401-450|fr|423 Miséricordieux comme le Père


LETTRE DU RECTEUR MAJEUR

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« MISÉRICORDIEUX COMME LE PÈRE »

Lecture salésienne de l’Année Jubilaire


Rome, 15 juillet 2016

1. Le JubilÉ Extraordinaire de la MisÉricorde. - 2. MisÉricorde : Mot-clÉ du Pontificat du Pape FranÇois. - 3. Dieu riche en MisÉricorde. 3.1 « Mon cœur se retourne contre moi ; en même temps, mes entrailles frémissent. » 3.2 Jésus-Christ, Visage de la Miséricorde du Père. - 4. Don Bosco, ÉvangÉlisateur et Éducateur sensible À la MisÉricorde de Dieu : Le Dieu que Don Bosco montre à ses jeunes. - 5. La MisÉricorde dans la Maison SalÉsienne. 5.1 Annonce de la Miséricorde de Dieu en une géographie de la douleur. 5.2 Vivre l’expérience personnelle de la Miséricorde de Dieu : Réconciliés et créateurs de milieux éducatifs qui réconcilient. 5.3 Miséricorde signifie avoir le « Cœur du Bon Pasteur ». 5.4 Miséricorde signifie vivre l’expérience spirituelle et éducative appelée « Système Préventif ». 5.5 Une miséricorde qui se réalise dans la justice. 5.6 Marie, Mère de la Miséricorde.





  1. LE JUBILÉ EXTRAORDINAIRE DE LA MISÉRICORDE



« Que celui-là taise tes louanges, Seigneur, qui ne considère pas tes miséricordes. »1 Voilà une affirmation forte de saint Augustin invitant à faire silence et à ne pas louer Dieu si, en même temps, on ne contemple pas sa Miséricorde. Dans un langage d’aujourd’hui, le Cardinal théologien Walter Kasper écrit : « Si nous ne sommes pas capables d'annoncer d'une manière nouvelle le message de la Miséricorde Divine aux personnes qui souffrent physiquement et spirituellement, nous devons nous taire sur Dieu. »2

Le Pape François a offert l'Église Universelle un Jubilé Extraordinaire de la Miséricorde comme un temps propice pour l'Église, « afin que le témoignage rendu par les croyants soit plus fort et plus efficace. »3 L'Année Sainte s'est ouverte le 8 décembre 2015, Solennité de l'Immaculée Conception, et se conclura en la Solennité liturgique du Christ Roi de l'Univers, le 20 Novembre 2016. Dans la Bulle d'indiction du Jubilé, le Pape stipule que nous devons toujours contempler le mystère de la Miséricorde, parce qu'elle est une source de joie, de sérénité et de paix. Et parce qu’ « Il y a des moments où nous sommes appelés, de façon encore plus pressante, à fixer notre regard sur la miséricorde, afin de devenir nous aussi signe efficace de l’agir du Père. C’est la raison pour laquelle j’ai voulu ce Jubilé Extraordinaire de la Miséricorde ».4

Cette proposition est conforme à la Tradition et au Concile Vatican II qui a marqué une ère nouvelle dans l'histoire de l'Église. À l'ouverture de ce Concile, le Pape Jean XXIII, aujourd'hui saint, a indiqué comme chemin à suivre, un temps où l'Église, « Épouse du Christ, préfère recourir au remède de la miséricorde plutôt que de brandir les armes de la sévérité ».5 Et le Pape Paul VI, aujourd’hui bienheureux, se situait dans la même perspective à la fin du Concile, en disant que toute la richesse doctrinale du Concile n’avait visé qu’une seule chose : « Servir l’homme. Il s’agit, bien entendu, de tout homme, quels que soient sa condition, sa misère et ses besoins. »6

Tout paraît donc indiquer que nous sommes à un moment très spécial de la vie pastorale de l'Église. Un moment où les paroles déjà citées de saint Augustin semblent avoir été écrites pour aujourd'hui avec toute la force d'un défi : ou l'annonce de la Miséricorde Divine ou le silence. Il semblerait qu’il n'y ait pas de moyens termes, pour tout homme et toute femme, pour arriver à l'Évangile et à Jésus-Christ lui-même, ni d'autres chemins à explorer. Il n’y a que cette voie : la Miséricorde Divine comme essence du message sur Dieu.

C'est dans cette sensibilité et avec cette certitude que l'on peut comprendre parfaitement ce que le Pape François dit presqu'au début de son message : « Combien je désire que les années à venir soient comme imprégnées de miséricorde pour aller à la rencontre de chacun en lui offrant la bonté et la tendresse de Dieu! Qu’à tous, croyants ou loin de la foi, puisse parvenir le baume de la miséricorde comme signe du Règne de Dieu déjà présent au milieu de nous. »7

Le thème choisi à la lumière de la Parole de Dieu, « Miséricordieux comme le Père », exprime pleinement ce que le Seigneur Jésus nous a enseigné à propos du Père : « Soyez miséricordieux comme votre Père est miséricordieux » (Lc 6,36), ce qui a, pour chaque chrétien, tout le caractère d'un véritable programme de vie.

Par conséquent, cette Année Sainte Extraordinaire se présente comme une belle occasion pour découvrir, de la façon la plus vitale et en en faisant le plus possible l'expérience, la Miséricorde qui nous est offerte par le Père depuis toujours. C'est une merveilleuse opportunité pour « nous laisser surprendre par Dieu. »8



  1. MISÉRICORDE : MOT-CLÉ DU PONTIFICAT DU PAPE FRANÇOIS



« Le Nom de Dieu est Miséricorde » est le titre d’un livre-interview du Pape François9. Le Pape y répond à de multiples questions sur l’Année Jubilaire et sur tout ce qui l’a motivé pour la déclarer. Avant la question de savoir ce qu’est la miséricorde pour le Pape, celui-ci répond que « la miséricorde est la carte d’identité de notre Dieu : Dieu de miséricorde, Dieu miséricordieux. »10

Nombreux sont les auteurs qui font référence au fait que le Pape François a choisi la miséricorde comme point-clé de son pontificat, comme sigle et mot central, comme mot qui revient le plus fréquemment11 dans ses interventions et discours, ses messages pastoraux et homélies, ainsi que dans ses gestes parce que, comme nous le savons, le Pape François communique beaucoup par des gestes.

Dans un monde complexe et dans des sociétés si différentes que dans beaucoup d'entre elles on court le risque de défigurer ou de ne pas reconnaître le visage de Dieu, le Pape veut nous dire que personne ne peut être exclu de la Miséricorde de Dieu. Et cela a une force particulière car la miséricorde est l'essence même de Dieu, et parce que cet homme ou cette femme fragiles – que nous sommes chacun d'entre nous – ont un profond besoin de sentir que cette miséricorde peut aussi les rejoindre car, heureusement, la « logique » de Dieu n'est pas notre logique.

Lorsque dans la révélation de l'Ancien Testament, Dieu se présente lui-même ["s'auto-présente"], en plus de se révéler comme « Je suis qui je suis » (Ex 3,14), il se présente aussi comme « Yahvé, Yahvé, Dieu de tendresse et de miséricorde »12, des mots qui sont le cœur de la révélation de Dieu. C'est dans la miséricorde que resplendit la souveraineté de Dieu, affirmaient les Pères Synodaux dans le Rapport final de la quatorzième Assemblée Générale Ordinaire, ce qui fait dire alors au Pape, à la messe de clôture du Synode, le 25 octobre 2015, qu'« Aujourd'hui est un temps de miséricorde ! »

Et c'est parce que l'Église croit et espère en cette miséricorde que cette Année Jubilaire est avant tout une invitation, à chaque personne et à l'ensemble de l'Église, à la conversion du cœur et de l'esprit. Il y a un changement de «logique». La «logique» dont parle le Pape François est la logique de Dieu, sa façon de regarder le monde, l'histoire, l'humanité et chaque être humain. Dans une de ses homélies qui sont considérées comme programmatiques de son Pontificat, le Pape parle de cette logique avec une forte conviction et la définit comme « La logique de l’amour qui ne se fonde pas sur la peur mais sur la liberté (...) La peur de perdre ceux qui sont sauvés et le désir de sauver ceux qui sont perdus. Aujourd’hui aussi il arrive, parfois, de nous trouver au croisement de ces deux logiques : celle des docteurs de la loi, c’est-à-dire marginaliser le danger en éloignant la personne contaminée, et la logique de Dieu qui, avec sa miséricorde, serre dans ses bras et accueille en réintégrant et en transfigurant le mal en bien, la condamnation en salut et l’exclusion en annonce. Ces deux logiques parcourent toute l’histoire de l’Église : exclure et réintégrer. »13

Indubitablement, avec ces fortes et fermes convictions, on saisit très clairement le motif de ce temps de grâce jubilaire que le Pape a voulu présenter comme un don pour tous les croyants et une invitation aux hommes et femmes de bonne volonté afin qu’ils puissent sentir que ces paroles veulent toucher leur cœur.



  1. DIEU RICHE EN MISÉRICORDE



Seul connaît vraiment Dieu celui qui a fait l’expérience de sa Miséricorde, écrivent unanimement tant d’exégètes qui réfléchissent sur la réalité de la Miséricorde Divine. Et dans les nombreuses recherches sur la Parole de Dieu (Ancien et Nouveau Testament), la miséricorde apparaît par excellence comme l’attribut propre de Dieu. « Ses entrailles de miséricorde le définissent comme le Dieu authentique (Ex 20,5.6 ; Dt 5, 9.10 ; 2Ch 30,9 ; Ne 9, 17.31 ; Jon 4,2 ; Jl 2,13 ; Is 55,7 ; Ps 145, 8.9) »14. Jésus lui-même n’énonce aucune doctrine sur Dieu sans communiquer sa propre expérience du Père, expérience qui se traduit pour nous en commandement : « Soyez miséricordieux comme votre Père est miséricordieux » (Lc 6,36). C’est une invitation à faire l’expérience de la Miséricorde de Dieu en soi-même, une invitation à se laisser conquérir par la miséricorde, à se laisser convertir par la Miséricorde de Dieu.



3.1 « Mon cœur se retourne contre moi ; en même temps, mes entrailles frémissent. » (Os 11,8)



Une lettre familière comme celle-ci n’est pas un traité académique qui synthétise la richesse que l’on rencontre dans les nombreuses études exégétiques qui ont été faites et qui se font encore sur ce thème de la Miséricorde, spécialement cette année. Il est cependant opportun, profitant d’une telle abondance, de faire remarquer, par exemple, que dans la Genèse, la Miséricorde de Dieu se présente avant tout comme Créatrice et Salvatrice. Il est opportun de montrer que c’est la manière avec laquelle Dieu réalise son projet d’Amour qui sauve sa créature et l’ensemble de la création dans un rapport d’Alliance gratuite avec son peuple.15

Dans le Livre de l'Exode, la Miséricorde de Dieu est, avant tout, expérience de libération de l'esclavage et guide à travers le désert. Le Peuple de l'Alliance fait continuellement l'expérience de cette présence de Dieu au milieu d'eux, une expérience de liberté avant tout.

Tout au long de l'histoire des prophètes, dans sa diversité, on voit que la Miséricorde de Dieu est particulièrement un moyen et une garantie pour le Peuple élu de marcher et croître jusqu'à devenir une société fraternelle et juste. Cependant, ce Dieu qui se manifeste ne peut être enfermé en aucun schéma, en aucune logique humaine, parce que son amour et son pardon dépassent l'imagination humaine. Cette miséricorde est le grand attribut du Dieu d'Israël qui le rend différent de tout autre divinité ou idole (cf. Mi 7,18 ; Sg 9,1).

Cette miséricorde divine, révélée dans l'Ancien Testament, dépasse tous les paramètres, en particulier ceux de la justice humaine. De nombreux auteurs s’accordent pour dire que le point culminant de la révélation de la Miséricorde Divine dans l'A.T. se trouve très probablement dans le prophète Osée. On connaît l’authentique révélation de l'amour « fou » de Dieu pour son Peuple. Ce Peuple a violé l’Alliance, devenant ainsi une prostituée. Dieu décide alors de ne plus lui manifester de compassion (Os 1,6-9). Tout semble se terminer ici avec la dénonciation de cette trahison et de ce péché, mais ce Dieu passionné pour le sort de son Peuple, s’exclame, déconcertant : « Mon cœur se retourne contre moi ; en même temps, mes entrailles frémissent. » (Os 11,8) Et Dieu pardonne à son Peuple (Os 14). Il est beau de faire cette constatation : « C’est un Dieu riche en miséricorde (Ps 51,3 ; Ps 69,17 ; Ps 9,1 ; 2Co 1,3 ; Ep 2,4 ; 1P 1,3). Cela entraîne des conséquences en ce qui concerne notre image de Dieu : Dieu apparaît comme sensible, délicat, vulnérable. Son amour, revêtu de tendresse maternelle (Is 49,14-15), le porte à s’émouvoir, à avoir compassion. »16





3.2 Jésus-Christ, Visage de la Miséricorde du Père



C’est avec cette magnifique et radicale affirmation que commence l’annonce de l’Année de la Miséricorde dans la Lettre d’Indiction « Misericordiæ Vultus » : « Jésus-Christ est le visage de la miséricorde du Père. Le mystère de la foi chrétienne est là tout entier. Devenue vivante et visible, elle atteint son sommet en Jésus de Nazareth. (…) À travers sa parole, ses gestes, et toute sa personne, Jésus de Nazareth révèle la Miséricorde de Dieu. »17

Et si dans les pages précédentes, j’ai brièvement exprimé comment Dieu se révèle progressivement miséricordieux dans toute l’Histoire du Salut, en Jésus, cette miséricorde se manifeste dans toute sa clarté. La miséricorde annoncée par Jésus comporte une nouveauté par rapport à l’Ancien Testament : cette miséricorde et pour tous,18 quelles que soient les conditions de vie de chacun, car elle provient toujours de la profondeur du cœur de Dieu : la compassion.

Déjà dans l’Ancien Testament, Dieu se révèle compatissant pour son peuple. Cependant, ce n’est que dans les récits évangéliques que nous contemplons Dieu qui, en Jésus de Nazareth, se mobilise parce que « touché », mû par une profonde compassion. C’est le sentiment de Jésus face au lépreux (cf. Mc 1,41), du bon samaritain devant l’homme blessé (cf. Lc 10,33). La compassion, c’est ce qu’éprouve Jésus en voyant les foules qui le suivent, fatiguées et comme des brebis sans berger (cf. Mt 9,36). La compassion, c’est ce qui le pousse à guérir les malades qui lui sont présentés (cf. Mt 14,14). La compassion, c’est le bouleversement intérieur que provoquent en lui les pleurs douloureux de la mère qui porte en terre son fils unique et auquel il redonne la vie (cf. Lc 7,15).

« Dans les paraboles de la miséricorde, Jésus révèle la nature de Dieu comme celle d’un Père qui ne s’avoue jamais vaincu jusqu’à ce qu’il ait absous le péché et vaincu le refus, par la compassion et la miséricorde. Dans ces paraboles, Dieu est toujours présenté comme rempli de joie, surtout quand il pardonne. Nous y trouvons le noyau de l’Évangile et de notre foi, car la miséricorde y est présentée comme la force victorieuse de tout, qui remplit le cœur d’amour, et qui console en pardonnant. »19

En définitive, les paraboles de Jésus montrent que l’action de Dieu pour ses fils et ses filles se caractérise par le fait d’être d’une gratuité sans mesure à notre égard. Cela explique que la position de Jésus, comme attitude existentielle personnelle lorsqu’il annonce le visage de Dieu et l’identité du Père, ne soit pas toujours acceptée, particulièrement par les gens « pieux » et les gens rigoureux et rigoristes dans l’observance de la Loi et de son accomplissement.

Et bien qu’il soit absolument certain que parmi les attributs de Dieu, il y a inséparablement la sainteté et la justice – que nous autres nous séparons – et qu’il en est de même dans le rapport entre miséricorde et justice – retenant la miséricorde comme ce qui corrige la justice –, en Jésus de Nazareth nous faisons l’heureuse découverte qu’en Dieu, il n’en est pas ainsi. En fait, « la miséricorde doit se concevoir comme la justice spécifique de Dieu et comme sa sainteté. »20 Nous pouvons aussi ajouter d'une manière plus radicale, également avec des mots de W. Kasper, que « la miséricorde est avant tout la face visible et efficace, même extérieurement, de l'essence de Dieu qui est Amour (Jn 4,8.16). »21 De là, on peut conclure que la miséricorde et l’un des noms de l’Amour de Dieu. Nous pourrions dire que c’est le nom divin de l’amour.

4. DON BOSCO, ÉVANGÉLISATEUR ET ÉDUCATEUR SENSIBLE À LA MISÉRICORDE DE DIEU



Avec cette lettre, chers frères Salésiens et chère Famille Salésienne, je désire souligner l’importance de cette Année de Grâce de la Miséricorde (Année Jubilaire) dans nos milieux salésiens. Comme cela aurait été pour Don Bosco, cette année est une opportunité pour répondre, avec une adhésion filiale, à cette initiative du Pape pour toute l’Église ; or nous, Famille Salésienne, nous sommes et nous nous sentons partie vivante de cette Église. Et comme Don Bosco en son temps, nous accueillons ce don de Dieu qui nous vient de la main du Pape François aujourd’hui, comme de Benoît XVI hier, comme de celui qui sera suscité par l’Esprit Saint demain.

Une seconde intention est de souligner et d’apporter quelque chose de concret, au plan salésien, au fait que nous soyons éducateurs et pasteurs des jeunes. Et c’est avec grand plaisir que je dirige mon regard vers Don Bosco pour percevoir comment il se comportait, dans sa condition de pasteur et éducateur de ses jeunes. Don Bosco était, par-dessus tout, un prêtre au cœur plein de Dieu. Il avait un cœur d’éducateur qui cherchait toujours à susciter chez ses jeunes le sens de Dieu et la confiance en Lui. Naturellement, nous ne pouvons pas imaginer un Don Bosco en dehors de son temps ni de la vision religieuse et théologique de son époque. Il est certain, en tout cas, que la représentation de Dieu à laquelle parvient Don Bosco dans sa maturité de prêtre et d’éducateur est le fruit d’un long parcours.

Nous savons, par l’histoire salésienne,22 que, dans son enfance, prédomine l’image d’un Dieu sévère. Maman Marguerite, catéchiste authentique, inculquait à son petit Jean le sens de la présence universelle de Dieu et de sa justice rigoureuse. « Dieu te voit, était le mot par lequel elle rappelait à ses enfants la manière de se comporter toujours sous les yeux de ce grand Dieu qui, un jour, les jugerait.»23 En même temps, elle leur transmettait le sens de la gratitude envers Dieu Créateur, tout-puissant, qui accordait le bien des moissons et qui permettait aussi leur perte à cause des tempêtes. Lorsqu’une récolte était perdue à cause de la grêle ou d’autres phénomènes naturels, Maman Marguerite disait aux siens : « Le Seigneur nous l’avait donnée, le Seigneur nous l’a enlevée. C’est Lui, le Maître. Tout est pour le mieux ; mais sachez que pour les méchants, il y a des châtiments et, qu’avec Dieu, on ne plaisante pas. »24

Cette même conviction est présente chez Don Bosco durant ses années de séminaire à Chieri, surtout à l’occasion de la maladie et de la mort de son ami Louis Comollo. Dans la bouche du jeune homme proche de la mort, les paroles que Don Bosco lui attribue donnent une vision terrible de Dieu, qui Le laisse apparaître implacable dans sa justice. « "Ce n’est pas le mal physique qui m’inquiète, dit le malade Comollo à son ami Bosco. Non, ce qui me préoccupe, c’est de devoir me soumettre au jugement de Dieu (…) Je ne m’inquiète ni ne m’énerve, je pense seulement que je dois comparaître devant ce grand tribunal, comme à un jugement sans appel ; voilà ce qui me trouble intérieurement (…)" Chaque fois que Bosco allait le visiter, son ami lui répétait toujours les mêmes paroles : "Le moment approche où je devrai me présenter au terrible jugement de Dieu". »25

Dans certaines méditations de l’ouvrage intitulé « La Jeunesse Instruite », Don Bosco évoque l’idée que le jugement de Dieu peut s’avérer terrible, ajoutant que l’âme pourra néanmoins avoir recours à la Miséricorde Divine, considérant que la mort est le moment ultime pour faire l’expérience de la Miséricorde de Dieu.26

Cela n’est évidemment pas l’unique vision ni l’unique source de la formation de Don Bosco. Au Convitto Ecclesiastico, Don Bosco apprend à être « curé » sous la houlette de Don Cafasso et de Don Guala, avec une morale inspirée de saint Alphonse-Marie de Liguori, morale qui était plus équilibrée et tendait à dépasser le rigorisme de l’époque. Le jeune prêtre Don Bosco découvre que le chemin pour attirer les âmes à Dieu, particulièrement les jeunes, ce n’est pas la rigueur mais la bonté, la bienveillance et la miséricorde.

C’est fort de cette conviction qu’il rédige son ouvrage intitulé Exercice de dévotion à la Miséricorde de Dieu, écrit en 1846, au sortir de sa maladie et de sa convalescence, au début de l’activité de l’Oratoire du Valdocco, peu après avoir quitté les œuvres de la Marquise Julie de Barolo.

L’histoire de cette Œuvre est intéressante.27 La Marquise de Barolo avait beaucoup à cœur la diffusion de la dévotion à la Miséricorde Divine. Dans les œuvres de bienfaisance qu’elle patronnait et où Don Bosco avait exercé son ministère, dans les premières années, on pratiquait la dévotion des « Sept Jours » pour implorer la Miséricorde Divine. La Marquise souhaitait que cela devînt une pratique stable et commune pour toutes les paroisses et les églises publiques, mais l’Archevêque de Turin ne voulait pas donner l’autorisation sans le consentement du Saint-Siège. C’est alors que la Marquise s’adressa directement au Pape Grégoire XVI qui accorda la permission en y adjoignant l’Indulgence Plénière pour ceux qui pratiqueraient cette dévotion.

La seconde partie de cette histoire concerne la rédaction du livret. La Marquise voulait qu’un théologien compétent écrivît un ouvrage sur la Miséricorde de Dieu pouvant être utilisé pour la pratique de cette dévotion. Son secrétaire, Silvio Pellico, lui suggéra le nom de Don Bosco ; mais elle l’écarta tout de suite. Cependant, Silvio Pellico, grand ami de Don Bosco, convaincu que celui-ci était l’homme de la situation, revint à la charge. Don Bosco accepta immédiatement. Il publia l’ouvrage, payant les frais d’imprimerie de ses propres deniers et, dit-on, par délicatesse et courtoisie envers la Marquise, ne voulut pas que son nom y figurât comme étant l’auteur, et il le publia donc comme un livre anonyme. Il en offrit ensuite un exemplaire à chacune des filles du Refuge et remit le reste à la Supérieure de ce Centre éducatif. La Marquise lut et approuva le livre mais ne permit jamais que l’on dise, en sa présence, que l’ouvrage avait été écrit par Don Bosco.



Le Dieu que Don Bosco montre à ses jeunes



Comme déjà dit, Don Bosco fut un homme de son temps et connut une théologie où la sévérité du jugement et la crainte de la condamnation éternelle était très présentes. Dans différents écrits, Don Bosco parle du caractère terrible que peut avoir le jugement de Dieu, comme on peut le lire, par exemple, dans « La Jeunesse Instruite ». Mais il écrit et enseigne aussi avec insistance à ses jeunes que Dieu est avant tout Créateur et Seigneur, et de quelque côté que l’on regarde, on peut voir ses bienfaits.

Devant ses garçons, Dieu est très fréquemment appelé Seigneur : « Le Seigneur vous avertit que si dès votre jeune âge, vous vous engagez dans la bonne route, il vous sera facile d’y rester toute votre vie et d’aboutir ainsi à la joie éternelle, en récompense de vos bonnes actions. »28 « Le Seigneur nous assure qu’il distribue ses dons indistinctement aux bons et aux pécheurs. »29 « À la première larme, au premier balbutiement de repentir, le Seigneur éprouve immédiatement de la compassion. »30

La vie de Don Bosco, ses écrits eux-mêmes et ce que l’on dit de lui dans les Mémoires Biographiques, sont pleins des signes de son regard éducatif et pastoral qui invite intensément à faire confiance au Seigneur et à s’abandonner à Lui et à sa Miséricorde. On pourrait recueillir des centaines de citations. Mais en en choisissant seulement quelques-unes, elles nous montrent comment il percevait cette miséricorde et cette protection divines, dans la Congrégation Salésienne et dans l’Institut des Filles de Marie Auxiliatrice. Cette miséricorde et cette protection divines ainsi que la présence de Jésus dans les sacrements – spécialement l’Eucharistie et la Confession – étaient les piliers fondamentaux de son action éducative.

En considérant un premier aspect, nous lisons : « J’ai pu savoir avec certitude que le Seigneur fait preuve de grande miséricorde à notre égard. »31 Et encore : « Il arrive le temps où les bons et les méchants seront surpris des merveilles qui se produiront très rapidement ; tout est miséricorde et tous seront consolés. »32

Sur le plan spécifique des sacrements, nous pouvons lire chez Don Bosco des expressions comme celle-ci : « On peut dire tout ce que l’on veut sur les différentes méthodes d’éducation, moi, je ne trouve aucune base sûre hormis la confession et la communion fréquentes, et je crois ne pas trop m’avancer en affirmant que, si l’on néglige ces éléments, la moralité est inexistante. »33

Nous pourrions dire que dans cette vision éducative, pour guider ses jeunes sur le chemin de la foi et de la prière chrétienne, il n’y a pas de contrastes chez Don Bosco. Il atténue, il adoucit la vision et la représentation d’un Dieu justicier et essaye d’amener ses jeunes gens à la contemplation d’un Dieu qui les aime, qui est miséricordieux mais qui attend d’eux, cependant, une vie chrétienne authentique : « Dieu est miséricordieux et juste. Il est miséricordieux avec celui qui veut bénéficier de sa miséricorde, mais il montre la rigueur de sa justice avec celui qui ne veut pas bénéficier de sa miséricorde. »34

Je termine cette brève référence à Don Bosco en rappelant encore que pour lui, les sacrements étaient des canaux de la Miséricorde Divine comme Marie était le canal parfait de la Grâce et de la Miséricorde de Dieu. Une action éducative et pastorale chez Don Bosco serait impensable sans référence à la présence de Marie Immaculée et Auxiliatrice, pour conduire les jeunes à Dieu.



5. LA MISÉRICORDE DANS LA MAISON SALÉSIENNE



Peut-être le titre que je donne à cette partie de la lettre surprendra-t-il. En fait, je voudrais, autant que possible, attirer l’attention sur le message de cette Année Jubilaire et le prendre comme une réalité ecclésiale qui s’adresse aussi à nous et au charisme qui est le nôtre, en le faisant passer dans notre vie. Je voudrais éviter que cette Année de la Miséricorde soit un simple « slogan » dont tout le monde parle mais qui passe sans laisser de traces. Nous ne pouvons pas le permettre : au contraire, cette Année est, et doit être, un appel solennel à la conversion et à l’authenticité salésienne.



5.1. Annonce de la Miséricorde de Dieu en une géographie de la douleur



Dans le panorama social actuel où nous constatons une géographie de la douleur inédite à ce jour, le rappel de l’Église à la miséricorde prend un sens évangélique profond. Dans ce climat, il est nécessaire d’assumer, comme Église, avec une sereine et sincère autocritique, ce que dit le Pape François : « Peut-être avons-nous parfois oublié de montrer et de vivre le chemin de la miséricorde (…) Le temps est venu pour l’Église de retrouver la joyeuse annonce du pardon. Il est temps de revenir à l’essentiel pour se charger des faiblesses et des difficultés de nos frères. »35

Nous savons bien que lire les signes des temps n’est pas chose facile ; mais avec un authentique discernement et sous la conduite de l’Esprit Saint, l’Esprit de Dieu qui nous parle ici et maintenant, c’est possible et nécessaire. C’est pour cela que nous devons nous demander ce que signifie et comment nous devons faire cette annonce de la Miséricorde dans les maisons salésiennes du monde entier. Faire cette annonce dans les lieux où l’on tue au nom de Dieu et où, au nom de Dieu encore, on place des bombes et on commet des attentats ; dans les présences salésiennes des pays en guerre, dans les territoires où les réfugiés se concentrent en masse ; mais aussi dans les parties du monde où prolifèrent des messages racistes et xénophobes…

Devant cette réalité, pouvons-nous rester neutres ou détourner notre regard comme si tout cela ne nous concernait pas ? Non ! Il n’existe pas – et ne peut pas exister – de « neutralité salésienne » devant ces situations. Et nos réponses ne peuvent être que celles de l’Évangile, nous engageant à répondre à l’invitation du Pape François à rechercher et à vivre la Miséricorde de Dieu avec toutes ses conséquences : un engagement qui ne soit pas quelque chose de limité dans le temps mais qui s’inscrive dans une longue durée. Le Pape nous invite à écouter « la parole de Jésus qui a établi la miséricorde comme idéal de vie, et comme critère de crédibilité de notre foi : " Heureux les miséricordieux, car ils obtiendront miséricorde " (Mt 5, 7)… Comme le Père aime, ainsi aiment les enfants », dit le Pape.36

Et ce désir d’essayer de vivre la Miséricorde de Dieu demande de notre part, de la part des présences salésiennes dans le monde en cette géographie de la douleur, d’ouvrir notre cœur à tant de personnes qui vivent en situation de précarité et de souffrance. Il exige de nous que nous soyons proches de ceux qui n’ont pas de voix pour faire valoir leur droit à la justice, que nous prenions soin des blessés de la vie dans un esprit fraternel et solidaire, et que nous ne tombions pas dans cette indifférence qui, loin de porter secours, ne fait qu’humilier.

« Ouvrons nos yeux pour voir les misères du monde, les blessures de tant de frères et sœurs privés de dignité, et sentons-nous appelés à entendre leur cri qui appelle à l’aide. Que nos mains serrent leurs mains, et les attirent vers nous afin qu’ils sentent la chaleur de notre présence, de l’amitié et de la fraternité. »37



5.2 Vivre l’expérience personnelle de la Miséricorde de Dieu



Réfléchir à la manière de vivre pleinement la Miséricorde, en cette année spéciale et dans l’avenir, dans nos présences salésiennes, ne signifie pas d’abord programmer ce que nous pouvons faire pour accueillir les autres et les servir au mieux. Cela aussi, bien sûr, mais en premier lieu, il nous est demandé de nous mettre en situation d’accueillir et de désirer vivre l’expérience de la Miséricorde.

À l’occasion du nouveau Millénaire, en l’An 2000, et du Jubilé proclamé par le Pape Jean-Paul II qui présentait cette Année Sainte comme un appel à la conversion, étant donné la nature même de l’Année Jubilaire, le P. Vecchi écrivit une lettre sur la Réconciliation. Dès le début, le Père y écrivait : « Il nous est donné, à nous aussi, une extraordinaire opportunité de revivre l’expérience de la Réconciliation selon notre condition de Salésiens consacrés, en en comprenant toujours mieux la dimension humaine et éducative en même temps que théologale. »38

Je renouvelle le même appel à moi-même et à vous tous. Avant d’aller à la rencontre de ceux qui pourraient avoir besoin de nous, faisons cette profonde expérience de la Miséricorde de Dieu en nous. Ne courons pas le risque d’être des « fonctionnaires » et soyons les premiers à vivre humblement, mais avec profondeur, ce don qui nous est offert.

L’invitation du Jubilé de l’An 2000 se renouvelle aujourd’hui pour nous avec les paroles du Pape François qui nous dit que « là où l’Église est présente, la miséricorde du Père doit être manifeste. Dans nos paroisses, les communautés, les associations et les mouvements, en bref, là où il y a des chrétiens, quiconque doit pouvoir trouver une oasis de miséricorde. »39

Sur cette invitation à la Réconciliation et à la rencontre miséricordieuse avec le Père, l’Évangile présente de multiples rencontres de pardon, toujours dues à l’initiative de Jésus. Ce ne sont pas l’homme ou la femme qui rencontrent Jésus qui demandent le pardon mais c’est Jésus lui-même qui le leur offre. Ces personnes souffrent parfois d’une condamnation sociale, ou bien elles sont infirmes ou encore elles expérimentent le poids d’une faute. Jésus touche leur cœur et provoque en elles un changement de vie. Ainsi en est-il de Lévi, de Zachée, de l’homme paralysé, de la femme pécheresse, de Pierre qui le renie…

Très différent, au contraire, est le rapport avec Simon le Pharisien (Lc 7,44b-47) et avec bien d’autres. Dans cette situation, Simon, bien qu’étant un homme religieux et connaissant la doctrine de la Sainte Écriture, ne se rend pas compte du regard de pardon que Dieu porte sur lui, et c’est précisément pour cela qu’il ne réussit pas à aimer, ni à reconnaître l’amour. Il connaît la religion et la Loi dont il est un observant scrupuleux et d’une orthodoxie irréprochable, mais, en définitive, il ne connaît pas Dieu.

Au contraire, l’expérience de pardon dans l’Évangile est l’expérience d’une Grâce débordante ; c’est une expérience de joie, de grande fête dans le ciel pour celui qui se convertit et de scandale pour ceux qui se considèrent des « gens bien » et des personnes justifiées. C’est un banquet auquel tous sont invités et qui révulse ceux qui se croient des « gens bien ». À la lumière de la révélation qu’il nous fait de son Père, « Jésus affirme que la miséricorde n’est pas seulement l’agir du Père, mais elle devient le critère pour comprendre qui sont ses véritables enfants. En résumé, nous sommes invités à vivre de miséricorde parce qu’il nous a d’abord été fait miséricorde. »40



Réconciliés et créateurs de milieux éducatifs qui réconcilient



Cela me paraît très important. Comme je l’ai dit précédemment, en tant qu’éducateurs de tous les jeunes, nous ne pouvons pas être des fonctionnaires et des dispensateurs de services variés. Nous sommes avant tout des croyants et nous avons besoin de nous sentir réconciliés, après avoir expérimenté la Miséricorde de Dieu. Le regard porté sur Don Bosco, comme modèle éducatif, pastoral et évangélisateur, nous amène à confirmer en premier lieu la grande importance qu’il accordait à la réconciliation sacramentelle dans l’éducation des jeunes car, par expérience personnelle, il la considérait comme un élément fondamental pour la croissance humaine et chrétienne.

L’expérience ininterrompue de Don Bosco, dès sa prime adolescence, ensuite comme séminariste et plus tard comme jeune prêtre et, enfin, comme le Don Bosco que nous connaissons tous, nous est présentée par le P. Eugenio Ceria en ces termes : « Don Bosco aima la confession dès son âge le plus tendre, et rien, au cours de sa vie, ne put affaiblir en lui ce goût de s’en approcher fréquemment. (…) À Chieri, son premier soin fut de chercher un confesseur stable. (…) Au grand séminaire, il se confessait chaque semaine. Jeune prêtre à Turin, il s’adressa avec la même régularité à Don Cafasso. À la mort de celui-ci, ce fut un de ses consdisciples qui, tous les lundis, recevait ses aveux à la sacristie de Marie Auxiliatrice, et, en échange, demandait le même service à Don Bosco. Pendant les voyages, ou en l’absence de son confesseur ordinaire, fidèle à sa chère habitude, il se confessait à un Salésien ou à un autre prêtre selon les circonstances. Par exemple, en 1867, au cours d’un séjour de deux mois à Rome, il choisit un père Jésuite, le Père Vasco, qu’il avait connu à Turin. Quant à ses fils, certains hésitaient parfois à l’entendre ; mais lui : "Allons, disait-il, fais cette charité à Don Bosco et permets-lui de se confesser !". »41

Tout cela nous dit comment Don Bosco entendait ce qui pouvait pacifier, rasséréner intérieurement un garçon, et comment il pouvait parler de l’accueil paternel et inconditionnel de Dieu. C’était possible parce que lui-même en avait fait l’expérience et l’avait vécu comme quelque chose de plus important qu’« une pratique de piété occasionnelle ou un service ministériel. Il l’avait vécu comme un espace où situer la totalité de la vie, un espace vécu dans la foi. Et cela vaut également pour nous. Par la grâce d’unité, l’expérience personnelle de la Réconciliation et la pratique pédagogique et pastorale se renforcent réciproquement. Réconciliés, nous devenons artisans et médiateurs de la réconciliation. »42 Et cela nous met dans une situation d’engagement ou, mieux encore, face à un défi éducatif qui nous conduit à mettre les jeunes en contact avec un circuit de grâce.



5.3. Miséricorde signifie avoir le « Coeur du Bon Pasteur »



Une caractéristique de notre être salésien est notre sensibilité pour la figure du Christ Bon Pasteur (Jn 10,3-4), puisque l’esprit salésien trouve son modèle et sa source dans le cœur même du Christ, Apôtre du Père, en qui brille son attitude de Bon Pasteur.

Avec ce modèle qu’est le Seigneur Jésus, nous croyons vraiment que la charité est la manière la plus appropriée de notre service des jeunes et nous le faisons avec une « amabilité "inlassable"et la "familiarité", noms salésiens de la charité appliquée aux jeunes ».43

Dans ce cadre ecclésial et spirituel, la Miséricorde doit se traduire et se concrétiser, très fortement dans notre cas, pour montrer au maximum les traits qui nous définissent de façon charismatique. Participant de la paternité de Don Bosco, les expressions de la paternité salésienne doivent être celles-là mêmes qui resplendissaient en Jésus : sa gratitude envers le Père pour la vocation divine qu’il a donnée à tous ses fils et filles, sa prédilection pour les petits et pour les pauvres, sa sollicitude dans sa prédication, dans son souci de guérir et de sauver, ainsi que sa mansuétude et le don de lui-même.44 Montrer aussi les traits caractéristiques de Don Bosco, tels ses gestes de bonté, l’affection qui faisait se sentir fils, une affection et une bonté inspirées de l’amour de Dieu et de la mansuétude du Christ. Sa bonté est celle de quelqu’un qui cherche à rendre les autres heureux. Sa bonté affectueuse – son amorevolezza – et son accueil sont le résultat d’un juste mélange d’affection et de responsabilité : une bonté aimable et compréhensive et, en même temps, responsable et exigeante avec la vie de ses jeunes gens. Et puisqu’avec bonté il se sent père de ses jeunes, il désire les faire s’approcher du mystère de Dieu et les mettre en contact avec Lui jusqu’à leur faire découvrir le plan merveilleux que Dieu avait pour eux, et les aider à être heureux en ce monde et dans l’éternité.45

Vivre la Miséricorde de Dieu dans nos présences avec cette sensibilité doit signifier que nous croyons qu’aujourd’hui encore, comme avec Jésus dans l’Évangile (Lc 7,50 ; Mt 9,22 ; Mc 5,34 ; Lc 8, 48), il s’agit de véritables expériences de rencontre humaine qui allègent le poids de l’existence et relèvent réellement de la poussière. Pouvoir faire, moyennant la rencontre humaine et la foi, l’expérience de la Miséricorde de Dieu, même à travers des médiations si pauvres et humaines comme peuvent l’être les nôtres, est une authentique et véritable guérison, bien plus profonde que les guérisons physiques. C’est faire l’expérience que nous sommes aimés et que nous pouvons aimer, malgré tout. Et c’est en cela que consiste être chrétien : croire en l’amour de Dieu pour nous (cf. 1Jn 4,16).

Et quand un garçon ou une fille rencontrent un véritable éducateur qui se donne à fond et consacre sa vie à sa tâche, ils font l’expérience de la façon dont Dieu les aime, d’une manière spéciale et unique. C’est en cela que consiste incarner le cœur du Christ Bon Pasteur, au point que si quelqu’un voulait faire du mal aux « brebis du troupeau », il devrait d’abord affronter celui qui les guide d’un véritable amour d’éducateur, de frère, de sœur, d’ami… En ce sens, on trouve intéressante la façon dont un exégète présente l’exemple moderne du berger qui se met à dormir en travers du seuil de la porte de la bergerie, de manière à tenir à la fois le rôle du berger et celui de la porte, comme pour dire : « Si l’on veut toucher à mes brebis, il faudra d’abord me passer dessus. »46 On pourrait faire dire la même chose à Don Bosco…



5.4 Miséricorde signifie vivre l’expérience spirituelle et éducative appelée « Système Préventif »



Cette expérience spirituelle et éducative vécue par Don Bosco avec les jeunes du premier Oratoire – et qu’il appela Système Préventif –, était pour lui un amour qui se donne gratuitement, s’inspirant de la charité de Dieu. Reçu de Don Bosco, ce Système est pour nous la manière de vivre et de travailler pour communiquer l’Évangile et sauver les jeunes, avec eux et par eux.47

Cette vie de Don Bosco avec les jeunes du premier Oratoire, dans la joie et dans un esprit de famille, est le cœur de l’esprit salésien où « la bonté (" quatrième vœu", lié au nom de salésien) n’est pas autre chose que la pratique du Système Préventif vécu avec les jeunes, et ce n’est pas seulement "le système de la bonté" mais "la bonté du système". »48

Naturellement, je mets en avant le Système Préventif, car l’esprit salésien se manifeste et s’incarne d’une manière unique dans ce Système. Et si je le mets en évidence, ce n’est pas pour en faire un développement pédagogique mais pour nous rappeler que dans l’esprit salésien, nous avons beaucoup d’éléments et de caractéristiques qui, vécus avec conviction et authenticité, rendent réelle la miséricorde dans toutes les maisons salésiennes du monde. Ces éléments et caractéristiques de la miséricorde que nous devons vivre sont les suivants :

  • une présence éducative qui persuade et suscite la confiance ;

  • une pratique qui, écoutant la voix du coeur, ne recherche que le bien de chaque jeune ;

  • un amour qui se donne gratuitement ;

  • un exercice permanent de la charité, une charité qui sait se faire aimer parce que l’amour construit la personne ;

  • une présence éducative ouverte, cordiale, qui fait le premier pas pour accueillir toujours avec bonté, respect et patience ;

  • une option de prédilection pour les jeunes parce que c’est un élément de « foi salésienne » : nous croyons vraiment que Dieu aime les jeunes.

  • « Un langage du cœur qui accepte les jeunes tels qu’ils sont, qui manifeste le plaisir de partager leurs goûts et leurs centres d’intérêt, qui démontre que l’on a confiance en eux, qui est ouvert à la tolérance et au pardon. »49

C’est pour cela que je crois que nous ne devons jamais nous lasser d’approfondir, d’intérioriser et de valoriser toujours plus cet esprit salésien qui se concrétise dans la manière de faire, de vivre, dans un Système. Et à propos de ce Système, Don Bosco lui-même, dans une de ses lettres à Jacques Costamagna, Provincial en Argentine, écrit, le 10 août 1885 : « J’aimerais avoir à mes côtés tous mes fils et nos sœurs d’Amérique (…) Je souhaiterais vous faire moi-même à tous (…) une conférence sur l’esprit salésien qui doit animer et guider nos actions et toutes nos paroles. Que notre système soit le Système Préventif (…) Que, dans les classes, résonne la parole douceur, charité, patience (…) Que chaque Salésien se fasse l’ami de tous et ne cherche jamais à se venger ; qu’il soit prompt à pardonner sans jamais revenir sur des choses déjà pardonnées (…) La douceur dans les paroles, dans les actes, dans les avis à donner permet de gagner tout et tous. »50

Pour terminer, je profite avec beaucoup de plaisir de l’opportunité que me donne cette lettre pour rappeler à ceux qui le connaissent, et le faire découvrir aux autres, le témoignage – déjà ancien mais toujours précieux – du Père Duvallet, collaborateur durant vingt ans, en France, de l’Abbé Pierre dans l’éducation des jeunes en difficulté. Parlant à des Salésiens du trésor le plus précieux que nous ayons, à savoir notre esprit et notre pratique éducative et évangélisatrice, le Père Duvallet dit ceci : « Vous avez des collèges, des œuvres, des maisons pour les jeunes, mais vous n'avez qu'un seul trésor : la pédagogie de Don Bosco (…). Dans un monde où l'homme et l'enfant sont broyés, disséqués, triturés, classés, instrumentalisés (…), le Seigneur vous a confié une pédagogie où triomphe le respect de l'enfant, de sa grandeur et de sa faiblesse, de sa dignité de fils de Dieu. Gardez cette pédagogie. Renouvelée, rajeunie, enrichie des découvertes modernes, adaptée à ces gosses matraqués par le vingtième siècle et par des drames tels que Don Bosco n'en a pas vu de pareils, mais gardez-la ! Changez tout, perdez vos maisons s’il le faut : qu’importe !  Mais conservez ce trésor. Gardez-nous, battant dans des milliers de poitrines, le cœur de Don Bosco, sa façon d'aimer et de sauver les gosses, son héritage. »51



5.5. Une miséricorde qui se réalise dans la justice



Pour développer quelque peu le titre de ce paragraphe, je dirais qu’il s’agit de la miséricorde qui se concrétise en justice dans nos présences salésiennes, parce que la Miséricorde que nous recevons de Dieu, en cette Année Jubilaire et en tout temps, comporte aussi pour nous une lecture salésienne de la justice qui se vit et doit être présente dans nos maisons.

Pour nous, la Miséricorde de Dieu signifie principalement la justice que nous devons rechercher, mettre en œuvre et même exiger, particulièrement à l’égard des personnes qui, d’une manière ou d’une autre, « dépendent » de nous.

Le Synode des Évêques de 1971 affirmait déjà : « Le problème de la justice dans le monde est l’un des plus vastes, des plus graves et des plus urgents de la société contemporaine. C’est le problème central de la société mondiale aujourd’hui. »52 Nous savons bien que cela continue d’être l’un des grand drames de notre monde. Le Pape François, dans le texte de la proclamation de l’Année Jubilaire, en appelant tout le monde à la conversion dans la rencontre avec le Seigneur, parle du mal commis, y compris des crimes graves, et demande « d’écouter pleurer les innocents dépouillés de leurs biens, de leur dignité, de leur affection, de leur vie même. »53

Cette réalité de la souffrance nous demande, avec notre sensibilité de fils et filles de Don Bosco, et comme personnes consacrées, de continuer à nous tenir du côté des pauvres face à toutes formes d’injustice, travaillant à réveiller nos consciences et celles des autres, devant toutes formes de pauvreté ou de misère, en droite ligne avec la valeur évangélique de l’engagement pour la justice. Et il nous revient, en recevant et en offrant la miséricorde, de faire en sorte que la pratique de la justice soit la marque distinctive des maisons salésiennes dans le monde, d’aborder la question de la justice ou de l’injustice et d’y répondre avec un vrai « scrutinium » en nous demandant si c’est un fondement et un principe inaliénable pour nous.

Cela se traduit en des choses très simples – mais en même temps décisives – comme, par exemple, garantir qu’il y ait des contrats et qu’ils soient respectés afin que soient défendus les droits des personnes. Cela signifie que dans nos présences, l’on paye des salaires justes ; cela signifie que nous devons toujours être honnêtes dans la gestion de l’argent, particulièrement quand il est destiné à d’autres. Cela signifie aussi que les personnes choisies pour les différents services et travaux dans nos présences le sont selon des critères établis, en considération de leur formation, de leurs capacités et de leur identité, et jamais en sous-main « par amitié » ou en échange de faveurs. Cela signifie encore que nous acceptons d’affronter les situations au quotidien, même si elles dérangent ; que nous acceptons d’être vigilants lorsque sont en jeu la justice et les droits des autres personnes, spécialement s’il s’agit de mineurs et donc plus faibles et moins protégés.

Tout cela, et plus encore, est l’expression et la manifestation de la Miséricorde de Dieu envers ces personnes, je le rèpète, par notre humble médiation. Cette réalité tout à fait concrète, que je désire pour tous, comporte une forte connotation théologique en soi. Lorsque je recherche la justice, j’aime avec l’amour même de Dieu et cela m’amène, en même temps, à aimer Dieu, parce que la justice a Dieu comme son destinataire ultime. Reconnaître les droits d’une autre personne, c’est reconnaître les droits de Dieu qui se rend présent dans le visage de l’autre (1Co 11,7) ; c’est reconnaître « le droit du Christ qui se fait exigeant dans le sacrement du frère (…) pour qui le Seigneur considère comme fait à lui-même tout ce que nous avons fait pour le frère (cf. Mt 25,34-40) ». Et c’est pour cela que « l’injustice, aujourd’hui, dans ses différentes formes, en niant la dignité des droits de l’homme, image de Dieu et frère du Christ, constitue un athéisme pratique, une négation de Dieu. »54



5.6 Marie, Mère de la Miséricorde



Le Pape conclut le document MisericordiæVultus en tournant sa pensée vers Marie, Mère de la Miséricorde, en souhaitant pour nous que la douceur de son visage maternel nous accompagne durant cette Année Sainte pour que nous puissions découvrir à nouveau la joie de la tendresse de Dieu.

Marie est reconnue comme Celle qui a fait l’expérience de la Miséricorde de Dieu dès le début de son existence : une miséricorde vécue dans la profondeur de son cœur, un cœur qui reconnaît la gratuité de sa vie, de son élection et de la protection permanente de Dieu qui « la couvre de son ombre », bien qu’Elle ait reconnue être une véritable « pèlerine » de la foi.

« Personne n’a connu comme Marie la profondeur du mystère de Dieu fait homme. Sa vie entière fut modelée par la présence de la miséricorde faite chair. La Mère du Crucifié Ressuscité est entrée dans le sanctuaire de la Miséricorde Divine en participant intimement au mystère de son amour. »55

Nous sommes invités à découvrir et à reconnaître la Miséricorde de Dieu dans notre vie, et à remercier pour cela. Nous sommes invités à expérimenter que tout en nous est don de Dieu et que son amour pour nous est totalement gratuit et en aucune manière une « réponse à nos mérites ». Cela demande de notre part simplicité et humilité pour abandonner notre éventuelle arrogance et pour continuer à vivre, comme Marie, un authentique chemin de foi. Cela veut dire accepter inconditionnellement Dieu dans notre vie, en découvrant peu à peu, et bien souvent sans comprendre, que sa Volonté et sa Miséricorde ont accompagné et béni notre vie.

Ainsi en a-t-il été pour Marie ; et « l’on pourrait dire que c’est seulement à la lumière resplendissante de la Résurrection que Marie a pu accueillir pleinement le mystère de son fils, bien qu’elle eût pourtant dit oui au projet du Père et se fût laissée conduire par l’Esprit. »56

Je termine cette lettre en confiant à Marie, Mère de la Miséricorde, la réalité de ce monde souffrant et d’une Église « pèlerine » qui doit suivre les pas de son Seigneur. Et de façon toute spéciale, nous recommandons à notre Mère toute la Famille Salésienne qui s’applique à effectuer un chemin de Miséricorde et de Fidélité.







Ô Mère d’Infinie Miséricorde,

tu as daigné venir à notre secours.

Aide-nous à nous libérer de tout ce qui peut nous emprisonner.


Fortifie notre foi,

pour que nous puissions être toujours Miséricordieux comme toi,

et que nous puissions répondre à l’appel reçu du Seigneur.


Protège jour et nuit

le chemin sous nos pas

et libère-nous de tout mal.


Prends soin de nos familles et de nos communautés,

de notre Famille Salésienne

et des jeunes que tu nous as confiés.


Ô Mère d’Infinie Miséricorde,

fais que ta présence

renaisse en nos cœurs.


Que ton regard bienveillant et maternel

guide le chemin intérieur que nous avons à parcourir.


Que tes mains bénies bénissent

la mission que nous devons accomplir.


Ô Mère d’Infinie Miséricorde,

que ton Cœur nous unisse

au Cœur du Christ,

et que rien ne nous sépare de Lui et de Toi.

Amen.







Ángel Fernández Artime, sdb

Recteur Majeur



























1Augustin d’Hippone, Confessions, VI, 7,12

2 W. Kasper, La Misericordia. Clave del Evangelio y de la Vida Cristiana, Sal Terrae, Santander, 2013, 4ª edic, 15 cité par J.J. Bartolomé, Jesús Compasivo. Jesús de Nazaret, testigo de la misericordia del Padre, CCS, Madrid, 2016, 5

3Misericordiae Vultus (MV), 3

4Cf. MV, 2-3

5MV 4, Citant le Discours d’Ouverture du Concile Œcuménique Vatican II, « Gaudet Mater Ecclesia », 11 octobre 1962, 2-3

6MV 4, Citant l’Allocution dans la dernière session publique, 7 décembre 1965

7MV 5

8MV 25

9PAPE FRANÇOIS, Le nom de Dieu est Miséricorde. Conversation avec Andrea Tornielli. Édition en langue française : Robert Laffont, Presses de la Renaissance, 2016, Paris

10Idem, 29

11Cf. Anselm Grün, Le sette opere di Misericordia, Queriniana, Brescia, 2016, 2ª, 5 ; Christian Albini, L'arte della Misericordia, Qiqajon, Magnano (BI) 2015, 93 ; Giuseppe Buono, Misericordia, missione della Chiesa.Librería Editrice Redenzione, Marigliano, 2016, 15

12Ex 34,6 cité par Gianni Barbiero, Miséricorde est le nom de Dieu, in « Consacrazione e Servizio », nº 3, 2016, Roma, 33

13Pape François, Homélie pour la messe avec les nouveaux Cardinaux, 15 février 2015

14J.J. Bartolomé, o.c. 14

15Je fais référence à une conférence du P. Rafael González Ponce, mccj, Président de la CER (Conférence Équatorienne des Religieux et Religieuses), qui a pour titre «Dios es misericordia». Conférence non publiée mais qu’on peut voir sur Internet : http:/www.comboni.org/es/contenuti/107647-apropi-ndonos-la-utop-a-de-papa-francisco

16J.J. Bartolomé, o.c. 14

17MV,1

18W. Kasper, Misericordia. Concetto fondamentale del Vangelo-Chiave della vita cristiana (Giornale di teologia 361), Queriniana, Brescia, 6ª edic, 2015, 103

19MV, 9

20W. Kasper, o.c. 26, et 34, 70, 86,137 et 155

21Ibid, 136

22Cf. E. Alburquerque, Don Bosco y la Misericordia de Dios, CCS, Madrid, 2016, 22-23

23MB I, 54. Cité par E. Alburquerque, o.c. 22

24MB I, 55. Ibidem.

25Istituto Storico Salesiano, Fuentes Salesianas. Don Bosco y su obra. Recopilación antológica. [Sources Salésiennes. Don Bosco et son oeuvre. Antuologie] Madrid, CCS, p. 916

26Cf. El joven cristiano [La Jeunesse Instruite] 55 et 57. In E. Alburquerque, o.c. 23

27Cf. MB II, 547-550

28El Joven Cristiano, 13. In E. Alburquerque, o.c. 20

29Ejercicio de devoción… [Exercice de la Miséricorde de Dieu], 56. In Ibidem

30Ejercicio, 71. Ibidem

31« Le Songe des Dix Diamants » in MB XV, 183-187, cité par E. Alburquerque, o.c. 24

32« Le Songe de Lanzo ou du Jardin salésien », in MB VI, 708-709, cité par E. Alburquerque, Ibid

33Le petit berger des Alpes ou la vie du jeune François Besucco d’Argentera, in Istituto Storico Salesiano, Fonti Salesiane, o.c. p. 1028 [dans l’édition en langue espagnole]

34Il mese di maggio consacrato a Maria SS.ma Inmmacolata ad uso del popolo [Le mois de mai consacré à la T.S.V.M. Immaculée, à l’usage du peuple], Turin 1858, le 20 du mois, p.131. In E. Alburquerque, o.c. 27

35MV, 10

36MV, 9

37MV, 15

38J.E.Vecchi, ACG, 369, 4

39MV, 12

40MV 9

41CERIA, E., Don Bosco avec Dieu, édition en langue française, Paris, 1980, pp.113-114, cité par VECCHI, J. E., ACG 369, 38-39

42VECCHI, J.E., o.c. 45

43CGS, 93

44Cf. Constitutions Salésiennes, 11

45Cf. VECCHI, J.E., Spiritualità salesiana. Elledici, Turin, 2001, 175-177

46Cf. CHAVEZ, P., ACG 384, 2003, 26-27

47Cf. Constitutions Salésiennes, 20

48CAVIGLIA, A., La pedagogia di Don Bosco, Rome, 1935, 14-15; cf. ACS 290, 1978, 10 cité in El Proyecto de vida de los salesianos de Don Bosco. Madrid, CCS, 1987, 253

Cf. aussi La Pastorale Salésienne des Jeunes. Quadre de Référence. Chapitre IV, Le Système Préventif, une expérience spirituelle et éducative, Rome, 2014, 78-103

49CHAVEZ, P., ACG 400, 2007,14

50CERIA, E., Epistolario IV, Turin, 1959, 332 cité in El Proyecto de vida…, 256

51AA.VV. Le Système éducatif de Don Bosco entre ancienne et nouvelle pédagogie, Documents du Congrès Européen Salésien sur le Système éducatif de Don Bosco. Elledici. Turin, 1974,314

52Synode des Évêques, « La justice dans le monde », Cité du Vatican 1971. Cité in CGS, 67

53MV, 19

54XXXIIème Congrégation Générale de la Compagnie de Jésus, Décret IV, n.29, cité in Nuovo Dizionario di Teologia Morale, Paoline, Milan, 1990, 510

55MV, 24

56CHÁVEZ, P., Testimoni del Dio Vivente [Témoins du Dieu Vivant], LEV, Rome, 2012, 328

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