après le retour du saint Evêque (30 juillet).
Ajoutons qu'il ne pouvait y avoir à cette époque une autre « sœur de la Cout », puisque la mère des deux
Religieuses avait passé à de secondes noces et que leur frère Claude ne se maria qu'en 1644.
204 Voir ci-dessus, note (157), p. 32.
205 Cf. S. Aug., De bono Viduit., c. XXI.
206 Ici s'arrête le premier feuillet de l'Autographe ; les lignes suivantes sont écrites en marge et continuaient sans doute
la troisième page de la lettre, la quatrième étant ordinairement réservée à l'adresse.
54/346

6.5 Page 55

▲back to top
Ce qui me tient en peine pour le fait de la fille de la petite seur207, c'est que je l'ay oüie en
confession et la fille de chambre aussi, et bien que de ce coste la je ne sache chose au monde de
ce qu'on dit, si est ce quil faut eviter qu'on le puisse penser. Dieu me conduira, car j'ay cela bien a
cœur.
Revu sur l'Autographe conservé à la Visitation du Mans. [49]
_____
MCCCXXXII. A Madame Bourgeois, Abbesse du Puits-
d'Orbe208. Bienvenue à l'Abbesse. La société des âmes pleines
d'amour divin allège les afflictions.
Thonon, 15 juillet209 1617.
Ma tres chere Seur,
Je sçavois vostre venue de deça par un advis que monsieur le Premier, vostre beaufrere210,
m'avoit envoyé, et par un billet receu des que je suis icy de madame la Premiere, nostre bonne
seur211. Et bien que je sois attaché icy encor pour quelque jours, si n'avois-je pas laissé de donner
ordre que vous fussies receu (sic) Annessi, comme vous seres, Dieu aydant, a vostre arrivee212,
laquelle je suis infiniment marri avoir esté retardee par cette213 ntion. O Dieu, quevous a
causé de desplaysirs ! Venes, ma tres chere Seur, et venes bien disposee a suivre mes conseilz, qui
partiront d'un esprit qui cherit vostre ame nompareillement. Que ce rencontre n'[ébranle] point
vostre courage ; Dieu convertira tout cela en bien.
La bonne madame de Chantal vous attend impatiemment ; vous seres, ce me semble, toute
alegee du fardeau [50] de vos afflictions quand vous aures esté un jour avec elle et avec ses filles,
qui sont, a la vérité, toutes pleines du divin amour et de douceur214.
J'escris a monsieur le lieutenant215 qui, je [m'assure,] suivra mon advis. Dieu vous benisse,
ma tres chere Seur, ma Fille, et je suis en luy,
Vostre plus humble frere et serviteur,
FRANÇS, E. de Geneve.
A Thonon le 15 (?) julliet 1617.
207 Françoise de Charmoisy (voir ci-dessus, note (161), p. 33).
208 L'Autographe de cette lettre est collé sur un carton, en sorte qu'on ne peut voir l'adresse, écrite sur le verso et dont
on aperçoit des traces au recto. Mais la seule lecture et la comparaison de ce texte avec celui de la lettre précédente
suffisent à persuader que la destinataire est Rose Bourgeois, abbesse du Puits-d'Orbe. (Voir tome XII, note (607), p.
271.)
209 Le second chiffre du quantième est très oblitéré sur l'Autographe ; nous ne donnons que sous réserve, car on pourrait
lire aussi 12 ou 13.
210 Nicolas Brûlart, premier président au Parlement de Bourgogne. (Voir ci-dessus, note (200), p. 48.)
211 La présidente Brûlart, sœur de la destinataire. (Voir tome XII, note (598), p. 267.)
212 Voir la lettre précédente, p. 48.
213 Plusieurs mots ont disparu de l'Autographe par suite de l'usure ; nous rétablissons entre crochets [ ] ceux que le
sens permet de supposer, et remplaçons les autres par des points de suspension.
214 Nous avons dit déjà (note (197), p. 47) que la voyageuse ne vint pas à Annecy ; cependant, ainsi que l'atteste la
lettre du 13 janvier 1618, elle vit le Saint, sans doute à Grenoble, pendant l'Avent de 1617.
215 « Lieutenant général des armées du Roi, baillif de Dijon, capitaine-lieutenant des gensdarmes de M. le Prince, »
Claude de Saulx, comte de Tavanes et de Beaumont, était fils de Guillaume de Saulx, deuxième du nom, et de
Catherine Chabot. En 1613, il était devenu neveu de l'Abbesse par son mariage avec la fille de la présidente Brûlart,
Françoise, qui lui donna onze enfants. (Cf. tome XIV, note (788), p. 278.) Claude mourut de maladie au siège de
Fontarabie, en 1638. (Moreri, 1740, tome VII.)
55/346

6.6 Page 56

▲back to top
Revu sur l'Autographe appartenant à M. l'abbé Gustave Chevallier, Missionnaire apostolique, à
Fixin (Côte-d'Or).
_____
MCCCXXXIII. Au Chanoine Jean-François de Sales, son
frère216. Un empressé départ.
Thonon, 19 juillet 1617.
Mon cher Frere,
Ces deux motz sont escritz sur le plus empressé depart [51] que je fis onques217 ; M. le
Collateral vous le dira218, et tout le reste. Vives joyeux avec Nostre Seigneur.
A Thonon, le 19 julliet 1617.
A Monsieur
Monsieur de Boysi.
Revu sur l'Autographe conservé à la Visitation d'Annecy.
_____
MCCCXXXIV. A la Mère de Chantal. Annonce de retour.
Thonon, 19 juillet 1617.
A nostre Mere.
Ma tres chere Mere,
Ces trois motz vous annonceront ma santé et l'esperance de vous revoir bien tost. J'escris
sur le depart pour Evian, ou je vay le plus empressement que jamais j'allay en lieu du monde ; M.
le Collateral vous le dira.
Je suis, ma tres chere Mere, comme vous sçaves vous mesme, tout vostre.
19 julliet 1617.
Revu sur l'Autographe conservé à la Visitation d'Annecy. [52]
_____
216 Voir le tome précédent, note (207), p. 48. Ce billet et le suivant sont écrits au recto d'un même feuillet, dont le
verso porte pour adresse : A Monsieur de Boysi.
217 Le Saint partait pour Evian et Saint-Paul. Peut-être allait-il conférer avec Claude de Blonay des affaires de la
Sainte-Maison.
218 Claude de Quoex (voir tome XII, note (138), p. 84), veuf depuis le 31 mai de sa première femme, Bernardine de
Chissé, était allé, au commencement de juillet, sur l'avis de l'Evêque et l'invitation de son frère Philippe, se « promener
jusques » à Thonon, pour voir Rose d'Yvoire qu'il épousa bientôt après.
56/346

6.7 Page 57

▲back to top
MCCCXXXV. A Madame de Genève, Abbesse de Baume-Les-
Dames219 (Inédite). Consécration d'une chapelle mortuaire.
Compliments affectueux et saints conseils.
Thonon, 24 juillet 1617.
Madame ma tres chere Mere,
Je pars, certes, accablé de mill'affaires, ayant aujourdhuy consacré la chapelle de monsieur
vostre frere, qui sera bien belle, certes, et la tumbe aussi220. Vous pouves penser si nous avons
souvent parlé de vous, mays non pas toutefois si souvent comme j'y ay pensé.
Ma tres chere Mere, vives tous-jours toute a Dieu, auquel vostre ame est de si long tems
consacree. Sa Passion soit vostre refuge, sa Croix vostre appuy, sa mort vostre vie et sa vie vostre
gloire æternelle. Je suis sans fin,
Madame ma tres chere Mere,
Vostre tres humble filz et serviteur,
FRANÇS, E. de Geneve.
24 julliet 1617, a Thonon.
Revu sur l'Autographe conservé à la Visitation de Nancy. [53]
_____
219 Le second feuillet de l'Autographe a disparu, et, avec lui, l'adresse. Mais il ne peut v avoir aucun doute que ces
lignes ne soient écrites à Marguerite de Genève (voir tome XV, note (751), p. 262), sœur du marquis de Lullin. (Cf.
note (86). p. 13.)
220 Par un acte du 16 septembre 1603, fait à Thonon, François de Sales avait autorisé le marquis de Lullin à « construire
une chapelle contigue à l'église de Notre-Dame de Compassion...., au côté droit, soit de l'Evangile, et sous le toit du
bâtiment du prieuré, dit anciennement de Saint-Hippolyte. » La nouvelle construction formait un carré de vingt pieds
de côté ; un grillage en fer donnant sur l'église, permettait d'en apercevoir le maître-autel. Cette chapelle, dont les
Barnabites acceptèrent la charge, avait un recteur, nommé et entretenu d'un revenu de cent cinquante florins par le
fondateur. Elle renfermait la tombe de l'illustre famille de Genève. La consécration eut lieu le 24 juillet 1617, et le fait
fut consigné dans une longue inscription gravée sur une plaque de marbre noir qui se voit encore, ainsi que celle
portant l'épitaphe du marquis de Lullin, dans un cloître de l'ancien couvent des Minimes, devenu l'hôpital. (R. E. et
Revue savoisienne, 20 octobre 1873.)
57/346

6.8 Page 58

▲back to top
MCCCXXXVI. A la Mère de Chantal. Des fermiers
retardataires à payer. Fine et aimable proposition du Saint à
la Mère de Chantal.
Gex, 26 juillet 1617.
A nostre Mere.
J'envoye prendre des chevaux pour vous aller revoir, ma tres chere Mere. Ce billet donq
n'est que pour vous saluer en attendant, et vous dire que les fermiers de Monseigneur vostre frere221
ne me veulent point donner d'argent, par ce, disent ilz, qu'ilz ne peuvent faire vostre somme que
d'icy a 15 jours222. Voyes si vous voules que, pour attendre cela, je retarde icy. Vous aymeres
mieux que je vous voye lundi, si ce n'est dimanche223.
Dieu soit a jamais au milieu de nostre unique cœur.
A Gex, le 26 julliet 1617.
Et a ma tres chere petite seur, ma fille tout uniquement tres aymee224, que j'ay grande envie
de revoir.
Revu sur l'Autographe qui appartenait à M. Mercier, chanoine de la cathédrale d'Annecy. [54]
_____
MCCCXXXVII. A la même. Retour de l'Evêque à Annecy.
Pourquoi il veut le lendemain se lever de bonne heure.
Annecy, 30 juillet 1617 225.
Me voyci donq arrivé, ma tres chere Mere, en tres bonne santé, graces a Dieu. Je dormiray
bien cette nuit, sil luy plait, et vous obeiray fort soigneusement. Mais je ne pense pas que demain
je puisse ne me lever pas matin, car il y a trop de playsir a jouir de cette douce partie du jour ; et
puis, ne faut il pas aller dire vostre Messe, puisque le reste du jour sera pour l'Office de nostre
grande feste226 ? Aussi ay-je un desir extreme de vous revoir, et ma tres chere petite seur227, avec
nos Filles.
Dieu soit a jamais au milieu de nostre unique cœur. Amen.
Revu sur l'Autographe conservé à la Visitation du Mans. [55]
_____
221 André Frémyot, archevêque de Bourges et prieur de Nantua. (Voir tome XII, note (669), p. 299.)
222 « Notre bienheureux Père, » dit la Mère de Chaugy (Mémoires, etc., Partie II, chap. II), n'avait « pas voulu que
notre Bienheureuse apportât quant et soi, non seulement du bien de ses enfants, mais non pas même du sien propre,
lui commandant de se contenter d'une pension viagère que Mgr de Bourges, son frère, l'avait priée d'accepter par
aumône, et laquelle il lui a toujours continuée tandis qu'elle a vécu. » Cette pension s'élevait, d'après le Livre de
Comptes du 1er Monastère d'Annecy, à environ trois cent soixante-quinze florins.
223 Selon toute probabilité, le Saint rentra, en effet, à Annecy le dimanche 30 juillet. (Voir le billet suivant.)
224 Marie-Aimée, veuve de Bernard de Sales.
225 Le retour de François de Sales après une longue absence, à la veille d'un jour dont l'après-midi devait être occupé
par « l'Office de nostre grande feste, » indique la date de ce billet : il a été écrit le soir du 30 juillet 1617.
226 La fête de Saint-Pierre-ès-liens, patronale du diocèse de Genève.
227 La baronne de Thorens.
58/346

6.9 Page 59

▲back to top
MCCCXXXVIII. Au Président Jean-Georges Crespin228
(Fragment inédit). Raisons d'un retard à écrire.
Annecy, [commencement d'août] 1617.
J'estois en Chablaix quand je receu la premiere lettre quil vous pleut de m'escrire, et
j'attendois response de la supplication que j'avois faite a Son Altesse229, pour pouvoir m'asseurer
de celle que j'avois a vous faire
Revu sur l'Autographe conservé à Turin, Casa Cottolengo. [56]
_____
228 Nous savons déjà la triste aventure de ce président, meurtrier de sa femme, et que l'immense charité autant que
l'exacte justice du Saint avaient protégé auprès du duc de Savoie. (Voir le tome précédent, note (1279), p. 390, et ci-
dessus, Lettre MCCCXXIX, p. 42.) Ces données permettent de penser que le présent fragment appartient à une lettre
dont il fut destinataire, et en fixent en même temps la date d'une manière approximative.
Crespin comptait parmi les familiers d'Antoine Favre ; après avoir été son disciple, il l'avait suivi au Sénat
en 1585 comme avocat, et comme sénateur en 1597. Depuis 1615, il était second président de la Chambre des
Comptes. L'émoi fut grand à Chambéry quand, le 15 avril 1617, commença contre lui, au sujet de l'homicide de la
dame Présidente, sa femme, une procédure criminelle. Elle dura jusqu'à la fin d'avril, et fut peut-être portée à Turin
par René Favre, parti pour le Piémont le 28 de ce même mois. Puis, sans doute sur l'ordre du prince, on tâcha de faire
le silence sur cette affaire ; mais Crespin résigna ses fonctions et se retira à la Grande-Chartreuse. Un ami de François
de Sales l'y accueillit, ayant égard, assurait-il, « a ses merites et aux bons offices de la sainte affection qu'il a toujours
demontree a ce qui concerne le bien de nostre Ordre. » (Lettre de D. Bruno d'Affringues à Favre, 10 octobre 1617. Cf.
Mugnier, Hist. du Président Favre, Paris, 1902-1903, pp. 427-431.) L'asile était-il trop austère ou trop proche de la
Savoie ? Dans l'été de 1618, l'infortuné Crespin s'en allait vers un autre ami de l'Evêque de Genève, Mgr Fenouillet,
avec l'espérance de « finir ses jours en » la « vocation ecclesiastique, comme dans un havre de grace... apres cette si
rude tempeste. » (Voir plus loin la lettre du 4 septembre 1618, et à l'Appendice I, celle du Président au Saint.) En effet,
en 1632, nous le retrouvons encore à Montpellier, bienfaiteur de la Visitation de cette ville, et recevant à ce titre une
lettre de la Mère de Chantal, où elle le traite de « Votre Révérence. » L'année suivante, la Sainte écrit à la Mère de
Marigny : « Voilà M. Crespin que je voudrais bien que vous eussiez assez de crédit pour arrêter en Languedoc et
l'empêcher de retourner en Savoie. » (Lettres, vol. IV, 1879, pp. 84 et 186.) Il dut suivre ce sage et prudent conseil,
car rien n'indique qu'il soit revenu dans un pays dont il était si tristement sorti.
229 Vide supra, Epist. MCCCXXIX.
59/346

6.10 Page 60

▲back to top
MCCCXXXIX. Au Président René Favre de la Valbonne230.
Félicitations au destinataire. Joie du Saint, et celle qu'il
promet au nouveau président du Conseil de Genevois. Le
petit Antoine et son grand-père.
Annecy, 6 août 1617.
Monsieur mon Neveu,
Nul ne vous est icy ce que je vous suis, et nul, ni icy ni ailleurs, ne vous veut honnorer et
cherir plus que je [57] souhaite de le faire. Pensés donq, s'il vous plait, quel est mon contentement
sur vostre venue en cette ville, pour y posseder la qualité que si souvent je vous avois desiree et
laquelle vous est arrivee avec tant d'honneur231. Le bien est doublement heureux quand il nous
arrive heureusement, et doublement honnorable quand il nous vient honnorablement. Venes donq,
Monsieur mon cher Neveu, venes vers nous et vivés avec nous joyeusement et suavement, jusques
a ce qu'apres longues annees vous suivies monsieur vostre pere au siege souverain, avec autant de
consolation publique comme vous venes luy succeder en ce siege subalterne232.
Je salue tres humblement ma tres chere niece233, et me res-jouis avec elle, si elle se res-
jouit de venir ; et si elle ne se res-jouit pas, je m'en res-jouis neanmoins, augurant que tout son
230 Fils aîné d'Antoine Favre et de sa première femme Benoîte Favre, René, seigneur de la Valbonne, naquit à Bourg
le 8 septembre 1583. Il épousa en 1611 (contrat dotal du 18 juin) Andrée de Nicolle de Crescherel. Jugemaje à Annecy
en juin 1607, installé au souverain Sénat de Savoie le 11 août 1609 (voir tome XIV, pp. 200 et 340), il prit possession
de « son estat et dignité de president en Genevois » le 14 septembre 1617, sans perdre pour cela les honneurs et les
avantages de la charge de sénateur. Son père songea encore, trois ans après, à lui obtenir la succession à la présidence
du Sénat, et leur saint ami François de Sales, trouvant M. de la Valbonne « grandement « consciencieux... fort docte...
et propre pour rendre beaucoup de service, » (lettre de juin 1620) donna les mains au projet, qui pourtant n'aboutit
pas. René mourut à Annecy, le 28 septembre 1656, ayant ordonné qu'on gravât sur sa tombe : Renatus Faber, baro,
senator et præses, tanquam Job expectat hic donec veniat immutatio sua. Ce style sentencieux lui plaisait ; il couvrit
les murs de son château de Proméry d'emblèmes, de devises, d'inscriptions morales, selon le goût du temps.
Dans son livre du Bien public (Annecy, 1646), M. de la Valbonne se montre comme son père jurisconsulte
éminent ; presque toutes les dispositions indiquées par lui ont passé dans les législations modernes ; et il trace l'image
de ce qu'il fut comme magistrat, quand il demande à ceux qui ont charge d'administrer la justice « un esprit fort et une
conscience tendre, » c'est-à-dire du jugement, de l'expérience et une éducation relevée, avec la crainte de Dieu. Le
contact fréquent de l'Evêque de Genève n'avait pas peu contribué à développer en lui ces précieuses qualités. « J'ai été
dans l'habitude de jouir de la vie familière d'un si grand homme, » dépose-t-il au Procès de Béatification (Process.
remiss. Gebenn. (II), ad 7um interrog.), « soit dans mon enfance, soit dans mon adolescence, et surtout pendant cinq
ans avant sa très sainte mort où... j'ai demeuré avec lui dans la même maison ; chaque jour il m'a été donné du ciel de
prendre part à ses entretiens pleins de suavité ; et toujours il parlait de l'amour de la vertu, de la fuite des vices, du
mépris du monde et des aspects divers des temps présents. » Cependant, sur ces derniers points, René ne se laissa
guère persuader ; car, dans son testament, il défend à son fils Philibert de rien rabattre des sommes qui lui sont dues
et pour lesquelles il a soutenu tant de procès ; il défend en outre à tous ses héritiers d'épouser une femme qui ne puisse
produire quatre quartiers de noblesse des deux côtés paternel et maternel, à moins qu'elle n'ait « vingt mille ducatons
vaillants » ! (D'après une ancienne copie conservée dans les Archives Lagrange.) Son legs aux Pénitents noirs
d'Annecy, avec les conditions qu'il impose, témoigne à la fois de sa piété, de son désir de faire le bien et de l'originalité
de son esprit. (Voir Mugnier, Hist. du Président Favre, Paris, Champion, 1902-1903, chap. II, et Revue Savoisienne,
15 mai 1864.)
231 La charge de président du Conseil de Genevois était vacante par le décès de Charles-Emmanuel du Coudrey qui se
noya malheureusement dans le lac d'Annecy les premiers jours de juillet. (Voir tome XV, note (68), p. 12.) Le duc de
Nemours la donna à René Favre de la Valbonne, s'y portant « de son mouvement, » écrit Antoine Favre au duc de
Savoie le 28 juillet, « sur la souvenance qu'il a heu de la recommandation qu'il pleut a V. A. S. luy en faire, sont passés
trois ans, et sur l'asseurance… que sans doubte V. A. S. auroit l'election aggreable. » (Mugnier, Correspondance du
Président Favre, tome II, publié par la Société savoisienne, etc., 1905.)
232 Avant d'occuper la première place au Sénat, Antoine Favre avait en effet rempli les fonctions de président au
Conseil de Genevois.
233 Andrée de Nicolle de Crescherel, femme du nouveau président.
60/346

7 Pages 61-70

▲back to top

7.1 Page 61

▲back to top
cœur, que vous aves et qu'elle a, s'en res-jouira quand elle y verra chacun en feste autour de vous
et d'elle, pour le contentement general de vostre venue et de la sienne.
Dieu soit a jamais au milieu de vostre esprit pour faire justice et jugement234, et pour vous
combler de douceur et consolation celeste. Je suis sans fin,
Monsieur mon Neveu,
Vostre tres humble oncle et serviteur,
FRANÇS, E. de Geneve. [58]
Je suis seulement en peine de la separation de monsieur vostre pere et de son petit Anthoyne
François235, si vous l'apportes, ou de celle de ma niece et de luy si vous ne l'apportes pas ; 236 mays
vous l'apporteres, je m'asseure, car, comme separeroit-on ma niece de ses entrailles ? et moy j'auray
charge de le caresser souvent de la part de ce grand grand pere.
Revu sur une copie conservée à la Visitation d'Annecy.
_____
MCCCXL. A une dame237. Ne jamais s'attrister, car Dieu nous
aime et nous sommes siens.
Annecy, 7 août 1617.
Quel bonheur, Madame, d'estre toute a Dieu ! car il ayme les siens, il les protege, il les
conduit, il les met au port de la desirable eternité. Demeurés donq ainsy, et ne permettes jamais a
vostre ame qu'elle s'attriste ni vive en amertume d'esprit, ou en scrupule, puisque Celuy qui l'a
aymee et qui est mort pour la faire vivre, est si bon, si doux, si amiable.
Il a voulu, ce grand Dieu, que vous fussies sienne, et vous l'a fait vouloir, et vous l'aves
voulu, et il vous a fait prendre tous les vrays moyens pour le devenir. Vous [59] l'estes donq sans
doute, ma tres chere Fille, dont je me res-jouis infiniment et en benis sa misericorde, comme estant
en elle sans fin,
Madame,
Vostre plus humble et tres affectionné serviteur,
FRANÇS E. de Geneve.
Annessi, le 7 aoust 1617.
_____
234 Ps. XCVIII, 4.
235 Cet enfant était né à Chambéry le 15 novembre 1615 (voir tome XV, note (634) ; p. 217). Il fut baron d'Aiguebelette
et chevalier d'honneur au Conseil de Genevois. Son grand-père et parrain l'avait fait héritier de sa maison d'Annecy ;
son père y ajouta les biens de Vaugelas, de Gillon, etc. Antoine-François mourut en 1690, sans postérité.
236 La fin est inédite.
237 Nous n'avons ici qu'un fragment d'une lettre adressée très probablement à une dame de Grenoble. Proposer un nom
est bien difficile, aussi ce n'est que sous toutes réserves que nous avancerons celui de Mme de Veyssilieu. (Voir le tome
précédent, note (1215), p. 371.)
61/346

7.2 Page 62

▲back to top
MCCCXLI. Au Père Pierre de Bérulle238. L'Evêque de Genève
propose au fondateur de l'Oratoire un établissement dans son
diocèse.
Annecy, 11 août 1617.
Monsieur,
J'ay bien sujet de vous remercier tres humblement pour l'offre qu'il vous a pleu de me faire
par l'entremise de monsieur de Forax239 ; mays j'attens de vous rendre ce devoir jusques a ce que
je sache si j'auray occasion de me prævaloir de la grace quil vous plait me faire.
Cependant vous sçaves, comme je pense, quelle estime j'ay tous-jours faite de vostre
Congregation240, et pour cela, des qu'il a pleu a Dieu par sa bonté de la faire esclorre, j'ay tous-
jours desiré d'en avoir une Mayson en ce diocaese ; ce que je n'ay sceu faire jusques a present, qu'a
mon advis je puis reuscir de ce dessein. C'est en une ville ou nous aurions un prieuré de huit cens
escus d'or de revenu fort liquide, l'eglise toute faite et presque ameublee, et le lieu beau, amene,
pres de Geneve et Losanne, et auquel on vit presque pour neant, c'est a dire a fort bon marché.
Reste qu'il vous playse de me faire [60] sçavoir si vous voudries accepter le parti, et si nous
pourrions y avoir d'abord huit prestres, puisque la fondation requiert cela, et si il se pourroit pas
faire que l'un des huit exerçast la charge des ames, aydé par les autres ; car cela estant, je n'auray
plus a faire que d'obtenir le consentement de Son Altesse qui, je m'asseure, l'accordera volontier241.
J'attendray donq de vos nouvelles pour ce regard, et vous conjurant de me recommander
souvent a la misericorde de Dieu, je demeureray a jamais, de toute vostre Congregation en general,
et de vous en particulier,
Monsieur,
Tres humble confrere et tres affectionné serviteur,
FRANÇS, E. de Geneve.
XI aoust 1617, Annessi.
A Monsieur
Monsieur de Berule,
en la Congon de l'Oratoire.
A Paris.
Revu sur l'Autographe conservé à la Visitation de Reims. [61]
238 Voir tome XII, note (350), p. 155.
239 Guillaume de Bernard de Foras (voir tome XVI, note (728), p. 226).
240 Voir tomes XIV, note (610), p. 207 ; XV, Lettre DCCXLV, p. 154 ; XVI, Lettres CM, p. 44, et CML, p. 135.
241 A la Sainte-Maison de Thonon, les choses ne marchaient pas aussi bien que l'Evêque de Genève l'aurait voulu ; il
y avait bien des heurts entre les prêtres séculiers et les autres corps réguliers de l'établissement. Pour rétablir la paix
et l'ordre, pour diminuer les frais, car l'insuffisance des ressources était une des grandes causes de conflit
François de Sales ne vit pas de meilleur moyen que de remplacer les huit ecclésiastiques du Presbytère par huit
Oratoriens. Cette pensée le poursuivra jusqu'à sa mort. Nous le verrons, dans les années 1620, 1621, 1622, agir
persévéramment auprès du prince pour faire réussir ce projet ; « sans cela, » écrit-il au duc de Savoie le 3 février 1622.
« tout ce qui regarde l'eglise de Nostre Dame et les bastimens qui en dependent s'en va ruiné. »
C'était donc le prieuré de Saint-Hippolyte qu'il offrait, le 11 août 1617, au fondateur de l'Oratoire. Première
origine de la paroisse de Thonon, ce prieuré existait déjà au XIIe siècle, desservi par des moines de Saint-Benoît ; sous
la domination protestante, il devint propriété de la commune. On a vu, au cours de la correspondance (tomes XI, p.
309, XII, pp. 25, 33, 399, 426) les démarches multiples de Mgr de Granier et du Prévôt pour le rachat du prieuré et son
attribution aux PP. Jésuites qui devaient diriger le collège. Par Bulle du 13 août 1606, Paul V confirmait l'union de ce
bénéfice à la Sainte-Maison, union consentie depuis 1601 par Charles-Emmanuel. Ses revenus étaient spécialement
destinés à l'entretien du Séminaire. (Cf. Piccard, Mém. de l'Acad. Sales., tome V, et Lavanchy, id., tome XXXIII.)
62/346

7.3 Page 63

▲back to top
MCCCXLII. A la Mère de Chantal (Inédite). Que faire contre
les bruyantes réclamations de deux femmes.
Annecy, vers mi-août 1617 242.
Ma tres chere Mere,
Voyci madame la fiscale qui crie tant qu'elle peut misericorde243, et la vefve crie aussi de
son costé244. Il [62] m’est advis que vous n'aves rien a faire en ceci, sinon de prendre ce que selon
justice et rayson messieurs les deputés245 vous bailleront, en le bien payant. Et quant au reste, la
vefve ne sçauroit garder ce qu'elle prætend ; car, quand pour avoir ce qui vous est necessaire de sa
mayson on la luy aura payee, il se treuvera asses de gens qui feront tenir sequestré l'argent. Mais
je ne puis bonnement m'expliquer par escrit ; ce sera demain matin, Dieu aydant. Cependant il faut
renvoyer le tout a ce que messieurs les deputés feront ; ce que je vous dis par ce que je crain (sic)
que ladite madame la fiscale n'aille encor vous parler et crier alarme.
Et bon soir de tout mon cœur, ma tres chere Mere de tout mon cœur.
Revu sur l'Autographe appartenant à M. le chanoine Robert, doyen du Chapitre de Belley.
_____
242 Par contrat du 16 août 1617, Maurice Barfelly donne aux Sœurs de la Visitation, comme dot de sa fille Louise, une
maison située « rue de l'Asie, » au nord du monastère et le joignant. En même temps, il leur vend, pour la somme de
cinq mille florins, une autre maison et ses dépendances, sise derrière la première, à l'est. Or, la maison donnée avait
été acquise par le procureur fiscal, de la veuve Lachenal (voir note (244) ci-dessous) ; celle-ci y conservait encore «
deux cabinetz » édifiés sur une allée formant voûte et conduisant de la rue de la Halle aux bâtiments vendus par
Barfelly le 16 août. (Archives de la Visitation d'Annecy.) Les Religieuses furent donc certainement contraintes
d'acheter encore ces deux pièces.
Ces détails fixent à peu près la date du billet et expliquent les gémissements des intéressées à l'affaire.
243 Jacqueline, fille d'Antoine Déaclard ou Déaclaz, et d'une demoiselle Déage, femme de Maurice Barfelly, conseiller
du duc de Nemours et procureur fiscal du Genevois (voir tome XVI, note (826), p. 257). Il faut reculer son mariage
au-delà de 1591, date de la naissance de son fils Jean. Après plusieurs testaments, elle signe le dernier, à l'insu de son
mari, le 10 octobre 1617, dans sa maison de Saint-Jorioz ; neuf de ses enfants y sont nommés. Le 1er mai suivant,
Jacqueline était inhumée dans l'église de Saint-Dominique d'Annecy ; aussitôt le procureur fiscal chercha à faire
annuler l'acte du 10 octobre, alléguant la « frenesie » qui aurait tourmenté sa femme. En 1624, les débats duraient
encore. (Mss. Lagrange.)
244 Fille d'honorable François Rouz, Marie était alors veuve de « Me Jacques de Lachenal, en son vivant notaire »
d'Annecy. Le 29 août 1618, elle contracte à son tour avec la Visitation pour la vente d'une maison, et, tenace pour le
gain comme l'année précédente, elle fait nommer des experts pour l'estimation de son immeuble, réclame des
dommages-intérêts pour le « transmarchement de ses ardes » et l'ennui « de s'aller loger ailleurs ; » enfin, trouve
moyen à cette occasion, de se débarraser de quatre créanciers, en passant toutes ses dettes au Monastère. Avant le 19
septembre 1619, la veuve Lachenal épousa Hugues Carron, fils de « feu honnorable Jeanton Carron, marchand de
ceste dicte ville. » (Archives de la Visitation d'Annecy.)
245 Barthélemy Flocard, Horace Bonfils et Roch Calcagni sont nommés comme témoins dans l'acte de vente du 16
août 1617 (voir note (242) de la page précédente). Seraient-ce les « deputés » chargés de régler les droits du vendeur
et de ses voisins ?
63/346

7.4 Page 64

▲back to top
MCCCXLIII. A Madame de la Fléchère. Une dame « un peu
brune » sur le Saint. Pourquoi son protégé n'a pas été pourvu
au concours.
Annecy, 28 août 1617.
Ma tres chere Fille,
Je le croy que cette bonne dame246 sera un peu brune sur moy, par ce que ell' affectionne
fort les serviteurs de sa mayson, et l'un d'iceux s'estant presenté au concours dernierement247 sous
sa recommandation, ne fut pas [63] prouveu, quoy qu'il soit certes fort capable. Mays a la premiere
commodité, je luy feray sçavoir qu'il m'est impossible de le gratifier tandis quil ne sera pas prestre
ni lié aux Ordres sacrés ; car, quelle apparence de donner les charges ecclesiastiques de telle
consequence a un qui n'est encor point ecclesiastique, au præjudice de plusieurs honnestes
ecclesiastiques qui ont des-ja fait longuement l'exercice et qui ont bien servi l'Eglise ? Je laisse a
part qu'il n'est pas du diocæse, car en cela je me puis dispenser. Voyla, ma tres chere Fille, tout le
sujet qu'elle peut avoir. C'est grand cas comme l'esprit humain est ami de sa volonté, et comme
chacun suit l'amour propre sans regarder ce qui est plus au service de Dieu ! Sur cela je luy escris
l'advis requis pour l'affaire de monsieur le Prieur248 ; je ne sçai si cela accommodera son cœur,
mais il me tardoit que je le fisse.
Au reste, Mlle de Chantal249 ne peut ne vous honnorer et cherir cordialement, puisqu'ell'est
la fille de sa mere, et la mienne certes, car je l'ayme bien. Et je suis parfaitement vostre, mais je
dis tres absolument, et Jesus soit a jamais nostre vie. Amen.
XXVIII aoust 1617, Annessi.
A Madame
[Madame] de la Flechere.
Revu sur l'Autographe conservé à la Visitation d'Annecy. [64]
_____
246 Impossible de la désigner.
247 Au concours du 18 août 1617. Il s agissait de pourvoir la cure de Douvaine ; elle fut donnée à Jean-Louis Questan.
(Voir le tome précédent, note (1101), p. 328.)
248 Probablement Jean-François de Blonay (voir tome XII, note (666), p. 298, et XV, note (1003), p. 354).
249 Françoise de Rabutin-Chantal était allée au commencement du mois d'août à Rumilly, auprès de Mme de la Fléchère
(Lettres de sainte J.-F. de Chantal, vol. I, p. 207) ; elle devait y être encore.
64/346

7.5 Page 65

▲back to top
MCCCXLIV. A Monseigneur Pierre Fenouillet, Evêque de
Montpellier250 (Inédite). Paris et Grenoble en attente de l'Evêque
de Genève pour le Carême. Mince bagage de science
qu'emporte d'Annecy le jeune des Hayes. Uu engagé militaire
en congé. Souvenir douloureux de la mort de Bernard de
Sales. Capitulation devant une « batterie de pleurs ». La
tyrannie du péché.
Annecy, 30 août 1617.
Monseigneur,
Je vous rens graces tres humbles de lhonneur que vous me faites, qui m'est certes infiniment
prætieux ; et pleut a Dieu que je peusse correspondre par autant de services comme j'ay de desirs
!
Je suis encor incertain si j'iray a Paris ou si je retourneray a Grenoble, Son Altesse, laquelle
m'a commandé l'un et l'autre, ne m'ayant encor voulu determiner auquel des deux je
m'attacheray251.
Monsieur Garin252 vous dira toutes nos nouvelles et que nous renvoyons le jeune M. des
Hayes253 doux, amiable, courtois, a M. son pere254, mais non pas fort sçavant, ains seulement
instruit d'un peu de latin et de quelques parties des mathematiques. Je m'asseure que monsieur son
pere s'en contentera, puisque il ne s'est rien peu faire davantage, quoy que nos Peres Barnabites,
ayent cooperé de tout leur pouvoir. [65]
Vous m'aves renvoyé M. de Barraux255, affin quil eut quelque sorte de refuge vers moy en
ce qui regarde son bonheur, c'est a dire vostre grace. Pour cela, suis je obligé de vous asseurer que
tous les jours il va de bien en mieux, s'estant rangé a la compaignie de M. le Marquis d'Aix256,
duquel il eut congé, apres la miserable prise de Verceil257, devenir icy, pour toutefois retourner
dans peu de jours en Piemont, ou je ne vous diray point quelle perte vous et moy avons faite : vous,
d'un serviteur fort asseuré, moy, d'un frere tres aymable et qui entroit fort honnorablement en la
connoissance et bienveuillance de son Prince258.259 Obmutui, Domine, et non aperui os meum,
quoniam tu fecisti260. La playe est des-ja a moytié soudee, apres trois moys.
La femme du sieur Gautier m'a forcé par ses larmes de vous supplier, Monseigneur, de
recommander sa misere a son mari, ou plus tost la misere de ses filles, car quant a la sienne, elle
250 Voir tome XIV, note (47), p. 4.
251 Par lettres datées de Paris, 4 mai 1617, les marguilliers de Saint-André-des-Arts avaient invité François de Sales
pour la station du Carême (cf. le tome précédent, note (1286), p. 393). La décision de Charles-Emmanuel ne vint qu'en
octobre ; elle envoyait le Saint à Grenoble. (Voir ci-après, Lettre MCCCLXVI, p. 105, et à l'Appendice I, la lettre du
duc de Savoie, 14 octobre.)
252 Jacquelin Garin (voir ci-après, note (382), p. 107).
253 Louis des Hayes, qui avait passé deux ans au collège d'Annecy. (Voir tomes XVI, note (1112), p. 340, et XVII,
Lettre MCI, p. 27.)
254 Antoine des Hayes (voir tome XII, note (573), p. 251).
255 Le neveu de l'Evêque de Montpellier, Michel Fenouillet, seigneur de Barraux. (Voir tome XVI, note (1105), p.
339.)
256 Louis de Seyssel-la-Chambre, marquis d'Aix (voir tome XIV, note (270), p. 89).
257 Voir ci-dessus, note (177), p. 42.
258 Comme on l'a vu plus haut (note (90), p. 13), Bernard de Sales était mort le 23 mai.
259 Je me suis tû, Seigneur, et je n'ai pas ouvert ma bouche, parce que c'est vous qui l'avez fait.
260 Ps. XXXVIII, 10.
65/346

7.6 Page 66

▲back to top
ne nie pas de l'avoir meritee261. Il ny a moyen de resister a cette batterie de pleurs, et cela
m'excusera dequoy je prens cette confiance.
M. de Bellerive262 avoit renvoyé en Piemont sa Marguerite, sur mes exhortations ; mais
comme ce sont des [66] diablesses familieres dont on ne se peut defaire apres qu'on leur a fait
hommage, on m'a dit qu'ell' est retournee d'elle mesme, comme philtree et transportee de la passion
de l'amour de cet homme ; mais quant a la vouloir espouser, il proteste de ny avoir jamais pensé.
Je le vis l'autre jour passant a Gex263, et croyois, quelques jours apres, de les assembler, ouïr et
accommoder, mays je ne fus pas si heureux de la voir ni le revoir ; encor veux je pourtant m'en
essayer. La tyrannie du peché est cruelle ; elle oste le jugement, oüy mesme a ceux qui n'en ont
point.
Je prie Dieu quil vous conserve et comble de toute sainte prosperité, demeurant a jamais,
Monseigneur,
Vostre tres humble et tres obeissant
frere et serviteur,
FRANCS, E. de Geneve.
30 aoust 1617, Annessy.
A Monseigneur
Monseigneur l'Evesque de Monpelier,
Conseiller d'Estat de Sa Majesté.
Revu sur l'Autographe conservé à la Visitation de Montpellier. [67]
_____
261 Peut-être s'agit-il de Jacquemine Falquet, femme d'honorable Claude Gauthier. Nous connaissons deux de leurs
filles : Aymée et Jeanne-Claude, nées en 1591 et 1593. (Reg. par. d'Annecy.)
262 Georges Plonjon, seigneur de Bellerive et de Collonges, était fils de Henri Plonjon et de Catherine de Châteauneuf.
Issu de deux familles hérétiques, il s'allia avec une protestante de Montpellier, Jeanne de Pluviers (1602). L'année
suivante, il entre au Conseil des Deux-Cents, et en reste membre jusqu'en 1610 ; à cette date, une prise de corps
décernée contre lui l'en fait exclure. Dès 1604, le Consistoire s'était occupé de prévenir la ruine de sa maison
qu'acheminait « la pauvre conduite de ce mesnage ; » ce fut bien pire en 1617 ; le Conseil de Genève remplit ses
Registres du récit des « vitieux deportements » de M. de Bellerive, et des démarches faites auprès du marquis de Lans
pour qu'il l'oblige « de pourvoir a l'entretenement et nourriture de sa femme et enfants qui sont en extreme necessité.
» Le Consistoire de Montpellier lui-même s'émeut en faveur de Jeanne de Pluviers et la recommande par lettres à «
Nos Seigneurs de Geneve. » Les efforts des Consistoires et du Conseil échouèrent ; les ministres de la foi catholique
réussirent mieux. Le 11 septembre 1617, les Registres notent que les Capucins « ont esté, avec l'Evesque d'Annecy,
instrumens de la reconciliation du sieur de Bellerive avec sa femme. » Celle-ci est appelée le lendemain devant le
Consistoire pour recevoir des « remonstrances, avec defenses de plus frequenter ny retirer en sa maison lesdits
Capuchins. » Les défenses ne furent sans doute pas respectées, car, plus tard, on retrouve Mme de Bellerive catholique,
et l'un de ses fils, revêtu de l'habit de saint François d'Assise. Quant à Georges Plonjon, il fut emprisonné à Chambéry
à la fin de ce mois de septembre 1617, sous diverses inculpations, notamment pour « s'estre du tout mal gouverné en
Piedmont, » où il était allé pour le service de Charles-Emmanuel. Son testament est du 5 avril 1619 ; sa mort précéda
le 10 février 1627, date du testament de son fils aîné. (D'après l'Armorial de Savoie et les Reg. du Conseil de Genève,
1603-1617.)
263 Le Saint était revenu depuis un mois déjà de son voyage de Gex. (Voir ci-dessus, note (225), p. 55.)
66/346

7.7 Page 67

▲back to top
MCCCXLV. Au Président Antoine Favre (Inédite). Une
distraction de François de Sales. Démarches de Mme de
Thorens pour recouvrer les armes de son mari. Inquiétudes au
suiet de la santé de la présidente de la Valbonne.
Annecy, 30 août 1617.
Monsieur mon Frere,
Hier, parmi un tracas importun, escrivant a monsieur de Charmoysi mon cousin264, et ayant
volonté de vous escrire, je fermay sa lettre comme si c'eust esté a vous, sur le sujet de la maladie
de madame la Presidente de Genevois ma niece265. Je croy que vous m'excuseres aysement, et mon
cousin aussi, qui connoisses asses mon esprit sujet aux evagations.
Maintenant, c'est au nom de ma seur de Thorens266 que je vous escris, et vous presentant
son tres humble baysemain, je vous supplie de la favoriser en ce qui se pourra bonnement faire
pour le recouvrement de certaines armes de feu mon frere son mari, dont ce porteur vous declarera
les particularités ; vous remerciant tres humblement encor de la part de cette seur du soin quil vous
plaist d'avoir es occurrences des affaires de feu mon frere, que nous allons demeslant le mieux que
nous pouvons, pour payer cinq ou six cens escus de debtes quil a laissés, en attendant de voir ce
que la providence de Dieu fera naistre de sa vefve enceinte.
Au reste, je vous supplie tres humblement de commander que nous soyons advertis de
l'estat de la maladie de nostre Presidente, car en verité nous en sommes en [68] peine jusques a
l'inquietude inclusivement, et les Dames de la Visitation n'oublient pas a prier Dieu, comme aussi
que sa bonté vous veuille conserver. Je suis, Monsieur mon Frere,
Vostre tres humble et obeissant frere et serviteur,
FRANCS, E. de Geneve.
Annessi, 30 aoust 1617.
Revu sur une ancienne copie conservée à la Visitation de Turin.
_____
264 Claude de Vidomne de Chaumont, seigneur de Charmoisy. (Voir tome XII, note (510), p. 216.)
265 Andrée de Nicolle de Crescherel, femme de René Favre de la Valbonne, nommé président de Genevois au mois de
juillet précédent. (Voir ci-dessus, Lettre MCCCXXXIX, p. 57.)
266 La veuve de Bernard de Sales, baron de Thorens.
67/346

7.8 Page 68

▲back to top
MCCCXLVI. A Madame de Blanieu267. Comment ne pas dévier
du chemin des ordonnances divines.
Annecy, 30 août 1617.
Que faites-vous, ma tres chere Fille ? car voyla le mot que vous voules. Mon cœur pense
souvent au vostre et, si vous entendies son langage, il vous demande si vous estes tous-jours au
pied de la Croix, ou je vous laissay, c'est a dire tous-jours attachee a la tressainte volonté de Dieu,
pour ne fourvoyer ni a droitte ni a gauche (ni aux contentemens ni aux afflictions, ni entre les amis
ni entre les ennemis) du chemin de ses ordonnances268. Je le croy, certes, ma tres chere Fille, et je
vous en conjure. Ces jours s'escoulent, l'eternité s'approche : passons si droit qu'elle nous soit
heureuse.
Ce sont les souhaitz que je fay sur vous, ma tres chere Fille, a qui je suis fort
affectionnement
Vostre tres humble serviteur en Nostre Seigneur,
FRANÇS, E. de Geneve.
Ce 30 aoust 1617, Annessi.
_____
MCCCXLVII. A la Mère de Chantal. Attente et désir du saint
Evêque.
Annecy, 5 septembre 1617 269.
Helas, ma tres chere Mere, si j'osois j'irois ; quand il sera a propos, faites le moy sçavoir.
Certes, mon ame est en peine. Dieu, par sa bonté, nous veuille donner l'ame de cet enfant et la vie
de la mere, que j'ay dedans mon cœur comme ma pauvre tres chere petite fille270.
Revu sur l'Autographe conservé à Turin, Archives Barolo.
_____
267 Dans l'édition de 1626, cette lettre précède celle du 3 avril 1617 dont l'Autographe a été heureusement retrouvé
(voir le tome précédent, Lettre MCCXCII), et est adressée à la même personne. Nous pouvons donc, presque avec
sûreté, indiquer Marguerite de Sassenage, dame de Blanieu, comme destinataire. (Voir ibid., note (1203), p. 362.)
268 Cf. Ps. CXVIII, 32, 35 ; Prov., IV, ult.
269 Quelques heures suffirent à la naissance, à la mort et à la sépulture du fils posthume de Bernard de Sales. Or, il fut
enterré le 5, d'après les Registres paroissiaux : ce billet a donc été écrit ce jour-là même, de très grand matin, peut-être
même dans la nuit.
270 « Ma douleur est a l'extremité de la mort, » disait la baronne de Thorens aux premières heures de son veuvage (Vie
manuscrite, par la Mère de Chaugy). Il ne fallut en effet que trois mois et demi à cette profonde douleur pour conduire
Marie-Aimée à la tombe. L'enfant qu'elle attendait la retenait seul ici-bas ; sa naissance s'annonça inopinément au
milieu de la nuit du 4 au 5 septembre. On dut renoncer à faire transporter la jeune femme dans la maison qui lui avait
été préparée ; la Mère de Chantal reçut elle-même son petit-fils à son arrivée en ce monde, et, pressée par l'urgente
nécessité, lui donna sans retard le baptême ; « apres quoy, » dit la Mère de Chaugy (ibid.), « ce pauvre petit tourna
aussy tost les yeux vers son tumbeau quil les heut ouvers pour voir la lumiere du monde, expirant presque aussy tost
quil commença a respirer. »
68/346

7.9 Page 69

▲back to top
MCCCXLVIII. A la même (Fragment inédit). Visite différée.
Annecy, 5 septembre 1617 271.
Ma tres chere Mere,
J'ay esté sur le point de vous aller [voir] et dire la [70] Messe en vostre eglise ; mais ce
qu'on m'a dit [du] mauvais chemin m'a arresté, outre que j'ay quelque [opinion] que je ny doive
pas aller encor maintenant. Pour272
Revu sur l'Autographe conservé à la Visitation de Fribourg.
_____
MCCCXLIX. A M. Laurent Scotto273 (Inédite). Un bénéfice prêt
à vaquer.
Annecy, 7 septembre 1617.
Illustre et molto Reverendo Signor,
Illustre et très Révérend Seigneur,
In fretta, con queste quattro righe, dico
a V. S. che il signor Nicolò Clerico274 non ha
mai voluto resignar la capella275, nè alcun altro
beneficio, quantumque egli sia un pezzo fa
ammalato. Per questo, V. S. farà bene di
prevalersi del tempo et procurar di haver la
nominatione de quelli che han il juspatronatus,
perchè li medici [71] certificano che ben presto
detto signor Nicolò morirà276. D'il che, non
havendo potuto far meglio, ho pensato di dover
dar aviso a V. S., alla quale io son con tutto il
cuore,
Affettionatissimo servitore et fratello,
FRANCO, Vescovo di Geneva.
In Annessi, alli 7 di Settembre 1617.
All' Illustre et molto Rdo Sigr,
Il Sigr Lorenzo Scotto,
Capellano di S. A.
Par ces quatre lignes, je dis en hâte à
Votre Seigneurie que M. Nicolas Clerc n'a
jamais voulu résigner la chapelle ni aucun
autre bénéfice, quoiqu'il soit malade depuis
longtemps. C'est pourquoi vous ferez très bien
de profiter du temps et de tâcher d'en obtenir la
nomination par ceux qui ont le droit de
patronage, car les [71] médecins assurent que
M. Nicolas mourra bientôt. Aussi, n'ayant pu
mieux faire, j'ai pensé devoir en avertir Votre
Seigneurie, à qui je suis de tout cœur,
Très affectionné serviteur et frère,
FRANÇOIS, Evêque de Genève.
Annecy, 7 septembre 1617.
A l'Illustre et très Révérend Seigneur,
M. Laurent Scotto, Chapelain de Son Altesse.
271 L'écriture, le format du papier, indiquent comme très probable l'année 1617, et ces lignes semblent faire suite au
billet précédent. Elles seraient donc de la matinée du 5 septembre.
272 L'Autographe a été mutilé.
273 Voir le tome précédent, note (996), p. 292.
274 Voir tome XI, note (769), p. 345.
275 Le mourant était bénéficier de la chapelle de Notre-Dame et de saint Jean-Baptiste dans l'église de Saint-Nicolas
de Villa-en-Michaille, et de celle du Saint-Esprit de l'église de Saint-Félix dont il était aussi curé. Par son testament,
du 4 septembre, il désignait Claude Clerc pour recteur de la première ; la seconde fut attribuée à Philibert Hudry, le 2
octobre, sur présentation des syndics. (R. E.) C'est peut-être de celle-ci dont parle le Saint.
276 Il dut mourir avant le 21 septembre, date de l'acte de présentation de Philibert Hudry par les syndics.
69/346

7.10 Page 70

▲back to top
Revu sur l'Autographe conservé à Milan,
Archives du prince Trivulzio.
_____
MCCCL. A Madame de Montfort. Nouveau deuil et nouvelle
douleur. Saintes dispositions de la baronne de Thorens à son
lit de mort.
Annecy, 10 septembre 1617.
Madame ma tres chere Cousine,
Nous n'avions encor achevé nos plaintes pour la perte que nous avions faite en Piemont277,
que voyci la seconde arrivee, laquelle, je vous asseure, nous est infiniment [72] sensible, cette
chere ame ayant tellement vescu parmi nous, qu'elle nous avoit rendus tous parfaitement siens,
mais moy plus particulierement, qu'elle regardoit avec un amour et honneur filial ; et puis, le
contrecoup receu par l'affliction de sa digne mere donne surcroist a nostre desplaysir.
Mais pourtant, a l'imitation de cette defunte, nous embrassons, aymons et adorons la
volonté de Dieu, avec toute sousmission de tout nostre cœur, car c'estoyent presque ses dernieres
paroles ; vous asseurant que jamais je n'ay veu un trespas si saint que celuy de cette fille, quoy
qu'elle n'eust que cinq heures pour le faire278.
Je vous remercie cependant humblement, et M. de Montfort, mon cousin279, de l'honneur
de vostre souvenance, et suis a jamais,
Madame ma Cousine,
Vostre tres humble cousin et serviteur,
FRANCS, E. de Geneve.
Le 10 septembre 1617. [73]
_____
277 La perte de Bernard de Sales. (Voir ci-dessus, Lettres MCCCXV-MCCCXVIII.)
278 Marie-Aimée de Chantal ne survécut que deux jours à son fils (voir ci-dessus, notes (269), (270), p. 70). Sur les
huit heures du soir, le 6 septembre, le médecin jugea qu'elle n'avait plus que trois ou quatre heures de vie ; François
de Sales immédiatement averti, accourut au monastère, accompagné de M. de Boisy, son frère, et de quelques
ecclésiastiques, et la trouva au sortir d'une syncope, le corps défaillant, mais l'âme toujours forte, présente à elle-
même, et croissant de minute en minute, pourrait-on dire, dans la plus haute perfection. Dieu, selon les propres paroles
de la mourante, mettait lui-même la main à cette sainte besogne ! Elle reçut les Sacrements de Pénitence et
d'Eucharistie ; puis, s'adressant à l'Evêque et à sa bonne mère, les supplia humblement de lui donner l'habit de la
Congrégation. Sa résolution avait été invariable de se donner à Dieu dès la mort de son mari, et celle de son enfant,
achevant de la détacher des choses de la terre, venait de ranimer ses désirs. Ils furent exaucés ; novice à neuf heures,
elle fut professe à dix, prononçant les trois vœux de religion lorsque son saint beau-frère lui eut administré l'Extrême-
Onction. « Les larmes de tous les assistans ne l'étonnerent point, » raconte l'annaliste de l'Ordre, « ses douleurs
extremes n'ébranlerent point sa constance... A deux heures apres minuit, elle dit fortement et doucement : Ah !
voicy la mort,... elle saisit mon cœur ; mais mon Jesus en est saisi le premier... — Et prononçant trois fois le sacré
nom de Jesus... elle expira, élevant ses yeux au ciel où son ame s'en alloit. » Elle avait dix-neuf ans, deux mois et six
jours. (Voir sa Vie par la Mère de Chaugy, dans Les Vies de VII Religieuses de l'Ordre de la Visitation Sainte Marie.
Annessy. 1659.)
279 Le mari de la destinataire (voir tome XVI, note (221), p. 60).
70/346

8 Pages 71-80

▲back to top

8.1 Page 71

▲back to top
MCCCLI. A un gentilhomme (Fragment). Sainte mort de la
baronne de Thorens.
Annecy, vers le 12 septembre 1617 280.
………………………………………………………………………………………………
Il a pleu encor, ces jours passés, a Dieu de me visiter en nostre mayson, retirant a soy nostre
nouvelle vefve, ma seur de Thorens, femme des plus sages, vertueuses et aymables qu'on eust sceu
desirer. Il m'estoit advis que mon frere ne fust pas du tout mort tandis que cette femme vivoit. Elle
s'estoit vouee a la Visitation des l'instant de sa viduité et avoit des-ja fait ce projet au despart de
son mari ; et Dieu luy a fait la grace qu'elle est morte en cette mayson, d'une mort marquee de
sainteté extraordinaire ; elle demanda l'habit et fit les vœux avant que de mourir.
Monsieur, il me fait grand bien de vous dire mes douleurs, puisque vous me faites l'honneur
de me vouloir du bien
Revu sur le texte inséré dans la Vie manuscrite de Marie-Aimée de Rabutin-Chantal, baronne de
Thorens, conservée à la Visitation d'Annecy. [74]
_____
280 Quel est le destinataire de ces lignes ? La Mère de Chaugy, qui nous les a conservées, dit seulement : « Nous avons
treuvé escript de la main de nostre B. P. ce qui suit, dans une lettre a un seigneur, qui n'est pas imprimee. » L'absence
du nom de « frere » fait exclure Foras et Milletot, tandis que les rapports récemment renouvelés avec le marquis de
Lullin (voir plus haut, Lettre MCCCXXXV, p. 53) pourraient faire songer à lui.
La date se déduit de celle de la mort de la jeune Baronne, arrivée « ces jours passés, » 7 septembre.
71/346

8.2 Page 72

▲back to top
MCCCLII. A la Mère de Bréchard, Supérieure de la Visitation
de Moulins281 (Fragment). Suprême transformation d'une âme.
« Un amour infiniment plus que fraternel. »
Annecy, vers le 12 septembre 1617.
……………………………………………………………………………………………………...
Au reste, que dires vous de nos afflictions domestiques ? Ce n'est pas l'aymable belleseur
de Thorens que vous avies veuë, c'est une seur toute autre que nous avons veu trespasser ces
derniers jours ; car, des un an en ça, elle estoit tellement perfectionnee qu'elle n'estoit plus
connoissable, mais sur tout despuis sa viduité, qu'elle s'estoit voüee a la Visitation. Aussi, mon
Dieu, quelle fin a elle faite ! certes, la plus sainte, la plus suave et la plus aymable qu'il est possible
de s'imaginer. Non, je la cherissois d'un amour infiniment plus que fraternel ; mais, ainsy qu'il a
pleu au Seigneur, ainsy doit il estre fait : son saint nom soit beni282 ! Amen. [75]
……………………………………………………………………………………………………...
_____
MCCCLIII. A la Mère Favre, Supérieure de la Visitation de
Lyon. Une baronne qui promettait de devenir une autre Mère de
Chantal. Sa mort douloureuse et sainte.
Annecy, 12 septembre 1617.
Vous vous imagineres bien de quelle sorte nous avons esté touchés ces jours passés, ma
tres chere Fille. Ce n'est pas la madame de Thorens que vous aves veuë, quoy que celle-la fust fort
aymable : c'est une madame de Thorens toute dediee a Dieu, toute relevee au desir de ne vivre qu'a
Dieu, toute pleine de clarté es choses spirituelles et de la connoissance de Dieu et de soy mesme,
et telle que l'on pouvoit esperer que dans peu de tems elle seroit une autre nostre Mere283.
Je ne vous diray rien de sa fin tressainte ; on vous l'escrira de chez nos Seurs. Entre ceux
qui la virent en cette derniere maladie, il y en eut qui, le jour suivant, me vindrent demander congé
de l'invoquer, et d'autres qui vindrent renouveller leurs bons propos, esmeus du spectacle de cette
mort toute pleine de douleurs extremes, et douleurs toutes parsemees de : « VIVE JESUS !
Seigneur Jesus, tirés moy284 a vous. O Passion et Mort de mon Jesus, je vous embrasse, je vous
ayme, je vous adore, vous estes mon esperance. VIVE JESUS et MARIE, que j'ayme plus que ma
vie ! » et semblables, prononcés si suavement que merveilles.
281 D'après l'édition de 1626, la lettre suivante s'adresse à la Mère Favre ; dans celle de 1641, le présent fragment
terminait un texte également attribué à la Supérieure de la Visitation de Lyon, mais composé de plusieurs pièces. (Voir
le tome précédent, Lettre MCLXVIII et les notes (554), (556), p. 150, et (558), p. 151.) Le sujet étant identique et les
termes presque semblables, on peut supposer que ces lignes ont été écrites plutôt à une destinataire différente, très
probablement à la Mère de Bréchard qui avait tant connu, elle aussi, la baronne de Thorens.
282 Job, I, 21.
283 Le saint Evêque avait, en effet, fondé de grandes espérances sur la jeune Baronne, et, « la regardant comme une
ame choisie, » dépose Michel Favre (Process. remiss. Gebenn. (I). ad art. 39), il « jetta sa mire sur elle pour la façonner
et rendre capable d'ayder a l'advancement spirituel des ames en l'Ordre de la Visitation. » Et les Sœurs, dit la Mère de
Chaugy (ouvrage cité, note (278). p. 73), « esperoient que lors que Dieu retireroit leur sainte Paule pour la couronner
de gloire, cette aymable Eustochium demeureroit pour leur consolation et pour leur conduite. »
284 Cant., I, 3.
72/346

8.3 Page 73

▲back to top
Or sus, ma tres chere Fille, il m'a fait grand bien de [76] vous dire ces quatre motz qui sont
un eschantillon de la pieté de cette mort. Cette chere ame est trespassee Seur et Fille de la Visitation
tout ensemble.
Je suis infiniment vostre.
FRANCS, E. de Geneve.
Le 12 septembre ….
Revu sur le texte inséré dans la Vie manuscrite de Marie-Airnée Je Rabutin-Chantal, baronne de
Thorens. conservée à la Visitation d'Annecy.
_____
MCCCLIV. Au Cardinal Robert Bellarmin285. Un heureux
transfuge de l'hérésie. Pour lui, le Saint réclame le paiement
d'une pension promise. Souhait ardent d'avoir, de la main du
savant Cardinal, l'explication de quelque Epître de saint Paul.
Les princes en guerre et le Pacificateur à venir.
Annecy, 12 septembre 1017.
Illustrissime et Reverendissime
Domine mihi semper in Christo colendissime,
Dominus Ludovicus Desplans286, in
media civitate Gebennensis natus et in medio
populi corda et labia polluta habentis287
educatus, ante multos annos conversus ad
Christum, Pastorem et Episcopum animarum
nostrarum288, ejusdem Sponsæ suavissimæ
Ecclesiæ nimirum catholicæ nomen dedit, vel
potius reddidit, [77] illiusque communioni
restitutus est, idque Romæ, Beatissimo P. Papa
Clemente octavo ita jubente ; postea vero a
Sanctissimo D. Papa Paulo, quem Deus
conservet, canonicatum hujus nostræ Ecclesiæ
Gebennensis accepit, una cum pensione
quadam, quæ tantisper ejus paupertati
utcumque sustentandæ sufficeret. Nam quod
ad canonicatum attinet, nemo sane,
quantumvis parcus, ex ejus fructibus vivere
posset, quippe qui ad summum 40 scutorum
vix unquam ascendunt, et quam sæpissime, ne
quidem ad summam 25 aureorum. Nunc vero,
cum pensione illa frui minime possit, vix est,
ac ne vix quidem, ut possit diutius vivere,
Illustrissime et Révérendissime
Seigneur, objet de ma constante vénération
dans le Christ,
M. Louis Desplans, né en pleine cité de
Genève, a été élevé au milieu d'un peuple au
cœur et aux lèvres souillés. Mais il y a de
longues années déjà que, converti au Christ,
Evêque et Pasteur de nos âmes, il est venu, ou
plutôt revenu, à sa très douce Epouse, l'Eglise
catholique, dans la communion de laquelle il a
été rétabli à [77] Rome même, et par l'ordre du
bienheureux Pontife Clément VIII. Plus tard, il
reçut de notre Très Saint-Père le Pape Paul V
que Dieu conserve ! un canonicat de
notre Eglise de Genève, ainsi qu'une pension
qui devait tant bien que mal subvenir à sa
pauvreté ; car, en ce qui concerne le canonicat,
personne assurément, si économe soit-il, ne
peut vivre de ses revenus : à peine s'élèvent-ils
a quarante écus, et encore, le plus souvent, ils
n'atteignent pas même vingt-cinq pièces d'or.
Mais voici que son titulaire ne peut en aucune
façon toucher la pension. Dans ces conditions,
il lui est désormais difficile, ou plutôt
285 Voir le tome précédent, note (830), p. 238.
286 Voir ibid., note (707), p. 202.
287 Is., VI, 5.
288 I Petri, II, ult.
73/346

8.4 Page 74

▲back to top
quandoquidem neque paternis bonis, neque
aliis ecclesiasticis gaudet. Quare iterum
recurrit ad fontem Apostolicum, ut vel ei
pensio illa stabilis et firma, ac fructuosa
reddatur, vel alia pensio aliudve beneficium illi
conferatur ; cumque expetiverit, ut eum
Illustrissimæ Dominationis Vestræ
commendarem, id quam libentissime facio, et
humillime289.
Et hanc occasionem nactus, eidem
plurimum gratulor de ultimis duobus libris
piissimis quibus fidelium mentes [78] et
recreavit et ad meliorem frugem excitavit290.
Sed adhuc unum verbum loquar ad domimim
meum291. Quam vellem, Deus bone ! quam
vellent etiam plerique viri cordati, ut si non
omnes, saltem unam aut alteram etiam ex
brevissimis Epistolis Sancti Pauli, tribus illis
sensibus quos Dominatio Vestra Illustrissima
notat, historico, dogmatico, mystico,
explicatam haberemus ; specimen videlicet et
exemplar cæterarum similiter explicandarum.
Sufficeret si vel illam brevem ad Titum, imo
ad Philemonem, vel si unum aut alterum caput
aliarum, ita expositas haberemus292. Nam
omnes petere aut [79] expectare ab
illustrissima manu Dominationis Vestræ
sequum sane ac justum non est, quandoquidem
illam in extrema hac senectute, post tam
multos pro re Christiana inde jam ab ineunte
propemodum ætate exantlatos labores, tanto
operi perficiendo, non animi (Deo gratias), sed
corporis viribus imparem esse satis suspicari
licet. Sane, methodum hanc aperire et
tyronibus etiam vix sequentibus præire in hoc
campo, operæ pretium foret.
Interim autem, dum id summopere
expeto, a Deo optimo maximo supplex peto ut
impossible de vivre, étant par ailleurs privé de
patrimoine et de tout autre bénéfice
ecclésiastique. C'est pourquoi il a de nouveau
recours à la source Apostolique pour obtenir
que cette pension lui soit confirmée et les
revenus assurés, ou bien qu'on lui octroie
quelque autre pension ou bénéfice. A sa prière,
je le recommande très volontiers et en toute
humilité à Votre Seigneurie Illustrissime.
Je saisis cette occasion pour vous
féliciter vivement de vos deux derniers livres,
pleins de piété, par lesquels vous avez ranimé
le cœur [78] des fidèles et les avez excités à
poursuivre une perfection plus haute. Mais je
dirai encore un mot à mon seigneur. Combien
je voudrais, ô Dieu de bonté ! combien
souhaiteraient aussi la plupart des gens de bien,
que nous eussions, sinon toutes, au moins l'une
ou l'autre des Epîtres de saint Paul, fût-ce des
plus courtes, expliquée au triple sens
historique, dogmatique et mystique, que
signale Votre Illustrissime Seigneurie. Ce
serait un spécimen et un type pour un
commentaire analogue des autres Epîtres. Il
suffirait d'avoir, exposée d'après cette
méthode, l'Epître si brève à Tite, ou même
celle à Philémon, ou encore tel ou tel chapitre
de quelque autre. Demander l'explication de
toutes, l'attendre de la main illustre de Votre
[79] Seigneurie, serait indiscret et excessif.
N'est-il pas permis de craindre, à un âge si
avancé, après tant de labeurs supportés dès la
jeunesse pour les intérêts de la chrétienté,
qu'une pareille œuvre ne soit au-dessus, non de
la vigueur de votre esprit, grâce à Dieu, mais
de vos forces corporelles ? Frayer cette voie
nouvelle dans le champ des Ecritures, à la tête
de jeunes recrues à peine en état de vous
suivre, serait assurément une œuvre très utile.
289 Ce premier alinéa est inédit.
290 Le Saint parle ici du deuxième et du troisième opuscule de Bellarmin : 1. De Æterna felicitate Sanctorum, libri V,
ad Illustrissimum et Reverendissimum D. Cardinalem Farnesium. Imprimé pour la première fois à Anvers en 1616,
cet ouvrage eut ensuite neuf ou dix autres éditions et fut traduit en diverses langues. 2. De Gemitu columbæ, sive
de bono lacrymarum, libri III, auctore Roberto S. R. E. Card. Bellarmino, e Soc. Jesu, ad ipsam eamdem Religionem
suam. Comme pour le précédent, la première édition, faite à Rome en 1617, fut suivie de dix à douze autres et d'un
bon nombre de traductions La traduction française parut dès 1617, « a Paris, chez Laurent Sonnius, ruë S. Jacques, au
Compas d'or, » avec une approbation donnée par les Frères Mineurs.
François de Sales, en recevant Le Gémissement de la colombe, ne put se taire de faire l'éloge du grand
Cardinal : « Ha ! » dit-il. « innocente colombe, vous gemissez en ce siecle ; mais dans le Ciel et dans les pertuis de la
pierre et dans la caverne de la masure, vous mettrez fin a vos travaux, et ferez sonner vostre voix aux oreilles du
celeste Espoux, et monstrerez vostre face ; car vostre voix est douce et la face de vostre ame est tres-belle. » (Charles-
Auguste, Histoire, etc., liv. IX.)
291 Gen., XVIII, 27.
292 Voir à l'Appendice I, le seul fragment de la réponse du Cardinal qui nous soit parvenu.
74/346

8.5 Page 75

▲back to top
Dominationem Vestram Illustrissimam quam
En attendant, tout en formulant ce vœu
diutissime et felicissime servet incolumem. de tout cœur, je supplie le Dieu très bon et très
Dominationis Vestræ Illustrissimæ et grand de garder une vie florissante le plus
Reverendissimæ,
longtemps possible à Votre Seigneurie
Addictissimus, obsequentissimus et Illustrissime et Révérendissime. dont je suis
humillimus servus, Le très dévoué, très obéissant et très humble
FRANCISCUS,. Episcopus Gebennensis.
serviteur,
Annecii Gebennensium, 12 Septembris
FRANÇOIS, Evêque de Genève.
1617.
Annecy en Genevois, 12 septembre
1617.
Heu, Illustrissime Domine, quot et
qualia impendent capitibus nostris mala, nisi
Hélas ! Illustre Seigneur, combien de
fiat pax in virtute Domini293 [80] Dei maux, et quels maux sont suspendus sur nos
exercituum294 ! Utinam esset Principibus têtes, si la paix ne se conclut par la vertu du
catholicis cor unum295 ! sed divisum est cor Seigneur, Dieu des armées ! Plût au Ciel que
eorum, nunc interibunt296. Ubi est pacem les princes catholiques [80] n'eussent qu'un
faciens297 ? Etiam, veni, Domine Jesu298 !
seul cœur ! Mais leur cœur est divisé, donc ils
périront ! Où est-il le Pacificateur ? Oui,
Revu sur une copie conservée à Rome, venez, Seigneur Jésus !
Archives du Postulateur général des Causes
des VVbles et BBx S. J., dossier Bellarmin,
carton 4º.
_____
MCCCLV. Aux Religieux du Monastère de Sixt299 (Inédite).
Encouragement à la réforme.
Annecy, 12 séptembre 1617.
Mes Reverens Freres,
Ayant sceu par monsieur le Prieur, monsieur Jean Moccand300, la bonne disposition en
laquelle vous [vous] treuves pour remettre vostre Monastere et Congregation au train de l'ancienne
pieté de vostre Ordre, j'en ay loué Dieu de tout mon cœur et m'en suis grandement res-jouy, [81]
comme de chose qui importe extremement au service de Dieu, et a vostre salut et consolation, et a
l'edification des fideles.
293 Ps. CXXI, 7.
294 I Reg., XV, et passim.
295 Act., IV, 32.
296 Oseæ, X, 2.
297 Is., XLV, 7.
298 Apoc., ult., 20.
299 Les Religieux de l'abbaye de Sixt dont les noms nous sont connus étaient alors : Jean Moccand, prieur, Bernard de
Passier, un autre Jean Moccand, François Biord, Nicolas Desfayet, Daniel de Lucinge, Bernard Rannaud, Bernard et
Claude Joenoz, Claude Moccand, Claude de Nambride, Pierre Puget, peut-être Jean de Passier. (Sur le Monastère,
voir tome XI, note (716), p. 316.)
300 Originaire de Sixt, Jean Moccand était déjà prieur en 1603 (voir tome XII, note (526), p. 226) ; il le fut jusqu'à sa
mort, arrivée le 3 juin 1627. Zélé pour la réforme, il seconda de tout son pouvoir les efforts du saint Evêque, malgré
les difficultés soulevées sans cesse par l'abbé commendataire Jacques de Mouxy. (Voir tome XIII, note (462), p. 169.)
Cependant les obstacles furent longs à surmonte r ; huit mois seulement avant sa mort, le fervent Prieur put faire sa
profession solennelle suivant les Constitutions données par François de Sales. (D'après l'Obituaire de Sixt, Bibl. publ.
de Genève, Manuscrits, suppl. 388.)
75/346

8.6 Page 76

▲back to top
C'est pourquoy je vous exhorte de toutes mes forces de prendre au plus tost entre vous la
resolution de commencer ; pour a quoy vous servir et assister, je vous envoyeray homme bien
instruit et de bonne qualité, quand vous me feres sçavoir qu'il en sera tems, et moy mesme, s'il est
requis, je m'y achemineray tres volontier, et m'estimeray bien heureux si je puis estre utile a faire
reuscir un dessein si honnorable et pieux301. Prenes courage, Dieu sera parmi vous, qui fera
l'œuvre, si vous l'en supplies ; il ne vous a pas donné cette bonne disposition, qu'il ne veuille vous
acheminer a la perfection de l'œuvre.
J'attendray cependant de vos nouvelles, et vous desirant toute sainte consolation, je
demeureray, mes Reverens Freres,
Vostre plus humble et tres affectionné
frere en Nostre Seigneur,
FRANÇS E. de Geneve.
Annessi, le XII septembre 1617.
A Messieurs
Messieurs les Reverens Chanoynes reguliers
de St Augustin et Chapitre du Monastere de Sixt.
Revu sur le texte inséré dans le Ier Procès de Canonisation. [82]
_____
301 Les exhortations du Saint ne furent pas vaines ; le 20 décembre suivant, « les sieurs Prieur, Religieux et Chanoines
reguliers de ce Monastaire... firent promesse et convention de vivre des lors en communion, remettant a cest effect
touttes leurs prebandes, vestiaires et autres droictz et devoirs en commun. Lequel acte fut appreuvé et emologué par
le Bien-heureux, » le 23 janvier 1618. (Dép. de Jean Moccand, prieur en 1632, Process. remiss. Gebenn. (I), ad art.
43.) Au mois de septembre, François de Sales venait lui-même à Sixt ; il y séjourna trois jours pour dresser les
Constitutions et règlements qu'il jugea nécessaires ; toutefois, le succès complet de la réforme ne fut obtenu que
plusieurs années après la mort du saint Evêque.
76/346

8.7 Page 77

▲back to top
MCCCLVI. A un gentilhomme. Quelques points qui doivent
servir à justifier les Religieuses de la Visitation. — Les Sœurs
ne manquent ni aux lois civiles, ni aux lois ecclésiastiques dans
la construction du monastère.
Annecy, vers 10-15 septembre 1617 302.
Monsieur,
Je prens la confiance en vostre charité de vous prier que les pointz suivans soyent bien
remonstrés, en sorte que, s'il est possible, l'audiencier les escrive303.
1. Que les Dames de la Visitation ayant acheté au veu et sceu de toute la ville la mayson
en laquelle elles sont [83] a present304, pour y servir Dieu, et s'y estant logees sans opposition ni
contradiction de personne, ni mesme des Peres de Saint Dominique, ains au contraire le Reverend
Pere de Bollo, Superieur de l'Ordre305, ayant favorisé leur Congregation et leur sejour en ce lieu la
de plusieurs saintes exhortations faites par luy en leur oratoire, elles n'avoyent nul sujet de penser
que lesditz Peres eussent pris en si mauvaise part leur demeure en ce quartier.
2. Que despuis, ayant pleu a Dieu de donner accroissement a leur Congregation, elles se
sont treuvees en necessité d'eslargir leur habitation et s'accommoder des maysons voysines, par
traittés legitimes faitz avec les possesseurs d'icelles306 et, par mesme moyen, elles se sont treuvees
en necessité de bastir et former leur mayson en monastere pour pouvoir observer la clausure et la
bienseance de l'habitation307 …… Et partant, ayant besoin d'avancer leur bastiment sur le canal, il
a pleu a la pieté de Sa Grandeur308, a laquelle il appartient, de la leur accorder, ainsy qu'il appert
302 Le destinataire doit être non pas M. de Foras, comme l'a supposé Migne, mais un membre du Conseil de Genevois
; peut-être l'un des collatéraux, Claude de Quoex ou Barthélemy Flocard. On pourrait encore songer à l'avocat Michel
Bouvard, très dévoué au Saint et aux intérêts des Religieuses de sa Congrégation.
Migne date cette lettre de 1614 ; mais la mention des traités faits avec les possesseurs des maisons avoisinant
le monastère de la Visitation, oblige à la reculer jusqu'en 1617, et le début du procès avec les PP. Dominicains indique
la première quinzaine de septembre. (Voir ci-dessus, note (242), p. 62, et ci-après, note (315), p. 86.)
303 Serge Saget, originaire d'Annemasse, fils de Jean Saget et de Roberte de Sales, occupait alors la charge d'«
audiencier au magnificque Conseil de Genevois. » Tout jeune homme, il avait connu François de Sales durant sa
vaillante campagne du Chablais et l'avait vu, dans la maison même de son père, composer un traité pour la défense de
la sainte Croix. Bientôt après, devenu secrétaire d'Antoine Favre. il accompagne le Prévôt et son ami dans une des
visites à Théodore de Bèze. A la suite de son maître, il est à Rome en 1599, lorsque le futur coadjuteur de Mgr de
Granier subit son mémorable examen devant Clément VIII ; et tandis que cet évènement fait le sujet des conversations
de toute la ville, Serge est frappé surtout de la modestie du Saint en une telle rencontre. Du service de Favre, Saget
passe à celui du duc de Nemours, et en cette qualité se trouve à Paris pendant le séjour qu'y fit le Serviteur de Dieu en
1602. Enfin, il est avec lui encore à Dijon (1604). le suit dans ses voyages, et peut assurer après sa mort qu'il a « heu
l'honneur de le cognoistre et frequenter durant l'espace de trente cinq ans. » (Process. remiss. Gebenn. (I), sa
déposition, passim.) Serge Saget avait acquis, le 1er mai 1607, le droit de bourgeoisie à Annecy, pour la somme de «
20 ducatons et deux sellotz. » (Reg. des Délib. municip.)
304 La maison Nicollin avait été achetée le 14 juin 1612 (voir tome XV, note (704), p. 245) ; les Sœurs ne s'y
transportèrent que le 30 octobre suivant (ibid., note (803), p. 282).
305 Pierre de Bollo ou Dubouloz (voir tome XIV, note (149), p. 50).
306 Le procureur fiscal Barfelly et la veuve Lachenal. (Voir ci-dessus, p. 62, la Lettre MCCCXLII et les notes qui
l'accompagnent.)
307 D'après Migne, quelques mots de l'original ont été rongés ici par le temps. Plus loin, nous rétablissons entre crochets
ceux que le sens permet de supposer, laissant les points de suspension là où la chose devient impossible.
308 Le duc de Nemours.
77/346

8.8 Page 78

▲back to top
par ses patentes309 ; et ce, les gens de Sa Grandeur, Messieurs de cette ville, et le Reverend Pere
nostre Maistre le Prieur310 ouÿs en toutes les remonstrances qu'il leur pleut de faire311. [84]
3. Qu'elles sont extremement marries de ne pouvoir eslever leur bastiment sans donner
quelque ombre au jardin desditz Peres : que si en cela elles donnent quelque nuisance, c'est a leur
regret et sans leur coulpe, puisque la necessite de leur edifice les contraint ; en sorte que si elles
font quelque incommodité, si ne leur font elles point de tort, estant des incommodités que les
voysins, par disposition de droit et la coustume generale des gens, doivent souffrir des voysins.
4. Que neanmoins, bien qu'en cela elles ne fassent rien que selon leur droit et avec legitime
authorité de Sa Grandeur et de l'Ordinaire du lieu, elles ont tousjours desiré pouvoir en quelque
façon accommoder leur necessité urgente de bastir en ce lieu la avec l'utilité desditz Reverens
Peres : ayant a ces fins supplié M. Rousselet312 et M. le President des Comptes313, et quelques
autres personnes d'honneur, de vouloir moyenner quelque accommodement qui peust contenter
lesditz Peres ; s'offrant, icelles Dames, de faire tout ce qu'il plairoit auxditz seigneurs Rousselet et
President, ou mesme a telz autres qu'on choisiroit, de marquer et ordonner. A quoy elles
perseverent, et prient lesditz Reverens Peres d'en venir a expedient amiable par les voyes qui seront
advisees plus propres ; et ce, en consideration de la charité religieuse qui doit regner entre des
personnes qui, par commune vocation, ont quitté le monde pour servir Dieu, lesquelles se pouvant
entr'ayder, le doivent faire, et non pas s'empescher l'une l'autre.
5. Qu'en ce qui regarde la bienseance et la juste distance qui doit estre entre les monasteres
des femmes et ceux des hommes, elles s'en sont rapportees au jugement du Reverendissime
Evesque de ce lieu, lequel est chargé par les Canons et par le Concile de Trente314 de prouvoir a
tout ce qui regarde la clausure et asseurance des [85] monasteres des filles. De sorte qu'iceluy,
toutes choses considerees, les ayant authorisees en ce bastiment, elles sont hors de tout reproche
et en droit de bastir en ce lieu la ; lequel, au reste, n'est ni proche ni en veuë du monastere desditz
Reverens Peres, ains seulement d'un jardin qui leur appartient, escarté de leur monastere et hors
l'enclos d'iceluy, lequel, avant que la Congregation de la Visitation fust, estoit exposé a la veuë
des femmes et filles, et au bruit [de celles qui] faisoyent la lessive, [là où] maintenant il semble
[que] la condition desditz Reverens [Pères est améliorée,] puisque lesdites Dames……. [et] que
les Seurs ne regarderont ni ne seront aucunement [regardées.] Mais sur tout [elles auraient prié
lesdits] Reverens Peres, avant que de passer aux ameres et peu edificatives poursuites de proces,
de convenir de gens d'honneur et de qualité qui fissent essay d'accommoder la necessité qu'elles
ont de bastir au lieu que Sa Grandeur leur a accordé, avec l'utilité du monastere de Saint Dominique
auquel elles desirent porter respect et honneur315. [86]
309 Ces patentes avaient été données le 20 août 1614 ; elles autorisaient les Religieuses de la Visitation à « bastir sur
la riviere de Thyouz, en delaissant quatorze piedz de roy de vuyde. » (Reg. des Délib. municip., 28 août 1617.)
310 Le P. Bernardin de Charpenne (voir tome XVI, note (773), p. 239).
311 En effet, tandis que le duc de Nemours se trouvait à Annecy, en 1614, fatigué des poursuites et réclamations qui
lui étaient faites, « tant par des reguliers ecclesiastiques que personnes laïcques, » au sujet de l'établissement dans la
ville du nouveau couvent, il ordonna « que la cause feust traictée en sa presence. » L'Evêque s'y rendit avec ses
adversaires ; « et appres que l'affaire feust discutée et disputée de part et d'aultre, et sur les puissantes raisons proposées
par le Bienheureux, » Henri de Nemours « imposa silence a ses officiers » et leur commanda « de ne plus troubler ny
molester lesdictes Religieuses au parachevement du bastiment qu'elles avoient commencé. » (Dép. de Georges
Rolland, Process. remiss. Gebenn. (I). ad art. 41.)
312 Guillaume Rousselet, pour lors secrétaire du duc de Nemours. Il sera plus tard destinataire.
313 Jacques Pelard, seigneur du Noyret (voir tome XVI, note (109), p. 23).
314 Sess. XXV, de Regular., c. V.
315 Dès 1614, il avait été question de l'échange de terrains entre le couvent de Saint-Dominique, celui de la Visitation
et le collège des Barnabites (voir tome XVI, p. 226, Lettre CMXCIX, et note (730), p. 227) ; depuis, rien n'était conclu,
et la construction du monastère s'était poursuivie au milieu de contradictions grandissantes (voir ci-dessus, note (56),
p. 6, et Lettre MCCCX). Le 28 août 1617, la Ville constate que les Religieuses « ont continué ung bastiment » sur le
canal, « ne delaissant pour vuyde que environ douze piedz, » au lieu des quatorze marqués par la convention du 28
avril 1614 (cf. ci-dessus, note (309), p. 84) ; ce qui « a esté veriffié... en presence de Illustre et Reverendissime seigr
Monseigneur François de Sales... ; lesquelles Dames ont confessé librement d'avoir usurpé quelque chose au par dessus
le consentement presté par la Ville, et neanmoins il a esté promis de rendre resolution... Partant, plaira adviser si l'on
s'opposera ou non. » Les syndics furent tirés de leur hésitation par l'arrivée du « R. P. Frere Bernardin de Charpenne,
78/346

8.9 Page 79

▲back to top
Monsieur, je laisse a part les procedures faites, les cautions prestees et ce qui resuite des
pieces ; mais ayant veu les Canons, les Conciles et les elucidations du Concile de Trente316, il me
semble qu'elles doivent rejetter sur moy l'article de la bienseance, comme chose dont je suis chargé.
Et qu'il faut encor bien noter la difference qu'il y a entre le monastere et le jardin du monastere,
sur tout en cette occurrence en laquelle le jardin est hors de l'enclos du monastere et de sa propre
constitution, sujet a la veuë de tout le voysinage ; de sorte que l'on n'empire pas sa condition, ains
on l'ameliore, puisqu'on leur ostera la veuë des [femmes] qui seront la aux fenestres de……….
deront point la… [87]
_____
MCCCLVII. A Madame de la Fléchère. Visite au milieu d'un
appointement. L'avis de François de Sales au sujet des études
de Charles de la Fléchère.
Annecy, 15 septembre [1617 317.]
J'ay veu ce cher filz318, mais si peu que c'est presque ne l'avoir pas veu, mesme aujourdhuy
quil est venu tandis que j'estois en un appointement. Mays pourtant, je le voy plein de bon visage
et bien marqué. Je suis d'advis qu'il retourne a Lyon319, puisque il s'y porte si bien et quil est de si
bon naturel quil ne refuse pas l'estude auquel il commence a prendre goust, ainsy que son maistre320
m'a dit. Mays avant son retour nous aurons bien le contentement de le revoir, et vous aussi, ma
tres chere Fille, a qui je souhaite mille et mille benedictions, qui suis infiniment vostre et
Vostre tres humble serviteur, compere et Pere,
sans loysir.
XV septembre.
A Madame
Prieur au couvent de Saint-Dominique, accompagné de R. P. Frere Estienne Donnet, supprieur..., qui a dict quil a
principalement interest a ceste nouvelle construction, pour plusieurs raisons. » Ces raisons, le Prieur les exposait ce
jour même sur place, c'est-à-dire dans le jardin de son couvent où se transportèrent les magistrats d'Annecy. Il remontra
« comme le nouveau bastiment... de la Visitation est grandement prejudiciable audict couvent : » 1. par l'obstruction
partielle d'un courant d'eau ; 2. par le trop proche voisinage des deux monastères ; 3. par l'ombre projetée sur le jardin
des Pères qui devient ainsi « sterile et sans fruict. »
Le 6 septembre suivant, le Prieur convoque de nouveau les syndics dans son jardin où il a fait assembler
capitulairement ses Religieux, et là « denonce nouvelle œuvre » des Religieuses qui font construire une muraille « sur
ung fons... qui est de la commodité de Saint Dominique, » et représente les raisons déjà produites le 28 août. Les
syndics donnèrent « acte au R. P. Prieur... de ses remonstrances et requisitions... pour s'en servir ainsy que de raison,
» et promirent de les signifier « a la Rde Dame Superieure et aultres Rdes Dames et Religieuses de la Visitation dans
demain. » (Reg. des Délib. municip.) Malheureusement, la signification ne fut faite que le 9 ; c'était déjà trop tard, le
Prieur avait cité en justice la Mère de Chantal et ses Filles.
Le procès dura plusieurs mois. « MM. de Saint-Dominique... veulent absolument 1200 écus d'or pour le
morceau de place qui nous est nécessaire, » écrit la Sainte à la Mère de Bréchard (Lettres, vol. I, p. 275). On finit par
tomber d'accord pour 10000 florins et deux chandeliers d'argent qui en valaient près de 500. (Livre des contrats
permanents du 1er Monastère de la Visitation d'Annecy.)
316 Sess. XXV, de Regular., cc. V, VIII, etc., passim.
317 La copie de Turin ne porte pas de millésime. Nous proposons 1617, qui fut la seconde année des études de Charles
de la Fléchère à Lyon. Cependant, l'absence de toute allusion à la mort si récente de Marie-Aimée de Chantal peut
amener le doute ; il faudrait alors reculer la lettre jusqu'en 1620 ; en 1618 et 1619, le Saint n'était pas à Annecy le 15
septembre, et après 1620, le fils de Mme de la Fléchère étudiait à Avignon.
318 Charles de la Fléchère (voir tome XV, note (258), p. 86).
319 Voir ci-dessus, note (73), p. 9.
320 Serait-ce déjà M. Sappin qui, d'après une lettre du saint Evêque, était auprès de Charles de la Fléchère en 1621, et
quitta Lyon pour le rejoindre à Avignon ?
79/346

8.10 Page 80

▲back to top
Madame de la Fleschere.
A Rumilly.
Revu sur une copie déclarée authentique, conservée à Turin, Archives de l'Etat. [88]
_____
MCCCLVIII. A Sa Sainteté Paul V321 (Minute). L'Evêque de
Genève implore une dispense pour les pauvres Clarisses de son
diocèse. Son but est de leur faciliter l'observance de la Règle
et la vie de prière.
Annecy. 17 septembre 1617.
Beatissime Pater,
Très Saint-Père,
Extant in hac diæcesi Gebennensi duo
Monasteria Ordinis Sanctæ Claræ, quorum
unum ex civitate Gebennensi in civitatem
Annessiacensem322, alterum, ex oppido Orbensi
in oppidum Aquianense323, hæreticorum injuria
et violentia ante sexaginta annos expulsa,
secesserunt. Cumque Sorores dictorum
Monasteriorum, inter varias et frequentissimas
paupertatis et mendicitatis serumnas, vitam
hactenus utcumque traxerint et sustentaverint ;
nunc tamen, post tot hæreticorum incursiones,
ac diuturnorum bellorum clades, cum diæcesis
ista, miseranda paupertate vexata, illarum
mendicitati occurrere deinceps minime valeat ;
ad pedes Beatitudinis Vestræ humiliter [89]
prostratæ, illius providentiam Apostolicam
suramis votis orant, ut in posterum, per ejus
placitum et dispensationem, illis liceat prædia et
alia bona immobilia in communi possidere324,
quemadmodum cum aliis ejusdem Ordinis
Sororibus, Gratianopoli degentibus325,
Il y a dans ce diocèse de Genève deux
Monastères de l'Ordre de Sainte-Claire,
transférés, depuis plus de soixante ans, l'un de
la cité de Genève en celle d'Annecy, l'autre de
la ville d'Orbe en celle d'Evian, lorsque
l'injustice et la violence des hérétiques
chassèrent les Religieuses de leurs couvents.
Les Sœurs de ces Monastères ont pu, jusqu'à
ce jour, tant bien que mal, traîner et soutenir
leur vie au milieu d'épreuves diverses et
nombreuses, conséquence de la pauvreté et de
la mendicité. Mais désormais, ce diocèse,
cruellement appauvri par les fréquentes
incursions des hérétiques et les ravages de
longues guerres, ne peut plus répondre à leurs
demandes de [89] secours. Humblement
prosternées aux pieds de Votre Béatitude,
elles adressent à Votre providence
Apostolique les vœux les plus ardents pour
qu'elles puissent, sous son bon plaisir et avec
sa dispense, posséder en commun des biens
321 Voir tome XIII, note (220), p. 69.
322 Voir ibid., note (229), p. 74.
323 Voir tomes XI, note (674), p. 293, et XVII, note (1129), p. 338.
324 Le 19 janvier 1618, après une audience accordée par le Saint-Père au Cardinal Préfet de la Sacrée Congrégation
des Evêques et Réguliers, celle-ci concédait aux Clarisses du diocèse de Genève l'autorisation demandée. (Archiv. des
Ev. et Rég., Regesta (Moniales), vol. 1618.)
325 Jean d'Armagnac, gouverneur du Dauphiné au XVe siècle, à la prière instante de Jeanne Baile, fille d'un président
au Parlement de Grenoble, obtint pour cette ville, en 1469, du Pape Paul II, la Bulle de fondation d'un Monastère de
Religieuses sous la Règle de Sainte-Claire, selon la réforme de sainte Colette. Le puissant protecteur des Clarisses
étant mort, le projet fut ajourné. Jeanne Baile alla prendre le voile au couvent du même Ordre à Chambéry, et en revint
en 1478 pour commencer la maison de Grenoble. Elle y mourut en odeur de sainteté. Ce Monastère était encore dans
toute sa ferveur quand, en 1614, Paul V, par une Bulle du 4 novembre, lui accorda le pouvoir de recevoir des biens
meubles et immeubles et d'en jouir. Cette permission ne parut pas une faveur aux généreuses Filles de Sainte-Claire ;
elles n'en usèrent pas et gardèrent leur pauvreté comme leur plus cher trésor. Chassées de Grenoble à la Révolution,
80/346

9 Pages 81-90

▲back to top

9.1 Page 81

▲back to top
minusque egentibus, pro Apostolicæ Sedis fonds et autres immeubles. Cette dispense a
paterna charitate, dispensatum esse omnes probi déjà été accordée, à Grenoble, par la
rerum spiritualium æstimatores laudaverunt. paternelle charité du Saint-Siège, à d'autres
Sic enim fiet ut molestissimis Sœurs du même Ordre, moins pauvres que
anxietatibus animi, quæ in tanta rerum omnium celles-ci. Tous les justes appréciateurs des
inopia spiritum propemodum extinguunt, choses spirituelles ont loué cette mesure.
liberatæ et solutæ, alacriter in cæteris Regulis
En effet, libres et affranchies par ce
sui Ordinis adamussim servandis, ac Dei moyen des pénibles anxiétés qui, dans un si
laudibus [90] celebrandis, necnon pro Ecclesiæ grand dénûment de toutes choses, semblent
precibus fundendis, longe fœlicius, facilius et presque étouffer l'élément spirituel, elles se
attendus incumbant et perseverent.
rendront avec ardeur parfaites observatrices
………………………………………………… des autres règles de leur Ordre ; et, avec plus
F. E. Gebennensis. de [90] joie, de facilité, d'attention et de
Annessii Gebennensium, 17 Septembris persévérance, elles s'adonneront à célébrer les
1617.
louanges de Dieu et à prier pour l'Eglise.
………………………………………………
FRANÇOIS, Evêque de Genève.
Annecy en Genevois, 17 septembre
1617.
_____
MCCCLIX. Au Cardinal Robert Bellarmin (Minute). La misère
des Clarisses du diocèse de Genève. Ce qu'apprend
l'expérience sur la trop grande pauvreté des Monastères de
femmes. Sollicitude du Saint pour des Religieuses exemptes
de sa juridiction. Il dénonce des manquements aux décrets du
Concile de Trente.
Annecy, 17 septembre 1617.
Illustrissime et Reverendissime
Illustrissime et Révérendissime
Domine mi in Christo colendissime,
Seigneur, très vénéré dans le Christ,
Habemus hic Monasterium unum
Sanctæ Claræ, et alterum Aquiani, in quibus
Sorores jejuniis, vigiliis, pedum nuditate ac
multis aliis corporis macerationibus, Deo
optimo maximo servire conantur326, cumque
mendicatis [91] hinc inde eleemosynis,
hactenus quamvis ægerrime, inter multas et
frequentissimas ægritudines utcumque
vixerunt327. Nunc demum res ad eum statum
redacta est, ut nulla prorsus ratione earum
victui provideri possit, nisi Sedes Apostolica
Nous avons, l'un ici, l'autre à Evian,
deux Monastères de Sainte-Claire, où les
Sœurs, par les jeûnes, les veilles, la nudité des
pieds et beaucoup d'autres macérations
corporelles, s'efforcent de servir le Dieu très
bon et très grand. Jusqu'à présent, avec des
aumônes [91] mendiées de côté et d'autre, elles
ont vécu tant bien que mal, quoique très
difficilement, au milieu de nombreuses et très
fréquentes afflictions. Finalement, les choses
en sont venues maintenant à un tel point qu'il
les Clarisses y sont revenues en 1878. (D'après de Franclieu, Jeanne Baile et les Clarisses de Grenoble, 1468-1887,
Lyon, 1887.)
326 Vid. Epist. præced.
327 Cf. tomes XVI, Lettre CMXIV, p. 71, et XVII, Lettre CMXIV, p. 56, et p. 338.
81/346

9.2 Page 82

▲back to top
cum eis dispensare dignetur, ut in communi
prædia et alia bona immobilia possidere
possint.
Nam triginta annorum bellum
durissimum, ac crebræ infestissimæque
hæreticorum incursiones effecerunt, ut in hac
Gebennensi diæcesi deinceps inveniri non
possint eleemosynæ, quæ Monasteriis istis
sustentandis et alendis sufficere queant. Mitto
mendicitatem fœminarum, ut experimento
certissimo constat, acerrimis sollicitudinibus,
continuis, immoderatis ac melancholicis
cogitationibus, importunis de modo quærendi
et habendi inventionibus, et inquietissimis
anxietatibus plenissimam esse.
Quare videns paupertatem hanc
extremam interiori [vitæ] plurimum obesse,
neque posse Moniales istas diutius [92] in
proposito perseverare, nisi de remedio
opportuno illis a Sede Apostolica provideatur,
quamvis non mihi, sed Ordini Fratrum
Minorum cura illarum incumbat, nolui tamen
omittere quin earum super hac re
supplicationem et preces, quas Sancissimo
Domino nostro offerre intendunt, meis etiam
humillimis votis adjuvarem apud
Dominationis
Vestræ
Illustrissimæ
clementiam, quam illis summopere cupio
propitiam.
Eamdem interim obiter admonens, in
istis Monasteriis mulierum hujus provinciæ
nullo modo observari Concilii Tridentini
saluberrima decreta de confessario
extraordinario bis terve in anno Monialibus
dando328, et de puellis feminisve ante
professionem ab Episcopo probandis329. Quin
etiam, quando per Jubilaeum cuicumque licet
quem maluerint, ab Ordinario approbatum,
confessarium eligere, per summum nefas istis
hæc via solandi conscientias suas
intercluditur330. Atque hoc Illustrissimæ
Dominationi Vestræ aperuisse satis sit. [93]
n'y a plus du tout moyen de pourvoir à leur
subsistance, si le Siège Apostolique ne daigne
leur donner la dispense nécessaire pour
qu'elles puissent posséder en commun des
biens fonds et autres biens immeubles.
En effet, après trente années d'une
guerre cruelle, après les fréquentes et
désastreuses incursions des hérétiques, on ne
peut plus trouver dans ce diocèse de Genève,
des aumônes suffisantes pour soutenir et
entretenir ces Monastères. Je passe sur ce
qu'une expérience convaincante nous apprend
de la mendicité des femmes : elle est toujours
accompagnée de préoccupations pénibles, de
soucis immodérés et continuels, de pensées
mélancoliques, d'industries dangereuses sur les
moyens de demander et d'obtenir, et des plus
troublantes inquiétudes.
Aussi, voyant cette pauvreté extrême
nuire beaucoup à leur vie intérieure et rendre
ces Religieuses incapables de persévérer plus
[92] longtemps dans leur vocation, si le Siège
Apostolique ne pourvoit d'un remède
opportun, j'ai tenu bien que le soin de ces
Sœurs incombe, non à moi, mais aux Frères
Mineurs à appuyer les demandes et les
supplications qu'elles se proposent d'adresser à
Sa Sainteté, par mes très humbles prières à la
bonté de Votre Seigneurie Illustrissime, que je
souhaite beaucoup leur être favorable.
Je l'informe en passant que dans ces
Monastères de femmes de notre province, on
n'observe nullement les très salutaires décrets
du Concile de Trente sur le confesseur
extraordinaire à donner deux ou trois fois
l'année aux Religieuses, et sur l'examen que
l'Evêque doit faire des filles ou femmes avant
leur profession. Bien plus, alors que, pour le
Jubilé, il est permis à chacun de choisir un
confesseur à son gré, pourvu qu'il soit
approuvé par l'Ordinaire, ce moyen de
soulager leur conscience leur est interdit par
328 Sess. XXV, de Regular., c. X. (Cf. tom. præced., pp. 59, 60.)
329 Ibid., c. XVII.
330 Ce n'était pas la première démarche que tentait François de Sales pour obtenir aux Religieuses Clarisses la liberté
de conscience. Au printemps de 1613, il avait fait parvenir à Rome, par l'intermédiaire du Nonce de Turin, un Mémoire
sur cette question ; il y dénonçait les confesseurs et Supérieurs de ces Monastères comme adversaires obstinés de
l'exécution des décrets du Concile de Trente. N'ayant rien obtenu, le Saint, non content d'avoir agi auprès du cardinal
Bellarmin, adressa, sans doute en même temps que la présente lettre, une nouvelle supplique à la Sacrée Congrégation
des Evêques et Réguliers. Ce fut un fils de l'Ordre franciscain, le P. Dominique de Chambéry, qui la présenta. Cette
fois, par commandement du Pape, l'Evêque de Genève demeura chargé d'insister auprès des Supérieurs pour qu'ils
donnassent un confesseur extraordinaire, ou, en cas de refus, de l'envoyer lui-même. (Archiv. des Ev. et Rég.,
Posizioni, vol. 1618, Regulares, G, et Regesta (Moniales), vol. 1618.) Malgré tout, les Religieuses ne furent
82/346

9.3 Page 83

▲back to top
Deus autem ipsam quam diutissime une cruelle injustice. Qu'il me suffise de
servet incolumem, cujus sacras manus signaler ces faits à Votre Illustrissime
humillime exosculor.
Seigneurie. [93]
Illustrissimæ et Reverendissimæ
Dieu veuille la garder en santé très
Dominationis Vestræ,
longtemps encore ! En lui baisant très
Obsequentissimus et humillimus servus, humblement les mains, je demeure,
F., E. G.
De Votre Illustrissime et
Annessii Gebennensium, XVII Révérendissime Seigneurie,
Septembris 1617.
Le très obéissant et très humble serviteur,
FRANÇOIS, Evêque de Genève.
Annecy en Genevois, 17 septembre
1617.
_____
MCCCLX. A Don Jérome Boerio, Général des Barnabites331.
Eloge du P. Baranzano. Prière de le renvoyer au collège
d'Annecy.
Annecy, 23 septembre 1617.
Reverendissimo in Christo Padre
Révérendissime et très honoré Père
osservandissimo,
dans le Christ,
Il P. D. Redento ritorna dove la santa
ubedientia lo chiama. Egli è persona di
bonissime qualità et laquale [94] ci ha dato a
tutti grand'edificatione332. Sô che ha fatto
errore nell'impressione de' libri suoi senza la
debita licenza333 ; ma di questo errore sô che la
Le P. D. Redento retourne où la sainte
obéissance l'appelle. Il a de très bonnes
qualités et nous a donné à tous beaucoup [94]
d'édification. Je sais qu'il a failli en faisant
imprimer ses livres sans l'autorisation requise,
mais je sais aussi que la cause principale de
pleinement libres de suivre les prescriptions de l'Eglise à ce sujet qu'en s'eximant, en vertu d'un Bref apostolique, de
la juridiction des Cordeliers pour passer sous celle de l'Ordinaire, ce qui eut lieu sous l'épiscopat de Jean-François de
Sales.
331 Voir le tome précédent, note (1244), p. 381.
332 Le P. Redento Baranzano était déjà la meilleure gloire du collège d'Annecy, et son nom, franchissant les frontières,
« sonnait bien haut en France, » suivant l'expression d'un biographe. Il a même traversé les siècles, et est arrivé jusqu'à
nous, célèbre encore parmi les savants.
Le jeune Religieux n'avait que vingt-cinq ans lorsqu'il inaugura ses cours dans l'établissement chappuisien,
le 3 novembre 1615, et il ne devint prêtre que le 19 décembre suivant, par les mains de saint François de Sales.
Originaire de Serravalle (diocèse de Verceil), dont son père Pierre-François fut quelque temps podestat, Jean-Antoine
avait reçu le nom de Redento à son entrée chez les Barnabites, où il fit profession le 11 avril 1609. Génie vif et prompt,
avide de savoir et servi par une mémoire tenace, il avait étudié avec succès et sut enseigner avec charme, suscitant un
véritable enthousiasme parmi ses disciples. D. Baranzano quitta la Savoie en octobre 1619 pour se rendre à Paris et
s'occuper auprès du Roi des intérêts des Barnabites du Béarn ; il prit ensuite une part active à la fondation du collège
de Montargis où l'appelait l'un de ses anciens élèves, Louis des Hayes, et y mourut le 23 décembre 1622, après une
trop courte, mais féconde carrière. Bacon, Galilée, Kepler avaient entretenu des relations avec l'éminent Religieux.
(D'après Colombo, Intorno alla vita ed alle opere del P. Redento Baranzano, scienziato da Serravalle-Sesia, Torino,
Vincenzo Bona, 1878.)
333 Résumé des leçons de Baranzano,imprimée aux frais de Louis des Hayes et de Muratori da Savigliano,
l'Uranoscopia venait de paraître1. Le système planétaire de Copernic y était développé ainsi que les idées de Galilée.
Or. la récente sentence de la Congrégation de l'Index à ce sujet, provoquée par l'imprudence de ceux qui transportaient
la question du terrain scientifique sur le terrain religieux, rendait doublement sévères les Supérieurs, sans l'autorisation
desquels le livre était mis au jour, D. Redento, dans un opuscule suivant (Nova de motu Terræ Copernicæo juxta
Summi Pontificis mentem disputatio, 1618) répare généreusement sa faute, et s'appliquant à lui-même la belle parole
83/346

9.4 Page 84

▲back to top
maggior parte è venuta da una certa simplicità cette faute est une certaine simplicité et
et inadvertenza ; et mediante la paterna et inadvertance ; sans doute, grâce à la correction
benigna correttione che V. P. Rma glie farà, egli paternelle et pleine de bonté qui lui sera faite
senza dubbio starà horamai saldo. Onde, se V. par Votre Paternité Révérendissime, il se
P. non giudica altrimenti che fosse tiendra désormais sur ses gardes. C'est
inconveniente [95] per qualche ragione a me pourquoi, à moins qu'elle ne le juge pas à
secreta, ardisco di dirli che saria bene di propos pour [95] quelque raison que j'ignore,
rimandarlo, già che havendo imparata la lingua j'ose dire à Votre Paternité qu'il serait bon de
et essendo molto grato in queste bande, parmi le renvoyer ici ; car ayant appris la langue et
che sarebbe di molta utilità334.
étant fort goûté en ces quartiers, il me semble
Però, in tutto io mi rimetto alla molta qu'il s'y rendrait très utile. Cependant, je me
prudentia di V. P. che Iddio faccia beata nella remets pour tout à votre grande prudence.
gratia et gloria celeste, et alla quale io voglio
Que Dieu comble de bonheur dans la
sempre restare
participation de la grâce et de la gloire céleste
Servitore et fratello humilissimo et Votre Paternité, dont je veux demeurer
devotissimo, toujours
FRANCO, Vescovo di Geneva.
Le très humble et très dévoué serviteur et
XXIII Settembre, Annessi.
frère,
FRANÇOIS, Evêque de Genève.
Al Rmo in Christo Padre
23 septembre 1617, Annecy.
osservandissimo,
Il P. Generale de' Clerici regolari di S. Paolo. Au Reverendissime et très honoré Père dans le
Milano.
Christ,
Le Père Général des Clercs réguliers de Saint-
Revu sur une copie déclarée authentique, Paul.
conservée à Turin, Archives de l'Etat. [96]
Milan. [96]
_____
de saint Augustin : « N'ayant pas eu d'abord la sagesse en partage, » dit-il dans la préface, « j'aurai maintenant
l'humilité, et n'ayant pas réussi à ne dire que des choses dont je n'aie pas à me repentir, du moins je regretterai d'avoir
dit ce que je n'aurais pas dû dire. » Une seconde édition de l'Uranoscopia (1619) fut corrigée et amendée. Saint
François de Sales parle ici de « livres », au pluriel, peut-être parce que cet ouvrage est divisé en deux parties, ou bien
désigne-t-il aussi la Summa Philosophiæ, publiée à Lyon en 1616 avec la permission des Docteurs, mais sans
l'approbation des Supérieurs de la Congrégation des Barnabites. (Cf. Colombo, ubi supra.)
1 Uranoscopia, seu de cœlo, in qua universa cœlorum doctrina clare, dilucide, et breviter traditur. Pars prima, in qua
novo ordine, modo et methodo cœlestia prædicata communiora expticantur. Pars secunda, in qua singularum
sphærarum essentia, natura, proprietas, theoria, prædominium, distantia, magnitudo, motus et status, brevi exponitur.
Coloniæ Allobrogum, apud Petrum et jacobum Choüet, 1617, in-4º.
334 Le désir du saint Evêque fut réalisé ; D. Baranzano rentrait à Annecy le 30 octobre suivant. (Cf. ci-après, Lettre
MCCCLXXIII, p. 116.)
84/346

9.5 Page 85

▲back to top
MCCCLXI. A Don Juste Guérin, Barnabite335. Départ précipité
du P. Redento. François de Sales ne sait pas encore s'il
prêchera à Paris ou à Grenoble. Le jardin des Barnabites.
Pourquoi le Saint garde une lettre sans l'envoyer.
Annecy, 23 septembre 1617.
Mon Reverend Pere,
C'est sans loysir que je vous escris, car le P. Redento part a l'improviste aujourd'huy336,
duquel j'attendois le despart seulement a lundi. Vous recevres un paquet ou sont les livres de
l'Introduction et les nouvelles desplaysantes de nostre perte recente de nostre pauvre et tres
aymable vefve337. Madame la Marquise d'Urfé338 a receu le paquet des mains de monsieur le
premier President339, et s'est chargee, de sa grace, de le vous rendre.
Je vous supplie de me faire office vers Monseigneur le Reverendissime Cardinal340, affin
que je puisse sçavoir si ce sera a Grenoble ou a Paris que j'iray cet Advent et ce Caresme ; car Son
Altesse341 a promis a monsieur le Mareschal342 que j'iray a Grenoble, et a d'autres que j'iray a Paris,
et je ne sçai auquel des deux son intention est que je m'attache. Or, il est tems que je le sçache, et
selon qu'elle me fera entendre, je me resoudray343. Je [97] vous supplie, mon Reverend Pere, de
me faire cette faveur que ce soit au plus tost.
Nostre Mere se porte bien, Dieu merci, et toute joyeuse de la belle croix344. Nous tascherons
d'eschapper en toute façon d'avoir besoin du jardin des Peres345, puisque je voy que cela en offence
grandement quelques uns, qui m'ont dit que vous avies escrit que vous avies fait toutes les
sollicitations. J'espere que Dieu nous aydera.
O mon tres Reverend cher Pere, je suis incomparablement tout vostre et de tout mon cœur
: c'est ce que je puis dire pour le present, allant celebrer les Ordres346. Je salue la signora dona
Genevra347 et dona Bona348. J'ay receu une lettre de la premiere qui estoit addressee a Vostre
Reverence, et en vostre absence, a moy, en laquelle j'ay plus de part que je ne merite ; c'est
pourquoy je ne vous la renvoye pas.
Je suis donq infiniment, mon Reverend Pere,
Vostre tres humble et fidele serviteur,
[FRANÇS, E. de Geneve.]
335 Voir le tome précédent, note (618), p. 171.
336 Vide Ep. præced.
337 Marie-Aimée, baronne de Thorens, morte le 7 septembre. (Voir ci-dessus, note (278), p. 73.)
338 Fille d'Antoine de Neufville, seigneur de Magnac, et de Claude du Bellay, Marie de Neufville avait épousé, en
1596, Jacques, marquis d'Urfé et de Beaugé. Elle mourut en novembre 1639. Son mari, frère aîné de l'auteur de
l'Astrée, était en ce moment en Piémont, au service du duc de Savoie.
339 Le président Favre, ami intime des d'Urfé.
340 Maurice de Savoie (voir tome XIII, note (934), p. 345).
341 Le duc de Savoie.
342 François de Bonne, duc de Lesdiguières, maréchal de France. (Voir tomes XII, note (183), p. 100 ; XVII, note
(1243), p. 380, et ci-après, Lettre MCCCLXVI, p. 105.)
343 Voir ci-dessus, note (251), p. 65.
344 Grande et belle croix de cristal, don de Marguerite de Savoie, duchesse de Mantoue, protectrice de la Visitation.
La croix « de Mme la Duchesse » est « bien riche, » écrit la Sainte, « et pour sa valeur » (six cents ducatons) « et pour
l'honneur du témoignage de sa protection. » (Lettres, vol. I, p. 223.)
345 La partie du jardin du collège chappuisien qui devait être donnée aux Dominicains en échange de la place que ceux-
ci cèderaient à la Visitation. (Voir tome XVI, note (729), p. 227, et ci-après, note (424), p. 120.) D. Juste s'était
généreusement employé auprès des princes de Savoie et des Supérieurs pour faire aboutir l'affaire.
346 Ce fut dans l'église de Sainte-Claire qu'eut lieu la cérémonie.
347 Ginevra Scaglia, destinataire le 27 février 1618. (Voir plus loin.)
348 Bonne de Challant, comtesse de San Secondo (voir le tome précédent, note (1247), p. 383).
85/346

9.6 Page 86

▲back to top
Annessi, le 23 septembre 1617. [98]
_____
MCCCLXII. A M. Guillaume de Bernard de Foras349. Le « Pré
Lombard » demandé au duc de Nemours pour la Visitation.
Annecy, 27 septembre 1617.
Monsieur mon Frere,
Vous recevres par M. Rousselet350 une de mes lettres, par laquelle je vous supplie de nous
assister vers Monsieur351 pour obtenir le Pré Lombard en faveur des Seurs de la Visitation352, et
nous vous ouvrons un expedient : qu'au moins il luy playse de permettre que les susdites Dames
en eussent la moytié pour donner en eschange aux Peres de Saint Dominique353, gardant l'autre
moytié pour en faire ce que Sa Grandeur voudroit. Mais me doutant que ces Peres de Saint
Dominique ne voudront pas lascher ce dont nous avons besoin si on ne leur donne tout le susdit
pré, je vous supplie de faire ce qui sera bonnement a faire, affin que Monsieur se contente que
nous leur puissions donner le tout. Que s'il ne se peut, alhors on pourra parler de la moytié354. [99]
Vous voyes, Monsieur mon Frere, comme je traitte avec vous, car j'escris ceci furtivement
sans que personne le sçache, parce que le porteur ne me donne nul loysir. Mon cœur salue et
embrasse le vostre, et je suis invariablement,
Vostre tres humble et tres affectionné
frere et serviteur,
FRANÇS, E. de Geneve.
27 septembre 1617, Annessi.
A Monsieur
Monsieur de Foras,
Gentilhomme de la Chambre de Monseigneur le Duc de Nemours.
A Paris.
_____
349 Voir tome XVI, note (728), p. 226.
350 Guillaume Rousselet, secrétaire du duc de Nemours.
351 Le duc de Nemours.
352 On appelait « Pré Lombard » une île carrée, de trois cents toises de tour, située tout près de la ville d'Annecy,
séparée de ses murailles seulement par le canal de Thiouz. Aujourd'hui, rattachée à la terre ferme, elle est devenue
jardin public.
En 1602, le 17 mai. Henri de Nemours l'avait achetée, pour 4000 florins, de Louis Flocard, conseiller du
prince et président de la Chambre des Comptes du Genevois ; mais la vente ne devait avoir son effet qu'après entier
payement. Quand saint François de Sales demandait le Pré Lombard pour ses Filles de la Visitation, rien n'était versé
de la somme promise et la famille Flocard demeurait propriétaire ; il n'en fallait pas moins s'adresser au Duc à cause
de l'acte de 1602. (Archiv. de la Visitation d'Annecy, Livre des contrats permanents.)
353 Voir ci-dessus, note (315), p. 86.
354 Les PP. de Saint-Dominique n'eurent jamais rien du Pré Lombard. En échange des quatre cents mètres carrés
environ qu'ils cédèrent en 1618 à la Visitation, ils obtinrent des biens à Annecy-le-Vieux. Quant à l'île, achetée de
nouveau (11 avril 1634) par la veuve du duc de Nemours, Anne de Lorraine, d'Henriette Flocard, dame de la Pesse,
pour la récréation de son fils Louis de Savoie, elle fut donnée par Charles-Amédée, frère de Louis, et son épouse
Elisabeth de Vendôme, au Monastère de la Visitation, en 1644. Les Flocard, s'étant réservé le droit de rachat,
protestèrent, ainsi que Jeanne-Aimée de Beaufort, dame de Longecombe, propriétaire d'une pièce du terrain non
encore payée par les princes. On traita avec les deux parties : les droits de Mme de la Pesse et de son fils, abandonnés
au Monastère, acquittèrent la dot de Sœur Françoise-Angélique de la Pesse et celle de sa nièce, Marie-Elisabeth ; Mme
de Longecombe demanda seulement une Messe et une Communion annuelles aux Sœurs de la Visitation. (Archives
de la Visitation d'Annecy, Ms. cité.)
86/346

9.7 Page 87

▲back to top
MCCCLXIII. A Madame de Granieu. Le courage appuyé sur la
confiance. Joie inaltérable des âmes données à Dieu. «
Religieux entre les soldatz » et « sainte entre les Religieuses »
Annecy, fin septembre ou octobre 1617 355.
Je croy fermement, ma tres chere Fille, que vostre cœur reçoit de la consolation de mes
lettres, qui vous sont aussi escrites d'une affection nompareille, puisqu'il a [100] pleu a Dieu que
ma dilection envers vous fust toute paternelle, selon laquelle je ne cesse point de vous souhaiter le
comble de toutes benedictions.
Tenes bien vostre courage relevé, je vous supplie, ma tres chere Fille, en la confiance que
vous deves avoir en Nostre Seigneur, qui vous a cherie, vous donnant tant d'humbles attraitz a son
service, et vous cherit en vous les continuant, et vous cherira en vous donnant la sainte
perseverance. Je ne sçai, certes, comme les ames qui se sont donnees a la divine Bonté ne sont
tous-jours joyeuses, car y a-il bonheur esgal a celuy la ? Ni les imperfections qui vous arrivent ne
vous doivent point troubler, car nous ne les voulons pas entretenir et ne voulons jamais y arrester
nos affections. Demeurés donq bien en paix, et vivés en douceur et humilité de cœur.
Vous aves bien sceu, ma tres chere Fille, toutes nos petites afflictions, lesquelles j'aurois
bien sujet de nommer grandes, si je n'eusse veu un amour special de Dieu envers les ames qu'il a
retirees d'entre nous ; car mon frere356 mourut comme un Religieux entre les soldatz, ma seur,
comme sainte entre les Religieuses357. C'est seulement pour les recommander a vos prieres que
j'en touche ce mot.
Monsieur vostre mary a bien rayson s'il m'ayme, car je le veux a jamais honnorer358 ; et
vous, ma tres chere Fille, je m'imagine que vous m'affectionnes tous-jours cordialement, et vostre
ame vous respondra pour moy que je suis vostre, puisque Nostre Seigneur et Createur de nos
espritz a mis cette liaison spirituelle entre nous. Qu'a jamais son saint nom soit beni et vous rende
eternellement sienne, qui est le souhait continuel,
Ma tres chere Fille, de
Vostre tres humble serviteur,
FRANCS, E. de Geneve. [101]
_____
355 La date de cette lettre est fixée approximativement par la mention de la mort de M. et de Mme de Thorens.
Pour la destinataire, ce n'est pas trop se hasarder, nous semble-t-il, de proposer Mme de Granieu. (Voir le tome
précédent, note (1297), p. 395.) Le ton général de ces lignes ne contredit pas à l'hypothèse.
356 Bernard de Sales (voir ci-dessus, note (104), p. 17).
357 Marie-Aimée de Rabutin-Chantal (voir ibid., note (278), p. 73).
358 Si la lettre s'adresse à Mme de Granieu, le « mary » serait François de Gratet, seigneur de Granieu, dont la note est
donnée plus loin.
87/346

9.8 Page 88

▲back to top
MCCCLXIV. A une religieuse359. L'arbre de vie et la rosée qui le
féconde. Un désir qui sera sûrement satisfait.
Annecy, mai-octobre 1617 360.
Ma tres chere Fille,
Il me semble, certes, que je le voy, ce Sauveur crucifié, au milieu de vostre ame comme un
bel arbre de vie, qui, par les fleurs361 des bons desirs qu'il vous donne, vous promet les fruitz du
divin amour qu'il produit ordinairement es lieux ou sont la rosee d'humilité, douceur et simplicité
de cœur. Vives donq bien ainsy, ma tres chere Fille : ce sont mes vœux et mes souhaitz continuelz,
comme vous cherissant d'une affection singuliere, et me confiant que reciproquement vous
souspireres souvent devant sa divine misericorde pour l'amendement de mon cœur, dont je vous
conjure ardemment, ma tres chere Fille.
Si je puis retourner a Saint André362, ce sera de toute mon affection : vous aures vostre
desir. Que si je ne puis, [102] vous aures plus que vostre desir, puisque le bon Pere que j'ayme et
honnore si cordialement363, y fera cent fois mieux le service de nostre commun Maistre que moy.
FRANÇS, E. de Geneve.
_____
359 Pendant le temps de ses prédications à Grenoble, le Saint, raconte l’Histoire de la Fondation de la Visitation de
cette ville, « allait souvent dans les Monastères de Montfleury et des Ayes pour traiter avec les Religieuses d'une plus
grande perfection. » L'édition de 1641, en adressant cette lettre A une Religieuse, désigne-t-elle un membre de l'une
de ces Communautés ? La réforme, dans l'abbaye cistercienne des Ayes, avait dès lors des aspirantes, et les Sœurs de
Ponçonnas et de Buissonrond, les premières à la provoquer, firent profession en septembre 1617. Cinq ans plus tard,
ce ne sera qu'après avoir demandé les avis de l'Evêque de Genève qu'elles commenceront à Grenoble même la vie
régulière que la Mère de Ballon venait d'inaugurer à Rumilly.
Faudrait-il plutôt chercher la destinataire parmi les demoiselles grenobloises, futures Religieuses de la
Visitation ? Les données manquent pour étayer solidement l'une ou l'autre supposition.
360 Les lettres précédentes (voir pp. 65 et 97) parlent des incertitudes dans lesquelles le duc de Savoie tint saint François
de Sales touchant la station de l'Avent 1617 ; le 14 octobre seulement, il lui mandait d'aller à Grenoble. (Voir sa lettre
à l'Appendice I, et ci-après, p. 105.) De là notre date approximative.
361 Le mot flammes porté par l'édition de 1641 doit être certainement une faute d'impression.
362 Antérieure au XIIe siècle, l'église Saint-André de Grenoble fut l'objet des libéralités du dauphin Guigue-André et
de ses successeurs, dont plusieurs y eurent leur sépulture. Elle était membre du prieuré de Saint-Martin ; elle en fut
détachée en 1227 et donnée au Chapitre de Saint-André de Champagnié. Dès lors, sa collégiale fut desservie par un
prévôt et douze chanoines qui, en 1308, signèrent un concordat les unissant très étroitement au Chapitre de la
cathédrale. Chapelle delphinale, l'église Saint-André était devenue celle du Parlement. (Cf. Chorier, Hist. gen. de
Dauphiné, Lyon, J. Thioly, 1672, réimprimée à Valence, 1869.)
363 Ne pouvant déterminer la destinataire, il est impossible de désigner le « bon Pere ». Les Registres du Parlement se
taisent sur le prédicateur qui aurait remplacé l'Evêque de Genève, si celui-ci n'avait pu remonter dans la chaire de
Saint-André.
88/346

9.9 Page 89

▲back to top
MCCCLXV. A Madame de Grandmaison364 (Inédite). Retour
douloureux et résigné sur les deuils multiples de l'année qui
s'achève. Le Saint prépare la destinataire à celui qui doit la
frapper bientôt. Où se transforment nos amertumes.
Belley, 5 octobre 1617.
Je vous puis dire, Madame ma tres chere Seur, que toute cett'annee j'ay vescu parmi les
mortz ; car, outre une quantité d'amis et parens que j'ay perdus pour ce monde365, j'ay veu ecclipser
en trois moys mon frere, son filz unique et sa femme366, que je cherissois incomparablement. Mays,
graces a Dieu, tout cela s'est passé [103] a leur salut ; car mon frere, qui estoit allé au service de
Son Altesse en soldat, y est mort en Religieux ; son filz est passé en innocence, et sa femme en
sainte, apres avoir demandé et obtenu l'habit de la Visitation et fait les vœux au lit de la mort. En
somme, ma tres chere Seur, ma Fille, tel a esté le bon playsir de Dieu, auquel nos volontés doivent
estre toutes soumises.
Et je voy bien que dans peu de jours vostre bon naturel recevra une pareille attaque ; car je
vis hier madame nostre bonne Mere367, et la trouvay sur les confins de cette vie mortelle, ou sa
maladie, et principalement son aage, l'ont conduit, et a mon advis, pour lent que soit son passage,
elle ne peut pas beaucoup tarder de l'achever. Or sus, ma tres chere Seur, il faudra bien tenir vostre
cœur ferme, affin quil ne chancele point a cette secousse, mais qu'attaché a la Providence divine,
apres les premiers eslans de douleur qui sont inevitables, il demeure doucement en paix, en
attendant avec une sainte esperance le tems auquel, par le mesme passage, nous irons revoir ceux
qui nous præcedent. Ma tres chere Seur, nous avons a remercier Dieu qui nous a si longuement
laissé cette mere, et n'est pas raysonnable que nous treuvions mauvais sil la reprend, puis que c'est
pour luy donner une meilleure vie.
Je sçai que vous irés digerer ce desplaysir au pied de la Croix de Nostre Seigneur ou toutes
nos amertumes deviennent douces. C'est pourquoy je n'ay plus rien a vous dire, sinon que je ne
cesse jamais de souhaiter mille et mille benedictions a vostre chere ame que j'ayme de tout mon
cœur, estant a jamais,
Madame ma tres chere Seur,
Vostre plus humble frere et serviteur,
FRANCS, E. de Geneve.
V octobre 1617.
Revu sur une photographie de l'Autographe, conservée à la Visitation d'Annecy. [104]
_____
364 Dos à dos sur un même carton sont collés l'Autographe de cette lettre et une lettre de sainte Jeanne-Françoise de
Chantal. On ne peut donc lire l'adresse ; mais la destinataire est indiquée par le texte même, et par cette note du XIXe
siècle, écrite au bas de la lettre de la Sainte : Celle de St Fois de Salles adressée a Mme de Grandmayson Hélène de
Longecombe de Peyzieu (voir tome XV, note (804), p. 283).
365 Parmi ces amis chers au Saint et dont il pleurait le récent départ, rappelons le président du Conseil de Genevois,
Charles-Emmanuel du Coudrey (voir ci-dessus, note (231), p. 58) ; François Chanal (ibid., note (133), p. 23) ; le
président de Sautereau (ibid., pp. 21, 25) ; trois chanoines de Saint-Pierre de Genève, très estimés de leur Evêque,
MM. Janus des Oches, Claude Grandis (voir tomes XI, note (685), p. 299, et XIII, note (522), p. 195) et François
Delespine (voir tomes XVI, note (1115), p. 343, et XVII, note (1169), p. 350).
366 Voir ci-dessus, notes (104), p. 17 ; (269), (270), p. 70, et (278), p. 73.
367 Françoise de Dizimieu, dame de Peyzieu (voir tome XV, note (557), p. 181). La mention de cette visite, faite la
veille, indique indubitablement la présence du Saint à Belley.
89/346

9.10 Page 90

▲back to top
MCCCLXVI. A Monseigneur Pierre Fenouillet, Evêque de
Montpellier (Inédite). Pourquoi le duc de Savoie désigne
Grenoble à François de Sales pour les prédications de l'A vent et
du Carême. Une ambition de l'apôtre au sujet de Lesdiguières
; son peu d'espoir de la voir satisfaite. Joies qu'il aurait eues à
Paris, avantage qu'il trouve en Dauphiné. La paix sans les
effets de la paix. Doute sur la validité d'une dispense.
Annecy, 19 octobre368 1617.
Monseigneur,
En fin, apres plusieurs incertitudes sur le lieu ou je devois prescher ces Advens et Caresme
prochains, Son Altesse me commande de retourner a Grenoble pour complaire a monsieur le
mareschal de Lesdiguieres369, qui, prié par la cour du Parlement, en a tesmoigné un tres grand
desir370. O sil playsoit a Dieu de le toucher, l'attirer et gaigner ! car c'est bien la coustume de sa
divine providence d'employer les choses basses et infirmes pour les grans effectz de sa Bonté371.
Mais ce souhait, entre vous et moy, qui serois estimé homme d'ambition excessive si quelqu'un
l'entendoit ; et neanmoins, j'y ay certes aussi peu d'ambition que d'esperance, a cause de
l'exclamation du Sauveur372 : O quam difficile est hominem divitias habentem, etc.373
Cependant, je confesse que, comme d'un costé ce m'eut [105] esté un contentement
indicible de jouir de la presence de cet amy incomparable qui me souhaitoit a Paris374 et de la
conversation de plusieurs autres qui me font lhonneur de m'affectionner, aussi m'est-ce un grand
soulagement de m'esloigner si peu de ma residence quil semble presque que je ne m'en esloigne
point ; car en somme, ma femme, mes enfans, mon devoir et mes affaires sont icy, puisque Dieu a
voulu que j'y fusse pere de famille et son œconome.
Je fus l'autre jour dire a Dieu a mon tres cher, tres aymable et tres digne voysin
Monseigneur de Belley375, qui s'en reva en son Paris et païs prescher a Saint Severin376 ; et outre
mille qualités qui m'obligent a l'honnorer, je le vis si plein d'amour, de respect et d'estime pour vos
merites quil ne se peut rien adjouster, et partant vous fustes une grande part de nos plus doux
entretiens.
368 Nous rectifions une erreur de l'ancienne copie : octobre s'impose au lieu d'août, car l'étude de la lettre ne laisse
aucun doute pour le mois.
369 Voir à l'Appendice I la lettre du duc de Savoie au Saint, 14 octobre, et cf. ci-dessus, pp. 65 et 97.
370 Ayant appris le succès de l'intervention du maréchal, le Parlement lui-même adressa au saint Evêque une lettre
d'invitation, datée du 8 novembre 1617. (Charles-Auguste. Histoire, etc., Preuve 46.)
371 Cf. I Cor., I, 27-29.
372 Marc., X, 23 ; Luc., XVIII, 24.
373 Oh ! qu'il est difficile à l'homme qui a des richesses, etc.
374 Après des démarches qu'il croyait près de réussir, Antoine des Hayes écrivait, le 14 août 1617, à M. de Charmoisy
: « Nous avions espéré de voir, ce Carême, Monsieur de Genève, dont chacun s'était grandement réjoui, mais l'on
m'apprend que son voyage est fort traversé. Je vous supplie... favoriser de tout votre pouvoir l'église de Saint-André
à laquelle il avait été promis. » (J. Vuÿ, La Philothée de St Fr. de Sales, 1879, vol. II, p. 157 ; cf. ci-dessus, note (251),
p. 65.)
375 Jean-Pierre Camus (voir tome XIV, note (426), p. 139).
376 Un oratoire de ce nom existait dès les temps mérovingiens. Sur son emplacement, fut bâtie, au XIIe siècle, une
église dont il ne reste, pour ainsi dire, plus rien. Cependant, une partie de l'édifice actuel, très intéressant au point de
vue archéologique, date du XIIIe siècle ; d'autres, des XVe et XVIe. (D'après une Note de M. Le Grand, archiviste aux
Archives Nationales.)
90/346

10 Pages 91-100

▲back to top

10.1 Page 91

▲back to top
Nous avons la paix, mais non pas encor les effectz de la paix, car l'execution du traitté est,
ce dit on, en quelque sorte de difficulté377. Qui cœpit bonum opus, perficiet solidabitque378 par sa
misericorde379. [106]
M. le juge mage Arpeaud380 et messieurs Fenouillet381 m'ont parlé du mariage de M.
Garin382, et m'ont demandé si je recevrois la dispense requise venant de Monseigneur le Legat
d'Avignon383. C'est la verité que nous n'avons jamais rien veu de cette authorité, ce païs estant hors
de la legation ; si neanmoins le diocæse luy estant marqué il dispense, j'auray tout sujet de croire
quil ne fait rien quil ne puisse ; mais en chose de telle importance et qui tire consequence,
j'aymerois mieux que l'expedition vint de Rome, pour mettre tout en asseurance.
Vous commanderes, et vous seres obei de tous eux, et de moy en verité plus
affectionnement que de tout le reste, puisque, vous baysant tres humblement les mains et vous
souhaitant toute sainte fœlicité, je suis,
Monseigneur,
Vostre tres humble et tres obeissant
frere et serviteur,
FRANÇS, E. de Geneve.
Annessi, 19 … 1617.
Revu sur une ancienne copie conservée à la Visitation de Montpellier. [107]
_____
377 A la suite des préliminaires de Madrid, le traité de paix avait été conclu à Pavie le 9 octobre, entre don Pedro de
Tolède, le cardinal Ludovisio et le comte de Béthune. L'ambassadeur de France, par une pièce signée de la main de
Sa Majesté Très Chrétienne, assurait le gouverneur de Milan que le duc de Savoie acceptait le traité d'Asti ; don Pedro,
de son côté, y souscrivait au nom de Sa Majesté Catholique. Là-dessus, on convint que les parties belligérantes, à
commencer par Charles-Emmanuel, auraient désarmé à la fin de novembre ; en outre, qu'elles devaient restituer les
places conquises pendant la guerre et mettre les prisonniers en liberté. Ce ne fut pas sans grandes difficultés que les
diverses clauses s'exécutèrent ; on ne satisfit à la dernière que le 10 juillet 1618. (Voir Guichenon, Hist. généal. de la
Maison de Savoie, tome II.)
378 Philip., I, 6 ; I Petri, ult., 10.
379 Celui qui a commencé la bonne œuvre, l'achèvera et l'affermira
380 Claude-Nicolas Arpeaud, juge-maje du Genevois. (Voir tome XIV, note (982), p. 340.) Il était parent des Fenouillet
depuis que François Fenouillet, frère de l'Evêque de Montpellier, avait épousé en secondes noces Constance Arpeaud,
sa sœur ou sa cousine. (Cf. le tome précédent, note (320), p. 77.)
381 Nombreux étaient les MM. Fenouillet, frères et cousins de l'Evêque ; il serait difficile de dire quels sont ceux qui
s'occupèrent directement du mariage de M. Garin.
382 Voir le tome précédent, note (482), p. 132. Jacquelin ou Acquelin Garin, cousin au troisième degré de Nicolarde
Fenouillet. fille de François (voir note (380) ci-dessus), qu'il voulait épouser, avait besoin d'une dispense pour
contracter cette alliance. Elle fut expédiée de Rome, ainsi que l'Evêque le souhaitait, le 1er janvier 1618. Le mariage
eut lieu entre 1618 et 1623, date de la naissance de Jean-Pierre, premier enfant de Jacquelin et de Nicolarde. (R. E. et
Reg. par. d'Annecy.)
383 Le Saint veut parler ici du Vice-légat, Jean-François Guidi di Bagno. (Voir le tome précédent, note (1000), p. 294.)
Depuis longtemps, la dignité de Légat d'Avignon appartenait comme de droit à un cardinal résidant à Rome, qui se
faisait représenter par un Vice-légat ; ce cardinal était alors le Secrétaire d'Etat, Scipion Caffarelli-Borghese. (Voir
tome XVI, note (453), p. 147.)
91/346

10.2 Page 92

▲back to top
MCCCLXVII. Au Prince de Piémont, Victor-Amédée. L'Evêque
de Genève implore la charité du Prince en faveur d'un ancien
converti.
Annecy, 24 octobre 1617.
Monseigneur,
Il pleut a Son Altesse, il y a plusieurs annees, d'ordonner quelques commodités au
cappitaine Henry de la Rose, homme lequel meshuy n'est pas seulement viel, ains decrepite384 ; et
bien que la liberalité de saditte Altesse fut excitee par diverses considerations, si est ce que celle
de la conversion de cette ame en fut le fondement. Et c'est celle qui me fait en toute humilité
supplier Vostre Altesse de l'avoir en recommandation, si toutefois il peut asses vivre pour avoir
besoin de ce qu'il recherche ; car il part, ce me semble, a moytié mort, tant il a desir d'avoir moyen
de vivre.
Dieu, par sa bonté, veüille conserver et prosperer la personne de Vostre Altesse,
Monseigneur, de qui je suis
Tres humble, tres obeissant et tres fide (sic)
orateur et serviteur,
FRANÇS, E. de Geneve.
Annessi, le XXIIII octobre 1617.
Revu sur l'Autographe conservé à Turin, Archives de l'Etat. [108]
_____
MCCCLXVIII. Au Duc de Savoie, Charles-Emmanuel Ier. Un
pauvre capitaine converti, solliciteur de Son Altesse.
Annecy, 30 octobre 1617.
Monseigneur,
Le pauvre cappitaine La Rose, sur le bord de sa fosse, recourt a la bonté de Vostre Altesse
pour en obtenir le moyen de passer avec quelque soulagement cette extremité de sa vie. A quoy je
joins tres humblement ma recommandation, avec mille et mille souhaitz que je fay devant Dieu
quil comble Vostre Altesse de fœlicité, demeurant, Monseigneur,
Vostre tres humble, tres obeissant et tres fidele
orateur et serviteur,
FRANÇS, E. de Geneve.
Annessi, le XXX octobre 1617.
Revu sur l'Autographe conservé à Turin, Archives de l'Etat.
_____
384 Voir tomes XII, Lettre CCXLV, et note (1001), p. 400 ; XIV, Lettre DXXIX, p. 158 ; XV, Lettre DCCCXVIII, p.
289.
92/346

10.3 Page 93

▲back to top
MCCCLXIX. A la Mère de Chantal385. Béatitude des crucifiés.
Le testament de la baronne de Thorens. Murmures faits au
sujet d'un projet de mariage pour Françoise de Chantal.
Annecy, [15-31 octobre] 1617 386.
Ma tres chere Mere,
Je ne puis m'empescher d'estre un peu en peyne de [109] vostre tracas survenu si mal a
propos ; mais387 il faut estre constant et ferme aupres de la croix, et sur la croix mesme, s'il plait a
Dieu de nous y mettre. Bienheureux sont les crucifiés, car ilz seront glorifiés.
J'ay cuydé connoistre que M. Colom388 venoit a double intention. Hier il me demanda
comme ma seur389 avoit disposé, et je le luy dis franchement ; et il tesmoigna de le treuver bon,
hormis qu'il eust voulu que Mlle de Chantal eust eu les trois mille escus, ce dit-il. Je ne luy parlay
point des mille escus de la legitime390. Que s'il faut defendre au notaire de n'en rien monstrer, je
vous prie d'en prendre la peyne, car je m'en vay dans demi heure au college391.
Il me parla du mariage de M. de Foras en termes extremement extravagans, et me dit qu'il
avoit charge de vous en parler et a ma fille392 ; mais ces paroles procedent d'un mauvais fondement,
car ilz croyent que l'on vous ayt fait la demande, et a Mlle de Chantal, pour qu'on veuille mespriser
le consentement du frere393 et de [110] l'oncle394. Je dis que l'on n'avoit fait aucune demande, ains
quelques significations par ci par la, lesquelles ne requeroyent point de responce, laquelle aussi on
n'avoit point faite.
Soulagés-vous, ma tres chere Mere, au mieux qu'il se pourra. Je vous iray voir sans faillir.
Dieu soit a jamais au milieu de nostre cœur. Amen.
_____
385 Le texte publié pour la première fois par Hérissant, tome III, p. 437, avec l'adresse A la Mère de Bréchard, est
composé de deux pièces distinctes : le billet ci-joint, certainement écrit à la Sainte, et une lettre du 2 mai 1618 à la
Mère Favre. Il est fort probable que les deux Autographes avaient été collés sur un même carton pour être encadrés ;
et le copiste, par inadvertance, les aura transcrits à la suite l'un de l'autre, comme un texte unique.
386 M. Coulon, l'homme d'affaires de la Mère de Chantal et de ses enfants, dut venir de Bourgogne en Savoie quelques
semaines après la mort de la baronne de Thorens ; d'où la date assignée à ces lignes.
387 La fin de ce premier alinéa a été interpolée par les éditeurs de 1626 dans une lettre composée de fragments de
différentes dates, et dont la plus grande partie a été donnée au tome XV, p. 375.
388 Déjà « capitaine au château de Bourbilly » en 1592, maître Jean Coulon (voir tome XV, note (901), p. 317) fournit,
le 2 novembre 1615, le dénombrement des terres et seigneuries de Bourbilly et Sauvignv, comme « capitaine et
admodiateur à Thoste,... suyvant la charge et procure specialle passé audit Coullon... par Dame Jeanne Fremyot. » (Cte
de Franqueville, Histoire de Bourbilly, Paris, 1907, p. 232.) Le fidèle serviteur des Chantal s'occupe encore des affaires
de l'hoirie de Celse-Bénigne en 1628. (Voir Lettres de la Sainte, vol. III, p. 157.)
389 Marie-Aimée de Rabutin-Chantal, baronne de Thorens.
390 Par son testament, fait le 6 septembre à 10 heures du soir, la jeune Baronne avait institué son beau-frère. l'Evêque
de Genève, son héritier universel, légué trois mille écus d'or à son frère Celse-Bénigne, mille écus à sa sœur Françoise,
et cédé sa légitime soit ses droits sur les biens paternels et maternels à sa mère, Jeanne-Françoise Frémyot.
Celle-ci, le 30 septembre 1617, renonça à ses droits en faveur de François de Sales, qui, en échange, s'engagea à payer
au Monastère de la Visitation une rente annuelle de deux cent cinquante florins. (Archives de Thorens-Sales et de la
Visitation d'Annecy.) C'est peut-être à cet acte que le Saint fait ici allusion.
391 Au collège des Barnabites.
392 Il sera question de ce projet de mariage pour Françoise de Chantal dans des lettres ultérieures.
393 Celse-Bénigne de Rabutin-Chantal.
394 Mgr André Frémyot, archevêque de Bourges.
93/346

10.4 Page 94

▲back to top
MCCCLXX. A une personne inconnue (Fragment inédit).
Douceur de la main divine. Affliction et consolation.
Annecy, [septembre-novembre] 1617 395.
……………………………………………………………………………………………………..
Il est vray, Dieu a affligé nostre mayson en la mort de mon frere et de ma seur de Thorens
; mais sa main divinement paternelle nous force d'adorer sa suave bonté qui ne nous a touchés que
doucement, puisque mon frere est mort saint entre les soldatz, ou il se treuve si peu de saintz, et
ma seur, sa chere espouse et mon unique fille, est morte sainte entre les servantes de Dieu et dans
le cloistre, qui est ordinairement un seminaire de sainteté. Elle a fait profession, et est enterree
dans l'habit de la Visitation. Le medecin qui la servoit en sa derniere maladie396 disoit que si les
Anges pouvoyent mourir, ilz voudroyent mourir de la sorte.
……………………………………………………………………………………………………...
Revu sur le texte inséré dans l'Histoire de la Fondation du 1er Monastère de la Visitation
d'Annecy.
_____
MCCCLXXI. A M. Jean de Lacurne397. Lettres perdues.
Eloge des PP. Barnabites ; la seule chose qui leur manque.
Fruits qu'on peut espérer de leur établissement en France. La
divine origine des afflictions. Souvenir du baron et de la
baronne de Thorens.
Annecy, 6 novembre 1617.
Monsieur,
Je n'ay point receu de vos lettres des quil vous pleut de me faire sçavoir que vous desiries
des miennes pour ces messieurs de la cour398, en recommandation de vos droitz. Et je vous prie de
croire que je vous ay neanmoins escrit plus d'une fois despuis, et que je suis bien marri quand je
sçay que vos addresses me manquent, car je fay beaucoup d'estat de vos escris, esquelz j'apprens
ordinairement et treuve une particuliere consolation.
Mays disons un mot de nos Barnabites, puisque je suis pressé et ne puis pas m'estendre. Ce
sont des gens de fort solide pieté, doux et gratieux incomparablement, qui travaillent incessamment
pour le salut du prochain ; en quoy ilz [se] rendent admirables egalement et infatigables. Une chose
leur manque, que nous supportons facilement icy : c'est qu'encor qu'ilz ayent des excellens
395 Ces lignes ont été vraisemblablement écrites avant la fin de l'année 1617, mais il est impossible de préciser
davantage la date et d'en désigner le destinataire.
396 Jean Grandis, médecin de la Visitation d'Annecy. (Voir tome XV, note (90), p. 20.)
397 Jean de Lacurne de Saint-Palaye naquit à Arnay-le-Duc en 1570 et y mourut le 21 juin 1631. Pendant quelque
temps il exerça la profession d'avocat à Autun, puis, en 1609, devint lieutenant-criminel au bailliage d'Arnay-le-Duc.
Il n'eut point d'enfants de sa femme Huguette Desvoyo (voir ci-après, note (401), p. 114), et s'adonna avec elle à la
piété et aux bonnes œuvres. « Ce sont deux personnes qui me sont très chères en Notre-Seigneur, » assurait sainte
Jeanne de Chantal, qui les honora de son amitié jusqu'à leur mort. (Lettres, vol. III, p. 324.) M. de Lacurne fut poète
et auteur de Mémoires fort savants ; Saumaise va jusqu'à l'appeler « les délices d'Apollon et de toutes les Muses. »
(Cf. Papillon, Bibl. des auteurs de Bourgogne ; Courtépée, Description du duché de Bourgogne, tome IV.)
398 Du Parlement de Bourgogne.
94/346

10.5 Page 95

▲back to top
praedicateurs, nous ne pouvons pas jouir pour encor de leur talent en cela, d'autant qu'ilz n'ont pas
encor [112] l'usage parfait du langage françois, ains seulement autant quil faut pour se faire
entendre es cathechismes, petites exhortations et conversations spirituelles ; mays ilz le vont
aquerant tous les jours. Et il est arrivé encor ces jours passés un malheur, en la perte qu'ilz ont faite
d'un Pere Parisien qui deceda399. Pour moy, je pense qu'ilz seront un jour de grand service a la
France ; car ilz ne font pas seulement proffit en l'instruction de la jeunesse (aussi n'est il pas si
requis ou les Peres Jesuites font si excellemment), mais ilz chantent au chœur, confessent,
cathechisent voire mesme es villages ou ilz sont envoyés, preschent et en somme font tout ce qui
se peut desirer, et fort cordialement, et ne demandent pas beaucoup pour leur entretien. Voyla ce
que je vous puis dire, et ce qui me feroit desirer leur introduction es lieux ou les Peres Jesuites ne
sont pas. Vostre prudence discernera ce qui se pourra faire pour les attirer en vostre Autunois400.
[113]
Je voy, ce pendant, madamoyselle vostre femme401, que je cheris a la verité tres
cordialement, sur la croix, entre les clouz et les espines de plusieurs tribulations qu'elle sent et que
vous ressentés. Que vous dirois je sur cela, Monsieur mon tres cher Frere ? Interroges souvent le
cœur de Nostre Seigneur, d'ou cett'affliction procede, et il vous fera sçavoir qu'elle a son origine
dans le divin amour. C'est bien fait de jetter nostre pensee sur la justice qui nous punit, mais c'est
mieux fait encor de benir la misericorde qui nous exerce.
Toute cett'annee nous avons vescu parmi les adversités, et je croy que vous aures sceu le
trespas inopiné de mon frere et de, ma seur402, que j'appelle inopiné, car, qui l'eut pensé ? mais
trespas tres heureux pour le genre et la sainteté du passage ; car, particulierement ma chere petite
seur, fit sa (sic) depart avec tant de pieté et de suavité, qu'un docte medecin qui le vit403 me dit que
si les Anges estoyent mortelz ils desireroyent cette sorte de mort. Mays en somme, que pouvons
nous dire en toutes ces occurrences ? Il est mieux de ne rien dire, ains acquiescer.404 Obmutui, et
non aperui os meum, quoniam, Domine, tu fecisti405. Et a la verité, pour parler cœur a cœur avec
vous, je n'ay presque jamais osé adjouster ce qui s'ensuit : 406 Amove a me plagas tuas407.
399 Le 22 octobre 1617, à huit heures environ du matin, décéda au collège des Barnabites d'Annecy, le P. Guillaume
Cramoisy, parisien de naissance, âgé d'environ quarante-cinq ans. Une fièvre ardente l'avait saisi au retour d'un
pèlerinage fait à pied à Saint-Claude ; sa mort fut des plus édifiantes, et il emporta les regrets de ses confrères et de la
ville entière. Jean Cramoisy avait dû ce qu'il appelait sa conversion au bienheureux Juvénal Ancina, ainsi qu'il le
raconta lui-même à l'Evêque de Genève. Sur le point de se marier après avoir entendu secrètement l'appel à la vie
religieuse, il assista par hasard à un sermon de ce grand Serviteur de Dieu sur l'inconstance de l'esprit humain et sur
la magnanimité avec laquelle il faut mettre en exécution les inspirations divines. C'était l'heure de la grâce ; le jeune
homme entra bientôt chez les Clercs réguliers de Saint-Paul où il prononça ses vœux le 23 septembre 1598. Ordonné
prêtre, il coopéra d'abord à la fondation du collège de Lodi, et fut envoyé à celui d'Annecy au mois de juillet 1615.
(D'après Charles-Auguste, Histoire, etc., liv. IX, et les Acta Collegii, Archiv. commun. d'Annecy, Série GG, Fonds
du Collège Chappuisien.)
400 Ce ne furent pas les Barnabites que M. de Lacurne attira en son Autunois ; au moins, nulle trace ne nous est restée
de démarches postérieures à cette date faites dans ce but. Par son testament du 23 avril 1631, il institua le P. Recteur
et les Jésuites de la maison d'Autun ses héritiers universels, « à la charge et condition d'entretenir à perpétuité en la
ville d'Arnay-le-Duc, sa chère patrie, deux régents capables et pertinents... pour l'instruction de la jeunesse en la
doctrine chrétienne, bonnes mœurs et bonnes lettres. » Au cas « où les dits Religieux viendraient à manquer auxdites
charges et conditions, il leur substitue en ses biens la ville d'Arnay-le-Duc, à la charge dudit collège. » L'année
suivante, au mois de juin, les PP. de la Compagnie de Jésus prenaient possession de la place. (Annales de la Ville
d'Arnay-le-Duc et Courtépée.)
401 Huguette Desvoyo ou d'Esvoyo, fille de Jacques, conseiller au bailliage d'Autun, et de Françoise Bernard. Elle
mourut le 23 décembre 1630, léguant au Monastère de la Visitation d'Autun quinze cents écus, ses bagues et joyaux,
etc., en mémoire et à l'honneur du saint Evêque de Genève ; mais les Religieuses ne recueillirent rien de cet héritage,
M. de Lacurne ayant suivi trop tôt sa femme dans la tombe. (Reg. par. d'Arnay-le-Duc et Lettres de Ste J.-F. de Chantal,
vol. III, pp. 391, 592.)
402 M. et Mme de Thorens.
403 Jean Grandis (cf. la lettre précédente).
404 Je me suis tu, et je n'ai pas ouvert la bouche, parce que, Seigneur, c'est vous qui l'avez fait.
405 Ps. XXXVIII, 10.
406 Détournez de moi vos coups.
407 Vers. 11.
95/346

10.6 Page 96

▲back to top
Je prieray Dieu quil sanctifie sa volonté en nous et nous en sa volonté. Quil soit vostre
consolation, et de madamoyselle que je vous prie treuver bon que je nomme [114] ma chere fille.
Sic state in Domino, charissimi408, et diligentem diligite409. Je suis,
Monsieur,
Vostre tres humble et cordial serviteur,
FRANÇS E. de Geneve.
6 novembre 1617.
A Monsieur
Monsieur de la Curne,
Lieutenant general au balliage d'Arne-le-Duc.
Revu sur l'Autographe conservé à la Visitation de Nancy.
_____
MCCCLXXII. A la Mère de Chantal. Attente de nouvelles de la
Fondatrice malade.
Annecy, 22 novembre 1617 410.
Ma tres chere Mere,
La glorieuse sainte Cecile m'appelle au chœur pour ouïr les louanges de son Seigneur, que
les musiciens, par devotion particuliere, veulent chanter de sa part. Mays si faut il pourtant sçavoir
des nouvelles de ma pauvre malade avant disner. Commandes donq, je vous prie, que [115] de la
main de madamoyselle de Chantal411, ma fille bien-aymee, ou de ma chere Seur de Chastel412, me
soit envoyé quelque petit billet qui m'en apporte, ou du moins quelque message d'honneur.
Cependant, bonjour, ma tres chere Mere ; Dieu soit nostre medecin et nostre guerison luy
mesme.
Revu sur une copie conservée à Turin, Archives de l'Etat.
_____
408 Philip., ult., 1.
409 Demeurez ainsi en Nôtre-Seigneur, mes bien-aimes, et aimez celui qui vous aime.
410 Une demi-feuille, unie au présent billet, portait ces mots : Ecrit de la propre main de notre Pere St Fr. de Sales.
Pour sa chere fille M. Cecilie de la Rovere, a Turin ; d'où la fausse adresse donnée par les précédents éditeurs. La
Mère de Chantal est la vraie destinataire, et la Sœur de la Rovere reçut plus tard en don le précieux Autographe.
Quant à la date, si le quantième est clairement désigné par le texte, l'année semble l'être aussi, la « pauvre
malade » dont François de Sales demande des nouvelles n'étant autre que la Sainte elle-même. Or, en novembre 1617,
elle fut presque à l'extrémité (voir ci-après, note (430), p. 124) ; il faudrait remonter à 1612 pour la trouver arrêtée par
une maladie à cette époque de l'année, mais le titre de « More » comme l'appellation de « Madamoyselle » pour
Françoise de Chantal, ne permettent pas de songer à ce millésime.
411 La seconde fille de la Sainte.
412 Ici, erreur de lecture de la part des précédents éditeurs qui ont écrit Chantal pour Chastel. La « chere Seur de
Chantal » n'aurait pu être que Marie-Aimée, baronne de Thorens, morte le 7 septembre précédent.
96/346

10.7 Page 97

▲back to top
MCCCLXXIII. A Don Jérôme Boerio, Général des Barnabites
(Minute). Action de grâces pour le retour d'un Religieux. Les
desseins du prince de Piémont et de l'Evêque de Genève sur
Contamine ; pour les faire réussir, l'intervention de D. Juste
auprès des cours de Savoie et de Rome est nécessaire. Deux
autres affaires importantes demandent ce voyage. Litige au
sujet d'un étang sans poissons ; équité et charité du Saint.
Annecy, vers la fin de novembre413 1617.
Reverendissimo in Christo Padre
Révérendissime et très honoré Père
osservandissimo,
dans le Christ,
Ringratio humilmente V. P. Rma
dell'amorevolezza colla quale ha rimandato in
questi luoghi il P. D. Redento, il quale io spero
che farà frutti degni della sua vocatione et grati
a V. P. [116]
Ecco fra tanto la santa et desiderata
pace414, et è hormai tempo di veder come
potremo far riuscire i pii disegni del
Serenissimo Prencipe di Piemonte per la solida
fundatione de questi düoi collegii di Annessi et
Tonone ; per laquale trattando io con Sua
Altezza415, ella si contentò che si pigliasse tutta
l'entrata del monasterio di Contamina,
supprimendo li monaci per più ragioni416, et
transferendo le loro præbende parte in questo
collegio, et parte in quello di Tonone, con patto
però che si mettano in luogho loro altri tanti
Padri Barnabiti in questi collegii, che possano
celebrar le Messe alle quali detti monaci erano
obligati, et con certe altre conditioni lequali dal
P. D. Giusto417 saranno spiegate a V. P., poichè
io le ho poste in scritto alla distesa.
Ma ho giudicato bene, si come ancho il
P. D. Giovanni Battista, Superiore di questo
collegio, huomo giudicioso et che dà a questi
popoli gran sodisfattione418, che questo [117]
Je remercie humblement Votre
Paternité Révérendissime pour la
bienveillance avec laquelle elle a renvoyé en
ce pays le P. D. Redento qui, je l'espère, fera
des fruits dignes de sa vocation et agréables à
Votre Paternité. [116]
Voici cependant la sainte paix tant
désirée ; aussi est-ce le moment de voir
comment nous pourrons faire réussir les pieux
desseins du Sérénissime Prince de Piémont
pour consolider la fondation de ces deux
collèges d'Annecy et de Thonon. Lorsque j'en
traitai avec Son Altesse, elle agréa que, dans ce
but, on prit tout le revenu du monastère de
Contamine, supprimant les moines pour
plusieurs raisons, et attribuant leurs prébendes,
partie au collège de cette ville, partie à celui de
Thonon, à condition, cependant, de placer dans
ces collèges autant de Pères Barnabites qui
puissent célébrer les Messes auxquelles les
moines étaient tenus. Quelques autres
conditions seront expliquées à Votre Paternité
par le P. D. Juste, car je les ai mises au long par
écrit.
Toutefois je crois avec le P. D. Jean-
Baptiste, supérieur de ce collège, homme
413 Le P. Redento Baranzano (voir ci-dessus, note (332), p. 95) étant de retour de son voyage à Milan le 30 octobre,
cette lettre se place naturellement en novembre, avant le départ du Saint pour Grenoble. La réponse du Général est
datée du 21 décembre.
414 Voir ci-dessus, note (377), p. 106.
415 Pendant son séjour à Annecy, août-septembre 1616. (Voir le tome précédent, notes (916), p. 268, et (990), p. 290.)
416 Voir ibid., note (1185), p. 354.
417 D. Juste Guérin qui, de Turin, devait se rendre à Milan. (Voir ci-après, note (423), p. 119.)
418 Né à Rome d'Aimé et de Marguerite de Gennari, et baptisé le 28 octobre 1583, Jean-Baptiste entra en 1601 chez
les Clercs réguliers de Saint-Paul où il fit sa profession solennelle le 22 juillet 1602. Le 24 mai 1608, il recevait
l'ordination sacerdotale, et dès lors commençait ses prédications nombreuses et fécondes en fruits de salut pour les
âmes. Le Chapitre général de 1617 le nomma Supérieur du collège d'Annecy ; par sa doctrine et sa vertu, il s'acquit
97/346

10.8 Page 98

▲back to top
negotio si debba trattar dal P. D. Giusto, non
solamente in questa nostra corte appresso il
Serenissimo Prencipe (il che, s'io non
m'inganno, sarà cosa facile), ma ancora in
Roma, doüe detto Padre faccia instantia
appresso il signor Ambasciatore di Sua
Altezza419, laquale, con espresso
commandamento, farà fare la sollecitatione ;
ma sollecitatione che non si farà mai bene se
[non da] detto Padre, informatissimo delle cose
di qua, et de tutti li motivi et circonstantie che
ponno indurre Sua Santità a far la gratia. Onde
mi pare necessario che detto Padre vada subito
di una corte nell' altra. Et havendo io un par
d'altri negotii buoni et laudabili nella Corte di
Roma, cioè, per un Seminario in questa
diocæsi420, et per rendre conto di questa mia
Chiesa alla Santa Sede, dovendo in ogni modo
mandar costì persona aposta et ben qualificata,
[118] sarei molto ubligato a V. Pta et alla
Congregatione s'io potessi adoprar detto P. D.
Giusto ; et io farei la spesa del viagio, in
maniera che la Congregatione non ne
sentirebbe danno nessuno.
Et per l'istessa via, detto Padre farebbe
duoi altri negotii : uno sarebbe procurar
l'unione di certi benefìcii non conventuali per
il stabilimento del Novitiato di Rumigli421 ; et
l'altro, far venire l'approbatione di queste
Sorelle della Visitatione, all' espeditione della
quale si attende, ma molto lentamente, come il
R. P. Procuratore422 scrive, per esser le Regole
in lingua francese : et il P. D. Giusto
spedirebbe il negotio in un tratto. Supplico
adunque nel nome del Signore V. P. Rma di
volerci concedere detto viaggio423.
Et già che ho parlato di queste Sorelle
della Visitatione, dirò anco quatro parole sopra
l'ultimo articolo della lettera mandatami da V.
P. per il P. D. Redento, et supplico V. P. di
credere saldamente che io non havrei [119]
judicieux et qui donne beaucoup de
satisfaction à la population, que cette affaire
doit se traiter par le P. D. Juste [117] non
seulement en notre cour auprès du Sérénissime
Prince (ce qui, si je ne me trompe, sera chose
facile), mais encore à Rome, où le Père la
poursuivrait auprès de l'Ambassadeur de Son
Altesse, laquelle, par exprès commandement,
en ferait faire la sollicitation. Mais cette
sollicitation ne pourra jamais être bien faite
que par ledit Père qui est très au courant de la
situation locale, non moins que des motifs et
des circonstances qui peuvent engager Sa
Sainteté à accorder la faveur implorée. C'est
pourquoi il me semble nécessaire qu'il aille
tout de suite d'une cour à l'autre. J'ai moi-même
deux autres bonnes et louables affaires à traiter
en Cour de Rome : l'érection d'un Séminaire en
ce diocèse, et le compte à rendre au Saint-
Siège de l'état de mon Eglise. De toutes
manières, je devrai y envoyer exprès une
personne bien qualifiée ; aussi serais-je très
[118] obligé à Votre Paternité et à la
Congrégation si je pouvais employer le P. D.
Juste. Je me chargerais des frais du voyage, de
sorte que la Congrégation n'en éprouverait
aucun dommage.
Par ce même moyen, le Père pourrait
s'occuper encore de deux autres choses : il
ménagerait l'union de certains bénéfices non
conventuels pour l'établissement du Noviciat à
Rumilly, et il obtiendrait l'approbation des
Sœurs de la Visitation, à l'expédition de
laquelle on s'emploie, mais très lentement,
comme l'écrit le Révérend Père Procureur,
parce que les Règles sont en français ; le P. D.
Juste achèverait rapidement l'affaire. Je
supplie donc au nom de Notre-Seigneur Votre
Paternité Révérendissime de vouloir bien
autoriser ce voyage.
promptement l'estime de saiut François de Sales et de toute la population. D. Gennari fit divers voyages en France
pour les fondations des collèges de Chabeuil et de Moatargis ; il devint Supérieur de celui-ci en 1620. Enfin, son
dernier champ d'action fut la cité de Casale (Montferrat) ; il y eut un tel succès auprès des calvinistes, que le Pape le
créa Consulteur du Saint-Office. Sa mort arriva le 17 octobre 1642. (D'après les Notes du R. P. Premoli, Assistant
général des Barnabites, les Acta Collegii Annessii et la Vita di Monsignor Giusto Guérin, Milano, 1859, Appendice,
p. 256.)
419 Philibert-Alexandre Scaglia (voir le tome précédent, note (696), p. 197).
420 Voir ibid., note (1301), p. 397, et ci-après, note (497), p. 142.
421 Voir le tome précédent, Lettre MCCXCIII, p. 364, et note (1209), p. 365.
422 Le P. Tobie Corona, procureur général des Barnabites à Rome. (Voir ibid., note (710), p. 203.)
423 Autorisé par son Général, D. Juste partit pour Rome dans la seconde quinzaine de janvier, et y arriva vers le 14
février. (Voir ci-après, la lettre écrite à D. Guérin entre le 5 et le 10 mars.)
98/346

10.9 Page 99

▲back to top
giamai pensato di domandare quella pezza di
terra, nella quale è la peschiera senza pesci, del
collegio, s'io havessi veduto che il darla fosse
stato di pregiuditio alli Padri, massime circa la
loro ricreatione, essendomi la sanità et
giucundità de' Padri cara quanto la mia
propria424 ; et io so con quale proportione si
debbano risguardare la case (sic) de Religiosi
et quella delle Sorelle, onde non vorrei dar
incommodità a quella per accommodar questa.
Ma per dirlo alla libera et sinceramente, il
prezzo di quella piazza della peschiera essendo
adoprato come si conviene, sarà molto più utile
al collegio che la piazza ; et mi son stupito
della præoccupatione de questi nostri Padri,
alli [120] quali io non hô voluto parlarne,
perchè vedendo che il solo imaginar questo
negotio li dava un gran freddo verso di me, non
volevo passar inanzi. Ma però, quantunque il
P. Superiore moderno425 fosse præoccupato
dall'opinione de l'altri al principio, tuttavia,
considerando che a lui toccava il negocio come
capo del collegio, il (sic) volsi parlar con lui,
non per persuaderli la mia opinione, ma
solamente per farglie intendere che il mio
sentimento non era tanto extravagante come
altri dicevano. Et adesso ha toccato colla mano
che io ho ragione, perchè fra le piazze del
collegio non ciè la più infruttuosa, nè la manco
utile alla recreatione, havendo due fenestre de'
Padri Dominicani lequali sonno di vista
immediata sopra quella pezza di terra ; et il P.
Priore426, nell'istesso muro che è
immediatamente sopra quel luogho, praetende
di fabricare il Novitiato suo colle finestre dalla
istessa banda, nella quale non sô come si possa
negare che habbiano jus luminis et
Et puisque j'ai parlé des Sœurs de la
Visitation, je dirai encore quatre mots sur le
dernier point de la lettre que vous m'avez
envoyée par le P. D. Redento. Je supplie Votre
Paternité de croire fermement que je n'aurais
jamais songé à demander la pièce [119] de
terrain du collège où se trouve l'étang sans
poissons, si j'avais vu que cette cession dût
porter préjudice aux Pères, surtout en ce qui
touche leur récréation ; car leur santé et leur
agrément me sont chers comme les miens
propres. Je sais d'ailleurs dans quelle mesure
on doit avoir égard soit à la maison des
Religieux, soit à celle des Sœurs ; aussi ne
voudrais-je point incommoder celle-là pour
accommoder celle-ci. Mais, pour le dire
librement et sincèrement, si le prix de cette
place de l'étang est employé comme il
convient, il sera bien plus utile au collège que
la place elle-même ; voilà pourquoi j'ai été
étonné des préventions de nos Pères, [120]
auxquels néanmoins je n'en ai point parlé ; car
voyant que la seule idée de cette affaire les
refroidissait avec moi, je n'ai pas voulu passer
outre. Toutefois, bien qu'au commencement le
Père Supérieur actuel fût prévenu par l'opinion
des autres, je pensai que la chose le regardait
comme chef du collège, et je me crus obligé de
lui en parler, non pour lui persuader de se
ranger à mon sentiment, mais seulement pour
lui donner à entendre que mon avis n'était pas
aussi extravagant que quelques-uns le disaient.
En effet, il a maintenant touché du doigt que
j'ai raison ; car, dans tout le jardin du collège,
il n'est pas une place plus stérile et moins
propre à la récréation : deux fenêtres des Pères
Dominicains y ont vue directe, et le Père Prieur
prétend bâtir son Noviciat contre le mur qui
424 Quand, en 1614, on avait projeté l'échange des jardins (voir ci-dessus, note (345), p. 98), le P. Général, alors D.
Mazenta, avait fait de sérieuses oppositions. Cependant, plein de confiance et de respect pour l'Evêque de Genève, il
s'en remit à son avis. Comme rien ne s'était décidé du côté des PP. de Saint-Dominique, tout resta également en
suspens avec les Barnabites. On sait où l'on en était à cette heure avec les premiers (voir ci-dessus, note (315), p. 86)
; il fallait connaître sûrement, avant l'issue du procès, ce qu'on pouvait espérer des seconds. D. Juste, dès le début,
s'était montré favorable à la cession du jardin ; le 15 septembre 1617, il exposait longuement à D. Boerio les fortes
raisons qui plaidaient en faveur des Sœurs de la Visitation. (Voir à l'Appendice II.) De leur côté, Leurs Altesses
insistèrent pour qu'on « leur fît ce plaisir d'accorder la place en question afin d'accommoder ces Dames. » (Lettre du
P. Général à D. Gennari, 26 novembre 1617.) L'affaire se traita en Chapitre à Annecy, le 5 janvier 1618, sur la
réquisition du Général qui désirait satisfaire à la fois le Saint, les princes et les Religieuses ; le vote fut pour
l'affirmative. Peu après, D. Boerio demandait le plan du collège ; il dut recevoir en même temps de nouvelles
réclamations de la part de quelques Religieux, car il tâcha dès lors de faire échouer le projet, tout en ménageant ceux
qu'il avait tant d'intérêt à contenter. (D'après les documents conservés à Milan et à Rome, Archives des RR. PP.
Barnabites, et les Acta Capituli, Archiv. commun. d'Annecy, Série GG, Fonds du Collège Chappuisien.)
425 D. Jean-Baptiste Gennari (voir ci-dessus, note (418), p. 117).
426 Frère Bernardin de Charpenne (voir tome XVI, note (773), p. 239).
99/346

10.10 Page 100

▲back to top
fenestrarum, poichè de facto ne hanno già la donne juste sur cet endroit-là, avec des fenêtres
possessione in quelle due fenestre.
du même côté. Je ne sais vraiment comment on
Hora veda V. P. Rma se sarà gran peut nier qu'ils aient sur celui-ci jus luminis et
prasgiuditio al collegio [121] di dar detto luogo fenestrarum, puisque par ces deux fenêtres ils
; anzi, se non si alzano le mura di esso luogho en ont de fait la possession.
che si estendono verso il restante del collegio,
Votre Paternité Révérendissime verra
quasi tutto il collegio è scoperto alla vista de' maintenant si l'abandon de [121] cette place
Padri Dominicani. Onde, come affettionato al porterait grand préjudice au collège. J'ajoute
collegio et al bene della Congregatione quanto même que si on n'exhausse pas de ce côté les
altro pare mio possa esser, io giudicarei esser murs qui s'étendent vers l'autre partie du
espediente che questa vendita si facesse ; et collège, celui-ci demeure presque tout entier
non dubito che V. P. Rma vedendo la pianta o découvert aux regards des Dominicains. C'est
piano di questo collegio, giudicarà che io ho pourquoi, étant aussi affectionné au collège et
ragione, sì come in fine il P. Superiore et il P. au bien de la Congrégation qu'aucun autre peut
D. Simpliciano427 han confessato.
l'être, j'estimerais qu'il serait expédient de faire
Hora ritorno a supplicare V. P. Rma di cette vente ; et sans doute, Votre Paternité
concedere il viagio del P. D. Giusto, che mi Révérendissime, après avoir vu le plan, jugera
sarà di manco speza et di magior utilità alla que j'ai raison, comme l'ont enfin avoué le P.
Congregatione. Et non havendo più tempo di Supérieur et le P. D. Simplicien.
scrivere più diffusamente, anzi havendo
Je supplie de nouveau Votre Paternité
occasione di pregarla che mi scusi se così mi Révérendissime d'autoriser le voyage du P. D.
son disteso, augurando a V. P. Rma ogni santa Juste, qui me sera de moindre dépense, et à la
felicità nel servitio del Signore, resto di essa Congrégation de plus grande utilité. Et puisque
Humilissimo et affettionatissimo fratello et je n'ai pas le temps d'écrire plus longuement,
servitor, ou plutôt, ayant sujet de vous faire agréer mes
FRANCO, Vescovo di Geneva. excuses pour m'être trop étendu, je souhaite à
Votre Paternité Révérendissime tout saint
Revu sur l'Autographe conserve à la
bonheur dans le service du Seigneur, et je
Visitation d'Annecy. [122]
demeure
Son très humble et très affectionné frère et
serviteur,
FRANÇOIS, Evêque de Genève. [122]
_____
MCCCLXXIV. Au Duc de Savoie, Charles-Emmanuel Ier.
Supplique en faveur de ceux qui s'occupent de «l'art de la soye».
Annecy, 29 novembre 1617.
Monseigneur,
Vostre Altesse a des le commencement favorisé l'establissement de l'art et traffiq de la soye
en ces cartiers de deça428 comme une œuvre de grande utilité au païs et de grande importance pour
la gloire de Dieu, affin de divertir les artisans et ouvriers d'aller perdre leurs ames dans Geneve.
Playse donq a Vostre Altesse de confirmer les privileges des-ja accordés aux maistres et apprentifz,
et autres personnes qui font profession de cet exercice. Je l'en supplie tres humblement, et ne cesse
jamais de luy souhaiter toute sainte prosperité, comme je suis obligé de faire, puisque j'ay lhonneur
d'estre,
427 D. Simplicien Fregoso (voir tome XVI, note (740), p. 231).
428 Voir le tome précédent, Lettre CMXVII, p. 65, note (264), p. 66, et Lettre MCLXXXVII, p. 185.
100/346

11 Pages 101-110

▲back to top

11.1 Page 101

▲back to top
Monseigneur,
XXIX novembre 1617, Annessi.
Tres humble, tres obeissant et tres fidele
orateur et serviteur de Vostre Altesse,
FRANÇS, E. de Geneve.
Revu sur l'Autographe conservé à Turin, Archives de l'Etat.
_____
MCCCLXXV. A la Mère de Chantal. Salutation affectueuse.
Grenoble, 4 décembre 1617.
Dieu, par sa bonté, vous conserve, ma tres chere Mere. Mon cœur vous salue infiniment et
a tous-jours le vostre [123] au dessus de toutes ses affections. Qu'a jamais soyes vous benie ma
tres chere Mere.
VIVE JESUS !
4 decembre 1617, a Grenoble, sans loysir.
A ma tres chere Mere.
_____
MCCCLXXVI. A la Mère Favre, Supérieure de la Visitation de
Lyon429 Inquiétudes du Saint au sujet de la Mère de Chantal.
Nouvelles et salutations.
Grenoble, 4 décembre 1617.
Que vous diray je, ma tres chere Fille ? Certes, je me porte bien, mais tous-jours en peyne
de nostre Mere, que je laissay un peu mieux qu'elle n'estoit il y a dix ou douze jours, mais tous-
jours en danger430. Et pensés si, ayant demeuré despuis la veille de saint André sans sçavoir en
sorte que ce soit de ses nouvelles, je dois estre peyné ! La volonté de Dieu soit a jamais l'unique
refuge de la nostre, et son accomplissement, nostre consolation.
429 Hérissant, tome III, p. 391, et les éditeurs suivants ont donné pour adresse : A Mme Françoise Angélique de Saint-
Hermand ; c'est sans doute le nom de la propriétaire qui était inscrit sur l'Autographe. Mais il suffit de lire le texte, le
dernier alinéa surtout, pour reconnaître la Mère Favre comme destinataire.
430 La mort de la jeune baronne de Thorens avait « percé et outre-percé » le cœur de sa mère (Lettres, vol. I, p. 221).
L'âme de la Sainte restait forte dans la douleur, mais le corps y succomba. Dès octobre, une violente fièvre quarte se
déclara et, le mal grandissant, on crut bientôt qu'il faudrait aussi préparer ses funérailles. On comprend dans quelles
inquiétudes l'Evêque s'était éloigné d'Annecy.
101/346

11.2 Page 102

▲back to top
Je suis icy receu avec joye431, et ne nous manque que [124] nostre seur Barbe Marie432,
laquelle sachant vers vous je ne requiers point. Ma tres chere Fille, je vous salue de tout mon cœur
et suis tres parfaitement vostre.
Nostre pere433 se porte bien ; le frere et la seur vont a Nessi434, trop heureux que sera ce
peuple de les voir.
Je salue nos cheres Seurs, et ma Seur Marie Aymee435 tres parfaitement, avec ma Seur
Jeanne Françoise436, et ma Seur Marie Catherine437 et ma Seur Françoise Hieronime438, en somme,
toutes sans reserve, et ma Seur [125] Colin439. Dieu soit a jamais au milieu de leurs ames. Amen.
4 decembre 1617, a Grenoble.
_____
MCCCLXXVII. A la Mère de Chantal. Un chant de joie du saint
Evêque. Ses souhaits pour lui-même et pour la destinataire.
Grenoble, 8 décembre 1617.
Au nom de la tressainte Trinité, trois paroles a ma tres chere Mere. Je suis allé tout gay
comme un petit oyseau, dans ma chaire, ou j'ay chanté plus joyeusement que l'ordinaire a l'honneur
de ce grand Dieu, qui a racheté ma vie de la mort440, et qui me couronnera en sa misericorde et
miserations441. Ouy, ma chere Fille, car saint Paul disoit bien a ses enfans : ma joye et ma
431 Cette joie du peuple fut loin d'être partagée par les ministres protestants, « qui sçavoyent fort bien qu'il ne venoit
que pour leur dommage. » (Charles-Auguste, Histoire, etc., liv. IX.) D'autre part, quelque jaloux de sa gloire publiait
« qu'il était un téméraire d'entreprendre de prêcher deux années consécutives dans une même ville, et devant un célèbre
Parlement ; que les hérétiques s'en réjouissaient, espérant que ses redites feraient paraître son ignorance. A quoi
l'humble Prélat répondit : « Si je voulais me prêcher moi-même, j'aurais sujet de craindre ; mais ne voulant prêcher
que Jésus-Christ et sa gloire, j'espère de faire connaître que notre Dieu est un fonds inépuisable. » (Hist. mste de la
Fondation de la Visitation de Grenoble.) Et en effet, à l'admiration de tous, l'orateur sut présenter sous des formes
nouvelles les vérités immuables déjà enseignées dans les stations précédentes. Comme alors, les réformés se mêlèrent
aux catholiques pour écouter le Saint, malgré les défenses formelles de leurs pasteurs. Le prêche avait été, à dessein,
fixé à l'heure des sermons ; mais le temple resta désert, et l'église Saint-André remplie d'une foule de peuple. (Ancien
Ms. de l'Année Sainte.)
432 La présidente Le Blanc de Mions (voir le tome précédent, note (1210), p. 366).
433 Le président Favre.
434 Metz, qui se lit dans les éditions précédentes, est évidemment une erreur de lecture. René Favre de la Valbonne,
nommé président au Conseil de Genevois dès le mois de juillet (voir ci-dessus, note (231), p. 58), se présenta aux
syndics d'Annecy en septembre, mais sans doute, il dut retourner à Chambéry, réservant son installation solennelle
pour l'ouverture des tribunaux. La cérémonie eut lieu le 10 janvier 1618. (Reg. des Délib. municip. et Acta Collegii,
Archiv. commun. d'Annecy.)
435 Sœur Marie-Aimée de Blonay.
436 Sœur Jeanne-Françoise Estienne (voir le tome précédent, note (1195), p. 359).
437 Grandmante du célèbre maréchal de Villars, Sœur Marie-Catherine était née à Condrieu, de Claude de Villars et
de Marguerite de Fay. Refusant la coadjutorerie de sa sœur aînée, abbesse de l'Ordre de Saint-Benoît, elle vint se
présenter à la Visitation de Lyon, parce qu'elle avait appris qu'on faisait, dans cet Institut, « une singulière profession
de l'humilité. » Admise à la vêture le 23 août 1615, à l'âge de vingt-et-un ans, elle prononça ses vœux le 18 juin 1617.
Lorsque son frère Claude de Villars eut pourvu à l'établissement du Monastère de Condrieu, elle fit partie du groupe
des fondatrices en qualité d'Assistante, son humilité lui ayant fait refuser la charge de Supérieure (1630). Elle dut
pourtant l'accepter plus tard à Avignon, de 1636 à 1639, et revint ensuite à Lyon, où elle décéda saintement en 1655,
(Livre du Chapitre du Ier Monastère de Lyon, transféré à Venise en 1801, et Archives de la Visitation d'Annecy.)
438 Sœur Françoise-Jéronyme de Villette voir le tome précédent, note (578), p. 159).
439 Isabeau Daniel, veuve Colin, alors novice sous le nom de Sœur Jacqueline-Elisabeth. (Voir tome XVI, note (779),
p. 241.)
440 Allusion à la maladie mortelle de la Fondatrice (voir la Lettre précédente et note (430), p. 124). Le Bienheureux
venait de recevoir de meilleures nouvelles. (Cf. note (447) de la lettre suivante.)
441 Ps. CII, 4.
102/346

11.3 Page 103

▲back to top
couronne442, composee des misericordes divines. Soyons a jamais tout a Dieu, benissons son saint
nom, et exaltons le throsne de son amour sacré dans nostre ame ; elle vivra jusques au siecle des
siecles.
Dieu donq soit a jamais beni, qui nous console en toutes nos tribulations443. Dieu soit a
jamais beni, et veuille de plus en plus establir l'esperance qu'il nous donne de la guerison de ma
tres aymee Mere et Fille. Dieu soit beni, et me donne la grace de luy rendre quelque service icy,
et par tout ou il luy plaira de m'appeller, sur tout en mon diocese, puisqu'il luy a pleu de m'en
charger, et du costé duquel, ou que j'aille, mon cœur s'y tournera a tous momens. [126]
La glorieuse Vierge soit a jamais honnoree, qui est nostre Dame et Reyne de dilection444.
C'est aujourd'huy sa premiere feste, qui m'est signalee445, et je viens de l'eglise des Peres Recolletz
qui est dediee au mystere qui se celebre446.
O Dieu, Sauveur de nostre ame, qui estes le jour de la clarté eternelle, donnés ce jour
temporel et dix mille apres, bons et utiles, saintz et aggreables, a la Fille bienaymee qu'il vous a
pleu rendre mienne et pretieuse a mon cœur comme moy mesme.
FRANÇS, E. de Geneve.
Jour de la Conception Nostre Dame, 1617.
_____
MCCCLXXVIII. A la même (Fragment). Messe d'action de
grâces pendant laquelle la Sainte Vierge a regardé François de
Sales de « bon œil ».
Grenoble, 9 décembre447 1617.
……………………………………………………………………………………………………..
Je ne pouvois mieux faire recevoir mon remerciement au celeste Medecin qui vous a guerie,
que par les mains de ma Dame sa Mere, Marie conceuë sans peché, nostre chere et souveraine
Maistresse. C'est pourquoy, aussi [127] tost apres mon pauvre petit sermon, je me suis venu reposer
en son eglise des Recolletz448 pour celebrer la Messe, durant laquelle cette sainte Dame, de sa
grace, a bien daigné me voir de si bon œil, que j'espere d'y retourner quelquefois pour la supplier
de conserver long tems la tres chere Mere de laquelle sans doute elle m'a obtenu la guerison
Revu sur le texte inséré dans un ancien Ms. de l'Année Sainte,
conservé à la Visitation d'Annecy. [128]
_____
442 Philip., ult., 1.
443 II Cor., 1, 3, 4.
444 Cf. Eccli., XXIV, 24.
445 Le 8 décembre 1603, François de Sales avait été sacré dans l'église de Thorens.
446 Voir le tome précédent, note (1074), p. 318.
447 Sur la foi de l'Année Sainte manuscrite, nous plaçons 3U 9 décembre ce fragment daté par Migne du 8. En effet, le
Saint aura reçu le jour de la fête de l'Immaculée-Conception l'espérance de la guérison de la Mère de Chantal, comme
il l'insinue lui-même, et le lendemain, une assurance plus grande. On pourrait cependant craindre, à cause de la
ressemblance des faits, que l'avant-dernier alinéa de la lettre précédente et les présentes lignes soient un même texte ;
mais le plus probable paraît être qu'il y eut réellement deux visites aux Récollets, et deux lettres différentes.
448 Voir le tome précédent, note (1074), p. 318. « Au sortir de son sermon, » raconte l'annaliste, « il alla a pies dans
l'eglise des Recolets... et i celebra la tres sainte Messe avec de si grands sentiments de pietté que tous ces bons Peres
le crurent extasié, ainsi que nous l'avons appris de la bouche de quelques uns qui etoient presens. » (Ancien Ms. de
l'Année Sainte.)
103/346

11.4 Page 104

▲back to top
MCCCLXXIX. A Madame de Chailliol449. Un heureux mariage.
Exhortation à l'humilité. Les avantages de la dévotion.
Quelle vertu il faut « soigneusement nourrir. »
Grenoble, 27 décembre 1617.
Madamoyselle,
Les marques d'une vraye vertu et pieté que j'ay veuës en vostre ame450 et l'estime que je
fay de vostre merite ne permettront jamais que je cesse de vous honnorer et cherir parfaitement.
C'est pourquoy, bien que par les projetz de l'annee passee je devois m'imaginer que vous n'esties
plus icy, si est ce que je n'ay peu m'empescher que d'abord mon cœur ne vous cherchast autour de
[128] madame vostre mere451. Et je ne vous ay [cherchée que] pour premierement me res-jouir
avec vous de vostre heureux mariage, car on m'en dit beaucoup de bien ; que vous aves tant de
contentement et que vous en rendes tant, que monsieur vostre mari est si vertueux452, et que le lien
d'une sainte et forte amitié vous tient unis ensemble ; en somme, que vous aves toute occasion de
louer Dieu, qui vous a fait rencontrer si favorablement le soin de monsieur vostre pere453 et de
madame vostre mere.
Et puis, me resouvenant que vous aves esté un peu ma fille spirituelle, je vous supplie de
vivre bien conformement a la grace que Nostre Seigneur vous a faite, et de correspondre fidelement
a la lumiere qu'il vous a envoyee par tant d'instructions qu'il vous a fait donner.
Souvenés vous, Madamoyselle, de vivre tous les jours en humilité, affin que Dieu vous
benisse en toute vostre mayson, puisqu'il est certain que Dieu resiste aux superbes et vains, et
donne aux humbles sa grace454. Rien ne vous honnorera tant que cette humilité, car Dieu exalte
les humbles455. Elle vous acquerra456
[Il n'y a rien] qui face tant arriver d'honneur, de reputation et de bonheur sur nous que de
ne point s'amuser.
Je ne vous dis rien de la sainte devotion, qui est desirable en tous tems et tous lieux ; car,
comme vous sçaves, parmi les joyes et contentemens, elle modere nos espritz ; [129] entre les
adversités, elle nous sert de refuge et nous delasse ; et, quoy qu'il nous arrive, elle nous fait benir
Dieu, qui est meilleur que tout. Elle rend la jeunesse et plus sage et plus aymable, et la viellesse
moins insupportable et ennuyeuse.
Voyés, je vous supplie, ce que j'ay marqué au livre de l'Introduction a la Vie devote457, de
la douceur et suavité que l'on doit soigneusement nourrir au mariage ; et pour bien apprendre a
prattiquer les enseignemens que vous y treuveres, il faut commencer des maintenant d'en essayer,
449 Françoise Béatrix-Robert, l'une des filles de Gaspard, seigneur de Bouquéron et d'Antoinette Camus, avait épousé,
dans le courant de cette année 1617, Claude de Chailliol, lieutenant-général civil et criminel au bailliage de Briançon.
Elle lui porta en dot la terre de Bouquéron.
450 Pendant l'Avent de 1616 et le Carême de 1617.
451 Mme de Bouquéron est destinataire le 18 janvier 1618. (Voir ci-après, Lettre MCCCXCI, p. 151.)
452 Claude de Chailliol, fils de François de Chailliol et de Gasparde du Faure, fut comme son père conseiller du Roi,
juge présidial, et, depuis 1620, vibaillif du Briançonnais. Il vivait encore en 1635. (D'après Chorier, L'Estat politique
de la province de Dauphiné, Grenoble, 1671, tome III, et l'Inventaire somm. des Archiv. des Hautes-Alpes, par l'abbé
Guillaume, tomes I et V.)
453 Fils de Jean Béatrix-Robert, seigneur de Bouquéron, et d'Anne de la Tour, Gaspard suivit les traditions de sa famille
en entrant dans la magistrature. D'abord avocat au Parlement de Grenoble, il fut nommé conseiller par lettres royales
du 23 juillet 1586, et remplaça François de Sautereau comme président le 21 novembre 1617. Il résigna cet office en
1621. (D'après l'Inventaire somm. des Archiv. de l'Isère, par Prudhomme, tome II.)
454 Jacobi, IV, 6.
455 Luc., I, 52.
456 Au lieu de reproduire ici les membres de phrases avec lesquels Hérissant a cru pouvoir suppléer à une lacune de
l'Autographe, nous indiquons celle-ci par des points de suspension.
457 Partie III, chap. XXXVIII.
104/346

11.5 Page 105

▲back to top
en faysant faire l'exercice du matin et du soir458. Et quand vous seres quelquefois en priere, priés,
je vous supplie, un peu pour moy, qui de tout mon cœur vous souhaitte, et a monsieur vostre mari
que je veux honnorer de toute ma force, mille et mille benedictions, demeurant,
Madamoyselle,
Vostre tres humble et tres affectionné serviteur,
FRANÇS, E. de Geneve.
Le jour de saint Jean l'Evangeliste 1617.
A Madamoyselle
[Madamoyselle] de Chaillol.
A Briançon.
_____
MCCCLXXX. A la Sœur de Gérard, Novice de la Visitation459.
La plus grande austérité. L'école de l'abnégation de la propre
volonté. Quelle mortification il faut rechercher.
[Grenoble, décembre 1617.]
J'ay veu les suggestions que l'ennemy de vostre avancement fait a vostre cœur, ma tres
chere Fille, et voy [130] d'ailleurs la grace que le tressaint Esprit de Dieu vous donne pour vous
maintenir forte et ferme en la poursuite du chemin auquel il vous a mis. Ma tres chere Fille, ce
malin ne se soucie point que l'on deschire le cors, pourveu qu'on face tous-jours sa propre volonté
; il ne craint pas l'austerité, ains l'obeyssance. Quelle plus grande austerité y peut-il avoir que de
tenir sa volonté sujette et continuellement obeyssante ?
Demeurés en paix. Vous estes amatrice de ces volontaires penitences, si toutefois
penitences se doivent nommer les œuvres de l'amour propre. Ouand vous pristes l'habit, apres
plusieurs prieres et beaucoup de considerations, il fut treuvé bon que vous entrassies en l'escole de
l'obeyssance et de l'abnegation de vostre propre volonté, plustost que de demeurer abandonnee a
vostre propre jugement et a vous mesme. Ne vous laisses donq point esbransler, mais demeures ou
Nostre Seigneur vous a mis. Il est vray que vous y aves des grandes mortifications de cœur, vous
y voyant si imparfaite et digne d'estre souvent corrigee et reprise ; mais n'est-ce pas ce que vous
deves chercher, que la mortification du cœur et la connoissance continuelle de vostre propre
abjection ?
Mais, ce dites vous, vous ne pouves pas faire telle penitence que vous voudries. Or dites
moy, ma tres chere Fille, quelle meilleure penitence peut faire un cœur qui fait faute, que de subir
une continuelle croix et abnegation de son propre amour ? [131]
458 Partie II, chap. X, XI.
459 Mlle de Gérard (voir ci-dessus, note (78), p. 10), étant encore dans le monde, avait été fort adonnée aux pénitences
corporelles. Cet attrait pour les austérités devint, après son entrée au noviciat, une véritable tentation. « Elle eut d'abord
de la peine. » raconte l'Histoire de la Fondation de la Visitation de Grenoble, « à comprendre la perfection cachée
sous l'apparente douceur de notre manière de vie ; elle écrivit sa peine à son saint Directeur qui pour lors était absent,
et il lui fit cette réponse... » C'est le texte que nous donnons ici.
Sœur Jeanne-Hélène (elle avait pris l'habit à Annecy, le 5 août 1617), encouragée par ces judicieux conseils,
poursuivit son noviciat, qu'elle termina à Grenoble par l'émission des vœux, le 19 août 1618. La Mère de Chastel
l'emmena en 1624 à la fondation du Monastère d'Aix-en-Provence ; elle en revint en 1625 pour exercer la charge de
Supérieure dans celui d'Embrun, établi depuis quelques mois. Après l'avoir gouverné six ans, la Mère de Gérard fonde
la Visitation de Sisteron ; réélue à Embrun en 1641, 1644 et 1650, elle est déposée en 1653, et dès lors son nom reste
dans l'oubli. (Archives de la Visitation d'Annecy.)
Puisque saint François de Sales « était absent » d'Annecy lorsqu'il traça ces lignes, il est vraisemblable de les
dater de l'Avent 1617.
105/346

11.6 Page 106

▲back to top
Mais je dis trop : Dieu luy mesme vous tiendra de la mesme main de sa misericorde avec
laquelle il vous a mis en cette vocation, et l'ennemy n'aura point de victoire sur vous, qui, comme
la premiere fille de ce païs-la460, deves estre bien espreuvee par la tentation461, et bien couronnée
par la perseverance462.
Je suis tout vostre, ma tres chere Fille.
FRANCS, E. de Geneve.
_____
MCCCLXXXI. A la Mère Favre, Supérieure de la Visitation de
Lyon. Force des vœux dans l'Institut de la Visitation. — Un
procédé que le monde n'approuve pas. Légitimité de
l'expulsion dans les Ordres religieux, et de la prolongation du
noviciat. Douce plainte du saint Fondateur.
Grenoble, décembre 1617 463.
Vos vœux, ma tres chere Fille, sont aussi fortz que les vœux de tous Ordres de Religion
pour obliger la conscience des Seurs a leur observance. Il est vray neanmoins qu'une fille qui
voudra perdre son ame et son honneur se pourra marier apres les vœux, comme feroit la plus grande
professe de France si elle se vouloit perdre et se servir de l'Edict de pacification464. Le formulaire
[132] de vos vœux est fait selon ceux des pareilles Congregations d'Italie, et exprime beaucoup
plus la force de l'obligation que ne font la pluspart des formulaires de la Regie de saint Benoist.
Le vœu de chasteté est fondamental, selon les anciens Peres465, es monasteres des femmes, et les
autres ne laissent pas d'estre essentielz.
Il est vray, on peut estre dispensé des vœux simples, et des autres aussi ; plus facilement
toutefois de ceux la que de ceux ci, mais non sans grande occasion, et lhors qu'il est expedient :
dont les Peres Jesuites se treuvent extremement bien, maintenant en partie le lustre de leur tres
illustre Compaignie par ce moyen, lequel le monde n'appreuve pas, mays ouy bien Dieu et l'Eglise.
Et toute l'antiquité des Religions a esté comme cela, la solemnité des vœux ayant esté establie
despuis peu de centaines d'annees466.
460 Si le Saint a écrit de Grenoble, a-t-il vraiment dit : « de ce païs-la » ? Peut-être les éditeurs de 1626 ont-ils fait ici
une légère modification.
461 Cf. Eccli., II, 1.
462 Cf. Apoc., II, 10.
463 Avant le Bref de Paul V (23 avril 1618) qui ordonnait à saint François de Sales d'ériger la Visitation en Ordre
religieux (voir à l'Appendice I), deux Monastères seulement furent fondés : Lyon et Moulins. Or, c'est dans la première
de ces villes qu'on souleva des difficultés au sujet des vœux simples que faisaient alors les Religieuses de l'Institut ;
la correspondance de l'Evêque de Genève et de la Mère de Chantal en témoigne. C'est donc à la Mère Favre que
s'adresse cette lettre. Elle a dû être écrite à la fin de 1617, et de Grenoble ; plusieurs sérieuses raisons font penser que
c'est la lettre du Fondateur annoncée par la Sainte à la Supérieure de la Visitation de Lyon le 25 novembre (Lettres,
vol. I, p. 232).
464 L'Edit de Nantes (1598) qui termina définitivement les guerres de religion et accorda aux protestants la liberté de
leur culte.
465 On peut citer parmi les Pères latins : saint Cvprien, Liber de Habitu Virginum ; saint Ambroise. De Virginibus et
De Viduis ; saint Jérôme, De perpetua Virginitate B. Maria, etc. ; saint Augustin, De sancta Virginitate, etc. Entre les
Pères grecs : saint Grégoire de Nysse, De Virginitate ; saint Basile, Constitutions monastica, etc.
466 Historiens et canonistes sont d'accord pour affirmer que le canon 21e du premier Concile de Latran (c. VIII, D. 27
dans le décret de Gratien), sous Callixte II, en 1123, énonce certainement cette loi. Héfélé (Histoire des Conciles, trad.
Delarc, tome VII, pp. 98 seq.) voudrait en faire remonter l'origine plus haut. (Cf. L. Choupin, Valeur des décisions du
Saint-Siège, 72e prop. du Syllabus, pp. 349-352.)
106/346

11.7 Page 107

▲back to top
L'expulsion a tous-jours esté parmi les anciens Religieux. C'est une chose rigoureuse que
pour ne vouloir pas observer le silence on mist une fille dehors. Ce ne seroit pas faute d'observer
le silence, mays pour vouloir obstinement troubler et renverser l'ordre et la Congregation, et
mespriser le Saint Esprit qui a ordonné le silence es Maysons religieuses. Que si on n'expulse pour
l'obstinee desobeyssance et le mespris affecté de l'ordre, je ne sçai pourquoy on expulsera. En fin,
les Religieux, mesme les plus solemnelz, expulsent ; au moins voit-on des [133] Religieux
expulsés de l'Ordre de Saint François, voire mesme des Capucins ; et les Peres Jesuites, qui sont
si avisés et prudens, expulsent pour les desobeyssances, pour peu qu'elles soyent affectionnees et
entretenues467.
La prolongation du noviciat se faysant pour cause, n'est pas contraire au Concile468, comme
ont declairé ceux qui ont la charge des declarations d'iceluy, et les docteurs mesmes l'entendent
ainsy469. De fait, les Carmelines la font selon qu'il semble a propos.
Si ces bons Messieurs470 eussent autant estudié et pensé pour censurer comme nous avons
fait pour establir, nous n'aurions pas tant d'objections. Or, Dieu soit loué ! J'espere que bien tost
chacun s'accoysera par la conclusion qu'on y mettra a Rome471.
Ma tres chere Fille, pour Dieu, ayes bon courage ; c'est aussi pour luy que vous vives et
travailles. Il soit a jamais beni et glorifié. Amen.
FRANÇS, E. de Geneve.
Si ceux qui font cette objection sont gens d'estude, ilz pourront lire Leonard Lessius,
Jesuite472, ou ilz treuveront ce qu'il leur faut. [134]
_____
Remarquons que ni la solennité des vœux considérée en elle-même, ni les effets qu'on lui attribue, ne font
partie de l'essence des vœux de religion, qui peuvent exister et ont réellement existé sans cela. Cette solennité est tout
entière d'institution ecclésiastique. Saint François de Sales l'explique très exactement dans la Préface des Règles de la
Visitation.
467 Vide Constit. S. J., secunda Pars, c. II, n. 4.
468 Concil. Trident., Sess., XXV, cc. XV, XVI, de Regular. et Monial.
469 La Sacrée Congrégation des Cardinaux interprètes du Concile de Trente, érigée par le motu proprio de Pie IV (2
août 1564), fut chargée d'interpréter authentiquement et de faire exécuter les décrets disciplinaires du Concile. Saint
Pie V, Grégoire XIII et Sixte V, confirmèrent à la Congrégation ce pouvoir ordinaire. (Cf. Alès, Dictionnaire
d'apologétique, art. Congrégations romaines.)
Pour les décisions de cette Congrégation au sujet de la prorogation du noviciat, voir Pallottini, Collectio
omnium conclusionum et resolutionum S. C. Concil. Trid., Voc. Professio religiosa, § II, n. 65, seq. Le même auteur
cite au n° 64, entre autres docteurs ayant écrit sur cette matière, Barbosa, Sanchez, etc.
470 Sans doute des membres du clergé de Lyon.
471 En effet, elle ne se fit pas attendre (voir ci-dessus, note (463), p. 132).
472 De Just. et Jure, l. II, c. XLI, De Statu religioso, Dub. XIV, pp. 610 seq. (Ed. 4a, Antwerpiæ, 1617.)
107/346

11.8 Page 108

▲back to top
MCCCLXXXII. A Madame de la Valbonne. Deux vertus
essentielles. Le plus sûr moyen d'acquérir l'honneur. Les
sécheresses spirituelles et leurs remèdes. Avis pour la
confession.
[1615-1617 473.]
Dieu vous benisse, ma tres chere Niece, ma Fille, dequoy vous perseveres tous-jours au
soin de luy garder les plus pretieuses affections de vostre cœur. Que vous seres heureuse, si cette
perseverance dure jusques a la fin de cette miserable vie ! car ainsy cette fin sera le sacré
commencement d'une belle et tressainte eternité.
Il faut bien tous-jours tenir ferme en nos deux cheres vertus, la douceur envers le prochain
et la tres aymable humilité envers Dieu ; et j'espere qu'il sera ainsy, car ce grand Dieu qui vous a
pris par la main474 pour vous tirer a soy, ne vous abandonnera point qu'il ne vous ayt logee en son
tabernacle eternel475. Il faut arracher tout a fait le soin des preseances, puisque mesme on ne
possede jamais tant l'honneur qu'en le mesprisant476, et que cela trouble le cœur et nous fait faire
des eschappees contre la douceur et l'humilité.
Ne vous estonnes nullement de vos distractions, froideurs et secheresses, car tout cela se
passe en vous du costé des sens et en la partie de vostre cœur qui n'est pas entierement en vostre
disposition ; mays, a ce que je voy, vostre courage est immobile et invariable es resolutions que
Dieu nous a donné. Vrayement, ma chere [135] Fille, il ne faut pas laisser la tressainte Communion
pour cette sorte de mal ; car rien ne ramassera mieux vostre esprit que son Roy, rien ne l'eschauffera
tant que son soleil, rien ne le destrempera si souëfvement que son bausme.477
Et ne vous troubles point dequoy vous ne remarques pas toutes vos menues cheutes pour
vous en confesser ; non, ma Fille, car, comme vous tombes souvent sans vous en appercevoir,
aussi vous vous releves sans vous en appercevoir. Aussi n'est-il pas dit au passage que vous m'aves
allegué478, que le juste se voit ou sent tomber sept fois le jour, mais qu'il tombe sept fois ; aussi il
se releve sans attention a ses relevees. Ne vous mettés donq pas en peyne pour cela, mais allés
humblement et franchement dire ce que vous aures remarqué ; et pour ce que vous n'aures pas
remarqué, remettes le a la douce misericorde de Celuy la qui met la main au dessous de ceux qui
tombent sans malice, affin qu'ilz ne se froissent point479, et les releve si vistement et doucement
qu'ilz ne s'apperçoivent pas, ni d'estre tombés, parce que la main de Dieu les a recueillis en leurs
cheutes, ni d'estre relevés, parce qu'elle les a retirés si soudain qu'ilz n'y ont point pensé.
A Dieu, ma tres chere Fille, ma Niece ; conservés tous-jours bien vostre ame bienaymee,
et ne tenes pas grand conte de ces annees qui passent, sinon pour gaigner la tressainte eternité.
FRANCS, E. de Geneve. [136]
_____
473 On ne peut fixer une date précise à cette lettre, jointe dans les éditions précédentes à celle du 15 mai 1617 (voir ci-
dessus, note (50), p. 3). En comparant les avis que reçoit ici la destinataire à ceux qui lui furent donnés en 1614 (voir
tome XVI, p. 209), il est permis de les supposer postérieurs ; mais ils doivent avoir précédé l'installation de Mme de la
Valbonne à Annecy, comme présidente du Genevois, en janvier 1618. (Voir ci-dessus, note (434), p. 125.)
474 Cf. Is., XLI, 13 ; Ps. LXXII. 24.
475 Pss. XXVI, 5, XLII, 3.
476 Cf. Introd. a la Vie dev., Partie III, ch. IV.
477 C'est ici que l'édition de 1626 insère la lettre du 15 mai donnée plus haut, p. 3.
478 Prov., XXIV, 16.
479 Ps. XXXVI, 24.
108/346

11.9 Page 109

▲back to top
MCCCLXXXIII. A la Mère de Brechard, Superieure de la
Visitation de Moulins (Fragment). Pourquoi les premières Mères
de la Visitation doivent être très humbles et unies à Dieu.
Septembre 1617-mars 1618 480.
……………………………………………………………………………………………………..
Mon Dieu, ma tres chere Fille, que vous autres qui estes les premieres Meres et comme les
colomnes de cette petite Congregation, deves estre grandement humbles, vertueuses et unies a
l'esprit de Dieu, puisque vous voyes que de toutes partz l'on vous desire, par tout l'on cherche des
greffes et plantes de vos pepinieres ; car voyla Grenoble481, Turin482, Montpellier, Valence,
Clermont, Le Mans483, en somme par tout il semble que l'on vous veuille a l'envi, sans que par nul
artifice on recherche ces recherches
Revu sur le texte inséré dans l'Histoire de la Fondation du 1er Monastère de la Visitation
d'Annecy. [137]
_____
480 Après avoir raconté, dans l'Histoire de la Fondation du 1er Monastère de la Visitation d'Annecy, la mort de la
baronne de Thorens, la Mère de Chaugy ajoute : « Il sembloit que cette benite defunte obtint de Dieu que grand nombre
de filles vinssent posseder la chere vocation qu'elle avoit tant aymee, car de tous costés l'on demandoit des
establissemens de la Visitation ; ce qui fit escripre a nostre Bx Pere les parolles suivantes a la chere Mere de nostre
Maison de Molins : Mon Dieu, ma tres chere Fille, » etc. La fondation de Grenoble ayant été résolue définitivement
pendant le Carême de 1618, la date de ce fragment se trouve comprise entre cette époque et le mois de septembre
1617.
481 Voir le tome précédent, note (1147), p. 343, et ci-après, Lettre MCDXII.
482 Sollicitée dès 1617, la fondation de Turin n'eut lieu qu'en 1638. (Cf. le tome précédent, note (1258), p. 385.)
483 Une seule de ces villes posséda un monastère de la Visitation du vivant du saint Evêque ; ce fut Valence, où
l'établissement se fit le 10 juin 1621. Montpellier attendit le sien jusqu'au printemps de 1631 ; la Maison de Clermont
se fonda le 3 septembre 1649, celle du Mans le 30 juillet 1634.
109/346

11.10 Page 110

▲back to top
Année 1618
_____
MCCCLXXXIV. Au Duc de Savoie, Charles-Emmanuel Ier.
Prochain voyage du Cardinal de Savoie en France. L'Evêque
de Genève se dispose à l'accompagner.
Annecy. 4 janvier 1618 484.
Monseigneur,
Comme Vostre Altesse Serenissime pouvoit choysir mille et mille personnes plus capables
de servir dignement Monseigneur le Prince Cardinal au voyage de France485, aussi ne pouvoit elle
donner le commandement de ce faire a homme qui vive, qui, avec plus de fidelité et de cœur, receut
cet honneur, ni qui, avec plus d'affection, se veuille essaÿer de correspondre par son tres humble
service a la faveur et gloire que je sens d'y estre appellé. [138]
Et attendant un nouveau commandement pour le jour auquel je me rendray a ce devoir, je
demeure,
Monseigneur,
Vostre tres humble, tres obeissant et tres fidele
orateur et serviteur,
FRANCS, E. de Geneve.
Revu sur l'Autographe conservé à Turin, Archives de l'Etat.
_____
484 Bien que les éditeurs précédents aient supposé que ces lignes avaient le prince de Piémont pour destinataire, leur
ton, plus obséquieux que celui de la lettre suivante, donne plutôt à croire qu'elles furent adressées au duc de Savoie.
Les deux lettres durent être expédiées simultanément, nul doute qu'elles ne soient aussi de la même date.
485 Le voyage de Maurice de Savoie (voir tome XIII, note (934), p. 345), décidé dès la fin de 1617, avait pour but
avoué de remercier le roi de France du secours prêté dans la dernière guerre, et de s'entendre avec lui pour mettre
complètement fin aux troubles d'Italie. Le but secret, alors à demi soupçonné hors de la cour ducale, et qui devint plus
tard le but principal, était le mariage de Christine de France avec Victor-Amédée de Savoie. Retardé par l'inexécution
du traité de Pavie, le Cardinal ne partit de Turin que le 6 octobre 1618. (Voir plus loin les lettres du 16 octobre, et
celle du 9 novembre à Dona Ginevra Scaglia.)
110/346

12 Pages 111-120

▲back to top

12.1 Page 111

▲back to top
MCCCLXXXV. Au Prince de Piémont, Victor-Amédée
(Inédite). Reconnaissance et soumission au sujet d'un
commandement honorable.
Annecy, 4 janvier 1618.
Monseigneur,
Je reçois a grand bonheur486 le commandement que Vostre Altesse me fait de suivre
Monseigneur le Serenissime Cardinal en France, et le feray487, Dieu aydant, avec tant de fidelité
et sujettion488, que je ne demeriteray point lhonneur que je possede d'estre489,
Monseigneur,
Vostre tres humble, tres fidele et tres obeissant
orateur et serviteur,
FRANCS, E. de Geneve.
4 janvier 1618, Annessi.
Revu sur l'Autographe conservé à Turin, Biblioteca Civica. [139]
_____
MCCCLXXXVI. A Don Juste Guérin, Barnabite. Raisons pour
lesquelles on sollicite le privilège du petit Office pour les Sœurs
de la Visitation. Demande d'Indulgences pour les
Monastères. Traiter toute cette affaire avec prudence.
Nouvel effort du Saint pour l'établissement d'un Séminaire.
Annecy, [commencement de janvier] 1618 490.
Mon Reverend Pere,
……………………………………………………………………………………………………..
L'affaire des Dames de la Visitation a Rome consiste en ce point : qu'il playse a Sa Sainteté
leur permettre de n'estre point obligees a dire le grand Office, pour les raysons suivantes491 :
Premierement, il n'y a nation au monde ou les femmes prononcent si mal le latin qu'en celle
de France, et notamment icy ; et seroit presque impossible de faire bien apprendre la prononciation
486 [Les variantes qui suivent sont tirées d'un autre texte autographe conservé au 1er Monastère de la Visitation de
Marseille.]
Je reçois a tres grand honneur
487 et l'executeray
488 de sujetion et de fidelité
489 point d'estre advoüé a jamais, comme je la supplie tres humblement de faire
490 Le Religieux auquel les éditeurs précédents adressent ces lignes, est sûrement D. Juste Guérin, chargé de traiter à
Rome les affaires de la Visitation (cf. ci-dessus, Lettre MCCCLXXIII, p. 119). Hérissant donne la date de 1617, mais
les instructions contenues dans cette lettre ont dù être envoyées au Barnabite peu avant son départ (voir ci-dessus,
note (423), p. 119), pour le mettre au courant de la question.
Le commencement et la fin du texte autographe semblent avoir été supprimés.
491 Cf. au tome précédent, p. 242, la lettre du 10 juillet 1616 à Bellarmin.
111/346

12.2 Page 112

▲back to top
de tout le grand Office, la ou il sera aysé de la leur apprendre pour le petit Office de Nostre Dame,
comme elles le prononcent en effect fort bien des a present.
Secondement, en cette Congregation on desire recevoir les filles de petite complexion, et
lesquelles, faute de forces corporelles, ne peuvent estre receuës es Religions plus austeres. Or,
celles qui sont obligees au grand Office, si elles le veulent dire distinctement et posement, ne le
peuvent faire sans effort ; et si elles le veulent dire viste et couramment, elles se rendent ridicules
et indevotes. [140] C'est pourquoy il est plus convenable que celles-ci qui, faute de forces
corporelles, ne le pourroyent pas dire posement, ne disent que le petit Office.
Troysiesmement, il y a exemple a Paris, ou les Seurs de Sainte Ursule, Religieuses des trois
vœux solemnelz, ne disent que le petit Office492.
Quatriesmement, les Seurs de la Visitation font plusieurs exercices spirituelz qu'elles ne
pourroyent pas faire en disant le grand Office.
Je pensois vous marquer les autres pointz ; mais je me resouviens que le P. Procureur
general493 les a bien au long. Il faut que je vous die que les Regles dont on demande l'approbation
sont toutes conformes a la Regie de Saint Augustin, hormis en la clausure absolue, que saint
Augustin n'avoit pas establie, a laquelle neanmoins les Seurs se veulent astreindre, selon le sacré
Concile de Trente494. Peut estre que le Saint Siege commettra quelqu'un de deça, quelques Prelatz
de Religions et autres theologiens pour les revoir, corriger et appreuver.
Je ne voy pas qu'il soit besoin de vous advertir d'autre [141] chose sur ce sujet, sinon que,
quant au Monastere de cette ville, attendu que l'eglise d'iceluy est consacree sous le tiltre de la
Visitation de Nostre Dame et du glorieux saint Joseph, il seroit desirable que l'on obtinst
Indulgence pleniere pour ces jours la, et pour les jours des tiltres des autres Maysons et Monasteres
de cette Congregation, outre l'Indulgence du jour de la Visitation, qui est le tiltre general de la
Congregation495.
Monseigneur de Lion est la, auquel s'il plaist de favoriser l'affaire, il peut infiniment en
cela. Or, je croy qu'il luy plaira, puisqu'il a en sa ville metropolitaine une Mayson de la Visitation
ou Dieu est grandement honnoré.
Mais, mon Reverend Pere, il faut traitter toutes choses doucement et avec circonspection.
Ce que je dis, parce que quelques ecclesiastiques austeres et exactz en leurs personnes ont rendu
quelque signe qu'ilz n'estoyent pas satisfaitz dequoy en cette Congregation il y avoit si peu
d'austerité et de rigueur de peynes ; mais il faut tous-jours regarder a la fin, qui est de pouvoir
recueillir les filles et femmes debiles, soit en aage, soit en complexion.
Je desire encor obtenir une lettre de la Congregation des Evesques496 a moy et au clergé de
ce diocese, par laquelle il me soit enjoint d'eriger un Seminaire de ceux qui pretendent a l'estat
ecclesiastique, ou ilz puissent se civiliser es ceremonies, a catechiser et exhorter, a chanter, et
492 Il s'était passé pour les Ursuliues, à Paris, quelque chose d'analogue à ce qui arriva pour la Visitation. L'Institut que
César de Bus et le P. Romillon avaient fondé en Provence, sur le modèle établi en Italie par Angèle Merici, n'était
qu'une simple Congrégation, sans vœux solennels ni clôture. En 1608, la Mère Françoise de Bermond, la première
Ursuline de France, fut appelée dans la capitale pour prendre la direction de la petite Communauté, née de la
Congrégation de Sainte-Geneviève d'où déjà était sorti le Carmel français. Lorsqu'il s'agit d'ériger définitivement
l'Institut, les avis des fondateurs se partagèrent : Mme de Sainte-Beuve et Mme Acarie, comme aussi MM. de Bérulle et
Gallemant, voulurent un vrai Monastère. M. de Marillac resta seul à soutenir l'ancien ordre de choses. L'Evêque de
Genève l'aurait certainement appuyé s'il eût été consulté : « Je vous diray sans hesiter, que vous « ne deves nullement
vous obliger a la closture ; vostre Institut ne tend pas « a cela, » écrira-t-il en juin 1613 à l'une des filles de Françoise
de Xainctonge (Lettre DCCCXXXII, tome XVI, p. 18). Les partisans de la clôture triomphèrent ; aussitôt (septembre
1610) les Supérieurs de Provence rappelèrent la Mère de Bermond (voir ibid., note (762), p. 237). La Bulle de Paul V
arriva en septembre 1612 ; elle érigeait les Ursulines de Paris en Ordre religieux sous la Règle de Saint-Augustin, avec
les vœux solennels, et permettait de remplacer habituellement le Bréviaire par le petit Office de la Sainte Vierge, sauf
à certains jours de fête. (Cf. H. de Leymont, Mme de Sainte-Beuve et les Ursulines de Paris, Lyon, 1890, chap. IX, X.)
493 Le P. Tobie Corona, procureur général des Barnabites à Rome. (Voir le tome précédent, note (710), p. 203.)
494 Sess. XXV, Reform., c. V.
495 Ces Indulgences furent accordées par une Bulle de Paul V. (Voir Préface des Regles et Constitutions, et Coustumier
et Directoire pour les Saurs Religieuses de la Visitation Saincte Marie, Paris, Huré, 1637. Directoire pour l'Office, 2
juillet.)
496 Voir tome XVI, note (460), p. 148.
112/346

12.3 Page 113

▲back to top
autres telles vertus clericales ; car, quant aux petitz enfans, nous en avons de reste qui veulent estre
ecclesiastiques et qui n'estudient pour autre fin.
Or, je desire que le clergé ait part a la lettre, affin qu'on puisse imposer pour cela quelque
petite cotisation sur les benefices497. Le Concile de Trente498 suffiroit, mais [142] pour le faire
valoir plus efficacement, la susdite lettre seroit requise.
……………………………………………………………………………………………………...
Je suis
Vostre frere et serviteur,
FRANÇS, E. de Geneve.
_____
MCCCLXXXVII. A M. Benigne Milletot499. Aimable réponse à
la demande d'une cédule d'amitié. Le voyage de l'Abbesse du
Puits-d'Orbe ; ce que le Saint blâme et regrette. Une âme que
l'amertume trouble démesurément. Nouvel ami de l'Evêque
de Genève. Tristesses et difficultés au sujet du testament de
la baronne de Thorens.
Annecy, 13 janvier 1618.
Monsieur mon Frere,
Je receu a Grenoble la lettre quil vous pleut m'escrire le 6 decembre 1617 ; mays que vous
diray-je ? Ni moy et tout je ne le croy pas que jamais vous puyssies entrer en opinion que je varie
et chancele en la sincere et solide affection que j'ay de vous honnorer et cherir a jamais, sans
reserve ni exception quelcomque. Non, Monsieur montres cher Frere, vous n'aures jamais cette
cogitation, et ce n'est pas cela qui vous fait demander une cedule de [143] moy pour vostre
asseurance ; car je suis certain que l'amitié dont vous me favorises est si parfaite qu'elle est au
dessus de toute desfiance. Et comme m'eussies vous peu tant aymer si vous n'eussies eu le
sentiment de l'invariable nature de mon ame en cette passion d'amitié ?
Vous le sçaves donq bien, je m'en asseure, je suis exempt de ses vicissitudes, et mesme
mon affection ayant rencontré un object si invariablement aymable comme vous estes, mon tres
cher Frere ; mays il ny a remede, il faut que vostre amour s'esgaye a me demander des certitudes
du mien, dont toutefois il ne peut douter. Nous sçavons bien cette douce importunité des amans,
qui se playsent d'ouïr mille et mille fois repeter qu'on les ayme, non pour s'asseurer, mays pour se
complaire en l'asseurance quilz ont, qui semble estre mieux savouree quand ell'est plus souvent
497 Dans sa séance du 22 juin 1618, la Congrégation des Evêques et Réguliers répondait au désir exprimé ici par le
Saint, et décidait « de presser l'Evêque de Genève de faire cette bonne œuvre, en consultant son clergé, avec toute la
célérité possible. » François de Sales reçut donc la lettre qu'il désirait, mais elle n'est pas parvenue jusqu'à nous.
Au mois d'avril précédent, deux pièces avaient été présentées en son nom à la même Congrégation : une
supplique demandant l'autorisation d'ériger un Séminaire à Annecy et un autre à Thonon, et des considérations sur les
raisons qui rendaient le diocèse de Genève plus nécessiteux que tout autre de tels établissements. Permission fut
accordée à l'Evêque suppliant d'ériger autant de Séminaires qu'il voudrait, à condition que les élèves auraient au moins
douze ans et porteraient l'habit clérical et la tonsure. (Archiv. des Ev. et Rég., Regesta (Episcopi), vol. 1618, et
Posizioni, vol. 1618 (Episcopi), G.)
498 Sess. XXIII, de Reform., c. XVIII.
499 Le ton général de cette lettre, les questions qui y sont traitées, l'appellation de « Frere », la mention des deux filles
du correspondant de l'Evêque de Genève, dont l'une Religieuse de la Visitation : tout désigne avec certitude pour
destinataire Bénigne Milletot (voir tome XV, note (50), p. 5).
113/346

12.4 Page 114

▲back to top
repetee. Que si vous voulies neanmoins une cedule de mon cœur, comme vous me le signifiés,
envoyes moy donq le vostre sur lequel je l'escriray, car nul autre papier n'est capable de cette sorte
d'escriture. Or sus, c'est asses dit pour cette verité que jamais vous ne revoqueres en doute.
Je viens a l'accessoire de vostre lettre. Je vis, de vray, Mme du Puis d'Orbe500, et, autant que
j'ay sceu connoistre et discerner, son voyage estoit exempt d'aucun mauvais dessein ; car elle
venoit, ainsy qu'elle et madame la Premiere501, ains monsieur le premier President502 mesme,
m'avoyent adverti au paravant, seulement pour me venir voir et descharger, comme elle me dit,
son cœur de cet amas d'ennuys qu'ell'avoit accueillis des qu'elle ne m'avoit veu. Voyla ce que j'en
croy, quoy que j'ay treuvé tres mauvais le rencontre et la suite de celuy qui estoit si odieux a tant
de gens de respect503, et qui [144] devoit, par tant de raysons, ne jamais approcher cette trouppe.
Mays quant a ma chere niece vostre fille504, j'en demeuray fort satisfait ; je vous supplie de
vous en asseurer. Pleut a Dieu seulement qu'elles eussent poursuivi leur voyage jusques icy, ou
madame de Chantal leur avoit præparé une douce retraitte pour tant qu'elles eussent volu505 ; je
m'asseure qu'elles s'en fussent retournees fort consolees de voir la devotion qui se prattique en la
Mayson de la Visitation, ou maintenant nostre fille506 est portiere pour la seconde fois, tant on
estime sa vertu que de luy donner cette charge, l'une des plus importantes, affin que je vous die
encor ce mot de consolation.
Je fis tant par mes remonstrances, que l'esprit de Mme du Puis d'Orbe, qui estoit aux abboys
a cause de tant de troubles et de regretz dont il estoit accablé, reprit un [peu de vigueur507] pour
s'en aller en paix et vivre en paix en [son abbaye.] Mays elle m'escrit despuis son retour, qu'elle a
de rechef treuvé tant de mauvais traittemens, qu'ell'a perdu presque toute esperance de jamais avoir
la paix. Or, je suis au bout de ma science pour cela. Il y a la des bons Peres Jesuites qui pourront
mieux que moy discerner ce qui est requis pour le bien de ce Monastere. Quant a moy, je pense
que la douceur gaigneroit plus sur cett'ame qu'aucune autre chose ; au moins vois-je bien que
l'amertume la trouble demesurement. [145]
Le bon Pere Dom Pierre508 a rayson de m'aymer, puisqu'il vous honnore si fort et que je
suis vostre cher frere. Vous l'aves conduit a præsjuger pour moy : et comme pourroit il autrement
juger ? Je n'ay pas le bonheur de le connoistre, mais ouy bien de connoistre sa Congregation que
j'ay au milieu de mon cœur, et de laquelle je respecte et le General509 et plusieurs autres grans
personnages qu'elle reunit, auxquelz donq je joindray celuy ci et le luy tesmoigneray a la premiere
commodité qui s'en presentera. Que sil se treuve a Paris le moys suivant, j'auray peut estre le bien
500 Rose Bourgeois. On sait qu'elle avait fait, en 1617, un voyage à Lyon ; n'ayant pas poursuivi jusqu'en Savoie, elle
dut aller voir le Saint à Grenoble pendant l'Avent. (Voir ci-dessus, note (197), p. 47, et Lettre MCCCXXXII, p. 50.)
501 La présidente Brûlart, sœur aînée de l'Abbesse du Puits-d'Orbe. (Voir tome XII, note (598), p. 267.)
502 Nicolas Brûlart, mari de la précédente, premier président au Parlement de Bourgogne. (Voir ci-dessus, note (200),
p. 48.)
503 M. de Sauzéa (voir ci-dessus, Lettre MCCCXXXI, p. 47).
504 Jeune encore, Michelle Milletot était entrée à l'abbaye du Puits-d'Orbe, et y avait fait profession le 4 octobre 1607.
L'amitié de l'Abbesse qui en faisait sa compagne de voyage, lui fut fatale ; car elle demeura fidèle à Rose Bourgeois
jusque dans son obstination à repousser la réforme tentée par les Bernardines du Val-de-Grâce, sur l'ordre de l'Evêque
de Langres. En 1644, on retrouve Michelle dans le petit groupe séparé de la Communauté régulière ; avec l'Abbesse,
elle déclare vouloir entrer dans cette Communauté, mais ni l'une ni l'autre n'y furent admises, tant on redoutait leurs
exemples et leurs discours. Elle vivait encore l'année suivante. (Archiv. de la Côte-d'Or, Puits-d'Orbe, Reg. des vœux
et réceptions ; voir D. Plancher, Hist. gén. et part, de Bourgogne, Dijon, 1739, tome I, Pièce CCXXXXVI.)
505 Voir ci-dessus, pp. 48, 50.
506 Marie-Marguerite Milletot, fille du destinataire. (Voir tome XV, note (55), p. 6.)
507 Par suite de l'usure, plusieurs mots ont disparu de l'Autographe ; quand on a pu les rétablir d'après le sens, ou les a
mis entre crochets [ ].
508 D. Pierre de Saint-Bernard, Feuillant, était déjà connu du saint Evêque. (Voir tome XV, note (660), p. 227.) Il
faudrait donc songer plutôt aux PP. Pierre de Saint-Romuald, Pierre de Sainte-Marie, ou Pierre de Saint-Joseph, du
même Ordre, cités dans la déposition du P. Harel, Minime, comme ayant tous trois écrit à la louange de François de
Sales. (Process. remiss. Gebenn. (II), ad interrog. 12.)
509 D. Sens de Sainte-Catherine (voir le tome précédent, note (171), p. 39).
114/346

12.5 Page 115

▲back to top
de l'y voir, car je pense que Monseigneur le Cardinal de Savoye s'y en va, que j'y accompagneray,
Son Altesse me l'ayant ainsy commandé sans reserve510.
Vous aures sceu combien l'annee passee nous a esté dure par le trespas de mon frere, de
son filz et de sa femme qui en moins de quatre moys ont esté emportés511. Mais, oserois-je vous
dire un surcroist de desplaysir qui m'est arrivé en cett' occasion ? Je le feray, Monsieur mon tres
cher Frere, mais c'est en confiance, vous suppliant que si il ne vous en est parlé, il vous playse n'en
rien tesmoigner a personne.
Ma pauvre belle seur nous fut ravie a l'improveu trois jours apres qu'elle fut accouchee, et
n'eut loysir qu'environ de cinq heures a mettre ordre a ses affaires. En cette presse, on ne vid jamais
un esprit si clair, si doux, si paisible, ni plus de marques d'une vraye sainteté, car jusques au trespas
elle souspira des [affections] si extremement devotes qu'elle nous ravissoit tous en admiration. Or,
parmi cela et soudain qu'elle vid qu'elle mourrait de [146] cet accident, elle voulut tester, laissant
a madame sa mere, a monsieur son frere et a sa seur sa dote, hormis un legat qu'elle fit encor
d'environ 900 escus ; et pour le reste, elle me fit son heritier, a la charge que je laisserois l'heritage
entier a mes freres512. Sur quoy je m'apperçois que [Mgr de Bourges513 et les autres] proches de M.
le Baron de Chantal ont opinion que j'aye procuré l'advantage et commodité que cette pauvre
defuncte a laissé a mes freres. Cela, certes, me fait de la peine, car je prevoy bien que la
bienveuillance que ce Prælat et ces messieurs avoyent envers moy s'en rafroidira. Et neanmoins,
Monsieur mon tres cher Frere, je vous dis le cœur ouvert et devant le Scrutateur des cœurs514, que
ni directement ni indirectement, ni par moy ni par entremise d'aucun, onques je ne parlois a cette
chere seur ni de tester, ni de rien faire de tout ce qu'elle fit pour mes freres. Madame sa mere, qui
fut presente a cette action, et pour le moins vingt personnes d'honneur m'en seront tesmoins
asseurés. Mays il est vray que ceux qui ont veu avec quel amour, quel honneur, quelle douceur
cette pauvre fille estoit cherie de tous nous, ne treuvent pas si estrange qu'elle n'ayt pas volu tirer
de nostre mayson que ce qu'elle y avoit apporté, sans que par autre voye nous luy ayons ni donné
ni pensé a luy donner cette volonté.
Je n'ay sceu me retenir, Monsieur mon Frere, de vous dire ce petit mal de cœur, sachant a
qui je le dis ; car d'en escrire a M. de Bourges, qui ne m'en a point escrit, je ne le juge pas a propos,
et me contente de sçavoir en mon ame que suis exempt de ces viles prattiques, ne sçachant mesme
pas ce que les testemens de mes pere et mere contiennent, sinon pour rayson des legatz pieux. Mais
c'est trop d'une chose que j'escris par eschappee. [147]
Dieu, par son infinie bonté, vous conserve et comble de bonheur, Monsieur mon Frere,
avec madame ma chere seur515, et suis
Vostre tres humble frere et tres asseuré serviteur,
FRANÇS, E. de Geneve.
XIII janvier 1618, Annessi.
Revu sur l'Autographe conservé à la Visitation de Lyon-Fourvière.
_____
510 Vide supra, Epist. MCCCLXXXIV.
511 Le 23 mai 1617, Bernard de Sales était mort à Turin ; son fils et sa femme le suivirent les 5 et 7 septembre. (Voir
plus haut, les notes (104), (269), (278) des pp. 17, 70, 73.)
512 Après avoir institué l'Evêque de Genève son légataire universel (voir ci-dessus, note (390), p. 110), Marie-Aimée
de Chantal lui substituait ses « seigneurs beaux freres, » Jean-François, Louis et Janus de Sales, « qui succederont et
tiendront le tronc de ladite maison de Sales et Thorens. » Elle avait donné en outre « en prelegat » aux quatre frères
de Sales une somme de « quatre cens escus a eulx payables respectivement... trois ans apres son deces. » (Archives
de Thorens-Sales.)
513 Mgr André Frémyot, oncle maternel de la défunte. (Voir tome XII, note (669), p. 299.)
514 Ps. VII, 10 ; Sap., I, 6.
515 Claude de Cirey, femme du destinataire qui l'avait épousée en 1586. Elle était fille de Jean de Cirey, auditeur des
Comptes à Dijon, et de Guillemette des Barres. On trouve encore des baux à cens signés par elle en 1637. (Archiv. de
la Côte-d'Or, E, 1368 et 21664.)
115/346

12.6 Page 116

▲back to top
MCCCLXXXVIII. A la Mère de Chantal. L'embarras du Saint à
l'arrivée de voyageurs dauphinois.
Annecy, 13 ou 14 janvier 1618 516.
Ma tres chere Mere,
Nos amis de Grenoble doivent arriver demain. Je les recevray avec playsir, a condition que
vous vous chargeres des femmes, car en fin, qu'en ferois-je ? [148]
_____
MCCCLXXXIX. A M. Bénigne Milletot. Recommandation en
faveur d'un ami engagé dans un procès. Voyage du Prince
Cardinal de Savoie différé.
Annecy, 15-17 janvier 1618 517.
Monsieur mon Frere,
Vay-je point trop souvent a vostre porte ? Vous importune-je point par mes si frequentes
supplications ? Certes, je ne dois, ni ne puis, ni ne veux manquer au devoir que j'ay a monsieur le
Marquis d'Aix518, qui me fait la faveur de m'aymer tres particulierement et que pour ses rares
qualités j'honnore parfaitement. Or, il a un'affaire devant la cour519 et, de bonne fortune, en la
Chambre de la Tournelle en laquelle vous estes520 ; et je vous supplie donq tres humblement,
Monsieur mon Frere, de la (sic) gratifier de vostre appuy au soustenement de son bon droit, puisque
mesme il implore mon [149] intercession aupres de vous, sachant le bien que j'ay d'estre advoüé
vostre frere.
516 En quittant Grenoble, aux fêtes de Noël, saint François de Sales donnait l'ordre à trois de ses filles spirituelles,
décidées à entrer dans l'Institut de la Visitation, « de partir après les Rois » pour aller commencer leur noviciat à
Annecy ; elles devaient ensuite faire partie de la fondation de Grenoble. C'étaient Mlles de Glézat. de Garcin du
Colombier, du Bonnet de la Bastie. Le contrat de réception de cette dernière (Archives de la Visitation d'Annecy)
porte que le départ eut lieu le 12 janvier ; les voyageurs durent donc arriver au plus tôt le 14.
Quand les généreuses postulantes quittèrent la capitale du Dauphiné, nombre de gentilshommes et de dames
les accompagnèrent fort loin hors de la ville ; plusieurs personnes de cette escorte poursuivirent leur voyage jusqu'en
Savoie, entre autres M. d'Ulme, M. de Glézat, frère de la prétendante, et Mme de Glézat, leur mère. (D'après l'Hist. de
la Fondation de la Visitation de Grenoble.)
517 Cette lettre a dû être écrite entre celle du 13 janvier, au même destinataire, et celle du 18, d'après laquelle le projet
de voyage du Cardinal de Savoie est de nouveau retardé. (Voir ci-après, p. 151.)
518 Louis de Seyssel (voir tome XIV, note (270), p. 89).
519 Il était en procès avec Mme de Vellepesle de Villeneuve (voir le tome précédent, notes (1199) et (1202), p. 361) ;
la cause avait été probablement portée au Parlement de Dijon.
520 Instituée par Charles VII en 1436, modifiée en 1452 et 1519, la Chambre de la Tournelle jugeait en dernier ressort
les affaires criminelles. Elle prenait son nom de ce que sa « composition se faisait par l'effet d'un roulement, pour que
l'habitude de connaître des affaires criminelles n'atténuât pas la mansuétude désirable du juge. » Elle ne pouvait
connaître des affaires civiles qu'incidemment. Son ressort s'étendait non seulement « aux jugements des juges
inférieurs, comme les juges royaux et seigneuriaux, mais encore aux décisions de certains juges extraordinaires,
comme l'Amirauté, la Connétable, les lieutenants de police, etc. »
Les fonctions des membres de la Grand'Chambre se partageaient avec celles de la Tournelle, c'est-à-dire que
les présidents à mortier et les conseillers attachés à la Grand'Chambre faisaient à tour de rôle six mois de service à la
Grand'Chambre et six mois à la Tournelle. (D'après Moreri, 1740, tome VIII, et Dalloz, Répertoire de jurisprudence,
« Organisation judiciaire, » nos 71, 97, 101.)
116/346

12.7 Page 117

▲back to top
Le voyage du Prince Cardinal de Savoye estant differé pour quelque tems et, comme je
croy, jusques a carneval521, je suis par consequent d'autant esloigné de l'esperance que j'ay que par
quelque rencontre ce voyage me pourra donner le bonheur de vous voir. Mays ce pendant je ne
laisseray pas de vous avoir present a mon ame, ni de prier Nostre Seigneur qu'il vous comble, et
madame ma seur522, de toute sainte prosperité, qui suis,
Monsieur mon Frere,
Vostre tres humble et tres affectionné frere et serviteur,
FRANCS, E. de Geneve.
[A Monsieur]
Monsieur Milletot, seigr de Villy,
Conseiller du Roy au Parlement de Bourgoigne.
Revu sur l'Autographe qui se conservait au Grand Séminaire de Besançon.
_____
MCCCXC. A Madame de Blanieu523. Le prix de la paix ; sa
récompense. Deux moyens de la conserver.
Annecy, 18 janvier 1618.
Madame,
Conservés-le donq bien, ce cœur, en ce juste contentement qu'il a de se sentir en paix avec
son Dieu ; paix de laquelle le prix n'est point au monde, non plus que la recompense, puisqu'elle
vous est acquise par le merite [150] du sang de nostre Sauveur, et qu'elle vous acquerra le Paradis
eternel, si vous la gardes bien. Faites-le donq, ma tres chere Fille, et ne fuyes rien tant que ce qui
la vous peut oster. Et vous le feres, je le sçai bien ; car vous invoqueres Dieu, affin qu'il vous en
continue la grace, et prendres soin de bien prattiquer ce que je vous ay conseillé, que j'espere de
confirmer par mon retour, puisque, comme j'ay opinion, le voyage de ce Prince que je devois
accompaigner est retardé524.
Ce pendant, faites-moy part a vos prieres, puisque je ne cesseray jamais de vous souhaiter
toute sorte de bonheur, et seray toute ma vie,
Ma tres chere Fille,
Vostre tres humble et tres affectionné serviteur,
FRANÇS, E. de Geneve.
Le 18 janvier 1618, Annessi.
_____
521 Ce voyage ne fut effectué qu'en octobre. (Voir ci-dessus, note (485), p. 138.)
522 La femme du destinataire (voir ibid., note (516), p. 148).
523 D'après l'édition de 1626, la destinataire est la même que celle de la lettre du 3 avril 1617 ; donc Marguerite de
Sassenage, dame de Blanieu. (Voir le tome précédent, note (1203), p. 362.)
524 Voir ci-dessus, note (485), p. 138.
117/346

12.8 Page 118

▲back to top
MCCCXCI. A la Présidente de Bouquéron525. Comment le
respect règle les témoignages de l'affection. Souhaits des
gens de bien et contradictions au sujet de la fondation du
Monastère de Grenoble. Le service de Dieu, unique bonheur
en ce monde.
Annecy, 18 janvier 1618.
Madame,
Si jamais ma bouche a refusé de vous nommer ma fille, ç'a esté sans le consentement de
mon cœur, qui des le premier abord du vostre sentit bien que Dieu luy donnoit [151] une forte et
invariable affection, toute vrayement paternelle pour vous ; mais on n'ose pas tous-jours parler
comme on desireroit, sur tout quand on doit du respect a ceux qui portent les mesmes tiltres que
nous voudrions avoir. Certes, puisque vous le voules, je ne sçaurois aussi plus me priver de ce
contentement.
Et vous diray donq, ma tres chere Fille, que je suis bien ayse que ces filles soyent venues
icy faire l'apprentissage du sacré mestier que par apres elles iront exercer, comme j'espere, dedans
le païs de leur naissance et de mon affection526 : pour moy, je n'en puis plus douter, voyant cette
generale concurrence des souhaitz qu'en font tant de gens de bien. Cependant il est fort certain,
comme vous dites, que ce bon œuvre ne se fera pas sans quelques contradictions ; car, comme
seroit-il bon autrement ? Mais pour cette dame, je ne croy pas qu'elle la face longue, puisqu'elle
est vertueuse et de bon esprit ; et puis, Dieu dissipe les cogitations humaines527 par sa science
celeste528.
Or sus, ma tres chere Fille, continués tous-jours a servir ce divin Maistre et Sauveur de
vostre ame en pureté et douceur d'esprit : c'est l'unique bonheur que nous pouvons pretendre, et
l'infallible asseurance de le [152] posseder eternellement consiste a l'aymer en ce monde
fidelement et confidemment.
Je ne suis pas hors d'esperance de vous revoir ce Caresme, et de vous dire de vive voix,
comme je le dis de tout mon cœur, que je suis,
Ma tres chere Fille,
Vostre tres humble et tres affectionné serviteur,
FRANÇS, E. de Geneve.
525 Par les voyageuses grenobloises de janvier 1618, étaient venues pour le Saint des lettres de M. et de Mme de
Bouquéron. (Cf. Lettres de sainte J.-F. de Chantal, vol. I, p. 236.) L'Evêque dut confier sa réponse aux personnes qui
avaient accompagné les prétendantes à la Visitation ; elles quittèrent Annecy au plus tôt le 18 janvier (Livre des
comptes du 1er Monastère). Nous sommes donc fondés à croire que ces lignes s'adressent à Antoinette Camus, femme
du président Gaspard Béatrix-Robert de Bouquéron depuis le 27 septembre 1588. Elle était fille de Claude Camus,
seigneur de Vaize, etc., trésorier de France à Lyon, et d'Anne Grollier. L'une des premières, à Grenoble, elle se mit
sous la direction de François de Sales, et son dévouement actif et généreux fut acquis aux Filles de la Visitation. La
présidente de Bouquéron mourut en 1630 (cf. Lettres de la Sainte, vol. III, p. 551). N'ayant pu, selon ses désirs, se
retirer au monastère de Grenoble, elle aurait voulu au moins avoir place dans sa sépulture, et fit pour cela un legs de
600 francs. Ses enfants envoyèrent le legs ; mais ne purent se résoudre à voir déposer leur mère hors du tombeau de
la famille. (Hist. de la Fondation.)
526 A Grenoble (voir ci-dessus, note (516), p. 148).
527 Cf. Ps. XXXII, 10.
528 L'établissement de la Visitation à Grenoble, si ardemment souhaité dès qu'on avait connu le saint Evêque de Genève
en Dauphiné (voir le tome précédent, Lettres MCCLXXIX, p. 343, et MCCLXXXIII, p. 348), trouva des
contradicteurs aussitôt qu'il fut sur le point de s'effectuer. Une fondation projetée par les Récollets était désirée par
plusieurs personnes qui essayèrent de détourner à son profit le zèle des partisans de la Visitation. On réussit même à
gagner pour un temps l'esprit de Mgr de Chalcédoine, coadjuteur de l'Evêque de Grenoble. L'orage ne s'apaisa que
pendant le Carême. (Voir ci-après, Lettre MCDXII, et note (649), p. 192.)
118/346

12.9 Page 119

▲back to top
Le 18 janvier 1618.
_____
MCCCXCII. Au Roi de France, Louis XIII529 (Minute). L'avis du
Saint pour le rétablissement des Carmes à Gex. Impossibilité
de leur assigner le revenu destiné au service des paroisses.
Travail et dévouement des Capucins. Deux moyens de hâter
l'entière conversion du pays.
Annecy, 21 janvier 1618.
Sire,
Pour obeir au commandement que Vostre Majesté me fait par sa lettre du dernier jour
d'aoust 1617, que je n'ay receu sinon quatre mois apres, je diray ce qu'il me semble sur la
proposition que le Pere Provincial des Carmes de la province de Narbonne530 luy a faite, pour [153]
le restablissement du couvent que ceux de son Ordre avoyent jadis a Gex531 ; et attendu qu'il y a
quelques restes des edifices et des biens dudit couvent, je croy bien, Sire, qu'il seroit bon qu'ilz
fussent remis en l'Ordre duquel ilz dependent, a la charge que le service y fust fait selon la
proportion du revenu qui en proviendroit. Et parce que maintenant il n'y a pas suffisamment pour
entretenir une seule personne, s'il plaisoit a Vostre Majesté leur ordonner les cent cinquante livres
sur les tailles, que ledit Pere Provincial luy a demandees en aumosne, il pourrait par ce moyen y
colloquer quelque habile et discret Religieux, qui, par les voyes ordinaires de la justice et des loix
publiques, retireroit petit a petit les pieces esgarees dudit couvent, sans que pour cela aucun eust
occasion de se plaindre, ni que personne en fust grandement incommodé.
Mais quant aux trois cens livres que ledit Pere Provincial demandoit sur les autres revenus
ecclesiastiques remis entre mes mains pour le restablissement de l'exercice catholique es eglises
du balliage dudit lieu, je ne voy pas que cela luy doive ni puisse estre accordé ; veu que tout est
requis pour estre employé aux services et offices divins et a l'entretien et reparation des edifices
sacrés, sans qu'on en puisse rien oster, ainsy que j'ay clairement fait voir audit Pere Provincial par
les contes de ceux qui, de la part de Vostre Majesté, ont esté establis et commis a la recette desditz
revenus. Outre que, s'il y avoit quelque chose de plus, il devrait plustost estre destiné a
l'accommodement des Peres Capucins qui, des plusieurs annees en ça, resident audit lieu de Gex
et y travaillent avec beaucoup de zele et d'incommodités.
Et quant a ce que Vostre Majesté veut sçavoir, s'il seroit point plus a propos d'introduire en
la ville dudit Gex quelque compaignie de Religieux reformés, je pense, Sire, qu'il n'y a point de
doute, puisque les desvoyés ne sont pas moins attirés a la connoissance du bon chemin par les bons
exemples que par les bonnes instructions. [154] Mais le reste des biens du couvent des Carmes
529 Voir tome XVI, note (560), p. 176.
530 De 1614 à 1618, la province des Carmes de Narbonne, de l'ancienne Observance, fut gouvernée par le P. Nicolas
Perriquet. Au prix de grands travaux et sur la fin de son provincialat, dit l'historiographe de cette Province, il rentra
en possession du couvent de Gex, ruiné depuis longtemps par les hérétiques. Né en Bourgogne vers 1571, Nicolas
Perriquet avait reçu l'habit du Carmel dans le couvent de Dijon, à l'âge de douze ans, et prononcé ses vœux en 1587.
Ayant fait de brillantes études à l'Université de Paris, il fut élu à diverses reprises définiteur et prieur de Dijon, de
Semur et de Clairval. En 1629, il devient administrateur de Gex, puis, en 1631, prieur de Besançon, où il meurt vers
1639, grand pénitencier de la cathédrale. Le P. Perriquet écrivit des Sermons pour le Carême (Conciones
Quadragesimales) et un traité De casibus conscientiæ reservatis, ouvrages aujourd'hui perdus. (Bibl. municip. de
Dijon, Ms. 620 : Miscellanea atque Collectanea Fr. Roberti Bulle, Dijon, 1771 ; Mém. du couvent des Carmes de
Besançon, Besançon, 1768, pp. 290, 291.)
531 Voir tome XV, note (899), p. 316.
119/346

12.10 Page 120

▲back to top
estant si petit, serviroit de peu a cela, qui ne peut estre fait que par le dessein expres de Vostre
Majesté et par union de quelque benefice riche, quand il viendroit a vaquer, ou par quelque autre
liberalité royale. Et lhors, Sire, si Vostre Majesté me commandoit de nommer quelle compaignie
j'estimerois plus propre pour ce lieu la, je nommerois celle des Prestres de l'Oratoire, bons a toutes
sortes de services spirituelz et qui plus aysement peuvent se mesler parmi les adversaires532.
Que si d'abondant Vostre Majesté me commandoit de luy marquer un autre moyen
grandement utile a l'avancement de la foy catholique en ce balliage de Gex, je dirois, Sire, que ce
seroit d'y mettre des officiers catholiques ; et sans ce moyen icy, les autres n'opereront que
foiblement et lentement.
Je prie Dieu, ce pendant, qu'il comble de benedictions Vostre Majesté, vostre couronne et
vostre royaume ; qui suis et seray a jamais,
Sire,
Vostre tres humble, tres obeissant et tres fidele
orateur et serviteur,
FRANÇS, E. de Geneve.
Annessi, le 21 janvier 1618. [155]
_____
MCCCXCIII. A la Mère de Chantal. Départ d'une belle âme
pour le Ciel. Une demeure toute de paix. Confiance en
Dieu, et regrets sur les morts.
Annecy, 24 janvier 1618 533.
Ma tres chere Mere,
Quand on m'a osté d'aupres de vous, ça esté pour monsieur de Sainte Catherine534, mais je
pensois que ce fust un accident comme l'autre fois ; et voyla que ça esté pour luy faire saintement
dire dix ou douze fois : VIVE JESUS ! et protester qu'il avoit toute son esperance en la mort de
Nostre Seigneur : qu'il a prononcé avec beaucoup de force et de vivacité, et puis s'en est allé ou
532 Les désirs du Saint ne se réalisèrent pas ; les Carmes eurent gain de cause, et rentrèrent dans leur couvent le 30
juillet 1618. En 1669, un décret du P. Mathieu Orlandi, Général et Visiteur apostolique de l'Ordre, fixa à sept le
nombre des Religieux du Monastère de Gex, et même à huit, si, comme ils en avaient l'espoir, ils pouvaient parvenir
à augmenter leurs revenus. (D'après les Notes du R. P. Marie-Joseph du S. Cœur, C. d., aumônier du Carmel de
Corioule, Belgique.)
533 Comme la lettre suivante, celle-ci a été datée pour la première fois par Hérissant, tome III, p. 416. Mais le quantième
qu'il lui attribue n'est pas juste. C'est le 24 janvier, et non le 25, que moururent D. Simplicien Fregoso et Philippe de
Quoex ; nous en avons le témoignage dans les Acta Collegii, qui mentionnent au 24 le décès du premier, et dans les
Registres paroissiaux d'Annecy qui inscrivent au 25 les funérailles du second1.
1 C'est à tort qu'au tome XII on a rectifié aux Errata la date du 24 donnée p. 30, note (148), pour indiquer celle du 23.
534 Philippe de Quoex (voir tome XII, note (57), p. 30). Ce digne ecclésiastique, premier prêtre, premier chanoine, et
confesseur de l'Evêque de Genève, eut la consolation d'être visité par lui soir et matin pendant les dix jours de sa
maladie. La veille de sa mort, François de Sales voulut lui administrer lui-même les derniers Sacrements, et, ne
pouvant se résoudre à le quitter, fit apporter son souper près de ce lit de souffrance dont il ne s'éloigna ensuite que sur
les pressantes instances de son entourage. Comme le frère du mourant, Claude-Louis-Nicolas de Quoex, s'affligeait
de la perte qu'il allait faire : « Il ne faut point pleurer, mon filz, » lui dit le saint Prélat, « nostre frere sera bienheureux
; je l'ay demandé chaudement a Nostre Seigneur, et il nous a faict ' sçavoir qu'il le vouloit. Dominus est ! ». (Dépos.
de Claude-Louis-Nicolas de Quoex, Process. remiss. Gebenn. (I), ad art. 27.)
120/346

13 Pages 121-130

▲back to top

13.1 Page 121

▲back to top
nous avons nos pretentions, sous les auspices du grand saint Paul535. Dieu qui nous l'avoit donné
pour son service, le nous a osté pour sa gloire : son saint nom soit beni536 ! [156]
Demeures cependant en paix, avec mon cœur, au pied de la providence de ce Sauveur pour
lequel nous vivons et auquel, moyennant sa grace, nous mourrons. Dieu reparera cette perte et
nous suscitera des ouvriers en lieu de ces deux537 qu'il a pleu retirer de sa vigne pour les faire
asseoir en sa table538. Mais tenes vostre cœur en paix, car il le faut ; et, comme dit l'Escriture539,
pleures un peu sur les trespassés, mais pourtant loues Dieu en consolation, puisque nostre
esperance est vivante. Amen.
FRANCS, E. de Geneve.
_____
MCCCXCIV. A la Mère Favre, Supérieure de la Visitation de
Lyon (Fragment). Mort de deux grands serviteurs de Dieu.
Admirable acquiescement du Saint.
Annecy, 24 janvier 1618 540.
Ma tres chere Fille,
……………………………………………………………………………………………………..
Il faut demeurer coy en ce que Dieu dispose et ordonne ; nous l'avons mesme fait ce
jourd'huy. A 7 heures du matin, nous avons perdu pour cette vie le P. D. Simplicien, et a trois
heures le bon monsieur de Sainte Catherine, deux grans serviteurs de Dieu, sans qu'il y aye presque
[157] aucun malade en cette ville. O Providence celeste ! sans esplucher vos effectz, je les adore
et embrasse de tout mon cœur, et acquiesce a tous les evenemens qui en succedent par vostre
volonté.
……………………………………………………………………………………………………...
_____
535 M. de Sainte-Catherine espira à 3 heures de l'après-midi, donc aux premières Vêpres de la Conversion de saint
Paul.
536 Job, I, 21.
537 D. Simplicien Fregoso, Barnabite (voir tome XVI, note (740), p. 231), était mort le matin du même jour, à 7 heures.
« Attendez-moi, dom Père Simpliciain, attendez-moi ! » s'écria fortement Philippe de Quoex un instant avant de rendre
le dernier soupir, « voulant dire que tous deux iraient ensemble au Ciel. » (Arpaud, Vie de Mgr D. Juste Guérin, Anneci,
1837, liv. I, ch. XI.)
538 Luc., XXII, 30.
539 Eccli., XXII, 11.
540 Le texte donné par l'édition de 1629 est non seulement tronqué, mais sans doute composé de deux fragments, dont
le premier parait s'adresser à la Mère Favre. Le double décès mentionné dans ces lignes en indique la date. (Voir la
lettre précédente et les notes qui l'accompagnent.)
Quant au second fragment, il trouvera sa place plus loin.
121/346

13.2 Page 122

▲back to top
MCCCXCV. A la Baronne de Menthon541 (Inédite). Vacance
d'un bénéfice. Trois raisons d'en pourvoir sur-le-champ
Benoît de Chevron.
Annecy, 26 janvier 1618.
Madame,
En la vacance de la chapelle de Sainte Catherine542 par le trespas du bon et devot M. de
Quoëx, j'ay rencontré par mon desir le choix que monsieur vostre mari543 et vous aves fait ; et je
n'avois garde de faillir, puisque monsieur le Doyen vous est si proche en toutes façons, que vostre
bon naturel ne vous eut pas permis de faire autrement544. Il m'a dit tout ensemble, et l'obligation
[158] qu'il vous en avoit, et la difficulté, ou plustost la consideration pour laquelle il n'avoit pas
l'acte de la nomination : qui estoit que monsieur vostre mari auroit quelque sorte d'opinion de
pouvoir un jour luy mesme la deservir.
Mays, Madame, il faut que je vous die trois choses en confiance. L'une est, que quand
monsieur le Baron seroit en estat (dont Dieu le garde) de deservir cette chapelle, en estant le
nominateur il ne pourroit pas la prendre pour soymesme, car nulle (sic) ne peut estre nominateur
de soymesme. L'autre est que laiqs ne peuvent en conscience tenir les benefices, ni les nominateurs
ne peuvent non plus les tenir en suspens sans offencer Dieu et les ames [159] des fondateurs. Et la
troysiesme, c'est que, si cette chapelle demeure quelque tems sans recteur, elle n'est pas si petite
541 Claudine, fille de Claude-Louis de Michaille, seigneur d'Outrechaise, dit de Martel, et d'Adrianne ou Oriane de
Mareste, avait épousé (contrat dotal postnuptial du 12 mai 1608) Bernard IV, baron, puis comte de Menthon, veuf de
Clémence de Genève. Restée veuve en 1627, elle teste en 1664 et meurt en novembre 1671.
542 Attenante à l'église du prieuré de Talloires, la chapelle de Sainte-Catherine avait été fondée à la fin du XIIIe siècle
par les seigneurs de Menthon, poijr leur sépulture, et elle était de leur présentation. Benoît de Chevron-Villette (voir
note (544) ci-après) en fut pourvu le 29 janvier 1618, et eut pour successeur, le 19 février 1621, Antoine Favre, fils
cadet du président de Savoie. (R. E.)
543 Bernard de Menthon (voir tome XIII, note (864), p. 319).
544 Jeanne de Menthon, sœur de Bernard, s'était alliée à Hector, baron de Chevron et de Dérée, qui fut gouverneur du
prince de Piémont Victor-Amédée. De ce mariage, naquit à Turin, en 1587, Benoît, que les plus hautes vertus devaient
rendre digne de sa parenté avec François de Sales dont il était cousin issu-de-germain. Bien que tonsuré dès 1601,
même minoré en 1603, le jeune homme ne put d'abord résister aux attraits de la cour et de la carrière des armes ;
compagnon d'enfance de l'héritier de la couronne, il pouvait espérer le plus brillant avenir. La grâce lui donna la force
de le sacrifier, et en acceptant en 1614 l'élection des chanoines de Notre-Dame de Liesse qui le faisait doyen de leur
Collégiale, il résolut d'être entièrement à Dieu. Le 20 septembre suivant, il était sous-diacre, diacre trois mois après,
et prêtre le 14 mars 1615. Lorsque, devenu recteur de la chapelle de Sainte-Catherine (voir note (542) de la page
précédente), Benoît de Chevron eut des rapports plus fréquents avec son ami Claude-Louis-Nicolas de Quoex et les
Religieux de Talloires, la pensée d'une plus grande perfection ne le quitta plus. Il résigne ses bénéfices, refuse le poste
d'aumônier de la princesse de Piémont, et prend en 1620 l'habit bénédictin, ajoutant à son nom de baptême celui de
Théophile ; en juin 1621, il prononçait ses vœux. Huit ans plus tard, son mérite le faisait choisir pour prieur claustral,
et en 1631 la volonté du duc de Savoie et du Pape le plaçait à la tête du diocèse de Tarentaise. Sacré à Turin en janvier
1633, le nouvel Archevêque se montra ferme à maintenir ses droits et à faire rentrer dans son obéissance tous les
membres de son clergé, zélé pour le bien des paroisses qu'il visita ou fit visiter quatre fois en vingt-cinq ans d'épiscopat,
entièrement dévoué aux âmes, à tel point que Charles-Auguste de Sales, son grand-vicaire (1636), qui dut le remplacer
pendant un voyage à Rome, trouva qu'il « étoit le Pere et le confesseur universel de toute la ville » de Moûtiers. (De
Hauteville, La Maison naturelle de St Fr. de Sales, 1669, Partie III, p. 649.)
Toujours fils de saint Benoît, Mgr de Chevron voulut établir dans son diocèse ses frères en religion ; un essai
infructueux lui coûta beaucoup de peines, de même que l'établissement des Bernardines à Conflans. Grands furent ses
regrets de n'avoir pu fonder aussi dans sa ville épiscopale un Monastère de la Visitation. En 1638, il eut au moins la
consolation de recevoir la Mère de Chantal en route pour Turin ; et après lui avoir prodigué les témoignages de sa
vénération : « Dieu soit béni, » dit-il, » cette journée n'est pas perdue, car nous avons rendu, selon notre petit pouvoir,
nos hommages à une Sainte ! » Tenu lui-même pour un saint, Benoît-Théophile de Chevron mourut en prédestiné le
15 juin 1658. Son successeur, Mgr Milliet de Challes, éleva à sa mémoire un monument gravé d'une longue et belle
inscription latine, résumé de sa vie et de ses vertus. (Cf. Notice sur Benoît-Théophile de Chevron-Villette, archevêque
de Tarentaise, par Dom B. Mackey, O. S. B., Chambéry, 1904.)
122/346

13.3 Page 123

▲back to top
quil ne se treuve des courans qui l'impetreront a Rome ; et elle sera bien impetree, attendu la
negligence de ceux qui doivent nommer. Sur cela, Madame, il me semble que vous deves des
maintenant gratifier ce neveu qui vous appartient en tant de façons, et luy donner la nomination,
affin de conserver vos droitz et l'intention des prasdecesseurs545.
Pour [ce], je vous escris ainsy librement et sans art, sachant que vous m'aymes franchement,
et croires aysement que je parle selon le devoir et l'affection que je vous ay et qui me rend,
Madame,
Vostre plus humble tres affectionné serviteur,
FRANÇS, E. de Geneve.
XXVI janvier 1618, Annessi.
A Madame
Madame la Baronne de Menthon.
Revu sur l'Autographe appartenant à M. le comte de Menthon, au château de Menthon (Annecy).
_____
MCCCXCVI. A Madame Bourgeois, Abbesse du Puits-d'Orbe.
Très sage avis du Saint au sujet du transfert de l'abbaye du Puits-
d'Orbe. Devoir de l'Abbesse pour maintenir ses filles en
union et charité. Humble démarche qu'elle doit faire.
Annecy, 30 janvier 1618.
Dieu, qui a fait vostre cœur pour son Paradis, ma tres chere Fille, luy face la grace d'y bien
aspirer. Je vous escris sans loysir, comme je fay presque tous-jours en cette multiplicité d'affaires
qui m'accablent. [160]
Je vous ay des-ja escrit qu'il ne failloit nullement penser a transplanter vostre Monastere a
Lion ; car, a quel propos oster une si notable fondation d'une province et d'un diocese pour la porter
en un autre ? Ni le Pape, ni l'Evesque, ni le païs, ni le Parlement ne le permettront jamais. Demeurés
donq ferme en la resolution de le transferer des chams a la ville, mais en une ville de la province
et du diocese ; s'il se pouvoit, a Langres, ou a Chastillon, ou a Dijon, et icy il seroit mieux. Et ne
faut point craindre que vos parens vous y faschassent, car y vivant en une bonne et sainte
reformation, chacun vous y reverra avec un amour nompareil ; et puis, il ne faut pas tant regarder
a vostre personne particuliere qu'au public et a la posterité. Mais si vous ne pouves ranger vostre
esprit a cet advis, du moins que ce soit a Chastillon546.
Je n'appreuve nullement que vous separies vos filles, tenant les unes comme vos
affectionnees et partisanes, et les autres comme distraittes de l'affection qu'elles vous doivent, ni
qu'on leur reinette leurs pensions ou autres particularités. Il faut que vostre courage surnage a tout
cela ; et croyes que si vous estes bien resolue de vivre en charité avec elles, leur monstrant un cœur
de douce mere, qui a oublié tout ce qui s'est passé jusqu'a present, vous les verres toutes revenir a
vous dans bien peu de moys547.
545 Thomas II, Henri, Humbert, Albert I et Albert II, seigneurs de Menthon aux XIIIe et XIVe siecles, avaient fait à la
chapelle de Sainte-Catherine différents legs portant obligation de prières pour les défunts.
546 Depuis longtemps François de Sales conseillait le transfert de la Communauté de la campagne dans une ville. Ce
projet s'exécuta le 21 décembre 1619. (Voir tomes XII, note (607), p. 271, et XIV, note (1042), p. 359.) Mais Rose
Bourgeois ne poursuivit pas plus efficacement la réforme à Châtillon-sur-Seine qu'elle ne l'avait fait au Puits-d'Orbe.
547 Les deux partis se maintinrent dans la Communauté jusqu'à la mort de l'Abbesse. Les Sœurs qui lui étaient opposées
en 1618, furent plus tard les vraies réformatrices. (Cf. ci-dessus, note (504), p. 145.)
123/346

13.4 Page 124

▲back to top
Madame la Premiere548 vous escrira. Je vous prie, escrivés luy en esprit de douceur et
d'humilité, et, sans faire conte des choses passees, tesmoignés que vous estes fille de Nostre
Seigneur crucifié. Et non seulement a elle, mais escrivés aussi a M. le President549 et a monsieur
[161] d'Origny550, leur disant qu'apres tant de tourmens que vou saves souffertz, en fin Nostre
Seigneur et vostre vocation vous convient de les prier de vous assister au dessein qui a tous-jours
esté en vostre ame, de reduire vostre Monastere a quelque perfection de la vie religieuse, et qu'es
occasions vous les advertires des moyens requis a cet effect, a ce qu'ilz vous aydent ; car en fin,
ma tres chere Fille, il faut avoir la paix, et la paix naist de l'humilité. De renvoyer ce point a eux,
il n'est pas raysonnable ; il faut que ce soit vous qui commencies. En somme, il faut amollir et
briser ce cœur, ma tres chere Fille, et convertir nostre fierté en humilité et resignation.
Je salue toutes nos Seurs551, et particulierement madame la Prieure552. Dieu, par sa bonté,
vous comble de son Saint Esprit, affin que vous vivies en luy et a luy.
30 janvier 1618.
_____
MCCCXCVII. A la Mère de Chantal. Discrétion que garde le
baron de Chantal et qu'il faut garder avec lui.
Annecy, 16 janvier-février 1618 553.
Ma tres chere Mere,
Vostre Baron554 ne me parla point de son cousin M. de Rabutin555, ni moy a luy ; mais je
croy qu'il ne [162] desire pas que vous luy parlies, comme en effect, aussi bien sera-ce chose
inutile, sinon en general, et dissimulant la particularité.
J'iray, si je puis, cet apres disné voir Mlle de Colombier556. Ce pendant, je vous donne le
bon jour de tout mon cœur.
Revu sur une copie déclarée authentique, conservée à Turin, Archives de l'Etat.
_____
548 Mme Brûlart.
549 Le président Nicolas Brûlart, beau-frère de Rose Bourgeois. (Voir ci-dessus, note (200), p. 48.)
550 Guillaume Bourgeois, baron d'Origny, frère de la destinataire. (Voir tome XIV, note (402), p. 131.)
551 Les Religieuses du Puits-d'Orbe.
552 Françoise Bourgeois, sœur de l'Abbesse. (Voir tome XV, note (473), p. 151.)
553 Le fils de la Sainte vint à Annecy dans l'hiver de 1618 ; d'autre part, Mlle du Colombier, l'une des trois prétendantes
grenobloises (voir ci-dessus, note (516), p. 148), prit l'habit de la Visitation et le nom de Sœur Françoise-Angélique,
le 22 février 1618. Donc, aucun doute quant à l'année ; pour le quantième, il doit être compris dans la dernière
quinzaine de janvier ou la première de février.
554 Celse-Bénigne de Rabutin, baron de Chantal (voir tome XIV, note (1093), p. 376).
555 Il s'agit de l'un des fils de François de Rabutin, seigneur de la Vaux, et d'Hélye de Damas. Ils étaient cousins-
germains de Christophe, père de Celse-Bénigne. François, le quatrième, plus près du baron de Chantal par l'âge, est
peut-être celui que le Saint désigne ici. Il fut baron de Crux, et épousa Marguerite de la Magdelaine, veuve de Ludovic
de la Rivière, dont il n'eut point d'enfants. (Cte de Bussy, Hist. généal. de la maison de Rabutin, Dijon, 1866.)
556 Plus encore que ses compagnes, récemment arrivées avec elle de Grenoble, Mlle du Colombier avait besoin de voir
le saint Evêque. « Toute nouvelle dans la milice spirituelle, » remarque l'Histoire de la Fondation du Monastère de
Grenoble, elle avait failli en route « rendre les armes, » succombant au rude combat intérieur et extérieur qui lui était
livré. Sa cousine, Mlle de Glézat, instrument déjà de sa vocation, le fut aussi de sa persévérance ; encouragée par cette
voix amie, Françoise de Garcin du Colombier atteignit Annecy où bientôt elle reçut le voile de novice (voir note (553)
de la page précédente). Elle fit profession l'année suivante à Grenoble, et en partit au mois de mars 1615 pour coopérer
à l'établissement de la Maison d'Embrun. De fin 1634 à 1641, Sœur Françoise-Angélique gouverna ce Monastère en
qualité de Supérieure. (Archives du 1er Monastère d'Annecy.)
124/346

13.5 Page 125

▲back to top
MCCCXCVIII. Au Père Claude-Louis-Nicolas de Quoex, Prieur
de Talloires. Doux reproche à un ami trop affligé. Aimer le
bonheur de ceux qui nous ont quittés pour aller à Dieu.
Annecy, fin janvier-février 1618 557.
Mon cher Frere (car je suis en la place de celuy que nostre bon Dieu a retiré pres de luy),
on me vient de [163] dire que vous pleures continuellement pour cette veritablement bien sensible
separation. Il ne faut nullement que cela soit, car, ou vous pleures sur luy, ou pour vous. Si c'est
sur luy, pourquoy pleurer, que nostre Frere est en Paradis ou les pleurs n'ont plus de lieu558 ? Que
si pour vous, n'y a-il point trop d'amour propre (je parle avec vous ainsy franchement), d'autant
qu'on jugera que vous vous aymes plus que son bonheur, qui est incomparable ? Et voudries vous
que, pour vous, il ne fust pas avec Celuy559 in quo movemur et sumus560, tous tant que nous sommes
qui acquiesçons a son saint playsir et divine volonté ?
Mais venes nous voir, et souvent, et nous convertirons les pleurs en joye561, nous souvenant
par ensemble de celle de laquelle nostre bon frere jouit et laquelle jamais plus ne luy sera ostee562.
Et en somme, pensés souvent en elle et en luy, et vous vivres joyeux, comme je le souhaite de tout
mon cœur, avec lequel je me recommande a vos prieres et vous asseure que je suis vostre.
FRANÇS, E. de Geneve. [164]
_____
557 Nul doute pour le destinataire ; c'est bien le Prieur de Talloires (voir tome XIV, note (517), p. 172) que François
de Sales console de la mort de son frère, Philippe de Quoex, arrivée le 24 janvier 1618 (voir ci-dessus, notes (533),
(534), p. 156). L'invitation du Saint à l'affligé, de venir le visiter souvent, ne permet pas de reculer ces lignes plus tard
qu'au commencement de février, le départ pour Grenoble ayant eu lieu le 26 de ce mois.
558 Is., XXV, 8 ; Apoc. VII, ult., XXI, 4.
559 en qui nous nous mouvons et nous sommes
560 Act., XVII, 28.
561 Ps. XXIX, 12.
562 Luc., X, ult.
125/346

13.6 Page 126

▲back to top
MCCCXCIX. Au Père Ange Calcagni, Cordelier563. Consolation
à un prisonnier.
Annecy, 4 février 1018.
Molto Reverendo Padre in Christo
Très Réverend et très honoré Père dans
osservandissimo,
le Christ,
Andando costì il signor Rocho suo
fratello, anch'io vado con esso lui mentalmente
a salutar Vostra Riverenza et pregharla che stia
allegra quanto Ella potrà in questa sua
tribulatione che, gratia al Signore, finirà
presto, poichè subito che Sua Eccellenza che
deve venir fra pochi giorni [sarà giunta564],
Vostra Paternità sarà messa in libertà565. [165]
Et cosi, augurandoli ogni vera
consolatione doppo questo travaglio, con tutto
il cuore alle sue orationi mi raccommando.
Di Vostra Paternità molto Reverenda,
Affettionatissimo come fratello et servitor,
FRANCO, Vescovo di Geneva.
In Annessi, alli 4 di Febraio 1618.
Al molto Rdo in Christo,
Il P. Angelo Calcagno,
Guardiano della Madonna della Campagna di
Piacenza566.
M. Roch votre frère se rendant vers
vous, je vais aussi en esprit avec lui saluer
Votre Révérence et la prier de demeurer
joyeuse, autant qu'elle le pourra, en cette
tribulation. Grâce à Dieu, elle finira bientôt,
puisque dès l'arrivée de Son Excellence, qui
doit venir dans quelques jours, Votre Paternité
sera mise en liberté. [165]
Ainsi, vous souhaitant toute vraie
consolation après cette épreuve, je me
recommande de tout cœur à vos prières.
De Votre très Révérende Paternité,
Très affectionné comme frère et serviteur,
FRANÇOIS, Evêque de Genève.
Au très Révérend [Père] dans le Christ,
Le Père Ange Calcagni,
Gardien de Notre-Dame de la Campagne de
Plaisance. [166]
Revu sur l'Autographe appartenant à M. le
comte Morandi, à Plaisance (Italie). [166]
_____
563 Frère de Roch Calcagni (voir tome XIV, note (850), p. 302), le P. Ange était, depuis le mois de mai 1617, Gardien
du couvent des Franciscains de Sainte-Marie de la Campagne à Plaisance. On trouve sa signature dans les actes de la
Fabrique de l'église jusqu'à la fin de 1617. Du 17 février 1618 aux derniers jours d'avril, au lieu de la sienne, paraît
celle du Vicaire, le P. Chérubin. C'est en effet le temps de son voyage en Savoie ; il y vint sans doute voir son frère,
et, peut-être pour une cause politique, il fut incarcéré. Sa parenté avec un officier du duc de Nemours, son arrivée d'un
pays où l'influence de l'Espagne demeurait très grande, suffisaient à le rendre suspect. La meilleure preuve de son
innocence, c'est que, à son retour, les Supérieurs le confirmèrent dans sa charge de Gardien ; du 23 juin 1619 au 25
mars 1620, le P. Ange est de nouveau signataire des actes de la Fabrique. Après une seconde interruption, il revient et
signe le 24 août 1620 ; enfin il figure pour la dernière fois le 31 décembre de cette même année ; dès lors, un autre
Gardien, le P. Pie de Plaisance, lui succède, et l'on ne sait plus rien de lui. (D'après les notes communiquées par S. G.
Mgr Pellizzari, Evêque de Plaisance.)
564 Le marquis de Lans était alors à Turin ; il revint à Chambéry le 31 mars. (Cf. Mugnier, Les Entrées du Sénat, p.
94.)
565 Voir ci-après, Lettre MCDVIII, p. 185.
566 Déjà en 1030 la Sainte-Vierge était honorée dans ce sanctuaire, car à cette époque on bâtit tout proche, et sans
doute pour le desservir, un couvent de Bénédictins. En 1522, pour remplacer le premier édifice aux proportions trop
modestes, on commença la construction de l'église actuelle, remarquable par son architecture et les œuvres d'art qu'elle
renferme. Les Frères Mineurs, déjà établis à Plaisance, reçurent en 1547 la garde de Sainte-Marie de la Campagne ;
ils l'ont eue jusqu'à présent, bien que, depouillés en 1866 de leur antique couvent, ils aient dû en édifier un autre.
(D'après une lettre de Mgr l'Evêque de Plaisance.)
126/346

13.7 Page 127

▲back to top
MCD. A M. Jean de Chatillon567 (Inédite). Décisions pour le
service de quelques paroisses.
Annecy, 6 février 1618.
Monsieur,
Re non integra568, je pense que cette attestation soit suffisante, laquelle pour cela je vous
renvoye, affin qu'elle serve au suppliant.
J'ay donné verbalement charge a M. le curé de Vualier569, de dire a monsieur le curé des
Alinges570 et a [167] M. le curé d'Orcier571, qu'en secourant Draillans572, jusques a ce que nous y
puissions mettre autre ordre, et eux et le vicaire des Alinges573 pourront celebrer deux fois a cette
contemplation, car il faut faire ce que l'on peut.
Madame d'Orlier574 me prie qu'elle puisse avoir la chapelle de Saint François, qu'elle
dotera. Je vous prie de voir que c'est et m'en tenir adverti, bien que je ne laisseray pas d'en parler
avec monsieur de Blonnay575, puisque il vient de deça, a ce quil m'escrit.
Je suis, Monsieur,
Vostre tres humble confrere,
FRANÇS, E. de Geneve.
6 febvrier 1618, Annessi.
D'après une copie de l'Autographe qui appartenait à M. Griolet, et qui a été vendu à Genève en
1910, par M. Thury. [168]
567 Une lettre adressée le 10 mai 1621 à Jean de Châtillon, plébain de Thonon, traite de questions analogues touchant
les mêmes paroisses mentionnées ici ; d'où l'on conclut à l'identité du destinataire. (Voir tome XV, note (184), p. 58.)
568 En l'état de la question,
569 « Vualier », soit Vailly, avait pour curé, depuis 1615, François de Lâchât, né à Sixt en Faucigny, vers 1576, d'égrège
Guillaume de Lachat et de Michière Biord. Il connut de bonne heure François de Sales et subit le charme auquel nul
ne pouvait résister, charme qu'il rappelle naïvement en déposant au Procès de Béatification du Saint : « On perdoit le
boire et le manger pour l'entendre... l'on ne se fusse jamais vouleu separer de luy. » En 1600, étant aumônier des
Allinges, M. de Lachat assiste à l'entrevue du Prévôt et de Nicolas de Harlay, gouverneur de la forteresse au nom du
roi de France ; à partir de ce moment, leur mutuelle intimité devient plus grande. « Je dis avoir accompagné ledict
Bien-heureux a la visite d'une infinité de malades, tant dans la ville d'Annecy qu'ailleurs, mesmes estant en voyages,
» pourra plus tard affirmer le curé de Vailly ; il suivit aussi le Saint en divers lieux « pour la reformation des
monastaires tant d'hommes que femmes. » (Process. remiss. Gebenn. (I), passim.) L'ami de François de Sales lui
survécut jusqu'en 1656.
570 Pierre Mojonier (voir tome XII, note (940), p. 376). Cet ecclésiastique fut un des premiers à travailler, après le
Bienheureux, dans le Chablais. Il avait été ordonné prêtre le 23 mai 1592 ; trois ans plus tard, il fut institué économe,
puis curé de la paroisse de Larringe, et desservait en même temps celle des Allinges dont il reçut officiellement la
charge en 1601, et la garda jusqu'à sa mort, en août 1623. (R. E.) Au témoignage de Charles-Auguste (Histoire, etc.,
liv. III), c'était un « homme puissant en œuvres et en paroles et qui entendoit fort bien la charge des ames. »
571 Le curé d'Orsier était alors Etienne Ollivier qui mourut en février 1624.
572 Petite paroisse de trente feux seulement, dépendante de la seigneurie des Allinges, que le Saint entoura de sa
sollicitude pastorale. Après l'avoir reconquise à la foi catholique, il la défendit contre les tentatives de l'hérésie et ne
cessa de travailler à y organiser les secours spirituels, comme nous l'avons déjà vu (tome XIII, Lettre CCLXXXIV, p.
43), et comme nous le verrons encore.
573 M. Rannaud, originaire de Sixt ; il occupa ce poste jusqu'au mois de mars.
574 Peut-être Diane de Rochette, fille du président Charles de Rochette et de Françoise-Marie de Villette-la-Couz. Elle
avait épousé en 1592 Charles d'Orlier, juge-maje du Chablais (voir tome XII, p. 481). Vivante encore en 1614, l'était-
elle en 1618 ? C'est probable, mais les documents nous manquent pour l'affirmer.
575 Claude de Blonay.
127/346

13.8 Page 128

▲back to top
MCDI. Au Prince de Piémont, Victor-Amédée576. Supplique pour
l'installation des Chartreux à Ripaille.
Annecy, 11 février 1618.
Monseigneur,
Entre les saintz projetz que Dieu inspira a Vostre Altesse tandis qu'elle fut icy, pour
restablir le lustre du service divin en ces païs de deça, l'un estoit de mettre les Peres Chartreux a
Ripaille577, qui de tous tems ont une tres particuliere obligation et fidele affection a la coronne de
Savoye, et desquelz la vie et les offices sont d'une merveilleuse edification. C'est pourquoy,
Monseigneur, le P. Don Laurens de Saint Sixt estant par dela578, j'ay creu que ce seroit a propos
d'en ramentevoir Vostre Altesse, a ce qu'elle oÿe avec confiance ce qu'il luy en [169] representera,
puisque non seulement il a pour ce sujet la creance de son General579, mais aussi une speciale
fidelité au service et a l'obeissance de Son Altesse, delaquelle il est nay sujet et vassal. Et ce
pendant, je prieray Dieu qu'il comble de ses graces Vostre Altesse, a laquelle faysant tres
humblement la reverence, je suis,
Monseigneur,
Tres humble, tres obeissant et tres fidele
orateur et serviteur,
FRANÇS, E. de Geneve.
Annessi, le XI febvrier 1618.
Revu sur l'Autographe conservé à Turin, Archives de l'Etat.
____
576 C'est à tort que les éditeurs précédents adressent cette lettre au duc de Savoie. Le destinataire est certainement
Victor-Amédée, comme l'indique le souvenir du séjour à Annecy.
577 Voir tome XVI, note (580), p. 183.
578 Ce très méritant Religieux était fils de noble Pierre de Saint-Sixt et de Huguette Comte. (Cf. tome XIV, note (914),
p. 319.) Il fit profession à la Grande-Chartreuse, le 6 octobre 1596. A partir de 1609, son nom est intimement lié avec
l'histoire de la Chartreuse de Vallon qui va s'éteindre, et avec celle de Ripaille qui doit en recueillir les épaves. Tout
en restant procureur de la Grande-Chartreuse, D. Laurent fut nommé administrateur des biens de la première, restitués
à l'Ordre en 1607 ; puis, mêlé comme personnage principal à la fondation de la seconde (1623), il en est d'abord
recteur, et, le nouvel établissement affermi, il en devient prieur en 1628. Dix-neuf ans après, il est transféré, avec le
même titre, à la Chartreuse de Collegno, près Turin. Là, comme dans ses charges précédentes, il montra sa rare capacité
pour les affaires ; ce fut même cette aptitude spéciale qui l'arracha une fois encore à son œuvre, et le fit choisir (1652)
pour continuer, en qualité de procureur, la restauration de la Chartreuse de Valbonne, où il mourut, en pleine activité,
le 14 janvier 1654. D. Laurent de Saint-Sixt ne put pas être un grand contemplatif ; « bon Religieux et zelé a son
debvoir, » mais toujours l'outil à la main pour édifier, restaurer les maisons de prière, il eut surtout le mérite de se
dévouer sans mesure au bien de son Ordre ; et l'Ordre reconnut ses services et ses vertus par des témoignages
exceptionnels d'estime et de reconnaissance après sa mort. (D'après les Notes du R. P. Archiviste général de l'Ordre.)
579 D. Bruno d'Affringues (voir tome XVI, note (640), p. 200).
128/346

13.9 Page 129

▲back to top
MCDII. A la Sœur de Blonay, Maitresse des novices a la
Visitation de Lyon580. La foi en la Providence au milieu des
sécheresses spirituelles. Quel examen il faut faire. Le
grand acte d'amour de Notre-Seigneur sur la croix. Profit que
nous devons tirer de nos imperfections. Vivre joyeuse sous le
regard de Dieu. Saluts paternels.
Annecy, 18 février 1618.
Ce m'eust esté une consolation sans pair de vous voir toutes en passant581, mais Dieu ne
l'ayant pas voulu, je m'arreste a cela ; et ce pendant, ma tres chere Fille, tres volontier je lis vos
lettres et y respons.
O Nostre Dame ! ma trrs chere Fille, si Nostre Seigneur pense en vous et s'il vous regarde
avec amour ? Ouy, ma trrs chere Fille, il pense en vous, et non seulement [170] en vous, mais au
moindre cheveu de vostre teste582 : c'est un article de foy, et n'en faut nullement douter. Mays je
sçai bien aussi que vous n'en doutes pas, ains seulement vous exprimes ainsy l'aridité, secheresse
et insensibilité en laquelle la portion inferieure de vostre ame se treuve maintenant. Vrayement,
Dieu est en ce lieu, et je rien sçavois rien, disoit Jacob583 ; c'est a dire, je ne m'en appercevois pas,
je n'en avois nul sentiment, il ne me sembloit pas. J'ay parlé de ceci au livre de l'Amour de Dieu,
traittant de la mort de la volonté et des resignations ; je ne me souviens pas en quel Livre584.
Et que Dieu vous regarde avec amour, vous n'aves nul sujet d'en douter ; car il voit
amoureusement les plus horribles pecheurs du monde, pour peu de vray desir qu'ilz ayent de se
convertir. Et dites-moy, ma tres chere Fille, n'aves vous pas intention d'estre a Dieu ? ne voudries
vous pas le servir fidelement ? Et qui vous donne ce desir et cette intention, sinon luy mesme en
son regard amoureux ? D'examiner si vostre cœur luy plaist, il ne le faut pas faire, mais ouy bien
si son cœur vous plaist ; et si vous regardes son cœur, il sera impossible qu'il ne vous plaise, car
c'est un cœur si doux, si suave, si condescendant, si amoureux des chetifves creatures, pourveu
qu'elles reconnoissent leur misere, si gracieux envers les miserables, si bon envers les penitens !
Et qui n'aymeroit ce cœur royal, paternellement maternel envers nous ?
Vous dites bien, ma tres chere Fille, que ces tentations vous arrivent parce que vostre cœur
est sans tendreté envers Dieu ; car c'est la verité que si vous avies de la tendreté vous auries de la
consolation, et si vous avies de la consolation vous ne series plus en peyne. Mais, ma Fille, l'amour
de Dieu ne consiste pas en consolation ni en tendreté ; autrement, Nostre Seigneur n'eust pas aymé
son Pere lhors qu'il estoit triste jusques a la mort585 et qu'il crioit : Mon Pere, mon Pere, pourquoy
m'as-tu abandonné586 ? Et c'estoit lhors, toutefois, qu'il faysoit le plus grand acte d'amour qu'il est
possible d'imaginer. [171]
En somme, nous voudrions tous-jours avoir un peu de consolation et de sucre sur nos
viandes, c'est a dire avoir le sentiment de l'amour et la tendreté, et par consequent la consolation.
Et pareillement, nous voudrions bien estre sans imperfections ; mais, ma tres chere Fille, il faut
avoir patience d'estre de la nature humaine et non de l'angelique. Nos imperfections ne nous
580 La mention des « cheres filles novices » et en particulier de la Sœur Colin, prouve que cette lettre fut écrite à la
Directrice de la Visitation de Lyon, Sœur Marie-Aimée de Blonay. (Voir tome XV, note (826), p. 290.)
581 Si le voyage du Prince Cardinal de Savoie avait eu lieu, comme l'on s'y attendait, le saint Evêque aurait vu, en effet
« en passant » ses Filles de Lyon. (Voir ci-dessus, note (485), p. 138.)
582 Matt., X, 30 ; Luc., XXI, 18.
583 Gen., XXVIII, 16.
584 Liv. IX, ch. III, XI-XIII.
585 Matt., XXVI, 38.
586 Ibid., XXVII, 46.
129/346

13.10 Page 130

▲back to top
doivent pas plaire, ains nous devons dire avec le saint Apostre587 : O moy miserable ! qui me
delivrera du cors de cette mort ? mais elles ne nous doivent pas ni estonner ni oster le courage.
Nous en devons voirement tirer la sousmission, humilité et desfiance de nous mesmes ; mais non
pas le descouragement ni l'affliction du cœur, ni beaucoup moins la desfiance de l'amour de Dieu
envers nous ; car ainsy Dieu n'ayme pas nos imperfections et pechés venielz, mais il nous ayme
bien nonobstant iceux. Ainsy, comme la foiblesse et infirmité de l'enfant desplaist a sa mere, et
pourtant, non seulement ne laisse pas pour cela de l'aymer, ains l'ayme tendrement et avec
compassion, de mesme, bien que Dieu n'ayme pas nos imperfections et pechés venielz, il ne laisse
pas de nous aymer tendrement ; de sorte que David eut rayson de dire a nostre Seigneur588 : Aye
misericorde, Seigneur, parce que je suis infirme.
Or sus, c'est asses, ma tres chere Fille. Vivés joyeuse : Nostre Seigneur vous regarde, et
vous regarde avec amour, et avec d'autant plus de tendreté que vous aves d'imbecillité. Ne
permettes jamais a vostre esprit de nourrir volontairement des pensees contraires ; et quand elles
vous arriveront, ne les regardés point elles mesmes, destournés vos yeux de leur iniquité, et
retournés devers Dieu avec une courageuse humilité, pour luy parler de sa bonté ineffable par
laquelle il ayme nostre chetifve, pauvre et abjecte nature humaine, nonobstant ses infirmités.
Priés pour mon ame, ma chere Fille, et me recommandés a vos cheres filles novices589,
lesquelles je connois toutes, [172] fors que ma Seur Colin590. Je suis entierement vostre en Nostre
Seigneur, qui vive a jamais en nos cœurs. Amen.
Annessi, ce XVIII febvrier 1618.
_____
587 Rom., VII, 24.
588 Ps. VI, 3.
589 Elles étaient, à cette date, au nombre de sept : Anne-Marie Bellet et Marguerite Chasselay, qui rentrèrent cette
année-là même dans le monde ; Jeanne-Françoise Estienne, Françoise-Catherine Orlandini, Jacqueline-Elisabeth
Daniel, Marie-Madeleine Ravier et Anne-Claude Colin.
590 Nous avons rencontré dès le début de la fondation de Lyon la gracieuse figure d'une enfant de dix ans, inséparable
compagne de piété de sa mère Isabeau Daniel, veuve Colin (voir tome XVI, note (779), p. 241). Elle reçoit d'abord la
robe grise des Sœurs de la Présentation, avec une cornette que remplace un petit voile blanc lorsqu'elle suit les
congrégées dans leur transformation en Filles de la Visitation. (Voir ibid., note (989), p. 305, et Appendice III, note
(1397), p. 423.) En attendant l'âge d'entrer au noviciat, Claude pratique tous les exercices de la Communauté, et ne
connaît d'autre divertissement que de « faire des oratoires. » (Livre du Couvent, du 1er Monastère de Lyon, transféré à
Venise.) La Mère de Chantal fut charmée du bon naturel et de la précoce maturité de cette toute jeune fille ; elle en
donna une preuve en la choisissant pour l'assister au parloir, même quand elle s'y trouvait avec l'Evêque de Genève,
en 1615. La Mère de Blonay lui montra plus tard semblable confiance, et l'aimable assistante nous a conservé le
souvenir de traits charmants de la débonnaireté du saint Prélat, dont elle fut témoin à cette occasion. Le 13 décembre
1617, le Chapitre l'admit à la vêture, et l'année suivante, 25 décembre, Sœur Anne-Claude prononça ses vœux. Elle
coopéra (1623 et 1641) aux fondations d'Avignon et de Tarascon, et mourut en odeur de sainteté dans ce dernier
monastère, en décembre 1680. Partout elle avait conquis l'affection et l'estime universelles par une vie d'abnégation,
d'obéissance et de charité. (Voir Année sainte de la Visitation, tome XII, p. 115.)
130/346

14 Pages 131-140

▲back to top

14.1 Page 131

▲back to top
MCDIII. A la Mère Favre, Supérieure de la Visitation de
Lyon591. Les mères poules et leurs poussins. Une école de
charité et de patience. Conseils au sujet de Novices. Le
filet imperceptible de la Providence. Parure de ce monde et
parure du Ciel pour les épouses du Christ. Humilité du saint
Evêque.
Annecy, 19 février 1618.
Je vous voy, ma tres chere Fille, toute malade et [173] dolente sur les maladies et douleurs
de vos filles592. On ne peut estre Mere sans peyne. Qui est celuy qui est malade, dit l'Apostre593,
que je ne le sois avec luy ? Et nos anciens Peres594 ont dit la dessus, que les poules sont tous-jours
affligees de travail tandis qu'elles conduisent leurs poussins et que c'est ce qui les fait glosser
continuellement, et que l'Apostre estoit comme cela. Ma tres chere Fille, qui estes aussi ma grande
fille, le mesme Apostre disoit aussi, que quand il estoit infirme, alhors il estoit fort595, la vertu de
Dieu paroissant parfaite en l'infirmité596. Et vous donq, ma Fille, soyes bien forte parmi les
afflictions de vostre Mayson. Ces maladies longues sont des bonnes escholes de charité pour ceux
qui y assistent, et d'amoureuse patience pour ceux qui les ont ; car les uns sont au pied de la croix
avec Nostre Dame et saint Jean, dont ilz imitent la compassion, et les autres sont sur la croix avec
Nostre Seigneur, duquel ilz imitent la Passion.
Quant a la Seur de laquelle vous m'escrives, Dieu vous fera prendre le conseil convenable.
Cette douceur es souffrances est un pronostic de la future faveur abondante de Nostre Seigneur en
cette ame, ou qu'elle aille ou demeure597. Salués, je vous supplie, ces deux filles tendrement de ma
part, car je les ayme ainsy.
Au demeurant, s'il est treuvé convenable de renvoyer cette Novice, il le faudra faire avec
toute la charité possible, et Dieu reduira tout a sa gloire. Dieu garde et benit les sorties aussi bien
que les entrees598 de celles qui font toutes choses pour luy, et qui n'occasionnent pas leurs sorties
par leurs mauvais deportemens. Sa providence fait vouloir le sacrifice qu'elle empesche par apres
[174] d'estre fait, comme on voit en Abraham599 ; et me semble que je dis je ne sçay quoy de ceci
au livre de l'Amour de Dieu, mais je ne me souviens pas ou600.
Dilatés cependant vostre cœur, ma chere Fille, mon ame, parmi les tribulations ;
aggrandisses vostre courage, et voyes le grand Sauveur penché du haut du Ciel vers vous, qui
regarde comme vous marches en ces tourmentes, et, par un filet de sa providence imperceptible,
tient vostre cœur et le balance en sorte qu'a jamais il le veut retenir a soy.
591 Toutes les éditions précédentes adressent ces pages A une Supérieure de la Visitation ; celle-ci, à n'en pas douter,
est la Mère Favre : l'ensemble du texte et surtout l'allusion aux maladies de ses Filles, le démontrent.
592 L'épreuve devait se prolonger encore plusieurs semaines. Le 14 mars, la Sainte écrit à la Supérieure de Lyon : «
Nous trouvons le temps long d'attendre de vos nouvelles et de vos pauvres malades que nous supplions Notre-Seigneur
de vouloir guérir pour sa gloire et notre consolation. » (Lettres, vol. I, p. 241.) Et c'est seulement le 29 qu'elle peut
ajouter : « Je me réjouis du soulagement des pauvres malades. » (Ibid., p. 246.)
593 II Cor., XI, 29.
594 S. Joan. Chrysost., hom. XLVII in Matt. ; S. Aug., Enarrat. in Ps. LVIII, § 10 ; Ven. Beda, Enarrat. in Evang. Matt.
595 II Cor., XII, 10.
596 Ibid., v. 9.
597 On peut penser qu'il s'agit ici de la Sœur Françoise-Catherine Orlandini, novice depuis le mois d'août 1617. Ses
infirmités précoces obligèrent à la recevoir au rang des Soeurs associées, lorsqu'elle eut les voix du Chapitre pour la
profession.
598 Cf. Ps. CXX, ult.
599 Gen., XXII, 10-12.
600 Liv. IX, ch. VI.
131/346

14.2 Page 132

▲back to top
O ma tres chere Fille, vous estes espouse non pas encor de Jesus Christ glorifié, mais de
Jesus Christ crucifié : c'est pourquoy les bagues, les carquans et enseignes qu'il vous donne et dont
il vous veut parer sont des croix, des clouz, des espines, et le festin de ses noces est de fiel,
d'hyssope, de vinaigre601. La haut nous aurons les rubis, les diamans, les esmeraudes602, le moust,
la manne603 et le miel. Je ne dis pas ceci, non, ma chere grande Fille, vous tenant pour descouragee,
mais vous tenant pour adoloree, et m'estant advis que je dois mesler mes souspirs avec les vostres,
comme je sens mon ame meslee avec la vostre.
Voyes vous, ne me dites point que vous abuses de ma bonté a m'escrire des grandes lettres
; car en verité, je les ayme tous-jours suavement.
Ce bon Pere dit que je suis une fleur et un vase de fleurs, et un phœnix604 ; mais en verité,
je ne suis qu'un puant homme, un corbeau, un fumier. Mais pourtant, aymés moy bien, ma tres
chere Fille, car Dieu ne laisse pas de m'aymer et de me donner des extraordinaires desirs de le
servir et aymer purement et saintement. En somme, apres tout, nous sommes trop heureux d'avoir
pretention en l'eternité de la gloire, par le merite de la Passion de Nostre Seigneur, qui fait trophee
de nostre misere pour la convertir en sa misericorde, a laquelle soit honneur et gloire es siecles des
siecles. Amen. [175]
Je suis vostre, ma tres chere Fille, vous le sçaves bien, mais je dis vostre d'une façon
incomparable.
FRANÇS, E. de Geneve.
Le 19 febvrier 1618.
_____
MCDIV. Au Père Jean-Matthieu Ancina de la Congrégation de
l'Oratoire605 (Inédite). Envoi d'un mémoire sur les vertus de
Juvénal Ancina.
Annecy, 23 février 1618.
Molto
Reverendo
osservandissimo,
Padre
Mi dispiace sommamente che Vostra
Paternità non habbia sin adesso ricevuto
l'elogio fatto da me intorno al concetto nel
quale ho sempre havuto la felicissima memoria
del nostro Monsignore Rmo di Saluzzo606. Et
ecco che io ne mando un duplicato fatto et
scritto in fretta, et dal rozzo mio ingegno, onde
non sarà degno d'esser appresentato alli occhi
del publico ; ma fatto però da un cuore che
stima sommamente [e] è amantissimo della
Très Révérend et très honoré Père,
Je regrette infiniment que Votre
Paternité n'ait pas encore reçu l'éloge que j'ai
fait en témoignage de l'estime en laquelle j'ai
toujours tenu notre Révérendissime
Monseigneur de Saluces, de très heureuse
mémoire. Voici donc que j'en envoie un
double, sorti de mon lourd entendement, et
écrit à la hâte ; aussi ne sera-t-il pas digne d'être
mis sous les yeux du public. Il est cependant
fait par un cœur qui honore grandement et
chérit le souvenir de notre Monseigneur. J'ai
601 Cf. Matt., XXVII, 34, 48 ; Joan., XIX, 29.
602 Cf. Apoc., XXI, 19, 20.
603 Cf. ibid., II, 17.
604 Le 1er février 1618, la Mère Favre écrit à son père : « Voyla un paquet pour Mgr de Genesve, avec une anagramme
qu'un bon Religieus a fayt sur son nom. » (Archives de la Visitation du Mans.) L'auteur de l'anagramme est très
probablement le « bon Pere » dont les comparaisons choquaient l'humilité du Saint.
605 Voir tome XIII, note (632), p. 234.
606 L'éloge du bienheureux Juvénal Ancina, frère du destinataire (voir tome XII, note (24), p. 7), sera donné parmi les
Opuscules.
132/346

14.3 Page 133

▲back to top
ricordatione di detto nostro Monsignore. Et ho
poco detto, perchè non ho havuto tempo da
vedere in esso la prattica [176] delle virtù alla
distesa ; Vostra Paternità potrà allargar,
corregere, abbreviare et mutar come gli parerà.
Et me facia gratia di haver sempre una
solida dilettione dell'anima mia, massime nelli
suoi Sacrificii, che così resto eternamente,
Di Vostra Paternità molto Reverenda,
Certissimo et affettionatissimo servitore,
FRANCO, Vescovo di Geneva.
Di 23 Febraio 1618, in Annessi.
dit peu de chose, parce que je n'ai pas eu le
temps de voir [176] en lui la pratique des
vertus en détail ; Votre Paternité pourra
allonger, corriger, abrég er et changer comme
bon lui semblera.
Faites-moi la grâce d'avoir toujours une
constante dilection pour mon âme, surtout dans
vos saints Sacrifices, puisque je demeure à
jamais, de Votre très Révérende Paternité,
Le très assuré et très affectionné serviteur,
FRANÇOIS, Evêque de Genève.
23 février 1618, à Annecy.
Revu sur une copie conservée à Milan, à la
Bibliothèque Ambrosienne.
_____
MCDV. A Dona Ginevra Scaglia607. Remerciements pour une
lettre et un présent. Sur la demande de la destinataire,
l'Evêque de Genève lui offre une occasion d'aider les Sœurs de
la Visitation. Nouvelles de la Congrégation.
Notre-Dame de Myans, 27 février 1618.
Illustrissima Signora mia in Christo
Très illustre Madame, très honorée
osservandissima,
dans le Christ,
Non ero in Granoble quando
Je n'étais pas à Grenoble quand Son
l'Eccellentia del signore [177] suo padre vi Excellence monsieur votre [177] père y vint,
capitò608, ma egli tuttavia non lasciò di mais il ne laissa pas de m'envoyer à Annecy la
607 Le texte italien est inédit. La comparaison de cette lettre avec celles que le Saint adresse à « Dona Genevra »
suffit pour identifier la destinataire. Dame d'honneur des Infantes de Savoie, Ginevra était fille de Philibert-Gérard
Scaglia, comte de Verrua, et de Blanche Ponte di Scarnafigi. Au milieu des splendeurs de la cour, elle était l'âme d'un
groupe de natures d'élite qui, se glorifiant d'être sous la direction du saint Evêque de Genève, attendaient avec
impatience, pour se donner à Dieu, l'établissement d'un monastère de la Visitation à Turin. Dona Ginevra attendit avec
plus de persévérance que toutes ; il fut même question pour elle de venir commencer son noviciat à Annecy ; cf.
Lettres de Ste J.-F. de Chantal, vol. I, p. 505). Mais enfin, comme la fondation fut retardée beaucoup plus qu'on n'avait
pu le prévoir au début, François de Sales conseilla lui-même à l'aspirante d'entrer au monastère de Sainte-Marguerite,
de l'Ordre de Saint-Dominique, à Chieri, près de Turin. Elle y prit l'habit et le nom de Marie-Christine en 1621 ; les
princes et princesses assistèrent à la cérémonie avec toute la haute noblesse. (Lettre du Saint à D. Juste Guérin, 12
octobre 1621.) En 1630, elle était déjà abbesse, et le fut plusieurs fois, faisant « des merveilles pour l'avancement
spirituel et temporel de ce monastère, se conduisant toujours comme fille de nôtre saint Fondateur dont les ouvrages
ont été sa continuelle direction, et dont elle a inspiré la dévotion à toutes les Religieuses de son couvent. » (Hist. de
la Fondation de la Visitation de Turin.)
Le Saint, lors de son dernier voyage en Piémont, visita sa fille spirituelle : « J'ay veu Seur Marie Chrestienne,
» écrit-il à la Mère de Chantal (fin août 1622), « que j'ay treuvee au dessus de tout ce que j'en avois pensé, en pieté, «
en generosité. » L'on garda longtemps à Sainte-Marguerite, comme une relique, une table sur laquelle il avait pris son
repas. Après avoir subi bien des vicissitudes depuis la dispersion des Dominicaines à la Révolution française, ce
monastère est aujourd'hui occupé par les religieux Salésiens.
608 Le comte de Verrua (voir tomes XII, note (191), p. 105, et XVII, note (643), p. 181) séjourna en Dauphiné dès les
premiers jours de janvier 1618 jusqu'à la fin du mois. Il y était venu conférer avec Lesdiguières de l'exécution du traité
de Pavie.
133/346

14.4 Page 134

▲back to top
mandarmi la lettera di V. S. Illma in Annessi ;
et pochi giorni passati ricevei da parte del buon
Padre D. Giusto una corona con la croce del
legno di San Francesco609, che pur V. S. Illma,
per quanto mi scrisse detto [178] Padre, mi
donava, et laquale io conservarò caramente,
ringratiando humilmente il cuore et la mano
che la diede. Et se le mie orationi saranno
essaudite dal Signor Iddio, a quel cuore sarà
dato il cumulo perfetto del celeste amore, et a
quella mano l'annello dello sponsalitio eterno
col Redentore delle anime, acciò V. S. Illma,
come Ella desidera, viva tutta per Christo et in
Christo et a Christo.
Detto Padre poi mi scrisse che dove
occoresse qualche occasione di agiutare il
monasterio delle Sorelle della Visitatione, io
ne scrivessi a V. S. Illma et che Ella poi farebbe
l'officio con la Serenissima Infante610. Et
perchè dette Sorelle hanno questi giorni passati
comprato un certo molino dal Signor Duca di
Nemours, et che morendo detto Signor Duca
senza figli sarebbe pericolo che la Camera di
Sua Altezza non solamente pigliasse detti
molini, ma facesse ancora perdere a dette
Sorelle il loro dinario (sic), per questo si
domanda a Sua Altezza611 che come ha usato
con parecchi altri in simili occasioni, cosi si
compiaccia di fare in questa opera pia,
rattificando il [179] contratto fatto con esso
Duca di Nemours o vero con quelli che in vece
sua contrattano612 ; et cosi dette Sorelle
supplicano la Serenissima Infante che si degni
raccommandar il negotio, et V. S. Illma che per
carità sia l'intercessora loro.
Et per dargliene animo l'assicuro che
quella Congregatione va tuttavia crescendo
lettre de Votre Seigneurie Illustrissime. Il y a
peu de jours, je reçus de la part du bon Père D.
Juste un chapelet avec la croix du bois de saint
François, qui, à ce qu'il m'écrivit, m'est aussi
offert par [178] vous. Je le garderai
précieusement, et en remercie humblement le
cœur et la main qui me l'ont donné. Si mes
prières sont exaucées par le Seigneur notre
Dieu, ce cœur recevra le comble de la
perfection de l'amour céleste, et cette main
l'anneau des éternelles épousailles avec le
Rédempteur de nos âmes, afin que, suivant les
désirs de Votre Seigneurie Illustrissime, elle
vive toute pour le Christ, dans le Christ et au
Christ.
Le Père m'écrivit aussi que si quelque
occasion d'aider le monastère des Sœurs de la
Visitation se présentait, je le fisse savoir à
Votre Seigneurie qui servirait d'intermédiaire
auprès de la Sérénissime Infante. Et voilà que
ces Sœurs ont justement, ces jours passés,
acheté un certain moulin de Monsieur le Duc
de Nemours ; or, si le prince venait à mourir
sans enfants, il serait à craindre que la
Chambre de Son Altesse, non seulement
s'emparât de ces moulins, mais qu'elle fît
encore perdre aux Sœurs leur argent. C'est
pourquoi on demande à Son Altesse de daigner
faire en faveur de cette œuvre de piété ce
qu'elle a fait en de semblables occurrences,
ratifiant le [179] contrat passé avec le Duc de
Nemours ou avec ceux qui contractent en son
nom ; et les Sœurs supplient la Sérénissime
Infante de vouloir bien recommander cette
affaire, et Votre Seigneurie Illustrissime,
d'intercéder pour elles, par charité.
609 Ce chapelet, évalué quinze à vingt écus, fut donné plus tard comme souvenir par François de Sales à un jeune
peintre nouvellement converti de l'hérésie. Les gens du saint Evêque n'approuvèrent pas cette libéralité, « d'autant que
le peintre se fut bien contenté d'un chapelet de cinq sols ! Hé ! qu'importe ? respondit-il, laissez l'aller, il en fera
son proffit. » (P. de la Rivière, La Vie de l'Illme et Rme François de Sales, Lyon, 1625, liv. IV, chap. IX.)
610 Marguerite de Savoie, duchesse de Mantoue, protectrice de l'Ordre de la Visitation. (Voir tome XVI, note (344),
p. 104.)
611 Le duc de Savoie.
612 Situés sur la rivière du Thiouz, derrière le monastère de Sainte-Claire, ces moulins avaient été vendus, le 18 janvier
1596. pour deux mille écus d'or et sous droit perpétuel de rachat, à Antoine de Conflens, par le duc de Genevois et de
Nemours, du consentement d'Anne d'Est, sa mère et curatrice. Les Religieuses de la Visitation, autorisées par lettres
patentes du prince, datées de Paris le 28 octobre 1617 (voir à l'Appendice II), et vérifiées par la Chambre des Comptes
de Genevois le 14 février 1618, traitèrent avec le neveu et héritier de l'acheteur, Antoine de Boëge, seigneur de
Conflens. Le 6 mars, l'acte fut signé ; les Religieuses entraient en jouissance des moulins et de leurs dépendances,
mais demeuraient tenues, à peine de nullité du contrat, d'obtenir de Son Altesse Sérénissime des lettres patentes de
ratification et approbation de la première et de la seconde vente. (Voir à l'Appendice II leur requête au duc de Savoie.)
Le 16 octobre, malgré l'intervention de dona Ginevra, on attendait encore l'expédition de ces patentes. (Turin, Archives
de l'Opera pia Barolo, Paquet 221, n° II, et Archives de la Visitation d'Annecy, Livre des contrats permanents.)
134/346

14.5 Page 135

▲back to top
nella perfettione religiosa et dà tanto odore,
Pour vous y encourager, je vous assure
che da molte bande si domandano Sorelle che que cette Congrégation croît toujours plus dans
vadano fondare Monasterii in diversi luoghi613. la perfection religieuse et répand une telle
Ma si aspettano i dispacci di Roma, per i quali odeur [de vertu], que de plusieurs côtés on
havendo adesso un tanto buon sollecitatore demande des Sœurs pour fonder des
come è il P. D. Giusto, et tante intercessioni, si Monastères. Mais on attend les dépêches de
è da sperare che presto le haveremo, mediante Rome ; ayant maintenant pour les obtenir un
la gratia del Signore, et massime poichè [180] solliciteur aussi habile que l'est le P. D. Juste,
è servitio et gloria di Sua Divina Maestà et et de si nombreuses recommandations, il faut
salute delle anime comperate col sangue del espérer qu'avec la grâce de Dieu nous les
Redentore, a cui sia dato honore et gloria et recevrons bientôt, d'autant plus [180] qu'il
benedittione eterna614, et a V. S. Illma quelle s'agit du service et de la gloire de sa divine
gratie che da me glie sonno desiderate.
Majesté, et du salut des âmes rachetées par le
Di V. S. Illma
sang du Rédempteur. A lui soit honneur, gloire
Humilissimo et certissimo servitore in et bénédiction éternelle, et à vous, Madame,
Christo, toutes les grâces que vous souhaite,
FRANCO, Vescovo di Geneva.
De Votre Seigneurie Illustrissime,
Nel monasterio di Nostra Signora di Le très humble et très assuré serviteur dans le
Mians615, alli 27 di Febraio 1618.
Christ,
FRANÇOIS, Evêque de Genève.
Revu sur une ancienne copie conservée à la
Au monastère de Notre-Dame de
Visitation d'Annecy. [181]
Myans, le 27 février 1618. [181]
_____
613 Voir ci-dessus, note (480), p. 137.
614 Apoc., IV, 9, V, 12, 13.
615 Le très antique sanctuaire de Notre-Dame de Myans est peut-être antérieur au XIe siècle, et devint célèbre surtout
à partir de 1248, date de sa miraculeuse préservation lors de l'éboulement du Mont-Granier. Deux siècles plus tard,
grâce à la piété de Jacques de Montmayeur, il fut confié aux Religieux de Saint-François qui y demeurèrent jusqu'à la
Révolution. C'est de leur couvent qu'est datée la présente lettre. A la suite du Concordat, Myans fut érigé en
paroisse, et le presbytère établi dans une partie de l'ancien monastère. De 1803 à 1860, des curés et des missionnaires
desservirent alternativement paroisse et pèlerinage. Les Jésuites leur succédèrent jusqu'en 1877, époque à laquelle de
nouveaux missionnaires diocésains ont repris la garde du sanctuaire vénéré. Une des plus belles manifestations
catholiques du XIXe siècle à Myans eut lieu le 17 octobre 1855. La statue monumentale de Notre-Dame de Savoie,
placée au sommet du clocher de la chapelle, fut bénite solennellement ce jour-là. au milieu d'un concours de quarante
mille fidèles et en présence de huit Evêques. (Cf. Maillet, Le pèlerinage de Notre-Dame de Myans, Chambéry, 1900.)
135/346

14.6 Page 136

▲back to top
MCDVI. Au Prince de Piémont, Victor-Amedee616. Les
nécessités de la Sainte-Maison de Thonon. Appel à la bonté
du prince.
Notre-Dame de Myans, 28 février 1618.
Monseigneur,
La Sainte Mayson de Thonon ne peut subsister che (sic) par la bonté et liberalité de Son
Altesse, qui en est la fondatrice, et laquelle partant est suppliee maintenant sur divers articles
desquelz la resolution et execution est necessaire pour maintenir laditte Mayson, ainsy que le sieur
Gilette617, present porteur, representera618.
Playse a Vostre Altesse Serenissime d'estre favorable a ce bon oeuvre, comme elle l'est
ordinairement a toutes ; c'est la supplication seule que pour le present je luy fay, et qu'elle me face
la grace de m'advouer tous-jours,
Monseigneur,
Son tres humble, tres obeissant et tres fidele
orateur et serviteur,
FRANÇS, E. de Geneve.
A Nostre Dame de Myans, le 28 febvrier 1618.
Revu sur l'Autographe conservé à Turin, Archives de l'Etat. [182]
_____
616 Le Saint mentionnant dans ces lignes « Son Altesse », il est évident qu'il s'adresse, non au duc de Savoie, mais à
Victor-Amédée dont il désirait la recommandation auprès de son père Charles-Emmanuel.
617 Pierre Gillette (voir tome XIV, note (119), p. 37).
618 Les affaires restaient bien compliquées à la Sainte-Maison de Thonon (voir ci-dessus, note (241), p. 61) ; il fallait
nécessairement aboutir à un accord au sujet du prieuré de Contamine (cf. ibid., note (128), p. 22, et pp. 117, 118) et
de l'abbaye de Filly (voir tome XI, note (563), p. 252). Ce dernier bénéfice avait été acquis des Chevaliers des Saints
Maurice et Lazare, le 4 octobre 1617, par la Sainte-Maison et le Chapitre de Saint-Jean-de-Maurienne ; mais en vertu
d'un échange fait le même jour, la première restait seule propriétaire des revenus de Filly, tandis que le prieuré de
Saint-Julien en Maurienne était attribué au second. (Cf. Lavanchy, Mém. de l'Acad. Salés., tome XXXIII, chap. II,
III.)
En cette année 1618, et sans doute après le retour de Piémont de Pierre Gillette, eut lieu un arbitrage réglant
les droits respectifs du Presbytère et des Barnabites sur Contamine et Filly. (Turin, Archives de l'Opera pia Barolo,
Paquet 221, no 10.)
136/346

14.7 Page 137

▲back to top
MCDVII. A Madame de Vignod, Religieuse de l'Abbaye de
Sainte-Catherine. Un bouquet mystique à offrir aux Saints ; de
quelles fleurs il faut le composer. Saint Thomas d'Aquin.
Quel est l'ennui le plus importun. Les menues tracasseries
exercent l'amour de la propre abjection. Avis pour supporter
et corriger une petite fille d'humeur difficile.
Annecy, [février 1606-1618 619.]
Vous me demandes, ma tres chere Fille, quel bouquet vous pourres donner a vostre
Valentin620 ? Il doit estre fait de quelques petites actions de vertu, que vous prattiqueres expres en
faveur de ce Valentin celeste, et au bout de la meditation du matin, vous le luy presenteres, affin
qu'il le consacre a vostre cher Espoux. Vous pouves aussi en cueillir quelquefois au jardin des
Olives, sur le mont de Calvaire (je veux dire ces bouquetz de myrrhe de vostre saint Bernard), et
supplier le celeste Valentin de les recevoir de vostre cœur et d'en louer Dieu, qui est comme s'il en
respandoit l'odeur, puisque vous ne pouves ni asses dignement flairer ces divines fleurs, ni asses
hautement en louer la suavité. Vous le pourres encor prier, ce brave Valentin, qu'il prenne aussi ce
bouquet, et que de sa main il le vous face odorer, et mesme qu'il vous en rende quelqu'autre en
eschange ; qu'il vous donne des gans parfumés, couvrant vos mains d'oeuvres de charité et
d'humilité, et vous donne des brasseletz de corail, des chaisnes de perles ; et ainsy faut [183] il
exercer des tendresses d'amour avec ces heureux gentilzhommes de ce Roy de gloire.
Il me semble que ce fut saint Thomas d'Aquin que vous tirastes pour le mois : le plus grand
Docteur qui aye jamais esté. Il estoit vierge, et la plus douce et humble ame qu'on sçauroit dire.
Or, parlons un peu de ce cœur de ma tres chere Fille : s'il estoit a la veuë d'une armee
d'ennemis, ne feroit-il pas des merveilles, puisque la veuë et le rencontre d'une petite fille maussade
et escervelee le trouble si fort ? Mais ne vous troubles pas, ma tres chere Fille, il n'est point d'ennuy
si importun que l'ennuy qui est composé de plusieurs petites, mais pressantes et continuelles
importunités. Nostre Seigneur permet qu'en ces petites rencontres nous demeurions courtz, affin
que nous nous humiliions, et que nous sçachions que si nous avons surmonté certaines grandes
tentations, ce n'a pas esté par nos forces, mais par l'assistance de sa divine Bonté.
Je le voy bien, que par ces menues tracasseries il y a force sujetz d'exercer l'amour ou
l'acceptation de nostre propre abjection : car, que dira-on d'une telle fille qui n'a point fait proffiter
et n'a point bien dressé ni donné bonne action a cette petite fille ? Et puis, qu'est ce que nos Seurs
diront de voir que pour la moindre importunité qu'une creature nous fait, nous nous desbattons,
nous nous plaignons, nous grondons ? Il n'y a remede, ma tres chere Fille. La fille de saint Athanase
eust acheté cette condition au prix de l'or621, mais ma fille n'est pas si ambitieuse : elle aymeroit
mieux que l'occasion luy fust ostee que d'entreprendre de la faire valoir. Recourés bien a l'humilité,
et pour ce peu de tems que cet exercice durera, essayés-vous de la supporter en la presence de
Dieu, et d'aymer cette pauvre chetifve pour l'amour de Celuy qui l'a tant aymee qu'il est mort pour
elle. Ne la corriges pas, si vous pouves, en cholere ; prenes la peine qu'elle vous donne a gré, et
me croyes tout vostre.
FRANCS, E. de Geneve. [184]
619 L'allusion si caractéristique à saint Bernard désigne comme destinataire une Religieuse de l'abbaye de Sainte-
Catherine, et probablement la Sœur Bernarde de Vignod. (Voir tome XIII, note (299), p. 103.)
Quant à la date, elle reste obscure, car les avis de cette lettre ont pu être écrits depuis février 1606 ; à cette
époque, Bernarde était déjà sous la direction du Saint. Le texte lui-même ne paraît pas d'une intégrité incontestable ;
il pourrait y avoir une interpolation à partir du troisième alinéa. (Cf. tome XIV, note (67), p. 14.)
620 C'est-à-dire au saint Protecteur que la Religieuse avait tiré au sort le 14 février. (Cf. le tome précédent, note (1384),
p. 423.)
621 Vide Collat. Patrum, l. XVIII, c. XIV, et cf. Introd. a la Vie dev., Part. III, ch. I (tom. III, p. 127).
137/346

14.8 Page 138

▲back to top
MCDVIII. Au Duc de Savoie, Charles-Emmanuel Ier.
Témoignage et intercession en faveur du P. Ange Calcagni.
Grenoble, 8 mars 1618.
Monseigneur,
Le Pere Frere Angelo Calcagnio, Gardien des Observantins de Playsance622, est prisonnier
des il y a trois moys a Chamberi ; et par ce que je l'ay souvent veu a Annessi, ou il a quelquefois
demeuré les moys entiers avec son frere623, et n'ay jamais rien reconneu en luy contraire a la pieté
et religion, je l'ay visité en sa prison, ou je l'ay treuvé comme un homme que le tesmoignage de sa
conscience tient asseuré. Et par ce qu'il m'a demandé pour l'amour de Dieu mon intercession aupres
de Vostre Altesse, je ne la luy ay peu refuser ; c'est pourquoy, croyant fermement que rien ne se
treuvera en cette occasion contre son innocence, je fay tres humble supplication a Vostre Altesse
de luy vouloir departir sa faveur pour sa briefve sortie et son renvoye en son cloistre624.
Dieu face de plus en plus abonder ses graces sur la personne de Vostre Altesse, a laque
(sic) je suis,
Monseigneur,
Tres humble, tres obeissant et tres fidele
orateur et serviteur,
FRANÇS, E. de Geneve.
625 A Grenoble, le 8 mars 1618.
Revu sur l'Autographe conservé à Turin, Archives de l'Etat. [185]
_____
622 Voir ci-dessus, note (563), p. 165.
623 Roch Calcagni, écuyer du duc de Nemours. (Voir tome XIV, note (850), p. 302.)
624 Il y retourna au plus tard en juin, puisque le 23 de ce mois il signe des actes à Sainte-Marie de la Campagne.
625 La date est de la main de Georges Rolland.
138/346

14.9 Page 139

▲back to top
MCDIX. A Don Juste Guérin, Barnabite (Inédite). Louange à
Dieu pour le bon et le mauvais succès de divers événements.
Confiance en la Providence et courage pour agir. Pourquoi il
faut tout tenter et tout sacrifier afin d'obtenir aux Sœurs de la
Visitation le privilège du petit Office.
Grenoble, [vers 5-10] mars 1618 626.
Mon Reverend Pere, que je cheris comme mon ame propre,
J'ay receu il y a 4 jours vostre lettre du 14 febvrier. Or, Dieu soit loué de vostre arrivee en
bonne santé et des peines que vous aves souffertes en chemin, comme encor du mauvais estat
auquel vous aves treuvé l'affaire de la Visitation627, contre l'esperance en laquelle on nous avoit
nourri.628 Si bona suscepimus de manu Domini, mala etiam cur non sustinemus629 ? Mays je sçai
si asseurement que nos prætentions tendent a la plus grande gloire de Dieu, que je ne puis perdre
l'esperance de les voir reuscir, apres que sa divine Majesté aura un peu espreuvé nostre courage.
Mays pourtant, affin que de nostre costé nous attirons le bon succes par toute la sousmission
quil nous sera possible, je vous diray, mon tres cher Pere : premierement, que si vous voyes du
jour qu'avec un peu d'importunité nous puissions obtenir les trois articles que nous [186]
demandons630, je vous supplie de faire tout effort631 opportune, importune632.
2. Mais toutefois, si vous voyes qu'on ne les puisse pas obtenir tous trois, qu'au moins on
tienne bon en la poursuite de celuy du petit Office ; car le grand Office dissiperoit et le lustre et la
fin de cette Congregation, puisqu'on ne pourroit pas le dire avec la gravité requise, ni avec la bonne
prononciation, et que plusieurs femmes et filles foibles de veüe ou d'estomac, quoy que
grandement devotes d'ailleurs, ne pourroyent estre receües. Et je sçai en verité que cet article fait
une notable attraction des ames. Ainsy, pourveu qu'on obtienne cet article, nous serons asses
contens, encor qu'on refusera les autres, quoy que grandement desirables.
3. Et plus tost que de mettre le grand Office en cette Congregation, j'aymerois mieux
accepter le parti que Monseigneur de Lyon propose, pourveu qu'on le puisse impetrer du Saint
Siege633 : a sçavoir, que cette Congregation demeurast en tiltre de simple Congregation, avec les
vœux simples, et qu'il pleut neanmoins a Sa Sainteté d'annuller et casser, ou declarer nulz et de
nulz effectz, tous les mariages que les Seurs (ce que Dieu ne veuille jamais permettre) voudroyent
contracter apres avoir faitz lesditz vœux simples, tout ainsy que Gregoire 13 a fait en faveur des
Jesuites estudians634. Ains, si cela se pouvoit obtenir, je l'aymerois mieux que toute autre [187]
chose, car toutes les difficultés cesseroyent ; mays j'ay grand peur que cela ne fut encor plus
626 C'est en 1618 que D. Juste se trouvait à Rome pour les affaires de la Visitation. Quant au mois et au quantième, la
première ligne du texte les indique approximativement, le voyage des lettres, de Rome à Grenoble, durant près de trois
semaines.
627 L'approbation des Constitutions, avec divers privilèges. (Cf. ci-dessus, Lettre MCCCLXXXVI, p. 140.)
628 Si nous avons reçu les biens de la main du Seigneur, pourquoi ne supportons-nous pas aussi les maux ?
629 Job, II, 10.
630 Voir le tome précédent, Lettre MCCXIX, p. 238.
631 à temps et à contretemps.
632 II Tim., ult.
633 Dans son Mémoire sur la Visitation fait en 1616 (cf. ibid., pp. 138 et 405), Mgr de Marquemont témoignait surtout
la crainte que les Sœurs, n'ayant que des vœux simples, pussent rentrer dans le monde, y contracter des alliances
valides, et causer ainsi dans leurs familles du trouble, du scandale et des procès. Peut-être avait-il écrit encore
récemment à l'Evêque de Genève pour lui proposer ce moyen terme : laisser les vœux simples, mais faire attacher la
solennité à celui de chasteté. (Cf. ci-dessus, Lettre MCCCLXXXI, p. 132.)
634 Le document en faveur des « Jesuites estudians » auquel le Saint fait allusion, est la Constitution Ascendente
Domino, de Grégoire XIII, donnée le VIII des calendes de juin 1584. (Cf. Instit. Soc. Jesu, Florentiæ, 1886-1891, p.
94.)
139/346

14.10 Page 140

▲back to top
difficile a impetrer du Saint Siege, quoy que l'exemple des Peres Jesuites serviroit de beaucoup
pour faciliter l'affaire.
4. Que si en fin on ne peut mieux faire, il faudra au moins tascher d'obtenir que cette
Congregation soit mise en tiltre de Religion, mais avec remission de l'obligation de dire le grand
Office, tant en particulier qu'en general, pour le plus long tems que se pourra, comme pour
cinquante ans ou soixante ; car au bout dudit tems on obtiendroit peut estre bien une prolongation,
quand le Saint Siege auroit veu par experience que cette dispense reusciroit a plus grand bien.
Enfin, cet article du petit Office est si important, que pour l'obtenir il faut se sousmettre a toute
sorte d'autres rigueurs635.
Je sçai que si Monseigneur de Lyon affectionne le bon evenement de cette negociation, il
le fera reuscir heureusement ; et bien que je ne luy escrive pas, respectant ses occupations, si ne
laisse je pas de luy faire la reverence et vous supplier de l'asseurer de ma fidelité tres humble a son
service. Et quant a vous, mon Reverend Pere, vous sçaves ce que je vous suis, c'est a dire que je
suis vostre, sans reserve ni condition, et
Vostre serviteur et frere tres humble,
FRANÇS, E. de Geneve.
636 Al molto Rdo Padre osservandissimo,
Il P. D. Giusto Guerini, della Conge de Chierici regolari di S. Paolo.
Roma.
Revu sur l'Autographe conservé à l'évêché d'Asti (Piémont). [188]
_____
635 Ce privilège du petit Office auquel tenait si fort le Fondateur fut accordé pour sept ans par Paul V, dans son Bref
du 23 avril 1618. (Voir à l'Appendice I.) Urbain VIII, par Bref du 9 juillet 1626, le confirma à perpétuité.
636 Au très Révérend et très honoré Père,
Le P. D. Juste Guérin, de la Congrégation des Clercs réguliers de Saint-Paul.
Rome.
140/346

15 Pages 141-150

▲back to top

15.1 Page 141

▲back to top
MCDX. A M. Claude de Quoex637. Dévouement aux Religieux
de Talloires en mémoire d'un ami défunt. « Multitude de
bonnes occupations. »
Grenoble, 10 mars 1618.
Monsieur,
Voyla les deux lettres pour l'affaire des Religieux de Talloire638, que je veux servir, cherir
et honnorer comme leur pieté et les desirs de mon pauvre aysné639 requierent ; car les desirs de ce
defunct et sa fidele amitié vivront a jamais en ma memoire et en mes affections. Que si je n'ay pas
escrit plus tost, ça esté sans ma coulpe, a cause de la multitude des bonnes occupations qui
m'environnent, outre la principale des sermons640.
Faites moy cependant lhonneur, je vous supplie, de perseverer a m'aymer, puisque je seray
toute ma vie, et [189] de vous et de celle qui est toute vous mesme641, Monsieur,
Plus humble, tres affectionné frere et serviteur,
FRANÇS E. de Geneve.
X mars 1618, a Grenoble.
642 A Monsieur
[Monsieur] de Quoex, Conseiller [de S. G.]
et Collateral premier au Conseil de Genevois.
Revu sur l'Autographe conservé à Chambéry, Archives du Sénat de Savoie.
_____
637 Voir tome XII, note (138), p. 84.
638 Voir ibid., note (829), p. 241, et tome XIV, note (518), p. 173. L'affaire en question concernait-elle le spirituel ou
le temporel du Monastère ? Le saint Evêque s'occupait paternellement de l'un et de l'autre. (Cf. le tome précédent,
Lettre MCCXLVIII, p. 296.)
639 Philippe de Quoex, décédé le 24 janvier précédent (voir ci-dessus, note (534), p. 156). Il s'était beaucoup employé
pour faire réussir la réforme du prieuré dont son frère, Claude-Louis-Nicolas, était prieur claustral. (Cf. tome XVI, p.
113, et Appendice II, p. 403.)
640 Voir au tome VIII, pp. 343-369, les cinq sermons attribués avec beaucoup de probabilité à cette station de Carême.
Dans une lettre du 1er février 1620 (voir à l'Appendice I), Artus de Lionne, seigneur d'Aoste, parle des fruits
merveilleux des prédications de François de Sales dans la capitale du Dauphiné. Messieurs du Parlement témoignèrent
du souvenir plein de reconnaissance qu'ils en gardaient, lorsque, plusieurs années après la mort du Bienheureux, ils
offrirent, pour contribuer aux frais de sa canonisation, 1000 livres au 1er Monastère de la Visitation d'Annecy ; ils
rappelaient en même temps « que le saint Prélat avait prêché deux années de suite à Grenoble, sans vouloir recevoir
d'honoraires, sauf ses déboursés. » (Extrait de l'Inventaire sommaire des Archives de l'Isère, par Prudhomme, tome II,
B. 2316.)
641 Le 3 juillet 1617, Philippe de Quoex écrivait de Thonon, où il avait suivi le Saint, à son frère le collatéral : « Je
vous ay promis de vous donner ample information du faict duquel j'ay prins la commission a mon despart. Voicy donc
la responce : La dame est de retour en cette ville... Pour sa personne, il n'y a rien a dire ; car elle est d'une tres belle
taille, vertueuse, devote, mesnagere, et tellement accompagnee de bonnes qualités, qu'il n'est pas possible, a l'advis de
Monseigneur et mien, d'en rencontrer une plus accomplie et de laquelle vous puissies avoir plus de contentement... Le
mariage est petit ; en un mot, il n'y a que la qualité de la dame fort considerable, car vous n'en trouveries jamais une
mieux a vostre gré ny au mien,.. Monseigneur dict que vous ne feries pas mal de vous venir promener jusques icy, et
verries le tout, car il y a de difference beaucoup a voir et ouïr dire ! » (D'après l'autographe communiqué en 1901 par
M. Mugnier.) Claude suivit le conseil, alla en Chablais (cf. ci-dessus, note (218), p. 52), et peu après épousait Rose
Forestier d'Yvoire, fille de Claude Forestier (voir tome XIII, note (521), p. 195) et de Françoise de Saint-Jeoire.
Convertie à la foi catholique, sans doute en même temps que son père (1606), elle s'était mariée en 1610 à Claude de
Prez qui la laissa veuve en 1614. De son mariage avec M. de Quoex, elle eut une fille, Louise-Françoise, filleule du
Saint et de Mme de Charmoisy, qui perdit sa mère avant septembre 1624, et devint plus tard Religieuse de la Visitation
au 2d Monastère d'Annecy.
642 C'est Georges Rolland qui a mis l'adresse.
141/346

15.2 Page 142

▲back to top
MCDXI. A Madame de Lescheraine643. Une visite manquée.
Grenoble, 10 mars 1618.
Madame,
Je n'ay point servi monsieur de Lescheraine vostre [190] filz644, ains je ne l'ay mesme pas
veu, ni hier quil prit la peine de venir ceans tandis que je me præparois au sermon, ni aujourd'huy
qu'il m'a apporté vostre lettre, par ce qu'il n'a pas fait sçavoir son nom a celuy a qui il a parlé et
que sa discretion a esté trop grande a s'en retourner, me sachant en occupation. Mays, Madame, ne
laisses pas, je vous supplie, pour cela de croire qu'en toutes occurrences je ne le serve de tout mon
pouvoir avec particuliere affection, comme estant de tout mon cœur,
Madame,
Vostre plus humble, tres affectionné serviteur,
FRANÇS, E. de Geneve.
X mars 1618, a Grenoble.
A Madame
Madame de Lescherayne.
Revu sur l'Autographe appartenant à Mme Denarié, à Chambéry.
_____
MCDXII. A la Mère de Chantal (Fragment). A quelle condition
Dieu bénit les entreprises. Sortie d'« avettes ».
Grenoble, 11 mars 1618.
En fin, ma chere Fille, nous venons de conclure avec nos bonnes dames l'establissement de
nostre Monastere645. Tout le monde applaudit a ce dessein ; nostre bonne dame la Presidente Le
Blanc646 a une sainte ardeur pour cela, et moy j'ay une esperance tres douce que Dieu [191] benira
ses intentions, si nous sommes si heureux que de nous humilier comme il faut devant luy, qui veut
bien se glorifier en nostre petitesse.
Je vous prie, ma tres chere Mere, de preparer doucement nos petites avettes pour faire une
sortie au premier beau tems, et venir travailler dans la nouvelle ruche pour laquelle le ciel prepare
bien de la rosee647.
……………………………………………………………………………………………………...
_____
643 La seule dame de Lescheraine qui eût, en 1618, un fils adulte, est Catherine de Monthouz (cf. tome XV, note (263),
p. 88), fille de Claude-Amé de Monthouz en Duyn et de Françoise Grimaldi. Elle avait épousé, en 1594, Antoine de
Lescheraine (voir tome XI, note (637), p. 283).
644 Pierre-Louis, unique fils de la destinataire, fut seigneur de la Compote, Montagny, etc. Il teste le 14 février 1640,
laissant l'usufruit de ces seigneuries et des biens qu'il possédait à Saint-Jean de la Porte et aux Bauges, à Aurélie
Becche, sa femme, dont il n'avait pas eu d'enfant.
645 L'établissement d'une Maison de la Visitation à Grenoble, qui se préparait depuis 1616 (voir le tome précédent,
note (1147), p. 343, et ci-dessus, note (528), p. 152).
646 Voir le tome précédent, notes (115), p. 22, et (1210), p. 366.
647 La Mère de Chantal, emmenant avec elle les Sœurs Péronne-Marie de Chastel, Claude-Agnès Joly de la Roche,
Marie-Marguerite Milletot, Marie-Antoine Thiollier, et les quatre Novices grenobloises, partit d'Annecy vers le 4
avril. La petite troupe demeura deux jours à Chambéry, chez le président Favre, et arriva le 7, veille du dimanche des
Rameaux, dans la capitale du Dauphiné.
142/346

15.3 Page 143

▲back to top
MCDXIII. A la même (Fragment inédit). Pronostic sur une
Novice.
Grenoble, 15-fin mars 1618 648.
Il faut que la Seur Anne Françoise face abnegation du desir qu'elle a de demeurer a
Annessi649, parce qu'elle [192] sera un bon pilier d'observance et mesme, un jour, une bonne
Superieure de la Mayson de Grenoble…
Revu sur le texte inséré dans l'Histoire de la Fondation de la Visitation de Grenoble.
_____
648 Il est difficile de préciser exactement la date de ce fragment ; tout ce qu'on peut assurer, c'est qu'il est postérieur à
celui du 11 mars, et a précédé les premiers jours d'avril.
649 Ame pleine de courage et d'énergie, Mlle de Glézat avait triomphé d'abord de l'amour du monde pour se ranger à la
vie dévote sous la direction de l'Evêque de Genève. Victorieuse ensuite de l'amour de sa mère qui, veuve depuis peu
et passionnée pour sa fille, cherchait à la retenir auprès d'elle, la prétendante était venue se consacrer à Dieu à Annecy
(voir ci-dessus, note (516), p. 148), où elle prit le voile de la Visitation et le nom d'Anne-Françoise le 22 février 1618.
Lorsqu'il s'agit de retourner à Grenoble, sa ville natale, elle appréhenda de se retrouver près de sa famille et de ses
anciennes connaissances, et fit part à la Mère de Chantal, et par elle au saint Evêque, de ses craintes et de son désir de
rester en Savoie. Les lignes du texte sont une partie de la réponse du Fondateur ; Sœur Anne-Françoise réalisa
pleinement les prévisions qu'il y exprime. Intelligente, fort bien douée pour tous les emplois, elle rendit de très grands
services au Monastère de Grenoble, qu'elle gouverna comme supérieure de 1635 à 1641. Sa vertu fut à la hauteur de
ses talents, et peut se résumer dans ces mots d'une ancienne annaliste : « Ses paroles aussi bien que ses actions ne
respiraient que sainteté. » (Hist. de la Fondation de la Visitation de Grenoble.) Sœur Anne-Françoise mourut le 11
avril 1649, à l'âge de soixante-trois ans.
143/346

15.4 Page 144

▲back to top
MCDXIV. A la Mere de Bréchard, Supérieure de la Visitation
de Moulins. Espérance d'un prochain revoir. Projets de
fondations à Bourges et à Paris ; celle de Grenoble va se faire.
Un bienfaiteur de la Maison de Moulins. — Œuvres dont
Dieu « tiendra bon comte ».
Grenoble, 29 mars 1618.
Ma tres chere Fille,
Accablé des sermons et de mill'autres surcharges, je vous diray que vous pouves, a mon
advis, recevoir ces filles pour soulager vostre Mayson et gratifier ceste damoyselle d'honneur qui
le desire650, puisqu'il ny a nul inconvenient, les personnes estant si discrettes que la discipline n'en
sera point incommodee.
Encor me confirme-on que cett'esté se fera le voyage de Monseigneur le Cardinal651 ; qui
me donne esperance de vous voir. Monseigneur de Bourges, a la verité, veut faire une Mayson a
Bourges, mais ce ne sera pas si tost652 ; cependant on en fait une en cette ville, ou nostre [193]
Mere sera dans huit jours653, et on travaille a Paris pour un'autre654. Dieu soit loué de tout.
Asseures monsieur le general de Palierne655 que je suis fort humblement son serviteur,
honnorant de tout mon cœur la grace que Nostre Seigneur luy fait de le tenir en son saint amour et
service. Et de toutes les assistences quil vous fait, sa divine Majesté luy en tiendra bon comte ;
comm'il fera aussi de la patience et du courage que vous prattiqueres a maintenir et avancer cette
Mayson lâ, laquelle reuscira un jour dautant plus grande qu'elle semble croistre plus lentement.
Dieu soit au milieu de vostre cœur et de vostre chere trouppe. Mays je salue a part ma Seur
Marie Avoy656, ma Seur Françoise Gabriele657 et ma Seur Jeanne Marie, ma niece658, et suis vostre
tres absolument, ma tres chere Fille.
A Grenoble, le 29 mars 1618.
659 A Madame
Madame de Brechard,
Superieure des Seurs de Ste Marie la Visitation.
A Moulins.
650 Il est fort difficile de dire quelles sont « ces filles » et la « damoyselle d'honneur » qui les recommandait ; l'Histoire
de la Fondation de Moulins ne fournit aucun renseignement positif à ce sujet. On peut cependant suggérer le nom de
Mme du Feu, dont les deux filles entrèrent fort jeunes à la Visitation (voir le tome précédent, note (1156), p. 346).
651 Maurice de Savoie (voir ci-dessus, note (485), p. 138).
652 Lorsque la baronne de Chantal obtint le consentement de son père pour commencer la Congrégation, son frère,
André Frémyot, archevêque de Bourges, voulait en placer le berceau dans sa ville épiscopale. N'ayant pu l'obtenir, il
crut au moins avoir le droit de faire venir sa sœur auprès de lui dès que les fondations commencèrent. (Voir le tome
précédent, note (388), p. 101.) En 1617, il revint à la charge et parut tout près de réussir (cf. Lettres de la Sainte, 10
avril 1617, vol. I, p. 191) ; toutefois la Mère de Chantal ne put partir pour Bourges que dans l'automne de 1618, et le
nouveau Monastère fut établi le 15 novembre de cette année-là.
653 La sainte Fondatrice et ses Filles arrivèrent à Grenoble le 7 avril. (Voir ci-dessus, note (649), p. 192.)
654 Dès 1613, il fut question de porter dans la capitale de la France une semence du nouvel Institut (cf. tome XVI, p.
92). Mais c'est Mme des Gouffiers qui était encore destinée dans les secrets de la Providence, pour préparer cette
fondation (cf. tome XVII, p. 346). Partie de Moulins vers le 15 octobre 1617, aussitôt arrivée à Paris elle s'employa
avec son zèle ordinaire à ce saint ouvrage qui fut accompli le 1er mai 1619.
655 Trésorier général de France en Bourbonnais, Nicolas de Palierne sera plus tard destinataire.
656 Sœur Marie-Avoye Humbert (voir le tome précédent, note (899), p. 263).
657 Sœur Françoise-Gabrielle Bailly (ibid., note (896), p. 261).
658 Sœur Jeanne-Marie Vincent de la Croix (ibid., note (902), p. 264).
659 L'adresse n'est pas de la main du Saint.
144/346

15.5 Page 145

▲back to top
Revu sur un fac-simile de l'Autographe, conservé à la Visitation d'Annecy. [194]
_____
MCDXV. A Don Juste Guérin, Barnabite660. A quoi les Sœurs de
la Visitation emploieront-elles le temps si elles ne disent le
grand Office ? Deux réponses à cette objection.
Grenoble, 16 661 avril 1618.
Mon Reverend Pere,
……………………………………………………………………………………………………..
Quant a la demande que fait le bon seigneur duquel vous m'escrives, sur l'occupation des
Seurs de la Visitation en cas qu'elles ne disent le grand Office, il y a deux raysons.
La premiere, que les Seurs disant le petit Office gravement et avec pauses, elles y
employent autant de tems comme la pluspart des autres Religieuses en mettent a dire le grand
Office, sans autre difference, sinon que les unes le disent avec plus d'edification et meilleure
prononciation que les autres662. Certes, il y a huit jours, qu'estant en un monastere pres de cette
ville663, je vis [195] des choses qui pouvoyent bien faire rire les huguenotz ; et des Religieuses me
dirent qu'elles n'avoyent jamais moins de devotion qu'a l'Office, ou elles sçavoyent de faire tous-
jours beaucoup de fautes, tant faute de sçavoir les accens et quantités, que faute de sçavoir les
rubriques, comme encor pour la precipitation avec laquelle elles estoyent contraintes de le dire ;
et que ne sachant ni n'entendant rien de tout ce qu'elles disoyent, il leur estoit impossible, parmi
tant d'incommodités, de demeurer en attention. Je ne veux pas dire pourtant qu'il les faille
descharger, sinon quand le Saint Siege, ayant compassion d'elles, le treuvera bon ; mais je veux
bien dire pourtant qu'il n'y a nul inconvenient, ains beaucoup d'utilité, a laisser le seul petit Office
en la Visitation. En somme, mon Reverend Pere, ce petit Office est la vie de la devotion en la
Visitation.
La deuxiesme responce est qu'en la Visitation il n'y a pas un seul moment qui ne soit
employé tres utilement en prieres, examen de conscience, lecture spirituelle et autres exercices.
Je m'asseure que le Saint Siege favorisera cette œuvre, qui n'est ni contre les loix, ni contre
l'estat religieux, et qui luy acquiert beaucoup de maysons d'obeissance en un tems et en un royaume
ou il en a tant perdu ; et puisque mesme il n'y a pas tant de considerations a faire pour des maysons
de filles, d'autant qu'elles ne font nulle consequence pour les autres Ordres, ni ne peuvent estre
occasion de plaintes aux autres fondees sous autres statutz. La seule consideration de la plus grande
gloire de Dieu me donne ce desir, et l'utilité de plusieurs ames capables de servir beaucoup sa
660 Le destinataire, désigné sous le titre d'un Religieux dans toutes les éditions précédentes, n'est autre que D. Juste
Guérin, alors à Rome, où il traitait les affaires de la Visitation. (Cf. la lettre au même, ci-dessus, p. 186.)
661 Cette lettre a dû être écrite non d'Annecy, où l'Evêque revint le 21 avril, mais de Grenoble ; c'est pourquoi nous
corrigeons la date, 26 avril, donnée par les autres éditeurs, et qui provient sans doute d'une erreur de lecture ou d'une
faute d'impression. Le début semble indiquer que le texte a été tronqué.
662 Voir ci-dessus, Lettre MCCCLXXXVI. p. 140.
663 Il s'agit sans doute du monastère des Aves ou de celui de Montfleury, l'un et l'autre voisins de Grenoble. (Voir ci-
dessus, note (251), p. 102.) Le premier, abbaye de l'Ordre de Cîteaux, datait de l'année 1160, et avait été fondé par
Marguerite de Bourgogne, femme du dauphin Guigues VIII. En 1618, l'Abbesse, Adriane de Chambéran, ne
gouvernait plus qu'une Communauté dégénérée, dans laquelle pourtant commençaient à poindre des germes de
réforme. (Cf. Guy Allard, Dictionnaire du Dauphiné, tome I.)
Quant au couvent des Dominicaines de Montfleury, depuis sa fondation (1342) par le dauphin Humbert II, il
était resté l'asile de la noblesse et de la vertu. (Cf. ibid., tome II.) Le Saint y trouvait des parentes de toutes ses filles
spirituelles de Grenoble, et des âmes déjà très avancées dans la perfection.
145/346

15.6 Page 146

▲back to top
divine Majesté en cette Congregation, avec la seule charge du petit Office, incapables autant de
pouvoir suivre le grand Office. Sera-ce pas une chose digne du Christianisme qu'il y ait des lieux
ou retirer ces pauvres filles qui ont le cœur fort, et les yeux ou la complexion foible664 ?
Pour le reste, mon Reverend Pere, travailles diligemment [196] a faire reuscir l'entreprise
de nostre Seminaire, car j'ay opinion qu'il sera meshuy necessaire665.
……………………………………………………………………………………………………..
Vostre frere et serviteur,
FRANÇS E. de Geneve.
Le avril 1618.
_____
MCDXVI. A la Présidente le Blanc de Mions666. Aimable et
ferme correction de François de Sales à une de ses filles
spirituelles excessive en ses témoignages d'estime et d'affection,
Annecy, 22 avril 1618.
Ma tres chere Fille de mon cœur,
Sçaches que j'ay une fille laquelle m'escrit que mon esloignement a fait approcher ses
douleurs ; que si elle ne tenoit ses yeux, ilz verseroyent autant de larmes que le ciel jette des gouttes
d'eau, pour pleurer mon despart ; et semblables belles paroles. Mais elle passe bien plus avant, car
elle dit que je ne suis pas homme, mais quelque divinité envoyee pour se faire aymer et admirer,
et, ce qui importe, elle dit qu'elle passeroit bien plus outre, si elle osoit.
Que dites vous, ma tres chere Fille ? Vous semble-il qu'elle n'ayt pas tort de parler ainsy ?
Ne sont ce pas des paroles excessives ? Rien ne les peut excuser que l'amour qu'elle me porte,
lequel est certes tout saint, mais exprimé par des termes mondains. Or, dites luy, ma tres chere
Fille, qu'il ne faut jamais attribuer, ni en une [197] façon ni en l'autre, la divinité aux chetifves
creatures, et que penser encor de pouvoir passer plus outre en louange, c'est une pensee desreglee,
ou au moins de le dire ce sont paroles desordonnees ; qu'il faut avoir plus de soin d'eviter la vanité
es paroles qu'es cheveux et habitz ; que des-ormais son langage soit simple, sans estre frisé. Mais
pourtant, dites-le luy si doucement, amiablement et saintement, qu'elle treuve bonne cette
reprimande, laquelle part du cœur plus que paternel que vous connoisses, comme fille certes tres
chere de mon cœur, mais fille en laquelle j'ay mis toute confiance.
Dieu soit a jamais nostre amour, ma tres chere Fille, et vives en luy et pour luy
eternellement. Amen.
Le 22 avril 1618.
_____
664 Voir ci-dessus, note (635), p. 188.
665 Voir ci-dessus, note (497), p. 142.
666 La lecture des lettres adressées à Ennemonde Chausson, femme du président Le Blanc de Mions, ne permet pas de
douter que ces lignes n'aient la même destinataire. (Voir le tome précédent, note (1210), p. 366, et cf. note (1260), p.
386.)
146/346

15.7 Page 147

▲back to top
MCDXVII. Au Duc Roger de Bellegarde667 (Inédite). Un
converti fugitif qu'il faut accueillir favorablement. L'audace
des hérétiques et le remède à y opposer.
Annecy, 25 avril 1618.
Monsieur,
Ce porteur, jeun'homme de Gex668, quitte son pais et la mayson de son pere pour eviter les
inhumaines et continuelles persecutions qu'il y a rencontrees des qu'abjurant l'hæresie il a embrassé
la foy catholique ; et c'est un grand cas, Monsieur, que cette faction de prætendus reformés, toleree
par l'indulgence du Roy, est si [198] insolente que de vouloir, par des voyes extraordinaires,
empescher aux sujets de la coronne la liberté de servir Dieu selon la religion du Roy et du royaume,
en laquelle l'Estat a esté et laquelle a tous-jours esté en l'Estat, il a, graces a Dieu, environ douze
cens ans.
Monsieur, c'est pour cela que je vous ay supplié de nous faire avoir des magistratz
catholiques en ce balliage de Gex669, qui, par l'authorité qu'ilz possederont, pourront donner le
contrepoids a la multitude et malice des ennemis de la religion du Roy et du royaume, qui sont si
hardis au mal et si pleins d'artifices pour l'executer que, s'ilz ne sont retenus de main forte, ilz ne
cesseront d'empescher par toutes sortes de moyens violens le progres de la conversion des ames.
Cependant, le favorable accueil et les graces qu'il plaira a Vostre Grandeur de faire a ce
jeun'homme qui recourt a vostre bonté, Monsieur, comme a son asyle, serviront de promesse a
ceux qui sont si heureux d'estre appellés a la conversion, d'estre protegés envers ceux qui les
voudroyent travailler et vexer pour ce sujet.
Au reste, Monsieur, c'est meshuy chose superflue de repeter les vœux de mon service, que
j'ay fait a Vostre Grandeur, puisque lhonneur que j'ay de vous oser regarder et considerer comm'un
pere tres affectionné fait son tres aymable filz, met hors de doute le parfait respect et infini amour
que mon ame a pour la vostre, que je supplie incessamment Nostre Seigneur de vouloir combler
de sa grace, et demeure invariablement,
Monsieur,
Vostre tres humble et tres obeissant serviteur,
FRANÇS, E. de Geneve.
25 avril 1618, Annessi.
Revu sur l'Autographe conservé à Tours, chez les Religieuses du Saint-Esprit. [199]
_____
667 L'Autographe ne porte point d'adresse, mais sur le second feuillet, qui en a été détaché, on lit ces mots d'une écriture
fort ancienne : Mr de Geneve a Mr de Bellegarde. (Voir au tome XV, p. 293, la note sur Roger de Saint-Lary, duc de
Bellegarde.)
668 Sans doute Bursal, que le Saint recommandera de nouveau au gouverneur de Bourgogne le 9 juillet de cette même
année.
669 Cette lettre à Bellegarde ne nous est pas parvenue ; elle devait être de même date à peu près que celle à Louis XIII
qui traite aussi de ce grave sujet. (Voir ci-dessus, Lettre MCCCXCII, p. 155.)
147/346

15.8 Page 148

▲back to top
MCDXVIII. Au Prince de Piémont, Victor-Amédée670.
Reconnaissance pour la protection accordée à de pauvres curés ;
prière de la continuer.
Annecy, 26 avril 1618.
Monseigneur,
Je fay en toute humilité action de graces a Vostre Altesse de la lettre qu'ell'a escritte a
monsieur le Marquis de Lans671 affin qu'il mit ordre a faire payer les curés d'Armoy672, de
Draillens673, qui de si long tems estoyent en extreme disette et prestz a qui ter leurs charges si je
ne les eusse soulagés674.
J'espere, Monseigneur, que ledit seigneur Marquis effectuera l'intention de Vostre Altesse,
ainsy qu'il m'a asseuré a mon retour de Grenoble ; et ne me reste qu'a la supplier tres humblement
de vouloir tous-jours ainsy proteger les affaires du service de Dieu, qui en suite multipliera ses
graces sur la vie et la personne de Vostre [200] Altesse Serenissime, a laquelle je fay tres
humblement la reverence, et delaquelle,
Monseigneur, je suis
Tres humble, tres obeissant et tres fidele
orateur et serviteur,
FRANÇS, E. de Geneve.
XXVI avril 1618, Annessi.
Revu sur l'Autographe conservé à Turin, Archives de l'Etat.
_____
670 Un passage de la lettre du 25 août 1618 (voir plus loin) nous apprend que c'est le prince de Piémont qui écrivit, «
environ les festes de Pasques, » au marquis de Lans. C'est donc à lui, et non au duc son père, que s'adressent ces lignes.
Voir le fac-simile placé en tête de ce volume.
671 Sigismond d'Est, gouverneur de la Savoie. (Voir tome XV, note (162), p. 49.)
672 Né à Samoëns, Jean Musy y fut tonsuré le 11 juin 1565, par Mgr Jean Péron, délégué de Mgr de Bachod. Le 20 mai
1575, il obtient une dimissoire pour se faire ordonner prêtre, et devient sacristain de la Collégiale de Samoëns, le 12
mars 1588. Après le retour des paroisses d'Armoy, Reyvroz et du Lyaud à la foi catholique (1589 et 1591), Jean Musy
fut le premier à les desservir. Il mourut en octobre 1621. (R. E.)
673 Saint François de Sales veut probablement parler du curé d'Orcier, Etienne Ollivier, qui avait la charge de secourir
la paroisse de Draillant, en attendant qu'on pût pourvoir à un autre ordre de choses. (Voir ci-dessus, Lettre MCD, p.
168.)
674 Cf. tome XIII, p. 43.
148/346

15.9 Page 149

▲back to top
MCDXIX. A la Mère de Chantal, a Grenoble. Charmantes
nouvelles de la Communauté d'Annecy. Comment employer
le nous et nostre. Avis sur une dispense. « Un peu de
consideration humaine » dans des désirs paternels. Difficultés
du mariage de Celse-Bénigne. La pensée du Saint sur la
Communion dans son Institut. Craintes pour le voyage de la
Mère de Chantal à Lyon. Lettres aux dames de Grenoble ;
recommandations à ce sujet.
Annecy, 30 avril 675 1618.
Il me tardoit bien fort, ma tres chere et plus que tres chere Mere, de vous escrire des icy,
ou je suis arrivé, grace Dieu, en bonne santé676. Mais quel moyen, je vous prie, a cet abord, parmy
ce flux et reflux de visites, et quelque affaire que j'ay treuvé pour Piedmont et Italie677 ? Certes, je
n'ay esté que deux fois voir nos cheres Seurs, qui font fort bien. Ma Seur Anne Marie est fort
devotement sage, comme vous n'en doutes pas678 ; ma Seur [201] Paul Hieronime, a ce qu'on me
dit, fait merveille679, et vostre Econome fait des miracles, hormis que ma Seur Anne Jacqueline680
luy parle tous-jours savoyard et de la monnoye de Savoye, et elle ne l'entend pas ; il faut des
truchemens681.
Hier je permis a la Seur Louise Marie682 d'aller voir sa mere en compaignie de ma Seur
Anne Marie, parce qu'on ne la pouvoit faire resoudre de se confesser, quoy qu'elle fust en tel danger
que les medecins croyoient qu'elle deust mourir cette nuit ; ce qu'elle n'a pas encor fait, bien qu'a
ce qu'on dit elle ne puisse pas aller loin. On luy a parlé des huit cens florins qu'elle avoit promis a
la Mayson, mays elle a remis a le faire quand elle pourra au desceu de son mary ; on court donq
fortune de les perdre683.
Les Peres de Saint Dominique semblent vouloir m'obliger de leur jardin sans nous
contraindre de vouloir le jardin des Barnabites ; toutefois je ne voy encor rien d'asseuré684.
675 L'ancienne copie qui nous a fourni ce texte, porte la date du 30 may ; il y a évidemment ou erreur de copiste, ou
distraction du Saint. La mention de la mort de Mme Barfelly (p. 208) ne laisse aucune hésitation pour le mois.
676 Vers le 17 avril, mardi de Pâques, l'Evêque de Genève quitta Grenoble et se rendit à la Grande-Chartreuse, où il
passa un ou deux jours. Il rentrait à Annecy le 21, après un court arrêt à Chambéry.
677 Cf. la lettre précédente.
678 En l'absence de la Mère de Chantal, Sœur Anne-Marie Rosset exerçait la charge d'Assistante-commise. (Cf. tomes
XIV, note (662), p. 230, et XVI, note (283), p. 81.)
679 La Sœur Paule-Jéronyme de Monthouz (voir au tome XVI, les notes (841, 910) des pp. 261 et 279) avait remplacé,
comme Directrice, la Mère Péronne-Marie de Chastel partie pour Grenoble.
680 Anne-Jacqueline Coste (voir tome XIV, note (181), p. 63).
681 Rien d'étonnant que Sœur Françoise-Marguerite Favrot (voir ci-dessus, note (150), p. 30), native de Franche-
Comté, eût de la peine à comprendre le parler savoyard de la bonne tourière.
682 Fille du procureur fiscal Maurice Barfelly et de Jacqueline Déaclard, Sœur Louise-Marie fut baptisée le 1er
septembre 1602. (Reg. par. d'Annecy.) Son entrée au noviciat de la Visitation (août 1617) avait beaucoup facilité
l'accord des Religieuses avec son père, au sujet des maisons destinées à agrandir l'enclos du monastère (voir ci-dessus,
note (241), p. 62). Elle prononça ses vœux le 9 septembre 1619, et fut envoyée en qualité d'Assistante à la fondation
faite à Rumilly le 29 septembre 1625 ; elle y mourut le 14 octobre 1631, regrettée « de toute la Communauté, qui
perdoit en ceste chere Sœur un modelle de bonté, douceur et cordialité sincere et colombine. » (Notice manuscrite,
par la Mère de Chaugy, Archives de la Visitation d'Annecy.)
683 Déjà, « au desceu de son mary, » Maurice Barfelly, Jacqueline avait fait son testament le 10 octobre 1617 (voir ci-
dessus, note (243), p. 62). Sa fille Louise n'y figurait que pour un legs de cinq florins ; les huit cents promis au
Monastère compensaient un peu la médiocrité de cet héritage ! On ne les reçut pas, puisque la malade décéda ce jour
même, 30 avril ; et les anciens livres de comptes ne mentionnent aucun don de la famille Barfelly en l'année 1618.
684 Voir ci-dessus, les notes (315), (424) des pp. 86, 120.
149/346

15.10 Page 150

▲back to top
Le nous et nostre ne me deplaist pas, et toutefois il [202] faudra le moderer en sorte que
par trop grande habitude de parler ainsy on ne rende pas les defautz, pechés, imperfections
communs et les confessions inintelligibles aux confesseurs estrangers ; et partant, il semble quil
suffiroit de dire nous et nostre de tout ce qui est vrayement commun, comme : nostre chambre,
nostre chapelet, nostre travail, nostre Seur, nostre Mere, nostre exercice ; car on peut bien dire : Je
n'ay pas fait nostre exercice du matin, je n'ay pas esté a nostre disner, j'ay pensé dans nostre lict,
et semblables685.
Si pour ne point differer de donner l'habit a nostre Seur de Collesieu jusques apres vostre
despart686, Monseigneur de Calcedoine687 veut dispenser du tems du premier essay, il faut accepter
la dispense pour cette fois688, et le supplier par apres de n'en point dispenser que pour des dignes
sujetz, attendu que la regie de cet essay est fort utile et salutaire a la Congregation.
J'ay envoyé a ma Seur Anne Marie pour avoir le double du contract de monsieur le premier
President689. [203]
Et a propos de monsieur le premier President, madame la Premiere690 m'a fait entendre, en
passant a Chamberi, quil desiroit bien que sa fille fust employee a Turin, si on la peut bonnement
retirer de Lion ; ce que je ne pense pas691. M. de la Roche692 m'en dit autant de la sienne693, et par
consequent vous voyes, ma chere Fille, quil y a un peu de consideration humaine en ces bons peres
; neanmoins je vous dis tout, affin que vous le consideries et ruminies pour vostre retour, et peut
estre que l'on ne demandera des Seurs de deça que pour un court emprunt. Mais laissons cela.
685 « Quand les Sœurs parleront de leurs defauts et de ce qui touche a « leur personne, » écrivit plus tard le Fondateur
au Coustumier et Directoire pour les Sœurs Religieuses de la Visitation Saincte Marie, « elles useront du « terme
singulier,... mais en tout le reste elles parleront en plurier... » (Art. XXIV, Documents fort utiles.)
686 La Mère de Chantal quitta Grenoble après le 10 mai, passa par Lyon, et revint à Annecy dans la dernière semaine
du mois.
687 Alphonse de la Croix de Chevrières, fils de Jean de la Croix (voir le tome précédent, note (1190), p. 357) et de
Barbe d'Arzac. Il fut sacré à Lyon le 9 novembre 1615, avec le titre d'évêque de Chalcédoine et comme coadjuteur de
son père à l'évêché de Grenoble, dont il devint titulaire en 1619. L'année suivante, il donne sa démission, et meurt à
Saint-Marcellin en 1637. Il avait eu le brevet de conseiller d'Etat, et possédé les prieurés de Notre-Dame de Grosse,
en Normandie ; de Beaulieu, à Angoulême ; d'Aubigny en Nivernais, et de Saint-Pierre de Joigny, dans le Perche.
(Moreri, 1740, tome III.)
688 La dispense ne fut point accordée ; Sœur Marie-Hippolyte Collisieux ne prit l'habit que le 31 juillet. Cette première
novice du nouveau Monastère appartenait à « une honneste famille de Grenoble, » disent les anciens Mémoires. Ils
ajoutent qu'elle reçut bientôt de Dieu un don d'oraison très élevé et que la Providence la gratifia de souffrances non
communes, supportées généreusement par la fervente Religieuse jusqu'à sa mort qui arriva le 1er août 1648. Elle avait
environ cinquante-deux ans. (D'après sa Notice manuscrite, par la Mère de Chaugy.)
689 Antoine Favre.
690 Philiberte Martin de la Perouse, femme d'Antoine Favre.
691 C'était bien la Mère Marie-Jacqueline Favre que les deux Fondateurs destinaient à la fondation du Monastère de
Turin, alors très prochaine, semblait-il. (Cf. ci-dessus, note (607), p. 177.) Mais l'Archevêque de Lyon n'était pas
disposé à laisser partir la « grande Fille. » En 1620 seulement, à force de démarches et d'instances, on put la déprendre
de la Maison de Bellecour pour l'employer à établir celle de Montferrand (cf. tome XV, note (554), p. 178), sans
perdre l'espoir de lui faire passer les monts. Jusqu'en 1627, chaque fois que se renouent les négociations pour
l'établissement de la Visitation à Turin, sainte Jeanne de Chantal rappelle à la Mère Favre qu'elle doit y coopérer ;
mais quand, en 1638, la petite troupe des fondatrices put enfin se diriger vers la capitale du Piémont, cette grande
Religieuse était décédée depuis dix-sept mois.
692 Jean Joly, seigneur de la Roche et d'Alery (voir tome XIII, note (977), p. 364).
693 Sœur Claude-Agnès Joly de la Roche, alors à Grenoble avec la sainte Fondatrice. Elle sera plus tard destinataire.
(Cf. tome XV, note (471), p. 158.)
150/346

16 Pages 151-160

▲back to top

16.1 Page 151

▲back to top
Je parlay a M. Carra694, qui ne presse nullement la reception de sa fille, et luy est indifferent
que ce soit ou un jour ou un autre695. Ma Seur Françoise Marguerite, ce me semble, n'aura achevé
son annee de probation [204] que la veille de saint Claude, avec ma Seur Michel et ma Seur Claude
Jacqueline696.
Je seray bien marry si le mariage de monsieur de Chantal ne reuscit au gré de ceux quil
regarde, et ne m'estonne pas toutefois si la bonne madame Liotart va un peu moins rondement que
nous n'avons pas fait de nostre costé, car elle n'a pas peut estre encor bien despouillé la robbe du
monde, ni perdu la coustume de parler selon la sagesse du monde. Je serois partant bien ayse de
sçavoir en gros comme cela se sera passé, ne me pouvant empescher de cette curiosité, a cause du
contentement que je souhaite a vostre Celse Benigne, et certes, encor a cette fille, que j'ayme pour
l'amour de ma tres chere Mere, comme si c'estoyent mes frere et seur697.
Je consens tres librement que nostre tres chere Seur Peronne Marie698 communie trois, voire
quatre et plus encor de fois la semaine jusques a l'edition des Regles, et que tous-jours une des
Seurs communie avec elle ; et quand elle ne communiera pas, qu'une Seur communie, [205] en
sorte que tous-jours quelque Communion se face tous les jours ; car je me confirme tous-jours plus
au desir que je vous ay communiqué, qu'en cette Congregation la Communion y soit quotidienne
de quelques unes des Seurs a tour, pour le souhait que le sacré Concile de Trente fait de voir que
quelqu'un communie a chaque Messe699, ainsy que je le declareray plus a plein aux Regles700.
Je croy fermement que ma Seur Barbe Marie701, m'ayme singulierement, et n'a pas tort, ni
aussi madame de Granieu702, qui m'est a la verité precieuse.
J'ay envoyé a ma Seur Françoise Marguerite pour faire arrester les mille ducatons a Dole703.
On me tourmente fort icy a l'occasion de vostre passage a Lion, d'autant, dit on, qu'il vous pourroit
causer du mal : a quoy je vous supplie de prendre soigneusement garde, car penses si rien m'est si
694 Paul de Beaumont-Carra, fils de Jean de Beaumont et d'Antoinette de Lambert, épousa (contrat dotal du 15
septembre 1580) Antoine-Charlotte de Divonne. Quarante-quatre ans après, la Mère de Chantal écrivait à la fille du
vieux seigneur (24 mars 1624) : « Priez pour M. votre père, lequel se porte si bien que l'on parle de le remarier. »
(Lettres, vol. II. p. 278.) Il ne paraît pas que ce projet ait eu de suite. Le 26 décembre 1632, Paul de Beaumont fait son
testament, voulant être, enterré dans le tombeau de sa famille, à Saint-François de Chambéry.
695 Ce fut en revenant de Grenoble par Chambéry que le Saint parla à M. Carra au sujet de la profession de sa fille,
Anne-Catherine, novice à la Visitation d'Annecy depuis le 23 avril 1617. La cérémonie n'eut lieu qu'après le retour de
la Fondatrice, le 27 mai 1618. La note de la Mère Anne-Catherine de Beaumont sera donnée plus tard.
696 L'année de probation ne s'achevait entièrement que le jour même de saint Claude, car c'était le 6 juin 1617 qu'avaient
reçu le voile les Sœurs Françoise-Marguerite Favrot (voir ci-dessus, note (150), p. 30), Marie-Michelle Viallon de
Nouvelles (ibid., note (147), p. 29) et Claude-Jacqueline Joris. Cette dernière, fille de Claude Joris, de Chambéry, et
de Claude Chavent, était entrée au monastère en mars 1617, à l'âge d'environ trente ans. Elle fit profession avec ses
deux compagnes le 7 juin 1618, mais pour le rang des Sœurs domestiques ; cependant ses continuelles infirmités ne
lui permirent pas de se livrer longtemps aux travaux pénibles, et c'est par une vie de souffrance et de prière qu'elle se
sanctifia. Elle mourut le 1er mars 1636. (Livre du Noviciat et Livre du Couvent, du 1er Monastère d'Annecy.)
697 Un projet de mariage entre Celse-Bénigne de Rabutin-Chantal et Huguette, troisième fille du président Jean Liotard
et de Marguerite du Solier, était déjà fort avancé. Le jeune baron, en quittant sa mère (voir ci-dessus, Lettre
MCCCXCVII, p. 162), s'était rendu à Grenoble, et, le ro mars, un acte avait été passé en présence de François de
Sales. Des difficultés surgirent depuis, tant de la part de l'Archevêque de Bourges, André Frémyot, que de celle de
Mme Liotard, mère de la fiancée (voir ci-après, note (782), p. 222) ; elles venaient principalement du règlement de la
dot, comme on le verra bientôt.
Huguette, ayant dû renoncer à l'alliance du baron de Chantal, épousa Antoine Rostaing d'Urre, seigneur
d'Aiguebonne, marquis de Treffort en 1648, lieutenant-général des armées du Roi en Italie, etc. Veuve vers 1655, elle
vivait encore en 1661. (D'après Guy Allard, Dictionnaire du Dauphiné, et Rivoire de la Batie, Armorial du Dauphiné.)
698 Sœur Péronne-Marie de Chastel (voir tome XV, note (408), p. 133), destinée à prendre le gouvernement de la
nouvelle Maison de Grenoble.
699 Sess. XXII, de Sacrif. Missæ, c. VI.
700 Vide Constit. XXI.
701 La présidente Le Blanc.
702 Laurence de Férrus, dame de Granieu (voir le tome précédent, note (1299), p. 395).
703 Sans doute ces mille ducatons faisaient partie de la dot de la Sœur Françoise-Marguerite Favrot, qui fut versée au
mois d'août par M. Clément, venant de Dole à Annecy pour assister à la profession de ses deux filles.
151/346

16.2 Page 152

▲back to top
cher, apres la sainteté de nostre ame, que la sante de ma Mere704. Je pense que j'ay tout dit quant
aux affaires.
Faites vous hardiment communiquer les lettres que j'ay escrit a ma Seur Barbe Marie, car
il y en a, a mon advis, qui sont bien bonnes705. Puisque vous voules tout avoir, j'en ay escrit une
bonne une fois a madame de Vissilieu706, et si j'ay du loysir, j'en escriray une autre a madame de
la Baume707 et vous l'envoyeray a cachet volant708 ; mais il la faudra bien cacheter, car je ne sçay
pourquoy, mais il est vray que les advis secretz frappent mieux le cœur jusques a ce que l'on soit
fort avancé au renoncement de son propre amour.
Je salue d'un cœur incomparablement paternel toutes [206] nos cheres Filles709, que j'ayme
tous les jours plus, m'estant advis que je dois cela a l'affection qu'elles ont de bien servir Dieu. En
somme, je me repose en vous comme a moy mesme pour bien faire mes honneurs et mes amours
envers ces benites ames qui m'ayment pour l'amour de Nostre Seigneur.
Il faut remettre les lettres que j'escriray a madame de la Baume et a madame de Pisançon710
et a madame Odoyer711, a M. d'Urme712, affin quil les rende, car il le desire. Madame la conseillere
Le Maistre me pria de la vous recommander, et sans doute elle a besoin qu'on asseure son ame,
pleine de bonne volonté, mais un peu sujette aux abattemens de courage et melancholie : ce
pourquoy il la faut encourager et un peu prendre par la main713.
Vives toute en la vie et en la mort de Celuy qui vit pour nous faire mourir a nous mesme,
et est mort pour nous faire vivre a luy mesme714. Ainsy soit il, ma tres chere et tres unique Mere.
Amen.
Je ne vous dis rien de madame de Bouqueron et de ses filles715, car vous sçaves asses de
quel cœur je suis pour elles et pour mesdames de Saint André716. Or sus, vive [207] Jesus ! Amen.
Cachetes bien ces lettres apres que vous les aures veuës, et les remettes au bon M. d'Urme auquel
j'escris quil les donne. J'abonde un peu en dilection et es paroles d'icelle en ce commencement ;
vous sçaves que c'est selon la verité et la varieté de ce vray amour que j'ay aux ames. Maintenes
moy bien es bonnes graces de celles que Dieu veut estre plus de mon soin.
C'est le 30 [avril] 1618.
Je ne vous envoye pas le contract717, d'autant que je n'ay peu le faire copier, et si il me
semble quil ne soit pas trop bien fait ; mais je vous en escriray plus amplement. Dieu soit beni
eternellement dans le cœur de ma tres chere Mere comme dans le mien propre.
704 Voir ci-dessus, note (686), p. 203.
705 Vid. tom. præced., Epist. MCCXCIV, MCCCI.
706 Marguerite de la Croix de Chevrières, dame de Veyssilieu (voir le tome précédent, note (1215), p. 371).
707 Catherine de la Croix de Chevrières, femme de Pierre de la Baume. (Voir note (719) de la lettre suivante.)
708 Epist. seq.
709 Les Sœurs de la nouvelle fondation. (Voir ci-dessus, note (647), p. 192.)
710 Anne Bally, fille de Jean Bally, conseiller au Parlement, et de Catherine Oddoz ou Odde de Triors. Elle était
devenue la belle-sœur des dames de la Baume et de Veyssilieu par son mariage avec Jean de la Croix de Chevrières,
seigneur de Pisançon, maître de camp d'infanterie.
711 Marguerite de Fay, femme de Jean-Claude Audeyer. (Voir le tome précédent, note (1275), p. 389.)
712 Jean-François d'Ulme, chanoine de Grenoble, qui sera destinataire. (Cf. ibid., note (1277), p. 390.)
713 Fille d'Antoine de la Porte et d'Hélène Cousin, Lucrèce épousa le 11 décembre 1591, Jean-Louis Le Maistre, qui
mourut doyen des conseillers au Parlement de Grenoble en 1627. (D'après des Notes de M. le comte de Terrebasse.)
714 Cf. Il Cor., V, 15.
715 Antoinette Camus, dame de Bouquéron (voir ci-dessus, note (525) p. 151), eut six filles : Marie et Laurence qui
épousèrent Sébastien et Artus Pourroy ; Virginie, mariée à Aymar Marnais ; Françoise, dame de Chailliol depuis 1617
(voir ci-dessus, note (449), p. 128) ; Anne et Mérite qui s'allièrent à Pierre Mitalier et à Charles du Peloux. Nous
ignorons la date de leurs mariages ; quelques-unes pouvaient être encore auprès de leur mère en 1618.
716 Honorade de Simiane, fille de François de Simiane, seigneur de la Coste, et de Claire Guérin, avait épousé, par
contrat passé à Forcalquier le 12 février 1572, Artus Prunier, seigneur de Saint-André-de-Rosans, président au
Parlement du Dauphiné, et l'un des plus signalés personnages de son temps. Honorade devint veuve le 4 mai 1616.
Sa belle-fille était Marguerite de Bellièvre, femme de Laurent de Prunier Saint-André. (Voir le tome
précédent, note (1271), p. 389.)
717 Le contrat du président Favre (voir ci-dessus, p. 203).
152/346

16.3 Page 153

▲back to top
Aymes bien madame de Granieu, car quant a madame Barbe Marie, il y a si long tems quil
ne le faut plus dire. J'ay receu la lettre que vous m'escrives, du 22 de ce mois, allant donner la
derniere benediction a madame la procureuse fiscale qui a perdu tout sentiment718.
Faites bien secher les cachetz volans, affin qu'on ne s'apperçoive que les lettres ayent esté
veuës.
Revu en partie sur une ancienne copie conservée au 1er Monastère
de la Visitation de Marseille. [208]
_____
718 Mme Barfelly (cf. ibid., p. 202).
153/346

16.4 Page 154

▲back to top
MCDXX. A Madame de la Baume. Baser sa dévotion sur de
fortes maximes. Le « grand artisan de misericorde. » Quel
doit être le seul souci des enfants de Dieu. Confiance et
abandon en la Providence. Qu'importe le temps à qui regarde
l'éternité ? Moyen de transformer en roses toutes les croix.
Annecy, 30 avril 1618 719.
VIVE JESUS !
Playse au Saint Esprit de m'inspirer ce que j'ay a vous escrire, Madame, et s'il vous plaist,
ma tres chere Fille. Il n'est besoin, pour vivre constamment en devotion, que d'establir des fortes
et excellentes maximes en son esprit.
La premiere que je souhaite au vostre, c'est celle de saint Paul720 : Tout revient au bien de
ceux qui ayment Dieu. Et a la verité, puisque Dieu peut et sçait tirer le bien du mal, pour qui fera-
il cela, sinon pour ceux qui, sans reserve, se sont donnés a luy ? Ouy, mesme les pechés, dont Dieu
par sa bonté nous defende, sont reduitz par la divine-Providence au bien de ceux qui sont a luy.
Jamais David n'eust esté si comblé d'humilité s'il n'eust peché, ni Magdeleine si amoureuse de son
Sauveur s'il ne luy eust remis tant de pechés, et jamais il ne les luy eust remis si elle ne les eust
commis.
Voyés, ma chere Fille, ce grand artisan de misericorde : il convertit nos miseres en graces,
et fait la theriaque [209] salutaire a nos ames, de la vipere de nos iniquités. Dites moy donq, je
vous prie, que ne fera-il pas de nos afflictions, de nos travaux, des persecutions qu'on nous fait ?
Si donq il arrive jamais que quelque desplaysir vous touche, de quel costé que ce soit, asseures
vostre ame que, si elle ayme bien Dieu, tout se convertira en bien. Et quoy que vous ne voyes pas
les ressortz par lesquelz ce bien vous doit arriver, demeures tant plus asseuree qu'il arrivera. Si
Dieu vous jette la boue de l'ignominie sur les yeux, c'est pour vous donner la belle veuë721 et vous
rendre un spectacle d'honneur. Si Dieu vous fait prendre une cheute, comme a saint Paul qu'il jetta
en terre722, c'est pour vous relever a gloire.
La seconde maxime, c'est qu'il est vostre Pere ; car autrement il ne vous commanderoit pas
de dire : Nostre Pere qui estes au ciel723. Et qu'aves vous a craindre, qui estes fille d'un tel Pere,
sans la providence duquel pas un seul, cheveu de vostre teste ne tombera jamais724 ? C'est merveille
qu'estant filz d'un tel Pere, nous ayons ou puissions avoir autre soucy que de le bien aymer et
servir. Ayes le soin qu'il veut que vous ayes en vostre personne et en vostre famille, et non plus,
car ainsy vous verres qu'il aura soin de vous. « Pense en moy, » dit il a sainte Catherine de Sienne,
719 Blaise, dans son édition de 1833 (Lettres, vol. III, p. 401), annonce qu'il a retrouvé la date de cette lettre, et ajoute
au quantième donné précédemment l'année 1622. Comme il n'indique pas la source où il a puisé son renseignement,
nous sommes en droit de ne pas accepter aveuglément ce millésime, et de rapprocher ces pages de celles que le Saint
écrit le 30 avril 1618 à la Mère de Chantal, lui annonçant une lettre pour Mme de la Baume (voir ci-dessus, p. 206).
La destinataire est en effet, si nos conjectures ne nous trompent pas, Catherine de la Croix de Chevrières,
fille de Jean de la Croix et de Barbe d'Arzac, mariée avant 1603 à Pierre de la Baume, conseiller au Parlement de
Grenoble, maître des Requêtes de Marie de Médicis, doyen du Conseil souverain de Savoie, etc.
720 Rom., VIII, 28.
721 Cf. Joan., IX, 6, 7, 11.
722 Act., IX, 4.
723 Matt., VI, 9.
724 Luc., XXI, 18 ; cf. XII, 7.
154/346

16.5 Page 155

▲back to top
de laquelle nous celebrons aujourd'huy la feste725, « et je penseray en toy726. » O Pere eternel, dit
le Sage727, vostre providence gouverne tout.
La troysiesme maxime que vous deves avoir, c'est celle que Nostre Seigneur enseigna a ses
Apostres : Qu'est ce qui vous a manqué728 ? Voyes vous, ma chere Fille, Nostre Seigneur avoit
envoyé les Apostres ça et la, sans argent, sans baston, sans souliers, sans besace, revestus d'une
seule soutane729, et il leur dit par apres : Quand je vous ay ainsy envoyés, quelque chose vous a-
elle manqué ? Et ilz luy dirent : Non730. Or sus donq, ma Fille, quand vous aves eu des afflictions,
mesme du tems que vous n'avies pas tant de confiance en Dieu, estes vous perie dans l'affliction ?
Vous me dires : Non. [210] Et pourquoy donq n'aures vous pas courage de reüscir de toutes les
autres adversités ? Dieu ne vous a pas abandonnee jusques a present ; comme vous abandonnera-
il des a present, que, plus qu'auparavant, vous voules estre sienne ?
N'apprehendes point le mal a venir de ce monde, car peut estre ne vous arrivera-il jamais,
et en tout evenement, s'il vous arrive, Dieu vous fortifiera. Il commanda a saint Pierre de marcher
sur les eaux ; et saint Pierre voyant le vent et l'orage, eut apprehension, et l'apprehension le fit
enfoncer, et il demanda secours a son Maistre, qui luy dit : Homme de peu de foy, pourquoy as-tu
douté ? Et luy tendant la main, il l'asseura731. Si Dieu vous fait marcher sur les flotz de l'adversité,
ne doutés point, ma Fille, n'apprehendes point. Dieu est avec vous ; ayes bon courage, et vous seres
delivree.
La quatriesme maxime, c'est celle de l'eternité. Peu m'importe qui je suis parmi ces momens
passagers, pourveu qu'eternellement je sois en la gloire de mon Dieu. Ma Fille, nous allons a
l'eternité, nous y avons presque des-ja l'un des pieds ; pourveu qu'elle nous soit heureuse,
qu'importe-il que ces instans transitoires nous soyent fascheux ? Est il possible que nous sçachions
que nos tribulations de troys ou quatre jours operent tant d'eternelles consolations732, et que nous
ne veuillions pas les supporter ? En fin, ma tres chere Fille,
Ce qui n'est pour l'eternité
Ne peut estre que vanité.
La cinquiesme maxime, c'est celle de l'Apostre733 : Ja n'advienne que je me glorifie, sinon
en la Croix de mon Jesus. Plantés en vostre cœur Jesus Christ crucifié, et toutes les croix de ce
monde vous sembleront des roses. Ceux qui sont piqués des espines de la couronne de Nostre
Seigneur, qui est nostre chef, ne sentent guere les autres piqueures.
Vous treuveres tout ce que je vous ay dit, es troysiesme, quatriesme ou cinquiesme et
dernier Livres de l'Amour [211] de Dieu734. Vous treuveres beaucoup de choses a ce propos en la
grande Guide des pecheurs, de Grenade735.
Il faut que je finisse, car on me presse. Escrives moy confidemment, et me marques ce que
vous jugeres que je puisse pour vostre cœur, et le mien le contribuera tres affectionnement ; car je
suis en toute verité,
Madame,
Vostre tres humble et asseuré serviteur,
FRANÇS, E. de Geneve.
725 Cette allusion à la fête de sainte Catherine de Sienne prouve que le quantième (28 avril) porté par les éditions
précédentes est une erreur.
726 B. Raym. de Cap., Vita S. Cath. Sen., Pars Ia, c. X.
727 Sap., XIV, 3.
728 Luc., XXII, 35.
729 Matt., X, 9, 10.
730 Luc., XXII, 35, 36.
731 Matt., XIV, 29-31.
732 II Cor., IV, 17.
733 Galat.,ult., 14.
734 Liv. III, chap. II, III ; liv. IV, ch. XI ; liv. XII, ch. IX.
735 Voir les tomes III, note (53), p. XXXVI, et XII, note (437), p. 190.
155/346

16.6 Page 156

▲back to top
Quand madame de Vicillieu736 sera de retour, je luy escriray ; cependant, s'il vous vient en
commodité, dites luy que je suis sien.
Le . . avril, Annessi.
_____
MCDXXI. A Don Juste Guérin, Barnabite (Fragment). Esprit
conciliant et condescendant du Saint. — Pourquoi les Sœurs de
la Visitation se contenteront d'être logées » avec incommodité. »
Pèlerines en route vers la cité permanente, hôtesses d'une
nuit.
Annecy, [fin avril] 1018 737.
……………………………………………………………………………………………………..
Quant au jardin, mon tres cher Pere, je n'y pense plus ; non que je ne voye bien que le projet
que nous avions fait n'incommodoit pas le [collège,] ains l'accommodoit par le moyen de la
recompense que nous eussions donnee ; mais, par la grace de Dieu, je n'eus jamais [212] desir de
me rendre contentieux, ni de blesser l'esprit de personne738.
Nos Filles de la Visitation feront leur bastiment avec incommodité, mais elles s'en
contenteront tres volontier, ains, je puis dire, elles en seront tres contentes, puisqu'il ne se peut
mieux. Et puis, elles sçavent qu'il n'est pas hors de propos que les fideles espouses de Celuy qui
n'eut jamais ni logis ni ou reposer son chef en ce monde739 ne soyent pas logees a leur commodité.
Comme vous sçaves, mon cher Pere, la Mere qui gouverne cette nouvelle trouppe740 a si bien
appris a loger au mont de Calvaire, que tout autre logis terrestre luy semble encor trop beau. Elle
n'a donq nul sentiment du refus, sachant bien que les pelerines qui devront avoir retraitte en ce
logis741, n'y devant habiter que la nuit de cette petite vie, seront, Dieu aydant, si attentives a tirer
païs dans le beau sejour de leur cité permanente742, que le reste leur sera indifferent.
En fin, mon tres cher Pere, nous sommes enfans de la Providence celeste ; Dieu aura soin
de ses servantes selon son bon playsir. Il faut avoir patience : 743 Qui seminant in lachrymis, in
exultatione metent744. Ainsy les rosiers produisent premierement les espines, puis les roses.
……………………………………………………………………………………………………...
Revu sur le texte inséré dans l’Histoire de la Fondation du 1er Monastère de la Visitation
d'Annecy. [213]
_____
736 La sœur cadette de la destinataire, Marguerite, dame de Veyssilieu. (Voir le tome précédent, note (1215), p. 371.)
737 La date approximative se déduit de l'étude des lettres échangées entre les Barnabites d'Annecy et leur Supérieur
général, au sujet de l'affaire traitée ici. (Voir la note suivante.)
738 Nous avons dit plus haut (note (424), p. 120) le bon vouloir de Leurs Altesses, du P. Boerio et de D. Juste pour
accommoder le Monastère de la Visitation par la cession d'une pièce de terrain. Ce bon vouloir échoua devant de
multiples obstacles ; et le 21 mars 1618, le General des Barnabites écrivit à D. Juste et au Supérieur d'Annecy son
désir que l'affaire fût entièrement laissée de côté. D. Guérin, contristé, fit ses excuses au Fondateur : il en reçut « cette
sainte reponce : Quant au jardin, » etc. (Hist. de la Fondation du 1er Monastère d'Annecy.)
739 Matt., VIII, 20.
740 La Mère de Chantal.
741 Cf. Heb., XI, 13.
742 Ibid., ult., 14.
743 Ceux qui sèment dans les larmes moissonneront dans l'allégresse.
744 Ps. CXXV, 5.
156/346

16.7 Page 157

▲back to top
MCDXXII. A Madame Cottin745 (Inédite). Recommandation à la
destinataire de soumettre sa volonté à celle de Dieu.
Annecy, [fin avril ou mai 1618 746.]
Ma tres chere Fille,
Enfin, le bon mary747 m'a prié de vous recommander ce que vous sçaves vous avoir esté
non seulement recommandé, mais commandé au nom de Dieu, a la volonté duquel il faut joindre
et lier inseparablement la vostre. Or, faites le donq courageusement et pour l'amour de Celuy qui,
pour vostre amour, a bien souffert la mort.
Atant, je suis
Vostre plus humble,
FRANÇS, E. de Geneve.
748 A Madle
Madle Cottin.
Revu sur l'Autographe conservé à la Visitation d'Amiens. [214]
_____
MCDXXIII. A la Mère Favre, Supérieure de la Visitation de
Lyon749. Espoir d'aller à Lyon. Le premier Président de Savoie
et sa famille attendus à Annecy.
Annecy, 2 mai 1618.
Il faut tous-jours tesmoigner a ma tres chere grande Fille que j'ay une continuelle memoire
d'elle, et un mot suffit pour cela.
Me voicy de retour750, ma tres chere Fille, et, parmi l'esperance de la paix751, je nourris
celle de vous voir en l'occasion du voyage de M. le Prince Cardinal, s'il est vray qu'il se face,
745 Complétons la note d'Isabeau d'Aspres ou Daspres (voir le tome précédent, note (1228), p. 376) en disant qu'elle
était fille de Claude d'Aspres, « capitaine-châtelain, concierge des prisons à Grenoble. » mort avant 1605, et de
Marguerite Coste. (D'après Prudhomme, Inventaire somm. des Archiv. de l'Isère, tome I, pp. 34, 357.)
746 Ecrite pour contenir les désirs impatients de Mme Cottin de se retirer du monde, cette lettre paraît dater du retour
des prédications du Carême en 1618.
747 Denis Cottin, capitaine-châtelain de Grenoble, garde des prisonniers du Palais, huissier en la chancellerie près de
la Cour. (Voir le tome précédent, note (1228), p. 376.) L'hypothèse émise au sujet de « M. le Maistre » (note (1229),
ibid.) ne subsiste plus. Celui-ci n'est certainement pas le mari de Mme Cottin ; on peut proposer avec beaucoup de
vraisemblance François Coste, Maître aux Comptes depuis 1592, et qui le fut jusqu'à sa mort, 1620. Ce serait un
parent, le frère peut-être, de Marguerite Coste (voir note (745) ci-dessus), qui aurait pris le soin de la famille de sa
sœur après le décès de Claude d'Aspres. (D'après Prudhomme, ubi supra, pp. 89, 90.)
748 L'adresse est de la main de Jean-François de Sales.
749 Hérissant qui, le premier, a publié cette lettre, se trompe en l'adressant à la Mere de Bréchard (voir plus haut, note
(385), p. 109) ; tout, dans le texte, indique la Mère Favre comme destinataire. Depuis l'année précédente, celle-ci
témoignait un ardent désir de revoir son bienheureux Père. (Voir à l'Appendice I, sa lettre du 26 septembre 1617.)
750 De retour de Grenoble (voir ci-dessus, note (676), p. 201).
751 La paix était signée déjà, mais les puissances belligérantes n'en avaient pas encore rempli les conditions. (Voir
ibid., note (377), p. 106.)
157/346

16.8 Page 158

▲back to top
comme nos courtisans m'asseurent752. Si moins, je feray mon voyage a Saint Brocard753, et allant
ou revenant, je prendray la consolation de voir cette grandement tres chere Fille, que mon ame
ayme tres singulierement, et avec elle, ces autres cheres filles qui l'environnent.
Ce pendant, le bon pere viendra icy faire les Rogations avec nous, et madame la Presidente
et les freres754, [215] ou nous ne serons pas sans parler de vous. De vous dire des nouvelles de
Grenoble, ce seroit chose superflue, car nostre Mere vous en fera part suffisante755. De celles d'icy,
que vous diray je, sinon que tout y va tres bien.
Reste que vous continuies aussi comme vous faites, que vous m'aymies tous-jours
cordialement, et que vous priies Dieu pour mon cœur, affin qu'il vive tout a luy. Le vostre sçait
bien que je suis sien.
D'Annessi, le 2 may 1618.
_____
MCDXXIV. A la Mère de Chantal, a Grenoble (Fragment).
Petites violettes à transplanter en divers jardins.
Annecy, [commencement de mai 1618 756.]
……………………………………………………………………………………………………..
L'esprit humain ne peut comprendre comment nos pauvres, basses et petites violettes de la
Visitation sont desirees en plusieurs jardins757. Revenes donq, ma chere Mere, pour tirer d'icy de
ces petites plantes de benediction et les transplanter ailleurs, a la gloire de nostre doux Jesus, que
je supplie de vous benir. [216]
……………………………………………………………………………………………………..
_____
752 Voir ibid., note (485), p. 138.
753 Ici, l'éditeur de 1758 a lu : « Saint-Brocard » ; mais n'a-t-il pas mal lu ? car aucune localité de ce nom ne se trouve
en France. Peut-être l'Autographe portait-il Saint Bonnet, seigneurie des Camus dans le Lyonnais. L'Evêque de Belley
pouvait y avoir donné rendez-vous à son saint ami.
754 Outre René de la Valbonne, la Mère Marie-Jacqueline Favre avait encore cinq frères vivants (voir tome XI, note
(129), p. 79). Il est difficile de dire lesquels d'entre eux devaient accompagner leur père et leur belle-mère à Annecy.
Le 19 mai, samedi précédant les Rogations, le Conseil de Ville délibère sur les présents à faire à Antoine
Favre dont l'arrivée est imminente. Ce jour même, il fait offrir « a Monseigneur le Reverendissime Evesque de
Geneve..., qui sans doubte logera ledit Sr Président a son logis, et pour tant de faveur quil faict journellement a la
ville,... ung cocq d'Inde, deux chappons et ung levrau. » (Reg. des Délib. municip.)
755 En retournant de Grenoble en Savoie, la Mère de Chantal passa par Lyon. (Voir ci-dessus, note (686), p. 203.)
756 Charles-Auguste (La Vie de la Mere Marie Aymée de Blonay, 1655, chap. VII) donne ce fragment comme ayant
été écrit à la Mère de Chantal en 1615, lorsqu'elle était à Lyon ; une étude sérieuse permet de croire qu'il s'est mépris
et que ces lignes furent envoyées en 1618, à Grenoble, alors que les demandes de fondations arrivaient de toutes parts.
757 Outre les fondations déjà traitées en 1616 (voir le tome précédent, note (509), p. 141, et Lettre MCLXXIV, p. 162)
et celles qui se préparaient à la fin de 1617 (voir ci-dessus, Lettre MCCCLXXXIII, et note (483), p. 137), on peut
encore citer celles de Bourges (voir ibid., note (652), p. 193), de Chalon-sur-Saône (cf. Lettres de la Sainte, vol. I, p.
210) et de Dijon. Pour cette dernière ville, le projet d'établissement avait été conçu dès 1611 ; les demoiselles Bertot
et Parise, promotrices de cette oeuvre, la poursuivaient à travers d'inextricables difficultés qui ne furent vaincues qu'en
1622.
158/346

16.9 Page 159

▲back to top
MCDXXV. A la Mère Favre, Supérieure de la Visitation de
Lyon (Inédite). Deux visites promises à la Mère Favre.
Lettres envoyées et reçues.
Annecy, 9 mai 1618 758.
Ma tres chere Fille,
Je vous respons a petitz pointz, estant extremement pressé. Je croy que nostre Mere vous
donnera le contentement que vous desires759, car je la layssay resolue a cela, comm'une Mere tres
amoureuse de sa tres chere fille ; et si ses forces et les necessités de cette Mayson d'icy le
permettoyent, je croy mesme qu'ell'iroit volontiers a Moulin.
J'espere que, quant a moy, j'iray et vers vous et a Moulin, passant a Paris, puisque on tient
asseuré le voyage du Prince Cardinal pour cet esté, lequel ne reuscissant pas, au moins iray je vers
vous, prendre la consolation de vous voir, et vostre chere trouppe, exceller en la sainte devotion,
comme l'on me dit que vous faites. Qu'a jamais Dieu en soit loué.
Il est certain que je vous escrivis des Grenoble une fois par monsieur de Bauvillars,
gentilhomme de Cremieu760, et l'autre, ce me semble, par monsieur Orlandini, ecclesiastique, frere
de l'une de nos Seurs761. [217]
J'escris a Mlle de la Moutiere, que j'honnore grandement pour plusieurs raysons762, et a
monsieur l'Aumosnier763. Je salue nos Seurs pour vous, et donneray vostre lettre a monsieur de
Boysi764 quand il sera de retour des chams ou il est. La chere belle et bonne seur765 se porte bien,
et nous tressaillons desja d'ayse en l'attente de monsieur le pere et madame la Presidente dans dix
jours766.
Dieu soit au milieu de vostre cœur, et je suis de tout le mien, tout invariablement et tres
parfaitement vostre, ma tres chere grande Fille, ma bien aymee Fille. Amen.
Vive Jesus !
IX may.
A ma tres chere grande Fille,
Supe de Ste Marie.
Revu sur l'Autographe conservé chez les Sœurs Bénédictines de Santa Cecilia, à Rome.
_____
758 Le Saint n'a pas ajouté l'année au quantième, mais les faits mentionnés dans ces lignes ne laissent aucun doute pour
1618.
759 De s'arrêter à Lyon au retour de Grenoble. (Voir ci-dessus, note (686), (702), p. 203, et p. 206.)
760 Gaspard de Bernières, seigneur de Beauvillars. (Voir ibid., note (196), p. 47.)
761 La famille Orlandini était originaire de Florence ; elle s'établit à Lyon vers le milieu du XVIe siècle, en la personne
de Guillaume Orlandini, négociant, qui fut sans doute le grand-père de l'ecclésiastique, messager du Saint, et de
Catherine Orlandini qui, entrée au monastère de Lyon à l'âge de vingt-quatre ans, y fut admise à l'habit le 12 août
1617, et reçut le nom de Françoise-Catherine. (Cf. ci-dessus, note (597), p. 174.) Elle fit profession le 9 septembre
1618 et décéda le 22 juillet 1625. (Livre du Chapitre et Livre du Couvent, du Ier Monastère de Lyon, transféré à
Venise.)
762 Toutes les recherches faites pour identifier « Mlle de la Moutiere » sont restées sans résultat.
763 Claude de Sévelinges, aumônier de Belleville, ancien confesseur de la Visitation de Lyon. (Voir tome XV, note
(948), p. 333.)
764 Jean-François de Sales.
765 La présidente de la Valbonne.
766 Voir ci-dessus, p. 215.
159/346

16.10 Page 160

▲back to top
MCDXXVI. A la Mère de Chantal, a Grenoble (Inédite). Encore
l'affaire des jardins. Les lettres de M. de Granier.
Difficultés au sujet d'un contrat de mariage. Roses changées
en épines. La clarté dans les affaires.
Annecy, 10 mai 1618 767.
Ma tres chere Mere, Je vous ay escrit ce matin768 avant que de prendre le [218] gelap du
bon monsieur de Granieu769, et ay respondu a vos deux lettres du 1er et 7e de ce moys. Tout
maintenant je reçois celle du 5 et j'adjouste ces deux motz.
Les Peres de Saint Dominique m'ont offert un parti pour avoir ce morceau de jardin dont
nous avons besoin, sans toucher a celuy des Peres Barnabites770, mais parti si impossible et, si je
ne me trompe, desraysonnable, qu'en fin ce n'est rien. Dieu y mettra sa main, sil luy plait, et nous
en fera treuver d'autres.
Vous vous resouviendres bien de ce que vous me dites de M. de Grenier et de ses lettres771
; j'ay sceu que c'est, et m'est advis que c'est si peu de chose, que si vous n'en pouves parler fort
doucement et imperceptiblement, il ne seroit presque pas bon d'en rien dire, de peur d'effaroucher
cette pauvre fille qui se promet tant de consolation de vostre veue772 ; et peut estre les termes
generaux suffiront, sil ne se presente d'autre biais bien propre pour venir aux particuliers.
Si vous voyes quil y ayt quelque messeance de manger en mesme table avec vostre
conducteur, vous pourres bien manger dessus vostre lit, comme lasse, et y faire manger aupres de
vous vostre conducteur.
Vrayement, je seray bien ayse de revoir M. de la Gran, que j'honnore cherement pour la
bonté de son cœur au [219] service de Dieu773. Nous avertirons affin qu'on face la profession au
tems que vous desirés774.
767 La mutilation de l'Autographe l'a laissé sans signature et sans date. Il est facile pourtant de déterminer l'année et
presque sûrement le quantième : la Mère de Chantal quitta Grenoble pour Lyon en mai 1618, et la lettre annoncée ici
à Mme Liotard est datée du 10 mai.
768 Cette lettre n'a pas été retrouvée.
769 François de Gratet, seigneur de Granieu, Faverges, Dolomieu, le Bouchage, etc., fut trésorier général de France en
Dauphiné, comme son père, Pierre-Jacques de Gratet, qui avait mérité cette charge par son dévouement au Roi pendant
les guerres civiles. Sa mère était Clémence Rabot, sœur du président d'Illins. Il épousa (25 avril 1595) Laurence de
Ferrus (voir le tome précédent, note (1299), p. 395), et l'aimable vertu de sa compagne l'attira bientôt à une vie très
sérieusement chrétienne ; les pauvres et les Religieux purent l'appeler leur père et leur appui. Quand Mme de Granieu
se mit sous la conduite de l'Evêque de Genève, son mari eut une large part des bénédictions et des grâces qui
descendirent sur la famille par l'entremise du Serviteur de Dieu. Il apprit surtout de lui, dit un ancien historien, à «
finir saintement ses jours. » (Menestrier, Vie de Laurence de Ferrus, dame de Granieu, dauphinoise, Lion, Brun,
1898.)
770 Voir ci-dessus, p. 202.
771 Sans doute le Saint veut parler de lettres écrites par Denis de Granier (voir le tome précédent, note (1093), p. 325)
à la Mère Favre. Celle-ci avait une certaine influence sur le trop inconstant chanoine ; elle devait s'en servir
heureusement plus tard pour le ramener dans la bonne voie.
772 Voir la lettre précédente.
773 Le prieuré de Lagrand, au diocèse de Gap, remonte au XIe siècle. D'abord de la dépendance du Saint-Sépulcre
d'Acquapendente (Italie), puis de l'abbaye de Cluny, il devint lui-même chef de nombreux prieurés, églises ou filleules.
Depuis le 23 janvier 1609, son prieur et seigneur était Louis de Simiane de la Coste, fils de Jean-Baptiste de Simiane
et de Marie de Portes, qui possédait encore le prieuré de Saint-Michel-de-Connexe et un canonicat à Grenoble. Ce
digne ecclésiastique fut un des premiers et des principaux bienfaiteurs de la Visitation de Grenoble ; pendant plusieurs
années (1656-1664), sans avoir le titre de Père spirituel du Monastère, il en remplit avec zèle toutes les fonctions au
nom de l'Evêque, Mgr Pierre Scarron. (D'après l'Inventaire somm. des Archiv. des Hautes-Alpes, par l'abbé Guillaume,
tome VIII, et l'Hist. de la Fondation de la Visitation de Grenoble.)
774 Trois Novices attendaient le retour de la Fondatrice, et sans doute aussi le règlement de leur contrat, pour prononcer
leurs vceux. C'étaient les Sœurs Claude-Catherine de Vallon (voir tome XIV, note (1029), p. 354), Hélène-Marie Le
160/346

17 Pages 161-170

▲back to top

17.1 Page 161

▲back to top
Que je suis en peine, ma tres chere Mere, de crainte que nostre mariage, dont nous nous
promettions tant de consolation, ne se rompe775 ; car de ne pas communiquer tres clairement et
sans replys toutes les difficultés quil y a, a M. de Chantal776 et a Monseigneur de Bourges777, il ny
a point d'apparence ; et de les leur communiquer, il y a toute apparence que Monseigneur de
Bourges se rebutera de voir que cette terre dont on avoit parlé ne soit pas terre, ains une mayson
seulement ; que mesme on ne la veuille donner que pour apres le trespas, et non aux noces ; que
l'argent n'est pas exigeable pour estre colloqué a propos des affaires que l'on a, et que l'on veuille
tant de pompe, que deux ou trois mille escus ne suffiront pas : de sorte que rien ne demeure qui
puisse bien contenter son esprit que vous connoisses, sinon la fille, que tout le monde avoüe estre
digne d'amour. Et puis, cette methode de se desfaire du gentilhomme que vous sçaves778,
engendrera elle pas indubitablement [220] des querelles, puisque il s'est declairé de sa pretention
a M. de Chantal et a moy, a qui mesme il a monstré l'escrit ? En somme, il arrive souvent en ce
monde que les roses se convertissent en espines.
J'ay pensé que je devois escrire un mot a Mme Lyotart779, laquelle je ne nie pas qu'elle ne
me dit qu'elle ne vouloit pas donner cette piece, qu'ell'appelloit terre, qu'hors du contract de
mariage : dequoy je me remis, comme des autres particularités, a ce qui seroit avisé entre vous,
comme peu expert en telles affaires. Ce sera pourtant grand domage si ce mariage ne se fait, car a
mon advis, les parties se fussent fort entr'aymees, et les parens contentés de cette aymable fille.
Pour moy, je faisois conte de quinze mille escus bien revenans en argent, et quinze mille en la terre
; car si ell'eut esté terre de cinq cens escus de revenu, elle les valoit fort bien. Et neanmoins, si on
fait 24 mille qui soyent franchement et clairement asseurés et recevables, quant a l'argent, selon la
necessité des affaires de M. de Chantal, je pense que l'on devra passer outre. C'est une belle chose
que la clarté es affaires. J'ay a contre cœur tout780… En somme, je recom[mande] supplie
d'accroistre en crainte filiale et parfaite ces dames : ma Seur Barbe Marie781, madame de
Granieu, avec toutes en esprit continuellement.
……………………………………………………………………………………………………...
A ma tres chere Mere
Madame de Chantal.
Revu sur l'Autographe conservé à la Visitation de Chambéry. [221]
_____
Blanc et Anne-Catherine de Beaumont (voir ci-dessus, note (695), p. 204). La première fit profession le 23 mai et les
deux autres le 27.
775 Le projet de mariage entre Celse-Bénigne de Rabutin-Chantal et Huguette Liotard. (Voir ci-dessus, p. 205, et la
lettre suivante.)
776 Celse-Bénigne, fils de la Mère de Chantal.
777 André Frémyot tenait lieu de père aux enfants de sa sainte sœur. Il devait, pour faciliter le mariage, avantager son
neveu d'une pension et donner les bagues à la fiancée. (Cf. Lettres de la Sainte, vol. I, p. 245.)
778 Un autre prétendant, sans doute, d'Huguette Liotard.
779 Epist. seq.
780 La moitié du second feuillet de l'Autographe a été coupée ; nous donnons ce qu'il en reste, en laissant aux lignes
leur disposition première, afin que le lecteur se rende compte de ce qui manque. L'adresse se trouve au verso, soit à la
quatrième page.
781 La présidente Le Blanc de Mions.
161/346

17.2 Page 162

▲back to top
MCDXXVII. A Madame Liotard782. Regrets du Saint en
apprenant les obstacles qui s'opposent à la conclusion d'une
alliance. Prière de la faciliter.
Annecy, 10 mai 1618.
Madame,
J'ay sceu par une lettre de madame de Chantal, que le desirable mariage qui fut conclu en
mon logis se treuvoit plein de difficultés en l'esclaircissement des articles particuliers ; et je
confesse que, le croyant si convenable et propre au contentement des parties et de leurs amis, je
ne puis m'empescher d'en estre en peyne783. En suite de quoy, comme je conseille a madame de
Chantal de ne point s'arrester a la diminution des esperances que nous avions des biens, aussi vous
conjure-je, Madame, d'apporter de vostre costé tout ce qui peut faciliter et rendre douce et
aggreable l'execution d'une si bonne [222] œuvre, et de prendre la methode la plus claire et franche.
Et ce pendant, je demeure tres asseurement,
Madame,
Vostre plus humble serviteur
FRANÇS, E. de Geneve.
10 may 1618, Annessi.
Je souhaitte mille et mille benedictions a Mesdamoyselles vos filles, que je cheris et
honnore de tout mon cœur, et suis leur serviteur784.
_____
782 La lecture de la lettre précédente et du présent texte suffit à fixer la destinataire.
« La bonne madame Liotart... n'a pas peut estre encor bien despouillé la « robbe du monde, ni perdu la
coustume de parler selon la sagesse du monde, » écrit le Saint à la Mère de Chantal à la fin d'avril 1618. (Lettre
MCDXIX, p. 205.) Cependant, depuis plusieurs mois, Marguerite du Solier, fille de Jean du Solier, sieur de la Mure,
et veuve (1603) de Jean Liotard, président à la Chambre des Comptes du Dauphiné. souhaitait se retirer à la Visitation
de Lyon « pour lui servir de passage au dessein » qu'elle avait « de se consacrer à Dieu. » (Lettres de la Sainte, 17
septembre 1617, vol. I, p. 222.) Mais elle n'avait « point de disposition pour la Religion, » la Fondatrice est obligée
de le reconnaître, tout en regrettant que « cette pauvre femme-là » ne pût être « assistée et aidée » comme elle l'aurait
voulu. (Ibid., 25 juin 1618, vol. I, p. 265.) La charitable Sainte recommandera encore Mme Liotard à la sollicitude de
la Mère de Chastel, supérieure à Grenoble, oubliant ainsi le défaut de désintéressement et de loyauté qui fit rompre un
projet de mariage fort goûté de son fils Celse-Bénigne. On trouve encore Marguerite du Solier signataire d'un acte en
1623.
783 Voir ci-dessus, note (697), p. 205.
784 Huguette Liotard avait deux sœurs aînées : Catherine, mariée à Jean de Dorgeoise la Tivolière, et Marguerite,
femme de Gabriel de Grôlée de Mépieu, qui demeura l'amie fidèle et dévouée de la Mère de Chantal. Celle-ci écrira
en 1630 : « Pour notre chère madame de Mépieu, c'est une petite âme que j'aime bien. » (Lettres, vol. III, p. 451.) Elle
fut une des bienfaitrices de la Visitation de Crémieux.
162/346

17.3 Page 163

▲back to top
MCDXXVIII. Au Duc de Nemours, Henri de Savoie785.
Recommandation en faveur d'un avocat.
Annecy, 11 mai 1618.
Monseigneur,
En cette vacance de l'estât d'advocat de Vostre Grandeur en ce Conseil de Genevois,
advenue par la promotion de monsieur Ouvrier a celuy de senateur786, je croy que le sieur Mottier
sera proposé a Vostre Grandeur ; et je puis dire que si elle luy fait la grace de le recevoir en cette
charge, ell'en sera extremement bien servie, non seulement par ce que c'est l'un des plus dignes
advocatz que nous ayons en ce païs, mais aussi par ce qu'il [223] affectionnera ardemment son
devoir787. Et les effectz de ce veritable tesmoignage en seront mes garens ; qui me fait le proferer
hardiment, priant au reste la divine Bonté qu'elle face abonder Vostre Grandeur en benedictions,
et demeurant,
Monseigneur,
Vostre tres humble et tres obeissant
orateur et serviteur,
FRANÇS, E. de Geneve.
XI may 1618, Annessi.
Revu sur l'Autographe conservé à Paris, Bibliothèque Nationale,
Fonds français, 3809, fol. 80.
_____
MCDXXIX. A Madame de la Fléchère. Un mal moins grand
qu'on ne pensait. Prochain retour de la Mère de Chantal.
Annecy, 15 mai 1618 788.
J'ay esté bien en peine d'abord, mais en fin j'ay sceu, ma tres chere Fille, que ce n'estoit que
les attaques ordinaires. Dieu soit loüé ! Du reste, nous en parlerons avec un peu plus de loysir
quand vous viendres icy ; et cependant, voyla un billet de nostre Mere, que j'ay ouvert
comm'addressé a [ma] fille et tres chere fille. Elle sera icy de vendredi en huit jours789. [224]
Dieu, par sa bonté, vive et regne en nos cœurs. Amen. XIIIII may.
A Madame
Madame de la Flechere.
785 Bien que l'Autographe ne porte point d'adresse, le titre de « Vostre Grandeur » et le sujet de la lettre désignent
clairement le correspondant du Saint.
786 Henri Ouvrier (voir tome XVI, note (224), p. 60) fut reçu au Sénat le 13 juin 1618.
787 La recommandation du Saint eut son effet : Robert Mottier, originaire de Thônes, docteur és-droits, devint avocat
au Conseil de Genevois. Il acquit le titre de noble en 1621, par son élection de premier syndic de la ville d’Annecy.
(Reg. des Délib. municip.)
788 La date de l'année, qui manque sur l'Autographe, est justifiée par l'annonce d'un retour de la Mère de Chantal à
Annecy pour la fin du mois de mai ; ce qui ne se présente qu'en 1618.
789 Voir ci-dessus, note (686), p. 203. François de Sales écrit ces lignes un mardi ; le vendredi suivant tombait, par
conséquent, le 18, ce qui fixerait au 25 l'arrivée de la Fondatrice. Elle n'eut lieu en réalité que le 26. (Voir ci-après,
Lettre MCDXXXI, p. 227.)
163/346

17.4 Page 164

▲back to top
Revu sur une copie déclarée authentique, conservée à Turin, Archives de l'Etat.
_____
XXX. A M. Guillaume de Bernard de Foras. Témoignage
d'amitié. Ombre à la joie du saint Evêque au sujet du mariage
de Henri de Nemours.
Annecy, 18 mai 1618.
Monsieur mon Frere,
Quelle apparence y auroit il de laisser partir ce porteur, de mes amis et confreres, sans luy
donner ces quatre motz ? car ne faut il pas, le plus souvent que l'on peut, ramentevoir cette juste et
inviolable affection plus que fraternelle que mon cœur a envers vous ? Il est vray, Monsieur mon
tres cher Frere, plus l'honneur et le bien de vous revoir m'est differé, plus ce sentiment va croissant
en moy.
Au reste, on nous a annoncé de toutes partz le mariage de Sa Grandeur790 ; mais j'attens
que vous me le facies sçavoir, avant que j'en tesmoigne ma joye, comme je dois, a sadite Grandeur,
avec laquelle je me res-jouirois bien davantage si on ne nous asseuroit pas, par la mesme [225]
nouvelle, qu'elle se resoult de ne venir plus icy. Or sus, la Providence divine sçait ce qu'elle a a
faire de nous.
Cependant, aymes tous-jours constamment, Monsieur mon Frere, celuy qui, a jamais, sans
cesse et sans reserve, est et veut estre
Vostre tres humble frere et serviteur,
FRANÇS, E. de Geneve.
Ce 18 may 1618.
On dit tous-jours que Monsieur le Cardinal fera son voyage, et que je l'accompagneray791.
A Monsieur
[Monsieur] de Foras,
Gentilhomme de la Chambre de M. le Duc de Nemours.
A Paris.
_____
790 Dès 1609, il était question du mariage de Henri de Nemours avec la petite-nièce du premier mari de sa mère, Anne
de Lorraine, duchesse d'Aumale, fille de Charles de Lorraine (cf. tome XIV, note (547), p. 184). En 1611, le projet
avait été rompu sur les vaines espérances que le politique Charles-Emmanuel donna à son cousin de lui accorder
l'infante Catherine (cf. tome XV, note (243), p. 79). Déçu dans son attente, le duc de Nemours renoua ses anciennes
négociations, et, non sans difficulté, les fit heureusement aboutir. Le 14 avril 1618, par l'intermédiaire de Jacques de
Montgommery, seigneur de Courbazon, à qui il avait passé procuration, le prince signait à Bruxelles l'acte de son
mariage avec Anne de Lorraine.
791 Voir ci-dessus, note (485), p. 138, et pp. 193, 215.
164/346

17.5 Page 165

▲back to top
MCDXXXI. A M. Claude de Blonay. Union de joies et de
peines. La Mère de Chantal est à Lyon et se dispose à rentrer
à Annecy.
Annecy, 19 mai 1618.
Monsieur,
Je participe a tous vos contentemens et a tous vos desplaysirs, selon nostre reciproque,
ancienne et invariable amitié ; c'est pourquoy je regrette la perte de la presence de monsieur vostre
beaufilz792, et prie Dieu quil console sa chere vefve, a laquelle je voudrois bien pouvoir rendre du
service.
La Visitation vous attend, et Mme de Chantal me conjura a son depart, ou par une lettre, de
vous conjurer de [226] les assister a present793. Ell'est maintenant a Lyon avec nostre fille794, et
sera icy dans huit jours pour recevoir la profession de Mlle de Vallon795 et de Mlle Carra796 le
dimanche entre les octaves de l'Ascension.
Monsieur nostre Prieur797 vous dira les nouvelles tous-jours plus asseurees de la paix798. Je
suis, Monsieur,
Vostre tres humble confrere,
FRANCS, E. de Geneve.
XVIIII mai 1618.
A Monsieur
Monsieur de Blonnay,
Prefect de la Ste Mayson.
Revu sur l'Autographe qui appartenait à M. l'abbé Pettex, curé de Marignier, près Bonneville
(Haute-Savoie).
_____
792 Amé de Mojonnier, fils de Jean de Mojonnier et de Louise de Laconay, avait épousé la fille aînée de Claude de
Bionay, Françoise-Madeleine. Il teste et codicille les 30 avril et 18 mai 1618.
793 C'était probablement le paiement de la dot de 3000 florins promise à la Sœur Marie-Aimée, que réclamait
instamment la Mère de Chantal. Il se fit bien attendre encore.
794 Sœur Marie-Aimée de Blonay.
795 La profession de Sœur Claude-Catherine Joly de Vallon fut avancée au 23 mai. (Cf. ci-dessus, note (774), p. 220.)
796 Sœur Anne-Catherine de Beaumont-Carra (voir ibid., note (695), p. 204).
797 Jean-François de Blonay, prieur commendataire de Saint-Paul en Chablais. (Voir tome XV, note (1003), p. 354.)
798 Voir ci-après, note (817), p. 236.
165/346

17.6 Page 166

▲back to top
MCDXXXII. A Madame de Granieu799. Quelles consolations
donner à la Mère de Chastel après le départ de la Mère de
Chantal.
Annecy, 20 mai 1618 800.
Pour moy, ma chere Fille, je n'escris a ce coup qu'a vous, car je m'imagine que la bonne
Mere sera partie, [227] et ce porteur est un personnage qui fait profession d'estre des grandes
connoissances de monsieur vostre mary801 et ne me donne que ce moment pour vous escrire.
Mais que vous diray-je ? Ceux qui n'ont qu'une volonté et qu'un cœur, c'est a dire, ceux qui
pour tout ne cherchent que le divin amour celeste et que la volonté et le cœur du Sauveur regnent,
ilz sont inseparables. C'est pourquoy, ma tres chere Fille, prenes la peyne, je vous prie, de dire cela
de ma part a ma Seur Peronne Marie802, laquelle, au depart de cette chere Mere, sera, je pense, un
peu attendrie. Mais qu'elle soit asseuree que Dieu l'assistera en sa besoigne ; et a la premiere
commodité je luy escriray moy mesme.
Ce pendant, vivés toute a ce cœur et pour ce cœur du Sauveur, ma tres chere Fille, et je
suis, certes, vostre tres parfaitement, et
Vostre serviteur plus humble,
FRANÇS, E. de Geneve.
may 1618, Annessi.
Madame la Presidente Le Blanc sçait bien ce que je luy suis, et pressé de donner vistement
ce billet, je ne luy puis escrire ; je la salue neanmoins de tout mon cœur.
_____
MCDXXXIII. A Madame de la Fléchère. Sollicitude paternelle.
Visites consolantes.
Annecy, 22 mai 1618.
Que faites vous, ma tres chere Fille ? car je suis en peine de ce violet que vous avies l'autre
jour, bien que ce porteur m'a dit que vous vous porties bien, graces a Dieu. Oh ! ce grand Dieu qui
est propice aux cœurs de bonne [228] volonté803, soit a jamais la vie du vostre, ma tres chere Fille,
et du mien, qui est vostre et ne cesse jamais de vous souhaiter cette sainte vie de l'amour celeste.
Nous sommes icy parmi les consolations que cette bonne compaignie nous donne804,
attendans pour compliment de bonheur la venue de nostre chere Mere805.
Vives, ma tres chere Fille, et soyes toute a Dieu, qui m'a rendu et fait vivre tout vostre.
Annessi, le XXII may 1618.
799 L'intimité qui s'établit promptement entre Mme de Granieu et la Mère de Chastel, et que l'on peut constater en
d'autres lettres de François de Sales, nous permet d'assurer que ces lignes ont été écrites à la première.
800 Nous corrigeons le quantième, 10 mai, donné par les éditions précédentes, et que dénient cette phrase du Saint : «
Je n'escris a ce coup qu'a « vous. » Le 10, il écrivait encore à Mme Liotard et à la Mère de Chantal, et celle-ci ne quitta
Grenoble qu'après cette date.
801 François de Gratet, seigneur de Granieu (voir ci-dessus, note (769), p. 219).
802 En revenant à Annecy, la sainte Fondatrice laissait pour Supérieure du nouvel établissement de Grenoble, la Mère
Péronne-Marie de Chastel.
803 Luc., 11, 14.
804 Le président Antoine Favre et sa famille. (Voir ci-dessus, Lettres MCDXXIII et MCDXXV, pp. 215, 217.)
805 Voir ibid., note (789), p. 224.
166/346

17.7 Page 167

▲back to top
A Madame
Madame de la Flechere.
Revu sur une copie déclarée authentique, conservée à Turin, Archives de l'Etat.
_____
MCDXXXIV. A la Présidente le Blanc de Mions (Inédite). Un
petit signe du cœur. — Messages affectueux.
Annecy, 23 mai 1618.
Ce n'est pas escrire, ceci, ma tres chere Fille ; c'est seulement, comme par un petit signe,
vous faire sçavoir que ce cœur duquel vous estes la fille a receu vostre lettre avec beaucoup de
joye et ne cesse point de vous desirer la perfection de l'amour caeleste. Vives ainsy, ma tres chere
Fille, de cette vie divine, toute remise es mains de Nostre Seigneur.
A la venue de nostre Mere j'apprendray toutes vos nouvelles, et puis j'escriray a la premiere
commodité. Cependant, salues cherement tout ce qui est plus cher a mon ame dans vostre
Grenoble. Mays vous sçaves que la [229] nouvelle Mere806 est ma fille ; si est bien madame de
Granieu ; salues les donq comme il faut. Dieu vous sauve toutes. Amen.
XXIII may, sans loysir et presque sans voir du tout. 1618.
A Madame
Madame la Presidente Le Blanc.
Revu sur l'Autographe conservé à Florence, dans l'oratoire privé de Mgr Donat Velluti-Zati, duc
San Clemente, Archevêque titulaire de Patras (Grèce).
_____
806 La Mère Péronne-Marie de Chastel.
167/346

17.8 Page 168

▲back to top
MCDXXXV. A une tante807. Condoléances et consolations.
Le chemin de la félicité future. Rempart contre le torrent des
adversités.
Annecy, 29 mai 1618.
Madame,
J'ay regardé avec compassion l'estat de vostre cœur, des que j'ay sceu le desplaysir qu'il a
receu ces jours passés ; car encor que je sache bien que, graces a Dieu, l'experience et
accoustumance que vous aves faite des quelques annees en ça a souffrir les mescontentemens, aura
affermi vostre ame et animé vostre courage pour n'estre plus si extraordinairement sensible a ces
coups inevitables de nostre condition mortelle, si est ce que d'ailleurs je crains que ces recharges
si frequentes n'estonnent vostre resolution. [230]
Mais toutefois, Madame, je ne laisse pas d'esperer qu'apres tant de remises de vostre
volonté a celle de Dieu, apres tant de considerations que vous aves faites sur la vanité de cette vie
et sur la verité de la future, apres tant de protestations de vouloir estre irrevocablement attachee a
la suite de la Providence celeste, vous ne treuvies une solide consolation au pied de la croix de
Nostre Seigneur, ou la mort nous a esté rendue meilleure que la vie ; et cette illusion de la vie de
ce monde n'aura pas eu le credit, je m'asseure, de vous faire desmarcher des resolutions que Dieu
vous fit prendre sur les evenemens d'autrefois.
En somme, Madame, il faut s'accommoder a la necessité et la rendre utile a nostre felicité
future, a laquelle nous ne devons ni pouvons aspirer que par ce chemin de croix, d'espines,
d'afflictions. Et en verité, il importe peu (ains il importe beaucoup) a ceux que nous cherissons,
que leur sejour soit court parmi le tracas et les miseres de cette vie ; et quant a nous, cela ne nous
toucheroit point, si nous sçavions considerer que c'est la seule eternité a laquelle nous devons
dresser tous nos desirs.
Pour Dieu, ma tres chere Tante, et certes, pour parler selon mon cœur, ma tres chere Fille,
ne vous laisses pas emporter au torrent des adversités, ains attachés vous aux pieds de Nostre
Seigneur et dites luy que vous estes sienne ; qu'il dispose de vous et de ce qu'il a voulu estre vostre,
a son gré, en vous asseurant, et a vous et aux vostres, la tressainte eternité de son amour. Ces
momens ne meritent pas qu'on y pense, sinon pour parvenir a ce bien.
Je suis, Madame,
Vostre tres humble neveu et serviteur,
FRANÇS, E. de Geneve.
Ce 29 may 1618, Annessi. [231]
_____
807 La différence de ton assez marquée entre le dernier alinéa et les premiers semblerait indiquer un texte bâti, mais il
est impossible de décider à quel fragment se rapporterait alors la date. Si toute la lettre a été vraiment adressée à une
Tante, comme le disent les éditions précédentes, on ne peut proposer que Jeanne de Menthon, veuve d'Hector de
Chevron-Villette (voir tome XIII, note (929), p. 344), accablée de deuils depuis 1607, et qui dut perdre son fils Bernard
entre 1617 et 1620.
168/346

17.9 Page 169

▲back to top
MCDXXXVI. A une dame808. La souffrance des séparations.
Par quelle pensée s'en consoler. Encouragement paternel à
écrire souvent.
Annecy, 30 mai 1618.
Je vous diray, Madame, mais aussi, s'il vous plait, ma tres chere Fille, qu'il est impossible
de n'avoir pas des ressentimens de douleur en ces separations ; car, encor qu'il semble que les
unions qui ne tiennent qu'au cœur et a l'esprit ne soyent point sujettes a ces separations exterieures,
ni aux desplaysirs qui en procedent, si est ce que, tandis que nous sommes en cette vie mortelle,
nous les sentons, d'autant que la distance des lieux empesche la libre communication des ames,
qui ne peuvent plus s'entrevoir ni s'entretenir que par cet office des lettres. Mays pourtant, ma tres
chere Fille, il y a bien dequoy vivre content en la tressainte dilection que Dieu donne aux ames
unies a mesme dessein de le servir, puisque le lien en est indissoluble, et que rien, non pas mesme
la mort, ne le peut rompre, demeurant eternellement ferme sur son immuable fondement, qui est
le cœur de Dieu, pour lequel et par lequel nous nous cherissons.
Et vous voyes, ce me semble, des-ja en ces paroles le desir que j'ay que vous vous servies
de mon ame avec toute confiance et sans reserve. Que si de m'escrire souvent de ce qui regarde la
vostre vous sert de consolation, comme vous me le signifies, faites le eonfidemment, car je vous
asseure que la consolation sera bien reciproque. Et que cela soit dit une fois pour toutes.
Certes, je le dis en verité, je vous cheris tres particulierement des que je vis en vostre cœur
les arrhes du saint amour de Dieu envers vous, tesmoignees par les [232] attraitz qu'il vous fait a
son service. Bienheureuse que vous seres, si, comme vous estes resolue de faire, vous les receves
humblement et les prattiques fidellement, ainsy que de toute mon affection je le souhaite,
demeurant a jamais, ma tres chere Fille, et d'un cœur vrayement paternel,
Vostre tres humble et invariable serviteur,
FRANÇS, E. de Geneve.
Ce 30 may 1618.
_____
MCDXXXVII. A la Mère de Chantal. Conséquence d'un
accablement d'affaires. Annonce d'un mariage.
Annecy, fin mai ou commencement de juin 1618 809.
Vrayement le serein d'hier ni le vent ne m'ont fait aucun ennuy, ma tres chere Mere ; mais
ouy bien l'accablement d'aujourd'huy qui m'a empesché d'aller saluer vostre cher cœur en presence,
nonobstant le juste empressement du mien ; je veux dire de vous aller voir moy mesme, qui en
avois tant de desir. Or sus, il n'y a remede ; ç'a esté le beni mariage de madamoyselle de Chavannes,
qui en fin reüscira, comme je pense810.
808 Nul doute que la destinataire ne soit une dame de Grenoble ; et c'est avec grande probabilité que nous suggérons
le nom de Marguerite de la Croix de Chevrières, dame de Veyssilieu. (Voir le tome précédent, note (1215), p. 371.)
809 D'après le texte, ce billet a été écrit évidemment entre le retour de Grenoble de la Mère de Chantal, 26 mai, et le
mariage de Mlle de Chavanes, 19 juin, de l'année 1618.
810 Fille de Claude de Chavanes, ami et condisciple de François de Sales (voir tome XI, note (146), p. 52), et de Jeanne-
Marie Fornerat de Cursinge, Marguerite de Chavanes épousa, le 19 juin 1618, le fils de Thomas Calcagni, Roch,
écuyer de la grande écurie du duc de Genevois (voir tome XIV, note (850), p. 302). Les parents de la jeune fille étaient
morts avant 1604 ; le Saint s'intéressait d'autant plus à elle, et lui-même bénit son mariage dans sa chapelle particulière.
169/346

17.10 Page 170

▲back to top
Conservés-vous bien parmi cette fievre salutaire. Oh ! Dieu vous conserve, ma tres chere
Mere, et vous comble de benedictions par tout ou vous estes, et moy aussi. Vive Jesus ! Amen.
Voyla la lettre de madame de Gouffier811. [233]
_____
MCDXXXVIII. A M. Guillaume de Bernard de Foras. Les
étoiles pâlissant devant le soleil. Une nouvelle apprise « a
tastons. » Souhaits de bonheur au duc de Nemours.
Aimable plaisanterie.
Annecy, fin mai-juin812 1618.
En somme il est donq vray, Monsieur mon Frere, que les estoilles ne sont plus en veuë
quand le soleil l'est sur nostre horizon, et qu'ainsy ce grand contentement que vous contemples au
mariage de Monsieur813 vous vaut tellement que nous ne sommes plus en memoire. Or sus, nous
nous res-jouissons, certes, avec vous, et de tout nostre cœur, de ce mesme bonheur que nous
estimons grand ; mais nous avons sceu cette heureuse nouvelle a tastons, ramassant ça et la les
asseurances que nous en avions parmi le bruit qui s'en faysoit ; car ni Monsieur, ni aucun de sa
part, ni nul homme du monde ne nous en a donné aucun advis. Mais Dieu soit loué, et veuille
multiplier ses benedictions sur cette sainte liayson.
Et vous, Monsieur mon Frere, passé ces premiers ravissemens que la grandeur de vostre
joye vous donne, vous vous demettres, je m'asseure, a nous vouloir encor un peu gratifier de vostre
bienveuillance. Ce pendant, croyés que, quant a moy, je demeure immobile en l'affection que j'ay
de vivre a jamais
Vostre plus humble et affectionné frere et serviteur,
FRANÇS, E. de Geneve,
A Monsieur
[Monsieur] de Foras, Gentilhomme ordinaire
de la Chambre de Monseigneur le Duc de Nemours. [234]
_____
811 Elisabeth des Gouffiers (voir tome XV, note (972), p. 343).
812 La présente lettre doit être postérieure à celle du 18 mai au même destinataire, et antérieure au 9 juillet, date à
laquelle le mariage du prince de Nemours était officiellement connue à Annecy, puisque, ce jour-là, la Ville décrète
qu'un feu de joie sera fait comme réjouissance de cet heureux événement.
813 Le duc de Nemours (voir ci-dessus, note (790), p. 225).
170/346

18 Pages 171-180

▲back to top

18.1 Page 171

▲back to top
MCDXXXIX. A la Mère de Chantal (Fragment). Comment se
disposer à recevoir le comble du saint amour. D'où procède la
souveraine unité dans une âme.
[Mai ou juin 1614-1618 814.]
……………………………………………………………………………………………………..
Or sus, Dieu ne donne pas tant de desir a nostre tres unique cœur, qu'il ne nous veuille
favoriser de quelque effect correspondant. Esperons donq, ma tres unique Mere, que le Saint Esprit
nous comblera un jour de son saint amour ; et, en attendant, esperons perpetuellement, et faysons
place a ce sacré feu, vuidant nostre cœur de nous mesmes tant qu'il nous sera possible. Que nous
serons heureux, ma tres chere Mere, si nous changeons un jour n.ostre nous mesme a cet amour
qui, nous rendant plus un, nous vuidera parfaitement de toute multiplicité, pour n'avoir au cœur
que la souveraine unité de la tressainte Trinité, qui soit a jamais benite au siecle des siecles ! Amen.
[235]
_____
MCDXL. A Monseigneur Pierre Fenouillet, Evêque de
Montpellier815. La vanité d'un chef de guerre. La vanité d'un
portrait.
Annecy, 3 juin 1618.
Monseigneur,
Ce digne porteur vous dira ce que nous sommes et ce que nous faysons. Nous sommes tous-
jours esperant et attendant la reddition de nostre Verceil, laquelle devroit il y a long tems estre
faite, selon la rayson et les promesses, mais qui ne devroit pas estre si tost attendue, selon l'honneur
de celuy qui tient la ville816, qui expres, dit on, ne la veut pas faire selon les articles et a point
nommé, affin que l'on ne puisse pas dire que c'est par l'authorité du Roy qu'il fait ce dernier
accomplissement de la paix817. En somme, la vanité prevaut.
814 Les éditeurs de 1626 ont accroché ce fragment à la fin de la lettre du 1er ou 2 mars 1615 (voir tome XVI, p. 311),
dont le texte est composé de plusieurs pièces ; assurément, le passage final n'est pas de la même date que la première
partie de la lettre. (Voir ibid., note (1012), p. 311.)
Ces lignes semblent avoir été écrites aux environs de la Pentecôte ; aucun indice pour préciser davantage la
date vague que nous leur attribuons.
815 L'ancienne copie que nous reproduisons n'a pas d'adresse ; mais c'est bien à Mgr Fenouillet que le Saint a coutume
de donner des nouvelles des armes de Savoie.
816 C'était le marquis de Montenegro, Jérôme Caraffa, petit-neveu de l'illustre Cardinal de ce nom, et fils de Renaud
Caraffa. Il était né en 1564 et avait été élevé avec soin par son grand-oncle. Sa carrière militaire commença dans les
Pays-Bas, sous le duc de Parme ; puis il servit dans le Milanais sous don Pedro de Tolède, passa en Allemagne, sur la
demande de l'Empereur qui le fit prince de l'Empire, et revint en Espagne en 1628. Il était vice-roi d'Aragon lorsque
le gouverneur des Pays-Bas l'appela auprès de lui. Le marquis de Montenegro mourut à Gênes en 1633, sans laisser
de postérité d'Hippolyte de Lanoy, son épouse. (Moreri, 1740, tome II.)
817 Le certificat de désarmement du duc de Savoie (cf. ci-dessus, note (377), p. 106) avait été apporté, de la part du roi
de France, au gouverneur de Milan, le 18 février et le 20 avril ; Verceil ne fut restitué que le 15 juin. La nouvelle en
parvint à Annecy le 18 juin, et aussitôt des actions de grâces et des réjouissances publiques furent ordonnées. (Cf. au
tome VIII de notre Edition, p. 370, le Sermon du 24 juin 1618.)
171/346

18.2 Page 172

▲back to top
Ouy mesme, je le puis dire, sur le sujet de l'image qu'on vous porte818, laquelle, vuide d'ame
et de cœur, [236] et n'estant que vaine representation d'un homme qui n'est que vanité819, prevaut
sur moy, qui desirerois bien d'aller en presence aupres de vous pour vous offrir de vive voix mon
tres humble service et jouir de l'honneur de vostre veùe. Mais ne pouvant pas encor, je demeure,
et suis de plus en plus desireux d'estre reconneu et advoué de vous,
Monseigneur,
Vostre tres humble et tres obeissant frere et serviteur,
FRANÇS, E. de Geneve.
Ce jour sacré de la Pentecoste 1618, a Annessi.
Revu sur une ancienne copie conservée à la Visitation de Toulouse.
_____
MCDXLI. A Madame de Granieu. Les « empeschemens » du
saint Evêque et sa paternelle bonté. Envoi de deux portraits.
« Le secret des secretz en l'orayson. » Quelle est la
meilleure prière. Double travail de la « petite mouche a miel.
» Messages de père et d'ami.
Annecy, 8 juin 1618.
Par cette si asseuree commodité, je vous diray, ma tres chere Fille, que nostre Mere dit la
verité : je suis extremement accablé, non tant d'affaires comme d'empeschemens, mais
d'empeschemens dont je ne puis me [237] desprendre. Neantmoins je ne voudrois certes pas, ma
chere Fille, que pour cela vous laissassies de m'escrire quand il vous plaira ; car la reception de
vos lettres me delasse et me recree beaucoup. Seulement faut-il que vous me soyes un peu bonne,
en m'excusant quand je seray un peu tardif a respondre, puisque je vous puis asseurer que ce ne
sera jamais que par necessité que je differeray, mon esprit prenant bien playsir a visiter le vostre.
Je ne vous sçaurois rien refuser, ma tres chere Fille, et partant, les deux portraitz que vous desires
se feront820. Que n'ay-je desiré de conserver l'image de nostre Pere celeste en mon ame, avec
l'integrité de sa ressemblance821 ! Ma tres chere Fille, vous m'ayderes bien a demander la grace
qu'elle soit reparee en moy.
Vostre sorte d'orayson est tres bonne, ains beaucoup meilleure que si vous y faysies des
considerations et discours, puisque les considerations et les discours ne servent que pour exciter
818 On peut signaler plusieurs portraits de François de Sales antérieurs à 1618 ; entre autres, celui envoyé à l'Evêque
de Bâle en 1617 (voir tome XIV, note (625), p. 215) ; mais plus d'une fois les amis du Bienheureux n'avaient obtenu
que des refus à leurs désirs. Enfin, au mois de juin 1618, raconte l'Année Sainte manuscrite, « une dame devote »
peut-être Mme de Granieu (voir la lettre suivante) « trouva l'invention de le lui faire dire par M. Michel Favre, son
confesseur, lequel dit au Saint, avec un peu de severité... quil etoit cause de plusieurs pechés veniels de murmure et
d'inquietude que le prochain fesoit sur sa resistance a se laisser peindre ; quil le prioit de s'en amender. Le bon Saint
s'y soumit avec une admirable simplicité. » Quand le peintre, Jean-Baptiste Costaz, « eut pris une fois bien au naturel
l'image de cet homme de Dieu, il en fit une tres grande quantité de copies, parce que chacun en vouloit avoir. » Puis,
par une ruse ingénieuse, il obtint une nouvelle séance de pose, de trois ou quatre heures, à la fin de laquelle le
condescendant Evêque lui dit : « Vous m'avez causé une grande mortification, mais je vous pardonne, a condition que
vous n'y retourniez jamais. »
819 Ps. XXXVIII, 6.
820 C'étaient les portraits des deux Fondateurs de la Visitation que Mme de Granieu avait instamment demandés. (Voir
ci-dessus, note (818), p. 236, et ci-après, Lettre MCDXLIX, p. 251.)
821 Cf. Gen., I, 26, 27.
172/346

18.3 Page 173

▲back to top
les affections ; de sorte que s'il plait a Dieu de nous donner les affections sans discours ni
consideration, ce nous est une grande grace. Le secret des secretz en l'orayson, c'est de suivre les
attraitz en simplicité de cœur. Prenes la peine ou de lire, ou de vous faire lire si vos yeux ne peuvent
fournir a cela, le septiesme Livre du Traité de l'Amour de Dieu, et vous y treuveres tout ce qui
vous sera necessaire de connoistre de l'orayson.
Je me resouviens fort bien qu'un jour en la confession vous me dites comme vous faysies,
et je vous dis que cela alloit fort bien, et qu'encor qu'il falut porter un point, si toutefois Dieu vous
tiroit a quelque affection soudain que vous series en sa presence, il ne falloit point s'attacher au
point, ains suivre l'affection ; et quand elle sera plus simple et plus tranquille, elle sera meilleure,
car elle attache plus fortement l'esprit a son object. Mays, ma tres chere Fille, estant une fois
resolue de cela, ne vous amuses point, au tems de l'orayson, a vouloir sçavoir ce [238] que vous
faites et comme vous pries ; car la meilleure priere ou orayson, c'est celle qui nous tient si bien
employés en Dieu que nous ne pensons point en nous mesmes, ni en ce que nous faysons. En
somme, il faut aller la simplement, a la bonne foy et sans art, pour estre aupres de Dieu, pour
l'aymer, pour s'unir a luy. Le vray amour n'a guere de methode.
Demeures en paix, ma tres chere Fille, marches fidelement au chemin auquel Dieu vous a
mis ; ayes bien soin de contenter saintement celuy quil vous a associé822 et, comme une petite
mouche a miel, en faysant soigneusement le miel de la sacree devotion, faites encor bien la cire de
vos affaires domestiques ; car si l'un est doux au goust de Nostre Seigneur, qui estant en ce monde
mangea le beurre et le miel823, l'autre aussi est a son honneur, puisque il sert a faire les cierges
allumés de l'ædification du prochain.
824 Dieu, qui vous a pris par la main pour vous mettre au chemin de sa gloire, vous
conduira825, ma tres chere Fille. Je ne cesseray jamais de l'en supplier, car croyes, ma tres chere
Fille, que je cheris tendrement et plus que paternellement vostre ame et vostre cœur, que Dieu
veuille de plus en plus rendre siens. Amen. Vive Jesus !
VIII juin 1618.
Je vous supplie, ma chere Fille, de saluer la bonne Mere826 et nos Seurs de la Visitation,
puisque je n'ay nul moyen d'escrire davantage : ce sera au premier loysir, Dieu aydant. Elles
sçavent bien, comme je pense, de quelle sorte je suis a elles. Cette Mere m'est grandement a cœur
; Dieu l'assistera et benira ses bons desirs.
J'ay un monde de lettres a escrire, mais je ne puis presentement. Je salue tres humblement
monsieur vostre cher mari et suis fort asseurement son serviteur. Je doy [239] une response a M.
d'Aouste, vostre bienaymé et bien aymable cousin827, mais je payeray la debte, quoy qu un peu
plus tard, Dieu aydant ; dites le luy, je vous supplie, ma tres chere Fille.
822 François de Gratet, seigneur de Granieu (voir ci-dessus, note (769), p. 219).
823 Is., VII, 15.
824 L'alinéa suivant est tronqué dans les éditions précédentes, et le postscriptum est inédit.
825 Cf. Ps. LXXII, 24, CXXXVIII, 10.
826 La Mère Péronne-Marie de Chastel, supérieure de la Visitation de Grenoble.
827 Bonne de Portes, tante maternelle de Mme de Granieu, avait épousé Sébastien de Lionne, seigneur de Leyssin,
Aoste, etc. De ce mariage, naquit à Grenoble, le 1er septembre 1583. Artus ou Arthur qui, dès 1605, était conseiller au
Parlement et marié à Isabeau de Servien, qu'il avait épousée en secondes noces. Elle le rendit père d'Hugues, le futur
ministre de Louis XIV, et mourut peu après. Artus ne chercha de consolations que dans la piété, entra dans les Ordres
et devint chanoine de Grenoble. Quelques années plus tard, la Visitation s'établissait dans la capitale du Dauphiné :
M. d'Aoste en fut le meilleur ami, et bientôt le Père spirituel ; il s'était fait lui-même le disciple du saint Evêque de
Genève, à qui il écrivait souvent, dit l'Histoire de la Fondation, pour lui rendre compte de l'état de la Maison. (Voir à
l'Appendice I, une de ses lettres au Bienheureux.) La Mère de Chantal avait « une dilection très particulière et spéciale
» pour ce vertueux ecclésiastique (Lettres, vol. IV, pp. 461, 462), et s'estimait « très honorée » qu'il eût daigné l' «
accepter non seulement pour sa sœur, niais pour sa très humble fille. » (Ibid., vol. III. p. 486.) En 1638, la Visitation
de Grenoble fut privée de cet excellent Supérieur, lorsque Artus de Lionne devint évêque de Gap par la mort de
Charles-Salomon du Serre dont il était déjà coadjuteur. Préconisé à Rome le 11 avril 1639, sacré à Paris le 27 novembre
suivant, il prit possession du siège épiscopal par procureur, le 24 mars 1640, et fit son entrée à Gap le 19 avril. Comme
son maître et ami François de Sales, le nouveau Pasteur déploya un zèle tout apostolique et une charité que sa grande
fortune seconda merveilleusement ; comme lui encore, attaché de cœur à son vaste et pauvre diocèse, il refusa le riche
évêché de Bayeux et l'archevêché d'Embrun. On doit à cet amour pour son Eglise les recherches qu'il entreprit sur son
173/346

18.4 Page 174

▲back to top
A Madame
[Madame] de G[ranieu]828.
Grenoble.
Revu sur l'Autographe conservé à la Visitation de Chambéry. [240]
_____
MCDXLII. A Don Juste Guérin, Barnabite (Fragment). Un
serment inutile. Protestation d'amitié.
Annecy, 17 juin 1618.
Mon Reverend Pere,
Je vous respons bien courtement, mais c'est par force, n'ayant autre loysir que pour cela.
Vrayement, mon Pere, il n'est nul besoin de serment pour me faire croire la verité de vostre sincere,
cordiale, intime et invariable amitié envers moy ; car je la croy, je la sçai, je la voy, je la sens, je
la touche, et il faudroit que mon ame fust inanimee et mon cœur insensible, s'il en doutoit. Mays
croyes bien reciproquement, mon tres cher Pere, que mon esprit correspond tres exactement au
vostre pour ce regard, et que je suis tres indissolublement et invariablement vostre, sans reserve ni
exception quelcomque ; mais voyes vous, je dis vostre, en sorte que mon cœur en cela n'a point de
sentiment qui n'y consente.829
……………………………………………………………………………………………………..
Annessi, 17 juin 1618. [241]
_____
histoire et le précieux Roolle des Evesques de Gap. Craignant que sa vieillesse ne fut nuisible à ses diocésains, Artus
de Lionne laissa l'administration à Pierre Gaillard, vicaire-général et official, et se retira (19 avril 1661) à Paris, auprès
de son fils Hugues. Il mourut pieusement le 18 mai suivant. (D'après l'abbé Guillaume. Inventaire somm. des Archiv.
des Htes-Alpes, Gap, 1897, Série G, tome III, p. XVIII.)
828 Le nom de la destinataire a été enlevé à l'ouverture de la lettre ; il ne reste que le G.
829 L'auteur de la Vie de D. Juste ajoute, après avoir cité ce tragment : « Le reste de la lettre regarde les affaires de la
Visitation, et de la Sainte-Maison de Thonon, et pour les convertis qu'il recevait au giron de l'Eglise. »
174/346

18.5 Page 175

▲back to top
MCDXLIII. A Madame de la Forest, Religieuse de l'Abbaye de
Bons830 (Inédite). Comment apaiser, par humilité et douceur, un
cœur mécontent. — Nul déshonneur à pardonner.
Annecy, 20 juin 1618.
Ma tres chere Seur,
Je voy bien es lettres que vous m'aves envoyees, le cœur de cette chere seur831 tout gros
d'ennuy et de mescontentement ; il faut avoir patience avec son naturel et ne point s'estonner.
Nostre seur de la Flechere832 m'a dit comme tout estoit passé, car je n'en sçavois autrement chose
quelcomque.
Il me semble que vous pourres luy respondre en peu de paroles quant a ce qui regarde la
grace, en luy disant que en la grande presse qu'on vous a donnee, pour laquelle vous n'avies nul
loysir d'attendre sa response, vous aves pris advis de ceux que vous aves jugé vous le pouvoir
donner ; et que, en fin, selon leur conseil, vous aves fait ce que vous aves fait, marrie que vous
seres si elle l'a a contrecœur ; et qu'elle excuse vostre simplicité, et n'impute toute cette procedure
qu'au manquement d'experience es telles occurrences (car en somme, ma tres chere Fille, il faut
affoiblir la passion de cette seur ainsy par humilité et douceur) ; qu'il ny a d'empesché que ceux
qui se treuvent en la meslee, et les filles n'auront ni honneur [242] ni deshonneur en tout ceci, car
on sçaura tous-jours que ce sont des filles. Et puis en fin, il faut revenir au point : il ny a point de
deshonneur a pardonner, ou sil y a de deshonneur, ce n'est que devant le monde.
Je suis sans loysir, et suis
Vostre tres humble frere et serviteur,
FRANÇS, E. de Geneve.
Vous treuveres Monseigneur de Belley revenu833.
XX juin 1618.
Revu sur une ancienne copie conservée à la Visitation de Turin.
_____
830 L'adresse A Madame de la Flechere que porte la copie conservée à Turin est certainement fausse, puisque Mme de
la Fléchère elle-même se trouve mentionnée dans ces lignes. La destinataire est évidemment sa sœur, Jeanne-
Bonaventure de la Forest, Religieuse de l'abbaye de Bons. (Voir tome XIV, note (600), p. 204.)
831 Ennemonde de la Forest, veuve d'Emmanuel-Philibert Roero de Bressieu. (Voir le tome précédent, note (660), p.
189.)
832 Madeleine de la Forest, sœur de Jeanne-Bonaventure et d'Ennemonde.
833 Probablement de Paris, où Mgr Camus prêcha dix années consécutives l'Avent et le Carême.
175/346

18.6 Page 176

▲back to top
MCDXLIV. A madame de la Fléchère. Deux mots écrits en
allant à Vêpres. Ne pas se mettre en peine après avoir fait ce
que l'on a cru être bon.
Annecy, 21 juin 1618 834.
Ma tres chere Fille,
Allant a Vespres et faire la benediction et procession, je vous escris ces deux motz. Vous
verres ce que j'escris a nostre chere seur de Bons835. Pauvre fille, ell'est bien en peine, mais il n'y
a pas de quoy, car elle a fait ce qu'ell'a cuydé estre bon. Je croy que nostre seur qui est en Piemont836
n'eut pas fait ainsy, mays elle ne peut pas gouverner tout ; la pauvre chere seur Religieuse a fait
selon sa condition. Tout cela reviendra a bien, moyennant la grace de Dieu, a laquelle je
recommande vostre ame qui m'est chere comme la mienne propre.
Revu sur une copie déclarée authentique, conservée à Turin, Archives de l'Etat. [243]
_____
MCDXLV. A la Mère de Chastel, Supérieure de la Visitation de
Grenoble (Fragment). Un homme « tout spirituel et tout de Dieu.
» Avis du Saint pour la conduite intérieure.
[Annecy, juin-juillet 1618 837.]
Je vous dis, ma chere Fille, que non seulement vous pouves, ains que vous feres
parfaitement bien d'ouvrir vostre cœur tout candidement au Pere Isnard ; il est non seulement docte
et religieux, mais il est tout spirituel et tout de Dieu ; vostre cœur bienaymé aura de la consolation
et du proffit a recevoir ses advis838.
Il faut que je vous die, ma chere Fille, que, gardant nostre liberté, je treuve qu'en plusieurs
rencontres il y peut avoir un incomparable advantage (sans s'attacher toutefois a des directions
834 La corrélation de cette lettre avec la précédente indique qu'elle a été écrite presque en même temps. Mais le saint
Evêque mentionnant la procession, il est probable qu'elle est du jour d'octave de la Fête-Dieu, soit du ar juin.
835 Epist. præced.
836 Mme de Bressieu.
837 Il est difficile de fixer exactement la date de ce fragment. La Mère de Chaugy, qui nous l'a conservé, nous dit
seulement que la Mère de Chastel « se voyant privée de la conduite de nôtre glorieux Fondateur et de nôtre venerable
Mere, et ayant trouvé dans Grenoble le Pere Isnard, de la Compagnie de Jesus, personnage d'une reputation
extraordinaire et dans l'estime d'une tres-eminente pieté... elle demanda avis a nôtre digne Pere et Directeur de luy
ouvrir confidemment son interieur. » (Les Vies de quatre des premieres Meres, 1659-1892, Vie de la Mère de Chastel,
chap. XX.) Ceci eut lieu dans les premiers mois qui suivirent le départ de Grenoble de la Mère de Chantal (juin-juillet
1618), et la réponse du Saint ne dut pas se faire attendre.
838 Le P. Jacques Isnard était né en 1581 dans le diocèse de Saint-Flour. Entré dans la Compagnie de Jésus en 1602, il
y fit en 1619 la profession des quatre vœux. Sa vie religieuse se partagea entre l'apostolat de l'enseignement et celui
de la prédication : elle se termina par une mort qui eut le mérite du martyre, car le P. Isnard, alors recteur du collège
d'Aix, succomba victime de son dévouement aux pestiférés, le 29 décembre 1629. Eminent controversiste, ce saint
Religieux « était devenu la terreur des ministres qui, » dit un historien, « de loin l'insultaient, » mais « n'osaient pas le
regarder en face, à moins qu'ils ne fussent cinq ou six contre un. » (Prat, Recherches hist. et critiques sur la Cte de
Jésus en France, 1876, tome IV, p. 85.) Non moins habile à guider les âmes dans les voies de la perfection qu'à les
ramener dans le chemin de la foi, il entretint d'intimes rapports avec la Visitation de Grenoble dès qu'elle fut établie,
et, admirant surtout la haute vertu de la Supérieure, il lui ouvrit le livre des Saintes Ecritures où bientôt elle se rendit
savante.
176/346

18.7 Page 177

▲back to top
particulieres) de faire passer le [244] jugement de quelqu'un par dessus le nostre pour nostre
conduite interieure : ainsy le divin Espoux renvoyoit son amante aux tabernacles des pasteurs839.
……………………………………………………………………………………………………..
Revu sur le texte inséré dans la Vie manuscrite de la Mere de Chastel, par la Mère de Chaugy.
conservée à la Visitation d'Annecy.
_____
MCDXLVI. Au Duc Roger de Bellegarde. Inquiétudes au sujet
de la santé du destinataire et action de grâces pour sa guérison.
Que faire pour le bien de la vie conservée.
Recommandation en faveur d'un nouveau converti.
Annecy, 9 juillet 1618.
Monsieur mon tres cher Filz,
Je ne vous sçaurois dire de combien d'afflictions mon cœur a esté tourmenté parmi les
incertitudes de vostre santé. Que de divers advis j'ay receus il y a environ deux mois ! Mais Dieu
soit loüé, qu'apres avoir pleuré et amerement regretté sur vostre trespas, qu'on m'avoit annoncé, je
benis sa divine Majesté et la supplie avec une incomparable consolation pour vostre vie que, certes,
vous deves meshuy cherir, Monsieur mon tres cher Filz, puisque vous voyes combien elle est
desiree, comme tres utile, par tant de gens de bien ; car on m'escrit de Gex que parmi tout vostre
gouvernement840 on a fait des actions de graces publiques a la divine Bonté pour vostre guerison.
Et en ce païs mesme de deça, si on ne les a fait publiques, on les a fait generales, et moy je les ay
fait tres particulieres, comme ayant receu en vostre conservation un des plus singuliers bienfaitz
que j'aye receus il y a long tems.
Aymés-la donq vostre chere vie, Monsieur mon tres cher Filz, et faites ensuite deux choses
pour son bien. L'une sera de la conserver soigneusement par les moyens [245] convenables,
estayant et appuyant l'infirmité d'icelle et le penchant que l'aage et les maladies luy ont causé, par
le repos et reglement propre a cela.
L'autre, et la premiere, sera que, si jusques a present vous aves eu intention de dedier tous
les momens de vostre vie presente a l'immortalité et eternité de la future, vous en redoublies la
resolution et les vœux, contant les jours et les heures, et les employant affectionnement a vostre
advancement en l'amour divin, a l'amplification de la pieté parmi les mondains, et en somme, a
l'execution des saintes vertus que la grace de Dieu et vostre bon naturel vous ont fait aymer et
desirer il y a long tems. Pour moy, je ne cesse point, certes, de prier a ce dessein, que par un asseuré
pressentiment je voy des-ja, ce me semble, tout executé, avec un surcroist de contentement
indicible de sçavoir combien monsieur vostre frere841 fraternise heureusement pour ce regard.
Au demeurant, Monsieur mon Filz, le jeune Bursal, de Gex842, s'estant converti a la foy
catholique par la bonté de Dieu, a tant receu de mauvais et indignes traittemens en sa patrie par
ses bourgeois et mesme par ses proches, qu'il a esté contraint de se retirer a Paris, ou il a pensé de
pouvoir treuver quelque condition de service pour s'entretenir ; et nos ecclesiastiques de Gex
m'asseurent qu'il est fort bon enfant. Ce qui me fait vous supplier tres humblement, Monsieur mon
Filz, d'avoir quelque soin de luy, affin que l'on voye que ceux qui abandonnent cette fause religion
839 Cant., I, 7.
840 Le duc de Bellegarde était gouverneur de la Bourgogne, de la Bresse et du Bugey.
841 Le baron de Termes (voir le tome précédent, note (478), p. 130).
842 Cf. ci-dessus, p. 198, la lettre au même, du 25 avril.
177/346

18.8 Page 178

▲back to top
pour embrasser celle du Roy et du royaume, qui est la seule vraye religion, ne sont pas abandonnés
de ceux qui tiennent les meilleurs rangs au service du Roy et de la coronne.
Vivés longuement, heureusement et saintement ; c'est le souhait personnel, Monsieur mon
Filz, de
Vostre tres humble et tres obeissant serviteur,
FRANÇS, E. de Geneve.
Ce 9 julliet 1618, a Annessi.
_____
MCDXLVII. A la Mère de Bréchard, Supérieure de la Visitation
de Moulins843 (Inédite). Envoi d'une lettre pour Mme des
Gouffiers. Comment vivre au-dessus du monde et de ses
embûches.
Ma tres chere Fille,
Annecy, 18 juillet 1618.
Je vous supplie de faire donq seurement tenir cette response que je fay a madame de
Gouffiez844, puisqu'elle desire tant de l'avoir. Le parti qu'elle propose pour vous est incomparable,
sil reuscit, et pourra mesme fort facilement obtenir de Rome le petit Office a perpetuité.
Courage, ma tres chere Fille, tenes vostre esprit haut eslevé au dessus de ce monde et de
toutes les embusches qu'il nous tend. Je veux dire, ma tres chere Fille, que vostre cœur ayant toute
sa confiance en la bonté de celuy de Nostre Seigneur, vous deves vivre joyeusement, paysiblement
et genereusement en vostre charge, que sa divine providence fera et portera avec vous. Ainsy soit
il.
Vostre, tres parfaitement vostre,
ma tres chere Fille, croyes le bien, car ainsy est il.
F. E. de Gen.
18 julliet 1618.
A ma tres chere Fille.
Revu sur l'Autographe appartenant à Mme Gaulard, à Auxonne (Côte-d'Or). [247]
_____
843 Le Saint n'a pas mis à l'adresse le nom de la destinataire, mais celle-ci est désignée avec certitude par l'envoi d'une
lettre pour Mme des Gouffiers.
844 Elisabeth Arnault des Gouffiers (voir tome XV, note (972), p. 343), après avoir procuré l'établissement des
Religieuses de la Visitation à Moulins (voir tome XVII, note (882), p. 256), et y être restée dix-huit mois, s'employait
maintenant à préparer une fondation à Paris. (Cf. ci-dessus, note (654), p. 194.)
178/346

18.9 Page 179

▲back to top
MCDXLVIII. Au Chanoine Jean-François d'Ulme845.
Contradictions suscitées à la Visitation. Le vaisseau « prest a
singler et a faire voyle. » — Pourquoi les Sœurs de Grenoble
sont heureuses. Fleurs de suavité.
Annecy, vers le 18 ou le 19 juillet 1618 846.
Monsieur,
Je ne m'estonne point de l'empressement que ces bons personnages ont a destourner les
ames que Dieu appelle a la Visitation847 ; car encor me semble-il que cette bienaymee petite
Congregation est quitte a bon marché des persecutions et contradictions que l'ennemi de son
progres luy suscite et a accoustumé de susciter en toute pareille occasion. Certes, je croy pourtant
qu'il n'en peut [248] plus, car, comme un plaideur qui a mauvaise cause, il ne sçait plus que faire,
sinon caler et prendre des delais.
J'ay receu de Rome commission d'eriger cette Congregation en tiltre de Religion, avec tous
les privileges, preeminences, immunités et graces qu'ont toutes les autres Religions, et ce, sous la
Regie de saint Augustin848. Dites a cette bonne ame qu'elle entre asseurement a Sainte Marie849 ;
bien qu'elle ne soit pas encor Religion, elle le sera bien tost, et j'oserois dire que, devant Dieu, elle
l'a tous-jours esté, puisque, par sa grace, l'on y a tous-jours vescu religieusement. Certes, asses
entre sur la mer qui entre dans un vaysseau qui est a l'emboucheure du Rosne, prest a singler et
faire voyle.
Nostre Meré ira cet hiver faire une Mayson a Paris850, et, comme je prevoy, avec tant de
bonheur, d'advantage, de protection et d'assistance, qu'apres cela je m'asseure que tout demeurera
calme et en paix.
J'estime nos Seurs de vostre ville trop heureuses de jouir, comme elles font, des effectz de
vostre charité, soin et affection. O quelle suavité a mon chetif cœur paternel, de sçavoir que mon
frere tres aymable est tout charitablement cordial a mes Filles bienaymees ! Je vous en fay mille
845 Le P. Ménestrier, dans son Histoire de la Visitation, cite deux passages de cette lettre comme adressés à M. Ménard,
chanoine-sacristain de Saint-Nizier (voir le tome précédent, note (397), p. 103) ; ce qui a induit Migne en erreur. Le
rapprochement de ces pages avec celles que sainte Jeanne de Chantal écrit le 14 juillet 1618 à la Mère de Chastel
(Lettres, vol. I, p. 274 ; texte revu sur l'Autographe), nous convainc que le vrai destinataire est M. d'Ulme, chanoine
de Grenoble.
C'était, d'après l'Histoire de la Fondation de la Visitation de cette ville, un « ecclésiastique fort estimé et en
réputation d'une extraordinaire vertu et piété..., frère de l'Archevêque d'Embrun. « Honoré du Laurens, mort
archevêque d'Embrun en 1612, avant d'entrer dans les Ordres avait été marié à Anne d'Ulme, fille de François d'Ulme
ou d'Ulmo, seigneur de Montravail, avocat général de Provence. Le chanoine Jean-François d'Ulme serait donc, sans
doute, fils de ce dernier et beau-frère d'Honoré du Laurens. Deux voyages à Annecy, en septembre 1617 et en janvier
1618, pour traiter l'entrée à la Visitation de sa fille spirituelle, Jeanne du Bonnet de la Bastie (cf. ci-dessus, note (516),
p. 148), le lièrent plus particulièrement aux deux Fondateurs. Il fut, le premier, confesseur des Filles de Sainte-Marie
à Grenoble, et garda cette charge jusqu'en 1620 ou 1621. Quelques petites difficultés lui firent quitter ce poste (voir à
l'Appendice I, la lettre d'Artus de Lionne au Saint), mais il demeura l'ami du Monastère, et nous le voyons, en 1625,
accompagner à Embrun les Sœurs qui allaient fonder une nouvelle Maison de la Visitation dans cette ville.
846 Hérissant donne la date du 2 juillet 1618, mais il semble plus exact, d'après l'étude de la correspondance de la Mère
de Chantal, de placer cette lettre après le 14 juillet, tout près de celle écrite par le Saint, le 19, à Mme de Granieu. Les
deux messages durent être confiés au même porteur.
847 Cf. ci-dessus, note (528), p. 152.
848 Le Bref d'érection de la Visitation en Ordre religieux est du 23 avril 1618.
849 « Je pense, » mande la Mère de Chantal le 14 juillet à la Supérieure de Grenoble, « que Monseigneur écrira à M.
d'Ulme comme la Seserin peut entrer parmi nous en parfaite assurance. » (D'après l'Autographe ; voir Lettres, vol. I,
p. 274.) C'est certainement la « bonne ame » dont il est ici question ; mais nous ne trouvons aucun nom se rapprochant
de celui-là parmi les premières Religieuses de la Visitation de Grenoble.
850 La Sainte partit d'Annecy le 22 octobre, pour Bourges et Paris.
179/346

18.10 Page 180

▲back to top
tres humbles actions de graces, Monsieur mon tres cher Frere, et vous proteste que, recevant vostre
lettre, il me sembloit cueillir des fleurs de suavité incomparable sur le coupeau d'une de nos
montaignes, ou j'estois alhors851. C'estoit en l'octave de nostre grand saint Jean, ou, me souvenant
que l'Evangeliste de nostre Princesse852 dit de luy : Et vinum et siceram non bibet853, j'admiray
[249] la douceur de Dieu, de m'abreuver, moy chetif homme, du vin de la charité que le Saint
Esprit a respandu en nos cœurs854.
Vivons ainsy, mon tres cher Frere, et croyes que, tant que je vivray, je porteray la qualité
de
Vostre tres obeissant frere et serviteur,
tout inutile et tout affectionné,
FRANÇS, E. de Geneve.
_____
MCDXLIX. A madame de Granieu. Heureuse occasion d'avoir
de mutuelles nouvelles. Ce que dit un portrait au cœur filial.
Conseils au sujet du confesseur et de la confession.
Salutations paternelles.
Annecy, 19 juillet 1618.
Je vous escris, ma tres chere Fille, a mesme que je vay monter sur le bateau pour aller
visiter un monastere de Religieux reformés desquelz pour le present j'ay charge855 ; mais ce
gentilhomme, qui est et mon parent et mon grand amy856, allant vers M. le Mareschal857, il faut a
quel prix que ce soit qu'il vous porte de mes nouvelles, puisque mesme il reviendra et m'en pourra
rapporter des vostres. Or, je respons a vos deux derniers billetz, lesquelz, comme tout ce qui vient
de vous, m'ont donné une consolation nompareille. [250]
Vray Dieu, ma tres chere Fille, que sera ce quand nous verrons aeternellement la face du
Pere eternel en elle mesme, puisque le portrait mort et muët d'un chetif homme res-jouit le cœur
d'une fille qui l'ayme858 ? Mays, ce me dites vous, ce portrait n'est pas muët, car il parle a vostre
esprit et luy dit des bonnes paroles. Or bien, c'est a vos seules aureilles, qui escoutent si
delicatement, que sans dire mot il parle, vous remettant en imagination ce que je disois lorsqu'en
chaire je vous representois la volonté de Dieu, qui est vostre sanctification859. Mays laissons cela.
851 Peut-être aux Voirons.
852 Luc., I, 15.
853 Et il ne boira ni vin ni autre liqueur enivrante
854 Rom., V, 5.
855 Le prieuré de Talloires (voir tomes XII, note (551), p. 241, et XIV, note (518), p. 173). Dans cette visite, l'Evêque
unit la chapelle de Saint-Jacques-le-Majeur à la mense conventuelle. Le 22, il traverse le lac et se rend au prieuré de
Saint-Jorioz, où il fait une translation des ossements de saint Joire.
856 Ce gentilhomme, parent et ami de François de Sales, est certainement M. de Charmoisy, mis en relations
particulières avec le gouverneur du Dauphiné au sujet des prétentions opposées des Seigneurs de Berne et du duc de
Longueville sur la principauté de Neuchâtel. Il venait de traiter ces graves questions au nom de Charles-Emmanuel,
comme son ambassadeur extraordinaire en Suisse. (Cf. J. Vuÿ, La Philothée de St Fr. de Sales, 1878, I, chap. XIV.)
857 Le maréchal de Lesdiguières (voir tome XII, note (183), p. 100).
858 Doublement précieux à Mme de Granieu, puisqu'il lui venait directement de son père spirituel (voir ci-dessus, Lettre
MCDXLI, p. 238), ce portrait de François de Sales eut sur elle une influence remarquable et, à son dire, miraculeuse.
Le P. Balthazard de Bus, S. J., qui la dirigea après le Saint, assura plusieurs fois « qu'elle n'avoit jamais regardé ce
portrait » sans recevoir « de nouvelles lumières et une particulière impression du mystère de la très sainte Trinité. »
(Menestrier, Vie de Laurence de Ferrus, dame de Granieu, p. 8.)
859 I Thess., IV, 3.
180/346

19 Pages 181-190

▲back to top

19.1 Page 181

▲back to top
Communies tous-jours comme vous faites ; confesses vous hardiment a monsieur
d'Aouste860 : en ce parquet la, il ni a point recusation a craindre. Vrayment, il faut que je die a ma
tres chere fille, que ma mere, avant que mourir, fit sa confession generale a moy861, et me rendoit
despuis tous les ans conte de sa vie avec une grande humilité ; et ma pauvre belleseur, de la sainte
mort de laquelle ma Seur Peronne Marie vous tesmoignera862, en fit de mesme. Il ny a donq point
de danger en ce que vous faites devant un tel cousin. Vous pourres neanmoins rendre conte a vostre
ancien confesseur de tems en tems, pour luy tesmoigner que vous le respectes tous-jours.
Ne vous mettes nullement en peine de n'avoir pas la memoire si tenante en la recherche de
vos fautes, car ce n'est pas le manquement de memoire qui desplait a Dieu, c'est le manquement
de volonté ; et, graces a sa Bonté celeste, vous ne manques pas en ceci.
Il est vray, je suis debiteur a monsieur d'Aoste et a [251] monsieur de la Gran863 de je ne
sçai quoy que je leur promis, mais je ne tarderay pas de m'en aquiter a mon premier loysir.
Vives tous-jours toute en Dieu, ma tres chere Fille, et je vous asseure que puisqu'il luy plait,
et je sens bien qu'il luy plait et luy plaira tous-jours, je suis tres parfaitement vostre, et de tout mon
cœur.
Je salue la chere Mere de dela, qui est bien ma fille, et nos Seurs et nos Novices864, et toute
cette Mayson la. Mays, ma tres chere Fille, recommandes tous-jours mon cœur a la misericorde de
Nostre Seigneur, que je supplie vous combler de sa benediction, avec monsieur vostre cher mari
et toute vostre famille865.
Annessi, le 19 jullet 1618.
A Madame
[Madame] de Granieu.
Grenoble.
Revu sur l'Autographe conservé à la Visitation de Chambéry. [252]
_____
860 Artus de Lionne, cousin-germain de Mmede Granieu. (Voir ci-dessus, note (827), p. 240.)
861 Cf. tome XIV, p. 261.
862 La Mère Péronne-Marie de Chastel, alors supérieure à Grenoble, était encore à Annecy lorsque la jeune baronne
de Thorens y décéda saintement.
863 Louis de Simiane de la Coste, abbé de Lagrand. (Voir ci-dessus, note (774), p. 220.)
864 La Mère de Chastel, les Sœurs venues avec elle d'Annecy (voir ci-dessus, note (647), p. 192) et les quatre Novices
dauphinoises qui avaient pris l'habit religieux en Savoie (ibid., notes (459), (516) des pp. 130, 148).
865 Deux fils et deux filles, au moins, naquirent du mariage de M. et de Mme de Granieu. L'aîné, Pierre, seigneur du
Bouchage, épousa Marguerite de Clermont-Montoison, et fut président au Parlement ; son frère, Claude, seigneur de
Dolomieu, devint président au bureau des trésoriers généraux de France en la généralité du Dauphiné, et s'unit à
Marguerite de la Poipe-Serrière. La fille aînée prit une alliance dans la maison de Saint-Paul, et la cadette eut la
meilleure part à la Visitation de Grenoble, où elle vécut saintement sous le nom de Sœur Marie-Madeleine. (Cf.
Chorier, L'Estat politique de la province de Dauphiné, 1671, tome III, art. Grattet.)
181/346

19.2 Page 182

▲back to top
MCDL. A Messieurs du Conseil de la Sainte-Maison de
Thonon866. Projet d'une assemblée pour le bien de la Sainte-
Maison.
Annecy. 23 juillet 1618.
Messieurs,
Outre l'extreme desir que j'ay tous-jours eu de voir une resolution au maniment des affaires
de la Sainte Mayson, par laquelle tous ceux qui y servent a Dieu puissent vivre avec plus de
tranquillité qu'on n'a pas fait jusques a present, monsieur le Marquis de Lans me convie a
m'employer a cela, s'offrant de son costé de contribuer toute son authorité et son pouvoir. C'est
pourquoy, toutes choses considerees, j'ay creu qu'il estoit requis de faire un'assemblee a
cett'intention et qu'il seroit a propos qu'elle se fit icy, affin que nous fussions plus pres de Son
Excellence, pour, en cas quil fut necessaire, recourir a elle867.
Pour cela, j'ay prié ce Pere868 de procurer de dela une assemblee preparatoire, en laquelle
vous deputeres ceux qu'il vous semblera plus propres a laditte resolution ; et pourveu que le jour
de Saint Pierre aux liens et celuy de Nostre Dame ad Nives soyent exceptés, tout autre tems [253]
m'est indifferent, vous priant seulement, sil se presentoyt commodité, de m'en advertir.
Cependant, je demeure,
Messieurs,
Vostre tres humble confrere,
FRANÇS, E. de Geneve.
XXIII julliet 1618, Annessi.
A Messieurs
Messieurs du Conseil de la Ste Mayson.
A Thonon.
Revu sur l'Autographe conservé à la Visitation de Lyon-Fourvière.
_____
866 Voir le tome précédent, note (993), p. 291.
867 L'assemblée demandée par François de Sales se tint sur le commandement du prince de Piémont et du marquis de
Lans, en présence du « sieur conseiller d'Estat et president d'Hostel et » du « sieur de Monthoux, conseiller de S. A.
S., senateur au souverain Senat de Savoye, avec les Revds Peres de Tardi, provincial des Capucins, et le P. Genand,
touts deux faisants pour la Sainte Maison, et le Revd Pere Dom Emilio Ferrier, procureur desdits Peres Bernabites. »
(Turin, Archives de l'Opera pia Barolo, Paquet 221, nº 10.) On y décida que Filly et Contamine (voir ci-dessus, note
(618), p. 182), sans cesser d'être membres de la Sainte-Maison, seraient attribués, quant à leurs revenus, à l'entretien
du collège et des Barnabites. La pièce citée ne porte que la date de l'année, 1618.
868 On peut proposer avec une égale vraisemblance le P. de Tardy, en religion Dominique de Chambéry, pour lors
provincial des Capucins (voir le tome précédent, note (645), p. 182), ou le P. François de Chambéry (voir tome XI,
note (419), p. 179), qui faisait de très fréquents voyages à Annecy.
182/346

19.3 Page 183

▲back to top
MCDLI. A la Mère Favre, Supérieure de la Visitation de Lyon
(Inédite). Estime que l'on fait du crédit du Saint ; celle qu'il en
fait lui-même.
Annecy, vers le 26 juillet 1618 869.
Cette lettre vous est estroittement recommandee, ma tres chere Fille, par celuy qui l'a
escritte en chemin, allant d'icy en Bornand870 ; car quant a moy, je ne vous dis rien pour le present,
sinon que je feray response a ces bons Peres desquelz vous m'envoyastes les lettres871. Et ne laisse
pas d'admirer comm'ilz desirent que j'escrive au Roy de leurs affaires, moy que le Roy ne sçait pas
estre au monde ; car, quel credit puis je avoir en chose de cette consequence ? Neanmoins, puis
que le P. de Lesseau872 [254] le veut, je le feray et vous envoyeray la lettre873 par ma Seur Barbe
Marie, nostre tres chere fille874.
Cependant, demeures tous-jours toute en Dieu, qui, a la verité, a conduit nostre esprit pour
le sujet de la bonne Mme Liotard875. Qu'en soit il beni a jamais. Amen. Je salue cherement nos
Seurs.
Revu sur l'Autographe conservé à l'évêché d'Alexandrie (Piémont).
_____
MCDLII. Au Roi de France, Louis XIII. Petite mer agitée.
Eloge des PP. Célestins. Double sentiment de l'Evêque de
Genève en approchant le trône de France.
Annecy, 31 juillet 1618.
Sire,
La Congregation des Cœlestins, agitee maintenant en France de quelque contention876,
espere que la venue [255] de son Abbé general, qui est de plus commis expressement par nostre
869 La lettre promise par François de Sales en faveur des Célestins, écrite le 31 juillet, et l'affaire de Mme Liotard (voir
note (875) de la page suivante) fixent très approximativement la date de ces lignes vers le 26 de ce mois.
870 Probablement au Grand-Bornand, vaste paroisse au sommet de la vallée de Thônes. Il y a aussi le Petit-Bornand,
dans le défilé entre la vallée de Thônes et celle de Bonneville.
871 Les Pères de la Congrégation des Célestins. Nous n'avons pas la réponse du Saint à ces Religieux ; mais voir ci-
après sa lettre à Louis XIII.
872 Guillaume de Lesseau (voir tome XV, note (997), p. 351).
873 Epist. seq.
874 Mme Le Blanc de Mions était arrivée le 14 juillet à Annecy.
875 Marguerite du Solier, veuve Liotard, était entrée à la Visitation de Lyon avec quelque velléité de vie religieuse,
mais elle ne put y persévérer. (Voir ci-dessus, note (782), p. 222.)
876 L'Institut des Célestins prit le nom de son fondateur, Pierre de Murrone, quand celui-ci devint le Pape Célestin V.
Urbain IV l'approuva en 1264, et en fit une Congrégation bénédictine.
La ferveur première s'était peu à peu ralentie dans la province française, formée sous Philippe-le-Bel. Au
commencement du XVIIe siècle, le Provincial, Charles de Champigny, voulut essayer une réforme. Pour réussir, il
fonda deux noviciats, l'un à Paris, l'autre à Avignon, et déposa plusieurs prieurs réfractaires au rétablissement de
l'ancienne observance ; toutes ces mesures furent sanctionnées par l'autorité Apostolique. A l'instigation de Claude
de Marseille, le prieur déposé de Paris, les Visiteurs de l'Ordre citèrent à leur barre le Provincial. Celui-ci, malgré son
appel au Pape, fut à son tour démis de sa charge, et même plus tard jeté en prison. Le conflit dura longtemps entre les
partisans et les adversaires de la réforme. Enfin, Paul V écrivit à l'Abbé général des Célestins, Celse Americi ou
Amerighi, et l'envoya visiter tous les monastères de l'Ordre en France, avec plein pouvoir pour juger les causes qui
183/346

19.4 Page 184

▲back to top
Saint Pere le Pape, calmera et accoysera aysement leur petite mer ; mais sur tout, si l'œil de Vostre
Majesté en favorise le dessein877.
C'est de quoy, Sire, vostre justice et pieté est suppliee tres humblement par cette trouppe
de tres fideles sujetz et tres devotz orateurs que Vostre Majesté a en cet Ordre, tous-jours jusques
a present de grande edification, et mesme sous vostre couronne royale, laquelle les a aussi tous-
jours gratifiés de sa speciale protection. Et puisque il a desiré que j'adjoustasse ma tres humble
recommandation a leur demande878, je le fay, Sire, avec toute reverence, quoy que je me sente tres
indigne d'approcher le trosne de Vostre Majesté, parce que la renommee de vostre debonnaireté et
devotion me promet autant d'acces aupres de vostre esprit royal que ma bassesse me donne de juste
sujet de respect et de veneration.
Playse a la souveraine misericorde de Dieu de vous benir, Sire, d'une tres longue et tres
heureuse et tres-sainte royauté, souhait continuel que je fay pour
Vostre Majesté, comme estant
Son tres humble et tres obeissant
orateur et serviteur, FRANÇOIS,
Evesque de Geneve.
Annessi, le XXXI julliet 1618.
Revu sur l'Autographe conservé à Paris, Bibliothèque Nationale,
Fonds français, 17362, p. 157. [256]
_____
MCDLIII. A la Mère de Chantal (Inédite). Vraie cause du peu
de santé d'une Novice. Que faire en face de caprices
inguérissables.
Annecy, 31 juillet 1618 879.
J'escrivoys au Roy880, ma tres chere Mere, quand ma Seur Anne [Jacqueline881] est arrivee.
avaient été déférées au Saint-Siège. (Bref du 21 mai 1618, Archives Vaticanes ; cf. Becquet, Gallicæ Cœlestinorum
Congregationis Ord. S. B., monasteriorum fundationes, virorumque vita aut scriptis illustrium elogia historica,
Parisiis, 1719.)
877 Le seul monastère de l'Ordre qui eût le titre d'abbaye était celui du Saint-Esprit de Murrone, dans la Pouille, et il
servait de résidence au Supérieur ou Abbé général. Celse Americi avait déjà ce titre en 1606. Son séjour en France eut
tout le succès qu'on en espérait. Après avoir été présenté au Roi par le Nonce, il commença la visite des monastères,
tint le Chapitre général le 17 octobre, à Paris, et repartit pour Rome vers la fin du mois, laissant toutes les discordes
apaisées et la ferveur prête à refleurir. La Congrégation française des Célestins, ainsi renouvelée, s'unit à la
Congrégation de Saint-Maur. (D'après un registre conservé à Paris, Archiv. Nat., LL 1503, fol. 54 seq., et une lettre
du Nonce Bentivoglio au Cardinal Borghese, 24 octobre 1618, La Nunziatura di Francia, etc., vol. III, p. 52.)
878 Voir la lettre précédente.
879 La date est fixée par ces paroles du Saint : « J'escrivoys au Roy... » C'est bien de la lettre de 1618 qu'il s'agit ;
l'affaire traitée dans ces lignes ne laisse point de doute à ce sujet.
880 Epist. præced.
881 Sœur Anne-Jacqueline Coste, première tourière de la Visitation. (Voir tome XIV, note (181), p. 63.)
Les mots entre crochets [ ] ont disparu de l'Autographe par suite d'une déchirure.
184/346

19.5 Page 185

▲back to top
Je ne voy pas qu'il y ayt autre chose a dire en l'affaire de nostre chere Seur, sinon qu'il faut
au plus tost faire le renvoy de cette pauvre fille882. Madame [de] Brochenu, sa tante883, me dit a
Grenoble qu'elle desiroit [qu'on] la renvoyast en la Mayson de Grenoble, estimant [que l'air] luy
seroit plus propre ; c'est pourquoy il ny [aura pas] grande difficulté de la renvoyer, en disant [que
ce] n'est pas l'air, mais la volonté de cette fille [qui l']afflige. Il faudra pourtant luy faire sçavoir a
[bon]n' heure son renvoye, et le faire charitablement.
[Ce n']est pas mauvais signe, mais bon, quand il se fait ainsy quelque petite purgation ; et
comme ce seroit [257] cruauté de renvoyer les filles par nos caprices, aversions ou inclinations,
aussi seroit ce cruauté de les retenir contre les leurs, quand ilz ne sont pas guerissables.
Bon jour, ma tres chere Mere ; apres disné j'auray le bien de vous voir, car j'ay donné parole a
nostre seur d'Aiguebelette884.
Revu sur l'Autographe conservé à la Visitation de Caen.
_____
MCDLIV. Aux Consuls de Chabeuil885. Le Saint congratule les
consuls de l'établissement projeté des PP. Barnabites dans leur
ville.
Annecy, 10 août 1618.
Messieurs,
Je me res-jouis de voir que nos bons Peres Barnabites prennent resolution d'envoyer a
Milan vers leur General886 pour pouvoir satisfaire a vos desirs, et prendre vostre petit college,
lequel, a mon advis, deviendra grand, s'ilz sont secondés de vostre assistence, comm'ilz ont
occasion d'esperer887. Pour moy, je vous asseure que ce [258] me sera tous-jours de la consolation
882 Il y avait alors à la Visitation de Lyon une Novice dauphinoise : Marguerite de Revel, fille de Laurent de Revel,
seigneur de Chasselay, et de Polixène d'Aquin ; sa réception à la vêture est notée au 4 juin 1617 dans le Livre du
Chapitre. Elle quitta le monastère peu après cette lettre, et, en 1623, elle épousait Paul Janon du Perron, avocat au
Parlement, qui, par ce mariage, fut substitué aux nom et armes de la branche aînée des Revel. (Cf. Rivoire de la Batie,
Armorial du Dauphiné, p. 517.)
883 Philippe de Peyre, dame de Bourchenu, porta en dot cette terre à son mari, Ennemond Moret, conseiller au
Parlement de Grenoble. C'est à la requête de celui-ci que fut dressé le contrat de mariage de sa nièce, Marguerite de
Revel. (Cf. ibid.)
884 Françoise-Melchionne du Four, femme de René Chabod-Lescheraine, seigneur d'Aiguebelette. (Voir tome XIV,
note (1134), p. 393.)
885 D'après le Registre des Délibérations consulaires de Chabeuil (Archiv, commun.. BB, 2), les consuls étaient, en
1618, Claude Bolat et Marc Roux. La famille de ce dernier est encore représentée.
886 D. Jérôme Boerio.
887 La petite ville de Chabeuil posséda des écoles dès 1519 au moins. En 1601, l'un de ses habitants, Jean Reynaud,
notaire, légua cent vingt écus annuels pour la fondation d'une maison d'éducation où les enfants seraient reçus
gratuitement, et qu'il voulait confiée à des « gens d'église, » de préférence à l'Ordre de Saint-Pierre ou des Doctrinaires.
Les Fils de César de Bus abandonnèrent ce collège vers 1604, faute de ressources ; la Ville songea alors aux Jésuites
avec qui on demeura longtemps en pourparlers. A leur défaut, les consuls s'adressèrent aux Barnabites, et leur député,
Reymond, vint à Annecy le 9 juillet 1618. Il en repartait le 14 avec les PP. de Gennari et Baranzano. Ceux-ci furent
reçus avec grand honneur dans la petite cité ; le Supérieur prêcha, D. Redento confessa, et en revenant en Savoie le
26, ils n'avaient que des actions de grâces à rendre à Dieu. Le 17 août, D. Jean-Baptiste de Gennari partit pour Milan,
porteur d'une lettre de saint François de Sales (voir ci-après, p. 263), afin de conférer de cette affaire avec le P. Général.
Tout semblait bien marcher. Mais au 19 février 1619, une lettre de D. Baranzano aux consuls de Chabeuil, laisse
deviner chez ces derniers un peu de refroidissement. Le Général trouva lui-même beaucoup de difficultés à un
établissement dans une si petite ville, et les Barnabites ne vinrent pas en Dauphiné. En 1620, nouvelle offre du collège
aux Jésuites, puis aux Minimes. Les Dominicains s'y établissent vers 1661, et sont remplacés en 1726 par les prêtres
185/346

19.6 Page 186

▲back to top
quand je sçauray que vous aures du contentement en ce sujet, auquel, et en tout autre, je vous offre
de rechef tout ce que je puis et que je suis, vous souhaitant, et a vostre ville, toute sainte
benediction, et demeurant de tout mon cœur,
Messieurs,
Vostre tres humble et tres affectionné serviteur
en Nostre Seigneur,
FRANÇS, E. de Geneve.
X aoust 1618, Annessi.
Je pense, Messieurs, que Monseigneur de Valence, vostre Evesque888, pourra tout et voudra
tout pour cette affaire, et que ces Peres luy seront fort agreables, et que par consequent il sera a
propos que de bon'heure on [259] l'advertisse, affin qu'il coopere aupres de Sa Majesté et puis
aupres de messieurs du Parlement.
A Messieurs
Messieurs les Consulz de Chabeul.
Revu sur l'Autographe conservé aux Archives communales de Chabeuil (Drôme).
_____
MCDLV. A la Présidente du Faure889. Réponse à des
témoignages de confiance et d'affection. Prières et souhaits
pour la destinataire.
Annecy, 10 août 1618.
Madame,
Ce porteur m'a fort obligé par la peine qu'il a prise de me venir voir, mais encor plus par le
soin qu'il a eu de me dire de vos nouvelles, puisqu'elles sont toutes bonnes, et qu'avec cela, pour
me donner plus de gloire et de contentement, il m'a dit que vous avies souvent memoire de moy ;
car je confesse franchement que ce bonheur m'est grandement praetieux, selon l'extreme affection
que je sens en mon ame a cherir et honnorer singulierement la vostre qui m'est tous-jours presente,
je vous asseure, au moins en mes principales prieres, qui sont celles de la sainte Messe. Et aussi,
du Saint-Sacrement de Valence, qui demeurent régents des classes jusqu'en 1791. (D'après Lacroix, Le Collège de
Chabeuil, 1891, et les Acta Collegii Annessii, Archiv. commun. d'Annecy, Série GG, Fonds du Collège Chappuisien.)
888 Originaire de la Guyenne, Pierre-André de Gélas de Leberon avait reçu, le 27 juillet 1597, de son oncle, Charles
de Leberon, les évêchés de Valence et de Die ; mais les bulles de Rome se firent attendre jusqu'en 1599. Le nouveau
Prélat trouvait deux diocèses ruinés par l'hérésie, bouleversés par les guerres de Religion ; les églises détruites, les
monastères déserts, un clergé ignorant et rebelle. La tâche était rude ; Pierre-André en mesura l'étendue dans la visite
générale qu'il fit en 1604. Il mit courageusement la main à l'œuvre, soutenu par son zèle et sa vertu, peut-être encore
par le désir d'offrir à Dieu et à l'Eglise une réparation du mal fait par le trop célèbre Jean de Montluc, son grand-oncle,
prédécesseur de Charles de Leberon sur le siège épiscopal. Pierre-André soumet les chanoines, essaye de rappeler les
Religieux, approuve la fondation des Capucins à Crest, établit les Jésuites à Die et tente de les installer à Valence ;
lui-même prêche de parole et d'exemple. Son œuvre n'était pas terminée que déjà ses forces étaient usées. Pensant que
l'air natal les ferait revivre, il partit pour le prieuré de Sainte-Livrade (Lot-et-Garonne) dont il était commendataire. Il
y mourut le 15 septembre 1622. (D'après J. Chevalier, Essai historique sur l'Eglise et la ville de Die, Valence, 1909,
tome III.)
889 Justine Dalphas, fille unique de Théodore Dalphas ou d'Alphas, conseiller au Parlement du Dauphiné, et de
Méraude Truffel, avait épousé François du Faure, qui devint président au Parlement en 1610. Elle était veuve en 1657.
Cette dame travailla beaucoup avec Mme de Granieu et plusieurs autres à l'établissement de la Visitation à Grenoble.
186/346

19.7 Page 187

▲back to top
certes, serois-je extremement ingrat si je ne correspondois de tout mon cœur a la sainte confiance
que le vostre a pris en moy.
Dieu, par sa bonté, vous veuille combler de ses plus desirables benedictions, ma tres chere
Fille, et vous rendre de plus en plus toute parfaitement sienne. En cette [260] esperance vives
joyeusement, et en fin eternellement sans fin, ma tres chere Fille, selon le souhait continuel de
Vostre tres humble et tres affectionné serviteur,
FRANÇS, E. de Geneve.
X aoust 1618, Annessi.
A Madame
Madame la Presidente du Faure.
Revu sur l'Autographe appartenant à M. Gauduel, à Grenoble.
_____
MCDLVI. A Madame de Granieu890. L'obéissance et le pain
quotidien. Explication d'un avis mal compris. Comment la
confiance restreint le nombre des lettres. L'amour céleste
exercé ici-bas. Préparation d'un sermon.
Annecy, 14 août 1618.
Vous le voyés bien, ma tres chere Fille, si l'obeissance est aymable : vous allies avec un
peu de repugnance891, et vous y aves treuvé la permission de recueillir force manne celeste. Or
ainsy soit il et a la tres bonne heure, que tous-jours, quand vous obeires, vous vous treuvies de plus
en plus unie a nostre Sauveur.
Vous aves donq extremement bien fait d'obeir a vostre confesseur, et vostre confesseur a
bien fait de vous imposer l'obeissance en un sujet si agreable. Je ne seray jamais celuy qui vous
ostera vostre pain quotidien892 tandis que vous seres bien obeissante. Je veux dire, ma tres chere
Fille, que vous communiies hardiment tous-jours, quand ceux a qui vous vous confesses diront
oüy, outre les Communions ordinaires que je vous ay marquees.
Quand je vous escrivis que vous rendissies comte de tems en tems a vostre ancien
confesseur893, je ne voulois [261] pas dire que vous fissies des revëues, car il suffit que ce soit
d'annee en annee a celuy que vous voudres ; mais je voulois dire que vous allassies vous representer
a luy pour luy faire connoistre la continuation de vostre sousmission, partie pour vous humilier,
partie pour le consoler.
Je suis bien ayse que vous ayes une parfaite confiance a la Mere de dela894, car je croy
qu'elle vous sera utile, et c'est une Mere qui est toute ma tres chere fille et en laquelle j'ay toute
confiance aussi ; et sans cette confiance je luy escrirois plus souvent, mais je m'en dispense, comme
je feray de vous a qui j'escris maintenant par rencontre, et j'en suis bien ayse. Mon Dieu, ma tres
chere Fille, que l'amour cæleste est aymable, voire mesme quand il est exercé icy bas parmi les
890 La comparaison de cette lettre avec celle du 19 juillet (p. 250) suffit à démontrer que l'une et l'autre s'adressent à
la même destinataire.
891 Il en coûtait un peu à Mme de Granieu de s'adresser, pour la confession, à M. d'Aoste, son cousin. On a vu que le
Saint l'y avait beaucoup encouragée.
892 Luc., XI, 3.
893 Vide supra, Epist. MCDXLIX, p. 251.
894 La Mère Péronne-Marie de Chastel, dont les conseils, tous appuyés sur la doctrine de l'Introduction à la vie dévote,
étaient fort goûtés des dames de Grenoble. « C'était un proverbe commun dans la ville, » raconte l'Histoire de la
Fondation, « que personne ne fréquentait le Monastère et la Mère de Chastel, qui ne devînt Philothée. »
187/346

19.8 Page 188

▲back to top
mysteres de nostre mortalité ! la distance des lieux, ni rien du monde ne luy peut oster la suavité.
Ainsy me semble il que je suis tous-jours avec vostre cœur et avec celuy de cette chere Mere, et
que nos cœurs s'entretiennent les uns aux autres, ains ne sont qu'un cœur qui, de toute sa force,
veut aymer Dieu, et ne s'ayme qu'en Dieu et pour Dieu. La tressainte Vierge, nostre Dame et
Maistresse et nostre sainte Abbesse, soit a jamais nostre Mere et Directrice.
Et je cesse de vous escrire davantage, malgré mon inclination, pour aller penser comment
elle mourut d'amour et comme ell'est coronnee de son amour au Ciel, pour en parler demain a mon
cher peuple de cette ville qui s'y attend895.
Je ne pense pas que nostre Mere d'icy vous escrive, mais elle vous a bien escritte au milieu
de son cœur. Dieu soit a jamais nostre tout. Amen.
XIIII aoust 1618.
Revu sur l'Autographe appartenant à M. le baron d'Yvoire,
au château d'Yvoire (Haute-Savoie). [262]
_____
MCDLVII. A Don Jérome Boerio, General des Barnabites.
L'offre d'un collège aux PP. Barnabites, Réponses à des
objections.
Annecy, 16 août 1618.
Reverendissimo
osservandissimo,
Padre
Si propone alla Paternità Vostra Rma
l'occasione di accettare un collegio nella
provincia del Delfinato896, il quale veramente
è piccolo, ma è tuttavia commodo per far
connoscere in quelle bande la Congregatione
sua, et in consequentia per farla gustare et
dilatare nel regno di Francia. Onde questi
nostri Padri havendone trattato meco per cavar
il mio sentimento, mi è parso di doverli dar
animo a procurare che detto luogho sia
accettato. Ma non lascio di vedere che Vostra
Paternità potrà considerare in questo alcune
difficoltà.
1. Che quella communità non dà molto
sufficientemente per stabilirvi numero
convenevole de Padri. Ma ciè buona speranza
di amplificatione, massime che Monsignor
Vescovo di Valenza897, veramente
valentissimo et [263] zelantissimo Praelato, so
che volentieri ajiutarà il negotio et haverà
Révérendissime et très honoré Pere,
On propose à Votre Révérendissime
Paternité d'accepter un collège dans la
province du Dauphiné. A la vérité, il est petit,
mais néanmoins très propre à faire connaître
votre Congrégation en ce pays, et par
conséquent à la faire goûter dans le royaume
de France et s'y étendre. C'est pourquoi, nos
Pères d'ici ayant traité de cette affaire avec moi
pour en avoir mon sentiment, j'ai cru devoir les
encourager à s'employer pour que l'offre de ce
collège fût acceptée. Je ne laisse pas cependant
de voir que Votre Paternité pourra trouver à
cela quelques difficultés.
1. Que la commune ne donne pas assez
pour établir un nombre suffisant de Pères. Mais
il y a bon espoir d'une augmentation de revenu,
d'autant plus que Mgr l'Evêque de Valence,
Prélat vraiment [263] de grand mérite et très
zélé, aidera volontiers, je le sais, au succès de
l'affaire et protégera la Congrégation avec une
particulière sollicitude.
895 On peut voir au tome VIII de cette Edition, p. 376, le sommaire de ce Sermon.
896 A Chabeuil (voir ci-dessus, note (887), p. 258).
897 Mgr Pierre-André de Leberon (voir ibid., note (888), p. 259).
188/346

19.9 Page 189

▲back to top
singoiar sollecitudine in promovere detta
Congregatione.
2. Parerà forsi duro che voglia quella
communità che i figliuoli delli haeretici siano
ricevuti al collegio per impararvi le lettere ; ma
oltre che habbiamo l'essempio nelli collegi de
Padri Giesuiti, non solamente questa
conditione non ci deve ritardare, anzi ci deve
incitare, perchè non ciè forsi più facil strada di
convertir gl'hæretici che questa, et essendo
usato questo mezzo con destrezza, farà mirabil
riuscita.
3. Le Messe si potranno ridurre
facilmente dall'Ordinario, et col tempo,
essendosi amplificate le entrate, potrà la
Congregatione scarigarsi.
4. Se bene par duro a questi nostri Padri
che voglia quella communità astringerli di non
pigliar altri studii in quella provincia 7e leghe
vicine a quel di Chabeuil, tuttavia non mi par
inconveniente, già che la Congregatione può
dilatarsi pigliando chiese ad ufficiare, et che si
eccettarà la theologia et philosophia. [264]
Per il restante me rimetto alla molta
prudentia del nostro Padre Prevosto, latore898,
ringratiando pur Vostra Paternità che ci habbia
dato detto P. Prevosto et inviati questi novi
Padri che sonno tanto amarevoli899. Et
preghando il Signor Iddio che a Vostra
Paternità Rma dia ogni vero contento, la saluto
humilmente.
Di Vostra Paternità Rma,
Humil et affettionatissimo fratello et
servitore,
FRANCO, Vescovo di Geneva.
In Annessi, alli XVI di Agusto 1618.
Al Rmo in Christo Padre osservandissimo,
Il P. Generale de' Chierici regolari di S.
Paulo.
2. Peut-être semblera-t-il dur que la
commune exige l'admission au collège des fils
des hérétiques pour y apprendre les lettres.
Toutefois, outre que nous avons l'exemple des
collèges des Pères Jésuites, cette condition,
loin de nous faire hésiter, doit au contraire
nous exciter à accepter ; car peut-être n'y a-t-il
pas de voie plus facile pour convertir les
hérétiques que celle-ci, et ce moyen employé
avec adresse aura un merveilleux succès.
3. Les Messes pourront se réduire
facilement par l'autorité de l'Ordinaire, et, avec
le temps, les revenus étant augmentés, la
Congrégation aura de moins lourdes charges.
4. Si bien il semble dur à nos Pères que
la commune veuille les astreindre à ne pas
accepter d'autres classes en cette province dans
un rayon de sept lieues autour de Chabeuil,
cela ne me paraît pas un inconvénient ; car la
Congrégation peut s'étendre en prenant des
églises pour les desservir. De plus,
l'enseignement de la théologie et de la
philosophie sera excepté. [264]
Quant au reste, je m'en remets à la
grande prudence de notre Père Prévôt, présent
porteur ; je remercie aussi Votre Paternité de
nous l'avoir donné et de nous avoir envoyé ces
nouveaux Pères qui sont si aimables. Priant
Dieu notre Seigneur d'accorder tout vrai
contentement à Votre Paternité
Révérendissime, je la salue humblement.
De Votre Paternité Révérendissime,
L'humble et très affectionné frère et serviteur,
FRANÇOIS, Evêque de Genève.
Annecy, le 16 août 1618.
Au Révérendissime et très honoré Père dans le
Christ,
Le Père Général des Clercs réguliers de
Saint-Paul. [265]
Revu sur l'Autographe conserve à Rome, dans
les Archives des RR. PP. Barnabites. [265]
_____
898 D. Jean-Baptiste de Gennari, supérieur du collège d'Annecy (voir plus haut, note (418), p. 117), qui partit pour
Milan le lendemain ; il revint le 2 septembre. (Acta Collegii.)
899 Ces Pères étaient : D. Flavien Moroni, de Verceil, D. Jean-Dominique Meda, milanais, et D. Lucien Fauldrier,
français, originaire d'Etampes, tous trois arrivés à Annecy le 17 mai précédent. (Ibid.)
189/346

19.10 Page 190

▲back to top
MCDLVIII. A la Mère de Chastel, Supérieure de la Visitation
de Grenoble900 (Fragment). Tenir son cœur au-dessus des
variations de la dévotion sensible.
Annecy, 19 août 1618.
Dites moy, ma tres chere Fille, vostre cœur que fait il ? Il est, je m'asseure, plus brave que
l'ordinaire en cette sainte octave en laquelle on celebre les triomphes de nostre Reyne, en la
protection de laquelle nostre esprit repose et nostre petite Congregation respire. O ma Fille, il le
faut tenir haut eslevé ce cœur, et ne permettre point qu'aucun accident de secheresse,
d'empressement ou d'ennuy l'estonne, puisque, encor que cela le puisse esloigner de la consolation
sensible de la charité, il ne le peut toutefois esloigner de la veritable charité, qui est la souveraine
grace de Dieu envers nous pendant cette vie mortelle.
Nos imperfections a traitter des affaires tant intérieures qu'exterieures sont un grand sujet
d'humilité, et l'humilité produit et nourrit la generosité et confiance.
……………………………………………………………………………………………………..
Annessi, le 19 aoust 1618. [266]
_____
MCDLIX. Au Prince de Piémont, Victor-Amédée901. Insuccès de
précédentes démarches. Nouvelles instances en faveur de
deux pauvres curés.
Annecy, 25 août 1618.
Monseigneur,
Quoy que Vostre Altesse Serenissime ayt souvent commandé, comme la justice et pieté
requeroit, que les curés dArmoy et de Draillens fussent payés de leurs pensions902, neanmoins il
(sic) n'ont jamais peu retirer un seul liard despuis quatre ans en ça, quelle sollicitation qu'eux et
moy en ayons sceu faire, et qu'elle (sic) remonstrance que nous ayons proposee de l'extreme
necessité que ces parroisses ont d'estre assistees. C'est pourquoy, Monseigneur, je suis forcé de
recourir de rechef a l'æquité et bonté de Vostre Altesse, affin qu'il luy playse d'user de sa
providence en cett'occasion et d'ordonner ces payemens, en sorte que meshuy ces pauvres
ecclesiastiques puissent en paix faire le service de Dieu en leurs eglises ; et cette divine Majesté
en benira de plus en plus Vostre Altesse,
Monseigneur, de laquelle je suis
Tres humble, tres obeissant et tres fidele
orateur et serviteur,
FRANÇS, E. de Geneve.
XXV aoust 1618, Annessi.
900 Dans l'édition de 1626, ce fragment commence un texte dont la suite est empruntée à une lettre du 2 mars 1622,
adressée à la Mère de Chastel. Il n'y a aucune raison pour ne pas reconnaître la même destinataire à ces lignes, d'autant
qu'elles conviennent bien à la Supérieure de Grenoble, fort dévote envers la Sainte Vierge, et souvent accablée par le
poids de sa charge.
901 Le destinataire de cette requête, que les éditeurs précédents ont cru être le duc de Savoie, est certainement Victor-
Amédée, prince de Piémont. Pour s'en convaincre, il suffit de lire la lettre suivante et celle du 26 avril.
902 Voir ci-dessus, Lettre MCDXVIII, et notes (672), (673), p. 200.
190/346

20 Pages 191-200

▲back to top

20.1 Page 191

▲back to top
Revu sur l'Autographe conservé à Turin, Archives de l'Etat. [267]
_____
MCDLX. A M. Jean Carron903 (Inédite). Premier témoignage
d'honneur et d'estime. L'insuccès des démarches et la vanité
des promesses faites en faveur des curés d'Armoy et de
Draillant. Triste état de leurs paroisses. Financiers à court
d'argent. Moyen proposé par le Saint pour remédier au mal.
Annecy, 25 août 1618.
Monsieur,
Je ne vous rendis onques aucun tesmoignage de l'honneur que je vous porte, ni de l'estime
que je fay de vostre amitié ; mais la faveur que vous m'aves faite de m'asseurer de vostre assistance
es occasions, me promet que vous me la departires au sujet qui s'en presente.
Quand Monseigneur le Serenissime Prince estoit icy il y a deux ans904, je luy representay
la justice de la demande des curés d'Armoy et de Draillens, selon la requeste ci jointe905 ; et Son
Altesse commanda, et par escrit et de bouche, qu'ilz fussent payés, en consideration de ce que leur
payement estoit de droit divin et humain. [268] Despuis, sadite Altesse l'a de rechef commandé
par lettres fort expresses, que vous, Monsieur, escrivites environ les festes de Pasques a monsieur
le Marquis de Lans906, auquel je les rendis moy mesme ; et ne se peut dire de quelle asseurance il
me promit que j'en verrois les effectz. Mays pour tout cela, non plus que pour trente pareilles
promesses, rien ne se fait, ains finalement Son Excellence a declaré qu'il n'y avoit pas moyen ; qui
me fait de rechef hurter a la providence de sadite Altesse907. Et si elle sçavoit la necessité qu'il y a
que ce payement se fasse, je m'asseure qu'elle le presseroit grandement ; car, Monsieur, il n'y a
rien en ces parroisses (je dis rien pour tout) pour l'entretenement du service de Dieu et des ames,
Son Altesse908 ayant voulu d'authorité souveraine, contre les arrestz du Senat, que tout le revenu
que l'Eglise y possedoit fut relasché a ceux de Geneve, assignant seulement a chaque curé
cinquante escus pour son entretien909. Et il n'y a moyen d'en rien avoir, ains faut qu'ilz despensent
beaucoup par empruntz, pour solliciter inutilement ce qui est deu si justement.
903 Saint François de Sales déclare qu'il écrit pour la première fois à son correspondant ; celui-ci n'est donc ni Vibod,
ni Boschi, mentionné d'ailleurs au post-scriptum. Selon toute probabilité, c'est le secrétaire du prince de Piémont, Jean
Carron qui, par son père Claude, était originaire du Bugey. Sa charge de maître auditeur à la Chambre des Comptes
de Savoie lui avait valu l'anoblissement en 1614 ; Charles-Emmanuel lui donna en 1617 la seigneurie de Saint-Thomas
de Cœur, et, deux ans plus tard, celle de Buttigliera. Il fit partie de la suite du Cardinal Maurice dans son voyage de
1618 à Paris. M. de Saint-Thomas, comme on l'appelait à la cour, devint secrétaire d'Etat par lettres patentes du 25
février 1633, servit fidèlement la régente, et mourut en janvier 1649. Il avait été marié trois fois ; sa seconde femme
fut Antoine-Françoise Dumercie et la troisième, Marie Tonda. (D'après Claretta, Storia della Reggenza di Cristina di
Francia, seconda Parte, Torino, 1869, cap. XVI, p. 348, et Carutti, Cariche del Piemonte, etc., Torino, 1798, tom. II,
Tit. II.)
904 Voir ci-dessus, note (84), p. 12.
905 Elle sera donnée avec les Opuscules.
906 Voir ci-dessus, Lettre MCDXVIII, p. 200.
907 Vide Ep. præced.
908 Le duc de Savoie.
909 Le cinquième article du traité de Saint-Julien, conclu entre le duc de Savoie et Genève (21 juillet 1603) avait
abandonné aux Genevois « les biens, fruits et revenus d'Armoys, Draillans et autres lieux... possédés par les Seigneurs
de Genève en l'année 1589. » (Fleury, Hist. de l'Eglise de Genève, Genève, 1880, tome II, chap. IX.) Le Sénat,
interprète des clauses, se basant sur la dernière phrase de l'article sujette à faire naître la contestation, avait sans doute
191/346

20.2 Page 192

▲back to top
Or, si Son Altesse nous renvoye aux tresoriers, gabelliere, financiers, nous n'en aurons
jamais chose du monde, car ilz se treuvent tous-jours courtz d'argent pour nous. Nous la supplions
donq d'assigner nostre payement sur les tailles ordinaires des mesmes parroisses, avec
commandement a la Chambre de faire descharger les païsans d'autant, et jusques a la concurrence
de ce qui nous est deu. Et les parroisses en seront soulagees, car elles payeront plus a commodité,
et les curés asseurés, tant de ce qui leur est deu et qu'ilz doivent reciproquement [269] ailleurs ou
ilz ont emprunté, que de ce qui leur doit ci apres estre payé pour leurs pensions.
Mais encor, s'il n'y a de bonnes clausules derogatoires, courrions nous fortune de n'avoir
rien, tant sommes nous favorisés en nos poursuites, pour justes qu'elles soyent ! Ce que je dis, non
pour me plaindre de la Chambre, qui est certes marrie de nous voir maltraitter non obstant les
arrestz qu'elle a rendus pour nous contre les gabelliers, mais pour vous supplier, Monsieur, de ne
rien oublier es depesches, affin que nous vous soyons, et ces curés et moy, de plus en plus
obligés910. Comme, me promettant vostre assistance, je me confesse des maintenant estre et vouloir
estre toute ma vie, pour me dire et tenir,
Monsieur,
Vostre plus humble et tres affectionné serviteur,
FRANÇS, E, de Geneve.
25 aoust 1618, Annessi.
Monsieur, je n'ay pas creu de devoir importuner monsieur Boschiz911 par une lettre en cette
occasion, estimant de devoir en cela espargner son loysir et me contenter de le supplier, par vostre
entremise, de [me] tenir pour son tres obligé serviteur, qui se promet sa faveur et en cette
occurrence et es autres, pour sa bonté.
Revu sur une ancienne copie conservée à la Visitation de Turiu. [270]
_____
rendu ultérieurement des arrêts favorables aux catholiques relativement à ces bénéfices. Charles-Emmanuel, peut-être
redoutant la guerre, serait intervenu de son « authorité souveraine » pour les adjuger à Genève.
910 Malgré les réclamations du Saint, les gabelliers restèrent chargés de payer les pauvres curés d'Armoy et de Draillant.
et ne s'acquittèrent guère mieux que par le passé de cette obligation, car la Chambre des Comptes dut rendre encore à
ce sujet un nouvel arrêt en 1622.
911 Annibal Boschi (voir le tome précédent, note (1044), p. 309).
192/346

20.3 Page 193

▲back to top
MCDLXI. Au Père Léonard Lessius, de la Compagnie de
Jésus912. Pourquoi le Saint aime et vénère le P. Lessius. Trois
livres du docte Jésuite ; appréciation de François de Sales.
Annecy, 26 août 1618.
Admodum Reverende in Christo Pater,
Très Révérend Père dans le Christ,
Attulit mihi Paternitatis Vestræ litteras
dilectissimus nobis magister Gabriel913, quæ ut
perhonorificæ ita et jucundissimæ mihi
fuerunt. Amabam jampridem, imo etiam
venerabar te nomenque
tuum, mi Pater, non solum [271] quia soleo
quicquid ex vestra illa Societate procedit
magnifacere, sed etiam quia sigillatim de
Vestra Reverentia multa audivi præclara
primum, deinde vidi, inspexi et suspexi.
Vidi namque ante aliquot annos opus
illud utilissimum De Justitia et Jure914, in quo
et breviter simul et luculenter difficultates
illius partis theologiæ, præ cæteris authoribus
quos viderim, egregie solvis.
Vidi postea consilium quod a magni
consilii Angelo915 per te mortalibus datum est
de vera Religione eligenda916 ; ac demum
obiter vidi in bibliotheca Collegii Lugdunensis
Tractatum de Prædestinatione917, et [272]
Notre cher maître Gabriel m'a apporté
la lettre de Votre Paternité, dont j'ai été charmé
autant qu'honoré. Depuis longtemps j'aimais,
bien plus, je vénérais votre personne et votre
nom, mon [271] Père ; non seulement à cause
de l'estime que je fais toujours de tout ce qui
tient à votre Compagnie, mais encore à cause
des œuvres remarquables de Votre Révérence,
dont j'ai d'abord entendu parler, et qu'ensuite
j'ai vues, examinées, admirées.
En effet, j'ai lu, il y a quelques années,
ce traité si utile De la Justice et du Droit, dans
lequel, avec autant de concision que de clarté,
vous résolvez excellemment, et mieux
qu'aucun des auteurs que je connaissais, les
difficultés de cette partie de la théologie.
J'ai vu depuis le conseil que, par votre
intermédiaire, l'Ange du grand conseil donne
aux pauvres mortels touchant le choix de la
vraie Religion. Enfin, passant à Lyon, j'ai vu
912 Entre les hommes illustres de la Compagnie de Jésus qui servaient alors Dieu et l'Eglise, le P. Léonard Lessius
mérite un rang à part. Sa « science des choses divines rappelle les admirables contemplations de saint Denis
l'Aréopagite, et » ses « vertus parurent dignes d'être proposées au Saint-Siège en vue des honneurs de la béatification.
» Ainsi s'exprime le P. de Guilhermy dans son Ménologe de la Compagnie de Jésus (Paris, 1899, Germanie, seconde
Série, Ire Partie, p. 59). Lessius, dont le vrai nom est Leys, était né à Brecht, près d'Anvers le 1er octobre 1554 ; à dix-
huit ans, déjà maître ès-arts, il entrait au noviciat des PP. Jésuites. Après avoir suivi deux ans à Rome les cours de
théologie de François Suarez, il enseigna lui-même cette science sacrée pendant quinze ans à Louvain, et fut dix-sept
ans préfet des études. Ses livres et la renommée de sa sainteté avaient rendu son nom célèbre. Bellarmin, et d'autres
encore, essayèrent de l'attirer au centre de la catholicité ; mais son humilité l'empêcha de céder à ces instances. Il
mourut à Louvain le 15 janvier 1623 ; ses ossements, retrouvés et reconnus, scellés après procès-verbal, reposent dans
le choeur de l'église des Jésuites, à Louvain.
913 Le Saint donne-t-il ici un nom de famille ou un nom de baptême ? L'incertitude rend l'identification presque
impossible. Toutefois on peut citer un Gabriel Bemmelius, de Bruxelles, que Val. Andreas signale de la manière
suivante dans sa Bibliotheca Belgica (Louvain, 1643) : « Docteur en droit canon, de l'Université de Louvain, en 1612,
personnage versé dans l'étude des sciences et des belles-lettres ; auteur du Triumphos SS. Ignatii de Loyola et Francisci
Xaverii, Societ. Jesu, in Divos relatorum. Bruxell. 1622. »
914 De Justitia et Jure cæterisque virtutibus cardinalilus, libri IV. Ad 2. 2. D. Thomæ, a quæst. 47 usque ad quæst.
161. Authore Leonardo Lessio e Societate Jesu, S. Theol. in Academia Lovaniensi professore. (Lovanii, ex officina
Joannis Masii. Anno MDCV.) L'archiduc Albert, gouverneur des Pays-Bas, faisait toujours placer ce livre devant lui,
à côté de l'épée de la justice, dans la salle où il rendait ses jugements. (Ménologe, etc., ubi supra.)
915 Is., IX, 6 ; juxta Septuag.
916 Cet ouvrage convertit un grand nombre d'âmes, entre autres le comte Jean de Nassau. Il fut publié à Anvers sous
ce titre : Quæ fides et religio, sit capessenda, Consultatio. Auctore Leonardo Lessio, Soc. Jesu, S. Theologiæ
Professore. (Antverpiæ, ex officina Plantiniana, apud Joannem Moretum, CIƆ.IƆC.IX.)
917 Déjà dans des traités précédents, Lessius avait émis sa pensée sur ce grave sujet. Les disciples de Baïus le
dénoncèrent comme novateur, et les Universités de Louvain et de Douai prononcèrent contre lui la censure. Vengé
193/346

20.4 Page 194

▲back to top
quamvis nonnisi sparsim ut fit oculos in eum
injicere contigerit, cognovi tamen Paternitatem
Vestram sententiam illam antiquitate, suavitate
ac Scripturarum nativa authoritate
nobilissimam, de prædestinatione ad gloriam
post prævisa opera, amplecti ac tueri. Quod
sane mihi gratissimum fuit, qui nimirum eam
semper, ut Dei misericordiæ ac gratiæ magis
consentaneam, veriorem ac amabiliorem
existimavi918, quod etiam tantisper in libello de
Amore Dei indicavi919.
Cum igitur ita erga Paternitatis Vestræ
merita, quam dudum laudaverant apud me
opera ejus, affectus essem mirifice, profecto
gavisus sum me tibi vicissim utcumque etiam
charum esse. Quod ut semper contingat, et
dictum
magistrum
Gabrielem
commendatissimum habebo, et si quid unquam
potero, quod tibi piacere cognoscam, id
exequar quam impensissime.
Valeat interim Reverenda Paternitas
Tua, et te Deus [273] usque in senectam et
senium nunquam derelinquat920, sed canos tuos
benedictionibus Cæli omet et compleat.
Admodum Reverenda Paternitatis
Vestræ,
Humilis et addictissimus frater ac servus in
Christo,
FRANCS, Episcopus Gebennensis.
Annessi Gebennensium, XXVI
Augusti 1618.
Admodum R. P. in Christo Patri Leonardo
Lessio,
Societatis Jesu Theologo clarissimo.
Revu sur deux fac-simile de l'Autographe,
conservés à la Visitation de Nancy et à celle
de Fribourg.
dans la bibliothèque du Collège, votre Traité
de la Prédestination. Comme il arrive [272] en
ces occasions, je n'ai pu qu'y jeter rapidement
les yeux ; cela m'a suffi pour me rendre compte
que Votre Paternité y embrasse et soutient
cette doctrine, qui a pour elle l'antiquité, le
charme propre et le pur sens de l'Ecriture, de la
prédestination à la gloire en suite de la
prévision des œuvres. Cette constatation m'a
été d'autant plus agréable, que moi-même j'ai
toujours regardé cette opinion comme plus
vraie et plus aimable, en tant que plus digne de
la grâce et de la miséricorde divine. Ainsi l'ai-
je indiqué dans mon petit livre de l'Amour de
Dieu.
Ayant de tels sentiments pour vos
mérites dont vos œuvres ont fait depuis
longtemps l'éloge auprès de moi, mon Père,
est-ce merveille si je me suis réjoui en voyant
à mon tour l'amitié dont vous voulez bien
m'honorer ? Pour que vous me la continuiez
toujours, je tiendrai maître Gabriel pour très
recommandé, et je n'épargnerai rien, à
l'occasion, de ce que je saurai vous être
agréable.
En attendant, j'envoie à Votre Paternité tous
mes souhaits de santé. Que Dieu, jusqu'à la
vieillesse et au dernier déclin de l'âge, ne [273]
retire jamais de vous sa main protectrice, et
que les bénédictions du Ciel, dont je le prie de
vous combler, soient l'ornement de vos
cheveux blancs.
Je suis, de Votre très Révérende
Paternité,
Le très humble et très dévoué frère et
serviteur dans le Christ,
FRANÇOIS, Evêque de Genève.
Annecy en Genevois, le 26 août 1618.
Au très Révérend Père dans le Christ, Léonard
Lessius,
Eminent théologien de la Compagnie
de Jésus.
par Sixte-Quint, le docte Jésuite soutint avec plus d'ardeur sa thèse, et l'exposa dans le livre dont parle ici saint François
de Sales : De gratia efficaci Decretis Divinis liberiate Arbitrii et Præscientiæ Dei conditionata Disputatio apologetica,
Leonardi Lessii e Socielale Jesu, S. Theol. in Academia Lovaniensi Professoris. Duæ aliæ ejusdem Auctoris
Disputationes : altera de Prædestinatione et Reprobatione Angelorum et hominum, altera de Prædestinatione Christi.
(Antverpiæ, ex officina Plantiniana, apud Joannem Moretum, MDCX.)
918 Voir tome IV de cette Edition, p. XLI, et tome XIII, note (880), p. 326.
919 Liv. III, chap. V.
920 Ps. LXX, 18.
194/346

20.5 Page 195

▲back to top
MCDLXII. A Don Juste Guérin, Barnabite. Chant de victoire
avant le triomphe. Un contrat rompu. Désir d'avoir
quelques livres.
Annecy, 27 août 1618.
Je ne vous escris jamais qu'avec precipitation, mon Reverend Pere, mays il faut (sic) mieux
pourtant quelque chose que rien. Je chantay, l'autre jour, la victoire avant le triomphe, quand je
vous escrivis que nous estions d'accord avec les Peres de Saint Dominique ; car, comme le contract
a esté dressé, il (sic) n'ont pas volu tenir parole, de sorte quil faudra marcher dans les termes de la
justice, laquelle si ell'est un peu bien administree, ilz [274] se repentiront d'avoir refusé dix mille
florins de ce qui n'en vaut pas cinq cens. Or, je voy bien que, quoy qu'on leur donnast, ou un autre
jardin, ou autre chose, il sera impossible de les ranger, car ilz s'obstinent par pure tentation. La
rupture du contract se fit hier seulement, et je n'ay encor pas eu loysir de penser a ce qu'il faut faire
sur cela ; mays, y ayant pensé, je le vous escriray921.
Cependant, tenes moy continuellement en vostre cœur, comme un homme qui est
parfaitement vostre et ne sera jamais que vostre, et vostre d'une façon nompareille.
Je seray bien ayse si je puis avoir la Regie de saint Augustin, d'Italie922, car j'ay celle des
Augustins de France923, outre la latine qui est en ses Œuvres924 ; et qui pourroit avoir les
Constitutions des Angeliques925, [275] elles serviroyent beaucoup. Je suis ce que je viens de
dire, plus que vostre.
XXVII aoust 1618.
926 Au R. Pere en Nostre Seigneur,
Le R. P. Don Juste Guerin,
Prevost en la Congregon des Clercz de St Paul.
A Thurin, aux Barnabites.
Revu sur l'Autographe appartenant à Mlle Adélaïde Vuÿ, à Carouge (Genève).
921 Le Fondateur voulait absolument terminer à l'amiable le procès pendant entre les PP. de Saint-Dominique et les
Religieuses de la Visitation depuis septembre 1617 (voir ci-dessus, note (315), p. 86). La défaite qu'il déplore dans
cette lettre ne lui fit pas perdre courage ; car le 15 septembre suivant, une transaction était enfin signée entre les deux
parties, en présence de l'Official, Jean-François de Sales, l'Evêque étant alors à Sixt. La Congrégation de la Visitation
Sainte-Marie, en la personne de Georges Rolland agissant pour elle, outre les dix mille florins qu'elle devait payer
pour la pièce de terre cédée, acceptait encore des conditions de construction très onéreuses au point de vue pécuniaire.
(Archives de la Visitation d'Annecy. Livre des contrats permanents.)
922 Une version italienne de la célèbre Règle venait d'être imprimée en 1617 pour les Frères de Saint-Jean-de-Dieu :
Regola di Sto Agostino con l'espositione di Ugone da S. Vittore, et Constitutioni della Religione del divoto Giovanni
di Dio. Roma, Stamp. della Camera Apostolica. 1617.
923 La Regie prescrite par S. Augustin aux Nonains et Religieuses, extraite de son epistre CIX et tournee de latin en
françois par Jean de Chabanel... avec le Miroir des Religieuses et autres petits traictez de devotion. (Tolose, Vve de
J. Colomiez, 1612.)
924 Epist. CIX.
925 Fondées par la comtesse de Guastalla en 1534 (voir tome XVI, note (791), p. 246), les Angéliques furent en 1536
placées par Paul III sous l'autorité des Clercs réguliers de Saint-Paul. Par l'ordre de saint Charles Borromée, le
Vénérable Charles Bascapé, Barnabite, et plus tard Général de son Institut, leur dressa des Constitutions ; mais le
grand Cardinal voulut laisser au temps d'en faire l'épreuve, et ne les fit pas publier. L'approbation définitive fut donnée
par le cardinal Frédéric Borromée, et elles s'imprimèrent pour la première fois en 1626, sous ce titre : Costituzioni e
Regole del monastero di S. Paolo di Milano, formate da S. Carlo, Cardinale Arcivescovo, e confermate con autorità
Apostolica dall'Illmo Sig. Cardinale Borromeo, successore, Vanno 1625. (In Milano, pei gl'impressori Archiepiscopali,
MDCXXVI.) François de Sales n'eut donc jamais ce livre entre les mains ; mais il en avait pu voir le manuscrit lors
de son voyage à Milan, en 1613.
926 L'adresse est de la main de Jean-François de Sales.
195/346

20.6 Page 196

▲back to top
MCDLXIII. Au Duc de Savoie, Charles-Emmanuel Ier. Les
victimes d'un désastre aux pieds de Son Altesse. L'Evêque
joint ses supplications aux leurs pour obtenir la pitié du prince.
Annecy, 30 août 1018.
Monseigneur,
Ces pauvres gens de la Vald'Aux, comme esperdus d'une ruine presente qui les accable,
n'ont sceu ou se jetter a refuge qu'aux pieds de Vostre Altesse927. Et certes, je ne voy nullement
qu'une main moins forte et un (sic) providence moins paternelle que la vostre, Monseigneur, les
puisse garentir ; car je pense qu'ilz n'ont a se plaindre principalement que de leur malheur, contre
lequel rien ne peut leur donner allegement que le bonheur d'estre regardés en pitié de Vostre
Altesse, a laquelle Dieu, qui void leur extreme misere, inspirera, comm'ilz esperent, quelque
moyen favorable pour les retirer de ce gouffre. [276]
C'est ce en quoy j'implore avec eux la grace de Vostre Altesse, a laquelle faysant tres
humblement la reverence et souhaitant le comble de toute sainte prosperité, je demeure,
Monseigneur,
Tres humble, tres obeissant et tres fidele
orateur et serviteur,
FRANÇS, E. de Geneve.
XXX aoust 1618, Annessi.
Revu sur l'Autographe conservé à Turin, Archives de l'Etat.
_____
MCDLXIV. A Don Juste Guérin, Barnabite (Fragment).
Affectueux reproches à un ami qui ne prend pas assez de soin de
sa santé.
Annecy, 30 août 1618.
O mon cher Pere, vous aves donq esté malade deux fois en si peu de tems ? C'est signe que
vous n'aves pas asses soin de conserver vostre santé, et neanmoins vous estes obligé d'avoir ce
soin la, pour servir tant mieux nostre grand Maistre et ses enfans, puisque vostre vocation vous y
astreint. Faites le dores-en-avant, mon tres cher Pere ; mais je vous le dis tout de bon, et avec tout
le cœur que j'ay pour vous et de tout le credit que j'ay envers vous.928… [277]
_____
927 La vallée d'Aulps, dans le Haut-Chablais, s'étend sur une longueur de trente kilomètres du confluent des trois
Dranses aux limites du Valais. Quel désastre l'avait désolée ? Eboulement ou inondation ? Les recherches faites à ce
sujet n'ont eu aucun succès, non plus que celles relatives au résultat de la requête du Saint.
928 Le P. Arpaud, en citant ces lignes dans la Vie de D. Juste Guérin, termine ainsi : « Le reste porte des affaires qu'il
lui recommande pour la gloire de Dieu. » Il est regrettable que le texte complet n'ait pu être retrouvé.
196/346

20.7 Page 197

▲back to top
MCDLXV. A un religieux929 (Fragment). Course rapide d'une
âme vers le sommet de la perfection. Le mystère d'un nom.
Annecy, 15-fin août 1618 930.
Mon Reverend Pere,
En fin vostre bonne Niece a surmonté genereusement toutes les difficultés et tous les
obstacles qu'on opposoit a son dessein. Elle est dans le noviciat, et je vous asseure que si elle
persevere a courir, comme elle commence, dans les voyes de Dieu, elle se treuvera bien tost au
sommet de la montagne du Seigneur931. Elle ne m'a pas [278] caché que la grace divine luy avoit
fait remarquer que ces trois noms de Marie, Marguerite, Michel, luy imposoyent l'obligation destre
une fille d'orayson, de mortification et de victoire. Je ne doute point qu'elle n'en vienne la, et qu'elle
ne soit un jour une grande servante de Dieu
_____
929 Nous lisons dans la Vie de la Mère Marie-Marguerite Michel (voir note (931) ci-dessous) : « La famille des
Clément, dont elle est sortie, a donné à divers Ordres religieux des personnes d'un mérite extraordinaire. » Mais ne
sachant à quel Ordre appartenait le destinataire, les recherches faites pour le découvrir ont été fort difficiles, et elles
sont malheureusement demeurées infructueuses.
930 Mlle Michel prit l'habit de la Visitation le 13 août 1618, jour où ses deux tantes maternelles, Marie-Gabrielle et
Anne-Marguerite Clément, faisaient profession. François de Sales ne dut pas tarder à donner à l'oncle les bonnes
nouvelles de sa nièce ; c'est la raison de notre date approximative.
931 Pour arracher au siècle et à l'amour du plaisir cette âme dont il voulait faire un vase d'élection, Dieu avait dû
employer le tout puissant moyen de la croix. Plus tard, Marie-Marguerite s'en réjouissait et s'en humiliait : « Comme
les Israëlites s'ils n'eussent pas été battus et froissez de coups, ils n'auroient point pensé d'aler au désert pour faire des
sacrifices au vrai Dieu, » disait-elle, « de même je n'aurois pas non plus pensé à venir lui faire des sacrifices dans la
Religion, s'il ne m'avoit pas châtiée jusqu'à me déboiter les os. » La petite vérole l'avait défigurée, deux accidents
douloureux là rendirent boiteuse, et chaque épreuve fut précédée d'une apparition mystérieuse ne laissant aucun doute
sur son but divin. Sous cette ruine de la beauté extérieure, vivait une âme ornée des dons de l'esprit et du cœur, que
les Fondateurs aimèrent et cultivèrent spécialement. Dès qu'elle eut le voile noir (1620), François de Sales voulut que
la conduite des Novices lui fût confiée ; « elle étoit née, » assurait-il, « pour la direction. » La Sainte le reconnaissait
aussi : « Dieu vous a donné un talent particulier pour cela, » lui écrivait-elle alors que vingt-cinq filles se pressaient
dans son noviciat de Besançon. La Mère Marie-Marguerite Michel, après avoir gouverné les Monastères de Belley et
de Dijon, commençait (1630) dans cette capitale de la Franche-Comté, la série de ses fondations ; Fribourg, Dole,
Salins, Soleure, Gray, Gruyère, lui durent des Maisons de la Visitation ; son zèle l'eût volontiers conduite jusque sur
la terre lointaine du Canada pour y porter la semence de son Institut. Les contradictions et les souffrances ce lui
manquèrent pas ; cette grande Religieuse les supporta avec autant d'humilité que de courage : « Ne vous affligez pas,
mes enfants, » disait-elle à ses Filles, « ce ne sera pas l'œuvre de Dieu qui sera détruite, ce ne sera que mon orgueil et
ma témérité. » Verceil et Arône furent les derniers monastères témoins des vertus de la Mère Marie-Marguerite. Elle
fut supérieure au premier de 1657 à 1662 ; élue au second cette même année, elle y mourut trois mois après son arrivée,
le 29 août. (Voir sa Vie par la Mère de Chaugy, dans Les Vies de plusieurs Supérieures de l'Ordre de la Visitation
Sainte Marie, Anneci, Fonteine, MDCXCIII.)
197/346

20.8 Page 198

▲back to top
MCDLXVI. Au Chanoine Honore des Echelles932. L'inconstance,
loi des choses de ce monde ; les amitiés saintes en triomphent.
Désir de quelques jours de repos à Belley. La demeure des
Filles de la Visitation ici-bas, leur demeure dans l'éternité.
Eloge de la Mère de Chantal.
Annecy, [août-septembre 1618.]
Entre les incertitudes du bienaymé voyage qui nous devoit assembler pour plusieurs moys,
Monsieur mon tres [279] cher Frere, je ne regrette rien tant que de voir differer le bonheur que nos
cœurs se promettoyent de se pouvoir entretenir a souhait sur leurs saintes pretentions933 ; mais le
monde et tous ses affaires sont tellement sujetz aux loix de l'inconstance, qu'il nous en faut souffrir
l'incommodité, tandis que nos cœurs disent : 934 Non movebor in æternum935. Non, rien ne nous
esbranlera en l'amour de la Croix et en la chere union que le Crucifix a fait de nos espritz. Mais
voyci le tems qu'il faut employer l'advantage que nostre amitié a au dessus de celle des enfans de
ce monde, et la faire vivre et regner glorieusement, nonobstant l'absence et division des sejours ;
et cela, a cause que son autheur n'est point lié au tems ni au lieu. Certes, mon tres cher Frere, ces
amitiés sacrees que Dieu a fait sont independantes de tout ce qui est hors de Dieu.
Oh ! si j'estois veritablement Theophile, comme vostre grand Prelat m'appelle (plus selon
la grandeur de sa charité que selon la connoissance qu'il a de mes infirmités), que je vous serois
aggreable, mon tres cher Frere ! Mays si vous ne me pouves aymer parce que je ne le suis, aymes
moy affin que je le sois, priant nostre grand Androphile qu'il me rende par ses prieres son
Theophile. J'espere d'aller faire dans quelques jours un peu de saint repos aupres de luy, qui est
nostre commun phœnix, pour odorer les bluettes de cinnamome dans lesquelles il veut mourir,
pour plus heureusement revivre parmi les [280] flammes de l'amour sacré duquel il escrit les
saintes proprietés dans une histoire qu'il compose936.
932 Le second alinéa de cette lettre parlant évidemment de Mgr Camus, le notable Ecclesiastique ou l'Ecclesiastique de
distinction que les éditeurs précédents assignent comme destinataire à ces lignes, appartenait donc au clergé de Belley.
La probabilité est presque une certitude pour Honoré de Belli des Echelles, fils de Jean de Belli, seigneur des Echelles
et de Vareilles, et de Catherine de Belli. Il fut, dit Guichenon (Hist. de Bresse et de Bugey, 1650, Partie III,
continuation), « prestre, chanoine et primicier en l'église cathédrale de Belley, official et vicaire général » de cet
évêché, et testa le 27 février 1635. Sainte Jeanne de Chantal parle souvent de M. des Echelles au cours de sa
correspondance ; dans un billet inédit, elle fait ainsi l'éloge de ce digne ecclésiastique qui fut Supérieur de la Visitation
de Belley : C'est « un des sages, capables et vertueux Pères spirituels qui soient dans l'Ordre, auquel j'ai une pleine
confiance, tant pour sa rare probité, que pour l'entière affection qu'il a pour toutes les Maisons de la Visitation ; outre
que notre Bienheureux Père nous l'a donné, qui l'aimait chèrement. »
Hérissant attribue à cette lettre la date de 1617 ; mais il est impossible de la faire concorder avec les divers
événements qui y sont mentionnés. Celle que nous proposons convient, à la rigueur, à tous ; cependant il faut
reconnaître que nous pouvons bien nous trouver en face d'un texte composé de plusieurs fragments d'époques
différentes.
933 Il s'agit du voyage à Paris, où l'Evêque de Genève devait se rencontrer avec celui de Belley et son grand-vicaire.
934 Je ne serai jamais ébranlé.
935 Ps. XXIX, 7.
936 Si cet alinéa est de 1618, il s'agit de La Memoire de Darie, composée vers ce temps-là par l'Evêque de Belley, mais
publiée seulement en 1620. L'auteur y raconte en style de roman la vie et la mort de Marie-Aimée de Chantal, baronne
de Thorens ; elle y est désignée sous le nom de Darie, et son mari sous celui de Chrysante ; le Saint lui-même y figure
sous le nom de Théophile. L'allusion est évidente ; elle peut être de 1618. Est-elle postérieure à l'impression de 1620
? L' « histoire » destinée à faire voir « les saintes « propriétés de l'amour sacré, » serait alors : Agathonphile ou les
Martyrs Siciliens, Agathon, Philargyrippe, Tryphine et leurs associés : histoire dévote ou se decouvre l'art de bien
aymer pour antidote aux deshonnestes affections. Le privilège est du 17 décembre 1620.
198/346

20.9 Page 199

▲back to top
Mays, qui vous a peu dire que nos bonnes Seurs de la Visitation ont esté traversees pour
leurs places et bastimens937 ? O mon cher Frere,938 Dominus refugium factus est nobis939 ; Nostre
Seigneur est le refuge de leurs espritz, ne sont elles pas trop heureuses ? Et comme nostre bonne
Mere, toute vigoureusement languissante, me dit hier, si les Seurs de nostre Congregation sont
bien humbles et fideles a Dieu, elles auront le cœur de Jesus, leur Espoux crucifié, pour demeure
et sejour en ce monde, et son palais celeste pour habitation eternelle.
Il faut que je dise a l'oreille de vostre cœur, si amoureusement aymé du mien, que j'ay une
suavité d'esprit inexplicable de voir la moderation de cette chere Mere et le desengagement total
des choses de la terre qu'elle a tesmoigné parmi toutes ces petites traverses. Je dis ceci a vostre
cœur seulement, car j'ay fait resolution de ne rien dire de celle qui a entendu la voix du Dieu
d'Abraham : 940 Egredere de terra tua, et de cognatione tua, et de domo patris tui, et veni in terra
quam monstravero tibi941. En verité, elle le fait, et plus que cela. Or, il me reste de la recommander
a vos prieres, parce que les frequens assautz de ses maladies nous donnent souvent des assautz
d'apprehension, bien que je ne cesse d'esperer [281] que le Dieu de nos peres multipliera sa devote
semence comme les estoilles du ciel et le sablon qui se voici sur l'arene des mers942.
Mais, mon Dieu, c'est trop dire en ce sujet, ou je ne voulois rien dire. Toutefois c'est a vous,
a qui toutes choses sont disables, puisque vous aves un cœur incomparable en dilection pour celuy
qui, avec un amoureux respect, vous proteste qu'il est incomparablement,
Monsieur,
Vostre tres obeissant et tres aymant serviteur
et confrere en Jesus Christ,
FRANÇS, E. de Geneve.
_____
MCDLXVII. A M. François Fyot de Barain943. Grande union des
chanoines de Saint-Pierre de Genève avec leur Evêque.
Celui-ci soutient leurs droits dans un procès avec la ville de
Seyssel.
Monsieur,
Annecy, 3 septembre 1618.
J'ay un Chapitre autant bien qualifié qu'il se peut dire ; c'est pourquoy, outre le devoir que
j'ay au service de Dieu et de l'Eglise, j'en ay un bien particulier a mes Chanoynes, qui, par un asses
rare exemple, ne sont qu'un cœur et qu'un'ame944 avec moy au soin de ce [282] diocæse. Pour cela,
937 Voir ci-dessus, notes (56), p. 6, et (315), p. 86.
938 Le Seigneur est devenu notre refuge.
939 Ps. LXXXIX, 1.
940 Sors de ton pays, et de ta parenté, et de la maison de ton père, et viens en la terre que je te montrerai.
941 Gen., XII, 1.
942 Gen., XXII, 17.
943 François Fyot, seigneur de Barain et de Vauginois dont le nom a été mal lu par Hérissant (1758) qui imprime
Frotbarain, ou mal écrit par un secrétaire du Saint chargé de mettre l'adresse était né à Dijon le 20 novembre 1560.
Tout dévoué à Henri IV, il s'endetta de plus de vingt-quatre mille livres pour le service du Roi qui le fit conseiller du
Parlement, séant à Semur, en 1592. Il fut encore commissaire de la Chambre de justice, conseiller d'Etat, et l'un des
juges du maréchal de Marillac qui s'opposèrent à sa condamnation. Intègre et savant magistrat, humain et bienfaisant
envers les infortunés, Fyot de Barain, plus connu sous le nom de Fyot de Vauginois, mourut en 1636, doyen de sa
compagnie. Il fut inhumé dans l'église Saint-Etienne de Dijon où l'on dressa à sa mémoire un monument sur lequel sa
seconde femme, Christine Morin, fit graver une inscription. (D'après Palliot, Le Parlement de Bourgogne, 1649 ;
Girault, Essais hist. et biogr. sur Dijon, 1814, etc.)
944 Act., IV, 32.
199/346

20.10 Page 200

▲back to top
Monsieur, j'implore avec eux vostre justice et pieté pour la conservation de leur droit en l'affaire
qu'ilz ont avec messieurs les scindiqs et habitans de Sessel945, lesquelz, si je ne suis grandement
trompé, ont bon besoin d'estre rangés et remis en devoir» tant envers les ecclesiastiques qu'envers
le magistrat946.
Mays de cela, Monsieur, vous en discerneres et jugeres, tandis que priant Dieu qu'il vous
face de plus en plus abonder en sa grace, je veux estre a jamais de tout mon cœur,
Monsieur,947
Vostre ………
FRANÇS, E. de Geneve.
Annessi, 3 septembre 1618.
A Monsieur
[Monsieur] Fiot [de] Barain,
Conseiller du Roy au Parlement de Bourgoigne.
Revu sur l'Autographe conservé à la Visitation d'Amiens. [283]
_____
MCDLXVIII. A Monseigneur Pierre Fenouillet, Evêque de
Montpellier. Remerciements pour l'accueil fait au président
Crespin. Naufragé abordant au hâvre de grâce. Le voyage
du Cardinal de Savoie est toujours incertain.
Annecy, 4 septembre 1618.
Monseigneur,
On ne remercie pas le soleil dequoy il fait le jour, ni la lune dequoy elle esclaire la nuit,
parce que c'est leur nature. Ni je ne vous remercieray pas du bon accueil que vous aves fait a
monsieur le President Crespin948, soit que vous l'ayes fait selon la generosité de vostre esprit, qui
vous est naturelle, soit que vous l'ayes fait selon la bienveuillance que vous me portes, de laquelle
l'habitude est passee meshuy en nature par la multitude de l'exercice que vous en faites
continuellement. Seulement vous diray je que je prie Dieu d'en estre le remunerateur, luy qui en
est l'autheur en vous.
Au demeurant, comme je loue le desir que ledit sieur President a de finir ses jours en nostre
vocation ecclesiastique, comme dans un havre de grace pour passer au havre de gloire apres cette
si rude tempeste et l'essay des plus cruelz orages du monde, aussi suis je de vostre advis, que ce
soit apres s'estre enrayé pour un peu du naufrage duquel il sort.
945 En 1618, Seyssel avait pour syndics : noble Louis de Vigniod, seigneur de Bioleaz, et spectable Claude Montanier.
946 Le procès entre le Chapitre de Saint-Pierre de Genève et les habitants de Seyssel durait depuis 1615 (voir tome
XVI, note (1086), p. 334). Il reprit avec une nouvelle activité en 1618 ; au mois de juillet, le Conseil de Seyssel
envoyait deux messagers à l'Evêque de Genève pour traiter de cette affaire à l'avantage de la ville, et un député à
Dijon, Jehan Girard, pour en surveiller la marche auprès du Parlement. Le 28 novembre suivant, c'est Hector
Parpillion, coseigneur de Chappelle, qui prend à son tour, dans le même but, le chemin de Bourgogne. Il fallut attendre
jusqu'au 11 août 1627 l'arrêt de la Cour. Il donnait raison aux chanoines ; mais les conclusions furent adoucies par
ceux-ci dans la transaction du 13 janvier 1631. (Archiv. de Seyssel, Délib. du Conseil de Ville, reg. n° 3, et liasse n°
74.)
947 L'Autographe a été mutilé ; mais l'éditeur de 1758 nous a conservé signature, date et adresse.
948 Jean-Georges Crespin (voir ci-dessus, note (228), p. 56).
200/346

21 Pages 201-210

▲back to top

21.1 Page 201

▲back to top
Nous sommes icy en paix, mays non pas du tout exemptz des ressentimens de la guerre
passee949 ; playse a Dieu qu'ilz ne degenerent pas en recheute.
Pour moy, je ne sçay encor si j'iray a Paris ou non, cette incertitude dependant de celle du
voyage de Monseigneur le Prince Cardinal950 et de celle qui est ordinaire es cours ; ou, pour ne
point mentir, je ne dis rien, [284] sinon peut estre qu'il est vray, et peut estre que non. Mais je dis
toutefois qu'il est vray, et ne sera jamais autrement, que je suis de tout mon cœur invariablement,
Monseigneur,
Vostre tres humble et tres obeissant frere et serviteur,
FRANÇS, E. de Geneve.
4 septembre 1618, a Annessi.
Revu sur une ancienne copie conservée à la Visitation de Toulouse.
_____
MCDLXIX. A la Présidente du Faure (Inédite). Lettres qui
soulagent au lieu de surcharger. Demande et promesse de
prières.
Annecy, 22 septembre 1618.
Vous ne sçauries, je vous asseure, Madame, m'escrire trop souvent, ni donner du
divertissement a mes occupations par vos lettres, qui plus tost me soulagent par la consolation que
j'ay de sçavoir des nouvelles de vostre cœur qui m'est extremement cher, et que je prie de tout le
mien de vouloir continuer sa charité envers mon ame, la recommandant souvent a Nostre Seigneur
; comme de mon costé je ne cesseray jamais de vous souhaiter la tressainte perseverance, avec un
continuel accroissement en l'amour celeste de sa divine Majesté, qui est le comble de tout bonheur,
Demeurés en paix, ma tres chere Fille, et benisses de plus en plus la Bonté divine qui vous veut
toute pour elle.
Je suis sans fin, d'un cœur nompareil, Madame,
Vostre plus humble, tres fidele serviteur,
FRANÇS E. de Geneve.
22 septembre 1618.
A Madame
Madame la Presidente du Faure.
Revu sur une copie conservée à la Visitation d'Annecy. [285]
_____
949 La guerre du Montferrat définitivement terminée par la reddition de Verceil, le 15 juin 1618. (Voir ci-dessus, note
(817), p. 236.)
950 Voir ci-apres, note (983), p. 296.
201/346

21.2 Page 202

▲back to top
MCDLXX. A Madame de Granieu951. Ne pas craindre d'écrire
souvent. Le souhait du Saint pour l'âme de sa chère fille.
Espérance d'un revoir.
Annecy, 22 septembre 1618.
Vous faites certes tres charitablement, ma tres chere Fille, de m'escrire souvent, car en
verité, vos lettres me consolent et recreent extremement, puis que Dieu a voulu que mon cœur soit
si paternel qu'il ne se peut dire plus, pour vous, qui estes reciproquement ma fille tres desirable952
es entrailles de nostre Sauveur. Faites donq tous-jours bien ainsy, escrives moy tous-jours quelques
motz, et moy, quand je pourray, je vous rendray soigneusement la pareille.
Dieu est bon, ma tres chere Fille, et puis qu'il luy a pleu de vous donner le desir de son pur
amour, il le rendra un jour parfait. C'est cela que souvent je luy demande pour vostre chere ame,
ma Fille, laquelle j'ayme comme la mienne propre.
Je vous escris sans loysir et seulement pour respondre a vostre petit billet ; un'autre fois
que j'auray plus de commodité, je respondray a vos deux precedentes, et qui sçait si dans le moys
prochain je passeray a Grenoble953 ? J'en ay certes quelqu'esperance : soit fait selon le bon playsir
de Dieu. Je suis vostre.
F., E. de Geneve.
22 septembre 1618, Annessi.
Revu sur l'Autographe conservé à la Visitation de la Côte-Saint-André. [286]
_____
MCDLXXI. A Dom Bruno d'Affringues, Général des
Chartreux954. Messages affectueux par un Capucin en route pour
la Chartreuse.
Annecy, 22 septembre 1618.
Mon tres Reverend Pere,
Outre le desir que j'ay de me ramentevoir souvent en vostre bonne grace, ce bon Pere
Capucin, qui est grandement de mes amis, m'en a reveillé la volonté quand il m'a dit qu'il alloit
expres voir cette saintete (sic) solitude en laquelle955 beneplacitum est Deo habitare in ea956 ; et
que particulierement il desiroit de vous bayser les mains, poussé de la renommee qu'il a pleu a
951 Impossible de voir l'adresse, l'Autographe étant collé sur un carton ; cependant il n'est pas difficile de reconnaître
Mme de Granieu dans cette « fille tres desirable » que poursuit le désir du « pur amour », et qui écrit souvent de petits
billets au saint Evêque de Genève.
952 Cf. Philip., ult., 1.
953 Il y passa en effet dans la seconde quinzaine d'octobre, comme le témoigne une lettre de la Mère de Chantal à la
Mère de Chastel. (Lettres, vol. I, p. 284.)
954 Le feuillet qui portait l'adresse a été détaché de l'Autographe ; la « sainte solitude » semble désigner la Chartreuse
comme demeure du destinataire, tandis que le titre de « tres Reverend Pere » et l'allusion à « la renommee » indiquent
clairement D. Bruno d'Affringues. (Voir tome XVI, note (640), p. 200.)
955 il a plu à Dieu d'habiter
956 Ps. LXVII, 17.
202/346

21.3 Page 203

▲back to top
Dieu que vous ayes, qu'il honnore avec inclination comm'estant du voysinage du lieu de vostre
naissance957.
Ainsy donq, mon tres Reverend Pere, je vous salue tres humblement par cette entremise, et
vous souhaitant toute sainte prosperité, je demeure a jamais
Vostre tres humble et tres affectionné
serviteur et confrere,
FRANÇS, E. de Geneve.
XXII septembre 1618, Annessi.
Revu sur l'Autographe conservé à la Trappe de Westmalle (Belgique). [287]
_____
MCDLXXII. A Messieurs les Avoyers et les Membres du
Conseil de ville de Fribourg958. Gracieuses offres de service.
Pourquoi le Saint veut toujours obliger les magistrats de
Fribourg.
Annecy, 23 septembre 1618.
Messieurs,
Jamais il ne se presentera occasion de vous rendre service, que je ne l'employe avec toute
l'affection et sincerité que Vos Excellences pourroyent desirer ; et non seulement par le devoir
d'amitié et voysinage, mais par une speciale inclination que j'ay envers vostre tres catholique, tres
pieuse et tres illustre Republique et Seigneurie, je m'estimeray tous-jours fort heureux quand je
pourray executer vos desirs. Ainsy, ces bons et devotz ecclesiastiques s'en revont promeuz aux
saintz Ordres959, marri que je suis que une quantité d'occupations qui me sont survenues en ces
deux jours ne m'ayent permis de les caresser a mon gré, selon l'affection que je porteray toute ma
vie a tous ceux qui me seront recommandés de Vos Excellences, que je prie Dieu vouloir combler
de [288] benedictions, et sa tressainte Mere de les conserver sous sa douce protection, qui suys
tres cordialement,
Messieurs,
Vostre plus humble et tres affectionné serviteur,
957 Quel est le Capucin du diocèse de Saint-Omer qui, en septembre 1618, allait d'Annecy à la Grande-Chartreuse,
pour visiter D. Bruno ? Un document imprimé de 1618, porte le nom d'un P. Jacques de Saint-Omer qui aurait assisté,
comme représentant des Provinces de Flandre, au Chapitre général tenu à Rome cette année-là, et n'aurait quitté la
Ville éternelle qu'après le 8 juillet. En rentrant en France à pied, il pouvait passer par Annecy au mois de septembre.
(Note du R. P. Edouard d'Alençon, archiviste général des FF. MM. Capucins.) Mais où et quand avait-il connu
l'Evêque de Genève ?
958 L'Autographe étant encadré, on ne peut voir l'adresse, si elle existe ; mais sur l'encadrement se lisent ces mots : «
Lettre écrite de la propre main de St François de Sales A leurs Excellences de Fribourg. »
En 1618, Charles de Montenach était l'avoyer régnant ; il n'assista pas cependant à la séance du Conseil, du
8 octobre, dans laquelle on lut le message de l'Evêque de Genève, réponse à celui des magistrats de Fribourg, en date
du 6 septembre (voir à l'Appendice I). L'avoyer Nicolas de Diesbach présida cette assemblée, formée des conseillers
Python, Alex, Paccot, Gerwer, Lary, Erhart, Zimmerman, Mayer, Gottrau, Kessler et Vonderweidt. (Note de M. Tobie
de Raemy, archiviste de l'Etat de Fribourg.)
959 A l'ordination générale faite par le Saint le 22 septembre 1618, Pierre Salbiner, fribourgeois, du diocèse de
Lausanne, reçut la tonsure, les Ordres mineurs et le sous-diaconat ; Balthazard Weber, de même origine, fut ordonné
diacre. (R. E.) Du premier, nous ne savons rien ; le second devint en 1622 curé de Dirlaret, puis, de 1623 à 1632, de
la paroisse d'Ueberstorf, et on le trouve en 1634 chanoine de l'église collégiale de Saint-Nicolas de Fribourg. (D'après
une Note de M. de Raemy.)
203/346

21.4 Page 204

▲back to top
XXIII septembre 1618, Annessi.
amy et voysin,
FRANCS, E. de Geneve.
Revu sur l'Autographe conservé à la Visitation de Fribourg.
_____
MCDLXXIII. A la Mère de Chantal. François de Sales seconde,
sans les connaître, les désirs de la Mère de Chantal.
Annecy, [1613-octobre 1618 960.]
Ma tres chere Mere,
Voyla les lettres, et celle que j'escrivois quand ma Seur Anne Jacqueline961 est venue, estoit
a M. de Leaval962. Regardes donq si vos desirs ont du pouvoir sur mon esprit, que ne les sachant
pas, je les seconde. Qu'a jamais les divines inspirations fassent de si puissantes influences en nostre
cœur, que sa volonté soit parfaitement faite en nous. Amen. Vive Jesus !
Revu sur une copie déclarée authentique, conservée à Turin, Archives de l'Etat. [289]
_____
MCDLXXIV. A la même (Billet inédit). Une bannière, ou une
croix de confrérie à restaurer.
Annecy, [1616-octobre 1618 963.]
Voyla la plus belle des trois. Qui auroit le loysir d'y mettre un autre rideau, il ne la
connoistroit pas, ou bien qui en osteroit le boys pour la luy rendre plus portable. Mays tenes bien
comte, car en somme, je suis homme qui ne veux rien perdre.
Revu sur l'Autographe appartenant à M. le baron de Viry, au château de Cohendier (Haute-
Savoie).
_____
960 Ne pouvant préciser de quel M. de Léaval il est question dans ces lignes, on ne peut que leur donner une date
extrêmement vague. Elles sont postérieures à 1612, ainsi que l'indique l'appellation de « ma tres chere Mere », et
antérieures au 18 octobre 1618, puisque la mention de la Sœur Anne-Jacqueline prouve la présence des deux Saints à
Annecy.
961 Sœur Anne-Jacqueline Coste, tourière de la Visitation. (Voir tome XIV, note (181), p. 63.)
962 Un M. de Léaval fut choisi, en 1619, par l'Evèque de Genève et le président Favre, pour gouverneur de Henri de
Charmoisy après la mort de son père. C'était un gentilhomme savoisien, d'une fortune médiocre, mais d'une vertu
éprouvée. Il suivit son pupille en Piémont et s'acquitta avec dévouement de sa mission auprès de lui jusqu'en 1621,
semble-t-il.
963 Ce billet a été écrit tandis que les deux Fondateurs étaient à Annecy, donc, au plus tard, en 1618. D'autre part,
l'écriture semble postérieure à celle de 1613-1615. C'est tout ce qu'il est possible de dire.
204/346

21.5 Page 205

▲back to top
MCDLXXV. A la même. Sollicitude paternelle du Saint pour
ses Filles. Quelque chose que la Mère de Chantal ne saura
peut-être jamais. Une postulante pauvre qu'il faut gratifier.
Annecy, commencement d'octobre 1618 964.
Ma tres chere Mere,
Il faut que je vous die que j'ayme bien cette pauvre Seur Estiennette965, et pensant en elle
il me (sic) venu [290] en l'imagination que peut estre a elle quelque scrupule sur ses confessions,
puisque hier elle me dit qu'ell'avoit un grand desir de faire une confession generale. Je voudrois
donq que vous sceussies cela d'elle, mais il faudroit que ce fut dextrement, affin que, s'il n'estoit
pas besoin, elle ne s'embarassast pas en cet article, et si elle en avoit besoin, qu'elle le dit, et vous
me le feries sçavoir. Vous sçaves, ma tres chere Mere, ce que je suis a ceux que j'affectionne, et
sur tout a nos Filles ; mais vous ne sçaures jamais peut estre ce que je vous suis, tant Dieu m'a
rendu vostre.
Je vay aux Cappucins966 pour un appointement. Il faudra passer la pauvre Fontani pour 400
ducatons et diminuer la liste des meubles967, car monsieur le collateral Flocard968 dit que ses freres
sont pauvres969 et que ce sera aumosne, et ell'est fille d'une si bonne mere970.
Revu sur l'Autographe appartenant à Mlle Hélène de Thiollaz, au château de Monpont, près Alby
(Haute-Savoie). [291]
964 Les dates d'entrée au noviciat des Sœurs « Estiennette » et « Fontani » fixent celle de cette lettre.
965 Etiennette Devillers, fille de Richard Devillers et de Claudine Martel, entra au monastère d'Annecy en septembre
1618, prit l'habit religieux le 9 septembre 1619 et fit profession l'année suivante. Reçue au rang des Sœurs
domestiques, elle fut admise à celui des Sœurs de chœur dans la Maison de Marseille, à la fondation de laquelle elle
avait coopéré. Sœur Marie-Tiennette y mourut le 21 avril 1640, laissant le souvenir d'une remarquable humilité.
(Livres du Noviciat et du Couvent, du 1er Monastère d'Annecy.)
966 Voir tome XV, note (1080), p. 374.
967 Le 15 octobre 1618, des mains du saint Evêque qui fut le prédicateur de la cérémonie (voir tome IX, p. 208),
Jeanne-Claudine de Pignier de Fontany reçut le voile de la Visitation et le nom de Sœur Jeanne-Marie. Elle avait dix-
neuf ans ; son père, Antoine de Pignier, seigneur de ou du Fontany, était mort avant le mois de février 1617 ; sa mère,
Françoise Piossasco d'Airasca, vivait sans doute encore. La profession de la Novice fut retardée jusqu'au 26 mars
1623, à cause du règlement de ses affaires temporelles, malgré un premier contrat du 20 mars 1619. « Notre Sœur
Jeanne-Marie est toute malade, » écrira la Sainte à la Mère de Chastel en 1626, « un peu difficile d'esprit qu'elle ne
peut manier comme elle voudrait, un peu chagrine, mais las ! tant bonne, tant sincère, tant fidèle à ses exercices ! Il la
faut traiter fort cordialement. » (Lettres, vol. II, p. 598.) Elle mourut le 17 mai 1672, au monastère de Seyssel où elle
avait été envoyée comme fondatrice en 1651. (D'après les Livres du Noviciat et du Couvent, du 1er Monastère
d'Annecy.)
968 Barthélemy Flocard (voir le tome précédent, note (1023), p. 303).
969 Antoine, Denys et Humbert de Pignier étaient encore pupilles en 1622. Nous retrouverons plus tard l'aîné comme
destinataire ; le second entra chez les Augustins, et Humbert chez les Dominicains. Leur sœur Péronne fut Religieuse
à Sainte-Catherine.
970 Françoise Piossasco d'Airasca (en Savoie, d'Erasque) épousa d'abord Claude Busillet, conseiller du Roi en son
siège présidial de Lyon ; de son second mari, Jean-François, seigneur de Monthouz en Duyn (contrat dotal du 15
novembre 1592), elle eut un fils posthume, Jean-Marc, qui se fit Capucin. Enfin, par contrat dotal du 17 novembre
1594, elle s'alliait à Antoine de Pignier, seigneur de Fontany. Françoise Piossasco était décédée lors de l'acte du 20
mars 1619. (Voir note (967) ci-dessus.)
205/346

21.6 Page 206

▲back to top
MCDLXXVI. A un gentilhomme971 (Inédite). Offre de services
et demande de protection.
Annecy, 16 octobre 1618.
Monsieur,
L'essay que je fis de vostre courtoysie il y a 20 ans que je fus a Rome, le recit que m'en fait
monsieur le chanoyne Desplans972, la consideration de lhonneur ou vos merites vous portent,
m'obligent a vous offrir mon service, quoy qu'inutilement, puisque, estant si peu de chose comme
je suis, je ne me puis pas promettre le pouvoir de vous en rendre.
Et bien que cette mesme consideration me deut retenir de vous importuner, si est ce qu'en
l'occasion que ledit sieur Desplans vous represente pour le secours des Chanoynes de mon Eglise,
je ne laisseray pas de vous supplier de nous estre favorable a tous, affin que les uns soyent aydés,
et moy consolé de les voir un peu assistés et delivrés de pauvreté, vous asseurant, Monsieur, que
vous obligeres force gens d'honneur et qui ont affection [292] de marcher de bien en mieux au
service de Dieu ; et en mon particulier, j'en demeureray a jamais,
Monsieur,
Vostre tres humble et tres affectionné serviteur,
FRANÇS, E. de Geneve.
XVI octobre 1618, Annessi.
Revu sur l'Autographe conservé à Bar-le-Duc, au couvent des Sœurs Dominicaines.
_____
MCDLXXVII. Au Cardinal Frédéric Borromée, Archevêque de
Milan973. Envoi d'une harangue du cardinal du Perron, et
promesse de son oraison funèbre.
Annecy, 16 octobre 1618.
Illustrissimo et Reverendissimo Signor
Illustrissime, Révérendissime et très
mio colendissimo,
vénéré Seigneur,
Questi honorati Padri Visitatori de
Barnabiti974 hanno trovato in me una
particolarissima memoria delli favori ricevuti
Ces honorés Pères Visiteurs des
Barnabites ont trouvé chez moi un très
particulier souvenir des faveurs reçues de
Votre Seigneurie Illustrissime ; et comme ils
971 D'après la teneur de la lettre, le destinataire était à Rome durant le séjour qu'y fit le Saint, du 17 décembre 1598 au
31 mars 1599 ; et, en 1618, il y occupait une place lui permettant d'aider de sa protection les chanoines de Saint-Pierre
de Genève. Ces données sont insuffisantes pour identifier sûrement le personnage. Sous toute réserve, nous
proposerons Jean de Vignod, docteur ès-droits, procureur en la cour de Rote, qui meurt à Rome en 1619, léguant à sa
parente Charlotte de Vignod, femme de Claude de Varax, une maison qu'il possédait près de l'église Santa Maria in
Vallicella. (Note de M. le chanoine Gonthier.) Peut-être était-il le fils d'un autre Jean de Vignod. décédé dans la même
ville en 1594. (Voir tome XI, Lettre LXXVII, p. 212, note (484), p. 213, et Appendice, p. 432.)
972 Louis Desplans (voir le tome précédent, note (707), p. 202).
973 Voir le tome précédent, note (575), p. 156.
974 Les PP. Fidèle Monti et Elisée Della Torre, visiteurs généraux de la Congrégation des Barnabites, étaient arrivés à
Annecy le 2 septembre 1618 avec D. Gennari qui revenait de Milan (voir ci-dessus, note (898), p. 265). Ils visitèrent
l'établissement de Thonon (23 septembre-9 octobre) et repartirent pour l'Italie le 20 octobre.
206/346

21.7 Page 207

▲back to top
di V. S. Illma 975 ; et havendomi significato che
[293] Ella tiene notitia della nostra lingua
francese, glie mando con humil976 questa
oratione o harenga fatta [dal Cardinal] del
Perrone977, opra bellissima, s' io non
m'inganno, [per] la vivacità del' ingegno che in
essa è mostrata. Et se essendo in Parigi, dove
vado per accompagnare il Prencipe Cardinale
di Savoya, posso veder qualche oratione
funebre di detto fû Cardinale del Perrone, non
mancarò di darne parte a V. S. Illma, non
dubitando che haverà a caro il saper la morte
felicissima et piena di zelo di questo
grand'huomo et Prelato978.
Et
fratanto,
basciando
humilissimamente le sacre mani [294] di V. S.
Illma et ritornando a farli profonda riverenza,
resto
Suo divotissimo et humilissimo [servitore],
FRANCO, Vesco[vo di Geneva.]
XVI Ottobre 1618, Annessi.
m'ont dit que vous aviez quelque [293]
connaissance de notre langue française, je vous
adresse en toute humilité ce discours ou
harangue faite par le cardinal du Perron, œuvre
très belle, si je ne me trompe, pour la vivacité
du génie qui la caractérise. Si je puis trouver à
Paris, où je vais accompagner le Prince
cardinal de Savoie, quelque oraison funèbre de
feu le cardinal du Perron, je ne manquerai pas
d'en faire part à Votre Seigneurie Illustrissime,
qui, je n'en doute point, aura pour agréable
d'apprendre les particularités de la mort très
heureuse et pleine de piété de ce grand homme
et Prélat.
En attendant, je baise les mains sacrées
de Votre Seigneurie [294] Illustrissime, et lui
renouvelant mes profonds hommages, je
demeure
Son très dévoué et très humble serviteur,
FRANÇOIS, Evêque de Genève.
16 octobre 1618, Annecy.
Revu sur l'Autographe conserve à Milan, à la
Bibliothèque Ambrosienne.
_____
975 Lors du voyage de saint François de Sales à Milan, fin avril 1613. (Voir tome XVI, note (33), p. 1.)
976 L'Autographe, assez endommagé par l'humidité, présente plusieurs lacunes. Nous y suppléons selon le sens par des
mots entre crochets [ ], sauf ici où il est difficile de décider si le Saint a écrit con humiltà, leçon donnée par les éditeurs
précédents, ou bien : con humilissa riverenza, ce qui paraîtrait plus probable d'après la place.
977 C'est sans doute la harangue du 2 janvier 1615 aux Etats généraux, que l'Evêque de Genève envoyait au cardinal
Borromée. Infidèlement reproduite d'abord dans le procès-verbal des Etats, elle fut publiée par l'orateur sous ce titre :
Harangue de Jacques Davy, cardinal du Perron, aux Estats, sur l'article du serment (Paris, Estienne 1615). On la
réimprima quatre fois cette même année.
Le 26 novembre 1618, Frédéric Borromée remerciait le Saint de cet envoi, par une lettre dont Migne, tome
VI, col. 1019, a donné une traduction ; mais, malgré de minutieuses recherches faites aux Archives Borromeo et à la
Bibliothèque Ambrosienne, le texte original n'a pu être retrouvé.
978 Le grand Cardinal (voir tome XVI, note (1147), p. 353) était mort le 5 septembre précédent, dans l'hôtel de Sens,
à Paris. Bien des voix célébrèrent sa mémoire, et François de Sales put choisir, entre cinq ou six oraisons funèbres
imprimées à Paris en 1618, celle dont il voulait faire part à l'Archevêque de Milan.
207/346

21.8 Page 208

▲back to top
MCDLXXVIII. A Dona Ginevra Scaglia979 (Inédite). Nouveaux
délais pour la fondation de Turin. Départ pour la France ; joie
au sujet d'un compagnon de voyage. L'itinéraire de la Mère
de Chantal différent de celui de l'Evêque de Genève.
Annecy, 16 octobre 1618.
Illustrissima Signora mia in Christo
Très Illustre Dame, très honorée dans le
osservandissima,
Christ,
Essendosi data la parola mia et quella
della Madre per Bourges et Parigi, saria
impossibile di far altramente980 ; ma ella
ritornarà presto, cioè questa prima (sic), et fra
tanto le cose del Monasterio di Turino si
saldaranno [295] et pigliaranno fondamento981.
Si riserba la Sorella Paola Hieronima di
Monthouz per accompagnarla et esser
impiegata in Turino, già che questo è gusto di
V. S. et, come si spera, sarà gusto del
Serenissimo Prencipe982.
Et quanto a me, parto adesso adesso per
andarmene servir il Serenissimo Prencipe
Cardinale983, già che così vuole Sua Altezza ;
et se è vera la nuova che mi vien data che il
signor Marchese fratello di V. S. facci il
viagio, mi sarà una particolar consolatione984,
et tanto più se io fossi tanto felice di darli
qualche segno della molta servitù ch'io tengo
verso il signor Comte985 et la persona di V. S.
[296]
Raccommandar a V. S. il nostro P.
Dom Giusto986 par cosa ingiuriosa alla charità
Ma parole et celle de la Mère étant
données pour Bourges et Paris, il serait
impossible d'agir autrement. Mais notre Mère
reviendra bientôt, c'est-à-dire au printemps, et
d'ici là, les affaires du Monastère [295] de
Turin s'affermiront sur un fondement plus
solide. On réserve la Sœur Paule-Jéronyme de
Monthouz pour accompagner la Mère et être
employée à Turin, puisque cela agrée à Votre
Seigneurie, et agréera, nous l'espérons, au
Sérénissime Prince.
Pour moi, je suis sur mon départ pour
le service du Sérénissime Prince Cardinal,
ainsi que l'a voulu Son Altesse. Si la nouvelle
que l'on vient de m'annoncer est vraie, que M.
le Marquis votre frère est du voyage, ce me
sera une particulière consolation, surtout si j'ai
le bonheur de pouvoir lui donner quelque
marque de mon profond attachement pour M.
le Comte et pour vous, Madame. [296]
Vous recommander notre bon P. D.
Juste serait une chose injurieuse à la
bienveillance que vous lui portez ; elle ne m'est
979 Cette lettre est certainement adressée à Dona Ginevra Scaglia ; la simple lecture du texte suffit à le démontrer.
980 « Voilà donc qu'il faut partir, mais non pas devant lundi, » écrit la Mère de Chantal, le 17 octobre 1618. (Lettres,
vol. I, p. 282.) Ce fut en effet le lundi, 22 octobre, qu'elle s'éloigna d'Annecy avec les Sœurs destinées à la fondation
de Bourges.
981 La fondation n'eut lieu qu'en 1638.
982 La Sœur Paule-Jéronyme de Monthouz (voir au tome XVI, les notes (841, 910), des pp. 261 et 279), à qui l'on
pensait encore en 1620 pour la fondation de Turin, n'y fut cependant pas employée. Les charges honorables que
quelques-uns de ses parents avaient à la cour de Savoie pouvaient lui attirer une spéciale bienveillance du prince
Victor-Amédée.
983 Maurice de Savoie, parti de Turin le 6 octobre, arriva à Montmélian le 17. C'est ce jour-là ou le lendemain que
l'Evêque de Genève dut quitter Annecy pour rejoindre le cortège princier.
984 Le marquisat de Caluso avait été apporté en dot (1606) à Auguste-Manfred Scaglia, fils aîné de Philibert-Gérard,
par Marguerite Biandrate di San Giorgio, veuve de Charles-Guillaume Valperga, possesseur de cette seigneurie.
Auguste-Manfred préféra toujours cependant à son titre de marquis celui de comte de Verrua qu'il prit à la mort de
son père. Vaillant militaire, il se distingua lors du siège de Verceil (1617), devint grand écuyer de Madame Royale,
maréchal de camp en France, où il fut ambassadeur de 1619 à 1621, général de l'infanterie ducale en 1633, et mourut
le 6 octobre 1637. (D'après les documents conservés aux Archives de Turin.)
985 Philibert-Gérard Scaglia, comte de Verrua (voir tomes XII, note (191), p. 105, et XVII, note (643), p. 181). Il fit
en effet partie de l'ambassade, ainsi que son fils le marquis de Caluso.
986 D. Juste Guérin.
208/346

21.9 Page 209

▲back to top
che ella tiene ; ma mi è lecita per darglie permise qu'en témoignage de l'affection que
qualche testimonio del mio affetto verso di lui. j'ai pour lui.
Della ratificatione del mollino per
De la ratification pour les moulins de
queste Madri non si ha nuova veruna, et non so ces Mères, nous n'avons aucune nouvelle, et je
doüe sarà capitata l'amorevole cura che V. S. si ne sais où aura échoué le soin bienveillant que
è degnata pigliarne987.
Votre Seigneurie a daigné prendre de cette
La Madre fa una strada per andar a affaire.
Bourges differente dalla nostra, et restarà in
La Mère suivra, pour aller à Bourges,
Bourges mentre sarò in Parigi ; ma non lasciarò une route différente de la nôtre et demeurera
di dar parte delli progressi di questa dans cette ville tandis que je serai à Paris ; mais
Congregatione a V. S. Illma, già che tanto glie je ne laisserai pas de vous faire part des progrès
vuol bene.
de notre Congrégation que Votre Seigneurie
Così mi tengha nella gratia sua V. S. aime tant.
Illma, et io a lei pregho il perfetto et puro amor
Veuillez aussi, Madame, me conserver
divino.
dans vos bonnes graces, et à mon tour, vous
Di V. S. Illma,
souhaitant le parfait et pur amour de Dieu, je
Certissimo et humilissimo servo in Christo, suis,
FRANCO, Vescovo di Geneva.
De Votre Seigneurie Illustrissime,
In Annessi, alli XVI di Ottobre 1618. Le très assuré et très humble serviteur dans le
Christ,
Revu sur l'Autographe appartenant à M. le
FRANÇOIS, Evêque de Genève.
comte Biandrate di San Giorgio, au château
Annecy, 16 octobre 1618. [297]
de Piasco, près Turin. [297]
_____
MCDLXXIX. Au Père Jean-Matthieu Ancina de la
Congrégation de l'Oratoire988. Pourquoi le Saint est obligé de
renoncer à écrire la Vie de Juvénal Ancina. Ses regrets.
Annecy, 16 octobre 1618.
Molto Reverendo Padre, singolarmente
Très Révérend Père, très
carissimo et osservandissimo,
particulièrement aimé et honoré,
Quantunque io vedeva di non poter in
niun modo scrivere convenientemente la Vita
della felice memoria di Monsignor Vescovo
suo fratello989, per la mia troppo grande
rozzessa et insufficientia, nientedimeno il
diletto ch'io havrei di dar gusto a V. R. et de
dar testimonio della stima di questo gran servo
d'Iddio, mi dava un certo che di speranza di
poterlo fare in qualche modo. Ma vedendomi
adesso tirato in Parigi, per servire il
Serenissimo Prencipe Cardinale nostro in
Bien que je fusse convaincu de ne
pouvoir en aucune façon écrire
convenablement la Vie de Monseigneur
l'Evêque votre frère, d'heureuse mémoire, à
cause de ma trop grande rusticité et
insuffisance, néanmoins la satisfaction que
j'aurais eue d'agréer à Votre Révérence et de
rendre témoignage de mon estime pour ce
grand serviteur de Dieu, me donnait quelque
espérance de pouvoir entreprendre ce travail.
Mais me voyant maintenant appelé à Paris
987 Voir ci-dessus, Lettre MCDV. p. 179, et note (612), p. 180.
988 Il est facile de reconnaître, à la lecture du texte, que ces lignes s'adressent au frère de l'Evêque de Saluces, le P.
Ancina, désigné seulement sous son titre de Religieux par les anciens éditeurs. (Cf. ci-dessus, Lettre MCDIV, p. 176.)
989 Le bienheureux Juvénal Ancina (voir tome XII, note (24), p. 7).
209/346

21.10 Page 210

▲back to top
questo viagio di Francia, io perdo ogni sorte di pour servir notre Sérénissime Prince Cardinal
speranza di scrivere, et massime che detta en ce voyage de France, je perds tout espoir de
historia richiede di esser scritta da [298] le faire, d'autant plus que l'histoire dont il s'agit
huomo che possa saper moltissime requiert [298] un écrivain qui soit à même de
particolarità che io non posso cognoscere nè savoir beaucoup de particularités que je ne puis
intender qui, et molto meno in Francia.
connaître ni apprendre ici, et moins encore en
Mi perdoni adunque V. P. s'io non la France.
servo in questa occasione, che per altro mi
Pardonnez-moi donc si je ne sers votre
sarebbe stata gratissima, et veda che la sola Paternité en cette occasion qui cependant m'eut
impossibilità m'impedisce. Ma non lasciarò a été si agréable, et voyez que la seule
suo tempo di mandargli alcune osservationi impossibilité m'en empêche. Toutefois je ne
circa queir historia990, che potranno forsi manquerai pas de vous envoyer en leur temps
giovare al scrittore ; et in ogni modo sono et quelques remarques touchant cette histoire ;
sarò sempre,
peut-être pourront-elles être utiles à l'auteur.
Di Vostra Paternità,
De toute manière, je suis et serai
Certissimo et affettionatissimo fratello et toujours, De Votre Paternité,
servitore,
Le très assuré et très affectionné frère et
FRANCO, Vescovo di Geneva.
serviteur,
In Annessi, alli XVI di Ottobre 1618.
FRANÇOIS, Evêque de Genève.
[299]
A Annecy, le 16 octobre 1618. [299]
_____
MCDLXXX. A M. Michel Favre991. Une liste de nécessiteux à
soulager.
Annecy, 16 octobre 1618.
Monsieur Michel,
Je vous prie que de l'argent qui viendra entre vos mains, qui m'appartiendra, vous delivries
a madame la collaterale Flocard992, six florins pour la Jeanne Peloux de Geneve ; autres trois florins
pour la Gautier, et trois pour la Jaquemine de Bœuf ; et a la Janine, trois pour la Marguerite de
Grenoble, et quatre pour la femme de Maleteste993.
FRANÇS, E. de Geneve.
XVI octobre 1618.
Revu sur l'Autographe conservé à Rome, chez les Dames du Sacré-Cœur
de la Trinité du Mont. [300]
990 Si François de Sales écrivit ces « remarques », elles ne sont pas parvenues jusqu'à nous.
991 Voir le tome précédent, note (722), p. 208.
992 Claudine, fille d'Hugues Viallon, seigneur de la Pesse, et de Françoise Crassus, avait épousé à l'âge de vingt-cinq
ans, Barthélemy Flocard, par contrat du 16 février 1603. (Voir le tome précédent, note (1023), p. 303.) Elle fut inhumée
le 4 avril 1644. (Reg. par. d'Annecy.)
993 « Quand ce Bienheureux faisoit voyage, » rapporte Michel Favre dans sa déposition (Process. remiss. Gebenn. (I),
ad art. 26), « il ne manquoit point de me laisser une liste des personnes miserables et necessiteuses, et de la somme
quil vouloit estre distribuee a un chescun d'icelles, et aucunes fois il me nommoit quelque personne de confiance a
laquelle j'aurois a remettre en gros telles aumosnes pour les distribuer tant plus secrettement. » Nous avons ici une de
ces listes des protégées du saint Evêque ; « la Jeanne Peloux de Geneve » et « la Marguerite de Grenoble » étaient
vraisemblablement des converties qu'il avait retirées à Annecy ; souvent ses charités allaient à cette sorte de pauvres,
au témoignage du même déposant. « La Gautier » pourrait être la malheureuse femme nommée dans une lettre à Mgr
Fenouillet (voir ci-dessus, p. 66). Le faubourg de Bœuf, habité par « la Jacquemine » était à Annecy le quartier des
pauvres.
210/346

22 Pages 211-220

▲back to top

22.1 Page 211

▲back to top
MCDLXXXI. A la Mère de Bréchard, Supérieure de la
Visitation de Moulins. Les excuses que doit faire la Mère de
Bréchard, pour le Saint et pour elle-même.
Annecy, 16 ou 17 octobre 1618 994.
Ma tres chere Fille,
Tout a la haste, et sans haleyne ni loysir, j'escris a monsieur vostre grand bienfacteur995 par
cette si asseuree commodité. Faites luy bien excuses, et commences a vous excuser vous mesme
de l'exces dont vous aures usé a dire du bien de moy affin quil m'aymast, car me voyla a la veille
d'estre conneu de luy, puisque le Prince Cardinal fait indubitablement son voyage996.
Ma tres chere Fille, Dieu soit au milieu de vostre cœur. Amen.
997 [A ma tr]es chere Fille en N. S.,
[La Mère] Jeanne Charlotte de [Bréchar]d,
Superieure de la Congregation de la Visitation.
A Moulins.
Revu sur l'Autographe conservé à la Visitation de Nevers. [301]
_____
994 La nouvelle assurée du voyage du cardinal Maurice arriva à Annecy vers le 17 octobre (cf. Lettres de la Mère de
Chantal, vol. I, p. 282) ; ces lignes furent donc écrites ce jour-là ou la veille.
995 Cette lettre à M. de Palierne, trésorier de France à Moulins, n'a pas été retrouvée. (Voir ci-dessus, p. 194.)
996 L'ambassade de Savoie ne passa pas à Moulins, comme le Saint l'avait espéré. De Montmélian (voir ibid., note
(983), p. 296), elle s'était rendue à Grenoble, où Lesdiguières fit une splendide réception au Prince Cardinal ; le 21
octobre, quittant la capitale du Dauphiné, elle vint à Lyon et y séjourna si peu que François de Sales eut à peine le
temps de voir, à la Visitation, la Mère de Chantal et ses Filles. De Roanne à Orléans, le voyage se fit sur la Loire (voir
ci-après, p. 307).
997 Les mots entre crochets [ ] ont été enlevés à l'ouverture de la lettre.
211/346

22.2 Page 212

▲back to top
MCDLXXXII. A la Mère Favre, Supérieure de la Visitation de
Lyon (Fragment). Servantes, grandes et petites, de la Mère de
Dieu, unies dans son amour.
[Orléans, commencement de novembre 1618 998.]
……………………………………………………………………………………………………..
Je vous envoyeray la copie du Bref par lequel nostre Congregation est establie en tiltre de
Religion999.
J'ay presché ce soir au couvent des Carmelites de cette ville1000. Oh ! Dieu soit beni,
qu'estant filles toutes et servantes de la mesme Mere de Dieu, quoy qu'elles grandes et vous petites,
vos cœurs soyent unis par sa sainte dilection que cette sacree Mere verse dedans le cœur de toutes
les Seurs. [302]
Soyés tous-jours toute courageuse, ma tres chere Fille, et vives toute en Celuy pour lequel
et par lequel vous estes creee, baptizee et eslevee a cette sublime dignité d'espouse de Jesus Christ.
Vostre tres affectionné pere et serviteur,
FRANÇS E. de Geneve.
_____
MCDLXXXIII. A M. Guillaume de Bernard de Foras. Grand
désir de l'Evêque de Genève d'obliger M. de Montholon.
Difficultés d'accepter les prédications de l'Avent à Saint-André-
des-Arts.
Etampes, 5 novembre 1618.
C'est moy qui veux respondre, Monsieur mon tres cher Frere, puisque c'est a moy a qui
lhonneur dont vous parles a nostre frere1001 s'addresse. Or, vous juges donq bien qu'estant aupres
de ce Prince1002 pour ce voyage, je ne suis plus a moy, ni n'ay point de liberté que celle qu'il me
donnera. Et toutefois, tout ce que je pourray je le feray, affin qu'il veuille bien me permettre que
998 Dans l'édition de 1626, ce fragment forme le second alinéa d'une lettre du 1er octobre 1620, adressée A une
Superieure de la Visitation ; nous croyons devoir l'en détacher, l'envoi du Bref de Paul V ayant dû suivre d'assez près
sa promulgation au Monastère d'Annecy. D'autre part, à la date indiquée, le saint Fondateur était en Savoie et ne
pouvait prêcher dans aucun couvent de Carmélites. Plusieurs raisons semblent militer en faveur de la Mère Favre
comme destinataire et du mois de novembre comme date ; cependant nous ne donnons l'une et l'autre que sous toutes
réserves, ces lignes pouvant avoir été écrites aussi après le sermon fait par l'Evêque de Genève aux Carmélites de
Tours, vers le 20 septembre 1619.
999 Le Bref de Paul V, du 23 avril 1618, ne fut mis en exécution que le 16 octobre suivant. (La date du 9, donnée au
tome XVII, note (502), p. 138, est celle de l'approbation des Constitutions.) Ce jour-là, François de Sales, « come
fondateur et commis du Saint Siege Apostolique, » vint au monastère et ordonna « que l'on gardat la cloture selon le
sacré Consille de Trante et la solanité des veux..., fesant entendre la grace et l'honeur que Dieu fesoit a cette petite
Congregation, d'une petite ninphe l'avoir rendue sy prontement une mere abeille. » (Histoire de la Fondation du 1er
Monastère d'Annecy, par la Mère de Chaugy.)
1000 Si la date que nous attribuons à ces lignes est exacte, le saint Evêque les a écrites d'Orléans, seule ville qui possédât
alors un Carmel entre celles qu'il traversa de Lyon à Paris. Les Filles de sainte Thérèse s'y étaient établies le 25 mars
1617, appelées par Mlle Sein, issue d'une ancienne famille de Tours. Du monastère de Pontoise sortirent les premières
Religieuses : la Mère Marie du Saint-Sacrement (Mlle de Saint-Leu) et cinq compagnes. (Voir Chroniques de l'Ordre
des Carmélites, Troyes, 1856, tome III, pp. 183 seq., etc.)
1001 Jean-François de Sales qui accompagna l'Evêque de Genève à Paris.
1002 Le cardinal Maurice de Savoie.
212/346

22.3 Page 213

▲back to top
je face tout ce que monsieur de Montelon desirera de moy pour la chaire de Saint André, estimant
la bienveuillance de ce seigneur au dessus de toute la pensee quil en sçauroit avoir, comme en
verité je suis obligé de faire pour plusieurs respectz1003. Des demain donq je parleray au Cardinal
affin que, sil se peut sans incommoder son service, je soys tout reservé a [303] Saint André ; et s'il
ne se peut pour l'Advent, comme a la verité il sera difficile que ce soit, pour autant d'autres
occasions quil plaira a mondit sieur de Montelon de me marquer1004.
Mays quant au logis, il me faut laisser ou le fourrier du Roy me fourrera1005 ; car, quoy
qu'inutile, ce Prince me veut voir assidu aupres de sa personne, et la rayson veut que je rende ce
devoir en suite de l'intention de Son Altesse1006. Mays j'ay tort [de] dire tant de choses sur ce
papier, puisque me voyci a la veille de vous voir en presence, et de prendre avec monsieur de
Montelon tous les moyens de suivre au plus pres qu'il se pourra toutes ses volontés.
Bonjour, Monsieur mon tres cher Frere ; Dieu soit a jamais au milieu de vostre cœur.
A Estampes1007, le 5 novembre 1618.
A Monsieur
Monsieur de Forax.
Revu sur l'Autographe conservé à la Maison-Mère des Religieux
des SS. Cœurs, dits de Picpus, à Paris. [304]
_____
1003 François de Montholon ou Monthelon, marguillier de Saint-André de Paris, avait déjà, avec MM. Mareschal et
Maillet, par une lettre du 4 mai 1617, invité François de Sales à prêcher le Carême dans leur paroisse. Au 1er janvier
1618, après six ans d'exercice de sa charge, il demanda à être remplacé, mais il dut prolonger ses fonctions jusqu'au
1er janvier 1619, auquel jour le curé et les membres de la Fabrique le remercièrent « de l'honneur qu'il avoit fait a
ladite parroisse et des bons predicateurs qu'il auroit pourveu en ladite eglise. » (Archiv. Nat., LL 686, fol. 49.) M. de
Montholon sera destinataire.
1004 Le saint Evêque sut triompher de toutes les difficultés, et, pour la station de l'Avent, il montait dans la chaire de
Saint-André. Cette vieille église avait été bâtie dans le grand clos de Laas, d'où son nom de Saint-André de Laas, puis
des Aas et des Ars (que l'on écrivit encore des Arcs, des Arts) ; elle appartint primitivement au Monastère de Saint-
Séverin dont l'Abbé nommait le curé. Ce droit passa en 1345 à l'Université. Enrichie et agrandie aux XVe et XVIe
siècles, l'église fut vendue le 4 fructidor, an V, et démolie en 1809. (Voir Cocheris, Histoire de la ville et du diocèse
de Paris de l'abbé Lebeuf, 1863-1867, tome III, p. 275 ; éd. de 1883, tome I, p. 284.)
1005 A Lyon, l'escorte princière avait rencontré M. Le Largi, maréchal des logis du Roi, chargé de pourvoir aux
logements aux différentes étapes ; mais ce fut M. de Bonneuil, introducteur des ambassadeurs, qui eut ce soin à partir
de Chartres. Le Prince Cardinal et l'Evêque de Genève furent logés à Paris à l'hôtel d'Ancre, anciennement de
Picquigny.
1006 Le duc de Savoie.
1007 D'Orléans (voir ci-dessus, note (996), p. 301) le cardinal Maurice et sa suite se rendirent à Chartres, en passant
par Etampes, d'où le Saint date cette lettre. (Voir ci-après, note (1020), p. 308.)
213/346

22.4 Page 214

▲back to top
MCDLXXXIV. A Dona Ginevra Scaglia. Projets de voyages
pour la Mère de Chantal. La bienveillance du comte de
Verrua pour François de Sales. Un Cardinal et un Evêque
ramant sur la Loire. Tout Paris à la rencontre de Maurice de
Savoie. Portrait de la future princesse de Piémont.
Accroissement de piété dans la capitale.
Paris, 9 novembre 1618.
Illustrissima
Signora
mia
osservandissima,
Hier sera ricevei la lettera di V. S. Illma
per via del signor Vardelli1008, et la ringratio
humilmente del favor che Ella mi fa di
scrivermi, che me dà mille consolationi.
La Madre1009 dunque, per providentia
particolare d'Iddio, si trovô in strada et giunta
in Borges quando ricevei il memoriale del
Serenissimo Prencipe1010 ; et cosi, da Borges
verrà, come credo, qui in Parigi per fundar un
Monasterio, perchè se bene la morte del
Cardinale Perrone mette un poco de difficoltà
alle dispositioni che egli vi haveva messe,
tuttavia vedo che poco a poco [305] vanno
disparendo1011. Et da questa città, nel ritorno
passarà in Digione, oüe le cose sonno
apparechiate per la fundatione di un'altro
Monasterio1012 ; et alla prima (sic) potrà andare
in Turino, se pur le cose si trovaranno in stato
di dovervi far la fundatione1013. Et così spero
che senza perdere tempo, ell'a (sic) impiegherà
bene le giornate, pur che sua divina Maiestà
l'agiuti et conforti.
L'Illustrissimo signor Conte1014 sta
molto bene, et per gratia sua mi dà tutti li segni
d'amarevolezza che si possono desiderare ; et
per strada mi disse che voleva parlar meco
delle cose di V. S. Illma ma sin adesso non l'ha
Illustrissime et très honorée Madame,
Je reçus votre lettre hier au soir par M.
Vardelli, et je remercie humblement Votre
Illustrissime Seigneurie de la faveur qu'elle me
fait de m'écrire, car cela me donne mille
consolations.
La Mère, donc, par une spéciale
providence de Dieu, se trouvait déjà en voyage
et même était arrivée à Bourges lorsque me
parvint le mémoire du Sérénissime Prince. De
Bourges elle viendra, je crois, à Paris, pour
fonder un Monastère ; car, bien que la mort du
cardinal du Perron amène quelques difficultés
dans les dispositions qu'il avait prises, je vois
néanmoins que petit à petit elles [305]
disparaissent. En quittant cette ville, elle
passera à Dijon, où tout est prêt pour la
fondation d'un autre Monastère, et au
printemps elle pourra se rendre à Turin, si
toutefois les choses sont en état pour
l'établissement. Ainsi j'espère que, sans perdre
de temps, elle emploiera bien ses journées,
pourvu que la divine Majesté l'aide et la
conforte.
L'Illustrissime M. le Comte se porte
très bien et me donne, grâce à sa bonté, tous les
témoignages de bienveillance qu'on saurait
souhaiter. Il me dit en chemin qu'il voulait me
parler de ce qui concerne Votre Illustrissime
1008 Serviteur, peut-être, de la maison Scaglia.
1009 La Mère de Chantal.
1010 Ce mémoire du prince Victor-Amédée concernait-il la fondation projetée d'un Monastère de la Visitation à Turin
?
1011 Du Perron était décédé le 5 septembre (voir ci-dessus, note (978), p. 294). Les anciennes relations de la fondation
du Monastère de Paris ne nous ont pas gardé le souvenir de ce qu'il avait fait pour préparer les voies à l'établissement.
Quant aux difficultés, elles devaient se prolonger plus que le Saint ne le pensait alors. (Voir ci-après, pp. 317, 333.)
1012 La Mère de Chantal jeta en effet les fondements de la Maison de Dijon le 9 mai 1622, à son départ de Paris. (Cf.
ci-dessus, note (757), p. 216.)
1013 Voir ibid., note (981), p. 296.
1014 Le père de la destinataire, Philibert-Gérard Scaglia, comte de Verrua.
214/346

22.5 Page 215

▲back to top
fatto, nè credo che sia per farlo cosi presto,
essendo assai occupato intorno alli negotii che
tutti sopra le braccia sue ricadono et sopra
quelle dell'Illustrissimo signor Marchese suo
fratello1015.
Il viaggio è stato
buonissimo, il Serenissimo nostro [306]
Padrone essendo venuto allegramente, et
havendo ricevute moltissime carezze et
applausi generali de grandi et minimi, ognuno
benedicendo Iddio et la Casa de Prencipi
nostri, et testificando un fervor particolare per
il matrimonio ricercato1016. Et li cinque giorni
di navigatione1017 ho havuto tempo di godere
la presenza del Serenissimo Cardinale, non
senza parlare di moltissime cose buone ; et due
volte il giorno Sua Altezza legeva libri francesi
per andar di più in più imparando la lingua et
le cose di questo Regno. Et anco alle volte
vogava et mi faceva vogare con lei, pensando
al principio che io non sapessi quell'arte, nella
quale tutta via s'è trovato che io era dottore.
Essendo giunti a Orleans, incontrati da
monsieur de Betune1018 et di Modena1019,
siamo stati duoi giorni per [307] riposare un
poco, et ivi, il giorno di tutti Santi, Sua Altezza
fece la santissima Comunione, et poi, a piccole
giornate, siamo venuti qui ; et non si può dire
con quanto honore fu ricevuta Sua Altezza, nè
quanto fosse il popolo che venne fuori per
vederla, nè si è veduto, di memoria d'huomo,
tanta concurrentia per entrata de Prencipe1020.
Seigneurie, mais il ne l'a pas fait jusqu'à
présent ; je ne crois pas même qu'il le puisse de
si tôt, occupé comme il l'est par les affaires qui
toutes retombent sur ses bras et sur ceux de M.
le Marquis votre frère.
Le voyage a été excellent ; notre
Serenissime Seigneur est venu [306]
joyeusement. Partout il a reçu un accueil très
empressé, avec un applaudissement général
des grands et des petits ; chacun bénissait Dieu
et la Maison de nos Princes, témoignant un
ardent désir du mariage projeté. Pendant les
cinq jours de navigation, j'ai pu jouir à loisir de
la présence du Sérénissime Cardinal, non sans
parler de beaucoup de bonnes choses. Deux
fois par jour, Son Altesse lisait des livres
français pour apprendre de plus en plus la
langue et s'initier aux affaires de ce royaume.
Parfois même elle ramait et me faisait ramer
avec elle, pensant d'abord que je ne savais pas
cet art, dans lequel pourtant il s'est trouvé que
j'étais déjà passé docteur.
Arrivés à Orléans, accueillis par MM.
de Béthune et de Modène qui étaient venus à
notre rencontre, nous arrêtâmes deux [307]
jours pour nous reposer un peu ; là, Son Altesse
fit la sainte Communion pour la fête de la
Toussaint, puis, à petites journées, nous
vinmes jusqu'ici. Il ne se peut dire avec quels
honneurs Son Altesse fut reçue, ni combien
grande était la foule sortie pour la voir ; de
mémoire d'homme, on n'avait vu pareille
1015 Auguste-Manfred Scaglia, marquis de Caluso (voir note (984), p. 296).
1016 Entre Victor-Amédée de Savoie et Christine de France.
1017 Voir ci-dessus, note (996), p. 301.
1018 Fils de François de Béthune et de Charlotte Dauvet, Philippe, comte de Selles, Charost, etc., eut quelque chose du
génie de son frère le grand Sully. Il se distingua surtout par son talent diplomatique dans les ambassades qui lui furent
confiées : en Ecosse en 1599, à Rome en 1601, auprès des ducs de Savoie et de Mantoue (1616), de l'Empereur et des
princes d'Allemagne (1619), du Pape Urbain VIII (1624). Il fut marié deux fois : en février 1600 à Catherine Le
Bouteiller, et en novembre 1608 à Marie d'Alègre, veuve de Jean de Sabrevois. M. de Béthune mourut à l'âge de
quatre-vingt-huit ans dans son château de Selles, en 1649. (D'après Moreri, 1740, tome II.)
1019 Cousin et confident intime de Luynes, François de Rémond était né de Laurent de Rémond, seigneur de Modène,
et de Françoise Gautier. Son père avait obtenu de Charles IX, en mars 1573, des lettres de naturalisation pour lui et
pour son fils, car ils étaient originaires du Comtat Venaissin. François arriva aux honneurs en même temps que le duc
de Luynes ; en 1617. il est conseiller d'Etat, conseiller aux Conseils d'affaires et direction des finances et gouverneur
de Fougères en 1620, grand Prévôt de France en 1621. Choisi pour ambassadeur extraordinaire afin de rétablir la paix
entre le roi d'Espagne et le duc de Savoie, il avait préparé de loin, à la cour de Turin, le mariage du prince de Piémont
et de Christine de France qui était maintenant sur le point de se décider. Plus tard, la faveur l'abandonna, et Richelieu
le tint quatre ans à la Bastille. Le Cardinal-ministre se souvenait sans doute des efforts tentés en 1618 par Modène,
sur l'ordre du Roi, pour éloigner de la Reine mère l'Evêque de Luçon. François de Rémond avait épousé, le 18 février
1602, Catherine d'Allemand ; il mourut à une date qui nous est inconnue et fut enterré dans la chapelle des Pénitents-
gris à Avignon. (D'après d'Hozier, Armorial de France ; De Stefani, La Nunziatura di Francia del Card. Bentivoglio,
passim, etc.)
1020 Ce fut le 31 octobre, au soir, que le Cardinal de Savoie débarqua dans la ville d'Orléans ; il logea à l'hôtel du comte
de Saint-Pol, et François de Sales avec lui. Le 5 novembre, le Prince couchait à Chartres où, le lendemain matin, le
215/346

22.6 Page 216

▲back to top
Il Re, poi, la Regina, Monsieur fratello del Re,
Madama magiore et minore fecero caresse
grandissime a detta [308] Altezza1021, ma sopra
tutti il Re che tutti li suoi dicono haver fatto
segni straordinarii di allegrezza1022.
Madama magiore è compitissima,
havendo scolpita la maestà et benignità nel
volto ; et è grande per l'età sua, et ha una gratia
incomparabile a carezzare con modestia et
gravità singolare1023. Il suo prædicatore, molto
mio amico [309] et huomo di gran pietà1024, mi
disse che haveva una divotione singolare, una
prudentia esquisita et una bontà notabilissima.
Non si può dire poi in che concetto sia qui il
nostro Prencipe magiore ; tutti lo chiamano
specchio de Principi in bontà verso li popoli, in
pietà, in fortessa et in summa in tutte le parti
che si possono desiderare. Et quanto a Sua
Altezza Serenissima, ella ha tanti servitori qui
partiali che non si possono numerare, et le lodi
sue si publicano ognora.
Ma ho torto, perchè so che si
mandaranno rilationi particolarissime di tutto
affluence pour une entrée de prince. Le Roi, la
Reine, Monsieur frère du Roi, Madame l'aînée
et Madame la cadette firent ensuite grande fête
à Son [308] Altesse, mais le Roi surtout qui, au
dire de tous les siens, a donné des marques
extraordinaires de joie.
Madame l'ainée est accomplie, la
majesté et la bonté sont empreintes sur ses
traits ; elle est grande pour son âge et met une
grâce incomparable à accueillir, avec une
modestie et une gravité singulière, ceux qui
l'approchent. Son prédicateur, mon grand ami
et homme [309] très pieux, m'a dit qu'elle est
douée d'une rare piété, d'une exquise prudence,
d'une bonté remarquable. Il ne se peut dire en
quelle estime est ici notre Prince majeur : tous
l'appellent le miroir des princes en bonté pour
les peuples, en piété, en vaillance, enfin en
toutes les qualités qu'on saurait désirer. Quant
à Son Altesse Sérénissime, si nombreux sont
ici ses partisans dévoués, qu'il est impossible
de les compter ; partout on publie ses louanges.
marquis de Cœuvres et M. de Bonneuil vinrent le prendre avec les carrosses de la cour. On dîna à Bourg-la-Reine, et
quelques heures après eut lieu l'entrée solennelle à Paris. Toute la noblesse accourut au-devant du fils de Charles-
Emmanuel qui, pour honorer sa maison, avait près de lui les deux hommes les plus remarquables de la Savoie :
l'Evêque de Genève et le président Favre. Celui-ci aimait à rappeler, quatre ans plus tard, « l'enivrement de la gloire
» auquel il céda ce jour-là en se voyant placé dans la même voiture que son ami et en entendant les murmures
louangeurs de la foule : « Voilà l'illustre Evêque de Genève, le plus grand théologien de nos jours ! Voilà le président
Favre qui a publié tant d'ouvrages, et qui est devenu comme le frère de François de Sales par la tendre affection et
incomparable amitié qui les unit ! » (Cf. Mugnier, Hist. du Président Favre, 1902-1903, chap. XX.)
1021 Pour la première fois, l'Evêque de Genève se trouvait en face des augustes enfants du Roi qu'il avait aimé et pleuré.
L'aîné, Louis XIII, avait alors dix-sept ans. de même que son épouse Anne d'Autriche. Gaston était né en 1608,
précédant d'un an « Madame la cadette, » tandis que « Madame l'ainée » devait compléter ses treize ans le jour même
de son mariage avec le prince de Piémont. Pendant son séjour en France, le saint Prélat reverra plus d'une fois les
membres de la famille royale ; chacun lui vouera une estime et une vénération qui croîtront avec les années et dont les
témoignages se multiplieront après sa mort. La Reine, alors, les reportera sur la Mère de Chantal et sur l'Ordre de la
Visitation dont elle fut l'amie et la protectrice. A son tour, le Saint lui montrera sa spéciale bienveillance en guérissant
miraculeusement le roi Louis XIII (voir tome XVI, note (560), p. 176), et plus tard son fils, le jeune Louis XIV, réduit
à l'extrémité par une petite vérole des plus malignes. Sa belle-sœur Henriette partagea ses sentiments pour les Filles
de celui qui, en 1619. lui prédisait « une gloire plus solide » que celle de la nouvelle princesse de Piémont. Solide et
durable, en effet, la gloire acquise par l'épouse de Charles Ier d'Angleterre autant dans les jours de sa grandeur qu'au
temps de son infortune. Bossuet le redisait, en 1669, devant le cœur de la princesse, dans l'église de la Visitation de
Chaillot, fondation d'Henriette de France et son asile durant de longues années. Quant au duc d'Orléans, la Mère de
Chaugy nous raconte qu'en l'année 1642, « en deux mois consecutifs qu'il demeura en » la ville d'Annecy, il « ne passa
aucun jour de venir entendre deux Messes aupres du tombeau du Serviteur de Dieu ; une, disoit il. pour rendre son
devoir a l'Eglise, et l'autre pour honnorer et invoquer son protecteur François de Sales. » (Process. remiss. Gebenn.
(II), ad 19um interrog.)
1022 Maurice de Savoie fut reçu par Louis XIII en audience privée, le soir même de son arrivée ; la réception solennelle
eut lieu le lendemain. Le 12 novembre, l'ambassadeur de Charles-Emmanuel demandait au nom de son père la main
de Christine de France pour le prince de Piémont. Agréant la demande, mais sans y donner une solution immédiate,
le Roi emmena à Saint-Germain son hôte illustre.
1023 « C'est un joyau de piété et de vertu, » écrivait d'elle le nonce Bentivoglio (vol. III, p. 65 de l'ouvrage cité à la p.
308). Mais il avoue aussi que la fille de Henri IV aurait préféré un roi à l'héritier du duché de Savoie.
1024 Serait-ce le P. Binet, Jésuite ? Au moment du mariage de la Princesse, il lui dédie La Vie du Bien-heureux Amedee
duc III de Savoye, dans des termes qui dénoteraient une certaine intimité avec la cour. Au reste, c'était en effet « un
homme très pieux » et « grand ami » du Saint ; il sera destinataire.
216/346

22.7 Page 217

▲back to top
il viagio et de tutte le cose successe qui. Dirò
Mais j'ai tort [de vous en écrire si long],
solamente che ho trovato Parigi con tanto sachant qu'on doit envoyer des relations
accrescimento di divotione che è un stupore ; détaillées du voyage et de tout ce qui s'est
et quel che è sopra tutto, il Re ha un concetto passé. J'ajouterai seulement que j'ai trouvé à
tanto alto della santissima religione catholica, Paris un tel accroissement de piété que c'est
che si ha da sperare ogni beneditione in questo merveille ; le Roi surtout a une si haute idée de
Regno.
la très sainte religion catholique, qu'on peut
Al nostro buon P. D. Giusto mille et espérer toutes sortes de bénédictions sur ce
mille saluti, et non mancarò di fare tutti li royaume.
officii che si potranno per sua Congregatione
A notre bon Père D. Juste mille et mille
nell'occorrenze. [310]
salutations ; je ne manquerai pas, à l'occasion,
Iddio sia eternamente lodato, et Egli de faire à sa Congrégation tous les bons offices
dalla sua santa mano tengha et benedica V. S. que je pourrai. [310]
Illma, della quale io sono
Dieu soit éternellement loué ; qu'il
Humilissimo et certissimo servitore, daigne, de sa sainte main, tenir et bénir Votre
FRANCO, Vescovo di Geneva. Seigneurie Illustrissime, dont je suis
9 Novembre 1618, in Parigi.
Le très humble et très assuré serviteur,
Di gratia, V.S. Illma saluti cordialmente
FRANÇOIS, Evêque de Genève.
il nostro Padre D. Giusto,1025quelle
9 novembre 1618, à Paris.
Serenissime non mancarò di offerire preci et
De grâce, que Votre Illustrissime
Sacrificii
Seigneurie veuille bien saluer cordialement
notre Père D. Juste, … ces Sérénissimes… je
All' Illma Sigra mia osservandissima,
ne manquerai pas d'offrir prières et
La Sigra Donna Genevra Scaglia.
Sacrifices
Turino.
A l'Illustrissime et très honorée Madame,
Revu sur l'Autographe conservé à la
Dona Ginevra Scaglia. Turin.
Visitation de San Remo (Italie).
_____
MCDLXXXV. A Madame de Charmoisy1026. Le seul mot de
consolation que puisse dire le Saint. Comment apaiser les
sanglots et soupirs.
Paris, novembre 1618.
Mon esprit ne peut cesser de penser en vous, ma tres chere Cousine, ma Fille, et ne voudroit
faire autre chose [311] que de vous parler en la façon qu'il peut, et ne sçait neanmoins que vous
dire, estant, comme le vostre, encor tout estonné ; sinon, ma tres chere Fille, que le divin Espoux
1025 Le bas de l'Autographe a été coupé, il n'en reste que deux demi-lignes.
1026 Dans l'édition de 1626, cette lettre suit celle du 10 septembre 1617 à Mme de Montfort, avec cette adresse : A la
mesme. Hérissant (tome III, p. 329), admettant l'identité de destinataire, ajoute la date de septembre 1617. Mais il est
évident que ces lignes, écrites à une veuve, cousine de François de Sales, furent envoyées à Mme de Charmoisy (voir
tome XIII, note (481), p. 179), pour la consoler de la mort de son mari, arrivée le 28 octobre 1618.
Claude Vidomne de Chaumont, seigneur de Charmoisy (voir tome XII, note (510), p. 216), avait été désigné
par le duc de Savoie pour accompagner le cardinal Maurice à Paris. Il était sur le point de partir (24 octobre) quand la
maladie l'arrêta à Chambéry. Le 26, il fit un premier testament modifié par celui du lendemain, et le 28, le vieil ami
et cousin de l'Evêque de Genève mourut chrétiennement, sans revoir sa femme, alors malade elle-même à Marclaz.
L'oraison funèbre du seigneur de Charmoisy fut prononcée dans l'église Saint-François d'Annecy, le 17 décembre, par
D. Candide Postcolonna, Barnabite. (D'après J. Vuÿ, La Philothée, etc., I, chap. XIV, XV, et les Acta Collegii
Annessii.)
217/346

22.8 Page 218

▲back to top
de nos ames veut que nous regardions tous nos evenemens dans le sein de sa celeste Providence et
que nous jettions nos affections en l'eternité, ou nous nous reunirons tous pour ne jamais plus estre
separés. O ma Fille, pourquoy nous sommes nous jamais asseurés et confiés en la vanité de cette
vie perissable ? Nos pretentions sont au dele, ou il faut donq lancer nos affections.
En somme, vous voyla, ma tres chere Fille, au vray essay de la fidelité que vous deves a
Dieu, auquel vous aves si souvent resigné toutes vos adventures. Ma tres chere Cousine, tenes
vostre cœur en haut et mettes le sacré Crucifix sur vostre poitrine, affin qu'il accoyse vos sanglotz
et souspirs. Soyes bien toute sienne et, croyes moy, il sera tout vostre.
Pour moy, je ne puis pas dire plus que jamais, mais s'il se pouvoit dire, certes, je dirois
qu'inseparablement, plus que jamais, je suis
Tout vostre, sans condition ni reserve,
FRANCS, E. de Geneve. [312]
_____
MCDLXXXVI. A la Mère Favre, Supérieure de la Visitation de
Lyon (Fragment). Une pépinière de fondations. Vertus à y
enraciner. Ce que la Mère Favre doit lire dans le cœur de son
père spirituel.
Paris, [fin novembre ou décembre 1618 1027.]
……………………………………………………………………………………………………..
Vous me distes, ma tres chere Fille, qu'en vostre Mayson on faisoit particuliere profession
de l'egalité d'esprit. Pour Dieu, je vous en conjure, taschés de bien establir cet esprit la en tout,
avec celuy de la douceur et humilité reelle. Je regarde meshuy vostre Mayson comme une pepiniere
de plusieurs autres ; c'est pourquoy il faut songer d'y enraciner les grandes et parfaites vertus de
l'abnegation de son amour propre, l'amour de son abjection, la mortification des humeurs
naturelles, la sincere dilection, affin que Nostre Seigneur et sa tressainte Mere soyent glorifiés en
nous et par nous.
Nous avons icy la cour, cela m'oste beaucoup de mon loysir d'escrire a mon gré ; mais ma
grande Fille se contentera bien aussi de lire dans mon cœur de loin, que je suis parfaitement sien
en Celuy qui, pour estre nostre et affin que nous fussions siens, voulut bien mourir pour nous.
Vives toute a Dieu, ma tres chere Fille, donnes tous les momens de vostre vie avec un grand soin
a Celuy qui vous prepare son amiable eternité.
Je suis tout vostre.
FRANÇS, E. de Geneve. [313]
_____
1027 La « grande Fille » dont le saint Evêque parle dans le second alinéa est certainement la Mère Favre. Il l'avait vue
à son passage à Lyon vers la fin d'octobre (cf. ci-dessus, note (996), p. 301), et les conseils donnés dans ces lignes ont
dû, semble-t-il, suivre d'assez près cette rapide visite. « Nous avons icy la cour, » dit François de Sales. La date ne
pourrait-elle donc pas se fixer après le retour de Saint-Germain où le Roi avait emmené le cardinal Maurice aussitôt
son arrivée ?
218/346

22.9 Page 219

▲back to top
MCDLXXXVII. A la Mère de Bréchard, Supérieure de la
Visitation de Moulins1028. Comment Dieu bénit une œuvre. —
Trois fondements de la Visitation. La racine de la joie.
Paris, 3 décembre 1618.
Je salue vostre cœur de tout le mien et vous prie d'aymer tous-jours bien ce vieux pere qui
vous cherit, certes, de tout son cœur de plus en plus, ma tres chere Fille, et se res-jouit d'apprendre
que, graces a Dieu, cette Mayson la s'advance en humilité, douceur, paix et amour divin. Qu'a
jamais l'eternelle Bonté soit benie !
On parle fort de faire un Monastere de la Visitation a Turin1029. Voyla, ma tres chere Fille,
comme Dieu multiplie et benit l'œuvre qu'il luy a pleu de faire commencer par la petitesse et
abjection de troys petites creatures, lesquelles pour cela doivent s'esvertuer d'estre de plus en plus
toutes a la divine Majesté et a cette vocation, pour la rendre tous les jours plus aggreable a Dieu.
Je vous escris selon mon sentiment present, car il faut que j'escrive ainsy a l'ame de ma tres
chere Fille, priant Dieu qu'il la face sainte, et moy aussi, qui suis tant esloigné de ce bonheur.
Encor vous faut-il dire ce mot, ma tres chere Fille : si vous n'estes pas favorisee, aymés
bien cette abjection. Croyes moy, Dieu void volontier ce qui est mesprisé1030, et la bassesse aggreee
luy fut tous-jours aggreable. Dieu est si bon, qu'il visitera interieurement nostre Visitation, la
fortifiera et l'establira a la solide humilité, simplicité et mortification. [314]
Vives joyeuse tant que vous pourres, de cette joye paisible et devote de laquelle l'amour de
nostre abjection est la racine. Ma tres chere Fille, je vous salue d'un esprit qui est inseparablement
vostre.
Vive Jesus ! Amen.
FRANCS, E. de Geneve.
Le 3 decembre 1618.
_____
1028 Cette lettre fut écrite certainement à l'une des trois premières Mères, et non moins certainement à la Mère de
Bréchard qui à Moulins, n'était « pas favorisee, » et avait tout lieu d'aimer « cette abjection. » Il est vraisemblable que
nous n'avons ici qu'un texte tronqué, peut-être même composé de plusieurs fragments.
1029 Voir ci-dessus, Lettres MCDLXXVIII, p. 295, et MCDLXXXIV, p. 306.
1030 Cf. Ps. CXXXVII, 6.
219/346

22.10 Page 220

▲back to top
MCDLXXXVIII. Au Prince de Piémont, Victor-Amedée.
Félicitations à Victor-Amédée au sujet de son mariage. Eloge
de la future princesse de Piémont. Grand prince et très digne
cardinal.
Paris, 18 décembre 1618.
Monseigneur,
En cette generale allegresse de tout ce royaume sur l'heureuse conclusion du mariage de
Vostre Altesse1031, je ne puis ni ne dois m'empescher de rendre quelque tesmoignage de la mienne,
laquelle, certes, est d'autant plus grande, que d'un costé je suis plus obligé a la bonté de Vostre
Altesse, et de l'autre j'ay reconneu plus particulierement un tres parfait assemblage de perfections
en Madame, au visage, au maintien, au parler ; en la conduitte de laquelle on remarque tant de
traitz de bonté, de prudence, de douceur et de devotion, qu'on ne sçait discerner laquelle de ces
perfections y èst plus parfaite. Et parce que la Sainte Escriture dit1032 que le mary d'une femme
bonne est heureux, je puis des a present augurer toute sorte de bonheur a Vostre Altesse pour ce
regard, et en benir Nostre Seigneur de tout mon cœur, puisque, [315] comme la mesme Escriture
nous annonce1033, la mayson et les richesses nous sont acquises par nos peres, mais la femme sage
et vertueuse, a proprement parler, est donnee comme un pretieux present de la liberalité divine.
Au surplus, Monseigneur, je ne sçaurois exprimer avec combien de grace Monseigneur le
Cardinal se comporte en cette cour, et combien il est adroit a mesler la qualité de grand Prince que
sa naissance luy a donnee, avec celle de tres digne Cardinal que sa profession luy fait tenir, alliant
admirablement bien la franche et generale courtoysie, qui est si desiree et estimee de cette nation,
avec la modestie et bienseance qui y est si pretieuse, comme par tout le monde.
Ainsy donq, Monseigneur, a Dieu soit de toutes parts honneur et gloire, avec tres humble
action de graces1034 pour les consolations qu'il donne et qu'il prepare encor a Son Altesse
Serenissime1035 et a la vostre, de laquelle je suis sans fin,
Monseigneur,
Vostre tres humble, tres fidele et tres obeissant
orateur et serviteur,
FRANÇS, E. de Geneve.
Paris, 18 decembre 1618.
_____
1031 Le 12 novembre, Louis XIII avait agréé la demande officieuse de la main de sa sœur Christine, pour Victor-
Amédée de Savoie. (Voir ci-dessus, note (1022), p. 309.) Le 21, le cardinal Maurice la renouvela officiellement, et le
mariage fut résolu en principe, bien qu'on attendît encore, pour en rendre la nouvelle publique, l'assentiment du roi
d'Espagne.
1032 Eccli., XXVI, 1.
1033 [...], XIX, 14.
1034 [...], I, 17[...] ; […] III, 12.
1035 Le duc de Savoie.
220/346

23 Pages 221-230

▲back to top

23.1 Page 221

▲back to top
MCDLXXXIX. A Madame de la Fléchère. Douloureuses
nouvelles de Savoie ; nombreuses et bonnes affaires à Paris.
Difficultés pour l'établissement de la Visitation.
Paris, 19 décembre 1018.
Croyes, ma tres chere Fille, que le trespas de ce cousin1036 et l'apprehension des regretz de
la chere cousine m'ont vivement touché ; mays parmi tout cela, Dieu soit [316] beni qui, par sa
providence, reduit toutes choses au proffit des siens1037.
Je suis icy presque accablé d'affaires, toutes bonnes, graces a Nostre Seigneur. Vous en
sçaures le detail par mon frere de Thorens1038, car je m'imagine qu'on luy en escrit par le menu.
Nous aurons au moins la plus vertueuse Princesse qui vive1039.
J'ay escrit selon que nostre seur, Mme de Bressieu, desiroit, au P. D. Juste1040.
Nostre bonne Mere se porte bien a Bourges1041. Icy, nous avons beaucoup de peine a faire
reuscir l'establissement de la Congregation et crains grandement qu'il ne soit differé1042, bien que
c'est merveille de la quantité des ames qui desirent en estre.
Si pour vostre consolation vous desires aller a la Visitation passer quelques jours, pourveu
que ce soit sans en [317] sortir pendant ledit tems, vous le pouves. Salues, je vous prie, nos cheres
Seurs, car il n'y a moyen d'escrire ; et nostre seur de Bons1043 et Mme la Comtesse et ses filles1044.
Dieu soit a jamais nostre Tout, ma tres chere Fille. Je suis en luy, plus vostre qu'il ne se
peut dire.
A Paris, le 19 decembre 1618.
A Madame
Madame de la Flechere.
Revu sur une copie déclarée authentique, conservée à Turin, Archives de l'Etat.
1036 M. de Charmoisy (voir ci-dessus, note (1026), p. 311).
1037 Cf. Rom.,V.
1038 Louis de Sales, devenu baron de Thorens à la mort de son frère Bernard. (Voir tome XII, note (165), p. 95.)
1039 Christine de France accordée en mariage à Victor-Amédée de Savoie. (Voir la lettre précédente.)
1040 Ennemonde de la Forest, dame de Bressieu (voir le tome précédent, note (660), p. 189), désirait-elle l'intervention
de D. Juste Guérin, alors à Turin, dans les affaires ennuyeuses qu'elle avait en Piémont ?
1041 La Mère de Chantal était arrivée dans cette ville le 14 novembre. Cinq Sœurs l'accompagnaient (voir ci-après,
note (1158), p. 352) : l'une d'elles, Sœur Anne-Catherine de Beaumont, devait suivre plus tard la Sainte à Paris.
Aux instances de l'Archevêque. Mgr Frémyot, pour avoir une Maison de la Visitation dans sa ville épiscopale
(voir ci-dessus, note 652), p. 193), s'étaient jointes les démarches d'une aspirante à la vie religieuse, Mlle de Lissav.
Grâce au père de cette jeune fille, le « Maire fit, avec messieurs les échevins, convoquer les Conseillers et les personnes
les plus considérables de la ville... Reconnoissant qu'il y alloit de l'honneur et de la gloire de Dieu, et de l'utilité
publique, on conclut l'établissement. » (Hist. de la Fondation de la Visitation de Bourges.) Les Religieuses furent
reçues avec un enthousiasme et une affection que Mgr Frémyot et M. de Neufchèzes, son neveu et grand-vicaire,
sentaient plus que tous. Nulle fondation n'avait eu plus de promesses et de garants de prospérité matérielle : de riches
prétendantes s'étaient annoncées ; le Prélat avait donné ordre à ses officiers de veiller aux besoins de la petite
Communauté. Les officiers oublièrent les ordres de leur maître, et « les neuf filles de 10.000 écus qui servaient de
fondement à ce nouveau monastère » se réduisirent « à une ». Et la Sainte continuait : « Il ne s'était encore rien
commencé de plus appuyé sur la divine Providence, et c'est ce qui nous console. » (Lettres, vol. I, p. 288.) Précieux
débuts pour la première Maison établie depuis la transformation de l'Institut en Ordre religieux, avec la clôture et les
vœux solennels.
1042 Voir ci-dessus., p. 305, et note (1011), p. 306.
1043 Jeanne-Bonaventure de la Forest, Religieuse à Bons.
1044 La veuve du comte de Tournon (voir tome XV, note (46), p. 1), safille Marguerite et mesdames de la Croix et
Guillet de Monthoux (voir tomes XVI, notes (654), p. 204, (274), p. 78, et XVII, note (1030), p. 305). La comtesse de
Rossillon, fille aînée de Philiberte de Beaufort, ne demeurait pas en Savoie.
221/346

23.2 Page 222

▲back to top
MCDXC. A la Mère de Chantal, a Bourges (Fragment). Un
sermon devant « la Reyne et son beau monde. »
Paris, 24 décembre 1618.
……………………………………………………………………………………………………..
Oüy, ma Fille, j'ay presché ce matin devant la Reyne et tout son beau monde1045 ; mais en
verité, je n'ay pas presché avec plus de soin, plus d'affection ni plus de playsir qu'en ma pauvre
petite Visitation. Ah ! ma Fille, que la vive presence du Roy et de la Reyne du Ciel fait bien eclipser
devant les yeux de nostre cœur toutes autres grandeurs de la terre !
……………………………………………………………………………………………………...
Revu sur un ancien Ms. de l'Année Sainte, conservé à la Visitation d'Annecy. [318]
_____
MCDXCI. A Madame de la Fléchère. Permission et conditions
pour l'entrée de la destinataire à la Visitation. Pourquoi le
Saint est de bon cœur à Paris, pourquoi il y souffre.
Paris, 29 décembre 1618.
Ma tres chere Fille,
Je vous ay des-ja escrit1046 que vous pourries entrer avec nos Seurs, puisque vous en estes
de cœur, d'affection et de pretention, pourveu que vous n'en sorties point pour aller parmi la ville,
ailleurs.
Je voy les douleurs et estonnemens de vostre cœur, parmi lesquelz Dieu ne laisse pas de
regner ; c'est pourquoy vous ne deves pas vous en tourmenter.
Je suis icy jusques a Pasques1047 ; et croyes moy, ma tres chere Fille, puisqu'il le faut, j'y
suis de bon cœur, mais d'un cœur qui se plairoit grandement d'estre parmi nos petitesses et dans
mon païs. Il ne se peut dire toutefois combien on voit d'exemples de pieté icy, mesme au milieu
de la cour. Mais, en somme, je n'y ay pas mon devoir, ni mes cheres brebis.
Dieu soit beni ! Ayes bon courage ; il faut passer parmi les ronces et espines en ce desert,
pour aborder a la terre de promission.
Je suis vostre ma tres chere Fille.
Paris, le 29 decembre 1618. [319]
_____
1045 Devant la reine Anne d'Autriche (voir ci-après, Lettre MCDXCII, p. 320).
1046 Epist. MCDLXXXIX.
1047 En 1619, Pâques tombait le 31 mars, et le départ du prince de Piémont avait d'abord été fixé pour cette époque.
Mais il ne quitta la cour de France que le 24 septembre.
222/346

23.3 Page 223

▲back to top
MCDXCII. A la Mère de Chantal, a Bourges (Fragment). Un
novice qui ne sera pas profès. Racine, branches et fruits.
Pommes de senteur entre les mains de Dieu. Le
dépouillement total de soi-même, combien difficile.
Paris, 29 décembre 1618 1048.
……………………………………………………………………………………………………..
Ne croyes pas, ma tres chere Mere, qu'aucune faveur de la cour me puisse engager. O Dieu,
que c'est chose bien plus desirable d'estre pauvre en la mayson de Dieu, que d'habiter dans les
grans palais des Rois1049 ! Je fay icy le noviciat de la cour ; mais jamais je n'y feray profession,
Dieu aydant. La veille de Noël je preschay devant la Reyne, aux Capucines1050, ou elle fit sa
Communion ; mais je vous asseure que je ne preschay ni mieux ni de meilleur cœur devant tous
ces princes et princesses que je fay en nostre pauvre petite Visitation de Nessi.
……………………………………………………………………………………………………..
O Dieu, ma tres chere Mere, il faut bien mettre son cœur en Dieu et ne point jamais l'en
oster. Il est luy seul nostre paix1051, nostre consolation et nostre gloire : que reste-il, sinon que nous
nous unissions de plus en [320] plus a ce Sauveur, affin que nous portions bon fruit1052 ? Ne
sommes nous pas bien heureux, ma chere Mere, de pouvoir enter nos cœurs sur celuy du Sauveur
qui est enté sur la Divinité ? car ainsy, cette infiniment souveraine Essence est la racine de l'arbre,
duquel nous sommes les branches1053, et nos amours les fruitz : ç'a esté le sujet de ce matin.
Courage, ma cherement unique Mere, ne cessons point d'eslancer nos cœurs en Dieu : ce
sont ces pommes de senteur qu'il se plait a manier, laissons les luy donq manier a son gré. Ouy,
Seigneur Jesus, faites tout a vostre gré de nostre cœur ; car nous n'y voulons ni part ni portion, ains
le vous donnons, consacrons et sacrifions pour jamais.1054
……………………………………………………………………………………………………..
Je salue cherement nos Seurs. Je suis marri que nostre Seur [Jeanne-Marie] ayt la fantasie
de changer de Mayson1055. Quand sera ce que nous ne voudrons rien, ains laisserons entierement
le soin a ceux a qui il appartient de vouloir pour nous ce qu'il faut ? Mais il n'y a remede : la propre
volonté est bridee par l'obeyssance, et toutefois on ne peut l'empescher de regimber et faire des
caprices ; il faut supporter cette infirmité. Il y va bien du tems avant que nous soyons du tout
despouillés de nous mesmes et du pretendu droit de juger ce qui nous est meilleur, et de le desirer.
J'admire le petit Enfant de Bethlehem, qui sçavoit tant, qui pouvoit tant, et, sans dire mot
quelcomque, se laissoit manier, et bander, et attacher, et envelopper comme on vouloit.
1048 Dans la première édition, cette lettre porte la date du 29 décembre 1619, et débute par un alinéa que nous
retrouverons au 18 septembre de cette même année. Le suivant : « Ne croyes pas, » etc., et le dernier ne peuvent être
que du temps de Noël 1618, alors que l'Evêque de Genève séjournait à Paris. Quant aux deux paragraphes : « O Dieu,
ma tres chere Mere, » et : « Courage, » etc., ce sont certainement encore des coutures ; mais l'impossibilité de les
classer sûrement nous oblige à les donner ici. (Cf. tome XIV. note (67), p. 14.)
1049 Ps. LXXXIII, 11.
1050 Près des jardins des Tuileries, dans la rue Saint-Honoré, s'élevait le couvent des Capucins, fondé en 1574 par
Catherine de Médicis, et plus tard illustré par le P. Joseph du Tremblay ; non loin, dans la même rue, s'étaient établies
les Capucines. Il est difficile de dire dans lequel de ces deux couvents François de Sales communia la reine Anne
d'Autriche, car l'Année Sainte manuscrite porte : « aux Capucins, » et la première édition des Epistres, suivie par les
autres jusqu'à Hérissant, donne : « aux Capucines. » (Cf. ci-dessus, Lettre MCDXC.)
1051 Ephes., II, 14.
1052 Joan., XV, 5.
1053 Ibid.
1054 Ici, les éditeurs de 1626 intercalent quelques lignes de la lettre du 5 avril 1607. (Voir tome XIII, dernier alinéa de
la Lettre CCCXCI, p. 276.)
1055 Sœur Jeanne-Marie de la Croix de Fésigny, l'une des coopératrices de la fondation de Moulins. (Voir le tome
précédent, note (591), p. 164.) Le saint Evêque la désigna plus tard pour la Maison de Paris.
223/346

23.4 Page 224

▲back to top
Dieu soit a jamais au milieu de vostre cœur et du mien, ma tres chere Mere.
FRANÇS, E. de Geneve.
Le 29 decembre …. [321]
_____
MCDXCIII. A un ecclésiastique. Le mot du plus franc amour
selon la nature et la grâce. Assaut d'humilité et d'affection.
[1618 1056.]
Monsieur,
Je vous ay tesmoigné par mes lettres que je prendrois a faveur de me nommer vostre frere,
qui est le mot du plus franc et desirable amour de tous ceux que la nature nous a donné et que la
grace nous ordonne. Mays quand je parle avec vous sous ce tiltre de frere, c'est avec un tres
singulier sentiment de fraternité ; et toutefois, vous me demandes encor que je sois vostre pere et
que vous soyes mon filz. Certes, je ne sçaurois refuser mon consentement a vos desirs ; mais usons
un peu de temperament, je vous supplie, qui m'oste le blasme d'estre un peu trop facile en un sujet
ou il y a danger d'outrecuydance.
Les freres aisnés succedoyent aux peres, anciennement, dans les familles, et estoyent
comme vice peres de leurs freres, en sorte que c'estoyent des freres peres, et des peres freres ; et
les puisnés estoyent des enfans freres et des freres enfans. Or sus, soyons comme cela. Il est vray,
l'affection que j'auray pour vous tiendra rang, puisqu'il vous plait, de paternelle, a cause de sa force
et constance, et de fraternelle, pour sa confiance et privauté ; et, comme que ce soit, « la charité
esgale ceux qui l'ont1057 » avec tant d'art, qu'ilz sont entre eux freres, peres, meres, enfans. Or, c'est
celle la dont vous me parles, mon tres [322] cher Frere ; c'est pourquoy je vous diray encor, mon
tres cher Filz, et mon tres cher Pere encor.
Et moy, ne pouvant sans prejudice du porteur escrire plus longuement, je demeureray d'un
cœur paternellement fraternel,
Vostre tres affectionné pere et frere,
FRANÇS, E. de Geneve.
_____
1056 Comment concilier l'adresse A un Religieux, donnée par les premiers éditeurs, avec l'appellation de Monsieur dont
use le Saint à l'égard de son correspondant ? Nous croyons plus sûr d'indiquer pour destinataire Un ecclésiastique, qui
pourrait bien être Artus de Lionne, seigneur d'Aoste, et Père spirituel de la Visitation de Grenoble (voir ci-dessus, note
(827), p. 240). Ce pieux ecclésiastique se nommait le fils de l'Evêque de Genève, et lui témoigna toujours une grande
et filiale vénération. Plusieurs lettres ayant été déjà échangées entre eux, comme le montre la première phrase du texte,
celle-ci doit dater probablement de la seconde moitié de 1618.
1057 Adagium Pythagoræ attributum.
224/346

23.5 Page 225

▲back to top
MCDXCIV. A la Mère de Chastel, Supérieure de la Visitation
de Grenoble. Conseils de prudence au sujet de visions et de
révélations. Ruses du malin esprit. Exemple de Nicole
Tavernier. Quelle conduite tenir à l'égard d'une âme qui
marche par une voie extraordinaire ; la leçon qu'elle doit
apprendre. Puissance de l'imagination.
Paris, [fin 1618 ou commencement de 1619 1058.]
Puisque je n'ay sceu plus tost, ma tres chere Fille, je respondray maintenant aux deux pointz
principaux pour lesquelz vous m'aves cy devant escrit.
En tout ce que j'ay veu de nostre Seur Marie Constance1059, je ne treuve rien qui ne me face
penser qu'elle [323] soit fort bonne fille, et que partant il la faut aymer et cherir de tres bon cœur.
Mais quant a ses visions, revelations, predictions, elles me sont infiniment suspectes, comme
inutiles, vaines et indignes de consideration ; car d'un costé, elles sont si frequentes, que la seule
frequence et multitude les rend dignes de soupçon. D'autre part, elles portent des manifestations
de certaines choses que Dieu declare fort rarement : comme, l'asseurance du salut æternel, la
confirmation en grace, le degré de sainteté de plusieurs personnes, et cent autres choses pareilles
qui ne servent tout a fait a rien ; de sorte que saint Grrgoire ayant esté interrogé par une dame
d'honneur de l'Imperatrice, qui s'appelloit Gregoire, sur l'estat de son futur salut, il luy respondit1060
: « Vostre douceur, ma Fille, me demande une chose qui est esgalement et difficile et inutile. »
Or, de dire qu'a l'advenir on connoistra pourquoy ces revelations se font, c'est un pretexte
que celuy qui les fait prend pour eviter le blasme des inutilités de telles choses. Il y a plus : que
quand Dieu se veut servir des revelations qu'il donne aux creatures, il fait preceder ordinairement
ou des miracles veritables, ou une sainteté tres particuliere en ceux qui les reçoivent. Ainsy le
malin esprit, quand il veut notablement tromper quelque personne, avant que de luy faire faire des
revelations fauses, il luy fait faire des prodiges faux et luy fait tenir un train de vie fausement saint.
1058 Nous avons dit (note (953), p. 286) qu'en se rendant à Paris, l'Evêque de Genève avait passé à Grenoble en octobre
1618 ; c'est alors qu'il vit la Sœur Marie-Constance. Cette lettre doit donc dater de la fin de 1618 ou du commencement
de 1619.
1059 Les avis sûrs et parfaitement sages donnés ici par François de Sales, au sujet des choses extraordinaires qui se
passaient en cette Novice de vingt-cinq ans, contribuèrent à préparer en elle une œuvre de Dieu magnifique. Toutes
les ruses de l'ennemi écartées, toutes les superfluités de l'imagination retranchées, l'action divine s'exerça librement ;
et parmi les premières Mères de la Visitation, Sœur Marie-Constance de Bressand est une de celles à qui l'on peut
donner le titre de précurseur de la bienheureuse Marguerite-Marie. Consacrée tout entière à l'amour de l'humanité
sainte de Jésus, elle reçut d'intimes communications du Sacré-Cœur ; elle s'y était disposée par une humilité profonde,
et M. Olier, qui fut longtemps à la fois son maître et son disciple, la tenait pour une âme des plus anéanties qu'il eût
connues.
La Mère de Bressand était née à Grenoble, et dès l'âge de sept ans avait reçu l'appel à la vie parfaite. Si un
instant le monde lui sourit, la lecture de l'Introduction a la Vie devote la ramena à sa première ferveur, et ses progrès
furent tels que l'Evêque de Genève, en 1617, la jugea capable de lire le Traitté de l'Amour de Dieu. L'année suivante,
la jeune fille prenait l'habit de la Visitation, et le 19 août 1619 elle prononça ses vœux. Dix mois après, Sœur Marie-
Constance fut envoyée au Monastère de Paris où elle remplit les charges d'Assistante et de Directrice. En 1625, elle
commence à Moulins une longue carrière de supériorité qu'elle continuera à Nantes et à Grenoble. Elle mourut dans
sa Maison de profession, en octobre 1668. Le Fondateur l'avait appelée « une rare fille », et la Mère de Chantal n'avait
pas craint de lui dire à elle-même (Lettres, vol. III, p. 104) : « Vous êtes l'une de nos Supérieures que j'aime et estime
le plus, et à qui j'ai entière confiance. » (Voir sa Vie dans l'Année Sainte, 1870, tome X, p. 583.)
1060 S. Greg. Mag., lib. VI, ep. XXII.
225/346

23.6 Page 226

▲back to top
Il y eut du tems de la bienheureuse Seur Marie de l'Incarnation1061, une fille de bas lieu qui
fut trompee [324] d'une tromperie la plus extraordinaire qu'il est possible d'imaginer1062. L'ennemy,
en figure de Nostre Seigneur, dit fort long tems ses Heures avec elle, avec un chant si melodieux
qu'il la ravissoit perpetuellement. Il la communioit fort souvent sous l'apparence d'une nuee
argentine et resplendissante, dedans laquelle il faysoit venir une fause hostie dedans sa bouche. Il
la faysoit vivre sans manger chose quelcomque. Quand elle portoit l'aumosne a la porte, il
multiplioit le pain dans son tablier, de sorte que, si elle ne portoit de pain que pour trois pauvres et
il s'en treuvoit trente, il y avoit pour donner a tous tres largement, et d'un pain fort delicieux, duquel
son confesseur mesme, qui estoit d'un Ordre tres reformé, envoyoit ça et la parmi ses amis
spirituelz, par devotion. Cette fille avoit tant de revelations, qu'en fin cela la rendit suspecte envers
les gens d'esprit. Elle en eut une extremement dangereuse, pour laquelle il fut treuvé bon de faire
faire essay de la sainteté de cette creature ; et pour cela, on la mit avec la bienheureuse Seur Marie
de l'Incarnation, lhors encor mariee, ou estant chambriere et traittee un peu durement par feu
monsieur Acarie1063, on descouvrit que cette fille n'estoit nullement sainte, et que sa douceur et
humilité exterieure n'estoit autre chose qu'une doreure exterieure que l'ennemy employoit pour
faire prendre les pilules de son illusion, et en fin on descouvrit qu'il ny avoit chose du monde en
elle qu'un amas de visions fauses. Et quant a elle, on conneut bien que non seulement elle ne
trompoit pas malicieusement le monde, mais qu'elle estoit la premiere trompee, ny ayant de son
costé aucune autre sorte de faute, sinon la complaysance qu'elle prenoit a s'imaginer qu'elle estoit
sainte, et la contribution qu'elle faisoit de quelque simulation et duplicités pour maintenir la
reputation de sa [325] vaine sainteté. Et tout cecy m'a esté raconté par la bienheureuse Seur Marie
de l'Incarnation.
Voyes, je vous prie, ma chere Fille, l'astuce et finesse de l'ennemy, et combien ces choses
extraordinaires sont dignes de soupçon. Neanmoins, comme je vous ay dit, il ne faut pas pour cela
mal traitter cette pauvre Seur, laquelle, comme je croy, n'a point d'autre coulpe en son affaire que
celle du vain amusement qu'elle prend en ces vaines imaginations. Seulement, ma tres chere Seur,
il luy faut tesmoigner une totale negligence et un parfait mespris de toutes ses revelations et
visions, tout ainsy que si elle racontoit des songes ou des resveries d'une fievre chaude, sans
s'amuser a les refuter ni combattre ; ains au contraire, quand elle en veut parler, il faut luy donner
le change, c'est a dire, changer de propos et luy parler des solides vertus et perfections de la vie
religieuse, et particulierement de la simplicité de la foy, par laquelle les Saintz ont marché, sans
visions ni revelations particulieres quelcomques, se contentans de croire fermement en la
revelation de l'Escriture Sainte et de la doctrine apostolique et ecclesiastique, inculquant bien
souvent la sentence de Nostre Seigneur : Il y aura plusieurs faiseurs de miracles et plusieurs
prophetes ausquelz il dira a la fin du monde : Retires vous de moy, ouvriers d'iniquité ; je ne vous
connois point1064. Mais pour l'ordinaire, il faut dire a cette fille : Ma Seur, parlons de nostre leçon
que Nostre Seigneur nous a recommandé d'apprendre, disant : Apprenes de moy que je suis humble
et doux de cœur1065. Et en somme, il faut tesmoigner un mespris absolu de toutes ces revelations.
Et quant au bon Pere qui semble les approuver, il ne faut pas le rejetter ni disputer contre luy, ains
seulement tesmoigner que, pour espreuver tout ce traffiq de revelations, il semble bon de le
mespriser et n'en tenir conte. Voyla donq mon advis, pour le present, quant a ce point.1066 [326]
1061 Mme Acarie (voir tome XIII, note (427), p. 153).
1062 Tous les historiens de la bienheureuse Marie de l'Incarnation ont parlé de cette fille de Reims, nommée Nicole
Tavernier, dont la sainteté apparente en imposa d'abord aux plus éclairés dans les choses spirituelles. Les détails que
relate dans cette lettre l'Evêque de Genève complètent ceux de du Val, Boucher, etc.
1063 Pierre Acarie, mari de la Bienheureuse. (Voir tome XV, note (468), p. 157.)
1064 Matt., VII, 22, 23 ; Luc., XIII, 27.
1065 Matt., XI, 29.
1066 Ici, la copie de M. Michel Favre, reproduite par les éditeurs de 1626, insère une partie d'une autre lettre qui est
certainement de l'année 1622. Les trois alinéas qui suivent appartiennent-ils vraiment au texte de 1618 ? L'édition
princeps les y unit, mais D. Jean de Saint-François (La Vie du Bien heureux François de Sales, Evesque et Prince de
Geneve, Paris, 1624, liv. IV, p. 334), après avoir cité tout ce qui précède, ajoute : « Il écrit d'une autre en ces termes :
226/346

23.7 Page 227

▲back to top
……………………………………………………………………………………………………
J'avois oublié de vous dire que les visions et revelations de cette fille ne doivent pas estre
treuvees estranges, parce que la facilité et tendreté de l'imagination des filles les rend beaucoup
plus susceptibles de ces illusions que les hommes : c'est pourquoy leur sexe est plus addonné a la
creance des songes, a la crainte des espritz et a la credulité des superstitions. Il leur est souvent
advis qu'elles voyent ce qu'elles ne voyent pas, qu'elles oyent ce qu'elles n'oyent point et qu'elles
sentent ce qu'elles ne sentent point.
Playsante histoire d'une de mes parentes, de laquelle le mary estant mort en Piemont,
s'estant imaginee qu'il l'avoit laissee grosse, elle demeura en cette imaginaire grossesse quatorze
mois, avec des imaginaires douleurs et des imaginaires sentimens des mouvemens de l'enfant, et a
la fin cria tout un jour et toute une nuit parmi des tranchees imaginaires d'un imaginaire
enfantement ; et qui l'eust creuë a son serment, elle eust esté mere sans faire aucun enfant.
Il faut donq traitter cet esprit la avec le mespris de ses imaginations, mays un mespris doux
et serieux, et non point mocqueur ni desdaigneux. Il se peut bien faire que le malin esprit ayt
quelque part en ces illusions ; mais je croy plustost qu'il laisse agir l'imagination, sans y cooperer
que par des simples suggestions. La similitude apportee pour l'explication du mystere de la sainte
Trinité est bien jolie, mays elle n'est pas hors de la capacité d'un esprit qui se complaist en ses
propres imaginations.
……………………………………………………………………………………………………...
Revu en partie sur une copie faite par M. Michel Favre, conservée
à la Visitation de Venise. [327]
_____
MCDXCV. Au Père Gérard de Tournon, Capucin1067 L'esprit de
contrariété là où devraient régner l'union et la « conformité. »
Un poste favorable pour un ecclésiastique. Sollicitude du
Saint pour quelques paroisses du pays de Gex. Son humilité
et sa reconnaissance à l'égard du destinataire.
Paris, fin 1618 ou commencement de 1619 1068.
Mon Reverenti Pere,
Ce m'est un desplaysir sensible de voir un si grand manquement de douceur parmi
messieurs nos ecclesiastiques de dela1069, et ne sçai ce que je ne ferois pas pour moderer leurs
passions. Mays il ny a remede ; l'esprit de contrarieté se fourre par tout, mais plus violemment ou
il sçait que l'unité et conformité seroit de plus grande edification. J'escris a monsieur le Curé1070
« J'avois oublié de vous dire que les visions et revelations de cette « fille, » etc. Nous ne pouvons donc affirmer qu'il
s'agisse encore de la Sœur de Bressand.
1067 Ce Religieux appartenait à la Province de Lyon ; tout ce qu'on sait de lui, c'est qu'il était, en 1613, Gardien du
couvent de Châlons, et de celui du Puy en 1625. (Note du R. P. Edouard d'Alençon, archiviste général des FF. MM.
Capucins.)
1068 Le projet alors existant du retour en Savoie pour Pâques ne permet pas d'éloigner beaucoup cette lettre de celle du
29 décembre à Mme de la Fléchère (voir p. 319). D'autre part, elle est certainement antérieure au 16 février 1619, jour
auquel M. Jacquin résigne sa cure de Chevry.
1069 Du pays de Gex. Dans sa lettre du 11 mai 1617 (voir ci-dessus, p. 1), le saint Evéque laisse entrevoir qu'il y avait
des dissensions entre les ecclésiastiques de cette région, et, à cette date, sa présence devenait nécessaire pour • trancher
nettement et ordonner a chacun son office et ce quil devra faire. »
1070 Etienne Dunant, curé de Gex. (Voir à l'Appendice I, sa lettre au Saint.)
227/346

23.8 Page 228

▲back to top
affin qu'il ne remue rien ni contre M. Jaquin1071, ni contre M. Paris1072 jusques a mon retour, qui
sera, Dieu aydant, soudain apres Pasque1073.
Je seray bien ayse que M. Jaquin soit en quelque lieu [328] ou il puisse s'exercer en sa
vocation, puisqu'a Chevry il n'a pas la commodité, et comme quelques uns pensent, ni beaucoup
de volonté, dautant qu'il ny a point encor fait de service. De sçavoir sil seroit expedient de le loger
ou a Sessi, ou a Grilly, je n'en puis pas bien resoudre de si loin, encor que j'inclinerois plus tost a
Grilly. puisque luy mesme y incline ; et je croy qu'il y fera bien, car il a asses de capacité pour se
rendre capable, quand il voudra y soigner1074.
Reste, mon Reverend Pere, qu'il vous playse de vous treuver avec les trois ou quatre
ecclesiastiques que je marque en la lettre que j'escris a M. le Curé, pour faire un advis de ce qui
sera necessaire estre fait pour Sessi, Grilly, Chevry, Versoex, Thuery ; et j'escris un billet a
monsieur Rogex1075 affin qu'il face des provisions selon cela, ayant creance que je ne sçaurois
mieux faire que de suivre si bon conseil.
Je ne suis pas prest a consentir qu'on oste le service de l'eglise de Gex, ni que M. Paris soyt
maltraitté, car je l'estime trop. Que si j'ay treuvé bon que M. Jaquin ny eut plus rien a faire, ça esté
par ce qu'il failloit preferer l'un des deux, dont le premier ne vouloit point de compaignon, ni le
second de maistre.
Volontier je remetz M. Dagan en l'exercice de ses Ordres, et suis bien ayse que vous en
rendiés bon tesmoignage1076. Je suis en butte a tous les complaignans, et puis en certaine façon
dire : 1077 Quis infirmatur, et ego [329] non infirmor1078 ? Vous participés avec compassion, je
m'asseure, a toutes nos imbecillités et miseres, et aves bon besoin d'exercer la patience parmi la
multitude de nos impatiences, devant estre arbitre parmi nous, affin de nous tenir en paix et
tranquillité d'esprit. Dieu en sera vostre recompense : ainsy l'en supplie-je, et demeure,
Mon Reverend Pere,
Vostre plus humble confrere et serviteur,
FRANÇS, E. de Geneve.
Paris.
Au R. P. en N. S.
Le P. Gerard de Tournon,
Praedicateur de l'Ordre des Capucins.
Gex.
Revu sur une copie authentique conservée à la Visitation d'Annecy. [330]
_____
1071 Claude Jacquin (voir ci-dessus, note (43), p. 1).
1072 La famille Paris était d'Allonzier ; elle compte trois prêtres contemporains du Saint. Celui dont il s'agit ici est
probablement François ; ordonné diacre par Mgr de Granier, le 19 décembre 1598, il reçut la prêtrise le 6 mars suivant.
Quelle charge remplissait-il au pays de Gex au commencement de 1619 ? Nous ne le savons pas. Le 14 mai de cette
année-là, il fut nommé curé d'Allonzier et mourut en juin 1637. (R. E.)
1073 Cf. ci-dessus, note (1047), p. 319.
1074 Il fut en effet institué curé de Grilly le 16 février 1619.
1075 En l'absence de Jean-François de Sales, alors à Paris, Philibert Roget (voir tomes XI, note (559), p. 249, et XVI,
note (1088), p. 335) remplissait les fonctions de vicaire général.
1076 On peut proposer Guillaume Dagand. prêtre depuis le 23 mars 1613, et curé de La Motte-en-Bauges le 10
septembre 1615, qui mourut en 1626 ; ou encore, et peut-être avec plus de probabilité, Martin Dagand, originaire
d'Allèves, qui entra dans les Ordres en 1614. On ne connaît pas ses différents postes jusqu'en 1626. A cette date, il est
chanoine de Peillonnex ; plus tard il devint chapelain de Saint-Théodore à Bogève, possesseur des bénéfices de
Burdignin et de Brenthonne, et finalement (1658) curé de Foncenex. (R. E.)
1077 Qui est infirme avec lequel je ne sois infirme ?
1078 II Cor., XI, 29.
228/346

23.9 Page 229

▲back to top
Année 1619
_____
MCDXCVI. A la Présidente de Herse1079. Le Saint accepte une
invitation et le carrosse de la Présidente.
Paris, 1619 1080.
V. + J.
De tout mon cœur, Madame, je me treuveray ou vous me marques et quand vous me
marques, et ne refuse pas la commodité de vostre carosse, puisque je n'en ay point que de ceux qui
me favorisent ; parmi lesquelz vous estes, je vous asseure, l'une des ames a laquelle je souhaite
plus cherement, tendrement et fortement toute sorte de sainte consolation, estant sans fin et sans
reserve,
Vostre tres humble serviteur en Nostre Seigneur,
FRANCS, E. de Geneve.
A Madame
[Madame] la Presidente de Herse.
Revu sur l'Autographe conservé à la Visitation de Poitiers. [331]
_____
1079 Charlotte de Ligny, fille de Jean de Ligny, seigneur de Rentilly et de Charlotte Séguier, avait épousé Michel
Vialart de Herse, conseiller du Roi et président aux Requêtes. Femme d'un « esprit élevé, d'un courage indomptable,
d'une ardeur sans pareille pour le bien, » elle fut l'amie et l'émule de toutes les nobles dames qui s'adonnèrent à une
piété sérieuse sous la direction de François de Sales, et se trouvèrent ainsi toutes prêtes à se dévouer à la charité sous
l'impulsion de Vincent de Paul. Celui-ci appelait Mme de Herse « la charitable présidente. » Il lui dut une maison à
Frèneville, et des secours abondants pour toutes ses œuvres, surtout pour celle des Ordinands ; le grand attrait de la
pieuse femme était, en effet, d'aider à la sanctification du clergé. Cousine de M. Olier, elle fut heureuse de le recevoir
avec ses compagnons dans son château de Marchefroy et de soutenir ainsi le début des missions de la fervente Société.
Mme de Herse vivait encore en 1653. (D'après Moreri ; Bougaud, Hist. de St Vincent de Paul, Paris, 1889, tome I, p.
335 ; Vie de M. Olier, Paris-Lyon, 1853, tome I, pp. 2, 212.)
1080 Ce billet, que Migne a placé en 1621, n'a pu être écrit que pendant le séjour de saint François de Sales à Paris en
1619, mais il est impossible d'en préciser davantage la date.
229/346

23.10 Page 230

▲back to top
MCDXCVII. A la Mère de Chantal, a Bourges. Les aventures de
Celse-Bénigne et les tourments de la Mère de Chantal.
Consolations et encouragements. Le bonheur de ceux qui
sont à Jésus-Christ. Un prétendant grandement en peine.
Paris, 5 janvier 1619.
Vous aures, je m'asseure, receu deux de mes lettres1081, ma tres chere Mere, quand celle ci
arrivera, et croyes que je ne perdray desormais null'occasion.
1082 Je suis grandement en peine de vostre affliction, bien que je n'en sache pas les
particularités ; mais je voy bien, par ce peu de paroles que vous m'escrivés, que vous la sentés
vivement1083. Ma tres chere Mere, cette vie mortelle est toute pleine de telz accidens, et les douleurs
de l'enfantement durent souvent plus que les sages femmes ne pensent. En quelles occurrences
pouvons nous faire les grans actes de l'invariable union de nostre cœur a la volonté de Dieu, de la
mortification de nostre propre amour et de l'amour de nostre propre abjection, et en somme, de
nostre crucifixion, sinon en ces si aspres assautz ? Ma tres chere Mere, vous ay-je pas souvent
intimé la nudité de toutes les creatures, pour se revestir de Nostre Seigneur crucifié1084 ? Or sus,
Dieu sera au milieu de vostre cœur, qui vous affermira, et j'espere [332] qu'il conduira ce filz a
bon port et que vous aurés encor la consolation interieure de le sçavoir1085.
Je me porte fort bien, et je pense qu'aujourdhuy on resoudra sur nostre affaire, qui a esté
grandement agité1086. Plus je vay avant en la connoissance du monde, plus j'estime heureux ceux
qui sont a Jesuschrist, quoy qu'ilz endurent pour luy1087.
Je n'ay seulement pas loysir de revoir vostre lettre pour voir si j'y oublie rien. Annessi, tout
va bien, graces a Dieu, Le bon M. de Forax est un peu malade, et grandement en peine sur le sujet
1081 Vide Epist. MCDXC, MCDXCII.
1082 Ce second alinéa, sauf la dernière phrase, avait été inséré par les premiers éditeurs dans un texte bâti, sous la date
du 11 janvier 1619. (Voir ci-après, note (1105), p. 339.)
1083 C'était l'impétueux et brillant Celse-Bénigne qui faisait ressentir à sa mère « les plus sensibles douleurs, » ainsi
qu'elle l'écrit à Mme de la Fléchère. « La cause, » continue-t-elle, « je vous la dirai à bouche. » (Lettres, vol. I, p. 303.)
Etait-ce encore un de ces duels fréquents où le jeune baron risquait avec une si grande insouciance et sa vie et son âme
? Ou bien l'esprit railleur qu'il tenait des Rabutin lui avait-il attiré quelque mésaventure ? « Chantal se moque de tout
le monde, » répéteront plus tard sans relâche ses envieux au roi qui lui donnait sa faveur. Que d'autres sujets, peut-
être, aux larmes de la Mère de Chantal ! « J'ai eu bien des croix... et me suis trouvée avoir le cœur fort maternel, »
confiait-elle à la Mère de Chastel ; « Dieu convertira tout à ta gloire. » (Ibid., p. 302.)
1084 Cf. Rom., XIII, ult. ; Ephes., IV, 24.
1085 Elle l'eut en effet ; «t quelques jours après le glorieux trépas du baron da Chantal au combat de l'île de Ré, elle
pouvait écrire à une de ses Filles : « Il est vrai que j'ai ressenti cette mort, non toutefois comme mort, mais comme vie
pour l'âme de cet enfant, Dieu m'ayant donné un sentiment très tendre et une lumière fort claire de sa miséricorde
envers cette âme. » (Lettres, vol. III, p. 91.)
1086 Il s'agissait de la fondation d'un Monastère de la Visitation à Paris. La comtesse de Saint-Pol, Mme de Villesavin
et des Gouffiers, la présidente Amelot, et plusieurs autres, faisaient des instances pour obtenir cet établissement. (Cf.
ci-dessus, p. 317.)
1087 Cette phrase a été interpolée par les éditeurs de 1626 dans une lettre composée de fragments de différentes dates.
L'un d'eux a été donné au tome XVII, p. 324 (voir les notes (1088) et (1089) de cette page, et, ci-après, note (1131),
p. 346).
230/346

24 Pages 231-240

▲back to top

24.1 Page 231

▲back to top
de sa pretention1088. C'est, a mon gré, le plus digne d'amitié quil est possible de voir. Mon frere1089
est encor aussi un peu mal de son pied. J'ay eu un certain engourdissement de jambes, qui passe,
et ne m'a nullement empesché d'aller et faire tout ce que j'ay volu. [333]
J'avois grand desir de voir Monseigneur nostre Archevesque1090, mais puis qu'il ne vient
pas, je me res-jouis en la consolation que vous aves de sa presence et luy bayse tres humblement
les mains, et salue de tout mon cœur nos tres cheres Seurs1091 ; qui suis infiniment, ainsy que vous
sçaves, ma tres chere Mere, vous mesme, en une façon incomparable tout vostre.
A Paris, 1619, le V janvier.
Revu sur l'Autographe appartenant à M. le comte Sormani-Andreani, à Milan.
_____
MCDXCVIII. A une religieuse. Le cœur de l'Enfant Jésus : ses
attraits. Une sainte jalousie. Comment concourir, du fond
du cloître, à la prédication du Saint. Efficacité de la prière.
[Paris, vers le 6 janvier 1619 1092.]
Et croyes moy bien aussi, ma chere Fille, que ce m'est une fort particuliere consolation de
recevoir de vos lettres et de vous envoyer des miennes.
Vous estes bien aupres de cette cresche sacree en laquelle le Sauveur de nos ames nous
enseigne tant de vertus par son silence. Mays, qu'est ce qu'il ne nous dit pas en se taisant ? Son
petit cœur, pantelant d'amour [334] pour nous, devroit bien enflammer le nostre. Mais voyes
combien amoureusement il a escrit vostre nom dans le fond de son divin cœur, qui palpite la sur
la paille pour la passion affectueuse qu'il a de vostre avancement, et ne jette pas un seul souspir
devant son Pere auquel vous n'ayes part, ni un seul trait d'esprit que pour vostre bonheur. L'aymant
attire le fer, l'ambre attire la paille et le foin : ou que nous soyons fer par dureté, ou que nous
soyons paille par imbecillité, nous nous devons joindre a ce souverain petit Poupon, qui est un vrai
tire cœur.
1088 Dès avant le 4 janvier 1616, il était question du mariage de Françoise de Chantal avec Guillaume de Bernard de
Foras. (Cf. Lettres de la Sainte, vol. I, p. 73, et voir ci-dessus, Lettre MCCCLXIX, p. 110.) En 1619, cette alliance
paraissait près de se conclure ; le 30 janvier, la Mère de Chantal, alors à Bourges, attendait l'arrivée de sa fille qu'une
maladie avait retenue en Savoie, et écrivait : « Je pense que dès qu'elle sera arrêtée quelque part, que le mariage se
fera bientôt. » (Lettres, vol. I, p. 295.) Et un mois après : « Vous ai-je dit que Françoise était à Dijon et que tous les
parents s'accordent à son mariage ? Mais M. de Foras est retenu par Monseigneur à cause de quelque digne occasion
qui regarde son bien. » (Ibid., p. 312.) Pendant ce délai, la jeune fille eut le temps de réfléchir, et le 5 mai, sa mère
avouait, non sans tristesse, qu'elle avait « chancelé pour les commodités temporelles. » (Ibid., p. 319.) L'année
suivante, Françoise devait rencontrer en M. de Toulongeon, peut-être autant de mérite, et sûrement plus de richesses
que dans le courtisan du duc de Nemours.
1089 Jean-François de Sales.
1090 L'Archevêque de Bourges, André Frémyot.
1091 Les Sœurs fondatrices du Monastère de Bourges (voir ci-après, note (1158), p. 352).
1092 Le texte indique que ces lignes furent écrites vers le temps de l'Epiphanie, c'est-à-dire dans les premiers jours de
janvier, et tandis que le Saint prêchait « au monde les louanges de Dieu. » Or, les stations de l'A vent finissaient
ordinairement à Noël ; à Paris, au contraire, les prédications de l'Evêque de Genève ne furent point interrompues, et
il ne quitta la chaire de Saint-André-des-Arts que pour en occuper d'autres dans nombre d'églises de la capitale. C'est
sur ces données que nous appuyons la date proposée.
Quant à la destinataire, on pourrait songer à la Sœur Claude-Agnès Joly de la Roche, alors Assistante-
commise au Monastère d'Annecy, très particulièrement douée pour bien parler de Dieu ; ou encore à une des
Religieuses de Sainte-Catherine, avec lesquelles François de Sales aimait à méditer les mystères de la Crèche.
231/346

24.2 Page 232

▲back to top
Ouy, ma Fille, ne retournons point en la region de laquelle nous sommes sortis1093 ; laissons
pour jamais l'Arabie et la Chaldee, et demeurons aux piedz de ce Sauveur. Disons avec la celeste
Espouse1094 : J'ay treuvé Celuy que mon cœur ayme, je le tiens, et ne labandonneray.
Helas ! ma chere Fille, l'envie que vous me portes procede elle de ce que je presche au
monde les louanges de Dieu ? O que c'est quelquefois un grand contentement au cœur de publier
la bonté de ce qu'on ayme ! Mays si vous desires de prescher avec moy, je vous en prie, faites le,
ma Fille, tous-jours, priant Dieu qu'il me donne des paroles selon son cœur et selon vos souhaitz.
Combien de fois arrive il que nous disons des bonnes choses parce que quelque bonne ame nous
les impetre ? Ne presche elle pas asses, et avec cet advantage, que n'en sçachant rien elle ne s'en
enfle point ? Nous ressemblons aux orgues, ou celuy qui met le souffle fait en verité le tout et n'en
porte point la louange. Aspirés donq souvent pour moy, ma Fille, et vous prescheres avec moy ; et
moy, croyes moy, je joins mon ame a la vostre tous les jours par le lien du tressaint Sacrement,
que je ne reçoy point qu'avec vous et pour vous. Faites donq, ma Fille, faites mille fois le jour ces
saintes aspirations a Dieu, protestant que vous estes toute, totalement, a jamais et eternellement
sienne.
VIVE JESUS ! car c'est nostre vie1095. Qu'a jamais son saint amour vive et regne dans nos
cœurs. [335]
_____
MCDXCIX. A Dona Ginevra Scaglia. Au milieu des affaires de
la cour, François de Sales n'oublie pas la vocation de sa fille
spirituelle. La conduite de la Providence sur ses serviteurs.
— Quand différer l'exécution d'un vœu en toute sûreté de
conscience.
Paris, 7 janvier 1619.
Illustrissima Signora mia in Christo
Illustrissime Madame, très honorée
osservandissima,
dans le Christ,
Ecco che parte il signor Marchese suo
fratello con tutte le buone speditioni che si
potevano desiderare1096 ; et rimettendomi a
quello che da lui si saprà, dirò solamente a V.
S. Illma che non mancarò punto di far tutti
l'officii che possibili mi saranno appresso
l'Eccellentia del signor Conte1097, acciò agiuti
il buon desiderio di V. S1098. Et piacendo al
Signore, haverò facilità horamai de trattar con
lui quando non haverà più tanti negocii adosso,
Voilà que M. le Marquis votre frère
part avec toutes les dépêches aussi bonnes
qu'on pouvait les souhaiter. M'en remettant à
ce qu'on apprendra par lui-même, je dirai
seulement à Votre Illustrissime Seigneurie,
que je ne manquerai pas de faire tout ce qui me
sera possible auprès de Son Excellence M. le
Comte, afin qu'il seconde votre pieux désir. S'il
plaît à Dieu, j'aurai désormais plus de facilité
de traiter avec lui ; car il ne sera plus surchargé
1093 Cf. Matt., II, 12.
1094 Cant., III, 4.
1095 Cf. Philip., II, 21.
1096 Auguste-Manfred Scaglia, marquis de Caluso (voir ci-dessus, note (984), p. 296), ne partit que le samedi suivant,
comme le dit le Saint dans le postscriptum, emportant les articles du contrat de mariage de Christine de France, signé
la veille, 11 janvier.
1097 Philibert-Gérard Scaglia, comte de Verrua, père de la destinataire. (Voir note (985), ibid.)
1098 Dona Ginevra songeait à se faire Religieuse et à établir un Monastère de la Visitation à Turin. (Cf. ci-dessus,
Lettre MCDLXXVIII, p. 295.)
232/346

24.3 Page 233

▲back to top
mentre si aspettarà la venuta del Serenissimo de tant d'affaires tandis qu'on attendra la venue
sposo1099. [336] Et veramente, detta Sua du Sérénissime époux. [336] Et vraiment, Son
Eccellenza mi favorisce di una Excellence me favorise d'une confiance toute
particolarissima confidentia ; onde spero di particulière, ce qui me fait espérer pouvoir
poter qualche cosa con essa.
quelque chose sur elle.
V. S. Illma fa bene di rimettere nelle
Votre Seigneurie Illustrissime fait bien
mani d'Iddio quel che tocca al P. D. Giusto ; et de remettre entre les mains de Dieu ce qui
già che lui non è consapevole del negotio concerne le P. D. Juste ; et puisqu'il n'est pas
fatto1100Se nascerà qualche calomnia, la au courant du faitS'il s'élevait quelque
divina Providentia la farà presto finire, che così calomnie, la divine Providence la fera bientôt
tratta ella ordinariamente con suoi servi.
cesser, car c'est ainsi qu'elle agit d'ordinaire
De gratia, che la chara anima di V. S. avec ses serviteurs.
non si lasci turbare da scrupuli circa il voto
De grâce, que votre chère âme ne se
fatto da lei d'esser Religiosa ; perchè chi non laisse pas troubler par des scrupules touchant
differisce il pagamento senon per pagar in le vœu que vous avez fait d'être Religieuse ;
moneta più magnifica, non deve esser car, qui ne diffère le paiement que pour payer
chiamato mal pagatore, massime doiie il en meilleure monnaie ne doit pas être appelé
giorno nè il tempo non è præfisso. La charità è mauvais payeur, surtout lorsque le jour ni le
regina della conscientia, et dove dice che per temps n'ont pas été fixés. La charité est la reine
magior gloria dello suo Sposo si differisca, non de la conscience ; quand elle dit de différer
deve la conscientia temere. V. S. aspetta il pour la plus grande gloire de l'Epoux, la
tempo nel quale seco tirarà parechie altre conscience ne doit point craindre. Votre
anime : aspetti pure et non dubiti, che è meglio Seigneurie attend l'heure où elle pourra tirer
senza dubbio il far così.
après soi plusieurs âmes : attendez donc et ne
Non so ancora quando io sia per craignez rien, car sans aucun doute il est mieux
ritornare in là, ma so bene che se così piacerà de faire ainsi.
al Signore, io non tardarò d'andar [337] in
Je ne sais encore quand je retournerai
Torino o col Serenissimo Cardinale, o col en Savoie, mais je sais bien [337] que, s'il plaît
Serenissimo Prencipe1101.
à Dieu, je ne tarderai pas d'aller à Turin, ou
Viva tutta in Dio, a Dio et per Dio V. S. avec le Sérénissime Cardinal, ou avec le
Illma, alla quale di tutto il mio cuore sono
Sérénissime Prince.
Servitore humilissimo et certissimo,
Que Votre Illustrissime Seigneurie
FRANCO, Vescovo di Geneva. vive toute en Dieu, à Dieu et pour Dieu ; de
VII Gennaio 1619, Parigi.
tout cœur je suis
Si ritarda il signor Marchese sino a
Son très humble et très assuré serviteur,
Sabatho1102.
FRANÇOIS, Evêque de Genève.
7 janvier 1619, à Paris.
Illma Sigra osservandissima,
On arrête M. le Marquis jusqu'à
La Sigra Dona Genevra Scaglia.
samedi.
Turino.
A l'Illustrissime et très honorée Dame,
Revu sur l'Autographe conservé à la
Dona Ginevra Scaglia.
Visitation de Harrow (Londres). [338]
Turin. [338]
_____
1099 Le prince de Piémont, Victor-Amédée, arriva le 6 février à Paris, avec son frère, le prince Thomas, après un rapide
voyage par Montmélian, Chambéry, Grenoble, Lyon, Roanne.
1100 Quelques mots ont disparu par l'usure de l'Autographe.
1101 Le cardinal Maurice retourna en Piémont les premiers jours de mars, Victor-Amédée attendit septembre ; mais
l'Evêque de Genève ne suivit ni l'un ni l'autre à Turin. Il ne devait revoir cette ville qu'en 1622. quelques mois avant
sa mort.
1102 Voir ci-dessus, note (1096), p. 336.
233/346

24.4 Page 234

▲back to top
MD. A la Mère de Chantal, a Bourges (Fragments). Jésus
crucifié et Jésus glorifié. Quand est-ce que Dieu supporte
notre fardeau avec nous.
Paris, 11 janvier 1619.
Ma Mere toute tres chere,
Si vous n'aves gueres ni d'or, ni d'encens pour offrir a Nostre Seigneur, vous aures au moins
de la mirrhe1103, et je voy qu'il l'accepte tres aggreablement, comme si ce fruit de vie vouloit estre
confit en la mirrhe d'amertume, tant en sa naissance qu'en sa mort1104. En somme, Jesus glorifié
est beau ; mais quoy qu'il soit tous-jours tres bon, si semble-il qu'il le soit encor plus crucifié. C'est,
pour ce tems present, vostre Espoux, ma tres chere Mere ; a l'advenir, ce sera luy mesme
glorifié.1105
……………………………………………………………………………………………………..
Or sus, c'est Dieu qui veut ainsy mettre nostre cœur au sec ; ce n'est donq pas une rigueur,
c'est une douceur.
Voyla que je vous dis, ma tres chere Mere ; et tout de mesme pour les nouvelles des
desplaysirs de M. [de Chantal1106.] En fin, Nostre Seigneur, peut estre, nous veut ainsy conduire
entre les espines desormais ; et je confesse, pour le regard de moy mesme en moy, qu'il en est bien
tems : en vous, je le supplie de toutes mes forces qu'il attrempe tous-jours doucement son calice ;
mais que nostre volonté ne soit pas faite, ains la sienne toute sainte1107. Ayés bon courage, car
pourveu que nostre cœur luy soit fidele, il ne nous chargera point outre nostre [339] pouvoir, et
supportera nostre fardeau avec nous quand il verra que, de bonne affection, nous sousmettrons nos
espaules.1108
……………………………………………………………………………………………………..
FRANÇS E. de Geneve.
Le 11 janvier 1619.
_____
1103 Cf. Matt., II, […]
1104 Cf. Joan., XIX […]
1105 Ici, les éditeurs de 1626 ont interpolé un passage de la lettre du 5 janvier : « Je suis grandement en peine de vostre
affliction... » (Voir ci-dessus, note (1082), p. 332.)
1106 Celse-Bénigne de Rabutin-Chantal (voir note (1083), ibid.).
1107 Luc., XXII, 42.
1108 Deux ou trois lignes empruntées à la lettre du 19 janvier terminent ce texte dans la première édition et dans celles
qui l'ont suivie. (Voir ci-après, note (1144), p. 349.)
234/346

24.5 Page 235

▲back to top
MDI. A Madame de Granieu. Grand et doux moyen de n'être
jamais séparés. Une recherche inutile. Où la Sainte Vierge
tient son noviciat. Nouvelles de la Mère de Chantal.
Prédications multipliées. La mort de M. de la Coste.
Paris, 16 janvier 1619.
Je sçai bien, ma tres chere Fille, que vostre cœur bienaymé demeure doucement resigné
entre les bras de la divine Providence. Soit que nous allions, soit que nous revenions, soit que nous
soyons en un lieu, soit que nous soyons en divers lieux, pourveu que nous soyons avec Dieu nous
ne pouvons jamais estre separés ; et mesme, si nous avons memoire de la parole de Nostre Seigneur
quand il dit a sa tres chere Mere : Ne sçavies vous pas qu'il failloit que je fusse es affaires de mon
Pere1109 ? car il veut dire que il importe peu ou que nous soyons, pourveu que nous vivions au
service du Pere celeste. C'est pourquoy, ma tres chere Fille, nous serons tous-jours ensemble et
mon cœur sera [toujours1110] inseparable du vostre, puisque, graces a Dieu, nous n'avons [qu'une]
volonté, qui est d'accomplir la sienne selon nostre petitesse, abjection et misere. [340]
Et bien, ma tres chere Fille, [votre lettre] m'a representé l'histoire du debat que vous eustes.
. . . quand vous desirastes d'estre ma fille ; et il n'y a nul [mal] que vous ne sachies pas si bien
exprimer en presence vos petites conceptions comme vous faites en absence. Ne vous [mettez]
nullement en consideration d'ou cela procede, car il n'importe [guère.]
Je participe par ressentiment au mal que monsieur vostre mari souffre1111 et a la peine que
vous en aves, parmi laquelle nostre tres sacree Maistresse et Abbesse vous peut bien donner de la
consolation, vous menant sur la montaigne de Calvaire ou elle tient le noviciat de son monastere,
monstrant la leçon non seulement de bien souffrir, mais de souffrir amoureusement tout ce qui
nous arrive, et a nos plus chers. Je pense que le bon cousin, M. de La Gran1112, y aura bien esté
pour apprendre a supporter le deplaysir que le trespas de son pere luy aura causé1113. J'ay prié Dieu
pour cett'ame que j'honnorois beaucoup, mais je n'ay pas escrit a ce filz par ce que je n'ay sceu
cett'affliction que tard et hors de sayson de consoler.
Nostre Mere se porte bien a Bourges, et croy qu'elle viendra icy avant Pasques, puisque il
y a de l'apparence qu'on y fera un Monastere1114, bien que jusques a present il y ayt eu des grandes
traverses du costé de l'esprit mondain, qui a tous-jours un peu de credit, mesme parmi les gens de
bien, [si qu'il faut être] grandement sur ses gardes. [341]
Je me porte bien, ma tres chere Fille, quoy qu'accablé du travail des prćdications [qu'il me
faut] faire a tous propos, et devant les peuples et devant la cour1115 ; mays cela ne durera que
jusques a Pasques [que, Dieu] aydant, je me retireray en mon petit bercail1116.
1109 Luc., II, 49.
1110 L'Autographe a souffert : il porte sur la marge des traces de brûlure. Quelques mots effacés sont rétablis entre
crochets [ ], autant que possible, d'après le sens et la place qu'ils devaient occuper.
1111 François de Gratet était sujet à des accès de goutte. (Voir ci-dessus, note (769), p. 219.)
1112 Louis de Simiane de la Coste, prieur de Lagrand. (Voir ibid., note (774), p. 220.)
1113 Docteur en droit, avocat, puis conseiller au Parlement de Grenoble, Jean-Baptiste de Simiane de la Coste venait
de mourir après avoir, le 16 novembre 1618, résigné sa charge en faveur de l'un de ses fils. Il avait eu pour parents
François de Simiane et Claire Guérin. Lui-même laissa, de Marie de Portes, Louis, Abel et Claude. (D'après Rivoire
de la Batie, Armorial du Dauphiné, et Prudhomme, Inventaire sommaire des Archives de l'Isère, tome II, p. 28.)
1114 Les difficultés en partie surmontées, la Mère de Chantal arriva pour la fondation dans la capitale le 6 avril. (Cf.
ci-dessus, pp. 317, 333, et ci-après, pp. 351, 364.)
1115 En vérité, c'était « a tous propos, et devant le peuple et devant la cour, » que le saint Evêque distribuait la parole
de Dieu. Après sa station à Saint-André-des-Arts, toutes les églises et chapelles de Paris voulurent l'entendre, et il lui
arriva de prêcher deux, trois et jusqu'à quatre fois un même jour. « D'où l'on a remarqué despuis, » dit Charles-Auguste,
« qu'il fit autant de predications à Paris qu'il y a de jours en l'an. » (Histoire, etc., liv. IX.)
1116 Voir ci-dessus, note (1047), p. 319.
235/346

24.6 Page 236

▲back to top
Dieu soit a jamais la vie de nos cœurs, ma tres chere [Fille, et] veuille y regner
eternellement. C'est par luy et en luy que je suis et seray invariablement, tres absolument vostre,
ma tres chere Fille, toute, certes, et a jamais bienaymee.
FRANÇS, E. de Geneve.
XVI janvier 1619, a Paris.
Je voudrois bien avoir loysir d'escrire a madame de Saint André, car il m'est advis que je
luy doy cela pour l'affliction que son cœur aura eu au trespas de monsieur de la Coste1117 ; mays il
ny a moyen. Je m'en vay prier pour elle, et vous prie de la saluer [humble]ment, ma tres chere
Fille.
Mays que dira nostre bonne et tres aymee Seur Marie Péronne1118 ? Si je puis, je luy
escriray, car je ne sçai si je pourray ; [mais] son cœur sçait bien de quell'affection je suis sien.
A Madame
Madame de Granieu.
Revu sur un fac-simile de l'Autographe, conservé à la Visitation d'Annecy. [342]
_____
MDII. A Madame de Veyssilieu1119. Le « tracas insupportable »
de Paris. Un cher malade en voie de guérison. Ce qu'il faut
pour vivre content en ce monde. Filiale confiance en Dieu et
paix entre ses bras.
Paris, 16 janvier 1619.
Il me semble, ma tres chere Fille, que vostre cœur est tellement asseuré de l'invariable
affection que j'ay pour luy, qu'il ne sçauroit meshuy plus en douter : ce que Dieu fait est bien fait.
Que si j'ay retardé a vous escrire, attribués-le, je vous prie, a ce tracas insupportable parmi lequel
il faut faire plus qu'on ne peut et qu'on ne veut, et ne faire pas ce que l'on veut, encor que l'on le
peut.
J'ay bien apprehendé ci devant que la maladie du bon monsieur vostre pere ne vous tinst
en peine ; mais maintenant que, graces a Dieu, il reprend forces et santé, je suis bien fort soulagé
de ce costé la.
O Dieu, ma tres chere Fille, que c'est une leçon digne d'estre bien entendue, que cette vie
ne nous est donnee que pour acquerir l'eternelle ! Faute de cette connoissance, nous establissons
nos affections en ce qui est de ce monde dans lequel nous passons ; et quand il le faut quitter, nous
sommes tout estonnés et effrayés.
Croyés moy, ma chere Fille, pour vivre content au pelerinage, il faut tenir presente a nos
yeux l'esperance de l'arrivee en nostre patrie, ou eternellement nous arresterons ; et ce pendant
croire fermement (car il est vray) que Dieu qui nous appelle a soy regarde comme nous y allons,
et ne permettra jamais que rien nous advienne que pour nostre plus grand bien. Il sçait qui nous
1117 Honorade de Simiane, femme d'Artus Prunier de Saint-André (voir ci-dessus, note (716), p. 207), était sœur de
Jean-Baptiste de Simiane de la Coste.
1118 La Mère Péronne-Marie de Chastel, supérieure du Monastère de la Visitation de Grenoble.
1119 Nous proposons avec beaucoup de vraisemblance Mme de Veyssilieu pour destinataire. Outre le ton de la lettre qui
lui convient très bien, nous avons encore pour appuyer notre conjecture la mention de la maladie de « monsieur vostre
pere, » c'est-à-dire de Jean de la Croix de Chevrières, qui habitait alors Paris, et, après une rechute, mourut le 8 mars
suivant. (Voir le tome précédent, note (1190), p. 357, et ci-après, Lettre MDXI.)
236/346

24.7 Page 237

▲back to top
[343] sommes, et nous tendra sa main paternelle es mauvais pas, affin que rien ne nous arreste.
Mais pour bien jouir de cette grace, il faut avoir une entiere confiance en luy.
Ne prevenes point les accidens de cette vie par apprehension, ains prevenes les par une
parfaite esperance qu'a mesure qu'ilz arriveront, Dieu, a qui vous estes, vous en delivrera. Il vous
a gardee jusques a present ; tenes vous seulement bien a la main de sa Providence, et il vous
assistera en toutes occasions, et ou vous ne pourres pas marcher, il vous portera1120. Que deves
vous craindre, ma tres chere Fille, estant a Dieu, qui nous a si fortement asseurés qu'a ceux qui
l'ayment tout revient a bonheur1121 ? Ne pensés point a ce qui arrivera demain1122, car le mesme
Pere eternel qui a soin aujourd'huy de vous, en aura soin et demain et tous-jours : ou il ne vous
donnera point de mal, ou s'il vous en donne, il vous donnera un courage invincible pour le
supporter.
Demeures en paix, ma tres chere Fille ; ostés de vostre imagination ce qui vous peut
troubler, et dites souvent a Nostre Seigneur : O Dieu, vous estes mon Dieu1123, et je me confieray
en vous1124 ; vous m'assisteres et seres mon refuge1125, et je ne craindray rien, car non seulement
vous estes avec moy1126, mais vous estes en moy, et moy en vous1127. Que peut craindre l'enfant
entre les bras d'un tel pere ? Soyés bien un enfant, ma tres chere Fille ; et, comme vous sçaves, les
enfans ne pensent pas a tant d'affaires ; ilz ont qui y pense pour eux ; ilz sont seulement trop fortz
s'ilz demeurent avec leur pere. Faites donq bien ainsy, ma tres chere Fille, et vous seres en paix.
Amen.
Vostre tres humble serviteur,
FRANÇS, E. de Geneve.
De Paris, le 16 janvier 1619. [344]
_____
1120 Cf. Deut., I, 31.
1121 Rom., VIII, 28.
1122 Cf. Matt., VI, ult.
1123 Ps. XXX, 15.
1124 Ps. XXIV, 2.
1125 Ps. XC, 2.
1126 Ps. XXII, 4.
1127 Joan., XV, 4.
237/346

24.8 Page 238

▲back to top
MDIII. A la Mère de Chantal, a Bourges. Abjuration d'un
gentilhomme. A quelles conditions peut-on recevoir les
infirmes à la Visitation. Sans jambes, si elle n'est point
estropiée de cœur, une Sœur est capable de tous les exercices
essentiels de la Règle. « La plus brave princesse » qui se
puisse voir et le cartel de son royal fiancé. Celse-Bénigne
s'apprivoise avec le Saint ; ce qui lui manque pour faire des
merveilles. Le projet de mariage entre Mlle de Chantal et M.
de Foras.
Paris, 19 janvier 1619.
Ma tres chere Mere,
Je reviens asses tard des Benedictins1128 ou, graces a Dieu, j'ay receu au giron de l'Eglise
un fort honneste gentilhomme, de bon esprit et de bonnes lettres1129, et si, je doy prescher demain
; c'est pourquoy je vous respondray courtement a vos lettres precedentes.
Nous ne vous envoyerons pas encor ni l'une ni l'autre de ces dames : l'une, qui est la mariee,
par ce qu'elle ne [345] veut donner que cinq cens francz de pension, se sous-mettant, quant au
reste, que sa fille de chambre estant espreuvee, si elle n'est propre a demeurer on la puisse chasser
; et pour ses moyens, bien qu'elle ne se determine a rien, si me semble-il qu'elle se laissera conduire.
L'autre, qui est a mon gré une brave et digne femme, par ce que voulant meshuy essayer si nous
pourrons faire reuscir nostre dessein sans ce bon seigneur, qui, a la verité, est incomparable a tenir
les affaires en longueur, nous aurons grandement besoin d'elle et de sa conduite qui est tres
bonne1130.
1128 L'abbaye bénédictine de Saint-Germain-des-Prés, placée d'abord sous le vocable de Sainte-Croix et de Saint-
Vincent, fut fondée vers 543 par Childebert Ier. Différentes réformes s'y succédèrent ; en 1614, les moines obtinrent
un Bref de Paul V pour introduire celle de Saint-Vanne de Lorraine. Mais ce premier dessein fut sans résultat, comme
aussi leurs démarches pour avoir à leur tête l'Evêque de Genève, après la mort du prieur commendataire, le prince de
Conti (13 août 1614). Le succès devait être plus beau pour s'être fait plus attendre : en 1631, l'abbaye de Saint-Germain
devint le chef de la grande Congrégation réformée de Saint-Maur. Elle subsista jusqu'à la Révolution française, après
avoir été gouvernée par une succession presque ininterrompue de quatre-vingt-huit abbés. Son église, où, le 28 avril
1619, François de Sales consacra l'autel récemment restauré des saints Symphorien et Germain, est aujourd'hui l'une
des paroisses les plus importantes de Paris. (Voir Gallia Christiana, et D. Bouillart, Hist. de l'abbaye de Saint-Germain
des Prés, Paris, 1724.)
1129 Durant son séjour à Paris, l'Evêque de Genève fit une copieuse moisson d'âmes parmi les hérétiques ; aussi il est
difficile d'identifier le converti dont il parle ici. Rappelons toutefois que cinq jours avant, c'est-à-dire le 14 janvier,
prêchant dans l'église Sainte-Madeleine, il prit pour texte ces paroles : Jésus a été obéissant jusqu'à la mort de la
croix. « Un heretique l'atendit dans la sacristie apres le sermon, » poursuit l'Année Sainte manuscrite, « et luy dit avec
beaucoup de fierté que ce tęme de son discours etoit hors de tems. Le Saint lui répondit en souriant : — C'est pour
vous, Monsieur, que j'ai parlé, par ce que je sçais que vous êtes desobeisant a l'Eglise. Cet homme fût si touché de
cette réponce, qu'il se fit instruire et se convertit. » Serait-ce son abjuration que l'infatigable apôtre reçut le 19 janvier
à l'abbaye de Saint-Germain.
1130 Il n'a pas été possible de découvrir le nom des deux dames dont le départ pour Bourges était retardé, ni celui du «
bon seigneur » qui traînait les choses en longueur. Tout au plus, pour ce dernier, pourrait-on songer au grand-vicaire,
Sylvius de Pierrevive, que nous retrouverons plus tard mêlé aux affaires de la Visitation de Paris.
238/346

24.9 Page 239

▲back to top
1131 Ce sera eternellement mon sentiment qu'on ne laisse jamais de recevoir les filles
infirmes en la Congregation, sinon que ce fut des infirmités marquees aux Regles1132, telle que
n'est pas celle de [cette] fille qui n'a point d'usage de ses jambes, car, sans jambes, on peut faire
tous les exercices essentielz de la Regie : obeir, prier, chanter, garder le silence, coudre, manger,
et sur tout avoir patience avec les Seurs qui la porteront, quand elles ne seront pas prestes et
promptes a faire la charité ; car il faudra souvent qu'elle supporte celles qui la porteront, si l'esprit
de dilection ne les porte. Si donq ell'a de quoy nourrir celles qui la porteront, je ne voy rien qui
doive empescher sa reception, si elle n'est point estropiee de cœur ; ains je l'ayme, la pauvre fille,
de tout mon esprit1133. [346]
Nostre Mme de Gouffier ne s'en ira pas, et je vay espiant une bonne commodité pour revoir
un peu son esprit1134.
Vous ne doutes plus de nostre mariage, je m'asseure ; car vous aures sceu meshuy que le
contract fut solemnisé il y a 9 jours, que tout s'est passé avec un bonheur nompareil1135. Les
ambassadeurs ont visité nostre chere petite Madame, avec tiltre de Vostre Altesse et conjouissance
de son mariage : c'est la plus brave Princesse quil est possible de voir. Le Roy a escrit a M. le
Prince de Piemont avec le tiltre de beau frere ; le Roy d'Espagne a rendu tesmoignage
d'aggreement. En Piemont et Savoye on a fait des allegresses incroyables les festes de Noel, lors
que le Prince eut receu les couleurs des faveurs ou les faveurs de couleurs de Madame ; et le Prince
publia un cartel pour un tournois general, auquel il invite toute l'Italie a venir voir mourir a ses
pieds tous ceux qui diront que l'amarante n'est pas la plus belle de toutes les couleurs, et la
Princesse qui favorise cette couleur, la plus digne qui est (sic) jamais esté, et quechevalier qui est
son esclave n'est pas le plus heureux du monde. Mais certes, je ne sçai pas trop bien l'histoire de
ce cartel ; aussi n'est elle pas trop propre pour estre leüe en [347] refectoir. Je veux dire en somme
que nostre mariage est fait, et Son Altesse ne fit jamais tant de demonstration d'une veritable et
extraordinaire [joie] comm'il fait maintenant. M. le Prince sera icy dans troys semaines1136. Voyla
pour ce point.
Monsieur le Baron de Chantal1137 me fit presque mentir quand je vous escrivis, car il arriva
ceans comme j'avois envoyé la lettre, et commença fort a s'apprivoyser avec moy, mays il ne me
parla point de ses affaires. Je feray tous mes effortz pour le faire entrer au service de Monseigneur
le Prince, et croy quil ne sçauroit mieux faire. Mays ce que je crain, c'est que d'abord on ne le
1131 Tout l'alinéa suivant faisait partie, dans l'édition princeps, d'un texte fabriqué dont nous avons déjà reproduit des
fragments en les plaçant à leur vraie date. (Voir le tome précédent, p. 324, Lettre MCCLXVIII, et note (1092), où il
faut lire 19 janvier au lieu de 9 ; cf. aussi ci-dessus, note (1087), p. 333.)
1132 « On excepte, « dit François de Sales dans ses premiers manuscrits des Constitutions, « celles qui auroyent quelque
mal contagieux ou dangereux, « comme les escrouelles, lepre, le haut mal, et autres semblables. » (Autographe
conservé à la Visitation de Thonon ; cf. les Constitutions imprimées : De la fin pour laquelle cette Congrégation a été
instituée.)
1133 La « pauvre fille » si aimée du compatissant Fondateur doit être la Sœur Marie-Françoise Thibaut, entrée au
monastère de Bourges le 27 février 1619, à l'âge de dix-neuf ans. Elle y vécut jusqu'au 11 novembre 1629, « plus en
souffrant qu'en agissant, ayant vrayement experimenté la charitable douceur de l'esprit de l'Institut pour les infirmes...
De son costé, » elle « se rendit si humble, devote et bonne malade que celles qui la servoient devoient bien esperer de
joüyr du merite de sa patience, » (Notice manuscrite, par la Mère de Chaugy.) La Mère de Chantal, vraie fille du doux
Evêque de Genève, avait, elle aussi, une spéciale tendresse pour cette Soeur qu'elle se plaisait à appeler « sa petite
brebis. »
1134 Ce n'était pas chose facile, on le sait, de revoir et manier l'esprit de l'ancienne Religieuse du Paraclet, et la difficulté
allait grandissant tandis qu'elle se fourvoyait au milieu d'interminables procès avec ses sœurs, procès « qui n'étoient
nullement aprouvés de notre Bienheureux Pere. » (Hist. de la Fondation de la Visitation de Paris.)
1135 Les prières du Saint n'étaient pas étrangères au succès de cette grande affaire. Antoine Favre se plut à l'affirmer
plus tard, rappelant qu'au moment où lui-même et le comte de Verrua ne songeaient plus qu'à retourner en Piémont,
découragés par de graves difficultés, François de Sales leur rendit l'espérance. Un matin, au sortir de l'autel : «
Attendez, » leur dit-il, « et Dieu fera tout. » Quelques jours après, le 11 janvier, le contrat de mariage entre Christine
de France et Victor-Amédée de Savoie était signé. (D'après Cambis, Vie manuscrite de St François de Sales, tome II,
p. 717.)
1136 Voir ci-dessus, note (1099), p. 336.
1137 Celse-Bénigne (voir ibid., pp. 332, 339).
239/346

24.10 Page 240

▲back to top
mettra pas en fortune, ains faudra qu'il la gaigne par la sujettion et par sa vertu, bien que,
moyennant cela, il y a apparence qu'il la fera proportionnee a sa condition. Je luy en parleray a la
premiere comodité. Qui luy pourroit persuader que la douceur et courtoysie est incomparablement
plus honnorable que la violence et fierté, le mettroit au chemin de faire des merveilles. Vous
sçaves, ma tres chere Mere, que la mayson du Prince est un monastere, et que pour chose du monde
il ne veut souffrir les desordres ; et bien que venant icy il veuille s'accommoder a la liberté du paÏs,
si est ce quil la veut vertueuse. Somme toute, je feray tout mon pouvoir pour le filz de ma tres
chere Mere, le frere de ma tres chere seur1138, et le neveu d'un tel oncle1139 qui m'en escrit.
M. de Forax le rencontra, et se firent mille caresses ; mais par ce que c'estoit en rue ilz ne
parlerent de rien. Ce qui tient en peine M. de Forax, c'est premierement qu'il ne sçait ou aller
prendre la finale conclusion de son mariage, ou de sa prćtention1140, puisque madamoyselle de
Chantal n'est pas aupres de vous, et que, ni elle sans vous, ni vous sans elle ne feres rien. 2. Il ne
sçait encor si M. de Chantal le voudra, mais de ce second il s'en pourra [348] esclarcir. 3. Il ne
sçait ni combien on luy donne de dote, ni si elle sera liquide, ou sil faudra la prendre des mains de
M. de Chantal. Pour moy, j'explique ces choses a ma façon, n'entendant rien aux termes et
ceremonies avec lesquelles il faut proceder en un'affaire que je ne fis jamais, Dieu merci. Et je
vous asseure que le pauvre garçon n'en est guere plus grand docteur que moy, ouy bien en toute
sorte de vertu, pieté et courtoysie ; et luy est advis qu'encor qu'il n'espouseroit pas Mlle de Chantal,
laquelle pourtant il a bien envie d'espouser, il ne laisserait pas d'estre vostre filz.
Mon engourdissement de jambes n'est rien de douloureux, ni qui m'empesche de marcher
des que j'ay fait dix ou douze pas1141. Je pense que c'est que je suis vieux ; en somme, ce n'est rien,
je vous asseure. Mon frere1142 est au lit, mais il se porte bien. M. Flocard1143 est tous-jours icy
nostre camarade, et tous-jours plein de vertu et de respect pour vous.
1144 Dieu vous benisse et toutes nos Seurs ; mays Dieu vous benisse, ma tres chere Mere,
que je cheris plus que moymesme, ou comme moymesme.
A Paris, le 19 janvier 1619.
Je m'en vay faire response a Monseigneur nostre Archevesque1145, et puis a Mme du Puys
d'Orbe qui m'a envoyé homme expres. Ma tres chere Mere, je suis tout vostre.
A Madame
[Madame] de Chantal.
[A] la Visitation.
Bourges.
Revu sur l'Autographe conservé à la Visitation de Thonon. [349]
_____
1138 Marie-Aimée de Chantal, baronne de Thorens.
1139 Mgr André Frémyot.
1140 Voir ci-dessus, Lettre MCDXCVII, p. 333.
1141 Cf. ci-dessus, p. 333.
1142 Jean-François de Sales (voir ibid.).
1143 Le collatéral Barthélemy Flocard (voir le tome précédent, note (1023), p. 303).
1144 Les éditeurs de 1626 ont interpolé les deux lignes qui suivent à la fin de la lettre du 11 janvier. (Voir ci-dessus,
note (1108), p. 340.)
1145 Cette lettre à l'Archevêque de Bourges n'a pas été retrouvée, non plus que celle à Rose Bourgeois, abbesse du
Puits-d'Orbe.
240/346

25 Pages 241-250

▲back to top

25.1 Page 241

▲back to top
MDIV. A la même. Celse-Bénigne recommandé au Cardinal de
Savoie. Affectueux éloges de M. de Foras. Projet de
fondation dans la capitale. Les Haudriettes. Monde et
mondains. Messages d'affection paternelle.
Paris, 21 janvier 1619 1146.
Ma tres chere Mere,
Je vous escrivis avanthier1147, non sans un grand empeschement, car j'estois grandement
chargé, et croyois que le messager deut partir hier de grand matin ; despuis, j'ay receu la lettre ci
jointe de la pauvre petite seur1148, et un'autre par laquelle elle me dit que je face entrer sa fille
aupres de nostre Princesse, ce que je m'essayeray de faire, Dieu aydant1149. Voyla une lettre de ma
Seur Claude Agnes1150, que vous verres ; puisque elle dit que elles n'ont point de vos nouvelles, je
luy vay [écrire que vous êtes] asses bien, Dieu aydant.
J'ay des-ja parlé a M. nostre bon Prince Cardinal pour favoriser l'entree de monsieur le
Baron de Chantal au service de M. son frere1151 ; il m'a promis de s'y employer. J'en parleray ou il
faudra, et feray tout ce qui sera en moy. M. de Forax m'a veu ce matin et vit hier monsieur de
Chantal duquel, ainsy qu'il m'a dit, il receut nouvelles caresses et comme de frere a frere. Je ne dis
[350] ceci pour rien, mais je le dis a ma chere Mere : si j'avois une seur digne de M. de Forax et
que j'eusse cinquante mille escus a luy donner, je le ferois de tout mon cœur1152. Plus je vay, plus
je l'ayme.
Nous avons fait une petite conference ce matin, de troys dames1153, pour voir comme nous
ferons pour le dessein de l'introduction de nostre Visitation. Nous treuvons treze mille escus d'or
et quinze cens francz de revenu pour commencer ; de sorte que nous allons travailler a bon escient,
et la bonne fille Mme de Gouffier va revoir toutes les dames qui doivent estre de la partie, pour
estre bien asseurés de l'affaire.
Quant a l'autre dessein, il subsiste tous-jours et je le laisse sur pied. Chacun n'est pas de la
bonté de nostre Monseigneur l'Archevesque1154, car on veut reconsiderer nos Regles, et chacun y
treuve son adire, qui d'une façon, qui d'un'autre. Nous sommes reduitz a cette proposition, qu'on
recevra dans les Audriettes nos Seurs, a la charge qu'elles recevront des filles, des l'aage de 14 a
15 ans, qui ont besoin de se retirer pour faire choix de leur vocation, lesquelles seront en un quartier
a part, ou deux ou trois des Seurs les gouverneront ; et pendant le tems qu'elles demeureront, ne
sortiront point et vivront en obeissance, en attendant que Dieu leur envoye l'inspiration ou quelque
parti1155. Voyci maintenant mon [351] sens : je leur laisseray faire le projet, et si es particularités
1146 La lettre à la Soeur de la Roche, annoncée dans les présentes lignes, est datée du 21 janvier ; celle-ci doit être du
même jour, surlendemain du 19, car, dit François de Sales : « Je vous escrivis avanthier. » Il est vrai que l'on ne peut,
sans sourire, constater, dans ce long courrier de trois pages si pleines, une lettre faite « non sans un grand
empeschement » et tandis que le Saint était « grandement chargé. »
1147 Epist. præced.
1148 Mme de Charmoisy, veuve depuis trois mois. (Voir ci-dessus, note (1026), p. 311.)
1149 Aucun document ne prouve que Françoise de Charmoisy soit entrée au service de la princesse Marie-Christine.
1150 Sœur Claude-Agnès de la Roche, Assistante-commise à la Visitation d'Annecy. (Voir ci-après, note (1159), p.
353.)
1151 Voir la lettre précédente, p. 348.
1152 Voir la lettre précédente, p. 348.
1153 Probablement, les trois dames nommées ci-dessus, note (1086), p. 333.
1154 L'Archevêque de Bourges, André Frémyot.
1155 Plusieurs de ceux qui ne voyaient pas de bon œil la venue des Filles de l'Evêque de Genève, imaginèrent, pour
entraver la réussite de l'affaire, de mettre en avant la condition que la nouvelle Communauté s'unirait à celle des
Haudriettes. Ces Religieuses devaient leur existence à Etienne Haudri, maître drapier de Paris, et à sa femme, Jeanne
La Dalomie, qui vivaient dans les premières années du XIVe siècle. Le fils des fondateurs, nommé aussi Etienne, et
241/346

25.2 Page 242

▲back to top
de la besoigne il y a chose qui repugne, on refusera ; car ce sera asses tost quand ilz me parleront
clair, ce que jusques a present ilz n'ont pas fait. Cependant, en me proposant le parti, ce sera asses
appreuver nostre Institut et præjuger pour le recevoir. Mon Dieu, que ce grand embaras de Paris
rend les affaires difficiles !
Faites bien mes excuses vers Monseigneur nostre Archevesque si je ne luy escris pas fort
au long. Peut estre aurons nous besoin de la faveur de monsieur le Grand1156 pour tesmoigner des
qualités de monsieur le Baron de Chantal, affin que non seulement il entre au service du Prince,
mais qu'il entre d'abord en qualité qui le puisse contenter et messieurs ses parens ; mais je croy
que M. le Grand le fera volontier. Vous ne sçauries croire, ma tres chere Mere, combien tout est
recherché en ce tems icy ; je croy que le monde va finir, car tous ont peur qu'il ne leur manque.
Or sus, ma tres chere Mere, saches que nostre partage en ce monde est en la croix ; il le
sera en l'autre en la gloire1157. Amen, amen. Vive Jesus !
Je salue tres cherement ma Seur Anne Marie, ma Seur Marie Marthe, ma Seur Anne
Catherine, ma Seur Helene, ma Seur…1158 Je vous asseure que je ne treuve pas [352] maintenant
les autres qui sont avec vous, car je les vis si vistement a Lyon que je ne l'observay pas. Or sus,
toutes, toutes, de tout mon cœur. Amen.
Revu sur l'Autographe conservé au Petit Séminaire de Zillisheim (Hte-Alsace).
_____
plusieurs membres de la famille firent des donations successives à cette Congrégation, spécialement destinée à des
veuves qu'on appela communément les « Bonnes femmes ». Leur établissement, rue de la Mortellerie, comprenait
aussi un hôpital, et des statuts leur furent donnés en 1414. Au commencement du XVIIe siècle, une réforme était
nécessaire ; le cardinal de la Rochefoucauld, leur Supérieur, voulut l'entreprendre. C'est pour la faciliter, sans doute,
que Henri de Gondi, cardinal de Retz, et d'autres personnes bien intentionnées donnèrent les mains au projet d'union
de la Visitation et des Haudriettes. On poursuivit cette pensée même après l'arrivée de la Mère de Chantal à Paris ;
niais grâce à la prudence, au tact et à l'humilité de la Sainte, elle n'aboutit pas. Quant aux « Bonnes femmes, » le
cardinal de la Rochefoucauld leur prescrivit, le 18 août 1620, un nouveau reglement, ajoutant aux vœux de chasteté
et obéissance, celui de pauvreté et l'obligation de la clôture ; le 6 septembre 1622, il transférait la Communauté rue
Saint-Honoré, et elle prenait le vocable de l'Assomption. Plus tard, les Filles de saint François de Sales devaient encore
retrouver sur leur chemin les anciennes Haudriettes. Un essaim, sorti de l'Assomption et tombé dans la dernière
décadence, fut confié en 1661 au zèle de la Mère Louise-Angélique de Lafayette ; mais le mal était trop grand, et les
Religieuses furent dispersées en diverses Communautés. (D'après des Notes de M. Lemoine, bibliothécaire-archiviste
du Ministère de la Guerre, et d'anciens Mémoires conservés au 1er Monastère d'Annecy.)
1156 Roger, duc de Bellegarde.
1157 Phrase insérée par les premiers éditeurs dans le texte de la lettre de fin avril-mai 1613, donnée au tome XV, p.
375. (Cf. note (1089), p. 376.)
1158 Sœur Anne-Marie Rosset, supérieure ; Sœur Marie-Marthe Legros (voir tome XV, note (672), p. 233) : Sœur
Anne-Catherine de Beaumont-Carra (cf. ci-dessus, note (695), p. 204).
Sœur Marie-Hélène Le Blanc avait fait profession le 27 mai 1618, au monastère d'Annecy où elle était entrée
l'année précédente, à l'âge de trente ans. Ses parents se nommaient Etienne Le Blanc et Humberte de la Palud. La
Mère de Chantal l'amena à la fondation de Bourges, et elle édifia cette nouvelle Maison par d'humbles et solides
vertus, jusqu'au 22 avril 1639, jour Je sa mort. (Livres du Noviciat et du Couvent, du 1er Monastère d'Annecy.)
La dernière des Sœurs venues en Berry avec la sainte Fondatrice était Jeanne-Françoise Estienne, professe
du Monastère de Lyon. (Voir le tome précédent, note (1195), p. 359.)
242/346

25.3 Page 243

▲back to top
MDV. A la Soeur de la Roche, Assistante-Commise de la
Visitation d'Annecy1159. Gracieuse annonce de François de Sales
à sa correspondante. Sainte liberté et surnaturelle prudence à
garder au sujet des confesseurs extraordinaires. Espérances
pour l'établissement de la Visitation à Paris. Salutations.
Paris, 21 janvier 1619.
Ma tres chere Fille,
Non, je vous prie, ne vous retenes point de m'escrire quand il vous plaira, car pourveu que
vous ayes patience de ne recevoir des responses que quand j'auray la [353] commodité de les faire,
je n'auray jamais que beaucoup de contentement d'avoir souvent de vos lettres ; car si vous ne le
sçaves pas, je vous annonce que vous estes bien ma tres chere fille1160.
Pour le point que vous me marques, il ne faut nullement alterer la regie du confesseur
extraordinaire1161 ; ni aussi estonner ce (sic) Seurs infirmes qui ont appetit d'avoir communication
avec le confesseur extraordinaire plus souvent que quatre fois l'annee. Mais il faut que si les Seurs
n'ont pas la confiance de demander a parler a luy, luy mesme l'ayt de demander de parler a elles
quelquefois, et sil ne l'avoit pas, il faut que vous la luy donnies, si c'est un Pere qui la puisse
recevoir ; car, comme il faut pourvoir d'une juste liberté aux Seurs pour la communication, aussi
les faut-il retenir dans la regie de la simplicité et humilité ; et n'est pas raysonnable que la foiblesse
de quelques unes face multiplier les confessions extraordinaires a toute la Congregation, et mette
en tristesse et ennuy le pauvre confesseur ordinaire. Bref, si chasque Seur veut estre de croire en
ses appetitz interieurs, la sousmission et la liayson se perdra, et, avec elle, la Congregation : dequoy
Dieu nous veuille garder. [354] Celles donq qui voudront communiquer extraordinairement,
qu'elles le facent en esprit d'une douce liberté, et qu'elles se confessent, sil [leur] plait, en
communiquant, sans solliciter les autres au mesme desir et sans les forcer par menees a les imiter.
1159 Plusieurs fois déjà nous avons nommé la fille aînée du gouverneur du château d'Annecy, Jean Joly de la Roche
d'Alery, et de Claudine de Locatel, ces fidèles amis et disciples de l'Evêque de Genève. (Voir tomes VI, p. XII ; XIII,
note (977), p. 364 ; XV, note (471), p. 158 ; XVII, note (1107), p. 329, etc.) Toute faite de grâce et d'énergie, attirante
par ses dons extérieurs, par l'éclat et la solidité de son esprit, Claudine avait beaucoup plu au monde, et le monde ne
lui avait pas déplu, quand, à vingt ans, le 25 janvier 1612, elle vint frapper à la porte de la petite maison de la Galerie
et y entra en même temps que Marie-Aimée de Blonay. Son noviciat, qu'elle obtint de recommencer six ans après,
l'établit dans cette humilité profonde qui. sans rien diminuer du charme surnaturel de sa personne, devait être, avec un
don d'oraison très élevé, son caractère distinctif. Quand la Mère de Chantal partit pour Bourges, Sœur Claude-Agnès
fut chargée de la Communauté d'Annecy en qualité d'Assistante-commise. En juillet 1620, elle quittait à son tour la
Savoie pour aller fonder à Orléans le neuvième Monastère de l'Institut dont elle était la neuvième Religieuse. L'estime
générale lui fut bientôt acquise ; les personnes du plus haut rang, même parmi les ecclésiastiques, tenaient à grand
bonheur de s'éclairer de ses lumières et de s'aider de ses conseils ; des conversions éclatantes furent plus d'une fois le
fruit de ses entretiens. L'Evêque de Nantes la réclama pour son diocèse, mais la ville de Rennes l'obtint et la vit arriver
en 1628, à la tête d'un nouvel essaim de la Visitation. Pour la Mère de la Roche, les faveurs d'En-haut s'unirent,
nombreuses, à celles de la terre. Le bienheureux Evêque de Genève, à peine fut-il mort, visita sa chère Fille par des
odeurs célestes bien souvent renouvelées, et, après Annecy, Orléans fut plus que nulle autre ville, témoin des miracles
opérés par l'intercession du Serviteur de Dieu. La souffrance pourtant n'oublia pas cette privilégiée du Ciel, et la sainte
Fondatrice pouvait lui écrire dès 1623 : « Je vois l'état admirable où la bonté de Dieu vous tient. Oh ! quand est-ce
que vous avez mérité tant de grâces et de faveurs que de souffrir au corps de si vives douleurs, et de si sensibles
épreuves en votre âme ? » (Lettres, vol. III, p. 523.) Ce martyre continua jusqu'au 30 décembre 1630, jour de son
heureuse mort. La Mère Claude-Agnès avait trente-huit ans. (Voir sa biographie dans Les Vies de quatre des premieres
Meres, par la Mère de Chaugy, 1659-1892.)
1160 Ce premier alinéa est inédit.
1161 Voir le tome précédent, Lettre MCVIII, p. 42, et note (193), p. 43.
243/346

25.4 Page 244

▲back to top
Nostre Mere se porte bien, graces a Dieu1162. Icy, nous taschons a vaincre les tentations
suscitees contre l'introduction de la Visitation, et espere que nous le ferons1163. Dieu vous
benisse,1164 ma tres chere Fille, et je suis en luy tres parfaitement vostre. Je salue de tout mon cœur
nos cheres Seurs, que j'ayme infiniment en Nostre Seigneur d'un'affection incomparable.
XXI janvier 1619, Paris.
Je salue par vostre entremise madame la Presidente] ma tres chere fille1165, et Mme de
Vars1166, et si la chere seur de la Flechere1167 estoit la, m[ille et] mille foys.
Je pensois escrire tout plein, mais1168
A ma tres chere Seur en N. S..
Ma Seur C. Agnes, Vice Supe de la Visitation.
Annessi.
Revu sur l'Autographe conservé à la Visitation d'Amiens. [355]
_____
MDVI. A la Comtesse de Rossillon1169. Prière d'agréer une
protestation de respect et d'affection. — Souhait du cœur. —
Délicat conseil à une jeune cousine.
Paris, 27 janvier 1619 1170.
Madame ma tres chere Cousine, ma Fille,
Laisserois-je bien aller aupres de vous ce digne frere1171, sans luy donner ces quatre motz
par lesquelz il vous puisse tesmoigner la protestation que je luy ay faite de lhonneur et, si vous me
le permettes, de l'amour que je vous veux porter toute ma vie ? Faites moy, je vous prie, la faveur,
ma tres chere Fille, de l'avoir aggreable, et de me departir reciproquement le bonheur que je desire
tant, d'estre conservé en vostre bonne grace.
Au demeurant, perseveres bien, ma tres chere Fille, a reluire en vertu et pieté devant Dieu
et les hommes, puisque sa divine Majesté vous a donné et l'inclination, et l'inspiration, et la
resolution pour cela. C'est le souhait que fait mon cœur pour le vostre bienaymé, ma tres chere
Cousine, ma Fille, et suis
1162 L'édition de 1626 et les suivantes suppriment cette phrase.
1163 Voir la lettre précédente, p. 351.
1164 Le reste de la lettre est inédit.
1165 La présidente de la Valbonne.
1166 Hélène d'Arerex était fille de Charles d'Arerex ou d'Arères, du pays de Gex, et de Charlotte Bernard. Par contrat
dotal du 6 août 1604. elle épousa Alexandre de Regard, seigneur de Morgenex et de Vars, qu'elle perdit probablement
avant 1615. La pieuse veuve donna deux filles à l'Institut de la Visitation, et se donna elle-même par la sainte
profession, le 3 juillet 1628. Devenue Sœur Marie-Hélène, elle fut employée à la fondation du second Monastère
d'Annecy, puis à celle de Pignerol où elle mourut le 5 janvier 1649. (Archives de la Visitation d'Annecy. Collection
J. Vuÿ et Livre du Couvent.)
1167 Madeleine de la Forest, veuve de Claude-François de la Fléchère.
1168 Les derniers mots étaient peut-être : nul moyen. Ils ont été enlevés par une déchirure.
1169 Fille aînée de Prosper-Marc de Maillard, comte de Tournon, et de Philiberte de Beaufort, Hélène-Ferdinande
devint bientôt demoiselle d'honneur des Sérénissimes Infantes de Savoie. Dans leur propre appartement, au palais de
Turin, fut signé (29 octobre 1609) le contrat de mariage de la jeune fille avec Jean-Baptiste de Malarmay, comte de
Rossillon, qui la laissa veuve en 1622.
1170 Bien que la date de l'année manque, elle est tout indiquée par la ville d'où cette lettre fut écrite.
1171 Marc-François de Malarmay de Lauray, abbé de Goaille, frère du comte de Rossillon. Nous le retrouverons plus
tard parmi les correspondants du Saint.
244/346

25.5 Page 245

▲back to top
Vostre tres humble cousin et serviteur,
FRANÇS, E. de Geneve.
Je salue bien cherement madamoyselle de Tornon, ma cousine1172, et desire bien qu'elle
ayme plus la beauté [356] de son ame et face plus pour l'accroissement d'icelle que pour celle de
son cors, car il y a longtems qu'elle sçait bien que j'ayme son cœur.
XXVII janvier, a Paris.
A Madame
Madame la Comtesse de Rossillion.
Bezançon.
Revu sur l'Autographe conservé chez les RRdes Sœurs Augustines,
à Rœulx (Belgique, Prov. de Hainaut).
_____
MDVII. A Madame de Villeneuve1173. Des tentations « plus
ennuyeuses que perilleuses. » Promesse d'une entrevue.
Paris, janvier ou février 1619.
Ma tres chere Fille,
Ayant bien veu la lettre que vous me donnastes aux [357] Benedictins1174, j'ay certes
ressenti grandement la peine de celle qui me l'a escritte, non que pour cela je la voye en aucun
danger, mais par ce qu'ell'est affligee ; et j'ay tant de part en elle qu'il est impossible que son
affliction ne m'afflige. Ces grandes tentations sont plus ennuyeuses que perilleuses. O Dieu, que
sa foy est bonne et qu'ell'est grande1175 ! car si elle n'estoit grande et forte, elle ne feroit pas des
1172 La sœur cadette de la destinataire, Marguerite de Maillard-Tournon voir tome XVI, note (654), p. 204).
1173 L'étude du texte nous amène à la presque certitude que cette lettre, écrite de Paris et avant l'établissement de la
Visitation dans cette ville, s'adresse à Marie Lhuillier, dame de Villeneuve. Elle était née en 1595, de François
Lhuillier, seigneur d'Interville et de Frouville, et d'Anne Brachet, de la noble famille des Hennequin. Après avoir
terminé son éducation dans la royale abbaye de Longchamps, Marie épousait à quinze ans Claude Marcel, sieur de
Villeneuve, conseiller du Roi et maître des Requêtes. Les livres de l'Evêque de Genève tombèrent bientôt entre les
mains de la jeune femme, qui conçut une telle estime pour leur auteur, qu'elle résolut de le consulter sur le grave sujet
de la nullité du mariage de sa sœur, la future Mère Hélène-Angélique Lhuillier. Un voyage à Annecy était décidé
lorsque survint l'annonce de la prochaine arrivée du Serviteur de Dieu dans la capitale. Mme de Villeneuve donna toute
son âme au saint Directeur, dont le regard sûr et pénétrant distingua les desseins particuliers de la Providence à son
égard. Elle aussi devait avoir la gloire de doter lțEglise d'une nouvelle famille religieuse, et c'est du grand Evêque
qu'elle reçut les premières idées de son dessein. Il lui répéta plus d'une fois que si Dieu lui conservait la vie, il
travaillerait à l'établissement d'une Communauté de filles et de veuves employées à l'instruction et édification du
prochain. Mme de Villeneuve résolut alors de se dévouer à cette œuvre, et obtint du Bienheureux une copie des
Constitutions primitivement dressées pour les Sœurs de Sainte-Marie. Sur ces Constitutions se calqueront plus tard
celles des Filles de la Croix ; mais la pieuse fondatrice dut attendre longtemps l'heure de Dieu. Ce fut en 1636
seulement qu'elle put commencer son Institut, soutenue par saint Vincent de Paul et d'autres personnages éminents,
encouragée par la Mère de Chantal qui lui écrivait : « Je vois que la souveraine Providence fait recueillir par ce moyen
quelques pensées et désirs de notre Père... j'en ressens une consolation fort tendre. » Celle qui depuis son veuvage
(1618) n'avait vécu que pour la piété et la vertu, voulut se donner plus complètement à Dieu, et, le 14 septembre 1641,
Mme de Villeneuve devint, par l'émission des vœux, simple membre de la Congrégation qu'elle avait fondée. Elle
l'édifia près de neuf ans encore, et termina saintement sa vie le 15 janvier 1650. Ses restes furent inhumés au monastère
de la Visitation de la rue Saint-Antoine, dout elle était la fondatrice, titre qu'elle acquit aussi pour le second monastère
de la même ville. (D'après sa déposition, Process. remiss. Parisiensis, et sa Notice insérée dans le Directoire pour les
Sœurs de la Congregation de la Croix eiablie dans le Diocese de Treguier ; Treguier, Pierre Le Vieil.)
1174 De l'abbaye de Saint-Germain-des-Prés (voir ci-dessus, note (1128), p. 345).
1175 Matt., XV, 28.
245/346

25.6 Page 246

▲back to top
repugnances si pressantes aux suggestions. Graces a Dieu, ma tres chere Fille, qui esprouve
cet'ame, comme j'espere, pour la bien affiner en l'amour de son abjection et en la mortification de
sa propre estime1176.
Quand vous me verres apres le sermon, ou aujourdhuy ou demain, nous prendrons jour et
heure pour parler avec elle. Cependant, voyla des lettres. Nous apprendrons aujourdhuy ou demain
des nouvelles des despeches de nostre Sainte Marie1177. [358]
Bonjour, ma tres chere Fille ; le doux Jesus soit a jamais au milieu de vostre cœur. Amen.
Revu sur l'Autographe conservé au Carmel du Mans.
_____
MDVIII. A la Mère de Chantal, a Bourges (Fragment). Les
craintes de la prudence humaine au sujet de la fondation d'un
Monastère de la Visitation à Paris.
Paris, vers le 20 février 1619 1178.
……………………………………………………………………………………………………..
O ma chere Mere, que la prudence humaine est admirable ! Croiries vous que des grans
serviteurs et servantes de Dieu m'ont encor dit aujourd'huy que la douceur et la pieté de nostre
Institut estoyent tellement au goust des espritz françois, que vous osteries toute la vogue aux autres
Maysons religieuses ; que quand on auroit veu cette madame de Chantal, il n'y auroit plus que pour
elle. Or sus, cela n'est rien. Dieu, qui voit que nous ne venons pas a Paris pour nous faire voir, mais
affin de faire voir a sa Bonté plusieurs ames s'acheminer purement a son saint service, nous aydera.
Je respons de la sincerité de vos intentions comme des miennes propres, si tien et mien se doit dire
entre nous, que Dieu a unis pour luy rendre un mesme service.
……………………………………………………………………………………………………...
Revu sur le texte inséré dans le Ms. original des Mémoires, etc., par la Mère de Chaugy,
conservé à la Visitation d'Annecy. [359]
_____
1176 Dans sa déposition au Procès de Béatification de l'Evêque de Genève, Mme de Villeneuve parle de ses propres
tentations contre la foi, calmées par le Serviteur de Dieu, et ajoute : « Je sçay d'une ame qui m'est tres intime... et de
profession religieuse... et estrangement tentée de la foy, avoir esté notablement soulagée luy parlant, ou le regardant,
et mesme pensant a luy. » (Process. remiss. Parisiensis, ad art. 24.) Cette âme n'est autre que celle de sa sœur, Hélène-
Angélique Lhuillier, qui, à son tour, déposant sur le même article, nous apprend comment le Saint lui ôta si bien ses
peines contre la foi qu'elle ne les ressentit plus jamais. Il peut donc s'agir ici, soit de la première dont François de
Sales parlerait à la tierce personne, soit de la seconde qui, ayant grande confiance en sa cadette, n'aurait pas craint de
la prendre comme intermédiaire.
1177 Le futur Monastère de la Visitation. C'est sur la marche des affaires concernant cette fondation que nous basons
notre date approximative. (Cf. ci-dessus, p. 351, et ci-après, notes (1178), p. 359, (1188), p. 364.)
1178 Une lettre de la Mère de Chantal, datée du 22 février, semble une allusion très directe à celle-ci : « Monseigneur
nous mande, » dit-elle, « que notre établissement est résolu par une autorité absolue de Dieu, ayant été combattu plus
qu'il ne se peut dire, et par quantité de personnes de grande dévotion qui pensent que nos Sœurs étant là auront la
vogue et diminueront l'estime des autres. » (Lettres, vol. I, p. 308.) Le Saint aurait donc écrit peu avant cette date, soit
aux environs du 20.
246/346

25.7 Page 247

▲back to top
MDIX. A Dona Ginevra Scaglia1179. Détails bar la mort du comte
de Verrua. Consolations à sa fille. La pensée du prince de
Piémont sur la fondation de la Visitation à Turin. Une vertu
plus nécessaire que la magnanimité.
Paris, 17 mars 1619.
Illustrissima Signora mia et Figliuola
Illustrissime Madame et Fille bien
nelle viscere di Christo amantissima,
aimée dans les entrailles du Christ,
Ecco che finalmente, nello horologio
della Providentia divina essendo sonnata l'hora
della partenza che haveva da fare il signor
Conte, padre di V. S., per ritornar nella mano
del Creatore dalla quale fu già creata l'anima
sua, in fine ha fatto felicemente il passaggio1180
: poichè havendo un pezzo fa ricevuto il
beneficio della absolutione et Comunione, in
circa quindeci giorni o tre settimane avanti la
morte fece un altra confessione, et continuò
quasi ogni giorno a confessarsi secondo che
s'andava ricordando delli suoi difetti ; et volse
che io lo visitassi, [360] et communicò meco il
modo che voleva tenere per assicurare le cose
della conscientia sua. Et certo, dappoi, quando
io lo visitava, parlava meco con un amor
riverentiale verso la dignità nella quale,
quantunque indegno, io mi trovo ; che
mostrava bene la sua religione. Et cavando la
sua berretta, me porgeva la mano acciò io la
toccassi et glie dessi la beneditione. Di poi,
venendo il tempo di darglie il Viatico,
temevano di turbarlo et volsero che io glie
dicessi, et lo feci, et trovai che lo volse di
buonissima voglia ; sì che io glie lo diedi per
contentar la sua divotione et riverentia, et poi
l'Oglio Santo. Agonizò poi duoi giorni et
mezzo, et mentre hebbe l'uso dei sensi mostrò
d'haver l'animo verso il Signore ; et per fine,
quantumque io l'havessi visto poche hore
manzi, non fui tuttavia presente al passaggio,
del quale non s'avedevano, se non il mio
fratello1181, il quale hebbe questa ventura di
dargli l'ultima beneditione.
Voici que, à l'horloge de la divine
Providence, ayant sonné pour M. le Comte
votre père l'heure du départ de cette vie, pour
s'en retourner entre les mains du Créateur d'où
son âme était sortie, il a fait heureusement ce
passage. En effet, quoiqu'il eût reçu il y a
quelque temps le bienfait de l'absolution et de
la Communion, quinze jours ou trois semaines
environ avant sa mort il fit encore une
confession, et continua à se confesser presque
chaque jour à mesure qu'il se rappelait ses
fautes. Il voulut que je le visitasse, et traita
avec moi de [360] la manière qu'il pensait tenir
pour assurer sa conscience. Depuis lors, quand
j'allais le voir, il me parlait avec un amour plein
de révérence pour la dignité dont je suis revêtu,
quoiqu'indigne ; ce qui montrait bien sa
religion. Puis, se découvrant, il me tendait la
main pour que je la touchasse et demandait ma
bénédiction. Le moment venu de lui
administrer le saint Viatique, on craignit de le
troubler, et on me chargea de lui en parler ; je
le fis, et trouvai qu'il l'agréait très volontiers.
Aussi, pour satisfaire sa dévotion et son
respect, je le lui donnai moi-même, et ensuite
l'Extrême-Onction. Il resta deux jours et demi
en agonie, et tant qu'il conserva l'usage de ses
sens, il témoigna que son esprit était tourné
vers le Seigneur. Bien que je l'eusse vu
quelques heures avant sa mort, je ne fus
cependant pas présent au suprême passage,
dont personne ne s'aperçut, sauf mon frère qui
eut le bonheur de lui donner la dernière
bénédiction.
1179 Le contenu de la lettre indique sûrement la destinataire, désignée dans l'édition de 1626 comme une Dame
piedmontoise. Jusqu'à présent les éditeurs n'ont donné qu'une traduction du texte italien qui, par conséquent, est inédit.
1180 Philibert-Gérard Scaglia, comte de Verrua, mourut à Paris les premiers jours de mars 1619. C'est le gentilhomme
dont parle Mgr Camus dans L'Esprit du B. François de Sales (Paris, Alliot, 1640), tome IV, Partie X, Sect. XXX.
1181 Jean-François de Sales.
247/346

25.8 Page 248

▲back to top
Ho voluto scrivere questo a V. S. Illma
J'ai voulu écrire tout cela à Votre
parendomi che la conclusione di San Paulo1182 Seigneurie Illustrissime parce que, me semble-
sia buona : Adunque, consolatevi in queste t-il, la conclusion de saint Paul est bonne :
parole ; che per i figliuoli d'Iddio [361] basta Consolez-vous donc en ces paroles ; car cette
questa consolatione, che i defunti habbiano consolation suffit aux enfants de [361] Dieu,
ricevuti li remedii efficaci della santa Chiesa que leurs défunts aient reçu avant leur départ
inanzi la partenza. Et aggiungo a V. S. la les secours efficaces de la sainte Eglise. Et
consolatione di San Francesco1183, che adesso pour Votre Seigneurie, j'ajoute la consolation
non havendo più il padre temporale, potrà più de saint François ; maintenant, n'ayant plus de
schiettamente [dire] : Pater noster, qui es in père temporel, vous pourrez dire avec plus de
cœlis1184, a nome del quale Padre celeste io ho vérité : Notre Père, qui êtes aux cieux. Aussi,
cominciato a chiamar V.S. : Figliuola mia est-ce au nom de ce Père céleste que j'ai
dilettissima. Del testamento, io non sò le commencé à vous appeler : Ma Fille bien
particularità, quantumque io fui testimonio aimée. Je ne sais pas les particularités du
dell'approbatione di esso fatta dal notaro.
testament, quoique j'aie été témoin de
Resta che io glie dica che il l'approbation qui en fut donnée par le notaire.
Serenissimo Prencipe ha sempre la voluntà Il me reste à vous dire que le Sérénissime
salda per il Monasterio1185 ; ma dice che glie Prince a toujours sa volonté bien arrêtée pour
scrivono di Piemonte che le cose d'esso sono la fondation du Monastère. On lui écrit de
in buon stato, et non essendo così, che al Piémont, que cette affaire est en bonne voie,
ritorno farà ogni cosa : et per fine, che bisogna dit-il ; mais quand il n'en serait pas ainsi, il
haver un poco di patienza, et se V. S. s'inquieta arrangera toutes choses à son retour. Enfin,
[e] che non vogl' aspettare, che vengha in ajoute Son Altesse, il faut avoir un peu de
Annessi. Ma io dico che è meglio che aspetti patience, et si Votre Seigneurie s'inquiète et ne
un poco, per magior gloria d'Iddio et salute veut pas attendre, qu'elle vienne à Annecy.
dell'anime ; chè al più non potranno passare se Mais moi je dis qu'il vaut mieux que vous
non alquanti mesi [362] che non si veda il fine attendiez un peu, pour la plus grande gloire de
del negotio1186. Hoimè ! carissima Signora mia Dieu et le salut des âmes ; car il ne se passera
Figliuola, le cose del servitio d'Iddio passano guère que quelques mois tout au plus, avant de
con queste difficoltà et dilationi ; onde bisogna voir la fin [362] de cette affaire. Hélas !
havere non solamente la magnanimità, ma Madame ma très chère Fille, les choses du
ancora, et molto più, la longanimità.
service de Dieu ne se font qu'avec ces
Non scriverò al nostro P. Don Giusto, difficultés et délais ; c'est pourquoi il faut avoir
huomo secondo il cuor mio ; ma egli sa bene non seulement la magnanimité, mais encore, et
che io lo amo et riverisco con tutto l'animo bien plus, la longanimité.
mio. Et così glie lo dirà V. S. Illma, che Dio
Je n'écrirai pas à notre Père D. Juste, cet
voglia cumulare di sue santissime beneditioni. homme selon mon cœur ; mais il sait bien que
Di V. S. Illma,
je l'aime et révère de toute mon âme. Veuillez
Humilissimo et certissimo servitore, le lui dire, et que Dieu daigne combler Votre
FRANCO, Vescovo di Geneva. Seigneurie Illustrissime de ses très saintes
Alli 17 di Marzo, 1619.
bénédictions.
De Votre Seigneurie Illustrissime,
Revu sur une ancienne copie conservée à la
Le très humble et très assuré serviteur,
Visitation de Turin. [363]
FRANÇOIS, Evêque de Genève.
Le 17 mars 1619. [363]
_____
1182 I Thess., IV, ult.
1183 S. Bonav., Legend. S. Franc. Ass., c. II.
1184 Matt., VI, 9.
1185 Le prince de Piémont, Victor-Amédée, s'intéressait à la fondation d'un Monastère de la Visitation à Turin.
1186 Au lieu de quelques mois, près de vingt ans devaient encore s'écouler avant la conclusion du projet. (Voir ci-
dessus, note (691), p. 204.)
248/346

25.9 Page 249

▲back to top
MDX. A la Mère de Chantal, a Bourges (Fragments). Nécessité
de presser le départ pour Paris. Hardiesse de l'entreprise.
Renouveler son courage pour le service de Dieu.
Paris, 21 ou 22 mars 1619 1187.
Ma tres chere Mere,
Je vous escris peu, selon mon desir ; beaucoup selon mon loysir, dont je n'eus jamais moins,
ce me semble, ni jamais plus de force et de santé. En somme donq, vous aures, le Samedi saint, un
carrosse a Orleans, qui y arrestera le jour de Pasques, passé lequel vous pourres partir et venir1188.
Je voy la mortification qu'il y a de voyager parmi ces bons jours et, pour toute bonne chose, je
voudrois vous delivrer de cette peine ; mays nous sommes pressés de mon retour, pour l'incertitude
du tems auquel il me le faudra faire1189, et chacun crie que vous venies avant mon depart.
En quel estat sont les affaires, vous l'apprendres de la bonne madame de Royssieux1190, une
toute bonne, toute vertueuse… [364]
1191 Cette affaire s'entreprend sous la seule Providence de DieuC'est un coup de hasard,
et plus que cela ; mays Dieu requiert que l'on le fasse, et il vaut mieux n'estre appuyé que sur sa
tressainte Providence que de se gouverner selon la sagesse et prudence humaine.
……………………………………………………………………………………………………..
Ma chere Mere, prenons nouveau courage, ou plustost renouvelions nostre ancien courage
pour faire merveilles au service de Dieu et de nostre bienaymee petite Congregation qui est toute
sienne.
……………………………………………………………………………………………………..
_____
1187 La date de cette lettre se déduit de l'étude des événements qui se succédèrent pendant la Semaine-Sainte, et que
nous rapportent l'Histoire de la Fondation de Paris et celle de Bourges. Le message de François de Sales dut arriver à
la Mère de Chantal le soir du dimanche des Rameaux, 24 mars ; il était donc parti de Paris le 21 ou le 22.
1188 Plusieurs Sœurs du Monastère de Moulins, destinées à la fondation de Paris, étant venues rejoindre la Sainte à
Bourges le 28 mars, la petite troupe se mit en marche le lundi de Pâques, et après deux jours de halte à Orléans, gagna
la capitale le samedi de la même semaine. (Cf. ci-dessus, note (1114), p. 341.)
1189 Ce retour fut différé jusqu'au mois de septembre. (Cf. ci-dessus, note (1047), p. 319.)
1190 Antoinette de Grossaine, fille unique de Jérôme de Grossaine, seigneur d'Irval, d'Avaux, etc., vicomte de Vandeuil,
avait épousé, le 25 août 1584, Jean-Jacques de Mesmes, seigneur de Roissy ou Roissieux (voir tome XV, note (776),
p. 272). Par ce mariage, elle était devenue l'alliée de Mmes de Sainte-Beuve, de Villeneuve, Brûlart, de Herse, toutes
filles spirituelles du saint Evêque de Genève.
On peut encore suggérer, mais avec moins de vraisemblance, le nom de Françoise Couvay, veuve de Nicolas
Dieudonné, sieur du Mont, qu'on trouve en 1616, mariée à Jacques de Royssieux, maître d'hôtel ordinaire du Roi de
1613 à 1625.
1191 Ces deux derniers alinéas sont extraits, le premier, des Lettres de la M ère de Chantal (vol. I, p. 314) ; le second,
du Ms. original des Mémoires, etc., par la Mère de Chaugy. Le contexte, la concordance des dates et des faits, tout
nous amène à conclure qu'ils ne sont l'un et l'autre que des fragments de cette lettre du 21 ou 22 mars.
249/346

25.10 Page 250

▲back to top
MDXI. A Madame de Veyssilieu. Quatre lignes sorties du cœur.
Aspirer aux contentements de l'éternité à mesure que Dieu
nous sèvre de ceux de ce monde.
Paris, 26 mars 1619 1192.
Ma tres chere Fille,
Si j'estois aupres de vous, je vous dirois bien plus de choses que je n'en sçaurois escrire, et
si j'estois en un autre lieu je vous escrirois plus amplement que je ne puis faire en celuy ci. Ces
quattre lignes partent de mon [365] cœur pour faire sçavoir au vostre que si je ne l'ay visité de
presence en son affliction, ç'a esté, je vous asseure, d'une affection grande et avec beaucoup de
sentimens.
Mais en fin, ce pere est trespassé en sorte que, si la foy de la vie eternelle regne en nos
espritz comme elle doit, nous devons estre grandement consolés. Petit a petit, Dieu nous sevre des
contentemens de ce monde ; oh ! ma tres chere Fille, il faut donq ardemment aspirer a ceux de
l'immortalité, et tenir nos cœurs eslevés au Ciel ou sont nos pretentions et ou nous avons meshuy
une grande partie des ames que nous cherissons le plus.
Qu'a jamais soit beni le nom de Nostre Seigneur1193 et que son amour vive et regne au
milieu de nos ames. La mienne salue cordialement la vostre, et suis, ma tres chere Fille, tres
parfaitement
Vostre tres humble serviteur,
FRANÇS, E. de Geneve.
A Paris, le Mardi saint.
_____
1192 Nul doute que ces lignes ne soient adressées à Marguerite de la Croix, dame de Veyssilieu, pour la consoler de la
mort de son père, Jean de la Croix de Chevrières, évêque de Grenoble, décédé à Paris le 8 mars 1619. (Cf. ci-dessus,
Lettre MDII, p. 343.)
La première édition date la lettre du mardi saint. Or, en 1619, le mardi-saint tombait le 26 mars ; c'est donc
à tort que les éditeurs suivants ont donné : 26 avril.
1193 Ps. CXII, 2.
250/346

26 Pages 251-260

▲back to top

26.1 Page 251

▲back to top
MDXII. A une dame1194 (Inédite). Une jeune fille prisonnière
chez les hérétiques.
Paris, 5 avril1195 1619.
Madamoyselle,
Parce que l'autre jour je vous vis en peine pour Dorothee1196, j'ay creu que je devois vous
donner advis [366] qu'hier, revenant du Louvre tout de nuit, je treuvay ceans des Peres Benedictins
qui me dirent qu'une jeune fille s'estoit peu auparavant addressee a eux pour me faire sçavoir que
Dorothee estoit detenue par force chez madame de la Trimouille1197, qui l'avoit mise entre les
mains de deux ministres, et que ce matin ilz la vouloyent emmener, et non obstant toutes les
resistances qu'elle faysoit. Je pense que de Geneve on aura mis ordre icy pour faire cela ; mays je
ne voy quasi point de remede, et mesme estant contraint, comme je suis, de partir pour aller a
quatre lieues d'icy1198, d'ou je ne seray de retour que ce soir, et croy que des ce matin on a emmené
cette fille.
Demain j'auray le bien de vous voir, sil plait a Dieu, et ce pendant, je prie sa divine Majesté
qu'elle vous comble de ses plus favorables benedictions, qui suis,
Madamoyselle,
Vostre serviteur tres humble,
FRANÇS, E. de Geneve.
Revu sur l'Autographe conservé au Noviciat de la Compagnie
de Saint-Sulpice, à Issy (Paris). [367]
_____
1194 En l'absence d'indices sûrs, nous ne pouvons que proposer, mais non désigner une destinataire. Serait-ce Madeleine
Lhuillier, dame de Sainte-Beuve, la fondatrice des Ursulines de Paris (voir tome XII, note (220), p. 121) ? On sait
qu'elle s'occupa beaucoup de la conversion des hérétiques, et ses relations avec l'Evêque de Genève pendant son séjour
en France en 1602 et en 1619 permettent de songer à elle.
1195 Si notre conjecture sur le voyage « a quatre lieues d'icy » est juste, la date que nous proposons l'est aussi. (Voir
note (1198) de la page suivante.)
1196 Sans doute une jeune fille que les hérétiques voyaient incliner vers le catholicisme ; il a été impossible de découvrir
à quelle famille elle appartenait.
1197 Charlotte-Brabantine de Nassau, veuve depuis 1604 de Claude de la Trémoille, était fille du fameux Guillaume-
le-Taciturne, prince d'Orange, l'un des chefs du protestantisme hollandais. Sa mère, Charlotte de Bourbon-
Montpensier s'était évadée de son abbaye de Jouare pour embrasser la religion réformée ; elle passa en Allemagne et
se maria en 1574. Mme de la Trémoille tint de ses parents l'attachement à son culte et fut une huguenote ardente et
sectaire. Elle mourut en 1631, après avoir eu le déplaisir de voir son fils aîné, Henri, se faire catholique. (Voir H. de
la Trémoille, Les Trémoille pendant cinq siècles, Nantes, 1895.)
1198 Le 5 avril 1619, René de Thou, seigneur de Bonneuil, conduisit l'Evêque de Genève à l'abbaye de Maubuisson,
pour y donner la confirmation à sa fille Marie, alors auprès de la Mère Angélique Arnauld. Le saint Prélat prêcha,
confirma l'enfant et s'en retourna le jour même. Il est probable qu'il s'agit ici de cette course, bien que Maubuisson fût
plus éloigné de Paris que des quatre lieues indiquées par François de Sales.
251/346

26.2 Page 252

▲back to top
MDXIII. A Madame Angélique Arnauld, Abbesse de Port-Royal
a Maubuisson1199. Ce que le Saint a vu dans le cœur de la
destinataire. Pourquoi Dieu n'exauce pas tout de suite nos
prières. La Visitation fondée à Paris.
Paris, 26 avril 1619.
Madame,
Ce me sera tous-jours une fort particuliere consolation quand j'auray le bonheur de recevoir
de vos lettres ; car en verité, je vous cheris et honnore parfaitement, puis [368] qu'il a pleu a Nostre
Seigneur de me faire voir vostre cœur, et au milieu d'iceluy, le sacré desir d'aymer invariablement
cette divine Bonté, en comparayson de laquelle comme il n'y a rien de bon, aussi n'y a-il rien
d'aymable. Mays croyes bien, ma tres chere Fille (car je ne puis empescher mon cœur de pousser
ce mot cordial), croyes, je vous supplie, que si mes souhaitz sont exaucés, vous feres un continuel
progres en cette sainte dilection ; car je n'oublieray jamais d'en supplier Dieu et de luy offrir
plusieurs Sacrifices a cette intention. Mais il faut dire quelque chose sur vostre lettre.
Vous voyes comment la Providence celeste est douce envers vous, et qu'elle ne differe son
secours que pour provoquer nostre confiance. L'enfant ne perira jamais, qui demeurera entre les
bras d'un Pere qui est tout puissant. Si nostre Dieu ne nous donne pas tous-jours ce que nous luy
demandons, c'est pour nous retenir aupres de luy et nous donner sujet de le presser et contraindre
par une amoureuse violence, ainsy qu'il fit voir en Emmaus, avec ces deux pelerins avec lesquelz
il n'arresta que sur la fin de la journee, et bien tard, et quand ilz le forcerent1200. En somme, il est
gracieux et debonnaire ; car soudain que nous nous humilions sous sa volonté, il s'accommode a
la nostre. Tasches donq, ma tres chere Fille, a fortifier de plus en plus vostre confiance en cette
1199 A bien étudier le texte, il est évident que nous avons ici la première lettre que saint François de Sales écrivit à la
Mère Angélique Arnauld, début d'une correspondance dont la beauté et l'intérêt feront à jamais regretter les
considérables lacunes. La Mère Arnauld nous le dit elle-même : ce qui en fut imprimé n'en est que la minime partie ;
ie reste, hélas ! semble irrémédiablement perdu.
La jeune et déjà célebre Abbesse avait alors vingt-sept ans. Née ie 8 septembre 1591, entrée à huit ans dans
l'Ordre de Saint-Benoît de par la volonté de son père Antoine Arnauld et de son grand-père maternel, Simon Marion
; abbesse de Port-Royal par bulles subrepticement obtenues de Rome en dissimulant l'âge de cette enfant ; Angélique
Arnauld, à dix-sept ans, avait entendu l'appel à une vie parfaite, y répondant de toute la plénitude d'une âme qui ne
savait rien faire à demi. Après avoir réformé son propre Monastère, elle était venue à Maubuisson remédier aux
désordres causés par l'Abbesse, Angélique d'Estrées ; aux prises avec « d'extremes difficultez, » raconte-t-elle dans sa
déposition (Process. remiss. Parisiensis, ad art. 27), « je recherchay le moyen de pouvoir veoir » l'Evêque de Genève,
« en esperant secours de luy dont j'avois ouy tant de merveilles. » Il vint le 5 avril (voir note (1198), de la page
précédente). De ce jour, Angélique Arnauld sentit qu'elle avait trouvé enfin un maître et un père. Le Saint admira les
dons de Dieu en cette âme qui dépassait de si haut le vulgaire ; il l'aima, et mit tout en œuvre pour répondre à sa totale
confiance et pour la guider vers les sommets où, semblait-il, elle devait faire sa demeure. Il faut étudier les lettres à la
Mère Angélique ; on y retrouve, pour ainsi dire, la photographie de cette nature riche et complexe, et déjà l'on peut
entrevoir, dans les tendances que combat l'habile Directeur, surtout dans « cet amour « de la propre excellence, »
(Lettre du 4 février 1620) trait de race des Arnauld les ressources que saura exploiter Saint-Cyran pour faire de
l'Abbesse presque un chef de parti, et la rendre superbe jusqu'à résister à l'autorité de l'Eglise, elle qui, au temps de
François de Sales, souhaita passionnément, dans sa soif d'obéissance, l'humble voile de la Visitation. Avant de tomber
aux mains du patriarche du Jansénisme, Angélique avait contribué, sous la direction de Mgr Zamet, à la fondation des
Bénédictines du Saint-Sacrement. Elle les quitta brusquement lorsque l'Evêque de Langres, s'apercevant avec effroi
des menées de Jean Duvergier de Hauranne et des ravages déjà faits par sa doctrine, voulut y mettre ordre.
Déposée, sur sa demande, de sa charge d'abbesse, en 1630. mais frémissante au rang secondaire, la Mère
Arnauld sut garder toujours par son influence, qu'elle reprît la crosse ou non, la première place soit à Port-Royal des
Champs, soit à Port-Royal de Paris. C'est dans ce dernier monastère que, le 6 août 1661, l'indomptable Abbesse
terminait, dans des ombres épaisses et lourdes, une vie dont le matin avait paru si radieux.
1200 Luc., ult., 29.
252/346

26.3 Page 253

▲back to top
sainte Providence, et l'adorés frequemment en vos retraittes spirituelles, et par ces regars interieurs
dont nous parlons en la prattique1201.
Je loüe Dieu que vous soyes plus constante, nonobstant vos perpetuelz tracas domestiques,
parmi lesquelz il faut faire valoir vostre dilection, comme le courage es batailles. [369]
Madame de Chantal est icy avec sa petite trouppe. Le vingt huitiesme avril elle
commenceront a chanter les Offices en publiq1202, ayant treuvé beaucoup plus de faveur en l'ame
de Monsieur le Cardinal1203, que les premieres apparences ne promettoyent.
Je ne manqueray pas d'imprimer un singulier amour pour vostre personne en cette
Congregation, specialement au cœur de madame de Chantal, vous asseurant que je desire
grandement que vous soyes toute comblee de cette pure charité qui vous rende a jamais aymable
a Dieu et a toutes les creatures qui le servent. Ainsy soit il. Et je suis sans fin,
Vostre tres humble et tres certain serviteur et frere,
FRANÇS E. de Geneve.
Le 26 avril, a Paris. [370]
_____
MDXIV. A la Mère de Chantal, a Paris. Une journée
laborieusement et fructueusement employée. Proposition
d'une maison pour les Filles de la Visitation.
Paris, 28 avril 1619 1204.
Ma tres chere Mere,
Voicy le conte de ma journee. Ayant passé toute la matinee a Saint Germain et deux heures
qu'au chemin qu'en chaire, et un'heure et demi avec des dames qui me sont venu voir apres le
sermon, j'ay treuvé le bon M. Berger1205 qui ira voir M. le grand Vicaire1206, pour luy annoncer et
1201 Un écrit, sans doute, que saint François de Sales avait donné à la Mère Angélique.
1202 Il y avait trois semaines que la Mère de Chantal était installée dans une petite maison de Mme des Gouffiers, au
faubourg Saint-Marceau, avec les Soeurs Anne-Catherine de Beaumont et Jeanne-Marie de la Croix, professes
d'Annecy ; Marie-Anastase Pavillon, Marie-Marguerite des Serpens de la Guiche, novices de Moulins, et une Sœur
domestique. (Cf. ci-dessus, note (1188), p. 364.) L'établissement canonique ne se fit pourtant que le 1er mai, les
permissions n'étant point encore obtenues, tant les adversaires de la Visitation avaient su circonvenir l'esprit du
cardinal de Retz. (Cf. ibid., pp. 351, 352, et ci-après, note (1213), p. 373.)
1203 Henri de Gondi, fils d'Albert, duc de Retz, marquis de Belle-Isle, et de Catherine de Clermont, était né en 1572. Il
avait vingt-quatre ans lorsque le Roi le désigna pour futur successeur de son oncle, Pierre de Gondi, évêque de Paris,
qui démissionna en 1602 et mourut en 1616. Deux ans après, Henri recevait la pourpre et prenait le nom de cardinal
de Retz. Ce fut un Prélat « des plus eminens en charité, humilité, douceur d'esprit, zelez a la gloire de Dieu et prudentz,
» assure un de ses contemporains, prêtre de son diocèse (Pierre Berger, Process. remiss. Parisiensis, ad art. 24). Tous
les historiens confirment ce témoignage. Comme chef du Conseil et premier ministre d'Etat, le Cardinal suivit Louis
XIII dans sa campagne contre les huguenots du Midi, et il mourut devant Béziers au mois d'août 1622. (Voir Moreri,
Hœfer, Ciaconius, etc.)
1204 La cérémonie qui retint l'Evêque de Genève toute la matinée à l'abbaye de Saint-Germain-des-Prés est très
probablement la consécration de l'autel de saint Symphorien (voir ci-dessus, note (1128), p. 345). La date du 28 avril
est donc tout indiquée.
1205 Pierre Berger, né à Sedan, de Pierre Berger et de Marie Bouchart, était un calviniste converti, conseiller au
Parlement, comme l'avait été son père. Il entra dans les Ordres en 1622, sur le conseil de François de Sales, pour
rendre à Dieu « actions de graces plus solennelles de » sa « conversion de l'heresie... a la foy catholique » (Process.
remiss. Parisiensis, ad art. 42), et devint chanoine de l'Eglise de Paris. Ami et admirateur du saint Evêque de Genève,
il fut tout dévoué à ses Filles, et son nom se retrouve plus d'une fois dans les lettres de la Mère de Chantal.
1206 Cousin de Pierre de Gondi, dont la mère se nommait Marie-Catherine de Pierrevive, Sylvius de Pierrevive, clerc
du diocèse de Turin, entre au Chapitre de Notre-Dame de Paris le 22 septembre 1580. En 1582, il est prêtre ; deux ans
plus tard, prieur de Sorbonne et chanoine-chantre ; en 1607, chancelier de Notre-Dame et de l'Université. L'Evêque,
253/346

26.4 Page 254

▲back to top
faire treuver bon le jour auquel vous commenceres a paroistre1207, estimant que ce compliment
estoit necessaire. Dela je suis allé chez Mme la Marquise [371] de Verneüil, que j'ayme certes bien,
car ell'est, a mon advis, bien franche1208. Or, elle m'a dit enfin quil failloit prendre la mayson qui
est pres de l'hostel de Guise1209 et qui est, ce dit elle, a madamoyselle de Creil1210 ; et qu'elle la
nantira d'une rente qu'elle respondra de valoir 24 mille escus, dont par apres vous luy tiendres
conte a commodité, ce qu'elle veut donner detrait. Elle dit plus : que l'hostel du Cardinal de Guyse,
qui est proche de cette mayson, nous sera encor vendu si nous voulons. Mays prenes garde,
neanmoins, qu'on ne luy desrobe pas ses tapisseries.
Ne voyla pas une bonne negociation ? Or sus, Dieu soit au milieu de nostre cœur, ma tres
chere Mere.
Revu sur l'Autographe appartenant à Mme la marquise Pensa, à Turin. [372]
_____
son parent, l'avait choisi dès 1590 pour son vicaire général ; il garda ce titre auprès de Henri et de Jean-François de
Gondi. Très actif et entreprenant, c'est lui qui réellement gouvernait le diocèse. Il mourut le 19 mars 1627, dans sa
soixante-dixième année, et fut inhumé à Notre-Dame, devant la chapelle Saint-Crespin. (D'après une Note de M.
Levesque, bibliothécaire de Saint-Sulpice.)
1207 Ce jour même, les Sœurs commençaient à dire l'Office en public (voir la lettre précédente), et le 1er mai devait
avoir lieu l'établissement solennel. (Cf. ci-dessus, note (1202), p. 370.)
1208 La trop célèbre fille de François de Balzac, seigneur d'Entragues, et de Marie Touchet, Henriette, tenait de Henri
IV son titre de marquise de Verneuil. Eloignée de la cour après 1605, forcée depuis 1611 de vivre dans une retraite
presque complète, Dieu lui laissa vingt-deux ans encore pour se préparer à la mort.
1209 Cet hôtel, où sont installées aujourd'hui les Archives Nationales, appartenait à la famille du cardinal de Guise,
Louis de Lorraine (1575-1621), alors archevêque de Reims, fils du duc de Guise assassiné aux Etats de Blois. Sa mère,
Catherine de Clèves, vivait encore, et sans doute le Cardinal habitait auprès d'elle pendant ses séjours à Paris, d'où
vient que le Saint désigne plus bas cet hôtel sous son nom.
1210 Au numéro 35 de la rue des Francs-Bourgeois, au 74 de la rue des Archives, se trouvent des immeubles signalés
comme ayant appartenu, au XVIIe siècle, à des membres de la famille de Creil. Tout proche encore de l'hôtel de Guise,
dans la rue des Vieilles-Haudriettes, Adrienne Gamin, veuve depuis 1609 de Jean de Creil, seigneur de Gournay, et
mère de la présidente Amelot, possédait une maison. (Acte du 18 juillet 1633, conservé à la Bibl. Nat., Pièces
originales, vol. 924, art. Creil, fol. 73.) C'est l'une de ces trois qu'on songeait à faire acheter en 1619 à la Mère de
Chantal. Il était difficile, en effet, à la petite Communauté de rester plus longtemps dans sa demeure provisoire, située,
dit l'Histoire de la Fondation, « entre deux tripots, ayant jour et nuit le tintamarre des joueurs. » Mais la négociation
n'aboutit pas. Les Sœurs de la Visitation louèrent une maison au faubourg Saint-Michel et s'y transportèrent le 2 juillet.
Deux ans après, elles s'établirent dans la rue du Petit Musc, et enfin, tout à côté, dans les dépendances de l'hôtel Zamet,
rue Saint-Antoine.
254/346

26.5 Page 255

▲back to top
MDXV. A la même. Annonce d'une visite, et d'un visiteur qu'il
faut traiter avec prudence.
Paris, 29 ou 30 avril 1619 1211.
Ma tres chere Mere,
Je m'en vay a vous tout presentement, mays M. Berger1212 y arrivera peut estre encor plus
tost que moy. Tesmoignes luy beaucoup d'obligation, et si d'aventure il parloit de la charge des
Pœnitentes1213, ne le rebuttes pas, ains dites simplement que pour maintenant vous [373] n'aves
point de personnes capables de cela, et que si Dieu en envoye a l'advenir, ce sera aux Superieurs
d'en disposer selon que Dieu les inspirera ; car en ce pais il faut grandement estre en respect.
Revu sur l'Autographe conservé à la Visitation d'Annecy.
_____
1211 Ce billet a dû suivre de très près celui du 28 avril et précéder l'établissement solennel des Filles de la Visitation,
1er mai.
1212 Pierre Berger (voir ci-dessus, note (1205), p. 371).
1213 La Maison des Filles de la Madeleine ou Madelonnettes avait été fondée au mois d'août 1618 par MM. de Montry
et du Fresnes. La marquise de Maignelay mérita aussi le titre de fondatrice par l'intérêt et les dons généreux qu'elle
prodigua à cette œuvre. Quand il s'agit de l'établissement de la Visitation à Paris, plusieurs personnes pensèrent qu'au
lieu de faire un nouveau couvent, il fallait confier aux Filles de Sainte-Marie la conduite des Repenties ; l'Evêque,
Henri de Gondi, entra dans ces vues. Avec sa prudence ordinaire, François de Sales ne repoussa pas brusquement la
proposition. « Un jour que l'on avoit prié ce Bienheureux d'aller donner l'habit a trois de ces filles, » raconte l'Histoire
de la Fondation de la Visitation, « l'on luy demanda si l'on accorderoit pas a Monseigneur le Cardinal de Reth que les
Sœurs de Saincte Marie viendroient, au lieu de s'establir, establir les Penitentes. Ce Bienheureux fust tardif a
respondre, et mestant la main sur ses yeux, se tint un peu en silence ; apres quoy il dit : « Il n'est pas temps de faire
cette besougne, le fruict n'est pas meur, » Et adjousta en une autre occasion : « Laissé venir le temps, cette maison de
Saincte Magdelaine reheusira plus avantageusement que l'on ne sçauroit pencer. » En rappelant cette « autre occasion,
» l'annaliste veut-elle parler du sermon fait par le Saint aux Pénitentes le 22 juillet ? En 1629, le « fruict » était «
meur. » Du consentement de la Mère de Chantal, le 1" Monastère de Paris envoyait quatre Sœurs sous la direction de
la Mère Anne-Marie Bolain, gouverner la Madeleine, située alors sur la paroisse de Saint-Nicolas-des-Champs. Par
leurs soins, l'ordre et la ferveur régnèrent dans la Maison, des Constitutions furent dressées, et le Pape Urbain VIII,
par Bulle du 15 décembre 1631, érige et institue ce Monastère sous la Règle de Saint-Augustin et le titre de Sainte-
Madeleine. Les Religieuses de la Visitation en gardèrent la direction jusqu'en 1671. (Archives Nationales, S 4740, et
Hist. de la Fondation du 1er Monastère de la Visitation de Paris, par la Mère de Chaugy.)
255/346

26.6 Page 256

▲back to top
MDXVI. A la Mère de Chastel, Supérieure de la Visitation de
Grenoble (Fragment inédit). La présidente Le Blanc parmi les
Anges.
Paris, commencement de mai 1619 1214.
……………………………………………………………………………………………………...
Vous n'aves donq plus parmi vous, ma tres chere Fille, Mme la Presidente Le Blanc ; or, je
croy qu'elle est parmi les Anges. En verité, c'estoit une rare femme ; Grenoble perd en elle un rare
exemple de vertu1215
Revu sur le texte inséré dans l'Histoire manuscrite de la Fondation
de la Visitation de Grenoble. [374]
_____
MDXVII. A la Mère de Chantal, a Paris. En quête d'un carrosse.
Paris, mai 1619 1216.
J'envoyeray prier M. des Hayes1217 de prester son carrosse et de vous aller prendre ; s'il se
treuve prest, je m'asseure qu'il le fera. Si moins, il faudra, comme tous-jours, avoir patience. Je
pense toutefois que si on prioit Mme de Royssieux1218, peut estre vous envoyeroit elle bien le sien,
1214 A la date du 5 mai 1619, la Mère de Chantal s'afflige avec la Mère Favre sur la mort de la présidente Le Blanc de
Mions. (Lettres, vol. I, p. 319.) Le présent message de l'Evêque de Genève à la Mère de Chastel ne serait-il pas parti
de Paris en même temps que le courrier pour Lyon ? Au moins n'en dut-il pas être très éloigné.
1215 Cette vertueuse dame, fidèle jusqu'au bout à son amitié pour les Filles de Sainte-Marie, leur envoya des présents
lors de sa dernière maladie, « mandant à la Supérieure : Voilà encore pour notre Saint-Sacrement. » Depuis sa
conversion, l'Eucharistie était en effet sa grande dévotion, et « presque toutes les paroisses aux environs de Grenoble
ont ressenti les effets de sa charité et de son soin. » Elle sollicita la faveur de revêtir avant sa mort l'habit de la
Visitation, ce qu'on lui accorda ; mais sa famille ne voulut point accéder à son désir d'être inhumée dans la sépulture
des Sœurs. (Hist. de la Fondation de la Visitation de Grenoble.)
1216 Il est fort probable que le carrosse cherché devait conduire la Mère de Chantal visiter des logis pour sa
Communauté. (Cf. ci-dessus, note (1210), p. 372.) Déjà le 28 avril, il était question d'un transfert, et le 20 mai on était
encore à la recherche d'une maison convenable (cf. Lettres de la Sainte, vol. I, p. 323) ; aussi ce billet paraît-il bien
placé dans le courant de mai.
1217 Antoine des Hayes (voir tome XII, note (573), p. 251).
1218 Voir ci-dessus, note (1190), p. 364.
256/346

26.7 Page 257

▲back to top
ou madame la Contesse de Joigni1219 ; et je m'advise que celuy de Mme de Royssieux n'est pas a
elle, mais a son beaufrere1220.
Nostre Seigneur soit au milieu de vostre cœur.
Revu sur l'Autographe qui se conservait chez les PP. Missionnaires de Saint-François-de-Sales
d'Annecy. [375]
_____
MDXVIII. A M. Michel Bouvard1221. Insuccès des démarches du
Saint en faveur de M. de Quoex. Recommandations au sujet
de diverses affaires.
Paris, 18 mai 1619.
Monsieur,
Respondant a la derniere lettre que vous aves pris la peine de m'escrire, je vous diray que
je n'ay rien oublié de tout ce que j'ay peu pour servir le pauvre M. le Collateral de Quoex en son
affliction1222. Mays, a ce que je voy, mes remonstrances et supplications ont esté charmees par
quelque esprit contraire, la force duquel Dieu a permis avoir esté plus grande. De dire d'ou ce
malheur m'est arrivé, je ne le puis qu'en devinant. Les tribulations ne seroyent pas tribulations si
1219 Plus connue encore sous le nom de Mme de Gondi, Françoise-Marguerite de Silly, fille d'Antoine de Silly, comte
de la Rochepot, et de Marie de Launay, avait épousé vers 1600, Philippe-Emmanuel de Gondi, comte de Joigny. On
sait ce que fut pour la famille du général des Galères celui qu'on appelait alors « M. Vincent ». La comtesse, à l'âme
aussi délicate et timide que belle et profonde, trouvait dans sa direction lumière, appui, consolation. Depuis un an, elle
avait obtenu son retour de Châtillon-les-Dombes, tout à propos pour qu'il pût connaître « M. de Genève » et contracter
avec lui une indissoluble amitié. Plus d'une fois les deux Saints durent se rencontrer sous le toit de la comtesse de
Joigny. Cette admirable femme avait été l'initiatrice de l'œuvre des missions, et son zèle d'apôtre rivalisait avec celui
de Vincent de Paul dans toutes les œuvres de charité spirituelle et corporelle. Elle en fut la victime ; à quarante-deux
ans, épuisée par ses courses perpétuelles auprès des pauvres, par ses veilles au chevet des mourants, elle succombait
à Paris le 22 juin 1625. Philippe-Emmanuel de Gondi ne put se consoler de cette perte, et peu après, il entrait à
l'Oratoire. (Voir Chantelauze, St Vincent de Paul et les Gondi, et Bougaud, Hist. de St Vincent de Paul, tome I, liv. I,
chap. IV-VII.)
1220 Si « Mme de Royssieux » est Antoinette de Grossaine, son beau-frère serait Jean de Barillon, fils d'Antoine de
Barillon, seigneur de Mancy. Veuf de Claude Dannès en 1597, il avait épousé en secondes noces Judith de Mesmes,
sœur de Jacques, seigneur de Roissy. (D'après une Note de M. Lemoine.)
1221 Le 7 juin 1632, appelé à déposer au Procès rémissorial de Genève pour la canonisation de François de Sales,
Michel Bouvard se dit fils de Jean Bouvard et d'Antoinette Mermod, âgé d'un peu plus de cinquante ans. Docteur en
droit après ses études aux Universités de Toulouse et de Louvain, avocat dès 1610, collatéral au Conseil de Genevois
avant 1624, il fut aussi conseiller du duc de Nemours. Il apprécia plus que tous ces titres l'amitié et la confiance dont
l'honora le saint Prélat. Celui-ci mit largement à profit sa science, son expérience et son dévouement. Sur sa demande,
Bouvard assiste aux concours pour la collation des bénéfices, il est désigné comme assesseur au tribunal de l'Officialité
et comme arbitre dans les arrangements soumis à la sagesse de l'Evêque, il rédige des actes importants et même est
choisi pour écrire, sous la dictée de François de Sales, son testament. Michel Bouvard dépose de nouveau au second
Procès de Béatification en 1652, et à cette date, il est encore premier collatéral au Conseil de Genevois. Il avait épousé
Philiberte Mingon.
1222 Sigismond d'Est, gouverneur de la Savoie, avait donné ordre, en janvier 1618, au collatéral Claude de Quoex,
d'exiger les trois quartiers dus par le Genevois, et de veiller à la subsistance des troupes logées dans cette province.
Est-ce cette gestion délicate, et assez étrangère aux ordinaires fonctions du magistrat, que la Chambre des Comptes
examina en 1619 ? Le résultat fut, pour M. de Quoex, l'obligation de payer environ mille ducatons, sous peine
d'emprisonnement jusqu'à libération de la somme. Elle était lourde et ne put être versée d'un coup. François de Sales,
après avoir vainement essayé de prévenir la détention de son ami, poursuivit auprès du duc de Savoie sa mise en
liberté, comme le prouve la lettre du 11 juillet de cette année. On ne sait ce qu'il obtint. (Cf. Mugnier, Saint François
de Sales docteur en droit, avocat, sénateur, Chambéry, 1885, p. 108.)
257/346

26.8 Page 258

▲back to top
elles n'affligeoyent, et les [376] serviteurs de Dieu n'en sont gueres exempts ; leur bonheur est
reservé pour la vie future. Et neanmoins, j'espere que le coup que M. le Collateral recevra ne sera
pas si grand comme l'apprehension.
Monseigneur le Duc de Nemours escrit a messieurs ses officiers qu'ilz luy donnent advis
sur la demande que je fay des protocoles du chastelain Musici1223, que M. [Barfelly1224] a pris et
gardés jusques a present de son authorité. Je vous prie de prendre la peine de les instruire de mon
droit, comme encor de ne vous lasser pas a bien conduire par vos advis l'affaire que j'ay avec M.
de Marcossey1225.
Je suis cependant de tout mon cœur, Monsieur,
Vostre tres humble, tres affectionné serviteur,
FRANÇS, E. de Geneve.
18 may 1619, a Paris.
A Monsieur
[Monsieur] Bouvart, Advocat au souverain Senat de Savoye. [377]
_____
MDXIX. A Madame Angélique Arnauld, Abbesse de Port-
Royal a Maubuisson. Les pensées de François de Sales sur la
confiance qu'on lui témoigne. Pourquoi il est bon de prendre
avis de diverses personnes. Réponse à la crainte de suivre ses
inclinations tout en obéissant. Promesse d'une visite ou d'une
lettre.
Paris, 25 mai 1619.
Madame,
Non, je vous supplie, ne soyes jamais en crainte de m'importuner par vos lettres ; car je
vous dis en vraye verité qu'elles me donneront tous-jours une tres grande consolation, tandis que
Dieu me fera la grace d'avoir le cœur en sa dilection, ou du moins desireux de la posseder. Or cela
soit dit pour une bonne fois.
1223 Notaire et châtelain à Viuz-en-Sallaz, Pierre de Musy reçoit l'acte de prise de possession du mandement de Thiez
par Gallois de Sales, agissant au nom de son frère l'Evêque de Genève (1er février 1603). En 1606 et 1608, il est fermier
de l'Evêque, et meurt avant le 6 juillet 1637. De sa femme, Françoise Moulin, il eut, entre autres enfants, deux filles
qui furent Religieuses de la Visitation. L'aînée, Françoise-Jacqueline, était supérieure à Moulins quand la Mère de
Chantal y termina sa sainte vie. (D'après les Mém. et doc. de l'Acad. Salés., tome XIX, et le Livre du Noviciat du 1er
Monastère d'Annecy.)
1224 C'est le Bathellis de l'édition de 1758, qui est évidemment Maurice Barfelly. (Voir tome XVI, note (826), p. 257.)
1225 La terre de Marcossey fut érigée en comté (10 avril 1618) en faveur du fils de Jean-François de Marcossey, Jean,
seigneur du dit lieu..., de Going, Essey, Passavant, baron de Sainct Georges et de Haussonville, places rière les Estatz
de Monsieur le duc de Lorraine, ... son conseiller d'Estat, chef et bally de la province des Vosges, et premier
gentilhomme de la Chambre du sieur de Vaudemont. » (Ouvrage cité note (1223) ci-dessus.)
Or, Marcossey faisait partie du mandement de Thiez, fief des Evêques de Genève. Le nouveau comte voulut
traiter avec François de Sales « sur l'indampnité dudit Marcocet, quil desiroit eximer, avec les biens despendantz, de
l'auchtorité que ledit Bienheureux avoit comme seigneur temporel. » Des experts furent nommés ; le saint Prélat s'en
remit complètement à eux et ne témoigna jamais « de voulloir avoir plus ou moins d'argent. » (Process. remiss.
Gebenn. (I), déposition de Claude de la Frasse, commissaire général de la Chambre des Comptes du Genevois, ad. art.
45.) Jean de Marcossey mourut à Nancy en 1620 ou 1021, sans laisser de postérité.
258/346

26.9 Page 259

▲back to top
Il est vray, sans doute, ma tres chere Seur, que si je ne fusse pas venu en cette ville,
malaysement eussies-vous peu communiquer vos affaires spirituelles avec moy ; mais puisqu'il a
pleu a la Providence celeste que j'y sois, il n'y a nul inconvenient que vous employes cette occasion,
si vous penses qu'il soit a propos. Et ne croyés nullement que j'aye cette cogitation que vous
recherchies l'excellence du personnage, car, bien que cette sorte de pensee est grandement
convenable a ma misere, si est ce qu'en telles rencontres elle ne me vient pas ; ains au contraire, il
n'y a peut estre rien qui soit plus capable de m'acheminer a l'humilité, admirant que tant de
serviteurs et servantes de Nostre Seigneur ayent une si grande confiance en un esprit si imparfait
comme est le mien. Et je prens un grand courage sur cela de devenir tel qu'on m'estime, et espere
que Dieu me donnant la sainte amitié de ses enfans, me donnera la sienne tressainte, selon sa
misericorde, apres qu'il m'aura fait faire une penitence convenable a mon mal. Mais j'ay quasi tort
de vous dire tout ceci.
C'est donq ce meschant esprit qui, a jamais privé d'amour sacré, voudroit empescher que
nous jouissions des [378] fruitz de celuy que le Saint Esprit veut estre prattiqué entre nous, affin
que, par les reciproques communications saintes, nous ayons moyen de croistre en sa celeste
volonté.
Il est malaysé, ma tres chere Seur, de treuver des espritz universelz qui puissent esgalement
bien discerner en toutes matieres : aussi n'est il pas requis d'en avoir de telz pour estre bien conduit,
et n'y a point de mal, ce me semble, de recueillir de plusieurs fleurs le miel qu'on ne peut pas
treuver sur une seule. Ouy ; mais, ce me dites vous, ce pendant je vay dextrement favorisant mes
inclinations et humeurs. Ma chere Seur, je ne voy pas qu'il y ayt grand danger en cela, puisque
vous ne voules pas suivre vos inclinations qu'elles ne soyent appreuvees ; et quoy que vous
cherchies des juges favorables, si est ce toutefois que, les prenant bons, sages et doctes, vous ne
sçauries mal faire de suivre leurs opinions, bien que desirees par vous, pourveu qu'au reste vous
proposies naifvement vos affaires et les difficultés que vous aves. Il suffit, ma tres chere Seur, de
se sousmettre aux advis, et n'est pas ni necessaire ni expedient de les desirer contraires a nos
inclinations, ains seulement de les vouloir conformes a la loy et doctrine celeste. Pour moy, je
pense que nous ne devons pas appeller les amertumes en nos cœurs comme fit Nostre Seigneur,
car nous ne les pouvons pas gouverner comme luy ; il suffit que nous les souffrions patiemment.
C'est pourquoy il n'est pas requis que nous marchions tous-jours contre nos inclinations, quand
elles ne sont pas mauvaises et qu'ayant esté examinees elles ont esté treuvees bonnes.
Il n'y a pas grand mal d'ouyr les personnes et les affaires du monde quand c'est pour y
mettre du bien, et ne faut pas estre pointilleuse en l'examen qu'on en fait ; car c'est chose
moralement impossible de demeurer beaucoup au fin point de la moderation. Mays, ma tres chere
Seur, je ne voudrois pas que vous manquassiés a l'orayson, au moins de demi heure, sinon que ce
fust pour des occasions violentes, ou quand l'infirmité corporelle vous tient. [379]
Au reste, je feray l'une des deux choses ; car, ou je vous escriray avant mon depart plus au
long, ou je vous iray voir au jour que j'ay marqué a ce bon et aymable porteur1226. Et croyes, je
vous supplie, que rien ne m'empeschera d'avoir ce dernier [contentement] que l'impossibilité, et
prendray tout le loysir que vous desires ; tant il est vray que je desire infiniment le vostre, et que
Dieu m'a donné une tres singuliere affection pour vostre cœur, que sa divine Majesté veuille
combler de benedictions. Alhors donq nous parlerons a souhait de vostre conduitte et de tout ce
qu'il vous plaira me proposer, sans que je m'excuse de rien, sinon quand je n'auray pas la lumiere
requise pour vous respondre. J'auray une grande satisfaction de revoir Mme vostre chere seur quand
il luy plaira1227.
Demeurés donq toute en Dieu, ma tres chere Fille, et en luy je seray a jamais, sans reserve
et de toute mon ame,
Vostre tres humble frere et invariable serviteur,
FRANÇS, E. de Geneve.
1226 Le départ du Saint ayant été différé jusqu'au mois de septembre, il put retourner plusieurs fois à Maubuisson et y
faire même des séjours assez prolongés. (Voir ci-après, note (1279), p. 399.)
1227 Mme Le Maistre, Catherine Arnauld, qui sera destinataire.
259/346

26.10 Page 260

▲back to top
Le 25 may.
Je salue infiniment Mlle vostre petite seur et la supplie de prier Dieu pour moy1228. [380]
_____
MDXX. A M. Soudan de la Palme1229 (Inédite). Un parrain
heureux des nouvelles de son filleul. Prochain départ de
Paris. Deux adresses pour les lettres.
Paris, 25 mai 1619.
Mon Filieul,
J'ay esté grandement ayse d'avoir appris de vos nouvelles et que vous soyes en cet honneste
exercice que vous faites. Je ne vous sçaurois asseurer de mon sejour en cette ville, par ce que
devant faire mon retour a la suite de Madame sœur du Roy, nostre Princesse, je seray obligé de
partir quant et elle, qui partira sur la fin de ce moys, comme l'on dit1230. Mays je vous diray bien
que vostre pere se portoit fort bien quand je vins, et vos freres aussi. Vous pourres tous-jours,
quand vous voudres, nous faire sçavoir de vos nouvelles, addressant vos lettres icy, a Maurice des
Melliers1231, valet de chambre de monsieur [le] Comte de Moret1232, qui est de nos voysins de
Thorens ; ou bien mesme a Rouen, a monsieur l'advocat Monet, qui est de la Bonneville1233. [381]
Cependant, je prie Dieu qu'il vous benisse, mon Filieul, et suis de tout mon cœur,
Vostre plus affectionné parrein, amy
et voysin a vous faire service,
FRANCS, E. de Geneve.
Le 25 may 1619.
A Monsieur Soudan de la Palme, escrivain.
A Honnefleur.
Revu sur l'Autographe conservé à la Visitation du Mans.
1228 Ce post-scriptum, donné par Migne, tome VI, col. 1028, renferme, semble-t-il, une erreur. « Madamoyselle vostre
petite seur » ne pourrait désigner que Madeleine Arnauld, alors âgée de huit à neuf ans. Cette enfant était-elle allée
passer quelques jours à Maubuisson ? c'est possible ; mais sa sœur Marie-Claire, professe de Port-Royal depuis 1616,
y était certainement, coopérant, sous la direction de son aînée, à la réforme de l'abbaye. Le Saint n'aurait pas
manqué de la saluer dans cette lettre ; donc, ou il s'agit d'elle ici, ou la phrase a été modifiée dans le texte.
Nous retrouverons plus tard Marie-Claire Arnauld ; quant à Madeleine, caressée par l'Evêque de Genève à
Andilly, en septembre 1619, elle l'entendit prédire sa vocation religieuse. En effet, quatre ans après, la jeune fille
entrait à Port-Royal où elle vécut effacée par suite de ses infirmités.
1229 Peut-être fils de Jacques Soudan, notaire à Thorens (voir tome XI, p. 35). Il n'a pas été possible de trouver des
renseignements sur ce filleul du saint Evêque.
1230 Voir ci-dessus, note (1047), p. 319.
1231 Maurice des Meillers ne serait-il pas le fils de Blaise des Meillers ou Démeiller, l'un des plus anciens domestiques
de la maison de Sales, qui fut présent à la naissance du Saint, le vit et l'admira dans sa petite enfance.
1232 Né en 1608 de Henri IV et de Jacqueline de Bueil, comtesse de Moret, Antoine de Bourbon posséda en commende
les abbayes de Savigny, de Saint-Etienne de Caen, de Saint-Victor de Marseille et de Signy. Il mourut le 1er septembre
1632 au combat de Castelnaudary. (Moreri, 1740, tome IV.)
1233 Claude-Aymon Monet était fils de Jacques Monet, avocat fiscal du Faucigny. Après avoir terminé ses études de
droit à Turin, il passa en France, où il s'acquit de la réputation comme avocat, et devint professeur de droit à l'Université
d'Orléans (1626). Louis XIII, voulant le retenir dans son royaume, lui accorda des lettres de naturalisation. En 1643,
la Duchesse régente, Marie-Christine, le nomma sénateur à Chambéry ; la mort le surprit à Orléans avant qu'il pût
retourner en Savoie (26 mai 1646). Aymon Monet avait épousé Marie Beaucorps en juillet 1619. (D'après Moreri,
tome VI, et Grillet, Dictionnaire historique, etc., Chambéry, 1807, tome I.)
260/346

27 Pages 261-270

▲back to top

27.1 Page 261

▲back to top
MDXXI. A Madame de Charmoisy (Inédite). L'Evêque de
Genève solliciteur pour Mme de Charmoisy. Difficultés
d'obtenir et circonspection à garder dans les demandes.
Approches du retour en Savoie.
Paris, 28 mai 1619.
Ma tres chere Cousine, ma Fille,
Pour Villy, je croy que nous obtiendrons ce que nous demandons. Pour la chatelanie de
Salanche, Monsieur me l'accorda il y a long tems, et tascheray d'en faire faire les despeches, mays,
a ce que j'entens, ce sera inutilement. Pour Samoen, je ne voy pas que pour le present cela se
puisse1234. [382]
Quant a M. Meynier1235, Monseigneur le Prince n'estant pas icy, ains a la cour, a Tours1236,
je ne voy pas qu'on y puisse faire autre chose. Mays croyes moy, je vous supplie, que quand il y
seroit, nous n'en aurions rien davantage, ni par la voye de Madame, qui ne demande rien en matiere
d'affaires que ce que Monseigneur son mari luy suggere de demander ; et il ne veut rien toucher,
ni d'une sorte ni d'autre, a ce qui doit estre pris des mains de Son Altesse1237. Et si vous voyies ce
que je voy, vous ne douteries point de cette verité, ni monsieur Meynier non plus ; et icy comme
ailleurs, mais plus icy qu'ailleurs, il faut aller tendrement aux demandes.
Mays vous sçaures mieux tout ceci bien tost, que j'auray lhonneur de vous voir, sil est vray
que Monseigneur le Prince s'en aille dans 15 jours, et Madame dans 15 apres, comm'on nous dit1238.
Je suis icy tout fin seul des serviteurs de Son Altesse.
Je prie Dieu qu'il vous comble de benedictions, ma tres chere Cousine, ma Fille, et suis de
tout mon cœur,
Vostre tres humble cousin et serviteur,
FRANÇS, E. de Geneve.
Je n'oublie point le desir de monsieur de Vallon, mon cousin1239, et m'essayeray de le faire
reuscir ; mais j'attens [383] l'occasion plus propre, et tandis, je le salue tres humblement.
Le 28 may 1619, a Paris.
A Madame
Madame de Charmoysi.
Revu sur l'Autographe conservé à la Visitation de Montluel.
1234 La veuve de Claude de Vidomne de Charmoisy poursuivait pour sa seigneurie de Villy, en Faucigny, une affaire
déjà heureusement acheminée avant la mort de son mari. Il s'agissait d'une reconnaissance de juridiction, et c'était à «
Monsieur », duc de Nemours, suzerain de tout le Genevois, qu'il fallait s'adresser pour ces questions-là. Quant à la
maison-forte de Sallanches, venue à M. de Charmoisy par sa mère Françoise de Bellegarde, et à Samoè'ns, nous ne
savons quel sujet réclamait l'intervention de François de Sales.
1235 Un Pierre Meynier, membre du Conseil général de Thonon, est nommé dans diverses pièces de 1593 à 1634.
Aucune preuve ne nous permet de l'identifier certainement avec le personnage dont parle ici le Saint.
1236 Après le traité d'Angoulême (30 avril), que Marie de Médicis ne se décidait pas à ratifier, Louis XIII était parti
pour Orléans vers le 8 mai, afin d'essayer d'amener sa mère à la paix avec des conditions raisonnables. La cour se fixa
ensuite à Tours, se rapprochant ainsi de l'Angoumois, et le prince de Piémont l'y avait suivie, bien que sa jeune femme
demeurât pour lors à Paris.
1237 Le duc de Savoie.
1238 Voir ci-dessus, notes (1047), p. 319, et (1189), p. 364.
1239 Jacques de Gex, beau-frère de M. de Charmoisy (voir tome XII, note (582), p. 260). Le contenu d'une requête au
duc de Nemours requête qui sera donnée avec les Opuscules nous porte à croire que « le desir » auquel l'Evêque
fait allusion concernait l'affaire des armoiries du seigneur de Vallon, rasées de l'église de Samoëns par ordre souverain.
(Voir tome XVI, notes (327), (328) des pp. 99, 100.)
261/346

27.2 Page 262

▲back to top
MDXXII. A Madame de Villesavin1240. Comment supporter les
petites persécutions des enfants du monde. Salomon, ses
richesses, et « son inenarrable malheur. » La devise du
Christ. Un adieu jusqu'à l'éternité. Pourquoi se réjouir de
s'être aimés en cette vie.
Paris, mai 1019.
Ma tres chere Fille,
Vous seres souvent parmi les enfans de ce monde qui, selon leur coustume, se moqueront
de tout ce qu'ilz verront ou penseront estre en vous contre leurs miserables inclinations. Ne vous
amuses point a disputer [384] avec eux, ne tesmoignes nulle sorte de tristesse de leurs attaques ;
mais, avec joye, riés de leurs risees, mesprises leur mespris, joues vous de leurs remonstrances,
moques vous modestement de leurs moqueries et, sans faire attention a tout cela, marches tous-
jours gayement au service de Dieu, et, au tems de l'oraison, recommandes ces pauvres espritz a la
divine misericorde. Ilz sont dignes de compassion de n'avoir point d'intention d'honneste entretien
qu'en riant et gaussant sur des sujetz dignes de respect et reverence.
Je voy que vous abondes en commodités de la vie presente ; prenes garde que vostre cœur
n'y demeure point engagé. Salomon, le plus sage des mortelz, commença son inenarrable malheur
par la complaysance qu'il prit es grandeurs, ornemens et magnifiques appareilz qu'il avoit, bien
que tout cela fust selon sa qualité1241. Considerons que tout ce que nous avons ne nous fait estre
rien plus en effect que le reste du monde, et que tout cela n'est rien devant Dieu et les Anges.
Souvenes vous, ma tres chere Fille, de bien faire la volonté de Dieu es rencontres ou vous
aures le plus de difficulté. C'est peu de chose de plaire a Dieu en ce qui nous plaist : la fidelité
filiale requiert que nous luy voulions plaire en ce qui nous desplaist, nous remettans devant les
yeux ce que le grand Filz bienaymé disoit de soy mesme : Je ne suis pas venu pour faire ma
volonté, mays pour faire la volonté de Celuy qui m'a envoyé1242 ; car aussi n'estes vous pas
chrestienne pour faire vostre volonté, mais pour faire la volonté de Celuy qui vous a adoptee pour
estre et sa fille et son heritiere eternelle1243.
Au reste, vous vous en alles, et moy je m'en vay aussi, sans aucune esperance de vous
revoir en ce monde. Prions bien Dieu qu'il nous face la grace de vivre tellement selon son bon
playsir en ce pelerinage, qu'estant arrivés en la celeste patrie nous nous puissions res-jouir de nous
estre veus icy bas et d'y avoir parlé des mysteres de l'eternité. En cela seul nous devons prendre
joye de nous estre aymés en cette vie : que le tout a esté pour la [385] gloire de sa divine Majesté
1240 C'est avec beaucoup de probabilité que nous proposons Mme de Villesavin comme destinataire, et, comme date
très probable aussi, le mois de mai 1619, moment où Louis XIII quitta Paris pour se rapprocher d'Angoulême, refuge
de la Reine mère. (Voir note (1236) de la page précédente.) Jean Phélipeaux, seigneur de Villesavin, suivit la cour ;
sa femme, Isabelle Blondeau, l'accompagna, et nous la retrouverons à Tours, en septembre, lors du passage du saint
Evêque. Mais au printemps, François de Sales se croyait sur son départ et ignorait le chemin du retour ; il pouvait
donc écrire : « Vous vous en alles, et moy je m'en vay aussi, sans aucune esperance de vous revoir en ce monde. »
Cette séparation, qui semblait définitive, devait être d'autant plus sensible à Mme de Villesavin qu'elle connaissait
depuis longtemps et très intimement le Serviteur de Dieu. Leur première rencontre eut lieu à Dijon en 1604 : depuis,
dit-elle, « j'ay eu l'honneur de » le « veoir maintes fois... tant en la maison de mon pere, » Guy Blondeau (cf. tome
XIV, p. 69), « qu'en celle de... mon mary, et ailleurs. » (Sa déposition, Process. remiss. Parisiensis, ad interrog. 5 et
6.) Beaucoup de lettres furent échangées entre eux ; très peu nous ont été conservées. Mme de Villesavin sut employer
les « commodités de la vie presente » dont Dieu l'avait comblée à se faire des trésors dans le Ciel, car elle se montra
toujours l'une des plus ardentes promotrices des bonnes oeuvres à Paris. Elle mourut dans une extrême vieillesse, en
1687.
1241 Cf. III Reg., X, 14 seq. ; Eccles. II, 4-12.
1242 Joan., VI, 38.
1243 Cf. Rom., VIII, 15, 17.
262/346

27.3 Page 263

▲back to top
et nostre salut eternel. Conserves la sainte gayeté cordiale qui nourrit les forces de l'esprit et edifie
le prochain.
Alles ainsy en paix, ma tres chere Fille, et Dieu soit a jamais vostre protecteur. Qu'a jamais
il vous tienne de sa main et vous conduise au chemin de sa sainte volonté1244. Ainsy soit il, ma tres
chere Fille, et je vous prometz que tous les jours je renouvelleray ces sacrés souhaitz sur vostre
ame, que la mienne cherira a jamais inviolablement. Et a Dieu soit a jamais, loüange, action de
graces et benediction. Amen1245.
FRANCS, E. de Geneve.
_____
MDXXIII. A la Mère de Chantal, a Paris. Un conseil de
conscience. Ce qui « osta un peu l'asseurance » au saint
prédicateur.
Paris, mai ou juin 1619 1246.
Monsieur de la Pause1247 me parla hier, et espere de conduire l'affaire a bon port1248. Il me
dit toutefois que [386] Monseigneur de la Rochefoucault1249 vouloit assembler un conseil de
conscience pour se determiner, et peut estre est ce pour cela que le P. Superieur de Saint Louys
vous veut parler1250.
1244 Cf. Ps. LXXII, 24.
1245 Apoc., VII, 12.
1246 Une étude sérieuse permettant de désigner presque sûrement l'affaire dont il s'agit dans ce billet, du même coup
destinataire et date se trouvent justifiées. C'est avec la Mère de Chantal, en mai ou juin 1619, que François de Sales
traite de l'entrée de Mme du Tertre à la Visitation. (Voir note (1248) ci-dessous.)
1247 Né d'une famille noble et hérétique du diocèse de Nîmes, Jean Plantavit de la Pause avait professé la doctrine de
Calvin comme ministre à Béziers. Il abjura en 1604 ; les Jésuites furent ses maîtres dans la sacrée théologie, à l'étude
de laquelle il se livra aussitôt après sa conversion. Au retour d'un voyage à Rome, il devint grand-vicaire du cardinal
de la Rochefoucauld, grand aumônier de France. M. de la Pause fut ensuite aumônier d'Elisabeth, sœur de Louis XIII
et reine d'Espagne, et enfin évêque de Lodève en 1625. Ce Prélat savant et pieux appela le premier en province les
prêtres de Saint-Sulpice. Contraint par ses infirmités, il résigna son évêché, et se retira à Béziers où il mourut le 28
mai 1651, à l'âge de soixante-quinze ans. (Voir Moreri, 1740, tome VII.)
1248 Une jeune veuve, que nous retrouverons bientôt, objet de la charité illimitée de François de Sales, donnait alors
de graves soucis à ses parents par son amour du monde et des plaisirs. Son honneur, l'avenir de ses deux enfants,
pouvaient être compromis. M. et Mme de Morville estimèrent que le meilleur remède était de confier leur fille, Marie-
Aimée, dame du Tertre, à l'Evêque de Genève, pour la faire retirer dans un monastère de la Visitation. Le cardinal de
la Rochefoucauld, le P. Binet s'occupèrent de cette affaire ; les lettres du Saint et de la Mère de Chantal en font foi. A
la fin de juillet 1619, Mme du Tertre partit pour la Visitation de Moulins.
1249 François de la Rochefoucauld, fils de Charles, comte de Randan, et de Fulvie Pic de la Mirandole, naquit à Paris
le 8 décembre 1558 et fut élevé au collège de Clermont. L'Eglise et l'Etat le comblèrent d'honneurs : successivement
évêque de Clermont (1585) et de Senlis (1613), cardinal du titre de Saint-Callixte (1607), abbé de Sainte-Geneviève-
du-Mont et de Tournus, commandeur des Ordres du Roi, grand aumônier de France (1618), président au Conseil d'Etat
(1622) ; son mérite, plus que sa naissance, lui valut tous ces titres. Jusqu'à sa mort, la vénération universelle l'entoura,
et Paul V disait lui-même : « La France n'a jamais eu un cardinal de plus grande piété et dévotion que celui-ci. » Son
zèle le porta surtout à s'occuper de la réforme des Ordres religieux tombés en décadence. En 1619 commencèrent,
sous son inspiration, entre la cour de France et la cour de Rome, d'importants pourparlers à ce sujet. Ils aboutirent, en
1622, à un Bref de Grégoire XV chargeant le cardinal de la Rochefoucauld de cette grande et délicate mission. Pour
s'y donner tout entier, il se démit de son évêché de Senlis ; de ses efforts naquit la Congrégation des chanoines réguliers
dits Genovéfains. Le pieux Cardinal mourut le 14 février 1645 et inhumé dans son abbaye de Sainte-Geneviève, tandis
que son cœur était déposé au collège de Clermont. (Cf. Ciaconius, Hist. Pontif. et Card., Romæ, 1677, tome IV, et
Moreri, 1740, tome VII.)
1250 Le Supérieur de la Maison professe des Jésuites de Saint-Louis, à la rue Saint-Antoine, était alors le P. Etienne
Binet.
263/346

27.4 Page 264

▲back to top
Moy je me porte bien, et hier je n'eu nulle peine, sinon en la si longue attente qu'on fit faire
aux auditeurs, qui me donna certes de l'inquietude, et m'osta un peu l'asseurance ; mays, comme
vous sçavés, ces choses-la sont de peu de consideration en moy qui suis certes tous-jours de plus
en plus vostre en Nostre Seigneur.
J'eu le bien d'entretenir un peu Monseigneur d'Ayre. Mon Dieu, que c'est un digne
Praglat1251 ! [387]
Or sus, Nostre Seigneur soit a jamais au milieu de vostre cœur. Amen.
Revu sur l'Autographe conservé à la Visitation de Montélimar.
_____
MDXXIV. A Madame Angélique Arnauld, Abbesse de Port-
Royal a Maubuisson. Les noms de « plus grande force pour
tesmoigner la dilection. » Un sentiment que le Saint veut
conserver soigneusement. Desseins de Dieu sur l'Abbesse de
Port-Royal. Le livre de D. Sens et la manière de le
comprendre. Remarque pleine de sagesse et de délicatesse de
l'Evêque de Genève au sujet de la doctrine du Général des
Feuillants. Ne pas trop se charger d'austérités.
Paris, vers 15-20 juin1252 1619.
Il n'y aura donq plus en moy de Monsieur pour vous, ni en vous de Madame pour moy ; les
anciens, cordiaux et charitables noms de Pere et de Fille sont plus chrestiens, plus doux, et de plus
grande force pour tesmoigner la dilection sacree que Nostre Seigneur a voulu estre entre nous. Et
je dis ainsy hardiment, que Dieu a voulu estre entre nous, parce que je le sens puissamment, et ne
croy pas que ce sentiment puisse venir d'ailleurs. Et de plus, je connois qu'il m'est profitable et
qu'il m'encourage a mieux faire : c'est pourquoy je le conserveray soigneusement. De vous dire
que vous en facies de [388] mesme, je ne le feray pas ; car s'il plait a Dieu, il vous l'inspirera, et je
ne puis douter qu'il ne le face.
Or sus donq, ma tres chere Fille, c'est la verité que je suis meshuy en si grande incertitude
du tems de mon depart1253 que je n'ose plus me promettre la consolation de vous revoir de mes
yeux mortelz ; mays si j'en ay le loysir, je le feray tres affectionnement, et si je croy que vostre
cœur bienaymé en doive recevoir quelque notable utilité, je feray tout ce que je pourray pour cela.
1251 C'était en effet un très « digne Prælat » que Philippe de Cospéau, évêque d'Aire depuis 1607. Originaire de Mons
en Hainaut, étudiant à Louvain, puis en Sorbonne, il avait été, en 1602, l'auditeur assidu du Coadjuteur de Genève ; il
en fit son modèle pour la prédication, ce qui contribua sans doute à son renom d'orateur. Son admiration pour François
de Sales s'accrut quand il le connut mieux, lors du voyage de 1619. La Mère de Chantal mandait à son bienheureux
Père en 1621 : « De vous, je n'oserais écrire ce qu'il en dit ; c'est sa douceur et ses délices de parler de vous. » (Lettres,
vol. I, p. 587.) A cette époque, Mgr de Cospéau venait d'être nommé évêque de Nantes ; il appela dans sa ville
épiscopale les Filles de la Visitation, et témoigna toujours un paternel intérêt à cet Institut, où trois de ses nièces firent
profession. En 1636, il quitta le siège de Nantes pour celui de Lisieux, et c'est là que, âgé de soixante-dix-huit ans, il
fit une sainte mort en 1646. Lui aussi s'occupa activement et fructueusement de la réforme des couvents, et contribua
à l'établissement à Paris des Carmélites et des Bénédictines du Caivaire. (D'après la Gallia Christiana, et Livet,
Cospéau, Paris, 1854.)
1252 En comparant les textes on se persuade que cette lettre doit être placée entre celle du 25 mai et celle du 35 juin, à
la même destinataire, et, sans doute, après la visite de l'Evêque de Genève à Maubuisson, le 11 juin.
1253 Voir ci-dessus, note (1188), p. 364.
264/346

27.5 Page 265

▲back to top
Cependant, ma tres chere Fille, souvenes vous souvent de ce que je vous ay dit : Dieu a
jetté les yeux sur vous pour se servir de vous en choses de consequence et vous tirer a une
excellente sorte de vie. Portés donq respect a son eslection et suivés fidelement son intention.
Animes continuellement vostre courage d'humilité, et vostre humilité, c'est a dire vostre misere et
le desir d'estre humble, animes les de confiance en Dieu, en sorte que vostre courage soit humble
et vostre humilité courageuse.
Parsemes toutes les pieces de vostre conversation, tant interieure qu'exterieure, de sincerité,
douceur et allegresse, suivant l'advis de l'Apostre1254 : Res-jouisses vous tous-jours en Nostre
Seigneur ; je vous dis de rechef, res-jouisses vous. Que vostre modestie soit conneuë de tous les
hommes. Et s'il est possible, soyes esgale en humeur, et que toutes vos actions se ressentent de la
resolution que vous aves faite d'aymer constamment l'amour de Dieu.
Ce bon porteur, que j'ayme cordialement parce qu'il est tout vostre, vous porte le livre du
P. Dom Sens, General des Feüillans, ou il y a une grande et profonde doctrine spirituelle, pleine
de maximes tres importantes1255. S'il vous sembloit qu'il vous portast hors de la [389] sainte
allegresse que je vous conseille si fort, croyes que ce n'est pas sa pretention, ains seulement de
rendre serieuse et grave cette joye, comme aussi faut il qu'elle soit. Et quand je dis grave, je ne dis
pas morne, ni affectee, ni sombre, ni desdaigneuse, ni altiere, mais je veux dire sainte et charitable.
Le bon Pere a une opinion, fondee en sa vertu et humilité, qu'on ne puisse pas passer un
jour sans peché veniel, dont on se puisse accuser en confession. Mais l'experience en ceci m'a fait
voir le contraire, car j'ay veu plusieurs ames bien examinees ne dire rien que je peusse remarquer
estre peché ; et entre autres, l'heureuse servante de Dieu, madamoyselle Acarie1256. Je ne dis pas
que peut estre il ne se passast quelques coulpes venielles ; mais je dis qu'elle ne les pouvoit
remarquer en son examen, ni moy reconnoistre en sa confession, et que partant j'avois rayson de
luy faire repeter l'accusation de quelque coulpe ancienne.
Vous ne dires point ceci a personne, s'il vous plait, ma tres chere Fille ; car je revere si
hautement ce bon Pere et tout ce qu'il dit, que je ne voudrois pas qu'il sceust qu'en ceci mesme je
me retirasse de luy. Outre que je ne sçai pas comme il aura touché cet article, ne l'ayant pas leu en
son livre, que je n'ay point veu encor, ains seulement le luy ayant ouy dire ; et je parle a vostre
cœur confidemment.
Ne vous charges pas de trop de veilles ni d'austerités (et croyés moy, ma tres chere Fille,
car j'entens bien ce que je dis en ceci), mais alles au Port Royal de la vie religieuse par le chemin
royal de la dilection de Dieu et du prochain, de l'humilité et de la debonnaireté.
Si jamais vous m'escrives des nouvelles de'vostre cœur, vous n'aves point besoin de vous
signer, ni de marquer le lieu d'où vous m'escrives, ni de parler de vous, ains seulement de la fille
que je vous ay recommandee. Je ne sçay pourquoy je vous escris si largement ; c'est mon cœur qui
ne se lasse pas de parler au vostre, mais il faut [390] que je finisse pour entrer au bain, puisque je
suis entre les mains du medecin1257.
Dieu soit a jamais au milieu de vostre cœur, ma tres chere Fille, et je suis de tout le mien
invariablement, Vostre Pere et serviteur,
FRANÇS, E. de Geneve.
_____
1254 Philip., ult., 4, 5.
1255 Le livre de D. Sens de Sainte-Catherine (voir tome XVII, note (171), p. 39) dont il est ici question, doit être celui
qui parut en 1619, à Paris, chez Jean Henqueville : Les Exercices spirituels distribués en vingt Méditations. A la Xme
Méditation de la Ire Partie, De la Confession, l'auteur dit que ceux-là se trompent qui croient « n'avoir rien fait... dont
ils se doivent confesser,... attendu qu'il n'y a homme sur terre, pour si juste qu'il soit, qui passe les jours et les heures
sans tomber véniellement. » (Cf. l'alinéa qui suit.)
1256 Voir tome VI, Entretien XV, p. 284, et Appendice I, p. 434.
1257 L'Evêque de Genève payait l'abus que son zèle faisait de ses forces ; le 9 juillet, la Mère de Chantal écrivait : «
Hélas ! ce bon et très cher Père se trouve tout mal. » (Lettres, vol. I, p. 328.) Ce fut l'occasion pour les grands et le
peuple, de témoigner de leur estime et vénération pour le Serviteur de Dieu. L'inquiétude générale ne fut heureusement
pas de longue durée ; le 22 juillet, la Sainte pouvait assurer que « Monseigneur se » portait « bien ». (Ibid., p. 330.)
265/346

27.6 Page 266

▲back to top
MDXXV. Au Prince de Piémont, Victor-Amédée1258. Une dame
d'honneur de la princesse de Piémont retenue à Paris.
Paris, 19 juin 1619.
Monseigneur,
La bonne madame de Saint George1259 fait elle mesme par lettre ses excuses a Vostre
Altesse, dequoy elle ne s'est [391] peu mettre en chemin pour suivre Madame1260 ; mays elle n'a
pas l'asseurance de nommer la cause de son retardement, par ce qu'elle est extraordinaire pour elle
qui, n'ayant peu devenir grosse en tant d'annees de son mariage, a rencontré ce contentement en
celle ci, comme plus heureuse pour la benediction des noces. Et d'autant qu'elle m'a prié de l'escrire
a Vostre Altesse, je l'ay fait, Monseigneur ; suppliant encor pour moy vostre bonté de se resouvenir
que je ne suis plus icy, il y a quelques moys, que pour y attendre les commandemens qu'elle me
fera au retour de M. Carron1261, puisqu'elle me l'a ordonné, et qu'en tout je veux vivre,
De Vostre Altesse,
Monseigneur,
Le tres humble, tres obeissant et tres fidele
orateur et serviteur,
FRANÇS, E. de Geneve.
Paris 19 juin 1619.
_____
1258 Le contenu de la lettre prouve qu'elle s'adresse non pas au duc de Savoie, comme les éditeurs précédents l'ont
supposé, mais à son fils Victor-Amédée. (Cf. note (1260) de la page suivante.)
1259 Jeanne de Harlay, baronne de Montglat, fille de Robert de Harlay et de Françoise de Longuejoue, avait épousé, le
13 octobre 1599, Hardouin de Clermont, seigneur de Saint-Georges. Elle fut successivement dame d'honneur de
Christine et de Henriette de France, et, après le mariage de ces deux princesses, gouvernante d'Anne-Marie d'Orléans,
duchesse de Montpensier. Ayant rejoint la princesse de Piémont à Tours, elle l'accompagna à Turin, où naquit son fils
François de Paule, en 1620. Vraie dame de cour comme sa mère, Mme de Saint-Georges était moins portée à la dévotion
que sa cousine germaine, Mme de Bréauté (voir tome XVI, note (793), p. 246) ; aussi François de Sales s'appliqua-t-il
soigneusement à faire le contrepoids de ses inclinations mondaines. Elle-même l'avoue dans sa déposition (Process.
remiss. Parisiensis, ad. art. 26) : « Voyant que je m'enfonçois trop avant aux pensemens de ceste vie, et que je
plongeois mon cœur dans le monde plus qu'il n'estoit de besoing, il m'exhortoit de me desprendre de toutes ces
pretensions et de n'avoir de l'ambition que pour le divin amour. » Jeanne de Harlay mourut dix ans après son mari, le
28 février 1643. (Cf. Moreri, 1740, tomes III, IV.)
1260 Christine de France allait à Tours où son mari, le prince de Piémont, avait accompagné le Roi au mois de mai. (Cf.
ci-dessus, note (1236), p. 383.) Le 5 juin, il était revenu dans la capitale pour préparer le départ de la princesse, et le
15 il se trouvait à Angoulême, ainsi que son frère, le prince Thomas, pour négocier, auprès de la Heine mère, sa
réconciliation avec Louis XIII.
1261 Jean Carron, secrétaire du prince Victor-Amédée. (Voir ci-dessus, note (903), p. 268.)
266/346

27.7 Page 267

▲back to top
MDXXVI. Au Duc Roger de Bellegarde. Instante requête au
destinataire pour l'heureuse conclusion d'un procès entre les
chanoines de Saint-Pierre de Genève et les habitants de Seyssel.
Paris, 21 juin 1619.
Je n'ay garde, certes, Monsieur mon tres cher Filz, de donner la liberté a mon cœur
d'entretenir le vostre, maintenant qu'il est tout environné des affaires de la cour1262. La seule
necessité de mon Eglise me dispense de ce respect, pour vous supplier, comme je fay tres
humblement, de vouloir retirer la connoissance du different qui est entre maditte Eglise et les sieurs
habitans de Sessel1263 par devant vous, au tems et au lieu qu'il vous plaira de marquer. Non que
nous voulions vous donner l'importunité d'assister a la meslee des allegations qui se feront de part
et d'autre, mais seulement nous souhaiterions que l'affaire se passast en lieu ou vous puissies, en
un mot de vostre authorité, determiner ce qui sera jugé convenable par ceux a qui il vous plaira de
donner le soin de voir le droit et le juste ; autrement, Monsieur mon Filz, il ny a nul moyen de finir
cette conteste, laquelle toutefois est de consequence pour le repos des ames des uns et des autres.
Playse vous donq, je vous en supplie de rechef tres humblement, de nous faire a tous cette
grace, et d'advertir les uns et les autres de vostre volonté, affin que, ce pendant, le proces cesse, et
qu'ilz se præparent a venir, icy [393] ou a Digeon, au tems de vostre commodité. Et bien que je
nomme ces deux lieux, ce n'est pas pour prsevenir vostre volonté, ains seulement pour tesmoigner
qu'y ayant en l'un et en l'autre des gens dignes de creance, il sera peut estre plus a propos d'y faire
venir des parties qui ont besoin d'estre rangees par l'advis de juges de qualité, et sur tout par vostre
commandement.
Je suis encor icy pour quelques jours, attendant ce qu'il plaira a Monseigneur le Prince de
Piemont de m'ordonner sur mon retour1264, lequel, si je fay selon mon souhait, se fera du costé ou
vous serés, pour avoir encor le bien et le contentement de vous revoir et recevoir lhonneur de vos
commandemens. Et tandis, je prie Dieu, Monsieur mon tres cher Filz, qu'il vous comble de toute
parfaite prosperité avec tout ce qui vous est plus cher, et suis invariablement, d'un cœur
paternellement passionné,
Vostre tres humble et tres obeissant serviteur,
FRANÇS, E. de Geneve.
XXI juin 1619, a Paris.
A Monsieur
Monsieur de Bellegarde,
Marquis de Seurre, etc.1265
Revu sur l'Autographe conservé à l'Hospice du Grand-Saint-Bernard. [394]
_____
1262 François de Sales fait allusion à la réconciliation de Marie de Médicis avec son fils, qui se traitait alors et tenait
en éveil tous les gouverneurs des provinces. D'un côté, la Reine mère avait essavé de les gagner à sa cause après sa
fuite de Blois ; d'autre part, des levées d'armes furent ordonnées par le Roi au cas où le duc d'Epernon et les partisans
de la Reine exciteraient une révolte.
1263 Voir ci-dessus, note (946), p. 283.
1264 Voir ci-dessus, note (1189), p. 364, et ci-après, p. 411.
1265 L'adresse manque à l'Autographe ; mais elle est donnée, sans doute incomplètement, dans l'attestation latine
d'authenticité, datée du 11 août 1798.
267/346

27.8 Page 268

▲back to top
MDXXVII. A la Mère de Chantal, a Paris. Un sentiment de
l'âme du Saint au lieu d'un bouquet du désert. Deux regards
qui rendent bienheureux. Comment faire la grille du choeur.
La première profession à la Visitation de Paris.
Paris, 23 juin 1619 1266.
Ma tres chere Mere,
Je voudrois bien, certes, avoir quelque beau bouquet du desert de nostre glorieux saint Jean
pour le presenter a vostre chere ame ; mais la mienne, plus sterile que le desert, n'a sceu y en
treuver aujourdhuy, bien qu'en verité ell'ayt eu ce matin et ayt encor presentement un certain petit,
insensible sentiment de ne vouloir plus vivre selon la nature, mais, tant qu'il se pourra, selon la
foy, l'esperance et la charité chrestienne, a l'imitation de cet homme angelique qué nous voyons,
dans ce profond desert, ne regarder que Dieu et soymesme. O que bienheureux est l'esprit de celuy
qui ne void que ces deux objetz, dont l'un le ravit a la dilection souveraine, et l'autre le ravale a
l'abjection extreme ! car, que pouvoit dire ce grand hermite, en un lieu ou il n'avoit que Dieu et
luy, sinon : « Qui estes vous, Seigneur, et qui suis-je1267 ? »
1268 Quant a vostre treille, je pense qu'il la faut, pour le present, faire de boys, tandis que
vous estes a louage, et qu'il y faut faire une porte, sans que toute la treille s'ouvre1269 ; car, quant a
la Profession, le Pontifical reveu [395] et imprimé par ordre du Pape, fait sortir les filles pour venir
faire le vœu1270 ; et quant a parer l'autel, on verra si on pourra continuer a faire1271Je n'y voy nul
inconvenient ; mais il faut subir l'esprit des autres.
Vrayement, si on veut faire professer ma chere Seur Anastase le jour de la Visitation, je
seray bien ayse d'estre l'officiant, et on pourra supplier un de ces seigneurs pour un autre jour ou
pour le Dimanche dans l'octave1272
Revu sur l'Autographe conservé à la Visitation de Poitiers. [396]
_____
1266 Le quantième est indiqué par les souhaits de fête à la Mère de Chantal, et l'année par la profession de Sœur Marie-
Anastase.
1267 Speculum vitæ S. Franc., circa medium.
1268 Dans l'édition princeps, ce qui suit est remplacé par un fragment sur saint Jean-Baptiste que nous avons donné au
tome XVI, p. 35. Hérissant et ceux qui l'ont suivi maintiennent l'interpolation et ajoutent le passage autographe
supprimé en 1626.
1269 Il s'agit de la petite fenêtre « haute d'un pied et demi, et large d'un grand pied, pour donner le voile aux Religieuses,
et au besoin la Communion, » que marque le Coustumier et Directoire... de la Visitation Saincte Marie, art. XXXVII,
Des grilles du chœur et meubles de l'église.
1270 L'édition du Pontifical romain à laquelle saint François de Sales fait allusion est sans doute celle qui, revue et
corrigée par ordre de Sa Sainteté Clément VIII, fut publiée en 1596, avec la Constitution apostolique du 10 février :
Ex quo in Ecclesia. Voir, dans ce Pontifical, le formulaire De Benedizione et Consecratione Virginum.
1271 Le bas de l'Autographe a été coupé ; la suite du texte est écrite dans la marge.
1272 Ce fut seulement le 9 juillet que la Sœur Marie-Anastase Pavillon, novice venue de Moulins à la fondation de
Paris, prononça ses vœux ; six prétendantes prirent en même temps l'habit. Le saint Evêque présida la cérémonie et
prêcha. Quant à la nouvelle professe, après avoir supporté généreusement les peines des débuts dans la capitale, elle
retrouva les mêmes difficultés et les mêmes mérites à la fondation de Meaux (1630), et à celle du Mans (1634) dont
elle fut la première Supérieure. Rappelée à Paris, Sœur Marie-Anastase se dévoua à la Maison de la Madeleine où elle
exerça six ans la charge de Directrice (voir ci-dessus, note (1213), p. 373), puis revint à son monastère de profession
et y mourut le 24 octobre 1654. (Voir sa notice dans l'Année Sainte de la Visitation, tome X, p. 658.)
268/346

27.9 Page 269

▲back to top
MDXXVIII. A une dame. Pourquoi on ne peut pas recevoir Mme
du Tertre à la Visitation de Paris. Réserve et prudence du
saint Evêque.
Paris, juin 1619 1273.
Madame,
J'ay promis a madame Goulay de vous tenir advertie de ce que j'aurois fait en son affaire,
et je tiens parole. Je n'ay encor rien sceu apprendre distinctement de la resolution prise par
messieurs du Conseil de Monseigneur le Cardinal de Retz1274.Je croy neanmoins que je la sçauray
ce soir, ayant supplié M. de Pierrevive, son Vicaire general1275, de m'en esclaircir.
Mays pourtant, les Seurs de la Visitation disent qu'elles se sont apperceuës que ledit Conseil
ne treuve nullement convenable qu'elles reçoivent cette bonne dame1276, parce que leur Monastere
est tout composé de Novices, et si recent en cette ville que la reputation en est delicate, comme
regardé curieusement en ce commencement, et [397] regardé de beaucoup d'espritz fort tendres ;
que, de plus, ledit Conseil a mis en consideration que mondit seigneur le Cardinal avoit tous-jours
declairé qu'il ne souffriroit jamais qu'on y entrast, sinon pour y vouloir demeurer tout a fait : qu'en
suite de cela il fut conclu qu'on ne la recevroit point pour quelque tems ; mais que si elle estoit
bien tendre et qu'elle voulust estre Religieuse a bon escient, on la pourroit recevoir, comme vous
me dites vous [mesme, quand on] auroit bien espreuvé sa vocation, et qu'une des bonnes marques
seroit qu'elle se contentast d'aller pour quelque tems en quelqu'un des monasteres de France, pour
ensuite revenir icy. Voyla en substance ce que j'en appris hier de la Mere Superieure1277, laquelle
me nomma son autheur, bien digne de foy1278 ; mais parce qu'il n'est pas du Conseil, je m'addressay
hier a M. de Pierrevive, qui, je m'asseure, me donnera plus de clarté.
Cependant, Madame, vous jugeres que si la chose est telle, je ne dois rien dire sur ces
Messieurs, estans les interpretes du Prelat ; et n'estant icy qu'en attente de mon depart, je dois en
tout et par tout suivre leurs sentimens, outre que ce seul bruit donne tant d'apprehension a ces
Seurs, que s'il est vray, je n'oserois leur persuader une reception de laquelle elles auroyent tant de
degoust.
Vous mesnageres, s'il vous plait, cet advis, en attendant celuy que je vous donneray soudain que
j'auray receu response de monsieur le grand Vicaire ; et tenes moy, je vous en supplie,
Madame, pour
Vostre bien humble, et tres affectionné serviteur,
FRANÇS, E. de Geneve. [398]
_____
1273 L'affaire dont il s'agit dans cette lettre est évidemment celle de Mme du Tertre, née Gruet ou Le Gruet de Morville
(voir ci-déssus, note (1248), p. 386), et sans trop nous aventurer, nous pouvons supposer qu'en imprimant Goulay,
Hérissant, coutumier du fait, a commis une erreur de lecture ; à moins que ce ne soit là le nom patronymique du
seigneur du Tertre. Des découvertes ultérieures éclaireront peut-être ce point obscur.
Mais à qui l'Evêque de Genève donnait-il des nouvelles de « la resolution « prise par messieurs du Conseil ?
» Deux personnes peuvent être proposées : Mme d'Assy ou d'Acy, soit Jeanne Hennequin, femme d'Antoine Hennequin,
seigneur d'Assy (cf. tome XII, note (218), p. 121), et Mme Chauvelin, sœur de Mme du Tertre. L'une et l'autre sont
continuellement mêlées aux débats, aux discussions et aux décisions dans la triste histoire de la future Sœur Marie-
Aimée de Morville. Quant à la date, la marche des faits indique le mois de juin.
1274 Henri de Gondi, évêque de Paris (voir ci-dessus, note (1203), p. 370).
1275 Sylvius de Pierrevive (voir ibid., note (1206), p. 371).
1276 Mme du Tertre, en effet, ne fut pas reçue au Monastère de Paris, mais envoyée à celui de Moulins.
1277 La Mère de Chantal.
1278 Peut-être le P. Etienne Binet qui, on l'a vu, s'occupait de cette affaire. (Cf. ci-dessus, Lettre MDXXIII, p. 386, et
ci-après, p. 413.)
269/346

27.10 Page 270

▲back to top
MDXXIX. A Madame Angélique Arnauld, Abbesse de Port-
Royal a Maubuisson. Une confession générale faite « a la
desrobee. » Promesse d'un revoir. Le chemin d'une «
excellente sorte de vie. » Divin compagnon de route ;
manière de le suivre. Méditation du Saint sur la Communion.
Paris, 25 juin 1619.
Je ne vous escris pas, ma tres chere Fille, car je n'en ay pas le loysir ce matin, un'ame
pressee de retourner aux chams et venant faire sa confession generale a la desrobee m'ostant cette
commodité. Je salue seulement vostre chere ame, a laquelle il ne se peut dire combien la mienne
chetifve est affectionnee, ne cessant de luy desirer la perfection du divin amour. Et vrayement, je
la reverray avant mon depart, s'il se peut1279, affin que la connoissant encor plus particulierement,
je puisse, si Dieu en dispose ainsy, la servir plus a son souhait es occurrences.
Dites cependant a cette fille bienaymee que je vous ay tant recommandee et que j'ay tant a
cœur1280, que je persevere a luy dire que Dieu la veut tirer a une excellente sorte de vie ; dont elle
doit benir cett'infinie Bonté qui l'a regardee de son œil amiable. Mays je luy dis aussi que le chemin
par lequel elle doit suivre cette vocation n'est point extraordinaire ; car, ma chere Fille, c'est une
douce, paysible et forte humilité, et une tres humble, forte et paysible douceur.
Dites luy, ma tres chere Fille, qu'elle ne doit en sorte quelcomque penser si elle sera des
ames basses ou des hautes, ains qu'elle suive la voye que je luy ay marquee, [399] et qu'elle se
repose en Dieu ; qu'elle marche devant iceluy en simplicité et humilité ; qu'elle ne regarde point
ou elle va, mais avec qui elle va. Or, j'entens qu'elle va avec son Roy, son Espoux et son Dieu
crucifié ; ou qu'ell'aille, elle sera bienheureuse. C'est aller avec l'Espoux crucifié que de s'abaisser,
s'humilier, se mespriser soymesme jusques a la mort de toutes nos passions, et je dis jusques a la
mort de la croix1281. Mais, ma chere Fille, notes que je replique que cet abaissement, cett'humilité,
ce mespris de soy mesme doit estre prattiqué doucement, paisiblement, constamment, et non
seulement suavement, mais allegrement et joyeusement.
Dites luy qu'elle communie hardiment en paix, avec toute humilité, pour correspondre a
cett' Espoux (sic), qui, pour s'unir a nous, s'est aneanti et suavement abaissé, jusques a se rendre
nostre viande et pasture, de nous qui sommes la pasture et viande des vers. O ma Fille, qui se
communie selon l'esprit de l'Espoux s'aneantit soymesme et dit a Nostre Seigneur : Masches moy,
digeres moy, aneantisses moy et convertisses moy en vous. Je ne treuve rien au monde dequoy
nous ayons plus de possession et sur quoy nous ayons tant de domination que la viande que nous
aneantissons pour nous conserver ; et Nostre Seigneur est venu jusques a cet exces d'amour, que
de se rendre viande pour nous. Et nous, que ne devons nous pas faire affin quil nous possede, quil
nous manie, quil nous masche, quili nous avale et ravale, qu'il face de nous a son gré ?
Si l'on murmure, sentes-le humblement et amoureusement ; les murmurations se convertiront en
benedictions. Du reste, je vous en parleray en presence.
Ne prenes point garde a bien bastir vos lettres pour me les envoyer, car je ne cherche point
les beaux ædifices, ni le langage des Anges, ains les nids des colombes et le langage de la dilection.
Vives toute a Dieu, ma tres chere Fille, et recommandes souvent a sa Bonté l'ame de celuy
qui, d'un'affection invariable, est tout dedié a la vostre.
F., E. d. G. [400]
Je pensois ne vous escrire que pour vous saluer, mais insensiblement je vous ay escrit.
1279 L'Evêque de Genève était de nouveau à Maubuisson le 17 juillet ; il y prêcha et reçut le vœu de chasteté de Mme
Le Maistre, Catherine Arnauld. A la fin du mois d'août eut lieu sa dernière visite.
1280 On se souvient que le Saint, pour ménager l'Abbesse, lui avait conseillé de lui parler d'elle-même sous cette
dénomination. (Voir ci-dessus, p. 390.)
1281 Philip., II, 8.
270/346

28 Pages 271-280

▲back to top

28.1 Page 271

▲back to top
Je salue la chere petite fille Seur Marie Angelique de Thouz et luy souhaite un'heureuse
perseverance1282.
Mon frere vous salue tres humblement1283, et moy, nos tres cheres Seurs1284.
Le 25 juin 1619.
A Madame
Madame l'Abbesse de Port Royal, m. f. (ma fille).
A Maubuysson1285.
Revu sur l'Autographe conservé à la Visitation de Meaux. [401]
_____
MDXXX. Au Duc de Savoie, Charles-Emmanuel Ier1286. « Quatre
lignes pour gage. »
Paris, 28 juin 1619.
Monseigneur,
Bien que je n'aye aucun autre sujet d'escrire a Vostre Altesse, si est ce que ayant prié ce
gentilhomme, mon ami, et qui est grandement affectionné a la Mayson de Vostre Altesse, de luy
faire la reverence de ma part, je luy donne ces quatre lignes pour gage, et en toute humilité je
demeure,
De Vostre Altesse, Monseigneur,
Tres humble, tres obeissant et tres fidele
orateur et serviteur,
FRANÇS, E. de Geneve.
XXVIII juin 1619, a Paris.
Revu sur l'Autographe conservé à Turin, Archives de l'Etat. [402]
1282 C'était la jeune fille que François de Sales avait confirmée le 5 avril, sur la demande de son père, René de Thou
de Bonneuil (voir ci-dessus, note (1198), p. 367), et qui, novice à Maubuisson, reçut le nom de Marie-Angélique de
Saint-Paul. Elle sera destinataire.
1283 Il est probable que Jean-François de Sales avait accompagné son frère dans ses précédentes visites à Maubuisson
; il y alla certainement le 17 juillet, et, avec l'avis du Saint, entreprit la conversion d'une Religieuse, Mme de la Serre,
dont les manières mondaines l'avaient frappé. Le zélé M. de Boisy obtint des promesses, mais peu de résultats.
1284 Les Religieuses de Maubuisson.
1285 Cette antique abbaye, de l'Ordre de Cîteaux comme celle de Port-Royal, devait sa fondation à Blanche de Castille
qui l'appela Sainte-Marie la Royale (1241). Le nom de Maubuisson lui vint de la terre dite Malodunum, achetée peu
après par la pieuse fondatrice. Blanche voulut avoir sa sépulture dans l'abbaye ; saint Louis et plusieurs de ses
successeurs l'enrichirent de dons et de privilèges. Foyer de ferveur pendant longtemps, Maubuisson avait, de même
que tant d'autres Monastères, passé par la période du relâchement, suivie d'une décadence rapide, et était finalement
tombé aux mains d'Angélique d'Estrées, la sœur de Gabrielle. La scandaleuse conduite de cette indigne Abbesse,
vingt-cinq ans impunie, reçut enfin son châtiment. Par ordre du Roi, Mme d'Estrées, qui avait refusé formellement de
comparaître devant l'Abbé de Cîteaux, fut emmenée de force et séquestrée aux Pénitentes de Paris, le 3 février 1618.
Quelques jours après, Angélique Arnauld venait, sur l'ordre de son Supérieur, essayer de relever l'abbaye de sa ruine
morale. Elle réussit au prix de grandes difficultés, nous le verrons plus tard. (Cf. Gallia Christiana, etc.)
1286 Point d'adresse sur l'Autographe. Nous maintenons celle que donnent Datta, Vivès et Migne, tout en émettant la
pensée que le prince de Piémont pourrait bien être le destinataire. En effet, l'Evêque, écrivant au duc de Savoie,
n'aurait-il pas fait mention de son fils et de sa nouvelle belle-fille ? La question serait peut-être plus facilement résolue
s'il était possible de trouver la trace du gentilhomme porteur du billet.
271/346

28.2 Page 272

▲back to top
MDXXXI. A un gentilhomme1287. La clarté de l'Ecriture, et
l'obscurité de l'esprit humain. Contradictions des luthériens et
des calvinistes dans l'explication de certains passages.
L'Eglise, gardienne et interprète infaillible de la Parole de Dieu.
Paris, 2 juillet 1619.
Monsieur,
Il est fort vray que l'Escriture sacree contient avec beaucoup de clarté la doctrine requise
pour vostre salut, et ne pensay jamais le contraire. Il est encor vray que c'est une tres bonne
methode d'interpreter l'Escriture sacree de conferer les passages d'icelle les uns avec les autres, et
reduire le tout a l'analogie de la foy ; et cela aussi l'ay-je tous-jours dit1288. Mais toutefois, je ne
laisse pas de croire fort asseurement et de dire constamment que, nonobstant cette admirable et
amiable clarté de l'Escriture es choses necessaires a salut, l'esprit humain ne treuve pas tous-jours
le vray sens d'icelle, ains peut errer, et d'effect erre tres souvent en l'intelligence des passages les
plus clairs et les plus necessaires a l'establissement de la foy : tesmoins les erreurs lutheriennes et
les livres calvinistes, qui, sous la conduitte des peres de la pretendue reformation, demeurent en
une contention irreconciliable sur l'intelligence des paroles de l'institution de l'Eucharistie ; et se
vantant l'un et l'autre parti d'avoir soigneusement et fidelement examiné le sens de ces paroles par
le rapport de la conference des autres passages de l'Escriture, et le tout adjusté a l'analogie de la
foy, demeurent neanmoins contraires en l'intelligence des paroles de si grande importance.
L'Escriture est donq claire es paroles ; mays l'esprit de l'homme est obscur, et, comme une
chouette, ne peut [403] voir cette clarté. La methode susmentionnee est tres bonne, mais l'esprit
humain n'en sçait pas user. C'est l'Esprit de Dieu, Monsieur, qui nous a donné l'Escriture, et c'est
le mesme Esprit qui en donne le vray sens, et ne le donne qu'a son Eglise, colomne et appuy de
verité1289 ; Eglise par le ministere de laquelle ce divin Esprit garde et maintient sa verité, c'est a
dire le vray sens de sa Parole ; et Eglise qui seule a l'infallible assistance de l'Esprit de verité1290,
pour bien, deuëment et infalliblement treuver la verité en la Parole de Dieu1291. Si que, qui cherche
la verité de cette celeste Parole hors de l'Eglise qui en est la gardienne, ne la treuvera jamais ; et
qui la veut sçavoir autrement que par son ministere, en lieu de la verité, il espousera la vanité ; et
en lieu de la certaine clarté de la Parole sacree, il suivra les illusions de ce faux ange, qui se
transfigure en ange de lumiere1292. Ainsy firent jadis tous les heretiques, qui tous ont eu pretexte
de mieux entendre l'Escriture et de vouloir reformer l'Eglise, cherchans en vain la verité hors du
sein de l'Espouse a laquelle l'Espoux celeste l'avoit confiee, comme a une fidele depositaire et
gardienne, qui la distribueroit aux chers enfans du lict nuptial qui est et sera a jamais sans macule.
C'est donq cela que je vous dis en substance, Monsieur, qui n'est ni de loin ni de pres
contraire a la doctrine des saintz Peres allegués par monsieur de Mornay1293 au livre qu'il vous
pleut m'envoyer hier au soir, et que je vous renvoye ce matin1294, avec remerciement et protestation
que je desireray continuellement de pouvoir, par quelqu'heureuse occasion, tesmoigner,
Monsieur, que je suis
Vostre serviteur tres humble en Nostre Seigneur,
1287 Hérétique nouvellement converti, ou hérétique à convertir, ce gentilhomme demeure inconnu.
1288 Cf. Les Controverses (tom. I hujus Edit.), Part. II. ch. III, art. 1.
1289 I Tim., III, 15.
1290 Joan., XIV, 17.
1291 Cf Les Controverses., ubi supra, art. II, et tom. XIV, p. 191.
1292 II Cor., XI, 14.
1293 Philippe de Mornay, seigneur du Plessis-Marly (voir tome XV, note (392), p. 128).
1294 Il semblerait, d'après le contexte, que le livre du « Pape des huguenots » fût son Traité de l'Eglise ; mais l'on ne
peut rien affirmer.
272/346

28.3 Page 273

▲back to top
Le 2 julliet 1619. [404]
_____
FRANÇS E. de Geneve.
MDXXXII. Au Prince de Piémont, Victor-Amédée.
Remerciements et soumission. Le duc et la duchesse de
Nemours.
Paris, 4 juillet 1619.
Monseigneur,
Je remercie tres humblement Vostre Altesse du soin qu'il luy a pleu de prendre de
m'advertir du retour de monsieur Carron1295, et attendray cependant les commandemens qu'elle me
fera pour les affaires qui regardent Monsieur le Duc de Nemours1296, qu'on m'asseure devoir
revenir icy samedi avec Madame sa femme, que l'on dit estre grosse1297.
Dieu, par sa bonté, prosperera parfaitement Vostre Altesse, Monseigneur, sil luy plait
exaucer les vœux de
Vostre tres humble et tres obeissant orateur
et tres fidele serviteur,
FRANÇS, E. de Geneve.
A Paris, le 4 julliet 1619.
Monseigneur, j'ay veu madame de Saint George1298 de la part de Vostre Altesse, a qui elle
bayse tres humblement les mains et luy fait la reverence, avec action de graces de la souvenance
qu'ell' a eu d'elle.
Revu sur l'Autographe conservé à Turin, Archives de l'Etat. [405]
_____
1295 Jean Carron (cf. ci-dessus, Lettre MDXXV, p. 392).
1296 Une lettre du saint Evêque, en date du 29 juillet (voir ci-après, p. 410), nous apprend que ces affaires avaient
rapport à un « retardement » de payement. En effet, l'un des principaux griefs du grand vassal contre son suzerain,
avait été en 1616, les lourds impôts levés sur le Genevois et le Faucigny, à l'occasion des guerres. Il est probable
qu'après la paix signée, le duc de Nemours réclama des dédommagements, et aussi les sommes qui lui avaient été
promises.
1297 L'enfant qu'attendait Anne de Lorraine naquit avant le départ de l'Evêque de Genève, et fut baptisé par lui, sous le
nom de François-Paul, dans la chapelle de l'hôtel de Nemours. Le petit prince de Genevois ne vécut que jusqu'en 1627.
1298 Jeanne de Harlay, dame de Saint-Georges (voir ci-dessus, Lettre MDXXV, et note (1259), p. 391).
273/346

28.4 Page 274

▲back to top
MDXXXIII. A la Mère de Chantal, a Paris. Une protectrice pour
la Visitation. Préparatifs d'une cérémonie de profession.
Paris, vers le 8 juillet 1619 1299.
Ma tres chere Mere,
Il est meshuy tems que je vous rende comte de ces deux ou troys jours.
Hier vous sceustes que Mme la Marquise de Verneüil1300 estoit allee aux chams. Aujourdhuy
j'ay veu Mme la Comtesse de Soyssons, qui a receu avec accueil la supplication que je luy ay faite
de recevoir la petite Congregation en sa protection, et m'a dit qu'on s'addressat a elle en toutes
occurrences1301.
Ce matin j'ay eu un'emotion de ventre qui m'a retenu au logis. Je meurs d'envie de vous
aller voir et entretenir, et nos cheres Seurs. Il faut præparer tout ce qui sera requis pour la
profession1302, et pour cela j'iray demain a quelque heure concerter avec vous. Et ayant pensé a ce
que vous me dites des habitz et de la demande qui s'en fait, j'incline qu'on la retranche ; mays nous
verrons1303. [406]
J'ay veu vostre papier, ma tres chere Mere, et j'en parleray quand vous voudres a vostre
cœur, que Dieu par sa bonté veuille combler de felicité comme le mien propre.
Je donne le bon soir a ma fille1304, et a toutes nos Seurs, et aux pauvres malades1305.
Revu sur l'Autographe conservé à la Visitation du Mans.
_____
1299 Le 9 juillet 1619, François de Sales présida la cérémonie de profession dont il parle dans ces lignes ; notre date
approximative est donc justifiée.
1300 Voir ci-dessus, note (1208), p. 372.
1301 Anne, comtesse de Montafia en Piémont, était la veuve de Charles de Bourbon, comte de Soissons et de Dreux
(voir tome XII, note (34), p. 11), qu'elle avait épousé en 1601. Née en 1577, de Louis de Montafia et de Jeanne de
Coëme (voir note (35), ibid.), elle mourut en 1644, et fut inhumée auprès de son mari, à la Chartreuse de Gaillon. Sa
fille, Marie, épousa en 1624 le prince Thomas de Savoie-Carignan. La comtesse de Soissons fut beaucoup mêlée à la
politique, et à ce point de vue est jugée diversement ; mais sa vertu et sa piété lui méritèrent des louanges universelles.
(Voir Hilarion de Coste, Reynes, Princesses et Dames illustres, 1647, tome I.)
1302 De la Sœur Marie-Anastase Pavillon (voir ci-dessus, Lettre MDXXVII, et note (1272), p. 396).
1303 Ceci est probablement une allusion à ce que prescrivait le premier formulaire de l'oblation des Sœurs : « Le
prestre… luy monstrant ses anciens habitz qui seront sur une escabelle du costé gauche de l'autel, et puys le voyle de
la Congregation, qui sera sur une autre escabelle du costé droict de l'autel, il continuera son propos, disant : Car,
ma chere Seur, voyla vos habitz du monde, et voyla le voyle de Religion : l'un et l'autre vous est proposé, affin qu'a
celuy que vous voudres, vous puissies estendre vostre main pour le choysir. » (D'après un fragment autographe
conservé à la Visitation de Caen, et une copie de l'époque appartenant aux Filles de la Croix de Guingamp.) Le
Fondateur écrivit ensuite : « Il n'est pas besoin de mettre en « veüe les habitz du monde. » Et d'après cette note, le
cérémonial fut légèrement modifié sur ce point.
1304 Sans doute Mme des Gouffiers.
1305 Aux nombreuses disettes et souffrances des commencements de la Visitation de Paris, se joignit sans tarder
l'épreuve de la maladie. Le 5 mai, la Mère de Chantal écrivait déjà : « Nous avons deux ou trois malades. » (Lettres,
vol. I, p. 320.) Sa meilleure coopératrice, la Sœur Anne-Catherine de Beaumont, fut la plus sérieusement atteinte, et
la Fondatrice elle-même dut payer son tribut à la fièvre.
274/346

28.5 Page 275

▲back to top
MDXXXIV. Au Duc de Savoie, Charles-Emmanuel Ier.
Témoignage en faveur du collatéral de Quoex. Quelle
correction permettent l'équité et la clémence pour des fautes sans
malice. Espérance en la bonté du prince.
Paris, 11 juillet 1619.
Monseigneur,
Ayant sceu la peine en laquelle se treuve le sieur collateral de Quoëx, detenu es prisons de
Chamberi pour la somme d'environ mille ducatons, esquelz il a esté condamné par quelques uns
des seigneurs senateurs et maistres des Comptes a ce deputés specialement ; asseuré que [407] je
suis d'ailleurs, qu'en tout ce dont il a esté chargé il n'a commis aucune faute malitieuse, ni manqué
en chose quelcomque a la tres humble sujettion qu'il doit a Vostre Altesse, en laquelle et luy et
tous les siens ont tous-jours vescu tres fidelement ; et de plus, estant fidele tesmoin qu'en l'occasion
qui se presenta en Genevoys, il y a quatre ans, et luy et son frere rendirent force bons et laborieux
tesmoignages de leur zele au service de Vostre Altesse1306, je ne puis m'empescher de la supplier
tres humblement et, si elle me permet, de la conjurer par sa propre bonté de tendre sa main
secourable a cet homme de bien et d'honneur, pour le retirer de la ruine en laquelle son malheur,
et non aucun forfait, le va precipiter1307.
Il n'y a au monde personne si sage ni si juste auquel on ne treuve quelque chose a censurer,
si a toute rigueur et curieusement on espluche par le menu la suite des actions de plusieurs annees
; mays, Monseigneur, quand les fautes sont sans malice, sans dol, sans mauvaise intention et de.
nulle consequence, la clemence des grans Princes, ni mesme l'equité, ne permet pas a leur justice
d'user d'autre correction que de celle d'une reprehension et d'un advertissement. Et sur tout,
Monseigneur, la debonaireté et grandeur de courage de Vostre Altesse n'a jamais manqué de
support pour les bons ; qui me fait esperer que celuy ci en treuvera encor abondamment, et que ma
tres humble supplication sera receuë aggreablement, comme conforme a la magnanimité que
chacun admire en Vostre [408] Altesse, a laquelle souhaitant incessamment toute sainte prosperité,
Monseigneur, je suis invariablement,
Tres humble, tres obeissant et tres fidele
orateur et serviteur,
FRANÇS, E. de Geneve.
Paris, 11 julliet 1619.
Revu sur une ancienne copie conservée à Turin, Biblioteca civica.
_____
1306 Lors de la révolte de Henri de Nemours contre Charles-Emmanuel, en 1616, ce fut le collatéral Claude de Quoex
qui empêcha le capitaine de la Grange de surprendre Annecy (voir le tome précédent, note (909), p. 266), et contribua
de tout son pouvoir à maintenir la ville dans la fidélité au duc de Savoie. Un autre fils de Jean de Quoex et de Jeanne
de Léaval, celui que M. de Sainte-Catherine appelle « nostre frere le capitaine » (Lettre du 22 janvier 1602), Jean-
Baptiste, avait largement payé de sa personne en cette même occasion. Resté boiteux à la suite d'une blessure reçue à
la guerre en 1593, il n'en exerçait pas moins vaillamment le métier des armes, et ce fut sans doute en récompense qu'il
obtint, le 6 septembre 1616, des patentes de sergent-major d'Annecy. En 1635, Jean-Baptiste de Quoex devint
contrôleur général des guerres en second. Il avait épousé Nicoiarde Coppier, sans savoir qu'elle lui était alliée au
quatrième degré. La revalidation de leur mariage se fit en Cour de Rome au mois de mars 1601. (R. E.)
1307 Voir ci-dessus, note (1222), p. 376.
275/346

28.6 Page 276

▲back to top
MDXXXV. A la Mère de Chantal, a Paris. Le Saint, malade,
traité par une « archimedecine. » Confessions avant de « s'en
aller aux chams. »
Paris, vers le 22 juillet1308 1619.
Ma tres chere Mere,
Il est vray que je suis revenu tout gay, a mon advis. Les cinq premiers jours de mon sejour
a [Maubuisson1309] [409] je fus travaillé de foiblesse et d'inquietude ; la femme de Port Royal, qui
est une archimedecine, me traitta tout a fait comme il le failloit, avec de l'eau de rhubarbe que je
meslay avec mon vin, qui me purgea et me restreignit insensiblement. Despuis, je me porte bien,
non pas pour aller faire encor de grans effortz, mais pour me renforcer de jour en jour.
Si je puis, je vous iray voir cet apres disner, non toutefois pour vous entretenir, mays c'est
apres avoir confessé des dames qui n'attendent que cela pour s'en aller aux chams ; et je ne voy
pas que passé cela je me treuve fort occupé que pour aller dire mes adieux tout bellement.
Bon jour, ma chere Mere ; Nostre Seigneur soit au milieu de nostre cœur. Amen.
FRANÇS, E. de Geneve.
_____
1308 En confrontant les différentes lettres de la période juin-septembre 1619, on est amené à croire que les historiens
se sont mépris en reculant jusqu'à la fin d'août le plus long séjour de l'Evêque de Genève à Maubuisson. Sa vraie place
est, très probablement, vers le milieu de juillet ; ce billet, écrit au retour, serait donc du 22 au plus tard. (Cf. ci-dessus,
note (1257), p. 391.)
1309 Hérissant et les éditeurs suivants impriment Mantes. Or le Saint n'est pas allé dans cette ville, trop distante, au
reste, de Port-Royal pour justifier les détails donnés ici. Ne peut-on pas supposer que l'Autographe endommagé ne
laissait plus lire que la première syllabe Maub..., et que de là est venue l'erreur ?
La Mère Angélique Arnauld, parlant de cette visite de François de Sales à Maubuisson : « Il y demeura une
fois neuf jours malade, » dit-elle, « et ne laissa neantmoings jamais de servir les ames. Et voyant que le grand autel
n'estoit point consacré, il me dit : Il ne faut pas sortir de ceste maison sans y rendre quelque petit service ; voulez-vous
pas bien que je consacre l'autel ?... et accomplit cette longue ceremonie tout malade, avec une incroyable devotion...
Apres, il fit un admirable sermon d'une heure et demie, nous expliquant toutes les ceremonies de la consecration. »
(Process. remiss. Parisiensis, ad art. 25.) Ce fait ne peut avoir eu lieu le 25 août, comme le marquent plusieurs auteurs
; le jour de saint Louis, l'Evêque de Genève était à Paris, célébrant cette fête à la Maison professe des Pères Jésuites.
L'Abbesse profita de la présence prolongée de son Père spirituel pour faire sous sa direction les exercices
d'une retraite.
276/346

28.7 Page 277

▲back to top
MDXXXVI. Au Prince de Piémont, Victor-Amédée1310. La
détresse du duc de Nemours. François de Sales appuie sa
cause. Désir de l'Evêque de retourner en son diocèse.
Paris, 29 juillet 1619.
Monseigneur,
La lettre que Vostre Altesse a escrit a Monsieur le Duc de Nemours a esté receue par luy
trois jours avant que la copie m'ayt esté remise en main, de sorte que des-ja il m'avoit parlé sur le
sujet d'icelle, non sans se douloir du retardement pour l'article qui regarde son payement, deu par
le sieur Bonfilz1311 des il y a long tems, a ce qu'il dit, et par le manquement duquel toute sa mayson
et ses affaires sont extremement incommodés1312 ; dont il ne peut esperer le remede que de la [410]
promesse qu'il a pleu a Vostre Altesse de luy faire, d'avoir du soin et de la bienveuillance pour luy
qui, a la verité, n'est pas sans beaucoup d'inquietude parmi la necessité en laquelle il se treuvé (sic),
ayant si peu de revenuz de deça, ou ses terres sont presque toutes engagees, et ne jouissant de celuy
qu'il [a] en Savoye, qui est son fond principal. Je me suis essayé de le soulager de parole et
d'accroistre la confiance qu'il a en Vostre Altesse, selon le commandement delaquelle j'arresteray
ou partiray ainsy qu'il luy plaira, ne doutant point qu'elle ne face toute la consideration requise du
devoir que j'ay de retourner en ma residence, soudain qu'elle jugera que mon retardement de deça
ne pourra plus estre utile a son service.
Et tandis, priant Dieu pour la prosperité de Vostre Altesse, Monseigneur, je suis,
Vostre tres humble, tres obeissant et tres fidele
orateur et serviteur,
FRANÇS, E. de Geneve.
A Paris, le 29 julliet 1619.
Revu sur l'Autographe conservé à Turin, Archives de l'Etat.
_____
1310 La corrélation de cette lettre avec celles du 19 juin et du 4 juillet permet de croire qu'elle s'adresse au même
destinataire.
1311 Horace Bonfils, trésorier général du Genevois. (Voir le tome précédent, note (683), p. 194.)
1312 Voir ci-dessus, Lettre MDXXXII, p. 405.
277/346

28.8 Page 278

▲back to top
MDXXXVII. A la Mère de Bréchard, Supérieure de la
Visitation de Moulins. Une jeune veuve qui désire la vocation
religieuse. Pourquoi le saint Fondateur a choisi le monastère
de Moulins pour sa retraite. De quelle tyrannie délivrer cette
âme, quel joug lui imposer.
Paris, vers la fin de juillet1313 1619.
Ma tres chere Fille,
Vous recevres cette lettre, Dieu aydant, par les mains [411] de madamoyselle du
[Tertre1314], grandement bien apparentee en cette ville, laquelle estant demeuree vefve despuis peu
et s'estant resolue a ne plus rentrer dans les liens du mariage, a creu de ne pouvoir mieux conserver
sa resolution que dans l'estat religieux, auquel neanmoins ne sentant pas pour encor une si forte
affection qu'elle souhaiteroit pour pouvoir d'abord s'y engager, elle a nonobstant un desir si grand
de s'y voir arrestee, qu'elle veut rechercher cette grace de Dieu es lieux ou elle espere qu'elle luy
sera plus facilement accordee. Et pour cela elle a choysi entre toutes les Congregations celle de la
Visitation, ou elle pretend qu'estant retiree, Dieu l'inspirera plus fortement qu'ailleurs, et que la
cordiale douceur et charité dont on y fait profession servira de moyen a la divine Providence pour
cet effect.
A cette occasion donq, ma tres chere Fille, nostre bonne Mere et moy vous l'envoyons, et
avons fait cette eslection pour elle comme la plus convenable, dont elle mesme vous dira
franchement toutes les autres raysons. Mais je vous diray celle ci, que vous ne croiries pas si
aysement de sa bouche : c'est que nous desirons grandement qu'elle soit conduitte a la vraye
connoissance et prattique de la vie devote. Et parce que jusques a present elle a esté maistresse de
soy mesme, et que, pour la bien et utilement mettre au vray chemin de la vie spirituelle, il faut
doucement et amoureusement et prudemment la delivrer de cette ancienne et tyrannique sujettion,
pour luy imposer le gratieux joug et la douce maistrise que le Saint Esprit veut avoir sur son ame,
nous avons pris cette confiance en vostre charité, que vous prendries volontier ce soin et sçauries
employer les moyens convenables. Je la voy toute franche, toute desireuse de reposer en la grace
de Dieu, toute desireuse de se laisser gouverner a quelque main amie et lasse de se gouverner soy
mesme. En somme, j'ayme en elle certaine marque de bonté, qui me fait esperer qu'un jour elle
sera bonne servante de Dieu. Elle ne demandera point d'exception, ni pour la [412] rigueur de la
clausure, ni pour toute la bienseance qu'on doit observer en vostre Mayson, a parler aux estrangers,
donner ou recevoir des lettres, ni pour toutes telles occasions qui sont requises d'estre
soigneusement gardees.
En fin, je vous dis trop de choses, a vous qui m'entendes si bien, ma tres chere Fille. Je la
recommande, en un mot, a vostre douceur et prudence, a vostre zele et condescendance, a vostre
vigilance et gratieuse conduitte.
Monsieur de N.1315 m'a envoyé une requeste pour estre presentee au Roy de vostre part. Je
ne l'ay sceu faire jusques a present ; mais si je puis, penses si je le feray de tout mon cœur, tout tel
que je suis, qui ne suis ni bon demandeur ni bon defendeur. Je vous escris a moytié malade, avec
tant de distractions que je ne sçai si vous m'entendres bien ; nostre Mere suppleera par la sienne.
Dieu soit a jamais au milieu de vostre cœur, de vostre petit troupeau et de toute cette
Congregation.
1313 La date donnée par Hérissant (tome IV, p. 37) : Vers le 8 août, nous semble trop tardive. En effet, la Mère de
Chantali écrit le 9 juillet 1619 à la Mère de Bréchard au sujet de la même personne : « Vous aurez cette bonne
demoiselle dans quinze jours. » (Lettres, vol. I, p. 327.)
1314 Voir ci-dessus, note (1248), p. 386, et Lettre MDXXVIII, p. 397.
1315 Vraisemblablement M. de Palierne, grand bienfaiteur et vrai père de la Communauté de Moulins.
278/346

28.9 Page 279

▲back to top
Je suis en luy,
Vostre tres humble frere, oncle et serviteur,
FRANCS, E. de Geneve.
Encor faut il que je vous die, que la retraitte de cette damoyselle en la Congregation a esté
appreuvee par tout le Conseil de Monseigneur le Cardinal1316, luy absent, et notamment par le R.
P. B[inet]1317, bien qu'elle ayt declairé qu'elle n'avoit que le desir d'estre inspiree a demeurer en
l'estat religieux ; et si la Mayson d'icy n'eust esté toute en noviciat, incommodee de logis et
embarrassee de tant de visites, nous l'eussions retenue tres volontier. [413]
_____
MDXXXVIII. A la Mère de Chantal, a Paris. Obligeante
intervention de M. de Neufchèzes dans une affaire. Le saint
Evêque, malade, est obligé de contremander plusieurs sermons.
Paris, 31 juillet 1619.
Les lettres sont de M. de Neufcheze, vostre neveu bien-aymé1318, qui me fit la faveur de se
charger d'une requeste que j'avois addressee au Clergé pour M. Boucard1319, et a obtenu cent escus
de pension annuelle. Reste que je m'essaye de gaigner ceux qui doivent les delivrer.
Ce matin, a quatre heures, le flux de ventre m'a repris, et m'a mené huit ou neuf fois jusqu'a
disné. Il semble que cela soit un peu accoysé maintenant ; c'est pourquoy j'ay envoyé a ces bonnes
dames leur dire que sur les deux heures je pourray avoir l'honneur de leur visite ; et si monsieur de
Meneville1320 venoit sur les quatre heures, j'en serois bien ayse.
Cependant il faut avoir patience de demeurer sans vous voir pour ce jourd'huy, et de
demeurer sans rien faire ; car j'ay contremandé par tout ou j'avois promis de prescher, et, ce qui
m'a bien fasché, j'ay contremandé le Pere Recteur du Noviciat des Jesuites1321, qui a les Quarante
Heures et les octaves du bienheureux Ignace, duquel j'avois desir de parler. Mays il faut demeurer
en [414] paix en tout nostre cœur, et unis en la tressainte volonté de Nostre Seigneur.
1316 Henri de Gondi, cardinal de Retz, évêque de Paris. (Voir ci-dessus, Lettre MDXXVIII, p. 397.)
1317 Voir ibid., p. 398, et Lettre MDXXIII, p. 386.
1318 Jacques de Neufchèzes, fils cadet de Marguerite Frémyot et de Jean-Jacques de Neufchèzes. (Voir tome XIV, note
(508), p. 170.)
1319 Claude Boucard, l'apostat relaps converti définitivement à Grenoble pendant le Carême prêché par l'Evêque de
Genève en 1617. (Voir tomes XIV, note (120), p. 37, et XVII, note (1148), p. 344.)
1320 Il est permis d'émettre un doute sur l'intégrité du nom imprimé par Hérissant, et de se demander s'il faudrait lire
Morville. Quoi qu'il en soit, la seigneurie de Maineville appartenait à la seconde branche de la maison de Roncherolles
; mais nous ignorons quel membre de cette famille en portait le titre en 1619.
1321 Le Noviciat de la Compagnie de Jésus à Paris avait été fondé en 1608, uni d'abord à la Maison professe de Saint-
Louis ; mais deux ans plus tard, il s'établissait au faubourg Saint-Germain, dans l'hôtel de Mézières, acheté par M. du
Tillet et Mme de Sainte-Beuve. Le Recteur de cette Maison était, depuis 1618, le P. Antoine Gaudier, homme de
grande valeur, qui avait déjà donné, dans différents postes, en Belgique, en Lorraine et à La Flèche, des preuves de sa
compétence en matière de philosophie et de théologie, et de son aptitude spéciale pour la direction des âmes. Originaire
de Château-Thierry, il était alors âgé de quarante-sept ans, en comptait vingt-six de profession et vingt de prêtrise. Les
fruits de son zèle comme maître des novices et des Pères de la troisième probation furent très abondants, bien que sa
mauvaise santé mît des entraves à son activité ; elle obligea ses supérieurs à le décharger de tout emploi en 1621, et il
mourut l'année suivante, le 14 avril, à Paris, laissant le souvenir édifiant de son grand don d'oraison et de son tendre
amour pour la sainte Humanité de Notre-Seigneur. (D'après des Notes du R. P. Hafner, archiviste général de la
Compagnie.)
279/346

28.10 Page 280

▲back to top
Bon soir, ma tres chere Mere. J'ay grand desir de vous entretenir et apprendre de vous les
pensees de vostre bon Seigneur de Lion1322. La bonne Mere de Port Royal1323 me prie de la
recommander de rechef a vos prieres : je le fay de tout mon cœur.
Dieu soit a jamais vostre vie, ma tres chere Mere, Amen ; et de toute vostre petite trouppe.
Amen.
FRANCS, E. de Geneve.
Le 31 julliet 1619.
_____
MDXXXIX. A Madame de Villesavin. Un même trésor pour
tous les cœurs des enfants de Dieu. Ne pas se lasser ni lasser
les autres par la longueur des exercices spirituels. Conduite à
tenir dans les conversations. Chasser la tristesse. Envoi
d'une méthode pour s'unir à Notre-Seigneur.
Paris, juillet-août 1619 1324.
Ne croyes jamais, ma tres chere Fille, que la distance des lieux puisse separer les ames que
Dieu a unies par les [415] liens de sa dilection. Les enfans du siecle sont tous separés les uns des
autres parce qu'ilz ont les cœurs en divers lieux ; mais les enfans de Dieu ayant leur cœur ou est
leur thresor1325, et n'ayant tous qu'un mesme thresor qui est le mesme Dieu, ilz sont par consequent
tous-jours jointz et unis ensemble. Sur cela, il faut soulager nos espritz en la necessité qui vous
tient hors de cette ville ; ce qui m'en fera aussi bien tost partir pour retourner en ma charge. Nous
nous reverrons bien souvent aupres de nostre saint Crucifix, si nous observons bien les paroles que
nous nous en sommes donné ; aussi bien est ce la ou les entreveuës sont uniquement profitables.
Cependant, ma tres chere Fille, je commenceray a vous dire que vous deves fortifier par
tous les moyens possibles vostre esprit contre ces vaines apprehensions qui ont accoustumé de
l'agiter et tourmenter. Et pour cela, reglés premierement vos exercices en telle sorte, que la
longueur ne lasse point vostre ame et ne fasche point celles de ceux avec lesquelz Dieu vous fait
vivre. Un demy quart d'heure, et moins encor, suffit pour la preparation du matin1326 ; trois quartz
d'heure ou une heure pour la Messe, et, parmi le jour, quelques eslevations d'esprit en Dieu, qui
n'occupent point de tems, ains se font en un seul moment ; et l'examen de conscience le soir avant
le repos, laissant a part les benedictions et actions de graces de table, qui sont ordinaires, et qui
tiennent lieu de reunion de vostre cœur avec Dieu. En un mot, je voudrois que vous fussies toute
Philothee, et que vous ne fussies rien plus que cela : c'est a dire, que vous fussies comme je marque
au livre de l'Introduction, qui est fait pour vous et vos semblables.
Es conversations, ma tres chere Fille, soyes en paix de tout ce qu'on y dit et qu'on y fait ;
car s'il est bon, vous aves dequoy louer Dieu ; et s'il est mauvais, vous aves dequoy servir Dieu en
destournant vostre cœur de cela, sans faire ni l'estonnee ni la fascheuse, puisque vous n'en pouves
mais et n'aves pas asses de credit pour divertir les mauvaises paroles de ceux qui les veulent dire,
et qui en diront encor de pires si on fait semblant de les vouloir [416] empescher ; car ainsy faysant,
1322 Mgr de Marquemont (voir le tome précédent, note (94), p. 16).
1323 La Mère Angélique Arnauld.
1324 L'hypothèse très plausible de Mme de Villesavin comme destinataire, s'appuie non seulement sur le ton de la lettre,
mais sur l'envoi de « la petite « methode » pour « s'unir a Nostre Seigneur le matin et toute la journee. » Une lettre
ultérieure du Saint nous apprend que cet envoi fut fait à Isabelle Blondeau, dame de Villesavin. La date se déduit
approximativement de l'espoir pour l'Evêque de Genève d'un prochain retour en Savoie.
1325 Luc., XII, 34.
1326 Vide Introd. a la Vie dev., Partie II, chap. X.
280/346

29 Pages 281-290

▲back to top

29.1 Page 281

▲back to top
vous demeureres toute innocente parmi les sifflemens des serpens, et, comme une aymable fraise,
vous ne contracteres aucun venin par le commerce des langues veneneuses1327.
Je ne puis penser comme vous pouves admettre ces desmesurees tristesses dans vostre
cœur, estant fille de Dieu, remise il y a long tems dans le sein de sa misericorde et consacree a son
amour. Vous vous deves soulager vous mesme, mesprisant toutes ces suggestions tristes et
melancholiques que l'ennemi nous fait avec le seul dessein de nous lasser et tracasser.
Prenes bien garde a bien prattiquer l'humble douceur que vous deves au cher mari1328 et a
tout le monde, car c'est la vertu des vertus que Nostre Seigneur nous a tant recommandee1329 ; et
s'il vous arrive d'y contrevenir, ne vous troubles point, ains, avec toute confiance, remettes vous
sur pied pour marcher de rechef en paix et douceur comme auparavant.
Je vous envoye une petite methode de vous unir a Nostre Seigneur le matin et toute la
journee1330.
Voyla, ma chere Fille, ce que, pour le present, j'ay pensé vous devoir estre dit pour vostre
consolation. Reste que je vous prie de ne point vous mettre a faire des ceremonies avec moy, qui
n'ay ni le loysir ni la volonté d'en faire avec vous. Escrives moy quand il vous plaira en toute
liberté, car je recevray tous-jours a contentement de sçavoir des nouvelles de vostre ame, que la
mienne cherit parfaitement, comme en verité, ma tres chere Fille, je suis
Vostre plus humble serviteur en Nostre Seigneur,
FRANÇS E. de Geneve. [417]
_____
MDXL. A la Mère de Chantal, a Paris. Programme d'une
journée.
Paris, [fin mai-août] 1619 1331.
Ma tres chere Mere,
Je m'en vay a la reception de la Religieuse1332 ; de la, je vay disner avec M. vostre frere1333,
chez M. d'Origni1334 ; de la, a l'assemblee qui se fait pour nos affaires, ou j'auray besoin d'une
Regie, car on en parlera, et je n'en ay plus1335. Recommandes l'affaire a Nostre Seigneur, et
m'envoyes donques encor une de ces Regles ; et bon jour de tout mon cœur.
Revu sur une copie déclarée authentique, conservée à Turin, Archives de l'Etat. [418]
1327 Cf. Tr. de l'Am. de Dieu, liv. XI, chap. II.
1328 Jean Phélipeaux, seigneur de Villesavin, comte de Buzançais, était fils de Louis Phélipeaux et de Radegonde
Garraut. Il fut secrétaire des commandements de Marie de Médicis, conseiller d'Etat, maître des Comptes (19 iuin
1621), etc. Son successeur en ce dernier office, Charles de Brussel, fut reçu le 30 mai 1636 (Archiv. Nat., P 2680, fol.
80) ; ce qui indiquerait à peu près la date de sa mort.
1329 Matt., XI, 29.
1330 Cet « Exercice » sera donné avec les Opuscules.
1331 C'est d'après la teneur même du billet et quelques indications tirées des lettres de la Mère de Chantal que nous
donnons cette date approximative.
1332 Pendant son séjour à Paris, l'Evêque de Genève présida plusieurs cérémonies de prises d'habit et de professions
religieuses ; il n'est pas possible de déterminer de laquelle il s'agit ici.
1333 L'Archevêque de Bourges, André Frémyot. Venu à Paris après la Mère de Chantal, il quitta la capitale avant le 15
septembre 1619.
1334 Guillaume Bourgeois, seigneur d'Origny (voir tome XIV, note (402), p. 131).
1335 L'impression venait de se faire à Lyon, sous le regard vigilant de la Mère Marie-Jacqueline Favre ; elle paraissait
sous ce titre : Regles de Sainct Augustin, et Constitutions four les Sœurs Religieuses de la Visitation. A Lyon, par
Jaques Roussin, M.DCXIX. Les approbations de Robert Berthelot, évêque de Damas, et de M. Ménard sont du 8
décembre 1618, et la permission d'imprimer du vicaire général, M. de Meschatin la Faye, est du 10.
281/346

29.2 Page 282

▲back to top
Appendice
[419]
______
282/346

29.3 Page 283

▲back to top
Les notes marginales indiquent la corrélation des pièces de l'Appendice
avec le texte des Lettres de saint François de Sales. [420]
283/346

29.4 Page 284

▲back to top
I. Lettres adressées a Saint François de Sales par quelques
correspondants
_____
A. Lettre de la Mère Favre, Supérieure de la Visitation de Lyon1336
_____
VIVE † JESUS
Monseigneur,
1337Ce mot est pour vous saluer en toute humilité et nous plaindre de ce que nous n'aurons
point l'honneur de vous voir selon que nous le croyions, ma sœur Barbe Marie1338 nous assurant
que vous n'allez pas à Paris, ains à Grenoble1339. Nous voilà donc privée de cette incomparable
consolation que nous attendions avec tant d'ardeur et d'affection : Dieu en soit béni, et nous fasse
la grâce de ne jamais rien désirer que l'accomplissement de sa très sainte et adorable volonté.
Il faut avouer, mon très honoré Père, que nous sommes mortifiée tout à fait, bien que de
l'autre côté nous soyons consolée d'avoir de quoi offrir à Notre-Seigneur la privation du bonheur
de vous entretenir, selon que nous nous étions promis de le faire amplement, et en ayant nécessité.
Oh ! Dieu soit béni de rechef de tout ce qu'il permet.
Nous serons toujours contente en l'assurance que nous avons, [421] Monseigneur, d'avoir
part en vos saintes prières, en qualité de celle qui est et sera éternellement,
Monseigneur,
Votre très humble et plus obéissante fille et servante
en Notre-Seigneur,
M. J. FAVRE de la Visitation.
Dieu soit béni.
De Lyon, ce 26 septembre 1617.
A Monseigneur
Monseigneur le Rmo Evesque et Prince de Genesve.
A Nicy.
Revu sur l'Autographe inédit, conservé à la Visitation d'Annecy.
_____
1336 Voir tome XV, note (554), p. 178. L'orthographe moderne est substituée à celle de la Mère Favre.
1337 Vide p. 215, not. (749).
1338 La présidente Le Blanc de Mions (voir le tome précédent, note (1210), p. 366).
1339 Vide Epist. seq.
284/346

29.5 Page 285

▲back to top
B. Lettre de Charles-Emmanuel Ier, Duc de Savoie1340
_____
Tres Reverend, tres cher, bien amé et feal Conseiller et devost Orateur,
1341Monseigneur le Mareschal des Diguieres1342 nous a faict instance de vous permettre
d'aller prescher le Caresme prochain a Grenoble. Nous la luy avons volontiers accordee pour le
fruict que Nous esperons que ce lieu la en tirera1343. Vous vous y disposerez donc de bonne heure,
sans attendre plus expresse licence de nostre part.
Et Dieu vous ayt en sa saincte garde.
De Thurin, ce 14e d'octobre 1617.
Le Duc de Savoye,
C. EMANUEL.
CREST.
A l'Evesque de Geneve.
Revu sur le texte inséré dans le IId Procès de Canonisation. [422]
_____
C. Lettre du Cardinal Robert Bellarmin1344 (Fragment)
_____
……………………………………………………………………………………………………..
1345Quod attinet ad explicationem illam in Apostolum Paulum, cujus memini in opusculo
ad Cardinalem Farnesium1346, litteralem, dogmaticam et moralem, jam scripseram in primum caput
Epistolæ ad Romanos, cum animadverti supra vires meas esse laborem illum. Nam præter
incommoda senectutis, plurimis urgeor et premor occupationibus gravissimis
[1617 1347.]
_____
1340 Voir tome XI, note (389), p. 168.
1341 Vide supra, pp. 65, 102, not. (251), (360).
1342 Vide tom. XII, p. 100, not. (183) ; XVII, p. 380, not. (1243).
1343 Vide Epist. MCCCLXVI.
1344 Voir le tome précédent, note (830), p. 238.
1345 Vide Epist. MCCCLIV, et p. 79, not. (292).
1346 Vide supra, p. 79, not. (290).
1347 C'est probablement en novembre ou décembre 1617 que le cardinal Bellarmin répondit à la lettre de l'Evêque de
Genève, du 12 septembre.
285/346

29.6 Page 286

▲back to top
D. Bref se Sa Sainteté Paul V1348
_____
Venerabili Fratri Episcopo Gebennensi
PAULUS PP. V.
Venerabilis Frater, salutem et Apostolicam Benedictionem.
1349Sacri Apostolatus ministerio, meritis licet imparibus, Divina dispositione præsidentes,
inter cætera cordis Nostri desiderabilia circa ea per quæ Majestas Altissimi ubique collaudetur
cultusque sui gloriosissimi nominis amplietur, et ad illius laudem et gloriam, Monasteriorum et
aliorum regularium locorum ac personarum, præsertim fœminei sexus, sub suavi Religionis jugo
studio piæ vitæ Altissimo [423] famulantium, numerus augeatur, sollicitudinis Nostra studium
libenter convertimus. Et ut pia Catholicorum Principum id exoptantium vota optatum sortiantur
effectum, opem et operarti, quantum Nobis ex Alto conceditur, impendimus efficaces, prout ad
Divini nominis exaltationem et animarum salutem in Domino conspicimus salubriter expedire.
Cum itaque, sicut ex insinuatione dilecti filli nobilis viri Caroli Emmanuelis, Sabaudiæ
Ducis, accepimus, in oppido Annecii, Gebennensis diocesis, nonnullæ honestæ mulieres, studio
melioris vitæ ac pio religionis desiderio ductæ, in quandam domum ejusdem oppidi jam a multis
annis se receperint ; inibique pie et devote viventes, Officium parvum Beatæ Mariæ Virginis
singulis diebus recitare consueverint ; si vero domus prædicta ad formam Monasterii reduceretur,
et in Monasterium Monialium ut infra erigeretur, ex hoc profecto saluti animarum dictarum
mulierum cum Divini cultus augmento et spirituali incolarum dicti oppidi consolatione peramplius
consuleretur : Nobis propterea dictus Carolus Emmanuel, Dux, humiliter supplicare fecit quatenus
domum prædictam in Monasterium Monialium Ordinis Sancti Augustini erigere1350, et alias ut
infra indulgere, de benignitate Apostolica dignaremur.
Nos igitur, qui Divini cultus augmentum et Christianæ religionis propagationem sinceris
desideramus affectibus, prædictum Carolum Emmanuelem, Ducem, a quibusvis
excommunicationis, suspensionis et interdicti, aliisque Ecclesiasticis sententiis, censuris et pœnis,
a jure vel ab homine quavis occasione vel causa latis, si quibus quomodolibet innodatus existit, ad
effectum præsentium dumtaxat consequendum, harum serie absolventes et absolutum fore
censentes, hujusmodi supplicationibus inclinati, Fraternitati Tuæ per præsentes committimus et
mandamus quatenus, si est ita, in prædicta domo, si et postquam illa ad formam Monasterii reducta,
et debita clausura munita, sacraque et profana suppellectili luculenter instructa, illique tot census,
redditus, proprietates et bona stabilia, quorum annuus valor ad competentem Monasterii dotem, ac
illius Abbatissæ, seu Priorissæ, et Monialium congruam sustentationem onerumque illis
incumbentium supportationem sufficiat, perpetuo dotata et assignata fuerint, unum Monasterium
Monialium Ordinis Sancti Augustini, cum ecclesia, campanili, campanis, cœmiterio, claustro,
refectorio, dormitorio, hortis, hortalitiis cæterisque officinis et membris necessariis pro una
Abbatissa, seu Priorissa, et competenti Monialium numero quæ inibi, juxta regularia ejusdem
Ordinis instituta, sub illius regulari habitu Altissimo perpetuo famulentur, Divinisque laudibus
insistant, ac alias in omnibus et per omnia, ad instar aliorum Monasteriorum Monialium dicti
Ordinis, perpetuo, sine alicujus [424] præjudicio, auctoritate Nostra Apostolica erigas et instituas.
Illique sic erecto et instituto, pro ejus dote ac manutentione, ac illius Abbatissæ, seu Priorissæ, et
Monialium aliarumque personarum sustentatione, ac onerum illis incumbentium supportatione,
omnia et singula tam mobilia quam immobilia bona quomodolibet nuncupata, per quoscumque
Christi fideles ipsi Monasterio donanda et assignanda, simili auctoritate etiam perpetuo applices
et appropries. Necnon eidem Monasterio, ac illius pro tempore existenti Abbatissæ, seu Priorissæ,
1348 Voir tome XIII, note (220), p. 69.
1349 Vide p. 302, not. (999).
1350 Cf. tom. præced, pp. 203, 246.
286/346

29.7 Page 287

▲back to top
et Monialibus, ministris et personis, eorumque rebus et bonis, ut omnibus et singulis privilegiis,
facultatibus, prærogativis, gratiis, concessionibus et indultis, tam spiritualibus quam temporalibus,
quibus alia Monialium Monasteria dicti Ordinis de jure, usu, statutu, consuetudine aut alias
quomodolibet utuntur, fruuntur, potiuntur et gaudent, ac uti, frui, potiri et gaudere possunt et
poterunt quomodolibet in futurum similiter et seque principaliter, absque ulla prorsus differenza,
uti, frui, potiri et gaudere, ipsisque Abbatissæ, seu Priorissæ, ac Monialibus ; ut ad septennium
tantum, Officium Beate Mariæ Virginis parvum nuncupatum, juxta rubricas Breviarii Romani
recitare libere et licite possint et valeant1351, illæque Officium hujusmodi recitando, ut præfertur,
obligationi Officium Divinum juxta statuta ejusdem Ordinis Apostolica auctoritate confirmata,
recitandi, in omnibus et per omnia satisfaciant, eadem auctoritate concedas et indulgeas. Super
quibus omnibus et singulis plenam, liberam et amplam facultatem et auctoritatem, auctoritate et
tenore similibus, tribuimus et impartimur. Nonobstantibus Constitutionibus et Ordinationibus
Apostolicis, necnon Monasterii et Ordinis prædictorum, etiam juramento, confirmatione
Apostolica, vel quavis firmitate alia roboratis, privilegiis quoque indultis et litteris Apostolicis in
contrarium præmissorum quomodolibet concessis, confirmatis et innovatis. Quibus omnibus et
singulis eorum tenore præsentibus pro piene et sufficienter expressis et ad verbum insertis
habentes, illis alias in suo robore permansuris, hac vice dumtaxat specialiter et expresse
derogamus, cæterisque contrariis quibuscumque.
Datum Romæ, apud Sanctam Mariam Majorem, sub annulo Piscatoris, die vigesima tertia
Aprilis, millesimo sexcentesimo decimo octavo, Pontificatus Nostri anno tertio decimo.
S. Card. S. SUSANNÆ.
Revu sur le texte inséré dans les Registres de l'ancien Evêché de Genève. [425]
_____
E. Lettre des Avoyers et du Conseil de la Ville de Fribourg
_____
Reverendissime et Illustrissime Seigneur,
1352Le present nostre bien aÿmé bourgeois, docte et devot Balthasar Wäber1353, duquel
jusques a present n'avons resentÿ que toute pieté et bons comportemens, desirant recepvoir les
derniers Ordres de prestrise de Vostre Reverendissime Paternité, merite d'estre recommandé. C'est
pourquoÿ ne l'avons point voulu laisser partir sans les presentes, par lesquelles prions tres
affectueusement Vostre Seigneurie Reverendissime de l'avancer et luÿ prester toute faveur et aide,
si que il soÿ (se) puisse louer avoir jouÿ de ceste nostre intercession : Nous paroffrans en toutes
les occasions de nous en revancher, prians le Tout Puissant et sa saincte Mere de conserver Vostre
Paternité en bonne prosperité.
6 septembre 1618.1354
Revu sur une ancienne copie inédite, conservée aux Archives
de l'Etat de Fribourg, Missival, N° 37, p. 558.
_____
1351 Vide p. 188, not. (635).
1352 Vide Epist. MCDLXXII.
1353 Vide p. 288, not. (959).
1354 La copie que nous reproduisons n'est pas signée.
287/346

29.8 Page 288

▲back to top
F. Lettre de M. Etienne Dunant, Curé de Gex1355
_____
1356 Monseigneur,
1357Pour obeir a vos commandemens de respondre aux vostres sur l'avis que vouléz avoir
touchant l'establissement que vous vouléz faire de la pension du sr Curé quil vous plaira institüér
de la cure de [426] Sacconex, il est certain que pour ce effect il est necessaire de chercher aillieurs
des moyens pour luy donnér quelque honneste commodité pour s'entretenir ; car ladicte cure d'a
present ne sçauroit avoir guiere davantage de 300 a 400 florins, monoye de Geneve. Or ce pendant,
quand a Vernier, Matigni et Meirin, mentionnees dans les vostres, il me semble que l'ont (sic) ne
pourroit affectér le revenu, soit les diesmes, de toutes troys, pour rendre bonne Sacconex, sans
interesser grandement icelles paroisses, et par consequent d'autres qui demeuroient (sic) desertes ;
et ainsi l'ont mescontenteroit beaucoup de gens. A mon avis, l'ont ne peut du moins que de prouvoir
les cures qui auront honnestement de quoy pour l'entretient d'un sr Curé, et principalement si les
habitantz des lieux les requirent : comment a Grilly, Versoix, Chevry, ou les paroissiens (dis je) se
plaignent de ce que ilz n'ont point de Curéz et qu'ont transporte le revenu autre part.
Quant a celles qui ont les biens venduz ou alienéz, et ce pendant il est requis d'y establir
des ecclesiastiques, comme Sacconex, Ornex, Thoiry, voisines des autres, Matigni, Vernier et
Meirin, il serait expedient, voire necessaire, sçavoir a quoy monte tout le revenu des biens
ecclesiastiques de ce Bailliage generalement, et, selon la porté desdicts biens, les distribüér a
chasque cure comme l'ont recognoistroit estre de besoing, et non pas demembrér le corps de
l'ceconomie pour accommoder un particulier. Et partant, puisqu'il vous plaict de faire un
establissement general et parfaict de toutes les cures, si vous estiés de retour moyennant la grace
de Dieu, vous pourriéz remettre ce qui est de Sacconex avec les autres ; et ainsi, pour une bonne
foys, vous vous delivreriéz de plusieurs ennuÿs que vous en recevés a l'ordinaire. Je me crain fort
que serés forcé de ce faire au plustost, et rompre cette œconomie qui mange une partie du revenu
tant pour une chose que pour autre. A grand peine les sieurs Curéz sont payéz, les debtes point ;
les bastimentz des eglises vont a ruine pour n'y faire aulcunes reparations.
Monsieur Roges1358, de vostre part, a voulu instituer M. Poncet de la cure de Sacconex,
comme vacante, lequel ne l'a osé acceptér que premierement il ne puisse veoir quelque revenu
certain ; ce (sic) soubmettant et remettant le tout a vostre bien heureux et desiré retour et bon
plaisir1359. Au reste, il en a pris la gardiature et charge dy faire le service divin, de quoy monsieur
Cheynel1360 n'en est pas [427] autrement content. Ce pendant hier, a ma presence, il promit a
monsieur Poncet de luy remettre et quittér ledit benefice d'icy a Noel, n'attendant autre que de
recouvrer tout ce que luy est deub de sa pension1361, et vous en donner avis. Si vous trouvés bon
que cela soit, lors monsieur Gobet, au lieu de Versoix (qui est un lieu plus important et qui requier
un homme bien capable), pourroit estre institué de Sessy1362. Monsieur Bernard1363 aussy desireroit
d'y venir, mais il seroit plus necessaire audit Versoix, si sa volonté y acquiesce.
1355 Voir tome XIV, note (188), p. 65.
1356 C'est au verso de cette lettre que saint François de Sales a écrit les notes pour des sermons, données au tome VIII,
p. 378. (Cf. note (2356), ibid.)
1357 Cf. Epist. MCDXCV.
1358 Vide tom. XI, p. 249, not. (559), et XVI, p. 335, not. (1088).
1359 Pierre Poncet fut en effet institué curé de Sacconex le 19 décembre de cette année. (Voir tomes XV, note (190),
p. 60, et XVI, note (709), p. 219.)
1360 L'économe de la paroisse de Bons, Claude de Cheynel, desservait en même temps celle du Grand-Sacconex. (Voir
tomes XV, note (966), p. 340, et XVI, note (713), p. 220.)
1361 Cf. tom. XVI, Epist. CMXCV, p. 220.
1362 Ordonné prêtre en 1615 et d'abord vicaire à Versoix, Jean Gobet en devint curé le 7 mars 1624 et mourut en 1631.
(R. E.)
1363 Serait-ce Pierre Bernard, natif d'Ardon, tonsuré le 16 juin 1576 ?
288/346

29.9 Page 289

▲back to top
Au reste, les catholiques dudit Versoix se plaignent grandement de ce que Mr Gobet ny
faict aucun service, et ny a moyen qu'il y fasse, puis qu'il ne reçoit aucune commodité pour y vivre
et qu'il n'y a lieu pour y celebrér. Mais je luy ay faict entendre que, ou il entrera en payement, qu'il
fasse son devoir et service en l'eglise de Souvernier, toute proche de Versoix et de l'habitation de
monsieur de Cottalliod : et ainsi il consoleroit tous ces bons catholiques de part dela.
A faute que ledit sr Cottalliod ne peut obtenir de monsieur Jaquin1364 ce qu'il vous a pleu
ordonnér pour son filz, j'ay esté contrain moy-mesme de prendre ce jeune homme avec moy, pour
consoler le pere et la mere qui sont fort pauvres. Le petit filz de Montanier, l'ayant aussy gardé
deux moys, est maintenant a Tonon, et son pere vous en rend un monde d'actions de graces, encores
quil ne ce soit prevalu de ce que luy avéz ottroyé. Verne (sic) Israelita, et dignus tanti beneficii.
M. Paris1365 n'en a pas esté content, ne regardant qu'a son profit particulier ; lequel ne m'en veut
point du bien, ne m'ayant jamais voulu rendre les clefz de ma cure, dans la quelle je l'avoys logé
gratuitement pour luy faire du bien, luy ayant encor accomodé d'un jardin 3 ou 4 annees. Pour
toute recompence, il m'a refusé les clefz, comme aussy les robbes que vous aviéz commandé de
faire pour les enfantz qui respondroient les Messes. Je desiroys les donnér a des pauvres petitz
enfantz tout nuds, et paroissiens, qui portent l'eau beniste par les maysons, qui seroient tres contens
de les avoir et servir les Messes cum decóre. J'en ay prié Mr Paris les me vouloir rendre, lequel n'a
jamais voulu ce faire.
Pour cela, ny pour autres choses, n'ayez, Monseigneur, aulcune doubte quil en survienne
aucun desordre, car je prometz a Vostre Reverendissime Seigneurie que je m'armeray d'une forte
patience jusques a ce que, par vostre ordonnance, droict soit faict a un chescun. Ce pendant, je ne
cesseray jamais, apres un tres humble baisemains, suppliér la divine clemence vous preservér
longuement sur [428] terre pour son service et consolations de vos peuples et diocœsains, et rendre
vostre voyage heureux pour le bien et respiration de la patrie.
Dieu soit en vostre garde. Amen. Demeurant,
Monseigneur,
Vostre tres humble, tres obeissant et fidelle S. et serviteur,
DUNANT, Curé de Gex.
Ce XIII octobre 1618.
Monseigneur, permettéz moy que je vous donne avis des empeschementz que ceux de la r.
p. r. apportent aux catholiques en plusieurs lieux du Balliage : comme a Divonne, les habitans du
lieu n'ont jamais permis qu'aucun catholique si soit retiré ; des particuliers y ont battus et blessés
monsieur le Curé, l'ayant aggressé sur le chemin pour le vouloir tüer. comme conste par les
informations prinses, lesquelles le sr Curé n'a voulu poursuivre, voyant la difficulté et longueur de
la Justice de Gex.
Dernierement, les R. P. Cappucins estantz au pays de Vaux, dans le chasteau de monsieur
de Prengin de Grang Cour1366. seigneur de Fribourg, les domestiques se plaignoient a eux qu'ilz
viendroient (sic) volontier venir a Divonne (lieu plus proche) pour ouyr la S. Messe, mais quilz
n'osoient a cause d'eux qui ne le veulent permettre.
La sepmaine passee arriva un cas fort estrange a la maison dudit sr Curé, par lequel ce peut
veoir de quel esprit sont guidez les auteurs d'iceluy, qui sont gens du lieu. Certaine femme, sous
l'ombre d'amitié, donne a une petite niepce quil a avec soy, aagée de quelques 15 ou 16 annees,
des pommes en quelque quantité. Jaçoit que la dicte fille fit tous les refus de les accepter, de peur
de desobeir a Mr sondit oncle, les reçoit neantmoins ; mais, par la volonté de Dieu, au lieu de les
manger elle les jette au feu pour les cuire, au moins une partie. Voicy que ces pommes estant
chaudes, qu'elles sautent toutes hors du feu, les unes en haut, les autres par la chambre, avec du
bruit. La fille voyant cela, estant toute espouvantee d'un tel stratageme, sort dehors a la rue, appelle
une femme pour venir voir telle chose ; retornent dedans, mettent le reste des dictes pommes au
1364 Vide p. 1, not. (43).
1365 Vide p. 328, not. (1072).
1366 Nicolas de Diesbach, seigneur de Prangins, baron de Grandcour, (Voir tome XII, note (226), p. 125, et ci-dessus,
note (958), p. 288.)
289/346

29.10 Page 290

▲back to top
feu, arrive le semblable. Que peut lon pensér quil fut arrivé a ceste creature si elle en eust mangé
? Enfin, si Dieu ne nous avoit en sa ste protection, jamdudum consumpti essemus.
Revu sur l'Autographe inédit conservé à la Visitation d'Annecy. [429]
_____
G. Lettre du Président Crespin1367
_____
Monseigneur,
Je ne pouvoy entendre une nouvelle plus aggreable que celle que monsieur de Medio1368 a
donné à Monseigneur le Rme 1369 de vostre voiage de Paris, avec Monseigneur le Prince
Cardinal1370, vous voiant regardé sur le theatre de ce grand monde de deçà comme l'instrument
plus considerable pour conduire à heureuse fin l'alliance d'un si illustre et si vertueux Prince, avec
une si grande Princesse que Madame de France ; y aiant pour associé monsieur le premier
President1371, à qui l'envie eust volontiers ravy cet honneur, si son merite ne le luy eust conservé.
Et comme, Monseigneur, vous m'avez tousjours favorisé de lhonneur de vostre amitié, c'est
en l'occasion de ceste commune resjouissance que je desire d'en ressentir principalement les
effects, sur l'asseurance que j'ay que le tort que monsieur de la Mente m'a fait luy estant representé
par vous1372, Monseigneur, vostre respect adoucira sa passion et le fera rougir en son ame de la
perfidie premierement, et despuis de l'impie cruauté avec laquelle il s'emporte en mon endroict1373,
en recompense de mon affection, delaquelle monsieur le Presidant peut estre tesmoing. sil luy plait
de se resouvenir combien de fois je le suis allé importuner pour ledit sieur. Je croy que
Monseigneur le Rme, qui va recherchant fort curieusement touttes les occasions de m'obliger, ne
perdra aussi ceste cy de se joindre a vous, Monseigneur, pour un œuvre si charitable, et quil y
contribuera fort volontiers tout son credit, quoyque touttesfois le vostre seul peut suffire pour le
faire reussir. Car je ne doubte point quil n'en faille venir là, recognoissant ledit sr Abbé si
passionné, quil ne se contentera point de m'avoir contrainct de le diffamer par ma fuitte [430] en
tous les lieux que je me suis refugié, mais se voudra diffamer luy mesme a Paris par les difficultés
quil y apportera, si vostre respect, auquel je m'asseure quil deferera, ne le retient. Que si peut estre
il desiroit que je luy fisse une declaration semblable a celle quil m'a fait presenter autresfois, je
vous supplie, Monseigneur, de luy enlever toutte esperance, puisque aussi il se doibt resouvenir
que j'ay mieux aimé m'exposer a l'hazard d'un rigoureux arrest, que de me faire ce prejudice de me
charger contre la verité du faict.
Je confesse, Monseigneur, que je ne merite une faveur si signalée, n'aiant jamais eu
lhonneur de vous servir. Mais aussi, ce sera un œuvre digne d'un grand Prelat comme vous estez,
de prendre en main la cause d'un vostre tres humble serviteur que l'impieté a opprimé, et duquel
vous ne recevrez pas moins de gloire devant les hommes que devant Dieu, que je prie de tout mon
cœur de me faire la grace que je puisse un jour vous randre preuve certeine de l'affection avec
laquelle je me recognoy,
Monseigneur, de V. S. Rme,
Tres humble et tres obeissant serviteur,
1367 Voir ci-dessus, note (228), p. 56.
1368 Vide tom. XII, p. 49, not. (88), et XVII, p. 89, not. (353).
1369 Pierre Fenouillet, évêque de Montpellier. (Cf. ibid., Lettre MCDLXVIII, p. 284.)
1370 Vide p. 138, not. (485), et Epist. MCDLXXVIII, MCDLXXXIV.
1371 Le président Favre (voir tome XI, note (68), p. 18, et cf. ci-dessus, note (1020), p. 308).
1372 Sylvestre de Saluces de la Mente (voir le tome précédent, note (1280), p. 390) était alors ambassadeur de Savoie
à la cour de France.
1373 Vide tom. præced., p. 390 ; supra, Epist. MCCCXXIX, MCCCXXX, et infra, Append. II, A.
290/346

30 Pages 291-300

▲back to top

30.1 Page 291

▲back to top
CRESPIN.
A Beziers, ce dernier novembre 1618.
Monsieur de la Mente se doit contenter que je porte la peyne quil meritoit luy mesme, par
l'oppression quil m'a fait en justice et vers S. A., laquelle luy serrera la porte du Ciel sil ne me
donne la satisfaction quil doibt. Que sil a esté exceder (sic), il le doibt rapporter a sa perfidie et a
son imprudence, car sil se fust bien informé de moy, il heust sceu que je n'estoy pas si lasche que
de souffrir une si grande injure sans en faire demonstration et ressentiment.
Revu sur l'Autographe inédit appartenant à M. le comte de Roussy de Sales, Archives de
Thorens-Sales (Annecy). [431]
_____
H. Lettre du Chanoine Artus de Lionne, Seigneur d'Aoste1374
_____
Monseigneur et mon très honoré Père,
1375Si le Ciel, pour un comble de faveurs, nous faisait la grâce de vous ouïr encore un
Carême, je pense que Grenoble serait du tout inondé de bénédictions célestes. Déjà, il semble que
Notre-Seigneur ait dit à notre Grenoble ce trait de David : Inimicos ejus induam confusione ; super
ipsum autem efflorebit sanctificatio mea. Véritablement, Monseigneur, vos saints discours ont vêtu
nos ennemis de confusion ; car, combien d'âmes avez-vous tirées d'entre les dents cruelles de ce
lion rugissant ! Vous l'avez spolié de sa conquête, nous en sentons tous les jours les effets ; et, si
j'ose ajouter ma pensée, je dirai que la sanctification de Dieu fleurit sur Grenoble, par le moyen de
vos très chères Filles, nos Sœurs de la Visitation. Il n'est pas croyable comme leurs saintes mœurs,
leur pureté de vie et leur céleste conversation attirent les cœurs et l'estime de tout le monde. Elles
ont fait presque autant de Philothées qu'il y a [de] dames dans Grenoble. O combien de vanités
renversées ! combien d'inutiles conversations distraites ! combien de pertes de temps heureusement
rachetées ! On ne coiffe plus Hécube en Hélène, mais on renverse Bélial aux pieds de Jésus-Christ.
Pour moi, je vous confesse, mon très honoré Père et Seigneur, que j'estime pour l'une des
rares faveurs du Ciel que j'aie jamais reçues, celle d'estre vostre fils1376 et le petit frère de la
Visitation, où votre esprit règne, ce me semble, en sa plénitude ; et je demande continuellement à
Dieu la grâce de pouvoir bien concevoir cet esprit et le réduire à mon usage.
Tout va avec grande bénédiction ; il n'y a que notre bon monsieur d'Ulme qui, par une
jalousie spirituelle, voulant être tout à la Visitation, il veut la Visitation trop à lui, ce qui lui donne
trop peu de repos et à notre bonne Mère1377 trop d'exercices1378. Mais, vrai Dieu, Monseigneur,
cette fille de votre cœur est bien fournie de votre [432] patience, douceur et discrétion, qu'à peine
le bonhomme peut-il uger que par lui-même il se rend trop importun. Et moi aussi sans doute, mon
très honoré Seigneur, en la longueur de ce discours : mais l'amour de fils me fait oublier le respect
de disciple, et mon bonheur me fait croire que vous ne me denierez jamais la qualité de
Votre très humble fils, disciple et obéissant serviteur,
ARTUS DE LIONNE.
De Grenoble, le 1er février 1620.
1374 Voir ci-dessus, note (827), p. 240.
1375 Vide p. 189, not. (640).
1376 Cf. Epist. MCDXCIII et p. 322, not. (1056).
1377 La Mère Péronne-Marie de Chastel (voir tome XV, note (408), p. 133).
1378 Vide p. 248, not. (845).
291/346

30.2 Page 292

▲back to top
Revu sur le texte inséré dans l'Histoire de la Fondation de la Visitation de Grenoble, par la Mère
de Chaugy, conservée au 1er Monastère d'Annecy1379. [433]
_____
1379 L'orthographe moderne est substituée à celle trop défectueuse du manuscrit.
292/346

30.3 Page 293

▲back to top
II. Lettres & Pièces diverses
______
A. Lettre de l'Abbé de la Mente1380 au Duc de Savoie (Fragment)
_____
Monseigneur,
……………………………………………………………………………………………………..
1381 J'ay infiniment à me plaindre à V. A. que nonobstant toutte poursuite que j'aye sceu
faire, presenté les lettres de V. A. à Messieurs du Senat, leur commandant de n'octroyer plus aucun
dellay au presidan Crespin sur l'assassinat qui m'a esté faict y a deux moys1382, ayns de veulloyr le
juger prontemant ; neantmoings, au prejudice de mon honneur et de ma reputation, et de la justice
qu'ils doyvent à un chasqun, ils vont prolongant le jugemant, ayant de nouveau octroyé un prolong
de troys semaynes pour ce (sic) representer ; encore qu'an mespris de la justice, un chasqun croye
qu'il ne soyt jamais parti de ce lieu, estan porté d'une partie de ses (sic) Messieurs du Senat ausquels
il est apparanté. Qui me faict supplier tres humblement V. A. me faire la faveur de m'octroyer les
patantes et lettres a cachet necessaires pour en avoyr ma rayson, suyvan la tres humble priere que
luy en fera le Conte de Verzolo de ma part ; auquel me remettant, je me diray à jamays,
Monseigneur, de V. A.,
Tres humble, tres fidele et tres obeissant
sujet, vassal et serviteur,
L'ABBÉ DE LA MANTE.
De Chambery, ce 18 de juin 1617.
Revu sur l'Autographe inédit, conservé à Turin, Archives de l'Etat (Francia, Lettere Ministri,
Mazzo 16). [434]
_____
1380 Sylvestre de Saluces de la Mente, abbé commendataire d'Hautecombe. (Voir le tome précédent, note (1280), p.
390.)
1381 Vide p. 44, not. (181).
1382 Vide tom. præced. p. 390.
293/346

30.4 Page 294

▲back to top
B. Lettre de Don Juste Guérin1383 a D. Boerio, Général des
Barnabites1384
_____
Benedicite Pater.
1385 Essendo in Annessi, fu pregato nostro R. Padre Provinciale1386, con molta instanza, da
Monsignor Rmo Vescovo di Geneva, aciò fosse contento esso et dare licenza et autorità a nostri
Collegiali d'Annessi di rimettere, o per vendita o per commutazione, un certo spazio di sito d'un
cantone d'un pratticello ove è una peschiera del nostro Collegio, alli Fratti di S. Domenico, aciò
essi rimettino altrettanto sito del loro giardino, necessario per la fabrica d'un monastero di
Monache fondato et eretto da detto Monsignor Rmo. Et per moverli maggiormente a fargli la grazia,
gli ha monstrato una lettera missiva del nostro Padre precedente Generale1387, per la quale egli
rimetteva tutto questo negozio in petto di detto Monsignor Rmo, atteso il singolare affetto che
sempre ci ha monstrato in tutte le occasioni ; il quale all'hora non eseguì secondo la rimissione
fattagli, parte per causa delle sue molte occupazioni che lo tirarono fuori della sua diocesi, parte
ancho perché vedeva che alcuni de nostri Padri di Annessi lo facevano tanto mal volentieri che
non ne restavano contenti, et sperando detto Monsignore, o di fare contentare li detti Padri di S.
Domenico che non ricercassero detto sito da noi, overo di sforzarsi di disporre in modo tale la
fabrica di detto monastero acciò non havesse bisogno di detto sito. Ma tutto gli è stato impossibile,
perchè è talmente angusto il luogho che non sene può passare, et gli detti Domenicani
amorevolmente non si sono mai contentati ; anzi, di più et di peggio, alli giorni passati hanno
mossa lite contro le dette Monache per il già fabbricato1388, per il che viene interrotta la fabrica et
li santi dissegni di Monsignor Rmo, al quale rincresce estremamente et l'uno et l'altro. [435]
Et havendo havuto risposta dal nostro R. P. Provinciale ch'egli non poteva dare autorità di
alienare, l'ha pregato et me instantemente acciò ne scrivessimo alla Sua Molto Reverenda
Paternità, pregandola, et li RR. PP. Assistenti, acciò si compiacia di rimettere parte di detto sito,
et dia quella facoltà che sarà necessaria alli nostri per alienare, o per vendita o per commutazione
; et promette detto Monsignor Rmo che sarà in evidentem utilitatem nostram, et dice che vole che
li nostri stessi Padri siano giudici di questa evidente utilità1389.
Di più, essendo noi giunti in Torino, fu ricercato detto nostro Padre Provinciale dal
Serenissimo Prencipe Cardinale di Savoia1390 et della Serenissima Infante Margarita, Duchessa di
Mantova1391, alla quale detto R. Padre parlò, et di propria bocca lo pregò instantemente di fare
tutto quello che potrà, et pregarne da parte di Loro Altezze Serenissime la Sua Molto R. P. aciò
per ogni modo sia fatta la grazia a dette Monache, delle quali ella è la protettrice et il Serenissimo
Prencipe Maggiore1392 protettore, alle quali sono affezionatissime Loro Altezze per la molta bontà
di dette Monache, a beneficio de quali in questa parte dice che impiegarà il favore del Serenissimo
Ducca suo padre1393, se farà di bisogno, et de tutti suoi fratelli li Serenissimi Prencipi1394.
Per il che, havendo inteso le suddette et seguenti cose, nostro R. Padre Provinciale et io
insieme, di comune concerto, scriviamo questa alla S. M. R. P., et la nostra opinione, sottoposta
1383 Voir le tome précédent, note (618), p. 171.
1384 Voir ibid., note (1244), p. 381.
1385 Vide p. 120, not. (424).
1386 D. Urbain Peyra, élu provincial pour le Piémont et la Savoie au dernier Chapitre général, arriva le 10 juillet 1617
à Annecy avec D. Juste Guérin, et en repartit le 21 août. (Acta Collegii Annessii.)
1387 Le P. Jean-Ambroise Mazenta (voir tome XVI, note (613), p. 190).
1388 Vide p. 86, not. (315), Epist. MCDLXII, et p. 275, not. (921).
1389 Vide Epist. MCCCLXXIII, pp. 119-122.
1390 Vide tom. XIII, p. 345, not. (934).
1391 Vide tom. XVI, p. 104, not. (344).
1392 Victor-Amédée, prince de Piémont (voir le tome précédent, note (199), p. 45).
1393 Le due de Savoie, Charles-Emmanuel Ier (voir tome XI, note (389), p. 168).
1394 Les princes Victor-Amédée, Maurice et Thomas.
294/346

30.5 Page 295

▲back to top
però a quella di S. M. R. P., che non si può negare questa grazia : poichè quando habbiamo opposto
che nel contratto ch'habbiamo fatto con la città d'Annessi v'è scritto che non alienaremo li beni di
detto Collegio ; et di più, che alcuni della città m'hanno detto che più presto litigaranno con noi
che permettere che sia fatta alcuna alienazione, Loro Altezze Serenissime hanno risposto che
quando i loro sudditi sapranno che tale è la loro volontà, nessuno d'essi contradirà, perchè essendo
necessario detto sito per la fabrica di detto monastero, vogliono che per ogni modo li sia rimesso ;
atteso che il sito del Collegio è grandissimo et questa parte non è di necessità per la fabrica nostra,
et che si esibisce ampia sodisfazione, rilevandosi d'ogni indennità, anzi facendo detta alienazione
in nostra utilità : si che gli pare che concorrendo la necessità di dette Monache, et un poco di nostra
commodità, la charità et una certa equità vole che tal cosa si faccia ; et per tanto, che si contentiamo
noi solamente, che faranno [436] bene contentare li altri che si volessero opporre. Hora, vedendo
la risoluzione di Loro Altezze Serenissime, pare che non possiamo fare di meno, perchè habbiamo
bisogno di loro ogni hora.
Di più, mi scordavo di dire che detto Monsignor Rmo ha promesso che ci comprarà una casa
immediatamente annessa ad un altro praticello pur nel sito stesso del nostro Collegio, dell'altra
parte, che sarà altrettanto sito, et farà fare ancho un'altra peschiera più bella di quella che di
presente habbiamo ; et questo si può fare, perche habbiamo un canale del lago che inonda di tutta
quella parte nostro Collegio. Di più, l'istesso canale d'acqua ch'ora è peschiera et che si rimetterà
alli Fratti, sempre perseverarà nello stesso corso suo et purgarà i luoghi comuni, i quali di presente
sono in fondo di detto canale, ma però da banda nostra ; et quando faremo fabricare, forsi che
bisognerà levargli d'indi. Et questo tutto possiamo fare commodamente, perchè possiamo tirare
tanta aqua et per tutte le parti del Collegio che vogliamo.
Quanto a me, id est Don Giusto, altre volte è stato contrario a questo, perchè temevo che
alcuni de nostri boni amici d'Annessi non s'inimicassero ; ma hora che vedo che tutto questo si farà
senza perdere l'amicizia loro, et non facendolo forsi che perderessimo quella delli Serenissimi
Prencipi et Prencipesse, che pure più importano, sono di parere che si faccia la grazia, perchè non
facendola perdaremo più di quello che vale tal sito ; et anche farla per charità, più
principalmente1395.
Aspettando dunque la risposta, chiedo la sua benedizione et mi raccomando alle sue devote
orazioni et santissimi Sacrificii.
Di Torino, alli 15 Settembre 1617.
……………………………………………………………………………………………………...
D. GIUSTO.
Revu sur l'Autographe conserve à Milan, dans les Archives du R. P. Provincial des Barnabites,
au collège Saint-Barnabé. [437]
_____
1395 Vide Epist. MCDXXI, et p. 213, not. (738).
295/346

30.6 Page 296

▲back to top
C. Lettres patentes de Henri de Savoie, Duc de Nemours1396, en faveur
des Religieuses de la Visitation d'Annecy
_____
1397 HENRY DE SAVOYE, Duc de Genevois, de Nemours et de Chartres, Marquis de
Sainct Sorlin, de Sainct Rambert, Comte de Geneve, de Gisors, Baron de Faucigny et Beaufort.
A tous qu'il appartiendra, sçavoir faisons que sur la remonstrance que Nous a esté faicte de
la part des Reverendes Dames Religieuses de la Visitation de Nostre ville d'Annessy, contenant
que pour avoir moyen de vivre et s'entretenir en ycelle, soubs les regles establies par nostre Sainct
Pere le Pape, elles ont besoing d'avoir des revenus asseurés et proches de la dicte ville ; et estant
informées que Mr Anthoine de Boege, dict de Conflens1398, tient de Nous, soubs grace de reachept
perpetuel, les moulins assis dans Nostre dicte ville d'Annessy, soubs la riviere de Thiouz, proche
l'eglise Saincte Claire, qu'elles ne peuvent commodement avoir sinon qu'il Nous plaise leur
permettre d'entrer en Nostre lieu et place ; Nous inclinant volontairement a leur priere, appres avoir
ouy les gents de Nostre Conseil pres Nostre personne, et desirant de tout Nostre pouvoir
l'accroissement et augmentation du culte divin, et preferant la gloire et honneur de Dieu a l'interest
particulier des droicts de Nostre domeyne :
Avons octroyé et permis, octroyons et permettons par ces presentes aux dictes Dames de
la Visitation d'entrer en Nostre lieu et place, et de prendre et retirer les fruicts des dicts moulins,
en payant par elles audict de Conflens les sommes portées par son contract d'engaigement du
dixhuictiesme janvier mil cinq cents nonante six, et aux charges et conditions portées par yceluy,
avec pouvoir de faire en yceux des nouveaux artifices pour la plus grande commodité de Nos
subjects.
Sy donnons en mandement a nos chers bien aymés et feaulx [438] Conseillers, les gents
tenants Nostre Chambre des Comptes de Genevois, de verifier et interiner ces presentes, et du
contenu en ycelles faire souffrir et laisser jouyr pleynement et paysiblement les dictes Dames de
la Visitation, sans difficulté ; et a nous (sic) advocats et procureurs fiscaulx et domaniaux, d'y
prester consentement. Car telle est Nostre volonté.
Faict a Paris, ce vingthuitiesme octobre mil six cents et dix sept.
HENRY DE SAVOYE.
Visées, scellées par Monseigneur.
ROUSSELET.
D'après une copie inédite de l'époque, conservée à Turin, Archives de l'Opera pia Barolo, Paquet
221, n° 11.
_____
1396 Voir tome XII, note (495), p. 211.
1397 Vide p. 180, not. (612).
1398 Vide tom. XIV, p. 391, not. (1125).
296/346

30.7 Page 297

▲back to top
D. Requête des Religieuses de la Visitation d'Annecy au Duc de Savoie
_____
A Son Altesse Serenissime.
1399 Exposent en toute humilité les Reverendes Dames Religieuses de la Congregation par
elles erigée dans Vostre Ville et cité d'Annessy, soubs le tiltre de la Visitation de Nostre Dame,
Vous (sic) tres humbles Oratrices : comme pour vivre plus commodement dans leur dicte
Congregation du peu de revenu que chescune d'elles y raporte, et mieux vacquer au service pour
lequel elles se sont sequestrées tout a faict du monde, elles auroient besoing de quelque fond proche
de la dicte ville, que leur raportast du bled pour leur provision. Et pour avoir ceste commodité,
elles auroient supplié Monseigneur le Duc de Genevois et Nemours, de leur baillir pouvoir de
rachepter les moulins par luy venduz, a faculté de rachapt perpetuel, situés dans Vostre dicte Ville
d'Annessy, a feu Noble Anthoine de Conflens, pour le mesme prix et somme, charges et conditions
portées par le contract de vente passée a Lagnieu, le dixhuictiesme [439] janvier mil cinq cents
nonante six, par devant Me Burdet, nottaire, dont la copie est ci joincte.
Ce que mondict Seigneur de Nemours leur auroit accordé facilement, par Patentes données
a Paris le vingt-huictiesme octobre dernier, cy joinctes1400, avec la verification qu'en a faict Vostre
Chambre des Comptes de Genevois, et le contract de cession de droicts qu'en a passé noble
Anthoine de Boege. dict de Conflens, son [neveu], par devant Me Duret, nottaire. le sixiesme mars
de l'année courante. La ratification duquel contract les Dames suppliantes desireroient obtenir de
Vostre Altesse Serenissime ; et ycelle faire verifier en Vostre souveraine Chambre de Savoye, pour
l'asseurance de leurs deniers a l'advenit.
Que les faict recourir a la bonté, clemence et pieté accoustumée de Vostre dicte Altesse1401,
a ce qu'il luy plaise ratiffier, confirmer et approuver tout le contenu au dict contract, et ordonner
qu'elles jouyront du fruict et benefice d'yceluy jusques a ce qu'elles soient remboursées du prix
porté par le dict contract, et despence qu'elles ce trouveront avoir faicte aux bastiments et artifices
nouveaux qu'elles pretendent faire au lieu ou sont situés les dicts moulins, conformement aux
Patentes sus designées et verification d'ycelles.
Et a ces fins, plaira a Vostre Altesse Serenissime enjoindre a sa dicte Chambre des Comptes
de Savoye, de verifier les Patentes que leur seront expediées pour le faict que dessus, sans aulcune
difficulté et sans aulcung esmolument, en derogeant pour ce regard, entant que de besoing, a tous
edicts a ce contraires1402 : affin que les dictes Dames puissent jouyr plus seurement et paisiblement
de la commodité des dicts moulins, et faire leurs fonctions avec plus de tranquillité d'esprit au
service de Dieu, qu'elles prient incessamment pour la prosperité de Vostre Altesse, conservation
et accroissement de ses Estats et de Nous (sic) Seigneurs les Princes Sermes, qu'il veillie combler
de ses graces et benedictions.
[Mars] 1618 1403.
D'après une minute inédite, conservée à Turin, Archives de l'Opera pia Barolo,
Paquet 221, n° 11.
_____
1399 Vide p. 180, not. (612).
1400 Vide supra, p. 438, C.
1401 Vide Epist. MCDV, pp. 179. 180.
1402 Cf. supra, p. 294.
1403 Le mois et le quantième ne sont pas indiqués dans la minute reproduite ci-dessus ; mais, d'après les faits qui y sont
rappelés et la note donnée plus haut, p. 180, il semble probable que cette requête fut dressée au mois de mars.
297/346

30.8 Page 298

▲back to top
Glossaire des locutions et des mots surannés ou pris dans
une acception inusitee aujourd'hui1404
_____
(L'astérisque désigne les mots qui ont paru dans le Glossaire des tomes précédents.)
* A pour avec (p. 235, lig. 9), comme un (p. 417, lig. 26), dans (p. 314, lig. 23), de (pp. 69, lig.
2 ; 151, lig. 10 ; 355, lig. 7 ; 369, lig. 25 ; 377, lig. 10), en (p. 207, lig. 3), par (pp. 38, lig. 9 ; 412,
lig. 33), pour (p. 146, lig. 25), pour un (p. 232, lig. 13).
* AAGE pour temps (p. 20).
* ABONDANT (d') de plus (p. 155).
ABORD pour arrivée (p. 201).
ABORD (d') pour tout de suite (pp. 352, 412).
* ACCOMMODEMENTpour avantage matériel (p. 154).
* ACCOMMODER pour satisfaire (p. 64).
* ACCOUSTUMANCE habitude, action de s'accoutumer (p. 230).
* ACCOUSTUMÉ (avoir) avoir coutume (pp. 40, 416).
* ACCOYSER, ACCOYSER (s') apaiser, calmer (pp. 256, 312, 414), s'apaiser, se calmer, se
tranquilliser (pp. 29, 134). Cf. le lat. ACQUIESCERE.
* A CE QUE pour afin que (pp. 162, 169).
* ACTION pour éducation, bonnes manières (p. 184).
ACCUEIL pour bienveillance (p. 406).
ACCUEILLI pour reçu, accumulé (p. 144).
ADIRE (son) son mot à dire (p. 351).
ADOLORÉ endolori, affligé (p. 175). Cf. l'ital. ADDOLORATO.
ADVENTURES pour événements de la vie (p. 312).
ADVISÉ pour jugé, trouvé (p. 85).
* AFFECTION pour ardeur (p. 32), désir, volonté (p. 412).
AFFECTION (de bonne) pour de bon cœur (p. 34o).
* AFFECTIONNÉ pour dévoué (p. 27), volontaire (p. 134), qui est affectionné à (p. 161).
* AFFECTIONNEMENT affectueusement, avec affection (pp. 15, 69, 389, etc.), avec ardeur,
zèle (p. 246). [441]
AFFECTIONNER pour avoir à cœur, désirer ardemment (pp. 2, 188).
* AGGREABLEMENTpour de bon cœur (p. 28).
AGGREABLEMENT (recevoir) pour agréer (p. 408).
* AGGREEMENT pour désir, ce qui agrée (p. 26).
* AINS au contraire, bien plus, et même, mais, mais au contraire, mais plutôt.
ALLEGRESSES pour réjouissances (p. 347).
* AMENE — du lat. AMŒNUS, d'un aspect agréable (p. 60).
* A MESME QUE au moment même où (p. 250).
AMEUBLÉ meublé (p. 60).
* AMIABLE doux, aimable.
* AMIABLEMENT aimablement, doucement (pp. 28, 198).
* AMPLIFICATION du lat. AMPLIFICATIO, accroissement (p. 246).
A PEU pour peu (p. 8).
1404 Nous n'avons pas songé à dresser ici, pour ce volume, en toute rigueur scientifique, le Lexique de saint François
de Sales. Un tel travail, à peine est-il besoin de le dire, ne pourra être établi qu'après l'achèvement de cette publication.
Notre but a été surtout de rendre provisoirement service aux lecteurs français ou étrangers qui seraient peu familiarisés
avec les particularités du vieux langage. On voudra bien, en se servant de ce recueil, se souvenir de la pensée d'ordre
tout pratique qui l'a inspiré.
298/346

30.9 Page 299

▲back to top
ARENE du lat. ARENA, rivage (p. 282).
* ARRESTÉ pour fixé (p. 412).
ASSEURÉ EN pour appuyé sur (p. 312).
* ASSEUREMENT pour sans hésitation, en toute assurance (p. 249).
ASSEURER pour fortifier, affermir (pp. 207, 211).
* ASSEURER (s') pour être sûr, se persuader, avoir confiance (pp. 2, 39, 61, etc.)
* ATANT en attendant, là-dessus (p. 3, 214).
* ATTREMPER adoucir, tempérer (p. 339).
* AU pour dans ce (p. 150, lig. 28), dans le (pp. 386, lig. 6 ; 412, lig. 25), le (pp. 39, lig. 8 ; III,
lig. 5), par le (p. 231, lig. 23), pour le (p. 282, lig. 23).
* AUCUNEMENT pour en quelque façon (p. 46).
* AUTANT pour aussi (p. 282).
* AVANCER pour faire progresser, prospérer (p. 194).
* AVANT QUE DE avant de (pp. 74, 324).
AVEC pour chez (p. 319).
* AVETTE abeille (p. 192).
BABILONIQUE qui ressemble à Babylone (p. 8).
* BAILLER donner (p. 63).
* BAYSEMAIN compliment (p. 68).
* BELLEMENT (tout) avec calme (p. 33) tout doucement, tranquillement (pp. 37, 410).
* BIEN pour plaisir, avantage (pp. 367, 387).
* BIENFACTEUR du lat. BENEFACTOR, bienfaiteur (p. 301).
* BONNEMENT pour vraiment (p. 34), bien, suffisamment (p. 63), facilement (pp. 68, 204).
* BRAVE pour accompli, parfait (p. 347).
BRIEFVE pour prompte (p. 185).
CALAMITEUX pour accablé de malheurs (pp. 44, 46).
* CARESSER pour bien accueillir, donner des témoignages d'honneur, de bienveillance (p.
288).
* CARMELINE Carmélite (p. 134).
* CARQUANT collier (p. 175).
* CE pour ceci, cela ; c'est (p. 207, lig. 13).
* CEANS ici (pp. 191, 348, 367).
* CE PENDANT pour en attendant, maintenant, présentement.
* CHAMBRIERE femme de chambre (p. 325).
* CHAMS (aux, des) pour à la campagne (pp. 399, 406, 410), de la campagne (pp. 161, 218).
CHATELANIE châtellenie (p. 382).
* CHEVIR venir a bout (p. 39).
* CI APRES pour dans la suite, plus tard (p. 270).
CIVILISER (se) pour se former, s'accoutumer (p. 142).
* CLAUSULE clause (p. 270). Du lat. CLAUSULA.
* CLAUSURE du lat. CLAUSURA, clôture (pp. 84, 85, 141, 413).
* COGITATION du lat. COGITATIO, pensée (pp. 143, 152, 378).
* COLLOQUER du lat. COLLOCARE, placer (pp. 154, 220). [442]
* COMME pour comment, de quelle manière, que (pp. 2, 65, 110, 195, etc.)
* COMME QUE CE SOIT quoi qu'il en soit (p. 322).
COMMODITÉ (a) pour commodément, facilement (p. 269).
COMMUNIER (se) pour communier (p. 400).
COMPLAIGNANT plaignant (p. 329).
* COMPLIMENT pour complément (p. 229).
* COMTE pour compte (pp. 194, 261, etc.)
299/346

30.10 Page 300

▲back to top
* CONDITIONNÉ pour pourvu des qualités requises (p. 47).
CONJOUISSANCE congratulation (p. 347).
* CONSPIRER AU pour s'unir dans le (p. 44).
* CONTE, CONTER pour compte, compter.
* CONTEMPLATION (a cette) en considération de cela (p. 168).
CONTESTE contestation, débat (p. 393).
* CONVERSATION pour relations de société (p. 39), compagnie, société (p. 106).
* COULPE du lat. CULPA, faute, culpabilité (pp. 85, 189, 326, 390).
* COUPEAU cime (p. 249).
* COURAGE pour confiance assurée (p. 211), âme (p. 408).
COURANT pour poursuivant (p. 160).
* CREANCE pour autorisation, lettres de créance (p. 170), croyance (p. 327), certitude (p.
329).
* CUYDER du lat. COGITARE, penser, croire (pp. 110, 243).
* DAMOYSELLE (voir MADAMOYSELLE) appellation usitée jadis à l'égard de toute femme
mariée qui n'était pas noble, ou qui, étant noble, n'était pas titrée (pp. 193, 413).
DANS pour avec (p. III).
DANS LE pour au (p. 278).
* DE pour à (pp. 202, lig. 8 ; 314, lig. 11), avec (pp. 46, lig. 17 ; 269, lig. 5), depuis (pp. 53,
lig. 8 ; 200, lig. 5), dès (p. 27, lig. 14), du (p. 243, lig. 3), par (p. 288, lig. 14), pour (p. 262, lig.
11).
DEÇA en deçà (p. 2).
* DEÇA (de) de ce côté-ci, de ce pays, d'ici, en ce pays, ici (pp. 12, 123, 141, 204, etc.)
DECLAIRER DE (se) pour déclarer, s'ouvrir de (p. 221).
* DEDANS pour dans (pp. 70, 152, 325).
* DELA (de) de là, du lieu où vous êtes, de cette région, là-bas (pp. 1, 253, 262, 328, etc.)
* DELA LE au-delà du (p. 2).
* DEMETTRE (se) pour s'abaisser (p. 234).
* DEMEURANT pour reste (p. 46).
* DES pour de (p. 217).
DESADVENTURE malheur (p. 44). Cf. l'ital. DISAVVENTURA.
* DESCEU (au) à l'insu (p. 202).
DESEMBARRASSÉ débarrassé (p. 48).
* DESENGAGEMENT dégagement (p. 281).
DESFIANCE pour attente mêlée de crainte (p. 26).
* DES ICY d'ici, de ce lieu (p. 201).
* DES IL Y A depuis (pp. 185, 410).
* DESIR pour l'accomplissement, la réalisation d'un désir (p. 102).
* DESMARCHER départir (p. 231).
* DESPLAYSANT pour douloureux, triste (p. 97).
* DES QUE pour depuis que, depuis le moment où (pp. 50, 112, 198).
* DES QUELQUES... PLUSIEURS ANNEES EN ÇA, DES UN AN EN ÇA depuis quelques...
plusieurs années (pp. 23, 230, 154), depuis un an (p. 75).
* DESSUS pour sur (p. 219).
DETRAIT déduit (p. 372).
* DEVANT pour avant, auparavant (pp. 19, 20, 28).
* DEVERS du côté de, vers (p. 172).
* DISCOURS pour réflexions, raisonnements (p. 238).
DISPOSÉ pour testé, fait ses dispositions testamentaires (p. 110). [443]
* DIVERTIR du lat. DIVERTERE, détourner, empêcher (pp. 123, 416).
DIVERTISSEMENT (donner du) pour empêcher, mettre obstacle (p. 285).
300/346

31 Pages 301-310

▲back to top

31.1 Page 301

▲back to top
DOMMAGE DE (c'est) c'est une chose fâcheuse que la perte de (p. 24).
* DONT pour ce dont, de quoi (p. 102), par conséquent, c'est pourquoi (p. 8).
* DORES EN AVANT dorénavant (p. 277).
* DOTE dot (p. 146).
* DOULOIR (se) se plaindre (p. 410). Du lat. DOLERE.
* DOUTER pour craindre (p. 29).
* DRESSER pour ériger (p. 22).
* DU TOUT pour absolument, complètement, entièrement, tout à fait.
* EMMI au milieu de, dans, parmi.
* EMPESCHÉ pour embarrassé (p. 242).
* EN pour à (pp. 157, lig. 6 ; 170, ll. 27, 28 ; 210. lig. 23, etc.), à faire (p. 86, lig. 2), à la (p.
219, lig. 20), au (p. 283, lig. 5), dans la (p. 348, lig. 28), par (p. 393, lig. 13), vers (p. 416, lig. 23).
* EN ÇA jusqu'ici (p. 267). Cf. l’ltal. IN QUA.
* ENCOR (pour) pour le moment (pp. 2, 112, 412).
* EN LIEU pour à la place, au lieu (pp. 157, 404).
EN MOY pour en mon pouvoir (p. 350).
ENTRESERVIR (s') se servir mutuellement, l'un à l'autre (p. 23).
* ENTRETENEMENT entretien (p. 269).
* ENTRETENIR (s') pour se tenir mutuellement (p. 262).
* ENVERS pour contre (p. 199).
* ESCHEOIT (s'il y) s'il est nécessaire (p. 2).
* ESLECTION pour choix personnel (pp. 19, 389, 412). Du lat. ELECTIO, choix.
ESSAY pour action d'éprouver (p. 284).
* ESSAYER (s') pour essayer (pp. 138, 184, etc.)
* ESTABLIR du lat. STABILIRE, rendre stable, affermir (p. 126).
ESTIME (d') estimable (p. 41).
ESTOIT pour s'était (p. 242).
* ESTONNÉ pour émerveillé, frappé d'admiration (p. 22).
* ESTONNEMENT pour émotion (p. 319).
* ESTONNER pour effrayer (p. 33), troubler, inquiéter (p. 354).
* ESTONNER (s') pour ébranler (p. 230), s'alarmer (p. 242), se déconcerter (p. 35).
ESTRE DE CROIRE être cru (p. 354).
* ESTROITTEMENT pour particulièrement, spécialement (p. 254). Cf. l'ital.
STRETTAMENTE.
* ET SI pour et encore, de plus (pp. 208, 345).
ET TOUT pour aussi (pp. 27, 143).
* EVENEMENT pour issue, succès (p. 188).
EXECUTION pour pratique (p. 246).
* FAIRE pour accorder (p. 46), donner, procurer (p. 49, être de (p. 196), établir, fonder (pp.
193, 249, 341), rendre (p. 21).
FAIRE FAUTE pour faillir, commettre une faute (p. 131).
* FASCHEUX pour fâché, mécontent (p. 416).
FIN POINT (au) au juste point (p. 379).
FORTUNE (mettre en) donner un emploi avantageux (p. 348).
FOURVOYER pour se fourvoyer (p. 69).
FRATERNISER ressembler à son frère (p. 246).
* FRATERNITÉ pour l'ensemble des frères et des sœurs (p. 13).
* GAUSSER pour se gausser, se railler (p. 385).
GELAP julep (p. 219).
301/346

31.2 Page 302

▲back to top
GRACE DIEU grâce à Dieu, Dieu merci (p. 201). [444]
* GRAND CAS (c'est, c'est un) c'est une chose surprenante (pp. 64, 198).
* GRATIEUX pour suave, doux (pp. 412, 413).
GRÉ (a) de bon gré (p. 184).
* HONNESTE pour honorable (p. 64).
* HURTER pour recourir (p. 269).
* ICY pour ci (pp. 155, 352).
* IMBECILLITÉ du lat. IMBECILLITAS, faiblesse, impuissance, infirmité, imperfection (pp.
172, 330, 335).
* IMPROUVEU (a l') a l'improviste (p. 146).
* INCOMMODÉ pour altéré (p. 193), dans la gêne, gêné (p. 410).
INCOMMODÉ DE pour gêné pour le (p. 413).
* INCOMMODER pour nuire à (p. 303).
* INCOMMODITÉ du lat. INCOMMODITAS, difficulté (p. 196).
* INFIRME du lat. INFIRMUS, faible (p. 105).
* JA pour déjà (p. 26), jamais (p. 211).
JETTER A REFUGE (se) se réfugier (p. 276).
* JOURD'HUY (ce) aujourd'hui (pp. 157, 414).
* LA OU pour tandis que (p. 140).
LARGEMENT pour longuement (p. 390).
* LEGAT du lat. LEGATUM, legs (pp. 146, 147).
LE TOUT pour tout (p. 35).
* MADAMOYSELLE (voir DAMOYSELLE) (pp. 31, 114, 129, etc.)
MAL pour malheur (p. 20).
* MANQUEMENT pour manque, défaut (pp. 242, 251, 328, 410).
* MARRI, MARRY fâché, peiné, regrettant.
MESCONTENTEMENT pour peine, épreuve (p. 230).
* MESHUY désormais, dorénavant, maintenant.
* MESME pour surtout, d'autant plus (pp. 144, 367).
* MOYENNER procurer en servant d'intermédiaire (p. 85).
MULTITUDE pour répétition très fréquente (p. 284).
* MURMURATION murmure (p. 400).
* NI pour et (pp. 2, lig. 2 ; 143, lig. 25 ; 284, lig. 4).
NONOBSTANT pour malgré cela (p. 412).
* NOURRITURE pour éducation (p. 26).
* NUISANCE dommage (p. 85).
* ODORER du lat. ODORARI, flairer, sentir le parfum (p. 280).
* OFFICE pour moyen (p. 232).
* OFFICE (faire) intervenir, rendre service (p. 97).
* ONQUES du lat. UNQUAM, jamais (pp. 52, 147, 268).
* ORATEUR titre que prenaient autrefois les gens d'Eglise écrivant à des souverains (pp. 11,
108, 155, etc.)
ORDONNER pour faire donner par commandement (p. 154).
* OR SUS or donc, eh bien ; parole d'encouragement. Cf. l'ital. ORSU.
* OU pour c'est pourquoi (p. 284, lig. 26).
302/346

31.3 Page 303

▲back to top
* OUTRE pour au delà de (p. 339).
* OUTRECUIDÉ présomptueux, téméraire (p. 2).
* OŸE, OYENT formes inusitées du verbe ouïr (pp. 169, 327).
* PAR APRES ensuite.
* PAR DELA là où vous êtes, au delà, des monts (p. 169).
PAR ENSEMBLE ensemble (p. 164).
* PARMI pour au milieu de tout cela (p. 146), dans (pp. 245, 319, 411), pendant (p. 364).
PASSIONNÉ pour ardemment affectionné (p. 394).
* PASTURE pour aliment, nourriture (p. 400). [445]
* PLAYSE VOUS pour qu'il vous plaise (p. 393).
* PLEIN (a) complètement, expressément (p. 206). Cf. l'ital. APPIENO.
PLEIN DE BON VISAGE avec très bonne mine (p. 88).
PLUS pour encore, de plus (p. 19).
* POINT pour ne point (p. 154).
* PORTION pour partie (p. 171).
POSITION pour pose (p. 28).
* POUR CE QUE parce que (p. 5).
PRÆJUGER pour juger d'avance favorablement (p. 352).
PRENDRE pour faire (p. 210).
PROFESSER (faire) pour faire faire la profession religieuse a, faire prononcer les vœux à (p.
396).
PROPOS DES (a) pour selon les (p. 220).
PROPOSÉ pour fait (p. 267).
* PROSPERER pour faire prospérer (pp. 12, 32, 108).
* PROUVEU pourvu (p. 64).
* PROVIDENCE pour prévoyance, soin, sagesse (pp. 267, 276).
PURGATION pour purification, élimination (p. 257).
* QUANT ET ELLE avec elle (p. 381).
QU'AU... QU'EN tant en... qu'en (p. 371).
* QUE pour de (p. 251).
* QUI pour ce qui (pp. 193, lig. 25 ; 224, lig. 2 ; 269, lig. 8).
* RAMASSER (l'esprit) le concentrer sur un objet, le recueillir (p. 136).
* RAMENTEVOIR faire ressouvenir de (p. 169), se rappeler, se ressouvenir de (p. 225).
* RAMENTEVOIR (se) se rappeler (pp. 31, 287).
* RECHARGE pour épreuve renouvelée (p. 230).
* RECOMPENSE pour compensation, dédommagement (p. 212).
* REFORMATION du lat. REFORMATIO, réforme (pp. 161, 403).
* REGARD (pour ce, pour le) pour à ce sujet (pp. 61, 315), à cet égard, sur ce point (p. 246),
au sujet, pour ce qui est (pp. 7, 339).
* REGARD (pour vostre) pour ce qui vous concerne (p. 37).
* REGARDER pour veiller (p. 26).
REGRETTÉ SUR déploré (p. 245).
RELEVEE action de se relever (p. 136).
* RELIGION pour état religieux (p. 8), Ordre religieux (pp. 133, 140, 141, etc.)
RELIGION (Ordres de) Ordres religieux (p. 132).
* REMONSTRANCE pour exposé (p. 267).
REMONSTRÉ pour démontré, exposé (p. 83).
* RENCONTRE (le) pour la rencontre (pp. 144, 184).
RENCONTRÉ LE CHOIX trouvé par hasard le choix (p. 158).
303/346

31.4 Page 304

▲back to top
RENCONTRER LE SOIN (faire) faire trouver, recueillir le fruit des soins (p. 129).
* REPLIQUER du lat. REPLICARE, répéter (pp. 28, 400).
* REPRESENTER pour présenter (p. 40), présenter de nouveau (p. 262).
REPUGNANCE pour résistance (p. 358).
* RESERVER pour épargner, priver de (p. 7).
RESIGNÉ pour remis, confié (p. 312).
* RESOLU pour plein de courage, raffermi (p. 17).
* RESOLUTION pour résignation courageuse (p. 27).
* RESOUDRE décider, juger (p. 329), prendre une décision, une détermination (p. 333).
* RESPECT pour considération (pp. 25, 303).
* RESSENTIMENT pour sentiment (pp. 17, 232), sentiment de chagrin, regret (pp. 20, 341).
* RETARDEMENT délai, retard (pp. 392, 410), prolongation de séjour (p. 411).
REUSCIR DE venir à bout de, faire réussir (p. 60), sortir heureusement de (p. 211).
REUSCISSANT pour s'effectuant (p. 218). [446]
* REVA, REVONT (s'en) s'en retourne, s'en retournent (pp. 106, 288).
* REVIGORE remis en vigueur (p. 11).
SECTATEUR du lat. SECTATOR, compagnon, celui qui suit (p. 16).
SENS pour sentiment (p. 352).
* SENTIMENT pour peine, regret (p. 213).
SEULEMENT TROP augmentatif de bien assez (p. 344).
* SI pour aussi (p. 378, lig. 21), aussi, de même (p. 230, lig. 1), cependant, néanmoins (pp. 85,
lig. 6 ; 346, lig. 5 ; 339, lig. 8) ; vraiment (p. 115, lig. 21).
* SI EST CE QUE cependant, il n'en est pas moins vrai que (pp. 108, 128, 232, 348), néanmoins
(pp. 49, 230, etc.), toutefois (pp. 35, 378).
* SI MOINS sinon (pp. 215, 375).
* SI QUE de sorte que (p. 404).
SOIN (de mon) pour confié à mes soins (p. 208).
* SUITE pour action de suivre (p. 144).
* SUPPORT pour protection (p. 408).
SUPPORTER pour porter (p. 340).
* SUR pour apres (p. 398, lig. 18), au sujet de (pp. 33, lig. 9 ; 174, lig. 1 ; 231, lig. 11).
* TANDIS en attendant (pp. 384, 394, 411).
* TANT pour autant de temps (p. 145).
* TANT PLUS d'autant plus (p. 210).
* TENANT pour exact, fidèle p. 251).
* TENDRE pour délicat, touché sensiblement (p. 398, ll. 1, 7).
* TENDREMENT pour prudemment, délicatement (p. 383).
* TENDRETÉ du lat. TENERITAS, tendresse (pp. 29, 172), sentiment affectueux (p. 171),
impressionnabilité (p. 327).
TESTEMENT testament (p. 147).
* TIRER pour attirer (p. 389).
* TOUT AINSY QUE pour comme (p. 326).
* TOUT FIN SEUL absolument seul (p. 383).
* TRAVAIL pour peine (p. 49), inquiétude, sollicitude (p. 174).
* TRAVAILLER pour molester (p. 199).
* TREILLE grille (p. 395).
TRIBULATION pour douleur (p. 26).
* VACATION emploi, occupation (p. 20).
* VERS pour à (p. 352), auprès de (pp. 2, 66, 97, etc.)
304/346

31.5 Page 305

▲back to top
* VEÜE pour entrevue, rencontre (p. 48).
* VEÜE (de vostre) de vous voir (pp. 219, 237).
* VIANDE pour mets, aliment (p. 172), nourriture (p. 400).
* VIEL vieux (p. 108).
* VIOLENTE pour pressante (p. 379).
* VIOLET pour tache violette (p. 228).
* VOIREMENT à la vérité (p. 172). [447]
_____
305/346

31.6 Page 306

▲back to top
Index des correspondants et des principales notes
biographiques et historiques de ce volume1405
_____
Affringues Bruno (d'), Général des Chartreux ………………………
AIRE (Ayre) Evêque d'. Voir COSPEAU.
ALBAMEY (Albume) Claude d' (Claude-Thérèse, Religieuse de la
Visitation) …………………………………………………………...
ALLINGES (curé et vicaire des). Voir MOJONIER et RANNAUD.
AMERICI ou AMERIGHI Celse, Abbé général des Célestins ……..
AMIS de saint François de Sales décédés …………………………..
Ancina Jean-Matthieu, de la Congrégation de l'Oratoire ……………
ANGÉLIQUES (Congrégation des) …………………………………
ANNECY. Voir BARNABITES, DOMINICAINS, PRÉ
LOMBARD, SAINT-MAURICE, VISITATION.
ANNECY (Exemption d'impôts pour) ………………………………
Aoste (Aouste) Artus de Lionne * (seigneur d'). Voir
ECCLESIASTIQUE ………………………………………………...
ARMOY (curé et paroisse d'). Voir MUSY …………………………
Arnauld Angélique, Abbesse de Port-Royal ……………………….
ARNAULD Madeleine ……………………………………………...
AVIGNON. Voir LÉGAT.
AVISE Marie-Gasparde (d'), Religieuse de la Visitation ……………
Avoyers et Conseil de Ville de Fribourg * ………………………..
AYES (abbaye des) ………………………………………………….
Ayrault René, Jésuite ……………………………………………….
Pages
»
»
»
»
»
»
»
»
»
»
»
»
»
»
287
31
256
103
176, 298
275
11
240, 322, 432
269, 270
368, 368, 378,
388, 399, 409
380 [449]
28
288, 288, 426
102, 195
30, 30
Ballon Louise (de), Religieuse de l'abbaye de Sainte-Catherine …… »
BARANZANO Redento, Barnabite ………………………………… »
BARFELLY Jacqueline Déaclard (dame) ………………………….. »
BARFELLY (maisons). Voir LACHENAL et VISITATION
D'ANNECY.
BARFELLY Marie-Louise, Religieuse de la Visitation ……………. »
BARILLON Jean de ………………………………………………… »
BARNABITES. Voir BARANZANO, BOERIO, CRAMOISY,
GENNARI, GUÉRIN.
BARNABITES à Chabeuil. Voir CHABEUIL.
BARNABITES d'Annecy (Affaire des jardins). Voir
DOMINICAINS, GUÉRIN, VISITATION D'ANNECY ………….. »
BARNABITES d'Annecy (Religieux et Supérieur des). Voir
GENNARI ………………………………………………………….. »
BARNABITES de Thonon …………………………………………. »
36
95
62, 202
202
375
98, 120, 213
265
22
1405 Les pages des Lettres sont indiquées par des chiffres ordinaires ; les caractères et les chiffres gras désignent les
noms des correspondants et leurs notes biographiques. Quant aux autres notes, leurs titres sont donnés en caractères
ordinaires.
Les noms suivis d'un astérisque * indiquent les auteurs ou les destinataires des pièces qui figurent à
l'Appendice.
Dans cet Index, on a donné aux personnages la désignation que leur attribue le texte des Lettres. (Cf. tome
XII, note (1239), p. 491.)
306/346

31.7 Page 307

▲back to top
BARNABITES (Visiteurs généraux des) …………………………… »
Baume Catherine de la Croix de Chevrières (dame de la) …………. »
BÉATRIX-ROBERT Gaspard. Voir BOUQUÉRON.
BEAUMONT-CARRA Anne-Catherine (de), Religieuse de la
Visitation ……………………………………………………………. »
BEAUMONT-CARRA Paul (de). Voir CARRA.
BEAUVILLARS Gaspard de Bernières (seigneur de) ……………… »
BEAUVILLARS (Mlle de) ………………………………………….. »
Bellarmin Robert *, Jésuite (Cardinal) …………………………….. »
Bellegarde Roger de Saint-Lary (duc de) …………………………… »
BELLERIVE Georges Plonjon (seigneur de) ………………………. »
BELLOT (Mlle) ……………………………………………………… »
BEMMELIUS Gabriel ……………………………………………… »
BÉNÉDICTINS de Paris. Voir SAINT-GERMAIN-DES-PRES.
BERGER Pierre …………………………………………………….. »
Bérulle Pierre de ……………………………………………………. »
BÉTHUNE Philippe de ……………………………………………... »
Blanieu Marguerite de Sassenage (dame de) ………………………. »
Blonay Claude de …………………………………………………… »
Blonay Marie-Aimée (de), Religieuse de la Visitation …………….. »
Boerio Jérôme *, Général des Barnabites …………………………..
»
Boisy Jean-François de Sales (de). Voir SALES.
BONS (fille de). Voir CHEVRON-VILLETTE-LA-COUZ.
BORNAND …………………………………………………………. »
Borromée Frédéric, Cardinal, Archevêque de Milan ………………. »
Bouquéron Antoinette Camus (dame de) ………………………….. »
BOUQUÉRON (filles de Mme de). Voir CHAILLIOL ……………… »
BOUQUÉRON Gaspard Béatrix-Robert (seigneur de) …………….. »
BOURCHENU (Brochenu) Philippe de Peyre (dame de) ………….. »
BOURGEOIS Claude de ……………………………………………. »
Bourgeois Rose, Abbesse du Puits-d'Orbe ………………………….
»
Bouvard Michel ……………………………………………………. »
BRÉCHARD Jean de ……………………………………………….. »
Bréchard Jeanne-Charlotte (de), Religieuse de la Visitation ……….
»
BRESSAND Marie-Constance (de), Religieuse de la Visitation ……. »
BRULART Marie Bourgeois (dame) ……………………………….. »
BRULART Nicolas, premier Président au Parlement de Bourgogne .. »
Calcagni Ange, Cordelier ……………………………………. »
CALUSO Auguste-Manfred Scaglia (marquis de) …………… »
CAPUCINS de La Roche (couvent et église des) ……………. »
CAPUCINS de Thonon (Saint François de Sales consacre
l'église des) …………………………………………………… »
CAPUCINS et CAPUCINES de Paris (couvents des) ……….. »
CARMEL d'Orléans ………………………………………….. »
CARMES de Gex (couvent des) ……………………………… »
CARMES de la Province de Narbonne (Provincial des). Voir
PERRICLUET.
»
293
209, 209
204
47
46
77,79, 91, 423
198, 245, 393
66
33
271
371
60
307
69, 150 [450]
13, 229
170
94, 116, 263,
435
254
293
151, 151
207
129
257
23
47, 50, 51,
144, 160
376, 376
14
14, 75, 137,
193, 247, 301,
314, 411
323
38
48
165, 165
296, 336
22
22
320
302
155
204
307/346

31.8 Page 308

▲back to top
CARRA Paul de Beaumont ……………………………………
Carron Jean ………………………………………………….. »
CÉLESTINS (Abbé général des). Voir AMERICI.
CÉLESTINS de France (Congrégation des) …………………. »
CHABEUIL (collège de). Voir CONSULS ………………….. »
CHAILLIOL Claude de ………………………………………. »
Chailliol Françoise Béatrix-Robert (dame de) ……………….. »
CHALCÉDOINE (Mgr de). Voir CROIX DE CHEVRIERES.
CHANTAL Celse-Bénigne de Rabutin (baron de) …………… »
CHANTAL Françoise de Rabutin. Voir FORAS …………….. »
Chantal Jeanne-Françoise Frémyot (Sainte), Mère de. Voir
THORENS, VISITATION DE BOURGES et DE PARIS ……
»
CHAPITRE DE SAINT-PIERRE DE GENÈVE (Procès avec
la ville de Seyssel). Voir SEYSSEL.
Charles-Emmanuel Ier *, duc de Savoie. Voir
MONTFERRAT ……………………………………………… »
CHARMOISY Claude Vidomne de Chaumont (seigneur de) … »
Charmoisy Louise du Chastel (dame de). Voir VILLY ……… »
Chastel Péronne-Marie (de), Religieuse de la Visitation. Voir
ISNARD ……………………………………………………… »
Chatillon Jean de …………………………………………….. »
CHAVANES Marguerite de ………………………………….. »
Chevron-Villette Amédée (de). Voir VILLETTE.
CHEVRON-VILLETTE Benoît (de), doyen de Notre-Dame de
Liesse d'Annecy ………………………………………………. »
Chevron-ViIlette Jeanne de Menthon (dame de). Voir TANTE »
CHEVRON-VILLETTE-LA-COUZ Jeanne-Antoinette (de),
Religieuse de l'abbaye de Bons ………………………………. »
CHRISTINE DE FRANCE, princesse de Piémont. Voir
MARIAGE …………………………………………………… »
CLARISSES de Grenoble ……………………………………. »
CLARISSES du diocèse de Genève ………………………….. »
CLERC (Clerico) Nicolas (bénéfices de) …………………….. »
COLIN Anne-Claude, Religieuse de la Visitation ……………. »
COLLATÉRAL (M. le). Voir QUOEX.
COLLISIEUX (Collesieu) Marie-Hippolyte, Religieuse de la
Visitation ……………………………………………………... »
COLOMBIER Françoise de Garcin du (Françoise-Angélique,
Religieuse de la Visitation). Voir VISITATION DE
GRENOBLE ………………………………………………….. »
CONCOURS …………………………………………………. »
CONGRÉGATION DES CARDINAUX interprètes du
Concile de Trente …………………………………………….. »
268, 268 [451]
255, 256
258
129
128, 128
205, 332, 333
333
7, 27, 32, 46, 52, 54, 54,
55, 62, 70, 70, 98, 109,
115, 123, 124, 126, 127,
148, 156, 162, 191, 192,
192, 201, 216, 218, 224,
233, 235, 257, 289, 290,
290, 295, 318, 320, 332,
332, 333, 339, 345, 350,
359, 359, 364, 371, 373,
375, 386, 395, 406, 409,
414, 418
11, 42, 109, 123, 138,
185, 276, 402, 407, 422,
434, 439
250, 312
311, 382
244, 244, 262, 266, 323,
374
167
233
158
230, 230
48
309
90
90, 93 [452]
71
173
203
162, 163
63
134
308/346

31.9 Page 309

▲back to top
CONSEIL DE GENEVOIS (audiencier au). Voir SAGET.
CONSEIL DE GENEVOIS (Président du). Voir VALBONNE »
Conseil de la Sainte-Maison de Thonon ……………………. »
Conseil de Ville de Fribourg. Voir AVOYERS.
Consuls de Chabeuil ………………………………………… »
Cornillon Gasparde de Sales (dame de) ……………………… »
COSPÉAU Philippe (de), Evêque d'Aire …………………….. »
COSTE François ……………………………………………… »
COSTE Jean-Baptiste de Simiane (seigneur de la) …………… »
COTTIN Denis ……………………………………………….. »
Cottin Isabeau Daspres, dame (Françoise-Elisabeth,
Religieuse de la Visitation) …………………………………… »
COULON Jean ……………………………………………….. »
CRAMOISY Guillaume, Barnabite ………………………….. »
CREIL Adrienne Gamin (dame de) ………………………….. »
CREIL (maisons appartenant à la famille de) ………………… »
CRESPIN Claude (Mlle) ………………………………………. »
Crespin Jean-Georges * ……………………………………… »
CROIX DE CHEVRIÈRES Alphonse (de la), Evêque de
Chalcédoine …………………………………………………... »
CROIX DE CHEVRIÈRES Jean (de la), Evêque de Grenoble.. »
58
253
258, 258
16
387
214
341
214
214, 214
110
113
372
372
44
56, 56, 430
203
343
DAGAND Guillaume ………………………………………………….. »
329
DAGAND Martin ……………………………………………………… »
329
Destinataires inconnus. Voir ECCLESIASTIQUE, RELIGIEUX ……
74, 83, 111, 292,
»
403
Destinataires inconnues. Voir RELIGIEUSE, TANTE ………………
38, 41, 59, 232,
» 366, 397 [453]
DEVILLERS Etiennette (Marie-Tiennette, Religieuse de la Visitation).. »
290
DOMINICAINS d'Annecy (Affaire des jardins). Voir BARNABITES et
VISITATION D'ANNECY ……………………………………………. »
98, 99
DOMINICAINS d'Annecy (Leurs différends avec la Visitation). Voir
VISITATION D'ANNECY ……………………………………………. »
6, 86, 275
DOYEN (M. le) de Notre-Dame de Liesse d'Annecy. Voir CHEVRON-
VILLETTE.
168, 200, 269,
DRAILLANT (curé et paroisse de) ……………………………………. »
270
Dunant Etienne *, curé de Gex ………………………………………… »
1, 426
Ecclésiastique (un). Voir AOSTE …………………………………….. »
Echelles Honoré de Belli (seigneur des) ………………………………. »
322
279, 279
Faure Justine Dalphas (dame du) ……………………………………… »
Favre Antoine …………………………………………………………. »
FAVRE Antoine-François ……………………………………………... »
Favre Marie-Jacqueline *, Religieuse de la Visitation …………………
»
Favre Michel …………………………………………………………... »
Favre René. Voir VALBONNE.
FAVROT (Favreau) Marguerite (Françoise-Marguerite, Religieuse de
la Visitation) …………………………………………………………… »
260, 260, 285
21, 68, 215, 308
59
76, 124, 132,
157, 173, 204,
215, 217, 254,
302, 313, 421
41, 300
30
309/346

31.10 Page 310

▲back to top
FENOUILLET (famille) ……………………………………………….. »
Fenouillet Pierre, Evêque de Montpellier ………………………………
»
FILLES DE LA CROIX (Congrégation des). Voir VILLENEUVE.
FLÉCHÈRE Jacqueline de la ………………………………………….. »
Fléchère Madeleine de la Forest (dame de la) …………………………..
»
FLOCARD Claudine Viallon de la Pesse (dame) ……………………… »
FONTANY (famille de Pignier de) ……………………………………. »
FONTANY Françoise Piossasco d'Airasca (dame de) …………………. »
FONTANY Jeanne-Claudine dé Pignier de (Jeanne-Marie, Religieuse
de la Visitation) ……………………………….……………………….. »
Foras Guillaume de Bernard (de). Voir CHANTAL Françoise ……….
»
Forest Jeanne-Bonaventure (de la), Religieuse de l'abbaye de Bons ….. »
FRIBOURG. Voir AVOYERS.
Fyot de Barain François ………………………………………………. »
GABRIEL (maître). Voir BEMMELIUS.
GARIN Jacquelin ………………………………………………………. »
GAUDIER Antoine, Jésuite ……………………………………………. »
GAUTHIER (Gautier) famille …………………………………………. »
GÉLAS DE LEBERON Pierre-André, Evêque de Valence et de Die …. »
Genève Marguerite (de), Abbesse de Baume-les-Dames ……………… »
GENNARI Jean-Baptiste (de), Supérieur des Barnabites d'Annecy …… »
Gérard de Réautier Jeanne-Hélène (de), Religieuse de la Visitation … »
Gérard de Tournon, Capucin ………………………………………… »
GEX. Voir CARMES.
GEX (Voyage de saint François de Sales à) ……………………………. »
GLÉZAT Anne-Françoise (de), Religieuse de la Visitation …………… »
GONDI Henri (de), Cardinal de Retz, Evêque de Paris ……………….. »
GONDI (Mme de). Voir JOIGNY.
GOUFFIERS Elisabeth Arnault (des). Voir VISITATION DE PARIS .. »
Grandmaison Hélène de Longecombe de Peyzieu (dame de) ………… »
GRANIEU (enfants de Mme de) ………………………………………… »
GRANIEU François de Gratet (seigneur de) …………………………… »
Granieu Laurence de Ferrus (dame de) ………………………………..
»
GRENOBLE. Voir SAINT-ANDRÉ, VISITATION DE GRENOBLE.
GRENOBLE (Saint François de Sales à). Voir SAINT-ANDRÉ,
VISITATION DE GRENOBLE ……………………………………….. »
Guérin Juste *, Barnabite ………………………………………………
»
GUISE (hôtel de) ………………………………………………………. »
GUISE Louis de Lorraine, Cardinal de ………………………………… »
HAUDRIETTES (Audriettes) Congrégation des ……………………… »
Herse Charlotte de Ligny (dame Vialart de) ………………………….. »
107
65, 105, 236,
284
34
9, 63, 88, 224,
228, 243, 316,
319
300
291
291
291
99, 225, 234,
303, 333 [454]
242
282, 282
107
414
66
259
53
117, 265
10, 130, 130
328, 328
1
192
370
247, 347
103
252
219
100, 227, 237,
250, 251, 261,
286, 340
65, 105, 124,
128, 189
97, 119, 140,
186, 195, 212,
241, 274, 277,
435
372
372 [255]
351
331, 331
310/346

32 Pages 311-320

▲back to top

32.1 Page 311

▲back to top
ISNARD Jacques, Jésuite ……………………………………………… »
JACQUES DE SAINT-OMER, Capucin ………………………………. »
JACQUIN Claude ……………………………………………………… »
JEAN-BAPTISTE (Don), Supérieur des Barnabites d'Annecy. Voir
GENNARI.
JÉSUITES. Voir AYRAULT, BELLARMIN, GAUDIER, ISNARD,
LESSIUS ………………………………………………………………. »
JÉSUITES d'Autun. Voir LACURNE.
JÉSUITES de Paris (Maison et Recteur du Noviciat de). Voir
GAUDIER ……………………………………………………………... »
JOIGNY Françoise-Marguerite de Silly (comtesse de) ………………… »
Joly de la Roche Claude-Agnès. Voir ROCHE (de la).
JORIS Claude-Jacqueline, Religieuse de la Visitation ………………… »
LACHAT François (de), curé de Vailly ……………………………….. »
LACHENAL Marie Roux (veuve). Voir BARFELLY et VISITATION
D'ANNECY ……………………………………………………………. »
LACURNE Huguette Desvoyo (dame de) …………………………….. »
Lacurne Jean de ………………………………………………………. »
LAGRAND (la Gran) Louis de Simiane de la Coste (prieur et seigneur
de). Voir SIMIANE DE LA COSTE …………………………………… »
LAGRAND (prieuré de) ……………………………………………….. »
LÉAVAL (M. de) ……………………………………………………… »
LE BLANC Marie-Hélène, Religieuse de la Visitation ………………… »
Le Blanc de Mions Ennemonde Chausson (dame) ……………………. »
LÉGAT et VICE-LÉGAT d'Avignon ………………………………….. »
LE MAISTRE Lucrèce de la Porte (dame) …………………………….. »
Lescheraine Catherine de Monthouz (dame de) ………………………. »
LESCHERAINE Pierre-Louis de ……………………………………… »
Lessius (Leys) Léonard, Jésuite, et ses ouvrages ……………………… »
LHUILLIER Hélène-Angélique, Religieuse de la Visitation. Voir
VILLENEUVE ………………………………………………………… »
LIEUTENANT (M. le). Voir SAULX.
Lionne Artus (de) *. Voir AOSTE …………………………………….. »
LIOTARD (filles de Mme) ……………………………………………… »
LIOTARD Huguette. Voir CHANTAL Celse-Bénigne ……………….. »
Liotard Marguerite du Solier (dame) …………………………………. »
Louis XIII ……………………………………………………………… »
LOUIS XIII et FAMILLE ROYALE ………………………………….. »
LULLIN (chapelle du marquis de). Voir THONON …………………… »
LULLIN Gaspard de Genève (marquis de) ……………………………. »
MADELEINE (Congrégation des Filles de la) ………………………… »
MAINEVILLE (Meneville)1406.
MARCOSSEY Jean de ………………………………………………… »
244
287
1
187
414
375
205
167
62
114
112, 112, 113
220
220
289
352
197, 229, 374
107
207
190, 190
191
271, 271, 272
358 [456]
432
223
205
222, 222, 255
153, 255, 383
309
13, 53
74
373
377
1406 Pierre de Roncherolles, seigneur de Maineville, né de François de Roncherolles et d'Hélène d'O, épousa le 18
janvier 1603 Marie Sublet, fille de Michel Sublet, seigneur d'Hendicourt. Elle mourut le 22 janvier 1639, et son mari
le 3 octobre 1658. (Bibl. Nat., Cabinet des Titres, Pièces originales, vol. 2539, art. Roncherolles, fol. 172.) Il s'agit
donc de l'un ou de l'autre si saint François de Sales a vraiment écrit M. de Meneville.
Ces détails nous sont parvenus trop tard pour nous permettre de les insérer dans la note (1320) de la page
414.
311/346

32.2 Page 312

▲back to top
MARIAGE du Prince de Piémont avec Christine de France. Voir
FAVRE (Antoine), Louis XIII, MAURICE DE SAVOIE, SALES
(François), VICTOR-AMEDÉE ……………………………………….. »
MARIE DE MEDICIS …………………………………………………. »
MARQUEMONT Denis-Simon (de), Archevêque de Lyon …………… »
MAUBUISSON (abbaye et abbesse de). Voir ARNAULD ……………. »
MAUBUISSON (Saint François de Sales à) ……………………………
»
MAURICE DE SAVOIE, Cardinal (Son voyage en France) …………..
»
MENTE Sylvestre de Saluces * (abbé de la) …………………………… »
Menthon Claudine de Michaille (baronne de) ………………………… »
MICHEL Marie-Marguerite, Religieuse de la Visitation ………………. »
Milletot Bénigne …………………………….…………………………. »
MILLETOT Claude de Cirey (dame) ………………………………….. »
MILLETOT Michelle, Religieuse du Puits-d'Orbe ……………………. »
MOCCAND Jean, Prieur de Sixt ………………………………………. »
MODÈNE François de Rémond (seigneur de) …………………………. »
MOJONIER Pierre, Curé des Allinges ………………………………… »
MOJONNIER Amé de …………………………………………………. »
MONET Claude-Aymon ……………………………………………….. »
MONTENEGRO Jérôme Caraffa (marquis de) ………………………... »
MONTFERRAT (Guerre du). Voir VERCEIL ………………………… »
MONTFLEURY (monastère des Dominicaines de) …………………… »
Montfort Michelle de Cerisier (dame de) ……………………………… »
MONTHOLON François de …………………………………………… »
MONTHOUZ Paule-Jéronyme (de), Religieuse de la Visitation ……… »
MORET Antoine de Bourbon (comte de) ……………………………… »
MOTTIER Robert ……………………………………………………… »
MUSY Jean, curé d'Armoy …………………………………………….. »
MUSY (Musici) Pierre1407 de ………………………………………….. »
MYANS (couvent et sanctuaire de Notre-Dame de) …………………… »
NEMOURS François-Paul (de), prince de Genevois ………………….. »
Nemours Henri de Savoie * (duc de Genevois et de) ………………….
»
NEMOURS Henri de Savoie (duc de Genevois et de) et la Visitation
d'Annecy. Voir VISITATION D'ANNECY ……………………………. »
NOTRE-DAME DE LA CAMPAGNE de Plaisance (couvent et
sanctuaire de). Voir CALCAGNI ………………………………………. »
NOUVELLES Marie-Michelle (de), Religieuse de la Visitation ………. »
ORLANDINI Françoise-Catherine, Religieuse de la Visitation ……….. »
ORLIER Diane de Rochette ? (dame d') ……………………………….. »
315, 347
383, 393
23
401
367, 399, 401,
409
138, 296, 301,
304, 308, 309,
338
434
158, 158
278
143, 149
148
145
81 [457]
307
167
226
381
236
106, 236
195
20, 72
303
296
381
224
200
377
181
405
223, 225, 405,
438
84, 180
166
29
174, 217
168
1407 On conserve aux Archives des Hospices d'Annecy, des Patentes de Henri de Nemours, « portant permission a Rme
François de Sales et a ses successeurs d'aberger les protocolles du mandement de Thiez. » Ces Patentes, qui sont
certainement de 1614, nous apprennent que Pierre de Musy était mort avant cette date et que le saint Evêque avait
remis les protocoles à son fils Claude-Gaspard. Mais celui-ci n'étant pas nommé avec le titre de « chastelain » dans la
pièce citée, il n'est pas possible de dire si c'est lui ou son père que mentionne la lettre du 18 mai 1619.
312/346

32.3 Page 313

▲back to top
PARIS. Voir CAPUCINS, HAUDRIETTES, JÉSUITES,
MADELEINE (la), SAINT-ANDRÉ-DES-ARTS, SAINT-GERMAIN-
DES-PRÉS, [458] SAINT-SÉVERIN, URSULINES, VISITATION DE
PARIS.
PARIS (Saint François de Sales à). Voir MAURICE DE SAVOIE …… »
PARIS François ………………………………………………………... »
PASSIER Paul de ………………………………………………………. »
Paul V * ………………………………………………………………... »
PAUSE Jean Plantavit (de la) …………………………………………... »
PAVILLON Marie-Anastase, Religieuse de la Visitation ……………… »
PÉNITENTES (les). Voir MADELEINE.
PERRIQUET Nicolas, Provincial des Carmes de la Province de
Narbonne ………………………………………………………………. »
PERRON Jacques Davy, Cardinal du ………………………………….. »
PEYSSARD Thomas, vicaire de Saint-Maurice d'Annecy ……………. »
PIERRE François de Macognin (seigneur de la) ………………………. »
PIERREVIVE Sylvius (de), grand-vicaire de l'Evêque de Paris ………. »
PISANÇON Anne Bally (dame de) ……………………………………. »
PORT-ROYAL (Abbesse de). Voir ARNAULD.
PRÉ LOMBARD ………………………………………………………. »
PUITS-D'ORBE (Communauté du) ……………………………………. »
Puits-d'Orbe (Mme du). Voir BOURGEOIS Rose.
65, 106, 296,
308, 334, 342,
345
328
24
89, 423
386
396
153
294
28
23
371
207
99
161
Quoex Claude de ……………………………………………………….
»
Quoex Claude-Louis-Nicolas (de), Prieur de Talloires ………………… »
QUOEX Jean-Baptiste de ……………………………………………… »
Quoex Philippe (de). Voir SAINTE-CATHERINE ……………………. »
QUOEX Rose Forestier d'Yvoire (dame de) …………………………… »
52, 189, 376,
408
163
408
5, 156, 157
190
RABUTIN François ? de ………………………………………………. »
RANNAUD (M.), vicaire des Allinges ………………………………… »
REDENTO (Don), Barnabite. Voir BARANZANO.
Religieux (un) ………………………………………………………….. »
Religieuse (une) ……………………………………………………….. »
RETZ (Cardinal de). Voir GONDI.
REVEL DE CHASSELAY Marguerite (de), Novice de la Visitation …. »
Roche Claude-Agnès Joly (de la), Religieuse de la Visitation …………
ROCHEFOUCAULD François (de la), Cardinal ……………………….
ROISSIEUX (Royssieux) ou ROISSY Antoinette de Grossaine (dame
de Mesmes de) ………………………………………………………….
Rossillon Hélène-Ferdinande de Maillard-Tournon (comtesse de) …….
ROYSSIEUX Françoise Couvay (dame de) ……………………………
162
168
278
102, 334
257 [459]
353, 353
387
364
356, 356
365
SAGET Serge …………………….……………………………………. »
SAINT-ANDRÉ Honorade de Simiane (dame Prunier de) …………….. »
SAINT-ANDRÉ de Grenoble (église de) ……………………………… »
SAINT-ANDRÉ-DES-ARTS de Paris (église de) …………………….. »
SAINTE-BEUVE Madeleine Lhuillier (dame de) ……………………... »
SAINTE-CATHERINE (chapelle de) ………………………………….. »
Sainte-Catherine (M. de). Voir QUOEX Philippe.
»
83
207
102
304
366
158, 160
22, 61, 182, 253
313/346

32.4 Page 314

▲back to top
SAINTE-MAISON DE THONON. Voir BARNABITES de Thonon,
CONSEIL DE LA SAINTE-MAISON …………………………………
SAINT-GEORGES Jeanne de Harlay (dame de) ………………………. »
SAINT-GERMAIN-DES-PRÉS de Paris (abbaye de) …………………. »
SAINT-HIPPOLYTE de Thonon (prieuré de). Voir SAINTE-MAISON »
SAINT-MAURICE d'Annecy (église et vicaire de). Voir PEYSSARD .. »
SAINT-SEVERIN de Paris (église de) …………………………………. »
SAINT-SIXT Laurent (de), Chartreux …………………………………. »
SALBINER Pierre …………………….……………………………….. »
SALES Bernard (de). Voir THORENS.
SALES FRANÇOIS * de (Saint). Voir AMIS, ARNAULD,
BELLARMIN, BELLERIVE, CAPUCINS de Thonon, CLARISSES du
diocèse de Genève, DRAILLANT, GEX, GRENOBLE, LACHAT,
LOUIS XIII, MADELEINE (la), MARCOSSEY, MARIAGE,
MAUBUISSON, NEMOURS (François-Paul), PARIS, QUOEX
(Philippe), SAINT-GERMAIN-DES-PRÉS, SÉMINAIRE, SIXT,
TALLOIRES, THORENS (Marie-Aimée), VILLENEUVE,
VISITATION …………………….…………………………………….. »
Sales Jean-François (de). Voir BOISY ………………………………… »
SAULX Claude de …………………….……………………………….. »
Sautereau Marie Gibert (dame de) …………………….………………. »
SCAGLIA Auguste-Manfred. Voir CALUSO.
Scaglia Ginevra …………………….………………………………….. »
SCAGLIA Philibert-Gérard, comte de Verrua …………………………. »
Scotto Laurent …………………….…………………………………… »
SÉMINAIRE pour le diocèse de Genève (Projet de fondation d'un) ….. »
SEYSSEL (Procès entre le Chapitre de Saint-Pierre de Genève et la ville
de) …………………….…………………….………………………….. »
SEYSSEL (syndics de) …………………….…………………………... »
SIMIANE DE LA COSTE Jean-Baptiste (de). Voir COSTE.
SIMIANE DE LA COSTE Louis (de). Voir LAGRAND.
Sixt (Prieur et Religieux de). Voir MOCCAND ………………………. »
SOISSONS Anne de Montafia (comtesse de) ………………………….. »
Soudan de la Palme François1408 ……………………………………… »
SYNODE de 1617 …………………….……………………………….. »
TALLOIRES (prieuré de) ……………………….……………………... »
Tante (une) ……………………….……………………….…………… »
TAVERNIER Nicole ……………………….………………………….. »
TERTRE Marie-Aimée de Morville (dame du) ………………………… »
THIBAUT Marie-Françoise, Religieuse de la Visitation ………………. »
THONON. Voir BARNABITES, CAPUCINS, LULLIN, SAINTE-
MAISON, SAINT-HIPPOLYTE.
THORENS Bernard de Sales (baron de). Voir SALES ………………… »
THORENS (fils posthume du baron de) ……………………………….. »
391
345
61
28
106
169
288
6, 7, 106, 178,
201, 215, 236,
250, 251, 286,
300, 302, 338,
347, 391
51, 401
51 [460]
25, 25
177, 177, 295,
305, 336, 360
178, 296, 360
71
142
283
283
81, 81, 82
406
381
2
8, 250
230
325
386, 397
346
13, 16, 17, 19
70
1408 La vingt-quatrième feuille était tirée lorsque nous sont arrivés quelques renseignements sur ce correspondant du
Saint. Dans les anciens registres des tabellions royaux « en la viconté d'Auge » (Etude de Me Bréard, notaire à
Honfleur), se trouve, au 27 mars 1619, l'original du contrat de mariage de « François Soudan, dit de la Palme, fils
aisné de Jacques Soudan, notaire public et curial d'Annessy, et de honorable femme Claude Caillat ; icelluy natif de
La Luaz, parroisse de Thorens, et bourgeois de La Roche en Genevois, de present demeurant en la ville de Honnefleu,
» avec « Marie, fille de feu Noel Le Mal, vivant capitaine de navire, » et « de Charlotte Guychard. »
314/346

32.5 Page 315

▲back to top
Thorens Marie-Aimée de Rabutin-Chantal (baronne de) ………………
»
TOURNELLE (Chambre de la) ……………………….……………….. »
TRÉMOILLE (Trimouille) Charlotte-Brabantine de Nassau (dame de
la) ……………………….……………………….……………………... »
35, 70, 73, 76,
110, 147
149
367 [461]
Ulme Jean-François d' …………………………………………………. »
URFÉ Marie de Neufville (marquise d') ……………………………….. »
URSULINES de Paris ………………………………………………….. »
248, 248
97
141
VAILLY (Vualier) curé de. Voir LACHAT.
Valbonne André de Nicolle de Crescherel (dame de la) ………………. »
3, 135
Valbonne René Favre (seigneur de la) ………………………………… » 57, 57, 58, 125
VALENCE Evêque (de). Voir GELAS DE LEBERON.
VARS Hélène d'Arerex, dame de (Marie-Hélène, Religieuse de la
Visitation) ……………………………………………………………… »
355
VERCEIL (prise et reddition de) ………………………………………. »
42, 236
VERNEUIL Henriette de Balzac (marquise de) ………………………... »
372
VERRUA Philibert-Gérard Scaglia (comte de). Voir SCAGLIA.
Veyssilieu Marguerite de la Croix de Chevrières (dame Rabot d'Aurillac
38, 59, 232, 343,
de) ……………………………………………………………………… »
365
Victor-Amédée de Savoie, prince de Piémont. Voir MARIAGE ……..
12, 45, 108, 139,
169, 182, 200,
267, 315, 319,
336, 391, 392,
»
405, 410
Vignod Bernarde (de), Religieuse de l'abbaye de Sainte-Catherine …… »
183
VIGNOD Jean de ………………………………………………………. »
292
VILLARS Marie-Catherine (de), Religieuse de la Visitation …………. »
125
Villeneuve Marie-Lhuillier (dame de), fondatrice des Filles de la Croix » 357, 357, 358
Villesavin Isabelle Blondeau (dame de) ………………………………. » 384, 384, 415
VILLESAVIN Jean Phélipeaux (seigneur de) …………………………. »
417
Villette Amédée de Chevron (baron de) ………………………………. »
18
VILLY (seigneurie de) …………………………………………………. »
382
VISITATION (Coutumes et Règles de la) ……………………………..
187, 188, 203,
302, 346, 395,
»
406, 418
Projets de fondations …………………………………………. » 137, 216, 306
VISITATION D'ANNECY (Achat de moulins du duc de Nemours).
Voir NEMOURS ………………………………………………………. »
180
Affaire des jardins et autres. Voir BARNABITES,
32, 98, 120, 275
DOMINICAINS, PRÉ LOMBARD ………………………….. »
[462]
VISITATION D'ANNECY (Eglise et monastère de la). Voir
BARFELLY (maisons), LACHENAL, NEMOURS ………………….. »
6, 84, 86
RELIGIEUSES * de la. Voir ALBAMEY, AVISE,
BARFELLY, BLONAY, BRÉCHARD, CHANTAL,
CHASTEL, DEVILLERS, FAVRE, FAVROT, FONTANY,
32, 201, 202,
JORIS, LE BLANC, MICHEL, MONTHOUZ, NOUVELLES,
205, 220, 438,
ROCHE (de la), VARS ………………………………………. »
439
VISITATION DE BOURGES (Fondation, fondatrices et Religieuses de
193, 295, 317,
la). Voir LE BLANC, THIBAUT ……………………………………… »
352
315/346

32.6 Page 316

▲back to top
VISITATION DE GRENOBLE (Fondation, fondatrices et Religieuses
de la). Voir AOSTE, BRESSAND, COLLISIEUX, COLOMBIER,
GÉRARD DE RÉAUTIER, GLÉZAT, ULME ………………………… »
VISITATION DE LYON (Religieuses de la). Voir COLIN,
ORLANDINI, REVEL DE CHASSELAY, VILLARS ……………….. »
VISITATION DE PARIS (Fondation, fondatrices et Religieuses de la).
Voir CREIL, GOUFFIERS, HAUDRIETTES, MADELEINE (la),
PAVILLON …………………………………………………………….
»
VISITATION DE TURIN (Fondation de la). Voir FAVRE,
MONTHOUZ, SCAGLIA (Ginevra) ………………………………….. »
VŒUX de Religion (solennité des) ……………………………………. »
VUAZ ou VUAD Jacques-François de Sales (seigneur du) …………… »
WEBER Balthazard ……………………………………………………. »
_____
148, 152, 192
172, 174
194, 333, 341,
359, 364, 370,
371, 372, 375,
407
204, 363
133
19
288 [463]
316/346

32.7 Page 317

▲back to top
Table de correspondence de cette nouvelle édition avec
les précédentes et indication de la provenance des
manuscrits
__________
NOUVELLE ÉDITION
MCCCVIII
MCCCIX
MCCCX
MCCCXI
p. 5
pp. 6, 7
suite
MCCCXII
MCCCXIII
MCCCXIV
MCCCXV
MCCCXVI
MCCCXVII
MCCCXVIII
MCCCXIX
MCCCXX
MCCCXXI
MCCCXXII
PROVENANCE DES
MSS.
METZ (Annecy). Ctesse
d’Asnières de Sales
………………………
………………………
ANNECY. Visit.
(Hist. de la Fondation)
………………………
HARROW (Londres).
Visitation
TURIN. Archiv. de
l’Etat
………………………
ANNECY. Chne J.-M.
Chevalier
………………………
………………………
………………………
………………………
ANNECY. Visitation
(Photographie)
………………………
ANNECY. Visitation
PREMIÈRE
PUBLICATION1409
Blaise, Nouvelles
inédites (1833), p. 41
Epistres spirituelles,
1626, l. II ; Hérissant,
III, p. 302. (Voir note
(50), p. 3)
Œuvres, 1641, t. II,
epist. XLVI
………………………
Datta, II, p. 204
Ibid., p. 203
………………………
Epistres spirituelles,
1626, l. V
Ibid.
Ibid.
………………………
………………………
Epistres spirituelles,
1626, l. V
Datta, II, p. 159
Hérissant, V, p. 39
ÉDITIONS
MODERNES
Vivès, VI, p. 125
Migne, VI, col.
877
Viv. XI, p. 22
Mig. V, col. 1046
Viv. IX, p. 488
Mig. V, col. 1048
Inédite
Viv. VI, p. 402
Mig. VI, col. 748
Viv. VI, p. 401
Mig. VI, col. 748
Mig. V, col. 1050
Viv. XI, p. 26
Mig. V, col. 1052
Viv. XI, p. 24
Mig. V, col. 1051
Viv. XI, p. 28
Mig. V, col. 1053
Mig. VI, col.
1013
Inédite
Viv. XII, p. 170
Mig. V, col. 1644
[465]
Viv. VII, p. 309
Mig. VI, col. 726
Viv. XI, p. 87
1409 Les indications qui figurent dans cette colonne sont données sous toutes réserves, et pour des raisons déjà exposées
dans l'Avant-Propos du tome XI.
La numérotation des pièces étant souvent très inexacte dans les éditions du XVIIe siècle, quand nous
remontons à celles-ci, au lieu de citer le numéro d'ordre des Lettres, nous indiquons seulement la série, soit le Livre
dans lequel elles sont insérées.
317/346

32.8 Page 318

▲back to top
MCCCXXIII
MCCCXXIV
MCCCXXV
MCCCXXVI
MCCCXXVII (fragt)
MCCCXXVIII
MCCCXXIX texte
variante
MCCCXXX (fragment)
MCCCXXXI
MCCCXXXII
MCCCXXXIII
MCCCXXXIV
MCCCXXXV
MCCCXXXVI
MCCCXXXVII
MCCCXXXVIII (frag)
MCCCXXXIX
MCCCXL
MCCCXLI
MCCCXLII
MCCCXLIII
MCCCXLIV
MCCCXLV
MCCCXLVI
BEUFORT. Sœurs
Hospitalières de St-
Joseph
SAN VITO AL
TAGLIAMENTO
(Italie). Visitation
………………………
………………………
………………………
MARSEILLE.
Visitation
(1er
Monastère)
TURIN. Visit. (Copie)
………………………
………………………
VILLE-EN-SALAZ
(Hte-Savoie).
Mlle
Gavard
LE MANS. Visitation
FIXIN (Côte-d’Or).
Abbé
Gustave
Chevallier
ANNECY. Visitation
Idem
NANCY. Visitation
ANNECY.
Chne
Mercier
LE MANS. Visitation
TURIN.
Cottolengo
Casa
ANNECY. Visitation
(Copie)
………………………
REIMS. Visitation
BELLEY. Chne Robert
ANNECY. Visitation
MONTPELLIER.
Visit.
TURIN. Visit. (Copie)
………………………
………………………
Epistres spirituelles,
1626, l. IV
Ibid., l. II
Ibid., l. III
………………………
………………………
Epistres spirituelles,
1626, l. I
………………………
………………………
………………………
Annales Salésiennes,
20 septembre 1889
………………………
………………………
………………………
Mémoires de l’Acad.
Salés., t. VI (1883)
………………………
………………………
………………………
Epistres spirituelles,
1626, l. IV
………………………
………………………
Datta, II, p. 205
………………………
………………………
Epistres spirituelles,
1626, l. IV
Mig. V, col. 1416
Inédite
Viv. XI, p. 30
Mig. V, col. 1055
Viv. XI, p. 462
Mig. V, col. 1493
Viv. XII, p. 91
Mig. V, col. 1579
Inédit
Inédite
Viv. VII, p. 334
Mig. V, col. 1055
Inédite
Inédit
Mig. VI, col.
1057
Mig. IX, col. 94
Ibid., col. 112
Inédite
Mig. VI, col.
1009
Inédit
Mig. VI, col. 985
(V. note (236), p.
59)
Viv. XI, p. 31
Mig. V, col. 1057
Viv. VII, p. 335
Mig. V, col. 1057
Inédite
Viv. VII, p. 337
Mig. VI, col. 749
Inédite
Inédite
Viv. XI, p. 33
Mig. V, col. 1058
318/346

32.9 Page 319

▲back to top
MCCCXLVII
MCCCXLVIII (fragt)
MCCCXLIX
MCCCL
MCCCLI (fragment)
MCCCLII (fragment)
MCCCLIII
MCCCLIV
1er
alinéa
suite
MCCCLV
MCCCLVI
MCCCLVII
MCCCLVIII
MCCCLIX
MCCCLX
MCCCLXI
MCCCLXII
MCCCLXIII
MCCCLXIV
TURIN. Archives
Barolo
FRIBOURG.
Visitation
MILAN. Archives
Trivulzio
………………………
ANNECY. Visitation
(Vie manuscrite de
Marie-Aimée
de
Rabutin-Chantal)
………………………
ANNECY. Visitation
(Vie manuscrite de
Marie-Aimée
de
Rabutin-Chantal)
ROME. Archiv. du
Postulateur des Causes
des VVbles et BBx S. J.
(Copie)
Idem
Ier Procès de Canonis.
………………………
TURIN. Archiv. de
l’Etat (Copie)
………………………
………………………
TURIN. Archiv. de
l’Etat (Copie)
………………………
………………………
………………………
………………………
Blaise, Nouvelles
inédites (1833), p. 23
………………………
………………………
Epistres spirituelles,
1626, l. V
Vie de la Sœur Marie
Aymée de Chantal
(1659) 1410, ch. XIII
Œuvres, 1641, t. II, ep.
XLVIII. (Voir note
(281), p. 75)
Vie de la Sœur M.-A.
de Chantal (1659), ch.
XIII
………………………
Actes Béatif. Vén.
Card.
Bellarmin,
Summarium
additionale, p. 53
………………………
………………………
………………………
Epistres spirituelles,
1626 (texte français),
1629 (texte latin), l. I
Ibid.
Datta, II, p. 206
………………………
Hérissant, III, p. 353
Œuvres, 1641, t. II,
epist. XXXIV
Ibid., epist. XXXII
Viv. VII, p. 338
Mig. VI, col. 867
Inédit
Inédite
Viv. VII, p. 339
Mig. V, col. 1060
[466]
Mig. VI, col.
1084
Viv. VII, p. 345
Mig. V, col. 1073
Viv. XI, p. 38
Mig. V, col. 1063
Inédit
Inédite
Mig. VI, col.
1078
Ibid., col. 1058
Viv. VI, p. 403
Mig. V, col. 1065
Viv. VI, p. 405
Mig. V, col. 1068
Viv. VII, p. 341
Mig. VI, col. 749
Mig. VI, col.
1083
Viv. VII, p. 342
Mig. V, col. 1071
Viv. XI, p. 43
Mig. V, col. 1073
Viv. XI, p. 473
Mig. V, col. 1054
1410 Les Vies de VIl Religieuses de l'Ordre de la Visitation Sainte Marie... par la Mere Françoise Madelene de Chaugy,
Superieure du premier Monastere de cet Ordre. A Annessy, par Jacques Clerc, MDCLIX.
319/346

32.10 Page 320

▲back to top
MCCCLXV
MCCCLXVI
MCCCLXVII
MCCCLXVIII
MCCCLXIX
MCCCLXX (fragment)
MCCCLXXI
MCCCLXXII
MCCCLXXIII
MCCCLXXIV
MCCCLXXV
MCCCLXXVI
MCCCLXXVII
MCCCLXXVIII
MCCCLXXIX
MCCCLXXX
MCCCLXXXI
MCCCLXXXII
MCCCLXXXIII (fragt)
MCCCLXXXIV
MCCCLXX
XV
texte
vartes
ANNECY. Visitation
(Photographie)
MONTPELLIER.
Visitation (Copie)
TURIN. Archiv. de
l’Etat
Idem
………………………
ANNECY. Visit.
(Hist. de la Fondation)
NANCY. Visitation
TURIN. Archiv. de
l’Etat (Copie)
ANNECY. Visitation
TURIN. Archiv. de
l’Etat
………………………
………………………
………………………
ANNECY. Visitation
(Ancien Ms. de
l’Année Sainte)
………………………
………………………
………………………
………………………
ANNECY. Visit.
(Hist. de la Fondation)
TURIN. Archiv. de
l’Etat
TURIN. Bibl. Civica
MARSEILLE.
Visitation
(1er
Monastère)
………………………
………………………
Datta, II, p. 209
Ibid., p. 210
Hérissant, III, p. 437.
(Voir les notes (385),
(387), pp. 109, 110)
………………………
Œuvres, 1652, col.
2291
Datta, II, p. 353
Ibid., p. 212
Ibid., p. 211
Hérissant, III, p. 392
Ibid., p. 391
Epistres spirituelles,
1626, l. V
………………………
Hérissant, III, p. 396
Epistres spirituelles,
1626, l. IV
Ibid., l. VI
Ibid., l. II. (Voir notes
(473), (477), pp. 135,
136)
Lettres de Ste J.-F. de
Chantal (1877), 1411,
vol. I, p. 221, note
(780).
Datta, II, p. 219
………………………
Epistres spirituelles,
1626, l. I
Inédite
Inédite
Viv. IX, p. 491
Mig. VI, col. 751
Viv. IX, p. 492
Mig. VI, col. 752
Viv. VII, p. 355
Mig. V, col. 1108
[467]
Inédit
Viv. IX, p. 493
Mig. V, col. 1074
Viv. XII, p. 184
Mig. VI, col. 837
Viv. VI, p. 419
Mig. VI, col. 753
Viv. VI, p. 418
Mig. VI, col. 752
Viv. XI, p. 46
Mig. V, col. 1089
Viv. XI, p. 45
Mig. V, col. 1088
Viv. XI, p. 46
Mig. V, col. 1089
Mig. VI, col.
1014
Viv. XI, p. 48
Mig. V, col. 1090
Viv. XI, p. 172
Mig. V, col. 1210
Viv. XI, p. 452
Mig. V, col. 1487
Viv. XI, p. 21
Mig. V, col. 1046
Viv. VII, p. 346
Mig. VI, col. 757
Inédit
Viv. VII, p. 345
Mig. V, col. 1091
1411 Sainte Jeanne-Françoise Frémiot de Chantal, sa Vie et ses Œuvres ; Lettres, vol. I, Paris, Plon, 1877.
320/346

33 Pages 321-330

▲back to top

33.1 Page 321

▲back to top
MCCCLXXXVI
MCCCLXXXVII
MCCCLXXXVIII
MCCCLXXXIX
MCCCXC
MCCCXCI
MCCCXCII
MCCCXCIII
MCCCXCIV (fragt)
MCCCXCV
MCCCXCVI
MCCCXCVII
MCCCXCVIII
MCCCXCIX
MCD
MCDI
MCDII
MCDIII
MCDIV
MCDV
MCDVI
MCDVII
………………………
LYON-FOURVIÈRE.
Visitation
………………………
BESANÇON. Grand
Séminaire
………………………
………………………
………………………
………………………
………………………
CHATEAU
DE
MENTHON
(Annecy). Cte de
Menthon
………………………
Ibid., l. VI
Etudes religieuses S.
J., mars 1866
………………………
Hérissant, VI, p. 3
Epistres spirituelles,
1626, l. IV
Œuvres, 1652, col.
2292
Epistres spirituelles,
1626, l. I
Epistres spirituelles,
1626, l. V
Ibid., 1629, l. VI. (Voir
note (540), p. 157)
………………………
Instructions
et
pratique de piété, 1688
1412
Viv. VII, p. 319
Mig. V, col. 1034
Mig. VI, col.
1092
Viv. VII, p. 379
Mig. V, col. 1130
Viv. XI, p. 51
Mig. V, col. 1092
Viv. XI, p. 52
Mig. V, col. 1092
Viv. IX, p. 501
Mig. V, col. 1093
[468]
Viv. VII, p. 347
Mig. V, col. 1098
Viv. XI, p. 53
Mig. V, col. 1095
Inédite
Viv. VII, p. 348
Mig. V, col. 1096
TURIN. Archiv. de
l’Etat (Copie)
………………………
PLAISANCE. Cte
Morandi
GENÈVE. M. Thury
(1910)
TURIN. Archiv. de
l’Etat
………………………
………………………
MILAN. Bibliothèque
Ambrosienne (Copie)
ANNECY. Visitation
(Copie)
TURIN. Archiv. de
l’Etat
………………………
Datta, II, p. 349
Epistres spirituelles,
1626, l. V
Pératé, 1886 1413, p. 80
………………………
Datta, II, p. 220
Epistres spirituelles,
1626, l. III
Ibid., l. IV
………………………
………………………
Datta, II, p. 221
Viv. XI, p. 412
Mig. VI, col. 834
Viv. XII, p. 180
Mig. V, col. 1650
Inédite
Viv. VI, p. 426
Mig. VI, col. 758
Viv. XI, p. 55
Mig. V, col. 1099
Viv. VII, p. 350
Mig. V, col. 1101
Inédite
Mig. VI, col.
1014 (traduction)
Viv. VI, p. 427
Mig. VI, col. 759
Viv. XI, p. 477
1412 Voir tome XVI, note (1442), p. 454.
1413 André Pératé, La Mission de François de Sales dans le Chablais, documents inédits tirés des Archives du Vatican
(extrat des Mélanges d’Archéol. Et d’Hist. Publiés par l’Ecole franç. De Rome, tome VI). Rome, Cuggiani, 1886.
321/346

33.2 Page 322

▲back to top
MCDVIII
MCDIX
MCDX
MCDXI
MCDXII (fragment)
MCDXIII (fragment)
MCDXIV
MCDXV
MCDXVI
MCDXVII
MCDXVIII
MCDXIX
MCDXX
MCDXXI
MCDXXII
1er
alinéa
suite
MCDXXIII
MCDXXIV
MCDXXV
MCDXXVI
MCDXXVII
TURIN.
l’Etat
ASTI
Evêché
Archiv. de
(Piémont).
CHAMBÉRY. Archiv.
du Sénat de Savoie
CHAMBÉRY. Mme
Denarié
………………………
ANNECY. Visit.
(Hist. mste de la
Fondation
de
Grenoble)
ANNECY. Visit. (Fac-
simile
de
l’Autographe)
………………………
………………………
TOURS. Religieuses
du Saint-Esprit
TURIN. Archiv. de
l’Etat
MARSEILLE.
Visitation, 1er Mtère
(Copie)
………………………
ANNECY. Visit.
(Hist. de la Fondation)
Idem
AMIENS. Visitation
………………………
………………………
ROME. Bénédictiones
de Santa Cecilia
CHAMBÉRY.
Visitation
………………………
Œuvres, 1641, t. II,
epist. XXVIII
Datta, II, p. 222
………………………
Mugnier, S. Fr. de S.
Docteur en droit, etc.
(Chambéry, 1885)
………………………
Année Sainte de la
Visit. (1689), t. I, p.
302
………………………
………………………
Epistres spirituelles,
1626, l. VI
Epistres spirituelles,
1626, l. III
………………………
Datta, II, p. 227
Hérissant, III, p. 454
Epistres spirituelles,
1626, l. II
………………………
………………………
………………………
Hérissant, III, p. 438.
(Voir note (385), p.
109)
Charles-Auguste, Vie
de la Mere de Blonay
(1655), chap. VII
………………………
………………………
Hérissant, III, p. 440
Mig. V, col. 1507
Viv. VI, p. 428
Mig. VI, col. 760
Inédite
Mig. VI, col.
1085
Viv. XI, p. 58
Mig. V, col. 1105
Inédit
Mig. IX, col.
1407
Viv. VII, p. 353
Mig. V, col. 1106
[469]
Viv. XI, p. 64
Mig. V, col. 1105
Inédite
Viv. VI, p. 430
Mig. VI, col. 762
Viv. VII, p. 360
Mig. V, col. 1114
Viv. XI, p. 347
Mig. V, col. 1364
Inédit
Mig. IX, col. 94
Inédite
Viv. VII, p. 356
Mig. V, col. 1108
Mig. VI, col.
1081
Inédite
Inédite
Viv. XI, p. 65
Mig. V, col. 1109
322/346

33.3 Page 323

▲back to top
MCDXXVIII
MCDXXIX
MCDXXX
MCDXXXI
MCDXXXII
MCDXXXIII
MCDXXXIV
MCDXXXV
MCDXXXVI
MCDXXXVII
MCDXXXVIII
MCDXXXIX (fragt)
MCDXL
MCDXLI
pp.
237-
239
post-
script
MCDXLII (fragment)
MCDXLIII
MCDXLIV
MCDXLV (fragment)
MCDXLVI
MCDXLVII
PARIS. Biblioth. Nat.,
Fonds français, 3809,
fol. 80
TURIN. Archiv. de
l’Etat (Copie)
………………………
MARIGNIER (Hte-
Savoie) Abbé Pettex
………………………
TURIN. Archiv. de
l’Etat (Copie)
FLORENCE. Mgr San
Clemente, Archêque
tit. de Patras (Grèce)
………………………
………………………
………………………
………………………
………………………
TOULOUSE.
Visitation (Copie)
CHAMBÉRY.
Visitation
Etudes religieuses S.
J., mars 1900
………………………
Hérissant, III, p. 445
………………………
Hérissant, III, p. 442
………………………
………………………
Epistres spirituelles,
1626, l. V
Œuvres, 1652, epist.
LXXII, col. 1712
Hérissant, Opuscules,
IV, p. 15
Hérissant, III, p. 447
Epistres spirituelles,
1626, l. III (Voir note
(814), p. 235)
Mgr Douais, La
Visitation de Toulouse
(Paris, 1905), ch. XIV,
p. 107
Epistres spirituelles,
1626, l. II (Voir note
(824), p. 239)
Mig. VI, col.
1059
Viv. VII, p. 358
Mig. V, col. 1111
Mig. V, col. 1111
Viv. VII, p. 357
Mig. V, col. 1110,
et VI, col. 1054
Mig. VI, col.
1016
Inédite
Viv. XI, p. 67
Mig. V, col. 1112
Viv. XI, p. 68
Mig. V, col. 1113
Viv. XI, p. 411
Mig. V, col. 1443
Viv. VII, p. 359
Mig. V, col. 1112
[470]
Viv. X, p. 500
Mig. V, col. 951
Viv. XI, p. 70
Mig. V, col. 1119
Idem
………………………
Inédit
………………………
TURIN. Visit. (Copie)
TURIN. Archiv. de
l’Etat (Copie)
ANNECY. Visitation
(Vie manuscrite de la
Mère de Chastel)
………………………
AUXONNE (Côte-
d’Or). Mme Gaulard
Arpaud, Vie de Mgr D.
Juste Guérin (1837),
liv. I, chap. XII
………………………
………………………
Vie de la Mere P.-M.
de Chastel (1659), ch.
XX
Hérissant, III, p. 470
………………………
Mig. VI, col.
1016
Inédite
Mig. VI, col.
1054
Viv. XI, p. 66
Mig. V, col. 1110
Viv. IX, p. 505
Mig. V, col. 1122
Inédite
323/346

33.4 Page 324

▲back to top
MCDXLVIII
MCDXLIX
MCDL
MCDLI
MCDLII
MCDLIII
MCDLIV
MCDLV
MCDLVI
MCDLVII
MCDLVIII
MCDLIX
MCDLX
MCDLXI
MCDLXII
MCDLXIII
MCDLXIV (fragment)
MCDLXV (fragment)
MCDLXVI
………………………
CHAMBÉRY.
Visitation
LYON-FOURVIÈRE.
Visit.
ALEXANDRIE
(Piémont). Evêché
PARIS. Bibl. Nat.,
Fonds
français,
17362, p. 157
CAEN. Visitation
CHABEUIL (Drôme).
Archives cummunales
GRENOBLE. M.
Gauduel
CHATEAU
D’IVOIRE
(Hte
Savoie).
Baron
d’Yvoire
ROME. Archives des
PP. Barnabites
………………………
TURIN. Archiv. de
l’Etat
TURIN. Visit. (Copie)
FRIBOURG
et
NANCY. Visitation
(Fac-simile)
CAROUGE (Genève).
Mlle Adélaïde Vuÿ
TURIN. Archiv. de
l’Etat
………………………
………………………
………………………
Œuvres, 1641, t. II,
epist. XLVII
Datta, II, p. 228
………………………
………………………
Blaise, Nouvelles
inédites (1833), p. 55 ;
Béthune (1833), XVI,
p. VI
………………………
Lacroix, Le Collège de
Chabeuil, 1881
Hérissant, III, p. 476
Epistres spirituelles,
1626, l. II
Vie de D. Juste Guérin
(ital. 1859)1414, p. 244
[471]
Epistres spirituelles,
1626, l. VI. (Voir note
(900), p. 266)
Datta, II, p. 230
………………………
Hérissant, III, p. 484
J. Vuÿ, La Philothée
de St Fr. de Sales, II,
(1879), p. 284
Datta, II, p. 231
Arpaud, Vie de Mgr D.
Juste Guérin (1837),
liv. I, chap. XII, p. 91
Vie de la Mère Marie-
Marguerite Michel
(1693)1415, p. 147
Viv. VII, p. 366
Mig. V, col. 1121,
et VI, col. 1120
Viv. XI, p. 72
Mig. VI, col. 763
Mig. VI, col.
1017
Inédite
Viv. VII, p. 369
Mig. VI, col. 886
Inédite
Viv. XI, p. 74
Mig. V, col. 1124
Viv. XI, p. 75
Mig. V, col. 1125
Viv. XI, p. 77
Mig. V, col. 1126
Viv. VI, p. 431
Mig. VI, col. 764
Inédite
Viv. IX, p. 507
Mig. V, col. 1128
Viv. VI, p. 432
Mig. VI, col. 765
Mig. VI, col.
1017
Ibid., col. 1095
Viv. XI, p. 41
1414 Vita del Servo di Dio Monsignor Goisto Guérin, Vescovo Principe di Ginevra, della Congregazione dei Chierici
Regolari Barnabiti, descritta dal P. Maurizio Arpaud, tradotta dal francese dar P. D. Mauro Rusca della stessa
Congregazione, ed ora nuovamente riveduta ed ampliata. Milano, Ditta Boniardi-Pogliani di E. Besozzi, 1859.
1415 Les Vies de plusieurs Supérieures de l’Ordre de la Visitation Sainte Marie, revuës et corrigées par un Père de la
Compagnie de Jésus. A Anneci, chez Humbert Fonteine, MDCXCIII.
324/346

33.5 Page 325

▲back to top
MCDLXVII
MCDLXVIII
MCDLXIX
MCDLXX
MCDLXXI
MCDLXXII
MCDLXXIII
MCDLXXIV
MCDLXXV
MCDLXXVI
MCDLXXVII
MCDLXXVIII
MCDLXXIX
MCDLXXX
MCDLXXXI
MCDLXXXII (fragt)
MCDLXXXIII
MCDLXXXIV
MCDLXXXV
AMIENS. Visitation
TOULOUSE.
Visitation (Copie)
ANNECY. Visitation
(Copie)
CÔTE-SAINT-
ANDRÉ. Visitation
WESTMALLE
(Belgique). A la
Trappe
Fribourg. Visitation
TURIN. Archives de
l’Etat (Copie)
CHATEAU
DE
COHENDIER. (Hte-
Savoie). Baron de Viry
CHATEAU
DE
MONPONT (Alby).
Mlle Hélène de
Thiollaz
BAR-LE-DUC. Sœurs
Dominicaines
MILAN. Bibliothèque
Ambrosienne
CHATEAU
DE
PIASCO (Turin). Cte
Biandrate di San
Giorgio
………………………
ROME. Dames du
Sacré-Cœur de la
Trinité du Mont
NEVERS. Visitation
………………………
PARIS. Maison-Mère
des Religieux des SS.
Cœurs
SAN REMO (Italie).
Visitation
………………………
Œuvres, 1641, t. II,
epist. XLIX
Hérissant, III, p. 489
Mgr Douais, La
Visitation de Toulouse,
chap. XIV, p. 108
………………………
………………………
La Trappe (1870)
………………………
Datta, II, p. 352
………………………
………………………
………………………
Datta, II, p. 232
………………………
Martène, Voyage
littéraire de deux
Bénédictins (Paris,
1709), Part. I, p. 178
Pératé, 1886, p. 83
………………………
Epistres spirituelles,
1626, l. VI. (Voir note
(998), p. 302)
Blaise, Nouvelles
inédites (1883), p. 23
Datta, II, 234
Mig. V, col. 1069
Viv. VI, p. 433
Mig. V, col. 1129
Inédite
Mig. VI, col.
1018
Mig. VI, col. 942
Viv. XI, p. 415
Mig. VI, col. 836
Inédite
Mig. VI, col.
1094
Inédite
Viv. IX, p. 513
Mig. VI, col. 765
[472]
Inédite
Viv. IX, p. 511
Mig. V, col. 1132
Mig. VI, col.
1028
Viv. XI, p. 237
Mig. V, col. 1268
Viv. VII, p. 370
Mig. VI, col. 867
Viv. VII, p. 372
Mig. VI, col. 768
Viv. XI, p. 35
325/346

33.6 Page 326

▲back to top
MCDLXXXVI (fragt)
MCDLXXXVII
MCDLXXXVIII
MCDLXXXIX
MCDXC (fragment)
MCDXCI
MCDXCII (fragments)
MCDXCIII
pp.
323-
MCDXCIV 326
fin
MCDXCV
MCDXCVI
1er
alinéa
MCDXCVII
p. 332,
ll. 4-17
suite
MCDXCVIII
………………………
………………………
………………………
TURIN. Archiv. de
l’Etat (Copie)
ANNECY. Visitation.
(Ancien Ms. de
l’Année Sainte)
………………………
………………………
………………………
VENISE.
(Copie)
Visit.
………………………
ANNECY. Visitation
(Copie)
POITIERS. Visitation
MILAN. Cte Sormani-
Andreani
Idem
Idem
………………………
Epistres spirituelles,
1626, l. V
Œuvres, 1641, t. II,
epist. XIX
Epistres spirituelles,
1626, l. IV
Datta, II, p. 240
………………………
Datta, II, p. 242
………………………
Epistres spirituelles,
1626, l. VI. (Voir les
notes (1048), (1054),
pp. 320, 321)
Ibid., l. VII
Vie du Saint, par D.
Jean de Saint-François
(1624)1416
Epistres spirituelles,
1626, l. II
Ibid. (Voir note
(1066), p. 326)
………………………
………………………
Datta, II, p. 243
Epistres spirituelles,
1626, l. V. (Voir note
(1048), (1082), pp.
320, 332)
Datta, II, p. 243
Datta, ibid. (Voir note
(1087), p. 333)
Epistres spirituelles,
1626, l. VII ; Datta, II,
p. 355
Mig. V, col. 1061
Viv. XI, p. 469
Mig. V, col. 1498
Viv. XI, p. 81
Mig. V, col. 1133
Viv. VII, p. 376
Mig. VI, col. 771
Mig. VI, col.
1019
Viv. VII, p. 378
Mig. VI, col. 772
Mig. VI, col.
1085
Viv. XI, p. 161
Mig. V, col. 1200
Viv. XI, p. 384
Mig. V, col. 1415
Viv. VI, p. 528
Mig. V, col. 1447
Viv. VI, p. 534
Mig. V, col. 1453
[473]
Viv. XII, p. 14
Mig. V, col. 1134
Mig. VI, col.
1048
Viv. XI, p. 82
Mig. V, col. 1135
Viv. XI, p. 83
Mig. V, col. 1135,
et IX, col. 100
Viv. XI, p. 83
Mig. V, col. 1136
Viv. XII, p. 197
Mig. V, col. 1658
1416 La vie du Bien-Heureus Mre François de Sales, Evesque et Prince de Geneve, Instituteur de l’Ordre des Religieuses
de la Visitation de Sainte Marie, par le R. P. Dom Jean de S. François, Superieur General de la Congregation des
Feuillens. A Paris, chez Michel Soly, MDCXXIV. (Liv. IV pp. 328-335.)
326/346

33.7 Page 327

▲back to top
MCDXCIX
MD (fragments)
MDI
MDII
MDIII
deux
premiers
alinéas
3e alinéa
suite
MDIV
MDV
MDVI
1er alinéa
pp. 354 (ll.
5-22)
355 (ll. 1-8)
fin
MDVII
MDVIII (fragment)
MDIX
MDX
texte italien
traduction
incomplète
1er fragment
HARROW (Londres).
Visitation
………………………
ANNECY. Visitation
(Fac-simile)
………………………
THONON. Visitation
Idem
Idem
ZILLISHEIM
(Alsace).
Petit
Séminaire
AMIENS. Visitation
Idem
Idem
ROEULX (Belgique).
Sœurs Augustines
LE MANS. Carmel
ANNECY. Visitation
(Ms. original de la
Mère de Chaugy)
TURIN. Visitation
(Copie)
………………………
………………………
Cibrario,
Lettere
inedite di Santi, etc.
(1861)1417, p. 137
Epistres spirituelles,
1626, l. V. (Voir notes
(1105), (1110) pp.
339, 340)
Publiée par le Cte de
Buffières et M. de
Jussieu (1878)1418
Œuvres, 1652, l. VI,
epist. LXX
Datta, II, p. 245
Epistres spirituelles,
1626, l. V, p. 585 ;
Datta, II, p. 246
Datta, ibid. (Voir note
(1144), p. 349)
L’Ami de la Religion,
Paris, 22 sept. 1859.
(Voir note (1157), p.
352)
………………………
Epistres spirituelles,
1626, l. VII
………………………
Revue cath. de
Louvain, janvier 1851
………………………
Mémoires, par la Mère
de Chaugy (Paris,
1874), Partie II, ch.
XII. Cf. Maupas1419,
Partie II, ch. XIII
………………………
Epistres spirituelles,
1626, l. I
Hérissant, V, p. 240
Mig. IX, col. 100
Viv. XI, p. 85
Mig. V, col. 1136
Viv. VII, p. 380
Mig. VI, col. 772
Viv. ibid.
Mig. ibid., col.
773
Viv. ibid., p. 381
Mig. ibid.
Mig. V, col. 1699
Inédit
Viv. VII, p. 383
Mig. V, col. 1138
Inédite
Mig. VI, col.
1055 [474]
Mig. VI, col. 1356
Inédit
Viv. XI, p. 92
Mig. V, col. 1141
Viv. XI, p. 433
Mig. V, col. 1476,
et VI col. 1025
1417 Lettre indite di Santi, Papi, Principi, illustri guerrieri e letterati, con note ed illustrazioni del Cavaliere Luigi
Cibrario. Torino, tipografia eredi Botta, MDCCCLXI.
1418 Lettre inédite de saint François de Sales, publiée avec des notes et des éclaircissements par le Cte Amalric
Lombard de Buffières et Alexis de Jussieu, archiviste de la Savoie. Paris, Plon, 1878.
1419 La Vie de la venerable Mere Jeanne Françoise Fremiot, Fondatrice, premiere Mere et Religieuse de l’Ordre de
la Visitation de Saincte Marie, par Messire Henry de Maupas su Tour, Evesque et Comte du Puy. Paris, chez Simeon
Piget, MDCXLIII.
327/346

33.8 Page 328

▲back to top
2d fragment
3e fragment
MDXI
MDXII
MDXIII
MDXIV
MDXV
MDXVI (fragment)
MDXVII
MDXVIII
MDXIX
MDXX
MDXXI
MDXXII
MDXXIII
MDXXIV
texte
tronqué
texte
complet
MDXXV
MDXXVI
ANNECY. Visitation
(Autographe de la
Sainte). Voir note
(1191), p. 365
Idem. (Ms original des
Mémoires, etc., par la
Mère de Chaugy)
………………………
ISSY (Paris). Noviciat
de la Compagnie de St-
Sulpice
………………………
TURIN. Mse Pensa
ANNECY. Visitation
Idem. (Hist. de la
Fondation de la
Visitation
de
Grenoble)
ANNECY.
Missionnaires de
Saint-François-de-
Sales
………………………
………………………
LE MANS. Visitation
MONTLUEL.
Visitation
………………………
MONTÉLIMAR.
Visitation
………………………
………………………
………………………
GRAND-SAINT-
BERNARD. Hospice
Lettres de Ste J.-Fse de
Chantal (1877), vol. I,
p. 314
Maupas, Vie de la Vble
Mere J.-Fse Fremiot
(1643), Part. II, ch. XII
Epistres spirituelles,
1626, l. V
………………………
Epistres spirituelles,
1626, l. IV
Datta, II, p. 312
………………………
………………………
Datta, II, p. 352
Hérissant, IV, p. 533
Epistres spirituelles,
1626, l. III
………………………
………………………
Epistres spirituelles,
1626, l. VI
………………………
Epistres spirituelles,
1626, l. IV
D. Martène, Voyage
littéraire de deux
Bénédictins (Paris,
1709), Part. I, p. 178
Datta, II, p. 249
Mémoires
de
l’Académ. Salés., t.
XVII (1894)
Viv. XI, p. 91
Mig. V, col. 1140
Inédite
Viv. XI, p. 89
Mig. V, col. 1139
Viv. VII, p. 385
Mig. VI, col. 813
et 1032
Mig. VI, col.
1026
Inédit
Viv. XI, p. 414
Mig. VI, col. 836
Viv. VII, p. 386
Mig. V, col. 1142
Viv. XI, p. 93
Mig. V, col. 1142
Inédite
Inédite
Viv. XII, p. 133
Mig. V, col. 1614
Viv. XI, p. 98
Mig. VI, col. 876
[475]
Viv. XI, p. 127
Mig. V, col. 1170
Viv. VII, p. 387
Mig. VI, col. 775
328/346

33.9 Page 329

▲back to top
MDXXVII
texte
tronqué
et
interpolé
texte
authen-
tique
MDXXVIII
MDXXIX
pp.
399,
401 (ll.
1, 2)
fin
MDXXX
MDXXXI
MDXXXII
MDXXXIII
MDXXXIV
MDXXXV
MDXXXVI
MDXXXVII
MDXXXVIII
MDXXXIX
MDXL
………………………
Epistres spirituelles,
1626, l. VII
POITIERS. Visitation
………………………
MEUX. Visitation
Hérissant, VI, p. 365.
(Voir note (1268), p.
395)
Ibid., IV, p. 76
Epistres spirituelles,
1626, l. IV
Viv. XII, p. 227
Mig. V, col. 1679
Viv. XI, p. 131
Mig. V, col. 1173
Viv. XI, p. 96
Mig. V, col. 1145
Idem
TURIN. Archiv. de
l’Etat
………………………
TURIN. Archiv. de
l’Etat
LE MANS. Visitation
TURIN. Bibl. Civica
(copie)
………………………
TURIN. Archiv. de
l’Etat
………………………
………………………
………………………
TURIN. Archiv. de
l’Etat (Copie)
Blaise (1821), III, p.
160
Datta, II, p. 250
Epistres spirituelles,
1626, l. VII
Datta, II, p. 251
………………………
Datta, II, p. 252
Hérissant, IV, p. 30
Datta, II, p. 254
Epistres spirituelles,
1626, l. II
Hérissant, IV, p. 32
Epistres spirituelles,
1626, l. II
Datta, II, p. 343
Viv. XI, p. 98
Mig. V, col. 1146
Viv. VII, p. 388
Mig. VI, col. 776
Viv. IX, p. 514
Mig. V, col. 1146
Viv. VII, p. 389
Mig. VI, col. 776
Mig. ibid., col.
1009
Viv. VII, p. 390
Mig. VI, col. 776
Viv. VII, p. 393
Mig. V, col. 1148
Viv. VII, p. 391
Mig. VI, col. 777
Viv. XI, p. 101
Mig. V, col. 1151
Viv. VII, p. 394
Mig. V, col. 1149
Viv. XII, p. 60
Mig. V, col. 1557
Viv. XI, p. 88
Mig. VI, col. 831
APPENDICE
I
A
B
C (fragment)
D
ANNECY. Visitation
IId Procès de Canonis.
………………………
………………………
Datta, II, p. 208
Bartoli, Vita di Rob.
Card. Bellarmino,
Roma, 1878), l. I, c.
XVII
………………………
Inédite
Mig. VI, col. 751
[476]
Viv. VII, p. 475
329/346

33.10 Page 330

▲back to top
E
F
G
H
A (fragment)
B
C
D
Registres de l’ancien
Evêché de Genève
(Copie)
FRIBOURG. Archives
de l’Etat (Copie)
ANNECY. Visitation
THORENS-SALES
(Annecy). Cte de
Roussy de Sales
ANNECY. Visit.
(Hist. de la Fondation
de la Visitation de
Grenoble)
………………………
………………………
………………………
………………………
Mig. V, col. 57
Inédite
Inédite
Inédite
Inédite
II
TURIN.
l’Etat
Archiv.
de
………………………
MILAN. Archives des ………………………
PP. Barnabites
TURIN. Archives de ………………………
l’Opera pia Barolo
Idem
………………………
_____
Inédit
Inédit
Inédit
Inédit [477]
330/346

34 Pages 331-340

▲back to top

34.1 Page 331

▲back to top
Table des matières
_____
Avant-Propos ……………………………………………………………………………. V
Avis au Lecteur ………………………………………………………………………….. XVI
_____
ANNEE 1617
(Suite)
LETTRE
MCCCVIII
MCCCIX
MCCCX
MCCCXI
MCCCXII
MCCCXIII
MCCCXIV
MCCCXV
MCCCXVI
MCCCXVII
MCCCXVIII
MCCCXIX
MCCCXX
A M. DUNANT. Zèle du Saint pour la discipline
ecclésiastique. Il soutient avec fermeté ses droits d'Evêque
dans toute l'étendue de son diocèse, et impose sa volonté pour la
gloire de Dieu et l'honneur de l'Eglise ……………………………
A Mme DE LA VALBONNE. Double renoncement.
Délicate charité de François de Sales à l'égard de ceux qui
n'approuvent pas ses avis. Quand la perte des Communions
n'est pas dommageable à l'âme …………………………………...
A M. DE QUOEX. Amour maternel que doivent avoir les
ministres de Dieu pour les âmes. Aimable réponse à une filiale
inquiétude. La « petite ruche » et les « pauvres abeilles. »
Ce qui affligeait l'Evêque de Genève et ce qui le consolait.
Dissension dans un prieuré ……………………………………….
A Mme DE LA FLÉCHÈRE (Inédite). Quelques nouvelles.
Intérêt de saint François de Sales pour les enfants de la
destinataire. Messages.« Une carrossee de dames » arrivant
de Grenoble. Les exercices spirituels de Mme de la Thuille …..
AU DUC DE SAVOIE. Droits de la ville d'Annecy aux
bienfaits du souverain ……………………………………………
AU PRINCE DE PIÉMONT. Recours à l'intervention du
prince pour obtenir la confirmation des privilèges de la ville
d'Annecy …………………………………………………………
A M. DE BLONAY. Pourquoi François de Sales retarde
volontiers son voyage en Chablais. Sa douleur et sa résignation
au sujet de la maladie de son frère Bernard ………………………
A LA MÈRE DE BRÉCHARD. Le Saint console la Mère de
Bréchard de la perte de son père. Quel douloureux message il
doit porter à la baronne de Thorens. Gloire humaine et saint
trépas du frère de l'Evêque de Genève ……………………………
A Mme DE CORNILLON, SA SŒUR. — Cris de douleur et
larmes de tendresse au sujet de la mort de Bernard de Sales.
Détails sur ses derniers jours. La vertu de sa veuve ………….
AU BARON DE VILLETTE. Deuil profond. Pleurs et
résignation de Marie-Aimée. Adhérence au vouloir de Dieu
A Mme DE MONTFORT. Réponse à des condoléances ………
AU PRÉSIDENT FAVRE (Inédite). Décès du président de
Sautereau. — Un cœur où se mélangent l'amour, l'amertume et la
constance. Prochain voyage à Thonon et à Gex. Départs
répétés pour l'éternité …………………………………………….
A LA PRÉSIDENTE DE SAUTEREAU. François de Sales
s'afflige avec la destinataire du décès de son mari. Comment se
1
3
5
9
11
12
13
14
[479]
16
18
20
21
25
331/346

34.2 Page 332

▲back to top
MCCCXXI
MCCCXXII
MCCCXXIII
MCCCXXIV
MCCCXXV
MCCCXXVI
MCCCXXVII
MCCCXXVIII
MCCCXXIX
MCCCXXX
MCCCXXXI
MCCCXXXII
MCCCXXXIII
MCCCXXXIV
MCCCXXXV
MCCCXXXVI
MCCCXXXVII
MCCCXXXVIII
préparer à « la vie ou il n'y a plus de mort. » Pour l'amour du
défunt, sa veuve doit modérer sa douleur ………………………..
A LA MÈRE DE CHANTAL. Une novice de la Visitation
malade à la mort ; ce qu'il faudrait faire pour ses funérailles.
Le cœur du Saint pour ses Filles. Conseils à la Mère de Chantal
AU PÈRE AYRAULT. Compliments affectueux à un ancien «
compaignon d'escole. » Deux prises de voile à la Visitation
A LA MÈRE DE CHANTAL (Inédite). Paternelle sollicitude
pour la santé de la Mère de Chantal. Ne pas se contenter
d'attendre les âmes, mais leur aller au-devant. La pureté en ce
monde. Désirs d'une sainte mère pour sa fille …………………
A LA BARONNE DE THORENS. Les consolations d'un «
frere et Pere tout ensemble. » Rien de précieux ne s'acquiert
sans peine. Une joie de la Mère de Chantal …………………..
A Mme DE BALLON. La chose la plus étonnante et
douloureuse qui se voit tous les jours. Malgré les épreuves
intérieures, aimer Dieu et lui rester fidèle ……………………….
A UNE DAME. Combat et liberté. Moyen de triompher.
Le principal devoir de la vraie dévotion. Particulières facilités
de la destinataire pour la vie chrétienne et pieuse. Témoignages
d'honneur et de sainte affection. Pourquoi la fécondité est une
bénédiction de Dieu ………………………………………………
A UNE PERSONNE INCONNUE (Fragment inédit).
Deshonorée devant le monde ; en estime devant Dieu …………..
A M. MICHEL FAVRE (Billet inédit). Demande de nouvelles
de deux chers malades ……………………………………………
AU DUC DE SAVOIE. François de Sales sollicite l'indulgence
de Charles-Emmanuel pour un homme plus malheureux que
coupable. Les deux ailes de la renommée des bons princes ….
AU PRINCE DE PIÉMONT (Fragment inédit). Deux offensés
qui souhaitent la grâce de l'offenseur. Plus d'infortune que
d'iniquité …………………………………………………………
A LA MÈRE DE CHANTAL. Une postulante attendue à
Sainte-Catherine et qu'il faut recevoir à la Visitation. Madame
du Puits-d'Orbe en route pour Annecy. Trempe d'esprit de
l'Abbesse.Le Saint offre son logis pour la voyageuse.
Malades corporelles et malades spirituelles ……………………...
A L'ABBESSE DU PUITS-D'ORBE. Bienvenue à l'Abbesse.
La société des âmes pleines d'amour divin allège les afflictions
AU CHANOINE DE SALES, SON FRÈRE. Un empressé
départ …………………………………………………………….
A LA MÈRE DE CHANTAL. Annonce de retour ……………
A L'ABBESSE DE BAUME-LES-DAMES (Inédite).
Consécration d'une chapelle mortuaire. Compliments
affectueux et saints conseils ……………………………………...
A LA MÈRE DE CHANTAL. Des fermiers retardataires à
payer. Fine et aimable proposition du Saint à la Mère de
Chantal …………………………………………………………...
A LA MÊME. Retour de l'Evêque à Annecy. Pourquoi il
veut le lendemain se lever de bonne heure ……………………….
AU PRÉSIDENT CRESPIN (Fragment inédit). Raisons d'un
retard à écrire …………………………………………………….
27
30
32
35
36
38
41
41
[480]
42
45
46
50
51
52
53
54
55
56
332/346

34.3 Page 333

▲back to top
MCCCXXXIX
MCCCXL
MCCCXLI
MCCCXLII
MCCCXLIII
MCCCXLIV
MCCCXLV
MCCCXLVI
MCCCXLVII
MCCCXLVIII
MCCCXLIX
MCCCL
MCCCLI
MCCCLII
MCCCLIII
MCCCLIV
MCCCLV
MCCCLVI
MCCCLVII
MCCCLVIII
AU PRÉSIDENT FAVRE DE LA VALBONNE. Félicitations
au destinataire. Joie du Saint, et celle qu'il promet au nouveau
président du Conseil de Genevois. Le petit Antoine et son
grand-père ………………………………………………………..
A UNE DAME. Ne jamais s'attrister, car Dieu nous aime et
nous sommes siens ……………………………………………….
AU PÈRE DE BÉRULLE. L'Evêque de Genève propose au
fondateur de l'Oratoire un établissement dans son diocèse ………
A LA MÈRE DE CHANTAL (Inédite). Que faire contre les
bruyantes réclamations de deux femmes …………………………
A Mme DE LA FLÉCHÈRE. Une dame « un peu brune » sur le
Saint. Pourquoi son protégé n'a pas été pourvu au concours
A Mgr FENOUILLET (Inédite). Paris et Grenoble en attente de
l'Evêque de Genève pour le Carême. Mince [481] bagage de
science qu'emporte d'Annecy le jeune des Hayes. Un engagé
militaire en congé. Souvenir douloureux de la mort de Bernard
de Sales. Capitulation devant une « batterie de pleurs ». La
tyrannie du péché ………………………………………………..
AU PRÉSIDENT FAVRE (Inédite). Une distraction de
François de Sales. Démarches de Mme de Thorens pour
recouvrer les armes de son mari. Inquiétudes au sujet de la
santé de la présidente de la Valbonne ……………………………
A Mme DE BLANIEU. Comment ne pas dévier du chemin des
ordonnances divines ……………………………………………..
A LA MÈRE DE CHANTAL. Attente et désir du saint Evêque
A LA MÊME (Fragment inédit). Visite différée ……………..
A M. SCOTTO (Inédite). Un bénéfice prêt à vaquer …………
A Mme DE MONTFORT. Nouveau deuil et nouvelle douleur.
Saintes dispositions de la baronne de Thorens à son lit de mort
A UN GENTILHOMME. Sainte mort de la baronne de
Thorens …………………………………………………………..
A LA MÈRE DE BRÉCHARD. Suprême transformation d'une
âme. « Un amour infiniment plus que fraternel » …………….
A LA MÈRE FAVRE. Une baronne qui promettait de devenir
une autre Mère de Chantal. Sa mort douloureuse et sainte ……
AU CARDINAL BELLARMIN. Un heureux transfuge de
l'hérésie. Pour lui, le Saint réclame le paiement d'une pension
promise. Souhait ardent d'avoir, de la main du savant Cardinal,
l'explication de quelque Epître de saint Paul. Les princes en
guerre et le Pacificateur à venir ………………………………….
AUX RELIGIEUX DU MONASTÈRE DE SIXT (Inédite).
Encouragement à la réforme ……………………………………..
A UN GENTILHOMME. Quelques points qui doivent servir à
justifier les Religieuses de la Visitation. — Les Sœurs ne
manquent ni aux lois civiles, ni aux lois ecclésiastiques dans la
construction du monastère ……………………………………….
A Mme DE LA FLÉCHÈRE. Visite au milieu d'un
appointement. L'avis de François de Sales au sujet des études
de Charles de la Fléchère …………………………………………
A S. S. PAUL V. L'Evêque de Genève implore une dispense
pour les pauvres Clarisses de son diocèse. Son but est de leur
faciliter l'observance de la Règle et la vie de prière ……………..
57
59
60
62
63
65
68
69
70
70
71
72
74
75
76
77
81
83
88
89
[482]
333/346

34.4 Page 334

▲back to top
MCCCLIX
MCCCLX
MCCCLXI
MCCCLXII
MCCCLXIII
MCCCLXIV
MCCCLXV
MCCCLXVI
MCCCLXVII
MCCCLXVIII
MCCCLXIX
MCCCLXX
MCCCLXXI
MCCCLXXII
MCCCLXXIII
MCCCLXXIV
AU CARDINAL BELLARMIN. La misère des Clarisses du
diocèse de Genève. Ce qu'apprend l'expérience sur la trop
grande pauvreté des Monastères de femmes. Sollicitude du
Saint pour des Religieuses exemptes de sa juridiction. Il
dénonce des manquements aux décrets du Concile de Trente ……
AU GÉNÉRAL DES BARNABITES. Eloge du P. Baranzano.
Prière de le renvoyer au collège d'Annecy ……………………
A DON GUÉRIN. Départ précipité du P. Redento. François
de Sales ne sait pas encore s'il prêchera à Paris ou à Grenoble.
Le jardin des Barnabites. Pourquoi le Saint garde une lettre
sans l'envoyer …………………………………………………….
A M. DE FORAS. Le « Pré Lombard » demandé au duc de
Nemours pour la Visitation ………………………………………
A Mme DE GRANIEU. Le courage appuyé sur la confiance.
Joie inaltérable des âmes données à Dieu. « Religieux entre les
soldatz » et « sainte entre les Religieuses » ………………………
A UNE RELIGIEUSE. L'arbre de vie et la rosée qui le féconde.
Un désir qui sera sûrement satisfait …………………………..
A Mme DE GRANDMAISON (Inédite). Retour douloureux et
résigné sur les deuils multiples de l'année qui s'achève. Le Saint
prépare la destinataire à celui qui doit la frapper bientôt. Où se
transforment nos amertumes ……………………………………..
A Mgr FENOUILLET (Inédite). Pourquoi le duc de Savoie
désigne Grenoble à François de Sales pour les prédications de l'A
vent et du Carême. Une ambition de l'apôtre au sujet de
Lesdiguières ; son peu d'espoir de la voir satisfaite. Joies qu'il
aurait eues à Paris, avantage qu'il trouve en Dauphiné. La paix
sans les effets de la paix. Doute sur la validité d'une dispense..
AU PRINCE DE PIÉMONT. L'Evêque de Genève implore la
charité du Prince en faveur d'un ancien converti …………………
AU DUC DE SAVOIE. Un pauvre capitaine converti,
solliciteur de Son Altesse ………………………………………...
A LA MÈRE DE CHANTAL. Béatitude des crucifiés. Le
testament de la baronne de Thorens. Murmures faits au sujet
d'un projet de mariage pour Françoise de Chantal ……………….
A UNE PERSONNE INCONNUE (Fragment inédit). Douceur
de la main divine. Affliction et consolation …………………..
A M. DE LACURNE. Lettres perdues. Eloge des PP.
Barnabites ; la seule chose qui leur manque. Fruits qu'on peut
espérer de leur établissement en France. La divine origine des
afflictions. Souvenir du baron et de la baronne de Thorens ….
A LA MÈRE DE CHANTAL. Attente de nouvelles de la
Fondatrice malade ………………………………………………..
AU GÉNÉRAL DES BARNABITES. Action de grâces pour
le retour d'un Religieux. Les desseins du prince de Piémont et
de l'Evêque de Genève sur Contamine ; pour les faire réussir,
l'intervention de D. Juste auprès des cours de Savoie et de Rome
est nécessaire. Deux autres affaires importantes demandent ce
voyage. Litige au sujet d'un étang sans poissons ; équité et
charité du Saint …………………………………………………..
AU DUC DE SAVOIE. Supplique en faveur de ceux qui
s'occupent de « l'art de la soye » ………………………………….
91
94
97
99
100
102
103
105
108
109
109
111
112
[483]
115
116
123
334/346

34.5 Page 335

▲back to top
MCCCLXXV A LA MÈRE DE CHANTAL. Salutation affectueuse ………. 123
MCCCLXXVI A LA MÈRE FAVRE. Inquiétudes du Saint au sujet de la Mère
de Chantal. Nouvelles et salutations …………………………. 124
MCCCLXXVII A LA MÈRE DE CHANTAL. Un chant de joie du saint
Evêque. Ses souhaits pour lui-même et pour la destinataire …. 126
MCCCLXXVIII A LA MÊME. Messe d'action de grâces pendant laquelle la
Sainte Vierge a regardé François de Sales de « bon œil » ………. 127
MCCCLXXIX A Mme DE CHAILLIOL. Un heureux mariage. Exhortation
à l'humilité. Les avantages de la dévotion. Quelle vertu il
faut « soigneusement nourrir » ………………………………….. 128
MCCCLXXX — A LA SŒUR DE GÉRARD. La plus grande austérité.
L'école de l'abnégation de la propre volonté. Quelle
mortification il faut rechercher ………………………………….. 130
MCCCLXXXI A LA MÈRE FAVRE. — Force des vœux dans l'Institut de la
Visitation. Un procédé que le monde n'approuve pas.
Légitimité de l'expulsion dans les Ordres religieux, et de la
prolongation du noviciat. Douce plainte du saint Fondateur 132
MCCCLXXXII A Mme DE LA VALBONNE. Deux vertus essentielles. Le
plus sûr moyen d'acquérir l'honneur. Les sécheresses
spirituelles et leurs remèdes. Avis pour la confession ……….. 135
MCCCLXXXIII A LA MÈRE DE BRÉCHARD. Pourquoi les premières Mères
de la Visitation doivent être très humbles et unies à Dieu ………. 137
ANNÉE 1618
MCCCLXXXIV
MCCCLXXXV
MCCCLXXXVI
MCCCLXXXVII
MCCCLXXXVIII
MCCCLXXXIX
MCCCXC
MCCCXCI
AU DUC DE SAVOIE. Prochain voyage du Cardinal de
Savoie en France. L'Evêque de Genève se dispose à
l'accompagner …………………………………………………..
AU PRINCE DE PIÉMONT (Inédite). Reconnaissance et
soumission au sujet d'un commandement honorable ……………
A DON GUÉRIN. Raisons pour lesquelles on sollicite le
privilège du petit Office pour les Sœurs de la Visitation. —
Demande d'Indulgences pour les Monastères. Traiter toute
cette affaire avec prudence. Nouvel effort du Saint pour
l'établissement d'un Séminaire ………………………………….
A M. MILLETOT. Aimable réponse à la demande d'une
cédule d'amitié. Le voyage de l'Abbesse du Puits-d'Orbe ; ce
que le Saint blâme et regrette. Une âme que l'amertume
trouble démesurément. Nouvel ami de l'Evêque de Genève.
Tristesses et difficultés au sujet du testament de la baronne
de Thorens ……………………………………………………...
A LA MÈRE DE CHANTAL. L'embarras du Saint à l'arrivée
de voyageurs dauphinois ……………………………………….
A M. MILLETOT. Recommandation en faveur d'un ami
engagé dans un procès. Voyage du Prince Cardinal de Savoie
différé …………………………………………………………..
A Mme DE BLANIEU. Le prix de la paix ; sa récompense.
Deux moyens de la conserver …………………………………..
A LA PRÉSIDENTE DE BOUQUÉRON. Comment le
respect règle les témoignages de l'affection. Souhaits des gens
de bien et contradictions au sujet de la fondation du Monastère
138
139
[484]
140
143
148
149
150
151
335/346

34.6 Page 336

▲back to top
de Grenoble. Le service de Dieu, unique bonheur en ce
monde …………………………………………………………..
MCCCXCII AU ROI DE FRANCE. L'avis du Saint pour le rétablissement
des Carmes à Gex. Impossibilité de leur assigner le revenu
destiné au service des paroisses. Travail et dévouement des
Capucins. Deux moyens de hâter l'entière conversion du pays 153
MCCCXCIII A LA MÈRE DE CHANTAL. Départ d'une belle âme pour
le Ciel. Une demeure toute de paix. Confiance en Dieu, et
regrets sur les morts ……………………………………………. 156
MCCCXCIV A LA MÈRE FAVRE. Mort de deux grands serviteurs de
Dieu. Admirable acquiescement du Saint ………………….. 157
MCCCXCV A LA BARONNE DE MENTHON (Inédite). Vacance d'un
bénéfice. Trois raisons d'en pourvoir sur-le-champ Benoît de
Chevron ………………………………………………………... 158
MCCCXCVI A L'ABBESSE DU PUITS-D'ORBE. Très sage avis du Saint
au sujet du transfert de l'abbaye du Puits-d'Orbe. Devoir de
l'Abbesse pour maintenir ses filles en union et charité.
Humble démarche qu'elle doit faire ……………………………. 160
MCCCXCVII A LA MÈRE DE CHANTAL. Discrétion que garde le baron
de Chantal et qu'il faut garder avec lui ………………………….. 162
MCCCXCVIII AU PRIEUR DE TALLOIRES. Doux reproche à [485] un
ami trop affligé. Aimer le bonheur de ceux qui nous ont
quittés pour aller à Dieu ……………………………………….. 163
MCCCXCIX AU PÈRE CALCAGNI. Consolation à un prisonnier ……… 165
MCD A M. DE CHATILLON (Inédite). Décisions pour le service
de quelques paroisses ………………………………………….. 167
MCDI AU PRINCE DE PIÉMONT. Supplique pour l'installation
des Chartreux à Ripaille ……………………………………….. 169
MCDII — A LA SŒUR DE BLONAY. — La foi en la Providence au
milieu des sécheresses spirituelles. Quel examen il faut faire.
Le grand acte d'amour de Notre-Seigneur sur la croix.
Profit que nous devons tirer de nos imperfections. Vivre
joyeuse sous le regard de Dieu. Saluts paternels ……………. 170
MCDIII A LA MÈRE FAVRE. Les mères poules et leurs poussins.
Une école de charité et de patience. Conseils au sujet de
Novices. Le filet imperceptible de la Providence. Parure
de ce monde et parure du Ciel pour les épouses du Christ.
Humilité du saint Evêque ………………………………………. 173
MCDIV AU PÈRE ANCINA (Inédite). Envoi d'un mémoire sur les
vertus de Juvénal Ancina ………………………………………. 176
MCDV A DONA SCAGLIA. Remerciements pour une lettre et un
présent. Sur la demande de la destinataire, l'Evêque de
Genève lui offre une occasion d'aider les Sœurs de la Visitation.
Nouvelles de la Congrégation ………………………………. 177
MCDVI AU PRINCE DE PIÉMONT. Les nécessités de la Sainte-
Maison de Thonon.Appel à la bonté du prince …………….. 182
MCDVII A Mme DE VIGNOD. Un bouquet mystique à offrir aux
Saints ; de quelles fleurs il faut le composer. Saint Thomas
d'Aquin. Quel est l'ennui le plus importun. Les menues
tracasseries exercent l'amour de la propre abjection. Avis
pour supporter et corriger une petite fille d'humeur difficile ….. 183
336/346

34.7 Page 337

▲back to top
MCDVIII
MCDIX
MCDX
MCDXI
MCDXII
MCDXIII
MCDXIV
MCDXV
MCDXVI
MCDXVII
MCDXVIII
MCDXIX
MCDXX
MCDXXI
MCDXXII
MCDXXIII
AU DUC DE SAVOIE. Témoignage et intercession en faveur
du P. Ange Calcagni ……………………………………………
A DON GUÉRIN (Inédite). Louange à Dieu pour le bon et le
mauvais succès de divers événements. Confiance en la
Providence et courage pour agir. Pourquoi il faut tout tenter
et tout sacrifier afin d'obtenir aux Sœurs de la Visitation le
privilège du petit Office ………………………………………..
A M. DE QUOEX. Dévouement aux Religieux de Talloires
en mémoire d'un ami défunt. « Multitude de bonnes
occupations » …………………………………………………...
A Mme DE LESCHERAINE. Une visite manquée ………….
A LA MÈRE DE CHANTAL. A quelle condition Dieu bénit
les entreprises. Sortie d'« avettes » ………………………….
A LA MÊME (Fragment inédit). Pronostic sur une Novice ...
A LA MERE DE BRÉCHARD. Espérance d'un prochain
revoir. Projets de fondations à Bourges et à Paris ; celle de
Grenoble va se faire. Un bienfaiteur de la Maison de Moulins.
— Œuvres dont Dieu « tiendra bon comte » ……………………
A DON GUÉRIN. — A quoi les Sœurs de la Visitation
emploieront-elles le temps si elles ne disent le grand Office ?
Deux réponses à cette objection ………………………………..
A LA PRÉSIDENTE LE BLANC DE MIONS. Aimable et
ferme correction de François de Sales à une de ses filles
spirituelles excessive en ses témoignages d'estime et d'affection
AU DUC DE BELLEGARDE (Inédite). Un converti fugitif
qu'il faut accueillir favorablement. L'audace des hérétiques et
le remède à y opposer …………………………………………..
AU PRINCE DE PIÉMONT. Reconnaissance pour la
protection accordée à de pauvres curés ; prière de la continuer ..
A LA MÈRE DE CHANTAL. Charmantes nouvelles de la
Communauté d'Annecy. Comment employer le nous et
nostre. Avis sur une dispense. « Un peu de consideration
humaine » dans des désirs paternels. Difficultés du mariage
de Celse-Bénigne. La pensée du Saint sur la Communion
dans son Institut. Craintes pour le voyage de la Mère de
Chantal à Lyon. Lettres aux dames de Grenoble ;
recommandations à ce sujet …………………………………….
A Mme DE LA BAUME. Baser sa dévotion sur de fortes
maximes. Le « grand artisan de misericorde. » Quel doit
être le seul souci des enfants de Dieu. Confiance et abandon
en la Providence. Qu'importe le temps à qui regarde l'éternité
? Moyen de transformer en roses toutes les croix …………..
A DON GUÉRIN. Esprit conciliant et condescendant du
Saint. — Pourquoi les Sœurs de la Visitation se contenteront
d'être logées » avec incommodité. » Pèlerines en route vers
la cité permanente, hôtesses d'une nuit …………………………
A Mme COTTIN (Inédite.) Recommandation à la destinataire
de soumettre sa volonté à celle de Dieu …………………………
A LA MÈRE FAVRE. Espoir d'aller à Lyon. Le premier
Président de Savoie et sa famille attendus à Annecy …………..
185
186
189
190
[486]
191
192
193
195
197
198
200
201
209
212
214
215
337/346

34.8 Page 338

▲back to top
MCDXXIV
MCDXXV
MCDXXVI
MCDXXVII
MCDXXVIII
MCDXXIX
MCDXXX
MCDXXXI
MCDXXXII
MCDXXXIII
MCDXXXIV
MCDXXXV
MCDXXXVI
MCDXXXVII
MCDXXXVIII
MCDXXXIX
MCDXL
MCDXLI
MCDXLII
MCDXLIII
A LA MÈRE DE CHANTAL. Petites violettes à transplanter
en divers jardins ………………………………………………..
A LA MÈRE FAVRE (Inédite). Deux visites promises à la
Mère Favre. Lettres envoyées et reçues ……………………..
A LA MÈRE DE CHANTAL (Inédite). Encore l'affaire des
jardins. Les lettres de M. de Granier. Difficultés au sujet
d'un contrat de mariage. Roses changées en épines. La
clarté dans les affaires …………………………………………..
A Mme LIOTARD. Regrets du Saint en apprenant les
obstacles qui s'opposent à la conclusion d'une alliance. Prière
de la faciliter ……………………………………………………
AU DUC DE NEMOURS. Recommandation en faveur d'un
avocat …………………………………………………………..
A Mme DE LA FLÉCHÈRE. Un mal moins grand qu'on ne
pensait. Prochain retour de la Mère de Chantal ……………..
A M. DE FORAS. Témoignage d'amitié. Ombre à la joie
du saint Evêque au sujet du mariage de Henri de Nemours ……..
A M. DE BLONAY. Union de joies et de peines. La Mère
de Chantal est à Lyon et se dispose à rentrer à Annecy ………..
A Mme DE GRANIEU. Quelles consolations donner à la Mère
de Chastel après le départ de la Mère de Chantal ………………
A Mme DE LA FLÉCHÈRE. Sollicitude paternelle. Visites
consolantes ……………………………………………………..
A LA PRÉSIDENTE LE BLANC DE MIONS (Inédite). Un
petit signe du cœur. — Messages affectueux …………………..
A UNE TANTE. Condoléances et consolations. Le
chemin de la félicité future. Rempart contre le torrent des
adversités ……………………………………………………….
A UNE DAME. La souffrance des séparations. Par quelle
pensée s'en consoler. Encouragement paternel à écrire
souvent …………………………………………………………
A LA MÈRE DE CHANTAL. Conséquence d'un
accablement d'affaires. Annonce d'un mariage ……………..
A M. DE FORAS. Les étoiles pâlissant devant le soleil.
Une nouvelle apprise « a tastons. » Souhaits de bonheur au
duc de Nemours. Aimable plaisanterie ………………………
A LA MÈRE DE CHANTAL. Comment se disposer à
recevoir le comble du saint amour. D'où procède la
souveraine unité dans une âme …………………………………
A Mgr FENOUILLET. La vanité d'un chef de guerre. La
vanité d'un portrait ……………………………………………...
A Mme DE GRANIEU. Les « empeschemens » du saint
Evêque et sa paternelle bonté. Envoi de deux portraits. «
Le secret des secretz en l'orayson. » Quelle est la meilleure
prière. Double travail de la « petite mouche a miel. »
Messages de père et d'ami ………………………………………
A DON GUÉRIN. Un serment inutile. Protestation
d'amitié …………………………………………………………
A Mme DE LA FOREST (Inédite). Comment apaiser, par
humilité et douceur, un cœur mécontent. — Nul dés-honneur à
pardonner ……………………………………………………….
216
[487]
217
218
222
223
224
225
226
227
228
229
230
232
233
234
235
236
[488]
237
241
242
338/346

34.9 Page 339

▲back to top
MCDXLIV A Mme DE LA FLÉCHÈRE. Deux mots écrits en allant à
Vêpres. Ne pas se mettre en peine après avoir fait ce que l'on
a cru être bon …………………………………………………… 243
MCDXLV A LA MÈRE DE CHASTEL. Un homme « tout spirituel et
tout de Dieu. » Avis du Saint pour la conduite intérieure ….. 244
MCDXLVI AU DUC DE BELLEGARDE. Inquiétudes au sujet de la
santé du destinataire et action de grâces pour sa guérison. Que
faire pour le bien de la vie conservée. Recommandation en
faveur d'un nouveau converti …………………………………... 245
MCDXLVII A LA MÈRE DE BRECHARD (Inédite). Envoi d'une lettre
pour Mme des Gouffiers. Comment vivre au-dessus du monde
et de ses embûches …………………………………………….. 247
MCDXLVIII AU CHANOINE D'ULME. Contradictions suscitées à la
Visitation. Le vaisseau « prest a singler et a faire voyle. »
Pourquoi les Sœurs de Grenoble sont heureuses. — Fleurs de
suavité ………………………………………………………….. 248
MCDXLIX A Mme DE GRANIEU. Heureuse occasion d'avoir de
mutuelles nouvelles. — Ce que dit un portrait au cœur filial. —
Conseils au sujet du confesseur et de la confession.
Salutations paternelles …………………………………………. 250
MCDL A MM. DU CONSEIL DE LA SAINTE-MAISON DE
THONON. Projet d'une assemblée pour le bien de la Sainte-
Maison …………………………………………………………. 253
MCDLI A LA MÈRE FAVRE (Inédite). Estime que l'on fait du crédit
du Saint ; celle qu'il en fait lui-même ………………………….. 254
MCDLII AU ROI DE FRANCE. Petite mer agitée. Eloge des PP.
Célestins. Double sentiment de l'Evêque de Genève en
approchant le trône de France …………………………………. 255
MCDLIII A LA MÈRE DE CHANTAL (Inédite). Vraie cause du peu
de santé d'une Novice. Que faire en face de caprices
inguérissables ………………………………………………….. 257
MCDLIV AUX CONSULS DE CHABEUIL. Le Saint congratule [489]
les consuls de l'établissement projeté des PP. Barnabites dans
leur ville ………………………………………………………... 258
MCDLV A LA PRÉSIDENTE DU FAURE. Réponse à des
témoignages de confiance et d'affection. Prières et souhaits
pour la destinataire ……………………………………………... 260
MCDLVI A Mme DE GRANIEU. L'obéissance et le pain quotidien.
Explication d'un avis mal compris. Comment la confiance
restreint le nombre des lettres. L'amour céleste exercé ici-bas.
Préparation d'un sermon ……………………………………. 261
MCDLVII AU GÉNÉRAL DES BARNABITES. L'offre d'un collège
aux PP. Barnabites, Réponses à des objections …………….. 263
MCDLVIII A LA MÈRE DE CHASTEL. — Tenir son cœur au-dessus des
variations de la dévotion sensible ……………………………… 266
MCDLIX AU PRINCE DE PIÉMONT. Insuccès de précédentes
démarches. Nouvelles instances en faveur de deux pauvres
curés …………………………………………………………… 267
MCDLX A M. CARRON (Inédite). Premier témoignage d'honneur et
d'estime. L'insuccès des démarches et la vanité des promesses
faites en faveur des curés d'Armoy et de Draillant. Triste état 268
339/346

34.10 Page 340

▲back to top
MCDLXI
MCDLXII
MCDLXIII
MCDLXIV
MCDLXV
MCDLXVI
MCDLXVII
MCDLXVIII
MCDLXIX
MCDLXX
MCDLXXI
MCDLXXII
MCDLXXIII
MCDLXXIV
MCDLXXV
MCDLXXVI
MCDLXXVII
MCDLXXVIII
de leurs paroisses. Financiers à court d'argent. Moyen
proposé par le Saint pour remédier au mal ……………………..
AU PÈRE LESSIUS. Pourquoi le Saint aime et vénère le P.
Lessius. Trois livres du docte Jésuite ; appréciation de
François de Sales ……………………………………………….
A DON GUÉRIN. Chant de victoire avant le triomphe. Un
contrat rompu. Désir d'avoir quelques livres ………………..
AU DUC DE SAVOIE. Les victimes d'un désastre aux pieds
de Son Altesse. L'Evêque joint ses supplications aux leurs
pour obtenir la pitié du prince …………………………………..
A DON GUÉRIN. Affectueux reproches à un ami qui ne
prend pas assez de soin de sa santé …………………………….
A UN RELIGIEUX. Course rapide d'une âme vers le sommet
de la perfection. Le mystère d'un nom ………………………
AU CHANOINE DES ÉCHELLES. L'inconstance, loi des
choses de ce monde ; les amitiés saintes en triomphent. Désir
de quelques jours de repos à Belley. La demeure des Filles de
la Visitation ici-bas, leur demeure dans l'éternité. Eloge de la
Mère de Chantal ………………………………………………...
A M. FYOT DE BARAIN. Grande union des chanoines de
Saint-Pierre de Genève avec leur Evêque. Celui-ci soutient
leurs droits dans un procès avec la ville de Seyssel ……………..
A Mgr FENOUILLET. Remerciements pour l'accueil fait au
président Crespin. Naufragé abordant au hâvre de grâce.
Le voyage du Cardinal de Savoie est toujours incertain ……….
A LA PRÉSIDENTE DU FAURE (Inédite). Lettres qui
soulagent au lieu de surcharger. Demande et promesse de
prières …………………………………………………………..
A Mme DE GRANIEU. Ne pas craindre d'écrire souvent.
Le souhait du Saint pour l'âme de sa chère fille. Espérance
d'un revoir ………………………………………………………
AU GÉNÉRAL DES CHARTREUX. Messages affectueux
par un Capucin en route pour la Chartreuse …………………….
AUX AVOYERS ET AUX MEMBRES DU CONSEIL DE
VLLLE DE FRIBOURG. Gracieuses offres de service.
Pourquoi le Saint veut toujours obliger les magistrats de
Fribourg ………………………………………………………...
A LA MÈRE DE CHANTAL. François de Sales seconde,
sans les connaître, les désirs de la Mère de Chantal ……………
A LA MÊME (Billet inédit). Une bannière, ou une croix de
confrérie à restaurer …………………………………………….
A LA MÊME. Sollicitude paternelle du Saint pour ses Filles.
Quelque chose que la Mère de Chantal ne saura peut-être
jamais. Une postulante pauvre qu'il faut gratifier ……………
A UN GENTILHOMME. Offre de services et demande de
protection ……………………………………………………….
AU CARDINAL BORROMÉE. Envoi d'une harangue du
cardinal du Perron, et promesse de son oraison funèbre ……….
A DONA SCAGLIA (Inédite). Nouveaux délais pour la
fondation de Turin. Départ pour la France ; joie au sujet d'un
compagnon de voyage. L'itinéraire de la Mère de Chantal
différent de celui de l'Evêque de Genève ………………………
271
274
276
277
278
279
282
284
[490]
285
286
287
288
289
290
290
292
293
295
340/346

35 Pages 341-350

▲back to top

35.1 Page 341

▲back to top
MCDLXXIX
MCDLXXX
MCDLXXXI
MCDLXXXII
MCDLXXXIII
MCDLXXXIV
MCDLXXXV
MCDLXXXVI
MCDLXXXVII
MCDLXXXVIII
MCDLXXXIX
MCDXC
MCDXCI
MCDXCII
MCDXCIII
MCDXCIV
MCDXCV
AU PÈRE ANCINA. Pourquoi le Saint est obligé de renoncer
à écrire la Vie de Juvénal Ancina. Ses regrets ………………
A M. FAVRE. Une liste de nécessiteux à soulager …………
A LA MÈRE DE BRÉCHARD. Les excuses que doit faire la
Mère de Bréchard, pour le Saint et pour elle-même ……………
A LA MÈRE FAVRE. Servantes, grandes et petites, de la
Mère de Dieu, unies dans son amour …………………………..
A M. DE FORAS. Grand désir de l'Evêque de Genève
d'obliger M. de Montholon. Difficultés d'accepter les
prédications de l'Avent à Saint-André-des-Arts ………………..
A DONA SCAGLIA. Projets de voyages pour la Mère de
Chantal. La bienveillance du comte de Verrua pour François
de Sales. Un Cardinal et un Evêque ramant sur la Loire.
Tout Paris à la rencontre de Maurice de Savoie. Portrait de la
future princesse de Piémont. Accroissement de piété dans la
capitale …………………………………………………………
A Mme DE CHARMOISY. Le seul mot de consolation que
puisse dire le Saint. Comment apaiser les sanglots et soupirs
A LA MÈRE FAVRE. Une pépinière de fondations.
Vertus à y enraciner. Ce que la Mère Favre doit lire dans le
cœur de son père spirituel ………………………………………
A LA MÈRE DE BRÉCHARD. Comment Dieu bénit une
œuvre. — Trois fondements de la Visitation. La racine de la
joie ……………………………………………………………...
AU PRINCE DE PIÉMONT. Félicitations à Victor-Amédée
au sujet de son mariage. Eloge de la future princesse de
Piémont. Grand prince et très digne cardinal ……………….
A Mme DE LA FLÉCHÈRE. Douloureuses nouvelles de
Savoie ; nombreuses et bonnes affaires à Paris. Difficultés
pour l'établissement de la Visitation ……………………………
A LA MÈRE DE CHANTAL. Un sermon devant « la Reyne
et son beau monde » ……………………………………………
A Mme DE LA FLÉCHÈRE. Permission et conditions pour
l'entrée de la destinataire à la Visitation. Pourquoi le Saint est
de bon cœur à Paris, pourquoi il y souffre ………………………
A LA MÈRE DE CHANTAL. Un novice qui ne sera pas
profès. Racine, branches et fruits. Pommes de senteur
entre les mains de Dieu. Le dépouillement total de soi-même,
combien difficile ………………………………………………..
A UN ECCLÉSIASTIQUE. Le mot du plus franc amour
selon la nature et la grâce. Assaut d'humilité et d'affection
A LA MÈRE DE CHASTEL. Conseils de prudence au sujet
de visions et de révélations. Ruses du malin esprit.
Exemple de Nicole Tavernier. Quelle conduite tenir à l'égard
d'une âme qui marche par une voie extraordinaire ; la leçon
qu'elle doit apprendre. Puissance de l'imagination …………..
AU PÈRE GÉRARD DE TOURNON. L'esprit de contrariété
là où devraient régner l'union et la « conformité. » Un poste
favorable pour un ecclésiastique. Sollicitude du Saint pour
quelques paroisses du pays de Gex. Son humilité et sa
reconnaissance à l'égard du destinataire ………………………..
298
300
301
302
303
305
[491]
311
313
314
315
316
318
319
320
322
323
328
341/346

35.2 Page 342

▲back to top
ANNÉE 1619
MCDXCVI
MCDXCVII
MCDXCVIII
MCDXCIX
MD
MDI
MDII
MDIII
MDIV
MDV
MDVI
MDVII
MDVIII
MDIX
A LA PRÉSIDENTE DE HERSE. Le Saint accepte une
invitation et le carrosse de la Présidente ………………………..
A LA MÈRE DE CHANTAL. Les aventures de Celse-
Bénigne et les tourments de la Mère de Chantal. [492]
Consolations et encouragements. Le bonheur de ceux qui sont
à Jésus-Christ. Un prétendant grandement en peine …………
A UNE RELIGIEUSE. — Le cœur de l'Enfant Jésus : ses
attraits. Une sainte jalousie. Comment concourir, du fond
du cloître, à la prédication du Saint. Efficacité de la prière ….
A DONA SCAGLIA. Au milieu des affaires de la cour,
François de Sales n'oublie pas la vocation de sa fille spirituelle.
La conduite de la Providence sur ses serviteurs. Quand
différer l'exécution d'un vœu en toute sûreté de conscience ……
A LA MÈRE DE CHANTAL. Jésus crucifié et Jésus glorifié.
Quand est-ce que Dieu supporte notre fardeau avec nous …..
A Mme DE GRANIEU. Grand et doux moyen de n'être jamais
séparés. Une recherche inutile. Où la Sainte Vierge tient
son noviciat. Nouvelles de la Mère de Chantal.
Prédications multipliées. La mort de M. de la Coste ………..
A Mme DE VEYSSILIEU. Le « tracas insupportable » de
Paris. Un cher malade en voie de guérison. Ce qu'il faut
pour vivre content en ce monde. Filiale confiance en Dieu et
paix entre ses bras ………………………………………………
A LA MÈRE DE CHANTAL. Abjuration d'un gentilhomme.
A quelles conditions peut-on recevoir les infirmes à la
Visitation. — Sans jambes, si elle n'est point estropiée de cœur,
une Sœur est capable de tous les exercices essentiels de la Règle.
« La plus brave princesse » qui se puisse voir et le cartel de
son royal fiancé.Celse-Bénigne s'apprivoise avec le Saint ; ce
qui lui manque pour faire des merveilles. Le projet de mariage
entre Mlle de Chantal et M. de Foras ……………………………
A LA MÊME. Celse-Bénigne recommandé au Cardinal de
Savoie. Affectueux éloges de M. de Foras. Projet de
fondation dans la capitale. Les Haudriettes. Monde et
mondains. Messages d'affection paternelle …………………
A LA SŒUR DE LA ROCHE. — Gracieuse annonce de
François de Sales à sa correspondante. Sainte liberté et
surnaturelle prudence à garder au sujet des confesseurs
extraordinaires. Espérances pour l'établissement de la
Visitation à Paris. Salutations ……………………………….
A LA COMTESSE DE ROSSILLON. Prière d'agréer une
protestation de respect et d'affection. — Souhait du cœur. —
Délicat conseil à une jeune cousine …………………………….
A Mme DE VILLENEUVE. Des tentations « plus ennuyeuses
que perilleuses. » Promesse d'une entrevue …………………
A LA MÈRE DE CHANTAL. Les craintes de la prudence
humaine au sujet de la fondation d'un Monastère de la Visitation
à Paris …………………………………………………………..
A DONA SCAGLIA. Détails sur la mort du comte de Verrua.
Consolations à sa fille. La pensée du prince de Piémont
331
332
334
336
339
340
343
345
350
353
356
357
[493]
359
360
342/346

35.3 Page 343

▲back to top
sur la fondation de la Visitation à Turin. Une vertu plus
nécessaire que la magnanimité …………………………………
MDX A LA MÈRE DE CHANTAL. Nécessité de presser le départ
pour Paris. Hardiesse de l'entreprise. Renouveler son
courage pour le service de Dieu ……………………………….. 364
MDXI A Mme DE VEYSSILIEU. — Quatre lignes sorties du cœur. —
Aspirer aux contentements de l'éternité à mesure que Dieu nous
sèvre de ceux de ce monde …………………………………….. 365
MDXII A UNE DAME (Inédite). Une jeune fille prisonnière chez les
hérétiques ……………………………………………………… 366
MDXIII A L'ABBESSE DE PORT-ROYAL. Ce que le Saint a vu dans
le cœur de la destinataire. Pourquoi Dieu n'exauce pas tout de
suite nos prières. La Visitation fondée à Paris ……………… 368
MDXIV A LA MÈRE DE CHANTAL. Une journée laborieusement
et fructueusement employée. Proposition d'une maison pour
les Filles de la Visitation ………………………………………. 371
MDXV A LA MÊME. Annonce d'une visite, et d'un visiteur qu'il faut
traiter avec prudence …………………………………………… 373
MDXVI A LA MÈRE DE CHASTEL (Fragment inédit). La
présidente Le Blanc parmi les Anges ………………………….. 374
MDXVII A LA MÈRE DE CHANTAL. En quête d'un carrosse …….. 375
MDXVIII A M. BOUVARD. Insuccès des démarches du Saint en faveur
de M. de Quoex. Recommandations au sujet de diverses
affaires …………………………………………………………. 376
MDXIX A L'ABBESSE DE PORT-ROYAL. Les pensées de François
de Sales sur la confiance qu'on lui témoigne. Pourquoi il est
bon de prendre avis de diverses personnes. Réponse à la
crainte de suivre ses inclinations tout en obéissant. Promesse
d'une visite ou d'une lettre ……………………………………… 378
MDXX A M. SOUDAN DE LA PALME (Inédite). Un parrain
heureux des nouvelles de son filleul. Prochain départ de Paris.
Deux adresses pour les lettres ………………………………. 381
MDXXI A Mme DE CHARMOISY (Inédite). L'Evêque de Genève
solliciteur pour Mme de Charmoisy. Difficultés d'obtenir et
circonspection à garder dans les demandes. Approches du
retour en Savoie ………………………………………………... 382
MDXXII A Mme DE VILLESAVIN.Comment supporter les petites
[494] persécutions des enfants du monde. Salomon, ses
richesses, et « son inénarrable malheur. » La devise du Christ.
Un adieu jusqu'à l'éternité. Pourquoi se réjouir de s'être
aimés en cette vie ………………………………………………. 384
MDXXIII A LA MÈRE DE CHANTAL. Un conseil de conscience.
Ce qui « osta un peu l'asseurance » au saint prédicateur ………. 386
MDXXIV A L'ABBESSE DE PORT-ROYAL. Les noms de « plus
grande force pour tesmoigner la dilection. » Un sentiment que
le Saint veut conserver soigneusement. Desseins de Dieu sur
l'Abbesse de Port-Royal. Le livre de D. Sens et la manière de
le comprendre. Remarque pleine de sagesse et de délicatesse
de l'Evêque de Genève au sujet de la doctrine du Général des
Feuillants. Ne pas trop se charger d'austérités ……………… 388
MDXXV AU PRINCE DE PIÉMONT. Une dame d'honneur de la
princesse de Piémont retenue à Paris ………………………….. 391
343/346

35.4 Page 344

▲back to top
MDXXVI
MDXXVII
MDXXVIII
MDXXIX
MDXXX
MDXXXI
MDXXXII
MDXXXIII
MDXXXIV
MDXXXV
MDXXXVI
MDXXXVII
MDXXXVIII
MDXXXIX
MDXL
AU DUC DE BELLEGARDE. Instante requête au
destinataire pour l'heureuse conclusion d'un procès entre les
chanoines de Saint-Pierre de Genève et les habitants de Seyssel
A LA MÈRE DE CHANTAL. Un sentiment de l'âme du Saint
au lieu d'un bouquet du désert. Deux regards qui rendent
bienheureux. Comment faire la grille du choeur. La
première profession à la Visitation de Paris ……………………
A UNE DAME. Pourquoi on ne peut pas recevoir Mme du
Tertre à la Visitation de Paris. Réserve et prudence du saint
Evêque ………………………………………………………….
A L'ABBESSE DE PORT-ROYAL. Une confession générale
faite « a la desrobee. » Promesse d'un revoir. Le chemin
d'une « excellente sorte de vie. » Divin compagnon de route
; manière de le suivre. Méditation du Saint sur la Communion
AU DUC DE SAVOIE. « Quatre lignes pour gage. » ………
A UN GENTILHOMME. La clarté de l'Ecriture, et
l'obscurité de l'esprit humain. Contradictions des luthériens et
des calvinistes dans l'explication de certains passages.
L'Eglise, gardienne et interprète infaillible de la Parole de Dieu
AU PRINCE DE PIÉMONT. Remerciements et soumission.
Le duc et la duchesse de Nemours ………………………….
A LA MÈRE DE CHANTAL. Une protectrice pour la
Visitation. Préparatifs d'une cérémonie de profession ………
AU DUC DE SAVOIE. Témoignage en faveur du collatéral
de Quoex. Quelle correction permettent l'équité et la
clémence pour des fautes sans malice. Espérance en la bonté
du prince ………………………………………………………..
A LA MÈRE DE CHANTAL. Le Saint, malade, traité par
une « archimedecine. » Confessions avant de « s'en aller aux
chams » …………………………………………………………
AU PRINCE DE PIÉMONT. La détresse du duc de Nemours.
François de Sales appuie sa cause. Désir de l'Evêque de
retourner en son diocèse ………………………………………..
A LA MERE DE BRÉCHARD. Une jeune veuve qui désire
la vocation religieuse. Pourquoi le saint Fondateur a choisi le
monastère de Moulins pour sa retraite. De quelle tyrannie
délivrer cette âme, quel joug lui imposer ………………………
A LA MÈRE DE CHANTAL. Obligeante intervention de M.
de Neufchèzes dans une affaire. Le saint Evêque, malade, est
obligé de contremander plusieurs sermons ……………………..
A Mme DE VILLESAVIN. Un même trésor pour tous les
cœurs des enfants de Dieu. — Ne pas se lasser ni lasser les autres
par la longueur des exercices spirituels. Conduite à tenir dans
les conversations. Chasser la tristesse. Envoi d'une
méthode pour s'unir à Notre-Seigneur ………………………….
A LA MÈRE DE CHANTAL. Programme d'une journée …..
_____
393
395
397
399
402
403
405
406
407
[495]
409
410
411
414
415
418
344/346

35.5 Page 345

▲back to top
APPENDICE
I
LETTRES ADRESSÉES A SAINT FRANÇOIS DE SALES
PAR QUELQUES CORRESPONDANTS
A LETTRE DE LA MÈRE FAVRE, SUPÉRIEURE DE LA VISITATION DE
LYON …………………………………………………………………………. 421
B LETTRE DE CHARLES-EMMANUEL Ier, DUC DE SAVOIE ……………… 422
C LETTRE DU CARDINAL ROBERT BELLARMIN …………………………. 423
D BREF DE SA SAINTETÉ PAUL V …………………………………………… 423
E LETTRE DES AVOYERS ET DU CONSEIL DE LA VILLE DE FRIBOURG 426
F LETTRE DE M. ÉTIENNE DUNANT, CURÉ DE GEX …………………….. 426
G LETTRE DU PRÉSIDENT CRESPIN ………………………………………… 430
H LETTRE DU CHANOINE ARTUS DE LIONNE, SEIGNEUR D'AOSTE ….. 432
II
LETTRES ET PIÈCES DIVERSES
A LETTRE DE L'ABBÉ DE LA MENTE AU DUC DE SAVOIE ……………… 434
B LETTRE DE DON JUSTE GUÉRIN A D. BOERIO, GÉNÉRAL DES 435
BARNABITES ………………………………………………………………... [496]
C LETTRES PATENTES DE HENRI DE SAVOIE, DUC DE NEMOURS, EN
FAVEUR DES RELIGIEUSES DE LA VISITATION D'ANNECY …………. 438
D REQUÊTE DES RELIGIEUSES DE LA VISITATION D'ANNECY AU DUC
DE SAVOIE …………………………………………………………………… 439
_____
Glossaire des locutions et des mots surannés ……………………………………………
Index des correspondants et des principales notes biographiques et historiques de ce
volume …………………………………………………………………………………...
Table de correspondance de cette nouvelle Edition avec les précédentes, et indication de
la provenance des Manuscrits ……………………………………………………………
_____
441
449
465
[497]
345/346

35.6 Page 346

▲back to top
ACHEVÉ D'IMPRIMER
SUR LES PRESSES DE
L'IMPRIMERIE MODERNE DE L'EST
25 BESANÇON
No D'IMPRESSION : 6064
DÉPOT LEGAL :
4e TRIMESTRE 1976 [498]
346/346