«Vicino o lontano io sempre penso a voi»


«Vicino o lontano io sempre penso a voi»

« DE PRÈS OU DE LOIN, JE PENSE TOUJOURS A VOUS »


1. Un chant de louange – 2. Les premiers mois de travail au Conseil général – 3. L’activité d’orientation doctrinale – 4. Visites aux Provinces– 4.1 En Italie – 4.2 En France – 4.3 En Pologne – 4.4 En Argentine – 4.5 Aux Philippines et en Thaïlande – Les motifs du voyage – La visite aux Philippines – La visite en Thaïlande – 5. Conclusion


Rome, 25 mars 2003

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1.1 Solennité de l’Annonciation du Seigneur

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Très chers confrères,


« De près ou de loin, je pense toujours à vous »1. Je commence cette lettre en adoptant les paroles de notre cher père Don Bosco, avant tout parce que je partage avec lui les mêmes sentiments à votre égard, et puis parce que cette lettre est d’une nature particulière. Comme vous le verrez, elle est moins doctrinale et plus familière. Car elle parle de la vie de la Congrégation, telle que je la trouve dans mes visites aux Provinces, et propose quelques réflexions qui naissent des provocations de la réalité et de ses défis.

De cette façon je veux aussi satisfaire une demande du CG25 qui, à propos des lettres circulaires du Recteur majeur, disait : « Pour mieux en tirer parti dans les différentes communautés, on suggère qu’elles soient écrites dans une langue simple et discursive, et que celles qui traitent davantage de thèmes plus exigeants alternent avec d’autres plus familières et informelles sur la vie de la Congrégation » (CG25, 101). J’essaierai d’être fidèle à cette requête, dans le but d’aider à développer davantage le sens de la Congrégation et de stimuler à réfléchir sur le charisme, deux choses indispensables pour garantir l’unité dans la diversité, une des tâches les plus précieuses que j’ai à exercer. Ainsi, la communication du Recteur majeur sera mise au service de l’animation et du gouvernement, à partir de ce qui s’est fait ou se fait dans la Congrégation, de ses besoins et de ses défis.

Après la lettre sur la sainteté, qui a été accueillie comme un texte programme et a suscité chez beaucoup de confrères et de communautés le désir de travailler plus sérieusement pour cette vocation fondamentale qui est la nôtre, nous avons publié le « Projet d’animation et de gouvernement du Recteur majeur et de son Conseil pour les années 2002-2008 ». Tous les conseillers sont en train de le présenter dans les diverses Provinces, pour essayer de les mettre en syntonie avec les grands axes prioritaires. Le moment est donc venu de partager avec vous mes impressions et mes évaluations de cette première année de rectorat. J’en ai parlé, après mes voyages, dans mes mots du soir à la maison générale et dans ma rencontre avec les confrères de la quasi-Province de l’UPS au début de décembre 2002 ; mais je pense qu’il vaut la peine de les rassembler de façon plus systématique et de les faire connaître à toute la Congrégation.


1. Un chant de louange


La première pensée que je me sens devoir exprimer est de rendre grâce à Dieu, du fond du cœur, pour la croissance du charisme de Don Bosco au service des jeunes dans les contextes les plus divers et dans les conditions les plus variées. Nous nous trouvons en effet dans des contextes de haut bien-être, de sociétés développées, de technologie avancée et, dans d’autres au contraire, d’extrême pauvreté, de sous-développement, de technique arriérée ; des contextes de démocraties solides, où il est pratiquement possible de tout faire sur le terrain de la mission, et d’autres de régimes totalitaires où l’on fait ce qu’on peut ; des contextes de population en majorité chrétienne et catholique, et d’autres où le nombre des catholiques n’atteint même pas le un pour cent, mais où notre travail éducatif est très significatif au point de vue culturel, à la façon d’un levain capable de fermenter la culture du pays. Présences de riche tradition salésienne, et d’autres où se sent davantage la distance des origines de la Congrégation.

Ce merci s’étend ensuite aux confrères missionnaires, ceux de la première heure envoyés par Don Bosco, et ceux de la deuxième, troisième ou quatrième heure envoyés par ses successeurs. Ils ont joué et continuent à jouer un rôle indispensable : implanter le charisme salésien qui est essentiellement éducatif et pastoral en faveur des enfants, en particulier des plus pauvres, abandonnés et en situation de risque psychosocial. De ce point de vue, il faut rappeler que nous sommes héritiers et transmetteurs d’un charisme, d’un esprit, d’une spiritualité, d’une mission et pas simplement des travailleurs diocésains ni des artisans sociaux, même si nous sommes très engagés sur le terrain de la construction de l’Eglise locale et de la promotion humaine. Une telle affirmation ne signifie pas que nous, salésiens, formions un groupe fermé. Jamais de la vie ! Comme religieux, nous sommes des hommes d’Eglise. Comme apôtres, nous sommes profondément plongés dans l’histoire humaine. Mais notre type de présence cherche à apporter à l’Eglise et à la société la contribution spécifique donnée par Don Bosco. Les critères pour évaluer la bonne réussite du charisme sont l’augmentation du nombre de présences, là où c’est possible, fruit du dynamisme intérieur qui pousse à se répandre, la croissance en qualité et en quantité des vocations, le développement de la Famille salésienne, l’importance évangélique sociale et ecclésiale, la vie de sainteté. C’est ce qu’on peut constater, grâce à Dieu, çà et là. Les missionnaires et la qualité missionnaire sont, par conséquent, deux éléments nécessaires du charisme qu’il faut entretenir et promouvoir dans chaque Province.

Mon merci va naturellement à vous tous, chers confrères, pour le don de votre vie à Dieu dans la maison et à l’école de Don Bosco. La richesse la plus grande de la Congrégation, ce n’est pas les structures, si grandes et splendides qu’elles puissent être ou sembler, mais ses membres. Il est important qui nous associons des collaborateurs dans la gestion de nos œuvres, que nous fassions croître la Famille salésienne, que nous cherchions des personnes toujours plus identifiées à l’éducation et à la pastorale que nous proposons ; cependant, le bien le plus précieux que possède la Congrégation est la vie de chaque confrère, tant de celui qui a des rôles d’animation ou de gouvernement à exercer, que celui qui travaille dans des services peu voyants, tant de celui qui est jeune et plein de forces, que celui qui est âgé et même malade. Nous devons être très reconnaissants envers tous les confrères. Sans eux, la Congrégation pourra avoir beaucoup d’amis de Don Bosco, mais pas des salésiens. Ce fait nous fait certes penser à veiller aux vocations, mais aussi à accompagner chacun des profès. Le confrère n’est pas quelqu’un qui partage ma maison ou mon travail, mais « quelqu’un qui m’appartient », « un don du Seigneur » (NMI 43), avec qui j’ai à créer communion et communauté ; en effet, « Dieu nous appelle à vivre en communauté, en nous confiant des frères à aimer » (Const. 50). Sur ce thème le CG25 et l’étrenne 2003 deviennent un encouragement et un programme ; je suis sûr que les Provinces sauront en tirer parti pour rénover les communautés.

Ce chant de louange me fait penser, en particulier, à notre centre de référence, Don Bosco, qui est toujours à étudier et à imiter, comme nous le propose l’article 21 de notre Règle de vie. Il s’agit de connaître à fond sa vie, son histoire, son projet apostolique, tel qu’il apparaît dans les Constitutions et dans le développement de la Congrégation à travers les Chapitres généraux, en particulier ceux des trente dernières années. Il s’agit de marcher au même rythme, en syntonie de sensibilité et d’options, même si les circonstances sont très différentes. En visitant les Provinces, je vois bien que celles qui ont fait l’effort d’assumer les Chapitres généraux et les grandes propositions avancées par le Recteur majeur avec son Conseil sur les terrains de la formation, de la pastorale des jeunes, de la Famille salésienne, de la communication sociale, des missions et des finances, se sentent davantage dans le mouvement de la Congrégation. Il suffit de penser au travail de certaines Provinces de traduire les documents les plus importants, pour les rendre accessibles à tous les confrères. Il y a malheureusement encore des cas de résistance au changement, comme s’il s’agissait de quelque chose de facultatif, avec le risque d’isoler les confrères et toute la Province. À ce propos, j’estime qu’une des tâches inaliénables des supérieurs de circonscriptions juridiques (Provinces, quasi-Provinces, Délégations) est de garantir leur identité et de créer en elles le sens de la Congrégation. Je sais bien que les plus proches du centre ont plus de possibilités et même de moyens, et que les plus éloignés sont souvent ceux qui ont le plus de difficulté. C’est pourquoi j’apprécie tellement ce qui se fait en ce sens et j’en suis reconnaissant.


2. Les premiers mois de travail au Conseil général


Je vous disais au début qu’il y a déjà plus de onze mois que j’ai été élu Recteur majeur. Vous voulez peut-être savoir ce que j’ai fait durant cette période. Je commencerai par vous dire que le travail le plus fort des premiers mois a été au niveau du Conseil général, comme c’est normal, également parce que j’ai choisi dès le début de travailler de façon beaucoup plus collégiale. Cela signifie que, pour des thèmes qui, d’habitude, n’étaient guère examinés ni étudiés au niveau du Conseil – parce que c’était ce qu’on estimait bon –, j’ai choisi d’associer davantage chacun des conseillers.


Un exemple de cette collaboration est la réflexion sur le rapport du Recteur majeur et du Conseil général vis-à-vis de l’UPS. À ce sujet, nous avons fait une première étude, tant au niveau de l’institution qu’à celui de l’action. Nous avons toujours eu à l’esprit trois grands points : l’identité de l’UPS et sa spécificité ; le projet organique de notre Université, avec un effort sérieux pour trouver le personnel pour les différentes Facultés ; et enfin la restructuration des bâtiments, qui a déjà été réalisée en partie avec les nouvelles résidences pour les communautés d’étudiants, la nouvelle bibliothèque, la rénovation de quelques aires, et qui devra se poursuivre dans l’avenir avec le nouveau siège pour la Faculté des Sciences de la communication sociale et pour les adaptations aux normes de la sécurité.


Nous avons aussi entamé une évaluation institutionnelle de l’Université, en commençant par la Faculté des Lettres chrétiennes et classiques, et nous avons terminé une des orientations de la dernière visite d’ensemble à propos de l’unification en une seule personne de l’économe de la quasi-Province et de celui de l’Université. Précisément parce que l’UPS est l’Université de la Congrégation, je saisis l’occasion pour remercier l’Université et la quasi-Province des services si précieux qu’elles ont rendus au cours de toutes ces années, de même que je remercie tous les professeurs qui ont contribué par leur travail intellectuel et professionnel à former les cadres des Provinces et des diocèses et à faire prendre à notre Université la place qu’elle occupe aujourd’hui parmi les Universités pontificales. Je voudrais faire sentir cette Université qui est la nôtre comme une chose qui nous appartient à tous, et je vous invite donc à être très ouverts et généreux à collaborer pour le personnel. Jusqu’à voici peu, les Recteurs majeurs savaient qu’ils pouvaient facilement le trouver dans les Provinces d’Italie qui, dans ce secteur spécifique comme dans d’autres, ont toujours été très généreuses et solidaires. Mais le temps est venu où le caractère pluriculturel de la Congrégation et de l’Université elle-même, en plus du fait que manque le personnel en Italie, oblige à être coresponsables pour gérer notre Université avec la qualité et la compétence requises. La rénovation de notre Université requiert aussi la participation de la Congrégation à valoriser cette excellente institution par l’envoi de confrères de toutes les régions de la Congrégation pour leur qualification.


En plus de l’administration ordinaire, une attention spéciale a été accordée ces mois-ci par le Conseil à la nomination des Provinciaux. Nous avons déjà nommé, dans cette période, près d’une trentaine de Provinciaux. Vous savez que la Congrégation compte 95 Provinciaux ; ce qui veut dire que nous en avons nommé près du tiers. Il se peut que sur l’importance du nombre de nominations en une période aussi brève ait influencé aussi la maladie du P. Vecchi, à la fin de l’an dernier. En effet, même si, en différentes Provinces les consultations avaient été faites, le Conseil général précédent avait pris la décision de postposer la nomination jusqu’après l’élection du nouveau Recteur majeur, sachant qu’il s’agissait là d’une tâche très spécifique du Recteur majeur. La nomination du Provincial crée un rapport tout particulier entre le Recteur majeur et le Provincial à qui il confie une Province ou une quasi-Province.


Cependant le travail le plus accaparant et, je dirais, aussi le plus important en cette période a été l’élaboration du Projet d’animation et de gouvernement du Recteur majeur et de son Conseil. Il a requis plusieurs mois de travail : il fallait, en effet, associer les divers dicastères de la maison générale et, au niveau de la Congrégation, les Régions et les Provinciaux. Ce fut une expérience très profitable. Je ne veux pas répéter ici ce que j’ai écrit dans ma présentation pour la publication du Projet au numéro 380 des ACG. Je vous invite plutôt à la lire et à bien connaître le Projet de la Congrégation pour ces six années. Il est bon – et même nécessaire ! – de savoir où nous allons, avec quelles options prioritaires, avec quels buts à rejoindre, quelles stratégies à utiliser, quel genre d’activités. Je me réjouis avec les Provinces qui ont fait leur propre programmation, en tenant compte tant du document du CG25 que de notre Projet historique. J’espère que les Provinces qui ne l’ont pas encore faite se sentiront stimulées.


Il y a eu d’autres thèmes qui ont occupé notre attention et notre temps. En plus de ce que j’ai mentionné à propos de l’UPS, nous avons commencé aussi l’étude de la valorisation de Cremisan. Nous avons pris en considération le présent et le futur immédiat, en laissant pour un autre moment plus favorable une perspective à longue échéance, comme l’avait envisagée le P. Vecchi. Nous savons tous comme est incertaine la situation politique en Terre Sainte. Nous nous sommes orientés vers le renforcement de la communauté de formation et du centre d’étude de Cremisan, pour les rendre toujours plus internationaux : Cremisan propose une formation à toutes le huit Régions de la Congrégation, tout comme le fait la communauté pour théologiens du « Gerini » à Rome. Dans notre monde pluriculturel et globalisé, nous reconnaissons l’importance d’expériences d’internationalité et d’interculturalité, à partir des études théologiques. Pour Cremisan, cela nous oriente aussi à commencer dans les prochaines années l’utilisation de l’anglais.


Nous avons terminé et approuvé les documents sur l’identité des IUS, Institutions universitaires salésiennes, et sur la politique de la Congrégation à ce sujet. C’est ainsi que prend fin une période extraordinaire, avec une délégation personnelle dépendant directement du Recteur majeur, qui a eu comme but de relever les données sur nos Universités et Instituts d’éducation supérieure ; cette période s’est révélée très enrichissante, parce qu’elle nous a permis de mieux connaître cette réalité qui existait dans la Congrégation, et parce qu’elle a atteint un niveau exemplaire de coordination et de synergie. À présent commence une nouvelle phase, plus institutionnelle, avec l’introduction de ce secteur dans le dicastère de la pastorale des jeunes, avec un projet et une programmation bien définis, dans le but de garantir toujours mieux les conditions qui rendent significatives ces présences et de profiter davantage de leur apport. La Congrégation ne prétend pas pousser toutes les Provinces à avoir leur Université, mais elle veut assumer la responsabilité de ces institutions, en fixant avec clarté leur identité et en définissant les critères qui la rendent possible. Ceux-ci, en effet, serviront de cadre de référence, quand il y aura une demande d’ériger une nouvelle Université.


Nous avons aussi étudié et défini la politique administrative et financière, vu qu’il s’agit là d’un point important, non seulement pour le bon fonctionnement de l’économie, mais aussi pour sa conformité aux critères salésiens. Avec le budget 2003, approuvé par le Recteur majeur avec le Conseil, on a étudié aussi le bilan 2001. À ce sujet, beaucoup de Provinces marchent de mieux en mieux dans cette ligne, tant au niveau provincial que local. D’autres ont encore du chemin à faire pour éviter le risque, non irréel, de manquer d’une gestion professionnelle et salésienne.


Dans la même ligne, bien que le sujet concerne le plus souvent le dicastère des missions, nous avons défini les critères pour la distribution des fonds, vu que, chaque année, à travers les Procures missionnaires, la Congrégation distribue une somme considérable pour mener à bien le travail que font les Provinces dans les divers contextes, en particulier ceux qui ont davantage besoin d’aide et de solidarité. Les Provinciaux ont reçu une communication, à faire connaître aux confrères, tant à propos des demandes d’aides que du compte rendu. Une plus grande responsabilité dans l’utilisation de l’argent et dans le compte à en rendre est un devoir moral vis-à-vis des bienfaiteurs et des directeurs des grandes Procures – Bonn, Madrid, New Rochelle, Turin – qui pourront, de la sorte, informer aussi les bienfaiteurs eux-mêmes.


Nous avons, en outre, fait une première approche de l’évaluation sur les Chapitres généraux, demandée par le CG25 au n° 136. L’assemblée capitulaire a senti la nécessité de revoir le modèle selon lequel se sont déroulés les derniers Chapitres généraux, du CG23 au CG25. Ils ont continué à suivre un modèle qui s’était montré valable pour la série des Chapitres généraux extraordinaires – donc les 19, 20, 21 et 22, qui avaient pour but de redéfinir l’identité de la Congrégation – qui s’est pratiquement terminée avec l’approbation du texte actuel des Constitutions. Le Chapitres suivants ont eu un thème sur lequel ils devaient réfléchir . Les capitulaires ont exprimé la nécessité de prendre comme point de départ le rapport qui est présenté sur l’état de la Congrégation, pour trouver ensemble les grandes options à prendre, les grands terrains de priorité, et confier ensuite au Recteur majeur et à son Conseil la tâche de les traduire concrètement en un projet d’animation et de gouvernement. Le Conseil général continuera sa réflexion, pour communiquer ensuite aux Provinces le résultat de l’évaluation et des propositions éventuelles, en sachant que ces propositions devront être faites avant la moitié du sexennat.


D’autres thèmes d’étude ont concerné le besoin de rénover le portail internet de la Congrégation, pour chercher à le rendre plus complet, facile et interactif ; des documents pour les divers projets demandés par le CG25 : le projet organique provincial, le projet personnel de vie et le projet de vie communautaire ; Don Bosco International (DBI), Bureau fondé depuis des années, qui joue le rôle de visage civil de la Congrégation devant les institutions de la Communauté européenne pour tout ce qui regarde la jeunesse, et Don Bosco Network, qui est le réseau des Procures missionnaires qui travaillent sous le patronage du DBI ; l’attention aux biens culturels de la Congrégation, pour laquelle on pense coordonner quelques dicastères pour prendre soin des bibliothèques, des musées, des archives, des œuvres d’art, de la production de communication sociale ; la mise à jour du Vade-mecum du Conseil général, qui regroupe la codification des Constitutions et des Règlements sur les diverses tâches du Recteur majeur et du Conseil, ainsi que les suggestions qui viennent de l’expérience ; le sondage fait dans toute la Congrégation sur la convenance d’un logo commun ; enfin le thème de la communauté de la maison générale.


Comme vous voyez, nous avons consacré une grande partie du travail du Conseil à l’étude. C’est un point à ne pas sous-évaluer, avant tout parce que l’animation et le gouvernement de la Congrégation, d’une Province et d’une communauté ont besoin de réflexion, mais aussi parce qu’il est indispensable de fixer les politiques de gouvernement et de définir les critères d’identité et d’évaluation. Ce ne fut pas du temps perdu, loin de là ! Je pense que c’est un travail qui porte des fruits à long terme, parce que ce sont les projets communs qui, avec l’affection pour chacun, aident vraiment à créer la communion et l’unité.


3. L’activité d’orientation doctrinale


Le deuxième grand terrain de mon travail durant cette période a certainement été celui de l’orientation doctrinale – spirituelle, communautaire et pastorale – qui doit s’entendre toujours plus comme un élément de gouvernement et non comme une simple animation.

À propos de cet aspect spécifique, je voudrais reprendre un point que le P. Juan Vecchi, mais avant lui déjà aussi le P. Egidio Viganò, soulignait fortement. Quand paraissaient ses lettres, il disait explicitement qu’il ne les avait pas écrites pour en faire une simple lecture spirituelle, mais pour les étudier, pour les faire entrer dans la culture salésienne, entendue non pas du seul point de vue notionnel, mais plutôt de celui de la constitution pastorale Gaudium et Spes, c’est-à-dire comme la manière salésienne d’être, de réagir, d’affronter la réalité, d’être en relation entre nous.

En cette période, je n’ai écrit qu’une seule lettre circulaire, celle sur la sainteté ; mais j’ai aussi rédigé la présentation du document du CG25, le commentaire écrit de l’étrenne et sa présentation en vidéo, ainsi que l’introduction du Projet d’animation et de gouvernement du Recteur majeur et du Conseil général, paru dans le précédent numéro des Actes du Conseil général. Il y a évidemment eu encore beaucoup d’autres interventions : conférences, salutations, messages, y compris ceux destinés au Bulletin salésien, à la Famille salésienne et au Mouvement salésien des jeunes, des interviews de journaux, radios, télévisions, qui requièrent vraiment beaucoup de temps et de préparation. Je connais à présent de façon plus directe le rythme de vie et l’horaire de travail de Don Bosco et de mes prédécesseurs, et l’insistance de l’un d’eux pour dire que le Recteur majeur devait consacrer une grande partie de son temps à étudier pour pouvoir offrir une doctrine solide, en sorte que les messages qu’il écrit puissent éclairer et faire des propositions, et ne pas être une parole purement formelle et donc peu marquante.

Je vois aussi que les documents salésiens n’arrivent pas à temps à toutes les Provinces ou, du moins, pas à toutes les communautés, ce qui crée une situation un peu singulière : car il arrive qu’alors qu’un document n’a pas encore été lu, le Recteur majeur est en train d’en écrire un autre. La solution n’est certes pas de cesser d’écrire, parce que le supérieur qui réalise ce service n’écrit pas pour sa gloire personnelle, mais pour guider et accompagner le cours de la vie humaine, ecclésiale et salésienne. Il est certes possible de faire une pause et de ne pas écrire, mais cela n’arrête pas l’histoire ; et les problèmes ne sont pas affrontés ni la vie éclairée.

Je pense que sur ce point, nous sommes tous appelés, à commencer par la Direction générale, à faire un effort pour favoriser l’accès immédiat aux diverses communications. Nous cherchons à mettre les textes sur notre site, pour qu’ils puissent se décharger directement de l’internet. Naturellement il revient aux Provinces de veiller à leur distribution, à leur étude et parfois aussi à leur évaluation, et de chercher toujours à ce qu’ils soient connus et assumés. Dans cette ligne, un bon confrère de la maison générale me suggérait de n’écrire une nouvelle lettre qu’après avoir vérifié la façon dont la lettre sur la sainteté avait été accueillie pour devenir un programme de vie. Même si, à la fin, je n’ai pas estimé opportun d’assumer cette suggestion, sa préoccupation reste valable.

Pour le moment, je vous dis déjà que j’aurais l’intention d’orienter les lettres et d’autres communications importantes durant les six années selon les objectifs du Projet d’animation et de gouvernement et à la lumière du CG25. Ce sera une façon de l’approfondir et d’en éclairer la pratique.



4. Visites aux Provinces


Je n’ai pas encore visité beaucoup de Provinces. Je dis : « encore », parce qu’un coup d’œil sur l’agenda pour l’avenir a un peu de quoi effrayer… D’un côté, je vois bien que la présence dans les Provinces devient un moyen privilégié d’animation, surtout quand les visites sont bien préparées ; mais je sais par ailleurs que je ne puis pas rester si longtemps hors de la maison générale, parce que j’ai besoin de veiller à beaucoup d’autres responsabilités. Je suis à votre disposition et je demande votre compréhension si le Recteur majeur ne peut pas toujours visiter toutes les Provinces. Il faut dire que le Vicaire aussi remplit ce rôle en de nombreux cas ; et puis le Conseil a la préoccupation de ce que toutes les Provinces puissent être visitées par les divers conseillers de secteur en plus des conseillers régionaux.

En Europe j’ai visité plusieurs Provinces d’Italie : la Province Lombardo-Emilienne, au début de mon mandat, mais très brièvement, à l’occasion de la fête du bienheureux Artémide Zatti à Boretto, c’est pourquoi je devrai retourner encore ; le Piémont et la Vallée d’Aoste, qui est une Province que je visite souvent, puisque s’y trouvent la maison mère et les lieux de référence de nos origines ; la Ligure-Toscane ; la Sardaigne ; la Province Romaine, où j’ai participé à de multiples événements, et celle de Venise. J’ai visité la France, l’Espagne, en particulier Salamanque pour recevoir la citoyenneté, puisque j’avais étudié à cette Université, la Pologne et l’Albanie. En Amérique je suis allé au Mexique, en Argentine, dans la Province de Recife au Brésil. En Asie j’ai visité les Philippines et la Thaïlande. Jusqu’à présent je ne suis allé dans aucun pays d’Afrique ni d’Océanie.

Au sujet aussi de ces visites, je désire partager avec vous quelques expériences, mais surtout quelques réflexions que je me suis faites au contact de ces Provinces. Je ne parlerai évidemment pas de toutes.


4.1 – En Italie


Je commence par une réflexion sur la visite aux Provinces italiennes. Elles ont le privilège d’avoir été les héritières directes du charisme de Don Bosco. Elles ont su l’accueillir vraiment très bien et aussi la transmettre. Bref, je puis dire que l’organisation et le vécu personnel et communautaire de ces Provinces cherchent à être fidèles aux critères salésiens présents dans les Constitutions.

Quand on a une vue d’ensemble de la Congrégation, qui est présente dans environ 130 pays du monde, ou quand on a l’occasion de participer, par exemple, à une expérience comme celle du CG25, où la mondialité est vraiment bien représentée, on perçoit qu’il y a une identité au sein de la diversité culturelle de notre Congrégation salésienne. Il faut l’attribuer, en grande partie, avant tout à la capacité de transmettre avec fidélité un charisme, à son enracinement et à sa capacité de se répandre dans les divers pays et contextes où s’est développée la Congrégation. Il faut dire que ce fut une sage politique de gouvernement que de ne pas concentrer tous les salésiens italiens dans le même pays, de ne pas multiplier sans mesure les Provinces en Italie, de favoriser ainsi la qualité missionnaire en Italie et par conséquent la mondialité dans la Congrégation.

Sous ce profil, l’intervention clairvoyante de Don Bosco dès le début, quand en 1875 il envoya la première expédition missionnaire, s’est révélée dynamique, courageuse et judicieuse. On a poursuivi chaque année avec cet élan, et parfois avec deux expéditions missionnaires par an. Cet esprit missionnaire peut expliquer notre expansion mondiale, mais aussi le visage actuel de la Congrégation, qui a une présence somme toute bien équilibrée dans les cinq continents. Il est vrai qu’aujourd’hui il n’y a pas beaucoup de vocations en Italie, du moins pas aussi nombreuse que par le passé ; il est vrai que la présence salésienne dans des pays d’antique tradition chrétienne d’Europe devra prendre un autre visage, mais il est tout aussi vrai que notre Congrégation continue à se développer dans toute l’Asie, et pas seulement en Inde, et en Afrique ; tandis qu’en Amérique latine les chiffres sont plus ou moins constants.

Cette présence de la Congrégation dans le monde est due de façon spéciale, mais non exclusive, aux salésiens d’Italie. Dès mon premier mot du soir, j’ai voulu remercier les salésiens italiens d’avoir transmis le charisme avec fidélité et dynamisme. Dans cette même adresse aux capitulaires, j’ai souligné que cette tâche était aujourd’hui passée à tous les salésiens, avant tout par le fait que la Congrégation n’est plus – ou seulement – italienne, mais vraiment mondiale, et aussi par le fait que la responsabilité doit à présent passer aux Provinces dans les divers contextes.

La qualité missionnaire de la présence salésienne italienne, qui continue à être très forte, a joué aussi un rôle important dans l’inculturation du charisme. Vous trouverez les missionnaires italiens dans plusieurs des expériences d’inculturation les mieux réussies dans la Congrégation, parce qu’ils ont étudié l’anthropologie appliquée, ont cherché à entrer dans la culture des peuples, ont appris leur langue, en ont écrit les grammaires et créé les dictionnaires, ont promu et accompagné leurs processus. Ce serait de la myopie que de ne pas valoriser ce que la présence salésienne italienne a donné à la Congrégation : entre autres, un sens très fort de Congrégation et des exemples valables d’inculturation.

Mais que signifie l’affirmation qu’à présent la tâche de la transmission du charisme doit passer à toutes les Provinces ? Que chaque Province doit développer et soigner ces points, et avant tout une profonde connaissance de Don Bosco. Don Bosco doit être connu ! On ne peut vivre de lieux communs ni d’anecdotes, sans jamais découvrir où se trouvent les critères et les lois de vie salésienne. Il faut étudier Don Bosco ! Il y a sans aucun doute une transmission vitale du charisme, de l’esprit, de la spiritualité, de la mission. C’est une espèce d’herméneutique existentielle de ce que signifie aujourd’hui être salésien. Mais cette expérience doit se codifier et avoir un cadre de référence. Ici en Italie il y a eu, en vue de ce travail aussi fondamental, un investissement très consistant en personnel dans le domaine de l’histoire, tant de la biographie que de l’historiographie critique, dans le domaine de la pédagogie et des sciences de l’éducation, dans le domaine de la spiritualité. Ce sont trois points essentiels pour connaître le charisme en profondeur et le transmettre avec fidélité. Que la responsabilité de transmettre le charisme passe à toutes les Provinces du monde, ce ne peut donc être un « slogan » sans contenus : cela comporte des conséquences. Et ces conséquences doivent être explicitées, précisément parce qu’il faut ensuite évaluer vraiment si les Provinces sont capables de prendre en main le témoin.

Il y a un autre point très important : la sainteté. Pour être fidèle justement, la transmission d’un charisme a besoin de témoignage, de sainteté. Je pense que nous sommes tous conscients d’appartenir à une famille de saints, confrères, membres de la Famille salésienne, élèves qui ont rejoint une mesure élevée de vie spirituelle. Il est très beau de visiter les Provinces et de découvrir ces modèles, proches de la réalité de tous, et ainsi de pouvoir dire : regardez ce qu’ont réussi à faire ces confrères ou ces jeunes et ce que nous sommes appelés à faire et à être, nous aussi.


4.2 – En France


Je commence par dire que j’étais allé en France essentiellement pour apprendre un peu de français, et par conséquent, pas pour faire une visite. Mais à la fin, le premier objectif s’est uni à un programme de visites aux communautés d’Alsace, de Bretagne et de Normandie. Ce fut une expérience très agréable, intéressante et enrichissante.

Trois points, en particulier, m’ont laissé une bonne impression. Avant tout un grand amour pour Don Bosco. Nous savons que Don Bosco est allé France chercher des fonds pour payer les frais de l’église du Sacré-Cœur, et il fut très explicite sur ce point. Le plus beau est que, non seulement Don Bosco obtint l’aide qu’il demandait, mais qu’il magnétisa le peuple français, qui resta épris de lui. En lisant quelques documents de la première visite de Don Bosco, en parcourant les pages de certains de ses sermons dans les églises, on voit comme il a réussi à susciter un grand étonnement plein d’admiration chez le peuple français.

En deuxième lieu m’ont frappé les centres de formation professionnelle et les écoles agricoles de haut niveau, dont plusieurs avec un nombre très grand d’internes. Je n’aurais jamais imaginé ce type de présences dans un pays qui est parmi les évolués d’Europe. Les écoles techniques industrielles ainsi que les écoles agricoles non seulement s’alignent avec un secteur typiquement salésien, mais nous permettent aussi de suivre et d’éduquer les jeunes du monde du travail et de la campagne, même dans des contextes riches et de bien-être ; ce n’est pas indifférent, malgré le déséquilibre entre les ressources humaines disponibles et les tâches à affronter. Il me semble avoir découvert un grand sens de responsabilité sur le terrain de la mission salésienne.

La troisième activité intéressante est la construction d’un centre de formation salésienne pour les laïcs à Lyon, qui devra être inauguré dans un an. C’est un signe de l’identité salésienne qui se vérifie dans la mission, de l’amour pour Don Bosco dont j’ai parlé, de la capacité de croire en son charisme et de la volonté de le partager et de le répandre, dans la ligne de la pratique de Don Bosco et en fidélité aux orientations des derniers Chapitres généraux, en particulier – à propos de cette initiative de Lyon – le CG24.


4.3 – En Pologne


En Pologne j’ai fait une visite aux quatre Provinces : Cracovie, Piła, Varsovie et Wrocław. La visite de chaque Province avait été préparée avec soin et, malgré la difficulté de la langue, elle s’est très bien passée.


Contact avec les origines


Avant tout, la visite de Cracovie. L’expérience qui m’a fait le plus d’impression est peut-être la visite à Oświęcim, la première œuvre de la présence salésienne en Pologne. Un lieu d’où le charisme salésien s’est répandu dans toute la nation, ainsi qu’à l’est de l’Europe, d’une manière si féconde que nous avons aujourd’hui plus de mille salésiens en Pologne. Oświęcim devient en outre éloquent par sa situation même. Il se trouve très près, à moins de 5 km, du camp de concentration d’Auschwitz, où il y a eu le plus grand cimetière du monde en 40-45 ! Il est stimulant de penser qu’aux environs de ce grand cimetière, expression la plus tragique d’une anticulture de mort, il y avait une œuvre où la vie, comme une semence aussi, croissait au même moment et se développait en suscitant l’espérance.

Il est étonnant de voir la fécondité en vocations du passé ainsi que du présent, le sens religieux profond du peuple, la ténacité pour conserver son identité. Les salésiens sont conscients de ce que l’entrée de la Pologne dans la communauté européenne apportera avec le bien-être un changement culturel ; ils sont prêts à bien l’affronter.


Dynamisme de la Famille salésienne et du Mouvement salésien des jeunes


À Wrocław, l’événement central a été une grande et solennelle célébration au célèbre sanctuaire de Notre-Dame de Częstochowa. Il est le cœur spirituel de la Pologne, et on peut y sentir sa densité religieuse. Pour moi ce fut un moment personnel de grande émotion. Cependant, au point de vue de l’animation, le moment le plus intéressant a été la rencontre de toute la Famille salésienne, à laquelle participaient quelques jeunes patronnés du patronage de Poznań. Ils nous ont montré la première partie du film qu’ils sont en train de réaliser sur les cinq jeunes martyrs de Poznań. J’ai eu le plaisir d’écouter leur récit, la manière dont ils se sentent identifiés à ces jeunes martyrs. Ils se savent de vrais héritiers d’un trésor spirituel à communiquer ! Je ne crois pas exagéré de vous dire que, après le patronage du Valdocco, le patronage le plus renommé du monde entier est à présent celui de Poznań, où la sainteté a fleuri, non seulement par le martyre, mais par la qualité de vie salésienne. La béatification des jeunes martyrs a souligné les traits de personnalité qu’ils avaient développés au patronage. Ils en étaient conscients, les jeunes qui, en présentant le film, affirmaient : « Nous sommes les dépositaires d’un trésor à communiquer aux jeunes du monde ». Ce sont ces jeunes qui ont présenté le message et le témoignage. Et je me disais : Que puis-je ajouter de plus ? Nous avons entendu ce qu’est capable de faire un patronage salésien : créer des personnalités robustes qui se manifestent précisément dans les temps de crise ; des jeunes qui ont eu une rencontre avec le Christ ; des jeunes qui ont appris à servir ; des jeunes qui savaient que leur foi pouvait même les conduire au martyre ; des jeunes d’une grande espérance, celle de la victoire du bien sur le mal. L’histoire leur a donné raison. Trois ans à peine après leur sacrifice, le nazisme était terminé ; c’est ce qui est arrivé quelques années plus tard avec l’idéologie communiste ; et cela signifie qu’en ces patronnés nous avons une sainteté authentique de jeunes.


Un « nouveau » terrain de la mission salésienne


À Piła, nous avons eu une célébration extraordinaire, avec une telle participation que la magnifique église était trop petite pour accueillir tout le monde. Mais ce qui m’a frappé le plus, c’est la rencontre avec toute la communauté éducatrice de l’école d’Aleksandrów Kujawski, parce qu’elle m’a fait voir la nouvelle organisation des salésiens polonais dans le secteur de l’école, avec un grand succès. En effet, Madame le ministre de la Culture est venue nous remercier au nom du gouvernement polonais du travail que les salésiens développent sur le terrain de l’éducation dans le pays. Il y a à peine dix ans que les confrères ont repris leur travail dans le monde de l’école ; et en dix ans il y a eu un changement profond et pour l’avenir. Il s’agit d’un fait important, parce que les jeunes salésiens n’avaient pas d’expérience en fait d’éducation formelle et ont découvert que c’est un terrain très prometteur, et qu’il est possible de faire encore beaucoup pour et avec les jeunes en ce contexte.


Maisons de formation et centres d’étude


La visite à Varsovie s’est concentrée dans la journée passée à Czerwińsk, avec la possibilité de rencontrer la plupart des confrères. Mais elle m’a donné aussi la possibilité de me faire une idée plus complète des maisons de formation de Pologne et de les apprécier : les noviciats de Kopiec (PLO) et de Czerwińsk, et les centres d’étude de Cracovie, de Łódź, et de Ląd (PLN).

Ce dernier célébrait le 50e anniversaire de sa présence. Après la solennelle célébration religieuse et académique, qui coïncidait avec l’inauguration de l’année, j’ai eu une rencontre avec le groupe des professeurs qui travaillent dans nos centres d’étude et dans le monde universitaire. À la vue de leur nombre et de la qualité du service qu’ils rendent, j’ai pu constater que les Provinces ont su investir dans la préparation du personnel en des temps très difficiles, et qu’ils ont des confrères très qualifiés, ce qui donne de l’importance à notre présence dans le secteur universitaire salésien et ecclésial.


4.4 – En Argentine


Dans mon voyage en Argentine j’ai visité les cinq Provinces dans l’ordre suivant : Buenos Aires, Bahía Blanca, La Plata, Córdoba et Rosario.

Deux raisons m’ont poussé à accepter l’invitation qui m’avait été faite durant le Chapitre, même si j’avais d’abord fixé comme critère pour les visites de donner la priorité aux Provinces qui n’avaient été visitées ni par le P. Vecchi ni, durant son dernier sexennat, par le P. Viganò, précisément à cause de leur maladie.

La première raison était l’hommage que les confrères et les membres de la Famille salésienne de la Province de Bahía Blanca voulaient faire au P. Vecchi, en lui dédiant une école à Viedma et un musée à Fortín Mercedes, et à M. Zatti, en lui dédiant une autre école, à Viedma également.

La seconde raison était le désir d’être proche des confrères d’Argentine dans la difficile situation économique de leur pays.

Sans entrer dans les détails de la visite, j’ai découvert en Argentine une présence de la Congrégation très significative, non seulement par le nombre des Provinces, même si à présent quelques-unes d’entre elles sont numériquement réduites, mais surtout pour un fait reconnu de tous – autorités civiles et ecclésiales, industriels et monde intellectuel, gens du lieu et d’ailleurs – : le fait d’avoir pu créer une culture en Patagonie. C’est un jugement que j’avais déjà entendu de la part de plusieurs jésuites il y a quelques années, au cours d’une visite à Punta Arenas. Il est difficile, pour qui n’a jamais visité la Patagonie, d’imaginer l’apport, en termes de civilisation et de culture, donné par nos confrères ; je dois reconnaître que je me suis senti fier d’eux !

Sur cette terre aussi le charisme s’est fidèlement implanté et a porté des fruits. Cela se voit au développement des vocations qu’il y a eu dans le passé, ainsi qu’à la présence de missionnaires argentins en diverses parties du monde ; l’Argentine, rappelons-le, a donné le premier Recteur majeur né hors d’Italie. Elle surtout donné des fruits de sainteté, ce qui est la vraie preuve de l’inculturation d’un charisme : la sainteté de Laura Vicuña, Chilienne, qui a grandi et est morte sur cette terre, et dont les restes mortels se trouvent à Bahía Blanca. De même aussi la sainteté de Ceferino Namuncurá, qui est un fait religieux social beaucoup plus important que ce que nous pouvons imaginer, comme le montre, à Fortín Mercedes, le mur d’inscriptions de remerciement pour les grâces reçues par son intercession ; et naturellement la sainteté de M. Artémide Zatti.


4.5 Aux Philippines et en Thaïlande


2 Les motifs du voyage

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La premier motif du voyage se rattachait à la célébration du 50e anniversaire du commencement de la présence des salésiens aux Philippines, qui tombait il y a deux ans. Le P. Vecchi avait pris l’engagement d’être présent dans les Provinces pour cette importante occasion, mais sa maladie a empêché le déroulement des célébrations aux dates souhaitées.

Il faut dire aussi que les premiers salésiens qui arrivèrent aux Philippines étaient deux confrères venus du Mexique beaucoup d’années auparavant  : le P. Guglielmo Piani, qui y alla comme délégué apostolique, et qui rentra plus tard au Mexique comme nonce apostolique. Il avait amené avec lui un prêtre mexicain natif du Texas, mais qui avait vécu à Puebla (Mexique), Louis La Ravoire Morrow, qui devait, quelques années plus tard, devenir évêque du diocèse de Krishnagar en Inde. Officiellement les salésiens sont arrivés aux Philippines en 1950. De toute façon, ma présence a aussi célébré, en particulier, le 50e anniversaire de l’école de Mandaluyong, le Don Bosco Technological Center.

En Thaïlande, par contre, se célébrait le 75e anniversaire de la présence salésienne. Les premiers missionnaires qui y arrivèrent furent les confrères expulsés de Chine. C’est un fait très intéressant, digne d’une réflexion historique : la Chine, providentiellement, se révèle comme la Province mère de plusieurs autres Provinces d’Asie, parce que les salésiens, qui en furent expulsés, abordèrent dans d’autres pays. L’exode de la Chine a produit l’implantation du charisme en d’autres terres et développé ainsi la présence salésienne en Asie. L’étude historique que fait un confrère pour préparer la célébration du centenaire de la présence salésienne en Chine nous offrira probablement des faits et des éléments sur ces pages d’histoire salésienne. Le sujet mérite certainement une recherche en belle et due forme.

Le dernier motif, « last but not least », à la base de mon voyage en Extrême Orient, a été l’invitation à prêcher la retraite spirituelle aux Provinciaux et aux délégués des Provinces et délégations des deux Régions d’Asie. C’est un point que j’estime très important au point de vue de l’animation du Recteur majeur, pour l’effet multiplicateur que peut avoir ce type d’intervention.


3 La visite aux Philippines

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Le fait le plus important de mon séjour dans la Province de Manille a certes été la visite faite à presque toutes les œuvres. Je crois avoir rencontré tous les confrères, les directeurs et les communautés, les formateurs et les jeunes salésiens en formation, les malades ainsi que la Famille salésienne.

Les présences les plus importantes dans la Province de Manille sont, à mon avis, les Technological Training Centres, que gèrent les confrères en ville comme à la campagne, en cherchant à préférer les jeunes qui sont restés à l’écart de l’éducation systématique et institutionnelle. Elles veulent en effet rendre effective la décision prise au dernier Chapitre provincial de renforcer les centres de formation professionnelle dans la campagne, vu que les Philippines continuent à être une région fondamentalement agricole, avec 75 p. cent de la population des jeunes vivant dans les campagnes. J’ai aussi trouvé une présence consistante parmi les enfants de la rue avec trois œuvres significatives. Je soulignerais en particulier celle de Tondo, véritable « slum », un des quartiers les plus pauvres, peuplés et populaires de Manille, où la présence salésienne est un signe d’espérance et de vie. Je vous avoue que j’ai été profondément ému de voir la volonté de vivre de ces gens, leur capacité de croire en leur avenir, quand ils se savent accompagnés et aimés par nos confrères salésiens et consœurs salésiennes.


Dans la Province de Cebu, j’ai commencé la visite par la première maison salésienne aux Philippines : Victorias, dans l’île de Negros, présence très proche du diocèse à présent confié à l’ancien Provincial, le P. Patrick Buzon, qui a été consacré évêque le 19 février dernier.

Dans cette Province aussi la présence en faveur des enfants de la rue et de la population la plus abandonnée est significative.

En visitant le patronage de Pasil, dans un des quartiers les plus pauvres de Cebu, je me suis rendu compte du travail fructueux des confrères parmi les jeunes et comme la religiosité est bien développée chez ces gens, même s’il reste encore beaucoup à faire au point de vue de la promotion sociale. C’est une œuvre très semblable à celle de Tondo. Voir nos confrères en ces lieux et ce qu’ils font avec et pour les jeunes, cela nous relie à nos humbles origines et nous assure le succès qui est le fruit de la fidélité. Je ne vous cache pas que, parmi eux, je me suis senti fier d’être salésien !


Quelques considérations


D’une part, il est impressionnant de voir l’immense religiosité populaire du peuple philippin ; elle est, d’une certaine façon, une expression inculturée de la foi, mais qui a encore besoin d’être évangélisée, pour rejoindre une plus grande unité entre la foi et la vie. Il est impressionnant aussi de constater dans la jeunesse une certaine perte d’identité culturelle. Il m’a semblé que le peuple philippin a une riche racine culturelle, mais en même temps, qu’il se sent très conditionné par le modèle occidental de vie.

Il est certes gratifiant de voir la présence massive des jeunes dans nos œuvres et leur disponibilité ouverte à la proposition religieuse, mais cela fait aussi réfléchir sur la rareté actuelle des vocations. Il suffit de penser que cette année il n’y a que cinq novices : un de la Province de Manille, deux de la Province de Cebu et deux de Chine. Je crois qu’il faudrait approfondir la réflexion. La première idée qui vient spontanément est que manquent un accompagnement plus qualifié et stimulant des nombreux jeunes et groupes que, certainement et avec esprit de sacrifice, nous éduquons dans nos milieux, ainsi qu’une proposition beaucoup plus claire, décidée et convaincante. Il faut la présence parmi les jeunes, la crédibilité et le témoignage, un milieu qui éduque, où se respire la salésianité, un grande compétence dans le management, certes, mais surtout dans la mystique et dans la spiritualité du « Da mihi animas » ; en somme il faut des communautés qui aiment les jeunes et soient des signes de l’amour du Christ pour eux. La vocation implique d’être proposée, mais elle est le fruit d’une présence attrayante, spirituellement intense, apostoliquement engagée. C’est ce que nous appelons pastorale de qualité pour les jeunes. Cela vaut, évidemment, pour toute Province et pour toute communauté.

Nous ne devons pas oublier que les Philippines – avec Timor Est – forment l’unique pays catholique d’Asie. Ce fait confère à l’Eglise du pays une grande responsabilité historique, qui devrait se traduire pas tellement ni avant tout par l’effort de convertir au christianisme les autres pays du continent, mais plutôt par celui d’être un paradigme, un modèle de ce que signifie être un pays catholique, riche de valeurs chrétiennes.

4 La visite en Thaïlande

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Les deux premiers jours dans la Province de Thaïlande se sont caractérisés par les grandioses célébrations organisées pour le jubilé de la présence salésienne, très bien préparées, tant les religieuses que les civiles, auxquelles ont participé des milliers – je n’exagère pas ! - de jeunes. Parmi les premières, la messe présidée par le cardinal Michael Michai Kitbunchu le jour de la fête de saint François de Sales. Parmi les secondes, celle qui s’est déroulée au stade couvert de Bangkok avec une participation de plus de 8 000 jeunes, qui représentaient les 22 écoles que gèrent les groupes de la Famille salésienne dans la capitale : les salésiens, les Filles de Marie Auxiliatrice, les Sœurs du Cœur Immaculé de Marie et les Filles de la Royauté de Marie, respectivement fondées par Mgr Pietro Carretto et par le P. Carlo Della Torre.

Il faut souligner précisément ce témoignage de synergie et de collaboration de toute la Famille salésienne et surtout la mobilisation très forte des Anciens élèves tant catholiques (une minorité) que bouddhistes. Le président précédent de l’Association des Anciens élèves était bouddhiste, et a été avec nous tous les jours de la visite. C’est quelqu’un qui connaît et aime beaucoup Don Bosco, qui est très engagé, et a été élève non seulement en Thaïlande, mais aussi en Australie, où il s’était transféré comme émigrant et avait retrouvé les salésiens.

Dans son salut, le vice-premier ministre, lui aussi ancien élève et bouddhiste, a fait un éloge extraordinaire de Don Bosco – et ses paroles revêtent une signification encore plus forte justement parce qu’elles proviennent d’un non-catholique – et de la contribution donnée par les salésiens au sens large au développement de la société thaïlandaise.

C’est de toute façon le dernier jour de la visite qui m’a donné un cadre effectif et une image plus complète de l’histoire des salésiens en Thaïlande, de l’influence de leur présence dans l’Eglise et dans la société, de leur signifiance. C’est une journée qui a commencé très tôt le matin et qui s’est terminée le soir, quand nous sommes arrivés à l’aéroport pour rentrer à Rome. Nous sommes passés d’une maison à l’autre. J’ai eu la possibilité de connaître mieux la stature et l’importance de deux grands hommes comme Mgr Gaetano Pasotti et Mgr Pietro Carretto, tous deux clairvoyants. À peine arrivés par le fleuve, ils s’étaient installés dans un village appelé Bangnokkuek, où se trouve à présent la cathédrale, et d’où la présence salésienne s’est étendue à d’autres villes du pays. En effet, quelques années plus tard, Mgr Carretto se rendit compte que cet endroit offrait peu de possibilités d’expansion, également parce que le fleuve limitait le territoire, et il décida de transférer le centre du diocèse à Ratburi, où il a bâti le grand temple dédié à Don Bosco et une école qui compte aujourd’hui 10 000 jeunes. Le plus intéressant peut-être est que les prêtres diocésains ont appris de Mgr Carretto à travailler sur le terrain de l’éducation. Sincèrement je dois dire que si je n’avais pas vu personnellement quelles avaient été les origines de la présence salésienne en Thaïlande, et l’évolution qu’a permis l’option prise ensuite d’aller dans d’autres villes comme Bangkok, Banpong, Sampram et Hua Hin, je n’aurais pas eu une connaissance suffisamment profonde de la présence en Thaïlande, où j’ai trouvé des œuvres vraiment très significatives sur le terrain de l’éducation. Cette fois, je n’ai pas pu visiter les confrères qui travaillent avec tant de zèle au Cambodge.


5 Quelques considérations

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En Thaïlande, je suis resté impressionné surtout par le développement social et économique du pays qui, voici à peine trente ans, était très pauvre et a rejoint un niveau économique supérieur à celui de beaucoup de pays d’Amérique latine. Ce fait aide à comprendre que l’intérêt économique, mais aussi théologique, se soit déplacé de l’Amérique latine à l’Asie.

Les grands centres d’éducation avec des écoles comme les Technological Training Centres, que j’avais vus dans les Philippines, et deux présences pour aveugles, l’une gérée par les FMA et l’autre par les SDB, sont vraiment significatives. La présence catholique dans le pays est très réduite : les catholiques sont à peine 400 000, c’est-à-dire 0,5 p. cent de la population, qui est en majorité bouddhiste. Mais est très important est le rôle des catholiques en général, et des salésiens en particulier, dans la vie de la société, surtout à travers l’éducation.

Dans ce contexte, je crois que nous, les salésiens, avons un triple grand défi à relever et à affronter : avant tout l’identité charismatique, dont il faut prendre soin avec une connaissance toujours plus grande et toujours plus profonde de Don Bosco ; le soin des plus pauvres, comme un point qui peut nous rendre plus significatifs en contexte bouddhiste, également parce qu’il devient une option contre-culturelle ; et les vocations, dont dépend toujours la vitalité et l’avenir des Provinces.


Cette première expérience dans le monde oriental salésien m’a fait comprendre surtout deux choses. En premier lieu, l’intérêt que suscite l’Asie au niveau économique, social, religieux et théologique. En second lieu, la nécessité de la question de l’inculturation du charisme, qui sera toujours plus forte et sentie, et qui implique d’une part une grande identité culturelle, mais d’autre part aussi une identité salésienne non moins grande. Il s’agit d’un processus qui doit absolument être éclairé et accompagné. Je me suis en effet proposé d’écrire une lettre circulaire sur ce thème.


5. Conclusion


Je termine avec l’espoir d’avoir satisfait vos attentes à tous, puisque vous vous intéressez à ce qui se passe dans la Congrégation. Rien de ce qui la touche ne devrait nous être indifférent. Le Recteur majeur exerce une tâche charismatique et institutionnelle ; il est important que les confrères soient informés de l’exercice de son rôle. La visite aux communautés constitue une approche de la vie de la Congrégation ; elle est toujours plus riche que le meilleur rapport qu’on pourrait en faire. Les réflexions que je propose ne veulent pas exprimer un jugement de valeur, mais entendent être une lecture salésienne de notre réalité, pour éclairer et stimuler non seulement les Provinces individuelles, mais toute la Congrégation.

Au cours des six années, dans les lettres familières sur notre vie demandées par le CG25, je pense présenter chacune des huit Régions, parce que j’estime très important que tous les salésiens aient une large vision de la Congrégation.

J’espère que ce partage contribuera à développer en chacun de nous le sens de la Congrégation et de la coresponsabilité. Ces communications aident en effet à renforcer la communion affective et effective, l’appartenance charismatique et l’esprit de famille ; c’est pourquoi j’estime que ce genre de communication devrait se faire à tous les niveaux, y compris les niveaux provincial et local.

J’ai commencé cette lettre avec les paroles de Don Bosco « De près ou de loin, je pense toujours à vous ». Je veux la terminer en vous assurant de mon souvenir permanent dans l’affection et dans l’Eucharistie de chaque jour.

Pendant que je vous écris, de puissants vents de guerre soufflent et je ne puis pas ne pas évoquer les messages que m’ont adressés les jeunes de Bagdad, qui rêvent d’un monde en paix, où ils puissent eux aussi développer toutes leurs potentialités et rejoindre la plénitude de vie. En cette année du Rosaire, prions pour la paix du monde ; confions à Marie, Notre-Dame de l’Annonciation, la grâce de nous apporter la bonne nouvelle de la paix, qui est un don et une tâche, qui est, comme nous a dit Jean Paul II dans son message pour la journée de la paix de cette année 2003, un « engagement permanent » qui crée les conditions les meilleures pour croître en communion et en fraternité. « Faisons de chaque famille et de chaque communauté “la maison et l’école de la communion”. »



Pascual Chávez V.

1 Lettre de Rome. Actes du Chapitre supérieur de la Pieuse Société salésienne 1 (1920) n° 1.

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