Interview: La Croix (la-Croix.com) - Les salésiens sont appelés à servir les jeunes d’aujourd’hui

La-Croix.com


21/08/2008 19:30



Des salésiens de Belgique et de France se sont réunis cette semaine près d’Angers pour une retraite. Leur recteur majeur, le Mexicain Pascual Chavez, détaille les « nouvelles pauvretés » qui touchent la jeunesse

P. Pascual Chavez : La spiritualité de Don Bosco est inséparable de son expérience pédagogique : si elle est toujours neuve, c’est parce qu’elle place le jeune au centre du système éducatif. Pour le fondateur des salésiens, les jeunes ne sont pas des « objets à éduquer », mais les acteurs de leur propre éducation. Or, ils y sont particulièrement sensibles, aujourd’hui comme hier !

À cela s’ajoute un esprit de bonté et de famille : tous se sentent accueillis comme ils sont, là où ils sont. Enfin, cette proposition éducative concerne tous les aspects de leur vie – aussi bien leur formation scolaire que personnelle –, afin de leur donner une vision positive d’eux-mêmes et de la réalité qui les entoure.

Notre ADN, c’est avant tout cette passion pour les jeunes, cette ardeur apostolique à leur faire du bien. C’est ce que nous vivons dans nos écoles, nos universités, nos centres d’accueil… Nous ne voulons pas faire de prosélytisme, mais partager la joie d’avoir découvert le Christ comme source de la plénitude à laquelle nous aspirons tous.

C’est vrai, cette transmission est plus difficile que par le passé, le christianisme étant moins présent dans la société actuelle. Mais notre message est plus signifiant aujourd’hui, car précisément il donne à voir l’identité chrétienne dans un monde pluraliste.

Ce sont toutes ces situations qui compromettent l’avenir des jeunes, comme la pauvreté affective : trop de jeunes n’ont plus de parents et vivent une grande solitude. Il y a aussi la pauvreté culturelle et l’absence de repères solides pour s’insérer. Cela traduit une pauvreté éthique et des difficultés à se situer dans le monde, beaucoup ne sachant plus distinguer le bien du mal.

Enfin, la pauvreté spirituelle est évidente : certains jeunes évoluent dans un monde sans transcendance, qui plombe les ailes de l’espérance. Et sans elle, pas d’avenir : ils se contentent de vivre l’instant présent, sans être ancrés dans le passé ni tournés vers l’avenir.

Ce qui manque aux jeunes d’ici, par rapport à ceux d’Amérique latine, d’Asie ou d’Afrique, c’est le sens de la vie : ils sont repus de choses, mais affamés d’amour. Mais il est un élément commun à tous les jeunes du monde : en règle générale, ils sont bons et désirent être heureux. Dès lors, le secret de l’éducateur est de gagner leur confiance afin de libérer toute l’énergie qui se trouve dans leur cœur.

Ce qui nous importe n’est pas tant le maintien des structures que l’éducation des jeunes : nous essayons de nous engager là où nous pouvons encore être signifiants. Dans un contexte de baisse des vocations, nous ne pouvons plus occuper tous les fronts d’action.

Sur un plan mondial, avec 500 novices et 270 ordinations chaque année, elles se portent bien, même si elles baissent en Europe. Convaincu du service que les salésiens sont encore appelés à rendre aux jeunes d’aujourd’hui, notre chapitre a décidé un « projet Europe » visant à raviver la présence salésienne sur le Vieux Continent. Nous nous réunirons à Rome fin novembre pour en décider les modalités.

Avec 1 800 salésiens, nous y sommes la présence de religieux la plus significative : nous devons continuer à soigner la qualité de nos écoles, développer l’évangélisation dans nos paroisses, affermir notre travail auprès des enfants de la rue… L’autre priorité est d’inculturer le christianisme auprès des populations marginalisées. Certes, l’évangélisation y est plus aisée qu’en Europe : le niveau de vie est moins élevé, et ces pays possèdent un « humus » religieux très fort. De plus, leurs populations sont jeunes.

Nous avons toujours cherché à travailler en lien étroit avec l’Église et le pape. Avant le cardinal Tarcisio Bertone (NDLR : actuel secrétaire d’État de Benoît XVI), plusieurs salésiens avaient déjà exercé de hautes fonctions au Vatican, mais c’est la première fois que l’un de nous reçoit une telle responsabilité. Il s’agit d’un service de notre congrégation pour l’Église, et c’est aussi une marque d’estime du pape envers les salésiens.

recueilli par François-Xavier MAIGRE