19-Oeuvres de Saint Francois de Sales-Tome XIX-Vol.9-Lettres


19-Oeuvres de Saint Francois de Sales-Tome XIX-Vol.9-Lettres

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ŒUVRES
DE
SAINT FRANÇOIS DE SALES
ÉVÊQUE ET PRINCE DE GENÈVE
ET
DOCTEUR DE L'ÉGLISE
ÉDITION COMPLÈTE
D'APRÈS LES AUTOGRAPHES ET LES ÉDITIONS ORIGINALES
ENRICHIE DE NOMBREUSES PIÈCES INÉDITES
DÉDIÉE A SA SAINTETÉ LEON XIII
ET HONORÉE DE DEUX BREFS PONTIFICAUX
PUBLIÉE SOUS LES AUSPICES DE Mgr L'ÉVÊQUE D'ANNECY
PAR LES SOINS DE RELIGIEUSES DE LA VISITATION
DU IER MONASTÈRE D'ANNECY
TOME XIX
LETTRES VOLUME IX
ANNECY
Monastère de la Visitation
MCMXIV
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Deuxième édition
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ŒUVRES
DE
SAINT FRANÇOIS DE SALES
ÉVÊQUE ET PRINCE DE GENÈVE
ET
DOCTEUR DE L'ÉGLISE
TOME DIX-NEUVIÈME
LETTRES
IXme VOLUME
1619 1620
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Propriété
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ŒUVRES
DE
SAINT FRANÇOIS DE SALES
ÉVÊQUE ET PRINCE DE GENÈVE
ET
DOCTEUR DE L'ÉGLISE
ÉDITION COMPLÈTE
D'APRÈS LES AUTOGRAPHES ET LES ÉDITIONS ORIGINALES
ENRICHIE DE NOMBREUSES PIÈCES INÉDITES
DÉDIÉE A SA SAINTETÉ LÉON XIII
ET HONORÉE DE DEUX BREFS PONTIFICAUX
PUBLIÉE SOUS LES AUSPICES DE Mgr L'EVEQUE D'ANNECY
PAR LES SOINS DE RELIGIEUSES DE LA VISITATION
DU IER MONASTÈRE D'ANNECY
TOME XIX
LETTRES VOLUME IX
ANNECY
Monastère de la Visitation
MCMXIV
Droits de traduction et de reproduction réservés
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Index OCR
Index OCR................................................................................................................................................ 7
Avant-Propos.......................................................................................................................................... 21
Avis au Lecteur ...................................................................................................................................... 28
Lettres de saint François de Sales. Année 1619 ..................................................................................... 29
MDXLI. A Madame de Lamoignon. Compassion pour une âme. Souhaits pieux. ....................... 29
MDXLII. Madame Angélique Arnauld, abbesse de Port-Royal a Maubuisson. Cinq avis au sujet
d'une confession générale. Par quel motif la faire. Se laisser à la Providence. Assurance
d'union éternelle ................................................................................................................................. 30
MDXLIII. A Madame Le Nain de Crevant. Témoignage d'affection et souhaits de perfection
spirituelle. ........................................................................................................................................... 31
MDXLIV. A la Mère de Chantal, a Paris. Recommandations à une convalescente. Saint Bernard
prêché par lui-même. Une nièce de Mme Amelot, prétendante de la Visitation............................. 32
MDXLV. A une dame. La courte durée des séparations faites par la mort. Contemplation de Jésus
et de Marie sur le Calvaire. Une mère dépouillée de son plus précieux vêtement. ....................... 33
MDXLVI. A Madame Angélique Arnauld, abbesse de Port-Royal. Joyeux retour d'un petit voyage.
Une amitié qui commence. Dans quel esprit la Mère Arnauld doit servir Dieu....................... 33
MDXLVII. A une dame de Paris. Faire courtement les exercices de piété, et avec un maintien digne
de Dieu. La pensée de l'éternité, souveraine consolation ici-bas. Protestation d'invariable
souvenir. ............................................................................................................................................. 34
MDXLVIII. A une demoiselle de Paris. Les adieux d'un Saint. Béatitude de l'âme qui n'est qu'à
Dieu; ce qu'elle cherche et ce qu'elle veut. ......................................................................................... 35
MDXLIX. A une Religieuse. Garder la paix sans se troubler de la variété des sentiments intérieurs.
Le Monastère, « academie de la correction, hospital de malades spirituelz. » Remède contre la
crainte des esprits. Souvenir de jeunesse de François de Sales. Pourquoi les ténèbres et la
solitude de la nuit lui sont devenues délicieuses. ............................................................................... 36
MDL. A Madame Angélique Arnauld, abbesse de Port-Royal. Le Saint quitte Paris. Réponse aux
appréhensions sur l'avenir. Ne pas examiner son oraison d'une manière curieuse. La patience
«parmi les niaiseries et enfances» du prochain. Un châtiment miséricordieux de la Providence
divine. Ce que Dieu unit est inséparable ....................................................................................... 37
MDLI. A Mesdames de Villeneuve et de Frouville. Une seule lettre pour deux sœurs. — Combien
salutaire l'union des cœurs et des âmes. — Les abeilles spirituelles dans leurs ruches. Assurance
de perpétuel et affectueux dévouement .............................................................................................. 39
MDLII. A la Mère de Chantal, a Paris. Fatigué du voyage, l'Evêque envoie des lettres à distribuer.
Itinéraire. Les prétendants du monde et les prétendantes au Ciel.................................................. 40
MDLIII. A Madame Angélique Arnauld, abbesse de Port-Royal. Le retour à Maubuisson de la Mère
Arnauld; affectueuse sollicitude de François de Sales. Ses sentiments au milieu des faveurs de la
cour. Abeilles et guêpes. Salutations paternelles...................................................................... 41
MDLIV. A la Mère Marie de Jésus, sous-prieure du Carmel d'Amiens (Inédite). Joie de l'Evêque de
Genève d'avoir revu deux des filles de Mme Acarie; regret de n'avoir pu visiter la troisième, au
Carmel d'Amiens. ............................................................................................................................... 43
MDLV. A Madame Angélique Arnauld, abbesse de Port-Royal. Intime union que l'éloignement
resserre de plus en plus. Un père chrétiennement résigné. Attendrissement du Saint sur la
maladie de deux de ses filles spirituelles; prière qu'il adresse à Dieu ................................................ 44
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MDLVI. A Madame le Maistre. Les faveurs de l'Epoux divin. Eloge de Robert Arnauld. Le
martyre de saint Maurice; le martyre du cœur. — «Tintamarres et presse» qui empêchent le Saint
d'écrire à son gré................................................................................................................................. 45
MDLVII. A M. Antoine Arnauld. Consolations sur plusieurs afflictions. De quoi nous devons
remercier Dieu. Modérer son travail «a mesure que le tems amoindrit les forces.» .......................... 47
MDLVIII. A la Mère de Chantal, a Paris (Inédite). L'hôte de l'Evêque de Genève à Bourges.
Lettres du Saint et de a Sainte trop lentes à parvenir. Début des tracasseries au sujet du mariage
de M. de Foras. — La courte consolation des Sœurs de Moulins. — Pourquoi François de Sales
n'écrit pas longuement ........................................................................................................................ 48
MDLIX. A la Mère Rosset Superieure de la Visitation de Bourges. Quelque chose qui est «demeuré
sur le cœur» du Saint. — Un métier plus difficile que celui de reprendre. Ne pas être prompte à
promettre, mais agit avec conseil. Obtenir à la fois le respect et l'amour de ses inférieurs. La
douceur ne doit point ressembler à la timidité.................................................................................... 50
MDLX. A la Mère de Chantal, a Paris (Inédite). Pourquoi François de Sales n'a pu voir à souhait
Mme de Villesavin. Témoignages d'estime qu'il a reçus de la Reine mère. Les Prélats de la cour
et les bons propos de l'Evêque de Luçon. On cherche à retenir le Saint en France; ses sentiments à
ce sujet. Projet d'itinéraire. Heureuses rencontres à Tours et à Bourges. Ce qu'on perd à la
cour. De quoi on blâme la Mère Anne-Marie Rosset; conseils que lui a donnés le saint Fondateur.
La future fondation d'Orléans et les aversions de Mgr Frémyot. Nouvelles du Monastère de
Moulins où Mme du Tertre «exerce sa vanité fort honnorablement.» ................................................. 52
MDLXI. A la Soeur de la Roche, Assistante-Commise a Annecy. Réponse au sujet d'un délai pour la
profession d'une Novice. .................................................................................................................... 56
MDLXII. A Monseigneur Jean-Pierre Camus, Evêque de Belley. Deux amis qui n'ont pu se dire
adieu, ni se rencontrer en chemin. le «nid» de l'Evêque de Genève bien loin de l'«aymable Paris»
de l'Evêque de Belley. Pourquoi les PP. Capucins sont plus propres à faire le bien dans le diocèse
de Mgr Camus. Messages d'honneur et d'affection. ....................................................................... 57
MDLXIII. A la Mère de Chantal, a Paris (Fragment). L'unique ambition du grand Aumônier de
Christine de France. Pourquoi il méprise la cour .......................................................................... 58
MDLXIV. A Madame Angélique Arnauld, abbesse de Port-Royal. Comment se rassurer au milieu
des inclinations mauvaises de la nature. Exemple de saint Paul. L'inconstance de notre âme; ce
qui doit y demeurer stable. Manière de combattre les tentations d'affectation. Conséquences
des fautes vénielles. Etre juste envers soi-même. Le danger des austérités indiscrètes ........... 59
MDLXV. A la Mère de Chantal, a Paris (Fragment). Une Communauté fervente, sous une
Supérieure très sainte mais plus propre à converser avec Dieu qu'avec les hommes ......................... 61
MDLXVI. A M. Claude de Blonay (Inédite). Inépuisable condescendance et sainte fermeté de
François de Sales. ............................................................................................................................... 62
MDLXVII. Au Prince de Piémont, Victor-Amédée. Infraction aux désirs et aux ordres de Son
Altesse pour les prébendes de Contamine. Lettres obtenues subrepticement. Prière de faire
connaître la véritable volonté du duc de Savoie. ................................................................................ 63
MDLXVIII. Au Prieur et aux Religieux du Monastère de Sixt. Aimable salut de retour. Tentation
de désunion au Monastère de Sixt. Ce qu'elle empêchera si elle prévaut. ......................................... 64
MDLXIX. A la Mère de Chantal, a Paris. Le rassasiement des affamés de justice. Un
enseignement de saint Paul que l'Evêque de Genève veut mettre en pratique. Dans quelle mesure
il tient à sa réputation ......................................................................................................................... 64
MDLXX. A la Présidente Amelot (Fragment inédit). Prédiction du Fondateur sur l'Ordre de la
Visitation. ........................................................................................................................................... 65
MDLXXI. A une demoiselle de Paris. L'accomplissement d'une promesse. Une «avette parmi les
toiles des araignees.» Ce que souhaite le Saint à sa correspondante, au souvenir de leurs adieux 66
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MDLXXII. A une dame. Maladie et affliction du cœur. — Petit ange envolé au Ciel. Les
richesses que nous amassons ici-bas. Etre à Dieu toujours. .......................................................... 66
MDLXXIII. Au Comte Jacques de Viry (Inédite). Ce qui reste à faire pour permettre la célébration
d'un mariage. ...................................................................................................................................... 67
MDLXXIV. A Madame de la Fléchère (Inédite). Comment le Saint occupera ses rares loisirs
jusqu'aux fêtes. Le futur mariage de Mme de la Croix. ....................................................................... 68
MDLXXV. A M. François de Montholon (Fragment). Douces plaintes et légitimes excuses.
Quelle coopération l'Evêque de Genève a donnée au mariage de M. de Foras. ................................. 69
MDLXXVI. A un gentilhomme (Fragment). Ce qui attriste le Saint dans les blâmes faits contre lui.
La seule cause de ses fautes. Pourquoi il voudrait regagner «la bonne grace» de ses adversaires
............................................................................................................................................................ 70
MDLXXVII. A Monseigneur Jean-Pierre Camus, Evêque de Belley. Quelle part l'Evêque de Genève
prend au deuil de son ami. Eloge de M. Camus de Saint-Bonnet et de sa famille. Surcroît
d'affliction pour le Saint au sujet de ce trépas. Explication loyale sur le mariage de M. de Foras.
Le mécontentement injuste de M. de Montholon .......................................................................... 70
MDLXXVIII. A la Mère de Chantal, a Paris. Envoi de lettres ouvertes. Ce qu'il faut faire de celle
adressée à M. de Montholon. Indifférence du Saint dans «la tempeste et la bonace.» L'exemple
de saint Joseph. Doux reproche à la Mère de Chantal. Le prédicateur de l'Avent. Des âmes
un peu trop empressées au bien. Messages ................................................................................... 72
MDLXXIX. A Madame Angélique Arnauld, abbesse de Port-Royal. Un Père qui connaît bien sa
fille. Les cerisiers et les palmiers. Regard compatissant sur les faiblesses humaines.
Combien de fois le jour remettre son cœur «en posture d'humilité.» — La volonté du saint Evêque
«suivante» de celle de Dieu. Deux âmes en péril. Encouragement à une affligée. Difficultés
suscitées au bien. Une des joies du Ciel ........................................................................................ 74
MDLXXX. Au Chanoine Jean-François de Sales, son frere. Vieilles lettres qui attendaient un
porteur. Les futurs aumôniers de Madame. Quelques nouvelles. Un Mémoire à présenter au
prince de Piémont. Projet d'union d'un bénéfice au Chapitre de Genève. Des jaloux auxquels il
faut répondre par des bienfaits. Commissions, recommandations et messages. ........................... 76
MDLXXXI. Au Prince de Piémont, Victor-Amédée. Requête au nom d'un Monastère qui fleurit «en
veritable devotion.» Un Mémoire dont la lecture n'est pas «hors de sayson» pendant les fêtes de
Noël. ................................................................................................................................................... 80
MDLXXXII. A une Religieuse de la Visitation. Comment accueillir l'aimable «petit Jesus». Une
de ses larmes sur notre cœur. — Troupe de bergères offrant leur plus bel agneau au divin Enfant. . 80
MDLXXXIII. A Madame du Tertre. Les larmes de la nature sur la séparation du monde.
Compassion et espérance. Respect du Saint pour l'action de Dieu dans les âmes. Sacrifice de
«poudres» et de «papiers dorés». Confidence paternelle. Coups de rasoir divins. Avis sur
des choses quelque peu superstitieuses et sur les visites. Les conversations de l'Evêque de Genève
après son sacre.................................................................................................................................... 82
MDLXXXIV. A la soeur de Blonay, maitresse des novices a la Visitation de Lyon. Vin
heureusement mêlé de baume. Un zèle «tout bon» qui avait besoin d'être purifié. Regard sur
l'Enfant de Bethléem. A qui appartiennent la joie et la paix. La condition suffisante pour
recevoir le divin Nouveau-né. ............................................................................................................ 85
MDLXXXV. A M. Claude de Quoex. Démarches infructueuses en vue d'obtenir un accommodement
entre deux parties................................................................................................................................ 86
MDLXXXVI. A Madame de la Fléchère (Fragment). Que faut-il pour devenir une vraie fille de la
Visitation ? ......................................................................................................................................... 87
MDLXXXVII. A la Mère de Chastel, Supérieure de la Visitation de Grenoble (Fragments). Mourir à
soi pour vivre à Dieu. Abandon à la Providence ........................................................................... 87
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MDLXXXVIII. A Madame de Thou, novice de l'abbaye de Port-Royal. Un bien inestimable.
Pourquoi le saint Evêque est «beaucoup» Père de la Novice. Humilité, obéissance et joie.......... 88
Année 1620 ............................................................................................................................................ 89
MDLXXXIX. A une Religieuse de la Visitation. Ingénieuse interprétation d'un texte de l'Ecriture.
Le sang de Jésus marquant l'entrée de l'année nouvelle. Comment rendre les nôtres fertiles.
Transformation de l'âme. Pourquoi Dieu nous laisse des imperfections ....................................... 89
MDXC. A Messieurs du Conseil de la Sainte-Maison de Thonon (Inédite). Recommandation en
faveur d'un ancien converti................................................................................................................. 90
MDXCI. A la Mère de Chantal, a Paris. L'Evêque de Genève roi de la fève à la Visitation d'Annecy.
Préparation à un «renouvellement extraordinaire». Bonne correction à une âme opiniâtre.
Science acquise à la cour par Jean-François de Sales; honneurs qu'il y reçoit. Protecteur d'année;
pourquoi le Saint aime la pauvreté ..................................................................................................... 90
MDXCII. A Madame Angélique Arnauld, abbesse de Port-Royal. A quoi faut-il employer la
nouvelle année. La Mère Angélique aux pieds de l'Enfant de Bethléem; l'abeille autour de son roi
............................................................................................................................................................ 92
MDXCIII. A la Mère de Chastel, Supérieure de la Visitation de Grenoble. Contentions en matière de
préséance. L'Evêque de Genève officiant ou prédicateur à plusieurs réceptions de Religieuses à
Paris. Mieux vaut avoir mille écus par une voie de douceur que douze cents en disputant.
Préférer l'obéissance au jeûne. L'opiniâtreté d'une tentation. Bonheur de la pauvreté.
Quelles dispositions porter à la sainte Table. ..................................................................................... 93
MDXCIV. Au Pere Dominique de Chambery Vicaire-Provincial des Capucins (Inédite). Permission
demandée pour un voyage du Frère Adrien des Echelles. Quand les vocations extraordinaires
doivent-elles être estimées. Regrets sur le décès du P. Constantin. Réponse de l'Evêque de
Belley au sujet des Capucins. ............................................................................................................. 95
MDXCV. A la Mère de Chastel, Supérieure de la Visitation de Grenoble (Inédite). Manière douce et
tranquille de rejeter l'amour-propre. La gloire de l'abjection. Chimères, contradiction et
extravagance d'une tentation. Comment aider à la combattre et à en triompher ........................... 96
MDXCVI. A la soeur de Gerard Religieuse de la Visitation de Grenoble. Les solitaires que Dieu
n'aime pas et avec lesquels il ne veut point d'union. Exemple d'obéissance de saint Siméon
Stylite. Marques de l'inspiration. Energiques conseils. ............................................................ 97
MDXCVII. A un oncle. Double affliction en un trépas. Se consoler sur le départ des nôtres et sur
les circonstances de ce départ, par la raison et par la foi. Miséricorde de Dieu qui a peut-être
employé le feu d'ici-bas pour épargner à une âme celui du Purgatoire. ............................................. 98
MDXCVIII. Au Comte Jacques de Viry. Respectueuse et ferme remontrance au sujet d'un mariage
contracté sans la dispense nécessaire ................................................................................................. 99
MDXCIX. A la Princesse de Piemont, Christine de France (Minute). François de Sales célèbre le
jour deux fois heureux où Dieu donna une princesse, à la France, par sa naissance, à la Savoie, par
son mariage. — Les vœux et les prières du grand Aumônier de Christine. ..................................... 100
MDC. Au duc Roger de Bellegarde. Pourquoi l'Evêque de Genève réitère sa recommandation en
faveur des Pères Barnabites.............................................................................................................. 101
MDCI. A M. Claude de Quoex. Noble désintéressement du Saint. Ce qu'il ne peut trouver
supportable. Les droits légitimes seront respectés; mais l'Evêque ne peut ni ne veut céder les
siens. Recours au Sénat pour «faire faire place» à son autorité .................................................. 102
MDCII. A Monseigneur Jean-Pierre Camus, Evêque de Belley (Fragment). Mesure de réputation que
l'Evêque de Genève ambitionne ....................................................................................................... 103
MDCIII. A Madame de la Fléchère (Fragment). Un «petit cœur» où le Saint veut loger lui-même
l'Hôte divin ....................................................................................................................................... 104
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MDCIV. A Madame Angélique Arnauld, abbesse de Port-Royal a Maubuisson. Nouvelles de la mort
de M. Arnauld et de la résignation des siens, données par la Mère de Chantal au saint Evêque.
Notre cœur, tiré «piece apres piece» vers Dieu. — Paternelle sollicitude pour les enfants du défunt.
La réforme de l'extérieur servant à celle de l'intérieur. Comment combattre les pensées de
vanité. Faire toutes choses «tout bellement,» et ne pas se mettre en peine des saillies sans volonté.
Douce et gracieuse plaisanterie sur une «petite niaiserie.» La discrétion du Directeur.
Conseils pour l'oraison. Spécial intérêt pour Mme Le Maistre ..................................................... 104
MDCV. A Madame Rousselet (Inédite). Raison d'une lettre particulière à la destinataire. Souhaits
de bénédictions. Deux chères vertus, nées de la confiance en Dieu................................................. 107
MDCVI. A la Mère de Chastel, Supérieure de la Visitation de Grenoble. Influence du mal physique
sur le moral. Une crainte du saint Fondateur. Décision en faveur d'une infirme. Regarder
Dieu et non ses propres imperfections. Ce que François de Sales apprit à la cour. Fondations
en France. ......................................................................................................................................... 108
MDCVII. A M. Marc-François de Malarmay de Lauray. La chose la plus agréable et salutaire en ce
monde. Affection paternelle et filiale entre l'Evêque de Genève et Mme de Rossillon.
Remerciements pour un présent. — Une amie de l’Abbesse de Baume. — Saint adieu. ................ 110
MDCVIII. Au Baron prosper de Rochefort. Heureuse naissance d'un petit-neveu de saint Bernard de
Menthon. Une pauvre femme pour laquelle on a trouvé un logis. La retraite à Talloires de
Benoît de Chevron; soupçons de sa mère contre l'Evêque de Genève. ............................................ 111
MDCIX. Au Chanoine Jean-François de Sales, son frère (Inédite). Vent en poupe et faveurs
princières. Démarches à Rome. François de Sales voudrait savoir à quoi Son Altesse désire
l'employer. Trois sortes de gens qui ne témoignent pas de joie de la promotion de Jean-François à
la coadjutorerie. Ceux qui s'en réjouissent .................................................................................. 112
MDCX. A M. Etienne Jarcellat-Beybin (Inédite). Prière de s'intéresser à l'affaire de la coadjutorerie
de Jean-François de Sales qui doit se traiter en Cour de Rome........................................................ 114
MDCXI. A Madame de Granieu. Deux mots seulement à la destinataire, pour avoir le temps d'écrire
à d'autres. Humilité et patience. M. de Boisy, évèque. A quoi François de Sales emploiera
son loisir. .......................................................................................................................................... 115
MDCXII. A Madame de Veyssilieu. Double raison pour le Saint d'aimer une postulante.
Confiance en Dieu, et nous ne serons pas confondus....................................................................... 116
MDCXIII. A Madame de Jomaron (Inédite). La consolation d'une paternité spirituelle. «Trois
vertus colombines que Jesus Christ recherche en ses amantes.» Surcharge de correspondance. 117
MDCXIV. A la Mère de Chastel, Supérieure de la Visitation de Grenoble (Fragment). Prochaine
entrée au noviciat d'une sœur de la Mère de Chastel. — Le bon cœur de M. d'Ulme; ce qu'il voudrait
savoir ................................................................................................................................................ 118
MDCXV. A la Mère Favre, Supérieure de la Visitation de Lyon. Comment entendre un «document»
du saint Fondateur. Avantages du Directoire spirituel; où conduisent ses multiples exercices.
Conseils à la Maîtresse des novices.................................................................................................. 119
MDCXVI. Au Baron Louis de la Tournette. Un vieil ami de M. de Boisy. Concurrents pour la
chapelle Sainte-Catherine; pourquoi le Saint ne peut favoriser le fils du destinataire. .................... 120
MDCXVII. A la Soeur de la Roche, Assistante-Commise de la Visitation d'Annecy. Conseils au
sujet d'une malade ............................................................................................................................ 121
MDCXVIII. A la Mère de Chantal, a Paris. Heureuse nomination de Jean-François de Sales à la
coadjutorerie de l'évêché de Genève. — Ce que fait la vieillesse dans le cœur et dans l'âme du Saint.
Ses pensées sur les projets qu'on forme pour lui à Paris. Sollicitude pour l'avenir de Françoise
de Chantal. L'abandon à Dieu au milieu des «douleurs interieures et exterieures.» Perplexité
sans affliction. Messages affectueux. «M. Vincent,» bon conseiller...................................... 122
MDCXIX. A un gentilhomme (Fragment inédit). Reconnaissance pour de bons offices ................ 125
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MDCXX. A une Religieuse de l'abbaye de Sainte-Catherine. Le cadran exposé au soleil. Cri de
guerre de la volonté. Un prédicateur de Carême qui réclame des prières. La pensée du Saint
sur la clôture de l'abbaye de Sainte-Catherine. Son dévouement et son dégagement. ................ 125
MDCXXI. A un Religieux de la Compagnie de Jésus (Inédite). La vocation de M. de Sonnaz.
Une âme «parfaitement bonne,» mais qui a besoin de réfléchir encore. Excellente chose
d'affranchir le collège de Chambéry des trésoriers et financiers; comment y arriver. ..................... 127
MDCXXII. Au duc de Savoie, Charles-Emmanuel Ier. Reconnaissance impuissante à s'exprimer. . 128
MDCXXIII. Au Prince de Piémont, Victor-Amédée. Délicat remerciement pour la nomination de
Jean-François de Sales comme coadjuteur ....................................................................................... 129
MDCXXIV. A la Princesse de Piémont, Christine de France (Minute). Les faveurs considérées en
ceux qui les donnent et en ceux qui les reçoivent. Ce que la princesse a dû voir dans le cœur de
François de Sales et dans celui de son frère ..................................................................................... 130
MDCXXV. A la Mère Claudine de Blonay, abbesse de Sainte-Claire d'Evian (Inédite). Les Clarisses
d'Evian en inquiétude sur un prétendu départ du saint Evêque. Voyage très assuré que celui-ci
recommande à leurs prières. ............................................................................................................. 130
MDCXXVI. Au Président François de Tardy. Bon droit des Religieux de Sixt et grande misère des
habitants du pays. ............................................................................................................................. 131
MDCXXVII. A M. Montenet. Une promesse fidèlement tenue. Réciprocité d'honneur et
d'affection. ........................................................................................................................................ 132
MDCXXVIII. A M. Claude de Blonay. Suspendre une nomination jusqu'à l'arrivée d'un Bref de
Rome. Regrets du départ d'un ecclésiastique .............................................................................. 133
MDCXXIX. A la Mère Rosset, Supérieure de la Visitation de Bourges. Décision au sujet de la
réception d'une Sœur. — Le Fondateur revise les Règles de son Ordre .......................................... 134
MDCXXX. A la Mère Favre, Supérieure de la Visitation de Lyon. Accablement d'affaires. Lettres
recommandées. Nombreuses demandes de fondations de la Visitation. Où trouver des filles?
Confiance en Dieu ............................................................................................................................ 134
MDCXXXI. A la Mère de Chantal, a Paris (Fragment). La coadjutorerie de Jean-François de Sales
est uniquement l'œuvre de Dieu ....................................................................................................... 135
MDCXXXII. A un ami (Fragment inédit). Un mot de l'âme du Saint ............................................. 136
MDCXXXIII. A Madame du Tertre. La mue du serpent; sa transformation en colombe. Ne pas
regarder en arrière. Condescendance et humilité du Fondateur. Suivre les inspirations d'En-
haut et laisser faire à Dieu. Quel soin il faut avoir de la créature nouvelle, née du Saint-Esprit 136
MDCXXXIV. A la Mère de Chastel, Supérieure de la Visitation de Grenoble (Inédite). Des raisons
qui ne satisfont pas l'esprit de François de Sales. Les prétentions de M. d'Ulme. On ne peut lier la
liberté pour le choix ou le changement des Pères spirituels. Salutations affectueuses. Disette de
Supérieures pour de nombreuses fondations .................................................................................... 137
MDCXXXV. A M. Guillaume de Bernard de Foras. Délicatesse dans le silence. L'ordinaire
méthode de la Providence divine. Véritable marque de la bénédiction de Dieu sur un mariage.
Conserver son bonheur et laisser parler le monde. ........................................................................... 138
MDCXXXVI. A Madame de Villesavin (Inédite). La préface d'une grande lettre. Quelle est la
meilleure marque de la dilection de Dieu pour ses enfants. Salutations à une petite fille........... 139
MDCXXXVII. A la Duchesse de Nemours, Anne de Lorraine. Trois requêtes renouvelées; appel à la
bonté, à la justice, à la piété du duc et de la duchesse de Nemours.................................................. 140
MDCXXXVIII. Au Chanoine Jean-Baptiste Germonio (Inédite). Envoi des saintes Huiles........... 141
MDCXXXIX. Au Chanoine Jean-François de Sales (Fragment). Avis du Saint sur une affaire
embarrassante. Envoi de lettres et promesse d'écrire bientôt. ..................................................... 142
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MDCXL. Au Cardinal Frédéric Borromée, Archevêque de Milan. Excuse pour un remerciement
tardif. Des Pères Barnabites en route vers Milan. ....................................................................... 143
MDCXLI. A Don Jérome Boerio, Général des Barnabites. Le Saint prie le Général de renvoyer à
Annecy deux Pères Barnabites et de leur en adjoindre un troisième d'àge vénérable. ..................... 144
MDCXLII. A la Mère de Chantal, a Paris. Nouvelles de l'âme de François de Sales. Ses lumières
sur les maximes évangéliques et sur la prudence humaine. M. de Boisy à la cour. Les affaires
et la santé de Mme de la Flèchère ...................................................................................................... 145
MDCXLIII. A M. Claude de Quoex. Débats au sujet de la nomination à une cure. Un
accommodement des Ermites du Mont-Voiron procuré par les délégués de l'Evêque de Genève... 146
MDCXLIV. A Madame de Valfin (Inédite). Une forte et tendre affection paternelle et filiale.
Incertitude du Saint sur l'avenir. L'enfant suspendu «au col de la Providence.»......................... 147
MDCXLV. A la Mère de Chantal, a Paris. Quatre objections au projet de fixer l'Evêque de Genève
en France. Son désir de demeurer attaché à son Eglise. Ce qui vaut mieux pour lui qu'un
chapeau de cardinal. Point de népotisme. Voyage probable à Rome ..................................... 148
MDCXLVI. A Madame Angélique Arnauld, abbesse de Port-Royal A Maubuisson. Les fautes
involontaires n'empêchent pas la marche vers la perfection. Vraie cause du mal chez la Mère
Arnauld. Comment modérer sa promptitude. Ne point se dépiter contre soi-même, mais être
enfant en humilité. Un nouveau saint Paul intercesseur pour Onésime ...................................... 149
MDCXLVII. A la Mère Favre, Supérieure de la Visitation de Lyon. Avis sur un voyage; la fondation
de Turin. Quelle doit être la durée du noviciat; quand on peut le prolonger. Etablissement de la
Visitation en Auvergne. Pourquoi François de Sales est empêché d'aller prêcher à Lyon.......... 150
MDCXLVIII. A la Mère de Chastel, Supérieure de la Visitation de Grenoble. A quelles conditions
on peut recevoir à la Visitation des aspirantes qui n'ont pas encore l'âge d'entrer au noviciat.
L'habit qu'il faut leur donner. Rester indifférente sur le choix que font les postulantes d'une
Maison ou d'une autre. — Bien que les Sœurs ne récitent que le petit Office, il est bon de maintenir
le rang des Associées. Profiter de nos mouvements imparfaits pour nous humilier ................... 152
MDCXLIX. A M. Guillaume Drujon Prieur Commendataire d'Anglefort. La nomination au prieuré
de Ripaille, désormais au pouvoir du saint Evéque. Son double avantage. Prière d'avoir soin de
papiers importants pour cette affaire. ............................................................................................... 154
MDCL. Aux Ermites du Mont-Voiron (Fragment inédit). La charité. Souhait........................... 155
MDCLI. A Madame de la Fléchère. Un tracas qui empêche de recevoir des consolations et d'en
donner. Petites contestations. Le seul souci que nous devons avoir. Désir de mettre fin à un
procès ............................................................................................................................................... 156
MDCLII. A la Mère Favre, Supérieure de la Visitation de Lyon (Fragment). Bénédictions divines
promises à la Sœur de Blonay .......................................................................................................... 157
MDCLIII. Au Marquis Sigismond de Lans (Minute inédite). Une adresse erronée. Nouvelle
nomination faite par le marquis de Lans .......................................................................................... 157
MDCLIV. A une religieuse. L'entrée dans la voie de la vraie dévotion et le secret pour y persévérer.
Préparation à la fête de la Pentecôte. Le vin du Ciel, et le pain de la terre ............................ 158
MDCLV. A Mademoiselle Lhuillier de Frouville. Fâcheuse affaire terminée. Que fera la
destinataire de sa liberté? Impossibilité de demeurer en l'état où elle est. Les périls et les
mortifications du mariage. Douce violence que le Saint doit faire à sa fille spirituelle. Ce qu'est
la vie religieuse. Réponse aux plaintes et aux appréhensions de la nature.................................. 160
MDCLVI. A M. Antoine de Pignier de Fontany (Fragment inédit). Prière au destinataire de régler les
affaires qui retardent la Profession de sa sœur. ................................................................................ 163
MDCLVII. A M. Guillaume de Bernard de Foras. Permutation probable de François de Sales et de
son frère. Un esprit qui aurait besoin de mûrir. Annonce d'une lettre à la Mère de Chantal.. 164
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MDCLVIII. Au Chanoine Jean-François de Sales, son frère. Double raison de rendre service à M.
Roero. Un canonicat prochainement vacant. Les talents et qualités d'un futur aumônier de Mme
Royale. Incapacité de beaucoup de prétendants à ce poste. Comment faire réussir un désir de
M. et de Mme de Cornillon. Envieux et victorieux. Une réponse embarrassante. Affaires de
Ripaille et de la Sainte-Maison. Coupable qui ne veut pas reconnaître ses torts. Désir de
François de Sales de favoriser les prétentions de M. de Longecombe; difficultés qu'il y rencontre.
Quelques nouvelles........................................................................................................................... 165
MDCLIX. Au duc de Savoie, Charles-Emmanuel Ier. A quoi employer les prébendes de Contamine
.......................................................................................................................................................... 169
MDCLX. A la Comtesse de Rossillon (Inédite). Une supplication que la destinataire est priée
d'appuyer. La vocation à l'état ecclésiastique doit procéder de libre volonté.............................. 170
MDCLXI. Au Chanoine Jean-François de Sales, son frère (Inédite). Contradictions au sujet des
Bulles du futur Evêque de Chalcédoine. Pourquoi le Saint n'a pu accepter de prêcher le Carême à
Lyon. Salutations et nouvelles. Quelqu'un qui veut être du voyage de Rome pour entretenir à
loisir François de Sales..................................................................................................................... 172
MDCLXII. A la Mère de Bréchard, Supérieure de la Visitation de Moulins. Prochain départ de
quelques Sœurs pour Moulins, Paris, Orléans. — Une lettre qui mettrait l'Evêque «bien en peine.»
Avis sur les Règles de saint Augustin. Les monastères des Filles de la Visitation en voyage.
On ne peut faire la Profession avant la fin de l'année du noviciat.................................................... 174
MDCLXIII. A Madame des Gouffiers. Perplexité au sujet d'une âme. Les tendances d'esprit et de
caractère qui lui rendraient périlleux le séjour dans le monde; aversion qui l'éloigne de la vie
religieuse. Quel état mitoyen elle peut embrasser. Souvenir attristé d'un temps de ferveur.
Les procès, «tres mauvaise occupation.» Etre pauvre plutôt que de s'enrichir par cette voie. .... 175
MDCLXIV. Au Chanoine Jean-François de Sales, son frère. Entreprise à l'avantage de Son Altesse,
proposée par Louis de Sales. Comment préparer doucement la réalisation du projet d'Antoine
Favre pour son fils. Les qualités du président de la Valbonne. Nouveau prétendant à la charge
d'aumônier de la princesse de Piémont. Bien qui résulterait de l'élection de Jean-François au
doyenné de Notre-Dame. Cinq cents écus qu'on n'arrive pas à retirer. Le Monastère de Turin et
les fondations de France. Une traduction de Philothée. Grande alarme parmi les Religieuses
non réformées du diocèse de Genève. Prédicateur de grandissime talent ................................... 177
MDCLXV. A M. Guillaume Rousselet. Affaires recommandées au duc de Nemours et dont l'Evêque
de Genève espère bonne issue. Le marquis de Lans outrepassant ses pouvoirs, Louis de Sales,
gardien du château d'Annecy. Ce qui rend inutile l'intervention du Saint en faveur d'une Novice.
Commissions affectueuses........................................................................................................... 180
MDCLXVI. A la Mère de Chantal, a Paris. L'excellence et les effets du don surnaturel d'intelligence.
Quel don le complète................................................................................................................... 182
MDCLXVII. A la Mère de Chastel, Supérieure de la Visitation de Grenoble. Préparation d'une
pieuse caravane pour la France. Une âme fortement attachée aux choses intérieures a quelquefois
de la peine à se rendre attentive aux extérieures. Quelques conseils pratiques. Le livre de la
Volonté de Dieu, et le danger de l'imagination jointe à l'amour-propre. Plusieurs décisions pour la
clôture, non encore établie au Monastère de Grenoble. — Aimable mot sur la sœur de la destinataire.
Supprimer les réflexions, les examens inquiets, et marcher avec confiance et abandon.
Pourquoi cette lettre ne part qu'après coup. Encore un mot de paix............................................ 183
MDCLXVIII. A Madame de Granieu. Providentiel mélange des douceurs parmi les amertumes.
«Petite prise» inopinée entre l'Official et un ordinand. — Une mortification pour les Sœurs qui s'en
vont en France. Trois lois «pour ne point pecher en la chasse.» L'amitié des enfants de Dieu
.......................................................................................................................................................... 186
MDCLXIX. Au Prince de Piémont, Victor-Amédée. Un projet concernant Genève. Prière
d'écouter favorablement le porteur ................................................................................................... 187
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MDCLXX. A Madame de Geneve, abbesse de Baume-Les-Dames. Un pieux dessein du marquis de
Lullin, non réalisé. Combien important de se préparer de bonne heure à la mort. Espérance
déçue du saint Evêque. Pourquoi il se réjouit de la nomination de son frère .............................. 188
MDCLXXI. A Madame de Villeneuve. Tendresse surnaturelle et paternelle. Réponses à des cas
de conscience.................................................................................................................................... 189
MDCLXXII. A la Mère de Chantal, a Paris. La Sœur d'Avisé jointe à la petite troupe des partantes.
Election d'une Assistante-commise au Monastère d'Annecy. «Loup par nature, mais brebis par
grace.» Deux lettres que la Mère de Chantal pourra confronter plus tard. Le formulaire de la
Profession chez les Bénédictins et à la Visitation. Eloge de Mme de Herse et de la comtesse de
Fiesque. Messages affectueux pour plusieurs filles spirituelles du Saint. Mgr de Belley à
Annecy. Zèle et miséricorde de François de Sales pour une âme ............................................... 190
MDCLXXIII. Au Prince de Piémont, Victor-Amédée. Un dessein recommandé à l'attention du
prince. ............................................................................................................................................... 193
MDCLXXIV. A Madame Angélique Arnauld, abbesse de Port-Royal a Maubuisson. M. Michel
député pour une visite. Il n'y a rien à craindre des misères spirituelles non aimées. Une fille du
monastère de la croix et volonté de Dieu ......................................................................................... 194
MDCLXXV. A la Présidente de Herse. Une religieuse «protestation» avant un «petit mot de liberté
et de franchise.» Silence réciproque du Père et de la fille. Pourquoi l'Evêque ne l'a pas rompu.
Le gémissement de saint Paul. Se résigner à sentir les attaques de l'amour-propre, mais n'y
point consentir. Où se réfugie la vraie indifférence. Que faire après une chute. Un charmant
filleul de François de Sales; ce que son parrain en attend. ............................................................... 195
MDCLXXVI. A Monseigneur Maroaurele Maraldi (Fragment). Le décanat de Saint-Germain
l'Auxerrois offert à l'Evêque de Belley. Pourquoi il ne peut l'accepter. Exposé des raisons qui
rendent une dispense légitime et nécessaire. Un diocèse bien disproportionné à la valeur de son
Pasteur. ............................................................................................................................................. 198
MDCLXXVII. A une Religieuse de la Visitation. L'humilité, réparatrice de nos imperfections.
Vertus à pratiquer pour s'unir parfaitement à Dieu. ......................................................................... 200
MDCLXXVIII. A Madame de Granieu. Retour de la Mère de Chastel à Grenoble. La commission
dont l'avait chargée Mme de Granieu. Pourquoi le Saint, malgré son désir, n'a pu y répondre. Sa
fidélité aux âmes. Espérance d'un revoir ..................................................................................... 200
MDCLXXIX. A la Mère Favre, Supérieure de la Visitation de Montferrand. Lettre à l'Evêque de
Clermont et humilité de l'Evêque de Genève. Perpétuels délais pour la fondation de Turin. La
Mère de Chastel à Annecy. Amis du Saint en Auvergne. Nouvelles de famille .................... 201
MDCLXXX. Au Père Jean-Antoine Rigaud, Ermite du Mont-Voiron (Fragment). Repos en l'amitié;
sainte armure, invincible confiance. ................................................................................................. 203
MDCLXXXI. A Messieurs du Conseil de la Sainte-Maison de Thonon (Inédite). La Bulle de
fondation de la Sainte-Maison oblige ses ecclésiastiques à la Règle de l'Oratoire. Moyen
nécessaire pour mettre cette condition en vigueur. Volonté du Prince, ordonnance de l'Evêque.
Projet d'un voyage de François de Sales à Thonon. ......................................................................... 204
MDCLXXXII. A la Mère de Bréchard, Supérieure de la Visitation de Moulins. Difficulté pour la
fondation de Nevers; d'où elle vient et le cas qu'il faut en faire. L'avis du Saint sur l'emploi des
personnes et de l'argent. Des entreprises «merveilleusement fascheuses;» les supporter, les porter,
et les aimer. Vouloir servir Dieu, sans s'attacher aux moyens de le servir. Les contradictions,
présage de succès. Une béatitude ................................................................................................ 205
MDCLXXXIII. A la Mère de Chantal, a Paris. Grandes lettres à Moulins pour l'affaire de Nevers.
Le titre épiscopal de M. de Boisy. Souhaits de bénédictions sur des cœurs aimés ..................... 206
MDCLXXXIV. A Madame du Tertre. Un témoignage que la destinataire doit rendre en faveur de la
vérité. Désintéressement de l'Evêque de Genève. Les désirs de M. et de Mme de Saint-Géran et
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d'autres personnes de Moulins. — Comment le vœu de Mme du Tertre en faveur de Nevers devra être
exécuté. Félicitations sur ses progrès dans la piété ..................................................................... 207
MDCLXXXV. A M. Nicolas de Palierne. Pourquoi François de Sales a choisi le monastère de
Moulins pour la retraite de Mlle du Tertre. Ce qu'il apprit par une de ses lettres. Affaire où il n'y
a nulle sorte d'injustice. Silence discret du Saint sur un «advis de conscience.» L'abjection que
la Mère de Bréchard devra porter en patience. ................................................................................. 209
MDCLXXXVI. A Monseigneur Jean-François de Sales, son frère, Evêque nommé de Chalcédoine
(INÉDITE). L'inconvenance de la proximité d'une étable et d'une église. Moyens à prendre pour y
remédier............................................................................................................................................ 210
MDCLXXXVII. A la Mère de Chastel, Supérieure de la Visitation de Grenoble. Heureuse
disposition de la Providence. Un nouvel Evêque à Grenoble; ce qu'il faudra faire avec lui.
Petite tentation filiale de la Mère de Chastel. Ne pas «espier» les sentiments de son âme ......... 211
MDCLXXXVIII. A Madame le Maistre. Ce qui soulagerait la destinataire dans ses afflictions.
«L'honneur de souffrir beaucoup,» partage des enfants de Dieu ici-bas. Deux sentiments de l'âme
du Saint. Demande affectueuse de nouvelles. ............................................................................. 212
MDCLXXXIX. A la Mère Geneviève de Saint-Bernard, prieure du Carmel de Chartres. Quand Dieu
nous a donné une charge, il nous doit sa grâce pour la bien remplir. Petit dialogue. On est
fidèle, si on est humble; on est humble, si on désire l'être. Le pain quotidien. Faire bien
aujourd'hui, sans penser à demain, se fiant en la Providence ........................................................... 213
MDCXC. A la Mère de Chantal, a Paris (Inédite). L’été, mauvaise saison pour la santé de François
de Sales. A quelle condition il écrira courtement à la Mère de Chantal. — Deux sœurs qui
s'aiment bien et qui sont très aimées par leur Père spirituel. Ce que va faire D. Juste en Piémont.
Regret de ne pouvoir envoyer quelques lettres, et messages paternels ....................................... 214
MDCXCI. Au Baron Prosper de Rochefort (Inédite). Pauvre âme à «l'esprit renversé» et à la
conscience dévoyée. Promesse d'intervenir auprès de Mgr de Belley en faveur du destinataire. 216
MDCXCII. A Dom Jean de Lucinge, prieur de Contamine. Une rixe sur laquelle il faut informer. 217
MDCXCIII. A la Mère de Bréchard, Supérieure de la Visitation de Moulins (Inédite). Un passage
d'une lettre de Mme du Tertre. Réponse que lui fit François de Sales. Sa décision après plus
ample information. La douceur des Règles de la Visitation Sainte-Marie. «Oublier les orages
et les flotz,» et ne point se lasser de souffrir .................................................................................... 217
MDCXCIV. A la Mère de Chantal, a Paris. Nouvelles réponses à Moulins et à Nevers pour éclaircir
les premières. Le caractère de «race des biens des anciens chrestiens.» Epreuves de la Mère de
Bréchard. Seule habitation stable de l'Evêque de Genève; regard sur l'autre vie. Quelques mots
de la Communauté d'Annecy. L'unique chose à traiter à Rome pour la Congrégation ............... 219
MDCXCV. A Mademoiselle Lhuillier de Frouville. Saint résultat de la promptitude à faire la volonté
de Dieu. Le calme après une rude secousse. Néant de ce que l'on quitte pour le Seigneur,
valeur immense de ce que l'on trouve. Trois parties de l'holocauste ........................................... 221
MDCXCVI. A Madame de Villeneuve. Une action héroïque, digne des premiers temps du
christianisme. Servir Dieu en Dieu. Consolation et force ...................................................... 222
MDCXCVII. A M. François Lhuillier d'Interville. Félicitations à un père qui a généreusement donné
sa fille à Dieu. Grâces qui naîtront de son sacrifice. ........................................................................ 223
MDCXCVIII. Au Père Antoine Antoniotti, de la Compagnie de Jésus (Inédite). Appréciation du
Saint sur une traduction de l'Introduction a la Vie devote. Critiques qu'il réfute; corrections qu'il a
faites. Envoi du Traitté de l'Amour de Dieu; multiples fautes d'impression de la sixième édition.
Trois ou quatre mille sermons en vingt-huit ans. Pourquoi l'Evêque de Genève ne peut écrire
comme ses amis l'en prient. Philothée réimprimée plus de quarante fois. .................................. 224
Minute de la lettre précédente (Fragment inédit) ......................................................................... 227
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MDCXCIX. A Monseigneur Jean-François de Sales, son frère, Evêque nommé de Chalcédoine
(Inédite). La paix en France, et les projets du Prince Cardinal. Déplaisirs de ce monde.
Nécessité croissante de réformer certains Monastères. Les intrigues du sacristain Perret.
Cuisinier et tailleur à «façonner au service et a la modestie.» Salutations respectueuses. «Un
article de foy morale.» Remerciements à faire à plusieurs Cardinaux ........................................ 228
MDCC. A la sœur de Morville, novice de la Visitation de Moulins. Inspirations partielles du Saint-
Esprit. Le père de l'Evangile et ses deux fils. Dieu ne veut être aimé que totalement.
Qu'attend-il pour verser dans les cœurs le «don sacré de l'orayson?» — Baume divin et parfums de
ce monde. A qui appartient une aumône déjà livrée. Il doit être indifférent à Mme du Tertre de
donner ici ou là, puisqu'elle donne au Seigneur ............................................................................... 231
MDCCI. A la Mère Favre Supérieure de la Visitation de Montferrand (Fragment). Double joie du
saint Fondateur de la Visitation ........................................................................................................ 232
MDCCII. A la Mère de Chantal, a Paris (Inédite). Lettre pour les Barnabites à Mgr de Bourges.
Douce espérance de revoir la Sainte à Paris. Le Monastère d'Orléans. Réponses que François
de Sales pense faire de vive voix. Les désirs de «plusieurs gens de bien » au sujet de Mgr Camus.
Ce qui contrebalance les réels défauts de Mme de Port-Royal. Combien il lui serait avantageux
de se retirer un peu à la Visitation; difficultés à ce projet. Des «honneurs» à faire .................... 233
MDCCIII. A un gentilhomme. Une importante affaire dont le succès dépend en partie de
l'intervention du destinataire. ........................................................................................................... 235
MDCCIV. A une dame. La partie inférieure de l'âme se ressent des incommodités du corps. Dieu
ne laisse pas d'agréer les actes de l'esprit faits avec peine et sans joie sensible. Etre juste envers
nous-même. Comment changer le plomb en or. Un peintre Capucin. La future «image
vivante de la divine Majesté.» .......................................................................................................... 236
MDCCV. A la Mère Marie de Jésus, prieure du Carmel d'Orléans. Une affeçtion vieille de dix-huit
ans. Grande qualité des amitiés créées par le Ciel. Les desseins miséricordieux de la
Providence sur les trois filles de Mme Acarie. Espérance pour ses trois fils. Portrait en échange
de reliques. — Les Sœurs de la Visitation en visite au Carmel; une règle qui leur fut «souvent
inculquee.» ....................................................................................................................................... 237
MDCCVI. Au Supérieur d'une communauté (Minute). François de Sales attend, pour permettre une
quête et une publication d'Indulgences, une attestation des pouvoirs du quêteur ............................ 239
MDCCVII. A la Mère de Chantal, a Paris. L'opinion de François de Sales sur la juridiction la
meilleure pour les Ordres de femmes ............................................................................................... 240
MDCCVIII. A la Mère Favre, Supérieure de la Visitation de Montferrand (Fragment). Le rôle de la
destinataire et celui de l'Introduction à la Vie dévote....................................................................... 241
MDCCIX. Au Prince de Piémont, Victor-Amédée. Exposé des facilités d'une fondation d'Oratoriens
à Rumilly et des avantages qui en résulteraient. Que devrait faire le prince pour aider à cette
bonne œuvre. — Les curés d'Armoy et de Draillant toujours sans argent. ...................................... 242
MDCCX. A la Mère de Chantal, a Paris. Pourquoi le Saint se réjouit du retard du voyage en France.
L'Evêque de Luçon et la Reine mère. M. Michel apportant de Paris «une milliasse de lettres.»
L'Abbesse de Port-Poyal auprès de la Mère de Chantal.............................................................. 243
MDCCXI. A Madame de Granieu. Les effets des affections saintes. Humble sentiment de
reconnaissance de l'Evêque de Genève. Avis sur la santé de la Supérieure de la Visitation de
Grenoble ........................................................................................................................................... 244
MDCCXII. A la Mère de Chastel, Supérieure de la Visitation de Grenoble (Fragment). La Sainte
Vierge aussi bien Mère de Notre-Seigneur sur le Calvaire qu'à l'heure du Magnificat. Paternelle
sollicitude du Saint pour la santé de la destinataire. Sentiment et consentement ........................ 245
MDCCXIII. A Madame de Granieu. Des maladies utiles à deux âmes. Comme le monde se
trompe dans ce qu'il appelle bien et mal. Double prière et souhait paternel. .............................. 246
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MDCCXIV. A M. Louis de Gerbais de Sonnaz. Le saint Evêque consent à la retraite du destinataire.
Un oncle qu'il faut contenter. Attente d'une réponse du prince de Piémont. .......................... 247
MDCCXV. A Madame Gasparde de Ballon, Religieuse de l'abbaye de Sainte-Catherine. La solitude
mentale au milieu du monde. Comment suppléer aux exercices de piété qu'on ne peut faire.
Préparation à la fête de la Toussaint et à celle des Morts ................................................................. 248
MDCCXVI. A une Religieuse de l'abbaye de Sainte-Catherine. On peut dire son mal, mais il ne faut
pas s'en plaindre. — Un coup d'œil sur la Jérusalem céleste............................................................ 248
MDCCXVII. A la soeur de Blonay, maitresse des novices a la Visitation de Lyon (Fragment).
Souvenirs charmants de l'enfance de Marie-Aimée de Blonay. L'ardente foi d'alors doit la
consoler dans le trouble de la tentation actuelle ............................................................................... 249
MDCCXVIII. Au duc de Savoie, Charles-Emmanuel Ier. Témoignage de la fidélité et du mérite du
collatéral Flocard .............................................................................................................................. 250
MDCCXIX. Au Prince de Piémont, Victor-Amédée. Un serviteur fidèle de Son Altesse............... 251
MDCCXX. A la Mère de Monthoux, Supérieure de la Visitation de Nevers. «Lettre d'attente.»
Quelle réponse faire à l'Evêque de Nevers. Les filles ineptes ne doivent pas être reçues.
Echange de bréviaires....................................................................................................................... 252
MDCCXXI. A la soeur de Chastellux, Assistante de la Visitation de Nevers. Le Saint se réjouit de la
savoir Directrice à Nevers. L'esprit qu'il faut donner aux Novices. ............................................ 254
MDCCXXII. Aux membres du souverain sénat de Savoie (Inédite). La cure de Rumilly étant
désormais unie au Chapitre des Altariens, les poursuites du Prieur contre le Curé n'ont pas de raison
d'être. ................................................................................................................................................ 255
MDCCXXIII. A M. Jean Rosetain. L'Evêque de Genève charge son Officiai forain d'une affaire qui
intéresse le Chapitre de sa cathédrale. Prochain départ pour le Faucigny. .................................. 256
MDCCXIV. Au Baron Jean-Claude de Clermont-Mont-Saint-Jean (Inédite). Demande de papiers,
inutiles au destinataire, et très utiles à François de Sales. ................................................................ 257
MDCCXXV. A la Mère de Monthoux, Supérieure de la Visitation de Nevers. La Visitation n'est pas
instituée pour l'éducation des petites filles. Double inconvénient de donner entrée au monastère à
de trop jeunes enfants. Quelques avis sur différentes affaires. La source des «tendretés» sur
soi-même. Une pensée dangereuse pour les fondatrices. Combien rares les femmes «sans
fantasie et malice et bigearrerie.» Sous quelle condition promettre aux aspirantes de les recevoir.
Ne pas prêter facilement les Constitutions jusqu'à ce qu'elles soient corrigées. Faut-il se laisser
peindre? Divers conseils relatifs aux Règles et observances. Pour quelle raison admettre les
postulantes riches; pourquoi les pauvres ne doivent pas être rejetées. Considération et
désintéressement dans l'admission des sujets. — Les dix mille francs de la Sœur de Morville ...... 258
MDCCXXVI. A la Mère de Chantal, a Paris (Fragment inédit). Une lettre toute d'or .................... 261
MDCCXXVII. A Monseigneur Jean-François de Sales, son frère, Evêque nommé de Chalcédoine.
Profonde douleur du Saint sur un apostat. Aveuglement étrange de cette âme et étonnantes
contradictions. Sa séparation du monde et de l'Eglise. Espérance de conversion pour
l'Angleterre. — Les effets de cette chute sur l'esprit et le cœur de François de Sales. Quelle
assurance Mgr de Chalcédoine devra donner au malheureux tombé................................................. 262
MDCCXXVIII. Au même. Quantité de lettres au retour d'un voyage. Dispositions du Prieur de
Rumilly toutes favorables à l'établissement des Pères de l'Oratoire. L'élection de M. du Châtelard
au doyenné de Notre-Dame. Quelqu'un que le Saint voudrait servir de son propre sang.
Nouvelles de famille. Tentative pour le retour d'une âme à la foi. A qui appartient le Royaume
des cieux. .......................................................................................................................................... 263
MDCCXXIX. A la Mère de Chantal, A Paris. Affliction profonde, mélangée d'espérance. Causes
de la chute de M. de Granier. Le jugement, «partie rare.» Quelle consolation le Fondateur
reçoit de sa Congrégation. Le tardif, mais beau fruit du dattier .................................................. 265
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MDCCXXX. A la Mère Thérése de Jésus, prieure du Carmel de Lyon (Fragment). Une vocation
divine pour l'Oratoire. Troubles au Carmel. Un pourquoi qui serait long à dire. ........................ 266
MDCCXXXI. A Madame de Granieu. Les matériaux des bâtiments célestes «au quartier des
hommes.» Ce que les Anges pourraient nous envier. Transformer l'infirmité en oraison.
Comment Notre-Seigneur nous fait souvent le plus de bien. — Un cœur faible et assoupi, mais non
point infidèle..................................................................................................................................... 267
MDCCXXXII. A M. Amédée Berchat, Curé de Notre-Dame du Chastel (Inédite). Délégation pour
enquête canonique. ........................................................................................................................... 268
MDCCXXXIII. A Monseigneur Jean-François de Sales, son frère, Evêque nommé de Chalcedoine.
Désagrément causé par les neiges. Un service à rendre à M. de la Pierre. Métamorphose
soudaine du sieur Bonfils. Pourquoi l'Evêque de Genève cèle le plus qu'il peut la nouvelle d'une
apostasie. Bonne mine et bon jeu. Maladies, mariage et mort. Témoignages d'honneur et
d'affection donnés par le Saint au nouvel Evêque de Chalcédoine .................................................. 268
MDCCXXXIV. Au Président Jean-Georges Crespin (Inédite). François de Sales assure le
destinataire de son souvenir et de son dévouement. Ermite qui saura bientôt toutes les nouvelles
de la cour. ......................................................................................................................................... 271
MDCCXXXV. A Madame Bellot. Prière à la destinataire de donner les ordres nécessaires pour le
bon succès d'une œuvre de charité. .................................................................................................. 271
MDCCXXXVI. Au Prince de Piémont, Victor-Amédée. Excès de misère de la Sainte-Maison de
Thonon, et sa triste conséquence. D'où vient cette détresse. Comment on peut y remédier .. 272
MDCCXXXVII. A la Mère de Chantal, a Paris. Le Saint «accommode» les Constitutions.
Comment tenir unies les Maisons du nouvel Institut? A défaut d'un hôtel «asses beau,» il faut se
contenter d'un «trop beau.» Démarches que doit faire à Rome Mme de Port-Royal pour obtenir de
passer de son Ordre dans celui de la Visitation ................................................................................ 273
MDCCXXXVIII. A Monseigneur Jean-François de Sales, son frère Evêque nommé de Chalcedoine.
Préparatifs pour le voyage de France. L'Evêque voudrait laisser son frère en sa place.
L'impossibilité où il se trouve d'aller jusqu'à Turin. Insolence de deux laquais au logis de François
de Sales; démêlé qui en résulte entre M. de la Valbonne et le baron de Tournon. Méthode pour
garder la paix et gagner les cœurs. — Prises d'habit au Monastère d'Annecy ................................. 275
MDCCXXXIX. A la Sœur Thérése de Jésus, sous-prieure du Carmel d'Orléans. Dangereuse
tentation survenue dans quelques Monastères de Carmélites. Quand on est bien, ne pas chercher
le mieux, de peur de trouver le mal. Eloge des Supérieurs du Carmel. Le manteau d'Elie et son
esprit. ................................................................................................................................................ 278
MDCCXL. A la Mère Marie de Jésus, prieure du Carmel d'Orléans (Inédite). Le Carmel ne doit
point désirer de changer de Supérieurs. Affection du saint Evêque pour cet Ordre et spécialement
pour la Prieure et la Sous-prieure d'Orléans ..................................................................................... 279
MDCCXLI. A Madame Louise de Ballon, Religieuse de l'abbaye de Sainte-Catherine. L’«humeur»
de l'Abbesse de Sainte-Catherine et celle de l'Evêque de Genève. Aversion de l'esprit humain à
recevoir «les conceptions d'autruy.» Le Dieu de paix triomphant au milieu de la guerre. Bonne
saison pour la récolte ........................................................................................................................ 280
MDCCXLII. A deux Religieuses de l'abbaye de Sainte-Catherine.................................................. 280
MDCCXLIII. A M. Charles Bally (Inédite). Un Capucin peintre de tableaux d'église. Indications
du Saint pour le groupement des personnages. ................................................................................ 281
Appendice............................................................................................................................................. 282
I. Lettres adressées a saint François de Sales par quelques correspondants ..................................... 284
A. Bref de Sa Sainteté Paul V ...................................................................................................... 284
B. Lettres de Charles-Emmanuel Ier, duc de Savoie ..................................................................... 285
19/341

2.10 Page 20

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II. Lettres & Pièces diverses ............................................................................................................. 287
A. Lettre du Chanoine Jean-François de Sales a M. Barthelemy Flocard .................................... 287
B. Brevet de Charles-Emmanuel Ier, duc de Savoie, pour la coadjutorerie de Jean-François de
Sales ............................................................................................................................................. 288
C. Lettre de Christine de France, Princesse de Piemont, au Cardinal Scipion Caffarelli-Borghese
...................................................................................................................................................... 289
D. Lettres de Victor-Amedee, Prince de Piemont, a l'abbé Philibert-Alexandre Scaglia............. 290
E. Lettres de l'abbe Philibert-Alexandre Scaglia .......................................................................... 291
I. Au duc de Savoie .................................................................................................................. 291
II. Au Prince de Piemont .......................................................................................................... 291
III. Au duc de Savoie (Fragment)............................................................................................. 292
IV. Au même (Fragment) ......................................................................................................... 292
F. Lettre du Cardinal Pierre Aldobrandini au Prince de Piemont................................................. 292
III. La fondation du Monastère de la Visitation de Nevers, huitième de L'ordre ............................. 294
Glossaire des locutions et des mots surannés ou pris dans une acception inusitée aujourd'hui ........... 298
Index des correspondants et des principales notes biographiques et historiques de ce volume ........... 306
Table de correspondance de cette nouvelle édition avec les précédentes et indication de la provenance
des manuscrits ...................................................................................................................................... 317
Table des matières ................................................................................................................................ 329
20/341

3 Pages 21-30

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3.1 Page 21

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Avant-Propos
A vrai dire, il est mille fois plus aisé d'admirer en détail la conversation écrite de l'Evêque
de Genève (car sa correspondance n'est pas autre chose), que de vouloir donner une idée
d'ensemble d'une matière variée à l'infini, et qui échappe à la synthèse générale qu'on voudrait
réaliser. La difficulté se fait sentir vivement en face de ce nouveau volume, riche en sources
d'études sur la vie extérieure et sur l'âme du saint Prélat. Ses deux cent trois Lettres embrassent
une période de dix-sept mois août 1619 à décembre 1620. Trente-huit sont inédites1; parmi les
cent soixante-cinq autres déjà publiées antérieurement, cinquante-quatre ont été revues et
collationnées sur les Autographes, vingt-deux sur d'anciennes copies. Quant à celles qui ont
échappé à ce contrôle, encore convient-il d'ajouter qu'elles ont pu être améliorées ou par une
ponctuation plus rationnelle, ou par une meilleure lecture.
Après dix mois de séjour à Paris, l'Evêque de Genève a le devoir d'accompagner la «tres
honnoree Dame et Princesse» que la France vient de donner à «la serenissime Mayson de
Savoye2.» La vie apostolique menée par François de Sales, son éloquence qui ne ressemblait à
aucune autre, la distinction de ses manières, le charme de sa conversation, avaient émerveillé la
Cour et la Ville, [V] comme on disait alors. Aussi, ses amis et ses enfants spirituels s'affligent à
l'approche du départ; le Saint les console en reportant leur regard vers l'éternité où le sien est
toujours fixé, et après les avoir confiés à Dieu3, il s'éloigne pour rejoindre les princes réunis en
Touraine.
Autour des souverains se pressent les grands seigneurs. Les uns, partisans de la Reine mère,
s'ingénient à faire oublier au Roi leur passé, prêts à profiter des faveurs escomptées comme gage
d'une réconciliation que l'on souhaite durable sans oser l'espérer; les autres, fiers de leur fidélité à
la couronne, font sonner bien haut leurs droits aux charges éminentes et lucratives. Il y a là encore
«tout plein de Praelatz4;» quelques-uns ne sont pas exempts d'ambition: tel Armand du Plessis-
Richelieu qui cherche à sortir de son évêché, «le plus vilain... de France,» à son dire, «et le plus
désagréable5.» La soif du pouvoir qui remplit déjà son âme, forme un singulier contraste avec la
suave humilité et l'esprit surnaturel de l'Evêque de Genève.
Celui-ci n'a pas à chercher les honneurs ou les faveurs royales; son mérite et sa sainteté les
attirent sans qu'il le veuille. C'est sur le désir formel de Marie de Médicis qu'il se présente deux
fois devant elle; Louis XIII et sa mère témoignent hautement leur satisfaction de le voir suivre la
jeune princesse de Piémont; les cardinaux de la Rochefoucault et de Retz, l'Archevêque de Sens
travaillent à le fixer en France et à lui faire accepter la coadjutorerie de l'évêché de Paris, projet
accueilli avec plaisir par le Roi6. En somme, il est «fort caressé7;» mais il avoue ingénuement n'en
être «point plus glorieux pour cela8.» Son âme ne se laisse pas éblouir par l'éclat mondain, et l'on
sent en elle, au contraire, une certaine mélancolie en face de «cette assemblee de [VI] divers
pretendans, car la cour est cela,» dit-il, «et n'est que cela... Amas de guespes... acharnees sur un
cors mort9,» ajoute-t-il énergiquement au triste spectacle de l'avidité insatiable des biens de la terre.
Le passage de Christine à travers le royaume fut une série de fêtes et de fatigues. Partout,
à Bourges, à Moulins, à Lyon, à Grenoble, on faisait «les complimens a Madame10,» ce qui
1 On compte aussi bon nombre de fragments inédits, et les pièces intéressantes données en Appendice sont, à
l'exception d'une seule, imprimées pour la première fois.
2 Page 116.
3 Cf. Lettre MDXLVIII.
4 Page 38.
5 Cité par J. Boulenger dans Le Grand siècle, chap. II (collection de l'Hist. de France dirigée par F. Funck Brentano).
6 Voir pp. 37-40.
7 Page 22.
8 Page 20.
9 Pages 20, 22.
10 Page 33.
21/341

3.2 Page 22

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consumait presque le temps des haltes, relativement courtes, car il fallait atteindre l'Italie avant la
mauvaise saison. Aussi, on s'imagine aisément cet «embaras incroyable11,» on croit entendre les
«tintamarres de cette presse12» dont nous parle François de Sales, et qui s'augmentent pour lui,
obligé qu'il est de partir «soudain comme Madame monte en carosse,» parce qu'il est «de la carosse
qui va immediatement devant elle13.» Comment donc trouva-t-il le loisir d'écrire tant de lettres
conservées en trop petit nombre, de visiter les couvents dans les villes que traversait le cortège
princier, d'y prêcher, de conférer avec les âmes pieuses, comme cette ancienne sous-gouvernante
des Enfants de France, Mlle Humbert, qui fut assez heureuse pour l'entretenir chaque jour pendant
le voyage14? La parfaite tranquillité d'esprit du saint Prélat, sa totale possession de lui-même et
l'ordre qui en découlait dans la succession de ses actes, nous donnent la réponse à cette question.
On arrive à Chambéry, et l'Evêque de Genève va quitter la cour pour rentrer dans son cher
Annecy. Mais la Providence a laissé venir sur lui la redoutable épreuve des honneurs; commencée
avec l'ambassade de Maurice de Savoie, continuée par les faveurs des princes, la familiarité des
grands, l'estime et la vénération universelles, elle va se poursuivre encore. La fille de Henri IV,
héritière du coup d'œil clairvoyant de son père sur les hommes, choisit François de Sales pour son
grand Aumônier; [VII] bientôt, les princes de Savoie, de concert avec elle, feront nommer Jean-
François coadjuteur de son frère avec future succession; Charles-Emmanuel montrera l'estime qu'il
fait du saint Evêque par sa volonté expresse de l'attacher à la suite de son fils le Cardinal, tandis
que les plus hauts dignitaires de l'Eglise de France multiplieront leurs efforts pour le faire entrer
dans leurs rangs.
Nous sommes loin du temps où l'ombrageux duc de Savoie affligeait par ses soupçons le
plus fidèle de ses serviteurs! Si les temps ont changé, le Saint reste le même. Tel nous l'avons vu
en butte aux sourdes persécutions, tel nous le retrouvons aujourd'hui dans ce que les hommes
appellent la prospérité. On le dirait impassible, et l'on est frappé du calme que respirent les lettres
écrites en cours de route, celles encore où il traite de la coadjutorerie ou des offres qui lui sont
faites personnellement. Les choses extérieures n'ont aucune prise sur cette âme qui domine toutes
les situations, et reste libre toujours de s'employer «au service de l'honneur de Nostre Seigneur15
son unique ambition. Tous ceux qui approchent l'Evêque de Genève trouvent en lui l'homme de
Dieu. Recueillons les échos de sa voix au sein des tumultes de la cour: au seigneur de Bonneuil, il
parle des heureuses et saintes dispositions de sa fille, novice à Port-Royal16; il entretient Robert
d'Andilly de l'abandon à la volonté divine17; ne va-t-il pas jusqu'à faire naître dans l'Evêque de
Luçon, maintenant favori de la fortune après en avoir connu les trahisons, des velléités de vie
retirée et toute sainte18?
Quant à lui, après ces longs mois de commerce avec les courtisans, il dit avoir «appris... a
estre plus simple et moins mondain19,» à abhorrer «de plus en plus» le monde, «et son esprit, et
ses maximes, et toutes ses niaiseries20.» C'est avec un soupir de soulagement [VIII] qu'il se
retrouve en son «nid21» et, sans transition, il reprend sa vie de Pasteur actif et zélé.
«Ce sont des torrens que les affaires de ce diocese,» disait-il autrefois22. Les torrents ont
grossi, ils débordent. Non seulement le séjour du chanoine Jean-François de Sales à Turin prive
l'Evêque de son concours intelligent et dévoué; mais son élection à la coadjutorerie réclame lettres
11 Page 32.
12 Page 29.
13 Page 44.
14 Voir note (749), p. 229.
15 Page 49.
16 Voir p. 23.
17 Voir pp. 26, 28.
18 Voir p. 38.
19 Lettre MDCVI, p. 131.
20 Lettre MDLXIII, p. 50.
21 Page 46.
22 Lettre CCCXXVIII, à la baronne de Chantal, tome XIII, p. 139.
22/341

3.3 Page 23

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et démarches nombreuses, en même temps qu'il faut chercher des Aumôniers pour Madame. Il
paraît que ce n'est pas chose facile, et le Saint ne sait «oujetter» sa «veüe» pour rencontrer «des
gens de bonne sorte23,» tels que les veut la princesse.
La bonne volonté de Victor-Amédée pour la réforme des Monastères et de la discipline
ecclésiastique s'affirmait de plus en plus; le moment était propice pour l'utiliser. François a déjà
tant travaillé à cette œuvre! il la continuera sans découragement comme sans impatience. Les
obstacles ne manquent pas. Les anciens possesseurs de Contamine, qui, pour la plupart, n'ont de
moines que le nom, luttent avec autant de persévérance que d'adresse contre les projets du Saint et
les ordonnances de Rome et de Turin. A Sixt, les désirs de ferveur se sont attiédis pendant
l'éloignement du Prélat; à son retour, sa tâche est de les ranimer, puis, bientôt après, d'apaiser les
différends entre les Chanoines et leur récalcitrant Abbé. Celui-ci, à son tour, cède enfin à l'empire
de l'Apôtre qui, pour sauver cette âme, ne craint pas d'entreprendre deux fois, au cœur même de
l'hiver, un difficile voyage24.
Tout au contraire, c'était la précipitation et l'ardeur prématurée qu'il avait à modérer à
l'abbaye de Sainte-Catherine, chez les Cisterciennes désireuses de la réforme. Depuis sept ans,
l'Evêque avait eu le rare talent de contenir ces femmes généreuses pour qui voir le bien [IX] et
l'embrasser semblait devoir être une même chose. Après une si longue attente, la patience leur
échappe; celle du Saint n'en est pas ébranlée. Peut-être serait-ce le moment de se «courroucer»
cette fois, mais il n'est pas «en humeur de le faire25.» Avec la même sagesse et douceur, il répond
aux anxiétés des autres moniales qui redoutent la clôture. Sa lettre à l'une d'elles26 montre quelle
prudence le guidait dans cette œuvre délicate de la réforme, le respect qu'il portait aux âmes, et
comment il entendait le vrai service de Dieu qui doit naître de la volonté et non de la contrainte.
C'est encore à la Sainte-Maison de Thonon, à Rumilly, que les difficultés se multiplient
sans fin. Des deux côtés, il faut faire marcher ensemble plusieurs corps qui se heurtent, se jalousent
quelque peu; et d'ailleurs, le défaut de ressources suffisantes complique la situation et attise les
rivalités. C'eût été à lasser tout autre que François de Sales; lui, se contente de travailler sans
relâche à remédier au mal, il écrit lettres sur lettres pour exposer l'état des choses et indiquer les
moyens à prendre. Si l'établissement de Thonon ne croula pas entièrement, et malgré tout vécut et
donna des fruits, on le doit à l'indomptable et patiente activité du Saint. Qui sait même si la
réalisation de son désir d'introduire les Oratoriens27 n'aurait pas conduit la Sainte-Maison à
remplir, plus pleinement et parmi moins d'orages, le but de son institution?
A Rumilly, l'Evêque de Genève voulait aussi appeler les fils de M. de Bérulle; ils y vinrent
plus tard, mais déjà les mesures prises avaient rétabli l'ordre dans cette église si longtemps
troublée28.
Le Réformateur ne doit pas faire oublier l'Administrateur dont l'œil embrasse et pénètre
tous les détails dans son vaste diocèse. Il tient régulièrement les synodes, organise l'Ermitage du
Mont-Voiron, écoute toutes les plaintes, résout tous les doutes, réprime les abus. [X] Signalons les
deux lettres remarquables à Claude de Quoex au sujet de «messieurs les Grassi29.» Peut-on allier
plus de fermeté avec autant de calme, de retenue, de noble désintéressement? Si François de Sales
n'a jamais réclamé la déférence des autres à ses vues ou volontés, s'il a souvent fait bon marché de
ses droits personnels, jamais l'Evêque de Genève n'abdiqua les siens ni ne toléra l'injustice. Il veut
«estre le maistre,» et ne se démettre que lorsqu'«il en sera tems30.» Cependant tout ce qu'il souhaite,
c'est de voir «l'equité... victorieuse et l'authorité» épiscopale «maintenue31;» cela sauf, il accorde
23 Page 223.
24 Voir notes (1171), p. 372, et (1256), p. 396.
25 Page 412.
26 Lettre MDCXX.
27 Voir note (737), p. 226, et lettres MDCLXXXI, MDCCXXXVI.
28 Voir Lettres MDCCIX, MDCCXIV, et notes (1140), p. 358, (1163), p. 370, (1165), p. 371.
29 Lettres MDCI, MDCXLIII.
30 Pages 119, 120.
31 Page 190.
23/341

3.4 Page 24

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sans arrière-pensée ce qui peut agréer au prochain, et même il s'en réjouit. Vertu pondérée et
parfaite qui est la gloire spéciale de notre saint Docteur.
Malgré les affaires qui accablent l'Evêque, le Fondateur et le Directeur trouve encore des
loisirs à consacrer à son Institut et aux âmes qui, de tous les points de la France et de la Savoie,
recourent à lui32.
Aux six monastères de la Visitation déjà établis et dont nous avons étudié les origines dans
les derniers volumes, s'ajoutent ceux de Montferrand, Nevers, Orléans. Des physionomies
connues, parmi les premières Mères, se dessinent davantage. C'est Claude-Agnès de la Roche,
«capitainesse de la petite troupe33» qui s'éloigne d'Annecy en juin 1620; Péronne-Marie de Chastel,
destinataire de nombreuses lettres où l'histoire de sa Maison de Grenoble et celle de son âme sont
vivement retracées; ce sont les Mères Favre, de Blonay, de Bréchard, aux prises avec plus d'une
difficulté et qui cherchent en leur Père la lumière et le réconfort. De nouvelles figures [XI]
surgissent, non moins attrayantes: Anne-Marie Rosset, Paule-Jéronyme de Monthoux, la Sœur de
Chastellux, et d'autres encore, sans oublier cette Hélène-Angélique Lhuillier, conduite au cloître
par des sentiers si peu battus qui, pour être éclaircis, avaient besoin du jugement lumineux, du tact
délicat et de la ferme bonté du grand François de Sales. La lettre où il discute et règle la question
de l'avenir de cette âme est un véritable chef-d'œuvre34.
La Mère de Chantal, pendant cette période, n'abandonne pas le Monastère de Paris. Sa main
seule est assez forte et expérimentée pour gouverner la petite barque au milieu des flots tumultueux
de la grande ville; son cœur et son esprit sont aptes éminemment à former les sujets d'élite qui
viennent nombreux, et à faire ainsi de cette Maison, à laquelle sa situation dans la capitale donne
une importance particulière, une pépinière de fondations nouvelles. De là, elle agit de concert avec
le saint Evêque; les messages sont fréquents entre eux, rien ne se décide sans leur avis mutuel. Le
Fondateur révise avec soin les Constitutions, les Directoires, les Formulaires. L'expérience de dix
années a fixé bien des questions restées flottantes, et, de plus, François de Sales ne dédaigne pas
de condescendre, quand il le peut, aux sentiments d'autrui. En lui, rien de personnel, rien d'étroit,
rien d'exclusif. Si l'opinion du prochain ne va pas à renverser ce que son esprit net et droit et ses
lumières surnaturelles lui font voir être le bien, il l'adopte simplement: «J'ay accommodé les
Constitutions le plus que j'ay sceu, au gré du tres bon P. Binet,» dit-il à la Sainte35. Toutefois,
lorsqu'un conseil semble inspiré par la prudence humaine, il y a comme un soubresaut dans cette
âme toujours si paisible et indulgente. Eloigner les infirmes des cloîtres de la Visitation de peur
d'en faire un hôpital? Ah! cela, il n'y consentira jamais: «Helas!» elles « n'ont point d'autre
retraite36.» Et il leur [XII] ouvre largement les portes à Grenoble, à Nevers, partout, pourvu que
leur esprit soit sain et leur volonté bonne.
Compatissant pour les disgraciées de la nature et les tempéraments maladifs, François de
Sales ne l'était pas moins pour les âmes trahies par leur propre faiblesse. Avec elles, il pousse la
patience et la miséricorde jusqu'à leurs dernières limites. «On fait beaucoup de choses pour «sauver
une ame,» dit-il37; et souvent, à ce prix, de «loups par nature,» il fait des «brebis par grace38
Même pour la fameuse Mme du Tertre, devenue la Sœur Marie-Aimée de Morville39, la
transformation, toute tardive qu'elle fut, ne doit-elle pas être attribuée à la douceur et à la bonté de
ce parfait imitateur du Sauveur des hommes?
32 Faisons remarquer, en passant, avec quelle confiance le Carmel de France s'adresse au saint Evêque de Genève pour
avoir son avis sur la délicate question du gouvernement des Maisons de l'Ordre. (Voir Lettres MDCCVII,
MDCCXXX, MDCCXXXIX, MDCCXL.)
33 Lettre de Ste J.-F. de Chantal, 30 juin 1620 (vol. I, p. 437).
34 Lettre MDCLV.
35 Lettre MCCXXXVII, p. 401.
36 Voir note (1284), p. 404.
37 Lettre MDCLXXII, p. 268.
38 Page 265.
39 Voir note (339), p. 87.
24/341

3.5 Page 25

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L'Evêque de Genève nous est déjà bien connu comme maître des âmes, Directeur des
consciences; continuer à le considérer sous cet aspect sera un des charmes offerts parle présent
volume. Lui-même nous révelera sa méthode toute «suave,» qui consiste à suivre l'action divine
sans jamais la prévenir, sans épouvanter les frêles courages par des sacrifices demandés
prématurément. «La serpe» pour trancher les «inutiles rejettons,» il «la laisse ordinairement es
mains de Dieu40.» Il est vrai qu'au besoin il aide la grâce par une impulsion vigoureuse; et lorsque
l'âme ne sait pas attirer en elle la lumière d'en-haut, le sage Directeur la lui donne avec une loyauté
entière. Les lettres à la Sœur Marie-Hélène de Gérard et à Mme des Gouffiers41 le prouvent
surabondamment.
Ennemi du trouble, des recherches inquiètes de la perfection, il ne l'est pas moins de
l'inertie, et sa plume trace ces mots, réfutation anticipée du quiétisme: «Tandis que nous sommes
au monde, nous ne pouvons aymer qu'en bien faysant, parce que nostre amour y doit estre actif...
[XIII] Il n'est rien de si pressant a la prattique du bien que l'amour celeste42
C'est surtout dans la conduite de la trop célèbre Mère Angélique Arnauld qu'il sera
intéressant d'étudier saint François de Sales. Cette nature supérieure et exceptionnelle avait enfin
trouvé son maître. Avide de direction, comprenant la nécessité d'être guidée, il lui fallait aussi
sentir que son guide la dépassait et la dominait par sa valeur personnelle, et non pas seulement par
le caractère surnaturel de son sacerdoce. Pour donner toute sa confiance, elle réclamait en même
temps un Père qui compatît à ses faiblesses et ne s'étonnât pas de ses chutes, car cette Abbesse,
«plus que fille a commander43,» avait des imperfections très féminines. Reconnaissons-le
toutefois, ce sont ses propres aveux qui nous apprennent ses «affectarions en discours, en lettres44
ses «entortillemens dans des pensees de vanité,» ses «menues envies,» et jusqu'à sa peine «d'estre
appellee fille,» par la Mère de Chantal45. Or, François de Sales ne répondait-il pas un jour à une
de ses filles spirituelles qui lui avait décrit avec simplicité une tentation de jalousie: «Vostre main,
escrivant vostre lettre, faysoit un trait plus vaillant que ne fit jamais celle d'Alexandre46
Angélique Arnauld, par ailleurs, avait de si hautes qualités, et, à cette époque, souhaitait si
sincèrement le bien, que l'Evêque de Genève l'honora d'une spéciale affection paternelle. Il trouvait
dans ses dispositions présentes, et surtout dans les grâces par lesquelles Dieu l'y avait amenée, des
raisons de radieuses espérances; d'autre part, il voyait les contrastes de cette nature, en comprenait
les richesses et les dangers, et son œuvre fut d'essayer d'y mettre l'équilibre, et de la réduire au
point de la vraie vertu, éloignée de tous les extrêmes.
Il est remarquable de voir ce prudent et éclairé [XIV] Directeur combattre dans la Mère
Arnauld tout ce qui, plus tard, causera sa ruine. A celle qui se fera une idée si étrange de Dieu, et
s'engagera dans la route d'une crainte effroyable et servile, il souhaite l'«avancement» dans l'amour
divin, «pur et courageux» sans doute, tel qu'elle le rêvait dès lors, «mais humble et doux47;» et
dans un élan de son cœur, véritable intuition de l'avenir: «O Dieu eternel,» s'écrie-t-il48, «benisses
l'ame de cette fille..., et respandes sur elle vostre grace en affluence, affin qu'elle vous serve en
l'esprit de la dilection des espouses eternellement.» Active, impétueuse, incapable de supporter
un retard, voulant l'exécution d'un désir aussitôt qu'il est conçu, Angélique Arnauld arrivera à
n'attendre jamais l'avis qui pourrait réformer le sien. Et François de Sales lui prêche sans cesse la
modération; il faut faire toutes choses «tout bellement49,» même les moindres actions extérieures,
et surtout apaiser l'activité et l'impatience intérieures dans la poursuite de la sainteté: «Les
palmiers, princes des arbres, ne portent leurs dattes que cent ans apres qu'on les a plantés, ce dit
40 Page 89.
41 Lettres MDXCVI, MDCLXIII.
42 Lettre MDCLXVI, p. 250.
43 Lettre au P. Binet, S. J., 11 novembre 1621.
44 Page 52.
45 Pages 124, 125, 126.
46 Lettre CMXXXVIII, à la Sœur Favre, tome XVI, p. 118.
47 Page 23.
48 Lettre MDXLVI, p. 8.
49 Page 125.
25/341

3.6 Page 26

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on. Une mediocre vie se peut acquerir en un an; mays la perfection..., elle ne peut venir qu'en
plusieurs annees50On verra un jour l'Abbesse frémissante d'effroi, chercher dans les
macérations, les jeûnes, les veilles sans fin un apaisement à ses angoisses, et vouloir appuyer sa
confiance sur ces moyens. François de Sales n'entend pas qu'elle pratique des austérités au-delà de
celles que prescrit sa Règle51; l'excès, quelque part qu'il le rencontre, choque son ferme bon sens.
Le fondement de l'espérance pour lui, est en la fidélité et bonté de Dieu, et le «soin principal»
d'Angélique doit être de «tenir son esprit dans la modestie, douceur et tranquillité;» qu'elle soit,
non un géant en mortification, mais «un enfant en humilité,» [XV] et ainsi «elle ne tombera pas...
d'en haut52.» Etre une enfant, elle, la grande Abbesse!... Le Saint répétait la parole du Christ!... à
ce prix seul on entre au Royaume des cieux.
En étudiant l'œuvre de l'Evêque de Genève dans les âmes, la direction qu'il leur imprime,
les principes qu'il leur inculque, déjà nous jetons un regard sur son propre intérieur, et nous
apprenons à le connaître. Mais il est bon de le pénétrer plus intimement et de ne plus se contenter
du reflet que projette sa lumière. Après avoir lu ces nouvelles pages, on sentira, nous semble-
t-il, le Serviteur de Dieu enveloppé d'une atmosphère de paix, de dégagement de ce monde et des
pâles honneurs qu'il peut offrir, d'indifférence et de béatitude céleste. Il ne veut plus rien, «ains
laisse vouloir a Dieu;» il demeure «exposé» à tous les événements, et lorsqu'ils «sont arrivés et
receuz,» son «attente se convertit en consentement ou acquiescement; mais avant la venue d'iceux,
en verité,» son «ame est en une simple attente, indifferente a tout ce qu'il plaira a la volonté divine
d'ordonner.» Pour dire ces choses, il fallait emprunter son propre langage, tel que nous le trouvons
au XVe chapitre de l'admirable Livre neuvième du Traitté de l'Amour de Dieu.
Que les rois et les princes le comblent des témoignages de leur estime, et qu'avec leur
agrément on lui offre une prélature en vue, où les revenus et les honneurs abondent: «Si Dieu ne
le veut de sa volonté d'approbation, je ne le veux jamais vouloir, et ni mettray du tout rien du mien
que mon consentement a la Providence celeste, quand je connoistray que ce sera son service53
Au contraire, a-t-il à subir la terrible bourrasque qui suivit le mariage de son ami Guillaume de
Foras, et à supporter les calomnies les plus noires54? il rend son devoir à la vérité en exposant les
faits ainsi qu'ils se sont passés, [XVI] puis il remet «tous ces mauvais vens a la providence de
Dieu: qu'ilz soufflent ou qu'ilz s'accoisent selon qu'il luy plaira; la tempeste et la bonace me sont
indifferentes,» assure-t-il55. Depuis son retour en France jusqu'au temps où s'arrête ce volume
et cette épreuve ne finira qu'en novembre 1622 il vivra dans une perpétuelle incertitude au
sujet de son lendemain. Il lui faut se tenir prêt à partir d'une heure à l'autre, tantôt pour Rome,
tantôt pour Paris; ordres, contre-ordres se succèdent sans cesse de la part du prince. On ne
surprendra pas dans les lettres du saint Evêque une parole trahissant le déplaisir, l'ennui qu'il en
peut ressentir; on y lira seulement des mots comme celui-ci: «Je ne suis plus de ce païs, ains du
monde, et fay estat de n'avoir nulle habitation que dans le sein de l'Eglise56.» Même lorsqu'il parle
d'un revoir avec la Mère de Chantal, l'abandon la sainte indifférence domine tout autre sentiment:
«Je commence,» lui écrit-il57, «a ne plus arrester ma pensee qu'a la reunion de l'autre vie, en
laquelle, comme nous sommes inseparables d'esprit, nous le serons encor de veue.»
Ce serait néanmoins une erreur de croire que la sublime perfection à laquelle est arrivé
François de Sales lui ôte cette grâce aimable et fine qui nous a charmés autrefois. Peut-être le
verrons-nous moins souvent sourire, surchargé qu'il est d'affaires écrasantes, écrivant toujours
«sans loysir ni haleyne58.» Cependant, le voici en contemplation devant le berceau de son filleul,
50 Page 75.
51 Page 52.
52 Pages 195, 196.
53 Page 40.
54 Voir note (154), p. 32.
55 Lettre MDLXXVIII, p. 71.
56 Lettre MDCXCIV, p. 311.
57 Ibid.
58 Page 144.
26/341

3.7 Page 27

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François de Herse, «si gentil, si doux, si beau et quasi des-ja si devot,» et qui, avec une «douce
petite mine» et «un respect enfantin,» avait reçu «entre» ses «mains...la filiation de Nostre
Seigneur59.» Ailleurs, il salue aimablement sa tres chere petite fille madamoyselle [XVII] Anne»
de Villesavin, «qui, je m'asseure,» dit-il, «est encor plus devote que belle60Ici, il nous parle
des «tentations parfumees61» de ces bonnes Religieuses qui veulent prévenir par une demi-réforme
le coup qu'elles redoutent; là, s'échappe une douce malice sur son frère Jean-François qui apprend
à la cour «la mortification de la propre volonté, excellemment, et encor plus celle de l'impatience,
activité et soudaineté, car il faut... attendre les heures du service, beaucoup plus, certes, que quand
il treuvoit quelqu'un à l'autel de la Visitation62
Ces traits joyeux ne sont pas rares; plus fréquentes sont les pages où la plume empressée
de cet homme de Dieu qui n'a pas le temps d'écrire, sème les fraîches images. Il y a tel éloge des
douces vertus de famille qui ne tient que quelques lignes63; des peintures ravissantes que le temps
de Noël fait éclore64; des «avettes» en maint endroit; un «buisson» à Nevers qui donne bien du
tracas, mais «il n'est pas besoin de se mettre en souci... Dieu sçait bien quelz oyseaux y doivent
chanter ses louanges65.» Combien nombreux et touchants surtout les cris du cœur du saint Evêque!
De tous, le plus pénétrant lui est arraché par l'apostasie d'un prêtre qu'il avait aimé comme un fils
et qu'il pleure avec la douleur d'un père et d'un pasteur66.
Disons encore qu'en poursuivant dans la lecture de ces Lettres la connaissance plus intime
de François de Sales, on trouve, groupées autour de lui, bien des figures sympathiques auxquelles
on s'arrête volontiers. On y peut suivre aussi avec intérêt les événements politiques de la France et
de la Savoie; nombre de personnages historiques, et non des moindres, s'y vont [XVIII] rencontrer.
C'est la physionomie très vivante du XVIIe siècle à son début qui passe sous nos yeux.
Ce volume aura donc de l'attrait pour plus d'une classe de lecteurs. Mais, qu'ils y cherchent
l'homme de génie, le noble caractère, l'écrivain, le théologien ou l'ascète, qu'ils s'attachent même
à l'étude de l'histoire, à chaque page, pour leur bonheur, ils entendront le Saint et une parole de vie
tombera dans leur âme.
LES EDITEURS.
Annecy, en la Fête de saint François de Sales,
29 janvier 1914. [XIX]
59 Page 273.
60 Page 179.
61 Page 247.
62 Page 101.
63 Page 18.
64 Voir Lettre MDLXXXII.
65 Page 308.
66 Denis de Granier (voir Lettres MDCCXXVII. MDCCXXIX).
27/341

3.8 Page 28

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Avis au Lecteur
Des Lettres publiées dans ce volume, un grand nombre ont été revues sur les originaux. La
provenance indiquée à la fin de chaque pièce, est celle qui nous était connue au moment où elle
nous a été communiquée. Lorsqu'un Autographe provient d'une Communauté française exilée ou
dispersée, nous donnons l'ancienne adresse de celle-ci.
Les Lettres qui ne sont suivies d'aucune indication sont celles dont, à défaut d'Autographes
ou de copies authentiques, on a dû emprunter le texte à des publications antérieures. Voir à la fin
de ce volume la Table de correspondance, et l'Avant-Propos du tome XI, pp. xxv-xxvij.
Les Editeurs sont seuls responsables de l'adresse et de la date qui précédent chaque pièce;
l'une et l'autre sont répétées à la fin quand elles figurent sur l'original, ou qu'elles sont
authentiques, quoique fournies par les textes imprimés. Les points remplaçant quelque
ènumèration de la date indiquent que cette partie de la date est donnée, mais fautivement, par
l'édition à laquelle notre texte est emprunté.
Quand la date attribuée à une lettre n'est pas absolument sûre, elle est insérée entre [ ].
Ces signes sont également employés pour les mots qu'il a fallu suppléer dans le texte.
Des points placés au commencement ou à la fin des lettres indiquent un texte incomplet.
Quand les Autographes ont subi quelque mutilation, nous l'indiquons chaque fois.
A la suite du Glossaire se trouve un Index, dans lequel il a été jugé à propos de fondre les
noms des destinataires avec les titres des principales notes historiques et biographiques. Toutes
les notes concernant le clergé de l'ancien diocèse de Genève sont tirées des Registres de l'époque;
elles sont désignées par les deux initiales R. E.
Sauf indication contraire, tous les renseignements relatifs à la noblesse savoisienne sont
empruntés au monumental ouvrage du Comte Amèdée de Foras, si dignement continué par le
Comte de Mareschal de Luciane: Armorial et Nobiliaire de l'ancien Duché de Savoie.
28/341

3.9 Page 29

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Lettres de saint François de Sales. Année 1619
(Suite)
MDXLI. A Madame de Lamoignon67. Compassion pour une âme.
Souhaits pieux.
Paris, 7 août 1619.
Voyla, ma tres chere Fille, pour la bonne madame de Vaugrenant68, a laquelle j'ay beaucoup
de compassion, [1] la considerant ainsy environnee d'affaires, elle qui, a mon advis, n'est pas
accoustumee a cela. Mays Dieu l'assistera et la tiendra de sa main, ainsy que j'en supplie sa
souveraine Bonté, que je ne cesseray jamais non plus de vous souhaiter propice et secourable, ma
tres chere Fille, demeurant a jamais
Vostre tres humble et tres affectionné serviteur,
FRANÇS, E. de.Geneve.
7 aoust 1619, a Paris.
A Madamoyselle
Madamoyselle de Lamoignon.
67 Sur le tombeau de marbre blanc élevé à Paris, dans l'église Saint-Leu, à la mémoire de Marie, fille de Guillaume
des Landes et de Bonne de Vitry, épouse de Chrétien de Lamoignon, une inscription nous donne les deux dates
extrêmes de sa vie: 28 septembre 1576-31 décembre 1651. Cette longue existence fut remplie des plus belles vertus;
et si le nom du président de Lamoignon et celui de son fils Guillaume restent le symbole de l'honneur, de l'intégrité,
de la science et de l'éloquence judiciaires, ceux de la présidente et de sa fille Madeleine seront à jamais mêlés à
l'histoire de la charité chrétienne au XVIIe siècle. Saint Vincent de Paul, priant près du lit de mort de Mme de
Lamoignon, honora de ses larmes celle qu'on nommait «la mère des pauvres.» Le président et la présidente furent les
amis fidèles de l'Evêque de Genève et des deux Monastères de la Visitation de Paris, surtout du second, qu'ils
comblèrent de bienfaits après lui avoir donné l'une de leurs filles. (Voir Moreri, 1740, tome V; Hilarion de Coste, Vies
des Dames illustres, Paris, 1630; Bougaud, Hist. de St Vincent de Paul, 1889, tome I, livre III, chap. I, etc.)
68 Anne Le Beau, fille de René Le Beau, seigneur de Sanzelles, et de Catherine de Montholon, était demeurée veuve
à dix-huit ans, de Jacquês Baillet, seigneur de Vaulgrenant. Elle allait bientôt devenir Mme de Foras (voir ci-après,
note (154), p. 32).
29/341

3.10 Page 30

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MDXLII. Madame Angélique Arnauld, abbesse de Port-Royal a
Maubuisson69. Cinq avis au sujet d'une confession générale.
Par quel motif la faire. Se laisser à la Providence.
Assurance d'union éternelle
Paris, 8 août 1619.
Dieu soit beni, ma tres chere Fille, de la tressainte bonté qu'il exerce envers vostre cœur,
que le mien, en verité, cherit, ce me semble, tout incomparablement et vrayement comme soy
mesme.
Au premier point, je dis que vous fassies donq cette confession; au second, que vous vous
y preparies par maniere d'une amoureuse humilité; au troysiesme, si vous voules faire quelques
marques sur le papier, que je l'appreuverois, mais sans anxieté; au quatriesme, que cela se face en
un jour, c'est a dire en troys ou quatre heures d'un jour, car cela suffit; au cinquiesme, que vous
changees de motif, car je vous connois, a mon advis, fort entierement. Faites le donq pour cette
bienaymee humilité, et pour animer d'une forte resolution l'offrande et totale remise de vostre esprit
es mains du Pere eternel. Il ne faut point d'autre preparation qu'une humble, mays [2] noble et
courageuse confirmation des mouvemens, resolutions et propositions que nos exercices ont excité
en nostre esprit.
Je ne suis ni gueri, ni malade70; mais je pense que bien tost je seray tout a fait le premier.
O mon Dieu, ma tres chere Fille, il faut laisser nostre vie et tout ce que nous sommes a la pure
disposition de la divine Providence; car en somme, nous ne sommes plus a nous mesmes, ains a
Celuy qui, pour nous rendre siens, a voulu d'une façon si amoureuse estre tout a fait nostre.
J'attens response de Monseigneur le [Prince de Piémont], et j'espere que ce sera pour mon
retour71, auquel mon ame me presse grandement a cause de mon devoir; et ne puis m'imaginer que
ni retour, ni chose quelcomque me puisse jamais separer de vous: non, ni mesme la mort, puisque
nostre union est en Celuy qui ne meurt plus72. Mais tous-jours je vous iray voir, ou avec N.73 ou
seul; car il faut que je le face.
Et tandis, Dieu soit a jamais au milieu de vostre cœur, et je suis invariablement
Vostre tres humble frere et serviteur,
FRANÇS, E. de Geneve.
Ce 8 aoust 1619. [3]
69 Voir le tome précédent, note (1199), p. 368.
70 Cf. le tome précédent, Lettre MDXXXVIII, p. 414.
71 L'édition de 1626 et les suivantes donnent: «J'attens response de Monsieur le pere de P.» C'est évidemment une
mauvaise interprétation d'une abréviation de l'Autographe: «J'attens response de M. le P. de P.» Le prince de Piémont,
que l'Evêque de Genève devait suivre, ne s'éloigna de la cour de France qu'au milieu de septembre. (Voir ci-après, p.
24, note.)
72 Rom., VI, 9.
73 Très probablement M. de Boisy, frère du Saint, qui l'accompagna en effet dans la visite à Maubuisson à la fin d'août.
Une lettre autographe de Jean-François de Sales, qu'on trouvera à l'Appendice II, fixe une question qui nous semblait
douteuse (voir le tome précèdent, notes (1308), (1309), p. 409). Cette lettre, adressée à M. Flocard, est datée de
Maubuisson, le 30 août. Nous y lisons: «Monseigneur... ne vous escrit pas..., estant occupé aupres de cette bonne
dame qui l'a tout a fait guery... Nous serons lundy a Paris,... Monsieur l'Evesque estant arresté pour sacrer dimanche
le grand autel de ceans.» Donc, un séjour assez prolongé du Bienheureux à la célèbre abbaye eut lieu entre les derniers
jours d'août et les premiers du mois suivant; c'est alors qu'il y fut malade, et la lettre à la Mère de Chantal placée vers
le 22 juillet au tome précédent, p. 409, doit être datée du 2 ou 3 septembre. Comme nous l'indiquions à la note (71),
la consécration de l'autel ne se fit pas le 25 août, mais le dimanche après le 30, c'est-à-dire le 1er septembre, et le retour
à Paris s'effectua le lundi, 2.
30/341

4 Pages 31-40

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4.1 Page 31

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MDXLIII. A Madame Le Nain de Crevant74. Témoignage
d'affection et souhaits de perfection spirituelle.
Paris, 20 août 1619.
Je me blasmerois moy mesme, ma tres chere Fille, si je laissois partir cette chere seur75
sans luy donner, en ces trois lignes, ce foible mais asseuré tesmoignage de la souvenance que j'ay
de vous et de vostre cœur que je cheris parfaitement, avec mille desirs qu'il se perfectionne de plus
en plus en douceur et humilité, affin quil vive tout selon le cœur de Nostre Seigneur, auquel je le
recommande incessamment, et tout ce qui vous est plus aymable, demeurant a jamais et
invariablement,
Ma tres chere Fille,
Vostre tres humble serviteur,
FRANÇS E. de Geneve.
XX aoust 1619.
A Madamoyselle
Madamoyselle de Crevant.
Revu sur l'Autographe appartenant à M. L. Chagot,
au château de Rastignac (Dordogne). [4]
74 Anne de Bragelongne était fille de Catherine Balarin de Raconis, et de Martin, seigneur de Charonne,
successivement conseiller au Parlement, prévôt des Marchands et conseiller d'Etat. Elle avait épousé Jean Le Nain,
seigneur de Beaumont, qualifié «sieur de Cravant» dans différents actes, et qui succéda à son père comme secrétaire
«du Roy, Mayson et couronne de France.» Il fut aussi conseiller et avocat en la cour du Parlement. (Bibl. Nat., Cabinet
des Titres, Dossiers bleus, vol. 479, fol. 9 et 13.) Deux des petits-fils d'Anne de Bragelongne se rendirent célèbres:
Sébastien, bien connu sous le nom de Le Nain de Tillemont, et Pierre, disciple fervent de l'abbé de Rancé, dont il
devint l'historien. Ce dernier fut élevé par sa grand'mere, «dame d'une rare piété et d'un mérite supérieur,» dit un auteur
(Dubois, Hist. de l'Abbé de Rancé, Paris, 1869, tome I, liv. IV, chap. II). «Elle avait été dirigée par saint François de
Sales, et elle ne négligea rien pour donner à son petit-fils une éducation vraiment chretienne, et lui transmettre quelque
chose de l'esprit du saint Evèque de Genève.» Mme Le Nain de Crevant mourut trois mois avant son mari, au
commencement de mars 1655, et fut inhumée aux Carmélites.
75 La sœur d'Anne de Bragelongne, Marie, était femme de Pierre de Verton, trésorier de France à Orléans.
31/341

4.2 Page 32

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MDXLIV. A la Mère de Chantal, a Paris. Recommandations à
une convalescente. Saint Bernard prêché par lui-même.
Une nièce de Mme Amelot, prétendante de la Visitation
Paris, 20 août 161976.
Dieu soit loué, ma tres chere Mere. Non, ne dites pas encor l'Office, mais si vous pouves
bien descendre pour la Messe, je le veux bien; et tenes vous assise le plus que vous pourres, et en
lieu ou ce grand vent qui tire dans le chœur ne vous frappe point77.
Je me prepare pour le sermon, avec beaucoup de desir, non toutefois sans defiance, de bien
rendre ce devoir a ce grand Saint, bien que je veuille que ce soit luy mesme qui face le sermon,
toutes les conceptions d'iceluy estant tirees de luy mesme.
Hier, madame la Presidente Amelot78 m'amena madamoyselle du Plessis, niece de M. de
Marillac, et me pria que j'intercedasse pour elle affin que l'on peust avoir resolution demain. Elle
m'asseura que les Seurs Carmelites l'aymoyent et cherissoyent grandement, et ne l'ont rejettee pour
autre occasion que pour son incommodité corporelle. Il me semble que ce soit une bonne fille; et
si, je metz en quelque consideration qu'elle est de bon lieu et bien apparentee. Elle a 200 livres
annuelles a perpetuité, c'est a dire qui demeureront a la Mayson, et ce qu'il faut pour l'entree. Elles
reviendront demain pour sçavoir la response, et, en cas qu'on la reçoive, quand on [5] la mettra au
premier essay79. Madame Amelot est si vertueuse que, comme je croy, elle parle sincerement des
qualités de la fille.
Bon jour, ma tres chere Mere, je suis incessamment vostre.
76 L'entrée de Mlle du Plessis à la Visitation marque pour la date de cette lettre la fin d'août 1619, et le sermon sur le
«grand Saint» détermine le quantième. C'est pour la fête de saint Bernard que l'Evêque de Genève prêcha à Paris; pour
celle de saint Augustin il se trouvait à Maubuisson (voir ci-dessus, note (73), p. 3).
77 On se rappelle que la Mère de Chantal avait été, comme ses Filles, éprouvée par la maladie. (Voir le tome précédent,
note (1305), p. 407.)
78 Jeanne-Catherine de Creil, dame Amelot, aura sa note biographique quand elle sera destinataire. Elle était belle-
fille de Marie de Saint-Germain (voir la note suivante).
79 La seigneurie du Plessis (commune de Tassé, Sarthe) appartenait à Robert de Saint-Germain, parent de Marie de
Saint-Germain, seconde femme de Michel de Marillac dont nous donnerons la note plus tard. Il avait épousé en 1583,
Françoise Chabot; leur fille Catherine fut admise en effet au Monastère de la Visitation de Paris, où elle reçut l'habit
le 13 janvier 1620 et fit profession le 8 mars de l'année suivante. Elle prit part à la fondation de Dol (1627) en qualité
d'Assistante, et suivit à Caen sa Communauté qui s'y transféra en 1631. Après la Mère Françoise-Marguerite Patin,
elle gouverna la Maison de la Charité fondée en 1644 par le bienheureux Eudes pour y retirer les filles repenties. Sœur
Catherine-Thérèse de Saint-Germain mourut en 1669. (D'après des documents conservés aux Archiv. Nat., Cabinet
des Titres, Pièces originales, vol. 2754, 2755, aux Archiv. de la Visitation d'Annecy, et Livre du Noviciat du Ier
Monastère de Paris.)
32/341

4.3 Page 33

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MDXLV. A une dame80. La courte durée des séparations faites
par la mort. Contemplation de Jésus et de Marie sur le
Calvaire. Une mère dépouillée de son plus précieux
vêtement.
Paris, 23 août 1619.
Ayant sceu vostre affliction, ma tres chere Fille, mon ame en a esté touchee de la mesure
de l'amour cordial que Dieu m'a donné pour vous; car je vous voy, ce me semble, grandement
assaillie de desplaysir, comme une mere qui est separee de son filz unique, et certes bien aymable.
Je ne doute pas pourtant que vous ne pensies bien et soyes tres asseuree que cette separation ne
soit pas de longue duree, puisque tous nous allons a grans pas ou ce filz se retreuve: entre les bras,
comme nous devons esperer, de la misericorde de Dieu. C'est pourquoy vous deves mitiger et
adoucir tant qu'il vous sera [6] possible, par la rayson, la douleur que la nature vous donne.
Mays je vous parle trop reservement, ma tres chere Fille. Il y a si long tems que vous aves
desiré de servir Dieu et que vous estes apprise a l'eschole de la croix, que non seulement vous
acceptes celle ci patiemment, mais, je m'asseure, doucement et amoureusement, en consideration
de Celuy qui porta la sienne et fut porté sur la sienne jusques a la mort, et de Celle qui n'ayant
qu'un filz, mais filz d'amour incomparable, le vit mourir sur la croix, avec des yeux pleins de
larmes et un cœur plein de douleur, mais de douleur douce et suave, en faveur de vostre salut et de
celuy de tout le monde.
En fin, ma tres chere Fille, vous voyla despouillee et desnuee du vestement le plus pretieux
que vous eussies. Benisses le nom de Dieu qui vous l'avoit donné, et l'a repris81, et sa divine
Majesté vous tiendra lieu d'enfant. Pour moy, j'ay des-ja prié Dieu pour ce defunt, et continueray
selon le grand devoir que j'ay a vostre ame, laquelle je prie la bonté eternelle de Nostre Seigneur
vouloir remplir de benedictions; et suis sans reserve tout vostre, ma tres chere Fille, et
Vostre serviteur plus humble,
FRANÇS, E. de Geneve.
Le 23 aoust 1619. [7]
MDXLVI. A Madame Angélique Arnauld, abbesse de Port-
Royal. Joyeux retour d'un petit voyage. Une amitié qui
commence. Dans quel esprit la Mère Arnauld doit servir Dieu
Paris, 3 septembre 1619.
Si faut il, ma tres chere Fille, que je vous die que nous sommes arrivés icy joyeusement. Et
comme se pouvoit il faire autrement, apres tant de caresses receues a Andilly82, et par M. vostre
pere en cette ville83? car, a mon advis, il m'a veu et entretenu de bon cœur, et croy qu'en fin j'aurois
80 Il n'est pas possible de désigner, ni même de proposer une destinataire.
81 Cf. Job, I, 21.
82 Au retour de Maubuisson (voir ci-dessus, note (73), p. 3), l'Evêque de Genève, avant de rentrer à Paris, se rendit à
Andilly (arrondissement de Pontoise), domaine qui était venu aux Arnauld par Catherine Marion, la femme d'Antoine,
et qui fut donné au fils aîné, Robert. La famille de celui-ci accueillit le Prélat avec vénération; il bénit et caressa les
enfants, et prononça même sur eux des paroles prophétiques que l'avenir devait réaliser.
83 Antoine Arnauld est destinataire le 22 septembre.
33/341

4.4 Page 34

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grand acces en son amitié, si son loysir et mon sejour me permettoyent de le voir souvent. Je vous
escriray sur ce sujet mes pensees avant que je parte84.
Ce pendant, ce billet vous porte une tres intime et tres chere salutation de la part de mon
ame, qui vous voit incessamment et ayme tout uniquement la vostre. O Dieu eternel, benisses l'ame
de cette fille qu'il vous a pleu lier a la mienne, et respandes sur elle vostre grace en affluence, affin
qu'elle vous serve en l'esprit de la dilection des espouses eternellement.
Je salue tendrement nos cheres Seurs Marie85 et [8] Marie Eugenie86, et leur souhaite mille
benedictions. Amen.
3 septembre 1619.
MDXLVII. A une dame de Paris87. Faire courtement les
exercices de piété, et avec un maintien digne de Dieu. La
pensée de l'éternité, souveraine consolation ici-bas.
Protestation d'invariable souvenir.
Paris, 4 septembre 1619.
Ma tres chere Fille,
L'Introduction a la Vie devote ayant esté faite pour des ames de vostre condition, je vous
supplie de la lire [9] et observer au plus pres que vous pourres; car elle vous fournira presque tous
les advis qui vous sont necessaires. Seulement j'adjouste en particulier, que vous deves apprendre
a faire vos exercices courtz, d'autant que vous n'aves pas tous-jours le loysir requis pour vous
dilater en iceux.
Le matin, demi petit quart d'heure suffira. Quand vous pourres ouÿr la sainte Messe, faites
le; quand vous ne pourres pas l'ouÿr, faites une demi heure de priere, unissant vostre esprit a la
tressainte Eglise en l'adoration de ce saint Sacrifice et du Redempteur de nos ames qui y est
84 Voir ci-après, note (96), p. 14.
85 Malgré sa jeunesse elle avait dix-huit ans — Marie Arnauld, en Religion Sœur Marie de Sainte-Claire, coopérait,
sous la direction de son aînée, à la réforme de l'abbaye de Maubuisson. En 1628, elle suivit sa sœur Agnès à celle de
Tart, lors des débuts de l'Ordre du Saint-Sacrement qui, selon la pensée de Mgr Zamet, devait unir ce Monastère et
celui de Port-Royal. Dans le monde «prodige d'esprit et de beauté,» Marie-Claire fut dans le cloître un modèle de
soumission, d'humilité, de générosité héroïque. Quand elle revint de Bourgogne à Paris, les nouvelles doctrines qui
s'implantaient au Monastère par les soins de Saint-Cyran, étonnèrent d'abord, écrasèrent ensuite son àme aimante et
douce. la lutte se prolongea, terrible; épuisée par ses efforts pour rapetisser et rétrécir son cœur, par des austérités
effrayantes, Marie-Claire mourut le 15 juin 1642, consolée pourtant à sa dernière heure par la dévotion à la Sainte
Vierge que nul ne put jamais lui arracher.
(Pour toutes les notes sur la famille Arnauld, cf.: Varin, La vérité sur les Arnauld, Paris, Poussielgue-Rusand,
1847; Monlaur, Angélique Arnauld, Paris, Plon-Nourrit, 1901; Delavaud, Le Marquis de Pomponne, Paris, Plon-
Nourrit. 1911; Gazier, «Notes et éclaircissements» ajoutés à la fin de l'Abrégé de l'Hist. de Port-Royal, par J.-B.
Racine, 2e éd., Paris, Soc. franç. d'imprimerie; etc.)
86 Autre sœur de la Mère Angélique, de trois ans plus jeune qu'elle, Anne s'était d'abord donnée tout entière au monde
avec l'enjouement, la grâce, qui faisaient le fond de son caractère et qu'emportera avec peine la glaciale atmosphère
du Jansénisme. Désabusée de la vanité, gagnée par Dieu, elle vint à Port-Royal en octobre 1616 et y fit profession le
18 février 1618. Sœur Anne-Eugénie de l'Incarnation (appelée ici Marie-Eugénie) rejoignit un peu plus tard sa sœur
à Maubuisson et y demeura un an. «Elle nous aida beaucoup,» témoigne l'Abbesse, qui, sûre de son talent et de sa
vertu, l'envoya en 1623 travailler à la réforme de l'abbaye du lys (diocèse de Sens). Après avoir marché sur les traces
de son aînée dans les sentiers de la perfection, Anne-Eugénie la suivit encore dans la route de l'erreur désolante qui
enveloppa sa mort de terreur et d'angoisse (1er janvier 1653).
87 La destinataire est certainement de Paris. Cette phrase: «Pries souvent pour les ames desvoyees de la vraye foy, et
benisses souvent Dieu de la grace avec laquelle il vous a maintenue en icelle,» permettrait de songer à Mme Le Nain
de Crevant ou à Mme de Verton, sa sœur, dont la famille maternelle appartenait en grande partie au protestantisme.
(Voir ci-dessus, notes (74), (75), p. 4.)
34/341

4.5 Page 35

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contenu. Ayes un grand soin d'estre attentive en toutes vos prieres et de tenir vostre cors en
reverence devant Dieu, en sorte que le prochain voye que c'est a la divine Majesté que vous parles.
Soyes humble et douce envers tous; car ainsy Dieu vous exaltera au jour de sa visitation88. Pries
souvent pour les ames desvoyees de la vraye foy, et benisses souvent Dieu de la grace avec laquelle
il vous a maintenue en icelle.
Tout passe, ma tres chere Fille; apres le peu de jours de cette vie mortelle qui nous reste,
viendra l'infinie eternité. Peu nous importe que nous ayons icy des commodités ou incommodités,
pourveu qu'a toute eternité nous soyons bienheureux. Cette eternité sainte qui nous attend soit
vostre consolation, et d'estre chrestienne, fille de Jesus Christ, regeneree en son sang, car en cela
seul gist nostre gloire: que ce divin Sauveur est mort pour nous.
Au reste, bien que je m'en aille sans esperance apparente de jamais vous revoir en terre, la
dilection que Dieu m'a donné pour vostre ame ne recevra aucune diminution, ains demeurera
ferme, stable et invariable; et ne cesseray jamais de souhaiter que vous vivies saintement en ce
monde et tres heureusement en l'autre. [10]
Attendant de nous revoir par sa misericorde divine, je seray,
Ma tres chere Fille,
Vostre tres humble serviteur,
FRANÇS, E. de Geneve.
Le 4 septembre 1619, a Paris.
MDXLVIII. A une demoiselle de Paris89. Les adieux d'un Saint.
Béatitude de l'âme qui n'est qu'à Dieu; ce qu'elle cherche et
ce qu'elle veut.
Paris, 7 septembre 1619.
Ma tres chere Fille,
Je vous dis de tout mon cœur adieu. A Dieu soyes vous a jamais en cette vie mortelle, le
servant fidellement entre les peines que l'on y a de porter la croix en sa suite90, et en la vie eternelle,
le benissant eternellement avec toute la Cour celeste.
C'est le grand bien de nos ames d'estre a Dieu, et le tres grand bien de n'estre qu'a Dieu.
Qui n'est qu'a Dieu ne se contriste jamais, sinon d'avoir offencé Dieu; et sa tristesse pour cela se
passe en une profonde, mays tranquille et paysible humilité et sousmission, apres laquelle on se
releve en la Bonté divine par une douce et parfaitte confiance, sans chagrin ni despit. Qui n'est qu'a
Dieu ne cherche que luy; et parce qu'il n'est pas moins en la tribulation qu'en la prosperité, on
demeure en paix parmi les adversités. Qui n'est qu'a Dieu pense souvent en luy parmi toutes les
occasions de cette vie. Qui n'est qu'a Dieu il veut bien que chacun sache qu'il le veut servir et [11]
se veut essayer de faire les exercices convenables pour demeurer uni a iceluy.
Soyes donq toute a Dieu, ma tres chere Fille, et ne soyes qu'a luy, ne desirant que de luy
plaire, et a ses creatures en luy, selon luy et pour luy. Quelle benediction plus grande vous puis-je
souhaiter? Ainsy donq, par ce souhait que je feray incessamment sur vostre ame, ma tres chere
Fille, je vous dis a Dieu; et vous priant de me recommander souvent a sa misericorde, je demeure
Vostre plus humble serviteur,
FRANÇS, E. de Geneve.
88 I Petri, ult., 6.
89 Parmi les nombreuses filles spirituelles que saint François de Sales laissait à Paris, on ne peut guère deviner quelle
est la «damoyselle» indiquée pour destinataire dans la 1re édition.
90 Cf. Matt., XVI, 24.
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La veille de Nostre Dame, en septembre 1619.
MDXLIX. A une Religieuse91. Garder la paix sans se troubler de
la variété des sentiments intérieurs. Le Monastère, «
academie de la correction, hospital de malades spirituelz. »
Remède contre la crainte des esprits. Souvenir de jeunesse de
François de Sales. Pourquoi les ténèbres et la solitude de la
nuit lui sont devenues délicieuses.
Paris, 9 septembre 1019.
Ma tres chere Fille,
Despuis que j'ay veu vostre cœur je l'ay aymé et le recommande a Dieu de tout le mien, et
vous conjure d'en avoir soin. Tasches, ma chere Fille, a le tenir en paix par l'esgalité des humeurs.
Je ne dis pas: Tenes le en paix; mais je dis: Tasches de le faire; que ce soit vostre principal souci,
et gardes bien de prendre occasion de vous troubler dequoy vous ne pouves si soudainement
accoyser la varieté des sentimens de vos humeurs. [12]
Sçaves vous que c'est que le Monastere? C'est l'academie de la correction exacte, ou chaque
ame doit apprendre a se laisser traitter, raboter et polir, affin qu'estant bien lissee et explanee, elle
puisse estre jointe, unie et collee plus justement a la volonté de Dieu. C'est le signe evident de la
perfection de vouloir estre corrigee; car c'est le principal fruit de l'humilité, qui nous fait connoistre
que nous en avons besoin.
Le Alonastere, c'est un hospital de malades spirituelz qui veulent estre gueris, et pour
l'estre, s'exposent a souffrir la saignee, la lancette, le rasoir, la sonde, le fer, le feu et toutes les
amertumes des medicamens; et au commencement de l'Eglise, on appelloit les Religieux d'un nom
qui veut dire guerisseurs92. O ma Fille, soyes bien cela, et ne tenes conte de tout ce que l'amour
propre vous dira au contraire; mays prenes doucement, amiablement et amoureusement cette
resolution: Ou mourir, ou guerir; et puisque je ne veux pas mourir spirituellement, je veux guerir;
et pour guerir, je veux souffrir la cure et la correction, et supplier les medecins de ne point
espargner ce que je dois souffrir pour guerir.
Au reste, ma chere Fille, on me dit que vous craignes les espritz. Le souverain Esprit de
nostre Dieu est par tout, sans la volonté ou permission duquel nul esprit ne se meut. Qui a la crainte
de ce divin Esprit ne doit craindre aucun autre esprit. Vous estes dessous ses aisles comme un petit
poussin93, que craignes vous? J'ay, estant jeune, esté touché de cette fantasie, et pour m'en desfaire,
je me forçois petit a petit d'aller seul, le cœur armé de la confiance en Dieu, es lieux ou mon
imagination me menaçoit de la crainte; et en fin je me suis tellement affermi que les tenebres et la
solitude de la nuit me sont a delices, a cause de cette toute presence de Dieu de laquelle on jouit
plus a souhait en cette solitude. Les bons Anges sont autour de vous comme une compaignie de
soldatz de garde. La verité de Dieu, dit le Psalme94, vous environne et couvre de son bouclier: vous
ne deves point craindre les craintes nocturnes. Cette asseurance s'acquerra petit a petit, a mesure
91 D'après la date, on peut conjecturer que le Saint ne s'adresse pas à une Sœur de la Visitation de Paris, puisqu'il se
trouvait alors dans la capitale. D'autre part, la connaissance entre le Directeur et sa fille spirituelle semble assez
récente, et la Philothée au début d'une vie parfaite. Pourrait-on songer à une Religieuse de l'abbaye de Maubuisson?
92 Cf. Les Controverses, Part. I, ch. III, art. X, p. 116; Les Vrays Entretiens, Entretien XVII, p. 322, var. (1005).
93 Cf. Pss. XVI, 8, LX, 5; Malt., XXIII, 37.
94 Ps. XC, 5.
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que la grace [13] de Dieu croistra en vous; car la grace engendre la confiance, et la confiance n'est
point confondue95.
Dieu soit a jamais au milieu de vostre cœur, ma chere Fille, pour y regner eternellement.
Je suis en luy
Vostre plus humble frere et serviteur,
FRANÇS, E. de Geneve.
Le 9 septembre 1619.
MDL. A Madame Angélique Arnauld, abbesse de Port-Royal.
Le Saint quitte Paris. Réponse aux appréhensions sur l'avenir.
Ne pas examiner son oraison d'une manière curieuse. La
patience «parmi les niaiseries et enfances» du prochain. Un
châtiment miséricordieux de la Providence divine. Ce que
Dieu unit est inséparable
Paris, 12 septembre 1619.
Je pars en fin demain matin96, ma tres chere Fille, puisque telle est la volonté de Celuy
auquel nous sommes, nous vivons et nous mouvons.97 O qu'il soit loué, ce grand Dieu eternel, pour
les misericordes qu'il exerce envers nous! Vostre consolation console mon cœur, qui est si fort uni
avec le vostre, que rien ne sera jamais receu en l'un que l'autre n'y ayt sa part, ains le tout, puisqu'en
verité ilz sont en communauté, ce me semble, parfaite; et qu'il me soit loysible d'user du langage
de la primitive Eglise, un cœur et une ame98.
Ceci estoit escrit quand j'ay receu vostre seconde lettre; mays je poursuis a vous respondre
a la premiere. [14]
J'espere que Dieu vous fortifiera de plus en plus; et a la pensee, ou plustost tentation, de
tristesse sur la crainte que vostre ferveur et attention presente ne durera pas, respondes une fois
pour toutes, que ceux qui se confient en Dieu ne seront jamais confondus99, et que, tant selon
l'esprit que selon le cors et le temporel, vous aves jetté vostre soin sur le Seigneur, et il vous
nourrira100. Servons bien Dieu aujourd'huy, demain Dieu y pourvoira. Chaque jour doit porter son
souci; n'ayes point souci du lendemain101, car le Dieu qui regne aujourd'huy, regnera demain. Si
sa Bonté eust pensé, ou pour mieux dire conneu que vous eussies besoin d'une assistance plus
presente que celle que je vous puis rendre de si loin, il vous en eust donné, et vous en donnera
tous-jours, quand il sera requis de suppleer au manquement de la mienne. Demeurés en paix, ma
95 Cf. Rom., V, 2, 5.
96 Le vendredi, 13 septembre 1619, l'Evêque de Genève quitta la capitale pour rejoindre la cour en Touraine. Quelques
jours auparavant (5 septembre), la réconciliation du Roi et de la Reine mère avait eu lieu à Coucières, où Louis XIII,
Anne d'Autriche et une suite brillante de princes, de princesses, de ducs, de maréchaux, de seigneurs et de dames,
étaient venus au-devant de Marie de Médicis. Les deux cours reprirent ensuite le chemin de la ville de Tours, et les
réceptions recommencèrent. (Cf. De Stefani, La Nunziatura di Francia del Card. Guido Bentivoglio, Firenze, 1867,
vol. III, p. 486, etc.)
97 Act., XVII, 28.
98 Ibid., IV, 32.
99 Eccli., II, 11.
100 Ps. LIV, 23.
101 Matt., VI, ult.
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tres chere Fille. Dieu opere de loin et de pres, et appelle les choses esloignees102 au service de ceux
qui le servent, sans les approcher; absent de cors, present d'esprit, dit l'Apostre103.
J'espere que j'entendray bien ce que vous me dires de vostre orayson, en laquelle pourtant
je ne desire pas que vous soyes curieuse de regarder vostre procedé et façon de faire; car il suffit
que tout bonnement vous m'en fassies sçavoir les mutations plus remarquables, selon que vous en
aves souvenance apres l'avoir faite. Je treuve bon que vous escrivies, selon les occurrences, pour
m'envoyer par apres selon que vous estimeres estre convenable, sans crainte de m'ennuyer; car
vous ne m'ennuyeres jamais.
Prenés garde, ma tres chere Fille, a ces motz de sot et de sotte, et souvenes vous de la parole
de Nostre Seigneur104: Qui dira a son frere: Raca (qui est une parole qui ne veut rien dire, ains
tesmoigne seulement quelque indignation), il sera coulpable de conseil; c'est a dire, on deliberera
comme il le faudra chastier. Apprivoyses petit a petit la vivacité de vostre esprit a la patience,
douceur, humilité et affabilité parmi les niaiseries, enfances et imperfections feminines des Seurs
qui sont tendres sur elles mesmes et sujettes a tracasser autour des aureilles des Meres. Ne vous
glorifies point en [15] l'affection des Peres qui sont en terre et de terre, mays en celle du Pere
celeste qui vous a aymee et donné sa vie pour vous105.
Dormes bien; petit a petit vous reviendres aux six heures, puisque vous le desires. Manger
peu, travailler beaucoup, avoir beaucoup de tracas d'esprit, et refuser le dormir au cors, c'est vouloir
tirer beaucoup de service d'un cheval qui est efflanqué, et sans le faire repaistre.
Pour la seconde lettre: Ne falloit il pas que vous fussies espreuvee en ce commencement
de plus grande pretention? Or sus, il n'y a rien en cela que des traitz de la providence de Dieu, qui
a abandonné cette pauvre creature affin de faire que ses pechés soyent plus fortement chastiés, et
que par ce moyen elle revienne a soy et a Dieu, duquel il y a si long tems qu'elle s'est departie106.
J'eusse voulu que vous ne vous fussies pas raillee et mocquee de ces gens la, mais qu'avec
une modeste simplicité vous les eussies edifiés par la compassion dont ilz sont dignes, selon que
Nostre Seigneur nous a enseigné en sa Passion. Neanmoins, Dieu soit beni dequoy encor la [16]
chose est ainsy passee, avec tant d'édification des autres prochains107, selon que le bon M. du V[al]
escrit108.
102 Cf. Rom., IV.
103 I Cor., V, 3.
104 Matt., V, 22.
105 Cf. Ephes., V, 2.
106 Angélique d'Estrées, abbesse de Maubuisson, fille du grand-maître de l'artillerie, Antoine d'Estrées, vicomte de
Soissons, marquis de Cœuvres, et de Françoise Babou de la Bourdaisière. Nous avons dit (voir le tome précédent, note
(1285), p. 401) comment la justice humaine s'était levée enfin pour châtier une longue suite de désordres. A aucun
titre, on le comprend, la Maison des Filles pénitentes où elle avait été séquestrée, ne pouvait plaire à l'Abbesse; aussi,
trompant la surveillance, elle s'évade en novembre 1618, et dès lors on commence à Rome à s'occuper de son affaire.
L'année suivante, le 6 septembre, Angélique d'Estrées se présentait à l'improviste à Maubuisson, accompagnée d'une
troupe de gentilshommes armés, que commandait le comte de Sanzay ou Sanzéi, son beau-frère. Au milieu du tumulte
et du danger, Angélique Arnauld ne perdit rien de son énergie et de son sang-froid; mais après des scènes de violence
qui pouvaient en présager d'autres plus terribles encore, Mme de Port-Royal, emmenant avec elle les trente Religieuses
qu'elle avait reçues à Maubuisson, se retira à Pontoise. Un exprès alla en toute hâte prévenir sa famille, et le lendemain
le prévôt et deux cent cinquante archers cernaient l'abbaye et cherchaient à s'emparer de Mme d'Estrées. Celle-ci,
prudemment, avait vidé la place ainsi que sa troupe, et bientôt on apprenait qu'elle était sur la frontière de Flandre.
Son procès commença; en décembre 1620 elle se vit privée, par sentence définitive, de l'abbaye qui fut d'abord donnée
à une sœur du duc de Luynes, et enfin à Charlotte de Soissons (1623); c'est alors que la Mère Arnauld retourna à Port-
Royal. (D'après Racine, Abrégé de l'Histoire de Port-Royal, publié par Gazier, 2e édition, Paris, etc.)
107 Tandis que sa rivale attirait de plus en plus sur elle le mépris général, Angélique Arnauld avait grandi encore aux
yeux de tous les témoins de leur lutte. Les faiblesses que relève le sage Directeur n'avaient point frappé autour d'elle,
mais seulement la dignité, la fermeté, l'inviolable attachement à la Règle. Pendant les trente heures de leur séjour à
Pontoise, l'Abbesse et ses Filles pratiquèrent les observances monastiques comme si rien d'anormal ne se fût passé.
Le 7 septembre, à dix heures du soir, le peuple enthousiasmé accompagna en foule, avec des lumières, la procession
de retour à Maubuisson, que protégeaient les archers à cheval.
108 André du Val (voir tome XII, note (434), p. 188), directeur du Carmel de Pontoise, se trouvait sans doute dans cette
ville lors de l'échauffourée de Mme d'Estrées à Maubuisson.
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Ma chere Fille, je vous dis adieu, et conjure vostre cœur de croire que jamais le mien ne se
separera de luy: il est impossible; ce que Dieu unit est inseparable. Tenes vostre courage haut
eslevé en cette eternelle Providence, qui vous a nommee par vostre nom109 et vous porte gravee en
sa poitrine maternellement paternelle110; et en cette grandeur de confiance et de courage, prattiqués
soigneusement l'humilité et debonnaireté. Ainsy soit il.
Je suis incomparablement vostre, ma tres chere Fille. Demeurés en Dieu. Amen.
Je pars un peu plus a la haste, parce que la Reyne desire que je luy face la reverence avant
mon retour111.
Ce qui n'est point Dieu doit estre peu en nostre estime. Dieu soit vostre protection. Amen.
Le 12 septembre 1619. [17]
MDLI. A Mesdames de Villeneuve et de Frouville. Une seule
lettre pour deux sœurs. — Combien salutaire l'union des cœurs
et des âmes. Les abeilles spirituelles dans leurs ruches.
Assurance de perpétuel et affectueux dévouement
Vers le 18 septembre 1619112.
Non certes, mes tres cheres Filles, il ne faut qu'une lettre pour deux seurs qui n'ont qu'un
cœur113 et qu'une praetention. Que cela vous est salutaire de vous tenir ainsy l'une a l'autre!
Cett'union des ames est comme l'unguent praetieux qu'on respandit sur le grand Aaron, ainsy que
dit le Roy Psalmiste114, auquel on mesloit tellement plusieurs liqueurs odorantes, que toutes ne
faysoyent qu'une senteur et une suavité115. Mays je ne veux pas m'arrester sur ce sujet. Ce que
Dieu a uni en sang et en sentiment est inseparable tandis que ce mesme Dieu regne en nous; et il
y regnera eternellement.
Or sus, vives donq ainsy, mes tres cheres Filles, douces et amiables a tous, humbles et
courageuses, pures et sinceres en tout. Quel meilleur souhait puis-je faire pour vous? Soyes comme
des avettes spirituelles qui ne portent que miel et cire dans leurs ruches. Que vos maysons soyent
toutes remplies de douceur, de paix, de concorde, d'humilité, de pieté par vostre conversation; et
croyes, je vous supplie, que la distance des lieux ni du tems ne m'osteront jamais cette tendre et
forte affection que Nostre Seigneur m'a donné pour vos ames, que la mienne cherit tres
parfaitement et invariablement.
Et par ce que la diversité de vos conditions peut requerir que quelquefois je vous escrive
differemment, non [18] obstant l'unité de vostre dessein, je le feray un'autre fois; mais pour le
present je me contenteray de vous dire et conjurer de le bien croire sans haesiter, mes tres cheres
Filles, que je suis
109 Is., XLIII, 1.
110 Cf. ibid., XLIX, 16.
111 La reine Marie de Médicis fit à l'Evêque de Genève le plus bienveillant accueil, et témoigna se souvenir de l'avoir
vu à la cour de Henri-le-Grand.
C'est sans doute par erreur que l'édition de 1626 et les suivantes portent response au lieu de reverence.
112 Les destinataires sont Marie Lhuillier, dame de Villeneuve (voir le tome précédent, note (1173), p. 357), et sa sœur
Hélène qui, depuis la rupture de son mariage avec M. Gobelain, ne quittait presque plus sa cadette. (Voir sa note
biographique avec la lettre du 31 mai 1620.) Elles durent recevoir ce message de leur commun Père spirituel peu après
son départ de Paris; selon toute apparence le Saint l'écrivit, comme plusieurs autres, pendant le voyage. (Cf. la lettre
suivante.)
113 Act., IV, 32.
114 Ps. CXXXII, 2.
115 Exod., XXX, 23-25.
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4.10 Page 40

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Vostre tres humble et tres affectionné serviteur,
FRANÇS, E. de Geneve.
A Mesdames
Mesdames de Villeneufve et de Frouville.
Revu sur l'Autographe conservé à Rome, à Santa Maria in Vallicella,
dans la chambre de saint Philippe de Néri.
MDLII. A la Mère de Chantal, a Paris. Fatigué du voyage,
l'Evêque envoie des lettres à distribuer. Itinéraire. Les
prétendants du monde et les prétendantes au Ciel
Tours, 18 septembre 1619.
Ma tres chere Mere,
Voyla nostre bon M. le Collateral116 qui vous va revoir, pour soudain nous venir rencontrer
en chemin. Je luy porte envie, et si j'estois aussi gaillard que luy pour courir la poste, je ne sçai si
je ne ferois point comme luy.
Je ne vous escriray guere, car je n'en puis plus du grand tracas que nous avons fait117.
Seulement je vous supplie de faire tenir les lettres ci jointes ou elles s'addressent, et de joindre a
celle de madame Godeau118 une copie [19] de l'Exercice119; car je n'en ay sceu faire aucune pendant
le chemin, que j'ay eu asses a faire a escrire toutes ces lettres que pour bonne consideration j'ay
voulu faire120.
Nous partons samedi121 et allons droit a Bourges, puis a Moulins, de sorte que nous verrons
toutes nos Seurs.
La Reyne mere m'a fait caresse122, et si, je n'en suis point plus glorieux pour cela:123 la veuë
de ces grandeurs du monde me fait paroistre plus grande la grandeur des vertus chrestiennes et me
fait estimer davantage leur mespris. Quelle difference, ma tres chere Mere, entre cette assemblee
de divers pretendans (car la cour est cela et n'est que cela), et l'assemblee des ames religieuses qui
n'ont point de pretention qu'au Ciel! Oh! si nous sçavions en quoy consiste le vray bien!
Or sus, je vous escriray de Bourges, et de Moulins, et de Rouanne, et de Lyon, et tous-
jours, Dieu aydant, que je me porte bien. Dieu soit a jamais au milieu de vostre cœur, ma tres chere
Mere et tres uniquement chere Mere. Je salue nos Seurs, et suis vostre de la façon que Dieu sçait.
FRANÇS, E. de Geneve.
A Tours, le 18 septembre 1619. [20]
116 Barthélémy Flocard (voir tome XVII, note (1023), p. 303, et ci-après, p. 32).
117 Parti de Paris le 13 septembre au matin (voir ci-dessus, note (96), p. 14), l'Evêque de Genève passa par Etampes,
Chartres, Orléans, et arriva à Tours sans doute le 17 au soir.
118 Très probablement Jeanne Terge ou Targe, femme d'Antoine Godeau, lieutenant particulier des Eaux et Forêts du
comté de Dreux. Leur fils Antoine, né en 1605, plus tard évêque de Grasse et de Vence, fut un grand admirateur du
Serviteur de Dieu, dont il a composé l'éloge.
119 Le Saint avait envoyé à Mme de Villesavin une petite méthode pour s' «unir a Nostre Seigneur le matin et toute la
journee» (voir le tome précédent, Lettre MDXXXIX, p. 417); il s'agit sans doute de ce même Exercice.
120 De «toutes ces lettres», la précédente seule nous est parvenue!
121 Le samedi 21 septembre.
122 Voir ci-dessus, note (111), p. 17, et ci-après, Lettre MDLX, pp. 37, 38.
123 La suite de cet alinéa avait été placée par les premiers éditeurs au début du texte donné au 29 décembre 1618. (Voir
le tome précédent, note (1048), p. 320.)
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5 Pages 41-50

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5.1 Page 41

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MDLIII. A Madame Angélique Arnauld, abbesse de Port-Royal.
Le retour à Maubuisson de la Mère Arnauld; affectueuse
sollicitude de François de Sales. Ses sentiments au milieu des
faveurs de la cour. Abeilles et guêpes. Salutations
paternelles
Tours, 19 septembre 1619.
Le second jour se passe, ma tres chere Fille, des mon arrivee en ce lieu, et je n'ay encor
sceu voir monsieur d'Andilly124, quoy que je l'aye desiré. Ce sera, Dieu aydant, demain; mais en
attendant, faut-il pas que mon cœur salue le vostre?
Je sceu a mon depart de Paris que vous esties rentree dans Maubuisson avec vostre petite
chere troupe, mays je n'ay peu sçavoir si vous avies treuvé vos papiers, vos meubles de devotion
et vostre argenterie sacree; car celle qui s'est elle mesme desrobee a Dieu, pourquoy ne desroberoit-
elle pas toute autre chose125?
Or sus ma tres chere Fille, parmi toutes ces grandeurs [21] de la cour (ou il faut que je vous
die que je suis fort caressé), je n'estime rien tant que nostre condition ecclesiastique. O Dieu, que
c'est bien autre chose de voir un train d'avettes qui toutes concurrent a fournir une ruche de miel,
et un amas de guespes qui sont acharnees sur un cors mort, pour parler honnestement.
Je vous escriray avant mon départ de ce lieu, apres que j'auray veu ce cher frere; et croyes
moy, ma tres chere Fille, mon ame se console a vous escrire, tant il est vray que Dieu veut que
mon ame regarde la vostre, la cherisse et soit parfaitement vostre. Je salue les cheres Seurs
Catherine Agnes, Marie et Anne126; et nostre bonne seculiere, qui m'est si chere, ma Seur Catherine
124 Le fils aîné d'Antoine Arnauld et de Catherine Marion, Robert Arnauld d'Andilly, avait alors trente ans; il y en
avait déjà près de quinze qu'il était entré à la cour où il remplit avec succès différents emplois. Sa courtoisie aimable,
son esprit, sa vertu lui attirèrent bien des amitiés; il eut sa large part dans celle dont saint François de Sales honora
tous les membres de sa famille. Malheureusement, il s'engagea plus tard dans l'intimité de Saint-Cyran. A cinquante-
cinq ans, il prenait place parmi les Solitaires de Port-Royal, et occupait ses loisirs à des traductions, pour la plupart
élégantes et exactes. Obligé à diverses reprises de quitter sa retraite, Robert d'Andilly y revint en 1673, et l'année
suivante, le 26 septembre, il y mourait dans un âge avancé, comme presque tous les Arnauld,. Dieu semblant laisser à
ces intelligences qu'il avait faites si belles, le temps de se dégager, si elles le voulaient, des ténèbres de l'erreur, pour
rentrer dans la pure lumière de la foi.
De son mariage avec Catherine Lefèvre de la Boderie (1613), Robert d'Andilly eut quinze enfants. Cinq de
ses filles furent Religieuses à Port-Royal; son fils, M. de Luzancy, y vécut parmi les Solitaires, tandis que Simon,
marquis de Pomponne, se rendait célèbre dans la carrière diplomatique.
125 Il s'agit d'Angélique d'Estrées et de son retour inopiné à Maubuisson. (Voir ibid., notes (106, 107), pp. 16, 17.)
126 De ces trois soeurs de l'Abbesse de Port-Royal, deux nous sont déjà connues: Marie de Sainte-Claire et Anne-
Eugénie (voir ci-dessus, les notes (85), p. 8, et (86), p. 9). La troisième, nommée au baptême Jeanne-Catherine-Agnès,
en Religion Catherine-Agnès de Saint-Paul, ou plus ordinairement la «Mère Agnès», était née en 1593. L'abbaye de
Saint-Cyr lui fut donnée en même temps que celle de Port-Royal à Jacqueline. Mais quand celle-ci, devenue la Mère
Angélique, eut réformé son Monastère, elle attira habilement auprès d'elle sa sœur Jeanne et la convertit si bien que
la jeune fille, renonçant à son abbaye, prit l'habit bénédictin à Port-Royal le 28 janvier 1611. Dès lors, les deux âmes
d'Angélique et d'Agnès semblent n'en former qu'une, malgré, ou peut-être à cause de leurs contrastes multiples. La
cadette, reconnaissant le haut mérite de son aînée, s'inclinait devant elle; l'aînée, appréciant la vertu de la cadette,
l'employait sans tenir compte de ses répugnances. Elle la laissa chargée de Port-Royal pendant les cinq ans passés à
Maubuisson, et lui fit obtenir des Bulles de coadjutrice (juillet 1620). En 1626, c'est Agnès qui vient à Maubuisson
pour une mission passagère; elle ira de même à Gomerfontaine, et sera abbesse de Tart. Puis, alternativement, avec la
Mère Angélique, elle gouverne Port-Royal des Champs et Port-Royal de Paris; mais, hélas! à cette époque l'une et
l'autre étaient entrées dans la voie funeste où elles s'enfonceront de plus en plus jusqu'à la mort, qui tarda, pour Agnès,
jusqu'au 19 février 1671. La première, elle avait mis en suspicion la pureté de sa foi par son Chapelet secret. Cet écrit,
d'un mysticisme embrouillé et d'une orthodoxie très douteuse, fut condamné par la Sorbonne (1633) et
chaleureusement défendu par Saint-Cyran. Dans les luttes qui suivirent et se prolongèrent longtemps, quand surtout il
s'agit de signer le Formulaire (1661), Agnès Arnauld aurait dû se souvenir de la prédiction faite en 1619 par saint
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5.2 Page 42

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de [22] Gennes127. En somme, mon cœur se tourne a tous momens de vostre costé, et ne cesse
point de respandre des souhaitz pour vostre avancement au pur et courageux, mais humble et doux
amour divin.
A Tours, le XIX septembre 1619.
128J'ay veu le bon M. de Bonneuil qui jubile de sçavoir que sa chere fille veuille aymer
Dieu129. Je la salue, ceste chere petite fille Marie Angelique; son130.
A Madame
Madame l'Abbesse de Port Royal.
Revu sur l'Autographe conservé à la Visitation de Lyon-Fourvière.
François de Sales. Sur les instances de la Mère Angélique, l'Evêque de Genève était en effet allé à Port-Royal. Il reçut
la confession générale d'Agnès et prêcha à la Communauté; mais au milieu du discours, l'orateur s'arrête suffoqué par
les sanglots. Interrogé ensuite sur la cause de cette émotion: «Madame,» répondit-il, «c'est que Dieu m'a fait connaître
que votre Maison perdra la foi; le seul moyen de la conserver, c'est l'obéissance au Saint-Siège.» (Lettre de Sœur
Marie-Xavier du Plessis, Religieuse de la Visitation de la rue Saint-Antoine, Paris, 20 septembre 1729.)
127 C'est peut-être après avoir prononcé son vœu de chasteté (voir le tome précedent, note (1279), p. 399) que Mme le
Maistre se fit appeler Catherine de Gênes. Elle est destinataire ci-après, p. 27.
128 Ce qui suit est inédit.
129 Le père de Sœur Marie-Angélique (voir le tome precédent, notes (1198), p. 367, et (1282), p. 401), René de Thou,
neveu de l'historien de ce nom, était fils de Jean de Thou, seigneur de Bonneuil, de Celi, etc., conseiller au Parlement,
puis maître des Requêtes, et de Renée Baillet. Il fut introducteur des ambassadeurs (cf. ibid., notes (1005), p. 304, et
(1020), p. 308). De sa femme, Marie Faye, il eut huit filles dont une seule se maria; cinq se firent Religieuses. D'après
Moreri, 1740, tome VIII.)
130 Quelques mots ont disparu par suite d'une déchirure.
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5.3 Page 43

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MDLIV. A la Mère Marie de Jésus, sous-prieure du Carmel
d'Amiens131 (Inédite). Joie de l'Evêque de Genève d'avoir revu
deux des filles de Mme Acarie; regret de n'avoir pu visiter la
troisième, au Carmel d'Amiens.
Tours, 20 ou 21 septembre 1619.
Ma tres chere Seur,
Je ne desirois pas moins de vous voir que je faysois de voir les deux cheres Seurs que j'ay
maintenant veües, [23] l'une a Paris au petit Couvent132, l'autre icy133. Mays il n'a pas pleu a Nostre
Seigneur qu'aucune occasion se soit presentee d'aller du costé d'Amiens pendant mon sejour en
ces quartiers, d'où partant tout presentement pour me retirer en mon diocsese, duquel je n'ay esté
que trop absent, je vay en esprit aupres de vous, et vous envoye ce billet qui vous dira de ma part
que toute ma vie j'ay cheri vostre ame de tout mon cœur, et me suis consolé de sçavoir que la
divine Majesté vous avoit retiree a son service en une si [sainte] vocation comm'est celle [24] en
laquelle vous vivés, et que j'honnore parfaitement, et en laquelle je prie Dieu, et ne cesseray point,
que vous perseveries heureusement, faysant des continuelz progres en134......................................
Nous avons bien fort renouvelé l'ancienne amitié et alliance spirituelle [vos deux chères
Sœurs] et moy, et elles sont tous-jours mes filles comme autrefois. Et par ce que je n'[ai point
oublié que] vous l'estes aussi fort particulierement, je ne vous appelleray plus ma Seur, [ains ma
Fille,] en toutes les occasions qui se presenteront desormais.
A la R. Mere en N. S.,
La Seur Marie de Jesus,
Sousprieure du Monastere des Seurs Carmelites
d'Amiens.
131 La «fille aisnee de la Seur Marie de l'Incarnation,... tandis que je fus a Paris il y a vingt ans, estoit non seulement
ma fille spirituelle, mais ma partiale,» écrira François de Sales en 1620. Peut-être le «naturel bon, franc et naïf» de
Marie Acarie était-il la cause de cette inclination particulière; peut-être aussi le Saint compatissait-il aux luttes
intérieures de la jeune fille qui, malgré son attrait pour la vanité, ne pouvait se resoudre à se fixer dans le monde, et
n'avait cependant pas le courage d'entrer en Religion. Un pèlerinage à Notre-Dame de Liesse, en 1607, mit fin à tes
hésitations; six mois après, elle devenait Sœur Marie de Jésus as Carmel de Paris, et le 25 mars 1609 elle prononça
ses vœux en même temps que sa sœur Geneviève. Quand sa bienheureuse mère fit profession au monastère d'Amiens
(1615), Sœur Marie de Jésus s'y trouvait, et l'année suivante elle en fut élue sous-prieure. En 1620, elle prit la conduite
de la Maison d'Orléans où elle mourut le 2 juillet 1641. Les avis de saint François de Sales «qui lui faisait assez
fréquemment l'honneur de lui écrire,» disent les Chroniques de l'Ordre (Troyes, 1856, tome III, p. 185), l'aidèrent
beaucoup dans son gouvernement. (Voir Boucher, Vie de la Bte Marie de l'Incarnation, éd. du P. Bouix, Paris, 1873,
pp. 335-337.)
Cette lettre a été écrite de Tours, comme le texte l'indique. L'Evêque arrivé le soir du 17 dans cette ville (voir
ci-dessus, note (117), p. 19), ne dut voir les Carmélites, au plus tôt, que le 19. La date est donc comprise entre ce jour
et celui du départ, 21 septembre.
132 On appelait «petit Couvent» celui qui avait été fondé par le premier à la rue Chapon, en 1617. Geneviève Acarie
(Sœur Geneviève de Saint-Bernard) fut sous-prieure dans ce monastère. (Voir tome XIII, note (791), p. 286.)
133 Marguerite Acarie, seconde fille de la Bienheureuse, naquit à Paris le 6 mars 1590. Elle reçut l'habit des Carmélites
en 1605 et attendit jusqu'en 1607 l'âge exigé par les Constitutions de l'Ordre pour faire profession. Elue sous-prieure
à Tours en 1615, elle devint prieure en 1618 et se rendit remarquable par son talent de guider les âmes. On la choisit
en 1620 pour aller rétablir l'ordre au couvent de Bordeaux, troublé par la question du gouvernement des Carmélites
dont il sera parlé plus loin; elle ne put réussir dans sa mission et fut envoyée à Saintes. En 1624, la Mère Marguerite
du Saint-Sacrement vint remplacer au Carmel de la rue Chapon la Mère Madeleine de Saint-Joseph, et ne quitta plus
cette Maison jusqu'à sa mort, arrivée le 24 mai 1660. La Mère de Chantal, dans son dernier voyage à Paris en 1641,
visita cette sainte Religieuse et l'entendit lui annoncer son prochain départ pour l'éternité. D'autres prédictions et des
faits merveilleux confirmèrent l'opinion que donnaient ses hautes vertus. (Voir sa Vie, par M. Tronson de Chenevière,
Paris, 1689, et Boucher, ubi supra, pp. 329 seq.)
134 Le bas de l'Autographe a été coupé; le dernier alinéa étant écrit en marge, chaque ligne demeure inachevée. Nous
suppléons selon le sens par des mots entre [ ].
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5.4 Page 44

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Recommandee a la Mere Prieure de Tours135.
Revu sur l'Autographe conservé au Carmel d'Orléans.
MDLV. A Madame Angélique Arnauld, abbesse de Port-Royal.
Intime union que l'éloignement resserre de plus en plus. Un
père chrétiennement résigné. Attendrissement du Saint sur la
maladie de deux de ses filles spirituelles; prière qu'il adresse à
Dieu
Amboise, 22 septembre 1619.
A mesure que je m'esloigne de vous, ma tres chere Fille, selon les lieux, je me sens
interieurement de plus [25] en plus joint et uni a vostre cœur selon l'esprit; et connois bien par la
que c'est le bon playsir de Dieu que nous ayons ce sentiment de veritable et sincere dilection.
J'ay veu en fin monsieur vostre frere136, que je proteste d'estre l'un des aymables
personnages que j'aye veu jamais, pour la bonté et pieté de cœur que Dieu luy a donnee. Le jour
precedent il avoit eu l'advis du depart de son pauvre petit François137, et neanmoins son esprit estoit
en une tranquillité parfaite, et avec un certain repos en la volonté de Dieu, qu'autre que Dieu mesme
ne pouvoit luy avoir donné.
J'avois escrit jusques icy, ma tres chere Fille, quand j'ay esté emporté du tracas a la cour,
et apres disné ay reveu ce cher frere, tous-jours plus ferme de courage, quoy qu'attendri jusques
aux yeux sur la maladie de nos Seurs Catherine de Gennes et Marie138. O ma Fille, Dieu me soit
en ayde. A peu que je ne luy aye dit les paroles de cet ancien Prophete139: Et comment, Seigneur,
vous affliges donq encor ces filles, qui pour l'amour de vous m'ont repeu et nourri? Mays non, ma
Fille toute tres chere, j'ayme mieux, avec l'autre Prophete140, dire: ]e suis muet sous vos verges, et
n'ouvre nullement ma bouche, car c'est vous qui faites cela. En somme, il sera tous-jours vray que
ceux qui pretendent d'avoir part avec Jesus glorifié doivent premierement avoir part avec Jesus
crucifié141.
Or sus, ma Fille, tenes vostre courage haut eslevé en Dieu, en sa providence, en l'eternité.
Amen.
Je suis ce que ce mesme Dieu veut et sçait que je suis pour vous, et je ne le sçaurois mieux
dire qu'ainsy. Je vous escriray a toutes rencontres, estimant qu'en contentant mon ame en cela, je
feray selon le gré de la [26] vostre, que je prie Nostre Seigneur de rendre toute sainte. Amen.
FRANÇS, E. de Geneve.
Le 22 septembre 1619.
135 Le Carmel de Tours fut établi le 17 août 1608 par la Mère Anne de Saint-Barthélémy. M. de Fontaines-Marans
(voir tome XVI, note (418), p. 135) fonda cette Maison pour la consolation d'une de ses filles que son peu de santé
empêchait d'être Religieuse. Ainsi, en qualité de fondatrice, elle put vivre dans le couvent sans cependant être éloignée
de son père. (Voir Chroniques de l'Ordre des Carmélites, tome II, pp. 397 seq.)
136 Robert Arnauld d'Andilly (voir ci-dessus, note (124), p. 21).
137 Lors de sa visite à Andilly (voir ibid., note (82), p. 8), le Saint, caressant le petit François, en très bonne santé à
cette époque: «Cet enfant porte la mort dans les yeux,» dit-il. Deux ou trois semaines après, la petite vérole emportait
le fils de M. d'Andilly; il était né le 2 novembre 1617, troisième de la famille.
138 Mme Le Maistre et Sœur Marie de Sainte-Claire (voir ibid., notes (127), p. 23, (85), p. 8, et la lettre suivante).
139 III Reg., XVII, 20.
140 Ps. XXXVIII, 10.
141 Cf. Rom., VIII, 17.
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5.5 Page 45

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MDLVI. A Madame le Maistre142. Les faveurs de l'Epoux divin.
Eloge de Robert Arnauld. Le martyre de saint Maurice; le
martyre du cœur. — «Tintamarres et presse» qui empêchent le
Saint d'écrire à son gré.
Amboise, 22 septembre 1619.
Que vous diray-je, ma Fille, vous voyant parmi ces amertumes? Oh! courage, je vous prie;
l'Espoux que vous aves choisi des que vous estes separee de celuy qu'on vous avoit choysi143, est
un faisceau de myrrhe144: quicomque l'ayme ne peut n'aymer pas l'amertume; et ceux [27] qu'il
favorise de son plus estroit amour sont tous-jours piqués de tribulations. Comme pourroit on serrer
sur sa poitrine Nostre Seigneur crucifié, sans que les cloux et les espines qui le transpercent ne
nous percent?
O le brave et bon frere que vous aves icy! Helas! le depart de son pauvre petit François145
ne l'a touché que comme un pere qui voit partir son filz de sa mayson et s'esloigner de luy pour
approcher un grand Roy et aller recevoir ses faveurs. Voyla, certes, comme il faut vivre en cette
vie si pleyne d'inconstance et d'evenemens divers. Mais quand ce frere a sceu vostre maladie et
celle de nostre Seur Marie, son cœur s'est attendri et son sentiment a paru sur les yeux; et toutefois
il demeure ferme et sans trouble, tant il est vertueux et vertueusement chrestien.
Et moy, ma tres chere Fille, j'espere que Dieu ayant receu en sacrifice de suavité
l'acquiescement de ce pere et le vostre, et celuy du grand pere et de la grand mere, et des tantes146,
il ne permettra pas que la tribulation face plus de progres: ainsy je l'en supplie, et qu'il vous face
sainte.
142 La correspondante du Saint, que les éditions précédentes désignent sous le nom d'une Veuve, est Catherine Arnauld,
l'aînée des filles, et destinée par ce fait au mariage. Quand Isaac Le Maistre demanda sa main, elle n'avait que onze
ou douze ans; mais ce parti, brillant cependant aux yeux du monde, lui inspira une telle répugnance qu'on ne songea
pas à la contraindre. En 1605, M. Le Maistre, veuf de celle qu'il avait épousée au refus de Mlle Arnauld, renouvela ses
poursuites, et cette fois la jeune fille céda. Ce fut pour son malheur. Après plusieurs années de martyre silencieux,
Catherine laissa entrevoir à ses parents ce qu'elle avait à souffrir. Son père, indigné et dans la plus profonde douleur,
obtint des arrêts de la cour qui autorisaient la séparation (1616). Dès lors, Mme Le Maistre ne vécut plus que pour Dieu
et pour ses enfants; quand la mort d'Isaac l'eut rendue tout à fait libre, elle entra à Port-Royal et y devint Religieuse
sous le nom de Catherine de Saint-Jean. Elle décéda en 1651.
143 Fils de Péronne Sanglier et de son second mari, Joachim Le Maistre, marchand bourgeois de Paris, Isaac était, sans
qu'on le soupçonnât d'abord, protestant, et sa conduite irrégulière autant que sa brutalité rendirent ses deux femmes
très malheureuses. La première, Mlle Mélyan, mourut après deux ans de mariage, et c'est alors que le conseiller du Roi
et maître des Comptes rechercha de nouveau l'alliance des Arnauld. Sa mère, à cette date, était remariée avec Jean de
Vailly, sieur de Brieul, de Pons et de Locé, qui figure au contrat de mariage de son beau-fils. (Archiv. Nat., Dossiers
bleus, vol. 32, n° 731, fol. 19, et Y 117, fol. 348.)
144 Cant., I, 12.
145 Comme on l'a vu à la lettre précédente, Robert Arnauld d'Andilly venait de perdre son troisième enfant.
146 Antoine Arnauld, destinataire de la lettre suivante, Catherine Marion sa femme, et leurs quatre filles (voir le tome
précédent, notes (1199), p. 368, (1228), p. 380, et ci-dessus, notes (85), p. 8, (86), pp. 9 et 22). Le Saint ne mentionnant
pas la mère de l'enfant, il est à croire qu'il lui écrivit directement; mais cette lettre n'a pas été retrouvée.
Mme Arnauld était née en janvier 1573 de Simon Marion, avocat général au Parlement, et de Catherine Pinon.
A douze ans et demi, elle épousa Antoine Arnauld dont l'éloquence avait enthousiasmé son père. Elle lui donna vingt
enfants, et gouverna sa maison en femme de tête et de vertu. Sa charité vigilante aida beaucoup la Mère Angélique,
soit à Port-Royal, soit à Maubuis son. En 1625, Mme Arnauld contribua à l'achat de l'hôtel de Clagny, berceau de Port-
Royal de Paris; l'année suivante, ayant mis ordre à ses affaires, elle entrait elle-même au noviciat, mais ne fit profession
qu'en février 1629, sous le nom de Sœur Catherine de Sainte-Félicité. La nouvelle Religieuse montra l'énergique vertu,
l'héroïsme qui se retrouvent chez toutes les Arnauld, et que n'accompagne pas, malheureusement, l'humble docilité de
l'esprit. Mme Arnauld mourut le 28 février 1641.
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Le grand saint Maurice, patron de la Touraine, dont on fait aujourd'huy la feste, vit tuer
toute sa chere legion devant ses yeux; et on peut dire qu'il souffrit autant de [28] fois le martyre
comme il vit martyriser et meurtrir de soldatz. Ma Fille, nous souffrons le martyre du cœu quand,
pour l'amour de Dieu, nous voyons mourir et acquiesçons a la mort de ceux que nous cherissons.
Or sus, que puis je dire davantage? Celle qui vit mourir le plus aymable filz de tous les filz sur la
croix, veuille impetrer de ce mesme Filz les consolations qui vous seront convenables, et a
monsieur vostre pere et a madamoyselle vostre mere.
Je porte au milieu de mon cœur la memoire de madamoyselle N., vostre chere cousine et
ma chere fille147, et voudrois bien luy escrire; mays je ne puis parmi ces tintamarres de cette presse
qui a peine m'a peu permettre de vous escrire ces lignes. Salues la cherement de ma part, je vous
supplie, et l'asseures que je ne passeray pas Bourges, ou nous nous acheminons demain matin148,
sans que je luy envoye une de mes lettres. Aymes cette chere ame, et l'appuyes de vostre
conversation, affin que, selon ses inclinations bonnes et vertueuses, elle serve Dieu de mieux en
mieux.
Je n'escris point non plus a madamoyselle vostre mere, car je sçai bien qu'elle se contente
que ce soit a vous a qui je dis que je suis finalement son serviteur tres humble. Ma tres chere Fille,
demeures ferme et forte en l'amour de Nostre Seigneur, qui m'a rendu, sans que jamais je varie,
parfaitement tout vostre.
FRANÇS, E. de Geneve.
D'Amboyse, ce 22 septembre 1619.
147 Serait-ce la future Sœur Anne de Saint-Paul, fille de Louis Arnauld, contrôleur général des restes? Ses parents
l'empêchèrent pendant plusieurs années de se faire Religieuse; enfin, à vingt-et-un ans, elle quitta la maison paternelle
et entra à Port-Royal. Elle était depuis six mois au monastère du Saint-Sacrement de la rue Coquillière, quand elle
mourut, le 12 septembre 1633. On pourrait encore proposer deux autres cousines-germaines de Mme Le Maistre,
filles de Simon Marion et de Madeleine de Montescot, qui moururent à Port-Royal: l'une, Sœur Catherine de Saint-
Alexis, en 1634; l'autre, Sœur Madeleine des Anges, en 1671.
148 Voir ci-après, Lettre MDLVIII.
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MDLVII. A M. Antoine Arnauld149. Consolations sur plusieurs
afflictions. De quoi nous devons remercier Dieu. Modérer
son travail «a mesure que le tems amoindrit les forces.»
Amboise, 22 septembre 1619.
Monsieur,
Je vous regarde de bien loin selon le cors, mays de bien pres selon l'esprit, et voy vostre
cœur paternel affligé de plusieurs accidens survenus despuis mon depart. Mais je voy encor, ce me
semble, que Dieu, vostre bon Ange, vostre prudence et vostre courage vous soulagent et fortifient
parmi toutes ces secousses. Vous sçaves trop bien la condition de cette miserable vie que nous
menons en ce monde, pour estre estonné des evenemens qui y arrivent de diverses sortes. Que vous
puis je donq dire en cette occasion? Laissons prendre a Dieu ce qu'il luy plait, et le remercions de
ce qu'il nous laisse, et encor plus de ce qu'il nous rendra le tout avec une usure nom-pareille au
jour auquel nous verrons sa face.
J'ay et auray a jamais part a vos contentemens et a vos desplaysirs, puisque je suis
inseparable d'affection d'avec vous et vostre famille benite de Dieu, laquelle, en la personne de M.
d'Andilly150 et de moy, vous conjure [30] d'avoir bien soin de vostre personne pour ne point tant
travailler des-ormais, qu'a mesure que l'aage decline vous deves vous soulager par un juste repos.
Vous feres incomparablement plus en dix ans de labeur moderé qu'en un ou deux de peyne
excessive. Il faut, certes, diminuer la charge a mesure que le tems amoindrit les forces.
Me promettant que vous prendres en bonne part cette cordiale remonstrance, je vous
supplie, Monsieur, de bien perseverer a m'aymer, comme sans fin je seray
Vostre tres humble et tres affectionné serviteur,
[FRANÇS, E. de Geneve.]
A Amboyse, ce 22 septembre 1619.
149 Fils aîné d'Antoine Arnauld et d'Anne Forget de Hermant, Antoine naquit en 1560. Jeune encore, il se fit une place
à part au barreau. De ses plaidoyers, celui contre les Jésuites eut le plus de retentissement: les Religieux furent expulsés
(1595). Quelques années avant ce triste succès, son éloquence lui avait valu l'alliance de Catherine Marion (voir ci-
dessus, note (146), p. 28). Sa femme lui apporta en dot Andilly (voir ibid., note (82), p. 8) et un hôtel à Paris, rue de
la Verrerie. C'est là que l'avocat général fixa sa demeure, là qu'il reçut plus d'une fois l'Evêque de Genève en 1619.
C'était la dernière année de sa vie, et les entretiens du saint Prélat le préparèrent, sans qu'il s'en doutât, à une mort
chrétienne. Homme intègre selon le monde, Arnauld ne poussait pas assez loin, parfois, le scrupule de la loyauté et de
la probité; l'on retrouvait aussi dans le catholique, sincère sans doute, l'ancien adversaire de la Ligue, le fils d'un
protestant converti. Au moins ne connut-il pas les erreurs de ses enfants!
150 Voir ci-dessus, note (124), p. 21.
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5.8 Page 48

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MDLVIII. A la Mère de Chantal, a Paris (Inédite). L'hôte de
l'Evêque de Genève à Bourges. Lettres du Saint et de a Sainte
trop lentes à parvenir. Début des tracasseries au sujet du
mariage de M. de Foras. La courte consolation des Sœurs de
Moulins. Pourquoi François de Sales n'écrit pas longuement
Bourges, 28 ou 29 septembre 1619151.
Ma tres chere Mere,
Icy a Bourges, entre les caresses non pareilles de nostre Monseigneur l'Archevesque152 en
sa mayson, j'ay receu vostre lettre du 23 de ce moys, unique, jusques a present, que j'aye receüe.
Mais j'admire bien plus que vous ayant escrit de Chatres (sic), d'Orleans, de Tours, [31]
d'Amboyse, vous n'en ayes encor receu pas un seul mot. Au moins suis-je asseuré que M. Flocard
vous aura veu, et fidelement mis en main ma lettre153 a l'heure que j'escris celleci, si quelque
disgrace ne luy est survenue.
Or sus, il faut que M. et Mlle de Forax digere (sic) ces amertumes, puisque Dieu le permet,
qui, comme j'espere, leur donnera ensuite des bonnes et solides consolations. Ell'a eu rayson de
dire que c'estoit elle qui avoit fait le mariage, car je ny ay, pour moy, contribué que ce que je ne
pouvois pas refuser a la verité des qualités de M. de Forax et que je ne devois pas denier a son
amitié154.
Nos Seurs ont esté consolees plus quil ne se peut dire, bien qu'en cet embaras incroyable
je ne les ay guiere veu en particulier, ains seulement a la Messe et exhortation155. De leurs
nouvelles, je vous en escriray par chemin entre ci et Moulins, comme des nouvelles de celles [32]
de Moulins entre Moulins et Lyon; car en ces villes ou on fait les complimens a Madame156, il ny
a nul moyen d'escrire qu'aux heures esquelles vous ne voules pas que j'escrive.
151 L'exhortation dont François de Sales parle dans cette lettre eut lieu le 27 septembre, fête des saints Côme et Damien
(voir tome IX de cette Edition, p. 217). Il écrit donc entre cette date et le 30, jour du départ de Bourges, plus
probablement le 29, dimanche. En effet, d'après l'abbé de la Mente Lettre du 30 septembre au duc de Savoie; Turin,
Archiv. de l'Etat, Francia, Lettere Ministri, Mazzo 17), le cortège princier arriva le 30 à Moulins, «de fort bonne
heure;» il avait donc fallu partir de grand matin.
152 André Frémyot (voir tome XII, note (669, p. 299).
153 Epist. MDLII.
154 Guillaume de Bernard de Foras, après avoir été éconduit par Françoise de Rabutin-Chantal (voir le tome précédent,
note (1088), p. 333), fut charmé des qualités d'une jeune veuve de dix-huit ans, Anne Le Beau, dame de Vaulgrenant,
et il demanda sa main. Cette alliance déplaisait souverainement aux parents de la veuve, surtout à M. de Montholon,
son oncle maternel, qui ne voulait donner sa nièce qu'à un homme de robe. L'Evêque de Genève consulté par les deux
parties les conseilla selon Dieu, et rendit témoignage du mérite et de la vertu de son ami. Malgré les protestations de
la famille, le mariage se fit dans le courant de septembre, peu après que le Saint eut quitté la capitale. Presque aussitôt
l'orage se déchaîna contre lui. On fonda, dit M. de Foras lui-même dans sa déposition (Process. remiss. Parisiensis,
ad art. 45), «des sinistres conjectures sur l'innocente affection dont ce Bienheureux m'honoroit, et» on publia «mille
choses controuvées, au prejudice de son honneur, faisant courir le bruit par tout Paris que c'estoit luy qui avoit manié
cest affaire, et l'avoit mené a fin avec peu de bonne foy, se servant de persuasions et artificieuses surprises, contraires
a son apparente candeur et a la saincteté de la vie delaquelle il s'estoit acquise la reputation.» Les lettres de François
de Sales montreront avec quelle résignation, quelle tranquillité d'esprit, il supporta cette épreuve. Ajoutons que la
mère d'Anne Le Beau, Mme de Sanzelles, alors retirée chez les Ursulines à Dijon (cf. tome XVI, note (94), p. 18),
n'entra pas dans les sentiments de son frère et des autres parents; elle approuva l'union que Dieu avait bénie, et surtout
elle défendit autant qu'elle le put le saint Evêque de Genève; car, rapporte l'historien de sa vie, «la haute estime qu'elle
avoit conceüe de ce grand Prélat l'obligeoit d'en faire l'apologie, de défendre ses intérests et de témoigner publiquement
qu'elle luy avoit obligation du mary qu'il avoit procuré à sa fille.» (Sénault, La Vie de Mme Catherine de Montholon,
veuve de M. de Sanzelles, Paris, 1653.)
155 Voir les notes (151) de la page précédente, et (159), p. 34.
156 A son arrivée à Bourges, Christine de France, princesse de Piémont, «fut rencontree par le mere et eschevins a troy
lieus, accompagnés d'environ 50 chevaux. A l'entree de la ville, tous les habbitans ce treuverent en armes et luy firent
une belle salve, et tout le canon tira pareillement; et fut lougee au lougis du Roy, ou elle fut visitee de leur Evesque et
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5.9 Page 49

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C'est pourquoy, bon soir, ma tres chere Mere; Dieu soit a jamais au milieu de nostre unique
cœur. Amen.
Je salue de toute mon affection nos cheres Seurs. Amen.
Ma tres chere Mere, je partz ainsy, sans loysir d'escrire davantage; mais salues, je vous
supplie, nos bonnes dames. Nostre Seigneur soit nostre tres unique praetention. Amen.
A Madame
[Mad]ame de Chantal,
Supre de Ste Marie de la Visitation.
Paris.
Revu sur l'Autographe conservé à la Visitation de Limoges.
de tous les cors de la cité.» (Lettre de l'abbé de la Mente, déjà citée.) A Moulins, les memes honneurs furent rendus à
la princesse.
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5.10 Page 50

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MDLIX. A la Mère Rosset Superieure de la Visitation de
Bourges157. Quelque chose qui est «demeuré sur le cœur» du
Saint. Un métier plus difficile que celui de reprendre. Ne
pas être prompte à promettre, mais agit avec conseil. Obtenir
à la fois le respect et l'amour de ses inférieurs. La douceur ne
doit point ressembler à la timidité.
Varennes, 2 octobre 1619.
Ma tres chere Fille,
Je retourne en arriere vous revoir en esprit et saluer vostre chere ame par ce billet, ne me
pouvant contenter [33] de cet a Dieu si court que je fus forcé de vous dire158, m'estant demeuré sur
le cœur que je ne vous parlay pas asses clairement sur le sujet de vostre conduitte en
l'administration de vostre charge, selon que je m'estois proposé de vous en entretenir un peu plus
amplement, si j'en eusse eu le loysir. Or, je repare cette faute au mieux que je puis, vous disant: 1.
que vous ne monstries point cette lettre que je ne fay que pour vous159.
2. Gardes vous bien de tomber en aucun descouragement pourvoir quelque petite
murmuration, ou quelque sorte [34] de reprehension qui vous soit faite. Non, ma tres chere Fille,
car je vous asseure que le mestier de reprendre est fort aysé, celuy de faire mieux, difficile; il ne
faut guere de capacité pour treuver les defautz et ce qu'il y a a redire en ceux qui gouvernent et en
leur gouvernement. Et quand on nous reprend ou qu'on nous veut marquer nos imperfections en la
conduitte, nous devons doucement tout ouÿr, et puis proposer cela a Dieu et nous en conseiller
avec nos aydes ou coadjutrices; et apres cela, faire ce qui est estimé a propos, avec une sainte
confiance que la divine Providence reduira tout a sa gloire.
3. Ne soyes pas prompte a promettre, mays demandes du loysir pour vous resoudre es
choses de quelque consequence; cela est propre pour bien asseurer nos affaires et pour nourrir
157 La vie de la Mère Anne-Marie Rosset était «digne de ces premiers tems de l'Eglise où l'Esprit de Dieu se répandait
avec profusion,» et la Providence «s'y est marquée par des traits si merveilleux» que l'historien en retranche la plus
grande partie, de peur de n'être pas cru. Une simplicité parfaite et une exacte docilité à la grâce l'élevèrent rapidement
à ces hauteurs de contemplation qui ravissaient le Fondateur lui-même et lui fournirent le sujet de bien des pages de
son Traitté de l'Amour de Dieu (cf. tome IV de cette Edition, p. LV). Mais les héroïques vertus de cette âme, plus
encore que ses extases et son don de prophétie, la rendirent chère à saint François de Sales et à la Mère de Chantal.
Humilité profonde, silence rigoureux, obéissance aveugle, tels furent les traits caractéristiques de cette vénérable
Religieuse de la Visitation.
Née à Saint-Claude le 23 avril 1593, elle eut le bonheur de recevoir dès l'âge de onze ans la bénédiction et
les conseils de l'Evêque de Genève (voir tome XIV, note (662), p. 230). Le 27 septembre 1612, elle prit l'habit au
monastère d'Annecy, et fut professe le 29 septembre 1613. Assistante-commise pendant l'absence de la Mère de
Chantal en 1618, Sœur Anne-Marie quitte la Savoie cette même année pour la fondation de Bourges où elle est élue
Supérieure (voir le tome précèdent, note (1158), p. 352). On vit bientôt que cette grande contemplative était peu propre
à manier les choses temporelles, et, sûrs de sa vertu, les Fondateurs lui adjoignirent une Sœur pour diriger tout
l'extérieur, ne lui laissant que le soin du spirituel (voir tome XVII, note (896), p. 261). Cette demi-mesure ne pouvait
durer, et en 1622, avant la fin de son triennal, elle fut déposée par l'ordre de la Mère de Chantal qui l'envoya à Dijon.
Dans la réforme de l'abbaye de Tart qu'on lui confia en 1624, Dieu permit encore, malgré le succès, que son genre de
vertu ne satisfît pas tout le monde. En 1629, nous retrouvons la Mère Rosset à la tête de la Communauté de Crémieux,
puis elle revient à Annecy (1652), où pendant de longues années elle servit de modèle aux nouvelles venues et se
montra toujours «la digne élève du saint Fondateur, et une des plus exactes Religieuses de tout l'Ordre de la
Visitation.» Sa fin bienheureuse arriva le 21 mai 1667. (Voir sa biographie dans Les Vies de plusieurs Supérieures de
l'Ordre de la Visitation Sainte Marie, Anneci, Humbert Fonteine, MDCXCIII.)
158 «Pendant le séjour qu'il fit à Bourges (voir la lettre précédente), l'Evêque de Genève fut si occupé, soit auprès de
S. A. R., soit à recevoir les honneurs et les visites qu'on lui rendait comme à une personne dont la sainteté était connue
de tout le monde, qu'il ne put donner à ses chères Filles tout le temps qu'elles auraient désiré.» (Hist. de la Fondation
de la Visitation de Bourges.)
159 Tout ce qui précède est inédit.
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6.1 Page 51

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l'humilité. Saint Bernard escrivant a l'un de mes praedecesseurs, Arducius, Evesque de Geneve160:
«Fay,» dit-il, «toute chose avec conseil,» mais conseil de peu de gens, qui soyent paysibles, sages
et bons.
4. Faites si suavement cela, que vos inferieures ne prennent point occasion de perdre le
respect qui est deu a vostre charge, ni de penser que vous aves besoin d'elles pour gouverner; ains
faites leur connoistre doucement, sans le dire, que vous faites ainsy pour suivre la regle de la
modestie et humilité, et ce qui est porté par les Constitutions161; car voyes vous, ma chere Fille, il
faut tant qu'il est possible, faire que le respect de nos inferieurs envers nous ne diminue point
l'amour, et que l'amour ne diminue point le respect.
5. Ne vous troubles point d'estre un peu rudement contrerollee par cette bonne ame de
dehors162, mays passes outre en paix, ou a faire selon son advis es choses esquelles il n'y a point
de danger de la contenter, ou a faire autrement quand la plus grande gloire de Dieu le requerra; et
alhors il faut, le plus dextrement qu'on pourra, la gaigner, affin qu'elle le treuve bon.
6. Sil y a quelque Seur qui ne vous traitte pas avec asses de respect, faites le luy sçavoir
par celle des autres [35] que vous jugeres la plus propre a cela, non comme de vostre part, mais de
la sienne. Et affin qu'en toutes façons vostre douceur ne ressemble point a la timidité et ne soit
point traittee comme cela, quand vous verries une Seur qui feroit profession de n'observer pas le
respect, il faudroit, doucement et a part, vous mesme luy remonstrer qu'elle doit honnorer vostre
office et cooperer avec les autres a conserver en dignité la charge qui lie toute la Congregation en
un cors et en un esprit.
Or sus, ma tres chere Fille, tenes vous bien toute en Dieu, et soyes humblement courageuse
pour son service; et recommandes luy souvent mon ame qui, de toutes ses affections, cherit tres
parfaitement la vostre et luy souhaite mille et mille benedictions.
Quand je vous dis: ne monstres pas cette lettre, je veux dire: ne la monstres pas
indifferemment; car si c'est vostre consolation de la monstrer a quelqu'une, je le veux bien.
A Varennes163, le 2 octobre 1619.
Je salue cherement nos Seurs, notamment celles qui sont de nostre mayson d'Annessi, que
j'ayme incomparablement164.
A ma tres chere Seur en Nostre Seigneur,
Ma Sr Anne Marie,
Supre en la Congregation de Ste Marie de la Visitation.
A Bourges.
Revu sur une copie faite par la Mère Rosset, conservée à la Visitation d'Annecy.
160 Epist. XXVII.
161 Constit. XXX.
162 Il s'agit très probablement de Mme de Jars, amie et bienfaitrice de la Maison de Bourges. (Voir ci-après, note (190),
p. 43.)
163 Varennes-sur-Allier fut la première halte après Moulins. Le lendemain, 3 octobre, Christine de France couchait à
Châteaumorand, où le marquis et la marquise d'Urfé firent «bonne chere a Madame et a toutte sa compagnie.» (Lettre
de l'abbé de la Mente, du 4 octobre, au duc de Savoie; Turin, Archiv. de l'Etat, Francia, Lettere Ministri, Mazzo 17.)
164 Les Sœurs Françoise-Gabrielle Bailly, venue de Moulins pour seconder la Mère Rosset (voir tome XVI, note (841),
p. 261), Marie-Marthe Legros (tome XV, note (672), p. 233), et Marie-Hélène Le Blanc, toutes trois professes
d'Annecy (tome XVIII, note (1158), p. 352).
Ces deux dernières lignes sont inédites.
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6.2 Page 52

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MDLX. A la Mère de Chantal, a Paris (Inédite). Pourquoi
François de Sales n'a pu voir à souhait Mme de Villesavin.
Témoignages d'estime qu'il a reçus de la Reine mère. Les
Prélats de la cour et les bons propos de l'Evêque de Luçon.
On cherche à retenir le Saint en France; ses sentiments à ce
sujet. Projet d'itinéraire. Heureuses rencontres à Tours et à
Bourges. Ce qu'on perd à la cour. De quoi on blâme la
Mère Anne-Marie Rosset; conseils que lui a donnés le saint
Fondateur. La future fondation d'Orléans et les aversions de
Mgr Frémyot. Nouvelles du Monastère de Moulins où Mme du
Tertre «exerce sa vanité fort honnorablement.»
Roanne-Voreppe, 5-19 octobre 1619165.
Il est bien teins, ma tres chere Mere, que je vous rende comte de mon voyage despuis Tours
jusques icy. Nous partismes donq de Tours le samedi166, avec certes du desplaysir d'y laisser la
chere Mme de Villesavin167 malade, non sans quelque danger. Je ne la vis que deux fois, non
seulement par ce que cette cour si grande et en laquelle j'avois tant de complimens a faire m'en
empescherent, mais aussi, et encor plus, par ce que monsieur de Villesavin168 estoit en une si
grande anxieté, crainte qu'on ne la fit parler, que nonobstant tout le soin que j'avois pour cela, il
estoit merveilleusement en peine. Et moy je le suis certes un peu jusques a ce que je sache qu'elle
soit hors de peril, car je la cheris grandement pour sa bonté et veritable vertu.
La, je vis la Reyne mere et luy fis la reverence a l'arrivee et au depart; et elle me favorisa
grandement par le tesmoignage qu'elle rendit du desir qu'ell'avoit eu de [37] me voir, et de celuy
qu'ell'avoit de m'ouïr et me voir plus longuement169. J'appris a connoistre tout plein de Praelatz, et
particulierement M. l'Evesque de Lusson, qui me jura toute amitié et me dit qu'en fin il se rangeroit
a mon parti, pour ne penser plus qu'a Dieu et au salut des ames170. Je vis M. le Cardinal de la
165 Ces pages semblent avoir été commencées à Roanne, d'après ce que dit le Saint, c'est-à-dire le 5 ou le 6 octobre;
elles s'achèvent à Voreppe, où la cour passa le 18 ou le 19 du même mois. Nous n'avons pas la lettre entière, qui se
termina sans doute à Grenoble, le même jour.
166 21 septembre (voir ci-dessus, p. 24, note).
167 Isabelle Blondeau, dame de Villesavin (voir le tome précédent, note (1240), p. 384).
168 Jean Phélipeaux, seigneur de Villesavin (voir ibid., note (1328), p. 417).
169 Voir ci-dessus, p. 20.
170 Armand du Plessis-Richelieu, évêque de Luçon (1606), grand aumônier de la Reine mère, secrétaire d'Etat (1616),
se connaissait en hommes. Déjà en 1617, sur la seule réputation de l'Evêque de Genève, il approuvait le choix que
voulait faire de lui la cour de Savoie comme ambassadeur extraordinaire à Paris (cf. La Nunziatura di Francia del
Card. Bentivoglio, vol. I, p. 79), et s'associait aux regrets du Roi qui, bien qu'il «ayt agreable qui que ce soit qui vienne
vers» lui «de la part de Son Altesse,... eust eu un particulier contentement que c'eust esté le dict sieur de Genève pour
les rares qualités qu'» il «estime en luy.» (Lettres du Cardinal de Richelieu, 18 janvier 1617.) Maintenant, il subissait
comme tant d'autres l'ascendant du Serviteur de Dieu. Celui-ci pénétrait-il l'avenir? voyait-il la fortune étrange et la
renommée sujette à contradiction de ce jeune Prélat de trente-cinq ans? Quels changements dans les destinées de
la France et de l'Europe, si le futur ministre de Louis XIII, se rangeant «au parti» de François de Sales, ne s'était plus
occupé que de «penser a Dieu et au salut des ames»! L'amitié jurée à Tours survécut au moins à la mort du Saint, et
surnagea au-dessus de la gloire qui en engloutit tant d'autres. En 1630, le Cardinal, traversant la Savoie à l'occasion
de la guerre de la succession de Mantoua, s'arrêta au tombeau de fEvêque de Genève et y rendit ses vœux avec grande
révérence, déposent plusieurs témoins du second Procès de Béatification.
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6.3 Page 53

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Rochefocaut171, qui m'obligea infiniment, et me dit qu'il desiroit faire l'union des Audriettes172, et
quil auroit un soin tout particulier de la Mayson de Sainte Marie, c'est a dire, dit il, de vos Filles.
Or, je vous dis tout ceci affin que si la Reine mere va demeurer a Paris, vous puissies aux
occurrences employer la faveur de M. de Lusson, puysquil m'ayme, et que vous esperies aussi en
celle de M. le Cardinal.
Je vis enfin M. le Cardinal de Retz, qui d'abord m'invita a demeurer en France par une
proposition laquelle, [38] estant bien mesnagee, seroit la plus convenable a mon esprit de toutes
celles qu'on m'eut peu faire173. J'en conferay avec M. de Berule et avec mon parfait ami M. des
Hayes, duquel, quand il viendra a Paris, vous pourres sçavoir plus entierement la chose; car je luy
escriray quil vous en parle, bien que nous fussions demeurés d'accord que nul n'en sceut chose du
monde, d'autant que je pensois vous le pouvoir escrire au long; ce que je voy maintenant n'estre
pas possible ni asseuré. L'affaire n'est pas encor preste, ni ne le sera pas si tost; et tandis,174 nous
escouterons ce que Dieu en ordonnera, a la plus grande gloire duquel je veux tout reduire et sans
laquelle je ne veux rien faire, moyennant sa grace, ainsy que je fis entendre a mondit seigneur le
Cardinal d'abord, et le luy repliquay de rechef estant a Amboyse175, ou il m'en parla encor plus
cordialement; et Monsieur le Cardinal de la Rochefocaut m'en tendit un mot devant M. le Prince176,
mais en sorte que cela ne fut [39] point consideré. On me dit despuis que M. l'Archevesque de
Sens177 en avoit parlé fort longuement au Roy, qui y avoit pris playsir. Mays en fin, si Dieu ne le
veut de sa volonté d'approbation, je ne le veux jamais vouloir, et ni mettray du tout rien du mien
que mon consentement a la Providence celeste, quand je connoistray que ce sera son service.
Le Roy me donna ses commandemens fort amiablement, et tant luy que la Reine mere
tesmoignerent a Son Altesse qu'ilz avoit (sic) a playsir que je suivisse Madame. La, a Amboyse,
nous receumes l'advis que nous irions a Nice et a Chasteaumorand178; avant hier nous fusmes
advertis que nous allions droit a Grenoble, et de la en Savoye, a Chamberi, d'où je me retireray a
171 François de la Rochefoucault (voir le tome précédent, note (1249), p. 387).
172 Voir ibid., note (1155), p. 351. «J'espère de vous écrire dans huit jours, car il faudra avertir Monseigneur de ce qui
sera été résolu des Dames Haudriettes, lesquelles enfin l'on nous remettra,» dit la Mère de Chantal à la Mère Favre le
30 décembre 1619. Et le 13 janvier suivant, elle ajoute: «L'affaire des Haudriettes s'avance; nous n'avons encore vu
les articles que l'on dit qui sont fort à notre avantage.» (D'après les Autographes; voir Lettres, vol. I, 1877, pp. 360,
367.)
173 Le cardinal de Retz (voir le tome précédent, note (1203), p. 370), oublieux des intérêts de son propre frère, Jean-
François de Gondi, avait conçu le projet de faire de François de Sales son coadjuteur à l'évêché de Paris. Parmi les
amis de l'Evêque de Genève, les avis furent différents; les uns, ne voyant pas la future succession assez formellement
garantie, trouvaient la proposition peu honorable; les autres se demandaient s'il fallait enlever des frontières de France
et d'Italie ce «mur inexpugnable» contre l'hérésie. D'autre part. Dieu n'avait-il pas destiné ce grand Prélat pour être
«comme sur le théâtre du monde,» servant «d'exemple et de lumière» à tous? MM. des Hayes, Vincent, du Val, etc.,
s'occupèrent spécialement de cette affaire qui resta en suspens jusqu'au milieu du printemps 1620. François de Sales,
indifférent à tous les côtés humains, attendit dans le calme la manifestation de la volonté de Dieu, et l'on peut dire que
la Providence seconda l'inclination secrète de son cœur en le laissant à Annecy. (Voir Lettres de Ste J.-Fse de Chantal,
vol. I, pp. 370, 378.) Le seul motif qui le fit hésiter un instant, D. Berretta, Barnabite, nous l'apprend dans sa déposition
au Ier Procès de Genève (ad art. 17-22). D'après son témoignage, le Serviteur de Dieu donnait à entendre dans une
lettre aujourd'hui perdue, que voyant dans la coadjutorerie de Paris une chance de succès pour un voyage en
Angleterre, l'ardent désir de travailler à la conversion du roi Jacques Ier l'aurait incliné à accepter la proposition du
cardinal de Retz.
174 Les trois lignes suivantes font partie, dans l'édition de 1626, d'un texte fabriqué, daté du 26 février 1620 (voir plus
loin la lettre autographe de la même date), et la fin de cet alinéa, aussi bien que les lignes 10-16, p. 38, et 1-4, p. 39,
ont été imprimés dans un catalogue d'Etienne Charavay, Paris, 1885.
175 Arrivée le 21 septembre à Amboise, la cour en repartit le lundi 23.
176 Victor-Amédée, prince de Piémont.
177 Le frère du cardinal du Perron, Jean, lui avait succédé sur le siège archiépiscopal de Sens. Il l'occupa peu de temps,
car il mourut le 4 octobre 1621.
178 Il fut question en effet de conduire la nouvelle princesse de Piémont à Nice pour y passer l'hiver, et se rendre
ensuite, par les galères, en Italie; mais plusieurs raisons firent abandonner le projet: la longueur et la fatigue du
voyage,la dépense, et les désirs des seigneurs français du cortège. On arriva à Châteaumorand en Forez le soir du 3
octobre (voir ci-dessus, note (163), p. 36), et le lendemain, un ordre de Charles-Emmanuel dirigeait la cour sur Turin
par Grenoble.
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6.4 Page 54

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Annessi. Il falloit escrire toutes ces choses du monde a ma Mere, affin qu'elle sache tout:
maintenant, parlons des affaires de Dieu.
A Tours, je vis les Meres Carmelines et y fis un'exhortation, et fus fort edifié de voir la
Superieure179, fille de feu Mlle Acarie, qui est une ame de haute vertu et d'esprit merveilleusement
amiable et franc, et joyeux et gay. Je vis le P. Suffren, avec mille reciproques consolations, et
communicasmes fort franchement; c'est un grand personnage, et veritablement humble et
sincere180. [40]
A Bourges, il est incroyable combien de faveurs nous receumes de M. nostre Archevesque,
qui est veritablement cordial181; mais nous eumes fort peu de tems a parler. M. de Neucheze182,
qui fait une particuliere profession de vous aymer, me dit quil vous avoit escrit pour se plaindre de
la defiance que son cousin avoit de luy183; et que quand il vint a Bourges, il ne vint nullement a
l'archevesché et ne vid point M. l'Archevesque, qui est fort bien avec M. le Mareschal184. Il faudra
donner un peu de loysir aux espritz de digerer leurs petitz dépitz, et puis tout se remettra.
M. de Saint Aignan185 n'est encor point venu; mais il faut que je vous die que nous avons
veu en sa mayson tant de marques de la pieté de Mme de Saint Aignan que j'en suis devenu tout
amoureux, m'estant advis qu'elle sera un jour sainte si elle persevere avec humilité. [41]
Penses vous, ma tres chere Mere, que des Roane j'aye eu le loysir de continuer cette lettre
jusques icy a Vareppe, deux liëues pres de Grenoble186? C'est une grande perte de tems que d'estre
a la cour, et plusieurs y perdent encor l'eternité. Non pas certes pour celleci, car tout y va presque
selon Dieu; et c'est une grande consolation de voir nostre petite Madame si gave et toute bonne, et
Madame de Vandaume, qui est un (sic) parfaite bonté187, et tout son train si bien rangé et vertueux.
179 La Mère Marguerite du Saint-Sacrement (voir ci-dessus, note (133), p. 24).
180 Jean Suffren (voir tome XIV, note (380), p. 126) naquit à Salon en Provence, le 30 novembre 1571, et entra dès
l'âge de quatorze ans dans la Compagnie de Jésus, où il fit les quatre vœux en 1603. Professeur remarquable, il fut
ensuite directeur d'âmes de grand mérite et prédicateur justement apprécié. La sainteté de sa vie, son savoir et sa
modestie le désignèrent à Marie de Médicis qui le choisit pour son confesseur. Trente ans, il demeura à ce poste plein
d'honneur et de périls, se tenant éloigné des intrigues de la cour, mais remplissant toujours courageusement son devoir.
De 1626 à 1631, il dirigea même à la fois la mère et le fils, car Louis XIII qui l'aimait, avait été heureux de lui confier
sa conscience. Mais quand la Reine mère, sacrifiée à Richelieu, dut s'exiler, le P. Suffren n'hésita pas; il sollicita et
obtint du Roi la permission de suivre la reine malheureuse, et ne la quitta plus. le 15 septembre 1641, il mourait à
Flessingue, en se rendant avec elle de Londres à Cologne. (Cf. Guilhermy, Ménologe de la Cie de Jésus, 1892,
Assistance de France, II, p. 292; Prat, Recherches... sur la Cie de Jésus en France, 1876, tome III; Crétineau-Joly,
Hist. de la Cie, 1859, tome III, passim.) L'illustre Jésuite, l'un des déposants au Procès de Paris, fut très estimé et aimé
de saint François de Sales et de sainte Jeanne de Chantal. Lors de la fuite de Blois en février 1619, le P. Suffren se
retira dans la capitale; il put donc voir souvent les deux Fondateurs, et il revit encore l'Evêque de Genève à Lyon où
il se trouvait en 1622 à la suite de la cour.
181 Voir ci-dessus, Lettre MDLVIII, et note (151), p. 31.
182 Jacques, grand-vicaire et chancelier de l'Eglise de Bourges, neveu de la Mère de Chantal. (Voir tome XIV, note
(508), p. 170.)
183 Peut-être que Celse-Bénigne de Rabutin-Chantal voyait d'un œil jaloux l'influence que Jacques de Neufchèzes
exerçait sur leur oncle commun, l'Archevêque de Bourges.
184 S'agit-il du maréchal de Lesdiguières? L'absence du nom le ferait croire; mais nous ne savons quelles relations
aurait eues Mgr Frémyot avec le gouverneur du Dauphiné.
185 Honorât de Beauvilliers, comte de Saint-Aignan, baron de la Ferté-Hubert, lieutenant-général du Berry, et maître
de camp de la cavalerie légère, avait eu pour parents Claude de Beauvilliers et Marie Babou de la Bourdaisière. Sa
femme, alliée de près à la marquise de Maignelais, était Jacqueline de la Grange, fille de François, seigneur de
Montigny, et de Gabrielle de Crevant. (Moreri, 1740, tome II.) M. de Saint-Aignan était frère de l'Abbesse de
Montmartre, dont François de Sales avait secondé le zèle pour la réforme de son Monastère. (Voir tome XII, p. 171.)
186 Là, le président de Saint-André, député par le Parlement du Dauphiné, vint saluer la princesse «et luy rendre toutte
sorte de complimans.» (Lettre de l'abbé de la Mente, du 19 octobre, au duc de Savoie; Turin, Archiv. de l'Etat, Francia,
Lettere Ministri, Mazzo 17.)
187 Bien des liens rattachaient François de Sales à Françoise de Lorraine, épouse de César, duc de Vendôme. Elle était
la fille de ce duc de Mercœur dont il avait prononcé l'éloge funèbre à Paris, le 27 avril 1602 (voir tome VII, p. 398),
et de Marie de Luxembourg, des comtes de Martigues, dont la famille de Sales s'honorait d'être vassale (voir tome
XII, note (198), p. 111). Son mari, grand prieur de France, avait été chargé d'accompagner la sœur du Roi jusqu'à la
frontière de Savoie; elle eut ainsi l'avantage de voir de près pendant un mois l'Evèque de Genève. Mme de Motteville
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A Bourges, je treuvay la pauvre Superieure188 entre les mortifications continuelles qu'on
luy fait sur ce qu'elle n'est pas habile aux choses du monde et trop facile a la reception des filles et
a la conduite des Seurs. La pauvrette est, nonobstant cela, toute douce et amiable. Je luy parlay et
a l'Assistente189 ensemblement, et dis qu'elle ne s'obligeast nullement a faire tous-jours venir
l'Assistente au parloir avec elle; mays qu'es affaires de consequence, apres avoir ouy ce qu'on
propose, elle prit loysir d'en conferer avec elle et les Coadjutrices, par ce qu'en cette sorte elle
conservera la dignité de Superieure et la bonne conduite des affaires ensemblement; et non pas
avec cette timidité avec laquelle elle n'osoit venir au parloir sans l'Assistente, de peur qu'on ne luy
parlast d'affaires temporelles: en quoy elle se tenoit trop sujette, et privoit les Seurs de deux
presences, [42] dont l'une pour le moins est requise pour tenir en devoir les Novices. Et dis a
l'Assistence (sic) qu'elle rendit tout respect a la Superieure, nonobstant le peu d'experience
qu'ell'avoit aux choses temporelles.
Mays quant a madame leur bonne protectrice190, elle ne sera pas satisfaite si on ne met
un'autre Superieure; car, dit elle, cette fille est faite pour estre un (sic) tres excellente Directrice,
et c'est dommage de la divertir au soin du temporel auquel elle ne sçauroit reuscir. Mays on verra
dans quelque tems ce quil faudra faire.
Monseigneur l'Archevesque et M. de Neuchaize ne peuvent souffrir qu'on parle d'une
Mayson a Orleans, et, comme je vous escrivis estant audit Orleans, ou je laissay ma lettre au P.
Lalemand191, il faudra conduire prudemment la reception ou acceptation d'une Mayson, et estre
bien asseuré de ce qui se promettra; car on me dit que le peuple y estoit un peu dur, et les espritz
malaysés a conduire. Mays le P. Lalemant, avec sa charité et prudence, pourra donner les advis
asseurés de toute chose. Il faudra tous-jours bien peser l'extreme aversion que Monsieur
l'Archevesque a a cela192. [43]
Je treuvay la pauvre Seur Jeanne Françoise193 toute attendrie dequoy, a son advis, vous ne
pouves avoir de l'inclination pour elle; elle s'est grandement changee, et marche de bon pied en la
douceur et humilité, a ce que j'appris. J'ay escrit sur chemin a la Superieure194 pour la soulager un
peu, puisque mesme je ne peu luy dire a Dieu qu'a la desrobee, non plus qu'a nos Seurs de Moulins
(Mémoires, tome I, chap. VII, p. 148) ne craint pas d'appeler la duchesse de Vendôme «une sainte et la mère des
pauvres.» De 1643 à 1649, elle partagea la disgrâce de son fils, le duc de Beaufort, et mourut en 1669.
188 La Mère Anne-Marie Rosset.
189 Sœur Françoise-Gabrielle Bailly (voir tome XVII, note (896), p. 261).
190 Fille de Guy de Monceaux, seigneur de Houdan, et de Jeanne de la Châtre, Anne avait épousé (mai 1579) François
de Rochechouart, seigneur de Jars et de Marceilles, qui la laissa veuve en 1596. Le 1er juillet 1620, Mme de Jars mourait,
léguant au Monastère de la Visitation de Bourges, qu'elle avait beaucoup aimé et protégé, «cinq mille livres et sa petite
chapelle garnie;» mais les héritiers ne voulurent pas remplir cette pieuse intention. (Moreri, 1740, tome VII, et Hist.
de la Fondation de la Visitation de Bourges.)
191 Le P. Pierre Lallemant était né à Paris le 4 juillet 1581; il entra au noviciat de la Compagnie de Jésus à Rome, le 2
avril 1611, et devint profès des quatre vœux à Paris, le 14 avril 1626. C'est encore dans cette ville qu'il mourut le 17
octobre 1649. Il y était revenu en 1625, après avoir passé à La Flèche, à Orléans, à Nevers, à Moulins, exerçant les
différentes charges de professeur, ministre, prédicateur, etc. (D'après une Note du R. P. Hafner, Archiviste général de
la Compagnie.) Quand François de Sales le vit à Orléans en 1619, le P. Lallemant était préfet de la Congrégation; la
même année, il était appelé à Nevers où il se dévoua beaucoup au nouveau Monastère de la Visitation. La sainte
Fondatrice recommandait à la Mère de Monthoux d'avoir à lui son «principal recours» (Lettres, vol. I, p. 456), et
l'Evêque de Genève le conseillait à ses Filles comme confesseur extraordinaire.
192 Nulle trace dans l'Histoire de la Fondation du Monastère d'Orléans des oppositions qu'y apporta Mgr Frémyot. Cet
établissement était désiré par la comtesse de Saint-Pol, femme du gouverneur d'Orléans, et par Mme de Royssieux. Il
eut lieu le 9 septembre 1620; les détails seront donnés plus tard.
193 Sœur Jeanne-Françoise Estienne, professe du Monastère de Lyon, que la Mère de Chantal avait emmenée à la
fondation de Bourges (voir tomes XVII, note (1195), p. 359, et XVIII, note (1158), p. 352). La Sainte, en 1622, la
ramena à Lyon, d'où elle partit en 1640 pour coopérer à l'établissement de la Visitation de Bordeaux. Elle mourut dans
cette ville le 21 juin 1658.
194 Epist. praeced.
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et de Lyon195, a cause de la surprise de mon depart que, par force, il me faut faire soudain comme
Madame monte en carosse, par ce que je suis de la carosse qui va immediatement devant elle.
A Moulins, je treuvay tout bien, hormis que nostre Seur a besoin d'une Directrice, ne
pouvant fournir a tout elle mesme, a cause du bon nombre de Novices qu'ell'a196. La fille des
revelations est toute desabusee, et croy qu'elle fera prou. Mlle du Tertre197 exerce sa vanité fort
honnorablement ceans, ayant sa chambre tapissee et son lit de soye; mays il faut un peu la
supporter, il y a esperance de mieux. Helas, que les enfans du monde sont niays de vouloir estre
estimés grans et dignes de respect par ces mollesses d'esprit!198
……………………………………………………………………………………………………..
Revu sur l'Autographe conservé à la Visitation de Harrow (Londres). [44]
MDLXI. A la Soeur de la Roche, Assistante-Commise a
Annecy199. Réponse au sujet d'un délai pour la profession d'une
Novice.
Chambéry, 23 octobre200 1619.
Ma tres chere Fille,
On peut, pour le sujet dont vous m'escrives, retarder la profession de nostre Seur201; ce que
je vous escrirois plus amplement, n'estoit que je suis si pressé que je n'ay loysir de rien adjouster.
Et cependant je me dispose de vous voir dans 4 ou cinq jours, comme je desire. Vous pourres donq
recevoir ce que ce sieur porteur donnera, et puis, en son tems, la profession et le reste se feront.
Vostre plus humble frere en Nostre Seigneur,
FRANÇS, E. de Geneve.
A Chamberi, le [2]3 octobre 1619.
202A ma tres chere Fille en N. Sr,
Ma Seur Claude Agnes,
Superieure des Seurs de la Visiton.
Anessi.
Revu sur l'Autographe conservé à la Visitation de Poitiers. [45]
195 C'est le 7 octobre que Christine de France avait fait son entrée solennelle à Lyon. Elle y fit un séjour assez prolongé,
puisque le 19 seulement elle atteint Voreppe, après avoir passé par la Côte-Saint-André. (D'après la lettre de l'abbé de
la Mente, déjà citée.)
196 La Mère Jeanne-Charlotte de Bréchard, supérieure de Moulins, avait alors sept novices dejà voilées: les Sœurs
Marie-Catherine Chariel, Marie-Catherine Ravateau, Françoise-Catherine de Gerbes, Marie-Marthe Bachelier,
Jeanne-Elisabeth du Brugerat, Claire-Geneviève de Feu, Louise-Antoinette Ogier et Marie-Séraphine Delalande.
197 Voir le tome précédent, note (1248), p. 386.
198 Voir ci-dessus, note (165), p. 37.
199 Voir le tome précédent, note (1159), p. 353.
200 L'autographe porte clairement: 3 octobre, mais c'est, a coup sur, une distraction du saint, puisqu'il n'arriva a
chambery que le 22 ou le 23; cette derniere date doit etre la vraie.
201 Sœur Jeanne-Marie de Fontany (voir le tome précèdent, note (967), p. 291) terminait son année de probation le 19
octobre 1619; mais le règlement de ses affaires temporelles fit retarder l'émission de ses vœux jusqu'au 26 mars 1623.
202 L'adresse n'est pas de la main du saint Evêque.
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MDLXII. A Monseigneur Jean-Pierre Camus, Evêque de
Belley203. Deux amis qui n'ont pu se dire adieu, ni se rencontrer
en chemin. le «nid» de l'Evêque de Genève bien loin de
l'«aymable Paris» de l'Evêque de Belley. Pourquoi les PP.
Capucins sont plus propres à faire le bien dans le diocèse de Mgr
Camus. Messages d'honneur et d'affection.
Chambéry, 27 octobre 1619.
Monseigneur,
L'affection que vous aves pour moy vous fera, comme je croy, asses imaginer quel a esté
mon desplaysir de partir de Paris sans avoir eu lhonneur de prendre congé de vous, que peut estre
ne reverray-je jamais204. A Chaires (sic) on me dit que vous esties a Estampes; a Estampes on me
dit que vous esties a Chatres, et je croy que vous n'esties ni en l'un ni en l'autre des lieux, mays ou
a Maubuisson ou par les chemins. En somme, me voyci en mon nid; quelle qu'en soit la vallee, il
me sera tous-jours avis que vous en soyes a une journee prés, et en vain, car vous seres dans vostre
aymable Paris, parmi cette multitude d'ames que Dieu veut benir par vostre entremise205.
Or, passant icy et entre les a Dieu que je dis a nostre court206, les RR. PP. Capucins m'ont
fait entendre [46] comme ilz sont desirés a Belley, ou d'autres Religieux se desirent en leur place;
et je sçai, Monseigneur, que vostre intention premiere fut d'avoir des Religieux qui administrassent
le saint Sacrement de l'absolution, mays que si les Capucins le pouvoyent administrer, vous les
praefereries a tous autres. Et a la verité, ilz sont praeferables pour mille raysons, puisque
maintenant ilz ont faculté de confesser en cette Province; car ilz ont des gens de capacité, une
renommee et approbation incomparable des peuples, une pauvreté qui incommode le moins ceux
qui les entretiennent, une correspondance entr'eux qui peut tenir en observance les Religieux, et
une tres particuliere inclination a vous honnorer. C'est pourquoy, vostre Belley attendant sur ce
vos commandemens, je vous supplie de contribuer vostre authorité a ce parti, duquel je sçai que
vostre bercail sera grandement consolé, et vous extremement satisfait207.
Ce pendant, Monseigneur, faites moy la grace de ne point permettre que mon esloignement
de vostre presence diminue vostre sacree bienveuillance envers moy qui vous honnoreray a jamays
tres cordialement, et seray invariablement
Vostre tres humble et tres obeissant
frere et serviteur,
FRANÇS, E. de Geneve.
203 Voir tome XIV, note (426), p. 139.
204 Les craintes du Saint, motivées par le séjour prolongé de l'Evêque de Belley à Paris, ne se réalisèrent pas. Mgr
Camus était à Annecy le 27 juillet 1620, et les deux amis passèrent plusieurs jours ensemble.
205 Sous l'impulsion de François de Sales, l'Evêque de Belley s'était donné avec grand dévouement au ministère de la
confession et de la direction des âmes, et les dames de Paris goûtaient beaucoup ses conseils.
206 Lesdiguières, après avoir fait une réception splendide à la princesse de Piémont dans la capitale de son
gouvernement, l'accompagna, le 22 octobre, jusqu'à Chambéry où elle fit son entrée ce même jour avec son époux
Victor-Amédée. Le duc de Savoie, qui était Venu lui-même saluer sa belle-fille à Grenoble, repassait presque seul
rapidement les monts pour préparer le passage de Madame Royale. Le 30 octobre, Leurs Altesses se mettaient en route
pour Turin, et sans tarder l'Evêque de Genève rentrait à Annecy. (Cf. ci-après, note (212), p. 49.)
207 Le 9 août 1620, le Conseil de Ville de Belley vote l'admission des RR. PP. Capucins. Ceux-ci étaient représentés
à l'assemblée par le P. Dominique de Chambéry et le P. Bonaventure de Lyon. (Archiv. dép. de l'Ain, G. 165; voir la
lettre du Saint à Mme Bellot, 10 décembre 1620.) Mgr Camus, sur la demande duquel agissaient les magistrats, bâtit le
nouveau couvent à ses frais; il entretint longtemps les Religieux «de toutes choses, et enfin, il leur donna sa
bibliothèque qui estoit nombreuse et choisie.» (Oraison funebre de Messire Jean-Pierre Camus, ancien Evesque de
Belley,... par Messire Antoine Godeau, Evesque de Grasse et de Vence. A Paris, chez Antoine Vitré, M.DC.LIII.)
L'église des Capucins ne fut inaugurée qu'en 1630, sous Mgr de Passelaigue.
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A Chamberi, le 27 octobre 1619.
208Si je n'esperois d'escrire a la Visitation de Paris et a Maubuisson bien tost, je vous
supplierois de commander a M. Jantet209 qu'il fit mes honneurs en ces deux [47] Maysons; mays
puisque dans deux ou trois jours je les feray moymesme par lettres, je me contenteray, sil vous
plait, quil asseure monsieur et madame de Saint Bonet210 de mon humble obeissance; et quand
j'escriray par dela, je n'oublieray pas de rendre mon devoir a madame de Herce211.
A Monseigneur
Monseigneur le Rme Evesque de Belley,
Prince du St Empire.
Revu sur l'Autographe conservé à Milan, Archives du prince Trivulzio. [48]
MDLXIII. A la Mère de Chantal, a Paris (Fragment). L'unique
ambition du grand Aumônier de Christine de France.
Pourquoi il méprise la cour
Chambéry, 30 octobre 1619212.
Madame, Son Altesse et M. le Prince ont voulu que je fusse le grand Aumosnier de madite
Dame; et vous me croires, je pense, aysement, quand je vous diray que je n'ay directement ni
indirectement ambitionné cette charge213. Non veritablement, ma tres chere Mere, car je ne sens
nulle sorte d'ambition que celle de pouvoir utilement employer le reste de mes jours au service de
208 Ce post-scriptum est inédit.
209 Benoit Jantet, aumônier et secrétaire de Mgr Camus. Les Annales de la Visitation de Belley nous ont conservé le
souvenir de ce «tres vertueux ecclesiastique» qui prit tant «de peine pour l'establissement» du Monastère. Il lui «fist
enfin... une grace plus grande que toutes les autres,» continue le vieux manuscrit, «s'y donnant luy mesme pour
confesseur,... sans aultre pension, advantage, ny recompence que celle quil attandoit et esperoit de Dieu.,. C'estoit un
vray fils de nostre Bienheureux Pere... Encores qu'il fut faict grand vicaire de l'evesché, jamais ses occupations ne luy
firent desister sa charité a assister nos Sœurs; et quand on luy en disoit quelque chose: — J'ay apris, disoit il, de mon
Bienheureux Pere qu'un homme qui ne perd poinct de temps a du loisir pour faire beaucoup de choses.» (Histoire de
la Fondation de la Visitation de Belley, par la Mère de Chaugy.)
210 Parents de l'Evêque Belley. Son père, Jean Camus, seigneur de Saint-Bonnet, Châtres, de Gaudreville et La
Chapelle, était né de Jean Camus et de Marie Bouguier. Il fut trésorier des menus plaisirs du Roi, capitaine, bailli et
gouverneur d'Etampes. Sa femme, Marie de Comtes, ou d'Escomtes, fille de Pierre de Comtes, capitaine de la marine,
lui donna de nombreux enfants et lui survécut de longues années. On trouve encore en 1647 un acte par lequel elle
cède plusieurs sommes à son fils Henri. (Bibl. Nat., Cabinet des Titres, Pièces originales, vol. 582, art. Camus.)
211 Charlotte de Ligny, dame Vialart de Herse (voir le tome précédent, note (1079), p. 331).
212 Nous détachons ce fragment d'un texte publié en 1626 sous la date du 30 novembre 1619 (voir ci-après, p. 58),
nous appuyant sur ces lignes que la Mère de Chantal écrivait à la Mère de Bréchard le 15 novembre: «J'ai reçu des
nouvelles du 30 d'octobre de ce bon Monseigneur; il était à Chambéry. Il me mandait qu'il était après à se déprendre
de la cour...Madame et Leurs Altesses l'ont fait grand aumônier, et M. de Boisy premier aumônier de Madame, de
sorte qu'il est engagé pour servir son quartier; et Monseigneur me mande que la charge de grand aumônier l'engagera
pour deux mois toutes les années à Turin.» (D'après l'Autographe; voir Lettres, vol. I, p. 353.) Il est évident que le
paragraphe que nous donnons ici appartient à cette lettre du 30 octobre, malheureusement perdue.
213 «Il pleust a Son Altesse (le duc de Savoie) et a mon dict Seigneur le Prince (de Piémont) qu'il feut grand Aumosnier
de Madame,» raconte Michel Favre (Process. remiss. Gebenn. (I), ad art. 41); «ce qu'il accepta, mais avec si peu
d'affection a cet honneur, quil n'en heut pas tourné son pied pour le demander.» Et son intendant, le fidèle Rolland,
dépose à son tour (ibid., ad art. 45): Le Bienheureux ne se voulut point prévaloir «des gages qui luy furent ordonnés
quand S. A. le feit grand Aumosnier de Madame la Princesse de Piedmont, desquels il n'a jamais rien retiré, moingts
faict ny faict faire aulcune recherche d'iceulx; et je sçay cecy par ce mesmes que je n'en ay jamais rien exigé.» Enfin
les historiens du saint Evêque nous apprennent qu'il n'accepta cette charge qu'à la condition de pouvoir demeurer dans
son diocèse, ce que Christine de France lui accorda, demandant seulement que le chanoine Jean-François de Sales
suivit la cour. (Voir de Hauteville, La Maison naturelle de St Fr. de Sales, Paris, 1669, Ire Partie, pp. 219, 220.)
58/341

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[49] l'honneur de Nostre Seigneur Non certes, la court m'est en souverain mespris, parce que ce
sont les souveraines delices du monde que j'abhorre de plus en plus, et luy, et son esprit, et ses
maximes, et toutes ses niaiseries.
……………………………………………………………………………………………………..
MDLXIV. A Madame Angélique Arnauld, abbesse de Port-
Royal. Comment se rassurer au milieu des inclinations
mauvaises de la nature. Exemple de saint Paul.
L'inconstance de notre âme; ce qui doit y demeurer stable.
Manière de combattre les tentations d'affectation.
Conséquences des fautes vénielles. Etre juste envers soi-
même. Le danger des austérités indiscrètes
[Fin octobre ou novembre] 1619214.
……………………………………………………………………………………………………..
Je voy clairement cette formiliere d'inclinations que l'amour propre nourrit et jette sur
vostre cœur, ma tres chere Fille, et sçai fort bien que la condition de vostre esprit subtil, delicat et
fertile contribue quelque chose a cela; mays pourtant, ma tres chere Fille, en fin ce ne sont pour
tout que des inclinations, desquelles puisque vous sentes l'importunité et que vostre cœur s'en
plaint, il n'y a pas de l'apparence qu'elles soyent acceptees par aucun consentement, ou du moins
par consentement deliberé. Non, ma tres chere Fille; vostre chere ame ayant conceu le grand desir
que Dieu luy a inspiré de n'estre qu'a luy, ne vous rendes pas aysee a croire qu'elle preste son
consentement a ces mouvemens contraires. Vostre cœur [50] peut estre tremoussé par le sentiment
de ses passions, mais je pense que rarement il peche par le consentement.
O moy miserable homme, disoit le grand Apostre215, qui me delivrera du cors de cette mort?
Il sentoit un cors d'armee composee de ses humeurs, aversions, habitudes et inclinations naturelles,
qui avoyent conspiré sa mort spirituelle; et parce qu'il les craint, il tesmoigne qu'il les hait; et parce
qu'il les hait, il ne les peut supporter sans douleur; et sa douleur luy fait faire cet eslan
d'exclamation, a laquelle il respond luy mesme216 que la grace de Dieu, par Jesus Christ, le
garantira, non de la crainte, non de la frayeur, non de l'alarme, non du combat, mais ouy bien de
la desfaite, et l'empeschera d'estre vaincu.
Ma Fille, estre en ce monde et ne sentir pas ces mouvemens de passions sont choses
incompatibles. Nostre glorieux saint Bernard dit217 que c'est heresie de dire que nous puissions
perseverer en un mesme estat icy bas, d'autant que le Saint Esprit a dit par Job218, parlant de
l'homme, que jamais il n'est en mesme estat. C'est pour respondre a ce que vous dites de la legereté
et inconstance de vostre ame, car je le croy fermement qu'elle est continuellement agitee des vens
de ses passions, et que par consequent elle est tous-jours en bransle; mais je croy aussi fermement
214 Après le retour de l'Evêque de Genève en Savoie, nous avons, pour premier message daté, à la Mère Angélique,
celui du 16 décembre; c'est un peu tard. Le Saint a dû certainement écrire à sa fille spirituelle à la fin d'octobre ou en
novembre (cf. ci-dessus, p. 47); est-ce la présente lettre? Nous le croyons, d'autant que la comparaison avec les autres
à la même destinataire lui assigne cette place, et que plus tard le titre de «frere» à la signature sera remplacé par celui
de «pere».
Il est vraisemblable que le commencement du texte autographe a été supprimé.
215 Rom., VII, 24.
216 Ibid., v. ult.
217 Epist. CCLIV, ad Guarinum.
218 Cap. XIV, 2.
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6.10 Page 60

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que la grace de Dieu et la resolution qu'elle vous a donnee, demeure continuellement en la pointe
de vostre esprit, ou l'estendart de la Croix est tous-jours arboré, et ou la foy, l'esperance et la charité
prononcent tous-jours hautement: VIVE JESUS!
Voyes vous, ma Fille, ces inclinations d'orgueil, de vanité et de l'amour propre se meslent
par tout, et fourrent insensiblement et sensiblement leurs sentimens presque en toutes nos actions;
mays pour cela ce ne sont pas les motifs de nos actions. Saint Bernard les sentant un jour qu'elles
le faschoyent tandis qu'il preschoit: «Retire-toy de moy, Satan219, dit il; je n'ay pas commencé pour
toy, et nefiniray pas pour toy220.» [51]
Une seule chose ay je a vous dire, ma tres chere Fille, sur ce que vous m'escrives que vous
fomentes vostre orgueil par des affectations en discours, en lettres. Es discours, certes, quelquefois
l'affectation passe si insensiblement qu'on ne s'en apperçoit presque pas; mais si pourtant on s'en
apperçoit, il faut soudain changer le stile. Mais es lettres, a la verité, cela est un peu, ains beaucoup
plus insupportable; car on void mieux ce que l'on fait, et si on s'apperçoit d'une notable affectation,
il faut punir la main qui l'a escritte, luy faysant escrire une autre lettre d'autre façon.
Au reste, ma tres chere Fille, je ne doute point que parmi cette si grande quantité de tours
et de retours de cœur, il ne se glisse par ci par la quelques fautes venielles; mais pourtant, comme
estans passageres, elles ne nous privent pas du fruit de nos resolutions, ains seulement de la
douceur qu'il y auroit de ne point faire ces manquemens, si l'estat de cette vie le permettoit.
Or sus, soyes juste: n'excuses, ni n'accuses aussi qu'avec meure consideration vostre pauvre
ame, de peur que si vous l'excuses sans fondement vous ne la rendies insolente, et si vous l'accuses
legerement vous ne luy abbatties le courage et la rendies pusillanime. Marches simplement, et vous
marcheres confidemment221.
Encor faut-il que j'adjouste en ce bout de papier ce mot important: ne charges point vostre
foible cors d'aucune autre austerité que de celles que la Regle vous impose; gardes vos forces
corporelles pour en servir Dieu es prattiques spirituelles, que souvent nous sommes contraintz de
laisser quand nous avons indiscrettement surchargé celuy qui, avec l'ame, les doit exercer.
Escrives moy quand il vous plaira, sans ceremonie ni crainte; n'employes point le respect
contre l'amour que [52] Dieu veut estre entre nous, selon lequel je suis a jamais invariablement
Vostre tres humble frere et serviteur,
FRANÇS, E. de Geneve.
219 Matt., IV, 10.
220 Ces paroles, citées et attribuées à saint Bernard par saint Ignace dans le livre des Exercices (Régulez de scrupulis,
§ 61), sont aussi rapportées par le P. Rodriguez dans son ouvrage sur la Perfection chrétienne (Partie I, Traité III,
chap. VI), avec cette note marginale: Bern. in Vita ipsius. Cependant, malgré les recherches faites par plusieurs
patrologues, elles n'ont pu être retrouvées dans les Vies anciennes et modernes du saint Docteur. Peut-être ce trait
appartient-il à la littérature légendaire de son histoire; mais l'Exorde, Hubert et Césaire ont été consultés sans plus de
succès.
221 Prov., X, 9.
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7 Pages 61-70

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7.1 Page 61

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MDLXV. A la Mère de Chantal, a Paris (Fragment). Une
Communauté fervente, sous une Supérieure très sainte mais plus
propre à converser avec Dieu qu'avec les hommes
Annecy, [novembre] 1619222.
Ma tres chere Mere,
J'ay receu une consolation inexplicable de voir a Bourges la chere petite trouppe de nos
Filles, si desireuses de la pure perfection de l'amour divin et si amoureuses de l'exacte observance
de leurs Regles, qu'il y a lieu d'esperer que cette Mayson sera benite de Dieu et en benediction a
la Congregation.
Mays, a vous dire vray, j'ay treuvé la pauvre petite Mere Rosset si affoiblie de cors et si
descheüe, que je croy qu'il la faudra retirer de dessous le fardeau223. Cette pure colombe est bien
plus propre a demeurer avec son Bienaymé dans le trou de la masure224 d'une cellule, qu'a
converser avec les hommes. Chacun admire sa vertu et bien peu goustent sa conduitte. O ma Mere,
il ne se faut pas estonner de cela: toutes les ames n'ont pas la grace de joindre l'actif au passif, et
de passer, sans prejudice interieur, de l'un a l'autre.
………………………………………………………………………………………………….[53]
……….Il faut dire la verité: a Grenoble, j'ay treuvé une, mays une Superieure toute selon mon
cœur225.
Revu sur le texte inséré dans la Vie manuscrite de la Mère Rosset,
par la Mère de Chaugy, conservée à la Visitation d'Annecy.
222 Déjà, dans sa lettre du 5-19 octobre à la Mère de Chantal (p. 42), François de Sales parle des difficultés créées au
Monastère de Bourges par le peu d'aptitude de la Supérieure pour les questions matérielles. Rentré à Annecy, il ne dut
pas tarder à revenir sur ce sujet, car la Mère de Chaugy, qui nous a gardé ce fragment, le place peu après l'entrevue du
Saint et de la Mère Anne-Marie Rosset en 1619; le mois de novembre nous paraît la date la plus probable de la lettre
d'où il fut extrait.
223 La déposition de la Mère Rosset n'eut lieu cependant qu'en avril 1622. (Voir ci-dessus, note (156), p. 33.)
224 Cant., II, 14.
225 Cette phrase nous semble devoir appartenir à la présente lettre; nous la trouvons sous la plume de la Mère de
Chantal, s'adressant le 13 janvier 1620, à la Mère Péronne-Marie de Chastel: «Monseigneur m'écrivit en me parlant
de nos Maisons qu'il avait vues: Il faut,» etc. «Or, pensez, ma Fille, si cela me fit grand bien.» (D'après l'Autographe;
voir Lettres, vol. I, p. 368.
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7.2 Page 62

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MDLXVI. A M. Claude de Blonay226 (Inédite). Inépuisable
condescendance et sainte fermeté de François de Sales.
Annecy, 15 novembre 1619.
Monsieur,
Je vous priay de dire a M. Combaz227 quil vint retirer sa fille228; mays despuis, sachant
l'extremité de la passion en laquelle il est sur ce sujet, j'ay pensé que je pourrois encor voir plus
particulierement sil y aura moyen de la [54] retenir; et Dieu sçait si j'en seroys joyeux, n'y ayant
que la necessité et force de la conscience qui puisse la faire renvoyer. Mays aussi, quand il le
faudra faire, je me disposeray a laisser dire tout ce qu'on voudra et faire mon devoir.
Je me remetz a vostre discretion, Monsieur, et suis
Vostre tres humble et tres affectionné confrere,
FRANÇS, E. de Geneve.
XV. IX. 1619.
A Monsieur
[Monsi]eur de Blonnay,
Prefect de la Ste Mayson.
Thonon.
Revu sur l'Autographe conservé à la Visitation de Fribourg.
226 Voir tome XII, note (224), p. 124.
227 Claude Combaz, notaire ducal à Thonon, dont l'acte de sépulture est daté du 9 novembre 1627 (Reg. par. de
Thonon). Il avait épousé Françoise Desplans, de Genève (cf. tome XVII, note (707), p. 202), qui fut convertie vers
1600 par l'Apôtre du Chablais.
228 Avant même sa naissance, Péronne Combaz avait reçu les bénédictions du Saint. Il ne la perdit pas de vue, et ayant
appris, en 1617, son désir de se consacrer à Dieu, il la fit entrer au monastère de la Visitation d'Annecy. Lui-même
s'appliqua à former cette âme qui «avait naturellement» les passions «vives et fortes,» disent les anciens Mémoires.
(Cf. la lettre du 5 ou 6 juillet 1620, à la Mère de Chantal.) Mais le débonnaire Evêque ne vit pas sur la terre le fruit de
ses soins; le 18 octobre 1623 seulement, la prétendante prenait l'habit religieux pour le rang des Sœurs domestiques
et devenait Sœur Françoise-Augustine. Encore n'arriva-t-elle pas pour cette fois à la profession. La Mère Marie-
Marguerite Michel, touchée de ses désirs persévérants, l'emmena au monastère de Belley; elle y reprit l'habit le 19
mai 1625, et y fit ses vœux sous le nom de Marie-Augustine. «Cette chère Sœur,» témoigne l'annaliste, a «été l'une
des plus excellentes Religieuses de son rang, infatigable dans le travail pendant plus de cinquante ans, avec autant de
ferveur à la fin qu'au commencement.» (Histoire de la Fondation de la Visitation de Belley.)
62/341

7.3 Page 63

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MDLXVII. Au Prince de Piémont, Victor-Amédée229. Infraction
aux désirs et aux ordres de Son Altesse pour les prébendes de
Contamine. Lettres obtenues subrepticement. Prière de
faire connaître la véritable volonté du duc de Savoie.
Annecy, 19 novembre 1619.
Monseigneur,
Des que Vostre Altesse eut l'heureuse pensee de contribuer son soin et son authorité a la
reformation des Monasteres de deça, elle donna ordre que les praebendes vacantes de celuy de
Contamine fussent reservees pour estre par apres appliquees selon ce dessein230. Or maintenant,
un Religieux ancien dudit Contamine ayant un desir extreme de faire avoir place et prsebende a
un sien neveu, jeune et ignorant231, a obtenu des lettres de Son [55] Altesse232, par lesquelles elle
commande que l'on luy donne cette praebende. Mays on ne peut croire que ces lettres soyent selon
l'intention de sadite Altesse, puisque elles sont contraires a la resolution prise avec tant de
consideration, delaquelle il se peut faire que la souvenance ne soit pas tous-jours presente a Son
Altesse; puysque mesme, en attendant qu'on obtienne de Rome le pouvoir d'appliquer plus
fructueusement ces praebendes, on les employe a reparer les domiciles necessaires et entretenir la
sacristie de ladite eglise.
Vostre Altesse donq est suppliee tres humblement de faire declarer la volonté de Son
Altesse sur cette occasion, affin que l'on puisse asseurement ou accorder, ou, ce qui est plus
desirable, refuser ladite praebende. Et tandis, je prie Dieu qu'il face de plus en plus abonder Vostre
Altesse en ses benedictions, et suis,
Monseigneur,
Vostre tres humble, tres obeissant et tres fidele
orateur et serviteur,
FRANÇS, E. de Geneve.
XIX novembre 1619, Annessi.
Revu sur l'Autographe conservé à Turin, Archives de l'Etat. [56]
229 Voir tome XVII, note (199), p. 45.
230 Voir les tomes XVII, note (201), p. 46, et XVIII, note (128), p. 22.
231 Des lettres subséquentes du Saint, et une lettre de Charles-Emmanuel (voir à l'Appendice I) nous apprennent le
nom de ce «Religieux ancien» et de son neveu. Le premier était Louis Perret, sous-prieur de Contamine sous le prieur
Buccio (1596). Dans le procès-verbal des visites faites par un délégué de Cluny, en 1607 et 1618, il est nommé
sacristain, office qu'il avait reçu le 11 septembre 1592. (Bouchage, Le Prieuré de Contamine-sur-Arve, Chambéry,
1889, chap. VI, VII.) Au mois de décembre 1620, Louis Perret était «grandement malade,» d'après une lettre de
François de Sales. Quant au parent qu'il voulait gratifier de sa prébende, il s'appelait Claude du Noyer.
232 Le duc de Savoie.
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MDLXVIII. Au Prieur et aux Religieux du Monastère de Sixt233.
Aimable salut de retour. Tentation de désunion au Monastère
de Sixt. Ce qu'elle empêchera si elle prévaut.
Annecy, 22 novembre 1619.
Messieurs mes Confreres,
Je vous salue et vous embrasse tres affectionnement en esprit a cette mienne arrivee apres
une si longue absence; et m'estant apperceu que l'ennemy de paix et d'union tasche a semer petit a
petit des pensees de separation parmi vous autres, je vous prie et exhorte de tout mon cœur de ne
point permettre qu'il prevaille contre les saintes et honnorables resolutions que vous aves prinses
avec moy, de vivre jointz et liés ensemble en l'observance de vos Regles, entre lesquelles la
communauté et union des cœurs et de biens est la principale234. Vous seres fortz estant unis, foibles
et aysés a succomber estant desunis. 235Et comme je prendray tous-jours a gré de vous servir tandis
que vous vivres de l'observance des resolutions prinses, aussi me despartiray je aysement de cette
affection, si par vostre desunion vous m'ostés le moyen de vous assister.
Je prie Dieu qu'il vous benisse, et suis
Vostre plus humble et tres affectionné confrere,
FRANÇS, E. de Geneve.
Annessi, le XXII novembre 1619.
A Messieurs
les Prieur et Religieux de Six.
Revu sur le texte inséré dans le Ier Procès de Canonisation. [57]
MDLXIX. A la Mère de Chantal, a Paris. Le rassasiement des
affamés de justice. Un enseignement de saint Paul que
l'Evêque de Genève veut mettre en pratique. Dans quelle
mesure il tient à sa réputation
Annecy, 30 novembre 1619.
Je voy, ma tres chere Mere, par la derniere de vos lettres, du 12 passé, que monsieur [de
Foras] est tous-jours en peyne, et que je suis exposé a divers jugemens pour son mariage236. Pour
luy, je n'ay rien a dire, sinon que bienheureux sont ceux qui ont faim et soif de justice, car ilz seront
rassasiés237. Et bien que ce rassasiement s'entende pour le jour du jugement auquel on fera justice
a tous ceux a qui elle a manqué, et qui par consequent en ont eu faim et soif en ce monde, si est ce
233 Voir le tome précédent, notes (299), (300), p. 81.
234 Voir ibid., note (301), p. 82.
235 La fin est inédite.
236 Voir ci-dessus, note (154), p. 32. Les ennemis de Guillaume de Bernard de Foras avaient réussi à le faire
emprisonner. Quant au Saint, la calomnie marchait bon train contre lui, et la Mère de Chantal, admiratrice et émule
de sa vertu, écrivait: «Je ressens vivement le trait que l'on jette contre cette renommée plus blanche que la neige, mais
je ne laisse pas d'aimer la livrée du grand Sauveur sur les épaules de son digne Serviteur, qui en est paré et honoré
avec plus d'honneur que les rois ne sont avec leur manteau de pourpre.» (Lettres, vol. I, p. 358.)
237 Matt., V, 6.
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7.5 Page 65

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que j'espere que le Parlement en fin rassasiera ce personnage, apres qu'il aura eu faim et soif de
justice: et Dieu veuille pardonner a ceux qui le persecutent.
Pour moy, je dis qu'il faut que je prattique l'enseignement de saint Paul238: Ne vous defendes
point, mes bienaymés, mais laisses le passage a la passion. Et neanmoins, puisque vous le treuves
a propos, j'escriray au premier jour a M. Berger239, affin qu'il ayt dequoy rejetter la calomnie,
asseuré de sa parfaitte charité pour moy qui l'estime et honnore plus qu'il ne se peut dire.
Demeurés en paix, ma tres chere Mere, sur tout cela. La Providence supreme sçait la mesure
de la reputation [58] qui m'est necessaire pour bien faire le service auquel elle me veut employer,
et je n'en veux ni plus ni moins que ce qu'il luy plaira que j'en aye. Or sus, c'est asses pour ce
coup.240
……………………………………………………………………………………………………...
Soyés a jamais benite, ma tres chere Mere, et que vostre cœur et le mien soyent a jamais
remplis du divin et tres pur amour que la divine Bonté nous a fait la grace de vouloir parfaitement
aymer.
Le 30 novembre 1619.
MDLXX. A la Présidente Amelot241 (Fragment inédit).
Prédiction du Fondateur sur l'Ordre de la Visitation.
Annecy, [octobre-décembre] 1619242.
……………………………………………………………………………………………………...
Madame, ne vous estonnes point de voir nos Filles de Sainte Marie si rejettees et
abandonnees. Dieu les eslevera [59] et fera croistre; ce petit Institut se multipliera et, comme la
violette, respandra par tout sa bonne odeur.
……………………………………………………………………………………………………...
Revu sur le texte inséré dans l'Histoire de la Fondation du 1er Monastère
de Paris, conservée à la Visitation d'Annecy.
238 Rom., XII, 19.
239 Pierre Berger (voir le tome précédent, note (1205), p. 371, et ci-après, note (260), p. 67).
240 Voir ci-dessus, note (212), p. 49.
241 Jeanne-Catherine de Creil, fille de Jean de Creil, seigneur de Gournay, etc., et d'Adrienne Gamin, naquit vers 1589,
et se maria avant 1610 à Jean Amelot, d'abord conseiller au Parlement de Paris, puis maître des Requêtes, conseiller
du Roi et, en 1610, président en son Grand-Conseil. Mme Amelot était veuve depuis trois ans lorsqu'elle mourut; le 28
septembre 1647 elle fut inhumée à Saint-Nicolas-des-Champs. (D'après Moreri, 1740, corrections et additions sur la
lettre A.) Nous l'avons nommée déjà (tome précédent, note (1086), p. 333) parmi les dames qui favorisèrent le plus
l'établissement de la Visitation à Paris. Elle resta fidèle amie des Religieuses; lorsque, peu après le départ du Saint de
la capitale, la peste chassa de la ville «non seulement la cour... mais presque tout le monde,... il n'y eut que Mme la
présidente Amelot qui» leur «continua l'honneur de ses visites et de sa protection.» Dans sa douleur de voir les
servantes de Dieu dans l'abandon et la misère, elle en écrivit à son Père spirituel, l'Evêque de Genève; il lui répondit
une lettre dont nous n'avons plus, hélas! que ces quelques lignes. (Histoire de la Fondation du 1er Monastère de Paris.)
242 Les renseignements fournis par les Mémoires du temps (voir Brièle, Délibérations de l'Hôtel-Dieu de Paris, tome
I; Héroard, Journal, tome II: Félibien, tome III des Preuves de l'Hist. de Paris, pp. 58. 59) et par les Lettres de la Mère
de Chantal (vol. I, pp. 331, 345, 348) sur la peste qui désola Paris dans la seconde moitié de 1619. déterminent à peu
près la date de la lettre de Mme Amelot au Saint et, par suite, de la réponse de celui-ci.
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MDLXXI. A une demoiselle de Paris. L'accomplissement d'une
promesse. Une «avette parmi les toiles des araignees.» Ce
que souhaite le Saint à sa correspondante, au souvenir de leurs
adieux
[Octobre-décembre 1619243.]
Madamoyselle,
Vous me le fistes promettre, et je le fay soigneusement: je prie Dieu qu'il vous donne sa
sainte force, affin que vous rompies genereusement tous les liens qui empeschent vostre cœur de
suivre ses celestes attraitz. Mon Dieu, il faut dire la verité: c'est pitié de voir une aymable avette
embarrassee parmi les viles toiles des araignees; mays si un vent secourable rompt cette chetifve
trame et ces fascheux fïletz, pourquoy est ce que cette chere avette ne prend cette occasion pour
se demesler et desprendre de ces pieges et pour aller faire son doux miel? Vous voyes, ma tres
chere Fille, mes pensees; faites voir les vostres a ce Sauveur qui vous semond. [60]
Je ne puis n'aymer pas vostre ame que je connois estre bonne, et ne puis ne luy souhaiter
le tres desirable amour de la genereuse perfection, me resouvenant des larmes que vos yeux
respandirent lhors que, vous disant adieu, je vous desirois a Dieu, et que, pour estre plus a Dieu,
vous dissies adieu a tout ce qui n'est pas pour Dieu.
Je vous asseure cependant, ma tres chere Fille, que je suis grandement
Vostre serviteur en Dieu.
MDLXXII. A une dame244. Maladie et affliction du cœur. —
Petit ange envolé au Ciel. Les richesses que nous amassons
ici-bas. Etre à Dieu toujours.
Annecy, 2 décembre 1619.
Le Pere confesseur de Sainte Claire de Grenoble245 me vient de dire que vous aves esté
extremement malade, ma tres chere Fille, apres que vous aves veu passer le cher N., et guerie d'une
grande infirmité. Je voy parmi tout cela vostre cœur bienaymé, qui, avec une grande sousmission
a la divine Providence, dit que tout cela est bon246, puisque la main paternelle de cette supreme
Bonté a donné tous ces coups.
O que cet enfant est heureux d'estre volé au Ciel comme un petit ange, avant que d'avoir
presque touché la terre! Quel gage aves vous la haut, ma chere Fille! [61] Mays vous aures, je
m'asseure, traitté cœur a cœur avec nostre Sauveur de cet affaire, et il aura des-ja saintement
accoysé la tendreté naturelle de vostre maternité, et vous aures des-ja plusieurs fois prononcé de
243 Peut-être avons-nous ici une lettre à «la pauvre N.» dont parle le Saint à la Mère Angélique Arnauld le 16 décembre
1619 (cf. ci-dessus, lettre MDLVI, p. 29). Il voulut sans doute aider cette âme qui était «en grand danger de perdre sa
vocation.» le texte même montre que ces lignes ont été écrites peu après le retour de France.
244 La destinataire est de Grenoble; la première ligne du texte l'indique. Ne serait-ce pas Mme de Veyssilieu (voir tome
XVII, note (1215), p. 371)? Le ton paternel et affectueux de cette lettre le ferait supposer; cependant nous ne savons
si elle perdit un enfant en 1619; ses trois fils, Jean, Louis et François, nés de 1613 à 1616, arrivèrent à l'âge d'homme.
245 Le P. Fodéré avait exercé peu auparavant la charge de confesseur des Clarisses de Grenoble; son successeur
immédiat fut-il le P. Charles Bellet, docteur de Sorbonne? (Cf. de Franclieu, Jeanne Bayle et les Clarisses de
Grenoble, Lyon 1887, chap. XIII, note (1), p. 127.) Aucun document ne nous permet de l'assurer.
246 Cf. Eccli., XXXIX, 21.
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tout vostre cœur la protestation filiale que Nostre Seigneur nous a enseignee247: Ouy, Pere eternel;
car ainsy vous a-il pleu de faire, et il est bon qu'il soit ainsy.
O ma Fille, si vous aves fait comme cela, vous estes heureusement morte en ce divin
Sauveur avec cet enfant, et vostre vie est cachee avec luy en Dieu; et quand le Sauveur paroistra,
qui est nostre vie, alhors vous paroistres avec luy en gloire. C'est la façon de parler du Saint Esprit
en l'Escriture248. Nous patissons, nous souffrons, nous mourons avec ceux que nous aymons, par
la dilection qui nous tient a eux; et quand ilz souffrent ou meurent en Nostre Seigneur, et que nous
acquiesçons en patience a leurs souffrances et trespas pour l'amour de Celuy qui, pour nostre
amour, a voulu souffrir et mourir, nous souffrons et mourons avec eux. Tout cela bien ramassé,
ma tres chere Fille, sont des richesses spirituelles incomparables, et nous les connoistrons un jour,
quand, pour ces legers travaux, nous verrons des recompenses eternelles249.
Cependant, ma tres chere Fille, puisque vous aves esté volontier malade tandis que Dieu a
voulu que vous le fussies, guerisses aussi maintenant de bon cœur, puisqu'il veut que vous
guerissies. Ainsy je le supplie continuellement, ma tres chere Fille, que nous soyons a luy sans
reserve ni exception, en santé et en maladie, en tribulation et en prosperité, en la vie et en la mort,
au tems et a l'eternité.
Je salue vostre cœur filial, et suis vostre.
FRANÇS, E. de Geneve.
Annessi, le 2 decembre 1619. [62]
MDLXXIII. Au Comte Jacques de Viry250 (Inédite). Ce qui reste
à faire pour permettre la célébration d'un mariage.
Annecy, 10 décembre 1619.
Monsieur,
La dispense pour le mariage de madamoyselle vostre fille est arrivee251, et neanmoins il
reste encor a vuider un empeschement mis au greffe de l'evesché par M. de Paumier252, et je voy
monsieur du Boys253 aucunement disposé a l'oster par le moyen de quelque somme d'argent; mays
je ne sçai pas si elle sera telle que les parties s'en contentent d'abord. C'est pourquoy j'ay creu que
je vous devois donner cet advis, affin que, s'il vous plaist, vous contribuies vostre authorité et
dexterité pour haster [63] l'accommodement, et par consequent les noces; puisque je me souviens
247 Matt., XI, 26.
248 Coloss., III, 3, 4.
249 Cf. II Cor., IV, 17.
250 Jacques, baron, puis comte de Viry, capitaine de cinquante lances des ordonnances de Savoie (1597), était fils de
Marin de Viry (voir tome XI, note (644), p. 285), et de Claudine de Lambert. Il épousa, par contrat du 18 décembre
1596, Marguerite de Bouvens. Son testament est du 19 septembre 1623. (Maison de Viry, Notice généalogique, Sedan,
1892.)
251 La mère de Marie de Viry, Marguerite de Bouvens, née de Jean de Bouvens et d'Hélène de Châtillon, était cousine
issue-de-germaine du fiancé, M. du Bois, dont l'aïeule paternelle était Claudine de Châtillon. Les futurs époux avaient
donc un lien de parenté qui nécessitait une dispense. Le contrat dotal fut signé le 26 janvier 1620, et le mariage célébré
sans doute en même temps, sans attendre que la «commission de dispenser obtenue de Rome» et donnée le 7 octobre
1619, eût été exécutée, ce qui motiva une lettre très sévère de François de Sales au même destinataire, en date du 28
janvier 1620. Marie de Viry vivait encore en 1650. (Mss. Besson.)
252 S'agirait-il ici du prieur de la Chartreuse de Pommier (voir tome XIV, note (566), p. 194), non loin de Viry? Le
Saint ne désigne pourtant habituellement ainsi que les possesseurs ou chefs d'abbayes. En Bresse, on trouve deux
seigneuries de Pommiers qui, à cette époque, étaient entre les mains des familles de Grillet et de Sauvage.
253 Fils de Jean-Jacquemin de Rossillon, dit de Châtillon, et de Péronne-Marie de Lambert (tome XVII, p. 84, note),
Jean-Antoine était baron de Ternier et Gaillard, seigneur du Châtelard, du Bois, de la Naz, et fut conseiller d'Etat de
Son Altesse Royale, chevalier de Saint-Maurice, etc. Il teste le 10 février 1648. (Mss. Besson.)
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7.8 Page 68

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que vous me tesmoignastes de les desirer voir faites avant vostre despart pour Bourgoigne, affin
de contenter monsieur du Boys, et que d'ailleurs, pour briefve que soit la voye de la justice, elle ne
peut qu'estre longue et sujette a beaucoup d'accidens.
Dieu vous veuille a jamais prosperer en sa benediction, Monsieur, et je suis,
Vostre tres humble et tres affectionné serviteur,
FRANÇS, E. de Geneve.
X decembre 1619, Anessi.
A Monsieur
Monsieur le Comte de Viri.
Revu sur une copie appartenant à M. le comte de Viry,
au château de Viry (Haute-Savoie).
MDLXXIV. A Madame de la Fléchère254 (Inédite). Comment le
Saint occupera ses rares loisirs jusqu'aux fêtes. Le futur mariage
de Mme de la Croix.
Annecy, 10 décembre 1619.
Ma tres chere Fille,
Je vous rens graces du livre, que je liray par ci par la, selon le tems que je pouray gaigner,
en attendant que vous revenies icy faire les festes, ainsy que la chere cousine255 m'a dit avoir esté
resolu entre vous deux. [64]
Le mariage de Mme de la Croix a commencé aujourdhuy a se divulguer en cette ville; au
moins, plusieurs personnes m'en ont parlé. Dieu, par sa Providence, le rende autant heureux que
de tout mon cœur je le souhaite, apres qu'avec la benediction du Pape il aura esté legitimement
celebré256.
O que c'est une bonne chose d'estre tout a Dieu! Soyons le donq, ma tres chere Fille. Je suis
en luy,
Vostre tres humble pere, compere et serviteur,
F., E. de Geneve.
X decembre 1619.
Conserves vous bien chaudement, affin quil ne se face point de fluxion sur vostre apostume.
Revu sur l'Autographe conservé à la Visitation de Gênes.
254 L'adresse manque sur l'Autographe, mais la simple lecture du texte suffit à désigner pour destinataire Madeleine
de la Forest, dame de la Fléchère. (Voir tome XIV, note (40), p. 1.)
255 Mme de Charmoisy (voir tome XIII, note (481), p. 179).
256 Claude-Françoise de Maillard-Tournon (voir tome XVI, note (274), p. 78), alors veuve de Salomon de Murat de la
Croix, était recherchée par un «M. de Cormand,» comme nous l'apprend François de Sales dans les lettres du 16
décembre 1619 et du 22 août 1620 à son frère Jean-François. A cette dernière date, le projet de mariage semblait
rompu. Il se renoua, puisque le 6 novembre 1621, l'Evêque de Genève annonce à Mme de la Fléchère que la dispense
nécessaire a été envoyée de Rome. Malgré cela, il y a tout lieu de croire que cette alliance, assez mal assortie comme
on le lit entre les lignes du Saint chaque fois qu'il en parle, no se conclut jamais: une pièce de 1643 (voir Dufour et
Mugnier, Les Maillard, Chambéry, 1889, p. 137, Doc. XV) nomme encore Claude-Françoise de Maillard, «dame de
la Croix
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7.9 Page 69

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MDLXXV. A M. François de Montholon257 (Fragment). Douces
plaintes et légitimes excuses. Quelle coopération l'Evêque de
Genève a donnée au mariage de M. de Foras.
Annecy, 13 décembre 1619.
……………………………………………………………………………………………………...
Permettes moy, je vous supplie, Monsieur, de soulager mon ame en me plaignant a vous
mesme de vos plaintes, [65] lesquelles a la verité m'affligent et m'estonnent, ne croyant pas d'en
avoir donné aucune occasion; puisque, hors le veritable tesmoignage que j'ay rendu une seule fois
des merites et bonnes qualités du gentilhomme, et une autre fois de sa religion258, je n'ay nullement
cooperé a cette alliance que peut estre par la recommandation que j'en ay faite a Dieu, si elle devoit
estre a sa gloire; et tout ce qui se dit de plus n'est qu'exageration.
Il est vray que les parties s'estans liees d'affection et de promesses pendant mon absence259,
je fus present, soudain apres mon retour, a la repetition des promesses qu'elles voulurent
renouveller devant moy; mais d'une presence si simple que je ne fis qu'escouter avec plusieurs
autres sans dire mot. Pouvois je refuser de telz offices a de telles personnes? Non plus que celuy
que je fis envers vous, Monsieur, qui, ce me semble, ne me fistes pas sçavoir que vous eussies une
si puissante aversion pour ce mariage, que de la j'eusse peu inferer cet ardent mescontentement
que vous aves, ce me dit on………………………………………………………………………..
…………………………………………………………………………………………………[66]
257 François de Montholon (voir le tome précédent, note (1003), p. 303) fut conseiller d'Etat sous trois rois, comme
l'indique l'épitaphe qu'il fit faire pour son père, François, deuxième du nom, seigneur du Vivier et d'Aubervilliers,
chancelier sous Henri III. Cette inscription, complétée plus tard, nous apprend aussi qu'il mourut lui-même le 29 mai
1626; elle se voyait dans l'église Saint-André-des-Arts, ainsi que celle de Geneviève Chartier, mère de M. de
Montholon. (Voir Raunié, Epitaphier du vieux Paris, tome Ier, Eglise Saint André des Arcs, épitaphes nos 58 et 104.)
Ce personnage, quoiqu'intime ami de M. de Foras et de l'Evêque de Genève, se laissa entraîner bien loin par son injuste
ressentiment à propos du mariage de sa nièce, Anne Le Beau, veuve de Vaulgrenant. Il était cependant homme de
mérite et de vertu, et zélé pour le bien, comme le prouvent ses fondations d'une Maison de l'Oratoire proche sa terre
d'Aubervilliers, et d'une chapelle de Saint-François à Saint-André-des-Arts.
«En fin donq j'escris a M. de Montholon,» dit le Saint à la Mère de Chantal le 13 décembre (p. 71); cette date
est par conséquent celle de la présente lettre.
258 Le 11 septembre 1619, François de Sales, sur la requête de son ami, lui remit en effet une attestation écrite de son
attachement à la foi catholique et de sa fidélité à en accomplir les œuvres. Cette pièce sera donnée avec les Opuscules.
259 Pendant le séjour à Maubuisson (voir ci-dessus, note (111), p. 3).
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7.10 Page 70

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MDLXXVI. A un gentilhomme (Fragment). Ce qui attriste le
Saint dans les blâmes faits contre lui. La seule cause de ses
fautes. Pourquoi il voudrait regagner «la bonne grace» de ses
adversaires
Annecy, 13 décembre260 1619.
……………………………………………………………………………………………………...
Or, Monsieur, je me suis un peu dilaté avec vous pour me soulager; non que je sois
grandement touché ni des censures ni des blasmes qu'on jette contre moy pour ce sujet, car je sçay
que devant Dieu je suis sans coulpe; mais je suis pourtant marri du souslevement de tant de
passions autour d'un affaire ou j'en ay eu si peu. Ceux qui me connoissent sçavent bien que je ne
veux rien ou presque rien avec passion et violence; et quand je fay des fautes, c'est par ignorance.
Je voudrois bien pourtant regaigner la bonne grace de ces messieurs en faveur de mon ministere;
si je ne puis, je ne laisseray pas de marcher en iceluy261 per infamiam et bonam famam, ut seductor
et verax262. Je ne veux ni de vie ni de reputation qu'autant que Dieu voudra que j'en aye, et je n'en
auray jamais que trop selon ce que je merite.
…………………………………………………………………………………………………[67]
MDLXXVII. A Monseigneur Jean-Pierre Camus, Evêque de
Belley. Quelle part l'Evêque de Genève prend au deuil de son
ami. Eloge de M. Camus de Saint-Bonnet et de sa famille.
Surcroît d'affliction pour le Saint au sujet de ce trépas.
Explication loyale sur le mariage de M. de Foras. Le
mécontentement injuste de M. de Montholon
Annecy, 13 décembre263 1619.
Monseigneur,
J'ay sceu despuis peu de jours que la divine Providence a en fin retiré de ce monde M.
vostre pere264; et soudain je suis allé a l'autel offrir le Filz eternel a son Pere pour l'ame de ce
defunt, et recommander la vostre et celle de madame vostre bonne mere et celles de toute la trouppe
260 Ce fragment d'une lettre qui devait être longue, d'après la première ligne, doit avoir pour destinataire M. Rousselet
(sa note sera donnée plus tard) ou M. Berger (voir le tome précédent, note (573), p. 371). L'un et l'autre, en effet, dans
leur déposition (Process. remiss. Parisiensis, ad art. 25 et 31), parlent d'une lettre qui leur fut écrite par le Saint à
l'occasion du mariage Foras et de l'orage qui le suivit; et ce qu'ils en disent s'accorde assez bien avec les pensées
exprimées ici. Cependant la présomption est plus forte en faveur de M. Berger; aussi nous indiquons la date du 13
décembre, comme celle très probable du message qui lui appartient, d'après ces paroles de François de Sales à la
Sainte, le 30 novembre (voir ci-dessus, p. 58): «J'escriray au premier jour a M. Berger...» Il dut le faire en même temps
qu'à M. de Montholon et à Mgr Camus, et ce serait la troisième des «lettres ouvertes» envoyées à la Mère de Chantal.
261 parmi la mauvaise et la bonne renommée; traité d'imposteur, et pourtant veridique.
262 II Cor., VI, 8.
263 Pour la date, voir la note de la lettre précédente.
264 Jean Camus, seigneur de Saint-Bonnet (voir ci-dessus, note (210), p. 48).
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8 Pages 71-80

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8.1 Page 71

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des freres et seurs265 au Saint Esprit, douce source de toute veritable consolation; car, que peut on
faire de meilleur en telles occurrences?
Certes, j'ay participé a vostre desplaysir; mais la part que j'en ay prise n'aura en rien diminué
la totalité du vostre. Oh! si les afflictions devenoyent moindres a mesure qu'elles sont respandues
dans le cœur de plusieurs, que vous en auries bon marché, ayant tant de personnes, et autour de
vous et bien loin de vous, qui vous honnorent et ayment sincerement, se communiquant les uns
aux autres vos sentimens pour les ressentir avec vous.
Je n'ay rien a vous dire de plus sur ce sujet, sinon que toute ma vie j'honnoreray la riche
memoire de ce bon seigneur trespassé, et seray invariablement tres humble [68] serviteur de sa
tant honnorable posterité et de madame sa vefve, qui a si heureusement cooperé au bonheur de sa
vie et a le faire vivre encor apres la mort en la personne de tant de si dignes enfans; car au reste,
de vous vouloir dire des paroles de consolation, je suis trop loin, et ne puis estre ouy qu'apres tant
d'autres, que ce seroit une impertinence trop excessive. Et de plus, quand j'eusse esté aupres de
vous, que vous eusse-je peu dire sinon: 266Bibe aquam de cisterna tua267? Quelz parfums peut on
donner aux habitans de l'Arabie Heureuse? On ne peut leur porter de la suavité qui soit comparable
a celle de leur païs, et ne peut on leur dire autre chose sinon: Sentes, odores, receves les exhalaisons
de vos cinnamomes, de vos bausmes, de vos myrtes. Ainsy vous eusse-je dit, et a vous et a madame
vostre mere, a messieurs et mesdamoyselles vos freres et seurs, vous envoyant tous a vous mesmes
pour vous consoler.
Mays moy, c'est la verité que j'ay encor une douleur sur le sujet de ce trespas qui me fasche
tous-jours quand j'y suis attentif. C'est qu'apres une forte resolution d'aller prendre congé de ce
bon pere a mon despart de Paris, l'ayant reservé pour le dernier comme celuy a qui je devois
beaucoup d'honneur et qui estoit le plus pres, ravi et emporté de la force des visites qui me furent
faites ce jour la, je fus tellement suffoqué d'esprit que je ne pensay point a cette obligation sur
l'occasion; et estant en chemin, lhors que je ne pouvois plus m'en acquitter, je m'en apperceus,
comme seulement pour en estre marri. Et quant a vous, Monseigneur, ce ne fut nullement faute
d'attention, mais par la fause asseurance que mon hoste de Chartres268 me donna que vous esties a
Estampes, ou apres je me reconneus trompé, mais trop tard. Or, [69] j'espere que ce bon seigneur
m'a aysement pardonné, s'il faut ainsy dire, puisque voyant Celuy qui voit tout, il voit bien que
cette mienne faute n'est point procedee de manquement d'honneur, de respect et d'affection. Et
vous me pardonnes aysement celle ci, par vostre douceur et bonté envers moy. Dieu m'a donné
vostre bienveuillance, Dieu me la conservera, s'il luy plaist; car de moy mesme je n'ay peu la
meriter, ni la conservation d'icelle.
Mais, a ce propos de conserver les bienveuillances, on m'escrit que je suis presque privé de
celle de M. de Montholon pour le sujet du mariage de M. de [Foras269.] Et encor faut il que je vous
rende conte de ceci, puisque vous estes celuy qui me l'avies procuree; et en un mot, je puis dire
avec verité que, hors les veritables tesmoignages que j'ay rendus une seule fois a madame de
[Vaulgrenant270] de la vertu et bonnes qualités de son mari, je n'ay rien cooperé a ce mariage, sinon
qu'apres avoir veu et sceu les fortes et vehementes liaisons d'affections, avec des grandes
promesses reciproques d'un futur mariage entre ces deux parties, faites pendant que j'estois a
Maubuisson271, et de plus, la damoyselle se promettre fort asseurement que madamoyselle de
265 L'Evêque de Belley était l'aîné des quinze enfants de Jean Camus et de Marie de Comtes. Trois ou quatre moururent
jeunes; Michel entra à l'Oratoire, Charles chez les Jésuites, Catherine à la Visitation de Paris, Florimonde et Geneviève
à l'abbaye de Moncel. Henri, seigneur de Saint-Bonnet, et Philippe servirent leur roi dans les armées; Roger fut sieur
de la Chapelle. Marie et Charlotte épousèrent M. Dufour et Charles Le Prince, seigneur de la Bretonnière.
266 Bois de l'eau de ta citerne.
267 Prov., V, 15.
268 Nous ne connaissons pas l'hôte du saint Evêque, mais nous savons que la maison où il logea à Chartres, située
«dans le plus beau lieu de la ville,» sur «la paroisse Sainte-Foy,» fut achetée par la Mère Claude-Espérance Jousse,
en 1649, pour y établir les Filles de la Visitation. (Histoire de la Fondation de la Visitation de Chartres.)
269 Voir ci-dessus, les notes (154, 236), pp. 32, 58.
270 Mme de Vaulgrenant, devenue Mme de Foras.
271 Vers la fin d'août.
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[Sanzelles272] appreuveroit tout, je dis alhors, qu'encor que je ne doutasse point de leur discretion
a la suite de leurs affections, neanmoins je leur conseillois de ne pas beaucoup tarder leur mariage;
conseil conforme aux decretz de l'Eglise, et que je donnay ne regardant qu'au plus grand bien et a
la plus entiere asseurance de ces ames, et a l'observance des commandemens de Dieu.
Il y a encor ceci de considerable, que M. de Montholon, lhors qu'il me parla de ce sujet, ne
me tesmoigna point d'avoir une si grande aversion ni un si grand interest en cet affaire, que pour
cela j'eusse peu croire qu'il en prendroit tant d'ardeur de mescontentement; de sorte que je [70] ne
puis encor sousmettre mon jugement pour me tenir coulpable en cet endroit, quoy que grandement
marri de voir tant de passions esmeuës a cette occasion, pour l'accoysement desquelles je n'ay autre
chose a dire, sinon: 273Redime me a calumniis hominum274, a Celuy devant lequel je suis sans fin,
Monseigneur,
Vostre tres humble et tres obeissant frere
et serviteur,
FRANÇS, E. de Geneve.
MDLXXVIII. A la Mère de Chantal, a Paris. Envoi de lettres
ouvertes. Ce qu'il faut faire de celle adressée à M. de
Montholon. Indifférence du Saint dans «la tempeste et la
bonace.» L'exemple de saint Joseph. Doux reproche à la
Mère de Chantal. Le prédicateur de l'Avent. Des âmes un
peu trop empressées au bien. Messages
Annecy, 13 décembre 1619.
VIVE JESUS! auquel et pour lequel et par lequel je suis parfaittement vostre, ma tres chere
Mere.
Je viens d'escrire troys grandes lettres275, que je vous envoye ouvertes, affin que vous les
voyes, et en icelles plusieurs choses qu'il faudroit que je vous escrivisse; et je n'en ay pas le loysir,
estant bien tard.
En fin donq j'escris a M. de Montholon; mays avant que de luy envoyer la lettre, faites la
voir, s'il vous plaist, a M. des Hayes276, et consideres s'il sera a propos qu'elle luy soit rendue; car
quant a moy, ma tres chere Mere, j'ay remis tous ces mauvais vens a la providence de Dieu: qu'ilz
soufflent ou qu'ilz s'accoisent selon qu'il [71] luy plaira; la tempeste et la bonace me sont
indifferentes. Bienheureux seres vous quand les hommes diront tout mal contre vous pour l'amour
de moy, en mentant277. Si le monde ne treuvoit a redire sur nous, nous ne serions pas bonnement
serviteurs de Dieu278.
L'autre jour, nommant saint Joseph a la Messe, je me resouvins de cette souveraine
moderation dont il usa, voyant son incomparable Espouse toute enceinte, laquelle il avoit creu
estre toute vierge279; et je luy recommanday l'esprit et la langue de ces bons messieurs, affin qu'il
272 La mère de Mme de Foras, Catherine de Montholon, veuve de René Le Beau, seigneur de Sanzelles. (Cf. ci-dessus,
note (154), p. 32.)
273 Délivrez-moi des calomnies des hommes.
274 Ps. CXVIII, 134.
275 Vid. Epp. MDLXXV-MDLXXVII.
276 Antoine des Hayes (voir tome XII, note (573), p. 251).
277 Matt., V, 11.
278 Cf. Galat., I, 10.
279 Matt., I, 18, 19.
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leur impetrast un peu de cette douceur et debonnaireté. Et tost apres, il me vint en l'esprit que
Nostre Dame, en cette perplexité, ne dit mot, ne s'excusa point, ne se troubla point, et la providence
de Dieu la delivra; et je luy recommanday cette affaire, et me resolus de luy en laisser le soin et de
me tenir coy. Aussi bien que gaigne-on de s'opposer aux vens et aux vagues, sinon de l'escume?
O ma Mere, il ne faut pas estre si tendre sur moy, il faut bien vouloir qu'on me censure: si
je ne le merite pas d'une façon, je le merite de l'autre. La Mere de Celuy qui meritoit une eternelle
adoration ne dit jamais un seul mot quand on le couvroit d'opprobres et d'ignominies. Aux patiens
et debonnaires demeure la terre et le ciel280. Ma Mere, vous estes trop sensible pour ce qui me
regarde; et donq, faut il que moy seul au monde je sois exempt d'opprobres? Je vous asseure que
rien ne m'a tant touché en cette occasion que de vous voir touchee. Demeures en paix, et le Dieu
de paix sera avec vous281, et il foulera les aspics et les basilics282; et rien ne troublera nostre paix
si nous sommes ses serviteurs. Ma chere Mere, il y a bien de l'amour propre a vouloir que tout le
monde nous ayme, que tout nous soit a gloire.
Je presche icy, ces Advens, les commandemens de Dieu, qu'ilz ont desiré ouÿr de moy, et
je suis merveilleusement escouté283, mais aussi je presche de tout mon cœur; [72] duquel cœur je
vous diray, ma tres chere Mere, que Dieu, par sa bonté infinie, le favorise fort, luy donnant
beaucoup d'amour des maximes du christianisme; et cela en suite des clartés qu'il me donne de
leur beauté et de l'amour que tous les Saintz leur portent au Ciel, m'estant advis que la haut on
chante avec une joye incomparable: Bienheureux les pauvres d'esprit, car a eux appartient le
Royaume des cieux284.285
…………………………………………………………………………………………………….
Nos Seurs d'icy font fort bien; il n'y a rien a redire, sinon qu'elles veulent trop bien faire,
affin que nostre Mere revenant treuve que tout va bien: cela les presse un peu. Hier nous fismes
un entretien ou je m'essayay de les mettre un peu au large286.
Je salue nos très cheres Seurs Anne Catherine et Jeanne Marie287; je leur escriray aussi
troys motz au premier jour, s'il plaist a Dieu. Et a nostre Seur Marie Anastase mille salutations;
c'est une petite Jacobite, car Nostre Seigneur l'a touchee a la cuisse288, et elle ira mieux boiteuse
au chemin de la perfection qu'elle n'eust fait autrement, comme j'espere289. Je salue nostre grande
[73] Novice290, et toutes, tant qu'elles sont, mes tres cheres Seurs et Filles en Nostre Seigneur.
280 Cf. ibid., V, 4, 10.
281 II Cor., ult., 11.
282 Cf. Ps. XC, 13.
283 Dans sa déposition (Process. remiss. Gebenn. (I), ad art. 35), François Favre nous assure que l'Evêque de Genève
prêchait «tousjours les Avens» à Annecy «lorsqu'il y estoit.» Son peuple le savait bien et y comptait; aussi, dans sa
délibération du 6 mai 1619, le Conseil de Ville déclare qu'en ce qui «concerne le predicateur pour l'Advent et Caresme
prochain,» malgré la promesse du P. Provincial des Capucins engagé pour trois ans à donner un de ses Religieux, on
attendra les commandements de «Monseigneur le Reverendissime,» puisqu'il «doibt bien tost arriver de France.» Et
le 16 décembre, les syndics décrètent que des présents seront faits à l'Evêque «pour plusieurs faveurs receues...,
notamment en ce quil excuse le predicateur du Caresme prochain qui debvoit prescher les Adventz.» Il ne nous est
rien resté de cette station.
284 Matt., V, 3.
285 Dans l'édition de 1626, se trouve ici un passage, répété sous la date du 8 janvier 1620. Nous croyons plus sûr de le
laisser dans ce dernier texte, d'autant qu'il s'agit d'une petite retraite qu'il eût été difficile à François de Sales de faire
au milieu de ses prédications. Peut-être la présente lettre renferme-t-elle encore d'autres interpolations.
286 Voir tome VI, pp. XIV et 474.
287 Anne-Catherine de Beaumont-Carra, Assistante du Monastère de Paris (voir le tome précédent, note (1202), p.
370), et Jeanne-Marie de la Croix de Fésigny (ibid., et tome XVII, note (902), p. 264).
288 Cf. Gen., XXXII, 25.
289 La souffrance physique fut le partage de la Sœur Marie-Anastase Pavillon presque aussitôt après sa profession
(voir le tome précédent, note (1272), p. 396). Pendant trois ans, elle dut marcher avec des béquilles par suite d'énormes
abcès aux jambes. Enfin, il fallut faire de profondes incisions, rendues plus douloureuses par les poudres mordantes
jetées dans les plaies. Elle supporta ce martyre avec une admirable patience. (Année Sainte de la Visitation, tome X,
p. 660.)
290 C'est ainsi que le saint Fondateur désigne souvent Sœur Marie-Marguerite de Gondras des Serpens de la Guiche,
venue, novice de Moulins, à la fondation de Paris (voir le tome précédent, note (1202), p. 370). Elle était d'une illustre
famille de l'Auvergne et fille, croyons-nous, de Philibert des Serpens, seigneur de Gondras, marié en 1588 à
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Je n'escriray point pour ce coup a ces dames291, que j'honnore tant et que Dieu veut que
j'honnore de plus en plus; salues les toutes cherement es occurrences. Dieu les veuille combler de
ses graces.
Ce 13 decembre 1619.
MDLXXIX. A Madame Angélique Arnauld, abbesse de Port-
Royal. Un Père qui connaît bien sa fille. Les cerisiers et les
palmiers. Regard compatissant sur les faiblesses humaines.
— Combien de fois le jour remettre son cœur «en posture
d'humilité.» La volonté du saint Evêque «suivante» de celle
de Dieu. Deux âmes en péril. Encouragement à une
affligée. Difficultés suscitées au bien. Une des joies du
Ciel
Annecy, 16 décembre 1619.
Je commence par ou vous finisses, ma tres chere et tres veritablement bienaymee Fille; car
vostre derniere lettre, entre celles que j'ay receuës, finit ainsy: «Je croy que vous me connoisses
bien.» Or il est vray, certes, je vous connois bien, et que vous aves tous-jours dedans le cœur une
invariable resolution de vivre toute a Dieu; mais aussi, que cette grande activité naturelle vous fait
[74] sentir une grande vicissitude de saillies. O ma Fille, non, je vous prie, ne croyes pas que
l'œuvre que nous avons entrepris de faire en vous puisse estre si tost faite. Les cerisiers portent
bien tost leurs fruitz parce que leurs fruitz ne sont que de cerises de peu de duree; mays les
palmiers, princes des arbres, ne portent leurs dattes que cent ans apres qu'on les a plantés, ce dit
on. Une mediocre vie se peut acquerir en un an; mays la perfection a laquelle nous pretendons, o
Dieu! ma chere Fille, elle ne peut venir qu'en plusieurs annees, parlant de la voye ordinaire.
Dites bien encor ceci a cette fille que je vous ay tant recommandee292, qu'en verité je ne la
puis oublier ni jour ni nuit, mon ame reclamant incessamment la grace de Dieu sur elle; et dites
luy hardiment que non, je ne m'estonneray jamais de ses foiblesses et imperfections. Ne serois je
pas un desloyal arrogant si je ne la regardois en douceur parmi les effortz qu'elle fait de s'affermir
en la douceur, en l'humilité, en la simplicité? Qu'elle continue donq fidelement ses poursuites, et
je continueray sans cesse de souspirer et respirer pour son bien et avancement. Le bon pere293 me
remercie si bonnement de la dilection que je porte a cette chere fille, sans considerer que c'est une
affection qui m'est si pretieuse et tellement naturalisee en mon ame, que personne ne m'en doit
sçavoir non plus de gré que dequoy je me souhaitte du bien a moy mesme.
Mais dites luy, a cette chere fille, qu'en l'exercice du matin elle mette son cœur en posture
d'humilité, de douceur et de tranquillité, et qu'elle s'y remette apres disner, pendant Graces, et a
Vespres, et le soir; et que parmi la journee elle se souvienne que je le luy ay dit.
Marguerite de la Guiche. (Cf. Moreri, 1740, tome IV.) Sa profession fut retardée jusqu'au 30 novembre 1621, à cause
du règlement de ses affaires, compliquées encore par la mort de son père (entre juin 1620 et juin 1621). Cette Sœur
avait des dons naturels remarquables auxquels vinrent s'ajouter de solides vertus pour la rendre capable d'être utile à
son Ordre, et de l'édifier, comme elle le fit jusqu'à l'âge de quatre-vingt-deux ans. Le 24 juin 1677, elle mourut au
second monastère de Paris où elle avait été envoyée vers 1628. (Archives de la Visitation d'Annecy.)
291 Filles spirituelles du Saint, amies de la Visitation.
292 L'Abbesse elle-même, on s'en souvient. (Voir le tome précédent, Lettre MDXXIV, p. 390.)
293 Probablement, le père de la Mère Angélique, Antoine Arnauld.
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Dites luy que je demeure icy, en mon diocese, tandis qu'il plaist a Dieu; et que, comme rien
ne m'en peut tirer que quelque particuliere occasion que je croiray estre a la gloire de Nostre
Seigneur, aussi, cela se [75] presentant, je n'auray non plus difficulté de me desprendre maintenant
des faveurs que je reçoy, qu'auparavant qu'elles me fussent donnees. Je suis et seray et veux estre
a jamais a la mercy de la providence de Dieu, sans que je veuille que ma volonté y tienne autre
rang que de suivante. Vous sçaures tous-jours tout, mais mesnages-le. On m'invite d'aller de rechef
a Paris, en une aggreable condition294. J'ay dit: Je n'iray point la, ni ne demeureray icy, sinon en
suite du bon playsir celeste. Ce païs est ma patrie, selon ma naissance naturelle; selon ma
renaissance spirituelle, c'est l'Eglise. Par tout ou je penseray mieux servir celle ci, j'y seray
volontier, sans m'attacher a celle la.
Non, ma Fille, ne laisses pas l'oraison que pour des occasions qu'il est presque impossible
de recouvrer. Il n'y a point de mal, ains du bien, a traitter avec nostre bon Ange.
Mais disons un mot de nos cheres Filles. Helas! la pauvre N. perdra elle ainsy le fruit de sa
vocation? O mon Dieu, ne le permettes pas. Sa pauvre seur est en grand danger, a ce qu'on m'escrit;
et je vous asseure que mon ame en est toute affligee, et voudrois, si je pouvois, beaucoup faire
pour retenir ces deux seurs pour Dieu qui les veut, pourveu qu'elles ne resistent295.
Je n'escris point pour le present a nostre chere seur Catherine de Gennes296. Je croy que
l'assemblee de L. n'aura rien peu contre elle, puisque vous ne m'en dites rien. O non, car Dieu
protegera cette chere ame et ne permettra pas qu'une si rude tempeste la vienne accabler. Qu'elle
reprenne ses espritz et qu'elle vive joyeuse.
Quant a la C.297, il ne faut pas treuver estrange le [76] refus qu'on en a fait: le bien qui en
doit reuscir est trop grand pour n'avoir point de difficulté et de contradiction. M. reviendra a soy;
certes, je ne me suis sceu empescher de luy en escrire bien amplement, encor que je ne le connoisse
point, m'estant advis que je le devois pour le bien des affaires de Nostre Seigneur.
Demeures en paix, ma tres chere Fille, et pries souvent pour mon amendement, affin que
je sois sauvé et qu'un jour nous tressaillions en la joye eternelle, nous resouvenant des attraitz dont
Dieu nous a favorisés, et des reciproques consolations qu'il a voulu que nous eussions en parlant
de luy en ce monde. O ma Fille, il soit a jamais l'unique pretention de nos cœurs. Amen.
Le 16 decembre 1619.
294 Voir ci-dessus, note (173), p. 39.
295 Quelles étaient ces deux sœurs rebelles à la grâce? L'une d'elles pourrait être la destinataire de la Lettre MDLXXI
(p. 60), mais avancer un nom serait se hasarder.
296 Mme Le Maistre; ses affaires avec son indigne mari (voir ci-dessus, notes (142), (143), p. 27) n'étaient pas encore
entièrement réglées.
297 Serait-ce «la Communion» que le saint Directeur aurait conseillée plus fréquente à l'Abbesse et à ses Filles? «M.»
serait alors M. Manceau, confesseur de la Communauté, que nous trouvons nommé pour la première fois dans une
lettre du 4 février 1620.
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MDLXXX. Au Chanoine Jean-François de Sales, son frere298.
Vieilles lettres qui attendaient un porteur. Les futurs
aumôniers de Madame. Quelques nouvelles. Un Mémoire
à présenter au prince de Piémont. Projet d'union d'un
bénéfice au Chapitre de Genève. Des jaloux auxquels il faut
répondre par des bienfaits. Commissions, recommandations
et messages.
Annecy, 16 décembre 1619.
Mon tres cher Frere,
Le bon poissonnier299 qui m'a apporté vos lettres de Ri vole300 nous asseura de venir dans
la huitaine prendre les nostres et vos habitz; mais la quinzaine passe, et il [77] ne vient point. C'est
pourquoy je vous envoye tout a coup mes vielles lettres, et celle ci par laquelle je respons a celles
que j'ay receües despuis par le sieur [Truytat301] et par autre voye.
M. le Doyen ne veut point aller a la cour, sa devotion le tirant ailleurs, ou il pretend se
rendre dans six semaines ou deux mois; mays il desire qu'on ne le sache pas, ne s'en estant
descouvert qu'a moy et au Superieur claustral du lieu ou il aspire, sur le rivage de ce lac302.
Je verray a [ces Ordres] M. l'Abbé de [Chézery303,] et sçauray en quelle disposition il se
treuve; et quant a [78] M. du Chastelard304, il me dit l'autre jour qu'en l'advertissant un mois
298 Voir tome XVII, note (207), p. 48, et ci-dessus, notes (212), (213), p. 49.
299 Dans le Compte-rendu de la tutelle de Henri de Charmoisy, n° 89 (Archives de Mlle A. Vuÿ), il est question de ce
«bon poissonnier», nommé Jacques Vesin, qui devait faire assez fréquemment le voyage de Savoie à Turin, où il prêta
même (1620) de l'argent au précepteur du jeune cousin de François de Sales.
300 La cour de Piémont était en ce moment à deux lieues et demie de Turin, au magnifique château de Rivoli, propriété
des ducs de Savoie.
Remarquons que Hérissant (Paris, 1758, tome IV), premier éditeur de cette lettre, a écrit Riviole, dénaturant
aussi presque tous les noms propres qui vont suivre; ce qui a rendu les recherches fort difficiles. Nous devrons donc
lire: «Truytat» pour Trulard; «ces Ordres» à la place de Lesorches; «Charmettes» pour Charmesay; «Belley» pour
Piolée; «Seyserieux» au lieu de Seysseriece; «d'Evian» pour Demun; «Bonnieres» pour Benmeres; «Lullin» pour
Salins, etc.
301 Presque à la même date, Mme de Charmoisy recevait «une lettre de M. de Boisy par le retour du sieur Truytal.» (J.
Vuÿ, La Philothée de St Fr. de Sales, II, 1879, p. 214.) Son vrai nom est Jacques-Philippe Truytat. C'était un maître
chirurgien, né à Annecy, vers 1594, de Jean Truytat, officier du duc de Nemours, et de Marguerite Risse. Il dépose en
1656 au second Procès de Béatification de l'Evêque de Genève qu'il avait beaucoup connu et servi dans ses maladies
les dernières années de sa vie.
302 Benoît de Chevron-Villette, doyen de la collégiale de Notre-Dame de Liesse (voir le tome précédent, note (544),
p. 158), méditait sa retraite à Talloires, dont le «Superieur claustral» était Claude-Louis-Nicolas de Quoex. (Voir tome
XIV, note (517), p. 172.)
303 L'édition de 1758 met ici Checeriece. Il s'agit de Gaspard Perrucard de Ballon, commendataire perpétuel du
monastère de la Bienheureuse Marie de Chézery, qui reçut les Ordres mineurs et le sous-diaconat à l'ordination
générale faite par François de Sales dans l'église de Sainte-Claire le 21 décembre de cette année 1619. (R. E.) Gaspard
était fils de Charles-Emmanuel Perrucard de Ballon et de Jeanne de Chevron-Villette (voir tome XIV, note (388), p.
129). Déjà prieur de Léaz, il fut prêtre en 1620, et obtint la charge d'aumônier de la princesse de Piémont. En 1625, le
Pape le nomma prévôt de la cathédrale de Genève. Sa mort, que nous avions placée en 1629 (tome XVII, note (966),
p. 292), d'après les indications de Besson, n'arriva qu'en 1630, après le 3 juillet, jour où il codicille.
Son abbaye de Chézery, du décanat d'Aubonne, appartenait à l'Ordre de Citeaux; elle avait été fondée, le 29
août 1140, par Amédée III, comte de Savoie. Pendant quarante ans, les Bernois en furent les maîtres et en dissipèrent
les revenus et les titres. (Besson, Memoires pour l'Histoire ecclesiastique des dioceses de Geneve, Tarentaise, Aoste,
etc., Moutiers, 1871, p. 139.) La ferveur ne revint pas avec le rétablissement des Religieux, et les désirs de réforme de
l'Evêque de Genève ne purent se réaliser. (Cf. tome XV, note (341), p. 117.)
304 Pierre-François de Rossillon, seigneur du Châtelard (voir tome XVII, note (339), p. 83).
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auparavant il se tiendra prest. Reste M. Favre305, qui desire d'attendre M. de [Charmettes306.] Si
quelqu'un de vostre connoissance vouloit entrer au premier quartier, en m'advertissant dans quinze
ou dix huit jours affin que je n'en fisse pas tenir prest l'un des susnommés, cela seroit bon, comme
je pense. Je pense aussi que la division de l'aumosne sera a propos ainsy que vous l'aves projetté.
M. de [Duyn307] aura response par les ci jointes, que [Mlle] de la Salle aura cent mille francs
de son pere et trente mille de sa mere, ainsy que M. de Medio308 m'asseure.
M. Favre309 m'escrit que M. de Foras n'est pas encor [79] hors de prison, par l'opiniastreté
des parens qui font le pis qu'ilz peuvent. J'[ai] escrit a M. de Montholon310, pour voir si on le pourra
destourner de la fause creance qu'il a de mon procedé, dont je ne me repens point, ni n'ay sujet
aussi de me repentir.
Je ne sçavois pas que les livres de Visites fussent a Paris, car on me l'a celé; mais il y a
apparence que monsieur le President en aura soin. Je les luy demanday l'autre jour, et il m'escrivit
qu'il en avoit un peu affaire pour encor, et qu'il me les envoyeroit par apres311.
Je vous envoye le projet que Monseigneur le Prince me commande de faire pour la
reformation des Monasteres de deça312, m'ayant semblé a propos qu'il luy fust remis parmi les
festes, en tems auquel telles pensees sont de sayson. Vous luy pourres dire que j'ay [écrit] apres
avoir conferé avec M. de Monthoux313 et M. l'Abbé d'Abondance314, et qu'il sera expedient que les
Memoires soyent dressés en italien ou en latin, mais plustost en italien, de quelque bonne main.
Vous verres que nous n'avons pas oublié nostre Eglise, pour laquelle il se presente encor
une occasion dont le Chapitre m'a prié de vous donner advis, affin que dextrement vous sachies si
on en pourroit reuscir. C'est que Monsieur le Reverendissime du Montdevis315 a, ce dit [80] on, un
305 C'était le quatrième fils du Président, Antoine, né à Chambéry, prêtre depuis le 13 juin 1609, et depuis 1612 prévôt
de la collégiale de Sallanches. R. E.) Quand il devint aumônier de la princesse de Piémont, il était prieur d'Entremont.
Il mourut en 1662, doyen de la Sainte-Chapelle de Chambéry, ayant reçu en 1656, comme coadjuteur, Don Antoine
de Savoie. Antoine Favre tint de son père un génie supérieur, et s'acquit la réputation d'un prédicateur éloquent.
306 Les derniers jours de mars 1620, Jean-Claude Favre, seigneur des Charmettes, partait pour la cour de Turin, porteur
d'une lettre par laquelle son père le présentait au duc de Savoie «pour recueillir l'honneur que» Son Altesse «s'est
daignée luy faire de le recevoir au nombre des gentilshommes servants de Madame. J'aurois a desirer,» ajoute le
Président, «qu'il eust plus d'aage et d'experience...» Jean-Claude allait pourtant terminer en juillet sa vingt-septième
année; en 1614, il avait épousé Jeanne-Françoise Paquellet de Moyron. Il vécut jusqu'en 1650. Son frère Antoine, qui,
en décembre 1619, voulait l'attendre, ne put le suivre en mars, comme aumônier de la princesse Christine: «Ayant
sceu que M. du Chastelard desiroit d'aller semison quartier en la mesme charge,» dit Favre dans la lettre déjà citée, je
suis contraint de retenir mon fils jusques au quartier de juillet.» (Mugnier, Correspondance du Président Favre, tome
II (suite) publié par la Société savoisienne, etc., Chambéry, 1906.)
307 Ici, Hérissant imprime M. de Drum. Aucun nom semblable n'existe dans l'ancienne noblesse de Savoie, et il faut
sans doute lire: M. de Duyn. On ne peut proposer alors que Philibert de Mareschal-Duyn, fils de Jean-Balthazard et
d'Antonie du Pont, qui épousa en 1626 Anne de Ceva; ou encore Pierre de Duyn (cf. tome XVI, note (1126), p. 345)
dont le fils, Jean-Baptiste, se maria en 1623. Quelle était la demoiselle de la Salle à l'alliance de laquelle on songeait?
on ne peut le dire. Les familles Salteur, Trouillouz, de Heu portaient ce titre, et encore d'autres dans le Lyonnais.
308 Jacques de Médio (voir tomes XII, note (88), p. 49, et XVII, note (353), p. 89).
309 Nous ne croyons pas que le Saint désigne ici Claude Favre de Vaugelas, alors cependant à Paris, car on l'appelait
toujours: «M. de Vaugelas.» Le nom de Favre, seul, n'était porté que par Antoine, l'ecclésiastique (voir note (305) de
la page precedente). Il s'agirait plutôt de Mme Favre, soit la Mère Marie-Jacqueline qui, à Lyon, avait facilement et
fréquemment des nouvelles de la capitale, par elle transmises à Annecy.
310 Epist. MDLXXV.
311 Nous ignorons de quels livres il s'agit ici, Si c'étaient des Registres de Visites pastorales, peut-être serait-il plus
probable de lire Turin, au lieu de Paris.
312 Ce Mémoire sera donné avec les Opuscules. (Voir la lettre suivante, et cf. tome XVII, note (990), p. 290.)
313 Claude-Louis Guillet de Monthoux (voir tome XV, note (177), p. 55).
314 Vespasien Aiazza (voir tome XIII, note (165), p. 48).
315 En mai 1603, François de Sales étant à Turin, alla jusqu'à Mondevis, ou Mondovï, vénérer la Très Sainte Vierge,
dont le culte avait été mis en grand honneur depuis sept ans, et à laquelle, par la générosité de Charles-Emmanuel,
s'élevait un temple, un des plus beaux du Piémont. Le nouvel Evèque, Charles Argentero ou Argentier, abbé de Saint-
Bénigne de Fruttuaria, fils de Virginie Broglia et de Georges, des marquis de Brezé et des comtes de Bagnasco, ne fut
promu qu'au mois d'août. Ce Prélat gouverna son Eglise avec sagesse, rétablit la concorde entre les citoyens, introduisit
les Carmes déchaussés dans son diocèse; il mourut, riche de bonnes œuvres, le 22 mars 1630, et on lui décerna le
surnom de Bienfaisant. le duc de Savoie, juste appréciateur de son mérite, lui avait confié plusieurs fois des missions
77/341

8.8 Page 78

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prieuré pres de [Belley], qui s'appelle Consieu, duquel s'il vouloit se desfaire en faveur de nostre
Eglise, on luy asseureroit une bonne pension, pourveu qu'elle n'excedast pas tous les fruitz316; et
apres on pourroit traitter avec le Chapitre de Belley, du doyenné de Seyserieux317. Or, je voy en
cela une extreme difficulté, a cause du placet du Roy qui tres mal volontier ordonnera pour unir a
un cors qui est hors du royaume. Neanmoins, parce que le Chapitre a cela en desir, vous pourres
avec dexterité sçavoir ce qui se pourra faire par dela avec Monseigneur du Montdevis.
M. le Prevost318 gousta merveilleusement la bonne pensee que vous aves faite, de voir si
on pourroit loger mon neveu de la Feuge chez Monseigneur le Prince Cardinal; et s'il se peut, ce
sera une tres grande charité319.
Mon frere [de Thorens320] vous escrit de la lettre que les gens de bien font voir par ci par
la a la desrobee. Il y a apparence qu'ilz feront ce qu'ilz pourront pour [81] ravaler le peu de faveur
qu'ilz voyent naistre pour nous; mais il ne faut pas que vous vous en remuies, ains que vous
respondies seulement par bienfaitz a leur mesdire. C'est le vray moyen de les fascher et combattre,
mesprisant leurs effortz par l'asseurance que nous tesmoignerons d'avoir dans nostre innocence et
inviolable affection au service de nos Princes.
M. le Marquis de Saint Damian s'en reva321, qui m'est venu voir avec beaucoup de
demonstrations de nous aymer. Il faut donq correspondre, affin que de toutes partz nous fassions
paroistre que nous sommes nous mesmes.
M. de Cormand a fiancé la bonne madamoyselle de la Croix, et croy que l'on est apres de
poursuivre la dispense322. M. de Leaval323 s'estoit chargé de retirer le depesche du sieur Menyer324;
s'il ne va pas bien tost en Piemont, madame de Charmoysi vous prie de procurer qu'on le face, et
de donner advis de l'argent qu'il faut pour le retirer, affin qu'on l'envoye soudain. Je croy bien que
pour celuy de naturalité de M. de [Bonnières325] il faudroit donner quelque chose en chancellerie,
mais il n'y a remede: si c'est peu de fait, il faudra avancer.
Les Seurs de Sainte Claire [d'Evian] me conjurent fort de vous recommander leur affaire326,
en laquelle M. le [82] Marquis de [Lullin327] les aydera fort. Ce porteur est l'un de leurs Religieux.
importantes auprès de l'Empereur et du duc de Mantoue. (Cf. Grassi, Memorie storiche della Chiesa vescovile di
Mondovi, Torino, 1789, vol. I, p. 157.)
316 A deux lieues de Belley, sur une colline entre Rossillon et Cordon, se trouvait le prieuré de Conzieu, de l'Ordre de
Cluny. Il ne fut pas uni au Chapitre de Genève, selon les désirs du Saint, car nous voyons Jean-Baptiste Argentier
(Argentero) succéder, comme prieur, à son oncle, l'Evêque de Mondovi, et résigner ce bénéfice en 1650. (Guichenon,
Hist. de Bresse et de Bugey, Lyon, 1650, Partie II, continuation.)
317 Le doyenné de Ceyzérieu avait été uni à la mense capitulaire de l'Eglise de Belley par une Bulle de Paul V, du 13
avril 1606, fulminée par François de Sales le 2 août 1607. (Guichenon, ibid., et Besson, Memoires, etc. p. 162.)
318 Louis de Sales, fils de Louis, seigneur de Montpiton et de Jeanne de Guasquis, cousin-germain du Saint. (Voir
tome XII, note (22), p. 6.)
319 Neveu du saint Evêque seulement à la mode de Bretagne, Melchior, fils de Gaspard de Sales (frère du précédent),
seigneur de la Feuge, coseigneur de Brens, etc., et de Nicoline de la Faverge, entra, en effet, au service du Cardinal
de Savoie. Plus tard, le 7 août 1632, il épousa Jacqueline de Leydier dont il eut plusieurs enfants (tige de la branche
qui se perpétue par les comtes d'Asnières de Sales), et mourut le 13 août 1680, à l'âge de quatre-vingts ans.
320 Il est impossible que le Saint ait écrit ce que Hérissant a lu: «Mon frere ledit sieur;» il s'agit certainement de Louis,
toujours appelé depuis la mort de Bernard: «mon frere de Thorens».
321 Henri de Maillard, comte de Tournon (voir tome XVII, note (1292), p. 394).
322 Voir ci-dessus, note (256), p. 65. Le titre de seigneur de Cormand appartenait à des membres de la famille de
Menthon-Montrottier, et de celle de la Faverge. La dispense regardait-elle un degré de parenté, ou le fiancé était-il
chevalier de Malte? La solution de cette question faciliterait l'identification du personnage.
323 Le précepteur de Henri de Charmoisy, M. de Léaval (voir le tome précédent, note (962), p. 289), retenu par la
maladie à Chambéry, n'avait pu suivre son élève en Piémont.
324 Voir ibid., note (1235), p. 383.
325 La famille Angot de Bonnières, originaire du comté de la Marche, vint se fixer en Savoie au commencement du
XVIIe siècle en la personne de noble Jean Angot, seigneur de Bonnières, marquis de Castre ou de Casto, qui devint
colonel d'infanterie. Il avait épousé depuis quelques mois Louise de Sales, fille de Gaspard, seigneur de la Feuge,
cousin-germain de l'Evêque de Genève, et c'est pour lui, sans aucun doute, qu'on désirait des «lettres de naturalité». Il
était fils de Léon Angot et d'Anne Niussard. Sa femme est veuve avant le mois de mai 1655.
326 Voir la lettre suivante.
327 Gaspard de Genève, marquis de Lullin (voir tome XI, note (645), p. 285).
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8.9 Page 79

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Je suis grandement ayse de sçavoir que madame de Saint George demeurera328, sachant
combien elle a de pouvoir et de vouloir pour le bien de l'esprit de nostre Maistresse, et par
consequent pour le contentement plus desirable de Son Altesse et de Monseigneur nostre Prince,
et le bonheur de cet Estat. La connoissance que j'ay des qualités de cette dame m'a tous-jours fait
souhaiter qu'elle demeurast, et loüe Dieu de tout mon cœur que cela soit. Salues la cherement de
ma part et l'asseures de mon service tres humble, et de mesme toutes les dames qui me font
l'honneur de m'aymer; mais, comme vous sçaures bien faire, mettes a part la signora Donna
Genevra, ma tres chere fille329. Je ne sçaurois luy escrire, ni quasi plus a personne; ce sera au
premier jour, et a nostre tres cher frere le P. D. Juste, duquel j'ay receu la boëte et la lettre du P.
Justin330.
Les deux dames qui vous ont escrit de France sont mesdamoyselles de Crevant, qui
s'appelle Anne de Bragelonne, et de Verton, qui s'appelle Marie de Bragelonne331.
Nous avons achevé l'annuel de M. de Charmoysi ce matin; et la bonne madame de
Charmoysi se sent grandement obligee a vostre amitié, et pour le soin que vous aves de son
Henri332. [83]
Monseigneur de Turin me recommande le Pere Sommier (?) pour la prebende de l'abbaye
d'Aulps; mais c'est la, et non icy, ou il faut faire l'office. Vous le feres, s'il vous plaist, envers
Monseigneur le Prince Cardinal, et puis en rendres conte a Monseigneur l'Archevesque333.
Las et recreu de tant escrire, je prie Dieu qu'il vous comble de contentement, et suis
Vostre tres humble frere et serviteur,
FRANÇS, E. de Geneve.
Le 16 decembre 1619.
A Monsieur
[Monsieur] de Boysi,
Chantre et Chanoine de l'Eglise cathedrale de St Pierre de Geneve,
Vicaire general du Diocese
et premier Aumosnier de Madame. [84]
328 Jeanne de Harlay, dame de Saint-Georges, devait rester quelque temps encore à Turin. (Voir le tome précédent,
note (1259), p. 391.)
329 Dona Ginevra Scaglia (voir le tome précédent, note (607), p. 177). Nous ne redirons plus en note le nom de cette
fille spirituelle du Saint, très souvent mentionnée dans les lettres à Jean-François, ainsi que D. Juste Guérin que nous
connaissons déjà (voir tome XVII, note (618), p. 171).
330 Un Père Justin, Trinitaire de la rédemption des captifs, «homme fort pieux et zélé,» dit l'Année Sainte manuscrite,
avait, en 1606, donné le scapulaire de son Ordre à l'Evêque de Genève durant un grave accès de fièvre qui mit la vie
du Saint en danger. Est-ce le même qui est nommé ici?
331 Voir ci-dessus, notes (74), (75), p. 4.
332 Claude Vidomne de Chaumont, seigneur de Charmoisy, était mort le 28 octobre 1618 (voir le tome précédent, p.
312, note); mais ses obsèques à Annecy n'eurent lieu que le 17 décembre suivant.
Son fils, Henri, avait dix-sept ans; peu après, à la suite du prince de Piémont, il arrivait à Paris, et entrait
comme page au service du cardinal Maurice avec lequel il revint en Savoie, attendant Victor-Amédée pour passer à
Turin. Henri de Charmoisy commence dès lors cette vie insouciante qui donna tant d'inquiétudes à sa mère. Aux
conseils maternels s'unissent ceux de François de Sales, du président Favre, etc.; mais le naturel indolent, quoique bon
du jeune homme, ne leur fit pas porter des fruits abondants. Cependant, sa déposition, faite au second Procès pour la
béatification du saint Evêque de Genève, témoigne de sa foi et de sa piété, du prix qu'il attachait aux rapports intimes
de sa famille avec le Bienheureux. En 1626, il s'en était encore rapproché en épousant Jeanne-Michelle de la Faverge.
(Voir J. Vuy, La Philothée de St Fr. de Sales.)
333 Philibert-François Milliet (voir tome XII, note (457), p. 195), transféré en 1618 de l'èvêché de Maurienne à
l'archevêché de Turin; en même temps, son abbaye d'Aulps (voir tome XI, note (594), p. 266) fut donnée en commende
au Cardinal de Savoie (février 1618). C'était donc auprès de ce dernier qu'il fallait «faire l'office» pour le P. Sommier,
personnage que nous ne connaissons pas, et dont le nom est peut-être dénaturé comme tant d'autres de cette lettre.
79/341

8.10 Page 80

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MDLXXXI. Au Prince de Piémont, Victor-Amédée334. Requête
au nom d'un Monastère qui fleurit «en veritable devotion.»
Un Mémoire dont la lecture n'est pas «hors de sayson» pendant
les fêtes de Noël.
Annecy, 17 décembre 1619.
Monseigneur,
Les Seurs de Sainte Claire d'Evian font supplication a Vostre Altesse pour avoir la place et
les masures du chasteau de ce lieu-la, affin d'y bastir leur couvent335, puisque monsieur le Marquis
de Lulin tesmoignera que cela ne peut en rien nuire a la conservation de la ville. Et puis qu'elles
ont encor desiré mon intercession aupres de Vostre Altesse, je la fay tres humblement, adjoustant
qu'il ny a, comme je pense, aucun Monastere de cet Ordre-la qui fleurisse plus en veritable
devotion que celuy ci.
J'envoye aussi a Vostre Altesse le projet dressé par son commandement, pour la
reformation des Monasteres de deça les montz336, duquel la lecture ne sera point hors de sayson
parmi ces festes, puisque tout le dessein regarde la plus grande gloire du divin Enfant, la naissance
duquel on celebre, et que je ne cesseray jamais de supplier qu'il face de plus en plus prosperer
Vostre Altesse,
Monseigneur, delaquelle je suis
Tres humble, tres obeissant et tres fidele
orateur et serviteur,
FRANÇS, E. de Geneve.
Annessi, XVII decembre 1619.
Revu sur l'Autographe appartenant à Mme Boarelli di Verzuolo,
à Saluces (Piémont). [85]
MDLXXXII. A une Religieuse de la Visitation337. Comment
accueillir l'aimable «petit Jesus». Une de ses larmes sur notre
cœur. — Troupe de bergères offrant leur plus bel agneau au
divin Enfant.
Annecy, 18 décembre 1619.
Ma tres chere Fille,
Voyla le tant aymable petit Jesus qui va naistre en nostre commemoration ces festes-ci
prochaines; et puisqu'il naist pour nous venir visiter de la part de son Pere eternel, et que les
pasteurs et les Rois le viendront reciproquement visiter en son berceau, je croy qu'il est le Pere et
l'Enfant tout ensemble de Sainte Marie de la Visitation.
334 La lettre à Jean-François de Sales, p. 82, indique clairement le destinataire de celle-ci; les éditeurs précédents se
sont donc trompés en l'adressant au duc de Savoie.
335 Voir tome XVII, note (1129), p. 338.
336 Voir ci-dessus, p. 80.
337 Il serait téméraire de désigner une destinataire; tout au plus peut-on proposer la Sœur Anne-Catherine de Beaumont,
en s'appuyant sur quelques particularités du texte qui semblent lui convenir. (Cf. ci-dessus, p. 73.)
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9 Pages 81-90

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9.1 Page 81

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Or sus, caressés le bien, faites luy bien l'hospitalité avec toutes nos Seurs, chantes luy bien
des beaux cantiques, et sur tout adores le bien fortement et doucement, et en luy sa pauvreté, son
humilité, son obeissance et sa douceur, a l'imitation de sa tressainte Mere et de saint Joseph; et
prenes luy une de [ses] cheres larmes, douce rosee du Ciel, et la mettes sur vostre cœur, affin qu'il
n'ayt jamais de tristesse que celle qui res-jouit ce doux Enfant. Et quand vous luy recommanderes
vostre ame, recommandes luy quant et quant la mienne, qui est certes toute vostre.
Je salue cherement la chere trouppe de nos Seurs, que je regarde comme des simples
bergeres veillantes sur leurs troupeaux, c'est a dire sur leurs affections, qui, adverties par l'Ange,
vont faire l'hommage au divin Enfant338, et pour gage de leur eternelle servitude luy offrent le plus
beau de leurs aigneaux, qui est leur amour sans reserve ni exception.
Vostre tres affectionné Pere et serviteur,
FRANÇS, E. de Geneve.
Ce 18 decembre 1619. [86]
338 Luc., II, 8-16.
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9.2 Page 82

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MDLXXXIII. A Madame du Tertre339. Les larmes de la nature
sur la séparation du monde. Compassion et espérance.
Respect du Saint pour l'action de Dieu dans les âmes.
Sacrifice de «poudres» et de «papiers dorés». Confidence
paternelle. Coups de rasoir divins. Avis sur des choses
quelque peu superstitieuses et sur les visites. Les
conversations de l'Evêque de Genève après son sacre.
Annecy, 18 ou 19 décembre 1619.
Que de joye, ma chere Fille, que mon cœur reçoit de voir la franchise et rondeur du vostre
a ce commencement! Non, ne vous estonnes point de ces larmes; car, bien qu'elles ne soyent pas
bonnes, elles viennent neanmoins de bon lieu. Si nos resolutions estoyent petites et revocables,
nous n'aurions pas ces sentimens en ces abnegations et hautes conclusions que nous avons prises.
David pleura tant sur Saül mort, quoy que ce fust son plus grand ennemi340: pleurons un peu sur
ce monde, [87] qui meurt, ains qui est mort pour nous, et auquel nous voulons a jamais mourir.
O ma Fille, ma bonne Fille, que je suis ayse de vous voir un peu travaillee de ce mal
d'enfant! Non, jamais nulle ame n'enfanta Jesus Christ sans douleurs, sinon la Sainte Vierge, a
laquelle en contrechange il en donna des grandes en mourant. Mays, ma Fille, vous verres qu'apres
ces tranchees de cœur vous aures mille sortes de consolations. Et moy, ne croyes vous pas que
339 Cette lettre, dont la destinataire est, à n'en pas douter, Mme du Tertre, a dû être écrite aux environs de Noël 1619
(voir ci-après, p. 90), et envoyée probablement avec celles des 18 et 19 décembre.
On sait déjà dans quelles circonstances Marie-Aimée Le Gruet de Morville, veuve à vingt-deux ans de M. du
Tertre, était entrée à la Visitation de Moulins. (Voir le tome précédent, note (1248), p. 386.) Mais il est temps de
connaître davantage cette âme dont le salut coûta si cher aux deux Fondateurs, et, en quelque sorte, à l'Ordre tout
entier. Elle sembla suscitée pour faire voir jusqu'où peut aller la charité des Saints, et, nous l'oserons dire, à quels
excès atteignent leur bonté, leur patience quand il s'agit de ramener à son vrai Pasteur la brebis égarée.
Les premiers temps de sa retraite furent assez paisibles; en qualité de bienfaitrice séculière, elle vivait sans
s'astreindre trop aux exercices religieux, et trouvait le moyen d'exercer «sa vanité fort honnorablement.» (Voir ci-
dessus, Lettre MDLX, p. 44.) Vers la fin de 1619, apprenant le projet d'un établissement à Nevers, et se doutant bien
que la Mère de Bréchard en serait supérieure, notre jeune veuve résolut de la suivre à tout prix, et, pour cela, se rendit
fondatrice de la nouvelle Maison. Les choses ne marchèrent pas comme elle l'avait pensé. La ville de Moulins ne
voulut pas laisser partir la Mère Jeanne-Charlotte qu'on estimait une sainte; du même coup, Mme du Tertre perdit ses
attraits pour Nevers, et redemanda la somme, dont le tiers dix mille francs était déjà employé à l'achat d'un
immeuble. (Voir à l'Appendice III.) Quand tout fut à peu près terminé de ce côté, Mme du Tertre sollicita son admission
au noviciat, et au mois d'août 1621, elle fit profession. Pour ménager sa vertu encore faible, on lui avait accordé
quelques exemptions et privilèges. Hélas! bientôt elle ne s'en contenta plus, et, peu à peu, porta ses dérèglements à
l'extrémité: «Cette pauvre créature vit à sa façon, est servie et logée comme il lui plaît, s'habille comme bon lui semble
et sans régularité; elle n'est sujette à rien et veut tout dominer.» Le portrait est de la main de la Mère de Chantal.
(Lettre citée dans la Vie de la Mère de Chastellux, Les Vies de plusieurs Superieures de…la Visitation, Anneci, 1693,
p. 276.) L'Evêque de Genève était mort; la sainte Fondatrice demeurait seule chargée de soutenir et de conseiller les
Mères Marie-Hélène de Chastellux et Marie-Constance de Bressand qui succédèrent à la Mère de Bréchard à Moulins
(1622-1634), de consoler et d'encourager la Communauté, et surtout de tâcher de convertir la malheureuse Sœur de
Morville. Elle y employa toutes les ressources de son cœur, toute l'énergie de sa fermeté, ne se lassant pas même
quand la malice de cette femme en vint, après avoir secrètement obtenu des Bulles de secularisation, à intenter un
procès à ses parents qui ne se souciaient pas du tout de la voir rentrer dans le monde, et à repandre des calomnies
contre la Visitation. L'incomparable bonté de la Sainte, les souffrances du Monastère de Moulins, les prières de tout
l'Ordre, eurent enfin raison de cette âme. Un songe mystérieux la fit rentrer en elle-même; la douleur de sa vie passée
fut si profonde qu'elle déchira publiquement ses privilèges de fondatrice le jour où, après un second noviciat, elle
voulut renouveler solennellement sa profession et faire amende honorable devant les principaux de la ville et une foule
de peuple. Quinze mois plus tard (1633), Dieu l'appelait à lui. (D'après l'Hist. des Fondations de la Visitation de
Moulins et de Nevers.)
340 II Reg., I, 12, 17.
82/341

9.3 Page 83

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mon cœur s'attendrisse sur le vostre? Si fait, je vous asseure, mais attendrissement doux et suave,
pour voir que vos douleurs sont des presages de plusieurs faveurs que Dieu vous fera, si
constamment et fidellement vous perseveres en cette entreprise, la plus digne, la plus genereuse,
la plus utile que vous pouvies jamais faire.
Or, poursuives donq, ma tres chere Fille; tenes bien vostre cœur ouvert. Pour moy, ne
doutes nullement de ma fidelité; confies vous en moy sans crainte, sans reserve et sans exception,
car Dieu qui l'a voulu me tiendra de sa sainte main affin que je vous serve bien. [88]
Ce mesme Dieu sçait que sur vostre despart341, il me [vint] en la pensee de vous dire qu'il
failloit retrancher le musc et les senteurs; mais je me retins, sur ma methode, qui est suave, de
laisser lieu au mouvement que petit a petit les exercices spirituelz ont accoustumé de faire dans les
ames qui se consacrent entierement a sa divine Bonté. Car vrayement mon esprit est extremement
amy de la simplicité, mays la serpe avec laquelle on tranche ces inutiles rejettons, je la laisse
ordinairement es mains de Dieu: et voyla, ma tres chere Fille, qu'il vous en va donner un coup pour
ces poudres, pour ces papiers dorés. Qu'a jamais sa misericorde soit benite, car elle vous est fort
misericordieuse, je le voy bien.
Ouy, donnes ces poudres et ces papiers dorés a quelque dame du monde, qui soit neanmoins
de telle confiance que vous luy puissies marquer le sujet de ce petit renoncement, et ne doutes
point que cela scandalise; au contraire, cela edifiera son ame, puisque je presuppose que ce soit
une dame qui en ayt une bonne. Vous aves rayson, ma tres chere Filie, de renoncer a tout cela;
croyes moy, ces petites abnegations seront fort aggreables a Dieu.
Vrayement il faut que je vous die ceci, puisque j'ay commencé a vous communiquer mon
ame avec naïfveté. Je n'ay jamais seulement voulu porter des bas d'estame, ni jamais des gans ni
lavés ni musqués, des que je me suis voué a Dieu, ni jamais papier doré ni poudres; ce sont des
mignardises trop menues et vaines. O Dieu, quel cœur vous me donnes en vostre endroit, marchant
de si bon pied!
Helas, ma chere Fille, il est certes vray: ces eternelz et irrevocables renoncemens, ces
adieux immortelz que nous avons ditz au monde et a ses amitiés, font quelque attendrissement a
nostre cœur. Et qui ne se mouvroit a ces coups de rasoir qui separent et divisent l'ame d'avec
l'esprit342, et le cœur de chair d'avec le cœur divin, et nous mesmes d'avec nous mesmes? Mais,
vive Dieu! Ces [89] coups sont donnés, c'en est fait: non, jamais plus il n'y aura reunion de l'un a
l'autre, moyennant la grace de Celuy pour auquel nous unir inseparablement nous nous sommes
separés pour jamais de toute autre chose.
Laisses absolument toutes ces guerisons par paroles: ce sont niaiseries que cela, que je
permettrois a une ame moins resignee que la vostre; mais a la vostre, ma Fille, je dis hautement:
Laisses ces enfances et bagatelles, lesquelles, si elles ne sont pechés, sont des amusemens inutiles,
tendans a la superstition.
O Dieu, ma Fille, a toutes ces compaignies mondaines qui vous arriveront, il faut rendre
une contenance doucement joyeuse. Mais affin que vous vous entretenies de nouvelles
reciproquement, entretenes les comme venant de l'autre monde, et elles vous entretiendront comme
venans du monde; car si vous leur parles le langage de leurs lieux, ce ne leur sera pas grande
nouvelle. Je fus un moys, apres ma consecration a l'evesché, que, venant de ma confession generale
et d'emmi les Anges et les Saintz, entre lesquelz j'avois fait mes nouvelles resolutions, je ne parlois
que comme un homme estranger du monde, et il me semble que j'avois bonne grace; et quoy que
le tracas ayt un peu alangouri ces bouillonnemens de cœur, les resolutions, par la grace divine, me
sont demeurees. Soyes courte la ou vous ne profiteres pas.
Ce grand Dieu aggrandisse de plus en plus le regne de son saint amour en nous. Je suis en
luy, mais d'une affection toute particuliere, vostre.
Si j'avois davantage de loysir, je vous escrirois encor, car je ne me lasse point en ce doux
entretien de Dieu, de son amour, de nos ames. Demandes fort au petit Jesus naissant sa sainte
nudité pour vostre cœur, affin que nuement et purement il soit a luy.
341 De Paris pour Moulins, vers la fin de juillet 1619. (Voir le tome précédent, Lettre MDXXXVII, p. 411.)
342 Cf. Heb., IV, 12.
83/341

9.4 Page 84

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Vostre tres affectionné Pere et serviteur,
FRANÇS, E. de Geneve. [90]
84/341

9.5 Page 85

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MDLXXXIV. A la soeur de Blonay, maitresse des novices a la
Visitation de Lyon343. Vin heureusement mêlé de baume. Un
zèle «tout bon» qui avait besoin d'être purifié. Regard sur
l'Enfant de Bethléem. A qui appartiennent la joie et la paix.
La condition suffisante pour recevoir le divin Nouveau-né.
Annecy, 19 décembre 1619.
O ma Fille, Dieu vous a fait une grande misericorde d'avoir rappellé vostre cœur au gratieux
support du prochain, et d'avoir saintement jetté le bausme de la suavité de cœur envers autruy dans
le vin de vostre zele.
Voyesvous, en fin je respons, quoy que tard, a la lettre que vous m'escrivies apres mon
passage344, et respons courtement, simplement, amoureusement, comme a ma tres chere Fille que
j'ay aymee presque des le berceau, parce que Dieu l'avoit ainsy disposé. Il ne vous failloit que cela,
ma tres chere Fille; vostre zele estoit tout bon, mais il avoit ce defaut d'estre un peu amer, un peu
pressant, un peu inquiet, un peu pointilleux. Or, le voyla purifié de cela; il sera des-ormais doux,
benin, gratieux, paysible, supportant. Hé! qui [ne] voit le cher petit Enfant de Bethlehem, duquel
le zele pour nos ames est incomparable, car il vient pour mourir affin de les sauver; il est si humble,
si doux, si amiable.
Vives joyeuse et courageuse, ma chere Fille, (je dis en la portion superieure de vostre ame)
car l'Ange qui preconise la naissance de nostre petit Maistre annonce en chantant, et chante en
annonçant, qu'il publie une joye, une paix, un bonheur aux hommes de bonne volonté345, [91] affin
que personne n'ignore qu'il suffit, pour recevoir cet Enfant, d'estre de bonne volonté, encor que
jusqu'icy on n'ayt pas esté de bon effect; car il est venu benir les bonnes volontés, et petit a petit il
les rendra fructueuses et de bon effect, pourveu qu'on les luy laisse gouverner, comme j'espere que
nous ferons les nostres, ma tres chere Fille. Ainsy soit il.
Je suis ensuite tout entierement vostre. Amen, il est vray.
FRANÇS, E. de Geneve.
Le 19 decembre 1619.
Revu sur un ancien Manuscrit conservé à la Visitation de Bourg-en-Bresse.
343 La «tres chere Fille» que François de Sales a «aymee presque des le «berceau» est évidemment la Sœur Marie-
Aimée de Blonay. (Voir tome XV, note (826), p. 290.) Vers la même époque, la Mère de Chantal écrivait à l'ardente
Directrice: «Dieu soit béni... au moins une fois je vous vois contente de votre noviciat!» (Lettres, vol. I, p. 324.)
344 Ce passage avait eu lieu entre le 7 et le 19 octobre (voir ci-dessus, note (195), p. 44).
345 Luc., II, 10-14.
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9.6 Page 86

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MDLXXXV. A M. Claude de Quoex346. Démarches
infructueuses en vue d'obtenir un accommodement entre deux
parties.
Annecy, [vers le 25 décembre 1619347.]
Monsieur,
Je tiens parole, et vous diray, qu'ayant tiré de la courtoysie de monsieur de Dalma348 tout
ce que je desirois pour le dessein d'un accommodement amiable, et pris le mesme jour que j'avois
des-ja marqué a monsieur de [92] Paschal349 qui, de sa grace aussi, m'avoit donné sa parole a
mesme fin, voyci que ce billet m'a esté envoyé tout maintenant, par lequel vous connoistres que
j'ay besoin en cet endroit d'estre aydé du credit que vous y aves.
Mon Dieu, que ce miserable monde nous tourmente! Que bienheureux sont ceux qui le
mesprisent de tout leur cœur. Je suis de tout le mien, Monsieur,
Vostre serviteur bien humble,
FRANÇS, E. de Geneve.
J'avois pris jour au lundy apres Noel.
A Monsieur,
Monsieur de Quoex,
premier Conseiller et Collateral
au Conseil de Genevois.
Revu sur l'Autographe conservé à Chambéry, Archives du Sénat de Savoie.
346 Voir tome XII, note (138), p. 84.
347 D'après l'écriture, cette lettre paraît être plutôt des dernières années de la vie de l'Evêque de Genève. Ses réflexions
sur le monde rappellent plus d'un passage des lettres écrites entre 1620 et 1622. Quand il parle d'une entrevue fixée
par lui au «lundy apres Noël,» on a le droit de supposer qu'entre Noël et ce lundi, les fêtes de saint Etienne, de saint
Jean, des saints Innocents, avaient dû être célebrées, le Saint les excluant pour un jour d'entrevue, à cause des Offices.
En 1619, Noël tombait un mercredi: cette particularité coïnciderait avec les conjectures que suggère le texte de la
presente lettre et confirmerait la date que nous lui attribuons.
348 Peut-être le frère de Louise de Dalmaz (voir tome XVI, note (856), p. 184), Mathurin, né comme elle de Charles-
François de Dalmaz et de Louise d'Angeville.
349 On peut proposer Hercule-Antoine de Pascal, qui épousa Antoinette de Beaufort; ou son fils Melchior, capitaine
des gardes du prince Thomas, mort avant le 24 décembre 1648, date à laquelle sa veuve, Madeleine de Malleville,
dame de Fontanil, fait une donation aux Religieuses de la Visitation de Chambéry. (Note de M. le comte de Mareschal
de Luciane.)
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9.7 Page 87

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MDLXXXVI. A Madame de la Fléchère (Fragment). Que faut-il
pour devenir une vraie fille de la Visitation ?
[1618 ou 1619350.]
…………………………………………………………………………………………………….
Je salue ma filleule, priant Dieu qu'il la benisse; et vous, ma chere Fille, je vous prie de
l'eslever fort humble, douce, devote et modeste, car il faut estre ainsy, ou devenir ainsy, pour estre
vraye fille de nostre petite Visitation………………………………………………………………
Revu sur une ancienne copie conservée à la Visitation de Turin.
MDLXXXVII. A la Mère de Chastel, Supérieure de la Visitation
de Grenoble (Fragments). Mourir à soi pour vivre à Dieu.
Abandon à la Providence
Annecy, [novembre 1619-1620351.]
Que diray je a cette chere Fille qui m'est si fort a cœur? Vives toute en Nostre Seigneur,
ma tres chere Fille, et croyes que, pour luy, la sainte amitié que je vous porte vit fort entierement
et immortellement en mon esprit. Qu'a jamais puissions nous perir a nous mesmes pour nous
retreuver tout en Nostre Seigneur.352
……………………………………………………………………………………………………..
Ne permettes plus tant a vostre esprit de faire des reflexions sur vostre misere et sur vostre
incapacité; car, a quoy est bon tout cela? Dépendes vous pas de la Providence de Dieu en tout et
par tout? Or, celuy qui habite dans le sejour du Seigneur demeurera en sa protection353.354
…………………………………………………………………………………………………[94]
350 La Vie manuscrite de la Sœur Françoise-Innocente de la Fléchère (Archives de la Visitation d'Annecy) donne ces
lignes comme écrites après le veuvage de sa mère, c'est-à-dire après février 1616. L'enfant avait alors huit ans, et, bien
qu'elle montrât de précoces dispositions à la piété, peut-être est-ce un peu tôt pour la question de la vocation. C'est
pourquoi nous donnons comme date flottante 1618-1619, sans songer aux années postérieures, car plus tard le Saint
n'aurait pas parlé d'«eslever» la jeune fille. (Voir tome XIV, note (167), p. 56.)
351 Ces deux fragments, extraits d'un texte fabriqué qui parut pour la première fois en 1652 (Œuvres, Paris, Huré, col.
1253), n'appartiennent probablement pas à la même lettre; mais ils nous semblent l'un et l'autre postérieurs au voyage
de France, sans qu'on puisse, d'après quelques indices, les placer plus tard que 1620.
352 Nous supprimons ici le passage commençant: «Or sus, vous aves veu que la divine Providence a bien disposé...»
qui est de la fin de juillet 1620.
353 Ps. XC, 1.
354 Nouvelle coupure au texte de 1653. Les quelques lignes qui le terminent se retrouvent dans la même lettre indiquée
à la note précédente.
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9.8 Page 88

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MDLXXXVIII. A Madame de Thou, novice de l'abbaye de Port-
Royal. Un bien inestimable. Pourquoi le saint Evêque est
«beaucoup» Père de la Novice. Humilité, obéissance et joie
Annecy, [fin 1619 ou 1620355.]
Je me resjouis grandement, ma tres chere Fille, du bonheur dont vous jouisses en cette
sacree compaignie en laquelle vous estes, ainsy que monsieur vostre bon pere m'a fait sçavoir; car
ce vous est un bien inestimable de vivre au service de Dieu en un lieu ou toutes les ames le servent,
et ou leur conversation environne vostre jeunesse pour la conserver et affermir en ses bons propos.
Et quant a moy, j'auray perpetuellement une grande affection a vostre avancement en la
devotion, non seulement parce qu'estant fille d'un pere que j'honnore parfaitement, et madame
vostre mere356, j'ay mon interest en leur contentement, mais aussi d'autant qu'avec leur permission
et celle de Madame vostre Abbesse357, je pense avoir quelque part en vostre ame, puisque elle
porte le sacré caractere de la Confirmation par mon entremise358. C'est pourquoy vous estes un peu
ma fille, comme je croy, et je suis beaucoup vostre Pere asseurément, ayant et sentant un'affection
grandement paternelle pour vous. Et en cette consideration, je vous prie de tout mon cœur de vous
exercer fidelement en la sainte humilité et obeissance [95] envers ces ames sacrees a qui Dieu a
confié la vostre, affin qu'un jour elle soit toute sienne et son espouse bien-aymee. Et tenes vous
joyeuse, ma tres chere Fille, puisque il n'y a point de veritable joye en cette vie mortelle que celle
de se treuver en la voÿe la plus asseuree pour parvenir a l'immortelle.
Vives donq ainsy humblement et doucement devant Dieu, ma tres chere Fille, et pries-le
souvent pour moy qui suis
Vostre humble et tres affectionné frere et serviteur
en Nostre Seigneur,
FRANÇS, E. de Geneve.
A Madame
Marie Angelique [de] Thouz,
Religieuse Novice de Port Royal.
Revu sur l'Autographe conservé à la Visitation de Chartres. [96]
355 Marie, fille de René de Thou de Bonneuil (voir ci-dessus, note (129), p. 23) et de Marie Faye, dut entrer au noviciat
peu après le départ de Paris du saint Evèque; c'est pourquoi nous donnons à ces lignes la date vague: fin 1619-1620.
La Novice reçut le nom de Marie-Angélique de Saint-Paul, fit profession à Maubuisson, mais «pour Port-Royal,»
où elle suivit ensuite la Mère Arnauld, et mourut à Paris le 20 avril 1657. (Supplément au Nécrologe de Port-Royal.)
356 Fille de Jacques Faye, seigneur d'Espeisses, président au Parlement de Paris, et de Françoise de Chaluet, Marie
Faye décéda en 1666. (Moreri, 1740, tome VIII.)
357 La Mère Angélique Arnauld.
358 Voir le tome précédent, note (1198), p. 367.
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9.9 Page 89

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Année 1620
MDLXXXIX. A une Religieuse de la Visitation. Ingénieuse
interprétation d'un texte de l'Ecriture. Le sang de Jésus
marquant l'entrée de l'année nouvelle. Comment rendre les
nôtres fertiles. Transformation de l'âme. Pourquoi Dieu
nous laisse des imperfections
Annecy, 2 janvier [1620359.]
Vrayement, ma bonne Fille, vous m'aves bien consolé de m'envoyer des nouvelles de vostre
ame a ce commencement d'annee360. Quand l'Escriture Sainte veut parler d'une personne bonne,
douce, innocente et dediee a Dieu, elle dit: C'est un filz ou une fille d'un an361. Helas! ma Fille, si
nous n'avons pas correspondu ci devant a l'amour de ce gratieux Sauveur par une sainte et
inseparable union de nos affections a sa sainte volonté, faisons maintenant en sorte qu'au bout de
cette annee nous puissions estre appellés enfans d'un an.
Je disois hier, ma chere Fille (car je vous veux faire part de nos predications), que quand
Dieu voulut prendre en sa sauvegarde les enfans des Israelites, affin que l'Ange exterminateur ne
les tuast comme il faisoit ceux des Egyptiens, il ordonna que leurs portes fussent enduites et [97]
marquees du sang de l'Aigneau paschal362; et qu'ainsy sa divine Majesté marquoit du sang de sa
Circoncision la porte et l'entree de cette annee sur nous, affin qu'en icelle l'exterminateur de nos
enfans n'eust aucun pouvoir sur eux. Et vous sçaves qui sont nos enfans, car je parle de ceux du
cœur: nos bons propos, nos bons desirs, nos amours divins.
Je l'espere, ma chere Fille, que nous serons inviolablement fidelles a ce Sauveur, et que ces
annees suivantes nous seront comme les annees fertiles de Joseph, lequel, par le moyen du mesnage
qu'il fit en icelles, se rendit vice Roy d'Egypte363; car nous mesnagerons si bien nos ans, nos mois,
nos semaines, nos jours, nos heures, voire nos momens, que le tout s'employant selon l'amour de
Dieu, le tout nous sera profitable a la vie eternelle pour regner avec les Saintz. Mais n'est ce pas,
donq, ma Fille, dores-en-avant nous ne serons plus ces vieux nous mesmes que nous avons esté
devant; nous serons des nous mesmes qui, sans exception, sans reserve, sans condition, serons a
jamais sacrifiés a Dieu et a son amour, et, comme de petitz phœnix364, nous serons renouvellés de
ce feu de la dilection divine pour laquelle, avec un irreconciliable divorce, nous avons pour jamais
abandonné et rejetté le monde et toute sorte de vanité. Nos petites choleres, nos petitz chagrins,
les petitz frissonnemens de cœur sont des restes de nos maladies, que le souverain Medecin nous
laisse affin que nous craignions la recheute, que nous nous humilions et demeurions en une sincere
sousmission. Nous irons neanmoins nous establissans de jour en jour, et ces petites alterations
s'affoibliront, Dieu aydant.
359 Il est impossible de nommer la Religieuse à qui le Saint s'adresse; mais lui-même désigne le quantième: «Je disois
hier, et il parle d'un sermon évidemment prononcé en la fête de la Circoncision. Pour l'année, la destinataire étant loin
d'Annecy, il ne faut pas songer à une date antérieure à la fondation du Monastère de Lyon, c'est-à-dire à 1616.
Quelques considérations tirées du texte même nous font écarter cette année et les trois suivantes. Les prédications du
1er janvier 1621 (d'après la déposition de Pierre Paget Process. remiss. Gebenn. (I), ad art. 26) et 1622 (voir tome X,
p. 147) ne sont pas sur le sujet indiqué ici. Reste donc 1620 comme date fort probable.
360 Cette première phrase est inédite.
361 I Reg., XIII, 1.
362 Exod., XII, 7, 13, 23.
363 Gen., XLI, 40-49.
364 Cf. tom. V, pp. 177-181; VII, p. 451; VIII, pp. 398, 399.
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9.10 Page 90

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Ayés courage, ma Fille, car ce petit Jesus vous ayme bien. Je suis en luy tout vostre.
FRANÇS, E. de Geneve.
Revu sur une copie conservée à Turin, Archives de l'Etat. [98]
MDXC. A Messieurs du Conseil de la Sainte-Maison de
Thonon365 (Inédite). Recommandation en faveur d'un ancien
converti.
Annecy, 8 janvier 1620.
Messieurs,
Il y a si long tems que Son Altesse366 tesmoigne d'affectionner le secours de monsieur de
Corsier367, et que je vous prie de l'avoir en recommandation comme l'un de ceux pour qui
premierement fut erigee la Sainte Mayson, que je pense estre superflu d'y rien adjouster; et sur tout
puisqu'il est tant appuyé de parens et amis en ces quartiers la. Neanmoins, pour rendre mon devoir
et a sa condition et aux intentions de Son Altesse, je continue ma recommandation tres
affectionnee, qui suis,
Messieurs,
Vostre plus humble et tres affectionné confrere,
FRANÇS, E. de Geneve.
VIII janvier 1620, Annessi.
Revu sur une ancienne copie conservée à la Visitation de Turin. [99]
MDXCI. A la Mère de Chantal, a Paris. L'Evêque de Genève roi
de la fève à la Visitation d'Annecy. Préparation à un
«renouvellement extraordinaire». Bonne correction à une
âme opiniâtre. Science acquise à la cour par Jean-François de
Sales; honneurs qu'il y reçoit. Protecteur d'année; pourquoi le
Saint aime la pauvreté
Annecy, 8 janvier 1620.
O ma tres chere Mere, Dieu par sa bonté soit a jamais au milieu de nostre cœur, pour y
vivre et regner selon son bon playsir.
Que diray je a ce commencement d'annee? Je suis roy de bon jeu en vostre Mayson, et nos
Seurs en sont fort contentes, et m'ont envoyé par escrit une grande protestation de leur sousmission
et obeyssance, et m'ont demandé quelques nouvelles loix selon lesquelles elles vivront; et je les
mediteray pour leur en porter quand je pourray leur faire une exhortation, que je m'essayeray de
365 Voir tome XVII, note (993), p. 291.
366 Le duc de Savoie.
367 Jean-Gaspard de Prez, seigneur de Corsier (voir tome XVII, note (257), p. 63).
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10 Pages 91-100

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10.1 Page 91

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faire dans cette octave le plus gratieusement que je sçauray, car j'ay des-ja une idee aggreable pour
cela368.
Sur le commencement de la semaine qui vient, je feray ma reveuë pour un renouvellement
extraordinaire que Nostre Seigneur m'invite de faire, affin qu'a mesure que ces annees perissables
passent, je me prepare aux eternelles369.
La Seur N. nous a donné de l'exercice et ne veut encor pas cesser; car elle a un moule a
part, auquel elle fait [100] des pechés mortelz, et opiniastre qu'elle ne peut se communier pour
cette occasion370. Je luy fis une bonne correction, avec autant de vinaigre que d'huyle, que je
repeteray, en changeant les motz, si souvent, qu'elle operera moyennant la grace de Dieu. Tout le
reste va bien; sur tout les jeunes sont gratieuses371.
Monsieur [de Boisy372] est tous-jours a la cour, ou il apprend la mortification de la propre
volonté, excellemment, et encor plus celle de l'impatience, activité et soudaineté, car il faut
demeurer trois heures et quatre a attendre les heures du service; beaucoup plus, certes, que quand
il treuvoit quelqu'un a l'autel de la Visitation. Mais au reste, c'est la verité qu'il fait des merveilles;
et non seulement nostre chere Madame, mais Son Altesse373 et tous les Princes et Princesses,
seigneurs et dames le cherissent et l'estiment grandement; et des maintenant, sans que j'en aye
parlé en sorte quelconque, on le va jetter dans la coadjutorerie, si Madame est de croire, affin que
son premier Aumosnier soit Evesque374.
O ma Mere, soit que la providence de Dieu me face changer de sejour, soit qu'elle me laisse
icy (car cela m'est tout un), ne seray-je pas mieux de n'avoir pas tant de charge, affin que je puisse
un peu respirer en la Croix de Nostre Seigneur et escrire quelque chose a sa gloire375?
Mon Saint, c'est saint François, avec l'amour de la [101] pauvreté376; mays je ne sçai comme
l'aymer cette aymable pauvreté, car je ne la vis jamais de bien pres: neanmoins, en ayant ouy dire
tant de bien a Nostre Seigneur, avec lequel elle nasquit, vescut, fut crucifiee et resuscita, je l'ayme
et l'honnore infiniment.
VIVE JESUS!
FRANÇS, E. de Geneve.
Le 8 de janvier 1620.
368 Le bon Saint ne se trompait pas; le 13 janvier, il se rendait auprès de ses chères Filles de la Visitation, et leur faisait
le très gracieux Entretien connu sous le nom des Trois Loix spirituelles (voir tome VI, p. 102), dans lequel l'Evêque
de Genève, appliquant à l'âme religieuse les propriétés des colombes, enseigne, à son ordinaire, dans le langage le
plus suave, la perfection la plus haute.
369 Voir ci-dessus, note (285), p. 73.
370 On lit dans la première édition S. J.; ce qui permet de croire qu'il s'agit de Sœur Jeanne-Françoise de Sales de Boisy,
dont la maladie mentale progressait sensiblement à cette époque. (Voir tome XV, note (756), p. 263, et ci-après, Lettre
MDCXVII, p. 150.)
371 Il y avait alors au noviciat d'Annecy, six jeunes professes n'ayant pas un an de profession, quatre novices et une
prétendante.
372 Jean-François de Sales.
373 Le duc de Savoie.
374 En effet, Charles-Emmanuel, par brevet du 12 février 1620, nommait Jean-François de Sales à la coadjutorerie de
l'évêché de Genève. (Voir ce document à l'Appendice II.)
375 Cette phrase fait-elle vraiment partie de la présente lettre? Nous la trouvons répétée par les anciens éditeurs dans
un texte du 26 février 1620, où entrent des passages de différentes dates. Elle semble n'appartenir ni au 8 janvier, ni
au 26 février; nous la laissons pourtant ici, ne sachant lui assigner une autre place.
376 Allusion à la coutume établie à la Visitation de tirer, au commencement de l'année, des Protecteurs et une vertu à
pratiquer. (Cf. tome XVII, note (1090), p. 324.)
91/341

10.2 Page 92

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MDXCII. A Madame Angélique Arnauld, abbesse de Port-
Royal. A quoi faut-il employer la nouvelle année. La Mère
Angélique aux pieds de l'Enfant de Bethléem; l'abeille autour de
son roi
Annecy, 8 janvier 1620.
Mon cœur salue cherement le vostre, ma tres chere Fille, et celuy de toutes nos quatre seurs
bienaymees et bien aymables377. Je n'ay nul autre loysir que cela378.
O ma Fille, employons bien cette nouvelle annee pour acquerir l'eternitté. Je vous voy, ce
me semble, autour de l'Enfant de Bethleem, que, luy baysant ses petitz pieds, vous le supplies quil
soit vostre Roy. Demeures-la, ma tres chere [Fille], et apprenes de luy quil est doux, humble379,
simple et amiable. Que jamais vostre ame, comme un'abeille mistique, n'abandonne ce cher petit
Roy, et qu'elle face son miel autour de luy, en luy et pour luy, [102] et qu'elle le prenne sur luy,
duquel les levres sont toutes detrempees de grace380, et sur lesquelles, bien plus heureusement que
l'on ne vid sur celles de saint Ambroyse381, les saintes avettes, amassees en essein, font leurs doux
et gratieux ouvrages.
Ma Fille, je suis de plus en plus parfaitement vostre.
VIII janvier 1620.
382A Madame
Madame l'Abbesse de Port Royal.
A Maubuisson.
Revu sur l'Autographe conservé à la Visitation de Lyon-Fourvière.
377 Les quatre sœurs de l'Abbesse: Catherine-Agnès de Saint-Paul, Marie de Sainte-Claire, Anne-Eugénie de
l'Incarnation, et l'aînée restée dans le inonde, Mme Le Maistre. (Voir ci-dessus, les notes (126), p. 22; (85), p. 8; (86,
142), pp. 9 et 27.)
378 Ce premier alinéa est inédit.
379 Matt., XI, 29.
380 Cf. Ps. XLIV, 3.
381 Paulinus, in Vita ejus, § 3.
382 L'adresse est de la main de Georges Rolland.
92/341

10.3 Page 93

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MDXCIII. A la Mère de Chastel, Supérieure de la Visitation de
Grenoble383. Contentions en matière de préséance. L'Evêque
de Genève officiant ou prédicateur à plusieurs réceptions de
Religieuses à Paris. Mieux vaut avoir mille écus par une voie
de douceur que douze cents en disputant. Préférer
l'obéissance au jeûne. L'opiniâtreté d'une tentation.
Bonheur de la pauvreté. Quelles dispositions porter à la
sainte Table.
Annecy, 11 janvier 1620.
Ma tres chere Fille,
Je confesse que je n'entens rien en toutes ces considerations ceremoniales, parce que je n'y
ay jamais pensé. Quatre bonnes fois, pour le moins, j'ay presché a Paris pour la reception des
Religieuses, qu'un simple prestre a fait l'Office; une fois j'ay fait la reception, qu'un Pere Jesuite a
presché; et en l'une et l'autre façon je ne laissois pas d'estre ce que je suis. Quicomque presche, il
tient le lieu et fait la fonction de l'Evesque: c'est pourquoy, si le bon monsieur [d'Ulme384] fait
l'Office, je ne voy pas [103] qu'un autre ne puisse prescher, quel qu'il soit. Ni Monsieur l'Evesque
de Nantes385, ni Monseigneur l'Archevesque de Bourges386 n'en font nulle difficulté a Paris, ni je
ne l'ay jamais faite icy, a Sainte Claire et a Sainte Catherine387.
Mays avec cela, je confesse aussi que c'est une vraye humanité au bon monsieur [d'Ulme]
de croire qu'il importe a sa reputation qu'il face ou ne face pas l'Office388, et mesme n'ayant pas le
talent de la predication; et croy, quant a moy, que ce soit au contraire. Mais apres cela, quel
remede? car, de le divertir, c'est renverser son esprit. Il sera donq a propos que si nostre bon M.
[d'Aoste389] peut faire que messieurs ses parens ne le treuvent pas mauvais, ce soit luy qui face
l'exhortation; et je ne puis deviner quelle rayson ilz peuvent avoir de le treuver mauvais, estant une
chose si bonne et honnorable. Et tous-jours l'action sera plus authorisee par ce moyen que par
aucun autre. Que si cela ne se peut, il faudra prier quelque Pere Religieux; car, que faire parmi ces
imaginations? Le jour est court, et de disposer Monseigneur390 a autre chose il n'y a pas de
l'apparence. Je vous asseure, [104] ma Fille, qu'une fille de consideration se faysant Carmelite, je
383 Les divers sujets traités dans cette lettre prouvent que la Superieure de la Visitation à laquelle elle s'adresse est la
Mère Péronne-Marie de Chastel.
384 Le chanoine Jean-François d'Ulme, confesseur de la Visitation de Grenoble. (Voir le tome précédent, note (845),
p. 248.)
385 Philippe de Cospeau (voir le tome précédent, note (1251), p. 387).
386 André Frémyot.
387 Le couvent de Sainte-Claire d'Annecy (voir tome XIII, note (229), p. 74), et l'abbaye de Sainte-Catherine (ibid.,
note (334), p. 116).
388 C'est-à-dire, présider la cérémonie de veture de la Sœur Anne-Thérèse de Rajat. C'était la nièce de Mme de
Veyssilieu, fille de sa belle-sœur Méraude de Rabot d'Aurillac, mariée à Hercule de Rigaud, seigneur de Rajat. Celui-
ci étant demeuré veuf, contracta une nouvelle alliance, et mit ses deux aînées dans une abbaye où l'on menait une vie
commode, sans grand souci de la Règle. Les jeunes filles y prirent l'habit, mais, par loyauté de conscience, ne voulurent
pas y faire profession; même, touchées de la grâce, elles résolurent d'entrer dans un Ordre réformé, et leur tante de
Veyssilieu les proposa à la Visitation: l'une entra au monastère d'Annecy (voir ci-après, Lettre MDCXII, p. 143), et la
seconde, dont il est ici question, à celui de Grenoble. Son contrat de réception est du 6 février 1620. Sœur Anne-
Thérèse rendit d'importants services dans l'Institut. En 1624, elle dirigea, avec la Mère de Chastel, la fondation d'Aix,
puis celle d'Arles en 1629 et la gouverna douze ans, ainsi que les Maisons d'Embrun et d'Apt. Rentrée dans son
monastère de profession, elle y mourut en 1670. (D'après l'Hist. de la Fondation de la Visitation de Grenoble et l'Année
Sainte de la Visitation, tome I, p. 595.)
389 Artus de Lionne, seigneur d'Aoste, Père spirituel de la Communauté. (Voir le tome précédent, note (827), p. 240.)
390 L'Evêque de Grenoble, Alphonse de la Croix de Chevrières (voir ibid., note (687), p. 203).
93/341

10.4 Page 94

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fis l'exhortation, et M. du Val, docteur en theologie, fit l'Office391, qui eust mieux presché que
moy, et moy mieux fait l'Office que luy. O Dieu, a quoy demeurons nous accrochés! Or bien, voyla
mon advis. Que s'il ne se peut encor, il faudra faire l'Office de la reception devant disner, et
l'exhortation apres disner.
Au reste, ma tres chere Fille, il est vray, qui a son cœur et sa pretention en Dieu, il ne se
sent point, au moins en la partie superieure, des agitations des creatures; et qui l'a au Ciel, comme
dit saint Gregoire a deux Evesques392, il n'est point tourmenté des vens de la terre.
Non seulement je consens, mais j'appreuve, ains j'exhorte de tout mon cœur que quand les
parens riches donnent raysonnablement selon leur condition et moyens, qu'on ne tracasse point
pour tirer davantage. Comme, par exemple, en la fille qui fait son essay393: j'aymerois cent fois
mieux doucement avoir mille escus, que douze cens avec amertume, et long et fascheux tracas.
L'esprit de Dieu est genereux, suave et humble. On gaigneroit peut estre deux cens escus en
disputant, mais on perdroit de reputation a quatre cens; et on oste encor le courage aux riches de
laisser venir leurs filles, quand on exige si chichement tout ce qu'on peut. Voyla mon sentiment,
voyla ce que je fay prattiquer icy.
Elle a rayson, certes, la bonne fille394, de croire que son humeur jeusneuse est une vraye
tentation: ce l'a esté, ce l'est et ce la sera tandis qu'elle continuera de faire ces abstinences, par
lesquelles il est vray qu'elle affoiblit son cors et la volupté d'iceluy, mais, par un pauvre eschange,
elle renforce son amour propre avec sa propre volonté; elle amaigrit son cors, et surcharge son
cœur de [105] la veneneuse graisse de sa propre estime et de ses propres appetitz. L'abstinence qui
se fait contre l'obeissance oste le peché du cors pour le mettre dans le cœur. Qu'elle mette son
attention a retrancher ses propres volontés, et bien tost elle quittera ces fantosmes de sainteté
auxquelz elle se repose si superstitieusement. Elle a consacré ses forces corporelles a Dieu; ce n'est
plus a elle a les ruiner, sinon quand Dieu l'ordonnera, et elle n'apprendra jamais l'ordonnance de
Dieu que par l'obeissance aux creatures que le Createur luy a donnees pour sa direction.
Si faut, ma tres chere Fille, il la faut faire ayder contre cette tentation par les advis de
quelque vray serviteur de Dieu; car il faut plus d'une personne pour desraciner ces persuasions de
sainteté exterieure et cherement choisies par la prudence de l'amour propre. Faites donq ainsy,
pries monsieur N.395 de l'instruire et fortifier contre cette tentation; et s'il est par luy treuvé bon,
que ce soit mesme en vostre presence.
Est ce tout de bon, ma tres chere Fille, quand vous dites: Nous sommes prou pauvres, Dieu
mercy? O que, s'il estoit vray, je dirois volontier: Que vous estes donq trop heureuses, Dieu mercy!
Mays je n'ose gueres parler d'une vertu que je ne connois que par le recit infallible du Roy des
pauvres, Nostre Seigneur; car, quant a moy, je n'ay jamais veu la pauvreté de pres.
Tenes vous dans le train de la Communion que nous vous dismes, et dressés vostre intention
a l'union de vostre cœur a Celuy duquel vous receves le cors et le cœur tout ensemble. Puys, ne
vous amuses pas a penser quelles sont les pensees de vostre esprit pour cela, puisque de toutes ces
pensees il n'y en a point qui soit vostre pensee que celle que, deliberement et volontairement, vous
aures acceptee, qui est de faire la Communion pour l'union et comme une union de vostre cœur a
celuy de l'Espoux.
…………………………………………………………………………………………………….
Vostre tres affectionné serviteur,
FRANÇS, E. de Geneve.
Le 11 janvier 1620. [106]
391 Ce fut peut-être au Carmel de Pontoise, dont M. André du Val (voir tome XII, note (434), p. 188) s'occupait
specialement; mais nous n'avons pu découvrir quelle est la Religieuse en question.
392 S S'agit-il encore de la Sœur de Rajat? Elle donna treize cents florins au Monastère. Ou bien le Fondateur parle-t-
il de Sœur Marie-Augustine Quinson dont le contrat, signé le 25 juillet 1620, porte deux mille quatre cents florins?
393 Greg. Mag., 1. XI, ep. XLV. (Vide tom. XIV, not. (488), p. 163.)
394 Sœur Jeanne-Hélène de Gérard (voir le tome précédent, Lettre MCCCLXXX, et note (459), p. 130, et ci-après,
Lettres MDXCV, MDXCVI).
395 Peut-être M. d'Aoste nommé plus haut, p. 104.
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10.5 Page 95

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MDXCIV. Au Pere Dominique de Chambery Vicaire-Provincial
des Capucins396 (Inédite). Permission demandée pour un voyage
du Frère Adrien des Echelles. Quand les vocations
extraordinaires doivent-elles être estimées. Regrets sur le
décès du P. Constantin. Réponse de l'Evêque de Belley au
sujet des Capucins.
Annecy, 12 janvier 1620.
Mon Reverend Pere,
La necessité des moliniers de cette ville et l'utilité de la continuation de leurs ouvrages397,
me donnent la confiance de vous supplier de donner permission au Frere Adrien pour un voyage
jusques a Lyon, auquel il se comportera selon les loix et conditions qu'il vous plaira de luy
prescrire, ainsy qu'il m'asseure de vouloir faire en toutes autres occurrences; autrement, certes, je
ne serois pas de ses confederés, ne pouvant jamais estimer les vocations extraordinaires, sinon
quand elles sont sousmises et correspondantes aux ordinaires.
Mays, mon Reverend Pere, n'est ce pas pitié du tres-pas du bon P. Constantin398? Je l'ay
regretté, et luy rendray, comme j'ay commencé, mon devoir es saintz [107] Sacrifices. 399Dominus
dedit, Dominus abstulit sit nomen Domini benedictum400.
Au reste, je suis invariablement
Vostre tres humble confrere et serviteur,
FRANÇS, E. de Geneve.
XII janvier 1620, Annessi.
Monseigneur de Belley m'a fait response quil estoit engagé avec les Peres Augustins401, et
que ce n'a esté que sur le refus que les Peres luy avoyent fait il y a quelques annees.
Revu sur l'Autographe appartenant à M. le comte Albert Solaro
della Margarita, à Turin.
396 La demande d'obédience pour le Frère lai, Adrien des Echelles (voir tome XVII, note (168), p. 38), est évidemment
adressée au P. Dominique de Chambéry, qui, depuis 1618, exerçait la charge de vicaire-provincial des Capucins. (Voir
ibid., note (645), p. 182.)
397 Pierre Richard, aidé de M. Magnin, «molinier» de Lyon, avait établi des métiers à soie à Annecy, autorisé en cela
par les lettres-patentes (1616) de Charles-Emmanuel. (Voir tomes XVI, note (1072), p. 330, et XVII, note (264), p.
66.)
398 Le P. Constantin de Chambéry (voir tome XV, note (890), p. 313).
399 Le Seigneur nous l'avait donné, le Seigneur nous l'a ôté: que le nom du Seigneur soit béni.
400 Job, I, 21.
401 On a vu (lettre du 27 octobre 1619, p. 46) que l'Evêque de Genève avait plaidé auprès de celui de Belley, la cause
des Pères Capucins pour les faire recevoir dans sa ville épiscopale. Les Augustins, avec qui Mgr Camus s'était engagé,
devaient appartenir à la réforme des Augustins déchaussés, commencée en Portugal (1574) par le P. Thomas de Jésus,
de la Maison d'Antrada, et introduite en France par le P. Mathieu de Sainte-Françoise, de Verdun. Leur premier
établissement se fit en Dauphiné à Pontcharra, où les reçut Guillaume d'Avançon, en 1595. Ils fondèrent en 1608 un
couvent à Paris, mais ne vinrent pas à Belley, où les Capucins eurent enfin la préférence. (Voir ci-dessus, note (207),
p. 47.)
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10.6 Page 96

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MDXCV. A la Mère de Chastel, Supérieure de la Visitation de
Grenoble (Inédite). Manière douce et tranquille de rejeter
l'amour-propre. La gloire de l'abjection. Chimères,
contradiction et extravagance d'une tentation. Comment aider
à la combattre et à en triompher
Annecy, 14 janvier 1620.
Je vous escrivis avant hier402, ma tres chere Fille, et respondis a vos deux lettres
praecedentes. O ma Fille [108] veritablement toute bienaymee de mon cœur, faites bien ainsy: ne
permettes pas a vostre esprit de considerer ces miseres; laisses faire a Dieu, il en fera quelque
chose de bon. Ne faites guere de reflexions sur ce que vostre nature meslera avec vos actions. Ces
saillies de l'amour propre doivent estre negligees; pour les desadvouer deux ou trois fois le jour,
on en est quitte; il ne faut pas les rejetter a force de bras, il suffit de dire un petit non.
Vous aves rayson: une fille qui est a Dieu ne doit penser a la reputation, cela est impertinent.
Quant a moy, dit David403, je suis abject et mesprisè; je n'ay point pour cela oublié vos
justifications. Que Dieu face et de nostre vie, et de nostre estime, et de nostre honneur a son gré,
puisque tout est a luy. Si nostre abjection sert a sa gloire, ne devons nous pas estre glorieux d'estre
abjectz? Je me glorifie, disoit l'Apostre404, en mes infirmités, affin que la vertu de Jesuschrist
habite en moy. Quelle vertu de Jesuschrist? L'humilité, l'acquiescement a l'abjection.
J'escris a cette pauvre chere fille405. Je ne vis jamais une tentation plus manifeste et
connoissable que celle la; ell'est presque sans fard et sans praetexte. Rompre des vœux pour
jeusner, presumer d'estre bonne pour la solitude sans estre bonne pour la Congregation, vouloir
vivre a soymesme pour mieux vivre a Dieu, vouloir avoir l'entiere jouissance de sa propre volonté
pour mieux faire la volonté de Dieu: quelles chimeres! Qu'une inclination, ou plus tost fantasie et
imagination, chagrine, bigearre, depiteuse, dure, aigre, amere, testue, puisse estre un'inspiration,
quelle contradiction! Cesser de louer Dieu et se taire de depit es Offices que la sainte Eglise
ordonne, par ce qu'on ne le peut louer en un coin selon son invention, quelle extravagance! Or sus,
j'espere que Dieu tirera de la gloire de tout ceci, puisque cette pauvre chere fille se sousmet en fin
a ce qu'on luy commandera et qu'elle revere vostre presence. Commandes luy souvent, et luy
imposes des mortifications opposees a ses [109] inclinations; elle obeira, et bien quil semblera que
ce soit par force, ce sera pourtant utilement et selon la grace de Dieu.406
Je n'ay nul loysir. VIVE JESUS en tout et par tout, sur tout au milieu de nos cœurs! Amen.
XIIII janvier 1620.
A ma très chere Seur en N. S.,
La Mere Superieure de Ste Marie de la Visitation.
A Grenoble.
Revu sur une copie authentique conservée à la Visitation d'Annecy.
402 Epist. MDXCIII.
403 Ps. CXVIII, 141.
404 II Cor., XXI, 9.
405 Sœur Jeanne-Hélène de Gérard (voir la lettre suivante et ci-dessus, p. 105).
406 Ici, les éditeurs de 1626 et ceux qui les ont suivis insèrent deux fragments dont l'un appartient à la lettre inédite du
2 avril 1620 à la même destinataire, et l'autre sera donné plus tard.
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10.7 Page 97

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MDXCVI. A la soeur de Gerard Religieuse de la Visitation de
Grenoble407. Les solitaires que Dieu n'aime pas et avec lesquels il
ne veut point d'union. Exemple d'obéissance de saint Siméon
Stylite. Marques de l'inspiration. Energiques conseils.
Annecy, 14 janvier 1620.
Ma tres chere Fille,
……………………………………………………………………………………………………...
La cogitation de sortir a toutes les plus veritables marques de tentation qu'on sçauroit
treuver; mays Dieu soit loué dequoy en cet assaut le donjon n'est pas encor rendu ni, comme je
pense, prest a se rendre. O Dieu! ma tres chere Fille, gardes vous en bien de vouloir sortir. Il n'y a
point d'entredeux entre vostre sortie et vostre perte; [110] car ne voyes vous pas que vous ne
sortiries jamais que pour vivre a vous mesme, de vous mesme, par vous mesme et en vous mesme?
et ce d'autant plus dangereusement, que ce seroit sous pretexte d'union avec Dieu, qui toutefois
n'en veut point avoir ni n'en aura jamais point avec les solitaires retirés, particuliers et singuliers,
qui quittent leurs vocations, leurs vœux, leurs Congregations par amertume de cœur, par chagrin,
avec depit et par degoust de la societé, de l'obeyssance des Regles et sainte observance.
Oh! ne voyes vous pas saint Simeon Stilite, si prompt a quitter sa colomne sur l'advis des
anciens408? Et vous, ma tres chere Fille, vous ne quitteres pas vos abstinences sur l'advis de tant
de gens de bien, qui n'ont nul interest de vous les faire quitter que pour vous faire rendre quitte et
exempte de vostre propre amour? Or sus, ma tres chere Fille, chantes meshuy le cantique de
l'amour: O que c'est une chose douce et bonne de voir les Seurs habiter ensemble409! Traittés
rudement vostre tentation; dites luy: Tu ne tenteras point le Seigneur ton Dieu; Va en arriere,
Satan; tu adoreras le Seigneur ton Dieu, et a iceluy seul tu serviras410.
Je vous laisse a penser, ma tres chere Fille: faire les genuflexions au Saint Sacrement
comme par despit, en suitte de la tentation, quelle plus grande marque de tentation peut on avoir?
La force des inspirations est humble, douce, tranquille et sainte; et comme donq peut estre
inspiration vostre inclination, qui est si depiteuse, dure, chagrine et tempestueuse? Retires vous de
la, ma tres chere Fille; traittés cette tentation comme on traitte celles du blaspheme, de trahison,
d'heresie, de desespoir. Ne devises point avec elle, ne capitules point, ne l'escoutes point; traverses-
la le plus que vous pourres par des frequens renouvellemens de vos vœux, par des frequentes
sousmissions a la Superieure; invoques souvent vostre bon Ange, et j'espere, ma tres chere Seur,
que vous treuveres la paix et la suavité de l'amour du prochain. Ainsy soit il.
Je vous escris sans loysir; mais faites ce que je vous dis. Chantes au chœur tous-jours plus
constamment a [111] mesure que la tentation dira: Taises vous! a la façon de ce saint aveugle411.
La paix du Saint Esprit soit avec vous.
FRANÇS, E. de Geneve.
Le 14 janvier 1620.
407 Ce que nous savons de la Sœur Jeanne-Hélène de Gérard de Réautier ne laisse aucun doute au sujet de la
destinataire, non plus que la lecture des Lettres MCCCLXXX (tome précédent, p. 130) et MDXCIII, MDXCV (ci-
dessus, pp. 105, 109).
Il est probable que le commencement du texte a été tronqué.
408 Niceph. Callist., Hist. Eccl.,1. XIV, c. LI. (Cf. Tr. de l'Am. de Dieu, liv. VIII. ch. XIII.)
409 Ps. CXXXII, I.
410 Matt., IV, 7, 10.
411 Marc., X, 46-48; Luc., XVIII, 35-39.
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10.8 Page 98

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MDXCVII. A un oncle412. Double affliction en un trépas. Se
consoler sur le départ des nôtres et sur les circonstances de ce
départ, par la raison et par la foi. Miséricorde de Dieu qui a
peut-être employé le feu d'ici-bas pour épargner à une âme celui
du Purgatoire.
Annecy, 16 janvier 1620.
Monsieur mon Oncle,
Il me semble que je voy vostre esprit doublement affligé pour le trespas de madamoyselle
ma cousine et pour la façon d'iceluy, car moy mesme, a la verité, ay eu ce double sentiment. Mays
pourtant, bien que la douleur ne puisse pas estre si tost tout a fait appaysee, nous devons neanmoins
l'adoucir le plus qu'il nous sera possible, par toute sorte de bonnes et veritables considerations.
Or, qu'elle soit trespassee, c'est un accident si commun, si general et si inevitable, que ce
seroit ne connoistre pas ce que vous estes et la fermeté de vostre esprit, que de vous vouloir donner
du secours pour vostre consolation en cela. Et quant au reste, ce sont les precedentes dispositions
au trespas, et non les circonstances d'iceluy, qui sont en effect considerables. Cette chere fille estoit
bonne et vertueuse; et, comme je m'asseure, elle hantoit les saintz Sacremens, et par consequent
estoit tous-jours bien disposee, au moins suffisamment, pour se conserver [112] en la grace de
Dieu: c'est pourquoy son trespas n'a peu estre que bon, non plus que celuy de saint Simeon Stilite,
que la foudre et feu du ciel tua sur la colomne413. Il faut entrer dans cette admirable providence de
Dieu et s'accoyser en ses ordonnances, avec une sainte confiance qu'elle aura eu soin de cette
bonne ame, qu'elle aura mesme peut estre purifiee en ce feu pour luy eviter celuy du Purgatoire.
En somme, il faut donner passage aux afflictions dedans nos cœurs, mais il ne leur faut pas
permettre d'y sejourner.
Dieu, vostre bon Ange et la sagesse que vostre longue experience vous a acquise, vous
suggereront mieux tout ceci que je ne sçaurois faire; mais je le dis pour vous tesmoigner qu'apres
avoir contribué mes prieres a vostre consolation et conservation, je voudrois bien y dedier tout ce
qui seroit en mon pouvoir, puisqu'ayant le bien et l'honneur de vous estre si proche, j'ay encor le
devoir, avec une tres sincere volonté,
Monsieur mon Oncle, d'estre a jamais
Vostre tres affectionné neveu et serviteur,
FRANÇS, E. de Geneve.
Annessi, le 16 janvier 1620.
412 Sans pouvoir rien affirmer positivement, nous avons tout lieu de croire que cette lettre est adressée au baron
Amédée de Chevron-Villette (voir tome XI, note (671), p. 341), et que la «cousine» dont le Saint déplore la perte est
la même que celle dont il est parlé dans les Lettres DCCCVI, DCCCXII et DCCCXIII (tome XV, pp. 264, 275, 276).
413 Joan. Moschus, Pratum spirituale, c. LVII.
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MDXCVIII. Au Comte Jacques de Viry. Respectueuse et ferme
remontrance au sujet d'un mariage contracté sans la dispense
nécessaire
Annecy, 28 janvier 1620.
Monsieur,
Je croy fort asseurement que nul homme du monde ne vous honnorera jamais plus
franchement que je fay; et d'autant plus suis-je marri de ce qui s'est passé ces derniers jours en
vostre mayson, puis que Dieu y a esté [113] offensé et le publiq scandalisé, et que le mariage est
tout a fait nul et invalide414, la commission de dispenser obtenue a Rome n'ayant point esté
executee; de sorte qu'il sera requis de celebrer derechef le contract du consentement nuptial, affin
de rendre cette conjunction et la posterité legitime. A quoy je contribueray tout ce qui sera en mon
pouvoir, sous la conduite des loix et constitutions ecclesiastiques, pourveu qu'il vous playse, et
aux parties, prendre creance que je ne rechercheray en cela nulle condition que celle qui sera
entierement necessaire et inevitable, puisque en verité je suis,
Monsieur,
Vostre serviteur tres humble et tres affectionné,
FRANÇS, E. de Geneve.
XXVIII janvier 1620, Annessi.
A Monsieur
Monsieur le Comte de Viry.
Revu sur l'Autographe conservé à la Visitation de Tarascon. [114]
414 Le mariage de Marie de Viry, fille du destinataire, avec Jean-Antoine de Rossillon. (Voir ci-dessus, Lettre
MDLXXIII, et note (251), p. 63,) Le 3 novembre 1622 seulement, François de Sales commettait M. Laurent de la
Place, prêtre d'honneur de Notre-Dame de Liesse, pour bénir et ratifier cette union. (Ce document sera donné avec les
Opuscules.) Retardée par la mort du Saint, renouvelée par son successeur Jean-François, la commission ne fut exécutée
que le 19 février 1624.
99/341

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MDXCIX. A la Princesse de Piemont, Christine de France415
(Minute). François de Sales célèbre le jour deux fois heureux où
Dieu donna une princesse, à la France, par sa naissance, à la
Savoie, par son mariage. — Les vœux et les prières du grand
Aumônier de Christine.
Annecy, 30 janvier 1620.
Madame,
Puisque, graces a Dieu, vous voyla en fin arrivee au lieu auquel vous devies achever le
voyage de vostre bien heureuse venue en ces Estatz, il m'a semblé que je puis oser meshuy
presenter de mes lettres a Vostre Altesse, [115] tandis qu'elles ne luy seront point desaggreables.
Et j'espere que celle ci aura ce bonheur, comme escritte seulement pour contribuer, en la façon que
je puis, mon sentiment a la joye publique et generale que toutes les provinces de la sujettion de
Vostre Altesse recevront en ce jour anniversaire qui nous represente celuy auquel, par vostre
naissance, Dieu vous donna a la France, et treize ans apres, par vostre mariage, il vous donna a cet
Estat416, dans lequel sans doute chacun benira a l'envi cet aggreable jour.
Mays moy, Madame, comme le plus obligé du monde, je le benis et beniray
incomparablement par les plus ardens souhaitz que mon ame puisse faire. Que ce jour soit a jamais
conté entre les jours que Dieu a creés pour sa gloire; que ce soit un jour d'eslite entre les jours qui
sont destinés aux humains pour les acheminer a l'eternité; que ce jour auquel, Madame, vous fustes
faite chrestienne, face jour a la consolation de toute la Chrestienneté; et face ce mesme jour, auquel
vous aves esté faite nostre tres honnoree Dame et Princesse, reluire la serenissime Mayson de
Savoye en une heureuse et tous-jours auguste posterité de Vostre Altesse.
Ce sont les vœux, Madame, que je fay, prosterné en esprit devant la divine Bonté, a
laquelle, selon le rang qu'il vous a pleu me donner au service de Vostre Altesse417, j'offre et
consacre tous les jours vostre chere et pretieuse vie, affin que par sa souveraine Providence il luy
playse de la multiplier par une longue suite d'annees, la sanctifier par une sainte fertilité d'actions
chrestiennement royales, et qu'a la fin elle la glorifie par la couronne de l'immortalité.
415 Quand François de Sales écrivait, parlant de la future princesse de Piémont: «Madame l'aînée est fort accomplie»
(voir le tome précédent, Lettre MCDLXXXIV, p. 309), il disait vrai. Christine de France reçut de Dieu tous les dons
qui peuvent faire le charme de la vie privée, beaucoup des qualités qui permettent de gouverner avec succès. Il lui en
avait coûté de se contenter d'une couronne ducale (voir note (1023) ibid.); au moins ne négligea-t-elle rien pour arriver
à porter avec son époux le titre d'Altesse Royale. Le sentiment de ce qu'elle était ne l'abandonna jamais, et elle sut
prouver par ses actes la parole qu'elle écrivait un jour en réclamant la réparation d'une injure: «Je veux être honorée
comme je le mérite et comme fille de France que je suis.» (Lettre du 28 mars 1626, au prince Victor-Amédée.) Fille
de France, Christine le fut toujours; cependant, donnée tout entière à son nouveau pays, elle servit loyalement ses
intérêts. Dès les premières années de son séjour en Piémont, et tout en tenant «sa cour dans les divertissements et les
fêtes autant qu'aucune souveraine de l'Europe,» la jeune princesse réclama sa part dans les affaires et l'obtint par
l'ascendant qu'elle eut sur Victor-Amédée. Veuve à trente-et-un ans, régente de son fils François-Hyacinthe (1637-
1638), puis de Charles-Emmanuel II (1638-1648), Madame Royale se trouva au milieu de difficultés étranges,
suscitées par ses beaux-frères Maurice et Thomas et par la politique de Richelieu. Le jugement, la fermeté, la décision
ne lui manquèrent pas, non plus que la constance dans le malheur. Quand la paix fut enfin rendue au Piémont (1659),
le duc avait vingt-six ans, mais sa reconnaissance et son respect laissèrent à sa mère la direction des affaires; elle la
conserva jusqu'à sa mort, arrivée à Turin le 27 décembre 1663. (Cf. Claretta, Storia della reggenza di Cristina di
Francia, Duchessa di Savoia, Torino, Civelli, 1868.)
Christine de France garda toujours au Saint qu'elle avait fait son grand Aumônier une vénération affectueuse.
Elle eut la joie de le voir placer sur les autels, et, à l'occasion de sa béatification, offrit une châsse magnifique pour
ses précieuses reliques. Ce fut pendant sa régence que la Visitation fut introduite à Turin; la duchesse, en souvenir du
Fondateur, favorisa de tout son pouvoir l'établissement, et honorant comme une sainte la Mère de Chantal, elle lui
donna les plus hautes marques de respect et de bienveillance.
416 Le 13 février 1619 (cf. le tome précédent, note (1021), p. 309).
417 Voir ci-dessus, note (213), p. 49.
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11.1 Page 101

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Je fay en toute humilité la reverence a Vostre Altesse, de laquelle,
Madame, je suis
Tres humble, tres obeissant et tres fidele
orateur et serviteur,
FRANÇS, E. de Geneve.
Annessi, le 30 janvier 1620. [116]
MDC. Au duc Roger de Bellegarde418. Pourquoi l'Evêque de
Genève réitère sa recommandation en faveur des Pères
Barnabites.
Annecy, 30 janvier 1620.
Monsieur mon tres cher Filz,
Quand les Peres Barnabites allerent a Paris pour obtenir du Roy leur entree au college de
Beaune, je les recommanday a Vostre Grandeur comme Religieux grandement estimables,
fructueux et sinceres; mays je ne laisse pas, en confirmant cette creance, de repeter maintenant ma
supplication pour leur rendre tesmoignage de l'affection que je leur dois, et non par aucune
defiance que j'aye que vous ne leur facies ressentir vostre bonté et pieté en ce qui sera de vostre
pouvoir419. [117]
Et ce pendant, ce m'est tous-jours de lhonneur et de la consolation de vous ramentevoir et
raffraichir la tres humble et inviolable passion paternelle que j'ay pour vous, Monsieur mon Filz,
selon laquelle je vous souhaite incessamment les plus favorables benedictions de Nostre Seigneur,
et suis
Vostre tres humble et tres obeissant serviteur,
FRANÇS, E. de Geneve.
30 janvier 1620, Annessi.
A Monsieur
[Monsieur] de Bellegarde,
Marquis de Seurre, chevalier des Ordres,
Pair et grand Escuyer de France,
Gouverneur de Bourgoigne, Bresse, Beugey, Valromey et Gex.
Revu sur l'Autographe conservé au 1er Monastère de la Visitation de Paris.
418 Voir tome XV, note (833), p. 293.
419 Les premiers jours du mois d'août 1619, arrivaient à Annecy des messagers de Beaune, porteurs de lettres par
lesquelles la ville demandait aux Pères Barnabites de venir diriger un collège. Sur une réponse favorable rapportée
par les députés, deux des syndics vinrent à leur tour (du 14 au 16 août) traiter les choses de vive voix, et débattre les
conditions de l'établissement. Le Supérieur, le P. de Gennari, avait sans retard averti le Père Général, sollicitant
l'autorisation de se rendre à Paris avec un compagnon pour obtenir les permissions royales; voyage nécessaire,
démontrait-il, d'autant que Monseigneur de Genève, accablé d'occupations, ne pouvait s'intéresser assez activement à
l'affaire, et qu'on pourrait s'entendre à la fois avec lui, avec l'Archevêque de Lyon et le prince de Piémont, également
à la cour. Le 30 août, les messagers de Beaune-reviennent en Savoie avec les articles de la fondation signés par les
syndics; aussitôt, le P. Vitalien Berretta part pour Milan afin de s'entendre avec les Supérieurs majeurs. D. Boerio
donna une procure générale, et le 6 octobre, le Supérieur d'Annecy se mettait en route pour la Bourgogne avec le P.
Baranzano, l'âme de toute la négociation. De Beaune ils passèrent dans la capitale où ils se rencontrèrent avec les
Pères Tobie Corona et Olgiati. Le Roi donna large permission; et cependant, cet établissement tant désiré ne se fit pas;
les fonds étaient insuffisants, les Barnabites ne voulaient pas enseigner le grec, la ville prétendait s'ingérer dans
l'administration du futur collège. Pour compenser cet insuccès, l'année suivante les Clercs réguliers de Saint-Paul
s'installaient à Montargis. (D'après les Acta Collegii Annessii et des Notes du R. P. Premoli, Assistant général des
Barnabites.)
101/341

11.2 Page 102

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MDCI. A M. Claude de Quoex. Noble désintéressement du
Saint. Ce qu'il ne peut trouver supportable. Les droits
légitimes seront respectés; mais l'Evêque ne peut ni ne veut
céder les siens. Recours au Sénat pour «faire faire place» à
son autorité
Annecy, 31 janvier 1620420.
Monsieur,
C'est le fin moindre de mes soucis que c'est que deviendra l'heritage de feu M. Gras421, et
apres un peu [118] de consideration du droit de l'Evesché, vous seres le maistre de tout ce qui en
dependra, comme de tout le reste qui appartient a ma personne. Mays qu'un prestre, sans tiltre ni
vray ni coloré, se tienne dans une cure par force, ne veuille reconnoistre l'authorité de l'Evesque,
rejette l'œconome qui est legitimement envoyé422, empesche que l'Evesque ne face inventaire de
ce qui est dans une mayson presbiterale, appelle comme d'abus d'une tres legitime authorité, tout
ainsy que si du moins le soin des benefices de ma charge, tandis qu'ilz sont vacans et jusques a
tant qu'ilz soyent prouveuz, ne m'appartenoyt pas: tout cela, je ne le puis ni treuver bon, ni civil,
ni supportable.
Quand M. Gras me fera voir ses legitimes provisions, je ne les mespriseray point, et les luy
feray fidelement valoir tout ce qu'elles vaudront, sachant le respect qui est deu et aux droitz et aux
faitz du Superieur general des ecclesiastiques. Mays en attendant, je veux estre le maistre, ayant
un bon tiltre pour moy, et luy n'en ayant point ni pour luy ni contre moy. Que s'il est permis, sur
des patentions, d'esloigner les justes et ordinaires procedures [119] des Praelatz par voye de fait,
quelz inconveniens n'en verrons nous pas? Je me demettray quand il en sera tems; mays quant a
present, je ne puis, ni ne dois, ni par consequent je ne veux point ceder mon droit de donner tel
ordre que bon me semblera a ce benefïce vacant, en attendant qu'il soit prouveu; et ne veux
nullement que ceux qui s'ahurtent y administrent les Sacremens, ayant deputé un prestre qui ira
420 Saint François de Sales n'a mis que le quantième; mais l'année est sûrement déterminée par la date du concours
pour la cure de Villy-le-Bouveret et son annexe Menthonnex, vacantes par la mort de François Gras. Ce concours eut
lieu le 29 janvier 1620.
L'adresse manque aussi; une étude sérieuse permet d'y suppléer et de désigner pour destinataire Claude de
Quoex dont l'Evêque de Genève était «compere» depuis le baptême de la fille de Rose d'Yvoire (voir le tome
précédent, note (641), p. 190).
421 François Gras, né à Arbusigny, fils de Jean Gras ou Grassi. Ordonné prêtre le 17 septembre 1578, par Mgr Gallois
de Regard, il fut, le premier après le retour du pays à la foi catholique, économe de Lancy (1589). En 1603, il reçoit
la cure de Villy-le-Bouveret et son annexe Menthonnex, et meurt ab intestat en janvier 1620. En conséquence, le
procureur fiscal de l'évêché de Genève fit valoir les droits d'échute, que contestèrent les parents du défunt. (Mss.
Lagrange et R. E.)
422 Originaire du diocèse de Lyon, docteur en théologie, chanoine théologal de la cathédrale de Belley, François Gariod
était devenu, le 4 janvier 1618, chanoine de Saint-Pierre de Genève, et théologal le 29 août suivant. Au concours du
29 janvier 1620 (voir note (420) de la page précédente), il fut institué économe des bénéfices vacants. Mais Jean-
Louis Gras, fils de Michel Gras et de Denise Mullin, neveu du curé défùnt et prêtre seulement depuis le 21 décembre
1619, entendait recueillir l'héritage de son oncle; avant d'avoir reçu ses Bulles de Rome, contre tout droit, il faisait
opposition aux dispositions de l'Evêque. Les Bulles arrivèrent le 30 juillet; il y eut un procès avec M. Gariod; celui-
ci, pour y mettre fin, céda son bénéfice à Jean-Louis Gras, moyennant une pension de cent ducats, plus vingt-six ducats
pour couvrir les frais de l'instance (3 mars 1621). Le même jour, M. Gras recevait l'institution de la cure de Villy et
de son annexe. Enfin, le 1er septembre 1621, le president Favre et les avocats Bouvard et Pellet, condamnaient, par
sentence arbitrale, la veuve et les enfants Gras à payer mille florins à l'Evêque de Genève, qui, à cette condition, leur
abandonnait les biens héréditaires. Les débiteurs n'achevèrent de se libérer que le 26 mai 1625. (Mss. Lagrange et R.
E.; Archiv. dép. de la Hte-Savoie, E 532, fol. 76 v°.)
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11.3 Page 103

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demain, pour empescher que ce peuple ne demeure pas desprouveu de ce qui luy sera necessaire
de ce costé la.
J'ayme messieurs les Grassi423, et d'autant plus que l'un d'entre eux est a vostre service;
mais je suis obligé de maintenir le respect qui est deu a l'authorité qui m'est confiee et a luy faire
faire place ou il est requis. A cette intention j'ay envoyé au Senat, et pour venir a chef de l'inventaire
et pour relever l'appellation comme d'abus, affin que je sois desabusé si j'abuse de l'authorité que
j'ay, ou que je face desabuser ceux qui pensent que j'en abuse.
Tout mon desplaysir seroit si en cela je vous desplaysois aucunement; mays je ne le croyray
pas ni ne le sçaurois croire, puisque mon intention est bonne et sans fiel, et vous m'aymes
constamment, qui suis aussi invariablement,
Monsieur,
Vostre tres humble serviteur et compere,
FRANÇS, E. de Geneve.
31 janvier.
Revu sur l'Autographe qui se conservait chez les PP. Missionnaires
de Saint-François de Sales d'Annecy. [120]
MDCII. A Monseigneur Jean-Pierre Camus, Evêque de Belley
(Fragment). Mesure de réputation que l'Evêque de Genève
ambitionne
Annecy, janvier 1620424.
……………………………………………………………………………………………………..
On me mande de Paris que l'on m'y rase la barbe a bon escient, mais j'espere que Dieu la
fera recroistre plus peuplee que jamais, si cela est necessaire pour son service425. Certes, je ne veux
de reputation qu'autant qu'il en faut pour cela; car, pourveu que Dieu soit servi, qu'importe que ce
soit par bonne ou mauvaise renommee426, par l'esclat ou le descri de nostre
reputation?............................
423 Il s'agit de Jean-Louis (voir la note précédente) et de ses frères: Rolet, Charles, François et Antoine. Leur père,
Michel Gras, bourgeois d'Annecy, était décédé après le 15 octobre 1614; leur mère était encore tutrice de ses trois
derniers enfants le 19 avril 1622; Rolet, qualifié «Maistre» dans l'acte de ce jour, doit être celui que Claude de Quoex
avait à son service. (Mss. Lagrange.)
424 Ce fragment appartient à une lettre postérieure à celle du 13 décembre 1619 (voir ci-dessus, p. 68), où le Saint parle
pour la première fois à l'Evêque de Belley de la tempête soulevée contre lui à cause du mariage de M. de Foras. Après
janvier, le calme commence à se faire. Telles sont les raisons de la date donnée à ces lignes.
425 Cf. Introd. a la Vie dev., Part. III, ch. VII.
426 II Cor., VI, 8.
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11.4 Page 104

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MDCIII. A Madame de la Fléchère (Fragment). Un «petit cœur»
où le Saint veut loger lui-même l'Hôte divin
Annecy, [janvier ou février 1616 ou 1620427.]
Ma tres chere Fille,
Je desire que vous disposies ma filleule a faire sa premiere Communion que je desire luy
donner de ma [121] main pour ces Pasques prochaines. Je la prie qu'elle prepare son petit cœur
pour estre le logis de Celuy qui la veut toute posseder. Enseignes-luy de bonne heure que pour
loger un tel Hoste, il faut bien nettoyer son ame de toutes sortes de vices et imperfections, en
l'ornant de toutes les vertus, singulierement de la devotion, amour, humilité.
……………………………………………………………………………………………………..
A Madame de la Flechere.
Revu sur une ancienne copie conservée à la Visitation de Turin.
MDCIV. A Madame Angélique Arnauld, abbesse de Port-Royal
a Maubuisson. Nouvelles de la mort de M. Arnauld et de la
résignation des siens, données par la Mère de Chantal au saint
Evêque. — Notre cœur, tiré «piece apres piece» vers Dieu. —
Paternelle sollicitude pour les enfants du défunt. La réforme
de l'extérieur servant à celle de l'intérieur. Comment
combattre les pensées de vanité. Faire toutes choses «tout
bellement,» et ne pas se mettre en peine des saillies sans
volonté. Douce et gracieuse plaisanterie sur une «petite
niaiserie.» La discrétion du Directeur. Conseils pour
l'oraison. Spécial intérêt pour Mme Le Maistre
Annecy, 4 février 1620.
O ma tres chere Fille, que vous puis je dire sur ce trespas428? Nostre bonne Mere de la
Visitation429 m'en a donné l'advis; mais a mesme tems elle m'escrit qu'elle avoit veu madame vostre
mere430 et ma tres chere fille vostre seur Catherine de Gennes431, braves, resolues et [122]
vaillantes, et de plus, que M. de Belley avoit receu de vos lettres, par lesquelles vous luy
427 Françoise de la Fléchère, filleule du Saint (voir tome XIV, note (167), p. 56), née le 22 juillet 1608, n'aurait pas eu
huit ans accomplis aux Pâques de 1608. Peut-être cette date est-elle prématurée pour le présent fragment. Si elle est
rejetée comme telle, nous ne pouvons proposer que 1630, l'Evêque de Genève étant absent d'Annecy pendant le
Carême les trois années précédentes. L'enfant avait alors onze ans et demi, âge ordinaire à cette époque pour les
premières Communions.
428 Antoine Arnauld, père de l'Abbesse, était mort le 29 décembre 1619.
429 La Mère de Chantal.
430 Catherine Marion (voir ci-dessus, note (146), p. 28).
431 Mme Le Maistre.
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11.5 Page 105

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tesmoignies vostre asseurance en cette occasion432. Je n'en doutois pas, ma tres chere Fille, que
Dieu n'eust soin de vostre cœur en ces occurrences, et que s'il le blessoit d'une main, il n'appliquast
son bausme de l'autre. Il frappe et guerit433, il mortifie et vivifie434; et tandis que nous pouvons
lever les yeux et regarder dans la Providence celeste, l'ennuy ne nous sçauroit accabler.
Mais c'est donq asses, ma tres chere Fille: Dieu et vostre bon Ange vous ayant consolee, je
n'y metz plus la main; vostre amertume tres amere est en paix435, qu'est il besoin d'en plus parler?
A mesure que Dieu tire a soy, piece apres piece, les thresors que nostre cœur avoit icy bas, c'est a
dire ce que nous y affectionnions, il y tire nostre cœur mesme436; et puisque je n'ay plus de pere
en terre, dit saint François437, je diray plus librement: Nostre Pere qui es es cieux438. Ferme, ma
tres chere Fille, tout est a nous, et nous sommes a Dieu439.
J'ay celebré pour cette ame, et celebre tous les jours avec memoire particuliere d'icelle
devant Dieu. Mais, ma Fille, et nos Seurs Catherine de Sienne, Anne et Marie440, que font elles,
les pauvres filles? Elles sont constantes, n'est ce pas? car elles sont nos seurs. De M. d'Andilly441
et de M. Arnauld mon filz442, il n'en faut pas douter. [123] Certes, quand je me souviens comme
M. d'Andilly me parla de son petit François443, j'en suis encor consolé. La paix de Dieu soit tous-
jours au milieu de nos cœurs. Amen.
Je respons des-ormais a vos deux dernieres lettres, du 19 novembre et du 14 decembre. Il
est vray, je suis merveilleusement accablé d'affaires; mais vos lettres, ma Fille, ne sont pas des
affaires, ce sont des rafraischissemens et allegemens pour mon ame: cela soit dit pour une bonne
fois.
C'est beaucoup qu'exterieurement vous soyes plus observatrice de la Regle. Dieu forma
premierement l'exterieur de l'homme, puis il inspira le spiracle de vie au dedans, et cet exterieur
fut fait en homme vivant444. Les humiliations, dit nostre Seigneur, precedent et introduisent bien
souvent l'humilité445; continues en cet exterieur, qui est plus aysé, et petit a petit l'interieur
s'accommodera.
432 Mgr Camus était fort connu à Maubuisson; il admirait l'Abbesse, mais le lui laissait trop voir: «Je l'aime bien, parce
qu'il est bon,» écrivait en 1621 la Mère Angélique à la Mère de Chantal, «mais il me brouille encore l'esprit avec ses...
louanges, car mon mechant esprit s'y plaît, et j'ai peine à dechirer ses lettres qui sont de si beaux panégyriques.» C'était
encore l'heureux temps où l'Abbesse de Port-Royal redoutait l'estime des autres et sa propre vanité!
433 Job, V, 18.
434 I Reg., II, 6.
435 Is., XXXVIII, 17.
436 Cf. Matt., VI, 21.
437 S. Bonav., Legend. S. Franc. Ass., c. II.
438 Matt., VI, 9.
439 I Cor., III, 22, 23.
440 Les trois sœurs de la Mère Angélique (voir ci-dessus les notes (126, 86), pp. 22 et 9, et (85), p. 8). La première
s'appelait en réalité Catherine-Agnès; le Saint en la nommant «Catherine de Sienne» veut sans doute la distinguer de
Mme Le Maistre, ou Catherine de Gênes.
441 Robert Arnauld (voir ci-dessus, note (124), p. 21).
442 Né en 1597, Henri Arnauld se destinait à l'état ecclésiastique. Son protecteur, le nonce Bentivoglio, l'emmena à
Rome en 1621 et le logea cinq ans dans sa propre demeure. Il était encore dans la Ville éternelle quand son frère
Robert prit en son nom possession de l'abbaye de Saint-Nicolas d'Angers (15 janvier 1624). Deux mois plus tard, il
recevait le brevet de conseiller et d'aumônier du Roi. En 1637, le siège épiscopal de Toul étant vacant par la mort de
Charles de Tournay, Henri Arnauld fut désigné pour l'occuper, mais des querelles s'élevèrent, suscitées par le droit
d'élire; les Bulles du Pape ne vinrent pas, et après quatre ans d'attente, M. de Fiesque était choisi en remplacement de
l'Abbé de Saint-Nicolas. Celui-ci remplit en 1645 une mission diplomatique à Parme, et poussa jusqu'à Rome (1646)
pour calmer les contestations entre Innocent X et la maison des Barberini; il fut même ambassadeur intérimaire en
l'absence de M. de Fontenay. Rentré en France au printemps de 1648, il devint l'année suivante évêque d'Angers, et
se montra toujours austère dans ses mœurs et charitable. Mais il fut pourtant l'un des quatre évêques qui refusèrent de
signer le Formulaire. Il le signa ensuite, non sans quelque restriction, et mourut dans une grande vieillesse le 8 juin
1692.
443 Voir ci-dessus, note (137), p. 26, et les Lettres MDLV, MDLVI.
444 Gen., II, 7.
445 Cette idée de l'humiliation précurseur de l'humilité, se dégage de plus d'un texte de la Sainte Ecriture, mais aucun
ne l'exprime aussi formellement. Les anciens éditeurs ont-il bien lu ces mots: «dit nostre Seigneur»?
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O Dieu, ma Fille, je voy vos entortillemens dans ces pensees de vanité; la fertilité, jointe a
la subtilité de vostre esprit, preste la main a ces suggestions; mais dequoy vous mettes vous en
peyne? Les oyseaux venoyent becqueter sur le sacrifice d'Abraham: que faysoit-il? avec un rameau
qu'il passoit souvent sur l'holocauste, il les chassoit446. Ma Fille, une petite, simple prononciation
de quelque parole de la Croix chassera toutes ces pensees, du moins leur ostera toute nuysance: O
Seigneur, pardonnés a cette fille du viel Adam, car elle ne sçait ce [124] qu'elle fait447. O femme,
voyla ton Pere sur la croix. Il faut chanter tout doucement: 448Deposuit pot entes de sede, et
exaltavit humiles449. Je dis qu'il faut faire ces rejetz tout doucement, simplement, et comme si on
les disoit par amour et non pour la necessité du combat.
Accoustumes vous a parler un peu tout bellement, et a aller, je veux dire marcher, tout
bellement, a faire tout ce que vous feres, doucement et tout bellement; et vous verres que dans
trois ou quatre ans vous aures rangé tout a fait cette si subite soudaineté. Mais souvenes vous bien
de faire ainsy tout bellement, et parles tout bellement es occasions ou la soudaineté ne vous
pressera point et ou il n'y aura nulle apparence de la craindre: comme, par exemple, a vous mettre
au lit, a vous lever, a vous asseoir, a manger, quand vous parleres avec nostre Seur Marie ou Anne,
ou avec nostre Seur Isabelle450; en somme, en tout et par tout, ne vous en dispenses point. Or, je
sçai bien que parmi tout cela vous feres mille eschappees le jour, et que tous-jours ce naturel si
actif fera des saillies; mais il ne m'en chaut pas, pourveu que ce ne soit pas vostre volonté, vostre
deliberation, et que tous-jours vous appercevant de ces mouvemens, vous taschies de les appayser.
Prenes bien garde a ce qui peut offencer le prochain et a ne rien descouvrir de secret qui
luy puisse nuire; et s'il vous arrive, taschés a reparer le tort, tant que vous pourres, sur le champ.
Ces menues envies ne sont rien, ains elles sont utiles, puis qu'elles vous font voir clairement vostre
amour propre, et que vous faites l'acte contraire.
Mais, ma Fille, cet amour de la propre excellence n'est [125] il pas gratieux en cette fille
que je vous ay tant recommandee et qui en verité m'est chere comme mon ame? Car, qu'y a il de
plus gentil que cette petite aversion, laquelle [provient] d'estre appellee fille de cette pauvre
Mere451? Mays demandes luy, je vous prie, si elle a encor point de sentiment dequoy je l'appelle
ma Fille, et si elle voudroit point que je l'appellasse ma Mere? O vray Dieu, qu'il luy a cousté
d'effortz pour me dire cette petite niaiserie! Certes, ma Fille, je ne sçai pas combien il luy couste,
mais je ne voudrois pour rien du monde qu'elle ne me l'eust dit, puisqu'en cela elle a prattiqué une
si profonde resignation et confiance envers moy.
Elle est de rechef encor plus aggreable quand elle me defend de dire ceci a cette pauvre
Mere. O ma Fille, dites luy que ces menues communications de son ame a la mienne entrent en un
lieu d'ou elles ne sortent jamais qu'avec congé de celle qui les y met. Au reste, ma tres chere Fille,
je ne sçai pas ce que cette fille m'a fait, mais je treuve ses miseres, qu'elle me descrit si naïfvement,
si bien remarquees que rien plus. Or dites luy qu'elle m'escrive tous-jours simplement, et qu'encor
qu'estant la aupres d'elle, elle ne m'eust jamais monstré des lettres qu'elle escrivoit a ses seurs,
maintenant, si j'y estois, elle n'en feroit nulle difficulté; car elle me connoist bien mieux qu'elle ne
faysoit pas, et sçait bien que je ne suis pas d'humeur mesprisante.
Pour l'orayson, ma tres chere Fille, je treuve bon que vous lisies un peu dans vostre
Theotime452, affin d'arrester vostre esprit, et que de tems en tems, a mesure que vous appercevres
que vous estes en distraction, vous disies tout bellement des paroles contraires a Nostre Seigneur.
446 Ibid., XV, 9-11.
447 Cf. Luc., XXIII, 34.
448 Il a renversé les puissants de leurs trônes, et il a élevé les humbles.
449 Ibid., I, 52.
450 Aux sœurs de l'Abbesse, le Saint joint ici une de ses plus chères Filles. Isabelle-Agnès de Châteauneuf, à peine
âgée de dix-neuf ans, avait accompagné la Mère Angélique à Maubuisson pour y remplir, avec une rare prudence, les
fonctions de Maîtresse des novices. Elle revint ensuite à Port-Royal dont elle ne connut que les beaux jours de foi et
de ferveur, car elle mourut le 4 juin 1626. (Voir les Mémoires four servir à l'histoire de Port-Royal, Utrecht, 1742,
tome I.)
451 La Mère de Chantal.
452 Le Traitté de l'Amour de Dieu.
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Mays voyes vous, ne vous estonnes pas de ces distractions: Si j'estois sainte, si je parlois au Pape,
et semblablables; car, pour estre fort vaines, elles n'en sont que plus parfaitement distractions, et
n'y faut nul autre remede que de ramener doucement le cœur a son object.
Je vous ay respondu a tout, ma tres chere Fille. O Dieu, [126] salues un peu bien tendrement
de ma part la pauvre chere seur aisnee453; mon cœur regarde le sien avec compassion. Je sçai qu'il
est tellement a Nostre Seigneur, que non pas mesme ce rude coup n'a sceu luy oster la paix
interieure; mays son ennuy et ses apprehensions auront esté grandes. Cette seur m'est chere tout
extraordinairement.
Dieu soit a jamais nostre tout. Amen. Je suis en luy tout vostre, d'une façon que la seule
Providence vous peut faire concevoir. La grace, paix, et consolation du Saint Esprit soit avec
vous454. Amen.
Annessi, le 4 febvrier 1620.
Mon frere455 est tous-jours aupres de Madame. Oserois je saluer le petit frere Simon456 et
la chere petite seur457? Mais ma fille Marie Angelique458, certes, je la salue de tout mon cœur, et
le bon M. Manceau459, et, quand vous la verres, vostre grande amie et ma chere seur de la Croix460.
Dieu soit au milieu de vostre cœur. Amen.
A Madame l'Abbesse de Port Royal. [127]
MDCV. A Madame Rousselet461 (Inédite). Raison d'une lettre
particulière à la destinataire. Souhaits de bénédictions. Deux
chères vertus, nées de la confiance en Dieu.
Annecy, 4 février 1620.
Ce n'est pas pour vous separer de monsieur vostre cher mari, que je vous escris separement
et a l'un et a l'autre, Madamoyselle ma tres chere Fille, mais c'est par ce que l'inscription seroit trop
grande si je la faysois a tous deux ensemble.
J'ay une continuelle memoire de vostre sainte dilection, et ne cesse point de vous souhaiter
mille et mille benedictions, ne doutant point que reciproquement vous ne me recommandies
souvent a la misericorde de Nostre Seigneur quand, en l'orayson, vous vous presentes devant sa
face.
453 Catherine Le Maistre.
454 Cf. I Cor., I, 3; Act., IX, 31.
455 Jean-François de Sales.
456 Ce «petit frere» était né en 1603 et avait eu l'honneur d'être tenu sur les fonts du baptême par la marquise de
Maignelais. Il suivit la carrière militaire, servit dans les carabins sous les ordres de son cousin Arnauld de Corbeville,
et fut tué à la guerre, près de Verdun, en 1639.
457 Madeleine (1607-1649) qui devait être plus tard Sœur Madeleine de Sainte-Christine. (Voir le tome précédent, note
(1228), p. 380.)
458 Sœur Marie-Angélique de Saint-Paul de Thou (voir ci-dessus, Lettre MDLXXXVIII, et note (355), p. 95).
459 Julien Manceau fut plusieurs années confesseur de l'abbaye de Port-Royal. Il lui laissa par testament quatre mille
livres. Mort le 30 mars 1639, on l'inhuma à Saint-Jacques-du-Haut-Pas. (Nécrologe de Port-Royal.)
460 Quelle était la «grande amie» d'Angélique Arnauld? On ne saurait le dire.
461 Tout ce que nous savons de la femme de Guillaume Rousselet (voir ci-après la lettre du 11 juin 1620), c'est qu'elle
se nommait Marguerite Le Fèvre. Plusieurs passages de la déposition de son mari au Procès de Béatification de
l'Evêque de Genève, nous la montrent objet de la sollicitude paternelle du Serviteur de Dieu. Il la dirigeait dans les
voies spirituelles, la visitait et la consolait dans ses maladies, et même après sa mort lui fit sentir son pouvoir auprès
de Dieu, car elle fut guérie d'une fièvre double-tierce mettant «sur son front un morceau de thoille... trempé dans le
sang du Bienheureux.» (Process. remiss. Parisiensis, passim.)
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11.8 Page 108

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La paix et tranquillité du cœur, qui prennent leur origine d'une parfaite confiance en la
bonté de Dieu et sont le lieu du Saint Esprit462, soyent aussi a jamais vos plus cheres compagnes.
Amen.
Je salue monsieur vostre pere463 de tout mon cœur, et suis sans fin,
Madamoyselle ma tres chere Fille,
Vostre tres humble et tres affectionné serviteur,
FRANÇS, E. de Geneve.
4 febvrier 1620, Annessi. [128]
Je vous supplie de saluer de ma part monsieur vostre tres digne Curé464 et l'asseurer de mon
service plus humble. Mon frere est tous-jours aupres de Madame.
A Madamoyselle
Madamoyselle Rousselet.
Revu sur l'Autographe appartenant aux Filles de la Croix de Tréguier.
MDCVI. A la Mère de Chastel, Supérieure de la Visitation de
Grenoble465. Influence du mal physique sur le moral. Une
crainte du saint Fondateur. Décision en faveur d'une infirme.
Regarder Dieu et non ses propres imperfections. Ce que
François de Sales apprit à la cour. Fondations en France.
Annecy, 7 février 1620.
Ce papier va treuver vos yeux, pour saluer par leur entremise vostre cœur tres aymé du
mien, ma tres chere [129] Fille. Oh! ce pauvre cœur, je le voy tout alangouri en la lettre que vous
m'escrivistes le 12 decembre, que je receus fort tard. Mais je parle mal sans y penser, ma tres chere
Fille: ce n'est pas vostre cœur qui est alangouri, c'est vostre cors; et a cause de la liayson qui est
entre eux, il semble au cœur qu'il a le mal du cors. Mon Dieu, ma Fille, ne vous tenes nullement
462 Cf. Ps. LXXV, 3.
463 Au milieu des nombreuses familles de cette époque qui portaient le nom de Le Fèvre, il a été impossible de
déterminer sûrement celle à laquelle appartenait le père de Mme Rousselet.
464 Guillaume Rousselet nous apprend, dans sa déposition, qu'il était paroissien de Saint-Jacques de la Boucherie. Or,
le curé d'alors se nommait Charles de la Saussaye. Fils d'Olivier de la Saussaye, seigneur de Brussolles, et de
Madeleine Alleaume Compaing, il naquit en 1564 à Orléans. A l'Université de cette ville, il prit le degré de docteur
en droit, et ses parents l'ayant fait voyager pour le détourner de la vie religieuse, il passa en Italie où il connut Baronius
et Bellarnîin. Au retour, il va étudier à Paris, y prend ses grades en théologie, est ordonné prêtre à Orléans, et devient
curé de Saint-Pierre en Sentelée. A trente-trois ans, il est nommé doyen du Chapitre de la cathédrale. le cardinal de
Retz l'attira à Paris et lui fit donner en 1617 la cure de Saint-Jacques de la Boucherie; il y mourut le 21 septembre
1622 et fut enterré dans la chapelle de Saint-Charles. Il avait établi dans sa paroisse la confrérie de Saint-Charles
Borromée où s'inscrivit François de Sales le 12 avril 1619, après avoir célébré la Messe à l'autel du Saint. M. de la
Saussaye s'occupa des Filles de la Visitation, «lesquelles il régit et traita avec la même douceur qu'un pere fait ses
enfants... Bien qu'il eust deux troupeaux à conduire,» continue le vieil historien, «sa paroisse et ses bonnes Religieuses,
ce néantmoins il ne laissoit pas de prendre le temps pour prescher et consoler les Filles pénitentes, celles de la
Magdelaine, de Montmartre,» etc. (Abrégé de la vie et de la mort de Messire Charles de la Saussaye... Curé de Sainct
Jacques de la Boucherie, par le sieur de la Saullaye; Paris, MDCXXII. Voir aussi Villein, Essai d'une histoire de la
paroisse de Saint Jacques de la Boucherie, Paris, 1758.)
465 L'ensemble des conseils contenus dans ces lignes convient parfaitement à la Mère de Chastel; de plus, dans sa Vie
par la Mère de Chaugy, nous trouvons citée la dernière phrase du présent texte. La seule objection possible se tirerait
du temps très long mis par la lettre du «12 decembre» pour aller de Grenoble à Annecy; cependant, elle n'est pas
insoluble, si Ton songe aux modes de communication d'alors; en outre, voir la note (466) de la page suivante.
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11.9 Page 109

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chargee de souffrir ce qu'il faut que vous souffries: c'est pour la tressainte volonté de Dieu, qui a
donné ce poids et cette mesure a vostre estat, corporel; mais l'amour sçait tout et fait tout; il me
rend466 ce me semble, medecin.
Je suis grand partisan des infirmes, et ay tous-jours peur que les incommodités que l'on en
reçoit n'excitent un esprit de prudence dans les Maysons, par lequel on tasche de s'en descharger,
sans congé de l'esprit de charité sous lequel nostre Congregation a esté fondee, et pour lequel on a
fait expres la distinction des Seurs qu'on y veut467. Je favorise donq le parti de vostre infirme, et
pourveu qu'elle soit humble et se reconnoisse obligee a la charité, il la faudra recevoir, la pauvre
fille468; ce sera un saint exercice continuel pour la dilection des Seurs.
O ma tres chere Fille, demeures en paix, ne vous amuses point a vos imperfections, mais
tenes les yeux haut eslevés en l'infinie bonté de Celuy qui, pour vous contenir dans l'humilité, vous
laisse vivre dans vos imperfections et infirmités. Ayes toute vostre confiance en sa [130] Bonté, et
il aura soin de vostre ame et de tout ce qui la regarde plus que jamais nous ne sçaurions penser.
Je serviray ce que je pourray monsieur N.469; mais il faut advouer qu'en matiere de
negociations et affaires, sur tout mondaines, je suis plus pauvre prestre que je ne fus jamais, ayant,
graces a Dieu, appris a la cour a estre plus simple et moins mondain.
Demeures en paix, ma tres chere Fille, et vives toute en Dieu. Je salue tres cordialement
nos cheres Seurs, et suis infiniment vostre, ma tres chere Fille. Nostre Mere a bien de la besoigne
taillee en France, pour la multitude des Maysons qu'on demande470.
VIVE JESUS! et son nom soit beni es siecles des siecles. Amen. Vous estes ma tres chere
Fille, et Dieu veut que j'aye de la consolation a le dire.
FRANÇS, E. de Geneve.
Le 7 febvrier 1620. [131]
466 Bien que le sens demeure assez clair en lisant: «il me rend,» on peut se demander si l'Autographe ne portait pas:
«il se rend... medecin.»
467 La première Constitution marque en effet «les trois rangs des Seurs:» 1. les Choristes, «employees a l'Office sacré
du chœur pour y chanter les Heures;» 2. les Associées «lesquelles, n'ayant pas les forces et les talens de dire et chanter
les Offices, sont neanmoins admises en la Congregation pour y prattiquer les autres exercices spirituelz et tout le reste
de la vie religieuse;» 3. les Sœurs Domestiques.
468 Nous n'avons pu découvrir cette «pauvre fille» qui mérita, comme tant d'autres, par ses infirmités, les prédilections
du saint Evêque.
469 Sans doute le même ami du Monastère de Grenoble que la Mère de Chastel avait recommandé au saint Fondateur
lors de son passage en cette ville à son retour de Paris. François de Sales lui promit de s'y intéresser: «Mais sachez,
ma Fille,» ajouta-t-il, «que ce ne sera pas sans me faire violence, car je vois le monde d'un certain œil, que Dieu me
fait la grâce de devenir toujours plus simple et moins mondain parmi les artifices de la cour.» (Hist. de la Fondation
de la Visitation de Grenoble.)
470 Ajoutons aux projets de fondations déjà mentionnés (tomes XVII, note (509), p. 141, et Lettre MCLXXIV, p. 162;
XVIII, Lettre MCCCLXXXIII, et note (483), p. 137), les démarches faites au commencement de 1630 pour un
etablissement à Nevers et à Orléans. (Voir ci-dessus, Lettre MDLX, p. 43, et cf. Lettres de Ste J.-F. de Chantal, vol. I,
p. 367.) Valence et l'Auvergne demandaient aussi des Filles de la Visitation.
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11.10 Page 110

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MDCVII. A M. Marc-François de Malarmay de Lauray471. La
chose la plus agréable et salutaire en ce monde. Affection
paternelle et filiale entre l'Evêque de Genève et Mme de
Rossillon. Remerciements pour un présent. Une amie de
lAbbesse de Baume. Saint adieu.
Annecy, 8 février 1620.
Monsieur,
En fin il se faut consoler; rien n'est si aggreable ni si salutaire en cette vie mortelle que de
bien aymer Dieu, et pour Dieu le prochain. Je le voy, certes, et je sens que vous m'aymes
cordialement et que vous y aves bien du playsir; et croyes aussi, je vous prie, que de mon costé
j'ay un contentement nompareil en l'extreme affection que Nostre Seigneur m'a donnee pour vous.
Et puis, voyla la tres chere seur qui de mesme ne respire presque que la bienveuillance de
son beaufrere, et ayme filialement ce chetif Pere spirituel, de qui Dieu luy a [132] donné une si
entiere et parfaite amitié qu'elle ne se peut exprimer. Et si, il faut que je vous le die, mon tres cher
Frere, (et ne voules vous pas ce tiltre cordial?) que cette pauvre me fait un peu de pitié, comme la
voyant la es chams, un peu trop tristement solitaire472. Mais, c'est son calice; ne faut il pas qu'elle
le boive473? Et puis, je m'imagine que vous luy escrives souvent, et alleges son tendre cœur par la
communication des sentimens du vostre.
Mais n'attendes pas, mon cher Frere, que je vous face le remerciement que je devrois de
vostre boëte toute pleine de parfums sacrés: seulement je vous asseure que j'estime plus ce present
que l'or et le topaze474, car il vient de vostre dilection et ne rend que devotion.
Je me resouviens fort bien que j'allay visiter une damoyselle, grande amie de madame
l'Abbesse de Baume475; et elle sera donq la mienne puisqu'elle est la vostre, car les cœurs qui sont
unis a un cœur ne peuvent qu'ilz ne soyent unis ensemble.
Mon frere ne se peut desprendre de la cour, ou le service et les faveurs de Madame
l'attachent; mais je puis bien respondre pour luy, qu'il est grandement vostre serviteur tres humble.
Il faut que je m'arreste, puisque le porteur me presse.
471 Les Malarmay semblent s'être établis à Besançon au début du XVIe siècle. Ils s'y enrichirent rapidement et plusieurs
d'entre eux occupèrent des places importantes dans le gouvernement de la cité. Charles-Quint les anoblit, et ils
portèrent les titres de comtes de Rossillon et de seigneurs de Lauray. Ce dernier appartenait en 1620 a Marc-François
de Malarmay, fils de Jean qui fut plusieurs fois co-gouverneur de Besançon, et de Philiberte d'Ernskerque. (D'après
des Notes de M. G. Gabier, conservateur de la Bibliothèque de Besançon.) Nous savons par une lettre à Jean-François
de Sales (6 juin 1620) que M. de Lauray fit connaissance avec le Saint à Paris, et Michel Favre a déposé (Process.
remiss. Gebenn. (I), ad art. 51) qu'il vint à deux reprises en Savoie, séjournant plusieurs semaines dans le logis même
de l'Evêque pour apprendre de lui à gouverner sa vie et son âme. De ses mains il reçut l'ordination sacerdotale, dans
la chapelle de Sainte-Claire, le 19 décembre 1620. (R. E.) Il était déjà coadjuteur de son oncle Cléradius, abbé de
Notre-Dame de Goailles. Cette abbaye, de l'Ordre de Saint-Augustin et sortie de celle d'Abondance, se trouvait à une
demi-lieue de Salins; Gaucher, seigneur de cette ville, la fonda en 1207. Le Nobiliaire de Varin (Bibl. de Besançon,
Ms. 1187) note que Marc-François de Malarmay mourut «devant l'Abbé»; il n'aurait donc jamais porté lui-même la
crosse. Le même manuscrit ajoute que «M. de Lauray» fut «inhumé dans le caveau des Pères Jésuites du collège de
Besançon.»
Comment Hérissant avait-il pu supposer que cette lettre a été écrite à Mgr Frémyot? c'est ce qu'on ne s'explique
pas. Tout prouve au contraire que l'adresse que nous donnons est juste.
472 Hélène-Ferdinande de Maillard-Tournon avait épousé le frère aîné du coadjuteur de Goailles, Jean-Baptiste de
Malarmay, comte de Rossillon. (Voir le tome précédent, note (1169), p. 356.) Tandis que son mari était souvent retenu
au service du duc de Savoie, elle demeurait au château de Rossillon, «un peu trop tristement solitaire.»
473 Joan., XVIII, 21.
474 Ps. CXVIII, 127.
475 Marguerite de Genève (voir tome XV, note (751), p. 262).
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12 Pages 111-120

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12.1 Page 111

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Vives tous-jours uniquement en Dieu, mon tres cher et tres veritablement tous-jours plus
cher Frere, et aymes continuellement mon ame, laquelle souhaite mille et mille consolations et
prosperités saintes a la vostre, vous cherit et vous honnore invariablement.
Monsieur mon tres cher Frere, c'est la veritable profession de
Vostre tres humble, tres obeissant et tres fidele
frere et serviteur,
FRANÇS, E. de Geneve.
Annessi, 8 febvrier 1620. [133]
MDCVIII. Au Baron prosper de Rochefort476. Heureuse naissance
d'un petit-neveu de saint Bernard de Menthon. Une pauvre
femme pour laquelle on a trouvé un logis. La retraite à
Talloires de Benoît de Chevron; soupçons de sa mère contre
l'Evêque de Genève.
Annecy, 12 février 1620.
Monsieur,
Je me resjouis grandement avec vous et toute vostre mayson de la naissance de ce beau
filz, auquel je souhaite toute sorte de benedictions et celle-la particulierement, de participer
beaucoup aux vertus du glorieux saint Bernard, comm'il a le bonheur de participer a son sang.
Tous vos justes contentemens, Monsieur, m'en donneront tous-jours, mon ame estant tellement
affectionnee a la vostre qu'elle a tous-jours des ressentimens de vos sentimens, et des complaysans
en vos playsirs, et des condoleances a vos douleurs; comme, quand a celles ci, j'espere d'avoir un
jours (sic) part en la gloire qu'elles vous apporteront, si vous les souffres avec l'humilité et charité
que vostre bon Ange et vostre propre esprit vous suggerent, en l'union des travaux de Nostre
Seigneur.
On a treuvé un logis et un' honneste compaignie pour cette pauvre femme, dont il vous
plaira faire donner advis a M. Rosetain477, affin que, s'il est tous-jours estimé expedient, on la
dispose a se praevaloir de cett'occasion478. [134]
Mays vous sçaves bien que le bon M. le Doyen de Chevron, mon cousin et vostre parent479,
que j'avois retenu des il y a trois ans en nostre profession ecclesiastique, estimant qu'il y pouvoit
rendre plus de service a Nostre Seigneur, enfin s'est retiré a Talloyres, dans la vocation monastique.
Dequoy c'est la verité quil communiqua premierement avec moy, sur le sujet du refus quil fit d'aller
aupres de Madame480, ou Monseigneur le Serenissime Prince le desiroit; mais ce fut avec une
resolution en laquelle il ny avoit plus aucun lieu de conseil. Cependant, madame de Chevron, ma
476 Prosper de Menthon, baron de Rochefort en Bugey, seigneur de Château-Bochard, était né de François de Menthon,
coseigneur dlAubanne, et de Gabrielle de Rivoire. Sa première femme fut Philiberte-Emmanuelle de Genève, qu'il
épousa en 1581. A une date qui nous est inconnue, Prosper se remaria avec Charlotte de Migieu (voir tome XVII, note
(800), p. 231) dont il eut plusieurs enfants. Le seul fils du premier lit qui vécût à cette époque, Balthazard, portait le
nom de «seigneur d'Escrivieux» (voir plus loin la lettre du 5 août 1630); le nouveau-né accueilli avec tant de joie par
les siens et par François de Sales est donc certainement un fils de Prosper et de sa seconde femme, mais il dut mourir
en bas âge, car on n'en trouve aucune trace dans les généalogies.
477 Jean Rosetain, officiai forain en Bugey, qui sera destinataire.
478 Voir plus loin la lettre du 5 août 1620.
479 Benoît de Chevron (voir le tome précédent, note (544), p. 158).
480 Voir ci-dessus, Lettre MDLXXX, p. 78.
111/341

12.2 Page 112

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bonne tante481, a pensé jusques a present que j'avois esté l'autheur de cette retraitte; qui a esté la
cause que je ne suis point allé voir madame de Boege482, en attendant que, par mesme voye, allant
visiter l'une de ses (sic) dames, je puisse aussi visiter l'autre, estant si voysines comme elles sont;
et lhors je n'oublieray pas ce quil vous a pleu de me recommander, Dieu aydant, ayant tous-jours
un desir invariable de vous pouvoir, par quelque preuve, asseurer,
Monsieur, que je suis et seray toute ma vie
Vostre tres humble et tres affectionné
serviteur et parent,
FRANÇS, E. de Geneve.
XII febvrier 1620, Annessi.
483A Monsieur
Monsieur le Baron de Rochefort.
Revu sur l'Autographe appartenant à la famille de la Flèchère,
à Saint-Jeoire (Haute-Savoie). [135]
MDCIX. Au Chanoine Jean-François de Sales, son frère
(Inédite). Vent en poupe et faveurs princières. Démarches à
Rome. François de Sales voudrait savoir à quoi Son Altesse
désire l'employer. Trois sortes de gens qui ne témoignent pas
de joie de la promotion de Jean-François à la coadjutorerie.
Ceux qui s'en réjouissent
Annecy, 16 février 1620.
Voyla ma procuration484, mon tres cher Frere, et le Memoire des choses qui me semblent a
propos d'estre remonstrees a Rome; mais puisque vous aves le vent en pouppe et que tout le monde
sçait cette affaire par dela, je pense que les faveurs de Son Altesse et de Messeigneurs les Princes
osteront toute difficulté. Le gratis est d'importance, et l'acceleration; a quoy vient a propos que,
481 Jeanne de Menthon, veuve d'Hector de Chevron. (Voir tome XIII, note (929), p. 344.) Celui-ci, cousin-germain de
Françoise de Sionnaz, était donc l'oncle à la mode de Bretagne du saint Evêque de Genève.
482 Fille de Jean-Amédée de Beaufort et de Claudine de Menthon-Roche-fort, Françoise était cousine-germaine du
destinataire. Elle avait épousé (contrat dotal du 20 novembre 1569) Sébastien-Balthazard de Montvuagnard, connu
sous le nom de M. de Boège, qui la laissa veuve, sans postérité, en 1603. La vieille douairière habitait le château de
Villard-Chabod, à Saint-Jorioz, sur les bords du lac d'Annecy, non loin de celui de Dérée, demeure de Mme de Chevron.
Mme de Boège mourut, plus que septuagénaire, le 10 avril 1626. (Voir Mém. de l'Acad. Salés., tome XVI, Annecy,
1893, pp. 159 seq.)
483 L'adresse est de la main d'un secrétaire.
484 Elle avait été passée à Annecy le 14 février, en présence de Claude de Quoex, Georges Rolland, François Favre,
Germain Pilliod, Jacques Duret, notaire, et Philibert Roget, official. Par cette procuration, l'Evêque de Genève, dans
l'impossibilité de se rendre lui-même à Rome, nommait trois témoins chargés de le représenter dans l'examen de la
cause de la coadjutorerie de son frère Jean-François (cf. ci-dessus, Lettre MDXCI, p. 101) et d'obtenir certaines faveurs
du Saint-Siège (voir la lettre suivante). Les procureurs choisis furent: Gédéon de Grimaldi, fils de Jean-Antoine de
Farges, Etienne Jarcellat, dit Beybin (voir ci-après, note (498), p. 139), et Antoine Quartery qui sera destinataire, tous
trois résidant alors à Rome. (D'après le document original conservé à Rome, Archives Aldobrandini.)
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12.3 Page 113

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commejecroy, monsieur l'Ambassadeur sera favorable485, et si Madame fait recommander l'affaire
a Monseigneur le Nonce, auquel neanmoins j'escriray dans peu de jours486. [136]
Nostre monsieur de Quoex487, dit quil ne faut rien que la procure que j'ay faite, et que la
chose soit vivement sollicitee; pour cela, j'escris a monsieur Beybin488, qui est non seulement de
ce diocese, mais curé de Saint Germain de la Chevre489 et respondant de Dumont490, et voysin de
monsieur l'Abbé de Cheysery491, et fort dependant de Monsieur de Bourges492.
C'est la verité qu'il est expedient que je n'aille pas a Turin qu'apres Pasques et le Sinode,
s'il se peut493, et particulierement s'il faut que l'information super vita et moribus se face en cette
ville. Je voudrois bien sçavoir, s'il se peut, en quoy Son Altesse me veut employer, selon que
monsieur Cavoret494 vous a dit; mais si vous le pouves tirer, quand vous m'escrires il ne sera pas
besoin de me marquer sinon en tierce personne, comme par exemple: L'amy sera employé en telle
et telle chose.
Je vous envoyeray au premier jour les lettres de remerciement, ne le pouvant maintenant.
Presque tout le monde icy tesmoigne de la joye de vostre promotion, et ceux qui ne la
tesmoignent pas sont de trois sortes: les uns, parce qu'ilz ont opinion que c'est tout a fait pour
m'oster d'icy, et ilz nous voudroyent tous deux; les autres, parce que cela leur est tellement [137]
inopiné, qu'a l'abord ilz ont eu peine de le croire; et les autres, qui sont fort peu et si peu que ce
n'est rien, par envie, jalousie et amertume de cœur. Mais messieurs du Chapitre, et particulierement
monsieur le Prevost495, ont grande joye dequoy l'on prend du sein de l'Eglise leurs Evesques.
Messieurs du Conseil et toute la ville, tout cela est en joye, et chacun l'appreuve encor plus parce
que cela s'est fait sans brigue ni recherche. Le bon monsieur du Chatelart496 en eut la premiere
nouvelle, c'est a dire deux jours devant moy, de sorte qu'on commença d'en parler avant que j'en
sceusse rien. En un mot, il faut si bien faire, et si saintement et si humblement, que la gloire en
demeure a Dieu.
Je vous envoyeray mes Bulles par mon neveu497, ou par autre premiere commodité, affin
que s'il y avoit quelque chose qui servit, on le prit; mais on sçait tout cela en chantant. Je n'escris
a personne, car je n'en ay nul loysir, et il faut faire partir cette procure et ce Memoire, qui est
l'essence de l'affaire. Il n'est point besoin de placet a Rome, la lettre de Son Altesse a
l'Ambassadeur suffit; mais il le faut avoir pour la possession, que le Senat ne permettroit pas sans
cela.
485 L'abbé Philibert-Alexandre Scaglia, ambassadeur à Rome. (Voir tome XVII, note (696), p. 197.)
486 Nous n'avons pas la lettre que le Saint écrivit à Pierre-François Costa, nonce à la cour de Savoie depuis 1606 (voir
tome XIII, note (678), p. 251); mais nous savons que le 1er mars suivant, celui-ci avertissait le Cardinal Secrétaire
d'Etat que «Leurs Altesses» songeaient «à supplier Sa Sainteté de nommer coadjuteur de Monseigneur l'Evêque de
Genève un sien frère, aumônier de Madame.» (Lettre du cardinal Borghese au Nonce, 21 mars 1620, Archiv.
Vaticanes, Nunz. di Savoia, vol. 40.)
Voir à l'Appendice II, la lettre de Christine de France au cardinal Borghese, 1er mars 1630, et celle du Prince
de Piémont à l'abbé Scaglia, 19 mars.
487 Claude de Quoex (cf. note (484) de la page précédente).
488 Epist. seq.
489 Dans sa Topographie, Guigue donne ce nom à Saint-Germain-de-Joux (arrondissement de Nantua), qui est bien la
localité designée par François de Sales et dont il visita l'église le 29 octobre 1605. Etienne Jarcellat-Beybin (voir ci-
après, note (498), p. 139) était alors titulaire de cette cure, tout en résidant à Rome.
490 Peut-être Philibert Dumont, greffier de l'officialité jusqu'en 1622. (Voir tome XIII, note (911), p. 338.)
491 Gaspard Perrucard de Ballon (voir ci-dessus, note (303), p. 78).
492 Outre le prieuré de Nantua, André Frémyot, archevêque de Bourges, possédait encore d'autres bénéfices dans le
pays de Gex.
493 Ce voyage n'eut pas lieu.
494 Ecuyer ordinaire du duc de Savoie et grand-croix de l'Ordre des Saints Maurice et Lazare, Louis Cavoretto, fils de
Christophe, comte de Pecetto, rendit d'éminents services à son prince, soit pendant la paix, soit surtout pendant les
longues guerres de ce règne. En récompense, Charles-Emmanuel, par patentes du 17 janvier 1626, érigea le fief de
Salussola en marquisat, pour lui et ses descendants; déjà en 1625, il l'avait nommé colonel de trois mille hommes de
pied de la garde ducale. (Turin, Archiv. de l'Etat, Registres des Patentes et Registres du contrôle des Finances.)
495 Louis de Sales, cousin du saint Evêque. (Voir tome XII, note (22), p. 6.)
496 Pierre-François de Rossillon, l'un des aumôniers de la princesse de Piémont. (Voir ci-dessus, p. 79.)
497 Probablement Melchior de Sales (voir ibid., Lettre MDLXXX, et note (319), p. 81).
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12.4 Page 114

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Dieu soit au milieu de vostre ame. Amen.
XVI febvrier.
A Monsieur de Boysi.
Revu sur une ancienne copie conservée à la Visitation de Rome. [138]
MDCX. A M. Etienne Jarcellat-Beybin498 (Inédite). Prière de
s'intéresser à l'affaire de la coadjutorerie de Jean-François de
Sales qui doit se traiter en Cour de Rome.
Annecy, 17 février 1620.
499Mio Signore,
Sua Altezza havendo favorito mio
fratello della nomina alla coadiutoreria di
questo Vescovato cum futura successione, hô
creduto che V. S. mi renderebbe volontieri
questo buon ufficio d'intraprenderne la
sollecitatione, gia che la di lei nascita in questa
diocesi e l'amicitia che suo padre et i suoi
fratelli500 mi hanno professata, [139] l'inviterà
a farlo. Et perciò io la prego di tutto cuore a
volerlo fare con affetto et a contribuirci una
buona diligenza, poichè Sua Altezza e
Monsignore il Prencipe desiderano
ardentemente che la cosa riesca ben presto, per
qualche degna consideratione che risguarda il
loro contento e servigio. E potrà V. S.
sicuramente impegnare la mia parola, che noi
non habbiamo impiegato in questa materia nè
artificio di corte, nè importunità, nè dimanda o
richiesta.
La mensa episcopale è picciola, la
diocesi grande et onerosa; perciò, se mio
Monsieur,
Son Altesse ayant fait à mon frère la
faveur de le nommer à la coadjutorerie de cet
Evêché avec future succession, j'ai pensé que
Votre Seigneurie me rendrait volontiers le
service d'en entreprendre la sollicitation,
d'autant plus que votre naissance en ce diocèse
et l'amitié que votre père et vos frères m'ont
toujours témoignée [139] vous inviteront à le
faire. Je vous prie donc instamment de vouloir
bien vous en occuper avec affection et toute
diligence; car Son Altesse et Monseigneur le
Prince désirent beaucoup que l'affaire réussisse
promptement pour de dignes considérations
qui regardent leur satisfaction et service. Votre
Seigneurie pourra en toute assurance engager
ma parole pour attester que nous n'avons
employé en ceci ni artifice de cour, ni
importunité, ni demande ou requête.
La mense épiscopale est petite, le
diocèse est grand et onéreux; c'est pourquoi, si
mon frère pouvait garder ses bénéfices pendant
498 Le Saint lui-même indique le destinataire de la présente lettre dans celle du 16 février: «J'escris a M. Beybin,»
mande-t-il à son frère. Ce fut en effet Etienne Jarcellat, dit Beybin, qui s'occupa à Rome de l'affaire de la coadjutorerie
de Jean-François de Sales, et fut l'un des trois témoins appelés à déposer dans l'examen de cette cause, en présence du
cardinal Aldobrandini, le 30 mai 1620. (Cf. ci-dessus, note (484), p. 136.) Etienne, docteur en droit civil et canonique,
étudiait déjà dans la capitale du monde chrétien en 1613; c'est là qu'il fut ordonné prêtre par dimissoires du 21
septembre de la même année. Sans quitter cette ville, il devint prieur de Léaz (1631) et d'Anglefort (1649). Il meurt
en août 1651, âgé d'environ soixante-trois ans. (R. E.)
499 L'italien de ce texte ne semble pas être celui du Saint; très probablement nous n'avons là qu'une traduction de la
lettre française qu'il écrivit au savoyard Beybin. Mais l'Autographe est perdu, et seule une copie italienne a été
conservée.
500 Honorable Jean Jarcellat, dit Beybin, habitait ainsi que ses enfants la paroisse de Saint-Germain-de-Joux, dont son
fils Etienne fut curé (voir la lettre précédente, p. 137). Jean-Claude Jarcellat, qui résigne ce bénéfice en 1643, doit être
un cadet de la même famille; en 1629, il était recteur de la chapelle de Passin à Songieu, dont il avait reçu l'institution,
n'étant que simple clerc, le si mai 1617. (R. E.) Il devint ensuite chanoine de Saint-Pierre de Genève, officiai de
l'évêché, et, en 1635, prieur de Talissieu; il vivait encore en 1650. (Guichenon, Hist. de Bresse et de Bugey, 1650,
Partie II, continuation, p. 107.)
114/341

12.5 Page 115

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fratello potrà ritenere i suoi beneficii tanto che
durerà la coadiutoreria, sarà molto a
proposito501. V. S. dunque ci oblighi della
condotta di [140] questo affare secondo la
confidenza ch'io ne piglio, e mi tenga,
Signor mio, per
Suo ben humile et
affettionatissimo confratello e servitore,
FRANCO, V. di Ginevra.
XVII Febraro 1620, Annessi.
la durée de la coadjutorerie, ce serait fort à
propos. Que Votre [140] Seigneurie veuille
donc nous obliger en se chargeant de la
conduite de cette affaire, selon la confiance
que je prends de vous en prier, et tenez-moi,
Monsieur, pour
Votre bien humble et très
affectionné confrère et serviteur,
FRANÇOIS, Evêque de Genève.
17 février 1620, Annecy.
Revu sur une ancienne copie conservée à
l'Archevêché de Naples.
MDCXI. A Madame de Granieu502. Deux mots seulement à la
destinataire, pour avoir le temps d'écrire à d'autres. Humilité
et patience. M. de Boisy, évèque. A quoi François de
Sales emploiera son loisir.
Annecy, 17 février 1620.
A vous, ma tres chere Fille, il ne faut point de ceremonie, car Dieu ayant rendu mon cœur
si fortement serré au vostre, il n'y a plus d'entredeux, ce me semble. C'est pour vous dire que je ne
vous escris que ces deux motz, reservant le loysir pour escrire a d'autres a qui il faut faire
responce503. [141]
Mais que sont ilz ces deux motz? Humilité et patience. Ouy, ma tres chere Fille, et tous-
jours, certes, plus chere Fille. Vous estes environnee de croix tandis que le cher mary a du mal504:
or, l'amour sacré vous apprendra qu'a l'imitation du grand Amant, il faut estre en la croix avec
humilité, comme indigne d'endurer quelque chose pour Celuy qui a tant enduré pour nous, et avec
patience, pour ne point vouloir descendre de la croix qu'apres la mort, si ainsy il plait au Pere
eternel. O ma tres chere Fille, recommandes moy a ce divin Amour crucifié et crucifiant, affin qu'il
crucifie mon amour et toutes mes passions, en sorte que je n'ayme plus que Celuy qui, pour l'amour
de nostre amour, a voulu estre douloureusement mais amoureusement crucifié.
Mon frere de Boysi, vostre hoste505, s'en va estre evesque pour me succeder, Madame
l'ayant ainsy desiré et Son Altesse voulu, sans que jamais, ni directement ni indirectement, je l'aye
501 Jean-François de Sales, chanoine et chantre de la cathédrale de Saint-Pierre de Genève, était encore recteur du
Petit-Bornand, suivant la permission accordée aux membres du Chapitre de pouvoir, «vu l'exiguité de leurs
prébendes,» garder avec leur canonicat, qui «n'atteignait pas les quarante ècus,» une cure du diocèse. Si le saint Evêque
demande que son frère soit autorisé à jouir de ses bénéfices, c'est à cause de l'insuffisance de la mense épiscopale qui,
au témoignage d'Etienne Beybin, «ne dépasse pas les douze cents écus, monnaie de Savoie, lesquels, réduits en
monnaie de la Chambre Apostolique, monteront à six cents ducats... Anciennement,» ajoute-t-il, «l'Evêché avait quatre
ou cinq mille écus de revenu; mais aujourd'hui, les Genevois en sont les détenteurs.» (Procès-verbal de l'examen du
30 mai 1620, indiqué note (498) de la page précédente, conservé à Rome, Archives Aldobrandini.)
502 Les allusions contenues dans cette lettre, surtout la mention de «M. de Boysi, vostre hoste,» désignent avec certitude
Laurence de Ferrus, dame de Granieu, pour destinataire. (Voir tome XVII, note (1299), p. 395.)
503 Vide Epist. seqq.
504 François de Gratet, seigneur de Granieu (voir le tome précédent, note (1111), p. 341).
505 C'est sans doute au retour de Paris, lors du passage à Grenoble, en octobre 1619, que Jean-François de Sales avait
logé chez Mme de Granieu. Le 5 juin suivant, la noble dauphinoise venait passer quelques jours à Annecy, et «ce ne
sera pas sans parler de vous avec affection,» écrit le Saint à son frère.
115/341

12.6 Page 116

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recherché. Cela me fait esperer un peu de repos pour escrire encor je ne sçay quoy du divin Amant
et de son amour506, et pour me preparer a l'eternité.
Ma tres chere Fille, je suis incomparablement vostre serviteur tres humble, et de monsieur
vostre mary, et de monsieur C.507, mais sur tout de vostre chere ame, que Dieu benisse. Amen.
FRANÇS, E. de Geneve.
Le 17 febvrier 1620. [142]
MDCXII. A Madame de Veyssilieu508. Double raison pour le
Saint d'aimer une postulante. Confiance en Dieu, et nous ne
serons pas confondus.
Annecy, 17 février 1620.
Cette fille me sera chere, venant de la main de la providence de Dieu, et sur vostre
recommandation509, ma tres chere Fille, qui m'est de tres grande estime en toute façon. Playse a
cette mesme Bonté celeste de respandre ses graces sur nous, affin que nous suivions tous les sacrés
attraitz de sa sainte vocation.
Je n'ay encor point parlé a monsieur N.510; mais, a veuë de païs, je ne laisse pas de vous
dire, ma tres chere Fille, que vous tenies la teste hautement relevee en Dieu et les yeux dans
l'eternité bienheureuse qui vous attend. Qu'est ce qui peut nuire aux enfans du Pere eternel qui ont
confiance en sa debonnaireté? En toy, Seigneur, j'ay mon esperance511; disons bien cecy, ma tres
chere Fille, mais disons le souvent, disons le ardamment, disons le hardiment, et ce qui s'ensuit
nous arrivera: Je ne seray point confondu512. Non, ma Fille, ni pour cette vie, ni pour la future,
jamais nous ne serons confondus. Esperes en Dieu, faites bien513, et continues vos exercices;
aymés les pauvres, et demeures en paix. [143]
Pour moy, je cheris vostre cœur de plus en plus, je le benis de plus en plus, et suis en verité
de plus en plus
Vostre tres humble serviteur,
FRANÇS, E. de Geneve.
Ce 17 febvrier 1620.
506 On se rappelle que le saint Evêque avait plusieurs ouvrages en projet, tels que l'Histoire théandrique, le Traité de
l'Amour du prochain, etc. (Voir tomes I, p. LIII, et XIV, p. 136.) Il en sera parlé plus en détail dans une note ultérieure.
507 Serait-ce M. de la Coste, soit Louis de Simiane, cousin de Mme de Granieu? (Voir le tome précédent, note (773), p.
220.)
508 Le 17 février, Hercule de Rigaud, seigneur de Rajat, signe le contrat de réception de sa fille Marguerite entrant au
noviciat du Monastère d'Annecy. La destinataire est par là même clairement désignée, puisque Mme de Veyssilieu était
tante de la nouvelle prétendante.
509 Sœur d'Anne-Thérèse de Rajat (voir ci-dessus, note (388), p. 104), Marguerite prit l'habit religieux, avec le nom de
Marguerite-Agnès, le 6 avril 1620, à l'âge de vingt-cinq ans, et fit profession le 13 juin 1621. Elle fut envoyée à la
fondation de Marseille (1630), et ensuite au monastère d'Aix, où elle décéda le 15 août 1635. (Livres du Noviciat et
du Couvent, du Ier Monastère d'Annecy.)
510 Très probablement M. d'Ulme, confesseur de la Visitation de Grenoble, venu à Annecy à la même époque. (Voir
ci-après, Lettre MDCXIV, p. 145.)
511 P. XXX, 1.
512 Ibid.
513 Ps. XXXVI, 3.
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12.7 Page 117

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MDCXIII. A Madame de Jomaron514 (Inédite). La consolation
d'une paternité spirituelle. «Trois vertus colombines que
Jesus Christ recherche en ses amantes.» Surcharge de
correspondance.
Annecy, 17 février 1620.
Il est vray, vous l'aves desiré et je l'ay accepté: vous estes ma tres chere Fille, et j'en ay de
la consolation, estimant que vos bons souhaitz devant Dieu ne serviront pas peu pour impetrer sa
misericorde sur mon ame, laquelle aussi reclame souvent cette mesme Bonté sur la vostre, affin
qu'elle soit toute sainte, et qu'en verité elle marche en douceur, humilité et simplicité interieure,
qui sont les trois vertus colombines que le divin Espoux Jesus Christ recherche en ses amantes.
Alles donq ainsy, ma tres chere Fille, et parmi ce tracas du monde tenes vostre cœur ou vous
aspires, dans le sein de la debonaireté de ce grand Dieu, en sa sainte gloire seternelle.
Je vous escris ces motz sans loysir ni haleine, pour la multitude des responses quil faut que
je face; mais je ne [144] les envoye pas sans un'extreme affection que j'ay pour vous, puisqu'il plait
a Celuy, ma tres chere Fille, qui m'a rendu, en son divin bon playsir,
Vostre tres humble serviteur,
FRANÇS, E. de Geneve.
XVII febvrier 1620, Annessi.
A Madamoyselle
Madamoyselle de Jomaron.
Revu sur l'Autographe conservé à Albano Laziale (Italie), au Scolasticat
des PP. Oblals de Saint-François de Sales.
514 Gaspard Jomaron, contrôleur des guerres, conseiller du Roi, fut anobli en 1603; il teste le 11 juin 1617. Est-ce à sa
veuve, Anne Thomé, d'une famille de Romans, que le Saint s'adresse, ou à la femme de son fils Jean, Anne de Rue,
fille de Joachim de Rue et d'Alix du Vache? Les données sûres nous manquent pour trancher la question. Anne de
Rue vivait encore le 9 septembre 1641, date du testament de son mari, seigneur du Merlet et de la Roche-de-Glun,
conseiller au Parlement de Grenoble (1608), et ensuite au Conseil souverain de Chambéry lors de l'occupation
française (1630). (D'après des Notes de M. le comte de Terrebasse.)
117/341

12.8 Page 118

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MDCXIV. A la Mère de Chastel, Supérieure de la Visitation de
Grenoble (Fragment). Prochaine entrée au noviciat d'une sœur
de la Mère de Chastel. — Le bon cœur de M. d'Ulme; ce qu'il
voudrait savoir
Annecy, 17 ou 18 février 1620515.
Ma tres chere Fille,
Vous me seres bonne, s'il vous plait, de m'excuser si je vous escris peu; mais vous estes
trop ma chere fille pour user d'excuses envers vous.
La chere seur viendra donq icy samedi, a ce que monsieur le President vostre beaufrere516
m'a fait dire, et croyes qu'elle sera parfaitement la bien venue, car je la cheris d'une dilection
incomparable517.
Nous avons parlé, le bon M. d'Ulme et moy, et nous [145] n'avons rien conclu, sinon qu'il
attendra jusques a ce que vous soyes en Chalamont518, coulant ainsy le tems doucement; et entre
ci et la, Dieu luy mesme accommodera toutes choses, ainsy que nous devons esperer. Je treuve
bien en luy le bon cœur que vous me dites, et pour cela il faut grandement l'honnorer et cherir. En
somme, il voudroit sçavoir en quelle qualité on le tient519, et croy qu'il voudroit celle de Pere
spirituel, pour deux raysons: l'une, parce que l'amour…………………………………………….
515 La sœur de la Mère de Chastel fut admise à la Visitation d'Annecy en février 1620, ce qui fixe la date de cette lettre,
envoyée sans doute avec les trois autres du 17, également destinées à Grenoble.
516 Georges de Lescheraine (voir tome XV, note (249), p. 81).
517 L'Evèque de Genève témoigna cette «dilection incomparable» à la Sœur Claude-Cécile de Chastel (voir tome XIV,
note (77), p. 18) en prenant un soin paternel de son âme, s'assujettissant à venir tous les huit jours lui faire rendre
compte de sa conscience.
518 Située sur une hauteur dominant Grenoble, la vigne de Chalamont appartenait à Mmes de Sautereau et de la Perrière.
Cet emplacement avait été choisi par la Mère de Chantal elle-même et elle en passa l'acte d'acquisition le 3 mai 1618.
Christine de France posa la première pierre du nouveau monastère le 19 octobre 1619; mais ce fut seulement le 30
septembre 1621 que la Communauté put en prendre possession. (Hist. de la Fondation de la Visitation de Grenoble.)
519 Voir ci-dessus, Lettre MDXCIII, p. 104, et ci-après, celle du 2 avril à la même destinataire. Cf. aussi la lettre
d'Artus de Lionne au Saint, du 1er février 1620, tome XVIII, Appendice I, p. 432.
118/341

12.9 Page 119

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MDCXV. A la Mère Favre, Supérieure de la Visitation de
Lyon520. Comment entendre un «document» du saint Fondateur.
Avantages du Directoire spirituel; où conduisent ses
multiples exercices. Conseils à la Maîtresse des novices.
Annecy, 22 février 1620.
……………………………………………………………………………………………………...
Or sus, je vous dis, ma tres chere Fille, que si j'ay dit en quelque Entretien521: douze heures
dans la mayson [146] pour une au parloir, j'ay dit ce qui seroit desirable, s'il estoit prattiquable. On
dit souvent de telles propositions qui se doivent entendre commodement, c'est a dire quand les
choses se peuvent bonnement faire, selon les lieux, les personnes et les affaires que l'on a.
Demeures donq en paix, et faites valoir ce document, sagement, prudemment, non durement ni
rigoureusement, ni ric a ric.
Le Directoire du noviciat propose quantité d'exercices, il est vray, et il est encor bon et
convenable pour le commencement de tenir les espritz rangés et occupés; mays quand, par le
progres du tems, les ames se sont un peu exercees en cette multiplicité d'actes interieurs et qu'elles
sont façonnees, desrompues et desengourdies, alhors les exercices s'unissent a un exercice de plus
grande simplicité: ou a l'amour de complaysance, ou a l'amour de bienveuillance, ou a l'amour de
confiance, ou de l'union et reunion du cœur a la volonté de Dieu; de sorte que cette multiplicité se
convertit en unité. Et de plus, s'il se treuve quelque ame, voire mesme au noviciat, qui craigne trop
d'assujettir son esprit aux exercices marqués, pourveu que cette crainte ne procede pas de caprice,
outrecuydance, desdain ou chagrin, c'est a la prudente Maistresse de les conduire par une autre
voye, bien que pour l'ordinaire celle ci soit utile, ainsy que l'experience le fait voir.
Vives toute a Dieu, en paix, en douceur, courageusement et saintement, ma tres chere Fille.
Je suis en luy parfaitement vostre, tout a fait.
FRANÇS, E. de Geneve.
Le 22 febvrier 1620. [147]
520 Il y a plusieurs probabilités que ces lignes s'adressent à la Mère Marie-Jacqueline Favre; nous en citerons une seule.
Une lettre de la Mère de Chantal, datant de la même époque, nous apprend qu'au Monastère de Lyon, quelques esprits
redoutaient de s'assujettir au Directoire spirituel (Lettres, vol. I, p. 365). La Supérieure de Bellecour consulta
certainement le saint Fondateur à ce sujet, et c'est en réponse à sa demande qu'il dut écrire le passage, plus tard extrait
de cette lettre pour être imprimé à la fin du Directoire sous ce titre: Avis sur le Directoire.
521 Entretien XVI (tom. VI, p. 300).
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12.10 Page 120

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MDCXVI. Au Baron Louis de la Tournette522. Un vieil ami de M.
de Boisy. Concurrents pour la chapelle Sainte-Catherine;
pourquoi le Saint ne peut favoriser le fils du destinataire.
Annecy, 23 février 1620.
Monsieur,
Je loue Dieu et vous remercie humblement de la paix et douceur que vous aves donnee a
vostre curé qui, je m'asseure, l'employera a rendre meilleur service a l'Eglise523. Et ne puis que
recevoir a beaucoup de faveur la memoire qu'il vous plait d'avoir de la ferme et reciproque amitié
de nos peres524, laquelle, de ma part, je cultiveray fort affectionnement en toutes les occasions
esquelles mon pouvoir s'estendra, de vous rendre service.
Que si la chapelle dont vous m'escrives estoit en ma main525, tres volontier je la
contribuerois a vostre contentement, pour la retraitte de monsieur vostre filz, Religieux en
Soüisse526. Mays monsieur le Doyen la possedera encor toute l'annee de son noviciat, apres
laquelle il en veut disposer en faveur d'un parent qui luy est si proche, [148] et a vous, Monsieur,
que quand il me l'a eu nommé et dit ses raysons, il m'a osté tout a fait le courage d'interceder pour
tout autre527. Et mesme que monsieur de Menthon, de la nomination duquel est ladite chapelle,
praeferera aussi celluy-la a quicomque pourroit venir, puisqu'il luy est aussi proche qu'a vous,
Monsieur, qui sous la faveur de Son Altesse ne tarderes pas, comme j'espere, beaucoup sans avoir
des autres bonnes commodités pour monsieur vostre filz; et moy, je desireray tous-jours le bonheur
de m'y pouvoir employer.
Ce pendant, Monsieur, cette mesme amitié ancienne qu'il vous a pleu de me marquer,
m'oblige a vous communiquer lhonneur que Son Altesse a fait ces jours passés a mon frere qui est
aupres de Madame, l'ayant nommé mon coadjuteur et successeur en cett'Evesché, avec une
gratification d'autant plus honnorable que ça esté sans que je l'aye jamais ni demandee ni fait
demander. De sorte, Monsieur, qu'a mon manquement, vous aures un autre Evesque qui, estant
mon frere, sera ensuite comme moy,
Vostre tres humble et tres affectionné serviteur,
FRANÇS, E. de Geneve.
XXIII febvrier 1620.
522 Louis de l'Alée, baron de la Tournette depuis 1613 (voir les tomes XI, note (48), p. 7; XV, note (852), p. 300, et
Appendice II, p. 413). Le Registre paroissial de l'église Saint-Maurice nous donne la date de sa sépulture, le 20 avril
1624; il avait alors soixante ans.
523 Le destinataire possédait plusieurs seigneuries en divers lieux; aussi n'est-il pas possible de désigner le curé en
question.
524 Ami de François de Sales, seigneur de Boisy (voir tome XI, note (272), p. 117), le père du baron de la Tournette
se nommait François de l'Alée, seigneur de Songy par sa mère, Catherine Revil de Saint-Sylvestre, femme d'Aîné de
l'Alée. Il épousa Jeanne-Marine de Chabod-Jacob, et fut maître-auditeur à la Chambre des Comptes de Savoie,
conseiller d'Etat, trésorier du duc de Nemours, enfin trésorier général de Savoie.
525 La chapelle de Sainte-Catherine, attenante à l'église du prieuré de Talloires, dont Benoît de Chevron, doyen du
Chapitre de Notre-Dame de Liesse, était recteur. (Voir le tome précédent, notes (542), (544), p. 158.)
526 Nous ne connaissons pas de fils de Louis de l'Alée qui ait été Religieux. Peut-être son aîné, François, avait-il fait
un noviciat dans un monastère de Suisse avant d'entrer dans le clergé séculier. Il fut prêtre le 23 septembre 1628 et
posséda un canonicat au Chapitre de Saint-Pierre de Genève.
527 La cousine-germaine du baron de la Tournette, Charlotte-Emmanuelle de Chahod, avait épousé Bernard de
Chevron, frère du doyen, et neveu de Bernard de Menthon (voir tome XIII, note (864), p. 319). C'est à l'aîné de leurs
fils, Henri-Sigismond, qu'on voulait donner la chapelle de Sainte-Catherine; mais comme il avait à peine dix ans, le
duc de Savoie lui-même demanda, par son ambassadeur à Rome, une dispense en sa faveur. (Lettre du 30 décembre
1620 à l'abbé Scaglia; Turin, Archiv. de l'Etat, Lettere Ministri, Mazzo 31.) Cette démarche n'eut pas de succès; le
président Favre soutint auprès de Charles-Emmanuel les droits de son propre fils Antoine (voir ci-dessus, note (305),
p. 79) qui l'emporta en effet sur ses concurrents et fut pourvu, le 19 février 1621, de la chapelle tant convoitée. (Voir
Mugnier, Correspondance du Président Favre, lettre du 17 janvier 1621.)
120/341

13 Pages 121-130

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13.1 Page 121

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528A Monsieur
Monsieur le Baron de la Tornette,
Conseiller d'Estat de S. A. et son Ambassadeur ordinaire
en Souisse.
Revu sur l'Autographe conservé à la Visitation du Mans. [149]
MDCXVII. A la Soeur de la Roche, Assistante-Commise de la
Visitation d'Annecy. Conseils au sujet d'une malade
Annecy, 25 février 1620529.
Il n'y a rien a craindre, ma tres chere Fille; il y a du malheur en l'esprit de cette Seur qui
luy fait parler et de vostre chastiment et du mien avec une esgale fauseté. Elle n'a garde de se faire
du mal qui cuise, elle ayme trop sa peau. Demain je luy parleray, mais non pas seul, affin qu'elle
ne dise pas que je la flatte. Si elle porte un cousteau, il le luy faut tres bien oster. Elle est
veritablement hors de sens, mais non pas tant qu'elle soit excusable en ses fautes. Je ne suis marry
sinon de la peyne que vous en aves, et du trouble qu'elle excite dans la mayson. En fin, elle me
contraindra de l'enfermer et la traitter en forcenee.
Je pars, et vous vay faire l'exhortation promise. [150]
528 L'adresse a été mise par un secrétaire.
529 Nous déduisons la date du sujet même de ces lignes, et particulièrement de cette phrase: «Demain, je luy parleray.»
Il s'agit de la pauvre Sœur Jeanne-Françoise de Sales (voir tome XV, note (756), p. 263) dont l'Evêque de Genève
écrit le 26 février à la sainte Fondatrice (p. 156): Elle «me vient de promettre des merveilles.»
Quant à la destinataire, c'est évidemment la Sœur Claude-Agnès Joly de la Roche qui, en qualité d'Assistante-
commise, gouvernait la Communauté d'Annecy pendant l'absence de la Mère de Chantal.
121/341

13.2 Page 122

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MDCXVIII. A la Mère de Chantal, a Paris. Heureuse
nomination de Jean-François de Sales à la coadjutorerie de
l'évêché de Genève. — Ce que fait la vieillesse dans le cœur et
dans l'âme du Saint. Ses pensées sur les projets qu'on forme
pour lui à Paris. Sollicitude pour l'avenir de Françoise de
Chantal. L'abandon à Dieu au milieu des «douleurs
interieures et exterieures.» Perplexité sans affliction.
Messages affectueux. «M. Vincent,» bon conseiller
Annecy, 26 février 1620.
VIVE † JESUS
Saches, ma tres chere Mere, que par une voye admirable Son Altesse a nommé mon frere
a ma coadjutorie et succession en cet Evesché, sur le desir de Madame et de Monseigneur le Prince,
brevet expedié530 et toutes les faveurs les plus favorables pour Rome; mays avec des paroles si
avantageuses de Son Altesse et de Madame pour toute nostre mayson, pour mon frere et pour moy,
que rien ne s'est veu de pareil. Et l'excellence du fait, c'est que, ni directement ni indirectement, j'e
n'ay demandé ni procuré ce bienfait, qui n'est pas grand, a la verité, quant aux moyens, mais bien
grand quand a lhonneur et la façon encor plus honnorable de le conferer. De sorte, ma tres chere
Mere, que dans trois moys, voyla un nouvel Evesque tout sacré; car ces Princes, et particulierement
Madame, le veulent ainsy avoir tout fait vistement531. Or ne sçai-je pas si avec cela ilz accroistront
point la pension de six cens escus, c'est a dire 300 pistoles, qu'ilz nous ont accordé et delaquelle
nous sommes entrés en payement des le quartier d'octobre, novembre et decembre passés. En
somme, nous voyla asses bien selon le lieu ou nous sommes, car mon frere retiendra ses
benefices532, qui suffiront avec la pension, puisque a la cour [151] il aura cinq bouches et des
chevaux entretenus par departement de plat porté en son logis.
Or, je vous dis ceci: premierement, affin que vous le sachies; secondement, pour m'excuser
si je ne vous escris pas, ni a monsieur des Hayes533, si amplement que je desirerois, ni a
personn'autre qu'a vous deux, car il me faut tant escrire a la cour, a tous ces Princes et Princesses,
des lettres de remerciement, et a Rome des lettres de supplications, que j'en suis tout es [soufflé534];
tiercement, affin que vous demeuries en paix, avec asseurance que je ne feray point de changement
en mes adventures que quand je verray une signalee occasion du service de Dieu et digne d'estre
suivie, toutes choses laissees. Je confesse, et il est vray, que je ne suis guere richement accommodé
de moyens; mais je suis sans necessité, et n'ay ni occasion ni inclination quelcomque de faire rien
d'indigne de ma condition et profession pour en avoir. Je me taste par tout dans le cœur pour voir
si la viellesse me porte point a l'humeur avare; et je treuve au contraire qu'elle m'affranchit de
souci, et me fait negliger de tout mon cœur et de toute mon ame toute chicheté, praevoyance
mondaine et desfiance d'avoir besoin. Demeures donq en paix.
Je suis certes grandement obligé a ce grand Cardinal pour l'estime qu'il fait de moy, qui
n'ay jamais merité la moindre des pensees qu'il a eu pour moy535. Mays je luy dis asses
530 Voir ci-dessus, note (374), p. 101.
531 Malgré les désirs des princes, le sacre de Jean-François fut retardé jusqu'au 17 janvier 1621.
532 Voir ci-dessus, note (501), p. 140.
533 La lettre à Antoine des Hayes ne nous est pas parvenue.
534 Ce mot est coupé.
535 Dans une lettre du 3 mars 1620 (vol. I, p. 378), la Mère de Chantal parle assez longuement à son bienheureux Père
du projet poursuivi par ses amis pour l'attirer en France et des bonnes intentions de Henri de Gondi, cardinal de Retz,
à cet égard. (Cf. ci-dessus, pp. 38-40.)
122/341

13.3 Page 123

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intelligiblement a Tours, que je ne voudrois estre demarié que pour n'estre plus marié, et
notamment de la sorte que vous m'escrives. Que je me chargeasse de l'espouse d'autruy par
obligation, moy! cela, comme je pense, me seroit impossible. Toutefois, monsieur des Hayes qui
a tant de bienveuillance pour moy et tant de dexterité en toute sorte d'affaires, apprendra
doucement les intentions, et desnoüera sagement l'affaire, sil la faut desnoüer. C'est asses de cela;
je cours au reste. [152]
Si vous nous donnes advis que ma chere fille madamoyselle de Chantal ne soit point
mariee, ni pour l'estre de dela, je m'essayeray de renouer le mariage, ou avec le neveu de M.
d'Andelot, sil revient asses tost d'Italie ou il est (j'entens l'oncle536), ou avec monsieur de Ballon,
s'il n'espouse madamoyselle de Charmoysi qu'il recherche avec force grans corrivaux537.
La pauvre [Sœur Jeanne Françoise538] nous exerce extremement, car, si je ne me trompe, il
y a apparence que sa cervelle va renverser. Nous ferons ce que nous pourrons, et sil plait a Dieu
que ce malheur arrive, nous la retirerons en quelqu'une des maysons de mes freres. Dieu soit beni!
Je vous dis courtement qu'ouy: cet abandonnement en Dieu parmi les douleurs interieures
et exterieures est tres [153] bon, et bon aussi de dire vocalement les paroles que vous me marques,
de tems en tems, pour faire sçavoir au cœur qu'il est en Dieu, par le tesmoignage que ces paroles
luy rendent. Il avoit dit, le grand saint Etienne: O Seigneur Jesus, receves mon esprit; et ayant dit,
il s'endormit en Nostre Seigneur539. Il faut donq dire quelque chose de semblable et s'endormir en
Nostre Seigneur, et puis, de tems en tems, repeter les mesmes ou semblables paroles, et se
rendormir.
Ne vous fasches point de ce que je vous ay dit de cette Seur Jeanne Françoise, car j'en suis
plus en peine que fasché; c'est a dire, je suis plus en perplexité comme je dois faire, qu'affligé de
ce qu'il y faut faire. En verité, je ne sens quasi point ce desplaysir, non plus que si c'estoit d'un'autre.
Je salue cordialement nos cheres Seurs, toutes. La grande est grandement aymee de mon
cœur540: quelle patience avec moy, d'attendre si longuement que j'escrive! La chere Seur Anne
Catherine sçait bien ce que je luy suis, et la chere Seur Jeanne Marie et Marie Anastase, et la
premiere Novice541, et toutes. Mays a la bonne madame de Villesavin542, que ne luy suis-je pas?
Je recommande sa grossesse et sa famille, de tout mon cœur, a la divine Majesté.
536 Chevalier de Malte, commandeur des Echelles, Claude d'Andelot, baron de Pressia, appartenait à une famille de la
Franche-Comté, illustre par son ancienneté, sa valeur et les services rendus à ses princes. Son père, Jean-Baptiste
d'Andelot, était bailli de Dole et gentilhomme de bouche du roi Philippe II; sa mère se nommait Madeleine Le Blanc,
dame d'Ollans. Entré d'abord au service du duc de Nemours, il resta à celui du duc de Savoie et devint général de la
cavalerie. En 1589, il est fait prisonnier des Genevois; en 1602, comme lieutenant de Charles d'Albigny, il prend part
à l'expédition de l'Escalade. A diverses reprises, le chevalier d'Andelot séjourna à Annecy; il y connut beaucoup
l'Evêque de Genève et la Mère de Chantal qui appréciaient hautement son mérite et sa vertu. Il décéda le 19 mars
1635.
Mais quel était le neveu de M. d'Andelot auquel on songeait unir Françoise de Rabutin? Très probablement
un fils de son frère aîné Ferdinand et de sa seconde femme Anne-Françoise de Laubespin. Les deux du premier lit
étaient morts déjà sur les champs de bataille; restaient Louis et Antoine. Louis, d'abord prieur de Champlitte et
coadjuteur de Theuley, avait quitté la soutane pour l'épée; il devint capitaine d'une compagnie de deux cents chevau-
légers, et vécut jusqu'en 1629. Antoine, capitaine d'infanterie, mourut après la prise de Bréda, 1er mai 1625, et fut
inhumé à Bruxelles. (D'après des Notes de M. l'abbé Boillot, curé à Liesle (Doubs), etc.)
537 Un mois plus tard, le mariage de Françoise de Charmoisy (cf. le tome precedent, note (161), p. 33) avec Pierre
Perrucard, seigneur de Cusinens et de Ballon, était définitivement arrêté. La convention préliminaire, rédigée le 28
mars 1620, porte en première ligne la signature du Saint. Le contrat dotal du 25 avril suivant se fit également à Annecy,
«dans la grande salle du palais de Mgr François de Sales,» qui voulut bénir lui-même cette union. Charles-Emmanuel
Perrucard de Ballon donnait à son fils aîné les terres de Ballon, Léaz, Cluses et Avanchy ou Vanchy, de Cusinens,
Méral et Eloyse. Françoise mourut après 1650; son mari vivait encore en 1657.
538 Jeanne-Françoise de Sales dont le nom a été coupé. (Voir la lettre précédente.) Cet alinéa et le premier de la
page suivante sont inédits.
539 Act., VII, 58, 59.
540 Mme des Gouffiers.
541 Les Sœurs Anne-Catherine de Beaumont, Jeanne-Marie de la Croix de Fésigny, Marie-Anastase Pavillon et Sœur
Marie-Marguerite de Gondras des Serpens de la Guiche. (Voir ci-dessus, notes (287), (289), p. 73, et (290), p. 74.)
542 Isabelle Blondeau, dame de Villesavin.
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13.4 Page 124

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Si l'affaire de Valence est si bien disposé comme vous l'escrivés, car voyla la premiere
nouvelle, je pense qu'il ne seroit pas mal a propos qu'il y eut une Mayson, car ce quartier la est
peuplé en noblesse; mais il faudroit bien adjuster l'affaire543. [154]
Je voy a la desrobee les Directoires544, et n'ay sceu achever, non plus que faire les entretiens
que vous desiries.
M. Vincent vous conseille fort bien545. Je n'ay jamais bien peu concevoir qu'il fut juste
qu'on fit perdre les creances a un homme pour les conserver au debiteur qui, [155] en aage de
discretion, a fait l'emprunt; mays si on pouvoit mettre ordre pour l'advenir affin qu'on ne peut plus
valablement emprunter et que cela fut notifié aux presteurs, cela seroit bon.
La Seur Jeanne Françoise me vient de promettre des merveilles; car saches que le porteur
qui me pressoit tant hier n'estant pas parti, j'ay adjousté ces deux motz.
Mille salutations, je vous supplie, a toutes nos cheres dames. O qu'il me fasche de ne
pouvoir escrire a ma tres chere fille Madame de Port Royal et a mesdamoyselles Arnaud et Le
Maistre546. Il ny a pas moyen; ce sera bien tost. Ces filles sont en verité au milieu de mon ame, et
je suis, comme vous sçaves vous mesme, tout vostre.
XXVI febvrier 1620.
A ma tres chere Mere en N. S.,
La Mere Supe [de] Ste Marie.
A Paris.
Revu sur l'Autographe conservé à la Visitation d'Annecy.
543 L'Evêque de Genève ignorait jusqu'alors le projet de fondation à Valence, et cependant c'était sa réputation de
sainteté qui l'avait inspiré à Claudine Meyssonnier. Cette jeune fille, encouragée par Marie Teyssonnier, si connue
sous le nom de Marie de Valence, avait résolu de consacrer sa fortune à l'établissement d'une Maison de la Visitation
dans sa ville natale. En attendant l'heure de Dieu, elle entra au monastère de Lyon; elle venait d'y prendre l'habit (20
février) quand le Saint écrivait ces lignes. On complétera ces détails dans la suite de sa correspondance.
544 C'étaient très probablement, avec le Directoire pour l'Office, les Directoires pour les Officières, dont parle déjà la
Mère de Chantal en janvier 1619 (Lettres, vol. I, p. 296). Ils furent plus tard imprimés à la suite du Coustumier.
545 Le fils aîné de Jean de Paul et de Bertrande de Moras, pauvres paysans des Landes, naquit à Pouy le 24 avril 1576.
Le 23 septembre 1600, Vincent devenait prêtre; après des épreuves et des aventures extraordinaires, il entra comme
précepteur dans la maison du général des Galères, Emmanuel de Gondi, comte de Joigny (voir le tome précédent, note
(1219), p. 375), et y demeura plusieurs années. Alors seulement il approchait de cinquante ans Vincent de Paul
trouve sa voie et commence la série de ses merveilles. Les campagnes sont évangélisées, la réforme du clergé débute
par les retraites des Ordinands et se poursuit par l'établissement des Séminaires, et la Congregation des Prêtres de la
Mission est vouée à ces deux œuvres; l'humble prêtre entre, en dépit de ses répugnances, au Conseil de conscience
créé par Anne d'Autriche, et contribue dans une large mesure à éloigner de l'épiscopat et des autres bénéfices les sujets
indignes; deux armées sont jetées en lutte contre toutes les misères physiques et morales: celle des Dames de Charité
où figurent les plus grands noms de France, et celle des Filles de la Charité qui étonne le monde par ses vertus et ses
dévouements. La générosité des unes et des autres éclate surtout lors des guerres qui ravagent la Lorraine, lors de la
Fronde qui désole Paris et la province; leur chef, avec une sainte habileté, une admirable sagesse, recueille les
aumônes, organise les secours, et l'on constate avec stupeur qu'un seul homme a distribué jusqu'à douze millions de
livres aux pauvres en ces temps de calamités. Toujours simple, plein de mépris pour lui-même après tant d'actions
éclatantes, Vincent de Paul mourut le 27 septembre 1660. Le saint Thomas d'Aquin de la charité, comme l'appelait
Mgr Freppel, méritait plus encore que la canonisation (16 juin 1737); le Pape Léon XIII l'a proclamé, en 1885, Patron
de toutes les Associations de charité dans l'Eglise universelle.
Quand Vincent de Paul connut François de Sales, rien n'était fait encore des grandes choses qui devaient
rendre son nom immortel. Ce qui séduisit l'Evêque de Genève, c'est le jugement net et sur, l'humilité profonde, la
simplicité, les lumières surnaturelles du maître des jeunes seigneurs de Gondi. Il en fit un tel état qu'il lui remit, en
quittant Paris, ce qu'il avait de plus cher: ses Filles de la Visitation. Quarante ans saint Vincent de Paul en fut le
Supérieur, et lui que tant d'intérêts importants absorbaient, ne dédaignait pas d'entrer dans tous les détails de la vie
religieuse et d'aider les Soeurs de Sainte-Marie dans les missions qui leur furent confiées. C'est ainsi qu'il collabora à
la rédaction des Constitutions des Filles de la Madeleine qu'elles gouvernaient. Il faudrait un long article pour parler
de ses relations avec la Mère de Chantal dont il devint le conseiller intime après la mort de François de Sales. Une
vénération mutuelle les inclinait l'un devant l'autre, et Vincent de Paul, qui survécut à la Sainte, mérita de voir, dans
la célèbre vision des trois globes, quelque chose de la gloire dont jouissaient les deux Fondateurs de la Visitation.
546 Mère et sœur de l'Abbesse Angélique Arnauld.
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13.5 Page 125

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MDCXIX. A un gentilhomme (Fragment inédit).
Reconnaissance pour de bons offices
Annecy, fin février ou commencement de mars 1620547.
Monsieur,
Je me sens si extremement obligé a la faveur que vous exerces envers mon frere et moy,
que je ne sçai comme commencer ni par ou finir a vous en faire action de [156] graces. Seulement
vous supplie-je tres humblement d'accepter la veritable protestation que je fay d'en avoir un aussi
grand sentiment qu'on sçauroit desirer d'un'ame toute pleine de connoissance de son devoir, avec
un'infinie affection de correspondre par toute sorte de fidele service.
Mays, Monsieur, sera ce point offencer les termes de la civilité, si demeurant redevable du
remerciment deu a vostre548……………………………………………………………………….
Revu sur l'Autographe conservé à la Violation d'Annecy.
MDCXX. A une Religieuse de l'abbaye de Sainte-Catherine549.
Le cadran exposé au soleil. Cri de guerre de la volonté.
Un prédicateur de Carême qui réclame des prières. La pensée
du Saint sur la clôture de l'abbaye de Sainte-Catherine. Son
dévouement et son dégagement.
Annecy, fin février ou commencement de mars 1620550.
Il m'est advis que je voy vostre cœur comme un cadran qui est posé au soleil et qui ne
remue point, ains demeure immobile, tandis que l'esguille et calamite qui est dedans [157] s'agite
incessamment et, par des continuelles inquietudes, s'eslance du costé de sa belle estoile; car ainsy
vostre cœur demeurant immobile, vostre volonté tend par des bons mouvemens a son Dieu. C'est
elle qui, emmi la meslee des passions, crie tous-jours intelligiblement: VIVE JESUS! Vous aves
donq bien rayson de demeurer en paix. Ouy, demeures en paix, ma tres chere Fille, et pries Nostre
Seigneur qu'il luy plaise de s'asseoir sur mes levres comme sur son throsne pour, de la, faire bien
entendre ses volontés et ordonnances a mes auditeurs pendant ce Caresme.
547 C'est probablement parmi les gentilshommes de la cour de Turin qu'il faut chercher le destinataire, mais avancer
un nom est bien difficile.
Le présent fragment est évidemment la minute d'une de ces nombreuses «lettres de remerciement» que le
saint Evêque promet à son frère le 16 février (voir p. 137) et dont il parle encore à la Mère de Chantal le 26 (p. 152);
il doit donc dater de la fin du mois ou des premiers jours de mars.
548 La minute est laissée inachevée.
549 Le Saint s'adresse à une Religieuse de Sainte-Catherine, sa fille spirituelle, de bonne volonté, mais redoutant la
réforme. Ces traits paraissent convenir à Sœur Jeanne de la Chapelle que nous retrouverons sous ce nom et sous celui
de «Mme de Valence » parmi les correspondantes de l'Evêque de Genève.
550 L'approche de la réussite des projets du prince de Piémont pour la réforme des Monastères indique 1620 pour
millésime; en cette année, en effet, François de Sales prêcha tous les dimanches de Carême dans l'église de la Visitation
d'Annecy. (Une étude plus approfondie permet de donner comme certain ce qui était proposé en doute au tome X de
cette Edition, à la fin de la note (607), p. 181.) Or, le mercredi des Cendres tombait le 4 mars; cette lettre, la première
partie du moins, est donc des premiers jours de ce mois ou des derniers de février. Il n'est pas impossible que le texte
de 1626 soit composé de deux pièces, dont la seconde (celle qui traite de la réforme) serait d'une date postérieure et
pourrait se rapprocher de la lettre écrite à Jean-François de Sales vers le 10 juin.
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13.6 Page 126

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Il faut que je me res-jouisse avec vous de vostre petite confiance avec la chere petite
cousine551, que vrayement mon cœur ayme tendrement, comme vous. J'espere que Nostre Seigneur
la rendra fort sa servante.
Il faut que je vous die ce mot, sur l'opinion qu'on a prise que je procurois de renfermer
vostre Monastere. Quicomque me connoistra, dira tout aussi tost qu'il ne faut pas croire de moy
des duplicités. Si j'avois cette pensee, de procurer vostre enfermement, je l'aurois dit; je m'en serois
declairé, je ne dis pas a vous, qu'en vraye verité j'estime correspondre a mon affection, mais a
madame l'Abbesse552 et autres qui m'ont parlé confidemment, tant je vay loyalement en semblables
occasions. Je vous veux un jour tout dire ce que Son Altesse m'a communiqué de son dessein pour
cela, et ce que je luy ay repliqué. Vous verres si je suis doux en cela, et si c'est vous loger au
sepulchre! Non, je n'ay pas voulu, en un Monastere ou j'avois toute authorité, les enfermer, parce
que les filles n'y avoyent pas inclination; et ay tous-jours dit que ces grans traitz dependoyent de
l'inspiration et non de l'authorité exterieure, laquelle peut bien faire des enfermees, mais non pas
des Religieuses.
Soyes bien ferme a ne point mescroire de moy, ma bonne Fille, et soyes toute certaine que
je suis tout ouvert de cœur avec vous. Et pour les autres553, Dieu les assistera, [158] s'il veut que
je les serve; et s'il ne le veut pas, sa volonté soit faite554. Pourveu que sa Majesté soit glorifiee en
elles, comme je m'asseure qu'elle sera tous-jours, je seray tres satisfait, et renonceray de bon cœur
au contentement spirituel que j'esperois avoir d'estre utile a leur bien. Mon Dieu, ma chere Fille,
non seulement pour celuy la, mays pour tous les autres encor, je renonce et resigne tout mon
interest au profit de la gloire de Dieu, et prie Dieu qu'il me rende tout purement resigné moy mesme
a son amour.
……………………………………………………………………………………………………...
551 Louise de Ballon (voir tome XVII, note (761), p. 220).
552 Pernette de Cerisier sera destinataire.
553 Les Sœurs rebelles à la réforme.
554 Matt., VI, 10.
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13.7 Page 127

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MDCXXI. A un Religieux de la Compagnie de Jésus555 (Inédite).
La vocation de M. de Sonnaz. Une âme «parfaitement
bonne,» mais qui a besoin de réfléchir encore. Excellente
chose d'affranchir le collège de Chambéry des trésoriers et
financiers; comment y arriver.
Annecy, 2 mars 1620.
Mon Reverend Pere,
Je fay la response que vous me demandes sur le sujet de monsieur de Saunas556. Il vint icy
les festes de Noël, renvoyé, ainsy qu'il me dit, par son Pere confesseur qui, ne se pouvant pas bien
resoudre sur sa vocation, me l'addressa affin qu'il en conferast avec moy. Ce qu'il fit, mais en
confession, en sorte que je ne puis dire sur ce sujet que deux veritables verités: l'un'est que cett'ame
est parfaitement bonne et toute exposee a la volonté de Dieu; et l'autre, que j'ay estimé a propos de
luy donner [159] encor un peu de tems, tandis qu'elle acheve son cours de theologie, pour plus
entierement digerer ses cogitations sur le fait de sa vocation. Son confesseur, a ce qu'il m'a dit, est
un tres grand personnage, et de la Compaignie557, qui verra plus clairement a la suite ce qui sera
convenable, et en discernera mieux que je ne sçaurois faire.
Mays quant au point de procurer un benefice au college de Chamberi, jusques a la
concurrence de ce que Son Altesse contribue, affin qu'on n'ayt rien a faire avec les tresoriers et
financiers, je l'appreuverois grandement, voire mesme quand la concurrence ne seroit pas du tout
egale. Que si monsieur de Saunas ne donne pas son prieuré558, il y en a d'autres aupres de
Chamberi, comme Saint Bardot559, et quelques autres petitz qui pourroyent servir a cela. Et
pourroit ce dessein estre mesnagé sur l'erection d'un evesché a Chamberi, que Son Altesse semble
tant affectionner et qui y est si nécessaire560, et dont [160] la commodité est meilleure que jamais
tandis que M. le mareschal des Diguieres gouverne561; car la proposition d'un Seminaire estant
555 Selon toute apparence, le destinataire de cette lettre est de la Compagnie de Jésus, et du collège de Chambéry. Le
ton assez familier ferait penser au P. Nicolas Polliens, ami intime du saint Evêque. (Voir tomes XIII, note (1023), p.
380, et XIV, note (856), p. 304.)
556 Louis de Gerbais de Sonnaz sera destinataire. (Cf. tome XIII, note (908), p. 336, et voir note (558) de la page
suivante.)
557 Parmi les Jésuites qui résidaient alors au collège de la Sainte-Trinité de Lyon, il n'est guère possible d'indiquer
celui que désigne François de Sales.
558 Le prieuré de Chindrieu, dans le décanat de Ceyzérieu, était de l'Ordre de Cluny et dépendait du prieuré de Nantua.
Il existait déjà au commencement du XIVe siècle. Louis de Sonnaz le tenait en commende; il semble, d'après ce que
dit ici le Saint, avoir eu quelque velléité de le donner aux Jésuites; bientôt, il l'offrira pour l'établissement des Pères
de l'Oratoire à Rumilly; en 1630, prenant l'habit religieux à Talloires, il l'unit à ce prieuré destiné à devenir le chef de
la Congrégation des Allobroges (plus tard, de Savoie). Cette cession, plusieurs fois cassée et reconnue par Sonnaz,
par Rome et la cour de Turin, fut renouvelée en 1650 (1er février); le prieur de Nantua se départait en faveur de
Talloires de ses droits sur Chindrieu, sous la condition d'une «rente annuelle de 200 livres tournoises, ou de l'entretien
de deux» de ses moines au monastère de Talloires. Mais l'acte n'ayant pas été homologué, les contestations
recommencèrent. (Archives de la Visitation d'Annecy, Collection J. Vuÿ.)
559 «Saint Bardot» ou Saint Baldoph, dans l'ancien décanat de Savoie (diocèse de Grenoble), à quatre kilomètres de
Chambéry, sur la route des Echelles. On trouve ce prieuré mentionné dès le XIVe siècle.
560 Cette érection n'était pas moins désirée par le saint Evêque de Genève; déjà en 1612, il avait adressé un Mémoire
au Saint-Siège où il exposait les raisons qui motivaient sa requête et les vœux de toute la ville. (Voir Charles Auguste,
Histoire, etc., liv. VII, éd. de 1634, p. 423; éd. Vivès, vol. II, p. 69.) Mais la réalisation de ces vœux devait se faire
attendre longtemps encore, car l'évêché de Chambéry, suffragant de l'archevêché de Vienne, ne fut créé qu'en 1779,
par Pie VI. Supprimé pendant la Révolution, lors de la réunion de la Savoie à la France, il fut rétabli en 1802 comme
suffragant de la Métropole de Lyon. Pie VII l'érigea en archevêché en 1817.
561 Les prieurés dont on désirait l'union au collège de Chambéry, se trouvaient sur le territoire du Dauphiné que
gouvernait Lesdiguières (voir tome XII, note (183), p. 100).
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13.8 Page 128

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faite, on pourra faire aysement entrer en propos l'entretenement de quelques Peres pour la conduite
d'iceluy.
Je vous salue tres humblement, mon Reverend Pere, et suis a jamais
Vostre tres humble et tres affectionné
confrere et serviteur,
FRANÇS, E. de Geneve.
2 mars 1620.
Revu sur l'Autographe appartenant à la famille d'Epenoux,
au château d'Epenoux (Haute-Saône).
MDCXXII. Au duc de Savoie, Charles-Emmanuel Ier562.
Reconnaissance impuissante à s'exprimer.
Annecy, 6 mars 1620.
Monseigneur,
Je ne me puis taire sur la nomination de mon frere a ma coadjutorie, car les grans coups de
faveur, comme ceux de la douleur, excitent qui que ce soit a parler; et si, je ne puis rien dire a
Vostre Altesse sur ce sujet, qui ne soit grandement au dessouz de mon sentiment. Et pour cela je
me contenteray de luy en faire tres humblement la reverence et l'asseurer que, comme elle pouvoit
gratifier grande multitude de gens de plus de merite, aussi n'eut elle peu en regarder de plus de
fidelité et d'obeissance [161] que mondit frere et moy, qui ne cesseray jamais de louer Dieu de
quoy il m'a rendu, par tant de devoirs,
Monseigneur,
Tres humble, tres obeissant et tres fidele orateur
et serviteur de Vostre Altesse Serenissime,
FRANÇS, E. de Geneve.
VI mars 1620, Annessi.
Revu sur l'Autographe conservé à Turin, Archives de l'Etat.
562 La formule finale, plus respectueuse et cérémonieuse, fait penser que, contrairement aux indications des éditions
antérieures, cette lettre s'adresse au duc de Savoie, et la suivante, plus développée, au prince de Piémont.
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13.9 Page 129

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MDCXXIII. Au Prince de Piémont, Victor-Amédée. Délicat
remerciement pour la nomination de Jean-François de Sales
comme coadjuteur
Annecy, 6 mars 1620.
563Monseigneur,
Les faveurs les moins meritees sont a la verité les moins honnorables, mais elles sont aussi
les plus obligeantes; et quand elles viennent d'un haut lieu et d'une main souveraine, elles sont
estimees parfaites, et ostent a ceux qui les reçoivent le pouvoir d'en faire des dignes actions de
[162] graces. Pour cela, Monseigneur, je ne destine pas ces lignes au tres humble remerciment que
je devrois faire a Vostre Altesse pour la grace qu'il luy a pleu d'exercer envers mon frere et moy,
le nommant a ma succession en cet Evesché; mais je luy en fay seulement tres humblement la
reverence, pour tesmoignage qu'en cette nouvelle obligation je renouvelle et confirme l'hommage
et la fidele obeissance que je doy a la bonté de Vostre Altesse, la suppliant en toute humilité de
continuer, comme ell'a commencé, de me proteger tous-jours avec mes freres sous la douceur de
sa debonnaireté, puisque nous ne respirerons jamais si cherement et cordialement autre chose
quelcomque de ce monde, que l'inviolable devoir par lequel nous sommes si heureux que d'estre
et vivre en la sujettion de Vostre Altesse, a laquelle souhaitant incessamment le comble de toute
sainte prosperité, je suis,
Monseigneur,
Tres humble, tres fidele, tres obligé et tres obeissant
orateur et serviteur,
FRANÇS, E. de Geneve.
6 mars 1620, Annessi.
Revu sur une copie déclarée authentique, conservée à Turin, Archives de l'Etat.
563 [Une minute inédite de cette lettre, écrite de la main de M. Michel Favre, se conserve à la Visitation d'Annecy. En
la reproduisant ci-dessous intégralement, nous maintenons l'orthographe du secrétaire.]
Monseigneur,
Les faveurs les moins esperees et moins meritees sont tousjours les plus grandes; mais quand elles viennent
d'un haut lieu et sont departies par une main relevee, elles sont demesurement obligeantes et ostent tout pouvoir a ceux
qui les reçoivent d'en faire des dignes remerciemens. C'est pourquoy, Monseigneur, je ne veux pas entreprendre de
faire aucunes actions de graces a Vostre Altesse pour celles dont ell'a gratifié mon frere et moy, le nommant pour me
succeder en cette Evesché; mais je ne puis pourtant que je ne face une tres humble reverence a V. A., [protestant] pour
tesmoignage qu'en cett'occasion je confirme et renouvelle l'invariable protestation et recognoissance de ma tres
humble obeissance envers elle, la suppliant qu'il luy plaise, comme ell'a commencé, de nous proteger, et le reste de
nostre maison, sous la douceur de sa bonté; puisque aussy, toutes les heures de nostre vie sont destinees au devoir par
lequel, Monseigneur, nous sommes si heureux d'estre
Vos tres humbles, tres obeissans et tres fideles [vassaux,]
orateurs et serviteurs.
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13.10 Page 130

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MDCXXIV. A la Princesse de Piémont, Christine de France
(Minute). Les faveurs considérées en ceux qui les donnent et en
ceux qui les reçoivent. Ce que la princesse a dû voir dans le
cœur de François de Sales et dans celui de son frère
Annecy, 6 mars 1620564.
Madame,
Si vous mesures vos faveurs a ce que Dieu a voulu que vous fussies, il n'y en aura jamais
de trop grandes; mays [163] si elles sont balancees avec le merite de ceux qui les reçoivent, celle
dont il vous a pleu de gratifier mon frere et moy, en la nomination faite par Son Altesse, sera sans
doute des plus excessives, et faudra advoüer, Madame, qu'elle n'a nul fondement qu'en la grandeur
de vostre bonté; sinon que, parmi plusieurs graces de Dieu, vous aves encor celle la de connoistre
les cœurs, et que dedans les nostres Vostre Altesse ayt regardé l'incomparable passion que Dieu
mesme y a mise, pour nous rendre infiniment dediés a vostre service et nous faire resigner a jamais
a l'obeissance de vos commandemens: car en ce cas, Madame, s'il vous a semblé bon de mettre en
consideration nostre tres humble sousmission, Vostre Altesse aura bien eu quelque sujet de nous
departir ce bienfait, duquel je luy rens tres humbles graces.
Et luy en faysant reverence avec un extreme respect, je prie la divine Majesté qu'elle
comble la royale personne de Vostre Altesse de l'abondance de ses benedictions, qui suis,
Madame,
Vostre tres humble, tres obeissant et tres fidele
orateur et serviteur,
FRANÇS, E. de Geneve.
Le.. mars 1620.
MDCXXV. A la Mère Claudine de Blonay, abbesse de Sainte-
Claire d'Evian565 (Inédite). Les Clarisses d'Evian en inquiétude
sur un prétendu départ du saint Evêque. Voyage très assuré que
celui-ci recommande à leurs prières.
Annecy, 14 mars 1620.
Demeurés en paix, ma tres chere Seur, et ne croyes point que j'aille ni en Espagne ni
ailleurs, au moins ny [164] a-il nulle apparence de cela; et j'espere que j'auray le contentement de
vous rendre quelque service pour vostre logement566 avant mesme que j'aille en l'autre monde, qui
est le plus long et le plus esloigné, comm'aussi le plus asseuré de tous les voyages que j'aye a faire,
et lequel je vous supplie tous-jours de recommander et faire recommander a Dieu par vos cheres
Filles, affin quil me soit heureux. Et croyes, je vous supplie, que si vous m'aymés toutes, je vous
cheris aussi d'une dilection tres entiere, et ne cesse point de souhaiter que vous abondies en toute
sainteté.
Je suis donq, ma tres chere Seur, et de vous et de toutes vos Filles bienaymees,
564 L'édition de 1626 date cette minute du 20 mars, mais il est permis de croire que c'est une erreur; la lettre pour la
princesse de Piémont dut partir avec celles du 6 mars à Charles-Emmanuel et à Victor-Amédée.
565 Voir tome XVI, note (659), p. 206.
566 Voir ci-dessus, p. 85, Lettre MDLXXXI.
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14 Pages 131-140

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14.1 Page 131

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Vostre tres humble frere et serviteur,
F., E. de Geneve.
XIIII mars 1620.
A ma tres chere Seur en N. S.,
La Rde Mere Abbesse de Ste Claire d'Evian.
Revu sur l'Autographe appartenant à Mme la générale Joppé, à Reims.
MDCXXVI. Au Président François de Tardy567. Bon droit des
Religieux de Sixt et grande misère des habitants du pays.
Annecy, 18 mars 1620.
Monsieur,
Outre que les venerables Religieux de Six, pour leur bonne vie et affection a la reformation,
meritent d'estre [165] protegés, l'affaire qu'ilz ont maintenant prenant son origine en partie de la
visite que j'y ay faite568, et en laquelle je puis bien prendre Dieu mesme a tesmoin d'avoir eu
seulement son service en veüe, et en laquelle, de plus, je n'ay presque rien ordonné qu'apres avoir,
par raysons, tiré le consentement amiable des parties, je me sens obligé de faire avec lesdits
Religieux une mesme supplication aupres de vous, affin qu'il vous playse de les favoriser en la
conservation de leur bon droit; en quoy vous feres chose grandement aggreable a Nostre Seigneur
et qui m'obligera extremement, qui suis a jamais,
Monsieur,
Vostre serviteur tres humble,
FRANÇS, E. de Geneve.
XVIII mars 1620, Annessi.
Monsieur, les habitans de Six, pour leur grande misere, sont dignes de compassion, et, pour
leur pieté, sont dignes d'estre affectionnés; c'est pourquoy je ne fay point de difficulté de vous
supplier tres humblement de leur departir vostre justice et faveur en la conservation de leurs bons
droitz569.
570A Monsieur
Monsieur de Tardy, Conseiller d'Estat de S. A.,
President au souverain Senat de Savoye.
567 François de Tardy, fils de noble Benoît de Tardy, procureur patrimonial à la Chambre des Comptes, et de Jeanne-
Françoise de Launay. Sénateur le 31 mai 1615, puis conseiller d'Etat, il fut reçu quatrième président au Sénat le 6 juin
1617, nommé premier président de la Chambre des Comptes de Savoie par patentes du 12 septembre 1631, et remplacé
en cette charge le 23 août 1635. Sa femme était Pernette Bovier; elle vivait encore en 1632. (D'après des Notes de M.
le comte de Mareschal de Luciane; Mugnier, Reg. des Entrées du Sénat; Carutti, Cariche del Piemonte, etc., Torino,
1798, tome I.)
568 Le 12 septembre 1618 (voir le tome précédent, note (301), p. 82). Des contestations s'étaient élevées entre l'Abbé
commendataire, Jacques de Mouxy, et les Religieux qui désiraient la réforme; les procès s'ensuivirent. Pour terminer
le différend, l'Evêque de Genève dut aller de nouveau à Sixt au mois de novembre 1620; il se fit accompagner par
deux jurisconsultes, Michel Bouvard et Jacques Despine. Sa douceur, son art de gagner les esprits, mieux que les
formules de droit, réussirent à ramener la paix et la concorde. L'Abbé rendit justice aux Chanoines, et plus encore, se
rendit justice à lui-même en faisant à François de Sales une confession générale peu de jours avant sa mort. (Cf. tome
XIII, note (462), p. 169.)
569 Ce n'était pas la première fois que l'Evêque s'intéressait à ses pauvres enfants de Sixt: il avait obtenu pour eux, en
1611, l'acquittement des tailles (voir tome XV, note (301), p. 103); peut-être était-ce la continuation de ce privilège
que l'on voulait sauvegarder.
570 L'adresse est écrite par un secrétaire.
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14.2 Page 132

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Revu sur l'Autographe conservé à la Visitation d'Annecy. [166]
MDCXXVII. A M. Montenet571. Une promesse fidèlement tenue.
Réciprocité d'honneur et d'affection.
Annecy, 21 mars 1620.
Monsieur,
Cette bonne Seur Jeanne572 m'a souvent dit que vous conservies tous-jours quelque
souvenance de moy, continuant a m'aymer, ainsy que vous me promistes la derniere fois que j'eu
le bien de vous voir. Et j'ay un si grand playsir de sçavoir cela, que je n'ay pas voulu laisser partir
cette Seur Jeanne sans luy donner ce billet, par lequel je vous remercie de tout mon cœur et vous
asseure que reciproquement je vous honnore passionnement, et voudrois bien estre si heureux que
de vous rendre quelque service. Mays cependant, je vous souhaite toute sainte benediction, et a
madamoyselle Montenet vostre femme, que je salue cordialement, et suis, Monsieur,
Vostre bien humble serviteur en Nostre Seigneur,
FRANÇS, E. de Geneve.
XXI mars 1620, Annessi.
A Monsieur Montenet.
Revu sur l'Autographe appartenant à M. Parraud, à Frontenay (Jura). [167]
571 Hérissant (tome IV, p. 212) ajoute à l'adresse de cette lettre le titre de procureur fiscal à Salins. Ces mots ne se
trouvent pas aujourd'hui sur l'Autographe; mais il y a lieu de croire qu'ils ne sont pas une invention de l'éditeur de
1758, et qu'ils devaient se lire dans une note jointe à la lettre. Deux pièces des Archives du Doubs (B. 0986 et 1857)
signalent en 1608 le «sieur Claude Montenet le jeune, libellance (greffier) du baillage d'Aval au siege de Salins;» son
acte de baptême, du 24 octobre 1568, inscrit dans les Registres de la paroisse Saint-Anatoile, nous apprend le nom de
son père, Claude Montenet, et le prénom de sa mère, Anne. Une lacune dans les Registres des mariages de Saint-
Anatoile, de 1589 à 1613, et l'absence d'indications dans ceux des autres paroisses ne nous permettent pas de connaître
la femme de Claude le jeune. Un de ses contemporains, son parent sans doute, Pierre Montenet, avait épousé
Gabrielle Gallet, de Salins; celle-ci était décédée le 19 avril 1627, date du mariage de sa fille. (Note de M. de Lurion,
érudit franc-comtois.) L'un ou l'autre doit être le correspondant du Saint.
572 Impossible de donner quelques renseignements sur elle.
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14.3 Page 133

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MDCXXVIII. A M. Claude de Blonay. Suspendre une
nomination jusqu'à l'arrivée d'un Bref de Rome. Regrets du
départ d'un ecclésiastique
Annecy, 27 mars 1620573.
Monsieur,
J'attens tous les jours un Brief du Pape, que mon frere m'escrit avoir veu entre les mains de
Monseigneur le Nonce, par lequel je suis commis pour ranger au meilleur ordre qu'il se pourra
toutes affaires de la Sainte Mayson574; et je vous prie que l'on attende jusques a ce tems la de
remplir la place que monsieur Thomas laisse, lequel il me fait mal de voir partir de ce diocese,
pour la vertu qu'il a tous-jours tesmoignee575, bien que d'ailleurs [168] je suis grandement consolé
qu'il aille en la vigne de Lyon, qu'on me dit avoir tant besoin de cultivateurs.
Je suis, Monsieur,
Vostre tres humble confrere,
FRANÇS, E. de Geneve.
Monsieur de Boys576 m'a dit que je ne pouvois faire autre decret sur la requeste de monsieur
Bidal577.
A Monsieur de Blonnay,
Prefect de la Ste Mayson de Thonon.
Revu sur une copie déclarée authentique, conservée à Turin, Archives de l'Etat.
573 Le 27 mars 1620, Jean-François de Sales était à la cour de Turin. A partir du 8 mars de cette même année, la
signature de Thomas Maupeau, prêtre et membre du Conseil de la Sainte-Maison de Thonon, très fréquente depuis
1613 dans les Registres paroissiaux, disparaît complètement. C'est la double raison de la date de 1620 que nous
ajoutons au quantième porté par la copie de cette lettre.
574 Ce Bref est daté du 30 août 1619 (voir à l'Appendice I). Par une lettre du 25 juillet 1620, du cardinal Borghese, on
peut conjecturer que des obstacles durent s'opposer à son exécution immédiate. «Nous apprenons avec satisfaction,»
écrit-il au Nonce de Savoie, Pierre-François Costa, «que V. S. a surmonté les difficultés qui avaient surgi au sujet de
la visite de la Sainte-Maison de Thonon qui doit se faire par l'Evêque de Genève, et que, grâce à l'autorité du Prince,
tout a bien réussi. Je suis sûr que l'Evêque fera son devoir en cette visite.» (Archiv. Vaticanes, Nunz. di Savoia, vol.
40.) Saint François de Sales ne put exécuter la commission reçue qu'à la fin de mai de l'année suivante.
575 Thomas Maupeau était né à Genève de parents hérétiques; il lui fallut donc, après avoir été converti par le Saint,
une dispense pour être ordonné prêtre, le 4 avril 1609. Dès 1602, un Thomas Maupeau est inscrit au Registre de Notre-
Dame de Compassion avec la qualité de «serviteur de la Sainte Mayson;» nous pensons que c'est le même personnage,
malgré la différence d'écriture qu'on remarque entre cette première signature et celles apposées plus tard aux Registres
paroissiaux de Thonon (voir note (573) ci-dessus). Lorsqu'il quitta cette ville, «monsieur Thomas» ne dut pas rester
longtemps dans le diocèse de Lyon, car le 3 décembre 1622 on le voit pourvu de la cure de Larringes où il vivait
encore en 1637. (R. E., etc.)
576 Selon toute vraisemblance, il s'agit de «noble et spectable François des Bois,» fils de Claude, et seigneur de la
maison-forte des Bois. Docteur en droit et avocat au souverain Sénat de Savoie depuis 1609, il fut élu premier syndic
d'Annecy en 1615 et de nouveau le 1er mai 1620. (D'après les Reg. des Délib, municip., et Mugnier, Reg. des Entrées
du Sénat, p. 76.)
577 Si «monsieur Bidal» est un ecclésiastique, comme il paraît probable, on peut proposer André, né à Evian, ordonné
prêtre le 9 juin 1612 et décédé en 1623. (R. E.)
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14.4 Page 134

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MDCXXIX. A la Mère Rosset, Supérieure de la Visitation de
Bourges. Décision au sujet de la réception d'une Sœur. — Le
Fondateur revise les Règles de son Ordre
Annecy, 27 mars 1620.
Ma tres chere Fille,
Ce billet que j'arrache de force d'entre un accablement extreme, n'est que pour vous dire
que cette bonne fille de laquelle vous m'escrives, ayant esté des premieres de cette Mayson la, et
estant de si importante consideration, comme vous me dites, pour tenir en paix cette bonne dame
et plusieurs personnes apparentes, je croy qu'il la faut recevoir a la Profession, puisque mesme il
n'y a point d'obstacles de consequence; et j'espere que cette feminine tendreté sur elle mesme se
passera petit a petit. [169] Elle pourra estre des Seurs Associees, qui sont l'objet de la plus parfaite
charité qu'on puisse exercer, ce me semble, en attendant que, le courage luy venant, elle puisse se
rendre un peu sujette au chœur. En un mot, il faut exercer une franche et suave charité envers son
esprit, et estimer que Dieu a voulu qu'elle fust la a cet effect578.
Je revoy les Regles et les Constitutions et les Formulaires579, ou j'ay treuvé de grans
manquemens, tant en l'impresse qu'es escritz, que je repare; et mettray ces benitz vœux si
expressement, que ce sera asses pour tout le monde affin qu'il demeure en repos580.
O ma tres chere Fille, je vous escriray de rechef bien tost, mais j'ay creu que je ne devois
pas tarder davantage de faire ce billet. Je salue vostre cœur de toute l'affection du mien, et suis
parfaitement vostre. Je salue nos cheres Seurs. Dieu soit loüé. Amen.
27 mars 1620.
Revu sur la copie faite par la Mère Rosset, conservée à la Visitation d'Annecy. [170]
MDCXXX. A la Mère Favre, Supérieure de la Visitation de
Lyon. Accablement d'affaires. Lettres recommandées.
Nombreuses demandes de fondations de la Visitation.
trouver des filles? Confiance en Dieu
Annecy, 27 mars 1620.
Ma tres chere Fille,
Ce garçon est venu en un tems auquel je n'ay, pour tout, sceu le depeseher que ce matin,
27 du moys, accablé, je vous asseure, d'affaires si pressantes que je n'ay peu m'en eschapper. Je
578 D'après une lettre de la Mère de Chantal du 7 avril 1620 (vol. I, p. 394, revue sur l'original), la Novice dont le saint
Evêque parle ici serait Sœur Marie-Françoise Thibaut (voir le tome précédent, note (1133), p. 346). Nous la croyons
fille de François de Thibaut, seigneur de Villegenon, et de Jeanne de Rochechouart, par conséquent nièce de Mme de
Jars qui doit être «la bonne dame» qu'il faut «tenir en paix.» (Voir ci-dessus, note (190), p. 43.)
579 Les Formulaires pour la réception à l'habit et à la Profession.
580 On tracassait à Bourges, à ce sujet, et la sainte Fondatrice écrivait à la même époque à la Mère Rosset: «Le monde
est admirable en ses sagesses. Quoi! des Religieuses formelles, sous la Règle Saint-Augustin, qui font les trois vœux
essentiels, ne sont pas liées? est-ce la façon de les prononcer qui les fait solennels? n'est-ce pas la déclaration qu'en a
faite l'Eglise?» (Lettres, vol. I, p. 399; voir encore ci-après, la lettre du 5 ou 6 juillet à la Mère de Chantal.)
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14.5 Page 135

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vous supplie de donner seure addresse aux lettres de Paris, et de recommander a nostre Seur de
Moulins581 celle de Bourges582 qui importe a la Superieure de ce lieu la.
Quant a Clermont, je treuve vostre response toute bonne, puisque vous aves des filles pour
fournir cette Mayson la583. Mais y auroit il encor, outre cela, une fille pour estre Superieure ou
Maistresse des novices? car je voy que de toutes partz on demande des Maysons; et voyla que celle
de Turin se va dresser, ou il en faudra bien, tant pour la qualité du païs que pour satisfaire a
Madame584. Or, Dieu fera des filles, quand il les devroit tirer des pierres585, et donnera l'esprit de
gouvernement a mesure qu'il voudra multiplier les Maysons.
Ma tres chere Fille, je suis uniquement vostre. J'ay grand desir de sçavoir ce que
Monseigneur l'Archevesque fera pour l'execution du Bref Apostolique586, et espere [171] que
l'humilité et douceur ne vous manqueront pas en toutes occurrences.
Je salue cherement nos Seurs, et tres uniquement vostre cœur, ma tres chere Fille. Amen.
XXVII mars 1620.
A ma tres chere Fille en N. S.,
Ma Seur Marie [J.] Favre, Superieure.
MDCXXXI. A la Mère de Chantal, a Paris (Fragment). La
coadjutorerie de Jean-François de Sales est uniquement l'œuvre
de Dieu
Annecy, mars 1620587.
……………………………………………………………………………………………………..
Vous me croires bien, ma tres chere [Mère], quand je vous diray simplement que la
nomination de mon frere a la coadjutorie est si clairement une œuvre de Dieu, que je n'en ay jamais
dit ni escrit une seule parole, ni mendié ni procuré aucune recommandation. La faveur est toute
entiere de la part de nos Serenissimes Princes et de l'absolue volonté de Madame; et ce procedé
me console, n'y voyant rien du mien ni rien d'humain.
………………………………………………………………………………………………[172]
581 La Mère Jeanne-Charlotte de Bréchard.
582 Epist. praeced.
583 Ce Monastère, dont il était question depuis 1617 (cf. le tome précédent, Lettre MCCCLXXXIII, p. 137), ne s'établit
cependant qu'en 1649.
584 Voir ibid., notes (607), p. 177, et (691), p. 204. Christine de France donnait les mains au projet de fondation, mais
on sait déjà combien il fut retardé.
585 Matt., III, 9.
586 Mgr Denis-Simon de Marquemont, persuadé que le Bref d'érection de la Visitation en Ordre religieux, donné le 23
avril 1618 (voir le tome précédent, note (999), p. 302), concernait seulement le Monastère d'Annecy, en sollicita un
autre pour les Maisons de Lyon et de Moulins, par une supplique qui reçut l'agrément du Pape le 12 avril 1619. Deux
Brefs furent expédiés: l'un à l'Archevêque de Lyon, l'autre à l'Evêque d'Autun de qui dépendait la Visitation de
Moulins. Bien que les minutes gardées aux Archives Vaticanes (Arm. XLII, tom. 55, fol. 121) ne portent pas de date,
il est probable que les documents pontificaux n'arrivèrent à leur destination qu'à la fin de 1619 ou au commencement
de 1620; Mgr de Marquemont exécuta le Bref dans le courant de cette année.
587 Il suffit de lire les lettres du 26 février et de la fin d'avril à la Mère de Chantal pour être convaincu que les présentes
lignes appartiennent à un courrier intermédiaire.
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14.6 Page 136

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MDCXXXII. A un ami (Fragment inédit). Un mot de l'âme du
Saint
Annecy, [vers la fin de mars] 1620588.
Nous sommes icy sans nouvelles, car elles sont toutes en Piemont maintenant, avec cette
ample et grande cour que les noces y maintiennent. Pour moy, je n'y suis nullement, non pas mesme
par la pensee, car mon ame est toute contournee a la vie contraire, et ne sçauroit s'amuser a la
consideration d'un objet qui luy revient si peu.
……………………………………………………………………………………………………...
Revu sur le texte inséré dans le Ier Procès de Canonisation. [173]
MDCXXXIII. A Madame du Tertre. La mue du serpent; sa
transformation en colombe. Ne pas regarder en arrière.
Condescendance et humilité du Fondateur. Suivre les
inspirations d'En-haut et laisser faire à Dieu. Quel soin il faut
avoir de la créature nouvelle, née du Saint-Esprit
Annecy, fin mars ou avril 1620589.
C'est la verité, ma tres chere Fille, que mon ame vous cherit tres parfaitement; et m'est
impossible, quand je pense en vous, qui n'est pas peu souvent, que je ne ressente un eslan
d'affection fort particuliere.
Or sus, il falloit bien que le serpent se fourrast de force dans l'aspreté de la pierre pour se
desfaire de sa vielle peau et se rajeunir heureusement590, affin d'estre transformé en colombe. Dieu
soit loué, ma tres chere Fille, que vous aves souffert les tranchees d'un accouchement quand vous
vous estes enfantee vous mesme a Jesus Christ! Marches maintenant saintement et soigneusement
en cette nouveauté d'esprit591, et gardes bien de regarder en arriere, car il y auroit un extreme
danger; et benisses la divine Providence qui vous avoit preparé une nourrice si aymable. O que
Dieu est souverainement bon et gratieux, ma tres chere Fille! Certes, j'ay eu un contentement
incroyable a voir comme il vous a conduitte en l'abondance de son amour. Hé! ne l'abandonnes
donq jamais, et donnes toute liberté a vostre cœur de s'unir et serrer invariablement a son bon
playsir, car il est fait pour cela.
588 Nous extrayons ce fragment de la déposition de M. Michel Favre (Process. remiss. Gebenn. (I), ad art. 41), qui le
cite comme écrit par le Saint à «un sien amy.» Parmi les amis de l'Evêque s'intéressant aux nouvelles de Savoie, on
peut proposer Rousselet ou Malarmay, ou encore des Hayes, mais il faut exclure Foras (voir ci-après, Lettre
MDCXXXV). A Mgr Fenouillet, les réflexions intimes n'accompagnent pas d'ordinaire la communication des
événements divers.
L'hiver ayant été assez rude, le prince et la princesse de Piémont s'arrêtèrent longtemps à Rivoli, dans la villa
du Cardinal Maurice, et les fêtes en l'honneur de leur mariage ne commencèrent à Turin que le 15 mars 1620. De là,
notre date approximative.
589 La lettre de la Mère de Chantal à la même destinataire et sur le même sujet est du 24 mars (Lettres, vol. I, p. 392);
celle-ci ne doit donc pas être éloignée de cette date.
590 Cf. Arist., Hist. Animal., 1. VIII, c. XVII; Vincent. Bellov., Speculum Naturœ, 1. XX, cc. V-VII.
591 Rom., VI, 4, VII, 6.
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14.7 Page 137

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Que cette chere Mere soit Superieure, j'y consens sans difficulté592; mays que cela se puisse
faire si absolument [174] comme vous m'en parles, je n'en sçay pas les moyens, ni il ne dependra
pas de moy, qui suis fort peu de chose icy et rien du tout ailleurs: seulement je repete que pour
mon consentement je le donne, et contribueray, de plus, ce que je pourray bonnement faire a vostre
intention.
Mais, ma tres chere Fille, ne sommes nous pas enfans, adorateurs et serviteurs de la celeste
Providence et du cœur amoureux et paternel de nostre Sauveur? n'est ce pas sur ce fonds sur lequel
nous avons basti nos esperances? Faites ce qu'il vous a inspiré pour sa gloire, et ne doutés
nullement qu'il ne face pour vostre bien ce qui sera le meilleur. Ne capitulons point avec luy: il est
nostre Maistre, nostre Roy, nostre Pere, nostre Tout; pensons a le bien servir, il pensera a nous
bien favoriser.
Donq, ma Fille, pour conclure, je feray pour vostre petit contentement tout ce que je
pourray, qui est peu; de dela, je m'asseure qu'on fera de mesme; mais au Ciel on fera tout, on vous
comblera de consolations par les moyens que la Sagesse supreme connoist et void, et que nous ne
sçavons pas.
Demeures en paix, nourrisses amoureusement soigneusement et fidelement cette nouvelle
enfant Aymee que vostre ame a nouvellement enfantee au Saint Esprit, affin qu'elle se fortifie en
sainteté et qu'elle croisse en benedictions, pour estre a jamais aymee du Bienaymé. Que vous puis
je desirer de plus, ma tres chere Fille?
Je suis tout a fait, je vous asseure,
Vostre tres humble serviteur en Nostre Seigneur,
FRANÇS, E. de Geneve. [175]
MDCXXXIV. A la Mère de Chastel, Supérieure de la Visitation
de Grenoble (Inédite). Des raisons qui ne satisfont pas l'esprit de
François de Sales. Les prétentions de M. d'Ulme. On ne peut
lier la liberté pour le choix ou le changement des Pères
spirituels. Salutations affectueuses. Disette de Supérieures
pour de nombreuses fondations
Annecy, 2 avril 1620.
Je suis certes marri, ma tres chere Fille, que nostre bon monsieur d'Ulme se retire ainsy593;
les raysons qu'il allegue ne sont pas selon le goust de mon foible esprit. Si Monseigneur de
Grenoble594 l'eut commis pour faire l'office de Pere spirituel, je l'eusse treuvé bon; mays cela ne
l'eut pas contenté, car je voy que tous-jours il eut volu estre en asseurance de parti, ce qui ne se
peut ni doit faire, a cause de la consequence.
595On ne doit pas estre variable a vouloir changer, sans grande rayson, de confesseur, mays
on ne doit pas aussi estre tout a fait invariable, y pouvant survenir des causes legitimes de
changement; et les Evesques ne se doivent pas lier les mains, qu'ilz ne peussent, quand il sera
592 Mme du Tertre ayant voulu se rendre fondatrice et Religieuse du Monastère de Nevers, exigeait que la Mère Jeanne-
Charlotte de Bréchard en fût Supérieure. (Voir à l'Appendice III le récit abrégé de cette fondation et des contradictions
qui l'accompagnèrent.)
593 Voir le tome précédent, note (845), p. 248, et ci-dessus, Lettre MDCXIV, p. 145.
594 Alphonse de la Croix de Chevrières (voir le tome précèdent, note (687), p. 203).
595 La phrase suivante termine dans toutes les éditions antérieures la lettre du 14 janvier 1620 à la même destinataire.
(Voir ci-dessus, note (406), p. 110.)
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14.8 Page 138

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expedient et sur tout quand les Seurs de commun sentiment le requerront, changer de Pere spirituel.
Et je croy bien que jamais rien ne fut survenu du costé de monsieur d'Ulme qui eut apporté du
changement, mais tous-jours ne pouvoit on pas donner une totale asseurance. Vostre Mayson sera
tous-jours obligee a l'honnorer et respecter et a prier Dieu pour luy. J'appreuverois que le chapelain
fut confesseur, car autrement il y auroit et des grans fraitz et des grandes incommodités. [176]
Salués cherement nostre tout uniquement bienaymee seur Mme de Granieu, et M.
d'Aouste596 que j'honnore parfaitement en mon ame, et toutes nos cheres Seurs.
Vive Jesus! Amen.
A madame de Veycelieu, mille et mille salutations; sa niece est une fille tres bonne et a un
cœur bien conditionné597.
On demande force Maysons en France; mais on a peine de treuver suffisamment de
Superieures598.
2 avril 1620.
A ma tres chere Seur en N. S.,
Ma Seur Per. Marie de Chatel, Superieure a Ste Marie.
Grenoble.
La chere seur est tres bonne, et je croy quelle reuscira grandement599.
Revu sur l'Autographe conservé à la Visitation d'Annecy.
MDCXXXV. A M. Guillaume de Bernard de Foras600.
Délicatesse dans le silence. L'ordinaire méthode de la
Providence divine. Véritable marque de la bénédiction de
Dieu sur un mariage. Conserver son bonheur et laisser parler
le monde.
Annecy, 8 avril 1620.
Monsieur mon tres cher Frere,
Ne prenes pas garde, je vous supplie, a ce que j'ay tant tardé de vous escrire, car vous auries
grand tort si vous [177] pensies que pour cela j'aye jamais cessé de vous cherir et honnorer
tendrement et tres partialement, et d'autant plus, certes, que je vous sçavois estre en peine sous la
persecution que l'on faysoit a vostre personne et a mon nom601; mais j'avois quelque desfiance que
mes lettres n'eussent pas esté ni utiles ni a propos, si l'on eust sceu que vous les eussies receuës.
Or, laissons cette pensee, et pour moy j'ay tous-jours esperé que vostre mariage reüsciroit
grandement heureux en son progres, cette entree ayant esté si fascheuse; car c'est une des ordinaires
methodes dont la providence de Dieu use en ce qu'elle destine a sa gloire, de faire naistre les
espines avant les roses.
596 Artus de Lionne (voir le tome précédent, note (827), p. 240), cousin de Mme de Granieu.
597 La nièce de Mme de Veyssilieu, Marguerite de Rigaud de Rajat, était à la veille de prendre l'habit religieux. (Voir
ci-dessus, note (509), p. 143.)
598 Cf. Lettre MDCXXX, p. 171.
599 L'aimable Saint a écrit en deux petites lignes au-dessous de l'adresse les nouvelles de Sœur Claude-Cécile de
Chastel, propre sœur de la Supérieure de Grenoble. (Cf. ci-dessus, p. 145.)
600 Le Gentilhomme que les éditions précédentes ne nomment pas est clairement désigné par l'allusion aux persécutions
suscitées contre lui et contre le Saint, à l'occasion de son mariage.
601 Voir ci-dessus, pp. 32, 58, 79, et les Lettres MDLXXV-MDLXXVIII, MDCII.
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14.9 Page 139

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On m'escrit que vostre amitié nuptiale est si entiere et parfaite que rien plus: et n'est ce pas
cela la veritable et certaine marque de la benediction de Dieu sur un mariage? Et ce que Dieu benit,
qu'importe-il que les hommes le censurent? Continues seulement en cette benediction, et
nourrisses soigneusement ce bonheur par une perseverante fidelité au service de la divine Majesté;
et que tout le monde parle tant qu'il voudra. Mays on me dit que tous ces messieurs les parens
commencent fort a s'apayser, et je le croy aysement; car en fin ilz ouvriront les yeux, et verront
que la volonté de Dieu doit estre adoree en tout ce qu'elle fait, et qu'elle a fait cette liayson de sa
sainte main.
Je finis donq, vous asseurant que je suis sans fin,
Monsieur mon tres cher Frere,
Vostre tres humble et tres affectionné frere
et serviteur,
FRANÇS, E. de Geneve.
Le 8 avril 1620. [178]
MDCXXXVI. A Madame de Villesavin602 (Inédite). La préface
d'une grande lettre. Quelle est la meilleure marque de la
dilection de Dieu pour ses enfants. Salutations à une petite
fille.
Annecy, 9 avril 1620.
603Ces quattre lignes suffiront, ma tres chere Fille, pour servir de preface a une plus grande
lettre que je me sens obligé de vous escrire, pour reparer le manquement que j'ay fait de vous
rendre ce devoir des mon arrivee en ce pais, ou je vous supplie de croire que vous estes toute
presente a mon esprit, qui ne finira jamais de cherir infiniment le vostre et luy souhaiter toutes les
plus favorables benedictions de Nostre Seigneur, et particulierement un continuel progres en
l'amour celeste qui seul peut assoüir vos affections.
J'ay loué sa divine Majesté quand j'ay sceu que vous esties acouchee heureusement apres
tant de maux et de peines604, par lesquelles la divine Providence vous veut associer a sa croix, qui
est la plus estimable marque de sa dilection parmi ses enfans. C'est un vray martire, ma tres chere
Fille, de souffrir beaucoup pour la volonté de Celuy a qui nous avons voué la nostre, et qui nous a
tant aymé quil a volu mourir pour nous605.
Je vous demande permission de saluer en ce petit bout de lettre ma tres chere petite fille
madamoyselle Anne, qui, je m'asseure, est encor plus devote que belle606. [179]
Dieu soit a jamais au milieu de vostre cœur, ma tres chere Fille, et je suis tout a fait en luy,
Vostre tres humble et tres affectionné serviteur,
FRANÇS, E. de Geneve.
9 avril 1620.
602 Isabelle Blondeau, dame de Villesavin (voir le tome précédent, note (1240), p. 384).
603 Voir le fac-simile placé en tête de ce volume.
604 Dans une lettre postérieure, le Saint nomme deux filles de Mme de Villesavin: Anne et Angélique. Cette dernière
serait-elle l'enfant née dans les premiers mois de 1630? Elle dut entrer dans un monastère ou mourir jeune, car son
nom ne se trouve pas dans les généalogies des Phélipeaux.
605 Galat., II, 20; Ephes., V, 2.
606 Anne naquit vers 1612 et se maria en 1627 à Léon Bouthillier, seigneur de Chavigny (cousin-germain du célèbre
abbé de Rancé), dont le génie pour les affaires fut deviné par Richelieu, et qui mérita, ainsi que son père Claude, d'être
désigné dans le testament de Louis XIII pour faire partie du Conseil de régence. Sa femme lui donna treize enfants; il
la laissa veuve en 1652, et elle lui survécut jusqu'en 1694. (D'après Moreri, 1740, tomes II et VII.)
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14.10 Page 140

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A Madame
[Madame] de Villesavin.
Revu sur l'Autographe conservé au 1er Monastère de la Visitation de Paris.
MDCXXXVII. A la Duchesse de Nemours, Anne de Lorraine607.
Trois requêtes renouvelées; appel à la bonté, à la justice, à la
piété du duc et de la duchesse de Nemours.
Annecy, 11 avril 1620.
Madame,
Je pense que Vostre Grandeur aura bonne souvenance que, donnant advis a Monsieur608 de
la mort du feu sieur [de] Charmoysi609, je le suppliay tres humblement de continuer sa grace et ses
bienfaitz a la vefve et au filz du defunt; ce que Sa Grandeur m'accorda avec une tres grande
demonstration de sa volonté et inclination a cela, [180] et Vostre Grandeur, Madame, adjousta sa
toute puissante faveur a ma recommandation.
Maintenant donq, renouvellant ma supplication, je recours de rechef a cette mesme
gratification qu'il pleut a Vostre Grandeur de tesmoigner, affin qu'il luy playse d'en commander
les depesches, comme aussi ceux de deux autres graces que je demanday a Monsieur pour deux
autres de mes amis; puisque, si je ne me trompe, l'une est de justice, pour reparation d'un tort fait
a un gentilhomme nourri et envielli au service de Monsieur610, et l'autre est de pieté, pour
l'assoupissement d'un proces que les gens de Sa Grandeur ont avec deux filles pupilles611. Et je me
garderay fort bien de jamais rien demander, ni mesme desirer de vostre bonté, Madame, ni de celle
de Monsieur, qui ne soit selon les loix de l'honneur et bonheur que j'ay d'estre,
De Vostre Grandeur, Madame,
Le tres humble……………………………………………..
Annessi, 11 avril 1620. [181]
607 Anne de Lorraine, duchesse d'Aumale, comtesse de Maulevrier, etc., était fille de Charles de Lorraine et de Marie
de Lorraine d'Elbeuf. Elle épousa, le 14 avril 1618, Henri de Savoie, duc de Nemours (voir le tome précédent, note
(790), p. 225), et mourut vingt ans après, le 19 février 1638. Sa haute vénération pour l'Evêque de Genève se manifesta
par l'offrande d'une riche lampe d'argent, accompagnée d'une fondation, pour qu'elle brûlât nuit et jour devant le
sépulcre du Serviteur de Dieu aussitôt le Décret de sa béatification.
608 Le duc de Nemours.
609 Claude Vidomne de Chaumont, seigneur de Charmoisy, décédé le 28 octobre 1619. (Voir le tome précédent, note
(1026), p. 311.)
610 C'était Jacques de Gex, seigneur de Vallon. (Voir le tome précédent, note (1239), p. 383.)
611 De son mariage avec Gasparde de Mouxy (1613), Henri, fils d'Antoine de Cerisier et de Philiberte de Chevron,
avait eu deux filles: Aimèe-Philiberte et Françoise. Il les laissa orphelines de bonne heure, puisque le 17 septembre
1619, sa veuve se remariait à Pierre de Monthouz du Barrioz. (Mss. Besson, tome I.) Le saint Evêque tenait par les
liens du sang et de l'amitié à cette famille et s'y intéressa particulièrement. Quant aux deux jeunes enfants dont il
plaidait ici la cause, l'aînée entra à l'abbaye de Sainte-Catherine, et l'on trouve son nom dans des actes de 1625 et 1639
(Archiv. dép. de la Hte-Savoie, E 534, 541). La seconde, Françoise, prit l'habit religieux au 1er Monastère de la
Visitation d'Annecy, à l'âge de vingt-cinq ans, le 23 février 1639, y fit profession le 19 mars 1640, et après avoir
exercé la charge de Directrice au second Monastère de cette ville, revint mourir au premier, le 30 août 1645. (Livres
du Noviciat et du Couvent, du Ier Monastère d'Annecy; voir dans l'Année Sainte de la Visitation, tome VIII, p. 736, la
Vie de Sœur Françoise-Augustine de Cerisier.)
Par la requête au duc de Nemours déjà mentionnée au tome précédent, note (1239), p. 383, on voit que les
«fiscaux» du prince avaient intenté un procès aux filles de Henri de Cerisier au sujet de «la curialité d'Ugine,» propriété
de leurs deux oncles, Emmanuel et Antoine, dont on ne pouvait «preuver la mort, l'un estant allé en Levant, et l'autre
en Hongrie.» François de Sales demande qu'on laisse aux pupilles la jouissance «de laditte curialité» pour un certain
temps, «passé lequel elle» sera «reunie au revenu de Sa Grandeur,» Henri de Savoie.
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15 Pages 141-150

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15.1 Page 141

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MDCXXXVIII. Au Chanoine Jean-Baptiste Germonio612
(Inédite). Envoi des saintes Huiles.
Annecy, 16 avril 1620.
Monsieur,
Voyla les saintes Huiles que vous desires, tres ayse que je seray toute ma vie de pouvoir
rendre quelque digne service a Monseigneur vostre oncle, a son Evesché et a vous, a qui je suis de
toutes mes forces, et vous saluant humblement,
Monsieur,
Vostre tres humble confrere et tres affectionné
serviteur,
FRANÇS, E. de Geneve.
Le Jeudi Saint, en haste, 1620.
Revu sur une ancienne copie conservée à la Visitation de Turin. [182]
612 Anastase Germonio, l'archevêque de Tarentaise (voir tome XV, note (564), p. 183), absent alors de son diocèse, en
laissait toute la charge à son neveu et vicaire général, Jean-Baptiste Germonio. Celui-ci était en même temps
archidiacre de Turin, dignité qu'il reçut en 1612 et conserva jusqu'à sa mort (1658). Après le décès de son oncle, Jean-
Baptiste quitta la Tarentaise, n'y conservant que deux chapelles dont il était recteur: Saint-Antoine, en l'église Sainte-
Marie de Moûtiers, et la Sainte-Croix, en l'église d'Aime. En 1628 et 1632, on le trouve à la tête du Séminaire de
Turin, puis vicaire capitulaire de ce diocèse en 1640. Il fut alors exilé par ordre de la régente, Christine de France.
(Historiœ patriœ Monumenta, Augustae Taurinorum, 1863, Pedemontium sacrum, col. 1767, 1789, 1790, 1829.)
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15.2 Page 142

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MDCXXXIX. Au Chanoine Jean-François de Sales613
(Fragment). Avis du Saint sur une affaire embarrassante.
Envoi de lettres et promesse d'écrire bientôt.
Annecy, 23 avril 1620.
…………………………………………………………………………………………………….
…………………………………………………………on l'apprendroit a l'avantage, et seroit on
deschargé de plus de la moytié de la peine quand ce viendroit au fait et au prendre, car on n'auroit
a faire sinon d'appliquer cela au point. Or, ce constitus la se peut avoir de tous les docteurs, tant
de droit que de theologie, et peut on le demander ou faire demander par maniere de curiosité. De
retourner a Orleans, j'y voy fort peu d'apparence, car cela est bien loin; chacun voudroit sçavoir
pourquoy, et il seroit malaysé de treuver un praetexte. Voyla donq mon sentiment. Et a monsieur
Deage614, que vous surpasseres de beaucoup, et a moy, il ne cousta pour tout que a chacun 40
escus. Il faudra avoir un promoteur favorable qui fera tout et conduira tout.
Voyla des lettres de Mme de Grignolz615. Je vous escriray plus amplement dans trois ou 4
jours que M. du Chastelard partira616, car j'ay tant escrit que je n'en puis plus. [183] Bonsoir, mon
tres cher Frere, mon ami. N'ayes nullement peur que l'on voye vos lettres, ni que celles de M.
Beybin617 se perdent.
La pauvre Mme de Charmoysi est toute affligé (sic) de son filz qui est de si mauvaise
humeur, a ce qu'on luy a dit, et m'a prié de luy escrire une lettre de censure618.
Ce XXIII avril 1620.
Revu sur l'Autographe conservé à la Visitation de Toulouse.
613 Nous n'avons ici que la dernière page d'une lettre qui devait en avoir trois; l'adresse se trouvait sans doute sur la
quatrième page, mais l'Autographe étant collé sur un carton, on n'a pu s'en assurer. Nul doute pourtant pour le
destinataire.
614 Dans l'impossibilité de savoir de quelle affaire il s'agit, il demeure impossible également de décider si ce M. Déage
est Jean, l'ancien précepteur du Saint (voir tome XI, note (30), p. 2), ou François Déage, prieur de Mesmes (voir ci-
après, note (720), p. 223). Nous inclinons pour le premier.
615 Jeanne-Françoise de Montluc, fille de Blaise de Montesquiou, seigneur de Montluc, maréchal de France, et
d'Isabelle de Beauville, avait épousé (contrat dotal du 31 octobre 1587) Daniel de Talleyrand, prince de Chalais, en
faveur duquel la terre de Grignols fut érigée en comté en 1613. Le malheureux comte de Chalais qui monta sur
l'échafaud en 1626 était un des fils cadets de Mme de Grignols. (D'après Moreri, 1740, tome VI, et La Chesnaye-des-
Bois, Dictionnaire généalogique, 1757, tome II, p. 230.)
616 Pour faire son quartier comme aumônier de Christine de France.
617 Etienne Jarcellat-Beybin (voir ci-dessus, note (498), p. 139).
618 Cette lettre à Henri de Charmoisy ne nous est pas parvenue. (Cf. ibid., note (332), p. 83.)
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15.3 Page 143

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MDCXL. Au Cardinal Frédéric Borromée, Archevêque de
Milan619. Excuse pour un remerciement tardif. Des Pères
Barnabites en route vers Milan.
Annecy, 23 avril 1620.
Illustrissimo et Reverendissimo Signor mio
colendissimo,
Illustrissime, Révérendissime et très vénéré
Seigneur,
Ho ricevuto la lettera suavissima che V.
S. IIIma et Reverendissima si compiaque di
scrivermi questi mesi passati, insieme colle
reliquie di San Carlo; et hô aspettato sin adesso
di farne il dovuto humilissimo ringratiamento,
che andando costi questi nostri buoni Padri
[184] Barnabiti, il P. D. Candido, latore, mi ha
promesso di compire anco con lei per supplire
al mancamento mio620. Il che è molto a
proposito, non havendo io nè senno, nè modo
di far con V. S. Illma il debito mio, sebene io di
affetto et rispetto verso di lei non credo di
dovere cedere a nessuno.
Et con questa certissima verità, glie
faccio humilissima riverentia et le pregho dal
Signor Iddio ogni santa prosperità.
Di V. S. Illma et Rma,
Humilissimo et divotissimo servitore,
FRANCO, Vescovo di Geneva.
In Annessi, alli 23 di Aprile 1620.
Revu sur l'Autographe conservé à Milan, à la
Bibliothèque Ambrosienne. [185]
J'ai reçu, avec les reliques de saint
Charles, la très aimable lettre que Votre
Seigneurie Illustrissime et Révérendissime a
daigné m'écrire ces mois derniers. J'ai attendu
jusqu'à présent de vous offrir l'humble
remerciement qui vous est dû, car nos bons
Pères Barnabites [184] se rendant à Milan, le
P. D. Candide, porteur, m'a promis de suppléer
à mon défaut en accomplissant ce devoir pour
moi. Certes, cela est très à propos, n'ayant moi-
même ni la capacité ni le moyen de le faire,
bien que, pour l'attachement et le respect
envers Votre Seigneurie Illustrissime, je croie
n'avoir à le céder à personne.
Et sur cette vérité très certaine, je lui
présente mes humbles hommages, et je prie
Dieu notre Seigneur de lui donner toute sainte
prospérité.
De Votre Seigneurie Illustrissime et
Révérendissime,
Le très humble et très dévoué serviteur,
FRANÇOIS, Evêque de Genève.
Annecy, le 23 avril 1620. [185]
619 Voir tome XVII, note (575), p. 156.
620 Le 23 avril 1620, partirent pour Milan les PP. Jean-Baptiste de Gennari (voir le tome précédent, note (418), p. 117)
et le P. Candide Poscolonna.
Celui-ci, né à Milan en 1583, de Jean-Jacques Poscolonna et d'Elisabeth Crivelli, avait reçu au baptême le
nom de Louis. Il étudia au collège des Jésuites à Brera, fut admis dans la Congrégation des Barnabites le 9 janvier
1600, l'année suivante (12 mars) il prononça ses vœux à Monza et devint prêtre le 20 décembre 1608. Venu des
premiers au collège Chappulsien (26 décembre 1614) pour y enseigner la rhétorique, le P. Candide exerça aussi la
charge de chancelier, puis celle de vicaire en 1618. Deux ans plus tard ses supérieurs l'envoyèrent à la fondation de
Montargis, et après de nombreuses missions dans la basse Champagne, il fut nommé d'abord vice-supérieur de la
nouvelle Maison d'Etampes (1629), enfin Supérieur, de 1644 à 1647. C'est là qu'il mourut en décembre 1651. (D'après
des Notes du R. P. Premoli, Assistant général des Barnabites, et les Acta Collegii Annessii.)
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15.4 Page 144

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MDCXLI. A Don Jérome Boerio, Général des Barnabites621. Le
Saint prie le Général de renvoyer à Annecy deux Pères
Barnabites et de leur en adjoindre un troisième d'àge vénérable.
Annecy, 23 avril 1620.
Reverendissimo Padre in Christo
osservandissimo,
Révérendissime et très honoré Père dans le
Christ,
Andando questi nostri Padri al Capitolo
et alla ubedientia di V. P. Rma622, vado ancora
io con essi loro per salutarla et proferirmeglie
per servitore affettionatissimo; supplicandola
di più che si degni, se però così far si può et è
espediente, rimandarli in qua, essendo che
havendo egli imparata la lingua et le usanze del
paese, potranno con più utiltà fatigar in questi
luoghi che altri che verrebbono senza tali
istromenti et mezzi necessarii.
Et nientedimeno, non lasciarò a dire a
V. P. Rma come in vero zelante del bene et
honore della sua Congregatione, che sarebbe
anche a proposito che con essi loro venisse uno
de quei vecchi Padri, l'età del quale potesse
[186] produrre una nuova veneratone a questi
nuovi collegi, li quali forse presto ne havranno
un terzo di Novitiato623; et così, tutte queste
Case, con la canuta presenza et authorità di tal
personaggio, verranno compite624.
Fratanto, augurando dal Signore ogni
santa prosperità a V. P. Rma, glie resto
Humilissimo fratello et
servitore,
FRANCO, Vescovo di Geneva.
XXIII Aprile 1620.
Al Rmo Padre in Christo,
Il P. Generale della Congregatione [di S.
Pao]lo.
Milano.
Revu sur l'Autographe conservé à Monza
(Milan), chez les RR. PP. Barnabites. [187]
Puisque ces Pères se rendent au
Chapitre et à l'obédience de Votre Paternité
Révérendissime, je vais aussi avec eux la
saluer et m'offrir à Elle en qualité de serviteur
très affectionné. Je vous supplie en même
temps, si toutefois cela se peut et s'il est
expédient, de vouloir bien les renvoyer ici; car,
ayant appris la langue et les usages du pays, ils
pourront y travailler plus utilement que
d'autres qui viendraient sans ces éléments
nécessaires de succès.
Néanmoins, je ne laisserai pas de dire à
Votre Paternité Révérendissime, comme très
désireux du bien et de l'honneur de sa
Congrégation, qu'il serait aussi très à propos
d'envoyer avec eux un des Pères anciens, dont
l'âge inspirerait plus de respect encore [186]
pour ces collèges récemment fondés qui
s'augmenteront peut-être bientôt d'un troisième
pour le Noviciat; ainsi, par la présence et
l'autorité d'un si vénérable personnage, toutes
ces Maisons recevraient leur entier
perfectionnement.
En attendant, je souhaite que le
Seigneur comble de toute sainte prospérité
Votre Paternité Révérendissime, et je demeure
Son très humble frère et serviteur,
FRANÇOIS, Evêque de Genève.
23 avril 1620.
Au Révérendissime Père dans le Christ,
Le Père Général de la Congrégation de Saint-
Paul.
Milan. [187]
621 Voir tome XVII, note (1244), p. 381.
622 Voir la lettre précédente et note (620), p. 185.
623 On se rappelle que le projet d'un Noviciat à Rumilly ne put réussir. (Voir tome XVII, Lettre MCCXCIII, p. 364, et
note (1209), p. 365.)
624 Les Acta Collegii ne mentionnent aucun nouveau nom dans le personnel du collège d'Annecy au retour d'Italie des
PP. de Gennari et Poscolonna (6 juin). Le premier dut même repartir aussitôt pour Montargis, où le second le rejoignit
au mois d'août suivant (cf. ci-dessus, note (620), p. 185).
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15.5 Page 145

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MDCXLII. A la Mère de Chantal, a Paris. Nouvelles de l'âme de
François de Sales. Ses lumières sur les maximes
évangéliques et sur la prudence humaine. M. de Boisy à la
cour. Les affaires et la santé de Mme de la Flèchère
Annecy, fin avril ou commencement de mai 1620625.
Que vous diray je? Rien autre, ma tres chere Mere, sinon qu'il me semble que mon ame est
un peu plus solidement establie en l'esperance qu'elle a eu, de pouvoir un jour jouir des fruitz de
la mort et resurrection de Nostre Seigneur; lequel, comme il m'est advis, parmi les jours de la
Semaine Sainte et jusques a present, non seulement m'a fait voir plus clairement, mays avec une
certitude et consolation intellectuelle et toute en la pointe de l'esprit, les sacrés axiomes et les
maximes evangeliques, plus clairement et suavement, dis je, que jamais; et je ne puis asses admirer
comme, ayant tous-jours eu une si grande estime de ces maximes et de la doctrine de la Croix, j'ay
si peu pris de soin pour les prattiquer. O ma tres chere Mere, si je revenois au monde avec mes
sentimens presens, je ne croy pas que toute la prudence de la chair et des enfans de ce siecle me
peust esbransler en la certitude que j'ay que cette prudence est une vraye chimere et une toute
veritable niaiserie. Or sus, j'ay dit ces quatre motz pour obeir a vostre cœur, que je cheris
incomparablement et comme le mien propre. Je vous escriray une autre fois d'autres choses.
La coadjutorie s'en va estre toute arrestee et accomplie avec tant de faveur que rien plus626;
et ne se peut croire [188] combien mon frere tesmoigne d'esprit et de vertu aupres de Madame et
de ces grans Princes, de sorte que je commence d'estre conneu et aymé parce que je suis son frere.
La petite seur est allee conduire sa fille a Vanchi627. Madame de la Flechere est tous-jours
bonne fort solidement, et tous-jours accablee d'affaires et de mauvaise santé. Ce bon Pere628 vous
dira tout le reste.
Ma tres chere Mere, Dieu soit au milieu de nostre cœur. Amen. [189]
625 L'allusion à la coadjutorerie, le mariage de Mlle de Charmoisy fixent l'année; les environs de la Semaine-Sainte
indiquent une époque peu éloignée du 19 avril, fête de Pâques, et le départ pour Paris du P. Fauldrier (voir note (628)
de la page suivante) ayant eu lieu le 6 mai, prouve que notre date approximative est bien justifiée.
626 Cette affaire se traitait alors en Cour de Rome. Une copie du Mémoire présenté à Paul V au nom du duc de Savoie
et de ses fils fut envoyée par le cardinal Borghese, le 10 avril 1620, au Nonce de Turin. Celui-ci était en même temps
prié d'informer le Saint-Siège des raisons qui motivaient la demande d'un coadjuteur pour l'Evêque de Genève et des
aptitudes de son frère pour exercer cette charge. Le 16 mai suivant, le Secrétaire d'Etat accuse réception du rapport
fait par Mgr Costa. (Archiv. Vaticanes, Nunz. di Savoia, vol. 40.)
627 Mme de Charmoisy accompagnait sa fille Françoise, mariée depuis le 20 avril à Pierre Perrucard de Ballon (voir ci-
dessus, note (537), p. 153), et l'installait à Vanchy, «séjour le plus ordinaire» des seigneurs de Ballon, «comme le plus
agréable et le plus commode de tout leur domaine, pour être situé au milieu du mandement..., à cinq lieuës de Genève
et autant d'Anecy.» (Grossi, La Vie de la Vble Mere de Ballon, Annecy, 1695, liv. I, chap. I; cf. tome XIV, note (388),
p. 129.)
628 L'édition de 1626 porte seulement: «ce bon P.», mais il est très vraisemblable de proposer, comme porteur de cette
lettre, le Père Barnabite déjà mentionné à la note (625) de la page précédente.
Cantien Fauldrier, né à Sens de Jean Fauldrier et de Nicelle David, entra le 22 mars 1611 dans la Congrégation
des Clercs réguliers de Saint-Paul, où il prit le nom de Lucien en revêtant l'habit religieux le 24 juin, dans l'église de
l'Annonciation à Zagaroli, près de Rome. Là encore il fit sa profession solennelle, ayant seulement vingt-deux ans.
C'est à Rome même qu'il reçut tous les Ordres, sauf la prêtrise qui lui fut conférée à Pavie, le 10 mars 1618. Le 17
mai suivant, D. Lucien prenait place dans le personnel du collège d'Annecy. Il partit de cette ville en 1620, et mourut
au collège de Montargis le 14 août 1626. (Liber I Professionum, Archiv. des Barnabites, à San Carlo à Catinari,
Rome.)
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15.6 Page 146

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MDCXLIII. A M. Claude de Quoex629. Débats au sujet de la
nomination à une cure. Un accommodement des Ermites du
Mont-Voiron procuré par les délégués de l'Evêque de Genève.
Annecy, 6 mai 1620.
Monsieur,
J'eusse desiré que le sieur Grassi se fut contenu dans les termes du respect et de la verité a
Vienne630, et que monsieur Gariod n'eut pas fait l'esclat qu'il a fait a Chamberi631 (sur lequel
monsieur le Marquis de Lans m'a escrit que le service de Son Altesse requeroit qu'on donnat la
cure de Villy aux doctes, et monsieur le procureur general632 a appellé comme d'abus, et le Senat
a tesmoigné de l'affection a la conservation du concours), ou qu'il eut eu encor un peu de courage
pourvoir sortir les effectz de sa requeste et de son bon droit, affin que l'equité estant victorieuse et
l'authorité des Evesques maintenue, on eut par apres plus honnorablement et courtoysement
accommodé toute cette affaire en la façon mesme qu'il a, comme je voy, acceptee. Mays puis que
il a treuvé bon de le faire avant ce tems-la, je ne m'y oppose point, et dautant plus, qu'autant quil
me sera possible j'affectionneray tous-jours vos desirs et ceux de monsieur de [190] Polinge633. Et
sil faut joindre cette piece encor, je diray que je suis encor bien ayse du bien de ce jeune
ecclesiastique qui, a ce moyen, pourra en s'occupant devenir tous-jours meilleur. Et ce pendant
monsieur Gariod praeparera des excuses pour la grande chaleur quil avoit donnee a cette affaire a
Chamberi.
Pour l'autre chef, les Hermites seront contens en l'accomodement quilz ont fait634, et,
comme j'espere, encor monsieur de Boege635; mays je ne sçai pas encor les particularités, cela
s'estant passé par l'advis de monsieur le Prevost mon cousin, monsieur Jai, M. Questan, M.
Rosetain636 que j'avois commis pour cela.
Au reste, je suis invariablement, Monsieur,
Vostre tres humble serviteur,
FRANÇS, E. de Geneve.
629 Il est évident que cette lettre s'adresse au même personnage que celle du 31 janvier (voir ci-dessus, p. 118), par
conséquent à Claude de Quoex. S'il pouvait rester un doute, il serait dissipé par la mention de M. de Pollinge (voir
note (633) de la page suivante).
630 Jean-Louis Gras, neveu du curé défunt de Villy-le-Bouveret, François Gras (voir ci-dessus, note (422), p. 119).
Pour faire valoir ses prétendus droits à l'héritage de son oncle, il s'était sans doute pourvu devant l'Officialité de la
Métropole, contre celle du diocèse de Genève.
631 L'économe du bénéfice en débat, François Gariod (voir ibid.), dut se défendre contre M. Gras au Sénat de
Chambéry.
632 Conseiller de Son Altesse, et procureur général au souverain Sénat de Savoie depuis le 3 septembre 1584, Jean-
Antoine Bay, était né de Jean Bay ou de Baiis et d'Ursule Gislandi. Il avait épousé Perrine Cochet et il mourut en
1624.
633 Philibert de Chissé, seigneur de Pollinge, des Forêts, de Crest et coseigneur de la Bâtie-Dardel, fils de Jean,
deuxième du nom, et de Jeanne de Cornillon. Il épousa Antoinette de Bruel (1583), et en secondes noces, Michière de
Bellegarde (cf. tome XVI, note (653), p. 204). Comme nous ignorons la date de sa mort, on peut encore proposer son
fils Claude qui s'était marié en 1615 à Bénigne de Montferrand. Claude de Quoex, par le fait de son premier mariage
avec Bernardine de Chissé, était le beau-frère du premier, et l'oncle du second.
634 Les Ermites des Voirons (voir ci-après, note (678), p. 206).
635 La seigneurie de Boège ou Boëge, tout près des Voirons, avait passé aux Montvuagnard en 1434, par Claudine de
Rovorée, femme de Jean. En 1603, Sébastien-Balthazard de Montvuagnard, dit M. de Boège, étant mort sans enfants
(voir ci-dessus, note (482), p. 135), sa succession fut recueillie par Prosper, son neveu, fils unique de François de
Montvuagnard, dit M. de Pierrecharve, et de Péronne-Emmanuelle de Genève-Lullin. (Cf. tome XV, note (753), p.
262.) Prosper épousa (contrat dotal du 28 août 1611) Renée de Saint-Michel d'Avully. Il fut enterré dans l'église de
Boège, au tombeau de ses prédécesseurs, après le 27 mars 1663, date de son second testament.
636 Le prévôt Louis de Sales (voir tome XII, note (22), p. 6); les chanoines Pierre-François Jay (tome XVI, notes (737),
(738) des pp. 229 et 230), et Jean-Louis Questan (tome XVII, note (1101), p. 328); Jean Rosetain, official forain, dont
la note sera donnée plus tard.
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15.7 Page 147

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VI may 1620.
Revu sur l'Autographe conservé à Chambéry, aux Archives du Sénat de Savoie. [191]
MDCXLIV. A Madame de Valfin637 (Inédite). Une forte et tendre
affection paternelle et filiale. Incertitude du Saint sur l'avenir.
L'enfant suspendu «au col de la Providence.»
Sales, 12 mai 1620.
Non veritablement, ma tres chere Fille, il n'est pas vray que je vous puisse dire de quel
cœur je vous cheris et honnore, ni par consequent que jamais je vous puisse obliger en vous
escrivant le plus souvent que je puis; quoy que je le fay avec bien plus de douceur, sachant que
vous aymes a recevoir ce petit tesmoignage de mon infinie affection, que vous ne pouves guere
connoistre humainement d'autre sorte, et de laquelle en suite vous auries bien sujet de douter si
Dieu, qui en est l'autheur, ne vous en donnoit la certitude dans le fond de vostre ame, comm'au
milieu de la mienne il a planté un invariable sentiment de ce que vous m'estes et de ce que vostre
cœur est au mien. Or sus, cette verité est trop grande et trop constante pour estre curieusement
protestee. Demeurons en icelle, puisqu'il plait a Dieu, et demeurons y en paix, sans apprehension
de vaciller ni d'haesiter jamais.
Je pense, pour moy, que je ne bougeray point de ce païs avant la Feste Dieu, et ne suis pas
certain si encor, apres cela, j'iray en aucun autre lieu, n'estant guere plus certain de l'employ de ma
vie que de l'heure de ma mort, tant je suis maintenant engagé dans la volonté d'autruy638. O que ce
me seroit un contentement incomparable si j'allois de639……………………………………[192]
...[ma] tres chere Fille, attaches vous au col de sa Providence comme un petit enfant a celuy de sa
mere; il vous portera, il vous allegera, il vous allaitra640 parmi les chemins pierreux de cette
mortalité. Et quand vous verres a Besangon le Saint Suaire641, et en iceluy la marque de la playe
de l'amoureuse poitrine du Sauveur, faites moy bien part des desirs que vous aures de vivre,
comm'un heureux hermite, dans la caverne sainte642 de la dilection infinie que vous descouvrires-
la. Je suis
Vostre tres humble et invariable frere et serviteur,
F., E. de Geneve.
A Sales, XII may 1620.
A Madame
Madame de Vallefin.
Revu sur l'Autographe conservé à la Visitation de Boulogne-sur-Mer.
637 Bonaventure de Malarmay, sœur de Marc-François, coadjuteur de l'abbaye de Goailles ou Goille (voir ci-dessus,
note (471), p. 132), s'était alliée en 1618, à Lèonel de Toulongeon, chevalier, baron de Valfin, seigneur de Montagna,
capitaine de cent lances. Elle vivait encore en 1641.
638 Comme aumônier de Christine de France, l'Evêque de Genève devait se rendre à Turin quand son frère reviendrait
en Savoie. Jean-François ne revint pas cette année-là, et le Saint demeura à Annecy.
639 Deux lignes sont coupées à l'Autographe.
640 Cf. Is., ult., 12.
641 Voir tome XIII, note (706), p. 262.
642 Cant., II, 1.
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MDCXLV. A la Mère de Chantal, a Paris. Quatre objections au
projet de fixer l'Evêque de Genève en France. Son désir de
demeurer attaché à son Eglise. Ce qui vaut mieux pour lui
qu'un chapeau de cardinal. Point de népotisme. Voyage
probable à Rome
Annecy, 14 mai 1620.
Or sus, ma Mere, je suis dans vostre parloir643, ou il m'a fallu venir pour escrire ces quatre
ou cinq lettres que je vous envoye644.
Il faut donq que je vous die que je ne puis avoir opinion que rien se face de ce costé-la, que
vous sçaves, si Dieu ne le veut de sa volonté absolue; car premierement, ce fut ce que d'abord je
dis a Monsieur le Cardinal645, que [193] si je quittois ma femme, ce seroit pour n'en avoir plus. Je
vay doucement, quoy qu'avec grand travail, supportant les charges de la mienne, avec laquelle je
suis envielly: mais, avec une toute nouvelle a moy, que ferois-je? La seule gloire de Dieu,
manifestee par mon superieur le Pape, me peut oster de cette demarche646.
2. Voyla mon frere Evesque; cela ne m'enrichit pas, il est vray, mais cela m'allege et me
donne quelque esperance de me pouvoir retirer de la presse: cela vaut mieux qu'un chapeau de
Cardinal.
3. Mais vos neveux seront pauvres647. Ma Mere, je considere qu'ilz ne le sont pas des-ja
tant comme ilz estoyent quand ilz nasquirent, car ilz nasquirent nuds. Et puis, deux ou trois mille
escus, ni quatre mesme, ne me donneroyent pas dequoy les secourir, sans diminution de la
reputation d'une prelature en laquelle il faut tant d'aumosnes, d'œuvres pies, et de frais justes et
requis.
4. Voyla Son Altesse qui me mande advertir que de toute necessité il veut que
j'accompaigne Monseigneur le Cardinal son filz a Rome648; et en effect, il sera a propos, pour le
service mesme de l'Eglise, que je face ce voyage, bien qu'en toute verité, ma Mere, il ne soit
nullement selon mon inclination: car en somme, c'est tous-jours aller, et j'ayme a demeurer; et c'est
tous-jours aller a la cour, et j'ayme la simplicité. Mais il n'y a remede; puisqu'il le faut, je le feray
de bon cœur, et tandis, les [194] pensees de ce grand Prelat de dela auront du loysir de se dissiper.
En somme, je ne feray rien pour ce parti la que je ne sois grandement asseuré que Dieu le veuille.
N'en parlons donq plus que selon les occurrences, ma Mere.
Je suis a jamais, sans reserve et sans comparayson, c'est a dire au dessus de toute
comparayson, vostre, et certes, comme vous sçaves tres bien vous mesme, je suis vostre tres
parfaitement.
FRANÇS, E. de Geneve.
Le 14 may 1620.
643 Au parloir du monastère de la Visitation d'Annecy.
644 Seule, la lettre à la Mère Angélique Arnauld nous est parvenue.
645 Henri de Gondi, cardinal de Retz (voir ci-dessus, Lettre MDCXVIII, p. 152).
646 «On vous loue extrêmement de ce que vous vous en rapportez au Pape,» écrit la Mère de Chantal à l'Evêque de
Genève, en l'entretenant des projets de ses amis de Paris, «pourvu, dit-on, que vous lui exprimiez largement toute
l'affaire.» (Lettres, vol. I, p. 370.)
647 Le Saint avait douze neveux: les six fils de Louis et les six de Gallois.
648 Dès le mois de mars 1620, l'ambassadeur de Savoie, Scaglia, informait son prince que le marquis de Cœuvres,
ambassadeur de France, répugnait à traiter avec le Cardinal protecteur d'Espagne, Borgia, et appréhendait plus encore
son probable successeur, Borghese. Le grand remède, d'après lui, consistait à députer Maurice de Savoie à Rome, pour
aider les mécontents à empêcher le Cardinal neveu de recueillir le protectorat du royaume Catholique. (Turin, Archiv.
de l'Etat, Lettere Ministri, Roma, Mazzo 31.) Charles-Emmanuel ne dut pas avoir de peine à entrer dans ces vues,
d'autant que son fils n'ayant pas encore reçu le chapeau, il était temps de le faire ainsi confirmer dans sa dignité.
Malgré cela, le voyage projeté n'eut lieu qu'en février 1621, et l'Evêque de Genève ne suivit pas le prince.
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MDCXLVI. A Madame Angélique Arnauld, abbesse de Port-
Royal A Maubuisson. Les fautes involontaires n'empêchent pas
la marche vers la perfection. Vraie cause du mal chez la Mère
Arnauld. Comment modérer sa promptitude. Ne point se
dépiter contre soi-même, mais être enfant en humilité. Un
nouveau saint Paul intercesseur pour Onésime
Annecy, 14 mai 1620.
Pour tout ce que vous m'escrives en trois de vos lettres, ma tres chere Fille, je ne laisse pas
d'avoir une tres parfaite confiance que la fille que je vous ay tant recommandee, et qu'en verité
j'ayme comme mon ame propre, reuscisse une grande servante de Dieu; car elle ne fait point de
faute a dessein, ni pour aucune volonté qu'elle ayt de nourrir ces inclinations revesches, vaines et
un peu mutines. Or, cela estant, il n'y a rien a craindre.
Sa promptitude naturelle est la cause de tout son mal; car elle anime sa vivacité, et sa
vivacité anime sa promptitude. Partant, vous luy dires de ma part, que son soin principal soit a
tenir son esprit dans la modestie, douceur et tranquillité, et pour cela, que mesme elle allentisse
toutes ses actions exterieures: son port, son pas, sa contenance, ses mains, et s'il luy plait, encor un
peu sa langue et son langage; et qu'elle ne treuve point estrange [195] si cela ne se fait point en un
instant. Pour mettre un jeune cheval au pas et l'asseurer sous la selle et la bride, on employe des
annees entieres.
Mais voyes vous, ma tres chere Fille, vous luy estes un peu trop severe a la pauvre fille; il
ne luy faut point tant faire de reproches, puis qu'elle est fille de bons desirs. Dites luy que, pour
toute broncharde qu'elle pourroit estre, jamais elle ne s'estonne, ni ne despite contre soy mesme;
qu'elle regarde plustost Nostre Seigneur qui, du haut du Ciel, la regarde comme un pere fait son
enfant qui, encor tout foible, a peyne d'asseurer ses pas, et luy dit: Tout bellement, mon enfant; et
s'il tombe, l'encourage, disant: Il a sauté, il est bien sage, ne pleures point; puis s'approche et luy
tend la main. Si cette fille est un enfant en humilité et qu'elle sache bien qu'elle est enfant, elle ne
s'estonnera point d'estre tombee, car elle ne tombera pas aussi d'en haut.
O Dieu, ma tres chere Fille, si vous sçavies combien mon cœur ayme cette fille et de quelz
yeux je la regarde des icy a tous momens, vous auries un grand soin d'elle, encor pour l'amour de
moy, outre ce que vous luy estes; car vous m'aymes d'un amour qui est asses fort pour vous faire
aymer tout ce que j'ayme. Quand le grand Apostre recommande a Philemon le pauvre garçon
Onesime, il luy dit mille paroles si douces qu'elles ravissent d'amour649: Si tu m'aymes, dit il, si tu
m'a receu dans ton cœur, reçois aussi mes entrailles; appellant ainsy le pauvre cher Onesime, qui
avoit fait un mauvais trait a Philemon, pour lequel Philemon estoit courroucé. O ma chere
Philemone, ma Fille, veux je dire, si vous m'aymes, si vous m'aves receu dedans vostre cœur,
receves y aussi ma chere fille Onesime, et la supportes; c'est a dire, receves mes entrailles, car
cette fille est en verité cela pour Nostre Seigneur. Et si quelquefois elle vous donne de la peine,
supportes la suavement a ma consideration, mays sur tout a la consideration de Celuy qui l'a tant
aymee, que, pour l'aller prendre dans son neant ou elle estoit, il s'est abbaissè jusques a la mort,
et la mort de la croix650. [196]
649 Vers. 10-20.
650 Philip., II, 8.
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Et quant a vous, ma tres chere Fille, comme n'aymeres vous pas Dieu qui vous ayme tant?
Quel tesmoignage de son amour, ma Fille, en cet heureux trespas de ce bon pere651 auquel vous
aves tant souhaité une telle fin! Certes, j'en suis ravi.
Mille benedictions sur vostre cœur, ma chere Fille, et sur toutes nos cheres Seurs652, et sur
tout ce qui est a vous, en vous et pour vous; et j'y auray donq ma bonne part, puisque je suis
infiniment a vous en Jesus Christ et pour Jesus Christ.
FRANÇS, E. de Geneve.
Le 14 may 1620.
MDCXLVII. A la Mère Favre, Supérieure de la Visitation de
Lyon. Avis sur un voyage; la fondation de Turin. Quelle doit
être la durée du noviciat; quand on peut le prolonger.
Etablissement de la Visitation en Auvergne. Pourquoi
François de Sales est empêché d'aller prêcher à Lyon
Annecy, 14 mai 1620.
Croyes moy, ma tres chere Fille, ne faites point la discrette avec moy pour ne m'oser pas
escrire tous les jours quand vous voudres; car jamais je ne verrav de vos let tres qu'avec tres grande
consolation pour moy653. Or, je respons a la vostre derniere.
Je treuveray fort bon que vous venies un peu a l'advantage icy, pour plusieurs raysons, et
que vous passies a Grenoble, puisque mesme, ainsy faysant, vous gaigneres le passage de
Chamberi quand vous ires a Turin; d'autant qu'y ayant esté en venant, et veu monsieur vostre pere,
vous n'aures pas sujet de vous destourner pour y repasser, ains ires le droit chemin et avanceres
d'une [197] journee. Mais de vous dire bien precisement quand vous ires a Turin, je ne le puis
encor; mon frere m'escrivoit dernierement que ce seroit environ la fin de juin ou le commencement
de julliet654.
Le Concile de Trente655 prefige absolument une annee de noviciat, en sorte que nul ne peut
en establir deux, ni mesme un seul mois davantage, sans special privilege du Pape; bien qu'es cas
particuliers, les Superieurs, ains la Superieure et les Seurs, peuvent differer la Profession quand il
y a cause legitime: comme quand, avec un peu de loysir, la Novice pourra se rendre plus capable,
ainsy qu'il est dit es Constitutions656. Mais cette verité, il la faut doucement mesnager et ne point
l'alleguer par maniere de resistance, mais plustost la luy faire dire par quelqu'homme qui la sache
dire avec dexterité657.
651 Voir ci-dessus, note (428), p. 122.
652 Les Religieuses de Maubuisson.
653 Voir au tome XVII, p. 94, la note (364) qui concerne cette phrase insérée par les précédents éditeurs dans un autre
texte.
654 Le voyage de la Mère Favre à Annecy n'eut pas lieu; la fondation de Montferrand l'appela bientôt en Auvergne
(voir note (658) ci-dessous), et celle de Turin, malgré les prévisions de Jean-François de Sales, fut différée, comme
l'on sait.
655 Sess. XXV, de Regular., c. XV.
656 Cette question, développée assez longuement dans les premières Constitutions manuscrites, passée sous silence
dans les Constitutions imprimées, est traitée dans le Coustumier, à l'Article IX: Ce qui precede la Profession.
657 En 1620, s'achevait l'année de noviciat d'Antoinette de Revol de la Ramillière qui avait été admise à la vêture le 20
août 1619. Tout nous porte à croire qu'il s'agit d'elle ici, et qu'elle est cette «Novice de qualité» dont parle l'Histoire
de la Fondation de la Visitation de Lyon, que le zèle et la patience des Mères Favre et de Blonay gardèrent deux ans
avec le voile du noviciat. Au bout de ce temps, et de l'avis du saint Fondateur, on mit la jeune fille dehors, au grand
déplaisir des parents, qui ne manquèrent pas de le faire sentir.
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16.1 Page 151

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Si d'Auvergne on poursuivoit pour vous avoir un moys au commencement de la fondation,
je pense que cela seroit bon et a propos pour la consolation des Seurs qui iront658. [198]
Cependant, ma tres chere Fille, [vous] me voyes bien marri d'estre reduit a l'impossible
pour aller prescher a Lyon659, Son Altesse voulant tres absolument que j'accompaigne
Monseigneur le prince Cardinal a Rome, qui fera le voyage cet automne660. En ce regret
neanmoins, j'ay ce contentement de devoir servir un si bon Prince, de pouvoir servir vostre petite
Congregation, et de vous voir allant et revenant.
Je salue vostre ame de tout mon cœur, ma tres chere et tres aymable Fille, et luy souhaite
incessamment les saintes benedictions du Ciel, et a ma Seur toute chere Marie Aymee, Anne
Françoise, Françoise Hieronime et toutes nos Seurs, que je cheris tres parfaitement, et la malade661,
et tout a part M. Brun662.
Annessi, 14 may 1620.
A ma tres chere Fille en N. S.,
Ma Seur Marie Jacqueline Favre,
Superieure de la Congregation de la Visitation. [199]
On pourrait encore proposer Sœur Marie-Claire de la Balme dont l'année de probation expirait en juillet 1620
et qui ne prononça les vœux que le 3 novembre.
658 Mme Chaudon, l'ancienne Sœur Anne-Marie Bellet, novice du Monastère de Lyon (voir tome XVI, note (112), p.
25), avait préparé l'introduction de la Visitation en Auvergne. Mlle des Roches, gagnée par elle, souhaitait ardemment
cet établissement, et Dieu l'ayant réunie providentiellement à Mlle Péronnelle de Blanzat et à la comtesse de Dalet,
animées des mêmes désirs, la fondation fut résolue. La Mère Marie-Jacqueline Favre arriva à Montferrand la veille de
la Pentecôte, 6 juin 1620, avec les Sœurs Anne-Françoise Chardon, professe d'Annecy, Claude-Marie de la Martinière,
Marguerite-Elisabeth Sauzion, Anne-Marie Chevallier et Marie-Jacqueline Compain, professes de Lyon. (Hist. de la
Fondation de Montferrand.) Elle devait y demeurer bien plus longtemps qu'on ne l'avait d'abord pensé.
659 C'était la seconde fois que saint François de Sales se voyait contraint de refuser les invitations qui le pressaient de
donner à Lyon les prédications de l'Avent et du Carême (voir tome XV, Lettre MCCXCII, p. 241). Toujours tenu en
suspens par la cour de Savoie, il ne put y faire qu'un séjour d'environ deux semaines au mois de mars de l'année
suivante.
660 Voir ci-dessus, note (648), p. 194.
661 Sœur Marie-Aimée de Blonay (voir tome XV, note (826), p. 290), Sœur Anne-Françoise Chardon (tome XVI, note
(1097), p. 337), et Sœur Françoise-Jéronyme de Chevron-Villette (tome XVII, note (578), p. 159). On ne peut désigner
la Sœur malade dont parle le Saint.
662 «Le douziesme may mil six cent sinquante sinq... Messire Estienne Brun... a rendu son esprit a Dieu en la maison
ou est decedé nostre Bx Pere,... ayant esté nostre confesseur depuis le 6 may 1617 (voir tome XVII, note (1118), p.
335) jusques a sa mort,» à l'âge «de plus de septente ans.» Les Sœurs du Monastère de Bellecour font suivre ces mots,
dans leur Livre du Chapitre, d'un long éloge de ce vertueux ecclésiastique dont le cardinal de Richelieu, archevêque
de Lyon, «disoit qu'il estoit un des plus savants prestres de son diocese» et souhaitait que tous «fussent aussi hommes
de bien que M. Brun.» Il se dévoua à la Visitation «avec un soin et une affection inexprimables, jusques la que
d'exposer sa vie» pour les Religieuses «au temps de la peste,» et quittant «sa cure... plustost que de desister d'estre»
leur «confesseur.» A tous ses précédents bienfaits, M. Brun ajouta, le 13 décembre 1653, la donation de tous ses biens
au Monastère.
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16.2 Page 152

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MDCXLVIII. A la Mère de Chastel, Supérieure de la Visitation
de Grenoble. A quelles conditions on peut recevoir à la
Visitation des aspirantes qui n'ont pas encore l'âge d'entrer au
noviciat. L'habit qu'il faut leur donner. Rester indifférente
sur le choix que font les postulantes d'une Maison ou d'une
autre. — Bien que les Sœurs ne récitent que le petit Office, il est
bon de maintenir le rang des Associées. Profiter de nos
mouvements imparfaits pour nous humilier
Annecy, 16 mai 1620.
Ma tres chere Fille,
La fille de laquelle vous m'escrives estant de telle consequence, pourveu qu'elle ayt environ
douze ans, pourra estre fort bien receuë663. Il est vray que ces jeunes gens donnent de la peine;
mais que feroit on la? Je ne treuve point de bien sans charge en ce monde. Il faut tellement adjuster
nos volontés, que, ou elles ne pretendent point de commodités, ou si elles en pretendent et desirent,
elles [200] s'accommodent aussi doucement aux incommodités, qui sont indubitablement attachees
aux commodités. Nous n'avons point de vin sans lie en ce monde. Il faut donq balancer: est il
mieux qu'en nostre jardin il y ayt des espines pour y avoir des roses, ou de n'avoir point de roses
pour n'avoir point d'espines? Si cette fille apporte plus de bien que de mal, il sera bon de la recevoir;
si elle apporte plus de mal que de bien, il ne la faut pas recevoir.
Et a propos de petites filles, la Seur Jeanne Marguerite, fille de madame la concierge, qui
a esté receuë si jeune, est malade d'une maladie douloureuse et, comme dit M. Grandis664, mortelle;
car elle est pulmonique. Je la fus voir l'autre jour, avec une incroyable consolation de voir une si
douce indifference a la mort et a la vie, une patience si suave, et un visage riant parmi une fievre
ardente et beaucoup de peines, ne demandant pour toute consolation que de pouvoir faire la
Profession avant que de mourir665.
663 Marguerite Bout de Saint-Didier, d'une très honorable famille de Grenoble, était née en même temps que la
Visitation, au mois de juin 1610, et son attrait pour cet Ordre s'éveilla dès qu'elle en entendit parler. A peine avait-elle
dix ans, que, se dérobant à ses parents, elle venait secrètement voir la Mère de Chastel, et la supplier de l'admettre
avec les Religieuses. Ravie de ces dispositions et des qualités de la petite fille, la Supérieure de Grenoble hésitait à
cause de sa grande jeunesse. Le saint Fondateur trancha la question par la présente lettre; l'enfant entra à douze ans au
monastère, le 24 décembre 1622, et par sa piété naïve, ses douces vertus, mérita d'être le type et le modèle des «petites
Sœurs» dont, une des premières dans l'Institut, elle porta le petit habit. Quand elle eut l'âge canonique, elle devint
novice avec le nom de Marguerite-Séraphique, et enfin professe. Peu d'années après, la charge de Directrice lui fut
confiée; et elle compta parmi ses disciples sa propre mère qui voulut généreusement terminer dans le cloître une vie
déjà très vertueuse. Sœur Marguerite-Séraphique gouverna deux ans la Maison des Filles Pénitentes confiée aux
Religieuses de la Visitation, et trois ans le second Monastère de son Ordre établi à Grenoble. Elle mourut en 1671
dans celui de Saint-Marcellin dont elle était Supérieure depuis dix-huit mois. (Voir sa biographie dans l'Année Sainte
de la Visitation, tome XII, p. 440.)
664 Jean Grandis, médecin de la Communauté d'Annecy. (Voir tome XV, note (90), p. 20.)
665 Cette enfant, fille de Nicolas de la Chavane, mort le 13 octobre 1617 concierge du château d'Annecy, avait été
reçue en 1614 au premier Monastère de la Visitation, «a la requeste de Mgr le duc de Nemours, pour de bonnes et
pieuses considerations.» Jeanne-Marguerite n'avait que neuf ans; elle eut plus tard pour compagne Catherine Austrain,
jeune lyonnaise, fille d'un bienfaiteur, et supporta avec une précoce vertu l'humeur impétueuse de cette petite
indomptée dont les saillies étonnaient la Mère de Chantal elle-même. A force d'instances, Jeanne-Marguerite obtint
en 1619 de revêtir l'habit religieux, mais sans cérémonies et sans avoir «la qualité de Novice;» déjà elle était atteinte
de la maladie qui l'emporta le 26 mai 1620. L'aimable et sainte enfant rendit le dernier soupir pendant que, sur sa
demande, on lui lisait la Passion de Notre-Seigneur, et sa fin fut si prompte qu'on ne put lui faire prononcer les vœux
de Religion comme le Fondateur l'y avait autorisée. (D'après sa Vie manuscrite, par la Mère de Chaugy, conservée à
la Visitation d'Annecy.)
152/341

16.3 Page 153

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Or, si vous receves celle que vous dites, il est vray qu'il ne la faut pas lier aux exercices,
car cela la pourroit rebuter en cette si tendre jeunesse, qui ne peut encor savourer ce que c'est de
l'esprit, pour l'ordinaire. Pour l'habit, je ne pense pas qu'il le luy faille donner avant l'aage, mais
ouy bien luy en procurer un fort simple, et [201] une petite escharpe qu'elle tienne sur sa teste; en
sorte qu'elle ressemble en quelque sorte a une Religieuse. Et sera bon qu'il soit ou noir ou tanné,
sans ornement, comme j'ay veu a Saint Paul de Milan666, ou il y avoit environ cent cinquante
Religieuses et vingt ou vingt cinq Novices, et bien autant de pretendantes qui y estoyent en pension
et attente; et celles ci estoyent toutes vestues d'une mesme couleur bleue, et des voyles de mesme,
et tout leur appareil esgal.
J'en dis de mesme pour la petite Lambert667; et ce sera comme une petite preparation a
l'habit, lequel, es filles bien disposees, on peut bien donner quelques mois avant le tems, mais non
pas la qualité de Novice, comme on a fait a la Seur Jeanne Marguerite; et toutefois, il me semble
qu'il ne le faille pas faire, sinon pour des occasions pressantes.
Un petit habit tanné, ou blanc, ou de la couleur que vous jugeres plus propre, avec un peu
de forme approchant de celle de la Religion, qui monstreroit qu'elles sont en pretention et attendant
l'aage, les pourroit contenter.
Que les filles aillent a Lyon ou ailleurs, il n'importe nullement, et ne vous en mettes point
en peine. Quand vous seres en vostre monastere, ses commodités feront leur attraction comme les
autres, et les filles y viendront comme les colombes aux colombiers qui sont blancz668. Cependant,
ma tres chere Fille, qui ne cherche que la gloire de Dieu la treuve dans la pauvreté comme dans
les commodités. Ces bonnes filles n'ayment pas la pauvreté necessiteuse, et nous, certes, n'en
sommes pas non plus ravis d'amour. Laisses donq doucement et paysiblement aller a Lyon qui
voudra; Dieu vous garde mieux que tout cela. [202]
Vous m'excuseres, ma tres chere Fille, j'espere que Dieu nous assistera affin que le grand
Office ne soit jamais introduit en cette Congregation669, et le Pape mesme en donna quelque
instruction. Et nonobstant cela, il est bon qu'il y ayt des Seurs Associees, pour faire la charité a
tout plein de personnes qui ne sçauroyent dire l'Office, ou pour avoir la veuë trop foible et basse,
ou pour avoir manquement d'estomach, ou pour quelque autre infirmité. C'est pourquoy l'on n'a
pas marqué les exercices qu'il leur faut donner en lieu de l'Office au chœur; car, selon leur
infirmité, il'les faut pourvoir. Si elles ont faute de veuë, on leur peut donner des chapeletz; si c'est
infirmité d'estomach et non de veuë, elles pourront dire les Heures, et la Superieure pourra disposer
d'elles a quelque office non incompatible avec leur infirmité.
Despuis, j'ay leu la premiere Constitution, ou il est asses clairement dit que les Seurs
Associees, comme les Domestiques, diront des Pater et Ave en lieu de l'Office: c'est en la page
118 et 119670. C'est pourquoy il ne sera nul besoin qu'elles disent les Heures, ains suffira qu'elles
fassent ce qui est porté en l'article de cette Constitution, et qu'au reste la Supérieure les employe
selon qu'elle verra qu'elles pourront faire.
Il sera bon que nostre Mere de Lyon passe a Grenoble pour vous voir; vous en recevres de
la consolation toutes deux671. Et ne vous mettes nullement en peine de cette petite touche que
vostre cœur en ressent, car cela n'est rien, et sert beaucoup pour nous faire humilier doucement,
666 C'est-à-dire au monastère de Saint-Paul converti, ou des Angéliques. (Voir tomes XVI, note (791), p. 246, et XVIII,
note (925), p. 275.)
667 Sans doute une cadette de la Sœur Marie-Elisabeth Lambert qui prit l'habit à quinze ans, au Monastère de Grenoble,
et dont le contrat de réception est du 4 mai 1619.
668 Comme nous l'avons dit ci-dessus, note (518), p. 146, la Communauté ne quitta la maison de louage, rue de Bonne,
que le 30 septembre 1621.
669 Voir le tome précédent, note (635), p. 188.
670 A la page 118 des Réglés et Constitutions imprimées en 1619 (voir le tome précédent, note (1335), p. 418), se
trouve en effet le passage de la Constitution 1re, Des trois rangs de Sœurs, qui détermine le nombre de Pater et d'Ave
vingt-neuf en tout — remplaçant, pour les Sœurs Associées et Domestiques, les Heures de l'Office. (Cf. ci-dessus,
note (466), p. 130.)
671 Ce désir du saint Fondateur ne put se réaliser. (Voir ibid., note (654), p. 198.)
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pour nous faire voir la misere de nostre nature, et pour nous faire desirer parfaitement de vivre
selon la grace, selon l'Evangile, selon l'esprit de Nostre Seigneur.
Parles moy tous-jours hardiment; car je proteste devant [203] Dieu et ses Saintz que je suis
vostre, ma tres chere et veritablement bienaymee Fille.
FRANÇS, E. de Geneve.
Ce 16 may 1620.
Je salue nos Seurs tendrement, et ces bonnes dames672.
A ma tres chere Fille en N. S.,
Ma Seur Peronne Marie de Chastel,
Superieure du Monastere de la Visitation Ste Marie.
A Grenoble.
MDCXLIX. A M. Guillaume Drujon Prieur Commendataire
d'Anglefort673. La nomination au prieuré de Ripaille, désormais
au pouvoir du saint Evéque. Son double avantage. Prière
d'avoir soin de papiers importants pour cette affaire.
Annecy, 22 mai 1620.
Monsieur,
Quelques uns de mes amis me conseillerent de demander a Son Altesse, quand ell'estoit
icy674, la nomination au prieuré de Ripaille, vacant par le trespas de Monseigneur de Saint Paul; et
je le fis, en sorte qu'elle me fut accordee fort favorablement, la consequence de cette [204]
nomination me pouvant estre utile par ce que, du revenu de ce benefice, a esté erigee une
commenderie de Saint Lazare, delaquelle, par ma naissance, je suis capable, et, venant a vaquer,
ce ne me seroit pas une petite ouverture de la demander quand j'aurois des-ja le tiltre du prieuré675.
Mays ce point icy je le confie a vous, qui m'aymes, et a M. D…..676, ne l'ayant volu dire a personne
qui vive.
Or ay je sceu que monsieur Drujon, vostre frere677, a en son pouvoir plusieurs tiltres et
papiers appartenans audit prieuré; qui me fait vous prier, par nostre commune vocation et l'amitié
que vous me portes, de faire que je les puisse avoir, et qu'en attendant que je voye ce que je devray
faire pour cela, je vous prie qu'ilz soyent soigneusement conservés.
Je prieray cependant monsieur…..de conferer de ce sujet avec vous, de qui ayant des-ja
receu beaucoup de courtoysie, je me prometz encor celle ci tout a fait, et suis,
Monsieur,
672 Les filles spirituelles que le Saint avait à Grenoble, amies de la Visitation.
673 Guillaume Drujon, fils de Pierre Drujon, seigneur de Bergin, et de Louise Ravier. En 1591, il devint titulaire du
prieuré d'Anglefort, de l'Ordre de Saint-Benoit, situé au bord du Rhône, à une lieue de Seyssel; il garda ce bénéfice
jusqu'en 1634, y ajoutant, le 29 août 1630, la chapellenie de Notre-Dame, Sainte-Marie-Madeleine, Marie de Jacques
et Salomè à Anglefort. Son testament est du 16 avril 1641, et il meurt le 28 décembre 1647.
674 En Savoie, à Chambéry, où Victor-Amédée passa quelques jours avec l'Evêque de Genève, au retour du voyage de
France (octobre 1619), un mois après la mort de Thomas Pobel, évêque de Saint-Paul-Trois-Châteaux. (Voir tome XI,
note (785), p. 356.)
675 Le Saint ne se prévalut du droit de nomination au prieuré de Ripaille (voir tome XI, note (563), p. 252) que pour
préparer la substitution des Chartreux aux Chanoines Augustins en pleine décadence de ferveur. (Voir tome XVI, note
(580), p. 183.)
676 Ce nom et celui qui manque plus bas ont disparu dans une déchirure.
677 Claude, seigneur de Bergin et de Mattet, avait épousé (1599) Madeleine du Piastre d'Ambléon. Il teste le 15 mars
1635 et est enterré le 19 du même mois, à l'âge de soixante-quinze ans. L'un de ses fils, Pierre, succéda à son oncle au
prieuré d'Anglefort.
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Vostre plus humble et tres affectionné confrere,
FRANÇS, E. de Geneve.
22 may 1620, Annessi.
Monsieur
Monsieur Drugeon, Prieur d'Enclafort.
Revu sur l'Autographe appartenant à Mme Girod, à Lavours (Ain). [205]
MDCL. Aux Ermites du Mont-Voiron678 (Fragment inédit). La
charité. Souhait.
Annecy, 24 mai 1620.
……………………………………………………………………………………………………...
La charité est douce, elle est pliable, elle est patiente, et, a la fin, elle fait tout679.
Dieu, qui est la charité mesme680, vous veuille tous conserver en son saint service, parmi
lequel je vous prie me faire part en vos oraysons.
……………………………………………………………………………………………………...
Revu sur le texte inséré dans le Ier Procès de Canonisation. [206]
678 La haute montagne d'Evoêron ou des Voirons est située entre le Chablais et le Faucigny. Le paganisme y eut
autrefois un oracle; l'idole fut renversée, à la fin du Ve siècle, par Domitien, évêque de Genève. Mille ans après, le
seigneur Louis de Langin y bâtit une chapelle en l'honneur de la Sainte Vierge, sous le vocable de la Visitation, et
quelques prêtres établirent tout proche un ermitage pour s'adonner à la pénitence et à la prière. En 1536, tout fut détruit
par les huguenots qui enlevèrent la statue de la Vierge noire; on la retrouva et on la replaça dans son sanctuaire auprès
duquel Jean du Vernay, prêtre, et Jean Grillet, tous deux natifs d'Arbusigny, recommencèrent la vie d'ermites. Le 11
juillet 1619, un provençal, Jean-Antoine Rigaud (il sera destinataire), vint se joindre à eux. Ces serviteurs de la Vierge
reçurent de François de Sales, le 9 mai 1620, l'approbation des Constitutions dont lui-même avait été l'inspirateur et
qu'il avait fait lire en plein Synode le 6 mai précédent. Le texte original de ces Règles, inséré dans le Ier Procès de
Canonisation, paraîtra parmi les Opuscules. Il nous donne les noms des Ermites alors aux Voirons; à ceux que nous
venons de citer, joignons «Frere Mermet Jorand, de la paroisse de Boege, que» du Vernay et Grillet «receurent pour
leur messager et questeur un an apres leur premiere habitation audict hermitage.»
Le plus illustre des Ermites fut Charles-Auguste de Sales; élu évêque de Genève, il persuada à ses anciens
frères d'accepter la Règle et l'habit de Saint-Dominique, ce qu'ils firent (1643); et le couvent subsista jusqu'au 7 août
1768, jour où un incendie terrible consuma tous les bâtiments et la chapelle. La Vierge noire fut sauvée; elle est
honorée aujourd'hui dans l'église de Boêge, tandis qu'un modeste sanctuaire, érigé en 1863 et reconstruit en 1893 après
un second incendie, réunit de nouveau les fidèles sur ces sommets consacrés à Marie. (Voir Charles-Auguste, Histoire,
etc., liv. IX, éd. 1634, pp. 531 seq., et Gonthier, Œuvres historiques, tome II, Thonon-les-Bains, 1902, Les Voirons
autrefois et aujourd'hui.)
679 I Cor., XIII, 4-7.
680 I Joan., IV, 8, 16.
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MDCLI. A Madame de la Fléchère. Un tracas qui empêche de
recevoir des consolations et d'en donner. Petites
contestations. Le seul souci que nous devons avoir. Désir
de mettre fin à un procès
Annecy, 26 mai 1620.
Que vous voyla bien ayse, ma tres chere Fille, en l'aggreable conversation de cette chere
cousine681! De me souhaiter aupres de vous, je n'ay garde de le faire, car je traine tellement tous-
jours mon tracas avec moy, que je ne puis presque ni recevoir les consolations que je pourrois
prendre de vous voir, ni encor moins en rendre.
Je croy aysement que ces messieurs jetteront le droit sur M. Nacot, faute de s'accorder a le
payer; et luy se couvrira tout de leur refus et du pretexte d'avoir volu obeir682. Mays, quel moyen
d'unir les cœurs sans la charité?
Si madame la Comtesse n'est pas partie683, je vous supplie de luy donner asseurance de
mon humble service, et a madame de la Croix, laquelle, a mon advis, ne sera pas sans souci de
demeurer ainsy seule en l'incertitude de ses pretentions684. Dieu, par sa bonté, ne permette pas que
nous en ayons jamais d'autre que de le servir et aymer eternellement.
J'auroys grand'envie de sçavoir un peu clairement le [207] fond de vostre proces, pour voir
sil y auroit moyen de le terminer, affin que de ce costé la vous eussies plus de repos. Je suis sans
fin, ma tres chere Fille,
Vostre tres humble serviteur.
XXVI may 1620.
A Madame
Madame de la Flechere,
ma fille tres chere en N. S.
Revu sur une copie déclarée authentique, conservée à Turin, Archives de l'Etat.
681 Mme de Charmoisy.
682 Le 18 mai précédent, l'Evêque de Genève avait assisté à une transaction passée entre le curé, le prieur de Sainte-
Agathe et les Altariens de Rumilly. Peut-être la paix n'était-elle pas si bien faite que les différends n'aient promptement
recommencé. M. Nacot doit être Rd Nicolas, que nous connaissons déjà. (Voir les tomes XV, note (47), p. 1; XVI,
note (835), p. 258; XVII, Lettres MCLXV, p. 146, et MCLXVI, p. 148.) Un autre Nacot, Jacques, était aussi altarien
dans le même temps.
683 Philiberte de Beaufort, comtesse de Tournon (voir tome XV, note (46), p. 1).
684 Allusion au projet de mariage de Claude-Françoise de Maillard-Tournon, veuve de Salomon Murât de la Croix,
avec M. de Cormand. (Voir ci-dessus, note (256), p. 65.)
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16.7 Page 157

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MDCLII. A la Mère Favre, Supérieure de la Visitation de Lyon
(Fragment). Bénédictions divines promises à la Sœur de Blonay
Annecy, vers la fin de mai 1620685.
……………………………………………………………………………………………………...
Laisses en vostre place nostre chere Marie Aymee; les benedictions que Dieu respand sur
sa conduite a l'esgard des Novices, s'eslargiront tous-jours sur tout ce qui luy sera
commis686……………………………………………………………………………………. [208]
MDCLIII. Au Marquis Sigismond de Lans (Minute inédite).
Une adresse erronée. Nouvelle nomination faite par le
marquis de Lans
Annecy, 29 ou 30 mai 1620687.
Ce porteur mesme me remit une lettre de Vostre Excellence, addressee a monsieur de la
Feuge, colomnel de la ville dAnnessi688; et j'ay eu peine a me resoudre si je [209] la luy envoyerois,
puisque il y a long tems quil n'est plus colomnel de cette ville, monsieur de Villette l'ayant esté
l'annee passee, et mon frere le Chevalier l'estant celle ci, lequel, n'estant pas a present icy, j'eusse
adverti promptement d'y venir, si ce n'eut esté que, par un bruit commun, j'ay sceu que Vostre
Excellence avoit donné tout le commandement et du chasteau de cette ville et des compaignies de
685 La Mère Marie-Jacqueline Favre quitta Lyon pour Montferrand à la fin de mai ou au commencement de juin 1620
(voir ci-dessus, note (658), p. 198); les avis du saint Fondateur au sujet de sa remplaçante au Monastère de Bellecour
arrivèrent sans doute quelques jours avant ce départ.
686 En qualité d'Assistante-commise, Sœur Marie-Aimée de Blonay gouverna la Communauté de Lyon depuis le départ
de la Mère Favre jusqu'en 1622, époque à laquelle l'Archevêque permit son élection comme Supérieure, ayant perdu
l'espoir de voir revenir la Mère Marie-Jacqueline envoyée à la fondation de Dijon.
687 Le titre de «Vostre Excellence» donné au destinataire et la teneur de ces lignes prouvent que celles-ci s'adressent à
Sigismond d'Est, marquis de Lans, gouverneur de Savoie. (Voir tome XV, note (162), p. 49.) La date se déduit des
faits que nous allons résumer et qui expliquent le contenu de la lettre.
Le 29 mai 1620, le Conseil de Ville d'Annecy inscrit au Registre de ses Délibérations: On reçoit «tout
maintenant» une lettre de Son Excellence «portant advis du passage des Hispagnolz, commandant de tenir la ville
garnie de gens...pour la garde et protection..., soubz la conduicte néanmoins du sieur baron de Monthouz. Si que,
puisqu'il y a ung coronnel esleu, qui est monsieur le Chevalier de Malte,...de Sales, qui se pourroit offencer
aucunement de telle commission, et pour eviter toute controverse,» on envoie la lettre de Son Excellence et une lettre
de la Ville au chevalier de Sales, à Thorens, afin qu'il avise. En même temps, le Conseil, déterminé à défendre ses
droits, députe à Chambéry, auprès du gouverneur de Savoie, le sieur Ducrest, syndic, pour lui «remonstrer...quil a
pleu a S. A. S. et a...ses predecesseurs de» lui «conceder l'election d'ung sieur capitaine, soit coronnel,» le supplier
«de vouloir conserver la Ville en ses...privilèges» et «de commander au sieur chevalier de Sales, coronnel pour cette
annee, de faire sa charge,» le baron de Monthouz devant s'occuper seulement de la garde du château. Ducrest dut être
aussi porteur de la lettre du Saint. Tout fut inutile; le marquis de Lans, suivant sa vieille tactique d'hostilité sourde
contre la maison de Sales, déclara d'abord «que le sieur baron de Monthouz» serait «le gouverneur...qui commandera
absolument pour ladite garde» de la ville, «et quant et quant au chasteau.» Cependant, il se ravisa, et laissa même la
charge de garder le château au Conseil, et nommément à Louis de Sales, seigneur de Thorens. (Voir ci-après, Lettre
MDCLXV, p. 248.)
688 Gaspard de Sales (29 juillet 1567-1642), coseigneur de Brens, Rogemont et Vallières, dit de la Feuge. Il était fils
de Louis de Sales et de Jeanne de Guasquis, et cousin-germain du Saint dont il fut le condisciple au collège d'Annecy.
(Cf. ci-dessus, note (319), p. 81.) Le 23 avril 1618, le Conseil de Ville l'avait élu coronel; un an après, Amédée de
Chevron, baron de Villette (voir tome XI, note (761), p. 341), le remplaça dans cette charge jusqu'à l'élection (23 avril
1620) de Janus de Sales (voir tome XV, note (1024), p. 362) qui l'emporta sur ses compétiteurs MM. de Monthouz et
Pelard du Noyret; il fut même réélu l'année suivante. (Reg. des Délib. municip.)
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16.8 Page 158

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la ville mesme a monsieur de Monthouz689, en sorte que mondit frere ne semble y avoir plus rien
a faire. Et neanmoins, pour ne point faillir, j'ay envoyé ladite lettre des ce matin, desireux que je
seray tous-jours d'honnorer les volontés de Vostre Excellence, a laquelle souhaitant de plus en plus
toute sainte prosperité,
Monsieur, je demeure, etc.
Revu sur l'Autographe appartenant à MM. Grosset, à Genève.
MDCLIV. A une religieuse. L'entrée dans la voie de la vraie
dévotion et le secret pour y persévérer. Préparation à la fête
de la Pentecôte. Le vin du Ciel, et le pain de la terre
Annecy, [fin mai 1620690.]
Ma tres chere Fille,
N'en doutes point, je vous ayme plus que jamais, parce que je vous voy en estat d'entrer
dans cette voye d'une [210] veritable devotion qui commence a destacher son cœur de toutes les
choses du monde, affin d'estre toute a Dieu et qu'il puisse absolument disposer de vous, pour
n'aymer que ce que Dieu ayme, pour faire sa volonté et suivre ses conseilz, pour fuir avec un soin
extreme tout ce qui le peut offencer, mortifier ses passions et regler sa vie sur les maximes de Jesus
Christ, estre humble et patiente; car le grand secret pour entretenir une bonne devotion, c'est d'avoir
beaucoup d'humilité. Soyes humble, et Dieu sera pour vous et appuyera vostre bonne volonté, vous
donnant a luy sans deguisement et sans reserve, luy disant du fond de vostre cœur que si jusques
a present vous ne l'aves pas asses bien servi, qu'il ayt la bonté de vous pardonner et fortifier dans
la resolution que vous aves prise de vous destacher de toutes les affections du monde, et de ne
vous attacher a rien sinon a l'amour de Dieu et, de tout vostre cœur, a le servir fidelement.
Je veux bien encor, ma chere Fille, vous faire quelque part de ce que je viens d'escrire a la
grande Mere Agnes, aux Carmelites691, sur les dispositions pour bien recevoir le Saint Esprit a
cette grande feste de la Pentecoste. Cet Amour increé, qui, sans esgard a ses propres advantages,
s'employe par tout a chercher nostre bien, nous cachant souvent les plus belles flammes ou nous
le pensions moins, a ce saint artifice pour nous engager a l'aymer de toute nostre puissance; et
parce que cet amour est un don [211] gratuit de son amour, aussi devons nous le chercher de toutes
689 Fils de Jean-François-Gaspard de Monthouz et de Claudine-Antoinette d'Illeins, Pierre, seigneur du Barrioz,
d'Argonay, coseigneur de Cornillon et de Martod, épousa (17 septembre 1619) Gasparde de Mouxy, veuve de Henri
de Cerisier (voir ci-dessus, note (611), p. 181). Lieutenant-colonel au régiment de Monthouz, conseiller de Son
Altesse, bailli du Genevois par patentes du 6 mars 1639, il teste le 24 mars 1661 et meurt avant le 24 avril 1664.
690 Nous croyons probable que ces lignes s'adressent à une Religieuse de l'abbaye de Maubuisson, et qu'elles furent
écrites en 1620, vers la fête de Pentecôte (7 juin). Les raisons de cette double proposition se tirent du ton et du sujet
de la lettre, et de la mention de la «grande Mere Agnes, aux Carmelites.» Maubuisson était tout proche de Pontoise.
691 Malheureusement, nous n'avons pas la lettre dont le Saint parle ici, et qu'il écrivait à la Mère Agnès de Jésus,
Religieuse au Carmel de Pontoise. Fille de M. des Lions de Theuville, procureur du Roi, aînée de trois sœurs qui
furent toutes Carmélites, Agnès faisait partie de la congrégation fondée par M. Gallemant. Avec Mlles Lefèvre,
Fournier et Charton, elle fut admise au Carmel de sa ville natale le surlendemain de sa fondation, 17 janvier 1605, et
prononça ses vœux le 19 janvier de l'année suivante. Dès 1609, elle est Sous-prieure, et Prieure du 13 octobre 1610
jusqu'en septembre 1614. En attendant l'arrivée de sa remplaçante, la Mère Marie de la Trinité Sevin, et pendant son
absence pour la fondation de Dieppe, la Mère Agnès de Jésus gouverna encore la Communauté de Pontoise. Elle eut
la grâce, en 1618, de recevoir le dernier soupir de la Sœur Marie de l'Incarnation, et, dans la même cellule d'où la
Bienheureuse était partie pour le Ciel, elle décéda le 16 avril 1632. Ses talents et sa vertu étaient tels que, d'après les
Chroniques du Carmel (Troyes, 1850, tome II, p. 181), elle fut «admirée et respectée de tous les grands Serviteurs de
Dieu de son siècle;» elle eut aussi à supporter le blâme et la persécution, mais resta humble et généreuse dans la
prospérité comme dans l'adversité.
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16.9 Page 159

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nos forces. Nous ne devons pas nous troubler pour nos offences; car souvent ce divin Esprit est
plus liberal de ses dons a ceux qui luy ont esté plus avares de leur cœur et de leurs affections.
Mais, ma tres chere Fille, il faut que nous tesmoignions a Jesus Christ toute nostre
confiance, avec les saintz Apostres et disciples, sur lesquelz il ne voulut pas envoyer le Saint Esprit
qu'apres estre monté au Ciel. Et si vous me demandes pourquoy cela, il faut avant sçavoir que le
Saint Esprit est le vin du Ciel, chez saint Bernard692, qui disoit qu'au Ciel il y avoit surabondance
de ce vin, je veux dire l'allegresse du Saint Esprit et la joye beatifique; mais il n'y avoit ce pain
sacré de l'humanité de Jesus Christ693. La terre, au contraire, avoit ce pain sacré dont elle faysoit
ses delices et sa joye; elle n'avoit pas ce vin si suave et si brillant du Saint Esprit, qui devoit enivrer
nos ames et les combler de joye.
Et voyci cette admirable induction de Jesus Christ694, remonstrant a ses Apostres qu'il
n'estoit pas juste de garder l'humanité de Jesus Christ et de prendre encor ce vin admirable du Ciel.
Il faut donq, leur dit Jesus Christ, qu'il y ait un saint commerce entre vous et les Anges: vous aures
infalliblement du Ciel ce vin si puissant du Saint Esprit, en luy faysant part de vostre pain sacré
qui est encor sur la terre et comme entre vos mains, c'est a dire l'humanité de Jesus Christ.
Je croy, ma chere Fille, que c'est asses pour bien ouvrir vostre cœur a la reception du Saint
Esprit, et de ces langues de feu et de flammes adorables. A Dieu, je suis tout vostre.
FRANÇS, E. de Geneve. [212]
692 Cf. Tract. ascetici, tract, III: Serm. III, in fest. Pentec., et Serm. XIX, de Diversis.
693 Cf. Joan., VI, 35, 48, 51.
694 Ibid., XVI, 7.
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16.10 Page 160

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MDCLV. A Mademoiselle Lhuillier de Frouville695. Fâcheuse
affaire terminée. Que fera la destinataire de sa liberté?
Impossibilité de demeurer en l'état où elle est. Les périls et
les mortifications du mariage. Douce violence que le Saint
doit faire à sa fille spirituelle. Ce qu'est la vie religieuse.
Réponse aux plaintes et aux appréhensions de la nature.
Annecy, 31 mai 1620.
Or sus, au nom de Dieu, ma tres chere Fille, il est vray, Dieu veut que vous vous servies de
mon ame avec une confiance toute entiere pour tout ce qui regarde le [213] bien de la vostre,
laquelle pour cela il m'a rendue toute chere et pretieuse en son celeste amour.
Vous voyla donq hors de cette fascheuse affaire696, ma tres chere Fille, avec une entiere
liberté que la Providence eternelle vous a donnee. Et puisque vous le connoisses ainsy, benisses
du plus profond de vostre esprit cette divine douceur; et moy je l'en beniray avec vous, destinant
a cela les Sacrifices tressaintz que j'offriray sur ses autelz sacrés, car plus grande action de graces
ne puis je faire a la divine Majesté, que de luy presenter Celuy pour lequel et par lequel tout luy
est aggreable au Ciel et en la terre.
Mays, ma Fille, que ferons nous donq de cette liberté que nous avons? Nous la voulons,
sans doute, toute immoler a Celuy de qui nous la tenons; car cette resolution est invariable, que,
sans reserve ni exception quelcomque, non pas mesme d'un seul moment, nous ne voulons vivre
que pour Celuy lequel, pour nous faire vivre de la vraye vie, voulut bien mourir sur la croix.
695 Mlle Lhuillier de Frouville, lorsqu'elle reçut cette lettre, se trouvait sur le seuil du cloître, où l'avaient amenée les
événements en apparence les plus éloignés de ce but, et malgré les résistances d'une nature que des souffrances inouïes
et des désillusions cruelles n'avaient pas réussi à détacher du monde. Elevée fort pieusement par sa mère, Anne
Brachet, dont la haute vertu avait été même à l'épreuve des faveurs de Henri IV, Hélène eut le malheur de perdre ce
soutien à l'âge de dix ans. Elle n'en comptait pas treize lorsque son père la fiança à un gentilhomme fort riche et d'une
illustre famille; mais après trois années passées dans la maison de sa future belle-mère, au milieu du luxe, des
divertissements et des adulations de tous, sur le commun désir des jeunes gens, le projet fut rompu. Un autre se forma
bientôt, et Mlle Lhuillier devint, à seize ans, l'épouse de Thomas Gobelin, seigneur du Val, commissaire du Roi et
maître à la Chambre des Comptes de Paris. Ce bonheur humaiif s'éclipsa promptement. La jeune femme eut à endurer
un martyre que son courage et sa générosité dissimulèrent même à son père. Celui-ci, au bout de sept ans, apprit tout
d'une manière indirecte, et, plein de douleur, soumit l'affaire à la Sorbonne. Le mariage fut déclaré nul; un long procès
s'ensuivit, mais Mlle Lhuillier en sortit victorieuse avec un accroissement d'honneur et de biens temporels. Dieu permit
cependant, pour l'arrêter au moment d'un nouvel engagement, que des inquiétudes poignantes la saisissent au sujet de
la précédente rupture. Dans son angoisse, elle crut que seul l'Evêque de Genève, dont la réputation était universelle,
pourrait l'éclairer. (Voir le tome précédent, note (1173), p. 357.) On était en 1618; vers la fin de l'année le saint Prélat
arrivait à Paris. Les doutes furent dissipés; restait la grande question de l'emploi de la liberté retrouvée. Mlle Lhuillier
pressentait la volonté divine, et n'osait y arreter sa pensée. Le sage Directeur ne pressa rien, et ce fut seulement en
1620 qu'il trancha les hésitations de sa fille spirituelle par l'admirable lettre que nous donnons ici. Le 2 juillet, jour
même où elle la reçut, Hélène entra au monastère, et commença, sous la direction de la Mère de Chantal, une vie
religieuse qui fut féconde et sanctifiante pour son âme et pour l'Ordre tout entier. Ses libéralités lui méritèrent le titre
de fondatrice du premier Monastère de Paris auquel ses vertus la rendirent plus précieuse encore. Elle le gouverna
comme Supérieure pendant quatorze ans (1627-1633, 1636-1639, 1642-1647); fonda par elle-même ou par ses Filles
ceux de Dol, Rouen, Meaux, Le Mans, Bayonne, Saint-Denis et Chaillot; organisa le service des Filles de la Madeleine
(voir le tome précédent, note (1213), p. 373), et fut l'instrument dont Dieu se servit pour la conversion du commandeur
de Sillery. Ces grandes œuvres s'accomplirent au milieu d'épreuves de toutes sortes: maladies, contradictions,
calomnies, etc. La Mère Hélène-Angélique, par une longue expérience personnelle, devint ainsi capable de consoler
une illustre affligée, Henriette de France, réfugiée au monastère de Chaillot qu'Anne d'Autriche avait fondé. C'est en
présence de cette reine qu'elle reçut l'Extrême-Onction, le 25 mars 1655, et peu d'heures après, elle rendit le dernier
soupir. (D'après sa Vie manuscrite et sa déposition, Process. remiss. Parisiensis.)
696 Les suites du procès avec M. Gobelin.
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17 Pages 161-170

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17.1 Page 161

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Mays comment? en quel estat? en quelle condition de vie? De demeurer en l'estat auquel
vous estes, ce seroit bien le plus aysé en apparence, mais en verité le plus difficile. Ce monde de
Paris, et mesme de toute la France, ne sçauroit vous laisser vivre en paix dans ce milieu; ilz ne
cesseroyent de vous pousser violemment hors des limites de la resolution que vous en auries prise.
Et de se promettre une resolution si constante qu'on ne peust l'esbransler et mesme renverser, ce
seroit se promettre [214] un vray miracle, en cet aage, en cette forme de visage, entre tant de subtilz
advocatz et intercesseurs que le monde et sa prudence auroit aupres de vous, qui, sans merci ni
relasche quelcomque, assailliroyent, qui d'un costé, qui d'autre, vostre repos; et a force
d'importunités, ou de deceptions et surprises, a la fin cheviroyent de leurs entreprises et de vostre
force. Et je voy bien que je ne dois rien dire de plus pour ce point, puisque vous mesme en
confesses la verité et connoissesqu'ily a de l'impossibilité. Reste donq pour sujet de nostre
consideration, le mariage, ou la Religion.
Mais, ma tres chere Fille, il ne m'a pas esté besoin d'une clarté extraordinaire pour discerner
auquel des deux je vous dois conseiller de vous ranger; car, ainsy que vous me le descrives
clairement et que vous me l'aves des-ja fait connoistre tandis que j'avois le bien de vous ouyr parler
confidemment de vostre ame a la mienne, le sentiment que vous aves contre le mariage provient
de deux causes, dont l'une presque suffiroit pour se resoudre a ne s'y point engager: une puissante
aversion, un degoust tout entier, une repugnance tres forte. O ma Fille, c'est bien asses, il n'en faut
pas parler davantage. Helas! ces ames qui ont une inclination toute partiale pour le mariage, pour
heureux presque qu'il soit, y treuvent tant d'occasions de patience et de mortification, qu'a grand
peyne en peuvent elles porter le fardeau. Et comment feries vous y entrant tout a fait a contrecœur?
Es autres conditions, j'ay veu cent fois de l'allegement au progres; en celle ci, jamais.
Certes, les Apostres ayant ouy parler une fois Nostre Seigneur de l'indissoluble lien du
mariage, luy dirent: Seigneur, s'il en va de la sorte, il n'est donq pas expedient de se marier? Et
Nostre Seigneur appreuvant leur opinion, leur respondit: Tous ne comprennent pas ce mot; qui le
peut comprendre, qu'il le comprenne697. Ma chere Fille, et moy, apres vous avoir ouy parler et veu
vostre lettre sur ce sujet, je vous parle hardiment et vous dis: Certes, ma Fille, puisqu'il est ainsy,
il n'est pas expedient de vous marier; et bien que tous [215] ne comprennent pas, c'est a dire
n'embrassent pas, n'empoignent pas cette parole, n'en entendent pas le bonheur, ne s'en prevalent
pas, si est ce que, quant a vous, ma chere Fille, vous vous en pouves aysement prevaloir, vous
pouves facilement atteindre a ce bien la, et comprendre et savourer ce conseil: et faites le donq.
Or, je dis encor d'autant plus asseurement ceci, que je voy en vous le mariage plus perilleux qu'a
une autre, a cause de ce courage pretendant que vous me marques, qui vous feroit incessamment
souspirer apres les aggrandissemens et vous feroit nager continuellement dans la vanité.
Mais cette resolution estant ainsy prise sans qu'il y ait sujet d'en avoir aucun scrupule, il est
bien plus difficile de vous dire ensuite: Entres donq en Religion. Et neanmoins, il faut par force
vous le dire, puisque ni les mœurs ni les humeurs de la France, ni les inclinations de vos parens,
ni vostre aage, ni vostre mine ne vous sçauroyent permettre de demeurer comme vous estes. Je
vous dis donq ainsy, par force: Ma Fille, entres en Religion; mais en vous le disant, je sens une
secrette suavité dans cette force, qui fait que cette force n'est point forcee, ains douce et aggreable.
Les Anges contraignirent le bon homme Lot, et sa femme, et ses filles, et les empoignerent par la
main, et de force les tirerent hors de la ville; mays Lot ne treuve point de violence en cette force,
ains il dit qu'il connoist bien qu'il est en leurs bonnes graces698. Et Nostre Seigneur commande en
sa parabole a son serviteur: Contrains les d'entrer699; et pas un de ceux qui furent contraintz ne dit:
Laisses moy, vous me blesses. Je suis forcé et contraint de dire a ma Fille: Entres en Religion;
mais cette contrainte ne fasche point mon cœur.
O ma Fille, parlons un peu cœur a cœur ensemble. Penses vous que Dieu donne tous-jours
la vocation de la Religion, ou bien de la parfaite devotion, selon les conditions naturelles et les
inclinations des espritz qu'il appelle? Non certes, ma Fille, ne croyes pas cela: la vie religieuse
697 Matt., XIX, 10-12.
698 Gen., XIX, 15-19.
699 Luc., XIV, 23.
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17.2 Page 162

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n'est pas une vie naturelle, elle est au dessus de la nature, et faut que la grace la donne et soit l'ame
de cette vie. Il est vray que la Providence souveraine se [216] sert maintes fois de la nature pour
le service de la grace, mais il s'en faut bien que ce soit tous-jours, ni presque tous-jours.
Celuy qui crioit si lamentablement: Le bien que je veux, je ne le fay pas, mais le mal que je
ne veux pas est en moy; c'est a dire: En ma chair n'habite pas le bien; car le vouloir est attaché a
moy, mais je ne treuve point le moyen de le parfaire. Helas! pauvre miserable que je suis, qui me
delivrera du cors de cette mort? La grace de Dieu par Jesus Christ; ou bien: Je rens graces a Dieu
par Jesus Christ. Donq, moy mesme je sers a la loy de Dieu en mon esprit et de mon esprit, et a la
loy du peché en ma chair et de ma chair700; celuy la, dis je, monstroit bien que sa nature ne servoit
guere a la grace, et que ses inclinations n'estoyent guere sousmises aux inspirations. Et neanmoins,
c'est un des plus parfaitz serviteurs que jamais Dieu ayt eus en ce monde, et lequel en fin fut si
heureux que de pouvoir dire en verité: Je vis moy, mais non plus moy, ains Jesus Christ vit en
moy701, apres que la grace eut assujetti la nature et que les inspirations eurent subjugué les
inclinations.
Ma Fille, ces craintes de treuver des Superieures indiscrettes et ces autres apprehensions
que vous m'expliques si fidelement, tout cela s'esvanouira devant la face de Nostre Seigneur
crucifié, que vous embrasseres cordialement. Vostre esprit genereux de la generosité du monde,
changera de force702, et se rendra genereux du courage des Saintz et des Anges. Vous verres la
niayserie de l'entendement humain en ses discours, et vous vous en mocqueres. Vous aymeres la
parole de la Croix, que les payens ont tenue pour folie, et les Juifs pour scandale; et laquelle a
nous, c'est a dire a ceux qui sont sauvés, est la sagesse supreme, la force et vertu de Dieu703.
Mais, ma Fille, voyci un adoucissement bien grand de ce conseil si absolu, et, ce semble,
si rigoureux. Vous estes riche; la vingtiesme, ou peut estre centiesme partie de vos moyens suffiroit
pour vous rendre fondatrice d'un [217] Monastere, et en cette qualité la vous auries un gratieux
moyen de vivre religieusement hors la presse du monde, en attendant que l'usage, la consideration
et l'inspiration donnast le dernier courage a vostre cœur et le dernier comble a vostre resolution,
pour estre tout a fait Religieuse. Ainsy vous tromperies finement vostre nature et attraperies vostre
cœur subtilement. Oh! vive le Sauveur a qui je suis consacré! que cet advis ne regarde que vostre
ame, et n'a nulle mire ni a droitte ni a gauche, que vostre paix et repos.
Et ce pendant pries Dieu, ma tres chere Fille; humilies vous, destines vostre vie a l'eternité,
releves vos intentions, purifiés vos pretentions, penses souvent qu'un seul petit profit en l'amour
de Dieu est digne de grande consideration, puisqu'il aggrandira nostre gloire a toute eternité. En
somme, vostre esprit, et ce que Dieu a fait pour vous avoir a luy, et mille considerations, vous
appellent a une non vulgaire generosité chrestienne. Je vous conseille d'avoir confiance en la bonne
Mere de la Visitation704 comme a moy mesme, car elle vous servira fidelement.
Or, je suis sans fin ni reserve,
Vostre tres humble et invariable serviteur,
FRANÇS, E. de Geneve.
Le 31 may 1620. [218]
700 Rom., VII, 18-20, 24, 25.
701 Galat., II, 20.
702 Is., XL, 31.
703 I Cor., I, 18, 23, 24.
704 La Mère de Chantal.
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17.3 Page 163

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MDCLVI. A M. Antoine de Pignier de Fontany705 (Fragment
inédit). Prière au destinataire de régler les affaires qui retardent
la Profession de sa sœur.
Annecy, [juin] 1620706.
……………………………………………………………………………………………………
Les Seurs de la Visitation m'ont voulu rendre quelque compte de l'estat de leur Monastere,
ou, entre autres choses, j'ay treuvé a dire en ce que la bonne Seur Jeanne Marie vostre seur, est
tous-jours novice, y ayant si long tems que son annee de probation est passee707. Et parce que elles
m'ont allegué708………….estant ainsy…………….ce qui est requis de vostre part pour sa
Profession, j'ay pensé, Monsieur, que vous me sçauriés [219] gré si je vous priois de vouloir
contribuer a cette bonne œuvre le soin qu'une bonne seur doit attendre d'un bon frere, et contribuer
a l'indemnité de ce Monastere qui, ce pendant, entretient tous-jours cette fille et la fait traitter en
ses maladies si frequentes, sans en avoir rien.
C'est pourquoy, Monsieur, je vous escris ces quatre lignes, que je finis en me disant,
Monsieur,
Vostre serviteur plus humble et plus affectionné,
FRANÇS, E. de Geneve.
……..Annessi.
Revu sur une copie conservée à la Visitation d'Annecy.
705 La copie que nous reproduisons à défaut de l'Autographe, a pour adresse: A Monsieur Errart d'Ottone. C'est là sans
doute le nom d'un ancien possesseur, mais non celui du destinataire qui est certainement Antoine de Pignier de
Fontany, frère de la Sœur Jeanne-Marie (voir au tome précédent les notes (967), (969), (970) de la page 291). Il épousa
(quittance dotale du 10 octobre 1620) Charlotte, fille de noble Jean-Paul de Rolland, et mourut après septembre 1622,
sans enfants, laissant ses biens à sa cousine Philiberte, dame du Chesne.
706 La première phrase semble avoir trait à une visite canonique. Or, le 3 mars 1620, la Mère de Chantal écrit au saint
Fondateur: «Je voudrais bien que vous fissiez la visite et tinssiez le Chapitre chez nous avant le départ de nos Sœurs,
afin que cela nous servît de modèle pour les autres Maisons.» (Lettres, vol. I, p. 381.) Cette lettre dut donc précéder
le 10 juillet 1620: la date la plus probable est le mois de juin, d'autant que la copie porte janvier, facile erreur de
lecture; mais rien ne justifie le millésime de 1615 qu'elle indique.
707 Elle avait expiré le 15 octobre 1619. Malgré les réclamations de l'Evêque, Antoine de Pignier fit attendre encore
longtemps sa sœur et le Monastère. Par contrat du 21 mai 1622, il abandonnait aux Religieuses de la Visitation la
seigneurie de Monthouz en Duyn, qu'il tenait de sa mère, héritière du fils de son second mariage, Jean-Marc de
Monthouz, en attendant les trois mille cent soixante florins promis le 20 mars 1619 pour la dot de la Sœur Jeanne-
Marie. (Archives de la Visitation d'Annecy, Livre des Contrats permanents.)
708 Lacunes de la copie.
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17.4 Page 164

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MDCLVII. A M. Guillaume de Bernard de Foras. Permutation
probable de François de Sales et de son frère. Un esprit qui
aurait besoin de mûrir. Annonce d'une lettre à la Mère de
Chantal
Annecy, 2 juin 1620.
Monsieur mon tres cher Frere,
Je ravis ce moment pour vous saluer tres humblement, et madame ma tres chere Seur, ma
fille709, et vous affirmer que tout ce qui vous appartient icy se porte bien, et, comme je pense, encor
a Turin, ou, ainsy que je voy, nostre commun frere arrestera encor un moys ou six semaines, affin
de rendre quelque bon service a Madame apres son sacre, et que, revenu icy, je puisse aller la en
sa place710.
Ce porteur est tous-jours luy mesme711. Si l'air de Paris pouvoit un peu meurir son esprit,
ce luy seroit un [220] grand bonheur. Il m'a grandement vanté l'honneur qu'il dit avoir de vostre
bienveuillance; ce seroit bien la plus advantageuse qualité qu'il peust posseder. Si Monsieur712 luy
fait du bien (et mesme il [y] pretend), peut estre s'assujettira-il plus qu'il n'a fait jusqu'a present a
mieux vivre.
Voyla tout, car, pressé que je suis, je differe d'escrire a la bonne Mere de Chantal jusqu'a
vendredi ou samedi, que je pourray prendre plus de loysir. Que si vous aves aggreable de [le] luy
faire sçavoir, elle en sera consolee.
Aymes moy tous-jours, s'il vous plait, et vous en supplie tres humblement, Monsieur mon
Frere, et croyes qu'a jamais je seray
Vostre tres humble frere et serviteur,
et de Madame ma chere Seur, ma fille,
FRANÇS, E. de Geneve.
Je vous supplie de treuver bon que je salue en ce petit bout de lettre monsieur et
madamoyselle Rousselet713.
Le 2 juin 1620, Annessi.
A Monsieur de Foras.
A Paris. [221]
709 Anne Le Beau, femme du destinataire. (Voir ci-dessus, notes (68), p. 1, et (154), p. 32.)
710 Voir ibid., les notes (531, 638) des pp. 151, 192.
711 Sans doute Denis de Granier, chanoine de Saint-Pierre de Genève. (Voir tome XVII, note (1093), p. 325.)
712 Henri de Savoie, duc de Nemours, dont Foras était un des premiers officiers.
713 Voir ci-dessus, note (461), p. 128, et ci-après, note (816), p. 247.
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17.5 Page 165

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MDCLVIII. Au Chanoine Jean-François de Sales, son frère714.
Double raison de rendre service à M. Roero. Un canonicat
prochainement vacant. Les talents et qualités d'un futur
aumônier de Mme Royale. Incapacité de beaucoup de
prétendants à ce poste. Comment faire réussir un désir de M.
et de Mme de Cornillon. Envieux et victorieux. Une
réponse embarrassante. Affaires de Ripaille et de la Sainte-
Maison. Coupable qui ne veut pas reconnaître ses torts.
Désir de François de Sales de favoriser les prétentions de M. de
Longecombe; difficultés qu'il y rencontre. Quelques
nouvelles.
Annecy, 2 juin 1620.
Voyla monsieur de Roüer qui va pour les proces que sa mayson a en ce pais-la715. Outre le
double lien d'alliance que nous avons avec luy, la grand'assistence que madame de Brescieu fit a
feu mon frere716, ainsy que mon frere le Chevalier717 m'a raconté, nous oblige a le servir es
occurrences.
Il vous dira comme M. Fornand s'en [va] aujourdhuy, ou demain au plus tard, pour suivre
la voye de toute chair718. Troys ou quatre se presenteront pour le canonicat, entre lesquelz, ce me
semble, M. Ducrest, qui est [222] docteur, est tout a mon gré et pour l'exterieur et pour l'interieur;
mais je ne sçai ce que messieurs du Chapitre feront719.
Pour avoir un aumosnier de Madame, j'ay jetté les yeux sur M. le Prieur de Mesme, tout
reformé, qui a bien estudié, qui parle bien, a tres bonne mine et a des moyens, et qui, a mon advis,
tiendra fort bien cette place, et nous en sera obligé et toute la ville de La Roche. Je ne sçai pourtant
pas encor s'il le voudra, mais je le sçauray bien tost. Son grand pere estoit noble, c'est a dire le fut
fait; et si, il n'est point boyteux ni pointilleux720. Je le fis deputé du clergé au Sinode, et despuis
714 Le Gentilhomme... ami de l'Evêque de Genève, destinataire de cette lettre dans les éditions de Datta, de Vivès et
de Migne, n'est autre évidemment que Jean-François de Sales. (Voir ci-après, note (754), p. 230.)
715 Nicolas Roero de Bressieu (voir tome XVII, note (381), p. 98), fils d'Ennemonde de la Forest (voir ibid., note (627),
p. 189), appartenait par son père à une famille du Piémont. Nous verrons plus tard (13 mai 1621) saint François de
Sales implorer la protection du duc de Savoie pour l'heureuse issue de la «pretention » qui, depuis longtemps, tenait
les Bressieu «en langueur.»
716 Bernard de Sales, baron de Thorens (voir le tome précédent, Lettre MCCCXV, p. 15, et les suivantes).
717 Janus de Sales, présent à Turin au décès de son frère Bernard. (Cf. ibid., pp. 16, 17.)
718 Le nom d'Amédée Fornand figure, en 1602, sur la liste des chanoines de Saint-Pierre de Genève. Cet ecclésiastique,
confesseur et aumônier du duc de Nemours, et présenté par le prince, obtient les chapelles de la léproserie de Duyn
(1613), de la Bienheureuse Vierge (1615) et de Sainte-Barbe dans l'église de Passy, enfin celle des Lépreux dans
l'église d'Ugine. (R. E.) Il mourut le 3 juin 1620 (voir ci-après, p. 235).
719 Natif d'Annecy, Gabriel Ducrest, tonsuré le 14 mars 1615, docteur en théologie, fut en effet chanoine de Saint-
Pierre en 1620 (cf. tome XVI, note (1179), p. 363.) En 1622, il est institué curé de Sciez et chapelain de l'annexe de
Sainte-Catherine; il résigne ces bénéfices en 1630, comme il résignera plus tard les cures de Gruffy (1651), et de
Marcellaz, quelques jours avant sa mort (28 avril 1671). Au décès de Mgr Jean-François de Sales, le Chapitre de la
cathédrale lui avait confié les fonctions de procureur fiscal épiscopal. M. Ducrest fit plusieurs fondations pieuses,
entre autres celle d'une Messe annuelle célébrée solennellement par le Chapitre le 2 juillet et d'une bénédiction
hebdomadaire du Saint-Sacrement, au premier Monastère de la Visitation. (R. E., Livre du Chapitre du Ier Monastère
d'Annecy.)
720 Révérend seigneur François Déage, coseigneur de Mesme, prieur commendataire de Talissieu en Bugey, prêtre
depuis le 14 mars 1620, chanoine et custode de l'église collégiale de Saint-Jean-Baptiste de La Roche (1618), dont il
devint archidiacre et primicier en 1646, économe de Béon et annexe de Culoz en 1627, accepta très volontiers le poste
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17.6 Page 166

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surveillant du quartier721, dequoy il m'a sceu tant de gré que je pense quil merite d'estre avancé;
outre que je ne sçai ou jetter ma veüe, tous nos ecclesiastiques de bonne naissance estans ou tarés
au cors et au maintien, ou de peu d'intelligence, ou trop vieux, ou sans talent pour cette charge en
laquelle nostre Maistresse veut avoir des gens de bonne sorte.
Or, quant a M. Favre722, je croy quil se contentera [223] d'avoir lhonneur et le tiltre sans
aller au service, messieurs ses freres723 s'estant accordés a le luy persuader. Pour celuy qui est a
Paris, en verité il auroit bien tous les autres talens, mais je croy que la constance lui manquerait,
et seroit dans peu de tems dans une dangereuse liberté qui lui serviroit de reproche, et a nous, le
passé nous ayant asses appris ce qui se doit presager pour l'avenir. Mais nous acheminons le plus
que nous pouvons l'eschange de son benefice avec un autre qui est possedé par un autre changeant,
affin quil puisse revenir724; et le tems nous fera sages.
Mon frere et ma seur de Cornillon725 ont un desir extreme que M. le curé de Regnier venant
a mourir, comm'il semble quil doive faire dans peu de jours726, M. François Baudri, qui est
maintenant vicaire, leur voysin, et qui a plusieurs bonnes petites conditions, eut la nomination727,
estimans que le bon M. Pergod, qui est procureur de M. Argentier, en nommeroit peut estre
quelqu'autre728. Pour [224] cela, sil se peut bonnement, il faudroit prier mondit sieur Argentier de
faire une lettre a moy, par laquelle, en cas que ledit messire François se treuvast capable et desiré
par les parroissiens, on le preferast; attendu que despuis plusieurs annees en ça il fait effectivement
la charge de curé, exhortant, administrant les Sacremens et cathechisant, et en somme suppleant le
devoir du curé qui, a cause de son mal, ne le peut faire.
d'honneur qui lui était offert. (Voir ci-après, pp. 230, 243.) En 1638, il résigna son prieuré de Talissieu et mourut en
août 1652. (R. E.; Grillet, Hist. de la Ville de La Roche, 1790.)
François Déage, d'une vieille famille de La Roche, était fils de Michel, seigneur de Mesme et de Louise-
Laurence de Chaffardon. Son grand-père, Jacques Déage, reçut la noblesse de son aïeul Mamert, anobli en 1555 parle
duc de Genevois, et par patentes du duc de Savoie en 1565.
721 Le Synode s'était tenu le 6 mai précédent. Sur les Surveillants, voir tome XVI, note (257), p. 72.
722 Antoine Favre, aumônier de la princesse de Piémont (voir ci-dessus, note (305), p. 79).
723 Voir tome XI, note (192), p. 79. M. de Vaugelas était alors à Paris.
724 Il est indubitable que François de Sales parle ici de Denis de Granier qui venait de passer quelques jours à Annecy.
(Voir la lettre précédente.) Loin de rentrer en Savoie, le malheureux dévoyé, à la fin de cette animée 1620, s'en alla
apostasier en Angleterre.
725 Melchior de Cornillon (voir tome XVII, note (879), p. 254) et sa femme Gasparde de Sales, sœur du Saint (tome
XIV, note (468), p. 158). Leur château de Meyrens était sur le territoire de la paroisse de Reignier.
726 Prêtre depuis le 12 février 1592, Claude Sonnerat fut institué curé de Reignier le 18 avril 1596. Malgré les
prévisions de son entourage, il vécut jusqu'au mois de janvier 1627. (Voir Mém. de l'Acad. Salés., tome XXIII, Annecy,
1900, pp. 30 seq.)
727 Une branche cadette de la famille de Baudry assez ancienne à Reignier, demeurait au village de Meyrens dont M.
de Cornillon était seigneur. Les renseignements sur l'ecclésiastique mentionné ici font complètement défaut: serait-ce
noble François, fils d'Alexandre de Baudry, qui reçoit les Ordres mineurs en 1601 et qu'on trouve en 1624 prébendé à
Reignier? Tout ce que nous savons, c'est qu'il n'en devint pas curé, car Rd Jean-Louis Sonnerat succédait à Claude,
son oncle, le 18 février 1627. (Cf. Mém. de l'Acad. Salés., tomes XXIII, pp. 42, 117, 118, et XXV, pp. 360 seq.)
728 Par son mariage avec Virginie Argentier, Noël Hugon-Pergod1 (voir tome XIII, note (526), p. 197) était devenu le
parent, très probablement le gendre de Georges Argentero ou Argentier, comte de Bagnasco, conseiller et premier
médecin de Son Altesse, et de Virginie Broglia (cf. ci-dessus, note (315), p. 80). Dans un acte de 1599, Georges le
désigne pour son procureur général et spécial, tant en son nom qu'au nom de son fils, Philibert Argentier, chevalier et
prieur de Saint-Victor (voir tomes XII, note (135), p. 82, et XV, note (851), p. 299), résidant habituellement à Turin.
A cette date, Philibert devait être mineur, car son père se déclare administrateur de ses biens; en 1626, le marquis de
«Cresantin» l'a remplacé comme commendataire du prieuré.
Au possesseur de ce bénéfice appartenait le droit de nomination à la cure de Reignier; il désignait aussi la
portion congrue qui devait revenir au curé. Claude Sonnerat (voir note (722) de la page précédente) obtint en 1599
une Bulle réglant cette part d'une manière définitive. Philibert Argentier y fit opposition, mais dut céder en 1602.
(Archives de la Visitation d'Annecy, Collection J. Vuÿ, et Mém. de l'Acad. Salés., tome XXIII, passim.)
1 C'est par erreur que le nom patronymique de Hugon a été considéré précédemment comme un prénom. La famille
Hugon, dite Pergod, fut affranchie par les seigneurs dont elle était taillable en 1508, puis en 1592. Dans l'acte de 1599,
Noël est qualifié «noble et spectable.» (Archives de la Visitation d'Annecy, Collection J. Vuÿ.)
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17.7 Page 167

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Quand vous desireres M. Rollant729 et maistre Nöé730, vous les aurés.
J'ay veu la lettre de M. Beybin731, qui ne m'a point estonné; au contraire, je l'eusse esté
extremement si, estans Savoyars et gens de bien, nous n'eussions point esté enviés en une si
heureuse faveur de nos Princes. La victoire demeure a ceux qui tiennent la place, et faut demeurer
en paix.
J'ay receu la lettre de Son Altesse732, par laquelle elle me commande ne rien mouvoir au
fait de M. Perret733 jusques a ce que je luy aye donné advis de ce qui m'en semble. Or, ne sçai
qu'escrire, sinon que si Son Altesse veut continuer le dessein d'employer ces prebendes pour
Thonon et Evian, ou la Bonneville, il faut qu'elle les treuve vacantes, et que l'on face solliciter a
Rome tout [225] ce quil faut pour faire reuscir le projet734. Je m'essayeray donq d'en escrire
aujourdhuy a sadite Altesse735; mays elle ne m'entendra pas si Monseigneur le Prince ne luy remet
en memoire le sujet.
O mon Dieu, quel bonheur si on peut restablir le service de sa divine Majesté en toutes ces
provinces! Mays pour Ripaille736 et pour la Congregation de Thonon, il n'est pas grand besoin que
de l'authorité de Son Altesse; car en l'un il ny a personne, et en l'autre on ne change rien, la Bulle
de Clement ordonnant que cette Congregation soit des Prestres de l'Oratoire737. Et quant a la
commission que Monseigneur le Nonce738 a pour la visite de la Sainte Mayson, s'il ne l'envoye,
tous-jours faudra-il que Son Altesse en soit advertie; car cette Mayson depend tellement des
bienfaitz de sadite Altesse, que, sans le concours de son authorité, malaysement pourroit on rien
faire effectivement. Il seroit donq besoin que l'on sceut ad quos fines ladite commisson tend, et en
communiquer avec Monseigneur le Prince; que si il le treuvoit bon, on pourroit par apres me
l'envoyer, et je l'executerois selon la necessité ou utilité739.
J'ay un desir extreme de servir monsieur Pernet740, mesme en la mauvaise affaire que son
cousin741 a avec [226] ce soldat; et y ay des-ja mis la main par l'entremise de monsieur de Mesme,
qui a fort heureusement gaigné sur ledit soldat quil se contentera de ses despens, la difficulté
n'estant plus que sur la quantité, laquelle je voy estre fort grande par la liste que j'en ay tiree, et
delaquelle, si je ne puis maintenant, au premier jour je vous envoyeray copie. Et ce qui m'oste
encor plus l'esperance de pouvoir servir monsieur Pernet en son desir, qui est digne de luy et du
729 Le chanoine Georges Rolland (voir tome XVI, note (437), p. 141).
730 Noël Rogeot, tailleur du saint Evêque. (Voir tome XIII, note (910), p. 337.)
731 Etienne Jarcellat-Beybin.
732 Voir à l'Appendice I cette lettre de Charles-Emmanuel, du 24 mai.
733 Rd Louis Perret, sacristain du prieuré de Contamine. (Voir ci-dessus, note (231), p. 55, et la lettre suivante.)
734 Le projet d'union du prieuré de Contamine à la Sainte-Maison de Thonon.
735 Vide Epist. seq.
736 Voir plus haut, note (675), p. 205.
737 La congrégation de Thonon n'était autre que la société des ecclésiastiques du Presbytère. Clément VIII avait, en
effet, déterminé, dans la Bulle d'érection (13 septembre 1599), que les sept prêtres séculiers garderaient les règles de
l'Oratoire de Rome. (Cf. tome XV, note (1116), p. 382.) Cette clause n'était pas observée, et l'Evêque de Genève, pour
remédier à ce défaut, cherchait à introduire les fils de M. de Bérulle à la Sainte-Maison. Il avait fait une première
démarche en 1617 (voir le tome précédent, note (248), p. 64), et en avait provoqué une autre en 1619 de la part du
Cardinal de Savoie auprès de la Cour de Rome, afin d'obtenir les permissions nécessaires. (Cf. La Nunz. di Francia,
vol. III, p. 408, lettre du cardinal Bentivoglio au cardinal Borghese, 30 juillet 1619.)
738 Mgr Pierre-François Costa.
739 Voir ci-dessus, Lettre MDCXXVIII, et note (574), p. 168.
740 Nous croyons pouvoir désigner Jean-Baptiste Pernet, de Cluses, conseiller de Son Altesse et, successivement,
secrétaire de Chancellerie (1608), de la Chancellerie criminelle (1612), du duc de Savoie (1617), enfin secrétaire d'Etat
et des Finances en 1620 et 1623. (Turin, Archives de la Chambre des Comptes, Registres des Patentes.)
741 Pierre, fils de Claude Pernet et de Nicolarde Rouge, naquit vers 1582; il eut «ce bonheur et honneur d'estre initié
aux sacrés Ordres a Rumilly,» des propres mains du Serviteur de Dieu. (Sa déposition, Process. remiss. Gebenn. (I),
ad art. 25.) De 1603 à 1612, il est régent au collège de Cluses, devient ensuite chanoine de la collégiale de La Roche,
occupe la cure d'Arâches de 1616 à 1629. Mais jusqu'en 1625, il fit desservir cette paroisse par un vicaire, M. de
Lachat, ce qui lui permit d'accompagner son saint Evêque dans le voyage de Lyon et d'Avignon (1622) et d'assister à
sa précieuse mort. M. Pernet fut curé-plébain de Cluses de 1629 à 1642, et reçut en 1630 la charge de surveillant
épiscopal au Bas-Faucigny; quatre ans plus tard, il se démit de son canonicat. (Cf. Lavorel, Mém. de l'Acad. Salés.,
tome XI, pp. 168, 188.)
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17.8 Page 168

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soin charitable quil a de ceux qui luy appartiennent, c'est que son cousin, M. le chanoyne, a ses
apprehensions si fortes, qu'il croid que sa partie a grand tort et luy en doit de reste; combien que
m'estant enquis le plus que j'ay peu de la verité, je treuve que c'est tout au contraire, et que ledit
sieur chanoyne Pernet a excedé fort scandaleusement, et que le bon M. Rogex742 l'a traitté avec un
respect duquel la partie a grandement a se plaindre. Mays qui le luy pourra persuader? En somme,
je m'essayeray en cett'occasion de tesmoigner a monsieur Pernet que ses recommandations ont tout
pouvoir sur moy.
Vous pouves penser de quell'affection j'honnore monsieur de Pezieu743, et comme je
regarde en verité toute [227] cette mayson la tout ainsy que si j'avois le bien d'estre l'un des freres.
Certes, j'estimerois madamoyselle de Beaufort l'une des plus heureuses femmes du monde, si
ell'estoit mariee avec luy. Mays il ny a moyen de le servir en cela par lettres; car d'un costé, je suis
engagé des il y a long tems pour M. de Saint Agné, frere de monsieur de Lucei744, et d'autre part
je sçai que les lettres n'ont nul pouvoir sur l'esprit de cette damoyselle, qui est si pleine de
considerations qu'il faut parler, et de presence l'esclarcir des repliques que son esprit luy fournit745.
Je verray neanmoins de quel biays je pourray prendre quelque occasion de servir ce cher frere,
utilement et [228] efficacement, par l'entremise de mes amis et par toute sorte de bons offices.
Mays je vous suplie, faites quil me pardonne si je ne luy escris pas pour ce coup, car je n'en puis
plus.
742 Philibert Roget, vicaire général pour Jean-François de Sales absent. (Cf. le tome précédent, note (1075), p. 329.)
743 «J'ay toujours faict profession et exercice de gentilhomme,» déclare François de Longecombe de Peyzieu en
déposant (1656) pour la béatification de l'Evèque de Genève, «par l'employ des charges que j'ay eu pour le service de
la Serenissime Maison de Savoye, et en divers temps, de capitaine d'infanterie, d'aide de camp..., de colornnel de deux
mille hommes de pied, de mareschal de camp tant en des corps d'infanterie que de cavalerie, d'ambassadeur envoyé
par Madame Royalle...au Roy tres chrestien son frere, et en Flandres a la Reyne sa mere, au cardinal Infant..., et autres,
pour divers sujetz.» (Process. remiss. Gebenn. (II), ad art. 2.) Cadet de la famille de Peyzieu (voir tome XV, note
(557), p. 181), François était né en 1591. Il fit ses études à Lyon, au collège des Jésuites, et les inquiétudes qu'il donna
alors à ses parents lui valurent, de la part du Saint, qu'il ne connaissait pas encore, «une lettre toutte pleine de bons,
aymables et amyables advertissements pour» le «remettre dans le trein de mieux employer le temps.» (Process. remiss.
Gebenn. (I), ad art. 27.) Cette lettre est perdue, hélas! comme les autres plus de trente qu'il reçut, ainsi que sa
femme, du Serviteur de Dieu. Il le vit pour la première fois en 1609, et dés lors le fréquenta familièrement, autant que
le lui permettaient ses séjours en Piémont. A la charité et à l'amitié de François de Sales, M. de Peyzieu dut la réussite
de son mariage avec Jeanne-Aimée de Beaufort (voir tome XVII, note (919), p. 268). Celle-ci étant morte le 20 avril
1643, François de Longecombe épousa (20 novembre 1643) cousine-germaine de sa première femme, du même nom
qu'elle (tome XVIII, note (354), p. 99), baronne de Confignon, veuve de Charles-Emmanuel de Menthon. Une seconde
fois veuf, en 1645, François contracte une troisième alliance, avant 1648, avec Claudine, fille de Jacques de Blonay.
Il meurt avant le 18 mai 1675.
744 Charles de Mareste, marquis de Saint-Agneux, et Louis, son frère, baron de Chevelu, Lucey et Chanaz, étaient fils
de Jean de Mareste et de Jeanne de Rubod d'Yenne. Louis, l'aîné, gentilhomme de la Chambre de Son Altesse, était
marié depuis 1610 à Marguerite Perrucard de Ballon. En 1654, sa baronnie de Lucey fut érigée en marquisat. Il mourut
en mai 1663.
Charles, n'ayant pas été agréé de Mlle de Beaufort, épousa (contrat dotal du 17 décembre 1623) Catherine
d'Arod. Il fut député par son prince à Paris en 1633, pour les affaires du duc de Nemours. Son testament est de janvier
1655.
745 Le condescendant Evèque disait vrai, et M. de Peyzieu, plein de reconnaissance, lui rendait plus tard ce témoignage:
«Son incroyable bonté et charité luy fesoit mettre la main a la plume pour escrire» de cette affaire «la ou il falloit, et
aultant de fois que je l'en requerois. Il s'incommodoit pour m'escoutter sur» ce projet «tout aultant que si ce fut esté
pour quelque chose de plus grand poix.» Et parlant de Mlle de Beaufort, il ajoute: «Elle l'a maintefois esté voir et
consulter longuement pour ce subject. Il s'est aussy vouleu incommoder de la venir voir...a son logis pour sortir cest
esprit des combatz ou il estoit et me mettre dans l'eclercissement de ce que je devois esperer...Tout cela n'estoit que
acte de charité nompareille, car les seulles considerations humaines n'estoyent pas cappables de l'y obliger.» (Process.
remiss. Gebenn. (I), ad art 27.)
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M. de Granier l'aisné me prie pour sa verrerie746. J'ay receu le paquet du P. General des
Feuillans747. Nous attendons nos Peres Barnabites et M. le premier President pour ces festes748.
Nostre Seur Marie pourra venir quand il luy plaira749. Hier la tres bonne Mme de Granieu arriva, et
sera icy ces deux jours suivans; ce n'est pas sans parler de vous avec affection750.
Dieu, par sa bonté, vous conserve, mon tres cher Frere, mon ami.
2 juin 1620. [229]
M. de Brescieu a desiré que le curé de Bellecombe l'accompaignast, et je n'ay pas eu grande
difficulté a le luy accorder, car, jusques a ce que ce curé change d'humeur, son absence sera plus
utile que sa presence751.
A Monsieur
Monsieur de Boysi, premier Aumosnier de Madame,
J'ay parlé a M. de Mesme qui prend a grand honneur ma pensee,
et je le treuve tous-jours plus a mon gré.
Revu sur l'Autographe conservé à la Visitation de Turin752.
MDCLIX. Au duc de Savoie, Charles-Emmanuel Ier. A quoi
employer les prébendes de Contamine
Annecy, 2 juin 1620.
Monseigneur,
Vostre Altesse, qui m'avoit commandé de faire recevoir le neveu du sacristain Perret a
Contamine,.me commande par un'autre lettre de ne le point faire jusques a ce que je luyaye donné
746 Pierre de Granier, frère aîné du chanoine Denis (cf. les tomes XII, note (470), p. 201, et XVII, note (1093), p. 325),
marié en 1594 à Isabeau Gay, avait fait bâtir dans la ville d'Yenne une verrerie; il obtint, par patentes du 18 mai 1622,
le privilège d'être le seul en Savoie à fabriquer et vendre «touttes sortes de verres de cristal» à meilleur prix que les
étrangers, sauf les verres de Venise.
747 D. Sens de Sainte-Catherine (voir tome XVII, note (171), p. 39).
748 Les PP. Jean-Baptiste de Gennari et Candide Poscolonna, partis le 23 avril pour assister à Milan au Chapitre général
(voir ci-dessus, Lettres MDCXI., MDCXLI), en revinrent le 6 juin, veille de la Pentecôte. Le président Favre ne put
venir (voir ci-après, Lettre MDCLXI, p. 233).
749 La cour de France et celle de Savoie ne désignaient Mlle Humbert que sous le nom de «Sœur Marie.» Sa vertu, sa
modestie, sa persévérance à porter l'austère costume du Tiers-Ordre de Saint-François de Paule, lui avaient valu cette
dénomination. Elle était née à Besançon, vers 1585, de Jacques Humbert et de Françoise Coulon. Choisie par Mme de
Saint-Georges, gouvernante des Enfants de France, pour la seconder dans sa charge, elle s'acquit l'estime de Henri IV
et de Marie de Médicis, et l'affection des princes ses élèves, surtout du dauphin, plus tard Louis XIII. Quand l'Evêque
de Genève vint à Paris en 1619, Mlle Humbert se plaça sous sa direction, et durant le voyage de Christine de France,
qu'elle accompagna à Turin, elle sut si bien prendre son temps que pas un jour ne se passa sans un entretien avec le
saint Prélat. A l'étonnement général, elle quitta le monde en octobre 1620, et se retira au monastère de la Visitation
d'Annecy, où elle devint Sœur Marie-Françoise le 28 décembre suivant. Elle fit profession le 30 décembre 1621, et en
1625 la Mère de Chantal l'emmenait comme Supérieure à la fondation d'Evian, transférée ensuite à Thonon. Les
Monastères d'Embrun, de Pignerol, de Crest, de Valence, le second d'Annecy, jouirent aussi de sa prudente conduite,
et ses filles de Thonon voulurent encore l'avoir pour Mère malgré son grand âge. Elle avait quatre-vingts ans quand
elle termina pieusement sa vie, le 27 mai 1664. (Voir sa biographie dans l'Année Sainte de la Visitation, tome VII, p.
703.)
750 Cf. ci-dessus, note (505), p. 142.
751 Sébastien Blanchin avait succédé à son oncle Claude, comme curé de Bellecombe, en septembre 1602. Depuis
1597, il était recteur de la chapelle de Notre-Dame du Puys à Saint-Jorioz (R. E.), et n'en avait pas plus de soin que
de sa cure; le saint Evêque put le constater à la visite de 1618. (Voir Mém. de l'Acad. Salés., tome XVI, 1893, p. 250.)
752 L'adresse seule se conserve à la Visitation d'Annecy; elle appartient bien à cette lettre, comme le montre la phrase
ajoutée par le Saint après sa fermeture. (Cf. ci-dessus, p. 223.)
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mon advis753. Et partant, Monseigneur, je supplieray Vostre Altesse de se resouvenir de l'heureux
dessein qu'ell'a d'employer les praebendes de ce prieuré-la pour l'establissement des lectures de
theologie et du Novitiat des Peres Barnabites754, puisque il est si malaysé [230] de mettre la
reforme en un Heu ou il ny a pour encor aucun sujet capable de l'introduire, et tout a fait destitué
de bastimens.
Et sur cela, Vostre Altesse me favorisera de ses commandemens, que j'attendray et recevray
avec l'obeissance que je luy doy,
Monseigneur, comme
Son tres humble, tres obeissant et tres fidele
orateur et serviteur,
FRANÇS, E. de Geneve.
2 juin 1620, Annessi.
Revu sur l'Autographe conservé à Turin, Archives de l'Etat.
MDCLX. A la Comtesse de Rossillon755 (Inédite). Une
supplication que la destinataire est priée d'appuyer. La
vocation à l'état ecclésiastique doit procéder de libre volonté.
Annecy, 2 juin 1620.
Madame,
Voyla donq la lettre que j'escris a Monseigneur le Prince Cardinal ensuite du desir de
Monsieur le Prothonotaire du Laurey, qui n'est guere moins mon frere que le vostre en mon
affection756; mays vostre parole animera ma supplication affin qu'elle reuscisse.
Ce pendant, vives tous-jours, Madame, joyeuse, devote et heureuse, avec le contentement
de voir vostre nouveau filz, auquel je souhaite, certes de tout mon cœur, beaucoup de
benedictions757. [231]
Monsieur vostre frere le plus jeune758 m'a grandement tesmoigné de ne vouloir nullement
estre ecclesiastique, non seulement par sa façon de vivre, mais par la priere quil m'a faite de
supplier madame sa mere759 d'avoir aggreable qu'il en quitte la robbe. C'est dequoy j'escris donq
la ci jointe; et m'est advis que l'on n'aura que du desplaysir si on le veut porter a contrecœur en une
vocation en laquelle il faut tant de bonne volonté. Favorises-le donq encor de vostre intercession
pour cela, Madame, et moy, de vostre bienveuillance continuelle, puis que continuellement je suis
Vostre tres humble parent et serviteur,
FRANÇS, E. de Geneve.
2 juin 1620.
A Madame
Madame la Comtesse de Rossillon.
753 Voir la lettre précédente, p. 225, et à l'Appendice I, les lettres de Charles-Emmanuel, 13 et 24 mai 1620.
754 Voir le tome précédent, Lettre MCCCLXXIII, p. 117, et ci-dessus, p. 187.
755 Hélène-Ferdinande de Maillard-Tournon (voir le tome précédent, note (1169), p. 356).
756 Marc-François de Malarmay, beau-frère de la destinataire (voir ci-dessus, note (471), p. 132), désirait accompagner
le saint Evêque qui, à la suite du Cardinal de Savoie, espérait se rendre à Rome. (Voir ci-dessus, note (648), p. 194, et
la lettre suivante, p. 234.)
757 Nous ne connaissons que deux fils de la comtesse de Rossillon, Jean-Baptiste et Maurice, tous deux vivants en
1641, mais nous ignorons la date de leur naissancê. (Inventaire somm. des Archiv. du Jura, p. 128, E 1000.)
758 Sanche-Marc-Prosper de Maillard, baron de Tournon. (Voir tome XV, note (969), p. 341.)
759 Philiberte de Beaufort, comtesse de Tournon.
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Revu sur l'Autographe conservé à la Visitation de Wilmington (Etats-Unis).
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MDCLXI. Au Chanoine Jean-François de Sales, son frère
(Inédite). Contradictions au sujet des Bulles du futur Evêque de
Chalcédoine. Pourquoi le Saint n'a pu accepter de prêcher le
Carême à Lyon. Salutations et nouvelles. Quelqu'un qui
veut être du voyage de Rome pour entretenir à loisir François de
Sales
Annecy, 6 juin 1620.
Et moy, mon tres cher Frere, il faut bien que je corresponde et que j'escrive le plus que je
pourray. Je croy que ce petit ahurtement (que l'on mette dans vos Bulles: «la nomination de Son
Altesse») ne sera pas de duree, puisque [232] on ne l'a jamais mis. Et de dire que monsieur le
Comte de Verrue ayt conillé pour obtenir plus aysement le chapeau, c'est chose impertinente; car
mes Bulles furent expediees en un tems auquel monsieur l'Abbé Scaglia estoit si jeune, ou plustost
si enfant, que son pere ne pouvoit avoir cette pensee760. Il faut attendre en patience, et deux ni trois
moys ne sont pas considerables sur une affaire de telle qualité.
Je voy bien le voyage de Rome incertain761, mais il ny a pas moyen de mesnager entre la
volonté de Son Altesse que je le face, en cas quil se face, et la qualité de la chaire de Lyon qui ne
peut demeurer en attente d'estre prouveue; de sorte que j'ay fait mes excuses762.
Je salue infiniment madame de Saint George763, que j'honnore sans fin, et la signora Donna
Genevra, ma tres chere fille. Item, nostre frere le bon P. D. Juste, duquel j'attens des nouvelles par
nos Peres Barnabites au premier jour764.
Nous attendions M. le premier President pour ces festes, mais son indisposition nous a
privés de ce bien jusques a [233] ce quil ayt plus de santé765. Vous aures sceu la blesseure du sieur
Bonfilz, qui est grande a ce qu'on dit, mais je ne croy pas quil en ayt autre chose que le mal766.
J'escris a madame la Comtesse de Rossillon767 a qui monsieur de Lauré, que nous vismes
a Paris, a despeché ce laquay sur le voyage de Rome, desirant estre du train de Monseigneur le
760 Par plusieurs lettres échangées entre la cour de Piémont et son ambassadeur, Philibert-Alexandre Scaglia (Turin,
Archives de l'Etat, Roma, Lettere Ministri, Mazzo 31; voir à l'Appendice II), nous apprenons que la Chancellerie
romaine se refusait à reconnaître au duc de Savoie le droit de nomination, et à en insérer la mention dans les Bulles
de Jean-François. Au moins voulait-elle qu'on en produisît des exemples, et pour cela réclamait les Bulles de l'Evêque
actuel de Genève; elles donnèrent raison aux jurisconsultes de Rome. Victor-Amédée protesta en vain que l'omission
de «la nomination de Son Altesse» dans ces pièces devait être une erreur de la Chancellerie; François de Sales
reconnaissait justement qu'on n'avait jamais fait cette mention, et qu'on ne pouvait accuser le comte de Verrua,
ambassadeur en 1599, de connivence par motif d'ambition. Philibert-Gérard Scaglia (voir tomes XII, note (191), p.
105, et XVII, note (643), p. 181) prétendit, en effet, au chapeau de cardinal pour son fils Philibert-Alexandre (voir
tome XVII, note (696), p. 197); mais ce fut seulement lors de son voyage à Paris. Il mourut «au plus beau» de son
dessein, écrit Bentivoglio (La Nunziatura di Francia, vol. III, p. 344); ses démarches, celles de son fils le marquis de
Caluso, n'eurent aucun succès. Ni la cour de France ni celle de Savoie ne voyaient de bon œil l'avancement de cet
homme, et Borghese y répugnait encore plus.
761 Voir ci-dessus, pp. 194, 199.
762 Cf. ibid., p. 199.
763 Jeanne de Harlay, dame de Saint-Georges (voir le tome précédent, note (1259), p. 391.)
764 Voir ci-dessus, note (748), p. 229.
765 A cette date, en effet, Antoine Favre, comme il l'écrira quelques jours plus tard au duc de Savoie, souffrait «non
seulement» de «l'indisposition ordinaire de» sa «jambe, mais aussy» de «certaines langueurs extraordinaires» qui lui
«faisoient tenir chambre et» l'empêchaient de s'acquitter des fonctions de sa charge. (Mugnier, Correspondance du
Président Favre, tome II, publié par la Société savoisienne, etc., 1906.)
766 Les blessures devaient être assez sérieuses, puisqu'au mois de septembre le trésorier Horace Bonfils (voir tome
XVII, note (683), p. 194) s'excusait «de ne pouvoir encor aller a cheval, ny mesmes faire» le voyage de Chambéry à
Turin «en chaire ou en littiere.» (Lettre du président Favre au duc de Savoie, 9 septembre 1620, Mugnier, ubi supra.)
767 Cette lettre, écrite depuis quatre jours (voir ci-dessus, p. 231), mais sans doute après celle de la même date à Jean-
François, avait attendu le départ d'un nouveau courrier pour Turin.
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18.3 Page 173

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Cardinal768. C'est un homme admirable en l'amour quil me porte, et l'affection quil a de m'entretenir
pendant le voyage luy donne de la peine. Or, il escrit donq sur ce sujet, dont vous n'aures a faire
autre semblant.
Nous attendrons Seur Marie; quand elle viendra nous en serons consolés769. Toute nostre
mayson se porte bien. Le Pere Fichet vient faire les praedications de ces festes770. Je suis
parfaitement joyeux des bons deportemens de mon neveu771 et des contentemens que monsieur
l'Abbé a donné de ses deportemens772. J'ay parlé a monsieur le Prieur de Mesme, qui se sent obligé
et desire grandement lhonneur; et ne croy pas que nous puissions mieux rencontrer, tant pour la
mine que pour le jeu773. [234] J'envoyay hier le P. Chavasse en Bornand, pour cette quinzaine en
laquelle ilz gaignent le Jubilé774.
Mays voyla nos messieurs du Chapitre qui me viennent prendre pour Vespres. Je suis donq
Vostre tres humble frere.
La veille de Pentecoste 1620.
Je salue infiniment madame de Sarsenasq775 et nos autres dames, et monsieur du
Chatelard776. Le bon monsieur Fornand mourut le 3 de ce moys777.
A Monsieur
Monsieur de Boysi,
premier Aumosnier de Madame.
Revu sur l'Autographe conservé à la Visitation de Palerme (Sicile). [235]
768 Voir la lettre précédente.
769 Mlle Humbert ne vint qu'en octobre. (Voir ci-dessus, note (749), p. 229.)
770 Dans une lettre postérieure (voir p. 247), le saint Evêque loue le talent oratoire du P. Alexandre Fichet, de la
Compagnie de Jésus. (Voir tome XVII, note (819), p. 236.)
771 Très probablement Melchior de Sales (voir ci-dessus, pp. 81 et 138).
772 Gaspard Perrucard de Ballon, abbé de Chézery, venait de faire son quartier comme aumônier de la princesse de
Piémont. (Voir ibid., note (303), p. 78.)
773 Voir ibid., Lettre MDCLVIII, et note (720), p. 223.
774 Balthazard Chavasse naquit aux Echelles en 1560 et mourut à Porentruy en 1634. Il avait passé cinquante-quatre
ans dans la Compagnie de Jésus, tant dans la Province de France où il fut surtout employé à l'enseignement à
l'Université de Pont-à-Mousson, que dans celle de Bavière, où il se livra particulièrement au ministère de la prédication
et de la confession. C'était un Religieux strict observateur de ses Règles, vertueux et zélé, tellement ardent au travail
qu'il cessa d'écrire seulement trois jours avant sa mort, et succomba, non à la maladie, mais à une complète extinction
de forces. Le P. Chavasse a composé plusieurs ouvrages estimés, entre autres le suivant: Antidote de la confession de
foy des Eglises prétendues reformées en France,... dédié ail Reverendissime et Illustrissime François de Sales,
Evesque de Geneve, Prince du S. Empire. A Lyon, chez Louys Muguet, en rüe Merciere, MDCXVI. (D'après son
article nécrologique, Archives de la Cie de Jésus, et Abram, L'Université de Pont-à-Mousson, Paris, 1870, pp. 331-
333.)
775 Fille du comte Bernardin Parpaglia et de Marguerite Langosco, Anne-Violante Parpaglia avait épousé en 1611
Jean-Baptiste Della Rovere, seigneur de Cercenasco (Sarsenasq en patois piémontais). Le duc de Savoie lui fit alors
une dot de quatre mille écus d'or pour récompenser son dévouement comme «Dame de chambre» des Infantes. Veuve
lors du testament de sa mère (11 juin 1627), Mme de Cercenasco est en 1638 première dame d'honneur de Christine de
France. Le dernier document qui nous parle d'elle est un brevet de 1640, par lequel le duc de Savoie lui accorde une
pension annuelle de quatre mille livres d'argent à cause de ses longs et affectueux services. (D'après des documents
conservés à Turin, Archives de la Chambre des Comptes et Archives de l'Opéra pia Barolo.)
776 Pierre François de Rossillon, l'un des aumôniers de la princesse Christine. (Voir ci-dessus, p. 79.)
777 Voir ibid., note (718), p. 222.
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18.4 Page 174

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MDCLXII. A la Mère de Bréchard, Supérieure de la Visitation
de Moulins. Prochain départ de quelques Sœurs pour Moulins,
Paris, Orléans. Une lettre qui mettrait l'Evêque «bien en
peine.» Avis sur les Règles de saint Augustin. Les
monastères des Filles de la Visitation en voyage. On ne peut
faire la Profession avant la fin de l'année du noviciat
Annecy, 9 juin 1620.
Ainsy que ces bons Peres me venoyent dire a Dieu778, j'ay receu vostre lettre, ma tres chere
Fille, du 22 may, a laquelle je respons vistement.
L'obedience de Monseigneur de Lyon suffira pour toutes, puisque vous estes sous sa
direction et authorité maintenant779; car, quant a mon consentement, vous l'aves des-ja. Nous
ferons partir nos Seurs au plus tost, mais non pas, a l'aventure, si tost que vous desireries; car nous
n'en voudrions pas faire deux trouppes, et il en faut pour Paris, et Orleans encores780. Mays vous
seres si proches, que quand vous series contrainte de partir avant l'arrivee de celle qu'on y envoyera
pour Moulins781, vous la pourres [236] bien instruire, outre que ma Seur de Chatelut soustiendra
bien pour un peu782.
J'escriray pour M. le General783 si tost que je pourray, et au moins par la Seur qui ira-la,
laquelle nous voudrions estre grandement excellente; mais il est malayse d'en treuver de telles. Je
seray bien en peine si M. le Mareschal de Saint Gerand m'escrit, ce quil n'a pas fait jusques a
present; Dieu me donnera la response, s'il luy plait784.
778 Le 10 juin 1620, le P. Jean-Baptiste de Gennari et le frère Rémi Gosset, Barnabites, partaient d'Annecy pour se
rendre à Montargis (voir ci-dessus, note (624), p. 187). Sur leur route se trouvait Moulins, et ils furent les porteurs de
cette lettre à la Mère de Bréchard (voir tome XIV, note (263), p. 86).
Le frère Rémi, picard d'origine, et déjà ancien profès, était venu d'Italie au collège Chappuisien en octobre
1614.
779 Pendant la vacance du siège d'Autun (1612-1621), Mgr Denis-Simon de Marquemont gouverna le diocèse par droit
de régale. Il fallait son obédience pour autoriser la Supérieure de Moulins et quelques-unes de ses Sœurs à aller fonder
un Monastère dans la capitale du Nivernais.
La connaissance des préliminaires et des débuts de cet établissement est indispensable si l'on veut comprendre
les lettres du Saint se rapportant à ce sujet; des notes disséminées le long de la correspondance resteraient forcément
obscures et incomplètes; aussi nous donnons à l'Appendice III une vue d'ensemble de cette histoire, y renvoyant le
lecteur quand il sera besoin.
780 Voir ci-après, Lettres MDCLXVII, p. 251, et MDCLXXII, p. 263.
781 Sœur Paule-Jéronyme de Monthoux qui devait remplacer la Mère de Bréchard. (Cf. ci-après, Lettre MDCLXIV, p.
246.)
782 La Sœur Marie-Hélène de Chastellux, professe de Moulins, sera destinataire.
783 Nous retrouverons plus tard, parmi les correspondants du Saint, Nicolas de Palierne, trésorier général de France en
Bourbonnais.
784 Jean-François de la Guiche, seigneur de Saint-Géran, chevalier des Ordres du Roi et gouverneur du Bourbonnais,
était fils de Claude de la Guiche et de Suzanne des Serpens. Veuf en 1614 d'Anne de Tournon, dame de la Palisse,
qu'il avait épousée en 1595, il se remaria, en octobre 1618, avec Suzanne aux Espaules, veuve de Jean, seigneur de
Longaunay. Le 16 mars suivant, il donnait sa démission du gouvernement du Bourbonnais, que prit à sa place son fils
Claude de la Guiche, et, le 24 août, Louis XIII le nommait maréchal de France. Il mourut en son château de la Palisse,
le 2 décembre 1632. (D'après Moreri, 1740, tome IV, et l'Inventaire somm. des Archiv. de l'Allier, tome I, pp. 140,
141.)
Mme des Gouffiers, en 1616, gagna la protection du gouverneur à la Visitation de Moulins (voir tome XVII,
note (882), p. 256, et Appendice I, p. 411); et quand il eut connu la Mère de Bréchard, son estime pour cette sainte
Religieuse doubla encore son intérêt pour le Monastère. Cette haute faveur fut bien un peu ouéreuse; lorsque le
maréchal apprit que la Supérieure de Moulins devait aller à Nevers, il s'y opposa formellement, et la lettre que l'Evêque
de Genève redoutait ne tarda pas à lui arriver.
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Les Regles sont imprimees a Lyon785, et croy que nos Seurs de Lyon en ont quantité de
copies. Il y a mille fautes, et sur tout celle la de la fin, ou, en lieu d'Approbation, on a mis Epilogue.
Encor qu'es Regles de saint Augustin il y en ayt qui ne sont pas pour ce tems, il ny a point de
danger de les lire, tant pour la reverence du Saint, que pour les bonnes consequences qu'on en peut
tirer.
Sil est possible, faites vous porter en carosse jusques a la porte de vostre monastere a
Nevers; et quoy qu'on vous aille au rencontre, ne descendes pas, et vous excuses sur ce que la
barque sur l'eau, ou le carrosse sur terre sont vos monasteres portatifz. Je ne croy pas qu'on vous
[237] y veuille faire des ceremonies; mays si on le veut, vous feres la guerre a l'œil, et l'esprit de
conseil vous enseignera ce qui sera requis.
Je vous envoyeray le Formulaire de la reception au Noviciat par la premiere commodité.
O ma Fille, il ny a pas moyen d'escrire davantage, non pas mesme a ma tres chere grande
fille de Paris786, a laquelle neanmoins je dis icy qu'il faut qu'elle ne desire plus la Profession avant
l'annee, par ce que cela est impossible. Elle sera asses professe, puisque elle sera si devote et
resignee, comme j'espere, et que par son entremise tant de filles parviendront a la veritable
devotion.
IX juin 1620, Annessi.
A ma tres chere Seur en N. S.,
Ma Seur Jane Charlotte de Brechard,
Superieure de la Visitation.
A Ste Marie de Moulins.
Revu sur l'Autographe appartenant à M. le comte Allard du Chollet, à Paris.
MDCLXIII. A Madame des Gouffiers787. Perplexité au sujet d'une
âme. Les tendances d'esprit et de caractère qui lui rendraient
périlleux le séjour dans le monde; aversion qui l'éloigne de la vie
religieuse. Quel état mitoyen elle peut embrasser.
Souvenir attristé d'un temps de ferveur. Les procès, «tres
mauvaise occupation.» Etre pauvre plutôt que de s'enrichir
par cette voie.
Annecy, 9 juin 1620.
Cet aymable esprit que j'ay veu en vous quelques moys durant, tandis que vous esties en
cette ville, ma tres chere Fille788, ne reviendra il jamais dans vostre cœur? [238] Certes, quand je
voy comme il en est sorti, je suis en grandeperplexité, non devostre salut, car j'esperequevous le
feres tous-jours, mays de vostre perfection, a laquelle Dieu vous appelle et n'a jamais cessé de
vous appeller des vostre jeunesse. Car, je vous prie, ma tres chere Fille, comme vous pourrois je
conseiller de demeurer au monde? Avec ce tres bon naturel que veritablement je connois en vous
dans le fond de vostre cœur, mays accompaigné d'une si forte inclination a la hauteur et dignité de
785 Voir le tome précédent, note (1335), p. 418.
786 Mme du Tertre.
787 Toutes les particularités du texte indiquent clairement pour destinataire Elisabeth Arnault des Gouffiers. (Voir tome
XV, note (972), p. 343.)
788 L'ancienne Religieuse du Paraclet avait, on le sait, passé quatorze mois (juin 1613-août 1614) à la Visitation
d'Annecy. (Voir tome XVI, notes (82), p. 15, et (727), p. 225.)
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vie, et a la prudence et sagesse naturelle et humaine, et de plus, d'une si grande activité, subtilité
et delicatesse d'entendement, que je craindrois infiniment de vous voir dans le monde! n'y ayant
point de condition plus dangereuse en cet estat-la que le bon naturel environné de telles qualités;
auxquelles si nous adjoustons cette incomparable aversion a la sousmission, il n'y a plus rien a
dire, sinon que, pour aucune consideration, quelle qu'elle soit, il ne faut pas que vous demeuries
au monde.
Mais d'ailleurs, comme pourrois je vous conseiller d'entrer en Religion, tandis que non
seulement vous ne le desires pas, mais aves un cœur tout a fait contrariant a ce genre de vie?
Il faudra donq chercher une sorte de vie qui ne soit ni mondaine ni religieuse, et qui n'ayt
ni les dangers du monde ni les contraintes de la Religion. On pourra bien, ce me semble, obtenir
que vous puissies avoir l'entree en quelque Mayson de la Visitation, pour vous recueillir souvent
en cette façon de vie, et que neanmoins vous n'y demeuries pas attachee, ains ayes un logis proche
pour vostre retraitte, avec la seule sujetion de quelques exercices de devotion propres a vostre
bonne conduitte; car ainsy vous aures la commodité de contenter vostre esprit, qui hait si
estrangement la sousmission et liayson a l'obeissance, qui a tant de peine a rencontrer des ames
faites a son gré, et qui est si clairvoyant a treuver les a dire et si douillet a les ressentir.
Oh! quand je me remetz en memoire le tems heureux auquel je vous voyois, a mon gré, si
entierement despouillee de vous mesme, si desireuse des mortifications, [239] si fort affinee a
l'abnegation de vous mesme, je ne puis que je n'espere de le revoir encor.
Quant a vostre sejour, je vous en laisse le choix; pour le mien, je croy qu'il ne sera qu'en ce
païs-la, apres le voyage de Rome dont je seray de retour a Pasques ou environ, si je le fay789. Mais
pourtant, faites un bon choix de lieu ou vous puissies estre bien assistee.
Puisque vous le voules, je traitteray avec monsieur N.790 O Dieu, que je desire ardemment
et invariablement que vos affaires se passent sans proces! car en somme, l'argent que vos
poursuites mangeront vous suffira pour vivre et, en fin de cause, qu'y aura il de certain? Que sçaves
vous que les juges diront et determineront de vostre affaire? Et puis, vous passeres vos meilleurs
jours en cette tres mauvaise occupation, et vous en restera peu pour estre employés utilement a
vostre principal objet; et Dieu sçait si, aprrs un long tracas, vous pourres ramasser vostre esprit
dissipé, pour l'unir a sa divine Bonté. Ma Fille, ceux qui vivent sur la mer, meurent sur la mer: je
n'ay guere veu de gens embarqués dans les procrs, qui ne meurent dans cet embarras. Or, voyes si
vostre ame est faite pour cela, si vostre tems sera dignement destiné a cela: je veux dire, prenes M.
Vincent791, examines bien avec luy toute cette affaire et coupes court. Ne veuilles pas estre riche,
ma tres chere Fille; ou du moins, si vous ne le pouves estre que par ces miserables voyes de proces,
soyes pauvre plustost, ma tres chere Fille, que d'estre riche aux despens de vostre repos.
Vous devies faire hardiment vostre confession generale, puisque vous ne pouvies accoyser
vostre conscience autrement, et qu'un docte et vertueux ecclesiastique vous le conseilloit. [240]
Mays il ne m'est pas loysible d'escrire davantage, ravi par les affaires, pressé par le depart
de ce porteur. Dieu soit au milieu de vostre cœur. Amen.
Le 9 juin 1620.
789 Malgré les désirs de beaucoup qui appelaient le saint Evêque soit en France, soit à Turin, il ne songeait, lui, qu'à
demeurer en Savoie. Il n'eut pas même à s'en éloigner pour le voyage de Rome qui ne se fit pas, nous l'avons déjà dit.
790 Probablement l'un des beaux-frères de Mme des Gouffiers, Paul de Damas, baron d'Anlezy (voir tome XVI, note
(725), p. 225), ou Jean-François-Antide de Garadeur, seigneur de l'Ecluse (cf. ibid., note (1364), p. 419). C'est en effet
avec ses sœurs qu'elle se débattit par d'interminables procès.
791 Saint Vincent de Paul (voir ci-dessus, note (545), p. 155).
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MDCLXIV. Au Chanoine Jean-François de Sales, son frère.
Entreprise à l'avantage de Son Altesse, proposée par Louis de
Sales. Comment préparer doucement la réalisation du projet
d'Antoine Favre pour son fils. Les qualités du président de la
Valbonne. Nouveau prétendant à la charge d'aumônier de la
princesse de Piémont. Bien qui résulterait de l'élection de
Jean-François au doyenné de Notre-Dame. Cinq cents écus
qu'on n'arrive pas à retirer. Le Monastère de Turin et les
fondations de France. Une traduction de Philothée.
Grande alarme parmi les Religieuses non réformées du diocèse
de Genève. Prédicateur de grandissime talent
Annecy, vers le 10 juin 1620792.
Vous verres, par la lettre et le memoire de nostre frere, la proposition qu'il desire estre faite
a Son Altesse ou a Monseigneur le Prince. Or, il a une grande esperance que, par ce moyen, il
rendra un bon et fructueux service a la coronne, car ceux qui entendent en l'affaire l'asseurent
qu'ell'est fort bonne et digne d'estre entreprise. Pour moy, je le desirerois bien fort, et croy que Son
Altesse n'ayant rien a delivrer presentement, ni mesme a l'advenir, ains seulement a authoriser
maintenant l'entreprise et tirer a l'advenir presque tout le fruit de ce travail, elle accordera volontier
ce qu'on demande; dequoy ce garçon apportera response, puisqu'il va expres pour cela793. [241]
Monsieur le premier President794 voyant que sa jambe ne luy pourra guiere meshuy
permettre d'aller aux audiences, avoit fait une pensee de supplier Son Altesse de vouloir donner
son office a son filz, M. de la Valbonne, qui l'exerceroit des a present et sans autres gages que ceux
quil a, pendant la vie de son pere, apres laquelle il succedast aus gages comm'a l'estat. Or, pour
parvenir a cela, il seroit requis d'user de praeparatifz, en quoy vous pouvés obliger l'un et l'autre
es occasions; comme seroit de faire naistre des propos parmy lesquelz vous puissies, par ci parla,
jetter dans l'esprit de Leurs Altesses et de Madame les conceptions suivantes:
Que M. le premier President est le plus grand jurisconsulte de ce tems, et que c'est
dommage quil ne puisse plus si aysement meshuy prononcer les arretz et se treuver a toutes
occasions comm'il faysoit; que sa maladie luy donne egalement cette incommodité et presque
asseurance de longue vie, puisque elle le decharge des humeurs peccantes; que c'estoit une belle
chose, es occurrences, de le voir haranguer et representer le Senat. Puys, que M. de la Valbonne
paternise en cela, qu'il est grandement conscientieux; quil harangue heureusement et fait fort bien
toutes sortes de complimens; qu'il preside merveilleusement bien et prononce avec beaucoup de
792 C'est à tort que la note (27), p. XXIII du tome III de notre Edition, qualifie de fausse la date de 1620. Tous les faits
mentionnés dans la présente lettre justifient au contraire ce millésime, et, de plus, indiquent les environs du 10 juin.
«Nous avons eu icy le P. Alexandre Fichet ces festes de Pentecoste,» dit le Saint; on sait déjà que cette fête se
rencontrait le 7 juin cette année-là.
793 Louis de Sales venait de faire ouvrir une mine dans ses terres; quelques jaloux en prirent occasion pour le calomnier
auprès de Charles-Emmanuel, comme si le gentilhomme cherchait, par cette «invention,» à «colorer une retraite qu'il
vouloit donner sous main à ceux de Genève.» Jean-François avertit promptement son frère du mécontentement du
duc, et il en reçut «une réponse si sage, si prudente,... si naïve et si chrétienne,» qu'elle suffit à dissiper les soupçons
du prince. Celui-ci envoya au baron de Thorens des «lettres patentes pour ces minieres,» qui s'accrurent l'année
suivante d'une nouvelle dans «la Vallée-du-Sillon.» L'intention «qui le poussoit à ce dessein,» assure de Hauteville,
«fut l'intérêt du Prince, l'utilité du peuple et la gloire de la Savoye.» (La Maison naturelle de St Fr. de Sales, Paris,
1669, Partie II, pp. 313-316.)
794 Antoine Favre.
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grace les arrestz; quil est fort docte; qu'il a esté dix ans au Senat, trois ans juge mage et trois ans
President icy, et que, par ces degrés, il s'est acquis une grande habitude a bien distribuer la justice;
quil a environ 38, aage de maturité et propre pour rendre beaucoup de service. Et ainsy semblables
choses, lesquelles sont fort veritables; de sorte que, sans doute, il ny en [a] pas un au Senat qui
peut mieux [242] succeder que luy; car les uns sont si vieux quilz n'en peuvent plus, les autres sont
bas de naissance et fort peu bien disans, les autres n'ont pas tant d'estude ni tant d'habilité. En
somme, toutes choses bien considerees, il ny en a pas un qui, a tout prendre, puisse mieux, ni certes
si bien reuscir en cette charge; car, a ce qu'on me dit, monsieur de Montouz est desiré en la
Chambre, et ne veut pas prsetendre ailleurs pour encor795.
Or, tout cela doit estre discretement, sagement et dextrement semé, comme pour
praeparatoire et disposition, es occurences; et M. le Premier espere que monsieur le Marquis de
Valromey796 contribuera bien a cet effect de son costé, et partant vous pourres bien en conferer
avec luy, mays il faut tenir le tout fort secret. Puis, M. le President estant icy, ou il espere tous-
jours de venir bien tost, il prendra resolution de ce quil aura a faire, et sur tout si vous me faites
sçavoir sil y pourroit avoir de l'apparence.
Je treuve M. le Prieur de Mesme fort a mon gré, propre, bonne mine, bon langage et bon
esprit, et des [243] moyens suffisans pour honnorer l'office797. Monsieur l'Abbé, que j'ay treuvé
fort refait et façonné798, m'a grandement prié de vous recommander M. le Prieur Curtet, que son
pere et ses parens desireroit (sic) grandement voir aumosnier de Madame; si donq vous le jugés a
propos, ce seroit bien fait de leur procurer ce contentement799.
Ces messieurs de Nostre Dame ont, par commune conspiration, un grand desir que vous
accepties le doyenné, estimans quilz ne sçauroyent mieux relever leur eglise800. Leur desir ne peut
nuire, et qui pourroit transporter nostre eglise en la leur, par les moyens et avec les articles
convenables, selon qu'on en a parlé ci devant801, non seulement je ne verrois point d'inconvenient
en cela, mais j'y treuverois beaucoup de bien; car, comme Doyen, vous gouverneries l'un des
Chapitres; comme Chantre, le chœur de l'un et de l'autre uni, et comm'Evesque, tous deux et tout
795 René Favre de la Valbonne (voir le tome précédent, note (230), p. 57) n'obtint pas la succession de son père qui fut
recueillie en 1623 par Hector Milliet, baron de Challes. Quant à Claude-Louis Guillet de Monthoux (voir tome XV,
note (177), p. 55), le 3 juin 1621, il prête serment en qualité de second président du Sénat.
796 Cinquième fils de Jacques d'Urfé et de Renée de Savoie, Honoré, marquis de Valromey, naquit à Marseille et y fut
baptisé le 11 février 1568. Il fit ses études chez les Jésuites de Tournon. Les possessions des d'Urfé en Piémont les
rendaient feudataires du duc de Savoie, tandis qu'ils étaient sujets du roi de France par leurs terres du Forez, du Bugey
et de la Bresse. Vaillant ligueur, lieutenant de Charles-Emmanuel de Genevois-Nemours, Honoré fut comme tel
emprisonné deux fois en 1595. Ses Epistres morales sont le fruit de sa détention; mais l'ouvrage qui lui valut le plus
de louanges de la part de ses contemporains, c'est l'Astrée, lu alors avec enthousiasme par la France et l'Europe. Il était
déjà composé quand, vers la fin de 1606, d'Urfé concourut avec ses deux amis, saint François de Sales et le président
Favre, à la fondation de l'Academie Florimontane. En 1600, il s'était fait relever de ses vœux de chevalier de Malte
pour épouser Diane Lelong de Chenillac, dame de Châteaumorand, dont le mariage avec Anne d'Urfé, son frère aîné,
avait été déclaré nul deux ans auparavant. Diane et Honoré se séparèrent ensuite à l'amiable. Le duc de Savoie, faisant
un nouvel appel à son dévouement, demanda en 1624 au marquis de Valromey de lui amener des troupes. Il partit, et
le 1er juin 1625, il mourait à Villefranche en Piémont, des suites d'une chute de cheval. (Cf. Auguste Bernard, Les
d'Urfé, souvenirs historiques et littéraires au XVIe et XVIIe siècles, Paris, 1889.)
797 L'office d'aumônier de la princesse de Piémont (voir ci-dessus, note (720), p. 223).
798 L'abbé de Chézery, Gaspard Perrucard de Ballon (cf. ibid., p. 234).
799 Toutes les recherches pour identifier le prieur Curtet et son père n'ont pas abouti. Les Registres des comptes
conservés à Turin (Archives de l'Etat) mentionnent souvent un Charles Curtet, valet de chambre du duc de Savoie, qui
reçut plus d'une fois de la libéralité du prince des dons en terres et en argent et, plus tard, le titre de comte pour lui-
même ou pour l'un de ses fils. «M. le Prieur» appartenait-il à la même famille?
800 La collégiale de Notre-Dame de Liesse (voir les notes (293) des tomes XIII, p. 101, et (340), XVI, p. 103) se
composait de douze chanoines, y compris le doyen, de douze bénéficiers ou prêtres d'honneur, de six enfants de chœur
avec leur maître de musique. La Bulle d'érection, donnée pendant le schisme par Clément VII, fut publiée le 31 août
1395. (Cf. Mercier, Souv. hist. d'Annecy, 1878, chap. VIII.)
Le titre de doyen appartenait alors à Benoît de Chevron (voir le tome précédent, note (544), p. 158) qui allait
le laisser vacant par sa profession religieuse à Talloires; il ne passa pas à Jean-François de Sales, mais à M. du
Châtelard.
801 Aucun document relatif à ce projet ne nous a été conservé.
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le clergé de la ville, parmi lequel on pourroit faire renaistre toute sorte de bonne discipline; et
vostre canonicat pourroit estre donné a mon neveu802. Mays ce [244] que je vous dis n'est que pour
sçavoir vostre pensee sur cette proposition, car ce pendant M. le Doyen achevera son noviciat.
Je suis grandement en peine des parroisses d'Armoy et Draillens pour lesquelles on ne
sçauroit avoir un liart, et ceux qui les servoyent, acablés de pauvreté et de dettes dont je suis
respondant, se sont retirés par force803. Monsieur le President d'Hostel804, qui me tesmoigne de
l'amitié autant que jamais, me dit qu'a l'advenir on sera payé annee par annee, mais que pour le
passé il faut treuver quelque moyen, que pourtant il ne void pas. Si vous voyes lieu d'en parler a
propos j'en seray bien ayse, car Monseigneur le Prince m'a tous-jours asseuré quil vouloit que nous
fussions payés; et c'est merveille que cinq cens escus coustent tant a retirer en un sujet si plein de
justice et de pieté.
J'ay bien envie de sçavoir que deviendra le Monastere de Turin, encor que je sois bien ayse
que ce retardement donne loysir a ma Seur Favre de fonder celuy de Clermont805, et a Mme de
Chantal celuy d'Orleans et de Nevers806. Nous avons esté contraint de destiner Mme de [245]
Monthouz a Moulins pour y estre Superieure, par ce que M. Grandis807 dit que si elle ne changeoit
d'air elle mourroit dans peu de semaines, comm'ell'a pensé faire ces jours passés, et l'office de
Maistresse des Novices occupoit trop son esprit, qui se portera mieux des affaires exterieures808.
Nous verrons si Mme la Signora Donna Genevra, ma tres chere Fille, viendra809. Je voudrois bien,
pour le service de Leurs Altesses et de nostre Maistresse810, que Mme de Saint George arrestast
encor quelques annees811.
Voyla un livre de l'Introduction en françois; le P. Antoniotti l'a bien mieux traduit qu'on
n'a pas fait a Rome812.
802 Probablement Etienne, fils de Gallois de Sales, tonsuré le 19 décembre 1615 et promu aux Ordres mineurs le 22
septembre 1618. Il entra chez les Bamabites, où il fut admis le 13 juin 1622; un mois après, il commençait son noviciat
à Thonon, et le 28 octobre recevait, avec l'habit religieux, le nom de Joseph. De là vient l'erreur de ceux qui ont donné
à Gallois de Sales deux fils Bamabites, Etienne et Joseph; les deux ne sont qu'un seul et même personnage. Le Novice
prononça ses vœux le 3 décembre 1623, entre les mains de D. Chrysostome Marliano; il avait vingt-trois ans. Ordonné
prêtre le 16 août-1626, D. Joseph passa ses quarante ans de vie religieuse dans les deux collèges de Savoie; en 1637,
on le trouve vicaire à celui d'Annecy. L'estime de ses Frères l'accompagna toujours, car «c'étoit un vray Israélite, sans
dol, sans'fraude, sans raffinement et sans artifice, tres-grand observateur de la pureté de sa Regle et de la pieté
religieuse.» Imitateur fidèle des vertus de son saint oncle, il eut l'incomparable joie d'assister aux fêtes de sa
béatification et d'entendre le récit de celles qui se firent à Rome lors de sa canonisation. Il n'attendait que cela, semble-
t-il, pour quitter ce monde. Après avoir célébré la Messe du nouveau Saint, son illustre parent, D. Joseph «courut dire
à son Superieur, avec un visage riant, qu'il s'en alloit mourir, luy demanda licence de se coucher au lit, et de recevoir
l'Extrème-Onction; ce qui fut fait, et peu de temps apres il trépassa.» (Stato personale della Congregazione, vol. E*,
b, Rome, Archiv. des PP. Barnabites; Acta Collegii Annessii; de Hauteville, La Maison naturelle de St Fr. de Sales,
Ire Partie, pp. 207-209.)
803 Voir le tome précédent, Lettres MCDLIX, MCDLX, et note (891), p. 270.
804 Catherin Gaultier, seigneur d'Hostel, troisième président à la Chambre des Comptes de Savoie. (Voir tome XIII,
note (1024), p. 380.)
805 Saint François de Sales veut sans doute parler ici de l'établissement de la Visitation à Montferrand (voir ci-dessus,
note (658), p. 198), car ses Filles ne furent reçues à Clermont qu'en septembre 1649.
806 La fondation de Nevers se fit le 21 juillet, et celle d'Orléans le 9 septembre de cette année 1620; la Mère de Chantal
n'y coopéra pas en personne.
807 Jean Grandis, médecin d'Annecy.
808 La Sœur Paule-Jéronyme de Monthoux (voir sa note plus loin) devait remplacer la Mère Jeanne-Charlotte de
Bréchard, destinée à la fondation de Nevers. Des difficultés multiples forcèrent à modifier ce plan, comme on le verra
dans la suite, et ce fut la Mère de Monthoux qui conduisit le nouvel essaim dans la capitale du Nivernais. (Voir à
l'Appendice III.)
809 Il avait été question pour Dona Ginevra Scaglia de venir commencer son noviciat à Annecy. (Voir le tome
précédent, note (607), p. 177, et Lettre MDIX, p. 362.)
810 La jeune princesse de Piémont.
811 Cf. ci-dessus, Lettre MDLXXX, p. 83.
812 Le P. Antoniotti, S. J., est destinataire le 16 août 1620. Voir au tome III de cette Edition, note (27), p. XXIII, le
titre complet de sa traduction de Philothée.
Par qui avait été faite celle de Rome? Toutes les recherches à ce sujet ont échoué. C'est probablement la
même que mentionnait le Saint an 1610, dans une lettre à Jacques de Bay (voir tome XIV, p. 292); elle dut être tirée
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J'attens de sçavoir des nouvelles de nostre P. General des Feuillens813, comm'aussi de nostre
monsieur l'Abbé d'Abondance814, selon l'advis que vous m'aves donné de son affaire, que je luy ay
fidelement envoyé. O mon Dieu, que Monseigneur le Serenissime Prince aura de benedictions si
la reformation se fait! Toutes ces bonnes Religieuses815 sont alarmees de ce que M. l'Abbé de [246]
Ceyserieu816 a dit a son retour qu'on les vouloit regler; les unes veulent prevenir en apparence,
mays n'ayant pas des Superieurs reformés, je ne sçai comme elles pourront faire. Ce sont des
tentations parfumees.
Nous avons eu icy le P. Alexandre Fichet ces festes de Pentecoste817, qui a des grandissimes
talens pour precher excellemment, je dis mieux que plusieurs dont on fait si grand estat.818
……………………………………………………………………………………………………..
Revu sur l'Autographe conservé à la Visitation de Turin.
MDCLXV. A M. Guillaume Rousselet819. Affaires
recommandées au duc de Nemours et dont l'Evêque de Genève
espère bonne issue. Le marquis de Lans outrepassant ses
pouvoirs, Louis de Sales, gardien du château d'Annecy.
Ce qui rend inutile l'intervention du Saint en faveur d'une
Novice. Commissions affectueuses.
Annecy, 11 juin 1620.
Monsieur,
Avec un extreme sentiment d'obligation, je vous rens graces du soin que vous aves eü des
affaires dont j'avois supplié Monseigneur de Nemours, et en espere bonne issue, si Sa Grandeur
en croid son Conseil de deça, car [247] elles sont toutes tres justes et selon Dieu820; ains, quant a
celle de monsieur de Vallon821, il ny a point de difficulté que il ny ayt obligation de conscience a
faire reparer le tort qu'on luy a fait tres manifestement. Apres donq que ces messieurs les officiers
auront deliberé sur l'advis qu'ilz en doivent donner, je feray une recharge de supplication a Sa
Grandeur.
à un petit nombre d'exemplaires et se repandit fort peu, car Jean-Baptiste Bidelli, l'éditeur milanais de la version du P.
Antoniotti, déclare dans sa dédicace (1621) que de son imprimerie sort la première traduction italienne, et le traducteur
lui-même paraît ignorer absolument que pareille œuvre ait été tentée avant lui.
813 D. Sens de Sainte-Catherine (voir tome XVII, note (171), p. 39).
814 Vespasien Aiazza (voir tome XIII, note (165), p. 48).
815 Les Religieuses des abbayes non réformées, entre autres celles de Sainte-Catherine, (Cf. ci-dessus, Lettre MDCXX,
et note (550), p. 157.)
816 Distraction du Saint, qui écrit Ceyserieu pour Chézery. Seysèrieux n'avait point d'abbaye; et c'était Gaspard de
Ballon, abbé de Chézery, qui était revenu de son quartier comme aumônier de Madame.
817 Voir ci-dessus, p. 234.
818 La fin manque.
819 Guillaume Rousselet, de même nom que son père, secrétaire du duc de Nemours, et plus tard conseiller du Roi et
contrôleur général de son domaine en la généralité de Paris, déclare avoir cinquante-neuf ans quand il dépose pour le
Procès de Béatification de l'Evêque de Genève (1628). Il le connut dès 1592, et depuis le revit souvent, soit en Savoie,
soit à Paris. Le Serviteur de Dieu l'honora, ainsi que sa femme (voir ci-dessus, Lettre MDCV, p. 128), d'une particulière
affection, et s'appliqua à leur faire faire «progrez et advancement en la perfection chrestienne.» (Process, remiss.
Parisiensis, ad art. 28.)
820 Voir ci-dessus, Lettre MDCXXXVII, p. 180, et les notes qui l'accompagnent.
821 Jacques de Gex, seigneur de Vallon (voir ibid., p. 181).
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Nous sommes parmi le passage des Espaignolz, pendant lequel monsieur le Marquis de
Lans a ordonné qu'on fit garde au chasteau de cette ville, et en avoit donné la charge a monsieur
de Monthouz; mais sur les remonstrances que ces messieurs du Conseil ont fait, il a revoqué cette
charge et l'a laissee audit Conseil, et nommement a mon frere de Thorens qui, en qualité de
chevalier dudit Conseil et officier de Monseigneur, en a presentement la garde822. Voyla nos
nouvelles.
La Superieure de Sainte Marie de Moulins m'escrivit, il y a quelque tems, que ce n'estoit
pas pour aucune infirmité corporelle que la niece que je luy avois tant recommandee luy sembloit
ne devoir pas estre retenue, ains pour l'extreme aversion qu'ell'avoit a tous les exercices de
Religion, laquelle aversion elle ne vouloit nullement surmonter, ains s'y laissoit tout a fait aller.
Despuis, elle ne m'en a point escrit, et pour moy, j'ay recommandé cette fille en sorte, qu'a mon
advis, rien que l'impossibilité de la retenir ne la fera renvoyer. J'escris a madame de Chantal, qui
en ayant appris plus de particularités, me les fera sçavoir affin que si on peut treuver quelque
remede on le face823.
Certes, j'apprehenderois plus cent fois vostre desplaysir que le mien propre, car je suis
parfaitement tout dedié a vostre bienveuillance et a celle de madamoyselle ma [248] fille824, a
laquelle je n'escriray pas pour cette fois, puis que j'ay des-ja trop retenu ce porteur qui devoit partir
hier matin si j'eusse peu escrire. Mays vous croires tous deux, je vous en supplie, que vous ne
sçauries jamais rencontrer un'ame qui vous honnore plus passionnement et constamment que moy,
qui suis,
Monsieur,
Vostre tres humble et tres affectionné serviteur,
FRANÇS, E. de Geneve.
Annessi, le XI juin 1620.
A ma fille Florence, mille benedictions825.
Je vous supplie, Monsieur, d'asseurer monsieur Lefevre826 que je l'honnore de tout mon
cœur et suis son serviteur; comm'aussi de prier monsieur et madame de Forax qu'ilz me favorisent
tous-jours de leur bienveuillance, car d'escrire il ny a plus de moyen.
A Monsieur
Monsieur Rousselet,
Secretaire du Roy et de Monseigr le Duc de Nemours.
Revu sur un fac-simile de l'Autographe, conservé à la Visitation d'Annecy. [249]
822 Voir ci-dessus, Lettre MDCLIII, p. 209, et les notes qui y sont jointes.
823 Le 9 juin, la Mère de Chantal écrivait de son côté à la Mère de Bréchard, Supérieure à Moulins: «M. Rousselet
craint fort que l'on renvoie sa nièce; je l'ai assuré que pour le corps on ne le ferait pas, pourvu que l'esprit aille bien.»
(Lettres, vol. I, p. 427.) Nous ne savons ce qu'il advint de la jeune fille, n'ayant pu découvrir son nom.
824 Mme Rousselet, femme du destinataire.
825 Dans sa déposition (ad art. 28), Guillaume Rousselet parle des «lettres que le Bienheureux Prelat» lui «a faict
l'honneur de» lui «escripre, et a» sa «femme, et mesmes a sa fille de chambre qu'il appelloit ses filles.» Florence est
sans aucun doute l'humble servante avec qui l'Evêque de Genève ne dédaignait pas de correspondre.
826 Beau-père du destinataire (voir ci-dessus, note (463), p. 128).
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MDCLXVI. A la Mère de Chantal, a Paris. L'excellence et les
effets du don surnaturel d'intelligence. Quel don le complète
Annecy, vers le 15 juin 1620827.
O que puisse je, ma tres chere Mere, bien recevoir et employer le don du saint entendement,
pour penetrer plus clairement dans les saintz mysteres de nostre foy! car cette intelligence assujettit
merveilleusement la volonté au service de Celuy que l'entendement reconnoist si admirablement
tout bon, et dans lequel il est enfoncé et engagé: en sorte que, comme il n'entend plus qu'aucune
chose soit bonne en comparayson de cette Bonté, aussi la volonté ne peut plus vouloir aymer
aucune bonté en comparayson de cette Bonté, ainsy qu'un œil qui seroit planté bien avant dans le
soleil ne peut envisager d'autre clarté.
Mais parce que, tandis que nous sommes au monde, nous ne pouvons aymer qu'en bien
faysant, parce que nostre amour y doit estre actif, comme je diray demain au sermon, Dieu aydant,
nous avons besoin de conseil, affin de discerner ce que nous devons prattiquer et faire pour cet
amour qui nous presse; car il n'est rien de si pressant a la prattique du bien que l'amour celeste. Et
affin que nous sachions comme il faut faire le bien, quel bien il faut preferer, a quoy nous devons
appliquer l'activité de l'amour, le Saint Esprit nous donne son don de conseil.
Or sus, voyla nostre ame bien partagee, avec un bon [250] partage des dons sacrés du Ciel.
Le Saint Esprit qui nous favorise, soit a jamais vostre consolation. Mon ame et mon esprit l'adorent
eternellement! Je le supplie qu'il soit tous-jours nostre sapience et nostre entendement, nostre
conseil, nostre force, nostre science et nostre pieté, et qu'il nous remplisse de l'esprit de la crainte
du Pere eternel.
Ce ne fut pas sans vous que nous celebrasmes cette sainte feste de la Pentecoste; car je me
souviens fort de la sainte devotion que vous aves a cette solemnité.
FRANÇS, E. de Geneve.
827 Le 7 juin 1620, fête de la Pentecôte, la Mère de Chantal, après avoir, selon la coutume de l'Institut, tiré au sort les
dons du Saint-Esprit, sans oublier son Bienheureux Père, lui écrivait: «Voilà celui de l'entendement que la divine
Providence vous a marqué pour cette année... Il m'est échu celui de conseil.» (Lettres, vol. I, p. 423.) La réponse du
Saint doit être des environs du 15. Dans la première édition, elle porte la date du 29 mai 1622; serait-ce parce que le
texte renferme quelque chose d'une autre lettre de cette époque? La dernière phrase pourrait bien, en effet, avoir été
accrochée.
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MDCLXVII. A la Mère de Chastel, Supérieure de la Visitation
de Grenoble. Préparation d'une pieuse caravane pour la France.
Une âme fortement attachée aux choses intérieures a
quelquefois de la peine à se rendre attentive aux extérieures.
Quelques conseils pratiques. Le livre de la Volonté de Dieu,
et le danger de l'imagination jointe à l'amour-propre.
Plusieurs décisions pour la clôture, non encore établie au
Monastère de Grenoble. — Aimable mot sur la sœur de la
destinataire. Supprimer les réflexions, les examens inquiets,
et marcher avec confiance et abandon. Pourquoi cette lettre
ne part qu'après coup. Encore un mot de paix
Annecy, 13-20 juin 1620.
Voyla que des avant hier nous sommes dans le choix des filles qu'il faut envoyer en France,
ma tres chere Fille. Et nostre Mere m'escrit que vous luy en donneres une, et la Mayson de Lyon
une autre, qui, avec les huit que nous en fournirons, feront le nombre qu'elle desire. Mais je ne
sçay pas encor comme nous ferons pour aller prendre la vostre828. Or, on y pensera; et ce pendant,
[251] parmi ce tracas, je vous respons, ma tres chere Fille, le plus courtement que je pourray.
Je voy en cette Seur Anne Marie je ne sçay quoy de bien bon et qui me plaist829. Il y a un
peu d'extraordinaire qui doit estre consideré sans empressement, affin qu'il n'y arrive point de
surprise ni du costé de la nature, qui se flatte souvent par l'imagination, ni du costé de l'ennemi,
qui nous divertit souvent des exercices de la solide vertu pour nous occuper en ces actions
specieuses. Il ne faut pas treuver estrange qu'elle ne soit pas si exacte a faire ce qu'elle fait; car
cela arrive souvent aux personnes qui sont attachees a l'interieur, et ne se peuvent tout a fait si bien
ranger en toutes choses. De sorte qu'en un mot, il faut empescher qu'elle ne face grand cas de ces
veuës, de ces sentimens et douceurs, ains que, sans faire beaucoup de reflexion sur tout cela, elle
face en simplicité les choses auxquelles on l'employe. On la pourra retirer de la cuisine, apres
qu'elle y aura encor servi quelque tems. O que cette cuisine est excellente et aymable, parce qu'elle
est vile et abjecte!
On peut retirer les Seurs du chœur au rang des Seurs Associees, et les Associees au rang
de celles du chœur, quand la rayson le requiert, ainsy qu'il est dit des Seurs Domestiques au premier
chapitre des Constitutions.
828 Annecy ne fournit que sept Religieuses: la Sœur Claude-Agnès Joly de la Roche, chef de la petite troupe, et les
Sœurs Paule-Jéronyme de Monthoux, Marie-Gasparde d'Avisé, Marie-Michelle de Nouvelles, Marie-Françoise Bellet,
Françoise-Jacqueline de Musy et Anne-Marguerite Clément. (Voir ci-après, Lettre MDCLXXII.) Sœur Marie-
Constance de Bressand, professe de Grenoble (voir le tome précédent, note (1059), p. 323), fut amenée à Annecy par
sa Supérieure elle-même, qui ne retourna en Dauphiné qu'après le 9 juillet. Quant à Sœur Françoise-Jéronyme de
Villette, que devait donner la Maison de Lyon (voir tome XVII, note (578), p. 159), elle se vit retenue à Moulins.
829 Native de Romans, Sœur Anne-Marie Arseney, reçue au Monastère de Grenoble en qualité de Sœur Domestique,
fit profession en 1621. Les «incommodités et tornoyements de teste...que le feu luy» causait déterminèrent les
Supérieurs à user de charité, et ils l'admirent au rang des Sœurs Choristes. D'après les conseils du saint Fondateur, on
considéra ce qu'il y avait d' «un peu extraordinaire» en elle, et la Mère de Chaugy nous assure (Vie manuscrite) qu'
«en suite de ses dévotions l'on l'a exercee a beaucoup de mortifications.» Elle mourut très pieusement à trente-huit
ans, en ayant passé douze dans la vie religieuse.
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Si je vay a Rome830, je m'essayeray de servir madame de Sautereau en son desir831. [252]
De sçavoir quand, es contratz, il est requis que le Pere spirituel soit present ou non, cela
depend de la nature des contratz, car il y en a ou cela est requis, et des autres ou cela n'est pas
requis; comme l'Evesque en quelques contratz a besoin de la presence de son Chapitre, en des
autres non. C'est aux gens d'intelligence de marquer cela es occasions, car on n'en sçauroit faire
une regle generale. Il y a quelquefois de l'incommodité, mays on ne sçauroit comme l'oster sans
tomber en une plus grande.
Que M. d'Ulme se nomme vostre Pere spirituel ou non, dans les contratz, cela ne fait ni
froid ni chaud832; car ce nom la se peut entendre en diverses sortes.
On peut laisser lire le livre de la Volonté de Dieu jusques au dernier, qui, estant asses
inintelligible, pourroit estre entendu mal a propos par l'imagination des lectrices833, lesquelles,
desirant ces unions, s'imagineroyent aysement de les avoir, ne sachant seulement pas que c'est.
J'ay veu des femmes Religieuses, non pas de la Visitation, qui, ayant leu les livres de la Mere
Therese, treuvoyent par leur conte qu'elles avoyent tout autant de perfections et d'actions d'esprit
comme elle, bien qu'elles en fussent bien esloignees; tant l'amour propre nous trompe834.
Cette parole: «Nostre Seigneur souffre en moy telle ou telle chose,» est tout a fait
extraordinaire; et bien que Nostre Seigneur ayt dit quelquefois qu'il souffroit en la personne des
siens, pour les honnorer, si est ce que nous ne devons parler si avantageusement de nous mesmes;
car Nostre Seigneur ne souffre qu'en la personne [253] de ses amis et serviteurs fideles, et de nous
vanter ou prescher pour telz, il y a un peu de presomption. Souvent l'amour propre est bien ayse
de s'en faire accroire.
835Quand le medecin doit entrer dans le monastere pour quelque malade, il suffit quil ayt
licence au commencement par escrit, et elle durera jusques a la fin de la maladie; le charpentier et
masson, jusques a la fin de l'œuvre pour laquelle il entre.
836Si je vay a Rome, je procureray la clausure pour la Mayson de Grenoble, c'est a dire
l'establissement en tiltre de Monastere, bien que il ne soit pas absolument necessaire, car
Monseigneur de Grenoble pourra l'establir quand il luy plaira, puisque la Mayson d'Annessi,
delaquelle est derivee celle la, l'est. Et je pense qu'au plus tard il seroit expedient que cela se fit
quand on ira au nouveau monastere837.
Je treuveray bon, sil se peut bonnement, qu'on retranche le manger de seculieres dans la
mayson a la reception des filles. Tandis que les femmes pourront entrer dans la mayson, il est
raysonnable que les estrangeres soyent preferees.
830 Voir ci-dessus, note (789), p. 240.
831 Marie Gibert, veuve de François de Sautereau (voir le tome précédent, note (139), p. 25), désirait peut-être assurer
à un membre de sa famille la transmission de l'abbaye de Boscodon, possédée alors par son beau-frère Abel. Ce
bénéfice passa en effet à François, puis à Michel de Sautereau.
832 Cf. ci-dessus, Lettre MDCXXXIV, p. 176.
833 La première édition du livre du P. Benoît de Canfeld, Capucin (voir tome IV, note (3), pp. VIII et IX), parut en
1609, à Paris, avec ce titre: Reigle de perfection contenant un bref et lucide abrégé de toute la vie spirituelle, reduite
à ce seul point de la Volonté de Dieu, divisé en trois Parties. Nonobstant cette annonce, la troisième Partie manquait;
on la trouve dans les éditions suivantes; la «cinquiesme, reveue et corrigée,» est de 1610, tant elles se succédèrent
rapidement. Les traductions en anglais, latin, italien, etc., ne se firent pas attendre. Malgré ce succès, la Règle de
perfection fut comprise, en 1689, dans les condamnations portées par l'Inquisition romaine contre les ouvrages
entachés de quiétisme. Le P. Benoît avait lui-même hésité longtemps à publier son livre, la troisième Partie surtout,
déclarant qu'on ne devait la lire qu'avec le consentement de son directeur. (Voir dans le Dictionnaire de Théologie,
tome II, col. 718, l'article du R. P. Edouard d'Alençon, Capucin.)
834 Cf. Les Vrays Entretiens, Entretien IX (tom.VI, p. 139).
835 Le second feuillet de l'Autographe a été retrouvé; il commence ici.
836 Ce qui suit est inédit, jusqu'au dernier alinéa de cette page: «Vostre chemin est tres bon...»
837 Voir ci-dessus, note (518), p. 146. Le saint Fondateur n'ayant pu se rendre à Rome, ce fut Michel Favre qui,
délégué par son Evêque l'année suivante, traita auprès du Saint-Siège l'affaire de l'érection «en tiltre de Monastere»
pour toutes les Maisons de la Visitation. Un Mémoire présenté à cet effet par le cardinal Maurice de Savoie, sera
donné plus tard.
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Ma Seur Claude Cecile est une bonne fille, au gré de la Superieure et de Monseigneur qui
l'ayme bien838.
Vostre chemin est tres bon, ma tres chere Fille, et ny a rien a dire, sinon que vous alles trop
considerant vos pas, crainte de choir. Vous faites trop [de] reflexions sur les saillies de vostre
amour propre, qui sont sans doute frequentes, mais qui ne seront jamais dangereuses tandis que,
tranquillement, sans vous ennuyer de leur importunité ni vous estonner de leur multitude, vous
dires non. [254] Marches simplement, ne desires pas tant le repos d'esprit, et vous en aures
davantage.
Dequoy vous mettes vous tant en peine? Dieu est bon, il void bien qui vous estes. Vos
inclinations ne vous sçauroyent nuire, pour mauvaises qu'elles soyent, puisque elles ne vous sont
laissees que pour exercer vostre volonté superieure a faire un'union a celle de Dieu plus
avantageuse.
Tenes vos yeux haut eslevés, ma tres chere Fille, par une parfaite confiance en la bonté de
Dieu. Ne vous empresses point pour luy, car il a dit a Marthe quil ne le vouloit pas839, ou du moins
quil treuvoyt meilleur qu'on n'eut point d'empressement, non pas mesme a bien faire. N'examines
pas tant vostre ame de ses progres, ne veuilles pas estre si parfaite; mays, a la bonne foy, faites
vostre vie dans vos exercices et dans les actions qui occurrent de tems en tems. Ne soyes point
soigneuse du lendemain840. Quant a vostre chemin, Dieu qui vous a conduit jusques a present vous
conduira jusques a la fin.
841J'escriray a nos Seurs Marie Marguerite et Marie Françoise au premier jour842, car il faut
aller celebrer les Ordres. Amen. Vive Jesus! Amen.
XIII juin 1620.
Ma Fille, je ne sceu jamais donner cette lettre a ceux qui estoyent venus aux Ordres, car ilz
partirent trop tost843.
Demeures tout a fait en paix, sur la sainte et amoureuse [255] confiance que vous deves
avoir en la douceur de la Providence celeste. Amen.
20 juin 1620.
A ma tres chere Fille en N. S.,
Ma Seur P. Marie de Chastel,
Superieure de Ste Marie.
A Grenoble.
Revu en partie sur l'Autographe appartenant à M. l'abbé L. Eberlé,
curé d'Amance (Haute-Saône).
838 C'est de son affection paternelle pour la propre sœur de la destinataire, Claude-Cécile de Chastel (voir ci-dessus,
note (517), p. 145), que le Saint parle ici aimablement.
839 Luc., X, 41, 42.
840 Matt., VI, ult.
841 Les deux alinéas suivants ont été supprimés dans toutes les éditions, qui rattachent immédiatement à ce qui précède
la phrase: «Demeures tout a fait en paix...» et y ajoutent, en laissant la date de côté, un fragment qui appartient au
mois d'octobre 1621.
842 Sœur Marie-Marguerite Milletot (voir tome XV, note (55), p. 6) et la Sœur de Glézat, dont le vrai nom était Anne-
Françoise et non Marie-Françoise (voir tome XVIII, note (649), p. 192).
843 Outre deux jeunes gens admis à la tonsure, douze clercs de Grenoble prirent part à l'Ordination, faite par François
de Sales dans l'église de Sainte-Claire, le samedi des Quatre-Temps de la Pentecôte, 13 juin 1620. Trois reçurent les
Ordres mineurs, et l'un de ceux-ci, Jean Mollard, fut encore élevé au sous-diaconat avec un autre dauphinois. Antoine
Bugnet, Jean Sauveur et Jean Marcel furent ordonnés diacres; enfin il y eut quatre prêtres: Félicien Boffin (voir ci-
après, note (848), p. 257), Pierre Thomasset, Pierre Bonnet et Pierre Guichon. (R. H.)
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MDCLXVIII. A Madame de Granieu. Providentiel mélange des
douceurs parmi les amertumes. «Petite prise» inopinée entre
l'Official et un ordinand. — Une mortification pour les Sœurs
qui s'en vont en France. Trois lois «pour ne point pecher en la
chasse.» L'amitié des enfants de Dieu
Annecy, 16 ou 20 juin844 1620.
Vous voyes, ma chere Fille, de quelle confiance j'use avec vous. Je ne vous ay point escrit
despuis vostre depart845 parce que je n'ay peu bonnement le faire, et je ne vous en fay point
d'excuses parce que vous estes veritablement et de plus en plus ma plus que tres chere fille.
Dieu soit loué dequoy vostre retour s'est fait bien doucement et que vous aves treuvé
monsieur vostre cher mary tout allegé846. Certes, cette celeste providence du Pere celeste traitte
avec suavité les enfans de son cœur et, de tems en tems, mesle des douceurs favorables parmy les
amertumes fructueuses avec lesquelles il les fait meriter.
847Je suis marri dequoy je ne caressay pas asses le filz [256] de monsieur d'Argenson, mais
la presse des Ordres ne me le peut permettre848. Et de plus, mon Official849 et luy eurent une petite
prise inopinement, sur ce qu'il s'estoit presenté aux Ordres non tondu ni tonsuré, ni barbe a la façon
d'icy, qui l'a fait retourner un peu mescontent; non pas qu'il me l'ayt tesmoigné a moy, mais il le
tesmoigna a d'autres en partant. En somme, il y a tous-jours beaucoup a faire a donner
promptement et a recevoir amiablement la correction.
Nous envoyerons sur le commencement du mois prochain, 7 ou huit Seurs en France,
lesquelles, comme je pense, passeront a Grenoble850; et voyla une mortification pour elles dequoy
elles ne vous y treuveront pas, et particulierement pour la Seur Claude Agnes851, qui en vain s'en
res-jouissoit grandement.
Or sus, ma tres chere Fille, saches, je vous supplie, que ce m'est une grande consolation de
recevoir souvent de vos lettres, et que mon ame cherit grandement ces tesmoignages de la dilection
que la vostre a pour elle.
Monsieur Michel852 me demandoit ce que j'avois escrit a monsieur le Grand sur le sujet de
la chasse; mais, ma tres chere Fille, ce ne fut qu'un article par lequel je luy disois qu'il y avoit trois
loix selon lesquelles il se failloit gouverner pour ne point offencer Dieu en la chasse853. [257] La
1. de ne point endommager le prochain, n'estant pas raysonnable que qui que ce soit prenne la
recreation au despens d'autruy, et sur tout en foulant le pauvre paisan, des-ja asses martirisé
844 La copie que nous reproduisons, à défaut de l'Autographe, porte pour quantième: 16 juin, et l'édition de 1626: 20
juin. Quelle est la vraie date, on ne saurait le dire, mais il est à peu près sûr que cette lettre partit le 20, avec la
précédente.
845 Arrivée à Annecy le 1er juin, Mme de Granieu en dut partir le 5. (Voir ci-dessus, p. 229.)
846 François de Gratet, seigneur de Granieu. (Voir le tome précédent, note (769), p. 219.)
847 Cet alinéa, les deux suivants et le dernier, sont inédits.
848 A l'Ordination du 13 juin (voir ci-dessus, note (843), p. 255), le saint Evéque avait conféré la prêtrise à Félicien,
fils de Félicien de Boffin, seigneur d'Argenson, La Sône, Moydans, avocat général au Parlement de Grenoble (1581),
marié le 12 janvier 1584 à Urbane du Vache. Il teste le 14 septembre 1628 et meurt en 1631.
Quant au jeune ecclésiastique, il fut seigneur de Moydans, prieur de La Sône et chanoine de Saint-André de
Grenoble. (R. E., et Notes de M. le comte de Terrebasse.)
849 Philibert Roget (voir tome XI, note (559), p. 249).
850 Voir ci-dessus, note (828), p. 251. Les voyageuses ne s'arrêtèrent pas à Grenoble.
851 Sœur Claude-Agnès Joly de la Roche.
852 M. Michel Favre, aumônier du Saint. (Voir tome XVII, note (722), p. 208.)
853 Dans le Mémorial et l'Examen de conscience que le saint Evêque adresse, en 1613, à Roger de Bellegarde (voir
tome XVI, note (212), p. 56), il explique dans quelles conditions on peut se livrer au plaisir de la chasse, mais le
second point exposé dans la présente lettre y est seul traité. C'est donc probablement à un autre écrit également destiné
à son fils spirituel, et assez récent peut-être, qu'il est fait allusion ici.
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d'ailleurs et duquel nous ne devons mespriser le travail ni la condition. La 2. de ne point employer
a la chasse le tems des festes signalees esquelles on doit servir Dieu, et sur tout prendre garde de
ne point laisser pour cet exercice la sainte Messe es jours de commandement. La 3. de ne point y
employer trop de moyens, car toutes les recreations se rendent blasmables quand on les fait avec
profusion. Je ne me souviens pas du reste. En somme, la discretion doit regner par tout.
Or sus, ma tres chere Fille, Dieu soit a jamais au milieu de vostre cœur pour unir toutes vos
affections a son saint amour. Amen. Ainsy a il, je vous asseure, mis en mon esprit une tres amiable
et tout a fait entiere affection pour le vostre que je cheris incessamment, priant Dieu quil le comble
de benedictions. Ainsy soit il, ma tres chere et tous-jours plus tres chere Fille. Amen.
Le.. juin 1620.
Ce soir madame de la Flechere est arrivee, qui m'a dit l'ayse qu'elle eut de vous voir. O ma
Fille, les enfans de Dieu s'entr'ayment tous-jours bien; soyons le bien donq, ma tres chere Fille, et
aymons nous bien a son gré; et certes, j'ay une non pareille consolation de sentir en mon cœur cette
toute sincere et incomparable dilection pour le vostre, ma tres chere Fille. Or cela est vray.
Revu sur une copie appartenant à M. le baron d'Yvoire,
au château d'Yvoire (Haute-Savoie). [258]
MDCLXIX. Au Prince de Piémont, Victor-Amédée. Un projet
concernant Genève. Prière d'écouter favorablement le porteur
Annecy, 25 juin 1620.
Monseigneur,
Je croy que parmi la multitude des affaires importantes que Son Altesse peut avoir pour le
bien de sa coronne et consolation de ses Estatz, il y en a peu qu'elle doive affectionner plus
fortement que celle que je proposay a Vostre Altesse quand j'eu l'honneur d'estre aupres d'elle au
chasteau de cette ville, pour le retirement de cette autre ville, par voye douce, paysible et
asseuree854. Or voyla, Monseigneur, un homme, sujet naturel de Son Altesse, qui, sans sçavoir mes
pensees, m'a communiqué un veritable dessein qui fait une partie de ma proposition.
Je supplie tres humblement Vostre Altesse, ains, si elle me le permet, je la conjure par sa
propre bonté et par son bonheur, de l'oüir promptement et favorablement, et de donner des
maintenant un bon commencement a ce saint projet, puis que il ny a rien a perdre, mais tout a
gaigner et encor plus a esperer, par la bonne issue que Dieu en donnera a Vostre Altesse, selon les
vœux universelz de tous les gens de bien et mes continuelles prieres pour la prosperité de la
coronne de Son Altesse et la vostre,
Monseigneur, de qui je suis
Tres humble, tres obeissant et tres fidele orateur
et serviteur,
FRANÇS, E. de Geneve.
25 juin 1620.
Revu sur l'Autographe conservé à Turin, Archives de l'Etat. [259]
854 Voir tome XVII, p. 274, Lettre MCCXXXII. Nous ne savons rien du projet; mais l'année suivante, le cardinal
Ludovisi, protecteur de la Savoie, envoyait le P. Corona (ibid., note (710), p. 203) solliciter Louis XIII d'aider Charles-
Emmanuel à recouvrer Genève.
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MDCLXX. A Madame de Geneve, abbesse de Baume-Les-
Dames. Un pieux dessein du marquis de Lullin, non réalisé.
Combien important de se préparer de bonne heure à la mort.
Espérance déçue du saint Evêque. Pourquoi il se réjouit de la
nomination de son frère
Annecy, juillet 1620855.
Il est vray, Madame ma tres chere Mere, que feu monsieur le Marquis vostre frere avoit
desseigné de me faire une entiere confession generale de toute sa vie, pour prendre de moy les
advis convenables pour en employer le reste plus ardemment au service de Dieu; mais je ne revins
pas asses tost pour luy rendre cet office, puisque Dieu l'appella avant mon depart de Paris, avec la
grace qu'il luy fit de bien recevoir ses divins Sacremens.
O ma tres chere Mere, que c'est une diligence bienheureuse que celle que l'on prend de se
bien disposer au depart de cette vie, puisque le tems en est incertain! et quand l'estat religieux
n'apporteroit aucun autre bien que celuy la, d'une continuelle preparation au trespas, ce ne seroit
pas une petite grace.
Aymés tous-jours bien ma pauvre ame, ma tres chere Mere, car elle est certes toute vostre;
pries souvent pour elle, affin que la misericorde divine la reçoive en sa protection parmi tant de
hasars et destroitz ou cette vocation pastorale la fait passer.
Je pensois que quand Son Altesse donna son placet856 [260] et ses faveurs a mon frere pour
le faire estre mon coadjuteur, comme il est maintenant (devant estre consacré Evesque de
Chalcedoine a cet effect dans un mois857, a Turin ou il est), j'aurois quelque moyen de retirer le
petit bout de vie qui me reste pour me mettre en equipage et me disposer a la sortie de ce monde;
mais je voy que pour le present je ne puis l'esperer, d'autant que Son Altesse et Madame veulent
que ou mondit frere ou moy soyons aupres de leurs personnes, en sorte que l'un estant icy, l'autre
soit la. Voyes donq, ma chere Mere, si j'ay besoin de vos supplications devant Nostre Seigneur;
car si la charge episcopale est perilleuse, la residence de la cour ne l'est guere moins.
Cependant, vous voyes comme je respans devant vostre cœur maternel mes pensees fort
naïfvement. Et faut que j'adjouste que cette coadjutorie a esté donnee a mon frere sans que je l'aye
demandee ni fait demander, ni d'une façon ni d'autre; ce qui ne m'est pas une petite consolation,
parce que, n'y ayant rien du mien que le consentement, j'espere que Nostre Seigneur l'aura plus
aggreable.
Or sus, Madame ma tres chere Mere, Dieu soit a jamais au milieu de vostre cœur et du
mien, duquel je suis sans fin,
Vostre tres humble et plus obeissant filz, frere
et serviteur,
F., E. de Geneve.
855 On ne peut douter que cette lettre n'ait été écrite à Marguerite de Genève, sœur du marquis de Lullin. (Voir tome
XV, note (751), p. 262.)
C'est seulement le 26 juillet 1620 que le Saint annonce à la Mère de Chantal le titre du nouvel Evêque, son
coadjuteur; donc ces lignes dans lesquelles est nommé l'«Evesque de Chalcedoine,» ne peuvent être de beaucoup
antérieures, si elles ne sont postérieures. Ne peut-on pas, avec vraisemblance, les rapprocher de l'anniversaire de la
mort du marquis de Lullin (23 juin 1619)? C'est à cette occasion, sang doute, que Marguerite de Genève aura rappelé
au saint Prélat les désirs de son frère. (Voir la note de celui-ci, tome XI, p. 285.)
856 Le 12 février 1620. (Voir à l'Appendice II.)
857 Ce sacre fut différé jusqu'à l'année suivante. (Voir ci-dessus, note (531), p. 151.)
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MDCLXXI. A Madame de Villeneuve. Tendresse surnaturelle et
paternelle. Réponses à des cas de conscience
Annecy, 4 juillet 1020.
C'est la verité que non seulement vous estes ma tres chere fille, mais c'est la verité aussi
que tous les jours [261] vous l'estes davantage en mon ressentiment; et Dieu soit loué dequoy non
seulement il a creé en mon ame un'affection veritablement plus que paternelle pour vous, mais
dequoy il a mis l'asseurance que vous en deves avoir dedans vostre cœur. Et certes, ma tres chere
Fille, quand en m'escrivant vous me dites par fois: Vostre tres chere fille vous cherit, et que vous
me parles en cette qualité, je confesse que j'en reçois un contentement admirable. Croyes-le bien
et dites-le bien, je vous supplie, que vous estes tres asseurement ma tres chere fille, et n'en doutes
jamais.
Ce que vous dites pour sauver un peu de bien temporel ne fut pas un mensonge, ains
seulement un'inadvertence, de sorte que tout au plus ce ne peut estre qu'un leger peché veniel; et,
comme vous m'escrives, encor y a-il de l'apparence qu'il ny en eut point du tout, puisque il ne s'en
ensuivit aucune injustice contre le prochain.
Ne faites nul scrupule, ni petit ni grand, de communier avant que d'avoir ouy la Messe, et
sur tout quand il y aura une si bonne cause que celle que vous m'escrives; et quand il ny en auroit
point, encor ni auroit pas seulement une veritable ombre de peché. Et tenes vostre ame tous-jours
en vos mains858, ma tres chere Fille, pour la bien conserver a Celuy qui, pour l'avoir rachetee,
merite luy seul de la posseder. Qu'il soit a jamais beni. Amen.
Certes, je suis tres parfaitement vostre en luy, et
Vostre tres humble serviteur, et a la chere Seur859,
et a toute vostre mayson,
FRANÇS, E. de Geneve.
4 julliet 1620.
A Madame
[Madame] de Villeneuve,
chez Monsieur d'Interville, son pere860.
Paris.
Revu sur l'Autographe conservé à la Visitation de Caen. [262]
858 Ps. CXVIII, 109.
859 Hélène Lhuillier.
860 François Lhuillier, seigneur d'Interville, que nous rencontrerons parmi les correspondants du Saint.
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MDCLXXII. A la Mère de Chantal, a Paris. La Sœur d'Avisé
jointe à la petite troupe des partantes. Election d'une
Assistante-commise au Monastère d'Annecy. «Loup par
nature, mais brebis par grace.» Deux lettres que la Mère de
Chantal pourra confronter plus tard. Le formulaire de la
Profession chez les Bénédictins et à la Visitation. Eloge de
Mme de Herse et de la comtesse de Fiesque. Messages
affectueux pour plusieurs filles spirituelles du Saint. Mgr de
Belley à Annecy. Zèle et miséricorde de François de Sales
pour une âme
Annecy, 5 ou 6 juillet 1620861.
Cette commodité d'escrire vous semblera grande, ma veritablement et uniquement tres
chere Mere, et neanmoins elle ne l'est pas; car il m'a fallu faire tant de despeches et escrire a tant
de Praelatz pour Lyon, Nevers, Orleans, Clermont862, quil me faut bien haster pour vous rendre
mon devoir, ma tres chere Mere; je dis, selon que je le puis rendre.
Voyla donq nos Seurs qui s'en vont, et, si je ne me trompe, elles sont toutes fort bonnes et
de bonn'observance; et nostre Seur Claude Agnes a si bien fait icy, que, comme je croy, elle fera
encor mieux-la. Nous avons pensé de vous envoyer ma Seur Marie Gasparde d'Avise pourvous
accompaigner a vostre retour863, qui sera quand vous le jugeres a propos, si rien ne presse du costé
de Thurin864. [263]
Ma Seur Françoise Marguerite est demeuree Assistante par election et consentement des
deux tiers des voix865; ma Seur Marie Magdeleine en eut plusieurs, et sans consideration, a mon
advis, puis que elle n'est encor point du Monastere, ains seulement de la Congregation, ayant encor
demandé terme pour achever ses affaires866; ma Seur Marie Andrienne867 en eut aussi quelques
unes. Mais en fin, Dieu voulut que ce fut ma Seur Françoise Marguerite, et il veut tous-jours le
mieux; car c'est une bonne femme, sage, constante et veritable servante de Nostre Seigneur; un
861 La «commodité d'escrire» qui devait sembler «grande» à la Mère de Chantal, était le départ des Sœurs d'Annecy
pour la France (voir ci-dessus, note (828), p. 251); il eut lieu vers le 10 juillet, c'est donc peu avant cette date que le
Saint écrivit cette lettre.
862 Avant d'arriver à Paris, les voyageuses devaient s'arrêter à Lyon, d'où venaient de partir les fondatrices du
Monastère de Montferrand (voir ci-dessus, note (658), p. 198); puis laisser à Moulins deux Sœurs destinées à la
fondation de Nevers. Le reste de la pieuse caravane était pour la future Maison d'Orléans. (Ibid., note (828), p. 251.)
On comprend donc que l'Evêque de Genève chargeât ses Filles de messages pour les Prélats sous l'autorité desquels
elles allaient vivre désormais. Aucune de ces lettres ne nous est parvenue.
863 La Sœur Marie-Gasparde d'Avise (voir tome XVI, note (154), p. 40) revint en effet de Paris avec la sainte
Fondatrice, en 1622.
864 Voir ci-dessus, Lettres MDCXLVII, p. 198, et MDCLXIV, p. 245.
865 En l'absence de la Mère de Chantal, Sœur Claude-Agnès Joly de la Roche avait gouverné le Monastère d'Annecy
en qualité d'Assistante-commise; son départ obligeait à lui donner une remplaçante. La Sœur Françoise-Marguerite
Favrot (voir le tome précédent, note (150), p. 30) fut élue par les «deux tiers des voix,» comme l'ordonne la
Constitution XLVIIe, De l'election de la Supérieure et autres Officieres.
866 Quand, le 16 octobre 1618, l'Evêque de Genève fulmina le Bref de Paul V qui érigeait la Visitation en Ordre
religieux (voir le tome précédent, note (999), p. 302), il accorda en même temps une prolongation au terme de six
mois avant d'être tenue à la loi de la solennité des vœux, à la Sœur Marie-Madeleine de Mouxy (tome XV, note (790),
p. 278) dont les affaires temporelles n'étaient pas terminées. Ce délai n'ayant pas suffi, un second lui fut concédé.
867 Sœur Marie-Adrienne Fichet (voir ibid., note (70), p. 12). Le Fondateur inclinait pour le choix de celle-ci comme
Assistante-commise, mais il voulut laisser pleine liberté à la Communauté et ne dit pas un mot pour faire pencher la
balance d'un côté ou de l'autre.
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peu seche et froide de visage, mais bonne de cœur, courte en paroles, mais moelleuse. Nous ne
faysons guere de praefaces, elle et moy, ni d'appendices non plus.
Mays il faut que je vous die que nostre Seur Peronne Marie est une fille tout a fait
admirable, en parole, en maintien, en effectz, car tout cela respire la vertu et pieté868.
Je suis tout a fait de vostre advis et de celuy de nostre bon P. Binet pour ma Seur Marie
Radegonde869. Qu'une [264] fille soit de tant mauvais naturel qu'on voudra, mais quand elle agit
en ses essentielz deportemens par la grace et non par la nature, selon la grace et non selon la nature,
ell'est digne d'estre recueillie avec amour et respect, comme temple du Saint Esprit. Loup par
nature, mais brebis par grace. O ma Mere, je crain souverainement la prudence naturelle au
discernement des choses de la grace, et si la prudence du serpent n'est detrempee en la simplicité
de la colombe870 du Saint Esprit, ell'est tout a fait veneneuse.
Mon Dieu, que nostre grande Fille est admirable871! Ell'a regardé ma lettre d'un biays
duquel je ne l'ay pas escrit. Il ny a remede: et ma lettre et la sienne sont escrittes; si jamais nous
nous revoyons, vous les confronteras et verres qui a le tort. Mais tous-jours ayme je cette fille, et
ne crain nullement ses emotions de decouragement; car apres tout cela, Dieu qui a volu que je luy
sois ce que je luy suis, luy seul fera qu'elle n'en doutera jamais, ou si elle en doute, ce ne sera que
par secousses et comme par maniere de tentation.
Vous recevres les Formulaires de la reception des Novices a la Profession et des
praetendentes a l'habit; je croy qu'il ny a rien a dire par rayson. J'admire ces bons Peres qui croyent
qu'on doive adjouster que l'on fait vœu aux Superieurs872. S'ilz voyoyent la Profession des
Benedictins, qui est la Profession des plus anciens et peuplés monasteres, ilz auroyent donq bien
a discourir, car il ny est fait mention quelcomque ni des Superieurs, ni des vœux de chasteté,
pauvreté et obeissance, ains seulement [265] de stabilité au monastere et de la conversion des
mœurs selon la Regle de saint Benoist. Qui promet l'obeissance selon les Constitutions de Sainte
Marie, promet l'obeissance et l'observance des vœux a l'Eglise et aux Superieurs de la
Congregation ou Monastere. En somme, il faut demeurer en paix; car qui voudra meshuy ouyr tout
ce qui se dira, aura fort a faire.
Veritablement Mme la Presidente de Herce, est (sic) ma tres chere fille et comere873, est
toute aymable devant Dieu et es (sic) hommes; je luy escris874, et la rayson mesme vouloit bien
que je luy eusse plus tost rendu ce devoir. Je vous supplie de l'aymer cherement, encor pour l'amour
de moy, qui voudroys que tous les gens de bien l'affectionnassent parfaitement.
Mme la Contesse de Fiesque est une des dames que j'honnore le plus en ce monde; et je sens
encor avec suavité l'odeur de sa pieté et vertu, que je receu en deux seules fois que je la vis chez
le bon monsieur de Monthelon875 et chez Mme de Guise876, et m'estimerois grandement favorisé si
868 La Mère Péronne-Marie de Chastel, venue de Grenoble pour amener Sœur Marie-Constance de Bressand, était
encore à Annecy. (Voir ci-dessus, note (828), p. 251, et ci-après, Lettre MDCLXXVIII, p. 279.)
869 Fille de Nicolas Regnard et de Catherine Jacquart, Sœur Marie-Radegonde avait trente-six ans lorsqu'elle reçut
l'habit religieux, des mains de saint François de Sales, le 9 juillet 1619. Elle fit profession le 28 décembre 1620, et fut
envoyée, en 1631, à la fondation de Meaux où elle mourut en 1645. (Archives du Ier Monastère de Paris.)
870 Cf. Matt., X, 16.
871 Mme des Gouffiers. Voir ci-dessus, p. 238, la lettre si paternelle qu'elle ne sut regarder que d'un mauvais «biays».
872 C'étaient certainement les troubles commençant à agiter en France l'Ordre des Carmélites, au sujet du mode de
gouvernement de ses Monastères (voir plus loin la lettre de juillet-octobre à la Mère de Chantal), qui provoquaient les
objections contre la formule des vœux à la Visitation. Nous avons vu (Lettre MDCXXIX et note (580), p. 170) la
Mère Rosset, à Bourges, obligée de se défendre contre des attaques là-dessus; la Mère de Chantal ajoutait au passage
déjà cité: «Et puis, ne dit-on pas que l'on fait vœu à Dieu, de chasteté, obéissance et pauvreté, selon les Règles et
Constitutions de cette Maison, lesquelles sont toutes pleines de l'obeissance due aux Supérieurs? Mon Dieu! que faire,
sinon demeurer en paix et les laisser dire!» (Lettres, vol. I, p. 399.)
873 Charlotte de Ligny, dame Vialart de Herse (voir ci-après, note (893), p. 271). Le Saint avait tenu, en 1619, un de
ses enfants sur les fonts du baptême. (Voir ibid., note (901), p. 274.)
874 Epist. MDCLXXV.
875 François de Montholon.
876 De son mariage avec Catherine de Nogaret de la Valette, sœur du duc d'Epernon, Henri de Joyeuse, le futur Père
Ange, avait eu une fille unique, Henriette-Catherine, née en 1585. Elle épousa en 1599 Henri de Bourbon, duc de
Montpensier, qui la laissa veuve le 27 février 1608, avec une enfant, Marie, plus tard femme de Gaston, duc d'Orléans.
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je pouvois luy rendre quelque digne service. Son ame est bien appellee de Dieu, et je croy qu'elle
correspondra heureusement877. [266]
Qu'est il besoin de vous dire ni de lhonneur que je porte a nostre chere Mme de Villesavin,
ni de l'affection que j'ay pour sa pieté? car vous le sçaves bien; et si je puis gaigner un moment, je
luy escriray, et a M. son mari878 qui m'a fait lhonneur de m'escrire. Mais si je ne puis, faites luy
bien mes honneurs et ne craignes point d'en trop dire, car les paroles de qui que ce soit n'egaleront
pas ce que j'en sens.
Et donnes encor, je vous supplie, la bonne et sainte joye a madame Amelot, de son heureux
accouchement879; ses consolations seront tous-jours les miennes, puisqu'en toute verité mon ame
la cherit tres singulierement. Mlle de Frouville880 sçait bien qu'ell'est tout a fait ma chere fille; ell'a,
je m'asseure, sa response881. Je vous supplie de saluer cherement Mlle de Puipeyroux882, et de la
prier qu'elle asseure Mlle de Crevant et Mme de Verton883 et la bonne Mme Amori884 qu'en verité je
conserve soigneusement une memoire continuelle du devoir que mon cœur a a leurs ames que je
cheris parfaitement.
Ma Mere, nous avons eu icy huit jours entiers nostre tres aymable Monseigneur de Belley,
qui a fait des [267] merveilleusement devotes exhortations885, et mesme le jour de la Visitation; ce
m'a esté une consolation extreme de le voir et savourer la veritable bonté de son esprit.
Je n'ay point de nouvelles de mon frere de Boysi886 des il y a 3 semaines; il attend la venue
du P. D. Juste qui, peut estre, arrivera aujourdhuy; mais je ne sçai sil amenera la tres bonne fille,
la Signora Donna Genevra, que mon frere m'a escrit il y a quelque tems avoir demandé son congé
aux Princes pour venir, impatiente de voir que l'on differe tant l'erection du Monastere de Turin887.
C'est une fille, comme mon frere m'escrit, tout a fait genereuse et sainte.
Il est vray, j'ay prié nos Seurs de garder cette grande Peronne888, esperant que si les projetz
de la reformation de plusieurs Monasteres en ce pais reuscit (sic), je pourray treuver quelque
moyen de la faire retirer, et l'oster de l'eminent peril d'estre perdue auquel elle seroit si on la
La duchesse se remaria, en 1611, à Charles de Lorraine, duc de Guise, qui mourut en 1640. Elle lui survécut jusqu'au
25 février 1656. Sur sa demande, on l'ensevelit avec l'habit de cet Ordre de Saint-François d'Assise que son père avait
tant illustré, et elle reposa dans l'église des Capucines de la place Vendôme. (Cf. Moreri, 1740, et De Cailliere, Le
Courtisan predestiné ou l'Histoire du Duc de Joyeuse, Capucin, Paris, 1661.)
877 L'année suivante, Dieu, par la souffrance, l'attirait plus près de lui encore. Le comte de Fiesque était tué à la guerre,
et le 28 septembre, la Mère de Chantal écrivait à son saint Directeur: «Peu de jours avant sa mort, sa chère veuve
m'avait écrit, et conjurée de la remettre entre les mains de Dieu et tout ce qui lui appartenait, pour en disposer selon
sa sainte volonté, Dieu la disposant ainsi doucement par cette détermination... Cette pauvre veuve a un désir si extrême
de se remettre entièrement à votre conduite qu'il ne se peut dire.» (Lettres, vol. I, p. 579.) Anne Le Veneur, fille de
Jacques Le Veneur, comte de Tillières, etc., et de Charlotte Chabot, avait épousé en 1609 François de Fiesque, prince
de Masseran, comte de Lavagne et de Bressuire. Elle ne put à souhait recevoir les conseils et la direction de l'Evêque
de Genève qui termina bientôt sa sainte vie; mais au moins elle eut la consolation de donner à son Ordre de la Visitation
trois de ses petites-filles: la Sœur de Fiesque et les deux Sœurs de Bréauté. Mme de Guise, qui l'estimait beaucoup, la
vit avec bonheur gouvernante de sa petite-fille, Anne-Marie d'Orléans. La comtesse mourut le 15 octobre 1653.
878 Jean Phélipeaux, seigneur de Villesavin (voir le tome précédent, note (1328), p. 417).
879 Charles Amelot, qui fut seigneur de Gournay, de Neuvy et de Brunelles, baptisé le 8 juin 1620, était le septième
enfant de Jean Amelot et de Jeanne-Catherine de Creil (voir ci-dessus, note (240), p. 59). En 1638, il devint conseiller
au Parlement de Paris, maître des Requêtes ordinaire de l'Hôtel du Roi en 1645, puis président au Grand Conseil. Le
13 février 1671, il est inhumé à Saint-Nicolas-des-Champs. Charles Amelot s'était allié avec Marie Lyonne. (D'après
Moreri, 1740, tome V, Corrections et additions sur la lettre A.)
880 Hélène Lhuillier.
881 Vide Epist. MDCLV.
882 Elle sera destinataire.
883 Anne et Marie de Bragelongne (voir ci-dessus, notes (74), (75), p. 4).
884 Françoise Simon, dame Amaury, dont la note sera donnée quand elle sera destinataire.
885 Vers la fin de juin 1620, Mgr Camus vint en effet à Annecy. Le 29, avec François de Sales, il célèbre solennellement
la Messe au collège Chappuisien et y prononce ensuite le panégyrique de saint Paul, en présence de la noblesse et
d'une grande affluence de peuple. (Acta Collegii Atinessii.)
886 Jean-François de Sales.
887 Projet qui n'eut pas de suite, on l'a déjà dit.
888 Péronne Combaz (voir ci-dessus, notes (227), (228), p. 54).
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renvoyoit a son pere, qui ne menasse de rien moins que l'envoyer parmi les huguenotz, et qui est
homme si terrible, que, puisqu'il le dit, on ne luy fait pas tort d'en douter et le craindre. On fait
beaucoup de choses pour sauver une ame, et je n'apprens pas que celle ci face de si grans maux
que pour cela on ne puisse luy faire la charité. Et croyes moy, ma tres chere Mere, quand
j'importune, il faut que je me sois premierement fort importuné moy mesme. Je treuveray, Dieu
aydant, quelque retraitte pour cette fille avec un peu de loysir, et ce pendant, n'ayant pas l'habit on
n'en peut pas faire grande consequence.889
……………………………………………………………………………………………….[268]
Je vous envoye nostre chere Seur Marie Gasparde d'Avise, avec nos Seurs de la fondation
d'Orleans, affin qu'a vostre retour elle vous serve de compagne; car c'est vrayement une fille
vertueuse, sincere, modeste et d'un bon secours aupres de vostre chere personne.
……………………………………………………………………………………………………..
Revu sur l'Autographe conservé à la Visitation de Rennes.
MDCLXXIII. Au Prince de Piémont, Victor-Amédée890. Un
dessein recommandé à l'attention du prince.
Annecy, 6 juillet 1620.
Monseigneur,
Ce porteur allant pour representer a Vostre Altesse plusieurs moyens et occasions
d'amplifier la gloire de Dieu et le bien des sujetz de Son Altesse, a la ruine de l'haeresie, je ne fay
nulle difficulté de supplier tres humblement vostre bonté, Monseigneur, de l'ouïr et de gratifier le
dessein qu'il a, si elle juge qu'il soit convenable, puisque je sçai qu'elle affectionne grandement
toutes les œuvres de pieté comm'est celle ci.
Et tandis, faysant tres humblement la reverence a Vostre Altesse, je vivray content en
lhonneur que j'ay d'estre,
Monseigneur,
Vostre tres humble, tres fidele et tres obeissant
orateur et serviteur,
FRANÇS, E. de Geneve.
VI julliet 1620, Annessi.
Revu sur l'Autographe conservé à Turin, Archives de l'Etat. [269]
889 La fin de la lettre manque; aux quatre premières pages devait au moins être jointe une demi-feuille portant l'adresse
au verso.
Le fragment suivant, cité dans la Vie de la Sœur d'Avise (Année Sainte de la Visitation, tome I, p. 315),
n'aurait-il pas été écrit sur le feuillet qui nous manque? Il est donné sous toutes réserves.
890 Les éditeurs précédents n'ont pas remarqué la mention de «Son Altesse,» et ils ont adressé à Charles-Emmanuel
cette lettre évidemment écrite à Victor-Amédée, sur le même sujet traité dans celle du 25 juin. L'«homme» dont il est
parlé à cette dernière date dut retarder son départ pour Turin et il est certainement le «porteur» des présentes lignes.
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MDCLXXIV. A Madame Angélique Arnauld, abbesse de Port-
Royal a Maubuisson. M. Michel député pour une visite. Il n'y
a rien à craindre des misères spirituelles non aimées. Une
fille du monastère de la croix et volonté de Dieu
Annecy, 5-7 juillet 1620891.
Ce n'est pas escrire que d'escrire si peu, ma tres chere Fille; mais c'est pourtant faire en
partie ce que l'on doit quand on fait ce que l'on peut. J'ay dit a M. Michel Favre, mon assistant
continuel, que s'il se pouvoit, il vous allast voir de ma part; car si je pouvois, j'irois moy mesme et
m'en estimerois plus heureux, ayant tous-jours une tres singuliere complaysance et consolation a
seulement penser que vous estes ma tres plus chere fille. Et imagines vous que M. [de Belley892]
ayant demeuré icy huit jours, ce n'a pas esté sans faire mention de vous, mais non pas certes asses
selon mon gré.
Or, je ne crains point toutes ces miseres dont vous m'escrives que vous estes accablee,
tandis que, comme vous faites et feres tous-jours, vous ne les aymeres pas et ne les nourrires pas;
car petit a petit vostre esprit se fortifiera contre vostre sens, la grace contre la nature et vos
resolutions sacrees contre vos indignations. Envoyes moy bien de vos nouvelles, ma tres chere
Fille, et ne vous mettes point en des pensees pour me faire des exhortations a ne point
m'incommoder pour vous respondre; car je vous asseure que je ne m'incommode point, ains je
m'accommode grandement quand le loysir me le permet.
A la premiere occasion, j'escriray a la chere seur [270] Catherine de Gennes893, qui m'est,
je vous asseure, toute cherement chere. La pauvre fille, helas! elle est du vray monastere de la
croix et volonté de Dieu.
Ma tres chere Fille, Dieu m'a rendu vostre, et je le seray invariablement a jamais et tout a
fait sans reserve; il est vray, ma tres chere Fille, je le suis plus qu'il ne se peut dire.
FRANÇS, E. de Geneve.
891 M. Michel Favre (voir tome XVII, note (722), p. 208) partit d'Annecy vers le 10 juillet avec la petite troupe de
Sœurs destinées aux Maisons de la Visitation de France. (Voir la lettre précédente.) Il emporta les lettres à la Mère de
Chantal, à Mmes de Villeneuve et de Herse, et très probablement celle-ci qui aurait donc été écrite, comme celles-là,
les premiers jours de juillet.
892 Voir ci-dessus, p. 267.
893 Mme Le Maistre.
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MDCLXXV. A la Présidente de Herse894. Une religieuse
«protestation» avant un «petit mot de liberté et de franchise.»
Silence réciproque du Père et de la fille. Pourquoi l'Evêque
ne l'a pas rompu. Le gémissement de saint Paul. Se
résigner à sentir les attaques de l'amour-propre, mais n'y point
consentir. Où se réfugie la vraie indifférence. Que faire
après une chute. Un charmant filleul de François de Sales; ce
que son parrain en attend.
Annecy, 7 juillet 1620895.
Madame,
Dieu nostre Sauveur sçait bien qu'entre les affections qu'il a mises en mon ame, celle de
vous cherir infiniment et vous honnorer tres parfaitement est l'une des plus fortes et tout a fait
invariable, exempte de vicissitude et d'oubli. Or sus, cette protestation estant faite tres
religieusement, je vous diray ce petit mot de liberté et de franchise, et recommenceray a vous
nommer du nom cordial de ma tres chere Fille, puisqu'en verité je sens bien que je suis
cordialement vostre Pere d'affection. [271]
Ma tres chere Fille donq, je ne vous ay point escrit; mais dites moy, je vous prie, et vous,
m'aves vous escrit despuis mon retour en ce païs? Mais pour cela vous ne m'aves pas oublié. Oh!
certes, ni moy non plus, car je vous dis en toute fidelité et certitude, que ce que Dieu a voulu que
je vous fusse, je le suis, et sens bien que je le seray a jamais tres constamment et tres fortement, et
ay en cela une tres singuliere complaysance, accompaignee de beaucoup de consolation et d'utilité
pour mon esprit. J'attendois que vous m'escrivissies, non point pour penser que vous le deussies,
mais ne doutant point que vous ne le feries et que, par ce moyen, je vous escrirois un peu plus
amplement. Mais si vous eussies tardé davantage, croyes moy, ma tres chere Fille, je ne pouvois
plus attendre; non plus que jamais je ne pourray omettre vostre chere personne et toute vostre
aymable mayson en l'offrande que je fay journellement a Dieu le Pere, sur l'autel, ou vous tenes,
en la commemoration que j'y fay des vivans, un rang tout particulier: aussi m'estes vous toute
particulierement chere.
O je voy, ma tres chere Fille, dedans vostre lettre, un grand sujet de benir Dieu pour une
ame en laquelle il tient la sainte indifference en effect, quoy que non pas en sentimens. Ce n'est
rien, ma tres chere Fille, que tout ce que vous me dites de vos petites saillies. Ces petites surprises
des passions sont inevitables en cette vie mortelle, car pour cela le grand Apostre crie au Ciel:
Helas! pauvre homme que je suis, je sens deux hommes en moy, le viel et le nouveau; deux loix,
la loy des sens et la loy de l'esprit; deux operations, de la nature et de la grace. Hé, qui me delivrera
du cors de cette mort896?
Ma Fille, l'amour propre ne meurt jamais qu'avec nostre cors; il faut tous-jours sentir ses
attaques sensibles ou ses prattiques secrettes tandis que nous sommes en cet exil. Il suffit que nous
ne consentions pas d'un consentement voulu, deliberé, arresté et entretenu, et cette vertu de
l'indifference est si excellente, que nostre viel homme, en la portion sensible, et la nature humaine,
894 Charlotte de Ligny, dame Vialart de Herse. Dans sa note biographique, au tome précédent, p. 331, nous l'avons
dite fille de Charlotte Séguier. Celle-ci, est, en effet, nommée par Moreri comme femme de Jean de Ligny; mais il
contracta certainement une autre alliance avec Jeanne du Gay, qui fut mère de Charlotte, de Catherine et de leurs trois
frères. (Bibl. Nat., Pièces originales, vol. 1711, n° 119, extrait du Reg. du Grand Conseil, 30 septembre 1620.)
895 Les éditeurs, depuis Hérissant (Opuscules, 1767), ont daté cette lettre de 1610, erreur évidente, puisque la
destinataire ne devint fille spirituelle de François de Sales qu'en 1619.
896 Rom., VII, 21-24.
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selon les facultés naturelles, n'en fut pas capable non pas mesme [272] en Nostre Seigneur, qui,
comme enfant d'Adam, quoy qu'exempt de tout peché et de toutes les appartenances d'iceluy, en
sa portion sensible et selon ses facultés humaines n'estoit nullement indifferent, ains desira ne point
mourir en la croix897; l'indifference estant toute reservee, et l'exercice d'icelle, a l'esprit, a la portion
superieure, aux facultés embrasees de la grace et en somme a luy mesme, en tant qu'il estoit le
nouvel homme.
Or sus, demeures donq en paix. Quand il nous arrive de violer les loix de l'indifference es
choses indifferentes, ou pour les soudaines saillies de l'amour propre et de nos passions,
prosternons soudainement, si tost que nous pouvons, nostre cœur devant Dieu, et disons en esprit
de confiance et d'humilité: Seigneur, misericorde, car je suis infirme898. Relevons nous en paix et
tranquillité, et renouons le filet de nostre indifference; puis, continuons nostre ouvrage. Il ne faut
pas ni rompre les cordes, ni quitter le luth quand on s'apperçoit du desaccord; il faut prester l'oreille
pour voir d'ou vient le detraquement, et doucement tendre la corde ou la relascher, selon que l'art
le requiert.
Demeures en paix, ma tres chere Fille, et escrives moy confidemment quand vous estimeres
que ce soit vostre consolation. Je respondray tous-jours fidelement et avec un playsir particulier,
vostre ame m'estant chere comme la mienne propre.
Nous avons eu, ces huit jours passés, nostre bon Monseigneur de Belley, qui m'a favorisé
de sa visite et nous a fait des sermons tout a fait excellens899. Or, pensés si nous avons souvent
parlé de vous et de vostre mayson. Mais que de joye quand M. Jantet900 me disoit que mon tres
cher petit filleul estoit si gentil, si doux, si beau et quasi des-ja si devot! Je vous asseure en verité,
ma tres chere Fille, que je ressens cela avec un amour nompareil, et me resouviens de la grace et
douce petite mine avec laquelle il receut, comme avec un respect enfantin, la filiation de Nostre
Seigneur entre mes mains. Si je suis [273] exaucé, il sera saint, ce cher petit François; il sera la
consolation de ses pere et mere, et aura tant de faveurs sacrees aupres de Dieu, qu'il m'obtiendra
le pardon de mes pechés, si je vis jusqu'a ce qu'il me puisse aymer actuellement901.
En fin, ma tres chere Fille, je suis tres parfaitement, et sans condition ni exception
quelconque,
Vostre tres humble et tres fidele frere, compere
et serviteur,
FRANÇS, E. de Geneve.
Annessi, le VII julliet....
Quand vous craindries la perte de vos lettres en chemin, bien que presque jamais il ne s'en
perd, vous pouves bien ne point vous signer, car je connoistray bien tous-jours vostre main.
Oseray-je bien vous supplier de presenter mes tres humbles affections et mon service a
madame la Marquise de Menelay902? Elle est asses humble pour le treuver bon, et le petit François
asses sage pour le luy persuader, et madame de Chenoyse903. Encor faut il dire que je salüe madame
de la Haye904.
A Madame la Presidente de Herce.
897 Cf. Matt., XXVI, 39.
898 Ps. VI, 3.
899 Voir ci-dessus, Lettre MDCLXXII, p. 267.
900 Benoît Jantet, aumônier de Mgr Camus. (Voir ci-dessus, note (209), p. 47.)
901 Ce filleul du saint Evêque avait été baptisé à Saint-Jean-en-Grève, le 23 août 1619. (Bibl. Nat., Fonds français,
Ms. 33588.) Il mourut sans doute en bas âge, car Chassebras n'en fait aucune mention dans sa généalogie très complète
des Vialart de Herse (continuation msre des Généal. des Maîtres des Requêtes de Blanchard).
902 Charlotte-Marguerite de Gondi, marquise de Maignelais (voir tome XIV, note (553), p. 185).
903 Sœur de Mme de Herse, Catherine de Ligny avait épousé Philippe de Castille, seigneur de Chenoise, grand maréchal
des logis de la maison du Roi. Elle vivait encore, ainsi que son mari, le 5 novembre 1648, et habitait alors le château
de Chenoise. (Bibl. Nat., Pièces originales, vol. 616, p. 96, et ubi supra, note (893), p. 271.)
904 Il est probable que le Saint désigne ici Madeleine de Paluau, fille de Denis de Paluau et de Madeleine de Montholon,
et femme de Jean de la Haye, conseiller au Parlement de Paris, ambassadeur pendant vingt ans à Constantinople sous
les règnes de Louis XIII et de Louis XIV. L'une de leurs filles fut Religieuse au premier Monastère de la Visitation de
Paris.
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Rue Pavee
A Paris. [274]
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MDCLXXVI. A Monseigneur Maroaurele Maraldi905 (Fragment).
Le décanat de Saint-Germain l'Auxerrois offert à l'Evêque de
Belley. Pourquoi il ne peut l'accepter. Exposé des raisons
qui rendent une dispense légitime et nécessaire. Un diocèse
bien disproportionné à la valeur de son Pasteur.
Annecy, 9 juillet 1620.
………………………………………………
A proposito di queste occorrenze, non
lasciarô di dire a V. S. Illma che da Parigi vengo
avvisato che il vecchio Decano di San
Germano Autissiodorense (ch'essi chiamano
de l'Auxerrois) ha resignato il suo decanato a
Monsignor Vescovo di Belley, con molto
gusto del Re, della [275] Regina, et di tutta la
corte et di tutti i buoni di Parigi906; et che
nientedimeno ciè difficoltà per
l'incompatibilità del Vescovato et di quel
benefìzio. Et certo che la difficoltà è molto ben
fundata, parlando secondo la legge ordinaria;
ma ciè un'altra legge superiore: Salus populi
suprema lex, secondo laquale ardisco dire che
maggior servitio a Dio, alla Sede Apostolica et
a santa Chiesa non si può fare, che di
dispensare in questo caso et dare quel
benefizio a quel Prelato: per due considerationi
principali.
La prima delle quali è, che quella
chiesa di San Germano è principalissima in
Parigi, essendo la parrocchia del Louvre et di
tutta la corte et di molte migliaia di persone; et
………………………………………………
A propos de ces affaires, je n'omettrai
pas de dire à Votre Seigneurie Illustrissime
que, de Paris, on me fait savoir qu'à la grande
satisfaction du Roi, de la Reine, de toute la
cour et de tous les honnêtes gens de la ville, le
vieux Doyen de Saint-Germain [275]
Autissiodorensis (appelé l'Auxerrois) a résigné
son doyenné en faveur de Monseigneur
l'Evêque de Belley. Il y a cependant une
difficulté, à cause de l'incompatibilité de
l'évêché et de ce bénéfice. Et certes, la
difficulté est bien fondée, parlant selon la loi
ordinaire. Mais il y a une loi supérieure: «Le
salut du peuple est la suprême loi,» d'après
laquelle j'ose dire qu'on ne saurait rendre un
plus grand service à Dieu, au Siège
Apostolique et à la sainte Eglise, qu'en usant
de dispense en pareil cas et en accordant le
bénéfice à ce Prélat: et cela pour deux raisons
principales.
La première: que l'église Saint-
Germain est des plus importantes de Paris,
étant la paroisse du Louvre, de la cour et de
905 De Stefani, La Nunziatura di Francia del Cardinale Guido Bentivoglio (tome IV, p. 454) donne cette lettre, ou
mieux cet extrait de lettre, comme adressé à Monseigneur le Dataire, à Rome. Le Prélat qui remplissait ces fonctions
en 1620, était Marc-Aurèle Maraldi, originaire de Césène. D'abord «curial de collège,» puis avocat, ensuite sous-
dataire, il fut nommé dataire par Paul V en remplacement du cardinal Michel-Ange Tonti. Dans un livre de comptes
de la Daterie, la signature de ce Cardinal figure encore au mois d'octobre 1611, et fait place le mois suivant à celle de
Maraldi qui, à son tour, disparaît à partir de janvier 1621. Mgr Maraldi ne fut donc pas confirmé à son poste par le
nouveau Pape, Grégoire XV. Il devint secrétaire des Brefs en 1627. (Cf. Moroni, Dizionario di erudizione storico-
ecclesiastica, tom. XIX, Venezia, 1843, p. 135.)
L'original de cette lettre ainsi que le Mémoire de Mgr Camus qui y était joint (voir La Nunziatura, etc., tom.
IV, not. (1), p. 455) n'ont pu être retrouvés, les Positions de la Daterie de cette époque, n'ayant pas été conservée».
906 Suivant une vieille tradition, le monastère de Saint-Germain l'Auxerrois aurait été fondé au VIe siècle par le roi
Childebert, puis restauré par Louis le Pieux après le passage des Normands. Jusqu'à la fin du XIe siècle, on lui donna
volontiers le nom d'abbaye, mais c'était une église collégiale régie par des doyens; elle devint paroisse royale, le
Louvre étant sur son territoire.
Le doyen résignataire en 1620, était Pierre Gillet, né à Montmorency de Claude Gillet et de Jeanne
Danneguin, prêtre depuis le 23 mai 1587. Vicaire de Saint-Denis de la Chartre en 1591, nommé à la cure ou vicairie
perpétuelle de Saint-Germain-l'Auxerrois le 14 mars 1598, il en fut élu doyen le 21 mars 1606. Le 14 mai 1621,
l'Evêque de Belley, lui succédant, prit possession du canonicat et du décanat; il se démit du premier le 29 juillet 1625,
et du second le 27 septembre suivant, en faveur de François Le Charron. (Gallia Christiana, tom. VII, et Archiv. Nat.,
LL 410, 411.)
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se viene a vacare il decanato per morte, potrà
haverlo per brighe et intrighi tale huomo, che
sarà nemico [276] dell'unità catholica et
dell'authorità Apostolica; che di questi tali vi
sono alquanti molto favoriti, et che possono
eccitare molti mali movimenti spirituali in
quella gran città, che non così facilmente si
potrebbero quietare senza male conseguenze.
L'altra consideratione è, che detto
Monsignore di Belley è devotissimo a Dio et
alla santa Chiesa, et ha un nome grande in
quella città, per essere uno de' più valenti
predicatori che sieno in Francia; et che ad ogni
modo infine, sarà forzato di resignare il
Vescovado di Belley, il quale, con tutta la
diocesi, non ha nè tanti sacerdoti, nè tante
anime come ha la sola parrocchia di San
Germano di Parigi (lasciando a parte la
disparità delle qualità), poiché io vedo che il
Re, motu proprio, l'ha voluto havere per
Consigliere di Stato, et che la Regina ha voluto
che, nonostante ch'egli predicasse ogni giorno
la Quaresima passata, egli pur venisse la sera a
far ragionamenti spirituali inanzi a Sua
Maestà: onde vedo che fra pochi giorni
bisognerà che ritorni là907. [277]
V. S. Illma et Rma mi perdoni se io di
queste cose tratto, che parmi in conscientia di
dover dare di questi avvisi.
……………………………………………….
Li 9 Luglio 1620.
plusieurs milliers de personnes. Aussi, ce
doyenné venant à vaquer par la mort de son
titulaire, pourrait, par brigues et intrigues,
tomber aux mains [276] d'un homme ennemi
de l'unité catholique et de l'autorité
Apostolique, car il en est beaucoup de cette
sorte, très en faveur, et qui pourraient exciter
dans cette grande ville de redoutables
soulèvements qui s'apaiseraient difficilement
ensuite, non sans de tristes conséquences.
L'autre raison est que Monseigneur de
Belley est très dévoué à Dieu et à la sainte
Eglise, et qu'il a un grand renom dans la
capitale comme l'un des meilleurs prédicateurs
de France. Enfin, il sera de toutes manières
obligé de résigner l'évêché de Belley qui ne
compte, dans tout le diocèse, ni autant de
prêtres ni autant d'âmes que la seule paroisse
de Saint-Germain de Paris (je laisse à part la
disproportion de la valeur du Prélat avec cet
évêché), puisque je sais que, de son propre
mouvement, le Roi a voulu l'avoir pour
conseiller d'Etat et que, bien qu'il prêchât tous
les jours ce Carême passé, la Reine désira qu'il
allât le soir faire des conférences spirituelles
devant Sa Majesté; aussi faudra-t-il que dans
quelques jours il retourne là-bas. [277]
Votre Seigneurie Illustrissime et
Révérendissime voudra bien me pardonner si
je parle de ces choses, mais j'ai cru en
conscience devoir l'en avertir.
……………………………………………….
9 juillet 1620.
907 Mgr Camus dut partir pour Paris seulement en octobre, car son saint ami lui fit une visite à Belley vers la fin de
septembre. (Voir ci-après, p. 336.)
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MDCLXXVII. A une Religieuse de la Visitation908. L'humilité,
réparatrice de nos imperfections. Vertus à pratiquer pour
s'unir parfaitement à Dieu.
Annecy, 9 juillet 1620.
Ce m'est tous-jours bien de la consolation, ma tres chere Fille, de sçavoir que vostre cœur
ne se depart point de ses resolutions, encor que souvent il se relasche a des immortifications; car
j'espere qu'a force de s'humilier parmi les signes de son imperfection, il reparera les defautz qu'elle
luy apporte.
Ma tres chere Fille, la condition de vostre esprit requiert que vous en ayes un grand soin, a
cause de cette liberté et promptitude qu'il a, non seulement a penser et vouloir, mais a declarer ses
mouvemens. Or sus, vous l'aures, je m'asseure, ce soin-la, car vous aspires de plus en plus a la
parfaite union avec Dieu, et ce desir vous pressera d'estre de plus en plus exacte en l'observance
[278] des vertus qui sont requises pour le contenter: entre lesquelles, la paix, la douceur, l'humilité,
l'attention a soy mesme tiennent les premiers rangs.
Et je prie sa divine Majesté, ma tres chere Fille, qu'elle vous comble de sa dilection, et suis
parfaitement vostre.
FRANÇS, E. de Geneve.
Ce 9 julliet 1620.
MDCLXXVIII. A Madame de Granieu. Retour de la Mère de
Chastel à Grenoble. La commission dont l'avait chargée Mme
de Granieu. Pourquoi le Saint, malgré son désir, n'a pu y
répondre. Sa fidélité aux âmes. Espérance d'un revoir
Annecy, 9 ou 1 o juillet 1620909.
Voyla cette chere et bienaymee Mere Peronne Marie qui s'en reva dans son nid, sur ses
œufs; je ne l'ay pas veüe a mesme de ce que j'eusse desiré. Elle m'a demandé de vostre part, que je
luy marquasse les imperfections que j'aurois remarquees en vostre ame910; mais je n'ay pas eu asses
de tems pour bien considerer ce qui pourroit estre a dire sur ce sujet. Et si j'eusse eu dequoy luy
parler en cela, je l'eusse fait, non seulement pour vous contenter, mais satisfaire a la fidelité que je
vous dois; vous asseurant en toute verité, ma tres chere Fille, qu'encor que j'ayme vostre ame d'un
amour extraordinaire et lequel est si fort quil ne peut estre dissimulé, si est ce qu'a mon advis, il
ne m'aveugle pas pour m'empescher de voir vos tares, si j'avois la commodité de les observer.
Or sus, ma tres chere Fille, vous estes aux chams, et j'ay quelque esperance de vous y voir,
et monsieur vostre cher [279] mary, si vous y estes encor quand j'iray voir le digne M. de Belley911.
Ma tres chere Fille, mon ame est toute vostre, et je suis asseuré que la vostre ne sçauroit
douter de cette si veritable verité que Dieu Nostre Seigneur a fait et quil fera durer a jamais pour
908 La destinataire de ces lignes, qui durent être remises à la Mère de Chastel, partie d'Annecy vers le 10 juillet, ne
serait-elle pas une Religieuse de la Visitation de Grenoble? Dans ce cas, on pourrait suggérer avec vraisemblance le
nom de la Sœur Jeanne-Hélène de Gérard que nous avons déjà vue correspondre avec le Saint.
909 La date de la présente lettre est tout indiquée par le départ d'Annecy de la Mère Péronne-Marie de Chastel.
910 Lors de sa visite au saint Evêque dans les premiers jours de juin. (Voir ci-dessus, note (845), p. 256.)
911 François de Sales se rendit, en effet, auprès de son ami, Mgr Camus (voir ci-dessus, note (907), p. 277), et Mme de
Granieu lui fit alors une «inopinee visite.»
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cette vie et pour l'eternité, selon que je l'espere de sa misericorde. Ainsy je salüe cette chere ame
de ma plus chere fille, et suis
Son tres humble serviteur,
FRANÇS, E. de Geneve.
Revu sur une ancienne copie conservée à la Visitation d'Annecy.
MDCLXXIX. A la Mère Favre, Supérieure de la Visitation de
Montferrand. Lettre à l'Evêque de Clermont et humilité de
l'Evêque de Genève. Perpétuels délais pour la fondation de
Turin. La Mère de Chastel à Annecy. Amis du Saint en
Auvergne. Nouvelles de famille
Annecy, 9 ou 10 juillet 1620912.
Ma tres chere Fille,
Voyla une lettre pour Monseigneur de Clermont913, puis que vous l'aves voulu. Et je dis
ainsy, par ce que [280] n'ayant pas l'honneur d'estre conneu de ce Prelat, je ne pense pas que ma
lettre puisse adjouster aucun degré de chaleur a son saint zele.
Je croy que vous pourres rester encor la quelques moys, ne voyant encor rien de prest a
Turin, quoy que Monseigneur le Prince persevere a dire que tout se fera. Au contraire, la signora
Donna Genevra, lassee de tant de remises, viendra peut estre icy commencer son noviciat914.
Vous scaves la bonne trouppe qui est [partie] d'icy915, ou nous avons encor la Seur Peronne
Marie, qui est en verité une tres excellente fille. Elle partira demain pour retourner a Grenoble,
d'ou elle avoit amené une rare fille916 pour faire le nombre necessaire pour Nevers, Orleans et
Paris.
Je loüe Dieu que vostre arrivee en ce païs-la a esté accueillie avec tant de joye, et j'espere
que la suite sera tous-jours correspondante; car les amis de Dieu sont trop plus honnorés917.
Vous aves en ce païs-la le bon Pere Theodose, Capucin918, mon grand amy, a qui j'escriray
au premier jour, et le bon Pere Anselme de [Riom], qui m'ayme incomparablement et qui demeure
a Riom, et je m'asseure qu'il vous ira voir919.
912 Le départ de la Mère de Chastel annoncé pour le lendemain fixe la date de cette lettre.
913 Joachim d'Estaing, fils de Jean, vicomte d'Estaing et de Cadars, baron d'Autun, etc., et de Gilberte de la
Rochefoucauld, était chanoine-comte de Lyon et abbé d'Issoire lorsqu'il fut nommé évêque de Clermont en 1614. Il
occupa ce siège jusqu'à sa mort, le 11 septembre 1650. Pendant son épiscopat il y eut toute une efflorescence de
nouveaux établissements religieux dans le diocèse: Oratoriens, Capucins, Récollets, Carmes déchaussés, Minimes,
Ursulines, Bernardines, Filles de Notre-Dame, etc. Les Filles de la Visitation fondèrent quatre Monastères:
Montferrand (1620), Riom (1625), Clermont (1649) et Billom (1650). (Cf. la Gallia Christiana et du Tems, Le Clergé
de France, Paris, 1775, tome III, p. 148.)
914 Cf. ci-dessus, Lettre MDCLXXII, p. 268
915 La «trouppe» des Religieuses destinées aux divers Monastères de France. (Voir ci-dessus, note (828), p. 251.)
916 Soeur Marie-Constance de Bressand. (Voir ibid.)
917 Ps. CXXXVIII, 17.
918 Le P. Théodose de Bergame (voir tome XV, note (798), p. 281).
919 Citant ce passage dans les Annales Franciscaines d'aoùt 1888, le R. P. Edouard d'Alenfon, archiviste général des
Capucins, corrige en note le nom que Hérissant donne à ce Religieux: «Le P. Anselme, de Riom,» dit-il, «et non de
Rome, pensons-nous, fut» nommé «définiteur de la Province de Lyon en 1626,» au Chapitre de Beaune; ceux de Riom
et de Lyon, en 1635 et 1636, lui redonnèrent cette charge, qu'il exerja encore de 1639 à 1641. (Cf. tome XV, note
(812), p. 285.)
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Nostre bon monsieur le Premier est presque tout a fait remis, et attendons qu'il nous assigne
le tems pour venir [281] icy a la recreation, et faire le baptesme du petit Charles Chrestien920.
Madame nostre Presidente ma niece est une vraye Seur de la Visitation de dehors921.
J'attens la consecration de mon frere pour me preparer au voyage922; mais avant mon depart
vous aures une fois de mes nouvelles.
Tout a vous,
FRANÇS, E. de Geneve.
A ma tres chere Fille en N. Sr,
Ma Seur Marie Jacqueline Favre,
Superieure de la Congregation de la Visitation.
A Montferrand.
920 Cet enfant, second fils de René Favre de la Valbonne, était né déjà depuis plus de trois mois. Son baptême, pour
lequel on attendait toujours le grand-père, fut différé jusqu'au 27 septembre de l'année suivante (lettre du président
Favre au prince Thomas de Savoie, 27 septembre 1621). Louis de Sales, baron de Thorens, représenta le parrain, Son
Altesse Charles-Emmanuel; la princesse de Piémont, Christine, avait aussi accepté d'être marraine, et la cérémonie se
fit avec une extraordinaire solennité. Le petit Charles-Chrétien ne put profiter d'une si illustre protection, car il n'arriva
pas à l'âge d'homme.
921 Andrée de Nicolle de Crescherel, dame de la Valbonne (voir tome XV, note (631), p. 216).
922 Au voyage de Rome, ou à celui de France, à la suite du Cardinal de Savoie. (Voir ci-dessus, note (648), p. 194, et
ci-après, Lettre MDCXCIV, p. 311.)
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21.3 Page 203

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MDCLXXX. Au Père Jean-Antoine Rigaud, Ermite du Mont-
Voiron923 (Fragment). Repos en l'amitié; sainte armure,
invincible confiance.
Annecy, 20 juillet 1620.
……………………………………………………………………………………………………...
J'auray tout le soin de vous que vous sçauries desirer d'un amy et frere fidele. Demeurés en
paix, et reposes [282] vous sur cette mienne declaration. Armes vous d'humilité, patience et
douceur, et puis chantes joyeusement: 924Si exsurgat adversum me prœlium, in hoc ego sperabo;
Dominus protector vitœ meœ, a quo trepidabo925? Demeures sous les aysles de Nostre Dame, et
ne craignes rien; ne prenes nul soupçon. 926Et pax Christi, quœ exsuperat omnem sensum, custodiat
corda vestra et intelligentias vestras927.
……………………………………………………………………………………………………..
Revu sur le texte inséré dans le Ier Procès de Canonisation. [283]
923 Le Frère Henri Raffy, Ermite du Mont-Voiron, cite ces lignes dans sa déposition (Process. remiss. Gebenn. (I), ad
art. 43), sans indiquer le destinataire qu'il désigne seulement comme «un particulier» d'entre les Ermites, au nombre
de trois ou quatre alors. (Voir ci-dessus, note (678), p. 206.) De fortes raisons nous permettent de croire que l'Evêque
de Genève s'adresse à Jean-Antoine Rigaud. Il était natif de Barjols, au diocèse de Fréjus, et fut dans sa jeunesse,
capitaine sous le comte de Fuentes, dont il devint secrétaire. «O Docte à merveilles,» dit Charles-Auguste de Sales
(Histoire, etc., liv. IX, p. 531), «tres-pertinent au maniement des affaires,» parlant «presque toutes sortes de langues,»
il voyagea beaucoup, et c'est d'Allemagne qu'il vint aux Voirons, pris par le désir intense de finir sa vie mouvementée
dans le calme du désert. Muni des recommandations de l'Inquisiteur général et du Légat du Pape résidant à Cologne,
Rigaud se présenta à l'ermitage le 11 juillet 1619 et y fut reçu «soubs le futur bon plaisir de» l'Evêque, alors à Paris,
qui ne tarda pas à donner son consentement. Le nouveau venu fit faire «de belles réparations» au logement des Ermites,
et, d'accord avec eux, supplia le Saint de «les instituer entièrement, à fin qu'ils peussent faire une vie plus meritante et
plus aggreable à Dieu.» Lui-même composa les Règles que François de Sales revisa et approuva, et le ié juillet 1620,
il était définitivement affilié à la Congrégation, sur le témoignage élogieux que lui rendirent ses confrères. Du 3 janvier
au 26 mars 1622, Antoine Rigaud reçut tous les Ordres sacrés des mains du saint Evêque. Il meurt avant le 9 août
1643. (Process. remiss. Gebenn. (I), Scripturae compulsatae, et R. E.)
924 Si un combat s'engage contre moi, alors même j'espérerai; le Seigneur est le protecteur de ma vie: qui me fera
trembler?
925 Ps. XXXVI, 3, 1.
926 Et que la paix du Christ, qui surpasse tout sentiment, garde vos cœurs et vos intelligences.
927 Philip., ult., 7.
203/341

21.4 Page 204

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MDCLXXXI. A Messieurs du Conseil de la Sainte-Maison de
Thonon928 (Inédite). La Bulle de fondation de la Sainte-Maison
oblige ses ecclésiastiques à la Règle de l'Oratoire. Moyen
nécessaire pour mettre cette condition en vigueur. Volonté du
Prince, ordonnance de l'Evêque. Projet d'un voyage de
François de Sales à Thonon.
Annecy, 22 juillet 1620.
Messieurs,
Je vous parle clairement, puisque le tems en est venu. Monseigneur le Prince929 ayant sceu
que vostre Bulle fondamentale obligeoit la Congregation des Reverens ecclesiastiques de Nostre
Dame a vivre a l'instar de ceux de l'Oratoire930, et ne doutant point que cela ne se fit plus
heureusement si quelques uns desdits Peres de l'Oratoire, qui sont maintenant establis presque par
toute la France, venoyent en ladite Congregation de Nostre Dame pour la dresser et perfectionner
selon leur Institut, il me commanda d'en traitter avec ceux de Paris; et despuis peu, j'ay receu
nouvel advis de la part de Son Altesse, qu'elle vouloit faire reuscir ce projet, et bientost, avec ordre
de tenir la place vacante en attente931, affin que plus librement et aysement on la puisse employer
pour une si sainte intention. Pour cela donq, ay-je estimé qu'on devoit retarder pour un peu la
provision, sans craindre d'alterer ladite Bulle fondamentale, qui en sera au contraire mieux
executee et plus selon l'intention de Sa Sainteté. Et croy que messieurs nos ecclesiastiques seront
bien ayses d'avoir avec eux des confreres qui les [284] assisteront, non seulement a bien faire
l'Office, mays a bien former leur Congregation sur le modelle que la Bulle de leur erection propose;
car rien ne se passera en toute cette affaire qu'avec toute equité, debonaireté et douceur, sans quil
puisse rester aucune occasion de se douloir a personne du monde.
Mays puisque je doy dans quelques semaines me treuver avec vous932, je pense que nous
aurons plus de bonne commodité d'en conferer ensemblement, et ny aura point de hazard de
surseoir jusques a ce tems-la toute sorte de resolution. Et cependant je demeure,
Messieurs,
Vostre plus humble, tres affectionné confrere,
FRANÇS, E. de Geneve.
XXII julliet 1620, Annessi.
Revu sur l'Autographe appartenant à M. Paul du Boys,
au château de La Combe de Lancey (Isère).
928 L'adresse, détachée de l'Autographe et perdue, est clairement indiquée par le texte même de la lettre.
929 Le prince de Piémont.
930 Voir ci-dessus, note (737), p. 226.
931 Vacante par le départ de Thomas Maupeau. (Voir ci-dessus, Lettre MDCXXVIII, et note (575), p. 168.)
932 Ce voyage à Thonon ne dut pas s'effectuer, car on n'en trouve aucune trace.
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21.5 Page 205

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MDCLXXXII. A la Mère de Bréchard, Supérieure de la
Visitation de Moulins. Difficulté pour la fondation de Nevers;
d'où elle vient et le cas qu'il faut en faire. L'avis du Saint sur
l'emploi des personnes et de l'argent. Des entreprises
«merveilleusement fascheuses;» les supporter, les porter, et les
aimer. Vouloir servir Dieu, sans s'attacher aux moyens de le
servir. Les contradictions, présage de succès. Une
béatitude
Annecy, 26 juillet 1620.
Je n'avois garde de deviner que cette difficulté deust jamais arriver pour la fondation de
Nevers, ma tres chere Fille933; car, quelle consequence y a il? Une fille est a [285] Moulins: il faut
donq qu'elle et ses moyens y demeurent. Mais ceux qui la font sont dignes de si grand respect et
ont tant de merite sur vostre Mayson et sur toute la Congregation, et ont tant de bon zele et de
pieté, qu'encor qu'a la rigueur elle ne soit pas bien forte, il faut, ce me semble, la faire valoir pour
une partie, selon l'advis du Reverend P. Recteur934, qui, comme m'escrit madamoyselle du Tertre,
estime que la moytié suffira pour commencer la fondation, et l'autre moytié pour bien accommoder
la Mayson de Moulins.
Reste la difficulté de vostre personne et de celle de cette chere fille, car je voy aussi la
grande affection que monsieur le Mareschal et madame la Mareschale935 ont que vous vous
arresties, et elle aussi, a Moulins; et faut que je confesse que je voy que cette affaire se prend d'un
biays que j'apprehende de dire mon sentiment. Je le fay neanmoins, et dis qu'il seroit a propos que
vous, qui aves traitté et qui estes conneuë, menassies ma Seur Paule Hieronime936 a Nevers, et l'y
establissies le mieux que vous pourries, pour le sejour d'un mois ou deux. Et quand je dis que vous
y allassies, j'entens aussi parler de madamoyselle du Tertre, ma fille, laquelle je sçai estre
inseparable [286] d'avec vous. Or, je presuppose que ces Messieurs prennent confiance a la parole
que vous leur donneres de revenir infalliblement et de ramener madamoyselle du Tertre. Que si ilz
ne le veulent pas, il faudra envoyer ma Seur Paule Hieronime avec deux ou troys qu'elle choisiroit,
et faire le mieux qu'on pourroit, pourveu qu'on fist le partage sus escrit; car ma Seur Paule
Hieronime a asses de courage et de capacité de bien faire, moyennant la grace de Dieu, pour reuscir
en cette entreprise.
Je vous asseure, ma tres chere Fille, que cette difficulté ne m'a point tant fasché que pour
le desplaysir que je sçai que vous en aves eu; sur le sujet duquel il faut que je vous die que vous
933 Pour l'intelligence de cette lettre et des trois suivantes, voir l'Appendice III.
934 Le P. Jean Foissey avait succédé au P. Aignan Moreau (voir tome XVII, note (982), p. 287) dans la direction du
collège de Moulins, qu'il gouverna de 1619 à 1625. Né à Montfaucon (diocèse de Langres) le 14 octobre 1576, entré
dans la Compagnie de Jésus le 12 juin 1600, profès des derniers vœux en 1616, le 23 octobre, il mourut le 9 juin 1631
à Bourges, où il était Recteur depuis 1625. (D'après des Notes du R. P. Hafner, archiviste général de la Compagnie.)
935 Dlle Suzanne aux Espaules, fille de messire Henri-Robert aux Espaules, bailli et gouverneur de Rouen, seigneur de
Sainte-Marie-du-Mont, de l'Isle-Marie, de Lyevre, etc., et de Jeanne de Boves, dame de Gennes, Authies, etc., avait
épousé en premières noces Jean de Longaunay, seigneur d'Amigny, gouverneur de Carentan. Elle fut ensuite la
seconde femme de François de la Guiche, maréchal de Saint-Géran (voir ci-dessus, note (784), p. 237), et la fille
qu'elle avait eue du sieur de Longaunay, Suzanne, s'allia avec Claude, fils du maréchal. (D'après l'Inventaire somm.
des Archives de l'Allier, tome I, p. 140, et Moreri.) Mme de Saint-Géran mourut en 1651; son Oraison funèbre fut
prononcée dans l'église des Minimes de Moulins dont, avec son mari, elle avait fondé le couvent, par le P. Harel, du
même Ordre. L'orateur y exalte, dans le style ampoulé de l'époque, la piété et les vertus de la maréchale, surtout son
zèle à faire du bien aux âmes, son ardente charité pour les pauvres et son esprit de pénitence et de mortification.
936 Sœur Paule-Jéronyme de Monthoux.
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lisies un peu le chapitre De la Patience, de Philothèe937, ou vous verres que la piqueure des
mouches a miel est plus douloureuse que celle des autres mouches. Les entreprises que les amis
font sur nostre liberté sont merveilleusement fascheuses; mais en fin, il les faut supporter, puys
porter, et en fin aymer comme de cheres contradictions. Certes, il ne faut vouloir que Dieu
absolument, invariablement, inviolablement; mais les moyens de le servir, il ne les faut vouloir
que doucement et foiblement, affin que si on nous empesche en l'employte d'iceux, nous ne soyons
pas grandement secoués. Il faut peu vouloir, et petitement, tout ce qui n'est pas Dieu.
Or sus, prenes courage: si le P. Recteur et moy sommes creus, selon ce que j'ay dit ci dessus,
tout n'en ira que mieux. Vous souvenes vous de la fondation de cette Mayson d'icy? Elle fut faite
comme celle du monde, de rien du tout, et maintenant on a despensé pres de seize mille ducatons
es bastimens, et jamais fille n'en bailla mille que ma Seur Favre. Nevers sera une Mayson benite,
et sa fondation ferme et solide, puisqu'elle a esté agitee.
Mays si d'adventure ces Messieurs de Moulins ne vouloyent pas entendre au parti duquel
le P. Recteur et moy sommes d'advis, que feroit on? O certes, je ne me puis imaginer cela; mais
en ce cas, il faudroit avoir bien soin de nostre Seur Paule Hieronime et de sa compaignie, et advertir
nostre Mere, qui peut estre a quelque autre [287] fondation par les mains, ou elle pourroit estre
employee. Si moins, on nous la renvoyera quand le tems sera un peu plus propre. Et en tous
evenemens, il faut demeurer en paix dans la volonté de Dieu, pour laquelle la nostre est faite.
Je salue de tout mon cœur cette chere Seur Paule Hieronime et la Seur Françoise
Jacqueline938, et toutes nos cheres Seurs.
En somme, bienheureux sont ceux qui ne font pas leur volonté en terre, car Dieu la fera la
haut au Ciel. Je suis infiniment vostre, ma tres chere Fille, et vous souhaite mille benedictions.
Salués, je vous supplie, le R. P. Recteur.
Ce 26 julliet 1620. [288]
MDCLXXXIII. A la Mère de Chantal, a Paris. Grandes lettres à
Moulins pour l'affaire de Nevers. Le titre épiscopal de M. de
Boisy. — Souhaits de bénédictions sur des cœurs aimés
Annecy, 26 juillet 1620.
Ce chevalier part avec tant de presse que je ne puis quasi pas vous escrire, ayant esté forcé
d'escrire a Moulins des grandes lettres939 sur le sujet de la difficulté qu'on y a fait naistre pour la
937 Introd. a la Vie dev., Part. III, ch. III.
938 «L'observance sera bien maintenue dans la Maison où notre Sœur «Françoise-Jacqueline gouvernera,» disait le
Saint en désignant cette Sœur pour la fondation de Nevers. Depuis longtemps il la connaissait; fille d'un serviteur de
la famille de Sales (voir le tome précédent, notes (1223), (1407), pp. 377 et 458), elle avait été placée, jeune encore,
auprès de Mme de Boisy, et jouit ainsi des exemples et de la direction de celui qui en était à la fois le fils et le Père.
Présentée par lui au Monastère d'Annecy, de ses mains elle reçut le voile le 26 juillet 1618, à l'âge de vingt-sept ans,
et prononça ses vœux le 9 septembre 1619. D'abord Directrice à Nevers, Sœur Françoise-Jacqueline de Musy devint
Supérieure en 1625, et depuis, malgré les répugnances très vives de son humilité, exerça près de vingt-huit ans cette
charge, tant dans cette Communauté que dans celles de Montargis, de Moulins et de Dijon. Pendant son premier
triennal, à trois reprises différentes, le fléau de la peste s'abattit sur le Monastère. Son zèle, sa prudence, son héroïque
dévouement parurent alors, et se révélèrent de nouveau lorsque, à Dijon, il lui fallut traverser les mauvais jours de la
guerre civile. La Mère de Chantal qui l'estimait beaucoup, contribua à la faire élire à Moulins en 1641, louant «sa
grande bonté, simplicité, droiture et solidité en la vertu.» (Lettres, vol. V, p. 500.) Peu après, la Mère de Musy recevait
le dernier soupir de celle qui l'avait engendrée à la vie religieuse; soumise à Dieu, elle resta courageuse en ces
douloureuses circonstances, et écrivit à l'Institut cette admirable lettre d'où la Mère de Chaugy a tiré le récit des
derniers moments de sainte Jeanne de Chantal. Ce fut à Nevers, le 6 janvier 1660, que la Mère Françoise-Jacqueline
termina sa féconde et pieuse carrière. (Voir sa biographie dans l'Année Sainte de la Visitation, tome I, p. 768.)
939 Vide Epist. praeced. et seqq., et not. (953), p. 294.
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fondation de Nevers. Je dis que l'on partage ces benitz moyens, car il y aura dequoy commencer
la fondation de 15000 francz (on n'en eut pas tant ni icy, ni a Lyon, ni a Grenoble), et que ma Seur
Jeanne Charlotte y meine et assiste pour un moys ma Seur Paule Hieronime, puisqu'on ne peut
mieux faire.
Je prie M. des Hayes de desnouer l'affaire aupres de Monseigneur le Cardinal de Retz940.
Mon frere s'appelle M. de Calcedoine.
Quand je seray plus asseuré de retourner a Paris, je vous en advertiray. Cependant, mille et
mille benedictions sur le cœur de ma tres chere Mere comme sur le mien mesme, et sur le cœur de
la tres chere madamoyselle de Frouville, ma fille941, et sur tous ceux de nos Seurs. Nous n'avons
pas oublié celuy de ma Seur Anne Catherine942, puisque c'est aujourdhuy la feste de sainte Anne,
26 julliet 1620.
A Madame
[Madame] de Chantal.
A Sainte Marie.
Paris.
Revu sur l'Autographe conservé à la Visitation d'Annecy. [289]
MDCLXXXIV. A Madame du Tertre. Un témoignage que la
destinataire doit rendre en faveur de la vérité.
Désintéressement de l'Evêque de Genève. Les désirs de M. et
de Mme de Saint-Géran et d'autres personnes de Moulins.
Comment le vœu de Mme du Tertre en faveur de Nevers devra
être exécuté. Félicitations sur ses progrès dans la piété
Annecy, 27 juillet 1620.
Je croy fort seurement, ma tres chere Fille, que vous tesmoignerés par tout en faveur de la
verité, que parmi les desirs que j'ay eu de rendre du service et de la consolation a vostre ame, je ne
me suis jamais meslé de sçavoir quelz estoyent vos moyens temporelz, ni ne vous ay jamais incité
de les employer pour les Maysons de Sainte Marie. Que si vous aves engagé vostre ame envers
Dieu pour la fondation d'un Monastere a Nevers, ça esté tout a fait sans m'en communiquer, sinon
apres que vous en eutes contractee la sainte obligation. Certes, je ne voudrois nullement estre en
estime d'un homme qui attire l'argent et l'or, non pas mesme pour les œuvres pies, car943 [je ne suis
pas appellé a cela. Je ne sçai donq comment on a peu penser que je vous aye addressee a Moulins
en consideration des commodités que vous aves, et que ce soit injustice de les divertir ailleurs.
Mais il me suffit de vous avoir dit] ces quatre paroles, pour justifier le consentement que j'avois
donné a vostre dessein pour Nevers; en quoy il ne me semble pas que j'aye rien commis digne de
censure.
940 Il s'agissait encore de faire agréer à l'Evèque de Genève la coadjutorerie de Paris (voir plus haut, Lettres
MDCXVIII, p. 152, et MDCXLV, p. 193). La Mère de Chantal écrivait le 9 juin: «Notre très cher Père... se porte bien;
on parle toujours de le tirer deçà, mais cela est lent et hors d'apparence.» (Lettres, vol. I, p. 428.)
941 Hélène Lhuillier.
942 Sœur Anne-Catherine de Beaumont.
943 Le bas du premier feuillet de l'Autographe a été coupé, et ainsi ont disparu plusieurs lignes des deux premières
pages. Nous les empruntons au texte publié par Hérissant, tome IV, p. 268.
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Or maintenant, ma tres chere Fille, je voy les ardens desirs de monsieur le Mareschal et de
madame la Mareschale de Saint Geran944, et encor de monsieur de Palierne et de Messieurs de la
ville de Moulins, dont le zele est digne de mille louanges, et la volonté de toute sorte de respect.
Si vous n'esties point obligee par vœu, j'aurois [290] bien tost donné mon advis. Mays la
consideration de vostre vœu me fait adhaerer au conseil du R. P. Recteur945, qui porte, comme
vous m'escrivés, que vous946 [fassies l'un et ne laissies pas l'autre; puisque, comme il est
presupposé, il y a suffisamment pour ayder puissamment la fondation de la Mayson de Nevers et
pour appuyer et secourir celle de Moulins. En quoy vostre conscience demeurera du tout accoysee
sur la plus grande gloire de Dieu qui] reuscira de ce partage, par le moyen duquel vous servires
Dieu au monastere dans lequel vous demeureres, en vostre propre personne et par vos propres
actions, et en celuy auquel vous ne seres pas, en la personne des Seurs qui, par vostre moyen, y
seront assemblees.
Voyla tout ce que je vous puis dire, ma tres chere Fille, demeurant au reste plein d'une
sainte satisfaction et, sil est permis de le dire, tout glorieux dequoy on m'asseure si fort que vous
faites des merveilles en pieté, et dautant plus que c'est madame la Mareschale de Saint Geran,
laquelle est, graces a Dieu, sçavante en ce saint mestier; car je croy que vous ne doutes pas que la
tres sincere et invariable dilection que Nostre Seigneur m'a donnee pour vostre ame, me face
aymer, cherir et sentir tres passionnement vostre establissement et progres au saint service de sa
divine Majesté. Continues, ma tres chere Fille; croisses tous les jours en humilité, douceur, pureté,
et recommandes souvent a cette celeste Bonté celuy qui vous recommande incessamment a elle,
et qui est a jamais, ma tres chere Fille,
Vostre tres humble et tres affectionné serviteur,
FRANÇS, E. de Geneve.
27 julliet 1620.
A Madamoyselle
Madamoyselle du Tertre A Ste Marie.
A Moulins.
Revu sur l'Autographe conservé à Nantes, chez les Missionnaires
de l'Immaculée Conception. [291]
944 Voir ci-dessus, les notes (784), p. 237, et (935), p. 286.
945 Le P. Jean Foissey, Recteur du collège des Jésuites de Moulins. (Voir ci-dessus, note (934), p. 286.)
946 Voir note (943) de la page précédente.
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MDCLXXXV. A M. Nicolas de Palierne947. Pourquoi François de
Sales a choisi le monastère de Moulins pour la retraite de Mlle du
Tertre. Ce qu'il apprit par une de ses lettres. Affaire où il
n'y a nulle sorte d'injustice. Silence discret du Saint sur un
«advis de conscience.» L'abjection que la Mère de Bréchard
devra porter en patience.
Annecy, 27 juillet 1620.
Monsieur,
Vos discours, pour longs qu'ilz soyent et quel sujet qu'ilz expriment, me sont tous-jours
aymables et dignes de respect. Je respons a celuy qu'il vous a pleu de me faire par vostre lettre du
16 de ce moys, et, sans artifice ni deguisement, je vous feray celuy de ma conduite a ce propos.
Je pris a bonheur de pouvoir en quelque sorte servir a Mlle du Tertre pour sa consolation, sur la fin
de mon sejour a Paris. Mays elle portera, je m'asseure, ce tesmoignage a la verité, que jamais je ne
luy fis aucune sorte de persuasion, non pas mesme indirectement, pour le choix de sa vocation ni
pour l'emploite de ses moyens, l'un estant, a mon advis, perilleux, et l'autre, tout esloigné de la
condition de mon esprit. Seulement je regarday que la Mayson de Sainte Marie de Moulins, a
laquelle je l'addressay [292] comm'a une desirable retraitte, ne pouvoit estre que soulagee
temporellement de la pension qu'ell'y contribueroit, et que si Dieu l'inspiroit de s'y arrester tout a
fait, elle pourroit donner tres suffisamment dequoy y estre entretenue.
Or, quand je passay a Moulins, je ne treuvay encor point de disposition en cett'ame pour
faire le choix qu'ell'a fait du despuis; seulement948, il y a, je pense, deux moys que je sceu par une
de ses lettres qu'elle s'estoit engagee envers Nostre Seigneur, non seulement pour sa vocation,
mays aussi pour l'erection d'une Mayson a Nevers. Et moy, qui ne pouvois nullement deviner qu'on
eut fait dessein pour Moulins sur ses moyens, veu que je ny avois pas mesme pensé que sous une
condition tres incertaine et indefinie, je ne peu treuver que bonne son election, comm'en effect elle
l'estoit. Et sur cela, estant averti que j'envoyasse une couple de filles, je les ay envoyees949, a la
verité sans beaucoup de consideration, n'ayant pas preveu que jamais personne deut attribuer a
injustice la sortie d'une personne d'un lieu ou elle n'estoit pas obligee de demeurer, ni la translation
d'un'autre, pourveu qu'elle laissat en sa place une qui succedat avec suffisante capacité d'exercer
sa charge. Voyla, Monsieur, tout ce que j'ay fait jusques a present pour ce regard.
Maintenant, Mlle du Tertre m'escrit que l'authorité de monsieur le Mareschal et de madame
la Mareschale de Saint Geran la retire de son premier projet, et que des dignes theologiens
l'asseurent que sa conscience est en liberté pour demeurer ou ell'est. Je n'ay rien a dire sur cela, ne
tenant pas les resnes de sa volonté, ne pretendant rien en la disposition de ses moyens, et ne voulant
nullement examiner l'advis de conscience qu'ell'a receu de ceux a qui je ne suis veritablement pas
comparable en la connoissance requise a telles decisions. Ce qui sera plus selon la gloire de Dieu,
947 Nicolas, fils de Jean de Palierne, seigneur de Mimorin et de l'Ecluse, et de Marguerite de Luppelin, exerça pendant
cinquante ans à Moulins la charge de trésorier de France, déjà possédée par son père. Sa femme se nommait Marguerite
Aubert de Blois. (D'après Meyret, Généal. de la famille Palierne, Moulins, Claude Vernoy, 1685.) M. de Palierne se
signala entre tous les bienfaiteurs et amis du Monastère de Moulins, et prit «en main toutes les affaires avec tant de
zèle et d'assiduité, que notre saint Fondateur et notre digne Mère de Chantal lui écrivaient des lettres d'une entière
confiance pour lui recommander la Maison, le priant de lui continuer sa protection et sa bienveillance. Il en a donné
des marques effectives en toutes rencontres... Il ne se contentait pas de donner son temps, sa peine et ses soins, il
ouvrait aussi charitablement sa bourse.» Ainsi parle du pieux gentilhomme que la sainte Fondatrice appelait son «très
cher frère,» l'Histoire de la Fondation de la Visitation de Moulins. Il mourut en 1652.
948 Tout ce qui précède est inédit, ainsi que la dernière phrase de la lettre.
949 Les Sœurs Paule-Jéronyme de Monthoux et Françoise-Jacqueline de Musy (voir ci-dessus, notes (808), p. 246, et
(938), p. 288).
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sera plus selon mon desir. Reste le desplaysir que, parmi cela, ma bonne Seur Jeanne [293]
Charlotte peut recevoir d'avoir donné des paroles a Messieurs de Nevers qu'elle ne peut soustenir,
car je croy que rien n'est capable d'affliger un'ame bien nee que cela; mays il ny a remede.
Et pour finir et vous dire, Monsieur, ce que j'escris a l'une et a l'autre de ces filles: j'escris
a Mlle du Tertre950, qu'elle face ce que le P. Recteur luy dira pour sa conscience; et a ma Seur de
Brechard951, qu'ell'endure tout ce qui reuscira de ce conseil, qu'elle reçoive en patience
cett'abjection, et qu'elle se resouvienne que les piqueures des avettes sont plus sensibles que celles
des mouches, et qu'a cause de leur miel on ne laisse pas de les aymer, encor qu'elles piquent. Les
Anges mesme se sont souvent treuvés d'opinions contraires et ont resisté les uns aux autres952, sans
violer les loix de la charité.
Je vous honnore de tout mon cœur, Monsieur, et vous supplie de continuer vostre dilection
envers ces filles et envers moy, qui seray a jamais
Vostre tres humble serviteur,
FRANÇS, E. de Geneve.
95327 juillet 1620.
A Monsieur
[Monsieur] de Palierne,
Tresorier general de France au Bourbonnois.
Revu sur l'Autographe conservé à la Visitation de Nevers. [294]
MDCLXXXVI. A Monseigneur Jean-François de Sales, son
frère, Evêque nommé de Chalcédoine954 (INÉDITE).
L'inconvenance de la proximité d'une étable et d'une église.
Moyens à prendre pour y remédier.
Annecy, 28 juillet 1620.
Mon tres cher Frere,
Vous sçaves l'incommodité que l'establerie de M. de Moyron955, attachee a l'eglise de Saint
François956, apporte, et combien elle est messeante. Or, monsieur de Cheinex957, qui succede au
fondateur, s'est chargé de faire que Son Altesse commandera qu'en payant a ceux qui praetendent
avoir droit en ladite establerie ce qui sera jugé equitable, on la face oster de la, comm'il est bien
convenable; et les Peres Cordeliers ont desiré que je vous priasse, si l'occasion s'en presente, de
faire encor office pour cela. Ce que je fay, adjoustant au paquet d'hier ce billet et les lettres y
jointes, qui m'ont seulement esté rendues il y a deux heures, quoy qu'elles soyent du mois d'avril.
950 Epist. praeced.
951 Epist. MDCLXXXII.
952 Cf. Dan., X, 13. (Vide tom. XVI, not. (367), p. 114.)
953 Saint François de Sales avait daté cette lettre du 24; il a biffé ensuite ce quantième pour lui substituer 27. (Cf. ci-
dessus, Lettre MDCLXXXIII, p. 289.)
954 Bien que l'adresse ne soit plus jointe à l'Autographe, on ne peut avoir de doute sur le destinataire.
955 François Paquellet, seigneur de Moyron, inhumé à Saint-François le 13 mars précédent (cf. tome XII, note (187),
p. 103), n'avait laissé qu'une fille de son second mariage avec Isabelle de Tardy, décédée en 1608. Sa première femme,
Jacqueline de Châteauneuf, qu'il avait épousée le 16 juin 1583, était morte avant 1605.
956 Voir tome XVII, note (1050), p. 310.
957 Jérôme d'Angeville, seigneur de Chenex, dernier héritier de la famille de Pierre de Lambert, fondateur de l'église
Saint-François. (Voir au tome XV, la Lettre DCCLXV, p. 199, et les notes qui l'accompagnent.)
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22.1 Page 211

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Dieu vous face croistre de plus en plus en sa tressainte grace, mon tres cher Frere, a qui je
suis
Tres humble frere et serviteur,
FRANÇS, E. de Geneve.
2VIII julliet 1620.
Revu sur l'Autographe conservé au Carmel de Lons-le-Saulnier. [295]
MDCLXXXVII. A la Mère de Chastel, Supérieure de la
Visitation de Grenoble. Heureuse disposition de la Providence.
Un nouvel Evêque à Grenoble; ce qu'il faudra faire avec lui.
Petite tentation filiale de la Mère de Chastel. Ne pas
«espier» les sentiments de son âme
Annecy, vers la fin de juillet 1620958.
Or sus, vous aves veu que la divine Providence a bien disposé, et tres favorablement pour
vous et vostre Mayson, sur la reception de Mlle Mistral959. Si cette mesme Providence establit une
Mayson a Valence960, elle vous fera voir de mesme que nous ne sçavons gueres, et que nostre
prudence doit demeurer doucement en paix et faire hommage a la divine disposition qui fait tout
reüscir au bien des siens961. O que ses cogitations sont bien differentes des nostres, et ses voyes
inconneuës a nos sentimens962!
Non, ne craignes pas que vos sentimens me facent rien faire; car encor que je vous cheris
tres parfaitement toutes, si est ce que je sçai bien que vos sentimens ne sont pas vous mesmes,
encor qu'ilz soyent en vous.
Je vous ay asses bien entendue sur vostre orayson: ne vous mettes point sur l'examen
pointilleux de ce que vous y faites; ce que je vous en dis suffira pour le present.
Si vous aves un nouvel Evesque, vous n'aves pourtant rien de nouveau a faire avec luy,
sinon de luy offrir vostre [296] obeissance et de luy demander sa protection; et selon que vous le
verres aysé et doux, ou par vous mesme ou par une discrette entremise, vous pourres luy demander
un Pere spirituel a qui vous vous puissies addresser es occurrences, et par le soin duquel vous
puissies traitter avec luy quand l'affaire le requerra. Si c'est M. Scarron, j'espere qu'on en aura de
la satisfaction; car bien que je ne le connoisse gueres, si est ce que j'en ay ouy dire de grans biens963.
958 Quelques phrases du texte indiquent une époque peu éloignée du séjour en Savoie delà Mère Péronne-Marie (voir
ci-dessus, notes (828), p. 251, et (868), p. 264). Mgr Scarron fut, il est vrai, nommé évêque de Grenoble le 30 juin;
mais le Saint, à la fin de juillet, pouvait n'être pas encore assuré de cette nouvelle.
959 Clémence Mistral, fille de Laurent Mistral et de Marie Thomé, et nièce de Mme de Jomaron, Philothée du Saint,
n'avait alors que quatorze ans. En juillet 1623, elle entra au monastère de Valence, prit l'habit religieux le 11 septembre
suivant et fit profession un an après. La Sœur Clémence-Marie fut envoyée en 1638 à la fondation de la Visitation de
Crest. (Livre du Noviciat et Annales de la Visitation de Valence.)
960 Cette fondation se fit le 10 juin 1621 et sortit du Monastère de Lyon. (Cf. ci-dessus, note (543), p. 154.)
961 Cf. Rom., VIII, 28.
962 Cf. Is., LV, 8, 9.
963 Pierre Scarron, conseiller-clerc au Parlement de Paris, fut sacré dans cette ville évêque de Grenoble le 27 mars
1621, et prit possession de son siège le 6 novembre. Il gouverna son diocèse jusqu'à sa mort, 8 février 1668, et dans
un si long espace de temps laissa peu de souvenirs de son administration. Chorier (Supplément a l'Estat politique du
pays de Dauphiné, Grenoble, Philippes, 1672, tome IV, p. 38) prétend qu'il ne lui fut pas avantageux d'avoir pour
prédécesseur Alphonse de la Croix de Chevrières et pour successeur Etienne Le Camus. Mgr Scarron intervint à
l'assemblée du Clergé de France en 1625 et 1641. En cette dernière année les Evêques le désignèrent pour porter la
parole en leur nom au Roi et au Cardinal-ministre. (Gallia Christiana, tom. XVI.)
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Murmurés tant que vous voudres contre moy, car je ne m'en soucie point, et sçay bien que vous
sçaves que je vous cheris et ay une tres entiere confiance en vous. Que si je ne vous ay pas fait
voir ces lettres, c'est que je n'y ay pas seulement pensé; comme a la verité, cette multitude et varieté
d'affaires m'oste la memoire de la pluspart des choses.
Ouy, il faut demander M. d'Aouste964 a ce nouvel Evesque; car a la verité, M. le Grand
Vicaire ne sçauroit en cela avoir ce soin particulier parmi le soin universel que son office luy
donne965.
Demeurés en paix, ma tres chere Fille, et n'espies pas si particulierement les sentimens de
vostre ame; mesprises les, ne les craignes point, et releves souvent vostre [297] cœur en une
absolue confiance en Celuy qui vous a appellee dans le sein de sa dilection.
FRANÇS, E. de Geneve.
A la Mere Superieure
de Ste Marie de la Visitation de Grenoble.
MDCLXXXVIII. A Madame le Maistre966. Ce qui soulagerait la
destinataire dans ses afflictions. «L'honneur de souffrir
beaucoup,» partage des enfants de Dieu ici-bas. Deux
sentiments de l'âme du Saint. Demande affectueuse de
nouvelles.
Annecy, [juillet-août 1620967.]
Ma tres chere Fille,
Certes, s'il se pouvoit, je voudrois tous les jours recevoir des nouvelles de vostre ame et
tous les jours vous en donner de la mienne, car je m'imagine que vous ne vives gueres sans
afflictions; si est-ce que par le sentiment de mon coeur je connois que le vostre seroit aucunement
soulagé par le commerce spirituel qu'il pourroit avoir avec le mien, selon qu'il a pleu a Dieu de me
donner une affection toute singuliere pour vous cherir de toutes mes forces.
Ma chere Fille, vous sçaves tres bien que Dieu reserve le partage de ses enfans pour la vie
future, et que pour celle ci, il ne donne ordinairement a ses mieux aymés que l'honneur de souffrir
beaucoup et de porter leur croix apres luy968. Je voy vostre cœur assis et affermi sur cette verité;
c'est pourquoy, bien que d'un costé je ne puisse [298] pas m'empescher de compatir avec vous,
puisque veritablement vous estes ma Fille, d'autre part je me glorifie avec vous en la Croix de
Nostre Seigneur969, puisque vous estes si heureuse que d'y participer; et ne cesseray jamais de prier
le Saint Esprit qu'il establisse de plus en plus le vostre en son obeissance [et en son] tres pur et
tressaint amour.
964 Artus de Lionne (voir le tome précédent, note (827), p. 240).
965 Pendant d'assez longues années, et jusqu'en septembre 1621, Abel de Sautereau figure dans les actes comme vicaire
général de l'évêché de Grenoble. Fils de Michel de Sautereau et de Jeanne de Salvaing, il était frère du président si
connu de François de Sales. En 1601, il avait reçu l'abbaye bénédictine de Boscodon (diocèse d'Embrun); il lui fallut
la retirer des mains des huguenots, la rebâtir en entier, rétablir le nombre de ses Religieux et racheter les biens aliénés.
Tout fut fait à ses frais. Une Bulle du Pape, du 18 février 1605, le pourvut du prieuré de Saint-Martin-de-Misèré, de
l'Ordre de Saint-Augustin. (D'après Rivoire de la Bâtie, Armorial du Dauphiné.)
966 En étudiant le texte, et en le comparant avec les lettres adressées à Catherine Arnauld, dame Le Maistre, et celles
où il est parlé d'elle, on demeure convaincu qu'elle est la vraie destinataire.
967 Nous rapprochons ces lignes de la Lettre MDCLXXIV, p. 270, dans laquelle le Saint promet à la Mère Angélique
d'écrire à sa sœur «a la première occasion.» Il se peut cependant qu'elles soient postérieures.
968 Cf. Matt., XVI, 24.
969 Galat., ult., 14.
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Faites moy ce bien, ma tres chere Fille, que par la premiere bonne commodité qui se
presentera, je puisse sçavoir quelque chose de l'estat de vostre cœur et de toute vostre chere petite
trouppe de petitz enfans, que Dieu vous a donnés affin que vous fussies leur mere selon l'esprit
encor plus que vous ne l'estes selon le cors970; et de nostre frere N. et de nostre seur N.971, et Sur
tout de la bonne madamoyselle vostre mere972. Et suis tres invariablement,
Ma tres chere Fille,
Vostre tres humble frere et serviteur,
FRANÇS, E. de Geneve. [299]
MDCLXXXIX. A la Mère Geneviève de Saint-Bernard, prieure
du Carmel de Chartres. Quand Dieu nous a donné une charge, il
nous doit sa grâce pour la bien remplir. Petit dialogue. On
est fidèle, si on est humble; on est humble, si on désire l'être.
Le pain quotidien. Faire bien aujourd'hui, sans penser à
demain, se fiant en la Providence
Annecy, [juillet-août 1620973.]
Ma tres chere Fille,
Quelle consolation pour vous que c'est Dieu mesme qui vous a faite Superieure, puisque
vous l'estes par les voyes ordinaires. C'est pourquoy sa Providence est obligee, a sa disposition, de
vous tenir de sa main affin que vous fassies bien ce a quoy il vous appelle. Croyes, ma tres chere
Fille, il faut aller a la bonne foy sous la conduite de ce bon Dieu, et ne point disputer contre cette
regle generale, que Dieu qui a commencé en nous le bien, le parfaira974 selon sa sagesse, pourveu
que nous luy soyons fideles et humbles.
Mays on va rechercher entre ses serviteurs quelqu'un qui soit fidele975. Et je vous dis que
vous seres fidele si vous estes humble. Mays seray je humble? Ouy, si vous voules. Mays je le
veux. Vous Testes donq. Mais je sens bien que je ne la suis pas. Tant mieux, car cela sert a l'estre
plus asseurement.
Il ne faut pas tant subtiliser, il faut marcher rondement; et comme il vous a chargee de ses
ames, charges le de la vostre, affin qu'il porte tout luy mesme, et vous et vostre [300] charge sur
vous. Son cœur est grand, et il veut que le vostre y ayt place. Reposes vous ainsy sur luy, et quand
vous feres des fautes ou des defautz, ne vous estonnes point; ains, apres vous estre humiliee devant
Dieu, souvenes vous que la vertu de Dieu se manifeste plus glorieusement dans nostre infirmité976.
970 Mme le Maistre eut cinq fils: Antoine (1608-1658), plus tard solitaire de Port-Royal, comme son frère Simon (1611-
1650) connu sous le nom de M. de Séricourt; Jean, M. de Saint-Elme, mort vers 1690; Isaac, M. de Sacy, le traducteur
de la Bible (1613-1684), et Charles, M. de Vallemont, qui mourut à Port-Royal de Paris en 1652.
971 Robert Arnauld d'Andilly (voir ci-dessus, note (124), p. 21) et très probablement la Mère Angélique.
972 Catherine Marion, veuve d'Antoine Arnauld depuis le 29 décembre précédent. (Voir ibid., note (146), p. 28.)
973 D'après ce que l'on sait du caractère de la Mère Geneviève de Saint-Bernard Acarie (voir tome XIII, note (791), p.
286), quelque peu porté à subtiliser, l'ensemble de la lettre lui convient parfaitement, et le ton à la fois paternel et
familier du saint Evêque confirme l'hypothèse. François de Sales avait, pendant son séjour à Paris, renouvelé les
intimes relations d'autrefois avec la fille de la bienheureuse Marie de l'Incarnation, alors au couvent de la rue Chapon.
Elle le quitta au mois de juin 1620 pour diriger comme Prieure la fondation de Chartres; c'est la raison de notre date
approximative.
974 Philip., I, 6.
975 I Cor., IV, 2.
976 II Cor., XII, 9.
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En un mot, ma chere Fille, il faut que vostre humilité soit courageuse et vaillante, en la confiance
que vous deves avoir en la bonté de Celuy qui vous a mise en charge.
Et pour bien couper chemin a tant de repliques que la prudence humaine, sous le nom
d'humilité, a accoustumé de faire en telles occasions, souvenes vous que Nostre Seigneur ne veut
pas que nous demandions nostre pain annuel, ni mensuel, ni hebdomadal, mais quotidien977.
Tasches de faire bien aujourd'huy, sans penser au jour suivant; puis, le jour suivant, tasches de
faire de mesme; et ne penses pas a ce que vous feres pendant tout le tems de vostre charge, ains
alles de jour en jour passant vostre office, sans estendre vostre souci, puisque vostre Pere celeste
qui a soin aujourd'huy, aura soin demain et passé demain de vostre conduitte, a mesure que,
connoissant vostre infirmité, vous n'espereres qu'en sa providence.
Il m'est advis, ma tres chere Fille, que je vay bien a la bonne foy avec vous de vous parler
ainsy, comme si je ne sçavois pas que vous sçaves mieux que moy tout ceci; mays il n'importe, car
cela fait plus de coup quand un cœur ami le nous dit.
Je suis vostre.
FRANÇS, E. de Geneve. [301]
MDCXC. A la Mère de Chantal, a Paris (Inédite). L’été,
mauvaise saison pour la santé de François de Sales. A quelle
condition il écrira courtement à la Mère de Chantal. Deux
sœurs qui s'aiment bien et qui sont très aimées par leur Père
spirituel. Ce que va faire D. Juste en Piémont. Regret de
ne pouvoir envoyer quelques lettres, et messages paternels
Annecy, 4 août 1620.
Ma tres bonne et tres chere Mere,
Je fay beaucoup de choses, et en laisse beaucoup pour suivre vostre intention. Il y a huit ou
9 jours que j'ay eu un peu des incommodités que l'esté a accoustumé de m'apporter; nostre M.
Grandis978 dit que ce n'est rien, et non seulement je le croy fermement, mais je le sens evidemment.
Or il est force pourtant qu'en suite j'escrive le moins que je puis; a ce moys prochain, cette reserve
me sera ostee.
Je n'escriray donq qu'a vous, et encor bien peu, a la charge neantmoins que vous n'en tireres
pas consequence que je veuille vous retrancher vos longueurs es lettres, car elles me sont tres
agreables, pourveu qu'elles ne vous nuisent pas. Et de plus, si j'eusse sceu plus tost le depart du
sire Pierre979, j'eusse escrit a cette fille bienaymee que vous aves aupres de vous, fille du jour et de
l'oratoire de la Visitation, qui fut si efficacement visitee au jour qu'on celebroit la feste des visites
celestes980. Mon Dieu, que j'ayme son cœur et celuy de ma tres chere fille sa [302] seur! Il faut
bien qu'elles cultivent l'un'et l'autre le don de Dieu981. J'ay envoyé a Rome affin d'obtenir l'entree
de cette seur982, qui sçait bien ce que je luy suis, et que je sçai la sainte et parfaite union qu'ell'a
avec cette chere fille, qui merite bien qu'elle la puisse quelque fois voir de plus pres.
977 Luc., XI, 3.
978 Jean Grandis, médecin d'Annecy. (Voir tome XV, note (90), p. 20.)
979 Pierre Richard (voir tome XVI, note (1072), p. 330).
980 Ce fut le jour de la Visitation que Mlle Lhuillier reçut de l'Evêque de Genève une réponse décisive au sujet de sa
vocation. (Voir ci-dessus, Lettre MDCLV.) Vaincue par la grâce, elle entra le jour même au monastère.
981 Joan., IV, 10.
982 Mme de Villeneuve.
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O ma Mere, je vous escriray, et a toutes nos Filles, si tost que nostre bon P. D. Juste sera
parti, qui est le plus admirable amateur et admirateur de la Visitation, de nous et de tout ce qui est
de nous, quil est possible d'imaginer. Il veut partir dans 4 ou cinq jours, tant pour faire venir la
signora D. Genevra, que pour assister a mon frere en son sacre, que pour un autre tout bon dessein
que Dieu luy a donné983.
Helas! je n'escriray point a ma tres chere fille Mme de Port Royal, ni a Mlle Le Maistre;
mays je prieray Dieu quil les console de l'abondance de son saint amour.
Je vis avec impatience jusques a ce que j'aye fait un petit mot de congratulation a nostre
chere fille sur son mariage, que Dieu veuille a jamais benir984. Amen.
Ma Mere, je salue toutes nos Seurs d'icy, vielles et nouvelles985, et toutes celles de dela, et
Mme de Gouffiez, ma fille, quoy qu'elle sache dire ni repliquer, et Mme de Villesavin, avec son
Anne et son Angelique986, et en somme, toutes. J'escriray et respondray a nostre bon M. de Saint
Jaques987.
4 aoust 1620.
Nous avons receu vostre fille de Dijon, delaquelle j'ay [303] bonne opinion; elle porte un
je ne sçai quoy de ma tres chere Mere en son visage988.
Dieu, par sa bonté, soit a jamais glorifié en nostre unique cœur. Amen. Vive Jesus! O ma
Mere, quand vous verres ma tres chere commere Mme la Presidente de Herce989………………….
A nostre très chere Mere
Supérieure de la Visitation d'Annessi.
A Paris.
Revu sur l'Autographe conservé à la Visitation de Limoges.
983 D. Juste Guérin était allé à Thonon le 30 juillet, il revint peu après à Annecy et repartit pour l'Italie le 17 août. (Acta
Collegii Annessii.) Il ne put ni faire venir en Savoie Dona Ginevra Scaglia (voir ci-dessus, p. 268), ni assister pour
lors au sacre de Jean-François, retardé jusqu'au 17 janvier 1621.
984 Le mariage de Françoise de Rabutin-Chantal et d'Antoine de Toulongeon avait été célébré à Paris le 12 juin 1620.
985 Les professes d'Annecy, fondatrices du Monastère de Paris, et celles qui venaient de quitter la Savoie pour Orléans.
Ces dernières étaient encore au-près de la Mère de Chantal.
986 Voir ci-dessus, notes (605), (607), p. 179.
987 Charles de la Saussaye, curé de Saint-Jacques de la Boucherie. (Voir ci-dessus, note (464), p. 129.)
988 Native de Dijon, et fille d'Etienne Valeray et de Marguerite Vincent, cette prétendante prit l'habit religieux et le
nom de Bernarde-Marguerite le 10 septembre 1620, à l'âge de vingt-cinq ans. Professe le 23 avril 1622, elle décéda le
17 juin 1631, après une pénible maladie de quatre années qui donna lieu d'admirer son énergie, le mépris qu'elle faisait
d'elle-même et son amour pour la Règle. (Livres du Noviciat et du Couvent, du 1er Monastère d'Annecy.)
989 Le Saint a laissé cette phrase inachevée.
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MDCXCI. Au Baron Prosper de Rochefort990 (Inédite). Pauvre
âme à «l'esprit renversé» et à la conscience dévoyée.
Promesse d'intervenir auprès de Mgr de Belley en faveur du
destinataire.
Annecy, 5 août 1620.
Monsieur,
Je parlay encor il ny a que trois jours avec monsieur Rosetain de cette miserable creature
de laquelle, et pour mon devoir et pour suivre vostre bon desir, j'avois affectionné la retraitte. Il
me dit qu'ell'avoit tout a fait l'esprit renversé, et qu'elle disoit rage de luy et de moy, comme [304]
si la voulant retirer icy je l'eusse volu trahir et perdre; et qu'au demeurant, elle fait ses actions en
sorte qu'on ne peut rien preuver. Dieu, par sa bonté, y veuille mettre sa sainte main, et guerir son
esprit de ce desvoyement de conscience.
Je ne sçai pas encor quand Monsieur le Rme de Belley voudra que je luy aille rendre mon
devoir991, et croy qu'il vous estime si entierement que mon entremise sera superflue. Mais puis
qu'il vous plait, je l'y contribueray, grandement obligé a vostre bienveuillance de la veritable
asseurance que vous prenes de mon affection, qui est toute invariable a vous honnorer fidelement,
et a me faire vivre a jamais,
Monsieur,
Vostre tres humble et plus obeissant parent
et serviteur,
FRANÇS, E. de Geneve.
V aoust 1620, Annessi.
Monsieur, je suis fort asseurement tres humble serviteur de monsieur d'Escrivieu, vostre
cher et digne filz992, et luy souhaite toute sorte de bonheur en sa sollicitation, avec l'incomparable
contentement de vous voir993 [heureux] longuement en cette vie.
Revu sur l'Autographe appartenant à M. le baron de Rostaing,
à Montbrison. [305]
990 Il suffit de comparer cette lettre avec celle du 12 février 1620 (p. 134), pour se convaincre qu'elle a été adressée au
même destinataire; la mention de M. d'Escrivieux (voir note (992) de la page suivante) ne laisse d'ailleurs aucun doute.
991 Le voyage à Belley se fit le 23 septembre. (Voir ci-après, p. 336.)
992 Seigneur de Château-Bochard, Escrivieux, et plus tard des Hayes, comme héritier de Charles de Menthon-
Montrottier (voir tome XI, note (127), p. 44), Balthazard de Menthon-Rochefort épousa Isabeau de Mornieu.
Longtemps sans enfants, cette noble dame s'en plaignit au Saint lors du voyage qu'il fit en Bugey dans l'automne de
1620. François de Sales lui promit de prier pour elle, et après la Messe célébrée à cette intention, il lui dit: «Ma fille,
remerciez Dieu; car il a exaucé vos prières, et devant qu'il soit une année» vous aurez un fils. (Charles-Auguste,
Histoire, etc., liv. IX, p. 546.) La prédiction se réalisa; l'enfant mourut jeune, mais il eut plusieurs sœurs dont deux
furent Religieuses de la Visitation à Rumilly.
993 Mot déchiré.
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MDCXCII. A Dom Jean de Lucinge, prieur de Contamine994.
Une rixe sur laquelle il faut informer.
Annecy, 5 août 1620.
Monsieur mon Cousin,
Comme M. Crosson vint l'autre jour a moy pour se plaindre de son Prieur995, aujourdhuy
son Prieur vient a moy pour se plaindre de luy, et m'a monstré son visage tout gasté des coups quil
dit avoir receu dudit M. Crosson, me priant de vous prier de vouloir aller sur le lieu de l'exces pour
informer: ce que je croy estre fort a propos. Et sil vous plait faire l'information en sorte que je m'en
puisse servir, il y aura moyen de rendre justice, a l'un par vous, et a l'autre par moy.
Atant, vous saluant bien humblement, je demeure, Monsieur mon Cousin,
Vostre tres humble cousin et confrere,
FRANÇS, E. de Geneve.
V aoust 1620.
A Monsieur
Monsieur de Lucinge,
Prieur de Contamine.
Revu sur l'Autographe conservé dans le trésor de l'église
Saint-François de Sales, à Lyon. [306]
MDCXCIII. A la Mère de Bréchard, Supérieure de la Visitation
de Moulins (Inédite). Un passage d'une lettre de Mme du Tertre.
Réponse que lui fit François de Sales. Sa décision après
plus ample information. La douceur des Règles de la
Visitation Sainte-Marie. «Oublier les orages et les flotz,» et
ne point se lasser de souffrir
Annecy, 9 août 1620.
Ma tres chere Fille,
J'ay receu vostre grande lettre, a laquelle je ne me suis pas hasté de respondre par ce que
des-ja j'avois respondu a tout ce qu'elle contient par la lettre que j'escrivis et a vous et a Mlle du
Tertre996, que je mis dans un paquet que j'addressay a monsieur le Mareschal997 par monsieur des
994 Dernier prieur claustral de Contamine (1618-1625), Jean était fils de Michel de Faucigny-Lucinge et de Charlotte
de Foras. Déjà religieux, il fut ordonné prêtre le 31 mai 1608, ayant reçu le sous-diaconat des mains de François de
Sales le 18 décembre 1604. (R. E.)
995 La collation du prieuré de Thiez appartenait au prieur de Contamine; c'est à un de ses Religieux, Amédée de Thoire,
qu'il conféra ce bénéfice en 1612. Il est fort probable que ce prieur de Thiez soit l'adversaire de M. Crosson; mais à
quel titre celui-ci pouvait-il l'appeler «son Prieur,» nous ne le savons pas.
Martin Crosson, après avoir possédé deux chapellenies, à Evian et à Vacheresse, avait, en 1603, échangé la
cure de Neuvecelle pour celle de Lugrin. Le 6 janvier 1608, il reçoit l'institution pour là chapelle de Saint-Bernard de
l'église de Saint-Jean d'Aulps. (R. E.)
996 Epist. MDCLXXXII, MDCLXXXIV.
997 Le maréchal de Saint-Géran (voir ci-dessus, note (784), p. 237).
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Hayes qui, revenant de Constantinople, alloit en poste au Roy998; et je m'asseure que vous l'aures
receue.
Voyci les propres paroles de la lettre que Mlle du Tartre (sic) m'avoit escritte: «Je ne fus
pas asses satisfaite d'avoir consulté les Capucins; je desiray voir le bon P. Recteur999, auquel je
vous puis asseurer, Monsieur, que je dy tout l'engagement, et de la mesme sorte que je vous l'ay
escrit. Il me dit que, dans l'interest de Dieu et le mien, je devois me tenir en cette ville, mais
neantmoins ayder l'establissement de la Mayson de Nevers, et quil me feroit voir par ses livres que
c'estoit avec des tres bonnes raysons quil me disoit que je pouvois transmuer mon dessein.» Sur
cela, je luy escrivis, et a vous, qu'elle [307] devroit suivre l'advis de ce Pere, qui ne peut estre que
grave personnage, et donner une partie de ses moyens pour Nevers, gardant l'autre pour Moulins,
en sorte qu'en faisant l'un elle n'abandonnast pas l'autre.
Mays on ne m'avoit pas dit tout, et je viens de l'apprendre tout maintenant. Le vœu n'est
pas demeuré entre Dieu et Mlle du Tertre; la promesse est passee jusques a Nevers et ell'y a esté
acceptee, et en suite de l'acceptation, on a acchepté places, mayson et meubles jusques a dix mille
francz, par commission donnee de la part de madamoyselle du Tertre1000. Certes, j'adjouste donq
que, tout au fin moins, les dix mille francz employés par ordre de madamoyselle du Tertre, sur sa
parole, en suite de son vœu, ne peuvent ni doivent estre retirés, sinon que, comm'il se peut faire,
je sois grandement deceu en l'intelligence des docteurs. Mais je m'asseure que le P. Recteur se sera
bien fait expliquer tout le fait et aura, par sa prudence, accommodé toutes choses selon le droit; et
je m'asseure que Mlle du Tertre aura eu de la consolation de voir que, par ses moyens, l'une des
Maysons soit fondee et l'autre mieux establie en commodités; et cela ne luy devra nullement oster
le tiltre de fondatrice, au contraire, elle le meritera doublement.
Et quant aux exceptions qu'elle desireroit pour moins incommodement vivre dans le
monastere: pourveu qu'elle se sousmette aux Regles et aux Constitutions essentielles (en quoy,
comme en toutes autres choses, le Pere Recteur et les autres theologiens vous pourront bien
conseiller); il ny a Regle au monde, ni Constitutions qui s'accommode (sic) tant aux infirmes que
celles de cet Institut. Et quant a l'obeissance, qui est essentielle, ell'est tous-jours bien douce, ce
me semble, quand on est en des monasteres ou les Superieures sont bien conditionnees,
principalement aux filles infirmes et qui pour quelque digne sujet sont exceptees.
Le Monastere de Nevers ira bien, apres que toutes ces bourrasques auront esté appaysees.
Il n'est pas besoin de se mettre en souci si celles ci ou celles-la y entreront; [308] Dieu, duquel la
providence a fait ce buisson, sçait bien quelz oyseaux y doivent chanter ses louanges.
Si la fille dont vous m'escrives, du marchand qui a mené les affaires, a sa vocation aux
Carmelites, qui oseroit avoir pensé de la desirer ailleurs? Elle sera bienheureuse d'estre en une si
sainte assemblee. Que si ell'est pour Sainte Marie, ell'y treuvera bien aussi de quoy y servir sa
divine Majesté1001.
Vous aves grandement bien accompaignee ma Seur Paule Hieronime de luy avoir donné
ma Seur de Chatelu1002. Si celle qui luy succede aupres de vous ne fait pas tant de besoigne, il faut
avoir patience; on ne peut pas avoir toutes choses a souhait. Seulement je vous prie de reprendre
patience, oublier les orages et les flotz, et mesnager le reste de vostre navigation tranquillement.
998 La question du maintien des Cordeliers dans la possession des Lieux Saints s'agitait en ce moment entre la cour de
France et le Sultan (cf. la lettre de Bentivoglio, 3 juin 1620, dans La Nunziatura di Francia, vol. IV, p. 264), et c'était
certainement le sujet du voyage du jeune diplomate Louis des Hayes (voir tome XVI, note (1112), p. 340) auprès de
Louis XIII qui venait alors d'entrer au Mans, poursuivant les partisans de la Reine mère.
999 Le P. Jean Foissey, Recteur des Jésuites de Moulins. (Voir ci-dessus, note (934), p. 286.)
1000 Voir à l'Appendice III.
1001 Peut-être s'agit-il de la fille de M. Vincent Bonsidat, si intimement mêlé à la fondation de Nevers. Elle prit l'habit
religieux dans ce monastère le jour même de l'établissement; elle y était encore en 1625 (cf. Lettres de Ste J.-Fse de
Chantal, vol. II, p. 423), car, en reconnaissance des services de son père, on la garda aussi longtemps qu'il fut possible,
sans l'admettre toutefois à la Profession, n'ayant pas de vocation. Sa sœur paraît être sortie bien avant elle. Des petites-
filles et arrière-petites-filles du bienfaiteur de la Communauté vinrent plus tard prendre la place de celles qui n'avaient
pas persévéré.
1002 Sœur Marie-Hélène de Chastellux accompagna à Nevers la Mère Paule-Jéronyme de Monthoux; elle est
destinataire le a novembre 1620.
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Vous n'eutes jamais tant de peine ni de mal de cœur que parmi ceste bourrasque; benisses Dieu,
demeures humble et courageuse, et ne vous lasses point de souffrir beaucoup.
Si je puis, j'escriray un mot a Mlle du Tertre; si je ne puis, salues-la cherement. Elle sçait
bien que la pretention que j'ay en elle n'est autre chose que son eternelle beatitude, praetention que
je la supplie de favoriser de tout son pouvoir. Amen. Vive Jesus!
Je suis sans fin, et sans varier ni peu ni prou, parfaitement vostre, ma tres chere Fille.
IX aoust 1620.
A ma tres chere Fille en [N. Sr],
Ma Seur Jean. Charle [de Brec]hard,
Superieure de Ste Marie de la Visitation.
A Moulins.
Revu sur l'Autographe conservé à la Visitation de Nantes. [309]
MDCXCIV. A la Mère de Chantal, a Paris. Nouvelles réponses
à Moulins et à Nevers pour éclaircir les premières. Le
caractère de «race des biens des anciens chrestiens.»
Epreuves de la Mère de Bréchard. Seule habitation stable de
l'Evêque de Genève; regard sur l'autre vie. Quelques mots de
la Communauté d'Annecy. L'unique chose à traiter à Rome
pour la Congrégation
Annecy, 9 août 1620.
N'attendes nullement de moy une grande lettre, ma tres chere Mere, car j'ay tant escrit que
je n'en puis plus, ayant esté contraint de faire de rechef des lettres pour Moulins et Nevers, plus
longues beaucoup que l'ordinaire, pour m'esclarcir sur les responses que j'avois faites, car on ne
m'avoit pas dit tout et je n'avois pas respondu tout1003.
C'est la verité que le vœu de Mlle du Tartre (sic) ayant esté fait en faveur de Nevers, et ayant
esté non seulement accepté, mays en bonne partie executé jusques a l'employ de dix mille francz
fait par ordre et procuration de Mlle du Tertre, il ny a nulle apparence qu'elle s'en puisse desdire,
au moins quant a la part des-ja employee. Or, je croy que tout ira bien, et l'affaire d'Orleans
aussi1004. Les biens qui se font sans contradiction ne semblent pas estre de la race des biens des
anciens Chrestiens. [310]
1003 C'est le 26 et le 27 juillet que le Saint avait fait ses premières réponses (voir ci-dessus, Lettres MDCLXXXII,
MDCLXXXIV et MDCLXXXV); quant aux lettres écrites le 9 août à Moulins et à Nevers, elles n'ont pas été
retrouvées, sauf celle à la Mère de Bréchard.
1004 Le passage de l'Evêque de Genève à Orléans en novembre 1618, le séjour qu'il y fit dans les premiers mois de
1619, préparèrent les voies à un établissement d'une Maison de la Visitation dans cette ville. La comtesse de Saint-
Pol (voir ci-après, note (1086), p. 335) et Mme de Roissieux (cf. note (192), p. 43) en furent les ardentes promotrices.
La seconde avait même réuni quinze à seize jeunes filles qui, maîtresses de leurs biens, promettaient de les consacrer
à la fondation; mais les choses traînant en longueur, les courages se lassèrent, et trois des aspirantes restèrent seules
fidèles. L'Evêque, les syndics, beaucoup des habitants, pour des raisons différentes, se montraient défavorables au
projet. Les deux nobles dames, amies des Sœurs de Sainte-Marie, vinrent à bout de toutes les difficultés, et la petite
troupe des fondatrices, après avoir stationné à Paris près de deux mois, en partit pour Orléans le 4 septembre. (D'après
l'Hist. de la Fondation.)
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La pauvre Seur Jeanne Charlotte a esté bien exercee, a ce qu'on m'escrit1005; et, ce qui est
plus deplorable, c'est que l'on a remué ces vieux bruitz qui, comme tres injustes, avoyent esté
ensevelis, ainsy que m'escrit ma chere fille de Goufiez, a laquelle je ne puis escrire, me contentant
de la saluer de tout mon cœur pour cette fois. O que le monde est inique, a mon gré, et que sa
prudence est haïssable, parce qu'ell'est serpentine et nullement associé (sic) a la simplicité
colombine! O il ny a nul danger que vous traitties toutes ces filles maternellement; elles le
reçoivent, je m'asseure, filialement.
Ne vous empresses nullement pour vostre retour; ces fondations de dela sont de si grande
importance quil ny faut pas espargner le tems. Et moy, voyant que je suis appellé a suivre M. le
Prince Cardinal, soit quil aille a Rome, soit qu'il aille en France, comme l'on dit quil fera1006, je ne
suis plus de ce païs, ains du monde, et fay estat de n'avoir nulle habitation que dans le sein de
l'Eglise. Je commence a ne plus arrester ma pensee qu'a la reunion de l'autre vie, en laquelle,
comme nous sommes inseparables d'esprit, nous le serons encor de veue. J'attens toutes les heures
qu'on m'escrive quil faut partir pour aller en France.
Je donnay un exemplaire du Formulaire de la reception des filles a l'habit et aux vœux, tres
bien escrit, a nos Seurs. Enfin, l'experience a fait voir que quand les filles demeurent a la treille un
peu eslevees, on les void mieux et on les entend mieux par tout l'oratoire.
Ma Mere, je suis cruel a nos Seurs d'icy, car je ne les voy point; mais le monde m'est cruel
a moy, qui m'apporte tant de tricheries. Helas! la pauvre Seur Marie Magdeleyne est une bonne
Seur, mais je ne sçai quand on la pourra tirer de dessus elle mesme1007. Mays la pauvre chetifve
Seur Jeanne Françoise1008 s'en va petit a petit [311] tout a fait folle, si Dieu ny met sa puissante
main. O pourveu que le dernier accident luy arrive en la grace de Dieu, il importera peu. Je suis
marri en la partie superieure de cela, et m'estonne dequoy je n'en ay nul sentiment ailleurs.
Ma Mere, si j'allois a Rome, il ne faudroit nullement traitter des Constitutions, car ce seroit
tous-jours a refaire; on deputeroit quelqu'un pour les revoir, qui les renverseroit toutes, peut estre.
Il ne faudroit que procurer la perpetuité du petit Office. Jamais il ny eut Religion delaquelle toutes
les Constitutions ayent esté appreuvees a Rome par le Saint Siege, il suffit que les Regles le soyent.
Tout ce que la prudence y peut faire, se fera a la reveüe; apres cela, il faut demeurer en paix et
laisser a la providence de Dieu de les establir, et elle le fera1009.
Je vous vay escrire un article pour ma fille Mlle de Frouville et Mme de Villeneuve1010, que
vous pourres monstrer a celle ci, car c'est pour le service de la seur que j'ayme tout a fait1011.
……………………………………………………………………………………………………..
………………………………………………………….niture sacree quil desire, et n'excepte rien
…………...la feu Infante et Madame1012 eut on fait faire ce de le pouvoir par l'entremise de celle
ci.
9 aoust 1620.
Revu sur l'Autographe conservé à la Visitation de Turin. [312]
1005 Voir à l'Appendice III.
1006 Voir ci-dessus, note (789), p. 240, et ci-après, p. 334.
1007 Sœur Marie-Madeleine de Mouxy (voir tome XV, note (790), p. 278).
1008 Sœur Jeanne-Françoise de Sales (voir plus haut, Lettres MDCXVII, p. 150, et MDCXVIII, p. 153).
1009 Elle le fit en effet lorsque, quatre ans après la mort du Fondateur, le Pape Urbain VIII approuva les Constitutions
de la Visitation par Bref du 27 juin 1626.
1010 Hélène Lhuillier et sa sœur Marie, dame de Villeneuve.
1011 Cette dernière phrase est écrite en marge de la seconde page de l'Autographe; la troisième, qui sans doute contenait
« l'article », aura été détachée et remise à Mme de Villeneuve; il n'en reste que trois lignes coupées, en marge. Datta ne
les a pas données.
1012 Une infante d'Espagne, Marguerite, sœur d'Anne d'Autriche, reine de France, née en 1610, mourut dans son
enfance. Est-ce d'elle qu'il est ici question? Elle tenait de près à «Madame,» Christine de France.
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MDCXCV. A Mademoiselle Lhuillier de Frouville. Saint
résultat de la promptitude à faire la volonté de Dieu. Le
calme après une rude secousse. Néant de ce que l'on quitte
pour le Seigneur, valeur immense de ce que l'on trouve. Trois
parties de l'holocauste
Annecy, 9 août 1620.
Ce m'est une douceur nompareille, ma tres chere Fille, de voir l'operation celeste que le
Saint Esprit a faite en vostre cœur, en vostre si forte et genereuse resolution de vous retirer du
monde. O que vous fistes sagement, suivant la sagesse surnaturelle, ma tres chere Fille! car ainsy
estoit il en l'Evangile de la feste qu'on celebroit1013, que Nostre Dame s'en alla tout hastivement
droit dans les montz de Juda1014. Cette promptitude de faire la volonté de Dieu est un grand moyen
d'attirer de grandes et puissantes graces pour la suite et accomplissement de toute bonne œuvre; et
vous voyes, ma tres chere Fille, qu'apres la rude secousse que vostre cœur sentit quand, de vive
force, il se desprit de ses sentimens, humeurs et inclinations pour suivre l'attrait superieur, en fin
vous voyla toute consolee et accoysee dans le bienheureux buisson que vous aves choysi pour
chanter a jamais la gloire du Sauveur et Createur de vostre ame.
Or, releves, ma chere Fille, releves souvent vos pensees a cette eternelle consolation que
vous aures au Ciel, d'avoir fait ce que vous aves fait. Ce n'est rien, certes (et je voy bien que vous
le croyes ainsy), ce n'est tout a fait rien en comparayson de vostre devoir et de ces immortelles
recompenses que Dieu vous a preparees; car, que sont toutes ces choses que nous mesprisons et
quittons pour Dieu? En somme, ce ne sont que des chetifz petitz momens de libertés, mille fois
plus sujettes que l'esclavage [313] mesme; des inquietudes perpetuelles, et des pretentions vaines,
inconstantes et incapables d'estre jamais assouvies, qui eussent agité nos espritz de mille
sollicitudes et empressemens inutiles: et ce, pour des miserables jours, si incertains, et courtz, et
mauvais1015. Mais neanmoins il a pleu ainsy a Dieu, que qui quitte ces neans et vains amusemens
des momens, gaigne en contreschange une gloire d'eternelle felicité1016, en laquelle cette seule
consideration d'avoir voulu aymer Dieu de tout nostre cœur et d'avoir gaigné un seul petit grade
d'amour eternel de plus, nous abismera de contentement.
En verité, ma tres chere Fille, je n'avois garde de vous dire: Foules aux pieds vos sentimens,
vos desfiances, vos craintes, vos aversions, si je n'eusse eu la confiance en la bonté de l'Espoux
celeste, qu'il vous donneroit la force et le courage de soustenir le parti de l'inspiration et de la
rayson contre celuy de la nature et de l'aversion.
Mays, ma tres chere Fille, il faut que je vous die que vous voyla doucement toute morte au
monde, et le monde tout mort en vous1017: c'est une partie de l'holocauste. Il en reste encor deux:
l'une est d'escorcher la victime, despouillant vostre cœur de soy mesme, coupant et tranchant toutes
ces menues impressions que la nature et le monde vous donnent; et l'autre, de brusler et reduire en
cendres vostre amour propre1018, et convertir tout en flammes d'amour celeste vostre chere ame.
Or, ma Fille certes toute tres chere, cela ne se fait pas en un jour, et Celuy qui vous a fait la grace
de faire le premier coup, fera luy mesme avec vous les autres deux; et parce que sa main est toute
paternelle, ou il le fera insensiblement, ou, s'il vous le fait sentir, il vous donnera la constance, ains
1013 Hélène Lhuillier de Frouville était entrée au monastère de Sainte-Marie de Paris le jour même de la Visitation, 2
juillet 1620. (Voir ci-dessus, note (695), p. 213.)
1014 Luc., I, 39.
1015 Gen., XLVII, 9.
1016 Cf. II Cor., IV, 1.
1017 Cf. Coloss., III, Galat., ult., 14.
1018 Cf. Levit., I, 6-9.
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la joye qu'il donna au Saint duquel nous faysons la feste, sur la grille1019. C'est pourquoy vous ne
deves point apprehender: Qui vous a donné la volonté, il vous donnera l'accomplissement1020.
Soyes seulement fidele en peu de choses, et il vous establira sur beaucoup de choses1021.
Vous me promettés, ma tres chere Fille, que si on vous [314] le permet, vous m'escrires
toutes les rencontres de vostre heureuse retraitte; et je vous prometz qu'on vous le permettra, et
que je recevray ce recit avec un extreme amour.
Dieu soit a jamais beni, loué et glorifié, ma tres chere Fille, et je suis en luy et pour luy,
tres singulierement,
Vostre tres humble et tres affectionné serviteur,
FRANÇS, E. de Geneve.
Ce 9 aoust 1620, Annessi.
Le bon oncle Chartreux1022 sera bien consolé quand il sçaura que vous estes [Religieuse],
A Madamoyselle de Frouville.
A Sainte Marie.
A Paris.
MDCXCVI. A Madame de Villeneuve. Une action héroïque,
digne des premiers temps du christianisme. Servir Dieu en
Dieu. Consolation et force
Annecy, 9 août 1620.
Je me res-jouys avec vous, ma tres chere Fille, de la retraitte de la chere seur1023, tant par
ce qu'en verité ell'a esté faite genereusement, saintement et, pour le dire comme je l'entens,
heroiquement et a la façon de ces anciennes ames du christianisme de l'aage plus saint, qu'aussi
dautant que, comme m'a escrit la bonne Mere Superieure1024, vous aves autant de part en cette
retraitte, et plus encor, que si vous vous fussies retiree vous mesme, en cas quil vous eut esté
loysible. O c'est ainsy, ma Fille tres cherement bienaymee, quil faut servir Dieu, car c'est le servir
en Dieu et par l'amour souverainement et incomparablement excellent. [315]
Je sçai le fort, vif et tendre amour de vostre cœur envers cette seur, et que cette petite
separation luy aura costé des grans effortz, et c'est cela qui me donne mille playsirs en la partie
superieure; car en l'inferieure, croyes moy, ma Fille, j'ay treuvé mon sentiment engagé dans le
vostre,1025 tant il est vray en un sens tres sincere, que «l'amour egale les amans1026.» Vous aves
donq si bonne part en ce sacrifice aggreable, que je m'en res-jouis tres affectionnement avec vous,
et croy que la divine Bonté aura une douce souvenance de vostre holocauste et confirmera vostre
conseil, et vous rendra, selon l'intention de vostre cœur1027, une consolation qui vous fera tousjours
croistre en cet amour, ou une force qui, sans consolation, vous fera tous-jours de plus en plus
parfaitement servir ce celeste amour.
Je ne sçai que vous dire, ma tres chere Fille, sinon que je suis indiciblement et
incroyablement vostre.
1019 Saint Laurent dont on célébrait les premières Vêpres.
1020 Philip., II, 13.
1021 Matt., XXV, 21, 23.
1022 Il a été impossible d'identifier le «bon oncle Chartreux.»
1023 Hélène Lhuillier.
1024 La Mère de Chantal.
1025 La fin de la phrase a été supprimée dans les éditions précédentes.
1026 Adagium Pythagoras attributum.
1027 Ps. XIX, 4, 5.
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23.3 Page 223

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Vive Jesus! Amen.
IX aoust 1620.
A Madame
Madame de Villeneufve.
Revu sur l'Autographe appartenant aux Filles de la Croix de Trèguier.
MDCXCVII. A M. François Lhuillier d'Interville1028.
Félicitations à un père qui a généreusement donné sa fille à
Dieu. Grâces qui naîtront de son sacrifice.
Annecy, 9 août 1620.
Monsieur,
Ayant sceu avec combien de resolution vous aves consenti a la soudaine et inopinee
retraitte de madamoyselle [316] de Frouville, vostre fille bienaymee1029, je ne me puis retenir de
m'en res-jouyr de tout mon cœur avec vous, comme d'une action en laquelle Dieu aura pris son
bon playsir, et dont les Anges et les Saintz auront glorifié extraordinairement la divine Providence.
Car je sçai bien, Monsieur, que cette fille vous estoit parfaitement pretieuse, et que vous n'auries
peu la donner a la divine volonté que premierement vous ne vous fussies abandonné tout a fait
vous mesme a son obeissance, qui est le plus excellent bonheur qu'on puisse souhaitter.
Or, j'augure de plus que, pour ce saint sacrifice spirituel que vous aves si franchement fait
a Dieu, sa souveraine et [infinie] Bonté vous donnera les mesmes benedictions qu'elle donna en
pareille occasion au grand Abraham1030. Et ce sont les desirs que je fay sur vous et sur toute vostre
mayson, qu'en vous benissant elle vous benisse, establissant vostre posterité en sa grace, contre
toutes sortes de contradictions.
Et vous saluant tres humblement, avec madamoyselle d'Interville, vostre compaigne1031, je
demeure,
Monsieur,
Vostre tres humble serviteur,
FRANÇS, E. de Geneve.
Le 9 aoust 1620. [317]
1028 François Lhuillier, fils de Jean, seigneur d'Interville, fut conseiller du Roi, secrétaire en son Conseil d'Etat et des
Finances. Il avait épousé en premières noces (1589) Anne Brachet, dame de Frouville, dont il eut deux fils et quatre
filles. Veuf le 9 février 1603, il se remaria avec Anne Le Prestre. (Voir note (1031) ci-dessous.) M. d'Interville fut
inhumé auprès de sa première femme, dans la chapelle de Saint-François, à Saint-Jacques de la Boucherie. (Bibl. Nat.,
Dossiers bleus, 409, et Pièces originales, 2376.)
1029 «Pour comble de... merveille,» dépose la Mère Lhuillier (Process. remiss. Parisiensis, ad art. 51), «trouvant moyen
de veoir mon pere avant que d'entrer, j'obtins sa benediction, quoy que contraire a ma retraicte, comme il a paru depuis,
m'ayant tenue sept mois et demy, ou environ, sans me vouloir laisser prendre l'habit; et n'eust esté ceste benediction,
que je croy que» le «B. Prelat m'obtint avec tout le reste, il m'eut peut estre fait sortir.»
1030 Gen., XXII, 17.
1031 Fille de Claude Le Prestre et de Louise Bourderel, Anne était veuve de J. Gobelin lorsqu'elle épousa François
Lhuillier. Dans un acte du 21 mars 1650 (Bibl. Nat., Pièces originales, 2376), Claude Gobelin et Jean Lhuillier sont
dits seuls héritiers d'Anne Le Prestre, leur mère.
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23.4 Page 224

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MDCXCVIII. Au Père Antoine Antoniotti, de la Compagnie de
Jésus1032 (Inédite). Appréciation du Saint sur une traduction de
l'Introduction a la Vie devote. Critiques qu'il réfute;
corrections qu'il a faites. Envoi du Traitté de l'Amour de
Dieu; multiples fautes d'impression de la sixième édition.
Trois ou quatre mille sermons en vingt-huit ans. Pourquoi
l'Evêque de Genève ne peut écrire comme ses amis l'en prient.
Philothée réimprimée plus de quarante fois.
Annecy, 16 août 1620.
Molto Reverendo Padre in Christo
osservandissimo,
Rimando alla PV. la traduttione sua,
laquale havendo veduta dal principio sino al
fine, parmi esser molto bella [318] et ben fatta;
et ringratio humilmente V. P. che si è degnata
di mettervi la mano1033.
Una sola cosa mi dà da pensarvi: et è
che alcuni signori Italiani dicono che li capi
nelli quali io tratto de giochi, balli, corteggi et
simili trastulli et passatempi1034, et anco il capo
Della honestà del letto nuptiale1035 et la
comparatione ch'è nel trattato delle Tentazioni,
della principessa sollecitata1036, risguardano la
leggierezza et libertà della natione francese, et
che la severità et gravità naturale de gl'Italiani
non ha bisogno che si tratti di cose tali. Et
questo io lo lascio al giuditio di V. Ptà,
sapendo bene tuttavia che in più luoghi d'Italia
et si balla, et si giocha, et si fan corteggi,
Très Révérend et très honoré Père dans le
Christ,
Je renvoie à Votre Paternité sa
traduction, que j'ai revue depuis le
commencement jusqu'à la fin. Elle me paraît
très belle et bien [318] faite; aussi je vous
remercie très humblement d'avoir daigné
l'entreprendre.
Une seule chose me donne à réfléchir:
c'est que quelques personnages italiens disent
que les chapitres où je traite des jeux, des bals,
des amourettes et de semblables amusements
et passe-temps, comme aussi celui De
l'honnêteté du lit nuptial et la comparaison de
la princesse sollicitée, qui se trouve dans le
traité des Tentations, conviennent à la légèreté
et liberté de la nation française; mais que la
retenue et la gravité naturelle des Italiens n'ont
pas besoin qu'on parle de tels sujets. Je laisse
ceci au jugement de Votre Paternité, sachant
1032 Né à lanzo (diocèse de Turin) en novembre 1568, Antoine Antoniotti entra le 18 octobre 1586 dans la Compagnie
de Jésus, où il fit profession des quatre vœux le 30 novembre 1605. C'était un homme d'un jugement solide, d'une rare
habileté, doué d'un talent particulier pour la direction des Congrégations de la Sainte Vierge. Occupé pendant quinze
ans dans les collèges, le P. Antoniotti fut aussi ministre et confesseur dans les Maisons de Turin, de Crémone, et dans
celle de Milan, où il mourut le 28 février 1624. (D'après des Notes du regretté P. Van Meurs, ancien archiviste général
de la Compagnie de Jésus.)
L'Autographe n'a pas d'adresse; la quatrième page porte de nombreuses notes pour la préface de la traduction
italienne de l'Introduction, et, en haut, d'une écriture différente, se lisent ces mots: Di mano del P. Antoniotti. De cette
même écriture, sur le premier feuillet, la note suivante: Lettera di S. Francesco di Sales al P. Antonio Antoniotto della
Compa di Giesù. Le pieux Jésuite utilisa largement cette lettre dans sa préface; rendant compte des raisons de son
travail, il place en première ligne le mérite remarquable de l'auteur de l'Introduction. Il loue sa noblesse, sa bonté, sa
doctrine, etc., et ajoute: «Il suffit de dire que depuis vingt-huit ans, il a fait plus de quatre mille sermons...» L'avant-
dernier alinéa de la lettre du saint Evêque est ainsi presque entièrement cité. Lorsqu'il prévient les objections des
lecteurs au sujet de certains chapitres, le P. Antoniotti reproduit les termes mêmes de François de Sales dans le second
alinéa, y joignant les passages de la Préface du Traitté de l'Amour de Dieu qui y ont rapport.
1033 Pour ce qui concerne cette traduction, voir encore ci-dessus, Lettre MDCLXIV, et note (812), p. 246.
1034 Partie III, chap. XXXII-XXXIV, XVIII.
1035 Ibid., chap. XXXIX.
1036 Partie IV, chap. III, VI.
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23.5 Page 225

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massime nelli luoghi vicini a Todeschi et alla
Francia, come è il nostro Piemonte. Et di più,
in Spagna si è trodotto (sic) questo libretto
senza eccettione1037, dove pur si fa molto conto
del sossiego. Et in simili opere, bisogna che li
savii habbino patienza mentre si tratta con altri
men prudenti, perchè parlando [319] a secolari,
corteggiani et altri, sapientibus et insipientibus
debitor sum1038.
Ho corretto molti luoghi doüe il
stampatore di Lyone1039 haveva errato, et
alcuni pochi doüe le parole francesi non erano
state ben intese, come: austruches, che non
vuol dire tartaruche, ma struzzi; detraquer,
sconcertare; detraquè, sconcertato; goderon,
lattuca; et alcune altre simili, poche in numero
et anco in importanza1040.
Mando a V. P. la carta qui alligata,
dove vederà i luoghi di S. Gregorio
Nazianzeno1041, et un pazzo (sic) del capo
Della honestà del letto nuptiale, dove sarà forsi
bene di non esprimer tanto alla scoperta la
comparatione1042. Mi è parso bene di mandar
adesso questa opera, perchè temo che Sua
Altezza non voglia che io passi in Francia
all'hora che io non vi pensarò.
Mando anco a V. P. il Trattato che io
feci dell'Amor [320] d'Iddio, il quale si traduce
da un gentilhuomo, assai felicemente, per
quanto io intendo1043. Et mi rincresce che in
questa ultima editione, che è la sesta1044, siano
trascorsi tanti errori in un libro doüe sarebbe
necessario che non se ne trovassero, poiché
facilmente l'errore del stampatore può far senzi
falsi in materie importanti; et s'io havessi
potuto trovar copie della prima editione1045,
l'haverei senza dubbio mandata.
Vederà nella Praefatione V. P., che io
scrivo molto poco: il che non aviene per
bien toutefois qu'en plusieurs endroits d'Italie
et l'on danse, et l'on joue, et l'on courtise,
surtout dans les lieux voisins de l'Allemagne et
de la France, tels que notre Piémont. De plus,
ce livret a été traduit sans aucun retranchement
en Espagne, où cependant on fait grand cas de
la gravité extérieure. Il faut, d'ailleurs, que les
sages prennent patience lorsqu'en de
semblables ouvrages [319] on traite avec de
moins prudents; car, parlant aux gens du
monde, à des courtisans et autres, je me dois
aux sages et aux insensés.
J'ai corrigé beaucoup d'endroits où
l'imprimeur de Lyon avait fait des fautes, et
quelques-uns où les mots français n'avaient pas
été bien compris, comme: «austruches,» qui ne
signifie par tartaruche (tortues), mais struzzi;
«detraquer,» sconcertare; «détraqué,»
sconcertato; «goderon,» lattuca; et quelques
autres du même genre, peu nombreux et aussi
de peu d'importance.
J'envoie à Votre Paternité la feuille ci-
jointe, où elle verra les textes de saint Grégoire
de Nazianze, et un passage du chapitre De
l'honnêteté du lit nuptial, où peut-être sera-t-il
bon de ne pas exprimer si ouvertement la
comparaison. Il m'a semblé mieux d'expédier
maintenant ce travail, car je crains que Son
Altesse veuille me faire aller en France à
l'heure où j'y penserai le moins.
Je vous adresse aussi mon Traitté de
l'Amour de Dieu, qu'un [320] gentilhomme
traduit assez heureusement, à ce que j'entends
dire. Il me fâche que dans cette dernière
édition, qui est la sixième, tant d'erreurs se
soient glissées en un livre où il n'en faudrait
point; car une faute d'impression peut
facilement donner un sens faux en matières
importantes. Si j'avais pu trouver un
1037 La traduction espagnole faite par Sébastien Fernandez de Eycaguirre avait paru en 1618. (Voir tome III, p. XXIV,
note.)
1038 Rom., I, 14.
1039 Pierre Rigaud (voir tome XIV, note (1100), p. 383).
1040 Cf. ci-après, pp. 324, 325. Le traducteur a tenu compte des observations de l'Auteur, et corrigé les fautes signalées.
1041 Vraisemblablement, c'étaient, avec leurs références, les textes cités dans les chapitres XVIII, XIX, XX, XXII et
XXXVIII de la troisième Partie (voir tome III, pp. 199, 205, 208, 214, 269). Le P. Antoniotti voulait sans doute se
reporter au latin pour traduire plus fidèlement en italien.
1042 La version italienne n'a qu'une très courte addition au chapitre indiqué. (Voir ibid., note (27), p. XXIII.)
1043 Depuis la publication du Traitté de l'Amour de Dieu de notre Edition, de nouvelles recherches ont été faites dans
les grandes bibliothèques de Rome (Vaticane, Chigi, Barberiniana) pour découvrir une traduction italienne antérieure
à celle de Daniele de Nobili, imprimée à Venise, chez Bertani, en 1642. (Voir tome IV, p. XVII.) Elles sont demeurées
infructueuses.
1044 Sans doute celle de 1620. (Voir ibid.)
1045 Parue en 1616 (voir tome XVII, pp. 208, 234).
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mancamento di materia, perchè io havrei molte
cose da scrivere dell'amor del prossimo1046, et
delle cose che io [ho] praedicato in tre o quatro
mille sermoni che io [ho] fatti de 28 anni in
qua, che a molti pare che sarebbono cose utili
al ben publico; et l'anno passato, che io fui in
Parigi col Serenissimo Principe Cardinale1047,
molte persone di gran qualità ne fecero
instanza. Ma è impossibile, sotto a questo peso
pastorale, [321] il scrivere per far stampare; se
sua divina Maestà lo vuole, mene darà la
commodità, et se non vuole, neanche io devo
volerlo.
Et quanto alla Introduttione, è vero che
è stata utilissima in Francia, in Flandria, in
Inghilterra1048, et è stata ristampata più di 40
volte, in diversi luoghi, nella lingua francese,
et ha servito ancora a convertire gli haeretici,
si come nota il P. Giacomo Galterio, della
Compagnia, nel sesto (sic) secolo delle sue
Tavole chronographique1049. [322] Non sô mo
se riuscirà cosi in Italia. Faccia il Signor Iddio
che la fatigha di V. P. et l'humiltà colla quale
Ella si è degnata di dare a questa operina il bel
vestimento italiano del quale ella è ornata, sia
utilissima alla salute di molte anime1050.
Et così resto,
exemplaire de la première édition, assurément
je vous l'aurais envoyé.
Votre Paternité verra dans la Préface
que j'écris très peu. Ce n'est pas, certes, faute
de sujet; car j'aurais beaucoup à écrire de
l'amour du prochain et des choses que j'ai
prêchées en trois ou quatre mille sermons faits
depuis vingt-huit ans, qui, de l'avis de
plusieurs, seraient utiles au bien public.
L'année dernière, étant, à Paris avec le
Sérénissime Prince Cardinal, nombre de
personnes de grande qualité m'en firent même
de vives instances. Mais il est [321] impossible
sous cette charge pastorale, d'écrire pour faire
imprimer. Si la divine Majesté le veut, elle
m'en donnera le loisir; et si elle ne le veut pas,
je ne dois pas le vouloir non plus.
Quant à l'Introduction, il est vrai qu'elle
a été très utile en France, en Flandre, en
Angleterre; on l'a réimprimée en français plus
de quarante fois, en divers lieux; elle a même
servi à convertir les hérétiques, comme le
remarque le P. Jacques Gaultier, de la
Compagnie de Jésus, au sixième siècle de ses
Tables chronographiques. [322] Je ne sais si
elle aura autant de succès en Italie. Plaise à
Dieu notre Seigneur que la peine prise par
1046 Cet ouvrage était déjà en projet en 1609. (Voir la lettre à l'Archevêque de Vienne, tome XIV, p. 126, et cf. ci-
dessus, p. 142.)
1047 Maurice de Savoie.
1048 La première traduction anglaise, due à un Bénédictin, D. John Yaworth, fut imprimée à Rouen, en 1613. L'année
suivante elle en était déjà à sa troisième édition. (Voir tome III, pp. XXIV note, et XXVIII.)
1049 Vrai fléau de l'hérésie dans le midi de la France, le P. Jacques Gaultier était né en 1563 à Annonay. A l'âge de
vingt-trois ans, il entra dans la Compagnie de Jésus où il prononça les quatre vœux en 1601. La même année, dans
une discussion de cinq semaines avec le ministre Charnier, il réduisit à un honteux silence son adversaire, déjà terrassé
par les PP. Coton et Armand. Après avoir lutté longtemps contre l'erreur par la parole et par la plume, le P. Gaultier
mourut Supérieur à Grenoble le 14 octobre 1636. (D'après le P. de Guilhermy, Ménologe de la Cie de Jésus, Assistance
de France, Partie II, et Prat, Recherches... sur la Cie de Jésus, passim.)
C'est à la prière de Henri IV qu'il avait composé l'ouvrage dont parle ici François de Sales: Table
chronographique de l'estat du Christianisme, depuis la naissance de Jesus-Christiusques a l'annee M.DCXII, reveüe
et de beaucoup augmentee par l'Autheur. Lyon, Jacques Roussin, MDCXIII. La première édition avait paru en
1609, et ne renferme pas le passage auquel fait allusion le Saint; on le trouve dans la seconde, p. 603, non au sixième
siècle, évidemment, mais au dix-septième: «Le la ou 13 de Febvrier, mourut, aagé de 87 ou 88 ans, Jehan Antoine de
Simiene..., frere de feu Monsieur de Gordes... et de Monsieur de Venes. Lequel ayant dès son enfance esté imbu du
Calvinisme, l'abjura se voyant proche de la mort, et par la sacree Confession, Communion et Extreme-Onction se
disposa à bien mourir... Deux choses ont esté remarquees en luy: l'une, qu'il estoit fort affectionné à faire l'aumosne,
mesmes aux Religieux... L'autre, qu'on trouva chez luy après sa mort, l'Introduction à la dévotion du Reverendissime
François de Sales, Evesque de Geneve, glosee de sa main; et sur la couverture ces mots: Leu et releu. Dieu veuille que
ce soit a la consolation de ma pauvre ame et édification de mon prochain
1050 Ecrivant à Mme de Charmoisy, le 9 juin 1621, D. Juste Guérin témoigne comme le vœu du saint Prélat eut son
accomplissement: «Notre-Seigneur,» dit-il, en parlant de l'Evêque de Genève, «va illuminant» par son moyen «tant
d'âmes qui lisent avec très grand profit son livre de la Philothée, lequel, ayant été traduit du français en italien, il a été
imprimé à Milan, et se va distribuant par toute l'Italie; et quand je fus à Milan..., j'en apportai plusieurs copies à Turin
et les ai distribuées toutes, et si j'en eusse apporté, je pense, des milliers, elles seraient été encore bien peu; à tel que
voilà comme cette sainte lumière va éclatant deçà et delà les monts.» (J. Vuÿ, La Philothée de St Fr. de Sales, II, p.
88.)
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Di V. P. molto Rda,
Humilissimo fratello et servitore,
FRANCO, Vescovo di Geneva.
16 di Agosto 1620. [323]
Votre Paternité et l'humilité avec laquelle Elle
a daigné donner à ce petit ouvrage le beau
vêtement italien dont il est orné, devienne très
profitable au salut de beaucoup d'âmes.
Je demeure, de Votre très Révérende
Paternité,
Le très humble frère et serviteur,
FRANÇOIS, Evêque de Genève.
16 août 1620. [323]
Minute de la lettre précédente (Fragment inédit)
Molto Reverendo Padre in Christo
osservandissimo,
Trovandomi adesso incerto se ritornarò
in Francia, et temendo che quando meno ci
pensaró sarò subito necessitato di partire, et
dall'altra parte havendo questa commodità de
Padri Barnabiti che vanno costi1051, rimando
alla Ptà Vostra l'Introduttione fatta da lei
italiana. Et l'ho veduta da capo a piedi,
parendomi che stia molto bene; et io [sono]
ubligatissimo a V. Ptà che si sia degnata
assumere questa gariga.
In certi luoghi, il stampatore di Lyone
havea errato, et in consequenza haveva dato
causa d'errore nella traduttione; et io vi ho
messo la correttione. In altri, l'energia delle
parole francese non era stata ben capita, et
questi erano pochissimi, anzi non me recordo
che fossero più de tré o quatro. Detraquement,
che vien dal verbo detraquer, [324]
sconcertare; detraqué, sconcertato; ma
detraquement, non sô se si possa dire
sconcertamento; et anco detraquer vuol dire
sviare. Goderon è la lattuca che si porta al
collo; et alcuni simili, come les defenses du
sanglier, che sono i denti che escono fuor di
bocca, che in francese non si chiamano denti,
ma solomente (sic) defenses; come venayson,
che è il grasso et il star bene de cervi.
Dirò liberamente a V. P. che da signori
Italiani ho havuto avisi molto differenti circa
questo libretto, perché alcuni dicono che i capi
nelli quali io tratto delli giochi, delli balli et
simili passatempi, et nelli quali si parla delli
corteggi et della honestà dello letto
Très Révérend et très honoré Père dans le
Christ,
Dans l'incertitude où je suis au sujet
d'un nouveau voyage en France, et craignant
un départ précipité au moment où j'y penserai
le moins, ayant d'autre part cette bonne
occasion des Pères Barnabites qui s'en vont là-
bas, je renvoie à Votre Paternité l'Introduction
traduite par Elle en italien. Je l'ai revue d'un
bout à l'autre, elle me semble fort bien; aussi
suis-je très obligé à Votre Paternité de ce
qu'Elle a daigné se charger de ce travail.
En certains endroits, l'imprimeur de
Lyon s'est trompé, et, par conséquent, a
occasionné des erreurs dans la traduction; je
les ai corrigées. En d'autres, la force des mots
français n'avait pas été bien saisie, et ceux-ci
sont en fort petit nombre; je ne me rappelle
même pas qu'il y en ait plus de trois ou quatre.
Détraquement, qui [324] vient du verbe
détraquer, sconcertare; détraqué, sconcertato;
mais je ne sais si détraquement peut se traduire
par sconcertamento; et détraquer signifie aussi
sviare. Goderon est la fraise qu'on porte autour
du cou; et tels autres mots, comme les défenses
du sanglier, qui sont les dents qui sortent de sa
gueule, lesquelles en français ne s'appellent
pas dents, mais seulement défenses; et encore
venaison, qui est la graisse et l'embonpoint des
cerfs.
Je dirai simplement à Votre Paternité
que j'ai reçu, au sujet de ce livret, des avis très
différents par des personnages italiens. Les uns
disent que les chapitres où je traite des jeux,
des bals et de semblables passe-temps, et ceux
1051 D. Juste Guérin, qui retournait au collège de Turin dont il était Prévôt, et les PP. Maurice Marin et Anselme
Chardon qui se rendaient à Milan. Ils partirent d'Annecy le 17 août. (Acta Collegii Annessii.)
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matrimoniale, et anco la comparatione che si fa
nelli capitoli della tentatione, di quella
principessa sollecitata, non sonno a proposito
in Italia, doüe la severità et prudenza naturale
della natione non permette que (sic) queste tali
cose si facciano; et che dall'altra parte bisogna
parlar molto accortamente delle cose
appartenenti alla honestà, acciò non si ecciti
l'imaginatione delle (sic) vitii contrarii. Altri
dicono che se bene in alcune provintie d'Italia
quella [325] severità regna, nientedimeno in
altre provincie et si balla, et si attende a quelle
legierezze,1052 nelli confini….de Todeschi et
Francesi………………..paese de Venetiani,
Piemonte et costa di Nizza.1053………………..
Revu sur l'Autographe conservé à Rome, au
Vatican, dans la chapelle des Reliques du
Pape.
où il est parlé des amourettes et de l'honnêteté
du lit nuptial, comme aussi la comparaison de
la princesse sollicitée que je fais dans les
chapitres sur la tentation ne sont pas à propos
pour l'Italie; car la retenue et la prudence
naturelle de cette nation ne permettent pas
qu'on fasse de telles choses. D'autre part, il
faut, dit-on, parler très prudemment de ce qui
touche la pudeur, afin de ne pas éveiller
l'impression des vices contraires. D'aucuns
avouent cependant que, quoique cette retenue
[325] règne en plusieurs provinces d'Italie,
ailleurs néanmoins on danse et on se livre à ces
légèretés,…..aux frontières de l'Allemagne et
de la France………………..pays des
Vénitiens, en Piémont et sur la côte de
Nice………………………………………….
MDCXCIX. A Monseigneur Jean-François de Sales, son frère,
Evêque nommé de Chalcédoine (Inédite). La paix en France, et
les projets du Prince Cardinal. Déplaisirs de ce monde.
Nécessité croissante de réformer certains Monastères. Les
intrigues du sacristain Perret. Cuisinier et tailleur à «façonner
au service et a la modestie.» Salutations respectueuses.
«Un article de foy morale.» Remerciements à faire à
plusieurs Cardinaux
Annecy, 22 août 1620.
Mon tres cher Frere,
Plus je vay avant, moins j'escris, car il me semble qu'il y a moins a dire.
Les nouvelles asseurees de la pacification en France1054 m'ostent tout a fait du doute auquel
j'estois du voyage [326] de Monseigneur nostre Prince Cardinal, ains me mettent en quelque
opinion que si elles arrivent a Son Altesse avant son depart pour l'abbouchement qu'elle devoit
faire avec M. de Lesdiguiere, elle en desfera le dessein; et si elle vient, ce sera pour si peu, que je
ne croy pas que sans importunité je luy puisse faire la reverence1055.
1052 Les déchirures du papier ont fait disparaître un mot ici et la moitié de la ligne suivante.
1053 Cette minute est restée inachevée.
1054 La paix qui avait suivi l'entrevue de Coucières (voir ci-dessus, note (96), p. 14) ne fut pas de longue durée. Sous
l'influence de ses partisans, la Reine mère forma une nouvelle coalition contre le premier ministre, et la cour se vit
obligée de la réduire par les armes; les troupes de Marie de Médicis furent défaites au Pont-de-Cé, et trois jours après,
le 10 août 1620, le traité d'Angers terminait la campagne.
1055 Déjà en juillet, la princesse de Piémont avait envoyé en mission confidentielle à la cour de France, son confesseur
le P. Monod. Il s'agissait de lever les soupçons de complicité avec Marie de Médicis, qui planaient, peut-être justement,
sur les princes de Savoie, et de préparer les voies à Victor-Amédée ou au cardinal Maurice, désireux de jouer un rôle
dans la réconciliation de la Reine mère et de son fils. L'« abbouchement » avec Lesdiguières devait avoir le même
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Si monsieur le Marquis de Saint Damien1056 vient, je m'essayeray de luy tesmoigner
combien je me sens obligé a sabienveuillance. La pauvre Mme de la Croix sera grandement a
plaindre sur la nouvelle de la rupture de son mariage, car a mesure qu'ell'a eu de la peine d'aymer
son prœtendu serviteur, elle aura de la peine a le des-aymer1057. Ce monde est tout plein de
desplaysirs.
Ce fut pour Aberes que Monseigneur le Prince prouveut1058. Si je sçavois qu'on ne mit pas
la main a la reforme generale des Monasteres, selon le projet de Monseigneur le Serenissime
Prince, je supplierois Monseigneur le Cardinal de la procurer pour son abbaie d'Aux, ou
neantmoins je ne croy pas qu'on la puisse faire de duree sans mutation d'Ordre ou de
Congregation1059. [327] J'escriray a Monseigneur le Prince soudain que je sçauray quil sera de
retour, affin quil luy playse faire reuscir ce bon œuvre general, car tous les jours il y a plus de
necessité.
M. le sacristain Perret est allé a Cluny, ou il remüe tant quil peut pour son dessein, et de la
il veut passer a Rome pour remonstrer a Sa Sainteté ce quil pense propre pour rompre celuy de
Monseigneur le Prince1060.
Je n'ay garde de m'engager a Lyon pour la seconde fois, que je ne sache asseurement de
pouvoir tenir parole1061; la providence de Dieu fera son coup selon sa gloire.
Mlle l'Ancienne de Sainte Catherine vous escrit, et m'a prié de la vous recommander aupres de
monsieur son neveu1062.
Voyla deux laquais, dont l'un est aucunement cuysinier, et l'autre est bon tailleur. Il les
faudra façonner au service, et peut estre a la modestie, bien quilz soyent bons enfans. Quand vous
marqueres le tems, M. Rolant ira vous servir.
Vives heureux et joyeux en la grace de Nostre Seigneur, mon tres cher Frere, et notamment
puisque vous aves maintenant le P. D. Juste qui vous ayme tant. Je l'ay prié de faire faire un
pourtrait du Saint Suayre1063; mais puisque monsieur Rollant va la, il aura le soin de payer
l'ouvrage.
Je salue tres humblement monsieur le Chevalier de Lescheraine1064, et suis son tres humble
serviteur. Je fay revenir mon neveu de Lyon, pour luy faire faire son cours [328] le filosophie icy
et le stiler aux offices du chœur, puisque il l'a desiré1065.
double but; on sait que le gouverneur du Dauphiné était en même temps tout dévoué à Charles-Emmanuel et très fidèle
à Louis XIII. (Voir De Stefani, La Nunziatura di Francia, vol. IV, pp. 339, 353, et cf. Dufayard, Le connétable de
Lesdiguières, Paris, 1892, chap. XVIII.)
1056 Henri de Maillard-Tournon, marquis de Saint-Damien (voir tome XVII, note (1292), p. 394).
1057 Voir plus haut, Lettres MDLXXIV, p. 65, et MDLXXX, p. 82, le projet de mariage entre Mme de la Croix et M.
de Cormand.
1058 Le patron de la paroisse d'Habères était l'Abbé d'Aulps, alors Maurice de Savoie; mais qu'eut-il à pourvoir en
1620, puisque le curé, Jean Michallat, institué le 20 mars 1613, ne mourut qu'au mois d'août 1640? Nous ne pouvons
répondre à cette question.
1059 Philibert Milliet de Challes ayant été nommé au siège de Turin, son abbaye d'Aulps (voir tome XI, note (594), p.
266) fut, par Bulle pontificale du 5 février 1618, donnée en commende perpétuelle au cardinal Maurice qui en prit
possession le 13 avril 1619. Si le nouvel Abbé essaya d'y mettre la réforme, il n'y réussit pas; car ce fut seulement au
commencement du XVIIIe siècle que l'ordre et la ferveur reparurent dans le vieux monastère.
1060 Voir plus haut, Lettres MDCLVIII, p. 335, et MDCLIX, p. 250. Le sacristain Perret, en dépit des ordonnances qui
attribuaient à la Sainte-Maison de Thonon les prébendes vacantes de Contamine, voulait assurer la sienne à son neveu.
1061 Voir ci-dessus, pp. 199, 233.
1062 Henri de Maillard-Tournon. L'ancienne Abbesse de Sainte-Catherine, Jèronyme de Maillard (voir tome XIV, note
(248), p. 79), était la propre sœur de Prosper-Marc, comte de Tournon, père du marquis de Saint-Damien.
1063 Grande était la dévotion du saint Evêque à cette relique insigne. (Voir tome XVI, note (565), p. 177.)
1064 Sans doute Georges de Lescheraine, chevalier de justice des saints Maurice et Lazare. (Voir tome XV, note (249),
p. 81.)
1065 Trois fils de Gallois de Sales embrassèrent l'état ecclésiastique: Etienne, plus tard D. Joseph, Barnabite (voir ci-
dessus, note (802), p. 244), Amé et Sébastien; il est bien difficile de décider lequel de ces jeunes gens était à Lyon.
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23.10 Page 230

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Je salue tres humblement madame de Saint George, que j'honnore plus qu'il ne se peut dire,
et la signora Donna Genevra, ma chere fille, et Mme de Berné1066, et toutes ces dames qui me font
la faveur de me vouloir du bien, et madame de Sarsenas a part, comme l'honnorant
singulierement1067. De nostre Pere D. Juste je n'en dis rien, car il sçait bien que c'est un article de
foy morale que je suis tres entierement tout sien.
Le bon M. du Crest de l'Estoile est mort, et a laissé, comme on me dit, messieurs de
Chevron ses heritiers en ce quil peut1068.
Je pensois escrire peu, et en voyla beaucoup. Je remercieray monsieur l'Ambassadeur1069
soudain que vous aures les Bulles, et le Cardinal Aldobrandin, qui m'a escrit une lettre bien
honnorable1070, et le Cardinal Melin1071 et le [329] Cardinal Sauli1072 qui m'escrit combien
d'obligation nous avons en cett'occasion a Monseigneur nostre Prince Cardinal.
Or sus, Dieu soit a jamais nostre unique support, et je suis en luy tout vostre.
F., E. de G.
XXII aoust 1620.
Vous estes le premier auquel j'escris en cette mienne 54e annee que je commence
aujourdhuy.
A Monseigneur
[Monseigneur] le Rme Evesque de Calcedoine,
premier Aumosnier de Madame.
Revu sur l'Autographe conservé à la Visitation d'Annecy. [330]
1066 Marguerite de Savoie, fille légitimée de D. Amé de Savoie, marquis de Saint-Rambert. Elle épousa Jérôme, comte
de Rossillon, marquis de Bernex en Piémont, seigneur de Saint-Genis au pays de Gex, etc. (Guichenon, Hist. généal.
de la Maison de Savoie, 1778, tome II, p. 275.)
1067 Anne-Violante Parpaglia, dame de Cercenasco (voir ci-dessus, note (775), p. 235).
1068 Gaspard de Montmayeur, fils de Nicolas, seigneur du Crest et de l'Etoile, et de Claudine-Françoise de Chevron-
Villette, n'ayant pas d'enfants de sa femme Benoîte Vorsier, légua ses biens à ses neveux de Chevron. Des fils d'Hector,
Bernard était mort, laissant veuve Charlotte-Emmanuelle de Chabod qui hérita au nom de ses enfants; vivaient encore
Benoît-Théophile, le novice de Talloires, et Prosper, chevalier grand croix des saints Maurice et Lazare, premier
maître d'hôtel du Cardinal de Savoie, gouverneur de Carmagnole, qui épousa Victoire Borella, et mourut à Turin le 4
avril 1632.
1069 Philibert-Alexandre Scaglia, ambassadeur à Rome. (Voir tome XVII, note (696), p. 197, et, à l'Appendice II de ce
volume quelques-unes de ses lettres au sujet de la coadjutorerie de Jean-François; cf. encore ci-dessus, note (760), p.
233.)
1070 Pierre Aldobrandini était protecteur de Savoie. (Voir tome XII, note (133), p. 81, et à l'Appendice II de ce volume,
sa lettre au prince de Piémont.)
1071 Jean Garsia Millini (cf. tome XIV, p. 416) naquit à Florence en 1572, de Marius Millini et d'Hortense Jacobacci,
noble romaine. Successivement avocat (onsistorial et auditeur de Rote, il accompagna Clément VIII à Ferrare, et les
cardinaux Cajétan et Aldobrandini dans leurs missions, fut nonce en Espagne et revêtit la pourpre en 1606. Chargé en
même temps du diocèse d'Imola, il résigna cet évêché en 1611, et reçut plus tard celui de Tusculum. C'était un homme
qui joignait à la piété une grande intelligence, une vaste érudition et une remarquable habileté dans les affaires; aussi
Paul V lui confia, outre une légation en Allemagne, plusieurs négociations importantes, et le nomma son vicaire à
Rome; ses deux successeurs, Grégoire XV et Urbain VIII, le confirmèrent dans cette charge. Le cardinal Millini
mourut le 1er octobre 1629. (D'après Ciaconius, Hist. Pontif. et Card., Romae, 1677, tom. IV.)
1072 Le fils d'Octavien Sauli, Antoine-Marie, était originaire de Gênes. Sa mère appartenait à la noble famille
Giustiniani. Après avoir rempli différentes nonciatures, il fut fait archevêque de sa ville natale en 1585, et deux ans
après, le 18 décembre, créé cardinal. Il occupa successivement plusieurs sièges épiscopaux, et devint en 1620, évêque
d'Ostie et doyen du Sacré-Collège. Son jugement sûr, sa rare prudence, son expérience consommée le firent beaucoup
estimer de ses collègues et le rendirent particulièrement cher aux huit Papes élus de son temps; il était plus
qu'octogénaire quand il mourut, le 24 août 1623. (Voir ibid.)
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24 Pages 231-240

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24.1 Page 231

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MDCC. A la sœur de Morville, novice de la Visitation de
Moulins. Inspirations partielles du Saint-Esprit. Le père de
l'Evangile et ses deux fils. Dieu ne veut être aimé que
totalement. Qu'attend-il pour verser dans les cœurs le «don
sacré de l'orayson?» Baume divin et parfums de ce monde.
A qui appartient une aumône déjà livrée. Il doit être
indifférent à Mme du Tertre de donner ici ou là, puisqu'elle donne
au Seigneur
Annecy, fin août-septembre 16201073.
O combien de benedictions Dieu espandra-il sur vostre cœur, et que de consolations sur le
mien, si vous alles croissant en la prattique parfaite du divin amour, ma tres chere Fille! Le Saint
Esprit tient quelquefois la methode d'inspirer par parties ce qu'il veut faire du tout, et ces vocations
ont accoustumé d'estre grandement solides. Ce bon homme de l'Evangile1074, ayant deux garçons,
dit a l'un d'iceux: Va, mon enfant, en ma vigne, pour y travailler; et il dit: Je n'en feray rien. Puis,
faysant reflexion et revenant a soy, il y alla et travailla tres bien. Puis, le pere dit a l'autre: Mon
enfant, va travailler en ma vigne; et il respondit: Je m'y en vay, et neanmoins il n'en fit rien. Or,
dit Nostre Seigneur, lequel des deux a fait la volonté du pere? Sans doute le premier, ma tres chere
Fille.
Vous aves le courage trop bon pour ne faire pas parfaitement ce qu'il faut faire pour l'amour
de Celuy qui ne veut estre aymé que totalement. Marchés donq bien ainsy, ma tres chere Fille,
l'esprit relevé en Dieu et qui ne regarde que le visage et les yeux de l'Espoux celeste [331] pour
faire toutes choses a son gré; et ne doutes point qu'il ne respande sur vous sa tressainte grace pour
vous donner des forces esgales au courage qu'il vous a inspiré. Le don sacré de l'orayson est tout
prest en la main droitte du Sauveur, soudain que vous seres vuide de vous mesme, c'est a dire de
cet amour de vostre cors et de vostre volonté propre; c'est a dire, quand vous seres bien humble, il
le versera dedans vostre cœur.
Ayes patience d'aller le petit pas, jusques a ce que vous ayes des jambes a courir, ou plustost
des aisles a voler. Soyes volontier pour encor une petite nymphe, bien tost vous deviendres une
brave avette.
Humilies vous amoureusement devant Dieu et les hommes, car Dieu parle aux aureilles
abbaissees. Escoute, dit il a son Espouse, et considere, et abbaisse ton aureille; et oublie ton peuple
et la mayson de ton pere1075. Ainsy le Filz bienaymé se prosterne sur sa face quand il parle a son
Pere eternel et qu'il attend la response de son oracle1076. Dieu remplira vostre vaysseau de son
baume quand il le verra vuide1077 des parfums de ce monde, et quand vous seres humble, il vous
exaltera1078. Mais, ma tres chere Fille, ne dites pas comme le jeune filz de cet homme: J'iray
travailler, qu'avec un ferme desir d'y aller.
1073 On ne peut douter que la destinataire ne soit Mme du Tertre qui, à sa vêture (après le 15 août 1620), avait repris
son nom de Morville. C'est sous ce nom que nous la désignerons désormais.
La date attribuée à ce texte convient parfaitement aux deux derniers alinéas. Elle peut, à la rigueur, convenir
également aux premiers, s'ils ont été écrits peu après la prise d'habit de la Sœur Marie-Aimée, mais nous n'osons
affirmer qu'ils n'aient pas suivi de près sa retraite du monde. Dans ce cas, ils devraient se placer dans les premiers
mois de 1620.
1074 Matt., XXI, 28-31.
1075 Ps. XLIV, 11.
1076 Matt., XXVI, 39.
1077 Cf. IV Reg., IV, 3-5.
1078 Luc., I, 52.
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Or sus, c'est la verité que j'ay escrit une seule fois a N.1079 qu'une aumôsne voiiee et non
delivree pouvoit estre en quelque sorte transferee d'un lieu auquel elle estoit destinee en un autre
d'egale pieté; mais qu'estant voüee, delivree et executee on ne pouvoit plus s'en desdire, puisqu'une
aumosne delivree n'est plus a celuy qui l'a faite, mais, de plein droit et tres certainement, appartient
a celuy qui l'a receuë, et sur tout quand il l'a receuë sans condition, ou avec une condition qu'il est
prest de son costé d'executer. Mais que je me sois plaint de vous, certes, je ne l'ay jamais fait, ni
n'ay nullement inculqué mon advis, qui est l'advis de tous les theologiens.
Voyla cependant qui va le mieux du monde, que vous [332] le veuillies suivre, nonobstant
ce que le monde voudroit dire. Aussi vous est il egal de donner ou icy ou la, puisque le Dieu du
Monastere de [Nevers] est le Dieu du Monastere de [Moulins], et que toutes les deux Maysons
sont egalement a la tressainte Vierge, et a vous, ma tres chere Fille, que je conjure de perseverer a
m'aymer constamment en Nostre Seigneur, comme tres invariablement je suis a jamais et sans
reserve vostre; et ne cesse point de supplier la tressainte Vierge, la plus aymee Dame du Ciel et de
la terre, qu'elle vous ayme et vous rende toute bien-aymee de son Filz, par les continuelles
inspirations qu'elle impetrera de sa Majesté divine.
Vostre plus humble pere et serviteur,
FRANÇS, E. de Geneve.
1620.
MDCCI. A la Mère Favre Supérieure de la Visitation de
Montferrand (Fragment). Double joie du saint Fondateur de la
Visitation
Annecy, [août-septembre] 16201080.
……………………………………………………………………………………………………..
Vous verres, ma chere grande Fille, que Dieu vous fera recueillir de bons et beaux fruitz
de vostre travail. Ah! que de joye a mon ame de sçavoir ma Mere1081 a Paris et nostre unique chere
fille en Auvergne, toutes deux cooperant avec le Saint Esprit a un service si digne et si saint!
…………………………………………………………………………………………………….
Revu sur le texte inséré dans la Vie manuscrite de la Mère Favre, par la Mère de Chaugy,
conservée à la Visitation d'Annecy. [333]
1079 Peut-être à la Mère de Bréchard.
1080 Ces lignes doivent être de peu postérieures à la lettre du 9 ou 10 juillet (voir ci-dessus, p. 280), car elles supposent
l'arrivée de la Mère Favre en Auvergne encore assez récente.
1081 La Mère de Chantal.
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MDCCII. A la Mère de Chantal, a Paris (Inédite). Lettre pour les
Barnabites à Mgr de Bourges. Douce espérance de revoir la
Sainte à Paris. Le Monastère d'Orléans. Réponses que
François de Sales pense faire de vive voix. Les désirs de
«plusieurs gens de bien » au sujet de Mgr Camus. Ce qui
contrebalance les réels défauts de Mme de Port-Royal.
Combien il lui serait avantageux de se retirer un peu à la
Visitation; difficultés à ce projet. Des «honneurs» à faire
Annecy, 11 septembre 1620.
Hier bien tard je receu vos lettres, ma tres chere Mere, de la veille de Nostre Dame, et ce
matin je vous escris hastivement par le sire Pierre qui va partir1082; et c'est le 22 de septembre, jour
de saint Maurice.
Or, tandis que je m'en resouviens, il faut que je vous die que nos Peres Barnabites m'ont
fait escrire la lettre ci jointe a Monseigneur l'Archevesque de Bourges1083, de laquelle il leur
importe grandement que j'aye response. Vous la verres, ma tres chere Mere, et si vous sçaves
quelque chose sur ce sujet avant que Monseigneur de Bourges m'escrive, vous ne laisseres pas de
me l'envoyer.
Apres cela, ma tres chere Mere, il faut que je vous die que le voyage de M. le Prince
Cardinal en France se remet en train, et mon frere m'escrit qu'on le tient pour asseuré et, quant et
quand, que je le feray, ce Prince voulant que je l'accompagne par tout ou il ira; de sorte que me
revoila a la veille de vous aller voir, si le Roy va faire l'hiver a Paris1084. [334]
J'espere avec vous, ma tres chere Mere, que nostre Seur Claude Agnes1085 fera bien, et sur
tout estant si proche de vous en ce commencement, car il me semble qu'Orleans est un fauxbourg
de Paris. Et cette si digne et bonne Princesse les protegeant si favorablement, il m'est advis qu'il
ny a qu'a beaucoup attendre de progres pour cette Mayson-la1086, moyennant la grace de Dieu,
[335] qui est le souverain et unique objet de toutes nos confiances.
1082 Pierre Richard (voir tome XVI, note (1072), p. 330).
1083 Nous ne savons quelle affaire André Frémyot avait avec les Barnabites d'Annecy. Peut-être ceux-ci désiraient-ils
son intervention auprès du Roi en faveur des fondations projetées en France. (Voir ci-dessus, note (419), p. 117.)
1084 Le lendemain même du jour où le Saint traçait ces lignes, le nonce Bentivoglio écrivait au cardinal Borghese au
sujet des persévérantes prétentions de Maurice de Savoie à une légation particulière en France, légation qui, dans la
pensée secrète de Charles-Emmanuel, se transformerait ensuite en celle d'Avignon (cf. ci-dessus, note (648), p. 194).
Tout échoua, et le voyage remis en train tant de fois, n'eut pas lieu. Quant au Roi, après avoir soumis les révoltés, amis
de la Reine mère, il était en ce moment à Bordeaux, se préparant à se rendre dans le Béarn pour y rétablir le culte
catholique. Le 7 novembre, Louis XIII rentrait à Paris. (D'après La Nunziatura di Francia, vol. IV, p. 426 et passim;
La Vie du Card. de Richelieu, Cologne, 1695, tome I, pp. 73-75.)
1085 La Mère Claude-Agnès Joly de la Roche, Supérieure de la nouvelle fondation d'Orléans.
1086 Déjà nous avons trouvé la comtesse de Saint-Pol, ou Saint-Paul, parmi les dames qui travaillèrent avec ardeur à
l'établissement de la Visitation à Paris (voir le tome précédent, note (1086), p. 333); nous la rencontrons encore comme
principal soutien de la fondation d'Orléans. Son mari, François d'Orléans, comte de Saint-Pol, pair de France, était
gouverneur de cette ville depuis 1616; elle sut le faire entrer dans ses désirs, ainsi que son fils, le duc de Fronsac, qui
parla au maire et aux échevins pour leur faire connaître les intentions de la princesse «et les prier de ne pas contrarier
son dessein.» (Cf. ci-dessus, note (1004), p. 310.) Elle-même triompha de toutes les hésitations de l'Evéque, Mgr de
l'Aubespine, obtint son autorisation, et l'établissement se fit le 9 septembre. (Hist. de la Fondation.)
Cette pieuse et puissante dame était Anne, fille unique de Geoffroy Nompar, baron de Caumont, et de
Marguerite de Lustrac, veuve en premières noces du maréchal de Saint-André, tous deux renégats du catholicisme.
La riche héritière fut, dès le berceau, «l'ambitieuse prétention de plusieurs princes et grands seigneurs.» A six ans,
captive au château de La Vauguion, à douze, femme de Claude des Cars, des Bourbons-Carency, fils de son tuteur et
détenteur, dont un duel la rendit veuve au bout de quelques mois (1586), elle fut aussitôt fiancée au frère du défunt,
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Je seray grandement ayse quand je sçauray que vous seres logees, et dedans la ville1087,
puisque mesme c'est le sentiment de nostre bon P. Binet1088 qui a tant de charité pour vous et tant
de bonne conduite. Je vay tous-jours differant de luy escrire, et peut estre le verray-je plus tost,
bien que je croy que le voyage ne se fera que sur l'extremité du moys prochain ou sur le
commencement de novembre. Et tandis que je m'en resouviens, je vous prie de dire a monsieur de
Saint Jaques1089 que j'attens de luy respondre par les effectz de ce quil m'a demandé, mon frere
m'ayant escrit quil n'oubliera rien pour satisfaire a son desir.
J'attens avec crainte vos premieres nouvelles sur la maladie de la Seur Marie Marguerite
de Saint Bonet, car je voudrois bien qu'elle guerit, si Dieu le vouloit, sans la volonté duquel je ne
veux rien vouloir1090. Demain je vay voir M. de Belley son frere, que je treuve tous-jours plus
aymable; mais je ne voy pas comme on puisse luy persuader de quitter ces gestes immoderés de la
praedication, ni arrester le cours de sa plume, comme vous m'avies escrit que c'estoit le desir de
plusieurs gens de bien. Or, il escrit maintenant des choses que les Peres Jesuites de deça et quelques
theologiens qui les ont veues [336] jugent devoir estre fort utiles parmi le monde: c'est une
besoigne de mesme espece que la Memoire de nostre pauvre Darie1091. Je vous escriray de rechef
par luy, qui part au commencement du moys prochain.
O que mon cœur a esté touché d'une douceur extreme dequoy ma tres chere fille Mme de
Port Royal a esté avec vous1092! car il est vray, je luy dis que devant estre a jamais tout a elle, je
vous donnois egalement et uniquement aussi avec moy, et j'eusse deu dire en moy. Or sus, je suis
infiniment ayse encor que vous la treuvies si aymable. Elle l'est a mon gré tout a fait, non obstant
tout ce qu'elle dit contre elle mesme, qui [est] voyrement veritable, mais qui est contrechangé par
une si bonne et franche volonté que cela ne tient point de place, et sur tout par ce qu'elle ne l'ayme
pas et que un jour tout cela s'esvanouira devant la grace de Dieu. Penses, ma tres chere Mere, si
[je] voudrois pouvoir seconder son désir et contenter son cœur bienaymé; car je suis bien avec
vous, que si ell'avoit le loysir d'estre un peu retiree avec nous, elle gaigneroit beaucoup. Mays quel
moyen? plus j'y pense, moins je voy de possibilité: cest Institut-la tient un plus grand rang que le
nostre, cet Ordre, grandement accredité. Mays Dieu sçait des choses que nous ne sçavons pas: sil
est expedient pour sa gloire, il fera possible ce qui nous semble ne le pouvoir pas estre, et s'il laisse
cette fille la, il fera pour elle, la, tout ce que nous pourrions desirer. De luy escrire il ny a pas
moyen, car voyla le sire Pierre qui presse. Ma tres chere Mere, salues tres cherement son ame de
la part de mon cœur qui est le vostre et qui est sien. Et Dieu tire tout a soy, en soy et pour soy.
Amen.
Henri. La princesse de Carency, comme on la nommait alors, devint, en octobre de la même année, du consentement
de sa mère, la prisonnière de Mayenne pour attendre, sous le titre de marquise de Fronsac, l'heure d'épouser le fils du
grand Ligueur. Meilleure fortune lui était réservée comme prix de sa seconde captivité: en 1587, elle était enfant de
l'Eglise catholique. Enfin, après de nouvelles et étranges aventures, Anne de Caumont entra dans l'illustre famille
d'Orléans, par son alliance avec le comte de Slaint-Pol (2 février 1595). Elle devint ainsi la belle-sœur de Catherine
de Longueville, dont l'Evéque de Genève avait admiré la vertu et favorisé le zèle (voir tome XII, note (231), p. 131),
et d'Antoinette d'Orléans, la sainte fondatrice de la Congrégation bénédictine du Calvaire. Anne de Caumont fut digne
de ses parentes. La mort ayant fait la solitude autour d'elle, l'oraison et les bonnes œuvres se partagèrent sa vie, et
quand à son tour elle quitta ce monde (17 juin 1642), elle laissait des églises restaurées, des monastères établis, des
missions fondées, un grand nombre de pauvres soulagés et des malheureux de toutes sortes bénissant sa mémoire.
(D'après Hilarion de Coste, Vies... des dames illustres, etc., 1647, et le P. Chérot, S. J., Etudes religieuses, 1896: Une
grande chrétienne au XVIIe siècle, Anne de Caumont, comtesse de Saint-Pol, etc.)
1087 Le transfert de la Communauté, de la maison sise au faubourg Saint-Michel dans sa nouvelle demeure de la rue
du Petit Musc, ne put avoir lieu qu'à la fin de juillet 1621. (Voir le tome précédent, note (1210), p. 372.)
1088 Le P. Etienne Binet, de la Compagnie de Jésus.
1089 Charles de la Saussaye, curé de Saint-Jacques de la Boucherie. (Voir ci-dessus, note (464), p. 129.)
1090 Catherine Camus (voir ibid., note (265), p. 68), à peine âgée de quinze ans, avait pris l'habit au monastère de Paris
le 25 novembre 1619; elle fit profession le 9 février 1621. C'est par erreur que le Saint l'appelle Marie-Marguerite,
elle porta le nom de Marie-Catherine. Envoyée à la fondation de Dol en 1627, elle mourut à Caen le 27 décembre
1646, après de longues souffrances, patiemment supportées. «Je désire expirer mon âme dans le Sacré-Cœur de mon
Jésus;» ce fut là une de ses dernières paroles. (Livre du Noviciat du Ier Monastère de Paris et Notice manuscrite.)
1091 Pseudonyme de la baronne de Thorens dans l'ouvrage de Mgr Camus. (Voir le tome précédent, note (936), p. 281.)
1092 La Mère Angélique Arnauld.
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24.5 Page 235

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Je ne sçaurois escrire a Mme la Marquise de Meneley, qui m'a escrit si cordialement, ni a
madame la Generale des Galleres1093, que j'honnore si parfaitement: faites [337] bien mes
honneurs, sil se peut. Je suis tres obeissant serviteur de Mme la Comtesse de Saint Paul1094.
Tout se porte bien icy. Je salue Mme la Presidente de Herce, a laquelle j'escriray dans peu
de jours, et toutes nos tres cheres Seurs.
22 septembre 1620.
A ma tres chere Mere1095 [en N.] Sr,
La Mere [Superieu]re de Ste [Marie] de la Visitation.
Paris.
1096A M. de Frouville et de Villeneufve, a nostre grande fille1097, mille salutations.
Revu sur l'Autographe conservé à la Visitation d'Annecy.
MDCCIII. A un gentilhomme1098. Une importante affaire dont le
succès dépend en partie de l'intervention du destinataire.
Annecy, 23 septembre 1620.
Illustrissimo Signor osservandissimo,
Ho pregato il signor advocato
Bovardo1099, latore della [338] presente,
d'andar a Monmelliano per un negocio che è
d'importanza a me et a Monsignor di
Calcedonia, mio fratello, come intenderà dal
sudetto latore. Et perchè haverà egli forsi
bisogno della authorità di V. S. Illma per
riuscirne, io la supplico di concederla doüe ne
fosse mestieri, per amor del signor Abbate di
Abondanza, che mi vuol tanto bene1100, et per
amor d'Iddio dell'honor del quale in parte si
tratta in questo negocio.
Et promettendomi facilmente questo
favore dalla cortesia et generosità di V. S. Illma
finisco, augurandoli ogni santa prosperità.
Di V. S. Illma,
Humilissimo
et
affettionatissimo servitore,
Illustrissime et très honoré Seigneur,
J'ai prié M. l'avocat Bouvard, porteur
de cette lettre, de se [338] rendre à Montmélian
pour une affaire qui m'intéresse aussi bien que
Monseigneur de Chalcédoine, mon frère,
comme vous l'apprendrez par le susdit porteur.
Et parce qu'il aura peut-être besoin de l'autorité
de Votre Seigneurie Illustrissime pour réussir,
je vous prie de la lui accorder là où elle sera
nécessaire, pour l'amour de M. l'Abbé
d'Abondance qui me chérit si fort, et pour
l'amour de Dieu, dont l'honneur est en partie
engagé dans cette affaire.
Me promettant aisément cette faveur de
la courtoisie et de la libéralité de Votre
Seigneurie Illustrissime, je finis en lui
souhaitant toute sainte prospérité.
De Votre Seigneurie Illustrissime,
1093 Charlotte-Marguerite de Gondi, marquise de Maignelais, et sa belle-sœur, Françoise-Marguerite de Silly, comtesse
de Joigny. (Voir tomes XIV, note (553), p. 185, et XVIII, note (1219), p. 375.)
1094 Voir ci-dessus, note (1086), p. 335.
1095 Les mots insérés entre crochets ont été enlevés à l'ouverture de la lettre.
1096 Cette phrase est écrite au-dessous de l'adresse.
1097 Mme des Gouffiers.
1098 L'Autographe a encore ses deux feuillets, mais la quatrième page ne porte aucune adresse. Il semble probable
pourtant, d'après la teneur de la lettre, que l'Evêque de Genève écrit au gouverneur de Montmélian. C'était, depuis
avril 1615, Jérôme Langosco, comte de la Motte. Il garda cette charge dix ans. En 1607, ce personnage, que nous
connaissons fort peu, avait eu la permission d'armer un vaisseau portant l'étendard de Son Altesse le duc de Savoie;
en 1613, il fut nommé général des galions du souverain. (D'après Dufour et Rabut, Montmélian, place forte, et les
Registres des comptes conservés à Turin, Archiv. de l'Etat.)
1099 Michel Bouvard (voir le tome précédent, note (1221), p. 376).
1100 Vespasien Aiazza (voir tome XIII, note (165), p. 48).
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FRANCO, Vescovo di Geneva.
In Annessi, alli 23 di Septembre 1620.
Revu sur l'Autographe appartenant à la
famille Berthet, à Annecy. [339]
Le très humble et très
affectionné serviteur,
FRANÇOIS, Evêque de
Genève.
A Annecy, le 23 septembre 1620. [339]
MDCCIV. A une dame. La partie inférieure de l'âme se ressent
des incommodités du corps. Dieu ne laisse pas d'agréer les
actes de l'esprit faits avec peine et sans joie sensible. Etre
juste envers nous-même. Comment changer le plomb en or.
Un peintre Capucin. La future «image vivante de la divine
Majesté.»
Annecy, 29 septembre 1620.
Ma tres chere Fille,
Je ne suis nullement estonné si vostre courage vous semble un peu plus pesant et engourdi,
car vous estes grosse; et c'est une verité manifeste que nos ames contractent ordinairement les
qualités et conditions de nos cors, en la portion inferieure. Et je dis ainsy, ma tres chere Fille, en
la portion inferieure, parce que c'est celle la qui tient immediatement au cors et qui est sujette a
participer aux incommodités d'iceluy. Un cors delicat estant appesanti par le faix d'une grossesse,
debilité par ce travail du port d'un enfant, incommodé de plusieurs douleurs, ne peut pas permettre
que le cœur soit si vif, si actif, si prompt en ses operations. Mays tout cela ne prejudicie nullement
aux actes de l'esprit, de cette pointe superieure, autant aggreables a Dieu comme ilz sçauroyent
estre parmi toutes les gayetés du monde, ains certes, plus aggreables, comme faitz avec plus de
peine et de conteste; mais ilz ne sont pas si aggreables a la personne qui les fait, parce que, n'estant
pas en la partie sensible, ilz ne sont pas aussi sensibles ni delectables selon nous.
Ma tres chere Fille, il ne faut pas estre injuste, ni exiger de nous que ce qui est en nous.
Quand nous sommes incommodés de cors et de santé, il ne nous faut exiger de nostre esprit que
les actes de sousmission et d'acceptation du travail, et des saintes unions de nostre volonté au bon
playsir de Dieu qui se forment en la cime de l'ame; et quant aux actions exterieures, il les faut
ordonner et faire au mieux que nous pouvons, et nous contenter de les [340] faire encor que ce soit
a contrecœur, languidement et pesamment. Et pour relever ces langueurs et pesanteurs et
engourdissemens de cœur, et les faire servir a l'amour divin, il faut en advoüer, accepter et aymer
la sainte abjection: ainsy vous changeres le plomb de vostre pesanteur en or, et en un or plus fin
que ne seroit celuy de vos plus vives gayetés de cœur. Ayes donques patience avec vous mesme;
que vostre portion superieure supporte le detraquement de l'inferieure; et offres souvent a la gloire
eternelle de nostre Createur la petite creature a la formation de laquelle il vous a voulu prendre
pour cooperatrice.
Ma tres chere Fille, nous avons a Nessi un peintre Capucin, qui, comme vous pouves
penser, ne fait point d'images que pour Dieu et son temple1101; et bien que travaillant il ayt une si
grande attention qu'il ne peut faire l'orayson a la mesme heure, et que mesme cela occupe et lasse
son esprit, si est ce qu'il fait ces ouvrages de bon cœur, pour la gloire qui en doit reuscir a Nostre
1101 Ce doit être le Frère lai, Nicolas de la Marche (Italie), qui joignait au talent de peintre «un grand esprit de foi et
d'oraison,... une patience admirable... et un grand amour de la discipline régulière.» Il mourut le 30 mai 1630, à
Chambéry, laissant un vrai renom de sainteté. (P. Eugène de Bellevaux, Nécrologe des FF. Min. Capucins de la Prov.
de Savoie, 1611-1902.)
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Seigneur et l'esperance qu'il a que ces tableaux exciteront plusieurs fideles a louer Dieu et benir sa
bonté. Or, ma chere Fille, vostre enfant qui se forme au milieu de vos entrailles sera une image
vivante de la divine Majesté; mais ce pendant que vostre ame, vos forces, vostre vigueur naturelle
est occupee a cet œuvre, elle ne peut qu'elle ne se lasse et fatigue, et vous ne pouves pas en mesme
tems faire vos exercices ordinaires si activement et gayement. Mais souffres amoureusement ces
lassitudes et pesanteurs, en consideration de l'honneur que Dieu recevra de vostre production; car
c'est vostre image, qui sera colloquee au temple eternel de la celeste Hierusalem et sera regardee
eternellement avec playsir de Dieu, des Anges et des hommes; et les Saintz en loueront Dieu, et
vous aussi quand vous l'y verres. Et ce pendant, prenes patience de [341] sentir vostre cœur un peu
engourdi et assoupi, et, avec la partie superieure, attaches vous a la sainte volonté de Nostre
Seigneur qui en a ainsy disposé selon sa sagesse eternelle.
En somme, je ne sçai pas ce que mon ame ne pense pas et ne desire pas pour la perfection
de la vostre, laquelle, puisque Dieu l'a voulu et le veut ainsy, est certes au milieu de la mienne.
Playse a sa divine Bonté que et la vostre et la mienne soyent toutes deux selon son tressaint et bon
playsir, et qu'il remplisse toute vostre chere famille de ses sacrees benedictions, et specialement
monsieur vostre tres cher mari, de qui, ainsy que de vous, je suis invariablement,
Tres humble et plus obeissant serviteur,
FRANÇS, E. de Geneve.
Le jour saint Michel 1620.
MDCCV. A la Mère Marie de Jésus, prieure du Carmel
d'Orléans. Une affeçtion vieille de dix-huit ans. Grande
qualité des amitiés créées par le Ciel. Les desseins
miséricordieux de la Providence sur les trois filles de Mme
Acarie. Espérance pour ses trois fils. Portrait en échange
de reliques. — Les Sœurs de la Visitation en visite au Carmel;
une règle qui leur fut «souvent inculquee.»
Annecy, [septembre ou octobre] 16201102.
Ma tres chere Fille et Reverende Mere,
J'ay receu vos deux lettres avec un contentement, a la verité, tout particulier, d'avoir veu en
icelles des marques evidentes que l'affection que Dieu avoit mise en [342] vostre cœur pour moy,
il y a dix huit ans, estoit non seulement toute vive, mais avoit pris de saintz accroissemens avec
celle que vous aves pour la divine Bonté, que l'excellente profession que vous faites a rendue, je
m'asseure, tres grande.
1102 Cette lettre est-elle formée d'un texte unique? Nous n'osons l'assurer. La première partie semble avoir été écrite à
une date peu éloignée de l'élection de la Mère Marie de Jésus Acarie au gouvernement du Carmel d'Orléans (juillet
1620), d'autant plus que le Saint parle de son voyage en France comme assez récent. L'avant-dernier alinéa pourrait
être des environs du 6 juin 1621; ce jour-là, la Mère de Chantal se réjouit aussi avec la Mère de la Roche de ce qu'elle
a vu «les bonnes Carmélites,» et ajoute au sujet de la Prieure: «Monseigneur me mande qu'il lui a écrit.» (Lettres, vol.
I, p. 542.) Les Filles de Sainte-Marie avaient fait une petite halte chez celles de sainte Thérèse en passant de leur
maison provisoire dans leur nouveau monastère. Il peut se faire encore qu'une première rencontre ait eu lieu à l'arrivée
des fondatrices de la Visitation d'Orléans, en septembre 1620, et que le passage en question s'y rapporte; mais cela
nous semble moins probable.
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C'est une qualité des amitiés que le Ciel fait en nous de ne perir jamais1103, non plus que la
source dont elles sont issues ne tarit jamais, et que la presence ne les nourrit non plus que l'absence
ne les fait languir ni finir, parce que leur fondement est par tout: puisque c'est Dieu, auquel j'ay
rendu graces tres humbles de vostre vocation et de celle des deux cheres Seurs a un si saint
Institut1104; et sur tout dequoy il vous y maintient avec tant de faveur, que toutes trois vous y rendes
du fruit et devenes toutes, les unes apres les autres, Meres en une si honnorable famille, pour
l'establissement de laquelle, en France, vostre veritablement sainte mere avoit tant prié et travaillé,
comme pour sa finale retraitte et vostre habitation en cette vie1105. O mon Dieu, ma tres chere Fille,
ma Mere, que de benedictions sur vous! que de fideles correspondances vostre ame doit rendre a
la douceur que la divine Providence a exercee en vostre endroit!
Oserois-je bien parler en confiance a vostre cœur? Certes, je ne pense jamais en vostre
bienheureuse mere que je n'en ressente du proffit spirituel, avec mille consolations de voir que ses
vœux ont esté exaucés en ses trois filles. Or, j'espere que ses trois filz aussi, quoy qu'il tarde,
recevront quelque bonne affluence de la misericorde de Celuy a qui je sçai qu'elle les avoit
consacrés. J'ay eu le bien de les avoir tous reveus a ce dernier voyage que j'ay fait en France, et le
contentement d'avoir reconneu en [343] leurs ames des grandes marques du soin que le Saint Esprit
a d'eux1106.
Vous me demandes par vostre premiere lettre, ma Reverende Mere, certaines reliques que
je m'essayeray de treuver, et si ma queste en cela se rencontre heureuse, je vous les envoyeray.
Mais prepares vous aussi de m'envoyer alhors une image d'un portrait que vous aves1107, que j'eusse
sans doute fait copier tandis que j'estois a Paris, si j'eusse sceu qu'il y en eust eu au monde.
Et pour finir, ma tres chere Fille, ce m'est une satisfaction nompareille que la Superieure et
les Seurs de Sainte Marie de la Visitation vous ayent veuë; parce que je sçai que cela les aura
toutes encouragees a servir bien le Filz et la Mere de Dieu, a qui elles sont consacrees. A la verité,
estant ce qu'elles me sont, elles ne pourront que d'avoir en vous une tres cordiale et tres asseuree
confiance en vostre dilection, en vous rendant tous-jours, et a tout vostre Monastere, un veritable
honneur et respect, selon la grande estime et amour que toute la Mayson de cette ville, dont elles
sont, a conceu de toutes les vostres, et (puisque je parle avec vous, ce me semble, cœur a cœur) je
puis adjouster, et selon la veritable regle que je leur ay souvent inculquee, qu'il failloit que chacun
cultivast la vigne en laquelle il estoit, fidelement et tres amoureusement pour l'amour de Celuy qui
nous y a [344] envoyés; mais qu'il ne falloit pour cela laisser de connoistre et reconnoistre
franchement la plus grande excellence des autres, et a mesme mesure leur porter toute reverence
et veneration.
C'est asses pour cette fois, car je me prometz de vous escrire souvent, et, si vous me le
permettes, de joindre tous-jours le mot de nostre ancienne alliance, vous appellant ma Fille, a celuy
que le rang que vous tenes en vostre Ordre vous a acquis; et suis de tout mon cœur a jamais,
Ma Reverende Mere,
Vostre tres humble et tres affectionné frere
et serviteur,
1103 Cf. tom. XV, p. 94.
1104 Marguerite du Saint-Sacrement et Geneviève de Saint-Bernard (voir plus haut, notes (133), p. 24, et (973), p. 300).
1105 Voir tome XIII, note (427), p. 153.
1106 Des trois fils de Mme Acarie, nous connaissons déjà Nicolas (voir tome XV, note (469), p. 157). Le second, Pierre,
baptisé le 13 mars 1587, après avoir commencé ses études au collège de Pontoise, les termina dans ceux de Calvi et
de Navarre avec son plus jeune frère. Il fit ensuite un essai de vie religieuse chez les Jésuites, puis entra dans le clergé
séculier. Le P. Coton et M. de Marillac lui obtinrent un prieuré de l'Ordre de Grammont, malgré les résistances de sa
sainte mère dont l'esprit surnaturel était bien éloigné des vues humaines. Pierre Acarie devint plus tard docteur de
l'Université de Paris, chanoine, théologal, etc., et enfin vicaire général de Rouen. Il mourut le 1er mars 1637, léguant
au Chapitre de la cathédrale de Rouen sa riche bibliothèque. Jean, le dernier fils, baptisé le 6 février 1589, se destina
d'abord à l'état ecclésiastique et fut prieur du Mesnil, mais bientôt il embrassa la carrière militaire, passa en Allemagne
et s'y maria. Sa descendance s'est perpétuée jusqu'à nos jours dans la ville de Strasbourg. (D'après Boucher, Vie de la
Bse Marie de l'Incarnation, éd. du P. Bouix, 1873, pp. 113-114, notes.)
1107 Un portrait de la bienheureuse Marie de l'Incarnation. Le 34 avril 1621, François de Sales remercie M. de Marillac
de lui en avoir envoyé un; preuve de plus que les présentes lignes sont d'une date antérieure.
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24.9 Page 239

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FRANÇS, E. de Geneve.
MDCCVI. Au Supérieur d'une communauté (Minute). François
de Sales attend, pour permettre une quête et une publication
d'Indulgences, une attestation des pouvoirs du quêteur
Annecy, [mai-octobre 16201108.]
Admodum Reverende Domine,
Accepimus
litteras
nomine
Dominationis Vestrae nobis datas, quibus
postulabatur ut eleemosynas fidelium in [345]
nostra diocaesi colligere, Indulgentias
publicare et Confraternitati Domus vestrse
utriusque sexus Catholicos adscribere,
procuratori vestro liceret. Nos, pro Domus
vestrae fama et longe lateque diffuso
splendore, litteras quidem amanter scriptas,
amantissime vidimus et perspeximus, neque
sine magna quadam animi propensione id
praestandi quod petebatur. Yerum, cum ad rem
ventum est, ubi ab eo qui litteras illas attulit
postulatum est ut facultatis rerum Domus
vestrse gerendarum authenticum diploma ac
Bullam aut Breve, vel transcriptum
concessionis Indulgentiarum proferret,
respondit se non habere. At vero multum,
Reverende Domine, et jure canonico1109 et
decreto Concilii Tridentini1110 cautum est ne
quis ad Indulgentiarum publicationem, earum
maxime quae cum eleemosynarum collectione
conjunctae sunt, admittatur, nisi fidem faciat
omni exceptione majorem, de illarum
concessione. [346] Prudentia autem multis
experimentis comprobata docet non cuilibet
Très Révérend Seigneur,
Nous avons reçu de la part de Votre
Seigneurie la lettre où vous demandez qu'il soit
permis à votre procureur de recueillir des [345]
aumônes dans notre diocèse, de publier des
Indulgences et d'enrôler des catholiques de l'un
et de l'autre sexe dans la confrérie de votre
Maison. Quant à nous, en considération de la
notoriété de celle-ci et du grand éclat qu'elle
répand de toutes parts, nous avons reçu et nous
avons lu de très grand cœur votre si affectueuse
lettre, non sans éprouver une grande
inclination à faire ce qu'elle sollicitait de nous.
Mais quand on est venu au fait et qu'on a
demandé au porteur de la lettre de fournir une
pièce authentique qui le constituât votre chargé
d'affaires, une Bulle ou un Bref, ou une copie
de la concession des Indulgences, il a répondu
qu'il n'en avait pas. Cependant, Révérend
Seigneur, le droit canon et le décret du Concile
de Trente ont eu grand soin de défendre que
personne puisse publier des Indulgences,
surtout celles qui sont jointes à la quête des
aumônes, s'il ne produit sans faillir la preuve
qu'il en a obtenu la concession. [346] La
prudence même, confirmée par de nombreuses
expériences, nous apprend à ne pas ajouter foi
1108 Pour le destinataire et la date de cette lettre, on est réduit aux conjectures. Elles sont assez sérieuses toutefois en
faveur, soit de l'Abbé de Saint-Maurice en Valais, soit du recteur de l'hospice de Saint-Jacques de Compostelle. Depuis
février 1620, le Supérieur de la célèbre abbaye d'Agaune était Georges Quartery; au mois de mai suivant, un Jubilé de
quinze jours fut proclamé. A la même époque, les chanoines songeaient à construire une nouvelle église, et il serait
naturel qu'ils aient envoyé au loin des quêteurs. La confrérie de Saint-Sébastien, qui existait certainement en 1628,
pouvait fonctionner déjà huit ans plus tôt; et les différentes particularités de la lettre du Saint auraient ainsi leur
explication.
Elles ne la trouvent pas moins dans ce passage de la Chronique de Bérody (Fribourg, 1894): «La même année
1620, et le même mois d'octobre, la plupart des gens d'Agaune et du Valais s'affilièrent à la Congrégation de Saint-
Jacques-le-Majeur, à cause des Indulgences accordées miséricordieusement dans le Seigneur, par le Souverain Pontife
Paul V, aux membres de la dite Congrégation. Trois hommes, avec l'autorisation du Pape et du recteur de l'hospice de
Saint-Jacques-le-Majeur de Compostelle, proposaient ces Indulgences dans tous les pays.» Ils avaient certainement
passé en Savoie avant de se rendre chez les Valaisans.
1109 Corpus Juris, Clemen. De abusionibus, De pœnit. et remiss.
1110 Sess. XXI, de Reform., c. IX; Sess. XXV, Decr. de Indulg.
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24.10 Page 240

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dicenti se nomine locorum piorum
eleemosynas colligere debere credendum esse,
aut concedendum quod quaerit; qua de re non
ita pridem ipsamet Sancta Sedes nos peculiari
cura monuit1111.
Quare, donec de potestate hominis qui
litteras attulit et de concessione
Indulgentiarum nobis constet, a collectione
eleemosynarum
et
publicatione
Indulgentiarum abstinendum decrevimus;
parati tamen ex animo vestris adesse votis
Domusque vestrae commodis, ubi per legum
ecclesiasticarum Canones nobis licuerit.
Dominationem Vestram id non aequo tantum,
sed etiam laeto et consentiente accepturam
animo credimus, nosque nihilominus suis
suorumque precibus Deo optimo
commendaturam, quod et nos vicissim
facimus.
Annessii Gebennensium. [347]
au premier venu, quand il se dit chargé de
recueillir des aumônes au nom des
établissements de piété, et de ne pas lui
accorder ce qu'il demande. A ce sujet,
récemment encore, le Saint-Siège nous
avertissait d'y veiller d'une façon toute
spéciale.
Aussi, jusqu'à ce qu'il nous conste des
pouvoirs du porteur de la lettre et de la
concession des Indulgences, nous avons fait
surseoir à la quête des aumônes et à la
publication des Indulgences, sincèrement
disposé toutefois à nous rendre à vos désirs et
à nous intéresser à votre Maison, aussitôt que
les lois canoniques nous le permettront. Nous
sommes persuadé que Votre Seigneurie
recevra cette lettre, non seulement avec
bienveillance, mais même avec plaisir et
conformité de pensées avec nous, et de plus,
qu'Elle nous recommandera à la Bonté divine,
comme réciproquement nous en usons envers
Elle.
Annecy en Genevois. [347]
MDCCVII. A la Mère de Chantal, a Paris. L'opinion de François
de Sales sur la juridiction la meilleure pour les Ordres de
femmes
Annecy, [juillet-octobre 16201112.]
Ma tres chere Mere,
…………………………………………………………………………………………………….
Je voy des gens de qualité qui penchent grandement et jugent qu'il faudra que les
Monasteres soyent sous l'authorité des Ordinaires, a la vielle mode restablie presque par toute
l'Italie, ou sous l'authorité des Religieux, selon l'usage introduit des il y a quatre ou cinq cens ans,
observé presque en toute la France.
Pour moy, ma tres chere Mere, je vous confesse franchement que je ne puis me ranger pour
le present a l'opinion de ceux qui veulent que les Monasteres des filles soyent sousmis aux
Religieux, et sur tout de mesme Ordre, suivant en cela l'instinct du Saint Siege, qui, ou il peut
bonnement le faire, empesche cette sousmission. Ce n'est pas que cela ne se soit fait et ne se fasse
encor a present loüablement en plusieurs lieux; mays c'est qu'il seroit encor plus louable s'il se
faysoit autrement: sur quoy il y auroit plusieurs choses a dire.
1111 Constit. Pii V, 1567, Etsi Dominici.
1112 Ce texte a certainement été tronqué, et la première phrase semble mal ou incomplètement transcrite. Quant aux
raisons de notre date approximative, elles se déduisent de l'étude des événements en partie exposés dans la note
suivante.
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25 Pages 241-250

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25.1 Page 241

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De plus, il me semble qu'il n'y a non plus d'inconvenient que le Pape exempte les filles d'un
Institut de la jurisdiction des Religieux du mesme Institut, qu'il y en a eu a exempter les Monasteres
de la jurisdiction ordinaire qui avoit une si excellente origine et une si longue possession.
Et en fin, il me semble que veritablement le Pape sousmis en effect ces bonnes Religieuses
de France au [348] gouvernement de ces Messieurs1113; et m'est advis que ces bonnes filles ne
sçavent ce qu'elles veulent, si elles veulent attirer sur elles la superiorité des Religieux, les-quelz,
a la verité, sont des excellens serviteurs de Dieu, mais c'est une chose tous-jours dure pour les
filles, que d'estre gouvernees par les Ordres, qui ont coustume de leur oster la sainte liberté de
l'esprit.
……………………………………………………………………………………………………..
O ma tres chere Mere, je salue vostre cœur qui m'est pretieux comme le mien propre. VIVE
JESUS!
FRANÇ5, E. de Geneve.
MDCCVIII. A la Mère Favre, Supérieure de la Visitation de
Montferrand1114 (Fragment). Le rôle de la destinataire et celui de
l'Introduction à la Vie dévote.
Annecy, 1er octobre 1620.
……………………………………………………………………………………………………..
Je me resouviens, ma tres chere Fille, que vous m'escrivistes une fois que messieurs les
confesseurs de ce païs-la vous renvoyoyent les femmes, affin de les faire esclaircir, par vostre
entremise, des difficultés et scrupules qu'elles avoyent es choses secrettes de leur vocation. Ma
tres chere Fille, vous faites bien de les renvoyer a l’Introduction, ou je declare suffisamment tout
cela1115 en une sorte que si elles le veulent considerer, pour peu qu'on les ayde (si elles sont si
rudes ou simples qu'elles ne l'entendent pas), elles le pourront entendre utilement; car vostre
vocation et la qualité de fille ne vous permet pas de leur rendre ce service en autre façon.
……………………………………………………………………………………………………..
1113 On sait que lorsque les Carmélites de la réforme de sainte Thérèse s'établirent en France, les Carmes déchaussés
n'y avaient pas encore pénétré. Le Pape Clément VIII avait donc confié (1603) le gouvernement de ces Religieuses à
trois prêtres de grande science et de haute vertu: Jacques Gallemand, André du Val et Pierre de Bérulle (voir tome
XII, note (213), p. 118, Lettre CLXVI, p. 131, et note (350), p. 155), désignant toutefois, au défaut du Commissaire
général des Carmes, le Général des Chartreux pour Visiteur de l'Ordre. Celui-ci ayant récusé cette fonction, un Bref
de Paul V, du 9 septembre 1606, ordonna la nomination d'un prêtre séculier, élu pour trois ans et rééligible seulement
pour un second triennal, spécifiant que cette disposition serait suivie, même au cas où les Carmes s'établiraient dans
le royaume. Enfin, en 1614 (17 avril), le même Souverain Pontife nommait M. de Bérulle Visiteur général et perpétuel
du Carmel de France, disposition confirmée par le Bref du 14 mars 1620.
Tous ces documents émanés de Rome n'étouffèrent pas les désirs de quelques Religieuses qui, s'appuyant sur
un texte des Constitutions de la sainte Réformatrice, réclamaient la juridiction des Pères de leur Ordre. Des troubles
éclatèrent à ce sujet en 1618 au Monastère de Bordeaux; celui de Bourges, que gouvernait la Mère Isabelle de Jésus-
Christ, suivit son exemple. L'Archevêque, Mgr Frémyot, sur la requête des Carmélites, se transporta à leur couvent le
17 juillet 1620, et les prit momentanément sous sa direction, défendant, par sentence du 18 août, et aux Carmes et aux
Supérieurs, de faire aucun acte d'autorité dans ce Monastère jusqu'à ce qu'il fût statué autrement par le Saint-Siège.
Mais déjà les premiers jours de novembre, il avait donné sa parole de ne plus soutenir les Religieuses. Ne peut-on pas
supposer que son prompt changement fut le résultat des conseils qu'il aurait demandés à sa sainte sœur, la Mère de
Chantal, et par elle, à l'Evêque de Genève? C'est pourquoi il est vraisemblable de placer ces lignes entre juillet et
novembre. (Voir Mémoire sur la fondation, le gouvernement et l'observance des Carmélites déchaussées, publié par
les Carmélites du premier Monastère de Paris; Reims, Dubois-Poplimont, 1894, tome II, Partie IV, chap. IX, et Partie
VI, chap. V.)
1114 Ce fragment ne fait qu'un, dans les éditions antérieures, avec celui que nous avons donné au tome précédent, p.
302, en expliquant les raisons de la scission. Nous indiquions, sous toutes réserves, la Mère Favre comme destinataire;
elle le serait donc également des présentes lignes.
1115 Partie III, chap. XXXIX.
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25.2 Page 242

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1er octobre 1620. [350]
MDCCIX. Au Prince de Piémont, Victor-Amédée1116. Exposé des
facilités d'une fondation d'Oratoriens à Rumilly et des avantages
qui en résulteraient. Que devrait faire le prince pour aider à
cette bonne œuvre. — Les curés d'Armoy et de Draillant
toujours sans argent.
Annecy, 7 octobre 1620.
Monseigneur,
En attendant que Vostre Altesse face reuscir le projet du restablissement de la vraye pieté
en tous les monasteres et es autres eglises de cet Estat de deça les montz, voyci une digne occasion
qui se praesente pour Rumilly. Le sieur de Saunaz, Prieur de Chindrieu en Chautaigne1117, desire
sans fin de consacrer sa personne et son prieuré au service de Dieu et des ames sous l'Institut des
Peres de l'Oratoire; et parce que son prieuré est proche de Rumilly, il a jetté ses yeux sur ce lieu-
la, duquel la cure estant asses bonne, icelle, jointe au prieuré avec quelques autres petitz benefices,
pourroit suffire a l'entretenement de dix ou douze bons ecclesiastiques dudit Oratoire qui auroyent
un grand employ en cette ville-la et en tout le voysinage. Mays pour avoir l'evenement propice, il
seroit requis, Monseigneur, que Vostre Altesse nous tesmoignast son consentement et
contentement, et que par apres elle favorisast les poursuites qu'il sera requis de faire a Rome.
Et de tout cela, je l'en supplie tres humblement, comm'aussi de commander que les pauvres
cures d'Armoy et de Draillens soyent assistees de l'argent que tant de foys Vostre Altesse leur a
ordonné; n'estant pas en nostre pouvoir, ni par prieres, ni par sousmissions, ni par [351] importunité
d'en rien avoir, des cinq ou six ans en ça, sinon 50 escus, sans plus1118. Yostre Altesse sçait combien
cette supplication est juste; qu'il soit donq son bon playsir de la faire reuscir, tandis que nous prions
Nostre Seigneur qu'il la conserve et face de plus en plus prosperer.
Je suis, Monseigneur,
Tres humble, tres obeissant et tres fidele orateur
et serviteur de Vostre Altesse Serenissime,
FRANÇS, E. de Geneve.
VII VIIIre 1620, Annessi.
Revu sur l'Autographe conservé à Turin, Archives de l'Etat.
1116 Dans sa lettre du 27 octobre à M. de Sonnaz, l'Evêque de Genève dit positivement que c'est au prince de Piémont
qu'il a fait la proposition touchant le prieuré de Chindrieu. Victor-Amédée est donc, à coup sûr, destinataire des
présentes lignes.
1117 Voir ci-dessus, note (558), p. 160, et ci-après, note (1140), p. 358.
1118 Voir ci-dessus, Lettre MDCLXIV, p. 245.
242/341

25.3 Page 243

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MDCCX. A la Mère de Chantal, a Paris. Pourquoi le Saint se
réjouit du retard du voyage en France. L'Evêque de Luçon et
la Reine mère. M. Michel apportant de Paris «une milliasse
de lettres.» L'Abbesse de Port-Poyal auprès de la Mère de
Chantal
Annecy, 11 octobre 1620.
Que de desirs de vous pouvoir bien et longuement escrire, ma tres chere Mere, sur le sujet
que vos deux dernieres lettres m'en fournissent! mays certes, il ny a pas moyen, car, sil plait a
Dieu, il faut que j'escrive encor a Moulins1119.
Or sus, il est certain que je feray le voyage de France, mais non pas si tost: dont je suis bien
ayse, car cependant il se pourra faire que le Roy ira a Paris, unique moyen de nous y faire aller
aussi1120. J'escriray, s'il se peut, encor aujourdhuy a M. l'Evesque de Lusson qui me fit tant de
caresses et de faveurs a Tours1121, qu'a mon [352] advis il fera encor quelqu'estat de ma
supplication. Mays a la Reyne Mere, certes, je ne le feray pas si tost, car il faut bien du sujet pour
escrire a ces Majestés. Je croy bien que Mme de Soyssons ne vous [a] ni favorisees ni defavorisees,
sur tout si vous ne l'aves priee de rien1122; mays a quelque chose malheur est bon. Cette grande
Reyne sera, ce crois-je, plus ardente et plus voysine si elle revient a Paris, comme l'on tient
asseuré1123.
J'attens M. Michel, et par luy bien des nouvelles de nos Seurs1124. Quelle consolation de la
guerison de la petite Seur de Saint Bonet1125, et de l'autre que je ne connois, ce me semble, pas.
Mays voyci nostre M. Michel arrivé avec une milliasse de lettres. O mon Dieu, que je dois
et devray de responses! mais je payeray tout avec un peu de loysir, et notamment je remercieray
nostre bon Pere Binet de ses advis, quand je les auray leuz1126, et feray tout ce que je pourray et
sçauray pour mettre en bon estat les Constitutions.
O ma Mere, que de joye en l'imagination de voir ma fille tres chere aupres de ma Mere, en
allant et venant de Port Royal1127! comme nous en parlerons amplement, si je vay, ainsy que je
l'espere. Mays pressé, je la salue par vostre entremise, et toutes nos cheres Seurs. Helas, je n'ay
encor veu que la fine moindre partie des lettres que [353] M. Michel m'a apportees; j'escriray par
tout ou vous voudres.
Cependant, vives toute en Dieu et pour Dieu, ma tres chere Mere; je recommande nostre
unique cœur a sa sainte misericorde.
Annessi, le XI VIIIre 1620.
A ma tres chere Mere en Nostre Seigr,
1119 Nous n'avons pas ces lettres.
1120 Voir ci-dessus, note (1084), p. 334.
1121 Voir ibid., Lettre MDLX, et note (170), p. 38. Le message de François de Sales à Richelieu n'est pas venu jusqu'à
nous.
1122 Anne de Montafia, comtesse de Soissons (voir le tome précédent, note (1301), p. 406).
1123 Après sa nouvelle réconciliation avec Louis XIII, le 13 août, près de Brissac, Marie de Médicis s'était d'abord
retirée à Chinon; elle rentra à Paris avant le Roi, c'est-à-dire sur la fin d'octobre.
1124 M. Michel Favre (voir tome XVII, note (722), p. 208) avait accompagné les Sœurs d'Annecy en France. Il s'occupa
surtout de la fondation d'Orléans; quittant cette ville dans la seconde quinzaine de septembre, il revint en Savoie,
s'arrétant aux monastères de Bourges, Nevers, Moulins et Lyon.
1125 Sœur Marie-Catherine Camus de Saint-Bonnet (voir ci-dessus, note (1090), p. 336). Il est impossible de désigner
l'autre malade.
1126 Ces avis du P. Etienne Binet sur différents points des Constitutions de la Visitation, se gardent au 1er Monastère
d'Annecy, écrits de la main de la Mère de Chantal qui y a ajouté ses propres réflexions, et annotés par le saint
Fondateur.
1127 De Port-Royal à Maubuisson. La Mère Angélique Arnauld, résidant alors dans la seconde de ces abbayes, ne
laissait pas de visiter de loin en loin la première dont elle restait abbesse.
243/341

25.4 Page 244

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La Mere Superieure de Paris.
A Paris.
Revu sur l'Autographe qui se conservait à Annecy, chez les RR. PP.
Missionnaires de Saint-François de Sales.
MDCCXI. A Madame de Granieu. Les effets des affections
saintes. Humble sentiment de reconnaissance de l'Evêque de
Genève. Avis sur la santé de la Supérieure de la Visitation de
Grenoble
Annecy, 16 octobre 1620.
Certes, il est vray que vostre inopinee visite de Belley, ma tres chere Fille, me laisse tout
plein de sainte consolation1128. O que les affections celestes ont bien d'autres effectz et d'autres
consequences que les humaines! Beni en soit le nom de Dieu qui en est l'autheur et le conservateur.
Ce m'est une douceur toute aggreable de penser a cela, ma tres chere Fille, et supplie sa divine
Majesté qu'elle me face la grace de bien correspondre a ses bien-faitz et au soin qu'ell'a d'appuyer
mon pauvre chetif courage par l'association qu'il luy donne avec plusieurs ames, et
particulierement avec la vostre, a laquelle je suis lié d'un nœud indissoluble. Soyons bien fideles,
tres humbles, tres doucement et amiablement fervens a continuer dans le chemin auquel cette
celeste Providence nous a colloqués, ma tres chere Fille. [354]
1129Il faut que nostre Superieure de Grenoble1130 se face traitter comme pleine ou de vers
ou de matiere de vers, et si de six semaines en six semaines elle repete les remedes, j'espere que
Dieu la delivrera. Je luy escris1131, et je vous salue de tout mon cœur, ma tres chere Fille en
Jesuschrist, par qui et pour qui et en qui je suis tres absolument vostre, et le seray eternellement.
16 octobre 1620, Annessi.
A Madame
Madame de Granieu.
Revu sur l'Autographe conservé à la Visitation de Riom.
1128 Voir ci-dessus, pp. 279, 280 et 336.
1129 Cet alinéa est inédit.
1130 La Mère Péronne-Marie de Chastel.
1131 Epist. seq.
244/341

25.5 Page 245

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MDCCXII. A la Mère de Chastel, Supérieure de la Visitation de
Grenoble (Fragment). La Sainte Vierge aussi bien Mère de
Notre-Seigneur sur le Calvaire qu'à l'heure du Magnificat.
Paternelle sollicitude du Saint pour la santé de la destinataire.
Sentiment et consentement
Annecy, 16 octobre 16201132.
Je le croy bien, ma tres chere Fille, que ce seroit vostre advis que nous vous ostassions la
charge de Mere, mais il n'est nullement le nostre. Helas! ma Fille, penses vous que Nostre Dame
fust moins Mere de Nostre Seigneur quand, outree de douleur, accablee d'ennuy et toute submergee
d'affliction, elle respiroit cette parole: Ouy, mon Filz, parce qu'ainsy il vous plait1133, que quand,
[355] d'un accent tres humblement joyeux, elle chanta le celeste cantique de son Magnificat1134?
Ne craignes point de mal edifier nos Seurs: Dieu y pourvoira1135. Vostre cœur est naïf, rond
et sincere1136.............Soulages vostre pauvre cœur, que j'ayme parfaitement et paternellement…….
1137O ma pauvre fille Peronne, si les vers avoyent blessé vostre cœur, vous series morte,
car cette partie, qui est la premiere a recevoir la vie et la derniere a la perdre, n'est jamais piquee
pour peu que ce soit qu'elle n'en meure, et par consequent celuy en qui elle est. La douleur que
vous aves sous le sein gauche a quelque autre cause que la blesseure du cœur par les vers. Je croy
bien toutefois que vous en aves: vostre teint, vostre couleur, vostre action le font connoistre, et
deves prendre quelque remede contre iceux.
Ne vous estonnes nullement de ce que vous n'aves pas les sentimens de devotion pendant
vos langueurs, puisque les consentemens et au bien et au mal peuvent estre sans sentiment, et le
sentiment sans le consentement. Demeures donq paysible, ma chere Fille; soyes Mere, et bonne
Mere, tout autant de tems que Dieu l'ordonnera.
……………………………………………………………………………………………………..
Revu sur le texte inséré dans la Vie manuscrite de la Mere Peronne-Marie
de Chastel, par la Mère de Chaugy, conservée à la Visitation d'Annecy. [356]
1132 La lettre précédente à Mme de Granieu nous indique sûrement la date de celle-ci.
1133 Matt., XI, 26.
1134 Luc., I, 46-55.
1135 Gen., XXII, 8.
1136 Ici, la Mère de Chaugy donne en abrégé les conseils de direction contenus dans la lettre datée 13-20 juin 1620, et
commençant par ces mots: «Vostre chemin est tres bon...» (Voir ci-dessus, p. 254.) Elle ajoute également, à la phrase
suivante: «et Dieu veut que j'aye de la consolation a vous le dire,» empruntant cette finale à la lettre du 7 février de la
même année. (Voir ibid., p. 131, et note (464), p. 129.)
1137 La Mère de Chastel avait écrit à son bienheureux Père, dit la Mère de Chaugy (Vie manuscrite), que son «infirmité
l'abbatoit si fort qu'elle en santoit quelquefois de l'ennuy et de la tristesse, qu'elle accroissoit son adversion a estre
Superieure et sa peine de ne pas bien servir Nostre Seigneur et ses espouses; quil luy estoit advis que c'estoit un ver
qui luy venoit piquer le cœur, et que cette maistresse partie du corps humain se rendant soudain a la douleur, tout le
reste demeuroit sans courage et sans force.» C'est à ces plaintes filiales que le Fondateur répond par l'alinéa qu'on va
lire. Il est inédit, ainsi que la première phrase qui le suit.
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25.6 Page 246

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MDCCXIII. A Madame de Granieu1138. Des maladies utiles à
deux âmes. Comme le monde se trompe dans ce qu'il appelle
bien et mal. Double prière et souhait paternel.
Annecy, 23 octobre 1620.
Certes, ma tres chere Fille, j'aymerois volontier les maladies de monsieur vostre cher mari,
si la charité me le permettoit, parce qu'a mon advis elles vous sont utiles pour la mortification de
vos affections et sentimens. Or sus, laissons cela a discerner a la celeste et eternelle providence de
Nostre Seigneur, si elles sont pour le bien de vostre ame ou pour celuy de la sienne, toutes deux
exercees qu'elles sont, par ce moyen, en la sainte patience. O ma Fille, que le monde appelle
souventesfois bien ce qui est mal, et encor plus souvent mal ce qui est bien!
Cependant, puisque cette souveraine Bonté, qui veut nos travaux, veut que neanmoins nous
luy en demandions la delivrance, je la supplie de tout mon cœur qu'elle redonne une bonne et
longue santé a ce cher mari, et une tres bonne et tres excellente sainteté a ma tres chere fille, affin
qu'elle marche fortement et ardemment dans le chemin de la vraye et vivante devotion.
J'escris a la Mere de la Visitation1139. En somme, graces a Dieu, il y a mal de tous costés;
mais mal qui est un grand bien, comme j'espere. A jamais le bon playsir de sa divine Majesté soit
nostre playsir et nostre consolation es adversités qui nous arriveront. Amen.
FRANÇS, E. de Geneve.
Le 23 octobre 1620. [357]
1138 Le ton de cette lettre convient très bien à Mme de Granieu. La mention des maladies du «cher mari,» François de
Gratet, et de la lettre à la «Mere de la Visitation,» la Mère Péronne-Marie de Chastel, corrobore l'hypothèse.
1139 La lettre annoncée nous manque; quelque phrase du texte précédent, pp. 355, 356, serait-elle du 23 octobre? (Voir
note (1136), p. 356.)
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25.7 Page 247

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MDCCXIV. A M. Louis de Gerbais de Sonnaz1140. Le saint
Evêque consent à la retraite du destinataire. Un oncle qu'il
faut contenter. Attente d'une réponse du prince de Piémont.
Annecy, 27 octobre 1620.
Monsieur,
Je voy dans vostre lettre le desir que vous aves de sortir promptement du monde, auquel je
ne veux nullement contredire, puisque mesme vostre retraitte n'empeschera pas l'execution de
vostre dessein. Mays en tout ce qui se pourra bonnement, il faut donner satisfaction au bon oncle,
qui vous a tous-jours aymé, et je voy que vous ne laisseres pas, estant dans l'Oratoire, de bien le
contenter. [358] Il m'escrivit l'autre jour une lettre digne certes de luy et de la forte estime que j'ay
tous-jours faite de sa veritable pieté1141.
Au reste, hier au soir je receus lettres de Piemont, par lesquelles mon frere m'escrit que
Monseigneur le Prince attendoit de m'envoyer la response sur la proposition que je luy ay faite de
vostre affaire1142, jusques a ce qu'il ayt conferé avec Son Altesse son pere; et qu'il aura soin de
solliciter. Il faut tous-jours avoir un peu de patience avec les Princes, mais j'espere que le tout
reuscira a vostre gré, et supplie Nostre Seigneur qu'il respande de plus en plus abondamment ses
saintes graces sur vous,
Monsieur, a qui je suis, de tout mon cœur,
Tres humble et tres affectionné confrere,
FRANÇS, E. de Geneve.
Annessi, 27 octobre 1620. [359]
1140 A n'en pas douter, le Saint s'adresse au Prieur de Chindrieu, Louis de Gerbais de Sonnaz, fils de François de
Gerbais et de Louise d'Alby. En novembre 1607, l'Evêque de Genève avait été appelé à intervenir dans sa vocation
(voir tome XIII, Lettre CDXX, et note (1089), p. 336); le jeune homme, alors au collège des Jésuites de Chambéry et
tonsuré depuis le 29 septembre, songeait à prendre l'habit de Cluny. Au mois d'octobre de cette année 1607, son parent,
Louis d'Alby, moine et prieur de Saint-Pierre de Nantua et de Saint-Laurent de Chindrieu, résignait en sa faveur ce
dernier prieuré et l'admettait comme coadjuteur avec future succession, moyennant une pension annuelle de deux cents
écus. Il n'est pas probable que M. de Sonnaz ait fait un essai chez les Cisterciens, mais il garda le prieuré en commende
(voir ci-dessus, note (558), p. 160), et retrouva plus tard ses désirs de vie religieuse. François de Sales consulté en
1620 (voir ibid., Lettre MDCXXI), demande encore «un peu de tems» pour que l'aspirant puisse «plus entierement
digerer ses cogitations.» Le temps fut court; au mois de novembre le Prieur de Chindrieu entre à l'Oratoire de Lyon,
résigne le 8 février 1621 son canonicat au Chapitre de Saint-Pierre de Genève, et achève son noviciat aux fêtes de
Noël. Dans sa pensée, qui répondait à celle de l'Evêque, son bénéfice serait unii la cure de Rumilly où l'on introduirait
des Oratoriens. Ainsi se termineraient les tristes dissensions du clergé de cette paroisse. Saint François de Sales donna
tous ses soins à faire réussir ce dessein; les circonstances semblaient le favoriser. Unanimes étaient les désirs des
syndics, Curé et Altariens de Rumilly (voir ci-après, Lettre MDCCXXII, et note (1163), p. 370); au mois d'octobre
1621, mourut le curé Jean Viret, et l'Evêque, après bien des démarches, lui donna, le 19 février 1622, Louis de Sonnaz
pour successeur, malgré les protestations de Bernard de Grailly, prieur de Sainte-Agathe. Malheureusement le
Supérieur général de l'Oratoire voulut que M. de Sonnaz allât à Paris (lettre du Saint, 19 novembre 1622), et il n'envoya
pas de prêtres pour commencer sans retard le service. Peut-être, la mort de François de Sales rompit-elle le projet; les
Oratoriens ne purent s'établir à Rumilly qu'en 1652. Quant à Louis de Gerbais, il permute cette cure avec celle de
Saint-Félix le 4 septembre 1623, et résigne ce second bénéfice le 2 janvier 1624. Avait-il quitté déjà l'Oratoire?
commençait-il à cette époque à en avoir de nouveau assez du monde? De fait, en 1630, il se sent inspiré d'embrasser
la Règle de Saint-Benoît et son observance dans l'abbaye de Talloires; mais au bout de deux mois et demi, l'inconstant
personnage quitte l'habit, et s'en va résider dans son prieuré de Chindrieu. En 1645, il était curé de Sonnaz et de
Montdésir. Sa mort arriva avant le 17 février 1651. (D'après l'Armorial de Savoie, la Collection J. Vuÿ, Archives de
la Visitation d'Annecy, et les R. E.)
1141 Il est sans doute question de Louis d'Alby, prieur de Nantua et de Chindrieu (voir la note précédente). Peut-être
était-il frère de Louise d'Alby, mère de M. de Sonnaz.
1142 Vide Ep. MDCCIX.
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25.8 Page 248

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MDCCXV. A Madame Gasparde de Ballon, Religieuse de
l'abbaye de Sainte-Catherine. La solitude mentale au milieu du
monde. Comment suppléer aux exercices de piété qu'on ne
peut faire. Préparation à la fête de la Toussaint et à celle des
Morts
Annecy, fin octobre [1620 ou 16211143.]
Il faut souffrir cette incommodité de l'amour de nos parens qui ne pensent pas qu'il y ayt
de la comparayson entre la satisfaction d'estre chez eux et celle que l'on prend au train du service
de Dieu. Soyes donq, ma chere Cousine, ma Fille, en la solitude mentale, puisque vous ne pouves
estre en la solitude reelle. Tout est doux aux doux, et tout est saint aux saintz.
Vous sçaves de quelle sorte il faut resister a toutes ces petites attaques d'impatience, chagrin
et autres. Benisses Dieu, ma chere Fille, de ces petitz essays qui vous arrivent pour tesmoigner
vostre fidelité. Oyes la Messe dans vostre cœur, quand vous ne pourres l'ouÿr ailleurs, et adores le
Saint Sacrement.
Quant aux bonnes festes qui approchent, vous n'aves rien a faire de plus, apres vos Offices,
qu'a tenir vostre esprit en la celeste Hierusalem, parmi ses ruës glorieuses ou vous verres de toutes
partz retentir les loüanges de Dieu. Voyes cette varieté de Saintz, et vous enqueres d'eux comme
ilz sont parvenus la; et vous apprendres que les Apostres y sont allés principalement par l'amour;
les Martyrs, par la constance; les Docteurs, par la meditation; [360] les Confesseurs, par la
mortification; les Vierges, par la pureté de cœur, et tous generalement, par l'humilité. Vous ires
aussi le jour des Mortz en Purgatoire, et verres ces ames pleines d'esperance qui vous exhorteront
de profiter le plus que vous pourres en la pieté, affin qu'a vostre depart vous soyes moins retardee
d'aller au Ciel.
Bon soir, ma chere Fille.
FRANÇS, E. de Geneve.
MDCCXVI. A une Religieuse de l'abbaye de Sainte-Catherine.
On peut dire son mal, mais il ne faut pas s'en plaindre. Un
coup d'œil sur la Jérusalem céleste
Annecy, fin octobre [1620 ou 16211144.]
O ma chere Fille, puisque la cessation de vostr'exercice ne vous donne aucun allegement,
vous pourries le reprendre, mais tout bellement, n'y employant que demy heure a la fois1145. Il est
vray, sans doute, l'humilité, la patience, l'amour de Celuy qui nous donne la croix, requierent que
nous la recevions sans en faire des plaintes; mais voyes vous, ma tres chere Fille, il y a difference
entre dire son mal et s'en plaindre. On le peut donq dire, ains, en beaucoup d'océasions on est
1143 Le titre de «cousine» indique une des Sœurs de Ballon, et le ton, ainsi que d'autres considérations font préférer
Gasparde à Louise. (Voir tome XVI, note (612), p. 190.)
Quant à la date, la proximité de la fête de la Toussaint détermine le mois, et nous proposons 1620 ou 1621, à
l'exclusion de 1622, à cause de l'absence d'allusion à la réforme déjà commencée en novembre de cette dernière année.
En 1619, le Saint était à Paris, et diverses raisons ne permettent pas de reculer ces lignes à une époque antérieure.
1144 C'est à cause de la similitude des pensées que nous indiquons pour cette lettre la même date que pour la précédente.
La Sœur de Vignod pourrait bien être la destinataire, mais les preuves décisives font défaut. (Voir tome XIII, note
(299), p. 103.)
1145 Il s'agit sans doute de l'oraison mentale.
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25.9 Page 249

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obligé de le dire, comme on est obligé d'y remedier; mais cela se doit faire paysiblement, sans
l'aggrandir par paroles ni plaintes. C'est cela que dit la Mere Therese1146; car se plaindre, ce n'est
pas dire son mal, mais le dire avec des lamentations, doleances et tesmoignages de beaucoup
d'affliction. Dites le donq naïfvement et veritablement, sans nul [361] scrupule; mais que ce soit
en sorte que vous ne tesmoignies point de ne vouloir pas y acquiescer doucement, car aussi faut-il
y acquiescer de tres bon cœur.
Passes bien devotement ces saintes festes; voyes bien ces belles ruës de la Hierusalem
celeste, ou tant de bienheureux S aintz, resident et ou tous jubilent autour de leur grand Roy et en
l'amour de Dieu, [lequel,] comme une celeste source vive, respand de toutes partz ses eaux qui
arrousent ces glorieuses ames et les font fleurir, chacune selon ses conditions, d'une beauté
incomprehensible. «Que la soyent nos cœurs,» ma Fille, «ou sont ces vrays» et desirables
playsirs1147.
VIVE JESUS! N'est ce pas nostre mot de guet? Non, rien n'entrera dans nos cœurs qui ne
die en verité: VIVE JESUS! Il sçait, ce doux Sauveur, que je suis en verité tout vostre.
FRANÇS, E. de Geneve.
MDCCXVII. A la soeur de Blonay, maitresse des novices a la
Visitation de Lyon (Fragment). Souvenirs charmants de
l'enfance de Marie-Aimée de Blonay. L'ardente foi d'alors
doit la consoler dans le trouble de la tentation actuelle
Annecy, [octobre ou novembre 16201148.]
……………………………………………………………………………………………………..
Ma Fille, ne doutés point de vostre salut; vous esties encor bien petite, que vostre foy me
parut grande. Vivés [362] conformement aux verités qu'elle nous enseigne et en cultives le don
pretieux que vous aves si advantageusement receu. Souvenes vous quand vous m'apportastes les
livres heretiques que vous avies pris chez N. N.1149, et que vous me disies avec tant d'ardeur qu'il
les failloit brusler et tous ceux qui les lisoyent. Souvenes vous aussi que vous demandant si vous
n'avies point la curiosité de les lire, vous me respondistes hardiment que si l'envie vous prenoit
d'apprendre quelque chose contre la sainte Eglise Catholique, Apostolique et Romaine, vous
voudries vous mesme de bon cœur estre bruslee.
O ma Fille tres chere et tous-jours veritablement aymee, je n'ay point oublié ce trait de
vostre enfance. Consoles en maintenant vostre cœur dans ce petit ombrage de trouble, et au lieu
de disputer sur les choses que l'ennemy vous suggere, rendes graces a Dieu de ce que, des l'aage
de neuf a dix ans, il vous a donné le desir de mourir pour la foy de la sainte Eglise. Maintenant,
ma Fille, moures a vous mesme pour la pureté de cette foy, aneantissant vostre esprit dans ces
bienheureuses tenebres.
……………………………………………………………………………………………………..
1146 Chemin de la Perfection, ch. XI.
1147 Collect. in Miss. Dom. IV post Pasc.
1148 Il semble à propos de rapprocher ces lignes de celles que la Mère de Chantal écrivait le 27 octobre 1620 à la Sœur
de Blonay: «A jamais que ce doux Sauveur vive et règne dans nos cœurs parmi les désolations et les ténèbres... Encore
que... nous ne le sentions point par les suavités de sa sainte foi, n'importe, il est avec nous. Et dessus ce fond sec et
aride, il faut bâtir la solide foi...» (Lettres, vol. I, p. 482.) Un peu plus tard, le 8 décembre, la Sainte se réjouit avec sa
Fille de ce que Dieu l'a «délivrée de la tyrannie de ces vaines craintes.» (Ibid., p. 496.) Les encourageantes paroles du
Fondateur ne furent-elles pas adressées à la Sœur Marie-Aimée pendant cette même période d'épreuves intérieures?
1149 L'historien de la Mère de Blonay ne nous a pas conservé ce trait de l'enfance de la petite Aimée; on ne peut donc
dire quel nom se cache sous ces N. N.
249/341

25.10 Page 250

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MDCCXVIII. Au duc de Savoie, Charles-Emmanuel Ier.
Témoignage de la fidélité et du mérite du collatéral Flocard
Annecy, 2 novembre 1620.
Monseigneur,
Je ne doute nullement que Vostre Altesse Serenissime ne sache qui est le sieur collateral
Flocard1150, qui aura [363] lhonneur de luy presenter cet escrit. Mays je ne laisseray pas de rendre
ce veritable tesmoignage pour luy, qu'en toutes les occurrences esquelles il a esté employé au
service de Vostre Altesse, il a rendu toutes les preuves qu'on sçauroit desirer, de probité, fidelité
et constance, comm'un vray et tres asseuré sujet doit faire; qui me fait tres humblement supplier
Vostre Altesse de le vouloir gratifier de son bon œil.
Et prie Dieu qu'il la conserve et protege de ses plus saintes faveurs a longues annees, qui
suis,
Monseigneur,
Vostre tres humble, tres fidele et tres obeissant
orateur et serviteur,
FRANÇS, E. de Geneve.
11 novembre 1620, Annessi.
Revu sur l'Autographe conservé à Turin, Archives de l'Etat.
1150 Barthélémy, second collatéral au Conseil de Genevois. (Voir tome XVII, note (1023), p. 303.)
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26 Pages 251-260

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26.1 Page 251

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MDCCXIX. Au Prince de Piémont, Victor-Amédée. Un
serviteur fidèle de Son Altesse
Annecy, 2 novembre 16201151.
Monseigneur,
Vostre Altesse aura, je m'asseure, conservé la memoire d'avoir veu, en ce païs et a Paris, le
sieur collateral Flocard, present porteur, servir fidelement Son Altesse es occurrences. Mais
puisqu'il le desire, je ne laisseray pas [364] de rendre veritable tesmoignage a Vostre Altesse, qu'il
est tous-jours luy mesme en probité, fidelité et constance pour cette affection, et certes, digne
d'estre confidemment employé.
Et sur cette verité, je fay tres humblement la reverence a Vostre Altesse, a laquelle je
supplie nostre Sauveur de vouloir departir le comble de ses graces; qui suis
……………………………………………………………………………………………………..
1151 Migne (tome VI, col. 1075) donne cette lettre à la date du 10 novembre 1610, avec le cardinal Maurice pour
destinataire. Ce prince n'étant pas venu en «ce païs,» il faut en conclure que le Saint s'adresse à son frère Victor-
Amédée, son recours habituel, au reste, pour les grâces qu'il veut obtenir et les protections qu'il sollicite.
La date de l'année est évidemment fausse; nous croyons aussi devoir corriger le quantième, en plaçant ces
lignes le même jour que celles écrites sur le même sujet au duc de Savoie.
251/341

26.2 Page 252

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MDCCXX. A la Mère de Monthoux, Supérieure de la Visitation
de Nevers1152. «Lettre d'attente.» Quelle réponse faire à
l'Evêque de Nevers. Les filles ineptes ne doivent pas être
reçues. Echange de bréviaires.
Annecy, 2 novembre 1620.
Ce n'est icy qu'une lettre d'attente, ma tres chere Fille, pour seulement vous dire qu'au
premier jour je respondray par le menu a toutes celles que vous m'aves fait la consolation de
m'escrire jusques alhors. [365]
Vous pourres ce pendant respondre a Monseigneur l'Evesque1153, que ces bonnes filles de
Moulins, comme vous aussi, n'estes la que pour faire le service de la fondation, et que quand le
Monastere sera establi, vous pourres [retourner1154] en vos Maysons de profession, ou [l'on vous
recevra]; et que partant, il ne faut rien demander pour ces [filles] la a la Mayson de Moulins, qui
demeure oblig[ee de les] recevoir quand elles retourneront…..Il semble qu'il n'est pas [a propos de
presser] nostre Seur Marie Aymee de Morville; ains qu'elle mesme laisse librement les dix mille
francz.
Tenes vostre courage hautement relevé et saintement humilié en Dieu, ma tres chere Fille.
[366]
1152 Née le 5 avril 1594, au milieu des épreuves que son père, Janus Guillet de Monthoux, eut à endurer de la part des
hérétiques (voir tome XVII, note (1032), p. 306), la petite Paule fut pour ses vertueux parents comme une rose entre
les épines. Dès l'enfance, Dieu la prévint de ses grâces, et nous avons vu déjà par quels moyens il l'attira à la Visitation
(tomes XVI, Lettre MXIII et les notes (841), (910) des pp. 261, 279; XVII, note (362), p. 93). La première, avec sa
compagne de prise d'habit (voir tome XVI, note (887), p. 271), elle reçut le voile blanc, les novices ayant porté
jusqu'alors des coiffes de soie pendant leur année de probation. Après sa Profession, 27 décembre 1615, elle parut si
bien établie dans la vertu, qu'on songeait à l'envoyer à la fondation de Riom qui se traitait alors (voir tome XVII, note
(983), p. 287); la Providence la garda en Savoie pour l'avantage et la consolation de la baronne de Thorens que la
Mère de Chantal confia à sa sainte amitié et à son zèle. Cette jeune Religieuse montra dans cette mission tant de
sagesse, de tact et de prudence, qu'on la jugea capable de conduire le noviciat (voir le tome précédent, note (679), p.
202). Destinée ensuite à la fondation de Bourges, et retenue par la maladie, promise à celle de Turin (voir ibid., note
(982), p. 296), Sœur Paule-Jéronyme partit enfin d'Annecy pour Moulins en juillet 1620 (voir ci-dessus, Lettre
MDCLXIV, p. 246). L'abrégé de l'histoire de l'établissement de la Visitation à Nevers (Appendice III), et plusieurs
des lettres et des notes suivantes, laissent entrevoir quelque chose des souffrances qu'elle eut à endurer, et en même
temps du savoir-faire naturel et des qualités surnaturelles dont elle donna la preuve en ces circonstances difficiles.
Elle ne rencontra presque pas moins de difficultés dans la fondation de Blois, entreprise en 1625; la pauvreté extrême
y fut longtemps sa compagne, ainsi que la contradiction et l'humiliation. Les maladies, les épreuves intérieures vinrent
s'y ajouter; mais de cette semence amère germèrent les plus beaux fruits: deux nouveaux Monastères fondés, Mamers
(1633) et Loudun (1648), les Religieuses de l'Hôpital de Blois réformées, et l'Institut tout entier édifié par l'inflexibilité
de la Mère Paule-Jéronyme à maintenir la Règle et à s'opposer à tout changement. Elle mourut le 3 septembre 1661,
dans la Maison de Blois qu'elle avait gouvernée dix-huit ans, pouvant, sur son lit d'agonie, se rendre le témoignage
d'avoir aimé par dessus tout «la vie cachée en Dieu et le mépris général de toutes les choses de la terre.» (D'après sa
biographie dans Les Vies de plusieurs Supérieures de l'Ordre de la Visitation Sainte Marie, Anneci, Fonteine, 1693,
et les documents conservés aux Archives du Ier Monastère d'Annecy.)
1153 L'évêché de Nevers, érigé au commencement du VIe siècle, était gouverné en 1620 par Eustache de Saint-Phal.
Sous son prédécesseur, Arnaud Sorbin de Sainte-foi, il avait été choisi, en 1579, comme vicaire général, et en 1588,
comme député du Clergé aux Etats généraux de Blois. Après la mort d'Arnaud Sorbin, Henri IV le nomma au siège
de Nevers qu'il occupa de 1606 à 1643. Plusieurs Maisons religieuses s'établirent dans le diocèse pendant son
épiscopat. Mgr de Saint-Phal se montra spécialement bon pour les Sœurs de la Visitation; dès qu'elles furent arrivées,
il les «prist... en une très tendre et paternelle affection, disant,que c'estoit ses filles très cheres, et que qui toucheroit
les filles toucheroit le pere.» Il s'assujettit même pendant plusieurs mois à venir leur dire la Messe tous les dimanches,
ayant désigné pour les jours de la semaine six des principaux de son clergé pour leur rendre ce service de charité.
(Gallia Christiana et Hist. de la Fondation de la Visitation de Nevers par la Mère de Chaugy.)
1154 L'Autographe publié pour la première fois par Hérissant (tome IV, p. 292), était fort endommagé; de là quelques
lacunes qu'on peut, pour la plupart, combler facilement, l'éditeur indiquant la mesure de la place occupée par les mots
disparus.
252/341

26.3 Page 253

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Certes, ces filles si ineptes ne doivent point estre receües a profession, et quand on les
connoist telles avant la reception a l'habit, elles ne doivent point y estre admises; mais je vous
diray cela en detail.
Vous pouves employer les Seurs qui doivent estre Domestiques, et qui ne sont point
vestues, au service du dehors, par lequel elles meritent tous-jours davantage leur reception future
a l'habit.
Je vous remercie de vos beaux breviaires, et envoyeray les miens vieux a la premiere
commodité1155. Ma tres chere Fille, je suis tres parfaitement tout a fait vostre, et comme a ma chere
fille [Françoise-Jacqueline1156] et comme a ma Seur Marie Aymee1157.
VIVE JESUS!
FRANÇS, E. de Geneve.
2 novembre 1620.
A ma tres chere Fille Paule Hieronime,
Superieure a Nevers. [367]
1155 Le saint Fondateur, répondant à la demande de sa fille, envoya en effet ses vieux bréviaires, que la Mère Paule-
Jéronyme reçut avec grande dévotion, comme de précieuses reliques. Le jour du glorieux trépas du Serviteur de Dieu,
ces deux livres «s'ouvrirent d'eux-mêmes plusieurs fois, et embaumèrent la maison d'une odeur toute céleste,» ce qui
donna aux Sœurs un pressentiment de la douloureuse nouvelle.
1156 Sœur Françoise-Jacqueline de Musy, partie d'Annecy avec la Supérieure de Nevers. (Voir ci-dessus, note (938),
p. 288.)
1157 Nous ne savons si la Sœur Marie-Aimée de Morville fit à ce moment un court séjour à Nevers; elle est encore
nommée dans la lettre du 9 novembre à la Mère de Monthoux. Sinon, il faudrait croire à une distraction de saint
François de Sales.
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26.4 Page 254

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MDCCXXI. A la soeur de Chastellux, Assistante de la
Visitation de Nevers1158. Le Saint se réjouit de la savoir
Directrice à Nevers. L'esprit qu'il faut donner aux Novices.
Annecy, 2 novembre 1620.
Ma tres chere Fille,
Ce m'a esté une grande satisfaction de vous sçavoir aupres de ma Seur Paule Hieronime,
ou vous estes cooperatrice en l'establissement de cette nouvelle Mayson [368] de Nevers; car, des
que j'eu le contentement de vous voir a Moulins1159, j'ay tous-jours pensé que Dieu vous
employeroit a son service fort utilement.
Tenes vostre courage humblement eslevé en Dieu, ma tres chere Fille; serves-le fidelement
et faites toutes vos œuvres pour son bon playsir, car a cela estes vous appellee. Donnes le plus que
vous pourres l'esprit d'un (sic) tres humble mais courageuse simplicité, et de l'amour de la croix a
ces ames que vous nourrissés, affin qu'elles soyent aggreables a Celuy qui desire les rendre ses
espouses.
Dieu soit au milieu de vostre ame, ma tres chere Fille, et je suis en luy,
Vostre tres humble frere et serviteur,
FRANÇS, E. de Geneve.
2 novembre 1620, Annessi.
A ma tres chere Seur M. de Chateluz,
Assistente au Monastere Ste Marie de la Visitation.
A Nevers.
Revu sur l'Autographe conservé à la Visitation d'Annecy. [369]
1158 Deux illustres familles s'unirent par le mariage d'Olivier de Chastellux et de Marguerite de Clermont d'Amboise.
Ces nobles seigneurs eurent treize enfants; Hélène, l'une des cadettes, dut, en cette qualité, entrer, avec une de ses
sœurs, à l'abbaye de Crésenon (Yonne), de l'Ordre de Saint-Benoît, que l'Abbesse, sa tante, promettait de lui
transmettre. Mais en attendant qu'elle eût l'âge de gouverner, la charge fut remise à une autre, et dès lors commença
pour Mlle de Chastellux une série d'épreuves fort pénibles. «Après m'avoir donné assez de naissance,» raconte-t-elle
elle-même, Dieu «m'a reduite dans une extrême pauvreté, pour mettre mon cœur dans un entier dépouillement. Mon
Abesse, qui portoit la crosse laquelle m'avoit été destinée, me refusoit du pain dans le Monastère dont je devois être
la maîtresse. Mon pére, qui me croioit bien logée, quoiqu'il n'ignorât pas les mauvais traitemens que je recevois, me
refusoit une dote pour me retirer ailleurs.» (Lettre à la Mère de Blonay.) La jeune Novice, chassée même à deux
reprises de son abbaye, ne s'empressa pas, on le comprend, de se lier par la Profession. Elle avait connu, avant 1610,
la baronne de Chantal; lorsque la Visitation s'établit à Moulins, Hélène résolut de s'y consacrer à Dieu. Son courage
triompha de tous les obstacles, et en 1617 elle devenait l'humble disciple de la Mère de Brèchard. Le coup d'œil sûr
de cette grande Supérieure apprécia vite la nouvelle venue; elle en trace ce portrait à la Mère de Chastel: «Elle a l'esprit
clair, net, vif, lumineux et pénétrant; l'inclination noble et généreuse, et encore plus disposée à la piété et à la vertu;
l'humeur douce, retenue, modeste et affable; mais au reste; le cœur ardent et violent au bien et à la perfection.»
Ajoutons un trait, emprunté au témoignage d'une des Communautés qu'elle a gouvernées: «autant incapable de se
laisser tromper que de tromper les autres.» Des dons si riches furent largement utilisés. De 1620 à 1622, Sœur Marie-
Hélène est Directrice à Nevers; elle est ensuite élue Supérieure à Moulins, et fonde la Maison d'Autun en novembre
1624. A la fin de ses deux triennats à Autun, Bourg la réclame (1631-novembre 1634), et tout en dirigeant ce
Monastère, elle établit celui de Saint-Amour; de nouveau, elle gouverne à Moulins (novembre 1634-1641), puis à
Semur (1641-1646), fonde la Maison d'Avallon en 1646, et y demeure jusqu'en 1654. Les Sœurs de Chalon-sur-Saône
et de Bourbon-Lancy jouissent à leur tour de sa conduite (1654-1657, 1657-1660). Enfin, la Mère de Chastellux revient
à Avallon, où deux ans après son élection, le 3 mai 1663, elle termine une vie féconde, traversée par des croix de
toutes sortes, qui servirent à faire éclater les vertus de celle que François de Sales trouvait non seulement «selon son
cœur,» mais encore «selon le cœur de Dieu.» (lettre à la Mère de Bréchard, novembre 1623. D'après Moreri; la
biographie de la Mère de Chastellux, dans Les Vies de plusieurs Supérieures, etc., 1693, et l'Histoire des Fondations.)
1159 Au retour de Paris. La Sœur Marie-Hélène fit alors sa confession générale au bienheureux Evéque.
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MDCCXXII. Aux membres du souverain sénat de Savoie1160
(Inédite). La cure de Rumilly étant désormais unie au Chapitre
des Altariens, les poursuites du Prieur contre le Curé n'ont pas
de raison d'être.
Annecy, 7 novembre 1620.
Messieurs,
Ayant sceu que M. le Prieur de Rumilly1161 inquietoit le sieur Curé dudit lieu1162 pour
certaine reconnoissance qu'il prœtend de luy, j'ay creu que je vous devois rendre ce veritable
tesmoignage, que la cure de Rumilly n'est plus au Curé (bien que, comme il est raysonnable, les
fruitz luy soyent reservés), puisque il l'a resignee par supplication qu'il m'a faite de l'unir au
Chapitre ou cors des Altariens de cette eglise-la1163, et que j'ay fait toutes les formalités
praeparatoires a laditte union, delaquelle les finales expeditions seroyent signees et mises en
execution, si Monseigneur le Serenissime Prince ne m'eust fait sçavoir que, voulant faire unir
quelques autres pieces [370] pour le plus grand bien de cette eglise, il desiroit que j'attendisse pour
un peu, affin de faire tout ensemble ce qui sera requis1164.
Mays cependant, en un'assemblee que les ecclesiastiques de Rumilly et les scindiques firent
devant moy1165, monsieur le Prieur traitta de toutes ses pretentions, en cas de l'union de la cure,
laquelle est a la veille d'estre faite, puisque je n'attens que le commandement de Monseigneur le
Serenissime Prince qui ne doit pas tarder. De sorte, Messieurs, que la cure estant hors des mains
du sieur Curé et se treuvant es miennes pour laditte union, a laquelle le sieur Prieur a consenti par
authorité mesme de ses Superieurs1166, je vous supplie tres humblement de tenir ledit sieur Curé
exempt de faire cette reconnoissance que le cors des Altariens fera, en la façon convenue, soudain
que l'union sera achevee.
Et priant Dieu qu'il vous comble de ses celestes benedictions, je demeure de tout mon cœur
en luy,
Messieurs,
Vostre tres humble et tres affectionné serviteur,
FRANÇS, E. de Geneve.
VII novembre 1620, Annessi.
1160 Le souverain Sénat de Savoie avait alors pour présidents secondaires après Antoine Favre: Guillaume d'Oncieu,
Antoine de Charpenne et François de Tardy (voir ci-dessus, note (566), p. 165). Suivaient les sénateurs, avocats et
procureurs généraux.
1161 Bernard, fils de Gaspard de Grailly, coseigneur de Ville-la-Grand (cf. tome XI, note (141), p. 51), et de Guicharde
Duret, entra chez les Bénédictins de Nantua, et fut institué prieur de Sainte-Agathe de Rumilly le 22 octobre 1603, en
vertu des Bulles du 1er août précédent. (R. E.) Il céda ce prieuré à celui de Talloires en novembre 1629, ce qui ne se
fit pas sans de vives réclamations de la part du Prieur de Nantua.
1162 Jean Viret (voir tome XVI, note (836), p. 259).
1163 Le 17 mars 1630, les syndics de Rumilly présentaient à l'Evêque de Genève une requête accompagnant celle du
curé Viret et des Altariens. Dans les deux sont exposés les faits que nous connaissons déjà (voir tome XVI, note (835),
p. 258, et note (836), p. 259), et sont exprimés les mêmes vœux: que l'autorité épiscopale prononce l'union de la cure
au corps des Altariens, afin d'augmenter le revenu de ceux-ci, et qu'en retour ils prêtent leur concours au ministère
paroissial. François de Sales agréa ces demandes et chargea son Official des formalités requises pour l'union projetée.
(R. E.)
1164 En 1622, les prieurés de Chindrieu et de Lausanne-de-Vaux, avec celui de Sainte-Agathe, étaient unis à l'église de
Rumilly, en faveur de la Congrégation de l'Oratoire.
1165 Ce fut le 18 mai 1620 que se tint cette assemblée, à Rumilly même (cf. ci-dessus, note (682), p. 207). Une
transaction pour ce qui regardait le culte fut signée: les Prieur, Curé et Altariens devaient dire alternativement par
semaine trois Messes tous les jours, dont la troisième était chantée; chaque jour aussi, on devait chanter les Vêpres et
les Complies, ainsi que les Matines aux fêtes solennelles et pendant le Carême et l'Avent. (Croisollet, Hist. de Rumilly,
Chambéry, 1869, note (2), p. 18.)
1166 Le Prieur de Nantua, qui avait droit de nomination à la cure de Rumilly, et l'Abbé de Cluny, chef de l'Ordre.
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A Messieurs
Messieurs les gens de S. A. Sme,
tenans le souverain Senat de Savoye.
Revu sur l'Autographe conservé à la Visitation de Rome. [371]
MDCCXXIII. A M. Jean Rosetain1167. L'Evêque de Genève
charge son Officiai forain d'une affaire qui intéresse le Chapitre
de sa cathédrale. Prochain départ pour le Faucigny.
Annecy, 7 novembre 1620.
Monsieur,
Voyla que ces Messieurs de nostre eglise cathedrale recourent a moy en vostre personne,
qui represente par dela la mienne, pour un'affaire qu'ilz ont, a mon advis, grande rayson
d'affectionner1168. Ilz ne doutent nullement que vous ne leur rendies bonne, briefve et fidele justice;
mais je doy vous recommander leurs affaires comme les miennes propres, puisque Dieu m'a joint
plus particulierement a eux et m'a enjoint la conservation de leurs droitz. Je le fay donq autant quil
m'est possible.
Et sur l'advis que vous me donnastes l'autre jour, j'envoyeray lundi M. Rollant1169 a
monsieur de Mont Saint Jean1170, puisque je suisforcé de passerjusques en Foucigni pour affaire
qui presse1171, et retourneray icy pour quelques [372] jours, passé lesquelles (sic), je m'en iray a
Gex; mais vous en seres adverti. Et tandis, je demeure,
Monsieur,
Vostre tres humble et tres affectionné confrere,
FRANÇS, E. de Geneve.
7 novembre 1620, Annessi.
A Monsieur
1172[Monsieur] Rosetain,
[Official fo]rain de l'Evesché [de Gen]eve
en Beugey, Valromey et Gex.
Revu sur l'Autographe conservé à la Visitation de Pignerol.
1167 D'une très ancienne famille du Bugey, Jean Rosetain ou Rostaing avait été nommé curé de Chavornay le 5 mai
1594; en 1608, il reçut la charge d'official pour la partie française du diocèse de Genève, et, en cette qualité, fit en
1614, par ordre de saint François de Sales, la visite de soixante-trois paroisses. Le 17 décembre 1624, il permute la
cure de Chavornay avec celle de Chanaz et, le 7 janvier 1625, ce dernier bénéfice avec une chapellenie. Il meurt en
1625. (R. E.)
1168 Nous ignorons l'affaire dont il s'agit.
1169 Georges Rolland, prêtre et économe de la maison du Saint.
1170 Jean-Claude de Clermont-Mont-Saint-Jean (voir note (1173) de la lettre suivante).
1171 C'était l'accord entre les chanoines de Sixt et leur Abbé commendataire qui appelait le saint Evêque en Faucigny.
(Voir ci-dessus, note (568), p. 166.) Après l'avoir conclu, il fit avec grande dévotion, le 14 novembre, l'ouverture du
tombeau du bienheureux Ponce, premier abbé de ce monastère; puis il revint à Annecy par Viuz, Mélan et Meyrens
(voir ci-après, p. 384), sans trouver ensuite le loisir d'aller jusqu'à Gex.
1172 Les mots insérés entre crochets ont disparu à l'ouverture de la lettre.
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MDCCXIV. Au Baron Jean-Claude de Clermont-Mont-Saint-
Jean1173 (Inédite). Demande de papiers, inutiles au destinataire, et
très utiles à François de Sales.
Annecy, 9 novembre 1620.
Monsieur,
Lhonneur que j'ay d'estre aymé de vous me servira de preface, et la confiance que j'ay en
ce porteur1174 me servira de narration. Je vous supplie seulement de luy donner le loysir de vous
faire ma supplication et, si vous la juges [373] juste et equitable comme je croy qu'elle le soit, vous
me favoriseres en l'enterinant. En somme, c'est avoir certains papiers, inutiles a vous, Monsieur,
ou je suis le plus trompé homme du monde, et utiles a moy qui, apres mon retour d'un voyage forcé
que je vay faire1175, auray bien peut estre lhonneur de vous offrir mon service en presence, comme,
absent et present,
Monsieur,
Vostre tres humble serviteur,
FRANÇS, E. de Geneve.
9 novembre 1620, Annessi.
A Monsieur
[Monsieur] le Baron de Mont St Jean
et de la Bastie.
Revu sur l'Autographe appartenant à M. Bosch, ministre plénipotentiaire
de la République Argentine, à Paris.
1173 Les généalogistes sont unanimes à rattacher la maison de Clermont-Mont-Saint-Jean à celle de Clermont-
Tonnerre; ce qui est moins sûr, c'est que toutes deux tirent leur origine de Robert de Clermont, tige des Bourbons. Le
chef de la première était alors Jean-Claude, baron de la Bâtie, seigneur de Saint-Pierre-de-Soucy, des Terreaux et de
Mécoras, etc., fils de Jean-Alexandre et de Françoise de Seyssel. Il épousa successivement Anne de Montfalcon et
Jeanne-Péronne de Regard. (Cf. tome XVII, note (772), p. 224.) Nous trouverons, dans la suite de la correspondance,
l'une de ses filles du premier lit, qui fut Religieuse à la Visitation d'Annecy.
1174 Georges Rolland (voir la lettre précédente).
1175 Voir ci-dessus, note (1171), p. 372.
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MDCCXXV. A la Mère de Monthoux, Supérieure de la
Visitation de Nevers. La Visitation n'est pas instituée pour
l'éducation des petites filles. Double inconvénient de donner
entrée au monastère à de trop jeunes enfants. Quelques avis
sur différentes affaires. La source des «tendretés» sur soi-
même. Une pensée dangereuse pour les fondatrices.
Combien rares les femmes «sans fantasie et malice et
bigearrerie.» Sous quelle condition promettre aux aspirantes
de les recevoir. Ne pas prêter facilement les Constitutions
jusqu'à ce qu'elles soient corrigées. Faut-il se laisser peindre?
Divers conseils relatifs aux Règles et observances. Pour
quelle raison admettre les postulantes riches; pourquoi les
pauvres ne doivent pas être rejetées. Considération et
désintéressement dans l'admission des sujets. Les dix mille
francs de la Sœur de Morville
Annecy, 9 novembre 1620.
……………………………………………………………………………………………………
1176Vous pouvés, avec la permission de Monseigneur [374] l'Evesque1177, recevoir la petite
fille qui est d'un naturel si bien conditionné, selon que vous me dites, que l'on doit esperer qu'il
n'en arrivera point d'inquietude a la Religion1178; mais, ma tres chere Fille, il faut tout a fait eviter
de recevoir des autres filles avant l'aage, car Dieu n'a pas esleu vostre Institut pour l'education des
petites filles, ains pour la perfection des femmes et filles qui, en aage de pouvoir discerner ce
qu'elles font, y sont appellees. Et non seulement l'experience, mais la rayson nous apprend que les
filles si jeunes estant reduites sous la discipline d'un Monastere, qui est ordinairement trop
1176 Dans l'édition de 1629, ce fragment fait suite à un autre, du 24 janvier 1618, adressé à la Mère Favre, (Voir tome
XVIII, note (540), p. 157.) On le trouve encore, augmenté des cinq premières lignes, jusqu'ici inédites, dans un ancien
manuscrit où sont aussi copiés plusieurs passages de la lettre autographe du 9 novembre 1620 à la Mère de Monthoux,
dont le commencement manque. (Voir note (1179) de la page suivante.) Nous croyons devoir l'y rattacher, l'enfant
dont il est ici question paraissant être Mlle Gascoing (voir note (1178) ci-dessous). L'Histoire de la Fondation de
Nevers cite en effet, en parlant d'elle, le sentiment du Saint tel qu'il est exprimé ici: «les filles si jeunes estan reduites
sous la discipline d'un Monastere,» etc. Or, elle entra à la Visitation le 8 décembre 1620; un nouveau message
d'Annecy à Nevers n'est pas probable entre deux dates si rapprochées.
1177 Eustache de Saint-Phal (voir ci-dessus, note (1153), p. 366).
1178 A peine les Filles de Sainte-Marie furent-elles arrivées à Nevers, qu'une enfant d'une des plus opulentes familles
de la cité demanda avec instance de se joindre à elles. Son père y consentit, et elle entra le jour de l'Immaculée-
Conception. Mlle Gascoing de Meurs n'avait alors que douze ans; on lui en crut près de quatorze, et, ravie de sa ferveur,
la Communauté l'admit à revêtir l'habit religieux. Elle le prit le 21 juin 1621, avec le nom de Gabrielle-Jéronyme.
Alors seulement on s'aperçut qu'il y avait eu méprise pour son âge. Le saint Fondateur averti, «écrivit à la Mère Paule-
Jéronyme qu'il fallait éviter de recevoir des postulantes avant le temps marqué, parce que les longs noviciats ne servent
qu'à ralentir la ferveur.» Tel ne fut pas le cas de la jeune Sœur; ses trois années d'épreuve s'écoulèrent dans la pratique
de toutes les vertus, et après sa Profession (2 juillet 1624), elle avança plus rapidement encore vers la perfection sans
se relâcher jusqu'au terme de sa longue vie de quatre-vingt-trois ans. Deux traits caractérisèrent cette âme: une très
profonde humilité et une ardente dévotion à la Sainte Vierge. De 1643 à 1646, Sœur Gabrielle-Jéronyme gouverna le
Monastère de La Châtre, et de 1650 à 1653, celui de Nevers. (Cf. sa biographie dans l'Année Sainte de la Visitation,
tome IX, p. 151.)
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disproportionnee a leur enfance, elles la haïssent et prennent a contrecœur. Si elles desirent par
apres de prendre l'habit, ce n'est pas par le vray et pur motif que requiert la sainteté de l'Institut.
Et ne s'ensuit pas que ce qui s'est fait pour cette fois [375] il le faille faire pour des autres,
non plus qu'il ne s'ensuit pas qu'un homme s'estant chargé d'une juste charge pour un amy, il doive
se surcharger d'une seconde charge pour un autre amy; et ceux qui le seront aussi de vostre Institut
auront patience jusques a ce que les enfans soyent d'aage convenable. O ma tres chere Fille, que
les cogitations des hommes sont inegales! Que de gens crient quand on reçoit leurs enfans grans,
meurs et rassis, et que de gens les voudroyent donner des le berceau!
…………………………………………………………………………………………………….
1179Pour la fondation de Roan, il en faut escrire a nostre Mere, puisque Roan est au dela de
Paris, et que d'envoyer des filles d'icy-la il auroit bien de la peine1180.
Il seroit a propos de dire ou faire dire doucement a Monseigneur l'Evesque que vous
prendres le P. Lallemant1181 pour faire vos confessions extraordinaires a ce commencement, bien
qu'il suffise pour cela d'en conferer avec vostre Pere spirituel1182.
Je ne pense pas qu'on puisse rien demander pour les Seurs qui vous ont accompagné de
Moulins, pour la rayson que je vous ay escritte, l'autre jour que je respondis a cet article1183.
Il ny a nul mal de demander aux Novices comm'elles se portent; mais quand elles marquent
des maux de nulle consequence, il ne faut pas les attendrir, ains simplement leur dire: Vous seres
bien tost guerie, Dieu aydant; puisque, a la verité, le sexe est merveilleusement enclin a se plaindre
ou a desirer d'estre plaint, et c'est la verité que ces tendretés prennent leur source de paresse et
amour propre. O mon Dieu, que saint Bernard dit une chose estrange et remarquable des Religieux
malades1184; mais je la vous-diray un jour. Vous aves donq fait grandement [376] bien pour la fille
de Moulins trop amie de soy mesme, de l'exercer et occuper exterieurement1185.
Ma chere Fille, il ne faut pas que vous autres qui fondes des Maysons, facies ces pensees,
si vous reviendres ou non, avant quil en soit tems. Or, il n'en est pas tems au commencement de
vostre besoigne. Ecoute, ma fille, et voy, et abbaisse ton aureille, et oublie ta mayson; et le Roy te
desirera, car il est ton Dieu1186: c'est a dire, il te ferareyne, car il est bon. Faites bien ainsy; bandes
tout a fait vostre esprit, avec fidelité et douceur, a une magnamité (sic) et force particuliere.
Serves vous a ce commencement des Seurs domestiques de dehors1187, et ce pendant, elles
demeureront en leur habit modestement seculier. Nous n'avons encor pas pensé sil faudra les
garder un'annee ainsy, mais nous y penserons bien tost.
Vous aves bien fait touchant ce sentiment, puisque il ny avoit nul consentement ni arrest
volontaire; cela doit estre negligé et mesprisé, sinon quil y eut quelque violence tout a fait
extraordinaire.
Je treuve bon l'advis donné a nostre Seur de Lyon1188 sur la reception d'une fille tout a fait
bonne, et nullement fantasque ni bigearre, mais d'un esprit tout a fait grossier. Il n'en faut pas
remplir la mayson, de telles filles, mais prenes celle la; car il se treuve si peu de personnes en ce
sexe, sans fantasie et malice et bigearrerie, que quand on en treuve on les doit recueillir. Je dis ceci
pour ma certes tres chere fille de Chateluz, que j'ayme cordialement. Si quelquefois elle est difficile
1179 Ici commence le texte autographe, dont il reste seulement deux feuillets.
1180 Il est fort probable que la proposition d'un établissement de la Visitation à Rouen venait de la maréchale de Saint-
Géran, originaire de cette ville (voir ci-dessus, note (935), p. 286). La fondation ne fut exécutée qu'en 1630.
1181 Le P. Pierre Lallemant, de la Compagnie de Jésus (voir ibid., note (191), p. 43).
1182 C'était le grand vicaire, M. Piochon, «ecclésiastique distingué par son mérite et sa vertu,» dit l'Histoire de la
Fondation de la Visitation de Nevers.
1183 Epist. MDCCXX.
1184 Epist. CCCXLV. (Cf. tom. X huj. Edit., p. 290.)
1185 Peut-être la Sœur Marie-Hélène de Chastellux (voir ci-dessus, note (1158), p. 368) dont la Sainte écrit, le 9 août,
à la Mère de Monthoux: «C'est une brave fille... il faut supporter ses petites tendretés.» (Lettres, vol. I, p. 456.) Voir
aussi ce que le Saint en dit quelques lignes plus bas.
1186 Ps. XLIV, 11, 12.
1187 Cf. ci-dessus, p. 367.
1188 Sœur Marie-Aimée de Blonay, Assistante-commise au Monastère de Bellecour depuis le départ de la Mère Favre
pour Montferrand.
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26.10 Page 260

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a traitter en ses incommodités corporelles, petit a petit cela passera. L'esprit humain fait tant de
destours sans que nous y pensions, que il ne se peut quil ne face des mines; celuy pourtant qui en
fait le moins est le meilleur. [377]
Il ny a nul danger, ains il est expedient de faire dextrement bien concevoir au Pere spirituel
l'importance de la Constitution De la Clausure1189, toute tiree du sacré Concile de Trente, et de
mesme a Monseigneur l'Evesque.
Il ne faut pas donner promesse a point de fille de la recevoir, sinon en cette façon: Nous
vous recevons en ce qui nous regarde, mais il faut que Monseigneur l'Evesque le treuve bon; et
faire tous-jours conferer avec le Pere spirituel, car il sçaura tous-jours bien les defautz, sil y en a.
Il faut eviter de prester vos Constitutions, en disant qu'en la premiere impresse beaucoup de fautes
se sont glissees, pour la haste de ceux qui les ont transcrittes, que l'on corrige; et que bientost l'on
fera les (sic) reimprimer1190, et que alors vous les communiqueres volontier. Mays les personnes
estant discrettes et de condition, en les advertissant de ce defaut, qui a la verité y est grand, vous
pourres selon vostre prudence les prester.
Il ne se faut pas laisser peindre, si Monseigneur l'Evesque ne le commande ou vostre Pere
spirituel, auquel vous pouves obeir en cela comm'es autres choses indifferentes, c'est a dire qui ne
sont pas contre l'Institut. J'en dis de mesme des autres Seurs, ausquelles il faut pourtant bien donner
des remedes contre la vanité, delaquelle toutefois il ny a pas grand sujet d'estre peint sur de la toile,
puisque il ny en doit point avoir d'estre peint en nostre propre personne a l'image de Dieu.
Il faut, a la verité, bien reverer l'Evesque, establi superieur en l'Eglise par le Sacrement de
son Ordre, c'est a dire par le Saint Esprit, comme dit saint Paul1191, et par la Regle propre et par la
Constitution1192; et Dieu benira vostre obeissance, qui est l'obeissance des Religieux anciens.
Il ne faut pas dire au Confiteor: et beatum Augustinum, par ce que vostre Congregation est
sous le tiltre de Sainte Marie de la Visitation, quoy que sous la Regle de saint Augustin. [378]
Il n'est pas necessaire de donner les Constitutions aux praetendentes qu'en les leur
expliquant. La filosophie des bains de cette bonne fille est gratieuse; en somme, il ny a rien qu'un
esprit foible ne glose; on ne peut remedier a telles nyayseries qu'avec la patience d'inculquer la
verité.
Pour ces filles indisposees a estre de la Congregation, il faudra suivre le conseil des sages
et spirituelz, apres un peu d'essay de correction. En somme, ce sont des choses que le Saint Esprit,
le conseil et l'œil vous feront discerner.
La fille au bras court doit estre receue, si elle n'a pas la cervelle courte1193; car ces
deformités exterieures ne sont rien devant Dieu.
Vostre sentiment est le mien: il ne faut pas recevoir les riches au choeur par ce qu'elles sont
riches, mais par ce qu'elles ont le talent d'y servir; et si elles ne l'ont pas: qu'elles soyent des
Associees si elles sont foibles, ou vielles, ou maladives; si elles sont fortes, qu'on les puisse
employer au service de la Mayson, ou du moins a cooperer aux Domestiques si quelque
consideration les fait mettre parmi les Associees, comme seroit leur delicatesse, ou la bonté de leur
esprit qui les rendra habiles a servir de Superieure ou aux autres offices, hors celuy d'Assistente.
Et les pauvres ne doivent estre rejettees, puisque Nostre Seigneur a tant aymé la pauvreté que, de
tous ses Apostres, la pluspart estoyent pauvres de condition. Mays pourtant il faut avoir quelque
egard aux charges de la Mayson, autant que la sainte prudence et la grandissime confiance en Dieu
le dicteront.
1189 Constit. II.
1190 Cette réimpression se fit seulement en 1622, à Paris, «chez Adrian Tiffaine, rué S. Jacques, à la Samaritaine.»
1191 Act., XX, 28.
1192 Constit. XXVIII.
1193 Fidèle aux conseils du Fondateur, la Mère de Monthoux, qui venait de recevoir une aveugle, aurait encore admis
cette postulante «qui avoit un bras bien plus court que l'autre, si ell'eust suppléé a ce deffaut corporel par les qualités
de l'ame...; mais comme on ne luy trouva pas l'esprit assez bienfait, on fut obligé de la refuser. Ce refus choqua si fort
ses parens, qui vouloient s'en décharger, qu'ils donnèrent bien a souffrir a notre Mère Paule [Jéronyme] par leurs
plaintes, mais elle chercha sa consolation dans le témoignage de sa conscience, et elle trouva la victoire dans sa
patience et sa douceur.» (Circulaire de la Visitation de Blois, 30 novembre 1672.)
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27 Pages 261-270

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27.1 Page 261

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En vostre chapelle, vos fenestres doivent estre voylees [379] affin qu'on ne vous puisse pas
voir distinctement; mays avec cela, il faut ouir le sermon le voyle de vos faces levé.
On peut recevoir Associees les femmes et filles qui ne sçavent pas lire, car tout ce qui est
dit de la lecture s'entend pour celles qui sçavent lire.
Vous aures les Indulgences de tout l'Ordre de Saint Augustin, car le Brief de vostre
institution les vous donne1194; nous prouvoirons de les avoir imprimees.
Ne receves pas legerement les filles: mais selon que la prudence vous enseignera, ou de
differer ou de se haster, faites le; si elles s'en vont ailleurs, Dieu les veuille conduire et en soit loué.
N'entreprenes que doucement, selon la petitesse des moyens que vous verres vous pouvoir
arriver; et pour les choses necessaires Dieu ne vous abandonnera point.
Nostre Seur Marie Aymee de Morville m'escrit une lettre toute sainte et dit qu'elle donnera
tout a fait les xoooo (dix mille) francz a Nevers, sans contredit.
Or sus, ma tres chere Seur, tenes vos yeux sur Dieu et sur son eternité de recompenses, et
sur le cœur de la tressainte Vierge, et marches tous-jours humblement et courageusement. Et a
jamais, sans reserve, je suis tout vostre et
Vostre pere et vostre serviteur,
comme a ma fille Paule Hieronime (sic) et a ma Seur Marie Aymee1195.
Vive Jesus! Amen.
IX novembre 1620.
Salues Monseigneur l'Evesque, vostre Pere spirituel et le P. Lallemant.
Revu sur l'Autographe conservé à la Visitation de Nevers. [380]
MDCCXXVI. A la Mère de Chantal, a Paris (Fragment inédit).
Une lettre toute d'or
Annecy, vers le 9 ou le 10 novembre 16201196.
……………………………………………………………………………………………………..
Nostre bonne Seur Marie Aymee de Morville m'escrit une lettre toute d'or: qu'elle a
deschiré son papier, qu'elle laisse les dix mille francz a Nevers, et qu'elle s'abandonnoit tout a fait
a Dieu et a sa sainte Mere. Voyla pas une ame bien aymee de Dieu?.............................................
Revu sur le texte cité dans une lettre autographe de Ste J.-Fse de Chantal,
conservée à la Visitation de Nevers.
1194 Voir le tome précédent, Appendice I, D, p. 423.
1195 Arrivé à la fin de cette longue lettre, et peut-être interrompu bien des fois, le Saint crut-il terminer un message à
la Mère de Bréchard, qu'il aurait chargée d'un paternel souvenir pour la Mère de Monthoux et la Sœur de Morville?
1196 Sainte Jeanne-Françoise de Chantal cite ces lignes dans une lettre inédite de 1620 à la Sœur de Morville: «Ce très
bon et digne Pere,» lui écrit-elle, «me dit par la derniere que je resue de luy: Nostre bonne Seur Marie Aymee» etc.
Malheureusement, la lettre du Fondateur n'a pas été retrouvée; elle dut probablement partir avec la précédente où déjà
il parle de celle «toute sainte» de la nouvelle Novice. (Voir ci-dessus, p. 380.)
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27.2 Page 262

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MDCCXXVII. A Monseigneur Jean-François de Sales, son
frère, Evêque nommé de Chalcédoine. Profonde douleur du
Saint sur un apostat. Aveuglement étrange de cette âme et
étonnantes contradictions. Sa séparation du monde et de
l'Eglise. Espérance de conversion pour l'Angleterre. Les
effets de cette chute sur l'esprit et le cœur de François de Sales.
Quelle assurance Mgr de Chalcédoine devra donner au
malheureux tombé
Annecy, 21 novembre 1620.
Voyla une lettre que j'ay ouverte sans m'appercevoir qu'elle n'estoit pas pour moy1197. O
Dieu, mon tres cher [381] Frere, que de douleurs a mon ame quand je l'ay leüe! Certes, il est vray
que de ma vie je n'ay eu un si fascheux estonnement. Est il possible que cest esprit se soit ainsy
perdu? Il me disoit tant qu'il ne seroit jamais autre chose qu'enfant de la sainte Eglise Romaine,
quoy qu'il creust que le Pape excedast les bornes de la justice pour estendre celles de son authorité.
Et cependant, apres avoir crié qu'il ne failloit pas que le supreme Pasteur, officier en l'Eglise,
entreprist de delivrer les sujetz de l'obeissance du supreme Prince de la Republique, pour aucun
mal qu'il fist: luy mesme, pour des abus pretendus, se va rendre rebelle a ce supreme Pasteur, ou,
pour parler selon son langage, a tous les Pasteurs de l'Eglise en laquelle il a esté baptizé et nourri!
Luy qui ne treuvoit pas asses de clarté, disoit il, es passages de l'Escriture, pour l'authorité de saint
Pierre sur le reste des Chrestiens, comme s'est il allé ranger sous l'authorité ecclesiastique d'un Roy
duquel l'Escriture n'a jamais authorisé la puissance que pour les choses civiles? S'il treuvoit que le
Pape excedoit les bornes de son pouvoir, entreprenant quelque chose sur le temporel des Princes,
comme ne treuve-il pas que le Roy sous lequel il est allé vivre excede les limites de son authorité,
entreprenant sur le spirituel?
Est il possible que ce qui ramena et maintint saint Augustin en l'Eglise n'aye peu retenir
cest esprit? Est il possible que la reverence de l'antiquité et l'abjection de la nouveauté n'aye point
eu le pouvoir de l'arrester? Est il possible qu'il aye creu que l'Eglise ayt tant erré, et que les
huguenotz ou Anglo-calvinistes ayent si heureusement rencontré par tout la verité, qu'ilz n'ayent
point erré en l'intelligence de l'Escriture? D'ou peut estre venue cette si universelle connoissance
du sens de l'Escriture en ces testes-la, es matieres de nos controverses, que par tout ilz ayent rayson,
et nous tort par tout, en sorte qu'il nous faille quitter pour adherer a eux?
Helas! mon cher Frere, vous vous appercevres bien du trouble que j'ay en mon esprit, quand
vous verres que je vous dis tout ceci. La modestie avec laquelle il traitte [382] en vous escrivant,
l'amitié laquelle il vous demande avec tant d'affection, et mesme avec sousmission, m'a fait une
grande playe de condoleance en mon ame, qui ne peut s'accoiser de voir perir celle de cest ami.
J'estois a la veille de luy faire faire place ici, et monsieur Jantet1198 avoit charge de traitter avec luy
pour cela1199; et maintenant, le voyla separé de tout le reste du monde par la mer, et de l'Eglise par
le schisme et l'erreur! Dieu neanmoins tirera sa gloire de ce peché.
J'ay une inclination particuliere a cette grande Isle et a son Roy, et en recommande
incessamment la conversion a la divine Majesté, mais avec confiance que je seray exaucé, avec
tant d'ames qui souspirent pour cet effect; et des-ormais, encor prieray je plus ardemment, ce me
semble, pour la consideration de cette ame-la. O mon tres cher Frere, bienheureux sont les enfans
1197 Une lettre du chanoine Denis de Granier adressée à Jean-François de Sales. (Voir tome XVII, note (1093), p. 325,
et la lettre suivante.)
1198 Secrétaire de M«r Camus, alors à Paris. (Voir ci-dessus, note (209), p. 47.)
1199 Cf. ibid., pp. 220, 224.
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27.3 Page 263

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de la sainte Eglise en laquelle sont trespassés tous les enfans de Dieu. Je vous asseure que mon
cœur a une continuelle palpitation extraordinaire pour cette cheute, et un nouveau courage de servir
mieux l'Eglise du Dieu vivant et le Dieu vivant de l'Eglise.
Il faut cependant tenir secrette cette miserable nouvelle, qui ne peut estre que trop tost
respandue pour tant de parens et amis de celuy qui la nous donne. Que si vous luy escrives, selon
qu'il me semble vous y inviter, par la voye de monsieur Gabaleon1200, asseures le que toutes les
eaux de la mer d'Angleterre n'esteindront jamais les flammes de ma dilection1201, tandis qu'il me
pourra rester quelque esperance de son retour a l'Eglise et a la voye de son salut eternel.
Mon Frere, quand vous seres consacré, faites le moy sçavoir, et me recommandes a la
misericorde de Nostre Seigneur, qui soit a jamais l'unique esperance et amour de nos ames. Amen.
[383]
1202Au P. D. Juste, mille salutations; a la signora Donna Genevra, ma chere fille; a monsieur
Viboz1203, que je remercieray au premier jour.
Annessi, le XXI novembre 1620.
A Monsieur
Monsieur l'Evesque de Chalcedoine.
Revu sur le texte inséré dans le Ier Procès de Canonisation.
MDCCXXVIII. Au même1204. Quantité de lettres au retour d'un
voyage. Dispositions du Prieur de Rumilly toutes favorables
à l'établissement des Pères de l'Oratoire. L'élection de M. du
Châtelard au doyenné de Notre-Dame. Quelqu'un que le
Saint voudrait servir de son propre sang. Nouvelles de
famille. Tentative pour le retour d'une âme à la foi. A qui
appartient le Royaume des cieux.
Annecy, 21 novembre 1620.
J'ay receu tout a coup cinq de vos lettres ou billetz, mon tres cher Frere, a mon retour en
cette ville du voyage que j'ay fait a Six, a Viu, a Melan, a Merens, pour diverses affaires1205. Toutes
les nouvelles que vous me donnes sont bonnes; Dieu nous face jouir des effectz entiers de tant de
bonnes volontés qu'il inspire a nostre bon Prince1206.
O que l'establissement des Peres de l'Oratoire reuscira heureusement a Thonon et a
Rumilly1207, et comme Dieu [384] le favorisera! car voyla M. le Prieur dudit lieu1208 qui, ce soir,
1200 Jean-Baptiste Gabaleone, général des postes de Savoie. (Voir tome XII, note (524), p. 225.) En 1618, il était à
Paris lors de l'ambassade du cardinal Maurice.
1201 Cf. Cant., ult., 7.
1202 Ce dernier alinéa est inédit. Le texte que nous donnons est inséré dans le Ier Procès de Béatification (Script.
compuls.); mais quelques erreurs du copiste ont été corrigées d'après l'édition de 1626.
1203 Claude-Amédée Vibod, secrétaire du duc de Savoie. (Voir tome XVII, note (418), p. 110.)
1204 Le Saint n'a pas mis d'adresse sur cette lettre, mais sur la précédente, avec laquelle elle partait, comme on peut le
voir à l'avant-dernier alinéa, p. 386. Il est étrange que les éditeurs Datta, Vivès et Migne aient désigné le président
Favre pour destinataire.
1205 Voir ci-dessus, Lettre MDCCXXIII, et note (1171), p. 372.
1206 Victor-Amédée.
1207 Voir ci-dessus, Lettres MDCLXXXI, MDCCIX, et note (1140), p. 358.
1208 Bernard de Grailly (voir ci-dessus, note (1161), p. 370).
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m'est venu dire qu'en le recompensant, il donnera son prieuré pour les intentions de Son Altesse.
Et il ne sera nullement malaysé de le recompenser sur Chindrieu1209, affin que d'abord les Peres de
l'Oratoire soyent logés, et dans l'eglise et dans le prieuré, a Rumilly. Or il ne sçait pas pourtant le
projet, sinon par conjecture quil tire de l'entree que fit, il y a dix jours, monsieur de Saunaz en
l'Oratoire de Lyon, d'ou il m'a escrit avec beaucoup de tesmoignage de consolation.
Pour Ripaille, je ne pense pas que Son Altesse y puisse loger plus a propos aucuns
Religieux que les Chartreux, en se reservant ce quil luy plaira pour y bastir son palais1210.
Au reste, en fin M. du Chatelard est Doyen, avec mille contradictions et avec autant de
promesses d'y faire des merveilles, et a moy de faire tout ce que je luy conseilleray1211.
Le bon M. Buccio m'a prié de le vous recommander en son affaire, que son frere vous
dira1212, et qui est, ce me semble, grandement favorable. Madame de la Flechere de Fossigni1213
m'a aussi prié de vous recommander son filz, auquel elle dit que vous aves des-ja fait bien des
[385] faveurs. Certes, tandis que sa praetention durera et quil y aura apparence qu'elle doive
reuscir, non seulement je ne voudrois luy nuire, mais je voudrois le servir de mon sang propre; car,
comme sa mere est ma tres chere fille, je le cheris aussi comme mon filz1214.
Voyla la response de M. l'Abbé, qui a maintenant dit sa Messe avec beaucoup de
devotion1215. Mon frere et ma seur de Cornillon1216 vous saluent cherement, et vous prient de les
excuser silz ne vous escrivent si souvent. Nostre Seur Marie est toute guerie et reprend grandement
son bon visage1217.
Je ne sçai plus que vous dire, mon tres cher Frere, pour cette fois, ayant le cœur si oppressé
de douleur de la perte de ce miserable qui vous escrit1218, que je confesse de n'avoir jamais eu tant
de sensible desplaysir que j'en ay eu; mays par ce que je sens encor un peu d'esperance en Dieu
pour son retour, je vous escris la lettre ci jointe1219, affin que vous la luy envoyïes. Qui sçait si,
conservant un peu de credit sur son esprit par cette voye, Dieu s'en servira pour le retirer? Mays je
ne sçai pourtant que vous dire la dessus, sinon que bienheureux sont les humbles, car a eux
appartient le Royaume des cieux1220. Ce miserable ne fut jamais que vanité.
Or sus, Dieu soit a jamais vostre tout, mon tres cher Frere.
Le 21 novembre 1620.
1209 Prieuré que M. de Sonnaz songeait à céder aux Oratoriens de Rumilly. (Voir ibid., notes (558), p. 160, et (1140),
p. 358.)
1210 Peut-être Charles-Emmanuel voulait-il seulement restaurer le château d'Amédée VIII (voir tome XIII, note (936),
p. 346); il ne semble pas qu'il ait donné suite à ce projet. Ripaille fut remis aux Chartreux, comme l'Evêque de Genève
le désirait depuis longtemps. (Voir tomes XI, note (563), p. 252; XVI, Lettre CMLXXIV, p. 182, et note (578), p. 183;
XVIII, Lettre MCDI, p. 169.)
1211 Pierre-François de Rossillon, seigneur du Châtelard, qui remplaça Benoît de Chevron comme doyen de la
collégiale de Notre-Dame, avait été élu le jour précédent par la pluralité des voix, et le lendemain (21 novembre),
«entre onze heures et midy,» il prit «possession du decanat, avec toutes les ceremonies a ce accoustumees.» (Turin,
Archiv. de l'Etat, Benefices dela les Monts, N° 6, Paquet 1, Actes cap. du Chapitre de N. D. d'Annecy.)
1212 Frère, ou tout au moins proche parent de Philippe Buccio (voir tome XII, note (21), p. 5), Antoine-Pie Buccio de
Saint-Cergues avait épousé Louise de Bellegarde. Ses enfants héritèrent, en 1626, de Philibert-Nicolas de Bellegarde,
seigneur de Vigny, mari de Gasparde de Sales.
1213 Madeleine de Saint-Michel, veuve de François de la Fléchère, seigneur de Rovorée. (Voir tome XI, note (456), p.
199.)
1214 Nous ne savons quelle était alors la «praetention» de François-Melchior de la Flèchère, chevalier des saints
Maurice et Lazare. Par contrat dotal du 21 août 1627, il épousa Jeanne-Marie de Mareschal-Duyn, et fut gentilhomme
et écuyer de Son Altesse, capitaine d'une compagnie de l'escadron de Savoie et commandeur de Vions. Son testament
est du 38 février 1653.
1215 L'Abbé de Chézery, Gaspard Perrucard de Ballon (voir plus haut, note (303), p. 78), fut ordonné prêtre le 19
septembre 1620. (R. E.)
1216 Au retour de Sixt, le Saint s'était arrêté au château de Meyrens, chez sa sœur Gasparde et son beau-frère Melchior
de Cornillon. (Voir tomes XIV, note (468), p. 158, et XVII, note (879), p. 254.)
1217 Marie Humbert qui avait été malade peu après son entrée à la Visitation d'Annecy. (Voir ci-dessus, note (749), p.
229.)
1218 Denis de Granier (voir la lettre précédente).
1219 Epist. praeced.
1220 Matt., V, 3.
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Mon tres cher Frere, je vous prie de ne point encor dire la fascheuse nouvelle de la lettre ci
jointe, laquelle [386] vous garderes, car il me semble a propos de ne la pas perdre. Certes, je suis
tout estonné, car il ny a que deux jours que je la sçai.
Revu sur l'Autographe conservé à la Visitation de Chambéry.
MDCCXXIX. A la Mère de Chantal, A Paris. Affliction
profonde, mélangée d'espérance. Causes de la chute de M. de
Granier. Le jugement, «partie rare.» Quelle consolation le
Fondateur reçoit de sa Congrégation. Le tardif, mais beau
fruit du dattier
Annecy, 22 novembre1221 1620.
Je suis grandement affligé, ma tres chere Mere, de la perte spirituelle de cet amy qui a tant
demeuré avec moy. O la vanité de l'esprit humain tandis qu'il se fie en soy mesme! O que les
hommes sont vains quand ilz se croyent eux mesmes! Il est expedient que scandale arrive, mais
malheur a celuy par qui il arrive1222. Ce jeune homme [ne s'est jamais voulu gouverner a mon gré,
tous-jours il a] repoussé le joug tres doux de Nostre Seigneur. [Or sus, je ne desespere pas] de le
voir un jour repasser la mer et venir au port, [mais je pleure sur luy de tout mon cœur.]
Il escrit luy mesme sa perte a [mon frere1223,] avec [387] tant de respect, de sousmission et
de courtoysie que rien plus, et avec ces termes: «Je me separe de la communion de l'Eglise pour
me retirer en Angleterre, ou Dieu,» dit il, «m'appelle.» Qui ne gemiroit sur ce mot la: «Je me separe
de la communion de l'Eglise»? puisque se separer de l'Eglise, c'est se separer de Dieu. Laisser
l'Eglise, o Dieu, quelle frenesie! Mais la chair et le sang le luy ont persuadé. La curiosité,
l'instabilité, la liberté, la presomption de son esprit, fondee sur le talent naturel de bien et
promptement parler, avec la sensualité, en fin l'ont perdu. En somme, le jugement est une partie
rare, tous-jours accompaignee de meureté et d'humilité. Or sus, peut estre n'en sçaves vous rien
encor: s'il est ainsy, n'en sçaches donq rien, ma tres chere Mere, et demeures en paix.
Que de consolations, au contraire, de sçavoir que nostre petite Congregation se multiplie
en bonnes ames; que ma tous-jours plus chere fille de Port Royal1224 tient son cœur haut eslevé en
Dieu; que ma chere dame de Montigni souffre en patience sa maladie1225. Ma Mere, resalues la de
ma part cherement, et luy faites sçavoir que je la cheris tres cordialement, et la croix sur laquelle
1221 La première édition donne 22 décembre; nous croyons à une erreur de lecture, car il ne se peut que l'Evêque de
Genève apprenant en novembre la chute du chanoine de Granier, ait attendu un mois entier pour en parlera la Sainte;
ses paroles, au reste, indiquent un fait tout récent.
La Mère de Chantal cite, dans sa déposition, un fragment de cette lettre, avec quelques phrases qui ne se
trouvent pas dans le texte de l'édition de 1626. Nous les ajoutons entre [ ]. Le commencement a certainement été
tronqué; il est impossible que la première phrase soit un début. A la fin, les premiers éditeurs ajoutent un passage
coupé dans la lettre du 26 février 1620 (pp. 153, II. 14, 15; 154, II. 1-9), suivi de deux lignes, prises à celle du 23 avril
1622. La finale, que nous laissons ici pour ne savoir où la placer, semble avoir été écrite un 2 février, fête de la
Purification.
1222 Matt., XVIII, 7.
1223 Voir ci-dessus, pp. 381, 386.
1224 La Mère Angélique Arnauld.
1225 Mme de Montigny fut une des bienfaitrices du 1er Monastère de la Visitation de Paris, et plus encore du second
qu'elle assista journellement dans ses commencements. Elle s'appelait Louise Pithou, était fille de Pierre Pithou,
seigneur de Savoye, et de Catherine Palluau, et avait épousé Pierre Lhuillier, seigneur de Montigny et de Saint-Félix.
Cette pieuse dame mourut en 1657 sans laisser d'enfants. (Moreri, 1740, tomes V, VII.)
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elle est. Je salue tres parfaitement madame N.1226, a laquelle je dis par vostre entremise, n'ayant
nul loysir, que sa retraitte est comme une datte, qui en fin produira une belle palme de triomphe,
mais peut estre seulement d'icy a cent heures, ou a cent jours, ou cent semaines, ou cent moys; et
les contradictions qu'elle a eues serviront a cela.
Dieu nous face de plus en plus abonder en la pureté et simplicité de sa dilection, et en la
fermeté et sincerité de celle du prochain. [388]
Or sus, [Dieu tire sa gloire de ceux qui l'abandonnent. Il faut finir] en vous asseurant, ma
tres chere Mere, que par la cheute de ce jeune homme, Dieu m'a gratifié de nouvelles douceurs,
suavités et lumieres spirituelles, pour me faire tant plus admirer l'excellence de la foy catholique.
………………………………………………………………………………………………….......
Bon soir, ma tres chere Mere. 1227Jesus Christ soit a jamais nostre jour en l'eternité et nostre
cierge ardent en la vie presente. Amen.
Ce 22………1620.
FRANÇS, E. de Geneve.
MDCCXXX. A la Mère Thérése de Jésus, prieure du Carmel de
Lyon1228 (Fragment). Une vocation divine pour l'Oratoire.
Troubles au Carmel. Un pourquoi qui serait long à dire.
Annecy, 24 novembre 1620.
………………………………………………………………………………………………….......
C'est Dieu, ma tres chere Seur, qui a conduit M. de Saunaza l'Oratoire1229, et je l'en remercie
profondement, [389] estimant que ce jeune gentilhomme y servira tres fidelement la gloire de son
nom.
J'ay sceu le petit trouble que quelques uns de vos Monasteres ont fait1230. Helas! ilz ne
sçavent rien de ce qu'ilz desirent, ni peut estre ce qu'ilz disent. Qui est bien, s'y doit tenir de pres.
En Italie, on a conneu manifestement que les Monasteres de filles n'estoyent nullement si bien sous
la conduitte des Peres de leur Ordre que sous les prestres et autres Ordinaires; le pourquoy est long
a dire, mays il est manifeste.
………………………………………………………………………………………………….......
24 novembre 1620.
A la Mere Therese de Jesus,
Prieure des Carmelites
de Lyon.
Revu sur une ancienne copie conservée à Paris, Archives Nationales (M. 234).
1226 Peut-être Hélène Lhuillier de Frouville, entrée depuis quelques mois à la Visitation de Paris, et dont la vocation
était très combattue par son père. (Cf. ci dessus, note (1030), p. 317.)
1227 Voir ci-dessus, note (1221), p. 387.
1228 La Mère Thérèse de Jésus Prud'homme, trente-septième professe du couvent de l'Incarnation, à Paris, où elle
prononça ses vœux en 1610, avait été envoyée en qualité de Sous-prieure (29 août 1616) à la fondation du Carmel de
Lyon. Elle en devint Prieure après le départ de la Mère Madeleine de Saint-Joseph, en juillet 1617, et maintint toujours
sa Communauté dans l'obéissance aux Supérieurs, ce qui lui valut d'avoir sa part de leurs épreuves. Quand elle eut
terminé sa supériorité à Lyon, la Mère Thérèse de Jésus alla fonder le Carmel de Marseille (1623); puis celui d'Aix en
1625, et enfin le couvent d'Arles en 1632. Revenue à Lyon, elle y mourut en 1648. (Archives du Ier Monastère du
Carmel de Paris et Chroniques de l'Ordre des Carmélites, tomes III, IV, passim.)
1229 Voir ci-dessus, note (1140), p. 358, et p. 385.
1230 Au sujet du gouvernement des Maisons du Carmel. (Voir ci-dessus, Lettre MDCCVII et la note qui l'accompagne,
et ci-après, Lettres MDCCXXXIX, MDCCXL.)
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27.7 Page 267

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MDCCXXXI. A Madame de Granieu1231. Les matériaux des
bâtiments célestes «au quartier des hommes.» Ce que les
Anges pourraient nous envier. Transformer l'infirmité en
oraison. Comment Notre-Seigneur nous fait souvent le plus
de bien. — Un cœur faible et assoupi, mais non point infidèle.
Annecy, 24 novembre 1620.
Or sus, ma tres chere Fille, vous voyla tous-jours aupres de la Croix, parmi les tribulations,
en la maladie de monsieur vostre cher mary. O que ces pierres qui semblent si dures sont
pretieuses! Tous les palais de la Hierusalem celeste, si brillans, si beaux, si aymables, sont faitz de
[390] ces materiaux, au moins au quartier des hommes; car en celuy des Anges les bastimens sont
d'autre sorte, mais aussi ne sont ilz pas si excellens. Et si l'envie pouvoit regner au royaume de
l'amour eternel, les Anges envieroyent aux hommes deux excellences qui consistent en deux
souffrances: l'une est celle que Nostre Seigneur a enduree en la croix pour nous, et non pour eux,
du moins si entierement; l'autre est celle que les hommes endurent pour Nostre Seigneur: la
souffrance de Dieu pour l'homme, la souffrance de l'homme pour Dieu.
Ma chere Fille, si vous ne faites pas des grandes oraysons parmi vos infirmités et celles de
monsieur vostre mary, faites que vostre infirmité soit une orayson elle mesme, en l'offrant a Celuy
qui a tant aymé nos infirmités, qu'au jour de ses noces et de la res-jouissance de son cœur, comme
dit l'Amante sacree1232, il s'en couronna et glorifia: faites ainsy.
Ne vous assujettissés pas a un mesme confesseur, tandis que, pour gaigner tems, il sera
requis d'aller au premier rencontre.
Je suis marry que madame de N. soit ainsy incommodee; mais puisqu'elle ayme Dieu, tout
luy reviendra a bonheur1233. Il faut laisser a nostre doux Seigneur la tres aymable disposition, par
laquelle il nous fait souvent plus de bien par les travaux et afflictions que par le bonheur et
consolation.
Ma tres chere Fille, ne me dites pas tant [de mal] de vostre cœur, car je l'ayme tant que je
ne veux point qu'on parle ainsy. Il n'est pas infidele, ma tres chere Fille, mays il est un peu foible
quelquefois, et un peu assoupi. Au reste, il veut estre tout a Dieu, je le sçai bien, et aspire a la
perfection de l'amour celeste. Dieu donq le benisse a jamais, ce cœur de ma tres chere Fille, et luy
face la grace d'estre de plus en plus humble.
Dieu soit beni.
FRANÇS, E. de Geneve.
Le 24 novembre 1620. [391]
1231 D'après l'édition de 1626, la destinataire de cette lettre est la même que celle de la lettre du 17 février 1620,
sûrement adressée à Mme de Granieu. Au reste, le sujet et le ton de ces lignes la désignent suffisamment,
1232 Cant., III, ult.
1233 Cf. Rom., VIII, 28.
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MDCCXXXII. A M. Amédée Berchat, Curé de Notre-Dame du
Chastel1234 (Inédite). Délégation pour enquête canonique.
Annecy, décembre 16201235.
Monsieur Berchat,
Ayant sceu que la Pernon Bottollier a donné l'enfant qu'ell'a fait a François de Levaut, je
vous commetz par ce billet pour oüir ladite Pernon et ledit François sur ce cas; et leurs responses
ouÿes, vous m'en envoyeres l'information et l'acte du baptesme de l'enfant.
Et m'asseurant de vostre fidellité et diligence a cela, je prie Dieu qu'il vous donne ses plus
desirables benedictions, et suis
Vostre humble, tres affectionné confrere,
FRANÇS, E. de Geneve.
Revu sur l'Autographe conservé à Turin, Archives de l'Etat. [392]
MDCCXXXIII. A Monseigneur Jean-François de Sales, son
frère, Evêque nommé de Chalcedoine. Désagrément causé par
les neiges. Un service à rendre à M. de la Pierre.
Métamorphose soudaine du sieur Bonfils. Pourquoi l'Evêque
de Genève cèle le plus qu'il peut la nouvelle d'une apostasie.
Bonne mine et bon jeu. Maladies, mariage et mort.
Témoignages d'honneur et d'affection donnés par le Saint au
nouvel Evêque de Chalcédoine
Annecy, 8 décembre 1620.
L'aspreté du tems et la grandeur des neiges ont retenu comme par vive force le bon M.
l'Abbé [jusques] a present1236, mon tres cher Frere; et ce qui me desplait en ceci, c'est qu'il
n'arrivera pas asses tost pour vous donner la commodité de nous faire jouir de vostre chere presence
pour ces premieres festes1237. Mais il n'y a remede: il faut croire que, Nostre Seigneur le voulant
ainsy, ce sera le mieux.
M. de la Pierre1238 n'a sceu comprendre que Son Altesse eust quelque degoust de luy; il dit
qu'il sçait bien qu'elle l'ayme et sçaura bon gré a qui luy presentera sa lettre, qu'il vous prie de luy
1234 Amédée Berchat fut ordonné prêtre le 22 décembre 1601. Successivement prébendé à Sallanches, curé de Saint-
Gervais, il était, en 1620, curé de Notre-Dame du Chastel de Cordon. Il meurt en juin 1630 à Vallorcine, après avoir
été trois ans pasteur de cette paroisse. (R. E.)
1235 La réponse de M. Berchat étant du 27 décembre 1620, la date que nous donnons est juste. On verra aux Opuscules
la sentence rendue par le Saint, et avec quelle miséricorde il adoucit celle de son procureur fiscal, à qui il avait ordonné
de soumettre la supplique du coupable loyal et repentant.
1236 Hérissant (tome IV, p. 536) écrit: «le bon M. l'Abbé Nesques a présent.» Notre leçon est évidemment la vraie, et
il s'agit de l'Abbé de Chézery (voir ci-dessus, note (1215), p. 386), qui s'en allait faire son service d'aumônier auprès
de la princesse de Piémont.
1237 On croyait à Annecy que le sacre de Jean-François avait eu lieu, et on attendait le nouvel Evêque pour les fêtes de
Noël.
1238 François de Macognin, seigneur de la Pierre. (Voir le tome précédent, note (135), p. 23.)
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27.9 Page 269

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faire tenir seurement; et se promet que, si vous en parles a M. Le Grand1239, il se [393] chargera
volontier de le faire, et qu'en cela il n'y a point de hasard. Que si cela se peut faire bonnement, ce
me seroit un grand playsir de le contenter. Il en escrit a M. le Collateral1240, affin qu'il en confere
avec vous.
J'escris a M. le Comte de Montmayeur1241, pour le remercier du soin qu'il eut de me faire
tenir une de vos lettres tandis que j'estois en Fossigni. J'escris a M. Vibo, me res-jouissant de le
voir au service de Madame, nostre Maistresse1242.
Je vous pourrois dire un monde de nouvelles. Tenés aujourd'huy,1243……..pour toutes
asseurances de la triomphante sortie de M. Bonfilz, qui est a mesme tems establi General des
Finances, avec un si extreme credit que nul ne pourra plus vivre que par sa bonne grace1244.
Toutefois, plusieurs ne veulent croire cette si soudaine metamorphose; et, quant a moy, je ne diray
sinon: peut estre qu'il est vray, et peut estre que non.
C'est une merveille qu'en ce païs on ne sçait encor point la deplorable adventure de M. de
[Granier1245]; car, quant a moy, je la cele le plus que je puis, affin de n'infecter point l'air d'une si
puante nouvelle. Quelle grace Dieu luy a faite de l'avoir reduit, par sa providence, dans la prison!
Mes freres sont tous-jours apres a faire descombrer la [394] mine de laquelle plusieurs ont
une grande opinion1246; mais Dupra n'en peut rire, craignant qu'une si bonne mine ne soit pas
accompaignee de bon jeu1247.
M. le Prevost1248 eut un rude accident de fievre avant hier; mais ce n'a esté qu'une fievre
ephemeride, Dieu mercy. M. Perret est grandement malade; et s'il mouroit, il y auroit danger qu'on
impetrast sa place a Rome, comme il l'impetra luy mesme1249.
Ceux de Rumilly et le Curé1250 ont receu leurs lettres avec toute obeissance religieuse; que
bien tost on leur face le bien pour lequel on retarde.
La Seur Marie se porte tres bien, avec grand playsir d'avoir l'habit1251.
1239 Est-ce un nom patronymique ou un titre attaché à une charge? Il y avait une famille Legrand alliée aux Perrucard
de Ballon. D'autre part, le grand Ecuyer du duc de Savoie était appelé ordinairement «Monseigneur le Grand»; mais
il n'est pas possible de désigner sûrement le personnage qui portait ce titre en 1620, car les ouvrages de Galli et Carutti
(Cariche del Piemonte) ne le mentionnent pas; plusieurs volumes manuscrits et autres documents consultés aux
Archives de Turin et à la Bibliothèque Royale n'ont fourni aucun renseignement. On sait seulement qu'Emmanuel-
Philibert Roero, comte de Revigliasco, né vers 1574 de Lucio-Silla Roero et de Diane Provana, fut nommé en 1603
premier écuyer de Son Altesse. Serait-il devenu plus tard grand Ecuyer, comme son aïeulet son père? Celui-ci était
déjà mort en décembre 1603.
1240 Barthélemy Flocard, alors en Piémont. (Voir ci-dessus, Lettres MDCCXVIII, MDCCXIX.)
1241 Le testament de Melchior-Théodore, comte de Montmayeur, est du 23 janvier 1618; si la mort suivit avant le 8
décembre 1620, le comte de Montmayeur dont parle ici le Saint, est le fils du précédent et de sa femme Claire-Marie
de Rye, François-Gaspard, dernier héritier du nom, car il mourut en Piémont, sans postérité, avant 1645.
1242 Il s'agit sans doute du fils de Claude-Amédée Vibod, secrétaire de Charles-Emmanuel (voir tome XVII, note (418),
p. 110), Maurice, qui fut secrétaire de Christine, et devint en 1651 conseiller et secrétaire d'Etat et des Finances du
duc de Savoie. Il reçut en 1635 le titre de comte de Pontedassio. (Turin, Archiv. de l'Etat, Registres du contrôle des
Finances.)
1243 Nous substituons des points de suspension à la leçon donnée par Hérissant, «jour de la feste de cette ville,» qui
nous paraît fausse.
1244 Le trésorier général Horace Bonfils avait été arrêté par l'ordre de Charles-Emmanuel le 9 septembre précèdent.
(Lettre du président Favre au duc de Savoie; cf. ci-dessus, note (766), p. 234.) Il réussit à lever les graves soupçons
qui planaient sur lui, et retrouva toute la faveur de son prince.
1245 Son apostasie (voir ci-dessus, Lettre MDCCXXVII).
1246 Voir ci-dessus, note (793), p. 241.
1247 Claude Dupra, de La Roche, serviteur de Louis de Sales, est mentionné comme témoin dans trois pièces concernant
un accord fait en août 1623 entre le baron de Thorens et le sieur de Boëge de Conflans. (Archives de la Visitation
d'Annecy, Collection J. Vuÿ.)
1248 Le cousin-germain du Saint, Louis de Sales, prévôt du Chapitre de la cathédrale.
1249 Sa prébende de Contamine. (Voir ci-dessus, Lettre MDCXCIX, et note (1060), p. 328.)
1250 Jean Viretet le clergé de Rumilly. (Voir ibid., Lettre MDCCXXII, p. 370.)
1251 La Sœur Marie Humbert était seulement, à ce moment-là, admise à recevoir l'habit qu'elle ne revêtit que le 28
décembre. (Voir ibid., note (749), p. 229.)
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27.10 Page 270

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Le bon M. l'Abbé1252 nous oblige grandement a l'aymer, a l'estimer, a le servir, pour
l'extreme affection qu'il nous tesmoigne avec toute sorte de confiance. C'est pourquoy je le vous
recommande de tout mon cœur, et vous prie de me tenir en la bonne grace de madame de
Sarsenas1253 qu'on m'a dit estre grosse, dont je me res-jouis grandement.
Ce que M. de Vallon1254 vous a escrit touchant le mariage de M. de Charmoysi avec la fille
de M. de Montmayeur, m'empeschera de vous en faire un plus long recit1255. [395]
M. l'Abbé de Six est en fin trespassé1256, et on m'a dit que M. l'Esleu ne demeure pas sans
affaires avec les Religieux qui ne le veulent pasreconnoistre, parce qu'ilz croyent qu'il n'a pas ses
permissions de Rome1257.
Je ne vous entretiendray pas davantage, ains me rapportant a la suffisance de M. le porteur,
je vous salue tres humblement, et, si vous estes consacré, je vous bayse les mains et la cime de
vostre teste parfumee de l'onction sacree, que je supplie Nostre Seigneur de faire saintement
descouler jusques a la robbe de cette Eglise, et que la rosee de vostre Hermon1258 soit heureusement
transportee jusques en nostre sein. C'est aujourd'huy le jour anniversaire de mon sacre, par lequel
je commence la dix neufviesme annee.
Je suis sans fin,
Vostre tres humble frere et serviteur,
FRANÇS, E. de Geneve.
A nostre M. le Collateral que luy diray je? Il sçaura que je suis parfaitement sien.
8 decembre 1620.
A Monseigneur l'Evesque de Chalcedoine,
premier Aumosnier de Madame. [396]
1252 Le porteur de cette lettre, l'Abbé de Chézery.
1253 Anne-Violante Parpaglia, dame de Cercenasco (voir ci-dessus, note (775), p. 235).
1254 Jacques de Gex, seigneur de Vallon.
1255 Est-ce Jeanne-Marie de Montmayeur, sœur de François-Gaspard (voir note (1241) de la page précédente), ou
Philiberte, fille de Claude-Etienne de Montmayeur-la-Gorge et d'Etiennette de Poypon, que Henri de Charmoisy
voulait épouser? Quoi qu'il en soit, le projet n'eut pas de suite. (Voir ci-dessus, note (332), p. 83.)
1256 Peu après le retour de Sixt du saint Evêque (voir ci dessus, note (1171), p. 372), Jacques de Mouxy, se sentant
près de mourir, témoigna le désir de revoir son dévoué Pasteur. Immédiatement celui-ci partit, malgré la mauvaise
saison, donna les Sacrements à l'Abbé, et l'assista jusqu'à son dernier soupir (4 décembre). Voir tome XIII, note (462),
p. 169.
1257 «Monsieur l'Esleu,» disait François de Sales à Humbert de Mouxy, lors de son premier séjour à Sixt en novembre,
«Monsieur l'Esleu, prenes garde si vous aves bien les provisions de l'abbaye et si tout est disposé comme il faut, car
Monsieur vostre oncle ne passerat pas ces deux lunes en vie.» (Dépos. d'Humbert de Mouxy, Process. remiss. Gebenn.
(I), ad art. 27.) Il prévoyait les «affaires avec les Religieux» qu'aurait à débrouiller le successeur de Jacques de Mouxy.
Celui-ci avait passé procuration le 37 septembre 1606, pour obtenir du Pape l'autorisation de prendre comme
coadjuteur le fils naturel de son frère Jean-François, Humbert, prieur commendataire de Grésy en Genevois. Les Bulles
furent données à l'«Esleu» le 6 des ides de mai 1609. L'année suivante, en trois jours (1-3 mai), l'Evêque de Genève
lui conférait les Ordres majeurs. Après la mort de son oncle, le nouvel Abbé restaure l'abbaye et défend ses droits
contre Sigismond Carron. Il meurt en 1647 (R. E.), âgé d'environ soixante-quatorze ans, ayant résigné son prieuré de
Grésy, et reçu pour coadjuteur de son abbaye de Sixt, Pierre de Bellegarde. (Voir de Loche, Hist. de Grésy-sur-Aix,
et Mém. de l'Acad. Salés., 1900, tome XXIII, p. 235.)
1258 Ps. CXXXII, 2, 3.
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28 Pages 271-280

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MDCCXXXIV. Au Président Jean-Georges Crespin1259 (Inédite).
François de Sales assure le destinataire de son souvenir et de son
dévouement. Ermite qui saura bientôt toutes les nouvelles de
la cour.
Annecy, 9 décembre 1620.
Monsieur,
Je prise trop l'honneur de vivre en vostre souvenance, pour laisser partir monsieur de
Barraux1260 sans luy donner ces quatre motz de tesmoignage de celle que j'ay de vous, laquelle est
tous-jours accompaignee d'un extreme desir de vous rendre service, si mon bonheur m'en laissoit
arriver quelqu'occasion. Car, de vous dire des nouvelles, ce seroit hors de propos, puisque le
porteur en sçait bien plus que moy, qui, presque aussi solitaire qu'un hermite et plus esloigné des
affaires du monde que plusieurs hermites, ne sçai rien de tout cela que ce qu'on ne peut ignorer.
Mon frere Monsieur de Chalcedoine sera icy dans dix jours, ainsy qu'il m'escrit1261, et lors il me
sera force d'apprendre toutes celles qui courent en nostre cour, ou je ne pense point d'aller qu'apres
Pasques1262.
Et ce pendant, Monsieur, je vous supplie tres humblement de cooperer a l'inclination que
Monseigneur de Montpellier1263 a de m'aymer, et de continuer a me croire, comme je suis,
Monsieur,
Vostre tres humble serviteur,
FRANÇS, E. de Geneve.
IX decembre 1620, Annessi.
A Monsieur le President Crespin.
Revu sur une ancienne copie conservée à la Visitation de Turin. [397]
MDCCXXXV. A Madame Bellot1264. Prière à la destinataire de
donner les ordres nécessaires pour le bon succès d'une œuvre de
charité.
Annecy, 10 décembre 1620.
Madamoyselle ma tres chere Fille,
Puisque vous aves treuvé bon, par l'advis mesme de monsieur l'Aumosnier vostre frere1265,
que la charité que vous avies destinee pour le bien spirituel de Belley soit employee pour
l'establissement des RR. PP. Capucins en ce lieu-la1266, qui feront les offices que vous desiries y
introduire, il ne restera sinon qu'en suite il vous playse d'ordonner a monsieur de Courtines1267 qui
1259 Voir le tome précédent, note (228), p. 56.
1260 Michel Fenouillet, seigneur de Barraux (voir tome XVI, note (1105), p. 339).
1261 Son retour fut différé jusqu'après le 17 janvier 1621, jour de son sacre.
1262 On sait que saint François de Sales n'alla pas à Turin en 1621.
1263 Pierre Fenouillet (voir tome XIV, note (47), p. 4).
1264 Jeanne de Sirvinges, veuve depuis 1617 d'Antoine Bellot, «élu» pour le Bugey, le Valromey et Gex. (Voir tome
XV, note (952), p. 335, et note (1267) ci-dessous.)
1265 L'aumônier de Belleville, Claude de Sevelinges ou Sirvinges (voir tome XV, note (948), p. 333).
1266 Voir plus haut, note (207), p. 47.
1267 Georges Ferra, seigneur de Courtine, reçoit en 1599 et 1606 des lettres de confirmation de noblesse; le 1er janvier
1618, par patentes datées de Paris, il est pourvu de l'office de conseiller élu en l'élection de Belley, en vertu de la
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28.2 Page 272

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a l'argent, de le delivrer ainsy que les Peres qui sont la luy marqueront. Et ainsy s'accomplira
heureusement vostre sainte intention, et aures la consolation d'en voir les fruitz avant que d'aller
jouir de la recompense d'icelle au Ciel; et moy je demeureray, Madamoyselle,
Vostre plus humble et affectionné serviteur,
FRANÇS, E. de Geneve.
Annessi, 10 decembre 1620.
A Madamoyselle l'Esleue Bellot.
A Lyon. [398]
MDCCXXXVI. Au Prince de Piémont, Victor-Amédée1268. Excès
de misère de la Sainte-Maison de Thonon, et sa triste
conséquence. D'où vient cette détresse. Comment on peut
y remédier
Annecy, 11 décembre 1620.
Monseigneur,
L'extreme desolation qui est en la Sainte Mayson de Nostre Dame de Thonon ne peut
recevoir remede que de vostre serenissime providence: la pauvreté y est demesuree, et les enfans
du Seminaire tout fin nuds, deschaux et transis de misere; les prestres de la Mayson et les Peres
Barnabites n'ont justement que pour manger et habiter, et non pour se vestir, et le reste va tres mal
en point; mays, ce qui est le pis, c'est que cette calamité y fait naistre une lamentable desunion,
tandis que chacun s'essaye de tirer a soy le peu de moyens et d'argent qu'on y porte. Le remede,
Monseigneur, a ce mal qui, a la verité, est de plus grande consequence qu'il ne semble, consiste en
ces pointz:
Le projet de cette Mayson a esté fait fort grand et ample1269, et failloit quatre mille escus
pour le soustenir annuellement. Despuys, on a de beaucoup amoindris les moyens qui y devoyent
estre employés et, pour un seul coup, on a osté le prieuré de Nantua1270, qui sont mille escus de
revenu, et environ deux mille ducatons que Son Altesse par sa liberalité y a destinés, ne sont pas
touchés a commodité. Il est vray encor, avec tout cela, Monseigneur, que la mauvayse intelligence
des membres de cette [399] Mayson et la mauvaise conduite de ses affaires l'apauvrit de plus en
plus.
Monseigneur, si Vostre Altesse fait reuscir le projet d'establir-la des vrays prestres de
l'Oratoire1271, en lieu de ceux qui y sont, on sauvera de ce costé la 300 ducatons; car faysans une
vie tout a fait commune, il ne faudra aucun gage comm'il en faut aux autres, layssant a part le lustre
et le proffit spirituel qu'ilz apporteront. Si Vostre Altesse fait reuscir le dessein d'appliquer toutes
les praebendes de Contamine aux PP. Barnabites, ormis cinq ou six, ou mesme sept, pour y faire
nomination faite par la veuve d'Antoine Bellot, dernier possesseur de cette charge. (Archives dép. de la Côte-d'Or, B.
12104, fol. 23, et B. 12094, fol. 209.) M. de Courtine «etoit fort ami de saint François de Sales, et ordinairement il
logeoit chez lui lorsqu'il visitoit Mgr de Belley.» L'une de ses filles, particulièrement caressée et bénie par l'Evêque de
Genève, entra plus tard à la Visitation de Belley, où elle reçut le voile noir de professe, le 25 avril 1627, des mains de
la Mère de Chantal qui lui témoigna toujours beaucoup d'estime et d'affection. (Hist. de la Fondation de la Visitation
de Belley.)
1268 Le sujet de la lettre indique le prince de Piémont pour destinataire, et non son père, le duc de Savoie.
1269 On se souvient que la Sainte-Maison de Thonon comprenait à la fois le clergé paroissial, un collège, une sorte de
séminaire, des missionnaires, un refuge pour les convertis, une école des arts et métiers. (Voir tomes XIII, note (861),
p. 316; XV, notes (500), p. 167, et (1116), p. 382.)
1270 Voir tome XIII, note (453), p. 165.
1271 Voir ci-dessus, Lettre MDCLXXXI, p. 384.
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28.3 Page 273

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faire le service parroissial et celebrer les Messes de fondation, on sauvera cinq cens escus de
revenu, et les finances de Son Altesse deschargees d'autant1272. Et puis, Monseigneur, si le projet
de la reformation des Monasteres et du clergé reuscit, on trouvera bien encor des bons et gracieux
moyens d'accommoder pour le reste.
Mays tandis que tous ces biens s'acheminent sous les auspices et par le soin de Vostre
Altesse Serenissime, je croy qu'il sera requis que, pour le present, elle face recevoir l'argent des
assignations a ce porteur, le sieur Gilette1273, affin qu'il en secoure les necessités pressantes de
laditte Sainte Mayson. Et je me prometz de vostre bonté, Monseigneur, que Vostre Altesse me
pardonnera aysement l'importunité de cette lettre, escritte de la main et du cœur,
Monseigneur, de
Vostre tres humble, tres fidele et tres obeissant
orateur et serviteur,
FRANÇS, E. de Geneve.
XI decembre 1620, Annessi.
Revu sur l'Autographe conservé à Turin, Archives de l'Etat. [400]
MDCCXXXVII. A la Mère de Chantal, a Paris. Le Saint
«accommode» les Constitutions. Comment tenir unies les
Maisons du nouvel Institut? A défaut d'un hôtel «asses beau,»
il faut se contenter d'un «trop beau.» Démarches que doit
faire à Rome Mme de Port-Royal pour obtenir de passer de son
Ordre dans celui de la Visitation
Annecy, vers le 25 décembre 16201274.
C'est tous-jours ainsy, ma tres chere Mere, que je vous escris sans loysir et sans haleyne;
voyla que M. du Tellier1275, gentilhomme de Mme de Mercœur1276, envoye prendre mes lettres, et
faut que je les finisse avant que de les avoir commencees.
J'ay accommodé les Constitutions le plus que j'ay sceu, au gré du tres bon P. Binet et au
vostre1277, et ne voy pas que pour des Constitutions on y puisse guiere plus rien adjouster. Reste a
voir comme on pourra tenir toutes les Maysons jointes; et certes, je ne sçai pour le present aucun
moyen qui ne trayne quant et soy des grandes repugnances. Mays je vous en escriray plus au long,
apres que, pendant ces festes, j'y auray un peu mieux pensé, avec l'advis de monsieur l'Abbé
d'Abondance que nous avons de conversation1278.
Que je seray content si je vous puis voir bien logees! L'hostel de messieurs Zameth n'est,
ce me semble, que trop beau; neanmoins, a faute d'un asses beau, il se faudra contenter d'un trop
beau1279. [401]
1272 Voir ibid., Lettre MDCLIX, p. 230.
1273 Pierre Gillette, économe de la Sainte-Maison. (Voir tome XIV, note (119), p. 37.)
1274 Différentes allusions de cette lettre indiquent que les fêtes prochaines dont parle le Saint sont celles de Noël 1620;
d'où notre date approximative.
1275 Pierre Le Tellier ou du Tellier (voir tome XIII, note (523), p. 196).
1276 La veuve de Philippe-Emmanuel de Lorraine, Marie de Luxembourg (voir tome XII, note (198), p. 111).
1277 Voir ci-dessus, note (1126), p. 353.
1278 Vespasien Aiazza (voir tome XIII, note (165), p. 48).
1279 Ce splendide hôtel avait été construit par Sébastien Zamet, le fameux financier, dans la rue.de la Cerisaie, près de
l'Arsenal. Henri IV y fut souvent reçu et magnifiquement traité. En mourant (14 juillet 1614), Sébastien le laissa aux
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28.4 Page 274

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Par la premiere occasion, je vous supplie, un peu des nouvelles de madame la Generale des
Galeres1280, de Mlle de Frouville et de madame de Villesavin, et de Mlle de Montigni1281, si ell'est
tous-jours malade ou non.
D'escrire a present a madame de Port Royal, ma fille, il ny a nul moyen. Que ne ferois-je
pas pour contenter son cœur! Voyci mon advis: puysque elle n'a jamais peu croire que ce fut la
volonté de Dieu qu'elle demeurast en cet Ordre, et que parmi toutes ses actions de vœux, de
Profession, de susception de charge ell'a tous-jours excepté devant Dieu de se retirer dudit Ordre
a la premiere bonne occasion, je pense qu'elle fera donq bien de faire un essay pour cela, et de faire
escrire a Rome pour avoir dispense, laquelle, si ell'exprime bien son intention, ne sera pas, si je ne
me trompe, difficile d'estre obtenue; car quand elle dira que ce n'est pas pour retourner au monde,
mais pour se retirer en une Religion en laquelle l'observance religieuse est en vigueur, il ny aura
rien a dire. Mais il ne faut pas qu'elle nomme la Religion en laquelle elle se veut retirer, ains
seulement qu'elle die qu'ayant la licence elle se retirera en un Monastere, pour y faire profession,
auquel l'observance est en vigueur. Or, il suffira que cela s'essaye par la voye d'un banquier
ordinaire, mays auquel, par le moyen du commis d'un secretaire d'Estat qu'elle m'escrit luy estre
grandement affectionné, on envoye une lettre qui puisse obliger monsieur [402] l'Ambassadeur1282
de favoriser l'affaire en cas de besoin. Avec cela, et le memorial estant bien fait, comm'il ne peut
manquer de l'estre si elle mesme s'explique bien a celuy qui le dressera, je ne doute point qu'elle
ne soit consolee d'un depesche favorable, estant une chose asses ordinaire. Puys, quant a
l'execution, il faudra prendre le biays le plus doux et avantageux qu'on pourra.
Mays, ma tres chere Mere, voyci un fascheux rencontre, car il seroit expedient que cette fille fut
un peu assistee et dressee par vostre amour tout affectionné; et neanmoins, voyla qu'a Turin le
Monastere est accepté, et le P. D. [Juste]1283……………………………………………………
……………………………………………………………………………………………………
………………………………….la fondation de nostre chere Congregation a Turin presse, et bien
que je promette d'y faire aller nostre grande Fille, ma Seur Favre, ces Princesses, sur tout nostre
chere Madame, vogliono la Madre……………………………......................................................
Helas! il n'est nullement vray que je me soys fasché en la partie superieure des advis que
vous m'aves envoyés sur les Constitutions; mais ayant de prim'abord jetté les [403] yeux sur celuy
deux fils que lui avait donnés sa femme, Madeleine Le Clerc du Tremblay. L'un, de même nom que lui, était en 1620
évêque de Langres; l'autre, Jean, véritable héros chrétien, créé maréchal de camp en 1622, fut tué peu après au siège
de Montpellier. Dix ans auparavant, il avait épousé Jeanne de Goth de Rouillac. Leur descendance, perpétuée par une
fille, ne conserva pas la somptueuse demeure qui passa successivement aux familles de Lesdiguières et de Villeroy.
(D'après les Mémoires de l'époque et Prunel, Sébastien Zamet... sa vie et ses oeuvres, Paris, Picard, 1912.)
Ce n'est point l'hôtel lui-même que la Mère de Chantal acquit pour sa Communauté, mais «les escuries et
feniers que Monsieur Samet... avoit faict batir proche de son autel.» (Hist. de la Fondation du 1er Monastère de Paris.)
Il fallut faire de grands accommodements, et les Religieuses ne purent en prendre possession que vers la fin de juillet
1621. (Cf. Lettres de la Sainte, vol. I, pp. 562, 564.)
1280 La comtesse de Joigny (voir le tome précédent, note (1219), p. 375).
1281 Louise Pithou, damé de Montigny (voir ci-dessus, note (1225), p. 388).
1282 François-Annibal d'Estrées, marquis de Cœuvres (1573-1670), fils d'Antoine d'Estrées et de Françoise Babou,
avait quitté l'état ecclésiastique, même un évêché auquel l'avait nommé Henri IV, pour embrasser la carrière des armes.
En 1619, il fut envoyé comme ambassadeur à Rome (voir le tome précédent, note (132), p. 23), et remplit plus tard
les mêmes fonctions en Suisse; mais il était meilleur soldat que diplomate. Le marquis de Cœuvres épousa
successivement: Marie de Béthune, en 1622; Anne Habert, en 1634; Gabrielle de Longueval en 1663. (D'après Moreri,
Feller, etc.)
1283 Le 7 février 1621, la Mère de Chantal écrit à la Mère Favre: «Je crois que vous savez que l'on a pris, au nom de
notre Congrégation, la possession du monastère pour Turin, avec douze cents écus d'or de rente: vous y êtes destinée
Supérieure, mais Monseigneur me mande que les princesses, et ces bonnes âmes qui désirent d'entrer, veulent avoir
la Madre ancienne pour quelques mois.» (D'après l'Autographe; voir Lettres, vol. I, p. 510.) Nous avons dans ces
paroles de la Sainte un résumé de ce qui devait suivre les mots: «et le P. D. Juste
Le second feuillet manque à l'Autographe; la deuxième page s'arrête aux mots: «estant une chose asses
ordinaire» (lig. 6). Les deux phrases suivantes sont écrites en marge de cette seconde page. Nous empruntons les lignes
13-16 à l'Histoire de la Fondation de la Visitation de Turin, qui les cite textuellement en parlant de la présente lettre;
elles sont inédites. Enfin l'alinéa: «Helas! il n'est nullement vray» se trouve en marge de la première page de
l'Autographe.
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28.5 Page 275

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de l'exclusion des maladives, qui est tout a fait contre mon esprit et sentiment, je dis par
un'inconsideree soudaineté: Qui laissera gouverner la prudence naturelle, elle gastera la charité et
ne sera jamais fait1284.
……………………………………………………………………………………………………..
Revu sur l'Autographe conservé à la Visitation de Turin.
MDCCXXXVIII. A Monseigneur Jean-François de Sales, son
frère Evêque nommé de Chalcedoine. Préparatifs pour le voyage
de France. L'Evêque voudrait laisser son frère en sa place.
L'impossibilité où il se trouve d'aller jusqu'à Turin. Insolence
de deux laquais au logis de François de Sales; démêlé qui en
résulte entre M. de la Valbonne et le baron de Tournon.
Méthode pour garder la paix et gagner les cœurs. — Prises
d'habit au Monastère d'Annecy
Annecy, 28 décembre 1620.
Je n'ay encor point receu de commandement de Son Altesse pour le voyage de France,
Monsieur mon tres cher Frere, ni ne sçai encor pas quel nombre de personnes je pourray mener.
Ce pendant je me vay preparant, affin de n'estre pas tout a fait surpris1285; que si je puis vous laisser
icy en ma place, je m'en iray bien plus joyeux. [404]
Nostre monsieur le Collateral1286 me conseille que, si je puis, j'aille voir comme Madame
se porte bien et exerce plusieurs vertus dignes d'elle, affin d'en pouvoir parler plus particulierement
au Roy et a la Reyne Mere; mays je voy que je suis trop pressé pour prendre ce loysir-la, et sur
tout en ce tems que les jours sont si cours, et faudroit une trop grande diligence; car autrement,
cela seroit fort a propos.
Voyla la lettre de monsieur de la Pierre, qui a receu asseurance, ainsy quil m'a fait voir,
que Son Altesse l'ayme; dequoy je ne doute point. Si donq vous le juges a propos, vous luy feres
le bon office qu'il desire1287.
1284 A propos de la réception de «celles qui, pour leur aage ou pour quelque imbecillité corporelle, ne peuvent avoir
acces aux Monasteres plus austeres,» les Constitutions exceptaient «celles qui seroyent atteintes de quelque mal
contagieux... ou qui auroyent des infirmités si pressantes qu'elles fussent tout à faict incapables de suyvre la Regle.»
Or, dans les notes du P. Binet (voir ci-dessus, note (1126), p. 353), nous lisons: «Semble quil faudroit ajouter: ou
si elles sont maladives, car autrement, avec le tanps, au lieu d'avoir une Religion on auroit un hôpital.» Le saint
Fondateur écrit à la suite de cette phrase: «La prudence humaine ne fera que trop cela; helas! les maladives n'ont point
d'autre retraite.»
1285 Ce voyage tant retardé, paraissait assuré cette fois: la Mère de Chantal attendait de jour en jour son bienheureux
Père à Paris; la mort du Pape rompit complètement le projet à la fin de janvier.
1286 Barthélemy Flocard, encore à Turin (cf. ci-dessus, p. 394).
1287 Voir ibid., p. 393.
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28.6 Page 276

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Vous aures sceu ce qui s'est passé de la part de monsieur le Baron de Tornon1288 envers
monsieur de la Valbonne1289. Ce qui m'en desplait le plus, c'est le mespris de la justice, et que, sans
ma coulpe, j'en aye esté l'occasion. Je ne sçai pourquoy, deux garçons de 20 ou 22 ans vindrent
faire un'asses deshonneste insolence ceans, avec des huees et urlemens asses grans: l'un avoit esté
laquay de Chappe l'aisné1290; l'autre estoit palefrenier de monsieur le Baron de Tornon. Or,
monsieur le President les fit saysir et emprisonner, et dans deux jours me les envoya pour me
demander pardon, sans que ni d'effect ni [405] de paroles on leur fit autre chastiment. Le jour
suivant, monsieur le Baron de Tornon treuva le secretaire de monsieur le President et, luy sautant
dessus, luy donna des coups de baston en luy disant: Tien, porte cela a ton maistre. Et bien que je
ne sçai pas si ces paroles ont esté preuvees, si sçai-je bien qu'elles furent dites.
Je vous escris l'histoire seulement affin que vous la sachies, et par ce que monsieur le
President a recouru a monsieur le Marquis de Saint Damien1291 qui, peut estre, vous en parlera;
affin que vous sachies que, quant a moy, je ne me suis nullement plaint, et avois de tres bon cœur
pardonné l'insolence, laquelle fut sans doute faite de guet a pend et sans que j'aye jamais offencé
ni les maistres ni les valetz; mais je sçai de certaine science qu'il faut dissimuler beaucoup et
mespriser toutes les offences qui le peuvent estre, et que, par cette methode, on garde la paix et en
fin on gaigne les cœurs des plus inconsiderés. Seulement suys-je marri de ces deux gentishommes,
qui prennent des habitudes si contraires a la courtoysie et generosité a laquelle leur naissance les
obligent (sic) envers la justice et tout le monde; et je ne doute point que monsieur le Marquis ne
les convie a faire quelque sorte de tesmoignage a monsieur le President, de des-playsir de l'avoir
ainsy traitté.
Mays tout ceci, mesnages-le selon que vous jugeres a propos, car il ne faut pas 1292de lite
facere lites, ni rien dire ou faire qui puisse ennuyer monsieur le Marquis de Saint Damien, puis
que il nous fait lhonneur de nous [406] aymer et qu'il oblige chacun, par sa vertu, a lhonnorer. En
somme, c'est cela qu'il faut faire pour fleurir et fructifier.
Mays voyla l'heure qui m'appelle pour me praeparer a la Messe, que je vay dire a la
Visitation, pour donner l'habit a nostre Seur Marie et a madamoyselle de Servieres, niece de
1288 Second fils de Prosper-Marc de Maillard-Tournon et de Philiberte de Beaufort, Alphonse, sauf une ambassade en
Angleterre, servit fidèlement son souverain dans les armées, bien que l'obéissance envers certains supérieurs lui parût
onéreuse. Il ne s'en cache pas à Madame Royale, et s'étonne que «pandant 38 années de servisse» il n'ait pu se «randre
asay oneste omme pour savoair commander.» On le vit pourtant lieutenant général de la cavalerie, après la mort de
son frère aîné, Henri. Alphonse de Tournon épousa Mme du Châtelard, Jacqueline de Chauvirey (voir tome XVI, note
(1127), p. 346), et hérita des baronnies de Confignon et de Beaumont. Il mourut à Rumilly le 2 février 1660. (D'après
Dufour et Mugnier, Les Maillard, Chambéry, 1889, et les Reg. par. de Rumilly.)
1289 René Favre, président au Conseil de Genevois (voir le tome précédent, note (230), p. 57).
1290 Jean Chappaz, fils de Nicolas, originaire de Thorens, était déjà procureur au siège de Genevois en 1592; il dépose
au Ier Procès de Béatification de l'Evêque de Genève, à l'âge de soixante-treize ans, le 24 novembre 1632, et se déclare
«familier en sa maison.» (Art. 46.) Nous ne savons s'il était «l'aisné,» ne connaissant pas ses frères.
1291 D'après-les dépositions des témoins au Procès de Béatification, les injures que reçut alors le Serviteur de Dieu
furent «atroces». Le marquis de Saint-Damien (voir tome XVII, note (1292), p. 394) auquel dans le même temps
François de Sales procurait l'avantageuse alliance de Charlotte-Emmanuelle d'Urfé, vivement touché de la faute de
son frère Alphonse, «pria le sieur Antoine Favre d'escrire» à l'Evêque qu'il en avait «un extreme desplaisir... et qu'il y
feroit bien mettre ordre; et que cepandant, il se sentoit tres obligé de la moderation dont il avoit usé, et de la vertu qu'il
avoit tesmoigné, qui faisoit bien connoitre qu'il estoit plein de l'esprit de Dieu.» (Dépos. de Janus Guillaume, Process.
remiss. Gebenn, (II), ad art. 74.)
1292 d'une querelle faire des querelles
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28.7 Page 277

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monsieur de Pezieu1293, avec lequel je disneray ceans, Dieu aydant. Dequoy nostre bon P. D. Juste
sera bien ayse1294, et moy aussi, qui suis,
Monsieur mon Frere,
Vostre tres humble frere et serviteur,
FRANÇS, E. de Geneve.
Jour des Innocens.
J'ay fait ce que monsieur l'Abbé mon cousin m'escrivit a son depart1295, pour M.
Mathieu1296, et feray ce qui me sera possible pour M. de Lea1297, estimant que je verray monsieur
de Ballon, mon oncle, bientost1298. [407]
Mille salutations a nostre monsieur le Collateral qui m'excusera si je ne luy escris.
A Monseigneur
Monseigneur l'Evesque de Calcedoine,
premier Aumosnier de Madame.
Revu sur l'Autographe conservé dans l'église paroissiale de Castel-Viscardo,
près Bolsena (Italie).
1293 Avec Mlle Humbert (voir ci-dessus, note (749), p. 229) prirent l'habit ce jour-là Claude-Melchionne Briliat et
Méraude de Saint-André. Cette dernière était fille de Henri de Saint-André, seigneur de Cervières en Dauphiné, et de
Lucrèce de Longecombe (tome XV, note (559), p. 182), sœur de M. de Peyzieu (ci-dessus, note (743), p. 227). Elle
reçut le nom de Sœur Marie-Innocente, et fit profession le 23 avril 1622. Envoyée à la fondation du Monastère de
Belley, on l'en rappela quelques années après pour le service de celui de Chambéry; employée ensuite au second
Monastère d'Annecy, elle le quitta pour aller au couvent de Crémieux; c'est là qu'elle mourut le 22 janvier 1670, à
l'âge de soixante-huit ans. (Archives du Ier Monastère d'Annecy.)
1294 Ce membre de phrase, ajouté après coup, se rapporte à la vêture de la «Seur Marie» à laquelle D. Juste Guérin
s'intéressait particulièrement.
1295 Gaspard Perrucard de Ballon, abbé de Chézery (voir ci-dessus, Lettre MDCCXXXIII, et note (1236), p. 393).
1296 Anselme Mathieu, natif de Chézery, ordonné diacre le 19 juin 1618, et prêtre le 22 septembre de la même année.
(R. E.)
1297 Frère jumeau de l'Abbé de Chézery, Melchior Perrucard de Ballon, seigneur de Léaz, coseigneur de Picaraisin, fut
maître d'hôtel du Cardinal de Savoie. Par contrat dotal du 20 mars 1633, il épousa Catherine de Seyturier. Son
testament est du 12 avril 1643. M. de Léaz, par son dévouement à seconder les pieux projets de ses sœurs Louise et
Gasparde, Religieuses à Sainte-Catherine, mérita d'être nommé par elles «le principal promoteur de la réforme... Il
leur répondit agréablement qu'il se contentoit d'en être apelé le frere lai.» (Grossi, Vie de la Vble Mere de Ballon, 1695,
liv. II, chap. XVI.)
1298 Charles-Emmanuel Perrucard de Ballon, père du précédent. (Voir tome XIV, note (388), p. 129.)
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28.8 Page 278

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MDCCXXXIX. A la Sœur Thérése de Jésus, sous-prieure du
Carmel d'Orléans1299. Dangereuse tentation survenue dans
quelques Monastères de Carmélites. Quand on est bien, ne
pas chercher le mieux, de peur de trouver le mal. Eloge des
Supérieurs du Carmel. Le manteau d'Elie et son esprit.
Annecy, [décembre 16201300.]
……………………………………………………………………………………………………...
Quand vous escrires a la Mere qui est allee a Xaintes, je vous prie de l'asseurer de lhonneur
et amour que je porte a sa pieté1301. [408]
J'ay sceu la petite, mays dangereuse tentation survenue pour le changement qu'on a
pretendu faire au gouvernement de vos Monasteres1302. Certes, dit saint Augustin a ses Filles1303,
vous aves pris naissance, nourriture et accroissement ainsy, pour la plus grande gloire de Dieu et
l'establissement de vostre salut: demeures donq ainsy, mes bienaymees, et qui est bien, qu'il ne se
meuve pour rien que soit, de peur qu'au lieu de mieux on treuve le mal.
Vos Superieurs modernes1304 ont tant travaillé pour vous: cela ne merite-il pas que vous les
reveries comme vos Peres, puisque mesme s'ilz ne sont Carmelites d'habit, ilz le sont en effect par
le zele et la pieté d'Helie? O combien de Carmelites y aura-il au monde qui n'ont receu que le
manteau d'Helie1305, et non son esprit au double1306! et combien de prestres seculiers qui, sans le
manteau, auront receu son esprit! Combien de Theresiennes sans l'habit, combien de Theresiennes
sans l'esprit de la Mere Therese!
1307Demeures en paix, ma tres chere Fille, et aymes tous-jours mon ame devant Dieu.
……………………………………………………………………………………………………..
Revu sur une ancienne copie conservée à Paris, Archives Nationales (M. 216). [409]
1299 Voir tome XIII, note (340), p. 119.
1300 Sur la copie de cette lettre, conservée aux Archives Nationales, se trouve cette indication: «Receue en janvier
1621;» le message était donc parti d'Annecy probablement dans le mois précédent, ou au plus tard les premiers jours
de l'année 1621.
1301 Lorsque, le 22 février 1622, les Commissaires vinrent signifier aux Carmélites de Saintes le Bref du Pape, au sujet
du gouvernement de leur Ordre, ils trouvèrent trois Religieuses qui déclarèrent être soumises aux ordonnances
pontificales. A leur tête était la Mère Marie du Saint-Sacrement, que les Supérieurs avaient envoyée dans ce couvent
pour y rétablir la paix, probablement en même temps que la Mère Marguerite du Saint-Sacrement recevait pareille
mission pour Bordeaux, c'est-à-dire en 1620. Cette Mère Marie du Saint-Sacrement était professe de Paris; en 1607,
la Mère Isabelle de Saint-Paul l'avait emmenée à Louvain, où elle fut Prieure en 1608 (5 octobre). Nous ne savons
quand elle rentra en France. A Saintes, après la signification du Bref, on lui confia la direction de la Communauté;
mais l'ancienne Prieure, Marie-Madeleine de Jésus (marquise de la Tresne) et les autres dissidentes ne voulurent pas
la reconnaître pour leur Supérieure. Elles sortirent du monastère, et bientôt de la France. (D'après le Mémoire sur la
fondation, etc., des Carmélites déchaussées, tome II, Parties V, chap. II, et VI, chap. VI.)
1302 Voir ci-dessus, Lettres MDCCVII et MDCCXXX.
1303 Cf. Epist. CCXI. (Vide Epist. seq.)
1304 MM. de Bérulle, Gallemant et du Val.
1305 III Reg., XIX, 19.
1306 IV Reg., II, 9-15.
1307 Cette dernière phrase, ainsi que le premier alinéa sont inédits.
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MDCCXL. A la Mère Marie de Jésus, prieure du Carmel
d'Orléans (Inédite). Le Carmel ne doit point désirer de changer
de Supérieurs. Affection du saint Evêque pour cet Ordre et
spécialement pour la Prieure et la Sous-prieure d'Orléans
Annecy, [décembre 16201308.]
…………………………………………………………………………………………………….
Pour moy, je dis a vostre cœur de tout le mien, ma tres chere Fille, ce que le grand saint
Augustin disoit en une epistre aux Seurs de sa Regle1309: «Perseveres en vostre bon propos, et vous
ne desireres point de changer de» Superieurs, sous lesquelz, «par tant d'annees, vous estes accreuës
en nombre, en aage,» en Monasteres, en reputation. «Sous» eux, «vous aves esté instruites» en la
vie religieuse, «voylees, multipliees. Vous devries pleurer si on vous les vouloit oster.» Ce n'est
pas que je veuille faire l'arbitre en un differend porté de part et d'autre de tant de gens; mais je vous
parle comme a mon ancienne et cordiale fille, en toute confiance.
Dieu soit beni qui vous a donné une sincere dilection pour ces Seurs de Sainte Marie, et
dequoy elles sont parfaitement dediees a vous honnorer et cherir comme elles doivent1310.
Moy, ma tres chere Fille, je suis tres sincerement vostre et a toute vostre Congregation,
specialement a la Mere Sousprieure, ma fille; et je suis bien ayse de vous escrire un peu sans
ceremonie et de vous oser nommer [410]simplement ma Fille, et de traitter cœur a cœur avec vostre
ame que j'ay tous-jours cherement aymee, et que je prie Dieu de vouloir combler de son tressaint
amour. Amen.
…………………………………………………………………………………………………….
Revu sur une ancienne copie conservée à Paris, Archives Nationales (M. 216).
1308 Cette lettre traitant du même sujet et en termes presque identiques que la précédente à la Sous-prieure du Monastère
d'Orléans, doit avoir été envoyée en même temps. La copie conservée aux Archives Nationales porte seulement: «de
l'année 1621;» ce qui indique sans doute la date de la réception, comme pour les lignes adressées à Sœur Thérèse de
Jésus de Pucheuil.
1309 Epist. CCXI.
1310 Les Sœurs de la Visitation d'Orléans (cf, ci-dessus, note (1102), p. 342)
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28.10 Page 280

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MDCCXLI. A Madame Louise de Ballon, Religieuse de
l'abbaye de Sainte-Catherine. L’«humeur» de l'Abbesse de
Sainte-Catherine et celle de l'Evêque de Genève. Aversion de
l'esprit humain à recevoir «les conceptions d'autruy.» Le
Dieu de paix triomphant au milieu de la guerre. Bonne saison
pour la récolte
Annecy, 16201311.
Ma Fille,
Dieu se sert du tems pour faire reuscir les decretz de sa providence. Je connois l'esprit de
madame l'Abbesse1312, elle ne fera pas la moytié des choses que sa repugnance de maintenant luy
suggere. Nous ne sommes pas de mesme humeur, elle et moy; mais je ne laisse pas d'esperer qu'elle
ne quittera pas tout a fait ma conduitte, que j'essayeray de rendre bonne, douce et juste. Voyes
vous, ma Fille, l'esprit humain ayme ses ayses et son propre jugement; ainsy, il ne faut pas treuver
estrange si on reçoit avec contradiction les conceptions d'autruy, quelque saintes qu'elles soyent.
[411]
Or sus, demeures en paix, souffres en paix, attendes en paix, et Dieu, qui est le Dieu de
paix1313, fera reuscir sa gloire au milieu de cette guerre humaine. Faites belle moysson pendant
qu'il en est la sayson, recueilles bien les benedictions des contradictions; vous proffiteres plus
ainsy dans un jour, que vous ne feries en dix d'une autre sayson.
Dieu parlera pour ceux qui se taisent, il triomphera pour celles qui endureront, et il
couronnera la patience d'un evenement salutaire.
FRANÇS, E. de Geneve.
MDCCXLII. A deux Religieuses de l'abbaye de Sainte-
Catherine
Annecy, 16201314.
Ma Fille,
Je voudrois bien me courroucer avec vous, mais je ne le puis, parce que je ne suis pas en
humeur de le faire.
1311 D'après l'historien de la Vie de la Mere de Ballon (Grossi, Annecy, 1695, liv. II, chap. VIII, p. 143), cette lettre fut
la réponse de l'Evêque de Genève à celle qui l'informait du complot formé contre les cinq aspirantes à la réforme.
Pressée par les anciennes, l'Abbesse avait résolu de les empêcher de communiquer avec les personnes du dehors, et
surtout avec leur Guide vénéré. Ceci se passait avant l'arrivée à Sainte-Catherine de Louise de Montfalcon, c'est-
à-dire dans le courant de l'année 1620. (Ibid., chap. X, p. 150.)
1312 Pernette de Cerisier qui sera destinataire.
1313 Rom., XV, ult., XVI, 20.
1314 Ces deux billets suivirent de près la précédente lettre que Sœur Louise de Ballon n'avait sans doute pas montrée à
ses compagnes, dit le P. Grossi (ouvrage cité), «parce qu'elle auroit... empêché qu'une autre n'écrivit un peu sèchement
au saint Prélat sur ce qu'il les tenoit si longtems en suspens et en souci, et qu'elle n'en reçût cette réponse, fort courte,
à la vérité, mais assez mortifiante, quoique mêlée de cette douceur sans égale qui étoit inséparable de sa conduite:
«Ma Fille, je voudrois bien,» etc.
«Une troisième lui aïant écrit sur le même sujét, mais avec plus de retenue, il lui fit réponse aussi
succinctement, en ces termes: «Ma Fille, la réforme,» etc.
Les Sœurs de Ballon étant exclues, il faut chercher les destinataires de ces lignes parmi leurs trois compagnes:
les Sœurs Bernarde de Vignod, Emmanuelle de Monthoux et Péronne de Rochette.
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Ma Fille.
La reforme se fera, et Dieu y fera cooperer les hommes lhors qu'on y pensera le moins.
[412]
MDCCXLIII. A M. Charles Bally1315 (Inédite). Un Capucin
peintre de tableaux d'église. Indications du Saint pour le
groupement des personnages.
Annecy, [1616-16201316.]
Monsieur le Chatelain,
Je vous prie d'achetter tout ce qui sera requis pour les tableaux que les Reverens Peres
Capucins me font la faveur de faire faire par l'un des leurs1317, pour l'eglise de Viu et de
Thorens1318.
Je suis vostre plus affectionné a vous faire service,
FRANÇS, E. de Geneve. [413]
Je voudrois que le tableau de Thorens fut grand, et de la Nativité de Nostre Seigneur, avec
un saint Maurice d'un costé. et saint Sebastien de l'autre; et celuy de Vieu, de la Passion, avec un
saint Blayse et saint François1319.
Revu sur l'Autographe conservé au presbytère de Viuz-en-Sallaz
(Haute-Savoie). [414]
1315 Déposant au Procès de Béatification de François de Sales en 1627, Charles Bally se dit natif de Mieussy, âgé
d'environ cinquante-trois ans, et fils «d'egrege Nicolas Bally,» notaire, «et de la Nicollarde sa femme.» (Process.
remiss. Gebenn. (I), ad 2um interrog.) Il devint châtelain et fermier du mandement et château de Thiez en Faucigny, le
29 décembre 1610 (Minutaire de Duret, Archiv. dép. de la Hte-Savoie, E 527); il l'était encore en 1635 (Revue
Savoisienne, 1886, p. 283). Ses fonctions le mirent à même d'admirer la charité du Saint dont il fut souvent le ministre,
payant, sur les revenus du fermage et par ordre de son maître, plusieurs pensions viagères à de pauvres prêtres et à
d'autres malheureux. Venait-il quelque bonne aubaine, l'Evêque, dit-il, «me commandoit de la distribuer aux pauvres
sans en advertir le sieur Roland, son œconome, et ledit sieur Roland, de son costé, me prioit de n'advertir point ledit
Bienheureux quand il en arrivoit, parce qu'il donnoit tout sans se soucier des nécessitez de sa maison.» (Sa dépos., ad
art. 36.) Charles Bally et sa femme, Guicharde Domen, furent l'un et l'autre favorisés, après la mort du Serviteur de
Dieu, de guérisons miraculeuses obtenues par son intercession. (Ibid., ad art. 52.)
1316 Se basant sur l'écriture, sur la mention du peintre Capucin faite dans une lettre de 1620, on peut éliminer les années
antérieures à 1616 et postérieures à 1620, sans arriver à fixer la date d'une manière plus positive.
1317 Le Frère Nicolas de la Marche (voir ci-dessus, note (1101), p. 341).
1318 Bally nous apprend, dans sa déposition (ad art. 27), que l'Evêque de Genève fit exécuter, à ses propres dépens, de
sérieuses réparations à l'église de Viuz, et entre autres «feit refaire le maistre autel avec le marchepied d'icelluy, et feit
mettre dessus un grand tableau peint a huille, représentant la Passion de Nostre Seigneur, avec son quadre et corniche
de boys de noyer.» Le tableau offert à l'église de Thorens avait de même cadre et corniche de noyer.
1319 On s'explique ce choix. Saint Maurice était patron de la paroisse de Thorens, et saint Sébastien celui d'une chapelle
de cette église, qui appartenait aux nobles de Sales de la branche aînée; François lui-même en avait été recteur de 1597
à 1603. (R. E.) A Viuz-en-Sallaz, le patron était saint Biaise, et l'Evêque voulut accompagner le portrait du Martyr de
celui du protecteur qu'il avait reçu au baptême.
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29.2 Page 282

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Appendice
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29.3 Page 283

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Les notes marginales indiquent la corrélation des pièces de l'Appendice avec le texte des Lettres
de saint François de Sales.
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29.4 Page 284

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I. Lettres adressées a saint François de Sales par quelques
correspondants
A. Bref de Sa Sainteté Paul V1320
Venerabili Fratri Episcopo Gebennensi
PAULUS PP. V.
Venerabilis Frater, salutem et Apostolicam Benedictionem.
1321Inter multiplices Pastoralis officii Nostri curas, illa Nos non leviter urget, ut divinus
cultus et devotio praesertim in Ecclesiis et aliis piis locis conscrventur, majoraque in dies
suscipiant incrementa, et si in aliquibus exciderint, modis congruis, quantum in Domino fieri
potest, restituantur opportunis. Hinc est quod Nos felici, prosperoque Domus Beatae Mariae
Compassionis, seu Septem Dolorum nuncupatae, presbyterorum saecularium, loci Tonnonis,
Gebennensis dioecesis, regimini et gubernio prospicere volentes, ac de tua singulari fide,
prudentia, doctrina et religionis catholicae zelo plurimum in Domino confisi, Tibi per prsesentes
committimus et mandamus, ut tanquam noster et Apostolicse Sedis delegatus, dictam Domum,
omnesque et singulos illius superiores, presbyteros aliasque personas etiam Nobis et dictas Sedi
immediate subjectas tam in capite quam in membris, semel tantum, auctoritate Apostolica visites
ac in illorum statum, vitam, mores, ritus et instituta diligenter inquiras, necnon evangelicae et
apostolicae doctrinae, sacrorumque [417] Canonum et generalium Conciliorum et praesertim
Tridentini decretis ac Sanctorum Patrum traditionibus, dictaeque Domus regularibus institutis a
Sede Apostolica approbatis inhaerendo, quacumque mutatione, correctione, emendatione,
revocatione et renovatione indigere cognoveris, reformes, mutes, corrigas et etiam de novo condas
ac condita sacris Canonibus et Concilii Tridentini decretis et regularibus dictae Domus institutis
non repugnantia confirmes; abusus quoscumque tollas; regulas, institutiones et ecclesiasticam
disciplinam, ubicumque illse exciderint, modis congruis restituas et reintegres; ipsasque personas
ad debitum et honestum vitae modum revoces, et quidquid statueris et ordinaveris observari facias;
inobedientesque, per censuras ecclesiasticas aliaque opportuna juris et facti remedia, cogas et
compellas; aliaque in praemissis et circa ea necessaria quomodolibet et opportuna facias, geras et
exequaris. Super quibus omnibus et singulis plenam, liberam et amplam facultatem auctoritate
praedicta, tenore praesentium, concedimus et impartimur. Mandantes propterea omnibus et
singulis ad quos spectat, ut Tibi in omnibus supradictis pareant, faveant, obediant et assistant;
tuaque salubria monita et mandata suscipiant, humiliter et efficaciter adimplere procurent; alioquin
sententiam sive poenam quam rite tuleris seu statueris in rebelles ratam habebimus et faciemus,
auctore Domino, usque ad satisfactionem condignam inviolabiliter observari.
Volumus autem, ut si quae graviora in hujusmodi visitatione repereris, illa, necnon
informationes omnes in hujusmodi visitatione sumendas, sub tuo sigillo clausas, ad Nos quam
primum diligenter transmittas, ut quod in illis statuendum sit matura consultatione adhibita
decernamus. Non obstantibus Apostolicis ac in universalibus, provincialibusque et sinodalibus
Conciliis editis, generalibus vel specialibus Constitutionibus et Ordinationibus, necnon dictae
Domus etiam juramento, etc., roboratis statutis et consuetudinibus, privilegiis quoque indultis et
literis Apostolicis eidem Domui illiusque superioribus et personis in contrarium praemissorum
quomodolibet concessis, confirmatis et innovatis. Quibus omnibus et singulis eorum tenore pro
plene et sufficienter expressis habentes illis, etc., permansuris, ac vice dumtaxat specialiter et
expresse derogamus, caeterisque contrariis quibuscumque.
1320 Voir tome XIII, note (220). p. 69.
1321 Vide p. 168, not. (574), Epistol. MDCXXVIII et MDCLVIII, p. 226.
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29.5 Page 285

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Datum Romae, apud Sanctam Mariam Majorem, sub annulo Piscatoris, die 30 Augusti
1619, Pontificatus Nostri anno decimo quinto.
S. CARD. S. SUSANNAE.
Revu sur une copie inedite, conservee a la Visitation d'Annecy. [418]
B. Lettres de Charles-Emmanuel Ier, duc de Savoie
I
Très Révérend, très cher, bien amé, féal Conseiller et dévot Orateur,
1322Nous accordâmes, il y a quelque temps, à Claude du Noyer1323, le père duquel mourut
au siège de Verceil, après Nous avoir longuement servi parmi ces guerres dernières, une prébende
des trois qui étaient vacantes au prieuré de Contamine. Ce que Nous fîmes d'autant plus volontiers
que, outre la particulière inclination et dévotion que ce jeune homme montre d'avoir à cet habit de
Saint-Benoit, Nous sommes convié d'en prendre quelque soin en mémoire des services du père qui
a délaissé plusieurs autres enfants sans commodités ni moyens de s'élever aux vertus.
Peu de temps après, les RR. PP. Barnabites recoururent à Nous pour faire révoquer cette
provision, pour divers prétextes, comme Nous fîmes; Nous donnant entre autres à entendre que les
trois prébendes étaient entièrement nécessaires aux réparations dudit prieuré, auxquelles
néanmoins Nous savons n'y avoir été employé jusqu'ici que ce que peut porter le revenu de deux,
lequel peut honnêtement suffire, suivant mêmement l'ordre qu'en a donné le Visiteur général1324.
Chose qui Nous occasionne de vous donner charge pour cela d'embrasser avec votre saint zèle
accoutumé, de Notre part, cette affaire; tenir main que le Prieur claustral1325 dudit Contamine mette
le froc audit Claude du Noyer, et dispose par même moyen lesdits Pères à payer librement le revenu
de sa prébende dès le jour de la vacance, en suite de la provision qu'il en a de Nous; en quoi ils
Nous feront chose très agréable de consentir, sans Nous donner plus sujet d'en être importuné
davantage ni d'un côté ni d'autre. D'ailleurs, vous verrez le Mémorial ci-joint du [419]
Sacristain1326, qui s'offre de payer auxdits Pères les 500 ducatons qui leur sont assignés sur ledit
prieuré, d'employer annuellement 200 ducatons aux réparations d'iceluy et d'accroître encore
l'aumône de dix coupes de froment, si [l'on] veut laisser à sa disposition le revenu avec les autres
deux prébendes vacantes: qui sont véritablement toutes considérations remarquables et qui Nous
font désirer d'autant plus l'effet de la consolation dudit du Noyer, lequel Nous vous recommandons
par ce bien particulièrement.
Et prions Dieu, sur ce, qu'il vous conserve longuement en sa sainte garde.
De Turin, ce 13 de mai 1620.
Le Duc de Savoie,
C. EMMANUEL.
1322 Vide Epist. MDLXVII, MDCLIX et Epist. seq.
1323 Vide p. 55, not. (231).
1324 D. Louis de la Tour, vicaire général de l'Ordre de Cluny, qui avait visité le prieuré de Contamine en mai 1618.
1325 Jean de Lucinge (voir ci-dessus, note (994), p. 306).
1326 Louis Perret (voir ci-dessus, note (231), p. 55).
285/341

29.6 Page 286

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II
Tres Reverend, tres cher, bien amé, feal Conseiller et devot Orateur,
1327Le Secrestain du prieuré de Contamine vous aura remis une nostre touchant la prebande
que Nous avions cy devant accordée sur ledit prieuré a du Noyer son neveu. Sur quoy neantmoins
Nous vous repliquons de ne mouvoir chose aucune que premierement vous Nous ayez envoyé la
dessus vostre advis, afin que Nous puissions estre mieux esclaircy de ce qui se debvrà bonnement
fere sur ce suject.
Atant, prions Dieu qu'il vous conserve en sa sainte garde.
De Turin, ce 24 de may 1620.
Le Duc de Savoye,
C. EMANUEL1328
CROTTI.
A l'Evesque de Geneve.
A Tres Reverend Pere,
tres cher, bien amé, feal et devot Orateur,
L'Evesque de Geneve.
Revu sur l'original inédit, conservé aux Archives communales d'Annecy
(Série GG, Fonds du Collège Chappuisien, 217). [420]
1327 Vide Epist. MDCLVIII, p. 225, MDCLIX, et Epist. praeced.
1328 La signature seule est autographe.
286/341

29.7 Page 287

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II. Lettres & Pièces diverses
A. Lettre du Chanoine Jean-François de Sales a M. Barthelemy
Flocard1329
Monsieur,
1330Vous aures, ce croy je, receu la response a celle que vous pristes la peine de m'escrire
dernierement; maintenant je la fais a celle que François1331 m'a apportee, par laquelle je voy que,
graces a Dieu, nous sommes presque a la veille de nostre depart. Monseigneur1332 s'y resoult de
tres bon cœur, et se delibere de sortir de Paris le lendemain de Nostre Dame. Il ne vous escrit pas,
estant asseuré que vous vous contenteres de luy pour ce coup s'il vous salue de tout son cœur par
nostre entremise, estant occupé aupres de cette bonne dame, qui l'a tout a fait guery1333; de quoy
je benis Nostre Seigneur, comme aussi de vostre santé, laquelle il faut conserver pour faire le
voyage allegrement.
Monsieur de Royssieu1334 nous oblige infiniment par le soin qu'il [421] prend de noz
affayres; je luy escris, et vous luy feres tenir la lettre, sil vous plait. Je suis estonné que l'on tarde
tant de nous fayre sçavoir le jour de nostre depart, et que le conducteur qui doit donner ordre pour
nous fayre desloger ne vienne point. J'admire la sortie de Mr le President1335 sans en donner advis
a personne, et pense diverses choses la dessus, meilleures a dire entre nous deux qu'a les escrire.
J'ay receu les nouvelles du gentilhomme dont vous me parlies par la vostre precedente, et
j'ay tres bien opiné du succes de ses affayres1336. Sy vous voyes la damoyselle, je vous conjure de
me tenir fort en sa bonne grâce et de l'asseurer que nous serons lundy a Paris, Monsieur l'Evesque
estant arresté pour sacrer Dimanche le grand autel de ceans, chose qui ne se doit fayre qu'en jour
de feste1337. Je meurs d'envie de luy parler. Je connois de vue celuy qui le poursuit, lequel, avec
toutes les bonnes qualités que vous luy donnes, est de tres mauvaise mine.
J'admire les nouvelles que vous nous dites de Savoye, mais plus la premiere que la derniere,
du sieur Bonfilz1338; nous en parlerons a loysir.
Monseigneur le Reverendissime a esté grandement affligé du malheur des Cordeliers1339;
il faut advertir nos gentz que l'on soit fort sur sa garde et que l'on se mesle le moins que l'on pourra.
Nous serons seulement a Paris lundy, ancore pour le soir. Je vous bayse les mains et suis
de tout mon cœur,
Monsieur,
Vostre tres humble et tres affectionné serviteur,
J. FRANÇS DE SALES.
A Maubuisson1340, le XXX aoust 1619.
A Monsieur
1329 Voir tome XVII, note (1023), p. 303.
1330 Vide p. 3, not. (73).
1331 Sans doute le valet de chambre du saint Evêque de Genève, François Favre, qui l'avait suivi à Paris. (Voir tome
XVI, note (439), p. 142.)
1332 Saint François de Sales.
1333 La Mère Angélique Arnauld (voir le tome précédent, note (1199), p. 368, et Lettre MDXXXV, p. 409).
1334 Nous avons déjà nommé deux MM. de Royssieux (voir ibid., note (1190), p. 364); nous pouvons en proposer un
troisième, le mari de Mme de Royssieux, coopératrice de la fondation de la Visitation d'Orléans, que nous retrouverons
dans les lettres du volume suivant.
1335 Le président Antoine Favre (voir tome XI, note (68), p. 18).
1336 Vraisemblablement, il s'agit ici du projet de mariage de Guillaume de Bernard de Foras avec Anne Le Beau, dame
de Vaulgrenant. (Voir ci-dessus, note (154), p. 32.) Celle-ci serait «la damoyselle» à qui Jean-François de Sales envoie
un message.
1337 Vide tom. præced. p. 409, not. (1309), et supra, p. 3, not. (73).
1338 Les Cordeliers d'Annecy (voir tome XVII, note (1050), p. 310).
1339 Voir le tome précédent, note (1285), p. 401).
1340 Vide tom. XVII, p. 194, not. (683).
287/341

29.8 Page 288

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Monsieur Flocard,
Conseiller de S. A. et Collateral au Conseil de Genevois.
Revu sur l'Autographe inédit, conservé à la Visitation de Chambéry. [422]
B. Brevet de Charles-Emmanuel Ier, duc de Savoie, pour la
coadjutorerie de Jean-François de Sales
POUR LA COADJUTORERIE DE JEAN-FRANÇOIS DE SALES
1341CHARLES EMANUEL, par la grace de Dieu Duc de Savoye, Chablais, Aouste et
Genevois, Prince et Vicaire perpetuel du Sainct Empire Romain, Marquis en Italie, Prince de
Piemont, Marquis de Saluces, Conte de Geneve, Nice, Ast et Tendes, Baron de Vaux et Foucigny,
Seigneur de Verceil, du Marquisat de Ceve, Oneille, Marro, etc.
Dautant que l'Evesché de Geneve est de tres grand poidz et tire appres soy beaucoup de
soing et de travail, tant pour la grande estendue de sa diocese que la voysinance de l'heresie de
Geneve, outre les grandes fatigues que tres Reverend nostre tres cher, bien amé, feal Conseiller et
devot Orateur, Messire François de Sales, moderne Evesque, faict aux predications et autres
exercices spirituelz pour exciter les ames a luy commises a leur perseverance a la devotion: il Nous
a semblé luy estre grandement necessaire un Coadjuteur, et que Nous ne pourrions faire
nomination de personne plus digne et de plus de merite que de Reverend nostre tres cher, bien amé
et feal, devot Orateur Jean François de Sales, frere dudict Evesque et premier Aulmosnier de
Madame1342; lequel, pour sa bonne vie, doctrine et autres vertuz, et pour satisfaire au desir dudict
Evesque, Nous avons nommé et presenté, et par ces presentes, en vertu du droict de nomination
qui Nous appertient sur ledict Evesché, nommons et presentons a Nostre Tressainct Pere le Pape,
pour Coadjuteur et futeur successeur audict moderne Evesque et Evesché de Geneve, suppliant Sa
Saincteté de le vouloir aggreer et luy faire expedier ses Bulles et provisions a ce necessaires,
moyenant lesquelles Nous voulons qu'il soit receu, admis et maintenu en la plaine et legitime
jouissance de ladicte coadjutorie, aucthoritez, prerogatives et autres choses quy en despendent,
sans aucune difficulté: car ainsy Nous plait.
Donné a Thurin, ce XII febvrier 1620.
C. EMANUEL.
Va ARGENTERO.
CROTTI.
Pour Messire Jean François de Sales, premier Aulmosnier de Madame, lequel [423] V. A.
nomme et presente pour Coadjuteur et futeur successeur au moderne Evesque et Evesché de
Geneve.
Gratis.
ARGENTERO.
Revu sur l'original inédit, conservé à la Visitation d'Annecy.
1341 Vide p. 101, not. (374).
1342 Vide p. 115, not. (415), et Epist. seq.
288/341

29.9 Page 289

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C. Lettre de Christine de France, Princesse de Piemont, au Cardinal
Scipion Caffarelli-Borghese1343
Monsieur mon Cousin,
1344Ayant pleu a Son Altesse d'accorder a ma consideration a Monsieur de Boissy, mon
premier Aumosnier, la coadjustorerie de l'Evesché de Geneve, et ayant recognu le soin et
l'affection qu'il a a mon service, J'ay pensé qu'estant particulierement informée de ses vertus et
merites, que vous auries agreable que Je vous rendisse ces tesmoignages de ses louables et
estimables qualités, affin de faciliter ses expeditions. Mais parce que J'ay donné charge a l'Abbé
Scaglia1345 de vous en faire de tres particulieres instances de ma part, Je vous prieray d'adjouster
creance a ce qu'il vous dira, desirant recevoir sur ce sujet des effetz de la continuation de vostre
bonne volonté, dont Je vous prie de tout mon cœur.
Ce pendant, Je vous asseureray que Je cheriray tousjours avec passion les occasions qui
vous pourront faire cognoistre que Je suis entierement,
Monsieur mon Cousin,
Vostre tres affectionée cousine,
CHRESTIENNE.
Turin, ce premier mars 1620.
A Monsieur le Cardinal Bourgueze,
mon Cousin.
Revu sur l'original inédit, conservé à Rome, Archives Vaticanes
(Borghese II, 83, p. 208). [424]
1343 Voir tome XVI, note (453), p. 147.
1344 Vide p. 136, not. (486).
1345 Vide tom. XVII, p. 97, not. (375).
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29.10 Page 290

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D. Lettres de Victor-Amedee, Prince de Piemont, a l'abbé Philibert-
Alexandre Scaglia1346
I
Molto Reverendo Oratore nostro carissimo,
1347Molti sono li rispetti per li quali Sua Altezza si è mossa di compiacere al Vescovo di
Geneva in concederli di haver un Coaggiutore, et non meno sufficienti sono le cause di haver fatta
nominatione del fratello di lui, huomo di tanta bontà di vita et buon essempio che si può dir che va
del pari col sudetto Vescovo. Oltre quello che Sua Altezza vi scrive, non habbiamo potuto
ommetter di aggiungervi queste righe, non per altro che di esservi invitati dall'officio che tiene di
primo Elemosiniero di Madama. Perciò, nel procurare le sue speditioni, spenderete il mio nome,
insieme a quello di Sua Altezza, con Nostro Signore, col signor Cardinale Borghese1348 et altrove,
secondo che vederete essere necessario, abbracciandone la cura come di cosa che a Noi sarà di
particolare gusto et sodisfattione.
Nostro Signore di mal vi guardi.
Il Prencipe di Piemonte,
V. AMEDEO.
CARRON.
Da Torino, li 19 di Marzo 1620.
Revu sur l'original inédit, conservé à Turin, Archives de l'Etat
(Lettere Ministri, Roma, Mazzo 31). [425]
II
(FRAGMENT)
………………………………………………………………………………………
1349Il non essersi fatta mentione della nominatione di Sua Altezza nelle Bolle del Vescovo
di Geneva deve essere difetto di Cancellaria, forse a dissegno di far evanouire le ragioni di Sua
Altezza, perchè sempre si sono spedite le nomine per tutti gli beneficii dei quali spetta a Sua
Altezza; ma per questo in particolare non si è ommesso, et li Ministri di Sua Altezza costì non gli
haveranno havuto l'avvertimento ch'erano obbligati. Perciò, nel far spedire le Bolle di Monsignor
di Boisy, procurarete che vi si faccia mentione di detta nomina. Intanto si farà diligenza di haver
quella che fu fatta per Monsignor di Geneva………………………………………………………
……………………………………………………………………………………………………...
Il Prencipe di Piemonte,
V. AMEDEO.
Maggio1350 1620.
Revu sur l'original conservé à Turin, Archives de l'Etat
(Lettere Ministri, Roma, Mazzo 31).
1346 Voir tome XVII, note (696), p. 197.
1347 Vide p. 136, not. (486).
1348 Vide Epist. praeced.
1349 Vide Epist. MDCIX, et p. 233, not. (760).
1350 Le quantième n'est pas indiqué.
290/341

30 Pages 291-300

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30.1 Page 291

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E. Lettres de l'abbe Philibert-Alexandre Scaglia1351
I. Au duc de Savoie
Serenissimo mio Signore,
1352Rappresentai nell'ultima audienza a Sua Santità il desiderio che tiene Vostra Altezza di
veder fatto Coadiutore del Vescovo di [426] Geneva il signor Giovanni Francesco di Sales, fratello
del medesimo Vescovo et Elemosiniero di Madama Serenissima. Sua Beatitudine intese volontieri
l'instanza, et mi rispose che haverebbe rimesso il negotio alla Congregazione Consistoriale,
conforme è solito di fare sempre in simili materie, appresso della quale io non mancarò di tenerlo
sollecitato acciò se ne habbia quanto prima l'espeditione.
Intanto è necessario mi si mandi la Bolla del sudetto Vescovo1353, affinchè a suo tempo io
possa con fondamento esibire la presentanone di Vostra Altezza per mantenimento del suo jus; chè
in altra maniera s'incontrarebbono delle difficoltà. Ch'è quanto con questa mi occorre dire in tal
proposito a Vostra Altezza, con farle per fine humilissima riverenza.
Di Vostra Altezza Serenissima,
Humilissimo, fedelissimo et obbligatissimo suddito
et servitore,
ALESSANDRO SCAGLIA.
Di Roma, li 4 di Aprile 1620.
Revu sur l'Autographe inédit, conservé à Turin, Archives de l'Etat
(Lettere Ministri, Roma, Mazzo 31).
II. Au Prince de Piemont
Serenissimo mio Signore,
1354Sua Santità ha inteso volontieri l'instanza fattali da me a nome di Vostra Altezza et del
Serenissimo Padre di Lei, di conceder per Coadiutore del Vescovo di Ginevra il signor Giovanni
Francesco Sales, fratello del medesimo Vescovo et Elemosiniero di Madama Serenissima. Et
conforme alsolito, ne ha rimesso il Memoriale alla Congregazione del Consistoro, dove io non
mancarò di tener solicitato il negotio con ogni calore.
Intanto, perchè la nomina di Sua Altezza non riceva incontro alcuno di difficoltà, sarà
necessario mi si mandino le Bolle del sudetto Monsignore, affinchè con esse si possa provare il
jus di Sua Altezza et mantenere il possesso del presentare. Supplico però l'Altezza Vostra dia
ordine mi s'inviano quanto prima le dette Bolle, [427] acciò io possa, in conformità del mio obligo,
fore il servitio di Vostra Altezza, alla quale resto, facendo humilissima riverenza,
Di Vostra Altezza Serenissima,
Humilissimo, fedelissimo et obbligatissimo suddito
et servitore,
ALESSANDRO SCAGUA.
Di Roma, li 4 di Aprile 1620.
1351 Voir ci-dessus, note (1069), p. 329.
1352 Vide Epist. MDCLXI et p. 233, not. (760).
1353 Cf. p. 138.
1354 Vide Epist. præced.
291/341

30.2 Page 292

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Revu sur l'Autographe inédit, conservé à Turin, Archives de l'Etat
(Lettere Ministri, Roma, Mazzo 31).
III. Au duc de Savoie (Fragment)
1355Quanto alla nominatione che si desidera espressa nella speditione del Vescovo di
Geneva, devo dire a Vostra Altezza che per molte diligenze usate in Cancellarla non si è potuto
trovare che nelle passate speditioni o nelle altre antiche si sia mai espressa tal nominatione. Et qua
si tratta di cosa insolita et impossibile insieme, che la sudetta Cancellarla admetta espressione di
nominatione, se non si mostrano gli essempi o non si fa constare de legitima
fundatione....................................
Di Roma, li 5 Giugno 1620.
Revu sur l'Autographe inédit, conserve à Turin, Archives de l'Etat
(Lettere Ministri, Roma, Mazzo 31).
IV. Au même (Fragment)
……………………………………………………………………………………………………...
1356Al Cardinale Aldobrandino ho trattato in materia della nomina alla Chiesa di
Geneva1357. Egli trova le medesime difficoltà che già avvisai, et se non si mostrano altre scritture,
Vostra Altezza ha solo [428] da poter proporre soggetti grati, in virtù di privilegi concessi da
Martino Quinto1358 et altri Pontefici; ma questi non danno il jus nominandi che è proprio de'
Padronati..........
……………………………………………………………………………………………………...
Di Roma, li 25 Luglio 1620.
Revu sur l'Autographe inédit, conservé à Turin, Archives de l'Etat
(Lettere Ministri, Roma, Mazzo 31).
F. Lettre du Cardinal Pierre Aldobrandini1359 au Prince de Piemont
Il Cardinale Aldobrandino al Principe di Piemonte.
L'Ambasciatore del Serenissimo Signor Duca, Padre di Vostra Altezza, non mi ha parlato
della coadiutoria da farsi del Vescovado di Geneva in persona di Monsignor Boysi, se non quando
è venuto il tempo di proporla in Concistoro1360; di modo che tutto il negotio s'è trattato senza ch'io
n'habbia saputo cosa veruna; quindi è che se non haverò potuto servire a Vostra Altezza
Serenissima com'era suo desiderio, sono degno di scusa.
1355 Vide Epist. MDCIX, et p. 233, not. (760).
1356 Vide p. 233, not. (760).
1357 Vide Epist. seq.
1358 Othon Colonna (1365-1431), élu Pape au Concile de Constance le 11 novembre 1417, couronné solennellement
le 21 du mème mois, prit le nom de Martin V et mit fin au schisme d'Occident.
1359 Voir tome XII, note (133), p. 81, et ci-dessus, notes (498), p. 139, et (1070), p. 329.
1360 Vide Epist. praeced.
292/341

30.3 Page 293

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Hora che mi comanda con la sua de' 18 del passato, resami dal medesimo Ambasciatore,
ch'io procuri sia fatta mentione nelle Bolle che si spediranno, della nominatione fatta dal
Serenissimo Signor Duca a questa coadiutoria del medesimo Monsignor di Boysi1361, io non
mancarò d'affaticarmi quanto sarà in me e quanto è l'obligo e volontà mia di servire a Vostra
Altezza Serenissima et a cotesta Serenissima Casa. Dubito bene che ci saranno delle difficoltà,
perchè vorranno qui che s'habbia relatione alle Bolle spedite dagli [429] altri antecessori, e seguitar
la forma e stilo di esse; si che, quando costà se ne trovassero alcune nelle quali si facesse tal
menzione, credo che il negotio si renderebbe con l'essempio manco difficile. Mi rimetto però alla
prudenza di Vostra Altezza Serenissima, se le paresse bene di far usar diligenza di trovar le Bolle
d'altri Vescovi di quella Chiesa e dar ordine che fossero mandate qua, che serviriano ove potessero
servire.
Et io mi adopererò con tutto lo spirito perchè segua la sodisfattone del Serenissimo Signor
Duca et di Vostra Altezza, a cui bacio di cuor le mani.
Di Vostra Altezza Serenissima,
Il Card. ALDOBRANDINO.
Roma, 18 Luglio 1620.
Al Principe di Piemonte.
Revu sur l'original inédit, conservé à Turin, Archives de l'Etat
(Lettere Ministri, Roma, Mazzo 30). [430]
1361 Vide p. 233, not. (760).
293/341

30.4 Page 294

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III. La fondation du Monastère de la Visitation de Nevers,
huitième de L'ordre1362
Le Monastère de Moulins était établi depuis trois ans (1616)1363, et la renommée de sa
ferveur se répandait dans les provinces voisines, attirant les âmes désireuses de se donner à Dieu.
Deux jeunes filles de Nevers souhaitèrent d'y être reçues; leur père, M. Bonsidat, honnête
bourgeois fort considéré pour son mérite et sa probité1364, voulut les présenter lui-même à la Mère
Jeanne-Charlotte de Bréchard1365. En route, les voyageurs rencontrèrent le baron de Lange;
informé de leur dessein: «Il y a quelque chose de mieux à faire,» leur dit-il. Et il expose le projet
d'une fondation de la Visitation à Nevers même; les dots des demoiselles Bonsidat en feraient les
premières avances, et, pour lui, il se chargeait d'obtenir les permissions nécessaires de l'Evêque,
Mgr Eustache de Saint-Phal1366, et de Charles de Gonzague-Clèves, suzerain du Nivernais1367. La
proposition fut goûtée; M. Bonsidat en fit part à la Supérieure de Moulins. Celle-ci, de l'avis des
Fondateurs, l'agréa, et bientôt les deux sœurs venaient commencer auprès d'elle leur noviciat.
Mme du Tertre1368 eut vent de ce qui se passait. Manœuvrant par dessous main, elle donna
promesse en bonne forme de trente mille francs à M. Bonsidat, avec facilité d'en toucher le tiers
sans retard; elle se constituait ainsi fondatrice temporelle d'une Maison dont elle n'en doutait
pas la Mère de Bréchard serait la pierre fondamentale. Telle n'était pas pourtant la décision
prise; le Monastère de Moulins avait encore besoin de sa vénérée fondatrice; il fut donc résolu que
la Supérieure de Nevers viendrait d'Annecy avec les Sœurs destinées à Paris et à Orléans1369.
Grande déception pour la jeune veuve! Elle déclare alors son dessein de se «dédier» à Dieu «avec
tous» ses «biens en la Maison qui s'établira... à Nevers, [431] mais à la charge toutefois que» la
«très chère Sœur Jeanne-Charlotte y sera toujours» sa «Mère1370.» Cela fit réfléchir. La Mère de
Chantal savait de quels ménagements il fallait user avec une âme qu'on voulait sauver à tout prix;
elle connaissait d'ailleurs l'incomparable condescendance de François de Sales, et, sans craindre
de trop l'engager, elle écrit à Mme du Tertre le 24 mars 16201371: «Ne doutez point que notre bon
Père ne vous concède votre désir selon toute l'étendue de son pouvoir, qui est toujours de plusieurs
années.» Avec prudence, la Fondatrice ajoute: «Mais nous nous assurons que Dieu vous ayant
confirmée en son saint amour pendant plusieurs années, vous fera aimer la conservation des
Règles.» La réponse de l'Evêque de Genève1372 est identique: «Que celte chere Mere soit
Superieure, j'y consens sans difficulté; mays que cela se puisse faire si absolument comme vous
m'en parles, je n'en sçay pas les moyens... Mais... faites ce que» Dieu «vous a inspiré pour sa
gloire, et ne doutés nullement qu'il ne face pour vostre bien ce qui sera le meilleur.»
Tout semblait donc devoir marcher sans obstacles désormais. Mme du Tertre ne songeait
qu'à se préparer à revêtir l'habit de la Visitation; ses parents, enchantés de sa résolution d'être
Religieuse, lui faisaient pour le temporel «un bon parti1373,» non toutefois sans trainer en longueur
les préliminaires du contrat, sans «faire des grandes assemblées de parents et de grands
mystères1374,» qui ne plaisaient pas trop à la Mère de Chantal. De son côté, la prétendante réclamait
des exemptions et privilèges qu'il était difficile de spécifier «par le menu,» comme elle le
1362 Cf. ci-dessus, note (779), p. 236.
1363 Vide tom. XVII, p. 256, not. (882).
1364 Vide p. 309, not. (1001).
1365 Vide tom. XIV, p. 86, not. (263).
1366 Vide p. 366, not. (1153).
1367 Hist. de la Fondation du Monastère de Nevers.
1368 Vide p. 87, not. (339).
1369 Vide p. 246, not. (808), et p. 251, not. (828).
1370 Lettres de Ste J.-Fse de Chantal, vol. I, p. 392.
1371 Ibid., p. 393.
1372 Epist. MDCXXXIII, p. 174.
1373 Lettre de Ste J.-Fse de Chantal à la Hère de Bréchard, 28 avril 1620 (vol. I, p. 406).
1374 Idem, 9 juin 1620 (ibid., p. 425).
294/341

30.5 Page 295

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voulait1375. Grâce à l'inlassable charité des deux Saints, on finit par s'entendre: en juin, les pièces
furent signées à Paris et à Moulins.
A Nevers, les permissions étaient obtenues. François de Sales avait écrit à Mgr de Saint-
Phal1376 qui, «pour le respect qu'il pourtoit a» la «rare vertu et saincteté» du Serviteur de Dieu,
donna franchement son autorisation. «Madame,» dit-il dans sa lettre à la Mère de Bréchard, «je
viens de signer la permission que vous avez desiree de moy pour vostre establissement en cette
ville, avec autant d'affection qu'affaire que j'aye signé de ma vie. L'on vous porte avec icelle le
tesmoignage de la bonne volonté de Messieurs de Nevers en vostre endroit.» Le duc Charles de
Gonzague, non seulement [432] liberté pour la fondation, mais il en montra beaucoup de
satisfaction, à cause de «l'estime qu'il faisoit» du saint Evêque de Genève1377. M. Bonsidat, avec
les dix mille livres de Mme du Tertre, et trois mille avancées par le Monastère de Moulins, achetait,
au mois de juin, des maisons et jardins, faisait faire les répations nécessaires pour recevoir les
Religieuses.
Ce fut alors que s'éleva un terrible orage. Quand on sut à Moulins ce qui se préparait pour
Nevers, il y eut une clameur générale. Le gouverneur et la gouvernante M. et Mme de Saint-
Géran1378 , le trésorier de Palierne1379, s'en mêlèrent. Ils écrivirent à l'Evêque de Genève,
protestant qu'ils ne laisseraient jamais sortir de la ville ni la Mère de Bréshard, ni Mme du Tertre.
L'estime universelle vouée à la première, la convoitise des biens de la seconde qu'on voulait
conserver à la Maison de Moulins, excitaient ces troubles et provoquaient ces démarches.
François de Sales, si éloigné des considérations humaines et des questions d'intérêt, ne
comprenait pas bien qu'on pût «attribuer a injustice la sortie d'une personne d'un lieu ou elle n'estoit
pas obligee de demeurer, ni la translation d'un'autre, pourveu qu'elle laissat en sa place une
personne qui luy succedat avec suffisante capacité d'exercer sa charge1380.» Il envoya, en juillet, la
Sœur Paule-Jéronyme de Monthoux1381 pour remplacer à Moulins la Mère de Bréchard, avec la
Sœur Françoise-Jacqueline de Musy pour compagne1382. Leur arrivée ne fit qu'envenimer les
choses. On enferma même pendant dix jours la jeune veuve au château de la Ville pour l'empêcher
de partir. Peut-être ces arrêts n'étaient-ils pas tout à fait contre le gré de la prisonnière! «J'eusse
grandement souhaité qu'elle n'eût bougé de notre maison,» écrivait la Sainte à M. de Palierne1383,
«assuré que l'on doit être que c'est un lieu où l'on ne force personne; mais bien, puisque Dieu a
permis cela, patience! Nous vous supplions toutefois que, puisqu'elle est résolue de continuer sa
bonne volonté, elle y retourne au plus tôt.»
La Mère de Bréchard ne savait quel parti prendre. Sa parole était donnée à l'Evêque de
Nevers pour aller elle-même commencer la fondation; son Supérieur, l'Evêque de Genève, l'avait
désignée pour cela. Elle écrivit à Annecy; nous avons plusieurs lettres du Saint en réponse à cette
communication1384. M. Michel Favre, qui conduisait la Mère de la Roche et ses compagnes en
France1385, en parla à Paris; la Mère de Chantal prit aussitôt la plume: «J'ai appris par l'aumônier
de Monseigneur de Genève,» dit-elle, «ce qui se [433] passe à Moulins contre le dessein de la
fondation de l'une de nos Maisons à Nevers. Vrai Dieu!... que ces soulèvements ont touché mon
cœur!» Et mettant le doigt sur la plaie: «Quoi! il n'est question que d'argent! Et qu'est-ce que cela?
Si Mme du Tertre en veut plus donner à Moulins qu'à Nevers, au nom de Dieu soit-il! cela nous est
indifférent; nous chérissons nos Maisons également, et la chère dame sait bien que c'est son pur
mouvement qui l'avait portée à Nevers. Si maintenant elle est persuadée par d'autres raisons et
1375 Idem, 21 juin 1620 (ibid., p. 430).
1376 Vide supra, p. 263.
1377 Hist. de la Fondation, par la Mère de Chaugy.
1378 Vide pp. 237, not. (784), et 286, not. (935).
1379 Vide p. 292, not. (947).
1380 Epist. MDCLXXXV, p. 293.
1381 Vide p. 365, not. (1152).
1382 Vide p. 288, not. (938).
1383 Lettre du 24 juillet 1620 (vol. I, p. 447).
1384 Epistol. MDCLXXXII, MDCLXXXIV, MDCI.XXXV.
1385 Vide p. 270, not. (891).
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inclinations, qu'elle les suive; mais je vous supplie que ce soit en sorte qu'il ne s'ensuive point de
brouillerie ni de procès1386. »
Le nœud de l'affaire, en effet, c'étaient ces trente mille francs promis, dont dix mille avaient
déjà été dépensés. Les amis du Monastère de Moulins, par un zèle qui n'avait rien de désintéressé,
n'entendaient pas qu'on portât ailleurs ces ressources, et Mme du Tertre écoutait volontiers de tels
conseillers. «Quand les intérêts particuliers se fourrent parmi nos affaires,» continuait la Mère de
Chantal, «ils nous font bien souffrir!» S'adressant à Mme du Tertre elle-même1387: «Eh bien!» écrit-
elle, «vous avez ouï et reçu des raisons et persuasions qui vous ont été faites pour demeurer à
Moulins. J'en serais consolée si tout se fût passé paisiblement; car, quel intérêt en tout cela?...
L'une des Maisons nous est chère comme l'autre, et nous ne demandons, sur toutes choses, que la
paix pour vivre tranquillement en nos petites observances. C'est pourquoi, ma très chère Fille, je
vous conjure que, pour éviter les maux et embarrassements que je prévois, vous laissiez à la
Maison de Nevers ce que vous lui avez déjà donné irrévocablement, et ce que vous ne pouvez lui
ôter sans faire soulever de grandes mutineries en ce lieu-là: chose qui nous serait insupportable et
nous ferait tout quitter...Il restera assez à Moulins, et la Supérieure que Monseigneur de Genève a
envoyée vous donnera pleine satisfaction, n'en doutez point.»
La solution indiquée par la Sainte était conforme, pour le partage des biens, à celle que
donna quelques jours plus tard François de Sales1388: que Mme du Tertre demeure à Moulins avec
ses vingt mille francs, et que les dix mille autres, déjà employés, appartiennent à la Maison de
Nevers. Restait à décider le choix de la Supérieure fondatrice de Nevers. L'avis de la Mère de
Chantal était que les obédiences fussent suivies1389; le Saint inclinait aussi pour ce parti. Mais si la
future Sœur Marie-Aimée de Morville avait renoncé à [434] son premier projet, c'était surtout
parce que, voyant les oppositions de la Ville, elle croyait que la Mère de Bréchard demeurerait en
Bourbonnais. Elle pousse à la roue et travaille si bien pour arriver à ses fins, qu'une seconde fois
la condescendance des saints Fondateurs surnage au-dessus de toutes les difficultés; l'échange des
obédiences est autorisé, mais l'Evêque de Genève demande cependant pour la Mère de Bréchard
un séjour «d'un mois ou deux» à Nevers1390, afin d'aider à l'installation. Quand sa lettre, datée du
26 juillet, arriva, la question était déjà tranchée. Il avait fallu précipiter les événements; sur le
conseil du R. P. Foissey, Recteur des Jésuites1391, et du Supérieur du Monastère de Moulins1392, la
Mère Paule-Jéronyme était partie secrètement pour Nevers, avec les Sœurs Marie-Hélène de
Chastellux1393, Françoise-Jacqueline de Musy, Marie-Péronne de Gerbais, Marie-Marthe
Bachelier et Jeanne-Elisabeth Brugerat. Elles arrivèrent le soir du 22 juillet; le lendemain, l'Evêque
fit la cérémonie de l'établissement et donna l'habit à une des filles de M. Bonsidat et à une nièce
de M. de Lange; le P. Lallemant1394 prêcha.
Les deux Mères de Bréchard et de Monthoux payèrent cher leur abnégation. La première,
blâmée par ceux de Nevers comme leur ayant manqué de parole, se voyait à Moulins en butte aux
calomnies: on lui attribuait faussement «le dessein premier de Mme du Tertre;» on l'accusait d'avoir
eu «de grandes passions pour aller à Nevers» et de s'être montrée «trop inflexible et sensible sur
la rupture de ce dessein1395;» des esprits «plus curieux que charitables» allaient plus loin, et
semaient contre la vénérable Mère les bruits les plus injustes1396.
La seconde, qu'on n'attendait pas à Nevers, fut accueillie très froidement par Messieurs de
la Ville. «Elle leur parut si jeune qu'ils disaient hautement qu'on leur avait envoyé une enfant pour
1386 Lettre à M. de Palierne, 22 juillet 1620 (vol. I, p. 441).
1387 Lettre du 22 juillet 1620 (ibid., p. 444).
1388 Epist. MDCLXXXII.
1389 Lettres, ibid., pp. 443, 445, 448.
1390 Epist. MDCLXXXIII, p. 286.
1391 Vide p. 286, not. (934).
1392 Claude Feydeau (voir tome XVII, notes (881), p. 255, et (886), p. 258.)
1393 Vide p. 368, not. (1158).
1394 Vide p. 43, not. (191).
1395 Lettres de Ste J.-F. de Chantal, vol. I, pp. 443, 463, 467.
1396 Vide supra, p. 311.
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30.7 Page 297

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être Supérieure de ce nouvel établissement; ils lui demandaient son âge et combien il y avait qu'elle
était Religieuse, et plusieurs choses de cette nature qui marquaient le peu de succès qu'ils se
promettaient de sa conduite1397
L'une et l'autre eurent une vertu plus forte que les épreuves. François de Sales conseille à
la Mère de Bréchard1398 de relire «le chapitre De la Patience, de Philothee.» A la Mère de
Monthoux, la Sainte répète1399: «Mon Dieu, ma très chère Fille, pourquoi [435] vous étonnez-vous
de toutes les petites contradictions? N'en ayez pas la moindre émotion du monde. Nous sommes à
Dieu, rien ne nous arrivera que selon son bon plaisir. Eh bien! quand l'on nous renverrait d'où nous
sommes venues, s'en faudrait-il troubler? Nullement, ma Fille. Faites donc en paix vos petites
affaires, et ne vous troublez de rien, quand tout renverserait.»
C'est que tout, en effet, était prêt de renverser. Les protecteurs du Monastère de Moulins,
non contents de la somme qu'on lui abandonnait, réclamaient encore les dix mille francs qui avaient
été livrés et employés à Nevers. Ceux de Nevers, l'Evêque en tête, invoquant la promesse
authentique de Mme du Tertre, demandaient le total des dix mille écus. Personne ne voulait céder,
et l'affaire menaçait d'être portée devant la justice. Le Saint, averti plutôt que consulté par la dame
bienfaitrice, déclare que son vœu subsiste1400; et la Mère de Chantal multiplie ses lettres pour parer
le coup qu'elle redoute: «Il faut, s'il vous plaît, contenter Monseigneur de Genève et le croire,»
écrit-elle à Mme du Tertre1401, «car pour nous, nous ne voulons avoir ni débat, ni procès; nous
quitterions plutôt cent fois autant que ce que vous donnez, estimant incomparablement davantage
la paix avec la sainte pauvreté, que tous les biens du monde et le moindre trouble... Or sus donc,...
qu'il ne se parle plus de tout cela, s'il vous plaît, puisque vous avez le sentiment de Monseigneur
de Genève et son avis; car nos pauvres Sœurs des deux Maisons sont affligées d'entendre parler de
choses qu'elles n'ont pas accoutumé d'ouïr.» Et quatre jours après, elle expose les choses avec sa
logique et sa clarté ordinaires à M. de Palieme1402, soutient le conseil donné par le Saint, supplie
d'accepter ce moyen terme, et conclut1403: «Si après toutes ces raisons et prières très humbles, Mme
du Tertre et ceux de Moulins veulent agir contre ceux de Nevers, qu'elle fasse ce qu'il lui plaira;
mais pour nous, nous n'attaquerons ni ne nous défendrons. A Dieu ne plaise que nous le fassions!
Monseigneur de Genève m'avouera; et plutôt, je m'assure, l'on quitterait tout d'une part et d'autre.»
Les deux Supérieures de Moulins et de Nevers apaisèrent elles-mêmes leurs amis, et les amenèrent
à acquiescer aux décisions de l'Evêque de Genève et de la Mère de Chantal. Mme du Tertre, devenue
au mois d'août Sœur Marie-Aimée de Morville, écrivait enfin, vers le 9 novembre, «une lettre toute
d'or» à saint François de Sales1404, annonçant qu'elle laissait absolument à Nevers ces dix mille
[436] francs, objet de tant de contestations. La Maison de Nevers paya même à celle de Moulins
la rente des mille écus qui lui avaient été par elle avancés, jusqu'à ce qu'elle pût rembourser le
capital. On verra, dans la suite de la correspondance, le Fondateur s'employer avec zèle pour
enlever à ses Filles toute ombre de propre intérêt, et protester avec énergie qu'il préférait à un
avantage temporel, quel qu'il fût, la parfaite union fraternelle. Ses leçons furent comprises, et les
Mères de Bréchard et de Monthoux se montrèrent dignes de leur Père et prêtes à tous les sacrifices.
[437]
1397 Hist. de la Fondation.
1398 Epist. MDCLXXXII, p. 287.
1399 Lettre du 9 août 1620 (vol. I, p. 457).
1400 Epist. MDCXCIII, p. 308.
1401 Lettre du 11 août 1620 (vol. I, p. 438).
1402 Page 460.
1403 Page 463.
1404 Vide p. 381.
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Glossaire des locutions et des mots surannés ou pris dans
une acception inusitée aujourd'hui1405
(L'astérisque désigne les mots qui ont paru dans le Glossaire des tomes précédents.)
*A pour dans (p. 160, lig. 5), dans la (p. 345, lig. 3), de (pp. 12, lig. 24; 57, lig. 5; 125, lig. 26,
etc.), en (pp. 122, lig. 28; 147, lig. 14; 211, lig. 21, etc.), par (p. 191, lig. 3), pour (pp. 1, lig. 2; 41,
lig. 3; 98, lig. 15, etc.), selon (p. 300, lig. 4).
A BEAUCOUP DE FAVEUR comme une grande faveur (p. 148).
A BONHEUR comme un bonheur (p. 292).
*ACCOISER (s') s'apaiser, se tranquilliser (pp. 71, 113).
*ACCOMMODÉ pour pourvu (p. 152).
*ACCOMMODER pour arranger (p. 146), pourvoir, pourvoir à (pp. 286, 400).
*ACCOYSEMENT apaisement (p. 71).
*ACCOYSER apaiser, calmer (pp. 12, 62, etc.) Cf. le lat. ACQUIESCERE.
ACCREUES (estre) pour avoir crû (p. 410).
*A CE pour le (p. 302).
*ACTION pour cérémonie, fonction ecclésiastique (p. 104), manière d'agir (p. 356).
*A DIRE (les) ce qu'il y a à dire, les objections (p. 239).
*ADVANTAGE, AVANTAGE (a 1') pour d'avance, à l'avance (pp. 183, 197).
*ADVENTURES pour manière de vivre (p. 152).
*AFFECTION pour désir (pp. 234, 286).
*AFFECTIONNÉ pour ardent, instant (p. 99).
*AFFECTIONNEMENT affectueusement, avec affection (pp. 57, 148).
*AFFECTIONNER pour avoir à cœur, désirer ardemment (pp. 99, 304, 372).
AFFECTIONS pour sentiments d'affection, de dévouement (p. 274).
AHURTEMENT aheurtement (p. 232). [439]
AHURTER (s') se contrecarrer, se disputer (p. 120).
*AINS au contraire, de plus, et même, mais, même.
*AINSY QUE pour au moment où, comme (p. 236).
*ALANGOURI languissant, rendu languissant (pp. 90, 130).
*ALLENTIR modérer, ralentir (p. 195).
AMASSEES pour réunies (p. 103).
A MESME DE CE QUE autant que (p. 279).
*AMIABLE aimable (pp. 18, 40, 42, etc.)
*AMIABLEMENT aimablement, doucement (pp. 13, 40, 257, 354).
*A PEU QUE peu s'en faut (p. 26).
*APPAREIL pour costume, extérieur (p. 202).
*APPREHENSION pour manière de voir, persuasion (p. 227).
APPRIS (estre) pour être instruit (p. 7).
APPUYER pour aider (p. 29), servir d'appui à, soutenir (p. 211).
*ARRESTER pour demeurer (p. 246).
ASSEURANCE pour sûreté (p. 70), fermeté, constance (p. 123).
ASSEURANCE DE PARTI assurance au sujet d'une charge (p. 176).
*ASSEURÉ pour sûr (p. 43), fidèle, dont on peut être sûr (p. 364).
1405 Nous n'avons pas songé à dresser ici, pour ce volume, en toute rigueur scientifique, le Lexique de saint François
de Sales. Un tel travail, à peine est-il besoin de le dire, ne pourra être établi qu'après l'achèvement de cette publication.
Notre but a été surtout de rendre provisoirement service aux lecteurs français ou étrangers qui seraient peu familiarisés
avec les particularités du vieux langage. On voudra bien, en se servant de ce recueil, se souvenir de la pensée d'ordre
tout pratique qui l'a inspiré.
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*ASSEUREMENT pour d'une façon sûre (pp. 56, 70), avec assurance, sans hésitation (p. 216),
véritablement, sûrement (p. 300).
*ASSEURER pour affermir (p. 196).
*ASSEURER (s') pour avoir confiance, être persuadé, être sûr, se persuader (pp. 7, 308, 311,
etc.)
*ATANT là-dessus (p. 306).
*ATTACHÉ pour occupé fortement (p. 252).
*AU pour dans le (pp. 265, lig. 7; 402, lig. 16), le (pp. 227, lig. 13; 340, lig. 28).
*AUCUNEMENTpour quelque peu, tant soit peu (pp. 63, 120, 298, 328).
*AUPARAVANT pour avant (p. 76).
*AUQUEL pour avec lequel, dans lequel (pp. 71, 100, 354), (pp. 291, 402).
*AUTANT pour aussi (p. 65).
*AVANT QUE DE avant de (pp. 71, 201, 262, 398).
*AVENTURE (a 1') pour peut-être (p. 236).
*AVETTE abeille (pp. 18, 22, 60, etc.)
AVOIR A PLAYSIR avoir pour agréable (p. 40).
*BAILLER donner (p. 287).
*BANDER pour appliquer fortement, tenir attentif (p. 377).
*BELLEMENT (tout) tout doucement, tranquillement, avec calme (pp. 125, 126, 196, 361).
*BENITE pour bénie (pp. 30, 53, 59, etc.)
*BIEN pour avantage, plaisir, bonheur (pp. 113, 167, 215, 228, etc.)
*BIGEARRE, BIGEARRERIE bizarre, bizarrerie (pp. 109, 377).
*BONNEMENT pour vraiment (p. 72), facilement (pp. 147, 175, 225, etc.)
*BRIEFVE pour prompte (p. 372).
BRONCHARD sujet à broncher, à faillir (p. 196).
CALAMITE nom donné autrefois à l'aimant (p. 157).
*CARESSE, CARESSES pour accueil bienveillant, démonstrations d'amitié (pp. 20, 31, 352,
etc.)
*CARESSER pour traiter avec bienveillance, faire bon accueil (pp. 22, 256).
*CARMELINE Carmélite (p. 40).
CARMELITE pour Carme (p. 409).
*CE pour cela (pp. 111, lig. 3; 314, lig. 4, etc.), on (p. 183, lig. 2).
*CEANS ici (pp. 44, 405, 407).
*CE PENDANT, CEPENDANT pour en attendant (pp. 8, 47, 289, etc.), pendant ce temps (p.
377).
*CE QUE pour en ce que (p. 131).
CE QUE C'EST DE L'ESPRIT les choses spirituelles (p. 201). [440]
CEREMONIALE qui regarde les cérémonies (p. 103).
CHAGRIN pour esprit chagrin (p. 147).
*CHAMS (aux, es) pour à la campagne (pp. 133, 279).
CHANGÉ (s'estre) pour avoir changé, s'être transformé (p. 44).
*CHAUT (il ne m'en) il ne m'importe (p. 135); indicatif présent de l'ancien verbe chaloir.
*CHEF (a) à bout (p. 120).
*CHEVIR venir à bout (p. 215).
*CLAUSURE du lat. CLAUSURA, clôture.
*COGITATION du lat. COGITATIO, pensée, dessein (pp. 110, 160, 296, 376).
*COL pour cou (p. 193).
*COLLOQUER du lat. COLLOCARE, placer (pp. 341, 354).
*COMBIEN QUE bien que, quoique (p. 227).
*COMME pour comment (pp. 8, 197, 239, etc.), de ce que (p. 154), que (p. 29).
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30.10 Page 300

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COMME SEULEMENT pour seulement pour ainsi dire (p. 69).
*COMMODITÉ, COMMODITÉS pour occasion favorable, facilité (p. 149), succès, réussite
(p. 161), biens, richesses (p. 290).
*COMMUNIER (se) pour communier (p. 101).
COMMUNIQUER (en) pour en parler (p. 290).
COMPLAYSANS pour sentiments de complaisance (p. 134).
*CONCURRIR du lat. CONCURRERE, concourir, contribuer (p. 22).
*CONDITIONNÉ pour pourvu des qualités requises (pp. 308, 375).
CONDOLEANCE pour compassion, commisération (p. 383).
CONDUITTE pour manière de gouverner, direction (p. 35).
CONILLÉ participe passé de l'ancien verbe conniller, user de subterfuges (p. 233). Voir le
Dictionre de Godefroy.
*CONJUNCTION du lat. CONJUNCTIO, union (p. 114).
CONNOISSABLE facile à reconnaître (p. 109).
*CONSIDERABLE pour digne d'attention, de considération pp. 70, 112), à considérer (p.
233).
CONSPIRATION pour entente (p. 244).
CONSTITUS constitut, contrat de droit romain qui obligeait au payement d'une somme
d'argent (p. 183).
*CONTE, COMTE pour compte.
*CONTÉ pour compté (p. 116).
*CONTESTE pour lutte, contradiction (p. 340).
CONTOURNÉ A pour incliné à, tourné vers (p. 173).
*CONTRAIRE (au) pour à l'encontre, le contraire (pp. 13, 104).
CONTRARIANT pour contraire, opposé, répugnant (p. 239)
CONTRECHANGE compensation, échange (p. 88).
*CONTRECHANGÉ compensé (p. 337).
*CONTREROLLÉ contrôlé (p. 35).
*CONTRIBUER pour aider de (pp. 47, 55, 63), aider par (p. 113), ajouter (pp. 50, 116),
apporter (pp. 220, 293, 305), donner, donner pour (pp. 148, 160), faire pour sa part (p. 175).
*CONVERSATION pour société, compagnie (pp. 95, 401).
*COPIE pour exemplaire (p. 237).
CORRIVAL rival (p. 153).
*COULPE du lat. CULPA, culpabilité, faute (pp. 67, 405).
COURAGE PRETENDANT pour ambition (p. 216).
*CREANCE pour assurance (p. 117).
CURIEUSEMENT pour avec affectation, subtilement (p. 192).
*DAMOYSELLE (voir MADAMOYSELLE) appellation usitée jadis à l'égard de toute femme
mariée qui n'était pas noble, ou qui, étant noble, n'était pas titrée (p. 70).
*DANS pour à (p. 358), sur, vers (p. 143).
DANS DEUX JOURS pour deux jours après (p. 405). [441]
*DE pour à (pp. 177, lig. 32; 189, lig. 3; 313, lig. 8, etc.), dans (p. 6, lig. 26), en (pp. 143, lig.
3; 228, lig. 9), explétif (p. 82, lig. 14).
*DEÇA (de) d'ici, de ce pays (pp. 55, 80, 247, etc.)
DEÇA LES (de) de ce côté-ci des (p. 351).
DECEU pour trompé (p. 308).
*DEDANS pour dans (pp. 74, 113, 164, etc.)
DEFORMITÉ du lat. DEFORMITAS, difformité (p. 379).
*DELA (de) de cette région (p. 311), près de vous, de votre côté (p. 153), là-bas (pp. 175, 195),
qui sont près de vous (p. 303).
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31.1 Page 301

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DEPARTEMENT DE PLAT distribution, répartition de vivres, d'aliments (p. 152). Cf. le
Dictionre de Godefroy.
*DEPESCHE, DESPECHE pour pièce, expédition (p. 82), réponse (p. 403).
*DEPESCHER pour congédier, renvoyer avec des messages (p. 171).
*DES pour depuis (p. 353).
DES-AYMER cesser d'aimer (p. 327).
*DESCHAUX déchaussé, sans chaussure (p. 399).
DESCHEÛ pour affaissé (p. 53).
DESCRI état de ce qui est décrié (p. 121).
DESENGOURDI dégourdi (p. 147).
*DESFIANCE pour crainte (pp. 152, 178).
*DESHONNESTE pour malséant (p. 405).
*DES ICY d'ici, de ce lieu (p. 196).
*DES IL Y A depuis (pp. 135, 228, 268, 348).
DESPITER pour se dépiter (p. 196).
DESPLAIRE (en) pour déplaire (p. 405).
*DESPROUVEU dépourvu (p. 120).
DESROMPU rompu à, accoutumé (p. 147).
*DESSEIGNÉ projeté (p. 260).
*DESSOUS pour sous (p. 13).
DESVOYEMENT état de ce qui est dévoyé (p. 305).
*DEVANT pour avant, auparavant, ci-devant (pp. 44, 98, 105, 138).
*DILATER du lat. DILATARE, étendre (p. 10).
*DIVERTIR du lat. DIVERTERE, détourner, distraire, empêcher (pp. 43, 104, 252, 290).
*DORES-EN-AVANT dorénavant (p. 98).
*DOULOIR (se) se plaindre (p. 285).
*DOUTER du lat. DUBITARE, craindre, redouter (pp. 89, 268).
*DRESSER pour diriger (p. 106), établir, fonder (p. 171).
*DU pour au (pp. 90, lig. 21; 126, lig. 10).
*DU DESPUIS depuis, depuis lors (p. 293).
*DU TOUT pour absolument, entièrement, tout à fait (p. 160).
*EMINENT pour imminent (p. 268).
*EMMI entre, au milieu de (pp. 90, 158).
*EMPLOITE, EMPLOYTE emploi (pp. 287, 292).
*EN pour à (pp. 11, lig. 15; 146, lig. 2; 174, lig. 3; 343, lig. 24, etc.), de (p. 206, lig. 5), sur,
sur la (pp. 10, lig. 31; 16, lig. 1; 273, lig. 5).
*EN ÇA jusqu'à présent, jusqu'ici (pp. 225, 352). Cf. l'ital. IN QUA.
*ENCOR (pour) pour le moment (pp. 231, 243, 332).
ENDOMMAGER pour causer du dommage à (p. 258).
*ENDROIT (en cest) pour en cela, en cette circonstance (p. 93).
ENFERMEMENT réduction en clôture (p. 158).
EN HAUT (d') pour de haut (p. 196).
*EN LIEU pour au lieu, à la place (pp. 203, 237, 400).
*ENSEMBLEMENT ensemble (pp. 42, 285).
ENSUIVRE (s'en) s'ensuivre (p. 262).
ENTENDRE EN pour entendre (p. 241). [442]
*ENTRE CI ET..., ENTRE CI ET LA d'ici à, d'ici là (pp. 32, 146).
*ENTRETENEMENT entretien (pp. 161, 351).
*ENVERS pour auprès de (p. 84).
*ENVIELLI, ENVIELLY vieilli, devenu vieux (pp. 181, 194).
ESCIENT (a bon) pour de la bonne façon (p. 121).
301/341

31.2 Page 302

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ESCLARCIR (s') pour s'expliquer (p. 310).
ESCLARCIR DES pour éclaircir sur les (p. 228).
*ESLARGIR pour s'étendre, se répandre largement (p. 208). Du lat. ELARGIRI.
*ESSAYER (s') pour essayer (pp. 12, 153, 226, etc.)
*ESTABLERIE étable (p. 295).
*ESTABLIR du lat. STABILIRE, rendre stable, affermir (p. 312).
ESTABLIR (s') pour s'affermir (p. 98).
ESTABLISSEMENT pour affermissement (p. 409).
*ESTONNÉ pour saisi, impressionné (p. 387).
*ESTRE DE CROIRE être cru (p. 101).
*ETERNITÉ (a toute) pour toute l'éternité, éternellement (pp. 10, 218).
*ET SI pour et de plus, et encore (pp. 5, 133, 223), et cependant (pp. 20, 161).
*EVENEMENT pour issue, résultat (pp. 351, 412).
EXCEPTÉ (estre) pour avoir des exceptions, des dispenses (p. 308).
EXPLANÉ aplani (p. 13). Du lat. EXPLANARE.
FAÇONNÉ pour policé, qui a de bonnes manières (p. 244).
*FAIRE pour avoir (pp. 19, 81, 242, 377), causer (p. 89), donner (p. 365).
FAIRE L'HIVER passer l'hiver (p. 334).
*FAUTE (a) faute, à défaut (p. 401).
FIN MOINS (tout au) tout au moins (p. 308).
*GARDER pour se garder (pp. 12, 174).
*GRACIEUX, GRATIEUX pour agréable, doux (pp. 218, 400).
*GRADE du lat. GRADUS, degré (p. 314).
GRATIFICATION pour agrément, bienveillance (p. 181).
GRATIFIER pour favoriser (p. 269).
GRILLE pour gril (p. 314).
HABILITÉ pour aptitude, intelligence (p. 243).
HARDIMENT pour avec confiance, sans crainte (pp. 203, 240).
*HASTIVEMENT pour en hate, promptement (pp. 313, 334).
HEBDOMADAL hebdomadaire (p. 301).
*HUMANITÉ pour faiblesse (p. 104).
*ICY pour ci (p. 205).
*IMPERTINENCE chose déplacée, hors de propos (p. 69).
*IMPERTINENT pour déplacé, déraisonnable, hors de propos (pp. 109, 233). Négatif de
pertinent (lat. PERTINENS), à propos.
*IMPETRER du lat. IMPETRARE, obtenir par supplications, attirer, demander (pp. 144, 395).
IMPRESSE impression (pp. 170, 378).
INDISPOSÉ pour qui manque des dispositions requises (p. 379).
INSCRIPTION pour suscription (p. 128).
*INSTINCT pour intention, sentiment (p. 348).
*JOINTE pour unie (p. 401).
*JUSQUES A TANT QUE jusqu'à ce que (p. 119).
*LANGUIDEMENT languissamment (p. 341).
*LE pour pendant le (p. 125, lig. 18).
LIAYSON pour assujettissement (p. 239). [443]
302/341

31.3 Page 303

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*MADAMOYSELLE (voir DAMOYSELLE) (pp. 2, 4, 29, etc.)
*MAL EN POINT en mauvais état (p. 399).
*MANQUEMENT pour défaut, privation (pp. 15, 149), faute (p. 170), faiblesse (p. 203),
manque (p. 70).
MARQUER pour désigner (p. 137).
*MARRI, MARRY fâché, peiné.
MEILLEUR pour plus facile (p. 161).
MESCROIRE croire à de mauvaises intentions, se défier (p. 158).
MESDIRE pour médisance (p. 82).
*MESHUY désormais, maintenant (pp. 111, 115, 242, etc.)
*MESME pour d'autant plus (p. 149).
*MESNAGE pour économie (p. 98).
*MESNAGER pour choisir, hésiter (p. 233).
*MEUBLE pour objet (p. 21).
MEURETÉ maturité (p. 188).
*MODESTIE pour réserve, retenue (p. 382).
MOUVOIR (se) pour s'émouvoir (p. 89).
*MURMURATION plainte, murmure (p. 34).
MUTATION pour changement (pp. 15, 327).
*NOURRIR pour élever (pp. 181, 369, 382).
*NUISANCE pouvoir de nuire (p. 124).
OBLIGEANT pour qui oblige à la reconnaissance (p. 162).
OBTENU (estre) pour à obtenir (p. 402).
OCCASION pour raison (p. 152).
OCCURRIR arriver, survenir (p. 255).
*OFFICE (faire, faire l') intervenir, faire ce qui est nécessaire (pp. 84, 295).
OPINIASTRER pour soutenir avec opiniâtreté (p. 101).
*ORATEUR titre que prenaient autrefois les gens d'Église écrivant a des souverains (pp. 56,
85, 162, etc.)
ORDONNER POUR donner des ordres pour (p. 81).
*OR SUS or donc, eh bien; parole d'encouragement. Cf. l'ital. ORSÙ.
*PAR pour pendant (p. 410).
*PAR APRES ensuite, dans la suite, plus tard (pp. 15, 55, 80, etc.)
PAR CHEMIN pendant le voyage (p. 32).
*PAR DELA au-delà des monts (p. 136), de votre côté (pp. 81, 372), là où vous êtes (p. 48).
*PARMI, PARMI LE pour au milieu de, du (pp. 206, 248, 293), avec (p. 201), dans (p. 290),
durant, pendant (pp. 80, 83, 391).
*PASSER (se) pour passer (p. 169).
PASSION pour affection, attachement (pp. 118, 164).
*PATERNISER ressembler à son père (p. 242).
PEUPLÉ pour fourni, touffu (p. 121).
PIECE pour raison (p. 191).
*PLUS pour le plus (p. 315).
*POINT pour ne point (p. 151), peut-être (pp. 126, 153).
POINT DE pour aucune (p. 378).
*PORTION pour partie (pp. 91, 272, 273, etc.)
*POUR pour sur le point de (p. 153).
POUR UN PEU un peu (p. 371).
POUR VOIR pour en voyant, parce que je vois (p. 88).
303/341

31.4 Page 304

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*PREPARATOIRE pour préparation (p. 243).
*PREFIGER du lat. PRAEFIGERE, fixer d'avance (p. 198).
PRENDRE CREANCE croire (p. 114).
PRETENTION (estre en) espérer, prétendre (p. 202).
*PRINS participe passé du verbe prendre (p. 57).
*PROPOSITION pour propos, résolution (p. 3).
*PROSPERER pour faire prospérer (pp. 64, 85).
*PROU assez, beaucoup, bien (pp. 44, 106, 309). [444]
*PROUVOIR du lat. PROVIDERE, pourvoir (pp. 119, 120, 327, etc.)
*QUAND pour quant (pp. 134, 151).
*QUANT HT QUAND, QUANT ET QUANT en même temps (pp. 86, 334).
*QUANT ET SOY avec soi (p. 401).
QUARTIER pour pays (pp. 99, 154).
*QUE pour au bout desquels, après lesquels (p. 183, lig. 15), ce que (pp. 245, lig. 17; 253, lig.
17), de ce que (p. 281, lig. 16).
*QUE C'EST QUE pour ce que c'est (p. 13), ce que (p. 118).
QUE D'AVOIR (ne pourront) ne pourront moins faire que d'avoir (p. 344).
*QUE L'ORDINAIRE pour qu'à l'ordinaire (p. 310).
*QUI pour ce qui (pp. 135, lig. 13; 205, lig. 10), celui qui (p. 314, lig. 34).
*RAFFRAICHIR pour rappeler, renouveler (p. 118).
*RAMENTEVOIR faire ressouvenir (p. 118).
*RECHARGE pour renouvellement, nouvelle instance (p. 248).
*RECIT pour parole, enseignement (p. 106).
RECOMPENSER pour dédommager (p. 385).
*REFORMATION du lat. REFORMATIO, réforme (pp. 55, 80, 165, 246, etc.)
REFORMÉ (tout) dont la conduite n'a pas besoin de réforme (p. 223).
*REGARD (pour ce) pour à cet égard, pour ce sujet (p. 293).
*RELIGION pour état religieux, vie religieuse (pp. 216, 239, 248, etc.), Ordre religieux (pp.
312, 402).
*REMONSTRÉ pour exposé (p. 136).
*RENCONTRE (au) à la rencontre (p. 237).
RENOUVELLEMENT pour rénovation (p. 111).
*REPLIQUER du lat. REPLICARE, répéter (p. 39).
*RESALÙER pour saluer (p. 388).
*RESERVEMENT avec réserve (p. 7).
RESIGNATION pour abandon (p. 126).
RESIGNER pour soumettre (p. 164).
*RESSENTIMENT pour action de ressentir, sentiment (pp. 134, 262).
*RETIREMENT recouvrement (p. 259).
*REUSCIR pour devenir (p. 195), résulter (p. 294), sortir, triompher (p. 412).
REUSCIR (en) pour en venir à bout (p. 80), en revenir (p. 341).
*REVA (s'en) s'en retourne (pp. 82, 279).
RIEN PLUS (que) qu'il ne se peut mieux, qu'il ne se peut davantage (pp. 126, 388).
RIEN QUE SOIT rien que ce soit (p. 409).
RUDE pour inculte, grossier (p. 350)
*SCRUPULE pour doute (p. 316).
*SEMONDRE inviter, solliciter (p. 60).
*SENTIMENT pour peine (p. 136).
SENTIR (se) pour se ressentir (p. 105).
304/341

31.5 Page 305

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*SI pour cependant, toutefois (p. 406, lig. 6).
*SI EST-CE QUE pour cependant, toutefois (pp. 58, 279, 297, etc.), il n'en est pas moins vrai
que (p. 216), néanmoins (pp. 253, 396).
*SI FAUT locution affirmative (p. 106).
SI FAUT IL oui vraiment, il faut (p. 8).
*SI MOINS sinon (p. 388).
*SOIGNEUX pour en souci, soucieux (p. 255).
*SOUDAINEMENT pour promptement (p. 12).
*SOUVENANCE souvenir, mémoire (pp. 4, 15, 180, etc.)
*SOUVENTES FOIS souvent, maintes fois (p. 357). [445]
*SPIRACLE du lat. SPIRACULUM, souffle (p. 124).
*SUFFISANCE du lat. SUFFICENTIA, capacité intellectuelle (p. 396).
*SUITE pour action de poursuivre, continuation (p. 313).
SUJETTE AU CHŒUR (se rendre) — s'assujettir aux exercices du chœur (p. 170).
*SUPPORT pour soutien, appui (p. 330).
*SUR pour au sujet de (pp. 56, lig. 12; 190, lig. 5; 296, lig. 3, etc.), d'après, suivant (p. 89, lig.
3), devant (p. 286, lig. 3), en (p. 44, lig. 5).
SUR LE pour à l'occasion du (p. 234, lig. 6).
*SUS ci-dessus (p. 287).
*TANDIS pour en attendant (pp. 3, 39, 195, etc.)
*TANT PLUS d'autant plus (p. 389).
*TENDRE pour douillet (p. 15), sensible, touché sensiblement (p. 72).
*TENDRETÉ du lat. TENERITAS, tendresse (p. 62), douilletterie (pp. 169, 376).
TERME (demander) demander un délai (p. 264).
*TIERCEMENT troisièmement (p. 152).
*TOUT A COUP pour tout à la fois (p. 384).
*TOUT AINSY QUE comme (p. 228).
TOUT FIN NUD sans vêtements suffisants (p. 399).
*TOUT MAINTENANT à l'instant (p. 308).
*TRAIT pour action, coup (p. 196).
TRANSMUER (un dessein) pour changer (p. 307).
*TRAVAIL pour peine, souffrance (pp. 62, 194, 340, etc.)
TRAVERSER pour contrarier (p. 111).
*TREILLE pour grille (p. 311).
TREMOUSSÉ (estre) être violemment agité (p. 51).
*TRICHERIE occupation de peu d'importance, bagatelle (p. 311).
*TROP PLUS extrêmement (p. 281).
VEILLANTE pour veillant, qui veille (p. 86).
VESTU (estre) pour avoir l'habit religieux (p. 367).
*VIEL pour vieux (p. 272).
*VISITATION du lat. VISITATIO, visite (p. 10).
*VOYREMENT effectivement (p. 337). [446]
305/341

31.6 Page 306

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Index des correspondants et des principales notes
biographiques et historiques de ce volume1406
ACARIE. Voir GENEVIÈVE DE SAINT-BERNARD,
MARGUERITE DU SAINT-SACREMENT, MARIE DE JÉSUS.
ACARIE Jean………………………………………………………..
ACARIE Pierre………………………………………………………
AGNES DE JESUS (des Lions de Theuvilie), Carmélite……………
ALBY Louis (d'), Cistercien. Voir SONNAZ. ALDOBRANDINI
Pierre *, Cardinal…………………………………………………….
ALEE François de l'………………………………………………….
ALEE François (de L'), seigneur de Songy………………………….
Alée Louis (de L'). Voir TOURNETTE. AMBASSADEURS. Voir
CŒUVRES et SCAGLIA. AMELOT Charles………………………
Amelot Jeanne-Catherine de Creil (dame)…………………………..
ANDELOT Antoine d'.………………………………………………
ANDELOT Claude d'..………………………………………………
ANDELOT Louis d'…………………………………………………
ANDILLY (Saint François de Sales à)………………………………
ANDILLY Robert Arnauld (seigneur d')……………………………
ANNECY. Voir COLONEL, CONSEIL DE VILLE, NOTRE-
DAME DE LIESSE, VISITATION. [447] ANSELME de Riom,
Capucin………………………………………………………………
Antonlotti Antoine, Jésuite. Voir INTRODUCTION À LA VIE
DÉVOTE…………………………………………………………….
ARGENSON Félicien de Boffin (seigneur d'). Voir BOFFIN………
ARGENTERO OU ARGENTIER Charles, Evêque de Mondovi…...
ARGENTERO OU ARGENTIER Georges…………………………
ARGENTERO OU ARGENTIER Philibert…………………………
Arnauld Angélique, Abbesse de Port-Royal. Voir ESTREES……….
ARNAULD Anne (Anne-Eugénie de l'Incarnanation, Religieuse de
Port-Royal)…………………………………………………………...
ARNAULD Anne de Saint-Paul, Religieuse de Port-Royal…………
Arnauld Antoine……………………………………………………..
ARNAULD Catherine-Agnès de Saint-Paul, Religieuse de Port-
Royal………………………………………………………………....
ARNAULD Catherine Marion, dame (Catherine de Sainte-Félicité,
Religieuse de Port-Royal)……………………………………………
ARNAULD Henri……………………………………………………
ARNAULD Marie (Marie de Sainte-Claire, Religieuse de Port-
Royal) ……………………………………………………………….
ARNAULD Simon…………………………………………………..
Pages 344
» 344
» 211
» 429
» 148
» 148
» 267
» 59, 59
» 153
» 153
» 153
»8
» 21
281
» 318, 318
» 257
» 80
» 224
» 225
» 2, 8, 14, 17, 21,
25, 50, 74, 102,
122, 123, 195, 270
»9
» 29
» 30, 30
» 22
»
» 28
» 123
»8
1406 Les pages des Lettres sont indiquées par des chiffres ordinaires; les caractères et les chiffres gras désignent les
noms des correspondants et leurs notes biographiques. Quant aux autres notes, leurs titres sont donnés en caractères
ordinaires.
Les noms suivis d'un astérisque * indiquent les auteurs ou les destinataires des pièces qui figurent à
l'Appendice.
Dans cet Index, on a donné aux personnages la désignation que leur attribue le texte des Lettres. (Cf. tome
XII, note (1239), p. 491.)
306/341

31.7 Page 307

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ARNAULD D'ANDILLY François………………………………… »
ARNAULD D'ANDILLY Robert. Voir ANDILLY. ARSENEY »
Anne-Marie, Religieuse de la Visitation…………………………….
AUGUSTINS DECHAUSSES……………………………………… »
AULPS (abbaye et Abbé d')………………………………………… »
BALLON Gaspard Perrucard (de), Abbé de Chézery. Voir »
CHEZERY…………………………………………………………..
Ballon Gasparde (de), Religieuse de l'abbaye de Sainte-Catherine…. »
Ballon Louise (de), Religieuse de l'abbaye de Sainte-Catherine……. »
BALLON Melchior Perrucard (de), seigneur de Léaz. Voir LEAZ… »
BALLON Pierre Perrucard (seigneur de Cusinens et de). Voir »
CHARMOISY……………………………………………………….
Bally Charles………………………………………………………… »
BARNABITES. Voir BOERIO, FAULDRIER, GUERIS,
POSCOLONNA, SALES...………………………………………….
BARNABITES à Beaune. Voir BEAUNE. BAUDRY (Baudri) »
François…………………...………………………………………….
BAY Jean-Antoine...………………………………………………… »
BEAUFORT Jeanne-Aimée (de). Voir PEYZIEU………………….. »
BEAUNE (Projet d'un établissement des Barnabites à)…………….. »
BELLECOMBE (curé de). Voir BLANCHIN.
Bellegande Roger de Saint-Lary (duc de)…………………………… »
Bellot Jeanne de Sirvinges (dame)…………………………………... »
Berchat Amédée, curé de N.-D. du Chastel…………………………. »
BERGER Pierre……………………………………………………... »
BERNEX (Berné) Marguerite de Savoie (dame de)………………… »
Beybin Etienne Jarcellat. Voir COADJUTORERIE, SAINT- »
GERMAIN DE LA CHÈVRE……………………………………….
BEYBIN Jean et Jean-Claude Jarcellat……………………………… »
BIDAL André...……………………………………………………... »
BLANCHIN Sébastien, curé de Bellecombe………………………... »
Blonay Claude de...………………………………………………….. »
Blonay Claudine (de), Abbesse de Sainte-Claire d'Evian…………… »
Blonay Marie-Aimée (de), Religieuse de la Visitation……………… »
BOEGE Françoise de Beaufort (dame de)………………………....... »
BOEGE Prosper de Montvuagnard (seigneur de)…………………… »
Boerio Jérôme, Général des Barnabites……………………………... »
BOFFIN Félicien (de), seigneur de Moydans……………………….. »
Bois (de Boys) François des…………………………………………. »
Bois (Boys) Jean-Antoine de Rossillon (seigneur du)………………. »
Boisy Jean-François de Sales (de). Voir SALES. BONFILS Horace.. »
BONNEUIL René de Thou (seigneur de)…………………………… »
BONNIERES Jean Angot (seigneur de)…………………………….. »
BONSIDAT (Mlles). Voir VISITATION DE NEVERS…………….. »
BONSIDAT Vincent. Voir VISITATION DE NEVERS »
BORGHESE Scipion Caffarelli*, Cardinal……………………….…
Borromée Frédéric, Cardinal, Archevêque de Milan………………... »
BOUT DE SAINT-DIDIER Marguerite (Marguerite-Séraphique,
Religieuse de la Visitation)…………………………………………..
Bréchard Jeanne-Charlotte (de), Religieuse de la Visitation. Voir »
VISITATION DE NEVERS…………………………………………
BRUN Etienne………………………………………………………. »
127
26
252
108
327
78
360
411
153
413, 413 [448]
187, 229, 236, 324
224
190
229
117
117
398
392, 392
67
329
139, 139
139
169
230
54, 168
164
91, 208, 362, 362
135
191
186
257
169
63, 114
234, 394
23
82
309
424
184 [449]
200
236, 285, 307
199
307/341

31.8 Page 308

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Buccio Antoine-Pie………………………………………………….. »
CAFFARELLI-BORGHESE Scipion. Voir BORGHESE. CAMUS »
(famille). Voir SAINT-BONNET……………………………………
Camus Jean-Pierre, Evêque de Belley. Voir CAPUCINS de Belley… »
CANDIDE (Don), Barnabite. Voir POSCOLONNA. CAPUCINS de »
Belley (couvent des)………………………………………………….
CARMEL (Troubles au sujet du gouvernement des Monastères du). »
Voir MARIE DU SAINT-SACREMENT……………………………
CARMEL d'Amiens (Sous-prieure du). Voir MARIE DE JÉSUS
Acarie.
CARMEL de Bourges………………………………………………. »
CARMEL de Lyon (Prieure du). Voir THÉRÈSE DE JÉSUS
Prud'homme………………………………………………………….
CARMEL d'Orléans (Prieure et Sous-prieure du). Voir MARIE DE
JÉSUS Acarie et THÉRÈSE DE JÉSUS de Pucheuil……………….
CARMEL de Saintes (Prieure du). Voir MARIE DU SAINT-
SACREMENT……………………………………………………….
CARMEL de Tours (Monastère et Prieure du). Voir MARGUERITE »
DU SAINT-SACREMENT Acarie………………………………….
CARMELITES. Voir AGNÉS DE JÉSUS, GENEVIÈVE DE
SAINT-BERNARD, MARGUERITE DU SAINT-SACREMENT,
MARIE DE JESUS, MARIE DU SAINT-SACREMENT, THÉRÈSE
DE JÉSUS……………………………………………………………
CAVORETTO (Cavoret) Louis…………………………………….. »
CERCENASCO (Sarsenas, Sarsenasq) Anne-Violante Parpaglia »
(dame de) ……………………………………………………………
CERISIER Aimée-Philiberte (de), Religieuse de l'abbaye de Sainte- »
Catherine……………………………………………………………..
CERISIER Françoise de (Françoise-Augustine, Religieuse de la »
Visitation……………………………………………………………..
CERISIER (membres de la famille de)……………………………… »
CERVIERES (Servières) Méraude de Saint-André [450] de (Marie-
Innocente, Religieuse de la Visitation)………………………………
CEYZÉRIEU (doyenné de)……………………………………….…. »
CHALAMONT. Voir VISITATION DE GRENOBLE……………..
Chalcédoine (Mgr de). Voir SALES (Jean-François)………………...
CHAMBÉRY (Projet d'érection d'un évêché à)…………………….. »
Chantal Jeanne-Françoise Frémyot (Sainte), Mère de. Voir »
FIESQUE, HAUDRIETTES, VINCENT DE PAUL, VISITATION
DE NEVERS………………………………………………………...
CHAPPAZ (Chappe) Jean…………………………………………... »
Charles-Emmanuel Ier*, duc de Savoie……………………………… »
CHARMETTES Jean-Claude Favre (seigneur des)…………………. »
CHARMOISY Françoise de………………………………………… »
385
68
46, 46, 68, 121,
123, 268, 276
47
349
349
25
137
235
181
181
181
407
81
160
5, 19, 31, 37, 49,
49, 53, 58, 58, 71,
100, 151, 170, 172,
188, 193, 194, 248,
250, 263, 265, 289,
302, 310, 334, 348,
352, 362, 381, 387,
401, 403
405
161, 230, 363,
419, 420, 423,
426, 428, 428
79
153
308/341

31.9 Page 309

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CHARMOISY Henri de…………………………………………….. »
CHASTEL Claude-Cécile, Religieuse de la Visitation……………... »
Chastel Péronne-Marie, Religieuse de la Visitation………………… »
Chastellux Marie-Hélène (de), Religieuse de la Visitation…………. »
CHATEAUNEUF Isabelle-Agnès (de), Religieuse de Port-Royal..... »
CHATELARD Pierre-François de Rossillon (seigneur du), Doyen de »
Notre-Dame d'Annecy……………………………………………….
CHAVANE Jeanne-Marguerite (de la), Religieuse de la Visitation… »
CHAVASSE Balthazard, Jésuite……………………………………. »
CHENOISE Catherine de Ligny (dame de)…………………………. »
CHEVRON Henri-Sigismond (de). Voir SAINTE-CATHERINE
(chapelle de)………………………………………………………….
CHEVRON (MM. de). Voir CREST DE L'ETOILE……………….. »
CHEVRON-VILLETTE Amédée (de). Voir COLONEL, ONCLE…
CHEZERY (abbaye et Abbé de). Voir BALLON(Gaspard)………... »
CHINDRIEU (prieuré de). Voir SONNAZ…………………………. »
Christine de France*, Princesse de Piémont. Voir FRANCE (guerre),
PRINCES DE PIEMONT……………………………………………
CLERMONT (Evêque de). Voir ESTAING.
Clermont-Mont-Saint-Jean Jean-Claude (baron de)………………… »
COADJUTORERIE de Jean-François de Sales (Affaire de la)……... »
COEUVRES François-Annibal d'Estrées (marquis de), ambassadeur »
de France à Rome…………………………………………………….
COLONEL de la Ville d'Annecy……………………………………. »
COMBAZ Claude…………………………………………………… »
COMBAZ Péronne (Marie-Augustine, Religieuse de la Visitation)... »
Conseil de la Sainte-Maison de Thonon…………………………….. »
CONSEIL DE VILLE D'ANNECY. Voir LANS.…………………... »
CONTAMINE (Prieur, prieuré et Religieux de). Voir LUCINGE,
NOYER (du), PERRET.
CONZIEU (prieuré de)……………………………………………… »
CORMAND (M. de). Voir CROIX (de la)………………………….. »
COURTINE Georges Ferra (seigneur de)…………………………… »
Crespin Jean-Georges……………………………………………….. »
CREST DE L'ETOILE Gaspard de Montmayeur (seigneur du)…….. »
Crevant. Voir LE NAIN.
CROIX Claude-Françoise de Maillard-Tournon (dame de la). Voir »
CORMAND………………………………………………………….
CROSSON Martin…………………………………………………… »
Destinataires Inconnus. Voir ONCLE, RELIGIEUX, SUPÉRIEUR.. »
Destinataires Inconnues. Voir RELIGIEUSE………………………. »
Dominique de Chambéry, Capucin…………………………………. »
DRUJON Claude……………………………………………………. »
Drujon (Drugeon) Guillaume, Prieur d'Anglefort…………………… »
DUCREST Gabriel………………………………………………….. »
DUPRA Claude……………………………………………………… »
DUYN (membres de la famille de)………………………………….. »
Ermites du Mont-Volron. Voir RIGAUD……………………………
ESCRIVIEUX Balthazard de Menthon-Rochefort (seigneur d')……. »
83
145
94, 103, 108, 129,
145, 176, 200,
251, 296, 355, 356
368, 368
125
385
201
235
274
329
78
160 [451]
115, 115, 163, 424
373, 373
136, 140, 188, 233
403
209
54
54
99, 284
209
81
82
398
397
329
65
306
67, 156, 173, 338
6, 9, 11, 60, 61,
340
107
205
204, 204
223
395
79 [452]
206, 206
305
309/341

31.10 Page 310

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ESTAING Joachim (d'), Evêque de Clermont………………………. »
ESTIENNE Jeanne-Françoise, Religieuse de la Visitation…………. »
ESTREES (d'). Voir CŒUVRES.
ESTRÉES Angélique (d'), Abbesse de Maubuisson………………... »
FAULDRIER Lucien, Barnabite……………………………………. »
FAVRE Antoine……………….……………………………………. »
FAVRE Antoine (fils du précédent). Voir SAINTE-CATHERINE »
(chapelle de)………………………………………………………….
FAVRE Charles-Chrétien…………………………………………… »
FAVRE Jean-Claude. Voir CHARMETTES.
Favre Marie-Jacqueline, Religieuse de la Visitation. Voir »
VISITATION DE MONTFERRAND……………………………….
FAVRE Michel……………………………………………………… »
FEUGE Gaspard de Sales (seigneur de la). Voir COLONEL………. »
FEUGE Melchior de Sales (seigneur de la)…………………………. »
FIESQUE Anne Le Veneur (comtesse de)………………………….. »
FLÉCHÈRE François-Melchior de la……………………………….. »
Fléchère Madeleine de la Forest (dame de la)………………………. »
FLOCARD Barthélémy*……………………………………………. »
FLORENCE (Mlle)……...…………………………………………… »
FOISSEY Jean, Jésuite……………………………………………… »
Fontany Antoine de Pignier de………………………………………. »
FONTANY Jeanne-Marie de Pignier (de), Religieuse de la Visitation »
FORAS Anne Le Beau (dame de). Voir VAULGRENANT………… »
Foras Guillaume de Bernard de……………………………………… »
FORNAND Amédée………………………………………………… »
FRANCE (cour de)……..…………………………………………… »
— (Guerre civile et religieuse en)…………………………………… »
FRANCE (Voyage de saint François de Sales en). Voir PRINCES DE »
PIEMONT……………………………………………………………
FREMYOT André, Archevêque de Bourges. Voir CARMEL DE
BOURGES [453]
Frouville Hélène Lhuillier (de). Voir LHUILLIER.
GASCOING DE MEURS Gabrielle-Jéronyme, Religieuse de la
Visitation……………………………………………………………..
GAULTIER Jacques, Jésuite………………………………………... »
GENERAL (M. le). Voir PALIERNE.
Genève Marguerite (de), Abbesse de Baumeles-Dames…………….. »
Geneviève de Saint-Bernard (Acarie), Carmélite…………………… »
Gérard de Réautler Jeanne-Hélène (de), Religieuse de la Visitation… »
Germonio Jean-Baptiste……………………………………………... »
GILLET Pierre, Doyen de Saint-Germain l'Auxerrois……………… »
GODEAU Jeanne Terge ou Targe (dame)…………………………… »
Gouffiers Elisabeth Arnault des……………………………………... »
GRAILLY Bernard (de), Prieur de Sainte-Agathe de Rumilly……… »
GRANIER Pierre de………………………………………………… »
Granieu Laurence de Ferrus (dame de)…………………………........ »
GRAS OU GRASSI (famille)…………..…………………………… »
GRAS OU GRASSI François……………………………………….. »
GRAS Jean-Louis. Voir GARIOD………………………………….. »
GRENOBLE. Voir VISITATION DE GRENOBLE.
280
44
16
189
79, 234
79
282
146, 171, 197, 208,
280, 333, 350
353
209
81
266
386
64, 93, 121, 207
421
249
286
219, 219
45
32
32, 177, 220
222
14
326, 327, 334
14, 19, 31, 34, 69
375
322
260
300, 300
110
182, 182
276
19
238
370
229
141, 256, 279,
354, 357, 390
120
118
119, 190
310/341

32 Pages 311-320

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32.1 Page 311

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GRENOBLE (clercs de). Voir ORDINATION.
GRENOBLE (Evêque et Grand-Vicaire de). Voir SCARRON et
SAUTEREAU.
GRIGNOLS Jeanne-Françoise de Montluc (dame de)……………… »
GUÉRIN Juste, Barnabite…………………………………………… »
GUISE Henriette-Catherine de Joyeuse (duchesse de)……………… »
HAUDRIETTES (Audriettes) Congrégation des……………………. »
HAYE Madeleine de Paluau (dame de la)…………………………... »
HAYES (Mission diplomatique de Louis des)……………………… »
Herse Charlotte de Ligny (dame Vialart de)………………………… »
HERSE François Vialart de…………………………………………. »
HUMBERT Marie (Marie-Françoise, Religieuse de la Visitation)….
INDULGENCES ET QUETES. Voir SAINT-JACQUES DE
COMPOSTELLE et SAINT-MAURICE en Valais…………………
Interville. Voir LHUILLIER D'INTERVILLE.
INTRODUCTION À LA VIE DÉVOTE (traduction italienne de l'). »
Voir ANTONIOTTI…………………………………………………
ISABELLE (Sœur). Voir CHATEAUNEUF.
JANTET Benoît……………………………………………………... »
JARCELLAT-BEYBIN. Voir BEYBIN.
JARS Anne de Monceaux (dame de Rochechouart de)…………….. »
JÉSUITES. Voir ANTONIOTTI, CHAVASSE, FOISSEY,
GAULTIER, LALLEMANT, SUFFREN, RELIGIEUX DE LA
COMPAGNIE.
JÉSUITES de Moulins (Recteur du collège des). Voir FOISSEY.
Joly de la Roche Claude-Agnès. Voir ROCHE (de la).
Jomaron (Mme de) Anne Thomé ou Anne de Rue? (dame de)……... »
JUSTIN (Père), Trinitaire…………………………………………… »
LALLEMANT Pierre, Jésuite………………………………………. »
Lamoignon Marie des Landes (dame de)…………………………… »
LANGOSCO Jérôme………………………………………………... »
Lans Sigismond d'Est (marquis de)…………………………………. »
Lauray Marc-François de Malarmay (seigneur de). Voir
MALARMAY.
LÉAZ (Lea) Melchior Perrucard de Ballon (seigneur de)…………... »
LE GRAND (M.)? Voir ROERO……………………………………. »
Le Maistre Catherine Arnauld, dame (Catherine de Saint-Jean, »
Religieuse de Port-Royal)……………………………………………
LE MAISTRE (fils de la précédente)……………………………….. »
LE MAISTRE Isaac…………………………………………………. »
Le Nain de Crevant Anne de Bragelongne (dame)………………….. »
Lhuillier de Frouville Hélène (Hélène-Angélique, Religieuse de la
Visitation)……………………………………………………………
LHUILLIER D'INTERVILLE Anne Le Prestre (dame)……………. »
Lhuillier d'Intenville François………………………………………. »
LIONS DE THEUVILLE Agnès (des). Voir AGNÈS DE JÉSUS…..
LUCEY Louis de Mareste (baron de)……………………………….. »
Lucinge Jean (de), Prieur de Contamine…………………………….. »
LUÇON (Lusson) Evêque de. Voir PLESSIS-RICHELIEU.
Malarmay Marc-François de………………………………………… »
MANCÈAU Julien…………………………………………………... »
Maraldi Marc-Aurèle, Dataire………………………………………. »
183
303, 323
266
38
274
307
271, 271
274
229
246, 323
47
43
144, 144
83
43
1, 1
338
209, 209
407
393
27, 27, 298
299
27
4, 4 [455]
18, 213, 213, 313,
317
317
316, 316, 317
228
306, 306
132, 132
127
275, 275
311/341

32.2 Page 312

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MARGUERITE DU SAINT-SACREMENT (Acarie), Carmélite….. »
MARIE (Sœur). Voir HUMBERT.
Marie de Jésus (Acarie), Carmélite………………………………….. »
MARIE DE MÉDICIS………………………………………………. »
MARIE DU SAINT-SACREMENT, Carmélite…………………….. »
MATHIEU Anselme………………………………………………… »
MAUBUISSON (Abbesse de). Voir ESTRÉES.
MAUBUISSON (Saint François de Sales à)………………………… »
MAUPEAU Thomas………………………………………………… »
MAURICE DE SAVOIE, Cardinal. Voir AULPS, FRANCE (guerre).
— (Projet de voyage à Rome et en France de)……………………… »
MESME François Déage (coseigneur de) et famille………………... »
MILLINI (Melin) Jean Garsia, Cardinal…………………………….. »
MISTRAL Clémence (Clémence-Marie, Religieuse de la Visitation) »
MONDOVI (Montdevis) Evêque de. Voir ARGENTERO.
Montenet (M.) ………………………………………………………. »
MONTENET (membres de la famille)………………………………. »
Montholon François de……………………………………………… »
Monthoux Paule-Jéronyme, Religieuse de la Visitation. Voir »
VISITATION DE NEVERS…………………………………………
MONTHOUZ Pierre (de). Voir COLONEL et LANS
»
MONTIGNY Louise Pithou (dame Lhuillier de)
MONTMAYEUR François-Gaspard ou Melchior-Théodore? (comte »
de) ……………………………..…………………………………….
MONT-VOIRON (ermitage et sanctuaire du). Voir ERMITES…….. »
Morville Marie-Aimée (de), Religieuse de la Visitation. Voir »
TERTRE et VISITATION DE NEVERS……………………………
MOUXY Humbert (de), Abbé de Sixt………………………………. »
MOUXY Jacques (de), Abbé de Sixt. Voir SIXT
»
MOYRON François Paquellet (seigneur de)………………………… »
MUSY Françoise-Jacqueline (de), Religieuse de la Visitation……… »
Nemours Anne de Lorraine (duchesse de)…………………………... »
NICOLAS de la Marche, Capucin……………………..……………. »
NOTRE-DAME DE LIESSE d'Annecy (collégiale et Doyen de). Voir »
CHATELARD……………………..…………………………………
NOYER Claude (du), Religieux de Contamine. Voir PERRET.
Oncle (un) ……………………..…………….……………………… »
ORDINATION faite par saint François de Sales. Voir ARGENSON, »
BOFFIN……………………..……………………………………….
ORLEANS. Voir CARMEL, VISITATION.
Palierne Nicolas (de). Voir VISITATION, DE NEVERS…………… »
PARIS. Voir HAUDRIETTES, SAINT-GERMAIN L'AUXERROIS,
VISITATION, ZAMET.
PASCAL Hercule-Antoine de……………………..………………… »
PAUL V*……………………..……………………………………... »
PAVILLON Marie-Anastase, Religieuse de la Visitation…………... »
PERGOD (famille Hugon-)…………………………………………. »
PERNET Jean-Baptiste……………………..……………………….. »
PERNET Pierre……………………..……………………………….. »
PERRET Louis, Religieux de Contamine……………………..…….. »
PERRON Jean Davy (du), Archevêque de Sens…………………….. »
PEYZIEU (Pezieu) François de Longecombe de……………………
24
23, 23, 342, 410
353
408
407
3
168
194, 334
223
329
296
167
167
65, 65
365, 365, 374, 379
210 [456]
388
394
206
331
396
396
295
288
180, 180
341
244
112
255
292, 292
93
417
73
224
226
226
55
40
312/341

32.3 Page 313

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PLESSIS (Mlle du). Voir SAINT-GERMAIN………………………. »
PLESSIS-RICHELIEU Armand (du), Evêque de Luçon…………… »
POLLIENS Nicolas. Voir RELIGIEUX DE LA COMPAGNIE DE
JÉSUS.
POLLINGE Claude de Chissé (seigneur de)………………………...
POLLINGE Philibert de Chissé (seigneur de)…………………….… »
PORT-ROYAL (Abbesse et Religieuses de). Voir ARNAULD, »
CHATEAUNEUF, LE MAISTRE, MARION, THOU……………...
PORT-ROYAL (Saint François de Sales à)………………………… »
POSCOLONNA Candide, Barnabite……………………………….. »
PRINCES DE PIEMONT (Voyage des)……………………………. »
PRUD'HOMME. Voir THÉRÈSE DE JÉSUS.
Quoex Claude de…..………………………………………………… »
RAJAT Anne-Thérèse de Rigaud (de), Religieuse de la Visitation… »
RAJAT Marguerite-Agnès de Rigaud (de), Religieuse de la Visitation »
RAMILLIERE Antoinette de Revol (de la), Novice de la Visitation.. »
REGNARD Marie-Radegonde, Religieuse de la Visitation………… »
REIGNIER (Regnier) cure et curé de. Voir ARGENTIER et
SONNERAT…………………………………………………………
Religieux de la Compagnie de Jésus………………………………… »
Religieuse (une)……………………………………………………… »
Religieuse de la Visitation (une)…………………………………….. »
Religieuses de l'abbaye de Sainte-Catherine. Voir BALLON………. »
RIGAUD Jean-Antoine, Ermite du Mont-Voiron…………………... »
RIPAILLE (prieuré de)……………………………………………… »
Roche Claude-Agnès Joly (de la), Religieuse de la Visitation……… »
Rochefort Prosper de Menthon (baron de)…………………………... »
ROERO Emmanuel-Philibert………………………………………... »
Rosetain ou Rostaing Jean…………………………………………... »
Rosset Anne-Marie, Religieuse de la Visitation…………………….. »
ROSSILLON (fils de la comtesse de)……………………………….. »
Rossillon Hélène-Ferdinande de Maillard-Tournon (comtesse de)…. »
Rousselet Guillaume………………………………………………… »
Rousselet Marguerite Le Fèvre (dame)………………………………
RUMILLY (clergé, église et Prieur de). Voir GRAILLY et SONNAZ »
SAINT-AGNEUX (Saint Agnè) Charles de Mareste (marquis de)…. »
SAINT-AIGNAN Honorat de Beauvilliers (comte de)……………… »
SAINT-AIGNAN Jacqueline de la Grange (comtesse de)…………... »
SAINT-BALDOPH (Saint Bardot) prieuré de………………………. »
SAINT-BONNET Catherine Camus (Marie-Catherine, Religieuse de »
la Visitation)………………………………………………………….
SAINT-BONNET Jean Camus (seigneur de)……………………….. »
SAINT-BONNET Marie de Comtes ou d'Escomtes (dame de)……… »
SAINT-DAMIEN Henri de Maillard-Tournon (marquis de)………… »
SAINTE-CATHERINE (chapelle de)……………………………….. »
SAINTE-MAISON DE THONON. Voir CONSEIL DE LA SAINTE- »
MAISON……………………………………………………………..
SAINT-GÉRAN (Saint Gerand) Jean-François de la Guiche »
(seigneur de). Voir VISITATION DE NEVERS…………………….
SAINT-GÉRAN Suzanne aux Espaules (dame de)…………………. »
227, 228
38 [457]
191
191
29
22
185
31, 33, 36, 40, 42,
44, 46, 173
92, 118, 190
104
143
198
264
159
12, 210
86, 97, 278
157, 361, 412
282, 282
205, 385
45, 150
134, 134, 304
393
372, 372
33, 33, 169
231
231
67, 247, 247 [458]
128, 128
207, 370, 371
228
41
41
160
336
48
48
406
149
168, 226, 399
237
286
313/341

32.4 Page 314

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SAINT-GERMAIN DU PLESSIS Catherine de (Catherine- Thérèse, »
Religieuse de la Visitation)…………………………………………..
SAINT-GERMAIN DE JOUX. Voir SAINT-GERMAIN DE LA
CHÈVRE…………………………………………………………….
SAINT-GERMAIN DE LA CHÈVRE (curé et paroisse de). Voir »
BEYBIN……………………………………………………………..
SAINT-GERMAIN L'AUXERROIS, de Paris (collégiale et Doyen »
de). Voir GILLET et CAMUS……………………………………….
SAINT-JACQUES DE LA BOUCHERIE, de Paris (curé de). Voir
SAUSSAYE.
SAINT-JACQUES DE COMPOSTELLE (hospice de)…………….. »
SAINT-MAURICE en Valais (abbaye de)………………………….. »
SAINT-PHAL Eustache (de), Evêque de Nevers…………………… »
SAINT-POL OU SAINT-PAUL Anne de Caumont (comtesse de). »
Voir VISITATION D'ORLEANS……………………………………
SALES Etienne (D. Joseph, Barnabite)……………………………… »
SALES (fils de Gallois de)…………………………………………… »
SALES FRANÇOIS* de (Saint). Voir ANDILLY, ARNAULD
(François),
BALLY,
CERISIER,
CHAMBERY,
COADJUTORERIE, COMBAZ (Péronne), ERMITES, FORAS,
FRANCE, GAULTIER, JUSTIN, MAUBUISSON, MAURICE DE
SAVOIE, MOUXY, ORDINATION, PORT-ROYAL, RIPAILLE,
RUMILLY, SAINTE-MAISON, SAUSSAYE, SIXT, VINCENT DE
PAUL, VISITATION DE NEVERS…………………………………
SALES Janus (de). Voir COLONEL.……………………………….
Sales Jean-François *(de), Evêque nommé de Chalcédoine. Voir »
COADJUTORERIE………………………………………………….
SALES Louis (de), baron de Thorens………………………………. »
SALES Melchior (de). Voir FEUGE.………………………………..
SARSENAS, SARSENASQ Voir CERCENASCO…………………
SAULI Antoine-Marie, Cardinal……………………………………. »
SAUSSAYE Charles (de la), curé de Saint-Jacques de la Boucherie, »
de Paris……………………………………………………………….
SAUTEREAU Abel de……………………………………………… »
SCAGLIA Philibert-Alexandre*, ambassadeur de Savoie à Rome. »
Voir COADJUTORERIE……………………………………………
SCARRON Pierre, Evêque de Grenoble……………………………. »
Sénat de Savoie……………………………………………………… »
SENS (Archevêque de). Voir PERRON (du)………………………..
SERPENS DE LA GUICHE Marie-Marguerite de Gondras (des), »
Religieuse de la Visitation……………………………………………
SIXT (Abbés de). Voir MOUXY.……………………………………
Sixt (Prieur et Religieux de)………………………………………… »
SIXT (Voyage de saint François de Sales à)………………………… »
Sonnaz (Saunas, Saunai) Louis de Gerbais (de), Prieur de Chindrieu. »
Voir CHINDRIEU…………………………………………………...
SONNERAT Claude, curé de Reignier……………………………… »
SUFFREN Jean, Jésuite……………………………………………... »
6
137
276
345
345
366
335
244
329 [459]
39, 49, 58, 72, 100,
131, 199, 289, 367,
406, 413
3, 49, 77, 136,
151, 183, 222,
232, 241, 295,
326, 381, 384,
393, 404, 421, 423
241
330
129
297
425, 426, 426,
427, 428, 428
297
370
74
57, 166
372, 396
358,358
224, 225
40
314/341

32.5 Page 315

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Supérieur d'une Communauté. Voir SAINT-JACQUES DE »
COMPOSTELLE et SAINT-MAURICE……………………………
Tardy François de…………………………………………………… »
Tertre Marie-Aimée de Morville (dame du). Voir MORVILLE……. »
Thérèse de Jésus (de Pucheuil), Carmélite…………………………..
Thérèse de Jésus (Prud'homme), Carmélite…………………………. »
THIBAUT Marie-Françoise, Religieuse de la Visitation…………… »
THOIRE Amédée (de), Prieur de Thiez…………………………….. »
THONON. Voir SAINTE-MAISON………………………………...
THONON (Congrégation de). Voir ibid……………………………..
Thou Marie-Angélique de Saint-Paul (de), Religieuse de Port-Royal. »
THOU Marie Faye (dame de)……………………………………….. »
THOU René (de). Voir BONNEUIL
Tournette Louis de l'Alée (baron de) ……………………………….. »
TOURNON (Tornon) Alphonse de Maillard (baron de)……………. »
TOURS. Voir CARMEL.
TRUYTAT Jacques-Philippe……………………………………….. »
VALERAY Bernarde-Marguerite, Religieuse de la Visitation……... »
Valfin Bonaventure de Malarmay (dame de)………………………... »
VALROMEY Honoré d'Urfé (marquis de)…………………………. »
VANCHY…………………………………………………………… »
VAULGRENANT Anne Le Beau (dame de). Voir FORAS………... »
VENDOME (Vandaume) Françoise de Lorraine (duchesse de)…….. »
VERTON Marie de Bragelongne (dame de)………………………… »
VESIN Jacques, poissonnier………………………………………… »
Veyssilieu Marguerite de la Croix de Chevrières (dame Rabot »
d'Aurillac de) ………………………………………………………...
VIBOD (Vibo) Maurice……………………………………………... »
Victor-Amédée de Savoie*, Prince de Piémont. Voir FRANCE »
(guerre), PRINCES DE PIEMONT………………………………….
Villeneuve Marie Lhuillier (dame de) ……………………………… »
VILLESAVIN Anne Phélipeaux de………………………………… »
Villesavin Isabelle Blondeau (dame de) ……………………………. »
VILLETTE Amédée de Chevron (baron de). Voir CHEVRON-
VILLETTE………….………………………………………………..
VINCENT DE PAUL (Saint)……………………………………...... »
Viry Jacques (comte de)…………………………………………..… »
VIRY Marguerite de Bouvens (dame de)…………………………… »
VIRY Marie (de). Voir Bois (du)……………………………………
VISITATION (Constitutions, Directoire et Règles de la)…………... »
— Ordre de la……………………………………………………….. »
— Projets de fondations…………………………………………….. »
VISITATION D'ANNECY (Religieuses de la). Voir BLONAY, »
BRECHARD, CERVIERES, CHANTAL, CHASTEL, CHAVANE,
COMBAZ, FAVRE, FONTANY, HUMBERT, MONTHOUX,
MUSY, RAJAT, ROCHE (de la), ROSSET, VALERAY…………..
VISITATION DE BOURGES (Monastère et Religieuses de la). Voir »
JARS, THIBAUT……………………………………………………
VISITATION DE CHARTRES. Voir FRANCE (Voyage de saint
François de Sales en)…………………………………………………
345
165, 165
87, 87, 174, 290
408
389, 389
170
306
95, 95
95
148, 148
405
78
304
192,192
243
189
1
42
4
77
143
394
55, 85, 162, 259,
269, 351, 364, 399,
425, 426, 427, 429
18, 261, 315
179
179
155
63, 63, 113
63 [461]
63, 114
130, 155, 203,
312, 353, 378, 404
254, 265
131, 376
251, 264, 407
170
315/341

32.6 Page 316

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VISITATION DE GRENOBLE (Monastère et Religieuses de la). »
Voir ARSENEY, BOUT DE SAINT-DIDIER, GERARD, RAJAT…
VISITATION DE LYON (Monastère et Religieuses de la). Voir »
RAMILLIÈRE……………………………………………………….
VISITATION DE MONTFERRAND (Fondation et fondatrices de la) »
VISITATION DE MOULINS (Monastère et Religieuses de la). Voir »
CHASTELLUX, MORVILLE, PALIERNE, SAINT-GERAN,
TERTRE, VISITATION DE NEVERS……………………………...
VISITATION DE NEVERS (Fondation, fondatrices et Religieuses de »
la). Voir GASCOING, MONTHOUX, TERTRE……………………
VISITATION D'ORLEANS (Fondation et fondatrices de la). Voir »
SAINT-POL………………………………………………………….
VISITATION DE PARIS (Monastère et Religieuses de la). Voir »
LHUILLIER, PAVILLON, REGNARD, SAINT-BONNET,
SERPENS, ZAMET…………………………………………………
VISITATION DE TURIN (Fondation de la)……………………….. »
VISITATION DE VALENCE (Fondation, fondatrices et Religieuses »
de la). Voir MISTRAL……………………………………………….
ZAMET (famille et hôtel)…………………………………………… »
146
171, 198
198
44, 171
431-437
43, 310
336
403
154
401 [462]
316/341

32.7 Page 317

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Table de correspondance de cette nouvelle édition avec
les précédentes et indication de la provenance des
manuscrits
NOUVELLE
ÉDITION
MDXLI.................
MDXLII................
MDXLIII..............
MDXLIV..............
MDXLV...............
MDXIVI...............
MDXLVII.............
MDXLVIII...........
MDXLIX..............
MDL.....................
MDLI....................
MDLII...................
MDLIII pp. 21-23.
post-scriptum……
MDLIV.................
PROVENANCE DES
MSS.
………………………...
………………………...
Château de Rastignac
(Dordogne). M. Chagot.
………………………...
………………………...
………………………...
………………………...
………………………...
………………………...
………………………...
Rome. Santa Maria in
Vallicella, chambre de St
Philippe de Néri……….
………………………...
Lyon-Fourvière.
Visitation………………
Idem...............................
Orléans. Carmel.............
PREMIÈRE
PUBLICATION1407
Hérissant, IV, p. 36…..
Epistres spirituelles,
1626, 1. IV……………
……………………….
Hérissant, V, p. 87…...
Epistres spirituelles,
1626, 1. V.....................
Lettre aux Religieuses
de la Visitation de Paris
(1697)1408……………..
Epistres spirituelles,
1626, 1. II.....................
Ibid., 1. VI…………...
Ibid……...……………
Epistres spirituelles,
1626, 1. III...................
Ibid., 1. IV...................
Hérissant, IV, p. 94.
(Voir note (123), p. 20).
Epistres spirituelles,
1629, 1. III...................
………………………..
………………………..
ÉDITIONS
MODERNES
Vivès. XI, p. 100
Migne, V, col. 1150
Viv. XI, p. 103
Mig. V, col. 1152
Viv. XI, p. 116
Mig. V, col. 1161, et
VI, col. 887
Viv. XI, p. 398
Mig. V, col. 1430
Viv. XI, p. 117
Mig. V, col. 1161
Viv. XI, p. 118
Mig. V, col. 1163
Viv. XI, p. 119
Mig. V, col. 1163
Viv. XI, p. 121
Mig. V, col. 1164
Viv. XI, p. 122
Mig. V, col. 1165
[463]
Viv. XI, p. 133
Mig. V, col. 1174
Viv. XII, p. 116
Mig. V, col. 1602
Viv. XI, p. 136; cf.
p. 160
Mig. V, col. 1176;
cf. col. 1199
Viv. XI, p. 137
Mig. V, col. 1178
Inédit
Inédite
1407 Les indications qui figurent dans cette colonne sont données sous toutes réserves, et pour des raisons déjà exposées
dans l'Avant-Propos du tome XI.
La numérotation des pièces étant souvent très inexacte dans les éditions du XVIIe siècle, quand nous
remontons à celles-ci, au lieu de citer le numéro d'ordre des Lettres, nous indiquons seulement la série, soit le Livre
dans lequel elles sont insérées.
1408 Lettre aux Religieuses de la Visitation du Monastère de Paris pour la justification des Religieuses de Port-Royal,
contre l'auteur de la Vie de la R. Mère Eugénie de Fontaine. Troisième édition augmentée de quelques lettres nouvelles
de S. François de Sales et de la V. Mère de Chantal, de l'Image abrégée de la conduite et de l'esprit des Filles de
Port-Royal, et de plusieurs autres pièces. Le tout addressé aux Monastères de la Visitation des Provinces Wallones.
MDCXCVII. (Bibl. Mazarine, n° 32343, A.)
317/341

32.8 Page 318

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MDLV..................
MDLVI.................
MDLVII................
MDLVIII..............
MDLIX Ier alinea..
suite.......................
MDLX..................
MDLXI.................
MDLXII................
MDLXIII
(fragment)……….
MDLXIV..............
MDLXV
(fragment)……….
MDLXVI..............
MDLXVII.............
MDLXVIII II. 1-
13……………….
fin.........................
MDLXIX..............
MDLXX
(fragment)……….
MDLXXI..............
MDLXXII.............
MDIXXIII............
MDLXXIV...........
MDLXXV
(fragment)……….
………………………...
………………………...
………………………...
Limoges. Visitation.......
Annecy. Visit.(Copie)…
Idem...............................
Harrow
(Londres).
Visitation.......................
Poitiers. Visitation…….
Milan.
Archives
Trivulzio........................
………………………...
………………………...
Annecy. Visitation. (Vie
manuscrite de la Mere
A.-M. Rosset)………….
Fribourg. Visitation……
Turin. Archiv. de l'Etat..
Ier Procès de Canonis….
Ibid................................
………………………...
Annecy. Visit. (Hist. de
la Fondation du 1er Mtère
de Paris)........................
………………………...
………………………...
Chateau de Viry (Hte-
Savoie). Cte de Viry
(Copie)………………...
Gènes. Visitation...........
………………………...
Epistres spirituelles,
1626, 1. V.....................
Œuvres, 1641, t. II,
epist. XXIII...................
Lettre, etc., 1697 (voir
note (1408) de la page
précédente)...................
……………………….
……………………….
Epistres spirituelles,
1626, 1. VI...................
(Voir note (174), p. 39)
……………………….
……………………….
Epistres spirituelles,
1626, 1. III. (Voir note
(212), p. 49).................
Ibid., 1. IV....................
Vie de la Mère Anne-
Marie
Rosset1409
(1693), p. 12. (Voir note
(226), p. 54)………….
……………………….
Datta, II, p. 256………
……………………….
……………………….
Epistres spirituelles,
1626, 1. III...................
……………………….
Epistres spirituelles,
1626, 1. III...................
Ibid., 1. V…………….
……………………….
……………………….
Vie du Saint, par D.
Jean de Saint-François
(1624), liv. V, p. 4031410
Viv. XI, p. 141
Mig. V, col. 1180
Viv. XI, p. 139
Mig. V, col. 1179
Viv. XI, p. 143
Mig. V, col. 1181
Inédite
Inédit
Viv. XI, p. 144
Mig. V, col. 1182
Inédite
Mig. VI, col. 1030
Ibid., col. 1029
Viv. XI, p. 148
Mig. V, col. 1184
Viv. XI, p. 163
Mig. V, col. 1502
Inédite
Viv. VII, p. 399
Mig. VI, col. 779
Mig. IX, col. 101
Inédite
Viv. XI, p. 147
Mig. V, col. 1184
Inédit [464]
Viv. XI, p. 159
Mig. V, col. 1199
Viv. XI, p. 149
Mig. V, col. 1185
Inédite
Inédite
Viv. IX, p. 517
Mig. V, col. 1186
1409 Les Vies de plusieurs Supérieures de l'Ordre de la Visitation Sainte Marie, revues et corrigées par un Père de la
Compagnie de Jesus. A Anneci, chez Humbert Fonteine. MDCXCIII.
1410 La Vie du Bien-Heureus Mre François de Sales, Evesque et Prince de Geneve, Instituteur de l'Ordre des Religieuses
de la Visitation de Sainte Marie, par le S. P. Dom Jean de S. François, Supérieur General de la Congrégation des
Feuillens. A Paris, chez Michel Soly, MDCXXIV.
318/341

32.9 Page 319

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MDLXXVI
(fragment)……….
MDLXXVII..........
MDLXXVIII.........
MDLXXIX...........
MDLXXX............
MDLXXXI...........
MDLXXXII..........
MDLXXXIII.........
MDLXXXIV.........
MDLXXXV..........
MDLXXXVI
(fragmt)………….
MDLXXXVII
(fragts)…………....
MDLXXXVIII…..
MDLXXXIX........
MDXC..................
MDXCI p. 100, II.
1-12……………..
II. 13-17…………
II. 18, 19
p. 101, II. 1-19…..
II. 20-25................
fin.........................
………………………...
………………………...
………………………...
………………………...
………………………...
Saluces (Piémont). Mme
Boarelli di Verzuolo......
………………………...
………………………...
Bourg-en-Bresse.
Visitation (Ancien Ms.).
Chambéry. Archiv. du
Sénat de Savoie.............
Turin. Visit. (Copie)…..
………………………...
Chartres. Visitation…....
Turin. Archiv. de l'Etat
(Copie)...........................
Turin. Visit. (Copie)…..
………………………...
………………………...
………………………...
………………………...
………………………...
Ibid., p. 404..................
Epistres spirituelles,
1626, 1. I......................
Ibid., 1. III. (Voir note
(285), p. 73).................
Ibid...............................
Hérissant, IV, p. 127…
Datta, II, p. 257...........
Epistres spirituelles,
1626, 1. VII..................
Ibid., 1. VI....................
Ibid., 1. IV....................
Mugnier, St Fr. de S.
Docteur en droit, etc.
(Chambéry, 1885)……
Vie de la Mère
Françoise-Innocente de
la Fléchère (1693)1411,
p. 357…………...........
Œuvres, 1652, col.
1253. (Voir notes (351),
(352), p. 94)..................
Hérissant, V, p. 306….
Epistres spirituelles,
1626, 1. VII.................
……………………….
Epistres spirituelles,
1626, 1. VII.................
Ibid., p. 887, et 1. III, p.
279…………………...
Ibid., 1. VII, p. 887......
Ibid., p. 888, et 1. IV, p.
536...............................
Ibid., 1. VII, p. 888......
Viv. IX, p. 518
Mig. V, col. 1187
Viv. IX, p. 519
Mig. V, col. 1187
Viv. XI, p. 151
Mig. V, col. 1190
Viv. XI, p. 154
Mig. V, col. 1195
Viv. VII, p. 401
Mig. V, col. 1192
Viv. VI, p. 439
Mig. VI, col. 779
Viv. XI, p. 157
Mig. V, col. 1197
Viv. XI, p. 496
Mig. V, col. 1334
Viv. XI, p. 158
Mig. V, col. 1198
Viv. XI, p. 422
Mig. V, col. 1457
Viv. XI, p. 474
Mig. V, col. 1504, et
VI, col. 1049 [465]
Viv. XII, p. 205
Mig. V, col. 1663
(Voir note (360), p.
97)
Inédite
Viv. XI, p. 169
Mig. V, col. 1306
Viv. XI, pp. 153 et
169
Mig. V, col. 1191 et
1206
Viv. XI, p. 169
Mig. V, col. 1206
Viv. XI, pp. 170 et
194
Mig. V, col. 1207 et
1231
Viv. XI, p. 170
Mig. V, col. 1207
1411 Voir note (1409) de la page précédente.
319/341

32.10 Page 320

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MDXCII...............
MDXCIII..............
MDXCIV..............
MDXCV...............
MDXCVI..............
MDXCVII............
MDXCVIII...........
MDXCIX.............
MDC.....................
MDCI...................
MDCII (fragt) 1re
phrase…………....
1re et 2e phrases….
MDCIII
(fragment)……….
MDCIV texte
tronqué…………..
texte complet…….
MDCV..................
MDCVI.................
MDCVII................
MDCVIII..............
MDCIX.................
MDCX..................
MDCXI.................
Lyon-Fourvière.
Visitation.......................
………………………...
Turin. Cte Albert Solaro
della Margarita………..
Annecy.
Visitation
(Copie)………………..
………………………...
………………………...
Tarascon. Visitation…..
………………………...
Paris. Visitation (1er
Monastère).....................
Annecy. Missionnaires
de St-François de Sales..
………………………...
………………………...
Turin. Visitation (Copie)
………………………...
………………………...
Tréguier. Filles de la
Croix.............................
………………………...
………………………...
Saint-Jeoire
(Hte-
Savoie). Famille de la
Fléchère.........................
Rome. Visit. (Copie)….
Naples. Archevêché
(Copie)………………..
………………………...
Ibid., 1. VII..................
Ibid., 1. VI...................
……………………….
Epistres spirituelles,
1626,1. III. (Voir note
(406), p. 110)...............
Ibid., 1. VI....................
Ibid., 1. V.....................
……………………….
Epistres spirituelles,
1626, 1. I......................
……………………….
……………………….
Vie du Saint, par D.
Jean de St-François
(1634), liv. V, p. 402…
Camus, L'Esprit du B.
Fr. de Sales (1640), t.
IV, p. 76……… [466]
Vie de la Mère
Françoise-Innocente de
la Fléchère (1693), p.
357……………………
Œuvres, 1641, t. II,
epist. XXIX………….
Hérissant, IV, p. 183…
……………………….
Epistres spirituelles,
1626, 1. IV...................
Hérissant, IV, p. 195…
……………………….
……………………….
……………………….
Epistres spirituelles,
1626, 1. V....................
Viv. XI, p. 171
Mig. V, col. 1207
(Voir note (378), p.
102)
Viv. VII, p. 405
Mig. V, col. 1208
Inédite
Viv. XI, p. 173
Mig. V, col. 1211
Viv. XI, p. 176
Mig. V, col. 1213
Viv. XI, p. 178
Mig. V, col. 1215
Viv. VII, p. 408
Mig. V, col. 1220
Viv. XI, p. 179
Mig. V, col. 1216
Viv. VII, p. 409
Mig. V, col. 1220
Mig. VI, col. 1061
Viv. XI, p. 151
Viv. XI, p. 181
Mig. V, col. 1222
Inédite
Viv. XI, p. 186
Mig. V, col. 1226
Viv. XI, p. 188
Mig. V, col. 1227
Mig. VI, col. 1086
Inédite
Inédite
Viv. XI, p. 190
Mig. V, col. 1228
320/341

33 Pages 321-330

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33.1 Page 321

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MDCXII................
MDCXIII..............
MDCXIV
(fragment)……….
MDCXV...............
MDCXVI..............
MDCXVII.............
MDCXVIII
pp. 151, 152
(II. 1-17)………...
II. 18-22…………
suite……………..
p. 153 2e al……....
3e al………
p. 154, 1er alinéa…
suite.......................
MDCXIX
(fragment)……….
MDCXX...............
MDCXXI..............
MDCXXII............
MDCXXIII texte..
variante………….
MDCXXIV...........
MDCXXV............
MDCXXVI...........
MDCXXVII..........
MDCXXVIII........
MDCXXIX...........
………………………...
Albano Laziale (Italie).
Scolasticat des PP.
Oblats de St Fr. de Sales.
………………………...
………………………...
Le Mans. Visitation……
………………………...
Annecy. Visitation……
Idem…………………..
Idem…………………..
Idem…………………..
Idem…………………..
Idem…………………..
Idem…………………..
Annecy. Visitation…….
………………………...
Château d'Epenoux (Hte-
Saône).
Famille
d'Epenoux……………..
Turin. Archiv. de l'Etat..
Idem (Copie).................
Annecy. Visitation........
………………………...
Reims. Mme la générale
Joppé..............................
Annecy. Visitation…….
Frontenay (Jura). M.
Parraud..........................
Turin. Archiv. de l'Etat
(Copie)..........................
Annecy. Visit. (Copie)..
Œuvres, 1652, 1. IV,
col. 1349......................
……………………….
Hérissant, V, p. 241.
Epistres spirituelles,
1626, 1. VI..........
Hérissant, IV, p. 180.
Blaise,
Nouvelles
inédites (1833), p. 34.
……………………….
Epistres spirituelles,
1626, 1. IV, p. 536. (Cf.
ci-dessus, note (375), p.
101)..............................
……………………….
……………………….
Epistres spirituelles,
1626, 1. VI, p. 761.......
……………………….
……………………….
……………………….
Epistres spirituelles,
1626, 1. III...................
……………………….
Datta, II, p. 258………
Epistres spirituelles,
1626, 1. I......................
……………………….
Epistres spirituelles,
1626, 1. I......................
……………………….
Datta, II, p. 259………
Hérissant, IV, p. 212…
Datta, II, p. 338...........
……………………….
Viv. XI, p. 191
Mig. V, col. 1229
Inédite
Viv. XI, p. 434
Mig. V, col. 1476
Viv. XI, p. 192
Mig. V, col. 1230
Viv. VII, p. 410
Mig. V, col. 1221
Viv. XI, p. 438
Mig. VI, col. 873
Mig. IX, col. 103
Viv. XI, p. 194
Mig. IX, col. 104 et
V, col. 1231
Mig. IX, col. 104
Inédit
Viv. IX, p. 539
Mig. V, col. 1284, et
IX, col. 104
Inédit
Mig. IX, col. 105
[467]
Inédit
Viv. XI, p. 463
Mig. V, col. 1494
Inédite
Viv. VI, p. 440
Mig. VI, col. 780
Viv. VII, p. 411
Mig. V, col. 1233
Inédite
Viv. VII, p. 413
Mig. V, col. 1233
Inédite
Viv. VI, p. 441
Mig. VI, col. 781
Viv. XI, p. 197
Mig. V, col. 1234
Viv. VI, p. 490
Mig. VI, col. 828
Mig. VI, col. 1356
321/341

33.2 Page 322

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MDCXXX............
MDCXXXI
(fragment)……….
MDCXXXII
(fragmt)………….
MDCXXXIII........
MDCXXXIV........
MDCXXXV.........
MDCXXXVI........
MDCXXXVII.......
MDCXXXVIII.....
MDCXXXIX
(fragmt)………….
MDCXL...............
MDCXLI..............
MDCXLII.............
MDCXLIII...........
MDCXLIV...........
MDCXLV............
MDCXLVI...........
MDCXLVII..........
MDCXLVIII texte
tronqué…………..
texte complet……
MDCXLIX...........
MDCL
(fragment).............
MDCLI.................
………………………...
………………………...
Ier Procès de Canonis….
………………………...
Annecy. Visitation.........
………………………...
Paris. Visitation (1er
Monastère).....................
………………………...
Turin. Visit. (Copie)…..
Toulouse. Visitation…..
Milan. Bibliothèque
Ambrosienne.................
Monza (Milan). PP.
Barnabites......................
………………………...
Chambéry. Archiv. du
Sénat de Savoie.............
Boulogne-sur-Mer.
Visitation.......................
………………………...
………………………...
………………………...
………………………...
………………………...
Lavours (Ain). Mme
Girod…………………..
Ier Procès de Canonis….
Turin. Archiv. de l'Etat
(Copie)...........................
Hérissant, Opuscules,
IV, p. 17.......................
De Hauteville, La
Maison naturelle de St
Fr. de S. (1669), Part. I,
p. 220………………...
Viv. XI, p. 198
Mig. V, col. 1234
……………………….
Epistres spirituelles,
1626, 1. IV...................
(Voir note (595), p.
176)…………………..
Epistres spirituelles,
1626, 1. III...................
Inédit
Viv. XI, p. 447
Mig. V, col. 1484
Inédite
Viv. XI, p. 199
Mig. V, col. 1235
……………………….
Blaise (1821), III, p.
294…………………...
……………………….
Mgr Douais, La
Visitation de Toulouse
(Paris, 1905), ch. XIII..
Datta, II, p. 261...........
Ibid., p. 263..................
Epistres spirituelles,
1626, 1. III...................
Mugnier, St Fr. de S.,
Docteur en droit, etc.
(Chambéry, 1885)
Inédite
Viv. VII, p. 414
Mig. V, col. 1236
Inédite
Viv. VI, p. 442
Mig. VI, col. 781
Viv. VI, p. 446
Mig. VI, col. 781
Viv. XI, p. 195
Mig. V, col. 1232
[468]
……………………….
Epistres spirituelles,
1636, 1. VI...................
Œuvres, 1641, t. II,
epist. XXVII.................
Hérissant, IV, p. 219…
Epistres spirituelles,
1626, 1. III…………...
Hérissant, IV, p. 236…
Mémoires de l'Acad.
Salés., t. VI (1883)…...
……………………….
Inédite
Viv. XI, p. 201
Mig. V, col. 1237
Viv. XI, p. 203
Mig. V, col. 1240
Viv. VI, p. 454
Mig. V, col. 1238
Viv. VI, p. 456
Mig. V, col. 1241
Inédit
………………………. Mig. VI, col. 1033
322/341

33.3 Page 323

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MDCLII
(fragment)……….
MDCLIII...............
MDCLIV...............
MDCLV................
MDCLVI
(fragment)……….
MDCLVII.............
MDCLVIII............
MDCLIX..............
MDCLX...............
MDCLXI..............
MDCLXII.............
MDCLXIII............
MDCLXIV............
MDCLXV.............
MDCLXVI............
MDCLXVII texte
tronqué
et
interpolé................
pp. 251-254 (II. 1-
3)………………...
II. 4-8……………
II. 9-23…………..
II. 24-30…………
p. 255, II. 1-19…..
II. 20-26…………
fin.........................
MDCLXVIII 1er et
2e alinéas………...
3e 4e et 5e alinéas...
6e et 7e alinéas…...
P.-S.......................
MDCLXIX...........
………………………...
Genève. MM. Grosset…
………………………...
………………………...
Annecy. Visit. (Copie)...
………………………...
Turin. Visit. (Voir note
(754), p. 230).................
Turin. Archiv. de l'Etat..
Wilmington (Etats-
Unis). Visitation………
Palerme. Visitation……
Paris. Cte Allard du
Chollet………………...
………………………...
Turin. Visitation............
Annecy. Visitation.
(Fac-similé)...................
………………………...
………………………...
………………………...
Amance (Hte-Saône).
Abbé Eberlé...................
Idem...............................
Idem...............................
Idem...............................
Idem...............................
Château d'Yvoire (Hte-
Savoie). Baron d'Yvoire
(Copie)………………...
Idem...............................
Idem...............................
Idem...............................
Turin. Archiv. de l'Etat..
Charles-Auguste, Vie
de la Mere de Blonay
(1655), chap. VII.........
……………………….
Hérissant, VI, p. 390…
Epistres spirituelles,
1626, 1. VI...................
……………………….
Hérissant, IV. p. 243…
Data, II, p. 266……….
Ibid., II, p. 265……….
……………………….
……………………….
Hérissant, IV, p. 247…
Epistres spirituelles,
1626, 1. III....................
Datta, II, p. 287............
Hérissant, IV, p. 254…
Epistres spirituelles,
1626, 1. VII…………..
Epistres spirituelles,
1626, 1. VI. (Voir note
(841), p. 255)…………
Hérissant, Opuscules,
IV, pp. 82-84................
Ibid., p. 84....................
……………………….
Hérissant, Opuscules,
IV, p. 85.......................
……………………….
Hérissant, Opuscules,
IV, p. 85.......................
Epistres spirituelles,
1626, 1. III...................
……………………….
Epistres spirituelles,
1626, 1. III...................
……………………….
Datta, II, p. 271............
Ibid., col. 1087
Inédite
Viv. XII, p. 216
Mig. V, col. 1693
Viv. XI, p. 206
Mig. V, col. 1244
Inédit
Viv. XI, p. 212
Mig. V, col. 1249
Viv. VII, p. 415
Mig. VI, col. 78
Viv. VI, p. 460
Mig. VI, col. 783
Inédite
Inédite
Viv. VII, p. 419
Mig. V, col. 1250
Viv. XI, p. 213
Mig. V, col. 1351
Viv. VI, p. 465
Mig. VI, col. 798
Viv. XI, p. 216
Mig. V, col. 1253
Viv. XI, p. 355
Mig. V, col. 1370
[469]
Viv. VI, p. 538
Mig. V, col. 1217
Viv. VI, p. 540
Mig. V, col. 1218
Inédites
Viv. VI, p. 540
Mig. V, col. 1219
Inédites
Viv. VI, p. 541
Mig. V, col. 1219
Viv. IX, p. 525
Mig. V, col. 1255
Inédits
Viv. IX, p. 526
Mig. V, col. 1255
Inédit
Viv. IX, p. 527
Mig. VI, col. 787
323/341

33.4 Page 324

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MDCLXX.............
MDCLXXI...........
MDCLXXII texte
tronqué…………..
texte authentique...
fragment final……
MDCLXXIII.........
MDCLXXIV........
MDCLXXV..........
MDCLXXVI.........
MDCLXXVII.......
MDCLXXVIII......
MDCLXXIX........
MDCLXXX
(fragmt)………….
MDCLXXXI.........
MDCLXXXII.......
MDCLXXXIII......
MDCLXXXIV......
MDCLXXXV pp.
292, 293 (II. 1-8)...
suite.......................
dernière phrase…..
MCDLXXXVI......
MDCLXXXVII
texte tronqué et
interpolé…………
texte complet…….
………………………...
Caen. Visitation……….
………………………...
Rennes. Visitation.........
………………………...
Turin. Archiv. de l'Etat..
………………………...
………………………...
………………………...
………………………...
Annecy. Visit.(Copie)…
………………………...
Ier Procès de Canonis….
Château de La Combe de
Lancey (Isère). M. du
Boys...............................
………………………...
Annecy. Visitation.........
Nantes. RR. PP. de
l'Immaculée-Conception
Nevers. Visitation..........
Idem...............................
Idem...............................
Lons-le-Saulnier.
Carmel………………...
………………………...
………………………...
Œuvres, 1652, 1. VI….
Instructions et pratique
de piété, 16881412…….
Epistres spirituelles,
1626, 1. VI...................
……………………….
Année Sainte de la
Visitation, t. I, p. 315…
Datta, II, p. 272............
Epistres spirituelles,
1629, 1. IV...................
Hérissant, Opuscules,
IV, p. 68.......................
De Stefani, La Nunz. di
Francia del Card.
Bentivoglio (Firenze,
1870), vol. IV, p. 454…
Epistres spirituelles,
1626, 1. III...................
……………………….
Hérissant, V, p. 217….
……………………….
……………………….
Epistres spirituelles,
1626, 1. III...................
……………………….
Hérissant, IV, p. 268…
……………………….
……………………….
……………………….
……………………….
Epistres spirituelles,
1626, 1. IV...................
Hérissant, V, p. 245….
Viv. XI, p. 239
Mig. V, col. 1275
Viv. IX, p. 528
Mig. V, col. 1256
Viv. VI, p. 547
Viv. XI, p. 219
Mig. V, col. 1461
Viv. IX, p. 529
Mig. VI, col. 788
Viv. XI, p. 130
Mig. V, col. 1172
Viv. X, p. 360
Mig. V, col. 762
Viv. XI, p. 218
Mig. V, col. 1256
[470]
Mig. VI, col. 1040
Viv. VII, p. 434
Mig. V, col. 1468, et
VI, col. 1033
Mig. VI, col. 1034
Inédite
Viv. XI, p. 223
Mig. V, col. 1257
Mig. VI, col. 1035
Viv. XI, p. 228
Mig. V, col. 1239
Inédites
Mig. VI, col. 1036
Inédite
Inédite
Viv. XI, p. 422
Mig. V, col. 1457
Viv. XI, p. 436
Mig. V, col. 1477, et
VI, col. 1041
1412 Voir tome XVI, note (1442), p. 454.
324/341

33.5 Page 325

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MDCLXXXVIII...
MDCLXXXIX.....
MDCXC................
MDCXCI..............
MDCXCII.............
MDCXCIII............
MDCXCIV texte
tronqué…………..
texte
authentique………
MDCXCV.............
MDCXCVI...........
MDCXCVII..........
MDCXCVIII texte
définitif………….
minute (fragmt)….
MDCXCIX...........
MDCC..................
MDCCI
(fragment).............
MDCCII................
MDCCIII..............
MDCCIV..............
MDCCV................
MDCCVI..............
MDCCVII.............
MDCCVIII
(fragment)……….
MDCCIX..............
MDCCX................
MDCCXl
1er
alinéa…………….
………………………...
………………………...
Limoges. Visitation.......
Montbrison. Baron de
Rostaing.........................
Lyon. Eglise Saint-
François de Sales……...
Nantes. Visitation..........
………………………...
Turin. Visitation………
………………………...
Tréguier. Filles de la
Croix…………………..
………………………...
Turin. Cte della Chiesa...
Rome. Vatican, chapelle
des Reliques du Pape.....
Annecy. Visitation.........
………………………...
Annecy. Visitation (Vie
manuscrite de la Mère
Favre.)...........................
Annecy. Visitation…….
Annecy. Famille Berthet
………………………...
………………………...
………………………...
………………………...
………………………...
Turin. Archiv. de l'Etat..
Annecy. Missionnaires
de St-François de Sales..
Riom. Visitation............
Œuvres, 1641, t. II,
epist. XXXI..................
Epistres spirituelles,
1626, 1. IV...................
……………………….
……………………….
Semaine cath. de Lyon,
14 décembre 1877……
……………………….
……………………….
Datta, II, p. 52.......
Epistres spirituelles,
1626, 1. VI, et
Hérissant, IV, p. 281
(post-scriptum)
Instructions et pratique
de piété, 1688………...
Epistres spirituelles, l
1626, 1. VI...................
……………………….
……………………….
……………………….
Epistres spirituelles,
1626, 1. II.....................
Vie de la Mere M.-J.
Favre (1659), ch. IX…
……………………….
Revue Savoisienne, mai
1863………………….
Epistres spirituelles,
1626, 1. III...................
Ibid...............................
Ibid. (texte français),
1629 (texte latin), 1. I..
Ibid., 1626,1. VI...........
Ibid. (Voir note (1114),
p. 350)………………..
Datta, II, p. 276............
……………………….
Année Sainte de la
Visitation, t. II, p. 199..
Viv. XII, p. 182
Mig. V, col. 1651
Viv. XI, p. 475
Mig. V, col. 1505
Inédite
Inédite
Inédite
Mig. VI, col. 1037
Viv. VII, p. 180
Mig. VI, col. 662, et
IX, col. 105
Viv. XI, p. 230
Mig. V, col. 1263
[471]
Viv. XII, p. 20
Mig. V, col. 1528
Viv. XI, p. 233
Mig. V, col. 1265
Inédite
Inédite
Inédite
Viv. XI, p. 166
Mig. V, col. 1204
Inédite
Viv. XI, p. 234
Mig. V, col. 1266
Viv. IX, p. 522
Mig. V, col. 1201
Viv. XI, p. 381
Mig. V, col. 1413
Viv. VI, p. 543
Mig. V, col. 1460
Viv. XI, p. 237
Mig. V, col. 1268
Viv. VI, p. 461
Mig. VI, col. 791
Mig. VI, col. 1038
325/341

33.6 Page 326

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2e alinéa................
MDCCXII pp.
355, 356 (II. 1-6,
21, 22)…………...
II. 7-20..................
MDCCXIII............
MDCCXIV...........
MDCCXV.............
MDCCXVI............
MDCCXVII
(fragmt)………….
MDCCXVIII.........
MDCCXIX...........
MDCCXX............
MDCCXXI...........
MDCCXXII..........
MDCCXXIII.........
MDCCXXIV.........
MDCCXXV pp.
374-376 (II. 1-9)…
II. 10-21…………
suite……………..
MDCCXXVI
(fragt)……………
MDCCXXVII.......
MDCCXXVIII......
MDCCXXIX........
MDCCXXX
(fragmt)………….
MDCCXXXI.........
MDCCXXXII.......
Idem...............................
Annecy. Visitation (Vie
manuscrite de la Mère
de Chastel)…………….
Idem...............................
………………………...
………………………...
………………………...
………………………...
………………………...
Turin. Archiv. de l'Etat..
………………………...
………………………...
Annecy. Visitation.........
Rome. Visitation............
Pignerol. Visitation……
Paris. M. Bosch.............
Bourg-en-Bresse.
Visitation (Ancien Ms.)
Nevers. Visitation.........
Idem..............................
Nevers. Visit. (Lettre de
Ste J.-Fse de Chantal)…..
Ier Procès de Canonis….
Chambéry. Visitation…
………………………...
Paris. Archiv. Nat., M.
234 (Copie)......
………………………...
Turin. Archiv.de l'Etat…
……………………….
Vie de la Mere P.-M. de
Chastel (1659) ch.
XXIII...........................
……………………….
Epistres spirituelles,
1626, 1. V....................
Datta, II, p. 277...........
Epistres spirituelles,
1626, 1. VII..................
Ibid...............................
Charles-Auguste, Vie
de la Mere de Blonay
(1655), chap. XXVI.....
Datta, II, p. 279………
……………………….
Hérissant, IV, p. 292…
Epistres spirituelles,
1626, 1. IV...................
……………………….
Datta, II, p. 55……….
……………………….
Epistres spirituelles,
1629, 1. VI, p. 977.......
……………………….
Epistres spirituelles,
1626, 1. VI...................
……………………….
Epistres spirituelles,
1626, 1. I......................
Datta, II, p. 280...........
Epistres spirituelles,
1626, 1. VI. (Voir note
(1221), p. 387)..............
Etudes religieuses S.J.,
août 1877
Epistres spirituelles,
1626, 1. V.....................
……………………….
Inédit
Viv. VII, p. 440
Mig. V, col. 1301
Inédites
Viv. XI, p. 238
Mig. V, col. 1269
Viv. IX, p. 533
Mig. VI, col. 792
Viv. XII, p. 239
Mig. V, col. 1689
Viv. XII, p. 240
Mig. V, col. 1689
Mig. VI, col. 990
[472]
Viv. VII, p. 424
Mig. VI, col. 792
Mig. VI, col. 1073
Viv. VII, p. 425
Mig. V, col. 1269
Viv. XI, p. 32
Mig. V, col. 1058, et
VI, col. 1039
Inédite
Viv. VI, p. 271
Mig. VI, col. 664
Inédite
Viv. XI, p. 54
Mig. V, col. 1095
(Voir not. (1175), p.
374)
Viv. VII, p. 427
Mig. V, col. 1271
Viv. VII, p. 428
Mig. V, col. 1272
Inédit
Viv. IX, p. 534
Mig. V, col. 1277
(Voir not. (1202), p.
384)
Viv. VII, p. 432
Mig. VI, col. 793
Viv. IX, p. 537
Mig. V, col. 1283
Viv. XI, p. 241
Mig. V, col. 1279
Inédite
326/341

33.7 Page 327

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MDCCXXXIII......
MDCCXXXIV......
MDCCXXXV.......
MDCCXXXVI......
MDCCXXXVII
pp. 401-403 (II. 1-
12)……………….
II. 13-16…………
fin………………..
MDCCXXXVIII...
MDCCXXXIX 1er
et dern. alinéas…..
p. 409……………
MDCCXL.............
MDCCXLI
(fragment)……….
MDCCXLII...........
MDCCXLIII.........
………………………...
Turin. Visit. (Copie)…..
………………………...
Turin.Archiv. de l'Etat...
Turin. Visitation............
Annecy. Visit. (Hist. de
la Fondation de la
Visitation de Turin)……
Turin. Visitation.............
Castel-Viscardo (près
Bolsena, Italie). Eglise
paroissiale......................
Paris. Archiv. Nat., M.
216 (Copie)....................
Idem...............................
Idem...............................
………………………...
………………………...
Viuz-en-Sallaz (Haute-
Savoie). Presbytère……
Hérissant, IV, p. 536…
……………………….
Blaise,
Nouvelles
inédites (1833), p. 56…
Datta, II, p. 282............
Ibid., p. 339..................
……………………….
Datta, II, p. 340……...
Cozza-Luzi, Sopra un a
Lettera inedita di S.
Francesco di Sales,
Roma 1892…………..
……………………….
Mémoire, etc., 18941413,
t. II, Partie VI, ch. V, p.
711……………………
……………………….
Grossi, Vie de la Mere
de Ballon (1695), 1. II,
ch. VIII, p. 144.............
Ibid., p. 143bis……….
……………………….
Viv. XI, p. 242
Mig. V, col. 1280
Inédite
Viv. XI, p. 246
Mig. VI, col. 887
Viv. VI, p. 463
Mig. VI, col. 794
Viv. XI, p. 247
Mig. VI, col. 828
Inédites
Viv. XI, p. 248
Mig. VI, col. 829
[473]
Inédits
Inédite
Viv. VII, p. 304
Mig. V, col. 1008
Inédite
APPENDICE
I
A…………………
B. – I…………….
II……………
Annecy. Visit.(Copie)
………………………...
Annecy.
Archiv.
communales, Série GG..
……………………….
Bouchage, Le Prieuré
de Contamine (1889),
ch. VIII, p. 131……….
……………………….
Inédite
Inédite
1413 Mémoire sur la fondation, le gouvernement et l'observance des Carmélites déchaussées, publié par les Carmélites
du premier Monastère de Paris; Reims, Dubois-Poplimont, 1894.
327/341

33.8 Page 328

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II
A…………………
B…………………
C…………………
D. – I…………….
II (fragment).
E. – I…………….
II……………
III (fragment).
IV (fragment).
F…………………
Chambéry. Visitation….
Annecy. Visitation.........
Rome.
Archiv.
Vaticanes (Borghese II,
83, p. 208)……………..
Turin. Archiv. de l'Etat
(Lettere Ministri, Roma,
Mazzo 31)……………..
Idem...............................
Idem...............................
Idem...............................
Idem...............................
Idem...............................
Idem (Mazzo 30)...........
……………………….
……………………….
……………………….
……………………….
……………………….
……………………….
……………………….
……………………….
……………………….
……………………….
Inédite
Inédite
Inédite
Inédite
Inédit
Inédite
Inédite
Inédit
Inédit
Inédite [474]
328/341

33.9 Page 329

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Table des matières
Avant-Propos..................................................................................................................................V
Avis au Lecteur............................................................................................................................XX
ANNÉE 1619
(Suite)
Lettre MDXLI A Mme de Lamoignon. Compassion pour une âme. Souhaits pieux...........1
MDXLII A l'Abbesse de Port-Royal. Cinq avis au sujet d'une confession générale. Par
quel motif la faire. Se laisser à la Providence. Assurance d'union éternelle..........................2
MDXLIII A Mme Le Nain de Crevant. Témoignage d'affection et souhaits de perfection
spirituelle.........................................................................................................................................4
MDXLIV A la Mère de Chantal. Recommandations à une convalescente. Saint Bernard
prêché par lui-même. Une nièce de Mme Amelot, prétendante de la Visitation.........................5
MDXLV A une dame. La courte durée des séparations faites par la mort. Contemplation
de Jésus et de Marie sur le Calvaire. Une mère dépouillée de son plus précieux vêtement…..6
MDXLVI A l'Abbesse de Port-Royal. Joyeux retour d'un petit voyage. Une amitié qui
commence. Dans quel esprit la Mère Arnauld doit servir Dieu.................................................8
MDXLVII A une dame de Paris. Faire courtement les exercices de piété, et avec un maintien
digne de Dieu. La pensée de l'éternité, souveraine consolation ici-bas. Protestation
d'invariable souvenir.......................................................................................................................9
MDXLVIII A une demoiselle de Paris. Les adieux d'un Saint. Béatitude de l'âme qui n'est
qu'à Dieu; ce qu'elle cherche et ce qu'elle veut.............................................................................11
MDXLIX A une Religieuse. Garder la paix sans se troubler de la variété des sentiments
intérieurs. Le Monastère, «academie de la correction, hospital de malades spirituelz.» [475]
Remède contre la crainte des esprits. Souvenir de jeunesse de François de Sales. Pourquoi
les ténèbres et la solitude de la nuit lui sont devenues délicieuses...............................................12
MDL A l'Abbesse de Port-Royal. Le Saint quitte Paris. Réponse aux appréhensions sur
l'avenir. Ne pas examiner son oraison d'une manière curieuse. La patience «parmi les
niaiseries et enfances» du prochain. Un châtiment miséricordieux de la Providence divine.
Ce que Dieu unit est inséparable...................................................................................................14
MDLI A Mmes de Villeneuve et de Frouville. — Une seule lettre pour deux sœurs. — Combien
salutaire l'union des cœurs et des âmes. — Les abeilles spirituelles dans leurs ruches. Assurance
de perpétuel et affectueux dévouement.........................................................................................18
MDLII A la Mère de Chantal. Fatigué du voyage, l'Evêque envoie des lettres à distribuer.
Itinéraire. Les prétendants du monde et les prétendantes au Ciel.......................................19
MDLIII A l'Abbesse de Port-Royal. Le retour à Maubuisson de la Mère Arnauld; affectueuse
sollicitude de François de Sales. Ses sentiments au milieu des faveurs de la cour. Abeilles et
guêpes. Salutations paternelles................................................................................................21
MDLIV A la Sous-prieure du Carmel d'Amiens (Inédite). Joie de l'Evêque de Genève d'avoir
revu deux des filles de Mme Acarie; regret de n'avoir pu visiter la troisième, au Carmel d'Amiens.23
MDLV A l'Abbesse de Port-Royal. Intime union que l'éloignement resserre de plus en plus.
Un père chrétiennement résigné. Attendrissement du Saint sur la maladie de deux de ses
filles spirituelles; prière qu'il adresse à Dieu..................................................................................25
MDLVI A Mme Le Maistre. Les faveurs de l'Epoux divin. Eloge de Robert Arnauld.
Le martyre de saint Maurice; le martyre du cœur. — «Tintamarres et presse» qui empêchent le
Saint d'écrire à son gré...................................................................................................................27
329/341

33.10 Page 330

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MDLVII A M. Antoine Arnauld. Consolations sur plusieurs afflictions. De quoi nous
devons remercier Dieu. — Modérer son travail «a mesure que le tems amoindrit les forces.»…30
MDLVIII A la Mère de Chantal (Inédite). L'hôte de l'Evêque de Genève à Bourges.
Lettres du Saint et de a Sainte trop lentes à parvenir. Début des tracasseries au sujet du mariage
de M. de Foras. — La courte consolation des Sœurs de Moulins. — Pourquoi François de Sales
n'écrit pas longuement...................................................................................................................31
MDLIX A la Mère Rosset. — Quelque chose qui est «demeuré sur le cœur» du Saint. — Un
métier plus difficile que [476] celui de reprendre. Ne pas être prompte à promettre, mais agir
avec conseil. Obtenir à la fois le respect et l'amour de ses inférieurs. La douceur ne doit point
ressembler à la timidité..................................................................................................................33
MDLX A la Mère de Chantal (Inédite). Pourquoi François de Sales n'a pu voir à souhait
Mme de Villesavin. Témoignages d'estime qu'il a reçus de la Reine mère. Les Prélats de la
cour et les bons propos de l'Evêque de Luçon. On cherche à retenir le Saint en France; ses
sentiments à ce sujet. Projet d'itinéraire. Heureuses rencontres à Tours et à Bourges. Ce
qu'on perd à la cour. De quoi on blâme la Mère Anne-Marie Rosset; conseils que lui a donnés
le saint Fondateur. La future fondation d'Orléans et les aversions de Mgr Frémyot. Nouvelles
du Monastère de Moulins où Mme du Tertre «exerce sa vanité fort
honnorablement.».....................37
MDLXI — A la Sœur de la Roche. — Réponse au sujet d'un délai pour la profession d'une
Novice……………………………………………………………………………………………45
MDLXII A Mgr Camus. Deux amis qui n'ont pu se dire adieu, ni se rencontrer en chemin.
Le «nid» de l'Evêque de Genève bien loin de l'«aymable Paris» de l'Evêque de Belley.
Pourquoi les PP. Capucins sont plus propres à faire le bien dans le diocèse de Mgr Camus.
Messages d'honneur et d'affection.................................................................................................46
MDLXIII A la Mère de Chantal. L'unique ambition du grand Aumônier de Christine de
France. Pourquoi il méprise la cour..........................................................................................49
MDLXIV A l'Abbesse de Port-Royal. Comment se rassurer au milieu des inclinations
mauvaises de la nature. Exemple de saint Paul. L'inconstance de notre âme; ce qui doit y
demeurer stable. Manière de combattre les tentations d'affectation. Conséquences des fautes
vénielles. Etre juste envers soi-même. Le danger des austérités indiscrètes.........................50
MDLXV A la Mère de Chantal. Une Communauté fervente, sous une Supérieure très sainte
mais plus propre à converser avec Dieu qu'avec les hommes........................................................53
MDLXVI A M. de Blonay (Inédite). Inépuisable condescendance et sainte fermeté de
François de Sales............................................................................................................................54
MDLXVII Au Prince de Piémont. Infraction aux désirs et aux ordres de Son Altesse pour
les prébendes de Contamine. Lettres obtenues subrepticement. Prière de faire connaître la
véritable volonté du duc de Savoie........................................................................................55 [477]
MDLXVIII Au Prieur et aux Religieux du Monastère de Sixt. Aimable salut de retour.
Tentation de désunion au Monastère de Sixt. Ce qu'elle empêchera si elle prévaut................57
MDLXIX A la Mère de Chantal. Le rassasiement des affamés de justice. Un
enseignement de saint Paul que l'Evêque de Genève veut mettre en pratique. Dans quelle mesure
il tient à sa réputation.....................................................................................................................58
MDLXX A la Présidente Amelot (Fragment inédit). Prédiction du Fondateur sur l'Ordre de
la Visitation....................................................................................................................................59
MDLXXI A une demoiselle de Paris. L'accomplissement d'une promesse. Une «avette
parmi les toiles des araignees.» Ce que souhaite le Saint à sa correspondante, au souvenir de
leurs adieux....................................................................................................................................60
MDLXXII A une dame. — Maladie et affliction du cœur. — Petit ange envolé au Ciel. Les
richesses que nous amassons ici-bas. Etre à Dieu toujours.......................................................61
MDLXXIII Au Comte de Viry (Inédite). Ce qui reste à faire pour permettre la célébration
d'un mariage...................................................................................................................................63
330/341

34 Pages 331-340

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34.1 Page 331

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MDLXXIV A Mme de la Fléchère (Inédite). Comment le Saint occupera ses rares loisirs
jusqu'aux fêtes. Le futur mariage de Mme de la Croix...............................................................64
MDLXXV A M. de Montholon. Douces plaintes et légitimes excuses. Quelle coopération
l'Evêque de Genève a donnée au mariage de M. de Foras..............................................................65
MDLXXVI A un gentilhomme. Ce qui attriste le Saint dans les blâmes faits contre lui.
La seule cause de ses fautes. Pourquoi il voudrait regagner «la bonne grace» de ses
adversaires……………………………………………………………………………………….67
MDLXXVII A Mgr Camus. Quelle part l'Evêque de Genève prend au deuil de son ami.
Eloge de M. Camus de Saint-Bonnet et de sa famille. Surcroît d'affliction pour le Saint au sujet
de ce trépas. Explication loyale sur le mariage de M. de Foras. Le mécontentement injuste
de M. de Montholon……………………………………………………………………………...68
MDLXXVIII A la Mère de Chantal. Envoi de lettres ouvertes. Ce qu'il faut faire de celle
adressée à M. de Montholon. Indifférence du Saint dans «la tempeste et la bonace.»
L'exemple de saint Joseph. Doux reproche à la Mère de Chantal. Le prédicateur de l'Avent.
Des âmes un peu trop empressées au bien. Messages..........................................................71
MDLXXIX A l'Abbesse de Port-Royal. Un Père qui connaît bien sa fille. Les cerisiers et
les palmiers. Regard compatissant sur les faiblesses humaines. Combien de fois [478] le jour
remettre son cœur «en posture d'humilité.» — La volonté du saint Evêque «suivante» de celle de
Dieu. Deux âmes en péril. Encouragement à une affligée. Difficultés suscitées au bien.
Une des joies du Ciel.................................................................................................................74
MDLXXX Au Chanoine de Sales, son frère. Vieilles lettres qui attendaient un porteur.
Les futurs aumôniers de Madame. Quelques nouvelles. Un Mémoire à présenter au prince
de Piémont. Projet d'union d'un bénéfice au Chapitre de Genève. Des jaloux auxquels il faut
répondre par des bienfaits. — Commissions, recommandations et messages…………………..77
MDLXXXI Au Prince de Piémont. Requête au nom d'un Monastère qui fleurit «en veritable
dévotion.» Un Mémoire dont la lecture n'est pas «hors de sayson» pendant les fêtes de Noël..85
MDLXXXII A une Religieuse de la Visitation. Comment accueillir l'aimable «petit Jesus».
— Une de ses larmes sur notre cœur. — Troupe de bergères offrant leur plus bel agneau au divin
Enfant…………………………………………………………………………………………….86
MDLXXXIII A Mme du Tertre. Les larmes de la nature sur la séparation du monde.
Compassion et espérance. Respect du Saint pour l'action de Dieu dans les âmes. Sacrifice
de «poudres» et de «papiers dorés.» Confidence paternelle. Coups de rasoir divins. Avis
sur des choses quelque peu superstitieuses et sur les visites. Les conversations de l'Evêque de
Genève après son sacre..................................................................................................................87
MDLXXXIV — A la Sœur de Blonay. — Vin heureusement mêlé de baume. Un zèle «tout
bon» qui avait besoin d'être purifié. Regard sur l'Enfant de Bethléem. A qui appartiennent
la joie et la paix. La condition suffisante pour recevoir le divin Nouveau-né.........................91
MDLXXXV A M. de Quoex. Démarches infructueuses en vue d'obtenir un accommodement
entre deux parties..........................................................................................................................92
MDLXXXVI A Mme de la Fléchère. Que faut-il pour devenir une vraie fille de la
Visitation?.....................................................................................................................................93
MDLXXXVII A la Mère de Chastel. Mourir à soi pour vivre à Dieu. Abandon à la
Providence.....................................................................................................................................94
MDLXXXVIII A Mme de Thou. Un bien inestimable. Pourquoi le saint Evêque est
«beaucoup» Père de la Novice. Humilité, obéissance et joie..........................................95 [479]
ANNÉE 1620
MDLXXXIX A une Religieuse de la Visitation. Ingénieuse interprétation d'un texte de
l'Ecriture. Le sang de Jésus marquant l'entrée de l'année nouvelle. Comment rendre les nôtres
fertiles. Transformation de l'âme. Pourquoi Dieu nous laisse des imperfections...................97
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MDXC A MM. du Conseil de la Sainte-Maison de Thonon (Inédite). Recommandation en
faveur d'un ancien converti.............................................................................................................99
MDXCI A la Mère de Chantal. L'Evêque de Genève roi de la fève à la Visitation d'Annecy.
Préparation à un «renouvellement extraordinaire». Bonne correction à une âme opiniâtre.
Science acquise à la cour par Jean-François de Sales; honneurs qu'il y reçoit. Protecteur d'année;
pourquoi le Saint aime la pauvreté...............................................................................................100
MDXCII A l'Abbesse de Port-Royal. A quoi faut-il employer la nouvelle année. La Mère
Angélique aux pieds de l'Enfant de Bethléem; l'abeille autour de son roi...................................102
MDXCIII A la Mère de Chastel. Contentions en matière de préséance. L'Evêque de
Genève officiant ou prédicateur à plusieurs réceptions de Religieuses à Paris. Mieux vaut avoir
mille ècus par une voie de douceur que douze cents en disputant. Préférer l'obéissance au jeûne.
L'opiniâtreté d'une tentation. Bonheur de la pauvreté. Quelles dispositions porter à la
sainte Table..................................................................................................................................103
MDXCIV Au Père Dominique de Chambéry (Inédite). Permission demandée pour un
voyage du Frère Adrien des Echelles. Quand les vocations extraordinaires doivent-elles être
estimées. Regrets sur le décès du P. Constantin. Réponse de l'Evêque de Belley au sujet des
Capucins......................................................................................................................................107
MDXCV A la Mère de Chastel. Manière douce et tranquille de rejeter l'amour-propre.
La gloire de l'abjection. Chimères, contradiction et extravagance d'une tentation. Comment
aider à la combattre et à en triompher.........................................................................................108
MDXCVI — A la Sœur de Gérard. — Les solitaires que Dieu n'aime pas et avec lesquels il ne
veut point d'union. Exemple d'obéissance de saint Siméon Stylite. Marques de l'inspiration.
Energiques conseils................................................................................................................110
MDXCVII A un oncle. Double affliction en un trépas. Se consoler sur le départ des nôtres
et sur les circonstances de ce départ, par la raison et par la foi. Miséricorde de Dieu qui [480] a
peut-être employé le feu d'ici-bas pour épargner à une âme celui du Purgatoire........................112
MDXCVIII Au Comte de Viry. Respectueuse et ferme remontrance au sujet d'un mariage
contracté sans la dispense nécessaire...........................................................................................113
MDXCIX A la Princesse de Piémont. François de Sales célèbre le jour deux fois heureux
où Dieu donna une princesse, à la France, par sa naissance, à la Savoie, par son mariage. Les
vœux et les prières du grand Aumônier de Christine...................................................................115
MDC Au Duc de Bellegarde. Pourquoi l'Evêque de Genève réitère sa recommandation en
faveur des Pères Barnabites……………………………………………………………………..117
MDCI A M. de Quoex. Noble désintéressement du Saint. Ce qu'il ne peut trouver
supportable. Les droits légitimes seront respectés; mais l'Evêque ne peut ni ne veut céder les
siens. Recours au Sénat pour «faire faire place» à son autorité..............................................118
MDCII A Mgr Camus. Mesure de réputation que l'Evêque de Genève ambitionne...........121
MDCIII A Mme de la Fléchère. — Un «petit cœur» où le Saint veut loger lui-même l'Hôte
divin…………………………………………………………………………………………….121
MDCIV A l'Abbesse de Port-Royal. Nouvelles de la mort de M. Arnauld et de la résignation
des siens, données par la Mère de Chantal au saint Evêque. — Notre cœur, tiré «piece apres piece»
vers Dieu. Paternelle sollicitude pour les enfants du défunt. La réforme de l'extérieur servant
à celle de l'intérieur. Comment combattre les pensées de vanité. Faire toutes choses «tout
bellement,» et ne pas se mettre en peine des saillies sans volonté. Douce et gracieuse
plaisanterie sur une «petite niaiserie.» La discrétion du Directeur. Conseils pour l'oraison.
Spécial intérêt pour Mme Le Maistre.......................................................................................122
MDCV A Mme Rousselet (Inédite). Raison d'une lettre particulière à la destinataire.
Souhaits de bénédictions. Deux chères vertus, nées de la confiance en Dieu........................128
MDCVI A la Mère de Chastel. Influence du mal physique sur le moral. Une crainte du
saint Fondateur. Décision en faveur d'une infirme. Regarder Dieu et non ses propres
imperfections. Ce que François de Sales apprit à la cour. — Fondations en France………..129
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MDCVII A M. de Malarmay de Lauray. La chose la plus agréable et salutaire en ce monde.
Affection paternelle et filiale entre l'Evêque de Genève et Mme de Rossillon. [481]
Remerciements pour un présent. Une amie de l'Abbesse de Baume. — Saint adieu………..132
MDCVIII Au Baron de Rochefort. Heureuse naissance d'un petit-neveu de saint Bernard de
Menthon. Une pauvre femme pour laquelle on a trouvé un logis. La retraite à Talloires de
Benoît de Chevron; soupçons de sa mère contre l'Evêque de Genève.........................................134
MDCIX Au Chanoine de Sales, son frère (Inédite). Vent en poupe et faveurs princières.
Démarches à Rome. François de Sales voudrait savoir à quoi Son Altesse désire l'employer.
Trois sortes de gens qui ne témoignent pas de joie de la promotion de Jean-François à la
coadjutorerie. Ceux qui s'en réjouissent..................................................................................136
MDCX A M. Jarcellat-Beybin (Inédite). Prière de s'intéresser à l'affaire de la coadjutorerie
de Jean-François de Sales qui doit se traiter en Cour de Rome....................................................139
MDCXI A Mme De Granieu. Deux mots seulement à la destinataire, pour avoir le temps
d'écrire à d'autres. Humilité et patience. M. de Boisy, évêque. A quoi François de Sales
emploiera son loisir......................................................................................................................141
MDCXII A Mme de Veyssilieu. Double raison pour le Saint d'aimer une postulante.
Confiance en Dieu, et nous ne serons pas confondus...................................................................143
MDCXIII A Mme de Jomaron (Inédite). La consolation d'une paternité spirituelle. «Trois
vertus colombines que Jesus Christ recherche en ses amantes.» Surcharge de
correspondance............................................................................................................................144
MDCXIV A la Mère de Chastel. — Prochaine entrée au noviciat d'une sœur de la Mère de
Chastel. — Le bon cœur de M. d'Ulme; ce qu'il voudrait savoir.................................................145
MDCXV A la Mère Favre. Comment entendre un «document» du saint Fondateur.
Avantages du Directoire spirituel; où conduisent ses multiples exercices. Conseils à la
Maîtresse des novices…………………………………………………………………………...146
MDCXVI Au Baron de la Tournette. Un vieil ami de M. de Boisy. Concurrents pour la
chapelle Sainte-Catherine; pourquoi le Saint ne peut favoriser le fils du
destinataire...................................................................................................................................148
MDCXVII — A la Sœur de la Roche. — Conseils au sujet d'une malade..................................150
MDCXVIII A la Mère de Chantal. Heureuse nomination de Jean-François de Sales à la
coadjutorerie de l'évêché de Genève. — Ce que fait la vieillesse dans le cœur et dans l'âme du
Saint. Ses pensées sur les projets qu'on forme pour lui à [482] Paris. Sollicitude pour l'avenir
de Françoise de Chantal. L'abandon à Dieu au milieu des «douleurs interieures et exterieures.»
Perplexité sans affliction. Messages affectueux. «M. Vincent,» bon conseiller………151
MDCXIX A un gentilhomme (Fragment inédit). Reconnaissance pour de bons offices.....156
MDCXX A une Religieuse de l'Abbaye de Sainte-Catherine. Le cadran exposé au soleil.
Cri de guerre de la volonté. Un prédicateur de Carême qui réclame des prières. La pensée
du Saint sur la clôture de l'abbaye de Sainte-Catherine. Son dévouement et son
dégagement..................................................................................................................................157
MDCXXI A un Religieux de la Compagnie de Jésus (Inédite). La vocation de M. de Sonnaz.
Une âme «parfaitement bonne,» mais qui a besoin de réfléchir encore. Excellente chose
d'affranchir le collège de Chambéry des trésoriers et financiers; comment y arriver.................159
MDCXXII Au Duc de Savoie. Reconnaissance impuissante à s'exprimer.......................161
MDCXXIII Au Prince de Piémont. Délicat remerciement pour la nomination de Jean-
François de Sales comme coadjuteur…………………………………………...........................162
MDCXXIV A la Princesse de Piémont. Les faveurs considérées en ceux qui les donnent et
en ceux qui les reçoivent. — Ce que la princesse a dû voir dans le cœur de François de Sales et
dans celui de son frère..................................................................................................................163
MDCXXV A l'Abbesse de Sainte-Claire d'Evian (Inédite). Les Clarisses d'Evian en
inquiétude sur un prétendu départ du saint Evêque. Voyage très assuré que celui-ci recommande
à leurs prières…………………………………………………………………………………...164
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MDCXXVI Au Président de Tardy. Bon droit des Religieux de Sixt et grande misère des
habitants du pays..........................................................................................................................165
MDCXXVII A M. Montenet. Une promesse fidèlement tenue. Réciprocité d'honneur et
d'affection....................................................................................................................................167
MDCXXVIII A M. de Blonay. Suspendre une nomination jusqu'à l'arrivée d'un Bref de
Rome. Regrets du départ d'un ecclésiastique..........................................................................168
MDCXXIX A la Mère Rosset. — Décision au sujet de la réception d'une Sœur. — Le Fondateur
revise les Règles de son Ordre.....................................................................................................169
MDCXXX A la Mère Favre. Accablement d'affaires. Lettres recommandées.
Nombreuses demandes de fondations de la Visitation. Où trouver des filles? Confiance en
Dieu……………………………………………………………………………………………..171
MDCXXXI A la Mère de Chantal. La coadjutorerie de Jean-François de Sales est
uniquement l'œuvre de Dieu……………………………………………………………...172 [483]
MDCXXXII A un ami (Fragment inédit). Un mot de l'âme du Saint...............................173
MDCXXXIII A Mme du Tertre. La mue du serpent; sa transformation en colombe. Ne
pas regarder en arrière. Condescendance et humilité du Fondateur. Suivre les inspirations
d'En-haut et laisser faire à Dieu. Quel soin il faut avoir de la créature nouvelle, née du Saint-
Esprit……………………………………………………………………………………………174
MDCXXXIV A la Mère de Chastel (Inédite). Des raisons qui ne satisfont pas l'esprit de
François de Sales. Les prétentions de M. d'Ulme. On ne peut lier la liberté pour le choix ou le
changement des Pères spirituels. Salutations affectueuses. Disette de Supérieures pour de
nombreuses fondations …………………………………………………………………………176
MDCXXXV A M. de Foras. Délicatesse dans le silence. L'ordinaire méthode de la
Providence divine. Véritable marque de la bénédiction de Dieu sur un mariage. Conserver
son bonheur et laisser parler le monde…………………………………………………………..177
MDCXXXVI A Mme de Villesavin (Inédite). La préface d'une grande lettre. Quelle est
la meilleure marque de la dilection de Dieu pour ses enfants. Salutations à une petite fille......179
MDCXXXVII A la Duchesse de Nemours. Trois requêtes renouvelées; appel à la bonté, à
la justice, à la piété du duc et de la duchesse de Nemours...........................................................180
MDCXXXVIII Au Chanoine Germonio (Inédite). Envoi des saintes Huiles…………….182
MDCXXXIX Au Chanoine de Sales, son frère. Avis du Saint sur une affaire embarrassante.
Envoi de lettres et promesse d'écrire bientôt...........................................................................183
MDCXL Au Cardinal Borromée. Excuse pour un remerciement tardif. Des Pères
Barnabites en route pour Milan....................................................................................................184
MDCXLI Au Général des Barnabites. Le Saint prie le Général de renvoyer à Annecy deux
Pères Barnabites et de leur en adjoindre un troisième d'âge vénérable........................................186
MDCXLII A la Mère de Chantal. Nouvelles de l'âme de François de Sales. Ses lumières
sur les maximes évangéliques et sur la prudence humaine. M. de Boisy à la cour. Les affaires
et la santé de Mme de la Flèchère.................................................................................................188
MDCXLIII A M. de Quoex. Débats au sujet de la nomination à une cure. Un
accommodement des Ermites du Mont-Voiron procuré par les délégués de l'Evêque de Genève.190
MDCXLIV A Mme de Valfin (Inédite). Une forte et tendre [484] affection paternelle et
filiale. Incertitude du Saint sur l'avenir. L'enfant suspendu «au col de la Providence.»......192
MDCXLV A la Mère de Chantal. Quatre objections au projet de fixer l'Evêque de Genève
en France. Son désir de demeurer attaché à son Eglise. Ce qui vaut mieux pour lui qu'un
chapeau de cardinal. Point de népotisme. Voyage probable à Rome...............................193
MDCXLVI A l'abbesse de Port-Royal. Les fautes involontaires n'empêchent pas la marche
vers la perfection. Vraie cause du mal chez la Mère Arnauld. Comment modérer sa
promptitude. Ne point se dépiter contre soi-même, mais être enfant en humilité. Un nouveau
saint Paul intercesseur pour Onésime.........................................................................................195
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MDCXLVII A la Mère Favre. Avis sur un voyage; la fondation de Turin. Quelle doit être
la durée du noviciat; quand on peut le prolonger. Etablissement de la Visitation en Auvergne.
Pourquoi François de Sales est empêché d'aller prêcher à Lyon...........................................197
MDCXLVIII A la Mère de Chastel. A quelles conditions on peut recevoir à la Visitation des
aspirantes qui n'ont pas encore l'âge d'entrer au noviciat. L'habit qu'il faut leur donner. Rester
indifférente sur le choix que font les postulantes d'une Maison ou d'une autre. Bien que les
Sœurs ne récitent que le petit Office, il est bon de maintenir le rang des Associées. — Profiter de
nos mouvements imparfaits pour nous humilier........................................................................200
MDCXLIX A M. Drujon. La nomination au prieuré de Ripaille, désormais au pouvoir du
saint Evêque. Son double avantage. Prière d'avoir soin de papiers importants pour cette
affaire…………………………………………………………………………………………..204
MDCL Aux Ermites du Mont-Voiron (Fragment inédit). La charité. Souhait............206
MDCLI A Mme de la Fléchère. Un tracas qui empêche de recevoir des consolations et d'en
donner. Petites contestations. Le seul souci que nous devons avoir. Désir de mettre fin à
un procès......................................................................................................................................207
MDCLII A la Mère Favre. — Bénédictions divines promises à la Sœur de Blonay..............208
MDCLIII Au Marquis de Lans (Minute inédite). Une adresse erronée. Nouvelle
nomination faite par le marquis de Lans......................................................................................209
MDCLIV A une Religieuse. L'entrée dans la voie de la [485] vraie dévotion et le secret pour
y persévérer. Préparation à la fête de la Pentecôte. Le vin du Ciel, et le pain de la terre.......210
MDCLV A Mlle Lhuillier de Frouville. Fâcheuse affaire terminée. Que fera la destinataire
de sa liberté? Impossibilité de demeurer en l'état où elle est. Les périls et les mortifications
du mariage. Douce violence que le Saint doit faire à sa fille spirituelle. Ce qu'est la vie
religieuse. Réponse aux plaintes et aux appréhensions de la nature......................................213
MDCLVIA M. de Pignier de Fontany (Fragment inédit). Prière au destinataire de régler les
affaires qui retardent la Profession de sa sœur...........................................................................219
MDCLVII A M. de Foras. Permutation probable de François de Sales et de son frère. Un
esprit qui aurait besoin de mûrir. Annonce d'une lettre à la Mère de Chantal.......................220
MDCLVIII Au Chanoine de Sales, son frère. Double maison de rendre service à M. Roero.
Un canonicat prochainement vacant. Les talents et qualités d'un futur aumônier de Mme
Royale. Incapacité de beaucoup de prétendants à ce poste. Comment faire réussir un désir
de M. et de Mme de Cornillon. Envieux et victorieux. Une réponse embarrassante. Affaires
de Ripaille et de la Sainte-Maison. Coupable qui ne veut pas reconnaître ses torts. Désir de
François de Sales de favoriser les prétentions de M. de Longecombe; difficultés qu'il y rencontre.
— Quelques nouvelles………………………………………………………………………….222
MDCLIX Au Duc de Savoie. A quoi employer les prébendes de Contamine....................230
MDCLX A la Comtesse de Rossillon (Inédite). Une supplication que la destinataire est priée
d'appuyer. — La vocation à l'état ecclésiastique doit procéder de libre volonté………………...231
MDCLXI Au Chanoine de Sales, son frère (Inédite). Contradictions au sujet des Bulles du
futur Evêque de Chalcédoine. Pourquoi le Saint n'a pu accepter de prêcher le Carême à Lyon.
Salutations et nouvelles. Quelqu'un qui veut être du voyage de Rome pour entretenir à loisir
François de Sales..........................................................................................................................232
MDCLXII A la Mère de Brechard. — Prochain départ de quelques Sœurs pour Moulins, Paris,
Orléans. Une lettre qui mettrait l'Evêque «bien en peine.» Avis sur les Règles de saint
Augustin. Les monastères des Filles de la Visitation en voyage. On ne peut faire la Profession
avant la fin de l'année du noviciat................................................................................................236
MDCLXIII A Mme des Gouffiers, Perplexité au sujet d'une [486] âme. Les tendances
d'esprit et de caractère qui lui rendraient périlleux le séjour dans le monde; aversion qui l'éloigne
de la vie religieuse. Quel état mitoyen elle peut embrasser. Souvenir attristé d'un temps de
ferveur. Les procès, «tres mauvaise occupation.» Etre pauvre plutôt que de s'enrichir par
cette voie……………………………………………………………………………………….238
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MDCLXIV Au Chanoine de Sales, son frère. Entreprise à l'avantage de Son Altesse,
proposée par Louis de Sales. Comment préparer doucement la réalisation du projet d'Antoine
Favre pour son fils. Les qualités du président de la Valbonne. Nouveau prétendant à la charge
d'aumônier de la princesse de Piémont. Bien qui résulterait de l'élection de Jean-François au
doyenné de Notre-Dame. Cinq cents écus qu'on n'arrive pas à retirer. Le Monastère de Turin
et les fondations de France. Une traduction de Philothée. Grande alarme parmi les
Religieuses non réformées du diocèse de Genève. Prédicateur de grandissime talent...........241
MDCLXV A M. Rousselet. Affaires recommandées au duc de Nemours et dont l'Evêque de
Genève espère bonne issue. Le marquis de Lans outrepassant ses pouvoirs. Louis de Sales,
gardien du château d'Annecy. Ce qui rend inutile l'intervention du Saint en faveur d'une Novice.
Commissions affectueuses......................................................................................................247
MDCLXVI A la Mère de Chantal. L'excellence et les effets du don surnaturel d'intelligence.
— Quel don le complète………………………………………………………………………..250
MDCLXVII A la Mère de Chastel. Préparation d'une pieuse caravane pour la France.
Une âme fortement attachée aux choses intérieures a quelquefois de la peine à se rendre attentive
aux extérieures. Quelques conseils pratiques. Le livre de la Volonté de Dieu, et le danger de
l'imagination jointe à l'amour-propre. Plusieurs décisions pour la clôture, non encore établie au
Monastère de Grenoble. — Aimable mot sur la sœur de la destinataire. — Supprimer les réflexions,
les examens inquiets, et marcher avec confiance et abandon. Pourquoi cette lettre ne part
qu'après coup. Encore un mot de paix....................................................................................251
MDCLXVIII A Mme de Granieu. Providentiel mélange des douceurs parmi les amertumes.
«Petite prise» inopinée entre l'Official et un ordinand. — Une mortification pour les Sœurs qui
s'en vont en France. Trois lois «pour ne point pecher en la chasse.» L'amitié des enfants de
Dieu……………………………………………………………………………………………..256
MDCLXIX Au Prince de Piémont. Un projet concernant Genève. Prière d'écouter
favorablement le porteur.....................................................................................................259 [487]
MDCLXX A l'Abbesse de Baume-les-Dames. Un pieux dessein du marquis de Lullin, non
réalisé. Combien important de se préparer de bonne heure à la mort. Espérance déçue du
saint Evêque. Pourquoi il se réjouit de la nomination de son frère.........................................260
MDCLXXI A Mme de Villeneuve. Tendresse surnaturelle et paternelle. Réponses à des
cas de conscience.........................................................................................................................261
MDCLXXII A la Mère de Chantal. — La Sœur d'Avisé jointe à la petite troupe des partantes.
Election d'une Assistante-commise au Monastère d'Annecy. «Loup par nature, mais brebis
par grace.» Deux lettres que la Mère de Chantal pourra confronter plus tard. Le formulaire
de la Profession chez les Bénédictins et à la Visitation. Eloge de Mme de Herse et de la comtesse
de Fiesque. Messages affectueux pour plusieurs filles spirituelles du Saint. Mgr de Belley à
Annecy. Zèle et miséricorde de François de Sales pour une âme...........................................263
MDCLXXIII Au Prince du Piémont. Un dessein recommandé à l'attention du prince........269
MDCLXXIV A l'Abbesse de Port-Royal. M. Michel député pour une visite. Il n'y a rien
à craindre des misères spirituelles non aimées. Une fille du monastère de la croix et volonté de
Dieu..............................................................................................................................................270
MDCLXXV A la Présidente de Herse. Une religieuse «protestation» avant un «petit mot de
liberté et de franchise.» Silence réciproque du Père et de la fille. Pourquoi l'Evêque ne l'a
pas rompu. Le gémissement de saint Paul. Se résigner à sentir les attaques de l'amour-propre,
mais n'y point consentir. Où se réfugie la vraie indifférence. Que faire après une chute.
Un charmant filleul de François de Sales; ce que son parrain en attend......................................271
MDCLXXVI A Mgr Maraldi. Le décanat de Saint-Germain l'Auxerrois offert à l'Evêque de
Belley. Pourquoi il ne peut l'accepter. Exposé des raisons qui rendent une dispense légitime
et nécessaire. Un diocèse bien disproportionné à la valeur de son Pasteur.............................275
MDCLXXVII A une Religieuse de la Visitation. L'humilité, réparatrice de nos
imperfections. Vertus à pratiquer pour s'unir parfaitement à Dieu..........................................278
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MDCLXXVIII A Mme de Granieu. Retour de la Mère de Chastel à Grenoble. La
commission dont l'avait chargée Mme de Granieu. Pourquoi le Saint, malgré son désir, n'a pu y
répondre. Sa fidélité aux âmes. — Espérance d'un revoir……………………………………279
MDCLXXIX A la Mère Favre. Lettre à l'Evêque de [488] Clermont et humilité de l'Evêque
de Genève. Perpétuels délais pour la fondation de Turin. La Mère de Chastel à Annecy.
Amis du Saint en Auvergne. Nouvelles de famille.................................................................280
MDCLXXX Au Père Rigaud. Repos en l'amitié; sainte armure, invincible confiance..282
MDCLXXXI A MM. du Conseil de la Sainte-Maison de Thonon (Inédite). La Bulle de
fondation de la Sainte-Maison oblige ses ecclésiastiques à la Règle de l'Oratoire. Moyen
nécessaire pour mettre cette condition en vigueur. Volonté du Prince, ordonnance de l'Evêque.
Projet d'un voyage de François de Sales à Thonon.................................................................284
MDCLXXXII A la Mère de Bréchard. Difficulté pour la fondation de Nevers; d'où elle vient
et le cas qu'il faut en faire. L'avis du Saint sur l'emploi des personnes et de l'argent. Des
entreprises «merveilleusement fascheuses;» les supporter, les porter, et les aimer. Vouloir servir
Dieu, sans s'attacher aux moyens de le servir. Les contradictions, présage de succès. Une
béatitude.......................................................................................................................................285
MDCLXXXIII A la Mère de Chantal. Grandes lettres à Moulins pour l'affaire de Nevers.
Le titre épiscopal de M. de Boisy. — Souhaits de bénédictions sur des cœurs aimés.................289
MDCLXXXIV A Mme du Tertre. Un témoignage que la destinataire doit rendre en faveur
de la vérité. Désintéressement de l'Evêque de Genève. Les désirs de M. et de Mme de Saint-
Géran et d'autres personnes de Moulins. — Comment le vœu de Mme du Tertre en faveur de Nevers
devra être exécuté. Félicitations sur ses progrès dans la piété................................................290
MDCLXXXV A M. de Palierne. Pourquoi François de Sales a choisi le monastère de
Moulins pour la retraite de Mme du Tertre. Ce qu'il apprit par une de ses lettres. Affaire où
il n'y a nulle sorte d'injustice. Silence discret du Saint sur un «advis de conscience.»
L'abjection que la Mère de Bréchard devra porter en patience.....................................................292
MDCLXXXVI A Mgr de Sales, son frère (Inédite). L'inconvenance de la proximité d'une
étable et d'une église. Moyens à prendre pour y remédier......................................................295
MDCLXXXVII A la Mère de Chastel. Heureuse disposition de la Providence. Un nouvel
Evêque à Grenoble; ce qu'il faudra faire avec lui. Petite tentation filiale de la Mère de Chastel.
Ne pas «espier» les sentiments de son âme.............................................................................296
MDCLXXXVIII A Mme Le Maistre. Ce qui soulagerait la destinataire dans ses afflictions.
«L'honneur de souffrir [489] beaucoup,» partage des enfants de Dieu ici-bas. Deux
sentiments de l'âme du Saint. — Demande affectueuse de nouvelles………………….……….298
MDCLXXXIX A la Prieure du Carmel de Chartres. Quand Dieu nous a donné une charge,
il nous doit sa grâce pour la bien remplir. Petit dialogue. On est fidèle, si on est humble; on
est humble, si on désire l'être. Le pain quotidien. Faire bien aujourd'hui, sans penser à
demain, se fiant en la Providence................................................................................................300
MDCXC A la Mère de Chantal (Inédite). — L’été, mauvaise saison pour la santé de François
de Sales. A quelle condition il écrira courtement à la Mère de Chantal. — Deux sœurs qui
s'aiment bien et qui sont très aimées par leur Père spirituel. Ce que va faire D. Juste en Piémont.
Regret de ne pouvoir envoyer quelques lettres, et messages paternels..................................302
MDCXCI Au Baron de Rochefort (Inédite). Pauvre âme à «l'esprit renversé» et à la
conscience dévoyée. Promesse d'intervenir auprès de Mgr de Belley en faveur du
destinataire..................................................................................................................................304
MDCXCII Au Prieur de Contamine. Une rixe sur laquelle il faut informer.....................306
MDCXCIII A la Mère de Bréchard (Inédite). Un passage d'une lettre de Mme du Tertre.
Réponse que lui fit François de Sales. Sa décision après plus ample information. La douceur
des Règles de la Visitation Sainte-Marie. «Oublier les orages et les flotz,» et ne point se lasser
de souffrir………………………………………………………………………………………307
MDCXCIV A la Mère de Chantal. Nouvelles réponses à Moulins et à Nevers pour éclaircir
les premières. Le caractère de «race des biens des anciens chrestiens.» Epreuves de la Mère
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de Bréchard. Seule habitation stable de l'Evêque de Genève; regard sur l'autre vie. Quelques
mots de la Communauté d'Annecy. — L'unique chose à traiter à Rome pour la Congrégation…310
MDCXCV A Mlle Lhuillier de Frouville. Saint résultat de la promptitude à faire la volonté
de Dieu. Le calme après une rude secousse. Néant de ce que l'on quitte pour le Seigneur,
valeur immense de ce que l'on trouve. Trois parties de l'holocauste......................................313
MDCXCVI A Mme de Villeneuve. Une action héroïque, digne des premiers temps du
christianisme. Servir Dieu en Dieu. Consolation et force..................................................315
MDCXCVII A M. Lhuillier d'Interville. Félicitations à un père qui a généreusement donné
sa fille à Dieu. — Grâces qui naîtront de son sacrifice…………………………………….316 [490]
MDCXCVIII Au Père Antoniotti (Inédite). Appréciation du Saint sur une traduction de
l'Introduction a la Vie devote. Critiques qu'il réfute; corrections qu'il a faites. Envoi du
Traitté de l'Amour de Dieu; multiples fautes d'impression de la sixième édition. Trois ou quatre
mille sermons en vingt-huit ans. Pourquoi l'Evêque de Genève ne peut écrire comme ses amis
l'en prient. Philothée réimprimée plus de quarante fois……………………………………..318
Minute de la Lettre précédente (Fragment inédit)..............................………………………….324
MDCXCIX A Mgr de Sales, son frère (Inédite). La paix en France, et les projets du Prince
Cardinal. Déplaisirs de ce monde. Nécessité croissante de réformer certains Monastères.
Les intrigues du sacristain Perret. Cuisinier et tailleur à «façonner au service et a la modestie.»
Salutations respectueuses. «Un article de foy morale.» Remerciements à faire à plusieurs
Cardinaux.....................................................................................................................................326
MDCC — A la Sœur de Morville. — Inspirations partielles du Saint-Esprit. Le père de
l'Evangile et ses deux fils. Dieu ne veut être aimé que totalement. Qu'attend-il pour verser
dans les cœurs le «don sacré de l'orayson?» — Baume divin et parfums de ce monde. A qui
appartient une aumône déjà livrée. Il doit être indifférent à Mme du Tertre de donner ici ou là,
puisqu'elle donne au Seigneur.....................................................................................................331
MDCCI A la Mère Favre. — Double joie du saint Fondateur de la Visitation……………..333
MDCCII A la Mère de Chantal (Inédite). Lettre pour les Barnabites à Mgr de Bourges.
Douce espérance de revoir la Sainte à Paris. Le Monastère d'Orléans. Réponses que François
de Sales pense faire de vive voix. Les désirs de «plusieurs gens de bien » au sujet de Mgr Camus.
Ce qui contrebalance les réels défauts de Mme de Port-Royal. Combien il lui serait
avantageux de se retirer un peu à la Visitation; difficultés à ce projet. Des «honneurs» à
faire………………………………………………………………….........................................334
MDCCIII A un gentilhomme. Une importante affaire dont le succès dépend en partie de
l'intervention du destinataire.......................................................................................................338
MDCCIV A une dame. La partie inférieure de l'âme se ressent des incommodités du corps.
Dieu ne laisse pas d'agréer les actes de l'esprit faits avec peine et sans joie sensible. Etre
juste envers nous-même. Comment changer le plomb en or. Un peintre Capucin. La future
«image vivante de la divine Majesté.»........................................................................................340
MDCCV A la Prieure du Carmel d'Orléans. Une affeçtion vieille de dix-huit ans. Grande
qualité des amitiés [491] créées par le Ciel. Les desseins miséricordieux de la Providence sur
les trois filles de Mme Acarie. Espérance pour ses trois fils. Portrait en échange de reliques.
— Les Sœurs de la Visitation en visite au Carmel; une règle qui leur fut «souvent inculquee.»...342
MDCCVI — Au Supérieur d’une communauté. — François de Sales attend, pour permettre une
quête et une publication d'Indulgences, une attestation des pouvoirs du quêteur………………345
MDCCVII A la Mère de Chantal. L'opinion de François de Sales sur la juridiction la
meilleure pour les Ordres de femmes...........................................................................................348
MDCCVIII A la Mère Favre. Le rôle de la destinataire et celui de l'Introduction à la Vie
dévote…………………………………………………………………………………………...350
MDCCIX Au Prince de Piémont. Exposé des facilités d'une fondation d'Oratoriens à Rumilly
et des avantages qui en résulteraient. — Que devrait faire le prince pour aider à cette bonne œuvre.
Les curés d'Armoy et de Draillant toujours sans argent.........................................................351
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MDCCX A la Mère de Chantal. Pourquoi le Saint se réjouit du retard du voyage en France.
L'Evêque de Luçon et la Reine mère. M. Michel apportant de Paris «une milliasse de lettres.»
L'Abbesse de Port-Poyal auprès de la Mère de Chantal..........................................................352
MDCCXI A Mme de Granieu. Les effets des affections saintes. Humble sentiment de
reconnaissance de l'Evêque de Genève. Avis sur la santé de la Supérieure de la Visitation de
Grenoble.......................................................................................................................................354
MDCCXII A la Mère de Chastel. La Sainte Vierge aussi bien Mère de Notre-Seigneur sur
le Calvaire qu'à l'heure du Magnificat. Paternelle sollicitude du Saint pour la santé de la
destinataire. Sentiment et consentement..................................................................................355
MDCCXIII A Mme de Granieu. Des maladies utiles à deux âmes. Comme le monde se
trompe dans ce qu'il appelle bien et mal. Double prière et souhait paternel...........................357
MDCCXIV A M. De Sonnaz. Le saint Evêque consent à la retraite du destinataire. Un
oncle qu'il faut contenter. Attente d'une réponse du Prince de Piémont..................................358
MDCCXV A Mme de Ballon. La solitude mentale au milieu du monde. Comment suppléer
aux exercices de piété qu'on ne peut faire. Préparation à la fête de la Toussaint et à celle des
Morts............................................................................................................................................360
MDCCXVI A une Religieuse de l'Abbaye de Sainte-Catherine. [492] On peut dire son mal,
mais il ne faut pas s'en plaindre. — Un coup d'œil sur la Jérusalem céleste................................361
MDCCXVII — A la Sœur de Blonay. — Souvenirs charmants de l'enfance de Marie-Aimée de
Blonay. L'ardente foi d'alors doit la consoler dans le trouble de la tentation actuelle...............362
MDCCXVIII Au Duc de Savoie. Témoignage de la fidélité et du mérite du collatéral
Flocard………………………………………………………………………………………….363
MDCCXIX Au Prince de Piémont. Un serviteur fidèle de Son Altesse..............................364
MDCCXXA la Mère de Monthoux. «Lettre d'attente.» Quelle réponse faire à l'Evêque
de Nevers. Les filles ineptes ne doivent pas être reçues. — Echange de bréviaires…………365
MDCCXXI — A la Sœur de Chastellux. — Le Saint se réjouit de la savoir Directrice à Nevers.
L'esprit qu'il faut donner aux Novices....................................................................................368
MDCCXXII Aux Membres du souverain Sénat de Savoie (Inédite). La cure de Rumilly étant
désormais unie au Chapitre des Altariens, les poursuites du Prieur contre le Curé n'ont pas de
raison d'être..................................................................................................................................370
MDCCXXIII A M. Rosetain. L'Evêque de Genève charge son Official forain d'une affaire
qui intéresse le Chapitre de sa cathédrale. Prochain départ pour le Faucigny........................372
MDCCXXIV Au Baron de Clermont-Mont-Saint-Jean (Inédite). Demande de papiers,
inutiles au destinataire, et très utiles à François de Sales............................................................373
MDCCXXV A la Mère de Monthoux. La Visitation n'est pas instituée pour l'éducation des
petites filles. Double inconvénient de donner entrée au monastère à de trop jeunes enfants.
Quelques avis sur différentes affaires. La source des «tendretés» sur soi-même. Une pensée
dangereuse pour les fondatrices. Combien rares les femmes «sans fantasie et malice et
bigearrerie.» Sous quelle condition promettre aux aspirantes de les recevoir. Ne pas prêter
facilement les Constitutions jusqu'à ce qu'elles soient corrigées. Faut-il se laisser peindre?
Divers conseils relatifs aux Règles et observances. Pour quelle raison admettre les postulantes
riches; pourquoi les pauvres ne doivent pas être rejetées. Considération et désintéressement
dans l'admission des sujets. — Les dix mille francs de la Sœur de Morville................................374
MDCCXXVI A la Mère de Chantal (Fragment inédit). — Une lettre toute d'or…………….381
MDCCXXVII A Mgr de Sales, son frère. Profonde douleur du Saint sur un apostat.
Aveuglement étrange de cette [493] âme et étonnantes contradictions. Sa séparation du monde
et de l'Eglise. Espérance de conversion pour l'Angleterre. Les effets de cette chute sur l'esprit
et le cœur de François de Sales. — Quelle assurance Mgr de Chalcédoine devra donner au
malheureux tombé.......................................................................................................................381
MDCCXXVIII Au même. Quantité de lettres au retour d'un voyage. Dispositions du
Prieur de Rumilly toutes favorables à l'établissement des Pères de l'Oratoire. L'élection de M.
du Châtelard au doyenné de Notre-Dame. Quelqu'un que le Saint voudrait servir de son propre
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sang. Nouvelles de famille. Tentative pour le retour d'une âme à la foi. A qui appartient
le Royaume des cieux...................................................................................................................384
MDCCXXIX A la Mère de Chantal. Affliction profonde, mélangée d'espérance. Causes
de la chute de M. de Granier. Le jugement, «partie rare.» Quelle consolation le Fondateur
reçoit de sa Congrégation. Le tardif, mais beau fruit du dattier..............................................387
MDCCXXX A la Prieure du Carmel de Lyon. Une vocation divine pour l'Oratoire.
Troubles au Carmel. Un pourquoi qui serait long à dire..........................................................389
MDCCXXXI A Mme de Granieu. Les matériaux des bâtiments célestes «au quartier des
hommes.» Ce que les Anges pourraient nous envier. Transformer l'infirmité en oraison.
Comment Notre-Seigneur nous fait souvent le plus de bien. — Un cœur faible et assoupi, mais
non point infidèle.........................................................................................................................390
MDCCXXXII A M. Berchat (Inédite). Délégation pour enquête canonique....................392
MDCCXXXIIIA Mgr de Sales, son frère. Désagrément causé par les neiges. Un service
à rendre à M. de la Pierre. Métamorphose soudaine du sieur Bonfils. Pourquoi l'Evêque de
Genève cèle le plus qu'il peut la nouvelle d'une apostasie. Bonne mine et bon jeu. Maladies,
mariage et mort. Témoignages d'honneur et d'affection donnés par le Saint au nouvel Evêque
de Chalcédoine.............................................................................................................................393
MDCCXXXIV Au Président Crespin (Inédite). François de Sales assure le destinataire de
son souvenir et de son dévouement. Ermite qui saura bientôt toutes les nouvelles de la cour..399
MDCCXXXV A Mme Bellot. Prière à la destinataire de donner les ordres nécessaires pour
le bon succès d'une œuvre de charité............................................................................................398
MDCCXXXVI Au Prince de Piémont. Excès de misère [494] de la Sainte-Maison de
Thonon, et sa triste conséquence. D'où vient cette détresse. Comment on peut y remédier.399
MDCCXXXVII A la Mère de Chantal. Le Saint «accommode» les Constitutions.
Comment tenir unies les Maisons du nouvel Institut? A défaut d'un hôtel «asses beau,» il faut
se contenter d'un «trop beau.» Démarches que doit faire à Rome Mme de Port-Royal pour obtenir
de passer de son Ordre dans celui de la Visitation.......................................................................401
MDCCXXXVIII A Mgr de Sales, son frère. Préparatifs pour le voyage de France.
L'Evêque voudrait laisser son frère en sa place. L'impossibilité où il se trouve d'aller jusqu'à
Turin. Insolence de deux laquais au logis de François de Sales; démêlé qui en résulte entre M.
de la Valbonne et le baron de Tournon. — Méthode pour garder la paix et gagner les cœurs. —
Prises d'habit au Monastère d'Annecy.........................................................................................404
MDCCXXXIX A la Sous-prieure du Carmel d'Orléans. Dangereuse tentation survenue dans
quelques Monastères de Carmélites. Quand on est bien, ne pas chercher le mieux, de peur de
trouver le mal. Eloge des Supérieurs du Carmel. — Le manteau d'Elie et son esprit………408
MDCCXL A la Prieure du Carmel d'Orléans (Inédite). Le Carmel ne doit point désirer de
changer de Supérieurs. Affection du saint Evêque pour cet Ordre et spécialement pour la Prieure
et la Sous-prieure d'Orléans.........................................................................................................410
MDCCXLI A Mme de Ballon. L'«humeur» de l'Abbesse de Sainte-Catherine et celle de
l'Evêque de Genève. Aversion de l'esprit humain à recevoir «les conceptions d'autruy.» Le
Dieu de paix triomphant au milieu de la guerre. Bonne saison pour la récolte......................411
MDCCXLII A deux Religieuses de l'Abbaye de Sainte-Catherine........................................412
MDCCXLIII A M. Bally (Inédite). Un Capucin peintre de tableaux d'église. Indications
du Saint pour le groupement des personnages.............................................................................413
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35.1 Page 341

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APPENDICE
I
LETTRES ADRESSÉES A SAINT FRANÇOIS DE SALES PAR QUELQUES
CORRESPONDANTS
A BREF DE SA SAINTETÉ PAUL V...........................................................................417 [495]
B LETTRES DE CHARLES-EMMANUEL IER, DUC DE SAVOIE
I....................................................................................................................................................419
II...................................................................................................................................................420
II
LETTRES ET PIÈCES DIVERSES
A LETTRE DU CHANOINE JEAN-FRANÇOIS DE SALES A M. BARTHELEMY
FLOCARD…………………………………………………………...........................................421
B BREVET DE CHARLES-EMMANUEL IER, DUC DE SAVOIE, POUR LA
COADJUTORERIE DE JEAN-FRANÇOIS DE SALES...........................................................423
C LETTRE DE CHRISTINE DE FRANCE, PRINCESSE DE PIEMONT, AU CARDINAL
SCIPION CAFFARELLI-BORGHESE......................................................................................424
D LETTRES DE VICTOR-AMEDEE, PRINCE DE PIEMONT
A L'ABBÉ PHILIBERT-ALEXANDRE SCAGLIA
I....................................................................................................................................................425
II...................................................................................................................................................426
E LETTRES DE L'ABBE PHILIBERT-ALEXANDRE SCAGLIA
I AU DUC DE SAVOIE..........................................................................................................426
II AU PRINCE DE PIEMONT................................................................................................427
III AU DUC DE SAVOIE.......................................................................................................428
IV AU MÊME.........................................................................................................................428
F LETTRE DU CARDINAL PIERRE ALDOBRANDINI, AU PRINCE DE PIEMONT…429
III
LA FONDATION DU MONASTÈRE DE LA VISITATION DE NEVERS, HUITIÈME DE
L'ORDRE.....................................................................................................................................431
Glossaire des locutions et des mots surannés...............................................................................439
Index des correspondants et des principales notes biographiques et historiques de ce volume....447
Table de correspondance de cette nouvelle Edition avec les précédentes, et indication de la
provenance des Manuscrits……………………………………………………………………..463
Imprimé en France -I.M.E. 25 -Besançon
Dépôt légal 4e trimestre 1978 -N° Imprimeur 6171 [496]
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