15-Oeuvres de Saint Francois de Sales-Tome XV-Vol.5-Lettres


15-Oeuvres de Saint Francois de Sales-Tome XV-Vol.5-Lettres

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ŒUVRES
DE
SAINT FRANÇOIS DE SALES
ÉVÊQUE ET PRINCE DE GENÈVE
ET
DOCTEUR DE L'ÉGLISE
______
ÉDITION COMPLÈTE
D'APRÈS LES AUTOGRAPHES ET LES ÉDITIONS ORIGINALES
ENRICHIE DE NOMBREUSES PIÈCES INÉDITES
DÉDIÉE A N. S. P. LE PAPE LÉON XIII
HONORÉE DE DEUX BREFS PONTIFICAUX
ET COURONNÉE PAR L’ACADÉMIE FRANÇAISE
PUBLIÉE SUR L’INVITATION DE MGR ISOARD, ÉVÊQUE D'ANNECY
PAR LES SOINS DE RELIGIEUSES DE LA VISITATION
DU IER MONASTÈRE DANNECY
__________
TOME XV
LETTRES VOLUME V
ANNECY
MONASTÈRE DE LA VISITATION
____
MCMVIII
Droits d'auteur pour tous les fichiers des Oeuvres complètes de saint François de Sales: sont mis à disposition pour
un usage personnel ou l'enseignement seulement. Dans l'usage public vous devez indiquer la source
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Deuxième édition
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ŒUVRES
DE
SAINT FRANÇOIS DE SALES
ÉVÊQUE ET PRINCE DE GENÈVE
ET
DOCTEUR DE L'ÉGLISE
_____
TOME QUINZIÈME
LETTRES
Vme VOLUME
1611 1613
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[I]
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Propriété [III]
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ŒUVRES
DE
SAINT FRANÇOIS DE SALES
ÉVÊQUE ET PRINCE DE GENÈVE
ET
DOCTEUR DE L'ÉGLISE
______
ÉDITION COMPLÈTE
D'APRÈS LES AUTOGRAPHES ET LES ÉDITIONS ORIGINALES
ENRICHIE DE NOMBREUSES PIÈCES INÉDITES
DÉDIÉE A N. S. P. LE PAPE LÉON XIII
HONORÉE DE DEUX BREFS PONTIFICAUX
ET COURONNÉE PAR L’ACADÉMIE FRANÇAISE
PUBLIÉE SUR L’INVITATION DE MGR ISOARD, ÉVÊQUE D'ANNECY
PAR LES SOINS DE RELIGIEUSES DE LA VISITATION
DU IER MONASTÈRE DANNECY
__________
TOME XV
LETTRES VOLUME V
ANNECY
MONASTÈRE DE LA VISITATION
____
MCMVIII [IV]
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Index OCR
Index OCR................................................................................................................................................ 7
Avant-Propos.......................................................................................................................................... 20
Avis au Lecteur ...................................................................................................................................... 25
Lettres de saint François de Sales........................................................................................................... 26
DCLIII. A la Comtesse de Tournon. Comme l'Evêque de Genève entendait réduire un délinquant à
l'obéissance ; ses griefs contre une famille qui le protégeait. Le plus grand désir du Saint. ......... 26
Année 1611 ............................................................................................................................................ 28
DCLIV. A M. Bénigne Milletot (Inédite). L'Evêque de Genève recommande à son ami les
négociations dn vicaire général de son diocèse et lui donne des nouvelles de sa fille Marie-
Marguerite, Religieuse à la Galerie.................................................................................................... 28
DCLV. A Madame Bourgeois, Abbesse de Puits-D'Orbe. Témoignages d'affectueux dévouement.
De belles et bonnes confitures. Deux recettes pour rétablir entièrement la santé ......................... 29
DCLVI. A Mademoiselle Claudine de Chastel. A quelle condition les exercices de piété revigorent
l'âme, même s'ils sont faits sans goût. La variété et l'unité des sentiments ; le monde et le Ciel.
Eloge de la future Mère de Chastel, alors novice. .............................................................................. 30
DCLVII. A la Mère de Chantal (Inédite). Ne rien regarder, ne rien aimer que dans la lumière et
l'amour de Notre-Seignenr. Un « livret » qui a besoin d'une préface pour être plus intelligible.
Communication promise pour le jour même ou le lendemain............................................................ 31
DCLVIII. A Madame de la Fléchère (Inédite). Dans quels cas il ne faut pas s'abstenir de communier.
La variété des petits accidents de cette vie et l'état immobile de la sainte éternité. Deux
nouvelles recrues pour la Visitation ................................................................................................... 31
DCLIX. A Madame de Monfort (Inédite). Félicitations à l'occasion d'une naissance. ...................... 33
DCLX. A la Mère de Chantal. La conversion de Mme de Saint-Cergues : la cérémonie se fera dans
l'oratoire de la Galerie. Pourquoi faut-il bien traiter son cœur et le « tenir en bon point. » — Ou
rien, ou Dieu. Notre amour pour Dieu, jamais suffisant, jamais excessif ..................................... 33
DCLXI. A la Présidente Favre. Convalescence de la Mère de Chantal. La « chere grande fille. »
Quand les « embarassemens » d'une grande maison augmentent, « il faut tant plus appeller Nostre
Seigneur a nostr'ayde. » La plus grande consolation à la fin de la journée ................................... 35
DCLXII. A M. Philippe de Quoex (Fragment). La nouvelle ruche de la Visitation. Une maladie
inconnue à Galien. Une mère abeille « trop aspre a la cueillette. » La Mère de Chantal et les
saintes veuves de l'Eglise. .................................................................................................................. 36
DCLXIII. A la Mère de Chantal. La gloire de Dieu, maîtresse et régente des affections de François
de Sales. — Un défi entre deux Saints ; leur unité d'âme et de cœur ................................................. 37
DCLXIV. A M. Bénigne Milletot (Inédite). Mme de Chantal apprend la mort de son père. Son «
desplaysir » et sa « vertu » dans cette circonstance. Eloge du défunt. Le bruit de la future
translation du saint Evêque à un autre siège n'est pas fondé .............................................................. 37
DCLXV. A la Présidente Brulart. Comment connaître l'intention de Notre-Seigneur à propos d'une
vocation. L'holocauste « en effect » et l'holocauste « en affection. » Une « hantise » indiscrète
et superflue. Il est mieux, pour une femme du monde, d'ouïr la sainte Messe tous les jours que de
faire l'oraison chez soi. Santé et sainteté ....................................................................................... 39
DCLXVI. A la Mère de Chantal (Inédite). Un moyen de « recreer nostre pauvre cœur. » — La Mère
de Chantal est avertie de ne pas se tenir à genoux pendant son oraison............................................. 40
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DCLXVII. A Monseigneur Jean-Pierre Camus Évêque de Belley. Il faut beaucoup souffrir des
enfants en bas âge. Quatre mots de saint Paul, règle des prédicateurs. La patience et la doctrine
............................................................................................................................................................ 41
DCLXVIII. A la Mère de Chantal. Le nom que le Saint avait d'abord adopté pour ses chères filles ;
pourquoi il le changea. Sa dévotion â sainte Françoise Romaine. Le « petit Batiste » et « Celse
Benine ».............................................................................................................................................. 42
DCLXIX. Au Président Antoine Favre. Les « pauvres gens d'Estrembieres ; » prière de les défendre
contre leurs frères rebelles.................................................................................................................. 43
DCLXX. A la Mère de Chantal (Inédite). Un arbitrage du Saint dans une querelle entre soldats ..... 43
DCLXXI. A la même. Le baume et les « basses herbettes » de la Croix. Grandeur de saint Joseph
; pourquoi pouvait-il faire envie aux Anges et défier le Ciel. La veuve de Naïm et la mère de
Celse-Bénigne .................................................................................................................................... 44
DCLXXII. Au Président Antoine Favre. Compassion du Saint pour les misères du pays au printemps
de 1611 ............................................................................................................................................... 44
DCLXXIII. A une dame inconnue. Le monde et ses séductions. Mépris extrême du Saint pour la
gloire. Les exigences du Créateur et celles du monde........................................................................ 46
DCLXXIV. A Madame de la Fléchère. Pourquoi les petites chutes et imperfections ne doivent
étonner ni l'âme chrétienne, ni son directeur ...................................................................................... 46
DCLXXV. Au duc de Savoie, Charles-Emmanuel Ier. Paris, Chambéry, réclament l'Evêque de
Genève pour le Carême de l'année suivante : que le duc de Savoie décide, le Saint se conformera à
son désir.............................................................................................................................................. 47
DCLXXVI. A l'abbe d'abondance, Vespasien Aiazza. Humble récit des commencements de la
Visitation. Pourquoi Mme de Chantal est-elle venue « a son chetif pere. » Sa prudence et sa
force virile. Jacqueline Coste. « Un doux et gracieux refuge. » L'esprit et la vie intérieure
des premières Religieuses. Dévouement de François de Sales à Dieu et à son Eglise. Pour la
charité, toute peine est bien aimée. — Un Saint qui avait le don d'ouvrir les cœurs.......................... 48
DCLXXVII. A la Mère de Chantal (Fragment inédit). Pourquoi faire ce qui est requis pour tenir sa
santé un peu forte. Ce que le Saint demandait à la Messe avec une « ardeur extraordinaire. »
Affectueux dévouement du Fondateur pour la Mère de ses chères filles ........................................... 49
DCLXXVIII. A Monseigneur Jean-Pierre Camus Évêque de Belley. Recommandation en faveur d'un
ancien serviteur d'Antoine Favre ........................................................................................................ 50
DCLXXIX. A M. Antoine des Hayes. Premiers projets de Denis de Granier ; son portrait. Les
jeunes gens et les difficultés. Menaces de guerre. ......................................................................... 51
DCLXXX. A M. Jacques de Bay. Un père de famille désire que son fils achève ses études au collège
de Savoie à Louvain. Le Saint sollicite l'admission du jeune étudiant.......................................... 52
DCLXXXI. A la Mère de Chantal. L'échange du Cœur du Sauveur avec celui d'une « benite Sainte. »
François de Sales désire pour lui et souhaite à la Mère de Chantal la même faveur ..................... 53
DCLXXXII. Au Président Antoine Favre. Les appréhensions et les difficultés d'un voyage à Gex.
Les exigences du service de Dieu et des âmes, plus impérieuses encore ........................................... 53
DCLXXXIII. Au Marquis de Lans. Le Saint donne avis de son voyage à Gex. ................................ 54
DCLXXXIV. A Madame de Vignod, Religieuse de l'abbaye de Sainte-Catherine. Divin échange.
Ce qu'il est utile d'imiter dans la vie de sainte Catherine de Sienne. Dieu seul mérite d'être servi et
suivi avec passion. La Communion fréquente et les âmes faibles. Ce que font les bergers en
Arabie. L'obéissance assure la protection de Notre-Seigneur ....................................................... 55
DCLXXXV. A la Présidente Brulart. Progrès spirituel de la Mère de Chantal. Les tribulations et
la sainteté. Qu'est-ce qui approche Notre-Seigneur de nos cœurs ................................................. 56
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DCLXXXVI. A la Présidente Favre (Inédite). L'ambition d'un prédicateur de Carême. — Les cœurs
simples et humbles, et la Croix........................................................................................................... 57
DCLXXXVII. Au Président Antoine Favre. Le Saint s'en remet à son ami pour informer le Sénat
qu'il accepte l'invitation de prêcher le Carême de 1612 ..................................................................... 58
DCLXXXVIII. A la Mère de Chantal. La religion catholique à Gex ; espérance de l'y voir refleurir.
L'apostolat du Saint ; un résultat qu'il n'estime pas médiocre ....................................................... 59
DCLXXXIX. A M. Jean de Chatillon (Inédite). Recommandation en faveur d'un solliciteur dans la
gêne. ................................................................................................................................................... 60
DCXC. Au grand-prieur et aux Religieux de Saint-Claude. La chrétienté de Divonne et les frais dn
culte sont confiés au zèle des Religieux de Saint-Claude. ................................................................. 61
DCXCI. A la Mère de Chantal. Annonce du retour à Annecy ........................................................... 62
DCXCII. A la même. Effusions de ferveur. Fruit du mystère de la Pentecôte. L'esprit de force
et l'esprit de sagesse ; l'amour sacré et la souveraine Unité ............................................................... 62
DCXCIII. A la même. Les armes et la devise de la Visitation. La Congrégation est « vrayement
un ouvrage du cœur de Jesus et de Marie. » — Ses armes symbolisent la soigneuse mortification du
cœur, propre à l'Institut....................................................................................................................... 63
DCXCIV. Au duc de Savoie, Charles-Emmanuel Ier. Sollicitation de la grâce pour un coupable ..... 64
DCXCV. Au même. Défense du Saint contre une calomnie. Son inviolable fidélité au duc de
Savoie. Ce qu'il a fait à Gex. Il a déjà rendu compte de tout ce qu'il a appris discrètement sur
les projets des Français. Une proposition du sieur de la Nous. Les Suisses catholiques et le
pays de Berne. Vains efforts des brouillons et des calomniateurs pour représenter l'Evêque de
Genève « avec des affections estrangeres »........................................................................................ 65
DCXCVI. A Monseigneur Pierre Fenouillet Évêque de Montpellier. Le rétablissement du culte à
Gex et part qu'y a prise le Chapitre de Genève. Sollicitation du placet royal pour lui annexer un
bénéfice. Petites nouvelles. Retour à la foi d'un gentilhomme. Pourquoi la connaissance de
la vérité n'est pas toujours suivie de la conversion............................................................................. 67
DCXCVII. A une religieuse. En quoi consista la rare mortification de saint Jean-Baptiste. Facilité
de l'imiter par la communion spirituelle, à défaut de la Communion réelle. Homme céleste ou
ange terrestre. Tout nous crie : Amour, amour ! Des dames qui « font merveilles» ................ 68
DCXCVIII. A la Mère de Chantal. Louanges de saint Jean-Baptiste : plus que vierge, plus que
confesseur et prédicateur, plus que docteur et martyr, plus qu'évangéliste et apôtre, plus que prophète
et patriarche, plus qu'ange et plus qu'homme. Ses prérogatives admirables. Quelqu'un de plus
grand encore ....................................................................................................................................... 69
DCXCIX. A la même (Fragment). Le mystère de la Visitation. La très sainte Vierge en la maison
de Zacharie ; effets miraculeux de sa présence. Effusions d'humble amour pour le Verbe incarné
............................................................................................................................................................ 70
DCC. A M. Antoine des Hayes. Assurance réciproque d'invariable amitié. Eloge du Prieur des
Feuillants et pour quelles raisons particulières il s'est fait estimer du Saint. Rupture d'un mariage
princier. Le deuil d'un ami. Il n'est pas accordé à l'Evêque de Genève d'aller prêcher un
Carême à Paris. La marquise de Maignelay. Derniers jours d'un poète ................................... 71
DCCI. A Madame de Bertrand de la Perrouse (Inédite). Les insistances d'un jeune gentilhomme.
Prudence et charité du Saint dans une affaire délicate. ...................................................................... 73
DCCII. A la Mère de Chantal. Mgr Camus annoncé pour une exhortation à la Galerie ..................... 75
DCCIII. Au Président Antoine Favre. Message confié à un ami ....................................................... 75
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DCCIV. A Madame de la Fléchère. Ne rien rabattre de nos pratiques religieuses par respect humain.
Vouloir savoir d'où procèdent les sécheresses : curiosité superflue. Nouvelles d'un Feuillant,
d'un Cordelier, d'un Cistercien. Une « bonne petite filleule » du Saint, « toute de succre »......... 76
DCCV. A la Mère de Chantal. Le catéchiste de Notre-Dame ............................................................ 77
DCCVI. A une dame. Le grand et l'unique bonheur d'une femme chrétienne. .................................. 78
DCCVII. A Madame de la Fléchère. Quel profit tirer des chutes. Servir Dieu parmi les
sécheresses nous est chose plus dure, selon notre goût, mais plus profitable selon le goût de Dieu.
Les « viandes seches » et les hydropiques. Exercer la débonnaireté à tout propos et sans propos 78
DCCVIII. A la Mère de Chantal. Souhaits à l'occasion de la Saint-Bernard. Les vertus
caractéristiques du grand Docteur, d'après saint François de Sales.................................................... 79
DCCIX. A la même. Une vocation à contrôler. Sujet d'oraison conseillé pour des novices à la
veille de leur profession ..................................................................................................................... 80
DCCX. A Madame de la Fléchère (Inédite). Jubilé de Thonon, Lorsque, par charité, l'on dérange
ses exercices de dévotion, Dieu ne cesse pas d'être servi. .................................................................. 81
DCCXI. A Monsieur Bénigne Milletot. Une réponse claire sur trois points. Pourquoi l'amitié de
saint François de Sales pour ses amis était plus forte que la mort. Le critère des vraies amitiés.
Une main « exquise et rare » et une matière « de mauvais lustre. » Pour quels motifs l'Evêque de
Genève déteste les contentions et disputes entre catholiques. Il n'a pas trouvé à son goût certains
écrits de Bellarmin. La pauvre mère poule et les poussins qui s'entrebecquettent. Adroite et
charitable critique ............................................................................................................................... 81
DCCXII. A la Mère de Chantal. Sollicitude pour la Mère de Chantal, alors absente de Savoie. Les
affaires : leur multiplicité ne doit pas troubler, ni leur difficulté émouvoir. Nouvelles de Mlle de
Blonay. Sermon sur la Nativité de la très sainte Vierge. Affection des deux Fondateurs pour la
Sœur Favre ......................................................................................................................................... 84
DCCXIII. A la même. Comment traiter des affaires de la terre. L'amour transforme tout. Santé
et sainteté de François de Sales. Le moyen de parvenir. Communauté de désirs et d'aspirations
entre la Mère de Chantal et son Directeur. La sainte Croix ; elle béatifie ceux qui l'aiment et la
portent. L'autel des crucifiés.......................................................................................................... 85
DCCXIV. Au duc de Savoie, Charles-Emmanuel Ier. Eboulement à Sixt. Détresse des habitants
qui en est la suite. Le Saint recommande ses diocésains à la charité du duc de Savoie ................ 86
DCCXV. A M. Michel Brisson (Inédite). Regrets de ne pouvoir accepter de prêcher un Carême à
Saint-Merry. Témoignages d'estime au destinataire qui avait transmis l'invitation ...................... 87
DCCXVI. A la Soeur de Bréchard, Religieuse de la Visitation. Notre-Seigneur saura bon gré à qui
porte et supporte les âmes qui se trouvent faibles .............................................................................. 88
DCCXVII. A la Soeur Roget, Religieuse de la Visitation (Inédite). Ce qu'il faut faire après «
quelques petitz mauvais pas. » — Avoir le cœur franc envers les Supérieurs. — La « petite
bienaymee Françon. »......................................................................................................................... 89
DCCXVIII. A la Mère de Chantal. Souhaits de bon et saint voyage. Affectueux messages pour les
compagnons, les parents et les amis de la Mère de Chantal............................................................... 90
DCCXIX. Au Baron Amédée de Villette. A propos de la mort d'une parente : regrets, condoléances,
consolations, promesse de prières. ..................................................................................................... 91
DCCXX. Au Président Antoine Favre (Inédite). La cure de Saint-Sigismond en 1611 : l'ami du
destinataire en mériterait une meilleure ............................................................................................. 92
DCCXXI. A la Sœur de Bréchard, Religieuse de la Visitation. Un Père vigilant qui a peur d'être
blâmé pour ne l'être pas assez. Pourquoi ne faut-il pat emporter toutes les couronnes. C'est
encore de la charité que de laisser faire aux autres quelque chose. De qui doit-on attendre l'issue
des maladies ....................................................................................................................................... 93
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DCCXXII. A M. Bénigne Milletot. La plus mauvaise façon de mal dire. Il est presque impossible
« de corriger l'immoderation moderement. » Ce qui arrive souvent aux chasseurs. A César ce
qui est à César, mais aussi à Dieu ce qui est à Dieu ........................................................................... 94
DCCXXIII. A un inconnu (Fragment inédit). Des bailliages qui n'avaient pas été visités « il y a plus
de cent ans. » Bourgeois et bourgeoises de Genève aux vendanges et de quoi ils étaient étonnés,
ayant ouï le Saint ................................................................................................................................ 95
DCCXXIV. A Dom Eustache de Saint-Paul Asseline, Feuillant. Amitié du Saint pour l'Ordre des
Feuillants. La disposition des matières dans une Somme de théologie ; moyen de rendre celle-ci «
plus friande et plus aggreable. » Les questions inutiles. Souhaits et témoignages d'affection. 96
DCCXXV. A la Mère de Chantal. De quels principes doit s'inspirer la Mère de Chantal pour fixer la
durée de son séjour en Bourgogne. Comme le monde censure ce qui est fait pour Dieu.
Nouvelles de la Visitation .................................................................................................................. 98
DCCXXVI. A M. Philippe de Quoex. Mlle de Blonay sera la bienvenue à Annecy ; qu'elle y vienne
sans attendre le retour de la Mère de Chantal..................................................................................... 99
DCCXXVII. Au Marquis de Lans. L'Evêque de Genève avertit le gouverneur de son départ pour
Gex ................................................................................................................................................... 100
DCCXXVIII. A la Mère de Chantal. Ferveur nouvelle de charité et de zèle pour Notre-Seigneur.
La beauté de la foi transporte François de Sales d'amour et de gratitude ; il en voit plus clairement la
grandeur, en pays hérétique.............................................................................................................. 101
DCCXXIX. A M. Jean de Chatillon. Lettre d'affaires ..................................................................... 102
DCCXXX. Au Marquis de Lans. L'Evêque de Genève expose au gouverneur le sujet et les résultats
de son voyage à Gex. Les commissaires, l'un « grand catholique, » et l'autre « grand heretique, »
Exécution de l'édit de Nantes à Gex. Espérances fondées pour le prochain rétablissement du
culte .................................................................................................................................................. 102
DCCXXXI. A Madame d'Aiguebelette (Inédite). Le meilleur témoignage de fidélité, Souffrance
et action, La mortification par élection et par acceptation. Quel est le vrai temps de la moisson
des affections. — Alerte provoquée par la Sœur de Chastel. — L'assistance des malades dans la
maison de la Galerie. On « desseigne » à Dijon un monastère de la Visitation .......................... 104
DCCXXXII. A la Soeur de Chastel, Religieuse de la Visitation. Encourageantes paroles à une
convalescente. Consolation que le Saint souhaite à la Mère de Chantal pour son retour à Annecy.
.......................................................................................................................................................... 106
DCCXXXIII. A Madame de Menthon, Abbesse de Sainte-Catherine. Souhaits de bonne fête à une
Abbesse, sa cousine. Prédications et auditeurs du Saint.............................................................. 107
DCCXXXIV. A Madame de la Fléchère. Comment témoigner la vraie fidélité à Notre-Seigneur.
Condition de la vie humaine. Ce qui arrive entre les enfants des hommes ................................. 107
DCCXXXV. A la Mère de Chantal (Inédite). Condescendance du Saint pour une Religieuse malade.
Promesse d'une visite à la Galerie pour le lendemain ................................................................. 108
DCCXXXVI. A la même (Inédite). Une journée très occupée. C'est Notre-Seigneur qui unit les
cœurs indissolublement .................................................................................................................... 109
DCCXXXVII. A la même. Les occupations du Saint privent la maison de la Galerie de ses
entretiens. Une visite de la baronne de Thorens. Charité délicate.......................................... 109
DCCXXXVIII. A une dame. Où se révèle l'amour pur de Notre-Seigneur et l'amoureuse fidélité à
son service. — Laissons Dieu façonner notre cœur tout à son gré. — Cinq élévations propres à
sanctifier les souffrances. Pourquoi et comment faut-il recourir aux remèdes. Profit spirituel de
la maladie. ........................................................................................................................................ 110
Année 1612 .......................................................................................................................................... 112
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DCCXXXIX. A la Mère de Chantal. Le baume sacré du nom de Jésus ; quels sont les cœurs qu'il
pénètre de son parfum. Pieuses aspirations. Souhaits pour la Mère de Chantal. Le mystère
de la Circoncision. Prière au « divin Poupon. » La circoncision spirituelle........................... 112
DCCXL. A M. Bénigne Milletot. Souhaits de nouvel an................................................................. 113
DCCXLI. Au Père Nicolas Polliens, de la Compagnie de Jésus. Un « livret » dont le Saint aurait
désiré avoir une copie. Sa dévotion pour le bienheureux Pierre Favre et ce qu'il pensait de
l'histoire de sa vie. ............................................................................................................................ 113
DCCXLII. A M. Antoine des Hayes. Bons effets que les amis du Saint attribuaient à ses lettres.
M. de Granier. Le duc de Nemours ne désire pas céder son hôtel .............................................. 115
DCCXLIII. A la Mère de Chantal. Les deux et le soleil comparés à la chair du Sauveur.
Contemplation angélique et Communion eucharistique. Une sentence du grand saint Antoine.
Pourquoi Dieu nous abaisse et se cache ........................................................................................... 116
DCCXLIV. A Madame Françoise Bourgeois Prieure du Puits-D'Orbe. L'appui des créatures et la
protection de la providence divine. Quand il nous arrive quelque chose contre notre gré, que faire
? Jugements et manquements qui ne sont pas mortels. Message............................................ 117
DCCXLV. A M. Pierre de Bérulle. M. de Marillac porteur d'une lettre de M. de Bérulle.
Sympathies du Saint pour la Congrégation de l'Oratoire. L'hôtel du duc de Nemours n'est pas
libre. Offre de services et remerciements pour l'envoi de deux livrets........................................ 118
DCCXLVI. A Mademoiselle Acarie. La sainte bienveillance d'une Bienheureuse pour l'Evêque de
Genève. Pourquoi aurait-il désiré faire le voyage de Paris ? Sentiment de François de Sales sur
l'Oratoire naissant ; regrets de n'avoir pu prêter son concours à M. de Bérulle. Souhaits pour la
nouvelle Congrégation ..................................................................................................................... 119
DCCXLVII. A la Mère de Chantal. Entre les deux Fondateurs, il n'y avait « ni second, ni premier. »
Modèle d'exhortation destinée à des prétendantes avant leur vêture. Ce qu'on enseigne aux
Novices. — Sœur Jeanne-Charlotte de Bréchard leur maîtresse ; obéissance qu'on lui doit. Une
illusion que les Novices ne sauraient avoir. ..................................................................................... 121
DCCXLVIII. A la même. Le très grand saint Paul. Un désir du Saint. Pourquoi Dieu soustrait
ses douceurs. Prière à Jésus. A quelle classe de personnes la douce charité profite davantage
.......................................................................................................................................................... 122
DCCXLIX. A la même (Billet inédit). Une résolution finale à prendre pour l'emplacement de
l'oratoire de la Visitation .................................................................................................................. 123
DCCL. A la même. Un remède souverain : les prières de la Mère de Chantal et la relique de sainte
Apolline. Preuve sensible de la communion des Saints .............................................................. 124
DCCLI. A la Présidente Brulart. Ce qui rend profitable la nourriture corporelle et spirituelle.
Sentiments d'humilité proposés à une âme privée de la Communion fréquente. Sentir qu'on est
tout à Dieu et « en train de l'orayson » ne dispense pas de s'exercer aux vertus et de mortifier ses
passions. ........................................................................................................................................... 124
DCCLII. A la Reine Mère, Marie de Médicis (Minute). L'ambassadeur de l'Evêque de Genève et du
petit peuple catholique de Gex auprès de la reine mère. .................................................................. 125
DCCLIII. A M. Jean de Chatillon. Une pauvre demoiselle recommandée à la Sainte-Maison de
Thonon ............................................................................................................................................. 126
DCCLIV. A M. Philippe de Quoex. Zèle de la Mère de Chantal et du Saint pour la conversion d'un
médecin. Brebis errantes et troupeau fidèle. Préoccupations et résignation du Fondateur de la
Visitation. ......................................................................................................................................... 127
DCCLV. Au Père Jacques-Philibert de Bonivard de la Compagnie de Jésus (Fragment). Grave
maladie de la Mère de Chantal. Une oraison prolongée et répétée sur la troisième demande du
Pater. La résignation et la confiance d'un Fondateur................................................................... 128
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DCCLVI. A Madame de Saint-Cergues. Les amitiés qui ont Dieu pour auteur, et la distance des
lieux. Une occupation agréable et précieuse pour l'Evêque de Genève. ..................................... 129
DCCLVII. A Sa Saintete Paul V (Minute). A quoi servent les canonisations ; le Saint les jugeait
presque nécessaires pour le temps où il vivait. Il demande au Pape de canoniser le bienheureux
Amédée ; motifs qu'il fait valoir en faveur de sa supplique ............................................................. 130
DCCLVIII. A la Soeur Favre, Religieuse de la Visitation. Questions et conseils. Comment « la
grande Fille » du Saint devait gouverner son cœur et l'encourager souvent. — Le souverain bonheur
de l'âme............................................................................................................................................. 134
DCCLIX. A Madame de Peyzieu (Inédite). Une mère du Saint, par alliance spirituelle.
Compliments et paroles d'affection. ................................................................................................. 135
DCCLX. A Monseigneur Anastase Germonio Archevêque de Tarentaise. La controverse sur le
pouvoir temporel des Papes et l'autorité des Conciles. De quel côté penchent les parlementaires et
les hommes d'Etat. Esprit et tendance du siècle. Un remède plus efficace que les discussions
des théologiens. Ce que doivent faire les prédicateurs. L'entente des Prélats, de la Sorbonne et
des Religieux, bientôt mortelle à l'hérésie. Moyens de ménager cette union. ............................. 137
DCCLXI. A la Présidente Brulart. Une solution également difficile et inutile. Etat des esprits en
1611 et en 1612. Zèle que le Saint jugeait inopportun. Dangers de certaines discussions agitées
par des docteurs incompétents. Souveraine autorité spirituelle du Pape ; droits qu'elle lui confère.
Devoirs corrélatifs des chrétiens envers le Pape et l'Eglise. Triple alliance qui doit exister entre
le Pape et les rois. Les deux autorités ne se contrarient pas, mais « s'entreportent l'une l'autre. »
.......................................................................................................................................................... 141
DCCLXII. A la Mère de Chantal. La plus heureuse salutation qui fut jamais. Les souhaits de
l'Ave Maria ....................................................................................................................................... 143
DCCLXIII. Au duc de Savoie, Charles-Emmanuel Ier. Requête en faveur d'un prisonnier innocent144
DCCLXIV. A la Mère de Chantal. L'insensibilité spirituelle : en quoi consistait cette épreuve pour la
Mère de Chantal. Conseils appropriés. Le haut point de la sainte résignation. Les ténèbres
au pied de la Croix............................................................................................................................ 144
DCCLXV. Au duc de Savoie, Charles-Emmanuel Ier. Supplique du Saint au nom d'un gentilhomme
qu'il avait assisté à ses derniers moments......................................................................................... 146
DCCLXVI. A M. Antoine des Hayes. Le nid du Saint. Messages et nouvelles.......................... 147
DCCLXVII. A M. Claude de Quoex (Inédite). « La pauvre dame Jaqueline. » Dureté de M.
Gilette. Le P. de Bonivard, S. ]., prédicateur du Carême à Annecy. Contentement mutuel du
Religieux et du bon peuple annécien. Affluence des Chambériens aux sermons de saint François
de Sales............................................................................................................................................. 148
DCCLXVIII. Aux Religieuses de la Visitation d'Annecy. Pourquoi saint François de Sales se
résignait à vivre en ce misérable monde. Abeilles mystiques et mouches libertines : le bonheur et
les exercices des unes et des autres mis en parallèle. Un festin plus délicieux que celui
d'Assuérus. Les spirituelles saillies sur les collines de Calvaire, d'Olivet, de Sion, de Thabor.
Bonheur de la vie religieuse ............................................................................................................. 149
DCCLXIX. Au Baron Bernard de Chevron. Envoi d'une lettre d'affaires. ...................................... 150
DCCLXX. A M. Claude de Quoex. Le Saint s'emploie pour obtenir l'expédition d'un procès........ 151
DCCLXXI. A la Mère de Chantal (Billet inédit). Cent mille bonjours............................................ 152
DCCLXXII. A la même. Visite promise ; visite annoncée .............................................................. 152
DCCLXXIII. A Madame de Maillard ancienne abbesse de Sainte-Catherine. Recommandations pour
la Sœur de Vignod. — Notre-Seigneur est jaloux des âmes qu'il favorise....................................... 153
13/321

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DCCLXXIV. A la Mère de Chantal (Inédite). Charité attentive et minutieuse du Saint pour la Mère
de Chantal. Le régime d'une convalescente................................................................................. 153
DCCLXXV. A M. Bénigne Milletot. Le Saint revendique son droit, qui était contesté, de conférer les
bénéfices dans certaines paroisses situées en France ....................................................................... 154
DCCLXXVI. A Madame de la Fléchère. L'aveuglement des duellistes ; pourquoi et comment le
Saint en avait une grande compassion.............................................................................................. 155
DCCLXXVII. A Madame de la Valbonne (Fragment). Quels sont ceux que le Sauveur n'abandonne
jamais. Un nouveau filleul du Saint. ................................................................................................ 156
DCCLXXVIII. Au duc de Savoie, Charles-Emmanuel Ier. Pourquoi le Saint désire obtenir l'agrément
du duc de Savoie pour les prédications qu'on lui demande à Lyon .................................................. 157
DCCLXXIX. A la Mère de Chantal (Billet inédit). « Nostre fievre » et « nostre teste. » Les
bonnes dispositions des syndics pour les agrandissements de la Visitation ..................................... 157
DCCLXXX. A la même (Fragment inédit). Une postulante qui avait de la répugnance pour
l'abjection ; comment traiter avec elle .............................................................................................. 158
DCCLXXXI. A la même. Beauté du Ciel après l'Ascension du Sauveur. Aspirations pieuses.
La seule chose qni donne du prix à l'éternité des biens, d'après saint François de Sales. La
glorification du corps de Notre-Seigneur et de notre corps.............................................................. 159
DCCLXXXII. Aux éminentissimes Cardinaux de la Sacrée Congrégation des Rites (Minute). L'une
des opinions maudites de Calvin. Dévotion des catholiques de Savoie au bienheureux Amédée.
Pourquoi les membres de la Sacrée Congrégation des Rites doivent faire avancer sa canonisation.160
DCCLXXXIII. A Dom Pierre de Saint-Bernard de Flottes Feuillant. Un grand désir du Saint.
Envoi d'un ouvrage. Les PP. Capucins en Savoie. ...................................................................... 162
DCCLXXXIV. A Monseigneur Pellegrino Bertacchi Évêque de Modène. Renseignements demandés
sur un étranger apostat, en faveur de sa femme convertie. ............................................................... 163
DCCLXXXV. Au Chanoine aimé rouge, sous-prieur de Peillonnex. Renseignements fournis sur un
jeune prêtre. ...................................................................................................................................... 165
DCCLXXXVI. A Madame de Cornillon, sa sœur. Une prétendante « de fort bonne famille et de tres
bonne mine. » ................................................................................................................................... 165
DCCLXXXVII. A Madame Bourgeois, abbesse du Puits-D'Orbe (Inédite). Condoléances et
consolations. Le seul prix de cette vie mortelle. Pour mourir, tous les moments sont « heureux
» à ceux qui craignent Dieu. L'Abbesse désire faire un voyage en Savoie ; le Saint ne sait ni le lui
conseiller, ni l'en dissuader............................................................................................................... 166
DCCLXXXVIII. Au duc de Savoie, Charles-Emmanuel Ier. Remerciements pour une grâce obtenue
.......................................................................................................................................................... 168
DCCLXXXIX. A Monseigneur Michel d'Esne, Évêque de Tournai (Inédite). L'Introduction à la Vie
devote attire à son auteur les louanges d'un Prélat étranger. Gratitude du Saint. Son oraison
pour Genève. Remerciements pour un envoi de traductions. ...................................................... 168
DCCXC. A M. Claude Dupanloup, Curé de la Muraz. Le saint métal et la dévotion à saint Théodule.
.......................................................................................................................................................... 169
DCCXCI. A la Mère de Chantal. La rose, symbole des vertus de saint Jean-Baptiste. Son amour
pour la Sainte Vierge et son Enfant. Deux lis dans une rose....................................................... 170
DCCXCII. A Messieurs les Chanoines de Saint-Jean de Lyon (Minute). Le Saint voudrait bien
accepter l'invitation du Chapitre, mais à cause du silence du duc de Savoie, il se dégage de sa
promesse........................................................................................................................................... 171
DCCXCIII. Au duc de Savoie, Charles-Emmanuel Ier. Recommandation en faveur d'un gentilhomme
offensé qui demande justice ............................................................................................................. 172
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DCCXCIV. A Madame de la Fléchère. Les Constitutions de la Visitation. Messages variés .... 172
DCCXCV. Au Père Nicolas Polliens, de la Compagnie de Jésus (Inédite). Une bonne fille qui ne
pourra pas être si tôt consolée. « Le livret » que prépare le Saint. ................................................... 173
DCCXCVI. A Madame de Travernay. Ce qui donnait à François de Sales « un particulier
contentement. » Pourquoi et comment les tracas sont utiles au progrès spirituel. Un sentiment
qui rend légers tous les déplaisirs. .................................................................................................... 174
DCCXCVII. A l'Archiduc d'Autriche, Albert VII. Supplique en faveur de l'établissement d'un
monastère à Saint-Claude. Le sort ordinaire de ceux qui recherchent l'intimité de Dieu.
Comment les âmes qui prient servent leur pays et leur époque........................................................ 175
DCCXCVIII. A la Mère de Chantal. Un bonjour du « grand saint Pierre. » La délivrance des liens
spirituels. « Mignardise d'amour » de Notre-Seigneur. La marque de l'amour fidèle. Il faut
mourir ou aimer. « Une jolie pensee. » Les jeunes apprentis et les vieux maîtres en l'amour de
Dieu. Où tendait l'amitié mutuelle qui unissait l'ime du Saint et celle de la Mère de Chantal .... 177
DCCXCIX. Au Marquis de Lans. Rentré à Annecy, l'Evêque de Genève rend compte de ses
négociations dans le pays de Gex. Eloge d'un commissaire. Sentiments des Genevois......... 178
DCCC. A la Reine Mère, Marie de Médicis (Minute). Remerciements à la reine régente et souhaits
pour son fils et pour elle, en retour de son intervention pour le rétablissement du culte à Gex ....... 179
DCCCI. A un gentilhomme. La mort d'une fille spirituelle du Saint, âme « belle et devote » ........ 180
DCCCII. A la Mère de Chantal. L'aube du jour éternel. Souhaits pour la petite Congrégation.
Un sentiment fort particulier qu'éprouve le Saint la veille de l'Assomption. La divine Fruitière.
En descendant de chaire ................................................................................................................... 181
DCCCIII. A M. Antoine des Hayes. Par « humeur », le Saint aime la discrétion. Service demandé
en faveur du Chapitre de Genève. Phénomènes célestes............................................................. 182
DCCCIV. A la Mère de Chantal. Avis charitable ............................................................................ 183
DCCCV. A Madame de Genève, abbesse de Baume-Les-Dames (Inédite). Offre conditionnelle d'une
postulante, fille de Gallois de Sales. Ce qui rebutait quelquefois les prétendantes à la Visitation.
Portrait de la nièce du Saint......................................................................................................... 183
DCCCVI. Au Baron Amédée de Villette. Le regard des princes et les rayons du soleil. « Petite
harengue » présentée à une Abbesse. Une cousine du Saint lui dit « son petit cas » : pourquoi elle
ne songeait pas à la Visitation .......................................................................................................... 185
DCCCVII. A M. Claude de Blonay. Le voyage de Milan n'est plus désespéré. Un Saint qui a soin
de ses dévots. Plan du voyage ; compagnon à retenir ................................................................. 186
DCCCVIII. A Madame de Travernay. Comment accommoder les prières avec beaucoup
d'occupations du matin jusqu'au soir. Les oraisons jaculatoires. Les afflictions du cœur. —
Quelles sont les âmes que Dieu aime. .............................................................................................. 187
DCCCIX. A la Mère de Chantal. Une âme à consoler ..................................................................... 188
DCCCX. A M. Antoine des Hayes. Une amitié à l'abri de toute défiance. Pourquoi, dans
l'intention de prêcher à Saint-Benoit, le Saint préparait « un cœur tout nouveau, » après dix ans de
ministère épiscopal. Opposition résolue du duc de Savoie anx prédications de François de Sales à
Paris, Perplexités d'un évêque ..................................................................................................... 188
DCCCXI. A M. Jacques de Bay. Recommandations en faveur de trois étudiants de Savoie.
Nouvelles religieuses........................................................................................................................ 190
DCCCXII. A la Mère de Chantal. Une jeune fille écartée de la Visitation pour cause de maladie . 191
DCCCXIII. Au Baron Amédée de Villette. La contagion au-pays de Vaud. La petite cousine
aimée tendrement de la Mère de Chantal ......................................................................................... 192
15/321

2.6 Page 16

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DCCCXIV. A Madame d'Escrilles. Affection des Religieuses de la Galerie pour la destinataire.
Les satisfactions sèches et les consolations savoureuses. Messages. .......................................... 193
DCCCXV. A Madame de la Fléchère. Ce que réservait le Saint dans ses demandes à Dieu. Petites
nouvelles. Annonce du départ de la Galerie ................................................................................ 194
DCCCXVI. A Madame de Grandmaison. Comment le Saint entend témoigner sa sainte amitié.
Messages divers................................................................................................................................ 196
DCCCXVII. A Madame de Peyzieu. Le nom du cœur. — Les consolations du Jubilé.
Témoignages d'amitié pour la destinataire et sa famille. Affliction fâcheuse et affliction
courageuse. La modération des affections ménagères, grandement utile à la piété. Une
imperfection dont peu de gens s'abstiennent. — Les cœurs faibles et les cœurs forts. .................... 198
DCCCXVIII. Au Marquis de Lans. Intercession en faveur d'un capitaine dans la gène et dans la
vieillesse. .......................................................................................................................................... 199
DCCCXIX. A la Sœur de Blonay, Novice de la Visitation. Ce qui rend certaines tentations
inoffensives. La petitesse et l'enfance spirituelle. ....................................................................... 200
DCCCXX. A la Mère de Chantal (Billet inédit). Annonce de visiteuses......................................... 201
DCCCXXI. Au duc de Bellegarde (Minute). Menaces et prétentions des pasteurs protestants.
Précaution que propose l'Evêque de Genève pour les atténuer. Eloge de M. Millelot................ 202
DCCCXXII. A M. Gilles le Mazuyer. L'église de Gex ; espérances qu'elle donne. Une difficulté
et une impossibilité se rencontrent dans les lettres de naturalité obtenues pour les curés. Une «
viande friande » au XVIIe siècle. Remerciements du Saint. Il ne fait pas le « refuseur, » mais
jamais il ne sera « praetendeur. » Les francs serviteurs de Dieu, peu nombreux. ....................... 203
DCCCXXIII. A M. Antoine des Hayes. Requête de François de Sales. A la diète de Bade.
Obstination des Bernois. Un déplaisir du Saint........................................................................... 205
DCCCXXIV. A la Présidente Favre. Une âme qui va bien. L'amour de Dieu et la paix. Les
voies du Ciel. Précaution contre les « babillardz ». Ce que pensait le Saint des Ursulines et des
institutrices chrétiennes. Les entreprises extraordinaires qui ne sont pas hasardées. Un
monastère de seize bonnes filles, où rien n'abonde ni ne manque. La pauvre Thiollier.............. 206
DCCCXXV. A Madame d'Escrilles. Nouvelles de la Mère de Chantal. Oratoire de la Visitation
.......................................................................................................................................................... 208
DCCCXXVI. A la Mère de Chantal (Inédite). Affectueuse gronderie. La Mère de Chantal au
milieu des tracas d'une installation. Pourquoi doit-elle garder ses forces ................................... 209
DCCCXXVII. A Madame de la Fléchère. Les bancs des femmes dans les chœurs des églises. —
Elles peuvent toutefois y entrer. Nouvelles de la Mère de Chantal et de la Congrégation.
Pourquoi il est mieux d'avoir moins. ................................................................................................ 209
DCCCXXVIII. A la Présidente Favre (Inédite). Les Ursulines et les petites filles de Chambéry.
Un défaut de l'éducation maternelle, assez fréquent, d'après le Saint .............................................. 210
DCCCXXIX. A M. Claude de Neuvecelle. Recommandation réitérée en faveur d'une pauvre fille.
.......................................................................................................................................................... 211
DCCCXXX. A la Mère de Chantal. Comment recevoir les remèdes imposés par l'obéissance et la
raison. Les croix qui répugnent aux sens et à la nature. Dans la maladie, la Mère de Chantal
doit être « brebis » et « colombe » ................................................................................................... 212
DCCCXXXI. A la même. Une auditrice que François de Sales a vue au sermon ; pourquoi il n'a pas
osé l'aborder. Un sermon « fait hardiment et passionnement. » Le dixième anniversaire d'un
sacre. Prédicateurs de l'Avent...................................................................................................... 212
16/321

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DCCCXXXII. A Madame Bourgeois, abbesse du Puits-D'Orbe. Un voyage en Bourgogne empêché
par un voyage à Turin. Pour s'avancer dans l'amour de Dieu, une jambe infirme est meilleure que
l'autre ................................................................................................................................................ 213
DCCCXXXIII. A Madame de Peyzieu. A propos du dernier et du premier jour de l'an. Souhaits
de piété. Exhortation à la douceur et humilité. Le saint nom de Jésus et « l'odeur de son parfum
» ........................................................................................................................................................ 214
DCCCXXXIV. A la Reine Mère, Marie de Medicis (Minute). Requête en faveur des catholiques de
Gex, pour obtenir en leur ville le rétablissement d'un ancien monastère de Carmes ....................... 215
DCCCXXXV. A la Mère de Chantal (Inédite). Une mère alarmée. Avis charitable donné à un
visiteur inopiné ................................................................................................................................. 216
DCCCXXXVI. A une dame (Fragment inédit). La dévotion et la maladie. En quoiconsiste et ne
consiste pas l'amour divin................................................................................................................. 216
DCCCXXXVII. A Madame de la Fléchère. Les solides consolations. La crainte et l'amour devant
Dieu. L'émondage spirituel. Condition d'une parfaite retraite................................................ 217
DCCCXXXVIII. A la Mère de Chantal. L'oraison de la Mère de Chantal trouvée bonne par le Saint
et agréable à Dieu. Pourquoi et comment doit-elle se garder des fortes applications de
l'entendement. Se tenir en la présence de Dieu et s'y mettre : deux choses différentes. Allégorie
de la statue dans sa niche. Marie-Madeleine. Bonheur de vouloir aimer Notre-Seigneur. Le
sommeil empêche-t-il de se tenir en la présence de Dieu ?.............................................................. 218
DCCCXXXIX. A la même. D'où vient l'amertume spirituelle. Jésus-Christ est un Dieu de
douceur ............................................................................................................................................. 219
DCCCXL. A la même (Fragment). La parole de Dieu et comment il faut la recevoir des uns et des
autres ................................................................................................................................................ 220
DCCCXLI. A Madame de la Fléchère. La tristesse des séparations. Pleurons un peu, non
toutefois beaucoup, « nos chers trespassés. » Les âmes chrétiennes doivent supporter doucement
la perte des parents. L'oraison et la variété des affections qui viennent t'y mêler. Particulariser
les résolutions. Le langage des yeux. .......................................................................................... 220
DCCCXLII. A la Mère de Chantal. Un visiteur annoncé. Pourquoi il faut lui faire un accueil
dévotement agréable. Personne ne se repentira d'avoir aidé la Visitation ................................... 221
DCCCXLIII. Au duc de Bellegarde (Minute inédite). Gratitude et humilité du Saint..................... 223
DCCCXLIV. A la Mère de Chantal. Lumières et sentiments que recevait le Saint pour écrire le
Traitté de l'Amour de Dieu ............................................................................................................... 224
Année 1613 .......................................................................................................................................... 225
DCCCXLV. A Madame de Travernay. Attitude de l'esprit humain en face des évènements.
Considérations sur une mort prématurée. Notre-Seigneur meilleur juge que nous de nos intérêts.
Consolations à la mère de l'enfant devenu un «brave petit saint» ............................................... 225
DCCCXLVI. A la Mère de Chantal. Le cœur de l'Evêque de Genève. — Un projet de Congrégation.
Le Traitté de l'Amour de Dieu. Nouvelle de la mort tragique du baron de Lux : compassion du
Saint.................................................................................................................................................. 226
DCCCXLVII. A M. Etienne Dunant, Curé de Gex (Inédite). Pouvoirs donnés à un curé ; avis et
recommandations diverses ............................................................................................................... 228
DCCCXLVIII. Au Comte Prosper-Marc de Tournon (Inédite). Assurance de dévouement.
Souhaits et bénédictions ................................................................................................................... 230
DCCCXLIX. A M. Jean de Chatillon. Recommandation en faveur d'un nouveau converti digne
d'assistance ....................................................................................................................................... 231
17/321

2.8 Page 18

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DCCCL. A Madame des Gouffiers, Religieuse du Paraclet (Fragment). Les sentiments que le Saint
aimait à trouver dans une postulante. A la Visitation, « toutes choses sont basses, » excepté « la
pretention » des Religieuses qui l'habitent. ...................................................................................... 232
DCCCLI. A Monseigneur Pierre Fenouillet Évêque de Montpellier. Remerciements pour de beaux
présents ; le Saint en a fait part à ses amis. Un plaisir interdit. Souhaits et message ............. 233
DCCCLII. A une dame. Dans quelles vues de foi il faut considérer les absences et les séparations
définitives. ........................................................................................................................................ 234
DCCCLIII. A Madame d'Escrilles. Affaires diverses. Parmi les tracas temporels, il faut garder la
sainte tranquillité et douceur de cœur............................................................................................... 234
DCCCLIV. A la Mère de Chantal. Un contrat qui va bien. Promesse d'une visite et annonce d'une
visiteuse ............................................................................................................................................ 235
DCCCLV. A la même (Billet inédit). Mesures à prendre à l'ouverture d'un testament. Décès de
Mme de Miribel.................................................................................................................................. 236
DCCCLVI. Au Père de Lesseau, Religieux Célestin. Le Saint décline les louanges d'un poète avec
une discrète humilité. ....................................................................................................................... 237
DCCCLVII. A Madame Bourgeois, abbesse du Puits-D'Orbe. Solidité des affections plantées de la
main de Dieu. Intérêt que porte le Saint au Puits-d'Orbe. Il faut faire souvent revivre les
résolutions prises au temps de la ferveur. Messages divers ........................................................ 237
DCCCLVIII. A M. Claude de Blonay. Le destinataire n'ayant pas eu à se louer de son fils, « excessif
en desseins, » le Bienheureux promet d'y porter remède. Messages divers ................................ 238
DCCCLIX. Au duc de Savoie, Charles-Emmanuel Ier. Pourquoi le Saint n'a rien entrepris contre
l'abbé de la Tour. Qu'on lui donne des commandements, il obéira ............................................. 239
DCCCLX. A Madame de la Croix d'Autherin. La vocation du mariage et le moyen d'y devenir fort
sainte. L'obéissance au confesseur. Règlement de vie. Conseils variés. La crainte des
vices et l'amour des vertus. Douceur et humilité. Une besogne que Dieu paie de mille
consolations. ..................................................................................................................................... 240
DCCCLXI. A M. Claude de Blonay. Le Saint renonce par charité à la consolation d'avoir un ami
pour compagnon de pèlerinage. Voyage à Turin, à pied ou à cheval, suivant les circonstances 241
DCCCLXII. A M. Antoine des Hayes. Détails rétrospectifs sur l'affaire Berthelot et l'internement de
M. de Charmoisy. Conseils adressés à Philothée par l'entremise du destinataire. Le Saint
désirerait avoir la liberté d'aller à Paris l'année suivante .................................................................. 243
DCCCLXIII. A Madame de Charmoisy. Quand doit-on témoigner à Notre-Seigneur son amour.
Sympathies et dévouement pour la famille de Charmoisy éprouvée................................................ 245
DCCCLXIV. A la Mère de Chantal (Fragment). Les embarras d'un héritage ................................. 246
DCCCLXV. A la même. Une chape vraiment belle : d'où lui vient sa beauté ; symbolisme des
dessins qui la décorent. Bénie soit la main de la brodeuse.......................................................... 246
DCCCLXVI. A la même. Le travail permis à la Mère de Chantal deux jours chômés. Souhait et
espérance du Saint. — Un visage pâle et un cœur vermeil .............................................................. 247
DCCCLXVII. Au Comte Prosper-Marc de Tournon. Dévouement du Saint pour M. de Charmoisy.
Malice de ses ennemis et crédulité du prince de Nemours. Berthelot et M. de Servette........ 248
DCCCLXVIII. A M. Claude de Quoex. Renseignements pour une dispense de mariage à obtenir
.......................................................................................................................................................... 249
DCCCLXIX. A la Mère de Chantal (Inédite). Une halte en Maurienne. Sollicitude du Saint en
voyage .............................................................................................................................................. 250
DCCCLXX. A la même. Comment attendre l'issue d'une maladie. Dans quels sentiments faut-il
sortir de cette vie et acquiescer à la Providence divine .................................................................... 251
18/321

2.9 Page 19

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Minute écrite par saint François de Sales pour Madame de Saint-Cergues ......................................... 253
DCCCLXXI. A Madame Dufour. Mme de Saint-Cergues expose les raisons de son abjuration.
Après la grâce du Saint-Esprit, la confession de foi catholique a surtout dessillé ses yeux : elle a vu
Jésus-Christ, unique objet de foi, d'espérance et de charité, l'exclusion de toute idolâtrie, le culte
raisonnable des Saints. Une « pauvre petite brebiette » se réunit au troupeau. La lumière n'est
pas toujours accompagnée de la facilité pour déduire les raisons de la croyance. ........................... 253
DCCCLXXII. Au Cardinal Anne de Pérusse d'Escars de Givry (Inédite). La Sainte-Maison de
Thonon. Les Carmes réformés de Paul V.................................................................................... 255
Appendice............................................................................................................................................. 258
I. Lettres adressées a saint François de Sales par quelques correspondants ..................................... 258
A. Lettre du Baron de Lux............................................................................................................ 258
B. Lettre du Prieur et des Religieux de Saint-Claude................................................................... 259
C. Lettre du Père Jean de Villars de la Compagnie de Jésus........................................................ 260
D. Lettre de Madame de Saint-Cergues ....................................................................................... 261
E. Lettre de D. Sens de Sainte-Catherine, Feuillant ..................................................................... 262
F. Lettre de M. Jean-Louis de Chevron, Seigneur de Bonvillard ................................................. 263
G. Lettre de Mgr Michel d'Esne, Évêque de Tournai .................................................................... 263
H. Lettre du Chevalier Claude de la Verchère ............................................................................. 264
II. Pièces diverses ............................................................................................................................. 266
A. Saint François de Sales et Mgr Germonio................................................................................. 266
B. Lettre de M. Antoine des Hayes A M. de Charmoisy.............................................................. 266
C. Les Grands Pardons d'Annecy ................................................................................................. 267
Jesus Christus, Filius Intemeratæ Virginis Mariæ.................................................................... 268
Du jeudy, sixiesme septembre mil six cens douze ................................................................... 268
Description du parement de l'Eglise de Nostre Dame .............................................................. 271
Description de l'autre porte de l'entree de l'Eglise de Nostre Dame et par laquelle la procession
est entree................................................................................................................................... 271
Description du portail dressé devant la trille de fer de la chappelle de Nostre Dame avec la
parure de l'autel d'icelle ............................................................................................................ 272
Description de l'oratoire dressé au jubé, sçavoir pres le crucifix ............................................. 272
Du vendredy, septiesme septembre, jour et feste de sainct Gras.............................................. 274
D. Lettre de M. Louis de la Tournette a M. Crotti ....................................................................... 276
Glossaire des locutions et des mots surannés ou pris dans une acception inusitée aujourd'hui ........... 277
Index des correspondants et des principales notes biographiques et historiques de ce volume ........... 286
Table de correspondance de cette nouvelle edition avec les précédentes et indication de la provenance
des manuscrits ...................................................................................................................................... 294
Table des matières ................................................................................................................................ 306
19/321

2.10 Page 20

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Avant-Propos
_____
Le recueil des Lettres écrites au cours des années 1611-avril 1613, contient plusieurs pièces
inédites1, dont quelques-unes d'une originale et vigoureuse beauté. L'ensemble de la
correspondance peut fournir de précieux documents sur la vie pastorale de l'Evêque ; mais surtout
les lettres adressées à la Mère de Chantal sont des pages incomparables qui nous livrent naïvement
les plus touchantes confidences de sa vie intime et surnaturelle.
Il y avait encore, en 1611, beaucoup à faire dans le diocèse de Genève pour relever les
ruines multipliées par les protestants sous prétexte de réforme : il fallait ramener les égarés, prêcher
aux fidèles, enseigner le catéchisme aux enfants, réorganiser les paroisses démolies ou supprimées,
rétablir les Ordres religieux dispersés et créer des Maisons nouvelles. Les Lettres de cette époque
nous racontent avec quelle ardeur et quel succès, François de Sales se dévoue et se dépense pour
cette œuvre de restauration religieuse.
Un terrain propice s'offrit à son cœur d'apôtre, quand il vint dans ce « petit bout » du
royaume de France2 qu'on appelait le pays de Gex. Il y séjourna en mai, novembre, décembre 1611
et du 14 au 31 juillet 1612. Si l'on excepte la mission du Chablais, nous ne croyons pas que, dans
toute sa vie et parmi les divers quartiers de son grand diocèse, l'infatigable Pasteur ait exercé un
apostolat plus laborieux. Pour faire revivre le culte catholique dans ce [V] malheureux bailliage,
il dut recourir à l'intervention des agents de la cour de France, et d'autre part, ménager l'esprit
soupçonneux de Charles-Emmanuel qui s'alarmait toujours de ses voyages, en l'accusant de nourrir
« des affections estrangeres3 ; » mais surtout, il eut à lutter contre l'opiniâtreté subtile, inlassable
des Genevois et des ministres.
Tant de difficultés et de contradictions ne purent l'arrêter ; bien plus, elles faisaient sa joie.
« Mon Dieu, ma tres chere Fille, que ce m'est une honnorable et douce peyne que celle-cy, »
écrivait-il de Gex4, au milieu des plus inextricables embarras. Dès sa première visite, l'ardent
Apôtre convertit un gentilhomme, réconcilie deux églises paroissiales ; en quatre sermons, il
ébranle plusieurs hérétiques et leur fait « advoüer que la verité catholique » est « belle, quoy que
difficile a comprendre5. » Il disait encore6, en parlant des calvinistes de ce pays : « Peut estre ne
les reduirons-nous pas, parce que, pour l'ordinaire, les considerations humaines empeschent celles
de leur salut, » mais « nous ne pensons pas peu faire quand nous leur faysons confesser que nous
avons rayson. »
Dieu visita son Serviteur au champ même de ses fatigues, par des consolations et des
lumières qui doublèrent son courage. « Sa Bonté, » confiait-il à la Mère de Chantal7, « me fait
savourer des douceurs, certes, extraordinaires et suaves et qui ressentent au lieu d'ou elles «
viennent. O que nostre Sauveur est bon et comme il traitte tendrement avec mon pauvre chetif
courage ! »
Le 14 juillet 1612, notre Saint retournait à Gex pour entrer en possession des églises qui
étaient encore occupées par les ministres. Il y demeura quinze jours, accompagnant de village en
village les commissaires royaux, assistant à toutes les assemblées, défendant pied à pied [VI] les
droits de ses ouailles contre les allégations des pasteurs. Le Procès-verbal de ces laborieuses
tournées nous a été conservé, témoignage précieux et véridique journal du zèle d'un grand Apôtre.
1 On en compte trente-six, sans parler de divers fragments de lettres, et aussi de plusieurs pièces placées à l'Appendice,
qui sont d'un grand intérêt.
2 Lettre DCCCXXI, p. 294.
3 Voir p. 69.
4 Lettre DCLXXXVIII, p. 57.
5 Lettre DCXCVI, p. 71.
6 Lettre DCLXXXVIII, p. 57.
7 Ibid. p. 56.
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3 Pages 21-30

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3.1 Page 21

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Dans les premiers mois de 1611, Annecy avait vu se produire une conversion assez
extraordinaire. Elle fit grand bruit parmi les catholiques et dans la cité de Calvin : ce fut le retour
de Mme de Saint-Cergues à la vraie foi8. Cette femme hardie, exaltée par une imagination ardente,
avait quitté son mari pour suivre le nouvel évangile de Genève. Bientôt, elle se mit à prêcher avec
une éloquence entraînante ; on l'appelait l'archi-ministresse. Un jour pourtant, malgré sa méfiance
envers saint François de Sales, elle accepta d'entrer en propos avec lui. L'entretien dura quatre
heures. La courtoisie, la modestie, la science du Saint eurent raison, après Dieu, de son
aveuglement opiniâtre. Elle se sentit convaincue et se convertit pour toujours, après être demeurée
vingt-quatre ans dans l'hérésie.
L'Evêque se préoccupait avec non moins de sollicitude de l'instruction des catholiques. Il
devint le prédicateur de toutes les fêtes ; il prêchait dans les paroisses, il prêchait dans les couvents.
Ce fut lui qui présida aux « Grands Pardons » d'Annecy9. Ces exercices lui apportèrent une «
infinie multitude d'occupations10, » mais aussi « mille consolations et point de peyne11. »
Quelques mois auparavant, les fruits recueillis à Chambéry avaient dépassé ses espérances.
Invité par le souverain Sénat de Savoie, à donner la station quadragésimale de 1612, il craignit un
instant « de rencontrer « trop de sagesse12. » Mais nous savons, par le témoignage des
contemporains et par l'aveu de François de Sales lui-même13, que les auditeurs répondirent à son
[VII] zèle par leur affluence et leur attention, et qu'ils furent remués par son éloquence. Il parla
aux Chambériens des larmes de Jésus, de sa miséricorde, de sa Providence. Les fragments de
discours qui nous restent de ce Carême14, émeuvent encore à la simple lecture, tout refroidis et
décolorés qu'ils sont, séparés des lèvres qui les firent entendre et de la ferveur d'amour qui les
inspira. On y remarque de ces traits que seuls savent trouver les grands orateurs et les Saints. En
parlant de l'étonnement des Juifs devant Jésus pleurant sur Lazare : « Ils virent, » dit-il, « l'amour
pleurer15. »
Et encore : « On se mire avant que de sortir ; nul ne « fait l'examen de sa conscience16. »
Le bienheureux Evêque dénonçait à ses auditeurs de Chambéry les artifices de l'ennemi
des âmes. « Oh ! ces prédicateurs ! » fait-il dire au tentateur, « oh ! ces prédicateurs ! ils vous
interdisent toute joie, toute nourriture, tout sourire, tout soin des biens temporels ; ils vous veulent
tout le jour à l'église, toujours dans le jeûne. » « Ah ! traître à l'humanité, » reprend le Saint, «
nous ne disons pas cela, mais : Nourris-toi de toute joie ; quant à la joie du péché, n'en use pas17.
» L'action, la pratique des vertus, c'est tout l'homme, disait-il encore18, et c'est le dernier mot, ou
du moins le principal de sa spiritualité. Ainsi, l'éminent Docteur prémunissait à la fois les âmes
contre les séductions du sentimentalisme et contre l'orgueilleuse impassibilité des stoïciens.
La renommée de sa parole avait depuis des années franchi les modestes limites de la Savoie.
On eût voulu l'entendre à Lyon, on eût voulu l'entendre à Paris ; mais il ne put s'y rendre. Le lecteur
éprouvera quelque surprise en parcourant les lettres que le Saint écrivit à ce sujet pour demander
à son souverain la permission [VIII] de remplir ces ministères19. Charles-Emmanuel prenait
ombrage de l'amitié et de l'estime que l'on avait en France pour l'Evêque de Genève, et refusa
toujours son agrément20. L'esprit méfiant du prince fit tort dans cette conjoncture à sa perspicacité.
Sa connaissance des hommes et sa finesse, qui assurèrent tant de fois le succès de sa diplomatie,
8 Voir note (76), p. 15.
9 On trouvera à l'Appendice II, p. 400, un récit pittoresque, inédit jusqu'à ce jour, du fameux Jubilé septénaire de 1612.
10 Lettre DCCCVI, p. 265.
11 Lettre DCCCXVII, p. 387.
12 Lettre DCLXXXVI, p. 54.
13 Lettre DCCLXVII, p. 304.
14 Voir tome VIII de cette Edition, pp. 74-102.
15 Ibid., p. 99.
16 Ibid., p. 84.
17 Ibid., pp. 82, 83.
18 Cf. ibid., p. 104.
19 Lettres DCLXXV, DCCLXXVIII.
20 Voir pp. 79, 272, 273.
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auraient dû l'avertir qu'il contristait par ses refus, et sans profit pour sa politique, le plus
désintéressé de ses amis et le plus loyal de ses sujets.
A part les prédications qui reviennent aux grandes circonstances, il y a le train journalier
de la vie d'un évêque que l'on voit pour ainsi dire en mouvement, en lisant les Lettres de saint
François de Sales. Ce sont des catéchismes à faire, c'est un synode à présider, c'est un jugement
ecclésiastique à prononcer ; surtout, ce sont les visites à recevoir et qui parfois le surprennent au
beau milieu d'une lettre qu'il est obligé d'abréger : « Bon jour encor, ma Fille ; j'apperçois entrer
nos plaideurs qui viennent interrompre la paix de mes pensees21. »
Cependant, l'occupation principale de sa vie d'alors, celle à laquelle il donne ses meilleurs
loisirs et qui lui fut la plus chère, concerne la Congrégation qu'il venait d'établir. Dès la première
heure, il veut que la Visitation ait ses Règles, ses armes, sa devise22. On peut suivre presque jour
par jour les nouvelles de la petite assemblée. Le Saint s'associe de cœur et d'âme à tous les
évènements qui s'y produisent. Quelle joie pour lui d'admettre les prétendantes au noviciat ! « Il
faut, » dit-il, « que j'aille estre l'aumosnier de nos Seurs de la Visitation pour la reception d'une
fille de Dijon, de fort bonne famille et de tres bonne mine23. »
Il partage avec la Mère de Chantal le tracas d'une installation du Couvent dans une maison
plus spacieuse [IX] et plus sortable ; et quand tout est fini, il écrit avec un contentement visible :
« Mercredi, nous logerons le Saint « Sacrement en l'oratoire de la Visitation, dequoy toutes « ces
bonnes filles sont grandement en feste24. »
Quelle attention et quelle adresse pour se concilier la bienveillance du duc de Nemours et
des officiers de sa maison en faveur de sa chère famille ! Il y a là-dessus une lettre fort curieuse25.
Quel souci pour procurer à la Communauté des vocations solides et recommandables, et pour
inculquer aux novices l'esprit tout particulier de l'Institut26 ! Le recrutement des sujets n'était
d'ailleurs pas facile ; le Saint l'avoue formellement et il en donne la raison : « Les humilités quil y
faut exercer rebuttent quelquefois les filles27. »
Au reste, le Fondateur se garde bien de circonscrire tout l'idéal de la vie religieuse dans le
cadre de son cher Couvent de « Neci. » Il s'intéresse à toutes les autres formes de Congrégations
régulières : il applaudit à l'établissement des Ursulines à Chambéry28, il protège les Annonciades
de Saint-Claude29 ; il est l'ami, le conseil, le correspondant de tous les grands Ordres de l'époque.
La vie intérieure de saint François de Sales apparaît dans ses Lettres d'une manière plus
expressive encore que sa vie du dehors et que ses œuvres extérieures. Ce qu'il dit quelque part30,
de « tant de personnes » qui lui ont remis « la clef de leurs cœurs » et qui en lèvent « la serreure
devant » lui, afin qu'il « voye mieux tout ce qui est dedans, » lui arrive à lui-même en écrivant. Il
se révèle d'abord avec les nobles qualités de son intelligence, une sagesse profonde qui sait mesurer
d'un [X] coup d'œil sûr et définitif la valeur et l'à-propos des opinions qui se contredisent.
En 1612, tout le monde dissertait sur le pouvoir temporel du Pape : c'était la question
brûlante de l'époque. Or, de l'avis du Saint, la solution d'une pareille controverse est « difficile et
inutile31. » Avec une grande liberté et un sens admirable, il déclare à un ami32 : « Je hais par
inclination naturelle, par la condition de ma nourriture, par l'apprehension tiree de mes ordinaires
considerations et, comme je pense, par l'inspiration celesté, toutes les contentions et disputes qui
21 Lettre DCXCIII, p. 64.
22 Ibid., p. 63.
23 Lettre DCCLXXXVI, p. 233.
24 Lettre DCCCXXV, p. 305.
25 Lettre DCCCXLII.
26 Voir Lettre DCCXLVII.
27 Lettre DCCCV, p. 263.
28 Voir pp. 302, 309.
29 Voir Lettre DCCXCVII.
30 Lettre DCLXXVI, p. 40.
31 Lettre DCCLXI, pp. 191, 192.
32 Lettre à Bénigne Milletot, p. 95.
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se font entre les Catholiques... mais sur tout en ce tems plein d'espritz disposés... aux mesdisances,
aux censures et a la ruyne de la charité. » A un Evêque italien, il disait encore33 : « Si en France,
les Prélats, la Sorbonne et les Religieux étaient bien unis, c'en serait fait de l'hérésie en dix ans. »
Cette rare sagesse, ce goût pour tout ce qui est sobre et modéré, notre Saint les portait
jusque dans la critique littéraire. Le croirait-on ! il conseille à l'auteur d'une Somme de Théologie
scolastique34 de retrancher, en écrivant, les formules méthodiques, d'être bref sur les questions
inutiles, de n'user que de citations « preignantes et courtes. » Il voudrait même qu'on traitât ces
matières abstraites dans un « stile affectif. » Mais ce style, qui est la propre manière de François
de Sales, ne l'a pas qui veut.
Oserons-nous maintenant pénétrer comme dans un sanctuaire, avec un regard respectueux
et discret, dans le cœur du saint Evêque ? Pour cela, il suffit de lire les lettres adressées à la Mère
de Chantal. La plupart de ces lettres sont plutôt des hymnes sacrés et des élévations mystiques, où
l'âme du Saint, ravie par la grâce divine, chante avec joie, en compagnie d'une âme qui sait
l'entendre et lui répondre, la gloire et l'amour de [XI] Jésus-Christ. Ainsi la Vierge, pleine du Saint-
Esprit, courut chanter son bonheur à sa cousine Elisabeth ; ainsi le « Poverello » d'Assise chantait
aux petits oiseaux les merveilles de l'amour divin. C'est l'amour divin qui unissait jusqu'à les
confondre les deux cœurs de saint François de Sales et de sainte Jeanne-Françoise de Chantal. Leur
amitié était d'un ordre inconnu à la philosophie païenne. C'est trop peu dire : elle était d'un ordre
purement surnaturel, e : toute spirituelle. « Ce feu sacré « qui change tout en soy, » écrivait un jour
le Bienheureux à sa chère Fille35, « veuille bien transmüer nostre cœur, affin qu'il ne soit plus
qu'amour et qu'ainsy nous ne soyons plus aymans, mais amour ; non plus deux, mais un seul nous
mesme, puisque l'amour unit toutes choses en la souveraine Unité. » Et une autre fois36 : « Nostre
Seigneur ne vous donne jamais de violentes inspirations de la pureté et perfection de vostre cœur,
qu'il ne me donne la mesme volonté, pour nous faire connoistre qu'il ne faut qu'une inspiration... a
un mesme cœur... Cette souveraine Providence veut que nous soyons une mesme ame pour la
poursuite d'une mesme œuvre et pour la pureté de nostre perfection. »
Qu'ils sont heureux de parler ensemble des choses du Ciel ! « Mon Dieu, ma Fille, que je
suis ayse de parler un peu de ces choses avec vous37 ! » Ils ne se lassent pas de s'entretenir toujours
sur le même propos : « Je retourne tous-jours a mes brebis, » dit naïvement le Saint38. Cette amitié
célèbre fut pour les deux Fondateurs une « mutuelle consolation et un reciproque avancement en
l'amour cæleste39. »
Sans doute, saint François de Sales n'aima jamais aucune âme plus tendrement et plus
généreusement que l'âme de sainte Jeanne-Françoise de Chantal, mais son [XII] cœur, dilaté
comme à l'infini par la charité, avait encore des trésors d'amour pour toutes les âmes qu'il savait
dédiées au service de Jésus-Christ. Dans les lettres qu'il leur envoie, il les appelle, mon Frere, ma
Mere, ma Seur, ma Fille ; il veut qu'on l'appelle en retour, son frere et son filz. « Bien que les
personnes que j'ayme soyent mortelles, » disait-il, « ce que j'ayme principalement en elles est
immortel40. » Aussi, comme il aimait les âmes chrétiennes, et pour mieux dire, comme il aimait
tous les hommes ! Comme il aimait jusqu'à ses adversaires de religion !
Un médecin calviniste41, étant venu de Genève pour soigner la Mère de Chantal : « Nostre
bonne malade, » écrit saint François de Sales42, « donneroit de bon cœur la vie pour la santé
spirituelle de son medecin, et moy, pauvre, chetif pasteur, que ne donnerois-je pas pour le salut de
33 Lettre à Mgr Germonio, archevêque de Tarentaise, p. 188.
34 Lettre à D. Eustache de Saint-Paul Asseline, Feuillant, p. 116.
35 Lettre DCXCII, p. 62.
36 Lettre DCCXIII, p. 102.
37 Lettre DCCCXXXVIII, p. 322.
38 Lettre DCCCII, p. 258.
39 Lettre DCCXVIII, p. 107.
40 Lettre DCCXI, p. 94.
41 Marc Offredi (voir note (504), p. 168). En le consultant, « notre Bienheureux Père, » écrit la Mère de Chaugy
(Mémoires, etc., Partie II, chap. VII, p. 170), « espérait de retirer cette sienne brebis de la gueule du loup de l'hérésie.»
42 Lettre DCCLIV, p. 169.
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cette deplorable brebis ! Vive Dieu, devant lequel je vis et je parle : je voudrois donner ma peau
pour le vestir, mon sang pour oindre ses playes et ma vie temporelle pour l'oster de l'eternelle mort.
»
Nous venons d'esquisser rapidement la vie extérieure de l'Evêque de Genève, et sa vie
surnaturelle, comme il nous a semblé les saisir l'une et l'autre dans les Lettres du présent volume.
Ces deux vies furent pour ainsi dire symbolisées dans les broderies que la Mère de Chantal avait
faites de sa main, sur la chape dont elle fit présent à son cher Evêque43. « O vrayement, » s'écrie
le Saint après l'avoir vue44, « elle est belle en extremité, la chappe que la plus chere mere qui vive
envoye a son [XIII] tres cher pere ; car elle est toute au nom de JESUS et de MARIE... Et les Phi
(φφ) redoublés signifient, comme lettres capitales, la philothie et la philanthropie, l'amour de Dieu
et l'amour du prochain... ces divins amours, dont l'un remonte en Dieu et fait des Philothees, l'autre
descend au prochain et fait des Philantropes... Benite soit a jamais la chere main de ma Mere qui
a si bien sceu faire ce bel ouvrage ! »
Ces « Phi redoublés, » brodés non sans intention sur la chape de saint François de Sales,
pourraient servir de devise ou d'épigraphe aux Lettres de ce nouveau recueil.
J.-J. NAVATEL, S. J.
Lyon, 1er mai 1908. [XIV]
43 Voir note (1043), p. 367.
44 Lettre DCCCLXV, pp. 367, 368.
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3.5 Page 25

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Avis au Lecteur
_____
Des Lettres publiées dans ce volume, un grand nombre ont été revues sur les originaux. La
provenance indiquée à la fin de chaque pièce, est celle qui nous était connue au moment où elle
nous a été communiquée. Lorsqu'un Autographe provient d'une Communauté française exilée ou
dispersée, nous donnons l'ancienne adresse de celle-ci.
Les Lettres qui ne sont suivies d'aucune indication sont celles dont, à défaut d'Autographes
ou de copies authentiques, on a dû emprunter le texte à des publications antérieures. Voir à la fin
de ce volume la Table de correspondance, et l'Avant-Propos du tome XI, pp. xxv-xxvij.
Les Editeurs sont seuls responsables de l'adresse et de la date qui précèdent chaque pièce
; l'une et l'autre sont répétées à la fin quand elles figurent sur l'original, ou qu'elles sont
authentiques, quoique fournies par les textes imprimés. Les points remplaçant quelque
énumération de la date indiquent que cette partie de la date est donnée, mais fautivement, par
l'édition à laquelle notre texte est emprunté.
Quand la date attribuée à une lettre n'est pas absolument sûre, elle est insérée entre [ ].
Ces signes sont également employés pour les mots qu'il a fallu suppléer dans le texte.
Les divergences qui existent entre quelques minutes et le texte définitif sont données au bas
des pages. Le commencement de la variante est indiqué par la répétition en italique des mots qui
la précèdent immédiatement au texte ; la fin est régulièrement marquée par la lettre de renvoi. Les
passages biffés dans les Autographes sont enchâssés entre [ ] .
Des points placés au commencement ou à la fin des lettres indiquent un texte incomplet.
Quand les Autographes ont subi quelque mutilation, nous l'indiquons chaque fois.
A la suite du Glossaire se trouve un Index, dans lequel il a été jugé à propos de fondre les
noms des destinataires avec les titres des principales notes historiques et biographiques. Toutes
les notes concernant le clergé de l'ancien diocèse de Genève sont tirées des Registres de l'époque
; elles sont désignées par les deux initiales R. E.
Sauf indication contraire, tous les renseignements, relatifs à la noblesse savoisienne sont
empruntés au monumental ouvrage du Comte Amédée de Foras, si dignement continué par le
Comte de Mareschal de Luciane : Armorial et Nobiliaire de l'ancien Duché de Savoie. [XV]
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3.6 Page 26

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Lettres de saint François de Sales
DCLIII45. A la Comtesse de Tournon46. Comme l'Evêque de
Genève entendait réduire un délinquant à l'obéissance ; ses
griefs contre une famille qui le protégeait. Le plus grand
désir du Saint.
Annecy, 9 septembre 1610.
Madame,
Dieu sçait que le desir duquel je suis pressé de faire chastier messire Nicolas Nacot47, n'a
point d'autr'origine qu'en mon devoir, qui m'oblige de reduire a l'obeissance ceux qui la doivent et
la refusent a l'authorité que je tiens. Que si ledit Nacot eut comparu estant [1] appellé, il y a long
tems que son innocence, sil en a, auroit esté honnorablement appreuvee. Mais de ne vouloir pas
seulement comparoistre et me vouloir dire ses raysons teste a teste, sans autre reconnoissance de
son devoir qu'en paroles, c'est chose que je ne puis estimer raysonnable.
Au demeurant, Madame, je ne puis non plus penser pourquoy vous tenes pour rigoureuse
la poursuite faite contre cet homme lâ, puisqu'il y a plusieurs moys qu'il va mesprisant toutes
citations impunément. Et encor suis-je plus estonné dequoy vous me tenes pour ombragé contre
monsieur vostre mari, et me dites que beaucoup d'indices ne luy en ont donné que trop de
connoissance ; car, en vray (sic) verité, je me suis tous-jours tenu pour fort honnoré de la
bienveuillance que, de sa grace, il m'a portee. Et si mon impuissance et insuffisance ne m'a pas
permis de la cultiver par mes services, ma connoissance pourtant ne m'a jamais permis de demeurer
sans une tres forte affection de correspondre a cette faveur par tous les tesmoignages qu'il me seroit
possible. Aussi, Madame, vous ne me marques que cette languissante, mais que neanmoins il vous
plait d'appeller rigoureuse procedure ; et moy, pourveu que vous me permettiés de me defendre un
peu librement contre vous, je vous diray que si le nœud du devoir que j'ay a monsieur vostre mari
et a vous se pouvoit desfaire, vous m'auries tous deux grandement des-obligé en deux occasions.
L'un'est quand, sciemment, vous fistes prendre la licence de faire le mariage de monsieur
et madame de Monthouz vos enfans, laquelle, pour un si grand empeschement, nous ne pouvions
donner qu'abusivement48. Mais, comme pouvoit-on ne faire pas ce qui estoit desiré d'un si bon lieu
? Or, Madame, je serois extremement [2] desplaysant si, sur la bienveuillance delaquelle vous me
gratifiés, j'avois pensé seulement a tirer de vous chose qui vous deut donner le moindre repentir
45 Sur la foi des précédents éditeurs, qui avaient daté cette lettre de 1610, et d'une copie réputée exacte, qui portait la
date de 1614, nous avons rejeté ce texte de notre tome XIV. L'Autographe nous a permis de restituer la vraie date,
mais il nous a été communiqué trop tard pour que nous ayons pu l'insérer à sa place.
46 Philiberte de Beaufort, fille d'Antoine de Beaufort, seigneur de Lupigny, Gerbais, etc., et de dame Claudine de
Charansonnay, avait épousé Prosper-Marc Maillard, comte de Tournon. (Voir Dufour et Mugnier, Les Maillard,
Chambéry, 1889, et tome XIII, note (906), p. 336.) Veuve en 1616, elle vécut jusqu'en 1633. C'est d'elle que parle le
Saint dans plusieurs lettres, sous le nom de « madame la Comtesse. » (Cf. ci-après, p. 11.)
47 Nicolas Nacot figure dans les Registres de l'Evêché de 1596-1601, comme bénéficiaire d'une prébende instituée
pour lui à Rumilly. La famille de Tournon aurait pu choisir, semble-t-il, un personnage plus digne de sa protection,
car les expressions sévères du Saint et d'autres indices font croire que le rebelle ne méritait pas beaucoup d'estime. Il
vivait encore en 1620.
48 En effet, Claire-Marie de Maillard avait été mariée, le 10 novembre 1609, à Gabriel Guillet, seigneur de Monthoux
; mais on s'aperçut plus tard qu'il existait entre eux un empêchement de parenté au troisième degré. Le 19 avril 1613,
saint François de Sales fit demander la dispense à Rome, et ce fut seulement deux années plus tard, le 14 septembre
1615, qu'il put écrire à Mme de la Fléchère : « Nous avons ce matin espousé M. et Mme de « Monthouz, leur dispense
estant venue en bonne forme. »
26/321

3.7 Page 27

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du monde, et jugerois de vous avoir grandement offencé si je l'avois fait esciemment.
L'autre fois, Madame, ça esté quand vous aves entrepris de soustenir la des-obeissance de
cet homme d'Eglise pour lequel vous m'escrivés ; car de maintenir sa cause, au fond de l'affaire,
vostre charité seule, sans autre consideration, vous en pouvoit donner une juste volonté. Mais ne
vouloir seulement pas quil responde et se represente quand il est appellé, et vouloir encor que je
sois condamné de rigueur et d'infidelité si je ne treuve bon cela, il me semble que c'est la rigueur
mesme et que, tacitement, on prefere ce prestre et son injuste repos a l'authorité en laquelle je suis,
et que, sans violer mon devoir, je puis vouloir en fin le ramener a la bergerie et sous la houlette.
Ce pendant, Madame, je veux bien attendre encor quelque tems avant que de faire aucunes
poursuites, pour apprendre de vous mesme, puisque vous me faites esperer le bien de vous voir si
tost, les raysons de ce venerable personnage. Que si elles sont telles que je me doive humilier, je
le feray de bon cœur ; mais si aussi il se treuve raysonnable qu'il s'humilie sous la justice que je
fay exercer, je vous supplieray de ne point employer l'authorité de vostre bienveuillance pour l'en
exempter, contre la necessité de ma charge.
Je me res-jouys que Sa Sainteté ayt ouctroyé le [remède] requis au mal de l'action que fit
messire Nacot, et seray encor plus ayse quand je sçauray quil aura esté legitimement appliqué ;
car, honnorant tres cherement monsieur vostre mari et vous, Madame, comme je fay et feray toute
ma vie, je desire que tout ce qui vous est praetieux vive entre les benedictions caelestes et que rien
ne demeure jamais en vostre mayson qui les en puisse divertir. Madame, j'ay de l'affection et de
lhonneur pour monsieur vostre mari, pour vous et pour les vostres autant que vous sçauries
souhaiter d'homme qui vive ; [3] mais le plus grand desir que je face, c'est que jamais Dieu ne soit
abandonné, non pas mesme pour un moment.
Je le supplie donq quil vous conserve tous, quil vous prospere et benisse de ses plus grandes
faveurs ; et vous, je vous conjure, Madame, faites moy le bien de me croire fermement,
Vostre plus humble serviteur et parent,
FRANÇS, E. de Geneve.
9 septembre 1610, a Neci.
A Madame
Madame la Contesse de Tornon49.
Revu sur l'Autographe appartenant à Mme la marquise Pensa, à Turin. [4]
49 L'adresse n'est pas de la main du Saint.
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3.8 Page 28

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Année 1611
_____
DCLIV. A M. Bénigne Milletot50 (Inédite). L'Evêque de Genève
recommande à son ami les négociations dn vicaire général de
son diocèse et lui donne des nouvelles de sa fille Marie-
Marguerite, Religieuse à la Galerie.
Annecy, 3 51 janvier 1611.
Monsieur,
L'honneur que j'ay d'estr'aymé de vous, servira de [simple52] praeface a ma supplication,
laquelle je vous [5] fay [d'estre] favorable protecteur de ce porteur, frere de monsieur le premier
President de Savoye53 et mon Vicayre general54, pour les affaires qui le tirent vers vous, qui sont
parties siennes et parties miennes ; mais, a mieux dire, siennes et miennes tout ensemble, puisque
luy mesme est mien par une longue et bonn'amitié.
Au demeurant, nostre bonne fille55 se porte mieux icy que nous n'eussions presque sceu
esperer ; ell'a bien eü un petit acces de fievre ces jours passés, mais ce n'a esté que cela. Ce qui est
le plus, c'est qu'ell'est toute pleyne de vraye bonté et pieté, qui la rend uniquement chere a toutes
ses Seurs. Dieu luy donne la sainte perseverance et vous conserve longuement, Monsieur, selon le
souhait de
Vostre tres humble et tres affectionné serviteur,
FRANÇS, E. de Geneve.
50 Né à Semur de Joseph Milletot, avocat du roi au bailliage d'Auxois, et de Hiéronime Lerouge, Bénigne Milletot,
seigneur de Villy, épousa en 1586 Claude de Cirey. D'abord conseiller à la Table de Marbre du Palais, puis conseiller
au Parlement de Dijon (6 juin 1585), il fut chargé de diverses négociations, de 1593 à 1608, à Chartres, Fontainebleau,
Beaune, Savigny. Parmi ses confrères du Parlement dijonnais, remarquables la plupart comme hommes de parole et
d'action, Bénigne Milletot se fit une certaine célébrité. Il prit part aux controverses ardentes sur le pouvoir des Papes
au temporel, qui, vers 1611, divisèrent en France théologiens et parlementaires. Le Saint ne goûtait pas beaucoup les
opinions du publiciste et nous verrons au cours des lettres qui vont suivre qu'il les désapprouvait ; mais il n'en resta
pas moins son ami, et cette amitié prit même un caractère d'intimité et de confiance fraternelle, depuis leur voyage à
Gex, où l'Evêque et le commissaire royal, au jour le jour, travaillèrent de concert pendant deux semaines au
rétablissemeut du culte catholique (14-31 juillet 1612). Cette commission achevée, Milletot fut nommé par le roi,
conseiller en ses Conseils d'Etat et privé ; doyen du Parlement en 1626, il mourut à Dijon, le 7 septembre 1640, dans
un âge fort avancé. (Archiv. dép. de la Côte-d'Or, E. 1368, E. 2166 Palliot, Parlement de Bourgogne, 1649 ; Papillon,
Biblioth. des Auteurs de Bourgogne, 1742, t. II.) Il eut deux filles Religieuses : l'une est la Sœur Marie-Marguerite
(voir note (55) de la page suivante) ; l'autre entra au monastère du Puits-d'Orbe.
51 L'Autographe étant déchiré, on pourrait se demander si le chiffre 3 qui subsiste est bien la vraie date, et si celle-ci
ne serait pas 13 ou 23 ; mais le doute paraît écarté par la date de la lettre suivante, à l'Abbesse du Puits-d'Orbe, qui dut
partir en même temps.
52 Les mots entre crochets ont disparu par suite de la déchirure.
53 Antoine Favre.
54 Jean Favre (voir tome XIII, note (713), p. 265).
55 Sœur Marie-Marguerite Milletot, quand elle entra à la Visitation le 14 août 1610, avait environ seize ans. Elle fit sa
profession le 30 juillet 1613, et mourut le 10 janvier 1658. Les Mères du Carmel de Dijon, auxquelles tout d'abord
elle avait demandé l'habit (cf. le tome précédent, note (787), p. 277), ne l'avaient pas jugée propre pour leur manière
de vivre ; c'est la Visitation qui fut le lieu de son repos. Son zèle pour l'observance, sa générosité d'âme la désignèrent
pour les fondations de Grenoble (8 avril 1618) et de Dijon (8 mai 1633). Jusqu'à la fin de sa vie, elle persévéra dans
la pratique des vertus monastiques, « sans vouloir s'exempter d'aucunes, non pas mesme de toute l'exacte suite de la
communauté, nonobstant son grand âge. » (Livre du Couvent, du Ier Monastère de la Visitation d'Annecy.) Les
bienheureux Fondateurs aimèrent toujours chèrement la fille du célèbre parlementaire.
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3.9 Page 29

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3 janvier 1611.
A Monsieur
Monsieur Milletot,
Conseiller du Roy au Parlement de Bourgoigne.
Revu sur l'Autographe conservé au Grand-Séminaire d'Autun. [6]
_____
DCLV. A Madame Bourgeois, Abbesse de Puits-D'Orbe.
Témoignages d'affectueux dévouement. De belles et bonnes
confitures. Deux recettes pour rétablir entièrement la santé
Annecy, 4 janvier 1611.
Si vostre lettre m'a comblé de joye, je le demande a mon cœur, qui a esté tout absorbé de
consolation voyant et la souvenance que vous aves de moy et l'honneur que vous continues de me
faire en m'aymant, mais tendrement et cherement, comme vous me le tesmoignes. Mais que puis-
je faire ni dire, ma tres chere Seur, qui puisse dignement vous satisfaire sur ce sujet ? Je confesse
ingenuement que je suis vaincu, et que, comme vous me devances infiniment de toutes partz, vous
le faites tres particulierement en celle-ci, de me rendre les devoirs et les tesmoignages d'amitié
pour celle-la avec laquelle je vous ayme. Je la sens si grande, si forte et si fidelle qu'il ne me semble
pas qu'aucun autre me puisse devancer de ce costé ; mais je ne sçai comme mon malheur a voulu
que je vous en aye rendu si peu de preuves cette annee passee. Il faut, ma chere Seur, l'attribuer
aux occasions qui ne s'en sont pas presentees, et non jamais a nulle sorte de mesconnoissance des
obligations que je vous ay, qui sont indicibles, puis qu'elles ne sont pas comprehensibles.
Croyés, ma tres chere Seur, que mon cœur est fraternellement amoureux du vostre, et que
si j'avois la commodité d'assouvir ses desirs, je serois bien tost en vostre solitude, laquelle, vous
dites, je redoute pour son aspreté, mais laquelle j'ayme precisement pour mille sujetz, mais
principalement pour l'amour de vous, qui, par vostre presence, me l'avés rendue ci devant plus
douce et plus aggreable que ne furent jamais les plus delicieuses conversations des villes. [7]
Il ne faut pas oublier de dire quatre motz, avant de finir, de la chere seur56 qui a manqué de
nous estre ravie ces jours passés par un brave et galant gentilhomme qui la recherchoit en mariage.
Je seray tous-jours extremement ayse de son contentement ; mais quand il sera de n'estre point
mariee, cette joye redoublera en moy. Mon Dieu, ne nous verrons-nous jamais tretous ensemble ?
J'en suis un peu, a dire vray, impatient ; mais je ne croy plus qu'elle m'ayme, puisque non obstant
que je luy escrivisse dernierement, je n'ay point de ses nouvelles que par vostre entremise. Or sus,
si ne laisseray-je pas de luy escrire.
Vous connoistres bien, ma tres chere Seur, par la longueur de cette lettre, le playsir que j'ay
de le faire et de m'entretenir avec vous ; mais il n'y a remede, vostre charité me pardonnera. Je n'ay
pas tous les jours le bien de vous pouvoir entretenir ; quand j'en ay la commodité, il s'en faut
prevaloir. Je ne vous parle point de [mon frere57] ni de madame de Chantal ; ilz vous escrivent
tretous.
Vous me dites sur la fin de vostre lettre je ne sçai quoy de vos belles et bonnes confitures,
et desquelles, estant avec vous, j'ay si abondamment usé. Mais, ma chere Dame, vous estes, avec
la petite seur58, la souveraine friandise pour m'attirer par devers vous, tout le reste n'est
56 Madeleine Bourgeois de Crépy, veuve de Palamède Jaquot. (Voir tome XIII, note (264), p. 87.)
57 Hérissant écrit monsieur ; on n'aura pas su lire mon frere que devait porter l'Autographe. De là, l'erreur reproduite
par les précédentes éditions, à partir de 1758. Ce frère est très probablement Jean-François.
58 Sans doute, Françoise Bourgeois de Crépy, sœur cadette de l'Abbesse. (Cf. tome XIII, p. 14.)
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3.10 Page 30

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qu'accessoire ; ces deux personnes que je viens de nommer sont le principal.
Il faut finir en vous recommandant le soin de vostre santé, avec la joye interieure et la
recreation exterieure, qui vous serviront pour un entier restablissement. Faites-le, ma chere Seur,
sinon pour vous, pour le moins en consideration de ceux qui la souhaitent entiere et parfaite. Je
suis de ceux-la, et vous le croyés, n'est-ce pas ? [8] Ma chere Seur, il faut bien le faire, et m'aymer
absolument, presque sans reserve.
Je suis en Nostre Seigneur, que je vous desire propice eternellement, ma tres chere Seur,
Vostre
FRANÇS DE SALES.
Je suis serviteur tres humble de madame nostre bonne mere59 et de monsieur le baron
d'Origny60, et leur bayse les mains avec humilité.
Ce 4 janvier 1611.
_____
DCLVI. A Mademoiselle Claudine de Chastel61. A quelle
condition les exercices de piété revigorent l'âme, même s'ils sont
faits sans goût. La variété et l'unité des sentiments ; le monde
et le Ciel. Eloge de la future Mère de Chastel, alors novice.
Annecy, 4 janvier 1611.
J'ay de la consolation de voir en vostre lettre, ma chere Fille, que non obstant tous vos
desgoutz et toute vostre tristesse, vous aves perseveré a faire vos exercices sans vous en estre
oubliee que fort peu ; car, pourveu qu'on fasse en consideration de l'amour de Dieu ce qu'on fait,
bien que ce soit sans sentiment et sans goust, l'ame ne laisse pas de prendre force et vigueur en
l'interieur et en la portion superieure et spirituelle.
Cheminés donq avec courage et parfaite confiance en [9] Nostre Seigneur, car il vous
tiendra de sa main ; et par la varieté des sentimens a laquelle nous sommes sujetz en ce miserable
monde62, il vous conduira au Ciel, ou nous n'aurons qu'un seul et invariable sentiment de la joye
amoureuse de sa divine bonté, a laquelle je vous conjure de me recommander perpetuellement.
La bonne seur que vous aves ici est vrayement une bonne Fille ; et pourveu qu'il playse a
la sainte providence de Nostre Seigneur de nous laisser quelque tems madame de Chantal, ainsy
que nous l'esperons63, j'ay confiance en ce mesme Sauveur que cette chere seur sera bien consolee
en ce genre de vie qu'ell'a embrassé. Je vous prie d'avoir souvenance de tout cela en vos oraysons.
Vostre tres affectionné serviteur en Nostre Seigneur,
FRANÇS, E. de Geneve.
A Neci, 4 janvier 1611.
A Madamoyselle de [Chastel].
_____
59 Mme de Crépy.
60 Guillaume Bourgeois, frère de l'Abbesse. (Voir le tome précédent, note (402), p. 131.)
61 Le dernier alinéa de la lettre nous avertit que la destinataire était ou une sœur de la Sœur Péronne-Marie de Chastel,
ou une sœur de la sœur Marie-Marguerite Milletot. D'autre part, Hérissant, II, p. 290, donnant pour adresse : « A
Mademoiselle de... » la particule permet de penser qu'il s'agit de Mlle Claudine de Chastel, à laquelle, du reste, le ton
de cette lettre convient parfaitement. (Cf. le tome précédent, pp. 18, 28.)
62 Cf. Collect. in Miss. Dom. IV post Pasc.
63 La Sainte avait été très gravement malade en décembre 1610. (Cf. le tome précédent, p. 394, et ci-après, p. 12.)
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4 Pages 31-40

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4.1 Page 31

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DCLVII. A la Mère de Chantal (Inédite). Ne rien regarder, ne
rien aimer que dans la lumière et l'amour de Notre-Seignenr.
Un « livret » qui a besoin d'une préface pour être plus
intelligible. Communication promise pour le jour même ou le
lendemain
Annecy, vers le 6 janvier 1611 64.
Ma tres chere Fille, ma Seur,
Il faut bien que mon cœur donne le bon jour au vostre de la part de Nostre Seigneur. Je prie
donq cette souveraine pureté et clarté qu'elle donne le jour de sa lumiere [10] et de son amour a
nostre cœur, affin quil chemine en cette lumiere et quil vive en cet amour, que rien ne soit regardé
qu'en cette lumiere, ni rien aymé qu'en cet amour.
J'ay bien treuvé le livret duquel je vous parlay ; mais j'y ay rencontré des choses si dures,
que je ne vous le veux bailler qu'apres vous avoir fait une præface qui vous le rende plus intelligible
et moins scabreux65. Cependant, demeurés toute en Dieu, et le suppliés quil rende nostre cœur tout
uniquement, simplement et purement sien.
J'ay un petit projet a vous communiquer, qui tend a la gloire de Dieu et reduction d'une
grande ame66. Si je puis, ce sera ce jourd'huy ; si je ne puis, ce sera demain.
Bonjour donq, ma tres uniquement chere Seur, ma Fille ; Jesus soit tous-jours sur vostre
cœur.
Revu sur l'Autographe appartenant à M. de Longeville, à Besançon.
_____
DCLVIII. A Madame de la Fléchère (Inédite). Dans quels cas il
ne faut pas s'abstenir de communier. La variété des petits
accidents de cette vie et l'état immobile de la sainte éternité.
Deux nouvelles recrues pour la Visitation
Annecy, 7 janvier 1611.
Ma tres chere Fille,
J'ay trois de vos lettres qui ne sont point respondues, et si, je n'ay encor point de loysir
maintenant. Seulement vous diray-je que la faute commise avec madame la [11] Comtesse67 et M.
du Coudrey68 m'a donné mille consolations en sa reparation, car vous la fistes extremement bien a
64 Ce billet a une corrélation évidente avec la Lettre DCLX, et l'on peut de ce rapport induire la date que nous
proposons.
65 On serait curieux de connaître ce « livret » que le saint Docteur voulait rendre « plus intelligible. » Il nous a été
impossible d'en découvrir le titre.
66 Cette « grande ame » est Mme de Saint-Cergues, dont la « reduction » et l'histoire sont racontées plus bas (note (76),
p. 15).
67 Probablement la comtesse de Tournon, qui demeurait à Rumilly. (Voir ci-dessus, note (46), p. 1.)
68 Charles-Emmanuel, ou Vincent, fils d'Amé du Coudrey, comte de Gerbais, et de Pernette Le Jay, d'Orléans. Le
premier, d'abord avocat au Sénat de Savoie, devint, en 1614, sénateur et président du Conseil de Genevois. Il se noya
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mon gré ; et ne failloit pas pour cela quitter la tressainte Communion, laquelle, au contraire, il faut
employer pour remede a telz petitz defautz, qui ne viennent pas tant de mauvayse volonté, comme
de surprise et foiblesse.
Je me res-joüys dequoy vostre fievre a cessé avant que j'en aye sceu le commencement. Il
faut ainsy cheminer par varieté de petitz accidens spirituelz et temporelz, tenans tous-jours
neanmoins a Nostre Seigneur qui, en cette sorte, nous conduira par sa grace a l'estat immobile de
la sainte eternité.
Nostre Mme de Chantal a esté rudement malade69, mais maintenant se porte beaucoup mieux
et va tous les jours en amendant de santé, avec une continuelle memoyre de vous, qu'elle cherit et
honnore de tout son cœur. Hier elle receut une nouvelle fille, qui fait la septiesme70, [12] et dans
peu on attend la huitiesme71. Elle se recommande a vostre charité.
J'ay escrit nagueres a Bons, par une bonne commodité. Dieu vous benisse, ma chere Fille.
Je suis immortellement tout vostre.
7 janvier 1611.
A Madame
Madame de la Flechere.
Revu sur l'Autographe conservé au Grand-Séminaire de Dijon. [13]
par accident, près de Menthon, dans le lac d'Annecy, et fut inhumé le 9 juillet 1617.
Le second, avocat au Sénat le 14 novembre 1612, conseiller de Son Altesse Royale, et reçu sénateur le 13
septembre 1622, épousa par contrat dotal du 25 février 1626, Dlle Marie de Lay, et testa le 28 avril 1654.
69 Cf. ci-dessus, note (64), p. 10.
70 La septième Religieuse était Adrienne Fichet, fille d'Aimé Fichet, châtelain de la seigneurie et mandement de
Bonneville, et de Jacqueline Vernaz. Née le 11 décembre 1594 et baptisée le 30 du même mois par François de Sales,
alors prévôt, Adrienne prit le saint habit le jour de son entrée (6 janvier 1611) des mains de la Fondatrice, et fit
profession le 12 juin 1612. Assistante à Chambéry depuis le 17 janvier 1624, elle fut première supérieure à Rumilly,
le 29 septembre 1625, et ensuite à Crémieux, 21 septembre 1627. Rappelée à Annecy en janvier 1629, pour cause de
santé, elle y demeura jusqu'à sa mort (5 novembre 1681), remplissant avec beaucoup de zèle les charges d'assistante,
de surveillante et de conseillère.
« Avec moi, » avait-elle dit un jour à la Sainte, « il faut marcher droit. » C'était une âme sans repli ni méfiance,
mais vive et ardente, qui dut travailler beaucoup pour acquérir la sainte tranquillité intérieure et extérieure. Le
Bienheureux donna d'admirables leçons à sa chère fille. « Il faut avoir une gravité de « princesse, » lui disait-il, «
parce que nous sommes épouses du Fils de Dieu... « La perfection ne consiste pas à bien parler, mais à bien faire. »
On trouvera dans l'Année Sainte, tome XI, une biographie très attachante de cette vénérable première Mère, si
populaire aujourd'hui encore dans l'Institut. Pendant soixante et dix ans, elle fut la tradition vivante, toujours écoutée,
répétant ce qu'elle avait entendu dire aux saints Fondateurs. De ses souvenirs est sortie l'Histoire de la Galerie, recueil
inestimable de traits charmants, indispensable pour connaître la Visitation dans ses premiers jours.
Son frère, le P. Alexandre Fichet, S. J., dont l'Année Sainte cite une savoureuse lettre, a écrit une Vie curieuse
de sainte Jeanne-Françoise de Chantal. Il fut un remarquable prédicateur pour son temps. La famille Fichet compte
aussi, selon toute probabilité, parmi ses membres, le célèbre Guillaume Fichet, recteur de l'Université de Paris (1467),
qui introduisit en France l'imprimerie.
71 Les parents de la « huitiesme, » Sœur Claude-Marie Thiollier, étaient François Thiollier, procureur au souverain
Sénat de Savoie, et Françoise Cordier. (Archives de la Visitation d'Annecy.) Leur fille reçut l'habit et pour la
première fois, avec qnelque cérémonie, après la récitation du Veni Creator des mains du Saint, le 6 juin 1611, le
même jour que la Mère de Chantal et ses deux premières compagnes firent leur oblation. Professe le 13 juin 1912, elle
partit d'Annecy le 14 janvier 1634, avec les fondatrices de Chambéry, où elle demeura jusqu'à la fondation de Rumilly
(voir note (70) de la page précédente). C'est dans ce monastère qu'elle mourut le 26 février 1637, à l'âge de cinquante-
six ans. « Elle estoit fort infirme... si que les medecins jugeant bien, comme il a esté vray, qu'elle [le] seroit toute sa
vie... disoient qu'il la faloit renvoyer ; mais sa vertu, jointe a l'esprit de nostre saint Institut, firent qu'elle fit la sainte
profession. Ardante a la vertu, suportant gaiement et joyeusement ses tres grandes intimités, » elle a « quasi toujours
esté surveillante et conseillere, tant ceans qu'a Chambery et Rumilly, pour sa droiture de cœur, ne regardant que Dieu
et le bien de la maison. » (Livre du Couvent, du 1er Monastère de la Visitation d'Annecy.)
32/321

4.3 Page 33

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DCLIX. A Madame de Monfort72 (Inédite). Félicitations à
l'occasion d'une naissance.
Annecy, 14 janvier 1611.
Madame ma chere Cousine,
Ça esté de tout mon cœur que je me suis res-joüy du contentement que Nostre Seigneur
vous a donné et a monsieur de Monfort mon cousin, puisque l'affection avec laquelle je vous
honnore me fait participer a tous vos ressentimens. Dieu vous face voir longuement cet enfant73
prouffiter es benedictions que luy souhaite,
Madame ma Cousine,
Vostre humble cousin et serviteur,
FRANÇS, E. de Geneve.
XIIII janvier 1611.
A Madame
Madame de Monfort.
Revu sur l'Autographe conservé dans la sacristie de l'église paroissiale de Grasse. [14]
_____
DCLX. A la Mère de Chantal. La conversion de Mme de Saint-
Cergues : la cérémonie se fera dans l'oratoire de la Galerie.
Pourquoi faut-il bien traiter son cœur et le « tenir en bon point. »
Ou rien, ou Dieu. Notre amour pour Dieu, jamais
suffisant, jamais excessif
Annecy, vers le 12 ou le 20 janvier 1611 74.
Or sus, ma tres chere Fille, la plus grande gloire de Dieu, qui est la souveraine maistresse
de nos affections, m'a retenu aupres de cette bonne dame de Saint Cergue, pour la reduction de
laquelle vous aves prié75 ; car l'ayant veuë disposee a prendre les finales resolutions de son
bonheur, je ne l'ay point voulu abandonner qu'elle ne les eust faites76, dont je loüe Nostre Seigneur
72 Michelle de Cerisier, fille de noble Antoine, seigneur de Marthod et Cornillon, et de Dlle Philiberte de Chevron-
Villette, épousa le 1er mars 1609, « noble et puissant Amé, seigneur de Montfort et de Conzié. » Le contrat fut fait à
Ugines, en présence de saint François de Sales, et le mariage fut béni par lui le même jour. Ils eurent cinq enfants :
Charles, Jacques-Gaspard, chanoine de Genève (1642), prévôt du Chapitre et vicaire général ; Pierre-Amé,
gentilhomme ordinaire de Son Altesse Royale ; Amé-Philibert, chevalier de Malte (1640), et Françoise, donataire de
sa mère (1649). Celle-ci testa le 5 juin 1652.
73 « Cet enfant » doit être Charles de Montfort. Nommé héritier universel par son père (testament de 1633), il embrassa
l'état ecclésiastique ; en 1630, il était chanoine de Genève.
74 Du témoignage de Charles-Auguste (Histoire, etc., liv. VII), de l'ensemble des dépositions qui concernent Mme de
Saint-Cergues et sa conversion, et aussi de la teneur de la présente lettre, il résulte que celle-ci a été écrite à la date
approximative que nous lui attribuons.
75 Cf. ci-dessus, p. 11.
76 L'évènement fit grand bruit. Le prestige dont jouissait à Genève cette femme extraordinaire, sa culture d'esprit, la
ferveur opiniâtre de son prosélytisme, tout concourut à faire paraître surprenante sa conversion.
Jeanne de Cartal, fille de noble Jacques de Cartal et de Humberte de Pingon, avait épousé Gaspard de Lucinge,
seigneur de Saint-Cergues. Vers 1588, elle quitta son mari pour se retirer dans Genève, où elle se fit remarquer par
l'ardeur de sa foi calviniste. On l'appelait l'archi-ministresse, car elle prêchait aux dames et jouissait d'un tel crédit,
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4.4 Page 34

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de tout [15] mon cœur. Et vous, loüés-le aussi de tout vostre cœur, et nous le louerons tous deux
de tous nos cœurs. J'ay opinion que sa Majesté divine sera honnoree en cette conversion.
Je suis bien ayse qu'elle se soit un peu recreée aupres de vous, car voyes-vous, elle sentira
tous-jours quelque petite tranchee de l'enfantement qu'elle va faire. Nous avons pris jour pour nous
voir demain et commencer, a mon advis, sa confession et preparation a la sainte Communion,
laquelle nous ferons Dimanche en vostre oratoire aussi ; car, ma tres chere Fille, puisque j'espere
que les Anges, et sur tout la Reyne des Anges, regarderont le spectacle de la derniere action de la
reduction de cette ame, je desire qu'elle se face autour de vostre chere petite trouppe, affin que
nous soyons tous regardés avec une joye extraordinaire et qu'avec ces Espritz celestes, nous facions
le festin d'allegresse77 sur cet enfant revenu78.
Je prie nostre doux Sauveur qu'il respande sa douce et aggreable suavité sur vous, affin que
vous reposies saintement, sainement, tranquillement en luy, et qu'il veille paternellement sur vous,
puisqu'il est le tres souverain amour de nostre inseparable cœur. O Dieu, ma chere Fille, je le vous
recommande, nostre pauvre cœur ; soulagés-le, confortés-le, recreés-le le mieux et le plus que vous
pourres, affin qu'il serve Dieu ; car c'est pour cette consideration [16] qu'il nous le faut traitter.
C'est l'aigneau d'holocauste qu'il nous faut offrir a Dieu, il le faut donq tenir en bon point et
grasselet, s'il est possible ; c'est le lict de l'Espoux, pour cela le faut-il parsemer de fleurs79.
Consolés-le donq, ma chere Fille, ce pauvre cœur, et luy donnés le plus de joye et de paix que vous
pourres. Helas ! qu'avons-nous autre chose aussi a souhaitter que cela ?
Vive Dieu ! ma Fille : ou rien, ou Dieu ; car tout ce qui n'est pas Dieu, ou n'est rien, ou est
pis que rien. Demeurés bien toute en luy, ma chere Fille, et le priés que j'y demeure bien tout aussi,
et la dedans aymons-nous puissamment, ma Fille, car nous ne sçaurions jamais trop ni asses
[aimer]. Quel playsir d'aymer sans craindre d'exces ! Or, il n'y en a jamais point ou on ayme en
Dieu.
Je vous envoye ce Miroir d'amour80, et apres vous je le verray, car j'en ay envie, estimant
qu'au dire de Charles-Auguste, elle « pouvoit entrer en comparaison avec les plus celebres ministres quant aux matieres
de controverse, ausquelles elle avoit appliqué son esprit despuis vingt deux ans. » L'ardente prêcheuse était d'ailleurs
à bonne école, elle demeurait au logis même de Théodore de Bèze ; c'est là que fut fait et passé, le 19 janvier 1588, le
contrat de mariage de Charlotte de Buttet, sa sœur maternelle, avec Denis Dufour, docteur en médecine, citoyen de
Genève, là qu'elle l'assista, au nom de sa mere1, « es presences du sieur de Besze et spectables Charles Perrot, Anthoine
de La Faye, ministres du Sainct Evangile,... et spectable Germain Colladon. » (Mém. et doc. de la Soc. d'hist. et
d'archéol. de Genève, tome XIX, p. 342.) Etant venue à Annecy, elle souffrit de se laisser conduire par Jean-François
de Buttet, son frère, au bienheureux Evêque, dont elle se méfiait comme d'un sorcier. L'entretien dura quatre heures.
Le Saint, dit Charles-Auguste, « se monstra si facile et si courtois, si modeste et si paisible à ses turbulentes
propositions, » il « luy proposa tant de solides raisons, qu'en fin, se voyant convaincue, » elle se convertit et « defendit
despuis fortement, selon son pouvoir, la foy de la saincte Eglise Catholique contre les Calvinolatres. » (Cf. à la fin du
volume, la minute d'une lettre écrite par le Saint pour Mme de Saint-Cergues.) Elle persévéra jusqu'à la fin de sa vie
dans la religion de son enfance, avec les sentiments d'une vive piété. La noble et tranquille beauté morale que respire
une de ses lettres à l'Evêque de Genève, (voir à l'Appendice, 29 juillet 1611) dénote en effet une grande âme.
1 Humberte de Pingon avait épousé en secondes noces Jean-François de Buttet, et de ce mariage étaient nés Louis-
Philibert, Charlotte, Jean-François, président du Genevois, Claude-Louis, l'historiographe, Jacqueline, etc.
77 En suggérant à la Visitation naissante de prendre part « au festin d'allegresse sur cet enfant revenu, » en voulant que
« la derniere action de la « reduction de cette ame » fût célébrée dans l'oratoire de la Galerie, le saint Fondateur
entendait bien ne pas déranger la vie contemplative de ses filles, mais, au contraire, lui donner un nouvel aliment. Une
fois allumée au cœur des premières Mères, cette petite flamme de l'apostolat discret, exercé sans bruit, ne devait plus
s'éteindre dans l'Institut ; toute son histoire le prouve.
78 Cf. Luc., XV, 10, 23, 24, ult.
79 Cf. Cant., I, 15.
80 L'édition de 1626 ne donne que ces deux mots ; celle de 1629 et les suivantes ajoutent : « a M. C. de Gennes. »
Nous croyons qu'il faudrait lire : « de M. C. de Gennes. »
Le Miroir d'amour1 paraît désigner La Vie admirable de la bienheureuse Catherine d'Adorny, native de la
ville de Gennes. Plus sont adjoustez les Dialogues spirituels composez par elle-mesme, avec un traité excellent du
Purgatoire. Le tout divisé en deux parties, et nouvellement traduit de l'Italien en François par les Ven. PP. Religieux
de la Chartreuse de Bourg fontaine. Paris, Cavellat, 1598 (ailleurs 1597). La traduction est du Prieur Dom Jacques
Cadet.
Le monastère de la Visitation de Venise conserve précieusement une réédition de cet ouvrage, revue et
corrigée, portant la date de 1610. (Voir tome IV de notre Edition, note (133), p. XC.) C'est sans doute l'exemplaire
34/321

4.5 Page 35

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que cette traduction faite par les Chartreux sera parfaite. …[17]
_____
DCLXI. A la Présidente Favre. Convalescence de la Mère de
Chantal. La « chere grande fille. » Quand les «
embarassemens » d'une grande maison augmentent, « il faut tant
plus appeller Nostre Seigneur a nostr'ayde. » La plus grande
consolation à la fin de la journée
Annecy, 25 janvier 1611 81.
Ma tres chere Seur, ma Fille,
C'est tout couramment que je vous escris. J'iray ce soir voir Mme de Chantal (qui guerit fort
lentement, sur tout des jambes et des bras, et qui vous bayse tres affectionnement les mains) pour
conferer avec elle sur la reception de la fille dont vous m'escrives, delaquelle les bonnes qualités
ne sont pas de peu de consideration82. Nous verrons aussi la chere grande fille83, qui est certes fort
aymable et le cœur gauche de Mme de Chantal.
J'ay dit, il y a des-ja quelque tems, a M. Pergod84 que je voulois estre son tresorier d'ores-
en avant ; bien que je desire que mon office finisse bien tost par la vente de cette mayson, laquelle
me sembleroit utile plus que la conservation, pourveu qu'elle se vendit a bonnes enseignes85. Mais
il n'en faut pas faire grand bruit.
Ma tres chere Fille, je vous voy, ce me semble, bien enfoncee dans une multitude
d'embarassemens, que la grandeur du mesnage ou vous estes vous met sur les [18] bras. Mais, ma
tres chere Fille, il faut tant plus appeller Nostre Seigneur a nostr'ayde et reclamer sa sainte
assistence, affin que ce travail que vous deves supporter luy soit aggreable, et que vous
l'embrassies pour son honneur et gloire. Voyes, ma chere Seur, que nos jours sont cours86 et que,
par consequent, le labeur que nous y avons ne peut estre long ; si que, moyennant un peu de
patience, nous en sortirons avec honneur et contentement, car nous n'aurons point de si grande
consolation a la fin de la journee que d'avoir beaucoup travaillé et supporté de peynes.
Bonsoir, ma tres chere Seur ; aymes fidellement ce frere et serviteur qui est tout vostre.
FRANÇ", E de Geneve.
XXV janvier.
Je vous remercie bien humblement de la marmotte.
A Madame
Madame la premiere Presidente de Savoye.
dont le Saint annonce ici même l'envoi à la Mère de Chantal.
1 Dans quelques éditions, le recueil de la Vie et des Œuvres de sainte Catherine de Gênes porte le titre de Theologie
de l'amour, etc.
81 Par la lettre du 7 janvier 1611 (p. 12), on voit que la Mère de Chantal avait été « rudement malade ; » en janvier
1612, elle fut « malade sans danger. » (Lettre à Françoise Bourgeois, 20 janvier 1612.) C'est donc la date de 1611 qui
paraît mieux convenir à la présente lettre.
82 Sœur Claude-Marie Thiollier reçut l'habit de la Visitation le 6 juin 1611 (voir ci-dessus, note (71), p. 13) ; Sœur
Marie-Antoine Thiollier le prit en novembre 1612, mais c'est de la première qu'il semble plutôt être question.
83 ur Marie-Jacqueline Favre, fille de la destinataire.
84 Noël-Hugon Pergod (voir tome XIII, note (526), p. 197).
85 M. Pergod était conservateur pour le duc de Savoie de certains subsides. La maison dont le saint Evêque jugeait
l'aliénation utile, était-ce la maison Lambert, première résidence du Bienheureux, ou celle du président Favre qu'il
habitait alors ? (Cf. tom. précéd., note (925), p. 322.) Il est difficile de le savoir.
86 Job, XIV, 5.
35/321

4.6 Page 36

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Revu sur l'Autographe conservé à la Visitation de Pignerol.
_____
DCLXII. A M. Philippe de Quoex87 (Fragment). La nouvelle
ruche de la Visitation. Une maladie inconnue à Galien.
Une mère abeille « trop aspre a la cueillette. » La Mère de
Chantal et les saintes veuves de l'Eglise.
Annecy, janvier ou février 1611 88.
……………………………………………………………………………………………………...
Je recommande a vos Sacrifices la santé de la mere abeille de nostre nouvelle ruche ; elle
est grandement [19] travaillee de maladie89, et nostre bon monsieur Grandis90, quoy qu'il soit l'un
des doctes medecins que j'aye veus, ne sçait qu'ordonner pour ce mal, qu'il dit avoir quelque cause
inconneuë a Galien, docteur des medecins. Je ne sçai si le diable nous veut espouvanter par la, ou
si elle n'est point trop aspre a la cueillette ; toutefois je sçai bien qu'elle n'a point de meilleur remede
a son gré que de s'exposer au Soleil de justice91.
Quoy que c'en soit, j'ay tant a cœur cette sainte entreprise, qui ne vient que d'en haut, que
rien ne m'estonne en sa poursuite, et croy que Dieu rendra tout a fait cette Mere une sainte Paule,
sainte Angele, sainte Catherine de Gennes et telles saintes vefves, qui, comme belles et odorantes
violettes, ont esté si aggreables a voir dans le sacré jardin de l'Eglise. De telles espouses de Jesus
Christ il est dit92 : Myrrha et gutta et casia a vestimentis93, etc.
……………………………………………………………………………………………………..
Revu sur le texte inséré dans l'Histoire de la Fondation du 1er Monastère de la Visitation
d'Annecy. [20]
_____
87 La lettre semble s'adresser à Philippe de Quoex, dont le Saint savait la sollicitude pour la Congrégation naissante et
sa Fondatrice. (Cf. le tome précédent, p. 328, Lettre DCX.)
88 L'éditeur de 1641 et ceux qui l'ont suivi donnent ce fragment sous forme de post-scriptum à la lettre du 3 avril 1611
à Vespasien Aiazza, mais l'Histoire de la Fondation du 1er Monastère d'Annecy le cite comme un billet indépendant,
adressé par le Saint « a un ecclesiastique de son diocese. » Il est difficile de préciser la date. Nous sommes seulement
avertis par le texte qu'il a été écrit au temps des premières maladies de la Mère de Chantal et des commencements de
l'Institut ; voilà pourquoi la date n'est qu'approximative.
89 Cf. supra, pp. 11, 18, et infra, p. 22.
90 Jean Grandis, fils de Nicolas Grandis, docteur en médecine, et de Bonaventure Buzat, né à Talloires vers 1572,
exerça la profession paternelle à Annecy. Médecin de grande expérience, il mérita par ses services la reconnaissance
de la cité, et par son dévouement à la Visitation, l'estime de ses Fondateurs. Aussi fut-il convié à déposer dans le
Procès de Canonisation du Saint.
91 Malach., ult., 2.
92 Ps. XLIV, 9.
93 Un parfum, de myrrhe, d'aloès et de cannelle sort de vos vêtements.
36/321

4.7 Page 37

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DCLXIII. A la Mère de Chantal. La gloire de Dieu, maîtresse et
régente des affections de François de Sales. Un défi entre
deux Saints ; leur unité d'âme et de cœur
Annecy, [février 1611 94.]
95O Dieu, ma toute chere Fille, je proteste, mais je proteste de tout mon cœur, qui est plus
vostre que mien, que je ressens vivement la privation que je souffre de vostre veüe pour ce
jourdhuy. Nostre maistresse, la gloire de Dieu, l'a ainsy disposé, et vous sçaves, ma tres chere Fille,
quelle fidelité nostre cœur tres uniquement un luy a voùee ; c'est pourquoy, sans reserve, je la
laisse regenter au dessus de mes affections, es occasions ou je voy ce qu'elle requiert de moy. O
demain, Dieu aydant, je vous iray entretenir une bonne heure avant le sermon, et nous parlerons
de nostre desfy, lequel vous treuveres bien aggreable, ma chere Fille, et bien digne de nostre si
inseparable cœur.
Or sus donq, bon soir, ma toute mienne96 Fille. Je voudrois vous pouvoir dire le sentiment
que ce jourdhuy j'ay eu, en communiant, de nostre chere unité, car il a esté grand, parfait, doux,
puissant, et quasi par maniere de vœu et de dedicace.
Bon soir, la fille de mon cœur, ou plus tost, ma Fille et mon cœur. Soyes toute en paix,
toute en repos et sur tout, toute en Dieu. Faites moy escrire deux motz, car ces messagers me sont
suspectz. [21]
Revu sur l'Autographe conservé à la Visitation de Pistoie. [21]
_____
DCLXIV. A M. Bénigne Milletot (Inédite). Mme de Chantal
apprend la mort de son père. Son « desplaysir » et sa « vertu
» dans cette circonstance. Eloge du défunt. Le bruit de la
future translation du saint Evêque à un autre siège n'est pas
fondé
Annecy, 26 février 1611.
Monsieur,
Il y a ja long tems que la triste nouvelle du trespas de feu monsieur le President Fremiot
nous estoit arrivee97, et quant et elle un regret extreme, selon les grans devoirs que nous luy avions
et la grand'estime en laquelle nous l'avions ; mais nous avions empesché que la bonne Mme de
Chantal n'en apperceut aucun bruit, parce que c'eust esté une cruauté de voir surcharger sa
maladie98 d'un sentiment de si grande douleur, en un tems auquel elle estoit encor fort foible.
Maintenant neanmoins, je luy ay porté moy mesme ce fascheux advis, en la reception duquel son
94 Le texte de cette lettre laisse entendre que la destinataire était souffrante ; l'absence du titre de « Mere », le ton du
billet et l'analogie avec le fragment placé en avril 1611 (Lettre DCLXXVIII) font pencher vers la date que nous
adoptons et ne permettent pas de la préciser davantage.
95 La première et la troisième phrase, la première ligne de l'alinéa qui suit, ainsi que le dernier alinéa tout entier sont
inédits.
96 L'Autographe porte tt m.
97 Le Président était mort dans la nuit du 20 au 21 janvier. (Voir tome XII, note (822), p. 326.)
98 Cf. supra, pp. 10, 12, 18, 20.
37/321

4.8 Page 38

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desplaysir a grandement combattu sa vertu, laquelle sans doute, si elle n'eust esté fort solide et
profonde, ell'eust esté vaincüe ; mays, Dieu mercy, ell' en a tant tesmoigné, que ceux qui l'ont veuë
en ce point de tristesse, en ont receu un exemple digne de memoyre99.
Et moy j'ay receu de la consolation, ayant sceu que ce bon et digne seigneur defunct avoit
eu aggreables les souhaitz que, selon ma naïfveté, j'avois marqués en ces dernieres lettres que je
luy escrivis. C'est la verité, [22] Monsieur, j'honnorois cet honnorable et grand personnage avec
un amour tout particulier, lequel ne perira jamais en mon ame, non plus que celuy que, de tout
mon cœur, je vous ay dedié et que de rechef je vous consacre.
Je ne sçai comme ce bruit de ma future translation a un autre Evesché a peu courir autour
de moy, sans qu'il y ayt eü de cela ni sentiment, ni desir, ni aucune sortè d'opinion en moy. Non,
Monsieur, il n'y a point eu d'apparence en tous les discours qu'on en a fait ; de sorte que je
persevereray au saint service que je suis obligé de rendre a la chere trouppe en laquelle vous aves
un si bon gage100. Dieu en soit loué et vous face abonder en ses graces et consolations.
Je suis en luy, Monsieur,
Vostre plus humble et tres affectionné serviteur,
FRANÇS, E. de Geneve.
A Neci, le XXVI febvrier 1611.
A Monsieur,
Monsieur Milletot,
Conseiller du Roy au Parlement de Bourgoigne.
Revu sur une ancienne copie conservée à la Visitation de Turin.
_____
99 La Mère de Chaugy (Mémoires, etc., Partie II, ch. IV) parle comme le Saint : « Notre très-digne Mère » reçut la
nouvelle « avec une très-pure vertu, ne s'enquérant d'autre chose sinon comme quoi ce cher père avait fini sa belle vie,
et sachant que ç'avait été très-vertueusement, et que Monseigneur de Bourges avait été Père spirituel de son cher père,
et que sa fin avait été toute chrétienne, cela lui suffit pour lui donner un saint soulagement, quoiqu'elle demeurât très-
attendrie. » (Cf. ci-après p. 26.)
100 Allusion à la fille du destinataire, Sœur Marie-Marguerite, dont il a été parlé plus haut, p. 6.
38/321

4.9 Page 39

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DCLXV. A la Présidente Brulart. Comment connaître l'intention
de Notre-Seigneur à propos d'une vocation. L'holocauste « en
effect » et l'holocauste « en affection. » Une « hantise »
indiscrète et superflue. Il est mieux, pour une femme du
monde, d'ouïr la sainte Messe tous les jours que de faire
l'oraison chez soi. Santé et sainteté
Annecy, 1er mars 1611 101.
Ma tres chere Seur, ma Fille,
J'ay vos deux lettres, dont la premiere est de l'unziesme du mois passé et la seconde de
l'unziesme de celuy-ci ; [23] et j'ay tant a respondre a la premiere [qu'à la seconde], parce que je
l'ay receuë seulement despuis peu et non gueres plus tost que la seconde.
Vous deves croire le confesseur de N.102 en ce qui regarde son entree en Religion, car vous
ne sçauriés mieux apprendre l'intention de Nostre Seigneur que par l'advis de celuy qu'il a donné
pour directeur a la fille dont il s'agit. Que [si] sa divine Majesté ne vouloit pas cet holocauste en
effect final, mais seulement en affection et application commencee, comme il fit d'Isaac103, c'est a
dire, si cette chere Fille estant entree en l'Ordre, ne se treuvoit pas forte pour y perseverer, mon
Dieu ! quel mal y auroit-il en cela ? Nul, sans doute ; et en ce cas, il faudroit renoncer a nos goustz
et plus secrettes affections pour acquiescer a la sainte volonté de Dieu.
Puis que donq maintenant elle est preste, au jugement de son Pere spirituel et des bonnes
Meres Carmelines, et que monsieur son pere contribue son consentement, il semble qu'en toute
asseurance vous en pouves faire l'offrande, et que Nostre Seigneur l'aura fort aggreable, sauf
neanmoins a son bon playsir de disposer de sa perseverance en cet estat particulier, ou de sa sortie,
selon que sa providence treuvera meilleur ; a quoy nous nous conformerons tous-jours et sans
replique, car il n'est pas raysonnable de prescrire a cette infinie Sapience la façon de laquelle il
nous veut rendre siens. Voyla pour le premier point.
Pour le second, je regrette infiniment que ce personnage104 se laisse si long tems tromper
et trompe soy mesme en cette indiscrette et superfluë hantise, et sur tout puisqu'elle donne du
scandale. O Dieu ! que ce leur seroit chose utile a tous deux de renoncer a ces inutiles et
inconsiderees complaysances, et que ce seroit une [24] grande charité de les en retirer ! Mais, quant
a la personne que je connois105, quoy que jadis elle fust aucunement interessee en ce mal, qui pour
n'estre pas vicieux ne laisse pas d'estre perilleux, je ne treuve aucun inconvenient que quelquefois,
selon les occurrences, elle se confesse en toute liberté a ce personnage-la, dans le cœur duquel, s'il
y avoit quelque impureté, elle ne se glisseroit pas par la confession, mais ouy bien par les autres
conferences et conversations, ou privautés et hantises. Qu'elle s'y confesse donq librement es
occasions ; mais qu'elle ne luy parle pas hors de la, que courtement et promptement.
Pour le troysiesme, croyés fermement que vous n'avés ni retenés a vostre escient aucune
affection contre la volonté de Dieu, c'est a dire pour le peché veniel, encor que plusieurs
imperfections et mauvaises inclinations de tems en tems vous surprennent. Ne laissés pas de faire
la Communion le jeudi et les festes sur semaine, et le mardi du Caresme ; mais cela n'en doutés
101 Les nombreuses particularités de cette lettre lui font attribuer Mme Brûlart comme destinataire. Cette induction est
confirmée par le ton et la teneur des lettres précédentes et des suivantes. Quant il la date, l'allusion au décès du
président Frémyot, rapprochée de celle qu'on trouve dans la lettre précédente à M. Milletot, permet de fixer le
quantième à un ou deux jours près.
102 Sans doute Madeleine, fille aînée de la Présidente. (Voir le tome précédent, note (425), p. 138.)
103 Gen., XXII, 10-12.
104 « Ce personnage » doit être encore M. Viardot. (Cf. ibid., note (407), p. 133.)
105 Sans doute, Mme Brûlart elle-même. (Voir tome XIII, pp. 174, 175.)
39/321

4.10 Page 40

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plus, ains employés vostre cœur a estre bien fidele en l'exercice de la pauvreté emmi les richesses,
de la douceur et tranquillité emmi le tracas, et de la resignation du cœur et de tout ce qui vous doit
arriver en la providence de Dieu. Qu'est-ce qui nous peut manquer, ayant Dieu ?
Pour le quatriesme, il est mieux en toute façon que vous oyies la sainte Messe tous les jours
et y faire l'exercice de la Messe, que de ne l'ouïr pas, sous pretexte de continuer l'orayson chez
vous. Je dis qu'il est mieux, non seulement parce que cette reelle presence de l'humanité de Nostre
Seigneur en la Messe ne peut estre suppleée par la presence mentale (bien que, pour quelque digne
respect, on demeure esloigné d'icelle), mais aussi parce que l'Eglise desire fort que l'on assiste a la
Messe. Et ce desir la tient lieu de conseil, auquel c'est espece d'obeissance de s'accommoder, quand
on le peut bonnement, et par ce que vostre exemple est utile au simple peuple en la qualité que
vous estes : or, il n'aura [25] point d'exemple de ce que vous feres en vostre oratoire. Arrestés-vous
donq a ceci, ma tres chere Fille.
Je ne prescheray ce Caresme qu'aux monasteres de cette ville, et cinq ou six fois en la
grande eglise. Je suis plein de santé, a mon advis ; fussé-je plein de sainteté, comme mon rang et
ma charge le requierent !
La bonne madame de Chantal a tesmoigné et tesmoigne une vertu toute particuliere en
l'occasion du trespas de monsieur son pere, qu'elle n'a sceu que despuis troys jours, parce que, la
voyant si affoiblie de sa maladie, je luy celay cette mauvaise nouvelle tant que je peus, sçachant
bien que cela retarderoit le retour de sa santé106. Vanité des vanités, et toutes choses sont vanité *,
ma tres chere Fille, sinon d'aymer et servir Dieu. Cette bonne Seur a esté toute consolee d'entendre
que son pere estoit mort en l'acte de repentance.
Demeurés toute en Dieu, ma tres chere Fille, vivés saintement joyeuse, douce et paysible.
Je suis, mais fort absolument,
Ma tres chere Fille,
Vostre serviteur tres humble,
FRANÇS, E. de Geneve.
_____
DCLXVI. A la Mère de Chantal (Inédite). Un moyen de «
recreer nostre pauvre cœur. » — La Mère de Chantal est avertie
de ne pas se tenir à genoux pendant son oraison
Annecy, [mars 1611 107.]
Je suis bien content, ma tres chere Fille, que vous retourniés doucement a la sainte orayson,
pour un peu [26] recreer nostre pauvre cœur aupres de son Sauveur qui, comme l'arbre de bausme,
distillera tous-jours quelque goute de sa sainte liqueur sur nous, qui demeurerons paysiblement en
attention. Demeurés donq une demi heure au matin et un quart d'heure au soir, et ne vous
opiniastrés pas a vous tenir a genoux, car il suffira bien d'estre assise.
Vous pouves tres bien recevoir M. de la Tour108 ; Dieu luy face la grace de bien profiter en
106 Cf. Epist. præced. Eccles., 1, 2.
107 La destinataire n'est pas douteuse ; ces mots, « nostre pauvre cœur » et la mention de M. d'Effrans la désignent
clairement.
Quant à la date de ce billet, la convalescence de la Mère de Chantal, l'appellation de « Fille » inclinent à
préférer 1611 à 1612. Le voyage de son neveu à Annecy, qu'on peut placer, non sans probabilité, après la mort du
président Frémyot (voir ci-dessus, note (97), p. 22), fait songer au mois de mars.
108 Parmi les nombreux gentilshommes de Bourgogne et de Savoie qui portaient ce nom à cette époque, il en est deux
surtout auxquels peut s'appliquer la rapide mention qu'en fait ici le Saint :
Charles de la Tour, fils dn baron de la Bâtie, maître d'hôtel du duc de Savoie, fut institué prieur
commendataire de Talloires et de Saint-Jorioz le 13 septembre 1596. Ordonné prêtre le 22 mars 1608 (R. E.), élu en
1611 archidiacre de la cathédrale de Genève, il eut plus d'un démêlé avec ses Religieux. En 1610, il donne plein
40/321

5 Pages 41-50

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5.1 Page 41

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vostre conversation, et a monsieur le Baron d'Effrans109, lequel il faut un peu que vous entreteniés
sur ses exercices et sur110
Revu sur une copie déclarée authentique, conservée à la Visitation d'Annecy. [27]
_____
DCLXVII. A Monseigneur Jean-Pierre Camus Évêque de
Belley. Il faut beaucoup souffrir des enfants en bas âge.
Quatre mots de saint Paul, règle des prédicateurs. La patience
et la doctrine
Annecy, 7 mars 1611 111.
Monseigneur,
Je me res-jouis avec vostre peuple qui a le bien de recevoir de vostre bouche les eaux
salutaires de l'Evangile, et m'en res-jouirois bien davantage, s'il les recevoit avec l'affection et
reconnoissance qui est deuë a la peyne que vous prenes de les respandre si abondamment. Mays,
Monseigneur, il faut beaucoup souffrir des enfans tandis qu'ilz sont en bas aage, et bien que
quelquefois ilz mordent le tetin qui les nourrit, il ne faut pas pourtant le leur oster. Les quatre motz
du grand Apostre112 nous doivent servir d'epitheme : Opportune, importune ; in omni patientia et
doctrina113. Il met la patience la premiere, comme plus necessaire, et sans laquelle la doctrine ne
sert pas. Il veut bien que nous souffrions qu'on nous treuve importuns, puisqu'il nous enseigne
d'importuner par son importune. Continuons seulement a bien cultiver, car il n'est point de terre si
ingrate que l'amour du laboureur ne fœconde. [28]
J'attendray cependant les livres quii vous plaist me promettre, qui tiendront en mon estude
le rang convenable a l'estime que je fais de leur autheur, et a l'amour parfait avec lequel je luy
porte et porteray toute ma vie honneur, respect et reverence.
Je suis, Monseigneur,
Vostre tres humble frere et tres obeissant serviteur,
FRANÇS, E. de Geneve.114
pouvoir au Nonce, Mgr Costa, évêque do Savone, pour obliger à leurs devoirs les Bénédictins. Il remplit diverses
ambassades à Milan, à différentes époques, de 1605 à 1635. C'est lui qui, en 1613, donna à Berthelot, officier du duc
de Nemours, des bastonnades à propos desquelles l'Evêque et ses frères eurent bien des tracas, a M. de la Tour »
n'avait qu'à gagner à la « conversation » de la Mère de Chantal, car il était aussi peu clerc que possible.
Dans le Journal de Gabriel Breunot (Dijon, 1864-1866), tomes II, III, un Antoine de la Tour, docteur en
droit, avocat à Beaune, beau-frère de Jérôme de Saumaise, est plusieurs fois mentionné avec un M. d'Effrans.
109 Ces mots du Saint : « lequel il faut que vous entretenies sur ses exercices, » désignent sans doute Jacques de
Neufchèzes, baron d'Effrans. On sait qu'il se destinait à l'état ecclésiastique. (Cf. le tome précédent, pp. 170, 343, 344.)
110 La suite manque.
111 L'édition de 1626 porte la date de 1621, mais on sait que, sous la plume du Saint, 1621 peut se confondre à la
lecture avec 1611. Cette dernière date est certainement plus probable, car il est presque prouvé qu'en 1621, Camus
prêchait à Paris. « Pendant neuf ou dix années de suite, » nous dit-il, « je fus appelé à Paris pour y prescher en diverses
eglises les Avens et les Caresmes. » (Eloge de Pieté à la benite memoire de Mire Claude Bernard, etc., Paris, 1641.)
Or nous savons par une lettre du Prélat à Mlle Le Gras, datée d'octobre 1623 (Archives des Lazaristes), qu'il dut, à
partir de cette même année, interrompre ses prédications dans les chaires de la capitale.
112 II Tim., IV, 2.
113 A temps et à contretemps ; avec toute la patience et la doctrine.
114 « Le bon P. Poissard est venu de par dela le diocese ; il a veu le P. Desgranges, a qui il a fait connoistre le plan du
pont de Secelles que Monseigneur a le projet de faire eslever au bas du couvent des Carmelites1. Le pauvre peuple
louera Dieu, car le service luy sera tres utile. »
Ces lignes sont données en post-scriptum par Migne (tome VI, col. 869), qui ne les cite pas au tome V, col.
41/321

5.2 Page 42

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Le 7 mars 16...
_____
DCLXVIII. A la Mère de Chantal. Le nom que le Saint avait
d'abord adopté pour ses chères filles ; pourquoi il le changea.
Sa dévotion â sainte Françoise Romaine. Le « petit Batiste »
et « Celse Benine »
Annecy, 9 mars 1611.
Ouy, ma chere Fille, ouy sans opiniastreté, nous changerons le nom de Seurs Oblates115,
puisque cette expression [29] desplait si fort a ces messieurs116 ; mais nous ne changerons jamais
le dessein et le vœu eternel d'estre a jamais les tres humbles servantes de la Mere de Dieu.
Renouvellés-en la promesse en vostre Communion ; j'en feray de mesme au Sacrifice de la Messe.
Helas ! il y a aujourd'huy douze ans que j'eus la grace de celebrer dans le monastere de cette sainte
vefve Romaine117, avec mille desirs de luy estre devot toute ma vie. Comme elle est nostre sainte
Patronne, il faut qu'elle soit nostre modele. Elle aymoit bien autant son petit Batiste118 que vous
aymés vostre Celse Benine ; mais [30] elle laissa a Dieu l'entiere disposition d'en faire a sa volonté,
et il en fit un enfant de salut. Ainsy je l'espere du cher enfant de ma tres chere Mere.
1291 ; elles ne se trouvent pas non plus dans l'édition princeps, ni dans les suivantes, jusqu'à Blaise, Nouvelles inédites
(1833), exclusivement. Ce dernier dit avoir reproduit cette lettre, avec le post-scriptum et sans date, d'après
l'Autographe appartenant à M. de Monmerqué2. Or, cette affirmation ne mérite pas absolue confiance, car l'éditeur a
publié dans le même volume une lettre rejetée de notre Edition comme apocryphe (voir tome XIII, note (514), p. 192).
Toutes ces raisons font paraître bien suspect le texte donné en 1833.
1 S'il s'agit de Seyssel, il faut noter qu'il n'y a jamais eu de couvent de Carmélites.
2 Une copie se conserve à la Bibliothèque publique de Lyon, Collection Coste, n° 16140.
115 On lit dans l’Année Sainte (ancien Ms.), à la date du 9 mars : « Nôtre Pere saint François de Sales avoit une dévotion
particulière pour sainte Françoise, que l'Eglise honore aujourd'hui. Le celebre monastere de la Tour des Miroirs est
un des lieux de pieté qu'il visitoit avec plus de tendresse dans les deux voiages qu'il a fait à Rome... Nous avons vû
dans les premiers Memoires qu'il fit pour commencer nôtre Institut, qu'il nous donnoit pour modele la conduite de
sainte Françoise : meme, il nous nommoit les Sœurs Oblates de la Sainte Vierge. » (Cf. le tome précédent, note (943),
p. 349.)
Le bienheureux Fondateur empruntait ce nom à l'illustre veuve romaine, qui l'avait donné à ses compagnes
le 15 août 1425, lorsqu'elle les affilia aux moines Olivétains de Sainte-Marie-la-Neuve, sous l'appellation d'Oblates,
du mot offero, oblatus, qui remplaçait celui de profiteor, professus. (Cf. le tome précédent, note (946), p. 330.) Et
dans la Congrégation de sainte Françoise, ce n'est pas seulement le nom de ses Religieuses qui lui avait plu tout d'abord
; leur vie séparée du monde, qui n'exigeait pas un costume monastique, et s'accommodait des vœux simples annuels
et de l'absence de clôture, avait souri au Saint, ce cadre de vie extérieure, souple et aisé, lui ayant paru suffisant pour
servir de bordure et de haie à la vie intérieure de ses filles.
116 Ces « messieurs » étaient les nombreux amis de la Congrégation naissante. Le nom d'Oblates n'était pas alors en
usage en France.
117 François de Sales fit cette visite à la Tour des Miroirs en 1599, lorsqu'il vint à Rome avec M. de Chissé. A cette
époque, la cause de la canonisation de la vénérable Fondatrice venait d'être reprise, et l'espoir de la voir aboutir avait
ravivé la dévotion du peuple romain. Cette circonstance explique l'empressement du pèlerin de Savoie à visiter
l'antique monastère.
118 Jean-Baptiste Ponziani naquit en 1400 et fut baptisé en l'église de Sainte-Cécile du Transtevere. Avant d'évacuer
Rome en 1409, le comte de Troja, capitaine du roi de Naples, Ladislas Durazzo, exigea comme otage le fils aîné de
Françoise ; mais l'enfant fut bientôt rendu à sa mère. En 1410, les Napolitains emmenèrent de nouveau le fils de la
Sainte, restée seule avec ses deux autres enfants, Evangéliste et Agnès, qu'elle perdit peu après. A la mort de Ladislas
(6 août 1414), Laurent Ponziani, avec son fils Baptiste, revint de l'exil et de la captivité. Celui-ci épousa (1417)
Mobilia, d'abord légère et futile, et bientôt transformée par la sainteté de Françoise. Il en eut deux enfants, Girolamo
et Vannozza. Baptiste survécut à sa sainte mère ; on voit encore son tombeau dans la sacristie de Sainte-Cécile, jadis
Ja chapelle des Ponziani.
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5.3 Page 43

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Revu sur uu ancien Ms. de l'Année Sainte, conservé à la Visitation d'Annecy.
_____
DCLXIX. Au Président Antoine Favre. Les « pauvres gens
d'Estrembieres ; » prière de les défendre contre leurs frères
rebelles
Annecy, 10 mars 1611.
Monsieur mon Frere,
Je vous ay escrit par celuy qui m'a apporté ce matin vostre lettre ; mais ces pauvres gens
d'Estrembieres me forcent, par leurs remonstrances, d'interceder pour eux, puisqu'ilz recourent a
moy pour cela, en qualité, disent-ilz, de mes enfans les plus exposés a la persecution de leurs freres
rebelles119. Je vous supplie donq tres humblement, en ce qui pourra bonnement et saintement se
faire, de les avoir en recommandation.
Je vous donne de rechef le bon jour tres affectionné, et suis
Le 10 mars 1611. [31]
_____
DCLXX. A la Mère de Chantal (Inédite). Un arbitrage du Saint
dans une querelle entre soldats
Annecy, [mars] 1611 120.
Je vous donne le bon jour, ma tres chere Fille, avec cette mortification de ne vous pouvoir
voir d'aujourdhuy, parce que je vay a deux lieuës d'icy pour accommoder certaine grande querelle
qu'il y a entre nos François121. Mays avant que de partir, je vay dire la Messe, tous-jours pour
nostre cœur, que je supplie Nostre Seigneur remplir de mille et mille benedictions, et sur tout de
celle de son tres parfait amour.
Bon jour donq, ma tres chere Fille, et dites moy comme vous vous portes. Au moins, vivés
joyeuse en ce Sauveur, au service duquel nous sommes trop heureux d'estre voués sans reserve
119 Le Président n'avait pas qu'un pouvoir juridique ; il était alors commandant général en Savoie. Sa correspondance
de cette époque prouve en effet que son influence et son activité s'appliquaient à procurer la sécurité aux « pauvres
gens » opprimés. Ces « freres rebelles » étaient les protestants de Genève et de Berne, qu'excitaient les tentatives sans
cesse renouvelées de Charles-Emmanuel. Etrembières étant aux portes de Genève, ses habitants se trouvaient « les
plus exposés » à pâtir de l'invasion. (Voir note (121) de la page suivante.)
120 La date proposée est assez vraisemblable ; elle résulte d'une étude comparée des lettres du Saint au président Favre
(10 et 19 mars 1611), et de la correspondance de ce dernier avec le duc de Savoie pendant ce même mois de mars. La
mention de la santé de la Mère de Chantal appuie encore cette induction.
121 La mort de Henri IV empêcha l'entreprise concertée contre le Milanais (voir le tome précédent, note (1153), p.
398), mais les nombreuses troupes massées pour ce grand dessein furent lentes à se retirer. D'ailleurs le duc en fit
passer une partie en Savoie pour s'en servir contre Genève. La Savoie, dans les derniers mois surtout de 1610 et
jusqu'au printemps de l'année suivante, fut donc presque constamment traversée par les soldats espagnols, ou
savoyards, ou français. Mal payés, ils rançonnaient le pauvre peuple qui gémissait de tant d'oppression. Le 20 mars
1611, le président Favre se plaignait au duc des brutalités du capitaine Gaucher et de sa troupe, « batant les pauvres
gens, » mettant « le feu aux bleds, » pendant « les bœufs tout vifs » à son passage dans le Genevois, et « a Hauteville
pres Rumilly, » c'est-à-dire tout près d'Annecy. (Voir Mugnier, Correspondance du Président Favre, 1903, tome Ier.)
Cette particularité permet de supposer que l'intervention de François de Sales se rapporte aux exactions du terrible
capitaine et de ses hommes.
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5.4 Page 44

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quelconque.
Vive Jesus ! Amen.
Revu sur une copie conservée à la Visitation d'Annecy. [32]
_____
DCLXXI. A la même. Le baume et les « basses herbettes » de la
Croix. Grandeur de saint Joseph ; pourquoi pouvait-il faire
envie aux Anges et défier le Ciel. La veuve de Naïm et la
mère de Celse-Bénigne
Annecy, 17 mars 1611 122.
Ma chere Fille, tenons nous, je vous supplie, tout au bas bout de la Croix, trop heureux si
quelque goutte de ce bausme qui distille de toutes pars tombe dedans nostre cœur, et si nous
pouvons recueillir de ces basses herbettes qui naissent la autour.
O je voudrois bien, ma tres chere Fille, vous entretenir un peu sur la grandeur de ce beni
Saint que nostre cœur ayme, parce qu'il a nourri l'Amour de nostre cœur et le cœur de nostre amour.
Sur ces paroles : Seigneur, faites bien aux bons et aux droitz de cœur123, o vray Dieu, dis je, qu'il
falloit que ce Saint fust bon et droit de cœur, puisque Nostre Seigneur luy a fait tant de bien, luy
ayant donné la Mere et le Filz ! Car, ayant ces deux gages, il pouvoit faire envie aux Anges et
desfier le Ciel tout ensemble d'avoir plus de bien que luy ; car, qu'y a il entre les Anges, comparable
a la Reyne des Anges, et en Dieu, plus que Dieu ?
Bon soir, ma toute chere Fille. Je supplie ce grand Saint, qui a si souvent dorloté nostre
Sauveur et qui l'a si souvent bercé, qu'il vous face les caresses interieures qui sont requises a
l'avancement de vostre amour envers ce Redempteur, et qu'il vous impetre abondance de paix
interieure, vous donnant mille benedictions. Vive Jesus, [33] vive Marie ! et encor le grand saint
Joseph qui a tant nourri nostre Vie.
A Dieu, ma Fille ; la vefve de Naïm124 m'appelle aux funerailles de son cher filz125. Ce n'est
pas que, sur ce sujet, je ne pense a ce que vous m'escrives du vostre. A Dieu soyons nous sans fin,
sans reserve, sans mesure. Jesus soit nostre couronne, Marie soit nostre miel.
Je suis, au nom du Filz et de la Mere,
Vostre tres asseuré serviteur,
FRANÇS, E. de Geneve.
_____
DCLXXII. Au Président Antoine Favre. Compassion du Saint
pour les misères du pays au printemps de 1611
Annecy, 19 mars 1611.
122 Le manque de liaison qui apparaît à travers certaines parties de cette lettre fait croire qu'elle est bâtie de plusieurs
fragments ; mais les uns et les autres ne semblent pas antérieurs à 1610. La présence de la Mère de Chantal à Annecy,
que suppose le texte, l'allusion à la fête de saint Joseph et quelques expressions persuadent la date de 1611 et justifient
le quantième adopté. (Voir note (126) de la page suivante.)
123 Ps. CXXIV, 4.
124 En 1611, le jeudi de la quatrième semaine de Carême tombait le 17 mars.
125 Luc., VII, 11-16.
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5.5 Page 45

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Monsieur mon Frere,
Le P. François126 et moy avons escrit a Thonon selon vostre derniere lettre, et ferons avec
soin tout ce qui se presentera a faire sur ce sujet.
Je vous escrivis l'autre jour des miseres de ce païs127, non point contre la verité, qui est plus
grande en cela qu'on ne sçauroit dire, mais bien contre mon gré, puisque le mal est irremediable128.
Mais, me treuvant chez M. le [34] Præsident de cette ville129 lhors quïlz despechoyent, je me
treuvay engagé par sa priere, et des autres seigneurs du Conseil130, de joindre ma lettre a la leur.
Je prie Nostre Seigneur quil soulage ce peuple de sa grace et le divertisse du desespoir, et les
affaires publiques d'une totale ruine.
Je suis, Monsieur mon Frere,
Vostre plus humble frere et serviteur,
FRANÇS, E. de Geneve.
XIX mars 1611.
A Monsieur
Monsieur Favre, Baron de Peroges.
Conseiller d'Estat de S. A., Premier President de Savoye.
Revu sur l'Autographe conservé à la Visitation du Mans.
_____
126 Sans doute le P. François de Chambéry, Capucin. (Voir tome XI, note (419), p. 179, et tome XIV, pp. 364, note
(1056), et 375.)
127 Cf. Epist. DCLIX.
128 Antoine Favre appuyait la requête de son ami, lorsqu'il écrivait à Son Altesse, le lendemain 20 mars : « Je reçoy a
toutes heures de pleintes des desordres que fait le capitaine Gauchier avec sa troupe, laquelle ayant rodé par le
Genevois et gasté tous les lieux ou ell'a logé, pour les avoir treuvé ja tous ruinés et sans pain... Tout le peuple des lieux
ou ceste troupe a logé jusqu'a present en Genevois, a fait instance au sr president de Buttet de leur permettre de courir
sus a la dite troupe et d'opposer la force a la force. » (Voir ci-dessus, note (121), p. 32.)
129 Jean-François de Buttet, seigneur d'Entremont, fils de noble Jean-François de Buttet et de Humberte de Pingon,
veuve de noble Jacques de Cartai, d'Ugines, avocat dès novembre 1585, conseiller de Son Altesse, reçu sénateur au
souverain Sénat le 29 avril 1608, avait épousé par contrat dotal du 31 août 1588, Antoinette du Coudray. Le 3 août
1610 il fit sa première entrée au Conseil de Genevois en qualité de président. (Mugnier, Entrées du Sénat et Petites
Annales d'Annecy.) Son acte de sépulture est daté du 2 décembre 1613. (Reg. par. d'Annecy.) Jean-François de Buttet
était neveu du célèbre poète Marc-Claude de Buttet et le frère maternel de la fameuse dame de Saint-Cergues. (Voir
ci-dessus, note (76), p. 15.)
130 Le Conseil présidial du Genevois se composait à cette époque d'un président, de deux collatéraux, Barthélemy
Floccard et Claude de Quoex, d'un avocat fiscal, Henri Ouvrier, et d'un procureur patrimonial.
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5.6 Page 46

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DCLXXIII. A une dame inconnue131. Le monde et ses
séductions. Mépris extrême du Saint pour la gloire. Les
exigences du Créateur et celles du monde.
Annecy, 22 mars 1611.
Helas, ma tres chere Fille, que ce miserable monde est puissant a nous traisner apres ses
niaiseries et amusemens ! Or, je suis bien ayse que nous nous soyons un peu [35] apprivoysés,
monsieur vostre mary et moy. A cette intention, je luy parlay bien amplement de mes affaires et
des occurrences qui me regardoyent, et ne sçavois bonnement comme faire pour luy celer l'extreme
mespris que Dieu m'a donné de toutes ces adventures qu'on appelle de fortune et d'establissement
; car il ne veut pas que cela soit mesprisé d'un si grand mespris comme est celuy que, graces a
Nostre Seigneur, j'en ressens en mon ame. O Dieu, ma chere Fille, que ce monde est estrange en
ses fantasies, et a quelle sorte de prix est il servi ! Si le Createur ordonnoit des choses si difficiles
comme le monde, combien peu treuveroit-il de serviteurs.
Or sus, demeurés en paix aupres de la tres sainte Croix, eslevee en ce tems pour enseignes
de salut a nos ames.
FRANÇS E. de Geneve.
Le 22 mars 1611.
_____
DCLXXIV. A Madame de la Fléchère. Pourquoi les petites
chutes et imperfections ne doivent étonner ni l'âme chrétienne,
ni son directeur
Annecy, 22 mars 1611.
Ma tres chere Fille,
Vous pouves penser qu'en ce tems je suis attaché icy, sans que je puisse executer le desir
et dessein que j'avois de vous aller voir, sinon que quelque cas de necessité m'appellast a vostre
service ; car alhors, rien ne me sçauroit retenir, estant si tres entierement et parfaitement vostre
comme je suis. [36]
J'ay veu par vos lettres vos petites cheutes et imperfections, pour lesquelles ni vous ni moy
ne devons aucunement nous estonner, car ce ne sont que des petiz advertissemens de nous tenir
bas et humbles devant nos yeux, et pour nous esveiller en cette sentinelle en laquelle nous sommes.
Il faut donq bien vivre courageuse, ma tres chere Fille, car en fin nous sommes a Dieu sans reserve,
ni exception aucune. Demeures donq en paix, avec la grace et consolation du Saint Esprit.
Je vous escris sans loysir, mays non pas sans un tres grand desir continuel de vostre
grandeur spirituelle, estant, comme je suis, tres entierement et parfaitement vostre.
F., E. de G.
A Neci, le XXII mars 1611.
131 La destinataire n'habitait pas loin d'Annecy ; son mari, dont la frivolité était extrême, devait avoir quelque emploi
à la cour, mais ne connaissait pas familièrement l'Evêque de Genève. Ses projets d'établissement indiquent un homme
encore jeune. Or, toutes ces particularités font écarter les correspondantes les plus connues du Saint ; elles
conviendraient assez bien à Mme de la Fléchère, mais celle-ci est destinataire le même jour d'une lettre que nous
reproduisons ci-dessous, d'après l'Autographe. Il faut donc l'exclure à son tour et laisser à des chercheurs plus habiles
le soin de découvrir le nom de l'inconnue.
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5.7 Page 47

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A Madame
Madame de la Fleschere.
Revu sur l'Autographe conservé à Aoste, aux Archives de la Société académique.
_____
DCLXXV. Au duc de Savoie, Charles-Emmanuel Ier. Paris,
Chambéry, réclament l'Evêque de Genève pour le Carême de
l'année suivante : que le duc de Savoie décide, le Saint se
conformera à son désir
Annecy, 3 avril 1611.
Monseigneur,
Je suis extremement recherché et pressé d'aller prescher le Caresme prochain a Paris.
D'autre part, messieurs du Senat de Chamberi me font l'honneur de me desirer a mesme fin. Je
supplie tres humblement Vostre Altesse de me commander ce qu'elle voudra, puisque je prendray
mon inclination de la sienne et ma resolution de son commandement132. [37]
Si Dieu exauce mes souhaitz, il comblera de ses plus cheres benedictions Vostre Altesse,
de laquelle je suis d'un cœur non pareil,
Le tres humble, tres obeissant et tres fidele serviteur,
FRANÇS, E. de Geneve.
A Neci, le jour de Pasques 1611.
_____
132 La permission ne fut pas accordée pour les prédications de Paris, et dès lors, le Saint s'engagea à prêcher « le
Caresme prochain » à Chambéry. (Voir les lettres des 4 mai et 11 juillet 1611.)
Ce refus dut être une déception pour les amis nombreux que l'Evêque de Genève comptait dans la capitale,
car l'année suivante ils gardaient encore le désir de l'entendre en 1613. On peut en croire son ami des Hayes, qui
mandait le 2 juin 1612 à M. de Charmoisy : « J'avais ci-devant écrit à Monseigneur de Genève le désir que Messieurs
de Saint-Benoît avaient d'être enseignés de lui le Carême prochain ; toutes les paroisses ont cette même volonté, et
plusieurs d'icelles s'en sont adressées à moi ; mais, ayant été fait marguillier,... je suis obligé d'écrire pour Saint-
Benoît... Céans, il sera logé chez son serviteur, hors de cérémonie ; je lui donnerai un carrosse pour visiter ses amis,
je lui ferai faire pénitence et le déchargerai de tout soin. Il aura des auditeurs, autant que l'église en pourra tenir, qui
est assez capable. » (Vuÿ, La Philothée de S. Fr. de Sales, tome II, 1879.)
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5.8 Page 48

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DCLXXVI. A l'abbe d'abondance, Vespasien Aiazza133. Humble
récit des commencements de la Visitation. Pourquoi Mme de
Chantal est-elle venue « a son chetif pere. » Sa prudence et sa
force virile. Jacqueline Coste. « Un doux et gracieux
refuge. » L'esprit et la vie intérieure des premières
Religieuses. Dévouement de François de Sales à Dieu et à
son Eglise. Pour la charité, toute peine est bien aimée. Un
Saint qui avait le don d'ouvrir les cœurs.
Annecy, 3 avril 1611.
Monsieur mon tres cher Frere,
L'incroyable parfum d'une amoureuse suavité dont vostre lettre nompareille en douceur
pour moy est pleine, [38] me force doucement a condescendre a vos fraternelz desirs de sçavoir ce
que je fay en ce recoin de nos montagnes, dont vous dites que l'odeur est montee jusqu'a vous. Je
le croy facilement, mon tres cher Frere : puisque j'ay mis des holocaustes sur l'autel de Dieu, falloit-
il pas qu'elles jettassent une odeur de suavité ? Voyci donq, non point ce que j'ay fait, mais ce que
Dieu a fait l'esté passé.
Mon frere de Thorens alla querir en Bourgoigne sa petite femme et amena avec elle une
bellemere qu'il ne merita jamais, d'avoir, ni moy de servir ; vous sçaves des-ja quelque chose
comme Dieu l'a renduë ma fille. Or, sachés donq que cette fille est venue a son chetif pere affin
qu'il la fist mourir au monde, selon le dessein que je vous ay communiqué a nostre derniere
entreveuë. Pressee des desirs de Dieu, elle a tout quitté, et, avec une prudence et force non
commune a son sexe fragile, elle a pourveu a son desengagement ; en sorte que les bons treuveront
beaucoup de choses a loüer en cela, et les enfans malins du siecle ne sçauront sur quoy s'attacher
pour former leurs mesdisances.
Nous l'enfermasmes le jour de la tres sainte Trinité, avec deux compaignes et la servante134
que je vous fis voir, qui est une ame si bonne dans la rusticité de sa naissance, que, dans sa
condition, je n'en ay point veu de telle. Despuis, il vient des filles de Chamberi, de Grenoble135 et
Bourgoigne, pour s'associer a elles ; et j'espere que cette Congregation sera pour les infirmes un
doux et gracieux refuge, car, sans beaucoup d'austerités corporelles, elles prattiquent toutes les
vertus essentielles de la devotion.
Elles disent l'Office de Nostre Dame, font l'orayson mentale ; elles ont une police de travail,
silence, obeissance, humilité, exempte de toute proprieté, extremement exacte et autant qu'en
monastere du monde136. Leur vie est amoureuse, interieure, paysible et de grande edification.
Apres leur profession, elles iront servir les malades, [39] Dieu aydant, avec grande humilité. Voyla,
mon tres cher Frere, un petit sommaire de ce qui s'est fait icy.
133 Dans l'Histoire de la Fondation d'Annecy, le destinataire de cette lettre est désigné ainsi : « Un personnage de
qualité eloigné de cette contree. » D'autre part, il résulte du texte que le Saint s'adresse à un ami de cœur, absent de
Savoie depuis de longs mois, et au courant de ses projets. Toutes ces particularités conviennent à Vespasien Aiazza,
qui devait souvent se rendre en Piémont et y séjourner, en qualité d'archidiacre de Verceil. (Voir sa note au tome XIII,
p. 48.)
134 Jacqueline Coste (voir le tome précédent, note (181), p. 63).
135 S'il vint à cette époque des postulantes de Grenoble, elles ne durent pas persévérer, car il n'est resté d'elles aucun
souvenir dans les Annales de l'Institut. (Cf. ibid., p. 331.)
136 Cf. tom. præced. p. 330.
48/321

5.9 Page 49

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Quant a la reforme que vous projettés137, je la passionne, et, faut advoüer la verité, vostre
inclination m'incline et me tire tout a soy ; vos raysons sont preignantes et vostre authorité toute
puissante pour moy. Non, pour Dieu, ne craignés point de m'importuner. J'ay sacrifié ma vie et
mon ame a Dieu et a son Eglise : qu'importe-il que je m'incommode, pourveu que j'accommode
quelque chose au salut des ames ? Traittés-moy donq fraternellement, puisque vous sçaves qu'entre
nous tout se fait en charité et pour la charité. Or, la charité n'a point de peyne qui ne soit bienaymee
: 138 Ubi amatur, non laboratur ; vel si laboratur, labor amatur139.
Si ce pauvre garçon ne m'eust rencontré ici pour se confesser a moy, il s'en alloit a Rome,
ne treuvant personne a qui ouvrir a son gré confidemment son ame, ou, a la verité, j'ay treuvé
moins de mal que je ne pensois, et incomparablement moins qu'il ne croyoit. O mon Dieu, mon
tres cher Frere, si Dieu, qui incline tant de personnes a me remettre la clef de leurs cœurs, voire a
en lever la serreure devant moy affin que je voye mieux tout ce qui est dedans, pouvoit si bien
fermer le mien que rien n'y entrast jamais que son divin amour et que rien ne l'ouvrist que la charité,
hé, que vous m'aymeries suavement ! Priés fortement pour cela, et croyés fermement que je suis
Vostre tres obeissant frere et serviteur,
FRANÇS, E. de Geneve.
Le 3 avril 1611.140 [40]
_____
DCLXXVII. A la Mère de Chantal (Fragment inédit). Pourquoi
faire ce qui est requis pour tenir sa santé un peu forte. Ce que
le Saint demandait à la Messe avec une « ardeur extraordinaire.
» Affectueux dévouement du Fondateur pour la Mère de ses
chères filles
Annecy, avril 1611 141.
……………………………………………………………………………………………………..
pas de vous faire bien ayder, tant quil se pourra, affin que ce mal vous soit utile ; car voyes vous,
ma chere Fille, il faut bien estre soigneuse de faire ce qui est requis pour nous tenir un peu forte et
vaillante, puisque, comme vous le desires,142 il nous faut faire des effortz pour devenir saints et
rendre des grans services a Dieu et au prochain. Or sus, j'attens donq un mot de vos nouvelles, que
vous m'escrires comm'amoy, c'est a dire vous mesme.
Ce pendant, mon cher enfant, ma mie, Dieu vous benisse, Dieu vous prospere, Dieu soit le
tres uniqu'amour de nostre tres unique cœur. Il faut bien que je vous die que ce matin a la Messe,
j'ay prié pour nostre avancement en la pureté, perfection et unité d'esprit avec, certes, un'ardeur
extraordinaire ; mais en cela, les extraordinaires me sont presqu'ordinaires. Apres disné, le P.
Prieur des Feuillans143 m'a donné beaucoup de consolation par [41] la bonn'opinion quil a d'un
137 Ce projet que le Saint passionnait, visait apparemment le prieuré de Talloires, où Aiazza songeait peut-être à
introduire les Feuillants comme à Abondance. (Voir le tome précédent, p. 371.)
138 « Là où il y a de l'amour, il n'est rien de pénible, ou bien, s'il y a de la peine, elle est bien aimée. »
139 S. Aug., De Bono Viduit., c. XXI (Mig., t. XL, col. 447).
140 Voir ci-dessus, note (88), p. 19.
141 L'allusion au « triomphant Sauveur, » qui termine la lettre, désigne le temps pascal ; la convalescence de la Mère
de Chantal, la présence du Prieur des Feuillants et ses conjectures sur l'avenir de la Congrégation excluent la date de
1610 et désignent celle de 1611. Le haut de la page autographe a été coupé.
142 Ce membre de phrase a été interpolé par les éditeurs de 1626, dans le texte d'une lettre écrite vers le ro mai 1611 à
la Mère de Chantal. (Voir ci-après, note (181), p. 56.)
143 Dom Jean de Saint-Malachie (cf. tome XIII, note (40), p. 2), dont la note sera donnée plus tard ; ou plus
vraisemblablement, dom Jean de Saint-Pasteur, prieur d'Abondance en 1612. Le 18 mai de cette même année, nous
49/321

5.10 Page 50

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grand progres de nostre Congregation.
Bon soir, mon cher courage, mon enfant. Oüy, ma Fille, vous estes le courage de mon cœur
et le cœur de mon courage en ce doux et triomphant Sauveur qui l'a ainsy voulu, et que je supplie
employer le tout a sa gloire, unique praetention de mon cœur et de mon courage uniquement unique
en luy.
Le bon soir a nos cheres filles.
Revu sur l'Autographe conservé à la Visitation de Poitiers.
_____
DCLXXVIII. A Monseigneur Jean-Pierre Camus Évêque de
Belley. Recommandation en faveur d'un ancien serviteur
d'Antoine Favre
Annecy, 12 avril 1611.
Monseigneur,
Cet honnest'homme parisien a servi longuement, fidelement et aggreablement monsieur le
premier Praesident de Savoye, et pour quelque sujet hors de luy, il quitte maintenant ce service, et
a desiré de moy cette lettre pour vous faire la reverence en vous la presentant, estimant que, si
d'adventure vous avies besoin de quelque serviteur de sa sorte, par cett'occasion il pourroit entrer
au bien de l'estre. Or, Monseigneur, cet (sic) ainsy sans artifice que je vous dis l'artifice louable de
ce bon personnage, auquel je sçai bon gré dequoy, par ce moyen, je puis me ramentevoir en vostre
sainte, sacree et inviolable bienveuillance, a laquelle je me recommande [42] tres humblement, luy
dediant mon obeissance et service perpetuel.
Dieu vous conserve et comble de ses graces, Monseigneur, et je suis
Vostre tres humble et tres obeissant frere et serviteur,
FRANÇS, E. de Geneve.
XII avril 1611.
A Monseigneur
Monseigneur le Rme Evesque et Seigr de Belley,
Prince du St Empire.
Revu sur l'Autographe conservé à la Visitation de Meaux.
_____
voyons le Saint lui accorder d'amples pouvoirs pour les prédicateurs et les confesseurs Feuillants de son choix. Ce
digne Religieux avait gagné l'estime du saint Evêque par le zèle qu'il avait déployé dans le gouvernement de l'abbaye
confiée à sa direction, au départ des chanoines de Saint-Augustin. (Cf. tome XII, note (938), p. 373.)
50/321

6 Pages 51-60

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6.1 Page 51

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DCLXXIX. A M. Antoine des Hayes144. Premiers projets de
Denis de Granier ; son portrait. Les jeunes gens et les
difficultés. Menaces de guerre.
Annecy, 13 avril 1611.
Monsieur,
Outre que je ne sçaurois pouvoir me ramentevoir en vostre bienveuillance et ne le faire pas,
je suis bien ayse de vous donner advis comme, sur ce que M. de Charmoysi, mon cousin, m'avoit
dit touchant vostre desir de me voir le Caresme prochain a Paris, j'ay escrit a son Altesse145 ; en
sorte que j'espere en peu de jours avoir une response absolue, laquelle, si elle est selon nostre gré,
je pourray justement croire que Dieu l'aura voulu d'une volonté speciale, puisque la concurrence
des affaires du monde me sera peu favorable, comme je pense. Mais [43] pensés, Monsieur, quel
contentement pour moy de pouvoir encor une bonne fois jouir de la douceur de vostre presence.
Au demeurant, j'ay avec moy un jeune homme d'Eglise, neveu de feu Monsieur le
Reverendissime mon predecesseur146, qui s'est immaginé qu'a l'adventure il pourroit entrer par delà
au service de quelques jeunes seigneurs pour leur instruction, et par ce moyen estudier aussi ; et
m'a tant pressé, sachant en quelle confiance je suis avec vous, que j'ay esté contraint de luy
promettre de vous supplier de me donner quelque advertissement si cela pourroit estre. Mais
j'adjouste pourtant, qu'encor que ce jeune homme soit de fort bonne mayson (mais mayson
descheuë) et qu'il ait l'esprit fort gentil et bien estudié, si est-ce que c'est plus son jugement qui le
porte a ce desir que non pas mon advis, qui est que son courage n'est pas pour entrer en ladite
sujettion que telle condition requiert. Mais les jeunes gens devorent toutes les difficultés de loin et
fuyent a toutes les difficultés de pres.
Or, Monsieur, il me suffira, s'il vous plaist, de m'escrire un mot qui le puisse aucunement
desabuser, car il est force de traitter avec luy ; affin que, sans [se tourmenter] de vous prier147, il
attende que Dieu luy pourvoye des moyens de nager a ses despens ; ce qui sera bien tost, puisque
j'en voy des-ja la semence paroistre sur le champ, qu'il seroit prest a recueillir des maintenant, si
la jeunesse luy eust permis d'estre aussi arresté ci devant comme il est resolu de l'estre dores-en-
avant.
Monsieur, je m'interesse avec vous et use librement de ce petit artifice en faveur dé ce jeune
homme, que je dois affectionner pour l'esperance qu'il donne de devoir reüscir, et sur tout a la
memoire que je dois a Monsieur [44] son oncle. Vous interpreteres le tout en bonne part, comme
d'un cœur qui prend toute confiance au vostre.
Nous sommes icy sans nouvelles, mais non pas sans menaces [de ceux de Genève] de faire
beaucoup de maux a nos eglises148 ; mais la protection de laquelle ilz font profession de tirer leur
force, ne leur sera, comme j'espere, jamais donnee pour ces miserables effectz. Dieu nous veuille
donner « la paix que le monde ne peut donner149, » et vous conserve, Monsieur, longuement et
heureusement, selon le souhait de
Vostre tres fidele et tres obeissant serviteur,
144 Il semble hors de doute que le destinataire soit des Hayes. Tout le désigne : le ton de la lettre, les allusions à M. de
Charmoisy et au Carême de Paris, et surtout la mention de Denis de Granier que nous retrouverons en 1612 dans les
lettres à « l'arch'intime » du Saint.
145 Epist. DCLXXV.
146 Ce « jeune homme d'Eglise, » qui donnait déjà des inquiétudes à ses protecteurs, est Denis de Granier, fameux par
ses aventures. (Voir le tome précédent, note (1000), p. 344.) Il en sera parlé plus tard.
147 Le texte de cette lettre donné par Hérissant, défectueux manifestement en plusieurs endroits, a été rectifié ici et là
sans hésitation ; mais cette phrase l'édition de 1758 porte : « sans ce tourment de vous prier, » ne saurait être
donnée, quoiqu'intelligible, pour celle de l'Autographe.
148 Voir ci-dessus, note (119), p. 31, et note (121), p. 32.
149 Orat. pro Pace.
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6.2 Page 52

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Ce 13 avril 1611.
_____
FRANÇS, E. de Geneve.
DCLXXX. A M. Jacques de Bay. Un père de famille désire que
son fils achève ses études au collège de Savoie à Louvain. Le
Saint sollicite l'admission du jeune étudiant
Annecy, 26 avril 1611.
Monsieur,
Le sieur Martinet, conseiller de Son Altesse et maistre de la Chambre des Comtes de
Savoye150, sachant avec combien de prudence et de soin les jeunes gens sont [45] conduitz et
gouvernés sous vostr'authorité et direction dans vostre college, il desireroit grandement que son
filz, qui a des-ja fait son cours en philosophie, eüt le bien d'y estre receu et retiré, affin que plus
heureusement il acheve ses estudes151 ; et cela, sans aucunement charger la despense du college,
puisque pour icelle, il prouvoyeroit de la pension et fourniture requise.
Or, estimant que, comme je vous honnore et cheris devant un chacun, aussi soys-je aymé
et cheri de vous, il a desiré que j'intercedasse pour cet effect aupres de vous. Ce que je fays, vous
priant, autant quil se peut, de recevoir ce filz-lâ a ma contemplation et comme filz d'un pere plein
d'honneur et de merite ; en quoy vous accroistres le nombre des obligations que je vous ay, pour
lesquelles je prie Nostre Seigneur vous combler de ses graces, et suis en luy,
Monsieur,
Vostre humble confrere et serviteur,
FRANÇS, Evesque de Geneve.
Annessi, le XXVI avril 1611.
A Monsieur
Monsieur de Bai,
Docteur et lecteur en theologie a Louvain,
President du College de Savoye, Chancelier de l'Université, Doyen de St Pierre.
Revu sur l'Autographe conservé à Bruxelles, Bibliothèque des PP. Bollandistes. [46]
_____
150 Le « sieur Martinet, » fils de maître Pierre Martinel, bourgeois de Seyssel, procureur au Sénat de Savoie, et de
dame Louise Magnin, avait épousé Dlle Georgine Bonier, qui était veuve de lui en 1636. Conseiller de Son Altesse et
maître auditeur à la Chambre des Comptes, par patentes du 33 avril 1598, il fut aussi commissaire député à la
réformation des tailles en Maurienne. Ascanio Martinel eut trois fils : Annibal-François, baptisé le 35 avril 1606, qui
entra dans la Compagnie de Jésus ; Georges-Louis (voir la note suivante) et Jean, conseiller de Son Altesse, «
commissaire des guerres deçà les monts, » qui épousa Jeanne-Françoise Sardo et mourut avant 1661.
151 L'étudiant pour lequel intercédait le Saint, devint chanoine de Genève. Il figure dans un acte du 24 mars 1615,
comme demeurant et étudiant à Chambéry. A cette même date, il lui fut délivré des lettres dimissoriales pour recevoir
tous les Ordres depuis la tonsure jusqu'à la prêtrise. (R. E.)
52/321

6.3 Page 53

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DCLXXXI. A la Mère de Chantal. L'échange du Cœur du
Sauveur avec celui d'une « benite Sainte. » François de Sales
désire pour lui et souhaite à la Mère de Chantal la même faveur
Annecy, 29 avril [1611 152.]
Je m'en vay a l'autel, ma chere Fille, ou mon cœur respandra mille souhaitz pour le vostre
; ou plustost, nostre cœur respandra mille benedictions sur soy mesme ; car je parle plus
veritablement ainsy.
O Dieu, ma chere Seur, ma Fille bienaymee, a propos de nostre cœur, que ne nous arrive-
il comme a cette benite Sainte de laquelle nous commençons la feste ce soir, sainte Catherine de
Sienne, que le Sauveur nous ostast nostre cœur et mist le sien en lieu du nostre ! Mais n'aura-il pas
plus tost fait de rendre le nostre tout sien, absolument sien, purement et irrevocablement sien ? Oh
qu'il le face, ce doux Jesus ! je l'en conjure par le sien propre et par l'amour qu'il y enferme, qui
est l'amour des amours. Que s'il ne le fait (oh ! mais il le fera sans doute, puisque nous l'en
supplions), au moins ne sçauroit-il empescher que nous ne luy allions prendre le sien, puisqu'il
tient encor sa poitrine ouverte pour cela. Et si nous devions ouvrir la nostre, pour, en ostant le
nostre, y loger le sien, ne le ferons-nous pas ?
Qu'a jamais son saint nom soit beni153 ! [47]
_____
DCLXXXII. Au Président Antoine Favre. Les appréhensions et
les difficultés d'un voyage à Gex. Les exigences du service
de Dieu et des âmes, plus impérieuses encore
Annecy, 30 avril 1611.
Monsieur mon Frere,
Ce porteur vous dira que j'ay un peu d'apprehension de faire le voyage de Gex, auquel
neanmoins mon devoir m'oblige, puisque c'est pour le restablissement de l'eglise a Divonne, lieu
fort important en ce païs-la. Le rencontre du bruit de guerre, qui n'est pas encor esteint154, du refus
des passages et de ces fausses nouvelles qui ont couru ces jours passés, me semble estre mal a
propos pour cett'occasion d'aller hors l'Estat et parmi monsieur le Grand et monsieur de Lux155 ;
mais je ne vois point de suffisant pretexte pour m'excuser de ce service de Dieu et des ames156.
Seulement, je m'essayeray d'estre court et revenir le plus vistement qu'il se pourra. J'en escris un
152 Le quantième est indiqué par la fête de sainte Catherine de Sienne, et l'appellation de « Seur » fait penser à 1611,
car celle-ci ne paraît plus à partir de 1612.
153 Cette phrase, qui termine ce billet complet, croyons-nous, est suivie dans l'édition de 1626, d'une pièce étrangère.
Hérissant (1758), en reproduisant au tome IV, p. 479, cette fabrication, ajoute la date de 1622, erreur qui a été répétée
par tous les éditeurs venus après lui. Migne, toutefois, au tome IX, col. 84, donne à part la lettre interpolée, avec la
date justifiée du 28 janvier 1615.
154 Tous ces bruits de guerre qui préoccupaient à cette date l'opinion publique en Savoie, venaient des préparatifs de
Charles-Emmanuel, toujours hanté du désir de surprendre Genève. Les fermes représentations de la cour de France
firent avorter son dessein. (Cf. Mugnier, Correspondance du Président Favre, tome Ier, février-avril 1611.)
155 Monsieur le Grand (le duc de Bellegarde) et le baron de Lux s'inspirant des ordres de Marie de Médicis pour arrêter
les menées de Charles-Emmanuel, le prudent Pasteur pouvait craindre d'alarmer, par le seul fait de les rencontrer,
l'esprit soupçonneux de son prince. (Voir la Lettre DCXCV, la juin 1611, an duc de Savoie.)
156 Le Saint fit en effet ce voyage quelques jours après. Il se mit en route le 5 mai et rencontra à Gex le duc de
Bellegarde. (Voir Lettres DLXXXVII, DCLXXXVIII, DCXC.)
53/321

6.4 Page 54

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mot a monsieur le Marquis de Lans157, ad cautelam, si vous le treuves bon158.
J'oubliay de dire a mon frere de la Thuille que monsieur [48] d'Abondance159 vouloit faire
que le Pape prieroit Son Altesse de vouloir quil vous employast a la response du livret160, et cela
a mon advis, ira mieux. Je suis sans fin ni reserve,
Monsieur mon Frere,
Vostre tres humble frere et serviteur,
FRANÇS, E. de Geneve.
XXX avril 1611.
A Monsieur
Monsieur le premier President de Savoye161.
Revu sur une copie conservée à Turin, Archives de l'Etat.
_____
DCLXXXIII. Au Marquis de Lans162. Le Saint donne avis de son
voyage à Gex.
Annecy, 30 avril 1611.
Monsieur,
Estant appellé pour restablir le saint exercice de la foy en une bourgade du pais de Gex163,
qui est de mon diocese, [49] mais hors de l'obeissance de Son Altesse Serenissime, j'ay voulu,
avant mon depart, donner connoissance a Vostre Excellence de ce petit voyage auquel ma charge
m'oblige, affin qu'en toutes occasions j'observe tant quil me sera possible les loix de mon devoir.
Dieu veuille a jamais benir Vostre Excellence, delaquelle je suis,
Monsieur,
Tres humble et tres affectionné serviteur en Nostre Seigneur,
FRANÇS, E. de Geneve.
XXX avril 1611.
A Monsieur,
Monsieur le Marquis de Lans, Lieutenant general,
Chevalier de S. A. deça les monts.
157 Epist. seq
158 Le marquis de Lans avait été nommé gouverneur et lieutenant-général en Savoie le 13 avril, et le 25 il avait présenté
en personne au Sénat sa lettre de commandement.
159 Vespasien Aiazza, abbé d'Abondance.
160 Ce « livret » et la réponse avaient-ils pour objet la question du pouvoir temporel des Papes, si passionnément agitée
en ce temps-là ? Nous n'avons pu le savoir. Le « livret » pourrait être l'ouvrage de Richer : De Ecclesiastica et politica
potestate liber, très petit par le nombre de pages, mais fort pernicieux par les erreurs qu'il soutenait contre le Siège
apostolique.
161 De ces mots, de Savoye, mal lus, l'éditeur Migne (tome VI, col. 954) et avant lui, le copiste italien, ont fait :
Desaugier !
162 Sigismond d'Est, marquis de Saint-Martin, de Lans, etc., né en 1577 de Philippe d'Est, marquis de Lans, et de Marie
légitimée de Savoie, fille d'Emmanuel-Philibert. Il épousa Françoise Gauthier d'Hostel et de Thesieu, et mourut en
1627. Le marquis de Lans s'attacha au duc de Savoie, son oncle, dont il servit quelquefois les intérêts avec plus de
dévouement que de clairvoyance. Chef de sa noblesse, général de sa cavalerie, lieutenant-général et gouverneur de
Savoie, il accompagna Charles-Emmanuel en 1599, lorsque celui-ci vint en France négocier l'affaire du marquisat de
Saluces, et fut son ambassadeur en France (1617). Le prince Thomas lui succéda à la fin de 1621 dans sa lieutenance
de Savoie, et le retrait de cette charge fut sans doute une disgrâce, car son mariage avait déplu à la cour de Turin. (Cf.
Moreri, 1740 ; Guichenon, Hist. généal, de la royale Maison de Savoie, tome II.) Nous verrons dans la suite de la
correspondance du Saint, que celui-ci n'eut pas toujours à se louer de la bienveillance du marquis.
163 Vid. Epist. præced.
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6.5 Page 55

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Revu sur l'Autographe conservé à Florence, Bibliothèque Magliabecchiana
(Autografi Gonnelli, n° 8).
_____
DCLXXXIV. A Madame de Vignod, Religieuse de l'abbaye de
Sainte-Catherine. Divin échange. Ce qu'il est utile d'imiter
dans la vie de sainte Catherine de Sienne. Dieu seul mérite
d'être servi et suivi avec passion. La Communion fréquente et
les âmes faibles. Ce que font les bergers en Arabie.
L'obéissance assure la protection de Notre-Seigneur
Annecy, 30 avril [1611 164.]
Nostre Sauveur vous arrache le cœur, comme il fit a la devote sainte Catherine de Sienne
de laquelle nous [50] faysons ce jourdhuy la feste, pour vous donner le sien tres divin, par lequel
vous viviés toute de son saint amour. Quel bonheur, ma tres chere Seur, si quelque jour, au sortir
de la sainte Communion, je treuvois mon chetif et miserable cœur hors de ma poitrine, et qu'en sa
place fut establi ce pretieux cœur de mon Dieu ! Mais, ma chere Fille, puisque nous ne devons pas
desirer des choses si extraordinaires, au moins souhaitte-je que nos pauvres cœurs ne vivent plus
desormais que sous l'obeissance et les commandemens du cœur de ce Seigneur. Ce sera bien asses,
ma chere Seur, pour, en ce fait, imiter utilement sainte Catherine ; et en cette sorte, nous serons
doux, humbles et charitables, puisque le cœur de nostre Sauveur n'a point de loix plus affectionnees
que celles de la douceur, humilité et charité165.
Vous seres bienheureuse, ma tres chere Seur, ma Fille, si parmi toutes ces fadaises de
partialités, vous vives toute en vous mesme pour Dieu (Dieu, qui seul aussi merite d'estre servi et
suivi avec passion) ; car ainsy faysant, ma chere Seur, vous donneres bon exemple a toutes et
gaignerés la sainte paix et tranquillité pour vous mesme.
Laissés, je vous supplie, philosopher les autres sur le sujet que vous aves de communier ;
car il suffit pour vostre conscience, que vous et moy sçachions que cette diligence de revoir et de
reparer souvent vostre ame est grandement requise pour la conservation d'icelle. Et si vous en
voules rendre conte a quelqu'une, vous luy pourres bien dire que vous aves besoin de manger si
souvent cette divine viande parce que vous estes fort foible et que, sans ce renforcement, vostre
esprit se dissiperoit aysement. Cependant continués, ma tres chere Seur, a bien serrer ce cher
Sauveur sur vostre poitrine ; faites qu'il soit le [51] beau et le suave bouquet dessus vostre cœur,
en sorte que quicomque vous approche sente que vous en estes parfumee et connoisse que vostre
odeur est l'odeur de la myrrhe166.
Tenés vostre esprit en paix, non obstant cet embarrassement qui est autour de vous.
Remettés a la plus secrette providence de Dieu ce que vous treuveres de malaysé, et croyés
fermement qu'il fera une douce conduite de vous, de vostre vie et de toutes vos affaires.
164 Les anciennes éditions donnent pour adresse : A une Dame ; Hérissant (1758), tome VI, p. 20 : A une Dame, saur
de saint François de Sales, sans doute parce que le Saint appelle « Seur » la destinataire. Or il est évident que celle-ci
est une Religieuse et qu'elle vivait en communauté. Le genre des conseils proposés, le style de la lettre font penser au
monastère de Sainte-Catherine et à Bernarde de Vignod. Toute autre attribution justifierait moins bien le ton et la
teneur de la présente lettre.
La date est déduite, mais avec moins de probabilité, des invitations à la Communion fréquente et du rapport
de la lettre avec celle du 29 avril précédent (voir p. 47), adressée à la Mère de Chantal.
165 Cf. Matt., XI, 29.
166 Cf. Cant., I, 12.
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Sçavés-vous ce que font les bergers en Arabie quand ilz voyent esclairer, tonner et l'air
chargé de foudres ? Ilz se retirent sous les lauriers, et eux et leurs troupeaux. Quand nous voyons
que les persecutions ou contradictions nous menacent de quelque grand desplaysir, il nous faut
retirer, et nous et nos affections, sous la sainte Croix, par une vraye confiance que tout reviendra
au prouffit de ceux qui ayment Dieu167.
Or sus, ma chere Fille, ma Seur, tenés bien vostre cœur ramassé, gardés-vous fort des
empressemens. Jettés souvent vostre confiance en la providence de Nostre Seigneur168 ; soyés
toute asseuree que plustost le ciel et la terre passeront169, que Nostre Seigneur manque a vostre
protection, tandis que vous serés sa fille obeissante, ou au moins desireuse d'obeir. Deux ou troys
fois le jour, pensés si vostre cœur est point inquieté de quelque chose, et treuvant qu'il l'est, taschés
soudain a le remettre en repos.
A Dieu, ma chere Fille ; Dieu soit a jamais au milieu de vostre cœur.
FRANÇS, E. de Geneve. [52]
_____
DCLXXXV. A la Présidente Brulart. Progrès spirituel de la
Mère de Chantal. Les tribulations et la sainteté. Qu'est-ce
qui approche Notre-Seigneur de nos cœurs
Annecy, avril 1611 170.
Ma tres chere Seur,
Escrivant a monsieur vostre mary en recommandation d'un mien amy, chanoine de Lyon171,
je vous fay ce petit billet pour tout simplement vous saluer de tout mon cœur, non seulement en
mon nom, mais de la part encor de la chere et bonne seur madame de Chantal, laquelle va de bien
en mieux pour sa santé et, pour le dire encor entre nous deux, pour sa sainteté, a laquelle les
tribulations et maladies sont fort propres pour donner de l'avancement, a cause de tant de solides
resignations qu'il faut faire es mains de Nostre Seigneur.
Vivés toute pour Dieu, ma chere Fille, et puisqu'il faut que vous vous exposies a la
conversation, rendés-vous y utile au prochain par les moyens que souvent je vous ay escritz. Et ne
pensés pas que Nostre Seigneur soit plus esloigné de vous tandis que vous estes emmi le tracas
auquel vostre vocation vous porte, qu'il ne seroit si vous estiés dans les delices de la vie tranquille.
Non, ma tres chere Fille, ce n'est pas la tranquillité qui l'approche de nos cœurs, c'est la fidelité de
nostr'amour ; ce n'est pas le sentiment que nous avons de sa douceur, mais le consentement que
nous donnons a sa sainte volonté, laquelle il est plus desirable qu'elle soit executee en nous, que si
nous executions nostre volonté en luy. [53]
Bon jour, ma tres chere Seur, ma Fille. Je prie cette souveraine Bonté qu'elle nous face la
grace de la bien chercher par amour, et suis en elle tout entierement,
Madame,
Vostre tres humble serviteur,
167 Rom., VIII, 28.
168 Cf. Ps. LIV, 23.
169 Matt., XXIV, 35.
170 Le recours au mari de sa correspondante, les salutations et les appellations du Saint, et aussi les conseils et les
encouragements donnés à la destinataire font croire que celle-ci est Mme Brûlart.
La date n'est pas donnée dans l'édition de 1641 ; elle a été ajoutée par Hérissant (1758). Les allusions de la
lettre paraissent la justifier, mais ne permettent pas de la préciser davantage.
171 Ce chanoine serait-il Louis de Sacconay (voir tome XI, note (697), p. 305), ou bien M. de Médio, chanoine de
Saint-Nizier de Lyon ? (Voir tome XII, note (88), p. 49.)
56/321

6.7 Page 57

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_____
FRANÇS, E. de Geneve.
DCLXXXVI. A la Présidente Favre (Inédite). L'ambition d'un
prédicateur de Carême. — Les cœurs simples et humbles, et la
Croix
Annecy, 2 mai 1611.
Ce seroit une faute inexcusable, ma tres chere Seur, ma Fille, de laisser partir un porteur si
fidelle sans luy donner une lettre pour vous. Vrayement je m'en res-jouis aussi dequoy bien tost
nous aurons le bien de vous voir icy, en attendant le Caresme prochain172, auquel sans doute je
porteray une extreme affection de gaigner beaucoup d'ames a Celuy qui, pour les gaigner toutes,
voulut bien perdre sa tres digne vie sur la croix. Mais, ma chere Seur, voules vous bien que je vous
die ma pensee ? Je crains infiniment de rencontrer trop de sagesse. Certes, c'est grand cas comme
la Croix ayme les cœurs simples et humbles. Neanmoins, c'est le Sauveur que je presche173, lequel
remplit les vallees et explane ou abbaisse les montagnes174.
Dieu vous benisse, ma tres chere Seur, ma Fille. Je suis tout en luy, [54]
Vostre plus humble frere et serviteur,
FRANÇS, E. de Geneve.
2 may 1611.
A Madame la premiere Presidente de Savoye.
Revu sur une copie conservée à la Visitation de Montélimar. [54]
_____
172 Vide supra, Epist. DCLXXV, et Epist. seq.
173 Cf. I Cor., I, 23.
174 Isaiæ, XL, 4 ; Luc., III, 5.
57/321

6.8 Page 58

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DCLXXXVII. Au Président Antoine Favre. Le Saint s'en remet
à son ami pour informer le Sénat qu'il accepte l'invitation de
prêcher le Carême de 1612
Annecy, 4 mai 1611.
Monsieur mon Frere,
Voyla, dans cette lettre que j'addresse a Messieurs du Senat175, la promesse que je leur fay
du saint service qu'ilz ont desiré de moy176. Monsieur de Monthouz177 m'a prié de la luy envoyer,
affin quil la rende, puisqu'il a eu charge de me donner la demande. Mays vous en feres a vostre
gré, car a cett'intention je vous confie le tout, vous estant des-ja tout confié moymesme, comme
Dieu et les hommes sçavent.
J'escris simplement qu'ouy, et n'ay pas eu le courage, ou pour mieux dire la temerité,
d'entreprendre de contrepointer les belles pointes de la lettre que j'ay receue en leur nom. Sil vous
plait d'enrichir mon offrande de complimens, vous le pourres faire en asseurance, car vous ne
devanceres point mon affection par tous les ornemens avec lesquelz vous l'exprimeres. [55]
Je pars demain pour Gex178, avec le congé de monsieur le Marquis179, et suis sans fin ni
reserve,
Vostre tres humble frere et serviteur,
F., E. de Geneve.
4 may 1611.
A Monsieur
Monsieur Favre, Baron de Peroges,
Conseiller d'Estat de S. A., premier President de Savoye.
Revu sur l'Autographe conservé à la Visitation du Mans.
_____
175 On comptait alors dans le Sénat dix-huit membres, parmi lesquels figuraient le premier président, Antoine Favre ;
Antoine de Passier et Geoffroy de Bavoz, deuxième et troisième présidents ; Jean-François de Buttet, François-Nicolas
de Riddes, Claude-Louis Guillet de Monthoux, Antoine de Lescheraine, René Favre, etc., sénateurs ; Pierre Favier,
avocat général, et Jean-Antoine Bay, procureur général. (Chambéry, Reg. des Entrées du Sénat.)
176 Le Sénat avait demandé à saint François de Sales de prêcher le Carême de 1612 à Chambéry. (Voir ci-dessus,
Lettres DCLXXV, DCLXXXXVI.)
177 Claude-Louis Guillet, coseigneur de Monthoux, seigneur de Pougny, de Marcossay, etc., fils de Guy, seigneur de
Monthoux, et de Louise Bay, devint avocat patrimonial à la Chambre des Comptes le 21 mars 1608, conseiller d'Etat
de Son Altesse et sénateur le 31 octobre 1609, deuxième président du Sénat le 3 juin 1621. Il épousa Dlle Gabrielle
Dyan. Ambassadeur du duc à Berne à l'occasion des affaires de la Valteline (1625-1626), M. de Monthoux fut, depuis
cette époque, à peu près toujours en mission. Il mourut à l'étranger en 1631, durant l'occupation de la Savoie par Louis
XIII. Sa veuve lui survécut, se retira en 1662 chez les Carmélites et y mourut en 1673.
178 Vide supra, Epist. DCLXXXII.
179 Le marquis de Lans (voir ci-dessus, Lettre DCLXXXIII).
58/321

6.9 Page 59

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DCLXXXVIII. A la Mère de Chantal. La religion catholique à
Gex ; espérance de l'y voir refleurir. L'apostolat du Saint ; un
résultat qu'il n'estime pas médiocre
Gex, vers 10 mai 1611 180.
……………………………………………………………………………………………………..
Dieu, qui en cela m'assiste, veuille retirer et ma personne et mes actions a sa gloire et a son
honneur, selon nostre souhait.181
Sa Bonté me fait savourer des douceurs, certes, extraordinaires et suaves et qui ressentent
au lieu d'ou elles viennent. O que nostre Sauveur est bon et comme il traitte tendrement avec mon
pauvre chetif courage ! Mays je suis bien resolu de luy estre fort fidele, et specialement au service
de nostre cœur que, plus sensiblement que jamais, je voy et sens estre unique. O Dieu, ma chere
Fille, qui pouvoit mesler si parfaitement deux [56] espritz qui ne fussent qu'un seul esprit,
indivisible, inseparable, sinon Celuy qui est unité par essence ?
Les affaires de la religion, qui s'accroissent icy tous les jours, me feront arrester plus
longuement que je ne pensois, ma tres chere Fille ; mais certes tres aggreablement, puisque c'est
pour la gloire de Dieu et le service des ames qu'il a rachetees, lesquelles, en divers lieux de ce
balliage, demandent qu'on leur restablisse le saint exercice. Mon Dieu, ma tres chere Fille, que ce
m'est une honnorable et douce peyne que celle-cy, qui me fait esperer que, sinon maintenant, au
moins par ci apres, tout ce païs pourra estre purgé de tant d'infection que le malheur de l'heresie y
avoit assemblé.
Hier nous restablismes le saint exercice a Divonne182, gros et beau village. Ces jours
suivans, il y a apparence d'en faire de mesme en deux autres183, et outre cela, nous prescherons icy
et parlerons a quelques ames desvoyees ; et bien que peut estre ne les reduirons-nous pas, parce
que, pour l'ordinaire, les considerations humaines empeschent celles de leur salut, si est-ce que
nous ne pensons pas peu faire quand nous leur faysons confesser que nous avons rayson, comme
plusieurs ont fait jusques a present. Priés particulierement ce Sauveur, ma tres unique Fille, pour
la conversion de ceux pour lesquelz j'ay commencé de travailler, affin qu'ilz voyent la sainte verité,
sans laquelle ilz ne sçauroyent que se perdre.
Mille et mille fois le jour mon cœur se treuve chez vous, avec mille et mille souhaitz qu'il
respand devant Dieu pour vostre consolation. Hé, Seigneur Jesus, vivés et regnés eternellement
dans ce cœur que vous nous aves donné.
Vostre tres affectionné serviteur,
FRANÇS, E. de Geneve. [57]
_____
180 Les éditeurs de 1626 et les suivants donnent un texte fabriqué : les premiers, sans date ; Vivès et Migne, avec la
date de « vers le 20 novembre 1613. » Or, la première partie de ce texte est du 7 décembre 1611 ; la seconde partie
constitue la présente lettre incomplète, et sa vraie date est celle que nous indiquons. Elle est toute prouvée par les
paroles du Saint : « Hier nous « restablismes le saint exercice a Divonne. » Ce rétablissement eut lieu dans la première
quinzaine de mai 1611.
181 Ici, les éditeurs précédents interpolaient la phrase indiquée note (142), p. 41.
182 Cf. ci-après, Lettre DCXC.
183 L'une de ces « deux autres » paroisses est Challex ; le duc de Bellegarde le dit formellement dans sa réponse à la
Seigneurie de Genève, le 20 mai 1611 (Archiv. de Genève, Pièces hist., n° 2443). Le saint Evêque ne put rétablir le
culte dans la troisième, puisque le 15 juin suivant il écrit : « J'eu la consolation... de reconcilier deux eglises
parrochiales. »
59/321

6.10 Page 60

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DCLXXXIX. A M. Jean de Chatillon184 (Inédite).
Recommandation en faveur d'un solliciteur dans la gêne.
Gex, 15 mai 1611.
Monsieur,
Je vous prie d'avoir en recommandation ce porteur pour tout ce que justement il pourra
desirer de vostre faveur185. Sa pauvreté me porte a cette priere, comme vos merites me feront tous-
jours tesmoigner que je suis,
Monsieur,
Vostre humble confrere en Nostre Seigneur,
FRANÇS, E. de Geneve.
XV may 1611, a Gex.
A Monsr
Monsr de Chatillon,
Docteur en theologie, Plebain de Thonon.
Revu sur l'Autographe conservé à Paris, chez les Dames de Saint-Maur. [58]
_____
184 Jean de Châtillon, né vers 1572, fut nommé le 4 juillet 1609, n'étant encore que diacre, plébain de l'église de Notre-
Dame de Compassion et de Saint-Hippolyte de Thonon, et reçut le 19 septembre suivant ses lettres dimissoriales de
prêtrise. Son acte de sépulture porte la date du 31 mars 1633. (R. E. et Reg. par. de Thonon.) Il était un des
administrateurs de la Sainte-Maison ; aussi le Saint eut souvent recours à lui pour en obtenir des secours en faveur de
ses protégés.
185 Ce porteur pourrait être quelque nouveau converti du bailliage de Gex.
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DCXC. Au grand-prieur et aux Religieux de Saint-Claude186. La
chrétienté de Divonne et les frais dn culte sont confiés au zèle
des Religieux de Saint-Claude.
Gex, 17 mai 1611.
Messieurs,
J'ay pris ma bonne part du contentement que messieurs vos confreres187 ont eu au
restablissement du saint exercice en l'eglise d'Ivonne, ou je ne doute point que vous ne facies de
plus en plus paroistre le zele que vous aves au service de Nostre Seigneur, comme je vous supplie
faire au soin du redressement et ameublement [59] de l'autel188 ; et de mesme en la diligence de
prouvoir le curé189 de l'entretenement qui luy est requis, lequel, affin quil ne demandast que
raysonnable, je luy ay taxé conformement a celuy que vous donnés au curé de Sessi190.
Au demeurant, je prie sa divine Majesté qu'elle vous comble de ses plus desirables faveurs,
et ay un tres grand desir de pouvoir un jour, ains toute ma vie, tesmoigner combien je vous honnore,
et suis,
Messieurs,
Vostre bien humble confrere et serviteur en Nostre Seigneur,
FRANÇS, E. de Geneve.
186 La célèbre abbaye de Saint-Claude, fondée par saint Romain et saint Lupicin son frère vers 430, fut enrichie par
les rois de France de nombreux dons et privilèges. Le premier monastère, qui portait le nom de Condat, prit celui de
saint Oyend, le quatrième abbé, mort vers 510, après l'avoir fait reconstruire. Mais sa gloire et son nom disparurent
devant la popularité de saint Claude, abbé de Saint-Oyend pendant cinquante-cinq ans, qui mourut en 694, presque
centenaire. La Règle des premiers jours se fondit plus tard avec celle de saint Benoît, et dès lors la vie monastique se
développa dans la terre de Saint-Claude avec une ferveur croissante. Au XIIIe siècle commença la décadence que les
règlements ne purent arrêter. En 1742, l'abbaye fut sécularisée ; les Religieux furent remplacés par des chanoines, et
ceux-ci dispersés à leur tour par un décret de suppression, le 23 octobre 1790.
En 1611, l'abbaye était gouvernée par Claude de la Mar. Issu d'une très ancienne famille noble d'Yenne
(Savoie), il était fils de noble Claude, seigneur de la Mar, commissaire de l'artillerie de la citadelle de Bourg, et
d'Urbane de Richard de Chanaz. C'est lui sans doute qui reçut saint François de Sales et sainte Jeanne-Françoise de
Chantal, quand ils firent leur célèbre pèlerinage, car il entra en charge dès 1604 et l'exerça jusqu'à sa mort (1627).
Les Religieux de l'abbaye de Saint-Claude étaient tenus de faire preuve de noblesse. Dans un acte capitulaire
du 18 avril 1620, on lit les signatures suivantes : « Anathole de Scey, chantre ; Africain de Croisier, infirmier : François
de la Rochelle, sacristain ; Louis du Saix, chambrier ; François de Chissey, » etc. (Voir D. Benoit, Hist. de l'Abbaye
et de la Terre de St-Claude, 1890-1892.)
187 Ce sont les Religieux du prieuré de Divonne, dont la fondation n'est pas antérieure à 1225. Dévasté par les Bernois,
puis possédé en 1543 par M. de Gingins, seigneur du lieu, il retomba en 1601 sous la juridiction monastique. Antoine
de Senailly, Religieux de Saint-Claude, en devint prieur le 33 août de cette même année. Le Chapitre obtint bientôt
que le prieuré de Divonne fût uni à la mense conventuelle, par bulle fulminée le 8 février 1607(voir D. Benoît, ouvrage
cité). Le 1er mai 1620, François de Sales céda aux Religieux de Saint-Claude ses droits sur le prieuré ; il les tenait
d'une rente de 300 écus dont ce prieuré était grevé. (Archiv. dép. de la Haute-Savoie, Minutes Duret.)
188 Au dire de l'historien de l'abbaye de Saint-Claude, celle-ci « contribua, par des sommes importantes, à la réparation
» et à l'ornementation « des églises de Cessy et de Divonne, » non moins qu'à « l'entretien des ministres catholiques.
» Toutefois, daps sa lettre du 15 juin 1611, l'Evêque de Genève écrit : A Gex, « Messieurs de Saint-Claude... n'ont
rendu, que je sache, aucun « service comparable a celuy que nos chanoynes ont fait. » (Voir à l'Appendice, la
réponse des destinataires, 20 mai 1611.)
189 Le P. Charles de Genève (Hist. abrégée des Missions des PP. Capucins de Savoye, Chambéry, 1867, p. 231) dit
qu'en 1612 « M. Nambride » était « curé de Divonne ; » il semble donc très probable qu'il l'était dès 1611. On peut
croire que cet ecclésiastique exerça ce ministère jusqu'en 1621, d'après la pièce suivante, signée par saint François de
Sales : « Nous commettons par ces presentes, venerable Mre Claude de Nambruide, curé de Divone, a l'administration
et œconomie des biens ecclesiastiques du balliage de Gex non appliqués ny assignés aux eglises de Farges, Gex,
Thoyri, Grilly, Chalex, Versoix, Divone, mais destinés aux autres eglises qui, pour le present, ne sont encor pourveues
de pasteurs. » Cette commission, conservée à la Visitation de Montélimar, porte la date du 17 décembre 1621.
190 Pierre Poncet, institué le 12 juillet 1611, sur la présentation des Religieux de Saint-Claude, résigna la cure de Cessy
et fut nommé à celle de Sacconex le 19 décembre 1618. (R. E.)
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A Gex, 17 may 1611.
A Messieurs,
Messieurs les Grand Prieur et Religieux de St Claude.
Revu sur l'Autographe conservé à Paris, Bibliothèque nationale,
Galerie Mazarine, vitrine XXXII, n° 324. [60]
_____
DCXCI. A la Mère de Chantal. Annonce du retour à Annecy
Gex, 19 mai 1611.
Je manque a ma parole, ma tres chere Fille, mais je ne manque pas au desir d'estre ce soir
a Neci. Ce sera demain, Dieu aydant, car les affaires191 le requierent ainsy. Or sus, en attendant,
bon soir, ma tres unique Fille ; Nostre Seigneur vous comble de son amour.
J'ay eu un peu de peyne pour la maladie de la petite tres chere seur192, bien que j'en espere
bonne issue. Je salue toutes nos filles. Mais vray, ma tres chere Fille, vous estes voyrement tout
uniquement et veritablement moy mesme.
Vive Jesus ! Amen.
19 may, a Gex.
_____
DCXCII. A la même. Effusions de ferveur. Fruit du mystère
de la Pentecôte. L'esprit de force et l'esprit de sagesse ;
l'amour sacré et la souveraine Unité
Annecy, [22 mai 1611 193.]
……………………………………………………………………………………………………..
Oste toy d'icy autour, o vent de bise, et viens, o vent de midy, et souffle dans mon jardin, et
les parfums [61] en sortiront abondamment194. O ma tres chere Fille, que je souhaitte ce gracieux
vent qui vient du midy de l'amour divin, ce Saint Esprit qui nous donne la grace d'aspirer a luy et
de respirer pour luy.
Ah ! que je voudrois bien vous faire quelque don, ma chere Fille ; mays, outre que je suis
si pauvre, il n'est pas convenable qu'au jour auquel le Saint Esprit fait ses presens, nous nous
amusions a vouloir faire les nostres ; il ne faut entendre qu'a recevoir au jour de cette grande
largesse. Mon Dieu, que j'en ay voyrement bien besoin de l'esprit de force ! car je suis, certes,
foible et infirme, dequoy neanmoins je me glorifie, affin que la vertu de mon Seigneur habite en
moy195. J'ayme mieux estre infirme que fort devant Dieu, car les infirmes, il les prend entre ses
bras et les fortz il les mene par la main. La Sapience eternelle soit a jamais dans nostre cœur, affin
que nous savourions les tresors de l'infinie douceur de Jesus Christ crucifié.
191 Voir les lettres précédentes.
192 Sans doute, la jeune baronne de Thorens.
193 Cette date est proposée sous toutes réserves, d'autant que le texte paraît composé de plusieurs fragments, et
quelques-uns de ceux-ci pourraient bien être de la fête de Pentecôte 1612, 10 juin.
194 Cant., IV, ult.
195 II Cor., XII, 9, 10.
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Dites a la grande fille196, que, comme moy, elle se glorifie en sa foiblesse, qui est toute
propre pour recevoir la force197 ; car, a qùi donner la force qu'aux foibles ?
Bon soir, ma tres chere Fille. Ce feu sacré qui change tout en soy, veuille bien transmuer
nostre cœur, affin qu'il ne soit plus qu'amour et qu'ainsy nous ne soyons plus aymans, mais amour
; non plus deux, mais un seul nous mesme, puisque l'amour unit toutes choses en la souveraine
Unité. A Dieu, ma chere Fille ; perseverons au desir de cette unité, de laquelle Dieu nous ayant
fait jouir des icy, autant, que nostre condition infirme le peut porter, il nous en fera plus
parfaitement jouissans au Ciel.
FRANÇS, E. de Geneve. [62]
_____
DCXCIII. A la même. Les armes et la devise de la Visitation.
La Congrégation est « vrayement un ouvrage du cœur de Jesus
et de Marie. » Ses armes symbolisent la soigneuse
mortification du cœur, propre à l'Institut
Annecy, 10 juin 1611.
Bon jour, ma tres chere Fille. Un accommodement qu'il me faut faire ce matin entre deux
de nos pasteurs de Gex198, me prive de la consolation d'aller voir mes plus cheres brebis et de les
repaistre moy mesme du Pain de vie. Voyla M. Rolland199 qui va suppleer a mon defaut. Toutefois,
il n'est [pas] asses bon messager pour vous porter la pensee que Dieu m'a donné cette nuit : que
nostre maison de la Visitation est, par sa grace, asses noble et asses considerable pour avoir ses
armes, son blason, sa devise et son cri d'armes. J'ay donq pensé, ma chere Mere, si vous en estes
d'accord, qu'il nous faut prendre pour armes un unique cœur percé de deux flesches, enfermé dans
une couronne d'espines, ce pauvre cœur servant d'enclaveure a une croix200 qui le surmontera, et
sera gravé des sacrés noms de JESUS et MARIE201.
Ma Fille, je vous diray a nostre premiere veuë mille [63] petites pensees qui me sont venues
sur ce sujet202 ; car vrayement, nostre petite Congregation est un ouvrage du cœur de Jesus et de
196 Sœur Marie-Jacqueline Favre.
197 Cf. ibid.
198 Etienne Dunant, curé de Gex (voir le tome précédent, note (67), p. 65), économe de l'Evêque de Genève pour les
églises de ce bailliage, et Humbert Curton, après un ministère de plusieurs années, avaient été institués tous les deux,
le 15 mai 1611, ce dernier pour desservir Farges et Asserens. (R. E.) Né seraient-ils pas les deux « plaideurs » dont
parle le Saint à la fin de sa lettre ?
199 Georges Rolland (voir tome XI, note (273), p. 117).
200 Le texte du Ms. de l'Année Sainte, souvent défectueux, portait : « servant dans l'enclaveure a une croix. » La version
que nous proposons est plus sûre.
201 Ce jour où le Saint donnait de telles armes et une telle devise à sa chère Congrégation et l'avouait pour un « ouvrage
du Cœur de Jesus et de Marie, » est une date mémorable dans l'histoire de la Visitation. Elle n'est pas négligeable non
plus pour l'histoire de la dévotion au Sacré-Cœur de Jésus, car en 1611, le 10 juin tombait le vendredi après l'octave
du Saint-Sacrement.
202 Qu'étaient-ce que ces « mille petites pensées » que saint François de Sales voulait confier à la Mère de Chantal ? «
Avait-il eu, dans cette nuit bienheureuse, sur laquelle nous avons si peu de détails, la révélation » du « grand évènement
qui devait plus tard jeter un si doux éclat sur l'ordre de la Visitation ? Ou bien, lorsqu'il voulut donner à un siècle plein
de haine, et qui devait être bientôt plein de ruines, la tendre dévotion à son sacré cœur comme une consolation et une
espérance, Dieu ne choisit-il la Visitation que pour la récompenser d'avoir pris pour armes, dès son berceau, ce cœur
couronné d'épines, et d'avoir ainsi comme donné le signal de cette belle dévotion ? » (Mgr Bougaud, Hist. de Ste
Chantal, 13e édition, Paris, 1899, tome Ier, chap. XIII, in fine.)
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Marie203. Le Sauveur mourant nous a enfantés par l'ouverture de son sacré cœur ; il est donq bien
juste que nostre cœur demeure, par une soigneuse mortification, tous-jours environné de la
couronne d'espines qui demeura sur la teste de nostre Chef, tandis que l'amour le tint attaché sur
le throsne de ses mortelles douleurs.
Bon jour encor, ma Fille ; j'apperçois entrer nos plaideurs qui viennent interrompre la paix
de mes pensees.
_____
DCXCIV. Au duc de Savoie, Charles-Emmanuel Ier.
Sollicitation de la grâce pour un coupable
Annecy, 12 juin 1611.
Monseigneur,
Quelques vertueux gentilshommes et moy, ayans, Dieu merci, terminé les poursuites que
le sieur de Blonnay faysoit a rayson de la perte de son filz contre le sieur [64] de Saint Paul204, par
un amiable et chrestien appaysement de toute inimitié et dispute, j'ay creu que je devois en donner
asseurance a Vostre Altesse, affin quil luy playse de plus facilement incliner sa clemence et donner
sa grace a celuy qui, ayant la paix avec sa partie par cet accomodement, et le pardon de Dieu par
la contrition et confession, n'a plus a rechercher que la remission de la peyne, que Vostre Altesse
seule luy peut ouctroyer et que la debonnaireté d'icelle luy fait esperer.
Et moy, je continue a reclamer la divine Bonté pour le parfait bonheur de Vostre Altesse,
delaquelle je suis,
Monseigneur,
Tres humble, tres fidele et tres obeissant orateur et serviteur,
FRANÇS, E. de Geneve.
A Neci, le XII juin 1611.
Revu sur l'Autographe conservé à la Bibliothèque communale de Nantes
(tome XVI, fol. 201, pièce 221). [65]
_____
203 Dès les premières années, l'origine divine de l'Institut et son opportune nouveauté frappèrent les amis du Saint,
ceux-là surtout qui avaient suivi l'histoire de ses premiers jours. Sur ce point, la lettre du P. de Villars, du 24 juillet
1611, renvoyée à l'Appendice, est aussi instructive qu'intéressante.
204 Georgios, fils de Jacques du Nant, dit de Russin, seigneur de Saint-Paul, Grilly, etc., épousa, par contrat de mariage
du 28 juin 1598, Béatrix de Seyssel, fille du baron de la Serraz. Il mourut le 9 août 1617, aux guerres du Piémont,
étant lieutenant de cavalerie. Sa femme décéda à Evian le 11 novembre 1631.
Le Sénat avait condamné à la peine capitale, par arrêt du 26 mars 1611 1, le meurtrier de Gabriel de Blonay
(voir le tome précédent, note (1064), p. 367) ; mais Georgios du Nant s'était dérobé au supplice en s'expatriant. Les
deux familles de Blonay et de Saint-Paul demeuraient divisées plus que jamais ; des amis s'interposèrent pour les
réconcilier. C'est dans le logis du saint Evêque et sous sa présidence, que les arbitres, parmi lesquels MM. de Menthon,
de Charmoisy, de Buttet, de Quoex, Floccard, se réunirent pour trancher les questions litigieuses qui séparaient les
deux maisons. La sentence du 11 juin 1611 et celle du 20 août suivant obtinrent l'acquiescement des parties et «
l'amiable appaysement de toute inimitié. » (Voir Duplan, Arrêt criminel du Sénat de Savoie, Evian-les-Bains, 1897.)
Restait l'arrêt du Sénat qu'il s'agissait de faire annuler ; c'est la faveur que le Saint sollicite du duc par cette lettre, au
lendemain de la première sentence d'arbitrage.
1 « De quoi, » écrit Antoine Favre le 29 juin 1611, « je me fusse bien passé, si ma conscience m'eust permis, et a tout
le Senat, de denier justice au pauvre pere et de dissimuler une si enorme meschanceté. » (Mugnier, Correspondance
du Président Favre, tome II, publié par la Société Savoisienne, etc., 1905.) Cet arrêt valut en effet au Président de
terribles rancunes.
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DCXCV. Au même. Défense du Saint contre une calomnie.
Son inviolable fidélité au duc de Savoie. Ce qu'il a fait à Gex.
Il a déjà rendu compte de tout ce qu'il a appris discrètement
sur les projets des Français. Une proposition du sieur de la
Nous. Les Suisses catholiques et le pays de Berne. Vains
efforts des brouillons et des calomniateurs pour représenter
l'Evêque de Genève « avec des affections estrangeres »
Annecy, 12 juin 1611.
Monseigneur,
Ayant esté adverti que l'on m'avoit chargé aupres de Vostre Altesse de fayre certains
mauvais mesnages d'Estat avec les estrangers, j'en ay esté le plus estonné du monde, ne pouvant
m'imaginer sur quell'apparence de fondement on peut bastir cette calomnie. Car encor que ces
jours mon devoir m'ayt necessite d'aller a Gex et y arrester quelque tems205, si est ce que non plus
lâ qu'ailleurs je ne me suis meslé de fayre ou dire chose aucune que selon ma profession, preschant,
disputant, reconciliant les eglises, consacrant les autelz, administrant les Sacremens206.
Et non seulement je n'ay point fait de mesnage contre le service de Vostre Altesse (ce qui
ne m'est jamais arrivé ni ne m'arrivera jamais, ni en effect, ni en pensee), mais au contraire, autant
que la discretion et le respect que je doy a ma qualité me le permettent, j'ay observé tout ce que
j'estimois estre considerable pour le service de Vostre Altesse, affin de luy en donner advis, comme
[66] j'eusse fait par escrit si, a mon retour, je n'eusse treuvé le commandement qu'elle me donnoit
de les porter de bouche a monsieur le Marquis de Lanz, auquel je parlay en toute franchise et
naifveté ; l'asseurant entr'autres choses, que les bruitz touchant le dessein des François sur Geneve
n'estoyent que des vrayes chimeres, que quelques uns avoyent peut estre fabriquées pour rendre
probables leurs prætendus services207. Car, en vraye verité, les François n'avoyent eu aucun'
intention de surprendre a force cette ville-la, ayans trop d'apprehension d'esmouvoir les humeurs
des heretiques de France et de leur faire prendre les armes, comm'ilz feront, silz peuvent, toutes
fois et quantes qu'on fera de telz coups contr'eux : tellement que ni monsieur le Grand de
Bellegarde, ni monsieur de Lux n'oserent jamais y aller, quoy qu'ilz y fussent invités, de peur
d'accroistre le soupçon que quelques uns en avoyent.
Vray est que le sieur de la Noüe208 proposa la dedans, par maniere de conseil, qu'il seroit
205 Cf. Ep. DCLXXXII, DCLXXXIII.
206 Il dut être douloureux au plus fidèle des sujets, d'avoir à défendre de nouveau devant son prince la sincérité de son
patriotisme. Cette fois encore, les soupçons étaient aussi calomnieux que les premiers. (Voir le tome précédent, note
(572), p. 196.) Hélas ! ce parfait serviteur de la dynastie de Savoie devra recommencer dans la suite, et plus d'une fois,
cette facile, mais toujours pénible apologie. Pour l'honneur de Charles-Emmanuel et sa réputation de très clairvoyant
connaisseur d'hommes, on voudrait qu'il eût épargné une telle humiliation à un si grand Saint et au plus désintéressé
de ses amis.
207 Les historiens modernes, les plus récents et les mieux informés, apprécient comme le saint Evêque « le dessein des
François sur Geneve. » « Il n'y eut pas de la part de Henri IV un plan arrêté à ce sujet... Les Bourbons, à l'imitation
du chef de leur race, ont en somme toujours respecté l'indépendance de la République calviniste. » (De Crue, Henri
IV et les députés de Genève, Genève-Paris, 1901, chap. X, p. 424.)
208 Odet de la Noue était le fils aîné du célèbre François de la Noue, dit Bras de Fer. Il fit ses premières armes dans les
Pays-Bas et y fut retenu prisonnier pendant sept ans (1584-1591). Après sa délivrance, il servit en France sous les
ordres de La Trémouille. A la faveur du prestige dont il jouissait dans le monde des réformés, ceux-ci le désignèrent
pour les représenter dans les assemblées de Sainte-Foi et de Saumur. Il présida celle de Loudun et prit une grande part
aux négociations qui préludèrent à l'Edit de Nantes. Activement dévoué aux intérêts de Genève, il s'y occupa beaucoup
des fortifications en 1605, 1607, 1610. Ses rapports se trouvent mentionnés dans les Portefeuilles historiques et dans
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7.6 Page 66

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expedient de remettre les murailles au Roy de France, pour eviter les perilz qu'elles couroyent a
tous momens. Mays, soit quil donnast cett'atteinte par le commandement de la Reyne, soit quil la
fit de son propre mouvement (dequoy je n'ay rien sceu apprendre de certain), elle fut si mal receüe,
que [67] ceux de la ville, en diverses occurrences, disoyent tout haut qu'ilz se donneroyent plustost
au malin qu'a Vostre Altesse et plustost a Vostre Altesse qu'au Roy ; d'autant que, non seulement
Vostre Altesse les recevroyt a meilleur marché que le Roy, mays quand elle voudroit alterer les
conditions de leur donation, ilz auroyent plus de moyen de la rompre par l'assistence des voysins,
que quand elle seroit faite en faveur du Roy. Et ne sçai si, pour ce regard, il vint point a propos
qu'a mesme tems les Souisses qui revenoyent d'aupres de Vostre Altesse dirent en passant des
merveilles en faveur des droitz qu'ell'a sur le pais de Vaux ; dequoy ceux de Geneve furent
extremement esmeuz.
Et sur ce propos, j'appris de divers discours des François, que si nostre Saint Pere se
remuoyt un peu vivement envers les Soüisses catholiques et la Reyne, comm' il le doit faire en
consideration de la religion, il n'y auroit point de difficulté de faire heureusement reuscir les
prætentions de Vostre Altesse contre les Bernoys, desquelz la grandeur est de longuemain
ennuyeuse aux Suysses catholiques209, et puisque la Reyne doit plus desirer l'amoindrissement du
parti huguenot, que soupçonner l'aggrandissement de Vostre Altesse.
Je dis plusieurs autres particularités a monsieur le Marquis de Lanz, desquelles sans doute
il aura eü bonne memoire pour les representer a Vostre Altesse, laquelle je supplie tres humblement
de croire que j'ay gravé trop avant en mon cœur le devoir que je luy ay, pour jamais me relascher
a faire chose qui puisse tant soit peu nuyre au service de ses affaires, et que j'ay une trop grande
[68] aversion au tracas des choses d'Estat, pour jamais y vouloir penser d'un'attention deliberee.
Ni moy, Monseigneur, ni pas un de mes proches n'avons, ni en effect, ni en prætention, aucune
chose hors l'obeissance de Vostre Altesse. Je ne sçai donq comment la calomnie ose me representer
avec des affections estrangeres, puisque mesme je vis, Dieu merci, de telle sorte que, comme je ne
merite voyrement pas d'estre en la bonne grace de Vostre Altesse, n'ayant qui puisse dignement
correspondre a cet honneur la, aussi merite-je de n'estre jamais en sa disgrace, ne faysant ni
n'affectionnant rien qui me puisse porter a ce malheur, que je ne crains aussi nullement, moyennant
l'ayde de Nostre Seigneur, qui, en faveur de la veritable fidelité que je conserve a Vostre Altesse,
ne permettra jamais que les brouillons et calomniateurs m'ostent la gloire que j'ay d'estr'advoüé,
Monseigneur,
Invariable, tres humble, tres fidele et tres obeissant serviteur et orateur de Vostre Altesse,
FRANÇS, E. de Geneve.
A Neci, le XII juin 1611.
Revu sur l'Autographe conservé à Turin, Archives de l'Etat.
_____
les Registres du Conseil. En février 1611, la cour de France l'envoya dans cette ville pour rassurer les Genevois
menacés parle duc de Savoie d'une prochaine invasion. De la Noue mourut à Paris le 23 août 1618. (Voir Moreri,
Hœfer, Michaud ; Haag, La France protestante, tome VI, etc.)
209 Dès 1536, Berne et Fribourg avaient pris possession du pays de Vaud. La diplomatie d'Emmanuel-Philibert amena
le traité de Lausanne (30 octobre 1564), d'après lequel il laissait aux Bernois leur conquête et gardait en échange le
pays de Gex, le Chablais, les bailliages de Ternier et de Gaillard. Plus tard, les cantons catholiques, humiliés par
l'orgueil de Berne, désirèrent vivement voir revenir les Vaudois sous l'obéissance de la Maison de Savoie. Saint
François de Sales se faisait ici l'écho de ces espérances qui, chez lui, s'avivaient d'un grand désir de conquête
spirituelle. A l'ouverture de la diète de Bade, il put croire que le rêve de son cœur d'apôtre allait enfin s'accomplir ;
mais on verra par la lettre du 14 novembre 1612 à son ami des Hayes, que cette attente fut déçue.
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7.7 Page 67

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DCXCVI. A Monseigneur Pierre Fenouillet Évêque de
Montpellier210. Le rétablissement du culte à Gex et part qu'y a
prise le Chapitre de Genève. Sollicitation du placet royal
pour lui annexer un bénéfice. Petites nouvelles. Retour à
la foi d'un gentilhomme. Pourquoi la connaissance de la
vérité n'est pas toujours suivie de la conversion.
Annecy, 15 juin 1611.
Monseigneur,
Nostre Chapitre de Geneve a plus cooperé aux commencemens de l'establissement de
l'exercice catholique [69] a Gex qu'aucuns ecclesiastiques ; car, outre que monsieur le Prevost211,
messieurs Grandis212, Bochuti213 et Gottri214, chanoynes dudit Chapitre, ont esté les premiers qui
ont fait residence a leurs despens en ce pais-lâ durant un'annee, ce fut ce Chapitre qui fournit aux
fraitz que je fis, estant encor Prevost, pour la sollicitation de la confirmation de l'establissement215.
En consideration de cela, un certain seigneur de Monluel, qui par longues annees avoit possedé un
petit benefice simple audit Gex, de la valeur d'environ 20 ou 25 escus de revenu, ayant de son gré
et par son election desiré que ce sien benefice fut uni a nostre dit Chapitre, je l'ay fait encor plus
volontier, comme chose sainte et juste216.
Mays d'autant qu'a l'adventure, les cours laïques, en cas quil y eut quelque controverse ci
apres, requerront que les proviseurs ayent le placet ou brevet du Roy, et que la valeur du benefice
n'est pas si grande qu'on puisse envoyer expres pour en faire la supplication a Sa Majesté (a
laquelle mesme, en tous evenemens, nous n'aurions aussi pas moyen d'avoir bon acces que par
vostre entremise), partant nous vous supplions tres humblement tous, que si ce n'est point vostre
incommodité, il vous playse [70] impetrer ledit placet. La petitesse de la piece, le travail passé de
ceux de ce Chapitre, vostre credit, nous rendent un'esperance certaine que cela ne sera pas fort
malaysé ; car, bien que nostre Chapitre reside maintenant, par emprunt, de deça, si est ce que
naturellement il est de Geneve. Et Messieurs de Saint Claude217, estrangers non seulement au
regard du royaume, mays encor au regard du diocæse, ont bien obtenu plusieurs placetz pour divers
benefices de ce pais-la de Gex, ou ilz n'ont rendu, que je sache, aucun service comparable a celuy
que nos chanoynes ont fait.
Voyla, Monseigneur, ma requeste envers vous, et voyci mes petites nouvelles. Je fus l'autre
210 Vers la fin de 1614, le Saint recourt à l'intercession de Mgr Fenouillet pour le même bénéfice dont il est question
dans cette lettre : « Il y a encor, » dit-il, « l'affaire de nostre Chapitre pour ce petit benefice de Gex, dont j'escris « a
nostre grand et parfait amy. S'il vous plaist, Monseigneur, vous y contribueres vostre faveur. » En juin 1611, le Prélat
savoyard était à Paris, et la faveur dont il jouissait à la cour donnait du poids à son entremise. Il est donc naturel que
le saint Evêque l'ait pris pour intercesseur. Les « petites nouvelles, » les confidences de la lettre confirment encore
l'opinion que Fenouillet en est le destinataire.
211 Louis de Sales, cousin du Saint, qui occupa cette charge jusqu'à sa mort. (Voir tome XII, note (22), p. 6.)
212 Claude Grandis (voir tome XI, note (685), p. 299, et tome XIII, note (522), p. 195).
213 Antoine Bochut (voir tome XII, note (78), p. 46).
214 Nicolas Gottry (ibid., note (78).
215 Voir tome XII, Lettres CXLIX, CLI, CLXV, CCLVII, CCLXV, CCLXVIII.
216 Le possesseur de ce bénéfice (Vésenex et Crassy) était « noble et Révérend seigneur Claude de Montluel, abbé du
monastère de l'abbaye nommé Bonmont, de l'Ordre de Cîteaux, » (R. E.) situé à quelques kilomètres de Divonne. Le
3 juin 1611, il en avait fait cession, mais en se réservant les fruits jusqu'à sa mort, qui arriva en 1614. Louis XIII permit
l'union de ce bénéfice au Chapitre de Genève par un brevet du 6 juillet 1611. (Archives départ, de la Côte-d'Or, B.
12094, fol. 58.)
217 Les Religieux de l'abbaye de Saint-Claude (voir ci-dessus, note (186), p. 59).
67/321

7.8 Page 68

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jour a Gex, aupres de monsieur le Grand218 et monsieur de Lux219, ou j'eu la consolation de retirer
un gentilhomme et cappitayne de la religion a la foy catholique220, de reconcilier deux eglises
parrochiales221, et, en quatre sermons, d'esbransler plusieurs haeretiques, et leur fayre advoüer que
la verité catholique estoit belle222, quoy que diffìcile a comprendre. Mais comme ce n'est pas tous-
jours l'erreur de l'entendement, ains le defaut de la volonté et l'impureté des affections qui tient les
hommes hors de l'Eglise, aussi n'y rentrent-ilz pas tous-jours quand ilz connoissent la verité
d'icelle.
A cette consolation, messieurs le Grand et de Lux en adjoustoyent presque ordinairement
une autre, qui estoit de me parler de vous et de vos merites comme l'honneur amoureux que je vous
porte me pouvoit faire desirer. A mon retour, je treuvay que mon voyage n'avoit pas esté seulement
fertile en consolation, selon sa petitesse, mais [71] aussi, de ce costé de deça et de dela les mons,
de soupçons et calomnies223, que la verité neanmoins effacera, comme je pense, par la suite de
quelques jours.
Il failloit dire ce mot de confiance avec vous, qui me donnés si abondamment le bonheur
de vostre amitié, que tout le monde s'en res-jouit avec moy, et particulierement ces seigneurs dont
je viens de dire les noms. Continués, je vous supplie, Monseigneur, et croyés que je suis
invariablement,
Vostre...
Revu en partie sur l'Autographe conservé à Issy (Paris), Maison de Philosophie de la Compagnie
de Saint-Sulpice.
_____
DCXCVII. A une religieuse. En quoi consista la rare
mortification de saint Jean-Baptiste. Facilité de l'imiter par la
communion spirituelle, à défaut de la Communion réelle.
Homme céleste ou ange terrestre. Tout nous crie : Amour,
amour ! Des dames qui « font merveilles»
Annecy, [vers le 24 juin 1611 224.]
……………………………………………………………………………………………………...
Or sus, ma chere Fille, si vous ne pouves bonnement communier souvent reellement, vous
vous communieres tant que vous voudres spirituellement.
Helas ! vous me demandes une bonne pensee sur saint Jean, et celle-cy m'est extremement
douce en plusieurs occurrences225. Il avoit conneu Nostre Seigneur des le ventre de sa mere ;
218 Le duc de Bellegarde.
219 Cf. supra, p. 48.
220 Les recherches faites pour découvrir ce « cappitayne de la religion » sont restées infructueuses. Parmi les convertis
de 1611, François Favre mentionne dans sa déposition (Process. remiss. Gebenn. (II), ad art. 33), « Amédée Le Moine,
» mais nous ne croyons pas que celui-ci soit le « gentilhomme » dont parle le Saint.
221 Challex et Divonne (voir ci-dessus, note (183), p. 57).
222 Nous n'avons retrouvé qu'une partie de l'Autographe, laquelle se termine ici. Ce qui suit est emprunté à l'édition
Blaise, 1821.
223 Cf. Epist. præced.
224 La destinataire pourrait être Jeanne-Bonaventure de la Forest, sœur de Mme de la Fléchère, Religieuse à Bons (voir
le tome précédent, note (600), p. 204), ou encore une Dame de Sainte-Catherine. D'ailleurs, le commencement qui
paraît tronqué, fait soupçonner que le texte est une mosaïque faite de plusieurs passages sur saint Jean, de dates
différentes. L'allusion aux progrès de la Visitation suggère 1611.
225 Cf. tom. XIII, p. 227.
68/321

7.9 Page 69

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tressaillant d'ayse de sa presence et de la voix de la Mere d'iceluy226, il tesmoigna bien des lhors
[72] le contentement qu'il auroit de le voir, de l'ouyr, de converser avec luy. Neanmoins il fut privé
de tout cela, et en tout ce que l'Escriture tesmoigne, il ne luy parla jamais deux bonnes fois ; ains,
sçachant que ce divin Sauveur preschoit et se communiquoit a tout le monde en Judee, il demeura
solitaire dans un desert tout voysin, sans oser le venir voir reellement, quoy qu'il le vist tous-jours
spirituellement. Fut-il jamais une mortification esgale, d'estre si proche de son unique et souverain
Amour, et, pour l'amour de luy, demeurer sans le voir, sans l'ouyr, sans l'escouter227 ? Et bien, ma
chere Fille, vous en feres de mesme, proche du Sacrement ou Jesus est ; car vous ne le gousteres
qu'en esprit, comme saint Jean.
Mon Dieu ! on ne sçauroit dire si ç'a esté un homme celeste ou un ange terrestre. Sa casaque
d'armes, faite de poil de chameau, representoit son humilité qui le couvroit par tout ; sa ceinture
de peau morte, mise sur son ventre et sur ses reins, signifioit la mortification avec laquelle il
restrecissoit et serroit toutes ses concupiscences. Il mangeoit des sauterelles, pour monstrer que si
bien il estoit en terre, il sautoit neanmoins perpetuellement en Dieu. Le miel sauvage228 luy servoit
de saulce, parce que la suavité de l'amour de Dieu assaisonnoit toutes ses austerités ; mais cet
amour estoit sauvage, parce qu'il ne l'avoit pas appris des maistres, ains des arbres et des pierres,
comme dit saint Bernard229.
Mon Dieu, ma Fille, mangeons et du sauvage et du domestique ; amassons de ce saint
amour a toutes occasions, et par l'exemple de nos Seurs et par la consideration des autres creatures
; car tout crie aux aureilles de nostre cœur : Amour, amour. O saint amour, venés donq et possedés
nos cœurs tres uniquement.
Vrayement, nos bonnes Dames de la Visitation font merveilles, et qui les void en est tout
consolé. Vive Jesus !
Je suis en luy, extremement vostre, ma chere Fille.
FRANÇS, E. de Geneve. [73]
_____
DCXCVIII. A la Mère de Chantal. Louanges de saint Jean-
Baptiste : plus que vierge, plus que confesseur et prédicateur,
plus que docteur et martyr, plus qu'évangéliste et apôtre, plus
que prophète et patriarche, plus qu'ange et plus qu'homme.
Ses prérogatives admirables. Quelqu'un de plus grand encore
Annecy, 24 juin [1611 230.]
Helas, ma tres chere Fille, que n'ay-je quelque digne sentiment de joye pour cet homme
angelique ou cet ange humain duquel nous celebrons la naissance ! Mon Dieu, que j'aurois de
suavité de m'en entretenir moy mesme ! Mais j'e vous asseure que la grandeur de mon interieure
pensee m'empesche de me donner cette satisfaction a moy mesme.
Je le treuve plus que vierge, parce qu'il est vierge mesme des yeux, qu'il a plantés sur les
objetz insensibles du desert et ne sçait point par les sens qu'il y ait deux sexes ; plus que confesseur,
car il a confessé le Sauveur231 avant que le Sauveur se soit confessé luy mesme ; plus que
226 Luc., I, 41, 44.
227 Cf. Luc., I, ult. ; Joan., I, 33.
228 Matt., III, 4 ; Marc., 1, 6.
229 Vita Ia S. Bern., l. I, c. IV. (Mig., t. CLXXXV, col. 240.)
230 Il est bien difficile de préciser la date de cette lettre, mais l'appellation de « Fille » donnée à la destinataire fait
songer à 1611. La mention de « toute la chere trouppe » exclut 1610.
231 Joan., I, 15-27.
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7.10 Page 70

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predicateur, car il ne presche pas seulement de la langue, mais de la main et du doigt232, qui est le
comble de la perfection ; plus que docteur, car il presche sans avoir ouy la source de la doctrine ;
plus que martyr, car les autres martyrs meurent pour Celuy qui est mort pour eux, mais luy meurt
pour Celuy qui est encor en vie, et contreschange, selon sa petitesse, la mort de son Sauveur avant
qu'il la luy ait donnee ; plus qu'evangeliste, car il presche l'Evangile avant qu'il ait esté fait ; plus
qu'apostre, car il precede Celuy que les Apostres suivent233 ; plus que prophete, car il monstre
Celuy que les Prophetes predisent ; plus que patriarche, car il voit Celuy qu'ilz ont [74] creu, et
plus qu'ange et plus qu'homme, car les Anges ne sont qu'espritz sans cors, et les hommes ont trop
de cors et trop peu d'esprit : celuy ci a un cors et n'est qu'esprit.
J'ay un goust extreme a le regarder dans ce sombre, mais bienheureux desert234 qu'il
parfume de toutes parts de devotion, et dans lequel il respand jour et nuit des soliloques et devis
extatiques devant le grand objet de son cœur ; cœur qui, se voyant seul a seul, jouit de la presence
de son Amour, treuve en la solitude la multitude des douceurs eternelles, la ou il succe le miel
celeste qu'il ira par apres bien tost distribuer dans les ames des Israëlites aupres du Jourdain235.
Mon Dieu, ma chere Fille, que voyla un admirable Saint ! Il naist d'une sterile236, il vit dans
les desertz, il presche au cœur aride et pierreux237, il meurt parmi les martyrs, et parmi toutes ces
aspretés il a son cœur tout plein de grace et de benediction. Mays cecy est encor admirable, que
Nostre Seigneur ayant dit qu'entre tous ceux qui estoyent nés de femme, nul n'estoit plus grand que
Jean, il adjouste : Voire, mais celuy qui est le moindre au Royaume des cieux, c'est a dire en
l'Eglise, est plus grand que luy238. O ma chere Fille, il est vray, car le moindre Chrestien
communiant est plus grand en dignité que saint Jean. Et que veut dire que nous sommes si petitz
en sainteté ?
Bon soir, ma chere Fille, et a toute la chere trouppe de nos Filles. Le bon saint Jean les
veuille benir avec leur chere Mere.
FRANÇS, E. de Geneve. [75]
_____
DCXCIX. A la même (Fragment). Le mystère de la Visitation.
La très sainte Vierge en la maison de Zacharie ; effets
miraculeux de sa présence. Effusions d'humble amour pour le
Verbe incarné
Annecy, 1er ou 2 juillet [1611 239.]
……………………………………………………………………………………………………..
Je vous laisse a penser, ma Fille, quelle bonne odeur respandit en la maison de Zacharie
cette belle fleur de lis, trois mois qu'elle y fut ; comme chacun en estoit embesoigné et comme
avec peu, mais de tres excellentes paroles, elle versoit de ses sacrees levres le miel240 et le bausme
pretieux ; car, que pouvoit-elle espancher que ce dequoy elle estoit pleine ? Or, elle estoit pleine
232 Ibid., vv. 29, 36.
233 Luc., I, 17, 76.
234 Luc., I, ult.
235 Ibid., III, 3.
236 Ibid., I, 7, 36.
237 Cf. ibid., III, 4, 5, 8.
238 Ibid., VII, 28.
239 Ce fragment faisait suite, dans les anciennes éditions, à la lettre du 30 juin 1610 (voir le tome précédent, note (935),
p. 324), mais il avait été interpolé, car l'Autographe ne le donne pas ; sa teneur permet de lui attribuer avec plus de
probabilité la date de 1611. Le Saint a pu écrire ces lignes la veille ou le jour même de la Visitation.
240 Cant., IV, 11.
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8 Pages 71-80

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8.1 Page 71

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de Jesus.
Mon Dieu, ma Fille, je m'admire tant que je suis encor si plein de moy mesme apres avoir
si souvent communié ! Hé, cher Jesus, soyes l'Enfant de nos entrailles, affin que nous ne respirions
ni ressentions par tout que vous. Helas ! vous estes si souvent en moy, pourquoy suis-je si peu
souvent en vous ? Vous entres en moy, pourquoy suis-je tant hors de vous ? Vous estes dans mes
entrailles, pourquoy ne suis-je dans les vostres pour y fouiller et recueillir ce grand amour qui
enivre les cœurs ?
Ma Fille, je suis tout parmi cette chere Visitation, en laquelle nostre Sauveur, comme un
vin tout nouveau, fait bouillonner de toutes parts cette affection amoureuse dedans le ventre de sa
sacree Mere.
FRANÇS, E. de Gèneve.
_____
DCC. A M. Antoine des Hayes. Assurance réciproque
d'invariable amitié. Eloge du Prieur des Feuillants et pour
quelles raisons particulières il s'est fait estimer du Saint.
Rupture d'un mariage princier. Le deuil d'un ami. Il n'est
pas accordé à l'Evêque de Genève d'aller prêcher un Carême à
Paris. La marquise de Maignelay. Derniers jours d'un
poète
Annecy, 11 juillet 1611.
Monsieur,
Hier seulement que ce digne porteur, le P. Prieur des Feuillans241, m'arriva, je receu la lettre
241 Très vraisemblablement, le « digne porteur » était dom Jean de Saint-François, car de tous les Feuillants de cette
époque, c'est à lui que conviennent le mieux les éloges caractéristiques donnés par le Saint.
Jean Goulu, plus connu sous le nom de dom Jean de Saint-François, né à Paris le 25 août 1576, était fils de
Nicolas Goulu, professeur royal de langue grecque, et de Madeleine Daurat, fille du savant humaniste Jean Daurat. Il
entra au barreau, puis le quitta en 1604 pour entrer chez les Feuillants. Depuis son noviciat, il eut toujours quelque
charge dans l'Ordre et obtint la première de toutes, le 19 juin 1622, dans le Chapitre général de Pignerol que présida,
au nom du Pape Grégoire XV, l'Evêque de Genève. « Dom Frère Jean de Saint-François, » écrivait le Saint à Rome,
« vient d'être élu Supérieur général de la Congrégation. Ce n'est pas seulement un homme d'une érudition remarquable,
vraiment supérieure ; par la variété de ses pieux écrits, par ses brillants travaux, il a en effet illustré l'Eglise, il l'a
défendue contre les hérétiques. C'est encore un homme d'une prudence très avisée et fort exercé aux affaires ; enfin,
ce qui est capital, il est versé dans la piété et dans la science de l'apostolat. Il y a donc tout lieu de croire que, sous son
gouvernement, toute la Congrégation profitera de jour en jour. » (Lettre latine à Grégoire XV, 22 juin 1622.)
Comme il entendait parfaitement le grec, il traduisit en français les Œuvres de saint Denys l'Aréopagite
(1608), le Manuel d'Epictète (1609), les Homélies de saint Basile sur l'Héxaméron (1616). En 1620, il fit un livre
contre celui du ministre du Moulin : De la vocation des Pasteurs, et publia en 1624 la Vie de saint François de Sales,
remarquable par son exactitude et la simplicité du récit. En 1627, il donna au public, sous le nom de Lettres de
Phyllarque, c'est-à-dire de prince des feuilles, deux volumes contre Balzac qui furent l'occasion d'une bruyante
querelle entre les partisans et les ennemis de ce dernier. Dom Jean de Saint-François mourut le 5 janvier 1629.
L'épitaphe que firent mettre sur son tombeau le duc et la duchesse de Vendôme serait de la façon de Corneille, au dire
du P. de Saint-Romuald. (Voir Bayle, Dict. historique et critique, 1730.) Le célèbre Feuillant fut un ami du Saint, et
à Pignerol, le confident de ses derniers projets en fait de publications. (Cf. Année Sainte de la Visitation, t. VI, 18 et
19 juin.) Et cette confiance se comprend, si l'on sait que François de Sales tenait en haute estime le savoir et le talent
littéraire de l'éminent Religieux. Aussi son élection, le croirait-on ? le contrista presque, « car il me semble, »
écrivait-il à un Cardinal le 21 juin 1622, « que luy ayant reusci d'escrire avec l'heur et la grace qu'on remarque es
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8.2 Page 72

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que vous m'escrivites par luy mesme le VI avril. C'est tous-jours avec mille joyes que tels
tesmoignages de vostre bienveüillance m'adviennent, et quoy que vos lettres soyent vielles en
dates, elles me donnent neanmoins des contentemens nouveaux.
Mays je voy en celle-ci, que vous aves longuement [77] esté sans en avoir des miennes
J'avoue sincerement mes fautes, mais celle ci, elle n'est pas mienne, ains des porteurs ; car je sçai
bien que tous-jours, quand je puis, je vous escris de mes nouvelles, non seulement par ce que vostre
desir a tout pouvoir sur ma volonté, mais aussi par ce que ma volonté a perpetuellement ce desir
de vous parler, comm'il m'est possible de parler de vous et de vous oüir ou voir parler a moy. Je
ne refuse pourtant pas l'amiable offre que vous me faites de ne changer jamais ni varier en l'amitié
que vous me portés, soit que je vous escrive ou que je ne vous escrive point. Non, Monsieur, je
vous en supplie, ne varies jamais en cette affection que vous aves pour moy ; car croyes qu'aussi,
soit que j'escrive, comme je feray Dieu aydant, ou que je n'escrive pas, je ne varieray jamais en la
resolution que j'ay faite d'estre a jamais homme tres veritablement vostre et tout vostre, sans
reserve ni exception. Je parle le langage de mon cœur et non pas celuy de ce tems. Or, selon mon
sentiment, c'est tout dit quand je dis que je suis tout vostre, et peu dit si je dis moins que cela.
Ce Pere, que j'honnorois des-ja bien fort pour les fruitz que j'avois veu de son esprit, m'a
lié a son amour et respect d'un lien indissoluble quand j'ay conneu en luy un si grand assemblage
d'erudition, d'entendement, de [78] vertu, de pieté, et, entre ses vertus, l'estime quil fait de la vostre
et du bien de vostre conversation ; car c'est une des maximes plus entieres de mon ame, que
j'honnoreray quicomque vous honnorera et cheriray quicomque vous cherira.
Que de bruitz, que de vaynes esperances242, que de vrayes afflictions avons nous eu par
deça ! Mays, graces a Dieu, nous voyci maintenant avec grand'apparence de tranquillité. Nous
avions longuement attendu quelle issue prendroit le traitté si longuement entretenu du mariage de
Mlle d'Anet et de nostre Monsieur ; mays a ce qu'on nous dit, nous n'en devons plus rien attendre,
puisque tout en est cassé. Et Dieu veuille que certaines nouvelles esperances qu'on nous propose
soyent plus asseurees que celles que nous venons de perdre n'ont esté243.
Nostre monsieur de Charmoysi est a Chamberi, il y a quelques jours, ou je luy ay envoyé
la nouvelle de la perte de son second filz, mon fileul244. Je croy quil la ressentira, car ayant retiré
son cœur de la cour, il l'avoit mis en sa femme, ses enfans et ses amis.
Je me res-jouis que Monsieur de Monpelier soit a Paris le Caresme suivant, a joüir de la
douceur de vostre presence, a laquelle croyes que j'aspire souvent, mays pour neant, puisque ayant,
plusieurs foys fait demander congé a Son Altesse de pouvoir aller fair'un Caresme en vostre
ville245, je n'ay sceu jusques a present l'obtenir, ni mesm' autre response sinon quil y failloit penser.
Mays nul ne me sçauroit empescher que d'esprit et de cœur je n'y sois journellement aupres de
vous, a vous honnorer, cherir et embrasser de toutes mes forces. [79]
Madame la Marquise de Meneley246 me fait trop de grace de se resouvenir de moy, et encor
plus de desirer que j'aille là. Je suis son tres humble serviteur et porte singuliere reverence a son
merite. Mays d'aller lâ, je n'en puis rien dire, sinon que ce sera quand je pourray ; mays de sçavoir
quand je pourray, il n'est pas en mon pouvoir.
Monsieur Nouvelet247, qui va petit a petit achevant le petit reste de sa vie, a desiré que je
traductions du grec en latin et en françois qu'il a donnees au public, et en refutant les heresies de ce tems, il pouvoit
rendre un plus grand et plus important service a la sainte Eglise en la continuation de cet employ. »
242 Ces « vaynes esperances » ne visent-elles pas le projet de mariage de Victor-Amédée avec Elisabeth de France,
dont les négociations commençaient à se ralentir, tandis que se traitait l'affaire des mariages espagnols ? Ceux-ci, en
effet, furent déclarés à la cour de France le 26 janvier 1612. (Cf. le tome précédent, notes (630), (631), p. 217.)
243 Le mariage « cassé » du duc de Nemours avec Anne de Lorraine eut lieu cependant en 1618 (cf. ibid., note (547),
p. 184), et les « nouvelles esperances » dont parle le Saint désignent sans doute le projet d'union avec l'infante de
Savoie, que Charles-Emmanuel proposait pour empêcher le premier.
244 Jean-François de Charmoisy était né à Annecy en 1610. Son acte de sépulture est daté du 7 juillet 1611. (Reg. par.
d'Annecy.)
245 Vide supra, pp. 37, 43.
246 Voir le tome précédent, note (553), p. 185.
247 Claude-Etienne Nouvellet (voir tome XII, note (80), p. 47).
72/321

8.3 Page 73

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vous asseurasse de son humble affection. Sur tout, je vous asseure de la mienne, et vous souhaitant
toute prosperité, je suis,
Monsieur,
Vostre tres humble et fidele serviteur,
FRANÇS, E. de Geneve.
Monsieur, j'ay loüé Dieu quand on m'a fait sçavoir de Lion que vous esties gueri d'une
grande maladie, avant que j'aye sceu que vous en ayes esté atteint. Dieu vous conserve, et je m'en
res-jouis avec madame vostre femme, delaquelle je suis de mesme humble serviteur.
XI julliet 1611.
A Monsieur
Monsieur des Haÿes, Maistre d'hostel du Roy, Gouverneur et Baillif de Montargis.
Revu sur l'Autographe conservé au 1er Monastère de la Visitation de Rouen. [80]
_____
DCCI. A Madame de Bertrand de la Perrouse248 (Inédite). Les
insistances d'un jeune gentilhomme. Prudence et charité du
Saint dans une affaire délicate.
Annecy, 27 juillet 1611.
On est bien empesché avec ces amoureux, ma chere Fille ! Voyci ce jeune gentilhomme
qui me demande une lettr'a vous pour vous rendre plus recommandables ses prætensions249, et moy
je me resouviens bien de ce que vous m'escrivistes lautrefois, quil failloit conduire l'affaire tout
bellement et le presser a loysir. C'est pourquoy je ne vous prie sinon de luy donner les advis
convenables a sa conduite pour ce regard, et a moy ceux [de] ce quil pourra esperer, affin que la
poursuite ou la retraitte se face a cette mesure-lâ.
Mays cependant, ma tres chere Fille, je suis bien ayse de vous escrire ainsy de tems en
tems, et vous resouvenir [81] de mon ame, qui ne cesse point de souhaitter mille perfections a la
vostre, pour la gloire de Nostre Seigneur qui m'a rendu,
Ma tres chere Seur, ma Fille,
Vostre humble frere et serviteur,
FRANÇS, E. de Geneve.
XXVII julliet 1611, a Neci.
Je ne sçai si monsieur vostre mari est lâ ; en ce cas, je le salue bien humblement, et suis
son serviteur en tous cas.
248 Jeanne de Chastel, fille de noble François de Chastel et de Jacqueline de Bonivard, épousa, par contrat dotal du 19
novembre 1601, Jean-Pierre de Bertrand, seigneur de la Perrouse. Il teste le 11 avril 1612 ; elle était veuve en 1615 et
fut sépulturée le 8 décembre 1664.
Mme de la Perrouse paraît être la destinataire de la présente lettre, car nous savons qu'après l'entrée de l'aînée
de ses sœurs au couvent, « elle servit de seconde mère aux autres. » (Année Sainte de la Visitation, tome IV, p. 107.)
249 Ce « jeune gentilhomme », si la destinataire que nous proposons est la vraie, serait dom Georges de Lescheraine,
fils de Gaspard, seigneur de la Compote, et de Françoise de Chabod. « Chevalier de justice des saints Maurice et
Lazare, clerc et recteur des chapellenies de Sainte-Catherine dans l'église de Lémenc et de Sainte-Apollonie dans
l'hôpital des Bonivard, les résigne le 8 octobre 1611, et le lendemain passe contrat dotal avec Françoise » de Chastel,
sœur de la destinataire. Il fut conseiller d'Etat, sénateur au souverain Sénat de Savoie, président à la Chambre des
Comptes, etc., et testa le 1er juillet 1630. « Contre l'intention de tous ses parents, » lisons-nous dans l'Année Sainte,
tome IV, p. 107, « M. de Lescheraine,... gentilhomme riche, pieux, parfaitement bien fait, d'un grand esprit, fort bien
vu à la cour de Savoie, persista sept ans à rechercher cette troisième fille de Mme de Chastel. Celle-ci, s'en allant enfin
à Notre-Dame de Myans, obtint ce digne parti. »
73/321

8.4 Page 74

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Revu sur l'Autographe appartenant à Mme la comtesse de Noailles, château de Buzet (Lot-et-
Garonne).
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8.5 Page 75

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DCCII. A la Mère de Chantal. Mgr Camus annoncé pour une
exhortation à la Galerie
Annecy, [vers le 30 juillet 1611 250.]
Nous avons donq pris cette matinee pour vous faire avoir l'exhortation de Monseigneur de
Belley, qui tesmoigna hier de desirer de vous voir. Ce sera sur les neuf heures et demi, ma chere
Fille et tres bonne Mere, a qui je donne mille fois le bon jour.
Revu sur une copie déclarée authentique, conservée à Turin, Archives de l'Etat. [82]
_____
DCCIII. Au Président Antoine Favre. Message confié à un ami
Annecy, 30 juillet 1611.
Monsieur mon Frere,
Je vous addresse ce paquet pour le peu d'asseurance que j'ay eu en ce porteur. Faites moy
la grace de le faire porter a M. Gros, l'advocat251, sil est encor a Chamberi. Que si de fortune il
estoit parti pour Thurin, ou il me dit quil devoit aller, je vous supplie le luy faire aussi tenir ; car
je suis certain quil n'ira ni ne demeurera sinon avec vostre congé, tant il fait profession d'estre
vostre serviteur.
Dieu soit a jamais vostre protecteur, et je suis, Monsieur mon Frere,
Vostre tres humble serviteur et frere,
FRANÇS, E. de Geneve.
XXX julliet 1611, a Neci, ou je salue humblement madame ma seur252.
Revu sur une copie déclarée authentique, conservée à Turin, Archives de l'Etat. [83]
_____
250 L'appellation de « Mere » exclut 1610, D'autre part, nous savons que l'Evêque de Belley visita le souverain Sénat
de Savoie à Chambéry, « où on le reçut en séance » le 30 juillet 1611. (Voir Mugnier, Hist. d'Antoine Favre, 1902-
1903, note (1123), p. 385, et Entrées du Sénat.) Comme à cette date les deux Saints étaient à Annecy, on peut supposer
que Mgr Camus vint leur faire visite. Nous ne voudrions pas, toutefois, exclure 1612 et 1613.
251 Me Humbert Gros était l'ami commun du Président et de l'Evêque. Le 31 août 1611, Favre écrit à l'avocat, alors à
Turin, pour lui faire des confidences et lui demander des services. Sur la liste des cent avocats assermentés en 1611,
Humbert occupait le 24e rang, et par conséquent était un des anciens.
252 La présidente Favre.
75/321

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DCCIV. A Madame de la Fléchère. Ne rien rabattre de nos
pratiques religieuses par respect humain. Vouloir savoir d'où
procèdent les sécheresses : curiosité superflue. Nouvelles
d'un Feuillant, d'un Cordelier, d'un Cistercien. Une « bonne
petite filleule » du Saint, « toute de succre »
Annecy, 5 août 1611.
Je n'ay pas plus tost veu monsieur vostre cher mari, que j'ay sceu son despart de cette ville.
Cela a esté cause, ma tres chere Fille, que je n'ay peu luy donner cette lettre, par laquelle je veux
respondre, quoy que couramment a mon accoustumee, aux dernieres lettres que j'ay receu de vous.
Sans doute, ma tres chere Fille, il ne faut pas une autre fois rien rabbattre des coustumes
generales avec lesquelles nous professons nostre sainte religion, pour la presence de ces bigarrés
huguenotz, et ne faut pas que nostre bonne foy ayt honte de comparoistre devant leur affeterie. Il
faut en cela marcher simplement et confidemment253. Mais aussi, le peché que vous fistes n'est pas
si grand qu'il s'en faille affliger apres la repentance, car il ne fut pas commis en une matiere de
commandement special, ni ne contient pas aucun desaveu de la verité, mais seulement un indiscret
respect ; et, pour le dire clairement, il n'y eut en cela aucun peché mortel, ni, comme je pense,
veniel, ains une simple froideur procedante de troublement et irresolution. Demeurés donq en paix
de ce costé la.
Quant au bon Pere dom Guillaume de Sainte Geneviefve254, il y a environ deux mois que
ses Superieurs l'ont envoyé pour resider a Tolose. [84]
Le P. Galesius255, a la verité dire, est excellent et fait merveilles pour establir des bonnes
resolutions ; mais je crains fort qu'il ne soit des-ja attaché. Toutefois, on pourroit bien le faire
traitter dextrement, et par mesme moyen luy faire entendre qu'on ne l'invite qu'au seul exercice de
charité et en lieu ou il n'y a rien a gaigner que les ames. Que si cela ne peut reüscir, il nous faudra
un peu considerer ou nous pourrons donner de la main.
Le confesseur de Sainte Catherine, Pere Antenne256, prescha il y a deux ans a La Roche,
ou il donna une fort grande satisfaction ; et si, il confesse et, comme je croy, il n'est encor point
arresté. Nous verrons donq un peu ce qui se pourra faire.
Ma tres chere Fille, vous faites tous-jours trop de consideration et d'examen pour connoistre
d'où les secheresses vous arrivent. Si elles arrivoyent de vos fautes, encor ne faudroit-il pas pour
cela s'en inquieter, mais avec une tres simple et douce humilité les rejetter, et puis vous remettre
253 Prov., X, 9.
254 Ce « bon Pere, » l'un des premiers Religieux Feuillants introduits à Abondance (cf. tome XII, note (938), p. 373),
s'était bientôt concilié la confiance de la famille de Blonay, voisine de l'abbaye. La vertueuse Marie-Aimée eut souvent
l'occasion de profiter de ses conseils. (Voir sa Vie par Charles-Auguste de Sales, 1655, chap. III.) Dom Guillaume de
Sainte-Geneviève avait prêché le Carême à Annecy, en 1610. Les Délibérations municipales (10 février) assignent
pour sa nourriture et celle de son compagnon cinq florins par jour.
Né à Paris, d'une famille qui porte le nom de Compans, il fit profession chez les Feuillants en 1585, dans leur
abbaye près de Toulouse. Au dire de Morotius, l'annaliste de l'Ordre, sa parole puissante remuait les foules que les
églises souvent ne pouvaient contenir. Alors elles se rassemblaient sur les places ou dans les champs, et plus d'une
fois, un arbre servit de chaire. Le prédicateur était un convertisseur irrésistible parce que son éloquence s'accompagnait
d'une sincère et très touchante humilité. Il mourut à Paris, le 9 septembre 1624.
255 Voir tome XII, note (185), p. 102.
256 Les aumôniers confesseurs des Religieuses Cisterciennes de Savoie ont toujours été des Cisterciens, désignés pour
cet office par l'abbé de Tamié, muni à cet effet des pouvoirs du Général de Cîteaux. De fait, depuis 1622 jusqu'en
1793, ce sont des moines Cisterciens et appartenant la plupart à l'abbaye d'Hautecombe, qui ont exercé la charge de
confesseur à Sainte-Catherine. (D'après une note de Dom F.-M. Symphorien, abbé de Notre-Dame d'Hautecombe.)
Le P. Antenne était, lui aussi, un Religieux d'Hautecombe ; il figure en cette qualité, dans un acte de
résignation fait par lui le 10 mai 1614. Dans un autre acte du 26 juillet 1612, il est mentionné sous la désignation de :
« Dom Jean Antenne, prêtre, bachelier en théologie, Religieux profès de l'Ordre de Cîteaux. » (R. E.)
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8.7 Page 77

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entre les mains de Nostre Seigneur affin qu'il vous en fist porter la peyne, ou qu'il vous les
pardonnast, selon [85] qu'il luy plairoit. Il ne faut pas estre si curieuse que de vouloir sçavoir d'ou
procede la diversité des estatz de vostre vie ; il faut estre sousmise a tout ce que Dieu en ordonne
et s'arrester la.
Et bien, au demeurant, voyla donq le cher mari qui s'en va, ma chere Fille. Puisque sa
condition et son humeur mesme le porte au desir de paroistre es occasions257, il faut humblement
recommander son despart et son retour a Nostre Seigneur, avec confiance en sa misericorde qu'il
en disposera a sa plus grande gloire.
Vives doucement, humblement et tranquillement, ma tres chere Fille, et soyes tous-jours
toute a Nostre Seineur, duquel de tout mon cœur je vous souhaitte la tres sainte benediction, et a
vos petitz258, mais particulierement a ma chere bonne petite filleule, qu'on me dit estre toute de
succre. La chere cousine259 est aux vendanges, et on me dit qu'elle se porte bien, comme fait
madame de [Chantal], qui, a mon advis, s'avance fort en l'amour de Dieu, avec toutes ses Seurs.
Vostre humble compere et serviteur,
FRANÇS, E. de Geneve.
Ce 5 aoust 1611. [86]
_____
DCCV. A la Mère de Chantal. Le catéchiste de Notre-Dame
Annecy, 11 août 1611 260.
Ma tres chere Fille,
A ce que vous me dites, je vois qu'il sera mieux de remettre jusques a lundi ; vous series
trop precipitees toutes, et eux aussi, comme je pense261 ; et je seray bien ayse de ne point rompre
l'assignation aux bonnes Seurs de Sainte Claire, qui ont demain leur grande feste, ni au catechisme
de Nostre Dame, ou il faut que je sois catechiste262, estant invité il y a dix ou douze jours, a mon
gré, la veille de Nostre Dame. [87]
_____
257 « Le cher mari » s'en allait sans doute à Turin, où nous savons qu'il fit plus d'un séjour.
258 Les enfants connus de Mme de la Fléchère sont : Françoise-Innocente, filleule du Bienheureux (voir sa note au tome
précédent, p. 56) ; Antoinette, qui épousa Louis de Coysia, deuxième président au souverain Sénat de Savoie, et décéda
le 14 décembre 1630 ; Charles, seigneur et coseigneur de Saint-Ours, Villy, Crans, etc., capitaine de cent hommes
d'armes, par patentes du 26 mars 1630, conseiller d'Etat et chevalier d'honneur au souverain Sénat de Savoie (2 août
1635). Il éponsa, le 25 juin 1634, Gabrielle More, veuve de Charles de Crans, et mourut en 1649. Dans ses lettres à
Mme de la Fléchère, le Saint parle souvent de lui.
259 Mme de Charmoisy.
260 Migne, le premier, attribue à cette lettre la date du 11 août 1616, d'après, sans doute, les allusions aux fêtes de
sainte Claire et de l'Assomption et à la présence des deux Saints à Annecy. Mais ces particularités du texte se vérifient
aussi bien en 1611. L'allusion an dimanche 14 août, assigné pour le catéchisme, et l'appellation de « Fille » indiquent
cette dernière date de 1611 comme plus probable.
261 S'agirait-il d'un règlement de dot pour une Religieuse ? Le 39 août suivant, Sœur Péronne-Marie de Chastel et Sœur
Claude-Françoise Roget firent leur oblation.
262 Les déposants et les historiens ont raconté avec complaisance l'institution des catéchismes établie par saint François
de Sales. De plus, on voit ici que le Fondateur ne faisait pas tort à l'Evêque, puisque la visite promise à la chère Galerie
fut ajournée à cause de l'invitation au catéchisme de Notre-Dame.
77/321

8.8 Page 78

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DCCVI. A une dame263. Le grand et l'unique bonheur d'une
femme chrétienne.
Annecy, 17 août 1611.
Madame,
Le souvenir de vos vertus m'est si aggreable qu'il n'a pas besoin d'estre nourri par la faveur
de vos lettres ; elles vous acquierent neanmoins une nouvelle obligation sur moy, puisque je reçois
par icelles et beaucoup d'honneur et beaucoup de contentement, de voir que non seulement vous
aves reciproquement memoire de moy, mais que vous l'aves aggreablement. Aussi n'en sçauries-
vous conserver pour personne qui ayt plus de sincere affection pour vous, a qui je souhaitte
continuellement devant Nostre Seigneur mille benedictions, et celle-la sur toutes et pour toutes,
que vous soyés toute parfaitement sienne. Soyés-le, Madame, de tout vostre cœur, car c'est le
grand, ains l'unique bonheur qui vous puisse arriver ; et si, monsieur le Senateur n'en aura point de
jalousie, puisque vous n'en seres pas moins sienne, et en recevra de l'utilité, puisque vous ne
sçauries donner vostre cœur a Dieu que le sien n'y soit engagé.
Je suis, Madame, mais je suis de tout le mien,
Vostre bien humble serviteur,
FRANÇS, E. de Geneve.
17 aoust 1611. [88]
_____
DCCVII. A Madame de la Fléchère. Quel profit tirer des chutes.
Servir Dieu parmi les sécheresses nous est chose plus dure,
selon notre goût, mais plus profitable selon le goût de Dieu.
Les « viandes seches » et les hydropiques. Exercer la
débonnaireté à tout propos et sans propos
Annecy, 17 août [1611 264.]
Or sus, que voules vous que je vous die, ma tres chere Fille, sur le retour de vos miseres,
sinon qu'au retour de l'ennemy, il faut reprendre et les armes et le courage pour combattre plus fort
que jamais. Je ne voy rien de bien grand au billet. Mais, mon Dieu ! gardes-vous bien d'entrer en
aucune sorte de desfiance, car cette celeste Bonté ne vous laisse pas tomber de ces cheutes pour
vous abandonner, ains pour vous humilier et faire que vous vous tenies plus serree et ferme a la
main de sa misericorde.
263 Parmi les sénateurs de Savoie en relation avec le Saint, il est difficile de préciser celui qu'il désigne à la fin de la
lettre, et partant, de connaître la destinataire de celle-ci. Le personnage que l'on peut proposer avec le plus de
vraisemblance est Antoine de Lescheraine, reçu sénateur le 14 juillet 1610 (voir tome XI, note (637), p. 283), qui
épousa en secondes noces, par contrat dotal du 12 octobre 1594, Catherine, troisième fille de Claude-Amé de
Monthouz en Duyn, et de Françoise Grimaldi.
264 Le ton des lettres adressées à Mme de la Fléchère et les particularités de celle-ci permettent de désigner cette dame
comme destinataire.
La date de 1611 se déduit de la phrase par laquelle commence le troisième alinéa ; elle semble dire que les
procès étaient finis, quoique non gagnés. Or, ils battaient leur plein jusque dans les derniers mois de 1610. Pendant
l'été de 1614, la destinataire fut encore assujettie aux tracas des procès, et le 19 août de cette même année le Saint lui
promet d'intervenir en sa faveur. Mais dans cette lettre, il écrit : « Que dires vous de ce pere qui tarde tant a respondre
? » Si la présente lettre avait été écrite le 17 août 1614, c'est-à-dire deux jours auparavant, il n'aurait pu parler ainsi.
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8.9 Page 79

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Vous faites extremement a mon gré de continuer vos exercices emmi les secheresses et
langueurs interieures qui vous sont revenues, car puisque nous ne voulons servir Dieu que pour
l'amour de luy, et que le service que nous luy rendons parmi le travail des secheresses luy est plus
aggreable que celuy que nous faysons parmi les douceurs, nous devons aussi, de nostre costé,
l'aggreer davantage, au moins de nostre volonté superieure. Et bien que selon nostre goust et
l'amour propre les suavités et tendretés nous soyent plus douces, les [89] secheresses neanmoins,
selon le goust de Dieu et son amour, sont plus profitables, ainsy que les viandes seches sont
meilleures aux hydropiques que les humides, bien qu'ilz ayment tous-jours plus les humides.
Pour vostre temporel, puisque vous vous estes essayee d'y mettre de l'ordre et que vous
n'aves peu, il faut donq maintenant user de patience et de resignation, embrassant volontier la croix
qui vous est arrivee en partage, et selon que les occasions se presentent, vous prattiqueres l'advis
que je vous avois donné pour ce regard.
Demeurés en paix, ma chere Fille ; dites souvent a Nostre Seigneur que vous voules estre
ce qu'il veut que vous soyes et souffrir ce qu'il veut que vous souffries. Combattes fidellement vos
impatiences en exerçant non seulement a tous propos, mais encor sans propos, la sainte
debonnaireté et douceur a l'endroit de ceux qui vous sont plus ennuyeux, et Dieu benira vostre
dessein.
Bon soir, ma tres chere Fille ; Dieu soit uniquement vostre amour. Je suis en luy, de tout
mon cœur, tout vostre.
F.
Ce 17 aoust.
_____
DCCVIII. A la Mère de Chantal. Souhaits à l'occasion de la
Saint-Bernard. Les vertus caractéristiques du grand Docteur,
d'après saint François de Sales
Annecy, 19 août 1610 ou 1611 265.
Je vous donne le bonjour, ma tres chere Seur, ma Fille, attendant a demain d'aller estre
vostre aumosnier sur la feste du grand saint Bernard. Veuille sa sainte Maistresse nous
communiquer quelque goutte de la [90] suavité dont elle l'alaitta. Je pense que ce tems vous sera
fort propice, a cause de son rafraichissement.
Mon Dieu, ma tres chere Fille, que de graces et benedictions je vous souhaite ! La pureté
d'esprit est la vertu particuliere et la louange speciale de saint Bernard. Souhaites-la bien a mon
ame, tres chere Seur. Nostre cœur soit a jamais uni a Celuy pour lequel il est creé. Amen.
Revu sur l'Autographe appartenant à M. Cassin de la Loge, à Angers.
_____
265 La brièveté de ce billet et les souhaits qu'il renferme, persuadent que la Mère de Chantal en est la destinataire. La
première phrase et l'appellation de « Seur » excluent une date antérieure à 1610 et postérieure à 1611.
79/321

8.10 Page 80

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DCCIX. A la même. Une vocation à contrôler. Sujet
d'oraison conseillé pour des novices à la veille de leur profession
Annecy, [vers le 19 août 1611 266.]
Je vous remercie de vostre beau grand present, ma tres chere Mere, ma Fille, et encor plus
de vostre billet. Soyés asseuree que je me gouverneray bien et que je tiendray ce que je vous ay
promis.
La fille de Saint Claude267 ne viendra qu'apres avoir [91] esté en N. On pourra la renvoyer
consolee, sans pourtant s'engager de parole qu'a mesure qu'on le verra convenable. Si Mlle de
Chapot268 ou les autres vont la voir, encouragés-la fort a se lier a Nostre Seigneur ; elle a besoin
de courage, et pour le reste, c'est une bonne fille.
Bon jour, ma tres chere Mere. La tres sainte Vierge nostre Maistresse veuille bien naistre
et resider en nos cœurs. Nos filles qui veulent faire les vœux pourront bien faire un peu d'orayson
preparatoire sur les vœux de Nostre Dame et de tant de filles et femmes assemblees qui les firent
a Nostre Seigneur et qui les gardent avec tant de fidelité, qu'elles souffrent plus volontier pour le
divin Maistre que de s'en despartir.
Helas, que je souhaitte de sainteté a cette chere trouppe de filles, et sur tout a cette tres
unique, tres aymee et tres honnoree Mere, ma Fille, vrayement mienne ! Dieu la benisse et marque
son cœur au signe eternel de son pur amour. Amen.
_____
266 En 1611, Sœur Claude-Françoise Roget et Sœur Péronne-Marie de Chastel firent leur oblation le 29 août. Cette
date justifierait l'allusion à la fête de la Nativité de la très sainte Vierge, lignes 4, 5 de la page suivante. Migne (tome
VI, col. 1006), le premier, attribue sans aucune preuve à ce billet la date de 1616. Or, en 1616, les deux seules
professions qui se firent eurent lieu le 24 mai et le 24 juillet. Avec ce quantième, on s'explique mal la mention de la
solennité du 8 septembre, et en 1616 le rite de la profession était fixé avec plus de précision. Comme le Saint partit
pour le Chablais le 6 septembre 1611, et la Mère de Chantal pour la Bourgogne, les recommandations de celle-ci
accréditeraient encore la date proposée.
267 Le mouvement de piété qui, parti de la terre de Saint-Claude vers 1609, devait amener les fondations de plusieurs
monastères de Religieuses Annonciades en Franche-Comté de 1612 à 1624, était conduit ou encouragé par Prospère
de Boisset, le P. de Bonivard, le P. François de Bugey : la première, parente de saint François de Sales, les autres, ses
amis, et très au courant de sa fondation récente d'Annecy. La vocation de « la fille de Saint Claude » sortait
apparemment du petit groupe d'âmes dévotes que soutenait l'exemple de la future Mère Marie-Prospère, mais il est
difficile de proposer un nom.
268 Mlle de Chapot semble devoir être Jeanne-Antoine qui, plus tard, sera destinataire sous le nom de Mme de la Croix
d'Autherin.
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9 Pages 81-90

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9.1 Page 81

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DCCX. A Madame de la Fléchère269 (Inédite). Jubilé de Thonon,
Lorsque, par charité, l'on dérange ses exercices de dévotion,
Dieu ne cesse pas d'être servi.
Annecy, 1er septembre 1611.
Je vous dis en deux motz, ma tres chere Fille, que lundi, Dieu aydant, je pars tout a pied
pour aller au Jubilé de Thonon270, ou si je vous voy, ma consolation [92] sera extremement plus
grande. Pour le reste, c'est un'œuvre de charité que l'accompaignement que vous alles faire, et bien
que ce soit avec un peu de detraquement des sains exercices de devotion, si est ce que ce n'est pas
avec aucune perte du service de Dieu.
Et puisque l'homme veut si soudainement partir, je vous donne mille benedictions, ma tres
chere Fille, vous escrivant au parloir de la Visitation, ou Mme de Chantal vous salue tres
cordialement comme moy, qui suis
Vostre plus humble compere et serviteur,
FRANÇS E. de Geneve.
1er septembre 1611.
Revu sur l'Autographe appartenant à MM. Lyautry, château de Touchebredier (Eure-et-Loir).
_____
DCCXI. A Monsieur Bénigne Milletot. Une réponse claire sur
trois points. Pourquoi l'amitié de saint François de Sales pour
ses amis était plus forte que la mort. Le critère des vraies
amitiés. Une main « exquise et rare » et une matière « de
mauvais lustre. » Pour quels motifs l'Evêque de Genève
déteste les contentions et disputes entre catholiques. Il n'a pas
trouvé à son goût certains écrits de Bellarmin. La pauvre
mère poule et les poussins qui s'entrebecquettent. Adroite et
charitable critique
Annecy, 1-5 septembre 1611 271.
Monsieur,
Vos lettres pleines d'amour et de confiance en mon endroit exigent de moy, avec une douce
violence, une response claire sur trois pointz.
Quant au premier, la bonne madame de [Chantal] vous [93] dira tout ensemble son advis
269 Le ton du billet, sa teneur, et aussi la clausule finale désignent manifestement comme destinataire Mme de la
Fléchère.
270 Les prédications du Saint firent du fruit (voir ci-après, p. 99). Sur ce Jubilé, sans doute moins éclatant que ceux de
1603 et de 1607, nous ne sommes renseignés que par la correspondance de l'Evêque de Genève.
271 Le destinataire reçut cette lettre par l'entremise de la Mère de Chantal qui partit pour la Bourgogne dans la première
semaine de septembre (cf. ci-après, note (284), p. 98). La date se déduit de cette particularité.
81/321

9.2 Page 82

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et le mien, de ce qui est requis pour l'entier establissement de vostre fille en cette Congregation272.
J'ay bien aussi prié cette mesme bonne dame de vous porter de ma part l'asseurance de ce qu'avec
une faveur trop excessive vous m'aves par deux fois demandé ; mais il faut pourtant que je l'escrive
icy de ma main, comme je le sens de tout mon cœur.
C'est la vraye verité, Monsieur, qu'encor que mes amis meurent, mon amitié ne meurt point,
ains, s'il s'y fait quelque changement, c'est pour une nouvelle naissance qui la voit plus vive et
vigoureuse entre leurs cendres, comme un certain phœnix mystique273 ; car, bien que les personnes
que j'ayme soyent mortelles, ce que j'ayme principalement en elles est immortel, et j'ay tous-jours
estimé cet axiome fondamental pour la connoissance des vrayes amitiés, qu'Aristote274, saint
Hierosme275 et saint Augustin276 ont tant solemnisé : Amicitia quæ desinere potuit, nunquam vera
fuit277.
O Dieu, le bon monsieur le President [Frémyot] est tous-jours vivant en mon cœur, et il y
tient le rang que tant de faveurs receuës de luy et tant de dignes qualités reconneuës en luy, luy
avoyent acquis. Mais, Monsieur, la reciproque communication qu'avec tant de confiance je ne
faisois presque que commencer avec luy, est cessee et se treuve convertie en l'exercice des
mutuelles prieres que nous faysons l'un pour l'autre : luy, comme sçachant combien j'en ay besoin,
moy, comme doutant qu'il n'en ait besoin. Et donq, puisqu'il vous plaist, puisque vous le voules,
je vous dis de toute mon affection : prenés la place, Monsieur, en cette communication, et mon
cœur vous y regardera, vous y cherira, vous y envoyera ses pensees avec un amour qui ne violera
point les loix de respect et un respect qui ne se separera jamais du devoir de l'amour. [94]
Mais commençons donq par icy a parler comme il faut entre les amis parfaitz, et venons au
troisiesme point, a ce que je vous dois respondre. Je vois en vostre livre278 deux choses : les traitz
et la main de l'artisan d'un costé, et la matiere et sujet de l'autre. En verité, je treuve vostre main
bonne, louable, ains exquise et rare, mais la matiere me desplaist ; s'il faut dire le mot que j'ay dans
le cœur, je dis : la matiere me desplaist extremement. Pleust a Dieu, dis je, que mon Polycletus279,
qui m'est si cher, n'eust point mis sa maistresse main sur un airain de si mauvais lustre !
Je hais par inclination naturelle, par la condition de ma nourriture, par l'apprehension tiree
de mes ordinaires considerations et, comme je pense, par l'inspiration celeste, toutes les
contentions et disputes qui se font entre les Catholiques, desquelles la fin est inutile, et encor plus
celles desquelles les effectz ne peuvent estre que dissensions et differens, mais sur tout en ce tems
plein d'espritz disposés aux controverses, aux mesdisances, aux censures et a la ruyne de la charité.
Non, je n'ay pas mesme treuvé a mon goust certains escritz d'un saint et tres excellent
Prelat, esquelz il a touché du pouvoir indirect du Pape sur les Princes280 ; [95] non que j'aye jugé
272 Sœur Marie-Marguerite, qui fit profession le 30 juillet 1612. (Voir plus haut, note (55), p. 6.)
273 Vide tom. VIII, pp. 398, 399.
274 Moral. Eudem., l. VII, c. II.
275 Epist. III, ad Ruf. (Mig., XXII, col. 335.)
276 Lib. de Amicitia. (Mig., XL, col. 833.)
277 « L'amitié qui a pu cesser, n'a jamais été véritable. »
278 L'ouvrage était un petit volume in-18, de 133 pages, ayant pour titre : Traicté du Delict commun et cas privilegié :
ou de la puissance legitime des Juges seculiers sur les personnes Ecclesiastiques, par B. M. C[onseiller]. Imprimé en
Fevrier, l'an 1611. (Bibliothèque de Dijon, 5278.) Cet opuscule fut traduit en latin en 1612, réimprimé en 1615 et en
1616, et inséré dans le premier volume des Libertez de l'Eglise gallicane, édition de 1631.
Milletot attaquait les immunités de l'Eglise et restreignait l'étendue de son pouvoir à l'égard des choses
temporelles. Voilà pourquoi « la matiere » déplaisait au Saint « extremement. » (Voir note (280).
279 Polyclète, célèbre sculpteur grec, qui vivait au Ve siècle.
280 Beaucoup en France Henri IV tout le premier pensaient alors comme le Saint. Mais Bellarmin ne souleva
cette irritante controverse que sur ordre de Paul V ; personnellement, il aurait préféré garder le silence. Les « escritz
» que l'Evêque de Genève ne trouvait pas à son goût étaient sans doute le traité De potestate Summi Pontificis in rebus
temporalibus, adversus Gulielmum Barclaium. (Romæ, 1610.) L'auteur y soutenait que le pouvoir du Pape, atteignant
proprement et premièrement les choses spirituelles, s'étendait au temporel des rois, secondairement et par voie de
conséquence, quand le salut des âmes l'exige et dans la mesure même où il l'exige. Cette thèse n'était pas une
nouveauté. Dans ses Controverses (1586-1593), Bellarmin l'avait déjà exposée comme une doctrine ancienne et
certaine ; et de fait, en dehors de l'école régaliste et gallicane, elle a été généralement admise. (Cf. J. de la Servière,
De Jacobo I, Angliœ Rege cum Cardinali Roberto Bellarmino, S. J., super potestate cum regia... tum pontificia
82/321

9.3 Page 83

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si cela est ou s'il n'est point, mais parce qu'en cet aage ou nous avons tant d'ennemis dehors, je
croy que nous ne devons rien esmouvoir au dedans du cors de l'Eglise. La pauvre mere poule qui,
comme ses petitz poussins, nous tient dessous ses aisles, a bien asses de peyne de nous defendre
du milan, sans que nous nous entrebecquetions les uns les autres et que nous luy donnions des
entorses. En fin, quand les Rois et les Princes auront une mauvaise impression de leur Pere
spirituel, comme s'il les vouloit surprendre et leur arracher leur authorité que Dieu, souverain Pere,
Prince et Roy de tous, leur a donnee en partage, qu'en adviendra-il qu'une tres dangereuse aversion
des cœurs ? Et quand ilz croiront qu'il trahit son devoir, ne seront ilz pas grandement tentés
d'oublier le leur ?
Je n'ay pas voulu remarquer tout plein de choses qui me semblent devoir estre extremement
addoucies281, et me suis contenté de vous dire ainsy en gros et grossierement mon petit sentiment,
ains, pour parler naïfvement, mon grand sentiment pour ce regard. Mais dites [96] moy maintenant,
Monsieur, si je m'excuse envers vous de vous parler ainsy franchement, repliqueres vous point que
c'est aussi trop franchement ? Voyla pourtant comme je traitte avec ceux qui veulent que je
contracte une entiere amitié avec eux. Ah ! je sçai, je croy, je jure par tout que vous aymés l'Eglise,
que vous estes constamment son enfant asseuré ; mays le zele de l'authorité que vous aves si
longuement et heureusement possedee vous a poussé un peu trop avant. Vive Dieu ! Monsieur, je
vous cheris avec tout cela de tout mon cœur :
Non sentire bonos eadem de rebus iisdem,
Incolumi licuit semper amicitia282.
Que s'il vous semble que d'abord je devois user de plus de moderation, je vous supplieray de croire
que je n'en sçai point en l'amitié, ni presque en rien qui en depende. Et quand donq peut elle user
de ses droitz qu'en la ferveur de ses commencemens ?
Au demeurant, Dieu sçait combien vostre chere fille m'est pretieuse, comme une propre
seur, si je l'avois en cette vocation. Aussi, comme j'ay tous-jours fait avec feu monsieur283, je desire
que par tout vous m'advoüiés,
Vostre filz et serviteur fidelle,
FRANÇS, E. de Geneve.
_____
disputante, Paris, 1900 ; Dictionnaire de théologie catholique, Paris, 1903, art. Bellarmin ; Perrens, L'Eglise et l'Etat
en France sous le règne de Henri IV, etc., Paris, 1872 ; Etudes religieuses, 5 mars 1903 et 20 avril 1907.)
On ne saurait donc se prévaloir de la remarque du saint Docteur pour l'opposer au sentiment du savant
Cardinal. L'Evêque jugeait qu'il était inopportun et dangereux d'agiter ces problèmes, mais il ne mettait pas en question
le fond de la doctrine. Il déclare formellement s'abstenir de juger « si cela est, « ou s'il n'est point, » et l'on devine que
c'est par un sentiment de délicate condescendance pour son ami. Mais son opinion n'est pas douteuse ; il l'exprime
sans détour dans une lettre placée en mars 1612, dont la destinataire pourrait bien être la présidente Brûlart.
281 Papillon (Biblioth. des Auteurs de Bourgogne, 1742, tome II, p. 57) note que « saint François de Sales faisoit une
estime singulière de ce livre et qu'il employa tout son crédit pour empêcher qu'il ne fût mis dans l'Index. » Si elle fut
tentée, la démarche échoua, car l'ouvrage de Milletot fut condamné le 23 juillet 1611. (Cf. Index librorum
prohibitorum, etc., Romæ, 1900, p. 214.) Cum pernitiosissimos errores contineat... omnino prohibeatur, est-il dit dans
le décret. On ajoutait que l'auteur, résidant en France, pourrait être averti par le Cardinal de la Rochefoucault de
s'amender et de corriger son livre. La condamnation ne fut publiée toutefois que le 3 juillet 1623. Il ne faudrait pas
voir dans ce délai l'indice d'une intervention du Saint, car en ce temps-là, l'usage n'existait pas encore de « publier
immédiatement après une Congrégation, la liste des livres défendus. » D'ailleurs, on n'a pas trouvé « dans les Actes,
la moindre trace d'une intervention de saint François de Sales en faveur de Milletot. » (Note du savant Secrétaire de
la Congrégation de l'Index, le R. P. Thomas Esser, O. P.)
Quant à « l'estime » prétendue de l'Evêque de Genève pour ledit ouvrage, on voit par cette lettre ce qu'il faut
en penser. Sous sa forme atténuée, et quoique l'expression en ait été adoucie par le ton amical d'une charité
bienveillante, le sentiment du saint Docteur, tel qu'il s'affirme ici, est tout le contraire d'une approbation.
282 Les gens de bien ont toujours eu le droit de différer d'avis sur une question, sans que leur amitié en soit blessée.
283 Le président Frémyot.
83/321

9.4 Page 84

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DCCXII. A la Mère de Chantal. Sollicitude pour la Mère de
Chantal, alors absente de Savoie. Les affaires : leur
multiplicité ne doit pas troubler, ni leur difficulté émouvoir.
Nouvelles de Mlle de Blonay. Sermon sur la Nativité de la
très sainte Vierge. Affection des deux Fondateurs pour la
Sœur Favre
Thonon, to septembre 1611.
Me voyci a Thonon despuis trois jours, ma tres chere Fille, ou je vins fort heureusement et
sans ressentiment d'aucune lassitude. O Dieu ! ma tres chere Fille, je ne sçai quel chemin j'ay fait,
ou celuy de Thonon, ou celuy de Bourgoigne284, mays je sçai bien que je suis plus en Bourgoigne
qu'icy. Ouy, ma Fille, puisqu'il plaist ainsy a la divine Bonté, je suis inseparable de vostre ame et,
pour parler avec le Saint Esprit, nous n'avons meshuy plus qu'un cœur et qu'une ame285 ; car ce
qui est dit de tous les Chrestiens de la naissante Eglise, se treuve, graces a Dieu, maintenant entre
nous. Or, demeurons donq bien ainsy en Nostre Seigneur, ma tres aymee286.
Je suis tous-jours attendant des nouvelles du succes de vostre voyage, que je me prometz
avoir esté bon, mais non pas sans crainte pourtant, a cause de la foiblesse de vostre santé et
l'excessive chaleur qui a regné quelques heures de ces jours passés ; mais je veux croire qu'en ces
heures-la vous aures sejourné, et aures employé les matinees et les soirs qu'il a tous-jours fait un
peu de vent. Je prie Dieu qu'il vous conserve cherement et saintement comme ma propre ame.
Hé, je vous supplie, ma tres chere Fille, tenés-vous [98] bien a Jesus Christ et a Nostre
Dame et a vostre bon Ange en toutes vos affaires, affin que la multiplicité d'icelles ne vous trouble
point et que leur difficulté ne vous estonne point. Faites l'un apres l'autre au mieux que vous
pourres, et employés pour cela fidelement vostre esprit, mais doucement et suavement. Si Dieu
vous en donne l'issue, nous l'en benirons ; s'il ne luy plaist pas, nous l'en benirons aussi. Et il vous
suffira que, tout a la bonne foy, vous vous soyés essayee de reüscir, puisque Nostre Seigneur et la
rayson ne requierent pas de nous les effectz et evenemens, mais nostre fidelle et franche
application, employte et diligence ; car ceci depend de nous, mays non pas les succes. Dieu benira
vostre bonne intention en ce voyage et en l'entreprise que vous aves faite de mettre en ordre les
affaires de cette mayson-la pour vostre filz, et vous recompensera ou par une bonne issue, ou par
une sainte humiliation et resignation. Mon cœur fera cependant mille millions de bons desirs pour
le vostre comme pour soy mesme, et ne cesseray point d'implorer les prieres de la tres sainte Vierge
en ce lieu qui est tout consacré a son honneur.
Je renvoye ce jourd'huy nostre M. Michel287 aupres de nos filles, affin qu'elles ne
demeurent pas tout a fait privees de quelqu'un en qui elles ayent confiance, j'escris a nostre Seur
de Brechard une lettre pour toutes, affin de leur donner courage. Ma petite seur288 se porte bien,
car la vostre petite, ma cousine289, me l'escrit par une fille de chambre qu'elle a envoyee icy. Ce
sont toutes nos nouvelles, ma chere Fille. De jour a autre, je vous tiendray advertie de ce que je
284 Quand la baronne de Chantal vint se fixer en Savoie, saint François de Sales avait promis à ses parents qu'elle «
pourrait faire quelques voyages en Bourgogne, s'il était nécessaire, pour le bien de ses enfants. » (Mémoires de la
Mère de Chaugy, Ire Partie, chap. XXV.) Cette nécessité s'offrit après le décès du président Frémyot. Munie du congé
requis, délivré le 5 septembre, la Mère de Chantal partit le lendemain, accompagnée de la Sœur Favre et du baron de
Thorens.
285 Act., IV, 32.
286 Philip., ult., 1.
287 M. Michel Favre, aumônier du Saint et de la petite Communauté.
288 La baronne de Thorens.
289 Cette « petite seur » est, croyons-nous, Mlle de Charmoisy, que la Mère de Chantal appelait « sœur », et le Saint, «
petite cousine ».
84/321

9.5 Page 85

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feray.
Monsieur de Blonay depeschera sa fille pour vostre retour290. Je la vis le jour de Nostre
Dame ; elle a tous-jours sa bonne mine et les marques de vertueuse fille. Ce jour-la, je preschay
devant un grand peuple et force [99] estrangers ; et la glorieuse Reyne du Ciel m'assista pour dire
quelque chose de bon a sa gloire. Je me depescheray au plus tost en faveur de nos filles.
A Dieu, ma tres chere Fille, a Dieu soyons-nous a jamais. Que son amour soit eternellement
l'unité de nostre cœur !
Je saluë d'une affection extreme ma tres chere grande fille291, a laquelle je recommande
tous-jours la santé de nostre douce Mere, et luy porte bien envie, sans luy desirer la privation de
ce qu'elle possede. Elle vacquera cependant a rendre son cœur un peu fort et genereux contre la
tendreté et delicatesse qui le tenoit a tous propos sujet au degoust. Vous sçaves, ma Fille, que
nostre cœur ayme d'amour celuy de cette grande fille. Salués-la donq amoureusement de ma part,
comme je la prie de saluer de la mienne madamoyselle de N.292 et toutes ces dames de la,
specialement madame la Prieure293 et monsieur N.294, car j'avois oublié ces petites particularités.
Je saluë aussi monsieur de N. et madamoyselle N., mais tout a part, monsieur de N., pour le
bonheur duquel je prie tous les jours, et monsieur de N.295, et en fin monsieur [de Thorens] mon
cher frere, auquel je recommande le service de sa mere, sa santé et sa consolation.
M. de Boisy296 a esté un peu estonné de la chaleur, mais il se remet, Dieu mercy.
A Thonon, le 10 septembre 1611.
Vive Jesus et Marie ! Dieu vous benisse, ma tres chere Fille. Je suis en luy, ce que luy seul
sçait. [100]
_____
DCCXIII. A la même. Comment traiter des affaires de la terre.
L'amour transforme tout. Santé et sainteté de François de
Sales. Le moyen de parvenir. Communauté de désirs et
d'aspirations entre la Mère de Chantal et son Directeur. La
sainte Croix ; elle béatifie ceux qui l'aiment et la portent.
L'autel des crucifiés
Thonon, 14 septembre 1611 297.
O Dieu, ma tres chere Fille, si est-ce que je vous escris soigneusement a toutes les
occasions. Or sus, beni soit Dieu qui vous a fait arriver au lieu ou les affaires qu'il vous avoit
laissees sur les bras vous ont appellee. Ma tres chere Fille, appliqués le travail et tracas que vous
y souffrires, a la gloire de la divine Majesté, pour l'amour de laquelle vous les subisses ; traittés
290 Marie-Aimée de Blonay reçut l'habit le 25 janvier 1612. (Cf. le tome précédent, p. 101, Lettre D.)
291 La Sœur Favre.
292 Mlle de Villers, ou Mlle de Puligny, ou encore Mlle de Traves. (Voir tome XIII, note (103), p. 23 ; tome XIV, note
(497), p. 166, et note (276), p. 91.)
293 Sans doute Françoise Bourgeois, prieure du Puits-d'Orbe.
294 Peut-être le confesseur de l'abbaye.
295 Ces derniers pourraient bien être, l'un, le beau-père de la Mère de Chantal, lequel vivait encore, et l'autre, Celse-
Bénigne.
296 Jean-François de Sales.
297 L'édition de 1626 et les suivantes ne donnent aucune date. Hérissant (1758) ajoute celle du 14 septembre 1611, qui
s'accorde avec la teneur du premier et du dernier alinéa ; mais le second, où le Saint parle de sa visite comme terminée,
inspire quelque doute, car il ne fut de retour à Annecy qu'à la fin d'octobre. Peut-être faut-il entendre par « ce bout de
visite, » les premiers jours consacrés à Thonon.
85/321

9.6 Page 86

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des affaires de la terre avec les yeux fichés au Ciel. Je seray tous-jours present a vostre chere ame
comme vous mesme, et respandray soigneusement la benediction des Sacrifices divins sur vostre
peyne, affin qu'elle vous soit douce et utile au saint amour, pour lequel mieux prattiquer vous estes
allee terminer les occasions de vos distractions. Ma chere Fille, tout ce qui se fait pour l'amour est
amour ; le travail, ouy mesme la mort n'est qu'amour, quand c'est pour l'amour que nous les
recevons.
Or sus, parlons de nos affaires. J'ay achevé ce bout de visite asses heureusement, et avec
esperance de quelque fruit pour les ames. Je me porte extremement bien, a mon advis, et observe
soigneusement vos ordonnances pour ma santé. Mays, pour ma sainteté, qui est ce que vous
affectionnés le plus, je ne fay gueres de choses, sinon mille continuelz desirs et quelques prieres
particulieres, affin qu'il plaise a Nostre Seigneur les rendre utiles [101] et fructueuses pour tout
nostre cœur, et, presque ordinairement, je me treuve plein d'une douce confiance que sa divine
Bonté nous exaucera. Et puisqu'en verité nous desirons, en verité nous parviendrons ; car ce grand
Amy de nostre cœur ne le remplit, ce me semble, de desirs que pour le combler d'amour, comme
il ne charge les arbres de fleurs que pour les recharger de fruitz. Ah ! Sauveur de nostre ame, quand
serons-nous autant ardans a vous aymer que nous le sommes a le desirer ?
Il me tarde, ma tres chere Fille, que ce cœur que Dieu nous a donné, soit uniquement et
inseparablement donné et lié a son Dieu par ce saint amour unissant qui est plus fort que la mort298
et que tout.299 Mon Dieu ! ma tres chere Fille, remplissons nostre cœur de courage et faysons des-
ormais des merveilles pour l'avancement de nostre cœur en cet amour celeste. Et remarquons que
Nostre Seigneur ne vous donne jamais de violentes inspirations de la pureté et perfection de vostre
cœur, qu'il ne me donne la mesme volonté, pour nous faire connoistre qu'il ne faut qu'une
inspiration d'une mesme chose a un mesme cœur, et que, par l'unité de l'inspiration, nous sçachions
que cette souveraine Providence veut que nous soyons une mesme ame, pour la poursuite d'une
mesme œuvre et pour la pureté de nostre perfection.
Or sus, ma tres chere Fille, ma Mere, il faut finir. C'est aujourd'huy le jour de la sainte
Croix. O Dieu, qu'elle est belle et qu'elle est aymable ! On donne des batailles pour en avoir le bois
et on l'exalte sur le mont de Calvaire. Ma tres chere Fille, helas ! que bienheureux sont ceux qui
l'ayment et qui la portent ! Elle sera plantee au Ciel quand Nostre Seigneur viendra juger les vivans
et les mortz300, pour nous apprendre que le Ciel est l'autel des crucifiés. Aymons donq bien ces
croix que nous rencontrons en nostre chemin.
Dieu vous benisse en l'amour de la sainte Croix. [102]
_____
DCCXIV. Au duc de Savoie, Charles-Emmanuel Ier.
Eboulement à Sixt. Détresse des habitants qui en est la suite.
Le Saint recommande ses diocésains à la charité du duc de
Savoie
Thonon, 16 septembre 1611.
Monseigneur,
Ayant veu a Six l'espouventable et irreparable accablement survenu il y a quelques annees,
298 Cant., ult., 6.
299 La suite de cet alinéa paraît se rapporter à une autre lettre ; la difficulté de lui attribuer sa vraie place nous oblige à
le laisser ici.
300 Matt., XXIV, 30.
86/321

9.7 Page 87

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par la cheute d'une piece de montagne301, je n'ay sceu refuser aux habitans du lieu, qui recourent a
la clemence de Vostre Altesse pour, a proportion, estre deschargés des tailles, mon veritable
tesmoignage en faveur de leur trop juste praetention. C'est pourquoy j'asseure que ce malheur leur
a osté une tres notable partie de leurs biens et, de miserables qu'ilz estoyent, les a rendus la misere
mesme, sur laquelle, comme sur un dign'objet, la charité de Vostre Altesse exercera, comm'ilz
esperent, son aumosne.
Je supplie Nostre Seigneur quil benisse de ses grandes perfections et benedictions la
couronne de Vostre Altesse, de laquelle je suis invariablement,
Monseigneur,
Tres humble, tres obeissant et tres fidele orateur et serviteur,
FRANÇS, Evesque de Geneve.
A Thonon, le XVI septembre 1611.
A Son Altesse Serenissime.
Revu sur l'Autographe conservé à Londres, au Musée Britannique. [103]
_____
DCCXV. A M. Michel Brisson302 (Inédite). Regrets de ne
pouvoir accepter de prêcher un Carême à Saint-Merry.
Témoignages d'estime au destinataire qui avait transmis
l'invitation
Thonon, 17 septembre 1611.
Monsieur,
J'avois certes grand desir de pouvoir servir ce Caresme prochain a l'instruction de la
parroisse de Saint Mederic, puis que messieurs ses curé et marguilliers me font lhonneur de m'y
souhaiter303 ; mais j'ay tant de besoigne taillee pour cett'annee, quii me seroit impossible d'en
fendre la presse pour partir d'icy a trois moys, comm'il faudroit faire. Je vous supplie donq,
Monsieur, tres humblement, de m'en excuser vers eux pour cett'annee ; et si, pour la suivante, les
difficultés que vous sçaves se pouvoyent vaincre, je serois bien ayse de leur tesmoigner combien
j'estime lhonneur de la semonce quilz me font faire par la personne du monde que j'honnore,
respecte et cheris de toute l'estendue de mes forces, et a laquelle je suis sans reserve et sans fin,
Monsieur,
Humble, fidele et tres affectionné serviteur,
301 « L'espouventable et irreparable accablement » était survenu le 21 février 1602. Une partie de la Tète-Noire,
s'écroulant tout à coup, avait couvert toute la plaine et rejeté le Giffre sur la droite de la vallée ; la coulée des blocs
avait emporté une trentaine de maisons, avec autant de granges, tué vingt-neuf personnes et détruit champs et bétail.
Cette catastrophe émut très douloureusement l'Evêque. Le 25 septembre de l'année suivante, il visita les parents des
victimes et fit des démarches pour alléger leur grande misère. Comme elles n'aboutissaient pas, il s'adressa de nouveau
au duc et lui écrivit la présente lettre. Charles-Emmanuel, cette fois, accorda la décharge sollicitée. (Voir Gonthier,
Œuvres hist., tome III, 1903, Un éboulement à Sixt en 1602.)
302 Le destinataire est vraisemblablement Michel Brisson, seigneur de l'Eraudière, conseiller du roi, connu de son
temps pour l'ardeur de sa foi et ses grandes libéralités. Par testament, il légua toute sa fortune pour fonder un Noviciat
de la Compagnie de Jésus, et mourut en 1635. Il était cousin du célèbre président Barnabé Brisson, pendu par les Seize
en 1591.
303 Les archives de la paroisse parisienne ont disparu. Même après de très nombreuses recherches, il n'a pas été possible
de découvrir les noms du curé et des marguillers qui avaient invité le Saint.
87/321

9.8 Page 88

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Ce XVII septembre 1611.
FRANÇS, E. de Geneve.
Revu sur l'Autographe appartenant à M. le comte de Chabrol, à Riom. [104]
_____
DCCXVI. A la Soeur de Bréchard, Religieuse de la Visitation.
Notre-Seigneur saura bon gré à qui porte et supporte les âmes
qui se trouvent faibles
Bons, fin septembre ou commencement d'octobre 1611 304.
Ma chere Niece, ma Fille,
Ce n'est que pour simplement vous saluer et asseurer que je me presseray le plus que je
pourray pour bien tost vous revoir, et espere que ce sera avec nostre mutuelle consolation et de
toutes nos Seurs mes cheres filles. Ce pendant, perseverés courageusement a porter et supporter
celles qui se treuveront foibles305 ; et croyés moy, ma chere Fille, ma Niece, que Nostre Seigneur,
a qui vous estes toute, vous en sçaura un grand gré306. Je le supplie qu'il vous comble de force, de
douceur et de benediction, et toute cette chere trouppe de filles qui me sont pretieuses comme la
prunelle de mes yeux.
A Dieu donq, ma tres chere Fille, ma Niece, continues d'aymer en Nostre Seigneur, celuy
qui est en luy tres cordialement tout vostre.
F.
A Bons.
A Madame
Madame de Brechard.
A la Visitation. [105]
_____
304 Le Saint était à Bons le 1er octobre 1611, mais le 14 septembre et le 3 octobre il était à Thonon : c'est donc entre
ces dernières dates que ce billet a été écrit.
305 Cf. Galat., ult., 2.
306 La Mère de Chantal, à son départ pour la Bourgogne, avait chargé la Sœur de Bréchard de gouverner en sa place.
La ferveur de cette dernière pouvait décourager des âmes moins viriles que la sienne : de là, ces avis du bienheureux
Fondateur.
88/321

9.9 Page 89

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DCCXVII. A la Soeur Roget, Religieuse de la Visitation307
(Inédite). Ce qu'il faut faire après « quelques petitz mauvais pas.
» — Avoir le cœur franc envers les Supérieurs. — La « petite
bienaymee Françon. »
[Septembre-octobre] 1611 308.
Vous m'aves fait un grand playsir de m'escrire, ma chere Filleule, ma Fille. Mais
vrayement, il faut estre bien brave a surmonter tous ces petitz chagrins et la melancholie qui les
produit. Or, je sçay bien que vous estes fort fidelle pour ce regard, et que si vous faites quelques
petitz mauvais pas, soudain vous vous releves humblement, doucement et sans vous estonner ; car
il faut faire ainsy, ma chere Fille, pour devenir parfaitement sainte, qui est vostre pretention. C'est
aussi bien fait [106] d'avoir de la confiance en nostre Seur de Brechard, et c'est la grace de Dieu
qui nous rend ainsy le cœur franc envers ceux a qui, pour son amour, nous obeissons.
A Dieu, ma chere Fille, que j'ayme extremement en ce mesme Seigneur, pour lequel je suis
tout vostre et a vostre mere309, et a ma Seur Chastel310, ma Seur Milletot311, ma Seur Fichet312, ma
Seur Tiollier313 ; car, quant a ma petite bienaymee Françon314, je la salue a part comme ma petite
fille toute mienne.
Dieu soit beni, ma chere Filleule, ma Fille.
A ma chere Seur Roget, ma fille.
Revu sur une ancienne copie conservée à la Visitation de Turin.
_____
307 Sœur Claude-Françoise Roget appartenait à une famille d'Annecy, que le Saint qualifie de « fort honnorable. »
(Voir le tome précédent, pp. 328, 329.) Baptisée le 31 décembre 1594, elle entra à la Visitation le 22 juillet 1610, y
prit l'habit le même jour, fit profession le 29 août 1611 et mourut le 14 juin 1613. Ses parents étaient Claude Roget et
Marie Empereur1, déjà veuve en 1600. Quoique d'une petite complexion, cette âme innocente dépensa une ardeur
toute virile pour se réformer. Sa carrière fut courte, mais Dieu fortifia son cœur et récompensa son angélique patience
par des faveurs surnaturelles. Très aimable, très vertueuse, très aimée des siens et des deux Fondateurs, elle fut la
première de leurs filles qui alla voir ce que l'Epoux céleste préparait aux autres. (Archives de la Visitation d'Annecy.)
Il sera souvent parlé d'elle au cours des lettres de 1613.
1 La jeune Sœur n'était donc pas fille de Marie Dupanloup, comme nous l'avions dit au tome précédent, note (940), p.
329, sur la foi d'une communication inexacte, par erreur de lecture.
308 Dans cette lettre, il n'est pas fait mention de la Mère de Chantal et de la Sœur Favre : elles n'étaient donc pas à
Annecy. D'autre part, le Saint nomme la Sœur Thiollier, entrée le 6 juin 1611. Ces circonstances persuadent que la
présente lettre a été écrite pendant le voyage de la Fondatrice en Bourgogne (septembre-décembre 1611), et
probablement durant le séjour du Bienheureux en Chablais (septembre-octobre) ; car les salutations finales font croire
qu'il était absent d'Annecy.
309 La mère de la destinataire (voir note (307) de la page précédente).
310 Sœur Péronne-Marie de Chastel (voir ci-après, note (408), p. 133).
311 Sœur Marie-Marguerite (voir plus haut, note (55), p. 6).
312 Sœur Marie-Adrienne (item, note (70), p. 12).
313 Sœur Claude-Marie (item, note (71), p. 13).
314 Françoise de Chantal.
89/321

9.10 Page 90

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DCCXVIII. A la Mère de Chantal. Souhaits de bon et saint
voyage. Affectueux messages pour les compagnons, les
parents et les amis de la Mère de Chantal
Bons, 1er octobre 1611.
315Le pied a l'estrier, je vous escris ces quatre motz, ma tres chere Fille mienne, seulement
pour vous tenir asseuree de nostre santé. Et Dieu me donne les heureuses nouvelles que je souhaite
aussi de vostre part, car jusques a present nous en jeunons encores. Or, j'espere en cette souveraine
Providence, qu'elle vous conservera saintement et cherement pour nostre mutuelle consolation et
reciproque avancement en son amour cæleste, pour lequel [107] je fay sans fin des aggreables et
desirables projetz, que je supplie le Saint Esprit nous faire suavement prattiquer.
A Dieu, ma tres chere Mere, ma Fille mienne, a Dieu soyons nous a jamais, et a jamais
vive Jesus ! Amen.
Je salue du cœur que vous connoisses, nostre grande fille316 et luy recommande nostre chere
et bonne Mere, comm'aussi monsieur de Thorens, que je cheris en qualité de mon frere et de vostre
filz, qui veut dire excessivement. Je suis a Bons et parmi les chams ; soudain que ce devoir me le
permettra, je seray a Neci, c'est a dire dans trois semaines.
Je salue humblement monsieur de Chantal et monsieur de Vauxcroissant317, et vous
penseres bien que si je sçavois que vous fussies ou a Dijon ou aupres de Monsieur
l'Archevesque318, je vous supplierois de faire mes honneurs convenablement.
Le doux Jesus, auquel et par lequel je suis autant vostre que vous mesme, vous veuille benir
et conserver a jamais, ma tres chere Fille mienne.
A Bons, le 1er d'octobre.
A Madame
Madame de Chantal, m.
A Montelon.
Revu sur l'Autographe conservé à la Visitation d'Autun. [108]
_____
315 Voir le fac-simile placé en tête de ce volume.
316 La Sœur Favre.
317 Voir le tome précédent, note (657), p. 229.
318 Mgr André Frémyot, archevêque de Bourges.
90/321

10 Pages 91-100

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10.1 Page 91

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DCCXIX. Au Baron Amédée de Villette319. A propos de la mort
d'une parente : regrets, condoléances, consolations, promesse de
prières.
Saint-Julien, 12 octobre 1611.
Monsieur mon Oncle,
Quel desplaysir viens-je de recevoir en la triste nouvelle du trespas de madame ma tante320,
qui m'aymoit si tendrement et cherement, et a laquelle j'avois si justement voué tant d'affection !
J'irois moy mesme vous tesmoigner ce ressentiment, si je croyois, par ce moyen, de pouvoir alleger
le vostre, ou que cet engagement auquel je suis parmi les assignations de ma visite le me permist
; mais au moins, voyla mon frere321 qui va recevoir vos commandemens pour luy et pour moy, et
vous asseurer que, comme j'ay honnoré de tout mon cœur la vie de cette chere defuncte, aussi
cheriray-je a jamais son honnorable memoire autant qu'aucun de ses parens et serviteurs qu'elle
ayt laissés en ce monde.
Au demeurant, Monsieur mon Oncle, cette si fascheuse separation est d'autant moins dure
qu'elle durera peu, et que non seulement nous esperons, mays nous aspirons a cet heureux repos
auquel cette belle ame est, ou sera bien tost logee. Prenons, je vous supplie, en gré cette petite
attente qu'il nous faut faire ici bas, et au lieu de multiplier nos souspirs et nos larmes sur elle,
faysons-les pour elle devant Nostre Seigneur, affin qu'il luy [109] plaise haster sa reception entre
les bras de sa divine Bonté, si des-ja il ne luy a fait cette grace.
Certes, pour moy, j'ay beaucoup de consolation en la connoissance que j'avois de l'interieur
de cette bonne tante, laquelle plusieurs fois, avec extreme confiance, me l'avoit communiqué en la
sacree confession ; car j'en tire une asseurance que cette divine Providence, qui luy avoit donné un
cœur si pieux et chrestien, l'aura comblee de benedictions en ce despart qu'elle a fait d'entre nous.
Benissons et louons Dieu, Monsieur mon tres cher Oncle, adorons la disposition de ses
ordonnances, reconnoissons la condition et instabilité de cette vie et attendons en paix la future.
Je m'en vay a l'eglise, ou, par le saint Sacrifice, je commenceray les recommandations de
cette chere et pretieuse ame, et celle que je dois a jamais continuer pour vous et tout ce qu'elle
aymoit le plus. Je suis sans fin et sans reserve,
Monsieur mon Oncle,
Vostre tres humble et tres fidele neveu et serviteur,
FRANÇS E. de Geneve.
A Saint Julien, le 12 octobre 1611.
_____
319 La teneur de la lettre désigne clairement le destinataire.
320 Marguerite de Pingon-Cusy (voir tome XIII, note (331), p. 116) fut inhumée à Giez, car dans son testament du 15
juillet 1621, son mari dit qu'il veut que son corps « soit porté à Giez, » pour être sépulturé auprès de sa femme.
(Archives de Chevron-Villette.)
321 Il s'agit probablement de Jean-François, en tournée pastorale avec le Saint, et la lettre insinue que celui-ci l'envoie
à M. de Villette.
91/321

10.2 Page 92

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DCCXX. Au Président Antoine Favre (Inédite). La cure de
Saint-Sigismond en 1611 : l'ami du destinataire en mériterait une
meilleure
Annecy, 29 octobre 1611.
Monsieur mon Frere,
A mesme que monsieur Jacquier322 m'a rendu vostre [110] lettre, monsieur Brunet323 m'est
venu dire adieu ; [si] que j'ay retardé ce moment pour vous resaluer humblement et vous dire que,
quant a la cure de Saint Sigismond, elle ne vaut sinon douze vingt florins, en un lieu tres aspre et
hors de chemin324. J'en desirerois une meilleure et plus a propos pour M. Charbonnet, que je dois
affectionner pour tant de raysons325. Neanmoins, s'il desire venir au concours de celle cy, ce sera
le 4e de ce mois suyvant qu'elle est assignee ; marri que peut estre je ne pourray pas m'y treuver,
si M. de Villette persevere de me sommer d'aller avec ses autres parens au commencement des
obseques de feu Mme de Villette326 environ ce tems-la.
J'attendray le retour du sieur Jacquier, pour les chappelles, et vous saluant mille et mille
fois de tout mon cœur, je suis sans fin,
Monsieur mon Frere,
Vostre tres humble frere et serviteur,
FRANÇS E. de Geneve.
XXIX octobre 1611.
A Monsieur Favre,
Baron de Peroges, Conseiller d'Estat de S. A.,
Premier President de Savoye.
Revu sur une copie conservée à la Visitation de Montélimar. [111]
_____
322 Sans doute, Charles Jacquier, de Cluses en Faucigny, « homme de chambre » du président Favre, qui lui légua deux
cents florins « pour les aggreables services, » note-t-il dans son testament (21 février 1624), « quil m'a rendu des
plusieurs anneés en ça quil est a mon service. »
323 Très vraisemblablement, Me Brunet, procureur au Sénat de Chambéry. C'était l'homme de confiance des familles
Favre et de Charmoisy, qui lui remettaient volontiers leurs messages et commissions. Son nom revient souvent dans
les lettres du Président et de M. de Charmoisy.
324 Saint-Sigismond dans le Faucigny ; le 4 novembre 1611, ce ne fut pas le protégé du Président, mais Claude Favre
qui obtint cette cure. (R. E.)
325 Michel Charbonnel, docte et vertueux ecclésiastique, fut institué curé de Cernex le 20 mai 1618. (R. E.) Le Saint
affectionnait vraiment ce digne prêtre ; on peut en juger, du reste, par sa déposition (Process. remiss. Gebenn., (I), ad
art. 44) : « Au commencement quil luy pleust me donner la charge des ames en la parroesse de Cernex, » dit-il, « y
estant tout nouveau et faisant des roolles de touttes les difficultés que j'avois et qui m'arrivoient, et le venant treuver
de temps en temps pour les luy exposer... il m'escouttoit volontiers, et m'expliquant toutes les doubtz et m'enseignant
comme je m'y comporterois. » Le même document nous apprend que M. Charbonnel avait étudié chez les Jésuites à
Chambéry et qu'il accompagnait à leur collège les enfants du Président : ce qui explique les sympathies particulières
du saint Evêque.
326 Vid. Epist. præced.
92/321

10.3 Page 93

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DCCXXI. A la Sœur de Bréchard, Religieuse de la Visitation.
Un Père vigilant qui a peur d'être blâmé pour ne l'être pas assez.
Pourquoi ne faut-il pat emporter toutes les couronnes.
C'est encore de la charité que de laisser faire aux autres quelque
chose. De qui doit-on attendre l'issue des maladies
Annecy, 29-31 octobre 1611 327.
Ma tres chere Fille, ma Niece,
L'on m'a adverti que vous vous accables de peyne, que vous ne vous devestes point
plusieurs nuitz de suite, que vous ne manges comme point, que vous faites les services plus
penibles de l'infirmerie et puis retournes promptement soustenir le chant du chœur. O ma Fille, ma
Fille, je ne veux point que vous soyes si brave ; car voyes vous, que me diroit nostre Mere si en
son absence il arrivoit quelque mal a cette tres aymee Jeanne Charlotte ? Certes, a son arrivee, je
courrois fortune d'estre blasmé comme un pere peu vigilant sur sa tres chere fille.
Croyés le pauvre Pere : prenés du repos et du repas suffisamment ; laissés amoureusement
du travail aux autres et ne desirés pas d'emporter toutes les couronnes ; le cher prochain sera tout
ayse d'en avoir quelques unes. L'ardeur du saint amour qui vous pousse a vouloir tout faire, vous
doit aussi retenir et laisser faire aux autres quelque chose pour leur consolation.
Dieu nous sera bon, ma Niece, ma Fille : j'espere qu'il nous menace pour ne nous point
frapper, et que la chere [112] Peronne de nostre Mere328 luy ira au devant a son arrivee, avec sa
tres chere lieutenante, ma fille tres aymee, que je desire qui travaille avec un esprit ardent mais
doux, fervent mais moderé, attendant le bon succes des maladies et affaires non de sa peyne, non
de son soin, mays de l'amoureuse bonté de son Espoux. Qu'il la veuille benir eternellement, avec
toute la trouppe de ma tres chere Mere absente et qui nous est si presente au cœur, en la presence
de Celuy qui est l'unique tout du cœur de la Mere et des filles.
Priés-le aussi qu'ainsy soit du Pere, affin que tout soit saintement esgal en nostre pauvre
chere petite Visitation. Amen.
_____
327 Au dire de la Mère de Chaugy (Les Vies de quatre des premieres Meres (Annecy, 1659 ; Paris 1892), Vie de la
Mère de Bréchard, chap. VIII), le Saint écrivit cette lettre à son retour du Chablais ; or, il revint à Annecy vers le 29
octobre. La date que nous adoptons se trouve d'ailleurs confirmée par l'allusion à la maladie de la Sœur de Chastel.
Celle-ci, en effet, tomba malade peu de temps après sa profession (29 août 1611) et après le départ de la Mère de
Chantal pour la Bourgogne, c'est-à-dire en septembre. (Cf. ibid., Vie de la Mère de Chastel, chap. XIV, et ci-après, p.
132, et note (410), p. 134.)
328 Sœur Péronne-Marie de Chastel, alors gravement malade. (Voir la note précédente.)
93/321

10.4 Page 94

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DCCXXII. A M. Bénigne Milletot. La plus mauvaise façon de
mal dire. Il est presque impossible « de corriger
l'immoderation moderement. » Ce qui arrive souvent aux
chasseurs. A César ce qui est à César, mais aussi à Dieu ce
qui est à Dieu
[Octobre] 1611 329.
Monsieur,
Vous m'aves grandement obligé recevant en bonne part ma franchise, bien qu'a vray dire
vous ne pouvies bonnement luy refuser ce gracieux accueil, puisqu'elle alloit vers vous avec le
sauf conduit de vostre semonce et sous la faveur d'une vraye amitié330 ; aussi n'avois-je garde de
luy donner le vol autrement.
Je ne veux nullement repliquer sur la declaration qu'il vous plaist de me faire de vostre
intention en l'edition [113] du petit livre331, car je serois marri si j'avois jamais eu un seul petit
soupçon au contraire ; mays je diray seulement ce mot qui part de la condition de mon esprit. Si
quelqu'un avoit immoderement parlé ou escrit de l'authorité, il auroit grand tort, car il n'y a point
de plus mauvaise façon de mal dire que de trop dire. Si on dit moins qu'il ne faut dire, il est aysé
d'adjouster ; mais apres avoir trop dit, il est malaysé de retrancher, et on ne peut jamais faire le
retranchement si tost, qu'on puisse empescher la nuisance de l'exces. Or, voyci le haut point de la
vertu : de corriger l'immoderation moderement. Il est presque impossible d'atteindre a ce signe de
perfection. Je dis presque, a cause de celuy qui dit332 : Cum his qui oderunt pacem eram pacificus333
; autrement, je pense que je ne l'eusse pas dit, car les chasseurs poussent par tout dans les buissons,
et retournent souvent plus gastés que la beste qu'ilz ont cuidé gaster. La pluspart de ces propos mal
mesurés qu'on dit ou qu'on escrit, sont plus heureusement repoussés par le mespris que par
l'opposition. Mais, n'en parlons donq plus. A Cesar ce qui est a Cesar, mays aussi334, a Dieu ce
qui est a Dieu335.
Je vous escris sans loysir. Vous me supporteres, s'il vous plaist, selon vostre bonté et ayant
esgard a mon affection, qui est toute inclinee a vous honnorer et cherir tres specialement. Et sur
cela, je prie Nostre Seigneur qu'il vous remplisse de la grace, paix et suavité de son Saint Esprit et
donne sa sacree benediction a toute vostre famille, laissant au surplus pour ce porteur a vous dire
comme nostre fille336 se porte bien.
Je suis, Monsieur,
Vostre plus humble serviteur,
FRANÇS, E. de Geneve.
_____
329 Il est difficile de préciser davantage la date, mais il est peu probable que Milletot ait attendu le retour à Annecy de
la Mère de Chantal, pour écrire la réponse dont parle le Saint. La Fondatrice ne revint de Bourgogne que le 24
décembre. Or, un auteur n'attend pas plusieurs mois pour répondre aux critiques ou aux louanges de son livre, surtout
quand elles viennent d'un ami, et qu'il s'appelle François de Sales.
330 Vide Epist. DCCXI.
331 Vide supra, p. 95, note (278).
332 Ps. CXIX, ult.
333 Je gardais la paix avec ceux qui baissaient la paix.
334 Cette brève, mais significative réserve, confirmerait, s'il était nécessaire, le sentiment du saint Docteur, amplement
exposé dans la lettre probablement adressée à Mme Brûlart en mars 1612.
335 Matt., XXII, 21.
336 Sœur Marie-Marguerite Milletot, fille du destinataire.
94/321

10.5 Page 95

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DCCXXIII. A un inconnu (Fragment inédit). Des bailliages qui
n'avaient pas été visités « il y a plus de cent ans. » Bourgeois
et bourgeoises de Genève aux vendanges et de quoi ils étaient
étonnés, ayant ouï le Saint
Annecy, novembre 1611 337.
Monsieur,
Des la reception de vostre derniere lettre, qu'on me rendit sur le commencement de
septembre, j'ay presque tous-jours esté aux chams pour faire la visite des baillages qui sont autour
de Geneve, qui n'avoyent esté visités il y a plus de cent ans, pour avoir esté restablis seulement des
douze ou quinze ans en ça au giron de la sainte Eglise. Plusieurs bourgeois et bourgeoises de
Geneve qui estoyent venus aux vendanges, nous ont veu en cet exercice, et ont tesmoigné pour la
pluspart d'en avoir pris bonne edification, et quelques uns qui m'ont voulu ouïr, ont esté estonnés
dequoy leurs ministres leur descrivoyent nostre creance tout autrement que nous ne la preschons
pas ; chose…
Revu sur une copie conservée à la Visitation d'Annecy. [115]
_____
337 Le destinataire nous est inconnu. Quant à la date, on peut la déduire avec assez de probabilité des allusions de la
lettre : la visite des bailliages, les vendanges, le séjour et les prédications du Saint en Chablais.
95/321

10.6 Page 96

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DCCXXIV. A Dom Eustache de Saint-Paul Asseline,
Feuillant338. Amitié du Saint pour l'Ordre des Feuillants. La
disposition des matières dans une Somme de théologie ; moyen
de rendre celle-ci « plus friande et plus aggreable. » Les
questions inutiles. Souhaits et témoignages d'affection.
Annecy, 15 novembre 1611 339.
Mon Reverend Pere,
C'est la verité que j'ayme d'amour vostre Congregation, mais d'amour infructueux jusques
a present. Dieu [116] le rende autant effectif qu'il est affectif ; et non seulement a [Abondance340,]
mais en deux ou trois insignes Monasteres de ce diocese341, nous verrons refleurir la sainte pieté
que le glorieux ami de Dieu et de Nostre Dame, saint Bernard, y avoit plantee.
Je voy bien en vostre lettre que vous languissés, puisque vous me dites : 342 Ecce quem
amas infirmatur343 ; mais je n'en ay pourtant point de compassion qu'avec une extreme suavité,
d'autant que 344 infirmitas hæc non est ad mortem345, sed ut manifestentur opera Dei346 ; ecce enim
qui amat infirmatur, puisque amore languet347. Et partant, je suis bien content de faire l'office d'une
fille de Hierusalem ; 348 et renuntiabo Dilecto tuo349 : Ecce qui amat et quem amas infirmatur. Et
vous, mon cher Pere, en contreschange, implorés pour moy et sur moy le secours duquel, entre les
338 Né à Paris et baptisé le 27 avril 1573, dom Eustache de Saint-Paul Asseline, fils d'Eustache Asseline, avocat au
Parlement, et de Marie Le Grand, débuta par de très brillantes études en Sorbonne. Docteur en 1604 et maître à son
tour, il enseigna successivement dans la célèbre maison, la philosophie et la théologie. Ses premières leçons furent
publiées en 1609, sous le titre de : Summa Philosophiæ quadripartita, de rebus dialecticis, moralibus, physicis et
metaphysicis. Cet ouvrage fut réimprimé plus de trente fois. Au dire de l'historien d'Asseline, dom Antoine de Saint-
Pierre, « François de Sales... en faisoit tant d'estat, qu'il en tenoit toujours les livres devant ses yeux, sur la table de
son estude. »
Asseline prit l'habit des Feuillants le 14 février 1605, avec le nom d'Eustache de Saint-Paul, et fit profession
l'année suivante. Prieur dans les monastères de Celle en Berry, 1611-1614, de Saint-Bernard de Paris, 1614-1617, de
Saint-Bernard de Rome, 1617-1620, il exerça la charge de Visiteur général de 1620 à 1625, et enfin celle d'assistant
du Général. Il mourut d'une attaque d'apoplexie le 26 décembre 1640. Son savoir étendu et sa piété lui acquirent un
grand renom, l'amitié de plusieurs prélats et la confiance du Pape Paul V ; il faut noter aussi qu'il fut une lumière du
« cercle Acarie » et que Port-Royal, dans la première période de son histoire, le choisit pour l'un de ses directeurs.
Quant à l'Evêque de Genève, son amitié pour l'illustre Feuillant datait du séjour qu'il fit'à Paris, n'étant encore que
coadjuteur. Il le connut alors jusqu'à la familiarité. Dom Eustache de Saint-Paul s'est surtout inspiré de ces souvenirs
dans la déposition remarquable qu'il a laissée sur les vertus de son saint ami. (Voir D. Ant. de Saint-Pierre, Vie du R.
P. D. Eustache de Saint Paul Asseline, Paris, 1646.)
339 Les anciens éditeurs attribuent à cette lettre la date de 1617, mais à tort. La vraie date doit être 1611, comme
s'accordant mieux avec la publication de la Somme dont il est parlé dans le texte, et aussi parce que, sous la plume du
Saint, 1611 et 1617 peuvent quelquefois facilement se confondre à la lecture.
340 Voir tome XII, note (938), p. 373.
341 Le Saint exprime ici discrètement son désir de réformer les trois abbayes cisterciennes du diocèse de Genève,
Aulps, Hautecombe, Chézery ; mais ses tentatives échouèrent.
342 Voici que celui que vous aimez est malade.
343 Joan., XI, 3.
344 cette maladie ne va pas à la mort, mais elle est afin que les œuvres de Dieu soient manifestées ; car celui qui aime
est malade, puisqu'il languit d'amour.
345 Ibid., v. 4.
346 Ibid., III, 21.
347 Cant., V, 8.
348 et j'annoncerai à ton Bien-Aimé : Voici que celui qui vous aime et que vous aimez est malade.
349 Ibid.
96/321

10.7 Page 97

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vens et les orages, j'ay tant besoin sur ces eaux : 350 Aquæ multæ, populi multi. Salvum me fac,
Deus, quoniam conculcava me homo, et libera me de aquis multis351.
J'ay veu avec un extreme playsir le projet de vostre Somme de Theologie352, qui est, a mon
gré, bien et [117] judicieusement faite. Si vous me favorises de m'envoyer un cahier, je le liray
amoureusement, et vous diray franchement et naïfvement mon advis, a quel prix que ce soit. Et
pour vous en donner quelque asseurance des maintenant, je vous dis que mon opinion seroit que
vous retranchassies tant, qu'il vous seroit possible toutes les paroles methodiques, lesquelles, bien
qu'il faille employer en enseignant, sont neanmoins superflues et, si je ne me trompe, importunes
en escrivant.
Qu'est-il besoin, par exemple : « In hac difficultate tres nobis occurrunt quæstiones : prima
nempe quæstio erit, quid sit prædestinatio ; secunda, quorum sit prædestinatio ; tertia, » etc.353 ?
Car, puisque vous estes extremement methodique, on verra bien que vous faites ces choses l'une
apres l'autre, sans que vous en advertissies auparavant.
De mesme : « In hac quaestione sunt tres sententiæ : prima sententia est, » etc.354 Car, ne
suffit-il pas de commencer a capite355 le recit des sentences, avec un nombre precedent, en cette
sorte : « 1. Scotus, Mayronis et sequaces, etc. ; 2. Ocham, Aureolus et Nominales ; 3. Sancti vero
Thomas, Bonaventura356 ; » et ainsy des autres.
Puis, au lieu de dire : « Respondendum est tribus conclusionibus, quarum prima sit357, » ne
suffit-il pas : « Jam ergo dico, primo, etc. 2. Dico, etc. 3. Dico,358 » ?
Comme aussi de faire des prefaces pour continuer les [118] matieres : « Postquam egimus
de Deo uno, congruum est ut nunc de Deo trino, sive de Trinitate, » etc.359 Cela est bon pour des
gens qui vont sans methode, ou qui ont besoin de faire connoistre leur methode parce qu'elle est
extraordinaire ou embarrassee. Or, cela empeschera extremement vostre Somme de grossir ; ce ne
sera que suc et moüelle, et selon mon sens, elle en sera plus friande et plus aggreable.
J'adjouste qu'il y a une quantité de questions inutiles a tout, horsmis a façonner le discours.
Certes, il n'est pas grand besoin de sçavoir, « utrum Angeli sint in loco per essentiam, aut per
operationem ; utrum moveantur ab extremo ad extremum sine medio360, » et semblables. Et bien
que je voudrois qu'on n'oubliast rien, si est-ce qu'en telles questions il me semble qu'il suffiroit de
bien exprimer vostre opinion et en jetter le vray fondement ; puis a la fin, dire simplement, ou au
commencement, que « talis et talis aliter senserunt361, » affin de laisser plus de place pour
s'estendre un peu davantage es questions de consequence, esquelles il faut regarder de bien
instruire vostre lecteur.
Item : je sçay que quand il vous plaist, vous aves un stile affectif ; car je me resouviens fort
bien de vostre Benjamin de Sorbonne362. J'appreuverois qu'es endroitz ou commodement il se peut,
350 Les grandes foules sont comme les grandes eaux. Sauvez-moi, mon Dieu, parce que l'homme m'a foulé aux pieds,
et délivrez-moi de la multitude des eaux.
351 Pss. III, 7, LV, 2, CXLIII, 7.
352 Cet ouvrage parut avec le titre suivant : Summa Théologiæ tripartita, de Deo, rebusque divinis ac supernaturalibus.
Paris, Charles Chastelain, 1613 et 1616. En le parcourant, on se rend compte que l'humble et docte Religieux a
déféré aux indications du saint Evêque, et répandu de l'onction dans l'exposé de ses thèses.
353 « Sur cette difficulté, trois questions se présentent : la première, qu'est-ce que la prédestination ; la seconde, qui
sont ceux qui seront prédestinés ; la troisième, » etc.
354 « Sur cette question, il y a trois opinions : la première est, » etc.
355 sans préambule
356 « 1. Scot, Mayronis et leurs disciples, etc. ; 2. Ockam, Oriol et les Nominalistes ; 3. mais saint Thomas et saint
Bonaventure ; »
357 « Il faut donc répondre par trois conclusions, dont la première est. »
358 « Je dis donc en premier lieu, etc. 2. Je dis, etc. 3. Je dis. »
359 « Après avoir traité de l'unité de Dieu, il convient maintenant d'expliquer ce qui regarde Dieu trine, ou la Trinité,
» etc.
360 « si les Anges sont dans le lieu par leur essence ou par leurs opérations ; s'ils se meuvent d'un endroit à un autre
sans passer par un milieu, »
361 « tel et tel ont pensé autrement, »
362 Par ces mots, il faut très probablement entendre la thèse de licence que soutint Asseline, en vue de son doctorat,
pendant le séjour de saint François de Sales à Paris (1602).
97/321

10.8 Page 98

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vous fissies les argumens pour vos opinions en ce stile ; comme en la question : « Utrum Verbum
carnem sumpsisset, Adamo non peccante363 ? » Et en l'une et en l'autre opinion, on peut [119]
reduire les opinions en stile affectif. En celle : « Utrum praedestinatio sit ex praevisis meritis364, »
soit que l'on tienne l'opinion des saintz Peres qui ont precedé saint Ambroyse, soit qu'on tienne
celle de saint Augustin ou celle de saint Thomas ou celle des autres, on peut former les argumens
en stile affectif, sans amplifier, ains en abbregeant ; et au lieu de dire : « Secundum argumentum
sit365, » simplement mettre un chiffre, 2.
Au demeurant, c'est un grand ornement de mettre plusieurs bonnes authorités, quand elles
sont preignantes et courtes ; si moins, peu avec renvoy.
Or sus, mon cher Pere, que vous semble de mon cœur ? va-il pas bien a la bonne foy envers
le vostre ? Mais croyés-moy, encores ne suis-je pas si simple, qu'avec un autre j'en usasse comme
cela. Je me resouviens de vostre douceur naturelle, morale et surnaturelle ; j'ay mon imagination
pleine de vostre charité, laquelle366 omnia suffert367, et que libenter suffertis insipientes, cum sitis
ipsi sapientes368 ; in insipientia, donq, mea dixi369.
Dieu vous fasse prosperer en son saint amour. Je suis en luy, a toute extremité,
Mon cher Pere,
Vostre frere et serviteur plus humble et affectionné,
FRANÇS, E. de Geneve.
D'Annessy, ce 15 novembre...
_____
DCCXXV. A la Mère de Chantal. De quels principes doit
s'inspirer la Mère de Chantal pour fixer la durée de son séjour en
Bourgogne. Comme le monde censure ce qui est fait pour
Dieu. Nouvelles de la Visitation
Annecy, 15 novembre 1611 370.
Ma tres chere Fille,
Je vous diray franchement que, quant a l'obligation de vostre conscience, je ne varie
nullement et persevere a ce que je vous en ay dit il y a long tems, qui est en un mot, que si la
necessité de la personne de ce bon seigneur371 est telle que vous soyés requise en presence pour la
secourir, vous deves arrester. Si ce n'est que la necessité du meilleur estat des biens, vous n'y estes
pas voirement obligee ; mais pourtant, si cette necessité estoit extreme et grande et qu'elle ne peust
estre remediee que par vous, c'est a dire que vous ne puissies suppleer par autruy aux affaires, vous
363 « Si le Verbe se fût incarné, au cas où Adam n'eût pas péché ? »
364 « Si la prédestination se fait d'après la prévision des mérites, »
365 « Soit le second argument, »
366 supporte tout, et que, étant sensés, vous supportez volontiers les insensés ; j'ai donc parlé avec ma simplicité
ordinaire.
367 Cor., XIII, 7.
368 Cor., XI, 19.
369 Ibid., v. 21.
370 L'édition de 1626 adresse cette lettre : A une Religieuse de la Visitation ; Blaise, Vivès et Migne (tome V, col.
1305) donnent pour destinataire la Comtesse de Dalet, et la date : « Après le 11 mai 1621. » Date et adresse sont
fausses. Au tome IX, col. 79, Migne reproduit la même lettre avec l'adresse : A la Mère de Chantal, et la date du 15
novembre 1611, d'après les Mss. de M. de Baudry. Sans nul doute, cette dernière adresse est la vraie ; il suffit de lire
le texte pour s'en convaincre. Quant à la date, elle concorde très bien avec les faits relatés par la Mère de Chaugy, à
propos du séjour de la Sainte en Bourgogne. (Cf. note (374) de la page suivante.)
371 Le baron de Chantal.
98/321

10.9 Page 99

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pourries librement arrester le tems requis a cela, que je remetz a vostre discretion et prudence, ne
pouvant dissimuler avec vous qu'en cette occasion je ne voye quelque sorte de tentation. Car sans
doute, si vous vous fussies remariee a quelque chevalier du fond de Gascoigne ou de Bretaigne,
vous eussies tout abandonné et on n'en eust rien dit. Maintenant que vous n'aves pas fait a beaucoup
pres un si grand abandonnement et que vous aves reservé asses de liberté pour avoir [121] un soin
moderé de vostre mayson et de vos enfans, parce que ce peu de retraitte que vous aves fait est pour
Dieu, il se treuve des gens qui taschent de le faire estimer mauvais et contre le devoir.
Ce que je ne dis pas pour ce bon chevalier372 qui vous souhaitte aupres de soy, car
vrayement il a rayson de desirer le bien de vostre conversation, qui ne peut que luy estre fort
aggreable ; mays pour ceux qui en parlent par maniere de conscience et de scrupule, qui, a mon
advis, ne sont pas bien fondés en cela, bien qu'en la lettre de monsieur N.373 je les voye fort doctes
et de grand esprit374. Mais je reviens a vous dire que vostre discretion vous doit regler, selon ce
que je vous en ay dit autrefois et que maintenant je repete.
Au demeurant, pendant vostre sejour, ces bonnes filles375 font au mieux qu'elles peuvent,
affin qu'a vostre retour vous ne treuviés point de decadence en cette heureuse vie en laquelle Dieu
les a mises sous vostre conduitte.
Je vous souhaitte mille et mille benedictions celestes pour l'avancement de vostre cœur au
tres saint amour du Crucifix, auquel il est voùé et consacré eternellement. Je suis, comme vous
sçaves, de toute mon ame, ma tres chere Fille, tout parfaitement vostre en Celuy qui, pour nous
rendre siens, s'est fait tout nostre, Jesus Christ, qui vit et regne es siecles des siecles. Amen.
FRANÇS, E. de Geneve. [122]
_____
DCCXXVI. A M. Philippe de Quoex. Mlle de Blonay sera la
bienvenue à Annecy ; qu'elle y vienne sans attendre le retour de
la Mère de Chantal
Annecy, 28 novembre 1611.
Monsieur Partat376 est substitué pour aller a Aix. Je vous prie de faire tenir les presentes a
M. de Blonay377, et luy escrire que s'il luy plaist que sa fille vienne sans attendre le retour de
madame de Chantal, elle sera la bienvenue378. Ce que je dis, parce que madame de Chantal, peut
estre, ne viendra pas avant Noël, puisqu'elle est resolue d'achever et demesler toutes ses affaires
avant que de revenir, affin de n'avoir plus sujet de distraction.
Je vous prie de faire la commission que je vous laissay, et de dire a M. de Chastillon379
372 Le beau-père de la Sainte.
373 Peut-être M. Robert (voir tome XIII, note (1020), p. 379), ou encore M. Claude Frémyot (voir tome XII, note (627),
p. 280).
374 « Les parents de M. de Chantal, son feu mari, » dit en effet la Mère de Chaugy (Mémoires, etc., Partie II, chap.
IV), « firent faire devant elle une assemblée, de gens doctes, même des religieux, pour lui persuader, par des raisons
de doctrine et de conscience, disaient-ils, « qu'elle devrait demeurer en son pays pour pourvoir aux biens de ses enfants,
puisqu'elle n'était pas religieuse de clôture ; qu'elle se devait contenter de vivre parmi les siens comme font en plusieurs
lieux celles du tiers-ordre de saint François. » Notre Bienheureuse Mère, » ajoute l'annaliste, « était trop bien fondée
dans les maximes de la sainte folie de la Croix, pour se laisser ébranler par la folle sagesse du monde. »
375 Les Sœurs de la Visitation.
376 Aucun personnage du nom de Partat n'a pu être découvert : serait-ce une erreur de lecture de l'éditeur de 1758 ?
En 1616, les Registres des Entrées du Sénat (cf. Mugnier, p. 90) mentionnent Me Auguste Parat, secrétaire patrimonial
du souverain Sénat de Savoie.
377 Claude de Blonay.
378 Voir ci-dessus, note (290), p. 99.
379 Jean de Châtillon (voir ci-dessus, note (184), p. 58).
99/321

10.10 Page 100

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qu'il face, pour les reconnoissances, selon qu'il m'escrivoit380. J'envoye a madame d'Allemand381
un livre, selon que je luy avois promis.
Je prie Dieu qu'il vous benisse, et me recommande a vos prieres.
Vostre plus humble confrere,
FRANÇS, E. de Geneve.
28 novembre 1611. [123]
_____
DCCXXVII. Au Marquis de Lans. L'Evêque de Genève avertit
le gouverneur de son départ pour Gex
Annecy, 28 novembre 1611.
Monsieur,
Les ecclesiastiques et Catholiques de Gex me conjurant d'aller a leur ayde pour un affaire
qui importe a la gloire de Dieu382, je m'y en vay tout maintenant. Mays, avant que de partir, je vous
en donne advis, remettant, apres mon retour, de fayre part a Vostre Excellence de ce qui se sera
passé.
Ce pendant, je supplie Nostre Seigneur quil la conserve, et suis,
Monsieur,
Vostre serviteur tres humble,
FRANÇS E. de Geneve.
XXVIII novembre 1611, a Neci.
A Son Excellence.
Revu sur l'Autographe conservé à l'abbaye de Saint-Maurice en Valais. [124]
_____
380 Ces « reconnoissances » visent probablement des bénéfices qui devaient être unis à la Sainte-Maison de Thonon
après la renonciation ou le décès des titulaires. Ces biens éventuels créèrent beaucoup de soucis au saint Prélat et aux
administrateurs. (Cf. Lettre DCCXXIX.)
381 Voir sa note au tome précédent, p. 332. Le « livre » que lui adresse le Saint, est sans doute un exemplaire de la
troisième édition (1610) de l'Introduction a la Vie devote.
382 Voir p. 127, la lettre du 13 décembre suivant au même destinataire, qui explique au long, par les résultats, le but
de ce voyage.
100/321

11 Pages 101-110

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11.1 Page 101

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DCCXXVIII. A la Mère de Chantal. Ferveur nouvelle de charité
et de zèle pour Notre-Seigneur. La beauté de la foi transporte
François de Sales d'amour et de gratitude ; il en voit plus
clairement la grandeur, en pays hérétique
Gex, 7 décembre 1611 383.
Tres chere Fille,
Il sera force que vous souffries ma briefveté, car me voyci encor a Gex emmi tant d'affaires,
que je ne sçay de quel costé me tourner, sur tout maintenant au despart. Or sus, qu'est-il besoin de
parler ainsy a une ame qui me connoist comme elle mesme ?
Je me porte fort bien, grace a nostre Sauveur, qui me donne certain courage nouveau de
l'aymer, servir et honnorer plus que jamais de tout mon cœur, de toute mon ame et de tout moy
mesme ; mays je dis de tout moy mesme, ma tres chere Fille, m'estant advis que jusques a present
je n'ay point eu l'ardeur ni le soin convenable au devoir que j'ay a cette immense Bonté.
Helas ! je vois icy ces pauvres brebis errantes, je traitte avec elles et considere leur
aveuglement palpable et manifeste. O Dieu, la beauté de nostre sainte foy en paroist si belle que
j'en meurs d'amour, et m'est advis que je dois serrer le don pretieux que Dieu m'en a fait, dedans
un cœur tout parfumé de devotion. Ma tres chere Fille, remerciés cette clarté souveraine qui
respand si misericordieusement ses rayons dans ce cœur, qu'a mesme que je suis parmi ceux qui
n'en ont point, je vois plus clairement et illustrement sa grandeur et sa [125] desirable suavité.384
Faites donq actions de graces pour ce cœur, comme pour le vostre mesme.
Dieu vous benisse de sa grande benediction ; c'est le continuel et invariable souhait de ce
cœur qui est vostre en Jesus Christ.
A Gex, le 7 decembre 1611, veille de ma consecration.
A Madame
[Madame] la Baronne de Chantal.
Revu sur le texte inséré dans le Ier Procès de Canonisation.
_____
383 Cette lettre représente la première partie d'un texte fabriqué, publié sans date par l'édition de 1626 et les suivantes,
et reproduit par Vivès et Migne avec cette fausse date : « Vers le 20 novembre 1613. » (Voir plus haut, note (180), p.
56.)
384 Aux deux dernières phrases, qui semblent inédites, les éditeurs de 1626 avaient substitué le texte donné plus haut,
vers le 10 mai 1611. (Cf. note (180), p. 56.)
101/321

11.2 Page 102

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DCCXXIX. A M. Jean de Chatillon. Lettre d'affaires
Annecy, 13 décembre 1611.
Monsieur,
Faites hardiment comme vous m'escrivistes l'autre jour, touchant les reconnoissances385. Et
pour le mari de la Torta, vous vous addresseres a monsieur le senateur de la Valbonne386, qui va
lâ, affin qu'il luy parle authoritative ; et, en passant icy, je luy recommanderay l'affaire. Au
demeurant, si ledit seigneur et senateur desire ouïr en tesmoignage aucuns ecclesiastiques, je vous
prie de dire ausdits ecclesiastiques de ma part, qu'ilz ayent a tesmoigner, deposer et dire la verité,
vous donnant, pour ce regard, tout pouvoir de le leur ordonner387. [126]
J'escris sans loysir ; mais avec l'affection de laquelle je suis,
Vostre humble confrere,
FRANÇS, E. de Geneve.
XIII decembre 1611, a Neci.
A Monsieur
Monsieur de Chastillon.
_____
DCCXXX. Au Marquis de Lans. L'Evêque de Genève expose au
gouverneur le sujet et les résultats de son voyage à Gex. Les
commissaires, l'un « grand catholique, » et l'autre « grand
heretique, » Exécution de l'édit de Nantes à Gex.
Espérances fondées pour le prochain rétablissement du culte
Annecy, 13 décembre 1611.
Monsieur,
Comme je donnay advis a Vostre Excellence de mon acheminement a Gex388, je le luy
donne aussi de mon retour que j'ay fait si tost qu'il m'a esté possible. Le sujet de mon voyage fut
que les huguenotz ayant dressé des plaintes en leur assemblee de Saumeur sur l'inexecution de
385 Vide supra, Epist. DCCXXVI.
386 René Favre, fils aîné du Président.
387 Dans les Archives du Sénat (Chambéry), Série I, Arrêts criminels, 1610-1611, on trouve la commission suivante :
« Sur la remonstrance faicte par le procureur general de S. A. tendant a ce qu'il soit commis l'ung des seigneurs
conseilliers et senateurs de ceans, pour informer sur ce que, portant dans l'esglise parrochialle de Thonon ung corps
decedé au lieu de Marcla, pour sepulture, ledict corps estant dans ladicte esglise, les prebstres faisans le divin service,
seroient arrivez et entré dans ladicte esglise, cinq de la ville de Thonon, avec armes, qui auroient empesché ladicte
sepulture et contrainctz les prebstres, au conspect d'iceulx qui estoient dans ladicte esglise, de ne le sepulturer au lieu
et dans la fosse faitte par (sic) sa sepulture.
« Veu ladicte remonstrance, signé Jean Anthoine Bay, et le contenu d'icelle consideré, le Senat... a commis
et commect le seigneur Favre, conseillier et senateur ceans, pour informer sur lesdictz exces... avec pouvoir de faire
saisir... ceulx qui se trouveront coulpables... Prononcé an procureur general, le 10 decembre 1611. »
Les diverses recommandations du Saint se rapportent manifestement à cette affaire et s'expliquent par la
teneur de la pièce qu'on vient de lire.
388 Vide supra, Epist. DCCXXVII.
102/321

11.3 Page 103

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l'Edit de Nantes389, le Roy de France, en son [127] Conseil, a deputé des commissaires en toutes
les provinces pour rendre par tout ledit Edit executé. Et pour la Bourgoigne, sous laquelle on
comprend les païs eschangés, on commit le sieur de Mazuyer390, vicomte d'Ambrieur, maistre des
requestes, grand catholique et grand homme d'affaires, et le sieur de Vilarnos391, beau-filz du sieur
du Plessis Mornay392, qui a la survivance de son beaupere au gouvernement de Saumeur, grand
heretique, et au reste, gentilhomme de bonne sorte et bien qualifié.
393L'un et l'autre estans arrivés a Gex, il fut proposé [128] de venir aux effectz de leur
commission, et par consequent, de me remettre toutes les eglises et tous les biens ecclesiastiques
possedés par les huguenotz, affin d'estre par moy pourveu en chasque lieu de pasteurs et services
convenables. Mays parce que je n'estois pas la, la proposition se fit en mon nom par un tres bon et
digne Pere Capucin, originaire de Beugey, mays natif de Chamberi394, qui neanmoins n'ayant point
de procuration, promit de me faire ratifier.
Sur cela, estant adverti et conjuré par les Catholiques de me rendre en praesence pour un
coup de si grande importance, j'y allay nuit et jour, et me treuvay asses tost pour une assemblee
generale de tout ce païs-la395, ou je refis a vive voix mes requisitions et m'essayay de respondre
aux allegations des ministres, qui n'ont rien oublié de leur costé pour empescher le fruit de cette
commission demandee imprudemment par leurs confreres, qui ne prirent pas garde que, si ailleurs
l'execution de l'Edit leur estoit favorable, a Gex elle leur estoit extremement contraire. Et en fin,
apres trois ou quatre assemblees ainsy generales et publiques, la multitude des oppositions et
allegations de nos adversayres fut causé que le tout a esté renvoyé au Conseil privé, pour estre par
iceluy ordonné selon qu'il verra a faire ; sauf pour le regard de l'eglise des Carmes de Gex, toute
389 L'assemblée de Saumur, qui s'ouvrit le 37 mai 1611 sous la présidence du fameux du Plessis-Mornay, gouverneur
de cette ville, et prit fin le 15 septembre suivant, avait pour objet d'élire six députés, parmi lesquels deux seraient
choisis pour résider à la cour comme mandataires des intérêts du parti. Les protestants préférèrent rédiger des cahiers
de plaintes et de requêtes. Elles comprenaient cinquante-sept articles, se réduisant à trois chefs principaux : le libre
exercice de leur religion, des règlements plus équitables dans l'administration de la justice et plusieurs places de sûreté.
Offensée de la hardiesse de ces réclamations, la régente les rejeta pour la plupart, et consentit seulement à envoyer
deux commissaires royaux dans les diverses provinces, l'un catholique, l'autre protestant, pour y veiller à l'exécution
de l'Edit de Nantes. On remarqua la présence à Saumur des députés de Genève, quoique étrangers au royaume de
France.
390 Gilles Le Mazuyer. Voir sa note avec la lettre que le Saint lui adresse le 14 novembre 1612.
391 Né le 17 novembre 1572, issu d'une ancienne famille noble de Bourgogne, Jean III de Jaucourt, seigneur de
Villarnoul ou Villarnos, devint chevalier de l'ordre du roi et conseiller royal. Il épousa, en 1599, Marthe du Plessis-
Mornay, la fille aînée de celui qu'on appelait « le pape des huguenots. » Commissaire en 1600, des édits de pacification
accordés aux calvinistes, il obtint de Henri IV, dès 1609, la survivance à toutes les fonctions et dignités de son beau-
père. Mais en 1619, la révolte des protestants fit échouer cet espoir. Rentré dans la vie privée, « le sieur de Vilarnos »
consacra tous ses loisirs aux affaires religieuses. (Cf. Moreri, Hœfer, Haag, etc.)
392 Philippe de Mornay (1549-1623) est trop connu dans l'histoire du protestantisme français pour qu'il soit nécessaire
de lui consacrer une longue notice. On sait qu'il se mesura avec le cardinal du Perron dans la fameuse conférence de
Fontainebleau et qu'il n'y fit pas merveilleuse figure. « Du Plessis, » écrit Sully dans ses Mémoires, « se défendit à
faire pitié et en sortit à sa honte. » On se plaît à reconnaître qu'il était judicieux, sage, modéré dès qu'il ne s'agissait
point des intérêts de son parti. On a de lui plusieurs ouvrages, presque tous remplis, dit Feller, « des erreurs de sa
secte, et de plus, d'une bonne dose d'enthousiasme. » Du Plessis-Mornay dépensa une activité incroyable à propager
ou à fortifier en France et au dehors la religion calviniste dont il fut, pendant cinquante ans, le chef et l'oracle toujours
écouté.
393 L'Autographe n'a pas été retrouvé, mais pour cet alinéa et le suivant, notre texte a été pris sur un catalogue
d'autographes, plus exact, croyons-nous, que celui publié par Datta (1835). L'adresse de la lettre, la date et la signature
sont reproduites aussi d'après ledit catalogue.
394 Sans doute le P. Genand, appelé tantôt François de Chambéry et tantôt François du Bugey. (Voir tome XI, note
(419), p. 179.) Son nom' revient sans cesse dans les lettres relatives aux affaires de Gex.
395 Le 28 novembre 1611 furent lues, publiées et enregistrées à Gex les lettres patentes des deux commissaires royaux,
datées du 10 octobre. François de Sales se hâta de rejoindre ces derniers. Le 12 décembre suivant, ils promulguèrent
une ordonnance par laquelle il était enjoint aux catholiques de ne pas molester les réformés dans leurs possessions,
jusqu'à ce que le roi en eût autrement disposé ; quant aux ministres, il leur fut signifié de ne rien changer dans tout ce
qui touchait aux églises et en dépendait, tels que cimetières et pensions, sous peine, pour les uns et les autres, d'être
déclarés ennemis du repos public. Une nouvelle ordonnance, qui avait surtout pour objet d'assurer la pacification, fut
publiée un mois après, le 16 janvier 1612. (Voir Brossard, Hist. du pays de Gex, 1851, chap. XXV.)
103/321

11.4 Page 104

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ruinee396, et [129] une chapelle jointe a icelle, fondee par un bastard de la mayson de nos Princes397,
comme encor de l'eglise d'Alemoigne398, qui, sur le champ, m'ont esté remises. J'espere neanmoins
que dans bien peu de moys on me remettra tout le reste, ayant tant de rayson comme j'ay de mon
costé ; si bien que ce voyage n'aura pas esté infructueux.
Rien autre ne s'est passé, digne d'estre representé a Vostre Excellence, laquelle je supplie
de m'honnorer tous-jours de sa bienveüillance, et de croire que de tout mon cœur je suis,
Monsieur,
Vostre tres humble serviteur,
FRANÇS, E. de Geneve.
XIII decembre 1611, a Neci.
A Son Excellence.
A Chamberi. [130]
_____
DCCXXXI. A Madame d'Aiguebelette (Inédite). Le meilleur
témoignage de fidélité, Souffrance et action, La
mortification par élection et par acceptation. Quel est le vrai
temps de la moisson des affections. Alerte provoquée par la
Sœur de Chastel. L'assistance des malades dans la maison de
la Galerie. On « desseigne » à Dijon un monastère de la
Visitation
Annecy, 15 décembre 1611 399.
Ma tres chere Fille,
Me voyci lautrefoys [de retour.] Je ne fus presque pas arrivé de la visite [en ce pays] de
deça, quil me falut partir pour aller [par delà] le Rosne pour chose qui importoit au service de
Dieu400. Helas ! que nous serons heureux si nous nous dedions bien entierement a ce saint service,
soit en allant ou en demeurant, soit en faysant le bien ou en souffrant le mal ; mays sur tout en
souffrant, car le tesmoignage de nostre fidelité est bien plus grand en la souffrance qu'en l'action :
dont les Martirs sont praeferés aux Confesseurs, et la Passion de nostre Sauveur a esté la
396 Toutefois, ce fut seulement le 19 juillet 1612 que saint François de Sales obtint l'entrée en possession. « Nous nous
sommes transportés, » disent les commissaires, « en la grande Eglise... des Carmes, laquelle nous avons trouvée toutte
ruinée, laquelle Eglise nous avons mise en la possession du Sr Reverend Evesque de Geneve... De la, nous nous
sommes transportés en la chappelle joignant ladicte Eglise des Carmes, en laquelle se tient presentement le siege du
Bailliage... Nous avons mis et mettons ledict sieur Evesque en la possession et jouissance de ladicte chapelle,
permettants... retirer de ladicte chappelle les tapisseries, tables, bancs et autres meubles servants à l'exercice de la
justice. » (Procès-verbal, etc., d'après une copie faite en 1642, conservée aux Archives de la Soc. d'hist. et d'archéol.
de Genève, Ms. 200.)
397 Le fondateur de cette chapelle serait-il un des enfants naturels de Philippe de Savoie, comte de Bresse, René, comte
de Villars, marié en 1498 avec Anne de Lascaris, comtesse de Tenda ?
398 D'après le procès-verbal des commissaires royaux qui vinrent à Gex en 1612 (cf. note (396), de la page précédente),
ce n'était qu'une chapelle « presque toutte ruinée et descouverte des deux tiers. » Comme pour l'église et la chapelle
des Carmes de Gex, il n'est pas dit que la remise au Saint ait soulevé des oppositions de la part des protestants.
399 La date de l'année et l'indication du mois manquent dans l'Autographe, il ne reste que le quantième ; mais la date
intégrale est fixée par l'annonce du prochain retour de la Mère de Chantal et la maladie de Mme de Lambert (voir ci-
après, note (407), p. 133). La mention de la Sœur de Chastel confirme encore cette déduction.
400 Vid. Epist. præced.
104/321

11.5 Page 105

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grand'œuvre de nostre salut.
Ma tres chere Fille, vous ne pouvés guere plus dormir couchee ; il faut que vous reposies
assisse, a cause du defaut d'aleyne. Mays voyla pas un bon exercice de mortification que Dieu
vous donne, et lequel tant de Sains ont prattiqué par election ? Or il n'en vaudra pas moins, ains
davantage, quand il sera prattiqué par acceptation. Acceptons-le donques avec tres profond'action
de [131] graces, de la main de ce Pere debonaire qui nous l'a imposé ; et si nous avons de la
difficulté a respirer, il nous faut tant plus aspirer et souspirer en Dieu par des desirs continuelz de
faire progres en son saint amour. Mon Dieu, tres chere Fille, que mon cœur souhaite de bien au
vostre entre les afflictions de vostre cors ! Le tems des afflictions douleureuses [est] le vray tems
de la moysson des vrayes affections [spirituelles.]
Nostre pauvre Seur de Chatel401 nous fit tellement peur [hier] au soir, que, par l'advis du
medecin, nous luy donnasmes le Saint Huyle, qu'elle receut avec une foy et devotion [très grandes.
Néanmoins] cette nuit passee elle s'est si bien [reposée]402[que si ce n']est pas miracle, c'est au
moins une speciale grace que [Dieu a] faitte aux prieres de ses cheres compaignes qui toutes
estoyent des-ja en larmes ; si bien qu'a mon jugement, il ni a plus rien a craindre pour ce coup.
Croyes que c'est une bonne fille et que Dieu la reserve pour s'en servir a bon escient. Sil vous plait,
ma chere Fille, vous feres donner cette nouvelle a nostre petite seur Claudine403, affin qu'ell'en
loue Dieu et qu'elle ne se mette point en peyne, car cette malade est servie et assistee
amoureusement, fervemment et fidelement, selon l'ordre de la compaignie ou ell'est.
Mme de Chantal doit arriver pour Noüel, sinon que quelqu'affaire d'importance luy soit
survenu ; car je luy ay escrit404 qu'elle n'espargnast pas le tems pour bien conclure tout ce qui est
requis, affin qu'apres son retour elle demeure en plus grand repos. Et si, il faut que je vous die
qu'elle m'escrit par sa derniere lettre que l'on desseigne a Dijon, ou ell'est, une mayson de la
Visitation pareille a celle d'icy ; et faudra peut estre, dans quelque tems, y envoyer un couple ou
troys des filles que nous [132] aurons, pour y donner commencement405. Mays il n'est pas requis
que ceci se sache encor ; c'est pourquoy je le dis a vous.
La chere cousine406 est toute aupres de Mme de Lambert407 qui est malade, si que je ne l'ay
point veu il y a trois semaines ; mais elle se porte bien.
Bonsoir, ma tres chere Fille ; continues a bien aymer Dieu, et moy pour l'amour de Dieu,
puisque par ce mesm'amour je suis tres entierement tout vostre.
Vive Jesus !
XV [decembre], a Neci.
A Madame
Madame d'Aiguebelette.
A Chamberi.
Revu sur l'Autographe conservé à la Visitation de Limoges.
_____
401 Sœur Péronne-Marie (voir la lettre suivante).
402 Le haut et le bas de l'Autographe ont été coupés, ainsi que quelques mots de la marge. Ceux que nous avons essayé
de rétablir sont placés entre crochets [ ] ; la ligne entière qui manque au verso de l'original est figurée par des points
de suspension.
403 Mlle Claudine de Chastel, sœur de la convalescente. (Voir plus haut, Lettre DCLVI.)
404 Vide Ep. DCCXXV.
405 La fondation de Dijon ne se fit qu'en 1622, le 8 mai.
406 Mme de Charmoisy.
407 Françoise de Bellegarde, fille cadette de Claude de Bellegarde, seigneur de Montagny, et de Charlotte de Saint-
Jeoire, avait épousé par contrat dotal du 4 octobre 1569, noble Pierre-Jérôme de Lambert de Lornay, baron de Ternier.
(Cf. tome XIII, note (528), p. 198.) Elle testa le 16 décembre 1611 et fut inhumée deux jours après, à Annecy. (Reg.
par.)
105/321

11.6 Page 106

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DCCXXXII. A la Soeur de Chastel, Religieuse de la
Visitation408. Encourageantes paroles à une convalescente.
Consolation que le Saint souhaite à la Mère de Chantal pour son
retour à Annecy.
Annecy, 15 décembre 1611.
Courage, au nom de Nostre Seigneur, ma pauvre tres chere fille Peronne Marie ! Remettons
nous du tout en [133] vigueur pour servir de nouveau nostre divin Maistre en sainteté et justice
tous les jours de nostre vie409. Tenes vous doucement en repos en Dieu, pour reprendre vos forces
de sa main, affin que quand nostre chere Mere reviendra, elle nous treuve tous braves. Qu'auroit-
elle dit, cette bonne Mere, si en son absence nous eussions laissé mourir sa chere Peronne410 ? Sans
doute, son coeur en eust esté maternellement affligé. Beni soit Dieu qui nous a visités en sa
douceur411, et qui nous a consolés ! Amen. [134]
_____
408 Née le 18 octobre 1586, de noble Jean-François de Chastel, capitaine au service de Son Altesse de Savoie, et de
Jacqueline de Bonivard, Péronne-Marie fut la cinquième Religieuse de la Visitation. Reçue parle Saint le 26 juillet
1610, elle prit l'habit le lendemain et fit profession le 29 août 1611. Elle s'employa à la fondation de Lyon (1615),
devint en 1618 première supérieure du Monastère de Grenoble, fonda, le 2 août 1624, et gouverna celui d'Aix-en-
Provence. Supérieure en 1626 du 1er Monastère d'Annecy, de celui de Chambéry en 1629, elle visita pendant ce dernier
gouvernement les fondations de Provence, établit les couvents de la Val-d'Aoste et de Grasse. De nouveau supérieure
à Annecy en 1635, elle y mourut le 22 octobre 1637, entre les bras de la Mère de Chantal. L'histoire de sa vie se trouve
copieusement racontée dans le recueil des Vies de quatre des premieres Meres, par la Mère de Chaugy (Annecy, 1659
; Paris, 1892).
L'habile annaliste semble avoir pris plaisir à dessiner les traits de la Sulamite. Sa candeur la défendit de bonne
heure contre les illusions qui, tout d'abord, charmèrent son adolescence. Les sages conseils des Jésuites de Chambéry,
les exhortations enflammées de Mgr Camus, la lecture de Grenade firent le reste. A peine entrée à la Galerie et avant
même d'avoir lu aucun ouvrage de haute spiritualité, Sœur Péronne-Marie fut gratifiée d'un don excellent d'oraison
infuse. Elle était de ces âmes portées continuellement vers Dieu par une sorte d'inclination naturelle, ingénieuse
comme elles à découvrir le Créateur dans les créatures et à déduire, à toutes rencontres, à propos des évènements les
plus menus, des pensées très délicates, pleines de savoureuse piété. Son intelligence des choses célestes, sa virginale
simplicité, jointes à l'affabilité d'un heureux naturel, l'aidèrent merveilleusement à implanter partout le suave et
vigoureux esprit de la Visitation. Sainte Jeanne-Françoise de Chantal a écrit dans le Livre du Couvent du Ier Monastère
d'Annecy, qu'elle « était une des dignes Supérieures qu'on eût jamais su souhaiter. » Quant au Bienheureux, il l'appelait
« la fille ou l'amante du Cantique des Cantiques, » et plus d'une fois il l'eut en vue, lorsqu'en rédigeant le Traitté de
l'Amour de Dieu, il décrivait les voies extraordinaires de certaines âmes privilégiées.
409 Luc., I, 74, 75.
410 « Cette languissante, » dit la Mère de Chaugy (ouvrage cité, chap. XIV), « fut reduite en une telle extremité, que,
toute esperance de la pouvoir guerir êtant perduë, on la disposa pour sa sepulture. Elle avoit perdu la parole et l'usage
de tous les sens, lors que nôtre glorieux Pere et Prelat luy vint administrer le Sacrement de l'Extréme-Onction ; et au
même temps qu'il luy apliqua les saintes huiles, elle fut parfaitement guerie, et comme si elle fût revenue d'un profond
sommeil, elle regarda le bon Evêque et puis s'endormit. »
Ceci arriva le 14 décembre 1611, comme le prouve la lettre précédente, adressée à Mme d'Aiguebelette. De
son côté, la Mère de Chaugy raconte que le saint Fondateur vint voir la malade le lendemain du jour qu'il l'avait
administrée et que, sur le soir du même jour, il lui adressa le présent billet, Celui-ci est donc du 15 décembre.
411 Ibid., v. 68.
106/321

11.7 Page 107

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DCCXXXIII. A Madame de Menthon, Abbesse de Sainte-
Catherine412. Souhaits de bonne fête à une Abbesse, sa cousine.
Prédications et auditeurs du Saint.
Annecy, 26 décembre 1611 413.
Certes, il n'y a pas moyen de tarder plus, parmi ces bonnes festes, d'aller saluer la tres chere
Mere et Cousine et sçavoir comment elle se porte en ce grand froid414. Bonjour selon tous mes
devoirs.
O Dieu, que j'ay pensé en vous devant la creche de Bethleem, et que j'ay prié pour nostre
cœur le divin Enfant ! Il me semble que ses bontés s'aggrandissent pour nous de moment en
moment. Croyes que j'eu bien d'auditeurs hier ; c'estoit chose prodigieuse, et je croy qu'il aura beny
mon discours. Aujourd'huy, avec l'assistence de ses graces, j'espere de discourir de la conformité
de nos volontés avec la sienne eternelle.
Revu sur une copie déclarée authentique, conservée à la Visitation d'Annecy. [135]
_____
DCCXXXIV. A Madame de la Fléchère. Comment témoigner la
vraie fidélité à Notre-Seigneur. Condition de la vie humaine.
Ce qui arrive entre les enfants des hommes
Annecy, 28 décembre [1611 415.]
Je ne doute point, ma tres chere Fille, que vous ne soyes grandement exercee de diverses
rencontres desplaysantes, sçachant une partie des sujetz qui vous en peuvent donner ; mays en
quoy, et quand, et comment pouvons nous tesmoigner la vraye fidelité que nous devons a Nostre
Seigneur, qu'entre les tribulations, es contradictions et au tems des repugnances ? Cette vie est telle
qu'il nous faut plus manger d'absynthe que de miel ; mais Celuy pour lequel nous avons resolu de
nourrir la sainte patience au travers de toutes oppositions, nous donnera la consolation de son Saint
Esprit en saison. Gardés bien, dit l'Apostre416, de perdre la confiance, par laquelle estans revigorés,
vous souffrires et supporteres vaillamment le combat des afflictions, pour grand qu'il soit.
J'ay esté certes marri quand j'ay sceu cette petite alteration survenue entre les deux chers
412 Pour l'adresse de ce billet, on peut hésiter entre Mme de Maillard, ancienne abbesse de Sainte-Catherine (voir le
tome précédent, note (248), p. 79), et Mme de Menthon, abbesse depuis 1600 (voir tome XIII, note (334), p. 116). Cette
dernière est plus probablement la destinataire, parce qne le Saint la désigne ici sous la double appellation de « tres
chere Mere et Cousine, » tandis que dans sa lettre du 15 octobre 1608, il appelle « Fille » Mme de Maillard. D'autre
part, Claudine de Menthon était souffrante (cf. ibid.) ; raison de plus pour le Bienheureux de « sçavoir comment elle
se porte en ce grand froid. »
413 Le texte tronqué publié par Migne, porte la date de 1621, mais celle de 1611 paraît être la vraie, car en I62I, la
destinataire serait Pernette de Cerisier. Or, les relations de cette Abbesse avec l'Evêque de Genève étant alors assez
tendues, ces lignes ne pourraient lui convenir.
414 Cette phrase est inédite.
415 Par le ton et aussi par les allusions, cette lettre semble avoir été adressée à Mme de la Fléchère. L'édition de 1626
ne donne comme date que : « Le jour des Innocens. » Blaise (1833), Lettres, vol. II, p. 300, ajoute la date de 1612,
disant l'avoir retrouvée ; mais comme il n'en fournit aucune preuve, elle nous paraît plus que douteuse, d'autant que
son texte n'est pas pris sur l'Autographe. La date de 1611 que nous avançons, se déduit avec quelque probabilité de
l'objet de la lettre. (Voir la note suivante.)
416 Heb., X, 35.
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11.8 Page 108

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cousins, pour ce morceau de pain laissé par la pauvre Mme de N.417 : ainsy arrive-il entre les enfans
des hommes. [136]
Or sus, je suis pressé. Dieu nous donne la grace de bien et saintement commencer et passer
cette nouvelle annee prochaine ; que puissions nous, en icelle, sanctifier le saint nom de JESUS et
faire proffiter le sacré soin de nostre salut.
Je suis immortellement tout vostre.
FRANÇS, E. de Geneve.
Le jour des Innocens.
_____
DCCXXXV. A la Mère de Chantal (Inédite). Condescendance
du Saint pour une Religieuse malade. Promesse d'une visite à
la Galerie pour le lendemain
Annecy, [1610-1611 418.]
Voyla mon grand verre que j'envoye a nostre pauvre malade419, affin qu'ell'y boive plus a
souhait. Si je pouvois contribuer quelqu'autre chose a la recreation de son goust, je le ferois de tout
mon cœur.
Mays vous, ma tres chere mt.420 Fille, dites moy, je vous prie, sera-il mieux que je vous
aille revoir demain matin pour assister au disner de cette grande fille, et encor de la Jaquemaz421,
sil y escheoit, ou que j'y aille [137] seulement apres Vespres pour la voir souper ? Mon opinion
est que ce soit apres Vespres, par ce que j'auray plus de tems, comme j'espere, d'estre avec moy
(je veux dire avec vous) et avec elle ; et lhors j'adjousteray aux tablettes le mot qui manque, car
j'ay grand'envie d'estr'un jour homme de parole.
Revu sur l'Autographe appartenant à Mlle Justine Magnin,
à Saint-Michel de Maurienne (Savoie).
_____
417 « La pauvre Mme de N. » pourrait être Françoise de Bellegarde, dame de Lambert. Celle-ci, en effet, décéda le 16
ou le 17 décembre 1611 (cf. ci-dessus, note (407), p. 133), laissant héritiers les seigneurs de Charmoisy et de la
Fléchère. Cette particularité justifierait la date de l'année que nous attribuons à cette lettre. La défunte, moins bien
dotée apparemment que ses sœurs aînées, laissait en effet « un morceau de pain, » dont le partage put amener la «
petite alteration entre les deux chers cousins, » Claude de Charmoisy et Claude-François de la Fléchère, ses neveux.
418 L'absence de l'appellation de « Mere, » qui revient dans la plupart des billets de 1612, le dîner auquel le Saint
voulait assister, le ton d'intimité qui règne dans ces lignes, tout fait supposer qu'elles ont été écrites dans les premiers
temps de l'Institut, de 1610 à 1611.
419 Sans doute la Sœur Favre, appelée plus bas « grande fille ».
420 Mienne toute ?
421 Sœur Anne-Jacqueline Coste.
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11.9 Page 109

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DCCXXXVI. A la même (Inédite). Une journée très occupée.
C'est Notre-Seigneur qui unit les cœurs indissolublement
Annecy, [1610-1611 422.]
Saches, ma tres chere mienne Fille (mais vous le saves bien), que ça esté outre mon gré
que j'ay passé cette journee sans vous voir. Toute la matinee s'en est allee en tracas, mais tracas
necessaire. Soudain apres disné, qui estoit le tems que j'avois reservé pour nostre cœur, mon bon
cousin monsieur de Charmoysi m'est venu treuver jusques a troys heures, qui estoit le terme que
j'avois promis d'aller parler en particulier avec les bonnes Dames de Sainte Claire, d'ou je viens
maintenant.
C'est, de vray, un sevrement aux enfans de demeurer les jours entiers comme cela. O, Dieu
nostre Sauveur nous soit a jamais toute chose ! C'est en luy et par luy que nostr'unique cœur est
indivisible ; qu'a jamais puisse-il tout vivre a son saint amour.
Bonsoir, ma mienne tres chere Fille ; mais bon soir [138] millions de foys. Conservés vous
doucement et prenes le repos requis a nostre cors. Demain ce sera sans nulle faute, sil n'arrive de
l'impossibilité.
Mon Dieu, ma tres chere mienne Fille, en fin, qui sommes nous, sinon ce que Nostre
Seigneur a voulu que nous fussions ?
Vive Jesus ! Amen.
Revu sur l'Autographe appartenant à M. Coignet,
château du Petit-Montreynaux, à La Tour-en-Jarret (Loire).
_____
DCCXXXVII. A la même. Les occupations du Saint privent la
maison de la Galerie de ses entretiens. Une visite de la
baronne de Thorens. Charité délicate
Annecy, [1610-1611 423.]
Tirannisé de visites et entretiens importuns, me voyci a la fin du jour sans vous avoir veu,
ma tres chere Fille. J'excepte pourtant la visite de la petite seur424, qui vient de me laisser
maintenant, et laquelle m'a laissé avec bon goust, par ce que nous avons parlé de bonnes choses.
Mais ne laisses pas, ma chere Fille toute mienne, de me faire sçavoir comme vous vous portes
cett'apres disner et apres souper, en peu de lignes, de peur de vous travailler. O, Dieu me donnera
demain quelqu'heure pour vous voir. Croyes que ce ne sera pas si tost que je le souhaite.
Vive Jesus ! Amen.
Revu sur l'Autographe qui, en 1900, était conservé à Milan,
dans l'oratoire de l'Addolorata. [139]
_____
422 La date se déduit avec quelque probabilité de l'appellation exclusive de « Fille » et du long entretien avec M. de
Charmoisy, banni en 1613.
423 Ce que nous savons des maladies de la Mère de Chantal et l'appellation de « Mere, » qui paraît simultanément avec
celle de « Fille » dans presque tous les billets authentiques de 1612, persuadent cette date approximative.
424 La baronne de Thorens.
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11.10 Page 110

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DCCXXXVIII. A une dame425. Où se révèle l'amour pur de
Notre-Seigneur et l'amoureuse fidélité à son service. Laissons
Dieu façonner notre cœur tout à son gré. — Cinq élévations
propres à sanctifier les souffrances. Pourquoi et comment
faut-il recourir aux remèdes. Profit spirituel de la maladie.
[1610-1611.]
Ma chere Fille,
Laissons pour un peu la meditation (ce n'est que pour mieux sauter que nous reculons), et
prattiquons bien cette sainte resignation et cet amour pur de Nostre Seigneur qui ne se prattique
jamais si entierement qu'emmi les tourmens ; car d'aymer Dieu dedans le sucre, les petitz enfans
en feroyent bien autant, mais de l'aymer dedans l'absinthe, c'est la le coup de nostre amoureuse
fidelité. De dire VIVE JESUS sur la montaigne de Thabor, saint Pierre, tout grossier, en a bien le
courage426 ; mais de dire VIVE JESUS sur le mont de Calvaire, cela n'appartient qu'a la Mere et a
l'amoureux fidelle qui luy fut laissé pour enfant427.
Or sus, ma Fille, voyés-vous, je vous recommande a Dieu pour obtenir pour vous cette
sacree patience, et n'est pas en mon pouvoir de luy proposer rien pour vous, sinon que tout a son
gré, il façonne vostre cœur pour s'y loger et y regner eternellement ; qu'il le façonne, dis-je, ou
avec le marteau, ou avec le ciseau, ou avec le pinceau : c'est a luy d'en faire a son playsir, non pas,
ma chere Fille ? faut-il pas faire ainsy ?
Je sçai que vos douleurs se sont augmentees despuis [140] peu, et a mesme mesure le
desplaysir que j'en ay ; bien qu'avec vous, je louë et benis Nostre Seigneur de son bon playsir qu'il
exerce en vous, vous faysant participer a sa sainte Croix et vous couronnant de sa couronne
d'espines.
Mais, ce me dites vous, vous ne pouves gueres arrester vostre pensee sur les travaux que
Nostre Seigneur a souffertz pour vous, tandis que les douleurs vous pressent. Et bien, ma chere
Fille, il n'est pas aussi requis que vous le fassies, ains que tout simplement vous esleviés, le plus
frequemment que vous pourrés, vostre cœur a ce Sauveur et que vous fassies ces actions :
premierement, d'accepter le travail de sa main, comme si vous le voyies luy mesme vous l'imposant
et fourrant en vostre teste ; secondement, vous offrant d'en souffrir encores davantage ;
troisiesmement, l'adjurant par le merite de ses tourmens, d'accepter ces petites incommodités en
l'union des peynes qu'il souffrit sur la croix ; quatriesmement, protestant que vous voules non
seulement souffrir, mais aymer et caresser ces maux comme envoyés d'une si bonne et douce main
; cinquiesmement, invoquant les Martyrs et tant de serviteurs et servantes de Dieu qui jouissent du
Ciel pour avoir esté fort affligés en ce monde.
Il n'y a nul danger a desirer du remede, ains il le faut soigneusement procurer ; car Dieu,
qui vous a donné le mal, est aussi l'autheur des remedes. Il faut donq les appliquer, avec telle
resignation neanmoins, que si sa divine Majesté veut que le mal surmonte, vous y acquiescerés ;
s'il veut que le remede vainque, vous l'en benirés.
Il n'y a point de danger, en faysant les exercices spirituelz, d'estre assise. Nullement, ma
Fille ; mais je dis pour beaucoup moins d'incommodités que celles que vous souffrés.
Mon Dieu, ma Fille, que vous estes heureuse si vous continues a vous tenir sous la main
425 Même après de longues études comparatives, il est difficile de proposer une destinataire. La lettre pourrait s'adresser
assez vraisemblablement à Mme de Travernay, mais aussi à Mme de la Fléchère ou à Mme d'Aiguebelette, l'une et l'autre
maladives ou souffrantes. Si elle a été écrite à l'une de ces trois personnes, la date approximative que nous lui attribuons
paraît probable.
426 Cf. Matt., XVII, 4.
427 Joan., XIX, 26.
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12 Pages 111-120

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12.1 Page 111

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de Dieu, humblement, doucement et souplement ! Ah ! j'espere que ce mal de teste profitera
beaucoup a vostre cœur ; vostre cœur, dis-je, que le mien cherit d'un amour tout particulier. [141]
C'est maintenant, ma Fille, que, plus que jamais et a tres bonnes enseignes, vous pouves tesmoigner
a nostre doux Sauveur que c'est de toute vostre affection que vous aves dit et dires : VIVE JESUS
!
Vive Jesus ! ma Fille, et qu'il regne parmi vos douleurs, puis que nous ne pouvons regner
ni vivre que par celle de sa mort. Je suis en luy, tout entierement vostre.
FRANÇS E. de Geneve. [142]
111/321

12.2 Page 112

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Année 1612
_____
DCCXXXIX. A la Mère de Chantal. Le baume sacré du nom de
Jésus ; quels sont les cœurs qu'il pénètre de son parfum. —
Pieuses aspirations. Souhaits pour la Mère de Chantal. Le
mystère de la Circoncision. Prière au « divin Poupon. » La
circoncision spirituelle
Annecy, 1er janvier 1612 428.
O Jesus, remplissés nostre cœur du bausme sacré de vostre nom divin429, affin que la
suavité de son odeur se dilate en tous nos sens et se respande en toutes nos actions. Mays pour
rendre ce cœur capable de recevoir une si douce liqueur, circoncisés-le et retranchés d'iceluy tout
ce qui peut estre desaggreable a vos saintz yeux. O nom glorieux, que la bouche du Pere celeste a
nommé eternellement, soyés a jamais la superscription de nostre ame, affin que, comme vous estes
Sauveur, elle soit eternellement sauvee. O Vierge sainte, qui, la premiere de toute la nature
humaine, aves prononcé ce nom de salut, inspirés-nous la façon de le prononcer ainsy qu'il est
convenable, affin que tout respire en nous le salut que vostre ventre nous a porté.
Ma tres chere Fille, il failloit escrire la premiere lettre de cette annee a Nostre Seigneur et
a Nostre Dame ; et voyci la seconde par laquelle, o ma Fille, je vous donne le bon an et dedie
nostre cœur a la divine Bonté. Que puissions-nous tellement vivre cette annee, [143] qu'elle nous
serve de fondement pour l'annee eternelle ! Du moins ce matin, sur le resveil, j'ay crié a nos oreilles
: VIVE JESUS ! et eusse bien voulu espandre cet huyle sacré sur toute la face de la terre.
Quand un bausme est bien fermé dans une phiole, nul ne sçait discerner quelle liqueur c'est,
sinon celuy qui l'y a mise ; mais quand on a ouvert la phiole et qu'on en a respandu quelques
gouttes, chacun dit : C'est du bausme. Ma chere Fille, nostre cher petit Jesus estoit tout plein du
bausme de salut, mays on ne le connoissoit pas, jusques a tant qu'avec ce couteau doucement cruel
on a ouvert sa divine chair430 ; et lhors on a conneu qu'il est tout bausme et huyle respandu431, et
que c'est le bausme de salut. C'est pourquoy saint Joseph et Nostre Dame, puis tout le voysinage
commence a crier : JESUS, qui veut dire Sauveur432.
Playse a ce divin Poupon de tremper nos cœurs dans son sang et les parfumer de son saint
nom, affin que les roses des bons desirs que nous avons conceus soyent toutes pourprees de sa
teinture et toutes odorantes de son unguent. Mon Dieu, ma Fille, que cette circoncision est a propos
de nos petitz, mais grans renoncemens ! car c'est proprement une circoncision spirituelle433.
Vostre tres affectionné pere et serviteur,
FRANÇS, E. de Geneve. [144]
_____
428 A cause de l'appellation de « Fille » donnée à la Mère de Chantal tout au long de cette lettre, et de l'allusion à un
fait très caractéristique (voir la note suivante), la date proposée est la plus vraisemblable.
429 Cf. Cant., I, 2.
430 Luc., II, 21.
431 Cant., I, 2.
432 Cf. Matt., I, 21.
433 « Le dernier jour de » l'année 1611, écrit la Mère de Chaugy (Mémoires, etc., Partie II, chap. V), « notre
Bienheureuse Mère commença à tenir le chapitre annuel, faire nomination des nouvelles officières et donner des aides,
comme il se pratique aujourd'hui. » On commença aussi à changer « les medailles, croix, chapeletz, images... entre
les Seurs, » ainsi qu'il est marqué dans la Constitution Ve des Religieuses de la Visitation. (Cf. tome VI, Appendice,
pp. 452, 453.)
Voilà, semble-t-il, la « circoncision spirituelle » dont parle le Saint au lendemain du jour où elle s'introduisit.
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12.3 Page 113

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DCCXL. A M. Bénigne Milletot434. Souhaits de nouvel an.
Annecy, 1er janvier 1612.
Monsieur,
A ce commencement de nouvelle annee, je vous supplie de recevoir aggreablement le
renouvellement des offres de mon bien humble service, qu'avec beaucoup d'affection, de sincerité
et de reconnoissance je vous ay ci devant fait. Que si Nostre Seigneur exauce mes vœux, cet an
vous sera l'an de prosperité, de contentement et de benediction sur vous, Monsieur, en vous et tout
autour de vous, qui, par apres, en verres une grande suite de pareilz, lesquelz en fin aboutiront a
l'annee eternelle, en laquelle vous jouires immortellement de l'Autheur de toute vraye prosperité
et benediction.
C'est le souhait, Monsieur, de
Vostre tres humble et tres affectionné serviteur en Nostre Seigneur,
FRANÇS, E, de Geneve.
Le premier jour de l'an 1612. [145]
_____
DCCXLI. Au Père Nicolas Polliens, de la Compagnie de
Jésus435. Un « livret » dont le Saint aurait désiré avoir une copie.
Sa dévotion pour le bienheureux Pierre Favre et ce qu'il
pensait de l'histoire de sa vie.
Annecy, 10 janvier 1612.
Mon Reverend Pere,
Il est bien tems que je vous rende le livret de la sainte Vie de nostre bienheureux Pierre
Faber436. J'ay esté si consciencieux que je n'ay pas osé le faire transcrire, parce que, quand vous
me l'envoyastes, vous m'en parlastes comme chose qui estoit reservee pour encor a vostre
Compaignie. J'eusse pourtant bien desiré d'avoir une copie d'une histoire de si grande pieté et d'un
Saint auquel, pour tant de raysons, je suis et dois estre affectionné437 ; car c'est la verité que je n'ay
pas la memoyre ferme pour les particularités de ce que je lis, ains seulement en commun. Mais je
434 Malgré le ton cérémonieux, cette lettre semble avoir été adressée à M. Milletot. C'est le destinataire le moins
improbable que l'on puisse proposer.
435 La présente lettre figure dans le procès-verbal d'une enquête sur le bienheureux Favre, ouverte à Annecy en 1626,
par l'officialité diocésaine. Le témoin qui en donne la teneur, la dit « adressée au Rd Père Nicolas Polliens, recteur
(sic) de la Compagnie de Jésus à Chambéry, datée du 10 janvier 1612. » (Voir Traits inédits de la Vie de St Fr. de
Sales, d'après les dépositions de son domestique (Annecy, 1878), p. 48, note A.)
436 Il est très probable que le Saint a voulu parler de la Vie latine du Bienheureux, par Orlandini, qui parut en 1617
comme ouvrage posthume, sous le titre suivant : Vita Petri Fabri, qui primus fuit Sociorum B. Ignatii Loyola,
Societatis Jesu, conscripta a Nicolao Orlandino ex eadem Societate. Lugduni, sumptibus Petri Rigaud, in vico
Mercatorio, sub signo Fortunæ, M.DC.XVII.
C'est sans doute le texte manuscrit de cet ouvrage qui circulait en 1612, mais comme « chose qui estoit
reservee pour encor » à la Compagnie de Jésus. L'édition citée plus haut, qui semble jusqu'ici la première en date,
porte une curiense dédicace de Pierre Rigaud, l'éditeur, à François de Sales.
437 Dans l'Introduction a la Vie devote, Partie II, chap. XVI, saint François de Sales parle du « grand Pierre Favre » et
de sa confiante piété à l'égard des saints Anges. C'est lui qui passe, à juste titre, pour avoir été le principal promoteur
du culte public rendu en Savoie à l'illustre enfant du Villaret, culte que Pie IX ratifia et confirma par un décret, le 5
septembre 1872.
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12.4 Page 114

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veux croire qu'en fin la Compaignie se resoudra de ne faire pas moins d'honneur a ce [146] premier
compaignon de son Fondateur qu'elle en a fait aux autres. Que si bien sa vie, pour avoir esté courte
et en un tems auquel on ne remarquoit si exactement toutes choses, ne peut pas tant fournir de
matiere a l'histoire comme celle de quelques autres, neanmoins ce qu'elle donnera ne sera que miel
et sucre de devotion.
Le bon monsieur Faber, nostre medecin de cette ville438, a despuis peu treuvé au
Reposoir439 une lettre de ce bienheureux Pere, escritte de sa main, que j'ay esté consolé de voir et
bayser440. Mais en fin, je vous remercie de la charitable communication qu'il vous a pleu me faire,
et vous supplie me continuer tous-jours celle de vos prieres, puisque de tout mon cœur je suis,
Mon Reverend Pere,
Vostre humble et tres affectionné confrere et serviteur,
FRANÇS, E. de Geneve.
Le 10 janvier 1612. [147]
_____
438 Spectable Jean Favre, docteur en médecine, bourgeois d'Annecy, mais originaire du Villaret, fonda en 1600, de
concert avec un autre Jean Favre, prêtre, une chapelle sur le lieu même où était jadis la maison du Bienheureux. Il
mourut la 2 décembre 1625, à l'âge de soixante-douze ans. (Voir Mém. de l'Acad. Salés., 1883, tome VI, pp. 60 seq. ;
Reg. par. d'Annecy.)
439 Chartreuse établie en Faucigny, le 22 janvier 1151, sur un plateau qui domine le confluent des Forons du Col et de
Vallon. Entre autres signatures, la charte de fondation porte celle du grand évêque de Genève, Arducius, frère du
donateur, Aimon de Faucigny. Ce seigneur, ses frères, ses enfants, et plus tard la famille de Savoie furent les
bienfaiteurs insignes des Chartreux. La solitude enfoncée du site, les noires forêts qui l'entourent, les âpres montagnes
qui l'encadrent rendaient le monastère très propice à la prière et plein d'attraits pour les âmes contemplatives. De ses
quatre-vingt-cinq prieurs, son dernier historien a pu dire : « Il n'y a pas de taches, ou il n'y a que de rares taches légères
sur cette légion de serviteurs de Dieu. » (Falconnet, La Chartreuse du Reposoir, Montreuil-sur-Mer, 1895, Mém. de
l'Acad. Salés., tome XVIII, p. 557.) Après le bienheureux Jean d'Espagne, qui donna au monastère le nom de Reposoir
et le gouverna le premier, de 1151 à 1160, on peut citer parmi les prieurs les plus connus : D. Christin de Sales, 1433-
1434 ; D. Mamert Favre, 1508-1522, et D. Claude Perrissin, 1522-1547, ces deux derniers, oncle et cousin du
bienheureux Pierre Favre. Supprimée en 1793, restaurée en 1846, fermée de nouveau le 12 mars 1855, puis réouverte
en 1863, la célèbre chartreuse a vu partir une troisième fois ses hôtes (septembre 1901), victimes de lois odieuses de
proscription.
440 On trouvera l'histoire de cette lettre, avec sa teneur, dans l'ouvrage cité ci-dessus, note (3), pp. 594 seq. et 672.
114/321

12.5 Page 115

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DCCXLII. A M. Antoine des Hayes. Bons effets que les amis du
Saint attribuaient à ses lettres. M. de Granier. Le duc de
Nemours ne désire pas céder son hôtel
Annecy, janvier 1612 441.
Monsieur,
Je loüe Dieu de cette nouvelle santé, le retour de laquelle vous m'annoncés par vostre lettre
du 6 decembre, avant que j'aye eu aucune sorte d'advertissement de vostre maladie. Veuille cette
bonté du Seigneur, qui vous a esté propice et a moy en vostre guerison, nous favoriser longuement
de sa duree et d'une constante consolation en cette sainte et douce amitié qu'elle a establie entre
nous. Que si je sçavois que mes lettres eussent quelques secrettes vertus pour vous donner un bon
portement, ainsy que vostre affection vous le fait estimer, croyés, Monsieur, que j'en escrirois jour
et nuit, et ne vous escrirois point d'autre encre que celuy de mon sang, pour marquer des caracteres
si aymables et pretieux [desquels] les effectz me seroyent si chers et desirables.
Ce grand Dieu, devant lequel je suis journellement offrant la divine Hostie de propitiation,
sçait bien qu'en ce tems-la je luy nomme tous-jours vostre nom, avec l'humble recommandation.
Si cela, comme je n'en doute point, a la force d'attirer les benedictions divines de son sein paternel,
je veux esperer qu'il vous en comblera.
M. de Granyer442 est allé, comme je pense, en Languedoc, sans passer icy ou nous
l'attendions, plus pour [148] apprendre les particularités des graces et traitz de vostre faveur, que
pour autres raysons, bien que je sçai qu'elles sont grandes.
Ce que j'avois preveu de la volonté de Monseigneur de Nemours touchant son hostel, s'est
treuvé plus que veritable443 ; car, outre ce que j'avois consideré, il y a de plus qu'il n'est nullement
hors d'occasion d'aller peut estre plus tost que je ne pense a Paris : vous pouvés bien penser
pourquoy, mays je dis cecy entre nous deux. Son Altesse luy a promis de rechef d'effectuer le
mariage ou devant caresme prenant, ou, apres Pasques444 ; le tems d'apres Pasques peut estre bien
long.
……………………………………………………………………………………………………...
_____
441 Les rapports de cette lettre avec celle du 13 avril 1611 (voir ci-dessus, p. 43) ne laissent aucun doute sur le
destinataire.
Il est difficile de préciser le quantième, mais la date est certainement antérieure au mois de mars, d'après la
teneur de la lettre. D'autre part, l'allusion à celle du 6 décembre adressée au Saint par son correspondant, ne permet
pas de la reculer au delà de janvier. La question de l'hôtel de Nemours confirme encore la date que nous adoptons.
442 Denis de Granier (voir plus haut, p. 44).
443 Voir ci-après, Lettres DCCXLV, DCCXLVI, et note (461), p. 154.
444 Le mariage avec Marie-Catherine, infante de Savoie (cf. plus haut, note (243), p. 79). La lettre du marquis de Lans,
qui donnait cette nouvelle, fut lue le 19 décembre 1611 au Conseil de ville d'Annecy. (Voir Ducis, Annecy et les Ducs
de Genevois, 1883, p. 48.)
115/321

12.6 Page 116

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DCCXLIII. A la Mère de Chantal. Les deux et le soleil
comparés à la chair du Sauveur. Contemplation angélique et
Communion eucharistique. Une sentence du grand saint
Antoine. Pourquoi Dieu nous abaisse et se cache
Annecy, 17 janvier 1612 445.
Voyla M. Michel446 qui va un peu plus tost que l'ordinaire, affin que vous puissies prendre
vostre tablette au moins une heure avant disner.
Mais, ma tres chere Fille, toutes deux, ces prises que [149] vous feres, sont tablettes
cordiales ; sur tout la premiere, composee de la plus excellente poudre qui fut jamais au monde.
Ouy, ma chere Fille, car nostre Sauveur a pris nostre vraye chair, qui est en somme poudre447 ;
mais en luy, elle est si excellente, si pure, si sainte, que les cieux et le soleil ne sont que poussiere
au prix de cette poudre sacree. Or, la tablette de la sainte Communion est cela mesme qui a esté
mis en tablette, affin que nous la puissions mieux prendre ; bien que ce soit la tres divine et tres
grande table que les Cherubins et Seraphins adorent et de laquelle ilz mangent par contemplation
reelle, comme nous la mangeons par reelle Communion. O Dieu, quel bonheur que nostre amour,
en attendant cette manifeste union que nous aurons avec Nostre Seigneur au Ciel, s'unisse par ce
mystere si admirablement a luy !
Ma tres chere Fille, tenés vostre esprit en paix ; ne regardés d'ou sa petite maladie luy vient,
ni ne vous mettés nullement en peyne de le guerir, mays divertissés le tant qu'il vous sera possible
de retourner sur soy mesme. Le grand saint Anthoine, duquel les intercessions ont une
extraordinaire influence [sur] cette journee, vous fera, par la bonté de Dieu, lever demain toute
brave. C'est une grande joye au cœur que vous aves icy, de s'imaginer ce grand Saint entre ses
hermites, tirer du fond de son esprit des sentences graves et sacrees, et les prononcer avec une
veneration incomparable comme des oracles du Ciel ; mais entr'autres, il me semble qu'il die a
nostre ame ce qu'il disoit parmi ses disciples, pris de l'Evangile448 : Ne soyés en souci de vostre
ame, ou pour vostre ame. Non, ma chere Fille, demeurés en paix, car Dieu, a qui elle est, la
soulagera.
Cependant, ma bienaymee Fille, je ne laysse pas, dans le fond de mon esprit, de prendre
des saintes esperances qu'apres que par ces petitz abandonnemens, Dieu nous aura espreuvé et
exercé en la mortification interieure, il ne nous vivifie par ses consolations sacrees. Il ne nous
abbaisse, ce doux Amour de nostre cœur, que pour nous eslever449 : il se musse et cache, et regarde
par le treillis450 quelle contenance nous tenons. Hé ! Seigneur [150] Sauveur, j'entrevois, ce me
semble, la clairté de vostre œil debonnaire qui nous promet le retour de vos rayons pour faire
renaistre un beau printems en nostre terre451. Ah ! ma Fille, nous en avons bien passé de plus
aspres : pourquoy n'aurons-nous pas le cœur de surmonter encores cette difficulté ?
Croyés, ma Fille, que je prie Nostre Seigneur pour vous avec tout nostre cœur ; car mon
ame est collee a la vostre et je vous cheris comme mon ame, ainsy qu'il est dit de Jonathas et de
David452. Dieu soit a jamais propice a ce cœur, tout voüé, tout dedié, tout consacré au celeste
445 La première édition donne la date de 1612 sans le quantième, mais l'allusion à la fête de saint Antoine abbé indique
clairement que cette lettre est du 17 janvier. Toutefois, nous n'osons garantir la justesse de la date pour l'année, à cause
de l'interpolation du texte (voir note (454), p. 151) ; celle de 1611 pourrait être aussi proposée avec quelque
vraisemblance, vu l'état souffrant de la Mère de Chantal. (Cf. plus haut, pp. 12, 18.)
446 M. Michel Favre (voir ci-dessus, note (287), p. 99).
447 Gen., III, 19.
448 Luc., XII, 22.
449 Cf. Matt., XXIII, 12 ; Luc., I, 52.
450 Cant., II, 9.
451 Cant., II, 12.
452 I Reg., XVIII, 1.
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12.7 Page 117

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amour.453
_____
DCCXLIV. A Madame Françoise Bourgeois Prieure du Puits-
D'Orbe454. L'appui des créatures et la protection de la providence
divine. Quand il nous arrive quelque chose contre notre gré,
que faire ? Jugements et manquements qui ne sont pas
mortels. Message
Annecy, 20 janvier 1612.
Il ne m'arrivera jamais, ma tres chere Seur, ma Fille, d'oublier vostre cœur, que le mien
aymera perpetuellement en Nostre Seigneur. Je vois par vostre lettre, que [151] vous ne vous
appuyés pas asses en la sainte providence divine. Ma chere Fille, si elle retiroit vostre bonne
seur455, ce que nous devons esperer n'arriver pas si tost, vous ne laisseries pas pour cela d'estre
sous la protection de ce tres bon Pere eternel qui vous couvriroit de ses aisles456. Nous serions
miserables, ma Fille, si nous n'establissions nostre appuy en Dieu que par l'entremise des creatures
que nous affectionnons. Mays avec cela, ma chere Seur, il ne se faut pas former des craintes inutiles
; il suffira bien de recevoir les maux qui de tems en tems nous arrivent, sans les prevenir par
l'imagination457.
Pour la charge que vous aves, c'est une tentation de n'y avoir pas l'amour requis pour le
tems auquel vous y seres. Au contraire, je voudrois, et Dieu voudroit, que vous l'exerçassies
gayement et amoureusement, et par ce moyen il auroit soin du desir que vous aves d'estre
deschargee et le feroit reüscir en son tems ; car notés une fois pour toutes, qu'il ne faut jamais
s'aheurter avec une de nos volontés, ains quand il nous arrive quelque chose contre nostre gré, il
le faut accepter de bon cœur, quoy que de bon cœur on desirast que cela ne fust point ; et quand
Nostre Seigneur voit que nous sommes ainsy souples, il condescend a nos intentions.
J'escriray a vostre seur qu'elle vous face faire les services comme les autres, car cela est
bon.
Quand les pensees nous arrivent du mal d'autruy et que nous ne les rejettons pas
promptement, ains nous y amusons quelque peu, pourveu que nous ne facions pas un jugement
entier, disant en nous mesmes : Il est vrayement ainsy, ce n'est pas peché mortel ; quand bien nous
dirions absolument : Il est ainsy, pourveu que ce ne fust pas en chose d'importance ; car, quand ce
dequoy [152] nous jugeons nostre prochain n'est pas chose griefve, ou que nous ne jugeons pas
absolument, ce n'est que peché veniel. De mesme pour avoir omis quelque verset de l'Office ou
453 Les éditeurs de 1626 ajoutaient à cette lettre, qui semble se terminer ici, deux alinéas que nous reproduisons à part,
à la fin de l'année 1612. Ils paraissent interpolés, pour plusieurs raisons déduites du texte ; mais il est moins facile de
savoir si la date de 1612, donnée dans l'édition princeps, appartient à la présente lettre, ou aux deux alinéas que nous
en avons détachés.
454 Françoise Bourgeois de Crépy, plusieurs fois mentionnée au cours des lettres précédentes, était sœur de la
présidente Brûlart et de l'Abbesse du Puits-d'Orbe (cf. tome XII, les notes (598), (607) des pp. 267, 271). Elle fit
profession en 1597 ; quand là Communauté fut transférée à Châtillon-sur-Seine, le 21 décembre 1619, Françoise l'y
suivit, mais en 1621 elle se sépara de sa sœur Rose qui s'était révoltée contre Mgr Zamet, son évêque. Toutefois, on
voit par le Registre des Vaux et réceptions, que la destinataire mourut prieure dans ce même monastère, le 5 mars
1642. (Archiv. départ. de la Côte-d'Or, Puits-d'Orbe.)
C'est bien à elle que la lettre parait être adressée : les allusions à sa sœur malade, à sa charge de prieure, à la
pension, à sainte Françoise sa patronne, ne permettent guère d'en douter.
455 Rose Bourgeois, abbesse du Monastère.
456 Cf. Pss. XVI, 8, LVI, 2, LX, 5.
457 Cf. Matt., VI, ult.
117/321

12.8 Page 118

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quelque ceremonie, il n'y a que peché veniel. Et quand la memoire de telle faute nous arrive apres
la confession, il n'est pas requis de retourner vers le confesseur pour aller a la Communion ; ains
est bon de n'y retourner pas, mays le reserver a dire pour l'autre confession suivante, affin de le
dire si on s'en souvient.
Tandis que vostre seur n'a pas voulu recevoir vostre pension, il n'y a eu nulle faute pour
vous ; mais ce sera chose bonne qu'elle la manie.
Ma tres chere Seur, il ne faut point perdre courage ; encor que vous ne prattiquiés pas si
fidellement les resolutions que vous faites, vous deves fortifier vostre cœur pour en venir a
l'execution. Continués donq, tres chere Seur, ma Fille, et ne cessés point d'invoquer Dieu et
d'esperer en luy, et il vous fera abonder en ses benedictions. Ainsy l'en supplie-je, par le merite de
sa Passion et les intercessions de sa Mere et de sainte Françoise.
Nostre doux Sauveur soit donq avec vous, ma chere Seur, ma Fille, et je suis tout en luy,
Vostre bien humble serviteur,
FRANÇS, E. de Geneve.
La bonne Mere de Chantal, qui est malade sans danger458, comme j'espere, vous saluë de
tout son cœur. Je la recommande a vos prieres, et moy aussi, ma chere Seur, ma Fille. A Dieu.
Le 20 janvier 1612.
_____
DCCXLV. A M. Pierre de Bérulle. M. de Marillac porteur d'une
lettre de M. de Bérulle. Sympathies du Saint pour la
Congrégation de l'Oratoire. L'hôtel du duc de Nemours n'est
pas libre. Offre de services et remerciements pour l'envoi de
deux livrets
Annecy, 20 janvier 1612.
Monsieur,
J'ay receu toutes les lettres que vous me marques par celle quil vous pleut m'addresser par
les mains de monsieur de Marillac459, et m'estonne comm'il est arrivé que vous n'ayes pas eu mes
responses que j'ay quelquefois dupliquees, de peur de manquer au devoir que je vous ay et pour
l'extreme contentement que je prens en la prattique de vostre sainte amitié. En toutes, je m'essayois
de vous tesmoigner l'ardent desir que j'aurois de rendre quelque sorte de service pour l'erection,
institution et avancement de vostre Congregation460, laquelle j'estime devoir estre un (sic) des plus
fructueuses et apostoliques œuvres qui ayt esté faite en France, il y a long tems. Mays, Monsieur,
je voy bien que je n'auray pas ce bonheur d'y contribuer chose quelcomque, sinon mes bons
souhaitz et mes vœux ; car, quant a l'hostel de Nemours461, il n'en faut nullement parler, puisque
458 Cf. ci-après, Lettres DCCLIV, DCCLV.
459 Né en 1572, Louis de Marillac, comte de Beaumont-le-Roger, gentilhomme de Henri IV, ambassadeur en Savoie,
à Mantoue, Florence, Venise en 1611, chargé en 1616 de diverses négociations, devint l'année suivante commissaire
général des armées de Louis XIII. Maréchal de camp au siège de Montauban, où il fut blessé (1621), nommé en 1625
lieutenant-général des évêchés de Metz, Toul, Verdun, et enfin maréchal de France, il encourut la disgrâce de
Richelieu, qui le fit arrêter en Piémont dans les derniers mois de 1630, et décapiter à Paris, sur la place de Grève, le 8
mai 1632. Après la mort du Cardinal, on réhabilita sa mémoire. La vénérable Louise de Marillac était sa nièce.
460 Voir le tome précédent, note (884), p. 307.
461 Cet hôtel occupait le quartier actuel du Quai des Augustins. Construit sous François Ier, il devint plus tard, par
donation de Henri II ; la propriété des ducs de Nemours. Depuis 1614, le prince Henri en fit sa demeure habituelle ;
c'est sans doute en prévision de son futur séjour à Paris, qu'il refusait de céder son hôtel à la Congrégation naissante
de M, de Bérulle. (Cf. la lettre suivante, et ci-dessus, p. 149.)
118/321

12.9 Page 119

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Monseigneur de [154] Nemours fait profession expresse, et de ne vouloir jamais se retirer du tout
de France, et d'avoir cette commodité de mayson, plus praetieuse que tout'autre chose.
Monsieur de Marrillac passa loin d'icy une journee et m'envoya homm'expres qui m'apporta
vostre lettre, sur laquelle j'en escrivis un'autre a un de mes amis462 qui a grand part au maniment
des affaires de ce Prince, affin quil servit monsieur de Marillac en cett'occasion. Mays l'homme
qui la porta n'arriva pas asses tost pour treuver ledit seigneur de Marillac qui passoit en diligence
; car cet amy a qui j'avois escrit, m'a veu despuis et m'a dit quil avoit parlé avec luy, sans que
pourtant il tesmoignast d'avoir aucun'affaire de luy.
Voyla comment je vous ay en tout et par tout esté inutile, mays certes je n'ay esté ni seray
jamais sinon tres affectionné, mesm'en ce dessein qui est tant a la gloire de Nostre Seigneur et
avancement de la pieté. Si donques il se presentoit jamais occasion de vous rendre service, ne
laisses pas, je vous supplie, de m'employer en qualité, Monsieur, de
Vostre tres asseuré et humble serviteur,
FRANÇS, E. de Geneve.
XX janvier 1612, a Neci.
Monsieur, j'ay voirement receu les deux livretz463 qui me furent renduz par monsieur de
Sauzea464, et pleut a Dieu que vostre commodité fut de m'en envoyer encor deux autres, car je les
employerois utilement.
A Monsieur
Monsieur de Berulle.
Revu sur l'Autographe conservé à Paris, au Carmel de la. rue Denfert-Rochereau. [155]
_____
DCCXLVI. A Mademoiselle Acarie. La sainte bienveillance
d'une Bienheureuse pour l'Evêque de Genève. Pourquoi
aurait-il désiré faire le voyage de Paris ? Sentiment de
François de Sales sur l'Oratoire naissant ; regrets de n'avoir pu
prêter son concours à M. de Bérulle. Souhaits pour la
nouvelle Congrégation
Annecy, 21 janvier 1612.
Madamoyselle,
Croyes, je vous supplie, que je ressens tous-jours une tres particuliere consolation quand
vous me faites le bien de m'envoyer de vos nouvelles et de m'asseurer de vostre sainte
bienveuillance. Si vous m'aves souhaité par dela, j'ay bien correspondu de mon costé, estimant que
un voyage seroit grandement utile, non aux autres, mays a moy qui, par la conference que j'aurois
avec tant de gens de bien, rafraichirois les resolutions et l'esprit qui m'est necessaire en ma
vocation.
J'eusse desiré plus quil ne se peut dire, d'estre utile au service de la sainte Congregation qui
462 Ce que nous savons de Charles Chaliveau, seigneur de la Bretonnière (voir tome XII, note (506), p. 214), et de la
confiance très particulière dont il jouissait auprès du duc de Nemours, persuade qu'il s'agit ici de ce personnage.
463 Ces « deux livretz » seraient-ils le Réglement de la Congrégation de l'Oratoire et le Plan de Retraite spirituelle,
opuscules composés à cette époque par M. de Bérulle ?
464 Voir tome XIII, note (741), p. 271.
119/321

12.10 Page 120

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esclost maintenant sous la direction de monsieur de Berulle465, laquelle j'ay opinion devoir estre
l'une des plus fructueuses qui ayt jamais esté a Paris ; mais je ne puis en point de façon, Nostre
Seigneur ne m'en treuvant pas digne, et l'affaire pour laquelle ledit seigneur Berulle m'escrivit,
impossible, a laquelle neanmoins j'eusse volontier contribué tout mon pouvoir, sil y eut eu
apparence de la voir reuscir466.
Dieu, qui par sa misericorde est autheur de cette benite assemblee, la logera, la protegera
et dilatera pour le salut et perfection de plusieurs. Ainsy l'en supplie-je, et quil vous face de plus
en plus abonder en son saint amour, [156] auquel je vous supplie de me recommander
continuellement, comme une personne qui est a [jamais],
Madamoyselle,467
………………………………………………………………………………………………
XXI janvier 1612, a Neci, ou je suis aussi plus humble serviteur de monsieur vostre mari468
et de monsieur vostre filz469.
A Madamoyselle
Madamoyselle Acarie. A Paris.
Revu sur l'Autographe conservé à Paris, au Carmel de la rue Denfert-Rochereau. [157]
_____
465 La Congrégation de l'Oratoire.
466 « L'affaire » en question, est celle de l'hôtel du duc de Nemours. (Voir la lettre précédente.)
467 La signature a été coupée dans l'Autographe.
468 Pierre Acarie, fils unique de Marguerite Cantin et de Simon Acarie, conseiller du roi et général de ses aides à Paris,
devint, à la mort de son père, vicomte de Villemor, seigneur de Montberrault, etc. Il fit ses études au collège de
Navarre, son droit à Orléans, et le 24 août 1582, il épousa Barbe Avrillot qui lui donna six enfants. (Voir tome XIII,
note (427), p. 153.) M. Acarie rendit de grands services à la Ligue, ce qui le fit exiler en 1594 à la chartreuse de
Bourgfontaine. Mais sa notoriété lui vient surtout de sa sainte compagne ; comme il l'avait prévu en plaisantant (voir
ibid., note (923), p. 341, in fine), c'est principalement à cause d'elle qu'il est parlé de lui. Souvent il mit sa patience à
l'épreuve ; mais s'il était d'humeur contrariante, ne faut-il pas lui savoir gré d'avoir ouvert sa porte sans mauvaise grâce
à tant de visiteurs qui ne venaient pas pour lui, attirés par des vertus et des lumières qui éclipsaient les siennes ? Pierre
Acarie mourut très chrétiennement à Ivry, le 17 novembre 1613, après avoir recommandé à ses enfants de beaucoup
respecter leur mère. (Voir les historiens de la bienheureuse Marie de l'Incarnation.)
469 Le Saint désigne sans doute ici l'aîné des fils, Nicolas. Elève du collège de Clermont et ensuite du collège de Calvy,
il termina ses études à celui de Navarre. Il figure comme témoin à Annecy, dans un acte de donation faite en faveur
de Bernard de Sales, au logis du saint Evêque, le 12 décembre 1603. (Archives du comte de Roussy de Sales.) On sait,
en effet, que sa mère le lui avait confié pour qu'il étudiât le droit, à l'école du président Favre. (Cf. tome XIII, note
(427), p. 153.) Durant son séjour en cette ville, il fut « faulsement accusé d'avoir publié un libelle diffamatoire, et...
sans estre ouy, » le procès fut jugé i son désavantage en la maison du Bienheureux, lequel en reçut « un tres grand et
cuysant desplaisir. » (Process. remiss. Gebenn. (I), dépositions de François Favre et de Georges Rolland, ad art. 31.)
Marié du vivant de son père, Nicolas donna plus tard quelque inquiétude à Mme Acarie, mais ces alarmes ne furent
que passagères. François de Sales, écrivant après son voyage de Paris (1619) à l'une des filles de la Bienheureuse, lui
disait à propos de ses trois frères qu'il avait revus : « J'ay eu... le contentement d'avoir reconneu en leurs ames des
grandes marques du soin que le Saint Esprit a d'eux. » Nicolas hérita des titres paternels ; dans le Procès de béatification
de sa mère, il est qualifié de « gentilhomme attaché à la cour de Louis XIII et maître des eaux et forêts de Champagne.
» (Voir Boucher, édition Bouix, 1873, Vie de la Bse Marie de l'Incarnation.)
120/321

13 Pages 121-130

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13.1 Page 121

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DCCXLVII. A la Mère de Chantal470. Entre les deux Fondateurs,
il n'y avait « ni second, ni premier. » Modèle d'exhortation
destinée à des prétendantes avant leur vêture. Ce qu'on
enseigne aux Novices. — Sœur Jeanne-Charlotte de Bréchard
leur maîtresse ; obéissance qu'on lui doit. Une illusion que les
Novices ne sauraient avoir.
Annecy, 24 janvier 1612 471.
Je vous seconderay le plus doucement quil me sera possible, ma tres chere Fille, en vostre
juste intention, bien qu'entre nous il ny a ni second ni premier, ains un (sic) simple unité. Ce matin,
m'estant esveillé un peu a bonn'heure, j'ay pensé que peut estre il seroit a propos demain, qu'avant
que de venir a la sainte Messe, vous fissies appeller toutes nos filles vers vous, et puis que vous
fissies venir les deux qui doivent estre receües472, et qu'en presence des autres, vous leur dissies
trois ou quatre paroles en ce sens :
« Vous nous aves demandé d'estre receues entre nous pour y servir Dieu en unité de
mesm'esprit et de mesme volonté ; et, esperans en la Bonté divine que vous vous rendres bien
affectionnees a ce dessein, nous sommes pour vous recevoir ce matin au nombre de nos Seurs
novices, pour, selon l'avancement que vous feres en la vertu, vous recevoir par apres aux oblations,
dans le tems que nous aviserons. Mays, avant que de passer plus outre, [158] penses bien derechef
en vous mesme a l'importance de ce que vous entreprenes ; car il seroit bien mieux de n'entrer pas
parmi nous, qu'apres y estr'entrees donner quelqu'occasion de n'estre point receues aux oblations.
Que si vous aves bonne volonté, vous deves esperer que Dieu vous favorisera.
« Or, entrant ceans, saches que nous ne vous y recevons que pour vous enseigner, tant que
nous pourrons, par exemple et advertissemens, a crucifier vostre cors par la mortification de vos
sens et appetitz de vos passions, humeurs, inclinations et propres volontés, en sorte que tout cela
soit desormais sujet a la loy de Dieu et aux Regles de cette Congregation473. Et a cet effect, nous
avons commis la peyne et le soin particulier de vous exercer et instruire a ma Seur de Brechard474
ci presente, a laquelle partant vous seres obeissantes, et l'escouteres avec respect et tel honneur,
qu'on connoisse que ce n'est pas pour la creature que vous vous sous-mettes a la creature, mays
pour l'amour du Createur que vous reconnoisses en la creature. Et quand nous commettrions
un'autre pour estre vostre Maistresse, quelle qu'elle fut, vous devries luy obeir avec toute humilité
pour la mesme rayson, sans regarder en la face de celle qui vous gouvernera, mais en la face de
Dieu qui l'a ainsy ordonné.
« Vous entreres donques en cett'escole de nostre Congregation, pour apprendre a bien
porter la croix de Nostre Seigneur, par abnegation, renoncement de vous mesme475, resignation de
vos volontés, mortification de vos sens476. Et moy je vous cheriray cordialement comme vostre
seur, mere et servante ; toutes nos Seurs vous tiendront pour leurs seurs tres aymees, et ce pendant
470 Hérissant, Vivès et Migne donnaient pour adresse, le premier, A une Supérieure de la Visitation, les deux autres,
A la Mère Favre. L'erreur de ceux-ci est évidente.
471 Sœur Marie-Aimée de Blonay prit l'habit avec Sœur Claude-Agnès Joly de la Roche, le 25 janvier 1612 ; le 31
décembre précédent, au Chapitre, Sœur Jeanne-Charlotte de Bréchard avait été nommée Directrice du Noviciat (cf.
note (433), p. 144), De ces deux faits, on déduit la date avec certitude.
472 MMlles de Blonay et de la Roche. Les notices de ces « prétendantes1 » seront données dans la suite de la
correspondance du Saint.
1 Terme usité dans l'Institut de la Visitation pour désigner celles qui aspirent à revêtir l'habit religieux.
473 Cf. Constit. XXXIII, De la Directrice.
474 Cf. note (471), de la page précédente.
475 Cf. Matt., XVI, 24.
476 Cf. Constit. XLIV, De l'entree des Novices.
121/321

13.2 Page 122

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vous aures ma Seur de Brechar (sic) pour Maistresse, a laquelle vous obeires, et suivres ses
advertissemens avec l'humilité, sincerité et simplicité que Nostre Seigneur requiert en toutes celles
qui se rangent en cette Congregation. Vous vous tromperies bien si vous pensies estre venues pour
avoir plus grand repos qu'au monde, car au contraire, nous ne [159] sommes icy assemblees que
pour travailler diligemment a desraciner nos mauvaises inclinations, corriger nos defautz, acquerir
les vertus ; mays bienheureux est le travail qui nous donnera le repos eternel477. »
Or, je ne dis pas, ma chere Fille, que vous disies ni ces paroles, ni tout ceci, mays ce que
vous verres a propos, plus pour l'edification et reveil des autres, que pour celle (sic) ci. Je treuverois
encor bon qu'apres que vous aures tiré quelque promesse d'elles, qu'elles se comporteront bien,
vous adjoustassies :
« Benites seront celles qui vous donneront bon exemple et qui vous consoleront en vostre
entreprise. Amen. »
Voyla ce que j'ay pensé, si vous estimes a propos. Bon soir, ma tres chere Mere, ma Fille
vrayment mienne. Vive Jesus et Marie ! Amen. Je me porte fort bien.
Revu sur l'Autographe consèrve à la Visitation d'Aurillac.
_____
DCCXLVIII. A la même. Le très grand saint Paul. Un désir
du Saint. Pourquoi Dieu soustrait ses douceurs. Prière à
Jésus. A quelle classe de personnes la douce charité profite
davantage
Annecy, 25 janvier 1612 478.
Le tres grand et miraculeux saint Paul nous a resveillés de grand matin, ma tres chere Fille,
si fort il s'est escrié aux oreilles de mon cœur et du vostre : Seigneur, que voules vous que je fasse479
? Ma tres [160] chere Mere et toute chere Fille, quand sera-ce que, tous mortz devant Dieu, nous
revivrons a cette nouvelle vie480 en laquelle nous ne voudrons plus rien faire, ains laisserons
vouloir a Dieu tout ce qu'il nous faudra faire, et laisserons agir sa volonté vivante sur la nostre
toute morte ?
Or sus, ma chere Fille, tenés vous bien a Dieu ; consacrés luy vos travaux, attendés en
patience le retour de vostre beau soleil. Ah ! Dieu ne nous a pas forclos de la jouissance de sa
douceur, il l'a seulement soustraite pour un peu, affin que nous vivions a luy481 et pour luy, et non
pour ses suavités ; affin que nos Seurs travaillees treuvent chez nous un secours compatissant et
un support suave et amoureux ; affin que, d'un cœur tant escorché, mort et matté, il reçoive l'odeur
aggreable d'un saint holocauste.
O Seigneur Jesus, par vostre tristesse incomparable, par la desolation nompareille qui
477 Dans ce projet d'exhortation, se trouve tout un idéal de vie religieuse dont les contemporains du saint Fondateur
virent, et de très bonne heure, la haute portée. L'un d'entre eux, bon juge en la matière, dom Sens de Sainte-Catherine,
lui écrivait le 3 février suivant : « Quand je considere vostre Congregation devant Dieu, je la vois aussi haute en amour
comme vous l'avez faite profonde en humilité. » (Voir la lettre à l'Appendice.)
478 La date de 1611, donnée par l'édition de 1626 et les suivantes, est contredite par le titre de « Mere » que le Saint
ne donnait pas encore à sa fille spirituelle, et par l'absence de toute allusion à l'état très souffrant de celle-ci. Par contre,
toute la lettre concorde mieux avec 1612, et en particulier, la mention qui s'y trouve de la « seur de nostre Seur N. »,
inexplicable en 1611. La date proposée est donc bien plus probable.
479 Act., IX, 6.
480 Cf. Coloss., III, 3.
481 Cf. II Cor., V, 15.
122/321

13.3 Page 123

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occupa vostre cœur divin au mont Olivet482 et sur la croix483, et par la desolation de vostre chere
Mere, qu'elle eut tandis qu'elle fut privee de vostre presence, soyés la joye, ou au moins la force
de cette fille, quand vostre Croix et Passion est tres uniquement conjointe a son ame.
Je vous envoye cet eslan de nostre cœur, ma tres chere Fille, que le grand saint Paul benisse.
Je pense qu'il vous faut caresser la seur de nostre Seur N.484, car en fin la douce charité est la vertu
qui respand le bon odeur edificatif, et les personnes moins eslevees la reçoivent avec plus de
prouffit. [161]
_____
DCCXLIX. A la même (Billet inédit). Une résolution finale à
prendre pour l'emplacement de l'oratoire de la Visitation
Annecy, [janvier-février] 1612 485.
Le Pere Jaques486 vous ira revoir demain, ma tres chere Mere, justement a sept heures de
matin, pour prendre resolution finale. Il gouste aucunement qu'on face l'oratoire en la grande tour,
ainsy quil vous dira plus amplement ; et moy, je ne vous diray plus sinon bon soir, pour ce coup.
Bonsoir donq, ma tres chere et tres bonne vraye Mere. Dieu vous conserve et rende toute
sainte.
Revu sur l'Autographe appartenant à M. l'abbé Louvier, curé des Pontets (Doubs). [162]
_____
482 Matt., XXVI, 37, 38 ; Luc., XXII, 43.
483 Matt., XXVII, 46.
484 Il s'agit très vraisemblablement de Marie-Antoine, sœur de Claude-Marie Thiollier (voir ci-dessus, note (71), p.
13), qui prit l'habit le 21 novembre 1612 et fit profession le 25 janvier 1614 ; ce fut la première de l'Institut reçue
comme Sœur domestique. Elle accompagna les fondatrices de Grenoble (4 avril 1618) et mourut dans ce monastère
le 11 décembre 1648, au rang des Sœurs associées, âgée d'environ soixante-dix ans. « Fidelle a la practique de toutes
les vertus, elle en estoit un vray modelle, sur tout en celles de l'humilité, simplicité, suport du prochain et abnegation
d'elle mesme. » (Livre du Couvent, du 1er Monastère de la Visitation d'Annecy.)
485 La mention du « Pere Jaques » (voir la note suivante) prouve que ce billet est antérieur au 18 mai 1612, et d'autre
part, ce n'est qu'en 1612 que commencèrent les premières démarches relatives à l'installation de la Communauté dans
la maison Nicollin. Sans exclure la fin d'avril ou le commencement de mai, nous proposons les mois de janvier-février,
car le Saint fut absent d'Annecy durant le Carême de 1612, soit du 7 mars au 25 avril.
486 Dans les Registres paroissiaux de Saint-Maurice d'Annecy, on lit sous la date du 18 mai 1612 : « A Saint
Dominique, R. frere Jacquier (sic) Jaes, prieur dudit Convent, » a reçu la sépulture. Ce Prieur est sans doute le « Pere
Jaques » qui devait faire visite à la Mère de Chantal. On verra dans la suite, que les deux Fondateurs durent ménager
plus d'une fois les susceptibilités de leurs voisins.
123/321

13.4 Page 124

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DCCL. A la même. Un remède souverain : les prières de la
Mère de Chantal et la relique de sainte Apolline. Preuve
sensible de la communion des Saints
Annecy, 9 février 1612.
Ma tres chere Fille,
Voyla vostre sacré remede que je puis dire m'avoir esté souverain487, puisque Dieu a agi
avec moy selon vostre foy, vostre esperance et vostre charité, et je dois confesser a la gloire de
Jesus Christ et de sa sainte Espouse, que je ne croyois pas de pouvoir dire Messe aujourd'huy a
cause de la grande enflure de ma jouë et du dedans de ma bouche ; mais, m'estant appuyé sur mon
prie Dieu et ayant posé la relique sur ma jouë, j'ay dit : « Mon Dieu, qu'il me soit fait comme mes
filles le desirent, si c'est vostre sainte volonté ; » et tout aussi tost, mon mal a cessé. Nostre Seigneur
m'a donné pendant ce tems-la plusieurs bonnes pensees sur le ruminement que la sainte Espouse
dit qu'elle faysoit entre ses dens488. Au sortir de la, chacun m'a dit que ma jouë estoit desenflee, et
je le sentois fort bien moy mesme.
O vive Dieu ! ma Fille, il est admirable en ses saintes espouses et en tous ses Saintz489. Il
a voulu que ce mal me soit venu aujourd'huy, pour nous faire honnorer son espouse Apollonie et
pour nous donner une preuve sensible de la communion des Saintz.
Revu sur un ancien Ms. de l'Année Sainte, conservé à la Visitation d'Annecy.
_____
DCCLI. A la Présidente Brulart490. Ce qui rend profitable la
nourriture corporelle et spirituelle. Sentiments d'humilité
proposés à une âme privée de la Communion fréquente.
Sentir qu'on est tout à Dieu et « en train de l'orayson » ne
dispense pas de s'exercer aux vertus et de mortifier ses passions.
Annecy, 11 février 1612.
Vous aves maintenant, ma tres chere Fille, ma response a la lettre que [Mme de Chantal]
m'apporta491 ; et voyei celle que je fay a la vostre du quatorziesme janvier.
Vous aves bien fait d'obeir a vostre confesseur, soit qu'il vous ayt retranché la consolation
de communier souvent pour vous espreuver, soit qu'il l'ayt fait parce que vous n'avies pas asses de
487 « Le neuvieme jour [de février] de l'annee 1613, saint François de Sales estant ateint d'une grande douleur de dens,
nôtre venerable Mere lui envoia un linge qui avoit touché les reliques de sainte Apolonie, et le pria de l'apliquer sur
sa jouë malade, pendant que toute la Comunauté aloit prier pour optenir sa guerison. Sur le soir de ce même jour, le
Bien-heureux lui renvoia le linge avec » le présent billet, (Ancien Ms. de l’Année Sainte.)
488 Cant., VII, 9. Cf. Traitté de l'Am. de Dieu, liv. VI, ch. 11 (tom. IV, p. 310).
489 Ps. LXVII, ult.
490 Les conseils et les recommandations de la lettre, l'allusion à « la bonne Carmeline, » désignent assez clairement la
présidente Brûlart comme destinataire.
491 En reprenant l'étude de la Lettre DLXXXVIII, donnée sous toutes réserves au tome précédent, p. 277, avec la date
« vers le 20 avril 1610, » il nous a paru qu'elle était plutôt de la fin de décembre 1611, ou de janvier 1612. Cette même
lettre est probablement la « response » à celle de la destinataire, mentionnée ici par le Saint et apportée par la Mère de
Chantal à son retour de Bourgogne (24 décembre 1611).
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13.5 Page 125

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soin de vous corriger de vostre impatience. Et moy, je croy qu'il l'a fait pour l'un et l'autre, et que
vous devés perseverer en cette penitence tant qu'il vous l'ordonnera, puisque vous aves tout sujet
de croire qu'il ne fait rien qu'avec une juste consideration. Et si vous obeisses humblement, une
Communion vous sera plus utile en effect que deux et troys faites autrement ; car il n'y a rien qui
nous rende la viande si prouffitable, que de la prendre avec appetit et apres l'exercice. Or, la
retardation vous donnera l'appetit plus grand, et l'exercice que vous feres a mortifier vostre
impatience revigorera vostre estomach spirituel.
Humiliés-vous cependant doucement, et faites souvent [164] l'acte de l'amour de vostre
propre abjection. Demeurés pour un peu en la posture de la Chananee : Ouy, Seigneur, je ne suis
pas digne492 de manger le pain des enfans ; je suis vrayement une chienne qui rechigne et mords
le prochain sans propos, par mes paroles d'impatience ; mais si les chiens ne mangent le pain entier,
au moins [ont-ilz] les miettes de la table de leurs maistres493. Ainsy, o mon doux Maistre, je vous
demande, sinon vostre digne Cors, au moins les benedictions qu'il respand sur ceux qui en
approchent par amour. C'est le sentiment que vous pourrés faire, ma tres chere Fille, es jours que
vous soulies communier et que vous ne communieres pas.
Le sentiment que vous aves d'estre toute a Dieu n'est point trompeur ; mais il requiert que
vous vous amusiés un peu plus a l'exercice des vertus et que vous ayés un soin special d'acquerir
celles esquelles vous vous treuves plus defaillante. Relisés le Combat spirituel et faites une
speciale attention aux documens qui y sont : il vous sera fort a propos. Les sentimens de l'orayson
sont bons, mais il ne faut pas pourtant s'y complaire tellement, qu'on ne s'employe diligemment
aux vertus et mortification des passions.
Je prie tous-jours pour la bonne issue des cheres filles494. De vray, puisque vous estes en
train de l'orayson et que la bonne Carmeline495 vous assiste, il suffit. Je me recommande a ses
prieres et aux vostres, et suis sans fin ni reserve, tres parfaitement vostre.
Vive Jesus ! Amen.
Ce 11 fevrier 1612. [165]
_____
DCCLII. A la Reine Mère, Marie de Médicis496 (Minute).
L'ambassadeur de l'Evêque de Genève et du petit peuple
catholique de Gex auprès de la reine mère.
Annecy, 12 février 1612.
Madame,
Ce porteur est le predicateur ordinaire de Gex, Religieux fort zelé, devot, discret,
extremement sortable au lieu et a la cause qu'il sert497. Ce petit peuple catholique et moy le
492 Matt., VIII, 8.
493 Ibid., XV, 36, 37.
494 Les filles de la destinataire (voir le tome précédent, note (411), p. 134), et plus particulièrement, sans doute,
Madeleine et Françoise. (Cf. ibid., pp. 278, 279, et ci-dessus, p. 34.)
495 C'est la Mère Louise de Jésus, qui était vraisemblablement prieure en 1613 du Monastère de Dijon. (Voir le tome
précédent, note (126), p. 41.)
496 C'est la première fois que le Saint écrit à Marie de Médicis, ou du moins, c'est la première lettre qui nous soit
connue. On verra dans la suite de la correspondance, que l'Evêque de Genève eut à se louer de sa bienveillance et de
sa protection.
497 Selon toute apparence, ce Religieux est un Capucin. Serait-ce le P. François de Chambéry ? Ses talents et ses vertus
le désignaient pour cette mission délicate. (Cf. ci-dessus, p. 139.)
On peut proposer encore, et même avec plus de probabilité, le P. Diègue de la Cité-Neuve (Marche d'Ancône),
issu d'une famille distinguée, du nom de Luchetti. Profès dès 1595, il mourut en septembre 1638. Sa charge de Custode
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13.6 Page 126

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presentons en toute humilité a Vostre Majesté comme un cahier animé, contenant les moyens plus
convenables pour la reduction de ceux de la religion pretendue et pour l'accroissement de la foy
catholique au bailliage de Gex498 ; affin que, si tel est le bon playsir [166] de Vostre Majesté, dont
je la supplie tres humblement, elle en sçache par luy toutes les particularités plus clairement.
Et tandis, j'invoqueray Nostre Seigneur a ce qu'il soit la couronne et la gloire de Vostre
Majesté au Ciel et en la terre, selon le continuel desir,
Madame, de
Vostre tres humble, tres obeissant et tres fidelle orateur et serviteur,
FRANÇS, E. de Geneve.
A Neci, le 12 fevrier 1612.
_____
DCCLIII. A M. Jean de Chatillon. Une pauvre demoiselle
recommandée à la Sainte-Maison de Thonon
Annecy, 14 février 1612 499.
Monsieur,
Cette pauvre damoyselle desireroit que la Sainte Mayson fit l'une de ses aumosnes pour la
retraite d'un de ses enfans500, selon que quelques uns des Peres de la Mission501 luy ont donné
esperance qu'elle le pourroit impetrer. Sa qualité et extreme necessité la me rend recommandable,
c'est pourquoy, autant que je puis, je [167] la vous recommande aussi, et priant Dieu quil vous
benisse, je suis,
Monsieur,
Vostre humble, tres affectionné confrere,
FRANÇS, E. de Geneve.
XIIII febvrier 1612, a Neci.
A Monsieur,
Monsieur de Chatillon,
Plebain de l'eglise de Tonon.
pour la mission du Chablais, assez semblable à celle d'un Préfet apostolique, lui donnait en 1612 beaucoup de crédit.
Estimé des Papes et des rois, considéré des protestants eux-mêmes, il se dévoua plus de trente ans à la mission qui
enserrait les environs de Genève et pénétrait souvent la grande cité. Le zèle patient et désintéressé du P. Diègue, sa
vie austère, son humeur affable et enjouée, le rendaient en effet « extremement sortable » à la cause qu'il avait à
défendre et en faisaient « comme un cahier animé. » (Voir Nécrologe et Annales biographiques des FF. Mineurs
Capucins de Savoie, 1611-1902, par le P. Eugène de Bellevaux.)
498 D'après le P. Charles de Genève (Hist. abrégée des Missions des PP. Capucins de Savoye, Chambéry, 1867), « la
Reyne régente octroya » aux PP. Capucins de Gex, « plusieurs priviléges, » par lettres patentes du 26 avril 1612. Ne
faudrait-il pas voir dans ces concessions, l'un des résultats de la présente lettre et de la mission du Religieux qui la
portait ?
499 Cette lettre est-elle de 16123 ou de 1622 ? L'examen de l'Autographe ne suffirait pas à le décider, mais la
comparaison du texte avec celui de la lettre du 15 mai 1611 au même destinataire (voir p. 58) permet de conclure en
faveur de 1612, faute de preuves certaines contre cette date.
500 Il y avait à la Sainte-Maison deux abris pour les enfants : le Séminaire, destiné à ceux qui étaient « privés de fortune
et doués de talents ; » les « rudes et les grossiers » étaient envoyés « à l'auberge des Arts. » (Cf. Mém. de l’Acad.
Salés., 1883, tome V, p. 362.)
501 Les couvents et les Capucins de Savoie, qui relevaient de la Province de Lyon, dite de Saint-Bonaventure, en furent
distraits, au mois d'avril 1611, pour former une Province indépendante. Elle fut appelée d'un nom qui désignait le
principal théâtre de leurs travaux apostoliques : Province des Capucins de la Mission de Thonon.
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Revu sur l'Autographe conservé au Grand-Séminaire d'Annecy.
_____
DCCLIV. A M. Philippe de Quoex502. Zèle de la Mère de
Chantal et du Saint pour la conversion d'un médecin. Brebis
errantes et troupeau fidèle. Préoccupations et résignation du
Fondateur de la Visitation.
Annecy, [vers le 24 février] 1612 503.
Monsieur mon tres cher Confrere et mon parfait Amy,
C'est par le retour de ce pauvre medecin504, qui n'a sceu guerir nostre Mere et que je n'ay
sceu guerir, que [168] je vous fay ce mot. Ah ! faut il qu'un filz empesche de vivre l'ame du pere
de son cors ? Nostre bonne malade donneroit de bon cœur la vie pour la santé spirituelle de son
medecin, et moy, pauvre, chetif pasteur, que ne donnerois-je pas pour le salut de cette deplorable
brebis ! Vive Dieu, devant lequel je vis et je parle : je voudrois donner ma peau pour le vestir, mon
sang pour oindre ses playes et ma vie temporelle pour l'oster de l'eternelle mort.
Pourquoy vous dis-je cecy, mon cher Amy, sinon pour vous encourager a bien prendre
garde que les loups voysins ne se jettent parmi vos brebis505, ou, pour dire plus paternellement
selon les sentimens de mon ame, sur ces pauvres Genevois. Prenés garde que quelques unes de
mes brebis galeuses et errantes n'infectent et ne fassent errer le cher et bienaymé troupeau ;
travaillés doucement a l'entour de cette bergerie et dites leur souvent : 506 Charitas fraternitatis
maneat in vobis507 ; et sur tout, priés Celuy qui a dit : 508 Ego sum Pastor bonus509, affin qu'il anime
nostre soin, nostre amour et nos paroles.
Je recommande a vos prieres ce pauvre medecin malade ; dites trois Messes a cette
intention, affin qu'il puisse guerir nostre Mere et que nous le puissions guerir. Elle est bien malade,
502 Le destinataire serait, d'après l'édition de 1641, un Curé de son diocese, mais l'Histoire de la Fondation d'Annecy
est plus précise : « Notre Bienheureux Pere, » dit-elle, « ecrivit les paroles suivantes a M. de Sainte Catherine,
ecclesiastique de son diocese. » Suit le texte de la présente lettre. Le ton affectueux et intime de ces lignes justifie
cette attribution.
503 La consultation des médecins, le retour du docteur genevois, la maladie désespérée de la Mère de Chantal font
écarter 1611 et suggèrent 1612. Quant au quantième, il est antérieur au 35 septembre (voir la lettre à M. de Blonay) ;
il faut exclure également l'époque du Carême, car la lettre suivante, connexe pour la date avec celle-ci, ne s'expliquerait
pas, son destinataire, le P. de Bonivard, étant en 1612 prédicateur à Annecy de la sainte quarantaine. Comme enfin
l'on ne trouve pas trace en mai-juin d'une maladie très grave, reste la date proposée, qui semble, mieux que toute autre,
concilier tous les faits.
504 D'après la Mère de Chaugy (Mémoires, etc., Partie II, chap. VII), le Saint prit prétexte de la violente maladie de la
Fondatrice, « pour faire revenir le médecin de Genève qui avait de bonnes dispositions pour la guérison de son âme,
sans un sien fils qui le tint si fort de près, qu'il fut cause de sa perte. » Il s'agit sans doute de Marc Offredi ; en effet, il
semble tout naturel que le Bienheureux ait voulu consulter le même médecin qui avait soigné Mme de Boisy. (Voir le
tome précédent, p. 212.)
Reçu habitant de Genève le 19 octobre 1573, bourgeois le 24 novembre 1579, décédé le 2 mai 1620, il
survécut deux ans à son fils, Paul Offredi, né en 1582 et docteur en médecine à dix-huit ans. Déjà membre du Conseil
des Deux Cents en 1611, rien d'étonnant qu'il se soit opposé à la conversion de son père. Paul Offredi mourut le 14
janvier 1618 ; son fils Charles, médecin lui aussi, devint catholique en 1634. (Voir Gautier, La Médecine à Genève
jusqu'à, la fin du dix-huitième siècle, Genève, 1906.)
505 Cf. Joan., X, 12.
506 Que la charité fraternelle demeure en vous.
507 Heb., ult., 1.
508 Je suis le bon Pasteur.
509 Joan., X, 11.
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13.8 Page 128

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cette bonne Mere, et mon esprit, un peu en peyne sur sa maladie. Je dis un peu, et c'est beaucoup.
[169] Je sçai neanmoins que si le souverain Architecte de cette nouvelle Congregation veut
arracher du fondement la pierre fondamentale qu'il y a jetté, pour la mettre dans la sainte
Hierusalem, il sçait ce qu'il veut faire du reste de l'edifice510. Dans cette veuë, je demeure en paix,
et
Vostre humble serviteur et confrere,
F., E. de Geneve.
Revu sur le texte inséré dans l'Histoire de la Fondation du 1er Monastère de la Visitation
d'Annecy.
_____
DCCLV. Au Père Jacques-Philibert de Bonivard de la
Compagnie de Jésus (Fragment). Grave maladie de la Mère de
Chantal. Une oraison prolongée et répétée sur la troisième
demande du Pater. La résignation et la confiance d'un
Fondateur
Annecy, [vers le 26 février] 1612 511.
Mon cher Pere,
Je vous demande une neuvaine pour la santé de nostre madame de Chantal. Il y a dix ou
douze jours que sa griefve maladie me fait faire mon orayson sur la troisiesme petition du Pater :
Fiat voluntas tua512. Je suis tout sousmis a cette volonté divine. S'il luy plaist de prendre cette
Mere, je la luy offre ; s'il luy plaist de nous la laisser, son saint nom soit beni513 ! S'il luy plaist que
nostre ouvrage se fasse, il nous en laissera la matiere, sinon, il la serrera dans son cabinet eternel.
[170]
Il faut que je vous advoue, mon cher Pere, selon les loix de nostre inviolable, paternelle,
fraternelle et filiale dilection, que la conduitte de Dieu sur tous ses desseins me tient en admiration,
mays avec certaine esperance intime qu'il mene sur le bord de la mort pour vivifier ; je dis plus,
qu'il tue pour resusciter514 515. Je fais finir toutes mes pensees par : Fiat voluntas [tua516].
……………………………………………………………………………………………………..
510 Voir note (517) de la page suivante.
511 En citant ce fragment, l'Histoire de la Fondation d'Annecy indique comme destinataire le P. de Bonivard. Cette
attribution est confirmée par la teneur du billet.
La date se déduit des mêmes particularités qui ont servi à établir celle de la lettre précédente, car toutes les
deux traitent du même objet.
512 Matt., VI, 10.
513 Job, I, 21.
514 Deut., XXXII, 39 ; I Reg., II, 6 ; Sap. XVI, 13.
515 L'espoir secret du bienheureux Fondateur ne fut pas déçu ; sa dévotion pour le grand Archevêque de Milan lui
ayant inspiré quelques jours après, de donner de ses reliques à la vénérée malade, presque agonisante, celle-ci se trouva
instantanément guérie. En reconnaissance, François de Sales fit le vœu d'aller visiter le tombeau de saint Charles
Borromée.
La Mère de Chaugy (Mémoires, etc., Partie II, thap. XI) place ce fait en février 1618. C'est une erreur, car à
cette époque, la Mère de Chantal, quoique très souffrante, ne fut pas réduite à l'extrémité ; sa correspondance le prouve.
D'ailleurs, le pèlerinage à Milan s'effectua le 35 avril 1613 (cf. Année Sainte de la Visitation, 35 avril) ; le Saint avait
même eu l'intention de le faire pendant l'automne de l'année précédente, comme on le voit par sa lettre du 25 septembre
1612 à M. de Blonay.
516 Ubi pag. præced.
128/321

13.9 Page 129

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Revu sur le texte inséré dans l'Histoire de la Fondation du 1er Monastère de la Visitation
d'Annecy.
_____
DCCLVI. A Madame de Saint-Cergues517. Les amitiés qui ont
Dieu pour auteur, et la distance des lieux. Une occupation
agréable et précieuse pour l'Evêque de Genève.
Annecy, [26] février518 1612.
Mais quand sera-ce donq que j'auray ce contentement de vous revoir, ma tres chere Seur ?
car je me voy presqu'a la veille de mon despart pour Chamberi ; et [171] apres Pasques, on ne
quitte pas volontier les chaires. Or sus, je voy bien que nous ne serons jamais guere ensemble, si
ce n'est en esprit ; aussi est-ce l'Esprit de Dieu qui est l'autheur de la sainte amitié dont vous
m'affectionnés, qui, par la distance des lieux, ne peut estre empesché qu'il ne face sa sacree
operation dans nos cœurs.
Que vous veut cependant dire ce petit mot de nos nouvelles ? La Reyne de France m'escrit
qu'elle nous rendra toutes nos eglises et tous nos benefices de Gex occupés par les ministres ; dont
je prevoy que cet esté je seray grandement occupé a servir a cette besoigne519, mays occupation
aggreable et pretieuse. Et qui sçait, si nous nous humilions devant Dieu, que sa sainte misericorde
ne nous ouvre point un jour la porte de nostre Geneve, affin que nous y rapportions la lumiere que
tant de tenebres en avoyent bannie ? Certes, j'espere en la souveraine bonté de Nostre Seigneur,
qu'en fin il nous donnera cette grace ; mais prions et veillons520 pour cela.
Ma tres chere Seur, perseverés a me cherir cordialement, puisque je suis sans fin et sans
reserve,
Vostre plus humble, fidelle frere et serviteur,
FRANÇS, E. de Geneve.
Je salue bien humblement M. de Saint Cergues521.
Le .. febvrier 1612. [172]
_____
517 Hérissant (1758), parce que le Saint donne à la destinataire le titre de « Seur », en avait conclu qu'elle était
Religieuse ; mais le contenu de la lettre, le salut final désignent Mme de Saint-Cergues (voir plus haut, note (76), p.
15).
518 L'éditeur de 1758 date cette lettre du 6 février. Or, saint François de Sales écrit encore d'Annecy, le 12 et le 14 de
ce mois : pouvait-il donc dire le 6 qu'il était « presqu'a la veille de » son « despart pour Chamberi » ? Il faut ajouter
que le mercredi des Cendres, jour de l'inauguration de la station quadragésimale, tombait cette année le 7 mars : ces
raisons suggèrent la date proposée comme plus vraisemblable. L'erreur, du reste, a pu se commettre facilement, surtout
si la date avait été marquée en chiffres romains ; ou encore, le premier chiffre aurait pu être oblitéré, ou manquer
même tout à fait par suite d'une déchirure.
519 Saint François de Sales dut en effet se rendre à Gex le 14 juillet suivant, pour travailler au rétablissement du culte
catholique, de concert avec les commissaires royaux. (Cf. ci-dessus, Lettre DCCXXX, et ci-après, lettre du 13 juillet
à Mme de la Fléchère.)
520 Cf. Matt., XXVI, 41 ; I Petri, IV, 7.
521 Gaspard de Lucinge, fils d'Amblard, seigneur de Saint-Cergues, coseigneur de Lucinge et de Vallon, et d'Antoinette
de Beaufort, n'ayant point d'enfants de Jeanne de Cartai (cf. plus haut, note (76), p. 15), prit pour fils adoptif noble
Nicolas Curlat, dit de Lucinge, seigneur de Châteaublanc.
129/321

13.10 Page 130

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DCCLVII. A Sa Saintete Paul V (Minute). A quoi servent les
canonisations ; le Saint les jugeait presque nécessaires pour le
temps où il vivait. Il demande au Pape de canoniser le
bienheureux Amédée ; motifs qu'il fait valoir en faveur de sa
supplique
Annecy522, 7 mars 1612.
Beatissime Pater,
Très Saint Père,
Semper quidem operæ pretium fuit
homines qui peculiari ac illustriori vitæ
sanctimonia Deum523 coluerunt, in Sanctorum
numerum, publica Ecclesiæ authoritate,
solemnique ritu referre : sic enim Deus in
Sanctis524 uberius laudatur, Sanctorum gloriam
libentius525 enarrant populi et laudem eorum526
splendidius annunciat [173] Ecclesia. Cumque
majore fiducia Sanctorum merita recolimus,
majore quoque fructu eorum intercessionibus
adjuvamur, ac denique eorum exempla
vehementius nos provocant, de quorum
sanctitate mentes nostræ nullatenus dubitant.
At vero, Beatissime Pater, hoc527 quod
« semper et ubique dignum et justum est, »
hisce nostris temporibus, non solum « salutare
» tantum528, sed fere necessarium videri debet,
cum scilicet quia abundavit529 iniquitas,
refrigescit charitas multorum530, imo
propemodum531 omnium ; unde quoniam
defecit sanctus532 a terra, ex iis qui redempti
Il a toujours été à propos que ceux qui
ont servi Dieu par une sainteté de vie
particulière et plus éclatante, fussent mis au
nombre des Saints par l'autorité publique de
l'Eglise et selon le rit consacré. Ainsi Dieu est
plus exalté dans ses Saints, les peuples mettent
plus d'empressement à celébrer leurs louanges
et l'Eglise plus de magnificence à publier leur
gloire. De même, quand nous honorons leurs
[173] mérites avec plus de confiance, nous
recevons de leurs intercessions plus de fruit.
Enfin, nous trouvons une exhortation bien plus
vivement efficace dans les exemples, lorsque
la sainteté des personnes ne peut plus être mise
en doute.
Or, Très Saint Père, ce qui a toujours
été, « et en tous lieux, juste et louable, » doit
paraître non seulement utile, mais presque
nécessaire en notre temps où la charité, à cause
du débordement de l'iniquité, s'est refroidie
chez plusieurs et à peu près chez toutes les
âmes. Aussi, puisqu'il n'y a plus de saint en ce
522 Le Saint, qui a daté sa minute autographe d'Annecy, était sûrement il Chambéry le 7 mars ; c'est peut-être par
distraction qu'il ne l'a pas datée de cette dernière ville, ou bien aura-t-il voulu, qu'en raison de son caractère officiel,
sa requête parût envoyée du lieu même de sa résidence ordinaire.
523 [Les variantes qui suivent sont tirées d'une première minute citée par Amblard Comte, dans sa déposition, Process.
remiss. Gebenn. (I), ad art. 33.]
Deum omnipotentem
524 in Sanctis suis
525 splendidius
526 utilius enuntiat Ecclesia : neque tam facile imitari piget quod celebrare delectat, dum eorum vita nos fortius ad
imitationem excitat de quorum sanctitate mens nostra non dubitat, ac denique majori fiducia Sanctorum merita
recolimus, majore quoque fructu eorum intercessionibus adjuvamur. (... l'Eglise raconte avec plus de profit leur
gloire. On a honte de ne pas imiter aussi facilement ce qu'on aime à exalter ; car leur vie nous porte plus généreusement
à l'imitation, lorsque leur sainteté ne fait plus de doute, et enfin le fruit que nous retirons de leur intercession est
proportionné à la confiance avec laquelle nous vénérons leurs mérites.) [Reprendre au texte, lig. 6.]
527 Hoc autem, Beatissime Pater,
528 In Præfat. Missæ.
529 non saluberrimum tantum, sed etiam propemodum necessarium videri debet, cum nimirum quia abundat
530 Matt., XXIV, 12.
531 multorum, id est pene
532 Ps. XI, 2.
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14.1 Page 131

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sunt533 de terra, revocandi sunt in memoriam et
in medium Ecclesiæ reducendi illi qui hactenus
majore sanctitatis splendore534 claruerunt, ut
sint (quemadmodum unus eorum dixit535) in
speculum et exemplum, [174] ac quoddam
veluti condimentum vitæ hominum super
terram, sicque apud nos etiam post mortem
vivant, et multos536 ex iis qui viventes mortui
sunt537, ad veram provocent et revocent vitam.
Cum igitur scirem, Beatissime Pater,
permultos ex istis omnium ordinum viros, a
Beatitudine Vestra expetiisse ut Beatum
Amedeum, Sabaudiæ Ducem tertium538,
Sanctorum cathalogo539 adscribere dignaretur,
nolui sane, neque vero debui committere quin
humillimis precibus idipsum ab apostolica540
Beatitudinis Vestræ providentia postularem.
[175]
Quod dum facio, idem omnia idem
mecum agere videntur541. Postulat id, non
precibus, sed suo jure, Dei omnipotentis
majestas, quæ in hoc Beato Principe clarius
mirabilis apparebit542. Postulat Hierusalem illa
cælestis, mater nostra, quæ suum civem a
nobis debitis honoribus celebrari lætabitur.
Postulat hæc nostra Hierusalem inferior543, cui
Beatitudo Vestra præest, quæ tanti filii nomen
scriptum in Cælis544, gaudebit sanctificari in
terris. Postulat545 rerum præclare a Sanctitate
monde, il faut, d'entre les justes qui ont été
rachetés de la terre, évoquer le souvenir et
ramener au milieu de nous la pensée de ceux
dont la vie a jeté le plus d'éclat par le
rayonnement de la sainteté. Qu'ils servent,
comme l'a dit l'un d'eux, de miroir et d'exemple
à la vie des hommes ; qu'ils en soient [174] de
quelque manière le condiment, afin qu'ils
vivent parmi nous, même après-leur mort, et
qu'ils appellent et ressuscitent à la vraie vie
beaucoup de chrétiens d'entre ceux qui,
quoique vivants, sont morts.
Je sais donc, Très Saint Père, qu'un
grand nombre de personnages de tout rang ont
demandé instamment à Votre Sainteté qu'Elle
daignât inscrire au catalogue des Saints, le
bienheureux Amédée, troisième duc de Savoie.
Or, ni ma volonté, ni mon devoir ne pouvaient
me faire omettre d'adresser en toute humilité la
même supplique à la providence apostolique
de Votre Sainteté. [175]
En désirant cette grâce, il me semble
que tout conspire pour la solliciter avec moi.
Cette demande instante, la majesté du Dieu
tout-puissant vous la fait, non par une prière,
mais de plein droit, car elle apparaîtra plus
manifestement admirable dans ce bienheureux
Prince. La Jérusalem céleste, notre mère,
attend aussi cette faveur, à cause de la joie
533 Ps. CVI, 2.
534 a terra opportunum erit ex iis qui empti sunt de terra, in medio Ecclesiæ eos statuere qui singulari aliqua
prerogativa sanctitatis
535 S. Hieron., l. I Comm. in Matt., V.
536 vivant, multosque
537 Cf. I Tim., V, 6.
538 Vide tom. præced., p. 198, note (575).
539 Et ecce, Beatissime Pater, jam olim non solum in istis provinciis quæ Serenissimo Sabaudiæ Duci subditæ sunt,
sed in aliis quoque, celeberrima memoria est Beati Amedei, tertii SabaudiæDucis, tum ob ejus præclara pietatis et
veræ sanctitatis facinora, tum ob multa quæ illius intercessione facta sunt miracula quæ numero et pondere maxima
sunt et clarissima. Quare cum scirem Reverendissimos Antistites Taurinensem1 et Vercellensem2 aliosque permultos
omnium ordinum viros, a Sanctitate Vestra expetiisse, ut tandem aliquando hunc clarissimum sanctitatis candidatum
in cathalogo Sanctorum (Or, Très Saint Père, ce n'est pas seulement dans ces provinces qui sont soumises au
serenissime duc de Savoie, c'est aussi dans les autres que jouit d'une très grande popularité le souvenir du bienheureux
Amédée, troisième duc de Savoie. Elle est due autant à ses éclatants exemples de piété et de vraie sainteté, qu'aux
miracles obtenus par son intercession ; et ceux-ci sont très grands et très remarquables en nombre et en qualité. Aussi,
sachant que les Révérendissimes Evêques de Turin et de Verceil, et beaucoup d'autres personnages de tous les ordres
avaient supplié Votre Sainteté de [vouloir bien inscrire] quelque jour dans le catalogue des Saints, ce très brillant
candidat à la sainteté...)
1 Mgr Broglia (voir tome XII, note (523), p. 224, et cf. ci-après, lettre du 2 juin 1612).
2 Mgr Goria (voir sa note avec la lettre du 2 juin).
540 precibus idemquoque a
541 omnia propemodum quae in Caelo et quae in terra sunt idem mecum postulare videntur.
542 majestas, cujus bonitas ac misericordia in hoc Beato Principe apparuit.
543 quæ suos cives ab Ecclesia militante debitis honoribus celebrari laetatur. Postulat hoc Ecclesia Cattolica
544 Luc., X, 30.
545 Postulat etiam
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Vestra gestarum series, ut quia nuper ex
principibus ecclesiasticis Divum Carolum
Sanctis annumeravit546, hunc quoque ex
secularibus547 adjungat, ut utriusque sortis
homines habeant quod imitentur. Postulat
Serenissimorum Sabaudiæ Ducum familia,
quæ non solum fidei constantia, sed præclaris
etiam fortitudinis operibus, magnum olim et
[176] deinceps Ecclesiæ attulit solatium.
Postulat hæc universa Sabaudia provincia,
maxime vero hæc diocesis Gebennensis548,
quæ tanti Principis nobilitata natalibus,
magnani in ejus precibus spem merito
collocabit.549 Postulant denique ipsius Beati
Amedei merita et miracula, quae pondere et
numero maxima sunt et illustrissima.
Age ergo, Beatissime Pater, et hanc
quoque lucernam igne divino accensam ne
diutius sub modio relinquas, sed pone eam550
super candelabrum, ut luceat omnibus qui in
domo sunt551. Nomen ejus sanctifica, qui
nomen Dei tanta charitate sanctificavit, ac
miraculorum multitudine collustravit ;
annuntia toti Ecclesiæ quæ est in terris, quia
Dominus mirificavit Sanctum suum in Cælis, ut
exaudiat nos cum clamaverimus ad eum552 553.
[177]
Hæc sunt vota ejus qui Beatitudini
Vestræ diu ac fœliciter Christianis omnibus
præesse ac prodesse, omnibus animi viribus
exoptat. Beatitudinis Vestræ,
Humillimus et obsequentissimus servus et
filius,
FRANCISCUS, Episcopus Gebennensis.
Annessii Gebennensium, VII die Martii
1612.
Revu sur l'Autographe appartenant au
marquis Chigi-Malvezzi, à Sienne (Toscane).
qu'elle aura de voir l'un de ses habitants honoré
par nos justes hommages. C'est encore l'ardent
souhait de notre Jérusalem d'ici-bas, que
préside Votre Sainteté, car elle se réjouira que
le nom d'un tel fils, écrit dans le Ciel, soit
glorifié sur la terre. Cette grâce est exigée pour
faire suite aux beaux actes de Votre Sainteté ;
car si naguère, d'entre les princes de l'Eglise,
Elle a canonisé le bienheureux Charles, Elle
doit lui joindre un prince séculier, afin que,
dans l'un et l'autre rang, il y ait un modèle à
imiter. Cette requête vous est adressée par la
famille des sérénissimes ducs de Savoie, dont
la constance dans la foi et les glorieux exploits
de [176] vaillance ont jadis et jusqu'à ce jour
apporté à l'Eglise une grande consolation.
Voici la province entière de Savoie qui vous
fait la même supplication, mais surtout ce
diocèse de Genève qui, se sentant ennobli par
la naissance d'un si grand prince, aura à juste
titre, une grande confiance en son intercession.
Enfin, c'est ce que demandent les mérites et les
miracles du bienheureux Amédée lui-même,
très grands et très illustres en qualité et en
nombre.
Faites-nous donc cette grâce, Très
Saint Père, et ne laissez pas plus longtemps
sous le boisseau cette lampe allumée par le feu
divin, mais placez-la sur le chandelier, afin
qu'elle éclaire tous ceux qui sont dans la
maison. Sanctifiez le nom de celui qui a
sanctifié le nom de Dieu avec tant de charité et
l'a fait glorifier par tant de miracles ; annoncez
à toute l'Eglise qui est sur la terre que le
Seigneur a exalté son Saint dans les Cieux,
pour nous exaucer quand nous crierons vers
lui. [177]
Ce sont les vœux de celui qui désire de
toutes ses forces que Votre Sainteté soit
longtemps et heureusement, et pour leur bien,
546 Saint Charles Borromée fut canonisé le 4 novembre 1610.
547 Divum Carolum cathalogo Sanctorum adscripserit, hunc quoque ex sæculi principibus eidem
548 Postulat Serenissima Sabaudiæ Principum familia, quænon constantia fidei tantum, sed etiam fortitudine et
præclaris operibus Ecclesiæ magnum jampridem solatium attulit. Postulat universa hæc Sabaudorum provincia,
seorsim vero ista Gebennensis diæcesis
549 [La phrase suivante ne se trouve pas dans la première minute.]
550 Beatissime Pater, lucernam hanc, igne divino accensam, quæ sub modio fere est, pone
551 Matt., V, 15.
552 Ps. IV, 4.
553 sanctificavit et in Dei nomine tot miracula patravit. Annuntia toti Ecclesiæ viatorum quod gestum est in Ecclesia
comprehensorum, qui scilicet mirificavit Dominus Sanctum suum, unde et exaudiet ejus orationes cum clamaverit ad
eum. (... et au nom de Dieu a opéré tant de miracles. Annoncez à toute l'Eglise des voyageurs ce qui s'est fait dans
l'Eglise des compréhenseurs, à savoir, que le Seigneur a exalté son Saint et qu'il exaucera ses prières quand celui-ci
criera vers lui.)
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à la tête de tous les chrétiens.
De Votre Sainteté,
Le très humble et très obéissant serviteur et
fils,
FRANÇOIS, Evêque de Genève.
Annecy en Genevois, le 7 mars 1612.
_____
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14.4 Page 134

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DCCLVIII. A la Soeur Favre, Religieuse de la Visitation554.
Questions et conseils. Comment « la grande Fille » du Saint
devait gouverner son cœur et l'encourager souvent. — Le
souverain bonheur de l'âme.
Chambéry, 10 mars 1612.
Nous parlons icy de vous si souvent et avec tant de playsir, ma chere Fille, que vous ne
deves pas avoir soin [178] de nous en rafraichir la memoyre. Mays ce n'est pas cela que je vous
veux dire, car j'ay d'autres choses a vous demander.
Dites moy donq vous mesme, ma chere Fille, le pauvre cœur bienaymé comme se porte-il
? Est-il pas tous-jours vaillant et vigilant pour s'empescher des surprises de la tristesse ? Je le vous
recommande au nom de Nostre Seigneur, ne le tormentés point, je dis mesme quand bien il auroit
fait quelque petit detour ; mays reprenés le doucement et le ramenes en son chemin. Car il est bon
; certes, ce chetif petit cœur de ma grande fille ; et pourveu [179] qu'elle le traitte bien, qu'elle
demeure un peu soigneusement en attention sur luy, que souvent elle le r'encourage par des petites
oraysons jaculatoires, par des petites conferences de ses bons souhaitz avec nostre Mere et avec
moy, par des petites bonnes cogitations faites sur ce sujet en diverses occasions, vous verres, ma
chere Fille, que ce cœur deviendra un vray cœur selon le cœur de Dieu. Seigneur Jesus, c'est pour
cela que deux foys le jour je vous fay priere particuliere.
Vives joyeuse, ma tres chere Fille ; Dieu vous ayme et vous fera la grace que vous l'aymeres
: c'est le souverain bonheur de l'ame pour cette vie et pour l'eternelle.
555La belle seur556 est une perle ; le frere est bienheureux de l'avoir treuvee et prise avant
554 Jacqueline Favre, fille du célèbre Antoine Favre (voir tome XI, note (68), p. 18) et de Benoîte, sa première femme
(ibid., note (172), p. 70), née à Chambéry en avril 1592 1, résolut de se faire Religieuse à la suite d'une fête mondaine
(cf. le tome précédent, note (709), p. 247). Le 6 juin 1610 elle entra à la Galerie avec la sainte Fondatrice, fit, une
année après, sa profession et prit part à la fondation du 1er Monastère de Lyon (2 février 1615), qu'elle gouverna
pendant cinq ans. Le 7 juin 1620, la Mère Favre fonde la Maison de Montferrand, la dirige pendant deux ans, et le 15
octobre 1622, prend à Dijon le gouvernement des Religieuses que la Mère de Chantal y avait établies le 8 mai
précédent. En 1623, la vaillante Supérieure travaille activement à la réforme de l'abbaye de Tart en Bourgogne, passe
quelques jours à Annecy, en juin 1624, pour la conclusion du Coustumier, retourne ensuite à Dijon, et le 19 mars 1627
va fondèr le couvent de Bourg-en-Bresse. Le deuxième Monastère de Paris lui est confié en avril 1628, et en 1631,
elle incorpore à la Visitation une Congrégation religieuse de Troyes. Elue en 1634 par la Communauté de Rennes, qui
ne put l'obtenir à cause de sa maladie, elle accepta l'année suivante la direction de celle de Chambéry, et c'est là que
se termina sa carrière, le 14 juin 1637.
Après la Mère de Chantal, la Mère Marie-Jacqueline tint la première place dans l'affection du saint Fondateur
; il l'appelait volontiers sa « grande Fille, » et de fait, la deuxième Mère de l'Institut justifia ce titre admirablement ;
car, selon la remarque de son biographe (Mère de Chaugy, Les Vies de quatre des premieres Meres, 1659-1892, Vie
de la Mère Favre, chap. XXVII), elle se montra vraiment grande en humilité, en obéissance, en dévotion, en pénitence,
en amour de Dieu et du prochain. Ce fut aussi la fille tendrement aimée et la plus chère confidente de la Sainte ; celle-
ci lui écrivait un jour : « Croyez qu'il est bien vrai que vous avez mes yeux et mes oreilles, et certainement encore plus
mon propre cœur. » (Sainte J.-F. Frémyot de Chantal, sa Vie et ses Œuvres ; Lettres, vol. III (Paris, Plon, 1878), p.
587.) En effet, ces deux filles de parlementaires s'attiraient par d'admirables affinités de tout ordre : elles apportaient
à l'œuvre commune, un cœur royal et magnanime, des conceptions également élevées, une intelligence toute virile, et
au service du Maître, une délicatesse et une générosité d'amour qui persévéra parmi les travaux les plus accablants
comme au milieu des plus vives souffrances.
Les Acta Sanctorum (Romæ, MDCCCLXVII), junii, p. 271, font mention de la Mère Jacqueline Favre : «
Elle est morte, » y est-il dit, « avec la réputation d'une sainte vie... » elle fut « la seconde colonne et pierre angulaire
» de l'Ordre de la Visitation... « Saint François de Sales l'appelait grande ; un jour, peut-être, le Souverain Pontife
l'appellera sainte. »
1 D'après la notice écrite par sainte Jeanne-Françoise de Chantal elle-même dans le Livre du Couvent, du 1er Monastère
d'Annecy.
555 A cet alinéa, qui est inédit, les précédents éditeurs substituaient la phrase suivante : « Ma tres chere Fille, je suis
incomparablement tout vostre. »
556 Mme de la Valbonne, femme de René Favre (voir ci-après, la lettre du 23 mai).
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14.5 Page 135

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qu'ell'eut conneu nostre petite Congregation, car autrement ell'eut esté vostre seur, mais non pas
vostre belle seur. Dieu la conduira pourtant en ce chemin auquel il l'a mise, a quelque bon point
de vraye perfection, puisqu'ell'en a tant de desir.
Le X mars 1612.
A Madame
Madame Favre.
A la Visitation.
Revu sur l'Autographe conservé au 2d Monastère de la Visitation de Marseille. [180]
_____
DCCLIX. A Madame de Peyzieu557 (Inédite). Une mère du Saint,
par alliance spirituelle. Compliments et paroles d'affection.
Chambéry, 17 mars 1612558.
Madame ma tres chere et tres honnoree Mere,
L'honneur que vos deux lettres m'ont donné ne peut estre dignement remercié par celle ci.
Elle vous tesmoignera seulement que j'ay un extreme sentiment du bonheur que vous m'aves
departi, m'advoüant pour vostre filz, me voyant tous les jours arriver des nouveaux ruysseaux de
faveur qui descoulent de cette vive fontaine. Car voyes-vous, Madame ma Mere, ne dois-je pas
estre fort glorieux de me treuver maintenant receu en la bienveüillance de monsieur et de madame
de Cerviere, [181] vos chers enfans559, comme presque cet autre frere560 qui, impatient d'estre privé
de la douceur de vostre presence, s'en reva si vitement aupres de vous, a laquelle il donnera, Dieu
merci, des bonnes nouvelles de la santé de cette bonne seur561, que je veux servir et honnorer de
tout mon cœur en l'absence des autres meilleurs freres562.
En un mot, Madame ma Mere, je n'oublie jamais a l'autel les recommandations que vous
557 Françoise de Dizimieu, fille de Balthazar, seigneur de Dizimieu, et de Claudine de Clermont, épousa François-
Philibert de Longecombe, écuyer, seigneur de Thoys et de Peyzieu, gentilhomme « de la maison du Roy et enseigne
de la compagnie d'hommes du comte de Bennes ; » il teste en mars 1591. (Guichenon, Hist. de Bresse et Bugey, 1650,
Partie III, continuation.)
Un des fils de la destinataire, François de Longecombe, dit en parlant du Saint : « Il honnoroit par sa grande
bonté nostre maison d'une particuliere bienveuillance, il nous faisoit la faveur d'y venir quelquefois. Il appelloit nostre
mere sa mere, et mes freres et moy ses freres, avec une cordialité singuliere. Nostre mere et mesdictz freres l'ont
cogneu long temps avant moy. » (Process. remiss. Gebenn. (I), ad art. 1.) C'est dans l'une de ces visites que la vénérable
aïeule, malade à l'extrémité, ayant dit son inquiétude de voir tous ses enfants se tourmenter pour la soulager, craignant
que cela ne nuisît à leur santé : « Et moy, ma chere Mere, » repartit le saint Evêque de fort bonne grâce, « je ne suis
jamais si aise quand je suis malade, que lors que je voy mes « parens et mes domestiques avoir bien de la peine autour
de moy... parce « que je sçav bien que Dieu les recompensera largement des assistances qu'ils « me rendent. » (Camus,
L’Esprit du bienheureux François de Sales, Paris, 1639-1641 ; Partie II, section IV.)
558 La date de l'année, omise par le Saint, est prouvée par sa présence, le 17 mars, à Chambéry où il prêchait le Carême,
et par le rapport de cette lettre avec d'autres lettres adressées à la même destinataire.
559 Lucrèce, l'une des filles de Mme de Peyzieu, avait épousé le 21 juin 1600, Henri de Saint-André, seigneur de
Cervières en Dauphiné. (Guichenon, ouvrage cité note (557) de la page précédente.) Méraude de Saint-André, leur
fille, entrée à la Visitation d'Annecy au mois d'octobre 1620, y reçut l'habit des mains du bienheureux Fondateur, avec
le nom de Sœur Marie-Innocente, le 28 décembre suivant. Saint François de Sales en parle dans une lettre écrite ce
même jour à son frère, l'Evêque de Chalcédoine.
560 « Cet autre frere » est très probablement Louis (cf. tome XIII, note (370), p. 130), que nous retrouverons dans la
suite de la correspondance du Saint.
561 Sans doute « madame de Cerviere » mentionnée plus haut et dans le post-scriptum.
562 Jacques (voir tome XIII, note (454), p. 165), Balthazar et François, dont les notes seront données ultérieurement.
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me commandastes d'y fere, car je suis fidellement et sans reserve,
Vostre tres obeissant filz et serviteur,
FRANÇS, E. de Geneve.
Mon Dieu, que j'ay de contentement de voir en cette chere seur qui est icy, non seulement
l'air de vostre visage, mais, ce qui est le plus beau, les traitz de vostre esprit et de vos affections.
J'en loüe Nostre Seigneur, Madame ma Mere.
A Chamberi, le 17 mars.
563 A Madame
Madame de Pezieu.
Revu sur l'Autographe appartenant à Mme la marquise de Mailly, au château de la Roche-Mailly
(Sarthe). [182]
_____
563 L'adresse est de la main d'un secrétaire.
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14.7 Page 137

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DCCLX. A Monseigneur Anastase Germonio Archevêque de
Tarentaise564. La controverse sur le pouvoir temporel des Papes
et l'autorité des Conciles. De quel côté penchent les
parlementaires et les hommes d'Etat. Esprit et tendance du
siècle. Un remède plus efficace que les discussions des
théologiens. Ce que doivent faire les prédicateurs.
L'entente des Prélats, de la Sorbonne et des Religieux, bientôt
mortelle à l'hérésie. Moyens de ménager cette union.
Chambéry, vers le 20 mars 1612 565.
Per avvisi particolari ricevuti di Parigi
et Digione et [183] per libretti stampati in detti
luoghi566, si vede chiaramente che quella
disputa dell'authorità del Santissimo Papa
sopra li Regi si va tuttavia dilatando,
com'ancora quell'altra della comparatione de li
Concilii con i Summi Pontefici. Et è chiaro che
la maggior parte de Parlamenti et huomini di
Stato, etiandio Catholici, inclina dalla banda
che è manco favorevole, o per dir meglio, che
è più contraria all'authorità papale, stimando
che sia più convenevole et giovevole
all'authorità regale. Et se le cose vanno inanzi,
ciè pericolo che non si facia una notabile
perdita et lamentabile divisione in quel regno ;
et massime perchè il Ré, fra tre o quattr'anni
dovendo pigliar l'administratione di quel
Par des avis particuliers reçus de Paris
et de Dijon et par des [183] opuscules
imprimés dans ces deux villes, on voit
clairement que la discussion touchant l'autorité
du Très Saint Père sur les rois s'étend de plus
en plus ; de même en est-il de celle qui a pour
objet de comparer les Conciles avec les
Souverains Pontifes. Il est clair que la majeure
partie des Parlements et des hommes d'Etat,
même catholiques, penchent du côté le moins
favorable, ou, pour mieux dire, le plus
contraire à l'autorité papale, cette opinion leur
paraissant mieux s'accorder avec l'autorité
royale et la servir plus utilement. Si cet état de
choses persévère, il est à craindre qu'il n'en
résulte pour ce royaume un dommage
considérable et une déplorable division ;
564 Anastase Germonio, troisième fils de Jean-Baptiste Germonio et de Catherine Ceva, né à Salé dans le Montferrat
(mars 1551), enseigna le droit avec un grand éclat, après l'avoir étudié à Turin avec Antoine Favre, sous Jean Manuce
et Pancirole. En 1586, il suivit le cardinal de la Rovere à Rome ; référendaire des deux signatures, vicaire de Sainte-
Marie-Majeure, promu à l'archevêché de Tarentaise le 12 novembre 1607, Mgr Germonio fit son entrée épiscopale à
Moûtiers le 7 octobre 1608. Malgré son âge avancé, le Prélat déployai une étonnante activité : visites pastorales,
synodes, confirmations, rédaction des constitutions, suppression des abus, son zèle s'étendit à tout. Arrivé à Madrid
comme ambassadeur (juillet 1614), il en repartit le 3 octobre suivant, rentra dans son diocèse au mois d'août 1616,
pour retourner encore à Madrid, où il mourut le 4 août 1627. François de Sales l'avait connu à Rome et en avait reçu
de nombreux services. Pendant que Germonio visitait son peuple, le Saint, alors à Ugines (cf. ci-dessus note (72), p.
14), alla au-devant de lui et l'invita gracieusement à venir à Annecy. (Voir à l'Appendice II, le récit de cette entrevue.)
Célèbre en son temps, oublié de nos jours, l'Archevêque de Tarentaise mériterait une biographie. On en trouverait les
éléments dans ses Œuvres, assez peu connues (2 vol. in-4º, Rome 1623) ; elles figurent à bon droit dans les Monumenta
historiæ Patriæ, Taurini, 1863, tome XI. (Voir Bonnefoy, Vie d'Anastase Germonio, Lyon, 1835.)
565 La date approximative que nous adoptons se déduit des particularités suivantes : le 35 mars 1612, le destinataire,
se trouvant à Chambéry pour un procès, écrivait au cardinal Borghese : « Mgr l'Evêque de Genève étant venu prêcher
ici... je lui demandai un de ces jours comment vont les affaires de France, surtout pour ce qui concerne l'autorité du
Pape dans ce royaume. Il me dit plusieurs choses, m'indiquant même les remèdes nécessaires... Je l'ai prié de vouloir
bien mettre par écrit [sa pensée,] ce qu'il a fait promptement. Aussi me semble-t-il de mon devoir d'envoyer cet écrit
à V. S. Illme, afin qu'elle puisse le montrer à Sa Sainteté, si votre prudence le juge à propos. » (Lettre citée par Pieralisi,
Rimedio alle dispute de' Cattolici in Francia, etc., Roma, 1878.) Les mots imprimés ci-dessus en italiques, suggèrent
la date indiquée.
566 Voir note (278), p. 95. Dans son Journal, de l'Estoile cite une longue liste d'ouvrages et de pamphlets qui ont trait
à ces questions.
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regno, sarà facil cosa alla fattione di quelli che
sonno contrarii all'authorità della Santa Sede,
di piegharlo da quella banda nella quale egli
vederà qualch'apparentia di aggrandire le sue
ragioni, essendo gl'huomini tanto inclinati alla
superiorità indepedente (sic), come si vede
massime in questi [184] tempi, et ancho nella
etâ giovenile, che per natura è temeraria et
audace, se bene è da credere che quel Ré sia di
buonissima et christianissima inclinatione.
Essendo poi questa impresa di scuotere ogni
giogo un mal contagiosissimo, passarebbe pian
piano di regno in regno et di corona in corona,
come si vede che altri simili mali son passati :
onde pare che il pericolo sia grande.
Il rimedio non par che sia di voler, col
mezzo di valenti theologi, disputar la
questione, perchè quanto più sarà fervente la
disputa, tanto più s'accenderanno gl'animi et si
farà grande la divisione. Oltra che le ragioni de
gl'adversarii sono grate alle orechie de grandi,
non per esser vere, ma per esser giovevole
all'intento loro ; nè mancaranno theologi che
per diversi rispetti abbracino la parte della
divisione.
Atalchè, il rimedio più efficace sarebbe
che mentre governa la Regina et il Consiglio,
si trattasse amarevolmente con lei dalla parte
di Sua Santità, lamentandosi che non essendo
giamai travenuto una sol differentia tra Sua
Beatitudine et il Ré, anzi Sua Beatitudine [185]
havendo in ogni occorrentia mostrato un animo
veramente paterno, affettionatissimo et
desiderosissimo del bene et stabilimento della
grandezza di quella corona, pur adesso
spontino certi cervelli pungenti, inquieti et
nemici della santa unione che tra Sua Santità et
Sua Maestà si truova, che venghano
impudentemente a ridurre in dubbio se Sua
Santità sia affettionata a quella corona,
movendo quelle inutili et intempestive dispute,
per mezzo delle quali generano nelli animi
infermi et deboli un (sic) diffidenza del sincero
affetto di Sua Beatitudine verso il Re et il
regno. Et che pertanto sia contenta Sua Maestà
di impor silentio a tali temerarie et seditiose
dispute, sì come Sua Santità, dal canto suo,
imporrà anco silentio, dove fia bisogno, a così
fatte importune et infruttuose questioni, le
quali, oltre che sonno inutili fra Catholici, sono
pernitiose fra gl'hæretici, et servono di
distrattione et diversione alla conversione delli
d'autant plus que le roi devant prendre dans
trois ou quatre ans l'administration de l'Etat, il
sera facile au parti hostile à l'autorité du Saint-
Siège de tourner ce prince du côté où celui-ci
verra quelque apparence d'étendre ses droits,
tant est grande l'inclination des hommes à
dominer sans aucune dépendance. C'est ce
[184] qu'on remarque surtout à notre époque ;
à plus forte raison chez la jeunesse, qui de sa
nature est téméraire et hardie. On peut croire
cependant, que le roi a des dispositions
excellentes et très chrétiennes. Cette tendance
à secouer tout joug est encore un mal des plus
contagieux ; aussi s'insinuerait-il petit à petit
de royaume en royaume, d'une couronne à une
autre couronne, comme il est arrivé pour
d'autres maux semblables. Le danger semble
donc bien grand.
Faire discuter la question par d'habiles
théologiens, ne paraît pas être le bon remède,
car plus les débats seront brûlants, plus aussi
les esprits s'échaufferont et la discorde ne fera
qu'augmenter. Il faut ajouter que les raisons
des adversaires flattent l'oreille des grands, non
pour leur justesse, mais parce qu'elles
favorisent leurs vues ; il ne manquera pas non
plus de théologiens qui, pour diverses
considérations, embrasseront le parti de la
division.
Le remède le plus efficace serait donc
que pendant la régence, l'on traitât à l'amiable
avec la reine et le Conseil, de la part de Sa
Sainteté. Se plaindre d'abord de ce que, tandis
qu'aucun différend ne s'est élevé entre Sa
Béatitude et le roi, tandis que le Pape a [185]
témoigné en toute occasion un cœur vraiment
paternel, très affectionné et très sympathique
au bien et à l'affermissement de la prospérité
de cet Etat, on voit maintenant surgir certains
esprits piquants, inquiets et ennemis de la
sainte union qui existe entre Sa Sainteté et Sa
Majesté ; ils viennent impudemment mettre en
doute l'affection du Saint-Père pour cette
couronne, soulèvent ces disputes oisives et
inopportunes, et engendrent par ce moyen dans
les esprits malades et faibles, une sorte de
défiance pour l'attachement sincère de Sa
Béatitude à l'égard du roi et du royaume. Que
Sa Majesté veuille donc imposer silence à ces
téméraires et séditieuses contestations. De son
côté, le Saint-Père imposera, s'il en est besoin,
silence à ces disputes aussi importunes
138/321

14.9 Page 139

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hæretici, liquali fan triompho di queste
divisioni.
In somma, è espediente per adesso che
si anneghino et affoghino quelle dispute nel
silentio, sì dall'una banda come dall'altra ; et se
bene è da laudare il zelo de quelli [186]
prædicatori che si sonno opposti all'insolentia
dell'adversarii, tuttavia, già che si vede che la
continuatione di litigar, disputare et altercare
non spinge (sic), anzi accende il fuogho, sarà
molto più giovevole il silentio che la disputa.
Et in vece di venire alle hipothesi, sarebbe
stato meglio di ben incolcare le thesi nelle
quali tacitamente si comprendono le hypothesi
; et in questa guerra, è certo che la pia dexterità,
prudentia et dolcezza è molto più utile che
l'infocata dottrina et ardore di spirito :
« Spreta exolescunt ; si irascare, agnita
videntur567. »
Et spesse volte, pur che si stabiliscano bene le
thesi, la meglior risposta che si possa fare alla
importunitâ de questi spiriti turbulenti, è non
stimarli degni di risposta. Et così sarebbe
bisogno che adesso in Francia tutti li
prædicatori, suavemente et non
turbulentemente, incolcassero l'unità
ecclesiastica et la divotione delli Catholici
verso il supremo Pastore, senza venire a
disputare de quella authoritâ in particolare che
ha sopra i Prencipi. [187]
Et a quelli che dell'authorità pontificia
parlano male, non bisogneria rispondere
direttamente, ma indirettamente, lamentandosi
che questo facciano senza necessità et con
maligna intentione, per mettre (sic) in odio la
Santa Sede, laquale tuttavia è dolcissima et
affettionatissima madre di quel regno. Et in
vece di rispondere alle loro propositioni,
sarebbe meglio d'impugnare le loro intentioni,
acciò di renderli odiosi come perturbatori della
quiete ; et fra tali discorsi, interporre
suavemente quelli düoi capi, dell'unitâ
ecclesiastica etchristiana, et dell'amore, o ver
divotione verso la Santa Sede, nodo di quella
unione et communione ecclesiastica.
Sarebbe anco bene che col mezzo de
Prelati affettionati et prudenti si procurasse
unione et buona intelligentia fra la Sorbona et
li Padri Giesuiti, acciò che giungendo quelli
duoi bovi in un sol giogo, si lavorasse nel sacro
qu'infructueuses. Inutiles pour les catholiques,
ces divisions sont encore funestes aux
hérétiques ; elles détournent et retardent leur
conversion, et de plus, leur fournissent la
matière d'un triomphe.
En un mot, il serait nécessaire, pour le
moment, d'arrêter et d'étouffer ces discussions
dans le silence, d'un côté comme de [186]
l'autre. Sans doute, il faut louer le zèle des
prédicateurs qui se sont opposés à l'insolence
des adversaires ; mais puisqu'on voit que par la
continuation des plaidoyers, des controverses,
des altercations, le feu s'allume au lieu de
s'éteindre, le silence sera bien plus avantageux
que la discussion elle-même. Il eût été
préférable aussi de ne pas en venir aux
hypothèses, mais d'inculquer fortement les
thèses où les hypothèses sont renfermées
implicitement. Dans cette guerre, une pieuse
adresse, la prudence et la douceur sont
certainement plus fructueuses que le feu de la
doctrine et l'ardeur du zèle.
« Telle chose qu'on méprise tombe dans
l'oubli ;
Si l'on s'en irrite, elle acquiert de l'importance.
»
Pourvu que les thèses soient bien établies, la
meilleure réponse qui se puisse faire aux
importunités de ces esprits turbulents, est de ne
pas les juger dignes de réponse. Aussi faudrait-
il que maintenant en France, tous les
prédicateurs prissent à tâche d'inculquer
suavement, et non violemment, l'unité de
l'Eglise et le dévouement des catholiques pour
le Pasteur suprême, sans entrer dans la
discussion de son autorité particulière sur les
princes. [187]
Quant à ceux qui parlent en mauvaise
part de l'autorité pontificale, on ne devrait pas
leur répondre directement, mais indirectement
; se plaindre de ce qu'ils font cela sans
nécessité et avec la maligne intention de rendre
odieux le Saint-Siège, lequel néanmoins n'a
pour ce royaume que les sentiments d'une mère
très douce et très aimante. Au lieu de répondre
à leurs propositions, il vaudrait donc mieux
attaquer leurs intentions, afin de les rendre
odieux eux-mêmes, comme perturbateurs de la
paix ; et parmi de tels discours, insinuer
doucement ces deux points : l'unité
567 Tacit., Annales, l. IV, c. XXXIV.
139/321

14.10 Page 140

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campo più efficacemente. Et questo si
potrebbe ancora fare se con destrezza et
discretione se ne trattasse con la Regina,
mostrando che con quel mezzo l'haeresia
sarebbe molto indebolita, come è vero ; perchè
se in Francia li [188] Prælati, la Sorbona et li
Religiosi fossero ben uniti, l'hæresia non
starebbe in piedi diec'anni. Et questa unione
non sarebbe difficile da procurarsi, dando bene
notitia alla Regina dell'importantia di essa, et
havendo huomini che con dexterità aiutassero
Monseignor Nontio568 et che potessero
domesticare l'uni con l'altri. A questo potrebbe
servire di raccommandare la cosa a li
Provinciali et Generali dell'Ordini, et mandar
Brevi suavissimi all'Università, et in
particolare alla Sorbona, et anco a Praelati ; et
in tutti mostrare l'affetto paterno di Nostro
Signore nella conservatione di quel regno, et
quanto Sua Santità desideri che tutti
ammaestrino li populi nella vera et sincera
obedientia et sommissione delli sudditi a
quella corona.
Ma prima che di far questa diligentia,
sarebbe necessario di haverne trattato con la
Regina et il Consiglio. Et a ciò servirebbe
grandemente che Sua Santità ne trattasse in
Roma col l'Ambasciatore569 e con i Cardinali
[189] francesi570, mostrando un gran desiderio
che quelle tali dispute scandalose siano
lasciate.
« Sero medicina paratur, Cum mala per
longas invaluere moras571. »
Et questo ho scritto per sodisfattone di
V. S. Illma et Rma, alla quale bascio le mani,
preghando il Signor Iddio che al suo vero zelo
nel servitio della Chiesa dia la debita mercede
in terra et in Cielo.
All'Illmo et Rmo Sigr mio
ecclésiastique et chrétienne, et l'amour ou le
dévouement pour le Saint-Siège, lien de cette
union et communion ecclésiastique.
Il serait bon aussi de ménager, par
l'entremise de Prélats dévoués et prudents,
l'union et la bonne intelligence entre la
Sorbonne et les Pères Jésuites, afin que,
réunissant deux bœufs sous un même joug, on
pût travailler dans le champ sacré d'une
manière plus efficace. Ce but, on pourrait
l'atteindre si l'on en traitait adroitement et
prudemment avec la reine, lui montrant que,
par ce moyen, l'hérésie serait
considérablement affaiblie. Ceci est très vrai,
car si en France, les Prélats, la Sorbonne et les
Religieux étaient bien unis, c'en serait [188]
fait de l'hérésie en dix ans. Cette union n'est
pas si difficile à ménager, pourvu qu'on en
fasse bien saisir l'importance à la reine, qu'on
ait des hommes capables d'aider adroitement
Mgr le Nonce et de se familiariser les uns avec
les autres. Ce qui pourrait aussi faciliter le
succès, serait de recommander l'affaire aux
Provinciaux et aux Généraux d'Ordres,
d'adresser des Brefs pleins de bienveillance
aux Universités, en particulier à la Sorbonne,
et aussi aux Prélats, témoignant en tous avec
quelle affection paternelle Sa Sainteté souhaite
la conservation de ce royaume, et combien elle
désire que tous dressent les peuples à la vraie
et sincère obéissance et soumission que les
sujets doivent à cette couronne.
Mais avant d'en arriver là, on devrait
d'abord en avoir traité avec la reine et le
Conseil ; il serait aussi très utile que Sa
Sainteté en conférât à Rome avec
l'ambassadeur et les Cardinaux [189] français,
témoignant un ardent désir de voir finir ces
scandaleuses discussions.
« Le remède vient trop tard, lorsque, par de
568 Robert Ubaldini (voir le tome précédent, note (611), p. 208).
569 François Savary de Brèves, né en 1560, dans le Nivernais, suivit, en 1582, son oncle Jacques de Lancosme à
l'ambassade de la Porte, et à sa mort (1591) lui succéda. Il revint en France vingt-deux ans plus tard, et fut ambassadeur
à Rome depuis 1607 jusqu'aux premiers mois de 1614. Attaché à la maison de Gaston d'Orléans, la reine le nomma
son grand écuyer, après la chute de Luynes, et fit ériger en comté la terre de Brèves. Il mourut à Paris en 1628. Habile
et passionné serviteur des intérêts de la France, très écouté à Constantinople, aimé de Henri IV, estimé de Paul V,
dévoué aux missions des Jésuites et aux Lieux-Saints, François de Brèves laissa la réputation d'un très distingué
diplomate. Cette existence si curieuse, si variée et féconde mériterait d'être contée ; même après les études de Perrens,
elle fournirait sans doute une contribution nouvelle et pittoresque à l'histoire diplomatique et religieuse de la France
au XVIIe siècle.
570 En 1612, les Cardinaux français étaient : François de Joyeuse (voir tome XII, note (1023), p. 411), Pierre de Gondi,
Anne d'Escars de Givry (voir le tome précédent, note (217), p. 70), François d'Escoubleau, cardinal de Sourdis, Jacques
du Perron, François de la Rochefoucauld.
571 Ovid., Remedia amoris, v. 89.
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15 Pages 141-150

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15.1 Page 141

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osservandissimo,
Monsigr l'Arcivescovo di Tarentasa572.
Revu sur l'Autographe conserve à Rome, à la
bibliothèque Barberini. [190]
longues négligences, le mal a fait des progrès.
»
J'ai écrit tout ceci pour agréer à Votre
Seigneurie Illustrissime et Révérendissime,
dont je baise les mains, priant Dieu notre
Seigneur d'accorder à votre zèle sincère pour le
service de l'Eglise, la récompense qui lui est
due sur la terre et au Ciel.
A mon très honoré, Illustrissime et
Révérendissime Seigneur, Mgr l'Archevêque
de Tarentaise. [190]
_____
DCCLXI. A la Présidente Brulart573. Une solution également
difficile et inutile. Etat des esprits en 1611 et en 1612.
Zèle que le Saint jugeait inopportun. Dangers de certaines
discussions agitées par des docteurs incompétents.
Souveraine autorité spirituelle du Pape ; droits qu'elle lui
confère. Devoirs corrélatifs des chrétiens envers le Pape et
l'Eglise. Triple alliance qui doit exister entre le Pape et les
rois. Les deux autorités ne se contrarient pas, mais «
s'entreportent l'une l'autre. »
Chambéry, [mars 1612 574.]
Je veux bien, ma tres chere Fille, respondre a la demande que vous me faites sur la fin de
vostre lettre ; mais ayés aggreable que je vous parle comme le grand saint Gregoire fit a une
vertueuse dame nommee, comme luy, Gregoire, et laquelle estoit dame de chambre de
l'Imperatrice575. Elle l'avoit prié d'obtenir de Dieu la connoissance de ce qu'elle devoit devenir, et
il luy dit : « Quant a ce que vostre douceur me demande et qu'elle dit ne vouloir point cesser de
m'importuner jusques a tant que je le luy aye octroyé, vous requeres de moy une chose esgalement
difficile et inutile. »
Je vous en dis de mesme, ma chere Fille. Quant a ce que vous me demandes, quelle
572 Vivès et Migne ont donné comme destinataire à cette lettre-mémoire, le Cardinal Borghese, mais l'adresse
autographe du Saint prouve que c'est une erreur. Voici comment elle s'est produite : Mgr Germonio ayant envoyé la
présente lettre à Rome au cardinal Borghese, celui-ci reçut du Saint-Père l'ordre d'en expédier une copie au Nonce de
France ; ce qu'il fit, en l'accompagnant d'une lettre datée du 5 mai 1612. L'Autographe de l'Evêque de Genève étant
resté à Rome, c'est sans doute la copie du cardinal Borghese, conservée à la Bibliothèque Nationale et publiée pour la
première fois par Vivès, qui aura dérobé à celui-ci le nom du véritable destinataire. (Voir Pieralisi, Rimedio, etc.)
573 La destinataire habitait une ville parlementaire, mais elle manquait d'idées nettes et paraissait avoir besoin de
s'instruire pour se défendre contre les « vains discours. » Ces circonstances font songer à la présidente Brûlart,
volontiers questionneuse, et obligée par son rang et ses relations d'être renseignée sur la controverse qui agitait alors
les esprits.
574 Le texte, d'ailleurs tronqué, ne fournit aucune indication précise pour la date. La similitude de pensées, et même
d'expressions, permet de placer cette lettre dans le voisinage de celle adressée à Mgr Germonio.
575 Lib. VI, ep. XXII.
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15.2 Page 142

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authorité le Pape a sur le temporel des royaumes et principautés, vous desires de moy une
resolution « esgalement difficile et inutile. » [191]
Difficile, non pas certes en elle mesme, car au contraire, elle est fort aysee a rencontrer aux
espritz qui la cherchent par le chemin de la charité ; mays difficile, parce qu'en cet aage qui redonde
en cervelles chaudes, aiguës et contentieuses, il est malaysé de dire chose qui n'offence ceux qui,
faysant les bons valetz, soit du Pape, soit des Princes, ne veulent que jamais on s'arreste hors des
extremités, ne regardant pas qu'on ne sçauroit faire pis pour un pere que de luy oster l'amour de
ses enfans, ni pour les enfans que de leur oster le respect qu'ilz doivent a leur pere.
Mais je dis inutile, parce que le Pape ne demande rien aux Rois et aux Princes pour ce
regard. Il les ayme tous tendrement, il souhaitte la fermeté et stabilité de leurs couronnes, il vit
doucement et amiablement avec eux, il ne fait presque rien dans leurs Estatz, non pas mesme en
ce qui regarde les choses purement ecclesiastiques, qu'avec leur aggreement et volonté. Qu'est-il
donq besoin de s'empresser maintenant a l'examen de son authorité sur les choses temporelles, et
par ce moyen ouvrir la porte a la dissension et discorde ?
Certes, icy je suis dans l'Estat d'un Prince qui a tous-jours fait tres particuliere profession
d'honnorer et reverer le Saint Siege apostolique ; et neanmoins, nous n'oyons nullement parler que
le Pape se mesle, ni en gros ni en detail, de l'administration temporelle des choses du païs, ni qu'il
interpose ou pretende aucune authorité temporelle sur le Prince, ni sur les officiers, ni sur les sujetz
en façon quelconque : nous nous donnons plein et entier repos de ce costé la et n'avons aucun sujet
d'inquietude. A quel propos nous imaginer des pretentions, pour nous porter a des contentions
contre celuy que nous devons filialement cherir, honnorer et respecter comme nostre vray Pere et
Pasteur spirituel ?
Je vous le dis sincerement, ma tres chere Fille : j'ay une douleur extreme au cœur de sçavoir
que cette dispute de l'authorité du Pape soit le jouet et sujet de la parlerie parmi tant de gens qui,
peu capables de la resolution qu'on y doit prendre, en lieu de l'esclarcir la troublent, [192] et en
lieu de la decider la deschirent, et, ce qui est le pis, en la troublant, troublent la paix de plusieurs
ames, et en la deschirant, deschirent la tres sainte unanimité des Catholiques, les divertissans
d'autant de penser a la conversion des heretiques.
Or, je vous ay dit tout cecy pour conclure que, quant a vous, vous ne deves en façon
quelconque laisser courir vostre esprit apres tous ces vains discours qui se font indifferemment sur
cette authorité, ains laisser toute cette impertinente curiosité aux espritz qui s'en veulent repaistre,
comme les cameleons du vent. Et pour vostre repos, voyci des petitz retranchemens dans lesquelz
vous retirerés vostre esprit a l'abri et a couvert.
Le Pape est le souverain Pasteur et Pere spirituel des Chrestiens, parce qu'il est le supreme
Vicaire de Jesus Christ en terre ; partant, il a l'ordinaire souveraine authorité spirituelle sur tous
les Chrestiens, Empereurs, Rois, Princes et autres, qui, en cette qualité, luy doivent non seulement
amour, honneur, reverence et respect, mais aussi ayde, secours et assistance envers tous et contre
tous ceux qui l'offencent, ou l'Eglise, en cette authorité spirituelle et en l'administration d'icelle. Si
que, comme par droit naturel, divin et humain, chacun peut employer ses forces et celles de ses
alliés pour sa juste defense, contre l'inique et injuste aggresseur et offenseur, aussi l'Eglise ou le
Pape (car c'est tout un) peut employer ses forces et celles de l'Eglise et celles des Princes chrestiens,
ses enfans spirituelz, pour la juste defense et conservation des droitz de l'Eglise contre tous ceux
qui les voudroyent violer et destruire. Et d'autant que les Chrestiens, Princes et autres ne sont pas
alliés au Pape et a l'Eglise d'une simple alliance, mays d'une alliance la plus puissante en obligation,
la plus excellente en dignité qui puisse estre ; comme le Pape et les autres Prelatz de l'Eglise sont
obligés de donner leur vie et subir la mort pour donner la nourriture et pasture spirituelle aux Rois
et aux royaumes chrestiens, aussi les Rois et les royaumes sont tenus et redevables reciproquement
de maintenir, au peril de leurs vies et Estatz, le Pape et l'Eglise, leur [193] Pasteur et Pere
spirituel576. Grande, mais reciproque obligation entre le Pape et les Rois ; obligation invariable,
576 Les auteurs qui défendent la thèse du pouvoir indirect des Papes au temporel, et en particulier le P. Bianchi, O.
M.1, remarquent justement, en citant ces paroles du saint Docteur, qu'ils ne pourraient eux-mêmes se servir de termes
plus énergiques.
142/321

15.3 Page 143

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obligation qui s'estend jusques a la mort inclusivement, et obligation naturelle, divine et humaine,
par laquelle le Pape et l'Eglise doivent leurs forces spirituelles aux Rois et aux royaumes, et les
Rois, leurs forces temporelles au Pape et a l'Eglise. Le Pape et l'Eglise sont aux Rois pour les
nourrir, conserver et defendre envers tous et contre tous spirituellement ; les Rois et les royaumes
sont a l'Eglise et au Pape pour les nourrir, conserver et defendre envers tous et contre tous
temporellement : car les peres sont aux enfans et les enfans aux peres.
Les Rois et tous les Princes souverains ont pourtant une souveraineté temporelle en laquelle
le Pape ni l'Eglise ne pretendent rien, ni ne leur en demandent aucune sorte de reconnoissance
temporelle ; en sorte que, pour abbreger, le Pape est tres souverain Pasteur et Pere spirituel, le Roy
est tres souverain prince et seigneur temporel. L'authorité de l'un n'est point contraire a l'autre, ains
elles s'entreportent l'une l'autre ; car le Pape et l'Eglise excommunient et tiennent pour heretiques
ceux qui nient l'authorité souveraine des Rois et Princes, et les Rois frappent de leur espee ceux
qui nient l'authorité du Pape et de l'Eglise, ou s'ilz ne les frappent pas, c'est en attendant qu'ilz
s'amendent et humilient.
Demeurés la : soyés humble fille spirituelle de l'Eglise et du Pape, soyés humble sujette et
servante du Roy. Priés pour l'un et pour l'autre, et croyés fermement qu'ainsy faysant, vous aures
Dieu pour Pere et pour Roy.
……………………………………………………………………………………………………..
FRANÇS, E. de Geneve.
_____
DCCLXII. A la Mère de Chantal. La plus heureuse salutation
qui fut jamais. Les souhaits de l'Ave Maria
Chambéry, 25 mars 1612 577.
Quoy qu'extremement occupé, comment pourrois-je m'empescher de saluer ma tres chere
Fille, au jour de la plus heureuse salutation qui fut jamais faite ? Hé ! je supplie cette glorieuse
Vierge qui fut aujourd'huy saluee, qu'elle nous impetre quelque part a la tres sacree consolation
qu'elle receut. Mais Dieu vous benie, vous remplisse de graces ; Dieu soit avec nous, ma tres chere
Fille, car je n'ay pas davantage de loysir, grace a Nostre Seigneur, lequel nous fait la faveur de
nous employer icy et la, a son tres saint service ; car c'est a cela que je suis occupé en diverses
sortes, de maniere que le cœur de ma tres chere Fille, comme le mien, en sera bien ayse.
Salut a toutes nos filles tres cherement, [et] a la chere petite seur578, a qui j'escriray au
premier rencontre de loysir.
Ce matin, jour de l'Annonciation.
A Madame de Chantal.
A la Visitation.
_____
1 Della Potestà e della Politica della Chiesa. Trattati due, contro le nuove opinioni di Pietro Giannone, dedicati al
Principe degli Apostoli. Roma, Pagliarini, 1745.
577 Pour la date de ce billet, on peut hésiter entre 1611, 1612 et 1613, à cause de l'appellation de « Fille » donnée à la
destinataire ; mais la promesse d'écrire, que fait le Saint, « au premier rencontre de loysir, » le salut qu'il donne à
toutes ses filles et l'allusion à ses travaux se comprennent mieux en 1612, pendant le Carême de Chambéry.
578 Sans doute, la jeune baronne de Thorens.
143/321

15.4 Page 144

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DCCLXIII. Au duc de Savoie, Charles-Emmanuel Ier. Requête
en faveur d'un prisonnier innocent
Chambéry, 26 mars 1612.
Monseigneur,
Vostre Altesse est supplies par le sieur Chapperon579 de luy vouloir donner la delivrance
de la prison en laquelle il se treuve presentement. Et par ce qu'en divers voyages qu'il a fait par
deça je n'ay jamais reconneu en luy qu'un esprit franc, candide et vrayement chrestien, et que
d'ailleurs plusieurs bons Religieux et gens de bien de cette ville m'ont conjuré de le secourir de ma
tres humble intercession aupres de Vostre Altesse Serenissime, je la supplie en toute reverence
qu'il luy playse accorder laditte delivrance, tant en consideration de l'innocence du pauvre
prisonnier, que les Peres Capucins attestent n'avoir aucunement cooperé a la sortie du P.
Bonaventure580, seul sujet apparent de son emprisonnement, qu'en faveur de ce saint tems de
Caresme, auquel le divin Aigneau d'innocence a si honteusement delivré nos ames coulpables de
la perdition. Vostre Altesse fera sans doute une justice charitable en cela581, pour laquelle Dieu
accroistra les recompenses qu'il luy a preparees.
Je prie continuellement cette souveraine Bonté qu'il [196] luy playse combler de ses graces
Vostre Altesse Serenissime, et suys inviolablement,
Monseigneur,
Vostre tres humble, tres obeissant et tres fidele orateur et serviteur,
FRANÇS, E. de Geneve.
XXVI mars 1612, a Chamberi.
A Son Altesse Serenissime.
Revu sur l'Autographe conservé à Turin, Archives de l'Etat.
_____
DCCLXIV. A la Mère de Chantal. L'insensibilité spirituelle : en
quoi consistait cette épreuve pour la Mère de Chantal.
Conseils appropriés. Le haut point de la sainte résignation.
Les ténèbres au pied de la Croix
Chambéry, 28 mars 1612.
Or sus, ma tres chere, tres unique, ma Fille, il est bien tems que je responde, si je puis, a
vostre grande lettre. Helas ! ouy, ma tres chere, toute vrayement tres chere Fille ; mays si faut-il
que ce soit en courant, car j'ay fort peu de loysir, et n'estoit que mon sermon, que je vay tantost
faire, est des-ja tout formé dans ma teste, je ne vous escrirois autre chose que le billet ci-joint.
Mais venons a l'exercice interieur duquel vous m'escrives. Ce n'est autre chose qu'une vraye
579 En 1610, un « capitaine Chaperon » avait « un roolle de trois cents hommes » pour prendre part à une entreprise
sur le pays de Vaud : serait-ce le personnage auquel s'intéressait le Saint ? Aujourd'hui encore, le nom que portait le
« pauvre prisonnier » subsiste en Savoie.
580 Il semble à peu près sûr que ce Religieux était Capucin, mais nous ignorons s'il rentra dans sa famille et s'il faut le
chercher parmi les nombreux Pères Bonaventure de ce temps-là.
581 Le duc acquiesça au désir de saint François de Sales ; voir la lettre du 18 juin 1612, à Son Altesse.
144/321

15.5 Page 145

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insensibilité qui vous prive de la jouissance, non seulement des consolations et inspirations, mais
aussi de la foy, esperance et charité. Vous les aves pourtant et en fort bon estat, mais vous n'en
jouisses pas, ains estes comme un enfant qui a un tuteur qui le prive du maniement de tous ses
biens, en sorte que, tout estant vrayement a luy, neanmoins il ne manie et ne semble posseder ni
avoir rien [197] que sa vie, et, comme dit saint Paul582, estant maistre de tout, il n'est point different
du serviteur en cela ; car ainsy, ma tres chere Fille, Dieu ne veut pas que vous ayés le maniement
de vostre foy, de vostre esperance et de vostre charité, ni que vous en jouissiés, sinon justement
pour vivre et pour vous en servir es occasions de la pure necessité.
Helas, ma tres chere Fille, que nous sommes heureux d'estre ainsy serrés et tenus de court
par ce celeste Tuteur ! Et ce que nous devons faire, n'est sans doute autre chose que ce que nous
faysons, qui est d'adorer l'aymable providence de Dieu, et puis nous jetter entre ses bras et dedans
son giron. Non, Seigneur, je ne veux point davantage de jouissance de ma foy, ni de mon
esperance, ni de ma charité, que de pouvoir dire en verité, quoy que sans goust et sans sentiment,
que je mourrois plustost que de quitter ma foy, mon esperance et ma charité. Helas ! Seigneur, si
tel est vostre bon playsir que je n'aye nul playsir de la prattique des vertus que vostre grace m'a
conferees, j'acquiesce de toute ma volonté, quoy que contre les sentimens de ma volonté.
C'est le haut point de la sainte resignation de se contenter des actes nuds, secs et insensibles,
exercés par la seule volonté superieure ; comme ce seroit le superieur degré de l'abstinence de se
contenter de ne manger jamais sinon avec desgoust, a contrecoeur, et non seulement sans goust ni
saveur.
Vous m'aves fort bien exprimé vostre souffrance, et n'aves rien a faire pour remede que ce
que vous faites, protestant a Nostre Seigneur, en paroles mesme vocales, et quelquefois encor en
chantant, que vous voules mesme vivre de la mort et manger comme si vous esties morte, sans
goust, sans sentiment et connoissance. En fin, ce Sauveur veut que nous soyons si parfaitement
siens, que rien ne nous reste, pour nous abandonner entierement a la mercy de sa providence, sans
reserve.
Or, demeurons donq ainsy, ma tres chere Fille, parmi ces tenebres de la Passion. Je dis bien
parmi ces tenebres, car je vous laisse a penser : Nostre Dame et saint Jean [198] estans au pied de
la Croix, emmi les admirables et espouvantables tenebres qui se firent, ilz n'oyoyent plus Nostre
Seigneur, ilz ne le voyoyent plus et n'avoyent nul sentiment que d'amertume et de detresse, et bien
qu'ilz eussent la foy, elle estoit aussi en tenebres, car il failloit qu'ilz participassent a la dereliction
du Sauveur. Que nous sommes heureux d'estre esclaves de ce grand Dieu qui, pour nous, se rendit
esclave583 !
Mais voyla l'heure du sermon. A Dieu, ma tres chere Mere, ma Fille en ce Sauveur. Vive
sa divine Bonté ! J'ay une ardeur incomparable pour l'avancement de nostre cœur, pour lequel je
resigne tous mes autres contentemens entre les mains de sa souveraine et paternelle providence.
Bon soir de rechef, ma tres chere Fille. Jesus, le doux Jesus, cœur unique de nostre cœur,
nous benisse de son saint amour. Amen.
FRANÇS, E. de Geneve.
Le 28 mars 1612.
_____
582 Galat., IV, 1.
583 Philip., II, 7.
145/321

15.6 Page 146

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DCCLXV. Au duc de Savoie, Charles-Emmanuel Ier. Supplique
du Saint au nom d'un gentilhomme qu'il avait assisté à ses
derniers moments
Chambéry, 29 mars 1612.
Monseigneur,
Ayant rendu quelque sorte d'assistence a feu monsieur de Lambert en l'extremité de sa
vie584 pour la consolation de son ame, selon ma vocation, il m'a conjuré de [199] presenter cette
supplication tres humble a Vostre Altesse. C'est, Monseigneur, qu'il vous playse luy continuer
lhonneur de vostre bienveuillance encor apres son trespas, comm'a un serviteur fidele et ancien de
Vostre Altesse, qui, en la vie et en la mort, n'avoit rien eü de plus entier en son ame que la tres
humble obeissance qu'il devoit a vostre couronne ; et que, ne pouvant plus exercer cette
sienn'affection en ce monde, il avoit fait choix du filz aysné du sieur de Chenex585 pour le nommer
son heritier, affin qu'avec ce peu de biens qu'il luy laisse, il puisse estre eslevé et nourri en la vertu
et en la puissante inclination du service de Vostre Altesse, a laquelle, outre son originaire devoir,
le nom et les armes de Lambert, qu'il luy ordonne de porter, le rendront absolument hipothequé et
consacré586. En suite dequoy, il supplioyt aussi tres humblement Vostre Altesse de recevoir ce sien
heritier sous la protection de sa bonté et de l'avoir en recommandation particuliere, affin que,
croissant a l'ombre de cette faveur, il devienne plus capable de prattiquer un jour le service de
Vostre Altesse auquel il a esté dedié.
M'estant donques rendu depositaire de ces derniers souhaitz de ce bon defunct, je rens mon
depost a Vostre Altesse, a laquelle il estoit addressé, la conjurant par sa propre bonté de departir
ce bonheur a ce jeune gentilhomme, pour ne point rendre vain le contentement que celuy qui l'a
fait son heritier prenoit en l'extremité de ses jours, en l'esperance qu'il avoit que Vostre Altesse ne
l'esconduiroit point en cette tres humble supplication que je luy fay maintenant de sa part. Et tandis,
continuant [200] les vœux que je doys et fay pour la prosperité de Vostre Altesse, je demeure,
Monseigneur,
Vostre tres humble, tres obeissant et tres fidele orateur et serviteur,
FRANS, E. de Geneve.
A Chamberi, le XXIX mars 1612.
Revu sur une copie conservée à Turin, Archives de l'Etat.
_____
584 Jérôme de Lambert (voir tome XIII, note (258), p. 198), qui avait été inhumé le 18 mars.
585 Le « sieur de Chenex » est Jérôme d'Angeville, dit de Mestral, seigneur de Chenex ou Chesnay, d'Allonzier, etc.,
fils de noble Marin d'Angeville et de Françoise-Marie de Lambert, maître de camp d'un régiment d'infanterie,
gouverneur de Verceil, puis maréchal de camp dans les armées de Son Altesse. Il avait épousé, le 18 avril 1605,
Claudine de Bouvens qui, étant veuve, teste au château de Lornay en 1670.
586 Le « filz aysné » du précédent, qui avait hérité de Jérôme de Lambert, son grand-oncle et parrain, à la condition
expresse d'en porter le nom et les armes pures, était Jérôme d'Angeville, dit de Lambert, baron de Ternier et Lornay.
Le 14 avril 1640, il épousa Lucrèce de Menthon de Lornay, et mourut le 27 juillet 1676, quelques mois après Claude-
Louis, son fils unique, décédé sans postérité.
146/321

15.7 Page 147

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DCCLXVI. A M. Antoine des Hayes587. Le nid du Saint.
Messages et nouvelles.
Chambéry, 29 mars 1612.
Monsieur,
Ce porteur, qui est filz d'un tres bon pere et lequel est de mes meilleurs amis588, n'a pas
voulu retourner a Paris sans vous rapporter de mes lettres comm'il m'en avoit apporté des vostres,
estimant que, comm'il desire, il vous en seroit plus aggreable. Je luy suis fort obligé de cette bonne
pensee, fondee sur la creance qu'il a de la parfaitte bienveuillance dont vous me favorisés, qui est
une persuasion laquelle, comm'elle m'est fort honnorable, elle m'est aussi fort douce et aymable.
Il vous dira toutes nos nouvelles, qui, a mon advis, consiste (sic) en ce que nous n'en avons point.
Pour moy, je tire chemin en ce Caresme, affin de me retirer dans mon nid soudain apres Pasques.
[201]
J'ay pensé avoir lhonneur de voir Monsieur le Cardinal de Mantoue a son retour589 ; mays
on nous dit quil prend le chemin d'Allemaigne. On avoit aussi donné du bruit du passage de
monsieur le Duc d'Espernon590, mais il s'esvanoüit aussi. Quant aux mariages591, vous sçaves qu'en
tems de Caresme ce n'en est pas la sayson ; aussi n'en dit-on plus mot.
Nous attendons le passage du sieur de Granier, qui nous dira ce quil aura pris d'argent sur
vostre faveur592, et soudain, Dieu aydant, je l'envoyeray, voulant meshuy donner commencement
a la satisfaction de tant de devoirs pecuniaires que je vous ay ; car quant aux autres, je ne pourray
ni ne voudray jamais en estre quitte, ayant un extreme playsir d'estre par obligation ce que je suis
si absolument par inclination : c'est,
Monsieur,
Vostre tres humble frere serviteur,
FRANÇS, E. de Geneve.
XXVIII mars 1612, a Chamberi.
Je ne cesseray jamais de recommander a Nostre Seigneur la prosperité de toute vostre
mayson, et suis tres humble serviteur de madame la mere de famille d'icelle, que je salue de toute
mon affection.
Monsieur le premier president Favre me tient icy en consolation, en parlant souvent de
vous selon mon desir.
Revu sur l'Autographe conservé à la Visitation de Reims. [202]
_____
587 D'après le texte, on voit que le destinataire de cette lettre résidait à Paris en 1612, qu'il s'intéressait aux choses de
Savoie, qu'il était le créancier du Saint et l'ami du président Favre. Toutes ces particularités font préférer des Hayes
aux autres correspondants de l'Evêque de Genève.
588 Ce porteur pourrait être un membre de la famille Bouvard, un de Quoex, un Paquellet de Moyron.
589 Ferdinand de Gonzague, né en 1587, cardinal en 1607, était fils de Vincent Ier, duc de Mantoue. A la mort de son
frère François (1612), qui n'avait laissé qu'une fille, il prit les titres de duc de Mantoue et de Montferrat, et en 1613,
s'empara de la tutelle de sa nièce. Après avoir quitté la pourpre en 1615, il épousa le 7 février 1617, Catherine de
Médicis, fille de Ferdinand Ier, grand-duc de Toscane, et mourut en 1626, sans postérité. Des négociations diverses
l'attirèrent à la cour de France, où il fit d'assez longs séjours, entouré d'égards et mêlé d'assez près à sa vie intime. (Cf.
Ciaconius, Hist. Pontif. et Card., 1677, tom. IV, p. 416 ; Moreri, 1740.)
590 Le fameux duc d'Epernon (1554-1642) était, par sa mère, neveu de Roger de Bellegarde. Il accompagnait Henri
IV, quand ce prince vint à Annecy en 1600. Parmi les vicissitudes qui traversèrent sa longue vie, il se montra toujours
le défenseur des intérêts catholiques.
591 Voir ci-dessus, notes (242), (243), p. 79, et note (446), p. 149.
592 Cf. ibid., pp. 148, 149.
147/321

15.8 Page 148

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DCCLXVII. A M. Claude de Quoex (Inédite). « La pauvre dame
Jaqueline. » Dureté de M. Gilette. Le P. de Bonivard, S. ].,
prédicateur du Carême à Annecy. Contentement mutuel du
Religieux et du bon peuple annécien. Affluence des
Chambériens aux sermons de saint François de Sales
Chambéry, 1er avril 1612.
Monsieur,
J'apporteray tout le soin quil me sera possible pour la pauvre dame Jaqueline, a laquelle
j'ay extreme compassion, et ne sçaurois neanmoins rien avancer que le sieur Gilette593 ne soit de
retour de Piemont ou il est. Il m'a des-ja tant ennuyé par la dureté avec laquelle il traitte cette
pauvre femme, que s'il ne fait autre chose, je la veux prendre avec luy le plus asprement que je
pourray, et ne doute point qu'il ne soit en mon pouvoir de le ruyner, si je m'y resous.
Ce m'est un extreme contentement que nostre cher Annessi gouste si franchement le
bonheur qu'il a d'ouïr ce grand homme de Dieu, le P. Bonnivard, duquel de toutes pars chascun me
fait festes. Je sçavois bien qu'un si bon peuple ne pouvoit qu'avoir un playsir infini d'un predicateur
qui a tant de bonnes parties. Il m'escrit reciproquement qu'il est tout plein de consolation de voir
que la terre qu'il cultive reçoit si utilement la graine sacree de la divine parole, et treuve que la
promesse que je luy en avois faite est surmontee par les effectz594. [203]
Pour moy, je vay devuidant le reste de Caresme, faysant au mieux que je puis, et ayant
jusques a present occasion de me louer de l'affluence et de l'attention de mes auditeurs595. Dieu
soit a jamais loüé du fruit qui en naistra, si tant est qu'il luy playse benir l'intention que j'ay de son
saint service en ce petit travail.
Les deux freres que vous aymes596 vous honnorent et cherissent affectionnement, et parlent
fort souvent de vous en ce sens et avec ce goust, mays celuy ci particulierement qui, vous saluant
de tout son cœur, et madame ma chere bonne seur597, est invariablement,
Monsieur,
Vostre tres affectionné plus humble serviteur,
FRANÇS, E. de Geneve.
593 Voir le tome précédent, note (119), p. 37.
594 Les Délibérations municipales d'Annecy font mention de ce Carême : « Le P. Bonivard, Jesuite, » y est-il dit à la
date du 33 avril, « predicateur du Caresme, devant se retirer jeudy a Pontarlier, lieu de sa demeure,... la ville ayant
recogneu la grand peine qu'a prise le Pere... a esté d'advis que l'on attendroit l'arrivee de Mgr le Revme, par l'advis
duquel et commandement, les scindiques se conformeront. » Et le 1er mai on a soin de noter que le prédicateur, venu
de Vesoul, n'a pas voulu « de sallaire. »
595 Comme il se l'était promis (voir ci-dessus, p. 54) et comme il l'avoue, le saint Evêque fit « au mieux » qu'il put,
pendant le Carême de Chambéry. Dieu se plut à bénir son zèle, car les auditeurs accoururent « a luy de toutes parts,
non seulement pour oüyr ses predications, mais encor pour recevoir les documens de salut sur la direction » de leur «
conscience... » (Dép. de Pierre-Antoine de Castagnery, baron de Châteauneuf, Process. remiss. Gebenn. (II), ad art.
11.) Au rapport de l'un d'entre eux, « l'on disoit communement que ses predications estoient miraculeuses, par ce que,
» donnant tout le jour aux « confessions et a des predications particullieres... il avoit fort peu de temps pour se preparer.
» (Dép. d'Antoine Dunant, curé de Contamine, Process. remiss. Gebenn. (I), ad art. 35.)
Nous avons les plans de quelques-uns des sermons que François de Sales prêcha à Chambéry (voir tome VIII,
pp. 74-102). L'exorde du discours de début est de grande allure ; les canevas eux-mêmes, où se pressent les pensées
originales, les remarques vives et pittoresques, donnent l'idée que son éloquence dut être, ainsi que le disait plus tard
la Mère de Beaumont, « toute charmante. » (Les Vies de plusieurs Superieures de l'Ordre de la Visitation, Annecy,
1693, Vie de la Mère A.-C. de Beaumont, p. 83.)
596 Le Saint lui-même et probablement Jean-François, qui avait dû l'accompagner à Chambéry ; peut-être aussi Antoine
Favre, ami de M. de Quoex.
597 Bernardine de Chissé, femme du destinataire (voir tome XII, note (179), p. 100).
148/321

15.9 Page 149

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1er avril 1612, a Chamberi.
A Monsieur de Quoëx, collateral, etc.598
Revu sur une ancienne copie conservée à la Visitation de Turin. [204]
_____
DCCLXVIII. Aux Religieuses de la Visitation d'Annecy.
Pourquoi saint François de Sales se résignait à vivre en ce
misérable monde. Abeilles mystiques et mouches libertines :
le bonheur et les exercices des unes et des autres mis en
parallèle. Un festin plus délicieux que celui d'Assuérus.
Les spirituelles saillies sur les collines de Calvaire, d'Olivet, de
Sion, de Thabor. Bonheur de la vie religieuse
Chambéry, 1er avril 1612 599.
Seroit-il bien possible que mon esprit oubliast jamais les chers enfans de ses entrailles600 ?
Non, mes tres cheres Filles, ma chere joye et ma couronne601, vous le sçavés bien, je m'en asseure
; et vos cœurs vous auront bien respondu pouf moy que si je ne vous ay pas escrit jusques a present,
ce n'est sinon parce que, escrivant a nostre tres unique et bonne Mere, je sçavois bien que je ne
vous escrivois pas moins qu'a elle, par cette douce et salutaire union que vos ames ont avec la
sienne ; et encor, parce que le saint amour que nous nous portons reciproquement, est escrit, ce me
semble, en si grosses lettres dans nos cœurs, qu'on y peut bien lire presque nos pensees de Neci
jusques icy.
Je suis avec un peu plus de monde que quand je suis en nostre sejour ordinaire aupres de
vous ; et plus j'en voy de ce miserable monde, plus il m'est a contrecœur, et ne croy pas que j'y
peusse vivre, si le service de quelques bonnes ames en l'advancement de leur salut ne me donnoit
de l'allegement.
Mon Dieu, mes cheres Filles, que je treuve bien plus [205] heureuses les abeilles, qui ne
sortent de leur ruche que pour la cueillette du miel, et ne sont associees que pour le composer, et
n'ont point d'empressement que pour cela, et dont l'empressement est ordonné, et qui ne font dans
leurs maysons et monasteres sinon le mesnage odorant du miel et de la cire ! Qu'elles sont bien
plus heureuses que ces guespes et mouches libertines, qui, courans si vaguement et plus volontier
aux choses immondes qu'aux honnestes, semblent ne vivre que pour importuner le reste des
animaux et leur donner de la peyne, en se donnant a elles mesmes une perpetuelle inquietude et
inutile empressement. Elles vont par tout furetant, sucçant et picorant tandis que leur esté et leur
automne dure, et l'hiver arrivé, elles se treuvent sans retraitte, sans munition et sans vie ; ou nos
chastes abeilles, qui n'ont pour objet de leur veuë, de leur odorat, de leur goust, que la beauté, la
suavité et la douceur des fleurs rangees a leur dessein, outre la noblesse de leur exercice, ont une
fort aymable retraitte, une munition aggreable et une vie contente parmi l'amas de leur travail
598 L'adresse a été sans doute tronquée à la transcription du texte autographe.
599 D'après les éditeurs de 1626, cette lettre serait du 1er avril 1610, et de 1616 d'après Hérissant. La première date est
fausse manifestement, puisque la Visitation ne fut fondée qu'au mois de juin suivant. Quant à la seconde, elle est
contredite par la double allusion à l'Evangile de la multiplication des pains (voir page suivante), lequel se lit le IVe
Dimanche de Carême, et par l'absence du Saint, d'Annecy. La date que nous adoptons concorde avec les faits et les
allusions du texte.
600 Cf. Is., XLIX, 15.
601 Philip., ult. 1.
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15.10 Page 150

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passé.
Et ces ames amoureuses du Sauveur, qui le suivent en nostre Evangile602 jusques sur le
haut du desert, y font un plus delicieux festin sur l'herbe et les fleurs, que ne firent jamais ceux qui
jouissoyent de l'appareil somptueux d'Assuerus603, ou l'abondance estouffoit la jouissance parce
que c'estoit une abondance des viandes et des hommes.
Vivés joyeuses, mes tres cheres Filles, entre vos saintes occupations. Quand l'air vous sera
nubileux, entre les secheresses et aridités, travaillés au dedans de vostre cœur par la prattique de
la sainte humilité et abjection ; quand il sera beau, clair et serein, allés, faites vos spirituelles saillies
sur les collines de Calvaire, d'Olivet, de Sion et de Thabor, et, de la montaigne deserte ou Nostre
Seigneur repaist sa chere trouppe aujourd'huy, volés jusques au sommet de la montaigne eternelle
du Ciel et voyés les immortelles delices qui y sont preparees pour vos cœurs604.
Hé, qu'ilz sont heureux ces cœurs bienaymés de mes [206] filles, d'avoir quitté quelques
annees de la fause liberté du monde, pour jouir eternellement de ce desirable esclavage auquel
nulle liberté n'est ostee que celle qui nous empesche d'estre vrayement libres !
Dieu vous benisse, mes tres cheres Filles, et vous face de plus en plus avancer en l'amour
de sa divine eternité, en laquelle nous esperons de jouir de l'infinité de ses faveurs pour cette petite,
mais vraye fidelité, qu'en si peu de chose, comme est cette vie presente, nous voulons observer
moyennant sa grace. La dilection du Pere, du Filz et du Saint Esprit soit a jamais au milieu de vos
cœurs, et que les mammelles de Nostre Dame soyent pour tous-jours nostre refuge. Amen.
Le 1er avril…
Dieu m'a favorisé d'avoir peu escrire tout d'une haleyne, quoy que presque sans haleyner,
ces quatre petitz motz a mes tres cheres filles, qui, mises ensemble comme fleurs en un bouquet,
sont delices a la Mere de la Fleur de Jessé605 et la fleur des meres. Hé, Seigneur, que ce soit en
odeur de suavité. Amen.
Vive Jesus, en qui je suis
Vostre tres affectionné serviteur,
FRANÇS, E. de Geneve.
_____
DCCLXIX. Au Baron Bernard de Chevron606. Envoi d'une lettre
d'affaires.
Chambéry, 2 avril 1612.
Monsieur mon Cousin,
Voyla une lettre de monsieur de Bonvilars nostre [207] oncle607, a laquelle je ne puis faire
autre response que celle que vous m'ordonneres. Cependant je demeureray, de vous et de madame
602 Evang. IV Dom. Quadrag. ; Joan., VI, 1-15.
603 Esther, I, 3-8.
604 Cf. Is., LX1V, I Cor., II, 9.
605 Is., XI, 1.
606 Bernard de Chevron-Villette, baron et seigneur de Chevron, de Dérée, etc., fils d'Hector de Chevron-Villette et de
Jeanne de Menthon (cf. tome XI, note (129), p. 45, et tome XIII, note (929), p. 344), avait épousé le 23 juin 1608,
Charlotte-Emmanuelle de Chabod, comme nous l'avons dit au tome précédent, note (147), p. 49, et note (764), p. 267.
607 Jean-Louis, dit de Chevron, troisième fils et cohéritier universel de ses père et mère, Michel, baron de Chevron et
seigneur de Bonvillard, et Béatrix de Dérée. Il épousa, par contrat dotal dn 9 mai 1592, Claudine Solliard de Miribel,
décédée en 1613, et en secondes noces, Jeanne de Ramus, veuve, le 34 juin 1618, de noble Jean-Baptiste de la Palud.
« Monsieur de Bonvilars » mourut sans postérité. (Voir à l'Appendice, sa lettre au Saint, 21 mars 1612.)
Il faut noter que ce billet a été écrit sur la même feuille envoyée par M. de Bonvillard, et qu'il occupe le blanc
laissé par celui-ci entre le texte et sa signature.
150/321

16 Pages 151-160

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16.1 Page 151

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ma cousine608,
A Chamberi, le 2 avril 1612.
Tres affectionné, plus humble cousin et serviteur,
FRANÇS, E. de Geneve.
A Monsieur
Monsieur le Baron de Chivron,
Chevalier du souverain Senat de Savoye609.
Revu sur l'Autographe conservé à la Visitation de Pignerol.
_____
DCCLXX. A M. Claude de Quoex. Le Saint s'emploie pour
obtenir l'expédition d'un procès
Chambéry, [vers le 20 avril 1612 610.]
Monsieur,
Le P. Recteur de Chambery me dit que l'expedition [208] de son proces611 vous estant
recommandee, il l'aura ou demain ou, au plus long aller, passé demain. Monsieur, je luy ay promis
que j'y employerois ma priere, et je le fay avec confiance par ces deux motz, au bout desquelz
j'adjouste un tres affectionné bon soir pour vous, Monsieur, et pour madame ma seur612, estant et
de vous et d'elle,
Serviteur et frere bien humble,
FRANÇS, E. de Geneve.
Revu sur l'Autographe conservé à Chambéry, Archives du Sénat de Savoie. [209]
_____
608 La femme du destinataire.
609 C'est Hector qui était « chevalier du souverain Senat de Savoye ; » son fils, le destinataire de la présente lettre, n'a
jamais eu cette charge. Le Saint aurait-il eu une distraction en écrivant l'adresse ? ou bien aurait-il envoyé la lettre à
Hector de Chevron, en l'absence de son fils ?
610 L'Autographe publié pour la première fois en 1885 par M. Mugnier (Saint François de Sales, docteur en droit, etc.,
pp. 114-116), ne porte ni date, ni adresse, « Comme nous avons » trouvé cette lettre, dit-il, « avec celles qui sont
écrites à Claude de Quoex et que le destinataire et sa femme y sont appelés mon frère et ma sœur, nous pensons qu'elle
a été envoyée à ce magistrat. » La chose nous semble assez probable.
La date que nous ajoutons paraît concorder avec la teneur de la lettre (voir la note suivante) ; mais une date
antérieure ne répugnerait pas absolument.
611 Le Recteur de Chambéry était le P. Claude Marius, ou Le Maire, ou Lemaire. Né à Dole en 1570, entré dans la
Compagnie de Jésus le 4 septembre 1590, profès des quatre vœux le 15 novembre 1609, il mourut à Grenoble le 4
avril 1631. (D'après les notes du S. P. Van Meurs, S. J.)
Depuis plusieurs années, le baron de la Serraz (Bertrand de Seyssel) était en procès avec les Jésuites de
Chambéry, à l'occasion du prieuré du Bourget que le Pape avait uni à leur collège en 1582 ; son fils, Louis des Granges,
s'emporta contre eux, au point de menacer de mort lo P. Recteur. Voir la longue lettre que le président Favre écrivit à
ce sujet au duc de Savoie, le 1er avril 1612 (Mugnier, Correspondance du Président Favre, tome II, publié par la
Société savoisienne, etc., 1905). Une sentence du Sénat rendit le baron responsable des violences de son fils ; il dut
même, sur l'ordre de Charles-Emmanuel, faire des excuses au P. Lemaire et au Sénat. Un mois après, un arrêt civil
prononcé, semble-t-il, le 14 avril 1612, donna gain de cause aux Jésuites. (Cf. Codex Fabrianus, lib. III, tit. XXII.)
612 Bernardine de Chissé, femme du destinataire.
151/321

16.2 Page 152

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DCCLXXI. A la Mère de Chantal (Billet inédit). Cent mille
bonjours
Annecy, 30 avril [1612 613.]
Dieu vous donne cent mille bonjours et la santé tres heureuse, ma tres chere Fille, que je
recommanderay de tout mon cœur a sainte Catherine de Siene, puisque c'est aujourdhuy sa feste.
Bonjour, ma tres chere Fille.
Revu sur une copie conservée à la Visitation d'Annecy.
_____
DCCLXXII. A la même. Visite promise ; visite annoncée
Annecy, 7 mai 1612 614.
Ma tres chere Fille,
Je vous donne le bonjour, et peut estre iray-je vous donner le bon soir en personne,
cependant, si je puis ; et mesme par ce que Mme l'Ancienne615 est venue, laquelle, [210] on
m'asseure, ira vers vous avec intention d'avoir plus de commodité de me parler ; bien que je voye
qu'ell'en aura peu ou que ce soit, a rayson de nostre Sinode, duquel les abors commencent
demain616.
Bonjour, ma tres chere Fille, et priés pour moy.
Revu sur une copie déclarée authentique, conservée à Turin, Archives de l'Etat.
_____
613 Ces lignes datent des premières années de la Visitation. En 1611, le Saint écrivit à la Mère de Chantal la veille de
la fête de sainte Catherine de Sienne (voir plus haut, p. 47) ; le présent billet semble donc assez bien placé en 1612.
614 Les corrélations de ce billet avec la Lettre DCCLXXIV (p. 212) et les rapports de l'une et de l'autre avec la lettre à
Mme de Maillard, donnée ci-après, ont fait préférer 1612 à 1611 ; le quantième se déduit de la date du Synode qui, en
1612, s'ouvrit le 9 mai.
615 Jéronyme de Maillard, ancienne abbesse de Sainte-Catherine (voir le tome précédent, note (248), p. 79).
616 « Les abors » du Synode désignent sans doute les réunions préparatoires qui se tenaient la veille de son ouverture.
(Cf. Mém. et doc. de l'Acad. Salés., tome II, pp. 174, seq.)
152/321

16.3 Page 153

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DCCLXXIII. A Madame de Maillard ancienne abbesse de
Sainte-Catherine617. Recommandations pour la Sœur de Vignod.
Notre-Seigneur est jaloux des âmes qu'il favorise.
Annecy, [vers le 8 mai] 1612 618.
Ma tres chere Fille,
Je salue vostre cœur de toute mon ame. J'ay dit a ce porteur ce qui m'a semblé a propos,
qui est quil regardast a treuver parti tout a loysir, affin de sortir de ce service auquel il est, plus
convenablement.
Ma fille [de Vignod619] doit estre bien sur ses gardes [211] pour ne donner aucun sujet aux
hommes de soupçon, par aucun desreglement de contenance, ou amusement, ni sujet de jalousie a
l'Espoux celeste, qui est, a la verité, jaloux des ames qu'il favorise, affin qu'on ne distraise de son
amour aucune affection pour l'appliquer a la creature. J'ay veu sa seur de Bons620 a Chamberi, et
ell'a [fait] fort devotement et confidemment sa revëue [depuis] que je l'ouys en confession en son
abbaye.
Dieu vous comble de ses benedictions, ma tres [chere] Cousine, ma Fille, et je salue nostre
Seur de [Vignod] et toutes nos autres Seurs.
Revu sur l'Autographe conservé au Ier Monastère de la Visitation de Marseille.
_____
DCCLXXIV. A la Mère de Chantal (Inédite). Charité attentive
et minutieuse du Saint pour la Mère de Chantal. Le régime
d'une convalescente
Annecy, vers le 10 mai 1612 621.
Ce livre la est bon, mais non pas pour l'affaire presente622 ; nous en chercherons un autre
plus court et le treuverons, Dieu aydant.
Cependant, ma tres chere Mere, reposés un peu bien, manges un peu de choses bonnes et
ne mettes pas du tout tant d'eau au vin ; car je voy que ces foiblesses proviennent d'abbatement
d'estomach et de froideur de teste. Du moins, trempes un peu vostre nez et vos poulz [212] de vin,
et manges une douzaine de raysin Damas apres souper.
Je suis bien ayse que cette bonne damoyselle soit si brave623 ; je l'ayme bien, je vous
617 Comme saint François de Sales l'avait prévu (voir le billet précédent), l'ancienne Abbesse de Sainte-Catherine n'eut
pas la « commodité » de l'entretenir à souhait et fut obligée de lui écrire (cf. le billet suivant). La présente lettre a tout
l'air d'être la réponse aux confidences de « Madame l'Ancienne. » La désignation de celle-ci comme destinataire est
fondée sur ces diverses concordances ; elle n'est donc pas absolument certaine.
618 L'année 1612 est sûre par l'allusion à la « revëue » de la « Seur de Bons » faite au Saint à Chambéry, sans doute
pendant le Carême ; l'écriture la confirme. Le quantième est indiqué par les relations de cette lettre avec les deux
billets précédent et suivant.
619 Le nom que nous croyons être de Vignod, a été coupé ; les autres mots ajoutés entre crochets [ ] ont disparu par
suite de la déchirure du bord de l'Autographe. Le même nom de Vignod, que nous restituons à l'avant-dernière ligne,
correspond juste à la place restée en blanc.
620 Jeanne de Vignod, la « jeun' Abbesse. » (Voir le tome précédent, note (603), p. 206.)
621 Pour la date de ce billet, voir note (614), p. 210.
622 Nous ignorons le titre du livre et le sujet de l'affaire.
623 Le 7 mai 1612, « l'Heustace, fillie de feu François Thavan, de la parroesse de Sainct Jeoire... declayre a Rde Dame
153/321

16.4 Page 154

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asseure. Demain, sil se peut, j'iray au moins a 9 heures.
Dieu vous benisse, ma tres chere Mere, et vous comble de son tressaint et pur amour. La
bonne Madame l'Ancienne m'a escrit tout ce qu'ell' avoit a me dire624. Vives joyeuse, avec Nostre
Seigneur vivant et regnant en nostre cœur. Amen.
Revu sur l'Autographe appartenant à Mme Revel de Mouxy, à Brest.
_____
DCCLXXV. A M. Bénigne Milletot. Le Saint revendique son
droit, qui était contesté, de conférer les bénéfices dans certaines
paroisses situées en France
Annecy, 13 mai 1612.
Monsieur mon Frere,
Ce porteur est chanoine de mon eglise cathedrale625, [213] sujet du Roy et regnicole. Il est
appellé devant la cour626 pour un abus que sa partie pretend avoir esté commis par moy en l'endroit
d'une provision de la chappelle627. Je croy que l'on considerera qu'il n'y a pas de loy au monde qui
m'ayt privé de l'usage de mon authorité ecclesiastique en la provision des benefices de mon diocese
; et que, comme M. l'Archevesque de Lyon pourvoit en Bourgoigne Comté, M. l'Evesque de
Grenoble en Savoye et a Chamberi mesme, non obstant leur residence au royaume, de mesme dois-
je jouir de l'authorité de pourvoir dans le royaume, quoy que je sois habitant en Savoye.
Je me persuade que cela est, et neanmoins je croy que j'ay besoin de vostre protection,
laquelle pour cela je reclame, puisque je suis,
Monsieur mon Frere,
Vostre tres humble frere et tres affectionné serviteur,
FRANÇS, E. de Geneve.
Le 13 may 1612, a Neci.
A Monsieur Milletot,
Seigneur de Villy,
Conseiller du Roy au Parlement de Bourgoigne.
_____
Jeanne Françoyse Fremyot, a present Superieure de la Congregation de la Visitation... qu'elle entend que tous et
chascungs ses biens soyent vendus... et que les deniers soyent convertis a l'utillité de ladicte Congregation, ou elle est
de present logee et entretenue, et a voüé, moyennant l'ayde de Dieu, d'y demeurer et finir ses jours. » (Archives de la
Visitation d'Annecy.)
Il nous semble peu probable, cependant, que « l'Heustace » soit la « damoyselle » dont parle le Saint ; car
celle-ci paraît être plutôt une nouvelle venue, tandis que la fille de M. Thavan devait avoir séjourné quelque temps à
la Visitation, avant le 7 mai. Cette « damoyselle si brave » serait-elle la « fille tentee » dont il sera fait mention plus
loin, Lettre DCCLXXX, p. 220 ?
624 Cf. la lettre précédente.
625 Jean Favre, frère du Président et grand-vicaire du diocèse de Genève, ou le chanoine Théodore Warouf, 1597-1616
(cf. tome XII, note (1233), p. 481), les seuls connus pour être à cette époque « sujets du Roy et regnicoles. » Comme
le Saint ne donne pas au porteur le titre de « grand vicaire », c'est plus probablement le dernier qu'il a voulu désigner
ici.
626 Le Parlement de Dijon.
627 Ce texte paraît défectueux ; il faudrait : « d'une provision de chappelle. »
154/321

16.5 Page 155

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DCCLXXVI. A Madame de la Fléchère628. L'aveuglement des
duellistes ; pourquoi et comment le Saint en avait une grande
compassion.
Annecy, 15 mai 1612.
Ma tres chere Fille,
Vostre derniere lettre m'a donné mille consolations, [214] et a madame [de Chantal] a qui
je l'ay communiquee, n'y ayant rien veu qui ne peust estre monstré a une ame de cette qualité la et
qui vous cherit si saintement. Or, je vous escris sans loysir, pour un depesche qu'il me faut faire
pour Bourgoigne.
Mays mon Dieu, ma tres chere Fille, que dirons-nous de ces hommes qui apprehendent tant
l'honneur de ce miserable monde et si peu la beatitude de l'autre ? Je vous asseure que j'ay eu des
estranges afflictions de cœur, me representant combien pres de la damnation eternelle ce cher
cousin s'estoit mis629, et que vostre cher mary l'y eust conduit. Helas, quelle sorte d'amitié de
s'entreporter les uns les autres du costé de l'enfer ! Il faut prier Dieu qu'il leur fasse voir sa sainte
lumiere et avoir grande compassion d'eux. Je les voy, certes, avec un cœur plein de pitié, quand je
considere qu'ilz sçavent que Dieu merite d'estre preferé, et n'ont pas neanmoins le courage de le
preferer quand il en est tems, crainte des paroles des mal advisés.
Cependant, affin que vostre mary ne croupisse pas en son peché et en
l'excommunication630, voyla un billet que je luy envoye pour se confesser et faire absoudre. Je prie
Dieu qu'il luy envoye la contrition requise pour cela.
Or sus, demeurés en paix ; jettés vostre cœur et vos souhaitz entre les bras de la Providence
celeste, et que la benediction divine soit a jamais entre vous. Amen.
Le 15 may 1612, a Neci. [215]
_____
628 L'ensemble de la lettre, les allusions qu'elle renferme désignent Mme de la Fléchère comme la destinataire la plus
probable.
629 Le duelliste serait-il M. de Vallon ? Celui-ci était à la fois cousin du Saint et de M. de la Fléchère ; il n'y aurait rien
d'étonnant que ce dernier eût été mêlé à une querelle de ce genre. Ces deux gentilshommes figurent parfois ensemble
dans les lettres de François de Sales et nous savons qu'ils se sont trouvés à Turin à la même date. (Cf. le tome précédent,
p. 3.)
630 Au temps de saint François de Sales, il y avait, en fait de lois ecclésiastiques contre le duel, outre la législation
ancienne, le canon du Concile de Trente (Sess. XXV, cap. XIX, de Reformat.), qui est de 1563, et les Constitutions
de Pie IV, de Grégoire XIII et de Clément VIII.
155/321

16.6 Page 156

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DCCLXXVII. A Madame de la Valbonne631 (Fragment). Quels
sont ceux que le Sauveur n'abandonne jamais. Un nouveau
filleul du Saint.
Annecy, 22 mai 1612 632.
……………………………………………………………………………………………………..
Or je ne doute point de cela, ma tres chere Fille, ma Niece, que ce mesme Sauveur qui vous a prise
par la main ne vous conduise jusques a la perfection de son saint amour ; car j'espere que vous ne
vous secoueres point d'une si douce et suave conduite et n'abandonneres jamais Celuy qui, par son
infinie bonté, n'abandonne jamais ceux qui ne veulent pas l'abandonner. Vray Dieu, que nous
serons heureux si nous sommes fideles a cette immense douceur qui nous attire !
Mme de Limogeon633 me pria il y a bien sept mois, de luy tenir ce dernier enfant qu'elle a
fait, et je le pris [216] en fort grand honneur ; mais je le treuve encor plus grand et plus aggreable,
puisque c'est avec cette heureuse rencontre que vous le deves tenir avec moy ; ce que je prens a
presage qu'un jour je pourray bien avoir la consolation d'en tenir un des vostres634. Mais, en tout
evenement, nous nous entretiendrons l'un l'autre par la sainte dilection qui me fera tous-jours estre,
Ma tres chere Niece, ma Fille,
Vostre plus humble oncle et serviteur,
FRANÇS, E. de Geneve.
22 may 1612.
Mon cœur salue le vostre635 et est son serviteur.
J'ay annoncé la feste de Pentecoste a monsieur Favre636 qui l'attend en devotion, et nous
tous637.
_____
631 L'adresse que nous attribuons à cette lettre est justifiée par le titre de « Niece » donné à la destinataire, et par
l'annonce faite à M. Favre, de « la feste de Pentecoste. »
Andrée de Nicolle de Crescherel, qui avait épousé d'abord Jean-Philibert de Genton, par contrat dotal du 12
septembre 1605, et ensuite René Favre de la Valbonne, 18 juin 1611 (cf. tome XIII, note (586), p. 217), était fille de
Jeanne de Sautereau et de Claude de Crescherel, dit Nicolle ou de Nicolle, seigneur de la Place et des Déserts, docteur
ès-droits et avocat consistorial au Sénat de Savoie. Le Saint appelle Mme de la Valbonne « une perle » (voir p. 180) et,
comme en témoignent ses lettres, il fut pour son âme un guide très affectueux.
632 L'Autographe, publié pour la première fois et sans date, par Hérissant (1758), se gardait alors à Rome, dans la
chambre de saint Ignace, au Gesù. Le texte que nous donnons reproduit une copie conservée à l'archevêché de Malines
(vol. Ignatiana, n° 11), mais cette copie est défectueuse et ne représente vraisemblablement que la seconde partie de
la lettre. Aussi la date de 1612, que porte ladite copie, ne peut être absolument garantie.
633 Mme de Limogeon (voir tome XIII, note (192), p. 58), née Jeanne-Louise de Genton, était belle-sœur de la
destinataire. Cette parenté explique le choix de celle-ci pour marraine de l'enfant attendu, dont il n'a pas été possible
de découvrir la date de naissance.
634 On lit dans le Registre des baptêmes de Saint-Léger, paroisse de Chambéry : Le 15 novembre 1615 « a esté baptizé
Antoine François, fils de noble et spectable René Favre, seigr de la Varbonne, et de damoyselle Andreaz Nicolle...
Parrain, noble... Antoine Favre... et marreinne, damoyselle Jeanne de Saultereau. » D'après le comte de Foras
(Armorial et Nobiliaire, etc., tome II, p. 369), François de Sales aurait été aussi parrain de cet enfant, peut-être parce
qu'il lui donna son nom.
635 C'est sans doute le mari de la destinataire que le Saint désigne ainsi.
636 Le Président.
637 Cette phrase assez obscure vient assurément d'une lecture défectueuse. Hérissant porte vous toutes, au lieu de «
nous tous. »
156/321

16.7 Page 157

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DCCLXXVIII. Au duc de Savoie, Charles-Emmanuel Ier.
Pourquoi le Saint désire obtenir l'agrément du duc de Savoie
pour les prédications qu'on lui demande à Lyon
Annecy, 26 mai 1612.
Monseigneur,
Je suys conjuré de la part de messieurs les doyen et Comtes de Saint Jean de Lion638, de
leur accorder mes prædications pour le Caresme prochain. La qualité de [217] cett'eglise-lâ, qui
est si honnorable entre toutes celles de France, le voysinage et perpetuel commerce de ceux de ces
pais ci avec les Lionnois, lhonneur que ces seigneurs m'ont fait de m'envoyer expres monsieur le
Comte de Saconay, originaire sujet et vassal de Vostre Altesse et lequel tient un rang fort principal
entr'eux639, me convie a ne point refuser en une si affectionnee et digne recherche. Seulement ay-
je reservé le bon playsir de Vostre Altesse, sous lequel je veux tous-jours vivre ; qui me fait la tres
humblement supplier de me fayre sçavoir ce qu'ell' aura aggreable pour ce sujet640, tandis que je
continueray mes vœux pour sa prosperité, comme doit,
Monseigneur,
Son tres humble, tres-obeissant et tres fidele orateur et serviteur,
FRANÇS, Evesque de Geneve.
A Neci, le XXVI may 1612.
Revu sur l'Autographe conservé à Turin, Archives de l'Etat.
_____
DCCLXXIX. A la Mère de Chantal (Billet inédit). « Nostre
fievre » et « nostre teste. » Les bonnes dispositions des
syndics pour les agrandissements de la Visitation
Annecy, 27 mai 1612 641.
Ma tres chere Mere,
Comme vous portes vous, je vous prie, a ce matin ? car hier vous fustes toute lasse et
attachee de nostre fievre ; [218] et je puis bien mieux dire de nostre fievre que ma Seur Milletot642
de nostre teste. Helas ! mon cœur vous donne mille fois le bonjour, aymant uniquement le vostre
comme soy mesme.
Je fis hier vostre ordonnance envers Messieurs de la ville643 que, sans mentir, nous obligent
638 Vide infra, Epist. DCCXCII.
639 Louis de Sacconay, qui était à cette date chamarier du Chapitre. (Voir tome XI, note (697), p. 305.)
640 Vide infra, Epist. DCCXCII.
641 La date est prouvée par la concordance du billet avec les délibérations du Conseil municipal d'Annecy, prises en la
séance du lundi 28 mai 1612. (Voir note (643) de la page suivante.)
642 Sœur Marie-Marguerite Milletot (voir ci-dessus, note (55), p. 6), qui abusait du pluriel en usage dès les premières
années de la Visitation.
643 Le procès-verbal de la séance du Conseil municipal d'Annecy, du 28 mai 1612, s'exprime ainsi : « A esté proposé
et remonstré, comme samedi dernier messieurs les scindics auroient visité Mgr le Revme Evesque de Geneve ; dont,
entre autres propos, fut dict par luy quii desiroit quil pleut a la ville de bailler a la maison de la Religion de la Visitation
(les Dames delaquelle ont acquis la maison des hoirs du sieur advocat de Gemilly, par authorité de Sa Sainteté) la
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16.8 Page 158

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tout plein en l'estime et l'amour quilz tesmoignent a nostre Mayson. Je vous diray la resolution
demain644, Dieu aydant ; et cependant, conserves vous bien fort, ma tres chere Mere, je vous en
conjure, et mille mille fois bon jour.
Revu sur l'Autographe appartenant à M. le marquis de la Prunarède, à Montpellier. [219]
_____
DCCLXXX. A la même (Fragment inédit). Une postulante qui
avait de la répugnance pour l'abjection ; comment traiter avec
elle
Annecy, vers fin mai 1612 645.
…………………………………………….. 646 et il y a un quart d'heure un'autre fois. En somme,
je suis le meilleur de vos peres et le plus brave de vos enfans.
Il me sembla que vous m'eussies marqué le jour de saint Claude. Il me semble qu'il ne faut
pas estonner cette fille si ell'est tentee647, ains seulement la bien examiner sur le desir d'estre de la
Congregation, et si on la treuve foible, luy donner loysir d'y penser, affin qu'elle se resoulve sans
præcipitation ; car il m'est advis que ce soit une bonne fille, mais qui a repugnance a l'abjection, et
par ce qu'ell'a l'esprit fort, elle ne peut bonnement le plier du tout pour encor.
Bon jour, ma tres chere Mere, vives saintement. Je prie Dieu pour nostre fille648, que je
sceu seulement hier estre malade. Dieu soit nostre cœur et nostre vie.
Revu sur l'Autographe conservé à la Visitation d'Annecy. [220]
_____
place qui est entre la tour du Prieur de Talloires et celle dudit sieur de Gemilly, en rendant a ladite ville, ou baillant,
tout le jardin du sieur de Talloires et la moitié de la tour d'icelluy... Et pour aultant que lesdites Dames baillent et
offrent de place davantaige que celle qu'elles demandent, et qu'en ladite place ne se jette que des immondices qui
aportent beaucoup d'incommodité, partant il semble que tel eschange aporte de proufict a la ville. Outre que lesdites
Dames desirant au mesme lieu bastir leur eglise, elles affectionnent entierement cette place. Sur quoy plaira a
l'assemblee d'ordonner ce qui sera respondu a Mgr le Revme a ce subject, et sur le tout pourvoir. »
« Messieurs les scindics, » Jean Floccard, Jean Crochet, Guillaume Méclard et François Marvin, se
montraient, on le voit, tout disposés à condescendre aux désirs des saints Fondateurs.
644 La « resolution » fut telle que le Saint pouvait l'espérer. « La Ville, » est-il dit dans le même procès-verbal cité à la
note précédente, « en desirant d'observer la volonté de Mgr le Rme Evesque de Geneve, qui affectionne la susdite place
pour lesdites Dames, pour y bastir leur eglise, » décide « qu'elle leur est accordee en contrechange de la place qu'elles
ont proposé. »
645 La date de l'année est proposée sous toutes réserves ; elle se déduit de l'écriture, qui ressemble beaucoup à celle
des billets adressés vers la même époque à la Mère de Chantal, et du rapprochement qu'on peut faire entre ce fragment
et la Lettre DCCLXXIV. (Voir ci-dessous, note (647). L'allusion au « jour de saint Claude, » 6 juin, permet de placer
ces lignes vers la fin du mois précédent.
646 Le haut de l'Autographe a été coupé.
647 « Cette fille tentee... qu'il ne faut pas estonner, » pourrait bien estre la « damoyselle si brave » dont il est parlé plus
haut (p. 213). Entrée au commencement de mai, elle aurait eu le loisir de témoigner d'abord beaucoup de ferveur et
de « desir d'estre de la Congregation ; » puis, le moment de prendre l'habit approchant, c'est-à-dire le 6 juin, « jour de
saint Claude, » elle aurait inspiré des craintes à la Mère de Chantal. De fait, elle ne persévéra pas, car son nom est
absent des listes des Religieuses reçues dans ce même temps.
648 Françoise de Chantal.
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16.9 Page 159

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DCCLXXXI. A la même. Beauté du Ciel après l'Ascension du
Sauveur. Aspirations pieuses. La seule chose qni donne du
prix à l'éternité des biens, d'après saint François de Sales. La
glorification du corps de Notre-Seigneur et de notre corps
Annecy, [31 mai 1612 649.]
Je vous donne, la joye dequoy nostre Sauveur est monté au Ciel, ou il vit et regne, et veut
qu'un jour nous vivions et regnions avec luy. O quel triomphe au Ciel et quelle douceur en la terre
! Que nos cœurs soyent ou est leur thresor650, et que nous vivions au Ciel, puis que nostre vie651
est au Ciel.
Mon Dieu, ma Fille, que ce Ciel est beau, maintenant que le Sauveur y sert de soleil652 et
la poitrine d'iceluy, d'une source d'amour de laquelle les Bienheureux boivent a souhait653 ! Chacun
se va regarder la dedans et y void son nom escrit d'un caractere d'amour, que le seul amour peut
lire et que le seul amour a gravé654. Ah Dieu ! ma chere Fille, les nostres y seront-ilz pas ? Si
seront, sans doute ; car bien que nostre cœur n'a pas l'amour, il a neanmoins le desir de l'amour et
le commencement de l'amour. Et le sacré nom de Jesus n'est-il pas escrit en nos cœurs ? il m'est
advis que rien ne le sçauroit effacer. Il faut donq esperer que le nostre sera escrit reciproquement
en celuy de Dieu. Quel contentement quand nous verrons ces divins caracteres marqués de nostre
bonheur eternel ! [221]
Pour moy, je n'ay rien sceu penser ce matin qu'en cette eternité de biens qui nous attend,
mais en laquelle tout me sembleroit peu ou rien, si ce n'estoit cet amour invariable et tous-jours
actuel de ce grand Dieu qui y regne tous-jours. Mon Dieu, ma chere Mere, que j'admire la
contrarieté qui est en moy, d'avoir des sentimens si purs et des actions si impures ! car vrayement
il m'est advis que le Paradis seroit emmi toutes les peynes d'enfer si l'amour de Dieu y pouvoit
estre, et si le feu d'enfer estoit un feu d'amour, il me semble que ces tourmens seroyent desirables.
Je voyois ce matin tous les contentemens celestes estre un vray rien aupres de ce regnant amour.
Mays d'ou m'arrive-il que je n'ayme pas bien, puisque des maintenant je puis bien aymer ? O ma
Fille, prions, travaillons, humilions-nous, invoquons cet amour sur nous.
Jamais la terre ne vit le jour de l'eternité sur son rond jusques a cette sainte feste, que Nostre
Seigneur, glorifiant son cors, donna, comme je pense, envie aux Anges d'avoir de pareilz cors, a
la beauté desquelz les cieux et le soleil ne sont pas comparables. Ah ! que nos cors sont heureux
d'attendre un jour la participation a tant de gloire, pourveu qu'ilz servent bien a l'esprit en cette vie
mortelle !
FRANÇS, E. de Geneve. [222]
_____
649 Cette lettre semble avoir été écrite une année où les deux Saints SE trouvaient dans la même ville pour la fête de
l'Ascension. Il faut donc exclure 1611, le Bienheureux ayant célébré cette solennité à Gex, et 1613, année de son
voyage à Milan-Turin : reste 1612. A cause de l'appellation de « Mere », qui n'y paraît qu'une fois, la lettre serait
moins bien placée au-delà de 1613.
Malgré l'analogie des idées et la concordance du dernier alinéa avec la pensée générale, ce texte nous paraît
interpolé ; l'avant-dernier alinéa pourrait bien appartenir à une autre lettre. Toutefois, à défaut de preuves certaines,
nous le laissons ici.
650 Matt., VI, 21.
651 Coloss., III, 4.
652 Cf. Is., IX, 19 ; Apoc., XXI, 23.
653 Cf. Is., ult., II, 12.
654 Cf. ibid., LXII, 2 ; Apoc., II, 17.
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16.10 Page 160

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DCCLXXXII. Aux éminentissimes Cardinaux de la Sacrée
Congrégation des Rites 655 (Minute). L'une des opinions maudites
de Calvin. Dévotion des catholiques de Savoie au
bienheureux Amédée. Pourquoi les membres de la Sacrée
Congrégation des Rites doivent faire avancer sa canonisation.
Annecy, 2 juin 1612.
Illustrissimi et Reverendissimi Signori
Mes très vénérés, Illustrissimes et
Padroni miei colendissimi,
Révérendissimes Seigneurs,
Fra le maledette et anathematizate opinioni che
dal nefando Calvino furono insegnate con
maggior vehementia et impudentia nella
misera città di Geneva, una [223] fu il
dispregio de' Santi che con Christo regnano in
Cielo, onde il nome loro cercò con ogni modo
possibile di mettere fuor di memoria, di
profanare le reliquie loro, burlarsi delle loro
intercessioni et bestemmiare contra li loro
meriti et gl'honori che ad essi si devono.
Per questo, come per via di
antiperistasi, nel restante di questa diocesi li
popoli catholici, con fervor particolare, si
essercitano in celebrare et invocare li Santi ; fra
quali li predecessori nostri hebbero
grandissima divotione al Beato Amedeo, Duca
terzo, come dalle honorate immagini sue in
parecchi luoghi si vede, che con le insegne di
L'une des opinions maudites et
réprouvées que l'infâme Calvin enseigna avec
plus d'ardeur et d'impudence dans la
malheureuse cité de Genève, ce fut le mépris
des Saints qui règnent au Ciel avec [223]
Jésus-Christ. Dans ce but, il tâcha par tous les
moyens d'effacer le souvenir de leur nom, de
profaner leurs reliques, de tourner en ridicule
leurs intercessions, de blasphémer contre leurs
mérites et les honneurs qui leur sont dus.
C'est pourquoi, par une sorte de
réaction, les populations catholiques du reste
de ce diocèse s'appliquent avec une ferveur
spéciale à honorer et à invoquer les Saints.
Parmi ceux-ci, le bienheureux Amédée,
troisième duc [de Savoie,] fut de la part de nos
ancêtres l'objet d'une très grande dévotion :
c'est ce qu'attestent ses images, vénérées en
655 La Sacrée Congrégation des Rites a été fondée par Sixte V, qui, dans sa Bulle Immensa æterni Dei, du â8 mars
1588, lui assigna son rôle et délimita ses attributions. Elle a pour but de régler tout ce qui touche au culte divin, et en
particulier de diriger la procédure à suivre dans la canonisation des Saints. (Voir Annuaire pontifical catholique, par
Mgr Albert Battandier, année 1899, p. 421.)
En 1612, la Sacrée Congrégation se composait de treize Cardinaux : François de Joyeuse (voir tome XII, note
(1023), p. 411). François-Marie del Monte, Préfet de la Congrégation dès 1607 jusqu'à sa mort. Sixte V l'avait créé
cardinal-diacre du titre de Sainte-Marie in Dominica, en 1588 ; il occupa successivement les sièges de Preneste et
d'Ostie, et mourut, doyen du Sacré-Collège, le 27 août 1627.
Robert Bellarmin (voir tome XIV, note (1169), p. 405) ; Jean Garsia Millino (voir ibid., note (1188), p. 416).
Pierre-Paul Crescenzio, créé le 11 août 1611, par Paul V, cardinal-prêtre des Saints Nérée et Achillée, après
avoir occupé plusieurs sièges, mourut le 19 février 1645, évêque de Porto.
Jean-Baptiste Leni, cardinal-prêtre du titre de Saint-Sixte (24 novembre 1608), qu'il échangea plus tard contre
celui de Sainte-Cécile. Il était évêque de Ferrare et archiprêtre de Latran, quand il mourut le 3 novembre 1627.
Horace Lancellotti, nommé le 17 août 1611, cardinal-prêtre du titre de Saint-Sauveur, mourut le 9 décembre
1620.
Antoine-Marie Gallo (voir tome XIV, note (778), p. 272). Odoard Farnese, créé cardinal-diacre du titre
de Saint-Eustache, par Grégoire XIV, le 6 mars 1591, mourut le 21 février 1626 ; il était évêque de Frascati.
André Baroni-Peretti, le 5 juin 1596, fut créé cardinal par Clément VIII, et devint successivement, sous
Urbain VIII, évêque de Preneste, d'Albano et de Frascati. Il mourut le 3 août 1629.
Jean-Baptiste Deti, fait cardinal le 3 mars 1598, mourut vers le 14 juillet 1630, évêque d'Ostie et doyen du
Sacré-Collège.
Ferdinand de Gonzague (voir ci-dessus, note (589), p. 202). louis Capponi mourut le 7 avril 1659 ; il avait
été créé cardinal par Paul V, le 24 novembre 1608, et nommé archevêque de Ravenne par Grégoire XV.
(Voir Ciaconius, Hist. Pontif. et Card., 1677, tom. IV.]
160/321

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17.1 Page 161

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santità nelle chiese si vedono. Ma perchè egli
non è canonizato, non se gli fa quell' honor
publico et solenne [che] [224] all'altezza et
verità della santità sua è debito. Et quantunque
in varie occurrentie habbiano molti provato
quanto sia la sua intercessione giovevole a chi,
con vera fede in Dio, alle sue orationi ricorre,
tuttavia altri non ardiscono invocarlo sin tanto
che dalla santa Chiesa vengha annumerato fra
Santi.
Il che vedendo che da tutto il Stato del
Serenissimo Duca di Savoya vien con sommo
affetto desiderato, et massime dalli
Reverendissimi Arcivescovo di Torino656 et
Vescovo di Vercelli657, vengho anch'io, con
tutte le forze dell' animo mio, a supplicare la
Santa Sede Apostolica che si degni far questa
gratia a tutti questi popoli circonvicini658. Et
perchè in queste occasioni Sua Beatitudine non
suole fare cosa veruna senza il consiglio et
assenso della Sacra Congregatione delle
Signorie Vostre Illustrissime et
Reverendissime, per questo vengho anco [225]
a supplicarle che vogliano giovare et favorire
quest'opera tanto pia : opera che agi' inimici de'
Santi farà gran confusione, alli devoti sarà di
gran consolatione, alli Prencipi sveglierà
l'appetito d'imitatione, et a tutta la Chiesa darà
materia di allegrezza et beneditione ; ma in
particolare a questa desolata diocesi nella
quale nacque et fu. allevato quel gran Prencipe,
il quale, secondo il nome suo, fu tanto amato et
amatore d'Iddio.
Che sì come egli con tutto il cuore
magnificò il nome divino, così anco sua divina
Maestà essaltò il suo con tanta multitudine di
veri miracoli, che quando se ne faranno le
informationi, si vederà chiaro che è
providentia d'Iddio che questa canonizatione
sia stata differita sin adesso, acciò che
abondando il dispregio de' Santi fra gli heretici
di questi contorni, molto a proposito si mettrà
inanzi agl' occhi loro questa lampada659 che fu
accesa fra li predecessori loro, nella quale
vedano una vita di mirabile pietà et miracoli di
plusieurs lieux dans les églises avec les
attributs de la sainteté. Mais, parce qu'il n'est
pas canonisé, on ne lui rend pas cet honneur
public et solennel qui est dû à l'éminence et à
la réalité de [224] ses mérites. De fait, en
plusieurs circonstances, un grand nombre de
personnes ont éprouvé l'efficacité de son
intercession en faveur de ceux qui, avec une
vraie confiance en Dieu, recourent à ses prières
; d'autres cependant n'osent l'invoquer tant que
la sainte Eglise ne l'a pas mis au nombre des
Saints.
Aussi, voyant avec quelle ardeur cet
évènement est désiré dans tous les Etats du
sérénissime duc de Savoie, et particulièrement
par les Révérendissimes Archevêque de Turin
et Evêque de Verceil, je viens à mon tour
supplier de toutes les forces de mon âme le
Saint-Siège Apostolique, afin qu'il daigne
accorder cette faveur à tous les peuples
environnants. Or, comme d'ordinaire Sa
Béatitude ne fait rien en de telles occasions
sans l'avis et l'assentiment de la Sacrée
Congrégation de Vos Seigneuries
Illustrissimes et Révérendissimes, [225] je les
supplie également de vouloir bien servir et
favoriser une œuvre de si haute piété. Elle
causera aux ennemis des Saints une grande
confusion, consolera grandement les âmes
dévotes, éveillera dans les princes le désir
d'imitation, enfin elle sera un sujet d'allégresse
et de bénédiction pour toute l'Eglise, mais
surtout pour ce diocèse désolé où naquit et fut
élevé ce grand Prince qui, ainsi que son nom
même l'atteste, fut tant aimé de Dieu et l'aima
si ardemment.
Il exalta de tout son cœur le nom divin,
mais en retour, la divine Majesté a glorifié le
sien, et par une telle multitude de vrais
miracles, qu'on verra clairement, au moment
des informations, que cette canonisation a été
différée jusqu'ici par une providence de Dieu.
Dans ces pays, en effet, les hérétiques ont un
grand mépris pour les Saints ; il est donc fort à
propos de mettre devant leurs yeux cette lampe
656 Mgr Charles Broglia (voir tome XII, note (523), p. 224, et cf. ci-dessus, variante (539), p. 175).
657 Jacques Goria, né à Villafranca d'Asti, précepteur de Maurice de Savoie, fut nommé par le Pape Paul V évêque de
Verceil, le 17 août 1611. Pendant trente-sept ans, ce Prélat administra son Eglise avec autant de courage que de
désintéressement. Il se montra le bienfaiteur des Religieux Feuillants, fit couronner avec grande solennité l'image de
la Bienheureuse Vierge, vénérée dans le sanctuaire du mont d'Oropa, et mourut en 1648. (Voir Ughelli, Italia sacra,
Romæ 1652, tom. IV, col. 1129.)
658 Cf. supra, Epist. DCCLVII.
659 Cf. Eccli., XXVI, 22 ; Matt., V, 15.
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mirabile chiarezza.
qui brilla jadis parmi leurs ancêtres : ils y
Et così, non dubitando punto che le verront une vie d'une piété admirable et des
Signorie Loro Illustrissime et Reverendissime miracles d'une merveilleuse évidence.
habbiano piacere di promovere un' opra tanto
Je ne doute point que Vos Seigneuries
desiderabile, facendole humil [226] riverentia, Illustrissimes et Révérendissimes ne prennent
pregho nostro Signore Iddio che le dia la santa plaisir à faire avancer cette cause si justement
pienezza delle sue gratie.
[226] désirée ; aussi, leur offrant mes humbles
Di Annessi, alli 2 di Giugnio 1612. hommages, je prie Dieu notre Seigneur qu'il
leur donne la sainte plénitude de ses grâces.
D'Annecy, le 2 juin 1612.
_____
DCCLXXXIII. A Dom Pierre de Saint-Bernard de Flottes
Feuillant660. Un grand désir du Saint. Envoi d'un ouvrage.
Les PP. Capucins en Savoie.
Annecy, 10 juin 1612 661.
Certes, mon Reverend Pere, je desire grandement de pouvoir tirer de la presse de mes
inutiles occupations [227] quelque petite besoigne de devotion, qui, en quelque sorte, corresponde
aux augures que vostre charité en fait662 ; mays il est tres vray que je n'ose nullement esperer cela
pour maintenant. Ce que j'ay de plus prest, qui regarde la conduite des ecclesiastiques de ce
diocæse663, je le remettray, Dieu aydant, a ce porteur, non seulement par ce qu'il est mon diocæsain
et quil a des-ja esté employé en semblable occasion, mays par ce aussi que vous le voules, puis
que je suis de tout mon cœur,
Mon Reverend Pere, et tres asseurement,
Vostre tres humble et tres affectionné frere et serviteur,
FRANÇS, E. de. Geneve.
Mon Reverend Pere, je vous escris tout a fait sans loysir et presque sans haleine, ce matin
660 Pierre de Flottes, né à Limoges, mort à Bordeaux le 14 septembre 1666, entra au noviciat de l'Ordre des Feuillants,
à Paris, le 8 septembre 1600, et s'adonna au ministère de la prédication ; bientôt, il y excella. Les principales chaires
de France retentirent de sa parole ; elle « plaisait au plus haut degré, » dit Morotius. Mais dom Pierre de Saint-Bernard
n'avait pas seulement les qualités de l'orateur ; « la sainteté de sa vie et une chaleur vivifiante pénétraient dans les
profondeurs de l'âme et y produisaient des fruits abondants. » Il exerça dans son Institut les charges de provincial, de
prieur et de conseiller du Général. Son grand mérite lui acquit d'illustres amitiés, en particulier celle de François de
Sales. C'est lui qui fit, étant prieur de Lyon, « une tres elegante oraison funebre » de son saint ami, en présence des
Religieuses de la Visitation de Bellecour, dans le service célébré le 30 décembre 1622 1. (Charles-Auguste, Histoire,
etc., liv. X.) A la fin de la « harangue, qui fut moins funebre que panegirique,... chascun, » dit François Favre (Process.
remiss. Gebenn. (II), ad art. 16), « publioit le Serviteur de Dieu sainct. »
1 Dans la même église et l'année suivante, l'orateur prononça une seconde oraison funèbre. Elle parut à Lyon en 1624,
avec une épître dédicatoire à Mgr Jean-François de Sales, sous ce titre : Oraison pour l'anniversaire de feu... Mre
François de Sales... Prononcée le jour des Innocents, 27 (sic) décembre 1623.
661 La date résulte des indications que fournit le texte sur un ouvrage du Saint et sur les fondations des PP. Capucins
en Savoie. (Voir notes (663), (664) de la page suivante.)
662 Serait-ce après avoir lu l'Introduction à la Vie devote que le destinataire aurait fait ces « augures » auxquels saint
François de Sales désire « correspondre » ? Et la « petite besoigne de devotion » ne serait-elle pas le Traitté de l'Amour
de Dieu, auquel il donnait alors ses loisirs ?
663 Le 8 février 1612, l'Evêque de Genève signe la préface, et le 9 mai suivant, à ses prêtres réunis en Synode, il
présente le texte d'un ouvrage qui avait pour titre : Rituale Sacramentorum ad præscriptum Sanctæ Romanæ Ecclesiæ,
jussu Reverendissimi Patris Francisci de Sales, Episcopi et Principis Gebennensis, editum, ad usum Ecclesiæ et
Diæcesis Gebennensis, etc. Lugduni, apud Joannem Charvet, 1612. Manifestement, le Rituale Sacramentorum
regardait « la conduite des ecclesiastiques ; » c'est sans doute un exemplaire de cet ouvrage qui fut communiqué à
dom Pierre de Saint-Bernard.
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17.3 Page 163

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de la Pentecoste. Presque toutes nos chaires sont occupees par les RR. Peres Capucins, qui ont huit
Maysons, la plus part nouvellement fondees664 ; et si, je vous puys dire que, excepté celle de cette
ville, je n'oserois en presenter une [228] a quelque predicateur qui, pour y venir, eut besoin de faire
une journee.
Au R. P. en N. S.
Le Pere Dom Pierre de St Bernard,
Predicateur Feuillentin. A Lion.
Revu sur l'Autographe appartenant à M. Léon Clugnet, à Fresnes-les-Rungis (Seine).
_____
DCCLXXXIV. A Monseigneur Pellegrino Bertacchi Évêque de
Modène665. Renseignements demandés sur un étranger apostat,
en faveur de sa femme convertie.
Annecy, 12 juin 1612.
Illustrissimo et Reverendissimo Signor
Mon très honoré, Illustrissime et
mio osservandissimo,
Révérendissime Seigneur,
Habbiamo qui in questa diocæsi un
certo Crespiliano il quale è da Modena, et un
pezzo fa venne a Genevra dove, fatta
l'abiuratione della santa fede catholica et datosi
in preda all'heresia, fece professione di
philosophia [229] in quella maledetta città666.
Nous avons dans ce diocèse un certain
Crispiliani, originaire de Modène. Venu à
Genève, il y a quelque temps, il y abjura la
sainte foi catholique, et, livré en proie à
l'hérésie, il professa la philosophie [229] dans
cette ville maudite. Ayant ensuite quitté
664 D'après le Nécrologe des FF. Mineurs Capucins, par le P. Eugène de Bellevaux (pp. XIV-XIX), voici la date de
fondation des Maisons qui furent établies dans leur province dite de Savoie, du vivant de saint François de Sales :
Chambéry, 1575-1576 ; Saint-Jean-de-Maurienne, 1580 ; Annecy, 1593 ; Montmélian, 1596 ; Thonon, 1602 ; Saint-
Julien-en-Genevois, 1602 ; Saint-Maurice en Valais, 1603 ; en 1612, les trois couvents de Gex, Moùtiers, Rumilly ;
La Roche, 1617 ; Sallanches, Aoste et Belley, 1619.
En mentionnant les « huit Maysons » des PP. Capucins, le Saint n'a pas voulu parler seulement des couvents
établis dans son diocèse ; car, d'après la liste précédente, on voit que, même après 1619, le territoire ecclésiastique de
Genève ne comptait que sept fondations. Le chiffre donné dans cette lettre s'applique donc à toutes les fondations de
Savoie et se trouve vérifié en 1612.
665 Pellegrino Bertacchi, né en 1567 à Castelnuovo (Garfagnana), dont il fut d'abord archiprêtre, suivit le cardinal
d'Este à Rome, où il séjourna de 1605 à 1608. Elu évêque de Modène en février 1610, il administra son diocèse avec
le zèle d'un vrai pasteur, alla à Madrid en 1614 pour accompagner le même Cardinal et y retourna en 1622, en qualité
d'ambassadeur extraordinaire. Revenu à Modène au mois de septembre, il y mourut le 22 août 1627. La fondation de
la Congrégation de Saint-Charles, l'érection de nouveaux Instituts, la construction de nouvelles églises datent de son
épiscopat. Mgr Bertacchi a laissé des ouvrages qui témoignent de sa sollicitude pour l'instruction et la sanctification
des prêtres et des fidèles. (Cf. Tiraboschi, Biblioteca Modenese, 1781, tome Ier.)
666 Voici en substance ce qu'écrivait Vespasien Aiazza sur ce personnage, dans une lettre adressée de Thonon au Nonce
de Savoie, le 14 avril 1612 (Archives Vaticanes, Savoia, 161) :
Un italien résidant près de Thonon, dans le territoire du roi de France, et se signant M. Crespiniani, se fait
passer pour gentilhomme. Il écrit un livre où il récrimine à la fois contre la religion catholique et la religion prétendue
réformée. A Genève, où il séjourna tout d'abord, son enseignement parut suspect et l'en fit exiler. Il aurait été évêque
et secrétaire de Clément VIII, chose à peine croyable ! Il pourrait plutôt avoir été le sacriste qui dépouilla, dit-on, la
sacristie de Sa Sainteté et s'enfuit. De fait, on prétend que Crespiniani avait apporté dans ces pays des ornements
d'église fort précieux et plusieurs milliers d'écus. Peu de temps après son arrivée à Genève, il épousa la fille d'un
gentilhomme savoyard, expulsé par l'édit de Son Altesse. Aujour-d'hui, celui-ci est converti, tous les siens sont bons
catholiques, et depuis quelques mois, la femme de cet italien a embrassé le catholicisme.
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17.4 Page 164

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Hora, ritiratosi da Geneva nelle terre di questa Genève pour se retirer sur les terres de ce
istessa diocæsi che dipendono di Francia, ha diocèse qui dépendent de la France, il prit, dans
pigliato moglie di casa molto honorata667, la une famille très honorable, une femme
quale era pur haeretica. Et adesso, per gratia également hérétique. Celle-ci, étant
d'Iddio essendo Catholica, è in scrupulo del aujourd'hui devenue catholique par la grâce de
suo matrimonio perché alcuni gli han detto che Dieu, conçoit des scrupules au sujet de son
detto Crespiliano de Crassi era o prete o frate mariage, parce que quelques personnes lui ont
professo. [230]
dit que ce Crispiliani de Crassy avait été prêtre
Per questo vengho a supplicare V. S. ou religieux profès. [230]
Illma et Rma che si degni procurare che si sappia
Je viens donc supplier Votre Seigneurie
la verità di questo dubbio ; il che, a mio parere, Illustrissime et Reverendissime de vouloir bien
sarà cosa facile, ogni minima disquisitione che faire éclaircir ce doute : chose facile, à mon
se ne faccia in quella sua città. Et oltre che V. avis, pour peu qu'on fasse la moindre enquête
S. Illma et Rma usarà in questo carità verso dans sa ville natale. Outre la charité que Votre
questa pover' anima della moglie di detto Seigneurie exercera à l'égard de cette pauvre
Crespiliano, a me darà grand' introduttione di femme dudit Crispiliani, elle me donnera
convertire esso Crespiliano et mi farà una grande ouverture pour convertir celui-ci et
gratia della quale io glie restarò ubligatissimo. m'accordera une faveur dont je lui demeurerai
Et così sperando, bascio le sacre mani très obligé.
a V. S. Illma et Rma et le pregho dal Signor Iddio
Dans cet espoir, je baise les mains
ogni vero contento.
sacrées de Votre Seigneurie Illustrissime et
Di V. S. Illma et Rma,
Révérendissime, et souhaite que Dieu notre
Humile et affettionatissimo servitore, Seigneur lui donne tout vrai contentement.
FRANCO, Vescovo di Genevra.
De Votre Seigneurie Illustrissime et
Di Neci, alli XII di Giugnio 1612.
Révérendissime,
L'humble et très affectionné serviteur,
All' Illmo et Rmo Sigr osservandissimo,
FRANÇOIS, Evêque de Genève.
Monsigr il Vescovo di Modena.
D'Annecy, le 12 juin 1612.
A Modena.
Au très honoré, Illustrissime et
Revu sur l'Autographe conserve à Modène, Révérendissime Seigneur,
Archives capitulaires. [231]
Mgr l'Evêque de Modène.
A Modène. [231]
_____
Aiazza recommande ensuite le secret et ajoute textuellement : « Le beau-père et les beaux-frères de cet italien
sont mes amis, et je n'ai pas besoin de m'en faire des ennemis. » Ces dernières lignes expliquent le ton de réserve sur
lequel sont données les informations précédentes : elles en garantissent aussi la valeur.
667 Marc-Antoine Crispiliani, seigneur de Crassy au pays de Vaud, épousa, par contrat de mariage daté de 1604, où il
est qualifié de « gentilhomme de Modene, » Amblarde Forestier, fille de Claude Forestier, seigneur d'Yvoire (voir
tome XIII, note (521), p. 195), à laquelle il fit un don de mille écus d'or. (Archiv. départ. de la Hte-Savoie, E 59.) Le
25 décembre de la même année, le Conseil de Genève l'accusait d'être espion de l'Inquisition. Il devint, le 16 novembre
1615, propriétaire de la juridiction d'Yvoire, et mourut avant le 29 mars 1626, car dans un acte daté de ce jour, il est
parlé des « hoirs de feu noble Marc Anthoine Crespelani... Ferdinand, Heleine et Marie Crespelani, » ses enfants.
(Archives de la Visitation d'Annecy, Mss. Lagrange.)
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17.5 Page 165

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DCCLXXXV. Au Chanoine aimé rouge, sous-prieur de
Peillonnex668. Renseignements fournis sur un jeune prêtre.
Annecy, 15 juin 1612.
Monsieur le Sousprieur,
Nos messieurs les examinateurs669 ont estimé que nous devions donner courage a M. de
Marteret670, puisqu'il a rendu un grand tesmoignage de vouloir dores-en-avant faire merveilles et
quil est parti avec vostre licence, ainsy que vous tesmoignes par vostre lettre, me le renvoyant
quant au dimissoire.
Je me recommande a vos prieres, et suis
Vostre bien humble tres affectionné confrere,
FRANÇS, E. de Geneve.
XV juin 1612, a Neci.
A Monsr
Monsr le Sousprieur de Pellionnex.
Revu sur l'Autographe conservé à la Visitation de Montélimar. [232]
_____
DCCLXXXVI. A Madame de Cornillon, sa sœur671. Une
prétendante « de fort bonne famille et de tres bonne mine. »
Annecy, 17 juin 1612.
Vive Jesus ! ma tres chere Seur, ma Fille. Je [n'écris que deux mots, car] je suis sans loysir
; mesme que demain il faut que j'aille estre l'aumosnier de nos Seurs de la Visitation pour la
reception d'une fille de Dijon, de fort bonne famille et de tres bonne mine, qui y est arrivee ce
668 Le titre de sous-prieur ou prieur claustral était-donné au supérieur local de la Communauté, sous le régime des
prieurs commendataires. Aimé Rouge était sous-prieur en 1606, quand François de Sales fit la visite canonique du
Monastère ; on le retrouve encore en 1626, dans la même charge. Il paraît avoit succédé à Jean-Louis Dupont, sous-
prieur en 1595. (Cf. Gavard, Peillonnex, 1901, chap. XI, XXIV, Mém. de l'Acad. Salés., tome XXIV.)
669 Le synode du 9 mai 1612 (cf. ci-dessus, note (617), p. 211) avait élu comme examinateurs : Louis de Sales, Etienne
de la Combe, Claude Grandis, Philibert Roget, Nicolas Gottry, Claude-Etienne Nouvellet, Marc-Antoine de Valence,
Janus des Oches, Louis Jacquier, Nicolas Garnier. (R. E.)
670 Jean-François du Martherey sera plus tard destinataire. Ce jeune Religieux dut tenir ses promesses, puisqu'il fut
ordonné sous-diacre le 33 septembre 1612 et prêtre le 22 décembre suivant. (R. E.)
Le manque de ressources ayant empêché de relever les bâtiments du monastère (cf. tome XII, note (555), p.
242), la petite Communauté de Peillonnex dut se disperser et ses membres se ménager un abri dans des cures du
diocèse. C'est dans cette circonstance que Jean-François du Martherey quitta le prieuré, avec RR. de Lagrange, de
Livron, Dagand, Bené et Mulin. Toutefois, cet exode ne les libérait pas de leurs obligations monastiques, puisque le
Saint fut sollicité après Pâques 1615, par les syndics de Bonne, de dispenser de la résidence « Rd messire du Martherey.
» (R. E.)
671 Le ton du billet, le nom de « frere » qu'on lit avant la signature désignent avec une tris grande probabilité la sœur
du Saint.
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17.6 Page 166

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matin avec sa mere672 et asses bien accompaignee. C'est un acquest que M. de Millet673 et mes
filles ont fait en leur voyage674. [233]
Je voudrois, mays je ne puis escrire a M. de la Forest675 sur sa convalescence ; ce sera donq
a la premiere commodité.
Gloire soit au Pere et au Filz et au Saint Esprit, dont nous celebrons la foy aujourd'huy676.
Vostre tres humble frere et serviteur,
FRANÇS, E. de Geneve.
17 juin 1612.
_____
DCCLXXXVII. A Madame Bourgeois, abbesse du Puits-D'Orbe
(Inédite). Condoléances et consolations. Le seul prix de cette
vie mortelle. Pour mourir, tous les moments sont « heureux »
à ceux qui craignent Dieu. L'Abbesse désire faire un voyage
en Savoie ; le Saint ne sait ni le lui conseiller, ni l'en dissuader
Annecy, 18 juin 1612.
Hier bien tard cette bonne dame arriva677, et ce matin elle prend mes lettres. Helas, ma
chere Seur, que j'aurois bien besoin d'un peu plus de loysir pour laysser reprendre mon cœur, tout
fasché de cette nouvelle que je viens de recevoir du trespas de madame nostre chere mere678 !
Mays puisque je ne puis, que vous diray-je, ma tres chere Seur, sinon que voyla comme cette
miserable vie mortelle est incertaine parmi nous, et que nous sommes encor plus miserables qu'elle,
si nous l'estimons pour autre sujet que pour ce qu'elle nous sert de passage [234] a l'eternelle ;
eternelle, ma tres chere Fille, a laquelle nous devons sans cesse aspirer, en laquelle nos proches et
nos amis se treuveront reunis avec nous d'une societé indissoluble.
Mon Dieu, je voy, ce me semble, vostre pauvre cœur fort affligé, car je sçai que vous l'aves
fort sensible en telles occasions. Mays, ma Fille, ayons patience ; bien tost nos jours finiront, et
nous passerons avec les autres, desquelz alhors nous treuverons la separation fort courte.
Certes, si je ne connoissois l'ame de nostre defuncte et que je n'eusse sceu qu'ell' estoit
672 Le 18 juin 1612, la Mère de Chantal écrivait à M. Legros, à Dijon : « Nous avons reçu votre chère fille avec
beaucoup de satisfaction... Demeurez en repos de cette chère petite âme, car elle a trouvé ici un père et une mère
d'affection... Nous avons fait alliance de sœur, la bonne madame Legros et moi. Je la chéris et estime fort, c'est une
brave et généreuse femme. » (Sainte J.-F. Frémyot de Chantal, sa Vie et ses Œuvres ; Lettres, vol. Ior, Paris, Plon,
1877, p. 9.) C'est tout ce que nous savons des parents de la nouvelle aspirante. Son père pourrait être Bernard Legros,
avocat au Parlement, procureur à la Table de Marbre le 12 décembre 1623, et inhumé le 22 novembre 1637 à la
Madeleine. (Palliot, Familles de Bourgogne, tome Ier, fol. 421.)
Sœur Marie-Marthe reçut l'habit le 21 septembre 1612, fit profession le 29 septembre 1613, et accompagna
les Sœurs qui sortirent d'Annecy avec la Sainte, le 22 octobre 1618, pour faire la fondation du monastère de Bourges.
Elle prit part à celle du couvent de Poitiers (6 novembre 1633), et c'est là qu'elle mourut le 25 juin 1651. « L'on voyoit
en elle, en l'âge de soixante cinq ou six ans, avec un corps bien cassé, un esprit fervent qui ne respiroit que Dieu, qui
ne parloit presque que de luy dans les recreations, qui estoit exacte au silence et a l'obeissance comme une novice. »
La Sœur Legros exerça « les charges d'assistante, surveillante, portiere, sacristine et infirmiere avec beaucoup de
charité et de support. » (Archives de la Visitation d'Annecy, Livre du Couvent et Circulaires de Poitiers.)
673 Il n'a pas été possible de découvrir le personnage que le Saint désigne sous ce nom.
674 Le voyage en Bourgogne, que la Mère de Chantal et la Sœur Favre avaient fait l'année précédente. (Voir plus haut,
note (284), p. 98.)
675 Les membres de cette famille étant très nombreux, il est difficile de connaître celui qui est mentionné ici.
676 En 1612, la fête de la sainte Trinité tombait le 17 juin.
677 La « bonne dame » pourrait bien être Mme Legros. (Voir la lettre précédente.)
678 Françoise de Montholon, veuve de Claude Bourgeois de Crépy (voir tome XIII, note (140), p. 35).
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17.7 Page 167

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bonne et craignoit Dieu, j'eusse esté plus estonné de la façon de son trespas679 que de son trespas
mesme, tant j'ayme l'esprit au dessus de tout le reste. Mays une si bonne conscience est tous-jours
asses preste, et ny a rien a craindre pour ceux qui craignent Dieu : tous les momens leur sont
heureux. Je prieray Dieu, selon mon devoir, et pour son repos et pour vostre consolation.
Et sur le sujet de vostre voyage par deça, je ne sçaurois vous le conseiller, pour
l'apprehension que j'ay quil ne vous incommode en vostre foible santé, ni ne sçaurois vous le
dissuader, pour le tres singulier contentement que j'aurois a vous tenir un peu parmi nous, en ces
desertz. Je ne voy point de tems qui ne soit propre, pourveu que le voyage que M. le Grand680 doit
faire a Gex ne me contraigne d'absenter de cette ville681 quand vous series de deça ; et c'est chose
delaquelle je ne me puis rien promettre. Mais necessayrement il faut que je sois icy des le
commencement de septembre'jusques au 20, pour la celebration d'un Jubilé que nous y avons de
sept ans en sept ans682. Vous verres donq le tems que vous aggreeres, et m'en advertires, affin
qu'autant quil [235] me sera possible je m'essaye de disposer mes affaires pour me treuver icy.
Mays pour vostre santé, je vous en laisse la consideration, et a vos medecins de dela683.
Je pensois, mais je ne puis escrire a madame la Prieure nostre chere seur684 ; vous
l'asseureres bien de ma fidelité. En vraye verité, vous n'aves point de cœur qui soit plus vostre que
le mien. Dieu soit a jamais vostre consolation. Amen.
Vostre plus humble, tres fidele frere et serviteur,
FRANÇS, E. de Geneve.
XVIII juin 1612.
Mme de Chantal n'ayant nul loysir, vous bayse les mains de tout son cœur et n'oubliera pas
de rendre le devoir a Mme la chere defuncte.
Que j'escrirois volontier a monsieur d'Origni685 ! mays je suis si pressé du depart de cette
bonne dame, que je suis forcé de vous conjurer que ce soit par vostre entremise que je luy offre
mon humble tres affectionné service.
A Madame
Madame l'Abbesse du Puys d'Orbe.
Revu sur l'Autographe conservé à la Visitation de Nancy.
_____
679 D'après le Voyage littéraire de D. Martène et de D. Durand (tome Ier, Paris, 1717), François de Sales aurait
prophétisé la mort de cette dame. Ce récit est contredit par le texte même du Saint.
680 Le duc de Bellegarde.
681 Ces prévisions se justifièrent ; l'Evêque de Genève se rendit en effet à Gex le 14 juillet suivant. (Cf. ci-dessus, p.
172 et ci-après, p. 254.)
682 Il s'agit des « grands Pardons » de Notre-Dame de Liesse. (Voir tome XIII, note (293), p. 101, et la lettre du 21
septembre 1612 au baron de Villette.)
683 Le voyage de l'Abbesse n'eut pas lieu cette année.
684 Françoise Bourgeois (voir ci-dessus, note (454), p. 151).
685 Guillaume Bourgeois, baron d'Origny, frère de la destinataire. (Voir le tome précédent, note (402), p. 131.)
167/321

17.8 Page 168

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DCCLXXXVIII. Au duc de Savoie, Charles-Emmanuel Ier.
Remerciements pour une grâce obtenue
Annecy, 18 juin 1612.
Monseigneur,
Apres que le sieur Chapperon a eü receu la liberté par la bonté et equité de Vostre
Altesse686, il a voulu [236] aller a ses pieds pour luy en porter le tres humble remerciment quil en
doit. Et moy, Monseigneur, qui ay intercedé pour luy, je l'accompaigne encor en cett' action de
graces, et suppliant Nostre Seigneur quil comble de prosperité Vostre Altesse, je demeuré,
Monseigneur,
Vostre tres humble, tres obeissant et tres fidele orateur et serviteur,
FRANÇS, E. de Geneve.
XVII juin 1612, a Neci.
A Son Altesse Serenissime.
Revu sur l'Autographe appartenant à M. l'abbé Bianchetta, curé de l'Anuonciade, à Turin.
_____
DCCLXXXIX. A Monseigneur Michel d'Esne, Évêque de
Tournai687 (Inédite). L'Introduction à la Vie devote attire à son
auteur les louanges d'un Prélat étranger. Gratitude du Saint.
Son oraison pour Genève. Remerciements pour un envoi
de traductions.
Annecy, 21 juin 1612.
Monseigneur,
Je cheriray des-ormais le pauvre petit livret de l'Introduction a la Vie devote plus
tendrement que je [237] n'ayfait, puis qu'il m'a acquis lhonneur de vostre sainte bienveuillance, et
me sentiray de plus fort obligé au P. Irenee688 qui, le premier, m'a donné la consolation de me le
faire sçavoir. Mays c'est en fin a vostre bonté a laquelle j'en dois le tres humble remerciment, qui
s'est rendue si favorable et a l'œuvre pour l'appreuver, et a l'autheur, pour l'aymer.
Je vous en fay donq tres humblement action de graces, et des bons souhaitz que vous faites
pour mon restablissement dedans ma miserable ville de Geneve, pour laquelle je fay cette courte
686 Vide supra, Epist. DCCLXIII.
687 Michel d'Esne, seigneur de Bétencourt, né en 1540, après avoir suivi la carrière des armes, entra dans les Ordres et
reçut la prêtrise le 5 janvier 1589. Promu le 39 novembre 1597 au siège de Tournai, il l'occupa durant dix-sept années.
Son amour pour la poésie et ses nombreuses occupations littéraires ne l'absorbèrent pas tout entier ; il gouverna son
diocèse avec un zèle éclairé et se fît remarquer par d'intelligentes libéralités en faveur des bibliothèques. Mgr d'Esne
mourut le 1er octobre 1614. (D'après la Biographie nationale, tome VI, Bruxelles, 1878.)
La présente lettre est une réponse ; celle du vénérable Prélat est donnée à l'Appendice.
688 Nous ignorons quel est ce P. Irénée.
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17.9 Page 169

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orayson : 689 Domine, aut convertatur, aut evertatur ; sed, pro tua pietate, potius convertatur quam
evertatur, et « quod nostra peccata præpediunt, indulgentia tuæ propitiationis acceleret690. »
Je garderay pretieusement les traductions qu'il vous a pleu m'envoyer691, non seulement par
ce que ce genre d'escritz m'est fort aggreable, mais par ce que ce me sera un tiltre du bien que j'ay
de participer a vos bonnes graces, lesquelles je vous supplie, Monseigneur, me conserver comm'a
un homme qui les estime et revere autant que nul autre, et lequel, confessant quil ne les a jamais
meritees, espere neanmoins quil ne meritera jamais de les perdre, puisque liberalement elles luy
ont esté concedees.
Dieu multipliera vos ans si mes vœux sont exaucés, et en vos ans, ses celestes benedictions,
et tous-jours vous [238] m'aymeres affectionnement, comme celuy qui est et sera invariablement,
Monseigneur,
Vostre tres humble et tres-obeissant indigne confrere
et tres fidele serviteur en Nostre Seigneur,
FRANÇS, E. de Geneve.
Jour de la Feste Dieu 1612, a Neci.
A Monseigneur
Monseigneur le Rme Evesque de Tournay.
Revu sur l'Autographe appartenant à M. le comte de Nédonchel, à Tournai (Belgique).
_____
DCCXC. A M. Claude Dupanloup, Curé de la Muraz692. Le saint
métal et la dévotion à saint Théodule.
Annecy, 21 juin 1612.
Monsieur le Curé,
Voyla du saint metail que j'envoye pour vos parroissiens, qui, esperans des benefices par
l'intercession de saint Theodule qui l'a beni693, devront tascher d'assister a la Messe qui se celebrera
a son honneur au jour que nous avons marqué de sa feste au Manuel694. Vous feres reposer ledit
metail dans l'eglise jusques a ce qu'il le faille jetter695, ce que vous feres avec la chappe, [ou] au
moins avec le surplis et l'estole. [239]
Je me recommande a vos prieres et de vos parroissiens, et suis
Vostre confrere tres affectionné,
FRANÇS, E. de Geneve.
689 Seigneur, ou qu'elle se convertisse, ou qu'elle soit détruite ; mais, par votre miséricorde, qu'elle se convertisse
plutôt, et « ce que nos péchés retardent, puisse-t-il bientôt s'accomplir par l'indulgence de votre propitiation. »
690 Collect. in Miss. Dom. IV Adventus.
691 La Bibliotheca Belgica, 1re série, tome IX, donne la liste de tous les Ouvrages de Michel d'Esne. On peut citer ses
traductions françaises des Vies de sainte Françoise Romaine, par Penia (1608) ; de sainte Lyduwine, par Brugman
(1609) ; de saint Ignace de Loyola, par Maffei, et de saint François de Borgia, par Ribadeneyra, Ces deux dernières
parurent en 1613.
692 Claude Dupanloup, né à Evires dans les Bornes, de Jean Dupanloup, reçut la tonsure et les Ordres mineurs le 17
décembre 1588, le sous-diaconat le 33 décembre 1589, et fut ordonné prêtre le 19 décembre 1592. Dès le 38 novembre
précédent, il avait été institué curé de La Muraz ; c'est en cette qualité qu'il fit son testament le 9 juin 1621 et signa un
codicille le 30 septembre 1639. (R. E. ; Mss. Lagrange, vol. A, pp. 250-253.)
693 Voir tome XIII, note (759), p. 277.
694 Ce Manuel n'est autre que le Rituale Sacramentorum publié par saint François de Sales cette même année. (Voir
ci-dessus, note (959), p. 338.) La fête de saint Théodule s'y trouve fixée au 16 août.
695 C'est-à-dire, le faire fondre.
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A Neci, le jour Feste Dieu 1612.
Revu sur l'Autographe appartenant à M. le Mis Costa de Beauregard, à Paris.
_____
DCCXCI. A la Mère de Chantal. La rose, symbole des vertus de
saint Jean-Baptiste. Son amour pour la Sainte Vierge et son
Enfant. Deux lis dans une rose
Annecy, [24 juin 1612 696.]
Voyés vous une rose, ma tres chere Fille ? Elle represente le glorieux saint Jean, duquel la
vermeille charité est plus esclattante que la rose, a laquelle encor il ressemble parce que, comme
elle, il a vescu emmi les espines de beaucoup de mortifications.
Mays pensés comme ce grand homme avoit gravé au milieu de son cœur la Sainte Vierge
et son Enfant despuis le jour de la Visitation, auquel il ressentit, le premier des mortelz, combien
la Mere de cet Enfant et l'Enfant de cette Mere estoyent aymables. Hors de cette Mere et de cet
Enfant, rien ne doit occuper le cœur de ma Fille et de son pere. Qu'a jamais ce glorieux et divin
Jesus vive et regne en nos espritz, entre les bras de sa sainte Mere, comme en son throsne
fleurissant !
Et voyla donq, ma tres chere Fille, un bouquet spirituel ou vous voyes deux lys dans une
rose, l'un qui est né dans l'autre, et qui tous deux benissent, de l'odeur de leur suavité et de la
perfection de leur beauté, la [240] rose des cœurs qui, par une parfaitte mortification poignante,
vivent nuds, despouillés et quittes de toute autre chose pour eux. Hé, qui nous fera la grace que
nous savourions bien le miel que cette Mere abeille fait au milieu de cette fleur aymable ?
Bon soir, ma tres chere Mere ; le bon soir a toutes nos Seurs.
FRANÇS, E. de Geneve.
_____
696 Le ton des lettres précédentes sur la fête de saint Jean-Baptiste (voir tome XIV, p. 320, et ci-dessus, p. 74) et la
phrase finale de celle-ci permettent d'indiquer cette date comme approximative.
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DCCXCII. A Messieurs les Chanoines de Saint-Jean de Lyon697
(Minute). Le Saint voudrait bien accepter l'invitation du
Chapitre, mais à cause du silence du duc de Savoie, il se dégage
de sa promesse.
Annecy, 25 juin 1612.
Messieurs,
Je prens a tant d'honneur la recherche quil vous a pleu de faire de mes predications pour
l'Advent et Caresme prochain, que si vostre rang en l'Eglise et le merite de tant de personnages
signalés desquelz vostre compaignie est composee ne m'avoit des-ja obligé a vous honnorer et
respecter, je ne laisserois pas de l'estre extremement par cette favorable semonce que, de vostre
grace, vous m'aves faitte, a laquelle je vous supplie de croire que j'ay fidellement correspondu par
un sincere'desir d'y satisfaire. Et a cet effect, ne pouvant bonnement partir de cette province ou ma
charge me tient lié, sans l'aggreement de [241] Son Altesse, non seulement j'ay fait supplication
pour l'obtenir698, mais ay conjuré un de ceux que je croyois estre plus propre, affin d'en solliciter
l'enterinement.
Or, voyant que jusques a present je n'ay aucune response et que si, par adventure, je la
recevois negative dans quelque tems, la faveur que vous m'aves faitte de me souhaitter seroit suivie
du desplaysir de n'avoir ni mes sermons, ni peut estre ceux des autres predicateurs sur lesquelz, a
mon defaut, vous pourries avoir jetté les yeux, d'autant que ce pendant ilz se pourroyent engager
ailleurs : cela, Messieurs, fait que je vous supplie de ne plus continuer envers moy l'honneur de
vostre attente et de colloquer ce vostre choix699 en quelqu'autre qui ayt plus de liberté que moy
pour l'accepter. Vous ne pourres que beaucoup gaigner au change, si l'on a esgard a la suffisance,
puisqu'en cette partie-la je suis inferieur a tous les predicateurs qui hantent les bonnes villes et
montent es grandes chaires, comme la vostre. Mais quant a l'affection de vous rendre du service et
du contentement, je pense que malaysement eviteries vous de la perte, puisqu'en verité j'ay le cœur
tout plein d'amour et de reverence pour vous, et d'ardeur et de zele pour l'avancement de la vraye
pieté en vostre ville.
Que si, apres ces longueurs qui sont ordinaires es cours, la response de Son Altesse
m'arrivoit selon vostre desir et le mien, et qu'il vous pleust me conserver l'eslection que vous avies
faite de moy pour une autre annee, je vous asseure, Messieurs, que je conserveray de mon costé la
volonté que j'avois prise de suivre la vostre ; volonté que je vous offre des maintenant avec un bien
humble remerciement, pour demeurer toute ma vie,
Messieurs,
Vostre bien humble et tres affectionné confrere
et serviteur en Nostre Seigneur,
FRANÇS, E. de Geneve.
Le 25 juin 1612, a Neci.
_____
697 Le Chapitre métropolitain de Lyon se composait de trente-trois membres. Les dignitaires étaient à cette date : Jean
Mellet de la Besnerie, doyen ; Antoine de Gibertés, archidiacre ; Hector de Crémeaux, précenteur ; Thomas de
Meschatin La Faye, chantre ; Louis de Sacconay, chamarier ; Claude de Salemard de Ressis, sacristain ; Jacques
d'Amanzé, custode ; Guichard de Chantelot, prévôt de Fourvière ; Laurent de Simiane, maître du chœur. (D'apres les
notes de M. E. Beyssac, érudit lyonnais.)
698 Vide supra, Epist. DCCLXXVIII.
699 L'édition de 1626 porte « ceux de vostre choix » ; la leçon adoptée semble devoir être la vraie.
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18.2 Page 172

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DCCXCIII. Au duc de Savoie, Charles-Emmanuel Ier.
Recommandation en faveur d'un gentilhomme offensé qui
demande justice
Annecy, 30 juin 1612.
Monseigneur,
Ce gentilhomme, qui a en ce païs plusieurs alliés dignes de recommandation, recourt a la
justice de Vostre Altesse Serenissime pour tirer rayson d'un homme qui est maintenant a Thurin,
des-ja remarqué pour desloyal700, ainsy qu'on luy a fait entendre. Et bien que la justice ne soit
desniee a personne, si est ce que, si Vostre Altesse le reçoit en sa speciale protection pour ce regard,
il espere qu'il jouira beaucoup plus tost des fruitz qu'il en pretend ; et pour cela, il implore sa bonté,
a quoy j'adjouste ma tres humble intercession, qui suis,
Monseigneur,
Tres humble, tres obeissant et tres fidele orateur et serviteur
de Vostre Altesse Serenissime,
FRANÇS, E. de Geneve.
30 juin 1612, a Neci.
A Son Altesse Serenissime.
Revu sur l'Autographe conservé à Turin, Archives de l'Etat. [243]
_____
DCCXCIV. A Madame de la Fléchère. Les Constitutions de la
Visitation. Messages variés
Annecy, 13 juillet 1612.
Ces quattre motz vous feront grand bien, ma tres chere Fille, pour vous dire que j'ay receu
vostre lettre derniere et que je pars demain de grand matin pour, si je puis, me rendre au giste a
Gex701. Je suis marri que la copie que je vous envoyay des Constitutions de la Visitation est si
incorrecte ; mais je pense que vous entendres bien le sens. Je ne puis monter a Sainte Catherine ;
j'escriray un mot a propos, et vous verres Madame l'Ancienne a Rumilly702, ainsy qu'on m'a dit.
Demeures en paix aupres de Nostre Seigneur, que je supplie vous benir et rendre toute
sienne. Amen.
Ce porteur estant tout mien et l'un des plus vertueux et devotz prestres, je luy ay dit quil
vous donnast en main ce billet.
La chere cousine est a Presle703 des il y a, je pense, dix ou douze jours, et je ne l'avois pas
veu (sic) dix ou douze jours au paravant, de sorte quil y a long tems que je ne l'ay pas veüe ; mays
700 Les noms de l'offenseur et du gentilhomme offensé n'ont pu être retrouvés.
701 Le Saint partit en effet le lendemain pour le pays de Gex, où il devait prendre possession de plusieurs églises. (Cf.
ci-dessus, pp. 172, 235.)
702 Jéronyme de Maillard, qui avait gouverné l'abbaye de Sainte-Catherine. (Cf. plus haut, p. 211.) Le rendez-vous de
Rumilly était sans doute chez sa mère, devenue la belle-sœur de Mme de la Fléchère depuis qu'elle avait épousé en
secondes noces Charles de la Forest.
703 Mme de Charmoisy, car il s'agit d'elle, avait maison et vignobles à Presle, hameau de Menthon-Saint-Bernard, non
loin du lac d'Annecy.
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18.3 Page 173

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elle se porte pourtant [bien] et est tous-jours fort desireuse de s'avancer au service de Nostre
Seigneur.
Madame de Chantal vous salue tres cordialement, estant un peu enbesoignee pour faire
accommoder la [244] nouvelle mayson704. Je m'en vay tantost luy dire a Dieu, et je vous le dis
aussi, suppliant sa divine Bonté que de plus en plus elle vous face abonder en ses graces. Amen.
Vive Jesus !
Au cher mari mille salutations, et autant de benedictions a ma petite filleule705.
XIII julliet 1612.
Madame
Madame de la Flechere.
Revu sur l'Autographe appartenant à Mgr Nunès, Archevêque d'Evora (Portugal).
_____
DCCXCV. Au Père Nicolas Polliens, de la Compagnie de
Jésus706 (Inédite). Une bonne fille qui ne pourra pas être si tôt
consolée. « Le livret » que prépare le Saint.
Gex, 17 juillet 1612.
Mon Reverend Pere,
J'affectionne extremement de donner satisfaction a la bonne fille pour laquelle vous
m'escrives ; son oncle, et [245] sur tout vostre tesmoignage m'y oblige707. La petitesse, neanmoins,
du logis et l'incommodité des Filles de la Visitation ne permettront pas encor sitost qu'elle soit
consolee. Faites moy ce bien, mon Reverend Pere, de m'escrire en quelz termes nous en
demeurasmes a Chamberi, par ce que n'en ayant pas distincte memoire, selon mon imbecillité, je
n'en puis pas si bien parler a ces Dames quil seroit requis.
Je travaille apres le livret que vous souhaites708, et seres des premiers a qui j'en dedieray
une copie, si jamais Dieu me le fait voir au jour.
Je suis, plus que vous ne sçauries croire,
Mon Reverend Pere,
Vostre plus humble confrere et serviteur,
FRANÇS, E. de Geneve.
XVII julliet 1612.
Revu sur l'Autographe conservé à la Visitation de Montélimar.
704 Le nombre des Religieuses augmentant tous les jours, la maison de la Galerie se trouva trop petite ; il fallut donc
chercher un logement plus vaste et qui facilitât aussi davantage la visite des malades. Le 14 juin 1612, les Fondateurs
achetèrent de M. Philippe Nicollin, avocat au Conseil de Genevois, une maison « toute joignante aux murailles de la
ville, vers la halle et sur le port du lac. » (Charles-Auguste, Histoire, etc., liv. VIII ; cf. ci-dessus, note (643), p. 219.)
La femme de l'avocat, Nicoline Baltazar, étant propriétaire de l'immeuble, figure dans l'acte de quittance comme
ratifiant la vente « pour le pris de dix mil cinq centz florins, monoye de Savoye, trois ducattons d'espingles et une
piece d'estamine pour faire une robbe a elle predicte damoyselle Baptessard. » (Archives de la Visitation d'Annecy.)
705 Françoise-Innocente (voir le tome précédent, note (167), p. 56).
706 Les lettres qui sont adressées à ce Religieux dans les deux tomes précédents sont écrites sur le même ton d'amitié,
et le désignent ici comme destinataire avec une très grande vraisemblance.
707 Cette « bonne fille » serait-elle Mlle Bellot, que nous trouverons à la Visitation en janvier 1613 ? Dans ce cas,
l'oncle pourrait être M. Boursier, dont il sera parlé plus loin.
708 Le Traitté de l'Amour de Dieu.
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18.4 Page 174

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_____
DCCXCVI. A Madame de Travernay709. Ce qui donnait à
François de Sales « un particulier contentement. » Pourquoi
et comment les tracas sont utiles au progrès spirituel. Un
sentiment qui rend légers tous les déplaisirs.
Du pays de Gex, 20 juillet 1612.
Madame,
Sçachés que j'ay un particulier contentement, quand je reçois de vos lettres, de voir que,
parmi beaucoup [246] d'empeschemens et de contradictions, vous conserves la volonté de servir
Nostre Seigneur ; car c'est la verité que si vous estes bien fidele entre ces traverses, vous en aures
d'autant plus de consolations que les difficultés que vous aves auront esté grandes. Je pense en
vous quand moins vous le pensés, et vous voy avec un cœur de compassion, sçachant bien combien
vous aves de rencontres en ce tracas parmi lequel vous vivés, qui vous peuvent divertir de la sainte
attention que vous desires avoir a Dieu. Pour cela, je ne veux point cesser de recommander a sa
divine Bonté vostre necessité ; mays je ne veux pas aussi laisser de vous conjurer de la rendre utile
a vostre avancement spirituel.
Nous n'avons point de recompense sans victoire, ni point de victoire sans guerre. Prenés donq bien
courage, et convertissés vostre peyne, qui est sans remede, en matiere de vertu. Voyés souvent
Nostre Seigneur qui vous regarde, pauvre petite creature que vous estes, et vous voit emmi vos
travaux et vos distractions ; il vous envoye du secours et benit vos afflictions. Vous deves, a cette
consideration, prendre patiemment et doucement les ennuis qui vous arrivent, pour l'amour de
Celuy qui ne permet cet exercice vous arriver que pour vostre bien.
Eslevés donq souvent vostre cœur a Dieu, requerés son ayde, et faites vostre principal
fondement de consolation au bonheur que vous aves d'estre sienne. Tous les objetz de desplaysir
vous seront peu de chose, quand vous sçaurés d'avoir un tel Amy, un si grand support et un si
excellent refuge.
Dieu soit tous-jours au milieu de vostre cœur, Madame ma tres chere Fille, et je suis de
tout le mien,
Vostre humble et tres affectionné compere et serviteur,
FRANÇS, E. de Geneve.
Le 20 julliet 1612. [247]
_____
709 L'appellation de « Madame », qui permet d'éliminer Mme de la Fiéchère, le titre de « compere » à la signature et le
rapport de cette lettre à celles adressées précédemment à Mmc de Travernay semblent désigner cette dernière comme
la destinataire la plus probable.
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18.5 Page 175

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DCCXCVII. A l'Archiduc d'Autriche, Albert VII710. Supplique
en faveur de l'établissement d'un monastère à Saint-Claude.
Le sort ordinaire de ceux qui recherchent l'intimité de Dieu.
Comment les âmes qui prient servent leur pays et leur époque.
Gex, 29 juillet711 1612.
Cum hoc tempus æstivum,
Augustissime Princeps, in recensendis rebus
ecclesiasticis hujus regionis Gayanæ
impenderem, ecce a finitimo oppido Sancti
Claudii, vineæ [248] quædam parvulæ, ut
antea suavissimum pietatis odorem712, ita nunc
amarum mentis suæ dolorem dederunt.
Aliquot enim illius loci virgines
devotissimæ, cum summopere cuperent
religiosum vitæ genus aggredi, viderentque se
tam longe a monasteriis mulierum abesse, ut
vix possent sperare se expetitis Sponsi cælestis
nuptiis aliquando potituras, de monasterio ibi
construendo cogitare cœperunt. Cumque res,
bonis omnibus grata, jamjam initium habitura
videretur, repente ab hominibus venit turbatio.
Solemne namque est omnibus regnum et
gloriam Dei paulo pressius quærentibus,
pericula in mari, pericula in terra, sed maxime
a falsis fratribus713, hoc est, a vulpibus parvulis
quæ demoliuntur vineas714, experiri. Ergo,
Serenissime Princeps, congregatio illa
virginum, quamvis Institutum Ecclesiæ judicio
probatum et in Burgundia jampridem
incœptum colere vellet, multis tamen
contradicentibus hujus sæculi filiis715, qui et
Très auguste Prince,
Pendant cette saison d'été, je passais en
revue les affaires religieuses de ce pays de
Gex, lorsque, de la ville voisine de Saint-
Claude, quelques petites vignes, qui
auparavant répandaient une [248] odeur de
piété très suave, ont exhalé soudain l'amère
douleur de leur âme.
Ce sont quelques jeunes filles de cette
cité, très dévotes et très désireuses d'entrer en
Religion ; mais voyant qu'elles étaient si loin
des monastères de femmes, qu'à peine
pourraient-elles jamais jouir des noces tant
désirées du céleste Epoux, elles ont pensé à
bâtir un monastère en ce lieu. La chose, agréée
de tous les gens de bien, allait, semble-t-il,
prendre commencement ; mais tout à coup, elle
a été dérangée par les hommes. C'est d'ailleurs
le sort ordinaire de ceux qui cherchent d'un peu
plus près le royaume et la gloire de Dieu,
d'avoir à subir des traverses sur mer et des
traverses sur terre, et surtout de la part des faux
frères, c'est-à-dire des renardeaux qui
détruisent les vignes. Oui, Serenissime Prince,
cette association de jeunes filles, quoiqu'elle
710 Albert VII (1559-1621), archiduc d'Autriche, prince des Pays-Bas, sixième fils de l'empereur Maximilien II, se
destina d'abord à l'état ecclésiastique et reçut en 1577, du Pape Grégoire XIII, le chapeau de cardinal. Plus tard,
renonçant à la pourpre, il épousa (1598) Isabelle-Claire-Eugénie, fille de Philippe II, roi d'Espagne. L'archiduc avait
une grande estimé pour l'Evêque de Genève, dont il eut l'occasion d'admirer les vertus. (Voir le tome précédent, note
(626), p. 215.)
711 Chez les premiers éditeurs, la traduction seule est ainsi datée : « De Gex, le 29 juin 1617. » Charles-Auguste place
cette pièce parmi les faits de 1612 ; Hérissant et les éditeurs suivants lui assignent cette dernière date, mais en retenant
le quantième du 29 juin. Des auteurs plus récents la datent du 29 juillet 1617 ; on a proposé encore 1611 et 1613.
Or, du texte même, il ressort que la lettre a été écrite à Gex, au cours de l'été, durant un séjour d'au moins
quelques semaines, parmi les occupations d'un recensement religieux du pays, et en faveur d'une Congrégation à
tendances contemplatives, laquelle n'existait encore qu'en projet. Ces particularités permettent d'exclure les dates
indiquées ci-dessus. En 1611, le voyage du Saint n'eut lieu qu'au mois de mai ; en 1613 (22-30 juillet), il ne dura que
huit jours à peine, et encore fut-il coupé d'un pèlerinage à Saint-Claude. En 1617, le futur établissement des
Annonciades était loin de ses débuts (voir note (992), p. 350). La date que nous proposons concilie à la fois ce que
nous savons des origines du monastère et du voyage que fit l'Evêque de Genève à Gex, du 14 au 31 juillet 1612. (Cf.
ci-après, Lettre DCCXCIX.)
712 Cf. Cant., II, 13.
713 II Cor., XII, 26.
714 Cant., II, 15.
715 Luc., XVI, 8, XX, 34.
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interdum, per horrendam astutiam, pietatem
pietatis prætextu evellunt, nulla ratione
hucusque negotium illud sacrum conficere
valuit. [249]
Verum, in tanta difficultate, etsi
plerique
simplicissimis
virginibus
desperationem injicerent, non potuerunt
nihilominus illæ non recte sperare, dum
videlicet in Celsitudinis Vestræ summam
pietatem oculos mentis conjiciunt, arbitrate
sane merito se ab ea facile præsidium
impetrare posse, quo omnia impedimenta
dispellantur. Et quia sexui et virginitati pudor
natura individuus comes est, non sunt ausse
[ad] pedes Celsitudinis Vestræ, nisi aliquo
sacerdote duce, accedere ; unde me, tanquam
ex Antistitibus viciniorem, rogaverunt, ut eas
earumque sanctum desiderium eidem piissimæ
Celsitudini Vestræ per litteras
commendarem716. [250]
Quod dum impensissimis precibus
facio, non certe propterea me velle ambulare in
magnis717 existimare quisquam debet : ideo
namque ambulo confidenter, quia ambulo
simpliciter718, confisus nimirum preces meas a
plerisque magnæ erga Vestram Celsitudinem
auctoritatis intercessoribus auxilium
accepturas. Postulabit enim mecum idipsum
quod expeto, innata Vestræ Celsitudinis
benignitas, infusa religio, parta devotio, ac
denique horum temporum miseranda conditio,
quae ea est ut preces plurimas, ac proinde
precatores multos requirat. Quare, novum hoc
mysticum examen apum, orationis mellificium
meditantium, eo gratius Celsitudini Vestræ
futurum duxi, quo locupletiorem et utiliorem
huic ætati operam navare constituit.
Vive porro, Celsissime et Serenissime
Princeps, vive quam diutissime, quam
désirât prendre un Institut approuvé par
l'Eglise et depuis longtemps établi en
Bourgogne, a rencontré bien des
contradicteurs parmi les enfants de ce siècle
qui bien souvent, par une effroyable malice,
renversent la piété au nom de la piété même ;
et ainsi, cette œuvre si sainte n'a pu
aucunement se faire. [249]
Dans un tel embarras, plusieurs ont
essayé d'enlever tout espoir à des âmes si
simples ; toutefois, celles-ci ont repris
confiance, et non sans raison, lorsque jetant les
yeux sur l'éminente piété de Votre Altesse,
elles ont pensé à bon titre en obtenir sans peine
le secours qui écarterait tous les obstacles.
Mais parce que la pudeur est la compagne
inséparable de ce sexe et de la virginité, elles
n'ont pas eu la hardiesse de se présenter à vos
pieds sans être introduites par quelque prêtre.
Aussi m'ont-elles prié, comme étant l'Evêque
le plus voisin, de recommander par lettres à
Votre très dévote Altesse, et leurs personnes et
leur religieux désir. [250]
Je le fais avec de très instantes prières,
mais on ne doit pas croire pour cela que je
veuille marcher en grandeur : si je marche
avec assurance, c'est que je marche avec
simplicité, bien persuadé que ma requête sera
appuyée par plusieurs intercesseurs très
influents auprès de Votre Altesse. Je trouverai
en effet pour m'aider à plaider ma cause, la
douceur qui est naturelle à Votre Altesse,
l'esprit de piété qui lui a été départi, la dévotion
qu'elle a acquise et enfin la malheureuse
condition de notre temps, qui exige bien des
prières, et partant beaucoup d'âmes qui prient.
C'est pourquoi, ce nouvel essaim d'abeilles
mystiques qui se préparent à composer le miel
de l'oraison, sera, je crois, d'autant plus
716 En 1609, la ville de Saint-Claude fut ébranlée par un mouvement de piété extraordinaire ; beaucoup d'âmes d'élite,
éprises de vie intérieure, gagnèrent le cloître. D'autres, à qui la clôture mitigée de la Galerie d'Annecy avait paru trop
douce, furent d'avis d'ériger un monastère à Saint-Claude même, sur les conseils du P. de Bonivard et du P. François
de Bugey, Capucin. (Cf. ci-dessus, note (267), p. 91.) Il s'agissait de fonder une nouvelle ruche « d'abeilles mystiques
; » les amis du Saint encourageaient l'entreprise, Prospère de Boisset, sa parente1, en était l'âme : en fallait-il davantage
pour lui concilier les sympathies de François de Sales ? De là, cette requête. Malgré toutes sortes d'oppositions, la
petite troupe obtint les lettres-patentes de l'archiduc le 27 juin 1617, l'autorisation de l'Ordinaire le 27 décembre 1618
et le 29 septembre 1620 le monastère fut inauguré par la vêture de quatorze postulantes. C'était la huitième maison
des Religieuses Annonciades célestes, fondées à Gênes en 1604 par la bienheureuse Victoire Fornari-Strata et le P.
Bernardin Zannoni, S. J, L'Institut se répandit rapidement en plusieurs pays et compta bientôt de célèbres monastères,
à Paris, Saint-Denis, Lyon. Celui de Langres, établi en 1623 par Mgr Zamet, est aujourd'hui encore le dépositaire des
traditions de l'Ordre pour la France. (D'après les Annales des Religieuses Annonciades de Langres.)
1 Elle était fille de Guillaume de Boisset et de Jeanne de Beaufort, de Savoie.
717 Ps. CXXX, 1, 2.
718 Prov., X, 9.
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felicissime ac sanctissime, ac sacrarum harum agréable à Votre Altesse, qu'elle a résolu de
virginum humillimarum faventibus oculis s'employer avec plus de générosité et de profit
aspice, excipe, perfice votum, quod humillime au service de notre époque.
exposuit Serenissimæ Celsitudini Vestræ…
Vivez, très grand et Sérénissime
[251]
Prince, d'une très longue, très heureuse et très
sainte vie, et, d'un œil favorable, regardez,
agréez, comblez le vœu de ces très humbles
pieuses filles, comme l'a très humblement
exposé à Votre Altesse… [251]
_____
DCCXCVIII. A la Mère de Chantal. Un bonjour du « grand
saint Pierre. » La délivrance des liens spirituels. «
Mignardise d'amour » de Notre-Seigneur. La marque de
l'amour fidèle. Il faut mourir ou aimer. « Une jolie pensee.
» Les jeunes apprentis et les vieux maîtres en l'amour de
Dieu. Où tendait l'amitié mutuelle qui unissait l'ime du Saint
et celle de la Mère de Chantal
Annecy, 1er août 1612 719.
Nostre grand saint Pierre, resveillé de son sommeil par l'Ange, vous donne le bon jour, ma
tres chere Mere. Combien de douceurs en l'histoire de cette delivrance720 ! car son ame en est
tellement saysie qu'il ne sçait s'il songe ou s'il ne songe pas. Que puisse nostre Ange toucher ce
jourdhuy nostre flanc, nous donner le resveil de l'attention amoureuse a Dieu, nous delivrer de tous
les liens de l'amour propre et nous consacrer a jamais a ce celeste amour, affin que nous puissions
dire : Maintenant je sçai, certes, que Dieu a envoyé son Ange et m'a delivré.
Helas ! qu'il fut heureux, nostre cher saint Pierre, car ce fut par mignardise d'amour que
Nostre Seigneur luy demanda si souvent : Pierre, m'aymes-tu721 ? Non point qu'il en doutast, mais
pour le grand playsir qu'il prend a nous souvent ouÿr dire et redire et protester que nous l'aymons.
Ma chere Mere, aymons-nous pas le doux Sauveur ? Ah ! il sçait bien que si nous ne l'aymons,
pour le moins desirons-nous de l'aymer. Or si nous l'aymons, paissons ses brebis et ses aigneaux722
: c'est la, la marque de l'amour fidele.
Mays dequoy faut-il repaistre ces cheres brebiettes ? [252] De l'amour mesme, car, ou elles
ne vivent pas, ou elles vivent d'amour : entre leur mort et l'amour, il n'y a point d'entredeux. Il faut
mourir ou aymer, car qui n'ayme, dit saint Jean723, il demeure en la mort.
Mais sçaves vous une jolie pensee ? Nostre Seigneur va dire a son cher saint Pierre : Quand
tu estois jeune, tu mettois ta ceinture et allois ou tu voulois ; mais quand tu seras viel, tu estendras
ta main, et un autre te ceindra et te menera ou tu ne veux pas724. Les jeunes apprentifz en l'amour
719 La date de 1611 serait contredite par le titre de « Mere » donné tout au long du texte à la destinataire ; la présence
des deux Saints à Annecy exclut 1613 et 1615, car ces deux années-là, au mois d'août, la Mère de Chantal était absente
de Savoie. Reste la date que nous proposons sous toutes réserves et sans prétendre écarter absolument 1614.
720 Act., XII, 3-11.
721 Joan., ult., 15-17. Cf. Tr. de l'Am. de Dieu, l. VI, ch. XIV (tom. IV, p. 353).
722 Ubi supra.
723 I Ep., III, 14.
724 Joan., ult., 18.
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de Dieu se ceignent eux mesmes : ilz prennent les mortifications que bon leur semble, ilz
choisissent leur penitence, resignation et devotion et font leur propre volonté parmi celle de Dieu
; mais les vieux maistres au mestier se laissent lier et ceindre par autruy et se sousmettent au joug
qu'on leur impose, et vont par lès chemins qu'ilz ne voudroyent pas selon leur inclination. Il est
vray qu'ilz tendent la main ; car, malgré la resistance de leurs inclinations, ilz se laissent gouverner
volontairement contre leur volonté, et disent qu'il vaut mieux obeir que faire des offrandes725 : et
voyla comm'ilz glorifient Dieu, crucifiant non seulement leur chair726, mais leur esprit.
Vrayement hier, tandis que l'on chantoit l'Invitatoire et qu'on disoit : « Vive le Roy des
Apostres ! Venes et adorés le727, » j'eus un si doux et amiable sentiment que rien plus, et soudain
je desirois qu'il s'espanchast sur tout nostre cœur.
O Dieu ! nostre Sauveur nous soit a jamais toute chose. Tenes le cœur en haut, dans le sein
amoureux de la divine Bonté et Providence, car c'est le lieu de son repos728. C'est luy qui m'a rendu
tout vostre, et vous toute mienne, affin que nous fussions plus purement, parfaitement et
uniquement siens. Ainsy soit il. [253]
_____
DCCXCIX. Au Marquis de Lans. Rentré à Annecy, l'Evêque de
Genève rend compte de ses négociations dans le pays de Gex.
Eloge d'un commissaire. Sentiments des Genevois
Annecy, 2 août 1612.
Monsieur,
Ayant esté remis en la possession de toutes les eglises de Gex729 qui estoyent occupees par
les ministres730, hormis de celles que ceux de Geneve detiennent731, pour le regard desquelles j'ay
esté renvoyé au Conseil du Roy de France, je suis revenu a mon ordinaire residence, en laquelle je
vous salue tres humblement et vous supplie me conserver lhonneur de vostre bienveuillance.
Le commissayre deputé pour me mettre en ladite possession est un simple conseiller de la
cour de Parlement de Digeon732, qui vint luy troysiesme ; et neanmoins, s'est fort bien sceu
fair'obeir, non obstant toutes les allegations et repugnances des heretiques. Ceux de Geneve ont
esté estonnés et marri (sic) qu'on ayt mis en compromis la restitution des biens quilz tiennent dans
la souveraineté de France, et n'ont pas manqué d'avancer que Son Altesse les traittoit mieux pour
ce regard.
Rien autre ne s'est passé qui soit digne de vous estre representé ; c'est pourquoy, priant
725 I Reg., XV, 22 ; Eccles., IV, ult.
726 Galat., V, 24.
727 Dans le bréviaire de l'ancien diocèse de Genève, le répons de l'Invitatoire pour les Matines des Apôtres était :
Regem Apostolorum * Adoremus Dominum. (Voir Lafrasse, Etude sur la Liturgie dans l'anc. dioc. de Genève., 1903-
1904, chap. V, Mém. de l'Acad. Salés., tome XXVII, p. 110.)
728 Ps. CXXXI, 14.
729 Cf. supra, p. 172.
730 Le Procès-verbal de Gex (Ms. cité plus haut, note (398), p. 130) donne les noms suivants : « David du Piotey,
Jacques Clerc, Jacques Gautier, Pierre Prevost, Jean Périer, Pierre de Préaux, Andoche Perreau, Abraham du Pan,
Jean-Baptiste Chalon, Jean Juppe. »
731 On lit dans le même Procès-verbal, sous la date du 28 juillet 1612 : « N'avons (les commissaires de Sa Majesté,
MM. Milletot et de Brosses) visité les églises de Moins, Satiny (Satigny), Avouilly (Avully), Ressins (Russin) et
Malve (Malvai), attandu les pretentions de la Seigneurye de Geneve sur lesdicts lieux, sur lesquels nous avons cy
devant ordonné que ledict sieur Evesque se pourvoiroit par devers Sa Majesté et nosdicts seigneurs de son Conseil. »
Voilà quels étaient les biens en litige.
732 Bénigne Milletot (voir ci-dessus, note (50), p, 5).
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Nostre Seigneur quil [254] vous face de plus en plus abonder en sa grace, je me nommeray en
toute verité,
Monsieur,
Tres humble et tres affectionné serviteur de Vostre Excellence,
FRANÇS, E. de Geneve.
2 aoust 1612, a Neci.
A Son Excellence.
A Chamberi.
Revu sur l'Autographe conservé à Turin, Archives de l'Etat.
_____
DCCC. A la Reine Mère, Marie de Médicis (Minute).
Remerciements à la reine régente et souhaits pour son fils et
pour elle, en retour de son intervention pour le rétablissement du
culte à Gex
Annecy, commencement d'août 1612 733.
Apres avoir rendu graces a Dieu du restablissement de son Eglise es lieus et biens ci devant
occupés et detenus par les ministres de la religion prætendue, au balliage de Gex,734 j'en remercie
tres humblement Vostre Majesté, de la royale providence et pieté delaquelle ce bonheur nous est
arrivé735. [255]
Dieu eternel veuill'a jamais establir la royauté du Roy vostre filz, puysque vous aves si
grand soin du restablissement de celle de son Filz, Roy des roys736 ; Dieu remplisse vostre royale
personne de ses benedictions, puisque, par l'authorité quil vous a donnee, vous faites benir son
saint nom en tant d'endroitz esquelz il estoit prophané.
Ce sont les continuelz souhaitz que, par un' immortelle obligation, fait et fera tous-jours,
Madame,
Vostre tres humble et tres obeissant orateur et serviteur,
FRANÇS, Evesque de Geneve.
Revu sur l'Autographe conservé à la Visitation du Mans.
_____
733 Le 13 décembre 1611, l'Evêque de Genève écrivait au marquis de Lans : « J'espere que dans bien peu de moys on
me remettra tout le reste » des églises et des biens ecclésiastiques. (Voir ci-dessus, p. 130.) Au même, il écrit dans la
lettre précédente : « Ayant esté remis en la possession de toutes les eglises de Gex, » etc. De ces lignes et de l'objet de
la présente lettre, se déduit la date de celle-ci. Il semble, en effet, que le Saint a dû l'écrire après son retour de Gex (31
juillet).
734 de Gex, [qui anciennement estoyent destinés pour l'exercice de la foy catholique,]
735 Cf. supra, p. 172.
736 I Tim., ult., 15 ; Apoc., XVII, 14, XIX, 16.
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DCCCI. A un gentilhomme. La mort d'une fille spirituelle du
Saint, âme « belle et devote »
Annecy, 7 août 1612 737.
Monsieur,
Je viens d'apprendre par M. le medecin Grandis738 le douloureux mais bienheureux trespas
de madame vostre chere espouse. Certes, mon cœur en a esté autant vivement touché que de perte
que j'aye faite il y a long tems ; car la bonté, la pieté et la vertu que j'avois veuës en cette belle ame
m'avoyent tellement rendu obligé a l'honnorer, que des-ormais j'en faysois une profession [257]
solemnelle. Qu'elle est heureuse, cette chere dame, d'avoir, parmi tant de douleurs et de travaux,
conservé la fidelité qu'elle devoit a son Dieu, et que ce m'a esté de consolation d'avoir sceu une
partie des paroles de charité que son esprit a lancees, avec ses derniers souspirs, dans le sein de la
misericorde divine !
Mays, Monsieur, n'auray je pas une immortelle obligation a la faveur qu'elle me faysoit,
puisqu'en cette extremité de sa vie mortelle, elle a si souvent tesmoigné qu'elle avoit memoire de
moy, comme de celuy qu'elle sçavoit luy estre tout dedié en Nostre Seigneur ? Jamais cette
souvenance ne sortira de mon ame, et ne pouvant luy offrir le service tres fidele que j'avois juré a
sa vertu et devotion, je vous conjure, Monsieur, de l'accepter et recevoir avec celuy que l'honneur
de vostre bienveuillance avoit des-ja acquis sur mes affections. Et cependant, en cette occasion,
employés la grandeur de vostre courage pour moderer la grandeur du desplaysir que la grandeur
de vostre perte vous aura donné. Acquiesçons, Monsieur, aux decretz de la Providence souveraine,
decretz qui sont tous-jours justes739, tous-jours saintz, tous-jours adorables, bien qu'impenetrables
et obscurs a nostre connoissance.
Cette belle et devote ame est decedee en un estat de conscience auquel si Dieu nous fait la
grace de mourir, nous serons trop heureux de mourir en quelque tems que ce soit. Aggreons cette
grace que Dieu luy a faitte, et ayons doucement patience pour ce peu de tems que nous avons a
vivre icy bas sans elle, puisque nous avons esperance de demeurer avec elle eternellement au Ciel,
en une societé indissoluble et invariable.
Monsieur, je respandray toute ma vie des benedictions sur madame vostre chere defuncte,
et seray invariablement
Vostre plus humble, tres affectionné et fidele serviteur,
FRANÇS, E. de Geneve.
D'Annessi, ce 7 aoust 1612.
_____
737 La lettre est ainsi datée en 1641, par le premier éditeur ; il n'a pas été suivi par les autres, qui ont changé 1612 en
1621. Jusqu'à preuve du contraire, nous croyons qu'il faut maintenir la première date.
Le destinataire avait peu de temps à vivre, il habitait la Savoie très probablement ; sa femme était dirigée par
François de Sales qui l'estimait beaucoup pour ses vertus : c'est tout ce que nous en savons.
738 Voir ci-dessus, note (90), p. 20.
739 Cf. Ps. CXVIII, 137.
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19 Pages 181-190

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19.1 Page 181

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DCCCII. A la Mère de Chantal. L'aube du jour éternel.
Souhaits pour la petite Congrégation. Un sentiment fort
particulier qu'éprouve le Saint la veille de l'Assomption. La
divine Fruitière. En descendant de chaire
Annecy, 15 août 1612 740.
Hé, que belle est cette Aube du jour eternel, laquelle montant devers le Ciel, va, ce semble,
de plus en plus croissant es benedictions de son incomparable gloire741 ! Qu'a jamais les odeurs
d'eternelle suavité742 esparses sur les cœurs de ses devotz, remplissent celuy de ma tres chere Mere
comme mon cœur propre, et que nostre chere petite Congregation, toute voüee a la louange de son
Filz et des mammelles sacrees qui l'ont alaité743, jouisse des benedictions preparees aux ames qui
l'honnorent.
Hier au soir, j'eus un sentiment fort particulier du bien que l'on a d'estre enfant, quoy
qu'indigne, de cette glorieuse Mere, Estoile de mer, belle comme la lune, esleuë comme le soleil744.
O mon Dieu ! ma tres chere Mere, j'ay eü une speciale consolation de voir comme elle donna une
belle robe d'une blancheur nompareille a son serviteur saint Hildephonse, Evesque de Tolede745 ;
car, pourquoy n'en donnera-elle pas une a nostre cher cœur ? Voyes-vous, je retourne tous-jours a
mes brebis.
Entreprenons des grandes choses sous la faveur de cette Mere, car si nous sommes un peu
tendres en son amour, elle n'a garde de nous laisser sans l'effect que nous pretendons. O Dieu
quand je me resouviens qu'aux Cantiques746, elle dit : Entourés moy de pommes, je [258] voudrois
volontier luy donner nostre cœur ; car, quelle autre pomme peut desirer de moy cette belle Fruitiere
?
Je viens du sermon, ou je voudrois bien avoir plus saintement et amoureusement parlé de
nostre glorieuse et sacree Maistresse ; je la supplie qu'elle me veuille pardonner. Dieu nous face la
grace de nous voir un jour consommés au divin amour. Ce pendant, bon jour, ma tres chere Mere.
Le 15 aoust, jour de la glorification de nostre tres honnoree Maistresse, qui soit a jamais
nostre amour.
FRANÇS, E. de Geneve.
_____
740 L'édition de 1626 donne ce texte sans date ; Blaise (1833) lui assigne celle de 1612, mais sans preuves. On peut la
retenir comme assez probable, à cause de l'allusion à « la chere petite Congregation. » (Voir aussi plan du sermon
pour la fête de l'Assomption 1612, tome VIII, p. 103.)
741 Cf. Cant., VI, 9.
742 Cf. ibid., III, 5.
743 Orat. post divin. Offic.
744 Cant., VI, 9.
745 Vide Matut. in festo S. Ildefonsi, IIo Noct., Lectio V.
746 Cap. II, 5.
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19.2 Page 182

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DCCCIII. A M. Antoine des Hayes. Par « humeur », le Saint
aime la discrétion. Service demandé en faveur du Chapitre de
Genève. Phénomènes célestes
Annecy, 31 août 1612.
Monsieur,
Il faut que l'asseurance que j'ay de vostre bienveuillance soit infiniment asseuree, puisque
a tous propos et avec tant de liberté, je prens la confiance de vous supplier pour les affaires
ecclesiastiques que maintenant il me faut avoir de dela ; car, certes, de mon humeur, j'ayme la
modestie.
Or, voyla une requeste pour obtenir une revision en faveur du Chapitre de mon Eglise747.
C'est un' affaire, comme je pense, ordinaire et que je ne vous devrois pas donner la peyne de faire
; mays vostre amitié en mon endroit est si universelle, que volontier elle me favorise en toutes
occurrences, grandes et petites. Aussi puis-je [259] jurer que mon affection pour vous est si
absolue, generale et invariable, que vous n'en aures jamais de plus entiere de personne du monde.
Je vous escris sans loysir, a cause du soudain despart de ceux qui portent ce pacquet a Lion.
Aussi n'ay-je rien de nouveau des la derniere lettre que je vous escrivis, sinon que nous avons veu
en cette ville plusieurs colomnes enflammees sur Geneve, et la veille de l'Assomption, entre midi
et un'heure, en un jour fort clair, un'estoile asses proche du soleil, aussi brillante et resplendissante
qu'est la bell'estoile en une nuit bien seraine748.
Je suis, Monsieur,
Vostre tres humble fidele serviteur,
et de madame vostre chere espouse,
FRANÇS E. de Geneve.
31 aoust 1612.
A Monsieur
Monsieur des Hayes, Maistre d'hostel du Roy,
Gouverneur et Baillif de Montargis.
Revu sur l'Autographe conservé au 1er Monastère de la Visitation de Rouen. [260]
_____
747 Il nous est difficile de savoir si cette requête avait pour objet d'obtenir une remise de dîmes, ou la restitution de
biens ecclésiastiques détenus par les Genevois.
748 D'après les indications obligeantes de M. G. Bigourdan, de l'Observatoire de Paris, ces « colomnes » peuvent avoir
été « produites par une aurore boréale. La situation de Genève, au nord d'Annecy, confirmerait cette explication. Le
sècond phénomène, l'apparition d'une étoile en plein jour, pourrait s'expliquer par une visibilité extraordinaire de
Vénus, qui, assez souvent, est visible à l'œil nu en plein jour. »
182/321

19.3 Page 183

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DCCCIV. A la Mère de Chantal. Avis charitable
Annecy, [1611-septembre 1612 749.]
Ma chere Fille,
Je vous advertis que madamoyselle d'Escrilles est de la mesme parentee que M. de
Corselles750, affin que vous ne luy disies pas ce que nous dismes de la bisayeule. Mais Dieu la
benie, la bonne madamoyselle d'Escrilles, et je prie sa Majesté qu'elle vous benisse aussi
infiniment.
Revu sur une copie déclarée authentique, conservée à Turin, Archives de l'Etat. [261]
_____
DCCCV. A Madame de Genève, abbesse de Baume-Les-
Dames751 (Inédite). Offre conditionnelle d'une postulante, fille de
Gallois de Sales. Ce qui rebutait quelquefois les prétendantes
à la Visitation. Portrait de la nièce du Saint.
Annecy, 19 septembre 1612.
Madame ma tres chere Mere,
Je fus certes en peyne de vostre chemin d'icy a La Roche752, voyant que [le] tems s'aigrissoit
un peu ; et Dieu soit loué dequoy vous l'aves passé asses heureusement. Vostre conseil a esté tres
bon d'envoyer prendre le carosse, et ce pendant donner la consolation de vostre veüe a madame la
Comtesse vostre seur753. [262]
749 Marie de Mouxy, veuve de Louis de la Touvière, seigneur d'Escrilles, avait passé quelques jours à la Visitation en
septembre, comme on peut le conjecturer par la lettre du Saint, 13 octobre 1612. Ce billet a dû être écrit
vraisemblablement pendant le séjour de la retraitante ; toutefois, voir la note ci-dessous.
750 Probablement Ferdinand de Prez, seigneur de Corcelles ; par sa mère, Antoine de Saint-Jeoire, il était cousin-
germain de Mme d'Escrilles, et leur bisaïeule commune était Jeanne de Compey, femme de Louis de Saint-Jeoire. La
conversion à la foi du seigneur de Corcelles avait suivi de près celle du baron d'Avully, dont il fut le témoin (1596) ;
aussi, au dire de son frère Jean-Gaspard, jouit-il d'une « grande conversation et familiarité avec le Bienheureux. »
(Process. remiss. Gebenn. (I), ad art. 29.) Il avait épousé Jeanne-Béatrix de Thomassin, veuve avant le 25 septembre
1612 ; cette particularité fait osciller la date de ces lignes entre les deux dates extrêmes que nous indiquons.
751 Marguerite de Genève, que la famille de Sales traitait avec tant de déférence et de considération, était fille de Guy
de Genève, chevalier, seigneur de la Bâtie, baron de Lullin, et de Catherine de Ray. Religieuse en 1576 à Baume-les-
Dames, elle gouverna cette Maison de 1583 à 1618 (cf. tome XIII, note (313), p. 110). C'est pour condescendre à ses
désirs, que François de Sales, lorsqu'il vint à Baume (voir le tome précédent, p. 230), « bailla de tres-saincts advis
pour la discipline reguliere aux Religieuses » du monastère, et l'Abbesse, ajoute Charles-Auguste (Histoire, etc., liv.
VII), « comm'elle estoit d'un tres-bon jugement et d'une grande pieté, tira depuis de luy par lettres plusieurs preceptes
de la vraye devotion et Religion. » Elle en « receut des grandes consolations spirituelles, et cecy je le sçay pour avoir
faict tenir les lettres a l'un et a l'autre. » (Déposition de Jean-Gaspard de Prez, Process. remiss. Gebenn. (I), ad art.
42.)
752 L'Abbesse était probablement venue en Savoie pour « les grands Pardons » d'Annecy (cf. ci-dessus, p. 235, et ci-
après, note (759), p. 265). Pour retourner à Baume, elle prit la route de Genève, et dut se détourner de son chemin,
une fois à La Roche, pour visiter sa sœur (voir la note suivante) qui habitait dans les environs.
753 Sans doute, Péronne de Genève-Lullin, veuve, avant juillet 1602, de François de Montvuagnard, connu sous le nom
de M. de Pierrecharve. Le contrat dotal de ce premier mariage est du 29 septembre 1588. Elle avait épousé en secondes
noces (contrat dotal du 26 janvier 1604) Claude-François Pobel, « conseillier d'Estat de Son Altesse, baron de Pierre,
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J'ay veu despuis vostre depart Mme de Chantal, qui vous honnore d'un honneur fort
particulier et desire que tous-jours je vous supplie de la tenir en vostre bonne grace ; ce que je fay
de tout mon cœur.
Au demeurant, soudain apres vostre despart, mes freres754 entrerent en un'ambition
d'obtenir une place de Religieuse en vostre Monastere pour un'unique niece, fille de nostr'aysné755,
que nous avons ; et m'a fallu leur promettre que je vous en supplierois, de cette grace. C'est
pourquoy je le fay, avec la reserve de vostre bon playsir, pour le tems et pour toutes autres
conditions, et encor pour la chose mesme, laquelle je ne veux vouloir qu'a mesure que cela se
pourra faire sans vostre incommodité, vostre contentement m'estant plus cher que tout l'honneur
qui pourroit arriver a ma niece, laquelle, pour ne rien celer a ma tres chere et tres honnoree Mere,
je m'essayeray de gaigner pour la Visitation756 ; mais par ce que les humilités quil y faut exercer
rebuttent quelquefois les filles, si je ne puis la tourner de ce costé la, j'imploreray encor de plus
fort vostre faveur. La fille est bien jolie et d'asses bon esprit, et fille d'une mere que je puis nommer
sainte, et damoyselle de bon lieu757.
J'eusse bien voulu que je vous eusse fait la supplication [263] a bouche et en presence, car
je vous eusse encor mieux tesmoigné combien je desire qu'elle ne soit respondüe sinon avec toute
consideration de la commodité ou incommodité qu'il y peut avoir, vous asseurant que je n'ay
null'affection a cela sinon entant que vous le jugeres a propos et le treuveres bon, et que vous
pouves user de ma volonté en ceci et en tout'autre occurrence a vostre gré, librement et
franchement, comme doit et peut faire une mere envers
Son tres humble filz et tres fidele serviteur,
FRANÇS, E. de Geneve.
19 septembre 1612.
A Madame
Madame l'Abbesse de Baume.
Revu sur l'Autographe appartenant à Mme de la Garde, à Besançon.
_____
» comte de Saint-Alban (Archiv. de la Visitation d'Annecy, Collection J. Vuÿ), frère de l'Evêque de Saint-Paul-Trois-
Châteaux, Thomas Pobel, l'un des consécrateurs du Saint. (Cf. tome XI, note (785), p. 356.)
754 Janus et Louis étaient à Annecy pour les « grands Pardons. » (Voir à l'Appendice II.)
755 François de Sales, quand il embrassa l'état ecclésiastique, céda son droit d'aînesse et ses titres à son frère puîné,
Gallois (cf. tom. XI, note (61), p. 12). Dès lors, celui-ci devint seigneur de Villaroget, et plus tard, seigneur de Boisy
et de Groisy ; il signe « Gallois de Sales de Boisy, » dans une pièce datée du 14 novembre 1608.
756 Françoise-Marie, fille de Gallois de Sales et filleule du Saint, reçut en effet de ses mains le voile de la Visitation le
24 mai 1616 et prononça ses vœux le 29 septembre de l'année suivante. Cette « unique niece, » qui avait pris à sa
vêture le nom de Sœur Jeanne-Françoise, donna bien du souci aux Fondateurs. A la suite d'une grande chute qu'elle
fit quelque temps après sa profession, son esprit se troubla, mais « non pas tant, » écrivait le Bienheureux en février
1620, qu'elle fût « excusable en ses fautes. » Dieu permit que cette humiliation prit fin avant sa mort (16 août 1671) ;
elle laissa, avec le souvenir d'un « naturel tres debonere et tandre pour le prochain, » l'espoir « que la Sainte Vierge, a
laquelle elle estoit tres devotte, » l'avait « conduite dans le sein de Dieu. » (Livre du Couvent, du 1er Monastère de la
Visitation d'Annecy.)
757 Jeanne, fille de Jean du Fresnoy-Martin, seigneur de Chuyt, et de Françoise de Vozerier ; elle fut inhumée à Annecy,
le février 1623. (Reg. par.) Le comte Louis de Sales est loué d'avoir su « conduire l'esprit » de cette belle-sœur, « assez
difficile à contenter, quoy qu'elle fût d'ailleurs tres-vertueuse. » (De Hauteville, La Maison naturelle de St Fr. de Sales,
Paris, 1669, Partie II.)
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DCCCVI. Au Baron Amédée de Villette. Le regard des princes
et les rayons du soleil. « Petite harengue » présentée à une
Abbesse. Une cousine du Saint lui dit « son petit cas » :
pourquoi elle ne songeait pas à la Visitation
Annecy, 21 septembre 1612.
Monsieur mon Oncle,
Je vous remercie tres humblement, quoy que plus tard que je ne devois, de la faveur de
vostre lettre, que monsieur de Gie, mon cousin758, m'apporta entre cette [264] infinie multitude
d'occupations que nos grans Pardons me donnerent759.
Je ne doutois point que Son Altesse ne vous regardast comme les grans Princes ont
accoustumé de voir leurs grans fideles serviteurs. Dieu veuille que ses mains vous soyent aussi
liberales que ses yeux760 ! Il seroit bien raysonnable que, comme les Princes s'estiment les soleilz
de ce bas monde, ilz rendissent les rayons de leurs regars effectifz, ainsy que ceux du soleil le sont
sur la terre.
Nous avons eu la bonne Madame de Baume761, que mon cousin saluâ, et luy fit une petite
harengue sur le sujet de sa maistresse762, qu'elle aggrea extremement ; et me dit que si elle luy
pouvoit rendre quelque sorte de bon office en ses amours, elle le feroit de tout son cœur,
m'asseurant que cette damoyselle dont il est question estoit une perle en bon naturel, en
bonn'humeur et en vertu : qui me fait d'autant plus louer le choix que vous en aves fait pour la
consolation de vostre viellesse future, et voudrois bien pouvoir contribuer quelque service a ce
dessein, comm'aussi a tous les autres qui regarderont vostre contentement.
Et a ce propos, hier ma chere petite cousine763 me [265] vint voir, qui m'expliqua son
intention pour le regard de la vocation religieuse, et me dit son petit cas si honnestement et
gentilment, que j'en demeuray fort edifié et consolé. Ce fut qu'elle desireroit bien d'avoir la volonté
d'estre Religieuse a la Visitation, mays qu'elle ne pouvoit s'y resoudre, par ce qu'elle ne pouvoit se
ranger a une si grande perfection et ne luy estoit pas advis qu'elle la puisse entreprendre. Mays par
ce qu'elle me dit qu'elle vous en avoit escrit fort amplement, je ne vous diray point le reste de nos
discours, desquelz la conclusion fut qu'elle me prioit de vous faire aggreer de la supporter en son
imperfection. Je croy bien que la pauvre petite ne pense nullement au mariage et qu'elle
s'accommoderoit a une autre sorte de vie, pourveu qu'on n'observast pas une regie si absolue comm'
on fait a la Visitation. Certes, je la treuve si bonne fille, que je ne puis m'empescher d'esperer que,
758 Le Saint désigne ici le fils du destinataire, Gaspard de Chevron, baron et seigneur de Villette, de Giez, de Pontvoyre,
etc., conseiller et chambellan de Son Altesse. Par contrat dotal du 9 mars 1613, il épousa le 11 avril suivant, Claire-
Marguerite de Challant (Archiv. de Giez), et mourut le 6 mars 1646.
759 Le Registre des Délibérations municipales d'Annecy, si sobre d'ordinaire dans ses procès-verbaux, raconte avec
des détails aussi intéressants que précis les grandes solennités septénaires (voir tome XIII, note (293), p. 101) que
François de Sales présida pour la deuxième fois en 1612. On trouvera un extrait de ce récit à l'Appendice II ; par la
seule relation des cérémonies d'ouverture, qui se firent le jeudi 6 septembre, vigile des « Pardons », il est facile de se
représenter les occupations du saint Evêque pendant ces fêtes.
760 Voir lettre du 11 octobre au même.
761 Marguerite de Genève, abbesse de Baume-les-Dames (voir ci-dessus, note (752), p. 262).
762 Très probablement Claire-Marguerite de Challant (voir note (758) de la page précédente), fille de Georges de
Challant, gouverneur et lieutenant-général du duché d'Aoste, et d'Adrienne Costa de la Trinité. Elle sera destinataire
en 1613.
763 Quatre filles du baron de Villette nous sont connues : Adrienne, Clarisse à Annecy (voir tome XIII, p. 344) ;
Charlotte, qui épousa Amédée de Bertrand, seigneur de Chamousset ; Antoinette-Philiberte, Religieuse de l'abbaye de
Château-Chalon (cf. ibid., note (340), p. 117) ; Louise, « morte fille, » d'après une ancienne généalogie (Archiv. de
Giez). Cette dernière serait vraisemblablement la « chere petite cousine ; » elle dut faire un séjour à la Galerie, mais
elle n'y reçut jamais l'habit de la Visitation. (Voiries Lettres DCCCXII, DCCCXIII.)
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19.6 Page 186

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de quel costé que se tourne, elle ne vous donne de la satisfaction.
Pour moy, priant Nostre Seigneur qu'il vous conserve a longues annees pour les vostres et
pour moy, qui suis le plus humble, je demeure,
Monsieur mon Oncle,
Vostre tres affectionné fidele serviteur et neveu,
FRANÇS, E. de Geneve.
21 septembre 1612, a Neci.
A Monsieur
Monsieur le Baron de Vilette,
Conseiller d'Estat et Maistre d'hostel de S. A.
Revu sur l'Autographe conservé à la Visitation d'Annecy. [266]
_____
DCCCVII. A M. Claude de Blonay. Le voyage de Milan n'est
plus désespéré. Un Saint qui a soin de ses dévots. Plan du
voyage ; compagnon à retenir
Annecy, 25 septembre 1612.
Monsieur,
Je desesperois du voyage de Milan764, par ce que je n'estimois pas avoir les finances
requises ; mays voyci que tout a coup, il m'arrive un'inopinee esperance d'avoir plus de moyens
quil ne m'en faut, pourveu que je ne parte pas de troys semaines. N'est ce pas le saint Archevesque
que nous voulons aller reverer, qui a soin de ses devotz ?
Mays l'importance est de sçavoir qu'est ce qu'en dira monsieur nostre Abbé765, qui doit
estre nostre Raphael en cette peregrination. Je vous supplie de l'apprendre de luy, car sil treuve
quil soit a propos, nous arriverions pour la feste du Saint et serons de retour pour les Advens. Et
advertisses moy, je vous prie, au plus tost, car sil faut aller, nous irons ; que sil est jugé plus a
propos, nous retarderons jusques au primtems766.
Voyla le sujet que j'ay de vous escrire sans loysir, vous asseurant que si monsieur Carrel767
n'est parti, il [267] recevra la commission desiree, car monsieur de la Roche768 m'en fit donner
advis des avanthier au soir.
Vostre plus humble tres affectionné confrere,
FRANÇS, E. de Geneve,
25 septembre 1612.
A Monsieur
764 Ce pèlerinage ne se fit qu'au printemps de 1613 (cf. ci-dessus, note (517), p. 171). Les particularités en seront
notées au cours des lettres de cette année-là.
765 Vespasien Aiazza, abbé d'Abondance (voir tome XIII, note (165), p. 48).
766 Voir note (764).
767 Noble Laurent Carrel, d'abord secrétaire, puis maître auditeur à la Chambre des Comptes de Savoie en 1598, exerça
cette charge jusqu'en avril 1615. Il avait épousé, à la mort de Jeanne Bara, Suzanne Mercier.
Dans la Correspondance du Président Favre (Mugnier, tome III, publié par la Société savoisienne, etc.,
1906), figure en 1617, avec le titre de « maistre des Postes, » un autre personnage du nom de Carrel, qu'on peut,
semble-t-il, identifier avec « monsieur le maistre Carrel » mentionné par le Saint le 11 octobre 1612 (voir ci-après, p.
277). Mais il est assez difficile de décider s'il s'agit dans la présente lettre, du maître auditeur ou du maître des Postes.
768 Probablement Jean Joly, seigneur de la Roche d'Alery (voir tome XIII, note (977), p. 364).
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Monsieur de Blonnay, Curé de Siez.
Revu sur l'Autographe conservé au château de Marin (Chablais), Archives de Blonay.
_____
DCCCVIII. A Madame de Travernay769. Comment accommoder
les prières avec beaucoup d'occupations du matin jusqu'au soir.
Les oraisons jaculatoires. — Les afflictions du cœur. —
Quelles sont les âmes que Dieu aime.
Annecy, 29 septembre 1612.
Madame ma tres chere Fille,
Vous sçaures par cette si digne porteuse770 parmi quelle multitude de tracas je vous escris
; qui me servira d'excuse si je ne vous parle pas si amplement comme je desirois.
Vous deves mesurer la longueur de vos prieres a la quantité de vos affaires ; et puis qu'il a
pleu a Nostre Seigneur de vous mettre en une sorte de vie en laquelle vous aves perpetuellement
des distractions, il faut que [268] vous vous accoustumies a faire vos oraysons courtes, mays
qu'aussi vous les vous rendies si ordinaires, que jamais vous ne les layssies sans grande necessité.
Je voudrois que le matin, au lever, vous pliassiés les genoux devant Dieu pour l'adorer,
faire le signe de la Croix et luy demander sa benediction pour toute la journee ; ce qui se peut faire
au tems que l'on diroit un ou deux Pater noster. Si vous aves la Messe, il suffira qu'avec attention
et reverence vous l'escouties, ainsy qu'il est marqué dans l’Introduction771, en disant vostre
Chappelet. Le soir, avant souper ou environ, vous pourries aysement faire un peu de prieres
ferventes, vous jettant devant Nostre Seigneur autant comme on diroit un Pater ; car il n'y a point
d'occasion qui vous tienne si sujette, que vous ne puissiés desrober ce petit bout de loysir. Le soir,
avant qu'aller coucher, vous pourrés, faysant autres choses, en quel lieu que ce soit, faire la reveuë
de ce que vous aurés fait parmi la journee, de gros en gros, et, allant au lict, vous jetter briefvement
a genoux, demander pardon a Dieu des fautes que vous aures commises, et le prier de veiller sur
vous et vous donner sa benediction : ce que vous pourrés faire courtement, comme pour un Ave
Maria. Mais sur tout je desire qu'a tous propos, parmi la journee, vous retiriés vostre cœur en Dieu,
luy disant quelques courtes paroles de fidelité et d'amour.
Quant aux afflictions de vostre cœur, ma chere Fille, vous discerneres aysement celles
auxquelles il y a du remede et celles esquelles il n'y en a point. Ou il y a du remede, il faut tascher
de l'apporter doucement et paysiblement ; celles ou il n'y en a point, il faut que vous les supportiés
comme une mortification que Nostre Seigneur vous envoye pour vous exercer et rendre toute
sienne.
Prenés garde a ne vous relascher gueres aux plaintes, ains contraignés vostre cœur de
souffrir tranquillement. Que s'il vous arrive quelque sorte de saillie d'impatience, soudain que vous
vous en appercevres, remettés vostre cœur en la paix et douceur. Croyés-moy, ma chere Fille,
[269] Dieu ayme les ames qui sont agitees des flotz et tempestes du monde, pourveu qu'elles
reçoivent de sa main le travail et, comme vaillantes guerrieres, s'essayent de garder la fidelité emmi
les assautz et combatz. Si je puis, je diray quelque chose sur ce sujet a cette chere seur tant
769 On trouve ici le même ton, les mêmes conseils et aussi presque la même signature caractéristique des autres lettres
écrites à Mme de Travernay ; il semble donc que la présente lettre s'adresse à cette dame.
770 Anne de Clermont-Mont-Saint-Jean, propre sœur de la destinataire (voir tome XIV, note (958), p. 334), ou plus
probablement Mme d'Escrilles, sa belle-sœur, qui était à Annecy à cette date (voir ci-après, lettre du 13 octobre).
771 Partie II, ch. XIV.
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aymable772, affin qu'elle vous le redie ; et je m'en vay pour l'accommodement d'une querelle
chaude, qu'il faut empescher.
Je suis, mais d'un cœur fort entier, Madame,
Vostre humble et tres affectionné compere et serviteur,
FRANÇS, E. de Geneve.
Ce 29 septembre 1612.
_____
DCCCIX. A la Mère de Chantal. Une âme à consoler
Annecy, [1611-octobre 1612 773.]
Cette bonne femme desire un peu de consolation ; vous la pourres faire monter a vous, ma
tres chere Mere, que je verray aujourdhuy, si je puis.
Revu sur une copie déclarée authentique, conservée à Turin, Archives de l'Etat. [270]
_____
DCCCX. A M. Antoine des Hayes. Une amitié à l'abri de toute
défiance. Pourquoi, dans l'intention de prêcher à Saint-
Benoit, le Saint préparait « un cœur tout nouveau, » après dix
ans de ministère épiscopal. Opposition résolue du duc de
Savoie anx prédications de François de Sales à Paris,
Perplexités d'un évêque
Annecy, 5 octobre 1612 774.
Monsieur,
Je pense que vous ne douterés jamais de mon affection a l'accomplissement de vos volontés
et desirs, car l'excellente amitié delaquelle vous m'honnorés est arrivee jusques a ce point de
perfection, qu'ell'est exempte de toute desfiance et de tout doute. Mays en l'occasion d'aller en
nostre chaire de Saint Benoist775, ce n'est pas vous, Monsieur, seulement qui n'en deves pas douter,
c'est tous ceux qui s'entendent tant soit peu en mes inclinations.
Dieu sçait bien que je præparois un cœur tout nouveau, plus grand, ce me semble, que le
mien ordinaire, pour aller-lâ prononcer ses saintes et divines paroles : premierement, pour, en une
772 Sans doute la « digne porteuse » mentionnée plus haut (voir note (770), p. 268).
773 Quand le Saint annonçait cette visiteuse à la Mère de Chantal, celle-ci devait habiter encore la Galerie et la clôture
n'existait pas ; ce qui permet de dater approximativement ces lignes.
774 Quoique douteuse sur l'Autographe, cette date est amplement confirmée par l'allusion que fait le Saint à ses
prédications de 1602 et par l'objet même de la lettre. Le 2 juin 1612, des Hayes écrit à M. de Charmoisy que MM. de
Saint-Benoit désiraient Mgr de Genève pour « estre enseignez de luy le Karesme prochain. » (Voir la lettre, qui est
intéressante, à l'Appendice II.)
775 L'église de la paroisse Saint-Benoit occupait l'angle S. O. de la rue actuelle des Ecoles ; elle a été fermée en 1813
et démolie en 1854. Un Chapitre de chanoines la desservait depuis le XIe siècle, par l'intermédiaire d'un de ses
membres, appelé vicaire perpétuel. Au temps de la Ligue, l'un de ses plus fougueux prédicateurs, Jean Boucher, portait
ce titre. François de Sales avait prêché à Saint-Benoit en 1602. Dix ans plus tard, ses auditeurs, d'après des Hayes
(lettre citée), « bien memoratifz du fruict » de ses prédications, désiraient vivement le revoir.
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si belle et dign'occasion, rendre de la gloire a sa divine Majesté ; puis, pour donner du contentement
a celuy qui m'y appelloit avec [271] tant de cœur et de courage. Et si, je me promettois, par un
certain exces d'amour a ce dessein, que preschant maintenant un peu plus meurement, solidement
et, pour le dire tout en un mot entre nous, un peu plus apostoliquement que je ne faysois il y a dix
ans, vous eussies aymé mes prædications, non seulement pour ma consideration, mais pour elles
mesmes.
Or, voyci a quoy je me treuve a present : Son Altesse a esconduyt la Reyne, ainsy que
monsieur de Roascieu776 vous aura dit, et un ami que j'ay en court m'advertit que rien ne proffitera
en ce sujet, auquel Son Altesse est resoluë de ne se laisser point plier. J'avois presque resolu de
passer jusques a Thurin pour voir si je pourrois, par declarations de mes intentions bonnes et
franches, esbransler son esprit. Mays voyci que de toutes pars on m'asseure qu'elle vient dans peu
de jours avec Monseigneur le Prince a Chamberi777, et nostre monsieur le premier President Favre
estime que sadite Altesse me retient de deça pour m'y treuver a sa venue : de sorte que me voyla
en perplexité, car si le Pape mesme me commandoit d'aller, et Son Altesse, estant de deça, me
retenoit avec promesses que le Pape n'auroit pas des-agreable, je serois bien en peyne, comme
vous pouves penser. Et quant a l'expedient du proces que j'ay au Conseil privé778, il m'est advis,
sauf le vostre meilleur, quil seroit extremement pressant et sujet a estre soupçonné d'affectation de
mon costé et a donner de l'avantage a mes parties.
Monsieur de Charmoysi qui, apres moy, desiroit le plus mon voyage, est en peyne comme
treuver une bonne sortie de ces considerations. Certes, si Son Altesse ne venoit point, l'authorité
du Pape seroit toute [272] puissante779, car j'employeroys son commandement sans prendre congé
que par lettres ; mais Son Altesse estant icy, j'aurois peyne a me desmesler des repliques qui me
seroyent faites et ne croys pas que je le puisse. Ce pendant, le tems court et nous va mettre dans
peu de semaynes a la veille du Caresme ; si que il sera meshuy malaysé de treuver un prædicateur
sortable a vostre chaire.
Il faut confesser la verité, j'ay un'extreme passion en cet'occurrence, et ne sçais bonnement
me resoudre sinon a ce point, que tout ce que vous me dires je le feray de tres bon cœur, quoy qu'il
en doive arriver ; et de plus, que si jamais je vay a Paris faire le Caresme, ce ne sera que pour
vostre seule consideration, soit que vous ayes la charge de l'eglise ou que vous ne l'ayes pas.
Je vous asseure, Monsieur, que je vous escris sans sçavoir presque que je fay, tant il me
fasche de ne pouvoir pas, avec entiere liberté, vous dire : Je vay. Vous m'excuseres donques, sil
vous plait, en mon stile, et croyres qu'avec un cœur invariable et immortel, je suis et seray
Monsieur,
Vostre tres humble et tres fidele serviteur,
FRANÇS,. E. de Geneve.
V octobre 1612, a Neci.
Monsieur des Hayes,
Maistre d'hostel du Roy, Gouverneur
776 Sans doute, Jean-Jacques de Mesme, deuxième du nom, seigneur de Roascieu, ou Roasci, Royssi, conseiller d'Etat
en 1600, appelé au Conseil de la direction des Finances et à celui des Dépêches en 1613. C'était le fils unique de Henri
de Mesme et de Jeanne Hennequin. Il mourut le 31 octobre 1642 et laissa plusieurs enfants, entre autres le célèbre
comte d'Avaux. (Voir Moreri, 1740.)
777 Dans les répertoires chronologiques de cette époque, on ne trouve aucune mention de ce voyage des deux princes
en Savoie ; il n'eut donc pas lieu.
778 Voir lettre du 2 août au marquis de Lans, p. 254.
779 Le Nonce de France, Robert Ubaldini, avait intéressé la Cour de Rome à cette affaire. Le 7 juin 1612, il écrivait au
cardinal Borghese, qui lui avait adressé la copie d'une lettre du Saint (voir plus haut, note (572), p. 190) : « Mgr de
Genève est ici en si haute estime et réputation, qu'il est grandement désiré pour les prédications du Carême prochain,
dans la principale paroisse de cette Université. Aussi, sachant bien qu'il pourrait y faire beaucoup de fruit, j'ai vivement
pressé M. le Nonce de Turin, sur les instances de ces paroissiens, d'en obtenir le consentement de Son Altesse. Sans
ce consentement, ils n'osent présenter leur requête à M. de Genève ; mais à peine obtenu, ils le feront aussitôt, et peut-
être se prévaudront-ils aussi de la faveur de la reine qui l'a en très grande estime. » (Pieralisi, Rimedio, etc., Roma,
1878.)
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et Baillif du chasteau et ville de Montargis.
Revu sur l'Autographe conservé au 1er Monastère de la Visitation de Rouen. [273]
_____
DCCCXI. A M. Jacques de Bay. Recommandations en faveur de
trois étudiants de Savoie. Nouvelles religieuses
Annecy, 8 octobre 1612.
Monsieur,
Outre le desir que j'ay de me ramentevoir en vostre bienveuillance par un'occasion si
asseuree comm'est celleci, je suis aussi obligé de gratifier les parens de ces jeunes gens par la tres
affectionnee recommandation que je vous fay en la faveur d'iceux. Ilz sont, certes, tous troys enfans
de personnes de bonne qualité et pour lesquelles je voudroys beaucoup de bien et de satisfaction ;
mays en particulier l'un d'entr'eux, nommé Grillet, est filz d'une mere qui m'appartient en sang et
d'un pere que, pour sa probité, j'affectionne estroittement780. C'est pourquoy, vous suppliant de
tout mon cœur de les recevoir tous entre les bras de vostre charité, je vous supplie plus
particulierement pour celuy lâ781.
Les parens aussi de M. Jean de Rua782 m'ont prié de le vous recommander ; ce que je fay
bien affectionnement, quoy que je ne doute pas que sil se comporte aussi modestement au college
comm'il a fait tandis quil a esté icy, il ne vous soit asses recommandable de luy mesme, sans que
j'y employe mon intercession.
Nous avons ces moys passés retiré environ 25 eglises [274] des mains des huguenotz autour
de Geneve783, que j'espere repeupler de bons pasteurs, comm' encor d'en retirer davantage, s'il plait
a Dieu de toucher le cœur des Princes affin qu'ilz conspirent a la sanctification de son saint nom.
Ce sont les seules nouvelles dont je vous puis servir et, comme je pense, les plus agreables et qui
vous donneront tant plus de courage de favoriser ce diocaese, eslevant aux lettres et a la pieté ceux
qui vous sont envoyés, et priant Nostre Seigneur pour moy qui, reciproquement, vous souhaite
toute sainte prosperité et demeure,
Monsieur,
Vostre humble tres affectionné confrere et serviteur,
FRANÇS, E. de Geneve.
VIII octobre 1612, a Neci.
A Monsieur
Monsieur de Bay,
Docteur regent et Chancelier de l'Université de Louvain,
Doyen de St Pierre, Praesident du College de Savoye.
780 Claudine de Sales, mère du jeune étudiant, sœur du chanoine Louis de Sales, et cousine-germaine du Saint, était
fille de Louis, coseigneur de Brens, et de Janine de Guasquis ou Guasques. Elle avait épousé « egrege » Jean Grillet.
781 Nicolas Grillet répondit aux espérances de son protecteur. Docteur en théologie, pourvu le 6 novembre 1623 de la
cure d'Allinges, il publia en 1630 l'Histoire de la Bonne Fontaine aupres de La Roche, précédée d'une dédicace à
Janus de Sales, et mourut au mois de septembre 1638. (R. E. ; Grillet, Dictionnaire historique, etc., Chambéry, 1807,
tome Ier.)
782 Il n'a pas été possible de retrouver la parenté de Jean de Rua, dont la famille paraît se distinguer tout à fait de celle
de Vincent de la Ruaz.
783 Eglises du bailliage de Gex, dont saint François de Sales avait pris possession au mois de juillet. (Voir ci-dessus,
Lettres DCCXCIX, DCCC.)
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20.1 Page 191

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Revu sur l'Autographe conservé à Bruxelles, Bibliothèque des PP. Bollandistes.
_____
DCCCXII. A la Mère de Chantal. Une jeune fille écartée de la
Visitation pour cause de maladie
Annecy, [août-octobre] 1612 784.
Ma tres chere Mere,
Nostre Seigneur vous donne l'abondance de ses graces. Hier M. de Vilette me parla, et luy
dis la difficulté de [275] la maladie dont je vous avois parlé785. Il ne treuva point mauvais cela ; de
sorte que sil vous plait, en luy tesmoignant de la charité, luy dire que les Seurs seroyent trop
troublees si telz accidens arrivoyent, et quil seroit requis qu'on luy fit les remedes necessaires
tandis qu'ell'est chez luy, je ne doute point quil ne le treuve bien doux, ouy mesme toute sorte de
dilation a luy bailler l'habit apres qu'elle sera receüe, et que cela demeure en nostre discretion.
C'est par ce quil me dit hier quil vous iroit voir, que je vous donne cet advis, et par ce que je suis
bien ayse de saluer un peu ce matin le cœur de ma tres chere Mere, qui est le mien propre, bien
que j'espere de le saluer ce soir, Dieu aydant.
Bonjour donq, ma tres chere Mere ; Nostre Seigneur soit a jamais beni !
Revu sur l'Autographe appartenant à M. le chanoine Collonges, aumônier de la Visitation de
Chambéry.
_____
784 Nous savons que le baron de Villette était à Giez dans la première quinzaine d'août 1612 et au commencement du
mois d'octobre suivant. La date approximative que nous proposons est suggérée par cette particularité et par la suite
des faits qui relie le présent billet aux lettres du 21 septembre et du 11 octobre. (Voir ci-dessus, pp. 265, 266, et la
lettre suivante.)
785 Le Saint fait ici une allusion discrète à la maladie de sa « petite cousine », que le baron de Villette désirait voir
entrer à la Visitation. (Cf. ibid.)
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20.2 Page 192

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DCCCXIII. Au Baron Amédée de Villette. La contagion au-
pays de Vaud. La petite cousine aimée tendrement de la Mère
de Chantal
Annecy, 11 octobre 1612.
Monsieur mon Oncle,
Sachant bien que vostre si soudain despart ne peut estre que pour quelqu'affaire de
grand'importance786, [276] je prieray tant plus soigneusement Nostre Seigneur quil vous assiste de
son saint esprit de conseil et de force, pour persuader les choses justes et convenables a ceux qui,
peut estre, n'y sont pas beaucoup disposés.
Monsieur le maistre Carrel787, revenant de Chablaix, m'a dit que la contagion s'estoit
respandue en cinq ou six endroitz du païs de Vaux788 ; cela pourroit rendre vostre passage difficile,
mais vostre prudence remediera a cet empeschement, prenant les destours propres a vostre
conservation que, sur toute chose, je vous supplie avoir en recommandation.
Quant a ma petite cousine789, elle vous donnera en tous evenemens sujet de contentement
; car, bien qu'elle n'ayt point son esprit incliné a la vie retiree et religieuse, si a elle une ferme
resolution de se rendre de plus en plus vertueuse et devote, et avec cela, vous ne sçauries recevoir
d'elle que beaucoup de satisfaction. Madame de Chantal l'ayme tendrement et a esperance que par
tout elle fera fort bien. Pour moy, j'ay commencé a la tenir pour ma fille, et ne veux jamais cesser,
avec vostre congé toutefois, comme je suis invariablement,
Monsieur mon Oncle,
Vostre tres humble neveu et serviteur,
FRANÇS, E. de Geneve.
XI octobre 1612, a Neci.
A Monsieur
Monsieur le Baron de Vilette,
Conseiller d'Estat et Maistre d'hostel de S. A.
Revu sur l'Autographe appartenant à M. le marquis Marsigli, à Bologne. [277]
_____
786 La diète de Bade (Suisse), qui s'était ouverte le 4 octobre ; M. de Villette fut un des ambassadeurs extraordinaires
envoyés par le duc de Savoie. (Cf. note (1091) de la page suivante et la lettre du 14 novembre à des Hayes.)
787 Le maître des Postes (voir ci-dessus, note (767), p. 267).
788 Dès 1611, les lettres du président Favre et celles des ambassadeurs en Suisse font souvent mention de la contagion
qui sévit en Valais, à Berne, Lausanne et dans les environs de Bade. Le 30 octobre 1612, le baron de Villette écrit dé
cette ville à Charles-Emmanuel : « Je partey soudain que j'heu le commandement de V. A. de venir icy, et passey par
Soleurre pour eviter les lieux de contagion et arriver plus tost. » (Turin, Archives de l'Etat, Lettere Ministri.)
789 Voir ci-dessus, pp. 265, 266, et la lettre précédente.
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20.3 Page 193

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DCCCXIV. A Madame d'Escrilles790. Affection des Religieuses
de la Galerie pour la destinataire. Les satisfactions sèches et
les consolations savoureuses. Messages.
Annecy, 15 octobre 1012.
Il me tardoit, certes, d'avoir quelqu'asseuree commodité de vous escrire, ma tres chere Fille,
ne doutant point que mes lettres ne vous soyent a consolation, selon la sainte dilection que Dieu a
creëe entre nous.
La bonne Mme de Chantal se porte fort bien a mon gré, comme j'ay veu ce matin que j'ay
dit la sainte Messe a la Visitation ; et c'est la ou ce porteur m'a treuvé que je sortois du parloir, ou
j'estois descendu pour la saluer et dire deux ou trois motz d'affaires. Je m'asseure qu'elle vous
respondra selon vostre desir, et la pensee qui vous est venue au contraire est une vayne pensee ;
car vrayement ces bonnes filles ont des cœurs tout plains de tres [278] saint et ferme amour pour
vous, de qui elles receurent une grande consolation en la sorte avec laquelle vous listes vostre
demande.
Au reste, demeurés en cette paix et tranquillité que Nostre Seigneur vous a donnee. La paix
de Dieu, dit saint Paul791, qui surpasse tout sentiment, conserve vostre cœur et vostr'esprit en Jesus
Christ Nostre Seigneur. Voyes vous pas, ma chere Fille, quil dit que la paix de Dieu surpasse tout
sentiment ? C'est pour vous apprendre que vous ne deves nullement vous troubler de n'avoir point
d'autre sentiment que celuy de la paix de Dieu. Or, la paix de Dieu, c'est la paix qui prouvient des
resolutions que nous avons prises pour Dieu et par les moyens que Dieu nous ordonne. Marchés
fermement en ce chemin auquel la providence de Dieu vous a mise, sans regarder ni a droite ni a
gauche : c'est le chemin de la perfection pour vous. Cette satisfaction d'esprit, quoy que sans goust,
vaut mieux que mille consolations savoureuses.
Que si Dieu vouloit que vous eussies un peu de difficulté au demeslement de vos affaires,
il faudroit recevoir cela de sa main, laquelle vous ayant saysye, ne vous abandonnera point qu'elle
ne vous ayt reduite au point de vostre perfection. Nous verrons de conduire tout bellement l'esprit
des freres792, et attendray que vous me facies sçavoir ce que vous aures fait avec la bonne mere793.
Vous verres bien, ma tres chere Fille, que la providence de Dieu fera par tout faire place a vostre
intention, puis qu'ell'est toute conforme a la sienne ; il faut seulement avoir un courage un peu
vigoureux et resolu. J'appreuve que vous retourniés avant le Caresme, affin que vous puissies au
plus tost vous desprendre de tout embarassement, et rencontrer le beni jour auquel [279] vous luy
790 La présente lettre a été publiée pour la première fois dans le Bulletin de l'Emulation de l'Allier, 1859, tome VII, p.
68, avec la fausse adresse : A Madame de Pont de Vaux, sur la foi d'une note inexacte qui accompagnait l'Autographe.
Or, toutes les particularités et allusions du texte désignent manifestement la destinataire proposée.
Née vers 1582, de Pierre-Marc de Mouxy, seigneur de Travernay, et d'Antoinette de Saint-Jeoire (voir note
(793) de la page suivante), Marie de Mouxy épousa par contrat du 13 novembre 1591 (Archiv. de Giez), Louis de la
Touvière, seigneur d'Escrilles, dont elle n'eut qu'un fils (voir ci-après, note (795), p. 280). Veuve à dix-huit ansi elle
ne prit toutefois l'habit de la Visitation que le 2 juillet 1614, et le 7 décembre 1615, fit ses vœux de professe. Le
Monastère de Belley l'eut en 1622 pour sa première supérieure ; la Maison de Rumilly fut sous sa direction de 1627 à
1634, et celle de Bourg-en-Bresse de 1635 à 1638. L'Année Sainte (tome V, p. 196) mentionne sa belle conduite durant
la peste qui désola ces deux villes ; dans le même Recueil, on trouvera l'histoire d'un épisode assez curieux qui marqua
son entrée en Religion et un trait significatif de sa confiance en la Sainte Vierge, lors de l'invasion de l'Albanais par
Louis XIII. « Toutte sa vie elle a pratiqué une devotion si tandre et amoureuse, que nostre Bienheureux Pere disoit
que ce don de pietté la conduiroit bien avant dans le Ciel. » (Livre du Couvent, du 1er Monastère de la Visitation
d'Annecy.) La Mère Marie-Madeleine de Mouxy décéda le 8 mai 1645, dans son monastère de profession.
791 Philip., ult. 7.
792 Balthazard de Mouxy, seigneur de Travernay (voir le tome précédent, note (957), p. 333), et Melchior, baron de
Saint-Jeoire.
793 Antoinette de Saint-Jeoire, fille de Charles de Saint-Jeoire, seigneur de la Chapelle en Chablais, et de Françoise de
Cojonay, était sœur du célèbre baron d'Hermance. Elle avait épousé, par contrat dotal du 17 mai 1573, Pierre-Marc de
Mouxy.
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20.4 Page 194

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tesmoigneres que ce n'est que luy que vous cherches.
J'ay escrit au P. Recteur de Chamberi794 sur le sujet du logement de vostre cher enfant795,
et ne doute point que vous ne treuvies tout'assistence. Et quant a moy, ma chere Fille, je ne pourray
jamais vous oublier ni en mes Sacrifices ni en mes prieres, ni en aucun'occasion de l'avancement
de vostre ame, puis que son Createur a gravé si profondement en la mienne une parfaite affection
pour vous. Je supplie nostre Sauveur et sa Mere quilz vivent et regnent a jamais au milieu de vostre
cœur. Amen.
Je suis invariablement, ma tres chere Fille,
Vostre plus humble parent et tres asseuré serviteur,
F., E. de Geneve.
13 octobre 1612, a Neci.
Vous m'escrires bien encor apres vostre retour de Chamberi : et si vous passies a la Bastie,
je vous prie de saluer madamoyselle de Saint Pierre796, a laquelle j'ay escrit et que j'ayme
cordialement.
Revu sur l'Autographe appartenant à Mme A. Richard-Cottin, à Lyon. [280]
_____
DCCCXV. A Madame de la Fléchère. Ce que réservait le Saint
dans ses demandes à Dieu. Petites nouvelles. Annonce du
départ de la Galerie
Annecy, 21 octobre 1612.
Je vous fis response l'autre jour, ma chere Fille, sitost que j'eu leu vostre lettre ; mais le
garçon qui l'avoit apportee ne revint pas prendre la mienne, laquelle je vous envoye encores toute
telle que je la fis.
Certes, j'ay esté en peyne de la pauvre chere Francine797, laquelle j'espere devoir estre une
bonne servante de Nostre Seigneur et qui ne laissera pas, moyennant la grace cæleste, d'aller au
Ciel apres avoir rendu des bons services a Dieu entre les hazars de cette vie mortelle. C'est
pourquoy, sa divine Bonté soit loüee de la nous avoir encor laissee, comme je l'en ay supplié, avec
la reserve de la sainte resignation, que je n'oublie jamais en choses de telle qualité.
794 Le P. Le Maire, S. J. (voir ci-dessus, note (611), p. 209).
795 Le jeune Antoine-Balthazard de la Touvière d'Escrilles, né après la mort de son père (cf. note (790) de la p. 278),
fit choix de bonne heure de l'Ordre des Capucins, et testa le 28 octobre 1618, en faveur de ses cousines Claudine-
Adriane et Anne-Françoise, filles de Balthazard de Travernay. Le 13 juin 1620, le P. Georges c'était son nom de
Religion avait fait profession ; le 18 septembre 1621, il recevait le sous-diaconat des mains de Mgr Jean-François
de Sales, dans l'église de Sainte-Claire d'Annecy. (Archiv. de la Visitation d'Annecy ; R. E.) L'année de sa mort ne
nous est pas connue.
796 Françoise de Seyssel, qui avait épousé en 1573 Jean-Alexandre de Clermont-Mont-Saint-Jean, seigneur de Saint-
Pierre de Soucy, de la Bâtie, etc., paraît être la personne saluée par le Saint, si toutefois elle vivait encore en 1612. A
son défaut, on pourrait proposer Anne de Montfalcon, femme de Jean-Claude de Clermont-Mont-Saint-Jean, belle-
fille des précédents. (Voir tome XIV, note (958), p. 334.)
797 Françoise-Innocente, fille cadette de la destinataire et filleule du Saint.
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20.5 Page 195

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J'ay fait tenir vostre lettre au P. Gardien798, et celle de Mme l'Ancienne799 sera rendue
demain. Ce fut avant-hier seulement que je receu vos lettres bien tard, que la [281] chere
cousine800, a qui elles avoyent esté portees, m'envoyâ. J'envoyay a M. des Crilles ce qu'elle desiroit
de moy801, et croy que vous aures fait tenir a nostre seur de Bons802 la lettreque je vous addressay.
Dieu vous benisse de sa grande benediction, ma tres chere Fille, et tout ce qui vous est plus cher.
Hier monsieur vostre mari et M. de Charmoysi allerent coucher a Thorens parmi un tres
mauvais tems. Mme de Chantal vous salue mille foys, des l'autre jour que je la vis. Lundi prochain,
ell' ameyne sa trouppe dans la ville803. Voyla le P. Gardien qui m'appelle, et je m'y en vay, vous
laissant avec la paix et grace du Saint Esprit.
Je suis tres veritablement et tres parfaitement tout vostre. F.
Vostre plus humble tres affectionné compere et serviteur,
F., E. de G.
Le 21 octobre 1612.
A Madame
Madame de la Flechere.
Revu sur l'Autographe appartenant à M. de Scitivaux, à Vilet-les-Nancy (Nancy). [282]
_____
798 Il s'agit, pensons-nous, du P. Gardien des Capucins d'Annecy, qui était, en 1612, le P. Théodose de Bergame, de la
famille des comtes Foresti (1545-1625). Entré dans l'Ordre vers 1572, il reçut la prêtrise des mains de saint Charles
Borromée, qui l'aimait beaucoup, et devint plus tard provincial de Lyon. C'est alors que, sur la demande de Mgr de
Granier et de Charles-Emmanuel, il désigna, pour travailler à la conversion du Chablais (1595), les PP. Chérubin de
Maurienne, Esprit de Baume et Antoine de Tournou. L'éminent Religieux, après avoir rempli les charges les plus
élevées, mourut à Ambert, au cours d'une mission. Les Annales de son Ordre relatent des faits miraculeux opérés sur
son tombeau. (Cf. Nécrologe des FF. Mineurs Capucins de Savoie, 1611-1903, par le P. Eugène de Bellevaux.) En
parlant du P. Théodose dans une lettre à la Mère Favre (juillet 1620), saint François de Sales l'appelle son « grand
amy. »
799 Jéronyme de Maillard, ancienne abbesse de Sainte-Catherine.
800 Mme de Charmoisy.
801 Cf. Epist. præced.
802 Jeanne-Bonaventure de la Forest, sœur de la destinataire, Religieuse de l'abbaye de Bons.
803 La « trouppe » ne fut pas prête le lundi suivant, 29 octobre ; elle ne quitta la Galerie que le lendemain, mardi, 30
octobre. « Ce fut sur les quatre heures du soir, » lisons-nous dans l'Histoire de la Fondation du 1er Monastère d'Annecy,
« que nos anciennes Meres et Sœurs sortirent... Elles alloient deux à deux, precedees de M. Michel Favre, » et « furent
receues en leur nouvelle maison par les dames Religieuses de l'Abbaïe de Sainte Catherine qui... embrasserent toutes
ces cheres Sœurs et les introduisirent dans leur nouveau sejour, » lequel, remarque la Mère Fichet (Hist. de la Galerie),
« etoit commode de tout, de jardin, verger et eaux. » (Cf. ci-dessus, note (704), p. 245.)
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20.6 Page 196

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DCCCXVI. A Madame de Grandmaison804. Comment le Saint
entend témoigner sa sainte amitié. Messages divers.
Annecy, 25 octobre 1612.
Madame ma tres chere Seur,
Je n'ay pas de quoy respondre aux paroles d'honneur extraordinaire que vous employés en
ma faveur es deux lettres que, de vostre grace, j'ay receues de vostre part des que vous nous
laissastes icy le desir de vostre presence805. Mays j'ay bien pourtant une si forte et sincere affection
pour vostr'ame, que si vous me le permetties, je revoquerois en doute, par maniere de desfy, que
vous eussies asses de bienveuillance pour y correspondre. Dieu vous le fera sçavoir, au plus tard,
apres cette vie mortelle ; car ce sera devant luy et ses Sains que je feray les principaux exercices
de la sainte amitié qu'il m'a donné pour vous, jettant souvent mes tres humbles souhaitz devant son
eternelle Bonté, affin qu'elle remplisse vostre cœur de son amour plus parfait. [283]
La distance de nos sejours limite presqu'a ce seul effect la volonté que j'ay sans limite de
vous rendre fidele et humble service, et ne me reste, ce semble, aucun autre moyen de la
tesmoigner, si ce n'est par le commerce des lettres que je vous envoyeray souvent, pour vous
rafraichir la memoire de mon ame qui a tous-jours tant de besoin d'estre secourue de vos oraysons,
et qui recevra tous-jours beaucoup de consolation de sçavoir de tems en tems des bonnes nouvelles
de la vostre. Mais, que suis tres parfaitement vostre, cela soit dit une fois pour toutes.
Alles donq maintenant, ma tres chere Seur, en vostre mayson et au pres de ce cher mari806
qui vous attend ; je vous suivray en esprit, et respandray sur vous et sur luy les vœux de beaucoup
de benedictions. Et puis qu'il faut que bien tost apres vostre arrivee vous souffries de rechef son
absence pour le voyage quil doit faire a la court, continués bien en vos exercices spirituelz, tenes
vous bien serree a Nostre Seigneur, et il suppleera, sans doute, le manquement de la desirable
presence du mari, par celle qui est incomparable de son Saint Esprit, lequel, habitant au milieu de
vostr'ame, la comblera de sa suavité nompareille. Ainsy soit-il et ainsy soyes-vous benite a
jamais.807
Je suis, Madame ma tres chere Seur, et, si vous le treuves bon, ma tres chere Fille, je suis
de tout mon cœur,
Vostre plus humble, tres affectionné frere et serviteur,
FRANÇS, E. de Geneve.
25 octobre 1612, a Neci, ou je salue humblement monsieur vostre mari et me dis par tout
804 L'adresse manque à l'Autographe, mais la corrélation de la présente lettre avec la suivante ne laisse aucun doute
sur la destinataire. Celle-ci est Hélène de Longecombe, fille de François-Philibert de Longecombe, seigneur de
Peyzieu, et de Françoise de Dizimieu (voir ci-dessus, note (557), p. 181). Elle épousa, le 25 juillet 1598, François de
Bessac, seigneur de Grandmaison (voir note (806) de la page suivante). En 1634, elle testa avec son mari, et le 17
septembre 1639, en l'absence de la marquise de Sennecey, elle posa la première pierre du monastère de la Visitation
de Macon. Mme de Grandmaison vivait encore en 1662. (Guichenon, Hist. de Bresse et Bugey, 1650, Partie III,
continuation ; Notes de Mgr Rameau, érudit mâconnais.)
Le Saint chérissait cette âme parce qu'il la trouvait tout à son gré « pour bien servir Nostre Seigneur. » (Voir
la lettre suivante, p. 287.)
805 Mme de Grandmaison était venue à Annecy pour les « grands Pardons » de Notre-Dame de Liesse qui avaient eu
lieu au mois de septembre. (Voir ci-dessus, note (759), p. 265, et cf. la lettre suivante.)
806 François de Bessac de Grandmaison, d'une famille originaire du Poitou, fils de Jean de Bessac et de Jeanne de
Félix, devint seigneur de Varennes, dont sa femme avait hérité le 2 mai 1607. Lieutenant pour le roi au gouvernement
de Mâcon (1610), gouverneur de Pont-de-Veyle en 1620, il laissa une fille, Claudine, qui fut abbesse de Brienne-les-
Anse, et trois fils : Pierre, Jean et Claude de Bessac, avec lesquels s'éteignit la famille dans le Mâconnais. (D'après
les notes de Mgr Rameau.)
807 Ici se termine le texte donné par Migne ; ce qui suit est inédit.
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20.7 Page 197

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son serviteur. [284] Je le suis aussi de monsieur vostre frere808 et de madame vostre seur809.
J'escris un billet a M. de Medio, chanoyne de Saint Nizier810, qui est celuy qui me fera
recevoir de vos lettres quand il vous playra de m'en gratifier, et en son absence, monsieur Vulliat,
contrerolleur de la mayson de Monseigneur le Duc de Nemours811. J'escris un mot aussi au bon P.
Anselme812, mon grand ami.
J'envoyeray les lettres desquelles vous gratifiés ma seur de Mayrens813 et madame de
Charmoysi, laquelle est aux chams, aussi bien que mon frere de Boysi814, qui sera bien marri de
ne s'estre pas treuvé icy pour vous remercier luy mesme. La seule Mme de Chantal vous escrit,
encor bien courtement.
Si vous le treuves a propos, je salueray bien humblement par vostre entremise madame de
Tremon815, que [285] vous m'aves obligé d'honnorer beaucoup par le recit que vous m'aves fait de
ses merites. Dieu vous soit guide et conducteur, ma tres chere Seur, et a vostre cher pouppon, que
pour maintenant je nommeray encor Pierre816, qui est si joly, a ce qu'on me dit.
Revu sur l'Autographe conservé à la Visitation de Mâcon.
_____
808 Il est difficile de deviner si le Saint a voulu désigner Louis, Balthazard ou François. (Cf. ci-dessus, notes (560),
(562), p. 182.)
809 Sans doute Lucrèce, dame de Cervières (voir ibid., note (559).
810 Voir tome XII, note (88), p. 49.
811 Le nom de ce personnage apparaît fréquemment dans les lettres de saint François de Sales et de ses amis : des
Hayes, Charmoisy, Antoine Favre. C'était l'homme serviable, toujours prêt à obliger pour des messages secrets ou des
affaires d'argent. Noble Mamert Vulliat, fils d'honorable Aimé Vulliat, de la paroisse de Copponex, était contrôleur
ordinaire en l'hôtel de Mgr le duc de Nemours ; ses deux frères, Etienne et Pierre, étaient avec lui au service du Prince.
(Reg. des Délib. municip. d'Annecy.)
812 Parmi les Religieux de ce nom, le P. Anselme Marchand, de l'Ordre des Frères Mineurs et fils de Pierre Marchand,
du Grand-Bornand, est connu pour avoir été l'ami de notre Saint. Il fut gardien du couvent des Cordeliers à Cluses,
sacristain de celui d'Annecy. Prenant congé de François de Sales à son départ pour Avignon (9 novembre 1622), le P.
Marchand recueillit cette parole : « Ce voyage me coustera la vie, et nous ne nous verrons plus qu'en Paradis. »
(D'après sa déposition, Process. remiss. Gebenn. (I), ad 2um interrog. et art. 52.)
En juillet 1620, le Bienheureux écrivant à la Mère Favre, supérieure à Montferrand : « Vous aves en ce païs
la, » lui dit-il, « le bon Pere Anselme de Riom, « qui m'ayme incomparablement. » Ce Religieux fut plus d'une fois
définiteur de 1626 à 1641. On ne peut savoir lequel de ces deux Pères est mentionné ici.
813 Gasparde de Sales, femme de Melchior de Cornillon, seigneur de Meyrens.
814 Probablement, Jean-François de Sales.
815 Anne de Rochefort-Plurault avait épousé Léonor de Semur-Trémont, baron, seigneur de Sercy et Sancenay, qui
vécut dans les camps sous Henri IV, fut deux fois gouverneur de Mâcon, 1605-1614, puis de 1621 à 1625, année de
sa mort. (D'après les notes de Mgr Rameau.)
816 Pierre de Bessac (cf. ci-dessus, note (806), p. 284) devint chevalier, seigneur de Varennes, gouverneur de Pont-de-
Veyle (1636), maître d'hôtel de Sa Majesté (1646), bailli de Mâcon (1646-1671), et mourut le 15 février 1678. On
l'inhuma dans l'église de Varennes, auprès de sa femme, Anne d'Andrieu, dont il n'eut pas d'enfants. (D'après les notes
de Mgr Rameau.)
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20.8 Page 198

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DCCCXVII. A Madame de Peyzieu817. Le nom du cœur. — Les
consolations du Jubilé. Témoignages d'amitié pour la
destinataire et sa famille. Affliction fâcheuse et affliction
courageuse. La modération des affections ménagères,
grandement utile à la piété. Une imperfection dont peu de
gens s'abstiennent. — Les cœurs faibles et les cœurs forts.
Annecy, 26 octobre 1612.
Madame ma tres chere Mere,
Vostre lettre pleyne de termes d'honneur, d'amour et de confiance, me raviroit du tout a
vous, si des long tems je n'y estois tout dedié. Mais, ma tres chere Mere, vous m'espargnes un peu
trop le nom de filz, qui est le [286] nom du cœur, pour me donner un nom respectueux, qui est
bien aussi nom du cœur, mais non pas du maternel, qui est celuy de mes delices.
C'est la verité, ma chere Mere, que nous eusmes icy une grande assemblee a nostre Jubilé818
et, ce qui importe, qu'il se fit quelque fruict. J'en eu mille consolations et point de peyne, ce me
semble ; seulement eusse-je bien819 voulu que madame de Grandmayson ma chere seur, vostre fille
bienaymee et bien aymable, ou fust venue trois ou quatre jours devant, ou eust arresté quatre ou
cinq jours apres, affin que j'eusse eu plus de commodité de luy rendre plus de tesmoignages du
devoir que je luy ay et de la sainte inclination que j'ay a son cœur, que je treuve tout a mon gré
pour bien servir Nostre Seigneur. Que si nous eussions eu le contentement et l'honneur de vous
avoir vous mesme, certes, c'eust esté un comble de bonheur, Madame ma tres chere Mere, et vous
eussies receu l'hommage que sept ou huit de mes freres et seurs ne vous ont encor point fait, en
qualité de vos humbles enfans et serviteurs. Mais puis quil ne se peut d'autre façon, je vous
approcheray souvent en esprit pour, avec vous conjointement, demander a Nostre Seigneur quil
luy playse consoler vostre ame de sa benediction, la faisant abonder en son saint amour et en la
sacree humilité et douceur de cœur, qui ne sont jamais sans ce saint amour, non plus que le saint
amour sans elles.
Et pour vous parler selon nostre confiance, ma tres chere Mere, ne vous faschés point, ni
ne vous estonnés point de voir encor vivre en vostre ame toutes les imperfections que vous m'aves
confiees. Non, je vous supplie, ma chere Mere, car bien quil les faille rejetter et detester pour s'en
amender, si ne faut-il pas s'en affliger d'une affliction fascheuse, mais d'une affliction courageuse
et tranquille, qui engendre un propos bien rassis et solide [287] de correction ; et ce propos, ainsy
pris en repos et avec meureté de consideration, nous fera prendre les vrays moyens pour l'executer,
entre lesquelz je confesse que la moderation des affections mesnageres est grandement utile. Je ne
dis pas le total abandonnement, mais je dis la moderation ; car par cette moderation, nous sçavons
treuver les heures franches pour l'orayson, pour un peu de lecture devote, pour eslever a diverses
rencontres nostre cœur a Dieu, pour reprendre de tems en tems le maintien interieur et la posture
cordiale de la paix, de la douceur, de l'humilité. Mais le grand secret en ceci, c'est d'employer
toutes choses.
Laissés sept ou huit jours pour bien rasseoir vostre ame et luy faire prendre profondement
817 L'édition de 1626 donne sans date cette lettre, avec des suppressions et des interpolations : c'est le texte qu'ont
reproduit tous les autres éditeurs. Hérissant (1758) ajoute la date de janvier 1606, par suite d'une fausse conjecture sur
le jubilé des Pardons d'Annecy, qu'il a pris pour un Jubilé universel. Blaise (1833), et après lui Vivès et Migne,
désignent comme destinataire la Présidente Brûlart, erreur manifeste qui ressort de la mention formelle de Mme de
Grandmaison, fille de Mme de Peyzieu. (Voir ci-dessus, note (804), p. 283.)
818 Les « grands Pardons » de septembre (cf. p. 265).
819 Les dix lignes suivantes sont inédites. Pour en dissimuler la suppression, les premiers éditeurs ont imprimé : «
seulement eusse-je bien désiré d'avoir l'honneur et le contentement de vous y voir, ma tres-chere Mere, » etc.
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ces resolutions. Sur tout, ma tres chere Mere, il faut bien combattre la haine et les mescontentemens
envers le prochain, et s'abstenir d'une imperfection insensible, mais grandement nuisible, de
laquelle peu de gens s'abstiennent ; qui est que s'il nous arrive de censurer le prochain ou de nous
plaindre de luy (ce qui nous devroit rarement arriver), nous ne finissons jamais, mais
recommençons tous-jours et repetons nos plaintes et doleances sans fin ; qui est signe d'un cœur
piqué et qui n'a encor point de vraye santé. Les cœurs fortz et puissans ne se deulent que pour des
grans sujetz, et encor, pour ces grans sujetz, ne gardent ilz guere le ressentiment, au moins avec
trouble et empressement.
820Vostre bon Curé821, qui me plaist fort, m'a parlé de vostre desir et je luy ay dit ma pensee.
Prenes courage, ma tres chere Mere, que ces petites annees que nous avons a couler icy bas nous
seront, Dieu aydant, les meilleures [288] et les plus advantageuses pour l'eternité.822 Je seray ce
pendant invariablement, Madame ma tres chere Mere,
Vostre tres humble filz et tres fidele serviteur,
FRANÇS, E. de Geneve.
J'ay eu peur de faire trop retarder ce porteur ; c'est pourquoy je vous ay escrit sans autres
considerations que celles que la sincerité de mon affection filiale m'a fourni.
A Neci, le 26 octobre 1612.
Revu sur une ancienne copie appartenant à Mme la marquise de Mailly, au château de La Roche-
Mailly (Sarthe).
_____
DCCCXVIII. Au Marquis de Lans823. Intercession en faveur d'un
capitaine dans la gène et dans la vieillesse.
Annecy, 31 octobre 1612.
Monsieur,
Me voyci tous-jours aux requestes pour ces pauvres gens de Geneve, desquelz meshuy je
seray le referendaire general aupres de Vostre Excellence.
Le capitaine La Rose est de ceux qui, les premiers, sortirent de cette ville la et de l'heresie
qui y regne824. Son Altesse Serenissime luy a donné un appointement par aumosne, tant en
consideration de sa viellesse que de sa famille, laquelle nous avons icy en grande disette ; [289]
mays, a ce qu'il me fait sçavoir, il demeurera privé de l'effect de ce benefice, si Vostre Excellence
n'anime le commandement de Son Altesse par le sien. C'est pourquoy il m'a conjuré de vous
supplier, Monsieur, en sa faveur pour ce regard ; ce que je fay tres humblement, et d'autant plus
volontier que la bonne feste nous invite au secours des affligés825.
820 Cette phrase est inédite.
821 Peyzieu ou Pézieu, actuellement hameau de trois cents habitants, était autrefois une paroisse sous le vocable de la
Sainte-Vierge. En 1612, elle était réunie à la paroisse d'Arbignieu. Mme de Peyzieu demeurait au château de Thuey ou
Thoys, à deux kilomètres au nord d'Arbignieu ; la maison-forte des seigneurs de Longecombe se dressait sur un
monticule. Le « bon Curé » qui plaisait fort au Saint, se nommait Claude Buttard ; il desservit la paroisse d'Arbignieu
et Peyzieu de 1603 à 1640. (D'après les notes de M. l'abbé Alloing, archiviste du diocèse de Belley.)
822 Ici, les anciens éditeurs substituaient aux clausules finales et au postscriptum, un passage assez considérable de la
lettre du 28 février 1615 à Mme de Peyzieu, et empruntaient à la même lettre la dernière phrase et la signature qu'ils
donnent à celle-ci.
823 Le texte de cette requête et le titre de « Vostre Excellence » donné au destinataire indiquent que celui-ci n'est autre
que le marquis de Lans.
824 Henri La Rose (voir tome XII, note (1001), p. 400, et tome XIV, p. 158).
825 Ces derniers mots font plutôt songer à la commémoration des Trépassés qu'à la fête de la Toussaint.
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Je prie Dieu, Monsieur, qu'il face de plus en plus abonder Vostre Excellence en prosperité.
Vostre tres humble serviteur,
FRANÇS, E. de Geneve.
A Neci, le 31 octobre 1612.
_____
DCCCXIX. A la Sœur de Blonay, Novice de la Visitation826. Ce
qui rend certaines tentations inoffensives. La petitesse et
l'enfance spirituelle.
Annecy, [octobre ou novembre 1612.]
Il n'y a point de danger en ce qui vous est arrivé, puisque vous le communiques ; mays
notés, ma tres chere Fille, que Dieu a commencé ses visitations en [290] vostre ame sur le
sentiment et l'exercice de la petitesse, bassesse et humilité827, pour appreuver l'advis qui vous est
donné de bien vous reduire a ce point et d'estre vrayement une petite fille : je dis toute petite, en
vos yeux, en vos exercices, en obeissance, naïfveté et abjection de vous mesme ; petite, et un vray
enfant, qui ne cache ni son bien ni son mal a son pere, a sa mere, a sa nourrice828.
C'est en attendant que nous en parlions plus amplement. Dieu soit tous-jours au milieu de
vostre cœur, ma tres chere Fille. [291]
_____
826 Marie-Aimée de Blonay (voir la note de son père, Claude de Blonay, tome XII, p. 134), née le 13 décembre 1590,
entra la dixième à la Visitation, le 25 janvier 1612. Professe le 10 février 1613, elle contribua, en 1615, à la fondation
du Monastère de Lyon, et le gouverna de 1622 à 1628, et de 1631 à 1637. Supérieure au couvent de Bourg-en-Bresse
en 1638, elle fut rappelée à Annecy en 1641, pour succéder à sainte Jeanne-Françoise de Chantal, et mourut le 15 juin
1649.
La vie de la Mère de Blonay a été racontée par Charles-Auguste de Sales1 ; il fallait la bonne grâce de son
style et sa candeur de piété pour peindre au naturel cette vierge qui, toute enfant, avait blessé le cœur de Dieu. Dès le
berceau, notre Saint l'avait chérie et cent fois bénie (cf. le tome précédent, note (297), p. 101), émerveillé de la
précocité de son intelligence perçante et raisonneuse, de sa facilité à spiritualiser toutes choses et de sa tendresse
ingénieuse pour les malheureux. Il lui avait légué son esprit et son cœur ; on le vit bien, car, naturellement ardente,
pressante et sévère jusqu'alors, elle devint toute autre après la mort du Bienheureux. La « petite colombe, » ainsi qu'il
l'appelait, ne manqua ni de force ni de prudence dans la pratique du gouvernement. Il convient de la mettre au rang
des premières Mères de l'Institut de la Visitation, qui ont coopéré de plus près et le plus efficacement à la pensée et à
l'œuvre des deux Fondateurs. La tendresse et la confiance de sainte Jeanne-Françoise de Chantal envers la Mère de
Blonay se trahissent à toutes les pages des innombrables lettres qu'elle lui a écrites. C'est là que, même apres la lecture
de Charles-Auguste, l'on trouvera des traits nouveaux pour compléter et parfaire le portrait de l'éminente Supérieure.
1 Paris, 1655 ; réimpression en 1873, Nancy.
827 A l'âge de quinze ans, Aimée avait ressenti une grande blessure pour sa fierté, en se voyant obligée de céder le pas
dans l'église de Saint-Paul, à une dame qui possédait une terre dont les de Blonay avaient été jadis les seigneurs. Elle
s'endormit dans son banc et fut gratifiée d'un songe, où elle se vit rebutée de la Sainte Vierge, qui lui dit : « Vous
n'estes pas assez petite pour moy, qui ay fait choix d'estre abjecte et la derniere en la maison de mon Dieu. » (Voir sa
Vie par Charles-Auguste de Sales, chap. XXI.) Les paroles du saint Fondateur semblent faire allusion à ces premières
« visitations. »
828 Les derniers mois de son noviciat, Sœur Marie-Aimée se trouvant tentée violemment, n'osait, par orgueil, s'en
déclarer. (Cf. ibid., chap. V.) Voilà pourquoi le Saint l'exhorte à tout dire naïvement à lui-même, à la Mère de Chantal
et à la Directrice. Ces particularités indiquent que le présent billet aurait été écrit entre octobre et novembre 1612.
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DCCCXX. A la Mère de Chantal (Billet inédit). Annonce de
visiteuses
Annecy, [novembre 1612 829.]
Ma tres chere Mere,
Cette bonne dame est ma chere tante830 et digne de caresses ; sil vous plaist, elle pourra
bien entrer et ses filles831. Mais ne vous lasses pas.
Les deux Religieuses de Bon et de Bonlieu832 ont [292] envie d'arrester ce soir avec vous ;
vous leur pourres faire cette charité.
Bon soir, ma tres chere Mere, a laquelle je suis tout en Dieu et tout vostre.
Revu sur l'Autographe qui, en 1895, appartenait à S. E. le Cardinal Sanfelice.
_____
829 Le rapport qui paraît exister entre ces lignes et un billet de la Mère de Chantal (voir la note suivante), suggère la
date de 1612. Le mois de « novembre » se déduit des nouvelles de sa santé, compromise par de graves indispositions,
les mêmes sans doute, dont elle se remettait à peine à la fin de ce mois. (Cf. la lettre du 22 novembre à Mme de la
Fléchère.)
830 En 1612, la Mère de Chantal écrit à la fin d'un billet qu'elle adresse au Saint : « J'ai vu la bonne tante ; oh ! que
c'est une vénérable dame ! » (Sainte J.-F. Frémyot de Chantal, sa Vie et ses Œuvres ; Lettres, vol. Ier, Paris, Pion,
1877, pp. 8, 9.) On pourrait proposer avec quelque vraisemblance Pernette de la Faverge (cf. tomes XI, note (783), p.
354, et XII, note (346), p. 152) ; veuve et chargée de six enfants depuis 1606, elle manquait de loisirs pour faire le
voyage de La Roche à Annecy. Il est donc très probable que la Sainte ne la connaissait pas encore.
831 Les filles de la « bonne tante » seraient : Aimée, pupille en 1608, et Jeanne-Michelle qui avait quinze ans.
832 Il est impossible de les désigner, parce que d'autres Religieuses que celles qui nous sont connues, ont pu venir à
Annecy ; la clôture, en ce temps-là et dans ces maisons, permettait ces sorties ou les tolérait.
Le prieuré de Bonlieu sûus Sallenôves, le plus ancien monastère de femmes du diocèse de Genève, dut
appartenir primitivement à des Bénédictines. On ignore la date de sa fondation ; elle paraît remonter au XIe siècle,
mais son existence n'est signalée que dans un inventaire fait en 1110. Vers 1120, le prieuré fut occupé par des
Religieuses Cisterciennes venues du monastère du Betton, en Maurienne ; au siècle suivant, un essaim de Bonlieu
fondait le couvent de Sainte-Catherine, sur lequel il garda, pendant quelques années, une sorte de suprématie. (Cf.
tome XIII, note (334), p. 116.) Dans ses projets de réforme des monastères de son diocèse, saint François de Sales
avait proposé de transférer à Annecy ou à Runiilly les Cisterciennes de Bonlieu ; cette translation, longtemps discutée,
ne s'effectua qu'en 1648. Les Religieuses se fixèrent à Annecy, au faubourg de Bœuf, et y demeurèrent jusqu'en 1755
; à cette époque, ayant acheté le monastère des Bernardines établies au Pàquier-Mossières, elles lui donnèrent le nom
de Bonlieu, qui est resté à ce massif de bâtiments. Moins de vingt ans plus tard, les Dames de Sainte-Catherine furent
réunies à celles de Bonlieu ; la révolution les dispersa en 1793. (Cf. Mém. de l'Acad. Salés., 1892, tome XV.)
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DCCCXXI. Au duc de Bellegarde833 (Minute). Menaces et
prétentions des pasteurs protestants. Précaution que propose
l'Evêque de Genève pour les atténuer. Eloge de M. Millelot.
Annecy, 10 novembre 1612.
Monsieur,
Je laisse a monsieur Milletot le contentement de vous representer l'heureux succes de la
commission que le Roy luy avoit donné pour l'execution de l'edit de Nantes a Gex834, et me reserve
seulement de vous faire [293] un tres humble remerciment pour le soin continuel que vostre zele
a du restablissement de la gloire de Dieu en ce miserable balliage, ou l'heresie, qui a si longuement
foulé aux piedz la pieté, nous menace ericor maintenant, aussi effrontement que jamais, de rendre
vaine l'esperance que nous avons en vostre protection835 ; comme si le credit des pretendues eglises
de France estoit plus puissant pour nous empescher le renversement de l'effectuelle jouissance de
nostre juste pretention, que la justice de la Reyne et vostre intercession pour faire maintenir un
arrest si equitable et si saint, comm'est celuy en vertu duquel l'edit a esté executé.
Mais, Monsieur, comme c'est nostre bonheur d'avoir une foy contraire a celle des
huguenotz, aussi nous glorifions-nous d'avoir une esperance opposee a leur presomption ; a rayson
dequoy, tous les Catholiques de Gex, et moy plus que tous, esperons et espererons tous-jours de
voir tous les jours quelque progres de nostre sainte religion en ce petit bout de royaume qui est si
heureux d'estre sous vostre gouvernement. A quoy ne [294] serviroit pas peu si monsieur Milletot,
qui a si dignement prattiqué sa commission, avoit quelque charge particuliere d'ordonner et
connoistre de tout ce qui en dependroit, par maniere de surintendance aux officiers de la justice ;
car iceux estans de contraire religion a la nostre, ce nous seroit un grand bien d'avoir qui eust un
soin particulier de nous, comme auroit ledit sieur Milletot, qui certes a tesmoigné une grande
prudence et bonn'affection en cette occurrence.
Mais, Monsieur, vostre sagesse vous suggerera ce qui sera plus a propos sur ce point, et
moy, ce pendant, je continueray mes souhaitz devant Nostre Seigneur pour vostre prosperité, affin
qu'il luy plaise vous en combler a jamais. Je suis
833 Roger de Saint-Lary et de Termes, duc de Bellegarde, pair et grand écuyer de France (1563-1646), est un
personnage trop connu pour qu'il soit besoin de résumer ici son histoire ; on la trouvera dans les Mémoires sur la cour
de France, au temps de Henri III, de Henri IV et de Louis XIII. Il convient toutefois de faire une mention sépciale des
circonstances qui firent du célèbre gentilhomme le pénitent et l'ami de François de Sales. Leur première rencontre,
d'après l'Année Sainte (tome VIII, pp. 225, 264), aurait eu lieu à Belley, au mois d'août 1603 ; ils en repartirent le 12
du même mois, « pour aller a Gex mettre en execution les lettres patentes du Roy et un arrest du Parlement de Dijon
pour l'establissement des cures et des eglises de Gex, Ternier et Galliard dependant de la couronne de France. » C'est
dans ce pays que le Saint convertit à la foi « les sieurs de Vangdemair et de Marqueron, » qui étaient de la suite du
duc. Irrités, les ministres essayèrent d'attenter à la vie du Bienheureux par le poison. Celui-ci, malgré les soins « du
medecin de monsieur de Bellegarde, tomba dans une grosse fievre et en pensa mourir... Et j'estois present, » ajoute
François Favre, de qui nous tenons ce récit. (Process. remiss. Gebenn. (I), ad art. 14.) Le duc intervint en 1611 pour
le rétablissement du culte à Challex et à Divonne. (Cf. ci-dessus, note (183), p. 57.) Au mois de juillet 1613, il était à
Gex, où notre Saint le trouva, et le 31, Roger de Bellegarde fit « ses Pasques » à Saint-Claude. (Lettre du 31 juillet
1613, au marquis de Lans.) C'est vers ce temps-là qu'il faut placer sa confession générale au Bienheureux.
Il nous reste une dizaine de lettres spirituelles adressées par François de Sales à son nouveau Théotime ; elles
ont passé jusqu'ici assez inaperçues. On y verra comment le prestige de sa sainteté rayonna, de son vivant, jusque sur
l'entourage intime de Louis XIII et de la régente, mais l'on admirera surtout par quelle merveilleuse souplesse son zèle
sut atteindre, avec autant de suavité que de force, l'une des âmes les plus mondaines et lès plus hautaines de la cour
de France.
834 Vide supra, Epist. DCCXCIX, DCCC.
835 Dans les derniers mois de cette année, en effet, les calvinistes avaient élevé de nouvelles protestations. Pierre
Chevalier, seigneur de Fernex, se chargea de présenter au Conseil du roi leurs réclamations ; mais un arrêt rendu le
23 décembre et publié à Gex le 14 janvier 1613, maintint la restitution des églises aux catholiques, tout en faisant
quelques concessions aux protestants. (Cf. Brossard, Hist. du pays de Gex, 1851, chap. XXV.)
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Ce 10 novembre 1612 836.
Revu sur le texte inséré dans le Ier et le IId Procès de Canonisation.
_____
DCCCXXII. A M. Gilles le Mazuyer837. L'église de Gex ;
espérances qu'elle donne. Une difficulté et une impossibilité
se rencontrent dans les lettres de naturalité obtenues pour les
curés. Une « viande friande » au XVIIe siècle.
Remerciements du Saint. Il ne fait pas le « refuseur, » mais
jamais il ne sera « praetendeur. » Les francs serviteurs de
Dieu, peu nombreux.
Annecy, 14 novembre 1612.
Monsieur,
Nostre pauvre Gex est tous-jours presque en mesme [295] estat838 ; ce quil y a de plus, ne
sont que certaines dispositions qui nous font promesse de mieux a l'advenir839, Mays il faut louer
Dieu, car aussi bien ne meritons-nous pas quil face une transmutation momentanee de ces cœurs
lâ, qui seroit un miracle en la grace, comme fut la transmutation de l'eau au vin840, en la nature. Je
m'essayeray de faire que rien ne manque de ma part, autant que mon pouvoir s'estendra.
Voyla, Monsieur, la copie des lettres de naturalité que vostre bonté a impetrees pour nos
pauvres curés, esquelles je treuve une difficulté et un'impossibilité. L'impossibilité est que ces bons
prestres obtiennent de Romme un brevet par lequel nostre Saint Pere accordera que les benefices
de ces curés venans a vaquer en cour de Romme, il n'en sera prouveu qu'a la nomination du Roy,
ou par les Ordinaires. Juges je vous supplie, Monsieur, si cela est en la puissance ni des curés ni
de moy ; car, ou ces benefices estans enclavés au royaume sont par la en cette condition, et lhors,
qu'est il besoin d'obtenir le [296] brevet mentionné ? ou ilz ne le sont pas, et lhors, quelle temerité
a des pauvres ecclesiastiques decousuz, de demander au Pape une chose de telle consequence ? car
836 Cette date est donnée par le second Procès de Canonisation du Saint ; elle manque dans le premier.
837 Gilles Le Mazuyer, né à Toulouse de Philibert Le Mazuyer, vicomte d'Ambrières, conseiller au Parlement de Paris,
et de Marie Legrenier, fut envoyé en 1611 au bailliage de Gex, avec le sieur de Villarnoul, pour régler les différends
qui divisaient les catholiques et les calvinistes de ce pays. Il était alors maître des requêtes au Conseil royal. Le «
grand catholique et grand homme d'affaires, » comme l'appelle le Saint dans sa lettre du 13 décembre 1611 (voir ci-
dessus, p. 128), devint quatre ans plus tard premier président du Parlement de Toulouse, Frànçois de Clary lui ayant
cédé sa charge et donné sa fille Françoise en mariage, à la fin de 1615. A peine installé, il offrait à l'Evêque de Genève
un témoignage délicat d'amitié, en lui demandant pour la capitale du Languedoc un essaim de ses chères filles ; il le
pria d'y venir lui-même prêcher un Carême. En 1617, il assista à l'assemblée des Notables tenue à Rouen, et à celle de
Paris en 1627. Magnifique dans le train extérieur de sa maison, inaccessible à la crainte, rude au parler et dans l'action,
Gilles Le Mazuyer était bien fait pour vivre dans cette époque tourmentée et pour tenir tête aux violences que
fomentaient dans le Midi les passions religieuses de son temps. S'il ne fut pas tendre et miséricordieux pour les
protestants, ceux-ci le lui rendirent bien. Les Oratoriens de Toulouse, les Carmélites d'Auch lui doivent leur fondation.
Cet homme intraitable était pieux jusqu'à la ferveur ; sa grandeur d'âme et son désintéressement éclatèrent surtout
pendant la peste qui, en 1631, désola Toulouse. Il mourut le 10 octobre, victime de son dévouement. (Voir Hist. du
Parlement de Toulouse, Ms. Lombard, conservé aux Archives du Parlement, tome III.)
838 Cf. Epist. præced.
839 Peu nombreux et craintifs, les catholiques de Gex ne formaient pas encore une communauté serrée et résistante.
Toujours aux aguets, il leur fallait compter avec leurs voisins, ingénieux et opiniâtres pour faire échec par tous les
moyens aux ordonnances des commissaires royaux.
840 Joan., II, 7-9.
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vous sçaves, Monsieur, que les grans estiment leurs droitz cherement, et que ce n'est pas a des
chetifs curés d'impetrer telles choses. Cela donq me semble impossible aux curés et a moy qui
voudrois m'engager pour eux.
La difficulté est en ce qu'on les veut astraindre que sil failloit playder pour les tiltres et
possessions desditz benefices, ilz poursuivront les proces par devant les officiers du Roy et non
ailleurs. Car, Monsieur, ne pourroyent ilz pas playder, ou au petitoire, ou, pour les tiltres, devant
mon official forain resident dans le royaume, ou devant Monsieur l'Archevesque de Vienne, nostre
Metropolitain ? Il m'est advis qu'en France les tribunaux ecclesiastiques ne sont pas inhabilités a
decider de telles causes ; neanmoins je ne le sçai pas bonnement. Mays icy en Savoye, ou on suit
le stile des cours des Parlemens de France, nous connoissons du petitoire, et par consequent des
tiltres ; et a Vienne, je sçai qu'on en playde aussi. Voyla donq ma difficulté.
Or, je vous represente l'un et l'autre, affin quil vous playse, Monsieur, si vous le juges
raysonnable et que je ne me soys pas trompé en mon discours, d'oster l'un et l'autre, en sorte que
les lettres puissent estr'utiles a ceux pour lesquelz vostre faveur les a obtenues ; car il ne manquera
pas d'entrepreneurs qui, par le manquement de l'execution de telles charges, attaqueront ces
pauvres curés pour avoir leurs benefices, viande si friande en ce tems, que les plus incapables en
veulent plus avoir.
Et a ce propos, je vous remercie humblement de la bonne pensee que vous avies faite pour
moy avec monsieur des Hayes, si je fusse allé a Paris841. Je ne meriteray jamais cette faveur, si
mes desirs et intentions ne tienne (sic) lieu de merite. Dieu, qui de sa grace a esté jusques a present
avec moy en ce chemin ecclesiastique [297] par lequel je chemine, m'a donné du pain a manger et
de l'eau a boire et des vestemens pour m'affeubler : c'est bien assés pour m'obliger a le tenir pour
mon Dieu, a luy dresser des autelz842 a Gex, en France et par tout ou il luy playra employer ma
misere pour la gloire de sa misericorde843. Je ne dis pas cela, Monsieur, pour faire le refuseur, mays
seulement pour dire avec, confiance de vostre amitié, que je ne seray jamais prætendeur.844 Cui
quod satis est satis non est, illi nihil satis est845.
Je ne laisse pas pourtant, Monsieur, de vous estre extremement obligé, et ne me puis
empesché (sic) de desirer que je puisse un jour vous l'aller tesmoigner a Paris. Et tandis, remettant
cela au bon playsir de Nostre Seigneur, je le supplie quil vous comble de ses benedictions et
madame vostre bonne mere846, delaquelle j'honnore de tout mon cœur la pieté, et me sens honnoré
de sa bienveuillance que le P. François847 m'a attestee. C'est un rejallissement de la vostre, pour
laquelle je suis sans fin,
Monsieur,
Vostre plus humble tres affectionné serviteur,
FRANÇS, E. de Geneve.
XIIII novembre 1612, a Neci.
Monsieur, je vous supplie humblement d'avoir soin, puisquil vous plait le me promettre, de
ma requeste contre ceux de Geneve848. Je crains la prudence de ce siecle, laquelle, selon Dieu, est
une mere imprudence849.
O combien cette divine Majesté a peu de francs [298] serviteurs ! Vous estes bienheureux,
Monsieur, d'estre de ce petit nombre.
A Monsieur
841 Voir ci-dessus, Lettre DCCCX.
842 Gen., XXVIII, 20-22 cf. I Tim., VI, 8.
843 On voit réapparaître ici le dessein que les admirateurs de François de Sales renouvelèrent si souvent de le faire
sortir de ses chères montagnes, pour donner à son apostolat un champ plus vaste ou un théâtre plus relevé.
844 Rien ne suffit à celui auquel ce qui suffit ne suffit pas.
845 Cf. Tr. de l'Am. de Dieu, liv. VIII, chap. VIII.
846 Nous n'avons pas de documents biographiques sur la mère du destinataire. (Cf. ci-dessus, note (837), p. 295.)
847 Le P. François de Chambéry (idem, note (394), p. 129).
848 Voir note (851) de la page suivante.
849 Cf. I Cor., I, 20.
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21.5 Page 205

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Monsieur Le Mazuyer, Viscomte d'Ambrieux,
Conseiller du Roy en ses Conseilz d'Estat
et privé et Maistre des requestes de l'hostel de Sa Majesté.
A Paris.
Revu sur l'Autographe conservé à la Visitation de Toulouse.
_____
DCCCXXIII. A M. Antoine des Hayes. Requête de François de
Sales. A la diète de Bade. Obstination des Bernois. Un
déplaisir du Saint
Annecy, 14 novembre 1612.
Monsieur,
Je ne puis pas perdre cett'occasion de vous ramentevoir mon affection qui vous honnore au
dessus de toutes les pensees que vous en sçauries jamais avoir. J'escris a monsieur Le Masuyer850,
tous-jours pour nos affaires de Gex, et luy recommande ma requeste contre ceux de Geneve,
delaquelle il luy a pleu me promettre d'avoir soin851. Ce n'est pas que j'espere rien de cette poursuite
[299] en un siecle si plein de considerations humaines, mays au moins empescheray-je la
præscription ; et si Dieu nous envoye une sayson plus pieuse, ce sera tous-jours un advantage
d'avoir demandé.
Nos ambassadeurs de deça sont revenus de la diete de Bades, ou ilz pensoyent que
l'authorité du Roy et l'entremise des Cantons catholiques auroyent disposé les Bernois a la
restitution du païs de Vaux, ou au moins a convenir d'arbitres pour un journee amiable ; mays ilz
ont treuvé tout au contraire, car les Bernois n'ont quasi pas voulu entendre la proposition, et nul
n'a parlé en nostre faveur852. Reste que Son Altesse prenne une bonne et salutaire resolution
850 Epist. præced.
851 Une copie non datée de ce document se conserve aux Archives de Genève, Portefeuille historique n° 2483 ; elle a
été publiée par M. Eugène Ritter, avec plusieurs autres pièces concernant la même affaire, dans la Revue Savoisienne
de septembre-octobre 1885.
Dans sa requête, le saint Evêque invoquait ses droits et ceux du Chapitre de son église cathédrale sur les «
domaines ecclesiasticques usurpez par la ville de Geneve, » et demandait au Roi et à son Conseil d'être « réintegré et
restably... en la reelle possession et jouissance des eglises, maisons presbiteralles, biens et revenus » qui appartenaient
jadis au Chapitre de Saint-Pierre et au prieuré de Saint-Victor. Déjà, au mois de juillet précédent, il avait présenté les
mêmes réclamations aux commissaires royaux chargés de mettre à exécution l'Edit de Nantes dans le bailliage de Gex.
Renvoyé par ceux-ci au Conseil de Sa Majesté (cf. ci-dessus, note (731), p. 254), il dut réitérer ses instances au
commencement de novembre, car le 17 de ce mois, « le Conseil d'Estat du Roy » ordonnait d'ouïr « les parties
pardevant les sieurs de Vic et Le Mazuier. » (Voir Revue Savoisienne, 1885, p. 260.) Mais, comme on le voit par cette
lettre, le Saint ne se faisait guère illusion sur l'issue de ses démarches ; ainsi qu'il l'avait prévu, elles échouèrent, et,
semble-t-il, devant les oppositions que leur suscita le zèle remuant du syndic Jacob Anjorrant, député de la Seigneurie
de Genève. (Voir ibid., ses lettres et ses rapports.)
852 La diète des huit cantons catholiques s'ouvrit à Bade le 4 octobre (cf. ci-dessus, note (786), p. 276) ; l'assemblée
de la diète générale se tint le 21 du même mois. Le baron Amédée de Chevron-Villette et le sieur Valdengo, auditeur
en la Chambre des Comptes de Piémont, avaient été adjoints comme délégués extraordinaires à M. de la Tournette,
ambassadeur ordinaire en Suisse depuis juin 1611. (Voir tome XI, note (49), p. 7.) De Lucerne, celui-ci écrivait à son
prince, le 8 octobre 1612 : « J'ay comparu a l'assemblee des 8 Cantons le 4 de ce presen mois... Je diray a V. A. S.
comme j'ay festiné Messrs les Ambassadeurs des 3 Cantons, je leur ay faict bonne chere et n'avons pas oublié de bien
boire a la santé de V. A. S. » (Turin, Archives de l'Etat, Svizzera, Lettere Ministri, Mazzo 5.) Ces libations furent
suivies de belles promesses, et ce fut tout. Les Bernois, ayant fait secrètement alliance avec les Valaisans et forts de
l'appui que leur promettaient leurs coreligionnaires de France, ne voulurent rien entendre. Nous avons les lettres
particulières du baron de Villette et du seigneur de la Tournette, où chacun expose au duc de Savoie l'insuccès de sa
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d'attendre que Dieu face [300] naistre un'occasion propre pour tirer sa rayson. Je suis marri de ce
succes a cause de la religion, qui est si peu regardee et favorisee, et j'ay encor mon interest
particulier pour 25 ou trente parroisses de ce pais-la, qui sont de mon diocæse.
Voyla nos nouvelles, et n'est pas besoin que je vous die que je ne desire pas que l'on sache
que je les escrive, car aussi ne les escrirois-je pas a un autre qu'a vous, a qui je suis tout
extraordinairement,
Monsieur,
Serviteur tres fidele et tres humble,
FRANÇS, E. de Geneve.
XIIII novembre 1612, a Neci.
Monsieur, je ne parle plus du deplaysir que j'ay eu de n'aller pas vers vous, mays je ne le
puis oublier853.
A Monsieur
[Monsieur] des Hayes, Maistre d'hostel du Roy,
Gouverneur et Baillif du chasteau et ville de Montargis.
Revu sur l'Autographe appartenant à Mlle Venant, à Lincelles (Nord).
_____
DCCCXXIV. A la Présidente Favre. Une âme qui va bien.
L'amour de Dieu et la paix. Les voies du Ciel. Précaution
contre les « babillardz ». Ce que pensait le Saint des
Ursulines et des institutrices chrétiennes. Les entreprises
extraordinaires qui ne sont pas hasardées. Un monastère de
seize bonnes filles, où rien n'abonde ni ne manque. La pauvre
Thiollier
Annecy, 18 novembre 1612.
Ma tres chere Seur,
J'ay receu vos deux lettres, toutes douces et de bonnes nouvelles ; car vostre chere ame va
bien, puisqu'elle [301] veut bien s'avancer au saint amour de Nostre Seigneur. Faysons bien cela,
ma tres chere Fille, car en fin, tout le reste n'est que vanité854. Et parce que l'amour ne loge qu'en
la paix, soyes tous-jours soigneuse de bien conserver la sainte tranquillité de cœur que je vous
recommande si souvent. Que nous sommes bienheureux, ma chere Seur, d'avoir des travaux, des
peynes et des ennuis ! car ce sont les voyes du Ciel, pourveu que nous les consacrions a Dieu.
mission, avec un embarras mal dissimulé. Une lettre de ce dernier, du 3 novembre 1612, adressée à un ministre de
Charles-Emmanuel, nous apprend qu'il fut vivement blessé de n'avoir pas mené tout seul les négociations. « On a bien
esté esbey, » dit-il, « de voir venir trois Ambassadeurs a la Diete generale, pour demander a Messrs de Berne ouy ou
non. » (Ibid. et Archives de la Visitation d'Annecy ; voir à l'Appendice II.)
La diplomatie de la cour de Savoie, si féconde en ressources, l'habileté et le dévouement de ses négociateurs
essayèrent en vain de déjouer l'obstination des Bernois. Quelques années plus tard, Charles-Emmanuel, épuisé, signait
le 23 juin 1617, un traité entériné seulement le 18 juillet 1629, qui leur cédait ses droits sur le pays de Vaud. (Cf. plus
haut, note (209), p. 68.)
853 Cf. Epist. DCCCX et p. 297.
854 Eccles., I, 2, 14, XII, 8.
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Je vous renvoye les papiers de devotion, que je treuve bien utiles ; mays si on les imprimoit,
je ne voudrois pas que vostre nom y fust descouvert, pour ne point donner lieu aux babillardz d'en
parler, et sur tout l'œuvre estant si courte.
Vous pouves bien, ce me semble, choisir ce bon Pere la pour vostre confesseur855,
puisqu'aussi bien le Pere Recteur856 est souvent empesché.
Nos bonnes Dames de la Visitation font extremement bien, et quand leur logement sera du
tout accommodé, elles seront tres bien ou elles sont maintenant857. Vostre fille858 chemine fort
devotement et se porte tres bien. La bonne Mere de Chantal est presque guerie et a aujourd'huy
esté a la sainte Messe859.
Ce seroit un tres grand bien qu'a Chamberi il y eust des Ursulines et voudrois bien y pouvoir
contribuer quelque chose860 ; car en fin, bonheur a ceux qui nourrissent [302] les enfans pour
l'amour, crainte et service de Dieu. Il ne faut que trois filles ou femmes courageuses pour
commencer ; Dieu donnera l'accroissement. Nos Dames de la Visitation doivent donner courage
d'entreprendre, a celles qui seront tant soit peu disposees. Selon mon jugement, ce n'est pas
hazarder que de se confier un peu extraordinairement a Nostre Seigneur es desseins de son service.
Ma tres chere Seur, ma Fille, aymés tous-jours bien mon ame, qui ayme tant la vostre. Je
suis en Nostre Seigneur, tout vostre.
Vostre tres humble et tres obeissant frere et serviteur,
FRANÇS, E. de Geneve.
18 novembre 1612, a Neci.
La bonne Thiollier sera, a mon advis, fort consolee en cette Congregation861, laquelle se
treuvera composee, mercredi prochain, de seize bonnes filles862, laissant a part celles qui sont
receuës et qui ne peuvent encor [303] venir. Des-ormais on sera en peyne a refuser, et neanmoins
il le faudra faire, si ce n'est pour quelque personne qui puisse rendre quelque extraordinaire service
a Nostre Seigneur. Et quant aux moyens, rien n'y abonde et rien n'y manque ; Dieu a soin de ses
servantes et Nostre Dame les pourvoit. Il vous faut tous-jours dire des nouvelles de cette petite
assemblee, laquelle, comme je croy, vous est chere.
855 Sans doute un Jésuite, dont nous ignorons le nom.
856 Le P. Claude Le Maire (cf. ci-dessus, note (611), p. 209).
857 Voir plus haut, note (704), p. 245, et note (803), p. 282.
858 Sœur Marie-Jacqueline Favre.
859 Cf. les deux lettres suivantes et ci-dessus, note (829), p. 292.
860 On lit dans les Chroniques de l'Ordre des Ursulines (Paris, 1673) : « C'est au grand saint François de Sales que la
Savoye est redevable de l'entrée des Ursulines en sa ville capitale de Chambery et de là en d'autres, parce que cet
incomparable Prelat, toujours animé de zele pour le salut des ames, s'employa aupres de Leurs Altesses Royales pour
leur faire connoistre le fruit qui provenoit aux peuples de la bonne institution que les Filles de sainte Ursule donnoient
à la jeunesse, et pour obtenir des patentes aux fins de leur etablissement dans leurs Estats. »
Le Saint fut heureux dans sa démarche, qu'il fit sans doute pendant son voyage à Turin, avril-mai 1613 : le
duc adressa, le 14 mai de cette même année, les lettres patentes au souverain Sénat (voir Burnier, Hist. du Sénat, 1864,
p. 687) ; mais celui-ci opposa mille obtacles et ne les entérina qu'en 1625, après plusieurs lettres de jussion. Mieux
inspiré, le Conseil de ville s'intéressa à la fondation et l'assista d'une « aumône de 25 ducatons pendant six années
consécutives. » (Ibid., p. 557.) Le chroniqueur cité plus haut, résume ainsi qu'il suit l'histoire de cette fondation : « Il
se trouva un jeune estudiant qui avoit veû la Mere Françoise Leguisé, Ursuline congregée, laquelle estoit alors au Pont
Saint Esprit, où celuy-cy luy écrivit en diligence, luy donnant avis de l'occasion qui s'offroit de faire une maison de
son Ordre dans la Savoye. » La Mère pria un de ses amis, « M. Faure, elû de Lion, de faire le voyage de Chambery ;
ce qu'il entreprit en compagnie du R. P. de Retz, superieur de la Congregation de l'Oratoire et des Ursulines de
Provence, et... ils jugerent qu'il ne falloit pas negliger ce bon dessein. Ainsi M. Zacharie Gonnet, ecclesiastique, et les
RR. PP. de Serre et Jacques George, de la Compagnie de Jesus, obtinrent les permissions necessaires. Aprés cela, la
Mere Leguisé, avec quatre autres filles, se mit en chemin et arriva à Chambery en avril 1625. »
861 Sœur Marie-Antoine (voir ci-dessus, note (484), p. 161).
862 La Congrégation comprenait à cette date : la Mère de Chantal, les Sœurs Marie-Jacqueline Favre, Jeanne-Charlotte
de Bréchard, Claude-Françoise Roget, Péronne-Marie de Chastel, Marie-Marguerite Milletot, Marie-Adrienne Fichet,
Claude-Marie Thiollier, professes ; Claude-Agnès Joly de la Roche, Marie-Aimée de Blonay, Marie-Marthe Legros,
Marie-Avoie Humbert, Anne-Marie Rosset, novices ; Marie-Antoine Thiollier, dont le Saint parle ici
prétendante, et Anne-Jacqueline Coste, tourière. La seizième serait-elle Sœur Anne-Françoise Chardon, qui reçut
l'habit le 29 novembre ?
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La pauvre Thiollier estoit si empressee, qu'elle oublia le pacquet de la bonne madame
d'Aiguebelle863, a laquelle partant je ne sçaurois respondre. Je salüe de tout mon cœur ma tres
chere niece864.
A Madame
Madame la premiere Presidente de Savoye.
_____
DCCCXXV. A Madame d'Escrilles. Nouvelles de la Mère de
Chantal. Oratoire de la Visitation
Annecy, 18 novembre 1612 865.
Vostre filz866 sera bien, je m'asseure, chez M. de Genesia867. Il sera bon de faire comme
vous dites, et [304] envoyer le quart ou le tier de la pension, selon qu'elle se donne aux autres lieux.
Nostre bonne Mme de Chantal se porte beaucoup mieux868, avec un (sic) tres chere
souvenance de vous et de vostre dilection. Mercredi nous logerons le Saint Sacrement en l'oratoire
de la Visitation869, dequoy toutes ces bonnes filles sont grandement en feste.
Quand vous seres a Saint Joyre je treuveray bien commodité de vous escrire, et, ou que
vous soyes, je vous auray tous-jours fort present'en ce peu de prieres que je presente a Nostre
Seigneur, que je supplie tenir vostre cœur de sa main et vous combler de son saint amour. Je suis,
Ma tres chere Fille,
Vostre plus humble tres dedié serviteur,
F., E. de G.
XVIII novembre 1612.
Revu sur l'Autographe conservé à Turin, à la Maison-Mère des PP. Salésiens
de Don Bosco. [305]
_____
863 Mme d'Aiguebelette (voir le tome précédent, note (1134), p. 393).
864 Sans nul doute, Mme de la Valbonne.
865 La date, qui serait douteuse, si nous n'avions que l'Autographe, est prouvée manifestement par l'allusion au nouvel
« oratoire » de la petite Communauté. Quant à la destinataire, la mention de Saint-Jeoire, dont le père de Mme
d'Escrilles. était seigneur et baron, la désigne assez clairement, et aussi le rapport de ce billet avec les lettres du 13
octobre 1613 et de février 1613, où il est parlé de « M. de Genesia. »
Migne (tome VI, col. 1091) a donc fait erreur en datant cette lettre de 1622, et en lui assignant pour
destinataire la sœur du Saint.
866 Antoine-Balthazard de la Touvière d'Escrilles (cf. ci-dessus, p. 280).
867 Lancelot Guillet, dit de Pougny, seigneur de Genissia, puis baron de Saint-Denis, Charansonay et Saint-Marcel,
épousa vers 1595 Charlotte de Maillard, et en secondes noces, après 1608, Louise de Montferrand. Il était fils de noble
Marin Guillet, coseigneur de Monthoux, et de Gasparde de Puencet.
Le choix de Mme d'Escrilles s'explique par les alliances qui avaient uni les familles de Mouxy et Guillet de
Monthoux.
868 Cf. pp. 302, 306, 307.
869 « La maison et chapelle estant bien ajancees, nôtre Bienheureux vint donner l'habit a une fille » — Sœur Marie-
Antoine Thiollier « et posa le Saint Sacrement. » Ceci se passa le 21 novembre. (Hist. de la Fondation du 1er
Monastère d'Annecy.)
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DCCCXXVI. A la Mère de Chantal (Inédite). Affectueuse
gronderie. La Mère de Chantal au milieu des tracas d'une
installation. Pourquoi doit-elle garder ses forces
Annecy, 20 novembre 1612 870.
Dites moy donq, mais dites en conscience, ma tres chere, comme vous vous portes du tracas
que vous fistes hier parmi cette nouvelle mayson. A peu que je ne fus scandalisé, ou au moins
fasché ; car, quell'apparence, au sortir de tant de foiblesses, s'aller travailler et rompre parmi cette
fabrique ? Neanmoins, j'attens de sçavoir comme cett'exercice vous sera reusci, car selon cela, ou
je me courrouceray en qualité de pere, ou je dissimuleray la faute en qualité de filz. Et ce pendant,
vous sçaves bien que vous ne deves pas jeuner aujourdhuy, car nostre glorieuse Reyne et
Maistresse a besoin de ce peu de forces qui vous restent pour d'autres services qu'elle veut des-
ormais tirer de vous.
Or sus, bon jour, ma tres chere Mere ; demeures non seulement en paix, mais en repos.
Dieu soit a jamais l'unique praetention de nostre cœur. Amen.
Revu sur l'Autographe appartenant à M. l'abbé Giraud, Aumônier du Noviciat des Frères des
Ecoles chrétiennes, à Moulins. [306]
_____
DCCCXXVII. A Madame de la Fléchère871. Les bancs des
femmes dans les chœurs des églises. — Elles peuvent toutefois y
entrer. Nouvelles de la Mère de Chantal et de la
Congrégation. Pourquoi il est mieux d'avoir moins.
Annecy, 22 novembre 1612.
Il est vray que nous fismes un decret, il y a environ trois [ans]872, ma tres chere Fille, que
tant qu'on pourroit, on osteroit les bancs a femmes des chœurs de toutes les eglises, parce que cela
est juste, bien seant et conforme aux anciennes coustumes des chrestiens. Mais il ne fut pas dit, ni
ne le devoit estre, que les femmes n'entrassent pas au chœur ; car, pour plusieurs occasions, il est
raysonnable qu'elles y entrent, pourveu que ce soit avec la modestie que la sainteté du lieu requiert.
Prenés donq discrettement la place, pour vos prieres, qui vous sera plus propre, pourveu que ce
soit sans banc ; car je ne voudrois pas que vostre banc fust aupres de l'autel, a cause [de] la
870 D'après sa teneur, ce billet a dû être écrit la veille d'une fête de la Sainte Vierge, pendant une convalescence de la
Mère de Chantal et alors que le nouveau logement des Sœurs n'était pas encore tout à fait accommodé. Or, le départ
de la Galerie s'effectua le 30 octobre 1612 (cf. ci-dessus, note (803), p. 282). Nul doute que l'intrépide Fondatrice n'ait
voulu prendre sa part de travail parmi les tracas de l'installation, après avoir pris le souci du déménagement. Le 18
novembre (voir ci-dessus, pp. 302, 305) elle était « presque guerie ; » le 22 (voir page suivante), elle se remettait «
fort foiblement ; » enfin, le 18 la maison n'était pas encore adaptée à sa nouvelle destination. Toutes ces circonstances
concordent avec la date que nous proposons.
871 Les particularités et les allusions du texte conviennent à Mme de la Fléchère plus qu'à toute autre destinataire.
872 Le Synode de 1603 avait fait la défense suivante : « Pour ce qu'il nous a esté remonstré que plusieurs gentilhommes
dressent des bancs dans les cueurs des eglises, occasion de quoy l'Office est empeché : nous avons ordonné qu'il leur
est permis d'y entrer ; mais quant aux femmes, qu'elles demeureront dans la nez. » (R. E.) Les constitutions synodales
de 1612 portent cet article : « Sont des a present les defenses rafreschiês. »
Il y a donc erreur dans le texte de Datta ; ce n'est pas trois, mais neuf qu'il faudrait lire. En supposant que le
Saint avait écrit en chiffres, l'erreur entre 3 et 9 serait facile.
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messeance. Vous sçaves bien qu'en cette ville et en nostre Office le plus solemnel, les femmes se
mettent bien dans le chœur et aux treilles.
La bonne madame de Chantal se va remettant, mais fort foiblement873 ; elle fut hier a la
Messe et a l'exhortation. Ell'a un cœur admirable envers Dieu et vous [307] cherit parfaitement.
La petite Congregation va croissant, ce me semble, en vertu comm'en nombre des filles.
Nous avons accommodé les differences du cher mari et du beaupere874 au mieux que nous
avons sceu. Il est mieux d'avoir moins et de l'avoir en paix.
Dieu vous benisse, ma tres chere Fille, et je suis en luy,
Vostre plus humble et tres affectionné serviteur,
FRANÇS, E. de Geneve.
_____
DCCCXXVIII. A la Présidente Favre (Inédite). Les Ursulines et
les petites filles de Chambéry. Un défaut de l'éducation
maternelle, assez fréquent, d'après le Saint
Annecy, 28 novembre 1612.
Ma tres chere Seur,
Je vous salue mille fois de tout mon cœur, et prie Dieu que le vostre soit a jamais rempli
de paix, douceur et devotion. Faites moy le bien de m'advertir, je vous supplie, quand Mme
d'Alufen875 sera arrivee a Chamberi, [308] et encor si l'envie que le bon Pere Thimothee876 a
d'introduire a Chamberi l'Institut des Urselines pourra reuscir877. Ce seroit sans doute un grand
bien pour ces pauvres petites filles, qui souvent, sous les caresses de leurs meres, aprenent
beaucoup de vanités qui croissent avec elles et plus qu'elles.
Hier, monsieur le Comte de Saint Alban et madame la Contesse sa femme878 passerent icy,
mays nous n'eusmes pas le bien de les voir.
Dieu vous benisse de sa grande benediction, ma tres chere Seur, ma Fille, et je suis a jamais
Vostre plus humble tres affectionné frere et serviteur,
FRANÇS, E. de Geneve.
873 Cf. le billet précédent.
874 Henri, seigneur de la Fléchère, Molliens, Vanzy, de la Caille, etc., chevalier des saints Maurice et Lazare,
commandeur de Saint-Julien et commissaire de l'artillerie deçà les monts par patentes du 15 février 1595, avait épousé
(contrat dotal du 18 septembre 1571) Etiennette de Bellegarde. Il testa le 8 avril 1612, mais il a pu survivre à son
testament. C'est de ce gentilhomme que fait mention la Mère de Chaugy, quand elle écrit dans la Vie de Mme de la
Fléchère, chap. II : « Les occasions d'exercer une sainte patience ne luy manquerent pas, ayant rencontré un beau-pere
âgé et d'une humeur assez fascheuse. » (Les Vies de VIII venerables Veves, etc., Annessy, 1659.)
875 Très probablement Anne de Gingins, fille de Joseph de Gingins, baron de la Sarraz au pays de Vaud, et de Barbille
de Chetin, de Berne. Elle avait épousé noble François-Gaspard Mestral de Mons, qui figure avec le titre de « seigneur
d'Aruffens » dans un acte du 20 février 1615. (Archives de la Visitation d'Annecy, Collection J. Vuÿ.) Par son mari,
fils de Françoise de Villette-la-Couz, « Mme d'Alufen » était alliée à la famille de Sales. (Cf. Guichenon, Hist. de
Bresse et Bugey, 1650, Partie III, continuation.)
876 Ce P. Timothée doit être un Capucin ou un Cordelier.
877 Voir ci-dessus, note (860), p. 302.
878 Claude-François1 Pobel, seigneur de Pressy et la Croix, baron d'Epierre, comte de Saint-Alban, était fils de Catherin
Pobel, seigneur d'Asnières ; il avait épousé Denise-Françoise de Lambert, et en secondes noces, par contrat dotal du
26 janvier 1599, Marguerite du Pont. Ambassadeur en Suisse (1593), chevalier du Sénat en 1597, conseiller d'Etat et
chambellan de Son Altesse, baron, puis comte de Saint-Alban en 1608, Claude-François testa le 28 juillet 1618 et
mourut le 14 juillet 1625. (D'après les notes de M. le comte de Mareschal et le Reg. des Entrées du Sénat.)
1 Il ne faut pas le confondre avec son frère Claude. Nous avons donc fait erreur (note (753), p. 262) en appelant celui-
ci Claude-François.
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22 Pages 211-220

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22.1 Page 211

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XXVIII novembre 1612, a Neci.
Je salue tres cherement ma bonne niece879, que j'aime et honnore de tout mon cœur.
A Madame
Madame la premiere Presidente de Savoye.
Revu sur une photographie de l'Autographe appartenant à M. comte d'Yrsch, à Freiharn, près
Munich (Haute-Bavière). [309]
_____
DCCCXXIX. A M. Claude de Neuvecelle880. Recommandation
réitérée en faveur d'une pauvre fille.
Annecy, 28 novembre 1612.
Monsieur,
La pauvre fille pour laquelle je vous parlay et vous me promistes quelque secours, se plaint
a moy dequoy elle ne reçoit aucun fruit de mon intercession, ni de la bonne volonté qu'alors il vous
pleut me tesmoigner. Ayes aggreable sur cela, je vous prie, Monsieur, que je vous en donne
souvenance, et vous die que Dieu vous recompensera de tout ce que vous feres pour cette sienne
pauvre creature, bien que ce soit par rayson d'equité et de vray devoir. Je m'asseure que vostre
charité et bon naturel vous solliciteront assés, sans que personne s'y employe davantage.
C'est pourquoy je me contenteray de vous l'aves (sic) rememoré, en vous conjurant de
m'aymer tous-jours, puis que vous souhaitant toute sorte de bonheur, et mesme en vostre digne
mariage dont on m'a donné la nouvelle ces jours passés, je demeureray,
Monsieur,
Vostre bien humble affectionné serviteur en Nostre Seigneur,
FRANÇS, E. de Geneve.
XXVIII novembre 1612, a Neci.
A Monsieur
Monsieur de Noveselle.
Revu sur l'Autographe appartenant à Mme Favet, à Nice. [310]
_____
879 Mme de la Valbonne, belle-fille de la destinataire.
880 Cette lettre s'adresse au fils de Georges-Philippe de Varax et de Melchide d'Angeville, Claude, seigneur de
Neuvecelle, Saxel, Meyroux, etc. De demoiselle Daniel Tronchet de Probein, qu'il avait épousée en 1612, il eut
plusieurs enfants, et décéda le 29 septembre 1646. (D'après les notes de M. le chanoine Gonthier.)
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22.2 Page 212

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DCCCXXX. A la Mère de Chantal. Comment recevoir les
remèdes imposés par l'obéissance et la raison. Les croix qui
répugnent aux sens et à la nature. Dans la maladie, la Mère
de Chantal doit être « brebis » et « colombe »
Annecy, 30 novembre 1612 881.
Je vous asseure, ma tres chere Mere, ma Fille, que je voudrois bien porter en mon cors et
en mon cœur toutes les peynes que vous aures parmi vos remedes882 ; mais ne pouvant ainsy vous
en descharger, embrassés saintement ces petites mortifications, recevés ces abjections en esprit de
resignation, et, s'il se peut, d'indifference. Accommodés vostre imagination a la rayson, vostre
naturel a l'entendement, et aymés cette volonté de Dieu en ces sujetz d'eux mesmes desaggreables,
comme si elle estoit en des sujetz les plus aggreables. Vous ne recevés pas vos remedes par vostre
eslection ni par sensualité ; c'est donq par obeissance et par rayson : y a-il rien de si aggreable au
Sauveur ?
Mais il y a de l'abjection. Et saint André et tant de Saintz ont souffert la nudité par maniere
de croix. O petite croix, tu es aymable, puisque ni les sens ni la nature net'ayment point, ains la
seule rayson superieure.
Ma tres chere Mere, mon cœur saluë le vostre finalement et plus que filialement, au dessus
de toute comparayson. Soyés une petite brebis, une petite colombe, toute simple883, douce et
aymable, et sans replique ni retour. Dieu vous benisse, ma tres chere Mere ; qu'a jamais nostre
cœur soit en luy et a luy. N'occupés pas vostre esprit [311] es affaires, et recevés humblement et
amiablement les petitz traittemens que vostre infirmité requiert.
Vive Jesus et Marie ! Je suis celuy que ce mesme Jesus a rendu vostre.
FRANÇS, E. de Geneve.
_____
DCCCXXXI. A la même. Une auditrice que François de Sales a
vue au sermon ; pourquoi il n'a pas osé l'aborder. Un sermon
« fait hardiment et passionnement. » Le dixième anniversaire
d'un sacre. Prédicateurs de l'Avent
Annecy, 9 décembre 1612 884.
J'ay bien veu au sermon nostre bienaymee fille Françoise885, mais je n'ay pas osé luy
demander comme ma tres chere Mere se portoit ; car il y avoit trop de gens qui m'eussent oüy, et
eussent esté en peyne de curiosité pour sçavoir quell'estoit cette tres chere Mere, autre que Dieu et
ses Anges et ses Saintz, et nostre cœur, ne sachant combien l'affection qui me rend pere, filz et une
mesm'ame avec vous, est suffisante et plus que suffisante pour faire cela.
Je donne donq la charge a ce petit billet de vous demander de vostre santé, et a nostre chere
petite fille de vous redire quelque chose du sermon, lequel j'ay fait hardiment et passionnement.
881 L'appellation de « Mere » fait préférer la date de 1612 à celle de 1611 ; l'allusion à saint André et aux répons de
l'Office du saint Apôtre désigne le quantième.
882 Cf. ci-dessus, pp. 306, 307.
883 Cf. Matt., X, 16.
884 La date est prouvée par le texte. (Cf. tome XII, note (346), p. 152, et p. 160.)
885 Mlle de Chantal.
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22.3 Page 213

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Et entr'autres choses, ayant differé hier de parler de mon sacre, a cause qu'aujourduy j'aurois plus
de gens886, j'ay dit quil y avoit dis ans que j'avois esté consacré, c'est a dire que Dieu m'avoit osté
a moymesme pour [me] prendre a luy et puis me donner au peuple887 ; c'est a dire, quil m'avoit
converti [312] de ce que [j'étais888] pour moy en ce que je fusse pour eux. Mays pour ce qui nous
regarde, vous sçaves que Dieu m'a osté a moy mesme, non pas pour me donner a vous, mais pour
me rendre vous mesme. Ainsy puisse-il advenir, qu'ostés a nous mesme, nous soyons convertis en
luy mesme par la souveraine perfection de son saint amour. Amen.
Bon soir, ma tres chere Mere, et plus que Mere ; le bonsoir a nos filles.
Non, ce n'est pas le P. Archange du Tillet889, c'est le P. Constantin de Chamberi890 qui sera
nostre prædicateur le reste de cet Advent, et moy je seray souvent celuy de nos cheres Seurs, car
ce n'est pas souvent, soit tous-jours, que je suis le vostre.
Revu sur l'Autographe conservé au 2d Monastère de la Visitation de Rouen.
_____
DCCCXXXII. A Madame Bourgeois, abbesse du Puits-D'Orbe.
Un voyage en Bourgogne empêché par un voyage à Turin.
Pour s'avancer dans l'amour de Dieu, une jambe infirme est
meilleure que l'autre
Annecy, 18 décembre 1612.
Sans doute, ma tres chere Seur, que je ne passeray jamais en Bourgoigne sans aller voir
vostre ame bien-aymee, qui est tous-jours presente a la mienne ; mais je ne suis pas prest pour aller
en ces quartiers la. Il faut que je me treuve a Turin891 pour le saint Caresme. [313] Monsieur [de
Sauzea] m'escrit que vostre Mayson s'avance fort a la pieté892, dont je me res-jouis selon la mesure
avec laquelle je vous souhaitte toute sainteté.
Hier je receus vostre billet, et j'y respons hastivement ce matin. Mais je ne sçai nulles
nouvelles de vostre santé, c'est a dire de l'estat de vostre pauvre jambe, de laquelle vous ne me
faites nulle mention, non plus que si vous n'esties pas ma chere Fille, et que cette jambe ne fust
pas la meilleure des deux pour vous avancer en la perfection de l'amour divin. Et vous sçavés, ma
tres chere Fille, que je vous ay tous-jours dit que vous m'escrivissies plus amplement par
l'entremise de madame la Presidente893, qui aura bien le soin de m'envoyer vos lettres, comme
aussi de vous faire tenir les miennes.
M. l'Abbé de Saint Maurice894 ne donne pas la survivance pour le prieuré de Semur, ne le
886 Le 9 décembre tombait un dimanche.
887 Cf. tom. præced., Epist. CDXCIV.
888 Ce mot suppléé a disparu de l'Autographe par suite d'une déchirure.
889 Ce Religieux serait-il le même que le P. Archange d'Orgelet (voir tome XIII, note (831), p. 305), ce dernier nom
désignant le lieu d'origine, et du Tillet étant le nom patronymique ?
890 Le P. Constantin de Chambéry fut gardien du couvent de Montmélian eu 1618, et mourut en 1620 dans celui de
Thonon.
891 L'étude du texte permet de supposer que, par une erreur de lecture, on a imprimé Paris pour Turin, car à cette date,
le voyage du Saint à Paris était plus que problématique, et d'ailleurs, s'il avait dû s'y trouver pour le Carême de 1613,
il aurait quitté Annecy avant le 18 décembre 1612. (Cf. Lettre DCCCX et pp. 297, 301.) Le voyage de Turin, projeté
dès avant septembre 1612, puis reculé pour diverses raisons (cf. ci-dessus, pp. 267, 272), a pu être fixé à la fin de
l'année. Ces particularités rendent très vraisemblable la leçon et la date que nous adoptons.
892 Cf. la lettre du 23 février 1613 à la même destinataire.
893 Mme Brûlart.
894 Adrien II de Riedmatten était abbé commendataire de ce monastère (voir tome XIII, note (739), p. 270), Pierre de
Grilly en était l'abbé claustral (ibid., note (738), p. 269) ; c'est sans doute le premier qui est ici désigné.
213/321

22.4 Page 214

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pouvant pas faire ; mais en toute occurrence de vacance, je feray tout ce qui me sera possible pour
monsieur vostre frere895.
Je suis plus que jamais, ma tres chere Fille, d'un cœur invariable,
Vostre tres humble serviteur,
FRANÇS, E. de Geneve.
18 decembre 1612, a Neci. [314]
_____
DCCCXXXIII. A Madame de Peyzieu. A propos du dernier et
du premier jour de l'an. Souhaits de piété. Exhortation à la
douceur et humilité. Le saint nom de Jésus et « l'odeur de son
parfum »
Annecy, décembre [1612 896.]
Ma tres chere Mere,
Nous voyci maintenant a la fin de l'annee, et demain, au commencement, de la suivante.
Faut-il pas louer Dieu de tant de graces que nous avons receuës, et le supplier de respandre le sang
de sa Circoncision sur l'entree de l'annee prochaine, affin que l'Ange exterminateur897 n'ayt point
d'acces en icelle sur nous ? Ainsy soit il, ma chere Mere, et que, par ces annees passageres, nous
puissions heureusement arriver a l'annee permanente de la tres sainte eternité.
Employons donq bien ces petitz momens perissables a nous exercer en la sacree douceur
et humilité que l'Enfant circoncis nous vient apprendre, affin que nous ayons part aux effectz de
son divin nom, lequel je ne cesse point d'invoquer sur vostre chere ame, ma tres chere et tres bonne
Mere, a ce qu'il la remplisse de l'odeur de son parfum898, et, avec elle, celles de tous les vostres.
Je suis, toutes les annees de ma vie,
Vostre bien humble,
FRANÇS, E. de Geneve. [315]
_____
895 Guillaume Bourgeois, baron d'Origny (voir le tome précédent, note (402), p. 131), qui était gouverneur de Semur.
896 Le ton de la lettre, l'appellation de « Mere », les souhaits de la fin font penser à Mme de Peyzieu. Quant à la date,
celle de 1606, donnée par Vivès et ajoutée sans preuves, étant des plus douteuses, nous proposons celle-ci comme
s'accordant mieux aux rapports qui dès 1612 ont existé entre les de Peyzieu et saint François de Sales.
897 Cf. Exod., XII, 7, 13.
898 Cf. Cant., I, 2.
214/321

22.5 Page 215

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DCCCXXXIV. A la Reine Mère, Marie de Medicis (Minute).
Requête en faveur des catholiques de Gex, pour obtenir en leur
ville le rétablissement d'un ancien monastère de Carmes
[1612.]
Madame,
Les Catholiques de Gex, qui ne peuvent respirer qu'en l'air de vostre royale faveur,
sçachans qu'en leur ville il y avoit jadis un monastere de Carmes899, lequel estant restabli rendroit
beaucoup de bons effectz pour l'accroissement de la foy, ilz supplient tres humblement Vostre
[316] Majesté d'aggreer les poursuites qu'ilz en font et de les faire reuscir selon le saint zele dont
elle est animee. Et je joins ma tres humble supplication a la leur, avec mille souhaitz qu'il playse
a Nostre Seigneur combler de ses graces et benedictions Vostre Majesté, de laquelle je suis sans
fin,
Madame,
Tres humble, tres obeissant et tres fidele serviteur et orateur,
FRANÇS, E. de Geneve.
_____
899 Hugard de Joinville, baron de Gex, fonda les Carmes de cette ville le 20 août 1343 ; grâce à ses libéralités et à la
protection des comtes de Savoie, le couvent de Saint-Georges prit assez rapidement de l'importance, et dès le XVe
siècle, il était célèbre. Mais en 1536, les Bernois expulsèrent les Religieux, confisquèrent leurs biens et, le 3 mai 1558,
vendirent aux syndics les bâtiments qu'ils affectèrent aux services publics de la ville. Heureusement, les titres de
possession avaient pu être soustraits aux usurpateurs et confiés, partie au couvent du Pont-de-Beauvoisin, partie à un
notaire catholique, Gaspard Montanier. A la faveur de ces documents, les expulsés purent revendiquer, le 13 janvier
1604, le loyer de leur réfectoire, et dans la suite, leur maison elle-même. En 1612, quand les commissaires royaux
vinrent à Gex (cf. ci-dessus, p. 254), les Carmes se présentèrent pour rentrer dans leur couvent. Cette lettre paraît avoir
été écrite à l'appui de leur démarche, mais l'une et l'autre restèrent sans effet. Vers 1617, le Provincial des Carmes de
Narbonne s'adressa pour cette même affaire au roi Louis XIII ; celui-ci consulta l'Evêque de Genève. Nous avons la
réponse du Saint, 21 janvier 1618 1 : ses préférences allaient, il n'en fait pas mystère, aux Capucins et aux Oratoriens.
Les Carmes l'emportèrent ; l'an 1618, le R. P. Marcellin Beauvalet fut envoyé à Gex comme prieur, et le 30 juillet, il
prit possession du couvent, après des oppositions et des procès qui ne s'arrêtèrent qu'en 1634. Fermé pendant la
Révolution, il devint en 1826 le monastère de la Visitation, frappé à son tour par les lois de 1902. (Procès-verbal du
23 mars 1688 pour les Carmes de Gex, Archiv. de l'Ain, D. 17 ; Brossard, Hist. du pays de Gex, etc. Voir à la fin du
volume, la lettre du Saint au Cardinal de Givry.)
1 On y verra pourquoi il jugeait peu recevables les prétentions du Provincial des Carmes ; celles-ci, à leur tour,
expliqueraient l'attitude du saint Prélat à l'égard de leur rentrée à Gex, et aussi la ferveur modérée de la présente adresse
à la reine Marie de Médicis.
215/321

22.6 Page 216

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DCCCXXXV. A la Mère de Chantal (Inédite). Une mère
alarmée. Avis charitable donné à un visiteur inopiné
Annecy, [1612 900.]
Je ne sçai comme j'ay laissé aller M. Colom901 sans vous prevenir, affin que vous ne
receussies point d'alarme. Mays, ma tres chere Mere, je pensois que le desir de sçavoir vostre Celse
Benine Feüillens902, vous osteroit toute autr'apprehension, mesmement si vous voyies M. Colom
arriver avec un visage joyeux, comme je l'en avois averti.
Or sus, bonjour, ma tres chere Mere, que je supplie [317] Dieu benir eternellement de ses
plus cheres faveurs. Il vous faut laisser entretenir pour le present avec vos lettres, avec vos
nouvelles et avec la santé si bien revenue au filz.
Revu sur l'Autographe appartenant à M. l'abbé Aguas, de l'église nationale des Espagnols de
Montserrat, à Rome.
_____
DCCCXXXVI. A une dame (Fragment inédit). La dévotion et la
maladie. En quoiconsiste et ne consiste pas l'amour divin
[1612 903.]
……………………………………………………………………………………………………...
Or sus, il faut estre comme Dieu dispose que nous soyons et, comme saint Paul, prendre
force en l'infirmité904. Helas ! donq, il n'est pas vray que vostre devotion soit malade quand vous
l'estes. Non certes, ma tres chere Fille, mais vous n'en sentes pas la consolation si souvent, et ne
pouves pas faire les actions exterieures ; en quoy ne consiste pas l'amour divin, mais en la
resolution du cœur, qui veut a jamais et inseparablement demeurer uni de toutes partz a la volonté
divine.
Ces petitz accidens905 ne sont tous-jours rien, et ne s'en faut nullement estonner…
Revu sur l'Autographe conservé au 1er Monastère de la Visitation de Madrid. [318]
_____
900 Pour l'écriture et aussi pour les dimensions du papier, ce billet se rapproche beaucoup de certains billets adressés à
la Sainte en 1612. Cette date paraît confirmée par la teneur du texte (voir ci-dessous, note (902).
901 C'est le même personnage qui est mentionné dans les Lettres de sainte Jeanne-Françoise sous le nom de « M.
Coulon. » Il était le receveur de la maison de Chantal, et signe le contrat du mariage de la Sainte, le 28 décembre 1592.
902 La première pierre de l'église des Feuillants fut posée à Fontaine-les-Dijon le 6 janvier 1614, par Roger de
Bellegarde ; mais les négociations de cette fondation et le bruit qui se fit autour, avaient pu, dés 1612, inspirer au jeune
Celse-Bénigne la velléité d'être « Feüillens. » Il était alors au collège des Godrans.
903 L'Autographe de ce fragment est collé sur le même carton qui porte une lettre du 12 octobre 1615 à la Mère Favre.
L'écriture fait croire que ce texte est d'une date antérieure. Nous proposons 1612, sous toutes réserves, faute d'indice
plus significatif.
904 II Cor., XII, 9.
905 Deux mots ont disparu de l'Autographe.
216/321

22.7 Page 217

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DCCCXXXVII. A Madame de la Fléchère. Les solides
consolations. La crainte et l'amour devant Dieu.
L'émondage spirituel. Condition d'une parfaite retraite
[1610-1612 906.]
Il est certes vray, ma chere Fille, vos consolations me consolent grandement, mais sur tout
quand elles sont fondees sur une si ferme pierre comme est celle de l'exercice de la presence de
Dieu. Cheminés donq tous-jours ainsy aupres de Dieu, car son ombre est plus salutaire que le
soleil.
Ce n'est pas mal fait de trembler quelquefois devant Celuy en la presence duquel les Anges
mesmes tremoussent907 quand ilz le regardent en sa majesté ; a la charge toutefois que le saint
amour, qui predomine en toutes ses œuvres, tienne aussi tous-jours le dessus, le commencement
et la fin de vos considerations.
Voyla donq qui va fort bien, puisque ces petitz esclairs de vostre esprit ne font plus leurs
saillies si soudaines, et que vostre cœur est un peu plus doux. Soyés tous-jours fidele a Dieu et a
vostre ame. Corrigés-vous tous-jours de quelque chose ; mais ne faites pas ce bon office par force,
ains taschés d'y prendre playsir, comme font les amateurs des exercices champestres a esmonder
les arbres de leurs vergers.
Nostre Seigneur sans doute suppleera a tout ce qui [319] vous defaudra d'ailleurs, affin que
vous puissiés faire une plus parfaite retraitte aupres de luy, pourveu que ce soit luy que vous
aymiés, que vous cherchiés, que vous suiviés. Aussi faites vous, je le sçai, ma Fille ; mais faites le
donq bien tous-jours, et me recommandés a sa misericorde, puisque de tout mon cœur je suis
Vostre tres affectionné serviteur,
FRANÇS, E. de Geneve.
_____
906 La première édition adresse cette lettre A une Dame, et la donne sans date. Hérissant, sans aucune preuve, l'adresse
A la Mère Favre, la datant du 18 décembre 1615, de sorte que les éditeurs qui l'ont suivi ont trois lettres à la Supérieure
de la Visitation de Lyon, datées du même jour : ce qui est inadmissible. Le 16 juillet 1608 et au mois de mars 1609
(voir le tome précédent, pp. 54, 136), le Saint parlait à Mme de la Fléchère du dessein qu'elle avait de quitter le monde.
L'allusion du même genre qui termine la présente lettre permettrait de désigner la même destinataire, mais seulement
avec une date approximative.
907 Cf. Præfat. Missæ.
217/321

22.8 Page 218

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DCCCXXXVIII. A la Mère de Chantal. L'oraison de la Mère de
Chantal trouvée bonne par le Saint et agréable à Dieu.
Pourquoi et comment doit-elle se garder des fortes applications
de l'entendement. Se tenir en la présence de Dieu et s'y
mettre : deux choses différentes. Allégorie de la statue dans
sa niche. Marie-Madeleine. Bonheur de vouloir aimer
Notre-Seigneur. Le sommeil empêche-t-il de se tenir en la
présence de Dieu ?
[1611-1612 908.]
Ma tres chere Fille,
Vostre façon d'orayson est bonne909 ; soyés seulement bien fidelle a demeurer aupres de
Dieu en cette douce et tranquille attention de cœur, et en ce doux endormissement entre les bras
de sa providence, et en ce doux acquiescement a sa sainte volonté, car tout cela luy est aggreable.
[320]
Gardés vous des fortes applications de l'entendement, puis qu'elles vous nuisent, non
seulement au reste, mais a l'orayson mesme, et travaillés autour de vostre cher objet avec les
affections tout simplement, et le plus doucement que vous pourres. Il ne se peut faire que
l'entendement ne face quelquefois des eslancemens pour s'appliquer, et il ne faut pas s'amuser a
s'en tenir dessus sa garde, car cela serviroit de distraction ; mais il faut se contenter que, vous en
appercevant, vous retournies simplement aux actions de la volonté.
910Se tenir en la presence de Dieu et se mettre en la presence de Dieu, ce sont, a mon advis,
deux choses ; car pour s'y mettre, il faut revoquer son ame de tout autre objet et la rendre attentive
a cette presence actuellement, ainsy que je dis dans le livre911. Mais apres qu'on s'y est mis, on s'y
tient tous-jours, tandis que, ou par l'entendement, ou par la volonté, on fait des actes envers Dieu,
soit le regardant, ou regardant quelqu'autre chose pour l'amour de luy ; ou ne regardant rien, mais
luy parlant ; ou ne le regardant ni parlant a luy, mais simplement demeurant ou il nous a mis,
comme une statue dans sa niche. Et quand, a cette simple demeure, se joint quelque sentiment que
nous sommes a Dieu et qu'il est nostre Tout, nous en devons bien rendre graces a sa Bonté.
Si une statue que l'on auroit mise en une niche au milieu d'une salle, avoit du discours et
qu'on luy demandast : Pourquoy es tu la ? Parce, diroit-elle, que le statuaire mon maistre m'a mis
icy. Pourquoy ne te remues tu point ? Parce qu'il veut que j'y demeure immobile. Dequoy sers tu
la ? quel proffit te revient il d'estre ainsy ? [321] Ce n'est pas pour mon service que j'y suis, c'est
908 Cette lettre, que les premiers éditeurs ont datée du 16 janvier 1610, paraît construite de plusieurs fragments, qui
vont de 1611 à 1612.
909 Un texte formel du saint Directeur (voir le tome précédent, p. 266) nous avertit qu'il conseillait en 1610 à sa fille
spirituelle de suivre « le train des « saintz devanciers et des simples. » Or, il s'agit ici d'une oraison un peu nouvelle
pour la Mère de Chantal, et assez différente de la méditation méthodique. Ces avis ne seraient donc pas antérieurs à
1610 et dateraient plutôt de 1611. Notre conjecture est d'ailleurs confirmée par le témoignage de la Mère de Chaugy :
« Durant sept ans... notre Bienheureuse Mère demeura en l'oraison active. » Et précédemment : « Elle fut sept ans
entiers dans le train ordinaire des méditations et considérations. » (Mémoires, Partie III, chap, XXIV, p. 498.)
910 Cet alinéa, et surtout le suivant, sont comme le premier jet d'une page célèbre du Traitté de l'Amour de Dieu (Livre
VI, chap. XI). L'idée de la statue apparaît déjà dans une lettre de 1605 (voir tome XIII, p. 20), mais ici, pour la première
fois, elle s'étale et s'élargit sous forme de dialogue. Les divergences de cette ébauche avec la rédaction définitive du
Traitté prouvent que le texte présent est une pièce originale, antérieure à 1616, date de l'impression de Théotime.
D'autre part, les avis cadrent assez bien avec les dispositions intérieures de la Mère de Chantal, telles que nous les
révèle la lettre du 28 mars 1612 (voir ci-dessus, p. 197).
911 Introd. a la Vie dev., Part. II, ch. II.
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22.9 Page 219

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pour servir et obeir a la volonté de mon maistre. Mais tu ne le vois pas. Non, dira-elle, mais il me
voit et prend playsir que je sois ou il m'a mis. Mais ne voudrois tu pas bien avoir du mouvement
pour aller plus pres de luy ? Non pas, sinon qu'il me le commandast. Ne desires tu donq rien ?
Non, car je suis ou mon maistre m'a mis, et son gré est l'unique contentement de mon estre.
Mon Dieu, chere Fille, que c'est une bonne orayson et que c'est une bonne façon de se tenir
en la presence de Dieu, que de se tenir en sa volonté et en son bon playsir ! Il m'est advis que
Magdeleine estoit une statue en sa niche, quand, sans dire mot, sans se remuer, et peut estre sans
le regarder, elle escoutoit ce que Nostre Seigneur disoit, assise a ses pieds912. Quand il parloit, elle
escoutoit ; quand il entrelaissoit de parler, elle cessoit d'escouter, et cependant elle estoit tous-jours
la913. Un petit enfant qui est sur le sein de sa mere dormante, est vrayement en sa bonne et desirable
place, bien qu'elle ne luy die mot, ni luy a elle.
Mon Dieu, ma Fille, que je suis ayse de parler un peu de ces choses avec vous ! Que nous
sommes heureux, quand nous voulons aymer Nostre Seigneur ! Aymons le bien donq, ma Fille ;
ne nous mettons point a considerer trop par le menu ce que nous faysons pour son amour, pourveu
que nous sachions que nous ne voulons jamais rien faire que pour son amour. Pour moy, je pense
que nous nous tenons en la presence de Dieu mesmement en dormant, car nous nous endormons a
sa veuë, a son gré et par sa volonté, et il nous met la sur le lit, comme des statues dans une niche ;
et quand nous nous esveillons, nous treuvons qu'il est la aupres de nous, il n'en a point bougé, ni
nous aussi : nous nous sommes donq tenus en sa presence, mais les yeux fermés et clos914.
915Or, voyla qu'on me presse. Bon soir, ma chere [322] Seur, ma Fille, vous aures de mes
nouvelles le plus souvent que je pourray. Croyés que la premiere parole que je vous escrivis fut
bien veritable, que Dieu m'avoit donné a vous916 ; les sentimens en sont tous les jours plus grans
en mon ame. Ce grand Dieu soit a jamais nostre Tout.
Je salue ma chere petite fille ma seur917, et toute la mayson918. Tenés ferme, chere Fille, ne
doutés point ; Dieu nous tient de sa main et ne nous abandonnera jamais. Gloire luy soit es siecles
des siecles. Amen.
Vive Jesus et sa tres sainte Mere ! Amen. Et loué soit le bon Pere saint Joseph ! Dieu vous
benisse de mille benedictions.
_____
DCCCXXXIX. A la même. D'où vient l'amertume spirituelle.
Jésus-Christ est un Dieu de douceur
Annecy, [1611-1612 919.]
Bon soir, ma tres cherement unique Fille. Tenés bien Jesus Christ crucifié entre vos bras,
car l'Espouse l'y tenoit comme un bouquet de myrrhe920, c'est a dire d'amertume ; mais, ma tres
chere Fille, ce n'est pas luy qui nous est amer, c'est luy seulement qui permet que nous, nous soyons
amers a nous mesmes. Voyci, dit Ezechias, que neanmoins, emmi mes travaux, ma tres amere
912 Luc., X, 39.
913 Cf. Tr. de l'Am. de Dieu, liv. VI, chap. VIII (tom. IV, p. 332).
914 Cf. ibid., chap. XI (tom. IV, p. 342).
915 De ces lignes, on peut déduire que ce qui précède a été écrit à Chambéry pendant le séjour qu'y fit le Saint, à
l'occasion des prédications du Carême de 1612.
916 Vide tom. XII, p. 262.
917 La baronne de Thorens.
918 La Congrégation naissante de la Visitation.
919 Ce billet, qui nous a paru indépendant, a été détaché de la lettre du 17 janvier 1612, à la fin de laquelle les éditeurs
de 1626 l'avaient interpolé. (Voir ci-dessus, note (454), p. 151.) Il n'est pas possible de préciser davantage.
920 Cant., I, 12.
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22.10 Page 220

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amertume est en paix921. O le Dieu de douceur veuille addoucir vostre cœur, ou au moins faire que
vostre amertume soit en paix. [323]
Cette bonne Religieuse desire vous communiquer un peu au large son cœur922, mais elle
dit qu'elle ne sçait comme faire ; il faudra donq l'ayder, et luy pourres dire que je vous l'ay dit.
Dieu soit beni. Amen.
_____
DCCCXL. A la même (Fragment). La parole de Dieu et
comment il faut la recevoir des uns et des autres
Annecy, [1611-1612 923.]
……………………………………………………………………………………………………..
J'oubliay hier de vous reprendre dequoy vous ne recevies pas en simplicité la parole de
Dieu, ains avies des aversions qui vous la rendoyent moins suave des uns que des autres. Oh !
l'humilité et douceur de l'amour de l'Espoux fait demeurer les espouses humblement et doucement
attentives a recevoir sa sainte parole.
Vive Jesus, ma tres chere Mere, en tout ce que nous sommes, selon l'unité qu'il a fait de
nous.
_____
DCCCXLI. A Madame de la Fléchère924. La tristesse des
séparations. Pleurons un peu, non toutefois beaucoup, « nos
chers trespassés. » Les âmes chrétiennes doivent supporter
doucement la perte des parents. L'oraison et la variété des
affections qui viennent t'y mêler. Particulariser les
résolutions. Le langage des yeux.
Annecy, [1611-mars 1613 925.]
Or sus, ma tres chere Fille, on me vient de dire que la chere seur est partie926, nous laissant
encor icy bas avec les passions ordinaires de la tristesse qui a accoustumé d'attaquer les demeurans
en telles separations. O Dieu ! je n'ay garde, ma tres chere Fille, de vous dire : Ne pleurés pas.
Non, car il est bien juste et raysonnable que vous pleuries un peu ; mais un peu, ma chere Fille, en
921 Is., XXXVIII, 17.
922 La « bonne Religieuse » serait-elle une Dame de Sainte-Catherine ?
923 La lettre du 18 juin 1609 (voir le tome précédent, p. 169, et note (511), p. 170) se termine par les présentes lignes,
que les premiers éditeurs ont interpolées pour n'avoir pas remarqué l'appellation de « Mere » donnée à la destinataire.
Cette appellation suggère la date proposée, et la répréhension du Saint indique plutôt les premières années de la
Visitation.
924 La signature « compere » et le ton de la lettre désignent comme destinataire Mme de la Fléchère, plus
vraisemblablement que toute autre personne.
925 La date que nous proposons se déduit approximativement de la note suivante et du fait que saint François de Sales
partit pour Milan le 15 avril 1613 et ne revint que le 26 mai.
926 La « chere seur... partie, » si notre conjecture pour l'adresse est exacte, serait Antoinette de la Forest, mariée i
Nicolas d'Avise, sénateur au souverain Sénat de Savoie. Il mourut le 3 octobre 1614 (Reg. des Entrées du Sénat) ; de
plusieurs pièces datées de juillet et octobre 1613, nous pouvons inférer que Mme d'Avise était décédée auparavant.
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23 Pages 221-230

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23.1 Page 221

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tesmoignage de la sincere affection que vous luy porties, a l'imitation de nostre cher Maistre qui
pleura bien un peu sur son amy le Lazare927, et non pas toutefois beaucoup, comme font ceux qui,
colloquans toutes leurs pensees aux momens de cette miserable vie, ne se resouviennent pas que
nous allons aussi a l'eternité, ou, si nous vivons bien en ce monde, nous nous reunirons a nos chers
trespassés pour ne jamais les quitter. Nous ne sçaurions empescher nostre pauvre cœur de ressentir
la condition de cette vie et la perte de ceux qui estoyent nos delicieux compaignons en icelle ; mais
il ne faut pourtant pas desmentir la solemnelle profession que [325] nous avons faitte de joindre
inseparablement nostre volonté a celle de nostre Dieu.
Qu'elle est heureuse, cette chere seur, d'avoir veu venir petit a petit et de loin cette heure
de son despart, car ainsy elle s'est preparee pour le faire saintement. Adorons cette Providence
divine et disons : Ouy, vous estes benite, car tout ce qui vous plaist est bon. Mon Dieu, ma tres
chere Fille, que ces petitz accidens doivent estre receus doucement de nos cœurs ! nos cœurs, dis-
je, qui meshuy doivent avoir plus d'affection au Ciel qu'en la terre. Je prieray Dieu pour cette ame
et pour la consolation des siens.
Ne vous mettes pas en peyne de vostre orayson ni de cette varieté de desirs qui vous
viennent, car la varieté des affections n'est pas mauvaise, ni le desir de plusieurs vertus distinctes.
Pour vos resolutions, vous les pouves bien particulariser en cette sorte : Je veux donq plus
fidellement prattiquer les vertus qui me sont necessaires ; comme, en telle occasion qui se presente,
je me prepare a prattiquer telle vertu ; et ainsy des autres. Il n'est pas besoin d'user de paroles
mesme interieures ; il suffit d'eslancer son cœur ou de le reposer sur Nostre Seigneur. Il suffit de
regarder amoureusement ce divin Amoureux de nos ames, car entre les amans, les yeux parlent
mieux que la langue.
Je vous escris sans loysir et en la presence du laquay. Bon soir donq, ma tres chere Fille ;
fondés et versés le trespas de la seur en celuy du Sauveur, ne regardés point cette mort de la seur
qu'en celle du Redempteur. Qu'a jamais sa volonté soit glorifiee. Amen. Vive Jesus !
Vostre humble serviteur et compere,
FRANÇS, E. de Geneve. [326]
_____
DCCCXLII. A la Mère de Chantal. Un visiteur annoncé.
Pourquoi il faut lui faire un accueil dévotement agréable.
Personne ne se repentira d'avoir aidé la Visitation
Annecy, mai 1612-février 1613 928.
Dieu vous comble de son saint amour, ma tres chere Fille, ma Mere. Hier Mme la
Presidente929 me dit que M. Berthelot930 vous vouloit aller voir avec elle, et croy que ce sera
927 Joan., XI, 35.
928 La mention de « madame de Mirebel » qui se voit à la fin de cette lettre, prouve qu'elle a été écrite entre les deux
dates extrêmes que nous donnons. En effet, les Sœurs de la Visitation ne commencèrent la visite des malades que le
1er janvier 1612, Mme de Miribel ne fut pas visitée tout de suite (voir note (932) de la page suivante) et elle mourut au
mois de février 1613.
929 La présidente Favre, qui pouvait être momentanément à Annecy, ou bien Antoinette du Coudray, femme de Jean-
François de Buttet, président au Conseil de Genevois.
930 Berthelot, dont les origines ne nous sont pas connues, avait remplacé, et peut-être supplanté M. de Charmoisy
auprès du prince de Nemours. (Cf. le tome précédent, note (531), p. 176.) Par ses flatteries et ses intrigues, ce «
jeun'homme fort eveillé » tâchait de conquérir le crédit que son prédécesseur devait à sa probité chevaleresque et à sa
haute valeur morale. François de Sales avait compris qu'un tel personnage devait être ménagé et qu'il était à propos de
répondre à ses avances par un accueil « devotement aggreable. » Hélas ! ce protecteur empressé allait bientôt lui causer
de douloureuses alarmes. Ses airs de dominateur et ses prétentions insolentes avaient blessé la fierté des
gentilshommes annéciens : l'abbé de la Tour (voir plus haut, note (108), p. 27) voulut s'en faire le justicier. Le mercredi
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aujourdhuy. Or, ainsy qu'elle me parla, il a [327] tout plein de bonne volonté pour nostre
Congregation ; c'est pourquoy il le faut recevoir avec un accueil saintement et devotement
aggreable et aggreablement devot et saint, et luy tesmoigner que des-ja la Congregation a beaucoup
d'obligation a Monseigneur de* Nemours (quil faut nommer Monsieur tout court), a cause de la
bonne volonté quil a eu, tant pour les laouds de ce que vous acheteries de son fief, que pour le four
; et que puis quil a pleu a Dieu de donner commencement a cette petite Congregation dans sa ville
principale, vous voules avoir une speciale devotion pour son salut et prosperité, et le tenir comme
special protecteur. Qu'il ne se pourra qu'en plusieurs occasions vous n'ayes besoin de ses graces et
faveurs, et que vous pries ledit sieur Berthelot de vous y vouloir assister de sa charité et
intercession. Que la Congregation s'essayera de fair'en sorte que personne n'aura du repentir de
l'avoir aydee ; et semblables petites choses.
Ledit sieur Berthelot est un jeun'homme fort eveillé ; mais il ne faut pas laisser de le traitter
devotement et de l'entretenir selon le loysir que vous en aures. Il dit que luy mesme contribuera,
si M. de la Bretonniere931 se peut resoudre de faire nostre chapelle.
Bonjour, ma tres chere Fille ; pour ce jourdhuy je n'iray pas vers vous, voulant laisser le
loysir a cet (sic) autre visite. Dites moy si vous vistes hier Mme de Mirebel932 ; je pense l'aller voir
aujourdhui.
Revu sur l'Autographe conservé à la Visitation d'Annecy. [328]
_____
des Cendres, 20 février 1613, le secrétaire de Henri de Nemours fut assailli de quelques bastonnades, tandis qu'il
traversait de nuit le bois de Sonnaz. On pouvait s'attendre à de dures représailles de la part d'un homme si atrocement
humilié. Elles ne tardèrent pas : le prieur commendataire de Talloires fut consigné dans sa maison, et M. de Charmoisy
interné dans son château de Marclaz, sous l'inculpation d'avoir été l'inspirateur du guet-apens. Les soupçons et le
ressentiment du prince n'épargnèrent ni les frères du Saint, ni le Saint lui-même ; cette aventure et les incidents qui la
suivirent lui valurent des tracasseries sans nombre et l'obligèrent à des démarches qui ne prirent fin qu'avec la mise en
liberté définitive du mari de Philothée. Berthelot ne survécut pas longtemps à la satisfaction de ses rancunes : le
malheureux fut tué aux environs de Frangy, dans la nuit du 3 septembre 1615. Les lettres de 1613 mentionneront, par
des allusions très nombreuses, les faits que nous résumons ici. (Cf. J. Vuÿ, La Philothée de St Fr. de Sales, 1878 ;
Mugnier, Hist. du Président Favre, 1902-1903.)
931 Charles Chaliveau (voir tome XII, note (506), p. 214).
932 Claudine Solliard, fille de noble Jean Solliard, seigneur de Miribel, de Sallanches, et de Guillelmine de Loche,
avait épousé Jean-Louis de Chevron, seigneur de Bonvillard (voir note (610), p. 208). « Travaillée d'une paralisie
quasi universelle... Helas ! » disait-elle à un ami du Saint, « que me servent mes biens, puisque je suis privée de la
consolation et du bonheur que les pauvres reçoivent d'estre visités par Madame de Chantal ? » À la suite d'instances
réitérées, le saint Fondateur permit enfin que la Mère de Chantal et ses filles « visitassent celle qui, dans l'abondance
des biens, se trouvoit si destituée des joies de l'esprit. » Après les avoir vues : « Il me semble, » dit-elle, « que Nostre
Seigneur est venu a moi avec ses servantes. » Le lendemain de son décès, « l'on vint dire que c'estoit aux Religieuses
de la Visitation de la faire enterrer, puisqu'elle testoit en leur faveur. » (Hist. de la Fondation du 1er Monastère
d'Annecy.) Ce testament souleva des oppositions dont il sera parlé dans la suite.
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23.3 Page 223

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DCCCXLIII. Au duc de Bellegarde933 (Minute inédite). Gratitude
et humilité du Saint.
Annecy, [fin 1612-mars 1613 934.]
Monsieur,
Lhonneur qu'il vous a pleu de me faire en m'escrivant, m'estonne egalement par sa grandeur
et me ravit par sa douceur. Je l'appellerois excessif, si je considerois seulement l'indignité de celuy
qui le reçoit ; mais je voy bien que935 la source d'ou il procede, Monsieur, ne permet pas que l'on
puisse nommer ainsy cette faveur, quoy qu'elle excelle936 au dessus de toutes autres, puis que vous
me favorisés937 selon ce que vous estes, Monsieur, et non selon ce que je suis, qui938 certes ne suis
rien, sinon en l'affection avec laquelle je revere Vostre Grandeur, pour la prosperité de laquelle je
respans plusieurs bons souhaitz devant ce grand Dieu du Ciel, qui gratifie volontier les grans de la
terre939 qui gratifient les petitz [329] et qui leur940 sont doux, gracieux et favorables ainsy que vous
m'estes, Monsieur, et que je vous supplie de m'estre tous-jours, me regardant comme
Vostre tres obligé, tres affectionné
et tres obeissant serviteur.
Revu sur l'Autographe appartenant à M. Defrance, à Villers-devant-Orval (Belgique).
_____
933 De tous les gentilshommes correspondants du Saint, le duc de Bellegarde est celui que l'on peut désigner avec le
plus de vraisemblance comme destinataire. La grandeur de son rang, la puissance de son crédit expliquent le ton
cérémonieux et déférent de la lettre.
934 Le grand Ecuyer ayant fait sa confession générale vers la fin de juillet 1613 (cf. ci-dessus, note (833), p. 293), la
présente lettre a dû être écrite avant cette date, car elle ne trahit aucun rapport d'amitié spirituelle, pas plus que la lettre
du 10 novembre 1612. Il paraît donc qu'elle a été plus probablement adressée au duc à la fin de 1612 ou dans les
premiers mois de 1613 : cette conjecture est confirmée par l'examen de l'écriture, soigneusement fait sur l'Autographe.
935 que [ce que vous estes...]
936 que l'on puisse [rappeller exces les faveurs dont vous gratifiés ceux qu'il vous plait,] quoy qu'elles excellent
937 favorisés [certes, Monsieur,] selon [vostre grandeur qui...]
938 qui [en verité...]
939 qui gratifie [de sa protection ceux]
940 et qui [est doux a ceux qui]
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23.4 Page 224

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DCCCXLIV. A la Mère de Chantal. Lumières et sentiments que
recevait le Saint pour écrire le Traitté de l'Amour de Dieu
Annecy, [1612-1613 941.]
Ma chere Fille,
Benissés Dieu du loysir qu'il me donne ces deux jours pour faire un peu d'orayson
extraordinaire ; car vrayement sa Bonté a respandu dans mon esprit tant de lumieres et dans mon
pauvre cœur tant d'affection pour escrire en nostre cher livre du saint amour, que je ne sçay ou je
prendray des paroles pour exprimer ce que j'ay conceu, si le mesme Dieu qui m'a fait concevoir ne
me fait enfanter.
Revu sur le texte inséré dans le IId Procès de Canonisation. [330]
_____
941 Migne (tome IX, col. 85) place ce billet en 1615 ; or, d'après les lettres du Saint, le Traitté de l'Amour de Dieu était
complètement rédigé dans les premiers jours de novembre 1614. Ces lignes ont dû être écrites bien avant, surtout s'il
est vrai, comme le dit la Mère de Chaugy dans la déposition même d'où nous les avons tirées (Process. remiss. Gebenn.
(II), ad art. 15), que « le Serviteur de Dieu escrivoit alors le Livre VII de son Traicté. » D'autre part, il semble qu'en
1612, l'ouvrage n'était pas si avancé, et qu'en 1614, dès janvier, il était poussé plus avant. Telles sont les raisons de la
date proposée.
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23.5 Page 225

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Année 1613
_____
DCCCXLV. A Madame de Travernay. Attitude de l'esprit
humain en face des évènements. Considérations sur une mort
prématurée. Notre-Seigneur meilleur juge que nous de nos
intérêts. Consolations à la mère de l'enfant devenu un «brave
petit saint»
Annecy, 3 janvier 1613.
Je vous asseure, ma tres chere Fille, que vostre affliction m'a touché vivement942, ne doutant
point qu'elle ne vous ayt esté fort rude, d'autant que vostr'esprit, comme celuy du reste des hommes,
ne voyant pas la fin et intention pour laquelle les choses arrivent, il ne les reçoit pas en la façon
qu'elles sont, mais en la façon quil les sent.
Voyla, ma chere Fille, que vostre filz est en asseurance, il possede le salut eternel ; le voyla
eschappé et garanti du hazard de se perdre, auquel nous voyons tant de personnes. Dites moy, je
vous supplie, ne pouvoit-il pas devenir avec l'aage fort desbauché ? Ne pouvies vous pas recevoir
beaucoup de desplaysir de luy a l'advenir, comme tant d'autres meres en reçoivent des leurs ? car,
ma chere Fille, on en reçoit souvent de ceux desquelz on en attend le moins. Et voyla que Dieu l'a
retiré de tous ses (sic) perilz, et luy a fait recueillir le triomphe sans battaille et moyssonner les
fruitz de la gloire sans labeur. A vostr'advis, ma chere Fille, vos vœuz et vos devotions ne sont ilz
pas bien recompensés ? Vous les faysies pour luy, mais affin quil demeurast icy [331] avec vous,
en cette vallee de miseres ; Nostre Seigneur, qui entend mieux ce qui est [bon] pour nous que nous
mesme, a exaucé vos prieres en faveur de l'enfant pour lequel vous les faysies, mais au despens
des contentemens temporelz que vous en prætendiés.
En943 verité, j'appreuve bien la confession que vous faites, que c'est pour vos pechés que
cest enfant s'en est allé, par ce qu'elle procede d'humilité ; mais je ne croy pas pourtant qu'elle soit
fondee en verité. Non, ma chere Fille, ce n'est pas pour vous chatier, c'est pour favoriser cet enfant
que Dieu l'a sauvé de bonn'heure. Vous aves de la douleur de cette mort, mais l'enfant en a un
grand prouffit ; vous en aves receu du desplaysir temporel, et l'enfant un playsir eternel. A la fin
de nos jours, lhors que nos yeux seront desillés, nous verrons que cette vie est si peu de chose quil
ne failloit pas regretter ceux qui la perdoyent bien tost : la plus courte est la meilleure, pourveu
qu'elle nous conduise a l'eternelle.
Or sus, voyla donq vostre petit enfant au Ciel, avec les Anges et les saintz Innocens ; il
vous sçait gré du soin que vous avés eu de luy ce peu de tems quil a esté en vostre charge, et sur
tout des devotions faites pour luy. En contrechange, il prie Dieu pour vous et respand mille
souhaitz sur vostre vie, affin qu'elle soit de plus en plus conforme a la volonté celeste, et que par
icelle vous puissies gaigner celle dont il jouit. Demeures en paix, ma chere Fille, et tenes bien
vostre cœur au Ciel, ou vous aves ce brave petit saint ; perseveres a vouloir tous-jours plus
fidelement aymer la bonté souveraine du Sauveur, et je le prie quil soit a jâmais vostre consolation.
942 Gaspard, le fils de la destinataire, né à Chitry le 8 mars 1612, était mort de la rougeole, âgé de dix mois.
943 Le bas de l'Autographe ayant été coupé, quelques mots et des membres de cette phrase ont disparu ; nous les
suppléons par le texte de la première édition, à laquelle nous empruntons aussi la signature.
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23.6 Page 226

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944Je salue de tout mon cœur ma chere petite fileule bienaymee945 ; mon ame luy souhaite
mille benedictions. [332] Mme de Chantal se porte mieux946, et ne doute point qu'elle ne vous
escrivit si ell'estoit avertie. Je suis sans fin,
Vostre plus humble, tres affectionné et fidele compere et serviteur,
FRANÇS, E. de Geneve.
3 janvier 1613.
A Madame
Madame de Treverney.
Revu sur l'Autographe conservé à la Visitation de Chambéry.
_____
DCCCXLVI. A la Mère de Chantal. Le cœur de l'Evêque de
Genève. Un projet de Congrégation. Le Traitté de l'Amour
de Dieu. Nouvelle de la mort tragique du baron de Lux :
compassion du Saint
Annecy, vers le 10 janvier 1613 947.
Ma tres chere Mere, ma Fille,
Je vous veux un peu donner le bon jour pour contenter mon cœur partout ; car encor le faut-
il aymer, ce pauvre cœur, puisque, tout infirme quil est, il veut aymer son Dieu de toute l'estendue
de ses forces, en sincerité et pureté.
Or je desire, mais je n'ose me promettre que je vous aille voir aujourdhuy. Entr'autres
causes de ma defiance, c'est que voyci arriver M. l'Aumosnier de Belleville948, [333] qui est celuy
944 Les deux phrases suivantes sont inédites.
945 Anne-Françoise dé Mouxy, fille cadette de la destinataire, qui épousa (contrat dotal du 5 février 1625) Jacques-
François Vidomne de Chaumont et fut inhumée à Rumilly le 25 décembre 1654. « Françon, » comme l'appelle le Saint
dans une de ses lettres, aimait tendrement son bienheureux parrain.
946 Voir plus haut, pp. 306, 307, 311.
947 La date est indiquée approximativement par la mort du baron de Lux arrivée le 5 janvier. (Voir ci-après, note (953),
p. 336.) La nouvelle n'a pas dû tarder à être connue à Genève, très bien renseignée par ses agents sur les moindres
évènements de la cour de France et de la capitale.
948 Sous ce nom, le Saint désigne Claude de Sevelinges, alias de Sirvinges, aumônier de l'abbaye de Belleville1. Il
figure avec ce titre, comme parrain, dans un acte de baptême du 1er juin 1603, Jeanne de Sirvinges étant marraine.
(Archives commun, de Belleville, Notes de M. d'Avaise, érudit lyonnais.) En février 1615, il devint le confesseur
ordinaire du 1er Monastère de la Visitation de Lyon, sur la demande que les Religieuses en avaient faite à Mgr de
Marquemont. A partir de cette date, la Mère de Chantal fait souvent mention dans les lettres qu'elle écrit à Lyon, de «
monsieur l'Aumônier. » Claude de Sevelinges fit en 1616 un autre voyage à Annecy, où il séjourna du 21 mai
jusqu'après le 6 juin, c'est-à-dire au temps même où les deux Fondateurs acceptèrent de convertir leur « Congrégation
en Religion. » « J'aime et honore grandement ce bon homme..., c'est une vraie bonne âme, » disait de lui la Sainte,
« conservez-moi en la souvenance de ses prières ; j'y ai confiance, je ne l'oublie jamais aux miennes petites. » (Lettres
à la Mère Favre, vol. Ier (Paris, Plon, 1877), pp. 122, 131.)
Le 21 janvier 1617, saint François de Sales mandait à la Mère Favre : « M. l'Aumosnier m'escrit que Mgr
l'Archevesque le vous oste ; » et, en effet, le 6 mai suivant, Claude de Sevelinges fut changé « a raison qu'il fut requis
d'aller a son benefice. » (Livre du Chapitre du 1er Monastère de Lyon, transféré à Venise en 1801.) Par testament du
20 février 1621, il laissait à la confrérie du Saint-Sacrement de Belleville, trois cents livres, son calice et ses ornements
d'église, avec la charge de plusieurs obligations. (Archives du Rhône, série G. no 155.)
1 L'abbaye de Belleville (diocèse de Lyon) fut fondée en 1159 par Humbert de Beaujeu, en faveur de six chanoines
réguliers de Saint-Irénée de Lyon.
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23.7 Page 227

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qui m'a escrit pour Mme des Gouffier949, et la rayson veut, que venant expres pour me voir, je luy
en donne le plus de commodité que je peurray. Je croy quil vous ira voir aussi, et je desire que ce
soit a sa consolation et edification, mesme quil a quelque sorte d'inclination a vouloir estre de
nostre future Congregation, si Dieu nous fait la grace que nous l'erigions950. [334] Il voudra aussi
peut estre voir nostre fille Bellod951, par ce quil est beaufrere de M. l'esleu Bellod952.
J'ay des-ja travaillé deux heures en l'Amour de Dieu. Mays faut il pas que je vous die le
desplaysir que j'eu hier de la nouvelle de la mort de nostre monsieur le baron de Lux, tué, comme
l'on dit, d'un coup de pistolet [335] par le chevalier de Guyse953. La nouvelle est un peu suspecte
949 Elisabeth Arnault des Gouffiers, Religieuse du Paraclet (voir ci-après, note (972), p. 343).
950 C'est ici que nous voyons apparaître pour la première fois, croyons-nous, le dessein du Bienheureux à l'égard de
cette Congrégation. En 1617, il disait à ses filles : « Pleust à Dieu, mes cheres Sœurs, qu'il se trouvast beaucoup de
gens qui les voulussent pratiquer, » les Règles et Constitutions de la Visitation « voire mesme des hommes ! »
(Les Vrays Entretiens spirituels, tome VI, var. (960), p. 303.) Le 7 décembre 1621, la Mère de Chantal écrivait au
Saint (Lettres, vol. Ier, p. 593) : « M. Jocelin... me vint derechef prier dernièrement de savoir de vous s'il n'y aurait
moyen que vous voulussiez établir une Congrégation d'hommes, tout ainsi qu'est la nôtre... Ils voudraient observer
nos mêmes Règles et Constitutions, et être Religieux. Je lui dis que je croyais que volontiers vous vous emploieriez à
cela, mon très cher Père, mais que la grande difficulté était de votre éloignement, parce que le plus grand profit et
utilité était de prendre votre esprit... Je proposai que l'on vous envoyât des hommes les mieux disposés pour être
dressés. »
D'après Mgr Camus, le Bienheureux aurait eu le « dessein de dresser une Congregation de prestres du clergé,
qui fust libre et sans vœux, » mais se serait désisté de son entreprise quand M. de Bérulle eut fondé l'Oratoire. (L'Esprit
du bienheureux François de Sales, 1639-1641, Partie VII, section XIV.) Jean-François de Blonay dépose (Process.
remiss. Gebenn. (I), ad art. 43) que l'Evêque de Genève désirait vivement « introduire la discipline des Oblatz de
Sainct Ambroise dans son clergé, ainsy quil conste, » dit-il, « par un acte authentique que j'ay en main. Il m'avoit
persuadé d'aller sejourner quelque temps a Milan pour cest effect, mais cella ne se peult bonnement exequuter. » Notre
Saint mourut sans avoir pu donner commencement à cette belle œuvre. Vers 1632, un très digne prêtre du Languedoc,
M. Bonal, après un pèlerinage à son tombeau, essaya de reprendre le projet, très encouragé par la Mère de Chantal.
En 1652, au dire de la Mère de Chaugy, il avait établi trois maisons de la Congrégation. (Cf. Année Sainte de la
Visitation, tome III, pp. 157-159, note.)
951 D'une famille fort honorable, nièce d'un ancien secrétaire d'Etat (cf. plus haut, note (709), p. 246) et proche parente
d'Antoine Bellot (voir la note suivante), « cette pauvre miserable Belot, » le Saint la désigne ainsi dans une de ses
lettres, remplit de ses aventures et de ses désordres Chambéry et Annecy. Touchés de compassion, les deux
Fondateurs la reçurent au monastère pour qu'elle y prît de sérieuses résolutions. Pendant le Carême de 1613, elle se
comporta fort bien, mais en sortant de la Visitation, la pécheresse retomba dans son inconduite. On verra dans la suite
de la correspondance de saint François de Sales comment sa charité inépuisable n'épargna rien pour l'en retirer. L'étude
approfondie de plusieurs documents permet de croire que la malheureuse dévoyée répondit à tant de miséricorde en
se faisant l'artificieuse complice d'une calomnie sans nom. (Voir Gallizia, Vita di S. Francesco di Sales, Venezia,
1743, lib. III, cap. XXXV ; Dépos. de M. de Foras, Process. remiss. Parisiensis, ad art. 29.)
Le 12 septembre 1616, le président Favre avertit le duc de Savoie qu'il va expulser de Chambéry les « seurs
Bellot, pour la vie... infame qu'elles meinent, » et désire savoir si même il ne conviendrait pas de les bannir de l'Etat.
(Turin, Archives de l'Etat, Lettere particolari, Favre.) A son tour, le 17 janvier 1617, le Saint parle au prince d'une «
damoyselle Marceline de Marcilly, dite Belot, » comme d'une femme décriée et dangereuse pour les familles ; c'est
sans doute l'une des deux sœurs, et très probablement celle qui avait été l'objet des paternelles sollicitudes de l'Evêque
de Genève.
952 Antoine Bellot, dont nous n'avons donné jusqu'ici qu'une notice très succincte (tome XIV, note (538), p. 179), avait
épousé Jeanne de Sirvinges, sœur de Claude de Sirvinges, aumônier de l'abbaye de Belleville. (Voir ci-dessus, note
(672), p. 233.) Par provision du 18 juin r6o2, il fut nommé à « l'estat et office d'Esleu en l'election nouvellement
establie a Belay, ou ressortira Bugey, Veromey et le bailliage de Gex. » Le même document fait valoir « le bon et
louable rapport » qui a été fait de sa personne, de son « sens, suffisance, loyaulté, preudhomie, experience et bonne
diligence. » (Archives dép. de la Côte-d'Or, B. 32, fol. 218-220.) Le 19 mars 1604, il signe une pièce qui l'établit, avec
Bernard Bellot, probablement frère de Dlle Bellot ci-dessus, note (949), patron et présentateur « de la chappelle Sainct
Bernard fondée en l'esglise parrochialle Sainct Roman d'Hostonne. » (R. E.) Antoine Bellot mourut avant le 28 juin
1625, puisque, dans un arrêt du Conseil d'Etat de cette date, « Jacques de Silvinges » figure « en quallité d'heritier de
feu Anthoine Belot et Jeanne de Silvinges sa femme. » (Archives dép. de la Côte-d'Or, B. 39, fol. 270.)
953 Le baron de Lux (cf. tome XII, note (131), p. 80) fut tué d'un coup d'épée par le frère puîné du duc et du cardinal
de Guise, sous le prétexte d'avoir été l'un des inspirateurs du meurtre de son père et de s'en être vanté. Mai» en réalité,
Edme de Malain gênait, par son alliance avec Concini, le parti des ducs de Bellegarde et d'Epernon et des Guise. Le
malheureux baron, raconte Malherbe, « est entré dans l'allée d'un cordonnier..., a monté cinq ou six marches dans le
degré, là où il est tombé mort... criant : Un prêtre, un prêtre ! Jésus, Jésus, Maria ! » (Lettres à Peiresc, 5 et 12 janvier
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pour venir de Geneve ; neanmoins, ainsy comme on l'asseure, j'ay grande opinion qu'elle soit
veritable. Helas ! que je le plains sil est mort ainsy, car autrement, la mort est trop commune et
trop necessaire pour s'en estonner extraordinairement.
Ma tres chere Fille, ma tres bonne Mere, Dieu vous comble de ses plus sacrees benedictions
en tout vostre cœur, en toute vostre vie. Ne me respondes que ce soir, mais dites a M. Michel954
comme vous vous portes.
Vive Jesus !
Revu sur l'Autographe appartenant au R. P. Houet, supérieur de l'Oratoire de Rennes. [336]
_____
DCCCXLVII. A M. Etienne Dunant, Curé de Gex (Inédite).
Pouvoirs donnés à un curé ; avis et recommandations diverses
Annecy, 16 janvier 1613.
Monsieur le Curé,
Vous pourres donques celebrer le mariage entre ce Claude Pietrequin et la fille de la Croix
blanche955, puis que monsieur de Siccard956, qui vaut cent tesmoins, asseure quiilny a rien du costé
dudit Pietrequin qui empesche, et que d'ailleurs la chose presse du costé de la fille.
Je ne suis pas d'advis que vous advertissies si tost le commis a Thueri957, jusques a ce quil
ayt rendu du [337] service a peu pres de l'argent quil a receu, car il n'a point quitté ces (sic) partis
praecedens et tumbera tous-jours sur ses pieds ; de sorte quil suffira de l'advertir quand on sera
prest d'en colloquer un autre. Voyés ce qui sera requis estre fait pour celuy qui sert a Chalex958, et
moy j'appreuveray vostre advis.
1613.) Le fils de la victime, Claude de Malain, provoqua le meurtrier de son père, mais il fut tué à son tour. (Voir à
l'Appendice, une lettre du baron de Lux au Saint.)
954 M. Michel Favre, confesseur de la Communauté.
955 Au verso de l'Autographe, on lit de la main du destinataire : « Congé pour le mariage de La Vallee et la fille de la
Thoennette, etc., 18 janvier 1613. »
Le 12 septembre 1609, François de Sales voulant sortir de Genève, qu'il venait de traverser (voir le tome
précédent, pp. 196, 216, 223), « la porte de Gex » se trouva « fermée à l'occasion de la Presche. C'est pourquoy il fust
contrainct... d'arrester l'espace d'une heure... au logis de la Croix blanche. » (Charles-Auguste, Histoire, etc., liv. VII.)
Sans doute, c'est la fille de l'aubergiste ou une servante de cette auberge que le Saint mentionne dans la présente lettre
; « Claude Pietrequin » et « La Vallee » semblent désigner un seul et même personnage.
956 M. de Siccard était un magistrat catholique du pays de Gex. Quand l'Evêque de Genève fit une ordonnance pour
régler le service divin dans ce bailliage, le 20 novembre 1613, il nomma ce gentilhomme parmi les conseillers dont il
fallait prendre l'avis dans « les choses ardues et difficiles. » Il rendit en effet de précieux services à la cause de la foi,
parmi les inextricables difficultés que rencontra le bienheureux Prélat dans le rétablissement du culte.
957 D'après un mémoire du Saint (9 novembre 1612), nous voyons qu'il s'agit ici de Jean Gay, fils de Pierre Gay et de
Jacquemine Filliod, de la paroisse de Fleyrier. Le 15 août 1632, il dépose qu'il est « prebstre et vicaire perpetuel de
La Tour (Faucigny)... aagé d'environ cinquante six ans. Il y a environ trente huict ans, » ajoute-t-il, « que je cognois
fort bien le bienheureux François de Sales, parce que j'estois Annessy au college au mesme temps quil prit l'habit
d'ecclesiastique... J'ay eu continuellement charge d'ames, tant a Sainct Joyre et La Tour, riere la domination de Son
Altesse, qu'a Thoyry, en la terre de Gex, riere la France. » ( Process. remiss. Gebenn. (I), ad 2um interrog. et art. 10,
28.) Sous-diacre le ao mai 1595, prêtre le 14 février 1598, Jean Gay devint recteur, le 10 octobre 1603, de la chapelle
de Notre-Dame de Consolation dans l'église de La Tour, et le a8 avril 1615, vicaire perpétuel de l'église paroissiale
elle-même. Le 23 août 1649, il résigna son bénéfice en faveur de Nicolas Gay. (R. E.)
958 Le 29 janvier 1590, Révérend Henri Ginon arracha aux mains des hérétiques la paroisse de Challex. Il céda la
place, le 19 septembre 1614, à Jean Curton, ordonné prêtre le 19 décembre 1609. Celui-ci travailla avec beaucoup de
fruit, reçut son titre officiel de curé le 29 décembre 1625 et mourut en septembre 1656. (R. E.) Nous ignorons si c'était
l'un de ces deux prêtres, ou même un troisième, qui desservait Challex en 1613.
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23.9 Page 229

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Mon cousin Chaudens959 m'oblige fort, et tascheray de m'en revancher. Monsieur le
baillif960 m'ouvre un moyen pour eviter le bruit qui pourroit naistre pour la chapelle961, qui est de
sursoyr a tout jusques a retour [338] du P. François962. Qui a tems, a vie ; mais il faudroit que
monsieur de Livron963 voulut donner ce loysir a l'affaire : a quoy le P. Michel Ange964 et vous,
pourres le disposer. Nous attendrons les nouvelles apportees par le sieur de Farnex965, et cependant
espererons qu'elles sont bonnes, puisquil n'est pas empressé de les delivrer.
Je me recommande a vos prieres, estant,
Monsieur le Curé,
Vostre humble, tres affectionné confrere,
FRANÇS, E. de Geneve.
XVI janvier 1613.
Je vous prie, par la premiere commodité, de m'advertir [339] quand nous pourrons loger un
curé a Sacconex966, c'est a dire quand nous aurons les moyens.
A Monsr
959 Très probablement François de Choudens (voir le tome précédent, note (618), p. 212), notaire à Gex en 1612, le
même qui figure dans le Procès-verbal des sieurs Milletot et de Brosses à la date du 27 juillet 1612. (Cf. plus haut,
note (731), p. 254.)
960 François de Boyvin, baron du Villars-sous-Salève (voir tome XII, note (1046), p. 417).
961 Cette chapelle doit être l'une des trois suivantes :
1. La chapelle de Saint-Gras, fondée en l'église paroissiale de Thoiry, où Jeanne-Gasparde de Menthon,
veuve de Henri de Livron, seigneur de Mattignin et d'Allemogne, veut être inhumée « au tumbeau du predict sieur
deffunct, » par déclaration testamentaire du 1er mars 1617. (Archives de la Visitation d'Annecy, Collection J. Vuÿ.)
Les seigneurs de Livron nommaient à cette chapelle.
2. La chapelle de Sainte-Catherine à Saint-Jean de Gonville, dont Louis et Bernard de Livron, avec Jeanne-
Gasparde de Menthon (voir ci-dessus), avaient acquis les biens par un acte de vente du 26 juillet 1569, autorisé par
Grégoire XIII et confirmé par Emmanuel-Philibert, duc de Savoie. (R. E.)
3. La chapelle ou église du Crozet, dont il est question dans le Procés-verbal de Gex. Elle faisait partie du
membre de Crozet, annexé à la commanderie des Feuillets, de l'Ordre de Malte, laquelle était située sur la commune
de Chàtenay en Bresse. Claude de la Verchère en fut commandeur de 1610 à 1615 ; dans une lettre au Saint, non datée,
mais qui doit être de janvier 1613 (voir à l'Appendice), il revendique les biens et l'église de Crozet, dont l'Evêque de
Genève avait pris possession le 26 juillet 1612. Il faut savoir que la famille de Livron avait un droit partiel à la dîme
des deux hameaux de Crozet ; ce qui expliquerait son intervention dans cette affaire.
962 Le P. François de Chambéry, Capucin (voir ci-dessus, pp. 129 et 298).
963 Les seigneurs de Livron de Thoiry demeuraient à Thoiry dès le XIVe siècle. Henri de Livron devint en 1552
seigneur d'Allemogne, qu'il acheta de Jean de Menthon, son beau-père ; Louis de Livron, son fils aîné, se déclare «
bon, vray et loyal catholique... romain, » dans son testament daté de 1620. Un autre fils, Bernard, seigneur
d'Allemogne, assistait à l'assemblée des bourgeois du pays de Gex, réunis le 16 juillet 1612 au logis du sieur de
Brosses. (Procès-verbal de Gex.) C'est apparemment de celui-ci que la lettre fait mention. Il épousa Dlle Louise-
Gabrielle de Laude de la Vulliane ou Veillane, qui fut veuve en 1613 ; toutefois, l'inventaire des biens du défunt n'eut
lieu que le 17 septembre, d'où l'on peut inférer qu'il vivait encore en janvier de cette année. (Archives de la Visitation
d'Annecy, Collection J. Vuÿ, et notes de M. Vidart, de Divonne.)
964 Un Capucin de ce nom se trouvait à Gex avec « Frere François de Beugey, » lorsqu'en l'hôtel du sieur de Brosses,
l'Evêque de Genève étant présent, il fut donné lecture, le 16 juillet 1612, de l'arrêt du Conseil privé de Sa Majesté pour
l'exécution de l'Edit de Nantes. (Procès-verbal de Gex.) Sans exclure le P. Michel-Ange d'Avignon, on pourrait
proposer avec plus de vraisemblance le P. Michel-Ange de Remiremont, qui demeura jusqu'en 1611 dans la custodie
de Savoie. Gardien du couvent de Chambéry en 1608, il devint dans la suite (la Province de Savoie étant indépendante)
définiteur de la Province de Lyon en 1617, 1619, 1630, et provincial en 1620-1622. (Notes du R. P. Eugène de
Bellevaux.)
965 Pierre Chevalier, seigneur de Fernex, fils d'Andrée d'Aubonne et de Paul Chevalier, le premier député régulier à la
cour de France, célèbre dans l'histoire de Genève par ses négociations auprès de Henri IV et de Louis XIII en faveur
de la cité. Le « sieur de Farnex, » député aux Etats-Généraux de 1614, fut, dit-on, moins bon patriote. (Voir De Crue,
Henri IV et les députés de Genève, 1901.) C'est lui qui, au cours de la tournée des commissaires royaux de Gex (juillet
1612), fit entendre avec une courageuse opiniâtreté les revenu dications de ses coreligionnaires. (Cf. Procès-verbal,
et note (835), p. 294.)
966 Pierre Poncet fut, comme nous l'avons dit plus haut (note (190), p. 60), institué curé de Sacconex le 19 décembre
1618, après résignation de M. Claude de Cheynel. A cause de sa pauvreté, le Grand-Sacconex (aujourd'hui dans le
canton de Genève) avait été confié à la charité d'un curé voisin.
229/321

23.10 Page 230

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Monsr le Curé de Gex.
Revu sur l'Autographe appartenant à M. Defrance, à Villers-devant-Orval (Belgique).
_____
DCCCXLVIII. Au Comte Prosper-Marc de Tournon (Inédite).
Assurance de dévouement. Souhaits et bénédictions
Annecy, 23 janvier 1613.
Monsieur,
Je feray tout ainsy que vous le desires et ne treuverés non plus en autre occasion, quelle
qu'elle soit, aucune replique en ce quil vous plaira me marquer pour vostre service et contentement,
selon l'estendue de mon pouvoir. Dieu vous conserve, Monsieur, et respande beaucoup de
benedictions sur vous, sur madame vostre femme, sur mesdames vos filles967, mais en ce tems icy
[340] particuliement sur madamoyselle la future968 et sur le seigneur dom Sanche969.
Je suis, Monsieur,
Vostre plus humble, tres affectionné serviteur,
FRANÇS, E. de Geneve.
XXIII janvier 1613, a Neci.
A Monsieur
Monsieur le Comte de Tornon.
Revu sur l'Autographe appartenant à M, de Charentenay, à Dijon.
_____
967 Hélène-Ferdinande, mariée à Jean-Baptiste de Malarmay, comte de Rossillon (29 octobre 1609) ; Claire-Marie, qui
avait épousé le 10 novembre de la même année Gabriel Guillet, seigneur de Monthoux (voir plus haut, note (48), p.
2) ; Marguerite, la cadette, qui n'était alors qu'une enfant. Les notes de ces trois filles du comte de Tournon seront
données avec d'autres lettres qui leur sont adressées ou qui font d'elles une mention plus explicite.
968 « Madamoyselle la future, » qui sera destinataire, est Claude-Françoise, fiancée dès novembre 1612 à Salomon de
Murat, « gentilhomme françois, » fils de Jacques de Murat, baron de la Croix des Issarts. (Turin, Archives de la Ch.
des Comptes, Lettres patentes du duc de Savoie, 14 novembre 1612.) Le mariage, dont le Saint fut « l'officier, »
comme il l'écrira lui-même plus tard (lettre à Mme de la Fléchère, 29 septembre 1613), dut être célébré avant le Carême
de cette année. (Cf. ci-après, note (995), p. 350.)
969 Sanche-Marc-Prosper de Maillard, baron de Tournon, devint abbé-gentilhomme de la chambre du prince-cardinal
Maurice de Savoie, te 10 mars 1612, Charles-Emmanuel ordonne à son trésorier général de continuer le paiement
d'une pension « pour maintenir aux esçoles don Alphonse et don Sancio de Mailliard, frères, enfans du comte de
Tournon. » (Turin, Archives de la Ch. des Comptes, vol. 26, Patentes, 1612.) Plus tard, le duc fait porter le second sur
le rôle des archers de la garde. (Cf. Mugnier et Dufour, Les Maillard, Chambéry, 1890.)
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24 Pages 231-240

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24.1 Page 231

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DCCCXLIX. A M. Jean de Chatillon. Recommandation en
faveur d'un nouveau converti digne d'assistance
Annecy, 24 janvier 1613.
Monsieur,
Nous avons icy le sieur Nicolas Bertolonio970, que nostre Chapitre a aucunement appointé
pour l'ayder a [341] vivre en servant au chœur. Mays il auroit necessité, de plus, de
quelqu'assistance pour meubler sa chambre, et prætend que la Sainte Mayson, selon son institut et
la charité qui y regne, l'aydera volontier de quelque chose pour cela. Or, il m'a prié d'attester envers
vous et, par vostre entremise, envers Monseigneur l'Archevesque971 et le Conseil de la Sainte
Mayson qu'il merite ayde et secours ; ce que je fay en saine conscience, pour l'avoir ainsy reconneu
jusques a present. A quoy j'adjouste ma priere en sa faveur, et vous souhaitant tout bonheur, je
demeure,
Monsieur,
Vostre humble, tres affectionné confrere,
FRANÇS, E. de Geneve.
XXIIII janvier 1613, a Neci.
A Monsieur de Chatillon,
Plebain de Thonon.
Revu sur l'Autographe conservé à Rome, au Collège Romain, dans la Chambre de saint Louis de
Gonzague. [342]
_____
970 Nicolas « Bertolonio, » fils d'Ambroise Bartoloni de Florence, changeur à Lyon, et d'Elisabeth Canami de Lucques,
entra dans l'Ordre des Servites. Puis, oubliant ses vœux, il se retira à Genève, y épousa (2 août 1599) Judith Gayon et
se fit recevoir bourgeois de la cité le 34 septembre 1606. « Touché du remord de conscience, » raconte François Favre
(Process. remiss. Gebenn. (I), ad art. 27), « il vint en cette ville d'Annecy et se feit presenter par le sieur de Polinge,
chanoyne de la cathedrale, au Bienheureux, lequel le receut fort favorablement, l'instruysit de nouveau, luy feit abjurer
l'heresie » et lui obtint du Souverain Pontife de célébrer comme avant la sainte Messe (1612). Bientôt, le charitable
Evêque « luy procura d'entrer au service de son eglise de Sainct Pierre. Il luy assistoit grandement du sien, l'appelloit
souvent a sa table, et quelque temps appres, ayant cogneu sa perseverance... et sa capacité, il luy feit obtenir la
prebende theologale en l'evesché de Sions, ou il se retira et persevera, faisant et s'acquitant bien de sa charge jusques
a sa mort. » Le 31 décembre 1615, le dévoué protecteur du converti écrivait à Mgr Jost, Evêque de Sion : « Je me
réjouis extrêmement que M. Nicolas se soit fixé à Sion, persuadé qu'il effacera par l'intégrité de sa vie, ses erreurs
passées. D'ailleurs, « c'est à mon avis, un homme d'une prudence expérimentée et d'un esprit « pénétrant. » Il mourut
et fut inhumé à Thonon vers le 31 mai 1616. (Voir Mém. de l'Acad. Salés., tome XV, 1892, pp. XIII-XV.)
971 Vespasien Gribaldi, ancien archevêque de Vienne (voir tome XII, note (51), p. 24).
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24.2 Page 232

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DCCCL. A Madame des Gouffiers, Religieuse du Paraclet972
(Fragment). Les sentiments que le Saint aimait à trouver dans
une postulante. A la Visitation, « toutes choses sont basses, »
excepté « la pretention » des Religieuses qui l'habitent.
Annecy, vers fin janvier 1613.
Madame,
……………………………………………………………………………………………………..
Puisque vous ne respires que l'imitation de la croix, de l'obeissance et humilité de nostre
Sauveur, venes a la [343] bonne heure chez nos Seurs de la Visitation. Mays vous vous
representeres que la mayson en laquelle vous venes est une petite Congregation encor mal logee,
et en laquelle toutes choses sont basses, humbles et abjectes, hormis la pretention de celles qui y
sont, qui n'est rien moins que de parvenir a la perfection de l'amour divin973.
……………………………………………………………………………………………………..
Revu sur le texte inséré dans l'Histoire de la Fondation du 1er Monastère de la Visitation de
Lyon.
_____
972 Son père, François Arnault des Gouffiers représentait l'une des premières maisons de Saintonge ; le bon plaisir, la
volonté même de Gabrielle de Fedict, sa mère, en avait fait une Religieuse du Paraclet. Elle céda à la violence, mais
ne se résigna jamais à une existence qui, bien que conforme à ses goûts de grandeur, n'était pas de son choix. Un jour,
l'Introduction à la Vie devote tomba sous ses yeux. Cette lecture et la nouvelle que l'auteur avait donné à une
Congrégation un idéal de vie encore plus parfaite, l'entraînèrent en Savoie. Au début de juin 1613, Elisabeth des
Gouffiers commençait un essai à Annecy ; elle mourut vers décembre 1621. Son labeur avait été court mais fécond :
en moins de huit ans, elle avait procuré les fondations de Lyon, de Moulins et de Paris.
Parmi les collaboratrices des deux Fondateurs, on chercherait en vain une figure plus expressive et surtout
plus originale dans la double acception du mot. C'était vraiment « un terrible esprit ; » le mot est de la Mère de
Chantal. (Lettres, vol. Ier, p. 142.) Dans un corps faible, elle portait une âme d'une activité prodigieusement remuante,
subtile pour concevoir les projets les plus ardus et non moins audacieuse pour les entreprendre, dévorant les
contradictions, surmontant les difficultés d'où qu'elles vinssent, à force de ténacité et de souplesse, aussi capable
d'amener doucement à ses desseins les volontés les plus hésitantes, que de les y réduire en les lassant par l'obstination
de son vouloir. Avec cela, « une forte inclination a la hauteur et dignité « de vie, » une « incomparable aversion a la
sousmission » et un esprit qui avait de la « peyne a rencontrer des ames faites a son gré » et très « clairvoyant a treuver
les a dire, non moins que douillet S les ressentir. » (Lettre du Saint à Mme des Gouffiers, 9 juin 1620.) Les deux Saints
l'aimèrent grandement, mais que de fois ils durent la porter sur leurs épaules (cf. Lettres de la Sainte, vol. Ier, p. 226),
constamment partagés entre l'amour de la paix, le devoir de la gratitude pour les services rendus et l'obligation de
défendre leurs Maisons contre ses exigences et ses ingérences inacceptables. On ne peut dire combien cette pauvre
âme servit d'exercice à leur héroïque mansuétude. Elle allait toujours s'embarrassant dans d'interminables procès
contre les siens : avis, supplications pressantes, Mme des Gouffiers n'entendait plus rien. Au mois d'août 1621, elle
avait même quitté la Visitation, où d'ailleurs elle ne fut jamais Religieuse, pour « demeurer à la merci du monde. »
Mais vint la maladie, qui sans doute ouvrit les yeux de la « chère Sœur ; » car, au dire de la Mère de Chantal, elle alla
« à Dieu fort heureusement, après avoir souffert avec grande douceur, patience et résignation. » (Lettre à la Mère de
Blonay, décembre 1621, vol. Ier, p. 600.)
973 Les lignes qu'on vient de lire semblent répondre à une lettre de Mme des Gouffiers que « M. l'Aumosnier de
Belleville » aurait apportée au Saint en venant à Annecy. (Voir ci-dessus, pp. 333, 334.) Cette réponse ne dut pas se
faire attendre : si elle ne fut pas remise à Claude de Sevelinges, assurément elle suivit de près son départ pour Lyon.
La date approximative placée en tête de notre texte se déduit de ces conjectures.
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24.3 Page 233

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DCCCLI. A Monseigneur Pierre Fenouillet Évêque de
Montpellier. Remerciements pour de beaux présents ; le Saint en
a fait part à ses amis. Un plaisir interdit. Souhaits et
message
Annecy, fin janvier ou commencement de février 1613 974.
Monseigneur,
Je ne puis dignement vous remercier des beaux presens qu'il vous a pleu m'addresser, que
j'ay receus avec [344] une extreme joye, non certes pour leur valeur, qui est grande, mais parce
que ce sont de grans tesmoignages du cœur que vous aves envers moy, m'estant envoyés avec bien
du soin et incommodité975. Et pour en retirer plus de gloire, je n'ay pas oublié d'en faire part a tous
ceux de cette ville que j'estime capables de peser le bonheur que ce m'est destre aymé de vous,
auquel ne pouvant donner avec contreschange, je fay pour le moins humble reconnoissance que
mon devoir surpasse mes forces, les-quelles neanmoins vous les dedie toutes a l'honneur de vostre
service.
Mais quel contretems ! Si, j'eusse esté si heureux d'aller a Paris cette annee, selon le desir
de monsieur nostre grand [ami976,] pour recueillir autour de vous et de luy les fruitz de la plus
excellente consolation que je pouvois avoir ! J'acquiesce neanmoins a l'ordonnance de la
Providence celeste, laquelle au moins a permis que, pour mes pechés, ce playsir me soit interdit977.
J'espere que le voyage de Piemont, dont j'ay dessein pour ce primtems, impetrera de Son Altesse
une si forte confiance en ma simplicité, que je pourray l'annee suivante avoir ma juste liberté.
Ce pendant, allés, Monseigneur, dessus ce grand theatre978 et, suyvant Dieu comme vous
faites, esperés toutes [345] sortes de bons effectz, et vous employés pour le bien de l'Eglise et de
la province pour laquelle vous vous achemines.
Mais usons979 doucement et toutesfois, si vous me croyés, un peu avidement de la presence
du grand amy, que j'estime si grand pour moy, que je ne voy rien de si grand parmi toutes les
grandeurs de Paris qui ne me semble petit en comparayson de sa bienveuillance. Que si
quelquefois, comme je n'en doute pas, vous me favorises de quelque mention de nous
ensemblement, je vous conjure, Monseigneur, que ce soit comme de
Vostre tres humble et tres obeissant frere et serviteur,
FRANÇS, E. de Geneve.
_____
974 Hérissant (1758), en publiant cette lettre le premier, l'a adressée A un Seigneur ecclésiastique ; Blaise (1821), A un
Evêque, et Vivès, corrigeant maladroitement ses prédécesseurs, Au Duc de Savoie. Or, le vrai destinataire est
certainement Mgr Fenouillet, comme on peut le déduire de son départ projeté pour Paris, du ton de la lettre et de
l'allusion à des Hayes, le « grand amy. »
La date est déterminée par la mention du voyage en Piémont qui, de fait, eut lieu au printemps (cf. les lettres
du 28 mars 1613). Le quantième approximatif se tire de l'allusion aux prédications du Carême qui appelaient à la
capitale l'Evêque de Montpellier. En 1613, le mercredi des Cendres tombait le 20 février.
975 Ces « beaux presens » ne seraient-ils pas du « piqu'ardent, » du « vin grec » ou vin de Grenache, dont le Saint parle
au comte de Tournon le 11 avril et le 14 juin de cette même année ? L'incommodité de l'envoi, sa valeur, la distribution
que François de Sales en fit à ses amis le feraient croire.
976 Antoine des Hayes.
977 Voir ci-dessus, Lettre DCCCX et pp. 297, 301, et ci-après, la lettre à des Hayes, 28 mars 1613.
978 « Le 4, jeudi (mai 1613). A neuf heures, en la grande salle, au sermon de M. Fenouillet, évêque de Montpellier.
» (Journal de Jean Héroard, Paris, 1868, tome II, p. 120.) Le Prélat était donc à Paris, et probablement il prêcha le
Carême au Louvre.
979 Les éditions précédentes portent disons, qui paraît être une erreur de lecture.
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24.4 Page 234

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DCCCLII. A une dame980. Dans quelles vues de foi il faut
considérer les absences et les séparations définitives.
Annecy, [fin janvier ou février 1613.]
A la verité, je ne sçavois pas, ma tres chere Fille, que vostre affliction eust si violemment
opprimé vostre cœur ; mais quand je l'ay sceu, j'eusse volontier pris resolution d'aller vous porter
le mien et, avec iceluy, toutes les consolations qu'il eust pleu a Dieu me fournir. Or, Dieu soit loué,
dequoy vous vous accoises tout bellement a la suite de sa divine Providence.
Ma tres chere Fille, estendes souvent vostre veuë jusques au Ciel, et voyes que cette vie
n'est qu'un passage [346] a celle que l'on fait la ; quatre ou cinq mois d'absence seront bien tost
passés. Que si nostre accoustumance et nos sens, amusés a voir et estimer ce monde et la vie
d'iceluy, nous font un peu trop ressentir ce qui nous y contrarie, corrigeons souvent ce defaut par
la clairté de la foy, qui nous doit faire juger tres heureux ceux qui, en peu de jours, ont achevé leur
voyage. En ces grandes occasions, ma tres chere Fille, il faut faire voir la grandeur de nostre
fidelité. Bienheureux sont ceux qui n'estiment jamais avoir rien perdu de ce que Dieu a receu a sa
grace.
Je feray ce que vous me dites. Vivés toute pour Dieu, ma tres chere Fille, et me croyes
Vostre plus humble et tres affectionné serviteur,
FRANÇS, E. de Geneve.
_____
DCCCLIII. A Madame d'Escrilles. Affaires diverses. Parmi
les tracas temporels, il faut garder la sainte tranquillité et
douceur de cœur
Annecy, commencement de février 1613 981.
Voyla des lettres qui m'ont esté rendues aujourdhuy, les unes venant de Chamberi, les
autres de Bourgoigne. Vous m'excuseres, s'il vous plait, ma tres chere Fille, si celle de monsieur
de Genesia982 est ouverte : ça esté sans malice quelconque que je l'ay fait.
Au demeurant, je parlay a monsieur de Treverney983 asses longuement et doucement de
vos affaires ; il me dit [347] qu'a son advis, vous vous trompies grandement en l'estime des biens
de feu monsieur vostre pere984, et quil se treuveroit que vous avies esté portionnee tres
suffisamment. Or, la conclusion neanmoins fut quil se sousmettroit a ce qui en seroit advisé par
telz arbitres et amis que l'on jugeroit convenable de choysir pour vuider les pretentions d'eux et de
980 Mme de Travernay pourrait être proposée avec quelque vraisemblance, puisqu'elle avait perdu tout récemment un
enfant. (Voir ci-dessus, note (942), p. 331, et la Lettre DCCCXLV.)
981 Dans la lettre du 13 octobre 1612 à la même destinataire, le Saint promet de s'occuper de ses affaires ; il donne ici
le résultat de ses démarches. L'entretien qu'il compte lui accorder avait été proposé déjà pour avant le Carême de 1613
(ibid., p. 279) ; aussi la « venue » indiquée comme prochaine dans la présente lettre, suggère la date approximative
que nous lui donnons.
982 Lancelot Guillet de Monthoux, seigneur de Genissia (voir note (867), p. 304).
983 Balthazard de Mouxy, frère de la destinataire. (Voir le tome précédent, note (957), p. 333, et cf. ci-dessus, p. 279.)
984 Pierre-Marc de Mouxy, seigneur de Travernay en Bresse, gentilhomme de la chambre du duc de Savoie, fils de
François-Gabriel de Mouxy, seigneur de Lupigny, et de Claudine de Luyset, demeura dès l'âge de douze ans « es
guerres et auz services des grands seigneurs, et vingt deux ans sans avoir esté dans la maison de son pere. » Il épousa
par contrat dotal du 17 mai 1573, Dlle Antoinette de Saint-Jeoire (voir ci-dessus, note (793), p. 279), et testa le 20
décembre 1602, instituant héritiers universels ses fils Balthazard et Melchior, auxquels il substitua ses filles Marie et
Jeanne-Françoise.
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24.5 Page 235

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vous a l'amiable985, qui est en somme le bon mot ; outre que vrayement il ne tesmoigna nullement
de treuver mauvaise vostre recherche. Mays a vostre venue, qui sera peut estre bien tost986, nous
en parlerons plus amplement.
Cependant, ayes tous-jours souvenance de la sainte tranquillité et douceur du cœur, et de
la parfaite remise de nos affections en la sainte providence de Dieu, a laquelle je vous supplie me
recommander, ma tres chere Fille, comme
Vostre plus humble parent et serviteur,
FRANÇS, E. de Geneve.
[Je] salue humblement madame vostre mere987, et a commodité, madame de la Flechere.
A Madame
Madame d'Escrilles.
Revu sur l'Autographe conservé à la Visitation de Poitiers. [348]
_____
DCCCLIV. A la Mère de Chantal. Un contrat qui va bien.
Promesse d'une visite et annonce d'une visiteuse
Annecy, 9 février 1613 988.
Voyla vostre contract que je vous renvoye, ma tres chere Fille ; je croy quil va bien, ce que
vous aves remarqué estant corrigé. M. de Blonnay ne me vit point hier au soir ; sil vient me parler,
je m'essayeray de le tirer aux 3 mille florins.
Voyla des lettres de Mme la Presidente989, et une medaille et certains Agnus Dei et des
livretz qu'ell'envoye a sa fille. Ce soir je vous iray voir, car j'ay des-ja demandé mon congé pour
deux heures.
Mme de la Flechere viendra ce soir ou ce matin, et ira descendre droit chez vous, venant
toute seule, sans fille de chambre, selon que vous verres par sa lettre.
Je ne sçai sil sera mieux que l'action de demain se face avant nostre Office ou apres990. Je
voudrois que ce fut devant, pour accompaigner mon cher hoste991 a l'Office, ou il veut estre. [349]
Bonjour, ma tres chere Fille ; Nostre Seigneur soit a jamais le saint Amour de nostre unique
985 Mariée à neuf ans (cf. note (790), p. 278), Marie de Mouxy « avoit tout quicté et renoncé moyennant la dote qui
luy fut constituee » alors. Plus tard, elle prétendit avoir droit à un « supplement de legitime. » Ce sont les « prætentions
» dont il est question dans cette lettre. Le 28 octobre 1618, elles n'étaient pas encore « vuidees ; » les nièces qu'elle fit
héritières de ses droits ce même jour (cf. note (795), p. 280), ne purent remplir leurs charges à l'égard du Monastère
de la Visitation, et le 13 juin 1620 il fallut en venir à une transaction. (Archives de la Visitation d'Annecy.)
986 Le mercredi des Cendres tombait le 20 février ; c'est donc avant cette date que la destinataire revint à Annecy. (Cf.
note (981) de la page précédente.)
987 Voir ci-dessus, note (984).
988 L'allusion au « contract » et aux « 3 mille florins » fait supposer quelque arrangement pour la dot de Sœur Marie-
Aimée de Blonay, à l'occasion de son oblation, laquelle se fit le 10 février 1613, dimanche de la Sexagésime : d'où la
date de ce billet.
989 La présidente Favre.
990 A la cérémonie d'oblation (cf. note (988), « le sainct Evesque... prescha sur ces paroles de David : Ordonnez un
jour solemnel, et amenez la victime jusques à la corne de l'autel. » L'office terminé, « il dit à la Mere de Chantal : Je
croy que Dieu veut faire quelque chose d'extraordinairement bon de nostre chere Cadette. Sa bonté a daigné m'en
donner de grands sentimens, et je ne me souviens pas d'avoir jamais rien offert à Dieu avec plus d'ardeur, ny de
meilleur cœur, que cette pauvre petite colombe. » (Ch.-Aug. de Sales, La Vie de la Mere Marie Aymée de Blonay,
1655, chap. V.)
991 M. de Sevelinges, l'aumônier de Belleville, arrivé vers le 10 janvier (cf. ci-dessus, pp. 333, 334), devait avoir quitté
Annecy ; aussi croyons-nous que le « cher hoste » désigne M. de Blonay, venu apparemment tout exprès pour assister
à l'oblation de sa fille.
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cœur. Amen.
Je pense ce soir vous aller voir a trois heures. Dieu benisse tout le cœur de ma tres chere
Mere.
Revu sur l'Autographe conservé à Annecy, chez les RR. PP. Missionnaires de Saint-François de
Sales.
_____
DCCCLV. A la même (Billet inédit). Mesures à prendre à
l'ouverture d'un testament. Décès de Mme de Miribel
Annecy, 15 ou 16 février 1613 992.
Ma tres chere Fille,
Soudain que vous aures nouvelles que le testament sera ouvert, envoyes appeller et prier
mon cousin993, et luy en conferes, disant que vous aures besoin de son ayde, affin que si le
testament a lieu, le peu de bien qui en arrivera a la Congregation arrive en paix et tranquillement994.
Je pense que je vous verrey avant mon départ995 ; au [350] moins je vous escriray. Ce
pendant, bon jour ma tres chere Mere, ma Fille vrayement bien aymee mienne.
Je croy que vous sachies (sic) que cette bonne damoyselle996 est trespassee a l'aube du jour.
Revu sur l'Autographe conservé à la Visitation de Chambéry.
_____
992 Il s'agit sans doute dans ce billet du testament de Mme de Miribel (voir ci-dessus, note (932), p. 328), qui fut inhumée
le 17 février 1613 et était « trespassee a l'aube du jour ; » donc, le 15 au plus tôt, ou le 16.
993 Louis de Sales, prévôt du Chapitre de Genève (voir tome XII, note (22), p. 6).
994 Mme de Miribel, pour reconnaître la charité de la Mère de Chantal et de ses compagnes qui l'avaient visitée, institua
le Monastère héritier de ses biens (voir note (932), p. 328), « soû la charge de faire dire et celebrer tous les jours de
l'an de son trepas une Messe des trepassez, et tous les samedis de châque semaine, à perpetuité, une Messe de Nôtre
Dame à son intention. » (Livre du Chapitre du Ier Monastère de la Visitation d'Annecy.) On verra que l'héritage,
comme le Saint semblait le prévoir, n'arriva pas « tranquillement » à la Visitation. (Cf. note (1040), p. 366.)
995 Le Prélat devait probablement se rendre à Rumilly pour bénir le mariage de Claude-Françoise de Maillard avec
Salomon de Murat de la Croix (cf. ci-dessus, note (970), p. 341), et ensuite, monter au château de Sales pour y passer
les jours de Carême-prenant.
996 Mme de Miribel.
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24.7 Page 237

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DCCCLVI. Au Père de Lesseau, Religieux Célestin997. Le Saint
décline les louanges d'un poète avec une discrète humilité.
Annecy, 19 février 1613.
Mon Reverend Pere,
Vous m'obligés trop de rendre tant de tesmoignages de vostre affection envers moy qui ay
si peu de force pour correspondre a mon gré, par quelque bon effect de gratitude, a lhonneur que
vous me faites, quoy qu'en verité j'en aye un desir extreme. Et sur cela, je regrette que vostre esprit,
digne de traitter des meilleurs sujetz, soit employé a favoriser un homme de si peu de merite. C'est
domage de broder si delicatement sur un vil bureau :
« Non omnes arbusta juvant humilesque miricæ998. »999
Cependant, mon Reverend Pere, je vous remercie tres humblement, et ne cesseray point de
respandre sur vostre [351] personne mille et mille bons souhaitz a vase plein, ni d'estre toute ma
vie,
Mon Reverend Pere,
Vostre tres humble et tres affectionné confrere
serviteur en Nostre Seigneur,
FRANÇS, E. de Geneve.
XIX febvrier 1613.
Au R. Pere en N. S.
Le P. de Lesseau, de l'Ordre des Celestins.
Lyon.
Revu sur l'Autographe conservé à Sens, dans le trésor de la Métropole.
_____
DCCCLVII. A Madame Bourgeois, abbesse du Puits-D'Orbe.
Solidité des affections plantées de la main de Dieu. Intérêt
que porte le Saint au Puits-d'Orbe. Il faut faire souvent
revivre les résolutions prises au temps de la ferveur.
Messages divers
Annecy, 23 février 1613.
Je suis certes bien marri, ma tres chere Seur, ma Fille, que vous n'ayés receu mes lettres
997 Guillaume de Lesseau ou Lessau, novice à Mont-Castres près de Compiègne, y fit sa profession, et mourut en 1634
au monastère de Metz, après avoir résidé la plus grande partie de sa vie dans celui de Paris. Il cultivait les lettres avec
succès, composait en vers, et sans doute il avait adressé au saint Evêque de Genève quelque anagramme, peut-être
même un sonnet à sa louange. Ce billet semble être une réponse à cet hommage poétique.
On attribue au même Religieux un poème élégiaque sur son frère Vincent, Célestin comme lui, et un ouvrage
sur le Chapelet. D. Antoine Becquet, auquel nous empruntons ces indications, parle aussi, mais seulement par ouï-
dire, d'un autre livre ascétique imprimé à Lyon, en 1618, qui aurait été dédié à saint François de Sales. (Gallicæ
Cœlestinorum Congr. Ord. Sti Benedicti Monast. fundationes, etc., Parisiis, 1719.)
998 Virgil., Eclog., IV, 1-3.
999 « Tout le monde n'aime pas les arbustes et les humbles bruyères. »
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24.8 Page 238

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que souvent je vous ay escrites et addressees a Dijon, non point tant pour autre sujet que pour la
consolation que vostre bon naturel vous fait recevoir quand vous voyés de mes escritz. Or sus,
Dieu soit loüé. Meshuy, quand nostre Mere de Chantal escrira a Bourbilly, je me serviray de
l'occasion, puisqu'elle est plus asseuree.
Mais dites moy, je vous prie, ma chere Fille, eussies [352] vous bien peu croire qu'une
affection plantee de la main de Dieu, arrousee par tant d'obligations que je vous ay et a vostre
Mayson, fut sujette a diminution ou esbranslement ? Non certes, ma tres chere Seur, ma Fille, il
n'est pas possible qu'une amitié vraye et solide puisse jamais cesser.
Quelle joye dequoy vostre Monastere va si bien et qu'il fait honneur, devant Dieu et ses
Anges, a M. de Sauzea1000 ! Certes, je ne suis pas Ange, mais je l'en honnore davantage, et prie
Dieu qu'il restablisse de plus en plus cette sainte famille en son amour. J'escrivis il y a quelque
tems audit sieur de Sauzea une response assez ample aux siennes ; je ne sçai s'il l'a receuë.
Au reste, pour vostre particulier, faites souvent renaistre toutes les saintes resolutions qu'au
commencement de nos ferveurs Dieu nous departoit si abondamment ; que si elles ne sont plus si
sensibles, il n'importe, pourveu qu'elles soyent fermes et fortes. J'ay bien entendu tout ce que vous
m'escrivés et me suffit. Dieu, par sa bonté, vous tienne tous les jours de sa tres sainte main ; c'est
une priere quotidienne que je luy fay.
Je vous remercie de la toile ; si vous venés l'esté prochain, vous nous communiquerés bien
de la recette, et ce pendant on employera ce que j'en ay. Je dis, si vous venés, parce que, encor que
ce me seroit un contentement extreme de vous voir a souhait en nos pauvres petites contrees, si
est-ce que je ne voudrois pas tirer sur moy le contregré de messieurs vos proches, s'ilz en avoyent,
en vous le conseillant, ni aussi prejudicier a ma consolation en ne vous le conseillant pas. Dieu
vous inspirera ce qui sera pour sa gloire et la vostre. Ce pendant, il faudra donq escrire dans le
livre quelque chose, a mesure que, parmi les frequentes pensees que j'ay sur vous, il plaira a Nostre
Seigneur jetter dans mon cœur des advis propres pour le vostre.
Je salue infiniment toute vostre chere trouppe et specialement nostre seur1001. Je salue encor
M. de Sauzea, [353] si par fortune il est la. Mes freres sont tous vos serviteurs tres humbles, sur
tout mon frere de Boisy1002, qui n'est pas present maintenant que j'escris ; et si, je ne l'ay point
adverti.
Aymés-moy tous-jours cordialement, ma tres chere Seur, ma Fille, puisque de tout mon
cœur je suis vostre. Dieu vous benisse. Amen.
Vostre plus humble et tres affectionné frere et serviteur,
FRANÇS, E. de Geneve.
23 febvrier 1613.
_____
DCCCLVIII. A M. Claude de Blonay. Le destinataire n'ayant
pas eu à se louer de son fils, « excessif en desseins, » le
Bienheureux promet d'y porter remède. Messages divers
Annecy, 2 mars 1613.
Monsieur,
Je participe plus que nul autre a vostre desplaysir, lequel, a mon advis, ne durera plus guere
quant a l'occasion pour laquelle vous l'aves maintenant ; car des-ja l'autre jour, que monsieur le
Prieur vint a Sales, je luy fis la moytié de la resolution que je luy envoye du tout maintenant. Mays
1000 Cf. supra, p. 314.
1001 Françoise Bourgeois, prieure du Puits-d'Orbe.
1002 Jean-François.
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24.9 Page 239

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pourtant, cet esprit-lâ voudra tous-jours des occupations plus que suffisantes, car il est excessif en
desseins1003. [354]
Il me demanda congé de faire certain livre pour imprimer, et je luy respondis fort
convenablement, a mon advis, quil pourroit s'exercer en cela, mais que de faire imprimer, c'estoit
une chose a part. En somme, il faut quil agisse ou d'une façon ou d'autre. Quant a la predication,
il me dit que cela n'incommoderoit rien et que vous en series content, et en fin quil vouloit faire
quelque chose. Si vous juges que je doive faire quelque sorte d'autre remede, je le feray.
Monsieur Soudan1004 me demande tous-jours de pouvoir playder pour retirer les biens
ecclesiastiques de sa parroisse, et dit que tout depend de vous, a rayson des patentes. Il s'en reva
dans dix ou douze jours et ira conferer avec vous.
Nostre fille1005 se porte bien et tout ce qui est avec elle, avec un peu d'embarassement pour
cet hæritage1006 ; mais j'espere que tout s'esclarcira bravement, Dieu aydant.
Je suis, Monsieur,
Vostre humble, tres affectionné confrere,
FRANÇS, E. de Geneve.
2 mars 1613, a Neci.
A Monsieur
Monsieur de Blonnay, Curé de Siez.
Revu sur l'Autographe conservé au château de Marin (Chablais), Archives de Blonay. [355]
_____
DCCCLIX. Au duc de Savoie, Charles-Emmanuel Ier. Pourquoi
le Saint n'a rien entrepris contre l'abbé de la Tour. Qu'on lui
donne des commandements, il obéira
Annecy, 4 mars 1613.
Monseigneur,
Sur les plaintes qui me furent faites de monsieur l'Abbé de la Tour1007, a rayson des
bastonnades qu'il avoyt donnees au sieur Berthelot1008, la grandeur du respect que je doys a Vostre
Altesse me suggera de ne point entreprendre de justice sur la personne dudit sieur Abbé, puys qu'il
estoit ambassadeur ordinaire de Vostre Altesse et n'estoit icy que par maniere de passage, et de
jour a jour en attente de retourner a l'exercice de son ambassade1009. Maintenant, Vostre Altesse
1003 Jean-François de Blonay (voir tome XII, note (666), p. 298) fut admis dans la vie intime du Saint, partageant sa
table, l'accompagnant plus d'une fois dans ses courses à Sixt, à Gex, à La Roche. « Le bon monsieur le Prieur, »
écrivait-il confidemment à Mme de la Fléchère (novembre 1613), « a un esprit attaché a ses imaginations, qui sont trop
grandes et disproportionnees a ses forces et a sa capacité, laquelle n'est pas de gouverner, mais d'estre gouverné. » En
1615, M. de Blonay aurait vivement désiré servir de chapelain à la Visitation de Lyon, mais le saint Fondateur ne le
jugea pas propre pour cet office. « C'est le meilleur homme, » disait de lui la Mère de Chantal ; « s'il croyait conseil...,
il serait saint. » (Lettre à la Mère de Blonay, 4 mars 1627, vol. III, p. 21.) Chargé de la cure d'Evian, Jean-François la
résigna, non sans quelque peine, le 17 mars 1632. (R. E.)
1004 Il nous a été impossible de découvrir le personnage désigné par ce nom, assez commun en Savoie.
1005 Sœur Marie-Aimée de Blonay, fille du destinataire.
1006 L'héritage de Mme de Miribel (voir ci-dessus, note (994), p. 350, et ci-après, note (1040), p. 366).
1007 Voir note (108), p. 27.
1008 Voir note (930), p. 327.
1009 Dans les premiers jours de janvier 1613, Charles de la Tour résidait à Milan, sa ville natale, où il semble que sa
mission avait surtout pour objet de renseigner le duc de Savoie sur les nouvelles du monde diplomatique et de la
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24.10 Page 240

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pourra voir les informations prises a charge et descharge dudit sieur Abbé, que ce porteur a en
main1010, et me donner sur cela ses commandemens, ausquelz j'obeiray avec la [356] fidelité qui
me fait incessamment supplier Dieu pour la prosperité de Vostre Altesse, delaquelle je suis,
Monseigneur,
Tres humble, tres obeissant, tres fidele serviteur et orateur,
FRANÇS, E. de Geneve.
A Neci, le 4 mars 1613.
A Son Altesse Serenissime.
Revu sur l'Autographe conservé à Turin, Archives de l'Etat.
_____
DCCCLX. A Madame de la Croix d'Autherin1011. La vocation du
mariage et le moyen d'y devenir fort sainte. L'obéissance au
confesseur. Règlement de vie. Conseils variés. La
crainte des vices et l'amour des vertus. Douceur et humilité.
Une besogne que Dieu paie de mille consolations.
Annecy, 12 mars 1613.
Dieu soit beni et glorifié de ce changement de condition que vous avés fait pour son nom,
ma tres chere Fille ; et je dis tous-jours ma tres chere Fille, car ce changement ne changera rien en
cette affection vrayement paternelle que je vous ay dediee. Vous verrés bien que si vous avés une
parfaite resignation de vostre ame en la providence et volonté de Nostre Seigneur, vous marcheres
en cette [357] vocation, vous y aures bien de la consolation et deviendres fort sainte a la fin. C'estoit
ce qu'il failloit a vostre esprit, puisque vous aves rencontré ce gentilhomme si plein de bonne
inclination.
Vous aves tort de faire scrupule de rompre le jeusne, puisque l'advis du medecin le porte.
Conduisés-vous en la Communion au gré de vostre confesseur, car il luy faut donner cette
satisfaction, et vous ne perdrés rien pour cela ; car ce que vous n'aurés pas par la reception du
Sacrement, vous le rencontreres en la sousmission et obeissance.
De regie pour vostre viè, je ne vous en donneray que celle qui est dans le livre1012 ; mais si
Dieu dispose que je vous puisse voir et il y a quelque sorte de difficulté, je vous respondray. Il
n'est nul besoin que vous m'escrivies vostre confession : que si vous aves quelque point particulier
société milanaise. La question du Montferrat s'agitait alors. Jacques-Antoine, père de l'ambassadeur, tomba lui aussi
en disgrâce, s'il faut en croire une lettre qu'il adressait le 2 octobre 1613 à son prince. En 1615, le prieur commendataire
de Talloires résigna le prieuré en faveur de César Perron ; cette cession pourrait bien être une suite, des « bastonnades.
»
1010 Le porteur doit être Jean Floccard, élu syndic le 1er mai 1612, le même sans doute qui mourut le 27 avril 1617.
(Reg. par. d'Annecy.) Il était bourgeois d'Annecy, avocat et docteur en droit. En 1612 et 1613 il fut assez souvent
envoyé à Turin, au nom de la ville. C'est lui que le prince de Nemours chargea de notifier sa colère aux syndics à
propos de l'affaire Berthelot. (Délib. municip. d'Annecy, 28 février 1613.)
1011 La désignation de la destinataire est fondée sur les rapports assez étroits de cette lettre, à l'égard des conseils qu'elle
renferme, avec les lettres du 23 juin 1615 et du 3 novembre 1621 adressées, d'après les Autographes, à Mme de la Croix
d'Autherin. Fille de Philiberte de Cartal et de noble Claude de Chapot, seigneur de Cezarche ou Césarches près de
Conflans, et coseigneur de Cornillon, Jeanne-Antoine de Chapot (cf. ci-dessus, note (269), p. 92) avait épousé le 28
janvier 1613, noble Charles-Sébastien de Pradel Autherin, seigneur de la Croix. Sa famille était de la Tarentaise ; celle
de son mari, de l'ancienne bourgeoisie de Chambéry, qualifiée noble dès le commencement du XVIe siècle. (D'après
les notes de M. le comte de Mareschal.) Jeanne-Françoise de Chapot (voir le tome précédent, note (937), p. 325) était
la sœur de notre destinataire.
1012 L'Introduction à la Vie devote.
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25 Pages 241-250

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25.1 Page 241

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duquel vous desiries conferer avec mon cœur, qui est tout vostre, vous le pourrés.
Soyés bien douce ; ne vivés point selon vos humeurs et selon vos inclinations, mays selon
la rayson et la devotion. Aymés vostre mari tendrement, comme vous ayant esté donné de la propre
main de Nostre Seigneur. Soyés bien humble envers tous.
Vous deves avoir un grand soin de ranger vostre esprit a la paix et tranquillité, et estouffer
ces mauvaises inclinations que vous aves, par une attention a la prattique des vertus contraires, en
vous resolvant d'estre plus diligente, attentive et active a la prattique des vertus. Et marqués ces
quatre paroles que je vous vay dire : vostre mal vient dequoy vous craignés plus les vices que vous
n'aymés les vertus. Si vous pouvies provoquer un peu profondement vostre ame a l'amour de la
prattique de la douceur et de la vraye humilité, ma chere Fille, vous series brave ; mais il faut y
penser souvent. Faites la preparation du matin1013, et en somme prenés a prix fait cette besoigne
que Dieu vous payera de mille consolations ; et pour cela, n'oubliés de souvent eslever vostre cœur
en [358] Dieu et vos pensees a l'eternité. Lises, au nom de Dieu, tous les jours un peu, je vous en
prie.
Faites cela pour moy, qui tous les jours vous recommande a Dieu, et je prie son infinie
Bonté qu'a jamais elle vous benisse.
FRANÇS, E. de Geneve.
Ce 12 mars 1613.
_____
DCCCLXI. A M. Claude de Blonay. Le Saint renonce par
charité à la consolation d'avoir un ami pour compagnon de
pèlerinage. Voyage à Turin, à pied ou à cheval, suivant les
circonstances
Annecy, 28 mars 1613.
Monsieur,
Par vostre lettre et par ce que j'ay peu apprendre de monsieur de Sainte Catherine1014, je
voy que c'est une grande incommodité a monsieur l'Abbé1015 de faire nostre pelerinage, lequel
pourtant il n'entreprend que purement pour me favoriser1016. Mays sur tout considerant quil est
incommodé de sa santé, j'entre en extreme apprehension que ce ne luy soit une peyne trop grande
de se mettre en voyage. Obliges moy donq, je vous supplie, de le conjurer, par toute la
bienveuillance quil me porte, de ne point se mettre au hazard, ni en la despence, ni en la peyne et
travail de ce chemin, puisque il n'y regarde que ma seule consolation, laquelle, je confesse, seroit
grandement languissante si je la recevois avec tant d'incommodité d'une personne que je cheris et
respecte tant.
Quant a moy, le voyage de Thurin qui m'a esté ci devant volontaire, m'est a present
necessaire pour plusieurs [359] raysons1017 ; et y estant, je passeray aysement a Milan pour rendre
1013 Vide Introd. à la Vie dev., Partie II, chap. X.
1014 Philippe de Quoex.
1015 Vespasien Aiazza, abbé commendataire d'Abondance.
1016 Le vénérable ecclésiastique devait servir de « Raphael » aux pèlerins. (Voir ci-dessus, p. 267.)
1017 La piété seule avait d'abord porté le Saint à entreprendre ce voyage ; des raisons d'amitié et de zèle lui firent hâter
son départ. (Cf. note (1021) de la page suivante.)
Il fallait prendre de vive voix, et sans tarder, la défense de M. de Charmoisy et des gentilshommes annéciens
que la malice et la ruse des calomniateurs perdaient de plus en plus dans l'esprit des princes. (Voir la lettre suivante et
celle du 11 avril 1613.) D'autre part, l'intérêt bien entendu de la Congrégation et de son avenir, à mesure que ses
membres augmentaient, semblait exiger qu'on lui ménageât l'appui de la cour de Savoie. Enfin le Prélat, justement,
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25.2 Page 242

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la veneration de si longuemain destinee au sepulchre du glorieux saint Charles1018. Et bien quil y
eut quelque chose de ce qu'on dit des excommunications, je ne laisserois pas de m'acheminer,
esperant qu'en toutes occasions Dieu me fera la grace de ne point m'oublier du devoir que j'ay a
l'Eglise et au Prince.
Somme toute, ne permettes pas que monsieur l'Abbé prenne cette si grande incommodité,
et sur tout quil mette en compromis sa santé, car ce me seroit un'excessive peyne de le voir en
peyne et un continuel mesayse de le voir en danger. Mays sur tout, ne manques pas de m'avertir
au plus tost de ce que vos remonstrances auront operé ; car selon l'advis que je recevray, je
disposeray autrement de mon despart, et peut estre de la circonstance du voyage, d'aller a pied ou
a cheval jusques a Thurin.
J'apprens que vous aussi et monsieur le Curé de Bons1019 ne feres pas qu'avec incommodité
ce voyage, et je vous prie, mais de tout mon cœur, de ne vous en incommoder nullement1020 et de
dissuader aussi ledit Curé de Bons ; car plustost que d'incommoder mes amis en chose non
necessaire, je romprois le voyage tout a fait. Response, je vous prie, et ne vous mettes en peyne
que de me venir voir icy apres Pasques, pour conferer de ce que je pourrois [360] utilement
entreprendre aupres de Son Altesse pour nos affaires ecclesiastiques ; puis, laisses moy faire mon
petit fait, et vous verres que tout ira bien et sans bruit. Mays voyes vous, je vous recommande tres
estroittement ce mien desir, et suis sans fin,
Vostre humble, tres affectionné confrere,
FRANÇS, E. de Geneve.
XXVIII mars 1613.
Je reçois des nouvelles pour lesquelles peut estre je seray obligé de partir un peu plus
tost1021 ; ainsy faut il changer selon le tems, mais sur tout selon ce que Dieu permet par sa
providence.
A Monsieur
Monsieur de Blonnay, Curé de Siey,
Præfect de la Ste Mayson.
Revu sur l'Autographe conservé au château de Marin (Chablais), Archives de Blonay.
_____
ému de la triste situation où se débattait le collège Chappuisien d'Annecy, voulait traiter avec le duc de son relèvement.
On verra que ces diverses négociations aboutirent.
1018 C'est vers la fin de février 1612 que ce pèlerinage avait été décidé. (Voir plus haut, note (570), p. 171.)
1019 Jean Mangier (voir le tome précédent, note (121), p. 38). Nous ignorons s'il fit le pèlerinage.
1020 M. de Blonay ne se laissa pas persuader et accompagna le saint Evêque en Italie.
1021 « Il y a quelques annees, » dépose Georges Rolland (Process. remiss. Gebenn. (I), ad art. 27), « pour deffendre
l'innocence » des gentilshommes impliqués dans l'affaire Berthelot, « le Bienheureux escripvit plusieurs lettres aux
Princes, lesquelles n'ayant assez d'effect, il se resoulut luy mesme d'en parler de vive voix, et pour cela il advança le
voyage... au sepulchre de sainct Charles. »
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25.3 Page 243

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DCCCLXII. A M. Antoine des Hayes. Détails rétrospectifs sur
l'affaire Berthelot et l'internement de M. de Charmoisy.
Conseils adressés à Philothée par l'entremise du destinataire.
Le Saint désirerait avoir la liberté d'aller à Paris l'année suivante
Annecy, 28 mars 1613.
Monsieur,
Vous verrés, je m'asseure, par la lettre que monsieur de Charmoysi vous escrit, comme des
le despart de [361] madame de Charmoysi1022 il a receu le desplaysir de se voir comme banni de
cette ville, par un expres commandement que Son Altesse luy a fait de s'en retirer et ne plus y
revenir, sur l'impression la plus fause du monde que Monseigneur de Nemours a receu de la part
de quelques calomniateurs, que les bastonnades donnees au sieur Berthelot avoyent esté
conseillees par monsieur de Charmoysi1023 ; dont mondit Seigneur de Nemours a entrepris le
ressentiment si chaudement, que nous en sommes tous estonnés. Et peu s'en est fally que l'un de
mes freres, chevalier de Malte1024, n'a esté ordonné a la prison (bien que tout le tems de la querelle
il fut avec moy a Sales), seulement par ce quil est grand ami du sieur Abbé de Talloyres1025 et qu'il
l'avoit fort visité apres les bastonnades. Or neanmoins, j'espere que dans peu de jours [362] tout
cela se passera, et Monseigneur de Nemours, selon sa bonté, sera marri d'avoir fait faire du mal a
monsieur de Charmoysi et d'en avoir desiré a tant d'autres ses plus fideles et affectionnés serviteurs
et sujetz1026.
Mays ce pendant, il faut que madame de Charmoysi tienne bonne contenance et ne face
nulle sorte de plaintes qui puissent venir a la connoissance de monsieur de Jacob1027, ains que luy
parlant, elle tesmoigne une grande asseurance que la bonté de Son Altesse et de Monseigneur de
Nemours regardera bien tost favorablement son mari et sera offencee contre ceux qui luy ont voulu
procurer du mal. Ce que je vous dis, Monsieur, par ce que vous pourres mieux dire a cette bonne
1022 Mme de Charmoisy partit au mois de mars pour Paris, s'y arrêta quelques semaines et gagna ensuite la Normandie.
Le 25 février 1614, elle quittait la capitale pour revenir en Savoie. (Cf. J. Vuÿ, La Philothée de St Fr. de Sales, 1878-
1879, vol. I, chap. XII, et vol. II, p. 137.)
1023 Voir note (930), p. 327, et la Lettre DCCCLIX.
1024 Né en 1588, Janus de Sales, le dixième enfant de M. et de Mme de Boisy, étudia d'abord au collège d'Annecy dès
sa sixième année, puis à Lyon, où il fut envoyé au mois d'octobre 1608, en vue de « prendre ses lettres... pour s'en
aller à Malte et y faire profession » dans l'Ordre de Saint-Jean de Jérusalem. Le chevalier devint ensuite « gentil-
homme ordinaire de la Chambre de Son Altesse, » et successivement « cornette du commandeur d'Andelot,... maréchal
de camp, » chef de la cavalerie de Savoie. Après s'être distingué en Piémont par son courage militaire, « il fut fait
gouverneur de la citadelle et château de Nice, » où il finit pieusement ses jours en février 1640. (De Hauteville, La
Maison naturelle de St Fr. de Sales, Paris, 1669, Parties I, II.) A la joviale rondeur, à la bravoure de l'homme de guerre,
ce gentilhomme alliait la dévotion et la foi profonde d'un vrai chrétien. Il eut beaucoup à souffrir des rancunes de
Berthelot qui, « pour des frivoleries, comme de ne le saluer pas, » avait fait de grandes plaintes contre lui. (Lettre du
Saint au comte de Tournon, 14 juin 1613.) Le marquis de Lans les avait sans doute accueillies ; car, par plus d'un
rapport adressé aux syndics d'Annecy, il essaya de diminuer la gloire et le bon renom du généreux chevalier. (Process.
remiss. Gebenn. (I), déposition de F. Roget, ad art. 31.) Janus de Sales accompagna jusqu'à Seyssel son bienheureux
frère en novembre 1622, « incessamment arrousant les chemins de ses larmes. » (Charles-Auguste, Histoire, etc., liv.
X.) En souvenir de lui, il se dévoua avec une grande sollicitude aux Religieuses de la Visitation, dont il procura
l'établissement à Nice le 29 juillet 1635. Sainte Jeanne-Françoise de Chantal l'appelait son « très cher et bien aimé
frère » et lui portait une cordiale et sainte affection.
1025 Charles de la Tour (voir plus haut, note (108), p. 27, et note (1009), p. 356).
1026 « Tout cela » dura encore de longs mois. Jusqu'au mois d'octobre, saint François de Sales multiplia lettres et
démarches en faveur de ses amis. Le 4, il remercie le duc de Nemours pour leur mise en liberté, mais ils ne pouvaient
pas encore rentrer à Annecy. Enfin, le 9 novembre suivant, des Hayes écrit à M. de Charmoisy la joie qu'il éprouve
d'apprendre sa « pleine et entière liberté. » (Voir J. Vuÿ, ouvrage cité, vol. II, p. 133.)
1027 Guillaume-François de Chabod, seigneur de Jacob, alors à Paris en qualité d'ambassadeur de Savoie. (Cf. tome
XI, note (480), p. 209, et tome XIV, note (630), p. 217.)
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25.4 Page 244

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dame comm'elle se devra comporter que je ne sçaurois le luy escrire, bien que je luy en touche un
mot.
Enfin, tout nostre Caresme s'est passé en cette pauvre petite ville a nous defendre presque
tous des calomnies qu'on jettoit indifferemment sur le tiers et le quart, a rayson de ces miserables
bastonnades. Eusse-je pas esté mieux si mon bonheur eut permis l'effect de vostre volonté, et que
j'eusse presché en vostre chaire1028 et jouy de la douceur de vostre conversation et de la presence
de Monsieur nostre Evesque qui est lâ1029 ? J'espere, dans le moys, partir pour Thurin1030, ou je
feray tout ce qui me sera possible affin d'avoir ma liberté pour l'annee suivante1031 ; car le desir du
bien que j'attens de vostre [363] veüe et du rencontre de tant de gens d'honneur qui, pour vostre
consideration, me recevront en leur conversation, est extreme dedans mon cœur. La volonté
neanmoins de Dieu en soit faite, et luy playse vous combler de toute santé et vraye felicité, avec
madame vostre chere digne compaigne et toute vostre mayson.
C'est le souhait perpetuel, Monsieur, de
Vostre tres humble, tres affectionné serviteur,
FRANÇS, E. de Geneve.
28 mars 1613, a Neci.
Monsieur, j'escris en sursaut, c'est pourquoy je ne vous envoye pas les papiers du conte fait
entre mes freres et les agens de madame la Duchesse de Mercœur1032, comme je feray bien tost,
puisque vostre bonté s'estend a vouloir en recevoir la peyne.
Monsieur
[Monsieur des] Hayes,
Maistre d'hostel du Roy,
Gouverneur et Baillif de Montargis.
Revu sur l'Autographe conservé au Ier Monastère de la Visitation de Rouen. [364]
_____
1028 Voir ci-dessus, Lettre DCCCX, p. 271, et pp. 301, 345, 346.
1029 Mgr Fenouillet, évêque de Montpellier, qui prêchait le Carême à Paris. (Cf. ci-dessus, Lettre DCCCLI.)
1030 Le Saint partit le 15 avril. (Cf. la lettre précédente.)
1031 Le désir si persévérant du bienheureux Prélat et celui de son ami furent encore déçus. Le 30 mai 1613, François
de Sales écrit à des Hayes que le duc de Savoie s'oppose à ce projet, quoique « avec des paroles tant honnorables «
que rien plus. » On voit par la même lettre, que son mauvais vouloir venait d'une pensée de méfiance adroitement
semée dans son esprit contre MM. de Charmoisy et des Hayes.
1032 Il s'agit du paiement de la terre de Thorens, lequel ne fut complètement effectué que le 26 décembre 1615. (Voir
tomes XII, pp. 125, 195, et XIII, pp. 171, 196.) Les agents qui intervinrent au nom de la duchesse à diverses dates,
étaient M. Le Tellier et M. de la Porte. (Voir tome XIII, note (523), p. 196, et tome XII, note (453), p. 194.) Des Hayes
avait jadis prêté de l'argent pour cet achat. (Cf. ci-dessus, p. 202.)
244/321

25.5 Page 245

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DCCCLXIII. A Madame de Charmoisy1033. Quand doit-on
témoigner à Notre-Seigneur son amour. Sympathies et
dévouement pour la famille de Charmoisy éprouvée.
Annecy, 28 mars1034 1613.
Ma tres chere Fille,
C'est maintenant que vous estes en affliction, que vous deves tesmoigner a Nostre Seigneur
l'amour que vous luy aves si souvent promis et protesté entre mes mains. Ce me sera extreme
consolation d'apprendre que vostre cœur se comporte bien pour ce regard.
Recommandés-vous aux prieres de saint Louys, lequel apres avoir longuement assisté et
servi les malades de contagion en son armee, s'estima bienheureux d'en mourir, prononçant cette
orayson pour ses dernieres paroles : J'entreray en ta mayson, o mon Dieu, j'adoreray en ton temple
et confesseray ton nom1035. Remettés-vous en la volonté divine, qui vous conduira selon vostre
mieux pour l'emprisonnement de vostre mary.
Je voudrois bien en cette occasion vous donner quelque sorte de bonne consolation, mays
je n'ay pas dequoy. Je prie donq Nostre Seigneur qu'il soit vostre consolation et qu'il vous face
bien entendre que par plusieurs travaux et tribulations il vous faut entrer au Royaume des
cieux1036, et que les croix et afflictions sont plus aymables que les contentemens et delectations,
puisque Nostre Seigneur les a choisies pour soy1037 et pour tous ses vrays serviteurs. [365]
Ayés bon courage, ma chere Fille, tenés ferme vostre confiance en Celuy au service duquel
vous vous estes dediee et abandonnee, car il ne vous abandonnera point. Et ce pendant, je
m'employeray de tout mon cœur, affin d'ayder vostre mary, envers tous ceux que je croy avoir du
credit pour le faire delivrer et que je sçauray vouloir faire quelque chose a ma contemplation ; et
des-ja j'ay commencé ce bon office des avant hier, vous cherissant comme ma vraye fille, et tout
ce qui vous appartient, pour l'amour de Nostre Seigneur a qui vous appartenes, la volonté duquel
soit faite es siecles des siecles. Amen.
FRANÇS, E. de Geneve.
A Neci.
_____
1033 L'allusion à saint Louis, patron de Mme de Charmoisy, à un « emprisonnement, » et d'autres non moins
significatives désignent sûrement Philothée comme destinataire.
1034 Dans la lettre précédente (p. 363) le Saint parle d'une lettre qu'il écrit en même temps à sa cousine : cette lettre
semble être celle-ci. Le bannissement de M. de Charmoisy aussitôt connu, le charitable Evêque dut s'empresser de
consoler sa femme. Ces diverses particularités rendent très probable le quantième adopté.
1035 Pss. V, 8, CXXXVII, 2.
1036 Act., XIV, 21.
1037 Cf. Heb., XII, 2.
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25.6 Page 246

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DCCCLXIV. A la Mère de Chantal (Fragment). Les embarras
d'un héritage
Annecy, [mars-15 avril1038] 1613.
……………………………………………………………………………………………………..
Et pourquoy non moy a ma Mere ? Vrayement, bonsoir, ma tres chere Mere.
J'ay fait avec le procureur La Tour1039 quil ira jeudi a Dizonche1040 ; c'est un bon personnage
qui fera fort bien [366] l'office. Or sus, portes vous bien, ma tres chere Mere. Dieu vous comble
de paix, benediction et amour. Amen.
J'ay response de Mme d'Aiguebellette qui dit que Mlle des1041
Revu sur une copie déclarée authentique, conservée à Turin, Archives de l'Etat.
_____
DCCCLXV. A la même. Une chape vraiment belle : d'où lui
vient sa beauté ; symbolisme des dessins qui la décorent.
Bénie soit la main de la brodeuse
Annecy, [vers le 7 avril 1613 1042.]
O vrayement, elle est belle en extremité, la chappe que la plus chere mere qui vive envoye
a son tres cher pere1043 ; [367] car elle est toute au nom de JESUS et de MARIE, et represente
parfaitement le Ciel des bienheureux, ou Jesus est le soleil1044 et Marie la lune1045 luminaires
1038 La mention d'un « procureur » et de « Dizonche » fait penser qu'il est ici question des difficultés suscitées par le
seigneur de Disonche et par sa femme à propos de l'héritage de Mme de Miribel. (Voir plus bas, note (1040). L'histoire
de cette succession et l'allure du billet justifient, croyons-nous, la date approximative que nous lui attribuons.
1039 Un Antoine La Tour était procureur au Conseil de Genevois en 1612, le même apparemment qui figure dans une
pièce datée de 1623, avec la charge de consyndic d'Annecy. (Archiv. dép. de la Hte-Savoie, E. 490.)
1040 Disonche, situé entre Annecy et Thorens, désigne une terre d'Antoine de Bellegarde, seigneur de Disonche, qui
avait épousé le 26 octobre 1584, Guillelmine de Loche, veuve de noble Jean Solliard, seigneur de Miribel. En 1592,
il était tuteur de Claudine Solliard sa belle-fille, la future bienfaitrice du premier Monastère de la Visitation. (Voir ci-
dessus, note (932), p. 328, et note (994) p. 350.) Le procureur La Tour devait sans doute se rendre auprès de ce
gentilhomme en vue d'un accommodement ; car, lorsque les « devotes Dames de la Visitation » déclarèrent vouloir
entrer en possession de l'héritage de Mme de Miribel, « noble sieur Anthoyne de Bellegarde, seigneur de Disonche et
Bogé, au nom de Dlle Guillermine de Loche, sa femme, et mere de ladicte damoyselle defuncte, » ne voulut «
acquiescer ny consentir,... tant a cause des droictz dotaulx de sadicte femme, » que parce qu'il prétendait que le
testament était nul. Après beaucoup de difficultés, le différend se termina, comme on le verra plus tard, par une
transaction passée le 30 juin 1613. (Archives de la Visitation d'Annecy.)
1041 Serait-ce Mlle d'Escrilles ? La suite manque.
1042 La chape sur laquelle François de Sales s'extasie, dut être terminée pour la fête de Pâques (cf. le dernier alinéa de
la lettre). La présence du Saint et de la Mère de Chantal à Annecy en 1613 le jour de cette solennité, qui tombait le 7
avril, suggère cette date, confirmée d'ailleurs, semble-t-il, par l'appellation de « Fille » qui reparaît encore. Toutefois,
l'année 1614 pourrait être également proposée.
1043 Avant de partir pour Avignon (novembre 1622), le Saint laissa cette chape au Chapitre de sa cathédrale ; en 1752,
elle servit pour les fêtes de la béatification de la Mère de Chantal. Le 29 avril, lisons-nous dans la relation de ces fêtes,
« M. le Prévôt fit lecture du Bref de Sa Sainteté, qu'il termina par un saint transport de joye et de ravissement... pour
manifester la consolation qu'il avoit d'être revetu d'une chape dont saint François de Sales avoit fait present à sa
cathedrale, et qui avoit été travaillée par notre bienheureuse Mere. C'est celle dont il la remercie dans son Epitre 21.
du 7. Livre. » (Archiv. dé la Visitation d'Annecy, Lettre circulaire du 14 mai 1752.)
1044 Cf. Apoc., ult., 5.
1045 Cf. Cant., VI, 9 et tom. VII, p. 440.
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25.7 Page 247

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presens a toutes les estoilles de cette sainte habitation1046 ; car Jesus y est tout a tous1047, et n'y a
point d'estoille en ce globe celeste en laquelle il ne soit representé comme en un miroüer. Et les
Phi (φφ) redoublés signifient, comme lettres capitales, la philothie et la philanthropie, l'amour de
Dieu et l'amour du prochain. Et les S fermees, avec leurs flesches qui montent d'un costé et
descendent de l'autre, demonstrent l'exercice de ces divins amours, dont l'un remonte en Dieu et
fait des Philothees, l'autre descend au prochain et fait des Philantropes : qui est l'unique bien de la
charité, qui nous rend vrays serviteurs et servantes de la divine Majesté. Sur tout, le Saint Esprit
influe et fait paroistre une grande varieté de fleurs et de toute sorte de vertu.
Benite soit a jamais la chere main de ma Mere qui a si bien sceu faire ce bel ouvrage ! Que
cette main soit propre a faire des choses fortes, et tout esgalement a manier le fuseau1048. Qu'elle
soit ornee de l'anneau de fidelité et son bras, du brasselet de charité ; que la dextre du Sauveur soit
a jamais jointe a elle et qu'elle paroisse pleine au jour du jugement ; qu'a jamais le cœur qui l'anime
soit revestu de JESUS, de MARIE, de philothie, de philanthropie, de sainteté, d'estoilles, de dards
volans du celeste amour et de toute sorte de vertu fleurissante ; que le Saint Esprit la rayonne en
tous tems. Bon soir, ma tres chere Fille, ma Mere.
Mais il faut encor dire cecy. Il est escrit de la femme forte1049, que tous ses gens ont double
vestement ; l'un, je pense, pour les festes, l'autre pour les jours ouvriers. Et me voyla revestu d'une
chappe admirable pour les festes, chappe belle et de couleur de la Resurrection ; et d'une robbe
encor pour tous les jours, de la couleur de la robbe [368] que Nostre Seigneur porta sur le mont de
la Passion1050. Dieu nostre Seigneur vous habille et de sa Passion et de sa gloire.1051
____
DCCCLXVI. A la même. Le travail permis à la Mère de Chantal
deux jours chômés. Souhait et espérance du Saint. Un
visage pâle et un cœur vermeil
Annecy, 8 avril 1613 1052.
Vous pourres bien travailler dedans la mayson, aujourdhuy et demain, pourveu que
personne ny entre d'estranger, sinon M. Grandis1053, M. Roget1054 et la petite seur1055 ; et bien que
quelqu'autre entrast, vous pourries neanmoins bien travailler en ces besoignes qui sont pour
l'eglise.
Je ne pensois nullement escrire a Paris, mais puis que vous l'aves desiré, j'escris a
Monseigneur de Bourges1056.
Si pour chose du monde je le puis, je vous iray voir demain ; si moins, tout au pis, j'iray
1046 Cf. Dan., XII, 3.
1047 I Cor., XV, 28 ; Coloss., III. 11.
1048 Prov., ult., 19.
1049 Ibid., v. 21.
1050 Ces lignes donnent à entendre qu'avec la chape, « couleur de la Resurrection, » la Sainte avait aussi envoyé une
soutane violette à son bienheureux Père.
1051 La lettre se termine très bien par ce souhait. Les premiers éditeurs l'ont fait suivre, mais à tort, croyons-nous, de
deux alinéas qui lui sont étrangers et qui paraissent appartenir à une époque plus reculée.
1052 Au lendemain de Pâques, 8 avril 1613, Sœur Claude-Françoise Roget dut s'aliter pour ne plus se relever. (Cf. note
(307), p. 106.) La permission pour le médecin et pour la mère de la malade d'entrer dans le monastère, suggère la date
adoptée. Le lundi et le mardi de Pâques étaient des jours chômés ; le samedi suivant se trouvant être l'avant-veille du
départ du Saint, sa promesse de dire la Messe à la Visitation ce jour-là au plus tard, s'explique d'elle-même et confirme
notre hypothèse.
1053 Jean Grandis, le médecin (voir ci-dessus, note (90), p. 20).
1054 Sans doute, la mère de la Sœur Roget (voir plus haut, note (307), p. 106).
1055 Marie-Aimée, la jeune baronne de Thorens.
1056 Mgr Frémyot, archevêque de Bourges.
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dire vostre Messe [369] samedi. Toutes les apres disnees de ces trois jours sont assignés (sic) en
appointemens.
1057Mon Dieu, ma chere Fille, que je vous souhaite de perfections ! et que de courage et
d'esperance j'ay maintenant en cette souveraine Bonté et en sa sainte Mere, que nostre vie sera
toute resserree en Dieu avec Jesus Christ, pour parler avec nostre saint Paul1058.
Bonjour, ma chere Mere mienne. Le bon jour a nos filles, toutes, et aux malades a part, y
comprenant la grande chere fille, pasle au visaige1059, mais, comme j'espere, vermeille de cœur en
l'amour cæleste. Bon jour de rechef, ma tres chere Mere, ma Fille vrayement mienne.
Revu sur l'Autographe conservé à la Visitation d'Annecy.
_____
DCCCLXVII. Au Comte Prosper-Marc de Tournon.
Dévouement du Saint pour M. de Charmoisy. Malice de ses
ennemis et crédulité du prince de Nemours. Berthelot et M.
de Servette
Annecy, 11 avril 1613.
Monsieur,
J'escris a part ce billet pour laisser l'autre lettre en estat de pouvoir estre monstree a
monsieur le marquis de Lans1060 ; et si je ne l'avois escritte si precipitamment, j'eusse voulu quil
l'eut envoyee ou a monsieur le Chancelier1061, ou a quelqu'un qui eut entrepris de bien [370]
representer a Son Altesse la malice et le venin des ennemis de nostre pauvre parent1062, qui est la,
mussé comme un lievre dans Marcia1063, avec une fort exacte obeissance. Chacun est scandalisé
du grand pouvoir que les accusations seules ont : sil suffit d'accuser, qui sera innocent ? Ceux qui
connoissent M. de Servette1064, et je croy que Son Excellence le connoist, sçauront bien discerner
de l'action d'hier. Certes, Bertelot n'avoit que faire de s'opposer a luy en la conduite des dames ;
car, comme vous sçaves, c'est un gentilhomme de si bon lieu, que, comme que ce soit, encor le
faut-il respecter.
Or, il suffit si l'on peut faire l'office au pauvre parent des-ja banni du Genevois et serré dans
1057 Les premiers éditeurs avaient intercalé cet alinéa dans le texte de la Lettre DCCCLXX. (Voir note (1089), p. 376.)
1058 Coloss., III, 3.
1059 La Sœur Favre.
1060 « L'autre lettre » écrite à la même date pour « estre monstree » ne nous est pas parvenue.
1061 François Provana, comte de Collegno, fils de Jérôme Provana, coseigneur de Bussolino, et de Gentina Provana de
Pianezza, d'abord reçu docteur en droit à Turin, devint le 27 juillet 1579 conseiller d'Emmanuel-Philibert, duc de
Savoie, sénateur et préfet de Mondovì. Référendaire d'Etat en 1584, deuxième et ensuite premier président de la
Chambre des Comptes, il fut en même temps créé auditeur général de la milice, par lettres patentes du 7 décembre
1592 ; le 1er juin 1602, Charles-Emmanuel l'élevait à la dignité de grand-chancelier, qu'il garda jusqu'à sa mort, arrivée
le 19 août 1625. C'est dans cette dernière charge qu'il seconda les efforts de saint François de Sales pour
l'affermissement de la foi catholique en Savoie. (Notes de M. le comte Provana di Collegno ; Cariche del Piemonte,
etc., Torino, 1798, tom. I.)
1062 M. de Charmoisy (cf. ci-dessus, note (930), p. 327, et pp. 362, 365).
1063 Le château et la seigneurie de Marclaz étaient l'une des possessions que la famille Vidomne de Charmoisy avait
en Chablais. (Cf. tome XI, note (502), p. 218.)
1064 Bernard d'Allinges, seigneur de Colombier, reconnaît le 7 janvier 1612, le fief de Servette pour lui et ses neveux,
Josué et Daniel. Le gentilhomme désigné par saint François de Sales paraît être Josué, fils d'Antoine d'Allinges,
seigneur de Servette, et d'Esther d'Haraucourt. Grand capitaine, il se signala au combat de Palestre en Piémont (1614),
devint seigneur de Coudrée, de Rochette et baron de Laringe. Le 12 juillet 1617, il épousa Louise-Pernette de Varax
et testa le 30 août 1635. (Archives de la Visitation d'Annecy, Collection J. Vuÿ.)
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25.9 Page 249

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une mayson seule. Pour moy, je voy tant de malice et de ruse en ses calomniateurs, et la voy si
clairement, que je me sens obligé de parler et me semble que le silence seroit peché. L'importance
est que l'office se face viste, car je m'asseure que ce matin, Berthelot despechera un homme,
comme sachant bien que la plus grande force de sa ruse consiste en la diligence.
Si madame la Comtesse1065 nous envoye des bouteilles, on les emplira tant quil y aura du
piqu'ardent1066, et si nous [371] eussions eü des ampolons a suffisance, nous n'eussions pas oublié
de vous envoyer vostre part. Je feray tenir seurement la lettre au cousin1067 lundi ou mardi, au fin
plus tard.
J'espere avoir le bien de vous saluer1068 et redire que je suis,
Monsieur,
Vostre plus humble, tres affectionné serviteur,
FRANÇS, E. de Geneve.
XI avril 1613.
A Monsieur
Monsieur le Comte de Tornon.
Revu sur l'Autographe appartenant à Mme la marquise Pensa, à Turin.
_____
DCCCLXVIII. A M. Claude de Quoex. Renseignements pour
une dispense de mariage à obtenir
19 avril 1613 1069.
Monsieur,
Outre le desir que j'ay de vous saluer, je me suis souvenu que j'avois oublié de vous supplier
d'envoyer a Romme pour monsieur de Monthouz Guillet et sa femme ; ce que neanmoins j'avoys
promis de faire audit sieur de Monthouz, lequel reciproquement m'a promis de vous donner argent
pour cet effect. Il s'appelle Gabriel Guillet ; elle, Marie de Maillard1070. Et quant a [372] elle,1071
contraxit bona fide anno ætatis suce duodecimo ; prolem susceperunt1072 et scandalosa esset
separatio. Utraque autem partium est sub potestate patris ; impedimentum est in tertio1073.
Je pass'outre, Monsieur, plein d'esperance que, nonobstant toute sorte d'oppositions, Nostre
1065 La femme du destinataire (voir plus haut, note (46), p. 1).
1066 Cf. ci-dessus, note (975), p. 345.
1067 M. de Charmoisy.
1068 A Turin, où le comte de Tournon se trouvait alors.
1069 Claude de Quoex reçut cette lettre le 21 avril, et ce même jour, François de Sales partait de Saint-Jean-de-
Maurienne. (Cf. la lettre suivante.) C'est probablement de cette ville ou de Chambéry qu'il écrivit ces lignes.
1070 Claire-Marie de Maillard, qui était fille du comte Prosper-Marc de Tournon et de Philiberte de Beaufort, mourut
le 29 septembre 1645; Gabriel Guillet de Monthoux décéda le 25 août 1630. Le 10 novembre 1609, à Annecy le père
de ce dernier, Janus (Juillet, seigneur de Monthoux et de Pougny, lui avait donné tous ses biens, sous la réserve de son
entretien et de celui de sa femme, Jeanne-Aimée de la Fléchère. Le même jour, Gabriel Guillet se rendit à Rumilly, et
le contrat de mariage fut passé chez le comte de Tournon, dans la chambre appelée la Chambre dorée. (Cf. Mém. de
la Soc. Sav. d'hist. et d'archéol., tome XXIV, 1886, pp. XXXVI, XXXVII.)
1071 elle a contracté de bonne foi, à l'âge de douze ans ; ils ont eu un enfant, et il y aurait scandale s'ils se séparaient.
Les deux parties sont sous le pouvoir du père ; l'empêchement est du troisième degré.
1072 Le nom de cet enfant ne nous est pas connu.
1073 La dispense ne vint de Rome qu'en 1615 ; le Saint la donna le 22 septembre de cette année, et lui-même bénit le
mariage deux jours après. (Voir plus haut, note (48), p. 2.)
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25.10 Page 250

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Seigneur nous donnera victoire1074. Aymes moy tous-jours cependant, et me tenes, Monsieur, pour
Vostre humble, très affectionné frere et serviteur,
FRANÇS, E. de Geneve.
XIX avril 1613.
Je salue bien humblement madame ma chere seur1075.
1076A Monsieur
Monsieur de Quoex, Conseiller de Monseigneur
et son premier Collateral en Genevois.
Revu sur l'Autographe conservé à Chambéry, Archives du Sénat de Savoie. [373]
_____
DCCCLXIX. A la Mère de Chantal (Inédite). Une halte en
Maurienne. Sollicitude du Saint en voyage
Saint-Jean-de-Maurienne, 21 avril 1613.
Ma tres chere et tres honnoree Mere,
Me voyci en la quatriesme journee1077, partant de Saint Jan de Maurienne, ou Monsieur
l'Evesque1078 nous a logés cordialement. Vives joyeuse, ma Mere vrayement toute bonne, en
Nostre Seigneur, que je ne cesse point de supplier quil luy playse remplir de plus en plus nostre
cœur unique de son tressaint et pur amour.
Je vous supplie de dire a M. Michel1079 qu'il face l'aumosne aux Peres Capucins1080 tout
ainsy que si nous y [374] estions, et que si les Dames de Sainte Claire1081 ont besoin de vin, mesme
pour les malades, il leur en donne.
O ma tres chere et vraye Mere, Dieu vous benisse de ses plus profondes benedictions, avec
1074 Allusion à l'affaire Berthelot-Charmoisy. (Cf. ci-dessus, note (1017), p. 360.)
1075 Bernardine de Chissé, femme du destinataire.
1076 L'adresse, écrite par un secrétaire, paraît être de la main de Georges Rolland.
1077 Le premier dessein du bienheureux Prélat était de faire le voyage à pied, mais il déféra aux instances de ses amis
et monta à cheval. Il partit à onze heures du matin, le 15 avril, escorté « d'une grande suitte des plus apparents de la
ville. » (Charles-Auguste, Histoire, etc., liv. VIII.) Les compagnons de son pèlerinage furent entre autres, MM. de
Blonay et Floccard, le baron de Thorens et probablement Jean-François de Sales ; Georges Rolland, François Favre
et Noël Rogeot. « On ne vit peut etre jamais des pelerins plus saintement apliqués ; le silence et l'oraison etoient leur
occupation ordinaire... nôtre Bienheureux Pere leur donnoit chaque jour le point de meditation, en les invitant a
demander, par l'intercession de saint Charles, le zele qui lui etoit necessaire pour la conduite de son diocese. » (Ancien
Ms. de l'Année Sainte, 25 avril.)
1078 Philibert-François Milliet (voir tome XII, note (457), p. 195).
1079 M. Michel Favre, aumônier du Saint.
1080 La fondation du couvent des Capucins d'Annecy se fit en 1593, par les libéralités de Charles-Emmanuel, duc de
Genevois-Nemours, et celles de son frère Pierre-Jacques de Savoie. Mgr de Granier consacra l'église et la chapelle du
monastère (31 août 1597), édifié sur les bords du lac. Il eut pour premier gardien le vénérable Jean de Maurienne, et
jusqu'à la Révolution, il soutint sa réputation de ferveur et d'austérité. En 1821, la ville ayant acquis les bâtiments, y
établit un hôpital qui subsiste encore. (Voir Mercier, Souvenirs hist. d'Annecy, 1878, chap. XVI ; Nécrologe, etc., par
le P. Eugène de Bellevaux, p. XVI.)
Saint François de Sales, attaché, comme l'on sait, à la famille franciscaine, « donnoit des bonnes aumosnes...
particulierement aux RR. PP. Capucins... Il alloit quelquefois manger avec eux, y faisant porter le disner pour tous. »
(Process. remiss. Gebenn. (I), dépos. de Ste J.-F. de Chantal, ad art. 27.)
1081 Voir tome XIII, note (229), p. 74.
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toute la chere trouppe, specialement la malade1082. Vostre filz1083, vostre neveu1084, tout cela vous
donne le bon jour. Qu'a jamais soyons nous a Dieu, vous comme moymesme, moy comme vous
mesme, puisqu'il a ainsy pleu a sa divine Bonté, a laquelle soit gloire es siecles des siecles. Amen.
XXI avril 1613, a Saint Jan de Maurienne.
A Madame
Madame de Chantal,
Superieure de la Visitation.
A Neci.
Revu sur l'Autographe conservé à la Visitation de Uedem (Prusse rhénane).
_____
DCCCLXX. A la même. Comment attendre l'issue d'une
maladie. Dans quels sentiments faut-il sortir de cette vie et
acquiescer à la Providence divine
[Fin avril-mai 1613 1085.]
Il faut attendre, ma tres chere Mere, l'evenement de cette maladie le plus doucement qu'on
pourra, avec parfaitte resolution de se conformer a la volonté divine [375] en cette perte, si perte
se doit nommer l'absence de quelque tems, qui, Dieu aydant, sera reparee par une presence
eternelle. Hé, que bienheureux est le cœur qui ayme et cherit la volonté divine en toutes
occurrences !
O si une fois nous avons nostre cœur bien engagé a cette sainte et bienheureuse eternité :
Allés, ce dirons-nous a tous nos amis, allés, chers amis, allés en cet Estre eternel a l'heure que le
Roy de l'eternité vous a marquee ; nous y irons aussi apres vous. Et puisque ce tems ne nous est
donné que pour cela et que le monde ne se peuple que pour peupler le Ciel, quand nous allons la,
nous faysons tout ce que nous avons a faire. Voyla pourquoy, ma Mere, nos anciens ont tant admiré
le sacrifice d'Abraham1086. Quel cœur de pere ! Et vostre sainte compatriote, la mere de saint
Symphorien, par le traict de laquelle je finis mon livre1087 !
O Dieu, ma Mere, laissons nos enfans a la mercy de Dieu, qui a laissé le sien a nostre mercy
; offrons luy la vie des nostres, puisqu'il a donné la vie du sien pour nous1088. En somme, il faut
tenir les yeux fichés sur la Providence celeste, a la conduite de laquelle nous devons, de toute
l'humilité de nostre cœur, acquiescer.1089
Dieu vous benisse, et marque vostre cœur du signe eternel de son pur amour. Il faut devenir
tres humblement saintz, et respandre par tout la bonne et suave odeur de nostre charité. Dieu nous
face brusler de son saint amour et mespriser tout pour cela ; Nostre Seigneur soit le repos de nostre
cœur et de nos cors ! Tous les jours j'apprens a ne point faire ma volonté et faire ce que je ne veux
1082 Sœur Claude-Françoise Roget (voir ci-dessus, note (1052), p. 369).
1083 Le baron de Thorens.
1084 Probablement, Jean-François de Sales que la Sainte se plaisait à nommer son « neveu. »
1085 Le texte que nous donnons ici est dégagé des interpolations où il se trouve entremêlé dans les éditions précédentes.
S'agit-il des enfants de la Mère de Chantal ou des filles spirituelles des deux Fondateurs ? L'allusion semble viser ces
dernières ; d'ailleurs, le ton résigné du Saint fait plutôt penser à la maladie de la Sœur Roget. (Voir ci-dessus, note
(1052), p. 369.) La date proposée est fondée sur ces conjectures.
1086 Gen., XXII, 1-12.
1087 Introd. à la Vie dev., Part. V, chap. XVIII. (Vid. tom. III, p. 366.)
1088 Cf. Joan., III, 16 ; I Joan., IV, 9.
1089 Ici, les anciens éditeurs avaient interpolé plusieurs phrases tirées de lettres de différentes dates ; entre autres, les
lignes 3-7 de la lettre du 8 avril. (Voir note (1060), p. 370.)
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pas. Demeurés en paix entre les doux bras de la divine Providence et dans le giron de la protection
de Nostre Dame.
FRANÇS, E. de Geneve. [376]
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Minute écrite par saint François de Sales pour Madame de
Saint-Cergues
_____
DCCCLXXI. A Madame Dufour1090. Mme de Saint-Cergues
expose les raisons de son abjuration. Après la grâce du Saint-
Esprit, la confession de foi catholique a surtout dessillé ses yeux
: elle a vu Jésus-Christ, unique objet de foi, d'espérance et de
charité, l'exclusion de toute idolâtrie, le culte raisonnable des
Saints. Une « pauvre petite brebiette » se réunit au troupeau.
La lumière n'est pas toujours accompagnée de la facilité pour
déduire les raisons de la croyance.
Annecy, février 1611.
……………………………………………………………………………………………………..
1091Au demeurant, Disdiere n'est pas assez clairvoyante pour juger dignement de mes
actions et beaucoup moins [377] de mes intentions1092, et partant vous aves bien fait, et tous mes
amis aussi, de ne point la croire quand elle vous a dit que je m'estois destournee de la vraye foy en
un seul Christ, pour adhserer aux fables, traditions et inventions des hommes. Il est vray que, par
une speciale grace du Saint Esprit, je suis retournee dans le giron de la sainte Eglise Catholique,
duquel, par ignorance et1093 inconsideration, je m'estois separee. Mays1094 je n'ay point esté attiree
a cette si salutaire resipiscence par aucunes fables, traditions ou inventions humaynes, ains par la
connoissance de la verité, prise en la pure, simple et claire Parole de Dieu, a laquelle je veux a
jamais inviolablement adhaerer.
Je confesse bien pourtant en bonne foy, que l'une des choses1095 qui m'a le plus aydee a me
1090 Charles-Auguste (Histoire, etc., liv. VII) note que « la vefve de Theodore de Beze (qu'on appelloit la Loriol) ne
douta point » d'écrire à « la Dame de Sainct Sergue... des lettres pleines de mille injures. » Or, Catherine del Piano,
veuve du célèbre ministre, mourut le 9 avril 1606. L'erreur manifeste de l'historien a fait tomber Migne dans une autre
erreur, en le persuadant que la présente lettre s'adressait à Mme Loriol. Mais la destinataire est très vraisemblablement
Charlotte de Buttet, sœur maternelle de la convertie, mariée à Denis Dufour. (Voir note (76), p. 15.) Elle était devenue
protestante, comme il a été dit, ce qui explique très bien le ton confiant de cette lettre, et l'on entrevoit aussi que, sous
des airs d'apologie personnelle, Mme de Saint-Cergues a voulu cacher un essai d'exhortation discrète au retour à la foi.
On peut se demander pourquoi cette minute, la convertie étant fort capable de s'en passer. Nous croyons que
son état souffrant et un passage du dernier alinéa (voir p. 380) justifient suffisamment la charitable intervention du
Saint. En effet, l'ébranlement qui suivit l'abjuration de Mme de Saint-Cergues la rendit malade ; quelques jours
s'écoulèrent sans doute avant que sa conversion s'ébruitât à Genève et lui en attirât des lettres injurieuses. Toutes ces
raisons persuadent la date que nous donnons à cette minute.
1091 Comme nous n'avons pas le commencement de la lettre et que l'Autographe n'est pas mutilé, on peut penser que
François de Sales aura laissé à Mme de Saint-Cergues le soin d'en rédiger elle-même le début et la fin, avec les
compliments appropriés, M. l'abbé de Baudry, si respectueux défenseur de la pensée du Saint, a pris ici d'étonnantes
libertés pour moderniser le style de cette lettre ; on s'en rendra compte en comparant notre texte avec celui donné par
Migne.
1092 La personne en question serait-elle Didière Sachet, qui avait épousé Nicolas de Bons, bourgeois de Thonon ? Nous
ignorons si elle était protestante, mais nous savons qu'Amé de Bons, neveu de son mari, était, en 1610, ministre de
Farges.
1093 et [mesgarde]
1094 Mays [en cela, non seulement je ne me suis point despartie de...]
1095 Je [veux bien] pourtant [confesser] en [faveur] bonne foy que [j'ay esté grandement...]
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fayre voir l'erreur auquel je vivoys, a esté1096 la confession de foy que j'ay veu faire icy aux
Chrestiens catholiques, mise en comparayson avec l'accusation qui s'en fait ordinayrement1097 es
sermons et conferences de messieurs les ministres. Car j'ay treuvé qu'icy on ne respire que la foy
en un seul Jesuschrist, on n'aspire et espere qu'en un seul Jesuschrist, on n'annonce que l'amour
d'un seul Jesuschrist, qui est hautement et clairement reconneu pour vive et vivante source et
unique fin de toutes louanges et benedictions.1098 Je ny ay point treuvé d'idoles, ains des [378]
images de Jesuschrist, exterminateur des idoles, et des portraitz des Saintz, qui ont perdu la vie
plustost que de souffrir les idoles. J'ay treuvé qu'on y prioit les bienheureux Saintz, non comme
compaignons, mais en qualité d'aggreables et tres humbles serviteurs de Jesuschrist, non point pour
desfiance de la bonté et charité divine envers nous, mays pour prattiquer et1099 se prævaloir de la
communion des Saintz. J'ay treuvé que l'on n'establissoit son salut qu'en la Mort et Passion de
Jesuschrist, et que l'on ny estimoit aucunes œuvres bonnes et meritoires qu'en la vertu et valeur
qu'elles ont par le merite du sang de Jesuschrist. Et en toutes choses, j'ay treuvé que la1100
souveraine gloire deüe a ce souverain Sauveur estoit1101 exactement preschée, inculquée,
reconneue et conservée avec une tressainte et religieuse jalousie ; chose, certes, comme vous
sçaves, bien esloignee du tesmoignage que messieurs les ministres1102 rendent contre les
Catholiques.
C'est pourquoy, ayant treuvé une si grande sainteté de religion ou l'on m'avoit tant asseuré
ny avoir1103 que superstition, un si grand zele pour lhonneur de Jesuschrist ou l'on præsupposoit
estre le seul regne de l'antichrist, une si droite pureté d'intention ou l'on m'avoit tant dit ni avoir
que faintise, une si grande clarté de doctrine ou l'on m'avoit fait entendre ni avoir qu'illusion, j'ay
esté grandement confuse en moymesme d'avoir si longuement accusé, par une vayne persuasion,
une si chaste et innocente Susanne1104, et, comme la charité m'obligeoit, je me suis res-jouye
d'avoir tant treuvé de bien ou j'avois pensé ne treuver que du mal. Dont, comm'une pauvre petite
brebiette esgaree qui retrouve en fin le trouppeau que par mesgarde ell'avoit laissé, je m'y suis
librement, [379] volontairement et par franche election, remise et reunie, n'ayant pas voulu refuser
au Saint Esprit l'exercice de sa grace en mon cœur, ni a la verité divine, l'hommage que mon
entendement luy devoit ; 1105 affin que les propheties, qui prædisent en tant d'endroitz le retour des
ames a l'Eglise, fussent heureusement accomplies en moy et par moy, et qu'ayant esté une des
estoiles errantes, desquelles parle saint Jude1106, en un ciel apparent et contrefait, je fusse meshuy
un'estoile du vray firmament, qui est l'Eglise Catholique, en laquelle on ne connoist le grand
dragon roux1107 que pour le combattre et fouler aux pieds, ains escraser et exterminer par la force
de la Parole de Dieu, pure, simple et entiere ; Parole qui est la vraye espee et le vray bouclier des
croyans1108, et a laquelle nul homme n'a touché pour en oster un seul mot, y adjouster un seul point,
ou y broüiller le vray sens, que soudain il n'ayt esté repris, puis condamné par la mesme Esglise.
Voyla ce que je vous puis dire de l'estat de mon ame qui sent une grande consolation en la
misericorde de Dieu, si doucement exercee envers moy ; et vous prie de croire qu'en cet heureux
changement je n'ay jetté mes yeux que sur Jesuschrist crucifié et sur l'eternité glorieuse quil m'a
acquise par son sang, au prix delaquelle j'estime toutes choses un vray rien1109. Et si je pouvois
aussi bien exprimer les raysons qui m'ont induite a ce desirable retour comme je les ay veüe (sic)
1096 a esté [la comparayson de...]
1097 ordinayrement [de leur doctrine entre messieurs les ministres...]
1098 et benedictions. [J'y ay treuvé des images, et point d'idoles. J'y ay treuvé...]
1099 et [entretenir]
1100 que [lhonnenr et]
1101 estoit [jalousement et]
1102 bien esloignee [de ce que] messieurs les ministres [nous ont fait entendre et...]
1103 ny avoir [qu'illusion et mensonge...]
1104 Dan., XIII.
1105 luy devoit [Ce n'a donq pas esté ni la crainte des travaux...]
1106 Vers. 13.
1107 Apoc., XII, 3.
1108 Ephes., ult., Heb., IV, 12.
1109 Cf. Philip., III, 7, 8.
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clairement pour m'y resoudre, je croy que vous en series fort satisfaite. Mais ce bon Dieu qui ne
nous manque jamais es choses necessaires a nostre salut, m'a donné la lumiere requise pour le voir
et l'embrasser, par ce que sans cela je me fusse perdue1110, et ne m'a pas donné le moyen de bien
declairer1111 ce que j'ay conneu et connois par cette lumiere, par ce que ce n'est pas a moy
d'instruire ni enseigner. Comm'en effect, je ne m'espancherois pas mesme si avant a parler [380]
de cette grace que j'ay receüe avec un'autre qu'avec vous qui m'aymes, et que je prie ne point
communiquer la presente, pour ne me point rendre plus odieuse a ceux qui croyront que1112 ce
mien despart d'avec eux m'en rende digne, et lesquelz, non obstant cela, je ne laisseray neanmoins
de cherir d'une vraye et sincere dilection, priant, etc.1113
Revu sur l'Autographe conservé à la Visitation d'Annecy. [381]
_____
DCCCLXXII. Au Cardinal Anne de Pérusse d'Escars de Givry1114
(Inédite). La Sainte-Maison de Thonon. Les Carmes réformés
de Paul V.
Annecy, 6 août 1607 1115.
Monseigneur,
Je ne respons encor pas aux articles quil vous a pleu me faire envoyer, par ce que je n'ay
encor sceu retirer le double de la fondation de la Mayson de Thonon1116, qui estoit la principale
piece que vous me commandiés de vous faire tenir. Je presse neanmoins le plus quil m'est possible
pour cela.
Mais despuis, le Pere Cherubin1117 m'a remis des Bulles [382] de nostre Saint Pere pour les
executer1118, par lesquelles il m'est commandé de ranger la Sainte Mayson de Thonon a
l'observation de certains articles signés par Monsieur le Nonce de Turin1119 et de Son Altesse,
lesquelz entr'autres choses, mettent ladite Mayson sous la protection de la Milice des saintz
1110 perdue [sans y penser]
1111 de bien [expliquer] declairer [les motifz...]
1112 que [mon bonheur...]
1113 Cf. ci-dessus, note (1091), p. 377.
1114 L'adresse manque, le feuillet qui la portait a dû être détaché ; mais au verso de la lettre, on lit cette suscription
d'une ancienne écriture : « Lettres (sic) de Monsr l'Evesque de Geneves a Monseigr le Cardinal de Givry, du 6 aoust
1607. » (Voir le tome précédent, note (217), p. 70.)
1115 Arrivée trop tard pour être classée, cette lettre est donnée ici en vue de justifier et compléter les renseignements
historiques sur les Carmes de Gex. (Voir ci-dessus, note (899), p. 316.)
1116 Sans doute, le Saint désigne ainsi la Bulle de fondation, datée du 13 septembre 1599. (Cf. tome XIII, note (453),
p. 165.) Dans cette Bulle, Clément VIII prescrivait, comme important au bon fonctionnement de la Sainte-Maison,
une règlementation très étudiée, dont les points principaux étaient les suivants :
1. Sept prêtres séculiers, avec un préfet qui les formerait d'après les coutumes des PP. Oratoriens de Rome.
2. Des classes de Grammaire, de Philosophie, Théologie, Ecriture Sainte, Controverse, confiées aux PP. Jésuites,
les premières pouvant être données à un prêtre séculier desservant l'église de Notre-Dame de Compassion. 3. Les
Capucins seraient employés aux prédications et missions dans le Chablais et les bailliages voisins. 4. Il y aurait un
séminaire et, de plus, un refuge pour les convertis.
On peut supposer que le Cardinal de Givry avait écrit à saint François de Sales au sujet de ces divers articles.
1117 Le P. Chérubin de Maurienne, Capucin (voir tome XI, note (244), p. 98), après un séjour de plusieurs mois à Rome
(mai-octobre 1606), revenait en Savoie porteur d'un Jubilé pour Thonon (cf. tome XIII, p. 272) et de documents
pontificaux relatifs à la Sainte-Maison.
1118 Le Bullaire de la Sainte-Maison ne contient aucune Bulle de 1607 ; c'est donc celle du 13 août 1606 que François
de Sales mentionne ici.
1119 Mgr Pierre-François Costa, évêque de Savone (voir tome XIII, note (678), p. 251).
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Maurice et Lazare1120.
Sil se pouvoit faire que Sa Sainteté envoyast la mission des Carmes reformés, delaquelle il
a esté parlé, pour le balliage de Gex1121, ce seroit un grand bien, et le Roy l'auroit aggreable, comme
monsieur le baron de Lux me l'a escrit1122.
Je vous bayse les mains en toute reverence, et suis, Monseigneur,
Vostre tres humble et tres-obeissant serviteur,
FRANÇS, E. de Geneve.
A Neci, le VI aoust 1607.
Revu sur l'Autographe appartenant à M. Maurice Le Corbeiller, à Concise (Thonon). [383]
1120 Le désir du Souverain Pontife avait été exécuté dans une grande assemblée tenue à Thonon le 7 juillet précédent.
(Cf. Gonthier, Œuvres historiques, 1901, tome Ier, p. 434 ; Mém. de l'Acad. Salés., 1880, tome II, p. 271.)
1121 Les Religieux dont il s'agit n'étaient ni les anciens Carmes de Gex, dits de l'Observance (cf. plus haut, note (899),
p. 316), ni les Carmes déchaussés de France, introduits dans notre pays dès 1605. Il faut savoir, en effet, que Paul V,
cédant aux prières du P. Thomas de Jésus, songea, vers 1607, à ériger une Congrégation spéciale de Carmes
déchaussés, uniquement destinée aux missions parmi les infidèles et les hérétiques. Mais le projet ne tint pas, et le
Bref du 22 juillet 1608, qui confirmait cet établissement, fut rapporté le 7 mars 1613. (Hélyot, Paris, 1721, tome Ier,
p. 359.) C'est sur ces Religieux, semble-t-il, que François de Sales fondait son espoir ; voilà pourquoi il les demande
au Pape.
1122 Voir sa lettre à l'Appendice, p. 385.
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Les notes marginales indiquent la corrélation des pièces de l'Appendice
avec le texte des Lettres de saint François de Sales.
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Appendice
_____
I. Lettres adressées a saint François de Sales par quelques
correspondants
_____
A. Lettre du Baron de Lux1123
_____
Monsieur,
1124Je n'ay pu vous faire responce plutost a celle qu'il vous a pleu de m'escrire ; j'attendoys
d'y sçavoir les volontés du Roy qui a eu fort aggreable que vous mettiez au bailliage de Gex les
Religieux Carmes reformez que Sa Sainteté vous doit envoyer1125. Sa Majesté s'asseure que vous
les choisirez tels, qu'elle en aura du contentement et les jugerés d'edification. J'en escris a ces
Messieurs un mien billiet dans le pacquet, afin que, voyans l'intention de Sa Majesté, ils n'y
apportent rien de contraire.
Il ne m'arrive contentement qui soit egal a celuy que je reçois de vous faire service qui vous
soit aggreable : cela estant, je suis asseuré que cette action est receue avec plaisir devant Dieu. Ne
me soyez, Monsieur, s'il vous plaist, siche de vos commandementz ; me les [385] departant, vous
faictes chose charitable, puisque sans iceux je ne fais chose aucune qui soit digne d'aggreer a la
divine Majesté.
Je la supplie tres humblement qu'elle me conserve vos bonnes graces, et vous donne,
Monsieur, [heureuse] et longue vie.
Vostre tres humble et tres obeissant serviteur,
DE LUX.
Missery, ce 18e mars 1607.
Revu sur le texte inédit, inséré dans le IId Procès de Canonisation.
_____
1123 Voir tome XII, note (131), p. 80, et ci-dessus, pp. 335, 336.
1124 Vide Epist. DCCCLXXII.
1125 Vide supra, p. 383, not. (1121)
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B. Lettre du Prieur et des Religieux de Saint-Claude
_____
Monsieur,
1126Nous avons reçu la vostre par les mains du sieur present porteur, et pour response à
icelle nous vous assurerons que nous monstrerons tousjours par effects l'affection et volonté que
nous avons au service de Dieu pour son honneur et gloire, et mesmement au faict du
restablissement de la sainte Messe audit lieu de Dyvonne. Et pour y satisfaire, nous avons donné
ordre à nos fermiers de fournir argent pour redresser l'autel et autres reparations necessaires, et
prié le sieur porteur d'en poursuivre l'execution. Pour les ornements, nous en avons delivré
suffisamment pour la celebration du divin service1127.
Quant à l'entretien du sieur Curé1128, outre ce que le ministre possedoit en domaine
dependant de la cure et trois cents florins de pension qui estoyent par nos fermiers payez audit
ministre, nous avons bien voulu nous charger et incommoder de luy augmenter l'entretien de
quarante francs sur nostre revenu ; qui fera une notable somme pour un homme d'eglise. Nous
assurons que plusieurs curés n'en ont pas tant, et que la religion ne nous sauroit contraindre d'en
donner davantage, d'autant que nous surpassons la portion congrue ; et sommes mary ne pouvoir
donner telle pension que celle de Cessy1129, selon qu'il est porté par la vostre, d'autant qu'il nous
est impossible, [386] parce que le revenu n'est pas semblable, pour ce que ledit prieuré de Dyvonne
est chargé de la troisiesme partie du revenu de pension annuelle au resignataire, par authorité du
Saint-Siege, outre les pensions annuelles qu'il nous faut payer trois cent vingt livres, pour l'argent
emprunté pour le remboursement du prix auquel on a esté condamné par arrest à Paris. Vous
assurons que la reunion du dit prieuré nous revient à plus de quatre mille ecus en frais, pour l'avoir
retiré de la main des heretiques ; à quoy l'on doit avoir consideration, mesme les reparations qu'il
convient y faire presentement, tellement que nous ne tirerons rien du revenu dudit prieuré durant
cinq ou six ans, joint que l'on nous menace des decimes pour ceste annee. N'entendant pas que la
dite pension de trois cents florins et augmentation de quarante livres par cy apres, soient payez par
nous lorsque le revenu de la cure sera reuny, comme il estoit anciennement.
Et d'autant que le droit de presentation de ladite cure nous appartient, desirant neantmoins
nous conformer à vostre volonté, nous vous supplierons accepter la presentation que nous vous
ferons du mesme qu'il vous a plu choisir ; ou, en tant que l'authorité vous ait esté donnee du Saint
Siege pour la premiere fois, de choisir tel que bon vous semblera, et que cela soit, comme nous
ont donné a entendre de vostre part nos confreres, nous vous supplions nous donner acte, tant pour
celle de Dyvonne que pour celle de Cessy, que ce soit sans prejudice pour l'advenir. Si non, nous
vous supplions ne pas trouver mauvais si nous maintenons nos privileges, que nous croyons que
vous nous conserverez ; qui nous fera sur ce vous baiser tres humblement les mains, et prier Dieu
de vous conserver et vous donner santé longue et heureuse vie, nous qui sommes,
Monsieur,
Vos tres humbles serviteurs,
LES GRAND PRIEUR ET RELIGIEUX DE St CLAUDE.
A Saint Claude, ce 20 may 1611.
A Monsieur
Monsieur le Reverendissime Evesque de Geneve.
Revu sur une ancienne copie conservée à Paris, Bibliothèque nationale,
Galerie Mazarine, vitrine XXXII, n° 324.
1126 Vide Epist. DCXC.
1127 Vide supra, p. 60, not. (188).
1128 Idem, not. (189).
1129 Idem, not. (190).
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C. Lettre du Père Jean de Villars de la Compagnie de Jésus1130
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Monseigneur,
1131Vostre humilité, ma condition et mon humeur me defendent la flatterie et commandent
la congratulation pour les biens que ma Mere, qui, de ses eaux salutaires, m'a engendré en vie
eternelle, reçoit par vous. Il est vray, Monseigneur, je ne suis qu'un pecheur et le dernier de nostre
Compaignie ; mais Dieu me donnoit des mouvemens si vifs d'asseurer madame de Chantal que le
Ciel luy vouloit donner l'eau de la Samaritaine par le canal de vos levres, que si les Anges fussent
venus troupes a troupes pour m'en dissuader, je ne crois pas qu'ilz l'eussent peu faire, parce que
l'impression estoit du Roy des Anges.
Et m'a semblé, depuis que vostre naissante Congregation est commencee, que je l'ay veüe
comme une Hierusalem nouvellement descendante du Ciel. Oh ! que je me suis ecrié de bon cœur
: Benite soit la premiere pierre de cet edifice ! Oh, qu'elle est polie ! C'est un marbre bien taillé,
marbre blanc, que le cœur de cette digne vefve, dont j'ay autrefois tant honoré les vertus et dont je
venere maintenant la sainteté. Il est blanc, ce cœur, par la pureté de ses intentions ; il est poli, par
les diverses afflictions qui, en guise de coups de marteau, ont osté toutes les superfluités et l'ont
jointe au point du lieu sacré ou elle devoit estre posee, et vostre ingenieuse main a gravé sur ce
marbre poli, pour un monument eternel de gloire a Dieu, ces quatre belles paroles qui sont les
devises de vostre cœur : VIVE JESUS ! VIVE MARIE1132 ! Tout a Dieu, tout pour sa gloire !
N'ay-je pas donc sujet de dire : Benite soit la pierre, beni soit l'ouvrier, et beni soit
eternellement l'Architecte celeste qui, dans son idee eternelle, avoit fait le projet de cet edifice ? Il
me semble, Monseigneur, que cette Congregation manquoit encor a l'Eglise, et que Dieu vous ait
suscité en nos jours pour l'eriger. Certainement, [388] Nostre Seigneur a visité son peuple, et faut
croire que la benediction de commencement s'estendra avec une amplification nombreuse : car,
que manquoit il aux foibles, que cette mediocrité ? que falloit il aux vefves, que cette douceur ?
que pouvoyent desirer les robustes et ferventes, que cette mortification ? Vous avez, mon tres cher
et digne Seigneur, dressé un temple de Salomon en ce siecle, voyla les trois estages : que reste il a
ces ames bienheureuses destinees a l'habitation d'iceluy. que d'entrer dans le Sancta Sanctorum de
l'eternelle felicité ?
Monseigneur, donnés moy quelque petite part aux prieres qui se feront dedans ce temple.
Il me reste de recourir a vous pour cet effect, car je crois que madame de Chantal ne me refusera
pas cette grace, puisqu'elle sçait mes besoins, et de plus, que je suis
Vostre tres humble, obeissant serviteur, fils, penitent,
JEAN DE VILLARS, Jesuite.
De Dijon, ce 24 juillet 1611.
Revu sur le texte inséré dans l'Histoire de la Fondation du 1er Monastère
de la Visitation d'Annecy.
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1130 Voir tome XII, note (857), p. 343.
1131 Vide p. 64, not. (203).
1132 Cf. Epist. DCXCIII.
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27 Pages 261-270

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27.1 Page 261

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D. Lettre de Madame de Saint-Cergues
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Monseigneur,
1133La reception de celle dont il vous a pleu m'honorer a apporté une telle joye et
consolation en mon ame, qui me sembloit, la lisant, que je vous voioyt present. Je me condamnois
neantmoins en ce que vostre bonté et courtoisie, joiend au soien quil vous plaist avoir de mon bien
et salut, m'avoit prevenue, encore que la faute ne provenoit pas d'obliance ni moins de
reconnoissance de mon devoir ; car il y a plus de huict jours que j'avois dressé une lettre pour vous
l'envoyer à la premiere comodité. Mais d'autant qu'elle contenoit quelque avis plains (sic) de
difficulté et facherie ou je me suis trouvé reduicte, il m'a semblé qui me seroist plus seant de m'en
taire pour le present, remettant à nostre premiere veüe à le vous dire de bouche ; qui sera, comme
j'oze esperer, bien tost, puis que nous approchons [389] de la feste qui vous donne subject de venir
à Thonon1134. Je m'en rejouis infiniment, me promettant que ce ne sera sans avoir l'honneur de
vous voir en passant, ou bien à vostre maison de Vieu1135.
Cependant, je vous diray (Monseigneur) comme par la grace et support de mon Dieu je
persevere en l'exercise ou il vous a pleu m'acheminer, qui apporte un grand repos à mon ame et
contentement à mon esprit parmi les traverses et facheries qui faut supporter en ce monde. Je me
raffreschis aussi la memoire tous les jours des bonnes et salutaires instructions qui vous a pleu me
despartir, en la lecture des beaux livres que je tiens cherement de vous, Monseigneur, ou je trouve
le remede à tous mes maux. Ne reste si non à me les sçavoir bien appliquer et en bien user.
Le Seigneur m'en fasse la grace, sil luy plaist, et me doinct meriter de me nommer à
tousjours, Monseigneur,
Vostre tres humble et obeissante fille, sœur et servante,
J. de CARTAL.
De Lucinge, ce 29 juillet 1611.
Revu sur l'Autographe inédit, qui, en 1895, appartenait à Mme Doroz,
née d'Arcine, à Besançon.
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1133 Vide Epist. DCLX, DCCCLXXI.
1134 La fête de la Nativité de la Sainte Vierge ; on se rappelle, en effet, que dès le 7 septembre 1611 saint François de
Sales se trouvait à Thonon, où il présida l'ouverture du Jubilé. (Cf. Lettres DCCX, DCCXII.)
1135 Viuz-en-Sallaz, chef-lieu du mandement de Thy, qui appartenait aux princes-évêques de Genève depuis 1185. (Cf.
tome XIII, p. 301.)
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27.2 Page 262

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E. Lettre de D. Sens de Sainte-Catherine, Feuillant1136
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Mon tres digne Pere et mon Pasteur bien aimé,
1137Les petits chiens, [qui] aiment grandement leurs maistres et que leurs maistres aiment
bien, ne laissent pas de les importuner [390] quelquefois de leurs griffes, mesme en leur
tesmoignant qu'ils les aiment et en les caressant. Ainsi, Monseigneur, je vay, avec les griffes de
ma plume, vous carresser comme mon cher maistre, et vous demander quelques unes des miettes
qui tombent sous vostre table, lorsque vous rompé le pain de salut a vos cheres Filles.
Mais, Monseigneur, vous ne [me] pardonnerié jamais si je vous racontois les louanges que
l'on donne a ce Pere et a ses Filles. L'on dit que c'est la perfection de ce siecle ; et, vous laissant a
part pour pardonner a vostre modestie et contenter vostre humilité, le bon Pere de Saint
Malachie1138 me disoit l'autre jour, qu'il consideroit devant madame de Chantal et la voioit en esprit
comme un soleil, et chacune de ses filles estait un rayon pour esclairer ce siecle.
1139Et moy, mon unique Seigneur, quand je considere vostre Congrégation devant Dieu, je
la vois aussi haute en amour comme vous l'avez faite profonde en humilité, et j'espere que bientost
la France, jalouse du bien de nos montagnes, voudra partager ce bonheur avec elles ; j'espere, dis
je, que comme les plaines sont plus propres a s'estendre que les monts et vallees, que dés que vous
auré fait quelques Maisons en nos quartiers, ce sera jetter madame de Chantal comme un grain
dans ces plaines, qui raportera au centuple. Dieu me rende digne de voir nos terres ensemencees
de cette bonne semence, et je prie Dieu de luy donner l'arrousoir d'en haut, par les benedictions, et
l'arrousoir d'en bas, par les bons accueils que cette Congregation merite recevoir par tout, quand
ce ne seroit qu'a la consideration de son Fondateur et de la Fondatrice, que j'honore sans difficulté,
selon le conseil de l'Apostre, comme l'autel sacré de Dieu.
Et apres vous avoir supplié en toute humilité, Monseigneur, de luy demander un Avé pour
moy [et] a toutes ses Filles, je demeure
Vostre tres obeissant fils,
DOM SENS DE Ste CATHERINE, indigne Feuillant.
De vostre Maison, ce 3e fevrier 1612.
Revu sur le texte inséré dans l'Histoire de la Fondation du 1er Monastère de la Visitation
d'Annecy. [391]
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1136 Sens ou Sans Beauner fit profession en 1586, dans la Congrégation des Feuillants, à l'âge de dix-sept ans. Supérieur
général pour la première fois, de 1607 à 1610, il exerça encore cette charge de 1614 à 1620, et mourut saintement à
Rome le 12 octobre 1629.
1137 Vide p. 160, not. (478).
1138 Vide tom. XIII, not. (40), p. 2.
1139 Migne, tome IX, col. 83, a publié cet alinéa, avec plusieurs changements ; le reste est inédit.
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27.3 Page 263

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F. Lettre de M. Jean-Louis de Chevron, Seigneur de Bonvillard1140
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Monsieur,
1141Je vous prierey m'excuser si je vous importune de ces deux moctz pour vous prier
representer, si vous voz (sic) treuvé en commodité, a messieurs de Chivron mes nepveuz1142, aux
fins que, avec vostre assistance et du sieur de Villette nostre cousin1143, puissions faire noz
partaiges sans aulcunes formallités de justice, ains par voye d'amytié, comme le debvoir nous
oblige. J'ey par plusieurs foys prié lesdictz sieurs mes nepveuz de prendre une journee pour y
resouldre en vostre presence, lesquelz ne si veullent entendre, ains desmeurent saysis de tout, a
mon grand prejudice, veu les grandz charges et debtes qui sont deubz sus noz biens1144.
Et sur ce, j'attendrey d'avoir de vous, nouvelles, en priant Dieu [392] qu'il vous aye en sa
protection, et suis, appres vous avoir baisé tres humblement les mains, Monsieur,
Vostre bien humble et affectionné cousin et serviteur,
J. L. DE CHIVRON.
A Bonvillard, ce 21e mars 1612.
Revu sur l'Autographe inédit, conservé à la Visitation de Pignerol.
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G. Lettre de Mgr Michel d'Esne, Évêque de Tournai
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Monseigneur,
1145Le P. Irenée a eu raison de vous parler de l'affection que je vous porte, car dez la
premiere veuë que j'eu de vostre Introduction, elle s'empara de mon ame et y va prennant racine si
avant, que la seule mort la poura arracher. Vostre Introduction, certes, a esté si bien receüe par
deça, que l'impression s'en est multipliée a l'esgal, sans doubte, du fruict qui en a reussi. Ha ! que
ce vous est un heureux travail que de combatre et debatre contre les huguenots ! (travail qui
infalliblement vous acquerrera une couronne de gloire et ça bas et au Ciel.)
Nous ne sommes pas icy, par la grace de Dieu, oisifz, mais nous n'advançons pas tant que
nous voudrions bien. Combien de fois ay je regretté la faulte de Geneve ! Pleust a mon Dieu que
je fusse condamné a vous restablir en vostre siege ! Tout viel que je suis (aagé de 71 ans), je m'y
achemineroy tres volontiers, deuse-je mourir (comme l'on dit) en la peine. J'ay maintes fois
1140 Voir plus haut, note (610), p. 208.
1141 Vide Epist. DCCLXIX.
1142 Hector de Chevron, frère du correspondant du Saint, et Jeanne de Menthon avaient quatre fils : Bernard (voir plus
haut, note (606), p. 207) ; Prosper, dit baron de Chevron, qui épousa Victoire Borella ; Philippe, chevalier de Malte,
et Benoît-Théophile qui devint archevêque de Tarentaise (cf. tom. XIII, note (929), p. 344). Ce sont apparemment les
deux premiers que M. de Bonvillard désigne ici.
1143 Le baron Amédée de Villette, cousin-germain d'Hector et de Jean-Louis de Chevron.
1144 Les différends survenus pour les seigneuries de Chevron et Bonvillard, d'abord entre les trois frères, Hector, Jean
et Jean-Louis de Chevron, ensuite entre ces deux derniers et leurs neveux Bernard et Prosper (voir note (1142) ci-
dessus), ne prirent fin qu'en 1616. Voulant les terminer « par voye amiable, » les parties se soumirent, par « acte de
compromis » daté du 8 juillet, « a l'arbitrage, decision et jugement » de saint François de Sales et du baron de Villette,
choisis pour « surarbitres. » La transaction fut passée à Annecy, « en la maison de Monseigr le Rme Evesque de Geneve.
» (Archives de Giez, Projet d'arbitrage, minute.)
1145 Vide Epist. DCCLXXXIX.
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27.4 Page 264

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souhaitté que ceste hydre n'eust qu'une teste (comme faisoit Neron du peuple Romain), pour la luy
trancher tout d'un coup.
J'envoye a Vostre Seigneurie Reverendissime une de mes petites traductions1146, que je
vous prie recevoir de pareille affection que je [393] la vous presente, priant Nostre Seigneur
seconder voz bons desseings, vous asseurant que je demeureray toute ma vie,
De Vostre Seigneurie Reverendissime,
Tres humble et tres affectionné confrere
et serviteur en Nostre Seigneur,
MICHEL, Evesque de Tornay.
Je me recommande a voz prieres. [Mai 1612.]
A Monseigneur
Monseigneur le Rme Evesque de Geneve.
Revu sur l'Autographe inédit, conservé à la Visitation d'Annecy.
_____
H. Lettre du Chevalier Claude de la Verchère1147
_____
Monsieur,
1148Il y a quelque temps que nous avez asseuré, monsieur de Gerlande1149 et moy, par vostre
reponce à celles que luy et moy vous avions escriptes, que me donneriez tout contentement pour
le faict de mes biens de Crozet, pays de Gex, dans les limites de vostre evesché, desquels vous
avez prins la possession sans qu'il vous appartienne ; car de tout temps, ça esté un membre
despandant de ma commanderie, fors des la prinse dudit pays par les seigneurs de Berne1150, qu'il
a esté occuppé par ceux de la religion, ainsi que je [394] vous ay fait entendre par mes lettres et
comme le sieur Girod, mon fermier1151, l'a fait voir sur lieux aux curez de Gex1152 et Farges1153,
qu'aviez a ces fins deputez, tant par mes derniers terriers, que ceux qui sont faiz des cent et quattre
vingts ans en ça, desquels il leur a baillé les coppies pour les vous fere tenir des le moys d'octobre
dernier ; par ou il appert clairement, avec d'autres enseignements, que la chappelle de Crozet ne
fust jamais cure ny parroisse, moings que lesdits biens en feussent depandants1154. De quoy, du
1146 Vide p. 238, not. (691).
1147 Claude de la Verchère, chevalier de l'Ordre de Saint-Jean de Jérusalem, commandeur de la commanderie des
Feuillets de 1610 à 1615 (cf. ci-dessus, p. 338, note (961), n° 3). On le retrouve encore avec ce titre en 1641 et 1645.
(Archives du Rhône, Fonds Malte, H. 278, 280.)
1148 Vide p. 338, not. (961), nº 3.
1149 Le chevalier Just de Fay de Gerlande fut d'abord commandeur de Villefranche et de Charrières, et ensuite grand-
prieur d'Auvergne. En 1613 et 1614, il était « recepveur general de l'Ordre Sainct Jean de Hierusalem. » (Ibid., H. 63,
258, 260, 281.)
1150 En 1536. (Cf. tome XXI, pp. 229, 230, 412.)
1151 Claude Girod, « praticien, abitant du village de Croset et fermier des dicts membres... du Croset et Maconnex. »
(Archives du Rhône, Fonds Malte, H. 260, n° 86.) Il paraît dans le Procés-verbal de Gex, comme mandataire du
chevalier de la Verchère ; cf. note (1154).
1152 Etienne Dunant (voir le tome précédent, note (188), p. 65, et ci-dessus, note (198), p. 63).
1153 Humbert Curton (cf. ci-dessus, note (198), p. 63).
1154 Le 26 juillet 1612, Claude Girod (voir note (1151) ci-dessus), au nom du commandeur de la Verchère, avait déjà
remontré aux commissaires royaux « que l'eglise dudict Crozet n'avoit oncques esté paroisse, ains une simple chapelle
qui avoit esté premierement construicte par les commandeurs » des Feuillets « pour leur usage... Que du temps que le
seigneur duc de Savoye estoit possesseur du bailliage de Gex, les biens dependants de ladicte chapelle estoient annexés
a laditte commanderie et membre dudict Crozet ; et partant, empechoit que ledict sieur Evesque fust mis en la
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27.5 Page 265

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despuis, je n'ay heu de vous aucune resolution, quoique mon fermier aye sollicité lesditz curez,
nottamment ceux (sic) de Gex qui l'a entretenu a parolles jusques a Noel dernier, et remettant
l'affaire sur vous, puis que vous avon envoyé lesdittes coppies et memoires. Tellement que, par le
silence que m en a du despuis fait ledit Girod (auquel j'avois donné charge d'en suivre les
poursuittes), a cause d'une maladie qui des lors l'a retenu au lit jusques a present, je croyois que
luy en aviez relasché la possession.
Mais je vois maintenant le contraire et que me detenez tousjours lesdits biens contre tous
nos droits et privilleges ; car jamais les Evesques n'ont heu a cognoistre sur ceux qui depandent de
nostre Ordre. De sorte que, comme il a pleu a Sa Majesté remettre les Catholiques en la possession
de tous les biens ecclesiastiques dudit Gex et les choses au mesme estat qu'elles estoyent
anciennement, afin que chacun jouy du sien paisiblement, je m'estois librement dispancé de luy
accenser ceux dont il est question ; dequoy il me demande de grands dhommages et interests, faute
de l'en faire jouir. C'est pourquoy je vous ay encor fait ceste, par laquelle je vous prie [395] mettre
le tout en consideration ; apres quoy je m'asseure qu'aurez pour agreable a me relascher
amiablement lesditz biens, ensemble les fruicts tant de la presente que derniere annee. Lhonneur
et le respect que je vous porte me fait souhaiter de n'en venir par la voye que chacung recherche
pour conserver le sien, que je seray contraint de suivre si, de vostre propre motif, vous ne vous
rendez a la raison.
Et quant a ce qui concerne le service que je doibs faire celebrer en laditte chappelle, je veux
tousjours rendre mon debvoir et payer le prestre qui le voudra faire au jour de la fondation ; mais
d'y entretenir ung, je ne le puis, tant pour en estre dispencé, que a cause des grandes charges que
je paye a ma Religion, joinct que le revenu n'est suffizant pour l'y entretenir1155. L'asseurance
donques que je prends que ne voudriez vous prevalloir de ce qui depand de nostre Ordre, ny le
constituer en frais pour chose si juste, mais plustot qu'en desiriez l'accroissement, me fait croire
que me donnerez tout contentement et que l'equité de vos proceddures ne refusera ce qu'avec
justice nous pourroit avec toute raison facilement rendre.
Cela m'obligera de tant plus a demeurer, comme je suis a jamais,
[Janvier 1613.]
A Monsieur et Reverend Seigneur,
Monsieur de Salles, Evesque de Geneve.
A Necy.
Revu sur la minute inédite, conservée à Lyon, Archives du Rhône,
Fonds Malte, H. 240, n° 29. [396]
possession de ladicte eglise, comme estant une chapelle particuliere. » Malgré ces réclamations, les délégués de Sa
Majesté passèrent outre, et mirent saint François de Sales en possession de la chapelle et des biens qui en dépendaient,
pour être « employés a l'usage auquel ils » avaient « esté destinés par les fondateurs. » (Procés-verbal de Gex.)
1155 Nous lisons dans le Procès-verbal de la visite de Crozet et Maconnex, faite par le commandeur de Gerlande (voir
ci-dessus, note (1149), p. 394), le 29 octobre 1614 : Le membre « de Croset consiste en une eglise, ne sachant si elle
est parochiale ou chapelle, d'aultant que ceux de la pretendue religion y ont faict leur exercisse il y a longues annees,
» et « ne si dict point de Messe... estant tous huguenots. » (Archives du Rhône, Fonds Malte, H. 260, n° 86.) Vers la
moitié du XVIIe siècle, la chapelle fut reconstruite par les soins de Révérend Léonard Boudillon, qui en avait été
pourvu par le commandeur de la Verchère en 1630.
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II. Pièces diverses
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A. Saint François de Sales et Mgr Germonio1156
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« Musteriensis diœcesis finibus appropinquanti, occurrit Franciscus Sales, Genevensium
Antistes, elegantis ingenii homo, doctusque, ac pius divini verbi præco, simul et Anastasii
studiosissimus, quod ejus opera, a Summo Pontifice Paulo Quinto plurima, eademque non vulgaria
et sibi et canonicis suis utilia beneficia accepisset ; quem Anastasius ad se officii gratia venientem
amanter, ac pro loci angustia honorifice habuit.
« Is sumpto cibo, post multa benevolentiæ signa utrinque edita, Anastasium rogat, ut
aliquando et cum opportunum duceret, Necium peteret ubi, inquit (amice Præsul), veri obsequii
officiis quantum tibi debeo, aptius ostendam. (In hoc Allobrogum oppido, domicilium habent
Genevensium Episcopi, ex quo ab infelici civitate, post abnegatam catholicam fidem, in exilium
projecti sunt.)
« Necium se iturum promittit Anastasius, tum ut invitanti amico gratum faceret, tum ut
Tarantasiensi Ecclesiæ subjectum cœnobium Sancto Christi Sepulchro nuncupatum inviseret, tum
demum, ut decem et octo passuum millibus Necio distantem, Genevam ex itinere videret. »
Ex Anastasii Germonii Commentariis, Historiæ Patriæ Monumenta,
tom. XI, Scriptores, tom. IV (Taurini, 1863), p. 1016. [397]
_____
B. Lettre de M. Antoine des Hayes A M. de Charmoisy
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Monsieur,
1157Je suis tres aise du desseing que vous avez pris de faire nourrir vostre filz en ceste court,
a quoy je vous pourray servir, puis que Dieu a voullu que nous feussions esloignez l'un de l'autre.
J'en ay parlé a Madame la Princesse, quy est toute disposee de vous obliger en cela, mais je ne l'ay
supplyee de rien, luy ayant seullement dict que je vous l'avoys conseillé et que vous y estiez resolu
: sur quoy elle m'a dict qu'elle s'offroyt. L'on me faict croire que dans peu de jours la court sera a
Montargis, ou je me prometz de donner bon commancement a l'affaire. Vous sçavez quil y a
maintenant trois premiers gentilzhommes de la Chambre : monsieur le Grand, monsieur le Marquis
d'Ancre, au lieu de monsieur de Bouillon, et monsieur de Souvray. Appres en avoir dict ung mot
a Sa Majesté, comme l'on doibt, et dont je me prometz telle responce que vous sçauriez desirer, je
menageray vers l'un des trois vostre contentement, et sy je ne suys assez fort, je manderay de vos
amys.
Madame de Guyse est allee en son Conté d'Eux, d'ou elle espere retourner dans ung mois
et rapporter de quoy vous contenter. Je l'en ay suppliee a son partement, et monsieur du Demare
aussy, auquel j'ay promis recognoissance, veoyant que l'affaire deppend de luy. Sy vous n'aviez
esté nourry chez les Princes, je seroys bien enpesché a vous faire conprendre comme l'on sy
1156 La rencontre des deux Prélats, dont nous donnons ici les détails, eut lieu au mois de mars 1609. (Voir note (564),
p. 183.)
1157 Vide p. 271, not. (774).
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27.7 Page 267

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gouverne et les incomoditez quilz reçoivent, faulte d'avoir pris garde a leurs affaires.
Monsieur Rousselet vous escripra comme j'ay representé audit sieur du Demare que vous
estiez pressé d'une petite partye deue a monsieur de Mezieres, affin que sil estoyt possible, elle
feut acquitee contant au retour de ma dite dame. Je verray a son retour ce quil fera, m'ayant asseuré
que ce sera sans plus de remise ; mais je vous conseille d'agreer que monsieur Rousselet et moy
luy promettions ce que nous adviserons : c'est le plus court chemin.
1158J'avois cy devant escript a Monseigneur de Genefve le desir que messieurs de St Benoist
avoyent d'estre enseignez de luy le Karesme [398] prochain1159. Toutes les parroisses ont ceste
mesme vollunté et plusieurs des principaulx d'icelles s'en sont addressez a moy. Mais ayant esté
faict marguillier deppuis trois sepmaines et l'ayant accepté, voyant que tout d'une voix j'estois
desiré, je suys dispensé d'escripre pour aultruy et obligé d'escripre pour S' Benoist, non seullement
comme en ayant charge, mais encores pour la comodité de ceste petite maison ou j'espere que
mondit Seigneur logera. Que sil acceptoyt une aultre chaise et que l'on luy donnast le logement
ordinaire des predicateurs, cela ne seroyt convenable a sa qualité ; sy l'on luy en donnoyt ung plus
grand, cela l'obligeroyt a quelque despence. Ceans, il sera logé chez son serviteur, hors de
cerimonye ; je luy donneray ung carrosse pour visiter ces (sic) amis, je luy feray faire penitence et
le dechargeray de tout soing. Il aura des auditeurs aultant que l'eglise en pourra tenir, quy est assez
cappable. L'on estimera quil a plustost defferé a la supplication de son serviteur qu'a la priere des
plus grandes et favorisees parroisses.
Je luy en escriptz amplement, et luy envoye une lettre que Monsseigneur le Nunce residant
en ceste ville, logé, comme vous sçavez, a l'hostel de Clugny, escript a Monsseigneur le Nunce de
Thurin, auquel il mande que messieurs les parroissiens de St Benoist, bien memoratifz du fruict
des predications que Monsseigneur de Genevefve (sic) a faict aultrefoys en leur parroisse, d'ou il
est maintenant, l'ont pryé luy escripre pour supplier Son Altesse d'avoir agreable que l'on prye
Monsseigneur, pour le bien de la relligion, de prendre ceste peinne1160, et luy donner congé
d'accepter la supplication que l'on luy en fera. Vous pourrez fere donner la lettre par M. du Fresne,
ou par quelqu'un quy en retirera responce. J'ay premierement pris ce chemin, a cause que je ne
veoy une entiere intelligence de la Royne avec Son Altesse ; sy elle n'est suffisante, quand j'auray
la parolle de Monssieur de Genefve j'en feray escripre Leurs Majestés et le Saint Pere, sil en estoyt
besoing1161. Lors quil sera icy, il ce (sic) fera beaucoup de bonnes choses pour le bien de la
relligion. C'est pourquoy je vous supplye vous employer a ce bon œuvre et m'en fere mander
promptement responce, attandant laquelle je prye Dieu, Monsieur, quil vous conserve et garde.
Vostre plus humble serviteur,
A. DES HAYES.
A Paris, ce 2e juing 1612.
A Monsieur
Monsieur de Charmoisy, escuyer, Sr de Marclaz.
En sa Maison, a Necy.
Revu sur l'Autographe appartenant à Mlle Adélaïde Vuÿ,
à Carouge (canton de Genève). [399]
_____
C. Les Grands Pardons d'Annecy1162
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1158 Vide Epist. DCCCX.
1159 Vide p. 271, not. (775), et cf. p. 37, note (132).
1160 Cf. p. 273, not. (779).
1161 Vide pp. 272, 273, 297, 301.
1162 Voir tome XIII, note (293), p. 101, et ci-dessus, note (759), p. 265 ; cf. aussi les Lettres DCCLXXXVII, DCCCVI
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1er septembre 1612
1163Il y a sept ans que l'on joua et representa quelques histoires a Sainct Mauris, tellement
qu'a modelle de ce, l'on a faict dressé des eschaffaultz pour representer quelques histoires, ayanct
esté faictes quelques despenses
Et de plus, comme Monseigneur le Reverendissime, a certaine assemblee quil feit faire,
feit appeller messieurs les Scindics ausquelz fut remonstré la grande affluence de peuple qui
accourera icy au Jubilé qui ce (sic) celebrera vendredy prochain, dont par ce moyen les logis seront
remplis, tellement quil sera besoin de rechercher quelques licts pour les plus notables, dans ceste
ville, vers les plus riches d'icelle, et ce quy il fault pourvoir
Pour l'affluence des personnes qui arriveront en ceste ville pendant le prochain Jubilé, que
en cas de necessité, l'on recherchera quelques licts vers les plus aisés, pour loger ceux que seront
representés par mondict Seigneur le Reverendissime ; estant donné acte de la remonstrance faicte
par messieurs les Scindics, de la volonté de monseigneur le Marquis de Lans continuant le faict de
la garde. [400]
Jesus Christus, Filius Intemeratæ Virginis Mariæ
Cy commence la solemnité du grand Jubilé concedé par Sa Saincteté, de sept en sept ans,
a la tres devote Chappelle de la tres sacree et tres heureuse Vierge Marie, fondé (sic) en l'eglise
collegiale de ladicte Vierge d'Annessy, ou reside (sic) les Reverends Seigneurs doyen, secretain
(sacristain), chantre, chanoines et Chapitre d'icelle.
Du jeudy, sixiesme septembre mil six cens douze
Comme il plaict a Dieu de donner a chascun la commodité de son sauvement, il luy a pleu
d'inspirer le tres sainct Siege Apostolique, plus de 200 ans, d'honnorer la Chappelle fondé (sic) en
ceste cité d'Annessy, estant en l'eglise dressee soubz son nom, ou resident les Reverends Seigneurs
doyen, secretain, chantre, chanoines, prebstres d'honneur de ladicte eglise, de plusieurs privileges
et indulgences ; et entre aultre d'ung Jubilé de sept en sept ans, lequel a esté continuellement, par
le clergé, habitans de la dite cité, circonvoisins et estrangers, tres devotement celebré, ainsy que
les livres et registres des archives de l'Hostel de ville ont delaissé par escript et enseigné.
Et partant, ce jourdhuy, affin que chascun se contint a son debvoir quant au peuple, suivant
l'ordonnance de noble et spectable sieur Jean Flocard, docteur es droitz, noble Jean Crochet, noble
Guilliaume Meclard, honnoré de ce tiltre de procureur au Siege presidiai du Conseil du duché de
Genevois, et noble François Marvin, scindics et consulz de la cité d'Annessy1164, et des seigneurs
leurs Conseillers : messire Janus de Sales, chevallier de la saincte Religion de Sainct Jean de
Jerusalem, residant pour maintenant a Malte1165, lieutenant de noble sieur Louys de Sales son frere,
et DCCCXVII.
Cette relation, inédite, croyons-nous, jusqu'à ce jour, fournit une intéressante contribution à l'histoire de la
piété en Savoie, au début du XVIIe siècle. Elle fera surtout connaître de quelle popularité jouissait au temps de saint
François de Sales et grâce à son zèle, le culte de Notre-Dame de Liesse d'Annecy.
Nous avons respecté scrupuleusement l'orthographe du texte, nous contentant d'ajouter les apostrophes et les
accents. Pour l'intelligence de certains mots plus difficiles à entendre, il a paru bon, soit de les répéter entre parenthèses
( ) et en italiques, avec une orthographe moderne, Soit de les expliquer par des synonymes.
1163 Dans ce procès-verbal, nous avons cru pouvoir omettre l'énumération des dépenses et autres détails dépourvus
d'intérêt. Les passages omis sont indiqués par des points de suspension.
Quant à la description des fêtes, elle est reproduite in-extenso.
1164 Cf. p. 219, not. (643).
1165 Vide p. 362, not. (1024).
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seigneur dudict lieu de Sales et de Thorens1166, a deux heures apres midy, auroit faict assembler
partie des enfans et habitans de la ville, au son de 4 tambours, accompagnés du fiffre ; qui,
assemblés a la place du College, les a faict marcher comme cy apres :
Premierement, tout a la teste marchoit le tambour majour, tenant son baston rouge ; puis le
gojat (goujat) dudict sieur lieutenant, portant la cuirasse et toulache (bouclier) d'icelle, et en la
teste le casque, le tout gravé et doré. Apres luy, suivoit le susdict sieur lieutenant, habillé de riches
vestements, portant l'aulse col aussi doré et gravé, et ung sergentin portant la houppe tissee de seye
verte, meslee a fil d'or, et au bout de chasque cordon, des bouttons de mesme estoffe, le manche
toutesfois de brisit (bisette ?). Les 4 capitaines des quatre penons de la ville sui voient ledict sieur
lieutenant, portant chascun une [401] partisanne (pertuisane) doree, et couverts les manches de
velours, deuement garnis de clouz dorés.
Quatre rangs d'allebardiers, bien armés de cuirasses la pluspart ; cinq arquebusiers tenant
place de caporaulx ; deux rengs de muscataires, et suivoient le tambour sonnant a l'accoustumee,
j rangs d'aultres muscataires ; et les arquebusiers, de rang a rang et a cinq par rang, suyvoient aussy
deux tambours. Le garçon de l'enseigne, portant une partisanne doree couverte de velours verd,
garnie aussy de clous dorés, sans aulcune enseigne, pour les causes cy apres. Puis, trois rendz
(rangs) d'allebardiers, six aultres d'arquebusiers, finalement six aultres rengs de picqueurs. Et
ladicte compagnie finie par trois sargens, de quatre [qu'ils étaient,] d'aultant que le quatriesme
estoit employé, par commandement du sieur scindic Marvin, sargent manent, a mettre en reng la
compagnie.
Et en tel ordre sont sortis par la porte du grand verger dudict College, proche de la grande
porte du Pasquier Messieres. Et arrivés au devant de l'Hostel de ville, seroit monté noble Monet
Falcaz, capitaine enseigne de la ville ; auquel Hostel de ville les susdicts sieurs Scindics estoient
assemblés, avec leurs Conseillers, cy devant nommez en l'assemblee de ce jourd'huy : ou estant,
leur auroit demandé le drappeau neuf, plyé dans une grande baucine d'argent, affin d'estre benict.
Lequel drappeau, ledict sieur Falcaz l'auroit reçu, gettant les genoux en terre, des mains du sieur
premier Scindic1167 ; et apres les remerciations ordinaires, ledict sieur Falcaz seroit descendu
portant a deux mains ladicte baucine et le drappeau neuf dans icelle, et auroit trouvé la compagnie
qui avoit faict alte jusques a sa venue, et se meit a son rang : estans a ladicte compagnie davantage
de 200, sans ledict chief et officiers.
Et prenant le chemin du Pont de la Hasle, sont arrivés au cimistiere de Sainct Maurice et
ont environné ledict cimistiere. Ledict sieur Falcaz seroit entré dans ladicte eglise, et arrivé au
marchepied du grand autel, ou il trouva Illustre et Reverendissime Seigneur FRANÇOIS DE
SALES, Esvesque et Prince de Geneve, revestu d'une estolle et la miltre en teste, auroit presente
ledict drappeau (est ans messieurs les Scindics, accompagnés de plusieurs Conseillers et de
secretaires, dans leurs sieges) : lequel drappeau auroit benist, usant de plusieurs sainctes et belles
ceremonies ; puis, mise (sic) a son baston, mondict Seigneur l'auroit eslevé un peu hault par la
poignee, et despuis remis audict sieur Falcaz qui, retournant a sa trouppe qui faisoit aussi alte, a
continué son chemin par devant Saincte Croix, ou soit la porte Genotton ; et se rendant devant
l'Hostel de ville, auroit arborisé aux fenestres ledict drappeau, ou il a demeuré jusques au lundy
apres, dixieme de ce moys. [402]
Cependant, le pennon de la Procure estoit prest pour entrer en garde avec l'enseigne
desployee, ce quil fet ; et puis se feit la predication a Sainct François, par le Pere François, Capucin.
Estant a noter que pendant que la trouppe passoit par devant la Porte Genotton, le penon d'icelle
s'estoit mis en tout debvoir, s'estant assemblé avec l'enseigne deployee, portee par lé fils ayné de
Mr Jean Gabriel Compte ; qui neanmoins a esté aulcunement altein en sa charge par Me Jean
Greyfié, procureur au Conseil de Genevoys, et par Me Claude et François Greyfié ses freres, qui
se sont mis en debvoir de luy arracher ladicte enseigne : s'estant tous les pennons esmeus tellement,
que les ungs ont levé les armes contre les aultres, estant le tout reucy, par la grace de Dieu, que
nul n'a esté offencé.
1166 Vide tom. XII, p. 95, not. (165).
1167 Vide p. 356, not. (1010).
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La predication achevee, l'on a sonné la procession a l'eglise de Sainct François, ou reside
le tres venerable Chapitre de l'eglise Cathedrale de Sainct Pierre de Geneve, ou touttes les eglises
se sont assemblees avec les croix, sauf celle de Nostre Dame. Et peu apres sont parties en
procession, chascune en son ordre, sçavoir :
Les devots Capucins premier ; puis la croix de Sainct François et de Saincte Clare joinctes
ensemble, avec les Peres de Sainct François qui les environnoient. Troisiesmement, la croix des
devots Orateurs de Sainct Dominique, et apres eulx, les Reverends Chanoines reguliers du prieuré
du Sainct Sepulcre. Finalement, les Reverends sieurs Prevost et Chanoines de Sainct Pierre, avec
leurs serviteurs, tous revestus de leur habit viollet, le rocquet au dessoubz ; les enfans de cœur
(chœur) habillés de tuniques de damas incarnat. Et puis, Illustre et Reverendissime Seigneur
FRANÇOIS DE SALES, Evesque et Prince de Geneve, revestu d'une chappe de drap d'or, assisté
de deux sieurs chanoines revestus de tuniques de satin rouge, et ung prestre qui portoit au devant
la croce, revestu de une chappe de damas roge (sic), estant pres des deux chantres portant des
chappes de satin rouge et des miltres de damas a leurs testes et tenant leurs bastons d'argent en
main ; et dernier (derrière) mondict Seigneur, autre prestre revestu d'une chappe de damas rouge
pour porter sa miltre.
Et estant entonné l'hymne Veni Creator Spiritus, la procession a commencé, au rang que
dessus, a marcher, mise neanmoins en reng par le Me des Ceremonies de Mrs de Sainct Pierre, qui
portoit un beau baston d'argent et marchoit en teste de la croix de Sainct Pierre. Puis suivoit un
enfant de cœur portant un cros (gros) benistier d'argent, deux aultres portans chascun un
chandellier d'argent, la grand croix de Sainct Pierre [portée] par un prestre revestu d'une tunique
de damas roge ; et apres les serviteurs et musiciens habillés de leurs surplis, nos Seigneurs les
chanoines, chascun par ordre ; enfin les deux chantres que dessus, puis celluy de la croce, et [403]
Monseigneur avec ses assistans, a costé le porte miltre. Et sont partis de ladicte eglise de Sainct
François en tel ordre.
Puis suyvoient quatre petits enfans portans chascun une tocque armizee des armes de la
ville, devant et dernier, portant chascun une torche cire blanche qui n'estoit allumee ; estans suivis
du secretaire de la ville tout seul, puis de messieurs les Scindics portans leurs bastons de scindicat
en main, le premier revestu de sa robbe d'audience, ayant les parementz devant et des manches de
velours, avec sa cornette. Et apres eulx, trois huissiers avec leurs baguettes d'argent, vestus de leurs
longues robbes ; puis nos seigneurs du Conseil, de la Chambre, juge mage, advocat et procureurs
fiscaulx, noblesse, advocats, procureurs et le reste du peuple.
Ayant icelle procession prins son chemin pardessus le Pont Morens pour aller vers celuy
de la Hasle, passant pardevant Sainct Dominique. Et ladicte procession arrivee sur le Pont de
Nostre Dame (tout ledict Pont, et fort bien loing, bordé de soldats, comme aussy celuy de la Hasle,
du pennon de la Procure, l'enseigne desployee, et au devant l'Hostel de ville le drappeau neuf et
tantost benist porté par ledict sieur Falcaz), s'est trouvé a costé du bout du Pont, pres la petite
maison de Me Jean Baptiste Garbillon, la croix de la venerable eglise de Nostre Dame, avec les
Reverends sieurs François de Lornay, doyen, revestu d'une chappe de drap d'or frizé ; le porte
croix revestu d'une tunique drap d'or parsemé quelque peu de soye viollette, et precedoit le maistre
bedeau avec son baston d'argent de ladicte eglise ; puis deux enfans de cœur (chœur) revestus de
tuniques de diverses couleurs, ainsy'que les aultres enfans d'icelle eglise, portans deux chandelliers
d'argent. En devant le dict sieur Doyen marchoit un seigneur chanoine, revestu d'une tunique de
pareil estoffe que la chappe dudict sieur Doyen, portant ung grand turibule ou encensoir d'argent ;
puis les serviteurs de ladicte eglise, faisant la musique. En apres, les prestres d'honneur et les sieurs
chanoines, portant leurs aumusses aux bras, et finallement deux chantres portans deux beaux et
grands bastons d'argent neuf, ayant de grosses pommes d'argent a la cyme, revestus de chappes
d'or tres riches : qui tous, apres avoir salué le clergé, se sont mis audevant la croix de Sainct Pierre
avec celle de Sainct Maurice, puis ont commencé a chanter en musique, a leur tour, le reste du Te
Deum, etc., avec Messieurs de Sainct Pierre. En tel ordre sont entrés dans l'eglise de Nostre Dame,
qui estoit paree tres richement, ainsy que sera declairé cy apres. [404]
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28 Pages 271-280

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28.1 Page 271

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Description du parement de l'Eglise de Nostre Dame
Premierement, a la premiere porte de l'entree de ladicte eglise, sçavoir celle qui est plus
proche de la chappelle de Nostre Dame, au dessus de l'arcade reposoit l'image de la tres sacree
Vierge Marie en bosse, et au dessoubz d'icelle estoit escript ce distique en grosse lettre jaune,
estant ung anagramme faisant les premieres lettres des motz MARIA VIRGO :
MATERNO
AFFLICTOS,
REGINA,
INTELLIGE
AMORE.
VERTITUR
IRATUS
REX
GENITRICIS
OPE.
Le susdict distique entouré de lierre et de buis, qui estoit soustenu de quatre belles colonnes
aussi de buys et de lierre, environnees d'ung papier feullaige de roze, avec l'arcade de ladicte porte
de mesme parure, et a chasque costé ung cherubin. Dont lesdictes 4 colonnes estoient posees deux
de chasque costé, soustenues par un lyon du costé de la chappelle, et d'ung chien de l'autre ; et
entre les deux colonnes estoit une colonne de papier, deuement eslaboree de beaux feullaiges. Par
laquelle porte la procession n'entra point, ains par celle cy apres.
Description de l'autre porte de l'entree de l'Eglise de Nostre Dame et par laquelle la
procession est entree
Au dessoubz du couvert de ladicte porte, pres les degrez de l'Hostel de ville, par ou la
procession fait son entree, estoit une Annonciade tres riche, et au dessoubz, aultre distique parlant
a ceulx qui desiroient d'entrer :
Crimen ad hoc fugias si vis attingere limen, nam sine sorde coli Virgo beata cupit ;
estant environné aussy de lierre et de buys, comme aussy l'arcade de ladicte porte garnie d'aultres
deux chrrubins comme la precedente ; et de chasque costé, de deux colonnes de buys soustenans
le susdict [405] distique ; et entre deux de ses (sic) deux colonnes, de chasque costé, estoit mise
une colonne piatte diversement eslaboree, [semblable] a celle de l'aultre portai.
Puis la procession a continué a marcher, sçavoir : les Peres Capucins et tout le reste du
clergé, sauf Messieurs de Nostre Dame et de Sainct Pierre, contre l'hostel (autel) de Nostre Dame,
au devant la trille de fer duquel s'estant reposés, Monseigneur le Reverendissime seroit allé prendre
le tres sainct et tres auguste Sacrement, qui a esté remis par ledict sieur Doyen, qui
continuellement, despuis l'arrivee a ladicte eglise, luy a assisté avec les aultres assistans que
dessus. Et apres que mondict Seigneur a heu en main le tres sainct Corps de Jesus Christ, les deux
chantres de Nostre Dame ont commencé Pange lingua, qui a esté chanté en musique par le cœur
(chœur) de ladicte eglise, et celluy de Messieurs de Sainct Pierre chante le second verset dudict
hymne ; et ainsy successivement les ung (sic) apres les aultres, jusque a la fin d'icelle. Et arrivé
mondict Seigneur aupres des degrés du jubé, ou estoit paré l'oratoire pour reposer Jesus Christ, a
esté conduict par ledict sieur Doyen, avec les deux assistans, audict oratoire richement paré, ou il
a reposé le Sainct Sacrement ; et cependant, les deux cœurs des deux eglises chantoient en musique
divers mottetz a la louange de nostre Dieu.
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28.2 Page 272

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Mais avant que descripre le reste, fault revenir au portai dressé devant le treillis de fer de
la chappelle de Nostre Dame.
Description du portail dressé devant la trille de fer de la chappelle de Nostre Dame
avec la parure de l'autel d'icelle
Oultre que ladicte chappelle, comme aussy tout le reste, estoit richement tapissee, sans
seulement veoir cuing (coin), tant petit quil fut, qui ne fut couvert de tapisserie, et des plus belles,
l'autel de ladicte chappelle estoit bien et devotement paré.
Au devant des personnages qui sont audict autel en bosse, estoit ung drap d'or qui leur
arrivoit ung peu plus hault de la ceinture ; le sainct siboire (tabernacle) revestu d'ung pavillon de
toille d'argent, garny de ses escallins esclattans.
A l'entree de ladicte chappelle, estoit dressé ung portai de bois, enrichy de deux colonnes
plattes de bois a chapiteau, avec la corniche tres riche au dessus ; le tout despeint
merveilleusement. Dont, au dessus de chascune colonne estoit posé un pommeau doré. Au dessus
de la corniche, qui estoit faicte a jour, estoit ung Jesus a bosse, revestu d'une chemise de toyle
d'argent ; au bas, a l'endroict [406] de ses piedz, ung pommeau, et deux aultres a chasque costé, et
au bas d'icelle corniche, sçavoir entre les consoles dorees et argentees estoit escript ce distique en
lettre d'or :
Virginis Anneciam venias si purus ad Ædem acta remittentur cuncta nefanda tibi.
Description de l'oratoire dressé au jubé, sçavoir pres le crucifix
L'oratoire estant dressé au jubé de ladicte eglise pres du sainct Crucifix, en lieu fort
eminent, dressé d'une merveilleuse façon, sans que ledict Crucifix fut veu ; fort bien, de la Vierge
et de sainct Jean, la teste seulement et les mains, qui sembloient adorer le tres auguste Sacrement.
Et estoit dressé ung autel, auquel pour y arriver, falloit monter six degrés, ausquelz ne paroissoit
aultre que de feullaiges dorés et argentés, enrichis de diverses couleurs ; et a chasque bout desdicts
degrés, ung cherubin ; et au marchepied de l'aultel, de chasque costé, deux vases grands de
mayolica (faïence) blanche, remplis de diverses fleurs, notamment de passefleurs de Rome, qui
sont jaunes. Et estoit ledict autel bien hault eslevé, paré au devant d'ung parement de satin rouge
cramoisy, parsemé de larmes d'or en broderie ; et au milieu dudict parement, ung soleil aussy en
broderie, ou estoit brodé ung Agneau. Et sur l'autel reposoit le tres sainct et tres adorable Sacrement
dans ung siboire doré ; deux grands anges dorés, mis l'ung d'ung costé et l'aultre a l'aultre, tenans
chascun ung brandon et au dessus ung cierge cire blanche allumé, et dernier (derrière) ledict
siboire estoient trois escallins richement elaborés ; et tout dernier, sçavoir pres le Crucifix, ung
parement de damas rouge parsemé d'estoilles d'or, et tout autour dudict oratoire, des tappisseries
de peau doree, neufves. Le fons qui estoit pres de la voulte estoit bleu, parsemé d'estoilles, avec
ung aultre parement de satin bleu estoillé, et au milieu, ung JESUS a façon de soleil.
Tout au devant et a l'aspect du peuple, y avoit trois arcades a façon de portes : celle du
milieu fort grande, les autres deux, petites. A l'une des dictes petites, sçavoir a celle du costé du
clochier, estoit dressé l'effigie de Moïse en grande statue, tenant les tables de la Loy es mains ;
icelle arcade bouché (sic) d'une tapisserie de peau doré. Et a l'aultre estoit l'effigie du grand
Prebstre Aaron, revestu de ses habitz sacerdotaux, portant le turibule ou encensoir es mains ; serree
au dernier (par derrière), de pareille tapisserie que l'aultre. Et la grande du milieu, toute ouverte,
richement paree.
Et entre la grande et les petites arcades estoient deux portes ouvertes, et au dessus ung fons
despict (peint) ; chacune porte soustenue [407] avec lesdictes arcades, de quatre grandes colonnes
argentees, a façon de chappiteau et a canaulx creux et de relief, et deux autres grandes plattes
richement travaillees, ausquelles estoient le soleil et la lune en deux verres rond (sic), et aultres
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28.3 Page 273

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verres en triangle, et les aultres en long, qui rendoient une grande clarté. Sur lesquelles plattes
colonnes estoient deux cherubins revestus d'une robbe drap d'or, et sur deux colonnes d'argent,
aultres deux cherubins revestus de robbes toille d'or et de soye viollette ; et sur lesdictes aultres
deux colonnes d'argent, estoient deux grandes fleurs de cartons couleurs, et au dessus desdictes
arcades et portes estoit parsemé d'etoilles qui rendoient grande clarté. Et tout au dessus, une cornice
grande, despeinte richement, ou estoit escript le distique :
Ecce Sacramentum cœloque soloque colendum ;
Ecce viatorum spes, via, vita, salus.
Et a l'arcade de Moïse estoient escriptz ces mots :
Lex per Moysen data est, et gratia per Christum.
A la porte proche de ladicte arcade de Moïse, dont le dessus estoit faict en fons despict
(peint), et au milieu d'icelluy le tres sainct nom de JESUS en grosses lettres d'or, et au dessoubz
de ce tres venerable Nom estoient escriptz ces mots aussy en grosse lettre :
Ecce Panis Angelorum.
Au tour de la grande arcade, qui estoit au devant le tres auguste et tres sainct Sacrement,
estoient couchés ces mots, aussy en grosse lettre :
Factus cibus viatorum.
Vere Panis Angelorum.
A l'aultre porte ouverte, estant de l'aultre costé pres celle ou estoit Aaron, garnie de son
fons despict, et au milieu, ce tres sainct nom, MARIA, au milieu d'ung soleil ; estoient escriptz au
dessoubz ces mots :
Non mittendus canibus.
Finalement, a la porte faicte en arcade, ou estoit Aaron portant l'encens a ses mains, comme
dict est, estoient escriptz a l'entour de ladicte arcade ces motz, parlant au Sainct Sacrement :
Tu es Sacerdos secundum ordinem Melchicedec (sic).
Et tout au dessus de la grande corniche, sept vertus en grande forme, touteffois a piatte
figure : dont la premiere estoit Justice, puis la suivante Prudence, Charité, et droict au milieu Foy,
portant le tres sainct Sacrement sur calice ; et apres elle, Esperance, Force et [408] Temperarle. Et
deça et dele desdictes vertus, deux soleils : l'ung, ce mot au milieu, JESUS, et a l'aultre, MARIA,
et entre deux desdictes vertus, des grands rameaux de laurier. Puis au dessoubz desdictes arcades,
ou soit desdictes colonnes et pillastres, estoit ung tres riche tour de lict, travaillé sur gaze de
diverses couleurs de soye, sans franges, qui estoit si long quil arrivoit d'ung but (bout) a l'aultre ;
et au milieu, ung tres beau Agnus Dei, et au dessoubz, douze Apostres. Dont au milieu estoit
l'image de la tres sacree Vierge Marie tenant son Enfant aux bras, en broderie d'or sur sattin blanc,
et a costé, ung tableau de l'effigie de Nostre Seigneur, de la face seulement, et de l'aultre costé,
aultre tableau d'ung Crucifix a broderie d'or. Et au dessoubz desdicts Apostres, 4 pantes de
courtines de satin blanc, garnies de leurs franges de soye blanche et fil d'or, ou estoit escript en
grosses lettres d'or :
Ave Maria, gratia plena, Dominus tecum ; benedicta tu in mulieribus, et benedictus fructus
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28.4 Page 274

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ventris tui.
Et les aultres trois arcades tout au dessoubz, estoient parees richement d'ung estoffe rouge
semé de petites croix blanches de sainct Mauris, et aux 4 pilliers estoient mis quatre pillastres
enrichies (sic) de diverses couleurs, avec des rosettes de papier dourees, argentees et coulouriees.
Et au tour de l'arcade du costé du clochier estoit escript :
Quæ est ista quæ processit sicut aurora consurgens ?
Sur celle du milieu :
Mulier amicta sole, et luna sub pedibus ejus.
Et au tour de la troisiesme arcade estoit escript :
Et duodecim stellarum erat coronata.
Puis a costé de celle du milieu, deça et dela au dessus d'icelle, sçavoir aux deux sieges qui
sont de pierre, deux anges revestus de rouge, les ailes dorees, tenans chascun ung chandellier
d'argent ou estoient deux cierges de cyre blanche. Au milieu de l'arcade du milieu, pendoient les
armes d'heureuse memoire Pape Clement, qui jadis s'appelloit Robertus de Gebennis ; au milieu
de l'arcade pres le clochier, pendoient les armes d'Illustrissime et Reverendissime Monseigneur
Cardinal de Savoye, et au milieu de l'aultre et troisieme arcade, celles de Son Altesse et de
Monseigneur. Et sur le pillastre pres du clochier ont esté mises les armes du venerable Chapitre de
Nostre Dame ; a l'aultre apres, celles d'Illustre et Reverendissime Seigneur François de Sales,
Evesque et Prince de Geneve ; sur le [409] troisieme, celles de monseigneur Sigismond d'Est,
marquis de Lans, lieutenant general pour Son Altesse deça les montz, et sur le quatriesme pillastre
estant pres la chappelle de Sainct Laurens, les armes de la ville. Chascune desdites armoiries
entorees d'ung chappeau de triomphe, avec des rouleaux de bandes de papiers couleuriés. Ayant
esté le susdict oratoire parsemé en divers lieux de petitz cherubins, et estoit paré l'autel de Saincte
Barbe fort richement, auquel l'on communyoit, et le reste de l'eglise estoit richement tapissé.
Et le tres sainct Sacrement mis au susdict oratoire, mondict Seigneur le Reverendissime est
descendu, puis la procession avec tout le clergé a commencé a partir par la porte de la grand allee
; et messieurs les Scindics sont demeurés dans Nostre Dame, sans avoir suivy et accompagné ladite
procession. Et comme toutes les croix sont sorties de l'eglise, Messieurs de Nostre Dame sont
pareillement sortis par le premier portai, avec leur croix et au mesme ordre que cy devant, et ont
attendu aupres du Pont ladite procession qui passoit, saluans tout le clergé a mesure quil passoit,
notamment Monseigneur le Reverendissime. Et arrivés au cuing Gouard, les Peres de Sainct
Dominique, apres une profonde salutation, se sont retirés, et les aultres croix aussi, soudain qu'elles
sont arrivees au commencement du Pont Morens, estant demeuré, avec la croix de Messieurs de
Sainct Pierre, seulement celle de Sainct François. Puis arrivés a l'eglise de Sainct François, chascun
s'est retiré, estant environ l'heure de sept apres midy. Et toute la nuyct l'eglise de Nostre Dame a
esté ouverte et plaine de peuple, et sur les autelz, de chandelles pour esclairer les penitens et ceulx
qui y abordoient.
Du vendredy, septiesme septembre, jour et feste de sainct Gras
Encores que la nuict precedente l'eglise fut toute remplie de peuple advenue (sic) a la
devotion, tant pour avoir plus de commodité de se confesser que pour adorer le tres sainct
Sacrement, n'a resté pourtant que la musique, mays [a] faict sa function avec les orgues, violles,
lutz, espinettes et aultres instrumens musicaulx.
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Estant a noter que le jour d'hui, tandis que Monseigneur le Reverendissime estoit dans
l'eglise de Nostre Dame, nonobstant que l'enseigne de la ville fut arborisee aux fenestres de l'Hostel
de ville, ne laissat (sic) pourtant d'arriver le pennon de la Porte de la Perriere, avec l'enseigne
desployee dudict cartier, [et ledit] pennon de se geter en garde soubz la conduicte de noble Pierre
Marvin, capitaine [410] dudict cartier. Et portoit l'enseigne monsieur Jean Rogex, estant sergent
honnorable Pierre des Roches, dict des Terres ; et estoient en soldatz bien armés, davantaige de
200, sans les officiers, qui ont faict ung corps de garde devant l'Hostel de ville, oultre les quatre
des quatre grandes portes.
Puis arrivee la minuyct, l'on a commencé de sonner les cloches grosses et petites, par ce
que a la dite heure commençoit le Jubilé, et aux quatre heures semblablement. Et aux cinq heures
ont esté commencees les Matines par monsieur le doyen François de Lornay, avec le reste de
l'Office de tout ce jour la, estant tousjours l'eglise remplie de peuple qui tachoit de se confesser ;
dont, pour le peu de confesseurs, plusieurs s'en sont allés confesser et communier a leurs
parroisses, d'aultant que mondict Seigneur le Reverendissime, par ordonnance quil feit attacher
aux portes des eglises, n'en commit la charge des confesseurs sinon a quatre sieurs chanoines de
Sainct Pierre et a trois sieurs chanoines de Nostre Dame qui ne pouvoient souffire ; estans lesdits
quatre de Sainct Pierre : Reverends seigneurs Estienne de la Combe, Claude Grandis, Philibert
Rogex et Janus des Oches ; et les aultres, Jean Loys Jacques, Thomas Peyssard et Roux des Oches.
Et es aultres actions de musique, estoient meslees les trompettes, qui estoient en nombre
de sept ; n'estant a oublier que soudain que le Jubilé fut ouvert, le chasteau ne manqua a rendre
son debvoir et de tirer des pieces de canons a la louange de nostre Createur, jusques a 40 coups.
Estant si plain l'autel de la Communion, et la devotion des penitens [si grande,] qu'apres avoir esté
repeus de ce tant sacré Sacrement, ils s'en alloient par les autelz baiser les linges par humilité.
Ayant messieurs du Conseil de la Chambre et messieurs les Scindics assisté a tous les Offices, sauf
a Matines, accompagnés de grand noblesse, respondues a divers cueurs (chœurs) de musique,
tantost aux orgues et ores aux violles, lutz et trompettes.
Puis environ une heure, l'on a celebré Vespres, et apres, la predication par le Pere Capucin
cy devant ; et enfin, joyé (joué) une partie de l'histoire de la vie de Joseph, vers Sainct Mauris, sur
ung theatre basti aux despens de la ville, et qui a duré deux heures et demye. Et [après] disné, les
escholliers ont faict monstre pour donner a entendre quilz avoient a jouer une histoire le lundy
prochain.
Et a esté continué la mesme devotion le jour de Nostre Dame, auquel ledict sieur Doyen a
faict l'Office, saufz a la grand Messe, qui a esté celebré (sic) par Monseigneur le Reverendissime
au grand autel, et a l'apres disné il a faict un tres rare sermon. Puis apres Vespres, joué et representé
le reste de l'histoire de Joseph.
Ce qui a esté obmis, c'est que le cartier de Bœuf est entré en garde, [411] son enseigne
desployee, portee par messire Humbert Falquet, conduict par noble Jean Jacques Demoliet,
capitaine, et honnorable Petremand Jacquet, sergent, estans environ 250 ; dont arrivans devant
l'Hostel de ville, a la salve qui a esté faict, a esté percer (sic) le drappeau d'ung coup de basle, et le
cartier de la Perriere s'est retiré.
Le Dimanche continuant le divin service, et la splendeur et la devotion s'augmentant, a esté
continué la fin de l'histoire de Joseph que fut commencer (sic) hier seulement (n'ayant esté
commencé le vendredy, comme cy dessus est dict, ains hier seulement). Et mondict Seigneur
prescha a la coustumee, sçavoir apres Vespres ; puis, environ les six heures du soir, la procession
assemblee a Sainct Pierre et partant dudict lieu, seroit venue droict par dessoubz [la] rue, puis
entree a Nostre Dame, chantans. Et tous les cœurs des eglises assemblés en pareil ordre que celle
cy devant, Monseigneur a prins le tres sainct Sacrement, puis marchand au mesme reng qu'a
l'ouverture du Jubilé, la procession est partie par la grand allee de Nostre Dame, qui est allé (sic)
vers le pré Chapuis, au coing Gouard ; et puis revinrent a l'eglise, ou Monseigneur a remis le Sainct
Sacrement au siboire de l'autel de Nostre Dame, et l'Ave Maria sonnee, la procession s'est retiree.
Et le lundy, les escholliers ont representé en vers latins la Vie de sainct Placide, surnommé
sainct Heustache ; puis apres, au lieu d'une farce, ont esté sonné les pris aux ascendants aux classes.
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Voila la fin du sainct Jubilé celebré a lhonneur de nostre Redempteur, auquel et a la tres
sacree Vierge sa Mere soit louange, honneur et gloire. Ainsi soit il.
VASSAL.
Archives de la Mairie d'Annecy, Délib. municip., vol. 33. [412]
_____
D. Lettre de M. Louis de la Tournette a M. Crotti1168
_____
Monsieur,
……………………………………………………………………………………………………..
1169Je donne a S. A. S. quelques nouvelles que j'ay entendu des nostre retour de Bade, là où
nous avons esté et n'avons rien faict, encoures que nous avons esté trois Ambassadeurs, si non
despendre beaucoup d'argent. A la verité, s'il m'est permis de parler avec vous sans offenser
personne, je ne sçay qui peut avoir conseillé S. A. S. de mander deux Ambassadeurs
extraordinaires avec moy, pour demander une simple responce sur les poursuittes et propositions
que j'ay desja faict cy devant a sept ou huict assemblees et dietes, suivant les commandements de
S. A. S. Pour moy, j'estime sçavoir cette negociation mieux que mon Pater ; s'il eut pleu a S. A.
Sme de me laisser suivre mes dessins, possible luy aurois-je apporté quelque contentement. Vous
sçavez, quand l'on est tant de gens ensemble, chacun veut croire son opinion. Vous priant
d'asseurer S. A. S. sur ma parolle, que je suis autant praticque des affaires de Suisse, autant aymé
et cognu, que tel qui a demeuré en ce pais les cinq et six ans, au rapport que le seigneur Auditteur
Valdengue en fera, s'il veut dire la verité. Je suis bien asseuré qu'il y a deux personnages parmi le
monde qui voudroient bien que je fusse ailleurs qu'en ce pais : je m'expliqueray un jour avec vous
plus amplement.
Je ne veux point contrevenir, ny moins y pencer, au commandement de S. A. S. ; mais on
a bien esté esbey de voir venir trois Ambassadeurs a la Diete generale, pour demander a Messieurs
de Berne ouy ou non. Si ce feut esté pour une conference, ou bien une [413] assemblee pour
disputer les droits de S. A. S., cela estoit bien, car trois sçavent plus que non pas un. Je me remettray
de cela et de toutte chose en ce monde aus commandemens que m'en fera tous-jours S. A. S. mon
Seigneur.
……………………………………………………………………………………………………..
Je suis a jamais, appres vous avoir baisé humblement les mains,
Monsieur,
Vostre plus humble et plus affectionné serviteur,
DE LA TORNETTE.
De Lucerne, ce 3 novembre 1612.
Revu sur une copie de l'Autographe inédit, conservé à Turin, Archives de l'Etat, Svizzera, Lettere
Ministri, Mazzo 5. [414]
1168 Jean-Michel Crotti de Savigliano, coseigneur de Costigliole, conseiller du duc de Savoie, secrétaire d'Etat et des
Finances par patentes du 13 avril 1611.
Nous ne donnons ici qu'une partie de la longue lettre que Louis de l'Alée, seigneur de la Tournette, écrit au
secrétaire d'Etat.
1169 Vide p. 300, not. (852).
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Glossaire des locutions et des mots surannés ou pris dans
une acception inusitée aujourd'hui1170
_____
(L'astérisque désigne les mots qui ont paru dans le Glossaire des tomes précédents.)
* A pour au (voir p. 338, lig. 10), de (pp. 52, lig. 26 ; 114, lig. 28 ; 264, lig. 1, etc.), en (pp. 68,
lig. 9 ; 347 ; lig. 10 ; 356, lig. 9).
ABANDONNEMENT pour renoncement, suppression (v. p. 288).
ABORS préliminaires (v. p. 211).
ABSENTER pour s'absenter (voir p. 235).
* ACCOISER (s') s'apaiser, se calmer (v. p. 346). Cf. le lat. ACQUÏESCERE.
* ACCOUSTUMANCE habitude (v. p. 347).
* A CE pour ce (v. p. 218).
A CE QUE pour afin que (v. p. 167).
ACQUEST pour acquisition (voir p. 233).
* ACTION pour acte (v. p. 141), cérémonie (pp. 16, 349).
* ADMIRABLE pour extraordinaire, qui excite l'étonnement (v. p. 199).
* ADMIRER pour trouver étonnant (v. p. 222).
ADMIRER (s') pour être à soi-même un sujet d'étonnement (v. p. 76).
* ADVENTURE (à l') pour peut-être, suivant l'occasion (v. p. 44), probablement (p. 70).
ADVENTURE (d', par) par hasard (v. pp. 42, 242).
AFFECTATION du lat. AFFECTATIO, recherche passionnée, ambitieuse (v. p. 272).
* AFFECTION pour désir, volonté, zèle, dévouement (v. pp. 264, 295).
AFFECTIONNÉ pour cher, préféré (v. p. 51), ardent (p. 218).
* AFFECTIONNEMENT avec affection, vivement (v. pp. 18, 204, 239, etc.)
AFFETERIE pour mômerie, pharisaïsme (v. p. 84).
AGGREABLEMENT pour d'une manière qui a été agréée (v. p. 42).
AIGU pour subtil (v. p. 192).
* AINS mais, mais encore, mais plutôt. [415]
* A L'ENTOUR autour (v. p. 169).
AMENDANT DE (en) pour s'améliorant de (v. p. 12).
* A MESME en même temps (voir p. 110).
* A MESME QUE dans le temps même où (v. p. 125).
* AMIABLE qui a lieu par voie de conciliation (v. p. 65), aimable, gracieux (p. 78).
* AMIABLEMENT aimablement, gracieusement (v. p. 312).
AMPOLON gros flacon à forme d'ampoule (v. p. 372).
* AMUSER (s') pour perdre son temps (v. p. 62), s'occuper (p. 165).
* A PEU QUE peu s'en est fallu (v. p. 306).
* APPARENT qui a l'apparence de la réalité (v. p. 380).
* APPOINTÉ pourvu de ressources suffisantes (v. p. 341).
* APPOINTEMENT pour arbitrage dans les différends (v. p. 370). Cf. l'ital.
APPUNTAMENTO.
* APPREHENDER pour faire cas de (v. p. 215).
* APPREHENSION pour sentiment, idée (v. p. 95).
APRES LE pour au (v. p. 246).
1170 Nous n'avons pas songé à dresser ici, pour ce volume, en toute rigueur scientifique, le Lexique de saint François
de Sales. Un tel travail, à peine est-il besoin de le dire, ne pourra être établi qu'après l'achèvement de cette publication.
Notre but a été surtout de rendre provisoirement service aux lecteurs français ou étrangers qui seraient peu familiarisés
avec les particularités du vieux langage. On voudra bien, eu se servant de ce recueil, se souvenir de la pensée d'ordre
tout pratique qui l'a inspiré.
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* ARRESTER pour rester, demeurer (v. pp. 57, 66, 287, etc.)
ASSEMBLÉ pour amassé (v. p. 57).
* ASSEURER (s') pour être persuadé, avoir confiance (v. p. 310).
ATTACHÉ pour engagé, saisi (v. pp. 85, 218).
* AU pour du (v. p. 278, lig. 11).
* AUCUN pour quelque (v. p. 126).
* AUCUNEMENT pour quelque peu, en quelque façon, en aucune façon, nullement, jusqu'à
un certain point (v. pp. 25, 44, 46, 162, 341).
AUGURES pour vœux, souhaits (v. p. 228). Cf. l'ital. ABGURII.
AUQUEL pour pendant lequel (v. p. 54).
AUTANT COMME (on diroit un) la durée d'un (v. p. 269).
AUTRE pour nul autre (v. p. 312).
* AVIDEMENT pour avec empressement (v. p. 346).
* AYSE pour joie (voir p. 72).
* BAILLER donner (v. pp. 11, 276).
* BENEFICE pour faveur, bienfait (v. pp. 239, 290).
BIGARRÉS pour d'opinions différentes (v. p. 84).
BONNE (ville) pour grande, considérable (v. p. 242).
* BONNEMENT pour bien (voir p. 297).
BONTEUSEMENT miséricordieusement (v. p. 196).
* BRAVE pour bien doué (v. p. 213), robuste (p. 220), bon (p. 358), beau (p. 332).
BRAVEMENT pour bonnement, paisiblement (v. p. 355).
BREBIETTE petite brebis (v. p. 379).
BUREAU pour grosse étoffe de laine, sorte de bure (v. p. 351).
* CARESSER pour faire bon accueil (v. p. 161).
* CARESSES pour démonstrations d'amitié (v. p. 292).
* CARMELINE Carmélite (voir pp. 24, 165).
* CE pour ceci, cela.
* CEANS ici, en ce lieu (v. p. 159).
* CE PENDANT, CEPENDANT pour en attendant, pendant ce temps, en même temps (voir
pp. 41, 159, 262, etc.)
* CHAIRE pour résidence (voir p. 172).
* CHAMS (aux, parmi les) pour à la campagne, en voyage (v. pp. 108, 115, 285).
* CI pour ici (v. p. 159).
* COGITATION du lat. COGITATIO, pensée, considération (v. p. 180).
* COLLOQUER du lat. COLLOCARE, placer, mettre (v. p. 338), concentrer (p. 325).
* COMME pour comment, de quelle manière, pour ainsi dire, par quels moyens (v. pp. 2, 39,
112, 253, etc.)
COMME QUE CE SOIT quoi qu'il en soit (v. p. 371).
* COMMIS pour délégué temporaire (v. p. 337), Cf. l'ital. COMMESSO. [416]
COMMUN (en) pour en gros (voir p. 146).
CONDITION da lat. CONDICIO, genre, tempérament (v. p. 114).
CONFERES (luy en) conférez de cela avec lui, consultez-le sur cela (v. p. 350).
CONGÉ pour permission (voir p. 355).
CONJOINTE A (son ame) pénètre intimement son âme (v. p. 161).
CONSEIL pour pensée, idée (voir p. 262). Du lat. CONSILIUM.
* CONSIDERABLE pour digne d'attention, de considération (v. p. 66).
CONSIDERATION (pour ma) par égard pour ma personne (v. p. 272).
* CONTE pour compte.
* CONTEMPLATION (a ma) à ma considération (v. pp. 46, 366).
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* CONTENTION du lat. CONTENTIO, dispute, forte opposition (voir p. 192).
CONTREFAIT pour simulé (voir p. 380).
CONTREGRÉ désapprobation, mécontentement (v. p. 353).
CONTREPOINTER LES rendre la pareille des (v. p. 55).
CONTREROLLEUR contrôleur (v. p. 285).
CONTRESCHANGE (avec) dans la même proportion (v. p. 345).
CONTRIBUER pour donner (voir p. 24), aider en (p. 154), aider de (p. 156), aider par (p.
265), faire pour sa part (p. 302).
* CONVERSATION pour relations de société (v. p. 53).
* COPIE pour exemplaire (v. p. 246).
* COUCHER pour se coucher (voir p. 269).
* COURAGE pour rensemble des inclinations d'une personne (v. p. 44, générosité (v. p. 257).
COURAMMENT pour en courant, à la hâte (v. p. 84).
* CREANCE pour foi, croyance religieuse (v. p. 115), certitude, assurance (p. 201).
* CUIDER du lat. COGITARE, croire, penser (v. p. 114).
* DAMOYSELLE (voir MADAMOYSELLE) appellation usitée jadis à l'égard de toute femme
mariée qui n'était pas noble, ou qui, étant noble, n'était pas titrée (v. p. 351).
* DE pour (v. p. 338, lig. 1).
* DEÇA (de) ici, ci, de ce côté-ci, de ce pays (v. pp. 71, 72, 235, 300, etc.)
DECOUSU pour besogneux, sans influence (v. p. 297).
* DEDANS pour dans (v. pp. 76, 125, 140, etc.)
DEFAUDRA 3e personne du futur présent du verbe DEFAILLIR, manquer (v. p. 320).
DEFAUT (a mon) pour à mon absence (v. p. 63).
* DELA (de) de la, là-bas, de l'autre côté (v. pp. 236, 259).
DELA LES (de) au delà des (voir p. 72).
DE LAQUELLE pour dont (v. p. 24).
DEMESLEMENT débrouillement (v. p. 279).
DEMEURANS (les) ceux qui restent, qui demeurent (v. p. 325).
DEMEURE pour immobilité (voir p. 321).
* DEPESCHE pour envoi, message (v. p. 215).
DEPLORABLE pour digne de compassion, d'être pleuré (v. p. 169).
* DERELICTION du lat. DERELICTIO, délaissement, désolation (voir p. 199).
* DES pour depuis (v. pp. 244, 260, 282, etc.)
* DESENGAGEMENT dégagement, affranchissement (v. p. 39).
DESIR du lat. DESIDERIUM, regret (v. p. 283).
DESNIÉ refusé (v. p. 243).
* DESPART pour trépas (v. p. 326), séparation (p. 381).
* DESPECHER, DEPESCHER pour envoyer une requête, un message (v. p. 35), envoyer (p.
99).
* DESPLAYSANT pour indélicat, indiscret (v. p. 3), désagréable (p. 136).
DESPLAYSIR pour douleur (voir pp. 22, 257). [417]
* DESPRENDRE (se) se dégager (v. p. 279).
* DESSEIGNER former un dessein, projeter (v. p. 132).
* DESSUS pour sur (v. p. 345).
DESSUS SA GARDE en garde (voir p. 321).
* DEVANT pour avant, auparavant (v. pp. 149, 287, 349).
* DEVERS vers (v. p. 258).
* DE VRAY à la vérité, vraiment (v. pp. 138, 165).
DEVUIDANT poursuivant (voir p. 204).
* DEXTREMENT adroitement (voir p. 85). Du lat. DEXTER, adroit.
DIFFERENCE pour différend (voir p. 308).
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* DILATION du lat. DILATIO, action de différer (voir p. 276).
* DISCOURS pour propos (v. p. 23), dissertation (p. 193), raison (p. 321).
DISPUTANT pour argumentant sur un point de doctrine (v. p. 66).
* DISTRACTION pour dérangement (v. p. 268).
DISTRAISE détourne (v. p. 212).
* DIVERTIR du lat. DIVERTERE, détourner, distraire (v. pp. 3, 193, 247), empêcher (p. 150),
préserver (p. 35).
DOMESTIQUE pour qui est de chez soi (v. p. 73).
* DONT pour c'est pourquoi (voir pp. 131, 172, 379).
* D'ORES-EN AVANT, DORES-EN-AVANT dorénavant (v. pp. 18, 44, 232).
DORMANTE pour endormie (voir p. 322).
* DOULOIR (se) du lat. DOLERE, s'affliger (v. p. 288).
* DOUTER du lat. DUBITARE, craindre (v. p. 323).
DOUZE VINGT deux cent quarante (v. p. III).
DUPLIQUÉ envoyé à double (voir p. 154). Du lat. DUPLICARE.
* DU TOUT pour entièrement, tout à fait (v. pp. 133, 155, 220, etc.)
EDIFICATIF qui édifie (v. p. 161).
* EFFECTUEL effectif réel (voir p. 294).
* ELECTION, ESLECTION pour libre choix (v. p. 70), choix personnel (p. 311), volonté (p.
380). Du lat. ELECTIO.
* EMBARASSEMENT, EMBARRASSEMENT affaires difficiles à débrouiller, tracas,
embarras (voir pp. 18, 52, 279, 355).
EMBESOIGNÉ pour très occupé à entourer d'égards (v. p. 76).
* EMMI parmi, dans, entre, au milieu de (v. pp. 25, 53, 89, 125, etc.)
* EMPESCHÉ pour embarrassé (v. p. 81).
* EMPLOYTE dévouement, service (v. p. 99).
* EN BON POINT en bon état de santé (v. p. 17).
* EN ÇA ancien terme de palais pour jusqu'à présent (v. p. 115). Cf. l'ital. IN QUA.
ENCOR (pour) pour maintenant, pour le moment (v. p. 220).
* EN LIEU pour à la place, au lieu (v. pp. 47, 193).
* ENSEMBLEMENT ensemble (voir p. 346).
ENTENDRE A pour s'occuper à, être occupé à (v. p. 62).
ENTRELAISSER cesser par intervalles (v. p. 322).
* ENTREPORTER (s') se soutenir, se porter mutuellement (v.pp. 194, 215).
* ENTRETENEMENT frais d'entretien (v. p. 60).
* ENTRETENIR (s') pour se tenir uni (v. p. 217).
* ENVERS pour auprès de (voir pp. 71, 366).
ESCIEMMENT à escient, exprès (v. p. 3).
* ESLANCEMENT pour élan, effort (v. p. 321).
* ESMOUVOIR pour exciter, soulever (v. p. 96).
* ESPANDRE du lat. EXPANDERE, verser, répandre (v. p. 144).
* ESTONNÉ pour fatigué, incommodé (v. p. 100), saisi, stupéfait (p. 362). [418]
ESTONNER (s') pour s'inquiéter, se troubler (v. p. 106).
ESTUDIÉ pour cultivé (v. p. 44).
* ET SI pour toutefois, pourtant, et encore, et certainement, et en vérité, et aussi (v. pp. 11, 85,
88, 132, 228, 272).
* EVENEMENT pour issue (voir p. 375).
EXPLANER aplanir (v. p. 54). Du lat. EXPLANARE.
EXTREMITÉ (en) extrêmement (v. p. 367).
* FABRIQUE pour aménagement, installation (v. p. 306).
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29 Pages 281-290

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29.1 Page 281

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* FAINTISE feinte, dissimulation (v. p. 379).
FANTASIES pour exigences (voir p. 36).
FAVORISER (me) pour me faire plaisir (v. p. 359). Cf. l'ital. FAVORIRMI.
FERMEMENT pour invariablement, constamment (v. p. 4).
FERMETÉ pour affermissement, consolidation (v. p. 192).
* FICHER fixer, arrêter (v. pp. 101, 376).
FIN PLUS TARD (au) à la dernière limite (v. p. 372).
FONTAINE pour source (v. p. 181).
* FORCE (a) pour par la force, par la violence (v. p. 67).
FORCLOS exclu (v. p. 161).
* FORT (de plus) plus fortement (v. pp. 238, 263).
* FORTUNE (de, par) par hasard (v. pp. 83, 354).
FOURNITURE pour frais d'entretien (v. p. 46).
* GASTER pour blesser, meurtrir (v. p. 114).
GENTIL pour vif, délié, courtois (v. p. 44).
GOUVERNER (se) pour se soigner (v. p. 91).
* GRACE (de sa, de vostre) par bienveillance, par faveur, par votre bienveillance (v. pp. 2,
241, 283).
* GRAND CAS (c'est) c'est admirable (v. p. 54).
GRASSELET grassouillet (v. p. 17).
GRÉ (prendre en) se résigner à (v. p. 109).
GROSSIER pour rude, sensuel (v. p. 140).
* HALEYNER prendre haleine, respirer (v. p. 207). Cf. le lat. ANHELARE.
* HANTISE fréquentation (v. pp. 24, 25).
* HASTIVEMENT promptement, à la hâte (v. p. 314).
HIPOTHEQUÉ pour attaché, engagé (v. p. 200).
* HONNESTE pour propre, net (v. p. 206).
HORS pour indépendant (v. p. 42).
* HUMEUR pour inclination (voir p. 259).
HUMILITÉS actes d'humilité, d'abaissement (v. p. 263).
* ICY pour ci (v. p. 340).
ILLUSTREMENT lumineusement (v. p. 125). Cf. le lat. ILLUSTRARE.
* IMBECILLITÉ du lat. IMBECILLITAS, faiblesse (v. p. 246).
* IMPERTINENT pour hors de propos (v. p. 193). Négatif de pertinent (lat. PERTINENS), à
propos.
* IMPORTANCE (l') pour l'important (v. pp. 267, 371).
IMPRESSION pour rapport, allégation (v. p. 362).
* INCOMMODER pour gêner, nuire à (v. p. 355).
* INCOMMODITÉ du lat. INCOMMODITAS, gêne pécuniaire (v. p. 246).
INHABILITÉ pour inhabile, incapable (v. p. 297).
* INTERESSÉ pour blessé, compromis (v. p. 25).
* JA déjà (v. p. 22).
JETTER pour faire fondre (voir p. 239).
* JOURD'HUY, JOURDHUY (ce) aujourd'hui (v. pp. 11, 21, 51, etc.)
* JUSQUES A TANT QUE jusqu'à ce que (v. pp. 144, 191). [419]
* LA OU pour tandis que (v. p. 75).
LAOUDS lois, droits, redevances (v. p. 328).
281/321

29.2 Page 282

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* LAUTREFOYS de nouveau, encore une fois (v. p. 131).
* LEVER du bas-lat. LEVARE, ôter, enlever (v. p. 40).
* LHORS pour alors (v. pp. 138, 144, etc.)
LOUANGE pour mérite (v. p. 91).
* MADAMOYSELLE (voir DAMOYSELLE) (v. pp. 100, 156, 157, etc.)
* MARRI regrettant (v. p. 111), fâché, peiné (pp. 114, 136, 244, etc.)
MAXIME pour règle, résolution (v. p. 79).
MERE du lat. MERUS, pur (v. p. 298).
* MESAYSE inquiétude, préoccupation (v. p. 360).
MESCONNOISSANCE manque de reconnaissance, oubli (v. p. 7).
MESGARDE pour inconsidération, imprudence (v. p. 379).
* MESHUY désormais (v. pp. 98, 202, 273, etc.)
MESME d'autant plus (v. p. 233).
* MESMEMENT surtout, même (v. pp. 317, 322).
* MESNAGE pour intrigue (voir p. 66).
MESNAGERES (affections) empressements aux affaires domestiques (v. p. 288).
MISERABLE pour infortuné, malheureux (v. p. 238).
MODESTIE pour discrétion, riserve (v. p. 259). Du lat. MODESTIA.
MOMENTANÉ pour instantané, soudain (v. p. 296).
MUSSE caché (v. p. 371).
* MUSSER (se) dissimuler sa présence (v. p. 150).
NAIFVETÉ pour simplicité (voir p. 22).
NEANT (pour) inutilement (v. p. 79).
NECESSITÉ (m'ayt) m'ait contraint (v. p. 66).
* NON PAS n'est-ce pas ? (v. p. 140).
* NOURRIR pour entretenir, former, élever (v. pp. 88, 200, 302).
* NOURRITURE pour éducation (v. p. 95).
NUBILEUX nébuleux, obscurci par les nuages (v. p. 206).
* NUISANCE dommage, préjudice (v. p. 114).
OBLATIONS pour émission des vœux (v. pp. 158, 159).
OFFENCÉ (contre) pour fâché, indisposé contre (v. p. 363).
* ORATEUR titre que prenaient autrefois les gens d'Eglise écrivant à des-souverains (v. pp.
65, 69, 167, etc.)
ORDINAIRE (rendre). rendre familier par l'habitude (v. p. 269).
ORDONNÉ pour condamné (voir p. 362).
* OR SUS hé bien, or donc, mais (v. pp. 8, 101, 140, 172, etc.) ; parole d'encouragement (v.
pp. 36, 161, etc.) Cf. l'ital. ORSO.
* OU pour tandis que (v. p. 206).
OUTRE pour contre (v. p. 138).
* PAR APRES ensuite, après, plus tard (v. pp. 75, 145, 158).
* PAR CI APRES dans la suite (v. p. 57).
* PAR DEÇA ici, de ce côté-ci, dans ce pays (v. pp. 79, 196, 235).
* PAR DELA là où vous êtes (voir p. 44).
* PAR DEVERS auprès de (v. p. 8).
* PARMI pour dans, durant, par (v. pp. 269, 282).
* PARROCHIALE paroissiale (voir p. 71). Du lat. PAROCHIA.
PARTI pour engagement (v. p. 338).
PASSER (se) pour passer (v. p. 363).
282/321

29.3 Page 283

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PASSIONNER pour désirer ardemment, passionnément (v. p. 40).
PETITION du lat. PETITIO, demande (v. p. 170).
PICORANT maraudant, picotant (v. p. 206).
PIEUX pour propice (v. p. 300).
PIQU'ARDENT picardant, vin blanc du midi de la France (v. p. 371).
* POLICE règlement, sage organisation (v. p. 39). [420]
* PORTEMENT santé (v. p. 148).
PORTION pour partie (v. p. 9).
PORTIONNÉ partagé (v. p. 348).
* POUDRE pour terre, poussière (v. p. 150).
* POUR pour par (v. p. 379, lig. 6).
POURPRÉ empourpré (v. p. 144).
PRÆTENDEUR celui qui recherche ou réclame quelque avantage, solliciteur (v. p. 298).
* PRÆTENTION, PRETENTION pour désir, espérance (v. p. 106), objet des aspirations (p.
306), réclamation (pp. 103, 294, 348).
* PREIGNANT pressant (v. pp. 40, 120). Adj. participe de l'ancien verbe preindre (lat.
PREMERE). Cf. le Dictionre de Hatzfeld et Darmesteter.
PRISE (faire une) pour prendre une dose (v. p. 149).
PROFFITER pour aboutir, servir (v. p. 272).
* PROSPERER pour faire prospérer (v. pp. 4, 41).
* PROUVOIR du lat. PROVIDERE, pourvoir (v. pp. 46, 60, 296).
QUANT ET ELLE avec elle (voir p. 22).
* QUE pour car, parce que (voir p. 288, lig. 30), de (p. 269, lig. 16), qu'elle (p. 266, lig. 17).
* QUI pour ce qui (v. pp. 74, 218, 265, etc.)
QUOY QUE C'EN SOIT quoi qu'il en soit (v. p. 20).
RAMASSÉ pour recueilli (v. p. 52).
* RAMENTEVOIR rappeler, faire ressouvenir de (v p. 299).
* RAMENTEVOIR EN rappeler à (v. pp. 42, 43. 2 4).
RARE pour peu commun, excellent (v. p. 95).
RASSIS pour réfléchi, ferme (voir p. 287).
RAYONNE (la) l’irradie (v. p. 368). Du lat. IRRADIARE.
RAYSON pour droit (v. p. 301).
RAYSONNABLE (que) que raisonnablement, ce qui est raisonnable (v. p. 60).
* REDONDER abonder (v. p. 192). Du lat. REDUNDARE.
* REDRESSEMENT reconstruction (v. p. 59).
* REDUCTION pour conversion, retour (v. pp. 11, 15, 16, 166). Cf. le lat. REDUCTIO, action
de ramener.
* REDUIRE du lat. REDUCERE, ramener, convertir (v. p. 57).
REFUSEUR celui qui fait un refus (v. p. 298).
REGARD (au) à l'égard (v. p. 71).
* REGARD (pour ce, pour le) à ce sujet, à cet effet, sur ce point, en ce qui concerne, au sujet
(v. pp. 81, 126, 129, 254, 266, etc.)
RENCONTRE pour moment (voir p. 195).
* RENCONTRER pour comprendre, saisir (v. p. 192).
RENCOURAGERréconforter (voir p. 180).
* RENFORCEMENT réconfort (voit p. 51).
* REPENTANCE contrition, acte de repentir (v. pp. 26, 84). Cf. l'ital. RIPENTENZA.
REPRENDRE pour revenir à soi (v. p. 234).
REPRESENTER (se) pour se présenter (v. p. 3).
* RESALUER pour saluer (v. p. 111).
283/321

29.4 Page 284

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* RESOLUTION du lat. RESOLUTIO, solution, décision (v. pp. 191, 354).
* RESOUVENIR pour faire ressouvenir (v. p. 81).
RESOUVENIR (se) pour se souvenir, se rappeler (v. pp. 119, 120).
* RESPECT du lat. RESPECTUS, considération (v. p. 25), crainte (p. 84).
* RESSENTIMENT pour regret (v. p. 109), sensation, sentiment (p. 98), vengeance (p. 362).
* RESSENTIR AU pour porter le caractère du (v. p. 56).
* RETARDATION du lat. RETARDATIO, retard, action de différer (v. p. 164).
RETRAITE action de retirer, de donner asile, refuge (v. p. 167).
* REVA (s'en) s'en retourne (voir pp. 182, 355). [421]
REVEIL pour moyen d'exciter, de renouveler la ferveur (v. p. 160).
* REVIGORER rendre force et vigueur (v. pp. 136, 164).
* REVOQUER rappeler, retirer (v. p. 321). Du lat. REVOCARE.
ROMPRE (se) pour se briser, se casser de fatigue (v. p. 306).
ROND pour globe, sphére (v. p. 222).
RUMINEMENT action de remâcher, de ruminer, de repenser (voir p. 163).
SAILLIE pour sortie (v. p. 206).
* SAPIENCE du lat. SAPIENTIA, sagesse (v. pp. 24, 62).
SEJOURNER pour se reposer, faire halte pendant un voyage (voir p. 98).
* SEMONCE invitation (v. pp. 104, 113, 241).
SERRÉ pour consigné, relégué (v. p. 371).
* SERRER pour cacher (v. p. 170).
SEVREMENT privation (v. p. 138).
* SI pour encore, toutefois, pourtant, oui vraiment, en vérité (v. pp. 8, 197, 277, 345).
* SI BIEN bien que, quoique (voir p. 73).
* SI EST-CE QUE il n'en est pas moins vrai que, il est pourtant vrai, néanmoins, toutefois (v.
pp. 44, 101, 119, 243, etc).
* SIGNE (a ce) de l'ital. A TAL SEGNO, à ce point (v. p. 114).
* SI MOINS au moins (v. pp. 120, 369).
* SI QUE de sorte que (v. pp. 19, 111, etc.)
SI SERONT locution affirmative (v. p. 221).
SITOST pour aussitôt (v. p. 281).
* SI TRES si fort, tellement (voir p. 36).
* SOIN pour travail (v. p. 169).
SOLEMNISER pour vanter, louer avec éclat (v. p. 94).
SORTE (de bonne) de bonne famille (v. p. 128).
* SOULOIR du lat. SOLERE, avoir coutume, avoir l'habitude de (v. p. 165).
SOUPLEMENT d'une manière souple, avec souplesse (v. p. 141).
* SOUVENANCE souvenir (voir p. 348).
STILE pour usage (v. p. 297).
SUBSTITUÉ nommé à la place d'un autre (v. p. 123).
* SUCCES de l'ital. SUCCESSO, issue, résultat (v. pp. 98, 113, 301).
* SUFFISANCE pour capacité, mérite (v. p. 242). Du lat. SUFFICENTIA.
SUJET pour assujetti, dépendant (v. p. 269).
SUPERSCRIPTION du lat. SUPERSCRIPTIO, inscription (v. p. 143).
* SUPPORT pour appui, soutien (v. p. 247).
* SUR pour dans la (v. p. 25).
* TANDIS en attendant (v. pp. 167, 200, 298).
* TANT pour le plus, autant, aussi longtemps (v. pp. 150, 159, 164).
* TANT PLUS d'autant plus (voir pp. 19, 132, etc.)
* TENDRETÉ sentiment affectueux, consolation, sensibilité (v. pp. 89, 100). Du lat.
284/321

29.5 Page 285

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TENERITAS.
* TOUT AINSY QUE comme (voir p. 374).
* TOUTES FOIS ET QUANTES autant de fois (v. p. 67).
TRAITTER (le faire) pour lui faire parler (v. p. 85).
* TRANSMUTATION du lat. TRANSMUTATIO, changement (voir p. 296).
* TRAVAIL pour peine, souffrance (v. pp. 89, 101, 141, etc.)
TRAVAILLÉ pour affligé, éprouvé (v. p. 161).
* TRAVAILLER (se) se fatiguer (v. pp. 139, 306).
* TRAVAUX pour douleurs, souffrances (v. pp. 141, 161, etc.)
* TRAVERS (au) malgré (voir p. 136).
TREILLE treillis, grille de fer (v. p. 307).
TRETOUS tous, tous sans exception (v. p. 8).
* TROUBLEMENT trouble (v. p. 84). [422]
* VERS pour auprès de (v. pp. 104, 158).
* VIANDE pour nourriture, mets, proie (v. pp. 51, 164, 206, 297).
VIEL pour vieux (v. p. 253).
* VISITATION du lat. VISITATIO, visite (v. p. 290).
* VISTEMENT, VITEMENT promptement, vite (v. pp. 48, 182).
* VOIREMENT, VOYREMENT vraiment, à la vérité, effectivement (v. pp. 61, 69, 155, etc.)
VOLONTAIRE pour laissé à ta volonté (v. p. 359). [423]
285/321

29.6 Page 286

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Index des correspondants et des principales notes
biographiques et historiques de ce volume1171
_____
Acarie Barbe Avrillot (Bienheureuse Marie de l'Incarnation),
dame …………………………………………………………….
ACARIE Nicolas ………………………………………………..
ACARIE Pierre …………………………………………………
Aiazza Vespasien, Abbé d'Abondance …………………………
Alguebelette Françoise-Melchionne du Four (dame de Chabod-
Lescheraine et d') ………………………………………………..
Albert VII, Archiduc d'Autriche ……………………………….
ALLIANCES princières ………………………………………...
AMBASSADEURS. Voir SAVARY DE BREVES,
TOURNETTE, VILLETTE …………………………………….
ANGEVILLE Jérôme (d'), de Lambert …………………………
ANNONCIADES de Saint-Claude ……………………………..
ANSELME DE RIOM, Capucin ………………………………..
ANSELME (Père). Voir MARCHAND ………………………..
ANTENNE Jean, Cistercien d'Hautecombe …………………….
ARUFENS (Alufen) Anne de Gingins (dame de Mestral d') ……
Asseline Eustache. Voir EUSTACHE DE SAINT-PAUL ……..
AVISE Antoinette de la Forest (dame d') ……………………….
Pages
»
»
»
»
»
»
»
»
»
»
»
»
»
»
»
156
157
157
38
131
248, 248
79, 149
276, 300
200
250
285
285
85
308
116, 116, 117
325 [425]
BADE (diète de) ………………………………………………... »
BARONI-PERETTI André, Cardinal ………………………….. »
BARTOLONI (Bertolonio) Nicolas ……………………………. »
Bay Jacques de …………………………………………………. »
BELLARMIN Robert, Cardinal. (Sa doctrine sur le pouvoir
temporel des Papes) …………………………………………….. »
BELLEGARDE Antoine (de), seigneur de Disonche ………….. »
Bellegarde Roger de Saint-Lary (duc de) ……………………… »
BELLEVILLE (Aumônier de). Voir SEVELINGES …………... »
BELLOT Antoine ……………………………………………… »
BELLOT (Mlle) ………………………………………………… »
Bertacchi Pellegrino, Evêque de Modène …………………….. »
BERTHELOT (M.) …………………………………………….. »
Bertrand de la Perrouse Jeanne de Chastel (dame de) ……….. »
Bérulle Pierre, Cardinal de …………………………………….. »
BESSAC Pierre de ……………………………………………... »
Blonay Aimée de (Marie-Aimée, Religieuse de la Visitation) »
Blonay Claude de ………………………………………………. »
BLONAY Jean-François (de), Prieur de Saint-Paul ……………. »
276, 300
224
341
45, 274
95
366
293, 293, 329
333
335
335
229, 229
327
81, 81
154
286
290, 290, 291, 349
267, 354, 359
354
1171 Les pages des Lettres sont indiquées par des chiffres ordinaires ; les caractères et les chiffres gras désignent les
noms des correspondants et leurs notes biographiques. Quant aux autres notes, leurs titres sont donnés en caractères
ordinaires.
Les noms suivis d'un astérisque * indiquent les auteurs ou les destinataires des pièces qui figurent dans
l'Appendice.
Dans cet Index, on a donné aux personnages la désignation que leur attribue le texte des Lettres. (Cf. tome
XII, note (1239), p. 491.)
286/321

29.7 Page 287

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BLONAY et SAINT-PAUL (Arbitrage entre les familles de) …. »
Bonivard Jacques-Philibert (de), Jésuite ………………………. »
BONLIEU (prieuré de) …………………………………………. »
BONVILLARD Jean-Louis de Chevron * (seigneur de). Voir
CHEVRON …………………………………………………….. »
Bourgeois Françoise, Prieure du Puits-d'Orbe ………………… »
Bourgeois Rose, Abbesse du Puits-d'Orbe ……………………. »
Bréchard Jeanne-Charlotte (de), Religieuse de la Visitation …. »
Brisson Michel ………………………………………………… »
Brûlart Marie Bourgeois (dame) ………………………………. »
BRUNET (M.) …………………………………………………. »
BUTTARD Claude, curé d'Arbignieu et Peyzieu ……………… »
BUTTET Jean-François (de), Président au Conseil du Genevois »
Camus Jean-Pierre, Evêque le Belley …………………………. »
CAPPONI Louis, Cardinal …………………………………….. »
CAPUCINS d'Annecy …………………………………………. »
CAPUCINS de la Mission de Thonon …………………………. »
CAPUCINS de la Province de Savoie (Couvents des) ………… »
Cardinaux de la Sacrée Congrégation des Rites. Voir
BARONI-PERETTI, CAPPONI, CRESCENZIO, DETI,
FARNESE, GONZAGUE, LENI, MONTE ……………………. »
CARDINAUX FRANÇAIS en 1612 …………………………… »
CARMES déchaussés de la mission de Paul V ………………… »
CARMES de Gex ………………………………………………. »
CARMES de Gex (église et chapelle des) ……………………… »
CARREL Laurent ……………………………………………… »
CARREL (M.) maître des Postes ………………………………. »
CERVIÈRES Henri de Saint-André (seigneur de). Voir SAINT-
ANDRÉ ………………………………………………………… »
CERVIÈRES Lucrèce de Longecombe de Peyzieu (dame de) »
CHALLANT Claire-Marguerite de ……………………………. »
CHALLEX (paroisse de). Voir CURTON et GINON …………. »
CHAMBÉRY (Carême de) …………………………………….. »
Chanoines de Saint-Jean de Lyon ……………………………. »
CHANTAL Celse-Bénigne de Rabutin ………………………… »
Chantal Jeanne-Françoise Frémyot (Sainte), Mère de …………
»
65
170, 203
292
208, 392
151, 151
7, 234, 313, 352
105, 105, 112
104, 104
23, 53, 164, 191
111
288
35
28, 28, 42, 82
224
374 [426]
167
228
223, 223
190
383
316
129
267
267
182
182
265
57, 338
204
241, 241
317
10, 15, 21, 22, 26,
29, 32, 33, 41, 47,
56, 61, 63, 74, 76,
82, 87, 90, 91, 98,
98, 101, 107, 121,
122, 125, 137, 138,
139, 143, 149, 158,
160, 162, 163, 163,
168, 171, 195, 197,
210, 210, 212, 218,
220, 221, 240, 252,
258, 261, 270, 275,
292, 306, 306, 311,
312, 317, 320, 320,
323, 324, 327, 330,
333, 349, 350, 366,
287/321

29.8 Page 288

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CHAPE brodée par la Mère de Chantal ………………………… »
CHAPERON, capitaine ………………………………………… »
CHARBONNEL (Charbonnet) Michel ………………………… »
Charles-Emmanuel Ier, duc de Savoie …………………………
»
» (Ses projets de guerre) ………………………………………... »
CHARMOISY Claude Vidomne de Chaumont * (seigneur de) .. »
CHARMOISY Jean-François de ……………………………….. »
Charmoisy Louise du Chastel (dame de) ……………………… »
Chastel Claudine de (Claude-Cécile, Religieuse de la Visitation) »
Chastel Péronne (Péronne-Marie, Religieuse de la Visitation) »
Châtillon Jean de ……………………………………………….
»
CHENEX Jérôme d'Angeville de Mestral (seigneur de) ………. »
CHERUBIN DE MAURIENNE, Capucin …………………….. »
CHEVRON (Arbitrage entre les membres de la famille de) …... »
Chevron Bernard (baron de) …………………………………… »
CHEVRON (fils d'Hector de) ………………………………….. »
CHEVRON Jean-Louis * (de). Voir BONVILLARD …………. »
Chevron-Villette Amédée (de). Voir VILLETTE …………….. »
CHEVRON-VILLETTE Gaspard (de). Voir GIEZ ……………. »
CONGRÉGATION DE PRÊTRES projetée par saint François de
Sales ……………………………………………………………. »
CONSEIL DE VILLE D'ANNECY (le) et la VISITATION. Voir
VISITATION …………………………………………………... »
CONSEIL DU GENEVOIS (membres du) …………………….. »
CONSTANTIN DE CHAMBÉRY, Capucin …………………... »
CONTAGION en Suisse ……………………………………….. »
CORCELLES Ferdinand de Prez (seigneur de) ………………… »
Cornillon Gasparde de Sales (dame de) ……………………….. »
COUDREY Charles-Emmanuel et Vincent du …………………. »
COULON (M.) …………………………………………………. »
CRESCENZIO Pierre-Paul, Cardinal ………………………….. »
CRISPILIANI Amblarde Forestier (dame) …………………….. »
CRISPILIANI Marc Antoine, seigneur de Crassy ……………… »
CROIX BLANCHE (logis de la) ………………………………. »
Croix d'Autherin Jeanne-Antoine de Chapot (dame de la) …… »
CROTTI Jean-Michel * ………………………………………… »
CROZET (chapelle du) ………………………………………… »
CURTON Jean …………………………………………………. »
CURTON Humbert, curé de Farges et Asserens ………………. »
Destinataires inconnues ……………………………………….
»
Destinataires inconnus ………………………………………... »
DETI Jean-Baptiste, Cardinal ………………………………….. »
DIÈGUE DE LA CITÉ-NEUVE (Luchetti), Capucin ………….. »
DIVONNE (prieuré de) ………………………………………… »
Dufour Charlotte de Buttet (dame) ……………………………. »
Dunant Etienne, curé de Gex ………………………………….. »
367, 369, 374, 375
367
196
111
37, 64, 66, 103,
196, 199, 217, 236,
243, 356
32, 48
360, 363, 398
79
362, 365
9 [427]
133, 133, 134
58, 58, 126, 167,
341
200
382
392
207, 207, 392
392
208, 392
109, 264, 276
264
334
219
35
313
277
261
233
12
317
223
230
230
337
357, 357
413
338, 395, 396
338
63
35, 88, 140, 318,
346
115, 256
224
166
59 [428]
15, 377, 377
63, 337
288/321

29.9 Page 289

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Dupanloup Claude, curé de la Muraz …………………………. »
EPERNON Jean-Louis de Nogaret de la Valette (duc d') ……… »
Escrilles ou des Crilles Marie de Mouxy, dame d' (Marie-
Madeleine, Religieuse de la Visitation) ………………………… »
Esne Michel * (d'), Evêque de Tournai ………………………… »
Eustache de Saint-Paul, Feuillant. Voir ASSELINE …………. »
FARNESE Odoard, Cardinal …………………………………... »
FAVERGE Pernette de Chevron-Villette (dame de la) ………… »
Favre Antoine …………………………………………………..
»
FAVRE DE LA VALBONNE Antoine-François ……………… »
FAVRE (Faber) Jean, médecin …………………………………. »
FAVRE (Faber) Pierre (Bienheureux), Jésuite …………………. »
Favre Jacqueline (Marie-Jacqueline, Religieuse de la Visitation) »
Favre Philiberte Martin de la Pérouse (dame) …………………. »
Fenouillet Pierre, Evêque de Montpellier ……………………… »
FERNEX Pierre Chevalier (seigneur de) ………………………. »
FICHET Adrienne (Marie-Adrienne, Religieuse de la Visitation) »
FLÉCHÈRE Henri de la ………………………………………... »
Fléchère Madeleine de la Forest (dame de la) ………………….
»
FLÉCHÈRE (enfants de Mme de la) ……………………………. »
FLOCCARD Jean, premier syndic d'Annecy ………………….. »
Flottes Pierre (de). Voir PIERRE DE SAINT-BERNARD ……. »
GAY Jean ………………………………………………………. »
GENÈVE et HENRI IV ………………………………………… »
Genève Marguerite (de), Abbesse de Beaume-les-Dames …….. »
GENISSIA Lancelot Guillet (seigneur de) …………………….. »
GERLANDE Just de Fay (seigneur de) ………………………… »
Germonio Anastase *, Archevêque de Tarentaise …………….. »
GEX (Bénéfice du pays de). Voir MONTLUEL ………………. »
GEX (Les commissaires royaux dans le pays de) ……………… »
GEX (Le culte catholique dans le pays de). Voir CARMES,
CHALLEX, CROZET, DIVONNE, SAINT-JEAN DE
GONVILLE, THOIRY ………………………………………… »
GEX (Ministres protestants du pays de) ……………………….. »
GEX (Saint François de Sales au pays de) ………………………
»
GIEZ Gaspard de Chevron-Villette (seigneur de). Voir
CHEVRON-VILLETTE ……………………………………….. »
GINON Henri ………………………………………………….. »
GIROD Claude …………………………………………………. »
Givry Anne de Pérusse d'Escars (Cardinal de) ………………… »
GONZAGUE Ferdinand (de), Cardinal de Mantoue. Voir
MANTOUE ……………………………………………………. »
GORIA Jacques, Evêque de Verceil …………………………… »
Gouffiers Elisabeth Arnault (des), Religieuse du Paraclet …….. »
GRANDIS Jean, médecin ……………………………………… »
239, 239
202
261, 278, 278, 304,
347, 348
237, 237, 238, 393
116, 116, 117
224
292
31, 31, 34, 48, 55,
83, 110
217
147
146
178, 178
18, 54, 301, 308
69, 344, 345
294, 339
12
308
11, 36, 84, 89, 92,
136, 214, 244, 281,
307, 319, 325
86
356
227, 227
337
67
262, 262 [429]
304
394
183, 183, 397
69, 70
129, 254
294, 296, 299
254
48, 129, 172, 244,
248
264
338
395
382
202
225
343, 343
20
289/321

29.10 Page 290

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GRANDMAISON François de Bessac (seigneur de) ………….. »
Grandmaison Hélène de Longecombe de Peyzieu (dame de) »
GRANDS PARDONS de Notre-Dame de Liesse d'Annecy …… »
GRILLET Claudine de Sales (dame) …………………………… »
GRILLET Nicolas ……………………………………………… »
GROS Humbert ………………………………………………… »
GUILLAUME DE SAINTE-GENEVIEVE (Compans),
Feuillant ………………………………………………………... »
GUILLET Claude-Louis. Voir MONTHOUX …………………. »
GUILLET Gabriel. Voir MONTHOUX ……………………….. »
Hayes Antoine * des ……………………………………………
»
JACQUES (Père) Jaes (Jay ?), Dominicain ……………………. »
JACQUIER Charles ……………………………………………. »
JEAN DE SAINT-FRANÇOIS (Jean Goulu), Prieur des
Feuillants ……………………………………………………….. »
JEAN DE SAINT-PASTEUR, Prieur des Feuillants
d'Abondance …………………………………………………… »
JÉSUITES DE CHAMBÉRY et le BARON DE LA SERRAZ »
LAMBERT Françoise de Bellegarde (dame de) ……………….. »
LANCELLOTTI Horace, Cardinal …………………………….. »
Lans Sigismond d'Est (marquis de) …………………………….
»
LA TOUR Antoine, procureur …………………………………. »
LEGROS Bernard ? ……………………………………………. »
LEGROS (Mme) ………………………………………………… »
LEGROS Marie-Marthe, Religieuse de la Visitation ………….. »
LE MAIRE ou LEMAIRE Claude, Recteur des Jésuites de
Chambéry. Voir MARIUS ……………………………………... »
Le Mazuyer Gilles …………………………………………….. »
LENI Jean-Baptiste, Cardinal ………………………………….. »
LESCHERAINE Antoine (de), sénateur ……………………….. »
LESCHERAINE Catherine de Monthouz en Duyn (dame de) »
LESCHERAINE Georges de …………………………………... »
Lesseau Guillaume (de), Religieux Célestin …………………… »
LIVRON Bernard, seigneur d'Allemogne ……………………… »
LIVRON de Thoiry (membres de la famille de) ……………….. »
LUX Edme de Malain * (baron de) …………………………….. »
Maillard Jéronyme (de), ancienne Abbesse de Sainte-Catherine »
MAILLARD-TOURNON Claude-Françoise de ……………….. »
MAILLARD-TOURNON Sanche-Marc-Prosper de …………... »
MANTOUE (Cardinal de). Voir GONZAGUE ………………… »
Mar Claude * (de la), Grand-Prieur de Saint-Claude. Voir
SAINT-CLAUDE ……………………………………………… »
MARCHAND Anselme, Cordelier. Voir ANSELME …………. »
MARILLAC Louis de ………………………………………….. »
MARIUS Claude, Recteur des Jésuites de Chambéry. Voir LE »
284
283, 283
265, 400
274
274
83
84
55
2, 372, 373
43, 77, 148, 201,
259, 271, 299, 361,
398
162
110 [430]
77
41
209
133, 136
224
48, 49, 49, 124,
127, 254, 289
366
233
233
233
209
295, 295
223
88
88
81
351, 351
339
338, 339
336, 385
211
341
341
202
59, 59, 386
285
154
209
290/321

30 Pages 291-300

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30.1 Page 291

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MAIRE …………………………………………………………
MARTHEREY Jean-François (du), Religieux de Peillonnex …. »
MARTINEL (Martinet) Ascanio et ses fils ……………………. »
MARTINEL Georges-Louis …………………………………… »
Médicis Marie de ………………………………………………. »
Menthon Claudine (de), Abbesse de Sainte-Catherine ………… »
MICHEL-ANGE DE REMIREMONT, Capucin ……………… »
MILAN (Pèlerinage de saint François de Sales à) ……………… »
Milletot Bénigne ………………………………………………..
»
MILLETOT Marie-Marguerite, Religieuse de la Visitation …… »
MIRIBEL Claudine Solliard (dame de Chevron et de). Voir
VISITATION …………………………………………………... »
MIROIR D'AMOUR (le) et la VIE DE SAINTE CATHERINE
DE GÊNES …………………………………………………….. »
MONTE François-Marie (del), Cardinal-Préfet de la Sacrée
Congrégation des Rites ………………………………………… »
MONTFORT Charles de ………………………………………. »
Montfort Michelle de Cerisier (dame de) et ses enfants ………. »
MONTHOUX Claire-Marie de Maillard-Tournon (dame Guillet
de) ……………………………………………………………… »
MONTHOUX Claude-Louis Guillet (coseigneur de). Voir
GUILLET ………………………………………………………. »
MONTHOUX Gabriel Guillet (seigneur de). Voir GUILLET »
MONTLUEL Claude (de), Abbé de Bonmont. Voir GEX …….. »
MOUXY Anne-Françoise de …………………………………... »
MOUXY Antoinette de Saint-Jeoire (dame de) ……………….. »
MOUXY Pierre-Marc (de), seigneur de Travernay ……………. »
NACOT Nicolas ………………………………………………... »
NAMBRIDE Claude (de), curé de Divonne …………………… »
NANT Georgios (du). Voir SAINT-PAUL ……………………. »
NEMOURS Ducs de (Leur hôtel à Paris) ………………………. »
NEMOURS Henri de Savoie, duc de Genevois et de.
(Gentilshommes annéciens calomniés auprès de lui) ………….. »
Neuvecelle Claude de Varax (seigneur de) …………………….. »
NOUE Odet de la ………………………………………………. »
OFFREDI Marc ………………………………………………… »
OFFREDI Paul …………………………………………………. »
PARIS (Saint François de Sales invité à prêcher le Carême à).
Voir SAINT-BENOIT ………………………………………….. »
Paul V (Camille Borghese) …………………………………….. »
PEILLONNEX (Religieux du prieuré de) ……………………… »
Peyzieu Françoise de Dizimieu (dame de) ……………………… »
PEYZIEU (paroisse de) ………………………………………… »
Pierre de Saint-Bernard, Feuillant. Voir FLOTTES …………. »
PLESSIS-MORNAY Philippe du ……………………………… »
POBEL Péronne de Genève-Lullin (dame) …………………….. »
Polliens Nicolas, Jésuite ……………………………………….. »
PONCET Pierre, curé de Cessy et de Sacconex ……………….. »
232
45
46 [431]
166, 255, 316
135, 135
339
171, 360, 361, 374
5, 5, 22, 93, 95, 96,
113, 145, 213
6
328, 350
17
223
14
14, 14
2, 372, 373
55
2, 372, 373
70
332
279
348
1
60
65
154
327, 360
310, 310
67
169 [432]
169
37, 271, 273, 363
173
232
181, 181, 286, 315
288
227, 227
128
262
146, 245
60, 340
291/321

30.2 Page 292

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PONZIANI Jean-Baptiste, fils de sainte Françoise Romaine ….. »
POUVOIR DU PAPE sur le temporel des Rois (Affaire du). Voir
BELLARMIN ………………………………………………….. »
PROVANA DE COLLEGNO François, grand-chancelier de
Savoie ………………………………………………………….. »
Quoex Claude de ………………………………………………. »
Quoex Philippe de ……………………………………………… »
Religieuse, destinataire inconnue ……………………………… »
REPOSOIR (chartreuse du) ……………………………………. »
ROASCIEU Jean-Jacques de Mesme (seigneur de) ……………. »
Roget Claude-Françoise, Religieuse de la Visitation ………….. »
Rouge Aimé, Sous-Prieur de Peillonnex ………………………. »
SAINT-ALBAN Claude-François Pobel (comte de) …………… »
SAINT-ALBAN Marguerite du Pont (comtesse de) …………… »
SAINT-ANDRÉ Henri (de). Voir CERVIERES ………………. »
SAINT-BENOÎT (église paroissiale de). Voir PARIS …………. »
SAINT-CERGUES Gaspard de Lucinge (seigneur de) ………… »
Saint-Cergues Jeanne de Cartal * (dame de) ………………….. »
SAINT-CLAUDE (abbaye de) …………………………………. »
Saint-Claude (Grand-Prieur et Religieux* de). Voir MAR …… »
SAINTE-MAISON de Thonon ………………………………… »
SAINT-JEAN DE GONVILLE (chapelle de Sainte-Catherine à) »
SAINT-PAUL Georgios du Nant (seigneur de). Voir BLONAY
et NANT ………………………………………………………... »
SAINT-PIERRE Françoise de Seyssel (dame de) ……………… »
SALES FRANÇOIS * DE (SAINT). Voir CHAMBÉRY,
CONGRÉGATION DE PRÊTRES, CROIX BLANCHE,
GERMONIO, GEX, GRANDS PARDONS, MILAN, PARIS,
SYNODE, TOUR DES MIROIRS, URSULINES …………….. »
SALES Françoise-Marie de Boisy de (Jeanne-Françoise,
Religieuse de la Visitation) …………………………………….. »
SALES Gallois (de), seigneur de Boisy ………………………… »
SALES Janus, chevalier de Saint-Jean de Jérusalem ………….. »
SALES Jeanne du Fresnoy-Martin (dame de Boisy de) ……….. »
SAUMUR (Assemblée de) …………………………………….. »
SAVARY DE BRÈVES François, Ambassadeur de France à
Rome …………………………………………………………… »
SAVOIE (Ravages des troupes en) …………………………….. »
SENAT DE SAVOIE (Enquête en Chablais du) ………………. »
SENAT DE SAVOIE (membres du) …………………………… »
SENS DE SAINTE-CATHERINE * (Beauner), Feuillant …….. »
SERVETTE Josué d'Allinges ? (seigneur de) ………………….. »
SEVELINGES ou SIRVINGES Claude (de), Aumônier de
Belleville. Voir BELLEVILLE ………………………………… »
SICCARD (M. de) ……………………………………………… »
SIXT (Eboulement à) …………………………………………... »
SYNODE de 1603 et de 1612 (Divers actes du) ……………….. »
THAVAN Eustache ……………………………………………. »
30
95, 194
370
203, 208, 372
19, 123, 168
72
147
272
106, 106, 369
232, 232
309
309
182
271, 273
172
15, 171, 377, 389
59, 60 [433]
59, 59, 386
167, 382
338
65
280
66, 163, 181, 349,
397
263
263
362
263
127
189
32, 34
126
55
390
371
333
337
103
211, 228, 232, 307
213
292/321

30.3 Page 293

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THÉODOSE DE BERGAME (Foresti), Gardien des Capucins
d'Annecy ……………………………………………………….. »
THIOLLIER Claude-Marie, Religieuse de la Visitation ……….. »
THIOLLIER Marie-Antoine, Religieuse de la Visitation ………. »
THOIRY (chapelle de Saint-Gras à) …………………………… »
THORENS (terre de) …………………………………………… »
TOUR Antoine de la …………………………………………… »
TOUR Charles (de la), Prieur de Talloires …………………….. »
TOUR DES MIROIRS (Torre di Specchi) Oblates de la ………. »
TOUR DES MIROIRS (Visite de saint François de Sales au
monastère de la) ………………………………………………... »
TOURNETTE Louis de l'Alée * (seigneur de la) ……………… »
Tournon Philiberte de Beaufort (comtesse de) ………………… »
Tournon Prosper-Marc de Maillard (comte de) ……………….. »
TOURNON (filles du comte de). Voir MAILLARD-TOURNON »
TOUVIÈRE D'ESCRILLES Antoine-Balthazard de la (P.
Georges, Capucin) ……………………………………………… »
TRAVERNAY Gaspard de …………………………………….. »
Travernay Péronne de Montfalcon (dame de) ………………… »
TRÉMONT Anne de Rochefort-Plurault (dame de Semur) …….. »
URSULINES de Chambéry ……………………………………. »
Valbonne Andrée de Nicolle de Crescherel (dame de la) ……… »
VAUD (Vain espoir d'ôter aux Bernois le pays de) ……………. »
VERCHÈRE Claude * de la ……………………………………. »
Vignod Bernarde (de), Religieuse de l'abbaye de Sainte-
Catherine ……………………………………………………….. »
VILLARNOS ou VILLARNOUL Jean de Jeaucourt (seigneur
de) ……………………………………………………………… »
VILLARS Jean * (de), Jésuite …………………………………. »
Villette Amédée de Chevron (baron de). Voir CHEVRON-
VILLETTE ……………………………………………………... »
VILLETTE (filles du baron de) ………………………………… »
VILLETTE Marguerite dePingon-Cusy (baronne de) …………. »
VISITATION (Apostolat, coutumes et formation spirituelle de
la) ………………………………………………………………. »
VISITATION (Blason de la) …………………………………… »
VISITATION (Maison de la). Voir CONSEIL DE VILLE
D'ANNECY ……………………………………………………. »
VISITATION et Mme DE MIRIBEL (son héritage). Voir
BELLEGARDE et MIRIBEL ………………………………….. »
Visitation d'Annecy (Religieuses de la). Voir BLONAY,
BRÉCHARD, CHANTAL, CHASTEL, ESCRILLES, FAVRE,
FICHET, LEGROS, MILLETOT, ROGET, SALES,
THIOLLIER ……………………………………………………. »
VULLIAT Mamert ……………………………………………... »
281
13
161
338 [434]
364
27
27, 356
30
29, 30
300, 413
1, 1
340, 370
340
280
331
246, 268, 331
285
302
216, 216
68
338, 394
50
128
388
109, 264, 276
265
109
16, 144, 160
63, 64
219, 245, 282, 305
328, 350, 366 [435]
205, 282, 303
285 [436]
293/321

30.4 Page 294

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Table de correspondance de cette nouvelle edition avec
les précédentes et indication de la provenance des
manuscrits
__________
NOUVELLE
ÉDITION
DCLIII
DCLIV
DCLV
DCLVI
DCLVII
DCLVIII
DCLIX
DCLX
DCLXI
DCLXII
DCLXIII
1re
phrase
2e phrase
ll. 10-14
ll. 15-18
fin
DCLXIV
DCLXV
DCLXVI
PROVENANCE DES
MSS.
TURIN. Marquise
Pensa
AUTUN. Grand-
Séminaire
………………………
………………………
BESANÇON. M. de
Longeville
DIJON. Grand-
Séminaire
GRASSE. Sacristie de
l’église paroissiale
………………………
PIGNEROL. Visitation
ANNECY. Visitation.
(Hist. de la Fondation)
PISTOIE. Visitation
Idem
Idem
Idem
Idem
TURIN. Visit. (Copie)
………………………
ANNECY. Visit.
PREMIÈRE
PUBLICATION1172
Datta, II, p. 273
ÉDITIONS
MODERNES
Vivès, IX, p. 530
Migne, VI, col.
789
………………………
Inédite
Hérissant, II, p. 292
Ibid. p. 290
Viv. IX, p. 371
Mig. VI, col. 781
Viv. X, p. 370
Mig. V, col. 781,
et VI, col. 1055
………………………
Inédite
………………………
Inédite
………………………
Inédite
Epistres spirituelles,
1626, l. III
Datta, II, p. 177
Œuvres, 1641, t. II,
epist. XLV (post-
script.)
Viv. IX, p. 410
Mig. V, col. 779
Viv. VII, p. 298
Mig. VI, col. 735
Viv. VII, p. 194
Mig. V, col. 787
………………………
Inédite
Epistres spirituelles,
1626, l. IV1173
………………………
Vie du Saint, par le P.
de la Rivière (1624), l.
IV, chap. XXIX
………………………
………………………
Œuvres, 1641, t. II,
epist. XVIII
………………………
Viv. XI, p. 194
Mig. V, col. 1231
Inédites
Inédite [437]
Inédite
Viv. X, p. 386
Mig. V, col. 793
Inédite
1172 Les indications qui figurent dans cette colonne sont données sous toutes réserves, et pour des raisons déjà exposées
dans l'Avant-Propos du tome XI.
La numérotation des pièces étant souvent très inexacte dans les éditions du XVIIe siècle, quand nous remontons à
celles-ci, au lieu de citer le numéro d'ordre des Lettres, nous indiquons seulement la série, soit le Livre dans lequel
elles sont insérées.
1173 Voir aussi Sainte Jeanne-Françoise Frémyot de Chantal, sa Vie et ses Œuvres (Paris, Plon, 1876), tome III,
déposition de la Sainte, art. 39, p. 196.
294/321

30.5 Page 295

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DCLXVII
DCLXVIII
DCLXX
DCLXXI
DCLXXII
DCLXXIII
DCLXXIV
DCLXXV
DCLXXVI
DCLXXVII
(fragment)
DCLXXVIII
DCLXXIX
DCLXXX
DCLXXXI
DCLXXXII
DCLXXXIII
DCLXXXIV
DCLXXXV
DCLXXXVI
DCLXXXVII
DCLXXXVIII
DCLXXXIX
DCXC
(Copie)
………………………
ANNECY. Visitation
(Ancien Ms. de l’Année
Sainte)
ANNECY. Visit.
(Copie)
………………………
LE MANS. Visitation
………………………
AOSTE. Archives de la
Société académique
………………………
………………………
POITIERS. Visitation
MEAUX. Visitation
………………………
BRUXELLES.
Bibliothèque des pp.
Bolladistes
………………………
TURIN. Archiv. de
l’Etat (Copie)
FLORENCE.
Bibliothèque
Magliabecchiana
………………………
………………………
MONTÉLIMAR.
Visitation (Copie)
LE MANS. Visitation
………………………
PARIS. Dames de
Saint-Maur
PARIS. Bibl. nat.,
Galerie Mazarine
Epistres spirituelles,
1626, l. I
Blaise, Nouvelles
inédites (1833), p. 25
Année Sainte de la
Visitation (1689), t.
Ier, p. 294
………………………
Epistres spirituelles,
1626, l. VII
………………………
Epistres spirituelles,
1626, l. VI
Bulletin de la Soc.
acad. d’Aoste, 1871
Mémoires de
l’Académ. Salés., t. II
(1880)
Œuvres, 1641, t. II,
epist. XLV
(Voir note (142), p.
41)
Hérissant, II, p. 314
Ibid., p. 321
Annuaires de
l’Université
catholique de Louvain
(1848), p. 258
Epistres spirituelles,
1626, l. VII
………………………
Datta, II, p. 56
Epistres spirituelles,
1626, l. IV
Œuvres, 1641, t. II,
epist. XXIV
………………………
………………………
Epistres spirituelles,
1626, l. IV
………………………
Blaise, Nouvelles
inédites (1833), p. 13
Viv. IX, pp. 541
et 561
Mig. V, col. 1291,
et VI, col. 869
Viv. X, p. 375
Mig. V, col. 784
Inédite
Viv. X, p. 284
Mig. V, col. 673
Mig. VI, col. 953
Viv. X, p. 376
Mig. V, col. 784
Viv. VII, p. 192
Mig. V, col. 785
Inédit
Viv. X, p. 385
Mig. V, col. 792
Viv. VII, p. 195
Mig. V, col. 795
Viv. XI, p. 351
Mig. V, col. 1367
Mig. VI, col. 954
Viv. VI, p. 272
Mig. VI, col. 665
Viv. XII, p. 27
Mig. V, col. 1534
Viv. X, p. 380
Mig. V, col. 787
Inédite
Mig. VI, col. 954
Viv. X, p. 468
Mig. V, col. 898
Inédite
Viv. IX, p. 412
Mig. VI, col. 859
295/321

30.6 Page 296

▲back to top
DCXCI
DCXCII
DCXCIII
DCXCIV
mutilée
DCXCV
entière
DCXCVI
pp. 69-
71 (ll. 1-
19)
suite
DCXCVII
DCXCVIII
DCXCIX (fragment)
DCC
DCCI
DCCII
DCCIII
DCCIV
DCCV
DCCVI
DCCVII
DCCVIII
DCCIX
DCCX
………………………
………………………
ANNECY. Visitation
(Ancien Ms. de l’Année
Sainte)
NANTES. Bibliothèque
communale
………………………
TURIN. Archiv. de
l’Etat
ISSY (Paris). Maison
de Philosophie de la Cte
de Saint-Sulpice
………………………
………………………
………………………
………………………
ROUEN. Visitation (1er
Monastère)
CHATEAU DE
BUZET (Lot-et-
Garonne). Ctesse de
Noailles
TURIN. Archiv. de
l’Etat (Copie)
Idem
………………………
………………………
………………………
………………………
ANGERS. M. de
Cassin de la Loge
………………………
CHATEAU DE
TOUCHEBREDIER
(Eure de Loir). MM.
Hérissant, V, p. 92
Epistres spirituelles,
1626, l. VII
Datta, II, p. 57
Ibid., p. 58
Vie du Saint, par
Charles-Auguste, liv.
VII
Datta, II, p. 59
Blaise (1821), II, p.
258
Epistres spirituelles,
1626, l. VII
Ibid.
Ibid.
Hérissant, Opuscules,
IV, p. 38
………………………
Datta, II, p. 349
………………………
Epistres spirituelles,
1626, l. III
Hérissant, V, p. 77
Ibid., II, p. 340
Epistres spirituelles,
1626, l. II
Revue d’Anjou
Hérissant, V, p. 61
………………………
[438]
Viv. X, p. 393
Mig. V, col. 840
Viv. X, p. 517
Mig. V, col. 1672
Viv. VII, p. 198
Mig. VI, col. 665
Viv. VII, p. 199
Mig. VI, col. 666
Viv. IX, p. 391
Mig. V, col. 732
Viv. VI, p. 273
Mig. VI, col. 666
Viv. IX, p. 416
Mig. V, col. 800
Viv. XII, p. 225
Mig. V, col. 1678
Viv. XII, p. 229
Mig. V, col. 1681
Viv. XII, p. 238
Mig. V, col. 1687,
1688
Viv. VII, p. 200
Mig. V, col. 802
Inédite
Viv. XI, p. 412
Mig. VI, col. 834
Mig. VI, col.
1075
Viv. IX, p. 418
Mig. V, col. 806
Viv. XI, p. 4
Mig. V, col. 1024
Viv. X, p. 397
Mig. V, col. 807
Viv. IX, p. 436
Mig. V, col. 854
Viv. XI, p. 391
Mig. V, col. 1422,
et VI, col. 1006
Inédite
296/321

30.7 Page 297

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DCCXI
Lyautry
………………………
DCCXII
………………………
DCCXIII
DCCXIV
DCCXV
DCCXVI
DCCXVII
DCCXVIII
DCCXIX
DCCXX
………………………
LONDRES. Musée
Britanique
RIOM. Cte de Chabrol
………………………
TURIN. Visit. (Copie)
AUTUN. Visitation
………………………
MONTÉLIMAR.
Visitation (Copie)
DCCXXI
1er alinéa ………………………
suite
………………………
DCCXXII
………………………
DCCXXIII (fragment)
ANNECY. Visit.
(Copie)
DCCXXIV
………………………
DCCXXV
………………………
DCCXXVI
DCCXXVII
DCCXXVIII
………………………
SAINT-MAURICE
(Valais). Abbaye
Ier Procès de
Canonisation
DCCXXIX
DCCXXX
DCCXXXI
DCCXXXII
………………………
………………………
LIMOGES. Visitation
………………………
Epistres spirituelles,
1626, l. VII
Epistres spirituelles,
1626, l. III
Ibid.
Datta, II, p. 62
………………………
………………………
………………………
………………………
Epistres spirituelles,
1626, l. V
Viv. IX, p. 451
Mig. V, col. 876
[439]
Viv. X, p. 399
Mig. V, col. 809
Viv. X, p. 402
Mig. V, col. 811
Viv. IX, p. 420
Mig. VI, col. 669
Inédite
Viv. XI, p. 79
Mig. V, col. 1131
Inédite
Mig. VI, col. 956
Viv. X, p. 404
Mig. V, col. 812
………………………
Inédite
Vie de la Mère J.-Ch.
De Bréchard (1892),
ch. VIII, (e), p. 1711174
Vie de la même
(1659), ch. VIII, (e),
p. 176
Epistres spirituelles,
1626, l. III
Viv. X, p. 398
Mig. V, col. 808
Viv. XII, p. 97
Mig. V, col. 1583
………………………
Inédit
Œuvres, 1641, t. II,
epist. IV
Epistres spirituelles,
1626, l. IV
Hérissant, II, p. 357
Datta, II, p. 63
Epistres spirituelles,
1626, l. IV
J. Vuÿ, La Philothée
de S. F. de S. (1879),
II, p. 280
Datta, II, p. 64
………………………
Vie de la Mère de
Viv. IX, p. 495
Mig. V, col. 1085
Viv. XI, p. 269
Mig. V, col. 1305,
et IX, col. 79
Viv. VII, p. 203
Mig. V, col. 814
Viv. IX, p. 421
Mig. VI, col. 669
Viv. X, p. 467
Mig. V, col. 898
(voir not. (386),
p. 126)
Viv. IX, p. 422
Mig. VI, col. 670
Inédite
Viv. X, p. 394
1174 Les Vies de quatre des premières Mères de l'Ordre de la Visitation Sainte-Marie... par la Révérende Mère
Françoise-Madeleine de Chaugy, Supérieure du premier Monastère de cet Ordre. Nouvelle édition... publiée par les
soins des Religieuses du premier monastère de la Visitation d'Annecy. Paris, Poussielgue, 1892.
297/321

30.8 Page 298

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DCCXXXIII
DCCXXXIV
DCCXXXV
DCCXXXVI
DCCXXXVII
DCCXXXVIII
DCCXXXIX
DCCXL
DCCXLI
DCCXLII
DCCXLIII
DCCXLIV
DCCXLV
DCCXLVI
DCCXLVII
DCCXLVIII
DCCXLIX
DCCL
DCCLI
DCCLII
DCCLIII
DCCLIV
ANNECY. Visit.
(Copie)
………………………
SAINT-MICHEL DE
MARIENNE (Savoie).
Mlle Magnin
LA TOUR-EN-
JARRET (Loire). M.
Ciognet
MILAN. Oratoire de
l’Addolorata (1900)
………………………
………………………
………………………
………………………
………………………
………………………
………………………
PARIS. Carmel de la
rue Denfert-Rochereau
Idem
AURILLAC. Visitation
………………………
LES PONTETS
(Doubs). M. le curé
Louvier
ANNECY. Visitation
(Ancien Ms. de l’Année
Sainte)
………………………
………………………
ANNECY. Grand-
Séminaire
ANNECY. Visit. (Hist.
de la Fondation)
Chastel (1659), ch.
XIV, p. 330
………………………
Epistres spirituelles,
1626, l. V
………………………
………………………
Datta, II, p. 64
Epistres spirituelles,
1626, l. V
Ibid., l. VII
Ibid.
Ibid., 1629, l. VII
Hérissant, VI, p. 227
Epistres spirituelles,
1626, l. II
Ibid., l. IV
Etudes religieuses
S.J., mars 1868
Ibid.
Epistres spirituelles,
1626, l. VI
Ibid., l. II
………………………
Année Sainte de la
Visitation (1689), t.
Ier, p. 163
Epistres spirituelles,
1626, l. II
Ibid., l. I
Mémoires de
l’Académ. Salés., t. II
(1880)
Œuvres, 1641, t. II,
epist. XV
Mig. V, col. 802
Mig. V, col. 1048
[440]
Viv. X, p. 446
Mig. V, col. 864
Inédite
Inédite
Viv. X, p. 377
Mig. VI, col. 830
Viv. XII, p. 164
Mig. V, col. 1639
Viv. XII, p. 207
Mig. V, col. 1664
Viv. X, p. 411
Mig. V, col. 816
Viv. IX, p. 424
Mig. V, col. 819
Viv. XII, p. 139
Mig. V, col. 1621
Viv. X, pp. 412-
414
Mig. V, col. 817,
818
Viv. X, p. 414
Mig. V, col. 820
Viv. VI, p. 549
Mig. V, col. 1466
Viv. X, p. 373
Mig. V, col. 783
Inédite
Viv. X, p. 420
Mig. VI, col. 672
Viv. X, p. 421
Mig. V, col. 822
Viv. VI, p. 276
Mig. V, col. 824
Viv. IX, p. 409
Mig. V, col. 791
298/321

30.9 Page 299

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DCCLV
DCCLVI
DCCLVII
variantes
texte
DC
CLVIII
pp. 178-
180 (ll.
1-12)
dernier
al.
DCCLIX
DCCLX
DCCLXI
pp. 183-
190 (ll.
1-4)
dernier
al.
DCCLXII
DCCLXIII
DCCLXIV
DCCLXV
DCCLXVI
DCCLXVII
DCCLXVIII
DCCLXIX
DCCLXX
DCCLXXI
DCCLXXII
DCCLXXIII
Idem
………………………
Ier Procès de Canonis.
SIENNE (Toscane).
Mis Chigi-Malvezzi
MARSEILLE.
Visitation (2d
Monastère)
Idem
CHATEAU DE LA
ROCHE-MAILLY
(Sarthe). Mise de
Mailly
ROME. Bibliothèque
Barberini
Idem
………………………
………………………
TURIN. Archiv. de
l’Etat
………………………
TURIN. Archiv. de
l’Etat (Copie)
REIMS. Visitation
TURIN. Visit. (Copie)
………………………
PIGNEROL. Visitation
CHAMBÉRY.
Archives du Sénat de
Savoie
ANNECY. Visit.
(Copie)
TURIN. Archiv. de
l’Etat (Copie)
MARSEILLE.
Visitation (1er
Monastère)
………………………
Hérissant, II, p. 368
Mig. VI, col.
1063
Viv. IX, p. 425
Mig. V, col. 821
Epistres spirituelles,
1626 (texte français),
1629 (texte latin), l. I
Epistres spirituelles,
1626, l. IV
Viv. VI, p. 285
Mig. V, col. 829
[441]
Viv. X, p. 423
Mig. V, col. 833
………………………
Inédit
………………………
Inédite
Pieralisi, Rimedio, etc. Viv. IX, p. 439
Rome, 1878 1175
Mig. V, col. 865
Ibid.
Epistres spirituelles,
1626, l. VII
Blaise, Nouvelles
inédites (1833), p. 30
Datta, II, p. 69
Epistres spirituelles,
1626, l. IV
Datta, II, p. 70
Hérissant, VI, p. 225
………………………
Epistres spirituelles,
1626, l. VI
Datta, II, p. 73
Mugnier, S. Fr. de S.
docteur en droit, etc.
(Chambéry, 1885)
Viv. IX, p. 446
Mig. V, col. 871
Viv. X, p. 286
Mig. VI, col. 872
Viv. VII, p. 204
Mig. VI, col. 673
Viv. IX, p. 426
Mig. V, col. 834
Viv. VII, p. 206
Mig. VI, col. 673
Viv. VII, p. 205
Mig. V, col. 836
Inédite
Viv. VII, p. 305
Mig. V, col. 1009
Viv. X, p. 424
Mig. VI, col. 675
………………………
Inédite
Datta, II, p. 344
Hérissant, VI, p. 36
Viv. X, p. 379
Mig. VI, col. 831
Viv. XII, p. 37
Mig. V, col. 1541
1175 Rimedio alle dispute de' Cattolici in Francia, proposto nel MDCXII da S. Francesco di Sales e commentato dal
sacerdote Sante Pieralisi, bibliotecario della Barberiniana, aggiunte tre Lettere del medesimo Santo. Roma, tipografia
Poliglotta della S. C, di Propaganda Fide, 1878.
299/321

30.10 Page 300

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DCCLXXIV
DCCLXXV
DCCLXXVI
DCCLXXVII
DCCLXXVIII
DCCLXXIX
DCCLXXX
(fragment)
DCCLXXXI
DCCLXXXII
DCCLXXXIII
DCCLXXXIV
DCCLXXXV
DCCLXXXVI
DCCLXXXVII
DCCLXXXVIII
DCCLXXXIX
DCCXC
DCCXCI
DCCXCII
DCCXCIII
DCCXCIV
DCCXCV
DCCXCVI
BREST. Mme Ravel de
Mouxy
………………………
………………………
MALINES (Belgique).
Archiv. de
l’Archevêché, vol.
Ignatiana, nº 11
(Copie)
TURIN. Archiv. de
l’Etat
MONTPELLIER.
Marquis de Prunarède
………………………
Inédite
Hérissant, II, p. 397
Epistres spirituelles,
1626, l. III
Viv. VII, p. 209
Mig. V, col. 838
Viv. IX, p. 430
Mig. V, col. 839
Viv. XII, p. 23
Hérissant, VI, p. 12 Mig. V, col. 1531
Datta, II, p. 75
Viv. X, p. 427
Mig. VI, col. 676
[442]
………………………
Inédite
ANNECY. Visitation ………………………
Inédit
………………………
………………………
FRESNES-LES-
RUNGIS (Seine). M.
Clugnet
MODÈNE. Archives
capitulaires
MONTELIMAR.
Visitation
………………………
NANCI. Visitation
TURIN. Abbé
Bianchetta, curé de
l’Annonciade
TOURNAI (Belgique).
Cte de Nédonchel
PARIS. Mis Albert
Costa de Beauregard
………………………
………………………
TURIN. Archiv. de
l’Etat
EVORA (Portugal). Mgr
Nunès
MONTÉLIMAR.
Visitation
………………………
Epistres spirituelles,
1626, l. VII
Ibid. (texte français),
1629 (texte italien), l.
I
Blaise (1833), XI, p.
26
Datta, II, p. 77
Blaise, Nouvelles
inédites (1833), p. 16
Datta, II, p. 79
………………………
Datta, II, p. 80
………………………
………………………
Epistres spirituelles,
1626, l. VII
Ibid., l. I
Datta, II, p. 81
………………………
………………………
Epistres spirituelles,
1626, l. V
Viv. XII, p. 214
Mig. V, col. 1671
Viv. VI, p. 290
Mig. V, col. 841
Viv. XI, p. 386
Mig. V, col. 1418
Viv. IX, p. 436
Mig. VI, col. 677
Viv. IX, p. 415
Mig. VI, col. 862
Viv. X, p. 429
Mig. VI, col. 677
Inédite
Viv. X, p. 430
Mig. VI, col. 679
Inédite
Mig. VI, col.
1076
Viv. XII, p. 233
Mig. V, col. 1684
Viv. VII, p. 210
Mig. V, col. 843
Viv. X, p. 431
Mig. VI, col. 679
Mig. VI, col. 960
Inédite
Viv. X, p. 433
Mig. V, col. 852
300/321

31 Pages 301-310

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31.1 Page 301

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DCCXCVII
DCCXCVIII
DCCXCIX
DCCC
DCCCI
DCCCII
DCCCIII
DCCCIV
DCCCV
DCCCVI
DCCCVII
DCCCVIII
DCCCIX
DCCCX
DCCCXI
DCCCXII
DCCCXIII
DCCCXIV
DCCCXV
DCCCXV
I
DCCCXV
II
pp. 283,
284 (ll.
1-24)
suite
pp. 286,
287 (ll.
………………………
………………………
TURIN. Archiv. de
l’Etat
LE MANS. Visitation
………………………
………………………
ROUEN. Visitation (1er
Monastère)
TURIN. Archiv. de
l’Etat (Copie)
BESANÇON. Mme de
la Garde
ANNECY. Visitation
MARIN (Chablais).
Archives de Blonay
………………………
TURIN. Archiv. de
l’Etat (Copie)
ROUEN. Visitation (1er
Monastère)
BRUXELLES.
Bibliothèque des PP.
Bollandistes
CHAMBÉRY.
Chanoine Collonges
BOLOGNE. Mis
Marsigli
LYON. Mme A.
Richard-Cottin
VILET-LES-NANCY
(Nancy). M. de
Scitivaux
Ibid. (texte français),
1629 (texte italien), l.
I
Ibid., 1626, l. VII
Datta, II, p. 82
Epistres spirituelles,
1626, l. I
Œuvres, 1641, t. II,
epist. XXI
Epistres spirituelles,
1626, l. VII
Hérissant, Opuscules,
IV, p. 49
Datta, II, p. 349
Viv. VII, p. 212
Mig. V, col. 845
Viv. XII, p. 234
Mig. V, col. 1684
Viv. IX, p. 431
Mig. VI, col. 680
Viv. VI, p. 277
Mig. V, col. 824
Viv. XI, p. 282
Mig. V, col. 1314
Viv. X, p. 205
Mig. V, col. 608
Viv. VII, p. 221
Mig. V, col. 855
Viv. XI, p. 412
Mig. VI, col. 835
[443]
………………………
Inédite
Datta, II, p. 86
Mémoires de
l’Académ. Salés., t. VI
(1883)
Epistres spirituelles,
1626, l. II
………………………
Hérissant, Opuscules,
IV, p. 46
Annuaire de
l’Université
catholique de Louvain
(1848), p. 259
………………………
Mémoires de
l’Académ. Salés., t.
XVI (1893)
Bulletin de la Société
d’Emulation de
l’Allier, t. VII (1859)
Viv. VII, p. 222
Mig. VI, col. 681
Viv. X, p. 438
Mig. V, col. 856
Mig. VI, col.
1092
Viv. VII, p. 224
Mig. V, col. 857
Mig. VI, col.
1092
Annales Salésiennes,
20 janvier 1891
MACON. Visitation ……………………… Mig. VI, col. 960
Idem
CHATEAU DE LA
ROCHE-MAILLY
………………………
Inédite
Epistres spirituelles, Viv. X, p. 138
1626, l. IV
Mig. V, col. 553
301/321

31.2 Page 302

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1-7)
ll. 8-17
ll. 18-35
pp. 288,
289, lig.
I
fin
DCCCXVIII
DCCCXIX
DCCCXX
DCCCXXI
DCCCXXII
DCCCXXIII
DCCCXXIV
DCCCXXV
DCCCXXVI
DCCCXXVII
DCCCXXVIII
DCCCXXIX
DCCCXXX
DCCCXXXI
DCCCXXXII
DCCCXXXIII
DCCCXXXIV
DCCCXXXV
DCCCXXXVI (fragt)
DCCCXXXVII
(Sarthe). Mise de Mailly
(Copie)
Idem
Idem
Idem
………………………
………………………
NAPLES. S. E. le
Cardinal Sanfelice
(1895)
Ier et IId Procès de
Canonisation
TOULOUSE. Visitation
LINCELLES (Nord).
Mlle Venant
………………………
TURIN. Maison-Mère
des PP. Salésiens
MOULINS. Abbé
Giraud, Aumônier du
Noviciat des FF. des
Ecoles chrétiennes
………………………
FREIHARN (Hte-
Bavière) Cte d’Yrsch
NICE. Mme Favet
………………………
ROUEN. Visitation (2d
Monastère)
………………………
………………………
………………………
ROME. Abbé Aguas
MADRID. Visitation
(1er Monastère)
………………………
………………………
Epistres spirituelles,
1626, l. IV
………………………
Hérissant, II, p. 424
Ibid., V, 275
………………………
Datta, II, p. 88
………………………
Hérissant, Opuscules,
IV, p. 45
Hérissant, II, pp. 426
et 438
………………………
………………………
Datta, II, p. 90
………………………
………………………
Epistres spirituelles,
1626, l. V
Hérissant, Opuscules,
IV, p. 14
Hérissant, II, p. 429
Epistres spirituelles,
1626, l. VII
Ibid., l. I
………………………
………………………
Epistres spirituelles,
Inédites
Viv. X, pp. 138-
140
Mig. V, col. 553,
554 (Voir not.
(820), p. 288)
Inédite. (Voir not.
(823), p. 289)
Viv. IX, p. 432
Mig. V, col. 859
Viv. XI, p. 455
Mig. V, col. 1489,
et VI, col. 1053
Inédite
Viv. IX, p. 433
Mig. VI, col. 682
Mig. VI, col. 961
Viv. IX, p. 435
Mig. V, col. 859
Viv. X, p. 440
Mig. V, col. 860
[444]
Mig. VI, col.
1091
Inédite
Viv. VI, p. 294
Mig. VI, col. 683
Inédite
Viv. XII, p. 4
Mig. V, col. 862
Viv. XI, p. 482
Mig. V, col. 1510
Viv. X, p. 442
Mig. V, col. 862
Viv. X, p. 445
Mig. V, col. 863
Viv. X, p. 215
Mig. V, col. 618
Viv. VI, p. 278
Mig. V, col. 824
Inédite
Inédit
Viv. X, p. 528
302/321

31.3 Page 303

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DCCCXXXVIII
DCCCXXXIX
DCCCXL (fragment)
DCCCXLI
DCCCXLII
DCCCXLIII
DCCCXLIV
DCCCXLV
DCCCXLVI
DCCCXLVII
DCCCXLVIII
DCCCXLIX
DCCCL (fragment)
DCCCLI
DCCCLII
DCCCLIII
DCCCLIV
DCCCLV
DCCCLVI
DCCCLVII
DCCCLVIII
DCCCLIX
………………………
………………………
………………………
………………………
ANNECY. Visitation
VILLERS-DEVANT-
ORVAL (Belgique). M.
Defrance
IId Procès de Canonis.
CHAMBÉRY.
Visitation
RENNES. R.P. Houet,
supérieur de l’Oratoire
VILLERS-DEVANT-
ORVAL (Belgique). M.
Defrance
DIJON. M. de
Charentenay
ROME. Collège
Romain
ANNECY. Visit. (Hist.
de la Fondation du 1er
Monastère de Lyon)
………………………
………………………
POITIERS. Visitation
ANNECY. RR. PP.
Missionnaires de St-Fr.
de Sales
CHAMBERY.
Visitation
SENS. Trésor de la
Métropole
………………………
MARIN. (Chablais).
Archive de Blonay
TURIN. Archiv. de
1626, l. IV
Ibid., l. II
Ibid. (Voir note (919),
p. 323
Ibid., l. VII. (Voir
note (923), p. 324
Ibid., l. V
Datta, II, p. 66
………………………
………………………
Epistres spirituelles,
1626, l. V
………………………
………………………
………………………
Bulletin de la Soc.
Achéol. De Tarn-et-
Garonne, 1877
………………………
Hérissant, V, p. 10
Epistres spirituelles,
1626, l. V
Hérissant, VI, p. 35
Datta, II, p. 350
………………………
Semnaine religieuse
du dioc. de Senset eu
Auxerre, 17 août 1901
Hérissant, III, p. 4
Mémoires de
l’Académ. Salés., t. VI
(1883)
Datta, II, p. 91
Mig. V, col. 997
Viv. X, p. 350
Mig. V, col. 738
Viv. X, p. 414
Mig. V, col. 818
Viv. X, p. 165
Mig. V, col. 571
Viv. XII, p. 42
Mig. V, col. 1545
Viv. X, p. 410
Mig. VI, col. 671
Inédite
Mig. IX, col. 85
Viv. X, p. 447
Mig. V, col. 879
(Voir note (944),
p. 332)
Viv. X, p. 335
Mig. V, col. 726
Inédite
Inédite [445]
Mig. VI, col.
1064
Viv. X, p. 449
Mig. V, col. 1403
Viv. XII, p. 148
Mig. V, col. 1627
Viv. XII, p. 36
Mig. V, col. 1540
Viv. XI, p. 413
Mig. VI, col. 835
Inédite
Viv. VII, p. 226
Mig. V, col. 881
Viv. VI, p. 296
303/321

31.4 Page 304

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DCCCLX
DCCCLXI
DCCCLXII
DCCCLXIII
DCCCLXIV (fragt)
DCCCLXV
DCCCLX
VI
pp. 369,
370 (ll.
1, 2)
(ll. 3-7)
fin
DCCCLXVII
DCCCLXVIII
DCCCLXIX
DCCCLXX
DCCCLXXI
DCCCLXXII
l’Etat
………………………
MARIN. (Chablais).
Archive de Blonay
ROUEN. Visitation (1er
Monastère)
………………………
TURIN. Archiv. de
l’Etat (Copie)
………………………
ANNECY. Visitation
Idem
Idem
TURIN. Marquise
Pensa
CHAMBÉRY. Arhives
du Sénat de Savoie
UEDEM (Prusse
rhénane). Visitation
………………………
ANNECY. Visitation
CONCISE (Thonon).
M. Le Corbellier
Epistres spirituelles,
1626, l. IV
Mémoires de
l’Académ. Salés., t. VI
(1883)
Hérissant, Opuscules,
IV, p. 50
Epistres spirituelles,
1626, l. V
Datta, II, p. 343
Epistres spirituelles,
1626, l. VII
Datta, II, p. 72
Epistres spirituelles,
1626, l. V (Voir note
(1060), p. 370)
Datta, II, p. 72
Ibid., p. 92
Mugnier, S. Fr. de S.,
docteur en droit, etc
Mig. VI, col. 684
Viv. X, p. 453
Mig. V, col. 882
Viv. VI, p. 297
Mig. V, col. 886
Viv. X, p. 451
Mig. V, col. 1633
Viv. X, p. 379
Mig. VI, col. 831
Viv. XII, pp. 192,
193
Mig. V, col. 1667,
1668
Viv. VII, p. 208
Mig. VI, col. 674,
675
Viv. VII, p. 208 et
XI, pp. 451, 452
Mig. VI, col. 675,
et V, col. 1487
Viv. VII, p. 208
Mig. VI, col. 675
Viv. VII, p. 228
Mig. VI, col. 684
[446]
………………………
Inédite
Epistres spirituelles,
1626, l. V. (Voir note
(1089), p. 376)
………………………
Viv. XI, p. 450
Mig. V, col. 1486
Mig. VI, col. 957
………………………
Inédite
APPENDICE
I
A
IId Procès de Canonis. ………………………
Inédite
B
PARIS. Bibl. nat.,
Galerie Mazarine
Blaise, Nouvelles
Viv. IX, p. 413
inédites (1883), p. 14 Mig. VI, col. 861
ANNECY. Visit. (Hist.
C
de la Fondation du 1er ……………………… Mig. VI, col. 955
Monastère)
D
BESANÇON. Mme
Doroz, née d’Arcine
………………………
Inédite
304/321

31.5 Page 305

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(1895)
E
1er et 2e
alinéas
ANNECY. Visit. (Hist.
de la Fondation du 1er ………………………
Monastère)
Inédits
3e alinéa Idem
……………………… Mig. IX, col. 83
fin
Idem
………………………
Inédite
F
PIGNEROL. Visitation ………………………
Inédite
G
ANNECY. Visitation ………………………
Inédite
LYON. Archiv. du
H
Rhône, Fonds Malte, H. ………………………
Inédite
240, nº 29
II
A
B
C
D (fragment)
………………………
CAROUGE (canton de
Genève). Mlle Vuÿ
ANNECY. Archiv. de
la Mairie (Reg. des
Délib. municip., vol.
33)
TURIN. Archiv. de
l’Etat
Hist. Patriæ
Monumenta, t. XI,
Scriptores, t. IV
(Taurini, 1863), p.
1016
J. Vuÿ, La Philothée
(1879), II, p. 123
………………………
………………………
Inédit
Inédit [447]
305/321

31.6 Page 306

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Table des matières
_____
Avant-Propos ……………………………………………………………………………. V
Avis au Lecteur ………………………………………………………………………….. XVI
_____
DCLIII A LA COMTESSE DE TOURNON. Comme l'Evêque de Genève
entendait réduire un délinquant à l'obéissance ; ses griefs contre une
famille qui le protégeait. Le plus grand désir du Saint ……………… 1
ANNÉE 1611
DCLIV
DCLV
DCLVI
DCLVII
DCLVIII
DCLIX
DCLX
DCLXI
DCLXII
DCLXIII
DCLXIV
A M. MILLETOT (Inédite). L'Evêque de Genève recommande
à son ami les négociations du vicaire général de son diocèse et lui
donne des nouvelles de sa fille Marie-Marguerite, Religieuse à la
Galerie …………………………………………………………….
A L'ABBESSE DU PUITS-D'ORBE. Témoignages d'affectueux
dévouement. De belles et bonnes confitures. Deux recettes
pour rétablir entièrement la santé ………………………………….
A Mlle DE CHASTEL. A quelle condition les exercices de piété
revigorent l'âme, même s'ils sont faits sans goût. La variété et
l'unité des sentiments ; le monde et le Ciel. Eloge de la future
Mère de Chastel, alors novice ……………………………………..
A LA MÈRE DE CHANTAL (Inédite). Ne rien regarder, ne rien
aimer que dans la lumière et l'amour de Notre-Seignenr. Un «
livret » qui a besoin d'une préface pour être plus intelligible.
Communication promise pour le jour même ou le lendemain …….
A Mme DE LA FLÉCHÈRE (Inédite). Dans quels cas il ne faut
pas s'abstenir de communier. La variété des petits accidents de
cette vie et l'état immobile de la sainte éternité. Deux nouvelles
recrues pour la Visitation ………………………………………….
A Mme DE MONFORT (Inédite). Félicitations à l'occasion d'une
naissance …………………………………………………………..
A LA MÈRE DE CHANTAL. La conversion de Mme de Saint-
Cergues : la cérémonie se fera dans l'oratoire de la Galerie.
Pourquoi faut-il bien traiter son cœur et le « tenir en bon [449]
point. » Ou rien, ou Dieu. Notre amour pour Dieu, jamais
suffisant, jamais excessif …………………………………………..
A LA PRÉSIDENTE FAVRE. Convalescence de la Mère de
Chantal. La « chere grande fille. » Quand les «
embarassemens » d'une grande maison augmentent, « il faut tant
plus appeller Nostre Seigneur a nostr'ayde. » La plus grande
consolation à la fin de la journée …………………………………..
A M. DE QUOEX. La nouvelle ruche de la Visitation. Une
maladie inconnue à Galien. Une mère abeille « trop aspre a la
cueillette. » La Mère de Chantal et les saintes veuves de l'Eglise
A LA MÈRE DE CHANTAL. La gloire de Dieu, maîtresse et
régente des affections de François de Sales. Un défi entre deux
Saints ; leur unité d'âme et de cœur ………………………………..
A M. MILLETOT (Inédite). Mme de Chantal apprend la mort de
5
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DCLXV
DCLXVI
DCLXVII
DCLXVIII
DCLXIX
DCLXX
DCLXXI
DCLXXII
DCLXXIII
DCLXXIV
DCLXXV
DCLXXVI
DCLXXVII
DCLXXVIII
son père. Son « desplaysir » et sa « vertu » dans cette
circonstance. Eloge du défunt. Le bruit de la future translation
du saint Evêque à un autre siège n'est pas fondé …………………..
A LA PRESIDENTE BRULART. Comment connaître
l'intention de Notre-Seigneur à propos d'une vocation.
L'holocauste « en effect » et l'holocauste « en affection. » Une «
hantise » indiscrète et superflue. Il est mieux, pour une femme
du monde, d'ouïr la sainte Messe tous les jours que de faire l'oraison
chez soi. Santé et sainteté ………………………………………
A LA MÈRE DE CHANTAL (Inédite). Un moyen de « recreer
nostre pauvre cœur. » — La Mère de Chantal est avertie de ne pas
se tenir à genoux pendant son oraison ……………………………..
A Mgr CAMUS. Il faut beaucoup souffrir des enfants en bas âge.
Quatre mots de saint Paul, règle des prédicateurs. La patience
et la doctrine ……………………………………………………….
A LA MÈRE DE CHANTAL. Le nom que le Saint avait d'abord
adopté pour ses chères filles ; pourquoi il le changea. Sa dévotion
â sainte Françoise Romaine. Le « petit Batiste » et « Celse
Benine » ……………………………………………………………
AU PRÉSIDENT FAVRE. Les « pauvres gens d'Estrembieres ;
» prière de les défendre contre leurs frères rebelles ……………….
A LA MÈRE DE CHANTAL (Inédite). Un arbitrage du Saint
dans une querelle entre soldats …………………………………….
A LA MÊME. Le baume et les « basses herbettes » de la Croix.
Grandeur de saint Joseph ; pourquoi pouvait-il faire envie aux
Anges et défier le Ciel. La veuve de Naïm et la mère de Celse-
Bénigne ……………………………………………………………
AU PRÉSIDENT FAVRE. Compassion du Saint pour les
misères du pays au printemps de 1611 …………………………….
A UNE DAME INCONNUE. Le monde et ses séductions.
Mépris extrême du Saint pour la gloire. Les exigences du
Créateur et celles du monde ……………………………………….
A Mme DE LA FLÉCHÈRE. Pourquoi les petites chutes et
imperfections ne doivent étonner ni l'âme chrétienne, ni son
directeur ………………………………….………………………..
AU DUC DE SAVOIE. Paris, Chambéry, réclament l'Evêque de
Genève pour le Carême de l'année suivante : que le duc de Savoie
décide, le Saint se conformera à son désir …………………………
A L'ABBE D'ABONDANCE. Humble récit des
commencements de la Visitation. Pourquoi Mme de Chantal est-
elle venue « a son chetif pere. » Sa prudence et sa force virile.
Jacqueline Coste. « Un doux et gracieux refuge. » L'esprit
et la vie intérieure des premières Religieuses. Dévouement de
François de Sales à Dieu et à son Eglise. Pour la charité, toute
peine est bien aimée. Un Saint qui avait le don d'ouvrir les cœurs
A LA MÈRE DE CHANTAL (Fragment inédit). Pourquoi faire
ce qui est requis pour tenir sa santé un peu forte. Ce que le Saint
demandait à la Messe avec une « ardeur extraordinaire. »
Affectueux dévouement du Fondateur pour la Mère de ses chères
filles ………………………………………………………………..
A Mgr CAMUS. Recommandation en faveur d'un ancien
serviteur d'Antoine Favre ………………………………………….
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DCLXXIX A M. DES HAYES. Premiers projets de Denis de Granier ; son
portrait. Les jeunes gens et les difficultés. Menaces de guerre 43
DCLXXX A M. DE BAY. Un père de famille désire que son fils achève
ses études au collège de Savoie à Louvain. Le Saint sollicite
l'admission du jeune étudiant ……………………………………… 45
DCLXXXI A LA MÈRE DE CHANTAL. — L'échange du Cœur du Sauveur
avec celui d'une « benite Sainte. » François de Sales désire pour
lui et souhaite à la Mère de Chantal la même faveur ……………… 47
DCLXXXII AU PRÉSIDENT FAVRE. Les appréhensions et les difficultés
d'un voyage à Gex. Les exigences du service de Dieu et des
âmes, plus impérieuses encore ……………………………………. 48
DCLXXXIII AU MARQUIS DE LANS. Le Saint donne avis de son voyage
à Gex ………………………………….…………………………... 49
DCLXXXIV A Mme DE VIGNOD. Divin échange. Ce qu'il est utile
d'imiter dans la vie de sainte Catherine de Sienne. [451] Dieu
seul mérite d'être servi et suivi avec passion. La Communion
fréquente et les âmes faibles. Ce que font les bergers en Arabie.
L'obéissance assure la protection de Notre-Seigneur ………….. 50
DCLXXXV A LA PRÉSIDENTE BRULART. Progrès spirituel de la Mère
de Chantal. Les tribulations et la sainteté. Qu'est-ce qui
approche Notre-Seigneur de nos cœurs …………………………… 53
DCLXXXVI A LA PRÉSIDENTE FAVRE (Inédite). L'ambition d'un
prédicateur de Carême. — Les cœurs simples et humbles, et la
Croix ………………………………….…………………………… 54
DCLXXXVII AU PRÉSIDENT FAVRE. Le Saint s'en remet à son ami pour
informer le Sénat qu'il accepte l'invitation de prêcher le Carême de
1612 ………………………………….……………………………. 55
DCLXXXVIII A LA MÈRE DE CHANTAL. La religion catholique à Gex ;
espérance de l'y voir refleurir. L'apostolat du Saint ; un résultat
qu'il n'estime pas médiocre ……………………………………….. 56
DCLXXXIX A M. DE CHATILLON (Inédite). Recommandation en faveur
d'un solliciteur dans la gêne ……………………………………….. 58
DCXC AU GRAND-PRIEUR ET AUX RELIGIEUX DE SAINT-
CLAUDE. La chrétienté de Divonne et les frais du culte sont
confiés au zèle des Religieux de Saint-Claude ……………………. 59
DCXCI A LA MÈRE DE CHANTAL. Annonce du retour à Annecy …. 61
DCXCII A LA MÊME. Effusions de ferveur. Fruit du mystère de la
Pentecôte. L'esprit de force et l'esprit de sagesse ; l'amour sacré
et la souveraine Unité ……………………………………………... 61
DCXCIII A LA MÊME. Les armes et la devise de la Visitation. La
Congrégation est « vrayement un ouvrage du cœur de Jesus et de
Marie. » Ses armes symbolisent la soigneuse mortification du
cœur, propre à l'Institut ……………………………………………. 63
DCXCIV AU DUC DE SAVOIE. Sollicitation de la grâce pour un
coupable ………………………………….……………………….. 64
DCXCV AU MÊME. Défense du Saint contre une calomnie. Son
inviolable fidélité au duc de Savoie. Ce qu'il a fait à Gex. Il a
déjà rendu compte de tout ce qu'il a appris discrètement sur les
projets des Français. Une proposition du sieur de la Nous.
Les Suisses catholiques et le pays de Berne. Vains efforts des
brouillons et des calomniateurs pour représenter l'Evêque de
Genève « avec des affections estrangeres » ……………………….. 66
308/321

31.9 Page 309

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DCXCVI
DCXCVII
DCXCVIII
DCXCIX
DCC
DCCI
DCCII
DCCIII
DCCIV
DCCV
DCCVI
DCCVII
DCCVIII
DCCIX
DCCX
DCCXI
A Mgr FENOUILLET. Le rétablissement du culte à Gex et part
qu'y a prise le Chapitre de Genève. Sollicitation du placet royal
pour lui annexer un bénéfice. Petites nouvelles. Retour à la
foi d'un gentilhomme. Pourquoi la connaissance de la vérité n'est
pas toujours suivie de la conversion [452] …………………………
A UNE RELIGIEUSE. En quoi consista la rare mortification de
saint Jean-Baptiste. Facilité de l'imiter par la communion
spirituelle, à défaut de la Communion réelle. Homme céleste ou
ange terrestre. Tout nous crie : Amour, amour ! Des dames
qui « font merveilles » …………………………………………….
A LA MÈRE DE CHANTAL. Louanges de saint Jean-Baptiste
: plus que vierge, plus que confesseur et prédicateur, plus que
docteur et martyr, plus qu'évangéliste et apôtre, plus que prophète
et patriarche, plus qu'ange et plus qu'homme. Ses prérogatives
admirables. Quelqu'un de plus grand encore ……………………
A LA MÊME. Le mystère de la Visitation. La très sainte
Vierge en la maison de Zacharie ; effets miraculeux de sa présence.
Effusions d'humble amour pour le Verbe incarné ………………
A M. DES HAYES. Assurance réciproque d'invariable amitié.
Eloge du Prieur des Feuillants et pour quelles raisons
particulières il s'est fait estimer du Saint. Rupture d'un mariage
princier. Le deuil d'un ami. Il n'est pas accordé à l'Evêque de
Genève d'aller prêcher un Carême à Paris. La marquise de
Maignelay. Derniers jours d'un poète …………………………..
A Mme DE BERTRAND DE LA PERROUSE (Inédite). Les
insistances d'un jeune gentilhomme. Prudence et charité du Saint
dans une affaire délicate …………………………………………...
A LA MÈRE DE CHANTAL. Mgr Camus annoncé pour une
exhortation à la Galerie ……………………………………………
AU PRÉSIDENT FAVRE. Message confié à un ami ………….
A Mme DE LA FLÉCHÈRE. Ne rien rabattre de nos pratiques
religieuses par respect humain. Vouloir savoir d'où procèdent les
sécheresses : curiosité superflue. Nouvelles d'un Feuillant, d'un
Cordelier, d'un Cistercien. Une « bonne petite filleule » du Saint,
« toute de succre » …………………………………………………
A LA MÈRE DE CHANTAL. Le catéchiste de Notre-Dame .
A UNE DAME. Le grand et l'unique bonheur d'une femme
chrétienne ………………………………………………………….
A Mme DE LA FLÉCHÈRE. Quel profit tirer des chutes.
Servir Dieu parmi les sécheresses nous est chose plus dure, selon
notre goût, mais plus profitable selon le goût de Dieu. Les «
viandes seches » et les hydropiques. Exercer la débonnaireté à
tout propos et sans propos ………………………………………….
A LA MÈRE DE CHANTAL. Souhaits à l'occasion de la Saint-
Bernard. Les vertus caractéristiques du grand Docteur, d'après
saint François de Sales …………………………………………….
A LA MÊME. Une vocation à contrôler. Sujet d'oraison
conseillé pour des novices à la veille de leur profession …………..
A Mme DE LA FLÉCHÈRE (Inédite). Jubilé de Thonon.
Lorsque, par charité, l'on dérange ses exercices de dévotion, Dieu
ne cesse pas d'être servi …………………………………………….
A M. MILLETOT. Une réponse claire sur trois points.
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93
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DCCXII
DCCXIII
DCCXIV
DCCXV
DCCXVI
DCCXVII
DCCXVIII
DCCXIX
DCCXX
DCCXXI
DCCXXII
DCCXXIII
DCCXXIV
Pourquoi l'amitié de saint François de Sales pour ses amis était plus
forte que la mort. Le critère des vraies amitiés. Une main «
exquise et rare » et une matière « de mauvais lustre. » Pour quels
motifs l'Evêque de Genève déteste les contentions et disputes entre
catholiques. Il n'a pas trouvé à son goût certains écrits de
Bellarmin. La pauvre mère poule et les poussins qui
s'entrebecquettent. Adroite et charitable critique ……………….
A LA MÈRE DE CHANTAL. Sollicitude pour la Mère de
Chantal, alors absente de Savoie. Les affaires : leur multiplicité
ne doit pas troubler, ni leur difficulté émouvoir. Nouvelles de
Mlle de Blonay. Sermon sur la Nativité de la très sainte Vierge.
— Affection des deux Fondateurs pour la Sœur Favre …………….
A LA MÊME. Comment traiter des affaires de la terre.
L'amour transforme tout. Santé et sainteté de François de Sales.
Le moyen de parvenir. Communauté de désirs et d'aspirations
entre la Mère de Chantal et son Directeur. La sainte Croix ; elle
béatifie ceux qui l'aiment et la portent. L'autel des crucifiés ……
AU DUC DE SAVOIE. Eboulement à Sixt. Détresse des
habitants qui en est la suite. Le Saint recommande ses diocésains
à la charité du duc de Savoie ……………………………………….
A M. BRISSON (Inédite). Regrets de ne pouvoir accepter de
prêcher un Carême à Saint-Merry. Témoignages d'estime au
destinataire qui avait transmis l'invitation …………………………
A LA SŒUR DE BRÉCHARD. Notre-Seigneur saura bon gré à
qui porte et supporte les âmes qui se trouvent faibles ……………..
A LA SŒUR ROGET (Inédite). Ce qu'il faut faire après «
quelques petitz mauvais pas. » — Avoir le cœur franc envers les
Supérieurs. La « petite bienaymee Françon » …………………..
A LA MÈRE DE CHANTAL. Souhaits de bon et saint voyage.
Affectueux messages pour les compagnons, les parents et les
amis de la Mère de Chantal ………………………………………..
AU BARON DE VILLETTE. A propos de la mort d'une parente
: regrets, condoléances, consolations, promesse de prières ………..
AU PRESIDENT FAVRE (Inédite). La cure de Saint-Sigismond
en 1611 : l'ami du destinataire en mériterait une meilleure ………..
A LA SŒUR DE BRECHARD. — Un Père vigilant qui a peur
d'être blâmé pour ne l'être pas assez. Pourquoi ne faut-il pat
emporter toutes les couronnes. C'est encore de la charité que de
laisser faire aux autres quelque chose. De qui doit-on attendre
l'issue des maladies ………………………………………………..
A M. MILLETOT. La plus mauvaise façon de mal dire. Il est
presque impossible « de corriger l'immoderation moderement. »
Ce qui arrive souvent aux chasseurs. A César ce qui est à César,
mais aussi à Dieu ce qui est à Dieu ……………………………….
A UN INCONNU (Fragment inédit). Des bailliages qui
n'avaient pas été visités « il y a plus de cent ans. » Bourgeois et
bourgeoises de Genève aux vendanges et de quoi ils étaient étonnés,
ayant ouï le Saint …………………………………………………..
A DOM ASSELINE. Amitié du Saint pour l'Ordre des
Feuillants. La disposition des matières dans une Somme de
théologie ; moyen de rendre celle-ci « plus friande et plus
aggreable. » Les questions inutiles. Souhaits et témoignages
98
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103
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32 Pages 311-320

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32.1 Page 311

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d'affection ………………………………………………………….
DCCXXV A LA MÈRE DE CHANTAL. De quels principes doit s'inspirer
la Mère de Chantal pour fixer la durée de son séjour en Bourgogne.
Comme le monde censure ce qui est fait pour Dieu. Nouvelles
de la Visitation …………………………………………………….. 121
DCCXXVI A M. DE QUOEX. Mlle de Blonay sera la bienvenue à Annecy ;
qu'elle y vienne sans attendre le retour de la Mère de Chantal ……. 123
DCCXXVII AU MARQUIS DE LANS. L'Evêque de Genève avertit le
gouverneur de son départ pour Gex ………………………………. 124
DCCXXVIII A LA MÈRE DE CHANTAL. Ferveur nouvelle de charité et de
zèle pour Notre-Seigneur. La beauté de la foi transporte François
de Sales d'amour et de gratitude ; il en voit plus clairement la
grandeur, en pays hérétique ……………………………………….. 125
DCCXXIX A M. DE CHATILLON. Lettre d'affaires ……………………… 126
DCCXXX AU MARQUIS DE LANS. L'Evêque de Genève expose au
gouverneur le sujet et les résultats de son voyage à Gex. Les
commissaires, l'un « grand catholique, » et l'autre « grand heretique,
» Exécution de l'édit de Nantes à Gex. Espérances fondées
pour le prochain rétablissement du culte ………………………….. 127
DCCXXXI A Mme D'AIGUEBELETTE (Inédite). Le meilleur témoignage
de fidélité, Souffrance et action, La mortification [455] par
élection et par acceptation. Quel est le vrai temps de la moisson
des affections. — Alerte provoquée par la Sœur de Chastel. —
L'assistance des malades dans la maison de la Galerie. On «
desseigne » à Dijon un monastère de la Visitation ………………… 131
DCCXXXII — A LA SŒUR DE CHASTEL. — Encourageantes paroles à une
convalescente, Consolation que le Saint souhaite à la Mère de
Chantal pour son retour à Annecy …………………………………. 133
DCCXXXIII A L'ABBESSE DE SAINTE-CATHERINE. Souhaits de bonne
fête à une Abbesse, sa cousine. Prédications et auditeurs du Saint 135
DCCXXXIV A Mme DE LA FLÉCHÈRE. Comment témoigner la vraie
fidélité à Notre-Seigneur. Condition de la vie humaine. Ce
qui arrive entre les enfants des hommes …………………………… 136
DCCXXXV A LA MÈRE DE CHANTAL (Inédite). Condescendance du
Saint pour une Religieuse malade. Promesse d'une visite à la
Galerie pour le lendemain …………………………………………. 137
DCCXXXVI A LA MÊME (Inédite). Une journée très occupée. C'est
Notre-Seigneur qui unit les cœurs indissolublement ………………. 138
DCCXXXVII A LA MÊME. Les occupations du Saint privent la maison de la
Galerie de ses entretiens. Une visite de la baronne de Thorens.
Charité délicate ………………………………………………… 139
DCCXXXVIII A UNE DAME. Où se révèlent l'amour pur de Notre-Seigneur
et l'amoureuse fidélité à son service. Laissons Dieu façonner
notre cœur tout à son gré. — Cinq élévations propres à sanctifier
les souffrances. Pourquoi et comment faut-il recourir aux
remèdes. Profit spirituel de la maladie ………………………… 140
ANNÉE 1612
DCCXXXIX A LA MÈRE DE CHANTAL. Le baume sacré du nom de Jésus
; quels sont les cœurs qu'il pénètre de son parfum. — Pieuses
aspirations. Souhaits pour la Mère de Chantal. Le mystère 143
311/321

32.2 Page 312

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DCCXL
DCCXLI
DCCXLII
DCCXLIII
DCCXLIV
DCCXLV
DCCXLVI
DCCXLVII
DCCXLVIII
DCCXLIX
DCCL
DCCLI
DCCLII
DCCLIII
DCCLIV
de la Circoncision. Prière au « divin Poupon. » La
circoncision spirituelle …………………………………………...
A M. MILLETOT. Souhaits de nouvel an ……………………
AU PÈRE POLLIENS. Un « livret » dont le Saint aurait désiré
avoir une copie. Sa dévotion pour le bienheureux Pierre Favre
et ce qu'il pensait de l'histoire de sa vie ………………………….
A M. DES HAYES. Bons effets que les amis du Saint
attribuaient à ses lettres. M. de Granier. Le duc de Nemours
ne désire pas céder son hôtel ……………………………………..
A LA MÈRE DE CHANTAL. Les deux et le soleil [456]
comparés à la chair du Sauveur. Contemplation angélique et
Communion eucharistique. Une sentence du grand saint
Antoine. Pourquoi Dieu nous abaisse et se cache …………….
A LA PRIEURE DU PUITS-D'ORBE. L'appui des créatures
et la protection de la providence divine. Quand il nous arrive
quelque chose contre notre gré, que faire ? Jugements et
manquements qui ne sont pas mortels. Message ……………..
A M. DE BÉRULLE. M. de Marillac porteur d'une lettre de M.
de Bérulle. Sympathies du Saint pour la Congrégation de
l'Oratoire. L'hôtel du duc de Nemours n'est pas libre. Offre
de services et remerciements pour l'envoi de deux livrets ……….
A Mlle ACARIE. La sainte bienveillance d'une Bienheureuse
pour l'Evêque de Genève. Pourquoi aurait-il désiré faire le
voyage de Paris ? Sentiment de François de Sales sur l'Oratoire
naissant ; regrets de n'avoir pu prêter son concours à M. de
Bérulle. Souhaits pour la nouvelle Congrégation …………….
A LA MÈRE DE CHANTAL. Entre les deux Fondateurs, il n'y
avait « ni second, ni premier. » Modèle d'exhortation destinée
à des prétendantes avant leur vêture. Ce qu'on enseigne aux
Novices. — Sœur Jeanne-Charlotte de Bréchard leur maîtresse ;
obéissance qu'on lui doit. Une illusion que les Novices ne
sauraient avoir ……………………………………………………
A LA MÊME. Le très grand saint Paul. Un désir du Saint.
Pourquoi Dieu soustrait ses douceurs. Prière à Jésus. A
quelle classe de personnes la douce charité profite davantage ……
A LA MÊME (Billet inédit). Une résolution finale à prendre
pour l'emplacement de l'oratoire de la Visitation …………………
A LA MÊME. Un remède souverain : les prières de la Mère de
Chantal et la relique de sainte Apolline. Preuve sensible de la
communion des Saints ……………………………………………
A LA PRÉSIDENTE BRULART. Ce qui rend profitable la
nourriture corporelle et spirituelle. Sentiments d'humilité
proposés à une âme privée de la Communion fréquente. Sentir
qu'on est tout à Dieu et « en train de l'orayson » ne dispense pas
de s'exercer aux vertus et de mortifier ses passions ………………
A LA REINE MÈRE, MARIE DE MÉDICIS. L'ambassadeur
de l'Evêque de Genève et du petit peuple catholique de Gex auprès
de la reine mère …………………………………………………..
A M. DE CHATILLON. Une pauvre demoiselle recommandée
à la Sainte-Maison de Thonon ……………………………………
A M. DE QUOEX. Zèle de la Mère de Chantal et du Saint pour
la conversion d'un médecin. Brebis errantes et troupeau fidèle.
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Préoccupations et résignation du Fondateur de la Visitation ….
DCCLV AU PÈRE DE BONIVARD. Grave maladie de la Mère de
Chantal. Une oraison prolongée et répétée sur la troisième
demande du Pater. La résignation et la confiance d'un
Fondateur ………………………………………………………... 170
DCCLVI A Mme DE SAINT-CERGUES. Les amitiés qui ont Dieu pour
auteur, et la distance des lieux. Une occupation agréable et
précieuse pour l'Evêque de Genève ……………………………… 171
DCCLVII A SA SAINTETE PAUL V. A quoi servent les canonisations
; le Saint les jugeait presque nécessaires pour le temps où il vivait.
Il demande au Pape de canoniser le bienheureux Amédée ;
motifs qu'il fait valoir en faveur de sa supplique ………………… 173
DCCLVIII — A LA SŒUR FAVRE. — Questions et conseils. Comment «
la grande Fille » du Saint devait gouverner son cœur et
l'encourager souvent. Le souverain bonheur de l'âme ………… 178
DCCLIX A Mme DE PEYZEU (Inédite). Une mère du Saint, par alliance
spirituelle. Compliments et paroles d'affection ………………. 181
DCCLX A Mgr GERMONIO. La controverse sur le pouvoir temporel
des Papes et l'autorité des Conciles. De quel côté penchent les
parlementaires et les hommes d'Etat. Esprit et tendance du
siècle. Un remède plus efficace que les discussions des
théologiens. Ce que doivent faire les prédicateurs. L'entente
des Prélats, de la Sorbonne et des Religieux, bientôt mortelle à
l'hérésie. Moyens de ménager cette union ……………………. 183
DCCLXI A LA PRÉSIDENTE BRULART. Une solution également
difficile et inutile. Etat des esprits en 1611 et en 1612. Zèle
que le Saint jugeait inopportun. Dangers de certaines
discussions agitées par des docteurs incompétents. Souveraine
autorité spirituelle du Pape ; droits qu'elle lui confère. Devoirs
corrélatifs des chrétiens envers le Pape et l'Eglise. Triple
alliance qui doit exister entre le Pape et les rois. Les deux
autorités ne se contrarient pas, mais « s'entreportent l'une l'autre » 191
DCCLXII A LA MÈRE DE CHANTAL. La plus heureuse salutation qui
fut jamais. Les souhaits de l'Ave Maria ……………………… 195
DCCLXIII AU DUC DE SAVOIE. Requête en faveur d'un prisonnier
innocent ………………………………….……………………… 196
DCCLXIV A LA MÈRE DE CHANTAL. L'insensibilité spirituelle : en
quoi consistait cette épreuve pour la Mère de [458] Chantal.
Conseils appropriés. Le haut point de la sainte résignation.
Les ténèbres au pied de la Croix …………………………………. 197
DCCLXV AU DUC DE SAVOIE. Supplique du Saint au nom d'un
gentilhomme qu'il avait assisté à ses derniers moments …………. 199
DCCLXVI A M. DES HAYES. Le nid du Saint. Messages et nouvelles 201
DCCLXVII A M. DE QUOEX (Inédite). « La pauvre dame Jaqueline. »
Dureté de M. Gilette. Le P. de Bonivard, S. ]., prédicateur du
Carême à Annecy. Contentement mutuel du Religieux et du
bon peuple annécien. Affluence des Chambériens aux sermons
de saint François de Sales ……………………………………….. 203
DCCLXVIII AUX RELIGIEUSES DE LA VISITATION D'ANNECY.
Pourquoi saint François de Sales se résignait à vivre en ce
misérable monde. Abeilles mystiques et mouches libertines :
le bonheur et les exercices des unes et des autres mis en parallèle. 205
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Un festin plus délicieux que celui d'Assuérus. Les
spirituelles saillies sur les collines de Calvaire, d'Olivet, de Sion,
de Thabor. Bonheur de la vie religieuse ………………………
DCCLXIX AU BARON DE CHEVRON. Envoi d'une lettre d'affaires ….. 207
DCCLXX A M. DE QUOEX. Le Saint s'emploie pour obtenir l'expédition
d'un procès ………………………………………………………. 208
DCCLXXI A LA MÈRE DE CHANTAL (Billet inédit). Cent mille
bonjours ………………………………….……………………… 210
DCCLXXII A LA MÊME. Visite promise ; visite annoncée …………….. 210
DCCLXXIII A L'ANCIENNE ABBESSE DE SAINTE-CATHERINE.
Recommandations pour la Sœur de Vignod. — Notre-Seigneur est
jaloux des âmes qu'il favorise ……………………………………. 211
DCCLXXIV A LA MÈRE DE CHANTAL (Inédite). Charité attentive et
minutieuse du Saint pour la Mère de Chantal. Le régime d'une
convalescente ……………………………………………………. 212
DCCLXXV A M. MILLETOT. Le Saint revendique son droit, qui était
contesté, de conférer les bénéfices dans certaines paroisses situées
en France ………………………………………………………… 213
DCCLXXVI A Mme DE LA FLÉCHÈRE. L'aveuglement des duellistes ;
pourquoi et comment le Saint en avait une grande compassion …. 214
DCCLXXVII A Mme DE LA VALBONNE. Quels sont ceux que le Sauveur
n'abandonne jamais. Un nouveau filleul du Saint ……………. 216
DCCLXXVIII AU DUC DE SAVOIE. Pourquoi le Saint désire [459] obtenir
l'agrément du duc de Savoie pour les prédications qu'on lui
demande à Lyon …………………………………………………. 217
DCCLXXIX A LA MÈRE DE CHANTAL (Billet inédit). « Nostre fievre »
et « nostre teste. » Les bonnes dispositions des syndics pour les
agrandissements de la Visitation ………………………………… 218
DCCLXXX A LA MÊME (Fragment inédit). Une postulante qui avait de
la répugnance pour l'abjection ; comment traiter avec elle ……… 220
DCCLXXXI A LA MÊME. Beauté du Ciel après l'Ascension du Sauveur.
Aspirations pieuses. La seule chose qni donne du prix à
l'éternité des biens, d'après saint François de Sales. La
glorification du corps de Notre-Seigneur et de notre corps ……… 221
DCCLXXXII AUX CARDINAUX DE LA SACRÉE CONGRÉGATION DES
RITES. L'une des opinions maudites de Calvin. Dévotion
des catholiques de Savoie au bienheureux Amédée. Pourquoi
les membres de la Sacrée Congrégation des Rites doivent faire
avancer sa canonisation ………………………………………….. 223
DCCLXXXIII A DOM PIERRE DE SAINT-BERNARD DE FLOTTES. Un
grand désir du Saint. Envoi d'un ouvrage. Les PP. Capucins
en Savoie ………………………………………………………… 227
DCCLXXXIV A Mgr BERTACCHI. Renseignements demandés sur un
étranger apostat, en faveur de sa femme convertie ……………… 229
DCCLXXXV AU SOUS-PRIEUR DE PEILLONNEX. Renseignements
fournis sur un jeune prêtre ………………………………………. 232
DCCLXXXVI A Mme DE CORNILLON, SA SŒUR. — Une prétendante « de
fort bonne famille et de tres bonne mine » ………………………. 233
DCCLXXXVII A L'ABBESSE DU PUITS-D'ORBE (Inédite). Condoléances
et consolations. Le seul prix de cette vie mortelle. Pour
mourir, tous les moments sont « heureux » à ceux qui craignent
Dieu. L'Abbesse désire faire un voyage en Savoie ; le Saint ne 234
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sait ni le lui conseiller, ni l'en dissuader ………………………….
DCCLXXXVIII AU DUC DE SAVOIE. Remerciements pour une grâce
obtenue …………………………………………………………... 236
DCCLXXXIX A Mgr D'ESNE (Inédite). L'Introduction à la Vie devote attire
à son auteur les louanges d'un Prélat étranger. Gratitude du
Saint. Son oraison pour Genève. Remerciements pour un
envoi de traductions …………………………………………….. 237
DCCXC A M. DUPANLOUP. Le saint métal et la dévotion à saint
Théodule ………………………………………………………… 239
DCCXCI A LA MÈRE DE CHANTAL. La rose, symbole des vertus de
saint Jean-Baptiste. Son amour pour la Sainte Vierge et son
Enfant. Deux lis dans une rose [460] ………………………… 240
DCCXCII AUX CHANOINES DE SAINT-JEAN DE LYON. le Saint
voudrait bien accepter l'invitation du Chapitre, mais à cause du
silence du duc de Savoie, il se dégage de sa promesse ………….. 241
DCCXCIII AU DUC DE SAVOIE. Recommandation en faveur d'un
gentilhomme offensé qui demande justice ………………………. 243
DCCXCIV A Mme DE LA FLÉCHÈRE. Les Constitutions de la Visitation.
Messages variés ………………………………………………. 244
DCCXCV AU PÈRE POLLIENS (Inédite). Une bonne fille qui ne pourra
pas être si tôt consolée. « Le livret » que prépare le Saint …… 245
DCCXCVI A Mme DE TRAVERNAY. Ce qui donnait à François de Sales
« un particulier contentement. » Pourquoi et comment les
tracas sont utiles au progrès spirituel. Un sentiment qui rend
légers tous les déplaisirs …………………………………………. 246
DCCXCVII A L'ARCHIDUC D'AUTRICHE. Supplique en faveur de
l'établissement d'un monastère à Saint-Claude. Le sort
ordinaire de ceux qui recherchent l'intimité de Dieu. Comment
les âmes qui prient servent leur pays et leur époque …………….. 248
DCCXCVIII A LA MÈRE DE CHANTAL. Un bonjour du « grand saint
Pierre. » La délivrance des liens spirituels. « Mignardise
d'amour » de Notre-Seigneur. La marque de l'amour fidèle.
Il faut mourir ou aimer. « Une jolie pensee. » Les jeunes
apprentis et les vieux maîtres en l'amour de Dieu. Où tendait
l'amitié mutuelle qui unissait l'ime du Saint et celle de la Mère de
Chantal …………………………………………………………... 252
DCCXCIX AU MARQUIS DE LANS. Rentré à Annecy, l'Evêque de
Genève rend compte de ses négociations dans le pays de Gex.
Eloge d'un commissaire. — Sentiments des Genevois ………….. 254
DCCC A LA REINE MÈRE, MARIE DE MÉDICIS. Remerciements
à la reine régente et souhaits pour son fils et pour elle, en retour
de son intervention pour le rétablissement du culte à Gex ……… 255
DCCCI A UN GENTILHOMME. La mort d'une fille spirituelle du
Saint, âme « belle et devote » ……………………………………. 256
DCCCII A LA MÈRE DE CHANTAL. L'aube du jour éternel.
Souhaits pour la petite Congrégation. Un sentiment fort
particulier qu'éprouve le Saint la veille de l'Assomption. La
divine Fruitière. En descendant de chaire ……………………. 258
DCCCIII A M. DES HAYES. Par « humeur », le Saint aime la discrétion.
Service demandé en faveur du Chapitre de Genève.
Phénomènes célestes …………………………………………….. 259
DCCCIV A LA MÈRE DE CHANTAL. — Avis charitable ……………… 261
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DCCCV
DCCCVI
DCCCVII
DCCCVIII
DCCCIX
DCCCX
DCCCXI
DCCCXII
DCCCXIII
DCCCXIV
DCCCXV
DCCCXVI
DCCCXVII
DCCCXVIII
DCCCXIX
DCCCXX
DCCCXXI
DCCCXXII
A L'ABBESSE DE BAUME-LES-DAMES (Inédite). Offre
[461] conditionnelle d'une postulante, fille de Gallois de Sales.
Ce qui rebutait quelquefois les prétendantes à la Visitation.
Portrait de la nièce du Saint ………………………………………
AU BARON DE VILLETTE. Le regard des princes et les
rayons du soleil. « Petite harengue » présentée à une Abbesse.
Une cousine du Saint lui dit « son petit cas » : pourquoi elle ne
songeait pas à la Visitation ….……………………………………
A M. DE BLONAY. Le voyage de Milan n'est plus désespéré.
Un Saint qui a soin de ses dévots. Plan du voyage ;
compagnon à retenir ……………………………………………..
A Mme DE TRAVERNAY. Comment accommoder les prières
avec beaucoup d'occupations, du matin jusqu'au soir. Les
oraisons jaculatoires. — Les afflictions du cœur. — Quelles sont
les âmes que Dieu aime …………………………………………..
A LA MÈRE DB CHANTAL. Une âme à consoler ………….
A M. DES HAYES. Une amitié à l'abri de toute défiance.
Pourquoi, dans l'intention de prêcher à Saint-Benoit, le Saint
préparait « un cœur tout nouveau, » après dix ans de ministère
épiscopal. Opposition résolue du duc de Savoie anx
prédications de François de Sales à Paris, Perplexités d'un
évêque ……………………………………………………………
A M. DE BAY. Recommandations en faveur de trois étudiants
de Savoie. Nouvelles religieuses ……………………………..
A LA MÈRE DE CHANTAL. Une jeune fille écartée de la
Visitation pour cause de maladie …………………………………
AU BARON DE VILLETTE. La contagion au-pays de Vaud.
La petite cousine aimée tendrement de la Mère de Chantal ….
A Mme D'ESCRILLES. Affection des Religieuses de la Galerie
pour la destinataire.Les satisfactions seches et les consolations
savoureuses. Messages ………………………………………..
A Mme DE LA FLÉCHÈRE. Ce que réservait le Saint dans ses
demandes à Dieu. Petites nouvelles. Annonce du départ de
la Galerie ………………………………………………………...
A Mme DE GRANDMAISON. Comment le Saint entend
témoigner sa sainte amitié. Messages divers ………………….
A Mme DE PEYZIEU. — Le nom du cœur. — Les consolations
du Jubilé. Témoignages d'amitié pour la destinataire et sa
famille. Affliction fâcheuse et affliction courageuse. La
modération des affections ménagères, grandement utile à la piété.
Une imperfection dont peu de gens s'abstiennent. — Les cœurs
faibles et les cœurs forts ………………………………………….
AU MARQUIS DE LANS. Intercession en faveur d'un
capitaine dans la gêne et dans la vieillesse ……………………….
A LA SŒUR DE BLONAY. — Ce qui rend certaines tentations
inoffensives. La petitesse et l'enfance spirituelle ……………..
A LA MÈRE DE CHANTAL (Billet inédit). Annonce de
visiteuses …………………………………………………………
AU DUC DE BELLEGARDE. Menaces et prétentions des
pasteurs protestants. Précaution que propose l'Evêque de
Genève pour les atténuer. Eloge de M. Milletot ………………
A M. LE MAZUYER. L'église de Gex ; espérances qu'elle
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donne. Une difficulté et une impossibilité se rencontrent dans
les lettres de naturalité obtenues pour les curés. Une « viande
friande » au XVIIe siècle. Remerciements du Saint. Il ne fait
pas le « refuseur, » mais jamais il ne sera « prætendeur. » Les
francs serviteurs de Dieu, peu nombreux …………………………
DCCCXXIII A M. DES HAYES. Requête de François de Sales. A la
diète de Bade. Obstination des Bernois. Un déplaisir du
Saint ……………………………………………………………... 299
DCCCXXIV A LA PRESIDENTE FAVRE. Une âme qui va bien.
L'amour de Dieu et la paix. Les voies du Ciel. Précaution
contre les « babillardz ». Ce que pensait le Saint des Ursulines
et des institutrices chrétiennes. Les entreprises extraordinaires
qui ne sont pas hasardées. Un monastère de seize bonnes filles,
où rien n'abonde ni ne manque. La pauvre Thiollier …………. 301
DCCCXXV A Mme D'ESCRILLES. Nouvelles de la Mère de Chantal.
Oratoire de la Visitation …………………………………………. 304
DCCCXXVI A LA MÈRE DE CHANTAL (Inédite). Affectueuse gronderie.
La Mère de Chantal au milieu des tracas d'une installation.
Pourquoi doit-elle garder ses forces ……………………………... 306
DCCCXXVII A Mme DE LA FLECHERE. Les bancs des femmes dans les
chœurs des églises. — Elles peuvent toutefois y entrer.
Nouvelles de la Mère de Chantal et de la Congrégation.
Pourquoi il est mieux d'avoir moins …………………………….. 307
DCCCXXVIII A LA PRESIDENTE FAVRE (Inédite). Les Ursulines et les
petites filles de Chambéry. Un défaut de l'éducation
maternelle, assez fréquent, d'après le Saint ……………………… 308
DCCCXXIX A M. DE NEUVECELLE. Recommandation réitérée en faveur
d'une pauvre fille ………………………………………………… 310
DCCCXXX A LA MÈRE DE CHANTAL. Comment recevoir les remèdes
imposés par l'obéissance et la raison. Les croix qui [463]
répugnent aux sens et à la nature. Dans la maladie, la Mère de
Chantal doit être « brebis » et « colombe » ……………………… 311
DCCCXXXI A LA MÊME. Une auditrice que François de Sales a vue au
sermon ; pourquoi il n'a pas osé l'aborder. Un sermon « fait
hardiment et passionnement. » Le dixième anniversaire d'un
sacre. Prédicateurs de l'Avent ………………………………… 312
DCCCXXXII A L'ABBESSE DU PUITS-D'ORBE. Un voyage en
Bourgogne empêché par un voyage à Turin. Pour s'avancer
dans l'amour de Dieu, une jambe infirme est meilleure que l'autre 313
DCCCXXXIII A Mme DE PEYZIEU. A propos du dernier et du premier jour
de l'an. Souhaits de piété. Exhortation à la douceur et
humilité. Le saint nom de Jésus et « l'odeur de son parfum » 315
DCCCXXXIV A LA REINE MÈRE, MARIE DE MEDICIS. Requête en
faveur des catholiques de Gex, pour obtenir en leur ville le
rétablissement d'un ancien monastère de Carmes ……………….. 316
DCCCXXXV A LA MÈRE DE CHANTAL (Inédite). Une mère alarmée.
Avis charitable donné à un visiteur inopiné ……………………… 317
DCCCXXXVI A UNE DAME (Fragment inédit). La dévotion et la maladie.
En quoiconsiste et ne consiste pas l'amour divin …………….. 318
DCCCXXXVII A Mme DE LA FLÉCHÈRE. Les solides consolations. La
crainte et l'amour devant Dieu. L'émondage spirituel.
Condition d'une parfaite retraite …………………………………. 319
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DCCCXXXVIII A LA MÈRE DE CHANTAL. L'oraison de la Mère de Chantal
trouvée bonne par le Saint et agréable à Dieu. Pourquoi et
comment doit-elle se garder des fortes applications de
l'entendement. Se tenir en la présence de Dieu et s'y mettre :
deux choses différentes. Allégorie de la statue dans sa niche.
Marie-Madeleine. Bonheur de vouloir aimer Notre-
Seigneur. Le sommeil empêche-t-il de se tenir en la présence
de Dieu ? ………………………………………………………… 320
DCCCXXXIX A LA MÊME. D'où vient l'amertume spirituelle. Jésus-
Christ est un Dieu de douceur ……………………………………. 323
DCCCXL A LA MÊME. La parole de Dieu et comment il faut la recevoir
des uns et des autres ……………………………………………… 324
DCCCXLI A Mme DE LA FLÉCHÈRE. La tristesse des séparations.
Pleurons un peu, non toutefois beaucoup, « nos chers trespassés.
» Les âmes chrétiennes doivent supporter doucement la perte
des parents. L'oraison et la variété des affections qui viennent
s'y mêler. Particulariser les résolutions. Le langage des yeux 325
DCCCXLII A LA MÈRE DE CHANTAL. Un visiteur annoncé. [464]
Pourquoi il faut lui faire un accueil dévotement agréable.
Personne ne se repentira d'avoir aidé la Visitation ………………. 327
DCCCXLIII AU DUC DE BELLEGARDE (Minute inédite). Gratitude et
humilité du Saint ………………………………………………… 329
DCCCXLIV A LA MÈRE DE CHANTAL. Lumières et sentiments que
recevait le Saint pour écrire le Traitté de l'Amour de Dieu ……… 330
ANNÉE 1613
DCCCXLV A Mme DE TRAVERNAY. Attitude de l'esprit humain en face
des évènements. Considérations sur une mort prématurée.
Notre-Seigneur meilleur juge que nous de nos intérêts.
Consolations à la mère de l'enfant devenu un « brave petit saint » 331
DCCCXLVI A LA MÈRE DE CHANTAL. — Le cœur de l'Evêque de Genève.
Un projet de Congrégation. Le Traitté de l'Amour de Dieu.
Nouvelle de la mort tragique du baron de Lux : compassion du
Saint ……………………………………………………………... 333
DCCCXLVII A M. DUNANT (Inédite). Pouvoirs donnés à un curé ; avis et
recommandations diverses ………………………………………. 337
DCCCXLVIII AU COMTE DE TOURNON (Inédite). Assurance de
dévouement. Souhaits et bénédictions ……………………….. 340
DCCCXLIX A M. DE CHATILLON. Recommandation en faveur d'un
nouveau converti digne d'assistance …………………………….. 341
DCCCL A Mme DES GOUFFIERS. Les sentiments que le Saint aimait
à trouver dans une postulante. A la Visitation, « toutes choses
sont basses, » excepté « la pretention » des Religieuses qui
l'habitent …………………………………………………………. 343
DCCCLI A Mgr FENOUILLET. Remerciements pour de beaux présents
; le Saint en a fait part à ses amis. Un plaisir interdit.
Souhaits et message ……………………………………………… 344
DCCCLII A UNE DAME. Dans quelles vues de foi il faut considérer les
absences et les séparations définitives …………………………… 346
DCCCLIII A Mme D'ESCRILLES. Affaires diverses. Parmi les tracas
temporels, il faut garder la sainte tranquillité et douceur de cœur.. 347
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DCCCLIV
DCCCLV
DCCCLVI
DCCCLVII
DCCCLVIII
DCCCLIX
DCCCLX
DCCCLXI
DCCCLXII
DCCCLXIII
DCCCLXIV
DCCCLXV
DCCCLXVI
DCCCLXVII
DCCCLXVIII
DCCCLXIX
DCCCLXX
A LA MÈRE DE CHANTAL. Un contrat qui va bien.
Promesse d'une visite et annonce d'une visiteuse ………………..
A LA MÊME (Billet inédit). Mesures à prendre à l'ouverture
d'un testament. Décès de Mme de Miribel …………………….
AU PÈRE DE LESSEAU. Le Saint décline les louanges d'un
poète avec une discrète humilité ………………………………….
A L'ABBESSE DU PUITS-D'ORBE. Solidité des affections
plantées de la main de Dieu. Intérêt que porte le Saint au Puits-
d'Orbe. Il faut faire souvent revivre les résolutions prises au
temps de la ferveur. Messages divers …………………………
A M. DE BLONAY. Le destinataire n'ayant pas eu à se louer
de son fils, « excessif en desseins, » le Bienheureux promet d'y
porter remède. Messages divers ……………………………….
AU DUC DE SAVOIE. Pourquoi le Saint n'a rien entrepris
contre l'abbé de la Tour. Qu'on lui donne des commandements,
il obéira …………………………………………………………..
A Mme DE LA CROIX D'AUTHERIN. La vocation du mariage
et le moyen d'y devenir fort sainte. L'obéissance au confesseur.
Règlement de vie. Conseils variés. La crainte des vices et
l'amour des vertus. Douceur et humilité. Une besogne que
Dieu paie de mille consolations ………………………………….
A M. DE BLONAY. Le Saint renonce par charité à la
consolation d'avoir un ami pour compagnon de pèlerinage.
Voyage à Turin, à pied ou à cheval, suivant les circonstances ……
A M. DES HAYES. Détails rétrospectifs sur l'affaire Berthelot
et l'internement de M. de Charmoisy. Conseils adressés à
Philothée par l'entremise du destinataire. Le Saint désirerait
avoir la liberté d'aller à Paris l'année suivante ……………………
A Mme DE CHARMOISY. Quand doit-on témoigner à Nôtre-
Seigneur son amour. Sympathies et dévouement pour la famille
de Charmoisy éprouvée …………………………………………..
A LA MÈRE DE CHANTAL. Les embarras d'un héritage …..
A LA MÊME. Une chape vraiment belle : d'où lui vient sa
beauté ; symbolisme des dessins qui la décorent. Bénie soit la
main de la brodeuse ………………………………………………
A LA MÊME. Le travail permis à la Mère de Chantal deux
jours chômés. Souhait et espérance du Saint. Un visage pâle
et un cœur vermeil ……………………………………………….
AU COMTE DE TOURNON. Dévouement du Saint pour M.
de Charmoisy. Malice de ses ennemis et crédulité du prince de
Nemours. Berthelot et M. de Servette …………………………
A M. DE QUOEX. Renseignements pour une dispense de
mariage à obtenir …………………………………………………
A LA MÈRE DE CHANTAL (Inédite). Une halte en
Maurienne. Sollicitude du Saint en voyage …………………..
A LA MÊME. Comment attendre l'issue d'une maladie.
Dans quels sentiments faut-il sortir de cette vie et acquiescer à la
Providence divine ………………………………………………..
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MINUTE ÉCRITE PAR SAINT FRANÇOIS DE SALES
POUR MADAME DE SAINT-CERGUES
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DCCCLXXI A Mme DUFOUR. Mme « de Saint-Cergues expose les raisons
de son abjuration. Après la grâce du Saint-Esprit, la confession
de foi catholique a surtout dessillé ses yeux : elle a vu Jésus-
Christ, unique objet de foi, d'espérance et de charité, l'exclusion
de toute idolâtrie, le culte raisonnable des Saints. Une « pauvre
petite brebiette » se réunit au troupeau. La lumière n'est pas
toujours accompagnée de la facilité pour déduire les raisons de la
croyance …………………………………………………………. 377
_____
DCCCLXXLI AU CARDINAL DE GIVRY (Inédite). La Sainte-Maison de
Thonon. Les Carmes réformés de Paul V ……………………. 382
_____
APPENDICE
I
LETTRES ADRESSÉES A SAINT FRANÇOIS DE SALES
PAR QUELQUES CORRESPONDANTS
A LETTRE DU BARON DE LUX ………..………………………………………. 385
B LETTRE DU PRIEUR ET DES RELIGIEUX DE SAINT-CLAUDE …………. 386
C LETTRE DU P. JEAN DE VILLARS, DE LA COMPAGNIE DE JÉSUS ……. 388
D LETTRE DE Mme DE SAINT-CERGUES ……………………………………… 389
E LETTRE DE D. SENS DE SAINTE-CATHERINE, FEUILLANT ……………. 390
F LETTRE DE M. JEAN-LOUIS DE CHEVRON, SEIGNEUR DE
BONVILLARD …………………………………………………………………. 392
G LETTRE DE Mgr MICHEL D'ESNE, ÉVÊQUE DE TOURNAI ………………. 393
H LETTRE DU CHEVALIER CLAUDE DE LA VERCHÈRE ………………….. 394
II
PIÈCES DIVERSES
A SAINT FRANÇOIS DE SALES ET Mgr GERMONIO …………………………. 397
B LETTRE DE M. ANTOINE DES HAYES A M. DE CHARMOISY ………….. 398
[467]
C LES GRANDS PARDONS D'ANNECY ……………………………………….. 400
D LETTRE DE M. LOUIS DE LA TOURNETTE A M. CROTTI ……………….. 413
_____
Glossaire des locutions et des mots surannés …………………………………………… 415
Index des correspondants et des principales notes biographiques et historiques de ce
volume ………………………………….……………………………………………….. 425
Table de correspondance de cette nouvelle Edition avec les précédentes et indication de
la provenance des Manuscrits …………………………………………………………… 437
_____
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33 Pages 321-330

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33.1 Page 321

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REPRODUCTION PHOTOGRAPHIQUE
PAR L'IMPRIMERIE FRANÇAISE DE MUSIQUE
ET REPRODUCTION PHOTOMÉCANIQUE
PARIS 1955 - Imprimé en France [468]
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