11-Oeuvres de Saint Francois de Sales-Tome XI-Vol.1-Lettres


11-Oeuvres de Saint Francois de Sales-Tome XI-Vol.1-Lettres

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ŒUVRES
DE
SAINT FRANÇOIS DE SALES
ÉVÊQUE ET PRINCE DE GENÈVE
ET
DOCTEUR DE L'ÉGLISE
______
ÉDITION COMPLÈTE
D'APRÈS LES AUTOGRAPHES ET LES ÉDITIONS ORIGINALES
ENRICHIE DE NOMBREUSES PIÈCES INÉDITES
DÉDIÉE A N. S. P. LE PAPE LÉON XIII
HONORÉE DE DEUX BREFS PONTIFICAUX
ET COURONNÉE PAR L'ACADÉMIE FRANÇAISE
PUBLIÉE SUR L'INVITATION DE MGR ISOARD, ÉVÊQUE D'ANNECY
PAR LES SOINS DES RELIGIEUSES DE LA VISITATION
DU IER MONASTÈRE DANNECY
__________
TOME XI
LETTRES - IER VOLUME
ANNECY
MONASTÈRE DE LA VISITATION
__
IMPRIMERIE F. ABRY & CIE
MCM
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Deuxième édition
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ŒUVRES
DE
SAINT FRANÇOIS DE SALES
ÉVÊQUE ET PRINCE DE GENÈVE
ET
DOCTEUR DE L'ÉGLISE
_____
TOME ONZIÈME
LETTRES
Ier VOLUME
1585 1598 [I]
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Propriété
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GENEVE LIBRAIRIE TREMBLEY FRERE ET SOEUR, RUE CORRATERIE, 4
Dépositaire principal
ANNECY ABRY, LIBRAIRE, RUE DE L'ÉVECHE, 3
PARIS VICTOR LECOFFRE, RUE BONAPARTE, 90
LYON EMMANUEL VITTE, PLACE BELLECOUR, 3
BRUXELLES SOCIÉTÉ BELGE DE LIBRAIRIE, RUE TREURENBERG, 16
MARSEILLE LIBRAIRIE SALÉSIENNE, RUE DES PRINCES, 78 [II]
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ŒUVRES
DE
SAINT FRANÇOIS DE SALES
ÉVÊQUE ET PRINCE DE GENÈVE
ET
DOCTEUR DE L'ÉGLISE
______
ÉDITION COMPLÈTE
D'APRÈS LES AUTOGRAPHES ET LES ÉDITIONS ORIGINALES
ENRICHIE DE NOMBREUSES PIÈCES INÉDITES
DÉDIÉE A N. S. P. LE PAPE LÉON XIII
HONORÉE DE DEUX BREFS PONTIFICAUX
ET COURONNÉE PAR L'ACADÉMIE FRANÇAISE
PUBLIÉE SUR L'INVITATION DE MGR ISOARD, ÉVÊQUE D'ANNECY
PAR LES SOINS DES RELIGIEUSES DE LA VISITATION
DU IER MONASTÈRE DANNECY
__________
TOME XI
LETTRES - IER VOLUME
ANNECY
IMPRIMERIE J. NIÉRAT
RUE DE LA RÉPUBLIQUE
MCM
Droits de traduction et de reproduction réservés [IV]
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Index OCR
Index OCR................................................................................................................................................ 6
Avant-Propos.......................................................................................................................................... 14
Lettre-circulaire de S. Em. le Cardinal Parecchi, Vicaire de Sa Sainteté, aux Evêques d'Italie............. 26
Avis au Lecteur ...................................................................................................................................... 28
Lettres de saint François de Sales. Années antérieures a 1593 .............................................................. 29
I. Au baron d'Hermance. Protestations de respect et de dévouement................................................. 29
Ibis. A un ancien professeur (Minute inédite). Succès des armes du roi de Navarre. Epidémie
parmi les étudiants.............................................................................................................................. 30
II. A Dom François de la Fléchère, prieur de Contamine et de Sillingy (Minute inédite). Regret de
n'avoir pas reçu de réponse à ses lettres. ............................................................................................ 32
III. A un inconnu (Minutes inédites). Remerciements pour une lettre reçue de lui............................ 33
IV. A un inconnu (Minute inédite). Témoignages de respect et d'affection....................................... 33
V. A un gentilhomme (Minute inédite). Remerciements pour la bienveillance que lui témoigne ce
gentilhomme et pour la lettre qu'il en a reçue..................................................................................... 34
VI. A un ami (Minute inédite). Assurances d'amitié. Désir d'être connu d'un personnage de grand
mérite. Nouvelles d'un condisciple. Message de son précepteur. Un mot sur son frère
Gallois. ............................................................................................................................................... 35
Année 1593 ............................................................................................................................................ 38
VII. A un ancien condisciple (Minute inédite). Remerciements pour l'attention qu'a eue ce
personnage de lui dédier ses thèses de théologie. Espoir de le voir prochainement à Annecy. .... 38
VIII. Au régent Ménenc (Minute inédite). Excuses pour le retard mis à répondre à deux lettres.
Immunités assurées aux docteurs en droit et en médecine et aux maîtres d'école.............................. 39
IX. Au sénateur Antoine Favre (Minute). Réponse affectueuse aux avances du sénateur Favre.
Regret de n'avoir pu le rencontrer lors de deux voyages faits à Chambéry. Protestations d'estime
et d'attachement. ................................................................................................................................. 40
X. Au même (Minute inédite). Remerciements pour lui avoir pro curé l'amitié de François Girard . 44
XI. Au même (Minute). Exposition des mêmes pensées.................................................................... 46
XII. Au même (Minute). Prières publiques ordonnées à l'occasion de la détention du duc de Nemours
; sermon prononcé à cette occasion. Naissance de Jeanne de Sales. Affaire litigieuse d'un
paysan de Thorens. Témoignages d'affection. Désir de le voir prochainement. ...................... 48
XIII. Au même (Minute). Sentiments qui se pressent dans l'âme du Saint à l'approche de son
ordination sacerdotale......................................................................................................................... 50
Année 1594 ............................................................................................................................................ 53
XIV. Au même (Minute). Espoir d'une prochaine réunion à Sales. M. et Mme de Boisy contraints
de s'absenter à cette époque. Envoi d'une lettre de M. de Montrottier. Le Saint part pour
Seyssel où il doit prêcher le Dimanche suivant.................................................................................. 53
XV. Au même (Minute). Rendez-vous à Faverges. Salutations faites à M. de Montrottier de la
part du sénateur Favre. ....................................................................................................................... 55
XVI. Au même (Minute inédite). Excuses au sujet d'une lettre écrite à la hâte. Remerciements
pour celle que le Saint a reçue du Sénateur. ....................................................................................... 56
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XVII. Au même (Minute inédite). Recommandation en faveur de Mme de Ville. Eloge du P.
Chérubin. ............................................................................................................................................ 58
XVIII. Au même (Minute). Envoi d'une lettre de Mgr de Granier..................................................... 59
XIX. Au même (Minute). La brièveté de cette lettre est occasionnée par le départ précipité du
porteur. Témoignages d'affection. ................................................................................................. 60
XX. Au même (Minute). Remerciements pour la protection accordée à diverses personnes.
Attente de la prochaine visite du Sénateur. ........................................................................................ 61
XXI. Au même (Minute inédite). Désir de profiter des nombreuses occasions que procurera la belle
saison pour se voir plus fréquemment. Nouvelles de plusieurs amis communs............................ 63
XXII. Au même (Minute). Prochaine réunion du synode diocésain. Obstacle imprévu qui a
empêché le Saint de se rendre à Chambéry. Ses regrets en apprenant que le Sénateur est allé
inutilement à sa rencontre................................................................................................................... 64
XXIII. Au même. Projet d'un pèlerinage à l'église de la Sainte-Croix d'Aix. Ordre que doivent
suivre pendant le trajet les pèlerins d'Annecy et de Chambéry. ......................................................... 66
XXIV. Au même (Minute). Le Sénateur est attendu à Annecy ; plusieurs maisons lui sont offertes.
Il est instamment prié d'amener sa femme. ................................................................................... 68
XXV. Au même (Minute). Déception du Saint et de ses amis en ne voyant pas arriver le Sénateur.
Le Prévôt va prêcher à La Roche. ...................................................................................................... 69
XXVI. A François Girard, Prévôt de l'Église Notre-Dame de Bourg (Minute). Gracieuses excuses de
n'avoir pas écrit plus tôt. Le Saint est à Hautecombe avec le sénateur Favre. .............................. 70
XXVII. Au sénateur Antoine Favre (Minute). Compliments affectueux. .......................................... 72
XXVIII. Aux fils du sénateur Antoine Favre (Minute inédite). Remerciements pour une lettre reçue
d'eux. Encouragements à suivre les exemples de leur père. Message pour leur mère.............. 73
XXIX. Au sénateur Antoine Favre (Minute inédite). Explications amicales. Remerciements pour
l'envoi de Méditations sur la pénitence. ............................................................................................. 73
XXX. Au même (Minute inédite). Les prévenances d'un ami commun attribuées à la
recommandation du Sénateur. Désir de se procurer quelques formules de prières. ...................... 75
XXXI. A François Girard, Prévôt de l'Église Notre-Dame de Bourg (Minute). Congratulations pour
le zèle qu'il déploie au service de Jésus crucifié, et pour son agrégation à la Confrérie de la Sainte
Croix................................................................................................................................................... 76
XXXII. A un gentilhomme de la cour du duc de Savoie (Minute). Prière d'intervenir auprès du duc
de Savoie en faveur du Chapitre de Genève....................................................................................... 78
XXXIII. Au sénateur Antoine Favre (Minute). Nouvelles de la mission du Chablais. Premières
difficultés suscitées par les ministres protestants. Energique résolution du Saint......................... 79
XXXIV. A un religieux (Fragment inédit) ......................................................................................... 81
XXXV. A Monseigneur Claude de Granier, Évêque de Genève. Endurcissement des hérétiques.
Aveu des ministres en faveur des missionnaires. ............................................................................... 81
XXXVI. Au senateur Antoine Favre (Inédit). Heureux présages pour le succès de la mission du
Chablais. ............................................................................................................................................. 82
XXXVII. Au même (Minute). Témoignages d'estime et de reconnaissance pour le P. Chérubin.
Envoi de plusieurs lettres. Premiers fruits des prédications. ......................................................... 83
XXXVIII. A Monseigneur Alphonse Delbene, Évêque d'Albi (Minute). Protestations de respect et de
dévouement. ....................................................................................................................................... 84
XXXIX. Au sénateur Antoine Favre (Fragment). Prédications de l'Avent. ....................................... 85
XL. A un curial (Minute). Réponse obligeante à la demande de quelque service. ............................ 86
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XLI. Au père Antoine Possevin, de la Compagnie de Jésus (Minute). Assurance de respectueux
attachement. Le Saint parle de son ordination et de ses débuts dans le ministère......................... 86
Année 1595 ............................................................................................................................................ 88
XLII. Au sénateur Antoine Favre (Minutes inédites). Commencement de la rédaction des
Controverses....................................................................................................................................... 88
XLIII. Au même (Minute inédite). Ingénieuses excuses pour un silence trop prolongé.................... 89
XLIV. Au même (Minute inédite). Difficultés qu'offre la rédaction des Controverses. .................... 90
XLV. Au même (Inédite). Détermination de lutter intrépidement contre l'hérésie. Avis du P.
Chérubin pour assurer le succès de la mission. .................................................................................. 91
XLVI. A Monsieur de Boisy son père. Courage invincible en face des dangers que présente la
mission du Chablais............................................................................................................................ 94
XLVII. A Monseigneur Claude de Granier, Évêque de Genève. Difficulté et lenteur des conversions.
............................................................................................................................................................ 95
XLVIII. Au père Antoine Possevin, de la Compagnie de Jésus (Minute). Témoignages de
reconnaissance et désir d'une prochaine entrevue. Etat des affaires religieuses en Chablais.
Nouvelles intimes. .............................................................................................................................. 95
XLIX. Au sénateur Antoine Favre. Eloge d'un ouvrage du P. Possevin. Motifs qui retardent la
conversion de Pierre Poncet. Présents des PP. Possevin et Chérubin. Encouragements reçus
d'un ami au sujet de la mission. .......................................................................................................... 97
L. Au même (Minute). L'avocat Poncet promet d'abjurer prochainement le protestantisme. .......... 100
LI. Au même (Minute). Arbitrage du Sénateur réclamé par le Chapitre de Genève et un
ecclésiastique qui demande à en faire partie. ................................................................................... 101
LII. Au même (Minute). Visite à Sales. Remerciements pour l'envoi de la Centurie premiere de
Sonnets. ............................................................................................................................................ 102
LIII. Au même (Minute inédite). Emotion causée par le malheur d'un ami commun ; vif désir de
défendre sa cause. Eloge de l'ouvrage du Sénateur. Pénible situation du Saint en Chablais.. 104
LIV. Au Bienheureux Pierre Canisius de la Compagnie de Jésus. Vénération qu'inspire sa vertu.
Désir d'entrer en relations avec lui. Nouvelles de la mission ; conversion de Pierre Poncet.
Question de controverse. .................................................................................................................. 107
Minute de la lettre précédente .......................................................................................................... 110
LV. A Monseigneur Jules-César Riccardi, Archevêque de Bari, Nonce Apostolique a Turin
(Minute). Violation des immunités ecclésiastiques ; le Saint sollicite l'intervention du Nonce auprès
du duc de Savoie............................................................................................................................... 111
LVI. Au Chanoine Gallois de Monthoux (Inédite). Recommandation en faveur de l'abbé de Ronis.
.......................................................................................................................................................... 113
LVII. Au sénateur Antoine Favre (Minute). Souffrances du saint Apôtre ; il désire s'adjoindre
d'autres missionnaires. Remerciements pour un ouvrage de Sponde ; calomnies des hérétiques
contre ce personnage et contre Pierre Poncet. Sentiments de foi et de confiance. ...................... 114
LVIII. Au même (Minute inédite). Troubles qui régnent à Annecy................................................. 116
LIX. Au même (Minute). Ebranlement qui se produit parmi les héretiques ; ingénieuse tactique du
Saint pour les provoquer à la discussion. ......................................................................................... 116
LX. Au même (Minute inédite). Attente de quelques lettres attardées. Allusion à la bénédiction
apostolique envoyée à Henri IV. Suite du travail des Controverses. Accueil fait par les
hérétiques à la Centurie premiere. L'avocat de Prez adresse des vers à l'auteur. ........................ 118
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LXI. Au même (Inédite). Prochain envoi d'une partie de son introduction au Code Fabrien.
Question de droit. ............................................................................................................................. 120
LXII. Au père Antoine Possevin, de la Compagnie de Jésus (Inédite). Nécessité pour le Saint
d'obtenir la permission de lire les livres hérétiques. Remarques sur les Institutions de Calvin et sur
un ouvrage de Théodore de Bèze. Témoignages de respectueuse confiance. ............................. 121
LXIII. Au duc de Savoie, Charles-Emmanuel Ier Exposé des mesures à prendre pour assurer la
conversion du Chablais. Heureuse influence de M. d'Avully...................................................... 123
Minute de la lettre précédente .......................................................................................................... 125
Année 1596 .......................................................................................................................................... 127
LXIV. Au sénateur Antoine Favre (Inédite). Rencontre avec Martinengo. Visite du Saint à sa
famille et au baron de Chevron. Bienveillance que manifestent à son égard le duc de Savoie et le
Nonce apostolique. Désir de recevoir le douzième Livre des Conjectures. Encouragement à
dédier à l'Evêque la Centurie seconde de Sonnets............................................................................ 127
LXV. A Monsieur Chavent (Minute inédite). Témoignages de reconnaissance et d'affection.
Eloignement du Saint pour les dignités ecclésiastiques. .................................................................. 130
LXVI. A Monseigneur Jules-César Riccardi, Archevêque de Bari, Nonce Apostolique a Turin
(Minute). Joie qu'éprouvent les Savoisiens de la nomination du Nonce. Récit de l'apostasie du
Chablais et des tentatives faites pour la conversion de cette province. Mesures à prendre pour en
assurer le succès. .............................................................................................................................. 131
LXVII. Au duc de Savoie, Charles-Emmanuel Ier. Nécessité de rendre une des églises de Thonon au
culte catholique. Ebranlement général parmi les hérétiques du Chablais. .................................. 134
LXVIII. A Monseigneur Jules-César Riccardi, Archevêque de Bari, Nonce Apostolique a Turin.
Instances pour obtenir l'intervention du Nonce auprès du duc de Savoie. Opposition à redouter de
la part des Chevaliers de Saint-Lazare. On découvre en Chablais quantité de personnes possédées
du démon. ......................................................................................................................................... 134
LXIX. Au sénateur Antoine Favre (Minute inédite). Ardent désir de voir le duc de Savoie effectuer
un voyage projeté en Chablais. Envoi d'une lettre pour le P. Chérubin. ..................................... 136
LXX. A Monseigneur Jules-César Riccardi, Archevêque de Bari, Nonce Apostolique a Turin. Séjour
à Annecy à l'occasion du synode. Remerciements pour trois lettres reçues du Nonce.
Conversions qui s'opèrent en Chablais. Nécessité d'y envoyer un nombre suffisant de
prédicateurs, et de nommer aux cures des prêtres dignes de les occuper. ........................................ 137
LXXI. A Monsieur d'Avully Envoi d'un commentaire de saint Jérôme. Joie d'apprendre la
conversion de Mme de Rovorée. Attente de l'arrivée du duc à Thonon...................................... 139
Extrait du commentaire de Saint Jérôme.......................................................................................... 140
LXXII. A Monseigneur Jules-César Riccardi, Archevêque de Bari, Nonce Apostolique a Turin
(Minute inédite). Calomnies répandues à la cour de Savoie contre M. d'Avully et l'Apôtre du
Chablais. Abandon dans lequel on laisse ce dernier. Désir de faire un voyage à Turin......... 141
LXXIII. Au même. Instances pour obtenir le rétablissement du culte catholique dans quelques
paroisses du Chablais. ...................................................................................................................... 143
LXXIV. Au sénateur Antoine Favre (Minute). Désir de lui voir accepter la charge de Président du
Conseil de Genevois. Délais apportés aux affaires du Chablais. Projet d'un pèlerinage au
tombeau de saint Claude................................................................................................................... 145
LXXV. A un cousin (Inédite). Témoignages d'affection. Annecy est menacé de la peste.
Message pour le P. de Lorini............................................................................................................ 146
LXXVI. Au sénateur Antoine Favre (Inédite). Recommandation en faveur de M. de Coursinge. .. 147
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LXXVII. A Monseigneur Jules-César Riccardi, Archevêque de Bari, Nonce Apostolique a Turin.
Réclamations au sujet d'un legs fait à trois églises de Savoie. ......................................................... 147
LXXVIII. Au sénateur Antoine Favre (Minute inédite). Espoir de solenniser à Thonon les fêtes de
Noël. Recommandation en faveur des nouveaux convertis de la paroisse de Mésinge............... 150
LXXIX. A Monseigneur Jules-César Riccardi, Archevêque de Bari, Nonce Apostolique a Turin.
Remerciements pour l'autorisation d'absoudre des cas réservés. Conversions opérées en Chablais ;
état des esprits dans cette province. Calomnies répandues contre M. d'Avully. Nomination du
nouvel Abbé d'Abondance................................................................................................................ 151
LXXX. Au duc de Savoie, Charles-Emmanuel Ier. Opposition apportée par les syndics de Thonon à
l'érection d'un autel, Combien la protection du duc est nécessaire aux nouveaux Catholiques.
Conversion d'un ministre protestant. ................................................................................................ 154
LXXXI. A Monseigneur Jules-César Riccardi, Archevêque de Bari, Nonce Apostolique a Turin.
Instances pour obtenir la protection du Nonce auprès du duc de Savoie. ........................................ 155
Année 1597 .......................................................................................................................................... 157
LXXXII. A Monsieur Bochut, Curé d'Ayse (Fragment inédit). Invitation à venir desservir la paroisse
de Thonon......................................................................................................................................... 157
LXXXIII. Au duc de Savoie, Charles-Emmanuel Ier (Minute inédite). Erection d'un autel dans l'église
Saint-Hippolyte. Recommandation en faveur du ministre Petit. Combien il importe que les
Chevaliers de Saint-Lazare cèdent les revenus ecclésiastiques qu'ils détiennent en Chablais. ........ 157
LXXXIV. Au Conseil des Chevaliers des Saints Maurice et Lazare (Minute inédite). Instances afin
d'obtenir que les revenus ecclésiastiques dont les Chevaliers jouissent en Chablais soient affectés au
rétablissement du culte catholique.................................................................................................... 159
LXXXV. A Monseigneur Jules-César Riccardi, Archevêque de Bari, Nonce Apostolique a Turin
(Minute inédite). Excuses pour le délai mis à répondre aux lettres du Nonce. Proposition d'une
conférence publique avec les ministres. Instante prière de lui obtenir la collaboration du P.
Chérubin, du P. Esprit et de plusieurs autres missionnaires. Moyens à prendre pour fournir aux
frais de la mission............................................................................................................................. 160
LXXXVI. Au même (Minute). Lettres reçues du Nonce. Remerciements pour la protection
accordée à trois églises de Savoie. Eloge du chevalier Bergera. Difficultés qui retardent
l'établissement des curés en Chablais. Pauvreté des paroisses. Prétentions injustes des
Chevaliers des Saints Maurice et Lazare relativement à la nomination des curés. Pension due au
prédicateur d'Evian. .......................................................................................................................... 163
LXXXVII. Au même (Minute inédite). Protestations d'obéissance et de dévouement. Nouvel
exposé des difficultés de la mission. Promesse faite par les Religieux d'Ainay. Prédication du
Saint à Cervens. Destination du chanoine Roget. Les hérétiques prétendent retirer à M.
d'Avully la dignité de juge de leur consistoire. ................................................................................ 167
LXXXVIII. Au duc de Savoie, Charles-Emmanuel Ier. Demande de secours pour des indigents.
Requête en faveur de quelques hameaux des Allinges. Menées des protestants contre M. d'Avully.
.......................................................................................................................................................... 169
LXXXIX. A Monseigneur Jules-César Riccardi, Archevêque de Bari, Nonce Apostolique a Turin
(Inédite). Installation d'un curé à Cervens. Eloge de M. de Blonay. ........................................... 171
XC. Au même (Minute inédite). Mesures à prendre pour pourvoir à la subsistance des curés du
Chablais. Voyage du chanoine Louis de Sales à Genève. Désignation des PP. Capucins et
Jésuites dont le concours serait le plus utile à la mission ; frais que nécessiterait leur entretien. .... 172
XCI. Au duc de Savoie, Charles-Emmanuel Ier (Minute inédite). Instances pour obtenir quelques
libéralités déjà sollicitées en faveur de nouveaux Catholiques. ....................................................... 175
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XCII. A Monseigneur Jules-César Riccardi, Archevêque de Bari, Nonce Apostolique a Turin.
Difficultés que présente la mission du Chablais. Intérêt du Pape pour cette œuvre. — Il est urgent
de réformer quelques abbayes de la contrée..................................................................................... 176
XCIII. A Sa Sainteté Clement VIII. Entrevue avec Théodore de Bèze ; endurcissement de ce
vieillard. Tyrannie exercée par les Genevois sur les Catholiques. Espoir d'obtenir la liberté de
conscience à Genève moyennant la médiation du roi de France. ..................................................... 178
Minute de la lettre précédente .......................................................................................................... 181
XCIV. A Monseigneur Jules-César Riccardi, Archevêque de Bari, Nonce Apostolique a Turin.
Heureux résultats que promet la conférence projetée avec les hérétiques. Lettre du Saint au Pape.
Pression qu'exercent les Genevois sur les Catholiques de Gex et de Gaillard. Etat des affaires
du Chablais. ...................................................................................................................................... 182
XCV. Au duc de Savoie, Charles-Emmanuel Ier (Inédite). Le curé de Saint-Julien est contraint de se
retirer. Requête des habitants de Bernex. Incident survenu entre le P. Esprit et le ministre
protestant. Combien il est désirable que le duc signifie aux Thononais le désir qu'il a de leur
conversion. ....................................................................................................................................... 184
XCVI. A Monseigneur Jules-César Riccardi, Archevêque de Bari, Nonce Apostolique a Turin.
Mêmes sujets. Installation d'un curé à Brens............................................................................... 186
XCVII. Au même. Maladie de l'Evêque de Genève. Obligations de l'Abbé d'Abondance envers le
prédicateur d'Evian. Indigence des Religieuses de Sainte-Claire. Poursuites à faire pour obtenir
la conférence avec les ministres. Le Saint sollicite l'autorisation de concourir pour la cure du
Petit-Bornand. La permission de lire les livres hérétiques est nécessaire aux missionnaires...... 190
XCVIII. Au même (Minute). Affaires du Chablais : démêlés avec les Chevaliers des Saints Maurice
et Lazare ; encore la conférence de Genève. .................................................................................... 195
XCIX. Au duc de Savoie, Charles-Emmanuel Ier (Minute). Témoignages de reconnaissance......... 198
C. A un gentilhomme de la cour du duc de Savoie (Minute inédite). Même sujet........................... 199
CI. A Monseigneur Jules-César Riccardi, Archevêque de Bari, Nonce Apostolique a Turin (Minute).
Assemblée faite à Annemasse pour traiter des intérêts de la religion en Chablais. Le P. Chérubin
député auprès du duc. Succès prodigieux des Quarante-Heures d'Annemasse. .......................... 199
Année 1598 .......................................................................................................................................... 202
CII. A Monsieur Claude Marin, procureur fiscal en Chablais (Inédite). Prochain retour du P.
Chérubin à Thonon. Promesse du président Favre. ..................................................................... 202
CIII. A Monseigneur Jules-César Riccardi, Archevêque de Bari, Nonce Apostolique a Turin
(Inédite). Le voyage du Saint à Rome retardé par une maladie grave. Envoi de trois lettres du duc.
Bonnes dispositions des habitants du Chablais. Intervention en faveur de deux religieux qui
ont encouru des censures ecclésiastiques. ........................................................................................ 203
CIV. Au duc de Savoie, Charles-Emmanuel Ier (Minute). Instantes prières pour que les Chevaliers
des Saints Maurice et Lazare soient contraints à payer les pensions dues aux curés du Chablais.
Députation des villageois de cette province pour obtenir du duc la restauration de leurs églises.
Maladie du Saint............................................................................................................................... 206
CV. A Monsieur Louis de Pingon, Baron de Cusy. Requête présentée au duc de Savoie pour obtenir
que l'usage de la cloche de l'église Saint-Hippolyte soit interdit aux hérétiques. ............................ 207
CVI. A Monseigneur Jules-César Riccardi, Archevêque de Bari, Nonce Apostolique a Turin
(Minute). Projet de célébrer les Quarante-Heures à Thonon, et de les faire suivre de disputes
publiques sur les matières controversées. Une conférence de ce genre vient d'avoir lieu entre le P.
Chérubin et le professeur Lignarius. ................................................................................................ 208
CVII. Au duc de Savoie, Charles-Emmanuel Ier (Minute inédite). Rumeurs inquiétantes qui circulent
en Chablais ; alarmes des Catholiques. ............................................................................................ 210
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CVIII. A Monseigneur Jules-César Riccardi, Archevêque de Bari, Nonce Apostolique a Turin.
Affaire de la cure du Petit-Bornand. Peste à Annecy. Mauvais vouloir des Chevaliers.
Ebranlement produit par l'annonce des Quarante-Heures à Thonon. Faveurs spirituelles qui sont à
désirer pour cette occasion. Zèle du duc de Savoie mal secondé par ses officiers...................... 211
CIX. Au même. Voyage du président Favre à Turin et à Ferrare. Nouvelles poursuites au sujet de
la cession des cures du Chablais. Mesures à prendre pour assurer le triomphe du catholicisme sur
l'hérésie............................................................................................................................................. 214
CX. Au même. Espérance d'obtenir, moyennant la médiation du roi de France, le libre exercice du
culte catholique à Genève................................................................................................................. 217
CXI. A Monsieur Amédée de Chevron Seigneur de Villette (Inédite). Témoignages de respect et de
reconnaissance. Annonce de sa visite.......................................................................................... 218
CXII. A Monsieur Claude Marin, procureur fiscal en Chablais. Préparatifs à faire en vue des
Quarante-Heures qui doivent se célébrer à Thonon. Indications pour le logement de l'Evêque.
Audience du duc de Savoie. Destination de deux ecclésiastiques............................................... 219
CXIII. A Monsieur Sébastien Werro, Administrateur Apostolique du Diocèse de Lausanne, prévôt de
Saint-Nicolas de Fribourg. Les exercices des Quarante-Heures à Thonon sont fixés aux 23 et 24 août.
.......................................................................................................................................................... 221
CXIV. A don Juan de Mendoça, commandant des troupes espagnoles (Minute). Supplications
collectives des missionnaires du Chablais pour obtenir que les troupes espagnoles ne traversent pas
cette province. .................................................................................................................................. 222
CXV. A Monsieur Sébastien Werro, Administrateur Apostolique du Diocèse de Lausanne, prévôt de
Saint-Nicolas de Fribourg. Remerciements. Retard des Quarante-Heures projetées à Thonon. . 224
CXVI. A Monsieur Amédée de Chevron Seigneur de Villette (Inédite). Prière de se rendre en
Chablais pour protéger les habitants si les troupes espagnoles traversent la province.
Recommander au duc les intérêts de la mission et l'engager à assister aux Quarante-Heures de
Thonon. ............................................................................................................................................ 225
CXVII. A Monsieur Jean Sarasin. Invitation à exposer par écrit la mission dont il est chargé. ...... 226
CXVIII. A Monseigneur Jules-César Riccardi, Archevêque de Bari, Nonce Apostolique a Turin.
Recours à la protection du Nonce. Pouvoirs spéciaux nécessaires aux missionnaires. Mesures à
prendre contre les Chevaliers des Saints Maurice et Lazare. Admirables résultats des Quarante-
Heures de Thonon. Zèle des Evêques de Genève et de Saint-Paul-Trois-Châteaux. Alarmes au
sujet de Genève. ............................................................................................................................... 227
Minutes écrites par saint François de Sales pour Monseigneur de Granier.......................................... 231
CXIX. A Sa Sainteté Clément VIII. Fruits merveilleux produits par les Quarante-Heures de Thonon.
Prière d'intervenir auprès du roi de France et du duc de Savoie pour que Genève ne soit pas
comprise dans le traité de Vervins.................................................................................................... 231
CXX. Au même. Raisons qui ont contraint le Prévôt de différer le voyage de Rome. Envoi des
documents qui doivent être présentés à Sa Sainteté. ........................................................................ 233
Appendice............................................................................................................................................. 234
Lettres adressées a saint François de Sales par quelques correspondants ........................................ 236
A. Lettres d'Antoine Favre ........................................................................................................... 236
B. Lettres de Mgr Jules-César Riccardi, Archevêque de Bari, Nonce Apostolique a Turin.......... 275
C. Lettres de Charles-Emmanuel Ier, Duc de Savoie .................................................................... 287
D. Brefs de Sa Sainteté Clément VIII .......................................................................................... 291
Table de correspondence de cette nouvelle édition avec les précédentes et indication de la provenance
des manuscrits ...................................................................................................................................... 292
12/318

2.3 Page 13

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Index des principales notes historiques et biographiques contenues dans ce volume .......................... 301
Glossaire des locutions et des mots surannés ou pris dans une acception inusitée aujourd'hui qui se
trouvent dans les Lettres de saint François de Sales contenues en ce volume ..................................... 305
Errata .................................................................................................................................................... 309
Table des matières ................................................................................................................................ 310
13/318

2.4 Page 14

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Avant-Propos
Les Lettres de saint François de Sales peuvent se passer de préface ; elles s'expliquent
d'elles-mêmes, et expliquent admirablement toutes les grandes œuvres qu'il plut à Dieu d'opérer
par son Serviteur et l'influence considérable qu'il lui donna d'exercer sur ses contemporains. Après
avoir fait la part des réticences de son humilité, on peut affirmer que la correspondance de saint
François de Sales est l'histoire de sa vie la plus complète qui existe et la plus fidèle. C'est là, et là
seulement, qu'il se dévoile tout entier ; à son insu, il permet de contempler à l'aise, d'étudier sous
tous ses aspects cette personnalité qui captive si puissamment.
Ailleurs, il se montre moins qu'il ne se laisse apercevoir ; ses divers ouvrages révèlent son
caractère par quelque côté, permettent d'entrevoir un trait spécial de sa physionomie morale et
intellectuelle, mais non pas de la saisir par un coup-d'œil d'ensemble. On y verra tour à tour
apparaître le polémiste, le théologien dogmatique, le moraliste, l'ascète, le prédicateur ; dans ses
lettres, il est en même temps tout cela, il est plus que cela. C'est encore et toujours le Saint et le
Docteur de l'Eglise, mais c'est aussi l'homme, et l'homme doué de la nature la plus exquise qu'on
puisse imaginer. La tendresse de l'amitié et de la piété filiale, l'ardeur du patriotisme, le
dévouement au prince, l'attachement à l'Eglise, le culte de la Papauté, le zèle des âmes et un
immense amour de Dieu : tous les sentiments les plus nobles, les plus purs, les plus élevés
jaillissent de son cœur et coulent à flots dans ses [V] lettres. Et ce n'est pas seulement à une époque
déterminée qu'il se dévoile et se montre à découvert ; on le rencontre, on le suit à toutes les périodes
de son existence. On peut constater le progrès, les transformations successives que la grâce de
Dieu d'abord, puis l'expérience, son travail personnel et celui des années opérèrent en lui. Nous le
voyons développer toutes ses qualités naturelles, et supprimer dans son style sinon des défauts qui
lui soient propres, du moins le tribut payé dans sa jeunesse aux défauts du siècle.
Dans cette correspondance l'Auteur ne revit pas seul ; il anime, il ressuscite pour ainsi dire
toute son époque : les personnages et les choses du temps, les grands évènements et les grands
caractères qui l'ont illustré, les désastres qui l'ont assombri et les humbles vertus qui l'ont honoré
reparaissent sous sa plume, contés ou jugés avec un charme infini, mais aussi avec une inépuisable
indulgence. Tout est vu par le meilleur côté ; les intentions semblent épurées, et les hommes,
grandis dès qu'ils sont en contact avec cet aimable Saint.
Cette réputation de bonté et de bienveillance universelle ne contribua pas peu à élargir le
cercle de ses relations, que sa situation et ses divers mérites eussent suffi à créer très étendu. Les
rois et les princes se faisaient gloire d'avoir part à l'amitié de l'Evêque de Genève : tels Henri IV
en France et Charles-Emmanuel Ier en Savoie ; les membres les plus marquants de l'épiscopat le
consultaient ; les Papes eux-mêmes recouraient à ses lumières. Et, après avoir satisfait avec une
aisance parfaite tous ces illustres correspondants, il reprenait la plume pour consoler quelque
douleur obscure ou diriger dans les voies de la perfection d'humbles religieuses, des chrétiennes
ignorées. Notre Saint traite tous les sujets avec une attention égale, toutes les âmes avec un égal
respect ; il descend à tous les détails, adapte ses conseils à toutes les conditions, harmonise ses
encouragements ou ses leçons avec tous les genres de caractères. Il sait trouver la note juste, le
mot qui éclaire et qui fortifie lorsqu'il écrit aux gens de petite et de moyenne condition [VI] tout
aussi facilement que s'il s'adresse au gentilhomme ou à la dame du grand monde. Toujours
semblable à lui-même, il domine de bien haut par l'intelligence et par le cœur la plupart de ses
correspondants, et, loin de les intimider par cette supériorité incontestable, il a le rare talent de la
leur faire oublier à force de grâce, d'indulgence et de bonté.
Mais c'est trop dire, puisque nous nous sommes promis d'épargner au lecteur l'ennui de lire
une préface, pour lui laisser le plaisir de passer plus tôt à la correspondance du saint Evêque.
Ajoutons néanmoins qu'une Etude historique et critique sur cette correspondance est l'un des sujets
les plus attrayants qui puisse tenter la plume d'un homme de talent et de loisir. Que si personne
jusqu'ici n'a succombé à la tentation de l'entreprendre, c'est qu'on manquait de l'élément
indispensable à un pareil travail, à savoir une édition authentique et complète des Lettres de saint
François de Sales.
14/318

2.5 Page 15

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Le public la réclamait depuis longtemps, et lui promettait un accueil empressé. De toutes
les Œuvres de notre Saint, il sentait que sa Correspondance était celle qui avait été publiée de la
manière la moins consciencieuse, et celle pourtant qui offrait l'intérêt le plus universel. Parmi ses
autres écrits, plusieurs en effet ne peuvent avoir d'attrait que pour une classe spéciale de lecteurs.
Qu'ont affaire communément les simples fidèles des traités de controverse ? Et les hommes du
monde se soucieront-ils beaucoup des quatre volumes de Sermons ? Mais les lettres possèdent un
charme que tous peuvent apprécier. Pas n'est besoin pour les goûter et les comprendre d'être
théologien ou littérateur de profession. Il suffit d'une intelligence, d'un cœur ouvert à toutes les
impressions du vrai, du simple, du limpide, en un mot, à tout ce qui est bienfaisant et beau, et,
quelque mal que l'on se plaise à dire de notre siècle, les gens de cette trempe n'y sont pas clair-
semés.
Seulement, avant d'entreprendre la lecture de ce volume et des cinq ou six qui doivent
suivre, chacun est en droit de nous poser deux questions : quels défauts peut-on [VII] reprocher
aux précédentes éditions des Lettres de saint François de Sales, et de quelles ressources allez-vous
disposer pour avoir la prétention de faire mieux ? A la première de ces questions nous répondrons
par un coup-d'œil rapide sur les collections les plus remarquables des Lettres : l'édition princeps
de 1626, celle de Hérissant au XVIIIe siècle et, en celui-ci, celles de Blaise, de Vivès et de Migne.
Un exposé des nombreuses découvertes d'Autographes et de documents authentiques faites en ces
dernières années, avec un compte-rendu sommaire des méthodes adoptées et de la marche suivie
pour la nouvelle Edition, sera notre réponse à la seconde question.
I
A Dieu ne plaise que nous imitions certains éditeurs qui, pour se faire valoir, ont la manie
de dénigrer sans merci tous leurs devanciers ! Ce serait mal comprendre l'esprit du Saint dont nous
reproduisons les Œuvres. Du reste, quel est l'éditeur qui n'ait besoin d'indulgence ?
Puis, la valeur d'une publication de ce genre peut rarement être appréciée d'une manière
absolue ; il faut tenir compte, pour en juger équitablement, de l'époque et des circonstances dans
lesquelles elle a paru, du but spécial que l'on s'est proposé, des méthodes qui avaient cours en ce
temps-là. C'est en nous entourant de toutes ces réserves que nous dirons succinctement comment
fut publiée l'édition princeps.
Bien que le chanoine Louis de Sales, cousin germain du Saint et son collaborateur dans la
mission du Chablais, soit éditeur en titre, c'est par les soins et sous la haute direction de sainte
Jeanne-Françoise de Chantal que parut ce recueil. Il est juste d'ajouter qu'il avait été préparé de
longue main. Les lettres sorties de la plume du saint Evêque étaient communément reçues et
conservées comme des reliques. Aussi n'eut-on qu'un mot à [VIII] dire, et ces feuilles qui un jour
ou l'autre s'étaient pour la plupart envolées d'Annecy, s'y donnèrent rendez-vous. Originaux ou
copies, il en revint de Paris et de Lyon, de la Bourgogne et du Dauphiné, de la Franche-Comté et
de l'Auvergne ; il en revint des Flandres et de Rome. On n'eut que l'embarras du choix, car par
malheur, on voulait choisir. D'une édition complète personne ne s'avisait, et les plus larges
prétentions n'allaient qu'à donner au public ce qui alors se nommait Epistres spirituelles. Le titre
explique le livre.
Six mois après la mort du Saint un nombre assez considérable d'Autographes avaient déjà
été rassemblés, ainsi que le donne à entendre sainte Jeanne-Françoise de Chantal1. La collection
continua à s'enrichir et c'est avec un air de triomphe que la Sainte écrit le 7 avril 1624 2: « Nous
avons trouvé encore quantité de belles lettres qui font fort connaître l'esprit de notre Bienheureux
Père. » Faire connaître de plus en plus et propager cet esprit était bien le but que se proposaient
surtout les éditeurs ; nulle part il ne se révélait mieux que dans les nombreuses pages adressées à
la Fondatrice de la Visitation. Ces pages devaient donc constituer le fonds le plus riche de la
1 Sainte Jeanne-Françoise Frémyot de Chantal, sa Vie et ses Œuvres (Paris, Plon, 1877), tome V, Lettre CDLX.
2 Lettre DXLI.
15/318

2.6 Page 16

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collection ; mais avant d'y figurer, que de retranchements n'eurent-elles pas à subir ! Et combien
de regrettables et vigoureux traits de plume furent tirés à travers les Autographes par la main virile
de la Sainte, pour indiquer les passages à omettre !
Le chanoine de Sales faisait également, de son côté, œuvre d'élimination. Les lettres
d'affaires, si ce n'est qu'elles s'adressassent à des personnages de marque, les lettres de famille ou
d'amitié furent généralement écartées. Restaient les lettres de direction. Quelque intimes, quelque
spirituelles qu'on les suppose, ces sortes de correspondances ne sont pas condamnées
inexorablement à rouler sur un même sujet. Le directeur doit être père et, comme tel, s'intéresser
à tout ce qui concerne l'âme [IX] ouverte devant lui. De là, dans les lettres de saint François de
Sales, qui se montra plus père que nul autre, bien des détails jugés banals ou trop caractéristiques
: on les supprima. Ce qui survécut à ces suppressions était souvent d'une si minime étendue que
l'on ne pouvait convenablement le présenter comme une lettre. Que faire alors ? Le bon chanoine
ne fut pas embarrassé. Sans scrupule, sans gêne aucune, il entreprend de réunir, de coordonner ces
fragments d'après l'analogie des sujets, de manière à en composer des lettres d'une raisonnable
longueur. Nul souci, bien entendu, de la diversité des destinataires, des différentes époques
auxquelles remontaient les extraits ainsi fusionnés. Quelquefois, à la fin de ces mosaïques, on
accolait la date de l'un des fragments dont elles étaient composées, on leur attribuait une adresse
des plus vagues : A une Dame mariée ; à un Gentilhomme ; à une Religieuse ; puis, tout était dit.
Les inconvénients d'une semblable méthode sont faciles à imaginer ; mais à cette époque, où l'on
se préoccupait beaucoup moins de l'authenticité et de l'intégrité des textes que de l'édification du
lecteur, le système était considéré comme excellent.
Hâtons-nous d'ajouter toutefois, pour être équitables, que toutes les pièces ne passaient
point par ce laboratoire. Celles qui composent le Livre premier de l'édition princeps nous semblent
être publiées assez intégralement, et si la plupart de celles que fournit sainte Jeanne-Françoise de
Chantal ont subi bien des suppressions, elles n'accusent pas du moins des interpolations notables.
Le travail de préparation marcha rapidement ; en automne 1624, il s'agissait déjà de choisir
l'imprimeur. Le bénéfice considérable que Rigaud avait réalisé dans l'impression de l'Introduction
à la Vie devote, excitait à Lyon les prétentions de tous les gens du métier ; c'était à qui d'entre eux
ferait des offres de service. La Sainte aurait voulu favoriser « le sieur Charvet, » un pauvre
savoisien établi dans la grande ville ; car à son avis, le livre des Epîtres était « capable de rendre
un homme riche3. » Néanmoins, à tout intérêt particulier, et même [X] à tout acte de charité, elle
préféra, comme il se devait, la perfection de l'œuvre : « Considérez bien, » écrit-elle à la Mère
Marie-Aimée de Blonay4, « si c'est chose qu'il puisse bien faire, et s'il aura des bons caractères
pour cela, et moyen d'imprimer tout ce qui sera de notre Institut ; car j'entends que celui qui
imprimera les Epîtres imprime tout le reste pour rien. » Ce n'était pas se montrer trop exigeante.
Mais, si faciles que fussent les conditions, le pauvre homme ne dut pas être en mesure de les
remplir, puisque l'impression fut confiée à un autre.
Pendant que se discutait le côté matériel, les manuscrits de l'ouvrage étaient soumis à la
révision des Pères Jésuites de Chambéry. Faute de loisir, ils firent traîner l'affaire en longueur.
Enfin, au mois de mai 1625, M. Michel Favre, qui avait été longtemps le confesseur du Saint, et
qui était encore celui de la Communauté d'Annecy, se rendit à Lyon pour surveiller l'impression5.
Néanmoins sainte Jeanne-Françoise de Chantal ne se reposait pas complètement sur sa vigilance.
Le 7 juin, elle mandait à la Mère de Blonay6 : « Vous ferez bien de retrancher les lettres de
compliments, s'il y en a trop ; car il en faut laisser quelque peu, à ce que l'on dit, afin que l'on voie
le bel esprit de ce Saint en tout. Je voudrais encore que vous prissiez garde s'il y en a d'autres où il
n'y ait rien de remarquable, que l'on les retranchât. Il me semble que parmi les dernières que j'ai
reçues, il s'en pourrait ôter quelques-unes. On les a laissées à cause de quelques points de l'Institut
3 Lettre DLXXXVI.
4 Lettre DLXXXVI.
5 Le chanoine Louis de Sales semble ne s'en être aucunement occupé, car il n'est plus du tout question de lui. Peut-
être était-il atteint déjà de la maladie qui l'enleva le 16 octobre de cette année 1625.
6 Lettre DCXXXI.
16/318

2.7 Page 17

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: elles sont au livre de l'Institut ; voyez-le, et accommodez. Ç'a toujours été mon sentiment que l'on
mît le Livre des Lettres des Papes le premier ; c'est un ornement au livre que [ce] beau rencontre-
là. » Ainsi fut-il fait.
La sainte Fondatrice ne perdait pas de vue l'impression de ce recueil qui lui tenait si fort au
cœur ; les feuilles (non pas les épreuves) lui en étaient envoyées au fur [XI] et à mesure du tirage,
lui apportant souvent beaucoup de joie, parfois une déception, comme il advint entre autres le 25
juin, où elle mande à la Mère de Blonay7 : « J'ai grande peine à me résoudre à la mortification que
j'ai de ce que l'imprimeur n'a pas mis au titre des Epîtres que notre Bienheureux Père était notre
Fondateur et Instituteur... Je ne le puis souffrir, et vous prie qu'il refasse cette feuille. » Cet ordre
fut exécuté, comme on le verra par la teneur du titre donné ci-après. Mais la Sainte crut avoir
d'autres fois des protestations plus sérieuses à élever ; c'est ainsi qu'elle écrit encore à la Mère de
Blonay8 : « Oh ! mon Dieu, ma très chère fille, jamais je ne me fierai à personne pour ce qui
regarde les écrits de notre Bienheureux Père. Certes, je les verrai moi-même ; car voyez-vous, je
ressens fort de ce que l'on a trop laissé dans les Epîtres des paroles d'affection. Le monde n'est pas
capable de l'incomparable pureté de la dilection de ce Saint... Mandez-moi si en les corrigeant j'en
retrancherai ; mais sachez cela de quelqu'un capable. »
Des personnes très compétentes furent en effet consultées, et assurèrent qu'un tel
retranchement eût été déplorable. C'est encore la Sainte qui nous l'apprend dans l'une de ses lettres9
: « J'en parlai à M. le Président de cette ville10, qui est homme de très bon jugement. Il me dit que
si on retranchait les paroles affectives, l'on en ôterait l'esprit de notre Bienheureux Père... Mgr de
Genève dit le même, et disait que s'il n'y avait point de paroles de compliments et recommandations
elles ne ressembleraient pas à des Epîtres. »
L'ouvrage, grand in-4º de 1012 pages, non compris les pièces préliminaires et les
approbations, contient 519 Lettres. Il fut « achevé d'imprimer le 10me jour de novembre 1625, » et
parut sous ce titre :
Les Epistres du Bien-Heureux Messire François de Sales, Evesque et Prince de Geneve,
Instituteur de l'Ordre de la Visitation de saincte [XII] Marie. Divisees en sept Livres...11
Recueillies par Messire Louys de Sales, Prevost de l'Esglise de Geneve. A Lyon, par Vincent de
Cœursilly. Et se vendent a Paris, chez Sebastien Huré, ruë S. Jacques, au Cœur-bon. M.DC.XXVI.
Avec Privilege du Roy.
Deux courtes épîtres dédicatoires, placées par l'éditeur au commencement du volume, sont
adressées, l'une : « A Monseigneur Messire Jean François de Sales, Evesque et Prince de Geneve,
» et l'autre, « Aux devotes Religieuses de la Visitation de Saincte Marie12. »
Le public accueillit avec faveur ce volume, tout en le trouvant « d'un prix excessif, » (il
coûtait cinq livres) ce qui pourtant ne nuisit pas à l'écoulement, car en février 1626, on s'occupait
déjà d'une seconde édition. C'était un peu prématuré ; ainsi le jugeait sainte Jeanne-Françoise de
Chantal, qui voulait avoir le loisir d'améliorer le premier travail. Il lui fallut plus d'une année, et le
25 juin 1627, elle écrit encore à la Supérieure de la Visitation de Lyon13 : « Voilà les Epîtres
rangées comme il faut. Je vous prie que l'on n'y touche point du tout, et que M. Cœursilly ait soin
que l'on ne gâte point l'ordre, et qu'elles soient imprimées correctement, avec les observances que
M. Michel marquera. »
La seconde édition parut en 1628, augmentée de douze lettres ; à la simple traduction des
7 Lettre DCXXXIV.
8 Lettre DCLXXXVI.
9 Lettre DCCXIII.
10 René Favre de la Valbonne, fils de l'illustre président Antoine, l'ami intime de notre Saint.
11 Suit un sommaire du contenu de chacun des sept Livres, de telle sorte que ce titre a l'aspect d'une table des matières
; aussi bien en tient-il lieu.
12 Au-dessous de cette Lettre dédicatoire figure la note suivante, curieuse à recueillir : « Vingt-trois Epistres du Bien-
Heureux Messire François de Sales, Evesque et Prince de Geneve, escrites en Latin et traduictes en François par
Charles Louys (sic) de Sales, nepveu de l'Autheur. »
On excuse le traducteur de revendiquer ainsi sa part de mérite ; c'était un jeune homme de dix-neuf ans !
13 Lettre DCCLXXXIX (tome VI).
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lettres latines et italiennes, qui forment presque en totalité le premier Livre, on joignit le texte
original. De plus, une Table des matières contenant le sommaire de chaque lettre, et une Table
analytique des sujets qui y sont traités, ajoutent considérablement à l'intérêt de l'ouvrage et en
facilitent l'usage. Cette seconde édition fut réimprimée en 1629 ; rien n'est changé dans le cours
du volume, à la fin duquel est scrupuleusement reproduite la formule insérée dans [XIII] la
première édition : « Achevé d'imprimer le 10me jour de novembre 1625. » Il faut non moins se
défier de l'indication qui figure sur chaque réimpression, à partir de 1628 : « Revue, corrigée et
augmentée. » Ce n'est ordinairement qu'une répétition servile de la phrase ajoutée au titre de cette
seconde édition.
Les réimpressions se succédèrent avec une telle rapidité qu'il serait fastidieux d'en donner
ici la nomenclature. Parfois un éditeur publiait en même temps les Epistres spirituelles en deux
formats différents ; c'est ce que fit Cœursilly en 1634. Souvent elles paraissaient la même année et
dans la même ville chez trois imprimeurs, comme il advint à Paris en 1636 ; si bien que dans le
courant du XVIIe siècle ce recueil fut réimprimé une quarantaine de fois. On l'inséra de plus dans
toutes les collections d'Œuvres complètes du Bienheureux François de Sales, à partir de 1637.
Celle de 1641 (tome II) contient en plus que cette dernière 53 lettres inédites.
C'est vers le milieu du XVIIIe siècle que fut tenté pour la première fois un effort sérieux
dans le but de donner une édition complète et fidèle des Lettres de saint François de Sales. L'abbé
Corru, avec un zèle et une persévérance dignes d'éloges, entreprit ce travail. Il voulut remonter aux
sources, et fit un appel aux divers Monastères de la Visitation, qui s'empressèrent de lui
communiquer les originaux qu'ils possédaient ou des copies certifiées conformes. L'éditeur parvint
ainsi à réunir 831 pièces, qu'il essaya de classer non plus par ordre de matières, comme on l'avait
fait jusqu'alors, mais par ordre de dates ; il s'efforça de rétablir les adresses, fit précéder chaque
lettre d'un sommaire assez diffus, et les accompagna de notes historiques, qui pour la plupart ne
sont pas dépourvues d'intérêt. L'ouvrage parut en 1758 sous ce titre :
Lettres de S. François de Sales, Evesque et Prince de Genève, Instituteur de l'Ordre de la
Visitation... Nouvelle édition, dans laquelle on a recueilli un très-grand nombre de ces Lettres qui
ne se trouvent point dans les éditions précédentes ; revues sur les Originaux et enrichies de
Sommaires, de [XIV] Citations, de Notes et de Remarques. A Paris, chez Claude Hérissant,
imprimeur de l'Ordre, rue neuve Notre Dame, à la Croix d'or, MDCCLVIII.
La collection se compose de six volumes in-12º, dont les deux derniers contiennent les lettres sans
date.
Cette édition marquait un progrès considérable sur toutes les précédentes ; mais combien
il restait encore à l'aire pour atteindre une parfaite exactitude ! Par exemple, l'éditeur insère au
milieu des lettres du Saint, un certain nombre de celles de ses correspondants, sans interrompre les
numéros d'ordre, absolument comme si elles appartenaient à une seule et même série de pièces
identiques. De plus, il se permet de broder les canevas conservés par divers historiens, et fabrique
ainsi de prétendues lettres de saint François de Sales14 ! Un tel travail ne pouvait être considéré
comme définitif. Mais de longues années, des années troublées et orageuses, devaient s'écouler
avant que personne songeât à le reprendre et à le parfaire.
En 1817,un éditeur de Paris, Blaise, reproduisit l'édition de 1758, et l'inséra quatre ans plus
tard dans la collection des Œuvres complètes de saint François de Sales, qu'il publia en seize
volumes in-8° et plusieurs tomes supplémentaires. On ne prit même pas la peine, pour expliquer
l'origine de ce recueil et les méthodes suivies par les éditeurs, de rédiger un simple Avant-Propos.
Ce qui porte le titre pompeux de Préface (une page et demie d'étendue), n'est autre qu'un emprunt
fait textuellement à celle de l'abbé Corru. Suivent, sans explication aucune, les deux Epîtres
dédicatoires de l'édition de 1625, qui font assez étrange visage dans une publication postérieure de
deux siècles. En 1833 cette collection fut réimprimée et suivie d'un nouveau supplément dans
14 Voir comme spécimen, la Lettre II de la collection Hérissant, que nous rejetons de notre Edition. On peut aussi,
pour se rendre compte du procédé, comparer la Lettre IV de la susdite collection avec le texte authentique de la même
pièce donnée ci-après, p. 117.
18/318

2.9 Page 19

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lequel paraissent 37 lettres inédites.
Sur ces entrefaites, le comte Gloria, ayant découvert bon nombre de lettres autographes de
notre Saint aux [XV] Archives de la Cour de Sardaigne, dont il était Président chef, obtint du roi
Charles-Albert, alors régnant, l'autorisation de les publier. Non content de ces trésors, il fit pour
les accroître de nouvelles perquisitions, auxquelles il intéressa spécialement Mgr Rey, alors Evêque
d'Annecy. Ce Prélat envoya au comte Gloria des copies faites par lui-même sur les Autographes
et le mit en relations avec un prêtre distingué de Genève, l'abbé de Baudry, qui, de son côté,
préparait une nouvelle édition des Œuvres de notre Saint. Avec un désintéressement qui l'honore,
cet ecclésiastique se dessaisit en faveur de l'éditeur piémontais d'une centaine de lettres inédites,
prêtes à être mises sous presse. Ses propres découvertes et le concours si actif qu'il avait rencontré
permirent au comte de réunir 329 pièces (parmi lesquelles plusieurs ne sont pas des lettres), dont
il confia la révision et le classement à l'un de ses subalternes, le chevalier Datta. On fit imprimer
cette riche collection chez Blaise, qui la donna comme un supplément de sa propre édition, sous
ce titre :
Nouvelles Lettres inédites de saint François de Sales, Evêque et Prince de Genève, dédiées
à Sa Majesté la Reine de Sardaigne, publiées par M. le Ch. P.-L. Datta, etc. Paris, Blaise,
MDCCCXXXV.
Cette publication se ressent de la rapidité avec laquelle elle fut exécutée : les textes latins et italiens
fourmillent d'inexactitudes15 et les traductions, faites à l'insu du comte Gloria, laissent beaucoup à
désirer.
En 1856-1858 parut en douze volumes in-8° l'édition des Œuvres complètes de saint
François de Sales, qui a été pendant quarante ans la plus connue et la plus appréciée : celle de
Vivès. Le classement des Lettres y est fait d'une manière assez singulière. On regrette l'ancien
recueil des Epistres spirituelles et on veut le reconstituer. Ces Lettres occupent trois volumes (X-
XII) ; quant aux autres, elles sont disséminées dans les tomes VI-IX, dont les deux premiers portent
pour sous-titre : Opuscules relatifs à la vie publique du Saint, à [XVI] l'administration de son
diocèse et à la direction de diverses Communautés religieuses ; et les deux derniers : Pièces
relatives à la conversion des hérétiques et aux matières théologiques. Les éditeurs ne durent pas
aller loin avant de constater qu'un tel système de groupement ne pouvait s'appliquer sans amener
des non-sens. Il était bien difficile, en effet, d'établir exactement une ligne de démarcation entre
les Epîtres spirituelles et les Lettres d'affaires, tant les Saints mêlent à toutes les choses de la terre
la pensée du Ciel. Etait-il bien rationnel surtout de ranger dans la dernière série celles adressées à
des Supérieures de Communautés ? Enfin, par suite de ce procédé, l'ordre chronologique est
sacrifié. Signalons encore, pour donner une idée complète de cette édition, que, tout en
reproduisant pour le fond celle de Blaise, elle renchérit sur le tort qu'eut ce dernier d'intercaler
parmi les Lettres bon nombre de pièces étrangères16.
Bien avant qu'il fût question de la collection Vivès, un respectable ecclésiastique, l'abbé de
Baudry, réunissait, comme nous l'avons dit, les éléments d'une publication identique. Il y consacra
une partie de sa fortune et vingt années d'infatigables labeurs ; surpris par la mort (2 avril 1854)
avant d'atteindre au terme de son entreprise, il légua tous ses manuscrits au 1er Monastère de la
Visitation. Un peu plus tard, par ordre de Mgr Rendu, alors Evêque d'Annecy, ils durent être
envoyés à l'abbé Migne, l'auteur bien connu de la Bibliothèque universelle du clergé. Celui-ci, sans
prendre le temps de réviser un travail auquel la dernière main n'avait pu être mise, se hâta d'éditer
les Œuvres complètes de saint François de Sales (1861-1862), en six volumes grand in-8°, à deux
colonnes, avec un tome supplémentaire (1864).
La Correspondance épistolaire est, quant au nombre des pièces, bien supérieure à tout ce
qui avait paru jusque-là ; car, outre les lettres livrées, en 1835, au comte Gloria, [XVII] l'abbé de
15 Les noms propres surtout furent singulièrement maltraités ; c'est ainsi qu'Avully se nomme Arcilias, le chevalier de
Compois, Compète, et l'Evêque d'Albi devient l'Evêque d'Aléria !
16 C'est ainsi que sur les 67 pièces cotées dans le tome VIII, comme étant des Lettres, 36 sont étrangères à la
Correspondance ; telles, par exemple, divers Brefs du Pape, des Lettres patentes du duc de Savoie, et même un extrait
de l'édit de Nantes !
19/318

2.10 Page 20

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Baudry en avait recueilli plus de 150 autres, auxquelles il faut en ajouter une cinquantaine réunies
par les soins d'un Religieux Capucin. Quelle fortune pour un éditeur ! Mais à la condition de savoir
l'exploiter. La première chose à faire eût été de fusionner toutes les diverses séries et de classer les
Lettres qui les composaient, d'après l'ordre chronologique. L'idée n'en vint même pas. Le tome V
contient l'édition de Blaise, avec addition de quelques pièces, et dans le tome VI sont placées
successivement, comme formant des collections absolument indépendantes, quatre sections
distinctes : 1. Lettres inédites de saint François de Sales... publiées en 1835 par le chevalier
Datta ; 2. Complément des Lettres inédites de saint François de Sales de l'édition Blaise ; 3.
Nouvelles Lettres inédites17, réunies ici pour la première fois... recueillies par les soins de
l'abbé de Baudry... (Cette section est précédée d'un Avant-Propos dans lequel l'édition de 1758 est
sévèrement appréciée) ; 4. Nouvelles Lettres inédites, seconde série, recueillies par les soins
du P. Camille de Thonon, prédicateur Capucin. Enfin, un dernier groupe de Lettres est inséré dans
le tome supplémentaire.
Avec chaque série l'ordre chronologique recommence. Cette méthode, ou plutôt cette
absence de toute méthode, diminue considérablement l'intérêt de l'ouvrage. Et encore ne parlons-
nous pas de la falsification des textes, de la répétition double et parfois triple des mêmes lettres
avec des adresses et des dates différentes, de l'intercalation de toutes sortes de pièces étrangères à
la Correspondance. C'est au point que, si l'on défalque ces pièces et les lettres répétées, au lieu de
dépasser 1600, résultat que donne une supputation faite à première vue, le chiffre des Lettres
publiées par Migne s'abaisse à 1360 [XVIII] environ. Et la conclusion qui s'impose à tout lecteur
intelligent, après avoir parcouru ces volumineux et indigestes recueils, est celle-ci : La
Correspondance de saint François de Sales reste encore à éditer.
II
Mais, avant tout, elle était à compléter. Ce qu'on possède de lettres de notre Saint ne
représente qu'une très minime partie de ce qu'il a écrit. « Il ne se passoit gueres de jours, » dépose
le témoin habituel de sa vie18, « qu'il ne fist vingt a vingt cinq lettres responsives a toutes sortes de
personnes en France et en Savoye, et cecy je le sçay parce que c'estoit moy qui fermois toutes ses
lettres et fesois ses paquets. »
La plupart de ces lettres, considérées comme un précieux héritage de famille, se transmirent
de génération en génération ; mais d'autres furent morcelées et distribuées en guise de reliques ;
d'autres enfin furent détruites par l'action du temps ou l'ignorance des hommes. On en rencontra
dans des boutiques d'épiciers, employées aux plus vulgaires usages. Il importait de sauver de la
destruction ce qui pouvait exister encore. La Providence y pourvut.
L'exaltation de saint François de Sales au rang des Docteurs de l'Eglise attira plus que
jamais l'attention générale sur sa personne et sur ses écrits. Mus par le sentiment religieux ou par
l'attrait littéraire, des hommes de conditions diverses poursuivirent une même fin : exhumer des
archives où elles gisaient les lettres inédites de notre Saint, et les publier soit dans des Revues
périodiques19, [XIX] soit dans des plaquettes spéciales20. Plusieurs ecclésiastiques distingués par
17 Ce titre d'inédite ne doit pas être accepté sans quelque défiance. Ainsi, la Lettre présentée comme telle, tome VI,
col. 926, n'est que la répétition de celle qui figure à la col. 619 du même volume. Sont encore données comme inédites
des lettres extraites des Vies imprimées de la Mère de Blonay (col. 990, 991), de la Mère Rosset (col. 1030), de la
Mère de Chastellux (col. 1039), etc.
18 François Favre (Process. remiss. Gebenn. (I), ad art. 5).
19 Les Etudes Religieuses des RR. PP. Jésuites, qui avaient déjà donné des lettres de notre Saint en 1866, 1868, 1874
et 1877, en éditaient encore une en 1878, et depuis leur rétablissement, elles en ont publié en 1893, et quatre en 1900.
Citons de plus la Revue Savoisienne, 1880 ; le Correspondant, 1881 ; les Annales Salésiennes, 1889, 1891 ;
la Revue du Monde Catholique, 1891, etc.
20 Voir Rimedio alle dispute de' Cattolici in Francia, proposto nel MDCXII da S. Francesco di Sales e commentato
dal sacerdote Sante Pieralisi, Bibliote cario della Barberiniana ; aggiunte tre Lettere del medesimo Santo (Rorua,
1878).
20/318

3 Pages 21-30

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3.1 Page 21

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leur savoir et leur piété fondèrent dans ce but à Annecy même (1878) une Société qui prit le nom
d'Académie Salésienne et qui, dans la collection de ses Mémoires et Documents, a donné déjà 35
lettres inédites, ou imprimées d'une manière inexacte dans les récentes éditions. Des écrivains
savoisiens insérèrent des lettres de l'Evêque de Genève jusque-là inconnues, dans des ouvrages
destinés à populariser quelqu'un de ses contemporains ; tel M. Jules Vuÿ, dans son intéressante
histoire de la Philothée21.
En 1885, M. Mugnier, conseiller doyen à la Cour d'appel de Chambéry, bien connu par sa
patiente érudition et ses remarquables travaux, eut la bonne fortune de découvrir aux Archives de
l'ancien Sénat de Savoie, douze lettres inédites de notre Saint. Il les inséra, en les accompagnant
de documents historiques d'un haut intérêt, dans une brochure intitulée : Saint François de Sales,
Docteur en droit, Avocat au Sénat et Sénateur, etc.
Vers le même temps, M. Pératé, lui aussi archéologue infatigable et écrivain de mérite, au
cours de recherches faites dans les Archives Vaticanes, mit la main sur une série de pièces
concernant la conversion du Chablais ; parmi ces pièces se trouvaient vingt lettres italiennes de
notre saint Docteur, dont dix entièrement inédites. Des dix autres, une traduction française
seulement avait été donnée par Migne. Ces lettres parurent dans le tome VI des Mélanges
d'archéologie et d'histoire publiés par l'Ecole française de Rome (1886). Nous aimons à rendre
hommage à l'exactitude avec laquelle fut faite cette reproduction qui n'était pas sans offrir bien des
difficultés, vu les irrégularités de l'orthographe du Saint et les abréviations dont il émaille ses
manuscrits.
Loin de satisfaire les pieuses ambitions des Filles de saint François de Sales, ces
découvertes les excitèrent [XX] davantage. Après ces riches filons, ne resterait-il pas des mines
plus riches encore à exploiter ? C'est la question que les Sœurs d'Annecy se posaient à elles-mêmes,
et qu'elles adressèrent aux différentes Communautés de leur Institut. Presque toutes y répondirent
en provoquant dans leur région des perquisitions ordinairement couronnées de succès inespérés.
Des recherches aux Archives romaines mirent en lumière une vingtaine de pièces inédites insérées
dans un des volumes du Procès de Canonisation, que personne n'avait jusque-là songé à consulter.
Bien plus, Son Eminence le Cardinal Parocchi, avant de résigner la charge de Vicaire de notre
Saint-Père Léon XIII, a daigné, avec l'assentiment de Sa Sainteté, adresser un appel à tous les
Evêques d'Italie22, appel qui amena la découverte de plusieurs Autographes inédits. D'autres
admirateurs de notre grand Saint, des amis dévoués de la Visitation ont contribué avec un zèle et
un désintéressement au-dessus de tout éloge à augmenter notre collection. Nous devons un
témoignage de spéciale gratitude à bon nombre d'ecclésiastiques et de religieux, notamment à
plusieurs Pères de la Compagnie de Jésus et à la Congrégation des Missionnaires de saint François
de Sales d'Annecy.
Grâce à ce concours si bienveillant, près de 400 lettres inédites ont été réunies ; en ajoutant
à ce nombre celles qui sont extraites des divers livres et Revues mentionnés ci-dessus, c'est une
augmentation de plus de 500 lettres que notre Edition compte sur celle de Migne, la plus complète
qui ait paru jusqu'ici ; et l'on peut espérer encore de nouvelles découvertes.
Si la quantité des pièces constitue le premier mérite d'une collection épistolaire, la manière
de les utiliser peut, sinon ajouter à leur valeur intrinsèque, du moins en augmenter singulièrement
le relief ; c'est pourquoi, les éditeurs de la présente publication se sont efforcés de ne pas rester au-
dessous des exigences de la critique contemporaine. Et d'abord, afin d'assurer l'intégrité des [XXI]
textes, ils ont voulu remonter aux sources toutes les fois qu'il a été possible de le faire. Cette
précaution est d'autant plus indispensable pour arriver à une parfaite exactitude, qu'il y a plus à se
défier de l'édition de 1626, base de toutes les autres. C'est seulement en ayant sous les yeux les
originaux ou des copies authentiques, qu'il est possible de reconstituer intégralement les lettres
dont on a détaché tant d'extraits pour les agglomérer de la façon que nous avons décrite. Faute de
ce soin, nos devanciers, après avoir donné les pièces de l'édition princeps, ont imprimé ensuite in
21 La Philothée de S. Fr. de Sales, Vie de Mme de Charmoisy (1879), vol. II.
22 La Lettre circulaire de Son Eminence est donnée ci-après, p. XXX.
21/318

3.2 Page 22

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extenso, en les présentant comme inédites, les lettres qui avaient servi à composer la première
collection.
L'ordre chronologique s'imposait de lui-même dans le classement des pièces, et il était
d'autant plus facile à suivre que la plupart sont datées. Quant aux autres, elles contiennent
ordinairement des détails, des allusions qui permettent de fixer presque à coup sûr l'époque à
laquelle elles remontent ; souvent aussi le caractère de l'écriture, qui varie d'une manière assez
sensible avec les années, autorise tout au moins des conjectures bien fondées. Les lettres pour
lesquelles tout moyen d'information fait absolument défaut sont reléguées à la fin de la publication.
Un travail non moins consciencieux préside à la restitution des adresses pour les lettres dont les
Autographes n'en portent aucune, et pour celles qui sont empruntées aux anciennes éditions. C'est
sur des preuves certaines, mais qu'il serait fastidieux d'exposer chaque fois, que nous avons basé
l'attribution de ces adresses ; et, quand la certitude manque, on préfère s'abstenir de toute
désignation plutôt que de hasarder quelque affirmation contestable.
Restituer dates et adresses aux pièces d'une collection épistolaire, c'est faire revivre l'auteur
; à ce prix seulement sa correspondance devient ce que nous avons dit plus haut, une sorte
d'autobiographie dans laquelle il se peint lui-même. Mais à cette vie il faut un terrain sur lequel
elle puisse évoluer. Scène, milieu sont créés par les notes biographiques et historiques qui groupent
autour de l'écrivain tous les personnages auxquels il eut affaire. [XXII] L'absence de ces données
condamne le lecteur à errer dans un monde tellement impersonnel qu'il ne peut s'y intéresser ; en
effet, lire les lettres de notre Saint dans la plupart des anciennes éditions, c'est se heurter à des
tombes sans épitaphes. Notre prétention est de ressusciter ces morts, de transformer ce cimetière
en une promenade publique où l'on ne rencontre que des visages connus.
Pour atteindre ce but, quel surcroît de travail il faut s'imposer et à quelles erreurs ne
s'expose-t-on pas, surtout lorsqu'on se trouve, et c'est le cas présent, en face de plusieurs milliers
de noms à identifier ! Telles sont les objections très judicieuses qui nous ont été adressées. La
majorité des lecteurs nous saura gré de passer outre. On allègue un surcroît de travail. C'est plus
que cela (l'expérience faite au cours de ce premier volume nous permet de parler en connaissance
de cause) : annoter le texte dans la mesure où nous l'avons entrepris, c'est quadrupler sa peine.
Mais le résultat est proportionné à l'effort.
On ajoute, et ceci est plus grave : Que d'erreurs possibles ! Ce serait témérité d'en
disconvenir. Toutefois, il est des hardiesses que Dieu bénit, et du reste nous ne hasardons pas
beaucoup, car les moyens d'information abondent ; telle est la sympathie qu'éveille le nom de saint
François de Sales qu'il suffit de l'évoquer pour obtenir un concours bienveillant. Nous l'avons
toujours trouvé, ce concours pour tout ce qui concerne notre pays, auprès du savant, et regretté
comte Amédée de Foras, qui se survit à lui-même dans son monumental ouvrage : Armorial et
Nobiliaire de Savoie, malheureusement inachevé. Le comte de Mareschal de Luciane, continuateur
de cette publication, ne fait pas à nos fréquents recours un accueil moins engageant23. Monseigneur
notre Evêque a daigné mettre à notre disposition les Registres de l'Evêché, contemporains de notre
Saint. C'est une mine d'informations encore peu exploitée, où nous avons trouvé des documents
utiles pour reconstituer la physionomie des membres les plus marquants du clergé à cette époque.
Nombre [XXIII] d'érudits, dont il serait trop long de refaire ici la liste, veulent bien nous permettre
de puiser dans les trésors de leurs connaissances sûres et étendues.
Les archives des anciennes familles en Savoie et ailleurs nous sont aussi très obligeamment
ouvertes, sans parler des Archives et des Bibliothèques publiques, où des perquisitions soigneuses
ont été faites et se continuent par nos correspondants. Les Archives Vaticanes, celles des diverses
Congrégations romaines ; à Turin, celles de l'Etat et de la Chambre des Comptes ; à Paris, les
Archives et la Bibliothèque Nationale ; celles de l'ancien Sénat de Savoie, à Chambéry, sont
largement mises à contribution. Pour ce qui concerne l'établissement et le gouvernement de l'Ordre
de la Visitation, sujet qui occupe une place considérable dans la correspondance du Fondateur, le
Monastère d'Annecy possède des manuscrits d'une autorité incontestable, qui permettront de
23 M. le docteur Favre, de Faverges, vient de nous communiquer les précieux manuscrits Besson dont il est possesseur.
22/318

3.3 Page 23

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redresser bien des erreurs commises par nos devanciers. Il n'est pas moins riche relativement à
l'histoire locale, grâce à la générosité de feu M. Jules Vuÿ. Ce savant archéologue a remis aux
Archives de cette Communauté la précieuse collection de documents, qui avait été la passion de
sa vie. Ces documents sont fréquemment utilisés par les éditeurs.
Moyennant toutes ces ressources, ils sont en mesure de consacrer une note biographique
non seulement à chacun des correspondants de notre Saint, mais encore à la plupart des personnes
simplement nommées, la première fois qu'il est question d'elles. Néanmoins, si ces personnes
doivent ensuite compter parmi les correspondants, la note qui les concerne est renvoyée à la
première lettre qui leur est adressée.
Il nous a semblé trop encombrant d'indiquer chaque fois sur place nos sources
d'information. Cette indication est donnée dans le cas seulement où nous avons puisé à des sources
peu connues ou inaccessibles au public. Une Table générale de tous les auteurs qui nous ont fourni
des éléments de notes historiques paraîtra à la fin du dernier volume de la Correspondance. [XXIV]
Après avoir exposé les soins pris pour assurer l'exactitude du texte, la marche suivie pour
le classement et l'annotation des lettres, il reste à édifier le lecteur sur quelques autres détails de
notre méthode.
Parmi les lettres du Saint se trouve un petit groupe de pièces spéciales qui ne peuvent être
logiquement éparpillées dans la correspondance : ce sont des brouillons écrits pour diverses
personnes, notamment pour Mgr de Granier. Ces pièces seront renvoyées à la fin du volume auquel
elles appartiennent par ordre de rédaction.
Il est un certain nombre de lettres dont une double et même une triple leçon manuscrite
nous a été conservée24. Les divergences qui existent entre les minutes et le texte définitif sont
ordinairement signalées au-dessous de ce dernier. Quelquefois cependant, pour éviter un
encombrement au bas des pages, où se rencontraient déjà notes et traduction, la minute est donnée
in extenso à la suite du texte définitif, mais sans numéro d'ordre distinct, puisque dans ce cas les
deux pièces ne forment qu'un seul tout.
Quelques lettres, dont les Autographes n'ont pu être recouvrés, sont insérées à la fois dans
les deux Procès de Canonisation de notre Saint. Le texte du premier Procès, généralement le plus
exact, est alors préféré, et mentionné seul dans l'indication de provenance. C'est seulement quand
ce premier texte est complété et même, ce qui est rare, rectifié par l'autre, que nous les signalons
tous deux.
Les lettres latines et italiennes, qui composent en majeure partie ce volume, ont été traduites
avec soin, travail qui n'a pas été sans offrir quelque difficulté. Dans les premières, la clarté ne va
pas toujours de pair avec l'élégance du style, et les jeux de mots, les allusions [XXV] recherchées
contribuent parfois à envelopper d'un certain nuage la pensée de l'Auteur.
Plus simples et plus claires sont les lettres italiennes ; elles traitent pour la plupart d'affaires
si sérieuses, qu'en les écrivant le Saint n'a garde de se préoccuper du style, et ne se donne même
pas toujours le temps de songer aux règles de la grammaire. Personne ne lui en fera de reproches,
tant il met de bonne grâce à confesser que ses lettres sont écrites dans un « italien francisé, ou un
français italianisé. » Les phrases sont souvent enchevêtrées et l'orthographe assez irrégulière,
quelquefois bizarre. Elle sera maintenue néanmoins, sauf le cas de faute évidente25 et avec les
légères modifications que voici : Les accents graves seront suppléés dans le texte, partout où ils
sont nécessaires, et régulièrement substitués aux accents aigus placés de loin en loin par l'Auteur.
Ces derniers sont conservés dans les variantes, où même on a dû en ajouter quelquefois, quand
l'absence d'accent change la signification des mots. Les apostrophes toujours omises dans les
24 Faute de se rendre compte de l'identité de ces pièces, les précédents éditeurs les ont pour l'ordinaire répétées, avec
dates et numéros d'ordre différents. Telle est, par exemple, notre Lettre LXIII, dont le texte définitif est conservé à
Turin, une autre leçon à Annecy et une troisième à Rennes. Cette dernière leçon est inséree dans la Vie du Saint, par
Charles-Auguste. Hérissant donne la minute conservée à Annecy, avec addition entre crochets des variantes de la
leçon de Rennes. Datta publie l'original de Turin, daté du 39 décembre 1595. Migne et Vivès le donnent à cette date,
et de plus, reproduisent tous deux la leçon Hérissant à la date de septembre 1596.
25 C'est ainsi que l'adverbe non est souvent représenté par no, forme que le Saint avait retenue de son séjour à Padoue
et qui se retrouve encore dans le dialecte vénitien.
23/318

3.4 Page 24

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originaux pour l'article contracté de représentant dei, ont dû être suppléées afin de prévenir des
équivoques. On a cru nécessaire aussi de substituer la lettre v à l’ü fréquemment employé par le
Saint dans le substantif vescovo et l'adverbe dove. Pour plus de clarté, la plupart des abréviations
ont été interprétées ; on les a conservées néanmoins dans les adresses, les variantes, et la formule
si souvent répétée : V. S. Illma et Rma.
L'orthographe des originaux a été scrupuleusement reproduite dans le texte français. C'est
bien cette orthographe essentiellement progressive dont il est parlé dans notre Introduction
générale26. Nulle part, mieux que dans la correspondance, on en peut suivre les évolutions, ce qui,
pour les linguistes, ajoutera un intérêt spécial à cette partie des Œuvres de notre Saint Docteur.
Dans les lettres écrites par secrétaires, l'orthographe de ces derniers a été maintenue. [XXVI]
L'orthographe ancienne des noms propres est conservée dans le texte avec toutes les
variations permises à cette époque27 ; seulement, pour éviter des équivoques, on a régularisé l'usage
des capitales. Souvent le Saint les emploie pour les particules nobiliaires, et les supprime aux noms
patronymiques ; d'autres fois il les place aux deux mots. Nous n'avons respecté cette irrégularité
que dans sa propre signature.
Tout en réprouvant la liberté que se sont accordée nos devanciers, de mélanger aux lettres
du Saint, celles de ses correspondants, nous n'avons garde de méconnaître le haut intérêt qu'offrent
ces dernières. Loin donc de les rejeter de notre publication, nous en avons recueilli bon nombre
d'autres inédites jusqu'ici ; elles seront données sous forme d'Appendice à la fin du volume auquel
elles se rattachent, par ordre de date.
Une Table de correspondance permettra d'embrasser d'un coup-d'œil la provenance de
chaque pièce, de juger du nombre de celles qui sont inédites, de voir à quelle époque les autres ont
été publiées une première fois et quelle place elles occupent dans les éditions Vivès et Migne.
Un mot maintenant sur le contenu de ce premier volume : il correspond aux années de la
jeunesse de saint François de Sales, et, les dates fissent-elles défaut, on le devinerait au style, du
moins pour les débuts. On y retrouve l'enthousiasme et, osons le dire, l'emphase pardonnable à cet
âge, surtout à la fin du XVIe siècle, où le goût littéraire était si peu sûr. La langue vulgaire ne suffit
pas au jeune Saint, spécialement pour ses relations avec le sénateur Favre. Les deux amis
échangent dans un latin recherché, les témoignages d'une affection que le temps devait consacrer
; les jeux de mots abondent, et, si ces deux grands hommes ne nous étaient connus, la tentation
viendrait de penser qu'ils visaient au bel esprit. Le Prévôt rédige avec soin des ébauches dont les
surcharges et les ratures accusent le travail et le souci de [XXVII] bien dire. N'ayons garde
cependant de nous en plaindre : nous devons à cette habitude de posséder les lettres du Saint à son
ami, car les originaux ont disparu ; il ne nous reste que ces minutes oubliées par l'Auteur, au milieu
d'autres papiers.
Cette période de jeunesse littéraire dura peu. Les travaux de l'apostolat mûrissent vite,
surtout un apostolat aussi laborieux que fut celui du Chablais. Bientôt le style du Missionnaire
s'élève, tout en se montrant plus limpide et plus naturel. Ce n'est plus alors le temps de songer aux
fleurs de rhétorique ; le Saint ne pense qu'à Dieu et aux âmes, et, s'affranchissant de toute influence
étrangère, il devient grave et simple parce qu'il est enfin devenu lui-même. Ses espérances et ses
tristesses prennent vie sous sa plume, les dernières surtout, qui furent longtemps les plus
nombreuses. Pendant près de deux ans ses lettres ne sont pour ainsi dire qu'un long gémissement
sur la mauvaise foi des ministres et l'obstination des protestants qui refusent opiniâtrément de
l'écouter. De loin en loin, quelques éclaircies dans ce ciel si noir, quelques conversions éclatantes,
comme celles de l'avocat Poncet et du seigneur d'Avully ; puis de nouveaux déboires et de plus
pénibles déceptions. Son voyage à Turin, dans l'automne de 1596, l'accueil empressé que lui font
le duc de Savoie et le Nonce apostolique présagent un heureux revirement dans la marche des
affaires ; on y compte, on l'attend, mais en vain. Et voilà notre saint Missionnaire réduit de nouveau
à jeter des cris de détresse à Charles-Emmanuel Ier, qui fait de magnifiques promesses, aux
26 Tome Ier de cette Edition, p. XCV.
27 L'orthographe usuelle est adoptée dans les notes et les traductions.
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3.5 Page 25

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Chevaliers des saints Maurice et Lazare qui en empêchent la réalisation, à Mgr Riccardi lui-même,
toujours prêt à lui compatir et souvent impuissant à le seconder. L'heure viendra cependant où il
moissonnera dans la joie ce qu'il a si péniblement semé dans les larmes ; et les cérémonies
triomphales des Quarante-Heures de Thonon seront le couronnement de son héroïque apostolat.
C'est bien dans ces lettres qu'il faut chercher l'histoire la plus vraie qui ait été composée de
la mission du Chablais, et la plus palpitante d'intérêt, Elles sont écrites [XXVIII] avec une émotion
tellement communicative que l'on croit assister à cette lutte admirable où la vérité reconquiert pied
à pied un terrain qui lui est si chèrement disputé par l'erreur. Le Saint réfute d'avance les récits
calomnieux de nos adversaires, et ferme la bouche à ceux qui veulent insinuer que la conversion
de cette province a été obtenue par intimidation militaire ou à prix d'argent.
Que de révélations ne contiendraient pas encore les lettres qui n'ont pu être recouvrées, et
il en est un grand nombre ; car nous constatons avec peine que cette première période de la
Correspondance offre des lacunes considérables. Et plût à Dieu qu'il n'y en eût pas d'autres !
Malgré toutes les recherches faites depuis vingt ans, il reste assurément encore un grand nombre
d'épis ignorés à faire entrer dans la gerbe si belle déjà qu'est la collection des Lettres de saint
François de Sales. Au nom de la Religion et de la littérature, nous adressons un pressant appel à
tous les possesseurs de ces richesses, et nous pouvons promettre d'avance à ceux qui voudront bien
y répondre, avec notre gratitude la plus profondément sentie, celle des lecteurs de cette Edition, et,
ce qui est infiniment préférable, la protection spéciale du plus aimable des Saints.
DOM B. MACKEY, O. S. B.
25/318

3.6 Page 26

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Lettre-circulaire de S. Em. le Cardinal Parecchi, Vicaire
de Sa Sainteté, aux Evêques d'Italie
_____
Dal Vicariato, Roma, nella festa del S. Cuore, Du Vicariat, Rome, en la fête du Sacré-Cœur,
9 Giugno 1899.
9 juin 1899.
Pubblicato appena il primo volume
(1892) della nuova edizione delle opere di S.
Francesco di Sales, per cura delle religiose
della Visitazione del primo monastero di
Annecy, con l'intelligente concorso del dotto
benedettino P. Mackey, si guadagnò il plauso
universale degli eruditi.
La solidità della carta, la chiarezza ed
eleganza de' tipi, la correttezza del testo,
superiori a quanto poteva aspettarsi dalla
piccola gemma della Savoia, furono giudicati
pregi bene inferiori alla squisita diligenza,
posta ad assicurare V autentica lezione dell'
opera, e la diligenza portò sì generosi frutti,
che dal primo volume al decimo (1898), e
sperasi così fino all' ultimo, il pensiero di S.
Francesco di Sales, quale egli medesimo affidò
alle immortali sue pagine, v'è fedelmente
riprodotto e in modo definitivo.
Ora, pubblicate omai le opere
maggiori, fino ai discorsi, e in essi se ne
trovarono d'inediti non pochi, come si venne a
stampare le [XXX] lettere, notarono gli editori
che moltissime ancora ne giacciono ascose
nelle biblioteche e negli archivi di pubblici e
privati instituti.
Si rivolsero pertanto a me, come a
Superiore delle Salesiane ili Roma, affinchè
facessi appello agli Ordinariati d'Italia, in aiuto
all' impresa. Il che avendo io significato alla
Santità di N. Signore, Egli nel tanto suo zelo
per le sacre discipline e per le lettere, di buon
grado aderiva.
E però non solamente in mio nome e
delle Salesiane d'Annecy, ma in qualche modo
anche da parte del Santo Padre, invito e prego
gli Ordinariati d'Italia a procurare ricerche
nelle biblioteche e negli archivi dipendenti
dalla loro giurisdizione, se mai si trovassero
lettere od altri scritti inediti del Santo Vescovo
di Ginevra. E trovati, li prego di trarne copia
autentica, e spedirli o direttamente alla
Superiora del primo monastero delle Salesiane
Dès que parut le premier volume
(1892) de la nouvelle édition des œuvres de
saint François de Sales, publiée par les soins
des Religieuses de la Visitation du Ier
Monastère d'Annecy, avec l'intelligent
concours du docte Bénédictin P. Mackey, il
obtint l'applaudissement universel des érudits.
La solidité du papier, la clarté et
l'élégance des caractères, la parfaite correction
typographique, supérieures à tout ce que l'on
pouvait attendre de ce petit bijou qu'on nomme
la Savoie, furent considérées comme des
avantages bien inférieurs à l'extrême diligence
mise à assurer l'authenticité du texte. Cette
diligence a obtenu des résultats si excellents
que, du premier volume au dixième (1898)
et l'on espère qu'il en sera ainsi jusqu'au dernier
la pensée de saint François de Sales, celle
qu'il confia lui-même à ses pages immortelles,
s'y trouve fidèlement reproduite et d'une
manière définitive.
Or, les principaux ouvrages du Saint
ayant été déjà édités jusqu'aux Sermons, parmi
lesquels il ne s'en est pas peu trouvé d'inédits,
l'impression des lettres allait être commencée,
lorsque les éditeurs constatèrent qu'un grand
[XXX] nombre demeurent encore cachées
dans les bibliothèques et dans les archives des
institutions publiques et privées. En
conséquence, ils s'adressèrent à moi, comme
au Supérieur des Salésiennes de Rome, afin
que, faisant appel aux Evêques d'Italie,
j'obtinsse leur concours pour cette entreprise.
Ce qu'ayant moi-même exposé à Notre
Saint-Père le Pape, si grand est son zèle pour
la discipline sacrée et pour les lettres qu'il
acquiesça de grand cœur à cette pensée.
C'est pourquoi, non seulement en mon nom et
au nom des Salésiennes d'Annecy, mais aussi,
en quelque sorte, de la part du Saint-Père,
j'invite et je prie les Evêques d'Italie de faire
faire des recherches dans les bibliothèques et
les archives dépendantes de leur juridiction,
26/318

3.7 Page 27

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d'Annecy, od a me.
Anticipo i più vivi ringraziamenti, e
affido alla gratitudine di S. Francesco di Sales,
dell'opera che presteranno in onore di lui, la
debita ricompensa.
Dev.mo aff. in G. C.
LUCIDO MARIA Card. PAROCCHI,
Vicario generale di S. S., Superiore delle
Salesiane di Roma. [XXXI]
pour savoir s'il s'y trouve des Lettres ou autres
écrits inédits du saint Evêque de Genève. Et en
ayant trouvé, je les prie d'en tirer une copie
authentique et de l'expédier ou directement à la
Supérieure du Ier Monastère des Salésiennes
d'Annecy ou à moi.
En leur offrant à l'avance mes plus vifs
remerciements, je confie à la gratitude de saint
François de Sales le soin de rémunérer la peine
qu'ils prendront pour procurer sa gloire.
Très dévoué et affectionné en Jésus-Christ.
LUCIDE-MARIE Cardinal PAROCCHI,
Vicaire général de Sa Sainteté, Supérieur des
Salésiennes de Rome. [XXXI]
27/318

3.8 Page 28

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Avis au Lecteur
_____
La plupart des Lettres insérées dans ce volume ont été confrontées sur les originaux,
comme l'atteste l'indication de provenance placée au bas de chacune. L'absence de cette indication
distingue les Lettres empruntées à des publications antérieures. Voir à la fin du volume la Table
de correspondance, et l'Avant-Propos, p. xxvii.
Les éditeurs sont seuls responsables de l'adresse et de la date qui précèdent chaque pièce
; l'une et l'autre sont répétées à la fin quand elles figurent sur l'original. Il n'y a d'exception que
pour les lettres envoyées au duc de Savoie par intermédiaire. Ces lettres ne portant pour toute
adresse que ces deux mots : A Monseigneur, ce serait embarrasser le lecteur de les placer après
la clausule et la signature.
Quand la date attribuée à chaque lettre n'est pas absolument sûre, elle est insérée entre [
]. Ces signes sont également employés pour les mots qu'il a fallu suppléer dans le texte.
Les divergences qui existent entre les minutes et le texte définitif sont données au bas des
pages. Le commencement de la variante est indiqué par la répétition en italiques des mots qui la
précèdent immédiatement au texte, à moins que le point de départ ne corresponde à un alinéa, ou
que la corrélation ne soit évidente. La fin est régulièrement marquée par la lettre de renvoi. Celle-
ci signale le commencement de la variante alors seulement que cette variante embrasse plus d'une
page. Les passages biffés dans l'Autographe sont enchâssés dans des [ ].
Dans les variantes des lettres latines et italiennes les seuls passages qui diffèrent
considérablement du texte ou qui n'y figurent pas du tout ont été traduits. Il en est de même pour
la minute de la Lettre LIV. Pour cette dernière, une † indique le commencement du passage à
traduire.
On trouvera à la suite de la Table de correspondance un Index des notes historiques et
biographiques contenues dans ce volume. Pour l'orthographe des noms propres, voir l'Avant-
Propos, p. xxvii. [XXXII]
28/318

3.9 Page 29

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Lettres de saint François de Sales. Années antérieures a
1593
___
I. Au baron d'Hermance28. Protestations de respect et de
dévouement.
Paris, 26 novembre 1585.
Monsieur,
Despuys vostre dernier voyage en ceste ville j'avois tousjours bien bonne devotion de vous
escrire, ce que toutefoys je n'avoys osé fayre. Mays m'ayant escript un de mes amis de l'honneur
et faveur que vous aves faict a une mienne seur29, je me suys persuadé que le treuveries bon de
moy, auquel vous fistes tant d'acueil dernierement en ceste ville ; joinct aussi que ne pouvant
encores (Dieu m'en face la grace pour l'advenir) fayre paroistre [1] l'affection que j'ay de vous
fayre humble service, j'ay volu (comme il s'accoustume) vous en donner souvenance par lettres.
Et maintenant que je suys au milieu et meillieur âge de mes estudes, si je puys cognoistre seulement
par presumption que prenies en bonne part mes lettres, ce me sera comme un aultre corage pour
poursuyvre mon entreprise en l'estude, laquelle j'oseroys bien me promettre (sans me flatter)
reussira au bien que je desire, Dieu aydant, qui est de le bien pouvoir servir ; puys apres, vous
fayre service, a qui j'ay tant de debvoir et obligation.
J'auroys bien bonne volonté de vous escrire des nouvelles de pardeça, mays les nostres ne
sont que de colleges, outre ce qu'elles sont si incertaynes (on a faict le prince de Condé mille foys
mort) que pour ce seul respect il me semble que je suys asses excusé d'en escrire.
Atant je vous bayse bien humblement les mains, et prie Dieu, Monsieur, qu'il vous tienne
en santé et tres heureuse vie, vous suppliant de vous resouvenir de moy comme de celluy qui est
et sera a jamays
Vostre plus humble serviteur
FRANÇOIS DE SALES.
Monsieur Deage30 vous bayse bien humblement les [mains]. De Paris, ce 26 novembre
1585.
A Monsieur
Monsieur le baron d'Armence a la Chapelle.
28 François-Melchior de Saint-Jeoire, baron de Saint-Jeoire, de Féterne et d'Hermance, seigneur de la Chapelle,
chambellan du duc de Savoie, Charles-Emmanuel Ier. Dans le couraut de septembre 1384, ce seigneur fut envoyé à
Paris pour notifier à la reine mère le mariage du duc son souverain avec Catherine d'Espagne. En qualité d'ami de M.
de Boisy, il visita son (ils, alors étudiant au collège de Clermont. Devenu plus tard gouverneur du fort de Sainte-
Catherine et de celui des Allinges, gouverneur militaire des baillages de Chablais, Ternier et Gaillard, le baron
d'Hermance protégea notre Saint dans les débuts de la mission du Chablais, et lui donna pendant six mois l'hospitalité
au château des Allinges. Il mourut le 20 novembre 1595.
29 Gasparde, sixième enfant de M. de Boisy. Quoiqu'elle fut encore en bas âge, peut-être, selon les usages de l'époque,
s'agissait-il déjà pour elle d'un projet d'alliance auquel le baron d'Hermance se serait intéressé.
30 Jean Déage, natif de Cornier en Genevois, précepteur de saint François de Sales dès sa tendre jeunesse, le suivit à
Annecy, à Paris et à Padoue ; ce fut dans cette dernière ville qu'il prit le grade de docteur en théologie (11 septembre
1591). Rentré en Savoie, il obtint un canonicat au Chapitre de Saint-Pierre de Genève, l'année même où son illustre
disciple en était nommé Prévôt. Quand celui-ci fut élevé à la dignité épiscopale, le chanoine Déage, demeuré son
conseiller, devint son commensal, et vécut dans l'intimité du saint Evêque jusqu'à sa mort. (L'acte de son inhumation
est daté du 8 juin 1610.)
29/318

3.10 Page 30

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Revu sur l'Autographe conservé à Genève, Archives de l'Etat.
Voir le fac-simile placé en tête de ce volume. [2]
_____
Ibis. A un ancien professeur31 (Minute inédite)32. Succès des
armes du roi de Navarre. Epidémie parmi les étudiants.
Padoue, 26 juillet 1590.
Io tengo con Vostra Signoria un
particular obligo di ringratiarla, poi que (sic)
particularmente de i Savoyani suoi essa a (sic)
fatta memoria nella sua cortesissima lettera
messa a tutti i nostri concameranti. La ringratio
dunque que la habbi quella memoria di noi et
tanta cura del ben nostro, ch'essendo in messo
(sic) d'una città que tanto (se io non m'inganno)
si rallegra di quella nuova Navarrescha, lei non
sene pigli altramente contentezza per amor
nostro ; se ben anchora il zelo della fede
catholica nostra impediscila principalmente in
V. S. allegrezza d'un fatto33 tanto
compassionevole a chi lo [1bis] mira sensa
occhiali34 dell' affettione propria. Io non tengo
quella nuova nel summo grado di certezza, se
ben non ardischo negargli fede per esser così
sparsa, et non so quello ch'Iddio35 de i
tramontani voglia fare, poi che i peccati sonno
molto grandi.
Qui insino a 42 de'nostri Francesi si
ritruovano febricitanti ; di là, per quanto si
dice, avete anchora gran numero di maladie ;
onde di vostra lettera, che ci assicura de vostra
santà (sic), habbiam tirato tuti multo contento,
il quale communicherò al primo incontro al
segnor Benedetto Pracho, poichè non ci
vediamo mai sensa ragionar de V. S., a cui
bascio le mani et in nome mio et in nome del
segnor Giuanni Monsieur Deage, et parimente
nella sua buona gratia mi raccommando et
Je me tiens spécialement obligé de
remercier Votre Seigneurie, puisqu'elle a fait
une mention particulière de ses Savoisiens
dans sa très aimable lettre adressée à tous nos
condisciples. Je vous remercie donc d'avoir
quelque souvenir de nous, et tant de sollicitude
pour notre bien, que vous trouvant au milieu
d'une ville où, si je ne me trompe, on se réjouit
beaucoup de la nouvelle Navarraise qui s'y est
répandue, par affection pour nous vous n'en
éprouvez aucun contentement. Il est bien vrai
que le zèle de Votre Seigneurie pour notre foi
catholique est la cause principale qui
l'empêche de se réjouir d'un [1bis] évènement si
affligeant pour quiconque ne l'envisage pas au
travers des lunettes du propre intérêt. Je ne
tiens pas cette nouvelle comme absolument
certaine, bien que, la sachant si répandue, je
n'ose pas y refuser foi. Je ne sais ce que Dieu
veut faire de la France, car les péchés y sont
très grands.
Il y a ici jusqu'à quarante-deux de nos
Français atteints de la fièvre ; et, d'après ce que
l'on dit, vous avez encore chez vous grand
nombre de maladies ; c'est pourquoi nous
avons tous reçu beaucoup de contentement de
votre lettre qui nous assure de votre bonne
santé. A la première occasion j'en ferai part à
M. Benoît Pracho, car nous ne nous voyons
jamais sans parler de Votre Seigneurie, dont je
baise les mains, en mon nom et au nom de M.
31 Ce personnage paraît être Jacques Ménochius (1532-1607), qui professa le droit pendant plus de vingt ans à
l'Université de Padoue. Il l'enseigna ensuite à Pavie, sa ville natale, durant l'année 1589-1590. Il n'est pas
invraisamblable qu'il se soit rendu de là à Venise, ville dévouée à Henri IV, pour surveiller l'impression du second
volume de son traité De Præsumptionibus, Conjecturis... Commentariorum Pars secunda. Venetiis, apud F. Ziletti
1590.
32 Cette lettre a été découverte et acquise par la Visitation d'Annecy après l'impression des premières feuilles de ce
volume.
33 d'un fatto [il qual forse non riescira doue gl'huomini creddono.]
34 sensa occhiali [dell'interesse proprio...]
35 ch'Iddio [de la Francia...]
30/318

4 Pages 31-40

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4.1 Page 31

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offero.
Jean Déage ; pareillement je me recommande
A dì 26 Luglio 1590. Pregandola36 à sa bienveillance et m'offre à son service.
escusar il nostro italiano francesato o francese
Le 26 juillet 1590. Je vous prie
italianato. [2bis]
d'excuser notre italien francisé, ou plutôt notre
français italianisé. [2bis]
_____
36 Pregandola [ch'Ella mi perdoni se promenando me per l'Italia in queste righe, io avero voltato l'occhio in
Francia.]
31/318

4.2 Page 32

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II. A Dom François de la Fléchère, prieur de Contamine et de
Sillingy37 (Minute inédite). Regret de n'avoir pas reçu de réponse
à ses lettres.
Padoue, [automne 159038.]
Monsieur mon Parrein,
Si ceste mienne lettre prend plus heureusement port que plusieurs autres que je vous ay
escrit, elle vous asseurera de deux choses. Premierement, que comme je croys que n'ayes receu
aucune de mes lettres, bien que realement je vous en aye envoyé plusieurs a diverses foys, aussy
n'en ay je receu aucune des vostres despuys que j'estoys malade, comme si je ne devoys avoyr ces
deux consolations ensemble, santé et vos lettres. Les lettres que je vous ay envoyëes se sont peut
estre perduës, pour autant que nous payons le port avant qu'elles partent, et partant besogne païee,
malfaicte. Seulement, [3] je me plains de celles que monsieur Cadel et autres amys ont porté, que
j'eusse pensé devoir estre fidellement rendues. Et de vos nouvelles nous en avons tousjours eu
nostre part quand vous escrivies a monsieur Coppier39, car de vostre grace vous faysies tousjours
mention et de moy et de tous ces autres messieurs ausquels je ne cede poinct en ce faict, et sans
ceremonie je me nomme...
Revu sur l'Autographe conservé à la Visitation d'Annecy.
_____
37 Charles-Auguste de Sales s'est trompé en donnant à entendre, dans le Pourpris historique de sa Maison, que son
saint Oncle eut pour parrain François, fils de Nicod III de la Fléchère. Des documents authentiques établissent au
contraire que le Saint fut tenu sur les fonts baptismaux par un autre membre de la même famille, François, fils de
François-Philibert de la Fléchère. Ce personnage avait fait profession au prieuré de Contamine-sur-Arve, de l'Ordre
de Cluny, le 6 mai 1560. Le 11 novembre de la même année (l'acte de son institution est conservé aux Archives de la
Visitation d'Annecy, Collection Vuÿ) il fut nommé prieur de Sillingy, dignité à laquelle il joignit bientôt celle de prieur
de Contamine, et, en 1580, celle de visiteur de tous les couvents elunisiens de Savoie. En 1584, il prend les titres de
docteur en droit, avocat un souverain Sénat de Savoie et prieur de Vion. Son testament est daté du 3 novembre 1602.
38 Les dates des quatre lettres suivantes sont établies d'après de très fortes conjectures fondées non seulement sur la
teneur de ces pièces, mais encore sur le caractère des originaux, les particularités de l'écriture et de l'orthographe, etc.
39 Jean Coppier, alors étudiant en médecine à l'Université de Padoue ; il exerça dans la suite sa profession à Chambéry,
et continua d'entretenir avec le Saint des relations dont on trouve la preuve dans la correspondance de celui-ci.
32/318

4.3 Page 33

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III. A un inconnu (Minutes inédites). Remerciements pour une
lettre reçue de lui.
Padoue, [vers octobre 1590.]
Monsieur,
Je ne fis jamais chose qui meritasse que vous prissies la peine de m'escrire avec tant de
caresses comme vous aves faict le 24 de septembre40, dont je vous remercie d'autant plus
humblement de ceste vostre faveur, pour laquelle je m'offriroys a vous humblement si je ne vous
estoys desja tout obligé et dedié. Or, vostre lettre me servira au moins de tesmoignage que vous
prenes a gré l'affection que je vous porte, et partant j'ay pris un tres [4] grand contentement de voir
que desires que je retourne bien tost par devers vous, tout plein de belles qualités...
……………………………………………………………………………………………………...
Monsieur,
Vous pouves bien tant quil vous playra accroistre le monde d'obligations que je vous ay,
comme vous aves faict prenant la peyne de m'escrire le 24 septembre avec tant de caresses comme
vous aves faict ; mays vous ne pouves plus accroistre l'affection que je vous porte, et a vostre
service, icelle estant aussy grande qu'on la pourroit avoir
……………………………………………………………………………………………………..
Revu sur l'Autographe conservé à la Visitation de Turin.
______
IV. A un inconnu (Minute inédite). Témoignages de respect et
d'affection.
Monsieur,
Padoue, [octobre ou novembre 159041.]
Je me fais accroyre que monsieur des Granges42, present porteur, m'ayme beaucoup,
comme j'en ay eu de fort bons signes ; dont l'ayant prié fort instamment [5] qu'estant de pardela il
me recommandasse fort affectionnement a vostre bonne grace, je ne doute poinct que sil vous peut
trouver et se souvient, il ne face cela pour moy. Toutefoys, pour autant que peut estre ne vous
trouvera il pas comme il desire, et aussy quil est fort aysé a oublier si peu de chose comme je
40 de septembre. [Bien que tousjours j'aÿe eu extreme affection a vostre service...]
41 L'allusion que cette lettre fait à la vacance du Saint-Siège justifie la date que lui attribuent les éditeurs. Elle a dû
être écrite dans l'intervalle qui s'est écoulé entre la mort d'Urbain VII (27 septembre 1390) et l'élection de Grégoire
XIV (5 décembre de la même année). Il est vrai que le Siège apostolique fut vacant quatre fois pendant les années que
saint François de Sales passa à Padoue ; mais des raisons qu'il serait trop long de détailler militent en faveur de l'époque
indiquée ci-dessus.
42 Jacques des Granges, étudiant à l'Université de Padoue, appartenait, d'après Charles-Auguste de Sales, à une noble
famille de la Val d'Aoste, Il fut l'un de ceux qui signèrent en qualité de témoins les lettres-patentes concédant à saint
François de Sales le grade de docteur en droit. On lit en effet dans ces lettres : Datum et actum Paduæ... anno Domini
MDXCI... die Jovis, V mensis Septembris... præsentibus Rde Domino Joanne de Agio et Nobilibus Dominis Joanne
Baptista Valentiano, Amedeo de Bavo, Joanne Gulielmo Martineto... Jacobo de Granges, et Joanne Jacobo Andrerio,
omnibus Sabaudis.
33/318

4.4 Page 34

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suys,43 affin d'asseurer mon intention j'ay escrit ces deux mots que je vous addresse, par lesquels
je vous saluë tres humblement et affectionnement, et vous remercie de la memoyre que vous eustes
de moy quand monsieur de la Chapelle44 print congé de vous pour venir icy, lequel m'a encores
dict que d'autrefoys vous luy avies parlé de moy ; 45 ce que cognoissant ne venir de mes merites,
j'en honore d'autant vostre bonté, delaquelle je reconnoys toutes ces faveurs.
On a dict que le duc de Florence46 s'en alloit mourir et quil se traittoit de fayre Pape le
Cardinal de Sens47, ce que n'estant asseuré je m'en rapporte a l'evenement. Je presuppose que deux
de mes lettres vous auront estëes donnëe...
Revu sur l'Autographe conservé à la Visitation de Turin. [6]
_____
V. A un gentilhomme (Minute inédite). Remerciements pour la
bienveillance que lui témoigne ce gentilhomme et pour la lettre
qu'il en a reçue.
Padoue, [1591.]
Monsieur,
Despuys lhonnorable memoyre que vous fistes de moy par lettre a monsieur de Marry, il y
a quelque tems, qui me fut comme un'arre de vos graces, le grand desir que ja auparadvant j'avoys
d'estre accepté pour vostre serviteur tres humble s'estoit extremement accreu. Et pourtant j'avoys
a plusieurs foys prié monsieur de la Tornette48 et monsieur de la Porte49 de vous fayre present, de
ma part, et de moy mesme et de mon service, pensant par ce moyen, sans que je vous importunasse
par lettres (que je craignoys fort), vous pouvoir fayre sçavoyr combien je me connoissois honnoré
de vostre mention et combien humblement je vous en remercioys. D'autre part j'estimoys que sous
l'adveu de ceux qui m'eussent presenté a vous, j'eusse esté beaucoup mieux receu que je [7] n'eusse
osé me promettre sans presomption.50 Dont vous pourres asses connoistre, sans que je vous en die
autre, avec combien de satisfaction j'ay receu vostre lettre, combien j'en fays d'estat et combien
estroittement je m'en sens obligé, mays beaucoup plus de ce que par icelle vous me presentes.
Dequoy je prendray et retiendray bien cherement tout ce dont je seray capable ; car il ne messied
43 comme je suys, [je luy ballie ceste lettre...]
44 Jean-Baptiste de Valence, fils de Jean-Baptiste, seigneur de la Chapelle, dont le nom figure dans le document cité
ci-dessus ; il fut toute sa vie l'ami de notre Saint. On le retrouve plus tard (1617) juge-mage à Ternier et Gaillard,
conseiller du duc de Savoie, puis enfin sénateur (1er octobre 1632).
45 de moy ; [faveur laquelle bien que je ne merite, si ne laysse je pas d'en estre tres ayse...]
46 Ferdinand Ier de Médicis, qui régna de 1587 à 1609. C'étaient assurément de faux bruits qui circulaient au sujet de
sa santé ; car non seulement l'histoire ne mentionne aucune maladie du duc à cette époque, mais elle témoigne au
contraire de l'activité qu'il déploya pendant les diverses vacances du Saint-Siège qui se succédèrent alors à de si courts
intervalles.
47 Nicolas de Pellevé (1518-1394), d'abord Evêque d'Amiens, avait été transféré à l'archevêché de Sens en 1562, et
promu au cardinalat le 13 juin 1570.
48 Louis de l'Alée ou de Lallée, seigneur, puis baron de la Tournette et Songy (ses terres furent érigées en baronnie par
patentes du 5 février 1613), conseigneur de la Val des Clefs, chevalier grand-croix de l'Ordre des saints Maurice et
Lazare, ambassadeur en Suisse. Son testament est daté du 10 décembre 1623.
49 Il existait en Faucigny une famille de la Porte, dite de Vallon ; on ne saurait toutefois affirmer que le personnage
dont il est ici question appartint cette famille ; peut-être est-ce celui que nous retrouverons plus tard intendant de la
duchesse de Mercœur, et auquel notre Saint adressa une lettre le 6 juin 1603.
50 sans presomption. [Voyla, Monsieur, qui me garda de vous bayser les mains en escrit, que je vous ay baysees
mille foys humblement en mon affection. Et de la, Monsieur, ny je ne vous diray plus avec quelle mesme satisfaction
j'ay leue et releu vostre si courtoyse lettre...]
34/318

4.5 Page 35

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pas a vostre grande humanité de beaucoup presenter, mays ce seroit grande insolence a moy de51
n'en vouloir refuser.
Et maintenant, puys quil vous a pleu me monstrer de si bons signes, ains de me favre fayre
de si bonnes asseurances de vostre amitié en mon endroit, je vous supplieray tres humblement de
me fayre ce bien que de continuer, et me mettre en conte comme vostre tres humble et serviteur.
Et bien que je n'aÿe autre52 merite, si est que la grande et bonne affection que j'ay est suffisante
pour me fayre avoyr un lieu de mortepaÿe en vostre service, affin que j'aye le contentement, par la
continuation de ceste vostre faveur
Revu sur l'Autographe conservé à la Visitation d'Annecy. [8]
_____
VI. A un ami (Minute inédite). Assurances d'amitié. Désir
d'être connu d'un personnage de grand mérite. Nouvelles d'un
condisciple. Message de son précepteur. Un mot sur son
frère Gallois.
Padoue, 25 mars 1591.
Quas ad me 3 calend. Decembris 1590
et 10 calend. Februarii 1591 53 perscripsisti
simul accepi his diebus, ut copia litterarum
tuarum momentanea pænuriam earumdem
diuturnam compensaret. Cujusnam autem
culpa factum sit ut priores illas tam tarde
acceperim cogitare nolui, ne ab ea cogitatione
in amicorum quempiam quippiam iracundiæ
meæ derivaretur. Ingenti te metu perculsum ais
ne aliquam in te concepissem indignationem,
quod postremis meis litteris stomachari
viderer, quasi tu vel in amando me pertinax
non esses aut diligens in scribendo ; quo magis
miror in te eum metum 54 extitisse, qui sane «
in constantem virum cadere [9] non possit55. »
Sed id ita solvis : « Cuncta timemus amantes56,
» bene est, si tamen mihi optio relicta est.
Gratius accepi quod posterioribus
scribis adduci non posse ut credas in me
aliquam tui oblivionem cadere posse ; id apud
te firmissimum ac omni formidine remota
constitutum velim. Profecto scripsi dedique ad
te litteras non semel, 57 de quarum appulsu
J'ai reçu à la fois, ces jours-ci, les lettres
que vous m'avez écrites le 29 novembre 1590
et le 23 janvier 1591. Cette abondance
momentanée compensait ainsi la pénurie dans
laquelle vous m'aviez laissé. A qui la faute si
j'ai reçu si tard la première lettre ? Je n'ai pas
voulu le rechercher, de peur que cette
recherche ne fît retomber un peu de mon
mécontentement sur quelqu'un de mes amis.
Vous avez grandement craint, dites-vous, que
je n'eusse conçu à votre égard quelque
indignation, car dans mes dernières lettres je
semblais fâché de ce que vous n'êtes pas ardent
à m'aimer ou diligent à m'écrire. Je m'étonne
d'autant plus qu'une telle crainte ait pu exister
en vous, qu'elle ne peut assurément « s'emparer
d'un homme fort et constant. » [9] Si vous
l'expliquez de la sorte : « Tout éveille les
craintes de ceux qui aiment, » c'est bien, mais
à la condition que vous me dispenserez de vous
prouver mon affection en redoutant tout de
votre part.
Votre dernière lettre m'a été plus
51 de [penser a les accepter...]
52 autre [qualité qui me puysse pousser en ce lieu la...]
53 Februarii 1591 [scripsisti Chamberii...]
54 timorem
55 Innocent. III, in Decretal., lib. I, tit. XL, c. IV.
56 Ovidius, Metam., l. VII, 719.
57 non semel, [septimestre silentium non fuit...]
35/318

4.6 Page 36

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nihil audivi ; postea hinc inde ab amicis, modo
hoc modo illo, de te exquisivi pæne importune.
Mirum undique de te (in te etiam fere dixi)
silentium. Te in Galliis esse audio ; ad te
desino scribere, ab aliis de te sciscitari non
desino. Quid mihi culpæ est ? Hæ mihi sunt
omni actione majores exceptiones. Ergo,
quantumvis amantissimus, his timoribus
locum deinceps ne dederis ; quamvis enim ii ab
amore proficisci videantur initio, postea tamen
sæpe parvulis et brevissimis mutationibus
temporisque processu genitorem ipsummet
suum interimunt. At ne me de timore tuo [10]
timere reflectas ; 58 mihi enim de eo mentio est,
nullus vero metus. Quos de me passim seris
sermones apud tuos, maxime apud eum quem
hærum tuum appellas, vide ne ita accipiantur
quasi sementem agri tui colloces ac quod
sentio sentiant alii : tua tibi in ore esse, tuoque
te melle delectari. Hæc pro familiaritate.
Alioquin quid mihi optabilius quam me ex
nomine, te nominante, ab eo cognosci cujus
nomini me, si annueret, consecratum facere
omnibus bonis cæteris anteponerem 59 ? Quam
in sententiam corde premo plurima quæ nec
pænitus dicere possum, nec si possem, spatium
ad scribendum a latore præstitutum
permitteret.
Antonium, quem Franciscum vi
simpathiæ nominas, Merindulensem 60 suamet
manu inter tuas (sic) adscribam, bonum,
prudentem, ac supra ætatem philosophum [11]
juvenem ; hoc solo nomine miserandum quod
tanto ingenio genioque minime par sit nactus
corpusculum, sed calculo generando pessime
aptum (lapidem philosophicum a generante
nominarim). Morbo sibi omnibusque amicis
suis gravissimo decumbens ipse, ego assidens,
de te plurima, quibus plane effectum est ut tui
desiderio non minus quam sanitatis langueret.
Deageus præceptor noster te plurimum
salvere jubet. Fratrem meum non adeo mihi
dissimilem credo quin semper inter tuos
agréable. Vous m'écrivez, en effet, que rien ne
vous persuadera que j'aie pu vous oublier le
moins du monde. Je voudrais que cette
conviction demeurât en vous le plus
fermement possible et prévînt toute ombre de
défiance. Le fait est que je vous ai écrit, que je
vous ai expédié plus d'une fois des lettres, sans
savoir jamais si elles vous étaient parvenues.
J'ai demandé ensuite de vos nouvelles d'ici, de
là, tantôt à un ami, tantôt à un autre, jusqu'à me
rendre presque importun ; mais partout, silence
étonnant sur vous (peu s'en faut-il que je ne
dise contre vous). J'apprends que vous êtes en
France. Je cesse de vous écrire, je ne cesse pas
de demander de vos nouvelles. Quelle faute ai-
je commise ? Ces preuves de mon affection
sont plus fortes que toutes vos accusations.
Donc, quelle que soit votre affection, ne cédez
plus désormais à ces craintes. En effet, bien
qu'elles semblent au début engendrées par
l'amour, souvent dans la suite, par de très
petits, d'insensibles changements, elles tuent,
avec le temps, celui-là même qui les a
engendrées. Toutefois, ne croyez pas que votre
crainte m'inspire une [10] crainte équivalente.
Je la mentionne simplement, je ne l'éprouve
nullement. Quant aux paroles que vous semez
sur mon compte, par ci par là, auprès de vos
amis, surtout auprès de celui que vous appelez
votre maître, prenez garde qu'on ne les
interprète comme si vous semiez votre champ
pour que les autres pensent ce que je pense
moi-même, c'est-à-dire que vous proclamez
vos vertus, que vous savourez votre propre
miel. Ceci entre nous. Si cet homme consentait
à m'accepter comme sien ce serait pour moi un
bien préférable à tout autre bien ; rien donc ne
me sera aussi avantageux que de lui être connu,
au moins de nom, par votre entremise. Sur ce
sujet, je garde en mon cœur bien des choses
que je ne puis entièrement révéler, et, le
pourrais-je, que le temps laissé par le porteur
ne me permettrait pas de les écrire.
Antoine de Mérindol que, par
58 timere reflectas ; [in ejus enim sum mentione non timore...]
59 En rapprochant ce passage de la Lettre IX, p. 20, lignes 2 et 3, on est amené à conclure qu'il s'agit ici du célèbre
Antoine Favre, alors sénateur à Chambéry. Ce qui confirme encore cette hypothèse, c'est que (voir variante (70) le
destinataire de la présente lettre parait habiter la même ville.
60 Antoine Mérindol (1570-1624), qui devint dans la suite conseiller, médecin ordinaire de Louis XIII (1616) et
premier professeur de médecine à l'Université d'Aix, avait fait de brillantes études à Paris et à Padoue. Il a laissé des
traités de médecine très estimés, qui ont été publiés en un volume in-folio (Aix, 1635), sous ce titre : Antonii
Merindoli... Ars medica in duas partes secta, in qua non solum explicantur ea quæ ad medicinam discendam sunt
necessaria, sed multa quæ Theologos et Philosophos recreare valeant continentur.
36/318

4.7 Page 37

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remaneat 61 ; quamdiu vero pro ætate ex nobis
pendet tanquam accessorium majori fratri
cedit. Porro, ad omnes operas jus in me tibi
esse non patrinatus sed patronatus existimes
quæso. Subinde scribam vale.
Patavii, ipso annunciatæ salutis
salutatæque Virginis die.
Revu sur l'Autographe couservé à la
Visitation de Turin. [12]
sympathie, vous appelez François, de sa propre
main se consigne entièrement entre les vôtres.
C'est un jeune homme bon, prudent et
philosophe à un degré bien supérieur [11] à son
âge. Une seule chose est à regretter en lui, c'est
qu'il ait un corps chétif, peu proportionné à ses
grandes qualités, à sa belle nature. Il est fort
porté à engendrer la pierre (que chez lui on
pourrait appeler pierre philosophale). Il a été
retenu au lit par cette maladie très douloureuse
pour lui et pour tous ses amis. Je l'assistai.
Nous parlâmes beaucoup de vous, ce qui le fit
soupirer après vous tout autant qu'après la
santé.
M. Déage notre précepteur m'ordonne
de vous saluer mille fois. Mon frère me
ressemble assez, je crois, pour demeurer
toujours des vôtres. Pendant que son âge le
tient en dépendance de nous, il suit comme un
accessoire son frère aîné. Sachez que, pour
n'importe quel service, vous avez droit d'user
de moi, non il est vrai en qualité de parrain,
mais à titre de maître. Et sur ce, je vous dis
adieu.
Padoue, jour de l'annonce de notre salut
et de la salutation donnée à la Vierge. [12]
61 Gallois, frère puîné de saint François de Sales, avait été d'abord destiné à l'état ecclésiastique et pourvu même de la
cure de Corsier et d'un canonicat au Chapitre de Saint-Pierre de Genève ; mais ses vues ne tardèrent pas à se tourner
ailleurs. Il épousa (contrat dotal du 30 janvier 1597) Jeanne du Fresnoysde Chuyt, dont il eut plusieurs enfants, et
mourut le 29 juillet 1614.
37/318

4.8 Page 38

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Année 1593
_____
VII. A un ancien condisciple (Minute inédite). Remerciements
pour l'attention qu'a eue ce personnage de lui dédier ses thèses
de théologie. Espoir de le voir prochainement à Annecy.
[Annecy, 1595.]
Tuis equidem meritis ac virtutibus me
Depuis longtemps déjà vos mérites et
totum jam pridem debebam, doctissime vir ; vos vertus, homme très savant, auraient suffi
nunc autem titulo sane omni exceptione pour m'attacher à vous sans réserve ; mais
majore, ob benevolentiam scilicet qua tam aujourd'hui vous vous êtes acquis sur toute ma
amice cultissimas illas de theologia personne un droit sans égal par la bienveillance
conclusiones mihi nuncupare dignatus es, me qui vous a porté à me dédier si amicalement
totum sane tibi vindicas. Quid enim mihi vos très savantes thèses théologiques. En effet,
gloriosius in humanis accidere potuit quam que pouvait-il humainement m'arriver de plus
ignotum me quidem, tibi, doctissimo et glorieux que de m'entendre donner le titre
absolutissimo viro, pro amico provocari, cum d'ami par un personnage si docte et si accompli
in me nihil sit tale quod tuam mihi possit ? Il n'est rien en moi, homme obscur, qui puisse
conciliare voluntatem ? Quamvis enim patriæ ainsi me concilier vos bonnes grâces. Sans
ac primi litterarii tirocinii mihi tecum doute, nous sommes compatriotes et nous
intercesserit communio, tot me tamen ingenii avons commencé ensemble nos études
et doctrinæ [13] gradibus inferiorem tibi littéraires ; mais vous m'avez [13] tellement
fecisti, ut in tanta dissimilitudine mirum sit dépassé, votre génie et votre savoir ont établi
tantam amicitiam esse posse quantam tibi une si grande distance entre nous, que je
mecum esse vis.
m'étonne de l'intime amitié que vous voulez
Verum quando de tuo ad nos reditu tam contracter avec moi.
recte sperare jubet ducalis Patrimonii
Quoi qu'il en soit, le procureur
principalis procurator 62 consanguineus tuus, principal du Patrimoine ducal, votre parent, qui
vir de republica ac de me seorsim optime a si bien mérité de l'Etat et de moi en
meritus, expecto in dies avidius lætam illam particulier, nous fait justement espérer votre
horam qua te videre, audire ac amicissimis retour parmi nous. J'appelle donc chaque jour
complexibus excipere liceat. Interea et de tanta avec plus d'impatience cette heure de bonheur
tua in me propensione gratias agere quantas où il me sera permis de vous voir, de vous
maximas me [credas] tibique scias entendre, de vous serrer le plus
addictissimum, vir ornatissime, et Christum affectueusement possible dans mes bras. En
habeto [propitium].
attendant, daignez agréer mes plus vifs
remerciements pour la sympathie que vous me
Revu sur l'Autographe appartenant à Mme témoignez, et croyez-moi, très digne
Doroz, née d'Arcine, à Besançon. [14] Monsieur, votre plus dévoué serviteur. Que
Notre-Seigneur Jésus-Christ vous soit
[propice]. [14]
_____
62 Noble Louis Bonier, dont les patentes de procureur furent entérinées par le Sénat le 15 janvier 1587. Il mourut le 9
juin 1613.
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4.9 Page 39

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VIII. Au régent Ménenc63 (Minute inédite). Excuses pour le
retard mis à répondre à deux lettres. Immunités assurées aux
docteurs en droit et en médecine et aux maîtres d'école.
[Eté de 1593.]
Francisais doctissimo Domino
Menencho.
Arcepi jam bis litteras tuas omnino
jucundas, sed maxime quod amari me abs te
serio testentur. Prioribus cur non responderim
id fuit causse quod sperarem, cum Episcopo
meo Reverendissimo64, istuc coram videndi te
ocasionem futuram. Posterioribus vero ita
breviter respondeo. Minus credendum est tam
pio patri qualis est [15] Rmus Antistes meus de
filio testificanti, quod sæpissime etiam
prudentissimi parentes quod volunt in filiis
inesse credunt id bonum. Verum qualis sum
me tuum optimo modo scias esse. Quod tam
amanter scribas gratias ago quantas possum
maximas, ac ut etiam si et in me referre possum
saltem testificationem aliquam referam.
Quod audiverim plebem illam apud
quam sementem ingenii tui facis adeo rudem
esse ut te non immunem ab oneribus publicis
existimet, ac ego uti immunem te mea non
possum authoritate quæ nulla est facere,
authoritate sane Imperatoris Constantini
efficio. Sic enim edixit, Lege 6, Tituli 52, cujus
titulus est De Professoribus et Medicis, libro
decimo Codicis : « Medicos, grammaticos et
doctores legum, cum uxoribus et filiis et rebus
(hoc te verbum omnino liberum facit) quas in
civitatibus suis possident, ab omni functione et
ab omnibus muneribus vel civilibus vel
publicis immunes esse, et nec in provinciis
hospites recipere nec ullo fungi munere. »
Hanc Imperatoris sententiam et sua Glossa,
verbo Muneribus, [16] et Lex ultima ejusdem
Tituli, si recte principium cum fine
conjungatur, et Lex ultima in fine ff. De
François au très docte Monsieur
Ménenc.
J'ai reçu vos deux lettres qui m'ont été
très agréables, surtout par les assurances
qu'elles me donnent de votre affection pour
moi. La raison pour laquelle je n'ai pas répondu
à la première est que j'espérais, avec mon
Révérendissime Evêque, avoir une occasion
prochaine de vous voir ici. Et voici ce que je
réponds brièvement à votre seconde lettre. Il ne
faut pas trop ajouter foi aux paroles [15] d'un
père aussi indulgent que l'est mon Evêque
lorsqu'il rend témoignage de son fils ; car bien
souvent les parents les plus prudents se
persuadent trouver dans leurs enfants les
qualités qu'ils désirent. Enfin vous savez du
moins que tout ce que je suis est entièrement
vôtre. Je vous remercie de tout mon cœur des
paroles si aimables que vous m'écrivez, et je
ferai tout ce qui dépendra de moi pour les
mériter.
Comme j'entends dire que les
populations auxquelles vous consacrez vos
talents sont si grossières qu'elles ne veulent pas
vous affranchir des charges publiques, et
n'ayant nulle autorité pour le faire par moi-
même, je le fais du moins par l'autorité de
l'empereur Constantin, qui a édicté le décret
suivant dans la VIe Loi du Titre LII, intitulée :
De Professoribus et Medicis, Livre X du Code
: « Les médecins, les maîtres d'école et les
docteurs en droit avec leurs femmes, leurs
enfants et les biens qu'ils possèdent dans la
ville (ce mot-là vous affranchit complètement)
sont exempts de tout impôt et charge soit
63 Jean Ménenc, qui se fit un nom parmi ses compatriotes comme moraliste et pédagogue, était natif de Cluses en
Faucigny. Après avoir enseigné pendant neuf ans à Thônes, il alla perfectionner ses études à l'Université de Tournon
; rentré en Savoie, il exerça successivement ses fonctions à Rumilly, une seconde fois à Thônes et enfin à Cluses. On
lui doit entre autres ouvrages un curieux traité de morale intitulé : Sauvegarde pour les disciples de Jean Menenc,
moderne regent à Cluses, et autres à qui plaira. L'épitre dédicatoire de ce livre, datée du 1er juillet 1600, est adressée
: « A tres noble et tres, vertueux François de Sales, fort fameux et venerable Docteur Utriusque Juris, et Prevost de
l'Eglise de Geneve, tres meritant. » Ménenc, dont les dispositions testamentaires remontent au 23 octobre 1595, mourut
dans son pays natal vers 1610.
64 Claude de Granier qui occupa le siège épiscopal de Genève de 1579 à 1602.
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4.10 Page 40

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Muneribus et Honoribus65 66 in eum sensum municipale, soit publique, de toute corvée et
confirmant67, ut te imperatoria Majestas obligation de logement. » C'est le sens qui est
immunem omnino pronunciet.
par la Glose attribué au décret de l'empereur
Hæc raptim, neque plura scribere per (au mot Muneribus). La dernière Loi du même
occupationes licet. Vale ergo, et ab omni onere [16] Titre, si l'on compare exactement le
publico et ab omni malo immunis, meque commencement avec la fin, et les derniers mots
pergas amare qui scilicet tuus sum totus.
de la dernière Loi du Titre des Pandectes, De
Muneribus et Honoribus, le confirment. Ainsi
Revu sur l'Autographe conservé à la
la Majesté impériale vous déclare absolument
Visitation d'Annecy. [17]
affranchi de tout impôt.
Ceci à la hâte ; car mes occupations ne
me permettent pas d'écrire davantage. Portez-
vous donc bien ; demeurez exempt de toute
charge publique et de tout mal, et continuez à
bien aimer celui qui est tout vôtre. [17]
_____
IX. Au sénateur Antoine Favre68 (Minute)69. Réponse affectueuse
aux avances du sénateur Favre. Regret de n'avoir pu le
rencontrer lors de deux voyages faits à Chambéry.
Protestations d'estime et d'attachement.
[Août 1593.]
Clarissimo viro, Senatori integerrimo
Au très illustre et très vertueux
Antonio Fabro.
Sénateur Antoine Favre.
Accepi litteras tuas, vir clarissime et
Senator integerrime, tuæ in me benevolentiæ
pignus suavissimum, [18] quæ animum meum
tanquam insperatæ adeo commoverunt ut
permixta admirationi gratulatio mihi
J'ai reçu votre lettre, très illustre et
vertueux Sénateur, et ce gage précieux et
inattendu de votre bienveillance pour moi m'a
tellement [18] rempli de joie et d'admiration
que mon esprit demeure impuissant à vous
65 Pandect., l. I., etc. ut infra, annot. (66).
66 [Le Saint a ajouté en tête de la lettre la note suivante :]
Medicis immunitatem contulit Augustus gravi morbo liberatus ab Antonio Musa. Dion, [Hist. Rom.,] lib. 53.
In annot. ad Legem finalem Tit. 4, lib. 50 ff. (Auguste ayant été guéri d'une maladie grave par les soins d'Antoine
Musa, accorda l'immunité aux médecins.)
67 deducunt
68 Antoine Favre, qui a été proclamé par le Parlement de Paris « le plus grand magistrat du monde, » naquit à Bourg-
en-Bresse le 5 octobre 1557. Les brillantes études qu'il fît à Paris, puis à l'Université de Turin, le préparèrent à remplir
avec éclat les premières charges dans la magistrature savoisienne. D'abord juge-mage de la Bresse et du Bugey (1584),
sénateur au souverain Sénat de Savoie (1587), président du Conseil de Genevois (24 décembre 1596), il fut nommé
en 1610 premier président du Sénat de Savoie. Il exerça quelque temps les fonctions de gouverneur civil et militaire
de tout le duché en l'absence du marquis de Lans et du prince Thomas de Savoie Carignan, qui furent successivement
gouverneurs en titre, et fut envoyé à Paris (1618) en qualité d'ambassadeur extraordinaire. C'est pendant les quatorze
années de son séjour à Annecy que cet illustre magistrat composa la plupart de ses ouvrages, entre autres son Codex
Fabrianus qui lui acquit une célébrité européenne. Antoine Favre mourut à Chambéry le 28 février 1624.
69 Le chevalier Datta, qui le premier a publié cette lettre, en 1835, la présente à tort comme étant la reproduction d'un
original conservé à la Visitation d'Annecy. Les Archives de ce Monastère ne possèdent que l'Autographe d'une minute
plus incomplète, de laquelle sont extraites les variantes données au bas du texte principal. Ce dernier est tiré d'une
copie déclarée authentique, qui se conserve aux Archives de l'Etat à Turin.
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5 Pages 41-50

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5.1 Page 41

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meummet ingenium eriperet. Ea videlicet tua
humanitas qua juvenem tirunculum vir
gravissimus senatorii ordinis ad amicitiam
provocas, [et] vetus tuæ in me pietatis
promerendæ desiderium, parem cum
gratulatione admirationem concitarunt.
70Si qualis in me fuit jam pridem
observandi te et amandi propensio, ejus et
fuisset aliqua significatio, non tam ad
amandum te, ut modestissime loqueris, aliqua
provocatione opus mihi fuisse cognovisses,
quam concessione libere id agendi ac palam
profitendi quod intimis hærebat sensibus.71
[19]
Universo enim orbi litterario cum ex
fructu arbor optima et sis et habearis72, mihi
unus perpetuo propositus es quem noctes
diesque respicerem73, et ad cujus exemplar
quam maxime possem genuine animum meum
efformarem, non tantum quod nullibi
superiorem, paucos etiam habeas pares, sed
quod provincialia, civilia aut, ut ita dicam,
domestica exempla nescio quid habeant
acutioris energiæ ac efficaciæ74.
75 Cum vero non solum speciem, sed ne
quidem specimen tam expressee virtutis in me
ullum post aliquot annos viderem, mese
tenuitatis mihimet satis conscius, videndi [20]
te coram et audiendi manebat consilium ; ac
tuæ in me benevolentiæ, si quo fieri posset
modo, promerendæ tanto tenebar desiderio, ut
exprimer ces sentiments. La bonté qui vous
porte, homme vénérable de l'ordre des
sénateurs, à rechercher l'amitié d'un novice
inexpérimenté, et mon désir déjà ancien de
mériter votre affection excitent dans mon cœur
un contentement égal à ma surprise.
Si j'avais pu vous témoigner
l'inclination que j'éprouve depuis longtemps à
vous honorer et à vous aimer, vous auriez
compris que j'avais moins besoin d'être excité
à vous aimer, comme vous le dites avec tant de
modestie, que d'obtenir la permission de vous
exprimer ouvertement les sentiments intimes
de mon âme. [19]
Puisque vous êtes un arbre excellent,
et, par ses fruits, reconnu comme tel dans tout
le monde savant, depuis longtemps je me
propose votre exemple, et, jour et nuit, je tâche
autant que faire se peut de me conformer à ce
modèle. Je le fais non seulement parce qu'il est
impossible de rencontrer ailleurs des talents
supérieurs aux vôtres, et difficile d'en
rencontrer de semblables, mais surtout parce
que les exemples que nous trouvons dans nos
provinces, dans nos villes, et pour ainsi dire à
notre foyer, ont plus de force, d'énergie et
d'efficace.
Cependant, après plusieurs années ne
voyant pas paraître en moi, je ne dis pas
l'image, mais le moindre indice d'un tel mérite,
[20] tout en étant convaincu de mon
70 Si qualis jam pridem mea in te fuit observantia, ejus etiam fuisset aliqua significatio, nulla sane ad amandum te
provocatione opus esse, quam observantia et amore fruendi permissione... concessione.
[Au verso de l'Autographe, le Saint a écrit une seconde leçon de cette phrase. Nous la reproduisons ici :]
Si meæ erga te observantiæ tam veros habuissem testes quam virtutum mearum, ut id ex tua dicam opinione,
profusos audivisti laudatores, cognovisses sane me nulla ad amandum provocatione indiguisse, sed potius libere ac
palam quod intimis hærebat sensibus profitendi liberali abs te concessione.
71 [A la suite du mot concessione, on lit dans la minute autographe les deux passages suivants, qui se retrouvent sous
une forme différente dans la seconde rédaction. Voir p. 20, (75), et p. 23, (81).]
Tanto enim tuæ amicitiæ, si quo fieri posset modo, promerendæ arctabar... captus eram desiderio, ut cum
nihil amplius animus meus capere posset, omnis modestiæ ruptis repaculis, nisi brevi per aliquam occasionem
licentiam impetrassem, opportune, importune, ipse, qualis qualis sum tirunculus, gravissimum et senatorii ordinis
virum evocassem.
At dubitandum fuerat ne non tam in senatore clarissimo integritatem ac eruditionem venerari quam in
integerrimo viro senatoriam dignitatem, tutelam... (Mais il aurait semblé que [je cherchais] moins l'occasion de
protester de la vénération que m'inspirent votre vertu et votre savoir, que les avantages qui me reviendraient de la
protection d'un homme aussi respectable que vous l'êtes.)
72 Cf. Matt., VII, 16, 20.
73 Voir p. 11, note (59).
74 Non enim incerta aliqua fama, sed clarissima tui nominis celebritas, unguis leonem, vel potius, ut ex præscripto
Christi loquar, arborem fructus, apud omnes te adeo commendat ut et multos habeat amatores sui simul et admiratores.
(Ce n'est pas une renommée imméritée, mais la juste célébrité qui s'attache à votre nom (l'ongle révèle le lion, ou
mieux, selon le mot de Jésus-Christ, le fruit révèle l'arbre), c'est cette célébrité qui vous rend si recommandable à tous,
qu'elle vous acquiert quantité d'amis et d'admirateurs.)
75 [Pour cet alinéa, voir ci-dessus, p. 19, remarque (71), et les cinq lignes qui suivent.]
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5.2 Page 42

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cum illud amplius animus meus capere non
posset, omnis modestiæ ruptis repaculis, nisi
brevi per aliquam occasionem licentiam
impetrassem, opportune, importune, ipse
qualis qualis sum tirunculus gravissimum
senatorem in suavissimum amandi certamen
evocare non dubitassem.
Quam occasionem cum76 præcipue
spero, tum vero, nescio quo malo meo, factum
est ut non utroque suo pede mihi constet
opportunitas. Cum enim, ut in advocatorum
numerum adscriberer77, Chamberium peto,
credoque admissus purpuratos omnes Patres
salutare, de more gratias agere ac per hanc
occasionem inter tuos locum impetrare,
meaque manu nomen meum scribere, quia
coguntur ad militiam nobiles78, hora
intempestiva [21] ipse cogor discedere
insalutato te, quem obiter salutare, præsertim
cui antea eram ignotus, nulla salutatione minus
ducebam. Hisce vero Paschalibus festis
præteritis dum adessem tu aberas, cum, D.
Coppier doctore medico ductore, tuas sedes
frustra peterem.
79Quare cum jam per litteras ac
obsignato veluti rescripto ferventem jam et
suapte natura pugnacissimum hoc in genere
certandi militem provocaveris, videndum est
utique tibi non tam quis prior in aleam
descendent observes, quam quis posterior
supersit.
Neque tamen efficias velim te priorem
amasse, quod existimas aut hinc minus me tibi
debere aut te magis virtutibus meis. Ego enim
tuarum illustrium virtutum et amator et
admirator fui priusquam vel de nomine tibi
notus esse possem, nec ante amavi quam in te
essent eæ quæ connatæ tibi sunt eximiæ animi
dotes, quæ te non amari nullo unquam tempore
permiserunt. Quod autem per summam
humanitatem prior ipse scripseris, id nimirum
[22] causæ fuit et te priorem dare, quod
divinius est, et me priorem accipere, quod
inferius decebat80. 81 Et ego ne potius in te
senatoriam dignitatem, quam in senatore
impuissance, je n'en ai pas moins gardé le désir
de vous voir et de vous entretenir. Ce désir de
me concilier votre bienveillance, s'il était
possible, était si ardent que mon âme ne
pouvait plus se contenir ; et si l'occasion ne s'en
était présentée, en dépit de toute modestie, je
n'aurais pas hésité, moi faible jeune homme, à
venir à temps ou à contre-temps vous
provoquer, vénérable Sénateur, à cette douce
lutte d'amitié.
Alors que j'aspirais avec ardeur à saisir
cette occasion, je ne sais par quel contre-temps
elle m'a échappé. Lorsque je suis allé à
Chambéry me faire inscrire au nombre des
avocats, j'espérais qu'une fois admis, je
pourrais saluer tous les Sénateurs, les
remercier selon l'usage, et, à cette occasion,
obtenir place parmi vos amis en vous laissant
mon nom écrit de ma main ; mais voilà que la
noblesse est appelée aux armes, et que je suis
contraint de partir à une heure indue, sans vous
avoir vu ; car j'aurais considéré comme un [21]
plus grand mal de vous saluer seulement à la
hâte, surtout vous étant inconnu, que de ne pas
vous saluer du tout. Aux dernières fêtes de
Pâques, me trouvant à Chambéry, je me
présentai chez vous, conduit par le médecin
Coppier ; ce fut encore inutilement, car vous
étiez absent.
Maintenant que par votre lettre, comme
par un cartel signé, vous avez provoqué un
combattant qui par nature est très ardent dans
ces sortes de luttes, prenez garde d'avoir
bientôt à considérer moins lequel de nous deux
est le premier descendu dans l'arène que celui
qui y demeurera le dernier.
Ne prétendez pas cependant, comme
vous le faites, avoir été le premier à m'aimer,
et ne croyez pas par suite que je vous doive
moins ou que vous deviez davantage à mon
mérite. J'ai admiré et aimé vos éclatantes
qualités avant même que mon nom vous fût
connu, mais non point avant que vous ne
fussiez enrichi de ces dons éminents innés en
votre âme, et qui, en tout temps, ont fait qu'il a
76 Quod dum
77 Le 24 novembre 1592.
78 Cet appel aux armes est sans doute celui que fit, en octobre 1592, le marquis de Treffort, lieutenant-général de la
Savoie, alors que le duc Charles-Emmanuel Ier, pressé par Lesdiguières, se voyait contraint de concentrer en Piémont
ses troupes régulières.
79 [Ce qui suit, sauf le dernier alinéa, n'a pas de corrélatif dans la première rédaction.]
80 Act., XX, 35.
81 [Voir ci-devant, p. 19, remarque (71), et la variante, p. 20, lignes 3-8.]
42/318

5.3 Page 43

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consummatissimam virtutem colere
existimarer, absentem salutare minime
consentaneum videbatur, cum præsertim me
non ejusmodi juvenem crederem qui in ore vel
aure cujusquam purpuratorum Patrum
venissem, in intima videlicet juvenili umbra
adhuc delitescens. Quod cum secus evenerit, et
lætandum mihi est me tam facile tuam
benevolentiam consecutum, quæ non tam
superbiam (etsi non levis esset titillatio) excitat
ullam quam in melius eundi animos addit.
Et simul verendum ne cum minora,
forsan etiam nulla, quæ de me audivisti majora
in recessu, persenseris, et te amasse et amorem
significasse pœniteat, ac is quem inde
suavissimum gusto fructum præcoci maturitate
perceptum repente etiam marcescat. Verum id
tua moderabitur humanitas, quam ita cum
summa [23] prudentia in te conjunctam esse
non dubito, ut nullæ bonæ vel malæ famæ
exaggeratio, additio, substractio, nulla etiam
referentium ornamenta ac locupletationes te
decipiant. Quare sive mei ad virtutem studii
promovendi causa, sive tuæ in eos qui vel
exiguum habent ingenii ac probitatis
sementem (quorum in te sunt uberrimæ
segetes) propensionis sedandæ, non amaveris
tantum (quod fide non negata referentibus
necesse habebas), sed etiam scripseris, nihil
formido quin deinceps amare pergas.
Ego quo minus me vel de nomine tibi
notum esse divinabam ac adeo tuas
expectabam litteras, eo magis tantam tuam
humanitatem sum præter modum admiratus,
quo factum est ut in immensum tui aspectus et
collocutionis
desiderium
creverit.
Admirationem enim cognoscendi desiderium
parere philosophiæ in limine tutum est
proverbium82.
Interim, dum id expecto, et mihi quam
maximæ agendæ gratiæ quod prior scripseris,
promitto83 me in colendo te [24] et observando
nullum unquam habiturum superiorem, ac tuæ
in me humanitati intima responsurum
voluntate84, quamvis meæ minus tersæ litteræ
jucundissimis et elegantissimis quas dedisti
non respondeant. Quas dum capio, lego
identidem ac relegendi finem facio nullum,
tanta me capit voluptas ac tui observantia
été impossible de ne vous pas aimer. Si, par
une bienveillance extrême, vous avez été le
premier à m'écrire, cela prouve seulement que
vous avez donné [22] le premier, ce qui est plus
divin, et que j'ai été le premier à recevoir,
comme il sied à mon infériorité. Et pour ne pas
paraître honorer en vous la dignité sénatoriale
plutôt que la vertu consommée du sénateur, je
n'estimais pas convenable de vous adresser
mes hommages à distance, car je ne me croyais
pas un jeune homme assez important pour
mériter que mon nom eût été prononcé ou
entendu par quelqu'un des membres de votre
illustre corps. Mais puisqu'il en est autrement,
je me réjouis d'avoir pu acquérir aussi
facilement votre bienveillance, ce qui sera
pour moi, non tant un sujet d'orgueil (bien que
mon amour-propre ait droit d'en être flatté)
qu'un stimulant à mieux faire.
En même temps, j'ai toutefois à
redouter que, lorsque je me présenterai à vous,
constatant l'infériorité de mon mérite qu'à
distance vous vous figurez si grand, vous ne
regrettiez de m'avoir témoigné tant d'affection.
J'ai à craindre que, cueilli prématurément, le
fruit si doux que me faisait goûter cette
affection ne vienne à se flétrir. Mais cette
crainte sera modérée par la connaissance que
j'ai de votre grande bonté, laquelle est unie à
une prudence telle qu'aucune [23] exagération,
addition, diminution, aucun artifice et habileté
de langage en ceux qui vous parleront de moi,
soit en bien soit en mal, ne saurait vous
tromper. Je ne m'informerai donc pas si c'est
pour m'exciter à la vertu que, non content de
m'aimer, vous daignez encore m'écrire, ou
(comme vous vous y croyez obligé par ce qu'on
vous a rapporté de moi) si c'est pour satisfaire
votre propre inclination envers ceux qui ont en
eux-mêmes quelque faible semence de cette
probité et de ces talents qui fructifient si
abondamment en vous. Quoi qu'il en soit, je ne
craindrai plus que vous ne cessiez désormais
de m'aimer.
Pour mon compte, moins j'attendais de
vos lettres, ne croyant pas vous être connu
même de nom, plus j'ai admiré votre extrême
bonté, et plus a grandi le désir que j'éprouvais
de vous voir et de vous parler. Que l'admiration
82 Aristot., Metaph., l. I, c. II, ante med.
83 prior scripseris, sanctissime recipiens
84 humanitati probe propensissima intima responsurum observantia
43/318

5.4 Page 44

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quantam animus meus capere potest ; adeo excite le désir de connaître, c'est une maxime
scilicet verum est captum esse qui cæperit85assurée qui s'apprend avec les rudiments de la
philosophie.
En attendant le bonheur de vous voir, je
vous remercie de ce que vous avez bien voulu
m'écrire le premier, et je vous promets de ne
[24] me laisser surpasser par qui que ce soit
dans le soin de vous honorer et de correspondre
à votre amitié. Je le ferai de toute l'étendue de
ma volonté, bien que cette si petite lettre ne
puisse répondre à l'amabilité et à l'élégance de
la vôtre. Toutes les fois que je la prends (je la
lis et relis sans fin) je me sens pris de la volonté
et de la joie de vous estimer davantage, à tel
point que mon âme reste prise dans son
impuissance. Ainsi est-il vrai que celui-là est
pris qui croyait prendre...
_____
X. Au même (Minute inédite). Remerciements pour lui avoir pro
curé l'amitié de François Girard
[Fin octobre 1593.]
86Factum hoc quidem fabre est,
amplissime vir, uti quos amas cæteris etiam
summis quibusque viris [25] amabiles tua
facias eloquentia.87 Qua in re parem gratiam
reddere nullo possum [modo]; in amando
namque, uti ne tecum quidem, quem tamen
amantissimum immortali nota percipio, certare
dubitaverim, sic alicujus amicitiam tibi
conciliare nec meum fert ingenium nec
clarissimum tuarum virtutum lumen. Non
enim is sum apud aliquem cujus authoritate
[hoc fieri posset]. Quamobrem tam majores
ago gratias quanto minus reddere nullo possum
modo. Amare namque omnes possunt; amicos
sibi conciliare permulti, ut ego quidem censeo,
aliis vero, non nisi quorum authoritas præcipua
atque exundans omnino sit. Necesse (sic) est
ea virtus cujus splendor non possessori suo
tantum illustrando, sed cæteris etiam satis esse
possit.
Quo mihi majores habendæ sunt tibi
C'est bien l'œuvre d'un [habile] artisan,
très digne Monsieur, de parvenir, grâce à votre
éloquence, à faire aimer des personnages les
[25] plus illustres ceux que vous aimez vous-
même. Je ne puis nullement à cet égard vous
rendre pareille faveur ; car, bien qu'en affection
je n'hésiterais pas à lutter même avec vous, que
je reconnais par des signes indubitables être un
homme des plus aimants, toutefois la
prétention de vous concilier l'amitié de qui que
ce soit n'est compatible ni avec la médiocrité
de mon mérite, ni avec l'éclat de vos vertus.
Auprès de personne, en effet, je n'ai l'autorité
suffisante ; aussi vous dois-je une
reconnaissance d'autant plus grande que je puis
moins vous offrir de retour. Tout le monde
peut aimer ; beaucoup à mon avis peuvent se
faire aimer ; mais susciter aux autres des amis
est au pouvoir de ceux-là seulement qui
jouissent d'une autorité transcendante et
reconnue. Il faut pour cela posséder une vertu
85 Is., XIV, 2.
86 [Au commencement de la page sur laquelle est écrite cette minute, on lit les mots suivants, qui appartiennent au
projet d'une lettre destinée à François Girard :]
Ut ad me hominem ignotum scriberes, vir clarissime, D. Fabrum...
87 eloquentia. [In amando namque, quamvis justa tecum lance contendo, amare namque etiam ego possum...]
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5.5 Page 45

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gratiæ, qui mihi tantum fabricasti amicum
quantum alioquin ne Nestorea quidem ætate
meis meritis consequi potuissem. Vere [26]
nullam unquam tibi parem me gratiam daturum
sperandum est, propterea vel maxime quod, ut
ea pollerem authoritate, qui te non colat, non
amet, non suspiciat, si quis aliquem invenire
velim doctum aut probum virum hemispherii
hujus nostri limites deinceps egrediatur
necesse est; neque alioqui, si is non esses,
Franciscum Girardum88, quantum tua docet
epistola, accurre foret... Et rursum ut89
argumenti perspicuitate ac lumine res confici
verius quam proferentis opera diceretur.
Quapropter, ut quod jam proximum est
faciam, quoniam nullus qui te non summopere
suspiciat, nullus Franciscus Girardus alius
superest, quicquid hujus rei fuerit id tibi totum
ac integrum me debere profitear. Ecquid enim
in me sit juris uti virum longe gravissimum,
annorum jam non exiguo cumulo venerandum,
disciplinarum ac virtutum omnium ornamentis
cumulatissimum, Franciscum Girardum, pro
amico (ut ejus retineam verba) provocassem
nihil omnino video.90 In te tantum ille est [27]
amor erga me tuus singularis qui satis sit uti
omnes me diligant, quem tam fortunatum 91 eo
vident nomine ; adeo nimirum vel errantes
summos viros facile quilibet sequitur.92
Quare consentaneum uti eum socium
appelles qui sua voluntate quidem sed tuo solo
me diligat amore, quem tui non sui cognoverit
opinione.93 Ego sane rem ratam haberi
[censeo].94
Revu sur l'Autographe appartenant à Mme
Doroz, née d'Arcine, à Besançon. [28]
dont la splendeur non seulement illustre celui
qui en est doué, mais encore rejaillisse sur tous
les autres.
C'est pourquoi je vous rends des
actions de grâces d'autant plus vives pour
m'avoir procuré un ami tel que, dussé-je vivre
toute la vie d'un Nestor, je n'eusse pu l'acquérir
par mes propres mérites. Du reste, eussé-je
l'autorité suffisante pour cela, n'espérez pas
que je vous [26] rende jamais pareil service ;
car, à moins de sortir de notre hémisphère, il
serait impossible de trouver un homme de
science et de probité qui ne vous vénère, ne
vous aime, et ne se propose vos exemples pour
modèle. Et si vous n'aviez pas toutes les
qualités qu'on vous attribue, c'est précisément
à François Girard, d'après ce que vous me dites
de lui dans votre lettre, que je devrais aller pour
les rencontrer... Vous voyez donc que ma
preuve ressort plus évidemment par sa propre
force que par l'habileté de celui qui l'expose.
Pour en venir à une conclusion déjà
manifeste, comme il n'est plus personne qui ne
vous honore grandement, comme il ne reste
plus d'autre François Girard, je déclare que,
dans cette affaire, je vous dois absolument
tout. Je ne vois rien en moi qui puisse
provoquer (pour me servir de la propre
expression de François Girard) l'amitié de ce
personnage si grave, déjà vénérable par l'âge,
et si magnifiquement [27] orné de toutes les
sciences et de toutes les vertus. C'est en vous,
c'est dans l'affection singulière que vous me
témoignez qu'il faut chercher la cause de mon
bonheur. Tous m'aiment pour cela seulement
qu'ils me voient honoré de votre estime, tant il
est vrai qu'on suit facilement les grands
hommes, même quand ils se trompent.
Il convient donc que vous appeliez
compagnon celui qui veut bien m'aimer, il est
vrai, mais seulement par amour pour vous,
88 Voir la note jointe à la Lettre XXXIe.
89 ut inveniretur
90 video. [Video quidem in te mellitissimos mores, eloquentiam singularem ac apud bonos omnes virtutis comitem
perpetuam authoritatem, quæ demissima quæque possit altissime collocare ac exigua dicendo maxima facere ; sed me
jam alio trahit ingenium.]
91 beatum
92 sequitur. [Agnosco igitur pressissime tuum illud esse singulare beneficentiam uti me Franciscus Girardus minime
antea cognitum diligat.]
93 quem tuis non suis cognoverit oculis. [Qua in re mirum est quam bene meus tuum sequatur genius. Vellem enim
semper, vir amplissime, quos amo amarent omnes; plurimumque cuperem id meo fieri ministerio quo mihi magis...]
94 Il peut se faire que les pièces X et XI ne soient que les ébauches d'une même lettre ; néanmoins, elles offrent assez
de divergences de style et de pensées pour qu'on n'ose pas l'affirmer absolument.
45/318

5.6 Page 46

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puisqu'il ne me connaît pas personnellement,
mais seulement d'après l'opinion que vous avez
conçue de moi. Certes, pour moi l'affaire est
terminée… [28]
_____
XI. Au même (Minute). Exposition des mêmes pensées.
[Fin octobre, 1593.]
Amplissimo Senatori Antonio Fabro,
Franciscus de Sales, Ecclesiæ Gebennensis
Præpositus, salutem dicit.
Au très illustre Sénateur Antoine Favre,
François de Sales, Prévôt de l'Eglise de
Genève, présente ses salutations.
Si tuis virtutibus jam pridem, aut tuæ
erga me humanitati me totum non deberem,
deberem nunc profecto titulo omni exceptione
majore, ob benevolentiam Francisci Girardi,
cujus tu mihi author extitisti, tua scilicet, uti
litteris ad me suis mandavit, eloquentia et apud
eum auctoritate. Quid enim tali amico
optabilius in humanis esse potest? Donum
istud est ipsa raritate illustre, ac quod nullo
possit æstimari pretio longe pretiosissimum,
mihique eo suavius possidendum, quo certius
agnosco nihil unquam tale meis meritis
accedere potuisse.
Neque vero propterea in te quicquam
imprudentiæ [29] esse dixerit quispiam, quod
num donatarius cum dono sibi certa respondeat
proportione parum prospexeris; verum enim
est quod Alexander Magnus credidit, satius
fore si donatore dignum sit donum, licet
alioquin imparem sortiatur donatarium95, ut in
eo non tam ad quem, quam a quo proficiscatur
considerandum sit. Rem ergo fecisti meis
longe superiorem meritis, Francisci Girardi
humanitate dignam, ei quam tu mihi tecum
esse voluisti amicitiæ consentaneam, qui mihi
bonum illud animi tui singulare, hoc est,
voluntatem eximii viri Francisci Girardi, mihi
quoque fecisti commune, atque, quod
consequens erat, me, jampridem in solidum
tuum, Francisco quoque Girardo tuo in
solidum adduxeris, ne vel minimæ rei inter vos
societas desideraretur.
Qua in causa nullam plane sentio
formidinem ne aliquam inter vos concissionem
dividendo experiri velitis, quandoquidem
Si vos vertus et votre bienveillance
pour moi ne vous assuraient depuis longtemps
des droits à mon dévouement, il vous serait
acquis aujourd'hui à juste titre en retour des
agréables relations que vous m'avez procurées
avec François Girard ; car, d'après sa lettre,
c'est à l'influence et à l'autorité que vous avez
sur lui que j'en suis redevable. Que pouvait-il,
en effet, m'arriver de plus heureux,
humainement parlant ? La rareté de ce don
suffirait seule à le rendre glorieux, tellement
précieux qu'il ne saurait être estimé à sa juste
valeur, et d'autant plus flatteur pour moi que
j'étais loin de le mériter.
Ne craignez pas toutefois d'être taxé
d'imprudence pour avoir [29] oublié la
disproportion qui existe entre le don et
l'homme qui le reçoit ; car Alexandre le Grand
pensait avec raison qu'un présent doit être
plutôt digne de celui qui l'offre que de celui qui
l'accepte. Vous avez donc fait une chose bien
supérieure à mes mérites, mais bien digne de la
bonté de François Girard et de l'amitié qui
existe entre vous et moi, en me faisant
participer à ce trésor singulier de votre âme,
c'est-à-dire à l'intimité de votre ami. Par suite,
me mettant en union de sentiments avec vous,
vous m'y mettez aussi avec François Girard, de
telle sorte que tout, jusqu'à la moindre
bagatelle, vous devient commun.
Certes, je ne crains pas qu'à ce sujet
survienne entre vous la moindre division ; car
si l'amitié que vous vous portez mutuellement
vous rend indivisibles, il en sera de même de
votre bienveillance pour moi. Pareillement
95 Plutarch., Apophthegm. Regum, etc., Alex. Mag.
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5.7 Page 47

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ambo si amici estis individui, estis et vestra l'estime que je vous porte à tous deux étant
utriusque erga me benevolentia ; uti et mea établie comme elle l'est dans mon âme,
erga vos observantia, cum animæ penitus s'identifie avec elle, et participe à sa nature qui
hæreat, ipsi cedat necesse est ejusque sequatur est, selon les termes de l'école, d'être tout
naturam, quæ tota est in toto, et tota, ut entière dans le tout et tout entière dans
secundum artem loquar, in qualibet parte96. chaque partie. D'où il suit que si, d'après [30]
[30] Quo fit ut si res ulla, ex Salomonio 97 la sentence de Salomon, un même bien peut
placito98, duplicem admittat possessorem, ea appartenir à deux personnes à la fois, c'est
maxime est amicitia.
assurément une intimité de ce genre.
Vivet vero semper in pectore meo
Le désir qui, dans mon cœur,
ardens quoddam desiderium omnes quidem demeurera toujours très ardent est de conserver
amicitias, sed hanc maxime Francisci Girardi, toutes mes amitiés, surtout celle de François
et cæteras quæ ex tua, Faber optime99, Girard, et, excellent Artisan, toutes celles qu'il
prodibunt officina diligenter colendi ; quod ut vous plaira me fabriquer. Afin qu'il en soit
præstare possem, utinam non verbis tantum ainsi, puissé-je vous ressembler non seulement
(qualia solet Franciscus Præpositus, et id genus dans la manière d'exprimer mes sentiments
alia, in quibus nescio quid inter nos est (comme a coutume de faire le Prévôt François,
similitudinis), sed re etiam et meritis, quod tu et en cela, ainsi qu'en plusieurs autres choses,
credis, conjungeremur, ut amore il existe entre nous un certain air de famille),
præstantissimorum virorum vel eo nomine mais encore en réalité et par le mérite, comme
merito non indignus videar qui me indignum vous vous persuadez que je le fais. Alors je
esse agnoscam libenter, et tenuitatem serais moins indigne de l'amitié d'hommes
meritorum desiderii amplitudine resarciam. aussi éminents que vous l'êtes. Que du moins
De cætero, quod parum promptus cette indignité soit atténuée par l'aveu que j'en
fuerim in respondendo, vel tuis vel Francisci fais, et que je compense les qualités qui me
Girardi litteris, causam profero, non meo manquent par le vif désir que j'éprouve de les
quidem judicio minus honestam, nec [31] tibi, acquérir.
ut arbitror, minus jucundam, qui familiaritate
Du reste, si j'ai mis quelque retard à
delectaris, quod scilicet ex media familia répondre soit à votre lettre soit à celle de
deprompta sit. Accepi vestras utriusque litteras François Girard, la raison de ce délai, qui vient
Sanctorum Simonis et Judæ die, quas decies et de ma famille, est, je pense, également légitime
iterum, uti soleo omnia tua, repetitas, dum en soi et agréable pour [31] vous qui aimez à
demitto postridie scripturus, ut per occasionem remplir les devoirs de l'amitié. Vos deux lettres
etiam stati temporis quo togatæ militiæ me sont parvenues le jour des saints Simon et
sacramentum faciendi [gratia] ad vos plerique Jude. Après les avoir relues plus de dix fois,
contendunt, ego quoque in præcepta tua comme j'ai coutume de faire pour toutes les
jurarem…
vôtres, pendant que je remettais d'y répondre
au lendemain, afin qu'en un jour où la plupart
Revu sur une copie déclarée authentique, des avocats vont prêter serment entre vos
conservée à Turin, Archives de l'Etat.
mains, j'eusse aussi moi-même des
protestations à vous faire
_____
96 S. Aug., de Trin., l. VI. c. VI.
97 La copie de Turin porte Salomonorum, erreur qui provient sans doute de la fausse interprétation d'une abréviation
mal comprise dans le texte original.
98 III Reg., III, 25.
99 Dans cette lettre et dans bon nombre d'autres adressées au sénateur Antoine Favre, le Saint joue sur le nom latin de
ce magistrat, qui peut se traduire par ouvrier, artisan.
47/318

5.8 Page 48

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XII. Au même (Minute). Prières publiques ordonnées à
l'occasion de la détention du duc de Nemours ; sermon prononcé
à cette occasion. Naissance de Jeanne de Sales. Affaire
litigieuse d'un paysan de Thorens. Témoignages d'affection.
Désir de le voir prochainement.
Annecy, commencement de décembre 1593.
Ecce ab Antistite nostro supplicationes
obsecrationesque pro captivo Gebenensi Duce
100 (quod Dux ipse per [32] litteras
postulaverat) per 9 dies publice decretæ ; ac uti
populus Deo placando ardentius incumbat in
sequentem Dominicain diem concionem
indicunt, idque muneris tyroni tuo, qui extra
scholas vix negare novit, impositum. Ergo in
sequentem hebdomadam scripturus, concioni
parandæ (nec enim insalutatis Doctoribus id
facere noster ferre potest vel genius vel
ingenium) mentem attribuo.
Qua absolutus cura, audio charissimam
matrem, anno 42 ætatis suæ, decimum tertium
propediem parituram filium101, acutioribus
torsionibus ac adeo non levi [33] mortis
suspicione vexari. Quare missis omnibus ad
eam, mea enim præsentia plurimum recreari
solet, propero, nec primum redii quin melius
per Dei gratiam, licet propinquiore partu,
haberet ; vixque consedi cum adest nuncius
eam nullo fere negotio peperisse, dolorum
nimirum præcedentium ex imminentium
summa substractione. Quare iterum redivivam
veluti visurus discedo, ac in itinere cum
occurreret D. Porterius102, unus ex canonicis
Notre Evêque vient d'ordonner une
neuvaine de prières publiques pour le duc de
Genevois fait prisonnier. (Ce Prince a sollicité
[32] lui-même par lettres ces prières.) Afin que
le peuple s'attachât avec plus d'ardeur à fléchir
la justice de Dieu, un sermon a été annoncé
pour le Dimanche suivant, et on a imposé le
soin de le prononcer à votre apprenti qui, hors
de l'école, ne sait guère refuser. J'ai donc été
obligé, pour préparer ce sermon, de renvoyer
ma lettre à la semaine suivante, car ni mon
caractère ni mon talent ne me permettent de
prêcher sans avoir consulté les Docteurs.
Délivré de ce souci, j'apprends que ma
très chère mère, étant déjà dans sa quarante-
deuxième année, doit prochainement donner le
jour à son treizième enfant, et qu'elle est si
fortement travaillée de douleurs aiguës qu'elle
appréhende d'en mourir. Dès lors, remettant
[33] toute autre affaire, je me rends en grande
hâte auprès d'elle, car ma présence lui donne
toujours beaucoup de consolation. Je ne revins
chez moi que lorsque je la vis beaucoup mieux,
grâces à Dieu, quoiqu'elle approchât de son
terme. A peine avais-je eu le temps de
m'asseoir à mon foyer que voilà venir un
100 Charles-Emmanuel, fils de Jacques de Savoie-Nemours et d'Anne d'Este, après s'être distingué dans les guerres de
la Ligue, avait été arrêté par les Lyonnais, le 21 septembre 1593, et enfermé au château de Pierre-Cise. Il y demeura
jusqu'au 26 juillet 1594 qu'il parvint à s'échapper. Ce prince mourut au château d'Annecy le 15 août 1595, étant âgé
seulement de 28 ans.
101 Le Saint emploie évidemment le mot filium dans un sens indéterminé. Le treizième et dernier enfant de M. et de
Mme de Boisy fut une fille, Jeanne, qui mourut en Bourgogne en octobre 1607.
On pourrait objecter, à l'encontre de la date attribuée ici à cette lettre (date fixée d'après une lettre d'Antoine
Favre), que dans celle qu'il adressa à sainte Jeanne-Françoise de Chantal au sujet de la mort de cette jeune sœur, le
Saint dit de la défunte : « Ce fut la premiere creature sur laquelle j'exerçay mon sacerdoce. » Or, il a seulement été
ordonné le 18 décembre 1593 ; mais il est vraisemblable que, par considération pour la famille du nouveau prêtre,
l'Evêque permit de différer les cérémonies du baptême jusqu'après l'ordination de celui-ci.
Faudrait-il supposer que les précédents éditeurs ont mal lu en imprimant anno 47 ætatis suæ au lieu de anno
42, qui est très lisible dans l'Autographe, ou bien auraient-ils fait cette substitution pour ne pas contredire certains
historiens d'après lesquels Mme de Boisy aurait été âgée de vingt-et-un ans à la naissance de son fils aîné (1567) ? Quoi
qu'il en soit, la présente lettre corrobore le témoignage de plusieurs contemporains qui affirment que Mme de Boisy
avait quatorze à quinze ans lorsqu'elle devint mère de notre Saint.
102 Jean Portier, prêtre du diocèse de Besançon, qui avait été institué chanoine de l'église cathédrale de Saint-Pierre de
Genève le 10 juin 1577.
48/318

5.9 Page 49

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nostris, 103 ad te brevi profecturus rogavi uti te
meo nomine salutaret, 104 quando scribendi
nulla dabatur opportunitas.
Quare ea mihi nunc demum constat
conditio quam pro tua humanitate ascripsisti :
« cum tibi commodum erit. » Cujus ego eam
vim quod ad rem attinet esse credo, ut tum
demum obtineat cum nullum officit
impedimentum quod « in virum constantem
cadere possit105. » [34]
Nescio vero fœliciusne an infœlicius
mecum actum sit, ut nimirum tum acceperim
ter a te litteras cum ne semel quidem dare
potuerim. Etsi enim tanto viro, dicam suavius
(quod per summam humanitatem tuam jam
mihi licere existimo) etsi tanto amico,
suavissime alloquenti non respondere durum
fuerit, jucundissimum tamen fuit, interea, inter
acerbas nonnullas animi occupationes,
mellificium illud tuum degustare ac te ex
litteris veluti loquentem subaudire.
Rogor enim inter hæc uti in quadam
agricolæ nostri Thorentiani causa adversus
Soudanum ejusdem loci notarium apud te
intercessorem agam, ac rogem ut rustici jus
suum supersit. Æqua sane petitio rustici sed
rustica, quam si facerem stultus merito
judicarer. Quod enim tibi curæ ac cordi non
est, jus non est ; quod vero cuique juris est, id
quoad per te potest integrum est ac tutum. Imo
vero cum nescio quid criminis in ea causa
versari audirem, prope fuit ut clamaverim : Viri
[35] sanguinum declinate a me106. 107 Nihil in
iis causis clericis negotii esse debet.
Accepi quidem ter a te litteras, quibus
hac una sola satisfacere sequum minime
duxerim ; seorsum namque de senatoris
dignitate recusanda vel desideranda huic tuo
tironi, Faber clarissime, alio tempore scribam,
nisi coram, uti spero, hac de re tractandi sese
det occasio108. Subolfacio etenim mihi brevi te
visendum, cui fœlicitati meæ promovendæ non
messager m'annonçant qu'elle était délivrée
presque sans peine, comme si ce qu'elle avait
enduré auparavant avait été pris en déduction
de ce qu'elle aurait dû souffrir à ce moment. Je
retournai donc visiter celle qui était pour ainsi
dire revenue à la vie. En chemin, je rencontrai
M. Portier, l'un de nos chanoines, que je priai
de vous saluer en mon nom, puisque je n'avais
aucune facilité pour vous écrire.
Me voici maintenant dans la condition
que vous aviez la bienveillance de me poser en
disant : « Ecrivez-moi quand vous le pourrez.
» C'était, ce me semble, me demander de vous
écrire tant que je ne serais pas retenu par un
empêchement qui arrêterait même « l'homme
fort et constant. » [34]
Je ne sais si je dois m'estimer heureux
ou malheureux d'avoir dans cet intervalle reçu
trois de vos lettres tandis que je n'ai pas même
pu vous en adresser une seule. Si d'une part il
m'a été très pénible de ne pouvoir répondre à
un homme tel que vous, j'oserais même dire
(pour employer un terme plus doux qu'autorise
votre extrême obligeance) à un tel ami, qui
m'écrit avec tant d'affection, d'un autre côté ce
m'a été une immense joie au milieu de
préoccupations très pénibles de savourer le
miel qui découle de votre plume, et de vous
entendre en quelque sorte parler par vos lettres.
On me sollicite en ce moment
d'intercéder auprès de vous en faveur d'un de
nos paysans de Thorens au sujet du différend
qu'il a avec Soudan, notaire dans la même
localité, et de vous prier de faire prévaloir les
droits du villageois. La requête de cet homme
rustique est rustique elle-même, mais juste.
Toutefois, si je vous la recommandais, je
passerais pour un sot ; car ce que vous ne
prenez pas à cœur n'est pas juste, toute cause
juste, quelle que soit la personne intéressée,
étant toujours patronnée par vous. De plus, j'ai
entendu dire qu'il y a en cette affaire je ne sais
103 ex canonicis nostris, [cum ad Senatum Chamberium se quamprimum petiturum...]
104 salutaret, [testareturque me in itinere occurrisse...]
105 Vide supra, p. 10, et Digest., l. IV, tit. II, § 6.
106 Ps. CXXXVIII, 19.
107 a me. [Non enim causam promovere cujusquam mihi licere credo ex qua...]
108 On a des preuves certaines que la dignité de sénateur fut offerte à saint François de Sales par le duc de Savoie. Un
déposant au Procès de Béatification dit même positivement avoir été chargé de lui porter les lettres patentes de sa
nomination. Un autre certifie à son tour avoir vu la lettre dans laquelle le Prévôt exposait au sénateur Favre les motifs
de son refus. Cette pièce n'a pas été retrouvée ; la prétendue lettre qui figure à ce sujet pour la première fois dans
l'édition Hérissant (1758) est un composé des paroles que, d'après Charles-Auguste, le Saint aurait dites en cette
circonstance.
49/318

5.10 Page 50

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deero. Ac si quid erit in ea tractatione quoi qui relève de la justice criminelle, c'est
difficultatis, opportunus omnino judex pourquoi j'ai été près de m'exclamer ;
occurret Franciscus Girardus, utriusque Eloignez-vous de moi, [35] hommes de sang ;
nostrum licet in dispari causa amantissimus, car en telles matières les ecclésiastiques ne
juri pariter ac theologiæ addictissimus. Sed hac doivent pas intervenir.
de re alias
Ayant reçu trois lettres de vous, je
Revu sur l'Autographe conservé à la
n'estime pas, seulement par celle-ci,
Visitation d'Annecy. [36]
m'acquitter à votre égard. Je compte vous en
adresser, illustre Artisan, au sujet de la
question que vous soulevez à votre apprenti, à
savoir s'il doit désirer ou refuser la dignité
sénatoriale ; à moins que je n'aie, comme je
l'espère, la possibilité de vous entretenir de
vive voix ; car je pressens que j'aurai bientôt ce
plaisir, et je ne manquerai pas d'en faire naître
l'occasion. Si nous trouvons quelque difficulté
dans cette négociation, nous aurons recours à
un juge tout désigné pour cela, François
Girard, qui est versé dans le droit aussi bien
que dans la théologie et nous aime tous deux
également, quoique à des titres divers. Mais
nous parlerons de cela une autre fois…[36]
_____
XIII. Au même (Minute). Sentiments qui se pressent dans l'âme
du Saint à l'approche de son ordination sacerdotale.
Annecy, vers le 15 décembre 1593.
Appetente et imminente jam tremendo
illo ac, uti Chrisostomi verbo loquar109,
horrendo mihi tempore, quo ex Antistitis
placito, id est, Deo volente tantum, non enim
alio ad Dei voluntatem explorandam utor
interprete, postquam per omnium Ordinum
gradus sacratissimos iter hucusque feci,
tandem ad augustissimum Sacerdotii apicem
evehendus sum110, committendum non duxi
quominus te de hac mea tanta (sic) tam
excellents honoris et boni expectatione
admonerem, ne tanta te inscio in re tua fiat
mutatio.111 [37]
Etsi namque etiam nescientis melior
fieri conditio potest, et hæc omnium quæ in
hac mortalitate expectari queunt mutationum
A l'approche de ce jour terrible, de ce
jour effroyable, comme l'appelle saint
Chrysostome, où d'après la volonté de notre
Evêque, c'est-à-dire d'après la volonté de Dieu
(car je ne cherche pas d'autre interprète de cette
divine volonté), à l'approche de ce jour, dis-je,
où après avoir passé par tous les degrés des
saints Ordres, je vais être promu à l'auguste
dignité du sacerdoce, je ne puis me dispenser
de vous annoncer l'insigne honneur et le bien
excellent qui m'attendent. Il ne convient pas en
effet qu'une telle transformation s'opère à votre
insu dans un homme qui est tout vôtre. [37]
On peut améliorer, il est vrai, la
condition d'un autre sans qu'il le sache, et le
changement que je vais subir est le plus
glorieux qui puisse m'arriver en ce monde ;
109 Hom. I. (al. LI) in Matt., § 3.
110 Saint François de Sales, ainsi que nous l'avons dit plus haut, reçut l'ordination sacerdotale le 18 décembre 1593.
111 fiat mutatio. [Utinam vero, vir amplissime... amantissime vir, fausta mihi ea sit accessio qua nemo unquam
extitit dignus.]
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6 Pages 51-60

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6.1 Page 51

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sit maxime gloriosa, 112 multo tamen mihi
jucunda erit [compassio tua]. Cum enim me
omnium quas antea sensi maxima me torqueat
solicitudo, timorque et tremor venerint super
me113, [tuæ benevolentiæ maxime indigeo.] Id
enim moris est amantibus, si quid arduum ac
periculosum aggredimur, sollicitudinem 114 ac
formidinem nostram solari amicis
[communicatione] facta, ac formidinis motus
sedantur si negotium ipsum mentemque
nostram amicis exponere 115 possimus. Nihil
vero unquam tam arduum tamque
periculosum, ni fallor, mortalibus occurrere
potest quam id manibus tractare ac, ut cum
Hieronimo [loquar116], id ore suo conficere
quod vix ac ne vix [quidem] cogitatione
complecti vel ore laudare satis possunt
beatissimæ illæ mentes, quibus nos (sic)
laudandis aut intellectu percipiendis nos
minime satis sumus. [38]
Et quidem non eram nescius,
observatissime vir, 117 magno cum periculo
hanc tantam (sic) sacram dignitatem
conjunctam esse.118 At male providis oculis
distantia illusit, aliudque jam dicam esse rem
eminus aliud vero cominus metiri. Tu vero
unus es, amplissime vir, qui huic mentis meæ
perturbationi percipiendæ 119 maxime mihi
videris idoneus. Tanta namque observantia,
tanta veneratione rerum divinarum [cultum]
prosequeris, uti facile tecum reputes quam
periculosum sit ac tremendum earum officinæ
prseesse, in iis quam facile simul et graviter
peccetur, quam vero difficile et leviter (sic) pro
dignitate tractentur. Atque si ingenii mei
imbecillitatem tam probe cognosceres, nihil in
te aliud desiderarem quo sorti meæ eam quam
a te suo jure quærit misericordiam
adhiberes120, cum non animo jam indigeo,
quem integrum erectumque hactenus sustinui.
Verum hæc dixisse sat est ; tantum
commovendæ [misericordiæ tuæ] gratia ita tibi
sensus meos explicavi, [39] quod scirem
medelam esse ægris amicis opportunam.
néanmoins votre sympathie me sera très
avantageuse, car je suis assailli par la plus
grande inquiétude que j'aie jamais ressentie. La
frayeur et le tremblement se sont emparés de
moi : plus que jamais, j'ai donc besoin de votre
bienveillance. C'est l'usage entre ceux qui
s'aiment de se confier leurs soucis et leurs
appréhensions au moment d'entreprendre une
œuvre ardue et périlleuse, afin d'obtenir
quelque consolation. Leurs craintes s'apaisent
par cette communication. Et certes, si je ne me
trompe, il ne saurait rien arriver de plus
difficile et de plus périlleux à l'homme que
d'être appelé à tenir entre ses mains et à
produire par sa parole, selon l'expression de
saint Jérôme, Celui que les Anges, ces
intelligences que nous sommes incapables de
concevoir ou de louer dignement, ne peuvent
pas même embrasser par la pensée ni célébrer
par de justes louanges. [38]
Assurément je n'ignorais pas, mon
vénérable Ami, que d'effroyables
responsabilités ne fussent jointes à une si
sainte et si auguste dignité ; mais l'éloignement
trompe les yeux, et c'est chose bien différente
de mesurer un objet de près ou de l'apprécier
de loin. Vous êtes le seul, Monsieur le
Sénateur, qui me paraissiez capable de
comprendre le trouble de mon esprit ; car vous
traitez les choses divines avec tant de respect
et de vénération que vous pouvez facilement
juger combien il est dangereux et redoutable
d'en présider la célébration, combien il est
facile de pécher et de pécher gravement, et
combien difficile de remplir dignement ces
saintes fonctions. Si vous connaissiez aussi
bien ma faiblesse, je solliciterais seulement sur
ma situation actuelle votre commisération qui
m'est bien due. Cependant je ne manque pas de
courage ; jusqu'à présent il ne m'a jamais
abandonné.
Mais c'est assez. Je vous ai déclaré mes
sentiments uniquement pour exciter votre
sympathie ; c'est un remède utile, je le sais,
112 maxime gloriosa, id tamen cuique amanti ab ipsa inditum est natura... Quæ etsi maxime gloriosa futura est,
113 Ps. LIV, 6.
114 amantibus, in rebus arduis sollicitudinem...
115 explicare
116 Epist. CXVI, ad Evang., § 1.
117 observatissime vir, [quid in hoc munere discriminis foret, longe antequam...]
118 conjunctam esse. Verum fallax sæpe distantia intuentis oculis illudit.
119 qui huic metus trepidationisque perturbationi componendæ
120 concederes
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6.2 Page 52

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Quamvis nescio (ut me sensim teque ab iis
cogitationibus substraham quas exposuisse
omnino sat est) quanam id ratione fiat ut cum
amicus commiseratione malum abesse velit ab
amico misero, miser hic contra miseratione
amici recreetur, cum miseratione mali
particeps [miserens] non fieri nequeat. Nisi
forsitan illud est quod miseratione clarissime
illucescit amicitia, quæ cum sit optima rerum
omnium, in amico longe melius est
deprehendere cum miseratione quam si sine
ulla mali communione vel nulla vel exigua
superesset benevolentia.
Cæterum, neque vellem ego me
existimes tanto pavore afficere misteria illa
sacrosancta uti suus recte spei ac lætitiæ nullus
supersit locus, quantum nullis unquam meritis
promereri possum. Lætor plurimum et gaudeo
me posthac eo saltem officio respondere posse
quod omnium supremum est, nimirum
sacrificiis, iisque medullatis121
Revu sur l'Autographe conservé à la
Visitation d'Annecy. [40]
pour soulager [39] le cœur souffrant. Et
pourtant, comment se fait-il (ici je m'éloigne
insensiblement des considérations qu'il me
suffit de vous avoir indiquées), comment se
fait-il que si un ami s'efforce par la compassion
qu'il porte à son ami malheureux d'éloigner de
lui les maux qui le menacent, celui-ci se sente
réconforté par cette compassion même, bien
qu'en s'apitoyant sur lui, le premier n'ait pu
s'empêcher de ressentir les mêmes maux ?
Sans doute cela vient de ce que la
commisération est la marque incontestable de
l'amitié, ce sentiment le plus exquis de tous,
lequel, dans nos amis, nous est bien plus
précieux étant mêlé de compassion que s'il se
terminait à une froide bienveillance qui ne
participerait en rien à nos douleurs.
D'autre part, ne vous persuadez pas que
les saints mystères m'inspirent un effroi tel
qu'il ne laisse en moi place à une espérance et
à une allégresse bien supérieures à ce que
pourraient me valoir mes propres mérites. Je
me réjouis spécialement et j'exulte de pouvoir
correspondre au moins par cet office le plus
sublime de tous, je veux dire par des sacrifices
et par le sacrifice de la plus auguste des
victimes… [40]
121 Ps. LXV, 15.
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6.3 Page 53

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Année 1594
_____
XIV. Au même (Minute). Espoir d'une prochaine réunion à
Sales. M. et Mme de Boisy contraints de s'absenter à cette
époque. Envoi d'une lettre de M. de Montrottier. Le Saint
part pour Seyssel où il doit prêcher le Dimanche suivant.
Antonio Fabro Senatori, Franciscus de Sales,
Præpositus Ecclesiæ Gebennensis, salutem
dicit.
Au Sénateur Antoine Favre,
François de Sales, Prévôt de l'Eglise de
Genève, présente ses salutations.
[Annecy,] commencement de février 1594.
Ego vero contra, Frater optime, tanta
me sensi totum perfundi voluptate in tuarum
litterarum lectione, ut 122 nihil aliud ejus
confirmandæ quam Deo volente jam
recuperaveram
valetudinis,
nullum
opportunius desiderari videretur remedium.
Quid enim convalescentibus optabilius, quid
opportunius, quam ex unius domusculæ umbra
[41] in amœnissimorum florentissimorum
hortorum conspectum frequenter exire, ibique
inter medios flores exspatiari ac auras odoribus
gratissimis onustas colligere ? Sic nempe
amicissimas tuas litteras lego.
Illud autem moleste admodum fero,
quod tam meo nimirum morbo angi te scribas,
maxime cum ego vel nullum vel minimum
sentirem dolorem ; ac cum tu per summam
amicitiam de febricula mea doleres, prope fuit
ut nostra dicerem si malorum ut bonorum inter
nos communio inducta foret (quod ego vix
indemnis facere possem, hoc genere longe
locupletior), ovationem propemodum ipse
deportassem ; at mihi jam vicissim dolendum
de tuo dolore foret, nisi iis doloribus modum
facere tandem aliquando satius esset.
De Antoniano convivio recte
procuratorem egit Chappasius123 ; dicam libere
pro candore pectoris fraterni Antonianum. Si a
Sancto Antonio velis non recte dici aliter posse
quam Antonianum, appelles quod minime taie
sit, cum nullum aliud convivium dicatur
Moi au contraire, mon excellent Frère,
je me suis senti inondé d'une si grande joie en
lisant votre lettre, que je n'aurais pu désirer
aucun remède plus efficace pour rétablir ma
santé, si, grâces à Dieu, elle n'eût été déjà
remise. En effet, quoi de plus doux, de plus
avantageux pour un convalescent que de
quitter l'obscurité d'une [41] maisonnette pour
aller souvent contempler des jardins les plus
agréables et les plus émaillés de fleurs et d'y
respirer à souhait l'air embaumé des parfums
les plus suaves ! Telle est l'impression que me
fait éprouver la lecture de votre lettre si
amicale.
Cependant une chose m'attriste, c'est
d'apprendre les angoisses que vous a causées
ma maladie, d'autant plus que je n'ai rien ou
presque rien souffert. Même, comme par l'effet
d'une souveraine affection vous ressentiez ma
fièvre, je dirais presque notre fièvre, si entre
nous les maux étaient communs comme les
biens (et de ceux-là je pourrais vous enrichir
sans m'appauvrir, car j'en suis de beaucoup le
mieux pourvu), j'en aurais été pour ma part tout
glorieux ; mais alors j'aurais souffert à mon
tour de vos douleurs, à moins qu'il n'eût été
préférable de mettre un terme à cette
communication de peines.
Chappaz vous a bien représenté au
festin antonien ; je dis vraiment bien antonien
par la sincérité de la tendresse fraternelle. Si
vous vouliez faire remonter à saint Antoine
l'origine de ce mot, vous vous [42] tromperiez
122 ut cum jam valetudinem recuperassem...
123 Jean Chappaz, procureur au conseil de Genevois, était né à Thorens en 1559. Il sera encore question de lui dans
une lettre de saint François de Sales datée du 23 décembre 1601.
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Antonius habuisse, [42] præter unicum illud in
quo convivator corvus affuit, convivæ Paulus
et Antonius, pro lautissimo edulio panis, pro
potu aqua.
Quandoquidem sperare jubes hisce
bacchanalibus futurum ut ambo incolumes et
una simus, ab hac expectatione tantam mente
concepi lætitiam, uti nullus sit futurus cui
tantam nauseam edulia quadragesimalia
pariant, ut magis festa Paschalia, quam ego
bacchanalia desideret. Sicque urbanitatis
Christianæ antiqua illa forma inter nos
reviviscet, qua solebant ad honestam
recreationem amici usque ante quadragesimale
jejunium convivia celebrare, ac simul
aliquantulum feriari, ut liberius toto
pœnitentiæ tempore sederent solitarii, et
tacerent, ac elevarent se supra se124, quasi
longioris silentii licentiam vicissim simul
expetentes.
Praecipua vero quam appellas
amœnitas loci in quo mei habitant, quod
nimirum eos omnes mecum sis visurus, vereor
ne nobis desit, quoniam per idem tempus
clarissimus senator, nostrum omnium
amantissimus, Dominus [43] Rogetius125, filiæ
natu majoris matrimonium cum judice majore
Focunacensium celebrabit ; parentes mei pro
sua erga senatoris universam familiam
observantia, jam per litteras rogati, deesse
minime poterunt.
Te veniente, non committam ut alibi
sim quam tecum. Etiam te non veniente, non
intrarem ; quomodo enim nuptiis interessem
qui vestem nullam habeo nuptialem126 ?
Antonianum timeo namque convivalem illum
senatum.
Iterum scribit Dominus de
Montrotier127, qui caracteris tui elegantiam et
subtilitatem admiratus se deinceps silentio
responsurum dicit. Ejus litteras simul cum
meis procuratori Chappasio commendo ;
jamjam enim Seyssellum versus pergo, die
; car dans la vie de ce Saint il n'est question
d'aucun banquet, si ce n'est celui dont
l'amphytrion était un corbeau, les convives,
Paul et Antoine, et où, à la place de mets
somptueux, l'on ne servait que du pain et de
l'eau pour boisson.
Puisque vous me donnez espoir que
nous passerons ensemble et en bonne santé le
carnaval prochain, mon cœur est rempli d'une
si douce joie qu'aucun de ceux qui sont
dégoûtés du maigre quadragésimal ne désire
plus vivement les fêtes de Pâques que je ne
soupire après le carnaval. Alors renaîtra pour
nous cette antique forme de l'urbanité
chrétienne selon laquelle les amis avaient
coutume, aux approches du jeûne de la sainte
Quarantaine, de s'accorder quelque honnête
récréation en s'invitant à de gracieux festins, et
de diminuer aussi quelque chose du travail
ordinaire. C'était afin d'avoir l'esprit plus libre
pendant le temps de pénitence pour s'asseoir
dans la solitude, se taire et s'élever au-dessus
de soi-même. Ils prenaient en quelque sorte
congé les uns des autres avant cette longue
retraite.
Quant à ce qui fait à vos yeux le
principal charme du séjour habité par ma
famille, le plaisir de nous y voir tous réunis, je
crains que nous en soyons privés ; car vers ce
même temps de carnaval, [43] M. le sénateur
Roget, un ami qui nous est si cher, devant
célébrer le mariage de sa fille aînée avec le
juge-mage du Faucigny, mes parents, qui ont
déjà reçu des lettres d'invitation, ne pourront se
dispenser d'assister à ce mariage sans manquer
aux égards qu'ils doivent à la famille du
Sénateur.
Si vous venez ici je me garderai bien
d'aller ailleurs, si ce n'est avec vous. Et, lors
même que vous ne viendriez pas, je
n'assisterais pas à cette fête ; car comment aller
aux noces, moi qui n'ai pas la robe nuptiale ?
D'ailleurs, je redoute ces réunions et ces
124 Thren., III, 28.
125 Jean Roget, qui avait été lui-même juge-mage du Faucigny (1577), était sénateur depuis le 3 novembre 1593, et
mourut le 22 mars 1595. Il paraît avoir été marié deux fois, mais le nom de sa seconde femme, Philiberte de Chignin,
est seul connu. Dans son testament (6 mars 1593) le sénateur Roget nomme toutes ses filles ; celle dont il est ici
question doit être Jeanne, qui aurait épousé en premières noces Etienne Chesnex ou Chesney, juge-mage du Faucigny
dès le mois d'août 1593, et en secondes noces, Janus Bessonet.
126 Matt., XXII, 12.
127 Charles III, fils de Pierre III de Menthon, qui avait épousé Marie de Chastillon, dame des Hayes Gascelin. Il devint
baron de Montrottier le 30 janvier 1596, et comte, le 1er juin 1632. Ce seigneur était attaché à la maison du marquis
de Saint-Sorlin. Il mourut le 20 mars 1636, après avoir légué le comté de Montrottier à Bernard V de Menthon.
54/318

6.5 Page 55

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Dominica concionaturus128. Sic [44] enim festins.
scribo familiariter. Baro Chivronius129
M. de Montrottier écrit encore une fois,
facillime a Principibus impetravit ut in mais il me dit que désormais il ne répondra que
sententiam Antistitis nostri consentirent, quod par le silence à vos lettres, dont le style élégant
ad ea spectat de quibus ipse tecum coram et délicat le remplit d'admiration. Je confie ma
disseruit. Utinam tam consentaneum rectæ lettre et la sienne au procureur Chappaz, et je
rationi foret ! Hæc raptim.
pars à l'instant pour Seyssel, où je dois prêcher
Dimanche. C'est ainsi que je vous écris [44]
Revu sur une copie déclarée authentique, familièrement. Le baron de Chivron a
conservée à Turin, Archives de l'Etat. [45] facilement obtenu que nos princes entrassent
dans les vues de notre Evêque, relativement à
l'affaire dont il vous a entretenu. Plût à Dieu
que le bon sens y trouvât son compte ! Ceci à
la hâte. [45]
_____
XV. Au même (Minute). Rendez-vous à Faverges.
Salutations faites à M. de Montrottier de la part du sénateur
Favre.
[Annecy,] mi-février 1594 130.
131Ne nihil omnino scriberem, hanc
licet brevem mittendam duxi epistolam, quasi
ejus quam brevi peracturum me puto coram
salutationis prodromum. Sic enim mea res se
habet, ut cum vicariam pro matre præsentiam
huic nuptiarum celebritati conferre
deberem132, quando ipsa interesse posse non
crederet, et ego molestissime ferrem
præsentiam etiam pro matre vicariam cuiquam
tunc [46] conferre cum ex ea ab amantissimo
tuo conspectu sequeretur absentia, enimvero
factum est ut, rebus aliter succedentibus, mater
ipsa vices jam meas expleverit. Quare, quod
Pour ne pas garder un silence absolu,
j'ai jugé à propos de vous écrire cette courte
lettre comme avant-coureur de salutations que
je pense vous adresser sous peu de vive voix ;
car voici où en sont les choses. Je devais
représenter ma mère à ces noces auxquelles
elle croyait ne pouvoir assister, et j'étais bien
désolé de devoir être ailleurs, même pour
représenter ma mère, puisqu'il en résulterait
pour moi la privation d'une rencontre avec
vous, le meilleur de mes [46] amis. Les choses
se sont arrangées autrement, et c'est ma mère
elle-même qui me remplace. Ainsi, comme
128 Ce sermon fut prêché le Dimanche de la Septuagésime, qui tombait cette année-là le 6 février. (Voir tome VII de
la présente Edition, p. 119.)
129 Hector, fils aîné de Michel de Chevron-Villette et de Béatrix de Dérée, baron de Chevron, seigneur de Dérée,
conseiller d'Etat de Son Altesse, grand chambellan par patentes du 1er mai 1601, premier maître d'hôtel du prince de
Piémont, chevalier du Sénat (1er décembre 1601), gouverneur des princes de Savoie. Il avait épousé (contrat dotal du
15 mai 1572) Jeanne de Menthon. Bien que son testament soit daté du 14 juillet 1608, il vécut jusqu'en mi-février
1616. La tante paternelle de ce seigneur, Bonaventure de Chevron-Villette, eut l'honneur de devenir par son mariage
avec Melchior de Sionnaz de Vallières la grand'mère maternelle de saint François de Sales.
130 La date de cette lettfe et celle de la suivante sont fixées par des preuves que fournissent la correspondance d'Antoine
Favre et surtout le Registre des Entrées du Sénat dans lequel sont mentionnées les diverses absences des sénateurs.
On y voit que le sénateur de Passier, qui avait quitté Chambéry pendant les vacances du carnaval dont il est question
dans ces deux lettres, était de retour pour la séance du 25 février.
131 [Laconicam potius quam nullam...] Brevem hanc epistolam succisive scribendam potius duxi, ne nihil omnino
scripsisse existimarer ; quam ut scriberem... sic enim mecum feliciter actum est ut qui excusandæ matris... [Expectabo
namque liberalia hæc tam libenter...]
132 ut cum vices parentis, ad hanc nuptiarum celebritatem, deferre deberem
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6.6 Page 56

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antea sperabamus, erimus simul, Frater nous l'avions espéré, mon bien aimé Frère,
amantissime, hisce liberalibus, si intra nous passerons ensemble ces jours de liberté si
Fabricarum limina Fabrum viderint les Favergiens ont le bonheur de voir Favre à
Fabricenses. Ego namque cum primum scivero Faverges. Quant à moi, dès que j'aurai
adesse te intra Fabricarum limina, non connaissance de votre arrivée dans cette ville,
committam quin inter Fabricenses imperitum je prendrai mes mesures pour que vous
sed alacrem videas tyronem ; succedetque puissiez voir parmi les Favergiens votre
Tulliana deinde casa133, quæ134 omni meliori inhabile mais diligent apprenti ; nous irons
modo [a te nomen sortietur]. Cætera coram. ensuite à la maison Tulliane, qui ne saurait être
Litteras Antistiti meo heri reddidi, quas plus illustrée que de recevoir son nom de vous.
mira voluptate iterum et iterum perlustravit. Nous dirons le surplus quand nous nous
Dominum de Montrotier, hodie ad verrons.
Marchionem Sansorlinum135 redeuntem, tuo
J'ai remis hier votre lettre à mon
nomine adeo opportune salutavi ut cum eo vel Evêque, qui l'a lue plusieurs fois avec un
ea causa [47] actum optime ducam quod de te plaisir extraordinaire. M. de Montrottier
Necienses (sic) ultima discedenti verba animo retournait aujourd'hui chez le marquis de
sint injecta, quasi odoratissimi conditus Saint-Sorlin. J'ai eu l'occasion la plus favorable
oblectamentum…
de le saluer de votre part. Ce qui m'a le plus
réjoui, [47] c'est qu'à son départ d'Annecy, j'ai
Revu sur l'Autographe conservé à la
pu, dans les derniers mots que nous avons
Visitation d'Annecy.
échangés, jeter, en lui parlant de vous, comme
le parfum d'un baume odorant dans son
esprit
_____
XVI. Au même (Minute inédite). Excuses au sujet d'une lettre
écrite à la hâte. Remerciements pour celle que le Saint a
reçue du Sénateur.
Sales, 24 février 1594.
Accepisti sane tu nostras litteras tardius
quam volueram ; cum enim136 præceptori meo
litteras antepenultimas dares, Chamberii te
constantem fore iis totis feriis uti dixerat sic
credebam, atque litteras do Joanni Baptistæ
Valentiano (quo cum ex communione
studiorum multa mihi intercessit necessitudo)
vixdum scriptas, ne [48] accipiendis eis minus
avunculo suo D. de Passier137 excedenti
Vous avez reçu ma lettre, mais
assurément plus tard que je n'eusse voulu. En
effet, d'après celle qui précédait l'avant-
dernière, remise à mon précepteur, je croyais,
comme il me l'avait dit, que vous demeureriez
à Chambéry toutes ces vacances, et j'ai confié
ma lettre à Jean-Baptiste de Valence, qui, en
qualité d'ancien condisciple, me reste
spécialement cher. A peine ai-je eu le temps
133 Le château de la Thuille, situé à l'extrémité méridionale du lac d'Annecy. En rapprochant le nom de ce manoir,
possession de sa famille, du souvenir de la demeure de Tullius Cicéron, le Saint semble vouloir signifier que le château
de la Thuille sera illustré par la présence du sénateur Favre comme la demeure de l'orateur romain l'était par la
résidence de son propriétaire.
134 quæ [ab alio Fabro quam a te Tulliani nomen sortiri non potest.]
135 Henri, fils de Jacques de Savoie-Nemours et d'Anne d'Este, alors gouverneur du Dauphiné au nom du duc de
Savoie. Il devint lui-même duc de Genevois et de Nemours à la mort de son frère Charles-Emmanuel, dont il a été
parlé ci-dessus, p. 32.
136 cum enim [D. Deageus noster...]
137 Probablement Antoine de Passier, fils de Jacques, « juge corrier de Maurienne, » et d'Anne Blondel, lequel avait
épousé Jeanne de Menthon de la Balme. Institué sénateur le 8 juillet 1577, il devint second président du Sénat le 3
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officiosus comes videretur ; illi alioquin vix d'écrire ; il [48] accompagnait son oncle, M. de
daturus qui tam cito volebat scribi, nisi multo Passier, qui était sur son départ, et je craignais,
magis dari quam cito dari ; quamvis et hoc si je l'eusse prié d'attendre, qu'il ne parût plus
maxime postulasset quod tibi quem, ut est empressé à m'obliger qu'à répondre aux désirs
litterarum amans138, unice colit, rem facturus de son oncle. Du reste, je n'eusse pas confié ma
gratam crederet si litteras nostras redderet. lettre à un homme qui me pressait de la sorte,
At vero quonam fieri potest modo ut s'il n'eût importé davantage de vous écrire qu'il
non sat cito litteras acceperim, qui tam bene n'était regrettable de le faire d'une manière trop
excepi quam bene aliud unquam sum précipitée. Il avait surtout insisté pour être mon
excepturus ? Non quidem quam bene sunt intermédiaire auprès de vous parce que, étant
scriptæ et elaboratæ, (quis enim tuum illud lui-même ami des lettres, il vous a voué une
mellificium satis pro dulcedine non dicam spéciale admiration, et qu'il pensait vous être
collocare sed gustare quidem possit ?) sed jam agréable en vous remettant mon message.
tam eleganter, tam amice ! Illud certe mihi
Mais comment se fait-il que le vôtre ne
accidit percommode ut priores tuæ litteræ cum me soit pas arrivé assez tôt, à moi qui l'ai reçu
ad me perlatæ sunt, secederem in avitam [49] avec un plaisir tel que je n'en éprouverai jamais
Salesiorum domum ; ut enim eas excepi tanta de plus grand en recevant tout autre envoi ?
legere sum aggressus aviditate ut aviditas C'est que vos lettres ne sont pas seulement
saporem omnem præriperet, at ubi mihi ipsum merveilleusement écrites et pensées (personne
otium itidem relegendi facultatem comparavit, en effet ne saurait assez, je ne dis pas
tum vero undique sese mihi effudit voluptas. apprécier, mais même savourer l'extrême
douceur de ces rayons de miel) ; elles sont
Revu sur l'Autographe appartenant à Mme aussi des chefs-d'œuvre d'élégance et des
Doroz, née d'Arcine, à Besançon.
monuments d'amitié. Par une [49] heureuse
coïncidence assurément, votre lettre
précédente me parvint au moment où je me
retirais dans ma maison paternelle de Sales.
Lorsque je la reçus, je me pris à la lire avec une
avidité telle que je ne pus la savourer ; mais
quand le loisir me permit de la relire, alors un
bonheur incomparable s'empara de tout mon
être.
_____
février 1598 et mourut le 11 décembre 1615. Le sénateur de Passier fut l'un de ceux qui rendirent témoignage de la
capacité de saint François de Sales, quand celui-ci se présenta pour être reçu avocat au souverain Sénat de Savoie.
138 Jean-Baptiste de Valence est l'auteur d'un poème latin en quatre livres, qui fut publié en 1611, chez Pierre Du Four,
à Chambéry, sous ce titre : Joantiis Baptistæ Valentiani Patricii Camberiani Solymeidos libri quatuor.
57/318

6.8 Page 58

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XVII. Au même (Minute inédite). Recommandation en faveur
de Mme de Ville. Eloge du P. Chérubin.
Annecy, commencement de mars 1594.
Nobilis vidua Villæi illius qui
hæreticorum insidiis inter sedium suarum
incendia ante aliquot annos peremptus est139,
cum te referente de causa quadam quæ inter140
Villæos filios, et Dominum Bessonet agitatur
ex Senatu [50] proximis hisce diebus
sententiam expectaret141, nescio quanam
ratione resciverit, mulier quam nunquam vidi,
me præcipuo quodam amore tibi charissimum
esse, rem sibi admodum utilem et fructuosam
facturam existimavit si me, matris optimæ
meæ implorata authoritate, intercessorem apud
te faceret, quo ei quod a candidissimo judice
honestissimum amicum petere posse antea
monuisti, bonam exoptes causam. Idque fecit.
Ego vero ne existimationi quam ex tuo
in me amore optimam colligo vel levi aliqua
suspicione detraherem, scripturum me recepi.
Quod vix postea faciendum ducebam, cum non
præcedentibus tantum sed posterioribus
quoque litteris animorum nostrorum vicissim
tantam exprimamus unitatem, ut
supervacaneum fere crederem te de
cogitationibus meis deinceps aliter certiorem
facere quam profunda quadam attentione.
Unico tantum hac in [51] re perculsus
argumento, quod meis exhortatiunculis
interesse tantopere desideres, quas tamen cum
habeam summa quadam intensione simul et
attentione, alioquin cogitatione subaudire
posses.142 Sed præstat uni Franciscano
Cherubino143 mentem auresque præbere, quem
Une noble femme, Mme de Ville, veuve
de celui qui par suite des embûches des
hérétiques périt, il y a quelques années, dans
l'incendie de son château, attendait ces jours
derniers la sentence d'un procès qui se plaidait
devant le Sénat entre ses fils et M. Bessonnet,
procès [50] dans lequel vous êtes rapporteur.
Cette dame, que je n'ai jamais vue, a été
informée je ne sais comment de la très grande
affection que vous me portez. Elle a jugé qu'il
lui serait fort utile et avantageux d'implorer
l'autorité de mon excellente mère, pour me
décider à vous demander de faire en sa faveur
ce que, de votre propre aveu, l'ami le plus loyal
peut solliciter du juge le plus intègre : que vous
patronniez sa cause. C'est ce qu'elle a fait.
Quant à moi, je me suis déterminé à
vous écrire pour qu'on ne puisse mettre en
doute le crédit que me donne sur vous l'amitié
que vous me portez. Il me semblait à peine
nécessaire de le faire parce que nos dernières
lettres, comme les précédentes, témoignent si
bien de l'unité de nos esprits, que volontiers je
croirais superflu de vous communiquer mes
pensées autrement qu'en concentrant sur elles
une profonde attention. Toutefois cette
hypothèse est détruite [51] par votre vif désir
d'assister à mes petites prédications, lesquelles
vous devriez pouvoir entendre de la seule
oreille spirituelle, puisque je les prononce avec
autant d'attention que de force. Vous ferez
mieux de ne prêter l'esprit et l'oreille qu'au
139 interiit
140 inter [orphanos suos...]
141 L'attentat dont il est ici question fut commis par les Genevois dans la nuit du 2 novembre 1582. S'étant emparés
par surprise de Gaspard de Grailly, coseigneur de Ville-la-Grand, ils l'avaient mis à mort, avaient brûlé son château et
enlevé sa femme, Guicharde Duret. Gaspard de Grailly était tuteur d'Abel Bessonnet ; dans la suite celui-ci réclama
de la veuve et des enfants du défunt la reddition des comptes de tutelle, lesquels avaient été détruits lors de l'incendie
du château. De là le procès mentionné dans cette lettre. Par un arrêt, rendu à Turin le 31 octobre 1594, gain de cause
fut donné à Mme de Ville-la-Grand. (Dans les pièces du procès, aussi bien que dans les lettres de saint François de
Sales, elle est souvent appelée, par abréviation, Mme de Ville.)
142 posses. [Ni Franciscani nostri concionibus intentus...]
143 Le P. Chérubin de Maurienne (Alexandre Fournier), Capucin, sur qui des détails biographiques seront donnés à
l'occasion de la mission du Chablais. Bien que personne jusqu'ici ne l'ait avancé, il est certain que ce Religieux prêcha
la station du Carême à Chambéry en 1594. Deux pièces récemment dé-couvertes dans les Archives municipales,
prouvent en effet que le P. Chérubin se trouvait en cette ville dès le 2 mars et recevait, le 3 avril, en sa qualité de «
Frere predicateur, » une somme de 60 florins allouée par les syndics. D'autre part, plusieurs raisons trop longues à
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6.9 Page 59

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tanto spiritus fervore concionantem audio, Franciscain Chérubin. J'apprends qu'il prêche
ut144 in promptu jam habeamus : Deum avec une si grande ferveur qu'elle semble
ascendisse super Cherubin145 et volasse.
réaliser cette parole : Dieu s'élève et prend son
Sed me jam D. de Chavanes146, uti vol, porte sur les Chérubins.
meas suis jungat litteras expectat, vir nostri
Mais M. de Chavanes, notre si cher
amantissimus. Episcopo nostro hodie tuas ami, attend pour joindre sa lettre à la mienne.
reddidi summa sua voluptate. De Domini de J'ai remis aujourd'hui votre lettre à notre
Montrotier statu nihil suis hucusque Evêque ; elle lui a causé le plus grand plaisir.
compertum est.
Quant à M. de Montrottier, les siens jusqu'à
présent n'ont encore rien appris sur son état.
Revu sur l'Autographe conservé au 1er
[52]
Monastère de la Visitation de Naples. [52]
_____
XVIII. Au même (Minute). Envoi d'une lettre de Mgr de
Granier.
Annecy, mars 1594.
Amplissimo Senatori Antonio Fabro, Fratri
optimo, Francisais De Sales salutem dicit.
Cum hesterna die litteras Rmi Antistitis
quas ad te mitterem accepissem, et non tam
scribendi quam litteras mittendi otium
occasionemque fecerit mihi nunc bonus hic
vir, qui me, in itinere verius quam in urbe, in
ipso discessu salutavit, non tantum laconice
sed etiam incitate et præpropere potius scribere
volui quam non scribere ; excusatione dignum
ratus si, per hæc jejuniorum tempora,
macillentam aliquantulum accipias epistolam,
a me præsertim qui vix aliter soleo, et cui non
tam edulii quam præsentiæ tuæ recenti
privatione arida videantur omnia et insipida.
[53]
Corpore videlicet ac mente hucusque
jejunus, mox mentis jejunium soluturus, dum e
mensa Domini sacratissimam illam terræ
pinguedinem medullatamque hostiam147 tuo
meoque nomine, uti soleo, et offeram et
sumam.
Au très illustre Sénateur Antoine Favre, son
excellent Frère, François de Sales présente ses
salutations.
J'ai reçu hier de mon Révérendissime
Evêque une lettre à vous transmettre, et
maintenant je n'ai que le temps de vous
l'envoyer, car ce bon homme qui vous la
portera est venu me saluer au moment de son
départ, et en chemin plutôt qu'en ville.
Cependant je préfère vous écrire non
seulement d'une façon laconique, mais à la
hâte et avec précipitation, que de ne pas le faire
du tout ; car, dans ce temps de jeûne, j'ai pensé
que je serais excusable de vous adresser une
lettre un peu maigre, moi surtout qui rarement
en écris d'autres, et qui, moins par la
suppression des mets, que par la récente
privation de votre présence, trouve tout fade et
insipide. [53]
En ce moment, je suis encore à jeun de
corps et d'âme ; mais je ne tarderai pas à
rompre le jeûne spirituel en me nourrissant à la
table du Seigneur de cette très sainte graisse de
énumérer démontrent que la Lettre XVII fut écrite par saint François de Sales durant le Carême de 1594 ; c'est donc
bien à cette époque qu'eurent lieu les prédications du « Franciscain Chérubin » auxquelles cette lettre fait allusion.
144 ut [jam verum sit apud me...]
145 Ps. XVII, 11.
146 Claude de Chavanes, docteur ès-droits, conseiller du duc de Savoie, maître auditeur à la Chambre des Comptes de
Genevois, seigneur de Manessy il avait été condisciple de saint François de Sales à Padoue.
147 Gen., XXVII, 28 ; Ps. LXV, 15. Cf. supra, p. 40.
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6.10 Page 60

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Revu sur l'Autographe conservé à la
Visitation d'Annecy.
la terre, de cette victime de choix que j'offrirai,
comme j'ai coutume de le faire toujours, en
votre nom et au mien.
_____
XIX. Au même (Minute). La brièveté de cette lettre est
occasionnée par le départ précipité du porteur. Témoignages
d'affection.
Annecy, mars 1594.
Illud a te, Frater optime ac
amantissime, enixe peto quæsoque uti me
iterum ad laconismum redeuntem benigne uti
soles complectaris ; 148 [profectio] enim hujus
[Tulliani] alioquin domestici hominis [me ad
scribendum [54] compellit]. Quomodo
namque hominem domesticum litteris ad te
meis vacuum abire permitterem ? Repentina
nihilominus ejus profectio, commodum hoc et
succisivum scribendi otium propemodum
antevertit, cum, parentibus meis absentibus,
rusticorum Tullianorum nomine negotium
quoddam in urbe gesturus, fere alia via iter
capere decrevisset.
Jam vero epistola illa tua postrema cum
mea quam ad te eodem die scripseram adeo
mente convenit, ut eosdem duorum fratrum
animorum sensus esse, in amando præsertim,
149 clare commonstret, quamvis non uno
quidem ore expressos, cum elegantia
longissimo præcedas intervallo. Quo fit ut
quod hactenus feci tu quoque vicissim
faciendum existimes150, ut nimirum qualis
unus es in me talem me esse erga te nusquam
dubites ; sic enim summa mea voluptate
conficio omnino te fratrem amantissimum et
omni meliori modo meum esse, qui adeo me
fratrem tuum esse perspicio ut a me fere alter
mihi [55] videar, ne si alter a me non sim, tyro
grægarius, idem summo meo incommodo cum
tanto fabro esse nequeam.
Bene vale, Frater optime, ac te iis
Paschalibus quo jucundius ver appetat nobis,
hic habeamus efficias.
Je vous prie et vous conjure, mon très
bon et très aimant Frère, d'accueillir avec votre
bienveillance accoutumée le laconisme auquel
je suis obligé de revenir ; car le départ de cet
homme de la Thuille, qui est aussi notre
domestique, m'oblige à vous écrire. Comment
[54] en effet laisser partir l'un de nos serviteurs
sans lui remettre une lettre pour vous ? Mais
son départ précipité m'a ôté le loisir et la
facilité d'écrire à mon gré ; en l'absence de mes
parents, il doit aller à Chambéry traiter une
affaire au nom des paysans de la Thuille. Il
était presque résolu à prendre une autre route
[lorsqu'il s'est décidé à passer par Annecy].
Quant à votre dernière lettre, elle offre
une telle harmonie de pensées avec celle que je
vous ai adressée le même jour, qu'elle montre
clairement la parfaite unanimité de sentiments
qui existe entre les deux frères, surtout en
matière d'amitié, bien que ces sentiments ne
soient pas exprimés de la même manière, car
par l'élégance de votre style vous me laissez
bien loin derrière vous. En conséquence, il est
juste qu'à votre tour vous fassiez pour moi ce
que j'ai fait jusqu'à présent pour vous : puisque
je vous tiens pour un ami hors de pair, que vous
me considériez aussi comme tel ; vous devenez
donc ainsi pour moi le frère le plus aimant, et
tout mien de la meilleure manière possible, et
je me sens devenu le vôtre, au point de me
croire un autre homme que moi-même. En
effet, si je [55] n'étais pas différent de moi-
même, qui ne suis qu'un apprenti du commun,
je ne saurais être une même chose avec un tel
artisan.
148 uti soles complectaris ; [repentina enim hujus alioquin familiaris Tulliani profectio me ad scribendum...]
149 ut unicam duorum fratrum animam unicamque prorsus mentem esse
150 feci ambo simul deinceps faciendum existimemus
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7 Pages 61-70

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7.1 Page 61

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Revu sur l'Autographe conservé à la
Visitation d'Annecy.
Adieu, mon excellent Frère ; faites en
sorte que nous vous ayons en ces fêtes de
Pâques ; votre présence augmentera pour nous
les charmes du printemps.
_____
XX. Au même (Minute). Remerciements pour la protection
accordée à diverses personnes. Attente de la prochaine visite
du Sénateur.
Annecy, vers le 28 mars 1594.
Ego autem, Frater suavissime et
optime, his omnibus præteritis diebus, non
diligens tantum, sed anxius fui in quærendo
uno ex multis qui ad vos iverunt151, atque, quæ
mea sors fuit, [de suo discessu me facturos]
certiorem non inveni. Non enim id, vel a servis
D. de [56] Charmoysi152, aut D. de
Beaumont153, vel a D. Porterio, Ecclesiæ
nostræ canonico, vel a Chappasio expectabam,
uti me inscio discederent, quod vel in primis
causæ fuit ut de iis nihil inquirerem. Jam vero
Chappasius laconicam mihi profert scribendi
occasionem. Qua dum utor laconice, peto a te,
Frater optime, ne unquam, si quidem me quod
facis scribendo expleveris, satiatum credas.
Sunt enim tuæ litteræ ejusmodi ut vel
insipidissimum gustatum reficiant semper,
obruant autem nunquam ; imperfectæ namque
suavitatis est copia obtundere gustantem.
Obruunt me potius tot tantaque beneficia
quibus non sine labore Tullianis nostris tuam
in Salesios tuos benevolentiam navasti ; quæ,
qua parte tui in me amoris sunt effectus,
recreant illa etiam plurimum, obruunt dum
cum tanto otii sacri tui incommodo
proficiscuntur.
Mitto nobilem viduam Villæam, cujus
causa, tum suo [57] jure, tum mei gratia tam
bene apud te est. Venio ad Rodulphum
C'est non seulement avec
empressement, mon très bon et très doux Frère,
mais avec une véritable anxiété que j'ai
cherché tous ces jours derniers à rencontrer un
des nombreux personnages qui se sont rendus
auprès de vous ; mais, par un regrettable
contretemps, aucun ne m'a prévenu. Je ne
pouvais supposer que les gens de M. de [56]
Charmoisy, de M. de Beaumont, que M.
Portier, chanoine de notre Eglise, aussi bien
que Chappaz, dussent partir sans m'avertir, et
c'est la principale raison pour laquelle je ne
m'informai pas de l'époque de leur départ.
Enfin Chappaz me donne un court moment
pour vous tracer quelques lignes. J'en profite,
mon excellent Frère, et je vous prie de croire
que, bien que vous me combliez de vos lettres,
vous ne parviendrez pas à m'en rassasier ; car
telle en est la douceur que, loin d'accabler
jamais, elles charmeraient toujours l'esprit le
plus blasé, tandis qu'une douceur trop fade
inspire le dégoût. La seule chose dont je sois
accablé, ce sont les bienfaits si nombreux et si
grands par lesquels, non sans peine, vous avez
montré à nos gens de la Thuille votre amitié
pour la famille de Sales ; et si d'une part cette
preuve d'affection me réjouit, de l'autre je
déplore le sacrifice de vos précieux instants de
loisir.
151 ad vos iverunt, [non patienter... impatiens dilationis tantæ...]
152 Charles Vidomne de Chaumont, seigneur de Charmoisy, Marclaz et Villy, remplit en France et en Italie diverses
missions qui lui attirèrent l'estime du duc de Savoie. Il avait épousé Françoise de Bellegarde, et mourut à Samoëns
(1599) chez sa fille, mariée au seigneur de Vallon.
153 Probablement Jacques de Menthon, baron de Beaumont et de Confignon, seigneur de Cohendier et de Sauterens,
gentilhomme de la chambre de Son Altesse. Il était fils de Charles II de Menthon, et avait épousé en premières noces
Jeanne de Cohendier et en secondes noces Jeanne de Charansonay, parente de la famille de Sales. Ce seigneur mourut
en septembre 1630.
61/318

7.2 Page 62

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Mellierum, Torentianum rusticum154, quem
Je ne vous parle pas de la noble veuve
dum ut commendatum habeas peto, jam nunc Mme de Ville, puisque sa [57] cause est en si
gratias ago quantas maximas possum quod bonne voie, soit parce qu'elle est juste, soit
meæ commendationi longe plus deferas quam aussi parce que, en ma faveur, vous avez bien
meis meritis deferre te par esset. Neque vero voulu la prendre en considération. J'en viens
cuiquam videri possum causam temerariam maintenant à Rodolphe Démeiller, ce bon
fovere velle, si quando ejusmodi tibi per paysan de Thorens ; en le recommandant à
ignorationem commendarem ; non enim votre bonté, je vous rends d'avance mille
aurichalcum pro auro dare velle mala fide actions de grâces de ce que vous avez déféré à
videri debet qui peritissimo fabro offert. Sed ma recommandation dans une mesure bien
missa hæc jam facio ; « bona verba, quæso155. supérieure à mes mérites. Je ne crains pas
»
qu'on m'accuse de vouloir favoriser une
Venies igitur post festa Paschalia mauvaise cause, si par ignorance je vous en
quamprimum ; nihil jucundius accidere mihi recommandais une qui fût telle ; car celui qui
potuit quam id audire ex D. de Charmoysi, présenterait du cuivre pour de l'or à un orfèvre
quocum heri in multam noctem mihi de te fuit aussi habile que vous ne saurait être soupçonné
sermo. Expectamus te uterque (sic) avidissime d'agir de mauvaise foi. Mais laissons tout cela
; hoc tamen cum incommodo meo, quod dies ; « soyez-moi indulgent. »
Crucifixo solemnes, qui mihi ob Divinorum
Vous viendrez donc immédiatement
tam solemnem et lectissimam [58] après les fêtes de Pâques : je ne pouvais
celebrationem brevissimi mihi futuri erant, eo recevoir de M. de Charmoisy une nouvelle plus
longiores sint quo te avidius expecto.
agréable. Nous avons passé hier une bonne
Vale, Frater, iterum et iterum partie de la nuit à nous entretenir de vous. L'un
suavissime.
et l'autre nous vous attendons avec une vive
impatience ; mais avec cet inconvénient pour
Revu sur l'Autographe conservé à la
moi, que les jours solennels consacrés au divin
Visitation d'Annecy.
Crucifié, lesquels m'auraient paru bien courts à
[58] raison des cérémonies si graves et si belles
qui les remplissent, me paraîtront d'autant plus
longs que je vous attends avec plus
d'impatience.
Adieu, mon Frère deux fois aimé.
_____
154 Sans doute celui dont il a déjà été question Lettre XII, p. 35. La famille Démeiller existe encore à Thorens.
(Pour les différentes manières d'écrire les noms propres, voir l'Avis au lecteur.)
155 Terent., Andria, Act., I, scena 11, 33.
62/318

7.3 Page 63

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XXI. Au même (Minute inédite). Désir de profiter des
nombreuses occasions que procurera la belle saison pour se voir
plus fréquemment. Nouvelles de plusieurs amis communs.
Annecy, vers le 16 avril 1594.
Jam vero, Frater suavissime, iniquum
prorsus ac ab omni humanitatis lege alienum
[judico] si Paschales hosce lætissimos dies
Quadragesimalibus in tanta agrorum, arborum
aviumque vernantium amœnitate, tristi nescio
quo silentio, conjungamus. Etsi namque
incommodum est et inopportunum
spontaneum omni sane tempore inter fratres
silentium (quo me longe ab eo sensu abfuisse
scias quem te aliquando secutum esse [59]
subverebar), at vero longe nunc acerbius et
iniquius esset, cum non modo colloquium, sed
garritum verni ipsius temporis leges permittere
videantur.
Neque tamen velim credas Domini
Monodii156 reditu alia ratione me non usum
esse quam quod me inscio discesserit. Neque
deinceps ipsa ad iter faciendum gratissima
tempestas opportunitate carere sinet, cum
litigatores vel recreationis gratia
frequentissime ad vos proficiscentur. Quibus
ne amantes diligentia cedant, curabo quam
potero impensissime ut quod operæ
miserandum illud genus hominum suis
discordiis ac inimicitiis [non] recte fovendis
tam libenter insumunt et turpiter, id amicitiæ
ac concordiæ liberaliter simul pariter et
honestissime conservandæ, per summam quæ
iis bonis inest voluptatem, amantes saltem
acerrimi attribuant.
Atque eam in rem jam paratum habeo
animum patris, habeboque omnino, uti me
Senatoris nostri familiæ [60] adjungam in
eleemosinarium, si me, sicut spero, de suo
itinere tantisper præmonuerit. Sin minus, quam
primum sequar, ne Quadragesimalia, nisi tui
conspectus saluberrimo [condimento] et ab
initio et a fine condiantur, edulia pessime
stomachum afficiant. Sic enim efficiam quod
insolentius soient ventres quidam, qui,
bacchanaliorum ritu Paschalia celebrantes,
A mon avis, très aimable Frère, il serait
tout à fait injuste et absolument
en dehors de toutes les lois de la bienséance
d'assimiler au temps du Carême, par je ne sais
quel triste silence, ces jours de Pâques si pleins
de joie, alors surtout que les prairies, les arbres,
les oiseaux célèbrent le printemps avec tant de
suavité. Le silence entre frères est toujours
pénible, inopportun (voyez que je suis loin du
sentiment que parfois je craignais un peu vous
voir adopter) ; mais [59] ce silence serait bien
plus amer, plus dur, aujourd'hui que les lois de
la saison printanière semblent nous permettre
non seulement une conversation sérieuse, mais
un babillage amical.
Si je n'ai pas profité du retour de M.
Monod, c'est seulement, croyez-moi, parce que
je l'ai ignoré. D'ailleurs, la saison si favorable
aux voyages nous fournira plus d'une occasion
de nous rapprocher, alors que les plaideurs,
même par simple divertissement, se rendront
bien souvent auprès de vous. Pour ma part, je
veillerai avec grand soin à ce que des amis
comme nous ne le cèdent pas à cette
malheureuse sorte de gens. Puisqu'ils se
donnent volontiers tant de peine pour
entretenir leurs discordes et leurs inimitiés, la
bienséance et la noblesse exigent que des amis
très affectionnés prennent au moins autant de
soin pour conserver entre eux la concorde et
l'amitié, à raison de la souveraine jouissance
attachée à ce bien.
J'ai déjà sur ce point incliné le
consentement de mon père, et je l'obtiendrai
tout à fait pour m'adjoindre à la famille de
notre [60] Sénateur en qualité d'aumônier,
pourvu qu'il me donne, ainsi que je l'espère,
quelque avis de son départ. S'il en va
autrement, je le suivrai le plus tôt possible ; les
mets de Carême chargeraient trop
douloureusement mon estomac, si, au
156 Selon toute probabilité, il s'agit de l'avocat Georges Monod, originaire de Bonneville, père du célèbre Jésuite Pierre
Monod. Dans le courant de l'année 1593, le duc de Savoie le destina aux charges de « senateur et conservateur de la
gabelle... desquels offices il n'a jamais jouy, prevenu par la mort. » (Archives de la Chambre des Comptes de Savoie.)
63/318

7.4 Page 64

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obtendunt consilium uti semper hinc inde inter commencement et à la fin, je ne les relevais par
bacchanalia, veluti carcere conclusam, le condiment très salutaire de votre présence.
retineant Quadragesimam.
J'imiterai en cela certains gourmands lesquels
Bene habet Antistes noster, tui cum ont la coutume extravagante de célébrer les
primis amantissimus ; Dominus item de fêtes de Pâques à la manière du carnaval, et
Chavanes. Affinem vero nostrum D. de semblent vouloir retenir le Carême comme
Charmoysi podagra torquet plurimum. Præses prisonnier, en le faisant précéder et suivre de
noster 157 ad suos Lutetianos crastina die bacchanales.
proficiscitur, et quando reversurus sit nescio.
Notre Evêque, qui est l'un de vos
Bene vale, suavissime Frater, et meilleurs amis, se porte bien. Il en est de même
Christum habeto propitium.
de M. de Chavanes ; mais la goutte fait
terriblement souffrir notre parent M. de
Revu sur une copie conservée à la Visitation Charmoisy. Notre Président part demain pour
d'Annecy. [61]
visiter ses Parisiens ; j'ignore l'époque de son
retour.
Portez-vous bien, Frère très aimable, et
que le Christ vous protège ! [61]
_____
XXII. Au même (Minute). Prochaine réunion du synode
diocésain. Obstacle imprévu qui a empêché le Saint de se
rendre à Chambéry. Ses regrets en apprenant que le Sénateur
est allé inutilement à sa rencontre.
Annecy, vers le 23 avril 1594.
Quid facerem jam, mi Frater, aut quo
me verterem, qui tam158 ardenti tuo illi
desiderio hactenus nec satisfeci, et jam
exclusus penuria temporis in promptu
satisfacere minime possum ? Ecce namque
synodica tempora jam appetentia159, clericis
omnibus hujus provinciæ celeberrima, cui si
non intersim anathemati caput ipsum objicio.
Subsequitur deinde de reipublicæ nostræ
ecclesiasticæ negotiis per aliquot dies tractatio,
quo toto tempore abesse me, quamvis inutilem,
omnino non patitur Rmi Antistitis et parentis
authoritas. [62]
At vero nudiustertius, cum venirem
huc160 uti sequenti die cum D. Copperio ad vos
pergerem, cum ad tria circiter milliaria inter
Que ferais-je, mon Frère, et de quel
côté me tourner, moi qui n'ai pas encore
satisfait à votre désir, et qui ne puis maintenant
y répondre, faute de temps ? Car nous voici à
l'époque très solennelle du synode, auquel tous
les membres de notre clergé sont tenus
d'assister ; et m'en dispenser, ce serait attirer
sur moi l'excommunication. Ensuite, vient
pour quelques jours le règlement des affaires
de notre Eglise ; et encore que j'y sois inutile,
notre Révérendissime Evêque et père ne
permet absolument pas que je m'absente
pendant tout ce temps. [62]
Avant-hier, me rendant ici dans
l'intention d'aller à vous le lendemain avec M.
Coppier, après environ trois milles de marche
157 Le Duché de Genevois ayant été donné en apanage, le 14 août 1514, à Philippe de Savoie-Nemours, second fils de
Philippe-sans-Terre duc de Savoie, ce Prince établit à Annecy le siège de ses états, et créa dans cette ville un Conseil
présidial et une Chambre des Comptes. En 1594, le président du Conseil était « le sieur » Poille ; le président de la
Chambre des Comptes, Louis Floccard. (Archives de la Chambre des Comptes de Genevois.)
158 qui tam [amanter ac ardenter expectanti complecti minime...]
159 Un usage du diocèse fixait ce synode pour chaque année au mercredi après le Dimanche du Bon Pasteur. En 1594,
il dut avoir lieu le 27 avril.
160 Le Saint avait sans doute passé quelques jours dans sa famille, au château de la Thuille. (Voir note (133), p ; 47.)
64/318

7.5 Page 65

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medios ac densissimos imbres processissem, sous une pluie torrentielle, je fus arrêté par un
sese mihi de quo nihil cogitaveram, ita se sane obstacle que je n'avais pas prévu, je vous
res habet, rapidissimus quidam torrens sese assure : le torrent était si enflé qu'il ne
objicit qui nullo loco tum vado transiri poterat, présentait aucun endroit guéable, et je fus forcé
sicque cogor retrocedere. Id autem causse fuit de rebrousser chemin. C'est ce qui m'empêcha
quo minus D. Copperio me in comitem de rejoindre M. Coppier, lequel faisait route
adjungerem, qui ex opposito lacus littore iter sans difficulté par le côté opposé du lac.
habuit omnino pervium.
Je suis pressé par un incroyable désir de
Angor desiderio incredibili id tenir ma promesse, et je le ferai aussitôt que je
præstandi quod promisi, quod quamprimum le pourrai ; mais je me garderai bien de vous
potero faciam; nullamque dicam diem ne indiquer le jour, de peur que vous ne veniez
obviam accedas iterum, quod te cum tali ac encore à ma rencontre. Vraiment, si cette
tanto comitatu semel fecisse, mei scilicet amitié extrême (je dirais aveugle ou presque
causa, nisi amor ille eximius (cæcusne dicam aveugle) que vous me portez ne vous servait
an cæcutiens?) erga me tuus excusaret, d'excuse, je jugerais intolérable qu'un sénateur
intolerabile omnino videretur in tanto senatore. aussi distingué que vous l'êtes se fût dérangé
Id ubi rescivi, hesterna scilicet nocte, tanto me une fois déjà pour moi avec toute une illustre
rubore sensi perfundi uti ne tuas quidem compagnie. Lorsque je l'appris (c'était hier au
litteras amplius per summam verecundiam soir), je sentis la rougeur me monter au visage,
respicere auderem. [63]
à tel point que je n'osais plus jeter les yeux sur
Pudet me, Frater optime, majorem in votre lettre. [63]
modum tam vehementer expetitum abfuisse.
Après avoir été attendu avec tant
Quid dicam ? Si mihi in mala causa bonus desit d'impatience, je suis on ne peut plus confus,
advocatus, actum quidem est de capite meo. At mon excellent Frère, d'avoir manqué au
Saltorio161 digna res erit ut in desperata causa rendez-vous. Que dirai-je ? Eh quoi ! si dans
remedio adsit præsentissimo, et mihi jam tam une aussi mauvaise cause je suis dépourvu d'un
magno pudore et damno castigato veniam, bon avocat, c'en est fait de moi. Mais il est
utpote quæ nemini noceat, obtineat. Utinam, digne de Salteur de plaider victorieusement
mi Frater, quam imis persentio medullis ex hac une cause désespérée, et d'obtenir un pardon
re perturbationem quam primum Deus avertat; qui ne peut nuire à personne, pour celui qui est
alioquin fieri nunquam posse reor ut te déjà puni de sa faute par la confusion qu'il en
exporrectis (sic) videam oculis…
éprouve et par la perte qu'il a faite. Qu'il plaise
à Dieu, mon Frère, me délivrer au plus tôt du
Revu sur l'Autographe conservé à la
trouble que je ressens jusque dans les
Visitation d'Annecy. [64]
profondeurs de mon être, sans quoi je cours
risque de ne plus oser vous regarder en face !...
[64]
_____
161 L'avocat Jacques II Salteur, qui devait être installé sénateur le 5 mars 1608. Son testament est daté de 1611. C'est
ce personnage qui présenta la requête de saint François de Sales, sollicitant sa réception comme avocat au Sénat de
Savoie, le 24 novembre 1592.
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7.6 Page 66

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XXIII. Au même. Projet d'un pèlerinage à l'église de la Sainte-
Croix d'Aix. Ordre que doivent suivre pendant le trajet les
pèlerins d'Annecy et de Chambéry.
Annecy, vers le 28 mai 1594.
Senatori amplissimo Antonio Fabro,
Franciscus Salesius, Ecclesiæ Gebennensis
Præpositus, salutem dicit.
Au très illustre Sénateur Antoine Favre,
François de Sales, Prévôt de l'Eglise de
Genève, présente ses salutations.
Fere conscriptam habebam jam
epistolam aliam quam ad te mitterem, Frater
suavissime, cum Soudanus tuam hanc ultimam
undique Spiritus Sancti odorem suavissimum
spirantem reddidit ; ego illa dimissa ut ad hanc
responderem animum adjicio.
Laus ergo Deo per Christum pro vobis
omnibus (ut Paulino jam utar scribendi
modo162) quia fides vestra nunc passim ubique
annunciatur. Ad Aquas163, uti [65] scribis,
peregrinationem tertio Spiritui Sancto sacro
die institutam, Deo dante, faciemus, non alio
apparatu quam quo vidisti nuper cum adesses,
easdemque Crucifixi Litanias dicemus.
Calceamenta pedum nostrorum solvemus,
locum enim ad quem pergemus sanctum
existimamus, ligno illo pretiosissimo
exornatum in quo Deus longe ardentiori
charitatis specie quam in rubo illo Mosaico
majoribus nostris apparuit164. Non tamen
totum iter, sed quædam tantum milliaria nudis
pedibus conficiemus, ea enim lex non sine
causa dicta est. Et quoniam recreandis viribus
necessarium erit cibum aliquem capere, in
unum omnes idemque hospitium secedere
decrevimus, in quo dum omnes simul
modestissime ac frugaliter prandebimus, pii
alicujus libelli lectio audiatur, ne videlicet
sacræ peregrinationi prophana admisceatur
confabulatio. Horam certam vix possum ego
dicere, cum turba plurima eidem
peregrinationi nobis invitis sese addixerit,
præsertim nonnullæ matronæ, quas quia ad
Communionem cæteraque pia exercitia
Societas hæc nostra ab initio admisit, ab hoc
cœpto repellere [66] nullis unquam potuit
J'avais presque achevé une autre lettre
qui vous était destinée, mon très aimable Frère,
lorsque Soudan m'a remis de votre part cette
dernière, qui est toute remplie de la très suave
odeur de l'Esprit-Saint. Laissant de côté la
première, je réponds à celle-ci.
Louange soit donc à Dieu pour vous
tous par Jésus-Christ, vous dirai-je avec saint
Paul, parce que votre foi est maintenant
annoncée partout. Le mardi de la Pentecôte,
Dieu aidant, nous ferons à Aix, [65] ainsi que
vous l'écrivez, le pèlerinage convenu. Le
cérémonial ne sera pas différent de celui que
vous avez vu dernièrement quand vous étiez
ici, et nous dirons les mêmes Litanies de Jésus
crucifié. Nous ôterons les souliers de nos
pieds, car nous regardons comme saint le lieu
où nous nous rendons, ce lieu orné du bois très
précieux sur lequel Dieu s'est montré à nos
pères avec une charité bien plus ardente que
dans le buisson de Moïse. Toutefois nous ne
ferons pas tout le chemin pieds nus, mais
seulement quelques milles, car ce n'est pas
sans raison que nous l'avons ainsi réglé.
Comme il sera nécessaire de réparer nos forces
en prenant un peu de nourriture, nous avons
résolu de nous retirer tous sous un même toit,
où nous dînerons ensemble modestement et
frugalement, écoutant la lecture de quelque
livre de dévotion, afin que nul discours profane
ne se mêle aux conversations pendant ce saint
voyage. Je ne puis guère vous dire l'heure
précise, puisque, contre notre gré, une foule
nombreuse s'est jointe à nous pour ce
pèlerinage, principalement quelques dames
que tous nos arguments n'ont jamais pu faire
162 Rom., I, 8.
163 L'église de cette ville, placée sous le double vocable de Notre-Dame et de la Sainte-Croix, possédait une parcelle
considérable de la vraie Croix, apportée de la Terre-Sainte par un seigneur d'Aix à l'époque des croisades.
164 Exod., III, 2-5.
66/318

7.7 Page 67

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verbis165. Sane ante meridiem ad Sanctæ
Crucis Aquentium ecclesiam Missæ sacra
audiemus, atque adeo ante meridiem vel
decima vel undecima hora adesse nos posse
credimus, vel forsitan citius. Vestrum erit
siquidem eodem die veniatis, nos, quia
viciniores estis nec aliis hominum cuneis
impediti, ibidem expectare.
Ita, mi Frater, non poterit ea non esse
vera fraternitas quæ ad ejus ligni conspectum
jurejurando firmanda est quod cœlites ipsos
immortales mortalibus hisce inferioribus
conciliavit166. Neque vero prætermittam unum
hoc loco mirandum, quod vos eo ipso scivistis
momento hujus nostræ peregrinationis
decretum quo vixdum statutum inter nos fuerat
; extrema namque Mercurii die hac de re
deliberavimus, ut divinitus factum videri [67]
possit, ut qui ad eamdem respiciebamus
Crucem, eumdem sensum receperimus. Soli
Deo gloria167.
Leges hujus nostræ Societatis ex ordine
descriptas jam habeas ; si quid incommodum
vobis videbitur pro locorum varietate,
immutabitis. Hæc una omnino vobis nobisque
lex sit perpetua, uti fratres hinc inde vicissim
omnes et filii Dei nominemur et simus168.
Sed jam iter ipsum aggrediamur. Bene
vale, mi Frater suavissime, amantissime,
dulcissime, ac Crucifixum habeto propitium.
Salutamus te iterum quotquot sumus
cæterosque omnes sanctissimæ Crucis filios,
sperantes protinus vos videre et os ad os loqui,
ut gaudium omnium nostrum sit plenum in
Domino169. [68]
changer de résolution, notre Confrérie les
ayant, dès le commencement, admises à la [66]
Communion et autres pieux exercices. Nous
entendrons la Messe en l'église de la Sainte-
Croix d'Aix sûrement avant midi, et même
nous croyons pouvoir arriver à dix ou onze
heures du matin, peut-être plus tôt. Puisque
vous venez le même jour, vous aurez à nous
attendre là, parce que vous êtes plus
rapprochés et que vous n'êtes point
embarrassés d'un si grand nombre de
personnes étrangères au pèlerinage.
Ainsi, mon Frère, il sera impossible
qu'elle ne soit pas véritable cette fraternité,
laquelle doit être jurée en la présence de ce
bois qui a réconcilié les immortels des Cieux
avec les mortels d'ici-bas. Et il ne faut pas que
j'oublie une chose merveilleuse : vous avez su
que notre pèlerinage était décidé au moment où
nous venions à peine de prendre cette
détermination, car c'est mercredi soir
seulement que nous avons délibéré à ce sujet ;
de sorte qu'on peut attribuer à une inspiration
divine ce fait que, portant les regards sur la
même Croix, nous [67] avons eu les uns et les
autres le même sentiment. A Dieu seul en soit
la gloire.
Je vous envoie les Statuts de notre
Confrérie mis en ordre ; si quelque point vous
paraît offrir des inconvénients à cause de la
variété des lieux, vous le modifierez. Il faut
seulement que vous et nous ayons à jamais
cette unique loi, d'être non seulement appelés,
mais d'être en effet tous frères et enfants de
Dieu.
Mais il est temps de nous mettre en
chemin. Adieu, mon très aimable, très aimant
et très doux Frère, et que le divin Crucifié vous
soit propice. Nous vous saluons encore une
fois, tous tant que nous sommes, et nous
saluons aussi tous les autres enfants de la très
sainte Croix, espérant de vous voir au plus tôt
et de vous parler bouche à bouche, afin que
notre joie soit pleine dans le Seigneur. [68]
165 On sait que saint François de Sales avait érigé à Annecy, le 1er septembre 1593, avec l'assentiment de Mgr de Granier
et le concours des chanoines, la Confrérie des Pénitents de la Sainte Croix, dont lui-même avait dressé les Statuts (voir
tome VII de la présente Edition, note (586), p. 80). Les congratulations qu'il adresse à son ami ont évidemment trait à
l'érection de la Confrérie de Chambéry, qui eut lieu le Dimanche de la Pentecôte, 29 mai 1594. Cet acte fut sanctionné
par un arrêt du Sénat, le 20 décembre de la même année.
166 Coloss., I, 20.
167 I Tim., I, 17.
168 I Joan., III, 1.
169 II Joan., v. 12.
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XXIV. Au même (Minute). Le Sénateur est attendu à Annecy ;
plusieurs maisons lui sont offertes. Il est instamment prié
d'amener sa femme.
Annecy, vers le 7 juin 1594.
Fratri suavissimo Antonio Fabro, Senatori
amplissimo, Franciscus De Sales salutem
dicit.
A son très doux Frère Antoine Favre, très
illustre Sénateur, François de Sales présente
ses salutations.
Expectabunt te quamplurimi,
suavissime Frater, ad extremum diem
decimumquintum calend. Julii. Ego vero cum
D. de Charmoysi, affini nostro, paulo citius
expectaturi sumus ; quorum enim longe majus
futurum est bonum, expectationem anteriorem
esse par est.
De domo quam170 urbanam in epistola
ad D. de Charmoysi appellas nihil est quod
cures, habemus enim paratam, non unam
tantum aut alteram, sed tertiam quoque ;
quandoquidem uti mea hoc nomine censeatur
velle non debeo, Domini vero de Charmoysi,
ut video, tu [69] ipse noluisti.171 Laconismum
non tam verborum quam temporum inopia
sequar.
Bene vale, expectatissime Frater.
Suavissimæ sorori, conjugi tuæ clarissimæ et
charissimæ172, salutem dicerene debeam non
satis scio, qui te illi jam nolim sane addicere
nisi tu ipse vicissim eam etiam nobis tecum
addicas. Christum vobis precor propitium et
nobilissimis liberis.
Bon nombre de nos amis vous
attendront le 17 juin au soir ; mais notre parent,
M. de Charmoisy, et moi nous vous attendrons
de meilleure heure. Il est juste que ceux dont le
bonheur doit être plus grand devancent, en
vous attendant plus tôt, le moment de le goûter.
Ne vous mettez nullement en souci de
ce que, dans votre lettre à M. de Charmoisy,
vous appelez une maison de ville. Nous en
avons non seulement deux toutes prêtes, mais
trois, puisque je ne dois pas vouloir que la
mienne porte ce nom, et je vois que vous n'avez
[69] pas voulu celle de M. de Charmoisy. Je
vise à la brièveté, faute de loisir et non de
choses à vous dire.
Adieu, mon Frère impatiemment
attendu. Je ne sais trop si je dois envoyer mes
salutations à ma très aimable sœur, votre
épouse très distinguée et très chère, car je ne
voudrais pas la reconnaître pour vôtre si, à
votre tour, vous ne la rendiez nôtre ainsi que
vous. Je prie Jésus-Christ de vous être propice
à tous deux et à vos très nobles enfants. [70]
Revu sur l'Autographe conservé à la
Visitation d'Annecy. [70]
_____
170 quam [civilem vel]
171 noluisti.[Utinam vero uxor suavissima non magis tibi hic deesset quam domus.]
172 Benoîte Favre, dame de Vaugelas, fille de Claude Favre et de Jacquemine Guinet ; son contrat de mariage est daté
du 1er janvier 1581. Le Sénateur épousa en secondes noces, avant septembre 1606, Philiberte Martin de la Pérouse,
qui fut inhumée à Chambéry le 11 janvier 1624.
68/318

7.9 Page 69

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XXV. Au même (Minute). Déception du Saint et de ses amis en
ne voyant pas arriver le Sénateur. Le Prévôt va prêcher à La
Roche.
Annecy, 13 juin 1594.
Quod D. de Charmoysi affini nostro
scripseras, te ad diem postremum Veneris vel
Sabbathi venturum, utroque die fuimus cum D.
de Chisse173, vicario Rmi Episcopi nostri, D. de
Montrotier et de Noveri174 in insidiis inter
utrumque iter ad solis occasum usque, ut te,
sicuti prioribus scribebam litteris, paulo citius
expectaremus quam reliqui plurimi. Atque
nihilo fere minus te inter cænandum apud
Dominum de Charmoysi frequentissime [71]
salutavimus, quid causæ esse posset, mi Frater,
cur non venires, in utramque partem ad multam
noctem disputantes. De solemni quidem
Sancto Sacramento Dominico die veniebat in
mentem, sed Dominus de Charmoysi ex tua ad
eum epistola confutabat.
Plurimum autem mea intersit (sic) hæc
retardatio, etsi hodierna die venires, qui die
Mercurii ad Rupenses concionandi gratia
pergo175. Ergone te accedente discedam ? Non
facerem omnino nisi scandali vitandi causa
subesset, et si te non antea venturum
credidissem, nullis rationibus iturum me
recepissem.176 Tuum est videre quanam
ratione tantam meam jacturam resarcire velis
Sane cujusvis diei major pars est horarum
septem primarum.
Jam ergo quando venire non vis,
salutem plurimam clarissimæ uxori tuæ quam
impensissime dico, itemque nobilissimis
liberis. Dolorem quem sentio cohibeo quanto
possum maximo conatu, cum qui raptim
scribere cogor, [72] cum stomacho et modestia
simul non possim. Bene vale177.
Comme vous aviez écrit à notre parent,
M. de Charmoysi, que vous viendriez vendredi
ou samedi soir, M. de Chissé, grand-vicaire de
notre Révérendissime Evêque, M. de
Montrottier, M. de Novery et moi nous
sommes tenus chaque jour en embuscade entre
les deux chemins jusqu'au coucher du soleil,
afin de vous attendre, ainsi que je vous l'avais
écrit précédemment, un peu plus tôt qu'un
grand nombre d'autres. Notre déconvenue ne
nous a pas empêchés de vous envoyer force
compliments en soupant chez M. de
Charmoisy, où [71] nous avons discuté jusque
bien avant dans la nuit sur les raisons qui vous
avaient arrêté, mon Frère. On pensait à la
solennité du Dimanche du Saint-Sacrement ;
mais, d'après la lettre qu'il a reçue de vous, M.
de Charmoisy réfutait cette supposition.
Quoi qu'il en soit, alors même que vous
arriveriez aujourd'hui, ce retard peut être bien
fâcheux pour moi qui me rends mercredi à La
Roche pour prêcher. M'en irai-je donc quand
vous venez ? Assurément je ne le ferais pas
sans la raison du scandale à éviter, et si je
n'avais cru que vous arriveriez plus tôt, rien
n'aurait pu me déterminer à cette absence. A
vous maintenant de voir comment vous me
dédommagerez d'une perte si considérable.
Songez seulement que les sept premières
heures du jour en constituent la majeure partie.
Si donc vous ne voulez pas venir,
laissez-moi saluer cordialement votre digne
épouse et vos nobles enfants. Je réprime autant
que je le puis, et avec bien des efforts, la peine
que j'éprouve, ne pouvant [72] en même temps,
173 François de Chissé, coseigneur de Pollinge, chanoine de Saint-Pierre de Genève, puis vicaire général et officiai en
1591. Le rare mérite de ce jeune ecclésiastique et sa parenté avec Mgr de Granier semblaient le désigner pour succéder
à son oncle dans l'épiscopat. Lui-même cependant joignit ses propres instances à la requête du Prélat sollicitant auprès
de Clément VIII (1599) la coadjutorerie de Genève pour saint François de Sales.
174 Amblard-Philibert, fils de Georges Vidomne de Chaumont, seigneur de Novery et de la Chapelle, et d'Emmanuelle-
Philiberte de Menthon-Montrottier. Il épousa en premières noces Marguerite de Rossillon, et en secondes noces
Philiberte de Jase. Nommé premier chevalier de la Chambre des Comptes de Savoie et conseiller d'Etat, il mourut en
1634 ou 1635.
175 Voir tome VII de la présente Edition, p. 182.
176 me recepissem. [Non enim aliter petentibus obtemperassem quam si et quando credidissem...]
177 Bene vale [et saltem nos ama.]
69/318

7.10 Page 70

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178Habes urbanas domos quibus utaris dans une lettre écrite à la hâte, allier le
si venias, ne te hæc moretur dubitatio.179 « courroux et la modération. Adieu.
Cuncta timemus amantes180 ; » facile est enim
Ne vous laissez pas arrêter par la
minus volenti excusationes invenire. De crainte de n'avoir pas d'appartement ; si vous
valetudine tua nihil ambigo, audivimus enim venez, vous aurez des maisons de ville à votre
ex itinere virum qui te togatum ambulantem disposition. « Tout éveille les craintes de ceux
animi gratia die Veneris viderit.
qui aiment, » parce qu'il est facile, quand on n'a
Bene vale, et tertium Principis pas une très bonne volonté, de trouver des
decretum ut venias, si ita tibi e re tua esse excuses. Je n'ai aucune inquiétude au sujet de
videbitur, expecta.
votre santé, car nous avons entendu dire à un
voyageur qu'il vous a vu vendredi vous
Revu sur l'Autographe conservé à la
promener en grande tenue.
Visitation d'Annecy. [73]
Adieu, et attendez un troisième arrêt du
prince pour venir, s'il vous semble à propos.
[73]
_____
XXVI. A François Girard, Prévôt de l'Église Notre-Dame de
Bourg181 (Minute). Gracieuses excuses de n'avoir pas écrit plus
tôt. Le Saint est à Hautecombe avec le sénateur Favre.
Hautecombe, vers le 24 juillet 1594.
In tanta quam feci scribendi cessatione,
humanissime et clarissime Girarde, id mihi
fere accidit quod probis pueris interdum
usuvenire solet, qui si182 statis collegii horis
quibusdam lectionibus per imprudentiam non
interfuerint, quamvis in officium gratiamque
magistri quam primum redire cupiant, nesciunt
tamen inter spem [et] metum nutantes horam
sibi ipsis dicere, qua in irati præceptoris
conspectum venire debeant ; dum præsentem
ejus iram declinare cum veniæ speratæ jactura,
an veniam [74] cum183 tanta molestia obtinere
satiusne sit, dubia mens pueri vix statuere
potest. Quam male ac imprudenter fecerim
hactenus, qui per tot menses nihil ad te scripsi,
ego ipse omnium maxime sentio ; atque eo
molestius fero quo me abs te amari quale
quantumque sit bonum nemo me melius
percipere potest.184 Unde vel per epistolam
intueri te absentem cui tantam iracundiæ
Après être demeuré si longtemps sans
vous écrire, mon très bon et très respectable
Girard, je suis à peu près dans la situation où
se trouvent parfois de bons écoliers qui, n'étant
pas arrivés aux heures fixées, ont manqué
inconsidérément certaines leçons. Ils
voudraient bien rentrer dans le devoir et
reconquérir les bonnes grâces de leur
professeur ; mais flottant entre la crainte et
l'espérance, ils ne savent se déterminer pour
l'heure où ils devront paraître en présence du
maître irrité : faut-il éviter sa colère présente
en sacrifiant le pardon espéré, ou obtenir leur
pardon en s'exposant à être punis ? Dans une
[74] telle hésitation l'esprit de l'enfant a bien de
la peine à discerner ce qui lui est plus
avantageux. A quel point j'ai été jusqu'ici
inconsidéré et coupable en passant tant de mois
sans vous écrire, je le sens mieux que
personne, et j'en suis d'autant plus affligé que
178 [Les deux alinéas suivants sont inédits.]
179 hæc [excusatio retineat. D. de Charmoysi universam familiam tuam nobilissimam salutat.]
180 Ovid., ubi supra, p. 10.
181 Voir la note jointe à la Lettre XXXIe.
182 qui si [absentes notati unicæ lectioni...]
183 cum [tanto pudore ac tanto inconimodo...]
184 percipere potest. [Dumque primum tuum vel per epistolam congressum formidandum...]
70/318

8 Pages 71-80

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8.1 Page 71

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causam dederim, per summam verecundiam personne n'apprécie mieux que moi les grands
vix audebam, nisi tuæ humanitatis ac pietatis avantages de votre amitié. Aussi, dans la
recordatio animos addidisset.
confusion que j'éprouve de vous avoir donné
Ecce ergo me culpam libenter un pareil sujet de mécontentement, à peine
agnoscentem atque tuam implorantem aurais-je osé, même par lettre, diriger sur vous
humanitatem, ut quam jus æquumque negat mes regards, si le souvenir de votre douceur et
majoribus integram restitutionem clementia de votre indulgence ne m'avait encouragé.
bonumque concedant. Sic enim fiet ut qui me
Me voici donc reconnaissant volontiers
totum semel pro ea qua me complexus [es] ma faute, implorant votre pitié, afin que la
benevolentia tibi Fabroque nostro clémence et la bonté m'accordent la totale
observandissimo, qui ejus mihi fuerit [auctor], restitution que la justice et l'équité refusent aux
ex unica causa debebam, jam tibi uni idem ipse majeurs. Ainsi moi, qui me devais déjà une fois
totum me debeam ; eoque sane majore ratione tout entier à vous, à raison de la bienveillance
quo in eo sum magnificentissimo cœnobio dont vous m'avez entouré, et à notre très digne
quod qui ingreditur eam [75] subeat sententiam Favre parce qu'il m'a obtenu cette faveur, je me
necesse est : « Difficilius est reformare quam devrai désormais tout entier à vous seul, et cela
formare185. »
avec d'autant plus de raison que je me trouve
Est enim undevigesimus hic dies quo dans ce [75] magnifique monastère où l'on ne
cum fratre meo Fabro nostro vitam ago peut entrer sans se rappeler cette sentence : « Il
suavissimam186, cui ad perfectam fœlicitatem est plus difficile de réformer que de former. »
id defuisse unicum videbatur quod te nobiscum
C'est aujourd'hui le dix-neuvième jour
non haberemus. Atque heri cum in hanc que je passe la vie la plus douce avec mon frère
Altæcombæ sanctissimam simul et notre cher Favre ; il ne manquait, ce semble, à
augustissimam solitudinem venissemus187, notre bonheur que de vous avoir avec nous.
Rmum Albiensem Episcopum visendi gratia, qui Nous sommes venus hier dans cette sainte et
ut doctissimus est sic Fabrum hunc nostrum auguste solitude d'Hautecombe pour voir
summo prosequitur amore, antequam a fratre l'Evêque d'Albi, prélat aussi savant que très
suavissimo divelli me patiar sic tam diuturnæ affectionné à ce cher Favre. Avant que j'aie la
cessationis veniam impetraturum abs te peine d'être séparé d'un très aimable frère, je
credidi, si pollicear me futura diligentia et me suis persuadé que je pourrais obtenir le
frequentia deinceps moram hanc præteritam pardon de mon silence prolongé en vous
repleturum. Id loci majestas, integerrimi ac promettant de vous dédommager à l'avenir par
optimi Antistitis [76] sanctitas, uti credas ma diligence et mon exactitude. La majesté de
efficiet (sic) ; efficientque eadem reor ut et tu ce lieu, le caractère sacré de cet excellent et
redeuntem me per epistolam in officium amice très vertueux Pontife vous feront croire à ma
excipias et ego in officio diligentior parole ; pour le même motif aussi, je l'espère,
permaneam…
vous [76] recevrez amicalement un coupable
qui en vous écrivant revient au devoir, et j'aurai
Revu sur l'Autographe conservé à la
moi-même plus de soin de rester fidèle à ce
Visitation d'Annecy.
devoir
_____
185 Vide S. Bernard., De dilig. Deo, c. V ; cf. Les Controverses, tom. I hujus Edit., p. 64 ; et tom. VII (Serm. I), pp.
11, 195.
186 Plusieurs pièces officielles conservées aux Archives de la Chambre des Comptes de Savoie, ainsi que des lettres
du Sénateur, prouvent qu'il s'était rendu à Annecy vers le 5 juillet, pour traiter une question relative à l'impôt de la
gabelle.
187 Monastère fondé au commencement du XIIe siècle sur les rives du lac du Bourget (Savoie), puis érigé en abbaye
et incorporé à l'Ordre Cistercien en 1135 sous l'influence de saint Bernard. Les princes de Savoie l'enrichirent par des
dons successifs et le choisirent pour le lieu de leur sépulture. Après plusieurs siècles le relâchement s'étant introduit
dans les observances régulières, les supérieurs ecclésiastiques et le pouvoir civil s'unirent pour ordonner une réforme
en 1549 ; mais les mesures prises alors n'avaient pas encore obtenu tout leur effet en 1594. Alphonse Delbene, Evêque
d'Albi, était à cette époque abbé commendataire d'Hautecombe. (Voir plus loin la note biographique sur ce Prélat,
jointe à la lettre qui lui est adressée par saint François de Sales.
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8.2 Page 72

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XXVII. Au sénateur Antoine Favre (Minute). Compliments
affectueux.
[Annecy, vers le 13 août] 1594 188.
189Nulla sane minori authoritate ea
Il ne faut rien moins que la très grande
quam maximam apud me habes adduci omnino autorité que vous avez sur moi pour me
possem ut crederem id ita semper esse verum convaincre, comme vous me l'écrivez, qu'il est
quod scribis, respondere nimirum facilius esse toujours plus facile de répondre à un ami que
quam provocare. Alioquin cum in ipso fere de le provoquer ; car [77] lorsque j'étais sur le
[77] provocandi articulo, tuas illas point de vous prévenir, votre lettre si gracieuse
amœnissimas et, quod caput est, amicissimas et, qui plus est, si amicale, m'est parvenue.
litteras accepissem, tanto tuæ humanitatis L'éclat de votre érudition m'a si fort ébloui
lumine mentem meam obtundi sensi ut qui jam l'esprit, que, tout en me disposant à vous écrire,
jam scripturus eram, tantæ humanitati je désespérais de pouvoir m'élever à la hauteur
respondere posse omnino deinceps de votre savoir. C'est ainsi que l'oracle
desperarem. Sic enim Apollinem cum tanta d'Apollon répondait, dit-on, avec tant de
subtilitate respondentem inducunt, ut si subtilité, que s'il eût posé lui-même des
interrogasset nulla humani ingenii virtute questions, la sagesse humaine aurait été
responderi potuis set.190 Tam multis namque incapable de les résoudre. Vous nous êtes
partibus superior es nobis ut nulla proportione tellement supérieur sous tous rapports que
tecum certare possimus, nisi tunc agamus cum nous ne pouvons en aucune façon nous
agere nondum cæperis, vel si voluntate res mesurer avec vous, à moins toutefois que nous
tractanda sit.
n'entamions la correspondance ou que nous
Tanta enim mea est erga te observantia, n'en choisissions le sujet.
ut ex hac parte vix equidem parem, superiorem
Si grande est l'estime que je vous ai
omnino neminem habere possim, nec alio vouée, que sur ce point on peut tout au plus
egeat monumento quæ tam justo caractere sit rivaliser avec moi, mais l'emporter, jamais.
insculpta nullius ut temporis injuria deleri Cette estime n'a pas besoin d'un monument qui
possit.191
en conserve le souvenir ; elle est gravée en
Bene vale, et Christum habeto caractères assez durables pour défier l'action
propitium.
du temps.
Adieu ; que Jésus-Christ vous soit
Revu sur l'Autographe conservé à la
propice ! [78]
Visitation d'Annecy. [78]
_____
188 Cette lettre et les quatre suivantes, écrites sur un même feuillet avec caractères absolument identiques, ont entre
elles une étroite connexion ; il convient donc de leur assigner des dates très rapprochées l'une de l'autre. Or, la dernière
(Lettre XXXIe) est bien à sa place dans le courant de l'été 1594, si l'on en juge par les évènements auxquels le Saint
fait allusion (voir note (204), p. 84). Quant à la première, elle n'est certainement pas antérieure au 11 août, puisque les
Entrées du Sénat constatent seulement à partir de ce jour la présence du sénateur Favre à Chambéry.
189 Dubitarem [si per te liceret...] Nescio sane, clarissime vir, an id ita omnino... semper verum sit [quod scribis...]
Dubitarem sane si te minor... Indiguit sane ea authoritate quæ maxima in me tua est... tanta quanta tua in me est...
190 responderi potuisset. [Sin vero non tam re quam voluntate certandum sit. Age vero...]
191 deleri possit. [Non ergo respondeo clarissime, sed de deditione tecum... te certiorem facio. Ago vero gratias
immortales... Sperandum vero mihi est tantam quam erga te habeo voluntatis propensionem... Curabit ille...
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8.3 Page 73

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XXVIII. Aux fils du sénateur Antoine Favre192 (Minute inédite).
Remerciements pour une lettre reçue d'eux. Encouragements
à suivre les exemples de leur père. Message pour leur mère.
[Annecy, vers le 15 août] 1594.
193Duo maxime nunc præstabo, Amici
charissimi : alterum quidem ut vestris litteris
quibus non ita pridem auctiorem me sane
fecistis et jucundiorem respondeam ; alterum
vero ut quoniam sentiunt ex194 iterata lectione
detrimentum, hac eadem epistola, recentes a
vobis expetam, cum eadem utrumque ratione
nitatur.
Rectissime namque facitis qui, patris
vestri clarissimi et optimi authoritatem secuti,
ad me tam amanter scripsistis. Hunc vobis
prælucentem sequamini, quæso, [79] religiose
; in hoc, Amici charissimi, splendidissimum
exemplar oculos vestros noctes diesque
intendite. Sic enim fiet ut ex ejus officina
ingenui nunc quidem tyrones, subinde fabri
nobilissimi prodeatis, ac me uti facit imprimis
diligatis.
Meo nomine impensissime salutate
clarissimam matrem vestram, quam tanta
prosequor observantia nulla ut aptius quam
filiorum reputari possit. Itaque, eam meo
nomine salutate.
Deux raisons principales me portent à
vous écrire, mes très chers Amis : la première
est de répondre à la lettre dont vous m'avez
favorisé récemment, et qui m'a causé tant de
plaisir ; la seconde est de vous demander une
nouvelle lettre, car celle que vous m'avez écrite
est tout endommagée par la lecture répétée que
j'en ai faite. Ce double motif s'appuie sur un
même fondement.
Vous faites très bien d'imiter l'exemple
de votre illustre et excellent père en m'écrivant
si affectueusement. Ayez jour et nuit, mes [79]
très chers Amis, les yeux fixés sur le modèle
éclatant qui resplendit devant vous ; suivez-le
religieusement. En agissant de la sorte, vous
qui êtes dans son atelier d'excellents apprentis,
vous en sortirez très nobles ouvriers, et
spécialement vous aurez appris de lui à
m'aimer.
Saluez en mon nom votre illustre mère
à qui j'ai voué un respect si grand qu'il ne peut
être justement comparé qu'à la piété filiale.
Saluez-la donc en mon nom.
Revu sur l'Autographe conservé à la
Visitation d'Annecy.
_____
XXIX. Au sénateur Antoine Favre (Minute inédite).
Explications amicales. Remerciements pour l'envoi de
Méditations sur la pénitence.
[Annecy, août] 1594.
Quam bonus eram vir et bardus, mi
Que j'étais donc simple et ingénu, mon
192 D'après plusieurs historiens, Antoine Favre eut de sa première femme (voir note (172), p. 70) huit fils. Deux
moururent en bas âge ; les survivants furent : René, seigneur de la Valbonne, baron d'Aiguebelette ; Claude, seigneur
de Vaugelas, le célèbre auteur des Remarques sur la langue française ; Antoine, aumônier de Madame Royale ; Pierre,
dit du Chesne ; Philibert, seigneur de Félicia, et Jean-Claude, seigneur des Charmettes et de Moyron. L'aîné avait près
de onze ans, le second neuf, lorsque cette lettre fut écrite.
193 Vestras litteras amoris in me vestri pignus suavissimum, etiamnum... [Hac epistola duo] maxime faciam...
194 ex [continua... multa attritione...]
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8.4 Page 74

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Frater, cum uti sororis meæ consuetudini ac Frère, quand je vous conseillais si naïvement
ustricitati (sic) tantisper indulgeres, tam d'être un peu condescendant envers ma sœur,
candide suadebam, mi Frater. Quasi vero tu [votre femme,] comme si jamais vous aviez eu
aliquid aliud cogitasses, et jam me puderet in d'autres pensées ! Je serais déjà plein de
tam [80] aperta luce deceptum esse si ab alio confusion d'avoir été trompé en chose aussi
quam ab ingeniosissimo fabro. Gaudeo sane [80] évidente si je ne l'avais été par un artisan
plurimum gratulorque tibi ex animo et sorori tel que vous. Je m'en réjouis vivement et je
ne bonæ fidei viatori spinas pedibus injicias, ut vous félicite tous deux de ce que, suivant le
est in proverbio195.
proverbe, vous ne jetez pas des épines sous les
Gratulor sane plurimum sorori de pieds du voyageur de bonne foi.
diuturniori illo tuo amœnissimo conspectu ; at
Certes, je félicite aussi grandement ma
quorsum eam in causam rogari, suaderi ac sœur de pouvoir jouir longuement de votre
propemodum cogi velle, et locum quem agréable présence ; mais pourquoi vouloir être
omnino tibi selegeris, non nisi post multas prié, pressé et presque contraint dans cette
aliorum præces, per summam artis aulicæ affaire ? Pourquoi n'occuper qu'après les
subtilitatem196, more Locatellæo197 occupare ? nombreuses instances de plusieurs, la place
Bene est. Semel falli vel prudentissimus que vous avez choisie vous-même, si ce n'est
quisque potest ; iterum si me iis artibus fallas, par une extrême finesse digne des hommes de
indignus omnino sim tua officina alumnus. cour, à la manière de notre Locatel ? C'est bien.
Opportune
pœnitentiales Le plus sage peut être trompé une fois ; mais si
Meditationes198 quibus exercear dum aberis je me laisse tromper de nouveau, que je sois
misisti, in quibus quid meum fuerit non [81] tenu pour un apprenti bien indigne de votre
video, tot nempe prætiosis tuis illis lapillis atelier.
intertextum et consitum opus illud est ut fœlici
Vous m'avez envoyé fort à propos les
mutatione nomen antiquum et formam omnem Méditations sur la pénitence, afin que je m'y
perdiderit.
exerce pendant que je suis privé de votre [81]
Nuper misi litteras Episcopi Albiensis ; présence. Mais je ne vois pas ce qui peut m'être
nescio num exceperis. Bene vale et ut valere attribué dans cet ouvrage, car vous l'avez vous-
vis, cum clarissima conjuge.
même tissé et enrichi de tant de belles
pierreries, que, par une heureuse
Revu sur l'Autographe conservé à la
transformation, il a perdu son ancien nom et sa
Visitation de Turin.
première forme.
Je vous ai transmis dernièrement la
lettre de l'Evêque d'Albi, je ne sais si vous
l'avez reçue. Portez-vous bien et à souhait,
ainsi que votre illustre épouse.
_____
195 Cf. Prov., IV, 12.
196 simulationem
197 Il s'agit probablement de Jacques de Locatel, seigneur de Locatel et de Cevins, chevalier du Saint-Sépulcre de
Jérusalem, « lieutenant d'une compagnie de six cents hommes d'armes deça les monts, pour le service de Son Altesse.
» En 1594 et 1595, il était procureur fiscal de l'Archevêque de Tarentaise.
198 Ces Méditations, soumises à l'examen du Saint, furent publiées l'année suivante sous le titre de Centurie premiere
de sonnets spirituels de l'Amour divin et de la Penitence. Par Antoine Favre, S. S. A Chambery, par Claude Pomar,
MDXCV. C'est au sujet de cet ouvrage que saint François de Sales écrivit à sainte J.-F. de Chantal, le 11 février
1607 : « Je vous envoye le livre ci joint auquel vous verres beaucoup de beaux traita, qui furent en partie faitz sur mes
premieres prædications, par M. le President de cette ville. »
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8.5 Page 75

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XXX. Au même (Minute inédite). Les prévenances d'un ami
commun attribuées à la recommandation du Sénateur. Désir
de se procurer quelques formules de prières.
[Annecy, fin août] 1594.
199Accepi tuas ab homine tuo litteras.
J'ai reçu votre lettre par le porteur à qui
Quid autem ju cundius fuerit, an hominem vous l'aviez remise. Qu'est-ce qui m'agréa
tuum an litteras tuas videre ? Non davantage, ou de voir votre envoyé ou de lire
jucundissimum quicquid tuum esse non potest. votre lettre ? Tout ce qui vient de vous ne peut
[82]
que m'être extrêmement agréable. [82]
Sane, quantum conjicere potui, non alia
En vérité, autant que j'ai pu le
me ratione amare cupiebat Franciscus conjecturer, François Chosal désirait lier
Chosallius200 quam quod me amares ; alioquin amitié avec moi pour cette seule raison que je
cum in me tam pauca e multis quæ dixeras suis votre ami. Du reste, comme il aura trouvé
deprehenderit, neque te neque me jam amaret, en moi si peu des qualités que vous m'avez
nisi amari me abs te,201 te quidem excusatione, attribuées, il ne voudra plus être ni votre ami
me benevolentia, utrumque admiratione ni le mien, à moins que, pour s'expliquer
dignum redderet. Quo mihi suavior est ea qua l'amour que vous me portez, il ne vous
me prosequitur benevolentia quod a tua considère avec beaucoup d'indulgence, moi
omnino proficiscatur, ac ad tuam pœnitus, ut « avec beaucoup de bienveillance, et tous deux
ad primam in suo genere et cæterarum avec quelque surprise. Cette bienveillance
mensuram202, » immediate referatur. Jam dont je suis l'objet de sa part m'est d'autant plus
autem tuum illud erit ut cujus boni author mihi douce qu'elle procède uniquement de celle que
fuisti conservator ejusdem esse velis.
vous avez pour moi et qu'elle se rapporte
Pergo. Audivimus confratrem nostrum, immédiatement à celle-ci, puisque « la
tuum vero in Cruce filium, virum optimum première chose en chaque genre sert de mesure
Saldium203, centum præcum [83] ad à tout le reste. » A vous maintenant de me
sanctissimi Crucifixi [honorem] ritus penes se conserver ce bien dont je vous suis redevable.
habere ; nos unde habere possimus non
Je poursuis. Nous avons entendu dire
videmus nisi, quoad commodum erit, decem que notre confrère, votre fils dans la Croix,
vel duodecim ex ipso accipiamus, quorum l'excellent Saldoz, possède une centaine de
prætium…
formules [83] de prières à Notre-Seigneur
crucifié. Nous ne voyons pas le moyen de nous
Revu sur l'Autographe conservé à la
en procurer, à moins qu'il ne nous en cède dix
Visitation de Turin.
ou douze exemplaires, dont le prix
_____
199 Non sunt sane suaviores litteræ tuæ, quæ suapte natura sunt suavissimæ, non sunt inquam suaviores litteræ tuæ ex
ejus qui eas attulit suavitate... jucundius quidem actum est rem tanti prætii magnis viris committere...
Accepi tuas litteras ; vidi Dominum Chosallium tuo nomine eas perferentem. Horum autem utrum jucundius,
non facile fuerit judicandum. Et litteras quidem aperte tuas videbam, Chosallius se tuum prorsus esse omnino
asserebat, [ac summa] qua pollet [dicendi facultate persuadebat...]
200 Selon toute probabilité, Jean-François Chosal ou du Chosal, qui fut reçu avocat au Sénat de Savoie en 1594.
201 abs te, summum amorem erga me tuum...
202 Aristot., Physica, l. IV. c. XIV.
203 Plusieurs personnages portant le nom de Saldoz ou Sardoz habitaient alors Chambéry. Peut-être s'agit-il ici d'André
Sardoz, marchand de cette ville, lequel est nommé plus d'une fois dans les lettres-patentes de Charles Emmanuel.
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8.6 Page 76

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XXXI. A François Girard, Prévôt de l'Église Notre-Dame de
Bourg204 (Minute). Congratulations pour le zèle qu'il déploie au
service de Jésus crucifié, et pour son agrégation à la Confrérie
de la Sainte Croix.
Annecy, fin août 1594.
205Et vero nunc tibi ex animo
gratulandum est, clarissime Girarde, cum te
totis viribus sub sanctissimi [84] Crucifixi
signo206 serio militantem videamus. Quid enim
est quos Deus odivit odio habere et super
inimicos Crucis tabescere207 quam pro Christo
decertare ? Nulla gloriosior bene de Deo ipso
et Ecclesia merendi occasio potest esse quam
hæc quæ tibi summa Dei providentia occurrit.
Et quidem facillimum est cuique Christiano ac
omnibus fere obvium, Christum languentibus
medentem208, mortuos excitantem sequi, at
Christum languentem et morientem id
paucissimis concessum est. Non arduum est
admodum Crucem erectam amplecti dum
nemo impellat nitaturve disturbare, at contra
pugnantium impetum eam ne labatur sustinere,
id confirmates virtutis est. O fœlix pugna in
qua Christo pariter et morimur et vivimus209.
Quid, quæso, tanta religione gloriosam nobis
antiquorum [85] Ecclesiæ Patrum memoriam
commendavit quam quod nullis se minis a
Crucifixi patrocinio (ut interim ita loqui
concedas) abduci se passi sint ? Martinos sane,
Chrysostomos, Hilarios, Damascenos nulla
adeo sursum evexit eruditio quam ea Christiani
animi celsitudo qua Imperatoribus cæterisque
falsis fratribus210 pugnam pro Christo
indixerunt, fortesque sese omnino ad prælia
Il faut maintenant vous féliciter du fond
du cœur, excellent Girard, puisque nous vous
voyons combattre de toutes vos forces sous
[84] l'étendard du très saint Crucifié ; car n'est-
ce pas combattre pour le Christ que de haïr
ceux que Dieu hait, et de sécher de douleur à
cause des ennemis de la Croix ? Vous ne
pourrez jamais rencontrer une occasion plus
glorieuse pour bien mériter de Dieu et de
l'Eglise que celle qui vous est présentement
offerte par la souveraine providence divine.
Oui sans doute, il est très facile à un Chrétien,
et c'est une chose pour ainsi dire à la portée de
tous, de suivre Jésus-Christ guérissant les
infirmes, ressuscitant les morts ; mais de suivre
Jésus-Christ souffrant et mourant, voilà ce qui
n'est accordé qu'à un fort petit nombre. Il n'est
pas très pénible d'embrasser la Croix
lorsqu'elle est debout, que personne ne
l'ébranle et ne s'efforce de la renverser ; mais
la soutenir contre le choc des assaillants pour
qu'elle ne tombe pas, voilà le propre d'un
courage éprouvé. O bienheureux combat dans
lequel à la fois nous mourons et nous vivons
pour le Christ ! Qu'est-ce qui a, je vous le
demande, environné de tant de gloire et [85]
d'une si religieuse vénération la mémoire des
anciens Pères de l'Eglise ? C'est que jamais
aucune menace n'a pu les empêcher de
204 François Girard, official de Bresse pour l'Archevêque de Lyon dès 1569, puis prévôt de l'église Notre-Dame de
Bourg en 1585. Cet ecclésiastique, de concert avec les autres chanoines et les syndics de la ville, prit, en 1594, des
mesures vigoureuses pour empêcher l'hérésie de s'infiltrer à Bourg. (Regeste de l'église Notre-Dame de Bourg, par J.
Brossard, 1897.) C'est à ce propos que saint François de Sales lui adresse ses félicitations.
Il est l'auteur de l'Antipathia ou Antithèse qui parut comme pièce préliminaire dans la Defense de l'Estendart de la
sainte Croix, publiée pour la première fois en 1600. (Voir la Préface du tome II de notre Edition, p. XII, note (15), et
l'Appendice III, pp. 412-421.)
205 [Les lignes suivantes, écrites en haut de la minute, représentent probablement la première pensée du Saint pour le
commencement de cette lettre :] Nulla deinceps tecum utar excusatione ; scribam quam frequentius potero. « Bos
lassus, » ut divus dixit Hieronimus, « fortius figit pedem. » Et tu in hac jam provecta ætate graves hæreticorum
inimicitias cum sustineas...
206 [vexillo]
207 Cf. Ps. CXXXVIII, 21.
208 languentibus medentem, [dæmones fugantem]
209 Rom., XIV, 8.
210 II Cor., XI, 26 ; Galat., II, 4.
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8.7 Page 77

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Domini prælianda præbuerunt.
patronner (permettez-moi cette expression) la
Quæ quidem non eo animo a me esse cause de Jésus crucifié. Ce n'est certainement
dicta velim intelligas quo tibi animum addere pas la science seule qui a élevé si haut les
vellem ; non enim est discipulus super Martin, les Chrysostome, les Hilaire, les
magistrum211, 212 et importunum omnino foret Damascène ; mais bien plutôt cette
te veteranum et gravions armaturæ militem a magnanimité chrétienne avec laquelle ils ont
grægario tyrone doceri. Gratulor potius tibi déclaré la guerre pour le Christ aux empereurs
majorem in modum quod in provecta jam hæc et aux autres faux frères, et se sont montrés
ætate, tam alacriter bellum pro Christo intrépides à combattre les combats du
susceperis ac susceptum sustinueris ; ut verum Seigneur.
jam sit illud etiam de te pronunciare quod est
Ne vous persuadez pas, du reste, qu'en
apud Hieronimum213 : « Bos lassus fortius figit vous disant ces choses je prétende exciter votre
pedem. » Quæ tua mihi gloria eo suavior est courage. Le disciple n'est pas au-dessus du
perfecta, quo nuper te in confratrum ex Cruce maître. Il serait en effet déraisonnable qu'un
nostrorum numerum majore cum vétéran accoutumé à porter la plus lourde
oblectamento [86] renunciavit vir optimus et armure reçût les leçons d'un nouvel enrôlé.
ipsa canitie venerandus, Joannes Tissotius214, Bien plutôt, je vous félicite hautement de ce
communis hujus Confraternitatis prior que, dans un âge avancé, vous avez entrepris et
meritissimus ; ut jam certo quodam jure poursuivez si hardiment la guerre pour le
omnium nostrum bona videantur esse Christ. Nous pouvons avec vérité vous
communia qui, tum aliis nominibus tum hoc appliquer la parole de saint Jérôme : « Le bœuf
peculiari fratres ex Cruce censemur. Quo fiet fatigué enfonce plus fortement le pied. » Votre
ut et nos gloria tam præclari tui certaminis et gloire me [86] devient d'autant plus douce que
tu nostris præcibus et sacrificiis participes l'excellent Jean Tissot, déjà vénérable par ses
vicissim efficiamur.
cheveux blancs, très digne prieur de notre
O nimium dilecte Deo, tibi militet æther ! Confrérie, vous a dernièrement inscrit avec
Dominus tibi adjutor, non timebis quid facit plus de bonheur au nombre des confrères de la
tibi homo215.
Croix ; car maintenant il y a entre nous une
Commilitoni tuo, viro clarissimo certaine communauté de biens à divers titres,
Domino Fabro, salutem plurimam dico. Bene et principalement parce que nous sommes
vale.
frères dans la Croix. En conséquence nous
participons aux avantages les uns des autres :
Revu sur l'Autographe, dont la partie déjà nous, à la gloire de vos combats, vous, au
publiée est conservée à la Visitation d'Annecy mérite de nos prières et de nos sacrifices.
et la partie inédite à la Visitation de Turin. O bien aimé de Dieu, que le Ciel vous soit en
[87]
aide !
Le Seigneur est votre défenseur, vous ne
craindrez pas ce que l'homme fera contre vous.
Je salue votre compagnon d'armes,
l'illustre seigneur Favre. Adieu. [87]
_____
211 Lucæ, VI, 40.
212 [A partir d'ici cette lettre est inédite.]
213 Epist. CII, ad Augustin., § 2.
214 Jean Tissot, chanoine de Saint-Pierre de Genève et vicaire général en 1569. C'est lui qui en 1578 délivra à saint
François de Sales, alors âgé de onze ans, les lettres dimissoriales pour la réception de la tonsure. Ce vénérable prêtre
lui succéda (1594) dans la charge de prieur de la Confrérie de la Sainte Croix, charge que le Saint dut résigner en vue
de son prochain départ pour le Chablais. Jean Tissot mourut en juin 1597.
215 Ps. CXVII, 6 ; Heb., XIII, 6.
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8.8 Page 78

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XXXII. A un gentilhomme de la cour du duc de Savoie
(Minute). Prière d'intervenir auprès du duc de Savoie en faveur
du Chapitre de Genève.
Annecy, [vers la fin août 1594.]
Monsieur,
Il pleut a Son Altesse, il y a quelque tems despuys ces guerres, declairer pour l'eglise de ce
diocæse estre de son intention et playsir que tous les biens qui se trouveroyent en ses estats216 avoir
esté de l'eglise anciennement, devant que Geneve eut chassé les ecclesiastiques, retournassent a
l'eglise, comme vray patrimoyne de Jesuchrist. Qui a faict que le Chappitre de Saint Pierre ayant
esté advisé, ou pensant quil se devoit tenir quelque journëe a Thurin touchant ces balliages et autres
affayres217, il a pris resolution, en l'asseurance de vostre zele et pieté, de vous supplier tres
humblement de leur faire ausmosne de vostre credit et intercession en cest endroict, affin qu'en cas
de quelque restitution de païs218, ils ressentent le prouffit219 de la devote intention de sa dicte
Altesse, et que les biens qui se trouveront avoir esté dudict Chappitre au tems de la subversion de
Geneve leur soient restitués. [88] Ils vous supplient donques, Monsieur, tres humblement, tous en
general et moy en particulier, comm'ayant cest honneur d'estre Prevost en leur compaignie, de
prendre ce leur affere en main ; se promettans que si la bonne intention de Son Altesse, dressëe
sur la pieté de la cause, est aydëe de vostre faveur et authorité, elle sortira en son effect avec grand
merite de sa dicte Altesse, qui nous aura remis nostre pain en la main, et de vous, Monsieur, qui
nous aures procuré ce bien, duquel je puys bien vous asseurer avec verité que nous avons bon
besoin, pour s'estre la pauvreté de cest'eglise cathedrale de trente chanoynes, quasi tous
gentilhommes ou gradués, fort rengregëe par ces guerres, sans avoir voulu jamais diminuer aucune
chose de ce qui s'observoit pour la decoration du service divin.
Vous suppliant donques nous avoir pour recommandés, nous recommanderons de toute
nostre devotion vostre santé et prosperité a Nostre Seigneur, et demeurerons obligés a jamais de
prier plus particulierement sa divine [Majesté] qu'elle vous comble de ses benedictions. Et pour
mon regard, Monsieur, continuant en la condition de monsieur de Boysi mon pere, je demeureray
Vostre tres humble serviteur.
Revu sur l'Autographe conservé à la Visitation d'Annecy. [89]
_____
216 qui se trouveroyent es troys balliages
217 Il s'agit probablement des négociations diplomatiques qui eurent lieu pour la conclusion et la prorogation des trêves
indiquées ci-après, p. 92.
218 affin que sil se peut faire et il escheoit en traitté... que sil se traitte de quelque restitution [des biens mal usurpés
des le tems de l'exil de ce cors ecclesiastique...] de l'autruy
219 l'effect
78/318

8.9 Page 79

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XXXIII. Au sénateur Antoine Favre (Minute). Nouvelles de la
mission du Chablais. Premières difficultés suscitées par les
ministres protestants. Energique résolution du Saint.
[Forteresse des Allinges,] commencement d'octobre 1594 220.
Non antea potui, mi Frater, suavissimis
illis tuis litteris respondere quam hic idem qui
tuas attulerat Chamberium versus rediret.
Fecissem id quidem libentissime, nulla enim
cogitatio alia me dulcius recreat quam ea qua
quotidie te mihi præsentem quoad
expressissime fieri potest efficio. Enimvero
tum post densissimas tenebras mihi lux
quædam oboriri videtur, adeo mihi
caliginosus221 hic est aer, cui procul dubio
princeps tenebrarum harum222 de quibus
loqueris præest223.
Post tuum enim discessum non cessavit
animos horum [90] hominum in deterius
quodque obvolvere. Gubernator224, cum
cæteris his Catholicis, rusticos circum circa,
necnon et cives Aquenses, secretis suasionibus
ad conciones nostras convocare, rem
Christianam recte ac impensissime promovere
[non destitit.] Quamprimum vidit dæmon ;
enimvero, tunc advocato suorum concilio, per
summam perfidiam, fidem vicissim
Tononienses quotquot sunt ex primariis sibi
faciunt, nullis se cæteramque multitudinem
unquam adfuturos Catholicis prædicationibus,
ne nimirum satis non esset privata cujusque
pertinacia nisi nefaria ac communi
cohortatione225, in suam perniciem, Principis
desiderio ac nostris conatibus illudant ac
omnino cervices opponant temulentas. Idque
actum est, quantum audio, nudiustertius in
urbis ipsius sedibus publicis, cum jam antea
Je n'ai pu, mon Frère, répondre à votre
délicieuse lettre, avant que le porteur retournât
à Chambéry. Certes, je l'eusse fait plus tôt très
volontiers, car nulle autre pensée ne m'est aussi
douce, ne me récrée autant que celle par
laquelle je tâche chaque jour de vous
représenter à mon esprit le plus fidèlement
qu'il m'est possible ; il me semble alors
qu'après de très épaisses ténèbres, une certaine
lumière luit pour moi, tant me paraît sombre le
nuage auquel commande sans doute le prince
de ces ténèbres dont vous me parlez.
Après votre départ, il n'a pas cessé de
voiler de plus en plus les [90] esprits de ces
hommes. Le gouverneur, avec quelques autres
Catholiques, n'a rien négligé pour attirer, par
de secrètes persuasions, les paysans des
environs et les bourgeois d'Evian à nos
sermons, et pour faire avancer, avec un zèle
ardent et éclairé, les affaires de la religion.
Mais le démon s'en est bien vite aperçu ; car
les principaux de Thonon ayant assemblé leur
conseil, se sont juré, par une souveraine
perfidie, que ni eux ni le peuple n'assisteraient
jamais aux prédications catholiques. Ce ne
serait pas assez, sans doute, de l'obstination
privée de chacun, s'ils ne se moquaient des
désirs du prince aussi bien que de nos efforts,
et ne s'acharnaient à leur perte par une
abominable entente. Cela fut fait, à ce que l'on
m'a dit, avant-hier à la maison de ville, et
plusieurs avaient déjà pris cette résolution à
l'assemblée des impies, qu'ils nomment leur
220 Le classement des lettres non datées adressées au sénateur Favre pendant la mission du Chablais est déterminé soit
par la teneur même de ces lettres, soit par la date des réponses du Sénateur, lesquelles seront données en Appendice à
la fin du présent volume.
221 mihi tenebricosus hic aer [apparet...]
222 Ephes., ult., 12.
223 Saint François de Sales fait allusion au protestantisme qui régnait en Chablais depuis près de soixante ans. Charles-
Emmanuel Ier, ayant reconquis cette province sur les Bernois, voulut y rétablir l'exercice de la religion catholique et
demanda des missionnaires à Mgr de Granier. C'est alors que notre Saint, sur le désir de son Evêque, partit presque
seul (14 septembre 1594) pour commencer la mission qui devait ramener dans le sein de l'Eglise toute cette florissante
contrée. Pendant les six premiers mois il était contraint, pour échapper à la fureur des hérétiques, de se retirer chaque
soir clans la forteresse des Allinges.
224 Le baron d'Hermance. Voir plus haut, note (28), p. 1.
225 nisi mutua ac communi [conjuratione]
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8.10 Page 80

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abiissent in concilio impiorum226, hoc est, per consistoire, où ils [91] s'étaient réunis sous
speciem matrimonii cujusdam, uti soient, prétexte d'invalider, selon leur coutume,
dirimendi convenissent in suo quod appellant certain mariage.
[91] consistorio, in quo idem jam plerique inter
Que feriez-vous, mon Frère ? Leur
se decreverant.
cœur est endurci ; ils ont dit à Dieu : Nous ne
Quid faceres, mi Frater ? Induratum est servirons pas ; retirez-vous de nous, nous ne
cor eorum227 ; dixerunt Deo : Non serviemus ; voulons point marcher dans la voie des
recede a nobis, viam mandatorum Dei commandements de Dieu. Ils ne veulent pas
nolumus228. Nolunt audire nos, quoniam nous écouter parce qu'ils ne veulent pas
nolunt audire Deum229. Mihi autem videre écouter Dieu. Certes, il me semble voir où
videor quo hujusmodi perditissimi homines tendent les desseins de ces hommes perdus. Ils
tendant. Nimirum vellent nos tandem, rerum voudraient assurément nous faire perdre
agendarum spe230 amissa, ad discessum l'espérance de mener nos affaires à bonne fin,
quodammodo compellere. At apud nos contra. et partant nous contraindre à nous retirer. Mais
Quamdiu per inducias231 et Principis utriusque il n'en sera pas ainsi ; car aussi longtemps qu'il
tum ecclesiastici tum secularis licuerit nous sera permis par les trèves et par la volonté
voluntatem, operi instare, nullum non movere du prince tant ecclésiastique que séculier, nous
lapidem, obsecrare, increpare in omni qua nos sommes absolument résolus de travailler sans
Deus donaverit patientia et doctrina232 omnino relâche à cette œuvre, de ne pas laisser une
ac firmissime constitutum233 est. [92]
pierre à remuer, de supplier, de reprendre avec
Atque non modo conciones imo vero toute la patience et la science que Dieu nous
Sacrificia, si quis me judice certare in hac donnera. [92]
palæstra velit, quamprimum fieri poterit
Je soutiens à quiconque voudra discuter
instituenda sunt, uti non tam animos demere avec moi sur cette affaire, que non seulement
nobis quam addere suis artibus sentiat inimicus les prédications sont nécessaires, mais encore
homo234. Verum ea in re magnam requiri video qu'il faut rétablir la célébration du saint
prudentiam, ut nimirum ea expectetur conditio Sacrifice le plus tôt qu'il se pourra, afin que
: si hac temporaria pace diutius fruamur.
l'homme ennemi voie que par ses artifices il
nous donne du courage au lieu de nous
Revu sur l'Autographe conservé à la
l'enlever. Mais en cela, il faut user d'une
Visitation d'Annecy.
grande prudence dans l'attente de cette
condition, à savoir : si la paix temporaire dont
nous jouissons sera durable.
______
226 Ps. I, 1, 5.
227 Exod., VII, 22 ; Joan., XII, 40.
228 Jerem., II, 20 ; Job, XXI, 14.
229 Ezech., III, 7.
230 spe [tandem destitutos ad reditum...]
231 La reprise des hostilités entre la France et la Savoie avait eu pour prétexte, sous Henri III, l'appui que ce prince
accordait aux Bernois et aux Genevois contre Charles-Emmanuel Ier. Elles continuèrent pour diverses causes jusqu'à
l'abjuration d'Henri IV. Les ligueurs ayant alors successivement désarmé, le duc de Savoie, qui les soutenait, signa
une trève avec la France d'abord, puis avec Berne (septembre 1593) et avec Genève (juillet 1594). Ces deux dernières
seulement furent renouvelées sans interruption jusqu'à la paix de Vervins (1598).
232 II Tim., IV, 2.
233 statutum
234 Matt., XIII, 28.
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9 Pages 81-90

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XXXIV. A un religieux (Fragment inédit)
Octobre 1594 235.
... que vous sçaves trop mieux comme l'on manie ces affaires, et que l'affection et devotion que
vous y aves vous y conseille asses. Mays seulement je vous rends ainsy conte de mes pensers,
lesquelz vous advoueres ou rayeres comm'il vous playra.
Ce pendant je prieray Dieu pour vostre heureuse santé et longue vie, vous suppliant tres
humblement me [93] continuer en lhonneur que j'ay de vostre Reverende Paternité, et lequel je
prise tant, d'estre advoüé pour
Vostre tres humble filz selon Dieu et tres obeissant serviteur.
Revu sur l'Autographe appartenant à Dorn B. Mackey, O. S. B.
_____
XXXV. A Monseigneur Claude de Granier, Évêque de
Genève236. Endurcissement des hérétiques. Aveu des ministres
en faveur des missionnaires.
Fin octobre 1594 237.
Monseigneur,
Je diray donq simplement a Vostre Seigneurie Illustrissime que l'opiniastreté de ce peuple
est si grande, qu'ilz ont derechef confirmé l'ordonnance publique que personne n'ayt a revenir a
nos predications catholiques ; et lhors que nous croyions que plusieurs viendroyent a nous, soit par
curiosité, soit par quelque reste du goust de l'ancienne religion, nous avons experimenté leur
endurcissement commun par leurs mutuelles exhortations. Et apportent pour excuse le mauvais
traittement qu'ilz recevroyent des Bernois et Genevois, qui les traitteroyent comme des deserteurs
de leur creance, s'ilz les [94] voyoyent seulement venir a nous d'autre façon qu'avec des injures a
la bouche ou des pierres a la main. Et non seulement il faut que nous ostions l'heresie, mais tout
premierement l'amour du siecle.
Dans les discours familiers, les ministres mesmes ont confessé que nous tirions de tres
bonnes conclusions des Saintes Escritures touchant nostre foy, mesme sur le tres auguste Mistere
de l'autel238 ; les autres confessent la mesme chose, et plusieurs viendroyent a nous s'ilz n'estoyent
empeschés par ceste trop grande crainte du monde. Mais, Monseigneur, nous esperons avec
patience que ce fort armé qui garde sa mayson sera chassé par un plus fort que luy239, qui est
Nostre Seigneur Jesus Christ. Voyla l'estat de nos affaires
235 En rapprochant cette minute de la précédente, on voit qu'elles ont été écrites sur le même feuillet, de sorte que la
date de l'une est déterminée par celle de l'autre.
236 Claude de Granier, fils d'un gentilhomme de la cour du duc de Nemours, naquit à Yenne (1548), au diocèse de
Belley ; il prit l'habit au monastère de Talloires, de l'Ordre de Saint-Benoit, et devint prieur de cette maison à l'âge de
quinze ans. Après avoir travaillé à la réforme de ses religieux, il fut nommé Evèque de Genève (1579), et gouverna
ce diocèse avec autant de sagesse que de piété de Granier mourut le 17 septembre 1602, heureux de déposer sa crosse
épiscopale entre les mains de saint François de Sales.
237 Bien que quelques historiens avancent que cette lettre a été écrite en 1595, des preuves tirées du Procès de
Canonisation de saint François de Sales démontrent qu'elle remonte à une époque antérieure et permettent d'en
déterminer approximativement la date.
238 Cf. Serm. XXVI, tom. VII huj. Edit.
239 Lucæ. XI. 21. 22.
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Revu sur le texte inséré dans un ancien Manuscrit de l'Année Sainte de la Visitation, conservé au
Monastère d'Annecy.
_____
XXXVI. Au senateur Antoine Favre (Inédit). Heureux présages
pour le succès de la mission du Chablais.
Evian, 2 novembre 1594.
Nunc demum mihi de rebus
Tononiensibus bene sperare licet, quod te scire
par est, Frater suavissime, cum me
nudiustertius ex eis quidam tanto [obsequio]
prosecutus fuerit quanto nihil jucundius nihil
gratius, immutata [95] jam ex parte eorum lege
qua cautum fuerat uti ne mecum non beneficiis
modo, sed ne quidem verbis agerent. Bonum
dubio procul omen, si ex uno omnia sunt ex
veteri proverbio cognoscenda. Tuas nimirum
litteras Tononienses quidam attulerant : et
quidnam præstantius, quæso, quo mihi munere
ingentes erga eos animos addiderunt ? Adeo
nempe alterum te esse me comperio, ut sine te
horum hominum colloquiis uti minime possim.
Exigebant tuæ illæ litteræ uti quæ de
Rolandi nostri240 rebus scriberem. Verum
prioribus id jam actum est, et inter Sanctorum
Omnium et Fidelium Defunctorum sacra
solemnia vix mihi otium suppetit tecum
colloquendi nisi nobilis hic vir Blonnayus241 in
aliam horam discessum referat. Alioquin et D.
Guichardo242 ut admodum [96] monuisti
dedissem, moxque dabo, si tamen receperis te
antea bona fide facturum ut et me scripsisse
noverit, et tam male quam soleo nesciat ; sic
enim fiet ut me diligentem sui cultorem
agnoscat, tam incultum non omnino existimet.
Bene vale.
Aujourd'hui enfin il m'est permis de
bien augurer des affaires de Thonon, et je dois
vous faire savoir, très aimable Frère, qu'avant-
hier l'un de ces messieurs m'a témoigné tant de
bienveillance et d'amabilité qu'il ne se peut rien
dire de plus. Ils ont donc en partie [95] changé
de dessein, car ils s'étaient fait une loi non
seulement de ne point me rendre de bons
offices, mais de ne pas même m'adresser la
parole. Voilà qui est de bon augure, sans doute,
si d'après le vieux proverbe, par un individu on
peut juger de tous. Quelques Thononais
avaient donc apporté votre lettre : je vous le
demande, pouvait-il y avoir rien de plus
efficace que ce présent qui relevait mon
courage pour aller à eux ? En effet, je me
trouve tellement devenu un autre vous-même,
que sans vous je ne pourrais traiter avec ces
hommes.
Vous me demandiez de vous écrire au
sujet des affaires de notre Rolland, mais je l'ai
déjà fait. D'ailleurs, la solennité des fêtes de la
Toussaint et des Fidèles Trépassés me laisse à
peine le loisir de m'entretenir avec vous, à
moins que ce noble M. de Blonay ne remette
son départ à une autre heure. S'il m'eût été
possible, j'aurais écrit aussi à M. Guichard,
comme vous me l'avez [96] recommandé, et je
le ferai au plus tôt, pourvu qu'auparavant vous
240 Une lettre du sénateur Favre, en date du 31 octobre 1594, prouve qu'il s'agit ici de Denis de Rolland de Versonnex,
qui avait reçu les Ordres mineurs le jour où saint François de Sales fut élevé au diaconat (18 septembre 1593). Ordonné
prêtre le 17 décembre 1594, Rolland dut être nommé, en ce même mois, chanoine de Saint-Pierre de Genève. Il mourut
en juin 1610.
241 La famille de Blonay était très nombreuse à cette époque, et plusieurs de ses membres entretenaient de fréquentes
relations avec saint François de Sales.
242 Claude Guichard, seigneur d'Arandas et de Tenay, natif de Saint-Rambert (Bugey), fonda dans cette ville le collège
du Saint-Esprit. Appelé à Chambéry par Charles-Emmanuel Ier, il fut nommé historiographe de ce prince en 1583,
secrétaire d'Etat, maître des requêtes, puis référendaire ordinaire du duc de Savoie et grand référendaire du prince de
Piémont en 1598. Dclbene, Evêque d'Albi, lui dédia un de ses livres. Il mourut le 15 mai 1607.
Entre plusieurs autres ouvrages en prose et en vers, Guichard publia l'opuscule suivant : Agreebles nouvelles
à tous bons Catholiques de la conversion du duché de Chablais. A Chambery, chez Claude Pomar, 1598.
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9.3 Page 83

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Aquiani, 4 non. Novembris 1594.
vous engagiez de bonne foi à l'assurer que j'ai
écrit, et à lui laisser ignorer que j'ai l'habitude
Revu sur le texte inséré dans le 1er Procès de d'écrire si mal. Il connaîtra par là combien je
Canonisation.
désire l'honorer, et ne me jugera pas tout à fait
inculte. Adieu.
Evian, le 2 novembre 1594.
_____
XXXVII. Au même (Minute). Témoignages d'estime et de
reconnaissance pour le P. Chérubin. Envoi de plusieurs
lettres. Premiers fruits des prédications.
Forteresse des Allinges, milieu de novembre 1594.
...243 Dum de patre et compatre [mater]
cogitabit, prolem etiam patri pariter et
compatri [similem] efficiat ; scis [97] enim
imaginationem facere casum. Verum iis rebus
tuum erit curam providere.
Venio ad posteriores, quæ Patris
Cherubini nostri244 præclaram de sua mei
recordatione testificationem proferebant. Ego
quidem ejus erga me amorem eo jucundius et
gratius præstantiorem esse existimo quod in eo
me tecum conjungat. Sane vir est hic noster in
Christo pater, qui pro sua in Deum ac eos qui
sunt Dei charitate omnem omnium mereatur
observantiam, et nonnisi ab [98] nostri
simillimis amatoribus satis amari possit. Has
meas ad eum litteras cum aliis ad Guichardum
nostrum, Girardum et Præsulem Albigensem
commendatas habeas velim ; et a me
quamprimum recentes expectes, cum de nostra
hac provincia et re Christiana conscribam.
Lætiores enim fructus in dies allatura mihi
...Tandis que [la mère] pensera au père et au
parrain, la ressemblance avec tous les deux se
produira chez l'enfant, car vous savez [97] que
l'imagination fait son œuvre. Mais ces choses-
là sont de votre ressort.
Je viens à votre dernière lettre qui
m'apportait un témoignage très manifeste du
souvenir que me conserve notre P. Chérubin.
Pour moi, j'estime d'autant plus précieuse son
affection si aimable et si bienfaisante qu'il me
fait partager cet avantage avec vous. Cet
homme est vraiment notre père en Jésus-Christ
; sa charité envers Dieu et envers ceux qui sont
à Dieu lui donne droit à la vénération de tous,
et il ne peut être aimé dignement que par des
hommes qui [98] aiment comme nous.
Permettez-moi de vous confier une lettre pour
lui, ainsi que d'autres pour notre Guichard,
pour Girard et pour l'Evêque d'Albi. Je ne
tarderai pas à vous écrire de nouveau pour vous
parler de ce qui se passe ici et des affaires de la
243 Voir à l'Appendice les lettres d'Antoine Favre en date du 31 octobre et du 3 décembre 1594.
244 Le P. Chérubin (voir note (143), p. 52) naquit à Saint-Jean de Maurienne le 24 mars 1566, et fit profession chez
les Capucins de Gênes, le 8 septembre 1584. Après avoir obtenu à Avignon le grade de docteur en théologie, il passa
quelque temps à Lyon, où il s'acquit une sorte de célébrité oratoire, et fut attaché ensuite au couvent de Montmélian.
Appelé à évangéliser les environs de Genève, il fixa sa résidence à Annemasse (janvier 1397), d'où Mgr de Granier
l'envoya solliciter, en faveur de la mission du Chablais, la protection du duc de Savoie, auprès duquel l'humble
Franciscain jouissait d'un grand crédit.
Saint François de Sales avait commencé sa mission depuis plus de trois ans, lorsque le jeune Religieux lui
fut donné pour auxiliaire (novembre 1597). Prédications véhémentes, conférences avec les ministres hérétiques,
pompes extérieures données au culte, fatigues de tout genre supportées dans l'exercice des fonctions sacerdotales :
rien ne put épuiser le zèle de l'intrépide missionnaire ; mais sa santé s'altéra, et, atteint d'une grave maladie, il fut
obligé de quitter le Chablais dès les premiers mois de 1599 pour n'y revenir qu'en 1602, à l'occasion du grand Jubilé.
On le retrouve à Rome en 1600 et 1601, avec charge de négocier les questions relatives à la fondation de la Sainte-
Maison de Thonon pour laquelle il travailla beaucoup encore dans la suite.
Les prédications du P. Chérubin, pendant les dernières années de sa vie, contribuèrent efficacement à
maintenir la foi dans le Valais, menacé de l'invasion du protestantisme. Il mourut à Turin le 20 juillet 1610, en
réputation de sainteté.
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9.4 Page 84

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videtur verbi hæc divini pluvia, quod ubi paulo religion.
pressius deprehendam, non committam quin me semble que cette divine rosée de la parole
te, qui rem tantopere consilio, auctoritate et de Dieu va porter chaque jour de plus heureux
opera promovisti [certiorem faciam].
fruits. Lorsque je l'aurai mieux constaté, je ne
Interim, bene vale, et Christum tibi mihique in manquerai pas de vous le faire savoir, à vous
dies magis ac magis concilia. Sororem meam qui avez employé votre conseil, votre autorité,
et commatrem nepotesque omnes salutatos votre action pour favoriser cette entreprise.
omnino velim.
En attendant, portez-vous bien, et que
Ex Allingiana245. [99]
le Christ nous soit de plus en plus propice à
vous et à moi. Veuillez saluer de ma part ma
sœur et commère et tous mes neveux.
De la forteresse des Allinges. [99]
_____
XXXVIII. A Monseigneur Alphonse Delbene, Évêque d'Albi246
(Minute). Protestations de respect et de dévouement.
Forteresse des Allinges, milieu de novembre 1594.
Quæ mihi causa fuit hactenus
quominus tuam humanitatem, gravissimis
semper studiis vel occupationibus intentam,
litteris aliquot meis provocarem, observantia
nimirum summa ac præcipua qua te veneror ac
suspicio, ea me nunc ad scribendum peculiari
jure compellit. Cum enim te discessum ad
Albienses tuos parare audiverim, non debui
committere quin, sin minus sacras illas [100]
tuas manus religiose coram uti par est
exosculari queam, saltem et veniam a te
peterem simul ac, levi licet significatione,
testatum facerem me immortali recordatione
tuam illam qua me quondam complexus es
benevolentiam animo servaturum, tuæque
Paternitatis Reverendissimæ perpetuum ac
humillimum cultorem futurum.
Quod cum ita sit, tuæ erit humanitatis
ac amplitudinis, mihi inter tuos ita locum
Le très grand respect et la profonde
vénération dont je suis pénétré à votre égard
m'ont seuls empêché jusqu'à présent de vous
prévenir par mes lettres, sachant Votre
Seigneurie toujours appliquée à des études ou
à des occupations très importantes. La même
cause me presse à bon droit de vous écrire
aujourd'hui. J'ai entendu dire en effet que vous
vous préparez à votre départ pour Albi, et, s'il
ne m'est pas possible d'aller, comme il
conviendrait, baiser religieusement [100] vos
mains sacrées, il est au moins de mon devoir
de vous en demander pardon, et je ne voudrais
pas y manquer. Ce faible témoignage de
gratitude vous prouvera l'impérissable
souvenir que je garde de la bienveillance dont
vous m'avez précédemment honoré ; il vous
montrera également mon désir d'être à jamais
le très humble serviteur de Votre
245 La forteresse des Allinges, assise sur un rocher à pic à peu de distance de Thonon, comprenait dans son enceinte
deux châteaux construits à des époques différentes. C'était, en 1594, la seule place forte du Chablais.
246 Alphonse Delbene (ou Del Bene, d'Elbène, etc.) naquit à Lyon vers 1538, d'une noble famille florentine que les
persécutions des Médicis avaient obligée à s'expatrier. Il reçut les grades de docteur en droit, après avoir étudié à
Bourges sous Cujas, et devint, en 1550, Abbé commendataire d'Hautecombe (voir note (187), p. 76). Sénateur en
1574, historiographe et conseiller d'Etat, il obtint encore de Charles-Emmanuel Ier (1594), pour lui et pour les Abbés
ses successeurs, le titre de sénateur-né du souverain Sénat de Savoie. Delbene avait été nommé Evêque d'Albi par
Henri III (1588) et sacré à Hautecombe par Mgr de Granier (1589). Accusé quelques années plus tard d'avoir entretenu
de secrètes intelligences avec les ennemis du duc de Savoie, il perdit les bonnes grâces de ce prince, qui exigea la
saisie des revenus de l'abbaye et porta plainte au Pape. Bien que réconcilié dans la suite avec son souverain, l'Evêque
d'Albi ne séjourna plus en Savoie et il échangea, en 1603, son abbaye d'Hautecombe contre celle de Mézières
(Bourgogne). Il mourut le 8 février 1608 et fut inhumé dans son église cathédrale d'Albi.
Alphonse Delbene occupe un rang distingué parmi les littérateurs. Ronsard lui dédia son Art poétique ; Juste
Lipse, son Recueil d'inscriptions. Lui-même composa plusieurs ouvrages historiques qui méritent d'être consultés.
84/318

9.5 Page 85

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aliquem fixum firmumque attribuere, ut me Révérendissime Paternité.
non minus unquam tuum existimare possis
Les choses étant ainsi, il appartiendra à
quam esse possim, et quando tuorum votre bonté et à votre magnanimité,
Allobrogum numerum inire placuerit, ego Monseigneur, de m'attribuer entre ceux qui
ultimus in mentem tandem tibi veniam, qui si vous sont dévoués une place si sûre et si stable
propensionem ac erga te observantiam que je ne puisse jamais être moins vôtre que
animorum tam probe perspectam haberes vous n'aurez daigné me croire. En
quam merita, inter primos facile apparerem. conséquence, lorsqu'il vous plaira de faire le
Quod reliquum est, nobis tuisque dénombrement de vos Allobroges, je me
omnibus Albigensibus ac reipublicæ litterariæ présenterai enfin le dernier à votre mémoire ;
Christum quam diutissime [101] habeas je serai d'ailleurs facilement des premiers si
servatorem, ac Albigenses tuos ita ad vous voulez bien prendre en considération non
Christianam disciplinam compositos ut ex tua pas le mérite personnel, mais l'estime et
præsentia tantum percipiant fructum ac l'affection dont tous ces cœurs vous entourent.
voluptatem quanta nos ex absentia et dolorem
Pour nous, unissant nos prières à celles
et jacturam.
de tous vos Albigeois et [101] de ceux qui
Ex arce Allingiana.
cultivent les lettres, nous demanderons au
Seigneur de vous conserver longues années et
de rendre vos diocésains parfaitement soumis
au joug de la religion. Ils retireront ainsi de
votre présence autant de bien et de plaisir que
votre absence nous causera de douleur.
De la forteresse des Allinges.
_____
XXXIX. Au sénateur Antoine Favre (Fragment). Prédications de
l'Avent.
[Thonon,] 27 novembre 1594 247.
……………………………………………………………………………………………………...
Dieu me faict icy entreprendre une besoigne digne de la seule vertu de sa droitte. Je
commence aujourd'huy a prescher l'Avent a quatre ou cinq petites personnes ; tout le reste ignore
malicieusement que veut dire Avent, et ce tems si auguste dans l'Eglise est en opprobre et [102]
en derision parmy ces infidelles. L'orayson, l'aumosne et le jeusne sont les trois parties qui
composent le cordon difficilement rompu par l'ennemi248 ; nous allons, avec la divine grace,
essayer d'en lier cest adversaire
_____
247 Un ancien Manuscrit de l'Année Sainte de la Visitation, qui seul nous a conservé ce fragment, le fait précéder d'une
indication ainsi conçue : « En l'annee 1594, notre Pere saint François de Sales ecrivit, de Chablais a Chambery, au
senateur le grand Anthoine Favre, l'honneur et la gloire de la jurisprudence, une grande lettre en latin, ou entre autres
choses, il luy dit les mots suivants qu'on nous a traduits : Dieu me faict icy, » etc.
Comme les prédications commencent le 1er Dimanche de l'Avent, la seconde phrase de ce fragment en indique
la date.
248 Eccles., IV, 12.
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9.6 Page 86

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XL. A un curial249 (Minute). Réponse obligeante à la demande de
quelque service.
8 décembre 1594.
Monsieur le Curial,
Celuy auquel vous voulies que je parlasse pour vous n'estant icy, je n'ay peu fayre ce dont
vous m'avies escrit ; mays en toute sorte d'occasion vous me trouveres tous-jours prompt a vous
servir. Je prie Dieu quil vous doint parfaitte santé et sa grace, et me recommande bien fort a vostre
bonne grace, de Madame la curiale et de vostre beaufilz et fille, attendant de bien tost aller voir
mes pere et mere et leur
Le 8 decembre 94.
Revu sur l'Autographe appartenant à M. le Chanoine Collonges,
aumônier de la Visitation de Chambéry.
_____
XLI. Au père Antoine Possevin, de la Compagnie de Jésus250
(Minute). Assurance de respectueux attachement. Le Saint
parle de son ordination et de ses débuts dans le ministère.
251Monsieur [mon Reverend Pere],
[Entre le 8 et le 20 décembre 1594.]
Je fays tant d'estat de lhonneur que j'ay eu a Padoue d'estre receu en roole avec vos enfans
spirituelz, que je penserois avoir faict une perte signalëe si j'estois rayé de ce nombre. Pour me
nourrir en vostre memoyre [et] [104] conserver ce bien pour moy, je vous ay voulu addresser ceste
lettre comm'une humble requeste, pour vous supplier m'entretenir tousjours252 en la faveur laquelle
une foys vous m'avies accordëe, n'ayant rien faict des lors qui m'en puysse priver, sinon que ce fut
249 Le Curial était à cette époque un officier de justice attaché à la curie qu'entretenaient les seigneurs jouissant de
droits judiciaires sur leurs vassaux. Il cumulait les attributions réparties aujourd'hui entre les notaires, les greffiers et
les juges de paix.
250 Antoine Possevin, né à Mantoue en 1534, entra dans la Société à Rome en 1559. Après une mission très fructueuse
parmi les hérétiques des vallées du Piémont, il fut nommé Recteur à Avignon, puis à Lyon, et prêcha avec succès dans
les plus grandes villes de France. Son dévouement à l'Eglise et son génie pour les négociations diplomatiques lui
méritèrent la confiance de Grégoire XIII, qui l'envoya en qualité de nonce dans diverses contrées de l'Europe. Il
détermina le roi de Suède, Jean III, à abjurer le luthéranisme, obtint un traité de paix entre la Russie et la Pologne (15
janvier 1582), s'efforça de réunir les Grecs schismatiques à l'Eglise romaine et convertit grand nombre d'hérétiques.
Revenu à Padoue en 1587, il y composa son grand ouvrage, la Bibliotheca Selecta, qui fut imprimé aux frais du Pape
Clément VIII. C'est dans cette ville que François de Sales, alors étudiant, connut le célèbre Jésuite et se plaça sous sa
direction, Possevin mourut à Ferrare le 36 février 1611.
251 Monsr mon R. P.
Les faveurs et l'amitié que j'ay receu si abondamment de vous a Padoue, desquelles je nourris tousjours une
fraiche et vive memoyre, m'ont faict tousjours desirer de sçavoir de vostre santé, [et me persuadent que vous seres
ayse de sçavoir que je suys devenu...] de laquelle ayant esté asseuré par ceux qui viennent de pardela et encores, il y
a quelques moys, par le Pere Jean de Lorini, j'ay pris asseurance en vostre bonté que vous recevries contentement de
sçavoir de mes nouvelles comme d'un de vos humbles enfans ; qui m'a faict donner ceste lettre a ce mien amy pour la
vous præsenter, afin que...
252 tousjours [au grade auquel...]
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9.7 Page 87

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d'avoir tant attendu de vous escrire et salluer. En quoy, le peu d'asseurance que j'avoys du lieu ou
vous esties et le respect que je dois a vos occupations me pourroit beaucoup excuser, puysque je
n'ay pas layssé de demander a toutes occasions de vostre santé, tant quil y a quelques moys que
j'en eus des nouvelles par le P. Jean Lorrini253. Mays le seul souvenir de vostre bonté m'en promet
un total pardon.
Et au reste, pour vous rendre quelque conte du vostre despuys que je suys de retour d'Italie,
je me suys tellement faict ecclesiastique que j'ay celebré Messe le jour de saint Thomas l'Apostre
dernier, en nostre eglise cathedrale de Saint Pierre de Geneve, ou je suys indigne Prævost, qui est
la premiere dignité apres l'episcopale, et, par le commandement de mon Evesque, des254 demy
annee en ça j'ay praesché icy et ailleurs parmi le diocæse la parole de Dieu255 ; en quoy je
m'accuseroys bien fort de temerité si l'obeissance ne m'en avoit osté le scrupule. [105] C'est ce que
j'ay faict et que je fays encores le mieux que je scay, vous portant bien souvent avec moy en
imagination en chaire. Pleut a Dieu seulement que j'y portasse quelque mediocrité de vos
perfections pour le service [de] sa divine Majesté, laquelle je prie continuer longuement en santé
Vostre Paternité, a laquelle baysant les mains, je demeureray
tres humble filz et serviteur.
Revu sur l'Autographe appartenant à M. le Chanoine Collonges,
aumônier de la Visitation de Chambéry. [106]
_____
253 Jean de Lorini (ou de Lorigny), né à Avignon (1559), entra au Collège Romain le 20 octobre 1575 et fit ses quatre
vœux à Milan le 5 janvier 1597. Après avoir enseigné la philosophie à Rome, à Paris, à Milan, il était lecteur en
théologie dans cette dernière ville lorsque saint François de Sales l'invita à venir en Chablais pour soutenir des
conférences avec les ministres hérétiques (1597-1598). Le P. de Lorini fut pendant vingt-quatre ans au nombre des
censeurs de la Compagnie et théologien du Général. Il mourut à Dôle le 26 mars 1634, après avoir publié des
commentaires de la plus haute valeur sur les Psaumes et sur plusieurs autres livres de la Sainte Ecriture.
254 des [que je suys d'Esglise... un [an]... neuf moys...]
255 La phrase qu'on vient de lire, et même tout l'ensemble de cette lettre, prouverait qu'elle a été écrite dans les premiers
mois de 1594 (on sait que saint François de Sales commença ses prédications en juin 1593). Cependant une preuve
matérielle oblige à la placer vers la fin de l'année. Cette minute étant écrite dans les marges et les interlignes de la
précédente, datée de la main du Saint, il est évident qu'elle est postérieure au moins de quelques jours à celle-ci.
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9.8 Page 88

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Année 1595
_____
XLII. Au sénateur Antoine Favre (Minutes inédites).
Commencement de la rédaction des Controverses.
Vers la fin de janvier 1595.
Et reipsa mihi nunc id faciendum est
quod per jocum dixeram, gallice scribendum
est mihi, Frater. Nam cum inter cænandum
cognoverim Tovaysium256 hunchac ipsa nocte
ad vos discessurum, non possum [hora]
profecta257 graviter hispanico more scribere.258
Satis illud quidem est superque, graviter me
admodum et moleste ferre recentem hunc
meum a te discessum ; post suaves illos dies
omnia deinceps mihi noctis instar esse [107]
videntur. Sic graviter ego sentio qui tam leviter
scribo…
Sperabam, mi Frater, ad te aliquid nunc
rerum nostrarum transmittere ; verum satius,
mutato consilio, duxi ut expectarem donec
aliquod possint corpus constituere, quam ea
membratim exponere259 ; neque vero sum adeo
diligens ut extra limina pedem adhuc
posuerim, variis aliis distentus occupationibus.
Scripseram tamen nudiustertius litteras quas
Tovaysio ad te perferendas darem ; at ille,
contra quam promiserat, non accepit. Mirum
ergo non fuerit si, quod per jocum nuper
dixeram, nunc reipsa gallice scribendum mihi
sit ; cum enim Servetanus noster260 jam
discedat et de hæreticorum hujus temporis
instabilitate Meditationes animo volvam, vix
quidem fieri posse reor ut graviter hispanico
more scribere possim. Sentio tamen graviter et
moleste recentem hunc meum [108] a te
discessum. Sed tu, mi Frater, inter tuam fabram
Benedictam clarissimam, tuosque omnes
Je dois de fait maintenant écrire à la
française, comme je vous le disais
dernièrement, mon Frère, par manière de
plaisanterie, car j'ai appris seulement pendant
le souper que Thovex doit retourner vers vous
cette nuit même. Je ne puis à une heure si
tardive écrire gravement à l'espagnole. C'est
assez, et même trop, de ressentir avec une
peine très vive mon récent éloignement de
vous. Après ces jours délicieux, toutes choses
sont pour moi [107] comme la nuit. Aussi je
sens péniblement, moi qui écris si
légèrement
J'espérais, mon Frère, vous envoyer dès
maintenant quelque chose de notre travail ;
mais, changeant d'avis, j'ai résolu d'attendre
qu'il formât pour ainsi dire un corps, plutôt que
de vous le soumettre pièce à pièce. Aussi bien
suis-je si peu diligent que, partagé entre
diverses autres occupations, je n'ai pas même
bien commencé. Je vous avais cependant écrit
avant-hier une lettre que Thovex devait vous
porter ; mais contre sa promesse il n'est pas
venu la prendre. Vous ne vous étonnerez donc
pas si, comme je vous le disais récemment par
manière de plaisanterie, je dois maintenant de
fait écrire à la française. Notre ami de la
Servette est sur le point de partir ; d'autre part
je roule en mon esprit des Méditations sur les
mutations des hérétiques de notre temps. Je ne
vois donc pas la possibilité d'écrire gravement
à l'espagnole. Ce que je ressens, ce qui me
256 La famille Thovex occupait à Chambéry un rang distingué. L'un de ses membres était syndic de la ville en 1618 et
1619.
257 hora profecta [post cænam et horis inopportunis...]
258 scribere. [Sic ergo leviter... satis enim fuerit... et vero Baro noster...]
259 Il s'agit du Traité des Controverses que notre Saint commença vers cette époque. (Voir la Préface de cet ouvrage,
tome Ier de notre Edition.)
260 Probablement Pierre d'Arloz, seigneur de la Servette, de Leyment, etc., alors lieutenant des Allinges. Ce
gentilhomme durant les guerres de 1589-1594, avait armé à ses frais une compagnie de deux cents hommes pour le
service du duc de Savoie. Les seigneurs de la Servette ne doivent pas être confondus avec les d'Allinges, seigneurs de
Servette, qui habitaient le Chablais.
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fabros et fabritios, bene vale et me quod facis peine gravement c'est mon récent éloignement
ama.
de vous. [108] Quant à vous, mon Frère,
portez-vous bien en la compagnie de votre
Revu sur l'Autographe appartenant à M. l'abbé illustre artisane Benoîte et de tous vos artisans
Paul Waille, à Poligny.
grands et petits, et aimez-moi comme vous le
faites.
_____
XLIII. Au même (Minute inédite). Ingénieuses excuses pour un
silence trop prolongé.
Forteresse des Allinges, février 1595.
Tantæ me sane pudet tarditatis, qui
suavissimis illis litteris quibus meas
expectabas hactenus non satisfecerim. At vero
in tanta temporis opportunitate, moram hanc
culpa purgare non aliter difficile fuit apud te,
virum tam religiosum, quam si agnoscere
culpam nolim. Hoc enim pœnitentiæ solemni
tempore, etiamque committendo in te
peccassem, dimitteres ; ergo veniam
omissorum impetrare facile posse me
extimavi. Mora est, fateor, et quæ culpa non
careat ; ea tamen ex parte [109] excusationem
aliquam habeo, quod me tantopere tuæ
delectant litteræ, ut quamvis continua
confractatione detrimentum charta sentiat,
novara tamen mihi quotidie suggerant
voluptatem qua mihi recentes subinde
videantur esse, maxime cum nullam temporis
habeant notam. Quod autem inter milites
pacem dilexisti, strenuum te præstas militem ;
sic enim monet Augustinus261 : Uspiam «
pacem habere debet voluntas, bellum
necessitas. » Cum ego conditiones quaslibet a
te ultro recipere sum paratus, ignosce.
Vale in Christo, vir clarissime.
Revu sur le texte inséré dans le Ier Procès de
Canonisation.
Je suis très confus d'avoir tant tardé
jusqu'ici de répondre à votre aimable lettre par
laquelle vous réclamiez la mienne. Mais dans
ce temps vraiment favorable, m'adressant à un
homme si pieux, il n'y aurait de difficulté à
obtenir le pardon de ma faute en ce retard que
si je refusais de l'avouer. En effet, j'ai pensé
que dans ce temps solennel de pénitence où
vous me remettriez même les péchés commis
contre vous, j'obtiendrais facilement grâce
pour les omissions. Le retard existe, je le
confesse, et il n'est pas sans coulpe ; mais voici
une raison qui m'excuse un peu. Vos lettres me
sont si agréables [109] que, bien que le papier
en soit tout endommagé par un continuel
maniement, je trouve chaque jour tant de
charme à les relire qu'elles me paraissent
toujours récentes, surtout lorsqu'elles ne sont
pas datées. En somme, parce que vous avez
aimé la paix au milieu des guerriers, vous vous
montrez bon soldat. C'est ce qu'enseigne saint
Augustin : « Nous devons vouloir la paix
toujours, et la guerre seulement quand elle est
nécessaire. » Puisque me voilà prêt à recevoir
toutes les conditions que vous voudrez
m'imposer, oubliez tout.
Adieu dans le Christ, très illustre Ami.
261 Ep. CLXXXIX, ad Bonifac., § 6.
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9.10 Page 90

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XLIV. Au même (Minute inédite). Difficultés qu'offre la
rédaction des Controverses.
Forteresse des Allinges, milieu de février 1595.
Scribam nunc brevius, mi Frater, quam
J'écrirai maintenant, mon Frère, plus
ingens illa lataque voluptas quam ex tuis brièvement que ne le demanderait le grand et
ultimis litteris sensim [110] exposcat262. Ergo immense plaisir que m'a fait éprouver votre
quod optas, priores mei in hæreticos operis [110] dernière lettre. Vous désirez voir les
paginas videre, ego quoque summopere premières pages de mon ouvrage contre les
desidero, nec prius qua par est alacritate in hérétiques ; je le désire aussi extrêmement, et
hostium cuneos signa inferam quam tu je ne porterai pas mes enseignes dans les rangs
consilium meum ac ordinem modumque de l'ennemi avec toute l'ardeur que mérite cette
certandi probaveris. Verum operis [gravitatem cause, avant que vous ayez approuvé mon
percipio], nec eas habeo copias auxiliares dessein, le plan de la bataille et la tactique
quarum ope fretus negotium premere possim, adoptée. Mais je sens la difficulté de
libris careo mihi necessariis, hoc est, homini l'entreprise, et de plus, il me manque les
memoria exiguam admodum servanti rerum troupes auxiliaires dont j'aurais besoin : je
supellectilem.
veux dire les livres nécessaires à un homme qui
Incœpi tamen, et ita incœpi ut paulo ne garde en sa mémoire qu'un très petit bagage
difficilius sit quam credideram ad exitum rem de connaissances.
deducere ; « dulce » bellum « inexpertis263. »
J'ai cependant commencé, et
Quamprimum commode fieri poterit nonnulla commencé de telle façon qu'il sera un peu plus
videbis. Quod reliquum est Quadragesimæ difficile que je ne pensais de mener mon affaire
Tononi transigam264 ; id et re mea est. à bonne fin. La guerre « est douce à qui n'en a
Guichardo nostro tandem conscientia adactus pas l'expérience. » Aussitôt qu'il se pourra
litteras dedi, idque raptim, qui colloquiis de re facilement faire, vous verrez quelque chose de
Christiana et concioni cæteram diem [111] mon travail. Je vais passer à Thonon le reste du
insumpsi. Sic enim te quid etiam singulis agam Carême ; c'est ce qui me paraît être le meilleur.
horis scire vellem.
Pressé par ma conscience, j'ai enfin écrit à
Bene vale, mi Frater.
notre Guichard, mais à la hâte, ayant employé
la première partie de la journée à des
Revu sur le texte inséré dans le Ier Procès de conférences sur la doctrine chrétienne et à un
Canonisation.
[111] sermon. Je vous le dis parce que je
voudrais que vous fussiez instruit de ce que je
fais à toute heure du jour.
Adieu, mon Frère.
_____
262 exposent ex tuis sermonibus extremis, licet...
263 Cf. Horat., Epist., lib. I, epist. XVIII, vers. 86.
264 Ce ne fut pas seulement pour le Carême, mais d'une manière définitive, que lé saint Apôtre s'installa à Thonon.
Voir ci-après, note (268), p. 114.
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10.1 Page 91

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XLV. Au même (Inédite). Détermination de lutter intrépidement
contre l'hérésie. Avis du P. Chérubin pour assurer le succès
de la mission.
Thonon, 7 mars 1595.
Antonio Fabro, viro clarissimo, Franciscus De Au très illustre Antoine Favre, François de
Sales salutem dicit.
Sales présente ses salutations.
Incœperam jam tum ex tuo ad
Sebusianos discessu dolere, cum ex nota
temporis cognovi te tunc cum litteras tuas
accepi rediisse. Verebar enim ne charissimæ
patriæ miseriam corde tuo illo piissimo
exceptam paullo [112] durius, uti solemus qui
nihil a nobis humani alienum putavimus265,
sustineres, videndo quam audiendo.
Quod dum ita cogito, oculum in
quemdam librum conjicio, cujus ea linea mihi
primum occurrit : « Nemo læditur nisi a seipso.
» O sententiam hisce temporibus
peropportunam et magno Chrisostomo
dignam, cujus homilia quædam266, quod
omnium optime nosti, clarissimo hoc
frontispicio illustris est. Enimvero, tam
solemni admonitione me meamque omnem
illam de te solicitudinem immaturam dissolvi
quam primum sensi, quonamque vento ii animi
mei motus excitabantur. Noveram te, mi
Frater, rerum omnium mortalium et temporum
accurata observatione ac despectione,
immortalium et æternitatis expectatione et
amore, ejus qua te natura donavit animi
fortitudinis numeros omnes absolvisse ; quibus
præsidiis munitum ulla te harum rerum
inferiorum mutatione lædi posse, inane sane
fuit et debilis ingenii commentum. Lædebar
ego a meipso, qui ideo lædebar quod te lædi
existimarem. Si quis enim unquam utilitatis ex
adversis capiendæ modum cognoverit, si [113]
quis attrita et lacerata tempora resarcire
unquam potuerit, id a te (senatore dicamne an
veterano fabro ?) fuit expectandum.
« Dabit Deus his quoque finem ;
... et hæc olim meminisse juvabit267. »
Je commençais à m'affliger de votre
départ pour la Bresse, lorsque j'ai vu, par la
date de votre lettre, que vous étiez de retour au
moment où je la recevais. Je craignais en effet
que, selon notre habitude de ne regarder
comme étranger à nous-mêmes rien de ce qui
touche [112] l'humanité, votre cœur si tendre
eût un peu plus de peine à supporter la vue des
misères de notre chère patrie qu'à en entendre
le récit.
Pendant que je suis dans ces pensées,
mes yeux tombent sur un livre dont je
remarque tout d'abord cette première ligne : «
Nul n'est blessé que par soi-même. » O
maxime bien propre à notre temps et digne du
grand Chrysostome, dont une certaine
homélie, vous le savez mieux que personne, est
illustrée par ce célèbre frontispice. En présence
d'un avertissement aussi solennel, j'ai senti
s'évanouir aussitôt toute la sollicitude
prématurée qui avait d'abord agité mon cœur à
votre sujet. Je le savais, mon Frère : par
l'observation attentive et le mépris des choses
périssables du temps, par l'attente et l'amour
des biens incorruptibles de l'éternité, vous avez
porté jusqu'au dernier degré de perfection cette
force d'âme dont la nature vous a gratifié.
Supposer que, si bien protégé et défendu, vous
pouviez être blessé par quelque changement
survenu dans les choses d'ici-bas, ce ne pouvait
être que vaine imagination d'un esprit faible.
J'étais donc blessé par moi-même, moi dont la
blessure venait de ce que je vous croyais
blessé. Si quelqu'un a jamais su le moyen de
[113] mettre à profit l'adversité, si quelqu'un a
jamais pu remédier aux ruines et aux désastres
de son époque, c'est de vous (dois-je dire
sénateur ou bien artisan expérimenté ?) qu'il
265 Terent., Heaut., Act. I, scena 1, 25.
266 Patrolog. Græca, tom. LII, col. 459.
267 Virgil., Æneis, l. I, 199, 203.
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10.2 Page 92

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Lædebar ego a meipso qui ideo lædebar quod
tu quoque lædi putarem, cum primos hos
animorum motus ratione antevertere fabri sit
non tyronis.
Cæterum ad Tononienses tandem
descendi268 ; hastam moræ tædio
excitatissimam hostis expectet. Cum enim ex
arce velut eminus impetitus conditiones justas
neglexerit, cominus nunc extremum impetum
faciam ; potior est numero at nos causa. Hi in
curribus et hi in equis, nos autem in nomine
Domine sperabimus269 ; si tamen inter
rodomontia Davidis verba recte sequantur.
[114]
Frequentioribus concionibus impedior
quominus justam operam possim impendere
Meditationibus nostris in hæreticos. Non sum
nescius, mi Frater, quantopere te meæ litteræ
delectent; id enim facile ex ea qua tuæ me
vivissima afficiunt voluptate conjicio. Quo fit,
licet omnem scribendi nimium idoneam
arripiam occasionem, [nunquam tamen
dixisse] et scripsisse sat est.
Accepi hodie litteras a R. P. Cherubino
nostro, qui inchoatum hoc opus promovendi
sua industria et opera se summo desiderio
teneri scribit, ac ita nos ad illud hortatur, ut
interim si a primo, secundo vel tertio servo ad
nuptias invitati noluerint venire, quartus
demum sit advocandus qui compellat
intrare270. Veniat ergo ipse qui omnium instar
esse poterit, ac tum demum succedat quartus.
Non miror sane si tam frigido invitatore qualis
sum non veniant; at si ab aliquot spectatissimis
viris accersiti venire recusent, ego vero tunc in
sententiam P. Cherubini descendere non
recusabo. At hæc animi gratia dicta sint, cum
ego, nec vi ulla ingenii neque [115] aliqua
scientia sed patientia fretus, in hanc arenam
venerim: Expecta, reexpecta, manda,
remanda, utinam, quod sequitur apud
Isaiam271, non vadant et cadant retrorsum et
confringantur.
Cæterum, velim a te scire quonam
[modo] latine exprimere possim commissaire
faut attendre cela.
« Dieu mettra encore un terme au malheur
présent ;
... et un jour ce souvenir ne sera pas sans
charmes. »
J'étais blessé par moi-même, moi qui l'étais
parce que je vous croyais aussi blessé ; c'est
qu'il appartient non à un apprenti, mais à un
artisan de prévenir par la raison ces premiers
mouvements de l'âme.
Enfin je suis descendu à Thonon ; que
l'ennemi s'attende à une lance très excitée par
l'ennui du retard. Attaqué des hauteurs
lointaines de ma citadelle, il a méprisé de
justes conditions ; maintenant je lui livrerai de
près le dernier assaut. Il l'emporte par le
nombre, nous l'emportons par la cause. Ceux-
ci se confient dans des chariots et ceux-là dans
des chevaux ; mais nous, c'est dans le nom du
Seigneur que nous espèrerons, si toutefois les
paroles de David peuvent être citées au milieu
de ces rodomontades. [114]
Des prédications plus nombreuses
m'empêchent de donner à nos Méditations
contre les hérétiques toute l'attention qu'il
faudrait. Je n'ignore pas, mon Frère, combien
mes lettres vous sont agréables ; je le devine en
effet facilement, puisque les vôtres me causent
un si vif plaisir. D'où il suit que, nonobstant
mon grand empressement à saisir toute
occasion favorable d'écrire, [je ne crois jamais]
avoir assez écrit.
J'ai reçu aujourd'hui une lettre de notre
R. P. Chérubin. Il m'écrit qu'il a un très ardent
désir de donner à l'œuvre commencée ici une
plus grande impulsion par son industrie et son
action personnelles, et voici ce qu'il nous
recommande : Si ceux qui sont conviés à la
noce refusent l'invitation d'un premier, d'un
deuxième, d'un troisième serviteur, il faut en
appeler un quatrième qui les force à entrer.
Qu'il vienne donc lui-même, qui vaudra tous
les autres ensemble, et qu'un quatrième lui
268 C'est donc bien en mars 1595, et non pas en juillet, comme quelques historiens l'ont avancé, que notre Saint se fixa
définitivement à Thonon. Il accepta l'hospitalité que lui offrait Jeanne Barbier du Maney, veuve de François du Foug
ou du Faug, parent de la famille de Sales, chez qui il avait un pied-à-terre dès le commencement de son séjour en
Chablais.
269 Ps. XIX, 8.
270 Lucæ, XIV, 17-23.
271 Cap. XXVIII, 10, 13.
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10.3 Page 93

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des guerres ; et num procurator Principis succède enfin. Je ne m'étonne pas qu'ils
idem sit quod procurator fisci ? vel enim id refusent de venir sur l'invitation d'un homme
antea numquam scivi, vel servisse non memini. aussi froid que je le suis ; mais s'ils refusaient
Etsi enim recuperatores Præfecti et cætera id encore après avoir été appelés par des hommes
genus nomina viderim, non tamen mihi constat qui ont bien fait leurs preuves, alors je
num huic significationi pressissime n'hésiterais pas à adopter le sentiment du P.
conveniant. Hæc expecto.
Chérubin. Ceci soit dit par plaisanterie, car ce
Jamque vale, et Christum habeto n'est pas en [115] comptant sur la force de mon
propitium, cum omnibus fabris et fabritiis. esprit, ni sur aucune science, mais sur la
Tononi, non. Martii 95.
patience, que je suis descendu dans l'arène.
Attends, attends encore ; commande,
Revu sur le texte inséré dans le Ier Procès de commande encore ; et plaise au ciel, pour
Canonisation. [116]
continuer à employer les paroles d'Isaïe, qu'ils
ne se retirent pas, qu'ils ne tombent pas en
arrière et qu'ils ne se brisent.
Encore un mot : je voudrais apprendre
de vous comment il faut traduire en latin
commissaire des guerres, et si procureur du
Prince a la même signification que procureur
fiscal. Je n'ai jamais su cela, ou, si je l'ai su, j'en
ai perdu le souvenir. J'ai bien vu l'expression
de recuperatores Præfecti, et autres
semblables, mais ces titres répondent-ils très
exactement à ce sens ? J'attends votre réponse.
Adieu, et que le Christ vous soit
propice, ainsi qu'à vos grands et petits artisans.
Thonon, le 7 mars 1595. [116]
_____
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10.4 Page 94

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XLVI. A Monsieur de Boisy son père272. Courage invincible en
face des dangers que présente la mission du Chablais.
Thonon, milieu de mars 1595.
Monsieur mon tres honnoré Pere,
Si Roland273 estoit vostre filz aussi bien qu'il n'est que vostre valet, il n'auroit pas eu la
couardise de reculer pour un si petit choc que celuy ou il s'est trouvé, [117] et n'en feroit pas le
bruit d'une grande bataille. Nul ne peut douter de la mauvaise volonté de nos adversaires ; mays
aussi vous faict on tort quand on doute de nostre courage. Par la grace de Dieu, nous sçavons que
celuy qui perseverera sera sauvé274, et que l'on ne donnera la couronne qu'a celuy qui aura
legitimement combattu275, et que les momens de nos combatz et de nos tribulations operent le prix
d'une gloire eternelle276.
Je vous supplie donq, mon Pere, de ne point attribuer ma perseverance a la desobeyssance,
et de me regarder tousjours comme
Vostre filz le plus respectueux.
Revu sur un ancien. Manuscrit de l'Année Sainte de la Visitation,
conservé au Monastère d'Annecy.
_____
272 François, second fils de Jean III de Sales et de Claudine de Charansonnay (6 janvier 1522-5 avril 1601) avait eu
pour parrain le vicomte François de Luxembourg-Martigues, chez lequel il passa plusieurs années en qualité de page.
Il servit ensuite avec éclat dans les armées françaises « et se signala en diverses occasions, principalement au siege de
Landrecies. » La mort de son père (1558) le rappela en Savoie. Il substitua au titre de seigneur de Nouvelle, sous
lequel il avait été connu jusque là, celui de seigneur de Boisy lors de son mariage avec Françoise de Sionnaz, qui lui
apporta cette terre en dot. (Contrat du 12 mai 1560.) M. de Boisy devint gentilhomme ordinaire du duc Emmanuel-
Philibert, et fut chargé par ce prince de plusieurs négociations importantes, notamment en Suisse (1563). Deux ans
plus tard, il présida l'assemblée générale de la noblesse de Savoie et de Faucigny réunie à Annecy. Par suite
d'acquisitions ou d'héritages il était devenu possesseur des terres de La Thuille, Vallières, Groisy, Villaroget, etc.
« C'estoit, » au témoignage de son petit-fils, Charles-Auguste de Sales, « un homme d'un tres-solide jugement
et tres-subtil esprit ; es choses grandes, d'une pensée tres-profonde et d'un courage tres-constant : esloigné de tout fast
et arrogance, tres-temperant en son vivre et en son parler ; au reste, eloquent et elegant à delices quand il en estoit
temps, espargnant en sa personne, tres-liberal envers les autres, tres-juste et equitable envers ses subjects, qui secouroit
abondamment de ses richesses les miseres des pauvres, qui fuyoit les heresies comme la peste... Et tel à la verité devoit
estre le pere d'un Sainct, qui finit sa vie tres-sainctement, de mesme qu'il l'avoit menée tres-devotement.»
273 Georges Rolland (1576-1641), que nous retrouverons constamment désormais aux côtés de saint François de Sales,
entra à son service en 1595, ainsi qu'il le dépose au Procès de Canonisation du Serviteur de Dieu, auquel, durant la
mission du Chablais, il servit tour à tour de laquais et de secrétaire. Il entra dans la cléricature en 1598, et fut ordonné
prêtre en 1605. La confiance que ce jeune ecclésiastique inspirait à son saint Maître était telle que celui-ci, devenu
Evèque (1602), le choisit pour économe de sa maison, bien qu'il eût à peine vingt-six ans.
En 1607, Rolland fut pourvu d'un canonicat à la collégiale de Notre-Dame d'Annecy, puis résigna ce bénéfice,
et, après avoir pris le grade de docteur en droit canon, devint chanoine du Chapitre de Saint-Pierre de Genève. Il fut
officiai sous l'épiscopat de Mgr Jean-François de Sales, frère et successeur du Saint, et plus tard, vicaire général.
Selon toute probabilité, le prétendu « si petit choc » mentionné dans cette lettre n'est rien moins qu'une
tentative d'assassinat, à laquelle l'Apôtre du Chablais échappa comme par miracle.
274 Matt., X, 22 ; XXIV, 13.
275 II Tim., II, 5.
276 II Cor., IV, 17.
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XLVII. A Monseigneur Claude de Granier, Évêque de Genève.
Difficulté et lenteur des conversions.
[Thonon, vers le commencement d'avril 1595.]
Monseigneur,
Si vous desires de sçavoir, comme il est convenable que vous le sçachies, ce que nous
avons faict et ce que nous faisons maintenant, vous le trouveres tout en la lecture des Epistres de
saint Paul. Je suis indigne d'estre mis en comparayson avec luy, mais Nostre Seigneur sçait fort
bien se servir de nostre infirmité pour sa [118] gloire277. Nous marchons, mais a la façon d'un
malade qui, apres avoir quitté le lict, se trouve avoir perdu l'usage de ses piedz et, dans son infirme
santé, ne sçait s'il est plus sain que malade.
C'est la verité, Monseigneur, ceste province est toute paralytique, et devant qu'elle puisse
marcher, je pourray bien penser au voyage de la vraye patrie. Une pieté semblable a la vostre me
peut obtenir ce que je ne meriteray jamais. Je suis pecheur278, et rien plus, indigne tout a faict des
graces que Dieu espanche sur moy. Vous le sçaves plus que tous, Monseigneur, aussi bien que
ceste verité, que toutes choses me rendent plus fort de jour en jour,
Vostre tres humble et tres obeissant filz et serviteur.
_____
XLVIII. Au père Antoine Possevin, de la Compagnie de Jésus
(Minute). Témoignages de reconnaissance et désir d'une
prochaine entrevue. Etat des affaires religieuses en Chablais.
Nouvelles intimes.
279Monsieur mon Reverend Pere,
Thonon, commencement d'avril 1595.
Je ne vous sçaurois dire, et ne sçay si vous sçauries croire, combien j'ay receu de
consolations de vostre lettre, car il y a longtems que je desirois infiniment d'estre [119] asseuré de
vostre santé ; mays en avoir l'asseurance de vous mesme, et de si pres comme je l'ay eue, je ne
l'eusse pas osé si tost esperer. J'en loue Dieu mille fois, et vous remercie tres humblement de la
souvenance que vous daignés avoir de si peu de chose que je suys et du desir que vous aves de me
voir, que je ne pense pas pouvoir estre plus grand que celuy que j'ay de jouir de vostre præsence,
quoy qu'on die que l'amitié descend plus vistement qu'elle ne monte.280 Et si ce n'estoit que je suys
icy engagé en un jeu ou qui la quitte la perd, je me serois desja rendu par devers vous ;281 ce que
je me prometz de faire, Dieu aydant, plus tost que je ne vous puys promettre et non jamays si tost
277 Cf. II Cor., XII, 9, 10.
278 Lucæ, V, 8.
279 Monsr mon R. P. Je loue infiniment la Majesté divine de la grace qu'elle me faict de vous pouvoir...
Monsr mon R. P. Je loue infiniment Dieu de la grace quil me faict maintenant et en ceste occasion de pouvoir
jouir de vos consolations, et vous remercie treshumblement de la souvenance que vous aves de si peu de chose que je
suys.
280 ne monte. [Mays c'est mon mal que je suys...]
281 par devers vous ; si tascherai je dans dix ou douze jours d'avoir ce bon heur, et ne sera jamais si tost que je
souhaitte. Ce qu'attendant, puysquil vous plaict...
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10.6 Page 96

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que je souhaitteroys.282 Si ne veux je pas m'en remettre du tout a ce tems la de vous dire de mes
affaires spirituelz.
Monsieur le senateur Favre, mon frere, vous aura bien dict, a ce que je voys, comme je
suys venu en ce païs, voyci desja le septiesme moys. Et toutefois, ayant presché en ceste ville
ordinairement toutes les festes, et bien souvent encor parmi la semayne, je n'ay jamays esté oùy
des huguenotz que de troys ou quatre qui sont venuz au sermon quatre ou cinq fois, sinon a
cachetes, par les portes et fenestres, ou ilz viennent presque tous-jours, et les principaux. Ce
pendant je ne perds point d'occasion de les accoster ; mays une partie ne veulent pas entendre,
l'autre partie s'excuse sur la fortune quilz courroyent quand la trefve romproit avec Geneve, silz
avoyent faict283 tant soit peu semblant de prendre goust aux raysons catholiques ; qui les tient
tellement en bride quilz fuyent tant quilz peuvent ma conversation. Neant-moins il y en a quelques
uns qui sont desja du tout [120] persuadés de la foy ; mays il ni a point de moyen de les tirer a la
confession d'icelle pendant l'incertitude de l'evenement de ceste trefve. C'est grand cas combien
de pouvoir a la commodité de ceste vie sur les hommes. Et ne faut pas penser d'apporter aucun
remede a cela, car de leur apporter en jeu l'enfer, la damnation, ilz se couvrent de la bonté de Dieu
; si on les presse, ilz vous quittent tout court. Et cest'occasion seule me prive pour quelques jours
du bien que je recevray de vous ouyr, parce que Son Altesse ayant un gentilhomme en Suysse qui
doit bien tost revenir, si par fortune il apportoyt point de bonnes nouvelles, je pourrois, me trouvant
icy, fair'esclorre ceste foy secrette. Quand aux vilages il ni aura pas grand peyne.
J'en dis trop, a vous qui sçaves bien de quell'estouffe doit estre la resolution qui faict
abandonner le soucy des biens de ce monde et de la famille. C'est tout ce qu'on peut faire que de
faire garder aux Catholiques naiz et nourrys, leur foy a ce pris la. Au reste, tous les benefices de
ce pais sont es mains des seculiers, ou bien peu s'en faut ; on attendoit que leurs Altesses en fissent
lascher quelques uns pour l'entretenement de quelques prædicateurs, mays nous en sommes encor
là, sans autre ordre que celuy que le Gouverneur y a mis par provision.
Au reste, j'ay icy quelques parens et d'autres qui me portent respect pour certaynes raysons
particulieres que je ne puys pas resigner a un autre ; et c'est ce qui me tient du tout engagé sur
l'œuvre. Je m'y fascherois desja beaucoup, si ce n'estoit l'esperance que j'ay de mieux ; outre ce,
que je sçay bien que le munier ne perd pas tems quand il martelle la meule. Aussy seroit il bien
dommage qu'un autre employast icy sa peyne pour neant, qui pourroit faire plus de fruict ailleurs
que moy, qui ne suys encor gueres bon pour præcher autre que les murailles, comme je fais en
ceste ville.
Voyla ce que pour cest'heure je puys escrire, me reservant de vous dire le reste a bouche
plus seurement et bien tost, Dieu aydant, quand vous me favoriseres de vos saints conseilz et
instructions, qui ne seront jamays [121] recueillys plus humblement et affectionnement que de
moy. Je prie Nostre Seigneur quil vous conserve longuement pour son service, et demeure,
Monsieur mon Reverend Pere,
Vostre tres humble filz et serviteur.
Revu sur l'Autographe conservé à la Visitation de Turin.
_____
282 je souhaitteroys. [Ce seroit des ores, si je n'estois engagé en ce païs... si ma liberté en ceste negociation ou je
suys...]
283 faysoyent
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XLIX. Au sénateur Antoine Favre. Eloge d'un ouvrage du P.
Possevin. Motifs qui retardent la conversion de Pierre Poncet.
Présents des PP. Possevin et Chérubin. Encouragements
reçus d'un ami au sujet de la mission.
Thonon, 11 avril 1595.
Clarissimo Senatori Antonio Fabro, Fratri
suavissimo, Franciscus De Sales salutem
dicit.
Au très illustre Sénateur Antoine Favre, son
très doux Frère, François de Sales présente
ses salutations.
Dicamne, mi Frater, quanta animi
voluptate tuas litteras et clarissimi viri Antonii
Possevini nudius tertius exceperim ? Et cum
alterius284 seorsim recordatio sola animum
omnem delectare posset et soleret, quid quæso
non recordatio solum, sed utriusque erga me
tantum benevolentiæ pignus effecerit ?
Epistola per se scribentis [122] quædam
effigies manualis est ; at in selecto illo libello
de Poësi et Pictura285, tam genuina est
Possevini effigies, ut non in messem alienam
miserit manum qui tam eleganter et graphice
seipsum representant et pinxerit ; ac nihilo fere
minus se libello mihi præsentem exhibeat
quam ipsissima præsentia tibi. Ob id tamen
nollem286 existimes minori me teneri ejus in se
videndi desiderio quod ex libro viderim ; quin
tam jucundo invitamento ipse acuitur
appetitus. Nihil est in hac mea oblectatione
durius287 quam quod in id tempus ceciderit quo
mihi, per aliquot saltem dies, fixo pede in hoc
agro sit permanendum.
Nam tandem aliquando albescunt
aliquot hujus tantæ messis spicæ288, quæ si
tempore tam incommodo non [123] tempestive
colligantur, verendum est ne ventis maxime
aquilonaribus (nam ab aquilone, ut est in
Prophetia289, omne malum panditur)
vehementius iis in terris flantibus, rectæ fidei
Dirai-je, mon Frère, avec quelle joie
intime j'ai reçu avant-hier votre lettre et celle
du très digne P. Antoine Possevin ? Si le seul
souvenir de l'un de vous séparément suffît
d'ordinaire pour délecter toute mon âme, qu'en
a-t-il été, je vous le demande, non du souvenir
seulement, mais de ce gage précieux de la
bienveillance de l'un et [122] de l'autre à mon
égard ? Une lettre est déjà comme un portrait
de celui qui écrit ; mais l'image de Possevin est
si naturelle dans ce charmant ouvrage de la
Poésie et de la Peinture que, pour se
représenter et se peindre soi-même avec tant de
grâce et d'exactitude, il n'a certainement pas
emprunté les pensées d'autrui. Il ne m'est guère
moins présent par cet écrit qu'il ne vous l'est en
réalité. N'allez pas croire cependant que, pour
l'avoir vu dans son livre, j'éprouve un désir
moins vif de le voir en personne ; au contraire,
l'appétit est aiguisé par un si agréable
alléchement. Une seule chose m'est pénible
dans cette jouissance, c'est qu'elle m'est offerte
en un temps où je dois rester de pied ferme
dans ce champ, au moins pour quelques jours.
En effet, voici enfin que commencent à
jaunir quelques épis de cette grande moisson,
et si, à cette époque malheureuse, je ne les
[123] recueillais à temps, il serait à craindre
que les grains de la vraie foi ne fussent
dispersés, surtout si le vent du nord venait à
284 Et quidem alterutrius [Voir ci-après, p. 124, (294).]
285 Antonii Possevini, S. J. Tractatio de Poesi et Pictura ethnica, humana et fabulosa, collata cum vera, honesta et
sacra. Adjecta est in hac editione novus index. Lugduni, apud Joannem Pillehotte, ad insigne Nominis Jesu.
MDXCIIII. Cet ouvrage n'est que la reproduction du Livre XVIIe de la Bibliotheca Selecta.
286 est Possevini imago et repræsentatio, ut nihilo fere minus illum mihi, putem, exhibeat quam ipsamet præsentia
tibi, ut non in messem alie-nam misisse manum videatur, qui dum de Poësi et Pictura tractat, tam eleganter et graphice
seipsum repræsentarit et pinxerit. Neque tamen propterea velim
287 viderim ; imo vero nihil in hac mea delectatione difficilius
288 Cf. Joan., IV, 35.
289 Jerem., I, 14.
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grana disjiciantur. In iis est Petrus Poncetus290
jurisconsultus doctus et vir bonus291, qui cum
jampridem de præsentia corporis Christi in
Eucharistia recte sentiret, etsi in quamplurimis
turpissime erraret, a scola Calviniana quæ in
tanto Sacramento falleret et falleretur292 abduci
se facile passus est ; ad caulas vero Catholicas
redire peculiare fuit negotium. Quod tamen
nunc facere se debere fatetur ; sed rei familiaris
perdendæ293 timor, antiquorum amicorum
objurgatio, induciarum incerta294 duratio,
currenti alioquin compedem injiciunt. [124] «
Per calcatum perge patrem,295 et ad Crucis
vexillum evola, » Beati Hieronymi
sententia296, si unquam alibi, hic imprimis
locum habet, sed plus æquo verum est vetus
dictum : « Morbos equites venire, pedites
abire. » Ergo oh primi hujus et septimestris
partus dolores subsisto297 ; mox eo velocius
iturus298 quo nullis unquam aculeis patientia
mea tentata fuit acrius quam hac tam morosa
mora299. Tarditatem suavitas compensabit.
Interim nolo te lateat clarissimorum
PP. Possevini et Cherubini nostri erga me
concursus animorum300. Misit [125] hic
icunculam Virginis Matris Christum Infantem
dormientem301 adorantis. Ego cum nihil
propemodum aliud hic oculis reficiendis
souffler plus fort en ces quartiers ; car tout mal
vient du côté de l'aquilon, selon l'expression du
Prophète. Au nombre des épis dont je parle, est
Pierre Poncet, savant jurisconsulte et cœur
droit. Malgré ses erreurs grossières sur presque
tous les points de notre croyance, il avait
depuis longtemps des idées justes sur la
présence réelle du corps de Jésus-Christ dans
l'Eucharistie ; ainsi ce fut chose aisée de le
détacher de la secte de Calvin, laquelle se
trompe et trompe les autres en ce qui concerne
cet auguste Sacrement. Mais il fut plus difficile
de le faire rentrer au bercail de l'Eglise. La
crainte de la perte de ses biens, les reproches
des amis, l'incertitude de la durée des trèves,
tout se réunit pour entraver sa conversion. Si
jamais on put [124] appliquer ailleurs le
conseil de saint Jérôme : « Foulez aux pieds
votre père et courez vous réfugier sous
l'étendard de la Croix, » c'est bien ici en
particulier le cas de le faire. Mais le vieux
proverbe est également vrai : « Le mal vient à
cheval et s'en retourne à pied. » Je m'arrête
donc ici à cause des tranchées de cet
enfantement qui arrive au septième mois. Je
m'échapperai bientôt, d'autant plus vite que
jamais ma patience n'a été mise à plus cruelle
épreuve que par cet ennuyeux retard. Le plaisir
290 L'avocat Pierre Poncet, natif de Gex. Bien que Charles-Auguste de Sales fixe la date de l'abjuration de ce
jurisconsulte au 20 août 1595, il est évident, d'après la correspondance de notre Saint, qu'il avait fait sa soumission à
l'Eglise dès le mois d'avril précédent,
291 In iis est jurisconsultus non indoctus, ac saltem omnium qui hic sunt doctissimus Petrus Poncetus
292 Sacramento hallucinaretur
293 se debere — si velit ad læta cœlestis montis pascua consceudere, fatetur. Rei familiaris amittendæ
294 [C'est assurément par suite d'un lapsus calami que l'Autographe porte certa, alors que le sens exige incerta. Ce
dernier mot est celui qui se lit dans une copie authentique de la minute (Turin, Archives de l'Etat) d'où sont extraites
les variantes données en regard du texte.]
295 perge patrem, per calcatam perge matrem,
296 Epist. XIV, ad Heliod., § 2.
297 Beati Hieronymi sententia est. At si alibi unquam, hæc sane locum habere deberet, ubi tantum vitæ spiritalis
detrahitur quantum iis humanis commodis tribuitur ; sed verum est illud antiquorum proverbium : « Equitem venire
morbum, peditem abire. » Jubent me cumulatius deinceps sperare, tum ipse Baro Hermentianus, tum eques
Compesius, vir alioquin militaris, sed summe Catholicus, qui uti in hebdomadam sequentem expectarem, nescio
quibus, faustis tamen si veris, prædictionibus compulit. Quare, tum ob primi hujus partus septimestris dolores, tum ne
prognosticis amicissimi viri fidem omnio negasse videar subsisto. (C'est la sentence de saint Jérôme, et, sijamais
elle fut applicable ailleurs, elle l'est particulièrement dans une occasion où l'on enlève à la vie spirituelle ce qu'on
donne aux intérêts temporels. Mais le proverbe des anciens est vrai : « Le mal vient à cheval et s'en retourne à pied. »
Le baron d'Hermance et le chevalier de Compois veulent que j'espère plus fortement que jamais. Ce dernier, homme
de guerre, mais excellent catholique, s'appuyant sur je ne sais quelles prédictions favorables, si toutefois elles sont
vraies, m'engage à patienter encore jusqu'à la semaine prochaine. C'est pourquoi je reste ici, tant à cause des douleurs
que je ressens de ce premier enfantement, que pour ne pas paraitre tout à fait incrédule aux pronostics d'un ami.)
[Cf. le texte, p. 127, lignes 1-5.]
298 discessurus
299 quam hac retardatione.
300 amicus
301 icunculam Christi puelli dormientis et Virginis Matris Salvatorem dormientem demisse
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haberem, identidem præ manibus charum
piumque munus amantissimi viri sumebam.
Ille vero libellum perelegantem, quem dum
primum aperio302, næniola venustissima303
Virginis ad Christum Infantem Horatii
Torcellini304 sese objicit. Hic ergo picturam
pictam et dictam, ille picturam veram et factam
dedit. Alter oculos templorum solitudine et
vastitate obtusos oblectavit, alter aures dudum
horrendis blasphemiis tinnientes recreavit ;
quo nimirum ambo tam sanctis piisque
munusculis pro sua erga me benevolentia altius
mentis mes oculis Christum Dominum
imprimerent. Quorum tu mihi bonorum author
cum sis, quid concludam tu ipse cogita305.
[126]
Eques Compesius306 vestras attulit
litteras,307 ac me simul cumulatius iisce de
rebus Christianis sperare jussit, nescio quibus,
faustis quidem si veris, prædictionibus ;
quibus, cum vir sit summe Catholicus et
Sabaudus, ipse facillime credit, ac adeo me uti
crederem vehementissime compulit. Is idem
has nostras ad te perferendas curabit, et alias a
te item ad me referendas si voles.
Hermentianus Baro te quam impensissime
salutat.
Bene vale, et ne suam erga me
benevolentiam remittat P. Possevinus, ut facis,
cura, et Christum308 habeto propitium.
Tononi, 3 idus Aprilis 95.
Revu sur l'Autographe conservé à Enghien
(Belgique), chez les RR. PP. Jésuites, maison
Saint-Augustin. [127]
compensera la longueur de l'attente.
Cependant je ne veux pas vous laisser
ignorer avec quelle unanimité de sentiments
les PP. Possevin et Chérubin m'ont prévenu.
[125] Celui-ci m'a envoyé une image de la
Vierge Mère adorant l'Enfant Jésus qui dort.
Comme je n'ai ici presque aucun autre objet
pour reposer ma vue, je me plais à prendre en
main de temps en temps ce cher et pieux
présent d'un très tendre ami. De Possevin j'ai
reçu un livre magnifique, et, à peine l'ai-je
ouvert, que j'y trouve la charmante berceuse de
la Vierge Mère au Christ enfant, composée par
Horace Torsellini. L'un m'a donc donné un
portrait parlé, l'autre, un portrait véritable et
naturel. L'un a charmé mes yeux, que fatigue
la vue de nos temples déserts et ruinés, l'autre
a récréé mes oreilles, continuellement
étourdies par d'horribles blasphèmes. Ainsi,
par leurs présents si pieux et si saints, tous les
deux, remplis de bienveillance à mon égard,
impriment plus profondément Jésus-Christ
dans mon cœur. Pensez vous-même quelle
conclusion je tirerai de ceci par rapport à vous
qui êtes l'auteur de ces biens. [126]
Le chevalier de Compois m'a apporté
votre lettre et m'a exhorté à concevoir de
meilleures espérances de nos affaires
religieuses. Il se fonde sur je ne sais quelles
prédictions, favorables assurément si elles sont
vraies. Comme c'est un homme éminemment
catholique et savoyard, il y croit lui-même très
facilement et a fortement insisté auprès de moi
afin que je croie aussi. Ce même chevalier se
chargera de vous porter cette lettre et, si vous
le voulez, de m'en rapporter une autre de vous.
Le baron d'Hermance vous salue
affectueusement.
Adieu, veillez, comme vous le faites, à
ce que le P. Possevin ne diminue rien de sa
302 Ad cap. XVIII, de Ode.
303 perelegantem, ut nosti, quem dam primum aperio, næniola jucundissima
304 Horace Torsellini (1545-1599), né à Rome, entra dans la Compagnie de Jésus en 1562. Il fut Recteur du Séminaire
romain, du collège de Florence et de celui de Lorette. Ce Jésuite publia plusieurs ouvrages.
305 et factam dedit. Quis non miretur illum oculis templorum solitudine ac vastitate obtusos, hunc autem aures
horrendis blasphemiis tinnientes, tam amanter simul imagine et poesi tam sancta, tam pia recreasse, quo nimirum
altius meo Christum animo imprimerent pro sua utriusque erga me benevolentia ? Quorum tu mihi bonorum author
es.
306 Etienne de Compois-Féterne, né vers 1527, gentilhomme de la maison du duc de Savoie (1561), gouverneur du
château de Thonon (11 octobre 1567), puis de Ripaille, et chevalier de Justice des Saints Maurice et Lazare (1575). Il
n'était illustré au combat de Saint-Quentin, où il avait enlevé un drapeau français, ce qui lui mérita d'être créé chevalier
doré sur le champ de bataille.
307 [La fin de cette phrase et la suivante ne se trouvent pas dans la minute. Cf. variante (297), p. 125.]
308 cura, Christumque Salvatorem
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10.10 Page 100

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bienveillance à mon endroit. Que le Christ
vous soit propice !
Thonon, le 11 avril 1595. [127]
_____
L. Au même (Minute). L'avocat Poncet promet d'abjurer
prochainement le protestantisme.
Thonon, vers le 15 avril 1595.
Quod non ad dictam diem servum
suum in urbem miserit eques Compesius, alia
via litteras ad te et ad P. Possevinum nuperrime
perferendas curavi ; at cum nunc idem ipse iter
conficiat, noluit propter moram sine meis ad te
litteris proficisci ac ea occasione salutandi te
destitui. Et qua est statura et voce, ut vides,
rodomontea, non ausus sum omnino negare
inermis homuncio ; quamvis nihil aliud
habeam quod iterum scribam, præsertim sic ex
tempore, quam Poncetum, de quo
superioribus, jam promisisse se in verba
Ecclesiæ Catholicæ palam paulo post
juraturum,309 [ac primo] quidem Compesio,
[128] qui id ab eo primum expressit, ipsaque
eadem hora mihi. Qua in re videbis verbis
militaribus non parum sibi gralulari hunc
nostrum equitem, quod meam hanc lætitiam
anteverterit.
Cæterum P. Possevinum Neciine an
Chamberii malim videre, difficile dixerim, nisi
tu utrimque adsis. Sed Neciensibus diem
dicere310 debeo, ut si, qua est in me humanitate,
venire volet, expectent in ipso itinere medio,
ne tanti viri visitatione priventur311. Salutat te...
Revu sur l'Autographe conservé à Enghien
(Belgique), chez les RR. PP. Jésuites, maison
Saint-Augustin. [129]
Comme le chevalier de Compois n'a
pas envoyé son serviteur en ville au jour
convenu, j'ai eu soin d'expédier tout
récemment par une autre voie des lettres pour
vous et pour le P. Possevin. Mais le chevalier
lui-même se mettant en route maintenant, n'a
pas voulu partir sans une lettre de moi, afin de
n'être pas privé, à cause de son retard, d'une
occasion de vous saluer. Et parce qu'il a,
comme vous voyez, une stature et une voix de
géant, je n'ai pas osé refuser tout à fait, moi
petit homme sans défense, bien que, pris ainsi
à l'improviste, je n'aie rien de nouveau à vous
écrire, si ce n'est que Poncet, dont je vous ai
parlé dans ma dernière lettre, a maintenant
promis de faire publiquement profession de la
foi catholique d'ici à peu de temps. Cette
promesse fut faite d'abord à Compois, qui la lui
extorqua en premier [128] lieu, puis à moi sur
l'heure même. Vous verrez que notre chevalier,
avec son langage militaire, ne se vante pas peu
de m'avoir devancé dans la joie de cette
conversion.
Au reste, il me serait difficile de dire si
j'aime mieux voir le P. Possevin à Annecy ou
à Chambéry, si vous n'êtes pas en l'un et l'autre
endroit. Mais je dois prévenir les Annéciens du
jour de son arrivée, afin que, si sa bienveillance
pour moi le décide à venir, ils ailllent l'attendre
à mi-chemin et ne soient pas privés de la visite
d'un tel homme… vous salue… [129]
309 juraturum, [ac primo] quidem Compesio [cui cum Poncetus ad me veniens occurreret, mox ille : Audivi te
Christianum fieri velle ; si ita est, da dextram societatis et complexum gratulationis... lætitiæ. Dedit et professionem
et complexum. Cui cum nollem...] (... d'abord à Compois qui, rencontrant Poncet lorsqu'il venait à moi, lui cria
aussitôt : J'ai entendu dire que tu veux te faire Chrétien ; s'il en est ainsi, donne-moi la main et l'accolade en signe de
fraternité et de réjouissance. Il donna et sa parole et l'accolade. Lorsque je ne voulais pas lui...)
310 [Les deux mots diem dicere sont simplement représentés dans l'Autographe par dd, dont l'interprétation ne nous
paraît pas douteuse.]
311 Le P. Possevin, chargé par le Pape de négociations relatives à l'absolution de Henri IV, séjournait alors au monastère
de l'Ile-Barbe, près de Lyon. C'est seulement à la fin de juillet qu'il traversa de nouveau la Savoie pour retourner en
Italie. Le 3 août il se trouvait à Turin.
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LI. Au même (Minute). Arbitrage du Sénateur réclamé par le
Chapitre de Genève et un ecclésiastique qui demande à en faire
partie.
Annecy, [mai] 1595.
Facient sua negligentia, mi Frater,
quibus ad te litteras meas extremas perferendas
dederam ut et has simul accipias. Porterio huic
nostro cum quodam sacerdote nomine Capituli
negotium coram te forsitan erit. Nimirum vult
hic in canonicum haberi, nos repugnamus ;
habemus enim Constitutiones decreto
Apostolico firmatas quæ cuiquam locum inter
nos facere vetant, qui vel nobilis ex utroque
parente vel312 doctor non sit. Solus Pontifex313
hac nos conscientia potest solvere ; at Pontifex
non aliter illi in Bulla canonicatum concessit,
quam si ad doctoratum intra annum
promoveatur. Horum nihil ab ipso factum
est.314 Nuper cum in Romana [130] Curia
conditionis remissionem postularet, repulsam
quod certo scimus passus est ; et vult
nihilominus canonicus et dici et esse. Martinus
Quintus anathemati caput Præpositi,
nominatim, et canonicorum objicit si secus
consenserint315.
Verum petivit ut te judice controversia
hæc finiatur. Nemo recusavit. Quare, cum in
Bulla sua, illi nobisque lex dicta sit, eam
proferat. Tu judica ; si enim tuta possit fieri
conscientia non abnuo, non abnuunt cæteri,
imo cupimus omnes eum316 optimo modo
canonicum esse ; vir enim est et doctus et pius.
Sed cum in odiosis versemur317 si
Constitutionum nostrarum venerationem, et, si
excommunicationis asperitatem spectes, in
periculosis, difficile adduci nos ab alio quam a
te patiemur, quem non modo ut peritissimum
fabrum, sed ut religiosissimum confratrem
veneramur.
Hæc communia ; at ego a te expecto
La négligence de ceux que j'avais
chargés de vous remettre ma dernière lettre
sera cause, mon Frère, que vous recevrez celle-
ci en même temps. M. Portier, au nom de notre
Chapitre, portera peut-être devant vous une
affaire concernant un certain prêtre. Cet
ecclésiastique veut être chanoine, mais nous
nous y opposons ; car, en vertu de nos
Constitutions, confirmées par un décret
apostolique, nous devons exclure tout candidat
qui ne serait pas noble dans les deux souches
ou n'aurait pas le grade de docteur. Le
Souverain Pontife seul peut nous délier de
cette obligation de conscience ; mais la Bulle
par laquelle Sa Sainteté admet ce prêtre au
canonicat, stipule expressément qu'il sera reçu
docteur dans l'espace d'une année. Le candidat
ne se trouve donc dans aucune des conditions
voulues, [130] et nous savons qu'ayant sollicité
une dispense en Cour de Rome, il a subi un
refus. Néanmoins il veut être chanoine et en
porter le titre. Martin V menace
d'excommunication les chanoines, et le Prévôt
nommément, s'ils donnent leur consentement
en telle occasion.
Le postulant a demandé enfin que vous
soyez juge en cette discussion. Personne ne s'y
est opposé. Ainsi donc la Bulle étant pour lui
comme pour nous la base du jugement, qu'il la
produise. C'est à vous de décider. Si la chose
peut se faire en sûreté de conscience, je n'y
mets pas d'obstacle, les autres non plus ; au
contraire, nous désirons tous qu'il soit
chanoine dans les meilleures conditions, car
c'est un homme docte et pieux. Mais nous
sommes dans l'odieux, eu égard au respect dû
à nos Constitutions, et dans le dangereux si
312 vel [theologiæ, juris civilis aut canonici]
313 Solus Pontifex [hanc nobis conscientiam potest adimere.]
314 factum est. [Summus Pontifex cum ab eo Constitutionis... Rogavit a Summo Pontifice... remissionem postularet
nuper ; negavit omnino, quod certo scimus.]
315 Cette Bulle, qu'on ne trouve pas dans le Grand Bullaire, remonterait, d'après certains historiens, au 24 octobre
1430.
316 eum [nobiscum in confratrem...]
317 Allusion à un principe du droit : « Favores ampliandi, odia restringenda.»
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quid de Possevino [131] nostro, nam de318 vous considérez le grand malheur d'une
Cantore, fratre nostro319, et de Girardo a excommunication. En conséquence, nous ne
canonico quodam Sebusiano qui nobiscum est voudrions pas voir la question tranchée par un
audivi. Bene vale, Frater millies suavissime, et autre que par vous, en qui nous honorons non
Christum habeto propitium.
seulement un très habile artisan, mais un très
Necii, ex Episcopi nostri domo, 95. religieux confrère.
Voilà ce qui concerne le général. Pour
Revu sur l'Autographe conservé à la
moi, j'attends de vous des [131] nouvelles de
Visitation d'Annecy.
notre Possevin, car j'en ai eu du Chantre, notre
frère, et de Girard par un certain chanoine de
Bresse qui est auprès de nous. Adieu, Frère
mille et mille fois très aimable ; que le Christ
vous soit propice.
Annecy, de la maison de notre Evêque,
1595.
_____
LII. Au même (Minute). Visite à Sales. Remerciements pour
l'envoi de la Centurie premiere de Sonnets.
Annecy, 16 mai 1595.
En iterum paululum recedo, mi Frater,
mox rediturus ; nam me pater advocat. Nolui
tamen pedem movere te [132] inscio, ne si
Possevinus veniat quonam loco sim ignorare
possitis ; ubi monueris recurram.
Ero igitur diebus aliquot apud Salesios
nostros. Nescio vero debeamne nunc ex equo
propemodum de320 sacra tua poesi mihi tam
amice nuncupata321 gratias agere ; et sane
opportunum fuerit, si ex temporis penuria mihi
liceat brevius agere quod si semper agam
nequidem semel satis egisse videar. Nulli
magis pœnitentiam amoremque divinum
suadere [occurrit] quam mihi. At hæc fusius
cum integrum opus attentius paulo, iis quatuor
aut quinque diebus, consideravero ; vix enim
aliquot paginas, partim concionibus, partim
aliis negotiis abstractus, degustasse licuit ;
eramque in officio apud Dominum de
Montrotier quod dixeras, cum libellum et
litteras a te excepit.
Je vais de nouveau m'absenter, mon
Frère, mais pour revenir bientôt. Mon père
m'appelle, et je n'ai pas voulu partir à votre
insu, [132] de peur que si Possevin venait, vous
ne sussiez où je suis. Aussitôt averti par vous,
j'accourrai.
Je passerai donc quelques jours chez
nos parents de Sales. Je ne sais si je dois
maintenant, ayant presque le pied à l'étrier,
vous remercier de ces poésies sacrées que vous
me dédiez si affectueusement ; certes,
l'occasion est bonne, car la pénurie de temps
m'autorise à faire plus courtement ce que je ne
croirai pas avoir bien fait une seule fois, alors
même que je le ferais toujours. Personne plus
que moi n'a besoin d'être exhorté à la pénitence
et à l'amour divin. Mais je vous dirai cela plus
au long lorsque j'aurai considéré un peu plus
attentivement l'ouvrage entier pendant ces
quatre ou cinq jours. A peine ai-je pu jusqu'ici
en savourer quelques pages, entraîné que
318 nam de [Girardo nuperrime auditui a Tissotto...]
319 Saint François de Sales avait la coutume de donner le nom de frère à ses amis intimes. Il l'attribue ici à l'un des
frères du Sénateur, probablement Jean Favre, chantre de l'église Notre-Dame de Bourg. On trouve cet ecclésiastique
au nombre des personnes appelées à déposer « sur la conduite du comte de Montmayeur dans la nuit du n août 1600,
lors de la prise de Bourg par les troupes de Henri IV. » (Histoire de la réunion à la France des provinces de Bresse,
Bugey et Gex. Bourg, 1852.)
320 de [tanto tuo munere ac amicissimi animi significatione...]
321 Voir note (198), p. 81.
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Accepisti nunc demum credo priores j'étais, soit par les prédications, soit par
meas, quas utinam Porterius noster habuisset ; d'autres affaires. Je m'acquittais de votre
retulisset reor responsum [133] de rebus commission chez M. de Montrottier lorsqu'il
nostris Chablasianis vel promovendis vel reçut votre opuscule et votre lettre.
removendis ;
Vous aurez reçu maintenant enfin, je
pense, ma précédente lettre ; plût à Dieu que
« Frigida pugnabant calidis322. »
j'eusse pu la remettre à notre ami Portier ! Il
m'aurait [133] sans doute rapporté la réponse
Sane tandem exceptio locum habebit ; per me au sujet de nos affaires du Chablais. Fallait-il
non stetit.
les poursuivre ou les abandonner ?
Bene vale, mi Frater, Christumque
habeto propitium. Clarissimam sororem, « Le froid luttait contre la chaleur. »
fabrosque nostros et fabritios impensissime
salutatos velim.
Certainement, tôt ou tard, quelque changement
Necii, in ipso profectionis articulo, 16 aura lieu ; la chose n'a pas dépendu de moi.
Maii, 3 Pentecostes die, 95.
Portez-vous bien, mon Frère, et que le
Christ vous soit propice. Je salue avec effusion
Revu sur l'Autographe appartenant à M. ma très illustre sœur et nos grands et petits
l'abbé Chavaz, à Genève, église Notre-Dame. artisans.
[134]
Annecy, au moment même de partir, le
16 mai, troisième jour de Pentecôte 1595.
[134]
_____
322 Ovid., Met., l. I, 19.
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LIII. Au même (Minute inédite). Emotion causée par le malheur
d'un ami commun ; vif désir de défendre sa cause. Eloge de
l'ouvrage du Sénateur. Pénible situation du Saint en Chablais.
Annecy, fin mai 1595.
De Guichardi nostri casu323 cum
primum audivi, attonito similis, oculis mens et
vox faucibus hæsit324, nihilque vel lætum vel
infaustum altius cordi insidere unquam mihi
poterit quam quod [dicis] de tanto amico ; ut
vix tuam ferre possim elegantiam, qua meam
diligentiam tuæ in hac causa vices gerere velis,
cum nec si diligentissimus sim mortalium,
meam erga ipsum clarissimum Guichardum
observantiam et propensionem explere
possim.325 Quamquam et tuam illam
diligentiam quibus quæso modis supplere
poteram ? [135]
Experiri tamen decreveram ecquidnam
possit ex me vel ingenii vel solicitudinis
elicere extremus conatus, nullum unquam a
meipso pensum industriæ majus accuratiusque
expressurus. Nulla par me, fœlicius dicamne
an infœlicius, ex clerico aulicum fecisset
occasio. Scio namque primum te esse
Guichardum, et ordine naturæ, quod aiunt, et
temporis, me vero secundum ; qui si ordinem
affectionis spectes, neque primus sim neque
secundus, ne forte vel numero simus diversi.
Gratias autem Deo omnipotenti quantas
possum ago maximas326, quod amicitiæ nostræ
vires hisce conatibus experiri nos non sit
passus qui327 ex amici communis miseria
prodire debuerant. Sic enim animi quietem hac
in causa tuo nomine indixit idem qui tuas
attulit, hesterna die328, urbis hujus præsbiter.
Quamquam vix mihi temperare possim
omnino nisi quidnam paulo pressius rem
intelligam. [136]
Montroterio vero, viro nobilissimo et
tui amantissimo, [injuriam faciam] si quid in
hanc rem verborum, quando rerum non potuit,
Lorsque j'ai appris l'accident de notre
Guichard j'ai été comme un homme frappé de
la foudre, ma langue est restée sans paroles et
mes yeux fixes. Aucune nouvelle triste ou
joyeuse n'a jamais pu m'impressionner à l'égal
de celle que vous me donnez d'un si grand ami.
Je comprends donc à peine l'estime que vous
faites de moi, lorsque vous voulez substituer
mon zèle au vôtre en cette affaire. Mais serais-
je le plus diligent des mortels, que je ne
pourrais témoigner tout ce que je porte de
respect et d'affection à ce très illustre
Guichard. Et d'ailleurs, comment, je vous prie,
suppléer à un zèle tel que le vôtre ? [135]
J'avais résolu cependant de tenter ce
qu'un suprême effort de mes aptitudes et de
mon dévouement pouvait tirer de moi. Jamais
tâche plus haute ni plus délicate ne s'offrirait à
mon activité ; aucune occasion comparable ne
pourrait faire, dirai-je plus heureusement ou
plus malheureusement, d'un clerc que je suis
un courtisan. Je sais, en effet, que le premier à
qui il appartient de venir en aide à Guichard,
c'est vous, et par ordre de nature, comme on
dit, et par ordre d'ancienneté ; moi, je ne suis
que le second ; mais au point de vue de
l'affection, que je ne sois, je vous prie, ni le
premier ni le second, et que rien n'altère l'unité
qui existe entre vous et moi. Je rends les plus
vives actions de grâces au Dieu tout-puissant
qui n'a pas permis que notre amitié mesurât ses
forces à des efforts suscités par le malheur d'un
ami commun. C'est ainsi que le prêtre de cette
ville qui m'apporta hier votre lettre, me
tranquillisa l'esprit de votre part touchant cette
affaire. Toutefois, je ne puis me calmer
entièrement avant d'avoir compris d'une
323 casu [tam alte sum corde...]
324 Une lettre du sénateur Favre, en date du 20 juin, prouve que les deux correspondants s'étaient exagéré la gravité de
l'accident arrivé à leur ami commun. Celui-ci, il est vrai, avait été dévalisé par les voleurs, mais il avait pu s'échapper
sain et sauf de leurs mains, n'ayant à déplorer que des pertes matérielles peu considérables.
325 explere possim. [Nulla me alia occasio aulicum reddere potuisset accuratum quam...]
326 plurimas
327 qui [ non sine amici jactura prodire...]
328 hesterna die, [vicarius Neciensis urbis...]
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et quam enixe contulerit, non referam ; vel si
tam elegantem et mellitissimam personam
referre velim, injuriam insignem, ni fallor,
fecero, et tu facilius apud te cogitaveris quam
ego memoria repetam.
Cæterum ita est ut scribis, mi Frater :
ad priores illas tuas respondisse me, quibus
opus tuum illud poeticum329 neque probandum
neque improbandum sumpseram330. Nec enim
sigillatim adhuc singula inspexeram, et nostra
laus deinceps, non minus quam mea, si quæ
mihi foret propria, in ore meo, verecundiam
movet. Amo, ut uno dicam verbo, modestiam.
Quid autem alii sentiant, id est. Mirantur
leporem verborum, rerum copiam
dignitatemque ; et tam egregium, nobile et
fabrefactum opus obscuro meo nomine
sordescere propemodum dicebant nisi fratrem
me tuum appellasses.
Dicam præterea libenter, in tua ad me
epistola, ut [137] venustate mirifice recreor, sic
candorem desidero. Quis enim nesciat talia
qualia sunt quæ scribis ex paupercula officina
mea non prodire, tamque grandes materias
ingenia parva sustinere non posse ? Et quidem
si nonnulla quæ tu procul dubio prius noveras,
ego vel prius dixi vel ad memoriam revocavi,
esto mea dicas ; sed tabulæ sunt rasæ et
informes quas tam accuratæ picturæ cedere
necesse est. Tu vero pro parte totam materiam
dixisti, et ut omnibus numeris amoris amica
hiperboles constaret, formam etiam meam esse
propemodum asseveras. Vel meum ergo
tuumque pœnitus inter nos non audiatur, vel
candidius tunc proferatur cum me tuum teque
meum dicere volueris.
Expectabasne pro tanto munere tam
gravem expostulationem ? Vetus tamen mos
est debitorum, cum non sunt solvendo, hac uti
solemni diversionis arte. Ego vero iterum et
iterum inter vernantes aves opus suavissimum
ad amussim apud Salesios nostros
contemplatus, ne tu hoc nescias, pulchrius
nusquam carmen cantatum fuisse [138] reor
quam quo Alexandri Magni lachrimas tam
belle et luculenter urges331 ut nullus
manière plus précise ce dont il s'agit. [136]
Je ferai injure à ce très noble M. de
Montrottier, qui vous est des plus attachés, si
je ne vous dis combien il a dépensé d'énergie
pour soutenir cette cause par son éloquence
lorsqu'il ne pouvait le faire par l'action. Ou
plutôt, si je ne me trompe, ce serait déjà une
grande injure que de vouloir rendre la grâce, la
douceur toute de miel de ce plaidoyer ; vous
vous le représenterez mieux par la pensée que
je ne pourrais vous le redire de mémoire.
Oui, comme vous l'écrivez d'ailleurs,
mon Frère, il est vrai que j'ai répondu à votre
précédente lettre sans entreprendre de louer ni
de blâmer votre œuvre poétique, car je n'en
avais pas encore examiné chaque partie
isolément. Du reste, notre louange, la mienne
surtout, si j'en mérite quelque peu, est
malséante dans ma propre bouche. Pour le dire
en un mot, j'aime la modestie. Mais quelle est
l'opinion du public ? La voici : on admire le
charme du style, la richesse et l'élévation des
pensées ; on semblait même dire que si vous ne
m'eussiez appelé votre frère, l'obscurité de
mon nom aurait rabaissé un ouvrage si
excellent et fait de main de maître.
J'avouerai volontiers encore qu'autant
la dédicace que vous m'en [137] faites m'a
merveilleusement charmé par sa grâce, autant
elle laisse à désirer pour la franchise. Qui ne
sait, en effet, que des écrits tels que les vôtres
ne sortent pas de mon pauvre atelier et que de
petits esprits ne peuvent traiter de si grands
sujets ? Et en vérité, si j'ai énoncé le premier
ou rappelé à votre mémoire quelques idées que
sans doute vous connaissiez déjà, soit,
attribuez-le moi ; mais ce ne sont là que des
tables rases et brutes qui doivent disparaître
sous une peinture si achevée. Vous, au
contraire, vous nommez fond ce qui n'est que
partie, et, pour que l'hyperbole amicale
corresponde en tout point à votre affection,
vous semblez affirmer que la façon même est
de moi. Eh bien ! qu'on n'entende plus entre
nous ces mots mien et vôtre, ou qu'ils ne se
profèrent en toute vérité que lorsque vous
voudrez me dire vôtre, ou vous dire mien.
Vous attendiez-vous, pour un si beau
329 Vide supra, p. 133.
330 existimabam
331 Sonnet LII 1.
1 Voir Plutarque, De Tranquill. Animi, cap. IV. Cf. tome IX de la présente Edition, p. 320.
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« Talia fando temperet a lachrimis332 333. » présent, à un si grave réquisitoire ? Mais c'est
la vieille coutume des débiteurs insolvables de
334Propero jam, mi Frater, Tononum recourir à cette adresse ordinaire de la
versus, te propemodum solo, quod satis est, diversion. Pour moi, étant chez nos parents de
probante ; sicque sum animatus ut335 sequentes Sales, au milieu des oiseaux qui chantent le
post menses quatuor, expleto nimirum anno, printemps, j'ai admiré et admiré encore dans
nisi suas quisque partes hoc in negotio fideliter tous ses détails ce très suave poème, et il ne
obeat, nullis me deinceps aliis retineri in faut pas que vous ignoriez ceci : je ne crois pas
officio verbis quam tuis patiar. Dicam planius. [138] qu'on ait jamais chanté plus belle ode que
Nos in ea provincia credunt versari præter celle où, avec autant d'esprit que d'élégance,
Principis voluntatem omnes fere, quin et vous rappelez les larmes d'Alexandre le Grand,
contra plerique, nec abs re. Magno namque est au point
argumento silentium ubi vel levissimum
sufficeret verbum, et homines videre, inter « Qu'à tel récit nul ne retient ses pleurs. »
media Ecclesiæ prædia, sub principe
Catholico, præcario propemodum et in dies
Je me dispose, mon Frère, à regagner
[139] vivere. Nolim tamen alii hæc cuiquam Thonon. Vous êtes à peu près le seul qui
dicas, nam, ut vides, suum possunt habere m'approuviez, mais c'est assez, et voici ma
periculosum sensum.336
résolution : dans quatre mois, c'est-à-dire mon
Si quid de Possevino audies, doceas année achevée, si chacun ne remplit pas
quæso. Bene vale, et humillimum fratrem, fidèlement son devoir en cette affaire, je ne
quod facis, ama ; nostrisque omnibus salutem, souffrirai plus qu'aucun autre que vous me
meo si placet nomine, dicas, seorsim retienne dans cette charge. Parlons plus
clarissimæ sorori meæ, quæ mihi non aliter… ouvertement. On croit communément que nous
travaillons dans cette province en dehors du
Revu sur l'Autographe conservé à la
prince ; bon nombre même disent, non sans
Visitation de Voiron.
raison, contre sa volonté. Quand le moindre
mot suffirait, son silence est en effet un grand
argument. C'en est un aussi de voir des
hommes au milieu des domaines de l'Eglise,
sous un prince catholique, vivre d'une vie
précaire et pour ainsi dire au jour le jour. [139]
Je ne voudrais cependant pas que vous en
parlassiez à personne, car, vous le voyez, ces
propos pourraient être mal interprétés.
Si vous apprenez quelque chose de
Possevin, dites-le-moi. Portez-vous bien ;
aimez, comme vous le faites, votre très humble
frère, et s'il vous plaît, saluez en mon nom tous
les nôtres, en particulier ma très illustre sœur
qui ne m'est pas autrement
_____
332 a lachrimis [albo notandum capillo duxi...]
333 Æneis, l. II, 6, 8.
334 Bien que l'Autographe ne forme certainement qu'un seul tout, il paraîtrait, d'après une réponse du sénateur Favre,
en date du 19 juin 1595, que le Saint aurait puisé dans cette minute les éléments de deux lettres distinctes, dont la
seconde commencerait avec cette phrase : « Propero jam, » etc.
335 ut [si, appetente hieme, quatuor menses... quibus expletis...]
336 periculosum sensum. [Mihi tamen ipsi plurimum quod te volente redibo ad opus.]
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11.7 Page 107

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LIV. Au Bienheureux Pierre Canisius de la Compagnie de
Jésus337. Vénération qu'inspire sa vertu. Désir d'entrer en
relations avec lui. Nouvelles de la mission ; conversion de
Pierre Poncet. Question de controverse.
Thonon, 21 juillet 1595.
Virtutis is est splendor, quod tu
omnium minime ignoras, Pater
observandissime, nullis ut locorum intervallis
[140] impediri possit quominus et videatur
ipsa, et eos a quibus possidetur suo lumine
reddat omnibus qui vel virtutis nomen tantum
honorant conspicuos et amabiles. Quo minus
excusatione indigere nunc me reor quod,
ignotus et obscurus homuncio, litteras ad te
dare non verear. Non enim tu ignotus es
vicissim aut obscurus, qui tot recte (ut
modestissime dicam) factis, dictis, scriptis pro
Christo universis Christi fidelibus innotuisti, ut
mirandum non sit eum qui omnibus toties
scripsit Christianis, a multis hoc solum nomine
quod Christiani sint, litteras item accipiat.
Cum ergo non longo multum
intervallo, et solo fere quod aiunt Lemano lacu
a te cognovissem me abesse, rem quidem tibi
non ingratam, mihi vero in posterum [141]
longe utilissimam facturum existimaverim si
qui præsens nequeo, absens per litteras,
commodum aliquando de rebus et
dubitationibus theologicis interrogarem, et
docentem te per litteras item interdum
audirem. Scriptum est enim338 : Interroga
generationem pristinam et diligenter investiga
patrum memoriam, et ipsi docebunt te ;
loquentur tibi, et de corde suo proferent
eloquia.
En igitur nonum jam ago mensem inter
Tel est l'éclat de la vertu, vous le savez
mieux que personne, très vénéré Père,
qu'aucune distance ne peut l'empêcher d'être
aperçue [140] et, par sa lumière, d'illustrer
ceux qui la possèdent et les rendre aimables à
quiconque honore au moins le nom de la vertu.
C'est pourquoi je ne pense pas avoir besoin
d'excuse quand j'ose vous écrire, moi, homme
de rien, inconnu et obscur ; car vous n'êtes pas
également un homme inconnu et obscur, vous
qui vous êtes signalé auprès de tous les fidèles
du Christ par tant de choses (j'emploie le terme
le plus modéré) si bien faites, dites et écrites
pour le Christ. Il n'est pas étonnant que celui
qui a écrit si souvent à tous les Chrétiens
reçoive aussi des lettres de plusieurs, pour cela
seul qu'ils sont Chrétiens.
Ayant donc su que je n'étais pas à une
grande distance de vous, et que nous n'étions
séparés, pour ainsi dire, que par le seul lac
Léman, j'ai pensé ne point vous être
désagréable et m'être extrêmement utile [141]
à moi-même, si, ne pouvant m'entretenir avec
vous, je vous adressais par lettres, à l'occasion,
des questions sur les matières théologiques et
sur les difficultés qu'elles présentent, afin de
recevoir aussi par lettres vos instructions. Il est
écrit en effet : Interroge l'ancienne génération,
recueille avec soin les souvenirs de nos pères,
et ils t'enseigneront ; ils te parleront et te
feront entendre le langage de leur cœur.
337 Pierre Canisius, né à Nimègue en Hollande (3 mai 1521), fit ses études à Cologne et à Louvain. Il entra dans la
Compagnie de Jésus le 8 mai 1543, à Mayence, et prononça ses quatre vœux le 4 septembre 1549, à Rome. Théologien
profond et controversiste distingué, il parut avec éclat au Concile de Trente, fonda un collège de la Compagnie à
Vienne en Autriche, alors qu'il était prédicateur de l'empereur Ferdinand Ier. Sur le désir de ce prince, il composa sa
Summa Doctrinæ Christianæ per quæstiones tradita, qui, publiée en 1555, avait déjà atteint, en 1597, la deux centième
édition. Cet abrégé fut rédigé « avec tant d'exactitude, de clarté et de précision, qu'il n'en existe pas de plus propre à
instruire et à confirmer les peuples dans la foi catholique. » (Bref de Béatification.) Canisius, qui avait été le premier
Provincial de son Ordre en Allemagne, fut nommé Nonce apostolique par Pie IV dans le même pays, assista à la diète
d'Augsbourg (1566), travailla à la fondation du Collège Germanique à Rome, et mit le comble à ses travaux par la
fondation du collège de Fribourg en Suisse (1580). C'est là qu'il termina sa laborieuse carrière le 21 décembre 1597.
Cet illustre Jésuite a été béatifié par Pie IX le 2 août 1864. On lui doit, outre son Catéchisme, plusieurs ouvrages très
appréciés.
338 Job, VIII, 8, 10.
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11.8 Page 108

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hæreticos, et in tanta messe octo tantum spicas
in arcam Dominicam inferre potui ; summo
Dei beneficio, quippe qui non tam sim
operarius quam operariorum prodromus. In iis
Petrus Poncetus, jurisconsultus eruditus sane,
et quod ad hæresim spectat etiam Calviniano
ministro loci longe doctior. Quem cum
antiquitatis authoritate non nihil moveri
viderem inter familiaria colloquia, porrexi
tuum illud Opus Cathechisticum, cum
sententiis Patrum a Busæo fuse descriptis339 ;
cujus lectione abduci se ab [142] errore in
tritam veteris Ecclesiæ viam passus est, ac
manus tandem dedit ; quo etiam tibi nomine
plurimum plurimum uterque debemus.
Cum vero nuper pro libero hominis
arbitrio illud urgerem Genes., 4 340: Sub te erit
appetitus ejus, et tu dominaberis illius, objecit
ex Calvino341 voces (ejus et illius) referri ad
Abelem, nimirum ut dicatur dominaberis
fratris, non peccati. Rationemque reddebat
eorum, Calvino authore, quod relativa illa apud
Hebræos sint masculina, vocem autem
Hæbraicam qua peccatum exprimitur esse
fœmininam. Huic nimirum rationi refellendæ,
etiam adhibita Bellarmini opera342, satis esse
non potui, libris autem in id necessariis hic
careo, quod paucos tantum de controverses
hujus sæculi, ut fit, mecum attulerim. Hujus
ergo phrasis Hæbraicæ interpretationem, a
peritissimo nimirum et humanissimo doctore,
rudis et incultus tirunculus postulo, et tua in
proximos omnes adjuvandos propensione
fretus expecto. [143]
Quodque reliquum est, Deus optimus
maximus venerandam tuam canitiem quam
diutissime reipublicæ Christianæ servet
incolumem ; at tu me, quod e vestra Societate
jampridem fecit Antonius Possevinus, in
humillimum, quæso, et addictissimum servum
habeto et filium in Christo.
Humillimus servus
FRANCISCUS DE SALES,
Ecclesiæ Cathedralis Sti Petri Gebennen.
Or, voici le neuvième mois que je suis
au milieu des hérétiques, et si vaste que soit la
moisson, je n'ai pu renfermer que huit épis
dans le coffre du Seigneur ; encore est-ce un
grand bienfait de Dieu en faveur d'un homme
qui est moins un ouvrier qu'un avant-coureur
d'ouvriers. Au nombre de ces convertis se
trouve un certain Pierre Poncet, jurisconsulte
très érudit et, pour ce qui concerne l'hérésie,
beaucoup plus savant que le ministre calviniste
du lieu. Voyant dans des entretiens familiers,
que le témoignage de l'antiquité faisait
impression sur lui, je lui prêtai votre
Catéchisme qui contient les enseignements des
Pères rapportés au long par Busée. Cette
lecture le tira de [142] l'erreur et le ramena
dans la voie frayée qui conduit à l'Eglise. Enfin
il s'est rendu, ce dont nous vous sommes l'un et
l'autre très, redevables.
Comme dernièrement j'appliquais au
libre arbitre de l'homme ce passage de la
Genèse : Ton appétit sera sous ta puissance et
tu le domineras, Poncet objecta, d'après
Calvin, que les mots ejus et illius se rapportent
à Abel, en sorte qu'on doit interpréter : tu
domineras ton frère, et non le péché. Il en
donnait cette raison, empruntée à Calvin, qu'en
hébreu ces deux pronoms sont du masculin,
tandis que le mot hébraïque qui désigne le
péché est du féminin. Or, je ne pouvais
suffisamment réfuter cette objection, même
avec le secours des œuvres de Bellarmin ; les
livres nécessaires pour cela me manquent ici,
car il est arrivé que je n'en ai apporté avec moi
qu'un petit nombre traitant des controverses de
notre temps. Je m'adresse donc à vous, qui êtes
un docteur très habile et très obligeant, et je
vous demande, moi pauvre débutant sans
aucune science ni expérience, l'interprétation
de cette phrase hébraïque ; je l'attends de
l'inclination que vous avez d'aider tout le
monde. [143]
Il me reste à souhaiter que notre bon et
grand Dieu conserve longuement à la
339 Pierre Busée (1540-1587), Jésuite, concitoyen et parent du B. Pierre Canisius, professeur d'Ecriture Sainte et
d'hébreu au collège de Vienne en Autriche.
Opus Catechisticum, sive de Summa Doctrinæ Christianæ D. Petri Canisii, Scripturæ testimoniis
sanctorumque Patrum sententiis illustration, opera D. Petri Busæi, Noviomagi. Coloniæ, Gervinus Calenius, 1569,
1570.
340 Vers. 7.
341 Comm. in Gen., ad locum.
342 Disputationes Roberti Bellarmini Politiani, de Controversiis Christianæ fidei. Editio secunda, Ingolstadii,
Sartorius, 1588-1593.
108/318

11.9 Page 109

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Præpositus indignus.
Tononi, 12 calend. Augusti, anno
millesimo quingentesimo nonagesimo quinto.
Observandissimo et plurimum Reverendo in
Christo Patri,
Patri Petro Canisio,
Societatis Jesu Theologo meritissimo.
Friburgi.
Revu sur le texte inséré dans le Ier Procès de
Canonisation. [144]
république chrétienne votre vénérable
vieillesse exempte d'infirmités. Veuillez vous-
même me tenir, comme l'a fait depuis
longtemps Antoine Possevin, de votre Société,
pour votre très humble et très dévoué serviteur
et fils en Jésus-Christ.
Votre très humble serviteur,
FRANÇOIS DE SALES,
indigne Prévôt de l'église cathédrale de
Saint-Pierre de Genève. Thonon, le 21 juillet
1595.
Au très vénéré et très Révérend Père en Jésus-
Christ,
Le Père Pierre Canisius, très digne théologien
de la Société de Jésus.
A Fribourg. [144]
109/318

11.10 Page 110

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Minute de la lettre précédente
343Virtutis quidem ea est præstantia, Pater observandissime, ut quod tu omnium minime
ignoras, nullis terrarum aut locorum intervallis impediri possit, quomimis et videatur et eos a
quibus possidetur iis etiam reddat ronspicuos et amabiles qui344, quamvis quid ipsa sit virtus
ignorent, virtutis tamen nomen honorant. Quo minus excusatione nunc indigere me reor quod,
ignotus et obscurus homuncio,345 litteras ad te dare non verear. Non enim tu vicissim ignotus es
aut obscurus, sed tot rebus bene (ut modestissime loquar) hactenus pro Christo gestis, dictis,
scriptis, universis Christi fidelibus innotuisti, ut mirandum non sit eum qui universis toties scripsit
Christianis, a multis hoc solum nomine quod Christiani sint, epistolas item accipiat.346
Cum ergo non longo admodum intervallo, et solo propemodum quod aiunt Lemanno lacu
a te me abesse cognovissem, rem tibi quidem non ingratam, mihi vero in posterum longe
utilissimam facturum existimavi, si qui præsens nequeo, familiarius per litteras absens
interrogarem, et docentem te per litteras item interdum audirem, pro tua in proximos charitate. Sic
enim scriptum est347 : Interroga generationem pristinam et diligenter investiga patrum memoriam,
et ipsi docebunt te ; loquentur tibi, et de corde suo proferent eloquia.
348En igitur nonus agitur hic mensis quo sum inter hæreticos hos Tononienses, jussu Rmi
Antistitis Gebenensis, [145] ut quando nulla vi ad caulas Ecclesiæ eos reduci vult Serenissimus
Allobrogum Princeps, pro pacto cum Bernensibus eam in sententiam facto, videam etiam atque
etiam num iis ad Christum convertendis verbo et colloquiis sit aliquis locus. Quem ubi nactus
fuero, immittet in messem hanc idoneos plerosque, tum alios quidem, tum etiam ex vestra
Societate, operarios349. Hæc vero rem omnino in multos hos dies protrahunt. Princeps cujus tamen
authoritate res incæpta350, quod aliis rebus sit impeditus, nullam huic rei dat operam. Inter rumores
bellicos metuunt incolæ ne si iterum Bernensium aut Gebenensium in nos explicentur arma, et non
modo ad Ecclesiam redeat aliquis (quod se nunquam facturos pollicentur omnes), sed tantum aures
Catholicis theologis dederit, is pessime et crudelissime excipiatur.
Non commisi tamen quin, pro mea tenuitate, concionem singulis Dominicis diebus bis
saltem haberem et quidem in templo publice, quo veluti prodromus aliis opere et [146] verbo
potentioribus351 viam aperirem. Pauci tantum qui supersunt Catholici ea re recreati [sunt] ;
hæreticorum nullus propemodum accessit unquam, nisi videndi me potius (est enim genus
343 [Miraberis forsitan...] Hæsi aliquantulum dubius animo, consentaneumne esset modestiæ legibus si litteras ad te,
ignotus et obscurus homuncio...
344 qui [vel ipsi a virtute possidentur, vel virtutis desiderio teneantur...]
345 obscurus homuncio, [hisce litteris tuam humanitatem...]
346 accipiat. [Accedit quod peculiare jus mihi scribendi fuit...]
347 Job, VIII, 8, 10.
348 Voici donc le neuvième mois que je suis au milieu de ces hérétiques de Thonon, par ordre du Révérendissime
Evêque de Genève, pourexaminer et examiner encore s'il y a quelque moyen de les convertir au Christ par prédications
et conférences, puisque le sérénissime prince de Savoie ne veut point qu'on les ramène par la force au bercail de
l'Eglise, à cause du traité conclu à cet effet entre lui et les Bernois. Dès que j'aurai trouvé ce moyen, Dieu enverra dans
cette moisson grand nombre d'ouvriers capables, ou de votre Société ou d'autres encore ; mais ces négociations traînent
en longueur depuis plusieurs jours, et, bien que la mission ait été commencée par l'ordre du prince, il ne s'en occupe
plus, absorbé qu'il est par d'autres affaires. Au milieu des bruits de guerre qui courent, les habitants de ce pays craignent
que, si les armes des Bernois et des Genevois se tournent de nouveau contre nous, il suffise pour être cruellement
maltraité, je ne dis pas seulement d'être revenu à l'Eglise (ce que tous promettent hautement de ne jamais faire), mais
même d'avoir écouté les théologiens catholiques.
Cela ne m'a point empêché de prêcher, aussi bien que me l'a permis mon incapacité, au moins deux fois
chaque Dimanche, et publiquement dans l'église, afin d'ouvrir la voie à des hommes plus puissants que moi en œuvres
et en paroles. Le peu de Catholiques qui restent ici sont les seuls que ces exhortations aient encouragés ; presque aucun
hérétique n'y est encore venu, si ce n'est pour me voir, bien plutôt que pour m'entendre (car cette espèce de gens est
portée à la curiosité). Néanmoins voici que, par la grâce de Dieu, plusieurs âmes, au nombre de huit, se sont soumises
à Jésus-Christ.
349 Matt., IX, ult.
350 Princeps cum absit
351 Cf. Lucæ, ult., 19.
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12 Pages 111-120

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12.1 Page 111

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hominum curiosum) quam audiendi gratia. Dei interim beneficio factum est ut aliquot animæ, octo
nimirum, iis novem mensibus Christo nomen reddiderint. In iis Petrus Poncetus, jurisconsultus
eruditus sane, et quod ad hæresim spectat etiam ministro longe doctior. Quem cum antiquitatis
authoritate nonnihil moveri viderem et saltem torqueri, explicavi Opus tuum illud Cathechisticum,
cum authoritatibus sententiisque Patrum a Busseo descriptis ; cujus lectione sensim ab errore
abduci se in tritam veteris Ecclesiæ viam passus est manusque tandem dedit ; quo etiam tibi nomine
plurimum uterque tibi debemus.
Is autem cum nuper pro libero hominis arbitrio urgerem locum Genes., 4 352: Sub te erit
appetitus ejus, et tu dominaberis illius, objecit referri voces (ejus et illius) ad Abelem ; nimirum,
dominaberis fratris non peccati ; rationemque ex Calvino reddebat quod in Hebreo relativa illa sint
masculina, peccatum vero apud Hebræos fœminina voce exprimatur. Ego vero interpretationem
Catholicam satis confirmavi, sed objectionem clare refellere non potui, quippe qui libris hic
caream necessariis. Advexi namque pauca tantummodo, ut fit, præcipua de hujus seculi
controversiis volumina, inter cætera quidem Belarmini opus illud illustre Controversiarum quem
dum hac in difficultate consulo, non satis loci nodum explicuisse comperio, dum de cohærentia
relativi fœminini ad nomen masculinum nihil agit. Quare cum bonum hunc virum et ex auditoribus
meis Catholicum ad vos [147] discedentem moxque rediturum cognovissem, hujus a te quæstionis
solutionem, a peritissimo nimirum magistro et humanissimo doctore, rudis tirunculus petere
constitui, tua in proximos omnes juvandos fretus propensione.
Quod reliquum est, Deus optimus maximus venerandam canitiem tuam quamdiutissime
reipublicæ Christianæ servet incolumem, et tu me, quod e vestra Societate Antonius Possevinus
jam pridem fecit, in humillimum habeto servum in Christo et filium.
Francis...
Revu sur l'Autographe conservé à la Visitation d'Annecy.
_____
LV. A Monseigneur Jules-César Riccardi, Archevêque de Bari,
Nonce Apostolique a Turin353 (Minute). Violation des immunités
ecclésiastiques ; le Saint sollicite l'intervention du Nonce auprès
du duc de Savoie.
Chambéry, [fin juillet 1595.]
Illustrissimo et Reverendissimo
Illustrissime et Révérendissime
Monsignore,
Monseigneur,
Comminciavano gli ofïiciali de l’
Illustrissimo Duca de Nemours et de
Genevois354 a far recherca de' peccati dell'
usura commessi dalle personne ecclesiastiche
nella [148] diocæsi de Geneva, et anco della
contraventione fatta di un editto annuale di Sua
Les officiers de l'illustrissime duc de
Nemours et de Genevois commençaient à faire
la recherche des délits d'usure commis par
[148] les ecclésiastiques dans le diocèse de
Genève, et même de la contravention faite à un
édit annuel de Son Altesse Sérénissime
352 Vers. 7.
353 Jules-César Riccardi, de la noble famille des marquis de Ripa, d'abord chanoine de Naples, avait été créé
Archevêque de Bari le 13 octobre 1592, et envoyé quelques années plus tard (mai 1595) en qualité de nonce
apostolique à la cour de Turin, où il demeura jusqu'en 1601. Ce Prélat s'acquit une grande considération auprès du duc
de Savoie, du roi de France et surtout du Pape, qui lui offrit la nonciature de Vienne. Il refusa cet honneur et revint
terminer ses jours à Naples, le 15 février 1602, à l'âge de cinquante ans.
354 Voir ci-devant, note (100), p. 32.
111/318

12.2 Page 112

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Altezza Serenissima, qual prohibiva la vendita
de' frumenti et altri grani fuor del mercato ;
credendo essi ufficiali laici potere castigare
indifferentemente per cotesti peccati et laici et
ecclesiastici, et questo per privilegio speciale
di Sua Santità, concesso a' serenissimi
prædecessori di Sua Altezza. Monsignor Rmo
Vescovo de Geneva, vedendo esser contra
l'una et l'altra ragione et contra la libertà
ecclesiastica questo privilegio, m' ha mandato
qui in Chiambery dal supremo Senato di Sua
Altezza, acciò che se ce ne fosse lo potessi
veder, per poi darne avviso a V. S. Illma et Rma.
Il Senato adunque no retrovando nell' archivi
ducali alcun simile privilegio, et sapendo che
in simile caso fa poco Sua Altezza haveva
prohibito a' suoi ministri di por mano sopra
l'Archa di Dio355, anzi haveva commandato
che lasciassero questo negotio a' prælati, ha
scritto anchora sopra di ciò a Sua Altezza per
saperne generalmente sua volontà.
D'il che ho giudicato dover dar avviso
prontamente a V. S. Illma et Rma, acciò si degni
pigliar il fatto in [149] mano appresso di Sua
Altezza, comm' essendo il refugio nostro et
protettrice della libertà ecclesiastica. Nè sarà
cosa difficile che Sua Altezza prohibisca di
nuovo tali atti a' ministri suoi et inferiori,
poichè già una volta ne ha fatta la prohibitione
et che ha havuto sempre in gran reverenza la
santa Chiesa. L'Illustrissimo, poi, Duca de
Nemours, non solo non darà impedimento
nessuno, chè più tosto ci giovarà in ogni modo,
essendo di coscienza delicatissima et persona
molto timorata; conciosiachè egli m'ha detto
che se non si trovarà il privilegio della
Santissima Sede Apostolica chiarissimo et
apertissimo, non ne vuol godere, nè
prevalersene.
Ho dubbio che Monsigr Vescovo di
Geneva havendo avviso di quanto habbiam
fatto qui col Senato, scriverà sopra di ciò
amplissimamente a V. S. Illma et Rma 356; nè per
questo ho volsuto lasciar di scriverne io, acciò
no dia risposta Sua Altezza al suo Senato
innanzi che lo sappia V. S. Illma, a cui pregando
dal nostro Signore [150] Iddio ogni vero
contento, basciogli humilissimamente le
défendant la vente des blés et autres grains hors
du marché. Ces officiers laïques croyaient
pouvoir châtier indifféremment pour ces délits
aussi bien les ecclésiastiques que les laïques, et
cela en vertu d'un privilège spécial accordé par
Sa Sainteté aux sérénissimes prédécesseurs de
Son Altesse. Mgr l'Evêque de Genève, voyant
que ce privilège serait contre l'un et l'autre
droit et contre la liberté ecclésiastique, m'a
envoyé ici à Chambéry auprès du souverain
Sénat de Son Altesse afin que, si ce privilège
existait, je pusse le voir, pour en avertir ensuite
Votre Seigneurie. Or, le Sénat ne trouve aucun
semblable privilège dans les archives ducales,
et sachant que depuis peu en pareil cas Son
Altesse avait interdit à ses ministres de porter
la main sur l'Arche du Seigneur, et que même
elle avait ordonné qu'on laissât cette affaire
aux prélats, il a écrit encore sur ce sujet à Son
Altesse pour connaître d'une manière générale
sa volonté.
J'ai jugé à propos de donner
promptement connaissance de cela à Votre
Seigneurie Illustrissime et Révérendissime
afin qu'elle daigne [149] prendre le fait en main
auprès de Son Altesse, puisque vous êtes notre
refuge et le protecteur de la liberté
ecclésiastique. Il ne sera pas difficile à Son
Altesse d'interdire de nouveau de tels actes à
ses ministres et subordonnés, puisqu'une fois
déjà elle les a défendus et qu'elle a toujours
porté un grand respect à la sainte Eglise. Quant
à l'illustrissime duc de Nemours, il n'y mettra
aucun empêchement ; au contraire, il nous
aidera de toute manière, car il est fort timoré et
doué d'une grande délicatesse de conscience ;
il m'a même dit que si le privilège du Saint-
Siège Apostolique ne se trouve pas très clair et
très positif, il n'en veut point jouir ni s'en
prévaloir.
Je présume que Mgr l'Evêque de
Genève étant averti de ce que nous avons fait
ici auprès du Sénat, écrira très amplement sur
cela à Votre Seigneurie. Néanmoins je n'ai pas
voulu laisser de vous en écrire, afin que Son
Altesse ne donnât pas une réponse à son Sénat
avant que Votre Seigneurie Illustrissime en fût
informée. En [150] implorant pour vous de
355 Cf. II Reg., VI, 6.
356 Mgr de Granier donna effectivement suite à cette affaire, ainsi que le prouvent une lettre du Nonce au Cardinal
Aldobrandino, en date du 9 octobre, et une autre de l'Evêque de Genève lui-même, du 16 octobre 1595. (Archives du
Vatican, Nunz. di Savoia, vol. 32.)
112/318

12.3 Page 113

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reverendissime mani et resto,
Dieu notre Seigneur tout contentement, je
Di Sua Signoria Illma et Rma, baise humblement vos mains vénérées et je
Divotissimo et infimo servitore demeure,
FRANCESCO DE SALES,
De Votre Seigneurie Illustrissime et
Prevosto indegnissimo della
Révérendissime,
Cathedrale de Geneva.
Le très dévoué et petit serviteur
FRANÇOIS DE SALES,
Revu sur une copie déclarée authentique,
très indigne Prévôt de la cathédrale de
conservée à Turin, Archives de l'Etat.
Genève.
_____
LVI. Au Chanoine Gallois de Monthoux357 (Inédite).
Recommandation en faveur de l'abbé de Ronis.
Annecy, 31 juillet 1595.
Monsieur mon Cosin,
Je voudrois bien vous salluer avec autre occasion que cellecy, mays les occasions ne sont
pas en nostre pouvoir ; elles viennent, nous ne les allons pas querir.
Monsieur de Ronis m'est venu voir ce matin et m'a monstré une vostre lettre par laquelle il
semble que [151] vous aves desplaysir de le voir poursuyvre le droict que son neveu a sur la cure
d'Argonnay. Et par ce que d'un costé il desire infiniment ne faire chose qui vous despleut, et de
l'autre il est obligé au proufit de son neveu, tant qu'il se peut maintenir avec rayson, il m'a prié
d'employer mon credit vers vous affin qu'il vous playse ne vous desplaire point s'il met a effect le
droit de son neveu, quil a desja acheminé si avant et avec tant de frais quil demeureroit en grosse
perte sil le quittoit ainsy tout court, sinon que sa partie voulut entendre a ce que Monseigneur le
Reverendissime et monsieur d'Angeville358 en avoyent une fois ordonné a l'amiable. L'obligation
que j'ay a monsieur de Ronis et a Monseigneur le Reverendissime, chez qui son neveu sert, m'a
faict aysement vous prier, comme je fays, que sil ny a point d'autre interest pour vous que pour
l'affection que vous pourries avoir a celuy qui est leur competiteur, il vous playse leur permettre
la poursuitte de leur prætention ; quilz vous rendront autant de service que l'autre.
Pour moy, je n'employe point autre merite vers vous pour estre continué en vostre bonne
grace, que lhonneur que j'ay de ma nature d'estre a jamays,
Monsieur,
Vostre plus humble cosin et serviteur
FRANÇOIS DE SALES.
A Necy, le dernier julliet 95, ou je bayse bien humblement les mains de monsieur et
madame de Monthou, mes cosin et cosine359.
357 C'est d'après la teneur de cette lettre, y compris le post-scriptum, que l'adresse en est conjecturée. Tout en effet
porte à croire qu'elle a été écrite à Gallois de Monthoux, qui résigna sa cure d'Argonnex vers la même époque. Le
chanoine François de Ronis sollicita ce bénéfice pour son neveu, Jean de Ronis, jeune diacre attaché à la maison de
Mgr de Granier. De son côté, Etienne Martinod fit des poursuites afin d'en être nommé titulaire. La sentence définitive
lui donna gain de cause. (Registres de l'Evêché de Genève.)
358 Claude d'Angeville, chanoine de Saint-Pierre de Genève, primicier de La Roche (1568), vicaire général et officiai
(1579-1591), plébain de Thônes (6 octobre 1587), doyen de Vuillonex (14 mars 1590), prieur de Douvaine (6
décembre 1595), était à cette époque l'un des hommes les plus remarquables de la Savoie. Sa piété, sa prudence et son
savoir lui méritèrent l'estime et la confiance de son prince qui le chargea (1598) de seconder saint François de Sales
dans la réorganisation des paroisses du Chablais. Le primicier d'Angeville mourut en 1627, âgé de quatre-vingt-neuf
ans, après avoir été cinquante-neuf ans à la tête de sa collégiale.
359 La famille de Monthoux était si nombreuse à cette époque qu'il est difficile d'indiquer auxquels de ses membres il
est fait ici allusion.
113/318

12.4 Page 114

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Revu sur l'Autographe appartenant à M. le baron Ludovic de Viry, au château de Cohendier
(Haute-Savoie). [152]
_____
LVII. Au sénateur Antoine Favre (Minute)360. Souffrances du
saint Apôtre ; il désire s'adjoindre d'autres missionnaires.
Remerciements pour un ouvrage de Sponde ; calomnies des
hérétiques contre ce personnage et contre Pierre Poncet.
Sentiments de foi et de confiance.
Annecy, 2 août 1595.
Non sum nescius, suavissime Frater,
non mediocriter inter nos hinc inde pariter
molestum esse silentium, ac propterea
excusationem ullam non affero.
Peregrinationibus partim, partim necessariis
cursitationibus insumpsi totum mensem; ac si
quando pedem firmavi, defuit qui litteras
perferendas susciperet.
Onus messis Tononiensis, meis impar
humeris, non nisi te volente, jubente, deponere
constitui; in eam tamen rem alios operarios
iisdemque commeatum dum artibus modisque
omnibus pergo parare, nullum, inter infinitas
hostis generis humani versutias, exitum,
nullum finem facio. Id me non leviter
torquebat, torquet autem [153] maxime, tot
clades capitibus nostris, mi Frater, imminere,
ut interea vix ullus pietatis procurandæ, cum
ipsa maxime sit necessaria, superesse locus
videatur. Animus tamen in meliorem spem,
Christo propitio, attollendus est. Cum
audiveritis bella ac seditiones, nolite terreri361.
Recreor autem plurimum Possevini
nostri de me accurata recordatione362. Accepi
namque et ejus munusculum, ut ais, et Girardi
nostri Spondæum, utrumque te auctore, te meæ
scilicet apud eos observantiæ commendatore.
Ac Spondæus quidem quam opportune cum
sua recenti præfatione venerit, vel ex eo
intelliges quod et Gebennenses et Chablasiani
ministelli nihil quod tanto viro tonderent
habebant quam eum, in pœnam fractæ fidei,
Je n'ignore pas, mon très doux Frère,
que le silence entre nous vous est aussi pénible
qu'à moi ; aussi je ne viens nullement
m'excuser. J'ai passé tout le mois soit en
pèlerinages soit en courses indispensables, et
si je me suis arrêté quelquefois, je n'ai trouvé
personne qui se chargeât de vous porter ma
lettre.
La moisson de Thonon est un fardeau
qui dépasse mes forces, mais j'ai résolu de ne
l'abandonner qu'avec votre agrément, par votre
ordre. Cependant, je continue à préparer par
toutes sortes d'expédients et d'industries de
nouveaux ouvriers pour cette œuvre, et à leur
chercher des moyens de subsistance. Je
n'aperçois nul terme, nulle issue parmi ces
ruses infinies de l'ennemi du genre humain.
[153] J'ai été tourmenté et je le suis encore,
mon Frère, en voyant que parmi tant de
catastrophes qui menacent nos têtes, il nous
reste à peine un moment pour cultiver la
dévotion dont nous aurions un si pressant
besoin. Il faut cependant, comptant sur la
miséricorde de Notre-Seigneur, élever nos
cœurs à de meilleures espérances. Lorsque
vous entendrez parler de guerres et de
séditions, n'en soyez point effrayés.
Je suis extrêmement réjoui du fidèle
souvenir que me conserve notre Possevin. J'ai
reçu en effet son petit présent, comme vous le
dites, et le Sponde envoyé par notre Girard,
double hommage dont je vous suis redevable,
360 Le premier, le troisième alinéa et les trois premières lignes du dernier sont inédits.
361 Voir ci-devant, note (311), p. 129.
362 Lucæ, XXI, 9.
114/318

12.5 Page 115

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amentatum et furiosum in angulo quodam à vous qui avez fait valoir auprès de tous deux
Galliæ delitescere. Quin Gebennenses le respect que je leur ai voué. Quant au Sponde
gloriabantur quemdam de sua schola avec sa nouvelle préface, vous pourrez juger
Demosthenem tanta verborum ac rerum vi par un seul fait combien il est arrivé à propos.
Spondæi rationes oppugnasse, ut susceptam Les prédicants de Genève et du Chablais, ne
religionem [154] primum, mox mentem ipsam sachant comment tondre un personnage si
abjecerit363. Quod ego ne crederem faciebat, important, disaient qu'en punition du serment
tum dicentium authoritas mentiendi, tum quod violé, cet homme, devenu fou furieux, était
recenti et insigni petulantia Poncetum a caché dans quelque coin de la France. Bien
demone crudelissime vexari dicerent iidem, et plus, les Genevois allaient répétant avec
me nocturnis exorcismis abigendo spiritui orgueil qu'un certain Démosthène de leur école
immundo operam secretam navare. Quid enim avait réfuté les arguments de Sponde avec tant
[qui] in tanta vicinitate tam audacter d'éloquence et des raisons si [154] probantes
mentiuntur non audeant de homine tot que l'auteur avait d'abord renoncé à sa religion,
intervallis disjuncto comminisci ?
puis, bientôt après, perdu la raison. Ce qui
Redeo crastina die ad Spartam meam m'empêchait de m'en rapporter à leur
(utinam si non ornandam saltem aliis témoignage, c'était d'une part leur supériorité
præstantioribus conservandam), faciamque dans l'art de mentir, et de l'autre, l'insigne
deinceps ne integro mense inter nos audiatur impudence avec laquelle ces mêmes hommes
silentium. Interim, mi Frater, inter hos patriæ affirmaient dernièrement que Poncet était
nostræ [155] tumultus (dicamne, an tumulos affreusement tourmenté du démon, et que je
?), dum circum circa oculis nostris ingrata passais les nuits à l'exorciser en secret pour
quæque sese offerunt, in patriam illam chasser l'esprit immonde. Quand on calomnie
cœlestem oculos intensissime figamus, si audacieusement ses proches voisins, que
cogitemusque perpetuo Heliam illum n'osera-t-on pas inventer contre un homme qui
Thesbitem non aliter quam per turbinem ad se trouve à une si grande distance ?
cœlum ascendisse364.
Je retourne demain à ma Sparte (si ce
Bene vale, mi Frater, et Christum n'est pour l'embellir, plaise au Ciel que ce soit
habeto propitium et Servatorem.
du moins pour la conserver à de meilleurs
Necii, 4 non. Augusti, 95.
ouvriers), et je ferai en sorte qu'il ne soit plus
question entre nous de ces silences d'un mois
Revu sur le texte inséré dans le Ier Procès de entier. Cependant, mon Frère, parmi ces [155]
Canonisation.
désordres (dirai-je plutôt cette ruine de la
patrie ?), alors que nos yeux ne rencontrent que
des sujets de tristesse, fixons plus
attentivement nos regards sur notre patrie
céleste, et souvenons-nous toujours qu'Hélie le
Thesbite n'est monté au ciel que dans un
tourbillon.
Portez-vous bien, mon Frère, et que le
Christ vous protège et vous conserve !
Annecy, le 2 août 1595.
_____
363 Jean de Sponde (1559-1595), frère aîné de Henri, Evêque de Pamiers, né à Mauléon d'une famille calviniste, mort
à Bordeaux, fut successivement lieutenant général de la chaussée de La Rochelle, puis maître des requêtes. Après
avoir abjuré le protestantisme, il rendit compte de sa conversion dans un ouvrage intitulé : Declaration des principaux
motifs qui ont induit le sieur de Sponde, conseiller et maistre des Requestes du Roy, à s'unir à l'Eglise Catholique,
Apostolique et Romaine, adressée à ceux qui se sont separez et distinguée en trois Parties. Melun, 1593.
C'est de la cinquième édition (Lyon, 1595) qu'il s'agit ici. On lit dans la préface de cette édition, qui parut
après la mort de l'auteur, la déclaration suivante : « Et quelque fresle de corps et d'esprit que je sois, jusques à present
la melancolie que quelques uns me reprochent entre leurs dents, ne m'a jamais tant gaigné le cerveau qu'on luy en aye
veu produire des frenesies. » (Voir la Defense de l'Estendart de la sainte Croix, tome II de cette Edition, p. 156.)
364 IV Reg., II, 11.
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12.6 Page 116

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LVIII. Au même (Minute inédite). Troubles qui régnent à
Annecy.
Sales, commencement d'août 1595.
Nonne bene dixeram, mi Frater,
N'avais-je pas raison de vous dire, mon
facturum me deinceps ne ullum inter nos Frère, que je ferais en sorte désormais qu'il ne
audiretur silentium ? Cum inter nostros fût plus question de silence entre nous ?
Tononenses vix semel in mense ad te possim Comme au milieu de nos gens de Thonon, je
scribere, scribo nunc ex paterna Salesiorum puis à peine vous écrire une fois par mois, je
casa per [156] Coquinum365, eo sane jucundius vous écris maintenant de ma maison paternelle
quod paulo meliora de rebus nostris jam [156] de Sales, par Coquin, avec d'autant plus
audiverim. Hesterna namque die Necii omnia de plaisir que je viens de recevoir des
propemodum eversa ac inversa dicebantur366 ; nouvelles un peu meilleures de nos affaires. On
adeo nimirum, sive in bonam sive in malam, disait hier à Annecy que tout était à peu près
res quam longissime protrahere solet vulgus ; sens dessus dessous, tellement le vulgaire a
ac adeo incredibile est quanta amaro animo de coutume d'exagérer extrêmement soit en bien
te tuisque omnibus, quem in primis, ut fit, soit en mal. On ne saurait croire combien de
periclitari, importuna cogitatione367 pensées inquiétantes agitaient mon âme
subibant.368 Non tamen bona spe vacuus attristée, relativement à vous et à tous les
omnino, itaque cum rem levius transigi vôtres, qui deviez, des premiers, comme il
audiam, mihi tibique plurimum gratulor ; arrive, être mis en péril. Je ne suis pas
quando infœlix hoc nostrum sæculum369, pro cependant privé de tout espoir ; aussi, en
faustis solent haberi quæ non sunt apprenant que la chose se passe plus
infaustissima.
facilement, je m'en félicite beaucoup pour vous
et pour moi. Puisque notre siècle est si
Revu sur l'Autographe appartenant à M. le infortuné, on s'accoutume à tenir pour heureux
baron Ludovic de Viry, au château de
tout ce qui n'est pas absolument malheureux.
Cohendier (Haute-Savoie). [157]
[157]
_____
LIX. Au même (Minute). Ebranlement qui se produit parmi les
héretiques ; ingénieuse tactique du Saint pour les provoquer à la
discussion.
Thonon, 18 septembre 1595.
Et jam, mi Frater, latior simul et lætior
Voici enfin, mon Frère, qu'une porte
patet ad Christianorum messem aditus. Heri plus large et plus belle s'ouvre à nous pour
365 Maître Jean Coquin était notaire ducal à Groisy, seigneurie qui appartenait à la famille de Sales.
366 Ces troubles venaient probablement des craintes qu'inspiraient les succès de l'armée française, maîtresse d'une
partie de la Savoie, et les troupes hérétiques massées sur les frontières suisses. De plus, tandis que des soldats
espagnols commettaient toutes sortes de déprédations dans les faubourgs d'Annecy, où pourtant ils étaient tenus pour
alliés, on prenait, en prévision de la mort imminente du duc de Nemours, certaines mesures militaires qui surexcitaient
la population au lieu de la rassurer.
Quant au sénateur Favre, il savait ses possessions de Bresse dévastées par les troupes de Biron, qui
continuaient à guerroyer dans cette province.
367 [On a dû suppléer les trois premières lettres de ce mot, lesquelles sont indéchiffrables dans l'Autographe.]
368 subibant. [Domino ergo immortales gratias ago...]
369 sæculum [nulla læta, sed fausta...]
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namque parum abfuit quin Avullæus370 cum
urbis sindicis, uti vocant, ad concionem palam
venirent, quod me de augustissimo
Eucharistiæ Sacramento disputaturum
audivissent371. Quo de mysterio sententiam
rationesque Catholicorum ex me audiendi
tanto tenebantur desiderio, ut qui palam
nondum venire, ne legis suæ immemores
viderentur, ausi sunt, me ex diverticulo
quodam secreto audiverint, si tamen per vocis
meæ tenuitatem licuit.
Ego hac iterum egi venatione ut
promitterem me, sequenti concione, de
Scripturis luce meridiana clarius [158] dogma
commonstraturum, ac tantis rationum
momentis propugnaturum, nullus ut futurus sit
ex adversariis qui non cognoscat densissimis
se tenebris excœcatum, nisi qui humanitati ac
rationi nuntium remiserit. His nimirum
rodomonteis propositionibus se ingeniumque
suum ad arenam vocari recte cognoscunt, ne
videlicet si non veniant existimentur imbelles
omnino, qui Catholicam vel homuncionis
nescio cujus impressionem reformident.
Res est in tuto ; jam enim ad colloquia
descendunt, mox, ut ex proverbio dicam, ad
deditionem venturi ; sic enim Crescanus
advocatus372 nos docuit Tononienses communi
consilio confessionem, uti vocant, suæ fidei
scriptis prolaturos, uti si quid a nobis differunt,
ea de re familiari ac privato colloquio vel
privatis scriptis agamus. Cumque legationem
hanc ministro suo quidam imponere vellent,
alii tutius contra fuere, ne nobiscum palæstram
[159] ingrediatur, ne subtilitatibus scholasticis
vincatur, cum philosophiæ sit ignarus.
Bene sane quando per vicarium
pugnam suscipiunt, et tam exiguis copiis
nostris anguntur, et de conditionibus
proponendis cogitant. Hos vero, erectis per Dei
gratiam animis, concertationem hanc bona spe
proni gaudentes expectamus.
Revu sur le texte inséré dans le Ier Procès de
Canonisation.
entrer dans cette moisson de Chrétiens, car il
s'en fallut peu hier que M. d'Avully et les
syndics de la ville, comme on les appelle, ne
vinssent ouvertement à la prédication, parce
qu'ils avaient ouï dire que je devais parler du
très auguste Sacrement de l'autel. Ils avaient un
si grand désir d'entendre de moi l'exposé de la
croyance des Catholiques et leurs preuves
touchant ce mystère, que n'ayant osé venir
publiquement, crainte de paraître oublieux de
la loi qu'ils se sont imposée, ils m'entendirent
d'un certain endroit où ils ne pouvaient être
vus, si toutefois la faiblesse de ma voix n'y a
pas mis obstacle.
De mon côté, j'ai fait encore ceci dans
cette chasse : j'ai promis qu'à la prédication
suivante je mettrais, par les Ecritures, ce
dogme en plus grande lumière que le plein
midi, et que je l'appuierais [158] d'arguments
si puissants que nos adversaires, sans aucune
exception, à moins qu'ils n'aient renoncé au
bon sens et à la raison, reconnaîtraient qu'ils
sont aveuglés par les épaisses ténèbres dans
lesquelles ils sont plongés. Ils savent bien que
ces espèces de rodomontades les invitent à
descendre dans l'arène, en sorte que s'ils ne
venaient pas ils seraient tenus pour gens tout à
fait pusillanimes, qui redouteraient de se
mesurer avec la religion catholique, même
quand elle est défendue par je ne sais quel
homme de rien.
C'est une chose assurée : puisqu'ils
consentent déjà à parlementer, bientôt, suivant
le proverbe, ils en viendront à capituler. En
effet, ainsi que nous l'a appris l'avocat du
Crest, les Thononais ont résolu d'un commun
accord de nous présenter par écrit leur
confession de foi dans les points où elle diffère
de la nôtre, afin que nous puissions les discuter
en particulier ou dans des entretiens familiers
ou par écrit. Quelques-uns voulaient charger le
ministre de cette négociation, mais d'autres
plus prudents furent d'avis contraire, [159]
craignant qu'il n'engageât la lutte avec nous et
ne fût vaincu par les subtilités scholastiques,
370 Sur le seigneur d'Avully, voir la note jointe à la lettre du 10 mai 1596.
371 Vide tom. VII huj. Edit., Serm. XXXII.
372 L'avocat Pierre du Crest de Cruseilles, seigneur de la Croix, bourgeois d'Evian, docteur ès-droits, fut conseiller de
Charles-Emmanuel Ier et lieutenant particulier de la judicature-mage du Chablais. Ce personnage, l'un des premiers
convertis par les prédications de notre Saint, témoigna dans la suite d'un inaltérable dévouement envers lui. Il
l'accompagna à Genève lors de sa célèbre conférence avec le ministre La Faye, et le seconda en diverses autres
occasions. Pierre du Crest mourut avant 1629.
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12.8 Page 118

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car il ne sait rien de la philosophie.
Assurément nous sommes en bonne
voie puisqu'ils acceptent le combat par leur
lieutenant, que nos si petites forces les effraient
et qu'ils pensent à nous proposer des
conditions. Pour nous, ayant grand courage par
la grâce de Dieu, nous attendons avec
empressement et avec joie cette lutte qui donne
bon espoir.
_____
LX. Au même (Minute inédite). Attente de quelques lettres
attardées. Allusion à la bénédiction apostolique envoyée à
Henri IV. Suite du travail des Controverses. Accueil fait
par les hérétiques à la Centurie premiere. L'avocat de Prez
adresse des vers à l'auteur.
Thonon, commencement d'octobre 1595.
Et ego quidem, mi Frater, tantum
posteriores, ad 6 non. Octobris datas a te
litteras, idque nuperrime recepi ; de prioribus
illis de quibus admones, nec de aliis item P.
Possevini, Porterio nostro commendatis, ne
levi [160] quidem susurro hactenus audivi
quicquam. Tu vero quam me male nunc hæc
tantarum litterarum tanta torqueat expectatio,
si ad justam observantiæ amorisque mei erga
te Possevinumque nostrum trutinam omnia uti
par est expendas, facile cognosces.
Recreor autem plurimum res tuas
æquiori loco a te inventas quam credideras. Ea
est propemodum temporibus calamitas non
minima, ut eminus rem spectantibus apud viros
probos et, ut sacro dicam verbo373, quibus est
cor, ipsa calamitate sit calamitosior opinio.
Quod autem de Barone nostro scribis374, male
apud malos qui religionem ferream sequuntur
audit, eo vero me nomine angit quod spes quæ
differtur affligit animam375. Audio equidem
Henricum, felici nuntio, a Sanctissimo Patre
nuperrime « Gallorum Regem, salutem et
Apostolicam benedictionem » audivisse376 ; id
Mon Frère, je n'ai reçu que votre
dernière lettre du 2 octobre, et cela tout
récemment. Quant à la première dont vous me
parlez, et à celle du P. Possevin, qui avaient été
confiées à notre Portier, [160] je n'en ai pas
entendu souffler le moindre mot jusqu'ici. Si
vous pesez toutes choses, comme il convient, à
la juste balance de l'estime et de l'affection que
j'ai pour vous et pour notre Possevin, vous
comprendrez combien je souffre maintenant
dans la longue attente de lettres d'une telle
importance.
Je suis très heureux de savoir que vous
avez trouvé vos affaires en meilleur état que
vous ne pensiez. Voilà bien en effet un des
grands malheurs de notre temps : la crainte est
plus nuisible que le mal lui-même à ceux qui,
entre les honnêtes gens, ou pour employer
l'expression du Texte sacré, les hommes de
cœur, voient les choses de loin. Quant à ce que
vous m'écrivez de notre baron, c'est une
mauvaise nouvelle pour les méchants qui
suivent une religion de fer ; et moi je souffre
parce que l'espérance différée afflige l'âme.
373 Cf. Jerem., V, 21.
374 Le baron d'Hermance et le président de Rochette avaient été envoyés par le duc de Savoie à Bourgoin afin de
négocier avec les représentants du roi de France les conditions d'un traité de paix.
375 Prov., XIII, 12.
376 Cette phrase a trait d'une manière générale à la rentrée en grâce de Henri IV auprès du Saint-Siège et ne saurait
s'entendre à la lettre. Il est vrai que la cérémonie solennelle de l'absolution du monarque avait eu lieu le 17 septembre
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12.9 Page 119

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si ita est, fiat pax in [161] virtute Domini377.
Quam eo beatiorem ego suspicor futuram,
quod videam hæreticis omnibus Genevensibus
maxime ingratam esse.
Nunc paullo pressius rem cum iis
Tononensibus ago, agamque brevi
pressissime, ubi quod jampridem meditabar
opusculum378 ad maturitatem qualem meum
fert ingenium perduxero, et tu negotium
probaveris. Sic enim apud me statutum est
nihil nisi te censore proferre. Habent ii
Tononienses meditationes tuas priores de
Pœnitentia et Amore divino379. Mirantur
omnes operis elegantiam. Insanus tantum
ministellus cum te fœlicem vocasse culpam «
quæ talem ac tantum meruit habere
Redemptorem380 » legeret : « O blasphemiam,
atheismum, Papismum ! » inclamavit homo
stultissimus et amentissimus. Ego vero quanta
potui modestia per interlocutorem, quando ne
quidem mecum manus conserere hactenus
ausus est, hominis petulantiam ratione
castigavi.
Interim advocatus de Pres381 ad me
versus quosdam in [162] tuam, quod ipse dixit,
laudem misit, ea quantum audivi mente uti ad
te quoque, non suo quidem sed meo nomine
gratulabundus scilicet, perferre curarem.
Habebis ergo qualecumque id carminis, si
placet, amanter ; vir enim est admodum
hæreticus, quem tamen propter spem melioris
mentis et multa virtutum semina non
mediocriter dilexi. Tu si separatim, cum ad me
scribes, nonnullam de illis versibus amicam
facias significationem (ad idem uti fit
litterarium), mihi rem tuo genio dignam fecisse
videaris ; hoc enim argumento, quod sæpius
jam cum eo feci, verbum Dei admonebo.
Vellem enim, si qua posset, eum a pertinaci illa
mente dimovere. At ipse, quod conscientiam
rationibus Catholicis concuti sentiat,
J'apprends, il est vrai, que le très Saint-Père
aurait tout dernièrement envoyé à Henri
l'heureux message : « Salut et bénédiction
apostolique au Roi de France. » [161] S'il en
est ainsi, que la paix règne par la force du
Seigneur ! J'augure que cette paix sera d'autant
plus heureuse que je la vois être plus
désagréable à tous les hérétiques de Genève.
Je presse maintenant davantage ces
messieurs de Thonon, et les presserai encore
beaucoup plus lorsque j'aurai conduit à terme,
suivant ma capacité, le petit ouvrage que je
méditais depuis longtemps, et que vous aurez
approuvé mon entreprise. En effet, j'ai résolu
ainsi à part moi de ne rien publier sans le
soumettre à votre censure. Ces messieurs de
Thonon possèdent vos premières méditations
sur la Pénitence et l'Amour de Dieu. Tous
admirent la beauté de l'œuvre. Seul, un pauvre
ministre insensé ayant lu que vous nommez «
heureuse la faute qui nous a valu un tel et si
grand Rédempteur, » s'est écrié comme un
homme tout à fait stupide et extravagant : « O
blasphème ! ô athéisme ! ô Papisme ! » Mais
avec toute la modération possible, j'ai, par un
tiers, remis à la raison cet effronté, car lui-
même n'a pas encore osé en venir aux mains
avec moi.
Cependant l'avocat de Prez m'a envoyé
quelques vers, à [162] votre louange, dit-il.
Son désir serait, si j'ai bien compris, que je
vous les fisse parvenir pour vous féliciter non
pas en son nom, mais au mien. Acceptez donc,
s'il vous plaît, avec bienveillance cette poésie
telle qu'elle est. Cet homme est enfoncé dans
l'hérésie ; toutefois je lui ai témoigné beaucoup
d'affection dans l'espoir de le ramener à de
meilleurs sentiments, et parce qu'il y a en lui
bien des germes de vertu. Si vous voulez me
faire à part, lorsque vous m'écrirez, une
aimable allusion à ses vers (dans le même style
que lui), il me semble que vous ferez quelque
1595. Mais la Bulle d'absolution, bien qu'elle soit datée de ce même jour, ne partit de Rome que le 7 novembre suivant
; c'est dans cette Bulle que pour la première fois il est salué par la formule indiquée ci-dessus.
377 Ps. CXXI, 7.
378 Vid. supra, not. (259), p. 108.
379 Idem, p. 137.
380 Præcon. Paschale.
381 Claude de Prez, docteur ès-droits, avocat au souverain Sénat de Savoie (1572), lieutenant de la judicature-maje du
Chablais (1576), syndic de Thonon (1598) et juge ordinaire d'Abondance, se signalait par son attachement obstiné à
l'hérésie. Il fut en conséquence de cette obstination exilé de Savoie ; saint François de Sales obtint sa grâce, et, par la
force de sa douceur, parvint à le convertir (1599). L'avocat de Prez fit son testament à Abondance (10 avril 1612) et
mourut en 1625.
119/318

12.10 Page 120

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insequentem fugit382 Christum Dominum.
chose digne de votre caractère. Je profiterai de
Bene vale.
cette occasion, comme je l'ai déjà fait plus
d'une fois à son égard, pour lui prêcher la
Revu sur le texte inséré dans le Ier Procès de parole de Dieu. Je voudrais en effet, s'il était
Canonisation. [163]
possible, le retirer de cette obstination d'esprit.
Mais parce qu'il sent sa conscience ébranlée
par les arguments des Catholiques, il fuit le
Christ Notre-Seigneur qui le poursuit.
Portez-vous bien. [163]
_____
LXI. Au même (Inédite). Prochain envoi d'une partie de son
introduction au Code Fabrien. Question de droit.
Thonon, 14 octobre 1595.
Antonio Fabro, clarissimo Senatori,
Franciscus De Sales salutem dicit.
A Antoine Favre, très illustre Sénateur,
François de Sales présente ses salutations.
Accepi tandem breviores illas tuas cum
Possevini nostri libro et litteris; nihilo sane
longiores redditurus, quod concionibus
crastinis383 texendis tempus instet. Ita quid
singulis horis momentisque faciam scire te
vellem.
Habebis a me quam primum caput
unum meorum adversus hæreticos
Commentariorum384, in quo quam veri non
Ecclesiæ sed antiquarum hæresum sint
reformatores conabor ostendere. Ac, ne sine te
quidquam [164] hic etiam agatur, peto a te,
Frater suavissime, uti ad regulam illam, «aienti
non neganti incumbit probatio,» sensum
genuinum, rationem a priori et a posteriori
adjicias, idque Gallice; nam habeo caput unum
in Commentariis quo hæreticos ex hac regula
velim ad probationem cogere, quantumvis
negativa potius quam affirmativa sit eorum
theologia385. Quod tua limandum erit, si placet,
opera, ut me deinceps eo vehementius
reformident ministri quod me tuo pugnare
Marte certius cognoscent.
Bene vale, Frater suavissime, et me,
quod facis, ama Christumque imprimis habeto,
J'ai enfin reçu votre trop courte lettre
avec le livre et la lettre de notre Possevin. Ma
réponse ne sera pas beaucoup plus longue,
parce que je dois composer mes sermons de
demain, et le temps presse. Je désirerais vous
tenir ainsi au courant de ce que je fais à chaque
heure, à chaque instant.
Je vous enverrai le plus tôt possible un
chapitre de mes Commentaires contre les
hérétiques, dans lequel je m'efforcerai de
montrer que, loin d'être les vrais réformateurs
de l'Eglise, ils font revivre les anciennes
hérésies. Et afin que, même ici, rien ne se fasse
sans vous, [164] je vous demande, très doux
Frère, de donner son vrai sens à cette règle : «
La preuve incombe à celui qui affirme et non à
celui qui nie. » Veuillez ajouter les preuves a
priori et a posteriori, et cela en français. J'ai en
effet, dans mes Commentaires, un chapitre où,
d'après cette règle, je voudrais forcer les
hérétiques à produire leurs preuves, bien que
leur théologie soit plus négative
qu'affirmative. Mettez, s'il vous plaît, tous vos
soins à le bien établir, afin que désormais les
ministres me redoutent d'autant plus qu'ils
382 Cf. Prov., XXVIII, 1.
383 Le 15 octobre coïncidait cette année avec le XXIIe Dimanche après la Pentecôte.
384 Ces Commentaires constituent un véritable traité de théologie polémique : De Summa Trinitate et Fide Catholica,
qui forme le premier Titre du Code Fabrien. (Voir notre Introduction générale, tome Ier de cette publication, p.
LXXXI.)
385 Voir dans la lettre de Favre en date du 25 octobre, l'explication demandée.
120/318

13 Pages 121-130

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13.1 Page 121

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cum clarissima universa familia, propitium ac verront plus clairement que je combats sous
Servatorem.
votre égide.
Tononi, pridie id. Octobris 1595.
Portez-vous bien, très doux Frère,
aimez-moi comme vous le faites, et surtout que
Revu sur le texte inséré dans le Ier Procès de le Christ vous protège et vous conserve, vous
Canonisation. [165]
et toute votre très noble famille.
Thonon, le 14 octobre 1595. [165]
_____
LXII. Au père Antoine Possevin, de la Compagnie de Jésus
(Inédite). Nécessité pour le Saint d'obtenir la permission de lire
les livres hérétiques. Remarques sur les Institutions de Calvin
et sur un ouvrage de Théodore de Bèze. Témoignages de
respectueuse confiance.
Thonon, 14 octobre 1595.
Monsieur mon Reverend Pere,
Je receu seulement avanthier vostre lettre et le livre. Je prie Dieu qu'il vous rende la peyne
et le soin que vous prenes pour son honneur, et vous remercie tres humblement de l'affection qu'il
vous plaict prendre a ce dont je vous avois prié.
Pour vray, mon Pere, si mon insuffisance n'est point l'occasion que Sa Sainteté me refuse
ces graces, il n'y a point faute [de] tres urgente necessité. Je n'ose reprendre Calvin ni Beze en
façon que ce soit, la ou ilz sont imposteurs et blasphemateurs, que chacun ne veuille sçavoir ou ce
que je dis se trouve ; dequoy j'ay desja receu deux affrontz que je n'eusse pas eu si ne me fusse pas
fié aux citations des livres qui m'ont faict faute. Et quoy que toutes ces gens ne disent ni escrivent
rien de nouveau, si escrivent ilz en nouvelle façon qui requiert quelque prælusion. En fin, en ce
balliage chacun manie les Institutions386 ; je suis es lieux ou chacun sçait ses Institutions par cœur.
Au reste, vostre livre me fera un tres grand office, quoy que j'eusse desja vostre Musæum et alia
opera de statu hujus sæculi387. Quant a Beze, [166] j'ay sceu despuis, que tant s'en faut qu'il escrive
pour appoincter de religion, que son livre388 monstre le differend estre inappoinctable et rejette
l'opinion d'un autre de mesme forme qui vouloit mesler les tenebres avec la lumiere ; mays comme
je n'en sçavois rien que par ouÿ dire, aussy j'avois esté trompé de l'autre costé pour trois relaps,
gens de simple condition et de peu d'importance.
Je ne pense pas que Sa Sainteté refuse. Si mon esperance reussit, je ne doute point que Sa
Sainteté mesme ne reçoive grand contentement de ceste besoigne. Mays il seroit requis pour la
gloire de Dieu et le salut des ames que, selon la malice du tems et la distance des lieux, Sa Sainteté
nous ouvrist par deça un peu liberalement la main de sa clemence in foro conscientiæ.
Je parle a vous comme a celuy duquel j'attens toute correction, laquelle je subiray tousjours sans
386 Institution de la Religion Chrestienne, par Jean Calvin. Basle, 1535.
387 Aucun des ouvrages du P. Possevin ne porte le titre de Musæum ; on peut croire que le Saint désigne par ce mot la
Bibliotheca Selecta, véritable encyclopédie, qui traite des sciences, des arts, etc.
Par alia opera de statu hujus sæculi il entend probablement le livre du P. Possevin Contra Chytræum, déjà
indiqué dans les Controverses (tome Ier de cette Edition, p. 199). Ce livre, réfutation de celui de Chytrée intitulé De
Statu Ecclesiarum, se divise en quatre parties, dont l'une porte ce titre : Atheismi hæreticorum hujus sæculi.
388 Il est probable que le Saint fait allusion à l'opuscule de l'hérésiarque de Bèze : Apologie pour la Justification (voir
tome Ier de cette Edition, note (1226), p. 221) ; ou bien encore au traité du même auteur sur les Marques de l'Eglise
(ibid., p. 203).
121/318

13.2 Page 122

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replique. Si est il, a mon advis, necessaire que les necessités particulieres [soient] sceües, et
revelees par ceux qui les voyent. Je vous entretiens comme celuy que je sçay se trouver en des
grandes occasions d'y prester ayde et avoir sur tout en zele le salut des ames. Ce pendant je ne
lairray pas de solliciter vers Monseigneur de Geneve affin qu'il procure vers Monseigneur le
Prince, de son costé, a ce qu'il soit prouveu a ces pauvres ames tant desolees et affligees, avec toute
la charité qu'il sera possible.
Excuses moy, Monsieur mon Reverend Pere, si j'use tant librement avec vous. Je ne laisse
pas d'estre tres humble en l'affection que j'ay de vivre et mourir
Vostre serviteur et filz en Nostre Seigneur,
FRANÇOIS DE SALES.
De Thonon, le 14 octobre 1595.
Revu sur le texte inséré dans le Ier Procès de Canonisation. [167]
_____
122/318

13.3 Page 123

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LXIII. Au duc de Savoie, Charles-Emmanuel Ier 389. Exposé des
mesures à prendre pour assurer la conversion du Chablais.
Heureuse influence de M. d'Avully.
Thonon, 29 décembre 1595.
Monseigneur,
Puysqu'il plaict a Vostr' Altesse de sçavoir les moyens que je pense390 estre plus pregnans
pour faire sortir en effect le saint desir qu'ell'a de voir ces peuples de Chablaix reunis391 a l'Eglise
Catholique, comme j'ay appris de monsieur d'Avully auquel il vous a pleu d'en escrire, je diray
purement et fidellement ce que j'en crois.
Il est du tout necessaire qu'il y aÿe un revenu certain et infallible pour l'entretenement de
quelque bon nombre de prædicateurs qui soyent debrigués de tout autre soucy que de porter la
sainte parole au peuple. A faute dequoy voyci la second'annëe qui se passe des qu'on a commencé
de precher icy a Thonon, sans jamais interrompre, avec fort peu de fruict, tant par ce que les
habitans n'ont voulu croire qu'on prechast par commandement de Vostr'Altesse, ne nous voyans
entretenir que du jour a [168] la journee, qu'aussy par ce qu'on n'a peu attirer nombre suffisant
d'ouvriers a ceste besoigne, pour n'avoir ou les retirer ni dequoy les nourrir, puysque les frais
mesmes qui s'y sont faitz jusqu'a present ne sont encor paÿés. Et a cecy pourroyent suffire les
pensions qu'on employoit avant la guerre a l'entretenement de passé vingt ministres huguenotz qui
prechoyent en ces balliages, sil playsoit a Vostr'Altesse de commander qu'avec une
prompt'execution elles y fussent appliquëes.
Encores seroit il necessaire de faire redresser les eglises et y establir revenu convenable392
pour les curés qui en auront la charge, ne pouvans les precheurs s'attacher a aucun lieu particulier,
mays devans estre libres pour aller par tous ces balliages comme la necessité portera. Et sur tout il
est besoin393 au plus tost de dresser et parer les eglises de ceste ville de Thonon et de la parroisse
des Alinges, et y loger des curés pour l'administration des394 Sacremens, veu qu'en l'un et en l'autre
lieu il y a ja bon nombre de Catholiques et plusieurs autres bien disposés qui, faute de commodités
spirituelles, se vont perdans ; outre ce, que cela servira beaucoup pour apprivoiser le peuple a
l'exercice de la religion Catholique, principalement sil y a moyen395 de faire les offices
honnorablement, comm'avec orgues et semblables solemnités, au moins en ceste ville qui est le
rapport de tout le duché.
Mays l'on prechera pour neant si les habitans fuyent la prædication et conversation des
pasteurs, comm'ilz ont faict cy devant en ceste ville. Playse donques396 a Vostr'Altesse fair'escrire
une lettre aux scindiques de ceste ville, et commander a l'un des messieurs les [169] Senateurs de
389 Charles-Emmanuel Ier, dit le Grand (12 janvier 1562-26 juillet 1630), qui fut, malgré ses défauts, l'un des princes
les plus remarquables de la maison de Savoie, était monté sur le trône à l'âge de dix-huit ans. Aussi magnanime que
belliqueux, il se montra le père de son peuple, l'ami des lettres et le protecteur infatigable de la religion. Après avoir
activement secondé notre Saint dans la grande œuvre de la conversion du Chablais, il resta jusqu'à la fin son admirateur
et son ami, et se plaisait, en parlant de lui, à le nommer le saint Charles de ses Etats. Il favorisa l'établissement de
l'Ordre de la Visitation, et après la mort du saint Evêque de Genève, fit des démarches en Cour de Rome pour obtenir
l'introduction de sa cause de Béatification.
390 [Les variantes qui suivent sont extraites d'une copie autographe conservée à la Visitation de Rennes.]
cuyderoys
391 ces peuples reünis
392 y establir revenuz competens
393 Et sur tout seroit necessaire
394 pour administrer les
395 commodité
396 Mays parce que l'on precheroit pour neant si les habitans fuyoyent la prædication et conversation des pasteurs,
comm'ilz ont faict ci devant en ceste ville, je crois, Monseigneur, que sil plaict
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13.4 Page 124

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Savoÿe de venir icy convoquer generalement les bourgeois, et en pleyn'assemblëe, en habit de
magistrat, les inviter de la part de Vostr' Altesse a prester l'oreille, entendre, sonder et considerer
de pres les raysons que les precheurs leur proposent pour l'Eglise Catholique, du giron de laquelle
ilz furent arrachés sans rayson, par la pure397 force des Bernois ; et ce, en termes qui ressentent la
charité et l'authorité d'un tres bon prince, comm'est Vostr'Altesse, vers un peuple desvoÿé. Ce leur
sera, Monseigneur, une douce violence qui les contraindra, ce me semble, de subir le joug de vostre
saint zele, et fera398 une grand'ouverture en leur obstination. Et s'il plaict a Vostr'Altesse y
employer monsieur le senateur Favre, je tiens que son affection et sa suffisance y seroit
extremement sortable.
Monsieur d'Avully aussy, avec son exemple et la sollicitation familiere quil pourra faire
vers les particuliers, aydera beaucoup a l'œuvre ; ce que je crois quil fera volontiers selon la bonne
volonté et disposition quil a, en laquelle mesme je l'ay tous-jours veu des le commencement que
je vins icy.
Apres cela, dresser une compaignie de gens d'armes ou cavallerie pour engager la jeunesse,
suyvant l'advis de feu monsieur le baron d'Hermance, pourveu qu'elle fut dressëe religieusement,
avec quelques institutions chrestiennes, ne seroit pas un moyen inutile d'attirer les courages a la
religion ; ny aussy, en cas d'obstination, de priver a forme des edictz de tous offices de justice et
charges publiques399 les persistans en l'erreur. En fin, qui adjousteroit a tout cecy un college de
Jesuites en ceste ville, feroit ressentir de ce bien tout le voysinage, qui, quand a la religion, est
presque tout morfondu.
Reste, Monseigneur, que je remercie Dieu qui vous presente de si signalëes occasions, et
allum'en vous de [170] si sains400 desirs de luy faire le service pour lequel il vous a faict naistre
prince et maistre des peuples. Il y a de la despence en ceste poursuite, mais c'est aussy le supreme
grade de l'aumosne chrestienne que de procurer le salut des ames. Le glorieux saint Maurice,
auquel Vostr'Altesse porte tant d'honneur, sera nostr'advocat en ceste cause pour impetrer de son
Maistre toute benediction a Vostr'Altesse, qui est401 l'instrument principal et universel de
l'establissement de la foy catholique en ces contrëes, lesquelles il arrousa402 de son sang et de ses
sueurs pour la confession de la mesme foy. Ainsy prie je sa divine Majesté pour la prosperité de
Vostre Altesse, comme je dois, puysque je suis né et mourray,
Monseigneur, de Vostr'Altesse,
Tres humble et tres obeissant sujet et serviteur,
FRANÇOIS DE SALES,
indigne Prævost de l'Eglise de Geneve403.
De Thonon, le 29 decembre 1595 404.
Revu sur l'Autographe conservé à Turin, Archives de l'Etat. [171]
_____
397 sans autre rayson ni persuasion, mais par la seule
398 qui les contraindra de subir librement le joug de vostre saint zele, et fera, ce me semble,
399 des edictz de toute sorte d'office de justice
400 bons
401 auquel vous portes tant d'honneur, sera nostr'advocat en ceste ste cause au pres de son Maistre pour impetrer
toute benediction a V. Altesse, qui sera
402 a arrousëes
403 je suis nê et nourri, vivray et mourray, Monseigneur,
404 Le 29. 10. 95. a Thonon.
Vostre treshumble et tresobeissant sujet et serviteur.
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13.5 Page 125

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Minute de la lettre précédente
405Monseigneur,
Puysque il plaict a V. A. de sçavoir quelz moyens je cuyderoys estre plus preignans pour
la reduction de ces peuples a la foy catholique, comme j'ay appris de monsieur d'Avully auquel il
vous a pleu d'en escrire, je produyray purement et fidellement ce qu'il m'en semble.
Voicy la second'annëe que, par vostre bon playsir et le commandement de Monseigneur le
Rme Evesque de Geneve, quelques vertueux personnages et moy avons preché icy a Thonon et es
Alinges. Il est du tout necessaire quil y ait un revenu certain et infallible pour l'entretenement de
quelque bon nombre de predicateurs, puysque pour croire il faut ouïr et l'on ne peut 0uyr sans
precheur406, et que ceux qui viendront icy pour precher doivent estre debrigués de tout autre soucy
que de porter la parole de Dieu. A faute dequoy voicy la second'annëe que l'on preche icy a Thonon
sans beaucoup de fruict, tant par ce que les habitans ne peuvent croire que ce soit par l'aveu ou bon
playsir de V. A.,407 ne nous voyans entretenir que du jour a la journee, que par ce qu'on n'a peu
attirer nombre suffisant d'ouvriers408 a ceste sainte besoigne, pour n'avoir ou les retirer ni moyen
de les y nourrir, mesme que la despence qui s'y est faite jusqu'a present n'a encor esté payëe. A
quoy pourroyent suffire les pensions qu'on employoit avant ces guerres a l'entretenement de vingt
et tant de ministres huguenotz qui [172] prechoyent en ce duché, sil playsoit a V. A. de commander
qu'avec une prompt'execution elles y fussent appliquëes.
Encores seroit il necessaire de faire redresser quelques eglises en quelques lieux qui
seroyent jugés plus a propos, avec les autelz bien proprement parés, pour409 apprivoyser les
habitantz a l'exercice de la religion catholique ; et en ces lieux la establir revenu competent pour
les curés qui en auront charge, ne pouvans les precheurs demeurer fermes en aucun lieu, mays
devans discourir de costé et d'autre pour l'instruction de tout le duché, et mesme des deux autres
balliages, s'il y eschoit. Mays sur tout il faudroit qu'au plus tost on dressat l'autel et410 fit on parer
l'eglise en ceste ville et de la parroisse des Alinges, et qu'on y logeat des prestres pour y administrer
les Sacremens, y ayant en l'un et en l'autre lieu bon nombre de Catholiques, et plusieurs autres
prestz a se convertir quand ilz verront bon ordre en cest affaire, qui, faute de ce secours, se perdent
bien souvent. Et puys, de main en main, a mesure qu'on jugera convenable, faudra ainsy par toutes
les parroisses remettre sus l'exercice de la foy catholique et y colloquer des pasteurs.
Et par ce que l'on precheroit pour neant, sur tout en ceste ville, si les habitans fuyoyent les
precheurs et la predication, comm'ilz ont faict cy devant, et ne veulent prester l'oreille a
l'instruction ni conferer avec ceux qui viendront, je crois, Monseigneur, que sil plaict a V. A.
fair'escrire une lettre au cors de ceste ville, et commander encores a l'un de messieurs les Senateurs
de Savoÿe de venir icy faire assembler le conseil general des bourgeois de ceste ville, et en pleyne
assemblëe, en habit de magistrat, les inviter de la part de Vostr'Altesse a411 prester l'oreille, ouyr,
sonder et considerer de [173] pres les raysons et predications de l'Eglise Catholique, du giron de
laquelle ilz ont estés arrachés par les Bernoys sans aucune rayson, et ce en termes qui ressentent
et la charité et l'authorité d'un tres bon prince, vrayement catholique comm'est V. A., vers un peuple
desvoÿé, ce leur sera une douce violence qui les contraindra de subir librement le saint joug de
vostre zele. Ceste bonté et authorité fera, ce me semble, une bien grande ouverture a leur
405 Monseigr, Je loue Dieu de voir par effect le zele et ste affection que je sçavois... croyois estre en V. A. pour
l'advancement de la foy catholique en ce pais. Monsieur d'Avully m'a faict voir que V. Alt. desiroit sçavoir les moyens
que je penserois estre plus propres pour ce dessain. Monseigr, ja que sous vostre bon playsir j'ose vous produyre mon
avis...
406 Cf. Rom., X, 14.
407 de V. A., [n'y voyant rien de ferme...]
408 d'ouvriers [a la vigne...]
409 pour [accoustumer]
410 il faudroit — [que tout promptement] on dressat l'autel et [mit on en ordre…]
411 de Vostr'Altesse a se laisser instruire avec la rayson, a revenir au giron de l'Eglise, duquel par la force...
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13.6 Page 126

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obstination, et mettra les voysins en admiration de la suavité de vostre domination. Et pour ceste
negociation je tiens la devotion et la suffisance de monsieur le senateur Favre pour extremement
sortable.
412Monsieur d'Avully aussy, avec son exemple et la sollicitation familiere quil pourra faire
vers les particuliers, aydera beaucoup a l'œuvre, ce que je crois quil fera volontiers, selon la bonne
volonté et disposition quil a, en laquelle mesme je l'ay tousjours veu des le commencement que je
vins icy.
Mays qui adjousteroit a tout cecy un college de Jesuites en ceste ville, feroit ressentir de ce
grand bien tout le voysinage, qui, quand a la religion, est quasi tout morfondu.
Reste, Monseigneur, que je remercie de tout mon cœur nostre Sauveur qui vous presente
de si grandes occasions, et donne de si ardantz desirs de luy faire le service pour lequel il vous a
faict naistre prince et maistre des peuples. Il va de la despence en ceste poursuite, mays c'est le
supreme grade de l'ausmone chrestienne que de procurer le salut des ames. Le glorieux Martir saint
Maurice, auquel vous portes tant d'honneur, demandera vangeance a son Maistre contre ceux,
quelz [174] quilz soyent, qui empecheront et retarderont l'establissement de la foy catholique en
ces contrëes, lesquelles il a arrousëes de ses sueurs et de son sang pour le tesmoignage de ceste
mesme foy. Au contraire, [il] attirera par ses prieres la benediction du Pere celeste a quicomque
l'advancera, et particulierement sur Vostre Altesse qui en est la cause principale et universelle,413
pour la prosperité de laquelle je prie ordinairement Dieu, comme je dois, puysque j'ay ce bien
d'estre né et nourry414, ainsy que je vivray et mourray, sil plaict a sa divine bonté,
Monseigneur,
Vostre tres humble et tres obeissant serviteur.
Revu sur l'Autographe conservé à la Visitation d'Annecy. [175]
412 [Ainsy ne doute je point, Monseigr, que Vostre Altesse ne se voÿe bien tost en possession du fruict de sa sainte
intention ; car la principarexcuse que ceux de ceste ville produysent pour ne venir a la prædication catholique c'est
que ce leur seroit legereté, sans autre sujet, de changer... quilz ne croyent pas que Vostre Altesse en aÿe tant de desir
qu'on dict. Et quand aux vilageois, pour la plus part ilz sont resoluz de se ranger a l'instruction quil plaira a Vostre
Altesse, parce, ce dient ilz, qu'ell'est mieux entendue qu'eux.]
413 et universelle, [sur Madame et Messeigneurs les enfans... pour la prosperité de laquelle je prie Dieu sans cesse...]
414 et nourry, [et l'esperance de vivre et mourir...]
126/318

13.7 Page 127

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Année 1596
_____
LXIV. Au sénateur Antoine Favre (Inédite). Rencontre avec
Martinengo. Visite du Saint à sa famille et au baron de
Chevron. Bienveillance que manifestent à son égard le duc de
Savoie et le Nonce apostolique. Désir de recevoir le
douzième Livre des Conjectures. Encouragement à dédier à
l'Evêque la Centurie seconde de Sonnets.
Annecy, 6 février 1596.
Habes sane, fateor, suavissime Frater,
quod de me conqueraris qui hoc anno a me
nihil litterarum accepisti ; habeo vero quod de
anno hoc conquerar qui tot me cursitationibus
initio torsit ac contorsit ut nullibi secundum
propemodum diem quiescere licuerit.
Martinengius415 [176] quidem cum ad Divæ
Catharinæ arcem venturus speraretur,
nostrorum precibus adactus sum ut partim
nocturno, partim diurno itinere ad condictum
locum et diem, negotiorum quorumdam pro
clericis cum eo tractandorum gratia416, [me
conferrem ;] cumque mœnia Gebenensia mane
lamberemus, didici te inde [aurora] ejus diei
discessisse417, quo mecum longe durius actum
existimavi quod tam parvo temporis intervallo
disjungeremur, ac ut fieri solet, veluti
præcurrentem consequuturus, ad multam
usque noctem iter feci ; sed frustra, nam ut, si
tamen factu possibile foret, desiderium quo
crucior fruendi te acueres, mihi ejus ingenium
imitatus videbaris, quæ fugiebat « ad salices
Je l'avoue sans peine, très aimable Frère, vous
avez sujet de vous plaindre de moi, car vous
n'avez pas encore, cette année, reçu de ma part
la moindre lettre. Et moi aussi j'aurais raison
de me plaindre de cette année dont le début m'a
mis et remis en tourment par toutes sortes de
courses, au point de ne pas me laisser, pour
ainsi dire, deux jours de tranquillité de suite.
On espérait que Martinengo [176] viendrait au
fort Sainte-Catherine. Sur les instances de nos
amis, je fus obligé de me rendre, partie de jour
et partie de nuit, au lieu et au jour convenus
pour y traiter certaines affaires concernant le
clergé. Au matin, comme nous longions les
remparts de Genève, j'appris que vous en étiez
parti à l'aube de ce même jour. J'en ai ressenti
un regret d'autant plus vif que moindre était
l'espace qui nous séparait, et pour atteindre
celui qui semblait, ainsi qu'il arrive souvent,
courir devant moi, j'ai voyagé une bonne partie
de la nuit, mais en vain. Comme pour attiser, si
toutefois la chose eût été possible, le désir dont
je brûlais de jouir de votre présence, vous
415 François Martinengo, comte de Malpagua, né à Brescia (1548) d'une illustre famille vénitienne, avait mis au service
de la Savoie sa bravoure et son dévouement. Grand écuyer, lieutenant de la cavalerie et « lieutenant-général ès armées
du duc Emmanuel-Philibert, » il fut sous son successeur « lieutenant-général deça les monts » (1588), gouverneur de
Nice, puis de la Provence (1592), qui venait de se soumettre à Charles-Emmanuel Ier. Investi encore une fois de la
charge de lieutenant-général, il dirigea les opérations militaires en Savoie et en Bresse (1595). Sa nationalité et la
faveur dont il jouissait éveillèrent les susceptibilités des Espagnols qui menacèrent le duc de lui retirer tout appui,
dans les guerres qu'il soutenait contre la France, s'il n'éloignait Martinengo. Celui-ci se retira dans sa patrie, et plus
tard fut nommé lieutenant-général de la cavalerie vénitienne. Il mourut à Bergame le 3 février 1621.
416 Les finances de Charles-Emmanuel Ier étant fort obérées par suite des guerres qu'il soutenait contre les hérétiques,
ce prince avait obtenu du Pape l'autorisation de lever un impôt extraordinaire sur le clergé. L'application de cette
mesure avait été confiée à Martinengo, réputé « très au courant des affaires de la Savoie. » (Archives du Vatican,
Nunz. di Savoia, vol. 33.) C'est à cette occasion que le Saint se rendait auprès du lieutenant-général.
417 Le registre des Entrées du Sénat permet de constater une absence du sénateur Favre du 12 au 15 janvier 1596. Il
est très probable qu'il s'était rendu à Genève pour surveiller l'impression de ses Conjectures, confiée à Jean de Tournes.
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13.8 Page 128

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sed » se cupiebat « ante videri418. » At ego, ne
igitur spinetum rosa carens ingrediar (non
[177] enim me ad sui contemplationem infœlix
civitas, sed unius quidem hominis, sed qui
instar multorum mihi sit, præsentia
pertraxerat), et ut suavissimi complexus
jacturam aliquo modo resarcirem, ad Salesios
nostros venio, mox ad Baronem nostrum
Chivronium, qui me tanta benevolentia quanta
maxima dici potest exceptum, per multos dies
quibusdam suis cum fratribus et agnatis rebus
componendis retinuit, ut litteras illas
suavissimas ad 7 calend. Februarii scriptas,
hesterna tantum die acceperim. Sed plurima
nihilominus me de te docuerat frater ille
propemodum alter Locatellus, quem semel et
iterum vidi epistolam de me tuam lectitantem,
per quam nobiscum fere colloqui videbaris, si
ea de te non dixissemus quæ te præsente dici
ipsa tua modestia non pateretur.
At me nunc nulla potest diutius
continere modestia quin tibi paullulum
succenseam, quem cum toties serio dicentem
audiverim summopere optare te nomen tuum
ab ore et aure principum quam longissime
abesse, te [178] jam lætitiam de eo maximam
capere videam quod magnifice Principem
nostrum de me passim et sentire et loqui
cognoveris. Ego vero, mi Frater, quod postea
dicis, Genandi419 nostri fœlicitati invidere, vel
potius deinceps niti non invidere, beatius
semper existimavi. Quod si stationem
inferiorem navicula nostra sortiatur, portum
tamen teneat secura ; ne si velificationi velit
incumbere, fiat tempestas magna, ita ut
operiatur fluctibus420.
Quod autem attinet ad prioratus, prior
ratus sum egomet nihil ad me spectare421 ; hoc
autem ad me spectat uti Chaventius, qui a
sembliez imiter l'industrie de celle « qui
s'enfuyait vers les saules, tout en cherchant
auparavant à se faire voir. »
Quant à moi, ne voulant pas m'enfoncer
dans un buisson d'épines [177] sans rose (car
ce n'était pas la malheureuse cité qui m'attirait
pour se faire admirer, c'était la présence de cet
homme qui seul a pour moi plus d'attraits que
la foule), et afin de compenser en quelque sorte
la perte que j'avais faite de vos embrassements,
j'allai chez nos parents à Sales. Bientôt après je
me rendis chez notre baron de Chevron, qui me
fit un accueil bienveillant au dessus de toute
expression, et me retint plusieurs jours pour
règlement d'affaires avec quelques-uns de ses
frères et autres parents. Ainsi je n'ai reçu
qu'hier votre très suave lettre du 26 janvier.
Toutefois Locatel, que je considère presque
comme un second frère, m'avait beaucoup
parlé de vous. Je l'ai vu lire et relire
attentivement cette lettre où il était question de
moi, et grâce à elle, vous auriez semblé
partager notre causerie, si, en nous entretenant
de vous, nous n'eussions dit des choses que
votre modestie n'eût pas souffert être dites en
votre présence.
Mais aujourd'hui aucune modestie ne
pourra me contenir plus longtemps. Il faut que
je me fâche un peu contre vous. Comment ? Je
vous ai entendu dire si souvent et sérieusement
que votre ardent désir était que votre nom fût
écarté le plus possible de la bouche et de
l'oreille des princes, et voici que je vous vois
dans la plus grande [178] joie parce que vous
avez appris que notre prince manifestait
parfois dans ses paroles de magnifiques
sentiments à mon égard ! Et moi au contraire,
mon Frère, je considère aussi bien que vous,
comme le plus heureux le parti choisi par notre
Genand, dont vous me dites plus loin envier le
418 Virgil., Eclog III, 65.
419 François Genand, avocat au Sénat de Chambéry (1789), avait quitté le barreau pour entrer dans l'Ordre des Frères-
Mineurs Capucins, où il est connu sous le nom de P. François de Chambéry. Il y fit profession le 25 janvier 1596, et
fut successivement Gardien du couvent d'Annecy (1602-1603), Custode général (1612), et enfin chargé, en qualité de
Commissaire général, du gouvernement de la Province de son Ordre en Savoie (1614-1618). Orateur éloquent et apôtre
zélé, il s'était acquis par sa sagesse et sa vertu la confiance des grands qui le consultaient souvent et le prenaient pour
arbitre de leurs différends. Ce Religieux termina au couvent de Belley (1634) une vie dont plusieurs prodiges
attestèrent la sainteté. (Archives des Capucins de Chambéry.)
420 Jonas, I, 4 ; Matt., VIII, 24 ; Marc., IV, 37.
421 Il s'agit des prieurés perpétuellement unis de Talloires et de Saint-Jorioz, vacants d'abord par le décès de Jacques
de Savoie (13 décembre 1595). Le duc Charles-Emmanuel Ier nomma à ce riche bénéfice Viale Calcagni, grand
aumônier de la duchesse et précepteur des princes ; mais celui-ci mourut à la fin de janvier 1596, avant d'avoir reçu
ses Bulles. Charles de La Tour fut institué prieur commendataire des deux monastères le 13 septembre de la même
année.
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13.9 Page 129

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secretis est Principis422, ingratum me non
existimet. Is autem nuper elegantissime et
[179] amantissime ad me scripsit quænam
Princeps et Nuntius Apostolicus de me
protulerit præjudicia, suamque ipsius erga me
hominem alioquin ignotum propensionem
copiose explicat. Ego per litteras gratias
acturus, quo gratius habeat, si tamen ita
videbitur, tu quoque pro me et habeas et agas.
Duodecimum Conjecturarum librum,
mihi quod ais inscriptum, videre non minus
cupio quam soleant alii amicorum liberos
legitimos ; et quod duodecimus sit, universitate
numerorum quam universam totius amicitiæ
summam inter nos esse commonstrabit, quod
nihil mihi gloriosius. Sacrum autem de
Eucharistiæ mysteriis poema423 non video
quare non possis Episcopo dicare424, cum
altius profundiusque sit opus priore, et
præterea non semper a supremis ad infima, sed
interdum ab infimis ad suprema transcurrere
æquissime ordo patiatur.
Caput illud de discordi hæreticorum
cum hæreticis concordia425 mecum non attuli,
vitio famuli cui cum quæ [180] afferre
statueram commissem, omisit. At faciam [ne]
diutius expectes ; redeo namque ad opus
Thononiense, neque prius quicquam agam
quam ut fragmentum illud remittam. Illud
autem unum te hæc scribere me scire par est.
Ecce a nobili atque bona illa vidua de
Plana426 epistolam accipio qua modestissime
creditam pecuniam a Domino de Chisse
expetit. Jamque vale, atque me sine otio
scribentem excusatum habeto. Universis
nostris salutem plurimam.
Necii, octava idus Februarii, anno
millesimo quingentesimo nonagesimo sexto.
Revu sur le texte inséré dans le Ier Procès de
Canonisation. [181]
bonheur, ou plutôt essayer de ne pas l'envier.
Si notre nacelle occupe un rang inférieur, que
du moins elle soit en sécurité dans le port, de
peur que si elle voulait livrer sa voile au vent,
elle ne s'exposât à une grande tempête et ne fût
couverte par les flots.
Pour la question des prieurés, je suis le
premier persuadé qu'elle ne me concerne
aucunement. Une chose pourtant m'intéresse :
je ne voudrais pas que Chavent, le secrétaire du
prince, me crût ingrat. Récemment, dans une
lettre très élégante et très aimable, il [179] m'a
écrit les jugements avantageux que portaient
sur moi le prince et le Nonce apostolique, et
exposé amplement son inclination personnelle
pour moi, qui lui suis d'ailleurs inconnu. Je
dois le remercier par une lettre, et, afin de lui
être plus agréable, si vous le trouvez bon, vous
le ferez aussi en mon nom, après avoir retenu
pour vous-même une part de mes
remerciements.
Vous m'avez dédié, dites-vous, le
douzième livre des Conjectures. Je désire le
voir avec autant d'ardeur que d'autres aiment à
voir les enfants légitimes de leurs amis. C'est
le livre douzième, nombre parfait qui prouvera
qu'entre nous existe la somme parfaite de toute
amitié. Rien ne saurait me donner plus de
gloire. Quant au poème sur les mystères de
l'Eucharistie, je ne vois pas pourquoi vous ne
pourriez le dédier à l'Evêque. Cette œuvre est,
en effet, plus élevée et plus profonde que la
première ; d'ailleurs, c'est dans l'ordre de ne pas
toujours descendre des plus hauts degrés aux
plus bas, mais de monter parfois des degrés
inférieurs aux degrés supérieurs.
Je n'ai pas apporté avec moi le chapitre
sur l'accord discordant des hérétiques entre
eux. C'est la faute d'un serviteur qui l'a oublié,
[180] quoique je lui eusse donné la liste de ce
que je voulais emporter ; mais je prendrai mes
mesures pour que votre attente ne soit pas trop
longue. Je retourne en effet à l'œuvre de
Thonon et, avant toute autre chose, je vous
expédierai cette pièce. Il est bon toutefois que
422 Voir ci-après, note (427), p. 182.
423 Ce poème constitue la Centurie seconde de Sonnets spirituels en l'honneur du tressaint Sacrement de l'Autel.
424 Vide supra, p. 137.
425 Vide supra, p. 164.
426 Donade Pernette de Baillans, nièce de Mgr de Granier et cousine-germaine du chanoine de Chissé, avait épousé
(1583) Gabriel de Vignod seigneur de Planaz, qui mourut le 26 septembre 1591. Le 7 février 1596 Mme de Planaz
achetait une terre, et le chanoine de Chissé signait en qualité de témoin le contrat d'acquisition. (Archives de la
Visitation d'Annecy, Collection Vuÿ.)
129/318

13.10 Page 130

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vous seul sachiez que j'en suis l'auteur.
Je reçois de cette noble et bonne veuve
de Planaz une lettre par laquelle elle réclame
très respectueusement au seigneur de Chissé
l'argent qu'elle a prêté. Adieu donc, et veuillez
m'excuser, car je vous écris sans loisir. Mille
saluts à tous les nôtres.
Annecy, le 6 février 1596. [181]
_____
LXV. A Monsieur Chavent427 (Minute inédite). Témoignages de
reconnaissance et d'affection. Eloignement du Saint pour les
dignités ecclésiastiques.
Annecy, vers le 8 février 1596 428.
Monsieur,
Mon insuffisance ne me despleut onques tant qu'elle fit quand je vis avanthier la lettre que
vous aves daigné m'escrire ; car j'eus tant d'honte de me voir si peu de chose au pris de l'opinion
que Son Altesse, de sa bonté, en a conceu et qu'avec son authorité il m'a faict valoir vers
Monseigneur le Nonce, que l'honneur lequel j'en reçois ne m'en peut pas relever.
J'ay receu la faveur avec laquelle vous m'offres vostre amitié avec d'autant plus d'humilité
que j'en ay moins de merite, avec ceste seule apprehension, que peut estre la connoissance du sujet
pourroit cy apres apporter du changement a ceste vostre volonté ; si ce n'est que vous y reg*ardies
l'affection que j'ay de me rendre capable de vous faire humble service, puisque vous me verries
aussi bien assorti de ce costé la que vous pourries jamais voir homme. Mais quant a la coadjutorie,
toutes raysons et ma propre experience me defend de la desirer ; et le [182] devoir, l'honneur et le
zele que j'ay a Monseigneur le Reverendissime Evesque m'empechera tousjours de penser a
l'evesché pendant que Dieu le me prestera pour Prelat, et mon incapacité, quand Dieu m'en auroit
privé.
Je supplie sa divine Majesté pour vostre santé, et vous, de me faire cest honneur de vous
asseurer que je vivray tousjours,
Monsieur,
Vostre tres humble et affectionné frere et serviteur.
Revu sur le texte inséré dans le Ier Procès de Canonisation.
_____
427 Théodule Chavent avait été d'abord clerc en grande chancellerie (1589) avant d'être nommé secrétaire ordinaire de
Son Altesse à Chambéry. On lui donne aussi le titre de secrétaire d'Etat.
428 Bien que cette lettre ne porte ni date ni adresse, il est cependant permis de conjecturer l'une et l'autre d'après la
mention donnée dans la lettre précédente au secrétaire du duc. L'allusion faite dans celle-ci à la coadjutorerie de
l'évêché de Genève ne contredit pas à la date ; car on sait que Mgr de Granier avait résolu de choisir le jeune Apôtre
du Chablais pour coadjuteur longtemps avant d'en faire la proposition à celui-ci.
130/318

14 Pages 131-140

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14.1 Page 131

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LXVI. A Monseigneur Jules-César Riccardi, Archevêque de
Bari, Nonce Apostolique a Turin429 (Minute). Joie qu'éprouvent
les Savoisiens de la nomination du Nonce. Récit de
l'apostasie du Chablais et des tentatives faites pour la conversion
de cette province. Mesures à prendre pour en assurer le
succès.
Thonon, 19 février 1596.
Illustrissimo et Reverendissimo
Mon très honoré, Illustrissime et
Signore mio colendissimo,
Révérendissime Seigneur,
Dobbiamo quanti siamo de Savoyani,
et io particolarmente, laudar Iddio et
rallegrarci della felice elettione che fece Sua
Beatitudine di V. S. per Nuncio Apostolico
[183] presso Sua Altezza Serenissima, poichè
più zelante, prudente et pietoso protettore et
medico non potevano desiderare queste povere
et afflitte chiese di Savoya. Dicano gli altri
quel che gliene pare, ma io dico che alle
afflittioni et piaghe de queste chiese savoyane
si conveniva un rettor et medico qual non solo
fosse sufficiente et prudentissimo, ma anco
zelante et pietoso.
Laudato [sia] Iddio benedetto quale ci
ha dato V. S. Illma et Rma, qual nella lettera che
mi scrisse un pezzo fa430 et che ho un poco fa
ricevuta, mostra quanto sia il suo zelo nell'
aiutare questa afflitta provincia col degnarsi
scrivere et trattare così amorevolmente meco,
che dalla predica in poi son persona privata et
vile. Onde mi rincresce infinitamente di non
haver in me le altre cose corrispondenti
all'opinione che V. S. Illma et Rma tiene di me,
se non un buon desiderio di servire a santa
Chiesa et di ubedire prontissimamente alli
commandamenti de'superiori miei, massime di
V. S. Illma ; [184] alla quale, per communicare
di quello che mi commanda per la lettera sua,
darò quanto più spesso far si possa fedele
avviso di quanto giudicarò degno della notitia
sua et de Sua Beatitudine, per beneficio
spirituale della Savoya. Ma per hora bastarà
che io gli dia ragguaglio dell' opera alla quale
piacque a Monsignore Rmo Vescovo di Geneva
Nous devons tous, tant que nous
sommes de Savoisiens, et moi
particulièrement, louer Dieu et nous réjouir de
l'heureux choix que Sa Sainteté fit de Votre
Seigneurie pour l'accréditer en qualité de [183]
Nonce apostolique auprès de Son Altesse
Sérénissime ; car ces pauvres églises de Savoie
si affligées ne pouvaient désirer un protecteur,
un médecin plus zélé, plus prudent et plus
compatissant. Que les autres disent ce que bon
leur semble ; quant à moi je dis que pour
remédier aux maux et aux afflictions de ces
églises savoisiennes, il fallait un guide, un
médecin qui fût non seulement capable et très
prudent, mais encore zélé et compatissant.
Loué soit le Dieu béni qui nous a donné
Votre Seigneurie Illustrissime et
Révérendissime laquelle, dans la lettre qu'elle
m'adressa il y a longtemps et que j'ai reçue
depuis peu, montra quel est son zèle pour
secourir cette province désolée en m'écrivant,
et traitant si cordialement avec moi qui,
mettant à part ma qualité de prédicateur, suis
une personne privée et peu digne de
considération. C'est pourquoi je regrette
infiniment de ne posséder aucune des autres
conditions qui justifieraient l'opinion
avantageuse que vous avez conçue de moi, si
ce n'est un ardent désir de servir la sainte
Eglise et d'obéir avec une grande promptitude
aux commandements de mes supérieurs,
surtout à ceux de Votre Seigneurie. Afin de
commencer [184] à exécuter les ordres qui me
sont intimés par sa lettre, je la renseignerai
429 Le texte italien de cette lettre n'a jamais été publié. Migne (tome V, col. 349) se borne à en donner une traduction
assez inexacte.
430 Voir à l'Appendice cette lettre du Nonce, qui est datée du 29 décembre 1595.
131/318

14.2 Page 132

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di destinarme fa un anno et mezzo.
Fu occupata dai Bernesi una parte di
questa diocesi di Geneva, fa sessant' anni, [e]
rimase heretica ; la quale essendo ridotta in
pieno potere di Sua Altezza Serenissima questi
anni passati, per la guerra, [e riunita al] suo
antico patrimonio, molti degli [abitanti,] mossi
piuttosto dal rimbombo delli archebuggi che
dalle prediche che ivi si facevano per ordine di
Monsignor Vescovo, si ridussero alla fede nel
seno della santa madre Chiesa. Ma poi,
essendo infestate quelle contrade dalle
incursioni de' Genevesi et Francesi,
ritornarono nel fango ; al quale male volendo
provedere sì d'un canto Sua Altezza
Serenissima, sì dall'altro Monsignore Rmo
Vescovo, io venni qua per ordine di detto Rmo
Vescovo, no come medico [185] convenevole
per tanta infirmità, ma piuttosto come
esploratore et forriero per vedere come si
potrebbe provedere di rimedi et di medici. Ma
consegliato dall' occasione et da pochi
Catholici che v'erano invitato, io incominciai
[a] fare alquante prediche, non senza qualche
speranza di buon frutto ; et da quell'hora in poi,
io per lo più, et a varie occasioni altri, parte
canonici della Cathedrale, parte curati di
questa diocesi, non habbiam mai intermesso
l'essercitio di predicatione le feste, se non due
volte per certe necessità. Et se bene il timore
delli heretici vicini ci ha portato grave
impedimento a questa impresa, si va facendo
tuttavia sempre qualche frutto nella
conversione di alquante persone, fra le quali ve
ne sono due le più sufficienti nell' heresia che
si trovassero.
Siamo di più adesso in procinto, con
questa nuova di pace431, di fare la raccolta di
quanto sin hora habbiamo [186] seminato.
Perchè lo santo desiderio di Sua Altezza
Serenissima venga in effetto, [alcuni mezzi
sarebbero da impiegarsi,] secondo gl'articoli
che io glie ne mandai ci è un pezzo432, nelli
quali davo avviso di quanto stimai necessario.
Cioè : che bisognava havere modo et entrata
fidèlement, et aussi souvent que faire se
pourra, sur tout ce que je jugerai digne d'être
porté à sa connaissance et à celle de Sa Sainteté
pour le bien spirituel de la Savoie. Mais, pour
le moment, il suffira que je lui rende compte de
l'œuvre à laquelle il plut à Monseigneur le
Révérendissime Evêque de Genève me
destiner, il y a un an et demi.
Une partie de ce diocèse de Genève fut
envahie par les Bernois, il y a soixante ans, et
demeura hérétique ; mais, ces années passées,
ce pays, par la force des armes, rentra sous la
domination de Son Altesse et fut réuni à son
antique patrimoine. Bon nombre des habitants,
plus touchés du fracas des arquebuses que des
prédications qui leur étaient faites par ordre de
Monseigneur l'Evêque, revinrent à la foi et
rentrèrent dans le sein de notre mère la sainte
Eglise ; mais ensuite ces contrées ayant été
infestées par les incursions des Genevois et des
Français, le peuple retomba dans son bourbier.
Son Altesse Sérénissime d'un côté, et
Monseigneur notre Révérendissime Evêque de
l'autre, voulant remédier à ce mal, je vins ici
par ordre de mondit [185] Révérendissime
Evêque, non comme médecin capable de
guérir tant d'infirmités, mais plutôt comme
explorateur et comme fourrier, afin d'examiner
les moyens à prendre pour pourvoir le pays de
remèdes et de médecins. Cependant, inspiré
par l'occasion et invité par le petit nombre de
Catholiques qui se trouvaient là, je commençai
à faire plusieurs prédications, non sans quelque
espérance de leur voir produire d'heureux
fruits ; dès lors, soit par moi-même le plus
souvent, soit par d'autres prêtres, en partie
chanoines et en partie curés de ce diocèse,
l'exercice de la prédication s'est continué sans
interruption tous les jours de fête, si ce n'est
deux fois que nous avons été contraints de
l'omettre. Bien que la crainte des hérétiques
nos voisins ait grandement nui au succès de
cette entreprise, on obtient néanmoins toujours
quelques fruits par la conversion de plusieurs
personnes, parmi lesquelles il s'en trouve deux
431 Cette nouvelle était sans fondement ; car les conditions de paix discutées à Bourgoin (voir ci-devant, note (374),
p. 161) avaient été acceptées par le duc de Savoie (6 novembre 1595), mais non par le roi de France. De longues
négociations se continuèrent à cet effet entre les deux puissances. La conférence du Pont-de-Beauvoisin ayant été sans
résultat, M. de Sillery fut envoyé à Charles-Emmanuel Ier qu'il rencontra à Suze (20 juillet 1596), et M. de Chabod,
ambassadeur de Savoie, fut reçu par Henri IV le 9 octobre de la même année. Mais il obtint seulement la prolongation
de la trêve jusqu'en mars 1597, et la proposition de soumettre tout le différend à l'arbitrage du Saint-Siège.
432 Vide supra, Epist. LXIII.
132/318

14.3 Page 133

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certa per molti predicatori, quali in diverse
parti di questa provincia heretica potessero
spargere la santa parola, et altra entrata per
sacerdoti che nelle parrochie convertite si
devono lasciare per l'administratione dei
Sacramenti ; non potendo li predicatori
fermarsi in un luogho particolar, ma dovendo
esser liberi per transcorrere ove la necessità
de'popoli richiederà. Ma sopra tutto, che in
questa terra di Tonone, che è recapito generale
della provincia, si deve prontissimamente
drizzar l'altare et ristaurare la chiesa, con
ornamenti et entrata da potersi fare officio
honorato, come sarebbe con organi o simili
cose ; et oltra di questo, doverebbe nel
medesimo tempo esser proveduto a quatro o
cinque altre parrochie, quali hanno dimandati
preti per regerle. Poi, se Sua [187] Altezza
commandasse al Governatore della provincia
di accarezzare li convertiti, invitare gl'ostinati
et privarli, [se ricusano,] d'ogni officio et
honore publico, et in particolare, se
commandasse a uno de' supremi Senatori di
Savoya di venire qui in Tonone invitare questi
citadini, no sarebbe poco aiuto.
Tutta l'importanza sarà nel modo de
havere le intrate necessarie, perchè se bene
sono in questo paese molti beneficii, sono
tuttavia occupati da varie persone, et per
Lo più da Cavaglieri di Santo Mauritio et
Lazaro433. Ma il servitio d'Iddio, di santa
Chiesa, di Sua Altezza Serenissima richiede
che prima si stabilisca la santa religione, ogni
altra cosa lasciata da parte
All'Illmo et Rmo Patron et Sigre mio
osservandissimo,
Il Sigre Archivescovo di Bari,
Nuncio Apostolico appresso S. A. Serenma.
Revu sur le texte inséré dans le Ier Procès de
Canonisation. [188]
des plus versées dans l'hérésie.
Nous sommes maintenant, grâce à cette
nouvelle d'une prochaine paix, à la veille de
récolter ce que nous avons semé jusqu'ici. Pour
[186] que le saint désir de Son Altesse
Sérénissime s'effectue, [plusieurs mesures sont
à prendre,] selon les articles que je lui en
envoyai, il y a longtemps, dans lesquels je lui
indiquai ce que j'estimais nécessaire. Il faudrait
avoir des moyens et des revenus assurés pour
nombre de prédicateurs qui pussent répandre la
sainte parole dans les diverses parties de cette
province hérétique. Il faudrait d'autres revenus
destinés aux prêtres qui doivent demeurer dans
les paroisses converties pour y administrer les
Sacrements ; car les prédicateurs ne peuvent se
fixer dans un lieu particulier, mais doivent être
libres pour se rendre là où les besoins des
populations les réclameront. Mais surtout en
cette ville de Thonon, qui est le rendez-vous de
toute la province, on doit très promptement
ériger l'autel, restaurer l'église et se procurer
des ornements et des revenus pour y faire
l'office
convenablement,
avec
accompagnement d'orgue et choses
semblables. Et en outre, il devrait être pourvu
dans le même temps aux besoins de quatre ou
cinq paroisses qui ont demandé des prêtres
pour les [187] desservir. Ce serait un grand
secours pour nous si Son Altesse commandait
au gouverneur de la province de favoriser les
convertis, d'inviter les obstinés, et de les priver
[en cas de refus] de toute charge et de tout
honneur public, et surtout s'il ordonnait à l'un
des membres du souverain Sénat de Savoie de
venir ici à Thonon exhorter les habitants.
Le plus important consiste à prendre les
moyens pour avoir les revenus nécessaires ; car
bien qu'il y ait en ce pays bon nombre de
bénéfices, ils sont détenus par diverses
personnes, et surtout par les Chevaliers des
Saints Maurice et Lazare. Mais le service de
Dieu, de la très sainte Eglise et de Son Altesse
Sérénissime exige que premièrement on
rétablisse notre sainte religion, toute autre
considération étant laissée de côté
A mon très honoré, Illustrissime et
Révérendissime Seigneur,
Monsieur l'Archevêque de Bari,
Nonce apostolique auprès de Son Altesse
433 Voir ci-après la note jointe à la lettre adressée au Conseil des Chevaliers des Saints Maurice et Lazare, février 1597.
133/318

14.4 Page 134

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_____
Sérénissime. [188]
LXVII. Au duc de Savoie, Charles-Emmanuel Ier. Nécessité de
rendre une des églises de Thonon au culte catholique.
Ebranlement général parmi les hérétiques du Chablais.
Thonon, 19 mars 1596.
Monseigneur,
La disposition en laquelle je vois maintenant ce peuple de Chablaix est telle que si, en
execution de la sainte intention de Vostr'Altesse, on dressoit prontement l'eglise a Thonon et
quelques autres lieux, je ne doute point d'asseurer Vostr'Altesse qu'elle verroit dans peu de moys
le general de tout ce pais reduict, puysqu'en la ville plusieurs sont si bien disposés et les autres,
tant esbranlés en leur conscience, que si on leur presente l'occasion ilz prendront infalliblement le
port que Vostr'Altesse leur desire. Et quand au reste du pais, ilz sont venus pieça de dix ou douze
parroisses prier qu'on leur donnast l'exercice de la foy catholique. Si que le tems est venu de voir
Dieu loué et le zele de Vostr'Altesse en effect, de laquelle j'attens l'ordre et provision necessaire ;
et la supplie tres humblement croire, quoy que peut estr'on luy die le contraire, que je ne luy escris
qu'avec la realité et conscience en laquelle il faut servir son sauverain Prince et Dieu mesme.
Je prie sa divine Majesté qu'ell'accroisse tousjours ses benedictions en Vostr'Altesse, de
laquelle j'ay cest honneur d'estre,
Monseigneur,
Tres humble et tres obeissant serviteur et sujet,
FRANÇOIS DE SALES,
indigne Prævost de St Pierre de Geneve.
De Thonon, 19 mars 1596.
Revu sur l'Autographe conservé à Turin, Archives de l'Etat. [189]
_____
LXVIII. A Monseigneur Jules-César Riccardi, Archevêque de
Bari, Nonce Apostolique a Turin. Instances pour obtenir
l'intervention du Nonce auprès du duc de Savoie. Opposition
à redouter de la part des Chevaliers de Saint-Lazare. On
découvre en Chablais quantité de personnes possédées du
démon.
Thonon, 19 mars 1596.
Illustrissimo et Reverendissimo Signor
Mon très honoré, Illustrissime et
mio osservandissimo,
Révérendissime Seigneur,
La speranza nella quale io mi ritruovo
L'espérance en laquelle je me trouve
adesso di veder far raccolta di buon numero maintenant de moissonner bon nombre d'âmes
134/318

14.5 Page 135

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d'anime in questa provincia di Chablaix, se si
darà l'ordine conforme al zelo di Sua Altezza
Serenissima, mi fa pregar colla debita humiltà
V. S. Illma di degnarsi di intercedere acciò no
solo si faccia questo bene, ma si faccia ancora
con quella prontezza che è tanto grata al
Signore ; perchè in questa terra di Tonon,
recapito de tutta la provincia, sono molti ben
disposti, et quasi tutti gl'altri tanto commossi
nella conscienza, che se vedessero l'essercitio
della religione catholica stabilito, facilmente et
fra pochi giorni si ridurrebbono. Quanto poi
a'luoghi circonvicini, di dieci o [190] dodeci
parrochie son già venuti i capi addomandare
l'essercitio catholico ; sì che il soprastare in
tanto negocio mi pare gran peccato.
Sua Altezza poi è affettionatissima a
questa impresa ; resta la diligenza nell'
essequire, la qual forse potrà esser impedita da'
Cavaglieri di San Lazaro, i quali hanno l'intrate
ecclesiastiche di questo paese, che alla
restauratione delle chiese et alla provisione per
curati et predicatori saranno necessarie. Ma si
ricordarà Sua Altezza che la religion catholica
è fondamento de tutte l'altre, et che no sarà mai
tanto servita da altra croce come da quella che
nel cuore de'suoi sudditi si va scolpendo. Oltre
che sua divina Maestà richiede adesso questo
servitio, poichè permette che fra queste genti
vi siano tanti inspiritati et tuttavia se ne
scuoprano ogni giorno più, i quali rimedio et
refrigerio no sanno trovare se non nel segno
della Croce, nell' acqua et candele benedette,
nell' Agnus Dei et simili cose sacre che per lo
innanzi abhorrivano tanto ; il che mi pare un
dolce invitamente della Providenza suprema a
questo popolo di ritornare al grembo [191]
della santa Chiesa, et a quelli che possono di
porgergli aiuti convenienti. Priego adunque
Vostra Paternità Illma si degni di procurare un
ordine pronto da le Loro Altezze.
Et io, continuando nella ubedienza di
V. S. Illma et Rma, no mancarò di darglie poi
certi avvisi importanti per aiuto spirituale di
questa diocesi et altre della Savoya.
Fra tanto pregarò l'eterno Iddio che la
conservi ad utilità della Chiesa, et basciandoli
riverentemente le sacre et paterne mani,
restarò,
Di V. S. Illma et Rma,
Perpetuo et divotissimo servitore,
FRANCO DE SALES,
dans cette province du Chablais, si l'on donne
des ordres conformes au zèle de Son Altesse
Sérénissime, me fait prier en toute humilité
Votre Seigneurie de daigner intercéder, afin
que non seulement ce bien s'effectue, mais
encore que ce soit avec cette promptitude si
agréable au Seigneur. Dans cette ville de
Thonon, rendez-vous de toute la province,
beaucoup sont bien disposés, et presque tous
les autres, si ébranlés dans leur conscience que
s'ils voyaient l'exercice de la religion
catholique rétabli, ils se rendraient facilement
et en peu de jours. Quant aux lieux
circonvoisins, les [190] principaux de dix ou
douze paroisses sont déjà venus demander
l'exercice du culte catholique, si bien que
différer en semblable affaire me paraît grand
dommage.
En outre, Son Altesse est fort
affectionnée à cette entreprise ; reste à
l'exécuter diligemment. Il pourra se faire qu'on
en soit empêché par les Chevaliers de Saint-
Lazare qui détiennent les revenus
ecclésiastiques de ce pays, revenus nécessaires
pour la réparation des églises et pour l'entretien
des curés et des prédicateurs. Mais Son Altesse
se souviendra que la religion catholique est le
fondement de tous les Ordres religieux, et que
jamais les intérêts du prince ne seront aussi
bien servis par aucune autre croix que par celle
que nous tâchons de graver dans les cœurs de
ses sujets. De plus, la divine Majesté montre
qu'elle réclame maintenant ce service, en
permettant qu'il y ait parmi ces gens tant de
possédés et que chaque jour on en découvre
davantage. Ils ne peuvent trouver remède et
soulagement que dans le signe de la Croix,
l'eau bénite, les cierges bénits, les Agnus Dei et
semblables pratiques sacrées que jusqu'ici ils
avaient en si grande horreur. Je crois voir en
cela une douce invitation de la [191]
souveraine Providence pour engager ce peuple
à rentrer dans le giron de la sainte Eglise, et
pour déterminer ceux qui en ont le pouvoir à
leur procurer les secours nécessaires. Je prie
donc Votre Paternité Illustrissime de vouloir
bien nous obtenir promptement un ordre de la
part de Leurs Altesses.
Et moi, persévérant dans la soumission
que je dois à Votre Seigneurie, je ne manquerai
pas de lui donner avis dans la suite de certaines
choses importantes pour le bien spirituel de ce
135/318

14.6 Page 136

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indegno Prevosto di S. Pietro de Geneva. diocèse et des autres de la Savoie.
In Tonon, alli 19 Marzo 1596.
En attendant, je prierai le Dieu éternel
A l'Ilimo et Revermo Sigr mio osservandissimo, de vous conserver pour l'avantage de l'Eglise,
Monsigr l'Archivescovo di Bari, et baisant respectueusement vos mains sacrées
Nuncio Apostolico appresso Sua Altezza et paternelles, je demeurerai,
Serma.
De Votre Seigneurie Illustrissime et
Turino.
Révérendissime,
Le perpétuel et très dévoué serviteur,
Revu sur l'Autographe conserve à Rome,
FRANÇOIS DE SALES,
Archives du Vatican. [192]
indigne Prévôt de Saint-Pierre de Genève.
A Thonon, le 19 mars 1596. [192]
_____
LXIX. Au sénateur Antoine Favre (Minute inédite). Ardent désir
de voir le duc de Savoie effectuer un voyage projeté en
Chablais. Envoi d'une lettre pour le P. Chérubin.
Thonon, 16 avril 1596.
Quam verum spem quæ differtur
animam affligere434, et certius ex Sacro Codice
cognoveram, et nunc quod peccata mea
meruerunt, in causa propria durius experior.
Crastinus enim hic et semper crastinus
Principis adventus435, quod crastinum etiam
tandiu faciat hujus nostri Christiani negotii
eventum hodiernum, mihi jampridem excitat
animi dolorem.
« Dic mihi, cras istud, Posthume, quando
venit436 »
et accedit, Frater suavissime ? Videndi te
ingens, ut par [193] est, et me apud te de mora
in scribendo purgandi desiderium [erat] quod
litteris nulla possum ex parte explere ; nec
otium quidem affuit, nec tabellarius ; dicam
candide, nec etiam animus, cum singulis
propemodum momentis profectioni
intenderem. Quod enim optamus credimus.
Jam vero, hoc redeunte otio et abeunte
nuntio, languescente etiam de profectione spe,
brevem hanc animi mei mitto sententiam. Si
venerit Princeps, ad te propero quamprimum ;
si, quod Deus avertat, non venerit, non
Combien il est vrai que l'espérance
différée afflige l'âme ! Je le savais très
certainement par les Livres Saints ; mais
aujourd'hui, en punition de mes péchés, j'en
fais personnellement une dure expérience. Ce
demain, ce sempiternel demain auquel est
toujours remise l'arrivée du prince me cause
depuis longtemps une vive douleur ; car ce
retard renvoie aussi au lendemain ce qui
devrait être fait aujourd'hui : l'achèvement de
nos affaires religieuses.
« Dis-moi donc, Posthumus, quand viendra ce
demain ? »
Quand arrivera-t-il, Frère très aimable ? J'ai eu,
c'est tout naturel, un [193] immense désir de
vous voir et de m'excuser de vive voix de mon
retard à écrire, car je ne puis en aucune façon
satisfaire par lettres mon affection pour vous.
Je n'avais d'ailleurs ni loisir ni courrier, et, je
l'avouerai naïvement, pas même de courage,
étant pour ainsi dire préoccupé à chaque
instant de mon départ, tant nous croyons ce que
nous souhaitons.
Mais voici que le loisir m'est rendu, que
434 Prov., XIII, 12.
435 On voit par les lettres du Nonce de Turin que dès l'année précédente Charles-Emmanuel Ier avait projeté un voyage
en Chablais. En février 1596 il semblait être sur le point de se mettre en route ; des raisons d'Etat l'obligèrent à différer
encore.
436 Martial. Epigram., l. V, epigr. LVIII.
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committam quin ad te quoque, si qua fieri le courrier va partir, qu'en même temps mon
possit, ex itinere omnino divertam ; namque espérance de voyage s'évanouit, et je vous
ecquid in animo habeat, quando per litteras envoie cette brève expression de ma pensée. Si
nequeo, coram extorquere in nomine Domini le prince vient, j'accours aussitôt vers vous ; si,
decrevi. Res namque hujus status nullam ce qu'à Dieu ne plaise, il ne vient pas, je ne
deinceps sine gravi damno patietur dilationem. manquerai pas de me détourner de mon
De demonomania ista scribo, uti jubebas, ad R. chemin, s'il m'est possible, pour me rendre
P. Cherubinum437. Res est memoria digna ; si auprès de vous. Puisque je ne puis savoir par
placet, perlegas antequam reddendi cures lettres quels sont ses sentiments, j'ai résolu de
copiam.
lui en extorquer l'aveu au nom du Seigneur.
Itaque, suavissime Frater, me quod Cet état de choses ne peut se prolonger sans un
facis plurimum [194] ama, et bene vale cum grave dommage. Selon vos désirs, j'écris au R.
clarissima familia tua, quam plurimum salvere P. Chérubin au sujet de cette démonomanie. La
cupio, Christumque habeto propitium.
chose est digne de mémoire. Lisez
Tononii, tertio resurgenti Salvatori attentivement la lettre, s'il vous plaît, avant de
sacro die, 1596.
chercher l'occasion de la faire parvenir.
Cependant, Frère très aimable, aimez-
Revu sur le texte inséré dans le Ier Procès de moi beaucoup, comme vous [194] le faites, et
Canonisation.
portez-vous bien, ainsi que toute votre très
noble famille, que je désire en excellente santé.
Que le Christ vous soit propice !
Thonon, troisième jour des fêtes de la
Résurrection du Sauveur, 1596.
_____
LXX. A Monseigneur Jules-César Riccardi, Archevêque de
Bari, Nonce Apostolique a Turin. Séjour à Annecy à l'occasion
du synode. Remerciements pour trois lettres reçues du
Nonce. Conversions qui s'opèrent en Chablais. Nécessité
d'y envoyer un nombre suffisant de prédicateurs, et de nommer
aux cures des prêtres dignes de les occuper.
Annecy, 6 mai 1596.
Illustrissimo et Reverendissimo
Mon très honoré, Illustrissime et
Signore mio osservandissimo,
Révérendissime Seigneur,
Essendo venuto qui appresso
Monsignor Rmo Vescovo per il sinodo438 et 439
altri negotii, ho ricevuto tre delle [195] lettere
che piacque a V. S. Illma scrivermi, due alli 8
di Aprile di medesima sostanza, et una al terzo,
delle quali la ringratio con ogni humiltà, et
della memoria che hebbe di me nel bisogno ch'
M'étant rendu ici auprès de
Monseigneur notre Révérendissime Evèque
pour le synode et pour d'autres affaires, j'ai
reçu trois [195] des lettres qu'il plut à Votre
Seigneurie Illustrissime m'écrire : deux du 8
avril, traitant du même sujet, et une autre du 3.
Je vous en remercie avec toute humilité,
437 Voir ci-dessus, p. 190, la lettre au Nonce, en date du 19 mars 1596.
438 Ce synode dut avoir lieu le 1er mai. Voir ci-devant, note (159), p. 62.
439 [Les variantes qui suivent sont extraites d'une minute insérée dans le Ier Procès de Canonisation.]
Vescovo, si per il sinodo, si ancora per
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io havevo della licenza de' libri prohibiti, la
quale io son aspettando ogn' hora, et ancora di
quella440 dispenza nel matrimonio contratto fra
parenti, non potendo però mandare a V. S. Illma
i nomi, cognomi, patria et dioccesi, come mi
commandò441, per non haver ancora risposta
del loro curato che sta un pezzo lontano.442
Quanto poi alli443 frutti che si fanno et
sonno per farsi tuttavia in Ciablais, no posso
mandargliene raguaglio distinto, massime dei
nomi de' convertiti, per haverli lasciati in
Tonon ; et spero fra poco di darne a V. S. Illma
un'allegressa compita444, se si darà modo di
potere inviare numero conveniente de
predicatori [196] in quella445 provincia, il che
aspettiamo della venuta di Sua Altezza et
conclusione di questa benedetta pace.
Et per conto degli beneficii, no credo
esser espediente di restituirli a quelli che
anticamente ne hanno [havute]446 le provisioni
etiandio di Sua Santità, perchè ancora che
fossero capaci per la cura dell'anime in luoghi
pacifici, moltissimi tuttavia, per luoghi di
guerra et contrasto non sono sofficienti, se non
mettessero altri capaci in luogo loro447. Et
importa infinitamente in questo principio di far
cosa illustre et compita, per esser quella
provincia di Ciablais a petto de tanti heretici.448
Non è tempo di dar quelli avisi ch' io
promisi449, sin tanto che sii in pace questo
desolato paese ; et allora no mancarò di farlo
con ogni studio et colla divotione ch' io devo
al servitio di santa Chiesa450, et forse
portandoli [197] io stesso a V. S. Illma,
allaquale priegho continuamente dal Signore
Iddio ogni contento, essendo,
Di Sua Paternità Illma et Rma,
Perpetuo et divotissimo servitore,
FRANCO DE SALES,
indegno Prævosto della Cathedrale di Geneva.
Di Anessi, alli 6 di Majo 1596.
comme du souvenir que vous avez eu de moi
en la nécessité dans laquelle je me trouve
d'obtenir la licence de lire les livres défendus.
J'attends encore cette permission aussi bien
que la dispense pour le mariage contracté entre
parents. Je ne puis néanmoins indiquer à Votre
Seigneurie Illustrissime, ainsi qu'elle me l'a
ordonné, les noms, prénoms, patrie et diocèse
des intéressés, faute d'avoir reçu la réponse de
leur curé qui demeure assez loin.
Quant aux fruits de salut qui se
produisent et se multiplient de plus en plus
dans le Chablais, je ne puis vous donner des
renseignements détaillés, ni vous envoyer la
liste des convertis, car je l'ai laissée à Thonon.
J'espère vous annoncer bientôt des nouvelles
qui seront pour Votre Seigneurie Illustrissime
le sujet d'une joie parfaite, si on nous procure
le moyen d'envoyer un nombre convenable de
[196] prédicateurs en cette province. Nous
attendons ce résultat de la venue de Son
Altesse et de la conclusion de cette bénite paix.
Et pour ce qui est des bénéfices, je ne
crois pas expédient de les rendre à ceux qui
précédemment en avaient été pourvus, même
par Sa Sainteté, à moins qu'ils ne mettent à leur
place d'autres prêtres capables. Encore qu'ils
fussent aptes au ministère des âmes dans les
lieux où tout est en paix, beaucoup d'entre eux
toutefois ne sauraient s'en acquitter
convenablement où l'on doit lutter et
combattre. Il importe infiniment de prendre
des mesures éclatantes et absolues, cette
province de Chablais étant environnée d'un si
grand nombre d'hérétiques.
Ce serait hors de propos de vous
communiquer les renseignements promis,
jusqu'à ce que la paix soit rendue à ce pays
désolé. Je le ferai alors avec le plus grand soin,
avec tout le dévouement que je dois au service
de la sainte Eglise, et peut-être pourrai-je les
440 prohibiti, et della
441 però dargli il nome, cognome et dioccesi, come mi commandava per fargli la gratia
442 un poco lontano di qua ; ma di subito ch' io l'havero non manchera di dargliene certezza.
443 Quanto poi alla informatione delli
444 in Tonon ; fra poco spero di farne a V. S. Illma un' allegressa piena
445 in quelle parrochie et
446 ne hanno havute
447 in luoghi pacifici, tuttavia, per luoghi di guerra et contrasto non sono soffìcienti.
448 et compita in quei luoghi che sono tanto a petto de tanti heretici. Che se nella conversione di questa provincia
si fara compitamente con quello zelo che si deve, si deve insieme sperare gran moto in tutte le provincie vicine.
449 quelli avisi che ho promessi a V. S. Illma
450 di Dio
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14.9 Page 139

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A l'Illmo et Revermo Sigr mio osservandissimo, porter moi-même à Votre Seigneurie
Monsigr l'Arcivescovo di Bari, Illustrissime. [197]
Nuntio Apostolico appresso di Sua Altezza.
Je prie sans cesse le Seigneur notre
Turino. Dieu de vous combler de toute sorte de
contentement, demeurant,
Revu sur l'Autographe conserve à Rome, De Votre Paternité Illustrissime et
Archives du Vatican.
Révérendissime,
Le perpétuel et très dévoué serviteur,
FRANÇOIS DE SALES, indigne Prévôt de la
cathédrale de Genève.
Annecy, le 6 mai 1596.
_____
LXXI. A Monsieur d'Avully451 Envoi d'un commentaire de saint
Jérôme. Joie d'apprendre la conversion de Mme de Rovorée.
Attente de l'arrivée du duc à Thonon.
Sales, 10 mai 1596.
Monsieur,
Je vous envoye le commentaire de saint Hierosme452 tout au long, duquel ont estés tirees
les paroles qui [198] vous faysoyent difficulté453. Il est clair et net, plein de doctrine catholique,
puysque la parole de l'Apostre454 demeure : Quæ seminaverit homo, hæc et metet. Et le secours
que les ames qui sont en Purgatoire reçoyvent, n'est autre qu'une recompense de la communion de
l'Eglise en laquelle les personnes chrestiennes meurent, communion par laquelle elles ont merité
d'estr' aydëes par nos prieres. Et c'est la ou se rapporte la premiere partie du commentaire, quand
il dict : « Mortui vero nihil valent adjicere ; » c'est a dire, ilz ne peuvent plus acquerir de merites
ni de justice, mais ilz peuvent bien percevoir le fruict de celle quilz ont eu en ce monde, et en vertu
de la communion des Saintz, en laquelle ilz sont decedés, peuvent estr'aydés par les prieres,
ausmones et satisfactions. Le dernier sens quil apporte du chien mort et lion vivant455 est mistique
451 Antoine de Saint-Michel, seigneur d'Avullv, Montfort, Vigny, la Chapelle, baron d'Hermance après la mort de son
beau-frère, François-Melchior de Saint-Jeoire (1595), était un des personnages les plus marquants du pays par
l'ancienneté de sa maison, l'importance des fiefs qu'il possédait en Chablais, et par l'illustration qu'il s'était acquise
dans les armes et dans les lettres. Il avait été longtemps le principal appui du protestantisme et demeurait encore juge
du consistoire de Thonon. Son âme droite et loyale fut ébranlée en assistant au premier sermon de saint François de
Sales (24 juin 1593) ; dès lors il chercha la vérité, et, non content de l'embrasser dès qu'elle lui fut connue, il seconda
activement le courageux Apôtre entre les mains duquel, d'après plusieurs contemporains, il aurait abjuré l'hérésie à
Thonon. Toutefois la cérémonie solennelle de son abjuration eut lieu à Turin, le 26 août 1596, en présence du Nonce
apostolique et de l'Inquisiteur. Le seigneur d'Avully épousa en premières noces (3 janvier 1573) Jeanne-Andrée de
Saint-Jeoire, fervente catholique qui contribua beaucoup à sa conversion, et en secondes noces (contrat dotal du 10
octobre 1608), Florise de Boyvin, baronne du Villars. Il mourut en 1610, âgé d'environ cinquante-neuf ans.
On a de lui quelques ouvrages de peu d'étendue, entre autres :
Copie de la lettre du Seigneur d'Avully touchant la dispute des ministres avec le R. P. Cherubin, prescheur
de l'Ordre des Capucins. MDCVIII.
Armes offensives et defensives contre les lhretiques calvinistes, par messire Antoine de Sainct Michel,
gentilhomme savoysien, seigneur d'Avully. Tonon, Marc de la Rue, 1602.
452 In Eccles., ad cap. IX.
453 Cet extrait de saint Jérôme, écrit de la main d'un secrétaire, est joint à l'Autographe de la présente lettre ; on a jugé
à propos de le reproduire ci-après.
454 Galat., ult., 8.
455 Eccles., IX, 4.
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14.10 Page 140

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ou allegorique ; mays vous considereres mieux que moy tout cecy.
J'ay eu ceste bonne nouvelle que madame de Ravoyrëe456 et sa fille de chambre avoyent
abjuré l'heresie. [199] Je ne sçai si elles auront esté instruittes a plein fons, et partant je vous
supplie, ou par lettre ou autrement, les consoler. Que si l'occasion se praesentoit, je voudrois bien
sçavoir s'il leur sera point demeuré de scrupule, car il est mal aysé a personnes qui ne sçavent pas
poiser la fermeté de la vraÿe Eglise de demordre ainsi tout a coup. Or, Monsieur, c'est chose vostre,
que je ne vous dois pas recommander si je ne vous estois tant serviteur que je suis.
Je languis en ceste si longu'attente de Son Altesse, laquelle ne venant pas ceste prochaine
semayne, comme on prætend, je retourneray a Thonon pour l'attendre. Ce pendant j'y envoye mon
cosin457. Monseigneur le Nonce m'escrit que Son Altesse est tres bien resolue pour le revenu des
benefices et affectionnëe a ceste besoigne.
Je prie Dieu nostre Createur quil nous face vivr'et mourir pour son service, et vous supplie
croire que je suys,
Monsieur,
Vostre humble serviteur,
FRANÇS DE SALES.
A Sales, le 10 may 96, ou je bayse les mains de madame vostre compaigne et de toute
vostre honorable brigade.
Revu sur l'Autographe conservé à la Visitation d'Annecy.
_____
Extrait du commentaire de Saint Jérôme
(Voir la note (453) de la page précédente)
Est confidentia quoniam canis vivens melior est leone mortuo ; quia viventes sciunt quod
moriantur et mortui nesciunt quicquam458, etc. Quia supra dixerat459 cor filiorum hominum impleri
malitia et procacitate, et post hæc omnia morte finiri, nunc eadem complet, et repetit : donec vivunt
homines eos posse fieri justos, post mortem vero nullam boni operis dari occasionem. Peccator
enim vivens potest melior esse justo mortuo si voluerit in ejus transire virtutes ; vel certe, eo qui
se [200] in malitia, potentia, procacitate jactabat et mortuus fuerit, melior potest quis pauper esse
et vilissimus. Quare ? Quia viventes, metu mortis, possunt bona opera perpetrare ; mortui vero
nihil valent ad id adjicere quod semel secum tulere de vita, et oblivione obvoluta sunt omnia ; juxta
illud quod in Psalmo scriptum est460 : Oblivioni datus sum tamquam mortuus a corde. Sed et
dilectio eorum et odium et æmulatio, et omne quod in seculo habere potuerunt, mortis finitur
adventu ; nec juste quippe possunt agere nec peccare, nec virtutes adjicere nec vitia.
Licet quidam huic expositioni contradicant, asserentes etiam post interitum excrescere nos
posse et decrescere, et in eo quod nunc ait461 : Et pars non erit eis adhuc in seculo, in omni quod
factum est sub sole, ita intelligunt ut dicant eos in hoc seculo, et sub hoc sole quem nos cernimus,
nullam habere communionem, habere vero sub alio seculo (de quo Salvator ait : Non sum ego de
hoc mundo462) et sub sole justitiæ463 ; et non excludi opinationem quæ contendit, postquam de hoc
seculo migraverimus, et offendere posse creaturas rationales et promereri. Aliter referebat mihi
456 Madeleine de Saint-Michel, fille du seigneur d'Avully et de Jeanne-Andrée de Saint-Jeoire, avait épousé François
de la Fléchère, seigneur de Rovorée ou Ravorée, en Faucigny. Elle était veuve en 1623.
457 Le chanoine Louis de Sales, à qui une note biographique sera consacrée plus loin.
458 Eccles., IX, 4-6.
459 Vers. 3.
460 Ps. XXX, 13.
461 Cap. cit., v. 6.
462 Joan., VIII, 23.
463 Sap., V, 6.
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15 Pages 141-150

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15.1 Page 141

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Hebræus versiculum istum in quo dicitur : Melior est enim canis vivens super leonem mortuum,
ita apud suos exponi : utiliorem esse quemvis indoctum, et eum qui adhuc vivat et doceat
præceptore perfecto qui jam mortuus est. Verbi causa, ut canem intelligerent unum quemlibet de
pluribus præceptorem, et leonem Moysem aut alium quemlibet Prophetarum.
Sed quia nobis hæc expositio non placet, ad majora tendamus ; et Chananæam illam cui
dictum est : Fides tua te salvam fecit, canem esse juxta Evangelium464 dicamus, leonem vero
mortuum circumcisionis populum, sicut Balaam Propheta dicit465 : Ecce populus ut catulus leonis
consurget, et ut leo exultavit. Canis ergo vivens nos sumus, ex nationibus ; leo autem mortuus
Judæorum est populus, a Domino derelictus : et melior est apud Dominum iste canis vivens quam
leo ille mortuus. Nos enim viventes cognoscimus Patrem et Filium et Spiritum Sanctum ; illi vero
mortui nihil sciunt, neque expectant aliquam repromissionem atque mercedem, sed completa est
memoria eorum ; neque ipsi meminerunt quæ scire debuerant, neque illorum jam Dominus
recordaturus est. Dilectio quoque qua aliquando Deum diligebant periit ; et odium, de quo audacter
loquebantur466 : Nonne odientes te, Domine, odivi et super inimicos tuos tabescebam ? necnon et
zelus eorum, juxta quem Phinees zelatus est467 et Mathathiæe intremuerunt poplites468. Perspicuum
est autem quod et pars eorum non est in sæculo ; non enim possunt dicere : Pars mea Dominus469.
[201]
_____
LXXII. A Monseigneur Jules-César Riccardi, Archevêque de
Bari, Nonce Apostolique a Turin (Minute inédite). Calomnies
répandues à la cour de Savoie contre M. d'Avully et l'Apôtre du
Chablais. Abandon dans lequel on laisse ce dernier. Désir
de faire un voyage à Turin.
Thonon, septembre 1596.
Illustrissimo et Reverendissimo Signor
Mon très honoré, Illustrissime et
mio osservandissimo,
Révérendissime Seigneur,
Hebbi hieri da monsieur di Avully la lettra che
si compiacque V. S. Illma di farmi alli 27 di
Agosto, con intera et perfetta allegrezza del
contento eh' essa hebbe nella reconciliatione di
questo cavagliero. Speravo ch'egli havrebbe
dato conto al Serenissimo Prencipe di quel
poco che sin adesso habbiam potuto fare qui in
questo paese, et di quanto è necessario per
veder fra pochi mesi questa benedetta opra
compita et perfetta. Ma, per quanto mi ha
detto, fu avertito che470 non mancavano
calomniatori in quella corte, et della sua
Je reçus hier, par M. d'Avully, la lettre
que Votre Seigneurie Illustrissime eut la bonté
de m'écrire le 27 août, et j'éprouvai une entière
et parfaite allégresse du contentement que vous
donna la conversion de ce chevalier. J'espérais
qu'il aurait rendu compte au Sérénissime
Prince du peu qu'il nous a été possible de faire
jusqu'ici dans ce pays, et de ce qui est
nécessaire pour voir en peu de mois cette
bénite œuvre achevée et affermie. Mais,
d'après ce qu'il m'a dit, on l'a prévenu qu'il ne
manquait pas de gens à cette cour pour
464 Matt., XXVI, 28.
465 Num., XXIII, 24.
466 Ps. CXXXVIII, 21.
467 Num., XXV, 13.
468 I Mac., II, 24.
469 Thren., III, 24.
470 che [al modo delle corti,]
141/318

15.2 Page 142

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conversione alla santa Chiesa, et della mia
intentione in471 queste mie poche [202] fatiche
; et per questo hebbe opinione di non poter
commodamente esser creduto, sì che lasciò di
parlarne più. Il che mi fa tanto magiormente
desiderar d'inviarme per Torino, acciò possa
havere risolutione del beneplacito di Sua
Altezza sopra questo tanto importante
negotio472.
Et se si darà l'ordine pronto come si
conviene, ritornarò certo et sicuro di veder ben
presto lieta raccolta di migliaia d'anime ; se per
contrario no si darà, pigliarò la benedittione di
V. S. Illma et Rma et licentia di abandonnar
questa impresa per altri più capaci, chè mi
sento spezzar il cuore di veder le parrochie
intere desiderar di esser satiate della santa
dottrina catholica et non poterli (sic)
provedere, per non havere il modo per inviare
a quest' opra numero sofficiente de predicatori
et pastori. Nò posso più io solo restare qui per
esser favola delli nemici, i quali vedendo non
si dar altr' ordine, sprezzano tanto più il mio
ministerio, del quale nientedimeno io ad ogni
modo devo esser zeloso.
Quanto poi alli calomniatori, spero che
in fine si cognoscerà, et lo sa Iddio benedetto,
che quanto a questo [203] io da ogni ambitione
sono libero, nè con queste poche fatiche cerco
di esser cognosciuto da' superiori se non
quanto basta per esseguire questo servitio et
altri così fatti. Et contro de tutte queste lingue,
ho sufficiente protettione nella bontà di V. S.
Illma ; nè spruzaranno giamai i calomniatori
tante aque de maledicentie che possano
estinguere il zelo del quale arde il serenissimo
cuore delle loro Altesse.
Della conversione di monsieur
d'Avully già ne scrissi ultimamente a V. S. Illma
et glie ne darò conto più particolar ; chè invero
non a luy (sic) solo et a me, ma ancora al
general di questo negotio, fanno gran
prejuditio questi tali maledicenti ; et in questo
sonno favorevoli agli hæretici, quali vanno
calomniando tutte le conversioni che si sonno
fatte a' tempi nostri, per impedir l'effetto che
suol far l'essempio dei primi nelle conscientie
del popolo. Ma sopra questo et molte altre cose
per servitio di Iddio et di santa Chiesa, spero
che presto V. S. Illma et Rma me darà udientia
calomnier sa conversion à la sainte Eglise, et
mon intention dans [202] ce peu de fatigues
que j'ai soutenues. Il se persuada pour cette
raison qu'il n'aurait pas été cru facilement ;
aussi laissa-t-il d'en parler davantage. C'est ce
qui me fait toujours plus désirer d'aller moi-
même à Turin afin d'obtenir une déclaration du
bon plaisir de Son Altesse sur cette affaire si
importante.
Que si, comme il convient, on donne
promptement des ordres, je reviendrai sûr et
certain de voir bientôt mûrir une heureuse
moisson de plusieurs milliers d'âmes ; si au
contraire on ne les donne pas, je demanderai
votre bénédiction et la permission
d'abandonner cette entreprise à d'autres plus
capables que moi. J'ai le cœur brisé de me voir
hors d'état de satisfaire des paroisses entières
qui désirent être rassasiées de la sainte doctrine
catholique, faute d'avoir les moyens de leur
envoyer à cet effet un nombre suffisant de
prédicateurs et de pasteurs. Je ne puis plus
rester seul ici pour devenir la fable de nos
ennemis, qui, voyant qu'on ne donne plus
aucun ordre, méprisent mon ministère, dont
cependant je dois être jaloux de toute manière.
Quant aux calomniateurs, j'espère qu'à
la fin on connaîtra, et Dieu [203] le sait,
combien en ceci je suis libre de toute ambition,
et que, par ces quelques travaux, je ne cherche
pas à être bien vu de mes supérieurs, sinon
autant qu'il le faut pour remplir cette mission
et d'autres semblables. Contre toutes ces
langues je trouve une protection suffisante
dans la bonté de Votre Seigneurie ; du reste, les
calomniateurs ne lanceront jamais les eaux de
leurs détractions avec tant de profusion
qu'elles puissent éteindre le zèle dont brûle le
cœur de leurs Altesses Sérénissimes.
J'écrivis dernièrement à Votre
Seigneurie au sujet de la conversion de M.
d'Avully, et je vous en rendrai un compte plus
particulier encore ; car vraiment ce n'est pas
seulement à lui et à moi, mais c'est au général
de la mission, que ces médisants portent un
grand préjudice. Ils sont en cela favorables aux
hérétiques, qui calomnient toutes les
conversions opérées de notre temps afin
d'empêcher l'effet que produit ordinairement
l'exemple des plus notables sur les consciences
471 in [questa mia fatica. Il che lo trattenne un poco piu...]
472 Le Saint partit effectivement pour Turin au commencement d'octobre.
142/318

15.3 Page 143

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con queir amorevolezza colla [204] quale si du peuple. Mais pour ceci et beaucoup d'autres
degna di invitarme al suo palazzo, acciò che473 choses qui regardent le service de Dieu et de la
io possi avantarme (sic) poi no solo di esser sainte Eglise, j'espère que bientôt Votre
suo divotissimo et humilissimo, come sono, Seigneurie me donnera audience selon cette
ma ancora domestico servidore. Come tal, bienveillance avec laquelle elle daigne
bascio humilissimamente le reverendissime m'inviter en son palais, afin que je puisse [204]
mani et resto,
m'honorer non seulement d'être, comme je le
Di V. S. Illma, suis, votre très humble et tout dévoué, mais
Ubedientissimo et indegnissimo servo, encore votre serviteur familier. En cette qualité
F. DE S. P. je baise humblement vos mains vénérées et
reste,
Revu sur l'Autographe conserve à la
De Votre Seigneurie Illustrissime,
Visitation de Rennes.
Le très obéissant et très indigne serviteur,
FRANÇOIS DE SALES, Prévôt.
_____
LXXIII. Au même. Instances pour obtenir le rétablissement du
culte catholique dans quelques paroisses du Chablais.
Sales, 14 novembre 1596.
Illustrissimo et Reverendissimo Signor
Mon très honoré, Illustrissime et
mio osservandissimo,
Révérendissime Seigneur,
Questa ritardatone della conclusione di
pace474 me fa gran dubbio che Sua Altezza
Serenissima no differisca [205] l' aiuto che se
deve dar a quell' anime di Chiablais ; et no
sapendo di dove rivolgermi, supplico
humilissimamente V. S. Illma che per amor di
Dio no permetta ch'io passi costì l' advento di
Nostro Signore senza vederlo venuto in quelle
contrade ; anzi procuri, colla solita carità, che
almanco in tre o quattro luoghi si comminci l'
essercitio catholico, se per il freddo no si potrà
più ottenere.
È molto il comminciare : se venirà
piccolo Christo come bambino in queste feste
natalitie, crescerà poi pian piano sino alla
perfetta mesura della plenitudine475. Et in
questo, ad ogni modo non ciè altro pericolo se
non di tralasciare l'impresa et fugire di
Bethleem, in caso che questo trattato di pace se
terminasse in guerra ; il che no solo nel
Chiablais, ma in molti altri luoghi di questa
diocesi traverrebbe. Chi sa se Iddio vuole che
la pace spirituale sii preparatione et
Ce délai apporté à la conclusion de la
paix me fait grandement redouter que Son
Altesse Sérénissime ne diffère de venir au
secours [205] de ces populations du Chablais.
Ne sachant de quel côté me tourner, je supplie
humblement, pour l'amour de Dieu, Votre
Seigneurie de ne pas permettre que l'Avent
s'achève sans que je voie Notre-Seigneur
rentrer en ces contrées. Veuillez donc nous
obtenir qu'on commence l'exercice du culte
catholique au moins dans trois ou quatre
localités, si à cause du froid on ne peut faire
davantage.
C'est beaucoup de commencer : si le
Christ vient à nous comme petit enfant en ces
fêtes de Noël, il grandira ensuite peu à peu
jusqu'à la parfaite plénitude de la maturité. Et
en cela, il n'y a de toute façon aucun péril à
courir, si ce n'est celui d'abandonner
l'entreprise et de fuir de Bethléem, au cas où
ces négociations de paix aboutiraient à une
guerre ; ce qui traverserait [les intérêts de la
religion] non seulement en Chablais, mais dans
473 acciò che [si come io gia ad ogni modo glie sono devotissimo et humilissimo servidore, cosi ancora...]
474 Voir ci-devant note (431), p. 186.
475 Ephes., IV, 13.
143/318

15.4 Page 144

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fondamento alla temporale.
Son in procinto di passare in Tonone,
quantunque io sia certo di esser favola delli
nemici, sin tanto che ci venga l'ordine di Sua
Altezza, il quale io sempre, lieto et sicuro,
vado aspettando, mentre mi ricordo del zèlo
[206] ardentissimo che V. S. Illma adopra in
questa sollecitatione, alla quale pertanto no
raccommando più il negotio. Solo dirò che la
speranza che si differisce affligge
incredibilmente l'anima mia476 et de molti
buoni Catholici, massime delli principianti, et
sarà forse causa d'afflittione æterna a molt'
altre.
Finisco con prieghar il Signore che ci
conservi V. S. Illma, della quale io sono
eternamente
Humilissimo et devotissimo servidore,
FRANCO DE SALES,
Prevosto di Geneva.
Di Sales, casa paterna mia, alli 14 9bre
1596.
All' Illmo et Rmo Sigr mio osservandissimo,
Monsigr l' Arcivescovo di Bari,
Nuntio Apostolico appresso S. A. Serenma.
Turino.
plusieurs autres lieux de ce diocèse. Qui sait si
Dieu ne veut pas que la paix spirituelle soit la
préparation et le fondement de la temporelle ?
Je suis sur le point de me rendre à
Thonon, bien que je sois certain d'être la fable
de nos ennemis jusqu'à ce que nous arrive
l'ordre de Son Altesse. Je l'attends toujours
avec joie et assurance, me [206] souvenant du
zèle très ardent que Votre Seigneurie déploie
dans cette poursuite ; je crois donc superflu de
la lui recommander encore. Je dirai seulement
que l'espérance différée afflige
incroyablement mon âme et celles de beaucoup
de bons Catholiques, surtout des nouveaux
convertis ; peut-être même sera-t-elle la cause
de la désolation éternelle d'un grand nombre
d'autres.
Je termine en priant le Seigneur de nous
conserver Votre Seigneurie Illustrissime, de
laquelle je suis pour jamais
Le très humble et très dévoué serviteur,
FRANÇOIS DE SALES,
Prévôt de Genève.
De Sales, ma maison paternelle, le 14
novembre 1596. [207]
Revu sur une copie authentique conservée à
Rome, Archives du Vatican. [207]
_____
476 Prov., XIII, 12.
144/318

15.5 Page 145

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LXXIV. Au sénateur Antoine Favre (Minute). Désir de lui voir
accepter la charge de Président du Conseil de Genevois.
Délais apportés aux affaires du Chablais. Projet d'un
pèlerinage au tombeau de saint Claude.
Annecy, 23 ou 24 novembre 1596 477.
Miraberis et merito fateor, mi Frater,
me totis iis octo quibus [Necii] fui diebus nihil
ad te dedisse litterarum. At ne propterea crede,
quæso, nihil me dedisse cogitationum qui meæ
menti unus perpetuo obversaris ; sed tot
undique sum obrutus negotiis, et dico candide,
ut Necii nunquam mihi firmus fuerim. Nunc
vero in profectionis articulo, quod a mora non
potui, ab ipso discessu otium hoc scribendi
quale quale est expressi.
In Ducis nostri Gebennensium mente et
ore eo es imprimis loco ut meliore vix esse
possit quisquam, et si permittas intelligi te (sic
enim de more aulico loquor) [208] Præsidem,
hic non optatissimum modo, sed his
temporibus necessarium sumus habituri. Plura
nequeo per epistolam et atramentum478.
Vidi summa mea voluptate fratrem
nostrum479 ; nihil suavius, candidius, politius.
Ita tamen vidi ut vix vidisse dici possim, cum
enim ad extremum diei crepusculum
convenissemus, magis utrimque audivimus
quam vidimus, etsi per duas horas simul
fuimus.
De re nostra Tononiensi quid dicam, mi
Frater ? Dominus de Jacob480 mira dedit in
promissis. Undique captamus occasiones
Principis hac in causa gratiam serio ineundi :
per Nuntium Apostolicum, per Jesuitas, per
Cappucinos. Incæperam bene sperare, sed de
bello audio nescio quid quod meæ spei
negotium facessit. Verum iis Deus optimus
maximus pro sua pietate moderabitur. [209]
Scribam
quam
primum
peregrinationem ad Divi Claudii reliquias
absolvero, quam post concionem diei
Vous serez étonné, mon Frère, et avec
raison, que j'aie pu passer huit jours à Annecy
sans vous donner de mes lettres ; mais ce n'a
pas été sans vous donner de mes pensées, car
vous êtes perpétuellement présent à mon
esprit. Les affaires m'assiégeaient de toutes
parts, à tel point que, je vous le dis en parfaite
sincérité, je ne me suis pas appartenu un seul
instant à Annecy. Maintenant toutefois
j'obtiens au moment du départ ce que je n'ai pu
me procurer en le différant : le loisir de vous
écrire un mot n'importe comment.
Vous occupez la première place dans
l'estime de notre duc de Genevois, et il ne porte
personne aussi haut que vous dans ses
louanges. [208] Si vous permettez que l'on
vous considère comme Président (c'est ainsi
que je parle à la façon des hommes de cour),
nous aurons un Président non seulement très
désiré ici, mais tel qu'il nous le faut dans les
circonstances où nous nous trouvons. Je ne
puis vous en dire davantage par le moyen de
l'encre et du papier.
J'ai vu notre frère avec une très grande
satisfaction : on ne saurait trouver quelqu'un de
plus aimable, de plus simple, de plus gracieux.
Cependant c'est à peine si je puis dire l'avoir
vu, car notre rencontre eut lieu en plein
crépuscule, de telle sorte que nous nous
sommes entendus plutôt que nous ne nous
sommes vus, bien que nous ayons passé deux
heures ensemble.
De notre affaire de Thonon, que vous
dirai-je, mon Frère ? M. de Jacob nous a fait
les plus belles promesses. Nous saisissons
toutes les occasions d'intéresser le prince à
477 La corrélation étroite qui existe entre cette lettre et celle du sénateur Favre du 21 novembre 1596 (voir à
l'Appendice), prouve qu'elles ont été écrites à la même époque.
478 Cf. II Joan., v. 12, III, v. 13.
479 Il s'agit probablement de l'un des frères du sénateur Favre ; nous les rencontrerons souvent dans la suite de la
correspondance de saint François de Sales.
480 Guillaume-François de Chabod, seigneur de Jacob, gouverneur de Savoie. Ce personnage étant l'un des
correspondants du Saint, sa note biographique sera donnée en regard de la première lettre qui lui est adressée.
145/318

15.6 Page 146

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Dominicæ Tononi, Deo dante, faciendam, notre cause, soit par l'entremise du Nonce
incipiam.
apostolique, soit par celle des Jésuites et des
Bene vale, Frater suavissime, et me Capucins. Je commençais à espérer un succès
quod facis ama. Unicum id erit hoc tam acerbo favorable, mais j'entends je ne sais quelles
tempore oblectamentum.
annonces de guerre qui ébranlent mes
Necii.
espérances. Dieu très bon et très grand
disposera de tout dans sa miséricorde. [209]
Revu sur l'Autographe conservé à la
Je vous écrirai après le pèlerinage que
Visitation d'Annecy.
je me propose de faire aux reliques de saint
Claude. Je partirai, s'il plaît à Dieu, après le
sermon que je dois prêcher Dimanche à
Thonon.
Adieu, mon très doux Frère, aimez-moi
toujours comme vous le faites ; c'est la seule
consolation que j'aie en ces temps malheureux.
Annecy.
_____
LXXV. A un cousin (Inédite). Témoignages d'affection.
Annecy est menacé de la peste. Message pour le P. de Lorini.
Coursinge, 25 novembre 1596.
Monsieur mon Cosin,
Je vous escris avec cest'asseurance que le peu de loysir et de commodité que j'ay ne vous
empechera pas de croire a bon escient que vous n'aves point de parent qui soit plus vostre
affectionné que je suis.
Madame vostre mere, ma cosine, se porte tres bien, Dieu mercy. A Necy il y a eu quelque
soupçon de contagion, mays ce ne sera rien, Dieu aydant. Je ne sçay si [210] le R. P. Jan de Lorini
se resouviendra point de moy ; a toutes fortunes je vous prie le saluer de ma part.
J'ay voulu vous saluer par ce mot de mauvays ancre et de mauvays papier, mais avec autant
de bonne affection que peut et doit un qui desire de vous estre irrevocablement,
Monsieur mon Cosin,
Vostre tres humble et affectionné serviteur et cosin,
FRANÇOIS DE SALES,
Prævost de St Pierre de Geneve.
A Coursinge, le jour sainte Catherine 1596, ou je salue tres affectionnement messieurs nos
cosins.
Revu sur une copie déclarée authentique, conservée à Turin, Archives de l'Etat.
_____
146/318

15.7 Page 147

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LXXVI. Au sénateur Antoine Favre (Inédite). Recommandation
en faveur de M. de Coursinge.
Fin novembre 1596.
Monsieur mon Frere,
L'obligation que j'ay d'affectionner le service de monsieur de Coursinge481 faict que
sçachant qu'il alloit au Senat pour un sien affaire d'importance, je vous supplie que son droict vous
soit en recommandation. Et bien que la singuliere recommandation en laquelle vous aves la justice
soit un'inseparable proprieté de vostre vie et qui [211] vous rend digne de recommandation
immortelle, si est ce que pour rendre l'amitié de laquelle vous m'honnores et l'honneur que je vous
porte plus recommandable, j'ay deu, ce me semble, vous faire, et vous prie de recevoir, ceste
humble recommandation qui part de celuy qui ne pense en rien estre recommandable qu'en
l'honneur qu'il a d'estre advoué de vous,
Monsieur mon Frere,
Vostre tres humble et tres affectionné
frere et serviteur.
Revu sur le texte inséré dans le Ier Procès de Canonisation.
_____
LXXVII. A Monseigneur Jules-César Riccardi, Archevêque de
Bari, Nonce Apostolique a Turin. Réclamations au sujet d'un
legs fait à trois églises de Savoie.
Thonon, 29 novembre 1596.
Illustrissimo et Reverendissimo Signor
Mon très honoré, Illustrissime et
mio osservandissimo482,
Révérendissime Seigneur,
La bontà di V. S. Illma mi fa tuttavia
maggior animo di adoprare483 i suoi favori.
Furono legati ciè un pezzo [212] da un
gentilhuomo Savoyano habitante in Roma,
chiamato il signor Vignodi484, 400 scudi per
due chiese485 di questa diocesi et 200 per
La bonté de Votre Seigneurie
Illustrissime m'encourage toujours plus à me
prévaloir de ses faveurs. Un gentilhomme
savoisien, [212] nommé M. de Vignod,
habitant à Rome, légua, il y a longtemps,
quatre cents écus à deux églises de ce diocèse,
481 Il s'agit selon toute vraisemblance d'Annibal de Genève, seigneur de Coursinge ou Cursinge, Cervens et Draillans,
capitaine d'une compagnie sous le marquis de Treffort (10 février 1594). Il avait épousé Lucrèce Roëro. Son testament
est daté du 7 juin 1599.
482 [Les variantes qui suivent sont extraites d'une minute insérée dans le Ier Procès de Canonisation.]
colendissimo
483 addomandargli
484 « Magnifique Jean de Vignod, docteur en l'un et l'autre droit, » frère du seigneur de Planaz (voir ci-devant, note
(2), p. 180), avait été dans sa jeunesse pourvu d'un canonicat, des cures de Pers et d'Eloise dans le diocèse de Genève,
et de celle de Hauteluce dans le diocèse de Tarentaise. Ne se sentant pas d'attrait pour l'état ecclésiastique, il résigna
ces bénéfices et s'établit à Rome, où il mourut en 1594. Dans son testament (9 septembre 1585), il avait fait aux trois
paroisses indiquées ci-dessus les legs que leur contestait la Chambre apostolique. (Archives de la Visitation d'Annecy,
Collection Vuÿ.)
485 chiese parrochiali
147/318

15.8 Page 148

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un'altra di Tarentasia. Hora essendovi, per
quanto si dice, un statuto in Roma che i legati
ad piam causam che no si pagano fra l'anno si
riduccano ad utiltà della486 fabrica di Roma, gli
soprastanti di quella fabrica, vedendo quelli487
legati non essersi pagati nel tempo prescritto,
vogliono ritirarli di là488. Supplico adunque
humilissimamente V. S. Illma si degni scriverne
a chi essa giudicarà più giovevole, acciò no
sian private queste tanto povere chiesuole di
qua di quello aiuto che da quelli legati glie può
venire489 ; [213] chè in questo vi sonno da farsi
queste considerationi. L'una, che i curati di
queste chiese non han havuto noticia de'detti
legati se non da poco tempo in qua, et manco
di detto statuto romano, in che sonno stati in
ignorantia invincibile ; l'altra, che se bene vi
fosse crassa ignorantia de'detti curati, le
parrochie nè le490 chiese non hanno da patirne
il danno et castigo. Oltre poi che è litigiosa
quella heredità, nè è ancora finita la lite491, et
si deve haver rispetto alla calamità492 che ha
sin adesso fermati i passi d'Italia ; nè eran
ubligati questi curati di villa a mandare per
haver passaporti da Sua Altezza493, chè a
questo modo i legati si sariano dileguati in
spese, nè hanno ingegno di farlo. [214]
Mosso da queste ragioni et della
compassione della povertà di queste chiese,494
ardisco di far' a nome loro questa supplica a V.
S. Illma. Nè lasciarò di pregarla con ogni
humiltà che seguiti col solito zelo di instare
alla fabrica spirituale di questo Chiablais
appresso di Sua Altezza Serenissima, laquale
se in cosa veruna vuole adoprare la sua
hereditaria pietà495, lo può et deve fare con496
et deux cents à une autre de Tarentaise. Or, il
existe à Rome, à ce que l'on dit, un décret
d'après lequel les legs pour oeuvres pies qui ne
sont pas acquittés dans le cours de l'année,
doivent être appliqués à la fabrique de [Saint-
Pierre de] Rome. Les administrateurs de cette
fabrique, voyant que ces legs n'ont pas été
payés au temps marqué, prétendent les retenir.
Je supplie donc très humblement Votre
Seigneurie de vouloir bien écrire à qui de droit,
afin que ces si pauvres petites églises de notre
pays ne soient pas privées du secours qui peut
leur revenir de ces legs. Il faut faire à ce sujet
les considérations [213] suivantes : l'une, que
les curés de ces églises n'ont eu que depuis peu
de temps connaissance de ces legs et qu'ils
connaissaient moins encore le décret romain ;
c'est donc de leur part une ignorance
invincible. L'autre, que si les susdits curés ont
été dans une ignorance crasse, ce n'est pas aux
paroisses ni aux églises à en subir le dommagé
et la peine. En outre, cet héritage est contesté,
le procès n'est pas terminé. L'on doit aussi
avoir égard à la calamité qui a jusqu'ici fermé
les passages d'Italie ; ces curés de campagne
n'étaient pas obligés à des démarches pour
obtenir des passeports de Son Altesse, car ainsi
ces legs auraient été consumés en dépenses
qu'ils ne sont pas en mesure de faire. [214]
Pressé par ces raisons et par la
compassion que m'inspire la pauvreté de ces
églises, j'ose adresser en leur nom cette
supplique à Votre Seigneurie. Je ne laisserai
pas de la prier en toute humilité de poursuivre,
avec son zèle accoutumé, les instances auprès
du duc pour la restauration spirituelle de cette
486 ad piam causam se non si pagano fra l'anno sonno applicati alla
487 questi
488 vogliono ritirarli ad uso della fabrica romana, et privarne queste tanto rovinate et mal fabricate chiesuole.
489 a chi essa vedera esser piu espediente, accio sian lasciati quelli denari a queste tanto rovinate et mal fabricate
chiesuole di qua
490 considerationi legittime. L'una, che li curati di quelle chiese non hanno saputo se non da poco tempo in qua la
morte del legatore et il statuto di Roma, et questo con ignorantia invincibile ; l'altra, che etiandio che vi fosse
negligentia supina de' curati, le parrochie, cioè i popoli de' quali sonno dette
491 Jean de Vignod n'ayant pas d'enfants, avait constitué héritier universel son frère puîné Gabriel, seigneur de Planaz
; mais celui-ci étant mort en 1591, l'héritage revenait de droit à son fils Gaspard, âgé de trois ans. Il fut contesté au
pupille par sa tante, Michelle de Vignod, femme de noble Janus Pensabin ; de là un procès qui se termina en juin 1596,
par un jugement en faveur de Gaspard de Vignod.
492 et castigo. Di piu, che non si sa neancho adesso a chi si hanno da domandare questi legati, perche l'heredita é
litigiosa, né ancora é finita la lite. All' ultimo, si deve havere rispetto alla calamità del tempo
493 di villa di mandare a domandare passaporti a S. A. Serenma
494 di queste chiese, che havrebbono bisogno d'altre restaurationi che di seicento scudi,
495 pietà et far cosa grata al Signore
496 in
148/318

15.9 Page 149

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questa occasione, con prontezza et diligentia province du Chablais. Si Son Altesse veut en
tanto grata a Dio497.
chose aucune témoigner de la piété héréditaire
498Non son ancora stato in Necy per il dans sa Maison, elle peut et doit le faire en
sospetto, se ben adesso no vi è male alcuno499. cette occasion, avec la promptitude et la
Son in procinto di fare la secretta informatione diligence si agréables à Dieu.
che mi ha commessa500, et subito [215] fatta la
Je n'ai pas encore été à Annecy à cause
mandarò di là. In tanto priegho Iddio æterno si des soupçons de peste, bien qu'en ce moment
degni benedire a tante fatighe che V. S. Illma fa il n'y ait aucun cas de cette maladie. Je me
a beneficio nostro et della santa Chiesa, et dispose à faire l'information secrète que vous
basciandoli
humilissimamente
le m'avez confiée, [215] et, aussitôt terminée, je
reverendissime mani, restarò in perpetuo,
vous l'enverrai. En attendant, je prie le Dieu
Di V. S. Illma et Rma, éternel de bénir tant de travaux que Votre
Divotissimo et humilissimo servidore, Seigneurie Illustrissime entreprend pour notre
FRANCO De Sales, bien et pour celui de la sainte Eglise, et, baisant
Prevosto di Geneva. très humblement vos mains vénérées, je
In Tonone de Chiablais, alli 29 di demeurerai à jamais,
Novembre 1596.
De Votre Seigneurie Illustrissime et
All' Illmo et Rmo Sigr mio osservandissimo,
Révérendissime,
Monsigr l'Arcivescovo di Bari, Nuntio
Le très dévoué et très humble serviteur,
Apostolico appresso di S. A. Sma.
François de Sales,
Turino.
Prévôt de Genève.
De Thonon en Chablais, le 29
Revu sur l'Autographe conserve à Rome, novembre 1596. [216]
Archives du Vatican. [216]
_____
497 et diligentia, ché non vi é pericolo nessuno di Stato.
498 Io non sono ancora stato a Necy per il sospetto, se ben adesso ogni pericolo é cessato. In tanto pregho la Bonta
suprema si degni benedire tutte [le] fatighe che si piglia per le cose nostre V. S. Illma, et basciandoli le mani Rme,
restero sempre, di V. S. Illma,
Humilissimo et perpetuo servitore.
499 On ne laissait pas néanmoins de prendre à Annecy diverses mesures sanitaires, ainsi qu'on le voit par le Registre
des délibérations municipales. Ordre avait été donné de construire près de Brogny des cabanes pour y retirer au cas
échéant les pestiférés ; le 27 décembre un nommé Portier est séquestré dans sa maison parce qu'on le soupçonne atteint
de la redoutable maladie, et quatre jours après on lui renouvelle la défense d'en sortir. C'est seulement le 13 janvier
suivant qu'un officier de santé venu de Chambéry constate la cessation de tout danger.
500 Voir ci-après, pp. 222-224.
149/318

15.10 Page 150

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LXXVIII. Au sénateur Antoine Favre (Minute inédite). Espoir
de solenniser à Thonon les fêtes de Noël. Recommandation
en faveur des nouveaux convertis de la paroisse de Mésinge.
Thonon, vers le 7 décembre 1596 501.
Quod optatissimum mihi fuerat,
suavissime Frater, accepi nudius tertius tuas
litteras, incolumitatis tuæ testes, eo etiam vel
maxime jucundas quod de tuo ad nos adventu
aliquam injiciant conjecturam ; ut enim in
maximis desideriis fieri solet, etiam
levissimum rei gerendæ indicium spei
certissimæ vices sustinet. Et quidem si, quod
Deo adspirante futurum speramus, iis in locis
Christus, inter sacros Natalibus suis dies velut
repuerascens, paucosque quos habet hic
fideles, iterum tandem aliquando nascatur,
certissimum mihi est te primum universa de re
admonere, tum vero testem oculatum
advocare. Quod si urbanorum pastorum
colloquia cum [217] rusticanorum societate
non facile commutaveris, at saltem te cum
Orientalibus
Dynastis
venturum
expectabimus. Faxit Deus optimus maximus
uti tantæ felicitatis spem peccata nostra non
antevertant.
Cæterum viri isti Mezingenses, qui, te
præsente, de extremo hæresi remittendo nuntio
mecum egerant in ædibus nostris
Marclianis502, post rectam fidei quam vocant
professionem, immunitatem, quam eo nomine
a Serenissimo Principe consecuti sunt, ad
principalis patrimonii procuratorem503, quo
eam ratam habeant deferunt504. Hos ut
imprimis tua opera et authoritate hoc in
negotio juves etiam atque etiam obtestor ;
quanquam tam sedulus Crucis discipulus, hac
in causa, cohortatione non indiget. Scribo in
eorum commendationem plurimis, sed ea lege
ut si tu e re futuras putaveris, litteras unicuique
statim deferant, sin minus referant easdem…
Revu sur l'Autographe conservé à la
Visitation d'Amiens. [218]
Comme je le souhaitais ardemment,
très aimable Frère, j'ai reçu avant-hier votre
lettre attestant votre bonne santé. Elle m'a fait
d'autant plus de plaisir qu'elle me permet de
conjecturer votre arrivée auprès de nous ; car,
ainsi qu'il advient ordinairement dans les
grands désirs, le moindre indice de leur
réalisation produit une espérance qui tient de la
certitude. Si donc ce que nous attendons
s'effectue par la grâce de Dieu : qu'en ces lieux,
durant les jours consacrés aux fêtes de sa
Nativité, le Christ, redevenant pour ainsi dire
petit enfant, naisse enfin de nouveau parmi ce
peu de fidèles qu'il a ici, je vous préviendrai
très certainement de tout, puis je vous
appellerai pour être témoin oculaire. Dans le
cas où vous échangeriez difficilement la [217]
compagnie des pasteurs de la ville contre la
société de ceux de la campagne, nous
comptons du moins que vous viendrez avec les
Rois de l'Orient. Plaise au Dieu très bon et très
haut que nos péchés ne ruinent pas l'espoir
d'une telle félicité !
Cependant ces hommes de Mésinge
qui, dans notre maison forte de Marclaz, me
parlaient en votre présence d'abjurer l'hérésie,
ont fait ce qu'on appelle la due profession de
foi. Ils vont solliciter du procureur principal du
patrimoine ducal la ratification des immunités
qu'ils ont obtenues du prince en conséquence
de cet acte. Je vous supplie donc instamment
de les aider de votre action et de votre
influence en cette affaire. Mais un si fidèle
disciple de la Croix n'a pas besoin
d'exhortation sur ce sujet. J'écris à plusieurs
personnes pour recommander ces hommes,
mais à condition qu'ils remettront
immédiatement mes lettres à qui de droit, si
vous le jugez utile ; sinon, ils les
501 Pour justifier cette date, voir à l'Appendice les lettres écrites par le sénateur Favre, le 25 novembre et le 14
décembre.
502 Le château de Marclaz, qui appartenait alors à M. de Charmoisy, est situé entre le lac de Genève et les Allinges, à
deux kilomètres de Thonon.
503 Louis Bonier ; voir ci-devant, note (62), p. 14.
504 Ces immunités avaient été concédées par patentes du 24 octobre 1596.
150/318

16 Pages 151-160

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16.1 Page 151

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rapporteront… [218]
_____
LXXIX. A Monseigneur Jules-César Riccardi, Archevêque de
Bari, Nonce Apostolique a Turin. Remerciements pour
l'autorisation d'absoudre des cas réservés. Conversions
opérées en Chablais ; état des esprits dans cette province.
Calomnies répandues contre M. d'Avully. Nomination du
nouvel Abbé d'Abondance.
Thonon, 12 décembre 1596.
Illustrissimo et Reverendissimo Signor
Mon très honoré, Illustrissime et
mio osservandissimo,
Révérendissime Seigneur,
Ho ricevuto l'ordine di Sua Altezza per haver i
scudi trecento per le spese già fatte, insieme
con la lettera di V. S. Illma, d'il che ne ringratio
humilissimamente sua bontà, et della licentia
per i relapsi, laquale io adoprarò con quella
maggior discretione505 che il Signor mi
concederà ; et in vero che cie n'era gran
bisogno.
506Da che son ritornato così vuoto di
espedittioni necessarie per quest' opra, son
stato la burla de questi infedeli, [219] et
nondimeno si sonno guadagnate da ottant'
anime fra piccoli et grandi. Se Sua Altezza,
secondo il suo santo zelo, mandarà qui un
senatore ad invitare gl' habitatori di Tonone all'
udito della santa parola, sì com' io lasciai in
memoria, spero che si farà un gran buon
effetto.
V. S. Illma mi ha dato la vita quando mi
ha fatto certo che nonostante le querimonie de'
Cavaglieri haveremo ben presto modo di
incomminciar un poco più di essercitio
catholico fra queste genti, perchè io mi son
J'ai reçu l'ordre de Son Altesse pour
percevoir les trois cents écus destinés à couvrir
les dépenses déjà faites, en même temps que la
lettre de Votre Seigneurie Illustrissime. J'en
remercie très humblement votre bonté, ainsi
que de l'autorisation d'absoudre les relaps :
j'userai avec toute la discrétion qu'il plaira au
Seigneur m'accorder de cette permission dont
nous avions vraiment grand besoin.
Depuis que je suis revenu ainsi
dépourvu des expéditions nécessaires pour
cette œuvre, j'ai été la fable de ces mécréants,
et néanmoins quatre-vingts personnes ont été
gagnées, tant parmi les petits [219] que parmi
les grands. Si, conformément à son saint zèle,
Son Altesse envoie ici un sénateur pour inviter
les habitants de Thonon à l'audition de la sainte
parole, ainsi que je le marquai dans le mémoire
que je lui ai laissé, j'espère que cela produira
un très bon effet.
Votre Seigneurie m'a rendu la vie en
m'assurant que, nonobstant les plaintes des
Chevaliers, nous aurons bientôt le moyen de
505 [Les variantes qui suivent sont tirées d'une minute insérée dans le Ier Procès de Canonisation.]
Hieri ricevei la lettera di V. S. Illma colle altre lettere di S. A. legate insieme, quali contengono ordine che
siano pagati i scudi trecento per la spesa gia fatta in questi duoi anni passati, di che ne ringratio humilissimamente V.
S. Illma, [et] della licentia che m' ha data per assolvere i relapsi, della quale io usaro con tutta quella prudentia
506 Da che io son ritornato in questo Chiablais, son stato [in] burla a questi nemici della Chiesa, sì del paese come de'
vicini Genevesi et Bernesi ; ma questo poco importa, poiche cio nonostante, si sonno fatti Catholici molte persone,
che potriano esser, fra huomini, donne et giovani, da ottanta anime, et molte parrochie sono molto disposte a ricevere
la santa fede. In somma mi son avveduto piu che mai dell' estrema necessita che han questi popoli di pastori, poiche
molti sonno Catholici da quel tempo che venne ultimamente S. A. Serenma in queste contrade ; molti sonno rilassi per
paura solamente, quali in conscientia han riserbata la santa fede ; molti non sanno quel che si sonno, et sonno come
peccorelle erranti et senza pastore.
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16.2 Page 152

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avveduto più che mai dell' estrema necessità
che vi è de santi pascoli. Molti sonno Catholici
da quel tempo in qua che passò qui Sua
Altezza507 ; molti sonno relapsi in foro
exteriori solamente, per forza et violentia
dell'armate nemiche ; molti sonno indifferenti,
nè sanno quel che si siano, et tutti, come
erranti pecorelle, senza pastore508. [220]
509Me piace che i signori Cavaglieri
habbino per poca cosa li beni ecclesiastici di
Chiablais, perchè essendo poi loro persone
magnanime, le (sic) lasciaranno volontieri a
servitio d'Iddio, et quell'oglio che glie (sic) par
poco bastarà per far un lume di santo essercitio
che mandarà raggi sin a mezzo [dei] Bernesi et
Genevini, pur che senza contrasto cie lo
lascino.
Ho ritrovato ancora altre parrochie et
persone qui molto ben disposte alla santa fede,
et se si essequiranno le sante intentioni di Sua
Altezza con fervore, si farà una grande
conversione, massime essendo il trattato di
pace in così pie et sante mani510. [221]
511Haverà adesso V. S. Illma la lettera di
monsieur di Avully in risposta del Breve di Sua
Santità512, perchè egli la mandò ciè un pezzo.
Ma non voglio mancare di dire a V. S. Illma che
no manca punto il nemico di far a questo
cavagliere tutti gl' assalti che egli può per
oscurare il lume che si era acceso della sua
conversione, suscitandogli molti odii, sì dalla
parte heretica come della catholica. Et
particolarmente da Berna è stato minacciato
acciò no sollecitasse altri alla fede ; il che
commencer à donner un peu d'extension au
culte catholique parmi ces populations ; car je
me suis convaincu plus que jamais qu'il est
extrêmement nécessaire de leur ouvrir de
saints pâturages. Un certain nombre sont
catholiques depuis que Son Altesse a passé ici
; beaucoup, contraints par la force et par la
violence des armées ennemies, sont relaps au
for extérieur seulement ; quantité d'autres sont
indifférents, ne sachant pas même à quelle
religion ils appartiennent, et tous sont sans
pasteur comme des brebis errantes. [220]
Je suis bien aise que messieurs les
Chevaliers estiment peu considérables les
biens ecclésiastiques du Chablais, car étant si
généreux, ils les cèderont volontiers pour le
service de Dieu. Cette huile, qui leur paraît peu
de chose, suffira pour produire une lumière de
saints exercices qui projettera ses rayons
jusqu'au milieu des Bernois et des Genevois,
pourvu qu'ils nous laissent ce revenu sans
contestation.
J'ai retrouvé encore ici nombre de
personnes et des paroisses entières bien
disposées à l'égard de notre sainte foi. Si les
intentions de Son Altesse s'exécutent avec
zèle, il se produira un grand mouvement de
conversions, surtout les négociations pour le
traité de paix étant confiées à de si pieuses et
saintes mains. [221]
Votre Seigneurie aura reçu maintenant
la lettre de M. d'Avully en réponse au Bref de
Sa Sainteté ; car il y a quelque temps qu'il vous
l'a adressée. Mais je ne laisserai pas de vous
507 Le passage de Charles-Emmanuel Ier à Thonon datait du commencement de septembre 1589, alors que, revenant
victorieux de la rencontre de Bonne, le duc reprit possession de la capitale du Chablais.
508 Matt., IX, 36 ; I Petri, II, ult.
509 [Au lieu des deux alinéas du texte, la minute donne la leçon suivante qui offre quelque correspondance avec les
lignes 2-5 de la page précédente.]
Qui nella terra di Tonone molti ancora si ridurrebbono alla fede se vedessero l' essercitio catholico ben
stabilito, quantunque non vi manchino de' tristi quali in diverse maniere cercano di ritenerli nel fango. Io poi son certo
che so li circonvicini heretici vedessero nel principio di quest' opera qualche fervore et ordine compito, no solo non
ne sariano scandalizati, anzi ne pigliarebbono buon odor. Ma questo non si fara senza l'essecutione del zelo che vi ha
S. A. Serenma ; et saria molto a proposito che fosse qui mandato un senatore ad invitar questi habitatori ad udire la
parola d'Iddio, si come io lasciai in memoria a S. A. Serenma. (En cette ville de Thonon beaucoup reviendraient à
la foi s'ils voyaient le culte catholique bien établi, quoiqu'il ne manque pas d'hommes pervers qui, de diverses manières,
cherchent à les retenir dans le bourbier. Je suis d'ailleurs certain que si les hérétiques du voisinage voyaient dans le
commencement de cette œuvre quelque zèle et de l'ordre, non seulement ils n'en seraient pas scandalisés, mais au
contraire ils en seraient édifiés. Cela n'aura pas lieu sans la mise à exécution des désirs de Son Altesse Sérénissime ;
et il serait fort à propos qu'un sénateur fût envoyé ici pour inviter les habitants à entendre la parole de Dieu, ainsi que
je le marquai dans le mémoire que j'ai laissé à Son Altesse Sérénissime.)
510 Le Cardinal Alexandre de Médicis, qui fut Pape sous le nom de Léon XI (1605), avait reçu de Clément VIII la
mission de négocier un traité de paix entre la France, l'Espagne et la Savoie.
511 [Pour les premières lignes de cet alinéa et du suivant, voir la variante (518).]
512 Le Bref de félicitation adressé par le Pape à l'illustre converti est daté du 20 septembre 1596.
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16.3 Page 153

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nientedimeno egli fa ad ogni sorte di
occasione, molto più consolato in queste
tribolationi catholiche che egli non era nelle
prosperitade heretiche. È mala bestia l' heresia,
et sa prevalersi di ogni sorte di sinistro
evenimento.
Mando qui alligata la informatione
secretta fatta per [222] commissione di V. S.
Illma, la quale io supplico di perdonarmi se no
sarà così ben acconcia, sì perchè questa è la
prima che io feci, sì perchè non ho potuto haver
secretano molto a proposito. Ma per quanto
vedo, non sarà troppo necessaria questa
informatione, poichè si ha da dar la badia ad un
altro.513 Et laudo il Signore della buona monte
che egli ha data a Sua Altezza Serenissima di
presentar a Sua Beatitudine quel gentilhomo
così ben qualificato514, come mi scrisse V. S.
Illma ; onde me ne viene certa speranza che se
usarà a questo modo Sua Altezza, et ne sarà
maggiore la gloria d'Iddio et la prosperità delle
loro Altezze et de questi stati515. Nè per questo
lasciarannono di haver bisogno di visita
apostolica queste badie et altri luoghi di
Savoya516, perchè, s'io no m'inganno, a tanta
difformatione ciè bisogno d'altra authorità che
di semplice prælato.
No credo che Sua Santità possa far cosa
più giovevole a [223] queste contrade che
mandando un Visitator apostolico ; et piacess'
al Signor che fosse V. S. Illma, allaqual con
humilissima riverenza bascio le sacre mani,
prieghandoli dal Signor ogni contento.517
Di V. S. Illma et Rma
Devotissimo et humilissimo servitore,
FRANCO DE SALES,
Prevosto di Geneva.518
Da Tonone, alli 12 Decembre 1596.
All' lllmo et Revermo Sigr mio
osservandissimo, Monsigr l'Arcivescovo di
dire que l'ennemi ne manque point de diriger
contre ce chevalier tous les assauts possibles,
afin d'obscurcir l'éclat qu'a eu sa conversion ;
il suscite contre lui beaucoup de haines, tant de
la part des hérétiques que de celle des
Catholiques. Et particulièrement Berne veut,
par des menaces, l'empêcher d'en solliciter
d'autres à se convertir à notre foi. Il le fait
néanmoins en toute sorte d'occasions, et
s'estime plus heureux d'endurer des
tribulations étant catholique, que s'il jouissait
de grandes prospérités étant hérétique. C'est
une mauvaise bête que l'hérésie : elle sait
exploiter tout évènement fâcheux.
Je vous envoie ci-joint l'information
secrète faite par ordre de [222] Votre
Seigneurie. Je vous prie de me pardonner si
elle n'est pas bien rédigée, soit parce que je
m'acquitte pour la première fois de semblable
commission, soit parce que je n'ai pu avoir de
secrétaire capable. Mais, à ce que je vois, cette
information ne sera pas très nécessaire,
puisqu'on va donner l'abbaye à un autre. Je
loue Dieu de la bonne pensée qu'il a inspirée à
Son Altesse Sérénissime de proposer à Sa
Sainteté un gentilhomme si bien qualifié, ainsi
que me l'écrivit Votre Seigneurie. J'ai une
certaine espérance que l'exécution de ce
dessein contribuera à l'accroissement de la
gloire de Dieu, à la prospérité de leurs Altesses
et de ces pays. Néanmoins, la visite
apostolique ne laisse pas d'être nécessaire à ces
abbayes et à d'autres lieux de Savoie, car, si je
ne me trompe, pour remédier à de tels
dérèglements il est besoin d'une autorité
supérieure à celle d'un simple prélat.
Je ne crois pas que Sa Sainteté puisse
faire chose plus avantageuse [223] à cette
contrée que d'y envoyer un Visiteur
apostolique. Plût à Dieu que ce fût Votre
513 Laudato Iddio che ha posto nella mente di S. A. di presentare a S. Sta quel [Reprendre au texte, lig. 8.]
514 On a tout lieu de croire qu'il s'agit de la nomination de Vespasien Aiazza à l'abbaye d'Abondance. Ses Bulles sont
datées du 15 juillet suivant.
515 V. S. Illma, pregando sua divina Maesta che cosi si faccia hora per maggior gloria d'Iddio et prosperita delle
Altezze.
516 queste badie comme anco il restante di queste bande di qua
517 ogni vero contento, essendo
518 [Les lignes suivantes sont une addition faite après coup dans la minute. Voir la remarque (511).]
Mando qui alligata la informatione secretta della quale V. S. Illma mi diede commissione, la quale supplico
di perdonarmi se non sara cosi ben fatta ; che questo occorse per la penuria mia d'ingegno et di pratica, essendo questa
la prima che io feci, et quella del secretario che non ho trovato molto a proposito. Et per quanto vedo, non sara molto
necessaria, poiche si ha da dar la badia ad altro.
Havera adesso la lettera di Monsigre de Avully in risposta del Breve di S. Sta, perche egli la mandó cie un
pezzo, per quanto mi disse hieri. Scrivera quanto prima a V. S. Illma.
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Bari, Nuntio Apostolico appresso di S. A. Sma. Seigneurie, dont je baise les mains sacrées
Turino. avec un très humble respect, suppliant le
Seigneur de vous combler de bonheur.
Revu sur l'Autographe conservé à Rome,
Je suis, de Votre Seigneurie Illustrissime et
Archives du Vatican. [224]
Révérendissime,
Le très humble et très dévoué serviteur,
FRANÇOIS DE SALES,
Prévôt de Genève.
Thonon, le 12 décembre 1596. [224]
_____
LXXX. Au duc de Savoie, Charles-Emmanuel Ier. Opposition
apportée par les syndics de Thonon à l'érection d'un autel,
Combien la protection du duc est nécessaire aux nouveaux
Catholiques. Conversion d'un ministre protestant.
Thonon, 21 décembre 1596.
Monseigneur,
J'attens519 le bon playsir de Vostre Altesse pour le restablissement de la religion520
catholique en ce balliage de Thonon, et ce pendant je pensois dresser un autel en l'eglise Saint
Hypolyte, en laquelle je preche ordinayrement des deux ans en ça, affin d'y pouvoir521 celebrer
Messe ces bonnes festes de Noel. Les scindiques de ceste ville y ont apporté522 de l'opposition, a
laquelle par apres ilz ont renoncé. Je ne puis sçavoir avec quel fondement ilz se sont osés produir'en
cest affaire, puysqu'on ne violoit point le traitté de Nion523 ; et, quand on l'eust violé, ce n'estoit
pas a eux d'y prouvoir. On ne forçoit [225] personne, et ne faisoit on autre que se mettr'en la posture
et au train auquel Vostre Altesse avoit laissé les Catholiques despuys ne fut elle icy524, duquel
ayant esté levés par force, on ne sçauroit dire525 pourquoy ilz ne puyssent s'y remettre toutes les
fois qu'ilz en auront commodité526, sous l'obeissance de Vostre Altesse.
Le zele que j'ay au service de Vostre Altesse me faict527 oser dire qu'il importe, et de
beaucoup, que layssant icy la liberté qu'ilz appellent de conscience, selon le traitté de Nyon, elle
præfere neanmoins en tout les Catholiques et leur exercice ; et que partant elle se layss'entendre a
519 [Les variantes qui suivent sont extraites d'une minute insérée dans les deux Procès de Canonisation.]
Je suis attendant
520 foy
521 en laquelle j'ay presché ordinayrement il y a passé deux annëes, affin d'y
522 voulu apporter
523 Un premier traité avait été arrêté à Nyon et signé à Lausanne en 1564 entre le duc Emmanuel-Philibert et les
Bernois. Ceux-ci restituaient à la Savoie les bailliages de Chablais, Ternier et Gaillard, mais à la condition que le libre
exercice du culte protestant y serait maintenu, et qu'ils pourraient y entretenir autant de ministres qu'ils le trouveraient
bon.
Par le second traité de Nyon (11 octobre 1589), le duc Charles-Emmanuel, aprè ses victoires de Collonges et
de Versoix, dictait des clauses plus favorables au catholicisme. Trois localités seulement, Bons, Nernier et Tully,
étaient autorisées à conserver un ministre protestant. Celui de Thonon n'était que toléré.
524 Vide supra, p. 220.
525 que se mettr'en train et en la posture en laquelle V. A. avoit laissé les Catholiques despuys ne fut elle en ce
duché de Chablais, delaquelle ayant esté levés par force, je ne puis entendre
526 toutes les fois que bon leur semblera
527 me met en courage de luy
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16.5 Page 155

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ces gens quilz doivent simplement et seulement user de la permission quilz ont528, sans se mesler
d'empecher ceux qui, par toute rayson et par l'exemple mesme de leur souverain Prince, taschent
d'avancer la foy catholique.529 Je ne pense point qu'il y ait aucune rayson qui puisse retarder
l'affection sainte de Vostre Altesse en la sollicitation de [ce] grand bien, ni qui la rend'autre
qu'aymable et admirable a ses plus endurcis ennemis530. [226]
M. de Lambert veut user de liberalité a l'endroit d'un ministre qui se convertit531 et qui par
sa sollicitation en tirera beaucoup avant quil se descouvre532 ; je crois que Vostre Altesse l'aura
agreable et luy commandera quil en face encores davantage533. Je supplie donq Vostre Altesse
commander comm'il luy plaira sur ce sujet, et priant Dieu tres affectionnement pour sa santé534, je
m'honnoreray du bien que j'ay d'estr'advoué,
Monseigneur,
De Vostre Altesse,
Tres humble sujet et serviteur,
FRANÇOIS DE SALES,
Prævost de St Pierre de Geneve.
A Thonon, jour St Thomas, 96.
Revu sur l'Autographe conservé à Turin, Archives de l'Etat. [227]
_____
LXXXI. A Monseigneur Jules-César Riccardi, Archevêque de
Bari, Nonce Apostolique a Turin. Instances pour obtenir la
protection du Nonce auprès du duc de Savoie.
Thonon, 21 décembre 1596.
Illustrissimo et Reverendissimo Signor
Mon très-honoré, Illustrissime et
mio osservandissimo,
Révérendissime Seigneur,
Scrivo a Sua Altezza Serenissima sopra
un'oppositione che hanno fatta questi di
Thonone quando, per celebrar queste feste di
Natale, io volevo incomminciar a far un altare
J'écris à Son Altesse Sérénissime au
sujet de l'opposition que m'ont faite les
habitants de Thonon quand j'ai voulu, pour
célébrer ces fêtes de Noël, commencer à
528 les Catholiques et l'exercice de la religion catholique ; et partant qu'elle fass'entendre a ces habitans et bourgeois
quilz doivent user simplement et purement de la permission que V. A. leur faict
529 catholique. Que s'il plaist a V. A. de commander a l'un des messieurs du Senat ou deux (entre lesquelz il me
semble que monsieur Favre seroit extremement sortable) qu'ilz se transportassent jusques icy, et en habit solemnel,
ayant convoqué la generale assemblee de ceste ville, remonstrassent le zele que V. A. a de leur salut et combien est
grande sa douceur a le leur procurer, et les invitassent a frequenter les sermons des prescheurs qui viendront icy sous
son adveu, je croy, Monseigneur, que cela occasionneroit une grande conversion de ces pauvres gens, et serviroit tout
autour d'un rare et signalé exemple de la bonté de V. A. vers les ennemis, et de sa prudence vers les amis.
530 et admirable aux plus endurcis mesme.
531 Pierre Petit, venu du Languedoc, avait été successivement pasteur à Armoy et à Choulex. Sa conversion fit grand
bruit parmi les protestants, qui, pour en atténuer le retentissement, décrièrent fort le nouveau converti. Celui-ci abjura
solennellement l'hérésie le 1er octobre 1398, en présence du Légat du Pape et du duc de Savoie, qui le nomma, quatre
ans plus tard, châtelain de Thonon. On lit dans le Registre paroissial de cette ville la note suivante que nous traduisons
du latin : « Noble Pierre Petit, châtelain de Thonon, est mort muni des Sacrements de Confession, de Communion et
d'Extrême-Onction, et a été sépulturé le 16 octobre 1621. »
532 M. de Lambert, gouverneur de ceste province, veut user de quelque libéralité a l'endroit d'un ministre qui est tout
disposé a se convertir
533 quil poursuive.
534 et priant Dieu quil l'enrichisse de plus en plus de ses benedictions
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16.6 Page 156

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nella chiesa nella quale io ho sin adesso
prædicato. Supplico V. S. Illma di procurarne la
risposta, acciò che con lettere io possa mostrar
a quei pochi che mi fanno impedimento che
glie (sic) deve bastar l'haver la libertà chiamata
di conscientia, senza dar disturbo a l'essercitio
catholico. Questo è l'ultimo sforzo che vuol far
il demonio in quest'opra, mentre vede che si va
ritardando l'essecutione delle buone intentioni
di Sua Altezza. Ma questo sarà poi un niente
quando V. S. Illma ci aiutarà dei suoi soliti
favori, et sollecitarà che quanto prima si metta
qui [228] un honorato et convenevole
essercitio catholico ; chè tuttavia ne vedo
maggior numero disporsi alla santa fede, se
bene alquanti ci fanno delle borrasche colla
lingua et le maledicentie et simili arti
diaboliche.
Ho voluto più presto scriver così in
fretta ch'a non darglie avviso delle nostre
necessità. Supplico adunque V. S. Illma di
perdonarmi se io glie son importuno, poichè
non ho altro refugio humano di là che appresso
la sua bontà et sollecitudine, alla quale,
inchinandomi humilissimamente, bascio le
mani reverendissime.
Et prieghando (sic) dal Signore ogni
contento, resterò æternamente,
Di V. S. Illma et Rma,
Perpetuo et divotissimo servidore,
FRANCO DE SALES,
Prevosto di Geneva.
In Tonone, il giorno di S. Thomaso, 96.
A l' Illmo et Revermo Sigr mio
osservandissimo,
Monsigr l'Arcivescoüo di Bari,
Nuntio Apostolico appresso di S. A.
Turino.
dresser un autel dans l'église où j'ai prêché
jusqu'à présent. Je supplie Votre Seigneurie
Illustrissime de me procurer des lettres que je
puisse montrer à ce petit nombre d'opposants,
pour leur prouver qu'il leur doit suffire d'avoir
la liberté appelée de conscience, sans troubler
l'exercice du culte catholique. Ceci est le
dernier effort que le démon tente contre cette
œuvre, en mettant à profit les délais que l'on
apporte à l'exécution des bonnes intentions de
Son Altesse. Mais ce ne sera rien si Votre
Seigneurie nous secourt de ses faveurs
accoutumées, et si elle intercède pour qu'au
plus tôt on établisse ici d'une manière
honorable et convenable [228] l'exercice du
culte catholique. Je vois toujours un plus grand
nombre de personnes disposées à embrasser
notre sainte foi, bien que d'autres nous
suscitent des orages par les propos de leur
mauvaise langue, des calomnies et semblables
autres artifices diaboliques.
J'ai préféré vous écrire ainsi à la hâte,
plutôt que de ne pas vous avertir de nos
besoins. Je supplie donc Votre Seigneurie de
me pardonner si je suis importun, car je n'ai
humainement autre refuge à la cour que votre
bonté et sollicitude, devant laquelle
m'inclinant très humblement, je baise vos
mains vénérées.
Priant le Seigneur vous combler de tout
bonheur, je reste à jamais,
De Votre Seigneurie Illustrissime et
Révérendissime,
Le perpétuel et très dévoué serviteur,
FRANÇOIS DE SALES,
Prévôt de Genève.
A Thonon, le jour de saint Thomas, 96.
[229]
Revu sur l'Autographe conserve à Rome,
Archives du Vatican. [229]
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16.7 Page 157

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Année 1597
LXXXII. A Monsieur Bochut, Curé d'Ayse535 (Fragment inédit).
Invitation à venir desservir la paroisse de Thonon.
Thonon, commencement de 1597.
Monsieur Bochut,
En fin, Dieu soit beni. Je voy bien que vous et moy sommes condamnés a porter le tracas
et difficultés de l'eglise de Thonon. C'est pourquoy je vous escris ceste [lettre], par laquelle je vous
invite de nouveau m'estre en secours, attendu que la charge et distraction des affaires de l'Eglise
me levent la commodité de m'arrester dans Thonon pour la continuation des divins offices et
administration des saintz Sacremens. Et parce que vous estes desja en ce lieu conneu et aymé, pour
y avoir prattiqué ceste mesme charge, si daignes prendre ceste peyne, je mettray ordre a la cuisine
et obtiendray de Monseigneur Reverendissime vostre congé
Revu sur le texte inséré dans le Ier Procès de Canonisation. [230]
_____
LXXXIII. Au duc de Savoie, Charles-Emmanuel Ier (Minute
inédite). Erection d'un autel dans l'église Saint-Hippolyte.
Recommandation en faveur du ministre Petit. Combien il
importe que les Chevaliers de Saint-Lazare cèdent les revenus
ecclésiastiques qu'ils détiennent en Chablais.
Thonon, vers le 21 février 1597.
Monseigneur,
J'ay receu un'incroyable consolation quand j'ay veu par celle qu'il a pleu a Vostre Altesse
signer le 7 janvier536, qu'elle trouvoit bon que l'on aye dressé un autel en l'eglise Saint Hypolyte
de Thonon. Pour vray, l'evenement a monstré qu'on n'a rien faict de trop ; et je puis dire a Vostre
Altesse que je vay tant retenu en ceste besoigne que je ne crains point d'autre juste accusation que
de trop de lascheté.
Monsieur de Lambert ayant receu advis que Vostre Altesse avoit agreable qu'il eust secouru
le ministre qui se veut catholizer537 n'a pas osé tirer consequence de la pour la continuation de ce
535 François Bochut, natif de Cluses, d'abord aumônier de Mgr de Granier, avait été chargé par ce Prélat de travailler à
la conversion du Chablais, et fut à cet effet nommé curé de Thonon (26 octobre 1589). Les oppositions qu'il rencontra
et les dangers qu'il courut l'obligèrent pour lors à renoncer à cette périlleuse mission. Il desservait la paroisse d'Ayse
quand saint François de Sales l'invita à venir le seconder. François Bochut fut quelque temps curé d'Hermance, tout
en conservant sa cure d'Ayse ; il remplit aussi les fonctions de « surveillant épiscopal » dans le Bas-Faucigny. Cet
ecclésiastique fonda un collège dans sa ville natale, et mourut à Ayse (28 avril 1657), âgé d'environ soixante et onze
ans.
536 Voir cette lettre à l'Appendice.
537 Vide supra, p.227.
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16.8 Page 158

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bienfaict, qui me faict supplier Vostre Altesse de la luy declairer. Le seigneur chevalier Bergere538,
connoissant bien que l'assignation des six pensions que l'on a faicte sur les revenus de la Religion
de Saint Lazare ne peut pas joindre a l'œuvre de la reduction de ces peuples a la foy catholique, a
trouvé raysonnable la proposition que je luy ay faicte que la Religion rendist absolument les cures
a cest effect. Plaise [231] a Vostre Altesse se resouvenir qu'elle la trouva desja juste quand j'eus
cest honneur de la luy representer, et d'employer autant de son authorité qu'elle jugera necessaire
pour reduire messieurs du Conseil de la Religion a ceste resolution.
Et louant Dieu de tout mon cœur du saint zele dont je voy devoré le cœur de Vostre Altesse,
je me resjouis d'estre comme je suis,
Monseigneur,
De Vostre Altesse,
Tres humble et tres fidelle sujet et serviteur.
Revu sur le texte inséré dans le Ier Procès de Canonisation.
_____
538 Thomas Bergera, de la famille des Villar Basse, en Piémont, conseiller d'Etat, chevalier et auditeur général de
l'Ordre des Saints Maurice et Lazare, était muni d'amples pouvoirs pour négocier les affaires de son Ordre en Savoie.
Il fut nommé dans la suite conservateur de la Sainte-Maison de Thonon, et mourut à Turin en 1622.
La Sainte-Maison, dont il a déjà été question ci-dessus, p. 98, note (244), était une institution fondée à Thonon
(1599) pour affermir dans la foi les nouveaux convertis ; elle était dirigée par une communauté de prêtres qui suivaient
la Règle de l'Oratoire de Rome.
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16.9 Page 159

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LXXXIV. Au Conseil des Chevaliers des Saints Maurice et
Lazare539 (Minute inédite). Instances afin d'obtenir que les
revenus ecclésiastiques dont les Chevaliers jouissent en Chablais
soient affectés au rétablissement du culte catholique.
Thonon, vers le 21 février 1597.
Illustrissimi Signori,
Illustrissimes Seigneurs,
Già che il signor cavaglier Bergera se
ne ritorna, così non ho bisogno di dargli (sic)
avviso particolar di quello che si è stabilito qui,
per ordine delle Sigrie V. Illme, ad [232] honor
d'Iddio et propagatione della santa fede
catholica. Dico solamente che io dal canto mio
farò, piacendo al Signore, tutto quel che da
huomo tanto da poco come io sono si può
giustamente sperar.
Pur vedendo che a me è toccato la sorte
di essere il forriero et procuratore de molti
predicatori et altri honorati ecclesiastici che
sonno per venir qua combattere li
combattimenti del Signore delle armate, et che
non potrò far di manco di esser forse
importuno a Sua Santità, alle Loro Altezze et
alle Sigrie V. Illme, per addimandar aiuto per le
spese che di giorno in giorno andaranno [233]
crescendo, secondo il numero di lavoranti che
per progresso di questo negotio saranno
necessarii, mi è parso di dover in una volta
proporre alle Sigrie V. Illme quello espediente
che, essequendosi, tagliarà la strada alla
necessità in questa opera, et alla importunità
che esse riceveranno delli aiuti che di tempo in
Puisque M. le chevalier Bergera s'en
retourne, je n'ai pas besoin de vous renseigner
sur ce qui a été établi ici, par ordre de Vos
Seigneuries Illustrissimes, à l'honneur de Dieu
et pour la propagation [232] de la sainte foi
catholique. Je dis seulement que, de mon côté,
je ferai, s'il plaît au Seigneur, tout ce qu'on peut
justement espérer d'un homme aussi incapable
que je le suis.
Néanmoins, puisque je me vois destiné
à être le fourrier et le procureur d'un grand
nombre de prédicateurs et d'autres honorables
ecclésiastiques qui viendront ici combattre les
combats du Seigneur des armées, je ne saurai
manquer de me rendre peut-être importun à Sa
Sainteté, à Leurs Altesses et à Vos Seigneuries
pour leur demander de nous alléger les
dépenses qui croîtront de jour en jour, selon le
nombre des ouvriers nécessaires au progrès de
cette œuvre. Il m'a [233] donc semblé devoir
proposer une fois pour toutes à Vos
Seigneuries Illustrissimes un expédient qui
nous mettrait à l'abri du besoin dans
l'accomplissement de cette œuvre, et
préviendrait l'importunité que leur
539 L'Ordre religieux militaire des Saints Maurice et Lazare se composait de deux institutions distinctes, fusionnées
par une Bulle de Grégoire XIII (13 novembre 1572).
Les Chevaliers de Saint-Lazare faisaient remonter leur origine à une association fondée à Jérusalem dans le
1er siècle de l'ère chrétienne, pour le service des pèlerins et le soulagement des lépreux. Il est certain néanmoins que
leur existence comme Ordre religieux militaire n'est pas antérieure aux Croisades. Pie IV accorda en 1563 des
encouragements et des privilèges aux Chevaliers, en considération de la double fin qu'ils se proposaient : secourir les
lépreux et combattre les hérétiques. Leur Grand-Maître Castiglione, avec l'approbation de Grégoire XIII, résigna son
titre et ses fonctions en faveur du duc de Savoie, Emmanuel-Philibert.
Un des prédécesseurs de ce dernier, Amédée VIII, avait institué l'Ordre de Saint-Maurice, par lettres patentes
données à Ripaille le 8 octobre 1434. Cet Ordre, qui se composait seulement d'un petit nombre de Chevaliers, étant
presque entièrement déchu, Emmanuel-Philibert le reconstitua, lui assignant pour fin la guerre contre les pirates, la
défense de l'Eglise contre les hérétiques et l'exercice de l'hospitalité.
Lors de l'invasion du Chablais par les Bernois, ces hérétiques, après avoir aboli le culte catholique dans toute
la province, confisquèrent à leur profit la plupart des biens ecclésiastiques. Une Bulle de Grégoire XIII (13 avril 1575)
accorda à l'Ordre des Saints Maurice et Lazare la jouissance d'une grande partie de ce qui avait échappé à la rapacité
des envahisseurs, mais à la charge que si le Chablais revenait au catholicisme, l'Evêque du diocèse aurait droit de
prélever sur ces biens tout ce qui serait nécessaire à l'entretien des curés. On verra dans plusieurs lettres du Saint
quelles difficultés suscita l'exécution de cette dernière clause.
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16.10 Page 160

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tempo sariamo costretti di addomandargli. Et
questo saria che, vedendo in effetto la sperata
pace540, le Sigrie V. Illme si contentassero di
lasciare assolutamente tutte le cure et
dependenze di esse che esse tengono qui; et
così, giungendo quelle con altre che da
particolari sonno processe, si potrà far un
servitio, in questo balliagio, tanto chiaro che se
ne vederà la luce d'ogni intorno.
Et per questa propositione non ho
bisogno d'altro procuratore, poichè vi è tanta
ragione et che non mancarà il zelo et integrità
delle Sigrie V. Illme, alle quali basciando
humilissimamente le mani et pregando dal
Signore Iddio ogni vero contento, le prego di
accettarme per essere,
Delle Sigrie V. Illme,
Divotissimo...
occasionneraient les demandes de secours que
nous serions obligés de faire de temps en
temps. Cet expédient consiste en ce que, étant
donné le traité de paix désiré, Vos Seigneuries
voulussent bien céder absolument toutes les
cures dont elles jouissent en ce pays avec leurs
dépendances ; en y ajoutant celles qui sont
provenues des particuliers, on pourrait faire en
ce bailliage un service religieux si éclatant que
la lumière s'en répandrait de tous côtés.
Et pour cette proposition je n'ai pas
besoin d'autre intercesseur, puisqu'elle est si
raisonnable et que le zèle et la justice de Vos
Seigneuries ne se démentiront pas en cette
occasion. Baisant très humblement leurs mains
et leur souhaitant du Seigneur notre Dieu tout
vrai contentement, je les prie de me tenir pour
Leur très dévoué... [234]
Revu sur le texte inséré dans le Ier Procès de
Canonisation. [234]
_____
LXXXV. A Monseigneur Jules-César Riccardi, Archevêque de
Bari, Nonce Apostolique a Turin (Minute inédite). Excuses pour
le délai mis à répondre aux lettres du Nonce. Proposition
d'une conférence publique avec les ministres. Instante prière
de lui obtenir la collaboration du P. Chérubin, du P. Esprit et de
plusieurs autres missionnaires. Moyens à prendre pour
fournir aux frais de la mission.
Thonon, vers le 21 février 1597.
Illustrissimo et Reverendissimo
Mon très honoré, Illustrissime et
Signore mio osservandissimo,
Révérendissime Seigneur,
Vedo, per l'ultima sua del 4 di Febraro,
V. S. Illma stupirsi ch'io non havessi ricevute
le ultime sue delli 4 et 6 di Genaro quando io
glie scrissi l'ultima volta del 27 de Genaro. Et
in vero hebbi dette lettere di V. S. Illma quello
istesso giorno nel quale io mandai le mie ; et
aspettando il mio ritorno qua, et essendo
ritornato, aspettando di giorno in giorno che si
desse principio all'ordine stabilito per li sei
curati (che non si è dato sin adesso), son stato
Je vois par votre dernière lettre du 4
février que Votre Seigneurie Illustrissime
s'étonnait de ce que lorsque je lui écrivis la
dernière fois le 27 janvier, je n'avais pas encore
reçu ses deux dernières lettres du 4 et du 6. A
la vérité, lesdites lettres me parvinrent le jour
même où j'expédiai les miennes ; mais
j'attendais mon retour ici pour y répondre, et à
mon retour j'attendis de jour en jour la mise à
exécution de l'ordre donné pour les six curés,
540 Vide supra, p. 186, not. (431).
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17 Pages 161-170

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17.1 Page 161

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così tardo a scrivergli, d'il che, se peccato vi
fosse delli reservati, ne chiedo perdono a [235]
V. S. Illma con ogni humiltà. Et non era
bisogno, per quanto mi pare, che V. S. Illma
usasse meco il precetto in virtute sanctæ
obedientiæ per far che io più spesso glie dia
avvisi delle cose di qua, poichè la semplice
volontà di V. S. Illma mi stringe tanto quanto
basta per farme far ogni gran cosa possibile.
Son stato consolatissimo vedendo che
V. S. Illma gusta la cosa della conferenza,
purchè si faccia con debito modo ; chè
persevero io a dire che maggior cosa che quella
non si è fatta ad honor d'Iddio da un pezzo, se
perseverano i Genevrini in questa intentione, sì
come da una lettera scritta da un citadino di
Geneva, del 19 Febraro, al P. Cherubino541, me
par che si possa sperare. Ad ogni modo, sia che
se faccia, sia che non se faccia questa
conferenza, supplico V. S. Illma che con
l'authorità [236] sua habbiamo qui in Chiablais
per questo anno detto P. Cherubino et il P.
Spirito, dello stesso Ordine542, et altri quanto
più si potrà, sì di quell' Ordine come della
Compagnia di Gesù, acciò che uniti quelli con
altri secolari che verranno, possiamo far un
vivo assalto all'heresia in questi paesini, chè
pian piano se ne sentirà l'odor in tutta la
vicinanza, sì de'Bernesi come de'Genevrini. Et
per farglie le spese (chè in vano cercarebbero
la limosina fra queste genti), bisognarà far una
di queste due cose : o risserbar a questo effetto
per un poco di tempo due pensioni delle sei, o
vero pigliar per via di contributione qualche
parte delle intrate che i particolari cavano delli
beni ecclesiastici di questo balliagio, già che
da' Cavaglieri non bisogna sperar altro. [237]
È vero che il signor cavaglier Bergera,
ce qui n'a pas encore été fait jusqu'à présent :
telle est la raison pour laquelle j'ai tant tardé à
vous écrire. S'il y a en ce délai quelque péché
de ceux qui constituent un cas réservé,
j'implore en toute humilité mon pardon. Il me
semble [235] qu'il n'était nullement besoin
d'user à mon égard du commandement in
virtute sanctæ obedientiæ pour m'obliger à
vous donner plus souvent des nouvelles de nos
affaires, puisque votre simple volonté me
presse assez fortement pour me faire accomplir
les plus grandes choses qui soient en mon
pouvoir.
J'ai été bien consolé en voyant que
Votre Seigneurie Illustrissime goûte le projet
de la conférence, pourvu qu'elle se fasse dans
les conditions voulues ; car je persiste à dire
que depuis longtemps il ne se sera rien fait de
plus avantageux à la gloire de Dieu, si les
Genevois persévèrent dans cette intention,
comme il me semble qu'on peut l'espérer
d'après une lettre écrite au P. Chérubin le 19
février par un bourgeois de Genève. Quoi qu'il
advienne, soit que cette conférence se fasse ou
qu'elle ne se fasse pas, je supplie Votre
Seigneurie d'employer son autorité afin que
cette année nous ayons ici [236] en Chablais le
P. Chérubin et le P. Esprit, du même Ordre. Il
nous faudrait encore d'autres missionnaires en
aussi grand nombre que possible, soit de
l'Ordre des Capucins, soit de la Compagnie de
Jésus, afin qu'unis aux prêtres séculiers qui
viendront, nous puissions livrer un vigoureux
assaut à l'hérésie en ces petits pays ; ainsi, peu
à peu, l'odeur s'en répandra dans tout le
voisinage, tant à Berne qu'à Genève. Et pour
les défrayer (car ils chercheraient en vain
l'aumône parmi ces gens-ci), il faudra faire
541 Pendant qu'au mois de janvier 1597 le P. Chérubin évangélisait, avec le zèle et l'ardeur qui lui étaient ordinaires,
les environs de Genève, un habitant de cette ville, l'orfèvre Jean Corajod, engagea plusieurs fois avec lui des
discussions sur les matières de controverse. Enfin il l'invita de la part des autorités civiles, disait-il, à venir soutenir
une conférence publique à Genève même, contre les ministres. Le 9 février cette invitation fut renouvelée par Corajod,
au nom du ministre Perrot et de plusieurs autres. Le P. Chérubin sollicita de Rome la permission d'accepter la dispute,
à laquelle le provoquait une nouvelle lettre datée du 19 février. Sur ces entrefaites, il dut aller prêcher la station du
Carême à Annecy, et le projet de conférence fut remis à plus tard.
542 Le P. Esprit de Beaume, originaire de la petite ville de Beaume-de-Venise au Comtat Venaissin, fut l'un des
premiers à revêtir l'habit des Capucins au couvent de Lyon. Il se signala par l'austérité de sa vie, son esprit de pauvreté
et d'oraison, autant que par son éloquence et l'ardeur de son zèle apostolique. Après avoir évangélisé une partie du
Lyonnais et de la Savoie, il fut employé avec le P. Antoine de Tournon à la conversion du bailliage de Ternier, et
contribua pour une grande part au succès prodigieux des Quarante-Heures d'Annemasse (septembre 1597).
L'année précédente, il s'était rendu à Rome pour assister au Chapitre général de son Ordre, et en avait rapporté
un Bref de Clément VIII à l'adresse de saint François de Sales. Il devint durant les années 1597-1599 l'intrépide
auxiliaire de l'Apôtre du Chablais, qui lui avait voué une profonde estime. (Voir ci-après, lettres du 20 mars et du 27
mai 1597.) Le P. Esprit de Beaume mourut à Lyon en 1602 à un âge très avancé.
161/318

17.2 Page 162

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lator di queste, mi ha promesso, mediante l'une de ces deux choses : ou réserver à cet
l'authorità di V. S. Illma, di far ogni sforzo effet, pendant quelque temps, deux des six
appresso il Consiglio della Religione pensions, ou bien prélever par voie de
de'Cavaglieri acciò ci sian lasciate affatto tutte contribution une partie des revenus que les
le cure di questo balliagio, per far poi il servitio particuliers tirent des biens ecclésiastiques de
compito, con questa conditione, che altro da ce bailliage ; car des Chevaliers il ne faut rien
loro non cercassero. Et sopra questa sua espérer de plus. [237]
intentione mi ha sollecitato di scrivere a V. S.
Il est vrai que M. le chevalier Bergera,
Illma ; il che io faccio molto volontieri, per porteur de ces lettres, m'a promis, moyennant
esser la cosa et giusta et molto a proposito per l'autorité de Votre Seigneurie Illustrissime, de
conto di questa impresa, acciò non habbiamo faire tous ses efforts auprès du Conseil de
da esser cortegiani de' Cavaglieri et loro l'Ordre des Chevaliers, afin que toutes les
pensionarii, che è cosa, se m'è lecito di dirlo, cures de ce bailliage nous soient complètement
molto disdicevole et di gran danno al frutto che abandonnées pour que le service divin puisse
si può sperare. Esso ha ancora voluto che io ne s'y faire entièrement ; mais cela, à la condition
scriva a Sua Altezza et al Consiglio de' qu'on ne leur demanderait plus rien. Il m'a
Cavaglieri, il che ho fatto per non pressé de vous communiquer cette proposition,
pretermettere dal canto mio quel poco che da ce que je fais très volontiers, la jugeant juste et
me si può addimandare. Voleva ancora che io très utile à cette entreprise ; car il ne faut pas
ne scrivessi a Sua Santità; ma quanto a questo que nous ayons à devenir courtisans et
non me basta l'anima di far volare le lettere mie pensionnaires des Chevaliers, ce qui, s'il m'est
così alto immediatamente, massime che in permis de le dire, serait inconvenant et
questo particolar V. S. Illma può et vuole tutto préjudiciable au fruit qu'on peut espérer. Il a
il necessario. Così ancora non ho dato altro encore voulu que j'en écrivisse à Son Altesse
raguaglio a V. S. Illma delli trecento scudi et au Conseil des Chevaliers, ce que j'ai fait
ordinati per pagar [238] le spese fatte sin pour ne pas négliger de mon côté le peu qui est
adesso, per non esser ancora finito il en mon pouvoir. Il voulait aussi m'engager à
pagamento di essi ; et tuttavia, et quello et ogni écrire à Sa Sainteté ; mais quant à cela je ne me
altra grati a venuta di là, la devo et ricognosco sens pas le courage de faire voler directement
dalla bontà di V. S. Illma
mes lettres si haut, d'autant plus que Votre
All' Illmo et Rmo Patron Sigre mio Seigneurie peut et veut tout ce qui est
osservandissimo, nécessaire à cet égard. De même, je ne vous ai
Il Sigre Archivescovo di Bari, point encore parlé des [238] trois cents écus
Noncio Apostolico appresso S. A. Serenma. destinés à couvrir les dépenses faites jusqu'ici,
Turino. vu que le paiement n'en est pas achevé.
Toutefois, ce bienfait et tous les autres qui
Revu sur le texte inséré dans le Ier Procès de nous sont venus de Son Altesse, je reconnais
Canonisation.
les devoir à la bonté de Votre Seigneurie
Illustrissime
_____
162/318

17.3 Page 163

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LXXXVI. Au même (Minute). Lettres reçues du Nonce.
Remerciements pour la protection accordée à trois églises de
Savoie. Eloge du chevalier Bergera. Difficultés qui
retardent l'établissement des curés en Chablais. Pauvreté des
paroisses. Prétentions injustes des Chevaliers des Saints
Maurice et Lazare relativement à la nomination des curés.
Pension due au prédicateur d'Evian.
Thonon, 2 mars 1597.
Illustrissimo et Reverendissimo Signor
Mon très honoré, Illustrissime et
mio osservandissimo,
Révérendissime Seigneur,
Da quindeci giorni in qua ho ricevuto
tre lettre che si compiacque V. S. Illma et Rma
di scrivermi : una alli [239] X di Decembre de
l'anno passato, la seconda al 4 de Genaro et la
terza alli 6,543 et la quarta alli 4 de Febraro. Ma
quanto alla prima, nella quale V. S. Illma mi
comandava di ritornar qui in Tonone, non ho
da farglie altra risposta colla carta, poi che già
l'ho fatta alla sua intentione col l'effetto.
Quanto alla seconda, ho da ringratiare
quanto più posso humilissimamente V. S. Illma
qual si degna pigliarsi così volontieri in
protettione le nostre cose di questa diocæsi, et
particolarmente nel procurar che quel legato
lasciato in Roma ci sia riservato544, non ostante
la prætentione della fabrica di San Pietro545 ; et
già che per l'ultima sua V. S. Illma mi
commanda che se ne scriva a qualche
savoyardo stante in Roma, acciò ne tratti con li
deputati della fabrica et habbia ricorso al
signor Cardinale Aldobrandino, così si farà.
Vedo poi la gran fatica che V. S. Illma
havrà durata per haver la provisione per li sei
curati, et no posso ch'io non ammiri il poco
zelo de chi, in questo negotio, havrà [240] fatto
le difficoltà. Et sia laudato Iddio æterno546
della patientia et zelo che ha dato a V. S. Illma
per far infine spontar questa benedetta impresa
con questo principio, del qual, per dar distinto
raguaglio a V. S. Illma, dirò che ciè un pezzo
che il signor cavaglier Bergera è giunto qui con
Depuis quinze jours j'ai reçu les trois
lettres qu'il plut à Votre Seigneurie
Illustrissime et Révérendissime m'écrire : l'une
du 10 décembre [239] de l'année passée, la
seconde du 4 janvier et la troisième du 6, et la
quatrième du 4 février. Quant à la première,
par laquelle Votre Seigneurie m'ordonnait de
revenir ici à Thonon, je n'ai pas à y répondre
par écrit, puisque j'y ai répondu de fait en
obéissant à votre intention.
Pour la seconde, j'ai à vous remercier le
plus humblement que je le puis d'avoir, avec
tant de bienveillance, pris sous votre protection
les intérêts de ce diocèse, surtout en procurant
que le legs de Rome nous soit réservé,
nonobstant les prétentions de la fabrique de
Saint-Pierre. Puisque Votre Seigneurie me
commande par sa dernière lettre d'écrire à
quelque savoyard habitant Rome, afin qu'il
traite de cette affaire avec les mandataires de
la fabrique et qu'il recoure au Cardinal
Aldobrandino, ainsi sera-t-il fait.
Je vois les grands embarras que Votre
Seigneurie Illustrissime aura eus pour obtenir
la provision en faveur des six curés, et je ne
puis que m'étonner du peu de zèle de ceux qui
font des difficultés en [240] un pareil sujet.
Loué soit le Dieu éternel de la patience et du
zèle qu'il vous a départis pour faire, par un
modeste commencement, éclore enfin cette
bénite entreprise. Afin de vous donner pleine
543 La fin de cette phrase est ajoutée en surcharge dans l'Autographe.
544 lasciato
545 Vide supra, Epist. LXXVII.
546 Iddio æterno [de questo poco principio che con tante fatighe di V. S. Illma...]
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17.4 Page 164

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quel ordine che mi scrisse V. S. Illma ;547 et
essendo allhora in Annessi per certo
negotio548, ritornai quanto prima per non esser
cagione della retardatione di così importante
servitio, quantumque io fossi certo che questo
cavaglier saria qui un pezzo, per haver a
riscuotere da sette millia ducati per la sua
Religione, che è una summa laquale no si fa
così presto fra questi travagli di guerra. Onde
essendo venuto, ho trovato questo
gentilhuomo tanto ben disposto, che io son
ubligato di dar testimonio a V. S. Illma che se
tutti gli altri di quella Relligione fossero così
fatti, V. S. Illma non fosse stata tanto
travagliata. Et hieri si diede principio al [241]
pagamento del frumento ; domani, per quanto
mi ha detto, si comminciarà il pagamento de
vino et denari.
Et per dire del prætio di queste
pensioni, secondo che me ne riferiscono questi
habitatori di Thonone, no può esser uno anno
per l'altro più di ottanta scudi ; et confesso che
questo potria bastar dove li sacerdoti havriano
qualche commodità di casa et albergo et di star
molti insieme. Et si dovriano pensare i signori
Cavaglieri, che in questo paese mancaranno
tutte le cose mondane alli sacerdoti, dalla
discortesia in poi. Ma, come mi scrive V. S.
Illma, l'istesso Signore che da piccoli semi, per
mezzo del tempo, fa uscir grandissimi alberi,
darà ancora col tempo et la fatica di V. S. Illma
un giusto augmento a questo debole principio.
Ho buona provisione de sacerdoti,
quali di subito si sbrigheranno per venire qui549
alla patientia et mortificatione, et usarò ogni
diligentia acciò siano ricchi di buona vita et
almanco commodi di lettere. Questa
Quadragesima spero di collocarne quattro in
diversi luoghi, et si (sic) io potessi li collocaria
tutti sei. Ma no si possono [242] ben introdurre
sensa far un poco de preparatione con il far
qualche sermoni cathechistici ; il che si deve
far da qualche predicatore prattico, et adesso
non è possibile haverne per esser impediti tutti
nelle quadregesimali prediche.550 Egli m'è
connaissance des choses, je dirai que M. le
chevalier Bergera est arrivé ici depuis
longtemps, muni de l'ordre dont vous m'avez
écrit. Je me trouvais alors à Annecy pour
quelque affaire, mais je revins aussitôt afin de
ne pas causer de retard dans un aussi important
service. Cependant j'étais sûr que le séjour de
ce chevalier serait de longue durée, car il avait
à percevoir pour son Ordre sept mille ducats,
somme qui ne peut se toucher si vite parmi ces
troubles de guerre. Or, à mon arrivée, ce
gentilhomme me parut si bien disposé, que je
dois lui rendre ce témoignage : si tous les
membres du même Ordre lui ressemblaient,
Votre Seigneurie Illustrissime n'aurait pas été
si fort importunée. Hier on commença le
paiement du blé : [241] demain, à ce qu'il m'a
dit, on commencera les paiements en vin et en
argent.
Quant à la valeur de ces pensions, elle
ne peut, au rapport de ces habitants de Thonon,
dépasser en moyenne quatre-vingts écus.
J'avoue que cela pourrait suffire là où les
desservants auraient la jouissance d'une
maison et habitation et la facilité de demeurer
plusieurs ensemble. Cependant messieurs les
Chevaliers devraient penser que, dans ce pays,
les prêtres souffriront disette de toutes choses,
si ce n'est de procédés désobligeants. Mais,
comme Votre Seigneurie me l'écrit, le même
Dieu qui, avec le temps, fait sortir de très
grands arbres des petites semences, donnera
aussi, moyennant le temps et votre travail, un
accroissement convenable à ce faible
commencement.
J'ai un bon nombre de prêtres qui se
dégageront bientôt pour venir s'exercer ici à la
patience et à la mortification ; je mettrai tous
mes soins afin qu'ils soient riches de bonne vie
et du moins, bien pourvus de savoir. Ce
Carême, j'espère en placer quatre en [242]
divers endroits, et si je le pouvais je les
placerais tous six. Mais on ne saurait les
introduire sans leur préparer d'abord les voies
par quelques sermons catéchistiques faits par
547 V. S. Illma ; [ma perche haveva da riscuotere qui per la sua Relligione da sette millia ducati, é stato... et ha
ritrovato i suoi debitori senza denari. Et hieri si diede principio al pagamento de'frumenti che furono assegnati, et
domani, per quanto egli pur hieri me disse, si dara principio al pagamento del denaro.]
548 in Annessi [et con i miei parenti] per certo negotio [d'importanza]
549 qui [a patire...]
550 prædiche. [Saro costretto a contentarme di collocarne 4 ; il che, oltra ch' io no posso esser molto tempo fuora di
Tonone... absente in questo tempo...]
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17.5 Page 165

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necessario di star qui la Quaresima, nò posso
io molto trascorrere adesso, poichè egli m'è
necessario horamai, per mancamento d'altri, di
attender alle confessioni per Pasqua.
Non v'è poi nè chiesa ristaurata, nè
altare drissato ; manco habbiam calici, messali
et altre simili commodità necessarie per le sei
parrochie. D'il che trattando col signor
cavaglier Bergera et non havendo egli carico di
lasciarci denari per questi servitii, si è
contentato di spender da otto o dieci ducatoni
per la chiesa di Tonone, dove ogni cosa era
sotto sopra, sensa altra commodità se non d'un
semplice et mal fatt'altare de legno che s'era
fatto questo Natale551. Et per aiutarci al
restante che si conveniva haver sì in Tonone
come nell' altre parrochie, [243] si [è]
contentato di assegnar il principio delle sei
pensioni dal 15 di Genaro sin al primo di
Marzo, che si è dato principio al pagamento ;
et dal primo di Marzo sin tanto che sian
collocati li sei curati, correndo sempre le
pensioni, potremo forse avanzare da 60 o 70
scudi per comperar le cose più necessarie et far
il manco male che fia possibile. Et acciò li
signori Cavaglieri no facciano compassione a
Sua Santità col la loro povertà protestata,
assicuro V. S. Illma che l'intrata che cavano da
questo balliagio de' beni ecclesiastici sarà d'un
anno per l'altro di quattro millia ducati buoni.
Quanto alla polizza del signor di
Ruffia, nella quale desiderano li Cavaglieri che
alcuni curati che prestano il nome a' laici che
tengono cure ne'balliagi rimettessero esse cure
alla Religione, come proprietaria, per
concessione di Sua Santità, de'beneficii
de'balliagi, quando tai curati non siano habili a
far servitio, et essendo habili, che siano
admessi al numero delli sei, il signor cavaglier
Bergera no m'ha proposto questo particolare ;
nè posso intendere come vogliono questi
clerici armati che un [244] curato
confidentiario possa esser habile per esser
admesso nel numero delli sei, che devono esser
un poco più costumati che non sogliono esser
li confidentiari.
Laudo Iddio benedetto che Sua Santità
habbia qualche intentione di collocare nell'
abadia dell'Abondanza i riformati di San
Bernardo, et priegho il Signore glie ne dia
un prédicateur expérimenté ; et maintenant il
est impossible d'en avoir parce qu'ils sont tous
retenus par les prédications quadragésimales.
Pour moi, je suis contraint de passer le Carême
ici ; je ne puis non plus beaucoup me déplacer,
étant désormais obligé, à défaut d'autres,
d'entendre les confessions pascales.
Au reste, il n'y a ni église restaurée ni
autel dressé ; nous n'avons pas même des
calices, missels et tels autres objets
indispensables aux six paroisses. J'en ai parlé
au chevalier Bergera ; mais n'étant pas chargé
de nous délivrer de l'argent à cet effet, il s'est
borné à dépenser huit ou dix ducatons pour
l'église de Thonon où tout était sens dessus
dessous, sans autre ameublement qu'un simple
autel de bois, mal fait, qui a été construit pour
Noël. Afin d'aider à nous pourvoir de ce qui est
encore requis, soit à Thonon soit dans les
autres paroisses, il a bien voulu affecter à cette
dépense le montant [243] des six pensions à
partir du 15 janvier jusqu'au 1er mars, époque à
laquelle on a commencé le paiement. Depuis le
1er mars jusqu'à ce que les six curés soient
installés, ces pensions courant toujours, nous
pourrons peut-être réaliser une avance de
soixante à soixante et dix écus pour acheter les
choses les plus nécessaires et faire le moins
mal possible. Mais afin que messieurs les
Chevaliers n'excitent pas la compassion de Sa
Sainteté par leur pauvreté prétendue, j'assure
Votre Seigneurie Illustrissime que le revenu
qu'ils tirent des biens ecclésiastiques de ce
bailliage est en moyenne de quatre mille bons
ducats.
Par un billet de M. de Ruifia, les
Chevaliers témoignent désirer que plusieurs
curés qui prêtent leur nom à des laïques,
possesseurs actuels de certaines cures en ces
bailliages, remettent ces cures, s'ils ne sont pas
aptes à les desservir, à l'Ordre qui est
propriétaire, par concession de Sa Sainteté, des
bénéfices des bailliages ; et, s'ils ont les
qualités requises, qu'ils soient compris au
nombre des six curés pensionnés. Le chevalier
Bergera ne m'a fait aucune proposition à ce
sujet. A la vérité, je ne puis comprendre
comment ces clercs armés prétendent [244]
qu'un curé confidentiaire puisse être capable
de compter parmi les six, qui doivent avoir des
551 Cf. supra, p. 228.
165/318

17.6 Page 166

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absolutissima volontà a beneficio dell' anime. mœurs un peu plus réglées que n'en ont
Quanto poi al novo Abbate, vorrei ben preghar il'ordinaire les confidentiaires.
humilissimamente V. S. Illma si degni
Je loue le Dieu béni de ce que Sa
commandarglie che faccia paghar Sainteté a quelque intention de placer dans
essattamente et compitamente la pensione che l'abbaye d'Abondance les réformés de Saint-
si suol dar dall'Abbate552 al P. Prædicator Bernard, et je supplie le Seigneur lui en donner
ordinario di Evian, il qual adesso è un une volonté absolue pour le bien des finies.
meritevole dottor, Provinciale del Ordine di Quant au nouvel Abbé, je voudrais supplier
San Domenico553 ; et l'hanno fatto stentare già Votre Seigneurie Illustrissime de lui ordonner
l' anno passato, et tuttavia lo fanno più stentare de payer exactement et entièrement la pension
questo. Et io ho in questo un poco de l'interesse que l'Abbé de ce monastère a coutume de
particolare, per esser Evian una terra vicina, délivrer au P. Prédicateur ordinaire d'Evian.
catholica quanto si può dire, et ha gran bisogno Celui-ci est actuellement un très digne docteur
di buon predicatore, quale non può havere de l'Ordre de Saint-Dominique : on l'a déjà fait
senza questa pensione. [245]
endurer l'année dernière, et on le fait encore
Vedo poi il dispiacere che ha sentito plus endurer cette année. J'ai en ceci un certain
Sua Altezza dell'oppositione che fecero questi intérêt particulier, parce qu'Evian est une ville
di Thonone all' erettione dell' altar, et ne ho de notre voisinage, catholique autant qu'on
ricevuto una lettera qual mi consola assai ; non peut le dire ; elle a donc grand besoin d'un bon
havendo però lasciato di eriger l'altar prédicateur, qu'elle ne saurait avoir sans cette
nonostante l'oppositione fatta, perchè no si pension. [245]
faceva dal consenso publico della terra, ma
Je vois de plus la peine que Son Altesse
dalla sola passione de certi particolari
a éprouvée en apprenant l'opposition apportée
par ces gens de Thonon à l'érection de l'autel ;
Revu sur l'Autographe conservé à la
j'en ai reçu une lettre qui m'a bien consolé.
Visitation d'Annecy.
Nous ne laissâmes pas pour autant d'ériger
l'autel, malgré cette opposition, car elle ne se
faisait pas du consentement public de la ville,
mais seulement par la passion de quelques
particuliers
_____
552 si suol dall'Abbate paghar
553 Le P. Jean de Fossias ou de Foissia, religieux Dominicain du couvent de Montmélian, docteur de la Faculté de
Nantes. Il avait été élu vicaire général de la province Gallicane de son Ordre au Chapitre de Blois (16 mai 1596), et
fut absous de cette charge trois ans plus tard au Chapitre de Troyes.
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17.7 Page 167

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LXXXVII. Au même (Minute inédite). Protestations
d'obéissance et de dévouement. Nouvel exposé des difficultés
de la mission. Promesse faite par les Religieux d'Ainay.
Prédication du Saint à Cervens. Destination du chanoine
Roget. Les hérétiques prétendent retirer à M. d'Avully la
dignité de juge de leur consistoire.
Thonon, 12 mars 1597.
Illustrissimo et Reverendissimo Signor
Mon très honoré, Illustrissime et
mio osservandissimo,
Révérendissime Seigneur,
Hoggi ho ricevuta la lettera di V. S.
Illma del 25 de Febraio, con il triplicato delle
precedenti, laquale mi ha [246] recato
altretanto di dolore quanto V. S. Illma mi
mostra di haver in ammiratone la tardità della
mia risposta a quelle precedenti, temendo che
V. S. Illma m'habbia per poco desideroso di
esseguire li suoi commandamenti. Et supplico
humilissimamente la sua bontà di creder più
tosto ogni altra cosa d'un servitor tanto
ubligato et divoto, et che me è mancato la
commodità, no la volontà ; massime perchè io
andavo aspettando di giorno in giorno la
partenza del signor cavaglier Bergera et il
principio dell'essecutione dell'ordine dato per
li sei curati, per dar poi risposta a V. S. Illma et
più grata, et più sicura, et più compita.
Hora ringratio humilissimamente V. S.
Illma della protettione che s'è presa di queste
chiese di Geneva554 et della risposta havuta dal
signor Cardinale Aldobrandino.
Dalla partenza del signor cavaglier
Bergera in qua, non ho havuto nè danari, nè
altro che quelle trenta coppe555 di fromento che
lasciò. Nè questo è mancamento de detto
cavaglier, qual è buon et di buona intentione ;
[247] ma è mancamento di quelli che hanno
tolto in affitto li beni de quella Religione, alli
quali haveva datto ordine di pagare, et essi van
differendo di giorno in altro quanto possono :
et per questo non posso chiamare i sacerdoti et
curati, non havendo danari da dargli per
principiar le loro residentie qui in questo
balliagio. Sì che io non ho speranza di veder
J'ai reçu aujourd'hui votre lettre en date
du 25 février, avec la triple copie des
précédentes ; elle m'a causé autant de douleur
que [246] Votre Seigneurie Illustrissime me
montre d'étonnement du retard de ma réponse
aux lettres précédentes, car elle m'inspire la
crainte d'être tenu pour peu empressé à
exécuter vos ordres. Je supplie très
humblement votre bonté de croire plutôt toute
autre chose d'un serviteur qui vous a tant
d'obligations et qui vous est si attaché, et d'être
persuadé que c'est l'occasion et non la volonté
qui m'a manqué. C'est surtout que j'attendais de
jour en jour le départ du chevalier Bergera et la
mise à exécution de l'ordre donné pour les six
curés, afin de faire ensuite une réponse plus
satisfaisante, plus sûre et plus complète.
Maintenant je remercie très
humblement Votre Seigneurie Illustrissime de
la protection accordée à ces églises du diocèse
de Genève et de la réponse du Cardinal
Aldobrandino.
Depuis le départ de M. le chevalier
Bergera je n'ai plus reçu ni argent ni autre
chose, sinon les trente coupes de froment qu'il
laissa. Ce n'est pas la faute dudit chevalier, qui
est bon et bien intentionné, mais celle des gens
qui ont affermé les biens de la Religion [247]
et auxquels déjà il avait ordonné de payer ;
néanmoins ils diffèrent tant qu'ils peuvent d'un
jour à l'autre. C'est pourquoi je ne puis appeler
des prêtres et des curés, n'ayant pas d'argent à
leur donner pour commencer à établir leur
résidence dans ce bailliage. Je n'espère donc
554 Vide supra, p. 240.
555 Mesure de capacité qui variait en Savoie selon les localités. La coupe de Thonon équivalait à cinquante-quatre
litres.
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17.8 Page 168

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grand' effetto de queste pensioni avanti
Quaresima passata, si perchè io non ho ancora
denari, sì perchè no potremmo cavare horamai
li sacerdoti che devono venire dalle chiese
dove sonno, per le confessioni et altre necessità
; et io no posso accompagnarli et collocarli,
restando ancora qui impedito per l'istessa
ragione.
Oltre le sei pensioni assegnate dalla
Religione di San Lazaro, ne haveremo doppo
Pasqua una settima dalli Religiosi di Henai, di
Lione556, i quali havendo qui un buon priorato,
mi han promesso di darne una tale quale io
addimandarò, senza regolarsi alle pensioni
cavaleresche. [248]
Domenica passata, terza di
Quaresima557, havendo prædicato secondo il
solito la matina a buon hora nella parrochia
dell'Alinges, passai in una altra parrochia di là
tre millia, dove sin allhora non ero stato,
chiamata Cervens ; et havendo dato aviso al
popolo che io desideravo di predicare, mi
fecero una numerosa et gratissima audientia, et
all' uscir della prædica mi diedero segno di
haver desiderio grande di quel pane de
figlioli558. Ma hebbi gran difficoltà a ritrovarmi
per tempo alla prædica di Thonone, che era
discosto di Cervens de cinque or sei millia ; sì
che, stando qui, è quasi impossibile di
trascorrere in più luoghi. Havendo dunque
provato l'animo del popolo di quella parrochia,
son risoluto di collocarvi uno delli sei
pensionarli ; nelli Alinges un altro. Qui verrà,
per quanto mi ha promesso, il dottor
Rogetto559, il qual son certo che V. S. Illma
haverà veduto, per esser stato deputato per il
viaggio di Piemonte ; et essendo egli buono et
prattico predicatore, potrà supplire in duoi
luoghi. Ma io non son risoluto di ricevere [249]
a l'abiuratione se non quelli che saranno ben
instrutti, et da dovero, per quanto la loro
capacità comportarà. Et così vede V. S. Illma
d'onde avviene che le cose di religione no si
facciano con quel fervore che si deve : ciò è
pas un grand résultat de ces pensions avant la
fin du Carême, soit parce que je manque
d'argent, soit parce que nous ne pourrions
retirer les prêtres des églises où ils sont
occupés à entendre les confessions et à exercer
d'autres ministères. Quant à moi, je ne puis les
accompagner ni les installer, me trouvant
retenu ici pour la même raison.
Outre les six pensions assignées par
l'Ordre de Saint-Lazare, nous en aurons après
Pâques une septième des Religieux d'Ainay, de
Lyon, qui, ayant ici un bon prieuré, m'ont
promis d'en donner une telle que je la
demanderai, sans se régler sur les pensions des
Chevaliers. [248]
Dimanche dernier, troisième de
Carême, ayant prêché le matin de bonne heure,
selon la coutume, dans la paroisse des
Allinges, je passai dans une autre paroisse
distante de trois milles, appelée Cervens, où je
n'avais pas encore été. Et ayant averti le peuple
que je souhaitais prêcher, j'eus une nombreuse
et bienveillante assistance qui, au sortir du
sermon, me témoigna un ardent désir de ce
pain des enfants. Mais j'eus grand'peine à me
rendre à temps pour le sermon de Thonon, qui
est à cinq ou six milles de Cervens, de sorte
que, étant fixé ici, il m'est presque impossible
d'évangéliser plusieurs localités. Ayant donc
sondé la disposition du peuple de cette
paroisse, j'ai résolu d'y placer un des six curés
pensionnés et un autre aux Allinges. C'est le
docteur Roget qui viendra ici, selon la
promesse qu'il m'en a faite, lequel doit vous
être certainement connu, puisqu'il a été député
pour le voyage de Piémont ; étant bon et très
expérimenté prédicateur, il pourra desservir
deux paroisses. [249] Mais je suis résolu de
n'admettre à l'abjuration que des personnes
véritablement bien instruites, dans la mesure
que leur capacité comportera. Votre
Seigneurie Illustrissime voit donc la cause
pour laquelle les affaires de la religion ne se
font pas avec l'ardeur désirable : c'est l'avarice
556 Abbaye de Lyon, située dans une île au confluent du Rhône et de la Saône ; on en attribue la fondation à saint
Badulphe, qu'on croit avoir vécu au IVe siècle. Ce célèbre monastère, qui se rangea plus tard sous la Règle de saint
Benoît, comptait dans sa filiation un grand nombre de prieurés, entre autres celui de Bellevaux dans le haut Chablais,
qui aurait été établi au XIe siècle.
557 En 1597, le troisième Dimanche de Carême se trouvait être le 9 mars.
558 Matt., XV, 26.
559 Philibert Roget, natif de Talloires, docteur en théologie et chanoine de Saint-Pierre de Genève. Il fut plus tard
(1610) vicaire général et official substitué, curé de Vallières et de Minzier. Le chanoine Roget mourut le 27 mai 1628,
à l'âge de soixante-quinze ans.
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dalla avaritia et mal uso de' beni ecclesiastici.
No voglio lasciar di dire a V. S. Illma
che monsieur d'Avully essendo per lo inanzi
giudice del consistorio supremo delli hæretici,
volendo questi giorni passati essi heretici
ricusarlo, non lo ha voluto patire, allegando
che non essendo questo consistorio per altro
salvo per la correttione de' vitii, facendosi
catholico non solamente non gli era mancato il
zelo et giudicio necessario per quella
correttione, ma gli era augmentato di gran
lunga, sì che non doveva esser tenuto per
incapace.
Vengo a supplicare ancora una volta V.
S. Illma si degni di incaricar strettamente al
novo Abbate560, o vecchio, qual si sia, di far
paghar essattamente la pensione dovuta al
prsedicator ordinario di Evian, perchè et quella
terra è meritevole di esser aiutata, et il
predicator che hanno adesso è risguardevole
per più rispetti. [250]
Dove non occorrendo altro particolar
degno di essergli scritto, priegho Nostro
Signor le dia ogni vero contento, et sarò
sempre,
Di V. S. Illma,
……………………………………………….
de ceux qui détiennent les biens ecclésiastiques
et le mauvais usage qu'ils en font.
Je ne veux pas omettre de vous dire que
M. d'Avully ayant été jusqu'ici juge du
consistoire suprême des hérétiques, ceux-ci
prétendaient le récuser ces jours passés. Il n'a
point voulu le souffrir, disant que ce
consistoire n'étant établi que pour la correction
des vices, sa conversion au catholicisme ne lui
a point ôté le zèle et le jugement nécessaires à
cette correction, mais qu'elle les lui a
grandement augmentés, en sorte qu'il ne doit
point être tenu pour incapable.
Je viens supplier encore une fois Votre
Seigneurie de vouloir bien presser le nouvel
Abbé, ou l'ancien, n'importe lequel, de faire
payer exactement la pension due au
prédicateur ordinaire d'Evian, parce que cette
ville mérite d'être aidée, et le prédicateur qu'ils
ont maintenant est digne d'égards sous
plusieurs rapports. [250]
N'ayant présente à l'esprit aucune autre
particularité qui vaille la peine d'être signalée,
je prie Notre-Seigneur vous donner tout vrai
contentement, et je serai toujours,
De Votre Seigneurie Illustrissime,
………………………………………………..
Revu sur l'Autographe appartenant à Mme
Doroz, née d'Arcine, à Besançon.
_____
LXXXVIII. Au duc de Savoie, Charles-Emmanuel Ier. Demande
de secours pour des indigents. Requête en faveur de quelques
hameaux des Allinges. Menées des protestants contre M.
d'Avully.
Thonon, 12 mars 1597.
Monseigneur,
Dernierement, quand j'eu (sic) cest honneur de bayser les mains a Vostre Altesse, je luy
repræsentay six ou sept pauvres gens, vieux et impuyssans a gaigner leur vie, qui ont vescu icy
avec une admirable constance en la loi561 catholique. Et parce que leur pauvreté562 pourroit estre
560 Vide supra, p. 223, not. (514).
561 [Les variantes qui suivent sont extraites d'une minute écrite sur le même feuillet que la lettre précédente.]
pauvres Catholiques, vieux, inhabiles...] qui ont vescu icy un grand espace de tems avec un'admirable
constance en la religion
562 necessité
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17.10 Page 170

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secourue avec une petite piece des graines de [251] Ripaille et Filly563 qui sont destinees aux
aumosnes, je suppliay tres humblement Vostre Altesse, a leur nom, de leur en assigner quelque
portion ; et selon la pieté dont Dieu l'a enrichie elle le trouva raysonnable. Maintenant je sçai que
ces aumosnes564 se reduysent aux Alinges pour la munition de la garnison ; mays je ne laisseray
pas pour cela d'oser supplier Vostre Altesse quil luy plais'ordonner565 que, d'une si grande quantité,
quattre ou cinq muys566 en soyent appliqués a ces pauvres gens vieux et a un autre qui, estant
encores de bon aage, ne laisse pas d'estre pauvre567 et, moyennant cest'aumosne, pourra servir au
clocher pour les Catholiques.
Il y a aussy certains petitz vilages qui estoyent anciennement de la parroisse d'Alinges, et
personne ne leur contredisoit d'en estre encores maintenant ; mays par ce que Vostre Altesse, selon
son saint zele, a gratiffié568 la parroisse d'Alinges d'un'immunité de toutes charges pour quattre ans
a venir, en contemplation de [252] leur retour a l'Eglise569, on a opposé a ces petitz vilages que du
tems de l'occupation des Bernois on leur commanda d'aller ailleurs a la præche. Je supplie donques
tres humblement Vostre Altesse d'eslargir plus tost sa liberalité sur ces vilages par une declaration,
que d'estressir570 ceste premiere parroisse qu'on a dressé en ce païs a la foy catholique.
Les gens du consistoire supreme de ce balliage taschent de lever a monsieur d'Avully la
judicature qu'il571 y tient de Vostre Altesse ; mays puysque ce consistoire n'est que pour la
correction des meurs et qu'il n'en est faitte aucune mention au traitté de Nion, a ce que j'ay peu
apprendre, comm'on ne perd pas le jugement pour se faire catholique, aussy n'en devroit on572 pas
perdre la judicature, specialement quand elle depend de la volonté573 de Vostre Altesse, pour la
santé de laquelle je ne cesseray de prier Dieu nostre Seigneur, comm'ayant ce bien [de] me pouvoir
et devoir dire,
Monseigneur,
De Vostre Altesse,
Tres fidelle et tres humble sujet et serviteur,
FRANÇOIS DE SALES,
indigne Prevost de St Pierre de Geneve574.
A Thonon, le 12 mars 97.
Revu sur l'Autographe conservé à Turin, Archives de l'Etat. [253]
563 Les prieurés de Ripaille et de Filly, placés tous deux sous la Règle de Saint-Augustin, comptaient, l'un quinze
religieux, l'autre, huit seulement. Le premier avait été fondé près de Thonon (1410), par le duc de Savoie Amédée
VIII ; le second, situé entre Thonon et Douvaine, faisait remonter son origine au commencement du XIe siècle. Ils
avaient été pourvus de riches dotations, mais à la charge de faire d'abondantes largesses aux pauvres des paroisses
environnantes. Lors de l'occupation bernoise, les envahisseurs chassèrent les moines et confisquèrent toutes leurs
possessions. Néanmoins ces nouveaux maîtres continuèrent à Ripaille « une aumône solennelle qu'ils faisaient trois
fois la semaine pour se faire aimer du peuple. » Les bâtiments de Filly furent convertis en hospice destiné à héberger
les mendiants.
564 Vostre Altesse de leur en assigner une portion, et elle le jugea raysonnable. Mais parce que je n'eu pas le tems
pour en solliciter le depeche, la chose en demeura-la. Maintenant je sçai [que ces aumosnes la ont esté portëes...]
qu'elles
565 je ne lairray pas pour cela de supplier encores V. A. de commander
566 Mesure de capacité qui pour le froment équivalait à douze coupes (voir ci-devant, note (555), p. 247), et à vingt-
quatre pour les céréales de moindre valeur.
567 a ces pauvres [qui tous sont impuyssans, vieux, sinon un qui ne laysse pas d'estr'indigent et que je desirerois
employer a un service public...] et impuyssans gens vieux, et a un autre qui, estant encores jeune, ne laysse pas d'estre
indigent
568 a voulu gratiffier
569 l'Eglise Catholique
570 d'aller a la præche ailleurs qu'Alinges. Je supplieray tres humblement V. A. d'eslargir plus tost sa liberalité sur
ces petitz vilages que d'accourcir
571 de ce balliage tascheroyent volontiers de lever la judicature que monsieur d'Avully
572 devra-on
573 nomination
574 je prie Dieu en tout'humilité, comm'ayant cest honneur d'estre, Monseigr
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18 Pages 171-180

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18.1 Page 171

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LXXXIX. A Monseigneur Jules-César Riccardi, Archevêque de
Bari, Nonce Apostolique a Turin (Inédite). Installation d'un curé
à Cervens. Eloge de M. de Blonay.
Thonon, 16 mars 1597.
Illustrissimo et Reverendissimo
Mon très honoré, Illustrissime et
Signore mio osservandissimo,
Révérendissime Seigneur,
Credo che tutti quelli ai quali ho dato
lettere per essere appresentate a V. S. Illma
fanno a gara per farmi parere negligentissimo,
poiché il signor cavaglier Bergera non è ancora
partito di Chamberi, per quanto mi vien detto,
et a questo gentilhuomo, il quale doveva
inviarsi la settimana passata, fu dato tempo di
far questa giunta alle precedenti mie.
Sono ritornato hoggi, quarta Domenica
di Quaresima, nella parrochia di Cervens, dove
quel popolo mi ha consolato con quell'avida et
attenta audientia. In somma, quest'anime, da
Tonone in poi, ci sonno date in preda, et
mancano solo i cacciatori. Ho collocato a
Cervens un buon sacerdote il quale, al
principio di queste guerre, fu già nominato per
star in quella parrochia se le cose [254]
succedevano, et era cognosciuto da una gran
parte degli habitanti575. Ho ricevuto cento
fiorini delle pensioni et non più, dei quali parte
ne ho data per certe provisioni necessarie, parte
ne darò a quello sacerdote di Cervens
postdomani, acciò cominci la sua residentia.
Hieri si diede un così grande rumore di guerra,
che questi poveri Catholici ne sono restati tutti
sbigottiti. Se per sorte il latore di queste, M. di
Blonnay576, havesse bisogno di ricorrere al
favore di V. S. Illmo la supplico
humilissimamente di fargliene gratia, perchè
egli è buon catholico et zelante.
Priegho il Signor si degni conservare
V. S. Illma ad honor di sua divina Maestà et
beneficio nostro, et io resto per sempre, di V.
S. Illma et Rma,
Devotissimo et humillissimo servidore,
FRANCO DE SALES,
indegno Prevosto di Geneva.
Tonone, alli 16 di Marzo 97.
Je crois que tous ceux à qui j'ai confié
des lettres pour être présentées à Votre
Seigneurie Illustrissime rivalisent entre eux
pour me faire paraître très négligent, puisque,
d'après ce qu'on me dit, M. le chevalier
Bergera n'est pas encore parti de Chambéry, et
on laisse assez de temps à ce gentilhomme qui
devait se mettre en route la semaine dernière,
pour me permettre d'ajouter ceci à mes lettres
précédentes.
Je suis retourné aujourd'hui, quatrième
Dimanche de Carême, dans la paroisse de
Cervens où ce peuple m'a consolé en montrant
tant d'avidité pour la parole de Dieu et tant
d'attention à l'écouter. En somme, si l'on en
excepte Thonon, les âmes nous sont partout
offertes comme une proie ; il ne manque que
des chasseurs. J'ai placé à Cervens un bon
prêtre qui, au commencement de ces guerres,
avait [254] déjà été nommé pour desservir
cette paroisse si les choses réussissaient et il
était connu d'une grande partie des habitants.
J'ai reçu cent florins des pensions et pas
davantage. J'en ai donné une partie pour
certaines provisions nécessaires ; je donnerai
l'autre après-demain à ce prêtre de Cervens
afin qu'il commence sa résidence. Hier on fit
circuler de telles rumeurs de guerre que ces
pauvres Catholiques en ont été tout effrayés. Si
par hasard le porteur des présentes, M. de
Blonay, avait besoin de recourir à votre
protection, je vous supplie très humblement la
lui accorder, car il est un bon et zélé
catholique.
Je prie le Seigneur de conserver Votre
Seigneurie pour la gloire de sa divine Majesté
et pour notre avantage, et je demeure à jamais,
De Votre Seigneurie Illustrissime et
575 Bernard Chevalier avait été nommé curé de Cervens le 10 janvier 1590.
576 D'après une lettre du Nonce de Turin, en date du 2 juin 1597 (voir à l'Appendice), il s'agit de Claude de Blonay,
coseigneur de Saint-Paul.
171/318

18.2 Page 172

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Révérendissime,
Revu sur une copie déclarée authentique de
Le très dévoué et très humble serviteur,
l'Autographe conserve à la cathédrale de
FRANÇOIS DE SALES,
Nardo (Italie, Pouille). [255]
indigne Prévôt de Genève.
Thonon, le 16 mars 1597. [255]
_____
XC. Au même (Minute inédite). Mesures à prendre pour
pourvoir à la subsistance des curés du Chablais. Voyage du
chanoine Louis de Sales à Genève. Désignation des PP.
Capucins et Jésuites dont le concours serait le plus utile à la
mission ; frais que nécessiterait leur entretien.
Thonon, 25 mars 1597.
Illustrissimo et Reverendissimo Signor
Mon très honoré, Illustrissime et
mio osservandissimo,
Révérendissime Seigneur,
Supplico humilissimamente V. S. Illma
per amor di Dio si degni perdonarme se così
spesso non haverà ricevute lettere da me577,
perchè la poca commodità che havemo qui, et
massime io, di inviare le lettere in Chamberi,
overo in Aousta, ne è stata la causa principale.
Et credo che tutti quelli alli quali io do le mie
lettere per farle appresentare a V. S. Illma fanno
a gara per farme parere negligentissimo ;
poichè uno, tre giorni fa, me ne mandò una che
già molti giorni sono haveva tolto per portar in
Piemonte, dicendo che egli non poteva passar
; [256] et il cavaglier Bergera, quale ne ha una
altra, era ancora fa poco in Chamberi, per
quanto mi vien detto. Hieri mi capitò nelle
mani, per huomo mandato espresso da
monsignor Vicario di Geneva578, quella che V.
S. Illma mi scrisse alli 12 di questo mese,
insieme con l'altra alligata per monsieur
d'Avulli et la copia della lettera del signor
Cardinale di Santa Severina579.
Monsieur d'Avulli ha ragione dicendo
che saranno necessarii vintidue curati in questo
Je supplie très humblement pour
l'amour de Dieu Votre Seigneurie Illustrissime
de daigner me pardonner si elle n'a pas reçu de
mes lettres aussi souvent qu'Elle le souhaitait ;
le peu de facilité que nous avons ici, moi
surtout, d'en envoyer à Chambéry ou à Aoste
en a été la cause principale. Je crois que tous
ceux à qui je confie mes lettres pour être
présentées à Votre Seigneurie Illustrissime
s'efforcent à l'envi de me faire paraître très
négligent ; car, il y a trois jours, l'un d'entre eux
m'en renvoya une qu'il avait depuis quelque
temps pour la porter en Piémont, assurant qu'il
ne pouvait [256] passer outre, et, d'après ce qui
m'a été dit, le chevalier Bergera, qui en a une
autre, était encore naguère à Chambéry. Hier je
reçus, par l'entremise d'un exprès que
m'envoya M. le Vicaire de Genève, celle que
Votre Seigneurie m'écrivit le 12 de ce mois,
avec une autre pour M. d'Avully et la copie de
la lettre de M. le Cardinal de Santa-Severina.
M. d'Avully a raison de dire que vingt-
deux curés seraient nécessaires en Chablais
577 ricevute da me risposte
578 Le vicaire général François de Chissé (voir note (173), p. 71).
579 Jules-Antoine Santorio, né à Caserte en 1552, avait été élevé au siège un archiépiscopal de Santa-Severina en 1366,
et, quatre ans plus tard, créé car-dinal du titre de Sainte-Barbe. Dans la suite, il résigna son archevêché et accepta celui
de Palestrina, sans laisser néanmoins d'être toujours connu sous le nom de Cardinal de Santa-Severina. Ce Prélat,
après avoir rempli avec beaucoup de zèle les fonctions de grand Inquisiteur, mourut à Rome en 1602.
C'est à propos de la conférence projetée entre les missionnaires et les ministres que le Cardinal écrivit la lettre
mentionnée ici. (Voir à l'Appendice celle de Mgr Riccardi du 12 mars 1597.)
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18.3 Page 173

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Chiablais, poichè (per venir al particolar) vi
sono da 45 parrochie580. Ma perchè io no so chi
voglia dar tanta intrata necessaria a tante
persone, ho sempre havuto opinione che
basterebbero da 18 curati, li quali, per dire
quanto io credo, devono havere honorata
provisione per sè et per un vicario che [257]
potesse aiutarli, già che le parrochie sariano
molto grandi, et acciò possano con decentia far
l'officio loro et no piglino le limosine per le
confessioni, sepulture, Messe et altre cose ; chè
se ben questo sarà forse lecito, tuttavia non è
per nessun conto espediente581. Se vorranno i
Cavaglieri lasciar le cure et beneficii curati,
purchè li particolari che ne hanno qui facciano
il medesimo et se ne faccia un grosso per esser
diviso in parti eguali, da Tonone in poi dove
deve esser un essercitio più decente, crederei
che questo saria un buon ordine. Ma non vorria
che i Cavaglieri havessero il jus patronatus
sopra queste cure, chè questo sarebbe rovinar
il concorso, et col tempo se vederiano
nominationi da non dire ; et essi non sonno nè
fondatori, nè restauratori de queste cure.
Quanto poi alle considerationi fatte in
Roma sopra la conferentia, sono veramente
degnissime, et io ne ho scritte memorie
amplissime di quanto me ne pare, et le ho
mandate al signor Ludovico de Sales, canonico
de Geneva, persona prattica, zelante, facunda
nel predicare et accortissima nel servitio
d'Iddio, il quale è così ben [258] informato dei
miei pensieri quanto io stesso ; et fu già
mandato fa poco in Geneva, dal comune
consenso di Monsignor Rmo et del Padre
Cherubino, per scuoprir un poco meglio questo
negotio, et vidde una gran porta aperta al
santissimo Crocifisso in quella terra, purchè
sia portato con secreto da persone pratiche di
questi humori, humili et patienti. Bisogna far
come facciamo la Settimana Santa : scuoprir
una corna della Croce, poi l'altra piano piano,
et così tutto, et gridar dolcemente : Ecce
lignum Crucis, venite adoremus.
Et io saria volentieri andato sin ad
Annessi per esser un poco consolato con
Monsignor Rmo et quelli Padri benedetti,
poichè io son qui solo come leproso fuori
dell’armata; ma un poco de ressentimento di
puisque, pour en venir à quelque particularité,
cette province comprend environ quarante-
cinq paroisses. Mais parce que je ne sais qui
voudrait fournir les revenus nécessaires à tant
de personnes, j'ai toujours été d'avis qu'environ
dix-huit curés suffiraient. Pour dire ce que je
crois, les paroisses étant très étendues, ils
doivent avoir une pension convenable,
suffisant à leur entretien [257] et à celui d'un
vicaire qui les seconde, en sorte qu'ils puissent
remplir leur ministère avec bienséance, et
qu'ils n'aient pas à exiger des aumônes pour les
confessions, sépultures, Messes et autres
choses ; car si cela est peut-être licite, toutefois
il n'est en aucune manière expédient. Si les
Chevaliers consentaient à céder les cures et les
bénéfices-cures, et si les particuliers qui en
détiennent ici faisaient de même, on pourrait
les réunir en un lot qu'on diviserait en parties
égales entre les paroisses rurales ; car à Thonon
l'exercice du culte demande plus de solennité.
Je crois que cet arrangement serait avantageux
; mais je ne voudrais pas que les Chevaliers
eussent le droit de patronage sur ces cures : ce
serait ruiner le concours, et, avec le temps, on
verrait des nominations peu avouables. Du
reste, ils ne sont ni fondateurs ni restaurateurs
de ces cures.
Quant aux considérations faites à Rome
au sujet de la conférence, elles sont vraiment
très sages ; j'ai écrit de très amples mémoires
sur ce qu'il m'en semble, et je les ai envoyés à
M. Louis de Sales, chanoine de Genève,
homme expérimenté, zélé, éloquent dans la
prédication, très prudent pour ce qui regarde le
service de Dieu et [258] qui connaît mes
pensées aussi bien que moi-même. Ayant été
naguère mandé à Genève, du commun
consentement de Mgr notre Evêque et du P.
Chérubin, pour approfondir un peu mieux cette
affaire, il vit en cette ville une grande porte
ouverte au très saint Crucifix, pourvu qu'il y
soit porté secrètement par des personnes
humbles, patientes et familiarisées avec les
mœurs des hérétiques. Il faut faire comme nous
faisons pendant la Semaine Sainte : découvrir
un bras de la Croix, puis l'autre, et ainsi peu à
peu, la Croix tout entière, en chantant
doucement : Ecce lignum Crucis, venite
580 La lettre écrite à ce sujet par M. d'Avully au Nonce de Turin, en date du 8 février 1597, a paru dans le tome VI (p.
351) des Mélanges d'archéologie et d'histoire publiés par l'Ecole française de Rome, 1886.
581 Cf. I Cor., VI, 12.
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febre che io hebbi questi giorni passati, le
confessioni alle quali per forza bisogna che io
attenda et le altre necessità di qua mi tengono
alligato qui sin alla Pasqua. Dirò ingenuamente
il mio parer: no potrà meglio far Sua
Beatitudine che di lasciar in questo et simili
negotii l'assoluta libertà et authorità fra V. S.
Illma et Monsignor Rmo, perchè questa guerra
devesi fare con l'occhio [259] et non
coll'orecchio, perchè le occasioni si
appresentano bene spesso, et passano senza
ritornar più da quelli che non le pigliano.
Questo sia detto da me con humillissima
obedientia. È tanto ammalata questa provincia,
che ogni minimo accidente che sopravenga
impedisce un grande effetto.
Ritornai la Domenica quarta a Cervens
et hebbi magior audientia che la prima. Io vi
lasciai un buon sacerdote che era già destinato
per esser curato in quella parrochia al principio
di queste guerre se le cose succedevano, et era
già conosciuto da molti de gl'habitatori. Heri
(sic) mi mandarono [ad] invitare per ritornare,
chè desideravano farsi Catholici; ma parte la
mia dappocagine, parte i negotii pure spirituali
et paschalitii di questo Tonone [et] d'Alinges,
mi diedero occasione di prorogar questo bene
sino al dopo Pasqua che haveremo aiuto da
altri predicatori.
Li Padri Cappucini li quali io per
adesso vorrei che fossero deputati a quest'opra,
sono il Padre Cherubino et il Padre Spirito,
dottissimi, santissimi, humilissimi, et [260]
ambiduoi predicano nella diocesi582 ; li Padri
Giesuiti, il Padre Giovan Saunerio583, dei primi
che habbiano di qua, et un altro che ha
predicato questa Quaresima in Rumilly, ma no
me sovienne il nome584. Priegharò Monsignor
Rmo che lo nomini. Et pur no mi par che si
debba restringer il numero a questi soli, ma si
estendere ad altri, se bisogno ne fosse a
l'anime, chè in questo no vedo che vi possa
esser abuso veruno. Et pertanto si potria
observar quest'ordine, che commandi V. S.
Illma alli Provinciali [che] essi mandassero
adoremus.
Je serais allé volontiers jusqu'à Annecy
pour me consoler un peu avec Mgr le
Révérendissime et ces bons Pères, puisque je
suis seul ici, comme un lépreux hors de l'armée
; mais un petit ressentiment de fièvre que j'eus
ces jours passés, les confessions que je dois
forcément entendre, et d'autres devoirs me
tiennent lié ici jusqu'à Pâques. Je dirai
ingénuement mon avis : Sa Sainteté ne pourrait
faire mieux que de laisser toute autorité et
liberté d'action en cette affaire et en d'autres
semblables à Votre Seigneurie et à Mgr notre
Evêque, puisque [259] cette guerre doit se
diriger par l'œil et non par l'oreille ; car bien
souvent les occasions se présentent et passent
sans retour pour ceux qui ne savent pas les
saisir. Ceci soit dit de ma part avec une très
humble obéissance. Cette province est
tellement malade que le moindre accident qui
surviendrait empêcherait un grand succès.
Je suis retourné le quatrième Dimanche
de Carême à Cervens, et j'ai eu un auditoire
plus nombreux que le premier. J'y ai laissé un
bon prêtre, qui déjà au commencement de ces
guerres avait été désigné pour être curé de cette
paroisse si les affaires réussissaient ; il était
déjà connu d'un grand nombre d'habitants. Hier
les paroissiens me firent inviter à y retourner
parce qu'ils désirent se faire catholiques ; mais
mon insuffisance d'une part, et de l'autre les
affaires spirituelles et les confessions pascales
de Thonon et des Allinges m'ont contraint de
différer ce bien jusqu'après Pâques, où nous
serons aidés par d'autres prédicateurs.
Les Pères Capucins que, pour le
moment, je voudrais voir destinés à cette
œuvre sont le P. Chérubin, le P. Esprit, l'un et
l'autre très doctes, très saints, très humbles ;
tous deux prêchent dans ce [260] diocèse.
Quant aux Pères Jésuites, je voudrais le P.Jean
Saunier, un des premiers qu'ils aient envoyés
ici, et un autre qui a prêché ce Carême à
Rumilly, mais dont je ne me rappelle pas le
nom. Je prierai Mgr le Révérendissime de le
582 Le P. Chérubin prêchait le Carême à Annecy (voir note (541), p. 236), et le P. Esprit le prêchait à La Roche.
583 Le P. Jean Saunier, né en 1545, entra dans la Compagnie de Jésus à la fin de l'année 1572. Il professa douze ans
les basses classes avant d'être employé au ministère apostolique. Le zèle qu'il déployait depuis plus de deux uns dans
l'évangélisation des bailliages de Ternier et de Gaillard inspira à saint François de Sales le désir de l'obtenir pour
collaborateur dans la mission du Chablais. Le P. Saunier fut ensuite préfet des études au collège de Chambéry ; il
mourut à Paris le 9 octobre 1610.
584 Probablement le P. Alexandre Hume (voir ci-après, p. 304).
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secondo le occurrentie, chè faremo poi venir demander. Cependant il me semble qu'on ne
delli secolari quanti più potremo.
devrait pas se limiter à ce petit nombre, mais
V. S. Illma mi commanda che io le dica l'augmenter d'autres encore si les âmes en
la spesa che ci potrebbe andar per mantener avaient besoin, car en ceci je ne vois pas qu'il
questi Padri. Dico in verità che cento scudi per puisse y avoir aucun abus. Partant, on pourrait
huomo sonno necessarii, perchè bisognerà che procéder ainsi : Votre Seigneurie Illustrissime
habbino un compagno per uno, et quelli [261] donnerait ordre aux Provinciaux d'envoyer des
che non saranno Cappucini, ancora un cavallo Religieux selon les occasions ; nous ferons
per trascorrere di luogho in luogho ; ma le cure ensuite venir autant de prêtres séculiers que
faranno questa spesa sin tanto che siano nous pourrons.
stabiliti i curati, purchè ci sian lasciate. No
Votre Seigneurie m'ordonne de lui dire
sapria dire circa questa riduttione più jusqu'où montera la dépense pour l'entretien de
particolarmente che io feci nelle memorie ces Pères. Je dis en vérité que cent écus par tête
lasciate a V. S. Illma et al P. Giulio sont nécessaires, parce qu'il faudra à chacun un
Coccapane585, da presentarsi a Sua Altezza. compagnon, et [261] à ceux qui ne sont pas
Una sola cosa dirò di più : che la Capucins il faut encore un cheval pour aller
reformatione di queste badie di qua importa d'un lieu à un autre ; mais les cures fourniront
infinitamente per far un buon odor da per tutta à cette dépense, pourvu qu'elles nous soient
la vicinantia
cédées, jusqu'à l'établissement des curés. Je ne
All' Illmo et Rmo Sigr mio osservandissimo, saurais sur cette réduction rien dire de plus
Monsigre l'Arcivescovo di Bari, spécial que le contenu des mémoires laissés à
Nuntio Apostolico appresso S. A. S. Votre Seigneurie Illustrissime et au P. Jules
Coccapane pour être présentés à Son Altesse.
Revu sur une copie déclarée authentique de
Je n'ajouterai qu'une seule chose : c'est
l'Autographe conservé à la cathédrale de qu'il importe infiniment de réformer les
Nardo (Italie, Pouille). [262]
abbayes de ce pays pour répandre dans tout le
voisinage un parfum d'édification
_____
XCI. Au duc de Savoie, Charles-Emmanuel Ier (Minute inédite).
Instances pour obtenir quelques libéralités déjà sollicitées en
faveur de nouveaux Catholiques.
Sales, il avril 1597.
Monseigneur,
Je suppliay nagueres Vostre Altesse par une lettre586 qu'il luy pleust accorder une portion
de cinq ou six muys de froment des aumosnes de Ripaille et de Filly pour le soulagement de sept
ou huit vieux bons Catholiques, pauvres et indigens, et pour un qui servist a Thonon au clocher
pour les Catholiques. Quand j'eus ce bonheur d'approcher Vostre Altesse l'annee passee a Turin
elle eut aggreable la proposition que je luy en fis, et maintenant j'ay prié M. de Blonnay de la luy
representer. Plaise donq lautrefois a Vostre Altesse de faire ceste aumosne a ces pauvres gens,
puisque c'est d'un bien qui est desja destiné aux pauvres.
Je supplie encor Vostre Altesse pour certains petitz vilages qui estoyent anciennement de
585 Le Jésuite Jules Coccapane, né à Carpi en 1536, d'une famille illustre, avait prononcé ses grands vœux à Milan le
19 avril 1587. Dix ans plus tard, le duc de Savoie le choisit pour confesseur, et lui conserva longtemps cette charge
qui mettait le P. Coccapane en mesure de protéger à la cour les intérêts de la religion. Il mourut à Turin en 1615.
586 Epist. LXXXVIII.
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la parroisse des Alinges et en furent distraitz sous les Bernois, lesquelz desirent estre reunis a leur
ancienne eglise et y faire l'exercice catholique ; a quoy personne ne contrediroit, si ce n'estoit que
Vostre Altesse a, par sa liberalité, exempté la parroisse des Alinges des charges et subsides, a quoy
ilz auroyent part par consequent. Plaise donq a Vostre Altesse estendre plustost sa liberalité sur
ces petitz vilages, qu'accourcir la premiere parroisse qui s'est faitte catholique par deça.
Ces huguenotz ont intention de priver monsieur d'Avully de la judicature du supreme
consistoire parce qu'il est catholique ; mais puysque cecy ne touche en rien au traitté de Nion et
qu'il a esté institué en cest office par [263] Vostre Altesse, je cuyde que ce soit pour l'honneur de
Dieu et de Vostre Altesse qu'il y soit expressement continué. Le ministre qui se veut catholiser et
s'y dispose de plus en plus fut secouru de quelque peu de bled par monsieur de Lambert, et Vostre
Altesse declaira l'avoir aggreable ; mais monsieur de Lambert n'a pas osé en tirer consequence
qu'il failloit continuer, qui me faict encor supplier Vostre Altesse de le luy faire entendre.
Ainsy ne cessé-je de demander a Vostre Altesse, mays je ne cesse aussi de demander a
Dieu qu'il la conserve longuement en tres parfaitte santé, puysque j'ay l'honneur d'estre,
De Votre Altesse,
Tres humble sujet.
Revu sur le texte inséré dans les deux Procès de Canonisation.
_____
XCII. A Monseigneur Jules-César Riccardi, Archevêque de
Bari, Nonce Apostolique a Turin. Difficultés que présente la
mission du Chablais. — Intérêt du Pape pour cette œuvre. — Il
est urgent de réformer quelques abbayes de la contrée.
Sales, 11 avril 1597.
Illustrissimo et Reverendissimo Signor
Mon très honoré, Illustrissime et
mio osservandissimo,
Révérendissime Seigneur,
Hebbi hieri quella di V. S. Illma
scrittami alli 4 di Aprile, et viddi nella
alligata587 copia del signor Cardinale [264]
Aldobrandino quanto Sua Santità habbia a caro
di haver avvisi588 delle cose di qua. Et io vorrei
poterne dar ogni giorno delle grate et vere
nuove, ma sin adesso le cose sonno andate
tanto lentamente et con tanta malinconia che
faceano noya alli più sani et saldi stomachi. Nè
sin adesso ho ricevuto altro per li curati se
non589 cento fiorini et 30 coppe di fromento,
come scrissi a V. S. Illma delle quali ne darò
buon et fedel conto, acciò sappiano i
Cavaglieri che la nostra povertà no ricerca i
J'ai reçu hier votre lettre du 4 avril, et
j'ai vu dans la copie de celle du Cardinal
Aldobrandino qui s'y trouvait jointe combien
[264] Sa Sainteté a pour agréable d'être tenue
au courant de nos affaires. Je voudrais pouvoir
lui en donner chaque jour de vraies et
réjouissantes nouvelles ; mais jusqu'ici les
choses sont allées si lentement et si tristement
qu'elles fatiguaient les estomacs les plus sains
et les plus forts. Comme je l'écrivais à Votre
Seigneurie Illustrissime, je n'ai encore reçu
pour les curés que cent florins et trente coupes
de froment, dont je rendrai bon et fidèle
compte afin que les Chevaliers sachent que
587 [Les variantes qui suivent sont extraites d'une minute insérée dans le Ier Procès de Canonisation.]
di Aprile, con infinita mia consolatione di vedermi concesso il perdono della negligenza passata, o vero
accettata la scusa della retardatione. Vedo bene dall' alligata
588 di saper
589 alli più sani et ben disposti stomachi. Hora non ho ricevuto altro che
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loro beni per farsi ricca o grassa. Laudo il
Signor il qual ha dato buona intentione a Sua
Santità di restituir le cure al servitio d'Iddio et
dell'anime, come vuol il dovere.590 [265]
Ho scritto591 a V. S. Illma della
giudicatura del consistono di Chiablais qual
vogliono592 levar a monsieur d'Avully, et non
è ragionevole. Ne scrivo l'altra volta a Sua
Altezza acciò si degni farne qualche
dichiaratione. No voglio mancar di
raccommandargli la prebenda so lita a pagharsi
al P. Predicator di Evian sopra la badia
dell'Abondanza, con incolcar, anzi gridar nelle
viscere di Christo593, che si faccia o la
riformatone o la mutatione delle badie d'Aux et
Abondanza594 et delle altre ancora di qua che
sonno seminarii de scandali595.
Monsieur di Blonnay, lator di questa, è
gentilhuomo meritevole et può fare buoni
servitii di qua ; per tanto, s'havesse bisogno di
ricorrer'al favor di V. S. Illma in [266] qualche
suo negotio, la vorrei ben preghar di farne
gratia et a luy (sic) et a me. Son sforzato a far
alta per certi giorni per venir al sinodo et altri
negotii, et per prevenire una malatia della
quale sono minacciato ciè un pezzo. Ma questo
sarà poco, et ritornarò poi alla tralasciata
impresa con più impeto596.
Fra tanto priegho il Signor conservi ad
notre pauvreté ne recherche pas leurs biens
pour s'enrichir et devenir opulente. Je loue le
Seigneur de ce qu'il a donné à Sa Sainteté
l'intention de rendre au service de Dieu et des
âmes les revenus des cures, ainsi que le
demande la justice. [265]
J'ai écrit à Votre Seigneurie au sujet de
la judicature du consistoire du Chablais que
l'on veut ôter à M. d'Avully ; c'est
déraisonnable. J'en écris de nouveau à Son
Altesse afin qu'elle prononce un arrêt à cet
égard. Je ne veux pas manquer de vous
recommander l'affaire de la prébende
d'Abondance que l'on a coutume d'appliquer au
P. Prédicateur d'Evian. Jamais non plus je ne
cesserai de presser, voire même de crier afin
d'obtenir par les entrailles de Jésus-Christ, que
l'on prenne des mesures pour la réforme ou le
changement des Religieux des abbayes
d'Aulps, d'Abondance, et d'autres encore qui
sont en cette province des séminaires de
scandales.
M. de Blonay, porteur de cette lettre,
est un gentilhomme de grand mérite, qui peut
nous rendre bien des services. Par conséquent,
s'il avait besoin de la protection de Votre
Seigneurie Illustrissime, [266] en quelqu'une
de ses affaires, je vous prierais de nous en
accorder la grâce à lui et à moi. J'ai été
590 i Cavaglieri che se bene io addomando li beni loro, non é per farmene ricco né grasso. Laudo il Sigre Iddio che
ha dato, per quanto vedo, buona intentione a S. A. di restituire le cure al servitio delle anime, come si conveniva, accio
si possa un poco piu liberamente, assolutamente et lietamente inviare questo negotio. Il sigr cavaglier Bergera mi
lascio certe assignationi appresso questo o quel altro della terra di Tonone; ma essi non paghando, non so come
sforzarli et farmeli nemici, poiche devo piuttosto tirarli a volerme bene per poterli far Catholici. (... quoique je
demande leurs biens, ce n'est pas pour m'enrichir et devenir opulent. Je loue le Seigneur notre Dieu de ce qu'il a donné
à Son Altesse l'intention de rendre au service des âmes les revenus des cures, ainsi qu'il était convenable, afin que
nous puissions un peu plus librement, absolument et joyeusement acheminer cette affaire. M. le chevalier Bergera me
laissa certaines assignations auprès de tel et tel habitant de la ville de Thonon ; mais comme ils ne payent pas, je ne
sais par quel moyen les y obliger, et je ne veux pas m'en faire des ennemis, puisque je dois plutôt leur inspirer de la
bienveillance à mon égard pour pouvoir les rendre catholiques.)
591 Epist. LXXXVII.
592 del consistorio la quale vogliono quelli di Tonone
593 Philip., I, 8.
594 Ces abbayes, tombées dans un si déplorable relâchement, avaient autrefois répandu un admirable éclat de sainteté
dans tout le pays. Celle d'Aulps devait son existence à des moines de Molesme, envoyés dans ces régions par saint
Robert, vers la fin du XIe siècle. Après la mort de Guy, son premier Abbé, elle avait été gouvernée par saint Guérin,
l'ami de saint Bernard. Ce grand Saint lui-même avait visité l'abbaye d'Aulps, ou de Notre-Dame des Alpes, et adressé
plusieurs lettres aux Religieux qui l'habitaient.
L'abbaye d'Abondance se glorifiait d'avoir eu pour fondateur saint Colomban, qui aurait été contraint de fuir
devant la fureur des barbares. Dans les dernières années du XIe siècle, des Chanoines réguliers venus d'Agaune
reprirent l'oeuvre du moine irlandais, et placèrent sous la Règle de saint Augustin ce monastère, qui eut pour troisième
Abbé le B. Ponce de Faucigny (1171).
595 o la mutatione di quelli Religiosi d'Aux et dell'Abondanza.
596 Son sformato di fare alta per certi giorni, si per venire al sinodo et veder di condurre i Padri Cappucini nel
Chablais, si per prevenire con qualche rimedio una malatia della quale son minacciato. Ma questo sara poco, et
ritornaro poi piu gagliardamente alla tralasciata impresa.
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utile della sua Chiesa V. S. Illma, alla quale contraint de m'absenter quelques jours afin
bascio con ogni humiltà le mani d'assister au synode, mettre ordre à certaines
reverendissime.
choses, et prévenir une maladie dont je suis
Di V. S. Illma et Rma, menacé depuis longtemps. Mais cette absence
Humilissimo et divotissimo servitore, sera courte et je retournerai ensuite reprendre
FRANCO DE SALES, avec plus d'ardeur mes travaux interrompus.
indegno Prevosto di Geneva597.
En attendant, je prie le Seigneur de
Di Sales, alli 11 di Aprile 97.
vous conserver pour l'utilité de son Eglise, et
All' Illmo et Revermo Sigr mio je baise en toute humilité vos mains vénérées.
osservandissimo,
De Votre Seigneurie Illustrissime et
Monsigr l'Arcivescovo di Bari, Révérendissime,
Nuntio Apostolico appresso S.A.
Le très humble et très dévoué serviteur,
Taurino.
FRANÇOIS DE SALES,
indigne Prévôt de Genève.
Revu sur l'Autographe conservé à Rome,
De Sales, le 11 avril 1597. [267]
Archives du Vatican. [267]
_____
XCIII. A Sa Sainteté Clement VIII598. Entrevue avec Théodore
de Bèze ; endurcissement de ce vieillard. Tyrannie exercée
par les Genevois sur les Catholiques. Espoir d'obtenir la
liberté de conscience à Genève moyennant la médiation du roi
de France.
Annecy, 21 avril 1597.
Beatissime Pater,
Très Saint Père,
Cum anno præterito de Bezæ599,
primarii inter Calvinianos hæretici, ad
Ecclesiam Catholicam reditu ac conversione,
tum Pater Spiritus Balmensis, ex Ordine
Cappuccinorum concionator, tum ego ipse
quoque, non [268] levibus multorum permoti
L'année dernière le P. Esprit de
Beaume, prédicateur de l'Ordre des Capucins,
et moi-même, persuadés par les sérieuses
affirmations d'un grand nombre, avions
commencé à bien espérer de la conversion de
Bèze et de son retour à l'Eglise Catholique.
597 il Signor nostro dia a V. S., con buona sanita, lungho, vero et perfetto contento, et restaro per sempre, di V. S.
Illma et Rma
598 Clément VIII (Hippolyte Aldobrandino), né en 1335, à Fano, d'une illustre famille vénitienne, avait étudié d'abord
la jurisprudence. Il devint auditeur consistorial à Rome, dataire sous Sixte V (1583) ; bientôt après cardinal et légat en
Pologne, et enfin il fut élu Pape par acclamation (30 janvier 1592). Clément VIII déploya toujours un grand zèle pour
l'extirpation de l'hérésie, et encouragea par plusieurs Brefs les travaux de l'Apôtre du Chablais. En 1599 il le nomma
coadjuteur de l'Evêque de Genève avec future succession, et voulut à cette occasion le soumettre à un examen public,
moins pour s'assurer de son savoir que pour le faire briller devant le Sacré Collège. C'est à la suite de cet examen que
Clément VIII, embrassant le jeune Saint, lui appliqua ces paroles du Livre des Proverbes : Bibe aquam de cisterna tua
et fluenta putei tui ; deriventur fontes tui foras, et in plateis aquas tuas divide. Ce Pontife mourut le 3 mars 1605.
599 Théodore de Bèze, qui devait être une des colonnes du protestantisme, était né à Vézelay, en Bourgogne (1519).
Les écarts d'une jeunesse orageuse l'ayant conduit à l'apostasie, il se rendit à Genève où il devint l'auxiliaire infatigable,
puis le successeur de Calvin (1564). Il figura au Colloque de Poissy à la tête des ministres protestants, souffla le feu
de la révolte à Paris et dans plusieurs autres villes de France, et revint à Genève où il mourut le 13 octobre 1605.
Théodore de Bèze contribua beaucoup au mouvement de renaissance littéraire en France : il a laissé un grand nombre
d'ouvrages.
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18.9 Page 179

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sermonibus, bene sperare cœpissemus, ne in re
tam optata aut industria nostra aut adminicula
cætera desiderarentur, ita inter nos convenit,
uti nimirum ille quidem, qui ad Capitulum,
quod vocant, generale sui Ordinis, Romæ
indictum, properabat, de re tota cum
Beatitudinis Vestras clementia coram
dissereret, peteretque ne redeunti hæresiarchæ
(si videlicet rumorem sequatur eventus)
Apostolica desit providentia. Milli vero ea
contigit cura ut, quam diligentissime et
cautissime fieri queat, intimos Bezæ sensus,
aliqua ut fit accepta occasione, ipsiusmet ore
detegerem et explicarem.
Id autem ut facerem, varia prætexens
negotia, sæpius Genevam ingressus, nullus
unquam mihi ad hominis quem quærebam
privata ac secreta colloquia patuit aditus,
præterquam hoc ultimo tertio Paschali die,
cum et solum et satis primo quidem accessu
facilem inveni ; sed tandem aliquando in
recessu, postquam extorquendæ [269] ab eo
animi sententiæ modos omnes tentassem,
omnemque, quoad per me fieri potuit, lapidem
movissem, lapideum deprehendi cor ejus600
immotum hactenus, aut sane non omnino
probe commotum, inveteratimi scilicet dierum
malorum601. Meum vero de illo judicium,
quantum quidem ex ejus verbis conjicere
possum, hoc sane fuerit. Si paulo frequentior
ac tutior ad ejus congressum accessus pateret,
futurum forsitan ut reduci possit ad caulas
Domini, sed in homine octogenario periculum
est in mora. Qua de re tota Beatitudinem Suam
monuisse debui, ne vel negligens videar vel
minus obsequens auditor mandatorum quæ
mihi Clementiæ Suæ Litteris Apostolicis et
Patris Spiritus voce exposita sunt.
Verum, quando per tantam
benignitatem licet, committendum non
existimo quin dicam passim finitimos
undequaque Genevensium populos, hactenus
hæreticos, ballivagiorum ut loquuntur de Gex
et Gaillard, restitutionem fidei reique
Catholicæ infimis postulare precibus, quo
deinceps Catholice vivere queant ; atque
plurimorum [270] inter eos quotidianam audivi
quærimoniam quod Catholici cum sint, ritu
tamen Catholico vivere Reipublicæ
Genevensis tirannide prohibeantur, cum
Pour contribuer [268] à un évènement si
désirable, nous ne pouvions épargner notre
industrie ni négliger aucun autre moyen.
Comme ce Religieux devait se rendre à ce
qu'ils appellent le Chapitre général de leur
Ordre, lequel se tenait à Rome, nous avions
convenu que, pour lui, il traiterait de toute cette
affaire en présence de Votre clémente
Béatitude, et qu'il vous prierait de ne pas
refuser (si toutefois ce bruit de conversion se
réalisait) votre bienveillance apostolique à cet
hérésiarque rentrant au bercail. Quant à moi,
ma mission devait être de profiter, aussi
prudemment et aussi soigneusement que
possible, de la première occasion pour
apprendre de la bouche même de Bèze ses
sentiments intimes et m'expliquer avec lui.
A cette fin, prétextant diverses affaires,
je suis entré fort souvent à Genève ; mais je n'ai
pu trouver ouverture à un entretien particulier
et secret avec l'homme que je cherchais,
jusqu'à la troisième fête de Pâques. J'ai
rencontré Bèze seul et d'un accès d'abord assez
facile. Quand enfin je me retirai après avoir
tenté tous les moyens de [269] lui arracher
l'aveu de sa pensée, sans avoir laissé une pierre
à remuer, je trouvai en lui un cœur de pierre,
jusqu'ici immobile, ou, du moins,
insuffisamment remué ; c'est-à-dire, un
vieillard endurci, plein de jours mauvais.
Autant que ses paroles me permettent de le
juger, voici quelle serait mon appréciation : s'il
était possible de l'aborder et plus fréquemment
et avec plus de sécurité, peut-être pourrait-on
le ramener au bercail du Seigneur ; mais pour
un octogénaire, tout retard est périlleux. J'ai dû
mettre Votre Béatitude au courant de toute
cette affaire, car je ne voudrais pas passer pour
négligent ou peu attentif à exécuter les ordres
qui m'ont été transmis, soit par les Lettres
Apostoliques de Votre Clémence, soit par la
bouche du P. Esprit.
Et puisque votre bonté si grande m'y
autorise, je ne veux pas manquer l'occasion de
vous dire que les populations hérétiques
jusqu'ici, qui de tous côtés environnent
Genève, celles des pays qu'on nomme
bailliages de Gex et de Gaillard, demandent
avec les plus humbles prières, le
rétablissement de la foi et du culte catholiques
600 Ezech., XI, 19 ; XXXVI, 26.
601 Dan., XIII, 52.
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18.10 Page 180

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alioquin ea Respublica non suo, sed afin de pouvoir vivre en catholiques. J'ai
Francorum Regis Christianissimi nomine in entendu bon nombre d'hommes de ces pays se
ejusmodi populos violentum illud exerceat plaindre chaque jour de ce qu'étant [270]
imperium ; neque probabile sit ejus tyrannidis catholiques, ils sont empêchés par la tyrannie
qua Catholicorum conscientiæ opprimantur de la république de Genève de remplir leurs
conscium esse Regem, qui nuperrime tanta devoirs de catholiques, d'autant plus que cette
contentione Catholicam communionem république opprime ces peuples non pas en son
expetivit. Quare libenter crediderim, fore ut si nom, mais au nom du très chrétien roi de
a Sede Apostolica iis de rebus Rex ipse France. Le roi connaît-il cette tyrannie que l'on
moneatur, longe fœlicius res habeat602. Quin fait peser sur les consciences catholiques ? Ce
etiam si paulo pressius idem ipse Rex a n'est pas probable, puisque tout récemment il a
Genevensi Republica contenderet ut poursuivi avec tant d'ardeur sa réunion à
libertatem, quam vocant, conscientiæ in l'Eglise Catholique. Je croirais volontiers que
civitate ipsa admitteret, non omnino si le roi lui-même était averti par le Siège
improbabile esset rei gerendæ argumentum. Apostolique, les choses se passeraient tout
Atque sane, Beatissime Pater, in rebus arduis autrement. Et d'ailleurs, si le roi faisait
et magni momenti etiam periculum fecisse quelques efforts plus pressants afin d'obtenir
operæ pretium est. Hæc ita fusius Beatitudini que la république de Genève accordât dans
Suæ exhibere sum ausus, quod non sim nescius cette ville même ce qu'ils appellent liberté de
quam fidei ac disciplinæ [271] Christianæ conscience, il ne serait pas tout à fait
instaurandæ Clementia Sua libenter animum improbable qu'il y réussît. Aussi bien, Très
adjiciat, et absentia (quæ hujus mortalitatis est Saint Père, vaut-il déjà la peine d'avoir tenté un
conditio) non nisi per præsentes cognosci essai dans les choses difficiles et graves. Si j'ai
possint.
osé présenter à Votre Béatitude ce trop long
Beatitudinem Tuam, Sanctissime exposé, [271] c'est que je n'ignore pas quel zèle
Pater, Christus Optimus Maximus Ecclesiæ Sa Clémence apporte à restaurer la discipline
suæ quam diutissime servet incolumem.
chrétienne, et que, dans les conditions de cette
Ad pedum oscula demississime vie mortelle, on ne peut apprendre ce qui se
provolutus,
passe au loin que par ceux qui sont présents.
Sanctitatis Suæ,
Très Saint Père, que le Christ très bon
Humillimus servus, et très grand conserve longuement à Votre
FRANCS DE SALES, Béatitude une heureuse vie !
Ecclesiæ Gebennensis Præpositus indignus.
Prosterné très humblement à vos pieds
Necii Gebennensium, 21 Aprilis, anno que je baise, je suis,
1597.
De Votre Sainteté,
A Sua Santità.
Le très humble serviteur,
Sancissimo Patri, Clementi octavo,
FRANÇOIS DE SALES,
Summo Christianorum Pontifici.
indigne Prévôt de l'Eglise de Genève.
Annecy, diocèse de Genève, le 21 avril
Revu sur l'Autographe conserve à Rome, 1597.
Archives du Vatican603. [272]
A Sa Sainteté.
Au Très Saint Père Clément VIII,
Souverain Pontife des Chrétiens. [272]
_____
602 En regard de cette phrase on lit dans l'Autographe la note suivante, écrite de la propre main de Clément VIII :
Attendendum quia scribendum in Galliam. Il fut effectivement donné suite à cette affaire, car dans une lettre du 31
mai de la même année (Archives du Vatican, Nunz. di Francia, vol. 44) le Cardinal Aldobrandino chargeait le Nonce
de Paris de faire valoir auprès de Henri IV les réclamations du « Prévôt de Sales. »
603 Au dos de la lettre, le Pape Clément VIII a écrit ces mots : A questo bisogna rispondere con un Breve. Ce Bref,
donné le 29 mai 1597, fut reçu par le Saint le 23 juin suivant.
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Minute de la lettre précédente
Beatissime Pater,
Cum anno præterito de Theodori Bezæ, primarii inter Calvinianos hæretici, ad Ecclesiam
Catholicam reditu et conversione, tum Pater Spiritus Balmensis, ex Ordine Cappuccinorum,
insignis et probitate et doctrina concionator, tum etiam ego ipse, multorum non levibus permoti
sermonibus, bene sperare cœpissemus, ne in re tam desideranda aut industria nostra aut adminicula
cœtera desiderarentur, ita inter nos conventum fuit, uti scilicet ille quidem, qui per ea tempora ad
Capitulum, quod vocant, generale sui Ordinis, Romæ indictum, properabat, de re tota coram
Beatitudine Tua dissereret, peteretque ne (si rumorem sequatur eventus) redeunti hæresiarchæ
Apostolica providentia desit. Mihi vero ea contigit cura uti, quam diligentissime et cautissime fieri
queat, intimos Bezæ sensus, aliqua accepta ut fit occasione commoda, ipsiusmet ore detegerem ac
explicarem.
Id autem ut facerem, varia prætexens negotia, sæpius Genevam eam ob causam ingressus
sum ; sed nullus mihi patuit aditus ad hominis quem quærebam privata et secreta colloquia,
præterquam hoc ultimo tertio Paschatis die, cum et solum et satis primo accessu facilem inveni ;
sed tandem aliquando, postquam extorquendæ illius animi sententiæ gratia, omnem, quoad per me
fieri potuit, movissem lapidem, lapideum tamen cor ejus604 immotum adhuc, aut sane non omnino
conversum deprehendi, inveteratum scilicet dierum malorum605. Qua de re tota Beatitudinem
Tuam monuisse debui, nevel minus diligens videar, vel minus obediens mandatis quæ mihi
Sanctitatis Tuæ Litteris et Patris Spiritus sermone sunt exposita.
Meum vero de homine illo judicium est, si paulo frequentior, tutior ac commodior ad ejus
colloquia pateret accessus, forsitan fore ut reducatur ad caulas Domini ; sed præcipue si, quod
speramus, Beatitudine Tua annuente, [273] Genevæ instituatur cum ministris disputatio. Atque
quidem, Beatissime Pater, in rebus arduis et magni momenti etiam periculum fecisse operæ
pretium est.
Verum, quando per Beatitudinis Tuæ clementiam licet, committendum non duxi quin eam
certiorem faciam, undequaque passim finitimos Genevensium populos, hactenus in hæresim
abductos, ditionum Gexensis et Galliardensis, ritusque et rei Catholicæ restitutionem demississime
postulare, quo deinceps Catholicam vitam agere queant ; atque quotidianam plurimorum inter eos
audiri querimoniam, qui, Cattolici cum sint, Genevensis Reipublicæ tyrannide prohibeantur ritu
Catholico vivere : cum alioquin Genevenses, non suo sed Christianissimi Francorum Regis
nomine, in ejusmodi populos imperium ac vim exerceant ; neque probabile sit ejus tyrannidis qua
conscientiæ Catholicorum opprimantur conscium esse Regem, qui tanta contentione Catholicam
communionem nuper obtinuit. Quare credibile admodum est, si a Beatitudine Tua his de rebus Rex
ipse admoneatur, fore uti quamprimum longe certius res habeat. Quin etiam, si paulo pressius idem
ipse Rex a Genevensi Republica contenderet ut libertas, quam vocant, conscientiæ intra civitatis
ipsius Genevensis mœnia permittatur, sperandum esset rem eam, qua vix alia magis hisce
temporibus optanda occurrit, fœlicem habituram eventum. Hæc ita, Beatissime Pater, fusius
explicare sum ausus, quod non sim nescius quam fidei ac disciplinæ Christianæ instaurando
Clementia Tua libenter incumbat, et absentia nonnisi per præsentes possit cognoscere.
Sanctitatem Tuam, Pater Beatissime, Christus Optimus Maximus incolumem diutissime
conservet.
Ad pedum oscula demisse provolutus, Beatitudinis Suæ,
Humillimus servulus,
FRANCISCUS.
Necii Allobrogum.
604 Ezech., XI, 19 ; XXXVI, 26.
605 Dan., XIII, 52.
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Revu sur le texte inséré dans le Ier Procès de Canonisation. [274]
_____
XCIV. A Monseigneur Jules-César Riccardi, Archevêque de
Bari, Nonce Apostolique a Turin. Heureux résultats que promet
la conférence projetée avec les hérétiques. Lettre du Saint au
Pape. Pression qu'exercent les Genevois sur les Catholiques
de Gex et de Gaillard. Etat des affaires du Chablais.
Annecy, 23 avril 1597.
Illustrissimo et Reverendissimo Signor
Mon très honoré, Illustrissime et
mio osservandissimo,
Révérendissime Seigneur,
Essendoci ritrovati insieme questi
giorni passati il Padre Cherubino, il Padre
Spirito et io, et conferendo di quelle cose
particolari che sonno seguite nei luoghi dove
habbiam predicato questa Quaresima,606 si
vede che la conferentia per laquale si aspetta la
licentia da Roma sarà, mediante la gratia del
Signor, una cosa molto fruttuosa, et la
premevano molto questa Quaresima quelli di
Geneva. Ma non patendo cavar da' nostri certa
risposta, la quale non si poteva dar, mi par di
vederli un poco ritirati sopr' il freddo. Basta :
che se si farà, sarà fruttuosa ; [275] se non si
farà per mancamento loro, sarà cosa gloriosa
per la causa catholica. Una cosa è successa che
me ne rincresce607 incredibilmente, et è che la
cosa è stata divolgata con gran rumore dalla
corte nostra, la quale è tanto secreta che
bastaria a rivelar li misteriosi secreti della
Apocalisse ; et habbiam a trattar con animali
che ogni piccol rumore hanno in608 sospetto.
Scrivo a Sua Santità per609 quel
particolar che vederà V. S. Illma, poichè per
questo le mando la lettera col sigillo volante ;
et havendola letta, si degni di chiuderla acciò
Nous étant retrouvés ensemble ces
jours passés, le P. Chérubin, le P. Esprit et moi,
et conférant des incidents particuliers qui sont
arrivés dans les localités où nous avons prêché
le Carême, nous avons jugé que la conférence
pour laquelle on attend l'autorisation de Rome
sera, moyennant la grâce de Dieu, une chose
très fructueuse. Ceux de Genève poursuivaient
fort pendant ce Carême pour qu'elle se fît ;
mais ne pouvant tirer des nôtres une réponse
précise, que nous n'étions pas à même de
donner, il me semble qu'ils se sont un peu
refroidis. N'importe : si elle a lieu, elle sera
fructueuse, et [275] si c'est par leur faute
qu'elle ne se fait pas, ce sera glorieux pour la
cause catholique. Ce que je regrette
incroyablement, c'est que cette affaire ait été
divulguée à grand bruit par notre cour, qui est
si discrète qu'elle suffirait à révéler les
mystérieux secrets de l'Apocalypse ; et nous
avons à traiter avec des animaux auxquels le
moindre bruit est suspect.
J'écris à Sa Sainteté sur le sujet que
Votre Seigneurie verra ; je vous envoie à cet
effet la lettre sous cachet volant, en vous priant
606 [Les variantes de cette lettre et des trois suivantes sont extraites de minutes insérées dans le Ier Procès de
Canonisation.]
si vede la conferentia con quelli di Geneva dover esser molto fruttuosa, se peró la licentia ne sara data da
superiori. Et la premevano al principio ; ma non havendone havuta certa risposta da nostri, che aspettavano l'ordine di
Roma, mi pare che si siano un poco affrcddati. Basta : che se la ricuseranno, in caso che si possa far, non sara piccolo
argumento contra di loro. Una cosa [Reprendre au texte, lig. 2.]
607 che mi dispiace
608 divolgata. dalla corte nostra, la quale é tanto secreta ; et adesso il rumor se ne fa tanto grande che bastaria a far
serrar le porte a Genevrini che ogni cosa hanno per
609 a Sua Beatitudine sopra
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19.3 Page 183

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nessun' altro la veda, perchè egli è cosa
importantissima per me che no si sappia donde
vengono questi avisi610. Ma V. S. Illma si farà
un gran merito611 se incolcarà molto bene a Sua
Santità quel particolar di Gex et Gaillard, chè
in vero la cosa è vituperosissima che [276] [i]
Genevrini occupando quelli luoghi a nome del
Re di Francia, sforsino li Catholici a viver
malamente ; et non è dubbio che il Re
sapendolo, darà ordine che si usi612 almanco
libertà di conscientia o l' Interim613, che
vogliono dire.
Così foss' inspirato detto Re di
addomandare l'istessa libertà nella città
medesima614 di Geneva, che forse non saria
cosa impossibile da ottenersi, purchè si
trattasse615 un poco vivamente. Anzi questi
giorni passati essendosi dato questo rumor in
Geneva, no so da che banda nè con qual
fondamento, si sentivano già molti dispareri
de'cittadini. Certo, in queste cose tanto grandi,
egli è molto meglio il tentare et sperar
molto616, in caso che il fallar no possa recar
gran danno, che per troppa discretione perdere
l'occasioni del bene617. [277]
Quanto poi al nostro Chiablais, vado un
poco trattenuto sin tanto che sia saldata questa
tregua laquale, per quanto mi vien detto, si
tratta, et618 in questo principio di Maggio spero
di condurvi et Padri Cappucini et altri619
necessarii quanto più potrò ; et se si darà
tranquillità et modo di poter continuare, credo
che il Signore ne sarà servito. Queste feste i
nuovi Cattholici mi hanno straccato col le loro
confessioni generali, ma con incredibil mia
consolatione di vederli molto divoti, con
monsieur di Avulli in capo, il qual non ha
tralasciato un sol punto di buon essempio.
de la fermer aussitôt après l'avoir lue, afin que
personne autre ne la voie, parce qu'il est très
important pour moi que l'on ne sache pas d'où
viennent les avis qu'elle contient. Mais Votre
Seigneurie acquerra un grand mérite en
sollicitant fortement auprès de Sa Sainteté
l'affaire de Gex et de Gaillard ; car à la vérité
c'est une chose honteuse que [276] les
Genevois, occupant ces pays au nom du roi de
France, contraignent les Catholiques à mal
vivre. Lorsque le roi le saura, il donnera sans
doute ordre de les laisser jouir au moins de la
liberté de conscience ou de l'Intérim, comme
ils l'appellent.
Plût à Dieu qu'il eût aussi l'inspiration
de demander la même liberté pour la ville de
Genève, ce que peut-être il ne serait pas
impossible d'obtenir en traitant l'affaire un peu
énergiquement. Ces jours passés le bruit s'en
étant répandu à Genève, je ne sais de quel côté
ni sur quel fondement, on voyait déjà de
nombreux dissentiments surgir entre les
citoyens. Certes, dans ces choses si
importantes, il vaut mieux tenter et espérer
beaucoup, lorsque l'échec ne peut apporter
grand dommage, que de perdre par trop de
discrétion les occasions de faire le bien. [277]
Quant à notre Chablais, je suis un peu
arrêté jusqu'à la conclusion de la trêve, qui, me
dit-on, se négocie maintenant. J'espère y
conduire, au commencement du mois de mai,
les PP. Capucins et les autres prêtres
nécessaires en plus grand nombre possible ; et
si on nous procure la paix et le moyen de
continuer, je crois que le Seigneur en sera bien
servi. Ces fêtes, les nouveaux Catholiques
m'ont lassé par leurs confessions générales ;
mais j'ai éprouvé une immense consolation de
610 et la pregho humilissimamente che havendola letta la chiuda et sigilli, accio nessun altro la veda che sua stessa
Santita, perche se la cosa si sapesse non potria poi esser sicuro appresso [i] Genevrini.
611 merito appresso Christo Signor nostro
612 a viver malamente et prohibiscano l' essercitio catholico ; et non è dubbio che se il Re lo sapesse, daria ordine
che si usasse
613 L'Intérim était un formulaire en vingt-six articles, rédigé par ordre de Charles-Quint (1541-1548), sur les matières
controversées entre les Catholiques et les Luthériens. Il ne devait faire autorité qu'en attendant les décisions d'un
Concile général.
614 Cosi piacesse [a] Dio che l'istesso Re domandasse che detta liberta fosse concessa dentro l'istessa città
615 purchè la cosa si trattasse dal Re
616 de' cittadini. In somma, in queste cose tanto importanti, egli è molto meglio il sperar molto et tentare
617 l' occasioni di ben fare.
618 poi
619 necessarii all'opra ; et se si dara modo di poter continuar, et la pace, spero che il Signore ne sara servito, il quale
supplico dia ogni vero contento a V. S. Illma, conservandola lungamente sana, a beneficio et consolatione di queste
afflitte chiese. Et cosi sono, di V. S. Illma
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Laudato ne sia il Signor Iddio.
Glie rimetterò di nuovo nella memoria,
con confidentia nella bontà sua, le riforme
delle badie di qua di monti, et particolarmente
di Aux et Abondantia, et la provisione per il
Padre Predicator di Eviano, acciò glie sia
paghata essattamente la præbenda solita.
Priegho poi il Signor Iddio dia ogni
vero contento a V. S. Illma et Rma,
conservandola lungamente a beneficio [278] et
consolatione di quest'afflitte chiesuole ; et così
resto perpetuamente,
Di V. S. Illma et Rma,
Humilissimo et devotissimo servitore,
FRANCO DE SALES,
Prevosto indegno di Geneva.
All' Illmo et Rmo Sigr mio osservandissimo,
Monsigr l'Arcivescovo di Bari,
Nuntio Apostolico appresso S. A. S.
Turino.
les voir si pieux, M. d'Avully à leur tête, lequel
n'a pas manqué une seule occasion de donner
le bon exemple. Que le Seigneur notre Dieu en
soit loué !
Me confiant en votre bonté, je vous
remémorierai la réforme des abbayes de cette
contrée, particulièrement de celles d'Aulps et
d'Abondance, ainsi que la provision pour le P.
Prédicateur d'Evian, afin qu'on lui paie
exactement la prébende accoutumée.
Je prie le Seigneur notre Dieu de
donner à Votre Seigneurie tout [278] vrai
contentement et de la conserver longtemps
pour le bien et la consolation de ces petites
églises si affligées, et je demeure à jamais,
De Votre Seigneurie Illustrissime et
Révérendissime,
Le très humble et très dévoué serviteur,
FRANÇOIS DE SALES,
indigne Prévôt de Genève.
Revu sur l'Autographe conserve à Rome,
Archives du Vatican.
_____
XCV. Au duc de Savoie, Charles-Emmanuel Ier (Inédite). Le
curé de Saint-Julien est contraint de se retirer. Requête des
habitants de Bernex. Incident survenu entre le P. Esprit et le
ministre protestant. Combien il est désirable que le duc
signifie aux Thononais le désir qu'il a de leur conversion.
Thonon, 27 mai 1597.
Monseigneur,
Ce pendant que j'attens plusieurs graces de la liberalité620 de Vostre Altesse, desquelles je
l'ay suppliee ci devant, les occasions me naissent tous les jours de luy en demander des autres621.
On avoit establi un curé a Saint [279] Jullin pres Geneve622, qui jusques a praesent a fort bien fait
son devoir, selon le tesmoignage de plusieurs gens de bien ; le peuple tout autour en estoit fort
consolé. Maintenant, Monseigneur, le voyla623 contraint d'abbandonner pour n'avoir dequoy vivre
; et neanmoins la cure, qui est en commande a messieurs de Saint Lazare, est de fort bon revenu.
Cecy n'est pas un petit scandale. Ceux de Bernex, qui sont une liëue pres de Geneve, au balliage
de Ternier, m'ont addressé une requeste pour avoir l'exercice catholique, comme si j'avois ou le
620 bonté
621 occasions de luy en demander des nouvelles me naissent tous les jours.
622 Pierre Mugnier, natif de Talloires, avait été nommé curé de Saint-Julien le 1er décembre 1589. Il permuta cette cure
contre celle de Copponex le 6 avril 1601.
623 jusques a præsent a rendu fort bon devoir en sa charge, ainsy que j'ay appris de plusieurs personnes dignes de
foy ; le peuple d'autour en avoit receu un grand prouffit. Maintenant il est
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19.5 Page 185

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moyen ou l'authorité de ce faire. Je represente volontiers624 toutes ces necessités a Vostre Altesse
delaquelle seule en depend625 le remede.
Aussy ne dois je pas oublier la necessité du lieu ou je suis. Le P. Esprit, docte et signalé
prædicateur Cappucin, estant icy ces festes626, ou il a apporté tres grande consolation a tous les
gens de bien, et a luy mesme esté consolé d'y en voir plus qu'il ne pensoit, voyant que ceux de la
ville s'opiniastroyent si fort a ne point ouyr les prædicateurs catholiques, voulut vendredy dernier
remonstrer publiquement, mais gratieusement, au ministre627 la fauseté de sa doctrine. Sur quoy
les bourgeois dirent que Son Altesse ne vouloit pas quilz traittassent avec nous. Je repliquay qu'au
contraire Son Altesse l'auroit tres aggreable. Ilz respondirent que Vostre Altesse ne leur en avoit
donné d'advis, et que quand il l'auroit fait ce seroit autre chose, et qu'au reste ilz ne m'en croyoient
pas. Mays un bourgeois plus impatient vint [280] tirer par force le ministre de la compaignie affin
qu'on ne sceut ce qu'il sçavoit faire628. La ou, Monseigneur, je me sens obligé en mon ame de
supplier tres humblement Vostre Altesse de faire meshuy sçavoir a ces gens qu'elle aura aggreable
qu'ilz oyent et sondent les raysons catholiques, sans plus alleguer de si impertinentes excuses629
comm'est cellecy, de mettr'en doute le bon desir que Vostre Altesse a de leur conversion. Le traitté
avec les Bernois ne peut en estr'alteré puysque, sans forcer personne au changement de religion,
on les invite seulement a la consideration de630 l'estat de leur conscience.
631Je ne lairray pas encores de remettr'en memoyre a Vostre Altesse la pauvreté du ministre
qui se recatholise, duquel je luy ay ja si souvent escrit, qui ne peut estre secouru d'ailleurs, et celle
de ces set ou huict personnes catholiques qui sont en extreme disette, pour lesquelz aussy j'ay ci
devant supplié a Vostre Altesse, affin que quattr'ou cinq muis des aumosnes de Ripaille et Filly
leur soyent appliqués en pension leur vie durant, qui ne peut plus guere durer puysque ce sont
presque tout gens vieux ; et ces aumosnes ne touchent en aucune façon la Religion de Saint Lazare.
Ce sera un'aumosne des plus fleuries qui puissent partir de la main de Vostre Altesse. [281]
Je prie Nostre Seigneur Jesus Christ qu'il accroysse de plus en plus ses benedictions sur
elle, comm'estant et devant estr'a jamais,
Monseigneur,
De Vostre Altesse,
Tres humble et tres obeissant sujet et serviteur,
FRANC8 DE SALES,
indigne Prævost de Geneve.
A Thonon, le 27 may 97.
Revu sur l'Autographe conservé à Turin, Biblioteca Civica.
_____
624 comme si j'en avois ou le pouvoir ou l'authorité. Je represente
625 delaquelle depend tout
626 Le P. Esprit, prædicateur Cappucin, estant venu icy
627 Louis Viret.
628 de sa doctrine. Pour quoy les bourgeois vindrent empoigner le ministre par le bras et le tirerent par force hors
du lieu, et dirent que Vostre Altesse ne vouloit pas quilz traittassent avec nous de la religion. Je repliquay que nous
n'estions toutefois icy pour autre que pour traitter des choses de leur conscience. Ilz me dirent que V. A. ne leur en
avoit encores point donné d'advis, et que quand elle l'auroit fait ce seroit autre chose.
629 qu'ilz oyent les raysons catholiques sans plus trouver ces excuses tant impertinentes
630 le bon desir de V. A. touchant leur salut. Le traitté avec les Bernois ne peut en estre alteré, puysqu'on ne force
personne au changement de reli-gion, ains seulement on les invite a bien considerer
631 Je ne lairray pas de representer encores a V. A. la necessité du ministre qui se recatholise, qui ne peut estre secouru
que de la bonté de V. A., et celle de ces sept ou huict vielles personnes catholiques, qui sont en extreme pauvreté, pour
lesquelz j'ay desja souvent supplié V. A., affin que trois ou quattre muis des aumosnes de l'abbaye de Ripaille et Filly,
qui ne touchent point en aucune façon les seigneurs Chevaliers de St Lazare, leur fussent appliqués en pension leur
vie durant, qui ne peut meshuy estre guere longue. Ce seroit une des plus fleuries aumosnes qui puissent partir de la
main de V. A., pour la prosperité de laquelle et eux et moy prierons Dieu toute nostre vie, comme je fais des ores,
suppliant Nostre [Reprendre au texte, lig. 1.]
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19.6 Page 186

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XCVI. A Monseigneur Jules-César Riccardi, Archevêque de
Bari, Nonce Apostolique a Turin. Mêmes sujets. Installation
d'un curé à Brens.
Thonon, 27 mai 1597.
Illustrissimo et Reverendissimo Signor
Mon très honoré, Illustrissime et
mio osservandissimo,
Révérendissime Seigneur,
Duoi sospetti m'hanno sin hora
trattenuto per un poco di scriver a V. S. Illma :
uno della guerra,632 l'altro del [282] contagio
del quale ciè stato un poco di pericolo in queste
bande. Dirò adesso a V. S. Illma che dalla
parrochia di Bernex, del balliaggio di Ternier,
discosta da Geneva tre millia, mi viene
indrissata una richiesta633 per laquale mi
addomandano l'essercitio catholico, con questa
impertinente presuppositione, che da Sua
Altezza habbia et modo et634 authorità di far
ogni progresso nelle cose della religione635.
Da San Giuliano, poco più discosto di
Geneva, mi furono indrissate636 lettere dal
giudice maggiore di Gex637 et altri, in favore
del curato di detto luogho (il quale fu stabilito
là fa poco638 et haveva molto ben esseguito il
suo carico sin adesso), che non havendo modo
di viver, è costretto di lasciar il639 luogho senza
pastore. La cura [283] è della Religione di San
Lazaro,640 et sin hora si dava certa pensione al
curato, laquale adesso gli è stata tolta ; onde ne
riesce questo scandalo che maggior non può
esser. Mi è stato riferito ch'il popolo, con le
lachrime all'occhio, in genocchione pregava il
curato di641 restar ; ma esso vedendo che
mentre li sacerdoti staranno da pecorelle il
Deux craintes m'ont empêché jusqu'ici
d'écrire à Votre Seigneurie Illustrissime : l'une
provenant des bruits de guerre, l'autre, de la
[282] peste, dont on a été un peu menacé de
nos côtés. Je vous dirai maintenant qu'on vient
de m'adresser une requête de la paroisse de
Bernex, au bailliage de Ternier, distante de
Genève d'environ trois milles. Sur cette
déraisonnable supposition que j'ai reçu de Son
Altesse le moyen et l'autorité d'avancer les
affaires de la religion, on me demande
l'exercice du culte catholique.
De Saint-Julien, qui n'est guère plus
éloigné de Genève, me sont arrivées des lettres
du juge-mage de Gex et autres en faveur du
curé dudit lieu. Il y fut installé depuis peu, et
avait jusqu'à présent fort bien rempli sa charge
; mais, n'ayant pas de quoi vivre, il est [283]
contraint de laisser la paroisse sans pasteur.
Cette cure appartient à l'Ordre de Saint-Lazare
qui donnait une certaine pension au curé ;
maintenant on vient de la lui ôter, d'où résulte
ce scandale qui ne pourrait être plus grand. On
m'a raconté que le peuple, les larmes aux yeux,
priait à genoux le curé de rester ; mais, voyant
bien que tant que les prêtres seront regardés
comme des agneaux le loup les mangera, il
632 Duoi sospetti mi hanno sin adesso trattenuto alquanti giorni senza scriver a V. S. Illma : uno della guerra, mentre
non ardiva di ritornar qui ;
633 bande. Adesso che dell'uno et dell'altro siamo peró alquanto liberi, scrivero a V. S. Illma sopra questi tre capi.
Prima, essendo io nel nostro Genevois, mi fu indrissata una richiesta de molti della parrochia di Bernex, discosta da
Geneva tre miglia, cioe una lega,
634 che S. A. Serenma mi havesse data plena
635 della religione in questa bande, et il modo di poter farlo.
636 Da San Giuliano ancora, discosto di tre miglia poco piu di Geneva, mi furono mandate
637 Antoine de Lescheraine, seigneur de la Compote, fut juge-mage de Gex depuis le 19 septembre 1586 jusqu'au traité
de Lyon (janvier 1601), qui annexa ce pays à la France. Il devint ensuite juge-mage de Ternier et Gaillard, puis
sénateur (14 juillet 1610).
638 in favore di un certo buon curato, quale fu stabilito in quel luogho di San Giuliano un pezzo [fa]
639 detto
640 di San Lazaro, possessa da un cavaglier particolar in commanda,
641 che maggior non può immaginarsi. Mi é stato riferito che volendo il curato partirsi, il popolo gia catholico, in
genocchione, colle lagrime lo pregava di
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19.7 Page 187

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lupo li mangiarà, si risolse di lasciarli ad ogni
modo, però con questa intentione di ritornarvi
le Domeniche642 a consolarli.
Queste cose travengono fuora del
Chiablais, appresso di Geneva, et ne ricorro
alla bontà di V. S. Illma ; et per questo glie
mando la richiesta di quelli di Bernex et
un'altra del curato di San Giulino, già un'altra
volta appresentata a Sua Altezza senza risposta
al principale643. Glie mando ancora le lettere
del signor giudice majore [284] di Gex et del
signor Barone di Viri644, persona honorata et
importante, acciò vedano i Cavaglieri ch'io no
son parte, ma avvocato della parte, et che la
parte non è altro salvo che il ben publico.
Sonno [in] francese, ma V. S. Illma se le potrà
far leggere o dal signor de Lulino645 o da altri ;
ma la priegho bene di non perder dette lettere,
acciò mi servano contra quelli che potriano
haver per male ch'io di tante cose m'impacci.
Scrivo sopra di ciò646 una parola a Sua Altezza
; si degni V. S. Illma, [285] per carità,
procurarne qualche breve et fruttuosa647
risposta.
Il buon, dotto P. Fra Spirito,
Cappucino648, essendo venuto qui queste feste
di Pentecoste et predicato qui nella terra et
nella parrochia des Alinges, si è sentito molto
résolut, malgré tout, de quitter ses paroissiens,
avec l'intention néanmoins de retourner chaque
Dimanche les consoler.
Ces choses arrivent hors du Chablais,
tout près de Genève. J'ai donc recours à la
bonté de Votre Seigneurie Illustrissime, lui
envoyant à cet effet la requête des gens de
Bernex et celle du curé de Saint-Julien qui, une
fois déjà présentée à Son Altesse, est demeurée
sans réponse sur son principal objet. Je vous
adresse aussi les lettres [284] du juge-mage de
Gex et du baron de Viry, personnage distingué
et influent, afin que les Chevaliers voient que
je suis seulement avocat et non point partie, car
la partie n'est autre que le bien public. Ces
lettres sont en français, mais Votre Seigneurie
pourra se les faire lire par M. de Lullin ou par
d'autres. Je vous prie instamment de ne pas les
égarer, afin que je puisse m'en servir contre
ceux qui trouveraient mauvais que je
m'entremette en tant de choses. J'écris [285] à
ce sujet un mot à Son Altesse, suppliant Votre
Seigneurie de daigner, par charité, nous obtenir
une courte mais efficace réponse.
Le bon et docte P. Esprit, Capucin,
étant venu ici ces fêtes de Pentecôte et ayant
prêché soit en cette ville, soit dans la paroisse
des Allinges, est demeuré fort consolé de ce
642 li mangiarà, ad ogni modo li lasció sospiranti ; peró con intentione di ritornarci le Domeniche, non piu come
curato, ma come fratello,
643 travengono appresso di Geneva, una sola lega fuora del Chiablais, nel balliaggio di Ternier, et io in questo non
ho né carico, né poter di aiutarli. Solo questo posso, cioe ricorrere alla bonta di V. S. Illma ; et per tanto glie mando sí
la richiesta di quelli di Bernex, si ancora un'altra richiesta di quelli di San Giuliano, presentata a S. A. senza esser
decretato sopra il principale, con risposta a certi incidenti.
644 Marin, baron de Viry et seigneur de la Perrière, était non moins remarquable par son dévouement à l'Eglise que par
l'éclat et l'illustration de sa maison, l'une des plus anciennes du pays, et par sa valeur guerrière. Au témoignage des
protestants eux-mêmes, « il se distinguait parmi les plus zélés convertisseurs, » sans toutefois négliger le service de
son prince dont il gagna l'estime et la confiance. Charles-Emmanuel Ier, après avoir mis le baron de Viry à la tète des
troupes levées contre les Bernois (1582), le nomma chambellan et conseiller d'Etat (lettres patentes du 21 avril 1583),
érigea la baronnie de Viry en comté le 12 mars 1598, et, le 24 mai de la même année, donna au nouveau comte le
commandement général de la noblesse du Genevois et du Faucigny, appelée sous les armes pour la défense du pays.
Ce seigneur fit son testament le 2 juillet 1605, et mourut peu de jours après. Il avait épousé Claudine de Lambert qui
lui survécut.
645 Gaspard de Genève, premier marquis de Lullin (1597) et de Pancarlier (1616), chevalier de l'Annonciade (1598),
chambellan, conseiller d'Etat, gou-verneur et lieutenant-général au duché d'Aoste et cité d'Ivrée, était l'ami le plus
dévoué et le protecteur le plus influent que saint François de Sales eût à la cour de Turin. Rien ne put affaiblir cette
constante amitié, ni la faveur croissante dont le marquis jouissait, ni les nombreuses ambassades qu'il remplit auprès
des empereurs, des rois de France, d'Angleterre et d'Ecosse, des archiducs d'Autriche, des princes électeurs et des
Ligues suisses. Il mourut à Thonon, âgé de soixante-dix ans (23 juin 1619), après avoir recommandé à son petit-fils,
Albert de Genève, de se conduire en tout d'après les conseils du saint Evêque.
646 del signor giudice et pregilo humilissimamente V. S. Illma di farsele leggere et interpretare a monsieur de Lulino,
o dal Barone de Chevron, o da qualche altro, perche sonno [in] francese, et di procurarne l'effetto appresso di S. A.
Serenma, senza lasciarle in arriere (sic), accio possa mostrare con quali titoli habbiamo da desiderar altri possessori de
beni ecclesiastici che non siano Cavaglieri. Ne scrivo
647 per bontà, di cavarne
648 Per il secondo, il P. Spirito Balmense, Cappucino predicatore
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consolato di questo nuovo popolo, et il popolo
incredibilmente delle sue fruttuose prediche.
Io fra tanto son andato a visitar la nuova
parrochia di Cervens dove ancora ho havuto
consolatione ; et tuttavia si vederà maggior
frutto quando questi ed altri predicatori
veneranno qui et si fermeranno alquanto, il che
adesso detto Padre non ha potuto far,649
chiamato dal Padre Provinciale650. [286]
Una cosa ciè travenuta : il Padre
vedendo gli habitatori di Tonone seguitar con
tanta furia il loro ministro heretico senza voler
intendere le nostre prediche, Venerdì passato
volse mostrar al ministro la falsità della sua
dottrina, et questo in publico. Ma uno della
terra, dei più ostinati, vedendo che la cosa non
poteva riuscir per il ministro, lo tolse con
violentia del luogho, con dire che Sua Altezza
Serenissima non intendeva651 che essi
trattassero con noi delle cose della religione.
Onde, dicendo noi che pur in queste bande non
eravamo venuti per altro652, dissero molti fra
gli altri ch'io questo non potevo provar, et non
volevano sopra di ciò darmi fede, et che
quando Sua Altezza gli dess' avviso della sua
intentione saria altra cosa.
Questa è la scusa de certi pochi ostinati
della terra (che quanto alla campagna non ci
sono queste difficoltà), li653 quali poi, con
diversi modi et prætesti, impediscono [287] gli
altri di ridursi. A talchè, se Sua Altezza
Serenissima con ogni minima parola si
lasciasse intendere del buon desiderio che tiene
circa la loro salute, senza romperla con
Bernesi, se ne vederia buon frutto654. Di questo
scrivo ancora a Sua Altezza. Egli è gran cosa,
ma non miracolosa perchè è ordinaria, che
questi nefandi figli di tenebre sono più accorti
et prudenti655 nelle loro generationi che non
nouveau peuple, et le peuple, à son tour, l'a été
incroyablement de ses fructueuses
prédications. Pendant ce temps je suis allé
visiter la nouvelle paroisse de Cervens, où j'ai
reçu aussi beaucoup de consolation. Toutefois,
les fruits seront encore plus abondants lorsque
ces prédicateurs et d'autres viendront ici pour
y séjourner ; ce que le P. Esprit n'a pu faire,
ayant été rappelé par le P. Provincial. [286]
Sur ces entrefaites, un incident est
survenu : le Père, voyant les habitants de
Thonon suivre si opiniâtrément leur ministre
hérétique sans vouloir écouter nos
prédications, résolut vendredi passé de
démontrer à celui-ci la fausseté de sa doctrine,
et cela en public. Mais un des plus obstinés de
la ville, s'apercevant que l'issue de la dispute
ne pouvait être à l'honneur du ministre,
l'entraîna de force hors de la place, disant que
Son Altesse n'entendait pas qu'ils traitassent
avec nous des choses de la religion. Or, comme
nous répliquions que néanmoins nous n'étions
pas venus en ces pays dans un autre but,
plusieurs entre autres repartirent que je ne
saurais le prouver, et qu'au reste ils refusaient
de me croire là-dessus, mais que si Son Altesse
leur signifiait son intention, ce serait autre
chose.
Voilà l'excuse d'un petit nombre
d'obstinés de la ville (dans la campagne nous
n'avons pas ces difficultés), lesquels ensuite,
par divers moyens et sous divers prétextes,
empêchent les autres de se [287] convertir. De
sorte que si Son Altesse donnait le moindre
témoignage du désir qu'elle a de leur salut, sans
rompre avec les Bernois, on en verrait
d'heureux fruits. Je lui écris aussi à ce sujet.
Chose étrange, mais non point miraculeuse, car
elle est ordinaire : ces misérables enfants de
649 molto consolato dall'auditorio delle sue prediche ; et tuttavia si vedera maggior frutto quando questo Padre et
altri veneranno a fermarsi alquanto in queste bande, il che per adesso non puo far per esser
650 Le P. Abonde de Côme avait été, en 1588, nommé une première fois à cette charge pour la province de Lyon, à
laquelle appartenaient alors les couvents de Savoie. Pendant un second triennat (1594-1597), il envoya des
missionnaires évangéliser les environs de Genève, et plus tard, il fut chargé lui-même par saint Laurent de Brindes,
Ministre général des Frères Mineurs Capucins, de la direction des Religieux employés à la mission du Chablais.
651 seguitar con tutto impeto il ministro heretico senza voler sentire le nostre prediche, Venerdì passato volse
publicamente mostrare al ministro la falsita della sua dottrina. Et essendosi inviata la disputa, uno della terra, ostinato,
vedendo che la causa non poteva riuscir per il ministro, lo tolse con violentia dalla disputa, con questo pretesto, che
S. A. Serenma non haveria per buono
652 per altro effetto che per trattare con loro della conscientia
653 ostinati di questa terra,
654 circa questo negotio, senza romperla cou Bernesi, spero che se ne vederebbe gran frutto, quale non possiamo
sperare mentre non vorranno trattar con noi.
655 ma ordinaria et vera, che questi figlioli di tenebre sono assai piu prudenti et ferventi
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sono i figli di luce656. Per conto mio son restato
consolatissimo di veder qui questo buon P.
Spirito, il qual potrà testificar delle cose
comme stanno.657
Collocarò questa settimana un curato
nella parrochia di Brens, et sarà la quarta in
questo balliaggio658. Il [288] signor Rogetio
venera qui fra pochi giorni, comme V. S. Illma
glie commandò659, et già saria venuto se non
fossero certi negotii del clero che lo
trattengono. Io dirò poi a V. S. Illma che le cose
di queste pensioni van male ; io sin adesso non
ho potuto cavarne660 altro senon 160 fiorini et
trentacinque coppe di fromento. È vero che me
ne sonno state appresentate da 75, ma tanto
cattive che io non potevo accettarle. Starò a
sollecitare, et havendo l'atto quanto potrò, sarò
scusato di far più661. Mancano alberghi per
curati, manca omnis ecclesiastica suppellex et
tutto bisogna comprar : hora lascio a
considerar a V. S. Illma in che stato stiamo.
Dubitavo molto che la conferentia di Geneva
non fosse andata in fumo con queste [289]
ritardationi ; ma, per quanto vengo avvisato, si
potrà haver, et in modo debito : la cosa sarà
fruttuosissima.
V. S. Illma mi fa tanto animo di
scrivergli spesso, ch'io etiamdio delle cose
minutissime glie scriverò liberamente, come a
Padre amantissimo di questi popoli,
quantumque nel servitio d'Iddio le cose minute
siano importanti. Bascio con ogni humiltà le
sue mani reverendissime, et prieghando il
Signor la conservi, resto eternamente,
Di V. S. Illma et Rma,
ténèbres sont plus avisés et prudents dans la
conduite de leurs affaires que les enfants de
lumière ! Pour mon compte, j'ai été très
consolé de voir ici ce bon P. Esprit qui pourra
certifier de l'état des choses.
Cette semaine je placerai un curé dans
la paroisse de Brens : c'est la quatrième de ce
bailliage qui sera pourvue. M. Roget viendra
[288] dans quelques jours, comme Votre
Seigneurie Illustrissime le lui a commandé ; il
serait déjà venu sans certaines affaires du
clergé qui le retiennent encore. Je vous dirai de
plus que les choses vont mal au sujet de ces
pensions ; jusqu'ici je n'ai pu en tirer que cent
soixante florins et trente-cinq coupes de
froment. Il est vrai qu'on m'en a offert environ
soixante-quinze, mais de si mauvaise qualité
que je n'ai pu les accepter. Je poursuivrai mes
sollicitations ; puis, ayant l'ait tout mon
possible, je serai dispensé d'en faire davantage.
Nous manquons de logements pour les curés,
nous manquons de tout ameublement pour les
églises et il faut tout acheter : je vous laisse à
penser en quel état nous nous trouvons. Je
craignais beaucoup qu'avec ces retards la
conférence de Genève ne fût allée en fumée ;
mais, d'après [289] ce que j'apprends, elle
pourra avoir lieu et d'une manière convenable
: elle sera très fructueuse.
Votre Seigneurie m'encourage si fort à
lui écrire souvent, que je lui parlerai librement
même des choses les plus minimes (bien que
dans le service de Dieu les moindres choses
soient importantes), Comme au Père très
affectionné de ces populations. Je baise en
656 Lucæ, XVI, 8.
657 consolatissimo della venuta di questo buon Padre, quale puo testificare del stato di queste cose, cioe : per conto
della campagna non cie difficolta veruna, et per conto della terra cie solamente questo da fare, che S. A. dia aviso del
suo buon desiderio, o scrivendo, o per bocca di qualche magistrato d'importanza, comme saria di un presidente o
senatore. (... de la venue de ce bon Père qui peut certifier l'état de ces affaires, savoir : pour ce qui regarde la
campagne, il n'y a aucune difficulté ; quant à la ville, il y aurait seulement un moyen à prendre. Son Altesse devrait
notifier son désir, soit en écrivant elle-même, soit par l'intermédiaire de quelque magistrat haut placé, tel qu'un
président ou un sénateur.)
658 C'est le chanoine Louis de Sales qui fut installé à Brens. Les autres paroisses pourvues de curés étaient Cervens,
les Allinges-Mésinge et probablement Bons.
659 Le chanoine Roget, qui fut longtemps « auditeur des comptes du clergé, » avait fait récemment le voyage de Turin
pour présenter des réclamations au sujet des impôts extraordinaires levés sur les biens ecclésiastiques. (Le 15 mars
1597 il date de Turin et signe, avec le chanoine Floccard et les autres députés des diocèses de Savoie, une lettre au
Cardinal Aldobrandino.) C'est alors sans doute qu'il avait reçu des ordres du Nonce relativement à la mission du
Chablais. (Voir ci-devant, note (416), p. 177, et p. 249.)
660 et sarà il quarto in questo paese. Ma io diro liberamente che le cose vanno male, et non si puo peggio. Io sin
adesso non ho potuto haver
661 di fromento et tuttavia staro a sollecitare. Il Sigr Rogetio venera qui, comme glie commando V. S. Illma, fra
pochi giorni, havendo esso esseguito certi negotii del clero.
[La fin de la minute manque dans le Procès.]
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Devotissimo servitore, toute, humilité vos mains vénérées et, priant le
FRANCO DE SALES, Seigneur de vous conserver longtemps, je
Prævosto di Geneva. demeure à jamais,
Da Tonone, alli 27 di Maggio 97.
De Votre Seigneurie Illustrissime et
All' Illmo et Rmo Sigr mio osservandissimo, Révérendissime,
Monsigr l'Arcivescovo di Bari,
Le très dévoué serviteur,
Nuntio Apostolico appresso S. A. S.
FRANÇOIS DE SALES,
Turino.
Prévôt de Genève.
Thonon, le 27 mai 1597. [290]
Revu sur l'Autographe conservé à Rome,
Archives du Vatican. [290]
_____
XCVII. Au même. Maladie de l'Evêque de Genève.
Obligations de l'Abbé d'Abondance envers le prédicateur
d'Evian. Indigence des Religieuses de Sainte-Claire.
Poursuites à faire pour obtenir la conférence avec les ministres.
Le Saint sollicite l'autorisation de concourir pour la cure du
Petit-Bornand. La permission de lire les livres hérétiques est
nécessaire aux missionnaires.
Annecy, 31 mai 1597.
Illustrissimo et Reverendissimo Signor
Mon très honoré, Illustrissime et
mio osservandissimo,
Reverendissime Seigneur,
Doppo haver scritto662 a V. S. Illma et
Rma di Tonone al 27 di questo,663 hebbi nuova
che Monsignor Rmo Vescovo stava molto
ammalato et desiderava sopra modo di
vedermi, essendo in pericolo della vita. Ond'io
venni di subito, et giunto664 trovai la lettera di
V. S. Illma del XII del praesente. Et per haver
scritto nella precedente il stato delle cose del
Chiablais, non occorre adesso di farglie altra
risposta665, salvo sopra il particolar del
prædicator di Eviano.666 [291]
Mando a V. S. Illma una copia del Breve
di Sua Santità in favor del P. Papardi, morto667,
nella quale vederà li motivi per li quali Sua
Après avoir écrit de Thonon à Votre
Seigneurie Illustrissime le 27 de ce mois, je
reçus la nouvelle que Mgr notre
Reverendissime Evêque était très malade, et
que, se sentant en danger de mort, il désirait
extrêmement me voir. Je partis aussitôt, et à
peine arrivé ici j'y trouvai votre lettre du 12
courant. Vous ayant exposé dans la précédente
l'état des affaires du Chablais, je n'ai
maintenant aucune réponse à vous faire, si ce
n'est au sujet du prédicateur d'Evian. [291]
J'envoie à Votre Seigneurie
Illustrissime une copie du Bref de Sa Sainteté
en faveur du feu P. Papard : vous y verrez les
662 Scrissi
663 di questo, et doppo haverglie scritto
664 et desiderava incredibilmente di vedermi. Onde io di subito venni et giunsi hieri qui, et vi
665 Et perche gli ho scritto delle cose nostre di Chiablais nella precedente, non mi pare di haver a scrivergli altro
666 Ho veduto la lettera di Monsigr della Novalesa, nella quale egli mostra veramente una grande abondanza di liberalita
a dare via tre prebende delle sue.
667 Le P. François Papard, de l'Ordre des Frères Prêcheurs, docteur en théologie, Inquisiteur général en Savoie, était
prieur du couvent de son Ordre à Annecy, en 1556. Il mourut en 1592.
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20 Pages 191-200

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20.1 Page 191

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Beatitudine giudicò ragionevolissimo che
l'Abbate desse quella præbenda, li quali sonno
adesso più potenti che mai. Quella terra è in
faucibus hæreticorum, non ha altro modo di
haver prædicatore ; l'Abbate668 cava tutte le
loro decime, et è ragionevole ch' egli669 pasca
la pecorella della quale egli si piglia la lana.
Questo è670 il magior servitio che si faccia al
Signor in tutta quella badia. L'Abbate d'Aux671,
il qual non v' è tanto ubligato, dà una pensione
intera [292] alla scuola de'fanciulli. Questo
prædicator moderno672 è persona
honoratissima ; et quantumque sia vicario
generale nella provincia Gallicana del suo
Ordine, non ha lasciato quest'anno le prædiche
dell'Advento et Quaresima, et essendo
scaricato di quel ufficio farà ancora maggior
beneficio. S'egli no sarà andato
nell'Abondantia, sarà o vero673 che no sarà
stato invitato, o vero che la cessatione della
præbenda haverà preceduta la cessinone della
prædica. Quanto all'altro prædicator ch'il
signor Abbate dice di dover mantener nella sua
badia, credo che si deve far, ma so et credo che
non si fa ; nè saria troppo caricato l'Abbate
havendo per lui duoi prædicatori, anzi mi par
molto caricato non havendoli.
Le religiose Monache di Eviano674
sonno non solo675 poverissime, anzi fameliche,
et so ch'il signor Abbate [293] glie fa limosina;
ma quanto a darglie una præbenda, come egli
dice, credo che questo si debba intendere con
distintione di præbende. Haverò ben presto
vero et distinto raguaglio di queste cose.
Quanto a quella suasione ch'il signor
motifs pour lesquels le Pape jugea raisonnable
que l'Abbé donnât cette prébende, motifs qui
actuellement sont plus pressants que jamais.
Ce pays est dans la gueule des hérétiques et n'a
aucun autre moyen d'entretenir un prédicateur
; l'Abbé perçoit toutes les dîmes, c'est donc
justice qu'il paisse la brebis dont il tond la
laine. C'est le plus grand service qui soit rendu
au Seigneur en toute cette abbaye. L'Abbé
d'Aulps, lequel n'y est pas si fort tenu, donne
une pension [292] entière pour l'école des
enfants. Le prédicateur actuel est un homme de
grand mérite ; quoiqu'il soit vicaire général de
la province Gallicane de son Ordre, il n'a pas
laissé néanmoins cette année de prêcher
l'Avent et le Carême, et quand il sera déchargé
de son office il ferra encore plus de bien. S'il
n'est pas allé à Abondance, ce sera sans doute
ou parce qu'il n'aura pas été invité, ou parce
que la cessation de la prébende aura précédé la
cessation des prédications. Quant à l'autre
prédicateur que l'Abbé dit être obligé
d'entretenir dans son abbaye, je crois que cela
doit se faire, mais je sais et je crois que cela ne
se fait pas. A la vérité, l'Abbé ne serait pas trop
chargé d'avoir deux prédicateurs à son compte
; il me semble, au contraire, qu'il le serait bien
davantage s'il ne les avait pas.
Les Religieuses d'Evian sont non
seulement pauvres, mais elles [293] endurent
la faim, et je sais que l'Abbé leur fait l'aumône
; pour ce qui est de leur donner une prébende,
comme il le prétend, je pense qu'il faut
distinguer entre prébende et prébende. J'aurai
bientôt des renseignements vrais et détaillés à
668 Il s'agit de Philibert Provana, Abbé commendataire d'Abondance et de l'abbaye bénédictine de Novalèse, en
Piémont. Au mois de juin suivant, il résigna ce dernier bénéfice en faveur du fils d'un autre Philibert Provana, premier
Président de la Cour des Comptes de Turin. (Archives du Vatican, Nunz. di Savoia, vol. 34.) Quant à l'abbaye
d'Abondance, elle était l'objet des prétentions de deux compétiteurs : Gaspard Provana, Prieur de Novalèse, qui
s'attribue en 1597 et 1598 le titre d'Abbé d'Abondance, et Vespasien Aiazza (voir note (514), p. 223), qui obtint gain
de cause le 27 novembre 1599. (Rome, Archives de l'Etat, Ubbligazioni.)
669 in favor del prædicator morto ; non perchè si possa far conseguenza per un altro, ma per monstrar a V. S. Illma
che Sua Sta giudicó esser molto ragionevole che l'Abbate, il quale cava tutte le decime di quella banda, dia agli habitanti
un poco di contraccambio spirituale et
670 la lana. Vedera che quella terra é in faucibus hæreticorum ; ma di questo poi l'assicuro, ch'io non so donde
possano havere predicatori sofficienti, se non col mezzo di questa praebenda, la quale cessando, cessara
671 Philibert Milliet fut Abbé commendataire d'Aulps de 1591 à 1618.
672 Le P. de Fossias (voir ci-devant, note (553), p. 245).
673 in tutta quella badia. Et se questo predicatore moderno non sarà andato nella Abondanza, sara forse o
674 Les Religieuses Clarisses fondées à Orbe par sainte Colette (1427-1428), ayant été chassées de leur couvent par
les hérétiques, s'étaient réfugiées à Evian le 24 mai 1555. Saint François de Sales témoigna toujours un profond intérêt
à cette Communauté, qui se distingua constamment par sa ferveur et sa régularité. Dissoute à la révolution française,
elle a été reconstituée au mois de septembre 1875 par une colonie sortie du monastère de Sainte-Claire de Versailles.
(Les Clarisses d'Evian-les-Bains, parle P. Ladislas de Marlioz.)
675 Quanto alle signore Monache, so che sonno
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Abbate, per gratia sua, desidera di far a V. S.
Illma, che non dia fede a Savoyardi in
generale676, io l'ho per una impertinentia tale
che non merita risposta. Ch'egli pur si sforsi di
far queste suasioni, ch' io son certo di far con
effetto contraria persuasione: cioè ch'io, in
questo nè in altro, non uso nè bugia, nè tratto
sinistro appresso V. S. Illma, nè domando un
solo baggatino della sua badia677. [294]
Hieri hebbi l'altra lettera di V. S. Illma
et viddi la copia di quella del signor Cardinale
Santa Severina. Monsignor Reverendissimo
chiamò subito il P. Provinciale
de'Cappucini678, quale era qui679, acciò
scrivesse al P. Cherubino, che era in
Mommelliano, per farlo venire qui acciò dia
assoluta risposta a quelli di Geneva, la quale
sin adesso non si è potuta dare, et si pigli
quanto prima, di banda et d'altra, qualche
risoluta conclusione680. Quel Padre è
diligentissimo681 et sagace, et ben presto
haverà trattato ; il che havendo fatto, subito
sarà avvisata V. S. Illma minutissimamente
d'ogni nostro pensiero, acciò li moderi tutti ; et
secondo il numero che vorranno quelli de
Geneva de conferenti, domandaremo [295] a
V. S. Illma o più o meno de theologi, et ad ogni
modo cercaremo che vi siano duoi o tre
Giesuiti. Non dormiremo punto in questo
negotio, et sarà et diligentissimamente et
ce sujet.
Quant à l'opinion que M. l'Abbé
prétend donner si gratuitement à Votre
Seigneurie Illustrissime, qu'en général il ne
faut pas se fier aux Savoyards, je la regarde
comme une impertinence telle qu'elle ne
mérite pas de réponse. Qu'il s'efforce tant qu'il
voudra d'insinuer de semblables opinions ;
pour moi je suis sûr de convaincre du contraire
par des effets : c'est-à-dire, qu'en cela ni en
chose quelconque je n'use point de mensonge
ou d'artifice auprès de Votre Seigneurie, et que
je ne demande pas un seul denier des revenus
de son abbaye. [294]
Hier je reçus l'autre lettre de Votre
Seigneurie Illustrissime et je vis la copie de
celle de M. le Cardinal de Santa-Severina. Mgr
le Révérendissime manda aussitôt le P.
Provincial des Capucins, qui était ici, pour le
charger d'écrire au P. Chérubin, actuellement à
Montmélian, et lui ordonner de venir rendre
une réponse positive à ceux de Genève. Cette
réponse n'a pu être donnée jusqu'à présent ;
cependant il faut au plus tôt prendre de part et
d'autre une résolution définitive. Ce Père est
très diligent et adroit, il traitera donc
promptement l'affaire. Dès qu'il aura achevé,
Votre Seigneurie sera informée par le menu de
nos moindres projets afin qu'ils soient tous
dirigés par vous. Nous vous demanderons plus
676 ch' il signor Abbate desidera di far, per gratia sua, che V. S. Illma [non] creda a Savoyardi, soliti di usar questi
et altri tiri
677 risposta et mi pare che se non fosse mai per altro che per rispetto del fondatore dell' Abondanza, doveria trattar
piu cortesemente gli Savoyardi. Basta ; che egli puo suadere a V. S. Illma quel che gli pare et piace, ma io son certo di
persuadere sempre con effetto che io non uso in questo né in altro, di bugia o tiro. Et a che modo farei io altrimenti,
poiche in questo non ho né poco, né assai, né voglio niente del suo ? Ma di questo basta appresso V. S. Illma, che é
giudice retto et non appassionato. (Et il me semble que, quand ce ne serait que par respect pour le fondateur
d'Abondance, il devrait traiter plus courtoisement les Savoyards. N'importe : il peut insinuer à Votre Seigneurie
Illustrissime ce qu'il lui plaît et ce que bon lui semble, car je suis sûr de convaincre toujours par des effets que je n'use
en ceci ni en chose quelconque de mensonge ou de ruse. Et à quelle fin ferais-je autrement, puisque je n'ai en cela ni
peu ni beaucoup, et que je n'ambitionne rien du sien ? Mais c'est assez sur ce sujet auprès de Votre Seigneurie
Illustrissime, qui est un juge équitable et non point passionné.)
678 Voir ci-devant, note (650), p. 286.
679 Hieri pure hebbi ancora una lettera di V. S. Illma del 25 di Maggio, per la quale si riferiva ad una copia di lettera
del Sigr Cardinale Sta Severina ; et ho veduto attentamente tutto, con incredibil consolatione che si sia data tutta
l'authorita per la conferentia a V. S. Illma et a Monsigr Rmo, che cosi si spediranno presto le cose, et fruttuosamente.
Subito Monsigr Rmo mandó a chiamare il Padre Provinciale de Cappucini
680 venire qui affinche faccia horamai risposta a quelli di Geneva, con la quale si possa venire a qualche risolutione
; poiche sin adesso si é andato differendo, con arti varie, di fare assoluta risposta.
681 et sagace, et spero che ben presto haveremo da scrivergli i disegni nostri minutissimamente, accio li moderi ; poiche
sin tanto che si comminci a capitulare con quelli di Geneva del numero de conferenti et del modo della conferenza,
non possiamo pigliare risolutione ; et questo tocca a detto Padre, quale é stato chiamato in questo campo. Ma sara
avvertita V. S. Illma di tutto distintamente et veramente, et de theologi che si faranno di bisogno; et ad ogni modo
cercaremo per tutte le vie possibili di haver duoi Padri Giesuiti, se non fosse mai per altro che per far vedere a quelli
heretici la concordia fra Catholici.
[La suite de la minute ne se trouve pas dans le Procès. Reprendre au texte, lig. 8.]
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minutissimamente avisata V. S. Illma. Laudo
che Sua Santità habbia lasciato questo carico a
V. S. Illma et a Monsignor Reverendissimo,
perchè veramente si farà et più speditamente et
più fruttuosamente.
Monsignor Reverendissimo è stato da
vinti giorni in qua nel letto molto ammalato, et
havendo ricevuto in questo mentre due lettere
di V. S. Illma, una il 26 et l'altra hieri per le mani
del signor Floccardo, canonico682, glie
rincrebbe infinitamente di non potergli far
risposta per allhora perchè il medico non lo
volse permettere. Spera nientedimeno che fra
pochi giorni, havendo ricuperato un poco più
di vigore, egli darà piena et compita
sodisfattione sì alle lettere di V. S. Illma, sì
ancora a quelle [296] del signor Giustiniano, il
quale non è certo ben informato delle cose di
qua, nè de li cunti del Rmo Monsignor suo
zio683. Priegha adunque Monsignor Rmo
Vescovo V. S. Illmo di haverglie un poco di
patientia sin tanto che possa farglie risposta
alle sue.
È vacante adesso un beneficio curato,
cioè una cura684, che può valer di intrata
dugento scudi, nelli buoni anni, et si darà,
secondo l'ordinario, per concorso. Io son
sollecitato da varii amici, etiamdio spirituali, di
prevalermi di questa occasione, che maggior
non habbiamo di qua. Io, per non spregiar
l'aviso loro, lo farò, ma con questa conditione,
di non riservare quel beneficio se non con il
beneplacito et giudicio di V. S. Illma, poichè io
non posso haver et ritener insieme con quella
cura il prævostato della chiesa Cathedrale. E
ben vero ch'il prevostato non havendo neanche
un quattrino d'intrata, et il canonicato che si dà
al Prævosto non havendo un anno per l'altro
sessanta scudi, io stimo più giovevole di esser
[297] commodo curato che povero Prævosto,
se non fosse la speranza del ritorno nostro in
Geneva, laquale sin adesso pasce molti
honorati dottori et nobili che sonno stati nella
Chiesa nostra. Ma parlando poi assolutamente,
io son poco meno costretto di lasciar questo
prævostato ad altri che possano far maggior
ou moins de théologiens selon [295] le nombre
de conférenciers voulu par ceux de Genève, et
nous tâcherons de toute façon qu'il y ait deux
ou trois Jésuites. Nous ne nous endormirons
point en cette négociation, et vous en serez
averti immédiatement, dans le plus grand
détail. Je me félicite de ce que Sa Sainteté en a
laissé le soin à Votre Seigneurie et à Mgr le
Révérendissime, car ainsi tout se fera d'une
manière plus expéditive et plus fructueuse.
Depuis vingt jours Monseigneur est au
lit très malade ; il a reçu pendant ce temps deux
lettres de Votre Seigneurie, l'une le 26, l'autre
hier par M. le chanoine Floccard, et regrette
beaucoup de n'avoir pu vous répondre, parce
que le médecin n'a pas voulu le lui permettre.
Il espère néanmoins recouvrer un peu de force
et vous donner, dans quelques jours, pleine et
entière satisfaction au sujet de vos lettres [296]
et de celles de M. Giustiniani, lequel n'est
certainement pas bien informé des affaires de
ce pays ni des comptes de Monseigneur son
oncle. Mgr notre Révérendissime Evêque vous
prie donc de patienter un peu jusqu'à ce qu'il
puisse vous répondre.
Un bénéfice-cure, c'est-à-dire une cure,
est maintenant vacant ; il peut rapporter
environ deux cents écus de revenu les bonnes
années, et doit, comme de coutume, se donner
au concours. Plusieurs de mes amis, même
spirituels, m'engagent à me prévaloir de cette
occasion, car nous n'en avons pas de meilleure
dans ce pays. Pour ne point mépriser leur avis,
je le ferai, mais à la condition de ne jouir de ce
bénéfice que sous le bon plaisir et avec
l'assentiment de Votre Seigneurie
Illustrissime, puisque je ne puis avoir et
conserver avec cette cure la prévôté de l'église
cathédrale. Il est bien vrai que la prévôté n'a
pas un liard de rente et le canonicat que l'on
donne au Prévôt ne rapporte en moyenne que
soixante écus par an ; j'estimerais donc plus
[297] avantageux d'être un curé renté, que
d'être un pauvre Prévôt, n'était l'espoir de notre
retour à Genève, lequel soutient encore
maintenant plusieurs docteurs distingués et
682 Barthélemy Floccard, chanoine de la Collégiale de Notre-Dame de Liesse d'Annecy dès 1577, puis sacristain de
cette même église. Il mourut en juin 1621.
683 Mgr Ange Giustiniani, après avoir été dix ans Evêque de Genève (1568-1578), avait échangé avec Claude de Granier
la crosse épiscopale contre les prieurés unis de Talloires et de Saint-Jorioz. Il était mort à Gênes, sa patrie, le 22 février
1596.
684 La cure du Petit-Bornand, vacante par la mort de Jacques Bally.
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residentia di quella ch'io posso far mentre son
in Chiablais, et habbiano modo di vivere senza
quello. Io veramente ho vissuto sin adesso, et
meglio di quello ch'io non merito, ma egli è
stato precario ; onde, ponderando bene ogni
cosa, mi risolvo alla cura, che è il più ricco
beneficio di questa diocesi, fra quelli ch'io
posso et mi è lecito sperar.
Desiderarci
bene
preghar
humilissimamente V. S. Illma che col
beneplacito di Sua Santità mi fosse lecito
ritener il canonicato semplice, acciò venendo
qui io habbia luogo nel cuoro (sic) nostro, il
quale è tanto ben ufficiato che è una delle più
grandi consolationi ch'io ne habbia. Et così,
havendo da vivere quanto basta per la mia
conditione, io altro non cercarò senon, con
quelle poche fatighe nelle quali sarò adoprato,
servire al Signore et [298] alla Chiesa di questa
diocaesi. Mi perdoni per bontà sua V. S. Illma
s'io, fra tanti pensieri d'importantia, la tratengo
sopra questo mio particolar, perchè in questi
miei dubbii no so dove quietarme senon nel
seno di Sua Paternità Illma et Rma.
Non so ancora se Sua Beatitudine si
sarà compiaciuta di dar la licentia de'libri
prohibiti alli signori Grandis685 et Rogetio,
dottori de theologia ; so bene che non bisogna
impacciarsi di prædicar fra gl'hæretici sensa
quella. La conferentia me vuol trattener un
pezzo di qua, ma fra tanto il signor Rogetio
passarà in Tonone acciò faccia quel che si
conviene in quell'opra.
Priegho il Signor conservi molti anni
V. S. Illma ad [299] utiltà di queste provincie,
et basciandoli humilissimamente le mani
reverendissime, resto eternamente,
Di V. S. Illma et Rma,
Humilissimo et devotissimo servitore,
FRANCO DE SALES,
indegno Prevosto di Geneva.
In Annessy, alli 31 di Maggio 97.
nobles qui ont appartenu à notre Eglise. Mais,
pour parler clairement, je suis presque
contraint de céder cette prévôté à quelqu'un qui
puisse résider ici plus assiduement que je ne le
fais moi-même pendant que je suis occupé en
Chablais, et qui ait en même temps de quoi
vivre sans ce revenu. J'ai à la vérité vécu
jusqu'à présent, et mieux que je ne le mérite,
mais d'une manière précaire ; c'est pourquoi,
toutes choses bien pesées, je me résous à
demander la cure, qui est le plus riche bénéfice
de ce diocèse parmi ceux qu'il m'est possible et
permis d'espérer.
Je désire aussi prier Votre Seigneurie
Illustrissime d'obtenir qu'il me soit loisible,
avec l'agrément de Sa Sainteté, de garder le
canonicat simple, afin que, venant ici, j'aie une
place dans notre chœur ; car les offices s'y
célèbrent si dignement que c'est là une de mes
plus grandes consolations. Ayant ainsi de quoi
vivre selon ma condition, je ne chercherai plus
autre chose sinon de servir le Seigneur et
l'Eglise de ce diocèse par les petits travaux
auxquels je serai [298] employé. Que votre
bonté daigne me pardonner si, au milieu de tant
de graves sollicitudes qui l'accablent, je
l'entretiens d'une affaire qui m'est personnelle
; mais, dans mes doutes, je ne sais où me
reposer si ce n'est dans le cœur de Votre
Illustrissime et Révérendissime Paternité.
Je ne sais pas encore s'il aura plu à Sa
Sainteté d'accorder à MM. Grandis et Roget,
docteurs en théologie, la permission de lire les
livres défendus ; mais je sais bien que, sans
cette permission, il ne faut pas se mêler de
prêcher parmi les hérétiques. La conférence
me retiendra longtemps ici ; en attendant, M.
Roget ira à Thonon pour remplir les devoirs du
ministère.
Je prie le Seigneur de vous conserver
longues années pour l'utilité [299] de ces
provinces, et baisant très humblement vos
685 Claude Grandis, docteur de Louvain, était un ecclésiastique plus remarquable encore par ses éminentes vertus que
par son savoir. Ordonné prêtre le 27 mai 1589, il avait été institué curé d'Arthaz le 3 novembre de la même année, et
sept ans plus tard (1er octobre 1596), il permuta ce bénéfice contre un canonicat à la cathédrale. Il s'était acquis l'estime
et l'affection de saint François de Sales, qui voulut l'avoir pour collaborateur dans la mission du Chablais, et, en 1608,
le nomma préfet de la Sainte-Maison.
La mort de ce chanoine, arrivée en juillet 1617, fut un deuil public, ainsi que l'écrit sainte Jeanne-Françoise
de Chantal en rendant le témoignage suivant à ses vertus : M. Grandis est un « homme de parfaite sainteté que chacun
pleure et regrette pour l'extrême perte que l'Eglise a faite. Les seigneurs de Genève même, forcés par sa rare vertu, le
regrettent, et disent que c'était un ange du Ciel ; certes, cette mort me toucha jusqu'au fond du cœur. Monseigneur en
a ressenti et ressent une douleur nonpareille. Encore ce matin les larmes lui en venaient aux yeux. » (Lettre du 1er août
1617.)
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mains vénérées, je demeure à jamais,
Doppo questa scritta et non mandata, il
De Votre Seigneurie Illustrissime et
P. Spirito mi ha mandata una, quale io [ho] Révérendissime,
giunta qui, et credo che glie darà aviso delle
Le très humble et très dévoué serviteur,
cose di Tonone.
FRANÇOIS DE SALES,
All' lllmo et Rmo Sigr mio osservandissimo,
indigne Prévôt de Genève.
Monsigr l'Archivescovo di Bari,
Annecy, le 31 mai 1597.
Nuntio Apostolico appresso S. A.
Cette lettre était écrite et non encore
Turino. expédiée, quand le P. Esprit m'en a fait
remettre une que je joins à celle-ci ; je crois
Revu sur l'Autographe conserve à Rome, qu'il vous renseignera sur les affaires de
Archives du Vatican. [300]
Thonon. [300]
____
XCVIII. Au même (Minute). Affaires du Chablais : démêlés
avec les Chevaliers des Saints Maurice et Lazare ; encore la
conférence de Genève.
Sales, 29 juin 1597.
Illustrissimo et Reverendissimo Signor
Mon très honoré, Illustrissime et
mio osservandissimo,
Révérendissime Seigneur,
Mi furono mandate le lettere di V. S.
Illma, insieme col Breve di Sua Santità686, dal
signor præsidente Pobello687 con grandissima
diligentia, sì che capitorono nelle mie mani in
Tonone alli 23 di Giugno. Ringratio
infinitamente V. S. Illma del zelo con il quale
Ella si adopra per questi poveri popoli.
Quanto all'ordine il quale il signor
Ripa688 fa intendere essersi dato, sì per la
conservatione del luogho di monsieur di Avulli
nel consistono di Chiablais, sì anche [301] per
la restitutione dell'intrata al curato di San
Giulino, non ne ho sin adesso sentito nuova
veruna.
Quanto poi a689 quello che è stato
promesso dalli Cavaglieri, è vero che il signor
cavaglier Bergera mi obligò gl' affitauoli, ma è
vero ancora ch' io protestai di non voler litigar
con essi, che eran tutti habitatori di Tonone ; et
Les lettres de Votre Seigneurie et le
Bref de Sa Sainteté me furent envoyés si
promptement par M. le président Pobel, qu'ils
me parvinrent à Thonon le 23 juin. Je vous
remercie infiniment du zèle avec lequel vous
vous employez pour ces pauvres populations.
Quant à l'ordre que M. Ripa dit avoir
été donné, soit pour le maintien de M. d'Avully
dans la charge de chef du consistoire du [301]
Chablais, soit encore pour la restitution du
traitement dû au curé de Saint-Julien, je n'en ai
jusqu'ici reçu aucune nouvelle.
Au sujet de ce qui a été promis par les
Chevaliers, il est vrai que le chevalier Bergera
obligea les fermiers en ma faveur ; mais il est
vrai aussi que j'ai protesté ne point vouloir
plaider avec ces gens, qui sont tous habitants
de Thonon ; et il ne faut pas que ceux qui
tâchent de les convertir aient ces démêlés avec
686 Voir ci-devant note (603), p. 272.
687 Raymond Pobel, seigneur d'Asnières et du Mollard, d'abord avocat au Sénat de Savoie (1566), juge-mage de Bresse
(1569), puis sénateur (1571), avait été nommé troisième président du Sénat le 9 janvier 1581, et devint second
président le 5 août 1585. Il mourut le 5 août 1597.
688 Augustin Ripa, premier secrétaire d'Etat, comte de Jaillon (1594), réunissait au titre de conseiller d'Etat, celui de «
secrétaire des Commandements, des Finances, de l'Ordre de l'Annonciade et de la sacrée Religion et Milice des Saints
Maurice et Lazare. »
689 a [quel grano et vino...]
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non fa bisogno che quelli i quali cercano di
ridurli habbiano questi intrighi con loro,
massime in questi calamitosissimi tempi et
paesi dove ogn' uno è povero.
Circa l' accrescer li curati, persisto io a
dire che è convenientissimo che non solo li
Cavagiieri, ma quanti sonno che si ritruovano
haver beneficii in Chiablais, li lascino in mano
di Monsignor Reverendissimo per darli a
capaci. Ma non mi par che debbano li signori
Cavaglieri, con questi prætesti, ritardar l'opra
et dire che quasi tutte le cure siano nelle mani
de'præti, perchè non saranno cinque præti che
godano pacificamente detti beneficii690. Et io
non ne so senon uno, de quelli cinque, [302] il
quale non sia querelato dall'istessi Cavaglieri,
et quello sin adesso non ne ha cavato un sol
quattrino per esser stato impedito dalli
Genevrini ; et nel resto ha speso del suo et delli
suoi amici, nell'opra di Chiablais, quanto basta
per non essergli rimproverato quel
beneficio691.
Ho ricevuto il Breve di Sua Santità con
ogni humiltà, et vederò di essequire quanto in
quello mi è commandato, con ogni diligentia.
È vero che il tempo è molto cattivo di qua.
Monsignor Rmo Vescovo mi ha mandato una
lettera per esser mandata a V. S. Illma, nella
quale glie dà raguaglio della sanità ricuperata
per gratia d'Iddio.
Il P. Cherubino glie scrive circa la
conferentia in che stato siamo. Temo che li
movimenti della Maurianna non ci diano gran
disturbo692, massime alla venuta del Padre
Giesuito che V. S. Illma vuol far venire. Et già
che mi [303] domanda quale fia più utile, o
vero il Rettor de Turino693, o vero il theologo
francese che legge in Milano694, stimo ch' il
francese tornarà più a commodo, sì per il
commercio della lingua, sì ancora per parer
minor affettatione dalla banda nostra, già che
questa conferentia non ha da farsi se non sotto
nome di Monsignor Reverendissimo nostro.
Ma saria bisogno di tenerlo avvertito acciò che
venga al primo avviso senza dilatione, perchè
eux, surtout en des temps si calamiteux, et en
des pays où tout le monde est pauvre.
Pour ce qui est d'augmenter le nombre
des curés, je persiste à dire qu'il est très
convenable que non seulement les Chevaliers,
mais encore tous ceux qui détiennent des
bénéfices en Chablais les remettent à Mgr le
Révérendissime afin qu'il les donne ensuite
aux plus capables. Toutefois, il me semble que
MM. les Chevaliers ne doivent pas, sous de
vains prétextes, retarder cette œuvre et dire que
presque toutes les cures sont entre les mains
des ecclésiastiques ; car il n'y a pas cinq prêtres
qui jouissent paisiblement de ces bénéfices.
Sur les cinq je n'en connais qu'un qui ne soit
pas molesté [302] par les Chevaliers mêmes, et
celui-ci n'en a pas tiré un seul liard parce qu'il
en a été empêché par les Genevois. Du reste, il
a suffisamment dépensé de son bien et de celui
de ses amis dans la mission du Chablais, pour
qu'on ne lui reproche pas ce bénéfice.
J'ai reçu en toute humilité le Bref de Sa
Sainteté ; je tâcherai d'exécuter avec grande
diligence ce qu'il m'enjoint. Il est vrai que les
temps sont bien mauvais pour ce pays. Mgr
notre Révérendissime Evêque m'a envoyé,
pour faire parvenir à Votre Seigneurie, une
lettre dans laquelle il vous annonce que, par la
grâce de Dieu, il a recouvré la santé.
Le P. Chérubin vous écrit où nous en
sommes touchant la conférence. Je crains que
les mouvements des troupes en Maurienne ne
nous causent de grands embarras, surtout pour
la venue du P. Jésuite que Votre Seigneurie
Illustrissime veut nous envoyer. Puisque vous
me demandez lequel serait le plus utile, du
Recteur de [303] Turin ou du français, lecteur
de théologie à Milan, je crois que le français
nous conviendra mieux, soit à cause de la
langue, soit aussi pour qu'il y ait moins
d'affectation de notre côté ; car cette
conférence ne doit se faire que sous le nom de
Mgr notre Evêque. Mais il faudrait prévenir ce
Père afin qu'il vînt sans retard au premier appel
: tout délai ne pourrait être que nuisible. Nous
690 detti beneficii et non siano [querelati dall' istessi...]
691 Le Saint parle ici de lui-même ; car il avait obtenu au concours, le 11 mai 1595, la cure de Corsier-Asnières, dont
les revenus étaient aliénés par les hérétiques.
692 Lesdiguières venait de faire une descente dans cette province ; le 23 juin il avait surpris Saint-Jean de Maurienne.
Dom Sanche de Salinas, chargé de défendre le pays, au lieu d'opposer quelque résistance, avait replié ses troupes sur
le Piémont. Lesdiguières le poursuivit jusqu'au pied du Mont-Genis, et s'empara du château de Saint-Michel.
693 Le P. Antoine Marchesi, milanais, qui exerça cette charge pendant les années 1595-1598 et 1602, 1605.
694 Le P. Jean de Lorini (voir ci-devant, note (253), p. 105).
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20.7 Page 197

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il differire non potrà esser senon nocivo.
Habbiamo in Chiambery duoi Padri Giesuiti
valenti : il Padre Saunerio et il Padre
Alexandro, scossese695 ; et in caso che fossero
chiusi i passi et le strade per venire, mi pare
che bastariano. E ben vero che questi
Genevrini fanno gran difficoltà di ricevere
Giesuiti in questa conferentia, con dire che
sonno huomini di Stato et esploratori di
Spagna ; ma noi, dal canto nostro, faremo ogni
sorte di instantia. [304]
Quanto alla parrochia per laquale
desideravo di haver dispensa, il fratello del
defunto curato pretende di esserne proviso696,
per resignatione, da Roma ; il che se sarà vero,
non vorrei esser importuno con V. S. Illma
indarno. Aspettarò adunque di supplicarla, sin
tanto che di Roma venga la resolutione per
questo pretendente.
Fra tanto mi fanno intendere che il
signor Cantor della metropolitana di Lione697
indrizza certi avvisi a Monsignor l'Illmo
Cardinale Legato in Francia698 circa le cose di
Genevra ; et perchè è persona degna de fede,
mi è parso di dover darne aviso a V. S. Illma,
acciò che se per sorte la scrivesse a detto signor
Legato et venisse a proposito, lo favoriscili
avons à Chambéry deux Pères Jésuites de
grand mérite : le P. Saunier et le P. Alexandre,
écossais ; si les passages et les routes [d'Italie]
étaient fermés, il me semble que ces Religieux
suffiraient. Les Genevois, il est vrai, font
grande difficulté d'admettre des Jésuites à cette
conférence, disant qu'ils sont hommes d'Etat et
explorateurs d'Es
pagne ; cependant nous emploierons de notre
côté toutes sortes d'instances. [304] Quant à
la paroisse pour laquelle je désirais avoir une
dispense, le frère du défunt prétend en être
pourvu de Rome par résignation. S'il est vrai,
je ne voudrais pas importuner inutilement
Votre Seigneurie ; j'attendrai donc pour vous
supplier à ce sujet la décision de Rome à
l'égard du prétendant.
On m'avertit que M. le chantre de la
métropole de Lyon adresse à Mgr l'Illustrissime
Cardinal Légat de France certains avis
touchant les affaires de Genève ; comme il est
un homme digne de foi, j'ai cru devoir vous en
informer, afin que si par hasard Votre
Seigneurie écrit audit Légat et qu'Elle en ait
occasion, Elle daigne le favoriser… [305]
Revu sur l'Autographe conservé à la
Visitation d'Annecy. [305]
_____
695 Le P. Alexandre Hume ou Humæus, né en Ecosse en 1560, appartenait probablement à la famille des barons Hume
de Polwarth ; il entra dans la Compagnie de Jésus en 1581. Un de ses contemporains fait de lui l'éloge suivant : Il se
rendit recommandable « par son humilité et par le courage qu'il témoigna en plusieurs rencontres où il s'agissait de la
conquête des âmes... C'était un saint, tenu pour tel en Chablais et partout ailleurs. » Le P. Hume partagea avec
beaucoup de zèle et de dévouement les travaux de saint François de Sales pour la conversion des hérétiques. Il mourut
à Chambéry le 29 mars 1606.
696 proviso [con derogatione...]
697 Louis de Sacconay, qui appartenait à une famille savoisienne, était chanoine de la métropole de Lyon dès le 24
décembre 1572. Il remplit suc-cessivement dans ce Chapitre les charges de maître de choeur (1577), chantre (1580)
et chamarier (1604) ; il mourut le 22 juin 1613.
698 Alexandre de Médicis ; voir ci-devant, note (510), p. 221.
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XCIX. Au duc de Savoie, Charles-Emmanuel Ier (Minute).
Témoignages de reconnaissance.
699Monseigneur,
[Juillet] 1597.
Je remercie tres humblement Vostre Altesse du favorable jugement qu'elle fit de moy
dernierement700, quand la nouvelle se donna que Monseigneur le Rrac Evesque de Geneve estoit
en danger de mort701. Et sachant que cest heur de comparoistre en vostre memoire en une si
honnorable occasion ne peut partir que de la bonté de Vostre Altesse, qui aura peut [être] esté
persuadëe qu'il y aye quelque suffisance en moy, proportionëe a ceste sienne faveur, je rougis
d'honte d'en estre tant indigne702, et loue Dieu neanmoins qui a donné a Vostre Altesse ceste
resolution de vouloir procurer des bons pasteurs a vostre peuple ; car encores que je soys le plus
indigne de tous ceux qu'elle pouvoit se reduyr'en souvenance, si [306] est ce que l'intention droitte
de Vostre Altesse ne laisse pas d'en estre tres recommandable703.
J'ay escrit pieça a Vostre Altesse des necessités du Chablais, et704 quoy que je ne doute
point que le zele dont Nostre Seigneur a eschauffé son cœur ne luy en tienne tousjours la memoyre
fraiche, si ay je prié monsieur le baron de Chevron de la luy representer.
Je prie sa divine Majesté qu'elle705 conserve et confere toute benediction a Vostre Altesse,
delaquelle je suis, Monseigneur,706 Tres humble et tres obeissant serviteur et sujet.
Revu sur l'Autographe conservé à la Visitation d'Annecy.
_____
699 Monseigr, Je remercie Vostre Serme Altesse du favorable souvenir qu'ell'eust de moy dernierement quand ell'eut
advis que Monseigr le Rme Evesque de Geneve estoit en danger de mort ; lequel, bien quil partit du respect que V. A.
porte a la vertu, du merite delaquelle elle croyoit que je fusse prouveu, dont je suis bien esloigné, ne peut qu'il n'anime
a se rendre vertueux tous ceux qui l'auront sceu, et ne me donne courage pour m'acquerir la suffisance en contemplation
de laquelle V. A. s'advisa lhors de me bienfaire. Et bien que je sois... Ell'animera neanmoins tous ceux qui le sçauront
a se [rendre capables de semblable...] procurer une vraÿe capacité qui puysse meriter un bien semblable...
700 Voir à l'Appendice la lettre du Nonce en date du 16 juin 1597.
701 Malgré le rétablissement de Mgr de Granier, le duc de Savoie ne perdit pas de vue le projet de lui donner le Prévôt
pour successeur ; le 29 août de cette même année, il signait les lettres patentes par lesquelles celui-ci était nommé
coadjuteur de l'Evêque de Genève avec future succession.
702 [Un léger trait de plume a été passé, probablement par distraction, sur les sept mots qui précèdent.]
703 tres recommandable. [Puys, en un siecle si desesperé... infortuné...]
704 et [ay prié monsieur le baron de Chivron d'en resouvenir par fois V. A...]
705 qu'elle [soit la protection de V. A...]
706 a Vostre Altesse, [laquelle je supplie de m'advoüer.] Monseigneur, [pour son]
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C. A un gentilhomme de la cour du duc de Savoie (Minute
inédite). Même sujet.
[Juillet] 1597.
Monsieur,
Je ne puys penser d'ou me vient la faveur [par laquelle] il vous pleut embrasser
dernierement l'honnorable souvenance que Son Altesse eut de moy sur la nouvelle qui courut de
la maladie de Monseigneur l'Evesque de Geneve, si ce n'est vostre bonté, qui vous sollicite a
bienfaire jusques aux inconneuz. Mays je sçai bien que ceste vostre courtoisie ne se pouvoit
adresser a [307] sujet qui s'en tint plus indigne et plus obligé a vous rendre humble service.
Je prie Dieu quil vous conserve longuement en prosperité, et m'offre meshuy a vous pour demeurer
a jamais,
Monsieur,
Vostre tres humble serviteur.
Revu sur l'Autographe conservé à la Visitation d'Annecy.
_____
CI. A Monseigneur Jules-César Riccardi, Archevêque de Bari,
Nonce Apostolique a Turin (Minute). Assemblée faite à
Annemasse pour traiter des intérêts de la religion en Chablais.
Le P. Chérubin député auprès du duc. Succès prodigieux
des Quarante-Heures d'Annemasse.
[Thonon,] 14 septembre 1597.
Illustrissimo et Reverendissimo Signor
Mon très honoré, Illustrissime et
mio osservandissimo,
Révérendissime Seigneur,
Mentre son stato differendo di giorno
in giorno di scriver a V. S. Illma sin tanto che io
potessi concorrere col P. Cherubino per
scrivergli più compitamente, sonno occorse
tante cose degne di esser scritte ch' io non so se
le potrò ben tutte ridurre nella memoria.
Essendosi ridotti in Annemasse li Rdi
Padri Giovanni Saunerio, Giesuito, Spirito et
Cherubino, Cappucini, [308] insieme col
signor canonico de Sales, il curato di
Annemasse707, tutti prædicatori, et il Barone di
Viri, consigliere di Stato di Sua Altezza, per
Pendant que je différais de jour en jour
d'écrire à Votre Seigneurie Illustrissime en
attendant que je pusse me concerter avec le P.
Chérubin pour le faire plus amplement, il est
arrivé tant de choses dignes de vous être
communiquées, que je ne sais si je pourrai les
rappeler toutes à mon souvenir.
Comme je vous l'écrivais dans ma
dernière lettre, les RR. PP. Jean Saunier,
Jésuite, Esprit et Chérubin, Capucins, le
chanoine de Sales, [308] le curé d'Annemasse
(tous prédicateurs, et le baron de Viry,
707 Balthazar Maniglier, « personnage de beaucoup d'érudition et d'une grande piété, » lié d'amitié avec saint François
de Sales depuis l'époque où ils faisaient ensemble leurs études à Paris, avait été nommé curé d'Annemasse le 29
octobre 1596. Honoré de la confiance de son Evêque et de celle du duc de Savoie, il fut chargé par ce dernier de
plusieurs missions importantes. Il mourut curé de Serraval en 1636.
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cercar li mezzi convenevoli di ridurre alla fede
li popoli che sonno intorno a Geneva, sì come
io scrissi a V. S. Illma per l'ultima mia, si fece
questa conclusione. Che bisognava ad ogni
modo che le cure fossero restituite dalli
Cavaglieli di San Lazaro et altri ; che fosse
drissato un collegio in Tonone de Padri
Giesuiti, od al manco una residentia ad tempus,
et per ciò fare, vi foss' applicata l'intrata di un
priorato conventuale posseduto dalla
communità di esso luogho. Et acciò che gl'
habitatori non ne havessero ramarico verso
detti Padri, il che impedirebbe assai il
progresso della loro conversione, fu avisato
che saria preghata Sua Altezza di voler dar a
detta communità, in vece del priorato, un datio
o taglione che si cava di detta terra di Tonone.
Questo fu il sommario delle conclusioni fatte
unanimamente da detti Padri et altri da un
canto. [309]
Si trattò poi della conferentia, a che
modo la potressimo inviare; ma di questo
lasciarò scriver al P. Cherubino al quale sonno
state fatte le risposte. In summa, li ministri
temono incredibilmente questa impresa. Et
perchè il P. Cherubino mi ha detto che V. S.
Illma proponeva di prieghar Sua Santità che ci
facesse gratia di scriver al signor Cardinale
Legato di Francia acciò procuri ch' il Re
commandi a' Genevrini di venir a
conferentia708, non posso tralasciar di dire che
a questo modo si farebbe detta conferentia et
più fruttuosamente et con conditioni più
avantaggiose.
Hora, di quanto fu proposto in
Annemasse, si fece un scritto et memoriale da
esser appraesentato a Sua Altezza Serenissima,
et fu deputato il P. Spirito per andar in corte a
trattarne ; ma poi Monsignor Reverendissimo
nostro volse, et prudentissimamente, che il
Padre Cherubino facesse questo viaggio. Et
insieme fu trattato di far l'oratione di Quarant'
hore in detto luogho di Annemasse, per
svegliar quelli ministri di Geneva ; [310] onde
detto Padre, essendo in corte, hebbe del tutto
piissima et gratissima risposta. Ma le cose
delle cure et del collegio furono lasciate nelle
mani delli signori di Lulino et di Giacob per
avisare del modo col quale si potessero
essequire ; et adesso, per quanto mi vien detto,
conseiller d'Etat de Son Altesse, se sont réunis
à Annemasse afin d'aviser aux moyens les plus
convenables pour ramener à la foi les
populations des environs de Genève ; voici ce
qui a été conclu. Il est absolument nécessaire
que les Chevaliers de Saint-Lazare et autres
cèdent les cures qu'ils possèdent ; qu'un collège
de PP. Jésuites, ou du moins une résidence ad
tempus soit établie à Thonon. Il faudrait
appliquer à cela le revenu d'un prieuré
conventuel qui appartient à la commune dudit
lieu. Mais afin d'empêcher les habitants de
conserver quelque froideur à l'égard des Pères,
ce qui entraverait beaucoup le progrès de leur
conversion, on proposa de prier Son Altesse de
vouloir bien, en dédommagement de ce
prieuré, abandonner à la commune l'impôt ou
taille qu'elle perçoit maintenant de la ville de
Thonon. Tel est le résumé des propositions
faites unanimement par les Pères et autres qui
assistaient à l'assemblée. [309]
On traita ensuite des moyens à prendre
pour acheminer le projet de la conférence ;
mais je laisserai le P. Chérubin écrire sur ce
sujet, puisque c'est à lui que les réponses ont
été données. En somme, les ministres
redoutent incroyablement cette entreprise. Le
P. Chérubin m'a dit que Votre Seigneurie
Illustrissime se proposait de prier Sa Sainteté
de vouloir bien écrire à M. le Cardinal Légat
de France, afin qu'il tâche d'obtenir que le roi
ordonne aux Genevois de venir à la conférence
; or, je ne puis omettre de vous prévenir que,
de cette manière, elle se ferait avec beaucoup
plus de fruit et dans des conditions plus
avantageuses.
De tout ce qui a été proposé à
Annemasse, on a dressé un écrit ou mémoire
pour être présenté à Son Altesse. Le P. Esprit
avait d'abord été désigné pour aller en cour
traiter de cette affaire ; mais ensuite
Monseigneur voulut, et cela très prudemment,
que le P. Chérubin entreprît ce voyage. Il avait
été aussi question de célébrer les prières des
Quarante-Heures audit lieu d'Annemasse pour
réveiller les ministres de Genève. Le Père se
trouvant donc à la cour, obtint sur [310] chaque
proposition une très pieuse et très agréable
réponse. Mais les projets relatifs aux cures et
au collège ont été remis entre les mains de
708 Il ne fut pas donné suite à ces projets, et les ministres protestants, après avoir fait traîner l'affaire en longueur,
finirent par refuser la discussion.
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21 Pages 201-210

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si aspetta la venuta del signor cavaglier di
Ruffia per farne fine.
Quell’ oratione di 40 hore si fece in
Annemasse la Domenica prima di Settembre et
il giorno della Natività della Madonna, con un
frutto molto più grande di quello che si
sperava709 ; et ha un poco del miracolo.
Annemasse è una parrochia nel contado, vicina
a Geneva tre millia, dove non ciè commodità
di allogiare quattro persone. Ivi, intorno alla
chiesa che è tutta guasta da gl' huguenotti, si
fece un tentorio capacissimo con tele, legnami,
tapisserie (sic) et altre cose simili acciò
potessero li popoli star all' or
Revu sur l'Autographe conservé à la
Visitation d'Annecy. [311]
MM. de Lullin et de Jacob, qui doivent aviser
comment on pourrait les mettre à exécution ;
maintenant, à ce qui m'est dit, on attend pour
en finir l'arrivée de M. le chevalier de Ruffia.
Cet exercice des Quarante-Heures se fit
à Annemasse le premier Dimanche de
septembre et le jour de la Nativité de Notre-
Dame, avec un fruit beaucoup plus grand que
celui que nous en espérions ; il tient même un
peu du miracle. Annemasse est une paroisse de
la campagne, à trois milles de Genève, où il n'y
a pas moyen de loger quatre personnes. Là,
autour de l'église, qui a été tout endommagée
par les huguenots, on construisit avec des
toiles, des boiseries, des tapisseries et autres
choses semblables une tente très vaste, afin que
tout le peuple pût demeurer… [311]
709 Au sujet des Quarante-Heures, voir tome II de cette Edition, Préface des éditeurs (Ire Partie) et Avant-Propos de
l'Auteur, pp. 25, 26.
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21.2 Page 202

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Année 1598
_____
CII. A Monsieur Claude Marin, procureur fiscal en Chablais710
(Inédite). Prochain retour du P. Chérubin à Thonon.
Promesse du président Favre.
Annecy, 3 janvier 1598.
Monsieur,
L'ayse que j'attendois de vostre presence m'a fait moins gouster celluy que j'ay accoustumé
de prendre quand je reçois de vos lettres, a la reception de vostre derniere, laquelle neanmoins, a
faute de vous, a esté la tres bien venue en une heure en laquelle j'estois en conversation avec le
Pere Cherubin, vers lequel je me suis servi de vostre authorité pour luy persuader de retourner bien
tost par dela, ce quil fera. Monsieur le president Favre est a Chambery, et m'asseure qu'il mettra
au jour les calomnies de ceux qui n'ont point d'autre religion que le mensonge, et reformera les
accusations de ces si mal formés reformateurs. [312]
Faites moy cest honneur de croire que la nouvelle santé que Dieu me donne vous est toute
acquise, puisque je suis
Vostre plus humble serviteur,
FRANÇS DE SALES,
Prævost de Geneve.
Annecy, 3 janvier 1598.
A Monsieur Marin,
Procureur fiscal du Chablais.
Revu sur une copie déclarée authentique, conservée à Turin, Archives de l'Etat.
_____
710 Claude Marin, originaire de Bonneville, « procureur fiscal pour Son Altesse au duché de Chablais » (lettres patentes
du 9 février 1594), était le chef de l'une des sept familles qui composaient toute la population catholique de Thonon
lors de l'arrivée de saint François de Sales. C'est dans sa maison que le Saint réunit et évangélisa pour la première fois
ce petit groupe de fidèles ; c'est là qu'il eut un pied-à-terre au commencement de son apostolat. Claude Marin, qui lui
demeura toujours profondément dévoué, devint dans la suite conseiller et administrateur de la Sainte-Maison. Il
mourut le 18 avril 1620.
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21.3 Page 203

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CIII. A Monseigneur Jules-César Riccardi, Archevêque de Bari,
Nonce Apostolique a Turin (Inédite). Le voyage du Saint à
Rome retardé par une maladie grave. Envoi de trois lettres du
duc. Bonnes dispositions des habitants du Chablais.
Intervention en faveur de deux religieux qui ont encouru des
censures ecclésiastiques.
Annecy, 14 janvier 1598.
711Illustrissimo et Reverendissimo
Mon très honoré, Illustrissime et
Signor mio osservandissimo,
Révérendissime Seigneur,
Visitato dalla bontà d'Iddio Signore
nostro con una febre continua et una ricaduta
tanto vehemente che sette giorni continui poco
da me si sperava altro che la [313] morte712,
adesso che per la medesima bontà sono
convalescente, mi è restata una tanta
debolezza, massime di gambe, che io non so se
devo sperare di poter fare il viaggio di Roma
avanti Pasqua, quantunque desiderarei
infinitamente di ritrovarmi costì per li giorni
santi, et farò ogni sforzo di farlo.
Onde, essendo andato nell'armata
nostra avanti ch'io mi ammalassi713, per pigliar
passaporto da Sua Altezza da un canto, et dall'
altro per haver dichiaratione da lui del suo
consenso quanto alla restitutione delle cure di
Chiablais per li curati che subito fatta detta
restitutione ivi si stabiliranno, Sua Altezza, con
tutta quella dimostratione di pietà che si poteva
sperare, commandò tre lettere : una a Sua
Santità et le altre a duoi Signori Cardinali,
nelle quali ella pregha instantemente la Santa
[314] Sede di rivocare la unione fatta alli
Cavaglieri. Hora, perchè dette lettere fanno
mentione di me come latore et instruttore della
necessità della desiderata revocatione, ho
differito sin adesso d'inviarle, sperando di
poter portarle fra poco. Ma già ch'io vedo le
Après avoir été visité de la bonté de
Dieu notre Seigneur par une lièvre continue,
j'ai fait récemment une rechute si dangereuse
que [313] pendant sept jours consécutifs on
n'attendait guère autre que ma mort.
Maintenant que, par la même divine bonté, je
suis en convalescence, il m'est resté une telle
faiblesse, surtout aux jambes, que je ne sais si
je pourrai faire le voyage de Rome avant
Pâques, quoique je désire infiniment de m'y
trouver pour la Semaine Sainte ; aussi ferai-je
tous mes efforts à cette fin.
C'est dans cette prévision que je m'étais
rendu au camp avant de tomber malade :
d'abord pour avoir un passeport de Son
Altesse, et ensuite pour obtenir la déclaration
de son consentement à la restitution des cures
du Chablais aux curés qui s'y établiront
aussitôt que cette restitution sera faite. Son
Altesse, avec toutes les démonstrations de
piété que l'on pouvait espérer, donna ordre
d'écrire trois lettres, l'une à Sa Sainteté et les
autres à deux Cardinaux, afin de prier
instamment le Saint-Siège de révoquer l'union
de ces bénéfices avec ceux des Chevaliers. Or,
parce que dans ces lettres je suis [314]
mentionné comme devant en être le porteur,
avec charge d'expliquer la nécessité de la
711 [La minute et l'original de cette lettre, dont les Autographes n'ont pas été retrouvés, sont insérés dans le Ier Procès
de Canonisation. D'après une note qui y est jointe, la seconde de ces pièces était signée de la main du Saint ; le post-
scriptum non plus que la date ne figure pas dans la minute d'où sont tirées les variantes données ci-après.]
712 Saint François de Sales avait été atteint de cette fièvre continue qui mit ses jours en péril, à la fin d'octobre 1597,
ainsi que le prouvent deux pièces signées, l'une par les chanoines Déage et Grandis, en date du 9 novembre, et l'autre
par Mgr de Granier, le 20 du même mois. C'est donc à tort, comme nous l'avons dit ailleurs (Préface de notre tome II,
note (10), p. X), que Charles-Auguste de Sales et les historiens qui l'ont suivi placent cette maladie une année plus
tard.
713 Le duc se trouvait alors à Barraux, sur les frontières du Dauphiné et de la Savoie, pour surveiller la construction
du fort qu'il y faisait élever, et qui fut pris par Lesdiguières l'année suivante.
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21.4 Page 204

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dette lettere invecchiarsi et dubito che vi sia
pericolo nella retardatione, mi è parso bene di
mandarle a V. S. Illma et Rma, protettrice
amorevolissima di tutto questo negotio, acciò
che overo le trattenga se cosi glie parerà, overo
le mandi per accelerare il negotio, il quale non
si terminarà giamai così presto quanto si ha da
desiderare.
Spero che Sua Santità non haverà in
questo difficoltà ; ma Sua Altezza in
particolare mi disse che questa opera haveva
da farsi senza communicarne una sola parola
col signore Arconato714, suo Imbasciatore
appresso Sua Santità, perchè egli
l'impedirebbe per il proprio interesse. È vero
che la necessità è grande ; et si conosce da
questo, che queste feste di Natale havendo Sua
Altezza [315] mandato il signor Presidente
Fabro, persona di singolarissima pietà et
sufficentia, in Tonone per conoscer l'animo
delli habitatori di Chiablais circa l'essercitio
catholico, quasi tutti mostrorno di desiderarlo,
et aspettano di hora in hora che si restituisca.
Il Padre Cherubino ha predicato
l'Advento in Tonone et deve giungere qua
domani, dal quale V. S. Illma haverà più
particolar avviso. Mi è stato detto che Sua
Altezza ha tolto l'intrata de'Cavaglieri per
servitio suo, et l'ho fatta preghare che facesse
dar la provisione necessaria per li ecclesiastici
che sono nelle tre cure già stabilite.
715Ma non posso finirla senza
révocation désirée, j'ai différé jusqu'à présent
de les expédier, espérant pouvoir les remettre
moi-même sous peu. Mais voyant que lesdites
lettres vieillissent, je crains qu'il y ait quelque
danger en ce retard, et il me semble devoir les
envoyer à Votre Seigneurie Illustrissime et
Révérendissime, protectrice très dévouée de
toute cette affaire, afin qu'Elle les retienne si
Elle le juge bon, ou qu'Elle les expédie pour
hâter cette œuvre, laquelle ne se terminera
jamais aussi promptement qu'on peut le
désirer.
J'espère que Sa Sainteté ne verra pas de
difficulté en cela ; mais Son Altesse m'a dit en
particulier que cette affaire doit être traitée
sans en souffler mot à M. Arconato, son
ambassadeur auprès de Sa Sainteté, parce qu'il
s'y opposerait en vue de son intérêt personnel.
Il y a vraiment urgence : ce qui le prouve, c'est
que pendant [315] les fêtes de Noël, Son
Altesse ayant envoyé à Thonon M. le président
Favre, homme d'une piété singulière et d'un
grand mérite, pour connaître le sentiment des
habitants du Chablais sur l'exercice du culte
catholique, presque tous ont témoigné le
désirer et ils attendent d'heure en heure qu'il
soit rétabli.
Le P. Chérubin a prêché l'Avent à
Thonon, et il doit arriver ici demain ; il
renseignera plus particulièrement Votre
Seigneurie Illustrissime. On m'a dit que Son
Altesse a saisi à son profit le revenu des
714 François Arconato, d'origine milanaise, comte de Tronzano, en Piémont, s'était fait connaître dans les armées du
duc de Savoie pendant les guerres de 1589 ; mais il servit encore plus utilement ce prince dans la carrière
diplomatique. D'abord ambassadeur à Rome (1593-1599), puis en Espagne, il fut l'un des plénipotentiaires qui
négocièrent le traité de Lyon. Charles-Emmanuel Ier le nomma conseiller d'Etat, chevalier des Saints Maurice et
Lazare, puis de l'Annonciade en 1608.
715 Ma io non posso finirla senza dimandar qualche gratia a V. S. Illma. Cié un monasterio di Canonici regolari,
sottoposto all'abadia d'Abondanza, nel quale sonno undici religiosi, quali tutti hanno celebrato avanti il tempo, et
alcuni dopo la Bulla della Sta di Sisto V, senza tuttavia haver notitia di detta Bulla. Hora, sapendo la irregolarita che
corre, desiderano d'havere assolutione, ma non sanno che strada pigliare. Onde supplico V. S. Illma di consolarli in
questo, avisandome del modo che si ha da tenere, poichè, per miracolo, questo solo monasterio, fra altri, desidera
unanimamente la sua reformatione. Se non vivono da frati, per non haver chi li conduca et ammaestri, vivono al meno
da buoni sacerdoti, come testifica il Sigr canonico de Sales, quale vi é stato [a] predicare queste feste passate, et ne
ritornó molto edificato della loro conversatione, in comparatione degl'altri religiosi savoyani. Il monasterio si chiama
Nostra Dama di Six. (Mais je ne puis finir sans demander quelque faveur à Votre Seigneurie Illustrissime. Il y a un
monastère de Chanoines réguliers, sous la juridiction de l'abbaye d'Abondance, où se trouvent onze religieux, qui tous
ont célébré avant le temps, et quelques-uns après la Bulle de Sa Sainteté Sixte V, dont ils n'avaient aucune
connaissance. Or, ayant été avertis de l'irrégularité qu'ils ont encourue, ils désirent en être absous, mais ne savent quel
chemin prendre. C'est pourquoi je supplie Votre Seigneurie de les consoler sur ce point, en m'indiquant à quels moyens
il faut recourir ; car, par miracle, ce monastère, seul parmi les autres, désire unanimement la réforme. S'ils ne vivent
pas en religieux parce qu'ils n'ont personne qui les conduise et les instruise, ils vivent du moins en bons prêtres, comme
l'atteste M. le chanoine de Sales qui a prêché là ces fêtes passées, et qui s'en est retourné très édifié de leur conduite,
si on la compare à celle des autres religieux savoisiens. Le monastère est appelé Notre-Dame de Sixt.)
[Reprendre au texte, lig. 1.]
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domandare a V. S. Illma qualche gratia secondo Chevaliers, et je l'ai fait prier de donner la
il solito. Sono duoi poveri religiosi, ma da provision nécessaire aux ecclésiastiques qui
bene, della badia della Madonna di Six716, sont dans les trois cures déjà établies.
[316] quali hanno celebrato avanti il tempo :
Mais je ne puis finir sans demander,
cioè uno, chiamato Francesco Biord, quale selon mon habitude, quelque faveur à Votre
celebrò nell'anno 19º ; l'altro, Nicolò Desfaiet, Seigneurie. Deux pauvres et vertueux religieux
che celebrò nel 23º, et questo dopo la Bulla di de l'abbaye de Notre-Dame de Sixt ont célébré
Sisto V717, senza tuttavia haver notitia di detta avant le [316] temps : l'un, appelé François
Bulla ; della quale, subito che sonno stati Biord, dans sa dix-neuvième année ; l'autre,
avvisati, mossi di grandissima penitenza, colle Nicolas Desfayet, dans sa vingt-troisième ; et
lagrime nei occhi, sonno ricorsi da me per cela après la Bulle de Sixte V, dont ils n'avaient
haver consolatione. Et io in questo non posso toutefois aucune connaissance. Aussitôt qu'ils
altro se non ricorrere alla bontà di V. S. Illma, ont connu l'existence de cette Bulle, touchés
acciò possino impetrare la consolatione dell' d'un grand sentiment de pénitence, les larmes
assolutione. Quel monasterio è di Canonici aux yeux, ils ont eu recours à moi pour recevoir
regolari, sottoposto all' Abondantia ; ma tiene quelque consolation. Et moi je ne puis faire
de' monachi quali sono dabbene et timorati, sì autre chose que de recourir à la bonté de Votre
come mi ha riferito il signor canonico de Sales, Seigneurie afin de leur obtenir l'absolution.
quale ivi ha predicato queste feste. [317]
Sixt est un monastère de Chanoines réguliers,
Et per fine, Iddio havendome dato sous la juridiction de l'abbaye d'Abondance ;
questo pezzo di vita che mi resta, io mais les moines qui l'habitent sont des hommes
ricog'nosco di tenerla per servitio di Sua divina de bien, vivant en la crainte de Dieu, ainsi que
Maestà, della santa Chiesa et in particolare per me l'a rapporté M. le chanoine de Sales qui a
essere,
prêché là ces fêtes passées. [317]
Di V. S. Illma et Rma,718
Et finalement, Dieu m'ayant donné ce
Humilissimo719 et devotissimo servitore, peu de vie qui me reste, je reconnais devoir
FRANCO DE SALES, l'employer au service de sa divine Majesté, de
Prævosto di Geneva. la sainte Eglise et tout particulièrement à me
Di Annessy, alli 14 Genaro 1598.
témoigner,
Li medici, quali non hanno per bene
De Votre Seigneurie Illustrissime et
che io scriva, m'hanno fatta usare la man Révérendissime,
d'altri, il che V. S. Illma me perdoni.
Le très humble et très dévoué serviteur,
FRANÇOIS DE SALES,
Revu sur les deux textes insérés dans le Ier
Prévôt de Genève.
Procès de Canonisation. [318]
Annecy, le 14 janvier 1598.
Les médecins, qui ne trouvent pas bon
que j'écrive, m'ont obligé à me servir de la
main d'autrui. Que Votre Seigneurie
Illustrissime me le pardonne. [318]
_____
716 Ce monastère, fondé dans une pittoresque vallée du Faucigny par des Chanoines réguliers venus d'Abondance, fut,
en 1144, élevé au rang d'abbaye. Sous la conduite du bienheureux Ponce de Faucigny, son premier Abbé, il atteignit
un haut degré de prospérité et de ferveur ; mais après plusieurs siècles la régularité s'altéra dans cette Communauté
que saint François de Sales eut la gloire de réformer. Ce sont précisément les deux religieux dont il est ici question
qui furent députés auprès de lui pour solliciter cette réforme. Ils survécurent tous deux à notre Saint, et déposèrent sur
ses vertus lors des informations pour sa Béatification (1632).
717 La Bulle Sanctum et salutare, donnée le 5 janvier 1589.
718 et Rma Paternita
719 affettionatissimo
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CIV. Au duc de Savoie, Charles-Emmanuel Ier (Minute).
Instantes prières pour que les Chevaliers des Saints Maurice et
Lazare soient contraints à payer les pensions dues aux curés du
Chablais. Députation des villageois de cette province pour
obtenir du duc la restauration de leurs églises. Maladie du
Saint.
Annecy, janvier 1598.
720Je crois que Vostre Altesse se resouviendra que l'annee passee, appres plusieurs
declarations de la bonne intention qu'elle avoit de prouvoir a l'entretenement des gens d'Eglise qui
seroient emploiés pour le service de Dieu au duché de Chablais, messieurs les Chevaliers de Saint
Lazare promirent en fin finale a Monseigneur le Nonce de donner chasque annee six pensions pour
autant de gens d'Eglise ; mais pour ne se forcer pas de premier coup, ilz ne firent ceste premiere
annee la que la moytié de ce quilz avoient promis, qui fut cause de reduire les six a troys. Or
pensois je que ceste annee ilz envoieroient les commandementz necessaires a leurs fermiers pour
faire delivrer tout entierement les six pensions [319] promises, affin non seulement de conserver
l'exercice commencé en trois lieux par les trois ecclesiastiques dejaz establys
Mais voiant quilz n'en tiennent aucun conte, je suis contraint de recourir a la bonté de
Vostre Altesse pour la supplier tres humblement que, comme par son authorité et zele elle tira la
promesse desditz seigneurs Chevaliers, il luy plaise aussy d'en faire sortir l'effait, commandant a
ses officiers et ministres de Chablais de faire saisir sur le revenu des cures ces six pensions, au
prouffit des trois curés dejaz constitués et de trois autres qu'on y establira tout aussi tost que l'on
aura le moien de les entretenir. Autrement, Monseigneur, le service cessera tout a coup la ou il est
commencé, qui sera un grand scandale et perte d'ames, et ne se trouvera personne qui veullie plus
y aller pour y estre a la mercy de la provision de messieurs les Chevaliers.
Ce pendant, voicy une preuve certaine de la necessité que l'on a en ce pais la de beaucoup
d'ouvriers spirituelz. Ces bons paisans, deputés de plusieurs parroisses, vont supplier Vostre
Altesse de leur doner moyen de refaire leurs eglises et d'avoir des pasteurs catholiques. Je puis dire
avec verité que la pluspart des vilages du balliage de Thonon sont de mesme vollonté ; pour tous
lesquelz je prie Dieu de tout mon cœur quil les fasse jouir des desirs quil a mis en eux, et supplie
Vostre Altesse en toutte humilité qu'elle leur fasse voir la grandeur de l'affection qu'ell'a a
l'honneur de Dieu, puisque l'acueil et faveur que leur simplicité recepvra de Vostre Altesse servira
de mesure et de reigle a tout le reste de Chablais, et en fin mesme a ceux de la ville de Thonon,
quoy quilz semblent maintenant revesches et rebelles a la lumiere. Aussi est ce l'ordinaire que les
pauvres et simples embrassent plus vollontiers le Crucifix que les riches et sages mondains721. Ce
furent des bergers qui les premiers adorerent Nostre Seigneur né.
Je pensois bien obtenir de Sa Sainteté la restitution universelle des cures des balliages,
suivant l'expres consentement que Vostre Altesse en avoit donné par escrit, [320] si Dieu n'eust
720 [Ce qui suit est écrit par saint François de Sales, d'une main ferme et appliquée, sur un feuillet dont la moitié est
restée en blanc. Empêché peut-être par la rechute dont il parle ci-dessus de terminer cette lettre, il dicta à Georges
Rolland, son valet de chambre, lequel écrivit au verso du même feuillet la minute qui constitue notre Pièce CIV.]
Monseigneur,
Il a pleu a Nostre Seigneur de retarder par une longue et grosse maladie le voyage de Rome, pour lequel
j'avois receu les commandemens de Vostre Altesse lhors qu'ell'estoit a Barraux, et par lequel j'esperois d'obtenir pleyne
provision pour les gens d'Eglise qui se fussent employés a l'instruction du peuple de Chablaix qui auroit affection de
se reduire a la sainte foy, selon le saint zele avec lequel V. A. avoit fait une tres ample declaration a Sa Sainteté qu'elle
consentoit que toutes les cures fussent employees a cest effect.
Ce pendant, le tems qui va fuyant nous a portés en une nouvell'annee ; et...
721 I Cor., I, 23, 26.
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retardé par une longue maladie le voiage de Rome pour lequel j'avois prins a Barraux les
commandementz et le congé de Vostre Altesse. Ce sera incontinant que je me verray asses fort
pour l'entreprendre.
Je prie tres instamment Nostre Seigneur quil vous doint
Revu sur l'Autographe conservé à la Visitation d'Annecy.
_____
CV. A Monsieur Louis de Pingon, Baron de Cusy722. Requête
présentée au duc de Savoie pour obtenir que l'usage de la cloche
de l'église Saint-Hippolyte soit interdit aux hérétiques.
Annecy, 12 février 1598.
Monsieur,
On avoit defendu aux huguenotz de Thonon de sonner la cloche qui est en l'eglise des
Catholiques. Ilz sont sur le point de demander a Son Altesse qu'il leur soit permis de s'en servir
autant qu'a nous, et sont si outrecuydés qu'ilz pensent de l'obtenir. Certes, ilz ont gasté desja une
autre plus grosse cloche, en haine de nous autres Catholiques qui la sonnions. Leur presche ne se
fait pas en ceste eglise la ni en la ville, car il leur est defendu ; pourquoy leur permettra on de le
sonner la ou ilz ne le disent ni peuvent dire ? Une cloche ne peut servir a Dieu et a Belial723. C'est
ce que j'escris a Son Altesse, et la supplie que si ceux de Thonon s'addressent a elle pour luy
presenter requeste de ceste affaire, elle les renvoye sans decret ou avec nouvelle defense de [321]
sonner. La cloche n'est pas si legere qu'elle semble ; car ilz sçavent faire valoir la moindre chose
qu'on leur accorde pour contrister les bons Catholiques.
Desirant donq infiniment, pour l'honneur de Dieu, que Son Altesse daigne lire ou faire lire
promptement ma lettre affin que je ne sois prevenu par les requestes de ces huguenotz, je n'ay sceu
a qui mieux m'addresser qu'a vous, pour vous supplier tres humblement de bailler ma lettre et prier
Son Altesse la voir, et, s'il ne la veut voir, luy discourir du sujet. La grande confiance que j'ay en
vostre bonté me fait ainsy vous importuner, ayant mesme ce bien et honneur d'estre et devoir estre
a jamais,
Monsieur,
Vostre tres humble neveu et serviteur,
FRANCS DE SALES,
Indigne Prævost de Saint Pierre de Geneve.
A Necy, le 12 fevrier 98.
_____
722 Probablement Louis de Pingon, baron de Cusy, gentilhomme de la duchesse de Savoie, capitaine des ordonnances
d'infanterie, seigneur de Prangin par son mariage avec Melchionne, fille unique de Pierre de Luyrieux, possesseur de
cette seigneurie (1563). Il avait un fils et un neveu nommés l'un Louis-Antoine et l'autre Louis-Ange de Piugon, mais
tous deux trop jeunes pour que le Saint prît à leur endroit la qualité de neveu, et par conséquent pour que l'un d'eux
pût être destinataire de cette lettre.
723 Cf. II Cor., VI, 15.
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CVI. A Monseigneur Jules-César Riccardi, Archevêque de Bari,
Nonce Apostolique a Turin (Minute). Projet de célébrer les
Quarante-Heures à Thonon, et de les faire suivre de disputes
publiques sur les matières controversées. Une conférence de
ce genre vient d'avoir lieu entre le P. Chérubin et le professeur
Lignarius.
[Sales,] 17 mars 1598.
Illustrissimo et Reverendissimo Signor
Mon très honoré, Illustrissime et
mio osservandissimo,
Révérendissime Seigneur,
Ho ricevuto lettere dal P. Cherubino et
di monsieur di Avulli sopra un concetto che
han fatto insieme di far [322] le 40 hore di
oratione in Tonone, con la maggior decentia
che far si possa ; et passate le 40 hore, di
proporre delle dispute theologique (sic)
authenticamente, et invitarvi gl'hæretici d'ogni
intorno, acciò che non si lascii cosa veruna da
tentar per scuotere quest'anime apestate dall'
heresia.
Mando adunque queste lettere loro a V.
S. Illma ; et insieme, per dire quanto me ne pare,
priegho V. S. Illma di credere che quanto alle
Quarant' hore egli non può esser senon cosa
fruttuosissima. Il che già per isperienza
habbiam veduto nelle 40 [ore] fatte l'anno
passato in Annemasse, dove si fece un gran
movimento nelle conscientie de gli hæretici
che le viddero, dei quali se ne ridussero
alquanti, et fu una grande consolatione alli
Catholici ; et spero che in Tonone la cosa sarà
molto più a proposito et utile.
Quanto poi alle dispute, spero certo che
saranno di grandissima ædificatione, non
ostante tutte le ragioni quali puotrebbono parer
in contrario : perchè o no verranno, et la
vittoria ci resta ; o vero verranno, et in questo
[323] caso, oltra la ragione et verità, haveremo
queste grandi prærogative, che staremo sopra
la defensiva et si potranno fare, nelle risposte,
delle piccole essortationi. Nè la cosa è nuova
di invitare gl'heretici alle dispute, poiché dal
collegio di Turnone724 spessissime volte sonno
J'ai reçu des lettres du P. Chérubin et de
M. d'Avully touchant le dessein qu'ils ont
conçu ensemble de célébrer les prières des
[322] Quarante-Heures à Thonon le plus
dignement possible ; puis, après les Quarante-
Heures, de proposer officiellement des
disputes théologiques. Tous les hérétiques des
environs seraient invités à y assister, afin de ne
négliger aucune tentative pour ébranler ces
âmes infectées d'hérésie.
J'envoie donc leurs lettres à Votre
Seigneurie Illustrissime ; et, pour dire en même
temps ce qu'il m'en semble, je vous prie de
croire que, quant à l'exercice des Quarante-
Heures, il ne peut être que très fructueux. Nous
en avons déjà fait l'expérience l'année dernière
à celles d'Annemasse. Un grand mouvement se
produisit alors dans les consciences des
hérétiques qui en furent témoins ; un certain
nombre d'entre eux se convertirent, et les
Catholiques en reçurent une grande
consolation. J'espère qu'à Thonon, cette
dévotion sera encore plus opportune et plus
utile.
Quant aux disputes, j'ai la ferme
confiance qu'elles apporteront une très grande
édification, malgré toutes les raisons qui
sembleraient contraires ; car, ou les hérétiques
ne viendront pas, et alors la victoire nous
demeurera, ou bien ils viendront, et dans ce
cas, nous [323] prouverons que la raison et la
vérité sont de notre côté ; nous aurons de plus
le grand avantage de nous tenir sur la défensive
724 Le fameux collège de Tournon avait été fondé et confié aux Jésuites (1560-1561) par le Cardinal du même nom,
qui désirait l'opposer comme un boulevard aux envahissements du protestantisme dans la contree. Vingt ans plus tard
cet établissement atteignait l'apogée de sa gloire. Une foule considérable d'étudiants, parmi lesquels beaucoup de
calvinistes, y recevaient les leçons de maîtres distingués, dont le nombre s'éleva parfois jusqu'à quarante-cinq. Ces
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stati invitati li ministri di Vivares et
Linguadocha; et per haver trattato in particolar
col Beza, Faïa725, Perrotto726, Belcastello727 et
altri principalissimi ministri, non vedo [324]
che vi sia gran pericolo. Però, se così parerà a
V. S. Illma, saria molto a proposito ch'il R. P.
Giovanni Laurinio, quale intendo esser adesso
in Milano, si ritruovasse in questo concerto.
Hora commandi V. S. Illma quel tanto che glie
parerà.
Mentre scrivevo, ecco che è giunto qui
il signor Procurator fiscale di Chiablais,
persona catholicissima728, il quale mi dà nuova
che Sabbato, 14 del presente, vennero quattro
persone di Geneva in Tonone, fra i quali era un
certo Hermannus Lignarius, tedescho,
celeberrimo professore di theologia in Geneva,
il quale et Sabbato et Domenica, in præsentia
di moltissime persone, venne argumentare et
disputare col P. Cherubino, et si scrisse di
banda et d'altra le risposte et argumenti729 ; et
mi ha [325] communicato detto signor
Procuratore fiscale il principio di detta disputa,
nella quale il P. Cherubino ha fatto
valentissimamente et con grande desterità.
Havendo, come spero, ben presto rilatione et
scritto più particolare di quanto si è fatto, ne
darò subito raguaglio a V. S. Illma. Detto
Hermanno è in grandissimo concetto appresso
gl' hæretici, et è stato chiamato di Allemagna
et de pouvoir, en répondant, faire de petites
exhortations. Du reste, ce n'est pas chose
nouvelle d'inviter les hérétiques à des disputes,
puisque les ministres du Vivarais et du
Languedoc y ont été invités fort souvent par le
collège de Tournon. Ayant traité en particulier
avec Bèze, La Faye, Perrot, Beauchâteau et
autres principaux ministres, je ne vois pas qu'il
y ait grand péril. Or, si Votre Seigneurie [324]
est de cet avis, il serait très à propos que le R.
P.Jean de Lorini, qu'on dit être actuellement à
Milan, se trouvât à cette assemblée. Veuillez
maintenant en ordonner comme bon vous
semblera.
Pendant que j'écrivais, M. le procureur
fiscal du Chablais, homme très catholique, est
arrivé ici. Il m'apprend que samedi, 14 courant,
quatre personnes vinrent de Genève à Thonon,
parmi lesquelles se trouvait un certain Herman
Lignarius, allemand, très célèbre professeur de
théologie à Genève. Samedi et Dimanche il se
prit à argumenter et disputer avec le P.
Chérubin en présence d'un grand nombre
d'assistants ; l'on écrivit de part et d'autre les
réponses et les arguments. M. le procureur
fiscal m'a communiqué le [325]
commencement de cette dispute dans laquelle
le P. Chérubin a fait preuve d'une science et
d'une dextérité très grandes. J'aurai bientôt, je
l'espère, une relation et un mémoire plus
religieux se délassaient des fatigues de l'enseignement en évangélisant les hérétiques, et en provoquant les ministres
à des conférences publiques dont plusieurs eurent un grand retentissement.
725 Antoine de La Faye (1540-1615), natif de Châteaudun en Berry, après avoir fait ses études à l'Université de Padoue,
vint se fixer à Genève, où il obtint une place de régent (1561). Il fut ensuite pasteur, professeur de philosophie et de
théologie, puis recteur de l'Académie, et acquit une si grande influence qu'après la mort de Théodore de Bèze il dirigea
le mouvement religieux. C'est pour réfuter un pamphlet publié par ce ministre sous le voile de l'anonyme que saint
François de Sales écrivit la Defense de l'Estendart de la sainte Croix (tome II de cette Edition).
726 Charles Perrot (1541-1608), fils d'un conseiller au Parlement de Paris, était le quatrième de la compagnie des
pasteurs de Genève, et fut deux fois recteur de l'Académie de cette ville. C'était un homme « courtois, doux et patient,
et qui se » plaisait « à la lecture des Peres. » (Lettre d'un gentil-homme Savoysien, etc., 1598.) Il se fit parmi ses
corréligionnaires l'apôtre de la tolérance, qu'il représentait comme étant « une branche nécessaire de la charité. » On
lui doit l'abolition du serment de fidélité au calvinisme que l'on avait coutume d'exiger des étudiants.
727 Probablement Etienne Beauchâteau, qui fut ministre à Lutry dans le pays de Vaud. Il eut plusieurs fois occasion de
conférer avec l'Apôtre du Chablais et se sentit tellement ébranlé dans ses croyances protestantes que, de son propre
aveu, il se serait converti, si des vues d'intérêt ne l'eussent retenu dans l'hérésie. (Process. remiss. Gebenn. (I),
déposition de Jean-Gaspard de Prez, ad art. 24.)
728 Claude Marin ; voir ci-devant, note (710), p. 312.
729 Herman Lignarius, ou Lignaridus, dont le vrai nom est Dûrrholz, était originaire de Westphalie. Après avoir été
précepteur des fils de l'électeur palatin, il fut appelé à Genève en 1596, et nommé professeur de théologie au
commencement de l'année suivante ; mais ayant eu des démêlés avec La Fave et d'autres ministres, il se retira à Berne
(1598). Lignarius mourut en 1628. (Voir Histoire de l'Université de Genève, par Ch. Bourgeaud.)
Quant à la dispute publique qui eut lieu à Thonon entre le P. Chérubin et le professeur calviniste, elle ne se
termina pas à l'avantage de ce dernier. Poussé à bout par son antagoniste, il feignit de vouloir remettre la discussion à
plus tard, et, par acte signé devant notaire, il s'engagea à venir la reprendre après Pâques. Mais, malgré toutes les
sommations du P. Chérubin qui l'attendait de pied ferme, Lignarius ne reparut plus.
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21.10 Page 210

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per esser stimato sottilissimo ; et tuttavia è détaillés de tout ce qui s'est passé, et j'en
stato impeditissimo col P. Cherubino, comme donnerai de suite connaissance à Votre
dice detto Procurator fiscale.
Seigneurie. Cet Herman, qui jouit d'une très
Vado pian piano disponendomi al grande réputation auprès des hérétiques, a été
viaggio con gran desiderio di basciarli le sacre appelé d'Allemagne parce qu'on le tient pour
mani
très subtil ; toutefois, au témoignage dudit
procureur fiscal, il s'est trouvé fort embarrassé
Revu sur l'Autographe conserve à la
avec le P. Chérubin.
Visitation de Turin.
Je me dispose tout doucement au
voyage, avec un grand désir de baiser vos
mains sacrées
_____
CVII. Au duc de Savoie, Charles-Emmanuel Ier (Minute inédite).
Rumeurs inquiétantes qui circulent en Chablais ; alarmes des
Catholiques.
[Sales,] fin mars 1598.
Monseigneur,
730Ce pendant que je ne puis aller en Chablais, les bons Catholiques qui y sont me font part
a toutes heures [326] de leurs nouvelles, et sur tout de leurs ennuis, leur semblant bien qu'ilz en
sont a moitié allegés quand ilz les ont declairés. Maintenant ilz m'escrivent de trois ou quattre
endroitz que le bruit y est bien gros qu'a la solicitation des Bernois, on y redoublera le nombre des
ministres pour y accroistre l'exercice de la nouvelle religion. Je les ay asseurés que Vostre Altesse
a trop de fermeté et reconnoist trop bien les obligations qu'elle a a la faveur que Dieu luy a fait en
ces dernieres victoires731, pour vouloir accorder aux Bernois chose qui apportast aucune
incommodité au service de sa divine Majesté, et que je ne croyois pas qu'il y eust personne aupres
de Vostre Altesse, si mal appris de son zele et sa pieté, qui osast entreprendre d'en faire la
proposition.
Je supplie tres humblement Vostre Altesse d'avoir aggreable ceste mienne responce, et
l'advoüer pour la consolation de ces pauvres gens, lesquelz ne se laissent aller a ces craintes que
par une grande jalousie qu'ilz ont de l'honneur de Dieu. Ainsy prie je Dieu tout puissant qu'il la
conserve tres longuement et luy face voir lous ses Estatz entierement affermis et dediés a son
obeissance732
Revu sur le texte inséré dans le Ier Procès de Canonisation. [327]
_____
730 Il semble a ces bons Catholiques de Chablais qu'ilz sont a moitié allegés de leurs ennuis quand ilz les m'ont fait
entendre. Ilz m'escrivent de plusieurs endroitz que les huguenotz se promettent qu'a la sollicitation des Bernois on
leur redoublera le nombre de leurs ministres et l'exercice de leur religion. J'ay respondu que V. A. fait trop de
profession de reconnoistre la bonté de Dieu et tenir de Dieu ces dernieres victoires pour ne s'en promettre pas
d'autres, plustost que d'accorder a qui que ce soit chose qui avançast tant soit peu l'impieté, et que je ne sçavois
personne si mal apprise du zele et devotion de V. A., qui osast luy en faire la proposition. [Reprendre au texte, lig.
15.]
731 de Dieu. Je supplie sa divine Bonté qu'il luy plaise estendre les victoires de V. A. sur tous ses ennemis, et luy
faire voir tous ses Estatz establis en l'obeissance qu'ilz doivent a leur Dieu et a leur Prince.
732 En dix jours seulement le duc de Savoie avait repris le fort de Charbonnières (7 mars), remporté une brillante
victoire sur Créqui à Epierre, et reconquis toute la Maurienne (17 mars).
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22 Pages 211-220

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22.1 Page 211

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CVIII. A Monseigneur Jules-César Riccardi, Archevêque de
Bari, Nonce Apostolique a Turin. Affaire de la cure du Petit-
Bornand. Peste à Annecy. Mauvais vouloir des
Chevaliers. Ebranlement produit par l'annonce des Quarante-
Heures à Thonon. Faveurs spirituelles qui sont à désirer pour
cette occasion. Zèle du duc de Savoie mal secondé par ses
officiers.
Sales, 10 avril 1598.
Illustrissimo et Reverendissimo Signor
Mon très honoré, Illustrissime et
mio osservandissimo,
Révérendissime Seigneur,
Essendo avisato da Roma che le
speditioni della cura di Bornando in favor mio
sonno nelle mani del Favretto ciè già un gran
pezzo, et havendo mandato li dinari necessarii
per due vie senza che per questo sin adesso
habbia potuto ricuperare le dette speditioni, nè
un solo avviso di detto Favretto, et che fra tanto
il fratello del defunto curato sta nel beneficio,
litigando per non lasciarlo sin tanto che
vengano dette speditioni733, etiamdio [328]
administrando li Sacramenti contra
l'espressissima prohibitione del Rmo Ordinario,
il che non si fa senza scandalo ; dubitando che
detto Favretto trattenga dette provisioni per
qualche summa dovutagli dal suo commettente
o rispondente di qua, son costretto di ricorrere
alla sua amorevolissima bontà, acciochè io non
tenga detto benefìcio nè in parte, nè in tutto
senon dal suo favore ; priegando
humilissimamente Sua Signoria Illma et Rma di
commandar in Roma al suo agente che glie
mandi dette speditioni, pigliandole dal
Favretto. Et se bisognaranno dinari, saranno
subito sborsati in Turino dal sig'nor Luciano
Grilli734 dove piacerà a Sua Signoria Illma et
Ayant été averti de Rome que les
expéditions de la cure du Petit-Bornand en ma
faveur sont déjà depuis longtemps entre les
mains de M. Favret, j'ai envoyé l'argent
nécessaire par deux voies, sans que malgré cela
j'aie pu jusqu'ici recevoir ces expéditions, ni un
seul mot dudit Favret. En attendant, le frère du
curé défunt jouit du bénéfice, plaidant pour ne
pas l'abandonner jusqu'à ce que les expéditions
soient arrivées. Il administre même les
Sacrements, [328] nonobstant la défense très
expresse du Révérendissime Ordinaire, ce qui
ne se fait pas sans scandale. Craignant que M.
Favret ne retienne ces provisions pour quelque
somme que lui doit son commettant ou
correspondant d'ici, je suis contraint de
recourir à votre très bien-veillante bonté, afin
que, soit en partie, soit en entier, je ne tienne
ce bénéfice que de la faveur de Votre
Seigneurie Illustrissime et Révérendissime. Je
vous prie très humblement de commander à
votre agent à Rome, de retirer lesdites
expéditions des mains de Favret et de vous les
envoyer. Et s'il faut de l'argent, il sera aussitôt
délivré à Turin par M. Lucien Gilli là où il
733 Jacques Bally, curé du Petit-Bornand, était décédé le 26 mai 1597, après avoir, disait-on, résigné ce bénéfice à son
frère, Nicolas Bally, qui desservait la paroisse en qualité de vicaire ; mais toutes les conditions exigées par le droit
canon n'ayant pas été remplies, cette résignation était nulle, et la cure devait se donner au concours, selon les
prescriptions du Concile de Trente. Ce concours eut lieu le 30 juin : en voyant paraître le Prévôt tous ses compétiteurs
s'éclipsèrent, et il fut nommé par l'Evêque curé du Petit-Bornand, moyennant l'assentiment du Pape. Nicolas Bally,
faisant valoir la résignation de son frère, s'était pourvu en Cour de Rome, et avait obtenu (4 juillet 1597) une Bulle
qui lui attribuait le même bénéfice. Le 13 septembre suivant, le Saint obtint à son tour des Bulles d'institution, que
Bally traita de subreptices. Néanmoins, le 1 juillet 1598 M. de Chissé, vicaire général, alla au nom du Prévôt prendre
possession de la cure ; mais les portes de l'église lui furent fermées et il dut se retirer. Nous verrons plus loin la suite
de ce débat.
734 Lucien Gilli ou Gilio, marchand de soieries, était l'un des fournisseurs de la cour de Turin. (Archives de la
Chambre des Comptes du Piémont, Controrolo generale delle Finanze di Piemonte, vol. XI.)
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22.2 Page 212

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Rma di commandare. No vorrei dar queste
importunità a V. S. Illma, ma et la sua bontà et
la necessità me ne dà animo.
Speravo di inviarmi ben presto costì et
fare queste cose ; ma la peste travenuta in
Annessi doppo mia partenza, poichè
Monsignor Reverendissimo nostro non [329]
ha voluto uscirne735, mi fa gran dubio che non
potremo partire così presto, non havendo le
carte necessarie dalla banda di detto
Monsignore Reverendissimo. Ho nuova che
egli sta benissimo et allegramente, ma non
senza pericolo. Iddio ne sia protettore et
conservatore.
Per quanto vedo, non mancarà dalla
banda de' signori Cavaglieri che le cose del
Chiablais non vadano in rovina, poichè non
tengono conto di far pagar le pensioni
promesse, senza lequali non si può continuare
l' essercitio comminciato nelle tre parochie, et
molto manco augmentarlo. No si può dire le
grande (sic) dispositioni che sonno in quel
paese alla fede catholica, lequali sonno vane
per mancamento di essercitio, il quale no si
può fare senza persone, nè le persone ponno
inviarsi senza spesa et intrata. Ho le lettere
lequali Sua Altezza Serenissima inviava a Sua
Santità, nelle quali priegava la Santa Sede che
si degnasse restituir le parrochie di Chiablais,
cavandole delle mani profane ; ma per [330]
l'accidente della mia malatia sonno restate qui.
Se parerà a V. S. Illma et Rma di mandarle inanzi
ch'io faccia il viaggio, per tanto più accelerare
il negotio, il quale no si tarda una sola hora
senza perdita di moltissime anime, io subito
glie le mandarò.
Il R. P. Cherubino è qui con noi da duoi
giorni in qua, aspettando nuova del convento
di Annessi ; et ciò ha fatto vedere il progresso
della conferentia fra luy (sic) et Hermanno
Lignario, famoso lettore di theologia fra [gli]
uguonotti, con molto mio gusto. Ne mandarà la
relatione a V. S. Illma et Rma et il successo che
ne spera.
Fra tanto egli si dispone di far la
devotione delle Quarant' hore in Tonone con
quella maggior sollemnità che si potrà fare. Et
essendosene data la nuova nelli luoghi
circonvicini, da ogni banda si dispongono le
plaira à Votre Seigneurie l'ordonner. Je ne
voudrais pas vous occasionner cet embarras,
mais votre bonté et la nécessité m'en donnent
le courage.
J'espérais pouvoir aller bientôt moi-
même traiter ces affaires sur les lieux ; mais la
peste ayant éclaté à Annecy après mon départ,
[329] Mgr notre Révérendissime Evêque n'a
pas voulu en sortir ; ainsi je crains beaucoup
que nous ne puissions partir de sitôt, faute
d'obtenir de la part de Monseigneur les papiers
nécessaires. J'ai su qu'il se porte très bien, sans
éprouver aucune appréhension, mais non sans
courir quelque danger. Dieu soit son protecteur
et son conservateur !
A ce que je vois, rien ne manquera du
côté de MM. les Chevaliers pour ruiner les
affaires du Chablais, puisqu'ils ne se mettent
aucunement en peine de faire payer les
pensions promises, sans lesquelles on ne peut
continuer l'exercice du culte commencé dans
les trois paroisses, et bien moins encore
l'augmenter. Il ne se peut dire quelles
excellentes dispositions on trouve en ce pays
pour la foi catholique ; mais elles demeurent
infructueuses par le manque d'exercice du
culte, lequel ne peut être rétabli sans des
ecclésiastiques, et les ecclésiastiques ne
peuvent être envoyés sans faire des dépenses et
avoir besoin de revenus. J'ai les lettres que Son
Altesse Sérénissime adressait à Sa Sainteté
pour prier le Saint-Siège de daigner retirer les
paroisses du Chablais des mains profanes et les
remettre à la disposition de [330] l'Evêque ;
mais, par suite de ma maladie, elles sont
restées ici. Si Votre Seigneurie juge bon de les
envoyer avant que j'entreprenne le voyage [de
Rome], afin d'accélérer cette affaire, qui ne
peut être retardée d'une seule heure sans
compromettre le salut de beaucoup d'âmes, je
me ferai un devoir de les lui expédier aussitôt.
Le R. P. Chérubin est ici avec nous
depuis deux jours, attendant des nouvelles du
couvent d'Annecy ; ce qui, à mon grand
contentement , m'a donné lieu d'être renseigné
sur la marche de sa conférence avec Herman
Lignarius, fameux lecteur de théologie parmi
les huguenots. Il en enverra la relation à Votre
Seigneurie Illustrissime et Révérendissime, et
735 On voit dans le Registre des délibérations municipales d'Annecy que le Conseil de ville était à cette époque
contraint de tenir ses assemblées « dans l'enclos et murailles du prieuré du Saint-Sepulcre... à cause de la contagion
arrivée en cette dite ville des le 1er d'avril 1598. »
212/318

22.3 Page 213

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persone di concorrere a questa divotione, non
solo dalla banda catholica, come di Fribourgo,
de Sguisseri et del Valeise, ma anco dalla
banda hæretica, come del Bernese et
Genevrino ; il che ci fa una grandissima
speranza di molto frutto et grande confusione
per [i] ministri. Ma [331] saria molto a
proposito se Sua Beatudine per quel tempo
concedesse qualche gratia spirituale, oltra la
Indulgentia plenaria, come dell'assolutione de'
casi riservati ; chè in vero in quelle bande ne
sonno moltissimi che ne havranno portati li
diece et vinti anni nella conscientia, liquali in
questa occasione li deponeranno. Et perchè mi
pare che la facoltà di commettere huomini per
l'assolutione de l'hæresia, che era stata
communicata a Monsignor Reverendissimo,
no passa questo mese, saria sopra tutto bisogno
di haverla di nuovo.
Vado hoggi verso Tonone dove per un
poco son necessario, et pigliarò il numero de'
Catholici fattisi in questi tre anni passati, per
mandarne raguaglio a V. S. Illma, acciò con
questo mezzo si dia animo a Sua Santità di
farci quelle gratie che a queste imprese sonno
necessarie.
Non habbiamo quasi altro amico nella
corte senon Sua Altezza Serenissima, laquale
ci giova poco per mancamento di essecutione
de' suoi commandamenti. In vero egli è
zelantissimo, ma non può esser ubedito. Che se
fosse ubedito come vuole il dover, havressimo
avanzato assai più di quel che habbiamo, et
insieme no saria [332] bisogno di dar noia a V.
S. Illma circa le pensioni, perchè egli ha
commandato spesse volte che si pigliassero,
facendosi giustitia sopra la promessa fattaci da'
Cavaglieri. Ma gl' inferiori fanno poi tante
considerationi di non offendere questo et
quell'altro, che fra tanto si offende gravemente
il Signor.
Il R. P. Cherubino mi ha dato parola di
scriver a V. S. Illma circa moltissime cose
degnissime di esser considerate, delle quali
habbiam trattato insieme. V. S. Illma et Rma è il
nostro solo protettore et solatio in queste
occasioni, onde preghiamo continuamente Sua
divina Maestà per la sua salute et
conservatione. Et bascio humilissimamente le
sue reverendissime mani.
Di V. S. Illma et Rma,
Humilissimo et divotissimo servidore,
lui dira le résultat qu'il en espère.
Cependant, il se prépare à célébrer les
Quarante-Heures à Thonon avec la plus grande
solennité possible. La nouvelle s'en étant
répandue dans les environs, on se dispose de
tous côtés à venir assister à cette dévotion, non
seulement des régions catholiques, comme de
Fribourg, de Schwitz et du Valais ; mais aussi
des territoires hérétiques, comme de ceux de
Berne et de Genève, ce qui nous donne une très
grande espérance de recueillir beaucoup de
fruits, à la grande confusion des ministres. Il
serait très à propos que Sa Sainteté voulût bien
[331] pour la circonstance accorder, outre
l'indulgence plénière, quelque grâce
spirituelle, comme l'absolution des cas
réservés ; car en vérité, de ces côtés il y a
beaucoup de gens qui, en ayant sur la
conscience depuis dix et vingt ans, s'en
déchargeraient en cette occasion. Comme me
semble que la faculté communiquée à Mgr le
Révérendissime de déléguer des
ecclésiastiques pour l'absolution de l'hérésie
expire à la fin de ce mois, il serait surtout
urgent de la renouveler.
Je vais aujourd'hui à Thonon où,
pendant quelque temps, je suis nécessaire. J'y
dresserai la liste des personnes rentrées dans le
sein de l'Eglise durant ces trois dernières
années, pour en informer Votre Seigneurie,
afin que par ce moyen Sa Sainteté soit
encouragée à nous accorder les grâces qui sont
nécessaires à cette entreprise.
Nous n'avons presque pas d'autre ami à
la cour que Son Altesse Sérénissime, ce qui ne
nous sert pas beaucoup puisque ses ordres ne
s'exécutent pas. Le duc est très zélé, il est vrai,
mais ne peut se faire obéir. Si on lui obéissait
comme on le devrait, nous serions bien plus
avancés que nous ne le sommes et, de plus,
nous n'aurions pas [332] à causer tant d'ennui
à Votre Seigneurie au sujet des pensions. Il a
déjà commandé plusieurs fois de les saisir,
cette mesure étant justifiée par la promesse que
nous avons reçue des Chevaliers ; mais les
subordonnés font tant de considérations pour
ne pas offenser celui-ci et celui-là, qu'ils
finissent par offenser grièvement le Seigneur.
Le R. P. Chérubin m'a donné parole de
vous écrire touchant plusieurs choses très
dignes d'attention dont nous avons traité en
semble. Votre Seigneurie est notre seul
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22.4 Page 214

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FRANCO DE SALES, protecteur et consolateur en ces occasions ;
indegno Prævosto di Geneva. aussi prions-nous continuellement la divine
Di Sales, alli 10 di Aprile 98.
Majesté pour votre santé et conservation. C'est
All' Illmo et Revermo Sigr mio en baisant très humblement vos mains
osservandissimo, vénérées, que je suis,
Monsigr l'Arcivescoüo di Bari,
De Votre Seigneurie Illustrissime et
Nuntio Apostolico nel Stato di Savoya. Révérendissime,
Turino.
Le très humble et très dévoué serviteur,
Revu sur l'Autographe conserve à Rome,
FRANÇOIS DE SALES,
Archives du Vatican. [333]
indigne Prévôt de Genève.
De Sales, le 10 avril 1598. [333]
_____
CIX. Au même. Voyage du président Favre à Turin et à Ferrare.
Nouvelles poursuites au sujet de la cession des cures du
Chablais. Mesures à prendre pour assurer le triomphe du
catholicisme sur l'hérésie.
Sales, 18 mai 1598.
Illustrissimo et Reverendissimo Signor
Mon très honoré, Illustrissime et
mio osservandissimo,
Révérendissime Seigneur,
Andando costì et quindi in Ferrara il
signore Præsidente Fabro736, persona di pietà
et sufficientia singolarissima, et per dirla737 a
modo mio, phœnice della nostra Savoïa,
desideravo incredibilmente di far il viaggio
con esso lui,738 perchè essendo egli solo fra
laici consapevole di quanto si è fatto di qua et
si deve fare per la santa fede, haverebbe certo
dato un grande aiuto nel negocio che per
questo739 habbiam da far appresso Sua Santità.
[334] Ma Monsignor Rmo Vescovo non
havendo fatta la quarantena che si usa per il
contagio740, non ha volsuto far li scritti
necessarii al viaggio, nè addimandare741
licentia a, Sua Altezza per il passagio, per non
dar alcun sospetto nò a Sua Beatudine742, nè a
V. S. Illma.
Havendo adunque le lettere che Sua
M. le président Favre, personnage
d'une piété et d'un mérite singuliers, et, pour le
dire à ma façon, le phénix de notre Savoie, se
rend à Turin, puis à Ferrare. Je désirais
extrêmement entreprendre ce voyage avec lui,
parce qu'étant le seul laïque bien au courant de
ce qui s'est fait et de ce qui reste encore à faire
pour la sainte foi dans ces pays, il nous aurait
certainement été d'un grand secours dans les
affaires que nous devrons traiter à ce sujet
auprès de Sa Sainteté. [334] Mais Mgr notre
Révérendissime Evêque n'ayant pas terminé la
quarantaine usitée en temps de peste, n'a pas
voulu préparer les écritures nécessaires à ce
voyage, ni demander la permission de Son
Altesse pour le passage, afin de ne donner
aucune alarme au Saint-Père ni à Votre
Seigneurie Illustrissime.
736 Il était député par la duchesse de Nemours, Anne d'Este, pour faire valoir les droits de cette princesse sur la
succession d'Alphonse II, duc de Ferrare.
737 [Ces variantes sont tirées d'une minute autographe conservée à la Visitation d'Annecy.]
di dottrina et pietà singolarissima, et se io lo dico
738 con esso lui, sí per godere la sua suavissima presentia, che anco
739 santa fede, zelantissimo et prudentissimo, haverebbe grandemente aiutatici nella negociatione che
740 L'Evêque faisait quarantaine à Vignères, hameau de la commune d'Annecy-le-Vieux.
741 la quarantena, non ha volsuto scriver le cose necessarie per far la sua ubedientia, né domandare
742 non dar dal canto suo alcun sospetto né a S. Sta
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22.5 Page 215

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Altezza scrisse a Sua Santità et alli Signori
Cardinali, nelle quali prieghava
instantissimamente la Santa Sede di restituire
le cure delli balliaggi ad uso delli sacerdoti che
vi facciano il servitio santo, et non havendo
voluto esponerle al pericolo che sin adesso è
stato nelle strade743, massime credendo di
esserne latore di giorno in giorno : hora ch' io
vedo dette lettere invechiarsi, et che se la
provisione di Sua Santità circa detta
restitutione non viene inanzi la raccolta le cose
saranno ritardate sin all' altr' anno (et Dio [335]
solo sa se saremo vivi), per questo744 ho dato
dette lettere a questo mio signore Præsidente,
acciò le dia a V. S. Illma, protettrice di tutto
questo negocio, la quale accompagnandole di
una strettissima et caldissima
ricommandatione745, potrà farne latore l'istesso
signor Presidente, chè più fedele et zelante non
si può trovare746.
Che si (sic) con747 queste nuove di
pace748 si stabilisce da dovero l'essercitio
catholico in quelli balliagi, si farà presto un
effetto tale che ritardandosi poi non seguirà749.
Et per conto delle sei pensioni promesse l'anno
1596 dalli Cavaglieri, non si è dato ordine750 se
non per tre l' anno passato et questo per nulla.
È tempo horamai che da un canto sia sollecitata
Geneva al ricever per il manco l' Interim751 col
mezo di questa pace, et dall' altro [336] che752
si faciano intorno intorno opere pie in gran
quantità : riformatione di badie, prædicationi,
dispute, libretti et altre cose simili ; chè così
creparà la volpe nelle sua caverna.
Et fra l'altre cose necessarie, una è che
si habbia in Annessi un stampatore. Gl'
hæretici mandano fuora ogni hora libretti
pestilentissimi, et restano molte oprette
J'ai entre les mains les lettres que Son
Altesse a écrites à Sa Sainteté et à MM. les
Cardinaux, pour prier instamment le Saint-
Siège de rendre la jouissance des cures des
bailliages aux prêtres qui doivent y faire le
service divin. Je n'ai pas voulu les exposer au
danger qui jusqu'ici a été sur les routes,
d'autant plus que je croyais de jour en jour
pouvoir en être le porteur. Mais maintenant je
vois que ces lettres vieillissent ; en outre, si le
décret de Sa Sainteté touchant la restitution des
bénéfices ne nous parvient pas avant la récolte,
cette [335] affaire sera retardée jusqu'à l'année
prochaine, et Dieu seul sait si nous serons en
vie ! Pour toutes ces raisons, j'ai donné lesdites
lettres à M. le Président afin qu'il les remette à
Votre Seigneurie, protectrice de l'entreprise.
Vous pourrez ensuite, les accompagnant d'une
très pressante et très chaude recommandation,
en rendre porteur le même Président ; car l'on
ne saurait trouver quelqu'un de plus fidèle et de
plus zélé.
Si à la faveur de la paix qui nous est
annoncée, l'exercice du culte catholique est
rétabli définitivement dans ces bailliages, on
obtiendra bientôt un résultat que tout retard
pourrait compromettre. Quant au payement
des six pensions promises en 1596 par les
Chevaliers, aucun ordre n'a été donné, sinon
l'année dernière pour trois ; et cette année, pour
aucune. Il est temps désormais de presser d'un
côté Genève à recevoir au moins l'Intérim,
grâce à cette [336] paix, et de l'autre, de faire
aux alentours de cette ville des œuvres pies en
grand nombre : réforme d'abbayes,
prédications, disputes, publication d'opuscules
et choses semblables ; car ainsi le renard
crèvera dans sa tanière.
743 Havendo adunque riserbato le lettre che S. A. scrisse a S. Sta, alli Illmi Cardinali et a V. S. Illma et Rma sopra il
desiderio buono che ella tiene che si restituiscano le cure delli balliaggi ad uso de gli ecclesiastici, accio si convertano
l'anime dall' hæresia, et non havendo mai havuto l'ardire di esponerle al pericolo delle strade fra tante difficolta che
sin adesso vi sonno state
744 in giorno, (p. 335) vedo che essendo tanto vicina la raccolta, se la provisione di S. Sta non ci vien presto, si
perdera questo anno, non senza grandissimo danno dell'anime. Onde
745 a V. S. Illma, laquale accompagnandole di una sua stretta raccomandatione a S. Sta
746 chè più zelante [né capace, pio,] non si puo ritruovar.
747 Questa é vera verità, che se con
748 On sait que, par la médiation du Saint-Siège, un traité de paix venait d'être conclu à Vervins, entre la France,
l'Espagne et la Savoie.
749 si faranno ben presto effetti che ritardandosi poi alquanto non si potranno cavare.
750 l’anno 1596, sino adesso non si é dato ordine da Cavaglieri
751 Vide supra, p. 277.
752 E tempo (p. 336) veramente horamai che da un canto si solleciti Geneva a ricever almanco l' Interim col mezzo
di questa pace fra li Regi, et che dall'altra banda
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22.6 Page 216

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catholiche753 nelle mani de gl'authori per non
Entre autres, il faudrait avoir un
poterle sicuramente inviare in Lione et non imprimeur à Annecy. Les hérétiques publient à
haver commodità di stampatore.754 Se dalle chaque instant des livres très pernicieux, tandis
badie et altri maggiori beneficii della diocæsi que plusieurs ouvrages catholiques demeurent
si cavasse un certo che per anno, sino alla entre les mains de leurs autcurs parce qu'on ne
Mimma di scudi cento, non saria cosa grave ad peut les envoyer sûrement à Lyon, et qu'ils
alcuno et saria una sufficiente provisione per n'ont pas d'imprimeur à leur disposition. Si l'on
un stampatore.755
prélevait sur les abbayes et autres bénéfices les
Credo che ben presto passa il tempo plus considérables du diocèse une certaine
prefisso alle facoltà concesse a Monsignor somme chaque année jusqu'à la concurrence de
Reverendissimo circa [337] l'assolutione de cent écus, cela ne chargerait personne et
gl'hæretici. È necessario primo modo che non suffirait à l'entretien d'un imprimeur.
ci manchino, perchè ogni hora cie n'è bisogno
Je crois que la durée des pouvoirs
in questi paesi. Già tre volte ho inviato queste accordés à Mgr le Révérendissime touchant
altre lettere, le qual adesso io glie mando, et l'absolution des hérétiques est près d'expirer.
non han potuto passare.
Ces pouvoirs [337] sont pour nous de première
Mi perdoni per bontà sua V. S. Illma et nécessité, car à toute heure on a besoin d'en
Rma se io glie sono importuno ; et rimettendomi user dans ces pays. J'ai déjà par trois fois
a quanto potrà cognoscere di queste et simili envoyé les autres lettres ci-jointes, mais elles
altre cose dal Signor latore, priegho Iddio n'ont pu passer.
ognipotente che756 la conservi fœlice et
Que votre bonté daigne me pardonner
contenta moltissimi anni ad utile di santa de lui être si importun. Je m'en remets au
Chiesa, et glie bascio humilissimamente le porteur des présentes pour vous donner une
mani reverendissime.
plus grande connaissance des affaires dont
Di V. S. Illma et Rma,
elles traitent et d'autres semblables ; et priant
Divotissimo servidore, le Dieu tout-puissant de vous conserver
FRANCO DE SALES, heureux et content de très longues années pour
Prævosto di Geneva. l'utilité de la sainte Eglise, je baise très
Di Sales, alli 18 di Magio, 98.
humblement vos mains vénérées.
All' Illmo et Rmo Sigre mio osservandissimo,
De Votre Seigneurie Illustrissime et
Monsigre l'Arcivescovo di Bari, Révérendissime,
Nuntio Apostolico appresso S. A. S.
Le très dévoué serviteur,
Turino.
FRANÇOIS DE SALES,
Prévôt de Genève.
Revu sur l'Autographe conservé à Rome,
De Sales, le 18 mai 1598. [338]
Archives du Vatican. [338]
_____
753 che si possa havere un stampatore qui in Annessi, il quale sia diligente et zelante, perche questi hæretici mandano
fuora ogni hora libretti pestilenti, et non se gli fa risposta per mancamento di stampa. So certo che restano gia alquante
oprette
754 in Lione lequali se fossero divulgate, farebbono un buon frutto. Hora
755 cento, per darli di provisione ad un stampatore, non saria cosa grave a veruno et bastaria a fare un grande effetto.
[L'avant-dernier alinea du texte ne se trouve pas dans la minute.]
756 potrà dirne di queste et simili cose il Sigr latore, priegho il Sigr Iddio
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22.7 Page 217

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CX. Au même. Espérance d'obtenir, moyennant la médiation du
roi de France, le libre exercice du culte catholique à Genève.
Sales, 13 juin 1598.
Illustrissimo et Reverendissimo
Mon très honoré, Illustrissime et
Signore mio osservandissimo,
Révérendissime Seigneur,
Fra gl' infiniti beni spirituali che da
questa benedetta pace757 sperano molti servi
d'Iddio, uno è ch'il Ré di Francia, invitato dalla
Santa Sede Apostolica, procuri vivamente che
la città di Geneva apra le sue porte a l'
essercitio catholico coll' Interim758, acciò che
in una tanta et tanto desiderata pace, sia fatto
luogho al Signore et Prencipe di pace759 Et
questo sarà tagliar il calvinismo nella radice.
So che Sua Altezza, dal canto suo, ne farà ogni
instantia possibile, come in opra di importanza
incredibile. Il R. P. Cherubino ha sopra di
questo molti buoni et particolari a visi, et son
certo che [339] ne darà raguaglio a V. S. Illma
et Rma 760, la quale per tanto io supplico di
haverli in grande consideratione.
A me, il quale in tale occurrentie non
hó altro valore se non nelli sospiri et desiderii,
basta di aprirne il cuore inanzi di V. S. Illma ; et
mentre sto aspettando quel giorno nel quale io
possa farglie in præsentia la debita riverentia,
glie bascio humilissimamente le mani
reverendissime, prieghando il Signore che la
conservi moltissimi anni a servitio dell' honor
suo divino.
Di V. S. Illma et Rma,
Humilissimo et divotissimo servitore.
FRANCO DE SALES,
Prævosto di Geneva.
Di Sales, alli 13 di Giugnio 1598.
All' Illmo et Rmo Sigre mio osservandissimo,
Monsigre l'Arcivescovo di Bari,
Nuntio Apostolico appresso S. A. S.
Turino.
Entre les incalculables avantages
spirituels que plusieurs serviteurs de Dieu
espèrent de cette bénite paix, ils se promettent
que le roi de France, sur l'invitation du Saint-
Siège
Apostolique,
s'emploiera
vigoureusement pour obtenir que la ville de
Genève ouvre ses portes à l'exercice du culte
catholique au moyen de l'Intérim, afin que le
Seigneur et Prince de paix ait sa place dans une
pacification si importante et tant désirée. Ce
serait couper le calvinisme par la racine. Je sais
que, de son côté, Son Altesse fera toute sorte
d'instances, comme pour une œuvre d'une
importance incroyable. Le R. P. Chérubin a
plusieurs vues spéciales et bonnes sur ce sujet
; je suis [339] sûr qu'il les communiquera à
Votre Seigneurie Illustrissime et
Reverendissime, partant je la supplie de les
prendre en grande considération.
Pour moi, qui n'ai en telles rencontres
d'autre pouvoir que celui des soupirs et des
désirs, il me suffit d'ouvrir mon cœur à Votre
Seigneurie. En attendant le jour où je pourrai
la voir et lui offrir les hommages qui lui sont
dus, je baise très humblement ses mains
vénérées, priant le Seigneur de la conserver de
très longues années pour le service de sa divine
gloire.
De Votre Seigneurie Illustrissime et
Révérendissime,
Le très humble et très dévoué serviteur,
FRANÇOIS DE SALES,
Prévôt de Genève.
De Sales, le 13 juin 1598. [340]
Revu sur l'Autographe conserve à Rome,
Archives du Vatican. [340]
757 Cette lettre fut écrite le jour même où la paix de Vervins était promulguée à Annecy.
758 Le 17 juin, Mgr de Granier adressait dans le même sens une supplique au Pape Clément VIII et une lettre au
Nonce. Au sujet de l'Intérim, voir note (531), p. 277.
759 Is., IX, 6.
760 Le P. Chérubin se proposait de faire un voyage à Rome, ainsi qu'il le dit dans une lettre adressée au Nonce de
Turin le 25 juin de cette même année.
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22.8 Page 218

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CXI. A Monsieur Amédée de Chevron Seigneur de Villette761
(Inédite). Témoignages de respect et de reconnaissance.
Annonce de sa visite.
Sales, 7 juillet 1598.
Monsieur,
Je me garderay bien, Dieu aydant, d'attribuer a mes merites, qui sont ou petitz ou nulz, la
faveur avec laquelle il vous plait recueillir mes importunités. Je la dois du tout a vostre bonté,
laquelle j'honnore d'autant plus que je me vois tous les jours obliger davantage a elle par tant
d'effetz, qui me fait extremement desirer d'estre tel que je devrois estre pour estre digne sujet de
ses bienfaitz ; la ou je n'av rien de sortable a ce bon heur qu'une tres humble affection d'estre et
vouloir estre, et confesser devoir estre vostre tres redevable.
Je desirois bien fort de vous baiser les mains en præsence, mais je suis lié sur le banq pour
ceste semaine. Que si je puys, a la prochaine je me rendray par dela, et sans honte ni autre
apprehension je prendray logis chez vous, comme vous me commandes ; car puysque je suis des-
ja tant insolvable des obligations que je vous ay, il ne m'importe meshuy de rien de l'estre tous-
jours [341] plus ; et quoy qu'on me juge importun, je ne lairray d'estre bien glorieux si par la je me
puys faire connoistre tel que je suis, Monsieur, non seulement vostre tres et tres obligé, mais
encores
Votre domestique serviteur et neveu,
FRANÇS DE SALES,
A Sales, ou mes pere et mere et toutes leurs gens vous saluent tres humblement.
Le 7 jullet 98.
Revu sur l'Autographe conservé à la Visitation de Milan. [342]
_____
761 Amédée III de Chevron, seigneur de Villette, Giez, Pontvoyre et autres lieux, conseiller et maître d'hôtel,
chambellan et majordome de Son Altesse, fut ambassadeur en Suisse, surintendant général des mines de Savoie, chef
des troupes en Tarentaise. C'est en sa faveur que la terre de Villette fut érigée en baronnie, le 1er avril 1604. Il avait
épousé Marguerite de Pingon, dame d'honneur de Marguerite de France, mère du duc Charles-Emmanuel Ier. Ce
seigneur était cousin germain de Françoise de Sionnaz, mère de saint François de Sales ; il fit son testament le 15
juillet 1621 et mourut peu de jours après.
218/318

22.9 Page 219

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CXII. A Monsieur Claude Marin, procureur fiscal en Chablais.
Préparatifs à faire en vue des Quarante-Heures qui doivent se
célébrer à Thonon. Indications pour le logement de l'Evêque.
Audience du duc de Savoie. Destination de deux
ecclésiastiques.
Monsieur762,
Sales, 6 août 1598.
Puisque Son Altesse veut que les Quarente Heures se facent le quinziesme de ce moys, et
qu'elle veut qu'elles se facent le plus solemnellement que l'on pourra, baillant partant esperance de
vouloir rembourser les frais qui s'y feront, ne voyant point d'argent prest, il m'a semblé que on ne
pouvoit point avoir de meilleur moyen pour loger les musiciens et autres semblables personnes
necessaires et les nourrir, que de faire que [342] les fermiers qui sont reliquateurs de plus de mille
florins vaillant pour les pensions de ceste annee, respondent vers quelqu'un de la despence que
lesditz musiciens pourront faire, a rate dequoy je les dechargeray de ladite dette. Et a ces fins je
fais trois mandatz : un a Meynet, l'autre a Vernaz et l'autre a Castellani763, affin quilz respondent
vers quelqu'un [de] la despence qui se fera par lesditz musiciens, chacun jusques a la somme de
cent florins. Restera qu'il vous plaise d'essaier si l'on pourra trouver qui veuille fournir aux frais a
ceste condition, en advançant, et je tiendrois main a les faire bien paier dans le terme quilz
prendroient ; et si vous le trouvies, il faudroit faire marcher (sic) a combien par jour ilz
entretiendroient la personne honnestement et sans superfluité.
Item, je vous prie de trouver un logis parmi les Catholiques pour Monseigneur l'Evesque.
On paiera le louage a tant par jour, en fournissant seulement le bois, linge et vaiselle, car quant au
reste, Monseigneur le Reverendissime fera sa despence luy mesme ; mais il faut que ce soit chez
un Catholique et qu'on aye pour le moins trois chambres. Si ce n'estoit qu'il m'a tant recommandé
que son hoste fut catholique, j'eusse nommé monsieur d'Alemand764 ; touttefois, au pis aller, encor
ne seroit il pas mal la, si autrement ne se peut faire. Jamais Quarente [343] Heures n'eurent tant de
difficultés que celles cy, qui m'en fait tant mieux esperer.
J'ay esté beaucoup deplaisant de ne m'estre pas trouvé icy quand vous y aves esté, pour
jouir de vostre conversation et apprendre a sohait de voz nouvelles. Son Altesse, quoy que tres
empeché, me bailla une audience de quattre motz lundi765, et entre autres choses me promit de
m'en bailler une plus grande aux Quarente Heures de Thonon ou elle esperoit se trouver. Dieu le
voulust, mais je crains fort quil n'en sera rien.
Je vous salue de tout mon cœur avec toutte vostre compagnie, et suis,
762 Cette lettre est écrite par Georges Rolland, sauf la signature, l'adresse et une partie du post-scriptum, qui sont de
la main du Saint (voir ci-après, note (767), p. 344).
763 Il est difficile d'identifier ces personnages qui portent des noms très répandus en Chablais. Plusieurs Meynet,
bourgeois de Thonon, figurent sulla liste des protestants convertis par notre Saint et ses collaborateurs. Le procès-
verbal de l'établissement des greniers à sel à Thonon (mars 1597) mentionne « Thomas et François Meynet » parmi
les marchands qui avaient précédemment débité du sel dans cette ville.
Dans un accord passé en 1602 entre les seigneurs de Fribourg et les habitants de Thonon, on trouve parmi
les signataires, bourgeois de cette dernière ville, Maurice et Pierre Vernaz. Celui-ci paraît n'être pas différent d'un
Pierre Vernaz qui est mentionné dans le procès-verbal précité comme étant curial de Thonon. (Voir ci-devant, note
(249), p. 103.)
764 La famille des nobles du Nant d'Alleman était représentée en Chablais à cette époque par Georgios, coseigneur
d'Alleman, seigneur de la Place, de Thollon, etc., et par ses deux neveux : François, seigneur de Saint-Paul,
possesseur du château d'Alleman, et un autre Georgios, seigneur de Grilly, d'Alleman, etc. Il n'est pas possible de
préciser quel est de ces trois personnages celui qui est désigné dans cette lettre.
765 Ce jour-là, 3 août, le duc se trouvait à Chambéry.
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22.10 Page 220

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Monsieur,
Vostre plus humble serviteur,
FRANÇS DE SALES.
Je baise tres humblement les mains a madame ma tante766, a madamoyselle du Maney et a
toutte la conversation,767 a laquelle je me rendray dans quattre ou cinq jours.
A Sales, le 6 d'aust 98.
Il m'est advis quil seroit bon que monsieur Chevallier768, qui a commencé a Bellevaux,
poursuivit, et que [344] monsieur Clerici769 fut curé a Thonon ou il feroit rage a bien tenir l'eglise
et instruire la jeunesse ; mais il faudroit que le P. Chtrubin fit un peu de disposition a cela tout
bellement.
Encor aurons nous besoin d'un logis pour sept ou huit personnes ecclesiastiques qui iront
la, en payant comme dessus ; sinon que celuy qui fournira pour les musiciens fournit encor a cela,
comm'il se pourroit bien faire.
A Monsieur
Monsieur Marin,
Procureur fiscal en Chablaix.
Revu sur l'original conservé à la Visitation de Turin.
_____
766 Le Saint avait coutume de donner ce titre à Jeanne du Maney, veuve de François du Foug, qui l'avait accueilli et
assisté avec un grand dévouement dès son arrivée en Chablais. (Voir ci-devant, note (268), p. 114.)
Quant à « madamoyselle du Maney, » ce pouvait être Claudine, fille de Marius du Maney et de Jeanne-Marie
du Foug, parente de la précédente.
767 Ce qui suit, moins la date, est autographe.
768 Claude Gaspard Chevallier, natif d'Annecy, était un prêtre de mérite que « le Serviteur de Dieu cherissoit fort. »
Cette affection remontait à l'époque où M. Chevallier, récemment sorti de l'Université de Louvain, choisit le Prévôt
pour présider la thèse publique de théologie qu'il soutint dans sa ville natale. Pendant cinq années, il desservit la
paroisse de Bellevaux, sans laisser de suppléer le Saint chaque fois que celui-ci devait s'éloigner de Thonon. Le 21
août 1601, cet ecclésiastique fut pourvu de la cure de Fessy-Lully, puis il devint théologal de Belley et finit par entrer
dans l'Ordre des Récollets où il est connu sous le nom de P. Antoine. On a de lui un court mais intéressant Mémoire
encore inédit, sur la vie et les vertus de saint François de Sales.
769 Nicolas Clerc ou Clerici, qui se trouvait à Padoue lorsque saint François de Sales y reçut le bonnet de docteur, fut
curé de Chanay, puis de Saint-Félix (1587), et protonotaire apostolique. Il accompagna le P. Chérubin dans le voyage
que ce religieux fit à Rome (1599) pour traiter des intérêts de la Sainte-Maison. M. Clerici mourut en septembre 1617.
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23 Pages 221-230

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23.1 Page 221

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CXIII. A Monsieur Sébastien Werro, Administrateur
Apostolique du Diocèse de Lausanne, prévôt de Saint-Nicolas
de Fribourg770. Les exercices des Quarante-Heures à Thonon sont
fixés aux 23 et 24 août.
Thonon, 12 août 1598.
Monsieur,
La devotion des Quarante Heures a esté retardee jusques au Dimanche et jour de saint
Barthelemi, 23 et [345] 24 de ce moys. C'est pour un beaucoup plus grand bien. Je vous ay bien
voulu faire ce mot d'advis, affin que si quelcun de dela desiroit honnorer cest'action de pieté de sa
præsence, il ne s'acheminast pas en vain ceste semayne. Mais aussi je voudrois que personne ne
perdit courage de venir pour ceste retardation, puisque la tardiveté sera recompensee d'une bien
grande consolation si Dieu nous fait les graces que nous esperons.
Je bayse tres humblement vos mains sacrees, et me dis a jamais,
Monsieur,
Vostre plus humble confrere et serviteur,
FRANÇS DE SALES,
Prævost de St Pierre de Geneve.
Le R. P. Cherubin et toute la brigade des serviteurs de Dieu que nous avons icy vous salue
tres affectionnement.
A Thonon, le 12 aoust 1598.
A Monsieur le Prevost de St Nicolas de Fribourg.
Revu sur l'Autographe appartenant à M. le docteur Jean Schaller, à Fribourg. [346]
_____
770 Sébastien Werro, né à Fribourg en Suisse (1555), avait suivi les cours de l'Université de Fribourg en Brisgau, où il
obtint le grade de maître ès-arts (1574). Etant entré dans les Ordres, il se vit, peu après son retour dans sa ville natale,
nommé chanoine, puis chantre du Chapitre de Saint-Nicolas, et fut pendant dix ans (1580-1590) curé de Fribourg.
A la dignité de Prévôt de la Collégiale (1596) il joignit, après la mort de l'Evêque de Lausanne, Antoine de
Gorrevod (1598), celle d'administrateur apostolique du diocèse, puis de vicaire général du nouvel Evêque, Jean Doroz.
L'étude et la prière remplirent les treize dernières années de sa vie, qui se termina en novembre 1614. Il fut inhumé
auprès du bienheureux Canisius, son ami, qu'il avait lui-même assisté à son lit de mort, et dont il avait composé
l'épitaphe et prononcé l'oraison funèbre.
Sébastien Werro a laissé plusieurs ouvrages estimés, entre autres la Chronica Ecclesiæ et Monarchiarum a
condito mundo (1599), et un traité sur le Cantique des Cantiques, intitulé De Philotheïa, qui parut la même année
(1609) que l'Introduction à la Vie devote. (Notice sur la Vie et les Œuvres de Sébastien Werro. Fribourg, 1841.)
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23.2 Page 222

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CXIV. A don Juan de Mendoça, commandant des troupes
espagnoles771 (Minute). Supplications collectives des
missionnaires du Chablais pour obtenir que les troupes
espagnoles ne traversent pas cette province.
Thonon, 16 août 1598.
Eccellentissimo
osservandissimo,
Signor
Excellentissime et très honoré
Seigneur,
Siamo in procinto di celebrar la oratione delle
Quarant'hore in questa terra Domenica, 23 di
questo mese, secondo il beneplacito di Sua
Santità et di Sua Altezza, havendo procurata la
præparatione necessaria a cotesta impresa non
senza grandissima spesa, parte fatta dalla
limosina concessa dalla Santa Sede, parte di
quella di Sua Altezza772. Et si inviaranno
questa settimana moltissimi popoli, sì dalla
banda de' Valesani che di quella [347] di
Fribourgo, et da ogni intorno ancora, per venir
a questa solemnità, laquale si è præparata per
la conversione di questa gente hæretica ; et se
ne spera un frutto grandissimo a gloria d'Iddio
et salute dell'anime.
Hora ci vien detto che Vostra
Eccellenza, con le sue forze, era per pigliar la
strada del suo ritorno costì773 ; il che se facesse,
è cosa certissima che detta celebratione delle
40 hore non potrà farsi per nessun conto,
poichè gl'habitatori, carghi de soldati, non
potran assistere ; anzi, per quanto si risolvono,
lasciaranno le case vode et passaranno il lagho,
et li forestieri non verranno. Sì che questa
divotione, præparata con tante spese et fatighe,
con tanta speranza di buon frutto, con
particolar licentia di Sua Santità et di Sua
Altezza et con774 tanta fama appresso li nemici
della santa fede, si resolverà in fumo ; non
senza cattivissimo essempio et grandissimo
Nous sommes sur le point de célébrer
Dimanche, 23 de ce mois, les prières des
Quarante-Heures en cette ville, avec
l'agrément de Sa Sainteté et de Son Altesse.
Les préparatifs nécessaires à cette solennité
n'ont pas été faits sans de grandes dépenses,
couvertes en partie par les aumônes du Saint-
Siège, en partie par celles de Son Altesse. Des
multitudes considérables, venues soit du côté
du Valais, soit du [347] côté de Fribourg,
comme aussi de tous les environs, se mettront
en route cette semaine afin d'assister à une fête
qui a été préparée pour la conversion de ces
hérétiques. On en espère un très grand fruit, à
la gloire de Dieu et au salut des âmes.
Or, nous apprenons que Votre
Excellence se dispose à prendre ce chemin
pour s'en retourner avec ses troupes. S'il en est
ainsi, très certainement la célébration des
Quarante-Heures ne pourra aucunement se
faire, car les habitants, chargés de soldats, ne
sauront y assister ; au contraire, comme ils l'ont
déjà résolu, ils laisseront les maisons vides et
passeront de l'autre côté du lac. Quant aux
étrangers, ils ne viendront pas. Ainsi cette
dévotion, préparée avec tant de frais et de
fatigues, tant d'espoir de succès, avec une
spéciale autorisation de Sa Sainteté et de Son
Altesse et un si grand retentissement parmi les
ennemis de notre sainte foi, s'en ira en fumée.
771 Don Juan appartenait à la famille Hurtado de Mendoça, l'une des plus illustres de l'Espagne. Placé par son souverain
à la tête d'un corps d'armée milanais mis au service de la Savoie, il fit preuve de grande bravoure, et fut créé par le
duc, comte de Saint-Germain. Néanmoins il est surtout connu sous le titre de marquis de Hynojosa. Don Juan, rappelé
à Milan, succéda plus tard (1612) à son oncle maternel, Juan Fernandez de Velasco, le fameux connétable de Castille,
dans la charge de gouverneur de cette ville. Bon et conciliant, il s'acquit l'affection du peuple et l'estime de tous. C'est
lui qui fit une réception solennelle à saint François de Sales, lorsqu'en 1613 il se rendit en pèlerinage au tombeau de
saint Charles. Trois ans plus tard, le gouverneur fut disgrâcié.
772 di Sua Altezza [et altri.]
773 La paix de Vervins permettait au duc de Savoie de congédier les troupes milanaises qui étaient à son service,
lesquelles étaient alors campées à Bonne.
774 con [tanto rumore...]
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23.3 Page 223

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scandalo [348] et alli Catholici et agli hæretici,
et perdita di una occasione, quale forse non ci
ritornarà mai nelle mani, de fruttificar fra
questa gente, con un disgusto grandissimo di
Sua Beatitudine et Monsignor Nuntio.
Per il che supplichiamo con ogni
humiltà possibile Vostra Eccellenza, et la
scongiuriamo per le viscere di Christo775 et per
quanto sangue ha sparso per le anime, la cui
salute procuriamo col mezzo di queste
divotioni, di degnarsi di pigliar altra strada per
il suo viaggio et lasciar questa libera al
Salvatore ; il che se si degnarà di fare, sia poi
certa ch'Iddio benedetto l'haverà per gran
servitio de sua divina Majestà et ne terrà buon
conto nel giorno del giuditio. Faccia adunque
Vostra Eccellenza776, da quel valoroso et
zelante animo ch' Ella777 tiene, questo servitio
all'honore d'Iddio. Diremo bene ancora che
non sappiamo chi l'habbia avvisata di questa
strada, ma che v' è un passo appresso il lagho,
fra Evian et San Mauritio, il più horribile et
pericoloso, in questo tempo nel quale le acque
di detto lagho crescono, che si possa
imaginare. [349] Confidatici dunque
nella pietà, bontà et zelo di Sua Eccellentia,
glie mandiamo questo nostro compagno et
fratello sacerdote, il qual anco esso con parole
potrà darglie avviso di quanta importantia saria
il scandalo che verrebbe dalla cessatione della
solemnità præparata. Et fra tanto staremo certi
che, per honor d'Iddio et della Corte cæleste,
Vostra Eccelentia concederà quanto
addimandiamo con tanto ardore et humiltà che
maggior non si può truovare, restando in
seterno, sì per li suoi meriti, sì per questo
beneficio et atto di zelo tanto segnalato,
Di Vostra Eccellentia,
Humilissimi et divotissimi servidori in
Christo.
Revu sur l'Autographe conserve à la
Visitation de Turin. [350]
Cela n'arrivera pas sans produire un très
mauvais exemple et même sans occasionner un
très grand scandale parmi les Catholiques et les
[348] hérétiques. Ce sera aussi, au très grand
regret de Sa Sainteté et de Mgr le Nonce, perdre
une occasion qui ne se retrouvera peut-être
jamais de recueillir quelques fruits parmi ces
gens.
C'est pourquoi, nous supplions avec
toute l'humilité possible Votre Excellence, et
nous la conjurons par les entrailles de Jésus-
Christ, par tout le sang qu'il a répandu pour ces
âmes dont nous tâchons de procurer le salut au
moyen de ces exercices, de daigner prendre un
autre chemin pour son voyage et de laisser
celui-ci libre au Sauveur. Soyez du reste assuré
que, s'il vous plaît en agir ainsi, Dieu le
regardera comme un grand service rendu à sa
divine Majesté et vous en tiendra bon compte
au jour du jugement. Que Votre Excellence,
avec ce courage vaillant et zélé dont Elle est
douée,
rende donc ce service à l'honneur de Dieu.
Nous dirons de plus que nous ne savons qui a
pu lui indiquer cette route ; car il y a près du
lac, entre Evian et Saint-Maurice, un passage
le plus horrible et le plus dangereux qu'on
puisse imaginer, en cette saison de la crue des
eaux. [349]
Nous confiant donc dans la piété, la
bonté et le zèle de Son Excellence, nous lui
envoyons ce prêtre, notre compagnon et frère,
qui pourra aussi lui exposer verbalement de
quelle conséquence serait le scandale qui
résulterait de la suppression de la solennité
préparée. En attendant, nous nous tiendrons
assurés que, pour l'honneur de Dieu et de la
Cour céleste, Votre Excellence nous accordera
ce que nous lui demandons avec une ardeur et
une humilité qui n'ont point d'égales. Nous
demeurerons à jamais, soit en considération de
son mérite, soit pour ce bienfait et cet acte si
éclatant de zèle,
De Votre Excellence,
Les très humbles et très dévoués
serviteurs en Jésus-Christ. [350]
775 Philip., I, 8.
776 Vostra Eccellentia[questo favore...]
777 ch'Ella [possede]
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23.4 Page 224

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CXV. A Monsieur Sébastien Werro, Administrateur
Apostolique du Diocèse de Lausanne, prévôt de Saint-Nicolas
de Fribourg. Remerciements. Retard des Quarante-Heures
projetées à Thonon.
Thonon, 20 août 1598.
Reverende ac plurimum in Christo
Révérendissime et très respectable
colende Domine,
Seigneur en Jésus-Christ,
Accepi litteras, quas ad me postridie
Assumptionis Beatæ Virginis dedisti,
incredibili cum animi mei voluptate, quod ex
iis non mediocrem in te erga Deum pietatem et
erga nos benevolentiam perspexerim, cum
hanc precum nostrarum destinatam
celebritatem, non tuis tantum sed etiam populi
cui præes precibus cumulasse significas, eam
utique, si res tulisset, tua præsentia
exornaturus. Facis sane tu quam liberaliter et
Christiane, et nos quam maximam habemus
gratiam.
Cæterum, pre rerum humanarum
inconstantia, hac ipsa hora qua scribo advolat
ad nos qui, gravissimis de [351] causis, in
festum Nativitatis Virginis, superiorum
voluntate, solemnem hanc quam instituebamus
præcationem referre jubet778. Intempestive
sane ; at obtemperandum, et quemadmodum
par est existimandum moram uberiores fructus
allaturam.
Qua de re tecum primis monitum volui,
ac tantam tibi salutem, tum meo tum P.
Cherubini nomine, dico quantam non possim
majorem.
Reverendæ tuæ Dominationis,
Humilis in Christo servus,
FRANCS DE SALES,
Ecclesiæ Gebennensis Præpositus.
Tononi, 20 Augusti 98.
Rdo in Christo Domino plurimum colendo,
D. Sebastiano Verronio,
Sacræ Theologiæ Doctori clarissimo,
et Friburgensis Ecclesiæ Proposito
mentissimo.
Revu sur l'Autographe conservé au Musée
cantonal de Fribourg. [352]
C'est avec une joie incroyable que j'ai
reçu la lettre que vous m'avez adressée le
lendemain de l'Assomption de la Bienheureuse
Vierge Marie ; j'y ai reconnu clairement
combien grande est votre piété envers Dieu et
votre bienveillance à notre égard. D'après vos
paroles, je vois que vous avez mis le comble à
la solennité projetée de nos fêtes, non
seulement par vos prières, mais encore par
celles du peuple qui vous est confié. Vous les
auriez même ornées de votre présence, si la
chose eût été possible. C'est agir assurément de
la façon la plus généreuse et la plus chrétienne,
et nous vous en rendons les plus vives actions
de grâces.
Du reste, telle est l'inconstance des
choses humaines, qu'à l'heure même où je vous
écris, survient un ordre de nos supérieurs qui,
pour les motifs les plus graves, nous enjoignent
de remettre à la fête de [351] la Nativité de la
Sainte Vierge, les supplications solennelles
que nous préparions. C'est certainement
fâcheux ; mais nous devons obéir et croire,
comme il convient, que ce retard apportera des
fruits plus abondants.
J'ai voulu que vous en fussiez averti
l'un des premiers, et, tant en mon nom qu'en
celui du P. Chérubin, je vous offre nos
meilleures salutations.
De Votre Révérence,
L'humble serviteur en Jésus-Christ,
FRANÇOIS DE SALES,
Prévôt de l'Eglise de Genève.
Au Révérend et très respectable en Notre-
Seigneur Jésus-Christ,
Seigneur Sébastien Werro,
très illustre docteur en théologie et très
méritant Prévôt
778 Le duc de Savoie, qui avait promis de rehausser par sa présence l'éclat des Quarante-Heures, se trouvant obligé
d'aller en Bresse, avait prié l'Evêque de retarder ces solennités jusqu'à ce qu'il pût se rendre à Thonon.
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23.5 Page 225

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de l'Eglise de Fribourg. [352]
CXVI. A Monsieur Amédée de Chevron Seigneur de Villette
(Inédite). Prière de se rendre en Chablais pour protéger les
habitants si les troupes espagnoles traversent la province.
Recommander au duc les intérêts de la mission et l'engager à
assister aux Quarante-Heures de Thonon.
Thonon, 23 août 1598.
Monsieur,
Ceste infinité de peyne que vous aves pour l'affaire de Dieu vous sera recompensee par
Celuy pour lhonneur duquel vous le faittes. Ces gens de Thonon desirent quil vous plaise leur faire
ce bien qu'au cas que le seigneur Dom Joan veullie passer icy resolument779, il vous plaise d'assister
a son passage, estimans que vostre præsence adoucira l'aigreur quilz en pourroyent sentir. Leur
religion ne merite pas ceste faveur ; mais qui sçait si Dieu se veut servir de vostre courtoisie pour
les faire penser a leur conscience ? Ilz promettent bien quilz n'en seront pas ingratz. Si donq cela
ne vous incommode pas beaucoup, je vous supplie tres humblement de le faire. Nous solliciterons
vivement l'exacteur pour la partie quil vous doit780, comme pour celuy auquel nous avons de si
grosses obligations.
Mais pour Dieu, escrivant a Son Altesse, touchés vivement un mot affin quil vienne a ces
40 [heures]. Sil nous baille moyen de loger honnestement des curés par tout ce balliage apres les
40 heures, tout est emporté pour la foy catholique. Il ne se fera jamais plus a propos, et sans
offencer personne, car cela viendra au desir de presque tous. Il ne coste rien a Son Altesse, car ces
benefices de ce pais ne peuvent avoir moindre emploite [353] que de demeurer aux Chevalliers de
Saint Lazare ; il sera bien employé qu'on les reduyse a leur premier usage en une si belle occasion.
Sa Sainteté approuvera tout indubitablement.
Je pensois partir passé demain, aller vers vous et a Sales ; mais j'attendray jusques a
mercredi, par ce que le P. Cherubin me vient de dire qu'a son advis il ne seroit que bon que vous
donnies un coup d'esperon jusques icy pour voir tant plus briefvement ouverture a vostre
payement. Que Son Altesse ne perde pas cest'occasion de reduire ses peuples en unité de foy ;
Nostre Seigneur mesprise ceux qui mesprisent le jour de sa visitation781.
Quand au bruit qui a couru que les Bernois avoyent des trouppes de reitres dela le lac, c'est
une bride a veau : est spaventa velliacho. Ilz ont bien fait leurs monstres de la milice ordinaire,
que je metz en mesme conte que les monstres du papegai de Neci782.
Or sus, Monsieur, je prie Dieu pour vostre santé, et suis irrevocablement
Vostre tres humble et tres asseuré serviteur et neveu,
779 Vide supra, p. 347.
780 Peut-être s'agit-il d'une pension qui, par patentes du 26 juillet 1598, devait être prélevée sur les « ... condempnations
et compositions des usures riere le Grand et Petit Bornand. » (Arch. de la Ch. des Comptes de Sav., Patenti, vol. 21.)
781 Is., X, 3 ; Lucæ, XIX, 44.
782 Par « monstre du papegai de Neci, » il faut entendre la parade que faisaient chaque année les chevaliers tireurs au
jour du tir à l'oiseau. Ces compagnies, qui existaient dans la ville de date immémoriale, avaient obtenu plusieurs
privilèges des ducs de Savoie. L'exercice du tir était une réjouissance publique, dans laquelle la religion avait une
large place. Des institutions semblables furent créées non seulement à Chambéry, mais encore dans la plupart des
villes de Savoie, telles que Thonon, La Roche, Cluses, Rumilly, etc. Charles-Emmanuel Ier alloua une prime de cent
florins au vainqueur ou roi du tir, avec l'exemption des droits de gabelle durant une année.
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23.6 Page 226

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FRANÇS DE SALES.
Thonon, 23 aoust 98.
Je salue monsieur et madame de la Faverge, mes oncle et tante783.
A Monsieur
Monsieur de Vilette,
Maistre d'hostel de S. A.
Revu sur l'Autographe conservé à Gênes, Sanctuaire de la Madonnetta. [354]
_____
CXVII. A Monsieur Jean Sarasin784. Invitation à exposer par écrit
la mission dont il est chargé.
Thonon, entre le 18 et le 24 septembre 1598.
Monsieur,
Puysque nous avons observé jusques a præsent de mettre nos dires de part et d'autre par
escrit, je vous prie d'escrire le vostre encores sur le particulier de l'intention des messieurs vos
superieurs touchant vostre venue, ce pendant qu'en responce (sachans que ce ne sera autre que ce
que vous aves proposé a bouche) nous dressons les articles demandés.
A tant, me voyla tous-jours, Monsieur,
Vostre tres affectionné
et humble serviteur en Dieu,
FRANÇS DE SALES.
A Monsieur
Monsieur Sarazin.
Revu sur l'Autographe conservé à Genève, Bibliothèque publique. [355]
_____
783 Janus de la Faverge, seigneur de Cormand, avait épousé Pernette de Chevron-Villette, cousine germaine de Mme
de Boisy, mère de saint François de Sales. Ils habitaient La Roche, et probablement le destinataire de cette lettre, qui
était aussi leur cousin germain, se trouvait auprès d'eux.
784 Noble Jean Sarasin (1574-1632) qui déjà à cette époque était à Genève un personnage marquant, devait l'être plus
encore dans la suite. Il devint membre, puis auditeur du Conseil des Deux-Cents (1600), secrétaire d'Etat (1605-1621),
fut huit fois syndic et quatre fois lieutenant de la justice. Sarasin publia, de concert avec Jacques Lect, l'ouvrage intitulé
: Le Citadin de Geneve (1606). Pendant la longue période où il fut investi de fonctions publiques, il eut à remplir
presque chaque année des missions importantes en Savoie, en France et auprès des divers cantons suisses.
Mais avant de le charger de ces négociations, les magistrats de Genève le choisirent en 1598 pour traiter en
leur nom des préliminaires de la conférence demandée par le P. Chérubin. C'est à ce sujet qu'il reçut du Saint le
billet ci-dessus.
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23.7 Page 227

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CXVIII. A Monseigneur Jules-César Riccardi, Archevêque de
Bari, Nonce Apostolique a Turin. Recours à la protection du
Nonce. Pouvoirs spéciaux nécessaires aux missionnaires.
Mesures à prendre contre les Chevaliers des Saints Maurice et
Lazare. Admirables résultats des Quarante-Heures de
Thonon. Zèle des Evêques de Genève et de Saint-Paul-Trois-
Châteaux. Alarmes au sujet de Genève.
Thonon, 13 octobre 1598.
Illustrissimo et Reverendissimo
Mon très honoré, Illustrissime et
Signore mio osservandissimo,
Révérendissime Seigneur,
La felice raccolta di molte migliaia
d'anime qual si è fatta questi giorni passati in
questo balliagio di Tonone, ci ha data una
incredibile consolatione, et veramente
compita, se la lettera di V. S. Illma et Rma
ricevuta hoggi dal P. Cherubino fosse capitata
all'hora. Ma è forza ch'io glie dica che
Monsignor di Geneva et di San Paolo785 et
[356] quanti siamo qui de suoi divoti
havevamo non poca maraviglia et altro tanto di
ramarico in non haver nuova veruna della
sanità sua, laquale se mai ci è stata cara, adesso
ci deve esser carissima, quando sonno le cose
nostre venute in tal stato che più che mai han
bisogno di un tale protettore et promotore
quale si è sempre mostrata V. S. Illma et Rma.
Poichè dal canto di Sua Altezza altro nè
sperare, nè desiderare si può nè deve, senon la
perseveranza delle christianissime opre quali
ha già fatte, et non ciè altro da domandare
senon un favor fervente, pronto et liberale dalla
Santa Sede Apostolica, acciò abbracci questa
impresa con quelle favorevole (sic) braccia
colle quali suole stringer le cose del Signore.
Hora, se questo bene non ci viene per mezzo di
V. S. Illma et Rma, non vedo per qual strada
possa venire.
Habbiam bisogno di gratie spirituali
per le assolutioni, acciò si possano far con ogni
libertà fra questi rozzi et novitii popoli, non
L'heureuse moisson de plusieurs
milliers d'âmes qui s'est faite ces jours passés
dans ce bailliage de Thonon, nous a donné une
consolation incroyable ; consolation qui eût été
vraiment à son comble, si la lettre de Votre
Seigneurie Illustrissime et Révérendissime,
reçue aujourd'hui par le P. Chérubin, nous fût
arrivée en ce même temps. Mais je suis
contraint de dire que Nosseigneurs de Genève
et de Saint-Paul et [356] nous tous qui vous
sommes dévoués ici, avions été fort étonnés et
non moins affligés de ne recevoir aucune
nouvelle de votre santé. Si toujours elle nous
fut chère, elle doit maintenant nous être très
chère, puisque nos affaires sont dans un tel état
que nous avons besoin plus que jamais d'un
protecteur et promoteur tel que Votre
Seigneurie Illustrissime et Révérendissime l'a
toujours été à notre égard ; car du côté de Son
Altesse on ne peut, on ne doit même espérer ni
désirer que la continuation des œuvres très
chrétiennes qu'elle a déjà accomplies. Il n'y a
autre chose à demander sinon un concours
actif, prompt et libéral du Saint-Siège
Apostolique, afin qu'il embrasse cette
entreprise du même bras favorable avec lequel
il a coutume de soutenir les œuvres de Dieu.
Or, si ce bien ne nous arrive par l'intermédiaire
de Votre Seigneurie, je ne sais par quelle voie
il peut nous venir.
785 Thomas Pobel, fils de Catherin, qui fut le premier président du Sénat de Chambéry (1559), avait été en 1578 nommé
à l'évêché de Saint-Paul-Trois-Châteaux en Dauphiné ; mais les hérétiques étant maîtres de cette ville, il ne put jamais
prendre possession de son siège épiscopal qu'il résigna en 1585. Ce Prélat, après un long séjour à Rome, revint en
Savoie (1592), où il cumula les dignités ecclésiastiques ; c'est ainsi qu'il était simultanément doyen de Ceyserieu,
prieur de Ripaille (1571), de Peillonnex (1585-1619) et Abbé d'Entremont (1596-1605). Thomas Pobel fut en 1602
l'un des consécrateurs de saint François de Sales. Il mourut à Chambéry où il fut inhumé le 30 septembre 1619.
227/318

23.8 Page 228

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solamente da Monsignor et Rmo Vescovo et da
me, ma da quanti sarà bisogno di commettere,
[357] non bastando a tanta messe se non gran
numero di messori786. Così anco habbiam
bisogno di qualche authorità da communicarsi,
secondo le particolari occurrentie, ad uno o più
persone ; et se non fossimo così vicini dell'
anno del Giubilæo, io diria una parola, che per
noi saria bisogno per un anno di un perfetto et
gran Jubilæo.
Et non solamente per le gratie
spirituali, ma per le temporali, habbiam
bisogno di Giubilæo ; et questo non si può
differire senza un gran danno della conscientia.
Cioè, che Sua Santità, conforme alla buona
mente di Sua Altezza, faccia restituir li
beneficii tenuti da' signori Cavaglieri alli
pastori et ecclesiastici, li quali si stabiliranno
adesso per modo di provisione in questo
balliaggio. Ne è necessario di procedere in
questo con quelle formalità ordinarie che
richiedono un gran tratto di tempo, perchè fra
tanto si perdono le anime redente da Christo, et
è pur vero che salus populi suprema lex esto787.
Nè bisogna in questo usar rispetti, perchè
periculum est in mora. Sonno le cose di
Christo a tal segno in queste provintie adesso,
che se habbiam [358] modo di farle
splendidamente, il capo del serpente se ne va
spezzato. Guai a chi darà impedimento a così
santa opra.
Le Bulle di Sua Santità, per le quali
concede a quelli della Religione li beneficii di
questa provincia788, vogliono che in caso che
la santa fede si restituisca, diano ad ogni curato
cinquanta ducati di prvisione. Ecco restituita
poco meno la santa fede per tutto generalmente
; ma le chiese sono rovinate, senza paramenti,
senza calici, senza croci : dove ne pigliaremo ?
Li curati da stabilire qui non devono esser
persone di cinquanta ducati ; devono haver
compagnia di un altro sacerdote. homini
soli789, massime nella vicinanza de' pardi, ursi
et lupi. Bisogna, si (sic) fia necessario, vender
i calici et altre gioie non necessarie dell' altre
chiese, per fare queste spese et dar da mangiar
a queste anime fameliche, lequali altrimente
sonno hora per hora per morire, acciò non si
Nous avons besoin de grâces
spirituelles relativement aux absolutions, afin
qu'elles puissent être accordées en toute liberté
à ces peuples grossiers et nouvellement
convertis, non seulement par Mgr notre
Révérendissime Evêque et par moi, mais aussi
par tous [357] ceux qu'il sera nécessaire de
déléguer à cet effet ; car pour recueillir une
telle moisson un grand nombre de
moissonneurs peut à peine suffire. De même
encore, nous avons besoin de quelques
pouvoirs qui puissent être communiqués, selon
les occurrences particulières, à une ou
plusieurs personnes ; et si nous n'étions pas
aussi proches de l'année du Jubilé, je dirais
qu'il serait nécessaire pour nous d'obtenir une
année de parfait et grand Jubilé.
C'est non seulement pour les grâces
spirituelles, mais encore pour les temporelles
que nous avons besoin d'un Jubilé, et ceci ne se
peut différer qu'au grand détriment des
consciences. Il faudrait que Sa Sainteté,
conformément à la bonne intention de Son
Altesse, fît restituer les bénéfices détenus par
MM. les Chevaliers, aux pasteurs et
ecclésiastiques qui s'établiront maintenant en
ce bailliage par manière de provision. Il n'est
pas nécessaire de procéder en ceci selon les
formalités ordinaires qui exigent beaucoup de
temps, puisque en attendant les âmes rachetées
par Jésus-Christ se perdent, et il est très vrai
que « le salut du peuple doit être la suprême
loi. » En cela il ne faut point user de
ménagements, car tout délai est un péril. Les
intérêts de Jésus-Christ sont maintenant en tel
état dans ces provinces, que [358] si nous
pouvons donner au culte la splendeur
convenable, la tête du serpent sera brisée.
Malheur à qui s'opposera à une œuvre aussi
sainte !
Les Bulles par lesquelles Sa Sainteté
concède aux Chevaliers de Saint-Lazare les
bénéfices de cette province exigent que dans le
cas où la sainte foi y serait rétablie, ils donnent
à chaque curé une provision de cinquante
ducats. Voici que la sainte foi est rétablie à peu
près partout, mais les églises sont ruinées, sans
ornements sacrés, sans calices, sans croix. Où
786 Cf. Matt., IX, 37, 38 ; Lucæ, X, 2.
787 Inter leges perditas XII Tabularum (juxta plures).
788 Vide supra, p. 233, not. (539), ad finem.
789 Eccles., IV. 10.
228/318

23.9 Page 229

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possa dire di noi : Quem non pavisti
occidisti790. Voglio dire che Sua Santità,
havendo rispetto all' importanza di questo
negotio, darà ordine che li Cavaglieri si
contentino di [359] permettere791 che sia
servito Christo Signore nostro dalle intrate
delli beni che a questo effetto sonno dati dalli
pii et religiosi padri et antichi nostri. Mi
perdoni per bontà sua V. S. Illma se io, rapito
dal desiderio di veder questo principio glorioso
capitar in un fine gloriosissimo, glie scrivo con
questa gran libertà et forse importunità ; è
avezza alli miei sconci et semplici concetti, et
non li haverà per male.
Vorrei poter et saper dar rilatione a V.
S. Illma di quello che Iddio ha fatto qui nel
tempo delle prime 40 hore celebrate il 20 et 21
del mese passato, inanzi che fosse giunta Sua
Altezza, et nelle seconde celebrate nel primo et
2 del presente ; son certo che io glie cavaria il
fastidio che gli ho dato colli miei desiderati
Jubilæi. Vorrei poterglie dire l'allegrezza che
ha ricevuto Monsignor Vescovo nostro di
Geneva, vedendosi ritornare nelle braccia tanti
figlioli prodighi, et con quanta faticha si
adopra in sì felice impresa. Vorrei poterglie dar
conto della desterità, prudentia et buon animo
col quale [360] Monsignor Rmo di San Paolo si
è affaticato per incaminar queste conversioni
et opre pie, il zelo col quale ne ha trattato et
appresso Sua Altezza et in ogni occasione ; chè
se crescer poteva l'amicitia che V. S. Illma tiene
verso di questo Prelato, son certo che d'altro
tanto crescerebbe. Lascio il Padre Cherubino,
il quale è tanto consolato sin adesso, che se non
fossero le fatighe grandissime che sente,
crederebbe che Tonone fosse Paradiso,
vedendo tante conversioni et il frutto maturo
delli suoi sudori.
Direi ancora di me che sto
consolatissimo, se un rumore sparso di qua non
mi desse noïa : cioè, che il Re Christianissimo
vuole che nell'honorata pace fatta dalla Santa
Sede fra li potentati catholici vi sia compresa
la vituperosa Babilonia di Geneva. Non la
posso creder, perchè l'ho per troppo
disdicevole che quella terra maledetta habbia
pace per mano della Santa Sede ; senza altro,
assolutamente non la posso capire. Iddio ci
en prendrons-nous ? Les curés que l'on aura à
placer ici ne doivent pas être des personnes à
cinquante ducats ; ils doivent avoir un autre
ecclésiastique avec eux. Malheur à l'homme
seul, surtout dans le voisinage des léopards,
des ours et des loups ! Il faut même, au besoin,
vendre les calices et objets précieux non
nécessaires aux autres églises, pour faire ces
dépenses et nourrir ces âmes affamées, qui
autrement sont exposées d'heure en heure à
périr, afin qu'on ne puisse pas nous appliquer
ces paroles : « Vous avez tué ceux que vous
n'avez pas nourris. » Je veux dire qu'il faut que
Sa Sainteté, ayant égard à l'importance de cette
affaire, intime des ordres pour que les
Chevaliers permettent [359] que les revenus
des biens donnés à cet effet par la piété et la
religion de nos pères et de nos ancêtres soient
employés au service de Notre-Seigneur Jésus-
Christ. Que la bonté de Votre Seigneurie
Illustrissime veuille bien me pardonner si,
transporté du désir de voir ce glorieux
commencement aboutir à une fin plus
glorieuse encore, je lui écris avec une si grande
liberté et peut-être même trop d'importunité ;
mais Votre Seigneurie, habituée à recevoir la
confidence de mes pensées souvent bien mal
exprimées, ne le prendra pas en mauvaise part.
Je voudrais pouvoir et savoir vous
donner la relation de ce que Dieu a fait ici
pendant les premières Quarante-Heures
célébrées le 20 et 21 du mois dernier, avant
l'arrivée de Son Altesse, et pendant les
secondes célébrées le Ier et le 2 courant ; je suis
sûr que je vous dédommagerais de l'ennui que
je vous ai causé par mes désirs de Jubilés. Je
voudrais pouvoir vous dire la joie de Mgr de
Genève, notre Evêque, en voyant revenir entre
ses bras tant d'enfants prodigues, et avec quelle
peine il se dévoue à cette heureuse entreprise.
Je voudrais pouvoir vous rendre compte de la
dextérité, de la prudence et du [360] courage
avec lesquels Mgr de Saint-Paul a travaillé pour
avancer ces conversions et œuvres pies, le zèle
avec lequel il a traité cette affaire auprès de
Son Altesse et celui qu'il déploie en toute
occasion. Si l'amitié de Votre Seigneurie pour
ce Prélat pouvait s'accroître, je suis sûr qu'elle
s'augmenterait d'autant. Je ne parle pas du P.
790 Decreti Ia Pars, Dist. LXXXVI, c. XXI, ubi hæc verba S. Ambrosio tribuuntur.
791 C'est sans doute par distraction que le Saint a écrit promettere. On a cru nécessaire de rétablir le mot exigé par le
sens.
229/318

23.10 Page 230

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darà nuove più grate. Ad ogni modo glie
faremo guerra colle prediche, et già che ci
chiamano ad una conferentia, ci [361]
prepariamo a far ogni sforzo. Ma la preghiamo
che il Padre Laurinio venga da Milano a
concorrere con noi ogni volta che sarà
chiamato ; il che, con la sua authorità, può
procurare, come Sua Altezza si propone di
farlo dal canto suo.
Supplico V. S. Illma et Rma di
perdonarmi l'altra volta et credere che la libertà
col laquale effundo animam meam inansi di
lei792, non nasce senon dal vivo et candido
affetto col quale io sono,
Di V. S. Illma et Rma,
Divotissimo et humilissimo servitore,
FRANCO DE SALES,
Prasvosto di Geneva.
In Tonone, alli 13 di Ottobre 98.
All' Illmo et Rmo Sigr mio osservandissimo,
Monsigr l'Archivescovo di Bari,
Noncio Apostolico appresso Sua Altezza.
Saluzzo.
Revu sur l'Autographe conserve à Rome,
Archives du Vatican. [362]
Chérubin, tellement consolé jusqu'ici, que,
n'étaient les fatigues très grandes qu'il ressent,
il croirait que Thonon est un paradis, voyant
tant de conversions et recueillant en pleine
maturité le fruit de ses sueurs.
Je dirais encore de moi-même que je
suis très consolé, si un bruit qui se répand de
nos côtés ne m'attristait beaucoup : c'est que le
roi très chrétien veut que l'infâme Babylone de
Genève soit comprise dans la paix honorable
faite par la médiation du Saint-Siège entre les
puissances catholiques. Je ne puis y croire, car
il serait trop inconvenant que cette terre
maudite reçût la paix par l'entremise du Saint-
Siège ; je ne puis absolument pas le
comprendre. Dieu nous donnera de plus
réjouissantes nouvelles. Quoi qu'il en soit,
nous lui ferons la guerre par la prédication, et
puisqu'on nous appelle à une conférence nous
nous préparons à faire tous nos efforts. Mais,
[361] de grâce, que le P. de Lorini vienne de
Milan nous apporter sa coopération chaque
fois qu'il sera appelé ; ce que Votre Seigneurie
peut obtenir par son autorité, ainsi que Son
Altesse se propose de faire de son côté.
Je supplie Votre Seigneurie de me
pardonner une fois encore et de croire que la
liberté avec laquelle je répands mon âme en sa
présence ne provient que de la vive et sincère
affection avec laquelle je suis,
De Votre Seigneurie Illustrissime et
Révérendissime
Le très dévoué et très humble serviteur,
FRANÇOIS DE SALES,
Prévôt de Genève.
Thonon, le 13 octobre 1598. [362]
792 I Reg., I, 15 ; Ps. CXLI, 3.
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24 Pages 231-240

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24.1 Page 231

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Minutes écrites par saint François de Sales pour
Monseigneur de Granier793
_____
CXIX. A Sa Sainteté Clément VIII. Fruits merveilleux produits
par les Quarante-Heures de Thonon. Prière d'intervenir
auprès du roi de France et du duc de Savoie pour que Genève ne
soit pas comprise dans le traité de Vervins.
Thonon, vers le 20 octobre 1598.
794Quam lætos atque uberes animarum
fructus ex hac Gebennensis diœcæsis vinea
hisce diebus perceperimus, Illustrissimi in
Christo Patris Domini Cardinalis a Medices, a
latere Legati [narratione,] uti spero,
cognoscet795 Sanctitas Vestra. Cum enim hoc
in oppido 40 horarum [363] oratio
celebraretur,796
ejusdem
Cardinalis
Illustrissimi ex itinere et Serenissimi Ducis
nostri præsentia, Deo procul dubio ita
disponente, incidit, faustis admodum auspiciis,
quando per idem tempus innumera hominum
multitudo hæresim abjurare fidemque
Catholicam amplecti statuerat, quorum pars id
in ipsius Illustrissimi Legati, pars in meis
manibus sancté præstitit, Serenissimo Duce
quam impensissime rem totam promovente.
Quæ omnia hic, quem ad Beatitudinis Vestræ
pedes supplicem destinamus, fusius facillime
exponet, quod omnibus rerum harum
successibus interfuerit.
At vero, dum ita fœliciter coram
Domino lætamur, sicut qui lætantur in messe,
sicut exultant victores capta præda quando
dividunt spolia797, hoc unum accidit
intempestive et molestissime : nimirum Rex
Christianissimus per litteras Serenissimum
Ducem serio admonet, velie se ejus quam tam
opportune Sanctitas Vestra, tanta totius orbis
Catholici voluptate, perfecit pacis vinculo
comprehendi hæresis totius Calviniana
Votre Sainteté aura appris, je l'espère,
par le rapport de l'Illustrissime Père et
Seigneur en Jésus-Christ, le Cardinal de
Médicis, son Légat a latere, quelle belle et
abondante récolte d'âmes nous venons de faire
ces jours passés dans la vigne de ce diocèse. En
effet, Dieu a disposé si heureusement les
choses, que ce grand Cardinal a pris [363] la
route de son retour par cette ville, où il s'est
rencontré avec le duc au temps où l'on y
célébrait les Quarante-Heures. Une multitude
innombrable d'hommes, qui avaient résolu de
renoncer à l'hérésie et d'embrasser la foi
catholique, ont fait leur abjuration, partie entre
les mains de l'Illustrissime Légat, partie entre
les miennes. L'influence de notre sérénissime
duc a beaucoup contribué à ce résultat. Celui
que nous députons aux pieds de Votre Sainteté,
ayant été témoin de tout ce qui s'est passé, lui
en fera un exposé plus complet et plus fidèle.
Mais pendant que nous nous
réjouissons heureusement devant le Seigneur
comme ceux qui se réjouissent au temps de la
moisson, comme se réjouissent les victorieux
lorsqu'ils se partagent les dépouilles de
l'ennemi, voici que nous arrive une nouvelle
fort inopportune et affligeante : le roi très
chrétien prévient sérieusement par lettres le
duc de Savoie qu'il entend que Genève, mère
et source de l'hérésie calviniste, soit comprise
dans le traité de paix que Votre Sainteté a fait
793 Ces deux minutes, qui occupent le recto et le verso d'un même feuillet, ont été écrites par le Saint avant son
départ pour Rome, bien que la seconde lettre paraisse n'avoir été envoyée qu'après son arrivée dans la ville éternelle.
794 [Hosce...] Quam lætos atque uberes animarum fructus, Deo propitio, [quos] hisce diebus perceperimus...
795 Legati, [et hujus quem ad B. V. pedes supplicem destinavimus... mittimus, narratione fusius cognoscet...]
796 oratio — [per Patres Cappucinos] celebraretur, [fœlicibus omnino auspiciis...]
797 Is. IX., 3.
231/318

24.2 Page 232

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matricem et [364] fontem, Genevensem
videlicet civitatem, quamvis pacis articulis, ut
par erat, nulla illius mentio habeatur798. Quæ
res incredibilem hæreticis omnibus audaciam
addit, fidei Catholicæ aditum præcludit,
novissime conversos animos, si non abjicit
omnino799, at sane perturbat quam maxime ;
mihi ac canonicis meis bonorum
ecclesiasticorum recuperandorum, quæ per
summam iniquitatem a Genevensibus
detinentur, spem omnem funditus evellit.
Quapropter istum Ecclesiæ meæ
Præpositum, quotquot sumus hic ordinis
ecclesiastici viri, quoad ejus fieri potuit
celerrime misimus qui, nostro omnium
nomine, ad clementis Beatitudinis Vestræ
pedes provolutus, quantam res hæc, si
succedat, jacturam sit allatura reipublicæ
Christianæ, quamque atram tanto ac tam fœlici
pacis exitui sit notam impressura, nostro
omnium nomine, [365] quam humillime
explicabit, ut pro sua erga orbem Catholicum,
maxime vero erga hanc tot malis exagitatam
provinciam, paterna clementia Sanctitas
Vestra serio, tum apud Christianissimum
Regem tum apud Ducem Serenissimum agat
ne tanta pax sit impiis800, nec ejus lætentur
privilegio qui ecclesiasticam pacem tot
scissuris convellere801 nituntur. Cui debent
honorem, potius honorem, cui vectigal,
vectigal compellantur reddere802 ; ac tum
demum veniat pax super illos in virtute
Domini803 et authoritate Sanctæ Sedis
Apostolicæ. Cui Sanctitatem Vestram
clementissime et beatissime804 insidentem,
Deus optimus maximus quam diutissime
servet incolumem.
Revu sur l'Autographe conservé à la
Visitation d'Annecy. [366]
conclure à la grande satisfaction de l'univers
catholique, bien [364] que, comme il était
raisonnable, nulle mention n'ait été faite de
cette ville dans les articles du traité. Cette
nouvelle inspire une incroyable audace à tous
les hérétiques et leur ferme l'entrée à la foi
catholique ; si elle n'abat pas entièrement le
courage des nouveaux convertis, du moins les
trouble-t-elle grandement, et nous ôte, aussi
bien à moi qu'à mes chanoines, tout espoir de
recouvrer les biens ecclésiastiques que les
Genevois retiennent par une souveraine
injustice.
C'est pourquoi, tant que nous sommes
ici d'ecclésiastiques, nous vous avons député le
plus promptement qu'il a été possible, le Prévôt
de mon Eglise cathédrale qui, en notre nom à
tous, se prosternera aux pieds de Votre
clémente Béatitude, et lui exposera combien
grand serait le dommage qu'une telle paix, si
elle vient à se conclure, causerait à la
république chrétienne et la tache honteuse
qu'elle imprimerait à un si grand et si heureux
succès. Que, selon la clémence [365]
paternelle qu'Elle témoigne à toute la
Catholicité et surtout à cette province agitée
par tant de maux, Votre Sainteté daigne
intervenir sérieusement auprès du roi très
chrétien et du sérénissime duc, afin qu'une telle
paix ne soit pas accordée aux impies, et qu'ils
n'en goûtent point les avantages ceux qui
s'efforcent de bouleverser par tant de divisions
la paix de l'Eglise ; mais que plutôt ils soient
contraints de rendre l'honneur à qui ils doivent
l'honneur, le tribut à qui ils doivent le tribut, et
que, par ce moyen, la paix vienne sur eux en la
vertu du Seigneur et par l'autorité du Siège
Apostolique que Votre Sainteté occupe si
heureusement et avec tant de clémence, et sur
lequel nous supplions le Dieu très grand et très
bon de vous conserver de longues années pour
le bien de son Eglise. [366]
798 Le traité de Vervins contenait la stipulation suivante : « De la part dudict sieur Roy Tres Chretien seront
comprins au present traité, si comprins y veulent estre... les treze cantons des ligues de Suisse, les sieurs des trois
ligues Grises, l'Evesque et seigneurie du pais du Valais, l'Abbé et ville de Sainct-Gall... et autres alliez desdicts
sieurs des Ligues. » Or, par cette formule si vague, « autres alliez, » Henri IV avait entendu désigner Genève,
comme il le déclare dans une pièce datée de Monceaux le 11 novembre 1598.
799 sinon [adimit] omnino, [quod minime futurum speramus, at demittit sane...]
800 Is., XLVIII, ult., LVII, ult.
801 convellere [omnibus quibus possunt modis,]
802 Rom., XIII, 7.
803 Ps. CXXI, 7.
804 beatissime [præsidentem]
232/318

24.3 Page 233

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CXX. Au même. Raisons qui ont contraint le Prévôt de différer
le voyage de Rome. Envoi des documents qui doivent être
présentés à Sa Sainteté.
Fin 1598.
Jamdudum Apostolorum limina meo
nomine visitasset Reverendus Franciscus De
Sales, Ecclesiæ meæ Præpositus, nisi
periculosissimo morbo quo per multos menses
decubuisset [impeditus fuisset,] et propter
pestem in plurimas hujus provinciæ partes
hactenus sævientem, aditus omnes nobis ad
Italiam interclusi fuissent. Perrexit
nihilominus tandem aliquando, ac superatis
itinerum difficultatibus, uti spero, ad
Sanctitatis Vestræ pedes accessit.
Ac quidem, quando res propter quam
abiit nullam sine summo periculo moram
patiebatur, nec omnia tunc haberem præ
manibus quæ visitationi sanctorum liminum
necessaria sunt, ea nunc duxi mittenda, quo
vices meas hac in re apud Sanctitatem Vestram
agat meo nomine ; ratus Clementiæ suæ id
acceptum iri, tum ut [367] difficillimo
tempore805 quæ fieri possunt per pauciora, per
plura nequaquam fiant, tum ut hic meus
procurator, qui non inutilem omnino hoc in
agro operam navare consuevit, variis
peregrinationibus ab opere abstrahatur.
Præcor autem Deum optimum
maximum uti Sanctitatem Vestram
Beatissimam Ecclesiæ suæ quam diutissime
servet incolumem.
Revu sur l'Autographe conservé à la
Visitation d'Annecy. [368]
Il y a longtemps que Révérend François
de Sales, Prévôt de ma Cathédrale, aurait visité
en mon nom les tombeaux des Apôtres, s'il n'en
avait été empêché par une très dangereuse
maladie qui l'a tenu alité plusieurs mois, et si
les voies d'Italie ne nous eussent été fermées
par la peste qui a affligé et afflige encore
presque toute cette province. Mais enfin il s'est
mis en route, et ayant, comme je l'espère,
surmonté les difficultés des chemins, il a dû se
prosterner déjà aux pieds de Votre Sainteté.
Or, parce que l'affaire pour laquelle il
est allé à Rome ne pouvait être différée sans un
très grand danger, et que je n'avais pas, lors de
son départ, tous les documents nécessaires
pour un voyage ad limina, j'ai jugé bon de les
envoyer maintenant, afin qu'en mon nom il
rendit ses devoirs à Votre Sainteté, espérant
que Sa Clémence l'aura [367] pour agréable.
C'est autant pour ne pas employer plusieurs
moyens là où un seul suffit dans les temps si
difficiles où nous vivons, que pour donner
occasion à mon procureur, qui n'a pas travaillé
inutilement dans le champ du Seigneur, de se
délasser par divers pèlerinages des fatigues
qu'il a soutenues.
Je prie le Dieu très bon et très grand de
conserver longuement Votre Sainteté à son
Eglise. [368]
805 difficillimo tempore [expensis una eademque via quam plurima fiant si possint...]
233/318

24.4 Page 234

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Appendice
[369]
234/318

24.5 Page 235

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Les notes marginales indiquent la corrélation des pièces de l'Appendice avec le texte des Lettres
de saint François de Sales. [370]
235/318

24.6 Page 236

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Lettres adressées a saint François de Sales par quelques
correspondants
______
A. Lettres d'Antoine Favre
_____
I
Chambéry, 30 juillet 1593.
Viro clarissimo Francisco De Sales,
Præposito Cathedralis Ecclesiæ Sancti Petri Gebenensis,
Antonius Faber, Senator, salutem dicit.
806Est omnino virtuti hoc insitum et peculiare, vir clarissime, ut possessores suos non illis
tantùm quos et ipsa possidet, sed iis quoque omnibus quibus amabilem se exhibet, sola sui
contemplatione et admiratione reddat amabiles. Sic enim præfari lubet, non quomodo plerique
solent, qui cùm primùm eos quos numquam viderint aut coràm aut per literas salutant, ab
excusationibus initium sumunt, ac si vel suspecta minusque laudabilis videri possit honesta illa
ineundæ amicitiæ provocatio, vel in eo quod per se honestum atque laudabile sit exequendo, aliam
quàm debiti officii rationem exquiri constareve oporteat.
Tu vixdum equidem mihi de facie notus, sed nominis tui fama pro singulari qua excellis
virtute, probitate ac eruditione notissimus, tanta me fruendi tui cupiditate allectum devinctumque
habes, ut jam inde à quo tempore mihi ad eadem ista bonarum literarum et jurisprudentias studia,
licet minus feliciter, incumbere contigit, de amando te et observando non tantùm consilium cepisse
videar, sed [371] etiam obligationis perpetuæ vinculum contraxisse. Neque tamen id à te sic accipi
velim, quasi in me vel singula et mediocria esse putem quæ in te universa sunt ac absolutissima,
sed ut intelligas et morum et animorum similitudinem quæ ad conciliandas inter ignotos quoque
amicitias plurimùm posse creditur, in eo etiam interdum elucere, in quo disparia sint omnia præter
unam eandemque similia consectandi voluntatem.
Nam quod iis usu venire solet qui longiore absentis aut defuncti alicujus desiderio
torquentur, ut ea demùm ratione recreari se sentiant, si non solum amici memoriam diligenter et
religiosè, ut par est, colant, sed etiam exactissima naturæ imitatione, quantùm arte effingi potest,
ejus quasi præsentis imaginem oculis suis intuendam objiciant, id ipsum nobis, quotquot ad
virtutem contendimus, faciendum existimo ; ut quoniam admirabilem ejus pulchritudinem, qualis
quantaque est, ne animi quidem cogitatione assequi possumus, eos saltem nobis ad amandum et
imitandum proponamus in quibus vivam illa sui effigiem elegantioribus et aptioribus, ut ita dicam,
coloribus depinxerit. Ita namque fit ut ad ejus cultum studiumque vehementiùs accendamur, quam
oculis si cernere possemus, proculdubio longè vivaciores prorsùsque mirabiles sui amores in
animis nostris excitaret. Nec enim malè quis, judicio meo, præclarum hoc encomium virtuti
adscribat, jam olim à divino illo Platone soli attributum sapientias, quam utique sapiens nemo
unquam à virtute sejunxit.
Ego sanè, quamquam id mihi semper enitendum credidi, ut boni cujusque amicitiam quibus
possem officiis et obsequiis promerêrer, nihil tamen facio libentiùs quàm ut totum me, quantulus
sum, iis dedam ultroque voveam quos mihi persuadeo sic natos et educatos esse ut ab iis consilii,
806 Vide Epist. IX.
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doctrinæ et, quod in re ardua laboranti præcipuum est, boni exempli adjumenta comparare possim.
In quibus si te unum esse dicam, qui hodie mihi instar omnium esse possis, in ista præsertim
vixdum virili ætate, in qua tot tantaque virtutum ac scientiarum omnium, non argumenta modò sed
clarissima lumina proferas ut à quo superari in posterum queas alium quàm te habeas neminem,
vereor ne adulatorem me potiùs quàm probum amicitiæ Fabrum suspicêre. Non quod non sis tu
tibi ipsi mihique testis optimus, nisi tua te fallit modestia, majorem tibi laudem deberi quàm ex
commendatione mea possit accedere ; sed quia minus fortassis credibile tibi futurum sit tale jam
meum de te judicium esse quale esse deberet, si mihi tam perspecta probataque foret virtus tua
quàm frequentissimis omnium quos de te loquentes audio sermonibus est commendata. [372]
Itaque quod superest, ne longiori epistola fiât importuna salutatio, rogo te et, si pateris,
etiam atque etiam peto, ut hanc perexiguam quidem, sed promptissimam et liberalem singularis
meæ erga te voluntatis significationem sic excipias, tanquam ab eo profectam à quo omnia
devotissimi et amicissimi hominis officia, non tam expectare debeas quàm pro jure et arbitriotuo,
quoties videbitur, vindicare.
Esset quidem honorificentius mihi, et optabilius, jam amari abs te, SI merêrer ut hoc ipso
merêri me intelligerem ; sed erit jucundius, fortassis etiam gloriosius, si ob eam causam amari me
post hac intelligam, quôd prior ego te tuique animi dotes eximias amaverim. Nam et plus præstat
qui prior amat, et in præclaro isto et laudabili contentionis genere ex quo suavissimam sibi quisque
speret victoriam, priorem vinci vincere est. Sic fiet ut plus tu mihi debeas quàm ego tibi ; sed plus
ego vicissim virtutibus tuis quàm tu meis, si tamen is ego sum qui meas possim ullas dicere.
Benè vale, vir clarissime, et me ama.
Ex urbe Chamberii, 3 calend. Augusti 1593.
A Monsieur
Monsieur De Sales,
Prevost en l'Esglise Cathedrale de Sainct Pierre de Geneve.
Revu sur l'original conservé à Annecy, Archives de la Société Florimontane.
_____
II
Octobre 1593.
807Ais velle te à theologia impetrare facultatem ad jurisprudentiæ sacra, quæ superiore
biennio intermisisti, quodam postliminii jure repetenda. Quo nomine non solùm mirabiliter
gaudeo, sed etiam, si tua causa id facis, ut facere debes, et tibi et jurisprudentiæ gratulor : tibi, cui
amplissimam gloriæ messem ex eo consilio paratam esse prospicio ; jurisprudentiæ, quam mira
ingenii tui felicitate ornatam maxime et illustratam iri confido si, quod facturum te non dubito, ad
eam sic voles incumbere ut quæ te prior disciplinæ suæ alumnum habuit, ejus laudem cum tua
putes esse conjunctam. Sin ut ais, et ego ut mihi magis placeam credere volo, mea potiùs causa et
quoniam ita suadeo idipsum facere voles, equidem perinde gratulabor jurisprudentiæ, cùm jam sic
affectus esse debeam ut in eo quôd mea causa facies, non minorem quàm si tua diligentiam et
industriam collaturum te persuasum habeam ; sed mihi potissimùm, cui tam [373] præclara ista
tamque facilis obtigerit benè de jurisprudentia merendi occasio, vel hoc solo quôd te induxerim uti
de ea benè merereris.
Utcumque verô sit, est quôd quantas possum tibi referam gratias, qui meis sive precibus
sive consiliis tantùm indulgere te profitearis ut studiorum tuorum legem ex arbitrio meo non solùm
instituere, quod esset facilius, sed etiam institutam et compositam immutare non recuses. Ego certè
ad sancta mutuæ necessitudinis nostræ fœdera constringenda adeo pertinere arbitror uti studiis
807 Vide Epist. XII. p. 36.
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iisdem exerceamur, ut, ni tu mihi hac parte prior concessisses, fuerim fortassis, dum per Senatum
et uxorem licuisset, theologiam pro jurisprudentia sequu turus.
Sed extra jocum, placere tibi imprimis theologiam nec miror nec doleo : est enim propria
illa et peculiaris illorum scientia quos Deus optimus maximus, non tam ad amplissimas quasque
Ecclesiæ dignitates, quas jam tibi sua spontè obvias video, quàm ad pietatem informaverit, cujus
te gravissimum et sanctissimum, non nomen, sed numen præcipuo cultu habere certô scio. Atque
utinam eadem mihi quas tibi in eam rem opportunitas adesset ! non voluntas, mihi crede, abesset,
non animus. Neque tamen despero quin, si quando una nos vivere et securiore plenioreque otio
frui Deus volet, et exemplo et auxilio tuo, theologiæ quoque degustandæ desiderium non parvum
subeat, quo jampridem titillari me sentio, in eaque, ut in Domino mori discam, qui Christianæ vitæ
scopus esse debet, tandem aliquando consenescam.
At cùm neque Spartam quæ mihi divinitùs data est deserere ultro debeam, neque à meipso
tanto abesse intervallo ut, qui vel soli jurisprudentiæ imparem me video, theologiæ etiam
amplectendæ temerarios spiritus sumere velim, planè conveniens est, ea mihi interim studia
præcipuè et in amoribus et cura esse sine quibus nec officii mei nec dignitatis ratio satis recta
constare possit, Tu verò longè beatior, qui, in ista potissimùm ætatæ quæ, ut ais, restitutionis
beneficium admittere adhuc posset, jam consecutus sis, ut et utramque scientiam, et tua et utriusque
dignitate, capessere possis, si voles, et velle debeas, quia potes.
At hic videor mihi videre hæsitantem te, quænam illa conditio sit quam admisi : « Si una
nos vivere Deus volet. » An fortassis quôd eventurum sperem ut in sanctissimo illo vestro collegio
canonicatum brevi ambiam, et liberalitate vestra tuaque præsertim authoritate adipiscar ? Sed à
dilectissima conjuge prius impetraverim ut mortem optet et oppetat, quàm ut id patiatur.
Quid ergo ? Ad nostrum ego te, ad nostrum, inquam (vereor enim ne non exaudieris),
collegium voco, et quanta possum contentione [374] hortor ut senatoriam dignitatem, non jam
ambias, sed summis meritis tuis tam honorificè novoque exemplo oblatam alacriter suscipias,
præsentemque urgeas occasionem : non quôd verendum sit, si te respicis, ne invitum te unquam
effugiat, sed ut tantò longiores dulcioresque dignitatis tuæ fructus percipias, cujus nec minima pars
illa futura sit quôd, in tanta rerum omnium perturbatione tamque perdita temporum conditione,
tam citô vereque dignus habitus sis qui ad eam promovereris.
Quid verò esse potest quôd te remorari aut ad cunctandum movere debeat ? An non et
Episcopos et Abbates habemus, et, ut de re judicata præscribam ne dubitationi locus relinquatur,
nonne ipsum quoque Ecclesiæ vestræ Præpositum, decessorem tuum, virum clarissimum, mihique
præ cæteris omnibus, nescio quo bono fato, familiarissimum, eumdemque Imperatorem808 et
theologiæ deditissimum, senatorem habuimus ? An non et sacerdotes sumus, et sacrosancta
divinarum et humanarum rerum mysteria tractamus ? An non denique et breviarium (si inter seria
jocari me pateris), quoties in secreto auditorio lites ex breviario, recitamus ? Quid autem vel tibi
gloriosius, vel amplissimo ordini honorificentius, vel denique bonis omnibus optatius, quàm inter
eos te sedere, quorum dignitas tibi communis, et illustriorem tuam reddere et ex tua accessione
illustrior ipsa fieri possit ?
At revocaret te, inquies, ea functio ab institutæ vitæ studiorumque ratione, Imô admoneret
potiùs, quamquam admonitione nulla eges, uti teipsum et tibi et nobis semper ad imitandum
proponeres, et quibus studiis eam tibi pietatis et sçientiæ famam comparasses quæ tante dignitatis
materiam peperisset ea perpetuò sectareris. Nec erit tibi difficiliùs à Principe et Senatu quàm ab
ipsa jurisprudentia impetrare, ut et potiores et quantas voles theologiæ boras largiare. A me etjam,
quem in eo pertinaciorem contradictorem vereri deberes, idipsum te facilè impetraturum recipio ;
quippe qui nimis feliciter et cùm jurisprudentia et mecum actum putabo, si te aliquando senatorem
et, ut voluntatis ita dignitatis communione, fratrem dicere potero.
Et verò, si tantùm mihi tribuis ut, quia sic volo, jurisprudentiam, cui repudium mittere
cogitabas, in gratiam recipere paratus sis, quidni ea quoque tibi persuaderi patiare, quæ sunt
prorsus çonsequentia, et tibi longè magnificentiora, mihi jucundiora, ipsi quoque Reipublicæ,
808 François Empereur, à qui saint François de Sales avait succédé dans la dignité de Prévôt de l'Eglise cathédrale de
Genève.
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cujus præcipuam rationem semper haberi æquum est, utiliora ? [375]
Non te hortor ad vanam illam gloriam, quam à te tantùm abesse scio quantùm à Christiano
pioque viro, ad veram gloriam nato, abesse debeat, quæque, etiamsi ex hominum existimatione
aucupanda esset, sequi tamen, non appeti deberet : sed hoc unum contendo, nihil esse quod tu, vel
tua vel mea vel denique publicæ utilitatis causa, libentiùs concedere et præstare debeas ; quo magis
mihi sperandum est, non commissurum te uti minorem dignitatis tuæ quàm voluntatis rationem
habuisse videaris
_____
III
Chambéry, 30 novembre 1593.
Amplissimo viro Francisco De Sales, Præposito Ecclesiæ Gebenensis,
Antonius Faber salutem dicit.
809Mihi verò jam longior ista cessatio videbatur ; neque tamen tam eo nomine molesta quùd
nullas ad me literas mitteres (quamquarn hoc ipsum esset molestissimum, nisi vel ex eo maxime
cognoscerem quod malo, gravioribus te intentum studiis ocio minùs abundare) quàm quia
subvereri inciperem ne quid adversi vel tuæ valetudini accidisset vel meis literis, quas Octobri
superiore, cùm apud Sebusianos meos feriarer, binas ad te longissimasque exararam. Quas enim
proximè dedi viro clarissimo D. Rogeto810, senatori nostro, et ut video gaudeoque, utriusque
nostrum amantissimo, ut pro sua erga me benevolentia perferri ad te curaret, eas tibi redditas esse
certò scio.
Peropportunè autem anxio mihi obtigit adventus D. Porterii811, viri optimi mihique jam
inde à multis annis cogniti ; qui primo statim congressu rogatus à me quàm benè haberes et num
quid à te literarum, respondit valere te optimè, literasque pro salutatione missurum fuisse
confirmavit, si non eodem fere instanti ab urbe fuisset tibi decedendum. Utrumque sane quàm fuit,
ut esse debuit, jucundissimum, sed hoc mihi ad plenam defuit voluptatem quòd de prioribus meis
literis intelligere nihil potui ; quæ si aut interceptæ essent, aut, quod vix credo, deperditas, ferrem
equidem gravissimè, et eo penè animi affectu quo ferre soleo illa ipsa quæ ad publicam jacturam
pertinent.
In quo si me tu minus verecundum putas, ne dicam impudentem, qui tantùm mihi arrogem
ut magnum aliquod Reipublicæ detrimentum illatum existimem si eas non acceperis, scito non
tanti me nugas et ineptias meas facere, nisi quoniam et ad te scriptas fuerunt et [376] de re ad
publicam, ni fallor, utilitatem spectante. Priores illas intelligo, quibus ego te tam enixis multisque
rationibus ad senatoriam dignitatem quæ tibi delata est capessendam cohortabar. Neque enim
magis publicè referre arbitror ut te senatorem omnes videant, quàm mea interesse ut qui videbunt
sciant quantùm mutuo amori nostro indulseris, qui meis potissimum, sive precibus sive consiliis,
persuasus sis, ut in hanc tam præclaram de Republica benè merendi occasionem traduci te paterêre.
Itaque mihi gratissimum erit si me ab hac suspicione et dubitatione liberaveris, sed longè gratius
(non enim dimittam te donec benè dixeris mihi) si voluntatem tuam à judicio meo nihil discrepare
testaberis, deque eo interim, ut desideria mea spe aliqua sustentem, aliquid ad me, si lubet,
rescribes. Igitur tuas literas expecto.
Benè vale, mi amicissime, meque, ut facis, ama.
Datum Chamberii, pridie calend. Decembris 1593.
A Monsieur
Monsieur De Sales,
809 Vide Epist. XII.
810 Vide p. 44.
811 Vide p. 34.
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Prevost en l'Esglise Cathedrale de St Pierre de Geneve.
A Necy.
Revu sur l'original conservé à la Visitation d'Annecy.
_____
IV
Chambéry, 11 décembre 1593.
Clarissimo viro Francisco De Sales, Ecclesiæ Gebenensis Præposito,
Antonius Faber salutem dicit.
812Siccine igitur te mihi tamdiu sors nostra invidebit, measque illudet expectationi ? At,
inquies, multùm distat à longissimo tempore mensis unus. Imò verò mensis hic, si mihi credis,
annus est qui in sequentem annum incidat, aut potius anni plures, apud me quem incredibile
videndi tui desiderium sic accendit ut ipsas etiam horas penè singulas pro mensibus numerem, et
invita quoque natura, ne dicam astrologia cujus planè sum ignarus, toto hoc hyemali solstitio dies
noctibus factas putem longiores. Quando tamen ita res fert, volo ego mihi quoque ipsi illudere, et
in longioris augurium felicitatis accipere si te in anni principio quàm si in fine videbo ; quamquam
si quæ mihi, quod nondum despero, ad te citiùs convolandi nascetur occasio, non ero tam
superstitiosus ut non malim incipere à fine : quod prudentiores, ex vulgari sapientiæ præcepto, scis
facere debere. [377]
Intereà expecto avidè literas illas quas brevi, bono, ut loqueris, argumento, scripturum te
fuisse insinuas. Nihil enim est quod commodius facere possis, ut dulcissimæ consuetudinis tuæ
suavitatem, quam toto animo jam amplector et deosculor, etiam desiderando sentiam, præsertim
cùm excellens quoddam argumentum illud fore necesse sit, si tu minus bonum istud vocas quod
posterioribus his tuis literis causam dedit, nisi fortè ad id respicis quod litium odio et execratione,
ut arbitror, inverecundus tibi et importunus videare, si pro inverecundo et importuno isto
litigantium hominum genere me interpelles.
Quod si ita est, patere, obsecro, me in hoc uno à te dissentire : non quoniam ea me ratio
litigatoribus asquiorem faciat, quòd inter eos et in mediis litium anfractibus assiduè versari me sit
necesse (tantò magis enim odisse deberem, cùm vel pulcherrimarum rerum oblectatio satietate
sordescat), sed quia multùm iis debere me sentiam qui, ut mihi per te commendentur, literas ad me
tuas deferre volent. Quid enim jucundius habere possim, quàm si ex his veluti testationibus
intelligam perspectam esse quàm plurimis cunjunctionem nostram, nec minus exploratum
quantùm me ames quàm illud etiam quanti ego vicissim te faciam ?
Itaque agam iis gratias tùm maximè cùm importuni tibi videbuntur, petoque à te ut mea
saltem causa eos in posterum ames, tanquam peropportunos amicitiæ nostræ nuncios et tabellarios.
Faciam si potero ut ad te redeant testes animi erga te mei, easdemque tibi gratias referant quas à
me acceperint, cùm sic habitos se videbunt ut negare non possint præcipuum apud me pondus
commendationem tuam habuisse.
Jam verò de patruelis tui causa, quam mihi commendas verecundiùs cùm pro tuo in me
imperio jubere potiùs debuisses, jam audieram quæ perorantes in publico auditorio advocati in
utramque partem disputaverant, et procurator Chappa813, ejusdem litis correus deque toto negotio
adprimè instructus, mihi omnia diligenter explanavit. Sic, obseçro, tibi persuade, in iis omnibus
quæ tu me præstare voles, id est, ut teipsum interpretari video, quæ salvo pudore et officio præstari
ab amicissimo viro possunt, non magis me tibi tuisque familiribus quàm mihi defutprum.
Amicissimus mihi est, quisquis amici mei se amicum probat. Neque facilè fero rigidos istos
Catones, qui apud probum judicem nullum amicitiæ aut commendationi locum relictum volunt.
812 Vide Epist. XII.
813 Vide p. 42.
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Sunt enim nonnulla quæ vel à severissimo judice amicus flagitare honestè ac pro suo jure possit,
quale illud imprimis ut bonam amico causam judex optet ; quod ipsum non parvi momenti est ad
impetrandum ut, si revera sit bona, [378] defendatur pertinaciùs, nec tam facilè per imperitiam aut
timiditatem deseratur. Cætera taceo quæ quotidie experiuntur, qui inter amicos et cognitos
litigatores judicandi munere sic funguntur, ut neque amicitiæ desertores videri velint, neque
improbiores fieri ut amiciores videantur. Quid enim amicitiæ tam contrarium quàm improbitas ?
Facis tamen tu injuriam, non probitati meæ, sed necessitudini nostræ et, si dicere audeam,
existimationi, qui ad me ita scribis quasi existimes Salesios ullos, quicumque tandem illi sint,
nedum patrueles tuos, aliqua egere apud me commendatione. Sed me ab hac ego injuria non
improbè vindicabo, et quibus officiis potero enitar ut se mihi commendatissimum fuisse gloriari
possit, non quia fuerit per te commendatus, sed quoniam is sit quem, cùm ex tuis esset, hoc ipso
mihi commendare non debueras quòd aliis minùs tuis commendare illum pro officii necessitate
debuisses.
Benè vale, mi amicissime, et me, ut facis, ama.
Datum Chamberii, 3 id. Decembris 1593.
A Monsieur
Monsieur de Sales,
Prevost en l'Esglise Cathedrale de Sainct Pierre de Geneve.
A Necy.
Revu sur l'original conservé à la Visitation d'Annecy.
_____
V
Chambéry, 20 décembre 1593.
814Clarissimo viro Francisco De Sales, Ecclesiæ Gebenensis Præposito,
Antonius Faber salutem dicit.
815Ego verò non solùm non misereor, sed etiam planè mihi gaudeo tibique ex animo
gratulor, de tam excellenti ista sacerdotalis dignitatis accessione. Gratularer ipsi etiam dignitati si
ad vulgare aliarum exemplum accomodari eam posse crederem. Nam in cæteris et amplissima et
propemodùm singularis veræ gratulationis materies illa esse solet, si quantùm ex dignitatis
acquisitione novo possessori laudis tantùm vicissim ex possessoris laudibus commendationis
dignitati possit accedere ; in ista verù nimjs impudens sim adulator si te, præsertim repugnantem,
eum esse dicam ex cujus meritis possit illa dignior fieri et illustrior. Etsi enim quæcumque
probitatis, pietatis et eruditionis exempla ab homine ullo vel singula sperari [379] possunt ea scio
expectari à te debere universa, quis tamen mortalium tantis misteriis pro dignitate exequendis par
esse queat quibus ipsi quoque immortales, ut sanctè vereque profiteris, omnino sunt impares ?
Sed tamen non potest ea res facere quominùs tibi gratulandum putem, quamvis ita me
affectum esse deceat ut in quo salutis tuæ periculum versari dicis, perinde ego debeam ac tu ipse
laborare. Illa enim me ratio consolatur quæ tibi per modestiam tuam fortasse minùs perspecta est
: quòd ad functionem istam probè capessendam dignitatis tantùm adferas quantum humanæ
condicionis imbecillitas patiatur, nec quicquam causæ sit cur in eo officio, quod tibi cum tot
sanctissimis viris commune esse voluit idem ille Deus optimus maximus quem tu ut debes suspicis
et vereris, prascipua quadam solicitudine angi velis ; nisi fortè hominem te natum pudet, cui nec
satis esset humanam condicionem cum angelica commutasse ut tanto muneri obeundo sufficere
(quomodo theologos tuos loqui audio) ex condigno posses.
814 Le texte latin de cette lettre est inédit.
815 Vide Epist. XIII.
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Te tamen maximè commotum esse, ut scribis, non solùm patior libentissimè sed etiam
lætor. Est enim id præclarum eximiumque argumentum et amoris tui erga Deum maximi et
observantiæ, quando nec aliter Deum amare nobis concessum est quàm timendo tremendoque, nec
sacrosanctæ religionis nostræ arcana sublimiùs venerari quàm enitendo, quoad ejus facere liceat,
ut quæ ne animi quidem cogitatione assequi possumus, verecundo saltem silentio et admiratione
prosequamur. Est omnino, ut scis, Divinæ Majestatis hoc proprium, ut tum maximè amari se
intelligat cùm timetur, agatque nobiscum tam liberaliter, ne dicam humaniter, ut timorem nostrum
pro amore habeat et, quod est consequens, humilitatem pro dignitate. Longè aliter quàm seculi
principes facere soleant, qui cùm amari sine timore possint, timeri tamen quàm amari malunt ;
unde illud etiam fit ut suorum metum pro odio nec abs re habendum existiment.
Atque utinam plerosque in consimili causa tui simillimos haberemus. Non essent in
sanctissimo sacerdotum ordine tam multi qui, pròh indignissimum facinus lachrymisque
sanguineis expiandum ! ad ambiendum sacerdotium tam inconsiderato ferrentur impetu, idque
assecuti tam irreligiosè tractarent ut dici nihil possit indignius. Putes aut nescire eos quis Ille sit
quem quotidie habent in manibus, aut non satis compertum habere nihil sacerdotio majus ac
divinius à Deo optimo maximo mortalibus datum esse. Sed quamquam ita est, nolim tamen sic te
commoveri ut perturberis, nisi ea fortasse perturbationis specie quæ divinæ gratiæ nuntia esse
solet, quamque [380] piorum animis tunc præcipué Deus inserit cùm cœlestes planeque divinas iis
parat consolationes. Sic Beatissimam Virginem in Angeli sermone turbatam legimus cùm cogitaret
qualis esset salutatio ; sic diloctissimos Apostolos in Transfigurationis fidem testes adscitos
cecidisse in facies suas, cùm ad æternæ felicitatis præmia gaudiaque jamjam delibanda essent
invitati ; sic denique mulieres sanctissimas cùm ad sepulchrum Domini venissent expavisse, viso
Angelo qui tam optatum gloriosissimæ Resurrectionis nuncium adferebat.
Ac sanè quid esse potest quod te tantopere debeat conturbare ? An humanæ naturæ
infirmitas ? An non verò et hominem te nasci Deus voluit et homines illos esse per quos juge illud
tremendumque sacrificium offerretur ? An ergo indignitas tua cum sacerdotii dignitate collata ? At
hoc ipso dignum te facis quod indignum esse agnoscis, nec tuæ est pietatis tam inverecunda
verecundia obsistere ne quò te Deus vocat trahitque ultrò evehi patiare. Gaude potiùs quòd non
cum terrestri principe tibi res est, qui quos ad dignitatem aliquam immeritos provehit sic ornare
nequeat ut ex imperitis eruditos faciat aut ex balbis oratores ; sed cum Deo illo cui non sit difficilius
dignum te sacerdotali dignitate facere quàm dignitatem ipsam conferre. Idem enim ille est à quo
evasit disertissimus qui legationem imperanti responderat : A, a, Domine, nescio loqui. Idem ille
per quem tam sanctus fortisque Rex factus est qui anteà non nisi belluis imperare didicerat. Is ipse
denique, ne cætera congeram quæ mihi ex officina tua petenda essent, cui inculta piscatorum
simplicitas pro sapientia fuit ad profligandam philosophorum insaniam.
Quare cùm ad istam omnium optimam vitæ rationem sis vocatus, tanquam Aaron, in eoque
proprium habeas conscientiæ tuæ testimonium (taceo enim, quod sciunt omnes qui te norunt, quot
quantisque difficultatibus impediri poteras ne tam sanctum institutum susciperes aut in suscepto
eo perstares nisi te solus divini amoris ardor inflammasset), quid aliud optandum tibi aut
faciendum restabat nisi ut vero nostro Aaroni sacerdotem te exhiberes secundum ordinem
Melchisedech ?
At ridiculus planè sum qui theologum ago, leviaque hæc mitto ad te cui longè preciosiora
domi nascuntur ; quamquam ut ineptire audeam cogis tu qui, in tanta celestium beneficiorum
abundantia quantam tibi jam obtigisse credendum est, non solùm participem me habere vis
consiliorum tuorum et, quod amicius est, intimiorum (sic) affectuum, verum etiam adjutore met
quasi consolatorem. In quo etsi nihil me præstare posse sentio quod vel tua erga Deum pietate vel
mea in te voluntate dignum videri debeat, putavi tamen faciendum uti quantum in me esset animum
tibi declararem meum, ut intelligeres [381] si quantum tibi me hoc nomine pro tanta benevolentiæ
significatione debere agnosco, tantundem referre possem non magis voluntatem mihi quàm
facultatem defuturam. Igitur, quod facere et possum et debeo, non te hortabor ad istam dignitatem
sic tuendam tractandamque ut appareat dignitatis functionem tibi cum multis communem esse
functionis verò dignitatem cum paucis (neque enim tu is es qui moneri aut excitari debeas), sed
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illum ipsum Christum qui sacrificator tecum erit supplex orabo, ut qui tam sancti propositi autor
fuit idem sit et adjutor perpetuus et remunerator, tantæque pietatis fructus in dies tibi præstet
uberiores et cumulatiores, in annos longissimos sola æternitatis commutatione finiendos.
Videbo te, ut spero, propediem et, si me nihil fallet, tam opportunè fortassis ut primis
sacrorum tuorum solennibus adesse possim. Quod si accidet, non tantùm in felicitatis tuæ partem
venisse me putabo, verùm etiam pro animorum nostrorum conjunctione felicitatem tuam quanta
tota erit in me transfudisse si non invidebis. Invidendi verò causa non suberit si cogitabis eodem
prorsus jure quæcumque mea erunt tibi etiam fore communia. Itaque me expecta, et benè vale.
Datum Chamberii, 13 calend. Januarii 1594.
His jam scriptis accepi literas à Girardo nostro816 quibus mirum in modum et gratulatur sibi
et agit mihi gratias de singulari tua erga se voluntate. Quantum autem tibi debere putet, etsi
pluribus ad me scribit, malo tamen ex ipsius te literis quàm ex meis cognoscere. Iterùm vale, mi
amicissime, et me ama.
A Monsieur
Monsieur De Sales,
Prevost en l'Esglise Cathedrale de Sainct Pierre de Geneve.
A Necy.
Revu sur l'original conservé à la Visitation d'Annecy.
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VI
Chambéry, 31 mars 1594.
Fratri dulcissimo Francisco De Sales, Ecclesiæ Gebenensis Præposito,
Antonius Faber salutem dicit.
817Silentii mei votum, ut ego nunc quidem agnosco, improbum fregit lectio tuarum
literarum, ex quibus cognovi in tanta ista taciturnitate [382] nihil minus quàm tacendi animum te
in votis habuisse. Itaque rescribo ad te, ut intelligas id unum mihi votum esse foreque perpetuum,
ut voluntates et actiones meas omnes ad exemplum tuum accommodem.
De Tullianorum negotio818 quod habes, gratiam facis tu liberaliter, qui in beneficiorum loco
ponis officia quæ à me sine scelere prætermitti non potuerunt. In Millierei819 causa feci quod
impræsentiarum fieri potuit, curaboque in cæteris omnibus ut commendationis tuæ memoriam
sentiat apud me manere alta mente repostam.
De mea ad vos profectione nihildum habeo constituti, sed si quid me morabitur, tuum erit
quam mihi jam pridem dedisti fidem præstare et ad nos venire ; hic enim videre te quàm Necii
malo.
Intereà benè vale et in Christo lætus sanusque vive.
Ex urbe et ex tempore pridie calend. Aprilis 1594.
A Monsieur et Frere,
Monsieur De Sales,
Prevost en l'Esglise Cathedrale de Sainct Pierre de Geneve.
A Necy.
Revu sur l'original conservé à la Visitation d'Annecy.
816 Vide p. 84.
817 Vide Epist. XIX, XX.
818 Vide pp. 55, 57.
819 Vide p. 58.
243/318

25.4 Page 244

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VII
Chambéry, 2 septembre 1594.
Fratri suavissimo Francisco Salesio,
Ecclesiæ Gebenensis Episcopo et Principi designato,
Antonius Faber salutem dicit.
Benè vale, Frater dulcissime, suavissime, mellitissime, iterum atque iterum vale. Jamjàm
ad te advolo, quando terrestre iter in tanta imbrium abundantia nullum superest. Non possim ad te
aut scribere breviùs, aut ire citiùs. Ego valeo ; benè est si vales. Iterum ergo, tu, cum Salesiis tuis
Salesianisque omnibus, benè vale.
Ex urbe, 4 non. Septembris 94.
Ad literas tuas quia non rescribo, quàm primùm ex ore respondebo.
A Monsieur mon Frere,
Monsieur De Sales,
Prevost de l'Esglise Cathedrale de Sainct Pierre de Geneve.
A Necy.
Revu sur l'original inédit, conservé à la Visitation d'Annecy. [383]
_____
VIII
Bonneville, 27 septembre 1594.
820Fratri dulcissimo Francisco De Sales, Ecclesiæ Gebenensis Præposito,
Antonius Faber salutem dicit.
821Nihildum habebam quòd ad te scriberem, Frater dulcissime, cùm hæc mihi tam præclara
sese obtulit scribendi occasio, nisi hoc ipsum quòd nihil habebam. Cur enim certiorem te faciam
quantum ex absentia tua mœroris contraxerim ? Id ita futurum esse, et ego jam tibi prædixeram, et
tu, etiam tacente me, credere non solùm potes sed etiam debes.
Nebulones istos Deus malè perdat si diutiùs in tenebris versabuntur, quarum fugandarum
gratia lux mihi mea erepta est ! Quamquam id ipsum est quod me maximè consolatur, quòd de
præclaris tuis conatibus tam benè spero quàm qui optimè, nec dubito quin tuam et industriam et
diligentiam, sed præcipuè pietatem, Deus optimus maximus sit fortunaturus.
Mitto ad te versiculos quibus ex itinere in hæreticos seriò jocatus sum ; si e re videbitur ut
eos Baroni nostro822 legendos exhibeas, non recuso. Sed illud etiam à te peto, ut emendes quæ
putabis et elegantiùs scribi potuisse et argutiùs ; vellem enim dignos fieri qui ubique gentium
legerentur ac insculperentur. Prætermittebam quòd scire te non nihil interest, quamquam nec erit
novum : hodie, si Deus volet, senator noster D. Rogetus, qui te salvere et bono animo esse jubet,
mecum ad parentes nostros Salesium versus proficiscitur. Rem faciemus, ut confido, parentibus
gratissimam, mihi verò tanto jucundiorem quanto suaviorem apud vos experiar, non tantùm
nominis tui recordationem, sed ipsam quoque penè expressam in materna facie vultus tui
820 Cette lettre est inédite, sauf le deuxième alinéa.
821 Vide Epist. XXXIII.
822 Vide p. 91.
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imaginem.
Benè vale, Frater dulcissime, et me, ut soles, ama.
Ex Bonavillano oppido, 5 calend. Octobris 1594.
Monsieur mon Frere,
Monsieur De Sales,
Prevost de l'Esglise Cathedrale de Sainct Pierre de Geneve.
A Chablaix.
Revu sur le texte inséré dans le Ier Procès de Canonisation. [384]
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IX
Annecy, 10 octobre 1594.
823Fratri dulcissimo Francisco Salesio,
Ecclesiæ Gebenensis Præposito et Pontifici designato,
Antonius Faber salutem dicit.
Nequedum habui, Frater charissime, cui poterim literas ad te dare neque occurrebat ferè
quod scriberem. Nam quæ de sacrosancti Episcopi nostri824 optimorumque omnium gratulatione
scribi possunt, ea tu et reputare tecum pro prudentia tua debes et ex consobrini tui fidelissimi
relatione jam cognoscere potuisti ; quæ verò proprie mea sunt, id est, quàm ex absentia tua dolorem
capio, etsi non ab alio quàm à meipso te intelligere æquum est, vereor tamen ne videar importunus
si hanc amoris erga te mei significationem adferam, quæ tam insigne pietatis tuæ officium aut
quam ex officio percipis voluptatem incommodè interpellet.
Illud scito in summa omnium expectatione esse quid præclarus iste conatus enixurus sit ;
non quòd quisquam verendum existimet ne tu ea omnia præstare non possis quæ ab eximio et omni
ex parte præstantissimo viro expectari debeant, sed quoniam tibi cum eo genere hominum res est
ut verendum sit potiùs ne, cùm omnia præstiteris, margaritas ante porcos sparsisse videaris.
Itaque, sic plerosque omnes affectos video : ut si feliciter res cedet, laudatores habiturus sis etiam
improbos et perditos viros, non laudandi tui studio vel impetu elatos, quod esset infamiæ
proximum, sed virtutis veritatisque viribus fractos ; sin, quod abominor, aliter eveniet, boni sanè
conatum laudabunt nec nisi hæreticorum insaniam accusabunt, pessimi temeritati tribuent quòd
industriæ potiùs et charitati Christianæ acceptum ferre deberent : omnes planè fatebuntur, neque
animum tibi defuisse ad audendam rem maximam neque ingenium ad agendam, sed seculi potiùs
felicitatem ad peragendam. Nec ullos ferè puto tam iniquos bonarum rerum et alienæ solertiæ
æstimatores, ut non plus tibi laudis ex propria industria quàm opprobrii ex aliena infamia accedere
debere existiment.
Me hoc unum malè habet quòd parentem nostrum optimum de tua salute adeo anxiè
laborare animadverto, ut vix persuaderi à me [385] possit nullo te ingeri periculo, ac ne quidem
(sic enim existimo) ulla periculi suspicione. Confirmo tamen, quantum in me est, et bono animo
esse jubeo, id sæpissime adseverans, de quo te non puto dubitare, numquam me abs te discessurum
fuisse si quam tibi vel minimam suspicandi periculi causam relictam existimassem.
Ego te proxima ut spero hebdomade videbo, et ut patri tuisque omnibus restituam, dabo
operam ut successorem habeas Spiritum Cappucinum825, jamjam hunc venturum, et si qui alii erunt
(neque enim adhuc exploratum habeo) quos Episcopus noster in locum tuum substituere volet. Te
interim valere et bono animo esse cupio ; nam si juberem, vereor ne tu me gallicè potiùs quàm
823 Les cinq premières lignes de cette lettre, ainsi que les lignes 6-9 et 13-33 de la page suivante sont inédites.
824 Vide p. 94.
825 Vide p. 237.
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latinè locutum putares, quasi prudentiæ et constantiæ tuas diffiderem, quæ mihi omnium maximè
est explorata. Quid tamen hactenus profeceris, aut in posterum profici posse speres, vellem jam ex
tuis literis intellexisse ; gratissimum erit si quod tuo commodo facere poteris nonnihil ad me de eo
rescribes ; versor enim in maxima animi, non solùm anxietate sed etiam perturbatione, non tam
quòd hinc absis, quàm quia tibi adesse non possim, tecumque et diligentiæ et periculi societatem
inire, ne alioqui leoninam826 contraxisse videar, si nulla laboris et incommodi parte suscepta laudis
tuæ particeps fieri velim.
Mitto ad te Locatelli nostri827 literas, tui meique amantissimas, ut quando aliter non possum
amicissimi fratris memoria te oblectem. Baroni nostro, Domino Servetano828 cæterisque
nobilissimis viris quos nunc in castris habes, plurimam, si placet, sed consobrino tuo meoque
Salesio potissimam salutem.
Benè vale, Frater suavissime, et quo graviore urgeris hæreticorum numero, eo magis crede
me tibi et amicissimum esse et nil morante locorum intervallo conjunctissimum. Iterum vale.
Ex temnore, Necii, 6 idib. Octobris 1594.
A Monsieur mon Frere,
Monsieur De Sales,
Prevost de l'Esglise Cathedrale de Sainct Pierre de Geneve.
Aux Allinges.
Revu sur le texte inséré dans le Ier Procès de Canonisation. [386]
_____
X
829Fratri suavissimo Francisco De Sales,
Ecclesiæ Gebenensis Præposito et Pontifici designato,
Antonius Faber salutem dicit.
830Cùm hæc tibi epistola reddetur, mi Frater, cupio magnoperè ne ad risum paratus sis et
solutus. Ego enim nudis ut aiunt lentibus video ; ita undique occurrunt læta omnia quæ scribam.
Primum illud est quòd tuas accepi literas dulcissimas, suavissimas et, ut meis mala fide tametsi
bona mente objicis, Ciceronianas planè, quando non pateris ut dicam Athenienses ; quid enim mihi
potuit esse jucundius ? Præsertim ex illa parte qua significas id, de quo non dubitabam, nec ullam
te scribendi occasionem prætermissuram nec amandi mei finem umquam facturum esse ; nam
cætera quæ tu tam faciliter et eleganter de vale nostro gallicè latineque rescribis, etsi demulcent
mirum in modum, ne tamen tam jucunda esse possint illud facit quòd absentiæ nostræ memoriam
efficaciùs renovant, nec patiuntur ut tam facile mihi possim imponere cùm te præsentem videri
volo.
Secundum est quod scire te mea refert. Natus est nobis felicissimo partu filius, junior
(dicamne an senior ?) mense uno quàm speraram, neque enim partum ante calend. Decembris
expectabam. Quòd nobis non mihi natum dico, quamquam mirari non potes qui omnia mea tecum
communia esse jampridem voluisti, minus tamen miraberis cùm pulcherrimum et suavissimum
(sic enim adrelatum est) videbis ; patrem namque in eo ut te habeat necesse est qui me habere non
potest. Optabam mirabiliter ut si pater videri nolles, ne multorum qui nostram illam mirificam
unitatem minus norunt animos offenderes, compater saltem esses, ne unum hoc vinculum
conjunctioni nostræ deesset, melioribus licet ac fortioribus colligatæ ; sed occupavit Guichardus
826 Cf. Digest., l. XVII, tit. II, lex 29.
827 Vide p. 81.
828 Vide p. 108.
829 Cette lettre est inédite, sauf le cinquième, le sixième et le septième alinéa.
830 Vid. Ep. XXXVI, XXXVII.
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noster831, cogitque ut in annum proximum necessitudinis hujus accessionem differri oporteat,
quam tamen jam inde ab hac hora volo te pro petita habere, cùm habeam ego pro impetrata.
Tertium est quod te scire volo. Egi cum patre nostro observantissimo de canonicatu, et qua
ille est in omnes humanitate et erga me propensione obtinui facillimè quæ volebam, factus paulo
impudentior in tam aperta tuisque literis tam mirificè expressa voluntatis erga [387] Rolandum832
tuæ significatione. Rei executio in Decembrem proximum dilata est, quòd eo mense ut audio
canonicatuum vestrorum collatio ad vos pertineat. Faciam ut Rolandus noster intelligat non solùm
peracta feliciter omnia, sed etiam quantum tibi hoc nomine debeat, quantum etiam patri, qui
Domini de Sacconex precibus urgebatur ut fratrem suum Comitem Lugdunensem833 honore isto
dignaretur. Non te pœnitebit collati in amicissimum tuique amantissimum virum beneficii ; qui
sicut de tuo erga se studio numquam dubitavit, ita sibi facile persuasit neque alio quàm te apud
patrem intercessore neque ullo sibi apud te adjutore opus esse ; officium tamen meum imploravit
ideo fortasse ne inviderem si tuus magis esse vellet quàm meus, aut potiùs ut socium obligationis
sibi quæreret, nimis (minus ?) suis fidens facultatibus quàm ut tantum tibi solus debere vellet.
Restat ut Necio tuo discedens salutem tibi plurimam impertiam. Vale enim non dicam, ut
agendum aliquid supersit quod me huc proximo quoque tempore reducem faciat. Nec rursus
æquum est ut absente me valere te jubeam qui absente te vix valere possim ; præsertim mense
proximo, quo neque tecum vivere licebit neque cum uxore dormire, nisi fortè postremum hoc
potiùs ad valetudinem meam conferat. Quo magis æquum erit, quantum otii et commodi uxoris
accubitus afferet tantùm me conscribendis expediendisque Conjecturis nostris834 impendere.
Faciam te de omnibus certiorem, habeboque ut spero crebriores post hac tabellarios, qui
meas ad te literas perferant, non in istam solitudinem in qua nunc degis, sed in urbem hanc, ad
quam te brevi ut prævideo revocabit, non solùm parentis nostri observantissimi votum, sed etiam
et Episcopi amantissimi jussus. Sic enim inter eos, me præsente, multis sermonibus actum est de
te revocando tibique dando successore. Miram animadverti patris impatientiam, dùm et saluti tuæ
diffidit et se diutiùs tantis Baronis nostri erga te beneficiis, aut potiùs officiis, onerari premique
molestè fert. Episcopus pro sua prudentia verebatur ne multùm de tuis laudibus detraheretur, si
quo tempore magis enitendum esset ut pietatis industriæque tuæ fructus aliquis constaret, eam de
te homines opinionem conciperent ut peragendi animum tibi potiùs quàm facultatem defuisse
suspicarentur.
Ego verè, cujus maxime interest non tantùm te salvum esse, sed etiam sic de me sentire ut
neque minùs te amare videar quàm à parente ipso ameris, neque minùs prudens providensque quàm
senatorem deceat, id unum verebar : ne aut minùs amare viderer parenti nostro si cum Episcopo
sentirem, aut minùs prudens Episcopo si parentis consilium adprobarem. Dixi tandem videri mihi
totam rem istam tui esse debere consilii et judicii, ut si nihil istic profici posse [388] videres,
majorem salutis tuæ paternique desiderii quàm tuæ laudis rationem haberes (neque enim dubito
quin ex conatibus istis, tametsi, quod abominor, irriti forent, eo major tibi laudis materia paretur
quo longiores erunt et, ut ita dicam, quando tibi cum obstinatissimis res est, obstinatiores), sin verò
benè sperares, non committeres ut ex præcipuis laboribus et victoriis tuis successori tuo, quisquis
ille futurus sit, triumphus quæreretur, sicut etiam quod te magis ut scio movebit, ut tanti momenti
res prosperè inchoata successoris tui sive inscitia sive minùs felici industria concideret.
Vides quàm egerim ex bona fide et ut amicum decebat, qui adversus mea commoda pro tua
dignitate etiam contra patrem laborarim. In quo tamen satis mihi fuit officio paruisse, succubuisse
verò etiam perjucundum. Placuit enim communibus utriusque parentis votis, nec me valdè
repugnante, ut jamjam redire et successorem accipere jubereris. Cupio ex tuis literis intelligere
quid tu aut feceris aut facere constitueris ; mihi probabuntur omnia quæ tu e re et dignitate tua esse
putabis, si tamen primæ salutis tuæ quæ mihi mea charior est habueris ut par est rationem. Benè
vale, mi suavissime, et me, ut facis, ama.
831 Vide p. 96.
832 Vide p. 96.
833 Cf. p. 305.
834 Vide p. 180.
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Necii, pridie calend. Novembris 1594.
Endo procinctu. Baronem nostrum, Servetanum cæterosque nobiles salutatos velim, sed
præcipuo quodam studio nostrum consobrinum. Iterum vale, sed ita ne vale tibi à me dictum putes.
A Monsieur mon Frere,
Monsieur De Sales,
Prevost de l'Esglise Cathedrale de Sainct Pierre de Geneve.
Aux Allinges.
Revu sur le texte inséré dans le Ier Procès de Canonisation.
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XI
Chambéry, 8 novembre 1594.
Fratri dulcissimo Francisco De Sales,
Ecclesiæ Gebenensis Præposito et Pontifici designato,
Antonius Faber salutem dicit.
835Ovabam, môx, ut mihi videbar, triumphaturus de Thononiensibus, Frater suavissime,
cùm primam literarum tuarum legerem, in qua scriptum erat magno te et præcipuo quodam ab iis
beneficio aftectum esse ; postea verò quàm ex reliqua lectione comperi quid sentires, in eo uno
scilicet de te benè meritos Thononienses quòd quidam ex iis meas tibi literas reddiderat, cognovi
quàm parùm tibi [389] mihique de istorum animis studiisque sperare liceat, si tam leve, in re tam
pusilla officium magni beneficii loco constituendum videatur.
Facis tamen tu non solùm liberaliter, sed etiam Christianè, utrumque autem ex bona fide,
qui et magna putes omnia quæ à me ad te proficiscuntur, nec prius de perditissimorum hominum
salute desperare velis quàm desperandi finem perditio ipsa afferat. Est sanè quòd iis habeam
gratiam de meis literis tam fideliter tibi redditis ; nam cùm vix ignorare possint quanta sit inter nos
animorum voluntatumque consensio, credibile est non valdè tibi infestos esse qui erga me adeo
fuerint officiosi.
Scripsi ad te non ita dudùm quid de toto isto negotio parens noster suspicaretur, quid
Episcopus speraret, denique quid ego sentirem. Non patiuntur temporis angustiæ quibus premor ut
vel repetam vel pluribus me explicem, præsertim cùm nec sit necesse : neque enim dubito quin tibi
literæ meæ redditæ sint, tuque pro singulari prudentia tua jam ex te constitueris quid me tibi
consulere, hoc est, quid te facere opporteret, prius etiam quàm literas meas accepisses. Jam
intelligere cupio quid feceris aut faciendum decreveris.
Mitto ad te Patris Cherubini literas, mihi nudius tertius redditas, quas vir ille optimus et
religiosissimus mihi, ut videbis, tecum communes esse voluit, in hoc uno fortassis minùs cautus,
quòd universalem illam bonorum nostrorum omnium communionem quàm habet perspectissimam
ignorasse videatur. Reddes, si placebit, cùm perlegeris, et mittes quas ad Guichardum nostrum
dare te velle profiteris ; eas ut ille accipiat curabo majore quàm anteà, non fide, sed diligentia. Ut
verò gratas habeat, facile impetrabit non tantùm summus erga te amor suus, sed etiam mellitissima
illa eloquentia quæ Thononiensium quoque barbaros licet animos alliceret et conciliaret, si tam
faciles illi se auditores præberent quàm te disertum et efficacem oratorem experirentur.
Uxor mea et filioli omnes benè valent, teque salutant quotquot loqui sciunt ; ego pro me
meisque omnibus tantam tibi salutem dico quanta non possim mihi meisque omnibus majorem,
consobrino nostro, quando per te licet, nec minorem. Benè vale, mi suavissime, et Fabrum tuum,
ut facis, ama.
835 Vide Epist. XXXVI.
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Ex urbe, 6 idib. Novembris 1594.
A Monsieur mon Frere,
Monsieur De Sales,
Prevost de l'Esglise Cathedrale de Sainct Pierre de Geneve.
Aux Allinges.
Revu sur le texte inséré dans les deux Procès de Canonisation. [390]
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XII
Chambéry, 25 novembre 1594.
Fratri suavissimo Francisco De Sales,
Ecclesiæ Gebenensis Præposito et Pontifici designato,
Antonius Faber salutem plurimam dicit.
De tuo, mi Frater, ad Necienses nostros reditu, etsi ex multorum sermonibus audiebam, ne
tamen facilè possem credere illud faciebat quòd nullis à te literis de eo certior factus essem, quas
cùm multis de causis avidissimè expectabam, tùm ob hoc maximè ut scirem venisses ne tantùm an
etiam rediisses. Occurrebat enim quod de Attilio Regulo apud Pomponium nostrum quodam loco
legere memineram, cùm à Carthaginensibus Romam missus esset, non visum eum postliminio
rediisse, quia dixerat se reversurum nec animam habuerat Romæ remanendi. Etsi namque
subverebar ne qua temporis prorogatio et desiderio meo et labori tuo accederet, malebamque te
ubivis gentium quàm inter perditos et desperatos istos helluones vivere, tamen non dubitabam quin
si quid aut jam proficeres, aut longiore molestia profici posse sperares, nihil tibi adeò durum aut
difficile videretur quod non facilè concoqueres, ne tam præclari instituti te umquam pœniteret.
Nunc verò mirificam capio voluptatem ex constantia consilii tui, cujus audio majores
quotidie fructus tibi totique Reipublicæ Christianæ constare, inclinata jam ad partes nostras
Victoria, paratoque triumpho de Avullæo cæterisque non minorum dumtaxat gentium, ut sibi
videntur, diis, sed melioris etiam notas adversariis ; quorum alios intelligo, argumentorum tuorum
sola recitatione fractos, aspectum congressumque tuum fugere, (quid verò, Deus bone ! si dicentem
et disserentem audissent ?) alios, oblatæ disputationi impares, scripto agere decrevisse, hoc ipso
impudentes quòd chartam, quamtumvis mendacem et impudentem, non putant erubescere posse.
Sed hæc omnia, cæteraque hujus generis quæ me singulari oblectatione afficiunt, essent
multo jucundiora si mihi per te, non per alios, essent explorata. Quamquàm enim te scio eum esse
qui laudes tuas ne audire quidem libenter, narrare verò multo minus velis, tuam tamen modestiam
hac in re illud frangere deberet quòd de iis nihil possis detrahere quin tantumdem ferè ex Dei
optimi maximi gloria, ad quam omnia ut debes refers, detrahatur.
De me nihil est quod scire te putem oportere. Quid enim publicas [391] privatasque de
temporum injuria querelas ad te deferam, aut cur velut in picta tabula ponam tibi ante oculos
profugam ad me socrum836 cum liberis, quos misera nostra tenebat Sebusia, amissos biennii ferè
integri redditus et facultates penè omnes quæ per lasciviam exercitus eripi diripique potuerunt,
cæterarum, quarum amissio paulò difficilior est, jacturam nec dubiam ab hostibus imminentem ?
Malo te ista vel omninò nescire, vel ex verbis quàm ex literis meis intelligere, ne tu pro
singulari tua erga me voluntate, magis mea causa commoveare quàm ego ipse, qui fero, non dicam
omninò constanter et indolenter, sed tamen ita moderatè ut appareat « nihil me humani à me
alienum837 » putare ; nam præter id quòd jam inde à multis annis omnimodo eventura ista
prævideram, nisi Deus à nobis averteret quem ipsum nos à nobis avertimus, illa quoque me non
836 Vide p. 70, not. (172)
837 Vide p. 113.
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25.10 Page 250

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parùm juvat consolatio, miserrima quidem sed tamen efficacissima, tot tantisque nos infortuniis
premi non posse ut non plura gravioraque, et pati possimus et expectare debeamus.
Magis me illud afficit et perturbat quôd nos omnes video in communibus maximisque
periculis versari, ipsamque rempublicam, cujus malis et incommodis non moveri tam sit insipientis
quàm moveri propriis. Erit mihi adversùs ingruentia omnia præcipuum solatium, si tu me amare
perges et votis tuis piisque ad Deum optimum maximum precibus adjuvare, literis quoque et
exhortationibus ad miserias istas publicas privatasque tolerandas, quanta poteris ope ac diligentia
confirmare. Itaque tuas literas quàm primùm expecto.
Benè vale, Frater suavissime, et consobrinum nostrum, itemque D. Servetanum,
cæterosque nostri amantissimos, meo, si placet, nomine salvere jube.
Ex urbe, 7 calend. Decembris 1594.
Monsieur mon Frere,
Monsieur De Sales,
Prevost de l'Esglise Cathedrale de Sainct Pierre de Geneve.
A Thonon.
Revu sur le texte inséré dans les deux Procès de Canonisation. [392]
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XIII
Chambéry, 3 décembre 1591.
838Fratri suavissimo Francisco De Sales,
Ecclesiæ Gebenensis Præposito et Pontifici designato,
Antonius Faber salutem dicit.
839Penè accidit, mi Frater, ut proficiscenti ad te Locatello nostro nullas dederim literas, non
ob id solùm quòd earum usus minus necessarius videretur præsente te, quem tu alterum me
existimare hoc ipso debeas quòd alterum te esse scis, sed etiam ne amantissimi et disertissimi
fratris aut voluntati aut eloquentiæ diffidere viderer. Sic enim dixerat et receperat facturum se, si
nihil scriberem, ut nullas tibi antehac à me præstantiores literas redditas faterere.
Verùm placuit temperamentum ut neque nullas omninò neque prolixas darem, præsertim
cùm exarandæ longioris epistolæ facultatem angustia temporis denegaret. Scribam igitur, quantum
dumtaxat necesse erit, ne dulcissimum scribendi officium ultrò intermittere videar, rursùm ut
significem redditas mihi tuas posteriores literas, in quibus cùm amantissima omnia fuerunt, tùm
illud etiam honorificum, quòd petitioni meæ de compaternitate tam liberaliter subscribis. Quæ res
me movet ut beneficii hujus amplissimi, licet tacitam conditionem habeat : si quis filius mihi
nascitur, tamen non tam spem quàm præsentem fructum animi cogitatione hauriam. Id enim
occurrit quod prudentibus nostris placere scis : pure promissum videri quod sub conditione
omnimodè extitura promittitur.
Tuas de hæreticis præclaras victorias plures majoresque in singulos dies audio, tibique eo
nomine ut et toti Christianæ religioni mirificè gratulor, vel ob id maximè quòd ex ipsis Episcopi
nostri literis intellexi conatus istos Serenissimo Principi nostro, non tantùm perspectos esse, sed
etiam probatos dignosque visos quos omni studio ac voluntate prosequi et adjuvare deberet.
Quæ sic me apud Senatum tui honoris causa curare oportuit jam perfecissem, nisi
quorumdam superstitiosa religio, ne quid gravius dicam, obstitisset ; quibus visum est ante omnia
faciendum ut tanta Episcopi erga te voluntas subscriptione aliqua constaret. Scripsi ea de re ad
838 Cette lettre est inédite, sauf le troisième alinéa.
839 Vide Epist. XXXVII.
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26.1 Page 251

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Episcopum itemque ad Deageum nostrum840, quibus scio majori id quàm tibi cura futurum. Quare
nec te rogatum volo ut [393] aliquam mihi tibique in hanc rem præstes diligentiam, sed tantùm ut
D. Deageum roges meo nomine ne quam in ea re quæ citò expediri possit moram fieri patiatur.
Habebis epistolam Albiensis nostri Episcopi841, mox Guichardi quoque, ut is ad me scripsit,
habiturus à Patre Cherubino842 et Girardo ; si quas ut spero accepero, brevi ad te perferandas
curabo. Benè vale, Frater suavissime, et me, ut soles, amare perge, Salesiisque nostris et Salesianis
omnibus, itemque confratribus, plurimam, si placet, salutem.
Ex urbe et ex tempore, 3 non. Decembris 1594.
A Monsieur mon Frere,
Monsieur De Sales,
Prevost de l'Esglise Cathedrale de St Pierre de Geneve.
A Chablaix.
Revu sur le texte inséré dans le Ier Procès de Canonisation.
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XIV
Chambéry, 1er janvier 1595.
Fratri suavissimo Francisco De Sales,
Ecclesiæ Gebenensis Præposito et Pontifici designato,
Antonius Faber salutem dicit.
Cùm opportune omnia mihi abs te veniunt, mi Frater, tùm nihil umquàm opportunius, quàm
quòd hoc ipso die qui dandis accipiendisque xeniis faustus creditur, reddidit mihi Filliardus tuas
illas amantissimas literas, cæterarum, ut ais, obsignatorias quas anno superiore tam multas tamque
elegantes, ut ad me scriberes incredibilis immensusque amor erga me tuus coegit. Itaque noli
quærere quanta me voluptate perfuderint ; nam cùm toto isto novendio mihi in mentem veniret
illius (illud ?) temporis quod Necii, annus unus est, tam suaviter tecum transegeram, nec facilè
ferrem, auctis tantoperè amandi tui rationibus, præreptum mihi usum dulcissimæ consuetudinis
tuæ, commodissima fuit ea consolatio quam literæ tuæ attulerunt, in quibus utinam oris istius
castissimi oculorumque quos semper in oculis fero vivam imaginem tam benè expressisses, quàm
expressisti præclarè magnitudinem animi studiique in te mei !
Unum illud facere poterat me Thononiensibus qui te fruuntur invidere, unaque succensendi
non minor quàm invidendi causa esset, [394] quòd te cùm habeant, frui tamen nesciunt, nisi
scriberes incipere eos sapere, tuisque conatibus favere ; quo nomine, quantùm tibi totique
Reipublicæ Christianæ gratulor, potes tu faciliùs ex gratulandi ratione et necessitate conjicere
quàm ego verbis aut vultu explicare. Neque verò quotquot sumus tui in Christo confratres, aut
potiùs filii, quoties convenimus, desistimus, quantùm votis precibusque possumus, Deo supplicare,
ut tam fortunata initia feliciore in dies progressu augeat, tandemque optatissimo fine compleat ;
quod ita venturum sperant omnes, neque dubitare possunt, qui pietatem tuam et ad maxima quæque
peragenda faciliùs quàm audenda præstantem proclivemque industriam perspectam habent. Itaque,
ut omnia complecterer, poteram breviùs scribere id unum nos à Deo flagitare, ut te unum quàm
diutissimè servet incolumem.
Sed ad id redeundum est, unde potiùs epistolam ordiri debueram. Pudet incredibiliter quòd
per Thovesium843, qui priores mihi à te literas attulerat, nullas à me acceperis, nec memini umquàm
id contigisse ut binas à te haberem cùm tu à me nullas. Id qua ratione, aut ut veriùs dicam, cujus
840 Vide p. 2.
841 Vide p. 100.
842 Vide p. 98.
843 Vide p. 107.
251/318

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culpa factum sit, si ex eo cognovisti, non excuso tam improbabilem hominis negligentiam, sed
ignosco culpæ, satis enim mihi fuerit quòd culpa me vacare intelliges ; sin fuit ille in hoc ipso
negligens ne se accusaret, neque excuso, neque ignosco, tametsi querelas omnes et injurias à me
hodie, ut par fuit, remissas esse non nesciam ; adeò mihi constitutum est perpetuas cum iis
inimicitias gerere si qui erunt quorum culpa fiet ut de mea, non dicam voluntate, (qui enim facere
posset ?) sed diligentia malè suspicandi quæsita tibi occasio videatur.
Eo nimirùm tempore scribæ meo dixerat velle se equum conscendere, cùm mihi ad
confraternitatis nostræ sacra jam inclinata hora proficiscendum erat. Quàm verò dolendum mihi
est, tùm fuisse negligentem, cùm diligentior esse debueram, ut eodem quo tu animo tam feliciter
transacti inter nos anni partem extremam singulari et mirifica quadam amoris erga te mei
significatione, aut saltem nota concluderem. Sed quando id mihi denegatum est, contendam
posthac tantò vehementiùs, ut nihil à me de pristina voluntate et diligentia remissum neque verò
remitti potuisse fateare. Nec tamen volo tecum agere tam familiariter ut hanc epistolam tam malè
compositam, et, ut agnoscis, extemporariam, xeniorum loco tibi redditam velim.
Habeo alia in promptu mutuæ nostræ necessitudinis dignitati aptiora, quæ etsi nunc dare
non possim, brevi tamen hoc ipso die sibi à me data fuisse intelliges. Meditationes illæ sunt meæ
poëticæ844, tibi, ut scis, inscriptæ, quas, cùm primùm per frigoris intemperiem licebit, typographus
noster excusurus est ; addo et posteriores [395] Conjecturarum mearum libros845, Gebenensi
typographo jam traditos, ut te Gebenensis quoque civitas perinvita Ecclesiæ Gebenensis
Præpositum et Pontificem designatum agnoscere incipiat. Sic fiet ut gallicè latineque me tibi et
fratrem et amicissimum, si non omnes, certè quamplures intelligant. Guichardus noster, qui adest,
te salutat, impeditus partim dubia valetudine, partim Marchionis nostri846 assidua consuetudine, ne
scribere potuerit.
Scripsissem ad Baronem nostrum si otium fuisset. Singularem ejus erga me benevolentiam
etsi perspectissimam habeo, per te tamen non tantùm conservatam, sed etiam auctam iri, et spero
et cupio. Plurimam illi, si placet, cæterisque nobilissimis viris nostris amantissimis à me salutem,
sed præcipuam consobrino nostro. Fabricelli tui omnes te salutant, et quæ tot Fabros fabricata est
soror tua Benedicta Fabra847. Omnes benè valemus ; tu, Frater suavissime, quantùm me amas, cura
ut valeas.
Ex urbe et ex tempore, calend. Januarii 1595.
A Monsieur mon Frere,
Monsieur De Sales,
Prevost de l'Esglise Cathedrale de Sainct Pierre de Geneve.
Aux Allinges.
Revu sur le texte inséré dans les deux Procès de Canonisation.
_____
844 Vide p. 81.
845 Cf. p. 388.
846 Vide p. 47.
847 Vide p. 70.
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XV
Chambéry, 26 janvier 1595.
Fratri suavissimo Francisco De Sales,
Ecclesiæ Gebennensis Præposito et Pontifici designato,
Antonius Faber salutem plurimam dicit.
Defuisse tibi ad scribendum chartam inter arma facilè credo, qui propemodum deesse mihi
video inter chartas. Itaque accipio, quamquam illubenter et perinvitus, excusationem illam quam
mihi Thovesius tuo nomine pro literis reddidit ; sed ea lege, ut si posthac chartæ penuriâ ullius ex
amicissimis meis literis mihi carendum sit, des operam et diligentiam aliorum ut omnium quotquot
sunt, fuerunt et erunt, caream potius quàm tuis. An non autem tibi nescio quo fato factum videtur,
quod eodem tempore typographo quoque nostro charta defuit, ne poëticas illas meas Meditationes
adhuc excudere potuerit ? Id tamen propediem facturum se pollicetur, et ut faciat quantum possum
urgeo, non tam quòd meæ sint, quàm quòd tibi jampridem nuncupatæ. Illa enim præcipua laus
mihi futura sit, si assequi [396] potero, ut hoc veluti nuncio singularis nostræ necessitudinis et, ut
verè soles dicere, incomparabilis ad exteros quoque fama perferatur.
Angustior sanè est tota hæc nostra Sabaudia quàm ut rem tantam suis finibus continere
possit. Sed charta mihi quoque defuerit, si longioris epistolæ argumentum petere velim ex
magnitudine mutui amoris nostri, quæ licet mihi æquè ac tibi perspectissima, non aliâ tamen quàm
tua eloquentia ex dignitate commendari se aut exprimi patiatur.
Benè vale, mi Frater suavissime, et me, ut facis, ama ; consobrino nostro charissimo
plurimam, si placet, ex me salutem.
Ex urbe, 7 calend. Februarii 1595.
A Monsieur mon Frere,
Monsieur De Sales,
Prevost de l'Esglise Cathedrale de St Pierre de Geneve.
Revu sur l'original conservé à la Visitation d'Annecy.
_____
XVI
Chambéry, 3 février 1595.
Fratri suavissimo Francisco Salesio,
Ecclesiæ Gebenensis Præposito et Pontifici designato,
Antonius Faber salutem dicit.
848Jam dederam discedenti Thovesio literas ad te, mi Frater, perferendas cùm posteriores
tuas Servetanus noster mihi reddidit. Ex quibus et ex Servetani sermonibus cognovi te et optimè
valere, quod fuit præcipuum, et absentis mei præsentem memoriam, de quo dubitare non poteram,
constantissimè retinere. Fuisset æquè perjucundum tui in hæreticos operis priores paginas videre ;
æstuo enim desiderio incredibili legendi quæ scribis, quòd ea scio futura ejusmodi quæ et te digna
videri debeant et toti Reipublicæ Christianæ mirabiliter prodesse possint. Nec erat cur vereris ne
minus grata forent si ea membratim exponeres ; etsi enim multo jucundius rem totam quanta est et
corporis et animi oculis subjicere, nihil tamen de jucunditatis magnitudine detrahet occupata per
partes oblectatio. Cujus sola spe non possis credere quantoperè delector.
848 Vide Ep. XLII, XLIV.
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Cum typographo nostro nondùm agere potui, nec agam priusquàm à te aliquid accepero
cujus exhibitione possim hominem, alioquin minus liberalem, permovere ut impensam excudendo
operi [397] necessariam prorogare non recuset. Vereor etiam ne illam excusationem afferat qua uti
solet cum urgeo ut poësim meam gallicam excudendam aggrediatur, quòd chartam non habet ;
quamquam jubet me sperare futurum ut brevi habeat. Moram hanc fero impatientissimè, meo certè
nomine potiùs quàm tuo, neque prius conquiescam quàm meo erga te officio studioque hac saltem
parte satisfecero ; adeò mihi videor nihil non benè posse facere si te vel authorem habeam, vel
motorem, vel adprobatorem.
Sed parùm cautus sum qui, cùm nec gallicè scribere audeam nec latinè possim in tanta
temporis penuria, tam longa tamen te morer epistola. Eo namque tempore hic noster amicissimus
mihi significavit paratum se discedere cùm salutandi tui potiùs quàm ad te scribendi otium fuit.
Non potui tamen facere ut is sine literis ad te meis proficisceretur, præsertim cùm haberem à
Girardo nostro quas ad te perferendas curarem ; ut taceam quòd politior illa scribendi ratio quàm
tu, vel invitis hæreticis et barbaris, tam constanter retines, mihi jam tecum familiarius et ut inter
fratres par est agenti, sicuti non necessaria ita minùs curanda videtur.
Benè vale, et meo, si placet, nomine charissimum nostrum consobrinum salvere jube.
Ex tempore, sine tempore, 3 non. Februarii 1595.
A Monsieur mon Frere,
Monsieur De Sales,
Prevost de l'Esglise Cathedrale de Sainct Pierre de Geneve.
Aux Allinges.
Revu sur le texte inédit, inséré dans le Ier Procès de Canonisation.
_____
XVII
Chambéry, 18 mars 1595.
Fratri suavissimo Francisco De Sales,
Ecclesiæ Gebenensis Præposito et Pontifici designato,
Antonius Faber salutem plurimam dicit.
Eram apud Sebusianos meos, et cum Guichardo nostro, viro (quod te scire arbitror) nunc
prorsùs militari, ut tempori nihil nisi bella et classicum resonanti magis quàm genio meo
inservirem,
Ludebam effigiem belli, similataque veris
Prælia, buxo acies fictas et ludicra regna,
cùm redditæ nobis sunt amantissimæ illæ tuæ literæ ad XI calendas [398] Martis date, sanè
perquàm opportunè, ut communi utriusque desiderio satisfieret, cùm mira amoris erga te nostri
impatientia urgeremur ne longiorem earum expectationem ferre possemus. Ego verò proprio
quodam jure, in mediis publicarum et privatarum miseriarum doloribus, hanc implorarem
consolationem, quæ mœrorem aliqua ex parte saltem levaret meum.
Itaque noli quærere quàm gratæ jucundæque nobis fuerint, quales et quàm multi, quamque
honorifici inter nos de te sermones, cùm, omisso statim ludo quasi ambo vicisse videremur, id
unum agere cœpimus, ut suavissimis de mutui amoris nostri magnitudine, deque tuis et virtutibus
et laudibus colloquiis reliquum diem transigeremus.
Ille, ut est ingenii non minùs quàm animi impetu potens, ex tempore conscripsit epistolam,
si quid mei judicii est, non inelegantem, quam post dies aliquot discedenti mihi tradidit ut curarem
ad te perferendam. Mihi, qui majorem et jucundiorem legendis tuis quàm conscribendis aut
poliendis meis diligentiam adhibere soleo, melius visum est et commodius differre rescriptionem
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in id usque tempus quo in hæc loca rediissem, præsertim cùm nec haberem ad manum per quos
possem scribere ; quamquàm non parum diligentiam meam illud expectabat, quòd tardius quàm
putaram ad Sebusianos meos profectus, videbam ex eo futurum ut longiorem quoque scribendo
moram facerem quàm sperares.
Post meum verô reditum (is fuit nudius tertius), posteriores tuas accepi ex Thononiensi
Babylone conscriptas849, quarum repetita sæpiùs lectione mirum in modum recreatus sum, ex ea
potissimum parte qua tu me bono et forti animo esse jubes ad publicas istas calamitates constanter
moderateque perferendas. Est omninò, mi Frater, ut scribis : oculi augent dolorem, fitque luctus
multò acerbior cùm ea videre cogimur quæ nec audire sine gravissimo mœrore possemus.
Teterrimum prorsùs et miserrimum spectaculum ! oppressa præcepsque in ruinam patria, cui
opitulari non possis. Neque verò possum negare, tametsi ad meos profecturus sic me comparassem
ut quem misera quæque et videre et perferre oporteret, me tamen non leviter commotum esse, cùm
multò graviora et deploratoria vidi omnia quàm timueram.
Nihil de privatis meis rebus conqueror, quarum perturbatio non mediocris animum meum
longè graviùs perturbaret, si à meipso, ut eleganter ais, lædi vellem. Fero licet ista minùs æquo
fortasse quàm deceret, tamen satis erecto animo ; non quòd ad eum sapientiæ gradum pervenerim
quem tu mihi ob oculos ponis (nimirùm, ut astutè quidem sed benevolè mihi imponas, ne cunctari
possem quin talem me præstare debeam qualem me tibi videri fingis), sed quia [399] nihil tam
durum aut calamitosum accidere potuit quod non jam inde à multis annis eventurum præviderim,
quòdque ridendus mihi ipsi videar magis quàm miserendus, si in tantis totius reipublicæ
calamitatibus, cùm in eadem sim navi in qua cæteri, præcipua quadam immunitate vitæque
conditione gaudere velim.
Et nihil me æquè ac illud confirmat, quòd quoties de te cogito (facio autem ferè assiduè),
agnosco indignum fore me quem tu fraterno amore prosequi deberes, si ab ea desciscerem animi
magnitudine quam in te admirabilem et propemodùm singularem, non modo vultu et oratione præ
te fers, quod tibi cùm multis commune est, sed etiam, quod paucis contigit, facto ipso totaque
institutæ vitæ ratione testaris.
Quàm, putas, animo meo hæret hærebitque semper, quod te nuper cùm una essemus dicere
memini, cùm quidam ad te retulissent me, levissimo implicitum morbo, graviore quàm par fuerat
mortis metu cruciatum fuisse, id te de eo qui se fratrem tuum diceret et gloriaretur non temerè
credere potuisse ! Nam qui, te potissimùm magistro, didicerit mortem non pertimescere, quam ego
nunquam sanè pertimescendam existimavi, an non multò stultior sit, si iis rebus moveatur quæ non
aliam ob causam acerbæ videri possint quàm quia mortem, vel quod adhuc insanius fuerit, vitam
quoque ipsam reddere soleant acerbiorem ? Sed tamen facere non possum quin me communes
miseriæ conturbent, quibus non valdè affici vereor ne inhumani potiùs quàm constantis hominis
esse videretur. Idque me tuo etiam exemplo, quod mihi instar omnium est ut esse debet, facere
certò scio. Verùm de iis fortasse nimis multa.
Reliquum est, mi Frater, ut te non jam horter ad pugnam istam quam te adversùs hæreticos
tanta contentione capessere video, sed moneam potiùs et rogem ut salutis et incolumitatis tuæ
rationem habeas, tibi parcas, caveasque ne tenuiores corporis vires et animi viribus impares,
jamque tot jejuniis attritas, dicendo scribendoque exhaurias, quas tibi integras salvasque conservari
non minùs reipublicæ quàm mea scis interesse, quandoquidem tibi cum eo hoste res est quem
nonnisi longo lentoque, ut vides, bello possis ad deditionem compellere. Ego, si quid hoc ad rem
pertinet, votis saltem et quantis potero ad Deum optimum maximum precibus adjuvare te non
desinam, faciamque ut confratrum nostrorum, quorum omnium propensissimus est ut esse debet
erga te animus, idem quoque studium experiare.
Benè vale, mi suavissime, et Baronem nostrum, itemque consobrinum si nunc tecum est,
ac cæteros omnes tui amantissimos, meo, si placet, nomine salvere jube. [400] Senator noster850,
longissimo jam et periculosissimo morbo consternatus, tam malè habet ut necdum medicis
exploratum sit sperandumne magis de clarissimi viri salute an pertimescendum habeant. Non
849 Vide Epist. XLV.
850 Vide p. 44, not. (125).
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possis credere quàm id me malè torqueat, pro arctissima quæ inter nos, non tantùm dignitatis et
ordinis, sed etiam, quod primum est, animorum conjunctione. Faxit Deus optimus maximus ut
brevi convalescat, quem diutissime sospitem salvumque esse, non tua solum et mea, sed totius
quoque reipublicæ causa cupio. Interim, iterum vale, et me, ut soles, ama.
Ex urbe, 15 calend. Aprilis 1595.
A Monsieur mon Frere,
Monsieur De Sales,
Prevost de l'Esglise Cathedrale de Sainct Pierre de Geneve.
Aux Allinges.
Revu sur le texte inséré dans le Ier Procès de Canonisation.
_____
XVIII
Chambéry, 19 avril 1595.
Fratri suavissimo Francisco De Sales, Ecclesiæ Gebenensis Præposito,
Antonius Faber salutem plurimam dicit.
851Majorem te in dies, mi Frater, voluptatem fructumque capere ex præclaro isto consilio
et ad rei Christianæ dignitatem cœlitus comparato instituto, etsi minùs miror, qui numquàm
dubitavi quin tam sanctos conatus Deus optimus maximus solita sua ergà te munificentia
fortunaturus esset, gaudeo tamen mirum in modum, cùm ex tuis literis ea ipsa intelligo quæ
frequentissimis hominum de te sermonibus publicè testata circumferuntur. Magna omnium fuit
expectatio quid rei eventus laturus esset à quo tempore auditum est hanc à te tam difficilem
susceptam esse provinciam, hac potissimùm tempestate quæ omnium maximè novas ac
propemodùm inexplicables, ut tutò expertus es, difficultates allatura videbatur.
Nunc verò, majorne dicam nescio voluptas an admiratio est, non eerum dumtaxat qui
negotio magis quàm tibi diffidebant, sed illorum etiam qui, cùm eam probarent, vix tamen
persuaderi poterant futurum ut jam citò tam uberes diligentiæ et contentionis tuæ fructus
constarent, quòd minùs tibi opis et auxilii parari viderent ab iis quorum authoritate præcipuè geri
res debebat quàm necesse esset [401] ad tantam rem feliciter aggrediendam gerendamque ; sic
enim jam omnibus ferè persuasum est fore brevi ut sacrosancta religio per tot annos ab istis populis
explosa pristinam suam per te recuperet dignitatem, indeque tamquam ex armario munitissimo
potentissima ad expugnandam Babylonem machina tandem depromatur.
Mihi sanè non parvi momenti esse videtur quod de Ponceto852 recuperato scribis ; fuit enim
ille hucusque præcipui, ut audio, inter hæreticos nominis pro ea qua præstat juris nostri rerumque
agendarum scientia, ut liceat sperare non defuturos permultos qui exempli authoritate movebuntur,
ut ratione tandem vinci se patiantur. O si Avullæus tibi datam fidem præstaret, Deo autem redderet
! Omnia penè acta putarem his duobus antesignanis adeò egregiis ad deditionem compulsis. Sed
de hoc audio nescio quid quod mihi bilem movet et stomachum facit ; verùm ipse viderit.
Possevinus noster853, cùm hic esset superioribus diebus in eumque sermonem incidissemus,
testabatur nihil se aut antiquius, aut optatius umquam habuisse quàm ut te videret deque toto isto
negotio alloqueretur, non solùm ne dubitare posset quin ad consilii capiendum esset quòd optimum
uterque vestrum probaret, sed etiam ut quantum haberet ingenii, virium et authoritatis, totum id
conatibus istis adjuvandis fovendisque conferret. Sed accidit ut cùm proximo quoque die Necium
se profecturum crederet, measque jam ad te literas urgeret, Lugdunum versus pergere coactus
851 Vide Epist. XLIX, L.
852 Vide p. 124.
853 Vide p. 104.
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fuerit ad ea tractanda negotia cum Duce Monmorentiano quorum maximè gratia in hac usque loca
peragravit854. Quando rediturus sit, planè adhuc in incerto est, etsi Bonaldus ille noster855, cui tuas
ad se et ad Possevinum literas reddidi, sperat non diutiùs abfuturum, quod ex ejus rescriptione
commodiùs cognosces.
Ubi verò redierit, si nihil intercessit quod consilii mutandi causam præbeat, hoc possim
confirmare facturum eum ut ad te quàm citò advolet ; quamquam multò gratius mihi fuerit si pro
sua gravitate hanc tibi ad se, ut æquius est, veniendi necessitatem imponet, ut quod per me, ut
video, impetrare abs te vix possem, per eum assequerer cui nihil tu denegare magis possis quàm
debeas. Nam quòd me interpellas ut ego ad te potiùs, etsi concedo libentissimè præstare, tamen
mihi paulô difficiliùs est quàm velle, tametsi non despero fieri posse ut in eos dies profectio
conferatur quibus possem desiderio meo non minus quàm tuo satisfacere. Quid enim ardentiùs
cupiam, quàm te videre, et Salesium meum, quid meum imò meissimum, aut, ut tandem dicam
expressiùs, meipsissimum, totis oculis, brachiis et sensibus amplecti, totque et tam enixis
amplexibus fatigare ? [402]
Nam ut ea taceam quæ mutuam nostram necessitudinem jam tot vinculis constringunt, ut
neque addi quicquam neque diminui posse videatur, placet mihi ratio illa quam tu proponis
inducendæ accessionis, quòd Senatore nostro vita functo856, quem nos singulari quidem sed tamen
communi studio et voluntate prosequebamur, sic nos agere par est, ut quodam veluti accrescendi
jure857, viriles nostras amicitiæ partes augeri sentiamus : quamquam non improbarem, si jus hoc
non tam accrescendi diceres quàm non decrescendi, ne qua incomparabili conjunctioni nostræ fiat
injuria, si quid ad ejus magnitudinem accedere posse fateamur. Sed vim malo in re esse quàm in
verbis.
Hic ego finem facerem (sum enim meo more jam longior, sed consultò, ut hoc habeas
diuturnioris meæ, licet inculpatæ cessationis fœnus), nisi quod tu de Patre Cherubino posterioribus
literis adscripsisti cogeret me ut de tam propensa tanti viri erga te voluntate, tamque pio officio
testata, tibi gratularer. Pervenerat ad nos superiore mense nec varius nec inconstans rumor,
defunctum apud Salinates virum clarissimum ; hoc solo incertus, quòd alii ferro hostium, alii
veneno inter pocula propinato necatum mentiebantur ; mirus ex eo stupor dolorque optimorum
omnium animos occupaverat, me verò, licet non sim ex optimis, tantò gravior quantò major jactura
fuisset mea, defuncto illo cujus probitate et summo in me studio possim aliquando, si non optimus,
quod propemodùm despero, saltem bonus fieri, aut minus malus quàm sim. Posteà compertum est,
nonnisi mundo eum mortuum, sibi verò totique Reipublicæ Christianæ adhuc superstitem esse ;
nec desunt qui affirment eum vos Necii proxima Quadragesima habituros. Quo tamen nomine, ne
tibi gratulari possim illud facit quòd mihi jam doleo qui tecum non ero. Nos Guarinum
Franciscanum expectamus.
Sed jam nimis multa, qui ad mediam usque noctem Guichardo nostro literas tuas curavi
perferendas. Expecto à Girardo quas ad te scripturum se discedenti nuper mihi receperat. Superest
ut plurimam à meis omnibus, sed à me maximam tibi et consobrino nostro tùm Baroni cæterisque
amicis nostris salutem accipias. Benè vale, Frater terque quaterque suavissime, et me, ut facis,
ama.
Ex urbe Camberii, 13 calend. Maii 1595, ex tempore, ut facilè agnosces.
Monsieur mon Frere,
Monsieur De Sales,
Prevost de l'Esglise Cathedrale de Sainct Pierre de Geneve.
Aux Allinges.
Revu sur le texte inséré dans le Ier Procès de Canonisation. [403]
_____
854 Vide p. 129.
855 Sans doute le P. François Bonald, Jésuite, recteur du collège de Chambéry.
856 Vide p. 401.
857 Digest., l. XXXVII, tit. 1, lex. 3.
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XIX
Chambéry, 20 juin 1595.
Fratri suavissimo Francisco De Sales,
Ecclesiæ Gebenensis Præposito et Pontifici designato,
Antonius Faber salutem plurimam dicit.
858Binis à te, mi Frater, acceptis literis hac una epistola respondebo, et breviùs sanè quàm
vellem aut soleam, in tantis quibus nunc opprimor temporum angustiis. Priores erant de inopinato
magis quàm acerbo Guichardi nostri casu, de Alexandri mei lachrymis, aliisque ejusmodi meis
ineptiis. Posteriores, de tuo ad Thononienses reditu.
Ad priores vix habeo quid respondeam ; namque de Guichardo nostro, si repetam liberatum
eum à latronibus, casumque illum moderatè, ut debuit, pertulisse, nihil novi dixerim, nisi quòd suis
ille ad me literis idipsum testatus est, quod ego ex hominis moribus mihi perspectissimis jam satis
per me conjiciebam, quorum testimonium mihi multò certiùs est quàm literarum.
Illud tamen possum addere, quòd licet novum tibi tamen persuasu facilè erit, novam illi
amandi colendique tui causam accessisse, cùm ex literis meis intellexerit quàm tu levius istud
infortunium, pecuniario tantùm incommodo æstimatum, malè habuisse ; qua de re brevi gratias
tibi habiturus est, redditurus haud dubio cùm et tu voles, et ille poterit. Expecto ut primo quoque
die ad nos veniat, mox ad Principem, ut audio, perrecturus.
De libello meo, quem tibi aliisque multis exemplo tuo tantoperè probari video, quid rursus
dicam, aut novas habeam gratias ? Vetus jam istud beneficium tuum est, quod ego sic accipio ut
quasi nihil dùm præstiterim, majus quidpiam à te expectari, et à me plura præstari debere intelligam
; quæ si voto et animo meo respondebunt, possis tu faciliùs et lubentiùs tua agnoscere quàm hæc
leviora quæ tu tanta contentione mea esse defendis, ne quid de tuis laudibus detrahatur. Sic enim
sales illos tuos interpretor, ut ironicum agas in eo ipso in quo me hyperbolicum fingis ; sed alias,
et ni fallor brevi, jocandum erit liberiùs et longiùs.
Venio ad posteriores tuas literas859, in quibus jucundissimum illud fuit quòd te video nihil
de pristina ista animi alacritate remittere, nihilque non tentare ut, si (quod abominor) minùs
feliciter res succedet, ea sola tibi culpa objici possit quòd plus animi et ingenii [404] habueris ad
audendum, quàm ii omnes, quorum hac parte præcipua authoritas est, voluntatis ad adjuvandum.
Sed illud sanè molestissimum est quod conquereris, nec immerito, tam frigide tantam rem
ab ipsis tractari, qui tam præclaros conatus tuos et modis et artibus omnibus fovere deberent. Nihil
autem miserius, quàm quòd hoc tempore in quo pax ista precaria, aut, ut Virgilius loquitur, «
sequestra » totque mensium firmatæ induciæ facere deberent ut benè sperare liceret, vix quisquam
est qui præter te in hanc curam velit incumbere. Sed tamen si tibi mihique credis, perge ut cœpisti
in id usque tempus quo desperatio non minùs probatam omnibusque cognitam quàm justam
habitura sit excusationem. Habebis tuæ fortitudinis virtutisque, non modò testes sed etiam
admiratores, eos ipsos quos fautores habere, ut decebat, non potuisti ; Deum verò optimum
maximum retributorem, qui laborum tuorum æstimationem non ex perceptis fructibus, sed ex iis
qui percipi potuerunt et debuerunt pro pietate sua initurus est : quamquam vix mihi in animum
cadere potest ut de tam piis et, quod præcipuum est, pie habitis conatibus desperandum putem.
Inter hæc scribendum, opportunè advenit frater ille noster Hierosolymitanus, scis quem
intelligam, Locatellus, faustus lætusque ; hoc uno minùs, ut sibi mihique videtur, felix, quòd
superioribus diebus Necium profectus, videre te non potuit. Quo nomine mirum est quantis eum
onerem ludibriis, quòd ille non ita dudum gloriaretur hanc sibi præcipuam fore oblectationem si,
absente me, solus te frueretur ; ego verò tantam felicitatem, fateor enim liberè, etiam fratri
inviderem.
858 Vide Epist. LIII.
859 Voir p. 139, note (334). C'est par erreur que dans cette note, la lettre du sénateur Favre est indiquée comme étant
du 19 juin.
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Soror tua, quam tu clarissimam vocas, quam charissimam dicere clariùs posses, te salutat,
sed ut fratrem potiùs quam ut compatrem, adeò ineptit illa in hoc ipso quòd ineptire velle desinit,
nisi sororis nostræ Locatellæ, quam adprimè gravidam esse scis, exemplo movebitur ; nec enim
ignoras hoc genus, penè adjeci dæmoniorum, exemplo magis quàm ratione vel authoritate moveri.
Benè vale, mi suavissime, et consobrino primum nostro, tùm Baroni, cæterisque amicis
nostris plurimam, si placet, ex me salutem, Iterum vale, et me, ut facis, ama.
Ex urbe et ex tempore, 12 calend. Julii 1595.
A Monsieur mon Frere,
Monsieur De Sales,
Prevost de l'Esglise Cathedrale de Sainct Pierre de Geneve.
A Tonon.
Revu sur le texte inséré dans les deux Procès de Canonisation. [405]
_____
XX
Chambéry, 3 août 1595.
Fratri suavissimo Francisco De Sales,
Ecclesiæ Gebenensis Præposito et Pontifici designato,
Antonius Faber salutem plurimam dicit.
860Etsi tam longo inter nos, mi Frater, silentio non magis delector quàm tu, dicam tamen
ingenuè, me meæ pudet pœnitetque diligentiæ ; audio enim te, si posteriores meas literas paulò
tardiùs accepisses, ad nos venturum fuisse ut clarissimum Patrem Possevinum videres, quem si
videre non potuisses, ego sanè te vidissem. Sed quando ita res tulit, ut neque tu illuin, neque ego
te videre potuerim, utrumque nimia et illius in discedendo et mea in scribendo diligentia, erit quòd
meæ posthac ignoscas negligentiæ, si quid à me hac in re peccabitur ; licet non ignorem vix fieri
posse ut damnum contingens ex diligentia per negligentiam sarciatur, mihi præsertim, cui hoc
unum restat absentiæ tuæ solatium, si per literas tuas te videam, per meas te alloquar.
Grata tibi fuisse et Patris Possevini et Girardi nostri munera gaudeo. Quòd verò tam
opportune Spondæus861 advenerit, non tantùm tibi, sed etiam mihi summoperè gratulor ; nihil enim
est quod feram molestiùs quàm, cùm nebulones istos audio de suis ineptiis tam magnificè sentire
et gloriari, de nostris verò nostrorumque egregiis meritis tam audacter et impudenter mentiri.
Baronem nostrum qui, ut scis, nunc adest862, iterum atque iterum conveni, primùm ut viro
nobilissimo meique amantissimo grati animi testimonium exhiberem, deindè ut ex ejus potissimùm
sermonibus intelligerem quid ille de tuis conatibus, non tam sentiret quàm speraret. Ille verò, quasi
certa jam et explorata, nedùm inclinata victoria jam triumphum canere mihi visus est, et ea credere
quæ ad felicitatem satis mihi fuerit sperare posse. De Ponceto præcipuè tibi mirum in modum
gratulatur, prædicatque tua illum opera et eruditione ab inferis revocatum, sacra religionis nostræ
tam serio amplexatum esse, ut tot ministellis in posterum nullo negotio profligandis, pro ea qua
fuit inter ipsos authoritate sibi unus sufficere posse videatur. De Avullæo verò sic loquitur quasi
nec dubitet quin ex nostris sît, totamque rem ex voto tuo confici ardentissimè desideret. Quòd si
ita est, non video quid te malè jam habere debeat, nisi quòd in re tanti momenti vix est ut Christiana
impatientia longioris moræ incommoda concoquere possit. [406]
De cæteris rebus, sivè publicis sivè privatis, nihil attinet in sequentem paginam protrahere
epistolam. Publicæ in eum statum deductæ sunt ut eas miseratione multo faciliùs quàm auxilio
860 Vide Epist. LVII.
861 Vide p. 155.
862 Vide p. 384.
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prosequi quilibet possit ; meæ verò ejusmodi ut earum conditionem parùm curare debeat quisquis
publicis ita uti par est afficiatur. Id unum nobis benè cedit, quòd cùm nihil sit in tanta rerum
omnium perturbatione quod non ducat ad desperationem, de omnibus tamen benè et in dies meliùs
ac meliùs sperare non desinimus ; sed cedet multò faciliùs si, quòd tecum precari faciliùs est quàm
ominari, una cum Elia illo tuo863 per turbinem in Cœlum rapimur.
Literas tuas ad Girardum quàm citò perferri curabo diligenter. Benè vale, mi Frater
suavissime, et me, ut facis, amare perge.
Ex urbe, 3 non. Augusti 1595.
Soror tua, itemque caeteri tui, quotquot ferè hic mei sunt, te salutant ; ego nostrum quoque,
si placet, consobrinum. Iterum vale.
A Monsieur mon Frere,
Monsieur De Sales,
Prevost en l'Esglise Cathedrale de Sainct Pierre de Geneve.
A Necy ou a Tonon.
Revu sur le texte inséré dans le Ier Procès de Canonisation.
_____
XXI
Monsieur mon Frere,
864Je ne suis plus marry que, pour faute de porteur, j'aye retardé plus que je ne voulois de
respondre a voz premieres lettres, qui me furent rendues ces jours passés avec les sonnetz de ma
Seconde Centurie865 par monsieur de Chavanes866 ; car je me fusse plaint fort aigrement de nostre
monsieur Portier, auquel j'avois remis mes precedentes lettres, avec celles du Pere Possevin et le
livre quil m'avoit adressé pour vous faire tenir. Maintenant je suis hors de ceste peine, voyant par
les vostres dernieres qu'en fin le tout vous a esté rendu.
J'ay pris fort a mon avantage ce que vous m'escrivez, que noz messieurs de Tonon facent
estat de ma Premiere Centurie867 ; car outre ce, que malaisement peut il estre ainsy quilz ne facent
sans comparaison plus d'estat de vous a qui je la rapporte toute, comme je doy, il me semble que
c'est un commencement de tesmoignage quilz donnent de leur resipiscence, sil est vray ce que j'ay
tousjours ouy dire, [407] que les heretiques ne veullent point ouyr parler de penitence, du moins
en la façon que j'en parle.
Les vers desquelz monsieur Després868 m'a honoré m'ont esté fort aggreables, et vous
remercie de la recommandation que vous y avez adjousté du vostre, et luy de la faveur. C'est un
personnage duquel j'ay desja ouy souvent parler, et tousjours en bonne part, osté le poinct, qui est
le principal, de la religion. Ce seul poinct a esté cause que je n'en ay peu faire l'estat que j'eusse
voulu ; car, comme il me souvient de vous avoir autrefois dit, je ne peux me commander de croire
qu'un heretique puisse rien avoir de bon, du moins que l'heresie ne gaste et corrompe. Non que
j'estime quil y aye en tous de la malice (j'en ay congnu qui, hors le faict de la religion, pouvoient
passer en monstre pour honestes hommes) ; mais je ne peux les excuser que je ne les accuse tous,
et tant plus ceux qui sont les plus habiles entre eux, d'un grand deffaut de jugement et de trop de
presomption en ce quilz osent faire plus d'estat de leur jugement particulier que de celuy de
l'Esglise universelle, fondés seulement sur l'opinion d'un homme, lequel sil eust esté de moins ilz
863 Vide p. 156.
864 Vide Epist. LX, LXI.
865 Vide p. 180.
866 Vide p. 52.
867 Vide p. 81.
868 Vide p. 162.
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27 Pages 261-270

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27.1 Page 261

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seroient maintenant des nostres.
Toutefois, je veux bien esperer de sa conversion puis que vous qui le voyez de plus pres en
concevez ceste esperance. Aussy me semble il bien difficile qu'un honeste et si habile homme
comme il est puisse croupir longuement en telle misere, pour peu quil veuille ouyr parler de la
religion a un vostre semblable. Je remetray a ce tems là de l'embrasser et de recueillir avec plus de
demonstration l'amitié que sa poesie me presente, vous priant toutefois de l'en remercier de ma
part. Si j'estois venu a bout de ma Seconde Centurie, je luy escrirois tres volontiers pour le prier
de l'avoir aggreable. Si ainsy estoit nous aurions tout gaigné, puis qu'elle sera toute en l'honneur
du Sainct Sacrement ; et non moins sil fait estat de la troisieme, laquelle je pretens faire, Dieu
aydant, en l'honneur de Nostre Dame.
J'attens de bon cœur l'ornement que vous m'avez promis pour mon Code Savoysien869,
lequel je vay avançant de jour a autre le plus que je peux pendant le loisir que m'en donnent ces
feries.
Entre autres poinctz, n'oubliez pas, sil vous plait, celuy là, que noz heretiques font mestier
de nier tout et ne rien dire. Ilz le font sans doubte par art et par finesse, affin quilz ne soyent tenus
de rien preuver et quilz nous chargent tant plus de preuve, dautant quil est beaucoup plus aisé de
nier la verité que de preuver le mensonge. Ilz se fondent sur la reigle qui dit que aienti, non neganti,
incumbit probatio ; mais vous sçavez mieux que moy comment telle reigle est [408] entenduë en
nostre jurisprudence, a laquelle proprement elle appertient. Noz loix dient que celuy qui dit et
afferme quelque chose [est tenu de le prouver, mais que celui qui soutient la négative870] n'est tenu
de la preuver ; la raison est parce que la preuve d'une negative semble estre impossible par la nature
mesme, dautant que ce n'est qu'une pure privation qui en somme n'est rien selon les philosophes.
Mais ceste raison mesme monstre que la reigle doit estre entenduë d'une pure negative qui ne
puisse estre circunstantiee de point de façon ; car quand ell'est coarctee, comme parlent noz
maistres, de la circonstance de quelque lieu ou de quelque tems, la preuve s'en peut faire, et faut
qu'elle se face par celuy qui nie : comme si quelqu'un nioit d'avoir esté a Romme un tel jour, il
pourroit et devroit preuver en quel autre lieu il fut ce jour là.
Il y a de plus que la negative mesme qui est pure privation, et quæ nihil ponit, nec includit
affirmativam contrariam, doit estre neantmoins preuvee par celuy qui l'avance, toutes et quantes
fois que c'est le fondement de son intention ; et en ce poinct s'accordent tous noz docteurs, fondés
sur ce que tousjours le demandeur doit estre chargé de preuver son intention et ce sur quoy il la
fonde. Il y en a une infinité d'exemples ramassez par le premier Marian Socin en ses Commentaires
sur le Droit canon, qui traite ceste matiere plus amplement qu'autre docteur quelconque qui jamais
en aye parlé. Il me souvient de l'y avoir veu autrefois a plein fonds, combien que je n'aye pas a
present le livre.
Je me suis fort appuyé autrefois sur ceste derniere consideration pour conclurre que noz
heretiques, pour nieurs quilz soyent, sont tenus de preuver toutes leurs negatives ; car ilz ne
peuvent nier quilz ne soyent demandeurs, puis qu'ilz viennent a nous troubler en nostre possession
de sezecentz ans qui nous rend deffendeurs ; et vous sçavez que c'est la principale commodité de
la possession, qu'elle decharge le possesseur de toute necessité de preuve jusques a ce que le
demandeur aye fondé et preuvé son action : de là vient que adversus extraneos, id est, nihil juris
habentes actores, etiam viciosa possessio prodest. Mais c'est trop faire le docteur avec vous ; aussy
me faites vous dottor in volgar. Escrivez moy si vous voulez que je le tire en consequence, affin
que je n'en abuse.
Je feray tenir voz lettres a Pere Possevin et a nostre frere monsieur de Locatel. J'ay esté
presque botté pour vous aller voir affin de vous conduire au Baptesme de nostre neveu, lequel nous
esperions [409] devoir estre fait le jour de la Toussainctz ; mais j'ay esté retenu par une infinité
d'incommodités, et pour avoir sceu aussy que monsieur le Commandeur doit partir aujourdhuy
pour Lyon, et qu'a ceste occasion la solemnité du Baptesme sera remise en autre tems.
Vous me treuverez aussy long en françois qu'en latin, mais je ne sçaurois qu'y faire. Encor
869 Vide p. 164.
870 L'auteur, probablement par distraction, a omis ici un membre de phrase qu'il a semblé indispensable de suppléer.
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27.2 Page 262

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avois je a vous prier de m'ayder a me faire avoir responce des lettres que j'ay escrit a Geneve et
addressé a l'hoste du Lyon d'Or, pour sçavoir si ces imprimeurs mettront la main a imprimer mes
derniers Livres de Conjectures suyvant les promesses qu'ilz m'en ont faites toute ceste annee. Je
ne peux attendre davantage pour le desir que j'ay de faire sçavoir en Allemagne et en l'Italie, aussy
bien qu'en France, que nous sommes freres ; et comme tel je vous baise les mains. Aussy font ma
belle mere et ma maistresse871, avec noz escoliers, qui prient tous Dieu avec moy quil vous
conserve, Monsieur mon Frere, a longues annees en sa grace, et nous, en la vostre.
Vostre plus humble et plus intime
frere et serviteur,
A. FAVRE.
De Chambery, en haste, ce 25 octobre 1595.
Revu sur l'original conservé à la Visitation d'Annecy.
_____
XXII
Chambéry, 22 novembre 1395.
Fratri suavissimo Francisco De Sales,
Ecclesiæ Gebenensis Præposito et Pontifici designato,
Antonius Faber salutem dicit.
Non est quod ex me nunc, mi Frater, aut longas aut suaves literas expectes, adeò me
conturbat repentinus sic obitus Baronis nostri Hermanciani872, sivè privatam jacturam meam
considero sivè totius reipublicæ nostræ causam, quæ tot jam adversis casibus cladibusque miserè
conflictatam spes erat maxima, hujus potissimùm viri opera vehementique pacis studio quo
flagrabat, restitui posse et recreari. Movet me etiam non parùm quòd, postremis qui mihi cum illo
ante morbum intercesserunt sermonibus, videbatur in eam potissimùm curam velle in posterum
incumbere ut sacrosancta religio [410] nostra, tuis potissimùm præclaris conatibus adjuta, per
totam istam provinciam quàm latissimè et vivissimè diffunderetur. Quamquam si, ut plerique
ominantur, provinciæ moderatio ad Baronem Petræ differretur, sperandum est æquè feliciter, ne
quid ampli us dicam, cessura omnia, dummodò quantum ille animi et contentionis in eam rem
collaturus est, tantum ad rem agendam habiturus sit authoritatis ; quam ego in hujusmodi causis
semper plus posse credidi quàm ipsum etiam jus potestatis. Sed de hoc postea videbimus.
Gaudeo interim te in Salesianum venire, in quo ita futurus sis otiosus ut numquam minùs
otiosus. Etsi enim ea ingenii tui vis est, ut ubi voles esse gentium non possis aut tui similis non
esse aut extrinsecis hujusmodi subsidiis indigere, conducet tamen non parùm ad edendum feliciter
partum hunc quem jampridem parturis, ut in eo loco sis in quo favorabilior tibi gratiorque Lucina
adfutura sit. Ego Librum meum duodecimum, tibi inscriptum et proprio quodam jure tuum quòd
in Salesiano tuo, ut meministi, inchoatus sit, dedi optimo et ornatissimo huic viro perferendum ad
typographum qui sæpiùs jam ad me scripsit facturum se ut quamprimùm prælo detur. Id ego
incredibiliter fieri cupio ut ita saltèm publicum extet singularis meæ erga te voluntatis
monumentum si facere posthac non potero ut majus quidpiam à me proficiscatur.
Benè vale, mi Frater, et me, ut facis, ama. Mei omnes, aut tui potiùs, te salutant ; ego
nominatim consobrinum nostrum. Iterum vale.
Ex urbe, 10 calend. Decembris 1595.
A Monsieur mon Frere,
Monsieur De Sales,
871 Le Sénateur avait coutume de désigner ainsi Mme Favre.
872 Vide p. 1.
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Prevost de l'Esglise Cathedrale de Sainct Pierre de Geneve.
A Chablaix.
Revu sur le texte inédit, inséré dans le Ier Procès de Canonisation.
_____
XXIII
Chambéry, 2 janvier 1596.
Fratri suavissimo Francisco De Sales,
Ecclesiæ Gebenensis Præposito et Pontifici designato,
Antonius Faber salutem dicit.
873Non minùs ex Avullæi874, tandem nostri, sermonibus quàm ex literis tuis, mi Frater,
cognovi quod maximè cupiebam, præclarè illum de religione sentire nec magis quidquam in votis
habere quàm [411] ut publicè id testatum faciat. Sic enim mecum egit ut præcipuo quodam animi
dolore angi videretur quòd, tantoperè urgentibus conscientiæ stimulis, rem tanti momenti tamdiù
procrastinando in hunc usque diem distulisset.
Libris illis de politica, ut eleganter inscribis, auscultatione id præscribentibus, hoc mihi
quàm dulce optatumque fuerit, etsi facilè æstimare potes qui optimus testis es nihil me umquam
ardentiùs desiderasse, vix tamen possis credere ni tibi persuadeas eum esse me qui factis
laudibusque tuis magis delecter quàm tu ipse, in ea præsertim re in qua nominis tui laus cum Dei
gloria non possit non esse conjuncta. Itaque noli quærere quàm alacriter utroque ut jubebas
amplexu hominem sim complexus, quamquam in eo mihi minus satisfecerit quod visus est
publicam conversionis suæ significationem nescio qua majoris boni spe in ulteriorem diem differre
velle. Adjecit sibi tecum sic convenisse ut Principem rogaretis de me in provinciam istam
mittendo, ut quæ ad sacrosanctæ religionis nostræ restituendam dignitatem pertinere videbuntur à
provincialibus impetrem aut potiùs extorqueam. Id verò quàm mihi honorificum si succedet ; etsi
nec dubitandi causa est si Deum authorem habebimus Principem fautorem et adjutorem. Intereà
expectationem nostram spe sustentemus.
De Pare Cherubino facere non potui ut eum Avullæus tam citò conveniret. Expectabam ut
ad me scriberes aliquid de prioratibus875 ; audio enim Baronem nostrum venisse876, ex cujus literis
sperabam fore ut ea de re fausti aliquid lætique intelligerem. Ad eum enim, cum tuis literis, meas
etiam dederam. Sed quando id hactenus factum non est, cura si placet ut quamprimùm fiat. Non
gratiora mihi aut melioris ominis xenia possis mittere ; ne (sic) si fragmentum illud quòd polliceris,
et quo tamen scito nihil mihi advenire posse optatiùs.
Benè vale, Frater suavissime, et quod felix faustumque sit ad me scribe. Mei omnes, aut tui
potiùs, valent optime et te salutant amicissimè. Iterum vale.
Ex urbe et ex tempore, 4 non. Januarii 1596.
A Monsieur mon Frere,
Monsieur De Sales,
Prevost de l'Esglise Cathedrale de Sainct Pierre de Geneve.
A Tonon.
Revu sur le texte inédit, inséré dans le Ier Procès de Canonisation.
_____
873 Vide Epist. LXIV.
874 Vide p. 198.
875 Vide p. 179.
876 Cf. p. 178.
263/318

27.4 Page 264

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XXIV
Chambéry, 19 février 1596.
Fratri suavissimo Francisco De Sales,
Ecclesiæ Gebenensis Præposito et Pontifici designato,
Antonius Faber salutem dicit.
877Acceptis uno die binis à te, mi Frater, literis, expertus sum, quod jam sæpe anteà,
numquam te minùs negligentem esse quàm cùm negligens videris. Nam eo ipso aut præcedenti die
scripseram ad te epistolam, perbrevem quidem, sed plenam expostulationis quòd per tam longum
tempus nullas à te habuissem.
Nunc mihi planè satisfactum est iis literis quibus ad omnia mearum capita tam diligenter
et accuratè respondisti, nisi quod subticuisti (dolone bono an malo non ausim dicere), quod
maximè significare debueras, quodque ex Chaventio878 cùm ei tuas darem intellexi, habere te nunc
Principis nostri, non voluntatem solùm, quæ tibi numquam defuit, sed eam quæ tamdiu desiderata
et expectata est subscriptionem. Quo nomine si tibi et mihi totique reipublicæ nostræ non gratuler,
indignus sanè sim quem boni ament, nedum tu qui es optimus. Sed id mallem coram et in fraternis
amplexibus quàm in literis, præsertim quas aut longiores aut politiores facere ocium nunc non
detur.
De prioratu Talloriarum879 rursum benè sperare cœperam, defuncto Calcaneo, qui Principis
voluntatem præcipiti ambitione meritis tuis præripuerat. Sed, ut audio, Baronis de la Bastie,
magistri hospitii, filio id indultum est.
De Centuria mea faciam quod suades et scribis. De pecunia curavi quod petis ut
humanissimæ creditrici meæ satisfiat880, duplici in eam rem exquisita ratione, ut si una deesset,
altera succederet. Si, quod abominor, neutra succedet, curabo artibus omnibus ne illam collati in
me beneficii, te verò præstiti amicissimè officii pœnitere possit. De eo scripsi ad Chissæum
nostrum881 itemque ad Agiæum882, à quo etiam habui de ea re suavem et benevolam
interpellationem.
Nos omnes valemus et te salvere jubemus. Tu vale, et nos, ut facis, ama.
Ex urbe, 12 calend. Martii 1596.
Post hæc scripta, accepi posteriores tuas literas, et quæ tu de hæreticis nostris tam argutè et
copiosè scripta adjecisti ; habeo gratiam, [413] et de eo brevi ad te rescribam. Dominum de
Lullin883, à quo tempore tuas accepi literas, non vidi ; faciam ut intelligat se mihi per te
commendatum.
A Monsieur et Frere,
Monsieur De Sales,
Prevost de l'Esglise Cathedrale de St Pierre de Geneve.
A Tonon.
Revu sur l'original conservé à la Visitation d'Annecy.
_____
877 Vide Epist. LXIV.
878 Vide p. 182.
879 Vide contra.
880 Vide p. 181.
881 Vide p. 71.
882 Vide p. 2.
883 Vide p. 285.
264/318

27.5 Page 265

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XXV
Chambéry, 27 mars 1596.
Fratri suavissimo Francisco De Sales,
Ecclesiæ Gebennensis Præposito et Pontifici designato,
Antonius Faber salutem dicit.
884Scripsissem ad te, mi Frater, diligentiùs, si de Serenissimi Ducis nostri adventu, de quo
te scio potissimùm laborare, certi quid et explorati habuissem ; sed fuerunt omnia in hunc usque
diem adeò incerta et in utrumque eventum titubantia, ne dicam penè deplorata, ut nihil scribendum
occurreret quod levandi et consolandi tui causa scirè te mea interesset. Nunc certioribus quàm
anteà rerum argumentis erectæ sunt spes nostræ reditu Præsidis Rochetani, qui affirmat esse omnia
non solùm in expedito, sed etiam in tuto, et ante festa Paschalia venturos à Rege in hanc urbem
legatos, qui perpetuum inter Principes fœdus sanciant et jurejurando devinciant. Id si ita erit, non
dubitamus quin ad nos Princeps quoque statim sit advolaturus. Tu, quod facturum te promittis, si
et Principem et nos amas, fac ut venias ; multum tibi ex loci et temporis opportunitate auxilii
præsidiique accesserit ad ista quæ solo Deo optimo maximo auspice tam feliciter instituisti, et
commodè et honorificè peragenda.
De Avullæo nostro doleo mirum in modum quod longioribus eum sermonibus tenere, ut
sperabam et cupiebam, non potuerim. Recessit enim postridie quàm Necio veni, cùm tamen non
priùs recessurum putarem quàm Principem vidisset. Literas à te nullas mihi reddidit ; itaque quas
Necii dixeras ad me scripsisse video interceptas, feroque, ut debeo, molestissimè ; etsi fuit illud
multo jucundius te videre, tanta præsertim videndi mei cupiditate incitatum, ni puderet magis quod
mea causa tam grave et noctis et itineris incommodum suscepisses885. [414]
Pater Cherubinus infinitam tibi salutem ; ardebat miro videndi amplectendique hominis
desiderio, maximè cùm id tibi optatissimum osse ex me intellexisset. De demonomania ista
Tononensi886 aliquas à te literas habere vellet. Si ocium erit, scribe ; at etiam si ocium non erit,
quod tamen sine ocio facere potes, me ama ; et vale, mi Frater, iterum atque iterum suavissime,
iterùm atque iterum vale.
Ex urbe Camberii, 6 calend. Aprilis 1596.
Tui omnes, quos cùm aliis scribo soleo meos dicere, te salutant.
A Monsieur mon Frere,
Monsieur De Sales,
Prevost en l'Esglise Cathedrale de St Pierre de Geneve.
A Tonon.
Revu sur l'original conservé à la Visitation d'Annecy.
_____
XXVI
Monsieur mon Frere,
887Je me doubte fort que la lettre que je vous escrivis la semaine derniere par la voye de
monsieur de Crans ne vous aye pas esté rendue, par les dangers de contagion continués et accreus,
884 Vide Epist. LXIX.
885 Vide p. 177.
886 Vide p. 194.
887 Vide Epist. LXXIV.
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27.6 Page 266

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comme l'on nous dit, du costé de Necy888. Je porteray la perte fort patiemment, pourveu que vous
croyez que je n'ay pas esté si paresseux d'attendre jusques a present de me conjouir avec vous de
vostre heureux retour (car aussy n'estoit elle pour autre), en attendant qu'avec plus de loisir je
puisse vous escrire. Despuis, j'ay eu quelques heures de meilleur loisir, mais point de commodité
de porteur qui s'en allast du costé de Sales ou de Tonon.
Je m'asseure que vous n'aurez pas esté moins impatient en l'attente de recevoir de mes
nouvelles que moy, en l'attente de pouvoir vous faire part des miennes et d'avoir des vostres,
combien que pour ma consolation j'aye veu nostre bon frere889, qui m'a bien au long entretenu, et
discouru plusieurs particularités de vostre voyage, toutes tres aggreables, mesme celle du françois
converti ; car elle vise a l'honneur de Dieu premierement, puis au vostre, qui sont les deux plus
grandes grandeurs que j'apprehende dans ce monde. Bref, il me semble que je vous ay veu et que
je vous voy, et peut estre encor que je vous verray en brief. [415]
Au reste, j'ay a vous dire pour bonne nouvelle, et meilleure pour moy que pour vous, que
monsieur de Jacob890, venant de France, m'a fait entendre que Madame de Nemours l'avoit prié
fort affectionnement de sçavoir de Son Altesse si elle auroit aggreable que je fusse convié d'estre
President du Genevois891 ; a quoy s'accorde un billet escrit par monsieur de Charmoisy, nostre
parent, a monsieur son pere892, qui adjouste que Monsieur et Madame de Nemours estoyent sur le
poinct de m'en prier. Je serois trop long a vous conter tout ce qui a esté dit sur ce propos entre luy
et moy ; tant y a, que son advis a esté que je peux et doy entendre a ceste condition, et que Son
Altesse l'aura tres aggreable, et a resolu de faire l'office a ce voyage qu'il fait en nostre court, ou il
s'est acheminé despuis deux jours. Je m'asseure que le commandement ne tardera gueres de venir
; il ne restera sinon que de l'autre costé on m'escrive. Et voyla ma cause gaignee. Apprestes vous
seulement d'estre le president du President, et de rabbattre trois ou quattre heures tous les jours de
vostre plus serieuse estude. Je ferois tort a ceste lettre, pleine d'un sujet tant desiré, si je la chargeois
d'autre matiere, sinon pour vous dire que j'ay fait tenir voz pacquetz a monsieur de Lullin par le
secretaire mesme de monsieur de Jacob, qui m'a promis de les delivrer en mains propres.
Nostre santé est tres bonne en general, graces a Dieu, lequel vueille qu'ainsy soit de celle
de Necy bien tost. Quant a la vostre, je la tiens et desire toute telle que celle de l'autre vous mesme,
sinon que de plus il est
Vostre serviteur,
A. FAVRE.
Ma maistresse avec toute la suite vous salue ; ainsy fait elle madame du Foug893, et moy
encores plus, sans oublier monsieur l'advocat du Crest894, et monsieur le Procureur fiscal895.
De Chambery, en haste, ce 21 novembre 1596.
Monsieur mon Frere,
Monsieur De Sales,
Prevost de l'Esglise Cathedrale de Sainct Pierre de Geneve.
A Tonon.
Revu sur le texte inédit, inséré dans le Ier Procès de Canonisation.
_____
888 Vide p. 215.
889 Vide p. 209.
890 Vide p. 209.
891 Vide p. 61.
892 Vide p. 57.
893 Vide p. 344.
894 Vide p. 159.
895 Vide p. 312.
266/318

27.7 Page 267

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XXVII
Monsieur mon Frere,
Combien que je vous aye escrit ny a que deux ou trois jours par l'homme de monsieur de
Coudree bien amplement, et avec beaucoup de contentement pour la bonne nouvelle de laquelle je
vous ay fait part de ma promotion a l'estat que je desirois, tousjours plus pour m'approcher de vous,
qui m'estes et serez in æternum instar omnium, que pour m'esloigner du reste de mes amis, si est
ce que j'ay recherché encores ceste commodité de vous pouvoir escrire par monsieur le
Gouverneur896, pour me reintegrer en la possession de noz premieres diligences, autant que la
commodité ou, pour mieux dire, l'incommodité et le malheur du tems le pourra permettre ; car
Necy est maintenant plus decrié que jamais pour le mal qui est naguieres survenu pres du pont de
Nostre Dame. Nous sommes de par deça assez asseurés, mais non pas entierement, parce quil y a
deux villages ausquelz le mal va encores s'entretenant.
Tout mon train se porte bien, graces a Dieu, et sur toutz celuy que vous tenez et
recognoissez pour
L'autre vous mesme et rien moins qu'autre,
A. FAVRE.
Tous mes gens se recommandent, et moy particulierement, mesmes a monsieur d'Avully,
monsieur du Crest, a monsieur le Procureur fiscal et a madame du Foug.
De Chambery, en haste, ce 25 novembre 1596.
A Monsieur mon Frere,
Monsieur De Sales,
Prevost de l'Esglise Cathedrale de Geneve.
A Tonon.
Revu sur l'original inédit, conservé à la Visitation de Rennes.
_____
XXVIII
Monsieur mon Frere,
897Je n'eusse pas laissé partir ces bons villageois sans les charger de mes lettres si j'eusse
esté adverty de leur despart ; mais la faute n'en est qu'a leur procureur qui m'avoit promis de me
les faire voir, ce qu'il n'a fait. Je sçay qu'ilz ont esté depechés a leur contentement, mais non pas
sans beaucoup de despence : en quoy peut estre que j'eusse peu leur apporter quelque soulagement,
si leur procureur m'en eust parlé avant que l'argent eust esté deboursé, s'estant aussy en cela
comporté plus nonchalamment qu'il ne devoit ; combien qu'a la verité, en semblables matieres
d'argent, si peu de gens ont le credit d'en faire rien rabbattre.
Je feray voir au Conseil d'Estat la requeste du gentilhomme duquel vous m'escrivez898 a la
premiere assemblee qui se fera, qui ne peut estre devant demain, 15e de ce mois, et n'oublieray rien
de ce que je pourray pour luy faire ressentir quelque bon effect de vostre recommandation ; me
resjouissant au reste des bonnes esperances que vous donne Monsieur le Nonce, ne pouvant croire
qu'elles doivent plus longuement demeurer sans effect en chose de telle importance, et laquelle je
ne doubte point que Son Altesse, aussy bien que luy, n'affectionne beaucoup plus qu'auparavant
des qu'ilz vous ont veu : et me semble qu'icy l'autheur doit admirer leur tardiveté autant que son
sçavoir.
896 Cf. p. 227.
897 Vide Epist. LXXVIIII.
898 Cf. Epist. LXXVI.
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27.8 Page 268

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Je m'estois bien promis que je me treuverois a la premiere grand'Messe que vous diriez a
Tonon pour ces festes de Noel, mais a ce que je voy, la chose sera remise a l'an qui vient. Bon
Dieu, que le tems m'en dure, et de vous voir et en cest acte là ! l'un et l'autre sera quand il plaira a
Dieu. Je suis retenu plus que jamais d'aller en Genevois jusques a ce que j'y aille pour une bonne
fois, pour ne sembler vouloir courir au devant des honneurs ; sinon que les lettres de monsieur de
Charmoisy, mon cousin, ou quelque sien commandement ou vostre m'en fist naistre l'occasion. Ce
pendant, pour accroistre ce contentement qui n'est qu'un a vous et a moy, je vous diray que je viens
de recevoir lettres de monsieur de Jacob, par lesquelles il m'asseure que Son Altesse a tres
aggreable que j'aille en Genevois et qu'elle m'en priera (voyez quelz termes) ; et qu'en tesnioignage
de cela, mes gaiges de senateur me demeureront. [418] Mais tenez, je vous prie, ce dernier poinct
secret, car il m'importe affin qu'on ne me rabbatte rien dans cela des gaiges qu'avoit monsieur
Poille899, qui est le plus haut degré d'ambition et d'avarice auquel ma pauvreté aspire. Il ne reste
sinon que je reçoive mes depeches et d'une part et d'autre. J'espere que de nostre court monsieur
de Jacob les apportera a son retour ; mais ce ne sera pas, comme je croy, avant Pasques, car il fait
estat de se treuver a Paris seulement pour le quinziesme du mois prochain, a ce que dit monsieur
de Trollioux qui est passé pour luy aller preparer son logis. Cela me fait tres bien esperer de noz
affaires, quoy qu'on veuille dire ou gazouiller au contraire. Autres advis n'en ay je desquelz je
puisse vous faire part.
Ma maistresse et tous voz neveux qui sçavent parler vous saluent, mais le pere sur tous et
plus que tous, comme celuy qui est et sera a jamais,
Monsieur mon Frere,
Vostre tres humble frere et serviteur,
FAVRE.
Je resalue infiniment tous ces messieurs qui se resouviennent de moy, et outre les
messieurs, madame du Foug, de laquelle je suis bien humble et obligé serviteur.
De Chambery, ce 14 decembre 1596.
Monsieur mon Frere,
Monsieur De Sales,
Prevost de l'Esglise Cathedrale de Sainct Pierre de Geneve.
A Tonon.
Revu sur le texte inédit, inséré dans le Ier Procès de Canonisation.
_____
Monsieur mon Frere,
XXIX
Estant au plus fort des Meditations poetiques que j'ay commencées despuis quelques jours
sur les misteres du tressainct Rosaire900, pour faire quelque provision de devotion pour ces bonnes
festes, j'ay sceu par monsieur l'advocat Salteur901, lequel m'a remis voz dernieres lettres, quil y
avoit commodité de vous faire responce par le [419] greffier de Thonon ; et a l'instant, sans poser
la plume, j'ay seulement changé de papier pour vous faire ce mot, non moins pour accroistre en
moy cet esprit de devotion par l'imagination que je conçoy de vostre conversation, que pour vous
advertir comme du jour mesme que je receus vostre pacquet, ou, pour ne mentir, du lendemain, je
le remis a la poste avec les autres que le Conseil d'Estat depechoit par courrier expres a Son Altesse
et soubs une mesme couverture, de sorte que je m'asseure quil aura esté bien et seurement rendu ;
dequoy je n'eusse pas tant tardé de vous advertir si j'eusse heu la commodité d'un porteur.
899 Vide p. 61, not. (157).
900 Cf. p. 408.
901 Vide p. 64.
268/318

27.9 Page 269

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Car, quant au reste que vous vouliez sçavoir de moy, de la negotiation de monsieur de
Jacob pour moy en nostre court, je vous ay ja escrit, et m'asseure qu'aurez receu la lettre, que Son
Altesse treuve tout bon et me laisse, avec l'estat de senateur, mes gaiges. On m'en escrit en ces
termes : « Vous irez, vous demeurerez et tirerez voz gaiges. » Toutefois, je n'ay encor point receu
de lettres de Son Altesse, non plus que de Leurs Excellences, tellement que, non sans beaucoup de
peine, je suis contraint de dissimuler et ne faire pas semblant que je desire de voir la chose
executee, quand ce ne seroit que pour empecher que noz confreres ne vous veullent mal, pour
l'asseurance quilz ont que la force de nostre amitié m'attire a ceste resolution autant qu'autre chose
quelconque. J'espere que le retour de monsieur de Marclaz, mon cousin, m'apportera ce
contentement avec les autres.
Cependant, felix nobis de la lettre de nostre Sainct Pere902. C'est maintenant, a ce que je
voy, quil fera bon estre de voz amis a qui en voudra avoir a Romme et a Turin. Je ne pers point
pour cela courage d'esperer que vous aymerez tousjours le President, lequel vous avez bien aymé
senateur. Encor veux je que le Pape le sçache quelque jour, aussy bien que Son Altesse le sçait.
Je ne pensois vous escrire qu'un mot, et vous voyez ou la passion me porte. Encor feroy je
bien ceste plus longue, si le dernier coup de Matines ne me pressoit ; car je vous escris ceste en
semblable tems auquel je jouissois de nostre premiere entreveuë a Necy en vostre estude, sont
passés trois ans. La seule souvenance me recree infiniment ; Dieu veuille que dans un an je la
puisse rafreschir par une nouvelle jouissance.
Je n'escris rien a monsieur de Charmoisy, mon cousin, en responce de la sienne, tant pour
n'en avoir a ceste heure le loisir, que pour avoir desja satisfait a tout ce quil attend de sçavoir de
moy par celle quil aura receu de moy despuis la sienne escritte. Si je puis retirer de monsieur
Chaven le depeche du gentilhomme avant que ce [420] porteur soit party, je feray quil le portera ;
sin minus, ce sera pour l'autre fois.
Je vous baise bien humblement les mains, et a monsieur nostre cousin, sans oublier tout ce
quil y a de bon et d'honeste en vostre ville de Tonon. Ma maistresse et voz neveus vous en
presentent autant, et du mesme cœur duquel nous prions Dieu, tous tant que nous sommes,
monsieur mon Frere, pour vostre santé et prosperité.
Vostre plus humble frere et serviteur,
A. FAVRE.
De Chambery, en haste, la veille de Noel, a 9 heures du soir, 1596.
A Monsieur mon Frere,
Monsieur De Sales,
Prevost de l'Esglise Cathedrale de St Pierre de Geneve.
A Tonon.
Revu sur l'original conservé à la Visitation d'Annecy.
_____
XXX
Monsieur mon Frere,
Je vous avois escrit en grande haste la veille de Noel, comme vous verrez par la cy jointe,
pour ne perdre la commodité qu'on m'avoit enseigné du greffier de Tonon ; mais il se treuva au
lendemain qu'il estoit parti le soir devant, fort tard, de peur, comme je croy, de se treuver a nostre
Messe de minuit. Despuis, j'ay receu une des vostres datee du jour de Sainct Thomas, non toutefois
l'autre laquelle vous dites m'avoir escrit par autre voye.
Je ne treuve pas moins estrange que vous l'empechement que vous font ces messieurs de
902 Cf. p. 222.
269/318

27.10 Page 270

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Tonon903, et en ay conferé bien a plein avec monsieur le Gouverneur904 lequel m'a dit les mesmes
raisons lesquelles il a discouru avec vous sur ce sujet. Tout ce que je treuve de plus considerable,
c'est qu'il dit que par les lettres mesmes de Monsieur le Nonce a vous905, il est fait mention des
depeches qu'en veut faire Son Altesse906, lesquelz ne sont encor venus ; car sans doute s'ilz estoient
entre vos mains, la chose se pourroit faire avec beaucoup plus de reputation. L'autre raison qui
m'esmeut beaucoup, c'est que la trefve estant sur le poinct de finir, il ne faut doubter que [421] si
elle estoit finie ou rompue l'ennemy courroit quant et quant du costé de Tonon, quand ce ne seroit
que pour abbattre l'autel lequel vous auriez fait construire.
Nous sommes attendans monsieur de Jacob dans deux ou trois jours. Je ne fauldray,
incontinent apres qu'il sera arrivé, de luy en parler, tant pour sçavoir s'il apporte point de
commandement de Son Altesse sur ce faict, que pour entendre ce qui luy en semblera ; et sera bon
que vous luy en escriviez, affin qu'il s'en prenne quelque bonne resolution entre luy et monsieur
de Lambert, lequel m'a dit que si la trefve est continuee il viendra le voir. Qu'y feriez vous, mon
bon Frere ? Il faut joindre encor ceste patience a tant d'autres desquelles Dieu vous a donné et le
sujet et le merite en ceste vostre si saincte et digne negotiation. Ce pendant, il faut presser Monsieur
le Nonce pour avoir, par son moyen, le commandement de Son Altesse. Je vous escriray dans peu
de jours ce que j'en auray appris de monsieur de Jacob.
Et en ceste attente, vous baisant bien humblement les mains, comm'aussy ma maistres.se
avec voz neveux, sans oublier madame du Foug, monsieur le Procureur fiscal et monsieur du Crest,
je prie Dieu vous donner la santé longue et contente vie.
Monsieur mon Frere,
Vostre plus humble frere et, s'il se peut dire, quelque chose de plus,
FAVRE.
De Chambery, ce 28 decembre 1596.
Monsieur mon Frere,
Monsieur De Sales,
Prevost en l'Esglise Cathedrale de Sainct Pierre de Geneve.
A Tonon.
Revu sur le texte inédit, inséré dans le Ier Procès de Canonisation.
_____
XXXI
Monsieur mon Frere,
Je receus hier tant seulement voz deux lettres, l'une du jour de Sainct Estienne, l'autre de
Sainct Thomas. Le subjet meritoit bien qu'elles me fussent plus tost renduës, affin que j'eusse peu
faire plus diligemment et plus chaudement l'affaire duquel vous m'escrivez. [422] La faute est
venue en partie des porteurs, en partie aussy de ce que j'ay esté absent de ceste ville pour certain
appointement que je suis allé faire du costé de Belley. Mais, graces a Dieu, tout va bien puisque
vous avez reintegré la Messe en sa possession en un jour si solemnel, quoy que non pas si
solemnellement que vous et moy eussions desiré.
Tant y a que voz scyndics de Tonon n'ont point esté icy pour se plaindre de vous, mais
seulement pour presenter requeste a la Chambre des Comptes a cause de la gabelle du sel907, a ce
903 Cf Ep. LXXX, LXXXI.
904 Cf. p. 417.
905 Vide Append. B, Ep. V.
906 Vide Append. C, Ep. I.
907 Vide p. 343, not. (763).
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28.1 Page 271

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que leur Procureur mesme m'a asseuré. je l'ay aussy sceu de monsieur le prenaient Pobel908, qui a
tousjours presidé au Conseil d'Estat en l'absence de monsieur de Jacob ; j'en ay encores parlé a
monsieur de Jacob, qui me dit n'avoir ouy aucunes plaintes de vous, ny deça ny dela les monts, au
contraire toutes les voix du monde favorables a vostre reputation, et l'un et l'autre treuvent bon ce
que vous avez fait et que vous continuiez, estant bien resolus, si quelqu'un de ces messieurs vient
se plaindre a eux, de luy bien laver la teste sans savon. Mais ilz sont bien d'advis que pour ce qui
reste a faire de plus, vous attendiez quelque commandement plus expres de Son Altesse, pour ne
contraindre Son Altesse de venir aux remedes violens qui seroient necessaires si ces messieurs
faisoient quelque insolence qui cust forme de mespris ou de rebellion ; car en somme, comme vous
escrivez, ilz n'ont point capitulé avec Son Altesse.
Monsieur de Jacob m'a asseuré que Son Altesse est tres bien disposee a plaider vostre cause
(si ainsy la faut appeller plustost que celle de Dieu) contre Messieurs de Sainct Lazare909, et que
luy mesme s'y est aydé, s'asseurant qu'en brief vous l'emporterez, du moins pour l'entretenement
de six curés. Il dit que monsieur de Lullin fait merveilles, et m'asseure que si a son retour de France
la chose n'est resolue il employera tout son credit pour la faire reussir a l'honneur de Dieu et a
vostre contentement. Nous avons resolu d'en conferer avec monsieur de Lambert, par lequel en
apres je vous en escriray plus a plein, car je suis maintenant merveilleusement pressé. La trefve
generale avec la France est continuee jusques au dernier d'avril ; monsieur de Jacob s'y en retourne
dans huict ou neuf jours.
J'ay de rechef recommandé a monsieur le president Pobel l'affaire de ce bon gentilhomme
de Tonon, et a monsieur Chaven encor qui m'avoit promis merveilles sans y avoir encor rien fait ;
et l'un et l'autre m'ont promis de le favoriser pour amour de vous, et de la plus briefve expedition
qu'il sera possible.
Monsieur l'Evesque de Sainct Paul910 se recommande a vos bonnes graces et m'a asseuré
d'avoir fait tenir vostre pacquet a Monseigneur [423] le Nonce, qui doit l'avoir receu ja des samedy
dernier. Excusez ma haste, et tenez moy in infinitum, extensivè et intensivè, pour celuy qui est,
Monsieur mon Frere,
Vostre plus humble frere et serviteur,
FAVRE.
De Chambery, ce 9 janvier 1597.
Ma maistresse et voz neveux vous baisent les mains ; aussy fay je moy a tous ceux de qui
vous m'escrivez. Nostre troisieme frere m'a escrit de France qu'il se porte tres bien.
Monsieur mon Frere,
Monsieur De Sales,
Prevost de l'Esglise Cathedrale de Sainct Pierre de Geneve.
A Tonon.
Revu sur le texte inséré dans le Ier Procès de Canonisation.
_____
XXXII
Monsieur mon Frere,
En responce de celle que ce porteur m'a remis de vostre part, je vous diray qu'il n'y a que
quattre ou cinq jours que je vous ay escrit bien a plein par le solliciteur de monsieur de Colombier,
pour respondre aux deux dernieres que j'avois eu de vous, dont la premiere estoit datee du jour de
Sainct Estienne, l'autre, du jour de Sainct Thomas. Je m'asseure que ma lettre ne s'esgarera pas,
908 Vide p. 301.
909 Vide p. 232.
910 Vide p. 356.
271/318

28.2 Page 272

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car je l'ay recommandee fort estroittement ; toutefois, parce que peut estre elle ne vous sera pas si
tost rendue, je vous en feray par ceste cy un epilogue.
Je vous escrivois qu'ayant conferé avec monsieur le president Pobel et autres seigneurs du
Conseil d'Estat, j'avois sceu que le scyndic Vernaz, qui estoit venu en ceste ville, ne s'estoit
aucunement plaint de vous, et que quand luy ou quelque autre viendroit a si mauvaise fin, on luy
lavera bien la teste. Il estoit venu seulement pour se plaindre de l'imposition qu'on leur veut mettre
sus de la gabelle du sel ; son procureur mesme me l'a ainsy confirmé. Tous ces messieurs treuvent
bien fait ce que vous avez fait et monsieur de Jacob encor, avec lequel j'en ay conferé bien au long
; et est d'advis, puisque vous avez commencé de dire la Messe a Sainct Hippolite, [424] que vous
continuiez ; mais il ne treuveroit pas bon que vous y fissiez construire aucuns autelz jusques a ce
que vous ayez receu depeches de Son Altesse, pour ne donner point de sujet ou d'occasion de
nouveau remuement en un tems si chatouilleux comme est celuy cy.
Qu'y feriez vous, mon Frere ? Il faut prendre ceste mortification et la joindre a tant d'autres
qui ont esprouvé vostre patience. Dieu est bien le chef des Conseilz d'Estat, lesquelz se tiennent
en ce tems par tout le monde ; mais quand on vient a parler de luy et de ses affaires, je croy qu'il
faut qu'il sorte de l'assemblee, comme s'il en estoit seulement le president ou l'un des conseillers.
Je me console en l'esperance que j'ay que vostre depeche ne tardera plus gueres, et que vous n'avez
pas peu fait par ceste boutee.
Monsieur de Jacob m'a dit que monsieur de Lullin fait merveilles contre les Chevaliers de
Sainct Lazare, et que Son Altesse la combat pour nous a spada tratta. Il m'a dit de plus que s'y
estant une fois treuvé et convié par Son Altesse d'en dire son advis, il le dit tel qu'il devoit pour la
cause de la religion, et se promet qu'a son retour, s'il reste a faire quelque chose, il s'y employera
si chaudement que nous en verrons les effects. Il tient desja pour fait qu'il y aura six curés
entretenus, a six vingts escus pour curé.
Il y a plusieurs autres choses en ma derniere lettre, a laquelle je suis contraint de me
remettre pour le peu de loisir que me donnent les occupations du Senat, ou je me treuve en rapport
et chargé d'ailleurs d'une infinité d'affaires. Si faut il qu'encor je vous die que j'ay receu par
monsieur de Jacob les patentes de Son Altesse, qui me permet d'aller en Genevois en retenant mon
estat de senateur avec mes gaiges. Mais je n'ay encores point receu des lettres de Leurs
Excellences, et croy que monsieur de Jacob a son retour de France, ou il n'est pas encores allé, me
les apportera, et que par consequent la chose ira a la longue.
Je le porte impatiemment pour le desir que j'ay de vous voir, et monsieur vostre pere, avec
tout ce qui est de la suite. Mais je me console en l'esperance qu'entre cy et la, Son Altesse fera
lever ceste gendarmerie qui ruine tout le pauvre Genevois, ou du moins la cavallerie. Monsieur de
Jacob m'a asseuré que Son Altesse est en ceste volonté, et que cela seroit ja fait, sans l'advis qui
vint a nostre court de la contagion reprise a Necy, lors qu'on estoit sur le poinct d'en faire les
depeches. Il attend que monsieur Trollioux les luy apporte dans peu de jours, parce qu'il en a chargé
ses memoires et escrit a Son Altesse de bonne encre. Toutefois, j'ay escrit a messieurs du Conseil
qu'il me sembleroit tres expedient que toute la province deputast quelque gentilhomme pour aller
representer a Son Altesse ses plaintes [425] et le miserable estat auquel se treuve reduit tout le
peuple. J'espere que monsieur de Beaumont, avec lequel j'en ay aussy parlé, prendra bien ceste
peine, s'il en est prié un peu vivement.
J'ay escrit bien au long a Monsieur nostre pere par l'homme de Necy qui m'apporta la lettre
de messieurs du Conseil ; je m'asseure que la lettre luy aura esté rendue. Ceste cy ne laissera, s'il
luy plaist, d'estre pour vous deux, comme encores les tres humbles recommandations que ma
maistresse et moy presentons a ses bonnes graces et a celles de Madame nostre mere, Messieurs
nos freres, et Mesdemoiselles nos sœurs, priant Dieu vous donner a tous, Monsieur mon Frere, une
santé longue et contente vie.
Vostre plus humble frere et serviteur in infinitum,
FAVRE.
De Chambery, en haste, ce quatorzieme janvier mil cinq centz nonante sept.
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28.3 Page 273

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J'ay remis au Pere Cherubin vostre traitté911 incontinent que je le vis a Necy apres vous
avoir laissé. Je m'asseure qu'il l'aura veu diligemment, car il me le promit, et je sçay qu'il desiroit
extremement de le voir.
A Monsieur mon Frere,
Monsieur De Sales,
Prevost en l'Esglise Cathedrale de St Pierre de Geneve.
A Sales.
Revu sur le texte inséré dans le Ier Procès de Canonisation.
_____
XXXIII
Monsieur mon Frere,
Vous m'avez osté d'une extreme peine me faisant sçavoir de voz nouvelles et m'envoyant
la requeste de ce bon gentilhomme qui languit des si long tems ; car ayant eu je ne sçay combien
de fois la main a la plume pour vous escrire, j'ay tousjours esté retenu et empeché par honte que
j'ay du tort que nous avons, monsieur Chaven et moy, de l'avoir abusé si longuement. Il n'a pas
tenu a moy que l'expedition ne s'en soit ensuyvie ; mais quoy que j'aye sceu faire, mesme despuis
mon dernier retour de Necy, il ne m'a jamais esté possible ny par courtoisie ny par force d'avoir de
ce petit homme autre que paroles et vaines promesses. Maintenant je me passeray [426] de luy, et
au premier Conseil d'Estat, qui se tiendra demain comme j'espere, j'auray quelque bonne provision,
a ce que me fait esperer monsieur le president Pobel, auquel j'en ay parlé ja des long tems et qui
m'a promis toute la faveur qui luy sera possible. Vous serez adverty par la premiere commodité de
ce que j'auray peu negotier.
Ce pendant tenez vous joyeux, nonobstant les traverses ou nonchalances de ceux qui
devroyent vous ayder en ceste vostre si saincte entreprise ; vostre patience a desja vaincu les plus
grandes difficultés, j'estime que ce qui reste a faire ne vous peut estre que subjet d'honneur et de
contentement. Je ne vous escris rien de ce malheureux acte qui s'est naguieres commis a Mussel,
tant pour n'en avoir le loisir que pour n'interrompre voz devotes pensees d'un si fascheux entretien.
J'en ay escrit a monsieur vostre pere ce qui m'en sembloit.
J'ayme mieux vous parler de monsieur Locatel, nostre frere, qui m'a chargé par sa derniere
lettre de vous baiser bien humblement les mains, et vous advertir qu'il est pere d'une Marguerite.
J'espere qu'avec vostre bonne ayde je pourray dans cinq mois estre pere d'un François, si ma
maistresse ne me trompe, laquelle en ceste apprehension vous baise bien humblement les mains,
comm'aussy je fay, et a madame du Foug et a tous ces messieurs nos communs amis, priant Dieu
vous donner a tous une santé longue et contente vie.
Monsieur mon Frere,
Vostre plus humble et plus obligé,
FAVRE.
De Chambery, en haste, ce 14 mars 1597.
A Monsieur mon Frere,
Monsieur De Sales,
Prevost de l'Esglise Cathedrale de Sainct Pierre de Geneve.
A Tonon.
Revu sur le texte inédit, inséré dans le Ier Procès de Canonisation.
_____
911 Cf. p. 415.
273/318

28.4 Page 274

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XXXIV
Monsieur mon Frere,
J'avoy differé quelques jours de vous escrire tout expressement pour donner loisir a mes
depeches de venir, affin de vous entretenir desormais de quelque subjet plus aggreable que ne sont
ces esperances languissantes qui nous ont morfondus despuis tant de mois. Enfin [427] tout est
arrivé avec monsieur de Jacob, horsmis la paix. Je ne pouvois desirer lettres plus favorables que
celles qui m'ont esté escrittes par Leurs Excellences, outre les patentes. Dieu soit loué que nous
voilà tous deux a l'egal contens et en beau chemin de jouir, sil plait a Dieu, a longues annees de
ceste mutuelle et incomparable amitié, laquelle se fait desja paroistre es lieux mesmes ou nous
n'avons jamais esté veus ny congnus.
Il ne reste sinon que ceste jouissance s'ensuyve de plus pres. Et pour ceste cause, je ne
refuse pas d'estre le premier a vous aller au devant, si messieurs du Senat et du Conseil treuvent
bon que j'aille prendre possession de mon presidentat, affin qu'a nostre premiere veuë je vous mette
un president entre les bras. J'espere que si ce n'est pour les derniers jours de la semaine prochaine,
ce sera pour la suyvante. Dieu sçait combien je desireroys de vous y treuver, et pour combien de
raisons ; mais je prendray bien patience pour quelques jours, pourveu que je sois bien adverty de
vostre bon portement, et que la conversation du Pere Esprit vous console parmy tant de travaux
que vous continuez de prendre a cultiver ceste barbarie huguenotte, si cultiver se peut dire pour
deraciner ; mais je parle du terroir, non pas de la semence.
Quant a la conference912, je ne desire rien tant que d'ouir dire le jour auquel elle se fera, et
ne croy pas quil y aye presidentat que je ne quittasse pour aller en estre tesmoin ; mais je suis bien
comme vous, je crains que ces longueurs n'en facent perdre et le goust et l'occasion. Sil se fait
quelque chose, je m'asseure que j'en seray adverty des premiers et que j'auray ce credit de m'y
pouvoir treuver en quelque coin.
Je vous envoye une lettre que je viens de recevoir de Monsieur l'Evesque de Mauriane.
Vostre commere vous salue pour elle et pour son petit François qui se fait tous les jours plus gros
que grand ; nostre frere de mesme, avec toute la brigade ; mais moy plus que tous, qui suis,
Monsieur mon Frere,
Vostre vous mesme, frere et serviteur,
A. FAVRE.
De Chambery, en haste, ce 21 may 97.
A Monsieur mon Frere,
Monsieur De Sales,
Prevost de l'Esglise Cathedrale de St Pierre de Geneve.
A Tonon.
Revu sur l'original conservé à la Visitation d'Annecy. [428]
912 Vide pp. 236, 295.
274/318

28.5 Page 275

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B. Lettres de Mgr Jules-César Riccardi, Archevêque de Bari, Nonce
Apostolique a Turin913
_____
I
Molto Reverendo Signore,
914Per il carico che io tengo di Nuntio appresso il Serenissimo Signor Duca di Savoia, son
stato obligato d'informarmi de' prelati et ministri che fanno bene l'officio loro. Et tra questi,
havendo havuto ottima relatione del zelo, della sufficentia et bontà di V. S. per bocca medesima
di Sua Altezza, ho voluto scriverle la presente acciò sappia la satisfattione che io sento di lei et il
testimonio che son per renderne a Nostro Signore in ogni occasione di suo servitio.
Et perchè Sua Santità desidera di haver spesso raguaglio del frutto che se va facendo nella
diocesi di Geneva, et dello stato in che si trovano le cose di quella Chiesa et dell' aiuto che se li
potrebbe dare, io desidero che V. S. mi avvisi spesso di tutto quello che giudicarà degno della
notitia di Sua Beatitudine, così circa le cose della diocesi di Geneva come di ogni altra cosa che si
potrebbe fare per beneficio spirituale della provincia della Savoia, chè me ne farà piacere
accettissimo.
Et offerendomele con tutto l'animo, le prego dal Signore Dio felicità continova.
Di V. S. molto Reverenda,
Come fratello affettionatissimo,
G. CESARE, Arcivescovo di Bari.
Di Torino, a dì 29 di Decembre 1595.
Al Molto Reverendo Sigre,
Monsre di Sales, Vicario di Geneva. [429]
_____
II
Molto Reverendo Signore,
915Ho presa molta consolatione della lettera di V. S. di 19 di Febraro, conoscendo il zelo
che tiene della religione cattolica et quanto fruttuosamente spenda il talento che Dio benedetto le
ha dato. Et per non defraudarle del suo merito, io di novo ne ho fatto testimonio a Sua Santità, et
le ho mandata la medesima sua lettera per ottener la licentia delli libri prohibiti et per poter
assolvere quelli che ha trovato haver contratto matrimonio senza dispensa ; et dell' uno et dell'altro
se ne haverà tra pochi giorni risposta.
Et perchè Nostro Signore desidera di haver particular raguaglio dello stato di quelle anime
della diocesi di Geneva, et del frutto che si va facendo et delli aiuti che si possono dare, io desidero
che V. S. sia contenta di darmene spesso avviso. Nel resto, tenga per certo che io le sono
affettionatissimo et che nessuna cosa desidero più che di havere occasione di procurarle servitio
et accrescimento ; et me le raccomunando con tutto l'animo.
Di V. S. molto Reverenda,
Come fratello affettionatissimo,
913 Ces lettres sont revues sur les textes insérés dans le Ier Procès de Canonisation. Elles sont inédites, sauf les lettres
IV, V, X.
914 Vide Epist. LXVI.
915 Vide Epist. LXVI.
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Di Torino, a 7 di Marzo 1596.
G. CESARE, Arcivescovo di Bari.
Al Molto Revdo Sigre,
Il Sigre Francesco di Sales, Prevosto di Geneva.
_____
III
Molto Reverendo Signore,
916Monsignore di Avully917 mi ha presentata a 25 di Agosto la lettera di V. S. di 23 di
Luglio, et l'impedimento del contagio haverà ritardato il cammino. In conformità di quel che V. S.
mi ha scritto, ho cognosciuto in questo cavalliero ottima disposinone di venire alla fede cattolica.
Et così hieri, che furono li 26, l'esseguì con incredibile mio contento, havendo abiurato avanti di
me et del P. Inquisitore le sue heresie ; et reconciliatose con la santa Chiesa Cattolica, volse [430]
anco che io lo communicassi di mia mano, et in ogni attione mostrò gran segno di pentimento. Et
spero che Dio benedetto se ne vorrà servire per instrumento da convertir quel ducato di Ciables, sì
come mi ha promesso di fare con tutto lo spirito. Io ho dato conto della sua conversione a Nostro
Signore918 che se ne rallegra incredibilmente, et gli ho mandato anco la lettera che V. S. mi ha
scritta, acciò cognosca quanto fruttuosamente Ella s' impiega in servitio di Dio benedetto.
Mando qui alligata la commissione al signor Vicario di Geneva919 che assolva et dispensi
sopra quelle persone che hanno contratto matrimonii in gradi prohibiti, et si potrà regolare
conforme alla stessa commissione.
Mi è stato gratissimo di haver inteso che V. S. sta per venire a Torino920, et venendo non
ha da pensare ad altro hospitio che a questo mio, poichè questa casa è sua. Et me le offero et
raccommando con tutto l'animo.
Di V. S. molto Reverenda,
Affettionatissimo per servirla,
G. Arcivescovo di Bari.
Di Torino, a 27 di Agosto 1596.
Al Molto Rdo Sigre,
Il Sigre Francesco di Sales, Prevosto di Geneva.
Ad Annessy.
_____
IV
Molto Reverendo Signore,
921La lettera di V. S. di 14 di Novembre, scrittami da Sales, non mi è capitata prima che a'
VI di Decembre, et però non si maraviglerà della tardità della risposta. Vedo che Ella sta con
pensiero della tarda spedittione che si fa qui circa li curati di Ciables, et con gran causa, per il zelo
che Dio benedetto le ha dato della conversione di quelle anime. Però non ha da perdere la speranza,
916 Vide Epist. LXXII.
917 Vide p. 198.
918 Cette lettre, adressée au Cardinal de Santa-Severina, a été insérée dans le tome VI des Mélanges d'archeologie et
d'histoire, publiés par l'Ecole française de Rome, 1886. (Voir p. XXIII de notre Avant-Propos.)
919 Vide p. 257, not. (578).
920 Vide p. 203, not. (472).
921 Vide Ep. LXXIII, LXXXVI.
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per l'ottima intentione di Sua Altezza et per il carico che io ho di sollecitarla. [431]
Il contrasto dei Cavallieri di San Lazaro922 è causa di questa dilatione, perchè pretendono
di cavar tanto poca somma di denari da quelli beni ecclesiastici che non possono concorrere a
questa spesa dei curati. Finalmente, dopo molte repliche che io ho fatto con Sua Altezza et lettere
venutegli dal signor Cardinale Aldobrandino, si sta in disponerli a concorrere al meno alla spesa
di sei curati, et spero con la gratia di Dio che si concluderà. Et almeno V. S. sia certa che io non
pretermetto un punto di diligentia, come le potrà far fede monsignor della Bastia923, il quale anchor
si adopra gagliardamente per la sua parte, acciò quanto prima ne segua l'effetto.
Io mandai a V. S. le lettere di Sua Altezza perchè le fossero pagati li trecento scudi d' oro,
et ne sto aspettando risposta ; et desidero in ogni modo che Ella si disponga di tornare in Ciables,
perchè la sua presentia sarà occasione di risolvere tanto più presto questo benedetto negotio, il
quale creda V. S. che mi è più a cuore che qualsivoglia altro che io habbia in questa nuntiatura.
Et con questo fine, assicurandola che la tengo sempre scolpita nella memoria, me le offero
et raccommando di cuore.
Di V. S. molto Reverenda,
Come fratello affettionatissimo per servirla,
G. CESARE, Arcivescovo di Bari.
Di Torino, a X di Decembre 1596.
Al Molto Revdo Sigre,
Il Sigre Francesco di Sales, Prevosto di Geneva.
Ad Annessy.
_____
V
Molto Reverendo Signore,
924In pochi giorni ho ricevuto tre lettere di V. S. : una di 12 et l'altra di 14 di Decembre, et
questa ultima di 21 925, consegnatami questa sera con l'alligata per Sua Altezza. Rispondo alla
prima, che trattava delli legati pii lasciati da quel gentilhuomo Savoiardo nelli quali pretende [432]
la fabrica di San Pietro926, che io ho mandata la lettera di V. S. a Sua Santità et supplicatala
instantissimamente a volerli rilasciare alle chiese della diocesi di Geneva et Tarantasia, conforme
alla disposinone del testatore, et rimettere qualsivoglia ragione che si potesse pretendere la fabrica
; et spero che restaremo consolati, et V. S. sarà avvisata della risposta.
Quanto alla seconda, che tratta delli curati di Ciables, V. S. sappia che in tutte le audientie
che ho havute da Sua Altezza ne ho trattato vivamente, et insieme con li signori Cavallieri di San
Lazaro ; et finalmente, dopo molte dispute, ho ottenuto che per adesso si stabiliscano sei curati alle
spese della Religione, la quale si obligarà di darli 18 coppe di frumento, duoi carra di vino et
ducento fiorini di moneta di Savoia per ciascuno, come V. S. vederà dalla copia alligata di [una]
polizza che mi ha scritta monsignor di Ruffia927. Io non intendo la moneta nè le misure di Savoia,
ma monsignor di Lullin, che è stato presente alla trattatione, mi ha assicurato che un anno per
l'altro sarà di cento scudi et forse davantaggio. Partirà di qua fra duoi giorni il cavallier Bergera928,
922 Vide p. 232.
923 Cf. p. 413.
924 Vide Epist. LXXVII, LXXIX, LXXXI, LXXXVI.
925 Il doit y avoir ici quelque confusion dans les souvenirs du Nonce. C'est dans sa lettre du 29 novembre (voir ci-
devant, p. 212) que saint François de Sales traite du legs fait par le gentihomme savoisien, et les pièces de
l'information secrète entreprise par ordre du Nonce accompagnaient la lettre adressée à celui-ci le 12 (voir p. 222) et
non pas le 14 décembre. A cette dernière date, nous ne connaissons aucune lettre du Saint.
926 Vide p. 413.
927 Vide p. 244.
928 Vide p. 231.
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mandato dalla Religione, il quale haverà carico di assignar subito il trattenimento per li suddetti
curati. Però V. S., al ricever di questa, provveda di sacerdoti letterati et di buona vita, et li dia
animo, che piacendo a Dio s'aumenteranno l'entrate et anco il numero delli altri sacerdoti ; et Ella
sa che tutti li principj sono deboli.
In questa medesima polizza mi ricercano li suddetti Cavallieri un altro particolare circa li
curati che prestano nome ai laici ; et non intendendo bene questo negotio, lo rimetto a V. S. et le
do la mia authorità acciò che in tutto quel che honestamente si può, si dia satisfattone alla
Religione.
Non voglio dire a V. S. la fatica che ho trovata in concludere questo negotio, con tutta la
pietà di Sua Altezza che in cose di religione non può essere più ardente ; ma le dico bene, che se
l' havessi durata cento volte più la fatica, devo reputarmi inutile in servitio d'Iddio benedetto. Sarà
necessario che dopo la deputatione di questi sei curati V. S. mi scriva più spesso et distintamente
di tutto quello bene che se andarà facendo, perchè Sua Santità ne riceverà consolatone grandissima
et s'andarà animando a farli delle gratie.
Con la lettera di V. S. di 14, hebbi anco l'informatione presa in quel negotio che le commisi,
et è venuta così bene come se V. S. fusse stato giudice un gran tempo. L'abbadia dell' Abondantia929
non è anco data per certi degni rispetti, et Sua Santità ha qualche intentione di levarne quelli
monaci et mettervi in suo loco li riformati di San Bernardo, et al novo Abbate credo che sarà data
questa commissione. [433]
Da questa ultima di V. S. di 21 ho intesa l'oppositione che le hanno fatto quelli di Tonone
; et perchè ero stato il giorno avanti alle audientie di Sua Altezza gli ho mandato subito la lettera
di V. S. con la mia, et supplicatala a farne risentimento et dar a lei risposta, la quale procurarò che
le se mandi quanto prima.
V. S. attenda a faticare allegramente et a scrivermi spesso, et sia sicura che la tengo scolpita
nel cuore. Et me le offero et raccommando quanto più posso.
Di V. S. molto Reverenda,
Come fratello affettionatissimo,
G. CESARE, Arcivescovo di Bari,
Di Torino, a 4 di Gennaro 1597.
Al Molto Reverendo
Sigre Francesco de Sales, Prevosto di Geneva.
_____
VI
Molto Reverendo Signore,
930Sua Altezza ha sentito gran dispiacere dell' oppositione che quelli heretici di Tonon
hanno fatta a V. S., et mi ha mandato [a] dire che per il segretario Marchando ne ha fatto subito la
provisione necessaria, la quai V. S. riceverà prima di questa con la sua risposta931. Io sarò domani
a [audienza] et soggiungerò quel di più che sarà necessario ; et V. S. stia di buon animo, che Dio
benedetto concorrerà con la sua santa gratia, et Sua Altezza non mancarà della sua solita pietà et
zelo, et io sarò diligentissimo procuratore.
Et perchè duoi giorni sono io ho scritto a pieno a V. S., avvisandola del stabilimento che
sarà preso per sei curati, mi rimetto a quella lettera, et me le offero et raccommando di cuore.
Di V. S. molto Reverenda,
Come fratello affettionatissimo,
G. CESARE, Arcivescovo di Bari.
929 Vide p. 266.
930 Vide Ep. LXXX, LXXXI.
931 Vide Append. C, Ep. I.
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Di Turino, a dì 6 de Gennaro 1597.
_____
Al Molto Revdo Sigre,
Il Sigre Prevosto di Geneva.
A Tonone. [434]
VII
Molto Reverendo Signore,
932Resto admiratissimo di non havere havuto risposta a due o tre lettere che io ho scritte a
V. S. sopra la risolutione che si prese delli sei curati di Ciables, et non è possibile che qualcuna
non vi sia capitata, et massime con l'arrivo del signor cavalliero Bergera, mandato dalla Religione
per questo et per altro effetto. Per assicurarmi del mal recapito, a 4 di Febraro, sotto coperta di
Monsignor di San Paolo933, rispondendo all' ultima di V. S. di 27 di Gennaro sopra la conferentia
di Geneva, le mandai il duplicato di tutte le lettere antecedenti ; et perchè da Monsignor di San
Paolo in capo di vinti giorni non ho nè anco havuta risposta, mi sono risoluto di mandarli il
triplicato, acciò in un negotio tanto grave sappia tutto quello che si è trattato et stabilito in quel
spatio passato.
Mandai a V. S. una copia della lettera del signor Cardinale Aldobrandino sopra quelli legati
pii lasciati dal signor Gioanni Vignodi934, et hora ne le mando un' altra ricevuta questa settimana,
dalla quale intenderà la risolutione del negotio. Io spero di haver assai presto risposta da Sua
Santità di quel che commandarà che si faccia circa la conferentia di Geneva, et subito V. S. ne sarà
avvisata, la quale torno a pregare che settimana per settimana mi tenga avvisato di tutto quello che
se va operando in Ciables, così circa la religione cattolica, com' introdur li sei curati. Et potrà
mandar le lettere a Ciamberi, dirette al signor Presidente Pobel, perchè mi verranno presto et a
buon recapito ; et la medesima farò io in scriverle, perchè non mi assicuro che Monsignor di San
Paolo stia a Ciamberi.
Sua Santità preme tanto in domandar i progressi di Ciables, che V. S. farebbe torto a sè
medesimo a non tenerme avvisato giorno per giorno, se fusse possibile, come spero che farà per
l'avvenire, posponendo tutte le altre occupationi a quest' una. Et me le offero et raccommando di
cuore.
Di V. S. molto Reverenda,
Come fratello affettionatissimo,
G. CESARE, Arcivescovo di Bari.
Di Torino, a 25 di Febraro 1597.
Non incaricarò più V. S. di quel che fo a scrivermi continuamente [435] li progressi delle
sue fatiche, et se Ella sapesse quanto Sua Santità preme nella conversione di Ciables, son certo
che mi haverebbe scritto più spesso.
Al Molto Revdo
Sigre Francesco de Sales, Prevosto di Geneva.
_____
932 Vide Epist. LXXXVII.
933 Vide p. 356.
934 Vide p. 433.
279/318

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VIII
935Resto il più admirato huomo del mondo di non haver lettere di V. S. et non so a che
attribuirne causa. Monsieur de Avully, con una sua di 8 di Febraro, mi ha scritta la gran
conversione che si fa in Ciables, et Monsignore non discende alli particolari, rimettendosi a V. S.,
ma dice solamente che vi sarebbono necessarii vinti duoi curati. Et non sapendosi li particolari di
quel paese, non vedo che Nostro Signore possa fare altra risolutione, se bene io gli habbia mandata
la medesima lettera di monsieur d'Avully936, che è brevissima.
Io mando a V. S. una copia di lettera che ho ricevuta dal signor Cardinal di Santa
Severina937 circa la conferentia da farsi in Geneva, dalla quale vederà tutte le considerationi che
sonno state fatte da Sua Santità et da tutti quelli Illmi Signori del Santo Officio in questa materia,
et tutte le particularità che desiderano di sapere prima che si faccia altra risolutione. Però io
desidero che Ella vada subito a trovar Monsignor di Geneva et il Padre Fra Cherubino938, et
unitamente mi rispondano subito capo per capo et punto per punto, et tutto quello che Sua Santità
desidera di sapere, con tutte le altre circostanze che essi giudicaranno degne della notitia di Sua
Beatitudine.
Li Generali di Gesuiti et Cappuccini hanno ordine di Sua Santità di proveder di quanti Padri
saranno necessarii per il ducato di Ciables et la diocesi Sedunense, secundo l'avviso che sarà dato
da me. Ma però V. S., insieme con Monsignor di Geneva et il Padre Fra Cherubino, pensaranno a
quelli Cappuccini che costì si potranno havere et mandarmi li nomi et cognomi di loro ; et l'istesso
faranno circa li Gesuiti, li quali si potrebbono facilmente havere dal collegio di Friborgo et di
Ciamberi per haver la lingua francese ; et se anco ne vorranno di qua, si potrà mandar il Rettore
del collegio di Torino, che è un valente theologo939 ; et mi potrà anco avvisar della spesa che si
potrebbe andare per mantener quelli Padri, per poterne dar conto a Sua Santità et a Sua Altezza.
[436]
Torno a ricordare a V. S. che leggano insieme attentamente la lettera del signor Cardinal
di Santa Severina et rispondano pontualmente ; et in caso che fussero invitati di andar a predicare
a Geneva, mi pare che [sarà bene che] si trattengano finchè Sua Santità veda quest' altra loro
replica. Se V. S. per qualche impedimento non potesse andare a trovar Monsignor di Geneva, li
mandarà questa mia istessa lettera ; et mi rispondino subito.
Et me le offero et raccommando con tutto l'animo.
Di V. S. molto Reverenda,
Come fratello affettionatissimo,
G. CESARE, Arcivescovo di Bari.
Di Torino, a 12 di Marzo 1597.
Al Molto Rdo
Sigre Francesco de Sales, Prevosto di Geneva.
_____
IX
Molto Reverendo Signore,
940In un medesimo tempo ho ricevuto due lettere di V. S., di 12 et 25 di Marzo, in risposta
di molte mie, le quali quanto più tempo sono state desiderate, tanto più mi sono state care. L' altra
935 Vide Epist. XC.
936 Vide p. 257, not. (580).
937 Vide p. 257.
938 Vide p. 98.
939 Vide p. 304.
940 Vide Ep. LXXXVII, XC, XCII.
280/318

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29.1 Page 281

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che Ella mi dice di havermi scritta per il cavallier Bergera non l'ho ricevuta, non essendo esso mai
comparso a Torino, nè preso pensiero di mandarmela. Accetto la scusa di V. S. di non havermi
scritto per il passato ; ma, per penitentia, le impongo che per l'advenire mi scriva più spesso, poichè
le occupationi saranno minori dopo la Quaresima et le giornate più lunghe ; et tanto più, quanto
che Ella potrà vedere dall'alligata copia di lettera del signor Cardinal Aldobrandino, quanta
consolatione senta Nostro Signore del progresso di Ciables et quanto habbia gradito l' opera et
diligentia di monsieur d'Avully.
Ho mandato a Sua Santità queste ultime due lettere di V. S., le quali si leggeranno nella
Congregatione del Santo Officio insieme con altre di Monsignor Vescovo di Geneva et Padre Fra
Cherubino in materia della conferentia di Geneva, et di tutto si haverà presto risolutione. Et quanto
alli curati, credo certo che Sua Santità constringerà li Cavallieri a lasciare li beni liberi alle suddette
cure.
Non rispondo capo per capo alle lettere di V. S. per non esser [437] troppo lungo, ma sappia
solo che a tutto quello ch' Ella propone io darò la mano con ogni cura possibile. Con che me le
offero con tutto l' animo.
Di V. S. molto Illustrissima,
Come fratello affettionatissimo,
G. CESARE, Arcivescovo di Bari.
Di Torino, a 4 di Aprile 1597.
Al Molto Revdo Sigre,
Il Sigre Francesco de Sales, Prevosto di Geneva.
_____
X
Molto Reverendo Signore,
941Non mi sono capitate le lettere di V. S. di 23 di Aprile se non alli otto di Maggio, et
venendo ogni giorno corrieri di Savoia mi maraviglio che tardino tanto per cammino.
Mi è piaciuta infinitamente la lettera che V. S. ha scritta a Sua Santità942, la qual con questo
ordinario gli ho mandata con l'altra del Padre Spirito943 et tutto il resto delle scritture alligate ; et
non dubito punto che Sua Santità darà ordini efficaci al Signor Legato che tratti col Re di Francia
per la restitutione della Messa nelli balliagi di Gex et Galliard, et spero anco che si habbia da
ottener secondo il desiderio di quelle povere anime. Sentirà anco gran gusto Sua Santità della
devotione delli novi cattolizati, et in particolare che sia stato capo del buon essempio monsieur de
Avully, come si poteva sperare da un cavalliero suo pari.
Io ho scritto efficacemente a monsignor della Novalesa944 che faccia proveder della sua
prebenda il predicatore di Eviano, et non lasciarò l'instantia finchè realmente sia satisfatto. Se
succederà pace o tregua presto, presto V. S. sentirà (sic) la provisione necessaria per la riforma
delle badie di Savoia, et in particolare di quella d' Aux et dell'Abondantia.
Aspetto con desiderio che V. S. mi avvisi spesso delli progressi di Ciables, et creda certo
che io non manco di ricordare perpetuamente a Sua Santità che si trovi qualche modo d'accrescere
li predicatori [438] et li curati. Et con questo fine, assicurandola della singolare affettione che io
le porto, me le offero et raccommando con tutto l'animo.
Di V. S. molto Reverenda,
Come fratello affettionatissimo,
G. CESARE, Arcivescovo di Bari.
941 Vide Ep. XCIV, XCVII.
942 Vide Epist. XCIII.
943 Vide p. 237.
944 Vide p. 292, not. (668).
281/318

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Di Torino, a XII di Maggio 1597.
Avanti ch' io habbia mandata a V. S. questa mia lettera, ho ricevuta l'alligata risposta di
monsignor della Novalesa, dalla quale vederà quel che mi risponde intorno al predicatore di
Eviano. Et perchè io non sono informato di questo fatto, V. S. mi potrà rescrivere tutto quel che
passa et quel che sarà conveniente che si dia di elemosina al predicatore.
Al Molto Revdo Sigre,
Il Sigre Francesco de Sales, Prevosto di Geneva.
_____
XI
Molto Reverendo Signore,
945Ho mandato a Monsignor Vescovo di Geneva la copia di una lettera di dieci di Maggio
che ho ricevuto dal signor Cardinal di Santa Severina, acciò intenda la risolutione che Sua Santità
ha fatta di rimettere a noi altri di qua il negotio della conferentia di Geneva. Et perchè la mia lettera
a Monsignor Vescovo, con la suddetta copia del signor Cardinale di Santa Severina, haverà da
esser partecipata a V. S. et alli Padri Cappuccini, io non mi estenderò in altro se non in dire a V.
S. che vorrei ogni giorno, se fusse possibile, avviso di tutto quel che pensano di fare in questo
negotio et di quel che hanno in animo, con fondamento. Et insieme aspetto avviso delli theologi
che se havessero bisogno per questa conferentia, perchè io ho authorità da Nostro Signore di
avvalermi di tutti li Religiosi ; et qui in Torino ci sono dei valentissimi Gesuiti, cioè un francese
et un italiano, il quale è Rettore del collegio, et quando s' havesse a venire a conferentia et che V.
S. giudicasse la venuta loro utile, io li mandarci subito subito. Ma non sono per movermi senza
haver raguaglio minutissimo da V. S. et dalli Padri Cappuccini, perchè così ricerca la qualità del
negotio.
Il Padre Cherubino ha havuto licentia da Nostro Signore di poter [439] scrivere liberamente
a quelli di Geneva, et sarà bene che Sua Paternità mi avvisi delle proposte et risposte per poterne
dar conto a Nostro Signore. Accusai a V. S. la ricevuta delle ultime sue lettere delli 21 di Aprile946,
et a Sua Santità furono mandate tutte et presto ne haveremo risposta. V. S., di gratia, si sforzi di
scrivermi il più spesso che sia possibile, per mostrare a Sua Santità che non si perde tempo in un
negotio di tanto momento.
Et me le offero et raccommando di cuore.
Di V. S. molto Reverenda,
Come fratello affettionatissimo,
G. CESARE, Arcivescovo di Bari.
Di Torino, a 25 di Maggio 1597.
Al Molto Revdo Sigre,
Il Sigr Prevosto di Geneva.
_____
XII
Molto Reverendo Signore,
Monsignor di Blonay947 mi ha mandato le lettere di V. S. delli 11 di Aprile948, le quali son
945 Vide Epist. XCVII.
946 La lettre du 21 avril, adressée au Pape par l'intermédiaire du Nonce, était accompagnée d'une autre lettre, datée
du 23, écrite au Nonce lui-même. (Voir la lettre précédente.)
947 Vide p. 255.
948 Vide Epist. XCII.
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29.3 Page 283

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capitate ben tardi, poichè non le ho havute se non all' ultimo di Maggio. Questo gentilhuomo non
ho anchor veduto, et venendo da me non mancarò di fargli ogni sorte di servitio per le sue qualità
et per amor di V. S. che lo desidera.
Circa la conferentia di Geneva io ho scritto a V. S. sei giorni sono a lungo, con un canonico
di Geneva che si partì di qua949, et me rimetto a quelle lettere che haveranno havuto buon recapito.
Circa l'abbadia d' Aux et d' Abondantia è già deputato il Visitatore da Nostro Signore, [e] per il
decanato di Ciamberi ; ma non si può mettere in cammino per aspettare l' esito della guerra. Quanto
all' accrescere li curati nel balliagio di Ciables, li Cavallieri dicono che non ci è tanta conversione
che sia necessario maggior numero ; et però io vorrei da V. S. un poco più distinto raguaglio per
disponer Nostro Signore a concederci quel che si pretende. [440]
Et con questo fine, ricordandomele affettionatissimo, me le offero et raccommando di
cuore.
Di V. S. molto Reverenda,
Come fratello affettionatissimo,
G. CESARE, Arcivescovo di Bari.
Di Torino, a 2 di Giugno 1597.
Al Molto Revmo Sigre,
Il Sigr Francesco di Sales, Prevosto di Geneva.
_____
XIII
Molto Reverendo Signore,
950Hebbi il plico di V. S., con tutte le lettere et scritture alligate, di 27 di Maggio, et di mia
mano presentai quella che era scritta a Sua Altezza, la qual la lesse con molto suo gusto et mi usò
parole verso di lei di tanta amorevolezza che non si può desiderare maggiore. Quanto a monsieur
de Avully, mi assicurò che in ogni modo voleva che li fusse conservato il solito suo loco in quel
Consiglio et che fusse restituita la entrata a quel curato che s'era partito ; et il signor Ripa951 mi ha
fatto intendere che dell'uno et dell'altro si è mandato l'ordine. Et circa questo, rimando a V. S. le
lettere et l'attestatione, acciò in ogni tempo, come Ella mi scrive, possa monstrare di moversi a
quest'officio per puro zelo et ricercata da altri.
Quanto al grano et al vino promessi dalli Cavallieri alli quattro curati et non accettato da
lei per esser cattivo, io ne ho fatto gran risentimento con questi signori del Consiglio, li quali mi
hanno risposto che non è colpa loro. Et il cavallier Bergera dice in sua giustificatione che obligò a
V. S. gli affitavoli per la suddetta somma, et che però, se non le danno roba buona, Ella li astringa
avanti il giudice o governatore, chè con poca fatica haverà quanto l'è stato promesso.
Circa l'accrescere li curati, persistono li medesimi Cavallieri a volerme dare ad intendere
che dalle cure loro non ne cavano ducento scudi, et che quasi tutte sono in mano di preti cattolici
li quali non vogliono resedere ; et che però tocca a Monsignor di Geneva, per la sua authorità
ordinaria et per quella che io gli communico per ogni bisogno, di constringere li suddetti curati a
resedere, et non volendo, [441] proveder d'altri in suo loco ; perchè usando questo rimedio, li
balliaggi verranno provisti di curati a sufficentia.
Mando a V. S. un Breve di Nostro Signore952 in risposta della lettera che Ella gli scrisse, et
per sua consolatione non lasciarò di dirle che Sua Santità l'ama assai et dalla lettere mie vedo che
l' ha in ottimo concetto.
949 Vide p. 296.
950 Vide Epist. XCV, XCVI.
951 Vide p. 301.
952 Vide Append. D, II.
283/318

29.4 Page 284

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Ho poi ricevuto l'ultime lettere di V. S. di 31 di Maggio953 in risposta delle mie di 25, et mi
son rallegrato infinitamente d'intendere che Monsignore Rmo di Geneva stia meglio della sua
indispositione, la quale io havevo intesa con infinito dispiacere. V. S. gli basci le mani da mia
parte, et gli dica che procuri di conservarsi sano per beneficio della sua Chiesa et contento de' suoi
amici et servitori, fra quali io non cedo a nissuno.
Quanto alla conferentia, poichè hanno ricevuta la copia della lettera del signor Cardinale
di Santa Severina et chiamato il Padre Fra Cherubino per concertar del modo, io non replicarò altro
se non che starò aspettando d'intender quando doverò mandar li Padri Gesuiti, senza li quali in
nissuna maniera desidero che si faccia questa disputa. Et perchè il Rettore di questo collegio di
Torino, che è un valente theologo, è italiano et non ha la lingua francese, desidero d'intendere da
V. S. se sarà a proposito d'inviarlo, o pur sarà più utile che sia francese ; perchè nel collegio di
Milano ve n'è uno che legge la Scrittura et è un valenthuomo954, et io lo farò venire quando farà di
bisogno.
Aspetto l'informatione circa il predicatore di Eviano, la quale sia chiara et distinta, per poter
constringere l'Abbate della Novalesa, il quale fugge quanto può di non (sic) far la spesa, non
ostante che sia moribondo.
Quanto al pensiero che V. S. mi ha communicato di voler concorrere a quella parocchia
che rende 200 scudi955, io non posso se non rimettermi a quello che Ella deliberarà col consiglio
di amici, sapendo che a lei non manca nè bontà, nè spirito, nè prudentia. Assicuro ben V. S. che la
tenerà per poco tempo, perchè Sua Altezza l' ha destinata a cose maggiori, et se io me trovarò qui
nella vacanza sarò diligentissimo procuratore. Intanto io ho supplicato Nostro Signore per la
dispensa di poter tener anco il canonicato, et presto se ne haverà risposta et però anco, senza fallo,
la gratia.
Circa la licentia di leggere libri prohibiti per il signor Grandis et Roget956, io ne scrissi già
al signor Cardinale di Santa Severina, ma poi, a confessar la verità, per molte occupationi non ho
havuto memoria di sollecitarla. Con quest' ordinario ne ho scritto di nuovo a Sua Signoria Illma et
dimandatola anco per il Padre Fra Cherubino. [442] Sua Santità a me ha conceduta facultà di poter
dare questa licentia a quelli Padri che interveneranno alla conferentia, et per tempo limitato et per
quello effetto solo ; et però mi è parso bene di scriver per tutti al signor Cardinale di Santa Severina.
Et con questo fine, salutandola et abbracciandola di cuore, le prego dal Signore Dio la sua
santa gratia.
Di V. S. molto Reverenda,
Come fratello affettionatissimo,
G. CESARE, Arcivescovo di Bari.
Di Torino, a 16 di Giugno 1597.
Al Molto Revdo Sigre,
Il Sigre Francesco de Sales, Prevosto di Geneva.
Annessi.
_____
XIV
Molto Reverendo Signore,
957Ho inteso con incredibile mio contento da quest'ultima di V. S. [del] XIV di Gennaro la
sua convalescenza, et se Ella sapesse la pena ch' io ho sentita del suo male crederebbe che è infinito
953 Vide Ep. XCVII, XCVIII.
954 Vide p. 304, not. (694).
955 Vide p. 297, not. (684).
956 Vide p. 299, not. (685) et p. 249, not. (559).
957 Vide Epist. CIII.
284/318

29.5 Page 285

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l'amore che io le porto. Spero che Dio benedetto la conservarà lungo tempo, et l'aspetto per dopo
Pasqua con gran desiderio.
Il portator che mi ha consegnata la lettera di V. S. non mi dà tempo se non hoggi a
rispondere, di maniera che non ho havuto commodità di trattare con questi signori della Religione
per conto di pagare lo stipendio promesso alli curati ; ma lo farò quanto prima et procurarò di
mandare a V. S. le provisioni necessarie. Mando a V. S. la facultà di assolvere li duoi Religiosi
della Madonna di Six958, li quali hanno celebrato innanzi il tempo, et insieme di dispensare coloro
sopra l'irregolarità contratta.
Con che fo fine, et me le offero et raccommando di tutto il cuore.
Di V. S. molto Reverenda,
Come fratello affettionatissimo,
G. CESARE, Arcivescovo di Bari.
Di Torino, a 10 di Febraro 1598.
Spero che non farà bisogno che V. S. arrivi a Roma, perchè la Sua Santità ha risoluto di
venire a Ferrara dopo Pasqua. Io ho [443] facilità di assolvere dalle censure et dispensar per l'
irregolarità di questi duoi Religiosi dummodo non insorduerint per annum, perchè in questo caso
bisognarebbe andare o mandare a Roma.
Al Molto Revmo
Sigre Francesco de Sales, Prevosto di Geneva.
_____
XV
Molto Reverendo Signore,
959Insieme con quest' ultima di V. S. di 17 di Marzo ho ricevuta la lettera di monsieur
d'Avully et del Padre Fra Cherubino, le quali mi hanno data infinita consolatione. Intendo il frutto
che si va facendo nella religione cattolica, et poichè giovarebbe che s'introducesse in Tonone
l'oratione delle Quarant'hore, come giovò ad Annemasse, io laudo assai il parere di V. S. et però
desidero che si esseguisca ; et intanto starò aspettando di intendere quello frutto che ne spero.
Quanto poi alle conclusioni che Ella giudica che sarebbono utili proponere alli ministri
heretici, bisogna che in questo caso si cammini con gran prudentia et con altrettanta sicurezza, et
sopra tutto che si venga alla disputa non di commissione o authorità di Sua Santità et della Sede
Apostolica, ma di Monsignor Vescovo di Geneva, come pastore ; avvertendo però che vi sia
almeno un theologo Gesuita, chè a questo fine scrivo le alligate al Padre Rettore di Ciamberi et di
Friborgo, acciò da un collegio o l'altro si mandi un Padre a richiesta di V. S. et del P. Fra Cherubino
: et con la sua assistentia si potrà venire alla suddetta disputa, rimettendomi in tutto, di farla o non
farla, alla prudentia sua et del suddetto P. Fra Cherubino.
Ho havuto anco consolatione che il medesimo Padre impugnasse con tanto valore li errori
di quel thedesco ministro heretico, quanto Ella mi dice960, et mi sarà caro di havere più
particolarmente raguaglio di tutto quello che passò fra loro.
Con che finisco, et a V. S. mi offero et raccommando con tutto l'animo.
Di V. S. molto Illustre,
Come fratello affettionatissimo,
G. CESARE, Arcivescovo di Bari.
Di Torino, a 25 Aprile 1598.
La lettera di V. S. mi è giunta tardi, et però V. S. non si maravigli [444] della tardità della
risposta. Io la sto aspettando con infinito desiderrio, et verrà a pigliar il possesso di una casa che è
958 Vide p. 316.
959 Vide Epist. CVI.
960 Vide p. 325.
285/318

29.6 Page 286

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sua.
Al Molto Revdo
Sigre Francesco de Sales, Prevosto di Geneva.
_____
XVI
Molto Reverendo Signore,
Pochi giorni sono fu qui il signor Presidente Fabro, il quale io conobbi con grandissimo
mio contento per haver trovato in lui tutte ciucile parti di pietà et di dottrina che V. S. mi haveva
testificato con le sue di 25 d'Aprile et di 18 di Maggio961. Mi fu bene di gran dispiacere che non li
fosse permesso d'intrare nella cità, per non haverlo potuto honorare nel mio hospitio conforme al
suo merito et al mio desiderio.
Trattammo a lungo insieme di tutti li particolari che V. S. mi ha scritti in queste ultime sue,
le quali io mandai a Sua Santità, supplicandola instantissimamente a darmi risolutione sopra tutti
quelli capi che si contengono in esse. Et per facilitarle con la viva voce del signor Presidente, io
l'accompagnai con lettere caldissime al signor Cardinal Aldobrandino, onde io spero ben presto
haveremo risolutione sopra tutti li capi ; et almeno io dal canto mio ho fatto tutto quello che
dovevo, et sono per fare sempre mentre che starò in questo carico. Ho anco dato ordine al mio
agente che ad ogni modo, senza risparmio di spesa, veda di ricuperare le Bolle di V. S. da quel
Favretto962, et presto haverà nova se sono spedite.
Mi occorre di dare avviso a V. S. che Nostro Signore mi ha destinato per suo Nuntio
ordinario alla corte dell' Imperatore, et commesso che io mi metta quanto prima all' ordine [pel]
viaggio. Io ho replicato a Sua Santità, rendendoli humilissime gratie del concetto che si degna
haver di me senza nissun mio merito ; ma, con la maggior modestia che ho potuto, le ho
rappresentato la mia poca sanità et un lungo catarro che mi ha occupato tutto il lato dritto, et
l'evidente pericolo che portarei di stroppiarmi in pochi giorni in quelli freddi di Germania, con
disservitio di Sua Beatitudine ; oltre che quel carico ricerca tanta gran spesa che sarebbe
impossibile di sopportarla. Per le quali ragioni spero che Sua Santità se degnerà di liberarmene, et
che la sua infinita benignità non permetterà che io perda questa poca [445] sanità che mi resta et
mi renda per sempre inabile al suo servitio. Di quel che ne seguirà darò parte a V. S., la quale in
ogni luogo dove sarò la terrò impressa nell' animo.
Et me le offero et raccommando di cuore.
Di V. S. molto Reverenda,
Come fratello affettionatissimo,
G. CESARE, Arcivescovo di Bari.
Di Torino, a 5 di Luglio 1598.
Prima di haver mandata questa, ho ricevuto l'ultima di V. S. di 13 di Giugno963, che tratta
ex professo di far restituire la Messa in Geneva. Io l'ho mandata subito a Sua Santità, con una di
Monsignor Vescovo sopra l'istesso proposito, et son certo che Sua Santità abbracciarà vivamente
l'impresa.
Con lettere ricevute hora hora dal signor Cardinale Aldobrandino sono assicurato che
Nostro Signore mi ha liberato dal carico dell' Imperatore, havendo havuta consideratione alla mia
poca sanità, la quale havrei finita di perdere in quelli freddi et in quella sorte di vita ; et il signor
Duca mi avvisa in questo punto che Sua Santità li haveva fatta gratia che io potessi continuare con
questo carico, et così haverò tempo di goder et riverir V. S., come farò sempre.
Al Molto Rdo
Sigre Francesco de Sales, Prevosto di Geneva. [446]
961 Vide Epist. CIX.
962 Vide p. 328.
963 Vide Epist. CX.
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C. Lettres de Charles-Emmanuel Ier, Duc de Savoie
_____
I
A Reverend, cher, bien amé et feal
Messire François de Sales, Prevost de Sainct Pierre de Geneve.
Reverend, cher, bien amé et feal,
964En responce de celle que avez escript, vous disons que treuvons bon qu'ayez faict dresser
un autel en l'esglise de Sainct Hipolite, comme aussy les aultres bonnes œuvres qu'a la louange de
Dieu et extirpation des heresies vous y allez exercitant ; et Nous desplaict des oppositions que l'on
vous y a faictes, que neantmoings avez surmonté ainsy que vous Nous escrivez. A quoy vous
continuerez avec la dexterité et prudence que vous sçavez convenir, ayant escript au sieur de
Lambert qu'il a tres bien faict de secourir le ministre qui se veult catholiser965, ainsy que vous et
luy Nous escripvez.
A tant prions Dieu que vous aye en sa garde.
De Thurin, ce 7 janvier 1597.
Le Duc de Savoye,
CHARLES EMANUEL.
RIPA.
Au Prevost de Sainct Pierre de Geneve.
Revu sur le texte inséré dans le Ior Procès de Canonisation. [447]
_____
II
LETTRES PATENTES DE NOMINATION DE SAINT FRANÇOIS DE SALES
A LA COADJUTORERIE DE L'ÉVÊCHÉ DE GENÈVE
CHARLES EMANUEL, par la grace de Dieu Duc de Savoye, Chablais, Aouste et
Genevois, Prince de Piedmont, etc.
A tous ceux qui ces presentes verront sçavoir faisons qu'estant deuement informé du sainct
zele que tres Reverend Pere en Dieu, nostre tres cher, bien amé, feal Conseiller et devot Orateur
Messire Claude de Granier, Evesque de Geneve, a de faire colloquer en son Evesché, par
coadjutorie ou autrement, homme cappable de telle charge, conforme a nostre intention, qu'a
tousjours esté qu'es benefices dependantz de nostre nomination les personnes mentantes soient
preferez aux aultres. A ceste cause, ayant remarqué la doctrine, vie exemplaire et autres rares
qualitez qui reluisent en nostre tres cher et bien aymé Orateur Messire François de Sales, Prevost
de Sainct Pierre de Geneve, heu d'allieurs esgard aux travaux que cy devant il a supportez et a
present supporte a la conversion des devoyés de nostre religion riesre nostre Duché du Chablais,
de quoy nous sçavons aussy Sa Saincteté estre bien informee, avons par ces presentes, en vertu
des concessions et indultz que Nous avons du Sainct Siege Apostolique, icelluy nommé et
presenté, nommons et presentons audict Evesché de Geneve, suppliant Tres Sainct Pere le Pape et
le Sacré College des Cardinaulx quilz veuillent a nostre nomination prouvoir ledict Messire
964 Vide Ep. LXXX, LXXXIII.
965 Vide p. 227.
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29.8 Page 288

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François de Sales dudict Evesché, soit par coadjutorie ou autrement, luy octroyant les despeches
sur ce necessaires.
Et pour meilleure asseurance de nostre volonté, avons signé les presentes de nostre main et
y faict apposer nostre seel accoustumé.
Donné au camp de Barreaux966, ce 29e jour d'Aoust 1597.
C. EMANUEL.
Visa pour Monsieur le Grand Chancelier : ROCHETTE.
RONCAS.
L. † S.
Revu sur le texte inséré dans le IId Procès de Canonisation. [448]
_____
III
967A Reverenti, cher, bien amé et feal Conseiller et devot Orateur,
le Prevost de l'Esglise de Sainct Pierre de Geneve,
Le Duc de Savoye.
Reverend, cher, bien amé et feal Orateur,
Nous avons receu un singullier contentement de l'asseurance que me donnez par vostre
lettre du unziesme du present, de differer les Quarente Heures pour le vingtiesme du present
mois968, auquel jour je ne faudray de me treuver a poinct nommé, sans aulcune aultre sorte de
dilation ; ayant esté tres aise de l'expedient qu'a treuvé le sieur de Lambert pour arrester le Pere
Cherubin, qu'indubitablement seroit tumbé mallade s'il heust voullu suivre sa deliberation d'aller
a Saluces pour rendre son obeissance, que je m'asseure sera excusable aupres de son General,
auquel j'en escris la cy enclose pour le prier de le nous laisser pour achever l'œuvre qu'a esté si
bien encommencee par luy. Je vous prie de tenir main a ceste deliberation, et je prieray le Createur
vous conserver en sa saincte et digne garde.
De Autecombe, le 14 septembre 1598.
CHARLES EMANUEL.
BOURSIER.
Au Prevost de Sainct Pierre de Geneve.
_____
966 Cf. p. 314, not. (713), et 321.
967 Les cinq lettres qui suivent sont revues sur le texte inséré dans le Ier Procès de Canonisation ; la Lettre VI a été
seule publiée par Datta.
968 Cf. p. 360.
288/318

29.9 Page 289

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IV
A Reverend, cher, bien amé et feal Orateur,
le Prevost de Sainct Pierre de Geneve.
Reverend, cher, bien amé et feal Orateur,
Sur l'advis que Nous avons heu du passage du Legat969 par nostre Estat et par le pays de
Valley, nous depeschames hier un courrier au Pere Cherubin pour le prier de differer les Quarente
Heures jusques [449] au [28] du present970, qui sera justement le jour de son arrivee a Thonon. De
quoy je reçois un tres grand contentement, attendu que nostre attente nous a appourté ce bon heur
que d'y avoir un tant principal Prelat, lequel Nous attendrons audict lieu, ou Nous nous
acheminerons a l'advantaige ; vous en ayant bien voullu donner [advis] a celle fin, que ce pendant
vous vous disposiez a une bonne patience qui se terminera a ladicte venue, sans aultre dilation.
A tant je prie Dieu qu'il vous aye en sa garde.
De Villeneufve[-les-Chambéry], ce 17 septembre 1598.
Le Duc de Savoye,
CHARLES EMANUEL.
BOURSIER.
Au Prevost de Sales.
_____
V
A Reverend Pere en Dieu, le Prevost de Sainct Pierre de Geneve.
Reverend, cher, bien amé et feal Orateur,
Par mes antecedentes lettres, vous aurez sceu de la venue du Legat et le desir qu'avons qu'il
se treuve aux Quarente Heures, qui les sollempnisera beaucoup plus ; et seroit bien marry si pour
un peu de temps luy et moy en perdions la commodité. Il sera mardy prochain a Bourg, et de la, il
sera dans six jours a Thonon ou Nous nous treuverons un peu advantaige pour l'y reçoipvre. Je
vous prie qu'un peu de temps ne nous soit vendu si cher, comme il seroit si icelle (sic) se faisoit
sans Nous, qui Nous causeroit un regret inevitable. Et si bien je crois que, mes lettres receues, vous
aurez changé de deliberation, si n'ay je pourtant voullu laisser de vous en donner advis, priant Dieu
qu'il vous aye en sa garde.
De Villeneufve, le 19 septembre 1598.
Le duc de Savoye,
CHARLES EMANUEL.
Au Prevost de Sainct Pierre. [450]
_____
969 Vide p. 221.
970 Vide infra, Ep. V, VI.
289/318

29.10 Page 290

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VI
A Reverend, cher, bien amé et feal devot Orateur,
le Prevost de Sainct Pierre de Geneve.
Reverend, cher, bien amé et feal Orateur,
Peu appres la lettre que vous avons escript du jourd'huy est arrivee la vostre du dix
huictiesme, qui Nous appourte un tres grand contentement et ensemble remplit de toutte
consolation, voyant tant d'ames bien disposees pour se remettre au vray chemin. A quoy Nous
sommes tout disposé pour les y assister de nostre presence et y appourter tout ce que Nous
pourrons, soit en luminaires que pour fournir a la despense, ainsy qu'escripvons au sieur de
Lambert de faire. Si aultre ne retarde le Legat, il s'y treuvera des mardy prochain en six jours, non
compris le mardy, et Nous un peu auparavant, ne le desirant pas moingtz que vous.
A tant prions Dieu qu'il vous aye en sa garde.
De Villeneufve, ce 19 septembre 98.
Le Duc de Savoye,
CHARLES EMANUEL.
BOURSIER.
Au Prevost de Sales.
_____
VII
A Reverend, cher, bien amé et feal,
le Prevost de Sainct Pierre de Geneve,
Le Duc de Savoye.
Reverend, cher, bien amé et feal,
Nous ayant, appres vostre despart, le Reverend Monsieur Louys Perrucard faict apparoir
de la nomination faicte en sa personne, des l'annee 1589, lhors que nous estions a Gex, du prieuré
de Sainct Jean soubz le vocable de Sainct Jean hors les murs de Geneve, riesre ledict pays, et
supplié de ne luy prejudicier en son anterieurité par l'aultre nomination qu'en avons faict au Baron
de Viry971 : ce que [451] Nous semblant raysonnable, et estant d'ailleurs bien memoratif des causes
que Nous meurent de le faire, Nous a semblé par ce de vous dire qu'ayez a vous desporter de la
charge et sollicitation qu'en pourriez faire pour l'union dudict prieuré a la Collegiale de Viry, ains
faire instance pour en obtenir les provisions necessaires en faveur dudict Perrucard, docteur es
droictz et esleu de Seseri, en escripvant en ceste conformité a monsieur l'Ambassadeur Arconat972
et au Cardinal Aldobrandin. De quoy avons voullu vous donner advis, priant Dieu qu'il vous aye
en sa garde.
De Thonon, ce vingtiesme novembre 1598.
CHARLES EMANUEL.
BOURSIER.
Au Prevost de Sales. [452]
971 Vide p. 285.
972 Vide p. 315.
290/318

30 Pages 291-300

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30.1 Page 291

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D. Brefs de Sa Sainteté Clément VIII
I
Dilecto filio Francisco de Sales,
Præposito Cathedralis Ecclesiæ Genevensis,
CLEMENS PAPA OCTAVUS.
Dilecte Fili, salutem et Apostolicam benedictionem.
973Narravit Nobis vir religiosus Frater Spiritus, ex Ordine Capucinorum, verbi Dei
concionator, de tua pietate et zelo divini honoris, quod pergratum Nobis accidit. Idem autem
quædam nostro nomine exponit, quæ ad Dei gloriam pertinent quæque Nobis cordi sunt maxime.
Tu fidem iIli cumulatam habebis, perinde ac Nobis ipsis; eamque diligentiam adhibebis quam a
tua prudentia et erga Nos atque hanc Sanctam Sedem devotione expectamus; tibique paterne
benedicimus.
Datum Romæ, apud Sanctum Marcum, sub annulo Piscatoris, die prima Octobris, anno
millesimo quingentesimo nonagesimo sexto, Pontificatus nostri anno quinto.
SYLVIUS ANTONIANUS.
Revu sur le texte inséré dans le Ier Procès de Canonisation.
II
Dilecto filio Francisco de Sales, Ecclesiæ Genevensis Proposito,
CLEMENS PAPA OCTAVUS.
Dilecte Fili, salutem et Apostolicam benedictionem.
974Fidei Catholicæ studium et zelum salutis animarum servo Dei et in sortem Domini
vocato plane dignum, in tuis litteris perspeximus; [453] et quid hactenus egeris in negotio ilio de
perdita ove ad Christi ovile reducenda, cognovimus.
Tuam, Fili, diligentiam et sedulitatem in Domino commendamus, et quamvis ea res, cujus
felicem exitum valde optavimus, non mediocrem, ut scribis, difficultatem habeat, quia tamen Dei
opus est, cujus gloriam quærimus et cujus misericordia atque auxilio nitimur, te propterea
magnopere hortamur ne eam curam deseras, neve cesses quod semel inchoasti, Dei adjutrice gratia,
urgere. Speramus enim quod labor tuus non erit inanis in Domino.
Quod ad populos illos attinet, quos Catholicæ religionis restitutionem avide expetere
significas975 id quidem perjucundum Nobis accidit ut ea de re scribamus in eam sententiam quam
res postulat et tu admones976. Tu interea quod potes præsta, Deo juvante; et Nos tibi paterne
benedicimus.
Datum Romæ, apud Sanctum Petrum, sub annulo Piscatoris, die vigesima nona Maii, anno
millesimo quingentesimo nonagesimo septimo, Pontificatus nostri anno sexto.
SYLVIUS ANTONIANUS.
Revu sur le texte inséré dans le Ier Procès de Canonisation.
973 Vide Epist. XCIII.
974 Vide Epist. XCIII.
975 Vide p. 270.
976 Vide p. 271, not. (602).
291/318

30.2 Page 292

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Table de correspondence de cette nouvelle édition avec
les précédentes et indication de la provenance des
manuscrits
NOUVELLE
ÉDITION
I
I bis
II
III
IV
V
VI
VII
VIII
minute
incomplè
IX
te
autre
minute
X
XI
PROVENANCE DES
MSS.
GENÈVE. Arch de
l’Etat
ANNECY. Visitation
Idem
TURIN. Visitation
Idem
ANNECY. Visitation
TURIN. Visitation
BESANÇON. Mme
Doroz
ANNECY. Visitation
Idem
TURIN. Arch de l’Etat
(Copie)
BESANÇON. Mme
Doroz
TURIN. Arch de l’Etat
(Copie)
XII
ANNECY. Visitation
XIII
XIV
XV
XVI
XVII
XVIII
Idem
TURIN. Arch de l’Etat
(Copie)
ANNECY. Visitation
BESANÇON. Mme
Doroz
NAPLES. Visitation
(1er Monastère)
ANNECY. Visitation
XIX
Idem
XX
Idem
PREMIÈRE
PUBLICATION977
Revue Sav., mars 1867
………………………
………………………
………………………
………………………
………………………
………………………
………………………
………………………
Datta978, I, p. 8
………………………
Datta, I, p. 17
Ibid., p. 36
Ibid., p. 31
Ibid., p. 45
Ibid., p. 50
………………………
………………………
Datta, I, p. 74
Ibid., p. 71
Ibid., p. 54
ÉDITIONS
MODERNES
Inédite
Inédite
Inédite
Inédite
Inédite
Inédite
Inédite
Inédite
Vivès, VII, p. 12
Migne, VI, col. 416
Inédite
Viv. VII, p. 20
Mig. VI, col. 421
Viv. VII, p. 47
Mig. VI, col. 436
Viv. VII, p. 43
Mig. VI, col. 433
Viv. VII, p. 54
Mig. VI, col. 444
Viv. VII, p. 58
Mig. VI, col. 445
Inédite
Inédite
Viv. VII, p. 76
Mig. VI, col. 464
Viv. VII, p. 74
Mig. VI, col. 461
Viv. VII, p. 62
Mig. VI, col. 449
[455]
977 C’est sous toutes réserves que nous indiquons les publications dans lesquelles les lettres ont paru pour la
première fois.
978 Voir l’Avant-Propos de ce volume, p. XVI.
292/318

30.3 Page 293

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XXI
XXII
XXIII
XXIV
XXV
XXVI
XXVII
XXVIII
XXIX
XXX
XXXI
XXXII
pp. 84-86
(ll. 1-11)
suite
XXXIII
XXXIV (fragment)
XXXV
XXXVI
XXXVII
XXXVIII
XXXIX (fragment)
XL
XLI
XLII
XLIII
XLIV
XLV
XLVI
variante
(a)
texte
ANNECY. Visit.
(Copie)
Idem
………………………
ANNECY. Visitation
Idem
Idem
Idem
Idem
TURIN. Visitation
Idem
ANNECY. Visitation
TURIN. Visitation
ANNECY. Visitation
Idem
ANNECY. Dom.
Mackey, O. S. B
ANNECY. Visitation
(Ancien Ms. de l’Année
Sainte)
Ier Procès de Canonis.
………………………
………………………
ANNECY. Visitation
(Ancien Ms. de l’Année
Sainte)
CHAMBERY.
Chanoine Collonges
Idem
Idem
POLIGNY. Abbé P.
Waille
Ier Procès de Canonis.
Idem
Idem
ANNECY. Visitation
(Ancien Ms. de l’Année
Sainte)
………………………
Datta, I, p. 42
Vie du Saint par
Charles-Auguste, liv. II
Datta, I, p. 57
Ibid., p. 59
Ibid., p. 61
Ibid., p. 15
………………………
………………………
………………………
Datta, I, p. 65
………………………
Datta, I, p. 97
Vie du Saint par
Charles-Auguste, liv. II
………………………
Vie du Saint par
Charles-Auguste, liv. II
………………………
………………………
………………………
Année Sainte de la
Visitation, t. XII, 1er
déc.
………………………
………………………
Datta, I, p. 41
………………………
………………………
………………………
………………………
Datta, I, p. 99 (Cf.
Inédite
Viv. VII, p. 51
Mig. VI, col. 441
Viv. VII, p. 65
(traduction)
Mig. V, col. 315
(traduction)
Viv. VII, p. 67
Mig. VI, col. 452
Viv. VII, p. 69
Mig. VI, col. 453
Viv. VII, p. 71
Mig. VI, col. 453
Viv. VII, p. 18
Mig. VI, col. 421
Inédite
Inédite
Inédite
Viv. VIII, p. 13
Mig. VI, col. 457
Inédite
Viv. VI, p. 265
Mig. VI, col. 479
Viv. VIII, p. 10
Mig. V, col. 313
Inédite
Viv. VIII, p. 3
Mig. V, col. 307
Inédite
Mig. VI, col. 1067
Ibid., col. 1066
Mig. VI, col. 1065
Ibid.
Viv. VII, p. 5
Mig. VI, col. 439
Inédite
Inédite
Inédite
Inédite
Viv. VIII, p. 28 (cf.
ibid., p. 2)
Mig. VI, col. 481
293/318

30.4 Page 294

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XLVII
XLVIII
XLIX
L
LI
LII
LIII
LIV
LV
LVI
LVII
LVIII
LIX
LX
LXI
LXII
LXIII982
………………………
minute
texte
définitif
TURIN. Visitation
TURIN. Archiv. de
l’Etat (Copie)
ENGHIEN (Belgique)
RR. PP. Jésuites
Idem
ANNECY. Visitation
texte
définitif
minute
1er et 3e
alinéas ;
dernier,
ll. 1-3
2e alinéa
et suite
du
dernier
texte
définitif
autre
leçon
minute
GENEVE. Abbé
Chavaz
VOIRON. Visitation
Ier Procès de Canonis
ANNECY. Visitation
TURIN. Archiv. de
l’Etat (Copie)
COHENDIER (Hte-
Savoie) Baron Lud. de
Viry
Ier Procès de Canonis.
………………………
COHENDIER (Hte-
Savoie) Baron Lud. de
Viry
Ier Procès de Canonis.
Idem
Idem
Idem
TURIN. Archiv. de
l’Etat
RENNES. Visitation
ANNECY. Visitation
l’édition Hérissant979,
t. I, p. 17
Vie du Saint par
Charles-Auguste, liv. II
Œuvres 1641, t. II980,
Ep. IX
Datta, I, p. 158
(cf. V, col. 36)
[456]
Viv. VIII, p. 91
Mig. V, col. 334
Viv. VIII, p. 22
Mig. V, col. 317
Viv. VIII, p. 82
Mig. VI, col. 524
R. P. Griselle, S. J.981
Ibid.
Datta, I, p. 83
La Philothée de S. Fr.
de S., par J. Vuÿ, II
(1879), p. 273
………………………
Viv. VII, p. 77
Mig. VI, col. 469
Inédite
………………………
Inédit
Datta, I, p. 106
Ibid., p. 270
Viv. VIII, p. 72
Mig. VI, col. 485
Viv. VI, p. 173
Mig. VI, col. 597
………………………
Inédite
Viv. VIII, p. 5
Vie du Saint par
Charles-Auguste, liv. II Mig. V, col. 308
………………………
Inédite
Vie du Saint par
Charles-Auguste, liv. II
………………………
………………………
………………………
Datta, I, p. 124
Vie du Saint par
Charles-Auguste, liv. II
Œuvres 1641, tome II,
Viv. VIII, p. 62
Mig. V, col. 235
Inédite
Inédite
Inédite
Viv. VIII, p. 45
Mig. VI, col. 499
Viv. VIII, p. 101
Mig. V, col. 341
979 Voir notre Avant-Propos, note (14), p. XV.
980 Voir notre Avant-Propos, p. XIV.
981 Quelques Manuscrits autographes de Saint François de Sales, par le R. P. E. Griselle, S. J. (Lille 1899).
982 Voir notre Avant-Propos, note (24), p. XXV.
294/318

30.5 Page 295

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LXIV
LXV
LXVI
LXVII
LXVIII
LXIX
LXX
LXXI
LXXII
LXXIII
texte
définitif
minute
LXXIV
LXXV
LXXVI
LXXVII
LXXVIII
LXXIX
LXXX
texte
définitif
minute
texte
définitif
minute
texte
définitif
minute
LXXXI
LXXXII (fragment)
LXXXIII
LXXXIV
LXXXV
LXXXVI
LXXXVII
Ier Procès de Canonis.
Idem
Ier Procès de Canonis.
TURIN. Archiv. de
l’Etat
ROME. Archives
Vaticanes (Savoia, 33)
Ier Procès de Canonis.
ROME. Archives
Vaticanes (Sav., 33)
Ier Procès de Canonis.
ANNECY. Visitation
RENNES. Visitation
ROME. Archives
Vaticanes (Savoia, 34)
ANNECY. Visitation
TURIN. Archiv. de
l’Etat (Copie)
Ier Procès de Canonis.
ROME. Archives
Vaticanes (Sav., 33)
Ier Procès de Canonis.
AMIENS. Visitation
ROME. Archives
Vaticanes (Sav., 34)
Ier Procès de Canonis.
TURIN. Archiv. de
l’Etat
Procès de Canonis.
ROME. Archives
Vaticanes (Sav., 33)
Ier Procès de Canonis.
Idem
Idem
Idem
ANNECY. Visitation
BESANÇON. Mme
Doroz
Ep. Ire
………………………
………………………
Héreissant, t. I, p. 85
(traduction)
Datta, I, p. 136
Pératé, La mission de
F. de S. dans le
Chablais983
………………………
Inédite
Inédite
Viv. VIII, p. 136
(traduction)
Mig. V, col. 349
(traduction) [457]
Viv. VIII, p. 58
Mig. VI, col. 507
Inédite
Pératé
………………………
Datta, I, p. 148
………………………
Pératé
Datta, I, p. 209
Inédite
Viv. VIII, p. 78
Mig. VI, col. 517
Inédite
Mig. VI, col. 902
(traduction)
Viv. VIII, p. 170
Mig. VI, col. 557
………………………
Inédite
………………………
Inédite
Pératé
………………………
………………………
Pératé
………………………
Datta, I, p. 169. (Cf.
Vie du Saint par Ch.-
Aug., liv. III)
………………………
Pératé. (Cf. Datta, I, p.
167)
………………………
………………………
………………………
………………………
Datta, I, p. 185
Inédite
Inédite
Mig. VI, col. 903
(traduction)
Inédite
Viv. VIII, p. 117
Mig. V, col. 346
Inédite
Cf. Viv. VIII, p.119
Cf. Mig. VI, col
529
Inédit
Inédite
Inédite
Inédite
Viv. VIII, p. 140
Mig. VI, col. 541
………………………
Inédite
983 Documents inédits tirés des Archives du Vatican. Extrait du tome VI des Mélanges d’archéologie et d’histoire
publiés par l’Ecole française de Rome, 1886. (Voir l’Avant-Propos du présent volume, p. XX.)
295/318

30.6 Page 296

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texte
LXXXVIII définitif
minute
LXXXIX
XC
XCI
XCII
XCIII
texte
définitif
minute
texte
définitif
minute
XCIV
XCV
XCVI
XCVII
XCVIII
texte
définitif
minute
texte
définitif
minute
texte
définitif
minute
texte
définitif,
pp. 291-
297 (ll.
1-5)
pp. 297-
299 (ll.
1-5)
p. 299,
ll. 6-14
fin
minute
XCIX
C
CI
CII
CIII
CIV
CV
TURIN. Archiv. De
l’Etat
BESANÇON. Mme
Doroz
NARDÒ (Italie),
Pouille. Cathédrale
Idem
Procès de Canonis.
ROME. Archives
Vaticanes (Sav., 34)
Ier Procès de Canonis.
ROME. Archives
Vaticanes (Sav., 29)
Ier Procès de Canonis.
ROME. Archives
Vaticanes (Sav., 34)
Ier Procès de Canonis.
TURIN. Bibliot. Civica
Ier Procès de Canonis.
ROME. Archives
Vaticanes (Sav., 34)
Ier Procès de Canonis.
ROME. Archives
Vaticanes (Sav., 34)
Ier Procès de Canonis.
ANNECY. Visitation
Idem
Idem
Idem
TURIN. Archiv. de
l’Etat (Copie)
Ier Procès de Canonis.
ANNECY. Visitation
………………………
Datta, I, p. 197
………………………
………………………
………………………
………………………
Pératé
………………………
Pératé
Vie du Saint par
Charles-Auguste, liv.
III
Pératé
………………………
………………………
Datta, II, p. 225
Pératé
………………………
………………………
Pératé
………………………
………………………
Datta, I, p. 212
Ibid., p. 256
………………………
Datta, I, p. 204
………………………
………………………
Datta, I, p. 238
Blaise, Lettres inédites
Viv. VIII, p. 151
Mig. VI, col. 550
Inédite
Inédite
Inédite
Inédite [458]
Inédite
Viv. VIII, p. 153
Mig. V, col. 353
Ibid., VI, col. 905
(traduction)
Inédite
Inédit
Viv. IX, p. 503
Mig. VI, col. 761
Ibid., VI, col. 906
(trad.)
Inédite
Mig. VI, col. 909
(traduction)
Ibid., col. 911
Inédite
Viv. VIII, p. 172
Mig. VI, col. 560
Viv. VII, p. 92
Mig. VI, col. 591
Inédite
Viv. VIII, p. 166
Mig. VI, col. 556
Inédite
Inédite
Viv. IX, p. 300
Mig. VI, col. 577
Viv. VIII, p. 183
296/318

30.7 Page 297

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CVI
CVII
CVIII
CIX
CX
CXI
CXII
CXIII
CXIV
CXV
CXVI
CXVII
CXVIII
CXIX
CXX
de 1833, p. 7
TURIN. Visitation
Datta, I, p. 217
1er alinéa
suite
Ier Procès de Canonis
ROME. Archives
Vaticanes (Sav., 35)
………………………
Pératé
………………………
texte
définitif
minute
Idem
ANNECY. Visitation
ROME. Archives
Vaticanes (Sav., 35)
MILAN. Visitation
TURIN. Visitation
FRIBOURG. Dr
Schaller
Pératé
………………………
Pératé
………………………
Notes histor. sur S. Fr.
de S., Bouchage, 1880
Notice sur Séb. Werro,
(fribourg, 1841)
TURIN. Visitation
Datta, I, p. 221
FRIBOURG. Musée
Cantonal
GÊNES. Sanctuaire de
la Madonetta
GENEVE. Bibliothèque
publique
ROME. Archives
Vaticanes (Sav., 35)
ANNECY. Visitation
Notice sur Séb. Werro
………………………
………………………
Pératé
Vie du Saint par
Charles-Auguste, liv.
IV
Idem
Ibid.
Mig. VI, col. 855
Viv. VIII, p. 176
Mig. VI, col. 564
Inédite
Mig. VI, col. 911
(traduction)
Ibid., col. 913
(trad.)
Inédite
Mig. VI, col. 915
(traduction)
Inédite [459]
Mig. VI, col. 916
Viv. VIII, p. 180
Mig. VI, col. 568
Ibid., col. 917
(trad.)
Inédite
Inédite
Viv. IX, p. 289
Mig. V, col. 360
Viv. IX, p. 292
Mig. V, col. 361
APPENDICE
A
I
ANNECY. Archives de
la Société Florimanotane
Datta, I, p. 1
Viv. VII, p. 6
Mig. VI, col. 409
Vie du Saint par
Viv. VII, p. 24
II
………………………… Charles-Auguste, liv.
II
Mig. V, col. 296
III
ANNECY. Visitation Datta, I, p. 21
Viv. VII, p. 34
Mig. VI, col. 425
IV
Idem
Ibid., p. 25
Viv. VII, p. 38
Mig. VI, col. 428
V
Idem
…………………… Ibid., col. 897
(trad.)
VI
Idem
Datta, I, p. 52
Viv. VII, p. 60
Mig. VI, col. 448
297/318

30.8 Page 298

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VII
VIII
IX
X
XI
XII
XIII
XIV
XV
XVI
XVII
XVIII
XIX
1er alinéa
2e alinéa
suite
Idem
…………………………
Ier Procès de Canonis.
…………………………
……………………
……………………
Vie du Saint par
Charles-Auguste, liv.
II
……………………
Ier Procès de Canonis.
Vie du Saint par
Charles-Auguste, liv.
II
alinéas
1-4
alinéas
5-7
fin
…………………………
Ier Procès de Canonis.
…………………………
……………………
Vie du Saint par
Charles-Auguste, liv.
II
……………………
Procès de Canonis.
Datta, I, p. 67
1er et 2e
alinéas
texte
complet
1er et 2e
alinéas
3e alinéa
suite
Vie du Saint par
………………………… Charles-Auguste, liv.
II
Procès de Canonis.
Datta, I, p. 118
…………………………
Ier Procès de Canonis.
…………………………
……………………
Vie du Saint par
Charles-Auguste, liv.
II
……………………
Procès de Canonis.
Datta, I, p. 76
ANNECY. Visitation
Ier Procès de Canonis.
Idem
Ibid., p. 86
……………………
Datta, I, p. 88
5er et 6e
alinéas
texte
complet
Idem
Ibid., p. 140
Vie du Saint par
………………………… Charles-Auguste, liv.
II
Procès de Canonis.
Datta, I, p. 100
Inédite
Inédit
Viv. VIII, p. 27
Mig. V, col. 321
Inédite
Viv. VIII, p. 24
Mig. V, col. 320
(voir note (823), p.
385)
Inédits
Viv. VIII, p. 7
Mig. V, col. 309
Inédite
Viv. VIII, p. 15
Mig. VI, col. 460
[460]
Viv. VIII, p. 40
Mig. V, col. 328, et
VI, col. 496
Inédits
Viv. VIII, p. 31
Mig. V, col. 324
Inédite
Viv. VIII, p. 52
Mig. VI, col. 464
Viv. VII, p. 80
Mig. VI, col. 472
Inédite
Viv. VII, p. 82
Mig. VI, col. 473
Viv. VIII, p. 65
Mig. VI, col. 512
Mig. V, col. 324
Viv. VIII, p. 29
Mig. VI, col. 481
298/318

30.9 Page 299

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XX
XXI
XXII
XXIII
XXIV
XXV
XXVI
XXVII
XXVIII
XXIX
XXX
XXXI
XXXII
XXXIII
XXXIV
I-III
IV
V
VI-IX
X
XI-XVI
I
II
Ier Procès de Canonis.
ANNECY. Visitation
Ier Procès de Canonis
Idem
ANNECY. Visitation
Idem
Ier Procès de Canonis.
RENNES. Visitation
Ier Procès de Canonis.
ANNECY. Visitation
Ier Procès de Canonis.
Idem
Idem
Idem
ANNECY. Visitation
Ibid., p. 153
Ibid., p. 113
……………………
……………………
Datta, I, p. 132
Ibid., p. 137
……………………
……………………
……………………
Datta, I, p. 171
……………………
Datta, I, p. 179
Ibid., p. 181
……………………
Datta, I, p. 202
Viv. VIII, p. 87
Mig. VI, col. 520
Viv. VIII, p. 35
Mig. VI, col. 491
Inédite
Inédite
Viv. VIII, p. 19
Mig. VI, col. 505
Viv. VIII, p. 59
Mig. VI, col. 508
Inédite
Inédite
Inédite
Viv. VIII, p. 121
Mig. VI, col. 531
Inédite
Viv. VIII, p. 128
Mig. VI, col. 537
Viv. VIII, p. 131
Mig. VI, col. 539
Inédite
Viv. VIII, p. 160
Mig. VI, col. 553
B
Ier Procès de Canonis.
Idem
Ier Procès de Canonis.
Idem
Idem
Idem
………………………
Datta, I, p. 164
Datta, I, p. 174
………………………
Datta, I, p. 199
………………………
Inédites
Viv. VIII, p. 115
Mig. VI, col. 528
[461]
Viv. VIII, p. 123
Mig. VI, col. 533
Inédites
Viv. VIII, p. 157
Mig. VI, col. 552
Inédites
C
Ier Procès de Canonis.
IId Procès de Canonis.
Vie du Saint par
Charles-Auguste, liv.
III
Datta, I, p. 227
Viv. VIII, p. 125
Mig. V, col. 348
Viv. VIII, p. 198
Mig. VI, col. 571
299/318

30.10 Page 300

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III-V
VI
VII
I
II
Ier Procès de Canonis.
Idem
Idem
………………………
Datta, I, p. 228
………………………
Viv. VIII, p. 199
Mig. VI, col. 572
D
Ier Procès de Canonis.
Idem
Vie du Saint par
Charles-Auguste, liv.
II
Ibid., liv. III
Viv. VIII, p. 104
Mig. V, col. 345
Viv. VIII, p. 162
Mig. V, col. 357
[462]
300/318

31 Pages 301-310

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31.1 Page 301

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Index des principales notes historiques et biographiques
contenues dans ce volume984
ABONDANCE (abbaye d') …………………………………………………... Pages 266
ABONDE DE CÒME, Provincial des Capucins …………………………….. »
286
AIAZZA Vespasien ………………………………………………………….. »
223
AINAY (abbaye d') …………………………………………………………… »
248
ALLEMAN (nobles du Nant, seigneurs d') ………………………………….. »
343
ANGEVILLE Claude d' ……………………………………………………… »
152
ARCONATO François ………………………………………………………. »
315
AULPS (abbaye d') …………………………………………………………… »
266
AVULLY Antoine de Saint-Michel (seigneur d') ……………………………. »
198
BALLY Jacques, curé du Petit-Bornand ……………………………………… »
328
BALLY Nicolas, son frère ……………………………………………………. »
328
BEAUCHATEAU Etienne …………………………………………………… »
324
BEAUMONT Jacques de Menthon (baron de) ………………………………. »
57
BERGERA Thomas ………………………………………………………….. »
231
BÈZE Théodore de …………………………………………………………… »
268
BOCHUT François …………………………………………………………… »
230
BOISY François de Sales (seigneur de) ……………………………………… »
117
BUSÉE Pierre, Jésuite ………………………………………………………... »
142
CANISIUS Pierre (Bienheureux), Jésuite …………………………………….
CHAPELLE Jean-Baptiste de Valence (seigneur de la). Voir VALENCE …..
CHAPPAZ Jean ……………………………………………………………….
CHARLES-EMMANUEL Ier, duc de Savoie …………………………………
CHARMOISY Charles Vidomne de Chaumont (seigneur de) ………………..
CHAVANES Claude de ………………………………………………………
CHAVENT Théodule …………………………………………………………
CHÉRUBIN DE MAURIENNE (Alexandre Fournier), Capucin ……………..
CHESNEX OU CHESNEY Etienne, juge-mage du Faucigny ……………….
CHEVALIER Bernard, curé de Cervens ……………………………………..
CHEVALLIER Claude-Gaspard ……………………………………………..
CHEVRON Hector, baron de …………………………………………………
CHISSÉ François de ………………………………………………………….
CHOSAL OU DU CHOSAL Jean-François ………………………………….
CLARISSES d'Evian ………………………………………………………….
CLÉMENT VIII (Hippolyte Aldobrandino) ………………………………….
CLERC OU CLERICI Nicolas ……………………………………………….
COCCAPANE Jules, Jésuite ………………………………………………….
COMPOIS-FETERNE Etienne de ……………………………………………
»
»
Pages
»
»
»
»
»
»
»
»
»
»
»
»
»
»
»
»
140
6, 49
[464]
42
168
57
52
182
52, 98
44
255
344
45
71
83
293
268
345
262
127
984 Les personnages qui figurent dans cet Index sont désignés de la même manière que dans le texte des Lettres. Saint
François de Sales emploie le nom sous lequel ils sont le plus connus ; c'est tantôt le nom patronymique, tantôt celui
de quelque seigneurie. D'autres fois, il ne les désigne que par leur charge ; nous donnons alors cette indication à la
suite du nom.
Si, au cours de la publication, nous pouvons découvrir des renseignements supplémentaires d'un haut
intérêt sur les personnages auxquels des notes auront été consacrées, ces renseignements seront réunis à la fin du
dernier volume de la Correspondance.
301/318

31.2 Page 302

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COPPIER Jean ……………………………………………………………….. »
4
COQUIN Jean ………………………………………………………………... »
157
COURSINGE ou CURSINGE Annibal de Genève (seigneur de) …………….. »
211
CREST Pierre du ……………………………………………………………... »
159
DÉAGE Jean …………………………………………………………………. »
2
DELBENE OU DEL BENE Alphonse, Evêque d'Albi ……………………… »
100
ESPRIT DE BEAUME, Capucin …………………………………………….. »
237
FAVERGE Janus de la ……………………………………………………….. »
FAVERGE Pernette de Chevron-Villette (dame de la) ………………………. »
FAVRE Antoine ……………………………………………………………… »
FAVRE Benoîte, sa femme ………………………………………………….. »
FAVRE René, Claude, Antoine, Pierre, Philibert, Jean-Claude, fils du »
Sénateur ……………………………………………………………………….
FAYE Antoine de la …………………………………………………………. »
FILLY (prieuré de) …………………………………………………………… »
FLECHERE François de la …………………………………………………… »
FLOCCARD Barthélemy ……………………………………………………. »
FOSSIAS OU FOISSIA Jean (de), Provincial des Dominicains …………….. Pages
FOUG OU FAUG Jeanne Barbier du Maney (dame du) …………………….. »
354
354
18
70
79
324
252
3
396
[464]
245
114,
344
GENAND (P. François de Chambéry), Capucin …………………………….. »
179
GILLI ou GILIO Lucien ……………………………………………………... »
329
GIRARD François ……………………………………………………………. »
84
GIUSTINIANI Ange, Evêque de Genève ……………………………………. »
297
GRANDIS Claude ……………………………………………………………. »
299
GRANIER Claude (de), Evêque de Genève …………………………………. »
94
GUICHARD Claude …………………………………………………………. »
96
HAUTECOMBE (abbaye d') ………………………………………………… »
76
HERMANCE François-Melchior de Saint-Jeoire (baron d') ………………… »
1
HUME OU HUMÆEUS Alexandre, Jésuite ………………………………… »
304
JACOB Guillaume-François de Chabod (seigneur de) ………………………. »
209
LESCHERAINE Antoine (de), juge-mage de Gex …………………………… »
283
LIGNARIUS OU LIGNARIDUS (Dürrholz) Herman ………………………. »
325
LOCATEL Jacques de ……………………………………………………….. »
81
LORINI OU LORIGNY Jean (de), Jésuite …………………………………… »
105
LULLIN Gaspard de Genève (marquis de) …………………………………… »
285
MANIGLIER Balthazar, curé d'Annemasse …………………………………. »
309
MARCHESI Antoine, Jésuite, Recteur du collège de Turin …………………. »
304
MARIN Claude ………………………………………………………………. »
312
MARTINENGO François ……………………………………………………. »
176
MÉDICIS Ferdinand Ier (de), duc de Florence ……………………………….. »
6
MENDOÇA Don Juan Hurtado de …………………………………………… »
347
MÉNENC Jean ……………………………………………………………….. »
15
302/318

31.3 Page 303

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MÉNOCHIUS (Menocchio) Jacques ………………………………………… »
1 bis
MÉRINDOL Antoine ………………………………………………………… »
11
MILLIET Philibert, Abbé d'Aulps …………………………………………… »
292
MONOD Georges ……………………………………………………………. »
60
MONTHOUX Gallois de …………………………………………………….. »
151
MONTROTTIER Charles de Menthon (baron de) …………………………… »
44
MUGNIER Pierre, curé de Saint-Julien ……………………………………… »
280
NEMOURS Charles-Emmanuel de Savoie (duc de Genevois et de) ………… »
NEMOURS Henri de Savoie (duc de). Voir SAINT-SORLIN ………………. Pages
NOVERY Amblard-Philibert Vidomne de Chaumont (seigneur de) ………… »
32
[465]
47
71
PAPARD François, Dominicain ……………………………………………… »
292
PASSIER Antoine de ………………………………………………………… »
49
PELLEVÉ Nicolas (de), Cardinal-Archevêque de Sens ……………………… »
6
PERROT Charles …………………………………………………………….. »
324
PETIT Pierre …………………………………………………………………. »
227
PINGON Louis (de), baron de Cusy …………………………………………. »
321
PLANAZ Donade-Pernette de Baillans (dame de) …………………………… »
181
POBEL Raymond …………………………………………………………….. »
301
POBEL Thomas, Evêque de Saint-Paul-Trois-Châteaux …………………….. »
356
PONCET Pierre ………………………………………………………………. »
124
PORTIER Jean ……………………………………………………………….. »
34
POSSEVIN Antoine, Jésuite …………………………………………………. »
104
PREZ Claude de ..…………………………………………………………….. »
162
PROVANA Gaspard …………………………………………………………. »
292
PROVANA Philibert …………………………………………………………. »
292
RICCARDI Jules-César, Archevêque de Bari, Nonce à Turin ………………. »
148
RIPA Augustin ……………………………………………………………….. »
301
RIPAILLE (prieuré de) ………………………………………………………. »
252
ROGET Jean …………………………………………………………………. »
44
ROGET Philibert ……………………………………………………………... »
249
ROLLAND Denis de …………………………………………………………. »
96
ROLLAND Georges …………………………………………………………. »
117
ROVOREE ou RAVOREE Madeleine de Saint-Michel (dame de) …………. »
199
SACCONAY Louis (de), chantre de la métropole de Lyon …………………. »
SAINTS MAURICE ET LAZARE (Ordre des) ……………………………… »
SAINT-SORLIN Henri de Savoie-Nemours (marquis de). Voir NEMOURS .. »
SALES Gallois de ……………………………………………………………. »
SALTEUR Jacques …………………………………………………………... »
SANTORIO Jules-Antoine, Cardinal de Santa-Severina …………………….. »
SARASIN Jean ……………………..……………………..…………………..
SAUNIER Jean, Jésuite ……………………..………………………………...
SERVETTE Pierre d'Arloz (seigneur de la) …………………………………..
SIXT (abbaye de) ……………………..………………………………………
SPONDE Jean de ……………………..………………………………………
Pages
»
»
»
»
305
232
47
12
64
257
[466]
355
261
108
316
155
TISSOT Jean ……………………..……………………..……………………. »
87
303/318

31.4 Page 304

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TORSELLINI Horace, Jésuite ……………………..…………………………. »
TOURNETTE Louis de l'Alée ou de Lallée (baron de la) …………………….. »
TOURNON (collège de) ……………………..………………………………. »
VALENCE (de) Jean-Baptiste. Voir CHAPELLE …………………………… »
VIGNOD Jean de ……………………..……………………………………… »
VILLE Guicharde Duret, veuve de Grailly (dame de) ……………………….. »
VILLETTE Amédée de Chevron (seigneur de) ………………………………. »
VIRY Marin, baron de ……………………..…………………………………. »
WERRO Sébastien ……………………..…………………………………….. »
126
7
324
6, 49
213
51
341
285
345
[467]
304/318

31.5 Page 305

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Glossaire des locutions et des mots surannés ou pris dans
une acception inusitée aujourd'hui qui se trouvent dans les
Lettres de saint François de Sales contenues en ce volume
_____
(Les mots distingués par une * ont paru dans le Glossaire des tomes précédents.)
ACCOURCIR pour diminuer (voir p. 253, var. (570), et p. 263).
*ADVEU pour protection, approbation, agrément (v. p. 7, et var. (529), p. 226).
ANCRE pour encre (v. p. 211).
*APPOINCTER pour accorder, concilier (v. p. 167).
APPRIVOISER pour accoutumer, familiariser (voir pp. 169, 173).
* ASSORTI pour pourvu, fourni (voir p. 182).
ATANT, A TANT là-dessus (voir pp. 2, 355).
AUTOUR (d') pour des alentours (v. var. (623), p. 280).
AVANCER pour favoriser (v. var. (730), p. 327).
* AYSE pour joie, consolation.
* BAILLER donner.
BIENFAIRE faire du bien (voir p. 306, var. (699), et p. 307).
BRIDE A VEAU nouvelle absurde, conte ridicule (v. p. 354).
BRIGADE pour assemblée, société d'amis (v. pp. 200, 346).
CACHETES (a) en cachette, en secret (v. p. 120).
CATHOLIZER (se) se convertir au catholicisme (v. pp. 231, 264).
* CE pour ceci, cela.
* CE PENDANT pendant, pendant ce temps.
* COLLOQUERdu lat. COLLOCARE, mettre, placer (v. p. 173).
COMMANDE pour commende (voir p. 280).
* CONTE pour compte.
CONTE (mettre en) pour considérer (v. p. 8).
* CONTEMPLATION (en) pour en considération (v. p. 252, et var. (699), p. 306.)
* CONVERSATION pour compagnie (v. p. 344).
CORAGE encouragement (v. p. 2).
* COSTER coûter.
* CREANCE pour croyance religieuse (v. p. 94).
* CUYDER du lat. COGITARE, penser, juger, croire.
CY APRES pour plus tard, dans la suite (v. p. 182). [469]
DE (sa bonté) pour dans, par (voir p. 182).
DEBRIGUÉ de l'ital. DISBRIGATO, dégagé, débarrassé (v. pp. 168,172).
DELA (de) de là (v. p. 346).
DEPECHE (le) expédition (voir var. (564), p. 252).
DEPLAISANT pour contristé, fâché (v. p. 344).
* DES ORES dès maintenant.
DESPUYS NE FUT ELLE depuis qu'elle fut (v. p. 226).
* DESSUS pour ci-dessus (voir p. 345).
* DEVANT pour avant.
* DISCOURIR du lat. DISCORRERE, courir ça et la (v. p. 173).
305/318

31.6 Page 306

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* DOINT ancienne forme de la 3e personne du subjonctif présent du verbe donner (v. pp. 103,
321).
DONT pour c'est pourquoi, d'où (v. pp. 5, 8, etc.)
DOUTER pour craindre (v. p. 189).
* DU TOUT tout à fait, absolument.
* EMPLOITE emploi (v. p. 353).
* EMPORTER pour gagner (voir p. 353).
EN ÇA jusqu'ici (v. p. 105). Cf. l'ital. IN QUA.
* ENTRETENEMENT entretien.
* ESCHOIT (s'il y) au cas échéant, s'il est nécessaire (v. p. 173).
ESTOUFFE pour étoffe (v. p. 121).
ESTRESSIR pour diminuer (voir p. 253).
FERME pour stable (v. p. 173).
FORGER (se) pour s'imposer un effort excessif (v. p. 319).
FORME (a) par forme, sous forme ? (v. p. 170).
FORTUNE (par) par hasard (voir p. 121).
* GRADE du lat. GRADUS, degré.
* HEUR bonne fortune, bonheur (v. p. 306).
* IMPERTINENT hors de propos, déplacé (v. p. 281). Négatif de PERTINENT fiat,
PERTINENS), à propos.
* IMPETRER du lat. IMPETRARE, obtenir par supplications (v. p. 171).
INAPPOINCTABLE inconciliable (v. p. 167).
INCOMMODITÉ du lat. INCOMMODITAS, préjudice (v. p. 327).
* JA déjà.
JOINDRE pour suffire (v. p. 231).
JOUR (mettre au) pour exposer, révéler (v. p. 312).
JOURNËE (tenir une) tenir un conseil pour délibérer sur quelque affaire publique (v. p. 88).
Cf. le Dictionre de Littré.
* LAIRRAY ancienne forme de laisserai.
LA OU pour c'est pourquoi (voir p. 281).
* LAUTREFOIS de nouveau (voir p. 263).
* LEVER du bas-latin LEVARE, ôter, enlever (v. pp. 226, 230, etc.)
LHORS pour alors, en ce temps-là (v. var. (699), p. 306).
MARCHER pour marché, prix fait (v. p. 343).
* MESHUY désormais.
MESSIED (il) il sied mal (v. p. 8) ; présent de l'indicatif de l'ancien verbe MESSEOIR. Cf. le
Dictionre de Hatzfeld et Darmesteter, au mot messéant.
* MONSTRE revue, inspection, parade (v. p ; 354).
MORTEPAŸE vieux domestique qu on garde sans le faire travailler (v. p. 8). Cf. le Dictionre
de Hatzfeld et Darmesteter.
MUNIER meunier (v. p. 121.)
* NOURRIR pour entretenir, élever, conserver (v. pp. 104, 121, etc.)
306/318

31.7 Page 307

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* ONQUES du latin UNQUAM, jamais.
* OR SUS parole d'encouragement. Cf. l'ital. ORSÙ.
* OUTRECUYDÉ arrogant, présomptueux. [470]
* PAPEGAI ancien nom du perroquet (V. p. 354).
PAR DEÇA de ce côté-ci (v. p. 263). Cf. le Dictionre de Littré, au mot deça.
PARDELA (de) de l'autre côté (voir p. 6, et var. (251), p. 104). Cf. le Dictionre de Littré, au
mot delà.
* PAR DEVERS auprès de.
PASSÉ pour plus de (v. p. 169).
* PIEÇA il y a quelque temps, jadis, autrefois ; ètym. PIÈCE et A, il y a une pièce de temps (v.
pp. 189, 307). Cf. le Dictionre de Littré.
POINT pour quelques (v. p. 121).
* POISER peser (v. p. 200).
* POUR QUOY à cause de quoi (v. var. (628), p. 281).
PRÆLUSION du lat. PRÆLUSIO, prélude, préparation (v. p. 166).
* PRECHEUR prédicateur.
* PREGNANT, PREIGNANT pressant (v. pp. 168, 172). Adj. particip. de l'ancien verbe
PREINDRE (lat. PREMERE). Cf. le Dictionre de Hatzfeld et Darmesteter.
PRESUMPTION du lat. PRÆSUMPTIO, supposition (v. p. 2).
PRINS participe passé du verbe prendre.
PRIS pour prix (v. p. 121).
* PRIS (au) en comparaison de.
PROPREMENT pour convenablement (v. p. 173).
* PROUVOIR du lat. PROVIDERE, pourvoir.
QUAND pour quant.
* QUE pour ce que, puisque (voir pp. 7, 167).
RAGE (faire) faire des efforts violents (v. p. 345).
RAPPORT pour rendez-vous (voir p. 169).
RATE (a) à proportion (v. p. 343). Cf. l'ital. RATA.
REALITÉ pour loyauté (v. p. 189).
RECATHOLISER (se) entrer de nouveau dans le sein de l'Eglise.
* RECUEILLIR pour accueillir (v. p. 341).
REDUIRE du lat. REDUCERE, ramener (v. pp. 189, 252, etc.)
RELIQUATEUR du lat. RELIQUATOR, reliquataire, redevable (voir p. 343).
REMETTRE SUS rétablir, remettre en vigueur (v. p. 173).
RENGREGÉ aggravé, augmenté (v. p. 89). Cf. le bas-lat. INGREVIARE.
* RETARDATION du lat. RETARDATIO, retard (v. p. 346).
ROOLE (recevoir en) mettre au rang, enrôler (v. p. 104).
* SCRUPULE petite difficulté (voit p. 200). Du lat. SCRUPULUM.
* SI pour toutefois.
* SI QUE de sorte que, si bien que.
SORTIR EN EFFECT se réaliser, s'effectuer (v. pp. 89, 168).
* SUBVERSION du lat. SUBVERSIO, renversement, action de renverser dans les esprits toute
loi, toute règle (v. p. 88).
* SUFFISANCE du lat. SUFFICENTIA, capacité intellectuelle, mérite (voir pp. 170, 306, etc.)
* TARDIVETÉ retard (v. p. 346).
TOUTES FORTUNES (a) en tout cas, quoi qu'il en soit (v. p. 211).
307/318

31.8 Page 308

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* VERS pour auprès de, envers (voir pp. 167 ; 226, var. (529), etc.)
VENIR pour être conforme (voir p. 353).
VISITATION du lat. VISITATIO, visite (v. p. 334).
* VISTEMENT vite (v. p. 120). [471]
308/318

31.9 Page 309

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Errata
_____
Page 2, note (30) : obtint un canonicat... l'année même où son illustre disciple en était
nommé Prévôt lire : fut institué chanoine le 23 mars 1591.
» 71, note (174) : Philiberte de Jase lire : de Juge.
» 14, note (62) : Noble Louis Bonier lire : Humbert de Ville était procureur
patrimonial. (Bonier n'était qu'avocat patrimonial.)
» 139, note (334) : 19 juin 1595 lire : 20 juin.
» 227, note (531) : Pierre Petit... pasteur à Armoy et à Choulex lire : fut proposé
pour la cure d'Armoy, et devint pasteur à Choulex.
» 285, note (645) : Pancarlier lire : Pancalier.
309/318

31.10 Page 310

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Table des matières
_____
Avant-Propos …………………………………………………………………………..
Lettre-circulaire de S. Em. le Cardinal Parecchi, Vicaire de Sa Sainteté, aux Evêques
d'Italie ………………………………………………………………………………….
Avis au Lecteur ………………………………………………………………………
_____
V
XXX
XXXII
ANNÉES ANTÉRIEURES A 1593
LETTRE AU BARON D'HERMANCE. Protestations de respect et de dévouement
I — ……………………………………………………………………………….. 1
I bis A UN ANCIEN PROFESSEUR (Inédite). Succès des armes du roi de
Navarre. Epidémie parmi les étudiants …………………………………… 1 bis
II A DOM FRANÇOIS DE LA FLÉCHÈRE (Inédite). Regret de n'avoir pas
reçu de réponse à ses lettres …………………………………………………. 3
III A UN INCONNU (Inédite). Remerciements pour une lettre reçue de lui .. 4
IV A UN INCONNU (Inédite). Témoignages de respect et d'affection …….. 5
V A UN GENTILHOMME (Inédite). Remerciements pour la bienveillance
que lui témoigne ce gentilhomme et pour la lettre qu'il en a reçue ………….. 7
VI A UN AMI (Inédite). Assurances d'amitié. Désir d'être connu d'un
personnage de grand mérite. Nouvelles d'un condisciple. Message de
son précepteur. Un mot sur son frère Gallois …………………………….. 9
ANNÉE 1593
VII
VIII
IX
X
XI
XII
XIII
A UN ANCIEN CONDISCIPLE (Inédite). Remerciements pour
l'attention qu'a eue ce personnage de lui dédier ses thèses de théologie.
Espoir de le voir prochainement à Annecy ………………………………….
AU RÉGENT MÉNENC (Inédite). Excuses pour le retard mis à répondre
à deux lettres. Immunités assurées aux docteurs en droit et en médecine
et aux maîtres d'école ………………………………………………………..
AU SÉNATEUR FAVRE. Réponse affectueuse aux avances du sénateur
Favre. Regret de n'avoir pu le rencontrer lors de deux voyages faits à
Chambéry. Protestations d'estime et d'attachement ………………………
AU MÊME (Inédite). Remerciements pour lui avoir pro curé l'amitié de
François Girard ……………………………………………………………...
AU MÊME. Exposition des mêmes pensées …………………………….
AU MÊME. Prières publiques ordonnées à l'occasion de la détention du
duc de Nemours ; sermon prononcé à cette occasion. Naissance de Jeanne
de Sales. Affaire litigieuse d'un paysan de Thorens. Témoignages
d'affection. Désir de le voir prochainement ………………………………
AU MÊME. Sentiments qui se pressent dans l'âme du Saint à l'approche
de son ordination sacerdotale ………………………………………………..
13
15
[473]
18
25
29
32
37
ANNÉE 1594
XIV AU MÊME. Espoir d'une prochaine réunion à Sales. M. et Mme
de Boisy contraints de s'absenter à cette époque. Envoi d'une lettre
41
310/318

32 Pages 311-320

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32.1 Page 311

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XV
XVI
XVII
XVIII
XIX
XX
XXI
XXII
XXIII
XXIV
XXV
XXVI
XXVII
XXVIII
XXIX
XXX
XXXI
XXXII
XXXIII
XXXIV
XXXV
XXXVI
XXXVII
de M. de Montrottier. Le Saint part pour Seyssel où il doit prêcher le
Dimanche suivant ………………………………………………………
AU MÊME. Rendez-vous à Faverges. Salutations faites à M. de
Montrottier de la part du sénateur Favre ……………………………….
AU MÊME (Inédite). Excuses au sujet d'une lettre écrite à la hâte.
Remerciements pour celle que le Saint a reçue du Sénateur …………
AU MÊME (Inédite). Recommandation en faveur de Mme de Ville.
Eloge du P. Chérubin ……………………………………………….
AU MÊME. Envoi d'une lettre de Mgr de Granier ………………….
AU MÊME. La brièveté de cette lettre est occasionnée par le départ
précipité du porteur. Témoignages d'affection ……………………...
AU MÊME. Remerciements pour la protection accordée à diverses
personnes. Attente de la prochaine visite du Sénateur ……………….
AU MÊME (Inédite). Désir de profiter des nombreuses occasions
que procurera la belle saison pour se voir plus fréquemment.
Nouvelles de plusieurs amis communs …………………………………
AU MÊME. Prochaine réunion du synode diocésain. Obstacle
imprévu qui a empêché le Saint de se rendre à Chambéry. Ses regrets
en apprenant que le Sénateur est allé inutilement à sa rencontre ………
AU MÊME. Projet d'un pèlerinage à l'église de la Sainte-Croix d'Aix.
Ordre que doivent suivre pendant le trajet les pèlerins d'Annecy et de
Chambéry ………………………………………………………………
AU MÊME. Le Sénateur est attendu à Annecy ; plusieurs maisons
lui sont offertes. Il est instamment prié d'amener sa femme …………
AU MÊME. Déception du Saint et de ses amis en ne voyant pas
arriver le Sénateur. Le Prévôt va prêcher à La Roche ………………
AU PRÉVÔT GIRARD. Gracieuses excuses de n'avoir pas écrit plus
tôt. Le Saint est à Hautecombe avec le sénateur Favre ………………
AU SÉNATEUR FAVRE. Compliments affectueux ……………….
AUX FILS DU SÉNATEUR FAVRE (Inédite). Remerciements pour
une lettre reçue d'eux. Encouragements à suivre les exemples de leur
père. Message pour leur mère ……………………………………….
AU SÉNATEUR FAVRE (Inédite). Explications amicales.
Remerciements pour l'envoi de Méditations sur la pénitence ………….
AU MÊME (Inédite). Les prévenances d'un ami commun attribuées
à la recommandation du Sénateur. Désir de se procurer quelques
formules de prières ……………………………………………………..
AU PRÉVÔT GIRARD. Congratulations pour le zèle qu'il déploie
au service de Jésus crucifié, et pour son agrégation à la Confrérie de la
Sainte Croix …………………………………………………………….
A UN GENTILHOMME. Prière d'intervenir auprès du duc de Savoie
en faveur du Chapitre de Genève ………………………………………
AU SÉNATEUR FAVRE. Nouvelles de la mission du Chablais.
Premières difficultés suscitées par les ministres protestants.
Energique résolution du Saint ………………………………………….
A UN RELIGIEUX (Fragment inédit) …………………………………
A Mgr DE GRANIER. Endurcissement des hérétiques. Aveu des
ministres en faveur des missionnaires ………………………………….
AU SENATEUR FAVRE (Inédite). Heureux présages pour le succès
de la mission du Chablais ………………………………………………
AU MÊME. Témoignages d'estime et de reconnaissance pour le P.
Chérubin. Envoi de plusieurs lettres. Premiers fruits des
46
48
50
53
54
56
59
62
65
[474]
69
71
74
77
79
80
82
84
88
90
93
94
95
97
311/318

32.2 Page 312

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XXXVIII
XXXIX
XL
XLI
prédications …………………………………………………………….
A Mgr DELBENE. Protestations de respect et de dévouement ……..
AU SÉNATEUR FAVRE. Prédications de l'Avent …………………
A UN CURIAL. Réponse obligeante à la demande de quelque
service ………………………………………………………………….
AU PÈRE POSSEVIN. Assurance de respectueux attachement.
Le Saint parle de son ordination et de ses débuts dans le ministère ……
100
102
103
104
[475]
ANNEE 1595
XLII AU SÉNATEUR FAVRE (Inédite). Commencement de la rédaction
des Controverses ………………………………………………………. 107
XLIII AU MÊME (Inédite). Ingénieuses excuses pour un silence trop
prolongé ……………………………………………………………….. 109
XLIV AU MÊME (Inédite). Difficultés qu'offre la rédaction des
Controverses …………………………………………………………… 110
XLV AU MÊME (Inédite). Détermination de lutter intrépidement contre
l'hérésie. Avis du P. Chérubin pour assurer le succès de la mission ... 112
XLVI A M. DE BOISY. Courage invincible en face des dangers que
présente la mission du Chablais ……………………………………….. 117
XLVII A Mgr DE GRANIER.Difficulté et lenteur des conversions ……….. 118
XLVIII AU PÈRE POSSEVIN. Témoignages de reconnaissance et désir
d'une prochaine entrevue. Etat des affaires religieuses en Chablais.
Nouvelles intimes …………………………………………………... 119
XLIX AU SÉNATEUR FAVRE. Eloge d'un ouvrage du P. Possevin.
Motifs qui retardent la conversion de Pierre Poncet. Présents des PP.
Possevin et Chérubin. Encouragements reçus d'un ami au sujet de la
mission ………………………………………………………………… 122
L AU MÊME. L'avocat Poncet promet d'abjurer prochainement le
protestantisme …………………………………………………………. 128
LI AU MÊME. Arbitrage du Sénateur réclamé par le Chapitre de
Genève et un ecclésiastique qui demande à en faire partie ……………. 130
LII AU MÊME. Visite à Sales. Remerciements pour l'envoi de la
Centurie premiere de Sonnets …………………………………………. 132
LIII AU MÊME (Inédite). Emotion causée par le malheur d'un ami
commun ; vif désir de défendre sa cause. Eloge de l'ouvrage du
Sénateur. Pénible situation du Saint en Chablais …………………… 135
LIV AU BIENHEUREUX CANISIUS. Vénération qu'inspire sa vertu.
Désir d'entrer en relations avec lui. Nouvelles de la mission ;
conversion de Pierre Poncet. Question de controverse …………….. 140
Minute de la lettre précédente …………………………………………. 145
LV A Mgr RICCARDI. Violation des immunités ecclésiastiques ; le Saint
sollicite l'intervention du Nonce auprès du duc de Savoie …………….. 148
LVI AU CHANOINE DE MONTHOUX (Inédite). Recommandation en
faveur de l'abbé de Ronis ………………………………………………. 151
LVII AU SÉNATEUR FAVRE. Souffrances du saint Apôtre ; il désire
s'adjoindre d'autres missionnaires. Remerciements pour [476] un
ouvrage de Sponde ; calomnies des hérétiques contre ce personnage et
contre Pierre Poncet. Sentiments de foi et de confiance ……………. 153
LVIII AU MÊME (Inédite). Troubles qui régnent à Annecy ………………. 156
LIX AU MÊME. Ebranlement qui se produit parmi les héretiques ;
ingénieuse tactique du Saint pour les provoquer à la discussion ………. 158
312/318

32.3 Page 313

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LX AU MÊME (Inédite). Attente de quelques lettres attardées.
Allusion à la bénédiction apostolique envoyée à Henri IV. Suite du
travail des Controverses. Accueil fait par les hérétiques à la Centurie
premiere. L'avocat de Prez adresse des vers à l'auteur ……………… 160
LXI AU MÊME (Inédite). Prochain envoi d'une partie de son introduction
au Code Fabrien. Question de droit ………………………………… 164
LXII AU PÈRE POSSEVIN (Inédite). Nécessité pour le Saint d'obtenir la
permission de lire les livres hérétiques. Remarques sur les
Institutions de Calvin et sur un ouvrage de Théodore de Bèze.
Témoignages de respectueuse confiance ………………………………. 166
LXIII AU DUC DE SAVOIE. Exposé des mesures à prendre pour assurer
la conversion du Chablais. Heureuse influence de M. d'Avully ……. 168
Minute de la lettre précédente ….………………………………………. 172
ANNÉE 1596
LXIV AU SÉNATEUR FAVRE (Inédite). Rencontre avec Martinengo.
Visite du Saint à sa famille et au baron de Chevron. Bienveillance
que manifestent à son égard le duc de Savoie et le Nonce apostolique.
Désir de recevoir le douzième Livre des Conjectures.
Encouragement à dédier à l'Evêque la Centurie seconde de Sonnets ….. 176
LXV A M. CHAVENT (Inédite). Témoignages de reconnaissance et
d'affection. Eloignement du Saint pour les dignités ecclésiastiques ... 182
LXVI A Mgr RICCARDI. Joie qu'éprouvent les Savoisiens de la nomination
du Nonce. Récit de l'apostasie du Chablais et des tentatives faites
pour la conversion de cette province. Mesures à prendre pour en
assurer le succès ……………………………………………………….. 183
LXVII AU DUC DE SAVOIE. Nécessité de rendre une des églises de
Thonon au culte catholique. Ebranlement général parmi les
hérétiques du Chablais …………………………………………………. 189
LXVIII A Mgr RICCARDI. Instances pour obtenir l'intervention du Nonce
auprès du duc de Savoie. Opposition à redouter [477] de la part des
Chevaliers de Saint-Lazare. On découvre en Chablais quantité de
personnes possédées du démon ………………………………………… 190
LXIX AU SÉNATEUR FAVRE (Inédite). Ardent désir de voir le duc de
Savoie effectuer un voyage projeté en Chablais. Envoi d'une lettre
pour le P. Chérubin ……………………………………………………. 193
LXX A Mgr RICCARDI. Séjour à Annecy à l'occasion du synode.
Remerciements pour trois lettres reçues du Nonce. Conversions qui
s'opèrent en Chablais. Nécessité d'y envoyer un nombre suffisant de
prédicateurs, et de nommer aux cures des prêtres dignes de les occuper 195
LXXI A M. D'AVULLY. Envoi d'un commentaire de saint Jérôme. Joie
d'apprendre la conversion de Mme de Rovorée. Attente de l'arrivée du
duc à Thonon …………………………………………………………... 198
Extrait du commentaire de saint Jérôme ………………………………. 200
LXXII A Mgr RICCARDI (Inédite). Calomnies répandues à la cour de
Savoie contre M. d'Avully et l'Apôtre du Chablais. Abandon dans
lequel on laisse ce dernier. Désir de faire un voyage à Turin ………. 202
LXXIII AU MÊME. Instances pour obtenir le rétablissement du culte
catholique dans quelques paroisses du Chablais ………………………. 205
LXXIV AU SÉNATEUR FAVRE. Désir de lui voir accepter la charge de
Président du Conseil de Genevois. Délais apportés aux affaires du 208
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32.4 Page 314

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LXXX
LXXXI
Chablais. Projet d'un pèlerinage au tombeau de saint Claude ………
A UN COUSIN (Inédite). Témoignages d'affection. Annecy est
menacé de la peste. — Message pour le P. de Lorini …………………..
AU SÉNATEUR FAVRE (Inédite). Recommandation en faveur de
M. de Coursinge ………………………………………………………..
A Mgr RICCARDI Réclamations au sujet d'un legs fait à trois églises
de Savoie ……………………………………………………………….
AU SÉNATEUR FAVRE (Inédite). Espoir de solenniser à Thonon
les fêtes de Noël. Recommandation en faveur des nouveaux convertis
de la paroisse de Mésinge ………………………………………………
A Mgr RICCARDI. Remerciements pour l'autorisation d'absoudre
des cas réservés. Conversions opérées en Chablais ; état des esprits
dans cette province. Calomnies répandues contre M. d'Avully.
Nomination du nouvel Abbé d'Abondance …………………………….
AU DUC DE SAVOIE. Opposition apportée par les syndics de
Thonon à l'érection d'un autel, Combien la protection du duc est
nécessaire aux nouveaux Catholiques. Conversion d'un ministre
protestant ……………………………………………………………….
A Mgr RICCARDI. Instances pour obtenir la protection du Nonce
auprès du duc de Savoie ………………………………………………..
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[478]
ANNEE 1597
LXXXII A M. BOCHUT (Fragment inédit). Invitation à venir desservir la
paroisse de Thonon …………………………………………………… 230
LXXXIII AU DUC DE SAVOIE (Inédite). Erection d'un autel dans l'église
Saint-Hippolyte. Recommandation en faveur du ministre Petit.
Combien il importe que les Chevaliers de Saint-Lazare cèdent les
revenus ecclésiastiques qu'ils détiennent en Chablais ……………….. 231
LXXXIV AU CONSEIL DES CHEVALIERS DES SAINTS MAURICE ET
LAZARE (Inédite). Instances afin d'obtenir que les revenus
ecclésiastiques dont les Chevaliers jouissent en Chablais soient
affectés au rétablissement du culte catholique ……………………….. 232
LXXXV A Mgr RICCARDI (Inédite). Excuses pour le délai mis à répondre
aux lettres du Nonce. Proposition d'une conférence publique avec
les ministres. Instante prière de lui obtenir la collaboration du P.
Chérubin, du P. Esprit et de plusieurs autres missionnaires. Moyens
à prendre pour fournir aux frais de la mission ……………………….. 235
LXXXVI AU MÊME. Lettres reçues du Nonce. Remerciements pour la
protection accordée à trois églises de Savoie. Eloge du chevalier
Bergera. Difficultés qui retardent l'établissement des curés en
Chablais. Pauvreté des paroisses. Prétentions injustes des
Chevaliers des Saints Maurice et Lazare relativement à la nomination
des curés. Pension due au prédicateur d'Evian ……………………. 239
LXXXVII AU MÊME (Inédite). Protestations d'obéissance et de dévouement.
Nouvel exposé des difficultés de la mission. Promesse faite par
les Religieux d'Ainay. Prédication du Saint à Cervens.
Destination du chanoine Roget. Les hérétiques prétendent retirer à
M. d'Avully la dignité de juge de leur consistoire ……………………. 246
LXXXVIII AU DUC DE SAVOIE. Demande de secours pour des indigents.
Requête en faveur de quelques hameaux des Allinges. Menées
des protestants contre M. d'Avully …………………………………… 251
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A Mgr RICCARDI (Inédite). Installation d'un curé à Cervens.
Eloge de M. de Blonay ………………………………………………..
AU MÊME (Inédite). Mesures à prendre pour pourvoir à la
subsistance des curés du Chablais. Voyage du chanoine Louis de
Sales à Genève. Désignation des PP. Capucins et Jésuites dont le
concours serait le plus utile à la mission ; frais que nécessiterait leur
entretien ………………………………………………………………
AU DUC DE SAVOIE (Inédite). Instances pour obtenir quelques
libéralités déjà sollicitées en faveur de nouveaux Catholiques ……….
A Mgr RICCARDI. Difficultés que présente la mission du Chablais.
— Intérêt du Pape pour cette œuvre. — Il est urgent de réformer
quelques abbayes de la contrée ……………………………………….
A S. S. CLEMENT VIII. Entrevue avec Théodore de Bèze ;
endurcissement de ce vieillard. Tyrannie exercée par les Genevois
sur les Catholiques. Espoir d'obtenir la liberté de conscience à
Genève moyennant la médiation du roi de France …………………….
Minute de la lettre précédente …………………………………………
A Mgr RICCARDI. Heureux résultats que promet la conférence
projetée avec les hérétiques. Lettre du Saint au Pape. Pression
qu'exercent les Genevois sur les Catholiques de Gex et de Gaillard.
Etat des affaires du Chablais …………………………………………..
AU DUC DE SAVOIE (Inédite). Le curé de Saint-Julien est
contraint de se retirer. Requête des habitants de Bernex. Incident
survenu entre le P. Esprit et le ministre protestant. Combien il est
désirable que le duc signifie aux Thononais le désir qu'il a de leur
conversion …………………………………………………………….
A Mgr RICCARDI. Mêmes sujets. Installation d'un curé à Brens
AU MÊME. Maladie de l'Evêque de Genève. Obligations de
l'Abbé d'Abondance envers le prédicateur d'Evian. Indigence des
Religieuses de Sainte-Claire. Poursuites à faire pour obtenir la
conférence avec les ministres. Le Saint sollicite l'autorisation de
concourir pour la cure du Petit-Bornand. La permission de lire les
livres hérétiques est nécessaire aux missionnaires ……………………
AU MÊME. Affaires du Chablais : démêlés avec les Chevaliers des
Saints Maurice et Lazare ; encore la conférence de Genève ………….
AU DUC DE SAVOIE. Témoignages de reconnaissance …………
A UN GENTILHOMME (Inédite). Même sujet.
A Mgr RICCARDI. Assemblée faite à Annemasse pour traiter des
intérêts de la religion en Chablais. Le P. Chérubin député auprès du
duc. Succès prodigieux des Quarante-Heures d'Annemasse ……….
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ANNÉE 1598
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A M. MARIN (Inédite). Prochain retour du P. Chérubin à Thonon.
Promesse du président Favre …………………………………………….
A Mgr RICCARDI (Inédite). Le voyage du Saint à Rome retardé par
une maladie grave. Envoi de trois lettres du duc. Bonnes
dispositions des habitants du Chablais. Intervention en faveur de deux
religieux qui ont encouru des censures ecclésiastiques ………………….
AU DUC DE SAVOIE. Instantes prières pour que les Chevaliers des
Saints Maurice et Lazare soient contraints à payer les pensions dues aux
curés du Chablais. Députation des villageois de cette province pour
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obtenir du duc la restauration de leurs églises. Maladie du Saint …….
A M. DE PINGON. Requête présentée au duc de Savoie pour obtenir
que l'usage de la cloche de l'église Saint-Hippolyte soit interdit aux
hérétiques ………………………………………………………………...
A Mgr RICCARDI. Projet de célébrer les Quarante-Heures à Thonon,
et de les faire suivre de disputes publiques sur les matières controversées.
Une conférence de ce genre vient d'avoir lieu entre le P. Chérubin et
le professeur Lignarius …………………………………………………..
AU DUC DE SAVOIE (Inédite). Rumeurs inquiétantes qui circulent
en Chablais ; alarmes des Catholiques …………………………………..
A Mgr RICCARDI. Affaire de la cure du Petit-Bornand. Peste à
Annecy. Mauvais vouloir des Chevaliers. Ebranlement produit par
l'annonce des Quarante-Heures à Thonon. Faveurs spirituelles qui sont
à désirer pour cette occasion. Zèle du duc de Savoie mal secondé par
ses officiers ………………………………………………………………
AU MÊME. Voyage du président Favre à Turin et à Ferrare.
Nouvelles poursuites au sujet de la cession des cures du Chablais.
Mesures à prendre pour assurer le triomphe du catholicisme sur l'hérésie
AU MÊME. Espérance d'obtenir, moyennant la médiation du roi de
France, le libre exercice du culte catholique à Genève …………………..
A M. DE CHEVRON VILLETTE (Inédite). Témoignages de respect
et de' reconnaissance. Annonce de sa visite …………………………..
A M. MARIN. Préparatifs à faire en vue des Quarante-Heures qui
doivent se célébrer à Thonon. Indications pour le logement de
l'Evêque. Audience du duc de Savoie. Destination de deux
ecclésiastiques …………………………………………………………...
AU PRÉVÔT WERRO. Les exercices des Quarante-Heures à Thonon
sont fixés aux 23 et 24 août ………………………………………………
A DON JUAN DE MENDOÇA. Supplications collectives des
missionnaires du Chablais pour obtenir que les troupes espagnoles ne
traversent pas cette province ……………………………………………..
AU PRÉVÔT WERRO. Remerciements. Retard des Quarante-
Heures projetées à Thonon ……………………………………………….
A M. DE CHEVRON VILLETTE (Inédite). Prière de se rendre en
Chablais pour protéger les habitants si les troupes espagnoles traversent
la province. Recommander au duc les intérêts de la mission et
l'engager à assister aux Quarante-Heures de Thonon ……………………
A M. SARASIN. Invitation à exposer par écrit la mission dont il est
chargé ……………………………………………………………………
A Mgr RICCARDI. Recours à la protection du Nonce. Pouvoirs
spéciaux nécessaires aux missionnaires. Mesures à prendre contre les
Chevaliers des Saints Maurice et Lazare. Admirables résultats des
Quarante-Heures de Thonon. Zèle des Evêques de Genève et de Saint-
Paul-Trois-Châteaux. Alarmes au sujet de Genève …………………..
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MINUTES ÉCRITES PAR SAINT FRANÇOIS DE SALES
POUR MONSEIGNEUR DE GRANIER
CXIX A S. S. CLÉMENT VIII. Fruits merveilleux produits par les Quarante-
Heures de Thonon. Prière d'intervenir auprès du roi de France et du
duc de Savoie pour que Genève ne soit pas comprise dans le traité de
Vervins
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CXX AU MÊME. Raisons qui ont contraint le Prévôt de différer le voyage
de Rome. Envoi des documents qui doivent être présentés à Sa Sainteté 367
_____
APPENDICE
LETTRES ADRESSÉES A SAINT FRANÇOIS DE SALES
PAR QUELQUES CORRESPONDANTS
A LETTRES D'ANTOINE FAYRE
I ………………………………………………………………………………………….
II …………………………………………………………………………………………
III ………………………………………………………………………………………...
IV ………………………………………………………………………………………..
V …………………………………………………………………………………………
VI ………………………………………………………………………………………..
VII ……………………………………………………………………………………….
VIII ………………………………………………………………………………………
IX ………………………………………………………………………………………..
X …………………………………………………………………………………………
XI ………………………………………………………………………………………..
XII ……………………………………………………………………………………….
XIII ………………………………………………………………………………………
XIV ………………………………………………………………………………………
XV ……………………………………………………………………………………….
XVI ………………………………………………………………………………………
XVII ……………………………………………………………………………………..
XVIII …………………………………………………………………………………….
XIX ………………………………………………………………………………………
XX ……………………………………………………………………………………….
XXI ………………………………………………………………………………………
XXII ……………………………………………………………………………………..
XXIII …………………………………………………………………………………….
XXIV …………………………………………………………………………………….
XXV ……………………………………………………………………………………..
XXVI …………………………………………………………………………………….
XXVII …………………………………………………………………………………...
XXVIII …………………………………………………………………………………..
XXIX …………………………………………………………………………………….
XXX ……………………………………………………………………………………..
XXXI …………………………………………………………………………………….
XXXII …………………………………………………………………………………...
XXXIII …………………………………………………………………………………..
XXXIV …………………………………………………………………………………..
371
373
376
377
379
382
383
384
[482]
385
387
389
391
393
394
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32.8 Page 318

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B LETTRES DE MGR JULES-CÉSAR RICCARDI
ARCHEVÊQUE DE BARI, NONCE APOSTOLIQUE A TURIN
I ………………………………………………………………………………………….
II …………………………………………………………………………………………
III ………………………………………………………………………………………..
IV ………………………………………………………………………………………..
V …………………………………………………………………………………………
VI ………………………………………………………………………………………..
VII ……………………………………………………………………………………….
VIII ………………………………………………………………………………………
IX ………………………………………………………………………………………..
X …………………………………………………………………………………………
XI ………………………………………………………………………………………..
XII ……………………………………………………………………………………….
XIII ………………………………………………………………………………………
XIV ………………………………………………………………………………………
XV ……………………………………………………………………………………….
XVI ………………………………………………………………………………………
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430
430
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438
439
440
441
[483]
443
444
445
C LETTRES DE CHARLES-EMMANUEL 1ER, DUC DE SAVOIE
I …………………………………………………………………………………………. 447
II Lettres patentes de nomination de saint François de Sales à la coadjutorerie de 448
l'évêché de Genève ………………………………………………………………………
III ………………………………………………………………………………………... 449
IV ……………………………………………………………………………………….. 449
V ………………………………………………………………………………………… 450
VI ……………………………………………………………………………………….. 451
VII ………………………………………………………………………………………. 451
D BREFS DE SA SAINTETÉ CLÉMENT VIII
I …………………………………………………………………………………………. 453
II ………………………………………………………………………………………… 453
_____
Table de correspondance de cette nouvelle Edition avec les précédentes, et indication de 455
la provenance des Manuscrits ……………………………………………………………
Index des principales Notes historiques et biographiques ……………………………… 463
Glossaire des locutions et des mots surannés …………………………………………… 469
Errata ……………………………………………………………………………………. 472
_______________________________________
Annecy, imprimé par J. NIERAT, 1900. 5862
318/318