301-350|fr|318_a L'association des coopérateurs salésiens

L'ASSOCIATION DES COOPÉRATEURS SALÉSIENS



1. Présentation aux confrères : L'action persévérante de Don Bosco - De Don Rua à nos jours - C'est l'heure d'un nouveau départ.

2. A la lumière du chemin parcouru par le Fondateur lui-même nous considérerons : - L'importance d'une refonte du Règlement - Les étapes du discernement - La souplesse d'un charisme vivant. - La responsabilité des animateurs.

Les aspects essentiels de votre identité de salésiens séculiers : L'énergie de la charité chez les laïcs - L'esprit salésien de Don Bosco.

Le nouvel élan de l'Association : Activités attendues - Un mouvement spirituel. - La présence vivante de Marie Auxiliatrice.



Rome, en la fête du Sacré-Cœur, 1986


Chers Confrères,

Recevez tout d'abord les salutations cordiales de tous les membres du Conseil général unies aux miennes. Nous sommes en session plénière ; nous prions et travaillons intensément pour vous.

Par la présente, je désire vous inviter à lire avec attention la lettre que j'adresse aux Coopérateurs et que je vous offre dans ce numéro des Actes.

Comme vous le savez, le 9 mai dernier, le Siège Apostolique, par décret de la Congrégation des Religieux et des Instituts séculiers, a approuvé le nouveau texte du « Règlement de vie apostolique » de l'Association des Coopérateurs salésiens. Il faut souligner cette date parce que 110 ans plus tôt, précisément le 9 mai 1876, le Pape Pie IX, grand ami de Don Bosco et son guide dans son œuvre de Fondateur, avait agréé la « Pieuse Union », dont notre bien-aimé Père avait soigneusement rédigé le Règlement, après l'avoir pratiqué et testé.

Quant à moi, j'ai voulu promulguer cet important document quelques jours plus tard, le 24 mai, en la fête de Marie Auxiliatrice et dans la basilique même du Valdocco remplie de fidèles et de membres de notre Famille.

Pour nous tous cet événement revêt une importance vitale.


L'action persévérante de Don Bosco.


Don Bosco n'a pas estimé que sa mission de Fondateur fût achevée, quelque longue et tourmentée qu'elle ait été, avant d'avoir donné une structure solide et son identité à cette Association. Elle était déjà présente, comme en germe, dès le début de l'œuvre des Oratoires.

Après l'approbation, en 1876, Don Bosco apporta personnellement tous ses soins à l'organisation et à la diffusion de l'Association des Coopérateurs. À cette fin, il lança, dès 1877, le Bulletin salésien, et il formula, à l'adresse des confrères, des instructions et des directives précises.

Encore en 1877, au cours du premier Chapitre général, auquel il attribua une particulière importance, (« Je désire que ce Chapitre fasse époque dans la Congrégation, de manière que, si je mourais, toutes choses soient déjà ordonnées et bien au point »),1 il voulut que l'on traite (dans la quatrième Assemblée plénière) la question des Coopérateurs et celle du Bulletin salésien : « l'Association est pour nous très importante. Elle est l'âme de notre Congrégation et le lien qui nous permet de faire le bien avec l'accord et l'aide des bons chrétiens qui, dans le monde vivent pratiquement selon l'esprit des salésiens… Ces Coopérateurs doivent se multiplier le plus possible... Les Directeurs, et en général tous les confrères salésiens devront toujours parler en bien de cette Association, afin d'augmenter le nombre de ses membres... Mais qu'on n'invite pas des personnes à devenir Coopérateurs qui ne soient déjà connues pour leur piété et leur probité.2

Don Bosco prit sur lui de faire les premières conférences pour assurer l'orientation et la consolidation de l'Association. On lit dans les « Memorie biografiche » qu'au mois de janvier 1878, Don Bosco tint la première conférence, à Rome, dans l'église des Nobles Oblates de « Tor de' Specchi », en présence du Cardinal Monaco La Valletta, Vicaire de Sa Sainteté. Et le 16 mai il tint une seconde conférence, à Turin, dans l'église de saint François de Sales.3 Il insistait souvent sur les modes d'apostolat propres aux Coopérateurs, sur leur importance providentielle et sur les « grandes choses » que le Seigneur daignerait opérer par eux et par nous avec eux.

Petit à petit se précisèrent aussi les normes et l'organisation.


Les Coopérateurs depuis Don Rua jusqu'à nos jours.


Don Rua, au cours du dixième Chapitre général, en 1904, était déjà en mesure de donner quelques directives pour la promotion de l'Association sous forme d'un règlement en 37 articles, « à l'usage des confrères salésiens concernant la Pieuse Union des Coopérateurs ».

On y lisait :

- que chaque salésien « ait soin de faire connaître et de faire apprécier toujours plus cette Pieuse Union » ;

- que les Provinciaux « désignent un confrère pour s'occuper, avec eux et sous leur dépendance, de tout ce qui regarde le développement et le fonctionnement régulier de la Pieuse Union dans leur Province » ;

- que dans chaque maison « il y ait un responsable des Coopérateurs qui aide le Directeur ».

L'exhortation finale reproduisait les paroles du Règlement de Don Bosco : « Que tous les membres de la Pieuse Société salésienne considèrent les Coopérateurs comme autant de frères en Jésus-Christ et les aident chaque fois que cela pourra servir à la plus grande gloire de Dieu et au bien des âmes ».4

Après le Concile Vatican II, et au cours du Chapitre général spécial, les capitulaires qui avaient étudié le thème de la « Famille salésienne » et repensé la vraie identité du Coopérateur, rédigèrent une réponse au message que les Coopérateurs leur avaient adressé. Cette réponse déclarait : « Dans une fidélité dynamique à notre Fondateur, nous nous déclarons décidés et prêts à revitaliser votre Association, pour que, finalement, se réalise ce projet génial, si cher à notre Fondateur. Nous avons pris clairement conscience que ce serait une véritable trahison si nous n'arrivions pas à faire ce travail, et nous croyons que c'est avec raison que vous avez lancé votre appel ».5

Cet engagement solennel se trouve affirmé explicitement dans nos Constitutions approuvées par le Siège Apostolique (1984). Elles précisent que les salésiens portent une responsabilité particulière à l'endroit des Coopérateurs6 et elles confient, au Conseiller pour la Famille salésienne, la tâche d'« orienter » et d'« aider » les provinces « afin qu'elles développent dans leur territoire l'Association des Coopérateurs salésiens ».7

De plus, les Règlements déclarent : « Chaque communauté se fera un devoir de soutenir et de développer, pour le bien de l'Église, l'Association des Coopérateurs salésiens. Elle contribuera à la formation de ses membres, fera connaître cette vocation et s'attachera à la promouvoir, surtout parmi les jeunes les plus engagés et les collaborateurs laïcs ».8

Pour sa part, le Règlement des Coopérateurs dans son texte rénové, après avoir décrit le ministère du Recteur majeur qui, en sa qualité de Modérateur suprême de l'Association « en garantit la fidélité au Projet du Fondateur et en favorise la croissance », rappelle le rôle particulier et indispensable des Provinciaux et des Directeurs : « Les Provinciaux salésiens, dans le contexte de leurs responsabilités propres, à l'intérieur de la Société de St. François de Sales, rendent présent, sur leur territoire, le ministère du Recteur majeur auprès de l'Association. Avec la collaboration des Directeurs, ils assurent, avant tout, les liens de l'unité et de la communion. Ils pourvoient à l'assistance spirituelle des centres et engagent leurs propres communautés dans l'accomplissement généreux de ce service d'animation des Coopérateurs ».9


C'est l'heure d'un nouveau départ.


Chers Provinciaux, chers Directeurs et vous tous, chers Confrères, ces rappels de toute notre tradition et de notre Règle de vie sont une invitation urgente adressée à notre zèle apostolique. Si nous voulons une reprise intégrale du charisme de Don Bosco, en ce temps de préparation aux fêtes du centenaire (1988) ; nous devons nous sentir chargés de « responsabilités particulières » dans l'animation et la promotion d'un «vaste mouvement de personnes »,10 et en particulier de l'Association des Coopérateurs. Dès nos origines, ils ont partagé notre mission auprès des jeunes et du peuple. Aujourd'hui cette mission nous pose, sans relâche, des questions qui vont au-delà des œuvres existantes.

Le projet de Don Bosco, touchant les Coopérateurs, nous fait percevoir l'audacieuse et authentique dimension apostolique du charisme salésien, dans l'union de forces nombreuses, pour le service du Royaume. Avec les Coopérateurs, nous assumons une même mission !

Pour eux nous sommes les frères « consacrés », « le lien sûr et stable, expressément voulu par Don Bosco, ... (pour être) le centre de propulsion de ce mouvement de baptisés ».11

Ils sont pour nous, selon la vigoureuse affirmation de Don Bosco, « une Association très importante et l'âme même de notre Congrégation ». En effet, les Coopérateurs nous incitent à une fidélité plus grande et plus dynamique à notre vocation salésienne commune,12 nous rappelant le critère permanent de notre action apostolique : « l'expérience de l'Oratoire ».13

Cette « expérience de l'Oratoire » appelle, bien au-delà des besoins propres de nos œuvres, de nombreux ouvriers, en plus de la présence nécessaire des Salésiens et des Filles de Marie Auxiliatrice.

En effet, les besoins de la jeunesse sont si nombreux et si graves, qu'ils exigent des forces d'intervention toujours plus abondantes ; le champ de l'action éducative et culturelle est si complexe, qu'il rend nécessaire, en plus de la présence de consacrés et de prêtres, celle de généreux laïcs actifs et compétents ; la problématique des jeunes est si vaste et si mouvante qu'elle réclame, en plus du renouvellement des précieuses œuvres existantes, l'inventivité et l'audace de nouvelles présences apostoliques, dans des secteurs où, bien souvent, seuls des laïcs auront accès et pourront agir efficacement.

La mission salésienne, à la lumière de ce que les Coopérateurs peuvent lui apporter, nous interdit de nous enfermer dans nos maisons et nous fait acquérir ce regard social et ecclésial qui poussait notre Père à rechercher des forces nombreuses pour répondre aux problèmes des jeunes et du peuple.

Il importe surtout de souligner la raison fondamentale qui touche à notre identité même d'héritiers du patrimoine de Don Bosco. Après l'approbation postconciliaire de nos Constitutions (1984), et de celles des Filles de Marie Auxiliatrice (1982), la récente approbation du « Règlement de vie apostolique » des Coopérateurs (1986) nous donne une vision complète de la manière de renouveler et de vivre le charisme de Don Bosco dans le présent et pour l'avenir.

Ce charisme est confié simultanément et en ordre principal à ces trois Groupes centrés sur le ministère d'unité dévolu au Successeur de Don Bosco. Nous devons dès lors prendre conscience qu'une ère nouvelle s'ouvre pour notre Famille et que les exigences d'une fidélité entière à notre Fondateur se sont faites plus concrètes et plus vastes.

Dans cette perspective, nous comprenons mieux pourquoi doit grandir l'union des esprits et la collaboration dans les entreprises de ces trois Groupes de la Famille salésienne, pour le plus grand bien d'ailleurs des autres Groupes. Nous ne devons pas nous replier passivement sur la défense des objectifs atteints ; il nous faut retrouver ce dynamisme animateur d'un « Mouvement de personnes », dynamisme qui caractérisait l'apostolat si entreprenant de Don Bosco.

Il disait dans une conférence aux directeurs, en 1876 : « Si un pauvre prêtre, n'ayant rien, et moins que rien, qui était pris pour cible par tous et de tous côtés, a pu mener les choses au point où elles en sont ; je le répète, si un seul, dépourvu de tout, a fait ce que vous voyez, quel bien le Seigneur ne doit-il pas s'attendre de trois cent trente hommes (c'était le nombre des confrères cette année-là !), bien portants, solides, de bonne volonté, savants et munis des puissants moyens dont nous disposons à présent ? Que ne pourrez-vous pas réaliser, avec l'aide de la Providence ?

Le Seigneur attend de vous de grandes choses ; je les vois clairement et distinctement, dans toutes les directions... Si dans un an quelqu'un me rappelle ce que je viens de dire, je pourrai vous faire voir les grandes choses que le Seigneur a daigné commencer durant cette année (il faisait allusion à la fondation de l'Association des Coopérateurs)... Ces choses... alors que je serai déjà dans mon éternité, auront de grandes conséquences pour le salut des âmes et la plus grande gloire de Dieu. Elles seront une aide pour l'Église universelle et feront la gloire - laissez que je dise le mot - oui, la gloire de notre Congrégation... Vous mêmes serez étonnés, stupéfaits de voir comment vous aurez pu faire tout cela à la face du monde et pour le bien de la société humaine ».14

Chers Confrères, dans ces conditions, il faut vraiment que chaque Province relance l'Association des Coopérateurs. Tout confrère devrait avoir une copie du nouveau Règlement de l'Association : cette lecture nous aiderait à mieux comprendre l'article 5 de nos Constitutions ainsi que les articles 36, 38, 39 de nos Règlements.

Il faut en outre que le Provincial, avec son Conseil et avec les Directeurs, étudie ce document pour renouveler et intensifier les initiatives à prendre dans nos maisons. Il s'agit d'une partie vivante de notre charisme ; Don Bosco y voyait la possibilité de faire de « grandes choses ». Ce n'est pas une œuvre supplémentaire ; elle fait partie de nous-mêmes ; elle constitue un grand apport d'énergie au bénéfice du « Mouvement » ; elle porte en elle la promesse d'une plus intense fécondité ; c'est une croissance dans la fidélité à notre Fondateur et une exigence de l'identité salésienne.

Notre Père concluait de la façon suivante la conférence aux directeurs que nous citions plus haut : « C'est le Seigneur lui-même qui a été l'initiateur de l'entreprise. C'est Lui qui lui a donné le développement et la croissance qu'elle a, c'est Lui qui, à l'avenir, la soutiendra et la conduira à son accomplissement. Le Seigneur est prêt à faire toutes ces grandes choses qui contribueront à une merveilleuse augmentation du nombre des confrères. Il ne nous demande qu'une chose : ne pas nous rendre indignes de tant de bonté et de miséricorde. Aussi longtemps que nous correspondrons à ses grâces par le travail, la moralité, le bon exemple, le Seigneur se servira de nous. Vous serez surpris que tant de choses aient pu se réaliser et que vous ayez été capables de les faire... Nous devons nous exclamer : ' Omnia possum in Eo qui me confortat ' ».15

Chers Confrères, qu'une réflexion soutenue, sur la lettre aux Coopérateurs (présente dans ce numéro des Actes) et sur le nouveau Règlement, vous inspire des résolutions pratiques dans toutes les Provinces et dans toutes les Maisons.

Que Don Bosco intercède pour nous et nous anime !

Affectueusement vôtre.

1 MB 13, 243.

2 Cf. Marcel Verhulst, I verbali dei primo Capitolo generale salesiano – 1877, Edizione critica, UPS 1980 ; pp. 126-141 et pp. 366-372. Thèse de doctorat (dactylographiée).

3 Cf. MB 13, 624 sq.

4 Cf. Guido Favini, Il cammino di una grande idea, LDC Turin 1962, p. 199.

5 CGS 734.

6 Constitutions (C) 5.

7 C 137.

8 Règl, 38.

9 Régl. Coop. 23.

10 C 5.

11 CGS 732.

12 CGS 733.

13 C 40.

14 MB 12. 82-83.

15 MB 12, 83.