Don Bosco et la vie spirituelle Chapitre IV Instruments de la perfection



Francis DESRAMAUT.Don Bosco et la vie spirituelle. Ed Beauchesne.Paris 1967


Les instruments de la perfection

En homme pratique, plus intéressé par les modes d'exé­cution que par les justifications spéculatives des résultats, quand Giovanni Bosco s'était fixé un but, son esprit agile s'appliquait aussitôt, avec toutes ses ressources, aux moyens qu'il mettrait en oeuvre pour y parvenir : un « oratoire » pour regrouper les jeunes travailleurs, des ateliers profession­nels pour leur donner une formation humaine et religieuse en les soustrayant aux dangers de la ville, un réseau de propagandistes pour diffuser ses Lectures Catholiques à travers l'Italie, l'union des coopérateurs salésiens pour ras­sembler les bonnes volontés de son pays, de l'Europe occiden­tale et, qui sait, du monde entier ... Que faut-il faire? Tel était son problème. Nul ne s'étonnera qu'il ait traité des questions de l'âme dans le même état d'esprit. Sur la route de la vie, cette âme doit être éclairée, guidée, nourrie et exercée par des adjuvants ou par des « instruments » ap­propriés 1.

Don Bosco croyait certes à l'ascèse et â la sanctification par la charité, comme d'autres chapitres le montreront ; mais il croyait d'abord à la vertu illuminatrice de la parole, au soutien apporté par le sacrement de pénitence, à la force divine que procure l'eucharistie et à l'assouplissement spiri­tuel par les « exercices » et les dévotions.


La parole de Dieu


La première nourriture de l'âme est la parole de Dieu. « De même que, sans aliments, notre corps s'affaiblit et meurt, ainsi en va-t-il pour notre âme, si nous ne lui don­nons pas son aliment. La nourriture et l'aliment de notre âme sont la parole de Dieu ... » 2

L'expression parole de Dieu, ne doit pas être prise ici à contre-sens. Nous supposerions volontiers que Don Bosco entendait par elle la seule Bible, qui eut « Dieu pour auteur », en quoi nous nous tromperions gravement. La Bible, qu'il distingua avec soin des paroles humaines, était assurément pour lui la parole de Dieu par excellence. Dans une note manuscrite sur les diverses histoires saintes d'usage scolaire en son temps, après avoir remarqué qu' « à son avis une histoire sainte à l'usage des classes [devait] avoir trois qualités et être I) véridique, 2) morale, 3) réservée », il commentait ainsi le premier adjectif : « I) Véridique. I1 s'agit de la parole de Dieu. En conséquence, ce qui n'est pas dans les livres saints, il faut, ou le taire, ou le signaler au lecteur, de sorte qu'il ne prenne pas pour parole de Dieu ce qui est parole de l'homme » 3. Cette réserve ne l'empêchait pas d'introduire sous l'expression tout l'enseignement de l'Église. Le passage du Garçon instruit cité à l'instant la définissait : « ... parole de Dieu, c'est-à-dire les sermons, l'explication de l'évangile et le catéchisme » 4. L'assimilation pure et simple de la parole de Dieu au texte de la Bible aurait eu pour Don Bosco des relents de libre examen, péché grave dont, comme un peu tout le monde dans la catholicité d'alors, il faisait grief aux protestants 5. L'Église seule est capable de donner une vraie vie à la parole de Dieu : « Quand elle est bien écoutée, elle engendre la foi. Mais elle doit être entendue de [la bouche des] ministres sacrés et expliquée par eux, selon ce que disait saint Paul lui-même : Fides ex auditu, auditus autem per verbum Christi » 6.

La parole qui anime la vie spirituelle produit des résultats aux mêmes conditions. Dominique Savio « avait enraciné en son coeur que la parole de Dieu est le guide de l'homme sur le chemin du ciel. Chaque maxime entendue dans un sermon était donc pour lui une consigne immuable qu'il n'oubliait plus »7. Nous savons que ce garçon s'acharnait â trouver l'explication des difficultés de cette parole et que, selon Dan Bosco, « ce fut la le point de départ de cette vie exemplaire, de ce progrès continuel de vertu en vertu et de cette exactitude â remplir ses devoirs, telle qu'il eût été difficile de faire mieux » 8. Sa sainteté était donc fondée sur une catéchèse d'Église et sur une catéchèse bien assimilée. Don Bosco eût été bien incapable de concevoir une charité qui mérite ce nom, sans, â sa base, une foi éclairée par l'Église vivante. En bonne logique, il offrait à la parole de Dieu la première place parmi les instruments de perfection.


La lecture spirituelle


Il joignait à son étude la lecture spirituelle. Le conseil suivant valait pour tout « catholique qui pratique ses devoirs de bon chrétien » : « Pendant la journée ou bien après vos prières du matin ou du soir, ayez soin de faire un peu de lecture spirituelle. Lisez par exemple un chapitre de l'Évan­gile, la Vie d'un saint, l'Imitation de Jésus-Christ, la Philo­thée de saint François de Sales, la Préparation à la mort ou la Pratique de l'amour de Dieu de saint Alphonse de Liguori, ou d'autres livres semblables » 9. Les deux premiers éléments de l'énumération méritent quelques réflexions.

En tête de liste, nous trouvons ici « un chapitre de l'Évan­gile » et la « Vie d'un saint ». La lecture de la Bible entière n'est nulle part conseillée dans l'oeuvre de Don Bosco. Convaincu de sa puissance d'instruction, il voulut toutefois, par san Histoire sainte, « en populariser la science au maximum » 10. La préface de la première édition de ce livre contenait même un tel éloge de la Bible qu'ensuite, probable­ment par crainte de sembler donner raison aux réformés, il l'enveloppa et le détourna au bénéfice de l'histoire sacrée 11.

Cette Histoire sainte, qui, selon sa préface encore, fut racontée avant d'être écrite, montre comment Don Bosco lisait lui-même et faisait lire la Bible. I1 y cherchait des faits qu'il exposait avec soin. Dés que l'occasion se présen­tait, il mettait brièvement en valeur les leçons morales qui lui paraissaient se dégager du récit. Nous lirons après la narration du sacrifice d'Isaac par Abraham : «Dieu bénit toujours ceux qui obéissent à ses préceptes » 12; après l'aven­ture de Dina, « insultée » lors d'une fête dans les environs de Sichem : « L'histoire de Dina nous enseigne à quel point les spectacles publics sont dangereux pour la jeunesse » 13; après la mort du patriarche joseph : « Ceux qui vivent dans la vertu ne craignent pas l'heure de la mort » 14, etc. I1 ne négligeait pas le sens typique de l'Ancien Testament. L'agneau pascal « est la figure du sauveur qui, par son sang, nous a rachetés de la mort et nous ouvre le chemin du salut éternel » ; la manne, « la figure de la sainte eucharistie » ; le serpent d'airain, « la figure du Christ élevé sur le mont Calvaire » 15 I1 soulignait le sens chrétien de la traversée du désert par le peuple juif : « pèlerinage des hommes en ce monde », et celui de la terre promise, qui « rappelle le paradis » 16 . Au cours de son livre, il tentait de montrer que « toute l'histoire de l'Ancien Testament peut être dite une fidèle préparation du genre humain â l'événement extra­ordinaire de la naissance du messie » 17. Le Christ était évidemment présenté en détail dans la dernière partie de l'ouvrage, qui racontait sa Vie.


Vies de saints et « exemples »


L'évangile était en effet pour Don Bosco le récit de la Vie la plus extraordinaire qui ait jamais été. Ce n'est pas sans raison qu'il est cité avant « la Vie d'un saint », parmi les lectures spirituelles du chrétien. Il y a cent ans, notre auteur croyait à la puissance du « témoignage » vécu ou décrit sur le développement harmonieux de la vie spirituelle. Le vocabulaire change (il parlait d'esempio), le principe subsiste garanti par l'expérience. Lui se conformait à une tradition qui, depuis le moyen âge, était demeurée vivante dans son pays : les vérités morales devaient être non seule­ment illustrées, mais portées par des « exemples ». Avec le temps, dans des régions touchées par la spiritualité réformée ou janséniste, l'exemplum était devenu suspect en littérature religieuse. Au dix-huitième et au dix-neuvième siècles, la péninsule de saint Alphonse de Liguori continuait d'en user largement, alors que sa voisine du nord-ouest, plus intel­lectualiste et toujours un peu sceptique devant les histo­riettes, préférait d'ordinaire les raisonnements abstraits 18. On a par exemple remarqué que la tradition spirituelle du Français Charles Gobinet avait été infléchie lors de sa traversée des Alpes sous la génération qui précéda Don Bosco 19. Pour reprendre les phrases d'un jésuite du dix­huitième siècle, les auteurs italiens qui en dépendent « n'ai­ment pas recourir â de nombreux raisonnements pour in­culquer la vertu et [aiment] moins encore la confirmer par un esempio ; ils aiment au contraire la présenter réalisée et, pour ainsi dire, incarnée en d'autres jeunes garçons, dont les exemples soient facilement accessibles ... » 20 L'esempio pre­nait â peu prés toute la place et tenait lieu d'exposé ascétique dans ces travaux, parmi lesquels figurait le principal modèle de Don Bosco dans l'élaboration du Garçon instruit.

La Guide angélique correspondait en effet à la tournure d'esprit du jeune apôtre de Turin, qui, dix ans avant la préparation de son manuel de dévotion, avait décidé de raconter chaque jour une « maxime » ou un esempio21. C'était une application un peu lointaine, mais défendable, de la vieille formule de Maxime de Turin, que l'on a retrou­vée sur un signet de son bréviaire . « Les exemples ont plus de force que les paroles et on enseigne mieux par des oeuvres que par des discours» 22. Plus tard, ses biographies spirituelles furent destinées à l'édification du peuple chrétien. L'esempio a été l'une des manifestations du zèle apostolique de son disciple, Dominique Savio, érigé à son tour en modèle par son mai tre 23. Après Michele Magone, qui lui emboîta le pas 24, combien d'autres l'imitèrent? La préférence, avouée ou inconsciente, pour l'esempio, est probablement l'une des caractéristiques de la littérature salésienne de la première génération.

En règle ordinaire, ces auteurs choisissaient d'ailleurs leurs esempi avec discernement. Don Bosco prenait en tout cas la plupart d'entre eux dans le monde familier de ses lecteursou auditeurs. Non qu'il ait tout â fait répugné à certaines histoires reprises â satiété par les compilateurs, comme on le voit parfois dans le Mois de mai 25. Mais il s'efforçait de demeurer le plus prés possible de son public, dans le lieu et dans le temps. Les esempi de ses ouvrages étaient par exemple situés à Modéne 26, â Turin au temps de Don Cafasso 27 et, mieux encore, sous ses yeux de principal témoin, à Chieri (Luigi Comollo) et à l'oratoire du Valdocco (Dominique Savio, Michele Magone, Francesco Besucco) ... La force entraînante de la vertu d'autrui était pour lui une évidence, surtout quand elle paraissait proche. Jugeant que le procédé convenait aux adultes, et non aux seuls enfants, comme l'un ou l'autre serait tenté de le croire, il disait aux salésiens : « Rappelez-vous toujours que les vertus des autres doivent servir de stimulant â notre bien â nous, selon cette parole de saint Augustin : si ille, cur non ego ? » 28

Faut-il ajouter qu'il n'en oubliait pas le Christ pour au­tant et rappeler qu'il se référait au contraire toujours lui ? « Appliquez-vous, mes garçons, à imiter Jésus dans son obéissance, qu'il soit votre unique modèle...» 29L'évan­gile doit être, avant la Vie des saints et les ouvrages de spiritualité les plus recommandables, la nourriture quoti­dienne du chrétien.


Les sacrements


L'évangélisation et l'étude de la parole de Dieu ne le fascinaient pas au point de négliger les sacrements, facteurs essentiels du progrès de l'âme selon la doctrine commune des catholiques et, d'ailleurs, occasions de transmettre le message du salut.

Ne nous attendons pas à des révélations sensationnelles de sa part sur chacun d'eux, bien qu'il ait parlé de tous, du baptême au mariage 30. En bien des cas, il ne dépassait pas le niveau d'un honnête catéchisme. Ce sont « des signes sensibles établis par Dieu pour donner à nos âmes les grâces nécessaires à notre salut » et « comme sept canaux par lesquels les faveurs du ciel sont communiquées depuis la divinité jusqu'à l'humanité » 31. Son intérêt se concentrait sur deux d'entre eux, la pénitence et l'eucharistie, qui, dans la pratique chrétienne de tous les jours, lui paraissaient éclipser les cinq autres. Quand il disait : les sacrements, sans plus, c'était eux qu'il désignait. Et Don Lemoyne rap­porta de lui ce propos très conforme à sa pensée : « Il y a deux ailes pour voler aux cieux : la confession et la communion » 32.


Le sacrement de pénitence


Son estime de la pénitence doit être rattachée â ses consi­dérations fondamentales sur la vie éternelle, la médiation efficace de l'Église, la valeur de l'homme, et aussi sur le péché. Au cours de sa vie sacerdotale, Don Bosco apprit toujours mieux que le progrès de l'âme jusqu'à la contem­plation céleste n'est pas rectiligne. Selon les songes qu'il a racontés, il reconnaissait dans son école des adolescents au coeur rongé par le vice et de véritables amis de Satan. Don Bosco croyait au péché grave. I1 croyait aussi à l'enfer et entretenait de son existence ses lecteurs et auditeurs 33.

En contrepartie, il était aussi convaincu que Dieu, repré­senté volontiers sous les traits affectueux et longanimes du père de l'enfant prodigue, était la miséricorde même 34. Sa bonté fit qu'il voulut « nous laisser une planche après le naufrage » : de la l'institution du sacrement de pénitence 35.

Au pénitent, Don Bosco demandait de se faire une juste idée du sacrement et des dispositions pour le recevoir cor­rectement, et aussi une juste idée de la situation réelle de son confesseur.

Nous n'apprendrons rien que de classique sur les deux premiers points. « Si Dieu avait dit qu'il ne pardonnerait nos péchés que par le baptême et non pas ceux que nous commettrions malheureusement après avoir reçu ce sacre­ment, oh ! combien de chrétiens iraient sûrement à leur perte ! Mais, connaissant notre grande fragilité, Dieu établit un autre sacrement par lequel nous sont remis les péchés commis après le baptême, et c'est le sacrement de la confes­sion » 36 . Son bénéfice est triple et quadruple. Il a été « institué par Jésus-Christ pour communiquer à nos âmes les mérites de sa passion et de sa mort, pour rompre les chaînes par lesquelles l'esprit malin les tient enchaînées ; pour nous fermer l'enfer et nous ouvrir les portes du ciel » 37. On estimera que Don Bosco énumérait sans plus d'originalité les actes du pénitent, qui « sont l'examen, le regret, le propos, l'aveu et la pénitence », en soulignant bien que « les plus importants sont le regret ou la contrition et le propos » 38, Sa description du confesseur, agent du progrès spirituel, qu'il présentait même aux fidèles 39, est plus instructive.


Le ministre et le progrès spirituel


Il avait appris de saint Alphonse les « quatre fonctions que le confesseur doit exercer, â savoir de père, de médecin, de docteur, et de juge » 40, mais, pour son compte, il insistait plus sur les fonctions de père et de médecin que sur celles de docteur et de juge.

Tout d'abord, il pensait, après Giuseppe Cafasso, que le confessionnal se prête peu â l'enseignement doctoral. Dans ses énumérations sur le rôle du confesseur, le docteur s'efface derrière le guide 41. Le juge aussi s'estompait dans ses leçons de pastorale et, plus encore, dans sa pratique du sacrement. Dans le Mois de mai, il avait noté que le « confesseur est un juge, non pas pour nous condamner mais pour nous absoudre et nous libérer de la mort éternelle » 42, ce qui vidait la fonction d'une partie de sa réalité. Plus tard, il n'en parlera plus, ou plus guère. Dans leurs constitutions, revues de prés par lui, les filles de Marie-Auxiliatrice pour­ront apprendre que Dieu destine leur confesseur à être « le père, le maître et le guide de leurs âmes » 43. On cherche vainement le juge dans cette liste, qui marque la fin d'une évolution dont un érudit pourrait déterminer les étapes. Cette évolution avait dû commencer très tôt, car, dés les années de Dominique à l'Oratoire (1854-1857), si Don Bosco se formait un jugement probable sur la culpabilité de ses pénitents, ses questions visaient surtout â assurer l'intégrité de l'accusation et le regret des fautes commises. Le temps des confesseurs jansénistes du dix-huitième siècle était pour lui tout â fait révolu.


La paternité spirituelle du confesseur


Sur les quatre substantifs de saint Alphonse, à vrai dire seul le vocable de père subsistait pour désigner le confes­seur selon le coeur de Don Bosco. Encore n'est-il pas sûr qu'il l'ait pleinement satisfait.

Le pere commande et protège, et Don Bosco était très capable de rappeler à un chrétien, fût-il Dominique Savio, l'obligation d'obéir à son confesseur 44. Mais, plus que l'autorité, la paternité de Dieu et de l'homme évoquait pour lui la bonté secourable. Mieux que ses maîtres d'autre­fois, semble-t-il, il refusait l'étouffement et la passivité infantile du paternalisme spirituel. Sa prédilection pour le terme d'ami pour désigner le confesseur nous en paraît être une preuve. I1 répétait à ses garçons que le confesseur était « l'ami » de leurs âmes 45, et pensait son oeuvre en termes d'affection et de service, caractéristiques de l'amitié. La nuance est capitale pour le confesseur, qui est invité à laisser toute suffisance, et pour le pénitent, qui doit attendre de lui compréhension et soutien.

L'amitié ne s'impose pas. Elle est là, libérale, prête à donner. Il faut donc offrir « toute commodité aux élèves pour se confesser quand ils le désirent » 46. En 1880, Don Bosco se plaignit à Léon XIII du peu d'empressement du clergé pour ce ministère 47.

Le père, qui est un ami, reçoit doucement et simplement (avec charité, dans la langue de Don Bosco) celui qui s'ouvre â lui. « Accueillez avec douceur toutes les catégories de pénitents, disait-il aux confesseurs, mais surtout les en­fants » 48. II faut â tout prix éviter de les affoler et, au contraire, les établir dans une confiance libératrice. L'amitié demande au confesseur de refaire l'examen des moins instruits, des jeunes en particulier. Les confessions sacri­lèges, qu'il estimait fréquentes, épouvantaient Don Bosco. On le surprend à écrire en 1861: « Je vous assure, mes chers garçons, qu'en écrivant ma main tremble à la pensée du grand nombre de chrétiens qui vont à leur perte éternelle, simplement pour avoir caché ou n'avoir pas exposé avec sincérité des péchés en confession » 49. Pour prévenir de telles catastrophes, fidèle à saint Alphonse 50, il débrouillait et invitait à débrouiller les phrases embarrassées et les demi­silences des pénitents, comme on le voit faire lui-même dans l'un ou l'autre de ses livres 51. Don Bosco ne s'introduisait toutefois qu'avec respect et délicatesse dans l'âme qui lui accordait sa confiance. Pas de reproches intempestifs, la « charité bénigne » recommandée par saint Paul. « Reprenez­les avec bonté, mais ne les grondez jamais » 52. On le voit : « Le confesseur est un père qui désire ardemment vous faire tout le bien possible et cherche â éloigner de vous le mal sous toutes ses formes » 53.


Confession et direction de conscience


Dés qu'il croit son secours utile, l'ami devient médecin et guide. Ainsi du confesseur qui, pour Don Bosco, était le directeur de conscience normal de ses pénitents 54. Pour qu'il soit « en mesure de donner les avis les plus propres au bien de l'âme » 55, il faut le bien choisir et lui être fidèle. Après saint Philippe Neri 56, le prêtre du Valdocco s'est fait l'apôtre du « confesseur stable », pour les jeunes en particu­lier. A moins de ne pas l'aimer, on ne change pas d'ami, faisait remarquer Michele Magone dans un dialogue sur la confession 57. Et on le voit régulièrement. Les entretiens avec le confesseur - dans l'acte de la confession - doivent être fréquents, à proportion, non seulement des fautes commises, mais du soin que le dirigé accorde à son progrès spirituel. «Celui qui désire peu penser à son âme, qu'il aille [se confesser] une fois par mois; celui qui désire la sauver, mais ne se sent pas tellement ardent, qu'il y aille tous les quinze jours ; mais que celui qui voudrait arriver à la perfection y aille toutes les semaines, disait-il à ses jeunes. Plus souvent non, à moins d'avoir quelque chose qui pèse sur la conscience » 58. Ces propos sont de 1876, mais il ne semble pas avoir évolué sur ce point. Entre 1859 et 1864, les biographies didactiques de Dominique Savio, Michele Magone, Francesco Besucco disaient déjà qu'un adolescent de valeur dirigé par lui se confessait toutes les semaines, à la rigueur tous les quinze jours 59.

L'exercice de fonctions définies n'explique pas tout le rôle du confesseur dans le sacrement de pénitence. Don Bosco, pour sa part, agissait plus par son influx que par la profondeur des paroles qu'il distribuait. Sa prière, sa clair­ voyance maintes fois attestée - au point que, dans son entourage, « lire sur le front » signifiait « deviner les péchés » 60 - la bonté qu'il irradiait toujours plus â mesure que les années s'écoulaient, créaient autour de sa personne une atmosphère qui opérait des guérisons inattendues. Il ne prenait pourtant pas son temps pour mettre le pénitent en condition. Pas plus que Don Giuseppe Cafasso, il ne se perdait en longues monitions 61 : habituellement, quelques phrases ordinaires, mais bien adaptées, lui suffisaient 62. I1 disait par exemple au Pere Vespignani, qui lui demandait conseil pour de jeunes habitudinaires : « Insister sur la fré­quentation des sacrements et le souvenir des maximes éter­nelles, sans jamais cesser de répéter le Vigilate et orate et d'encourager la dévotion au sacré coeur de Jésus et â Marie auxiliatrice » 63.

Son principal souci était de susciter chez ses dirigés des actes positifs de regret et d'amélioration spirituelle. Il dé­plora cent fois l'inutilité de confessions, pourtant fréquentes et intègres, auxquelles manquait un ferme propos. Il faut prendre des résolutions en confession, malgré Satan, qui les redoute au plus haut point 64. La réception mécanique des sacrements ne satisfaisait pas du tout notre saint, qui faisait écrire au catéchiste (directeur spirituel) des apprentis du Valdocco : « Tu diras â taus que je recommande du fond du coeur la confession et la communion fréquentes, mais que ces deux sacrements soient reçus dans les dispositions re­quises pour que l'on constate chaque fois le progrès dans une vertu » 65.

Le pardon de Dieu procure à l'âme la sécurité indispen­sable à son progrès. Il est générateur de joie et de paix 66. La paix du fils de Dieu réconcilié avec son père exclut l'alié­nation paralysante. Elle ne rassure pas non plus à bon marché. Car, de confession en confession, le pénitent, qui est aussi un dirigé, est entraîne à repousser toute forme de mal et à pratiquer les vertus qui lui sont les plus néces­saires. Toujours purifié par le sang du Christ dans le sacre­ment, il est incité â toujours progresser. D'autant plus que Don Bosco ne séparait pas la pénitence de l'eucharistie, le plus merveilleux moteur de la charité chrétienne. Il faut, pour grandir en sainteté, se confesser et communier ! ...


La doctrine eucharistique


Sa doctrine sur l'eucharistie, qui était « traditionnelle » et, à notre sens, solide, était aussi moulée dans les modes de penser et de parler hérités de la Contre-Réforme. Ainsi, quand il évoquait l'eucharistie, neuf fois sur dix, il pensait, non pas à la messe, mais à la seule communion.

I1 lui arrivait cependant de disserter - toujours sobre­ment - sur l'ensemble du mystère, messe et communion, sans d'ailleurs parvenir à les raccorder l'une l'autre de manière tout à fait satisfaisante. En tout cas, ses termes étaient alors simples et profonds 67. La messe, enseignait-il, est le mémorial de la passion : « Assister à la sainte messe est la même chose que de voir le divin sauveur sortir de Jérusalem et porter sa croix sur le mont du Calvaire, pour y être crucifié dans les tourments les plus barbares et répandre son sang Jusqu'à la dernière goutte » 68. L'offrande de la messe est réelle, aussi réelle que celle de la croix : « La sainte messe est dite sacre­ment et sacrifice du corps et du sang de Notre-Seigneur Jésus-Christ, qui fut offert et distribué [a la dernière cène] sous les espèces du pain et du vin. Ce sacrifice fut accompli par Jésus-Christ sur le calvaire et il est appelé sanglant, c'est-à-dire avec effusion de sang. C'est le même sacrifice qui est accompli chaque jour par le prêtre â la sainte messe, avec la seule différence que celui-ci est non sanglant, c'est­à-dire sans effusion de sang » 69. Quant à la communion sacramentelle, nous lisons dans un texte (au reste tardif et que, par conséquent, on peut être tenté de croire soufflé par un collaborateur), elle est pour le Christ « le moyen de s'unir avec nous dans l'union la plus ineffable ... » 70. Tout compte fait, ses instructions nous assurent qu'il n'ignorait pas la doctrine fondamentale du mystère eucharistique. Bien au contraire.

I1 est vrai qu'il insistait de préférence sur certains de ses aspects, auxquels un autre siècle devait moins s'attacher : le Christ est réellement présent sous les espèces et il est la pour la nourriture des fidèles. Ainsi, après avoir, dans son Histoire sainte, raconté la dernière cene du Christ, il poursuivait par ces lignes révélatrices, ou les deux vérités semblaient consti­tuer à elles seules toute l'eucharistie : « C'est l'institution du très saint sacrement de l'eucharistie, dans lequel le Sauveur, sous les espèces du pain et du vin, moyennant le pouvoir accordé aux prêtres, donne aux âmes son corps et son sang pour aliment spirituel. Rappelons-nous bien que ce sacre­ment n'est pas un souvenir (memoria) de ce que Jésus a fait, mais un sacrement dans lequel sont donnés à l'homme le même corps et le même sang qu'il a sacrifiés sur la croix » 71. De tels soucis dogmatiques n'étaient pas récents en 1860. On nous apprend aujourd'hui qu'ils avaient infusé aux médiévaux une «conception antiliturgique qui séparait l'action liturgique de la communion » 72. Les inspirateurs habituels de Don Bosco, élevés dans l'atmosphère de la Contre-Réforme, ainsi que le contexte de la polémique anti­vaudoise des années 1850-1860, les avaient encore renforcés dans son âme. Les réformés calvinistes qu'il connaissait ne croyaient pas á la présence réelle, sinon, dans les meilleurs cas, de façon transitive. Les catholiques du dix-neuviéme siécle, et lui en bonne place, répliquaient en célébrant la présence continue du Christ sous les espèces consacrées. Par ailleurs, Don Bosco répétait aussi la doctrine habituelle sur le pain de vie, souvent expliquée avant lui par saint Alphonse de Liguori et saint Léonard de Port-Maurice, et alors reprise dans les opuscules de contemporains, tels que Mgr de Ségur dont, en 1872, il ferait publier dans les Lectures Catholiques un livret sur la sainte communion 73. Parce que le Christ de l'eucharistie réalise ce qu'il signifie, il est, sous les espèces du pain, nourriture salutaire. « Écoutez comment Jésus-Christ nous invite â la sainte communion. Si, dit-il, vous ne mangez ma chair et ne buvez mon sang, vous n'aurez pas la vie éternelle. Celui qui mange ma chair et qui boit mon sang habite en moi et moi en lui. Car ma chair est une vraie nourriture et mon sang un vrai breuvage » 74.

La note suivante était plus originale. Toute la création dépendant du Christ, Don Bosco semble avoir professé que le monde entier, animé et inanimé, trouve sa stabilité et sa vigueur dans la communion des catholiques à la chair et au sang du fils de Dieu. «Quelle grande vérité je vous dis maintenant, écrivait-il un jour. La communion fréquente est la grande colonne qui maintient le monde moral et matériel pour qu'il ne tombe pas en ruine » 75. I1 insistait : « Croyez­-le bien, mes chers enfants, je pense ne pas trop dire en af­firmant que la communion fréquente est une grande colonne sur laquelle repose un pôle du monde » 76. Logique, il ne manquait pas de recommander ses soucis matériels au Christ de l'eucharistie, en particulier lors de visites au saint sacre­ment, dont il va être bientôt question.


La pratique eucharistique


Ces idées, dont plusieurs passent à l'arrière-plan dans la spiritualité courante de la deuxième partie du vingtième siècle, lui permettaient en effet de justifier ses conseils sur la pratique eucharistique : messe et communion, avec les dévo­tions annexes.

Don Bosco n'a pas vécu dans une époque où les chrétiens tenaient à ne jamais se séparer de la prière du célébrant, encore que nous puissions parfois découvrir tel courant d'une modernité inattendue au hasard d'une brochure écrite dans son entourage 77. En conformité avec l'esprit du temps et les coutumes de son pays, ses garçons récitaient leur cha­pelet pendant les messes quotidiennes 78et, le dimanche, ne le remplaçaient que par le Petit office de la sainte Vierge au cours d'une deuxième messe à laquelle ils assistaient. Mais on se tromperait à faire de lui le partisan exclusif de cette méthode, qu'il ne semble avoir jamais érigée en modèle unique, car il connaissait et proposait d'autres façons d'as­sister avec fruit au sacrifice eucharistique. Le Garçon instruit et la Clef du paradis, que l'on gagne toujours à consulter en ces matières, suggéraient aux fidèles une suite de courtes prières, accordées au déroulement de la liturgie et destinées à être lues pendant les messes latines où le célébrant se souciait peu d'être compris. A les parcourir nous-mêmes aujourd'hui, nous éprouvons quelque peine devant l'humble supplication : « Recevez, Seigneur, les prières qui vous sont adressées pour moi par ce prêtre », qui accompagnait une collecte perpétuellement hermétique 79. Un auteur piémontais du dix-neuvième siècle pouvait-il faire beaucoup mieux avant la diffusion des missels traduits parmi ses lecteurs ?

Quoi qu'il en soit, l'insistance toujours plus marquée de Don Bosco sur la communion eucharistique des fidèles prouve qu'il penchait pour une participation effective au saint sacrifice. Le Christ est la, « maître, médecin et [sur­tout ?] nourriture » 80 : il faut vivre de lui.

I1 s'est pour cela progressivement écarté de la pratique commune de la génération qui l'avait précédé. Sans être vraiment janséniste, la hiérarchie piémontaise inclinait alors à la réserve dans la fréquentation eucharistique. A la fin du dix-huitième siècle, un confesseur de religieuses, qui avait prié l'archevêque de Turin d'autoriser une soeur converse, sa pénitente, à communier tous les jours, s'entendit répon­dre : « La communion quotidienne ne doit être permise qu'à des personnes dont la perfection est éprouvée et par­faite (sic). Si la sœur converse Irene Silvestri est vraiment vertueuse et animée de l'esprit de Dieu, elle sera humble, docile, mieux, obéissante à ses supérieurs ; et elle sera heu­reuse qu'on lui permette de s'approcher de la sainte com­munion quatre ou cinq fois la semaine. Si elle ne s'en contente pas, on peut douter de l'esprit qui la meut. La sainte communion lui sera donc accordée plus rare­ment ... » 81 Quarante ans après, Jean Bosco adolescent fut étonné, quand son propre confesseur de Chieri le poussa à se confesser et à communier plus fréquemment qu'il ne le faisait, car, devait-il noter, « c'était alors chose très rare de trouver quelqu'un qui encourageât à fréquenter les sacre­ments »82.

Devenu prêtre à son tour, il opta pour la communion fréquente. Durant les vingt premières années de sa vie sa­cerdotale, il le fit toutefois selon les règles déterminées par saint Alphonse. Il prêcha donc la communion hebdo­madaire aux catholiques bien disposés, c'est-à-dire à ceux qui ne tombaient pas dans le péché mortel, ou qui, s'ils y tombaient, ne le faisaient que rarement, par fragilité et décidés à se corriger ; la communion fréquente, c'est-à-dire plusieurs fois la semaine, à ceux qui tendaient vraiment à progresser dans la vertu et s'abstenaient du péché véniel délibéré ; et la communion quotidienne à ceux-là seuls qui manifestaient des dispositions plus parfaites encore et cor­respondaient aux grâces du sacrement 83. Il appliqua ces principes à Dominique Savio, son élève entre 1854 et 1857.jusque-là, « selon l'usage des écoles », Dominique s'était confessé et avait communié une fois par mois. Au Valdocco, « il commença par se confesser tous les quinze jours, puis tous les huit jours, et communia aux mêmes intervalles. Son confesseur [c'est-à-dire Don Bosco], qui avait remarqué le grand progrès qu'il faisait en matière spirituelle, lui conseilla de communier trois fois par semaine et, au terme d'une année, lui permit la communion quotidienne » 84. Or, Domi­nique Savio, très différent de Michele Magone, était déjà une petite perfection à son arrivée dans « la maison de l'Oratoire ». De plus, sa décision de « se faire saint », qui coïncida avec des progrès décisifs dans sa vie spirituelle, prit forme dés le printemps de 1855. I1 faut croire que Don Bosco, qui ne l'autorisa à communier tous les jours que six mois après, était exigeant. Mais passé ce temps, il ne lui sembla plus possible de refuser cette joie au jeune garçon. Ses dispositions étaient « parfaites » : « N'allons pas ima­giner qu'il ne comprît pas l'importance de ce qu'il faisait et qu'il n'eut pas la conduite de vie chrétienne normale chez celui qui désire communier quotidiennement, lisons-nous â cet endroit de sa biographie, car sa conduite était en tous points irréprochable » 85. Les principes étaient saufs.

L'évolution de la pratique de Don Bosco, amorcée depuis plusieurs années 86, n'est devenue manifeste qu'en 1864 87 Elle était due, croyons-nous, â diverses expériences pédago­giques, qui lui avaient révélé le rôle de l'eucharistie dans une vie spirituelle 88, et à l'influence d'un courant de pensée, qui se dessinait alors en faveur de la communion fréquente 89. Le coup décisif, qui libéra enfin sa langue, paraît avoir été le livre du prieur Giuseppe Frassinetti : Les deux joies cachées, qui célébrait la communion fréquente et quoti­dienne en même temps que la chasteté parfaite. Il avait vraisemblablement pris connaissance de l'ouvrage et déjà décidé de son édition dans les Lectures Catholiques90, quand, lors d'un mot du soir de juin 1864, il se hasardait à prendre ainsi position : « Si maintenant vous voulez connaître mon désir, le voici : communiez tous les jours. Spirituellement ? Le concile de Trente dit : sacramentaliter ! Par consé­quent ? ... » 91

Il se mit alors â proposer la communion fréquente, sinon quotidienne, à tous ceux qui, même médiocres, désiraient pro­gresser dans la vie spirituelle. La pratique de l'Église primi­tive, saint Augustin, saint Philippe Neri l'aidaient à soute­nir sa thèse. Il retouchait dans ce sens des ouvrages publiés antérieurement. La réponse à la question . « Que voulez­-vous dire par les paroles [appliquées aux premiers chré­tiens] : Ils persévéraient dans la fraction du pain ? » ne fut plus : « Ces paroles signifiaient que ces premiers chrétiens fréquentaient beaucoup la sainte eucharistie » 92, mais : « Ces paroles signifient que ces premiers chrétiens fréquentaient beaucoup la sainte communion » 93. Et, dans son livret sur la neuvaine de Marie auxiliatrice, publié en mai 1870, on put lire cette thèse dérivée de saint Thomas (mais emprun­tée à Mgr de Ségur) : « Celui qui reconnaît par expérience que la communion quotidienne le fait croître dans l'amour de Dieu, doit communier tous les jours » 94, La permission jadis accordée avec parcimonie était donc devenue une obligation.

Une clause subsistait pourtant. Le disciple de saint Al­phonse n'admettait pas encore sans restriction que le fidèle en état de grâce dût normalement communier pendant les messes auxquelles il assistait. Il n'était donc pas prés de se résigner aux communions mécaniques et de convenance. La communion doit « faire croître dans l'amour de Dieu ». A sa façon, il manifestait encore par la son esprit reli­gieux et chrétien. Aucun progrès n'est pensable en dehors de Dieu et du Christ. L'Incarnation exige de chercher le Christ dans les sacrements, et surtout dans le sacrement majeur, « le plus grand prodige de la puissance divine », par lequel « Dieu trouva le moyen de donner à nos âmes ,

un aliment proportionne et spirituel, c'est-à-dire sa propre divinité » 95. Mais comment penser trouver Dieu et le Christ, sinon par la charité surnaturelle, transfiguratrice de ceux-la seuls qui prétendent, sans hypocrisie, les chercher ?


Exercices et dévotions


La recherche de Dieu suppose de la patience et réclame des gestes souvent très humbles, opinait Don Bosco. Le jésuite Pasquale De Mattei, dont un petit écrit pour les jeunes lui servit de modèle dans la rédaction de ses Six dimanches en l'honneur de saint Louis de Gonzague 96, avait cru pouvoir proposer aux dévots de ce saint, après une considération sur saint Louis et l'amour de Dieu, les prati­ques suivantes : « I. Déterminez à votre usage quelques actes d'amour de Dieu (...). 2. Quand vous vous sentez inerte et froid dans votre amour de Dieu, entretenez en vous au moins le désir de l'aimer. Ce regret et ce désir vous obtiendront l'amour véritable. 3. Réjouissez-vous d'une épreuve que Dieu vous envoie ou d'une peine ou d'une diffi­culté que vous rencontrez à son service » 97. Son adaptateur descendit carrément d'un étage et, après la même considé­ration, écrivit : « Récitez les prières du matin et du soir devant l'image de Jésus crucifié et baisez-la souvent (...). Si vous le pouvez, allez faire une visite à Jésus au saint sacrement, surtout la où il est exposé pour l'adoration des Quarante Heures » 98

Giuseppe Cafasso lui avait transmis sa grande estime des exercices religieux les plus communs : sacramentaux, usage de l'eau bénite, prières du matin et du soir, visites au saint sacrement, gains d'indulgences, signes de croix, chape­lets ... 99 Ils constituaient pour lui l'« écorce » de l'arbre spirituel. Sans elle, celui-ci a vite fait de périr 100. Sur les traces de ce maître et fort de sa propre expérience, il ensei­gnait à son tour que, « dans le grand édifice de notre per­fection et de notre salut, chacune [de ces pratiques] joue un rôle efficace » 101. Stéréotypées ou non, il ne les voulait jamais compliquées ni difficiles à exécuter : « Je conseille­rais donc de veiller avec ardeur â proposer des moyens faciles qui n'épouvantent pas, qui ne fatiguent même pas le bon chrétien, la jeunesse surtout. Dans la plupart des cas, on omet les jeûnes, les longues prières et les autres austérités semblables, ou bien on les observe laborieusement et impar­faitement. Tenons-nous aux choses faciles, mais avec per­sévérance » 102.

Ces exercices étaient aussi variés que les vertus 103. Domi­nique Savio s'exerçait aussi bien à la charité fraternelle qu'a la pénitence, à la pureté qu'à la piété (c'est-à-dire a la vertu de religion). Après l'avoir montré dans son emploi d'infirmier bénévole, Don Basco ajoutait : « I1 avait ainsi le champ libre pour exercer continuellement sa charité en­vers le prochain et accroître son mérite devant Dieu » 104. Nos deux saints étaient pourtant loin de se rendre es­claves de leurs pratiques. Don Bosco n'a jamais donné l'im­pression d'un scrupuleux. Dominique Savio fut rabroué par lui le jour où il versa dans ce travers et s'en corrigea aussi­tôt. Don Bosco offrait en modèle un Michele Magone « vif de caractère, mais pieux, bon, dévot », qui « estimait beau­coup les petites pratiques de religion », et, cependant, « les pratiquait avec allégresse, sans contention (con disinvol­tura) ni scrupule » 105.

Le directeur du Valdocco pensait ici aux exercices quoti­diens, hebdomadaires, mensuels, annuels ou simplement oc­casionnels, qui figuraient dans ses manuels de piété et dont nous sommes parfois amenés à parler dans ce travail : le signe de croix matinal, les prières du chrétien, la méditation, les oraisons jaculatoires, le rosaire, la lecture spirituelle, l'assistance aux offices religieux, le Petit office de la sainte Vierge, la visite au saint sacrement et â la sainte Vierge, l'examen de conscience, le chapelet du sacré coeur de Jésus, le chapelet de Notre-Dame des sept douleurs, l'exercice de la bonne mort, le chemin de la croix, le mois de Marie, les six dimanches en l'honneur de saint Louis de Gonzague 106, la neuvaine de Noël, etc. I1 recommandait aussi les entre­tiens spirituels 107, faisait grand cas des fêtes religieuses, recourait aux «bouquets spirituels» pendant les neuvaines qui préparaient â ces solennités et aux étrennes spirituelles quand une nouvelle année commençait 108. Nous dirons plus tard qu'il tendait à en restreindre le nombre. Il est toute­fois certain que pratiques et exercices légués par la tradition dévotionnelle locale ou universelle fourmillaient dans la vie et les leçons de Don Bosco 109.

S'il fallait dire celles qui lui tenaient le plus à coeur, on ne devrait pas retenir la méditation ou l'examen de cons­cience, dont il a assez peu parlé, sinon, quelquefois, à ses religieux, mais bien, après l'exercice de la bonne mort et les exercices spirituels de l'année, la visite au saint sacre­ment, si prisée par saint Alphonse de Liguori.

Dans sa perspective, la visite au saint sacrement permet­tait à tout croyant de rencontrer le Christ, son ami et sa nourriture, et de s'unir à lui pendant la journée, même quand il ne pouvait le recevoir sous la forme sacramentelle. Bien faite, elle établissait l'âme dans une vraie contemplation. Le salut, la persévérance finale, la perfection spirituelle, étaient facilités par ces instants de recueillement devant le tabernacle. Don Bosco disait aux salésiens réunis pour des exercices annuels en 1868 : « Qu'on aille au pied du tabernacle simplement pour dire un Pater, un Ave et un Gloria, quand on ne peut pas faire plus. Cela suffit à rendre forts contre les tentations. Celui qui a la foi, qui visite Jésus au saint sacrement, qui fait sa méditation tous les jours, à condition qu'il n'ait pas une fin humaine, ah, je vous le dis, il est impossible qu'il pèche » 110. « J'ai grand­ peur de retomber dans l'offense de Dieu, faisait-il dire â Michele Magone. C'est pourquoi je vais supplier Jésus dans le saint sacrement, afin qu'il me donne le soutien et la force de persévérer dans sa sainte grâce » 111. Le lecteur de la Vie de Dominique Savio connaît les longues contemplations silencieuses de ce garçon devant le tabernacle et devine leur lien avec son héroïque amour de Dieu.

Dans cet exercice, entrait normalement la communion spirituelle. Selon saint Léonard de Port-Maurice, dont saint Jean Bosco a diffusé un traité eucharistique 112, « plusieurs docteurs ne craignent pas de dire qu'on peut faire quelque­fois la communion spirituelle avec tant de ferveur qu'on y reçoive la même grâce que si l'on communiait réelle­ment » 113. Il pensait de même et recommandait avec prédi­lection cette manière de s'unir à Dieu en tout temps : « Fré­quentez autant que possible les saints sacrements, et ne vous inquiétez pas quand cela n'est pas possible. Faites alors plus souvent des communions spirituelles et conformez-vous pleinement à la sainte volonté de Dieu, très aimable sur toutes choses » 114.

C'était, avec la Bible dont il redisait volontiers les sen­tences et un enseignement ecclésiastique qui lui était fami­lier, avec les sacrements de pénitence et d'eucharistie, véri­tables piliers de sa pédagogie religieuse, l'un des moyens par lesquels il se maintenait lui-même en présence de Dieu. La plupart étaient fort simples, fondés sur une idée très catho­lique de la grâce divine, qui donne « le vouloir et le faire », et bien adaptés à une spiritualité qui ne faisait pas grise mine â la richesse humaine.

1 Instruments, au sens où CASSIEN, Collationes, conf. I, chap. VII-X, en parlait. Voir, en particulier, le chap. VII : «Les jeûnes, les veilles, la méditation des Écritures, la nudité et le dépouillement de tous les biens, ne sont pas la perfection, mais les instruments de la perfection..."


2 (G. BOSCO), Il giovane provveduto.. , éd., Turin, 1851, première partie, Cose necessarie.., art. 6, p. 18. (Voir aussi, ci-dessous, document 5, sentence 12.)

3 Avvertenza intorno all'uso da farri nelle scuole delle Storie Sacre tradotte da lingue straniere, s. d. (vers 1847, selon A. Caviglia), éditée dans Opere e scritti. . , vol. I, première partie, Turin, 1929, p. 20.

4 (G. BOSCO), Il giovane provveduto . . , loc. cit. Nous lisons ailleurs : « Par tradition, on entend la parole de Dieu qui n'a pas été écrite dans les livres saints » (G. BOSCO), Maniera facile per imparare la Storia Sacra . . , éd., Turin, 1855, § x ; dans Opere e scritti . . , vol. I, première partie, p. 30), ce qui induit à penser qu'il connaissait une parole transmise, soit dans les livres saints, soit par d'autres voies, et une parole vivante, qui était l'enseignement de l'Église de son temps.

5 « Comme, chez eux, chacun est libre d'expliquer la Bible comme il veut, chacun peut aussi se faire une religion comme il veut. » (G. BOSCO), Maniera facile . . , éd. cit., § 30 ; dans Opere e scritti . . , op. cit., p. 68. La formule était intacte dans la éd., Turin, 1877, § 29, p. 81.) « La croyance des évangélistes, c'est-à-dire la libre interprétation (il modo libero di interpretare) de la Bible, remonte à la réforme de l'Église catholique » (G. BOSCO), Massimino, ossia Incontro di un giovanetto con un ministro protestante sul Campidoglio, Turin, 1874, p. 19). La phrase est attribuée au protestant mis en scène dans cette partie du livre.


6 G. BOSCO, Vita di S. Paolo . ., éd., Turin, 1878, chap. 9, p. 42. 7.

7. G. BOSCO, Vita del giovanetto Savio Domenico . . , 6` éd., Turin, 1880, chap. 8, P. 31.

8 BOSCO, ibid. Voir, ci-dessus, chap. 2, p. 77

9 G. BOSCO, La Chiave del Paradiso. ., éd., Turin, 1857, p. 38. Conseil analogue, mais pour les jeunes, dans le Giovane provveduto, première partie, Cose necessarie.., art. 6 101ª éd., Turin, 1885, p. 18).

10 G. BOSCO, Storia sacra, . , Turin, 1847, préface (dans Opere e scritti. . , vol. I, première partie, p. 6). Même phrase dans la éd., Turin, 1863 (dans Opere e scritti. ., ibid., p. 122).

11 « [La Bible] est le fondement de notre sainte religion : elle en contient les dogmes et les prouve » (G. BOSCO), Storia sacra. . , Turin, 1847, préface ; dans Opere e scritti. . , ibid., p. 6). « L'étude de l'histoire sainte témoigne par elle-même de son excellence et n'a pas besoin d'être recommandée, car elle est la plus antique de toutes les histoires ; elle est la plus sûre, parce qu'elle a Dieu pour auteur; elle est la plus précieuse, parce qu'elle contient la volonté de Dieu manifestée aux hommes ; elle est la plus utile, parce qu'elle contient et prouve la vérité de notre sainte religion. » (Op. cit., éd., Turin, 1863, préface ; dans Opere e scritti. , , ibid., p. 123.)

12 Op. cit., éd., Turin, 1863, troisième époque, chap. 2 (dans Opere e scritti. . ,ibid., p. 15 0).

13). Op. cit., éd. cit., troisième époque, chapitre 4 (dans Opere e scritti . . , ibid., p. 156.

14 Op. cit., éd. cit., troisième époque, chap. 7 (dans Opere e scritti. . , ibid., p. 169).

15 Op. cit., éd. cit., troisième époque, chap. 10 (dans Opere e scritti . . , ibid., p. 177) ; quatrième epoque, chap. 1 (dans Opere e scritti . . , ibid., p. 18 1) ; quatrième époque, chap. 2 (dans Opere e scritti. . , ibid., p. 187).

16 Op. cit., éd. cit., quatrième époque, chap. 3 (dans Opere e scritti. . , ibid., p. 190).

17 Op. cit., éd. cit., Storia sacra del Nuovo Testamento, Introduction (dans Opere e scritti . . , ibid., p, 283).

18 Voir R. CANTEL et R. RICARD, Exemplum, dans le Dictionnaire de Spiritualité, t. IV, col. 1885-1902, surtout 1901 ; G. CACCIATORE, La letteratura degli « exempla », dans S. ALFONSO M. DE LIGUORI, Opere ascetiche. Introduzione generale, Rome, 1960, p. 239-290.

19 P. Stella (Valori spirituali.., p. 34) cite comme oeuvres typi­ques de cet infléchissement : Guida angelica, o siano pratiche istru­zioni . . , Turin, 1767 ; La Gioventù divota dell'angelico giovane S. Luigi Gonzaga.., Carmagnola, 1805; Voce angelica, ossia l'Angelo custode che ammaestra una figlia . , , Pignerol, 1835.

20 Gius. A. Patrignani, dans P. STELLA, Valori spirituali . . , p. 34-35

G. BOSCO, Cenno biografico sul giovanetto Magone Michele.., Turin, 1861, chap. 13, p. 67.

21 Memorie dell'Oratorio . . , p. 88 (ci-dessous, document 2).

22 Signets du bréviaire de Don Bosco, dans E. CERIA, Memorie bio­grafiche. . , t. XVIIl, doc. 93, p. 806-808 (ci-dessous, document 5, sentence 15). Voir les premiers mots de la biographie de Luigi Comollo : « Comme l'exemple des actions vertueuses vaut beaucoup plus que n'im­porte quel élégant discours ... » (G. BOSCO), Cenni storici rulla vita del chierico Luigi Comollo . . , Turin, 1844, p. 3).

23 G. BOSCO, Vita del giovanetto Savio Domenico . . , éd., Turin, 1880, chap. II, 13, 21, p. 46, 48, 56, 100.

24 G. BOSCO, Cenno biografico sul giovanetto Magone Michele.., Turin, 1861, chap. 13, p. 67.

25 Par exemple, diverses anecdotes de Pères du désert ou encore l'aventure du soldat Beauséjour, racontée d'après «molti autori» (G. BOSCO, Il mese di maggio.., éd., Turin, 1874, vingt-septième jour, p. 169).

26 G. BOSCO, Il mese di maggio . . , éd. cit., vingtième jour, p. 131

27 G. BOSCO, Il mese di maggio . , éd. ci:., vingt-cinquième jour, p. 158.

28 G. BOSCO, Présentation des Biografie dei salesiani defunti negli anni 1883 e 1884, Turin, 1885, p. IV.

29 G. BOSCO, Storia sacra ... éd., Turin, 1863, septième époque, chap. 2 (dans Opere e scritti. . , ibid., p. 298).

30 Au moins dans le Mese di maggio.

31 G. BOSCO, Il mese di maggio . . , éd. cit., huitième jour, p. 64­.

32 G. B. LEMOYNE, Memorie biografiche. . , t. VII, p. 50, d'après la chronique de Giovanni Bonetti (janvier 1862). Propos analogue dans le Regolamento del!'Oratorio di San Francesco di Sales per gli esterni, Turin, 1877, deuxième partie, chap. 7, art. I.


33 G. BOSCO, Il giovane provveduto.., 101ª éd., Turin, 1885, première partie, Sette considerazioni . . , I1 peccato mortale p. 39-41 ; l'Inferno, p. 47-49. G. BOSCO, La Chiave del Paradiso . . , éd., Turin, 1857, p. 17 ; et Il mese di maggio .. , éd., Turin, 1874, quatorzième jour : II peccato, p. 94-99 ; dix-huitième jour : Le pene dell'inferno p. 116-122 ; dix-neuvième jour : Eternità delle pene dell'inferno, p. 122-127.

34 Voir, ci-dessus, chap. 3, p. 90.

35 G. BOSCO, Novella amena di un vecchio soldato . . , Turin, 1862, chap. 2 : La confessione e le pratiche di pietà, p. 22. On trouvera aussi des exposés de Don Bosco sut la confession dans [G. BOSCO], Il giovane provveduto.., éd., Turin, 1851, deuxième partie, Maniera pratica per accostarsi degnamente al Sacramento della Confessione, p. 93-98, instruc­tion bientôt modifiée et fragmentée sous les titres : Del Sacramento della Confessione, Disposizioni per fare una buona Confessione, Modo pratico per accostarsi degnamente al Sacramento della Confessione, Dopo la Confessione (101ª éd., Turin, 1885, p. 94-105) ; et, sous les mêmes titres, avec un texte adapté pour les adultes, dans G. BOSCO, La Chiave del Paradiso .. , éd., petit format, Turin, 1881, p. 153-195. Cf. encore les ouvrages suivants de Don Bosco : Conversazioni tra un avvocato ed un curato di campagna sul Sacramento della Confessione, Turin, 1855 ; Il mese di maggio . . , éd., Turin, 1874, vingt-et-unième jour : La confessione, p. 133-138; vingt-deuxième jour : Il confessore, p. 139-I43 ; Cenno biografico sul giovanetto Magone Michele . . , éd., Turin, 1880, chap. 5 : Una parola alla gioventù, p. 22-26; Il pastorello delle Alpi, ovvero Vita del giovane Besucco Francesco . . , Turin, 1864, chap. 19 : La confessione, p. 100-105 ; etc. Voir, ci-dessous, document 15.

36 G. BOSCO, Il mese di maggio . . , éd. cit., vingt-et-unième jour, P. 134­

S. ALPHONSUS DE LIGUORIO, Praxis confessarii, éd. cit., chap. I, p. 5.

37 G. BOSCO, Conversazioni tra un avvocato ed un curato di cam­pagna.., éd., Turin, 1872, p. 7. Le premier point, par lequel il marquait le lien entre le sacrement et la mort du Christ, touchait parti­culièrement Don Bosco : « Il [le confesseur] sait combien plus grande encore [que vos fautes] est la miséricorde divine qui, par son inter­médiaire, vous offre le pardon. Il applique les mérites infinis du sang précieux de Jésus-Christ avec lequel il peut laver toutes les taches de votre âme» (G. BOSCO, Cenno biografico sul giovanetto Magone Mi­chele.., Turin, 1861, chap. 5, p. 24-25).

38 G. BOSCO, La Chiave del Paradiso.., éd. cit., p. 158.

39 G. BOSCO, Il mese di maggio.., éd. cit., vingt-deuxième jour.

40 S. ALPHONSUS DE LIGUORIO, Praxis confessarii, éd. cit., chap. I, p. 5.

41 Don Bosco n'a retenu que les fonctions de père, médecin et juge, dans Il mese di maggio . . , éd. cit., vingt-deuxième jour, p. 140 ; et Conversazioni tra un avvocato ed un curato di campagna.., éd. cit., p. 86.

42 G. Bosco, Il mese di maggio ... ibid.

43 Regole o Costituzioni per le Figlie di Maria SS. Ausiliatrice. . , Turin, 1885, titre 17, art. 4, p. 83.

44 « La pénitence que le Seigneur veut de toi, lui dis-je, c'est l'obéissance. Obéis et, pour toi, cela suffit » (G. BOSCO, Vita del giovanetto Savio Domenico .. , éd., Turin, 1880, chap. 15, p. 65).

45 Regolamento dell'Oratorio di San Francesco di Sales per gli esterni, Turin, 1877, deuxième partie, chap. 7, art. 8 ; voir G. BOSCO, Cenno biografico sul giovanetto Magone Michele.., 3ª éd., Turin, 1880, chap. II, p. 49-50, résumé plus bas.

46 G. Bosco à G. B. Francesia, 1878, dans Epistolario, t. III, p. 426. Cette liberté fut un des leit-motive de Don Bosco éducateur.

47 A l'attention des historiens de la pastorale au XIXe siècle : " Plus d'empressement et plus de charité dans l'audition des confessions des fidèles. La plupart des prêtres ne donnent jamais ce sacrement, d'autres entendent à peine les confessions durant le temps pascal, et c'est tout [e poi non più] » (notes pour une audience du souverain pontife, dans Epistolario, t. III, p. 561).

48 G. Bosco, Cenno biografico sul giovanetto Magone Michele ... 3° éd., Turin, 1880, chap. 5, p. 25.

49 G. BOSCO. Cenno biografico sul giovanetto Magone Michele . . , Turin, 1861, chap. 5, p. 25 ; voir la éd., p. 23­

50 Voir S. ALPHONSUS DE LIGUORIO, Praxis confessarii, éd. cit., chap. 2, p. 41-87­


51 G. BOSCO, Cenno biografico sul giovanetto Magone Michele— . , 3ª éd., Turin, 1880, chap. 3, p. 16-18 ; et Severino, ossia Avventure di un giovane alpigiano . . , Turin, 1868, chap. 8, p. 44-45. Ce chapitre décrit la vie de Severino à l'oratoire du Valdocco.

52 G. BOSCO, Cenno biografico sul giovanetto Magone Michele..,, éd. cit., 1880, chap. 5, p. 25.

53 Ibid., p, 22.

54 Voir le Projet de Règlement pour la maison annexe de l'oratoire Saint-François-de-Sales, première partie, Appendice, chap. 1, art. 3. (L'édition de G. B. LEMOYNE, Memorie biografiche, t. IV, p. 746, concorde ici tout à fait - une petite retouche stylistique mise à part - avec le manuscrit reproduit que nous avons collationné.)

55 Ibid., art. 4. (Même remarque qu'à la note précédente

56 Voir les Ricordi generali di S. Filippo Neri alla gioventù, dans (G: BOSCO], Porta teco.., Turin, 1858, p. 35.

57 G. BOSCO, Cenno biografico sul giovanetto Magone Michele. . , .éd. cit., 1880, chap. II, p. 49-50.

58 Mot du soir, 2 novembre 1876, d'après la reconstitution de E. CERIA, Memorie biografiche, t. XII, p. 566.

59 Don Bosco ne paraît pas avoir pris position pour les adultes.

60 Voir E. CERIA, Don Bosco con Dio, éd. Cit., p. 297-301.

61 Voir A. GRAZIOLI, La pratica dei confessori nello spirito del Beato Cafasso, 2ª éd., Colle Don Bosco, s. d., p. 99-100.

62 E. CERtA, Don Bosco con Dio, éd. cit., p. 181. Soulignons que le Père Ceria avait été le témoin direct de ce qu'il avançait là.

63 Conversation de 1877, reproduite par E. CERIA, Memorie bio­grafiche, t. XIII, p. 321.


64 G. Bosco aux garçons de Lanzo, 11 février 1871, dans Epistolario, t. II, p. 150. Le thème du propos revient dans un mot du soir du 31 mai 1873 (reproduit par A. AMADEI, Memorie biografiche, t. X, p. 56) ; dans une lettre de Don Bosco aux apprentis de l'oratoire du Valdocco, 20 janvier 1874 (Epistolario, t. II, p. 339) ; dans la lettre sut la charité en éducation, 10 mai 1884 (Epistolario. t. IV, p. 267) ; etc.

65 G. Bosco à G. Branda, s. d. (1879), dans Epistolario, t. III, P. 436. Cette lettre a été dictée.

66 (G. Bosco), Conversione di una Valdese .., Turin, 1854, chap. II, p. 97 ; G. BOSCO, La forza della buona educazione, Turin, 1855, chap. 3, p. 26-30 ; Vita del giovanetto Savio Domenico . . , Turin, 1859, chap. 26, p. 136, c'est-à-dire la conclusion de la biographie ; Cenno biografico sul giovanetto Magoree Michele.., Turin, 1861, chap. 4, p. 20-23. La remarque figure évidemment aussi dans les éditions posté­rieures de ces ouvrages, qui furent tous très répandus du vivant de Don Bosco.

67 Les mêmes phrases reparaissent dans ses livrets doctrinaux les plus connus : {G. BOSCO}, Il giovane provveduto . . , éd., Turin, 1851, deuxième partie, p. 84-86, 98-99, etc. : G. BOSCO, La Chiave del Paradiso . . , éd., Turin, 1857, p. 43-4G, 73-74 ; Il mese di maggio . . , Turin, 1858, p. 134-144. Notons déjà que certaines considérations d'ordre pratique sur l'eucharistie ont varié dans les rééditions de ces ouvrages

68 ( G. BOSCO), Il giovane provveduto . . , éd. cit., p. 84.

69 G. BOSCO,Ilmese di maggio . . ,éd.,Turin,187 4,vingt­troisième jour, p. 145.



70. G. BOSCO, Nove giorni.., cinquième jour éd., Turin, 1870). II est possible que cette idée perce déjà dans la réponse suivante (très antérieure) à la question : « Pourquoi a-t-il institué ce sacrement ? » « Jésus-Christ a institué ce sacrement pour donner un signe du grand amour qu'il portait aux hommes et pour donner à nos âmes un aliment adapté » (G. BOSCO, Maniera facile .. , éd., Turin, 1855, § 21 ; dans Opere e scritti. . , vol. I, première partie, p. 58).

71 G. BOSCO, Storia sacra. . , éd., Turin,1863, septième époque, chap. 7 (dans Opere e scritti .., loc. cit., p. 325). On voit que, dans son ardeur, Don Bosco en venait presque à nier la thèse du mémorial, qu'il soutenait pourtant dans les éditions parallèles du Mois de mai.

72 J. DUHR, Communion fréquente, dans le Dictionnaire de Spiri­tualité, t. II, Col. 1259.

73 Mgr de SÉGUR, La santissima comunione (coll. Letture Cattoliche), Turin, 1872. On y lisait : « La grâce propre de l'Eucharistie est donc une grâce d'aliment et de persévérance " (op. cit., p. 6).

74 G. BOSCO, La Chiave del Paradiso . . , 2ª éd., Turin, 1857, p. 74. Ce principe est au centre de la conversation didactique entre Don Bosco et Francesco Besucco sur les motifs de la communion eucharistique, conversation écrite à un moment où sa doctrine sur ce sacrement paraît être tout à fait formée (G. BOSCO, Il pastorello delle Alpi. . , Turin, 1864, chap. 20 : La santa Comunione, p. 105-109).

75 G. BOSCO aux élèves de Mirabelle, 3o décembre 1863, dans Episto­lario, t. I, p. 299.

76 Ibidem.


77 « L'importance du saint sacrifice dans l'ordre de la rédemption humaine et l'obligation faite par l'Église à tous les fidèles d'y assister aux jours festifs, rendent nécessaires aux fidèles eux-mêmes la con­naissance et la juste appréciation de ce grand acte de notre sainte religion, afin qu'ils n'en soient pas les spectateurs oisifs, mais qu'ils sachent y prendre toute la part active et l'intérêt vivant qui leur convien­nent. Car le fidèle ne fait pas qu'assister au divin sacrifice, il l'offre aussi par la main du célébrant, comme l'Église nous l'indique dans la messe elle-même n (Avvertenza non signée de la brochure également anonyme : Trattenimenti intorno al sacrifizio della S. Messa (Turin, 1854), parue dans les Letture Cattoliche (ann. II, fasc. II et 12), à une époque où Don Bosco les contrôlait de près. Elle pourrait, par conséquent, avoir été rédigée sous son inspiration, mais le style de la pièce ne semble pas permettre de la lui attribuer.)

78 Il invitait tous les jeunes à entendre la messe chaque jour (G. BOSCO, Il giovane provveduto . . , 101ª éd., Turin, 1885, deuxième partie, p. 87) et donnait un conseil analogue aux adultes (G. BOSCO, Il mese di maggio . . , éd., Turin, 1874, vingt-troisième jour, p. 148).

79 (G. BOSCO), Il giovane provveduto .. , éd., Turin, 1851, p. 87 ; G. BOSCO, La Chiave del Paradiso.., éd., Turin, 1857, p. 48.

80 G. BOSCO, Il giovane Provveduto. . , 101ª éd., Turin, 1885, deuxième partie, p. 111

81 Réponse de l'archevêché de Turin à Gio. Cappone, à Savigliano, 19 juillet 1793, conservée aux archives de la curie turinaise ; citée par P. STELLA, Crisi religiose nel primo Ottocento piemontese, Turin, 1959, p. 65, note.

82? Memorie dell'Oratorio ... p. 55.« En ce temps-là, au sémi naire [de Chieri], il n'était pas facile [non si aveva la comodità) de faire la sainte communion en dehors du dimanche» (G. BOSCO, Cenni sopra la vita del giovane Luigi Comollo . . , Turin, 1884, chap. 8, p. 66).

83 Voir, pour saint Alphonse, F.-X. GODTS, Exagérations historiques et théologiques concernant la communion quotidienne, Bruxelles, 1904, p. 67-70.

84 G. BOSCO, Vita del giovanetto Savio Domenico.. , Turin, 1859, chap. 14, p. 68-69.

85 Ibid., p. 69-70.

86 « Comme la manne fut la nourriture quotidienne des Hébreux au désert, la sainte communion devrait être notre soutien et notre nourriture de chaque jour » (G. BOSCO, Il mese di rnaggio . . , Turin, 1858, vingt­quatrième jour, p. 141).

87 Le Père A. CAVIGLIA, dans son étude importante sur Savio Dome­nico e Don Bosco, Turin, 1943, p. 341-383, pressentait cette évolution.

88 « L'expérience prouve que les deux plus fermes soutiens de la jeunesse sont les sacrements de la confession et de la communion » (sic) (G. BOSCO, Vita del giovanetto Savio Domenico . . , Turin, 1859, chap. 14, P. 67-68).

89 La brochure de Mgr de Ségur, La très sainte communion, est de 1860 (voir Mgr de SÉGUR, Œuvres, première série, t. III, Paris, 1867, P. 413-479).

90 G. FRASSINETTI, Le due gioie nascoste.., constitue le fascicule de décembre 1864 de la revue. Un intervalle d'au moins six mois entre la décision de le publier et la publication même paraît s'imposer.

91 Mot du soir du 18 juin 1864, selon la Cronaca et la reconstitu­tion de G. B. LEMOYNE, Memorie biografiche, t. VII, p. 679. Don Bosco a tenu des propos identiques (qui, jusqu'à un certain point confirment ceux du mot du soir) dans la biographie de Francesco Besucco, publiée cette année-là dans les Letture Cattoliche (fascicule de juillet-août) : G. BOSCO, Il pastorello delle Alpi . . , Turin, 1864, chap. 20, p. 109. Noter que Mgr de Ségur (coll. cit., p. 421) recourait aussi au concile de Trente pour justifier la communion fréquente.



92 G. BOSCO, Maniera facile . . , éd., Turin, 1855, § 38 (dans Opere e scritti . . , loc. cit., p. 66).

93 G. BOSCO, Maniera facile.., éd., Turin, 1877, § 27, p. 76. Les manuels de dévotion contenaient désormais un article sur la comunione frequente.

94 G. BOSCO, Nove giorni.., Turin, 1870, sixième jour. Et voit G. BOSCO, Il mese di maggio . . , éd., 1874, vingt-quatrième jour, P. 149-153 (ci-dessous, document 28).

95 G. BOSCO, Il mese di maggio..,, éd. cit., huitième jour, p. 65.

96 Ci-dessus, p. 42.

97 P. DE MATTEI, Considerazioni per celebrare con frutto le Sei Domeniche e la Novena in onore di S. Luigi Gonzaga. . , Novare, s.d. (vers 1840), p. 53 et sv.

98 G. BOSCO, Le Sei domeniche.., éd., Turin, 1886, p. 33-34. La remarque est de P. STELLA, Valori spirituali . . , p. 73-74­

99 Voir L. ZANZI, Le pie pratiche del sacerdote, Spirito del Ven. D. Cafasso, Bagnacavallo, 1914.

100 GIUSEPPE CAFASSO, Manoscritti vari, V, 2097 B ;citéspar F. ACCORNERO, La dottrina spirituale di S. Giuseppe Cafasso . . , p. 103.

101 G. BOSCO, Introduction aux Regole o Costituzioni. . , Turin, 1877, p. 37. On trouve là une énumération des pratiques de piété, de la méditation quotidienne à l'abstinence du vendredi, en passant par le chapelet.

102 G. Bosco, Cenno biografico sul giovanetto Magone Michele. . , 3ª éd., Turin, 1880, chap. 9, p. 41. Don Bosco concluait : «C'est le chemin qui conduisit notre Michele à un merveilleux degré de perfection. "

103 Sur les sens multiples de l'expression « exercices spirituels », voir A. RAYEZ, Exercices spirituels, dans le Dictionnaire de Spiritualité, t. IV, col. 1922-1923.

104 G. Bosco, Vita del giovanetto Savio Domenico.. , Turin, 1859, chap. 12, p. 62.

105 G. Bosco, Cenno biografico.. , éd. cit., chap. 13, p. 57.

106 Exactement, en l'honneur des six années passées par ce saint dans la Compagnie de Jésus, si nous en croyons un titre anonyme : Divozione di Sei Domeniche in onore de' sei anni che San Luigi Gonzaga della Compagnia di Gesù visse in religione : da praticarti da chiunque brami efficacemente procurarsi il potentissimo di lui Patrocinio, Turin, 1740. (Cité par P. STELLA, Valori spirituali. . , p. 38, note.) Le même auteur (op. cit., p. 37, note) signale un livret des dix dimanches en l'honneur de saint Stanislas Kostka.

107 A travers ses biographies de Luigi Comollo et de Dominique Savio, où l'on voit les fruits de conversations de ce genre entre amis. Don Bosco croyait aux bienfaits de l'amitié et de la correction fraternelle : « Bienheureux qui a un moniteur ! » (Memorie dell'Oratorio . . , p. 54).

108 Étrennes spirituelles pour un directeur d'école : G. Bosco à G. Bonetti, 3o décembre 1868, dans Epistolario, t. I, p. 600-601 ; G. Bosco à G. Bonetti, 3o décembre 1874, ibid., t. II, p. 434. (Ci-dessous, documents 24, 29.) Ces étrennes étaient de règle au Valdocco.

109 Comme nous le verrons, il demandait avec saint Philippe Néri de ne pas les multiplier inconsidérément (Regolamento per le case . . , Turin, 1877, deuxième partie, chap. 3, a. 9, p. 64) et les réduisait au minimum dans le Règlement des coopérateurs salésiens (chap. 8 ; ci-dessous. p. 333.)


110 Notes d'auditeur au cours d'exercices spirituels, Trofarello, 26 sep­tembre 1868 ; selon l'édition de G. B. LEMOYNE, Memorie biograliche, t. IX, p. 355-356. (Ci-dessous. document 23.)

111 G. BOSCO, Cenno biografico.., éd. cit., chap. 12, p. 55.

112 Il tesoro nascosto, ovvero Pregi ed eccellenze della Messa, con un modo pratico e divoto per ascoltarla con frutto (coll. L.C., ann. VIII, fasc. XII), Turin, 1861.

113 B. LÉONARD DE PORT-MAURICE, Oeuvres trad. C. SAINTE-FOI, t. III, Paris, 1869, p. 60.

114 G. Bosco à Mme et Mlle Lallemand, 5 février 1884, dans Epistolario, t. IV, p. 422. Cette lettre a été écrite en français.



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Chapitre IV. Instruments de la perfection